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Full text of "Éloge funèbre de S.M. Don Pedro, empereur de Bresil, Duc de Bragance, Régent du Portugal et de l ..."

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Société he l'Uinon dei5 Uati0nje 



POUR 



LA CIVILISATION UNIVERSELLE. 




ÉLCXËIE 



H, M. DOIV PEDRO, 

Duc de Bragaace y Régent do Portugal et de TAlgarve^ 



PAR 



LE COMTE GOnOE DE LIANCOURT, 



SUIVI DE 










PAR M. DE SAINT-ANTOINE. 



. Osten tient fume terris tantiun fata.... 

En la chapelle sainte où repose t6n père. 
Don Pedro, dors en paix dans rimmortalîté ; 
Le Portugal est libre, et la patrie entière 
fîcspire dans la liberté. 



A PARIS 9 




<z in fftncif âttx ,^,t6rAtr<» )>n ^^afaU-^^o^af, 




183a. 



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Clage Snnèbve 



•1 • • I-. 






DUC DE BRA6ANCE, EHPEREUB DU BRÉSIL, 



BÉGENT BU PORTUGAL ET BE L'ALGAEVE, 



Messieurs , 



Osiendeni hune terris tantùm faia,,.. 

En U chapene aamte où rqKM« ton père, 
Don Pedro , dors en paix dan» rimmortaUté ; 
Le Portugal est libre, et la patrie entière 
^Mpire dans la liberté. 



) 



Je ne viens pas louer Thamanité d'un général qui a été cruel, la 
▼ie d'un prince revêtu de la pourpre , l'intégrité d'un magistrat qui 
a vendu les lois, mais je viens vous entretenir d'un homme qui est, 
aujourd'hui, sans titres et saqs pouvoir; je viens le remercier, au 
nom de la civilisation, de ce qu*il a servi glorieusement sa patrie 



T -î i*^. 



'j% 





et rhuinanité , et proposer son exemple à ceux qui out encore à 
vivre et à mourir. 

Chez toutes les nations éclairées, messieurs > il y a des honneurs 
résfrws à la înéinoire des grands citoyens. La Société de VUnioik 
des nations pour la civilisaiio'n univers elle distribue sur la ten*e 
l'éloge et le blâme i elle préside k cq partage comme Dieu et la 
conscience le feraient. 

Je la remercie de m'avoir choisi pour prononcer Téloge de feu 
S. M. I. don Pedro, duc de Bragance, empereur du Brésil, roi duPor- 
tugal et de TAlgarve, régent au nom de S. M . la reine dona Maria II. 

Je vais vous décrire , sans art , une vie que nous déplorons sans 
feinte , et en homme qui a interrogé son cœur avant d'aborder son 
sujet , en homme qui apprécie la gloire des autres sans crainte et 
sans espérance. 

Le Portugal % rea&nnié , de tout temps , un peuple brave et ja- 
loux de son indépendance i sds habîtans furent les premiers qui 
lancèrent leurs viaisseau'T sur des mers inconnues, qui subjuguè- 
rent les Indes après en avoir fait la découverte. Cependant les Por- 
tugais se sont montrés plus fiers encore de la dignité de la nation 
que de la gloire des conquêtes. 

Dès le XII* siècle , les Portugais se donnèrent une constitution 
libre et conservèrent un gouvernement représentatif jusqu'au mo- 
ment où , tombés sous la pernicieuse domination monacale i^ leur 
histoire ne nous offre plus » pendant trois siècles ^ qu'une série d'af- 
freux; désastres. C'est en vs^in que , de loin en loin ^ quelques 
hommes arrêtent ce mouvement de décadence^ D'aussi rares succès 
sont effacés par une multitude de revers^ les jésuites apparais- 



saientsur Le premier plan^ #t 86 précipitaidAt île tous c6t^ aox 
funérailles da grand peuple, pour s'tirracher jusqu'aux derniers 
lambeaux de son indépendancQ. 

Foui* coniblé de malhear, la vivacité d'imagination qoi distingue 
la nation pos^tiigaise la rendait^ plus que tottte a«ire^ aoceasible à la 
Superstition» 

Au Xyi* siècle ^ une révolution violente éclata à Lisbonne , et 
sembla tappder le peuple à son ancienne énei^e. Elle Èe JSt avec 
tant de rapidité, qu'au palaia*de«j«isliee les magistrats^ qui venaient 
de prononcer na arrêt au nom ddt roi Philippe, s^n$ lever la léance^ 
jugèrent une autre cause an nom de Jean IV. 

Les efforts de l'Espagne étaient devenus impnissans pour com- 
battre l'émancipation de ses voisins. Elle semblait sur le point de 
perdre pour toujours sa dateatable influence politique; mais les 
Portugais I en recouvrait leur indépendante > n'avaient )>aa pensé 
à détruire les causes qui la leur avaient fait perdre : l'empire des 
moines et des jésuites était resté debout. Sans armée , sans coni- 
mu*ce , sans agriculture^^ la nation retomba sous le joug.| et les tré<- 
^ors du Brésil ne purent la sauver de la misère. 

Cependant la maison de Bra^pnce montait sur le trône au milieu 
d'un immense cri de liberté^ dont l'écho devait survivre au règne 
des factions, parce que tout ce qui est légitime dans son principe 
est ordinairement durable dans ses effets* 

Peu d'événemens de cette nature sont plus instructifs et provo- 
quent de plus sérieuses réflexions sur la faiblesse des combinaisons 
humaines* 

Tous les souverains de TEurope accueillirent les ambassadeurs 



i 



-4- 

da roi Jean ; le pape seul se montra récalcitrant , pour ne pas dire 
indomptable , comme il le fut quatre siècles plus tard dans une cir- 
constance analogue. 

Le Portugal, messieurs, semblait ainsi destiné II épuiser la coupe 
du malheur, lorsqu'une catastrophe épourantable ^int y mettre le 
comble. Pendant une nuit de 1757, Tenfer menaça de bri- 
ser ses voûtes et d'ouvrir un soupirail au sein même de Lisbonne , 
pour engloutir la race des moines* La terre tremble, le ciel gronde, 
les temples et les palais chancèlent et s'écroulent.... Superbe et 
terrible spectacle ! Le vertige de la terreur se répand en tous lieuir, 
dans les murs, hors les murs; la désolation et l'épouvante boule- 
versent les coeurs les plus solides. Le peuple , les mains levées au 
ciel , fait entendre d'affreux gémissemens , désespérant d'échapper 
aux périls qui le menacent sur cette terre mouvante. Consterné^ 
ou saisi d'effroi , il se presse en foule autour de l'infortuné Joseph , 
en proie , lui-même , a la plus douloureuse inquiétude , et deman- 
dant partout : Que faire? — Enterrer les morts et songer aux vi^ 
vans ! s'écrie la voix de Pombal , debout su milieu des ruines- 
Parole d'une sublime énergie qui révélait l»ien une âme faite pour 
commander. Aussitôt on vit Carvalho, marquis de Pombal , se pla- 
cer à la tête de l'administration. Richelieu portugais , il annonçait 
aux rois de l'Europe ^ue le temps des grandes fautes était passé 
pour sa patrie; que le Portugal allait redevenir puissance. Mi- 
nistre intrépide , non content de chasser du Portugal les jésuites et 
les moines , qu'il appelait la vermine la plus dangereuse qui puisse 
ronger un état, il provoqua leur expulsion de toute l'Europe. 

Sébastien- Joseph de Carvalho, aidé d'une t;ol6nté constante et 



V>."- 




— 5 — 

passionnée, administra le Portugal avec force et célérité. On 
vit refleiirif Funiversité de Coïinbre ; Tespril militaire se ranimait ; 
le commerce , Tinduslrie et la marine se réveillaient après une fa- 
tale léthargie. 

