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Full text of "Anecdotes, illustrative of a select passage in each chapter of the Old Testament"

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•  / 


CL'=^ 


C  'v       .  3  J 


L',UNIVERS.;^<,*. 


HISTOIRE  ET  DESCRIPTION 

DE  TOUS  LES  PEUPLES. 


SYRIE 

ANCIENNE  ET  MODERNE. 


PARIS 

rYPO<;RAl'HIE  l)K  KIRMIIN   HiDOT  1  UKRK*^. 

RUK  JAO<»H,  56, 


I-  a-,.; -US 


SYRIE 


ANCIENNE  ET  MODERNE, 


PAR  M.  JEAN  YANOSKI, 

OmciEB  ET  AGREGE  DE  l'UNIVBRSIII^  , 

PROFRSSEUR  D^UISTOIRE  AU   LYC^  CCAlNEILLE , 

MEMBRE  DU  OOHIT^  BI8T0RIQUE 

insliUic  pres  le  Minlst^re  de  I'lnfttnicUon  pubUque,  pour  la  pubUcatiuii 

dcfl  documents  Inedtts  relallfs  h  I'histoirc  dr  France , 


ET 

PAR  M.  JULES  DAVID, 


0RIENTALI8TE. 


PARIS, 

FIRMIN  OIDOT  FRERES,  ^DITEURS, 

fllPRIMIWRK-LIBRAIRES  DE   L'iNRTITUT  DE  PHANCF, 

HI  F    JACUH  ,   5H. 

1848. 


-m 


v>7 


L'UNIVERS. 


ov 


HISTOIRE  ET  DESCRIPTION 

DE  TOUS  LES  PEUPLES, 

DE  LEIIRS  RELIGIONS,  MOEURS,  COUTUMES,  etc. 


HISTOIRE 

DB  LA 

SYRIE    ANCIENNE, 

PAR  M.JEAN  TANOSKI, 

PROFKSSIUR    d'hISTOIRB   AV   COLLiOB   ROTAL    DS   HSVIII    IT  (*), 

ET  PAR  M.  MAXIMILIEN  VEYDT. 


CHAPITRE  PREMIER.  nous  voulons  parler.  S'appuyant  sur  de 

vieiiles  traditions,  plasiearsont  confondu 

DBSCKiPTion  OBOGRAPHiQUB  DE  LA  FAssyrie  etla  Syrie;ilsontappel^Syrien8 

STBU  ARGiBNNB.  tous  ceux  qui  liabitaient  le  pays  com- 

pris  entre  la  Babylonie  et  le  solfe  d^Is- 

Sous  ie nom  de  Syrie,  nous  ne  com-  bus,  et  depuis  ce  golfe  jusqirau  Pont- 

prendrons ,  soH  dans  oette  description ,  Euxin  (*).  Du  temps  de  Justm,  on  corn* 

loit  dans  le  r^it  qai  va  suivre,  que  le  mettait  encore  la  mdme  confusion  (**). 

pays  qui  s*tond  depuis  la  Cilicie  et  FA-  Strabon  restreint  davantage  la  Syrie ; 

maD08,ao  nord,jusc(u'ji  la  Ph^nicieet  mais,  frapp6  de  certaines  similitudes 

k  la  Jod^ ,  an  midi ;  et  depuis  la  nter  ethnologiques,  il  Tagrandit  trop  au  midi. 

Int^rieore, i^  Touest, jusqu'arEuphrate,  Pour  lui ,  elle  s*6tend  depuis  la  Cilicie 

a  Test  et  aux  r^ions  d^ertes,  habitues  et  TAmanus  jus^u'^  T^gypte.  «  Je  la  di- 

par  les  Arabes  sc^oites.  Nous  ne  sorti-  vise,  dit-il,  ainsi  qu'il  suit,  en  partant 

rons  des  limites  que  nous  venons  de  de  la  Cilicie  et  du  mont  Amanus  :  la 

tracer  que  pour  raeonter  les  destines  du  Comma^^ne,  la  S6leucide»  la  Coel6syrie, 

Taste  empire  qui  ^ut  en  partage  aux  la  Ph6nicie,  sur  las  c6tes,  et  la  Jud6e, 

S^leueides.  dans  Fint^iieur  des  terres  C**).  »  Pour 

Quelques  anteors anciens  ont  singu-  nous,  comme  nous  I'avons  dit,  nous 

limroeot  recul6  les  bomes  du  pays  dont  ne  nous  occuperons  que  de  la  Syrie  pro- 

prement  dite,  laissant  h  part  la  Judee, 

ai1'!I;iI;?!!S.!S[^l^S'nS?na^^^^  r)  Strabon,  XII,  644;  XVI.  737.  WfOdote,  I. 

pl^lee  en  plaalean  endroits,  aartoat  aa  com.  ??«  i«  ^J^^  'x?fT*T  «««<»'«^  ^uoioev 

mcncemoit ,  |>tr  des  additioos  oomldArablea.  X<7«ieai  y^  ,  ti^  inA  *oiv(xt)<;  jAcxpt  BaguXw- 

Tooldbla,  U  at  ploalears  parties  qui  soot  res-  viae.  Q«i  venati  sunt  in  Sacris  sciunt  quam 

itn  k  pen  prts  lellet  qoit  Paatear  les  ayait  r6-  late  paleal  terra  Sar  Hebrait  dicta. 

digfes.  nous  Cfterons,  par  exemple,  toales  les  (**)  Imperium  Auyrii^  quipostea  Sffri  dicti 

pages  qnl  m  rapporteot  k  to  dyoasUe  des  S6*  ntnt,  mitie  trecentitannit  tenuert,  Justin,  1.9. 