Cependant , messieurs , cet homme , qui avait exercé un pouvoir 
absolu , si éclatant et si utile , œ fondateur du gouvernement cons- 
titutionnel , ce grand architecte qui avait fait sortir Lisbonne de 
ses mines , ne trouva pas grâce devant la noblesse et le clergé ; il 
fut écrasé sous le poids du rocher qu'il avait eu la hardiesse de sou- 
lever. On Tàccusa , il fut condamné , banni , et mourut en 1 782. 
L'homme de ce siècle avait cessé de vivre depuis plusieurs années, 
mais l'impulsion vigoureuse qu*il avait donnée aux idées du peuple 
eut la force d'atteindre le règne de Jean VI , honnête homme , 
étranger à l'art politique^ k la science gouvernementale, et cepen- 
dant appelé à régner dans un temps des plus difficiles. 

Le prince portugais n'apportait pas sur le trône des préjugés fa- 

t 

vorables à la noblesse et à la cour d'Espagne. ' 

Ce fut le principe de sa disposition à s'allier avec l'Angleterre et 
à se diriger d'après les lumières de son siècle . * • 

Malheureusement les événemens politiques vont suspendre toute 
idée d'amélioration sociale. ' ' 

La révolution de 91 éclata en France , et le Portugal se laissa en« 
traîner, avec tous les états secondaires, <lans la coalition qui vou- 
lait la comprimer. . . . ' » . r 

Napoléon paraissait sûr U scène politique au milieu de ses ai- 
gles; vainqueur de l'Espagne, dictant des lois à. Cainpo-Mayor, » 
El vas , à Olivenza ; traitant avec Pinto , et maître de la Guiaae. 



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•»■ ^i ^ 



Le Portugal per&îstô daos sa DeuXralîié ^pvès Im vidUlion du traité 
d'Amiens^ et refuse obstinément de fermer ses ports qax vaisseaux 
de la Grandes-Bretagne. 

Napoléon conçoit aussitôt le projet de le rayer delà caii^poU-* 
t^qxie de TEmope. 

Après d'inutiles et nisigoifiante& oégociatioos^ Jeau YI apprit, 
pur le Moniteur^ que la m^isoo de Bragaoce avait cfissé de r^oer 
en Eui*ope« - 

Les événemens se succédaient partout avoclainéme rapidité que 
les idées de rhotunaie étouoant qui reiuuatt le monde entier. 

Lorsque le prince régent se vit menacé par les armées françaises 
déjà, sur son territQire^ il chetclia un asile sur sa flotte^ avec sa fa-> 
mille et une partie de sa c<|ur, et fit voUe pour le Brésil» 

Au même moment, 17 novembre 1807, le ministre aBglais, lord 
Strangford , demandait ses passeports et se rendait u bord de Tes^ 
cadre anglaise sous le commandem^ent de sir Sydney Smith. 

Le temps était arrivé où la vaste Amérique allait offrir uu^a iioun 
velle patrie aux rois de l'Europe dépossédés par les révolutions. 

Cette terre lointaine devenait le jardin déUciens où les Bra-« 
gance vont rêver à leurs destinées nouvelles ; où deux frères pré- 
luderont bientôt, par une éducation différente, ^Tordre des évé- 
nemens qui détermineront la nature de leur sort respectif. 

Doo Pedro, pjçince doux et affiiM^^, joignait à ce j^ qualités, toute 
la hardiesse que donne l'instinct de la supériorité. U unissait ^ à 
beaucoup de talens, boaucpup d'/esprit; e| un désir insatiable île 
s'instrun^ à uu §ùia> prononcé picmr M ar^^ dont i^ ^e montra 
protecteur éduiré. 




Do0 Miguel, aiLcoatraira, livré fort jeune à un entourage de su- 
balterneS) eut une éducatioii. qui soufTrit de$ révolutions qui agi- 
taiéait le pfiys. Élevé au milieu d'enfans corrooipuS) il débuU dans 
la vie psir d^atroces exercices*. On le voyait tantôt arrêter les 
passans sur les grandes roules ^ ou bien exercer d'affi:euse& barba- 
ries sur de pauvres animaux dopiestiques. 

Don Pedro ^ entraîné dans la cUrection apposée ). cbevcha de 
bonne heure à connaitre les passions des boixiQiies > sans doute parce 
qu'il atspirait à.lea.diriger*^^ Il voqluti ainsi quQ César, unir la gloire 
des lettres à La gloire dc& ai*tne$y et comnire il avait la consejienc^e 
de ce qu'il pouvait faire et de ce qu'il avait à craindre, il n^ trouva 
rien au*des»s de son ambitign €px^ la^ajpdenr de.s^ vu^. 

Le 16 décembre 181 5^ huit ans après l'arrivée de la famille 
royale pprtugaise au Brésil » au momept oàiNey éta^t iusIUé par les 
Bourbons en France , où les chambres législatives donnaîej[|t l'abr 
solution aux fauteurs de la rébellion et de VumrpùtiQn de Bono^ 
parte, le, rpi Jeau YI élçyaifc le Brésil au rang, de royaiype* 

Napoléon, qui avait démeinbré le PorM^^l, était au milieu de 
l'Océan atlantique, à cinq cents lieues de toute terre ; Murât, qu'il 
avait faitpiyippuraitfAsîU^.^ Piasq^.petîte grille de kt Calabre ; et 
Jean Vl accoirdait à soi) tour, k d^o Pedro, le titre âe prince royal 
des royaumes unis de Portugal, de Rio et d'Algarve...... 

. Étranges de&tinées de&.TÛi& et des peuple U!. Q«eji est celai qui 
ne serait ému à la viue de cette: vieille Europci agitée l9a|<*àrc»i»p par 
l'esprit novateur que les écrite de .quelques ho9^nM9^Qn<t produit eu 
vingt an», et qui jse* trouva exposée ^aiijnilj eu de aes mutiklnofis, 
aux outrages de tant d'ambitions subalternes'! 



-,8 — 

Don Pedro, qui avait vu le jour (i s octobre 1798) au temps où 
le génie de Bonaparte commençait à se développer, où il veillait sui: 
les moissons de FÉgypte et le Nil , qui en est le dispensateur ; don 
Pedro, héritier présomptif de la couronne par la mort de son frère, 
voulut, comme Napoléon , s'allier à la maison d'Autriche. ^ 

La gloire immense de celui qu'il avait pris pour modèle avait 
frappé sron imagination du plus grand enthousiasme. 

Le prince foyal àes royaumes unis épousa, K Tâge de dix-neuf 
ans (1817), l'archiduchesse Léopoldina, fille de l'empereur Fran- 
çois I", et sœur de Marie-^Louise , ancienne impératrice des 
Français. ' 

L'année suivante (5 février 18 18), le régent Jean VI se fit cou- 
ronner roi de Portugal et du Brésil . 

Le monde continuait ainsi à changer de face dans les deux hé-i 
misphères. 

Le Chili proclamait son indépendance* 

Bernadotte montait au trône de Suède : avec une épée pour an<t 
cétres, il se croyait aussi légitime que les descendans d'Odiq 
(ï8i8). 

' En Espagne , Riego et Quiroga insurgeaient plusieurs corps 
d* armée, proclamaient la constitution des cortès, et marchaient 
sur Madrid. 

Malheureusement pour lui ^ le roi Ferdinand VU avait oublié que 
les corps politiques sont comme les cèdres du Liban , qui , à mesure 
qu'ils s'élèvent^ ont autant besoin de la terre que du ciel. 

Le tocsin sonnait en mémo temps dans les Asturies , U Navarre , 

^ ■ • 

la Galice et l'Andalousie, ' 




De rapides succès légitimèreat Taudace des révolutionnaires. L'ar- 
mée espagnole changea la face de l'Europe, en iSao^ comme l'armée 
prussienne en ifii!2. 

De son câté^ le Portugal ne pouvait pas demeurer spectateur de 
tant d^événemens qui se passaient à la porte de Lisbonne. 

Il éprouva bientôt et vivement le besoin de se régénérer. 

L'exemple donné en Espagne par les Mina, les Porlier, les Lascy, 
les Milans, les Quiroga, les Riego, etc., trouva des imitateurs dans 
TÂlgarve. 

La révolution d^Espagne mit bientôt le feu au Portugal. 