Kaddes.                     (Note  des  iditeitrt,)  ("*)  Strabon ,  XV 1 ,  749. 

1'^  UvraUon.  (sybib  ANCisiHifE.}  1 


I/UNIVERS. 


la  Ph^nicie ,  la  M^sopbtainie .  la  Babylt)- 
nie ,  la  Cilicie  et  les  cantons  nabit6s  par 
les  Syriens  blancs  ou  Leucosyriens.  Tons 
ces  paysont  6t^  design^s  qoelquefois, 
il  est  vrai ,  par  un  nom  commun;  mais 
lis  ont  eu  des  fortunes  di verses,  et 
chacun  d'eux  se  distingue  par  quelques 
traits  d'une  vive  originalite  (*). 

La  Syrie  est  un  pays  montagneux; 
mais  on  y  rencontre  aussi  de  belles  et 
vastes  ulaines  f*).  La  terre,  cultiv^  avec 
soin ,  dans  les  tennps  anciens,  par  une 
nombreuse  population,  ^tait  d'une 
grande  fertility ,  et  elle  pr^sentait  un  as- 
pect qu^elle  n'a  plus  aujourd'hui.  Des  ci- 
t^s  ilorissantes  s'elevaient  de  toutes 
parts,  mdme  du  cot^  du  desert  ou  se 
trouve  Palmyre.  Le  voyageur  moderne 
Burckhardt,  parcourant  ia  chaliie  mon- 
tagneuse  qui  s^pare  la  piaine  d'Alep  du 
bassin  de  rOronte,  rencontra  les  ruines 
de  quarante-deux  villes  anciennes. 

Les  montagnes  de  la  Syrie  se  ratta- 
chent,  du  cote  du  nord,  au  Taurus  et  a 
TAmanus ;  et  au  Liban  du  c6t^  du  midi. 
La  plus  ^levee  de  toutes  est  celle  qui  se 
trouve  sur  la  rive  gauche  de  TOronte,  et 
que  Ton  appelait  dans  Tantiquite  Cassius 
(Ka9io().  Elle  etait  couverte,en  plusieurs 
endroits,  d'epaisses  for^ts.  La  province 
qui  Tavoisinait  fut  appelee,  de  son  nom, 
Cassiotis.  Au  nord  se  trouvait  la  mon- 
tagne  Pieria  (i  nu^ia),  qui  se  rattachait  a 
I'Amanus. 

L'Oronte  (6  Opovrvtc),  plus  ancienne- 
ment  appele  Typhon  (Tu^mv)  ,  es(  le 
fleuve  principal  de  la  Syrie.  11  prend  sa 
source  dans  laGoel4^syrie,non  loin  d'U^- 
liopolis,  dans  la  chatne  de  TAntiliban  : 
ii  re^it ,  dans  son  cours ,  un  affluent , 
le  Marsyas ,  et  il  se  jette  daus  la  mer 
Int^rieure.  Vient  ensuite  le  Cbalus  (Xa- 
Xo( );  il  termine  son  cours  dans  une 
sorte  de  lac  qui  se  trouve  entre  Cbaleis 
et  Bero^.  Les  poissons  de  cette  riviere 
^taient  sacres  pour  les  Syriens.  Pres  de 
I'Kuphrate,  d'autres  petites  rivieres  cou- 
lent  dans  la  direction  du  nord  au  sud, 
oorame  le  Singas  et  le  Daradax. 

La  Syrie,  pour  les  anciens,  se  divisait 

•'  C*)  IVoos  avoDfl  ^emeot ,  et  poor  la  mteie 
cause ,  retraocb^  de  Dotre  redt  tout  oe  qui  se 
ratlache  &  la  Palmy  reoe. 

{**)  On  Irouvera  aiiieurs,  dans  cette  collection, 
k  propos  de  la  Syrie  moderne,  les  descriptions 
iles  voyageurs  etce  qui  se  rapporte  k  Tbistolre 
naturelledelaoontrSe. 


eh  dehx  parties  princi pales :  la  Syrie  supe- 
rieure  {yi  antti  Zupia),  qui  comprenait  les 
cantons  du  nord  jusqu'au  Liban ,  et  la 
Syrie  injirieure  (o^  xa7«  2upi«) ,  com- 
mun^ment  appel^e  Syrie  creuse  (i(  xciXn 
2«pia)  ou  Coefesyrie  (*). 

Les  divisions  politiques  subirent  de 
nombreux  changements  Dans  les  tein[>s 
les  plus  anciens,  la  contree  renfermait 
plusieurs  petits  royaumes.  Sous  la  do- 
mination mac^donienne,  elle  avait  qua- 
tre  villes  princi  pales :  Antioche ,  Seleu- 
cie,  Apamee  et  Laodicee,  et  peut-^tre 
.autantde  provinces  distinctes.  Plus  tard, 
elle  fut  de  nouveau  parfagee  en  dix  pro- 
vinces, que  nous  ferons  connaitre  dans 
I'ordresuivant : 

1°  La  Commagene  (Kof&fta')pm) ,  au 
nord ,  entre  T Amanus ,  TEuphrate  et  le 
Singas.  Ce  petit  pays,  qui  eut ,  pendant 

auelque  temps ,  une  existence  ind^pen- 
ante,  fut  reuni  d^finitivement  au  reste 
dela  Syrie  par  Tern pereurVespasien  (**). 

T  LaCyrrhestique(Kuppt(mxi)),  au  sud 
dela  precedente,s'etendaitjusqu'a  TEu- 
phrate. 

S*"  La  Pi6rie  (ntipia)  aait  a  Touest  : 
elle  touchait,  au  nord,  a  la  Cilicie. 

4°  La  Seleucide(Z8XtiiAi(),  au  sud  de 
la  pr^cedente.  Cette  petite  province 
avoisinait  la  mer. 

6**  La  Chalcidice  (XxXxi^ixii)  6tait  situee 
^  Test  de  la  Seleucide. 

6°  LaChalybonitide  (XxXuScmic) ,  plus 
k  Torient  encore ,  s'^tendait ,  dans  le 
desert,  jusuu'a  TEuphrate. 

V  La  Paimyrene  (noaiAupnivii),  pays  sa- 
blonneux,  diait  au  sud  de  la  precedente. 

S*"  La  Laodicene  (A«c<^wir)vr.)  avoisinait 
la  Phenicie,  et  se  trouvait  h  Touest  de  la 
Paimyrene. 

9*  L*Apam^ne  {kjsvj^tm)  6tait  situ^ 
au  nord  de  la  precedente. 

10°  LaCassiotide  (R>a9(n&Tt{)  s*etendait 
k  Touest ,  sur  les  cdtes,  entre  la  Seleucide 
et  la  Phenicie. 

Cette  division  subsista  jusqu*au  mo- 
ment ouConstantinsepara  la  Commagene 
et  la  Cyrrhestique  du  reste  de  ia  Syrie,  et 
en  forma  une  province  ^  part  qui  fut  desi- 
gnee sous  le  nomd' Euphrateusis  ouKu- 
phraUsia  (***).  Plus  tard  encore,  Theo- 


[:: 


(*)  Slrabon ,  p.  133,   692 .  742 ,  749 ,  750 ,  75*. 
('♦)  Boeciih,    Corpus  vtscript.  grac,  t.  I, 
p.  433. 
(*♦«)  Ammlcn,XlT,  8;  XVIO,  4.  Procope, 


^^A3^" 


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^ 


SYRIE  ANCIENNE. 


doseleJeonediTisa  tout  le  pays  en  deux 
grandes  parties:  Syria  PrimaeiSafiaSe' 
cunda.  La  premiere  avait  Antiocne  poor 
capiule :  elle  embraasait  les  cdtes  et  les 
eantons  du  nord,  Josqu'a  rEuphrate. 
La  seeoode,  qui  afait  poor  ville  princi* 
pale  Apam^  eomprenait  tout  le  pays 
situ^ao  oiidide  i'Oronte.  La  partie  orien- 
tate de  la  Syrie,  vers  rEuphrate,  et  pr^ 
do  66sen ,  appartenait  alors  aux  bar- 
bares  ,  Parthes  ou  Arabes ,  eooeinis  de 
Tempire. 

Mous  aliens  teom^rer  les  prineipales 
Tillesde  la  Syrie,  en  repreoant  une  a  une 
les  di verses  provinces,  suivant  Tordre 
que  nous  a  vons  pr^eedemment  ^tabli. 

F^Uleg  de  la  Commagine.  La  plus  con- 
siderable de  toutes  ^tait  Samosate,  pa- 
trie  de  Lucien.  Les  rois  du  pays  y  resi- 
daient.  Une  legion  romaine  y  tut  placee 
sous  Tempire.  Puis  vient  Germanicia^ 
palrie  de  Nestorius.  Quelques  auteurs 
ont  pretendu  qu*Adata  avait  ^t^  son 
premier  nom  (*).  Nous  nommerons  en- 
eore  Jnfiochia  ad  Taurutn, 

failles  de  Ui  Cyrrketiique.  AU  premier 
rang  se  u^^s^HUrapoiis,  aussi  appelee 
BamJbyce  (  BofiiGuKik )  et  Mabog.  Cetait 
nne  des  viiles  les  plus  florissantes  de  la 

arrie.  Elle  de vait  sa  prosp^rite  au  tem- 
,  e  fameux  de  la  grand e  deesse  syrienne. 
C'etait  uneentre  religieux  ou  aflluaient, 
de  toutes  parts,  les  etrangers  porteurs 
de  riches  offrandes.  Le  christianisme 
ameoa  sa  ruine.  Quand  Justinien,  conime 
■oQs  Tapprend  Proeope,  voulut  relever 
ses  murs,  elle  6tait  en  partie  inhabi- 
ts ("*).  A  ZeugmOy  sur  1  Euphrate ,  se 
troavait  on  pout  de  bateaux.  Cetteville, 
eomme  Thapsaque,  servait  a  communi- 
quer  avec  la  M^opotamie.  Europus  (Eu- 
^MKo;),  aussi  sur  TEuphrate ,  se  trouvait 
aa  sud  de  Zeugma.  Beroea  (BipoM),  aussi 
v^\i»Chalep  (ZcXiic),  est  placee  entre 
Antioche  et  Uierapolis.  Quelques-uns 
rontconfondue,  i  tort ,  avec  Chalybon 
ou  Chelbon.  Cette  ville  ( auj.  Alep)  doit 
son  importance  aux  Seljoucidies.  BatncB 
(  Bxtva^xux  )  se  trouvait  entre  Beroea 
et  Hierapolis.  Aujourd'hui  encore  une 
vallee  fertile,  plae^e  entre  Alep  et  Mund- 