IjOs troupes portugaises, comme les armées du continent , sem- 
blent aussi attaquées de la manie de donner des lois à TEurope ; 
elles s'insurgent à Oporto le ^4 ^^^^ 1820, expulsent les Anglais, et 
vont droit à Lisbonne. 

Un gouvernement provisoire est établi sous la présidence de 
Pinto. 

Lisbonne se trouva très-disposé à suivre cet exemple , malgré la 
proclamation du gouverneur royal , qui taxait d'horrible rébellion 
le mouvement d'Oporto. 

Tout change.... Les contestations se décident promptement à 
coups de sabre. Mais ces régénérations momentanées s'accomplis- 
sent trop vite pour être durables. Il viendra des convulsions plus 
terribles après lesquelles se terminera l'anarchie complète qui 
règne dans le grand système européen. 

Para , Bahia , Rio* Janeiro , embrassèrent la cause des Cortès. 

Le roi Jean adopta , lui-même , les bases du nouvel ordre social 
€t politique ; nomma le prince royal don Pedro vice-roi du Brésil ; 



2 






— lO 

et s'embarqaa ^ avec le reste ie sa famille , poar retourner en Eu- 
rope (a5 avril 1831 )• 

Sur le continent américain, le goût de la liberté continua à gagner 
les prorince», <}ont les habitans se déclarèrent indépendans de Rio- 
Janeiro. 

On vit les Cazadores courir aux armes à San-Paulo , au moment 
où, à Villa-Rica, les habitans levaient l'étendard de la révolte. . 

Jean VI arriva le 5 juillet 1821 dans larade de Lisbonne, jura 
la constitution devant le congrès national, et tint parole. 

Ce retour du roi en Europe devint bientôt le sujet d!ane grave 
scission entre les deux grandes pièces de la monarchie Brésilio^por- 
tugaise. 

La situation respective des deux pays subissait un important chan- 
gement. Le Portugal reprenait son ancienne attitude de métropole^ 

Jean YI redemanda son fils don Pedro. 

Mais le progrès avait marché à pas de géant en Amérique. C'é* 
tait un empire que les Bragance avaient jeté au moule. La présence 
de don Pedro avait été un puissant mobile pour le développement 
des sciences et l'état florissant du Brésil. C'était à son activité que 
cette jeune nation était redevable d'être entrée ^ur la scène des 
grands événeméns politiques: 

Tandis que, sous la protection éclairée du régent, Tagriail- 
ture fertilisait un sol vierge , étonné de se voir si riche ; tandis^ 
que le commerce multipliait ses relations, le nouvel état social de^ 
venait préférable à celui des Portugais. 

Cette émancipatioB de fait ne^ pouvait pas tarder à être suivie 
d'une manifestation générale. 



M 

Les proTinces éprouvaient TÎvement le besoûii de proclamer 
Pacte de leur indépendance de droii.-lÈMes eâvoyèreint une adresse 
à don Pedro danii laquelle un le suppliait de rester au Brésil , sous 
peine de provoquer les plus ^nglans déciiirenrens. En effet, les 
contributions n'étaient plus payées^ \^s provinces sHsolaîent, et 
Rio- Janeiro était une ctipitale sans départ€fmens. 

Au milieu de ce conflit qui menaçait de bonleversef la £ice de 
TËmpire , de compromettre ^ en - même temps , la vie du régent et 
celle de sa famille , la municipalité de Rio- Janeiro renvoya les 
troupes portugaises , et les députés brésiliens conférèrent à don 
Pedro le titre de régent , puis de protecteur constitutionnel , enfin 
celui d'empereur (i 3 tnars 183:2). 

Les titres les plus glorieta s'alliaient bîe^ aux noms d'un prince 
à qui > le Patriarche disait , cdmme saint Grégoire de Naziance à 
Thémiste : o Vous êtes te seul ^qui • travaillez en faveur des lettres; 
vous êtes à la lé te des gens éclairés ; vous savez philoso{^er dans 
la plus haute place , joindre Tétude au pouvoir, et la dignité à la 
science.» 

Le soleil avait à peine paru quelques fois sur le brûlant horizon 
brésilien, que tous les peuples se ralliaient à cette énergique parole 
du nouvel Empereur : L'indépendance ou la mSori ! > 

Pendsf nt que^ la terre d'Amérique offrait 'ainsi le spectacle d'un 
pevple nottveau s^affrandiissant de ià tutelle d^une mélr^ypdie il- 
vrée aux moines, lie Portugal et fÂlgarve continuaient à être en 
proie à des attentats de toute nature. 

La mère de l'infant Miguel cherchait à détrôner son mari sous 
le prétexte qu'il était aliéné , mais avec l'intention secrète de re- 



12 

▼étir son fils de la pourpre royale, afin de régner elle-même 
comme la tutrice de Charles IX. 

Cette Charlotte de Bourbon , tour à tour absolutiste ou républi- 
caine, machinait de perfides complots, comme pour plonger, à plai- 
sir, le Portugal dans une éternité de malheurs. 

Le 23 février iSsS, le comte d'Âmaranthe, marquis de Chavès, 
et les Jésuites, appelèrent les Portugais aux armes. Cette tentative 

resta d'abord sans succès. La bonne contenance de quelques géné- 
raux constitutionnels étouffa ce mouvement d'insurrection, et Cha- 
vès fut rejeté en Espagne ,. où il of&it ses servii:es au duc d'An- 
gouléme. 

 cette époque , l'armée française occupait Madrid , et le parti 
absolutiste triomphait dans la péninsule ibérique. 

Don Miguel , honteux de sa défaite , s'enfuyait du palais de son 
père. Mais la liberté ne pouvait pas cependant résister long-temps 
aux sourdes menées des moines qui confessaient l'armée, et de 
l'Infant , qui croyait pouvoir légitimer toute espèce de crimes par 
des processions , et que l'on trouva toujours disposé à faire couler 
le sang du juste , pourvu qu'il eût une Sainte-Vierge pendue à son 
chapeau. 

Le gouvernement absolu fut proclamé de nouveau à Lisbonne- 
La presse une fois enchaînée , Charlotte et son fils sortaient triom- 
phans de leur palais d'exil , suivis d'une longue file de ces hommes 
couverts d'un linceul, et qu'on retrouve partout où il y a une proie 
à dévorer. 

L'assassinat de LouUé signala l'intronisation de la fisiciion abso^ 
latiste. 



— i3 — 

Trois mois étaient à peine éconlés , que don Miguel fit son père 
prisonnier dans son propre palais , afin que cette fois la couronne 
ne lui pût échapper. 

L'autorité des ambassadeurs , ayant à leur tête Hyde de Neu- 
ville ^ suffit à peine pour permettre à Jean VI de gagner ses vais- 
seaux. 

Étrange spectacle , qu- un monarque poursuivi par sa femme et 
par son fils , obligé de se sauver en pleine mer^ arborer son pavillon 
à la mâture d'un navire anglais ! ! • . • 

Don Miguel , mandé à bord , y parut en suppliant ; demanda et 
obtint son pardon ; partit pour Brest sur une frégate française, et 
ne tarda pas à arriver à la cour de Louis XVIII , qui lui adressa de 
sévères réprimandes. 

La famille royale finit par le consigner aux portes du château. 
Sur ces entrefaites Jean VI mourut (lo mars i8a6). Il avait été le 
mari d'une Jésabelle , le fils d'une mère folle , le père d'un fils re- 
belle , roi absolu , mais sans pouvoir. 

Don Pedro , empereur du Brésil , fut appelé à remplacer Jean VI 
sur le trône portugais. 

Mais don Pedro s'était fait tout brésilien ; il mettait sa gloire à se 
proclamer le défenseur de sa nouvelle patrie ... 

Il avait célébré pompeusement son indépendance \ protesté con- 
tre les actes tyraqniques dirigés par le Portugal contre les droits 
politiques du Brésil. 

L'Empereur et Roi abdiqua, le 2 mai i8a6, la nouvelle cou- 
ronne que lui avait apportée le duc de Lafoens , en faveur de dona 
Maria da Gloria , princesse du grand Para. 