^  Bell.  per$.,  1,  17 ;  H, 40.  Malala.  Chron., p.a. 
—  Foyez  aassi  Boeckloc ,  ad  Not,  imp.,  I ,  p.  3S9. 

(•)  }'oy.  Manocrt,  VI,  I ,  p.  384. 

rh  Procope,  de  JSd.  11,9.—  f^oy,  Pococke,  11, 
p.  3i2. 


bedje,  est  appel^  Batn  ou  Bathnan  (*), 
Cyrrhut  ( Ku^po< )  donna  son  nom  a 
toute  la  province  ( Cyrrhestiea ). 

FUiesdeta  Piirie.  Suria  cdte  se  trou- 
vait une  ville  florissante ,  JIf yrlojufrtif 
( Mup^dcv^pec  ).  Cetait,  suivant  les  tradi- 
tions, uneoolonie  ph^nicienne  j  elle  s'^ 
levait  non  loin  des  defiles  de  la  Cilicie  et 
d'Issus.  Elle  fut  appelee  plus  tard  au- 
(xv^ptia  ( on  ajoutait  d  ce  nom  nar' 
favov  pour  la  dlstinguer  des  autres 
Alexandries ),  et  aussi  Alexandria  Sea 
biosa,  Ce  fut,  suivant  quelques-uns, 
pres  de  ses  murs  qu'Alexandra  livra 
oataille  k  Darius  (**).  On  trouvait  en- 
core, dans  la  Piirie,  la  ville  de  Pagroe 
(naf^pxt),  et  non  loin  de  eelle-ci  une 
place  maritime  appellee  Bhosus  ( t»«<r6c }. 

F^Ules  de  la  Sileucide.  La  ville  prin- 
cfpale  ^tait  Seleucia  (  ZtXi6iuift  )  :  elle 
fut  fond^  par  S^leucus.  Cetait  une 
place  tres-forte.  Nous  nommerons  en- 
eore  Gindarus  (Tn^apoc),  placee  a  tort 
par  quelques-uns  dans  la  Cyrrbestique. 

rnies  de  la  Chalcidice.  Dans  cette 
province  se  trouvait,  sans  parler  de 
Chalets  (XiXxiOi  la  capitate,  la  ville 
d'Arra,  appelee  ^fnarra/ par  Abulf<6da. 

^iltes  de  la  Chaiybonitide,  Apres 
Chalybon  (XaXuC»v),  la  capitate,  qui 
donna  son  nom  k  la  province ,  il  faut 
nommer  Thapsacus  (  e««|>ouoc  ),  ville 
tres>ancienne.  Cetait  le  passage  le  plus 
fr^quent^  de  tons  ceux  qui  se  trouvaient 
sur  rEuphrate.  S6leucus ,  s*il  faut  en 
eroire  Pline ,  changea  le  nom  de  Thap- 
sacus  en  celui  d'Amphipolis.  Les  voya- 
geurs  et  les  g^graphes  modernes  ne 
S*accordent  pas  tous  sur  Templacement 
de  cette  ville  (***).  On  trouvait  aussi 
dans  la  Chalybonitide ,  Barbalissus 
(BAp6ixXiaao(),  que  Justinien  fortiGa;  Sura 
( 2oOf,« ),  detruite  par  Chosroes  et  rebdtie 
par  Justinien.  Cette  derniere  ville  ^tait 
sjtu^esur  TEuphrate.  M.  Forbiger,  dans 
un  ouvrage  recent ,  pretend  que  Man- 
nert  n*a  point  connu  le  veritable  empla- 

(•)Maiiiiert,VI,I,p.  400. -^ Pooocke,  H, 

(•*)  Foy,,  tar  Mexandntie,  les  Lettret  idyUunr 
in  Writes  par  les  mtsslonnafres  j^alles ,  t.  II , 
p.  98  el  99 ;  «d.  de  Paris ,  1780.  —  Nlebohr,  III . 

^1 9. — Pococke,  II,  p.  260  el  sulv .  —  Foy*  aasM 
Iter ,  Erdkunde .  II ,  p.  464. 
(*••)  Mannerl,  VI,  I,  p.  410,  snppoae  k  tort 

Sue  Ton  donna  it  la  %lfe«le  Thapsaque  le  nom 
e  Ze^iohia, 

1. 