- i4- 

Uatm plus tard, don Mîguei Ibt nommé Régeoft du Aojrauiii€-4ini 
de Portugal et de FAlgarve, et .fiancé a Sv M. la jeune reine. 

C'était une faute inouie que la bonté du oœur d'un père et la 
grarité des circonstances ne sauraient :&ire pardonner. 

Dans le même temps, le reflnK des idées réyolutionnaires gagnait 
le continent mexicain ; on voyait éclater au Brésil une agitation 
causée par les iniraitîésqui existaient entre les Portugais, deyenus 
Brésiliens par adoption , et les Brësiliena d'origine. 

Le marquis de Barbacena, le général Brant, le marquis de Ca- 
rarplbos, marchaient en tête des mécontens. 

Il était hautement question d'une fédération k l'instar de celle 

des États-Unis. 

En Portugal , les affaires se compliquaient de jour en jour. Don 
Miguel oubliait la lettre datée de Vienne (19 octobre 1827) par la- 
quelle il remerciait son frère d'avoir daigné le nommer lieutenant- 
général et Régent du Rojr^ume-uni , et lui jurait d'employer tous 
ses efforts h maintenir la constitution portugaise. Le traître ren- 
dait un décret qui suspendait cette même constitution pour se faire 
proclamer roi de Portugal. 

Nouveau monarque^ il débu^ par vouloir faire emprisonner 
tout le Portugal ; rapprochant ainsi , malgré lui , le terme de sa 
chute , en préparant ceUe* des» autres. 

Don Miguel , la personnification de l'absolutisme ,'de ce gouver- 
nement imbécille, assis sur la pourpre, dans un coin^de TËvrope... 
Au moment où- les Jésuites arrivaient au^ eonseils' du roi Char- 
les X... C'était im trait de la fatalité capable de blesser bien du 
monde. 



— i5 — 

Les temps étaienl ckongës. Le siècle ne se rcfMMaiii, à de courts 
intervalles ) que pour marcher ensuite. plus à son aise^ers sa des- 
tinée. 

Il n'était plus permi&de faim servir long-temps la religion à la 
politique; pas plus que de voir un peuple de moines parquer au 
milieu de TEurope nouTelle. Le palladium des ambitieux et des 
courtisans, la propriété du. crime et. de l'a bossesse ;, était au pen- 
chant de sa ruine. 

Cependant le soi^ de la liberté en Portugal fit tremUer, le Brésil. 
Maisden Pedro, afin de prouver sa sincérité au peuple^^qui pré*- 
voyait, a tort, la dissolution Ae sa constitution danis oellede son 
ancienne métropole ^ créa altssitàt) sa fille duchesse) d'O porto .^ en 
L'honneur des 'habitans de oeO)e- ville Ivéroïque ^ qui- avaient essayé 
de soutenir ses droits par les armes « . 

Jamais le mimde Wavait été plus .gi*a2id ni plus avidie de gran^ 
deur ; jamais scène politique et révolntiionnaire n^avait été plus lar- 
gement dessinée. 

On a vu, à. certaines époques^ certains peuples se remuer sur leurs 
bases pour être libres entre ^tous^ mais à coté d^eux les .autres nan 
tiens demeurer immobiles» A oette épreuve ' soleonelle ,. au coi»- 
traita, tous les^regards^ont tournés vers la France^ Il n'y en a pas 
une^ui soit-disposée à lui céder le^rivilége* du iraouvement et de 
l'action^ 

Au XVIU' siècle,, la- pensée avait pris deux directions : Tintelli^ 
gence du passée et la passion dUnterroger Vauenir.i 

Au XIX*^ siècle, les intérêts matériels semUent dominer exclusif- 
vement Teiisemble des conceptions humaines. Ua nouveau pr«^ 



— i6 — 

bléine social est donné à résoudre. Les masses entrent en tournoi 
avec leurs Gracques en tête. 

L'Europe ancienne et l'Europe moderne se séparent en deux 
camps, s'apprétant h prendre part à la discussion la dague au 
poing. 

D'un côté, on voit le pouvoir aristocratique aveuglé ; de l'auti^, 
le pouvoir constitutionnel résolu h rompre l'équilibre. 

Plaise à Dieu que les nations qui sont environnées de la nation 
entfvprenante soient pacifiquement amenées à subir la loi de l'é- 
galité des droits politiques , plutôt que de s'exposer à de doulou- 
reuses alternatives capables de faire trôner cette autre égalité, en- 
nemie de toute gloire , jalouse de toute supériorité , et ne recon- 
naissant le plus souvent , pour loi , que la spoliation et le sang ! 

Au milieu de ces préparatifs pour une grande tragédie , don 
Pedro s'élança dans l'avenir en homme de conviction. 

Le Brésil lui devait la liberté de la presse , des écoles nombreu- 
ses , une foule d'établissemens de charité , une constitution libérale 
extrêmement large. Il voulut encore lui donner un nouveau gage 

de gloire et de stabilité en associant à ses destinées celles d'une 
jeune femme de la maison de Napoléon. 

Le 17 octobre 1:829 eut lieu la célébration du mariage, en se- 
condes noces , de l'Empereur avec la Princesse Amélie-Âugusta-Na- 
poléon, fille du prince Eugène-Napoléon, Duc de Leuchtenberg, et 
de la Princesse Amélie , sœur du Roi de Bavière. 

La civilisation du monde se ranime ; les' conditions de l'espace s'a- 
baissent devant la loi du temps; il semble que l'heure a sonné où 
les choses humaines vont être révisées. 



i 



\ 



— 17 — 

I 

L'Orient, le Midi, FOccident et le Septentrion s'émeuvent et s'ap- 
prêtent à se confondre dans une même pensée révolationnaire. 

La tempête gronde. La France, comme un Océan^ Ta se déborder 
par tous ses rivages ; l'artillerie de sa pensée va retentir d'un pôle 
à l'autre. 

C'était un spectacle bien plus imposant que celui des champs de 
bataille |.t» 

La France versait des flots de lumière sur des terres qui jadis * \ 

avaient jeté dans son sein des millions de barbares* 

Mais les hommes ne savent plus pourquoi il3 sont rassemblés. 

Les rois semblent prêts à $e disperser. 

Le christianisme parait abandonner sa glorieuse mission, comme 
s'il n'avait plus la force de la continuer. * 

L'humanité n'est plus capable d'un assez grand effort pour se £siirc 
une religion ; cependant elle a l'air de marcher avec confiance dans 
la vie... Elle n'est plus soutenue que par l'intelligence de sa position, 
m^ cet instinct lui .suffit encore ponr l'animer, pour ne la rebuter 
de rien et ne pas lui permettre de se décourager. 

Les sociétés sont plongées dans la fermentation d'un polythéisme 
décoloré; elles ne savent pas où elles vont... 

Elles ont passé alternativement du dogme à Paiiome philoso- 
phique , de l'axiome à la loi , et le terme des métamorphoses n'est * 
point arrivé. . . Le siècle ne possède pas* •• 

Quelques esprits éclairés ont avancé que la science représentait la 
vérité; mais la marche rapide des sciences affranchîra-t-elle, à elle 
seule , l'univers ? 



• 



* 



~ i8 — 
La ^d4^pq^ à riodivâdaitliSBie ne Qdas nienat^e-t-elle pas d'une 

La poésie ti'e^t plii£ possible , car elle ne saurait être Tinlerprète 
d^ l'égoS^iue. 

Le déisme ferait-il plus pour les hommes que le protestantisme ^ 
qui a rendu 1^ France coinme un i^éléore ? 

Rien n^échappera à cette crise*. • Le Brésil tourmenté , comme 
tant d'autres pays, par un vague désir de chaqgeniçnt ^ continuait 
son mouvement d'insurrection. 

Don Pedro parcourait les provinces. Tout se calmait à son aspect. 
Au 29 décembre i83o, l'enthousiasme deTamour éclatait en tous 
lieux sur son passage. 

A ilio<JaneÎFo , quelques joumatix se répandaient en invectives 
contre l'Empereur ; pendant «e temps ou le portait en triomphe 
dan9 les prqvinqes de Minas. . . 