LTJNIVERS. 


cement  de  Sura  H.  Zenohia  (Zr.vo€ia)^ 
fond^  par  Z^nobie ,  dtait  a  trois  jour- 
D^es  de  marche  de  Sura,  et  k  la  m^me 
distance  deCircesium.  Serianey  qui  est, 
suivant  Manuert,  la  ville  appelee  Chalj- 
bon  par  Ptol6m^.  Delia  Valle  {ep.  IS }, 
et  les  voyageurs  lea  pluR  modemes,  ont 
cru  reconnattre  ses  ruines  k  trois  fortes 
iourD^  de  marche  sud-estd*Alep,  et  k 
rest  de  Hamath ,  dans  le  d^rt.  Nous 
nommerons  encore  Salaminias  et  Are- 
thusa  (  ip<6ouoa  ).  Cette  derniere,  pla- 
cee  au  nord-ouest  de  Salaminias,  au 
uord  d'j^ese,  pr^s  d'£piphanie,  ^tait, 
au  temps  de  Strabon,  le  si^ge  d*une  pe- 
tite principaut^  arabe  qui  existait  sous 
la  protection  de  Rome  {**). 

failles  de  la  Pahnyrine.  D*abord 
Palmyre  (noXfAu^a),  appelee  aussi  Thad- 
mor  dans  r£criture  sainte,  ensuite 
Resapha  ( Koo^a ) ,  sur  TEu^hrate ,  au 
sudde  Sura  (*♦*). 

FUles  de  la  Laodicene,  Nous  ne  cite- 
rons  parmi  les  Yilles  de  cette  province 
que  la  capitale,  Laodicea  ( AaodUeta ). 

P  tiles  detApam^ne.  La  capitale,  Apa- 
fiiea  ( Xffoifiketx),  plac^edans  une  contr^ 
tres-fertile,  ^tait  une  grande  et  forte 
ville.  Suivant  quelques  auteurs,  Antigoue 
lui  avait  donned'abord  le  nom  dePella. 
£lie  fut,  sous  la  domination  romaine, 
comme  nous  Tavons  dit  plus  haut,  la 
capitale  de  la  Syria  Secunda,  Burck- 
hardt  (****)  a  cru  reconnattre,  h  Tendroit 
appel6  aujourd'hui  KakaM-Medyk, 
Templacement  de  Tancienne  Apamee. 

(*)  A.  Forbiger,  Handbueh  der  alien  Geo- 
graphic^ t.  II ,  p.  656 ;  Leipzig ,  1844 ,  ia-8*.  — 
^oy.  Manoert ,  YI ,  1 ,  p.  408. 

(**)  yoy,  sur  ses  ruines  :  Pococke,  II,  p.  a08, 
et  Ricl)ter*8  ff"alifahrien ,  p.  2I«. 

(••*!  f^oy.  sur  Palmvre,  uootnous  ne  devoos 
point  parler  dansceiU  histolre,  HuUnglon,  dans 
mPhiloaoptUcat transactions,  vol.  XlX,  n.  217 
et  218  —Seller,  The  Antiquities  of  Palmyra  ; 
Lond.  1606.  —  Dawlilns,dan8l*ouvrage  inlitul^: 
Rvins  of  Palmyra  de  Rol)ert  Wood;  Lond. 
1768.  —  Volney,  Foyage  en  Syrie  eten£gypte. 
— Richter,  ff^alUahrten.  p.  216. — RoseamuUer, 
Handbuch  der  Bihl.  AlteHhumskunde .  I,  II, 
p.  277.  —  FlOgel,  art.  sur  Palmyre  dans  VSncy- 
clopedie  vniverselle  de  Erscli  et  Grul>er ,  3*  sed., 
dixi^me  vol.,  p.  185.,  etc.  Nous  n*avons  pas  bcr 
soin  de  renvoyer  ici  tux  prindpaux  gtographes. 

(****)jBurcUiardt,  Travels  in Syna^p,  148.— 
M.  Letronne,  dans  le  Journal  des  Savants,  oo- 
tobre  1833 ,  dit  que  la  position  de  Seidjar  paratt 
oonvenir  ji  Apamte.  —  Forbiger,  de  son  o6t^ 
{Handbuch  der  alien  Geographu.  II,  p.  648), 
critiqueRurckhardt.  —  Koyez  aussi  sur  ce  point : 
Kitter ,  Erdhunde ,  11 ,  p.  449 . 


Aux  environs  de  la  ville  se  trouvaient 
de  gras  pflturages  ou  S^teucns  avait  pla- 
c^  trois  cents  etalons ,  trente  mille  ju- 
ments  et  dnq  cents  61^phants.  Apr^ 
Apamee  nous  devoos  citer  Emesa 
( i/^ifsoL } ,  c^l^bre  par  son  temple  de 
Baal  {").  La  ville  de  Berya  est  plac^ 
dans  la  carte  de  Peutinger  an  sud-est 
d*Antioche,  entre  Cbalciset  Bathna  (**). 
L'Apamene  renfermait  encore  une  ville 
c^lenre :  c^^tait  Epiphania  ( iirt^antiz ). 
Elle  est  appelee  Hamath  dansPficriture. 
Suivant  certains  auteurs ,  elle  avait  ete 
fondee  par  les  Ph^niciens.  Epiphania, 
qui  a  repris  son  ancien  nom  ( if  amah ), 
est  encore  aujourd'hui  one  ville  conside- 
rable. 