IJii réd^çA^ur éi^it miaen jugement, mais bientôt après 1^ tribunal 
le renvoyait avçc.iin v^xJict d'acquittement : "et cette circonstance^ 
presque i^pçrçeptibl^ par 4Ue^n\êiiie, deviat un signât d'eneoupa- 
gement pour les aj[itai?4M*$» 

L'Ewpiçr^ur paruti et tout rentra dians l'immobilité jusqu^a sou-* 

« 

lèvemeut de la populace^ qoeiques joupq plus lai'd* 
Aiu$i ballotté bat» i'ivressb de la tsédition et l'ivresse de la joie j 

<jbn Pedro faîaait un péniUe a|>pr en tissage de là royauté. 
*Le Brésil subissait la loi oo4)|mane dos métamorphoses de tout 

ce qui est. 
Au ouJi>eu de tout oe dévergondage, il y avait un fait très-singu* 

lier et bien propre k caractériser l'esprit du siècle. 









~ «9 — 
Les Brésiliens reprochaient amèreœfejaft à FEmperéiir ses rela- 
tions ayee l'Europe; et c'étail préek^tneftt avec les idées desder* 
nières ibsurrectioDs popalaires <lé notre continent qu'on menait 
le povo liëroSco du Brésil ! 

Étranges desiinées des empires! Le Brésil, naguère forcé d'em- 
prunter ses moindres inslrumenS de traraîl^ persécute un prince, 
parce qu'il importait trop l6t, sur sa terre Tierge, les arts, les scien- 
ces , les institutions et la culture de TEûrope ! 

Au moment oà la^ Sarmatie succombait et derenait un fief de 
cosaques; 

Où le lion belge se réTeillait yittorieux ; 
Où les friperies du Torysme allaîéût être jetées aux vents dé 
la mer; 

Au Brésil , on se plaignait aussi du ministère. 
En ce Iemps4à^ au i5 mars i8îo^ (Quatre mois avant la révolution 
de juillet , le marquis de Palmella arrivait à Terceira constituer le 
nouveau gouvernement an notn de S. M. dona Maria da Gloria. 

Palmella , pour échapper aux croiseurs portugais envoyés dans lé 
but de Varrêtér, avait recours à une ruse audacieuse qui fbt cou- 
ronnée jd'iio plein succès* Il transféra la Bégence , du vaisseau où 
il l'avait établie lors de son départ d'Angleterre , sur un bâtiment 
américaijD faisant voilà |iour Ttle, en vœ de l'escadre du blocus, et 
le commandant de l'escadare ne se douta de rien. 

Les plus grands événemens sont suspetidus à des ûh impercep- 
tiUe8% 

Don Pedro., voiulant coocilier ce qui était inconciliable, changeait 
son mijiistère le 17 mats i83o, et le recomposait seulement de Bré- 



— ao — 

siliens nés, et parmi lesquels se trouYaient plusieurs conspirateurs* 
L'Empereur s'aperçut bientôt, mais trop tard, qu'il s'était trompé, 
et le 5 avril suivant le conseil subit une modification complète. 

Le lendemain la révolte leva la tête. Une vingtaine de députés 
et trois juges-de-paiz, entourés de la populace, demandaient le ren- 
voi des nouveaux ministres et le rappel des anciens. 

La liberté subissait ainsi la mise en œuvre de toutes les inter- 
prétations. 

L'Empereur répondit : uPour ce qui est des ministres actuels, je 
me consulterai sur le parti qu'il me convient de prendre. Nul n'a le 
droit de prétendre à m'en imposer d'autres. Ce serait renoncer à 
l'ordre établi par la constitution , et je n'y consentirai jamais.... Je 
vous déclare , messieurs , que je ferai tout pour le peuple , mais 
rien par le peuple. » 

Le temps déploya ses ailes rapides ; la dernière secousse appro- 
chait. 

 la nuit le nombre des révoltés se grossit ; la presse avait frappé 
l'oreille de tout le peuple. 

Les portes des arsenaux furent rompues. La populace fut appelée 
au combat au bon moment^ c'est-à-dire au commencement de la 
victoire. 

A onze heures, le major et quelques soldats de la garde d'hon- 
neur, ainsi que le bataillon de l'Empei^eur, commandé par le jeune 
Lima, partirent pour le camp Sainte-Anne. 

Les ministres de France et d'Angleterre furent appelés au châ- 
teau. Sur ces entrefaites, le brigadier Lima vint lui-même au pa- 
laia, et y expédia ensuite plusieurs officiers d'ordonnance pour en- 



— ai — 

gager l'Empereur à céder aux exigences du peuple. S. M. persista 
courageusement dans son refus. 

Don Pedro vit alors qu'il n'avait plus rien à prétendre au sceptre 
des tropiques. 

Il connaissait la prédiction de Rousseau : « Nous approchons de l'é- 
« tat de crise et du siècle des révolutions. Le grand pourra devenir 
u petit, le riche devenir pauvre , et le monarque devenir sujet. » 

Le 7 avril, à deux heures du matin, le major Prias vint, au nom 
du brigadier Lima , supplier de nouveau l'Empereur de conserver 
la pourpre. A trois heures et demie, malgré les représentations des 
ministres étrangers et les supplications de ses amis , don Pedro re- 
mit à M. Prias l'acte d'abdication en lui disant : « Voilà la réponse 
« qu'il convient à l'honneur de donner; j'ai abdiqué. Je pars; soyez 
« heureux dans votre patrie. » 

A sept heures, l'Empereur, l'Impératrice et la Reine se rendirent 
h bord du vaisseau anglais le JVarspite. 

La révolution brésilienne s'était faite en un jour; don Pedro avait 
rendu sa couronne , mais sans cesser d'être roi (i). 

Hoc est regnare noie regnare cirni possis. 

Je l'aime mieux maître d'école à Syracuse, que Tarqnin mendiant. 
L'abdication de l'Empereur ne tarda point à produire ses effets 
naturels. 

(i) On a pensé qu'il n'était pas improbable qae la résolntlon prompte de don 
Pedro arait pa avoir lieu à la suite d'un arrangement pris entre lui et ^n fils, afin 
de reconquérir le sceptre de sa fille, et d'ayoir ainsi un trône i Touest de l'Europe, 
et un autre sous les tropiques. 



— 22 — 

Les Porlugj^is ont été d'abord insultés, dbassésen masse des em- 
plois publics, et enfin, poursuivis ea plusieurs lieux dans leurs vies 
et dans, leurs biens« ' . 

m 

Pendant ces actes de vengeance , on remarque un ineideni très-^ 
pi<2uant. Le président de la législature coaâdéraiil ^ dana sa pro^ 
clamation, le Brésil , comme n'existant que depuis le 7 avrils jeur ou 
don Pedro IL montait sur le trône de son pays natal,, et, d'un autre 
côté, yingt- quatre. Députés de Bahia adressaient des représenta- 
tions à l'ex-Empereur, qu'ils regardaieut comme leur seul Menais 
que^ et engageaient à comprimer la révolte» 

Don Pedro reviat du Brésil avec la même sef énité que s^il fàk:rei- 
venu d^un voyage d'agrément. 

En un an de temps, il avait abdiqué la couronne du Port«^let 
de l'Âlgarve en faveur de son auguste fille ^ dona Maria da Gloria , 
petite*fiUe de François I*% Empereur d'Allemagne , beau*-pèr0 de 
l'Empereur Napoléon ; celle du Brénl , pour la conlSer au nouveau 
Moïse destiné à être, le législateur du Mexique ^ et petiO-fils.d'Eun 
gène Beauharnais , beau-fils de Bonaparte, et vice-roi d'Italie» 

Tant de révolutions^ d'usurpations, de déchéances, d'abdications, 
précipitées, capables de bouleverser de. fond en comble Tharmonie 
de Tétre humain , n'altérèrent nullement la situation tranquille de 
l'âme du duc de Bragance. 

L'Empereur débarqua à Che]4)ourg. 

Les autorités municipales et les principaux habitans de la ville se 
rendirent auprès de l'illustre voyageur , pour s'attrister avec lui sur 
ses nobles infortunes , lorsqu'il leur grand étonnement ils trouve-, 
rent don Pedro et la fille de Beauharnais occupés autour d*un piano 
à cultiver les arts. 



. / 



- !l3 - 

Mais le duc «de iBragance s'arracha bientôt des bras d^ane population 
dont il avait captivé le plus yif intérêt, pour se diriger vers Paris ; 
parce que, à Paris, la Providence y est plus grande qu'ailleurs , et 
que c'est de cette capitale que les idées révolutionnaires sont toutes 
parties pour faire le tour du monde. 

Le 26 juillet i83i , don Pedro arriva à Paris , dina à la cour du 
nouveau roi des Français , et assista au concert qui avait lieu au 
Palais^Royal. 

LIEmpereur^ qui devait repartir le lendemain pour Cherbourg, 
accepta cependant arec empressement l'invitation que lui fit le Roi 
de l'accompagner à cheval dans les solennités qui devaient avoir lieu 
au Panthéon et à la Bastille. Don Pedro différa son voyage , pour 
paraître k la revue du 29 juillet^ une des plus belles revues mili- 
taires dont la capitale ait jamais eu le spectacle. 

Le canon des Invalides annonça bientôt un premier anniversaire 
des journées de juillet i83o. 

Don Pedro se sentit fortement ému k la vue du grand peuple. 

Rendu à là condition de simple citoyen français , il se laissa péné- 
trer dé toute la puisisancè des idées de confraternité , de puissance 
et de mouvement. 

La France était alors le pays le mieux placé pour permettre au 
philosophe d'y juger de Tautorité du droit, et de la faiblesse du 
despotisme. L'imprimerie balayait le monde de toutes les entraves 
qui s'opposaient à ses progrès rénovateurs, pour suivre le meuve- 

■ 

ment révolutionnaire^ allant d'un bout de la terre à l'autre,, 
comme avait fait le mouvement philosophique sous l'impulsion de 
Descartes. 



• 



• 



F 



Le duc de Bragance sentit toute la valeur des coups d'ëtat^ qui 
n*ont qu'un éclat éphémère; il savait que les révolutions sont de^ 
tremblemens de terre qui se communiquent à des distances incom- 
mensurables. 

En s'associant à nos joies , don Pedro puisa l'inspiration de la li* 
berté aux lueurs d'un volcan qui s'éteignait ; mais cependant nous 
allons le voir marcher, presque seul, à la conquête du trô|ie ^e 
sa fille ^ usurpé par son frère. 

Don Miguel régnait : il ayait montré tant de penchant à tiiçr, 
qu'il avait fini par SQ faire bourreau. Ce Domitien entretenait ainsi 
le vautour dont il était la victime. 

Don Migue} demandait à la crainte, qu'il inspirait, ce que 
l'amour devait seul lui accorder; il abaissait ses sujets, dans 
l'espoir de relever sa dignité. Les vertus étaient devenues des arrét^ 
de mort , parce que le courage était un crime ; Lisbonne ne fut 
plus rempli que de délateurs, une moitié du Portugal emprison-i 
nait l'autre : vieux généraux , négocians , magistrats , furent jetés 
péle-méle avec les voleurs et les assassins; les femmes respectables 
et leurs filles étaient arrachées au calme et à l'innocence pour être 
renfermées avec des prostituées. •• 

La reine Charlotte criait au gouverneur de Lisbonne ; « Coupez 
« des têtes , mpnsieur le gouverneur ; la révolution française en o^ 
« fait tomber quarante mille , et la population n'a pas dimi-r 
(( nué! » 

Jamais le Portugal i^'avait compté tant de yiclimej; et d'orphe- 
lins chassés du sein de leurs dieux domestiques. 

I 

Pans cette afireuse mêlée , le hasard et la vengeance dési^qèn 



— 25 — 

i^nt les victimes , le caprice détermÎBait le genre da supplice. 

Les pauvres Portugais en étaient réduits à la condition de ces 

anciens Perses que le prince faisait cruellement battre de verges, 

et qu'on obligeait ensuite à paraître en sa présence : a Nous venons, 

« disaient-ils, vous remercier, seigneur, d'avoir daigné vous souve** 

« nir de nons. » ' 

Glorieux d'avoir remporté quelques victoires sur des fantômes , 

le monstre portugais crut pouvoir insulter impunément la France 

* 

dans la personne de quelques-uns de ses enfans. Il n'est aucun de 
vous, messieurs, qui ne se rappelle comment le contre-amiral 
baron Roussin , commandant l'escadre française dans le Tage , lava 
cet outrage en imposant au gouvernement de Tinfant la flétrissante 
obligation de chasser ses juges et le chef de la police du royaume, 
d'annuler les jugemens et de payer un million el demi d'indemnités. 
Le respectable Mello^ âgé de quatre-vingt-quatre ans, ancien am- 
bassadeur et ministre de la justice , doyen des magistrats portugais , 
avait été jeté dans un obscur cachot où l'o.n s'étudiait h le torturer; 
on allait jusqu'à couvrir d'ordures son peu d'alimens, et avant qu'on 
lui permit de prendre un léger repos sur son grabat, le geôlier y 
faisait entrer un mendiant couvert de vermine* Mello succomba.... 
son cadavre ne fut pas même respecté.... Les tyrans sont des lâches 
qui insultent jusqu'à la cendre des morts. 

m 

Voilà comme un grand citoyen , objet de vénération partout où 
l'on est citoyen , est traité pire qu'un forçat dans un gouvernement 
despotique; voilà aussi comme la grandeur éphémère s'avilit sans 
remords* 

Mais assez sur ce savant criminel qui mourra sans avoir jamais 

4 



— a6 — 

trouTé uo i9ou»Q«>t pour vivre <, etqa'uo uûnîstre anglais osa ce^ 
pendant proposer aux Français de reconnaitre ! 

Dans ce maode , il n'y a pcânt de crimes auxquels on ne prodigue 
des éloges ^ Gordon avait bien raison de dire : Si la peste avait des 
honneurs ou des pensions à donner , il est des hommes asses vils 
p*our soutenir que le règne de la peste est de droit divin, et que 
se soustraire à ses malignes influences, c'est se rendre coupable au 
premier chef. 

IVéanmoins , Pesprit d'innovation et de découverte continuait h 
se propager activement, il animait et vivifiait tout ce qui n'était 
pas le Portugal : on se dirait au temps où la doctrine d'Épîcure dé- 
trônait les divinités païennes. 

Les systèmes nouveaux ne sèchent pas sur pied. Partout le mou- 
vement pratique suit de près Timpulsîon théorique ; on marché par 
bonds ; les hommes et les choses se transforment si rapidement, 
qu'il semble que rien n'appartiendra bientôt plus au passé. 

La Belgique , la Hollande, l'Angleterre , l'Espagne^ la Suisse, le 

9 

Wurtemberg, la France, l'Italie, la Pologne^ l'Afrique, l'Amé- 
rique... tout est bouleversé. 

L'Egypte rappelle à nos souvenirs les illustrations guerrières des 
Omarites. 

L'Allemagne invoque silencieusement une réforme c<^stitution- 
neUe, mais la liberté qu'elle convoite est une moisson que les 
pe^upltô n6 recueillent qu'au milieu des tempêtes 

La Russie épuisée a le sein déchiré par des dissensions intestines. 
I^e jour où sa vieille ai?istoqratie aura le dessons, la révolution la 



— 37 — 

débordera, et les serfs, comme ceux de la Pologne, seront appelés 
à la liberté , pour en abuser et la perdre. 

La France et PÂngleierre unies apparaissent an milieu des 
inondes, comme ce colosse de Rhodes qui a tu tant de pavillons 
passer entre ses jambes et qu^un tremblement de terre a renversé. 

Tous les peuples ont les yeux tournés vers la France; la force et 
Fénergie qu'elle inspire rayonnent autour d'acné comme les feux 
des volcans. 