niles  de  la  Cassiotide,  La  capitale, 
Antiochia  (ivTto'xiift),  fut  une  de&  plus 

frandes  villes  du  monde.  Elle  fut  agran- 
ie  ou  embellie,  depuis  le  regno  de  Se- 
leucus  Nieator,  presque  par  tous  les  rois 
de  ladynastie  desSeleucides.  Elle  fut 
d^truite  par  Cbosro^s  et  relev^  par 
Justinien.  Bile  conserva  sa  grandeur 
jusque  dans  les  derniers  temps  de  la 
domination  romaine.  Elle  fut  la  patrie 
d*Ammien  Marcellin  et  de  Jean  Ciiry- 
sostome.  Antioche  ^taitplacte  au  milieu 
d'une  plaine  d'une  admirable  fertilite. 
Cette  plaine  (to  t«v  Avtiox^»v  «i^iov) 
dtait  drros6e  par  trois  petites  rivieres 
qui  avoisinaient  TOronte,  ^savoir :  VJr» 
ceuthus  ( IpxiuOoc } ,  le  Labotas  (  Aa^o'- 
Ta; )  et  VCSnobaras  (  ONoSapxc }.  La 
premiere  de  ces  trois  rivieres ,  d*apre8 
Af  alala,  etait  la  plus  considerable.  Abul- 
feda  {Tab.  syr,,  p.  153)  les  appelle  /a- 
ghYa,  Aswadet  Eejrin  (***).  Dansle  voi- 
sinage  d' Antioche,  k  quarante  stades, 
se  trouvait  lebourg  de  Daphne  ( Ao^ vr,  ], 
dans  un  bois  de  lauriers  et  de  cypres.  lA 
s'^levait  un  temple  fameux ,  fond^  en 
rhonneur  d'Apolton  et  de  Diane.  II  fut 
an^anti  par  les  flammes,  en  363.  Dans  la 
inline  province  se  trouvait  Laodicea 
( jffiTf  Oa>.arn;i),  aujourd'hul  Latakieh. 

{")  ConstaotlD  PorphyrogeD^te  ( de  Adm, 
imp.  c.  2ft)  I'appelle  £ueo9a;  Anamfen  Ifar- 
oelUn  (XI Y ,  8) ,  Emit$a,  et  la  carte  de  Peatin- 
aer,  Uemesa,  —  Voy .,  snr  ses  ruines ;  Pooocke, 
11,  p.  206.—  Ric)iter*s  ff'allfahrien,  p.  205,  etc 

{**)  Mlebulir  vit  les  ruines  de  cette  viile, 
eonnue  aujourd'liui  sous  le  nom  de  Berua.  ill, 
p.  06. 

(***)  Foy.,  sur  les  mines  d*Antioche :  Pococke, 
II,  p.  27&;  et  Richter*!  fFaUJahrUn,  p.  381. 


SYRIE    ANCIENNE 


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STRIE  ANCIENNE. 


C^taitaossi  rone  des  principales  villes 
de  la  Syne. 

yUles  de  la  CcBliifprie.  I9oiu  devons 
mentionner  avant  tout  Damascus  ( Ao^ 
fMiovoc ).  Damas  est  la  plus  ancienne 
ville  du  monde.  On  voit  dans  la  Genese 

S'elle  eiistait  d^ia  du  temps  d' A  bra- 
in. EUe  est  situee  dans  une  vall^  ar- 
TOfi^  par  le  Chrysorrhoas  ( Xpu<ro^^oa« ) 
00  Bardines  ( hd^^ina ).  Cette  ville,  tres* 
riche  et  tres-nopuleuse  dans  Tantiquit^, 
n'a  nen  perdu  aujourd'hui  de  son  im- 
portanee.  £ile  fut  souvent  un  sujet  de 
diseorde  entre  les  S^eucides  et  les  La- 
gtdes.  Diocl^lien  y  etablit  une  fabrique 
d'annes.  D*un  autre  cdt^,  elle  porte, 
ebez  les  6crWains  ecclesiastiques,  le 
titrede  m^tropole  (*).  HiliopoUs  ( 6xtcu- 
seXtc),  aujoura*bui  Baaibeck,  est  c^lebre 
par  son  teniple'du  soleil.  Les  ruines  de 
cette  ville  et  de  son  temple  font  en- 
ooie  maintenant  Tadmiration  des  voya- 
geurs  f  *)•  jibUa  ( l6aa ) ,  au*il  ne  faut 
pM  coofoodre  avec  Abila  de  r  Arable  Pe- 
tree,  etait  situ6e  entre  H^liopolis  et  Da- 
mas: elledeviutlacapitalede  la  t^trarchie 
d*Abilene.  On  trouvait  encore  dans  la 
Coel^yrie :  Aphaca  ( ra  'Aooxa),  plac6e 
i  ^ale  distance  d'Heliopolis  et  cle  By- 
blus,  surle  fleuve  Adonis;  Occarura 
et  Mariamne. 