La cbaine des pensées, la chaîne des êtres matériels^ le monde 
suspendu à leurs anneaux , tout se tient d'une manière grande et 
mystérieuse à la fois. On cherche dç toute part à pénétrer les se- 
crets de Tavenir ; les plus profonds publicistes se perdent dans un 
océan de conjonctures ; cet avenir s^avance , menaçant bien des 
têtes illustres; et il a été donné à peu de Papercevoir. 

Au loin , dans le Brésil , on aperçoit le yolcan des dissensions 
jeter encore quelques étincelles. 

Pinto-Medera , homme de cœur et d'entreprise^ tentait une in* 
surrectîon en faveur de l'ex-Empereur dans la province deCeara. Et, 
pendant qu'au Brésil la mémoire de don Pedro faisait ainsi palpi- 
ter des coeurs généreux^ à Paris on baptisait avec pompe aux 
Tuileries, l'infante J&lle de l'Empereur^ descendante des Bona* 
parte *, le Roi des Français la tenait en personne^avec la Reine^ qui 
lui donna son nom (lo janvier i83a). 

La vue de don Pedro avait, percé la nuit ife$ temps ; il semUe 
même que ce ptiaee avait déchiffré le caractère des arrêts q«i 
limitaient les destinées humaines et la sienne propre. U lui était 



— 20 — 

deveaa impossible de rester dans Finaction. .. Un aliment devenait 
nécessaire à son âme ardente... Il va bientôt le troaver* 

Le Portugal gémissait ; la nature, la morale étaient foudroyées 
sur sa terre sanglante... Les droits dedona Maria y sont foulés au Xi 

< 

pieds par un monstre q.ui s'épuisait à tout détruire par art et 
par principes; Le duc de Bragance prit alors le noble parli d'aller 
briser les fers qu'un tyran secouait sur un peuple plus malheureux, 
qu'esclave. 

Au milieu de ces graves circonstances, nous allons voirie Régent 
s'affranchir lui-même de sa chaîne mortelle. Si jamais la noblesse, 
le courage , la majesté de l'homme ont annoncé qu'il.était le maître 
de la terre , c'était surtout dans les traits de Bragance qu'il fallait 
voir comment la nature y avait imprimé le caractère de sa dignité à 
cette époque solennelle de sa carrière. 

L'Empereur, qui avait étudié le monde et l'homme, observé l'état 
critique de l'Europe , le mouvement des idées et la marche dès es- 
prits, se prépara à attaquer le tigre dans sa retraite. Il ne s'in- 
forma point du nombre de ses ennemis, mais seulement du lieu où 
ils campaient. 

Le Portugal, qui depuis son départ n'avait vu luire que de tristes 
soleils, va admirer le père de sa Reine, bravant les dangers^ bri- 
guant, le fer à la main, le privilège de mourir en héros, et ne 
vouloir assurer sa mémoire et le trône qu'aux dépens de ses jours^ 
Le canon de Falmouth ne tarda point à saluer son arrivée dans la 
Grande-Bretagne; mais l'Empereur, impatient de se mesurer avec 
ks difficultés incalculables que présente l'expédition qu'il a prépa*- 
rée , confie bientôt sa fortune aux flots de la mer, et aborde à Ter^ 



— 2^- 

ceira , où le brave Villaflor, sentinelle vigilante , interrogeait les 
destins. 

Là commençaient à se rassembler les illustres débris de vingt 
peuples qui s'y étaient donné rendez-^vous pour assister aux funé- 
railles de Tabsolutisme portugais*..* On eût dit les trois cent cin- 
quante Suisses de Glaris. 

L'expédition se prépara et s'accomplit au milieu de toutes les 
privations, de la faim, des besoins de toute espèce ; mais chacun 
s'apprêtait à combatre pour la liberté , et plaçait toute sa force dans 
sa confiance , et toute sa confiance dans sa force. 

La révolution qui fait le tour de l'Europe au pas de course , rend 
le succès de la phalange guerrière de jour en Jour moins chanceux. 

La seconde ville du royaume céda bientôt aux efiorts de l'armée 

libératrice, sous la conduite du Régent. 

Les beaux faits d'armes du maréckal Solignac, de Saldanha, de 
Stnbbs , de Sartorius, de Villaflor , du vice-'^amiral Napier , devant 
rhéroïque Oporto, la ville des braves, sont tous présens à votre 
mémoire. Pas un d*entre vous n'a oublié , entre autres , la touchante 
et généreuse action de l'Empereurpendant les affaires qui avaient 
Heu entre Valongo. et Poiitor-Ferr^ra. Don Pedro avait vu, lors du 
combat, tomber prèsde lui un soldat frappé d'une balle à la jambe. 
Aussitôt S« M.r L se saisit d'un couteau, ouvrit la botte du malheur 
reux blessé, afin d'examiner sa blessure, et lui poser le premier ap- 
pareil.' 

Don Pedro vainqueur k Oporto, marcha vers les murs de Lisbonne, 
à la tète d'une phalange qui se croit justement invincible , et qu'ur 
premier succès a rendue fière comme l'armée de Godefroy. 



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4^ 



— 3o — 

Le premier soleil levant donna \e signal du totaobat ^ tant chacun 
était impatient de signaler sa braTOure. L^artillerie de l'ennemi 
semblait tonner du faant deseienx; maâs doa Bedm^ inébran- 
lable, méprisant les furenrs de la guerre ,. s'avançait d'un pas 
ferme an milieu des torrensdefen^ brarant la mitraille qui pieu* 
vait de tous côtés, pendant que du sein de la- flotta les instrumens 
destroctifs Élisaient gronder les bombes qni albnent ravager la ville. 

Le cri de Thonneur partit de la bouche de FEmperenr : il est plus 
fort et plus imposant que le fracas des foudres ; ansrà le péril, la mort, 
la crainte, tout disparut jusqu'à ce qne la victoire £àt enchaînée. Le 
général en chef, mesuré dans ses mouvemeas, unissait partout la force 
de la discipline à la force de l'eKcmple^ et communiquait à cens qui 
l'en tombaient cette flamme inconnue au reste des hommes* L'ennemi 
s'étonne, le sang de vingt nations a vait fait ftimer la terre, et dès lors 
r£mperem% qui parut en ce moment unir le génie des sièges à ce- 
lui Aes batailles , fixa la victoire. L'on se demanda bientôt où étaient 
les redoutables bataillons de Tabsolutisme. Lisbonne était forcée, 
le feu s'éteignit , et le bruit dn canon cessa de frare trembler les 
Portugais. 

Après le combat, S. M. L tr&versait le champ de bataille pour 
visiter les blessés des deux armées* Il aperçeit un oiBder de l'armée 
miguelliste perdant une grande quantité de sang. Don Pedro le< pansa 
immédiatement en attendant l'arrivée du miédecin. Mais tandis que 
le duc de Bragance honorait ainsi sa victoire, de tristes objets* de 
comparaison accusaient la férocité des migueUisteSb 

Un officier russe ^ au service de don Pedro , était tombé au pour 
l'armiée ennemie. On lui creva les ;euz ^,on.lui coupa la lan- 



— 3i — 

gue ) el son c^ps fut criblé de coops de baïonnettes arant d'être 
aoberé par oes eonnibolcs. Où était donc l'eaptrit de charité de cette 
armée de jneises qm se prétendaient les défenseurs de TÊTangile ? 
Est-ce à coups de poignard qu'on persuade 7 

Les entrailles de la terre aoat le aeol asile ou ces aOrenz propbè* 
tes doivent aller célébrer lears mystères. 

Don Miguel était seul plongé dans les alarmes ; ce superbe cri mi- 
nel voyait des abâines s'ouvrir de toutes parts. La mort avait frappé 
son vil ironpeau dont elle fut le pasteur ; ses ressorts politiques 
étaient brisés^ ses titres magnifiques anéantis : le poids &tal de son 
usurpation écrasait sa poitrine. 

Lui seul ^ il prenait la fuite avec ses £iusses divinités politiques , 
et s'éloignait à jamais d'an sol où il avait prétendu creuser le tom* 
^ beau de la civilisation. 

« 

Ah ! messîeui*», si vous venez d'assister , parla pensée , à un spec-» 
taele afTreui^ celui où des hommes s'entre- détruisent et s'égorgent 
sans se connaîti*e et se comprendre , vous saurez qu'il y avait en- 
core une scène plus touchante que les dehors de la guerre ^ les 
commencetnens , Iw progrès et l'ardeur de la mêlée , que toutes ces 
situations cruelles qui attaquent Pâme par tant d'endroits : c'était 
l'intérieur de Lisbonne. 

Don Pedr(> et ses braves soldats n'apercevaient plus que du sang 
et des cadavres, un déluge de victimes dont les sons du clairon 

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avaient seuls honoré la mort. La terre natale du Régent , le berceau I 

de sa fiUe^, étai^t peuplés de fan t6m es , et ces&ntômes respiraient* 
encore! Ou eotendait partout de longs géniissemens ; les malhe» 
reines victimes entassées dans les prisons n'avaient plus la foir ^^ 

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— 32 — 

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crier vire la liberté ; les yeux éteints , le front pâle, le corps couvert 
de lambeaux , ils viennent exprimer aux vainqueurs cette recon- 
naissance vive et sensible qui n'est connue quèdes prisonniers em- 
brassant leurs libérateurs. 

Don Pedro , au milieu de tontes tes satisfactions qui naissent des 
prospérités militaires , conserva l'âme la plus élevée^ Il ne regarda 
pas comme son propre bien la gloire qui avait usé le principe de sa 
vie, et voulut la partager avec Palmella, Villaflor, Saldanha, 
Stubbs , Napier, Sartorius. Vous l'avez vu s^empresser de les armer 
de l'épée de la civilisation , et leur partager ses lauriers : chez un 
général honnête homme, la vanité n'étouffe pas la reconnaissance^ 

Sur ces entrefaites^ le Régent mourut ; parce que dans l'homme^ 
pour l'homme, autour de l'homme, tout périt, tout s'use, tout 
change : Fata marient omnes. Il fallait peitt-étre cette mort préma- 
turée pour mettre le comble à sa gloire , en le sauvant des écueîls 

d'une longue carrière. La mort seule met le comble aux grandeurs 
humaines : Fitœ brevis est cursus. . . gloriœ sempiternus. Mais il se* 
rait bien difficile de chercher un exemple plus frappant de la haute 
mission confiée au duc de Bragance , que de Vous rappeler l'inquié- 
tude qui dominait vos esprits à la nouvelle de sa mort , et les soins 
qui agitaient vos âmes pendant cette lutte de la civilisation contre 
l'absolutisme; vous avez vu chanceler aussitôt la fortune du Portu- 
gal ; la paix sembla prête b s'élbigtier. Un instant plus tard , le camp 
ennemi allait peàt-étre se ranimer par la vengeance. 

A la nouvelle de cette mort, les villes et les campagnes pleure* 

leur défenseur ; chacun admira le passé et trembla pour l'ave- 

^^^ '\nstinct de la nation lui fît sentir que la perte du régent était 



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— sa- 
une calamité publique. On ne pensa bientdl plus qu'à lai dresser 
une pompe funèbre là «ttenV-atleodaiC a lui préparer un triomphe. 
Comme c^est le plus ordinairement au moment où l'on descend 
l'homme au tombeau que l'on aperçoit le vide qu'il a laissé sur la 
terre f. on ne tarda pas à prendre, api-ès sa mort, une idée frap- 
pante de la puissffncfedc l'EmpereeT, (l<**ravawx qu'iLavait exé- 
cutés, et de la peine qu'ils lui araient coûtée. 

Bien des esprits furent «aisis^dladmiration et d^étonnement. Un 
autre sentiment succéda à ces premiers transports , quand on vint 
à méditer sur la patrie, sur l'objet de l'emploi des talens d'un roi ; 
on se sentit pénétré d'un respect religieux pour l'homme qui n'était 
plus ; en cessant de jeter des regards aussi dédaigneux sur la pre- 
mière fonction sociale , on jugea mieux comment le caractère d'une 
nation dépend souvent de celui qui est placé à sa tête , et comment 
aussi la figure du monde se renouvelle et change sans cesse avec les 
vivans et les morts. 

En quittant ia :vie,don Pedfo.rendit.à .la dignité impériale 
l'hommage le plus imj4aaiHit>; «WKieJ* vainqueur de l'Apocalypse, 
il ramassa toute sa gloire; et vous avez tous vu avec quelle confiance 
calme il consacra d'une main l'épée d'OpORto a. notr£ brave compa- 
triote Eugène BeaubaraQJ«>y ft^lpir^ulre 41 poMila couronne royale 
6ur la tête de doBa<1tlaria da'fiUmâf nfla-^iiMccée de la paix , bril- 
lant et favorable augure du rtptiË'ét'iÉle'lw Jiberté du Portugal et de 
l'Algarve. 

Un instant après, il s'él«igntt uoottiM ies-ivaydns-du soleilt are^ 
majesté. 



avâttQcs 



SUB Uk WÊÙBT 



DE S. M. DON PEDRO. 



Muse de la doaleur, rieits essuyer nos larmes ! 
Sa grande âme est partie aax champs de l'avenir ; 
Dans les mains de la Gloire il a remis ses armes 
Pour se reposer et mourir ! 

Mourir ! quand le flambeau des discordes civiles 
S'éteignait étouffé sous son pied triomphant ; 
Quand sur le Portugal des jours purs et paisibles 
Rempla^ient le deuil et le sang ! 



La Liberté voulait encor cette victime*... 
Ses soldats trépassés l'appelaient k grands cris. 
Pour se oonsolcr sûenx dans le fond de l'aUme 
Avec le sauveur du ptys. 



Liberté ! liberté! veille .sur le rivage 
\^ Où flottait l'étendard de la rébellion, 
NProtége les travaux du soldat et du sage; 

\ Du père de la nation. 

\ 




\ 



— 35 — 

Parmi les plus grands rois de la Lusitanie , 
Son nom resplendira comme un pliare éclatant ; 
Et dans le Panthéon fondé par la patrie , 
La piwmière place l'attend. 



En yain ses ennemis noirciraient sa mémoire , 
C'est le roc snr lequel viennent mourir les flots ; 
La Calomnie expire à Taspect de la Gloire 
Rendant compte de ses travaux. 



Vous savez ce qu'il fut au milieu des batailles. 
De Porto triomphant , héroïques soldats , 
Recula-t-il jamais devant les funérailles 
Que la mort semait sons ses pas ? 

Tous y dont le fer vengeur immola l'esdavage 
Comme un serpent impur qu'on écrase chez soi y 
Conservez par la paix votre immortel ouvrage , 
Et vivez libres sous la loi. 



Sous le sceptre éclairé de votre noble reine ^ 
La gloire et le bonheur renaîtront tour à tour ; 
L'hydre aux sanglans complots verra tomber sa haine 
En présence de son amour. 



Le soleil descendant sur les rives du Tage , 
De 9e9 rayons d'azur caressera son front ; 
Comme une jeune fleur échappée à l'orage | 
Les autans la respecteront. 



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*-»• 






— 36 — 

£a la chaptlle'Sdititdoû npoceiion père. 
Don Feâlt>) doRSieri^paÎK^laiisi^iiiMilorUlhé ; 
Le Portugal cttlîlnre yietJa ^râe «niière 
Respire daoslla dîi 



Dors CD piux!:ioii^jpinnrët-l»£Ue ebérie 
T'învoqticktml lotiventtlesijt^ttK 'notiillés depleurs; 
Et leur main' eMîrà kt |ilvim kIo k patrie , 
En ft'entr^Hnmfat'ooinimcr'dnM sœurt. 



DAmEL DE SAINT-ANILINE. 



la Octobre i834> 
Château d^Hargenville, 



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■iMBvaaHHHiiHHHHBèHfièsBaacnnEvéÉUièiiHÉ^ 
PARIS. — IMPRIMERIE D£ D£ZAUCn£ , RUE Ot tACïOtJRC-MONTAUUTBE , K* !!• 



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