-'  Nous  Savons,  par  de  nombreux  temoi- 
gnages ,  que  les  habitants  de  la  belle 
eontr^  dont  nous  venons  de  parler, 
appartenaient  a  la  famille  aram^nne. 
D*aiUeurs,  leurs  traditions,  ieurs  moeurs, 
Jeurs  usages  et  leurs  croyances  religieu- 
ses  Jes  rapprocbent  incontestablement 
des  peoples,  comme  eux  de  race  semi- 
tique,  Qui  les  avoisinaient  a  Test  et  au 
ftiidi.  S^ils  different  par  quelques  points 
des  Arabes,  par  exemple,  ou  des  Phe- 
niciens,  c*est  qu'ils  sont  places  geogra- 

(*)  A^<>y.,  Bor  DamoM ,  aaxis  parler  des  aateuit 
aooens :  Schulteus ,  Comment,  giograph,,  %.  v. 
Damascus.  -^LtsLettres  edijkmles,  t.l,  p.  165, 
976  et  iuiv.;  t  II ,  p.  430  etBOiv.  -  Pococke,  II, 
p.  171.  — mebuhr,  lll«  p.  83.  —  Ricfater's  ff'alif., 
p,  138.  —  Paoiui  Sammlungd.  merkwurd.  Rei- 
ten  in  d.  Orient,  VI ,  p.  69. 

C*)  Fog.t  sor  Meiiopolis  ou  BatObeik:  Schal- 
tern,  s.  ▼.  Balbtcum. — MaoDdrell,  Joumeufrom 
JUb  to  Jerusaiem,  p.  136.— LaRoque,f^7yaoe 
defyrie,  p.  I3i  etsiilv.  — RadzivUl,  Peregrin. 
lenmolym.,  ep.  II. — Poeocke,  II«  p.  156. — Wood 
et  DawUiit  (  The  Auins  qfBaaibee, ).  —  Yoloey, 
Fogageen  Sgrie,  —  Barckhardt,  Travels  in  Sg- 
ria,  p.  lu.  —  aichter's  PFai\fahrUn,  p.  81. 


.phiooement,  si  nous  pouvonsnous  ser- 
vir  de  oe  mot ,  dans  d^autres  conditions, 
lis  subissent  i'influencedu  pays  quMIs 
habitent.  Les  Syriens,  par  n^cessit^, 
durent  se  livrer  aux  travaux  de  Tagri- 
culture. 

lis  n'eurent  pas,  dans  les  temps  an- 
ciens ,  comme  navigateurs ,  la  reputa- 
tion des  Ph^niciens.  Cependant,  toutes 
les  villes  de  la  cdte,depuis  Myriandre  jus- 
qu'au  port  pheniciend*Araaus,  firent  un 
grand  commerce  par  mer.  D*aotre  part, 
les  mardiands  syriens ,  qui  voyageaient 
sur  les  fronti^res,  par  caravanes  ou  au- 
trement ,  <^taient  nombreux.  lis  domi- 
naient  TEupbrate;  et  Thapsaque,  le 
grand  passage  sur  le  fleuve ,  leur  appar- 
tenait.  lis  sembiaient  plac^,  en  quelque 
sorte,  pour  unir,  comme  Alexandrie  plus 
tard,  la  haute  Asie  aux  paysoccidentaux. 
Cetait  vers  leurs  frontieres,  depuis  Tex- 
tr^mite  de  la  Commageoe  jusqu^a  Thad- 
mor,  quesedirigeaient  tous  les  produits 
naturels  ou  fabriqu^  de  TOrient  pour 
arriver  en  £gypt^  et,  par  la  Phenicie, 
iusqu*aux  parties  les  plus  recuiees  de 
r£urope. 

Aussi ,  comme  Tattestent  les  auteurs 
anciens,  la  Syria,  soit  par  son  agricul- 
ture, soit  par  son  commerce,  atteignit^ 
des  les  temps  les  plus  recul^s ,  ^  un  naut 
degr^  de  prosp^rile. 

CHAPITRE  II. 

BSLIGION  DB6   SYRIBNS. 

Rien  ne  prouve  mieux  la  parente  des 
Syriens  avec  les  peuples  qui  les  avoisi- 
naient que  leurs  croyances  et  leurs  c^r^- 
monies  religieuses.  Le  savant  Creuzer, 
dans  un  morceau  que  nous  citerons  ici , 
parce  auMI  se  rattache  directement  a  no- 
tre  sujet,  a  parfaitement  etabli  les  rap- 
ports qui  existent  entre  la  religion  dela 
vieille  Syrie  et  celles  de  presque  toutes 
les  eontr^esasiatiques.  II  ait : « Isischer- 
che  dan.sByblos  son  epoux  au'elle  a  perdu. 
La  d^esse  nous  met  elle-meme  sur  la  voie 
des  rapports  certains  qui  existent  entre 
les  religions  de  l'£gypte  et  celles  de  la 
Ph6nicie  et  dela  S:^rie.  £n  effet ,  les  Ph^- 
niciens  et  les  Syriens  revendiquaient  le 
dieu  de  Fl^ypte;  toQs  les  ans,  k  la  fgte 
d* Adonis,  une  t^te  myst^rieuse  6tait, 
dit-on ,  port^  par  mer  du  rivage  ^ypr 


LUNIVTERS. 


tiensurlac^tedeBybloa.  Les  monDaies* 
de  cette  ville  ph^nicienne  montrent  en^ 
core  la  figure  d'lsis ;  et  les  cuites  et  le$ 
divinity ,  et  les  id^s  et  les  images ,  tout 
cela ,  au  foild ,  ^tait  identique  ehez  les 
£gyptiens  et  chez  les  nations  de  TAsie 
moyenne  et  ant^ieiire.  Vovons  done  en 

3uoi  consiste  oette  identite ;  tdchons  de 
^velopper  les  conceptions  fondamenta- 
les  qui,  etant  eommunesaux  religions  de 
tous  ces  peuples ,  les  ont  eonduits  a  rap- 

Erocber  et  m6me  a  confondre  ensem- 
le  ieurs  dieux.  D'abord ,  nous  remar- 
quons  eng^n6ral,  dans  les  cuites  de  PA- 
sie  occidentale,  les  deux  sexes  a  cdte 
Tun  de  Tautre ,  un  principe  aetif  et  un 
principe  passif ,  un  dieu-soleil ,  roi  des 
cieux,  qui  a  le  pouvoir  f^ondant;  une 
d^esse-lune,  qui  con^it  de  hii,  et  qui 
parfois  seconrond  avec  la  terref^condee. 
En  second  lieu,  dans  ces  religions,  une 
seule  et  m^me  divinite  reunitsouvent  les 
deux  sexes;  tantdt  c*est  un  hoinme- 
femme,  et  tant6t  une  femme-homme , 
selon  que  Tun  ou  Tautre  sexe  domine. 
Quelquefois  enOn ,  Tune  des  deux  per- 
sonnes  divinesrdisparaft  tout  k  fait  dans 
le  culte  populaire;  sou  vent,  par  exem- 

{)1e,  c'est  le  principe  femeile  qui  fait 
'objetexclusif  des  adorations,  mais  non 
sans  des  rapports  plus  ou  moins  evidents 
avec  un  principe  mk\e.  Si  maintenant 
nous  cherchons  comment  ces  notions  et 
ces  combinaisons  diversea  peuvent  se 
rattacher  aux  grandes  divinites  de 
r£gypte,le9  noms  r^clament  avant  tout 
notre  attention  :  Bel  ou  Baal ,  Belsa- 
meu,  Moloch,  Adon,  Baaltis,  Astarte 
ou  Astaroth,  Mylitta, Aiitta,Silith,  Ma, 
Ammas,  Mitra  I  tels  sont  les  principaux. 
Or,  ^ue  nous  representent  ces  noms  ? 
trois  idee^  fondamentates :  rid^.e  de  Tern* 
pire  et  de  la  domination ;  Tid^e  de  la  nuit 
et  celle  de  la  lune,  qu^elle  emporta 
avecelle;  Pid^  de  |a  maternity.  Toute$ 
se  retrouvent  e^alement  dans  les  nom^ 
des  dieux  de  I'Egypte,  principalement 
dans  ceux  d*Athor  et  d*Isis ;  dans  le  sur*. 
Dom  de  cette  derni^re,  Moyth,  ou  la  mere 
par  excellence,  la  mere  du  monde, 
Gomme  s*appelait  encore  la  lune  chez  les 
^gyptlens ,  ^elon  Plutarque ;  enfin ,  dans 
rOsiris ,  }lau\s  le  Serapis,  seigneur  et  roi , 
dans  rjsisr^ioe  elmaitresse:  attribu- 
tions si  generales,  qu'il  n*est  presque 
pas  un  culte,  pas  une  religion  qui  ne\es 


ait  consacrto*.  Quant  aux  corobinaisons 
de  ces  id^es,  Isis,  le  principe  femeile, 
apparattd*abord  comma  la  grande  deesse 
de  r£gypte,  pendant  qu'Osiris,  bienfai- 
teur  des  numains ,  aceomplit  sur  la  terre 
les  travaux,  les  souffranoes  et  ia  mort, 
qui  doivent  lui  m^riter  I'honneur  de  par- 
tager  avec  sa  divine  Spouse  les  bomma- 
ges  des  peuples.  Voila  done  un  dualisrne 
qui  se  forme  pen  a  peu ,  mais  od  le  prin- 
eipe  femeile  est  longtemps  dominant.  Un 
dualisrne  d'un  autre  genre  se  remarque 
dans  les.fdtes  religieuses  de  Tfigypte, 
aussi  bien  que  dans  oelles  de  rAsie 
moyenne  et  ant^ieure.  La  ftSte  de  Thaift- 
muz  dans  la  Syrie  et  dans  la  Ph^nicie; 
oelle  de  Cyb^ledans  la Phrygie,  divjsees 
en  deux  parties  distinctes ,  avaient  Ieurs 
jours  de  deuil  oh  Ton  pleurait  un  dieu 
perdu,  et  lenrs  joure  ^'all^gresse  oik 
Ton  se  r^jouissait  de  I'avoir  retrouvt^;  de 
m^me  en  £gvpte,  la  f§te  d^Osiris  pr^seo- 
tait  ce  double  caractere,  les  lannes  et  la 
joie;  un  dieu  perdu  et  retrouv^;  mais  oe 
o'est  pas  tout;  la  religion  des  EgypUens 
eonnaissait  encore  ce  singulier  accident 
dont  nous  avons  parl^ ,  les  forces  actives 
reunies  aux  forces  passives  dans  un  <tre 
unique  mdle  et  femeile  a  la  fois.  Isis,  ou 
la  lune,  se  montre  sous  deux  aspects 
divers ,  passive  vis-^-vis  du  taureau  g^ 
n^rateur,  du  soleil  fecondant ;  active  vis- 
^•vis  de  la  terre  qu*elle  feoonde  k  son 
tour,  en  lui  communjquant  les  germei 
producteurs  qu*elle  a  recus,  Le  rappro- 
chement des  deux  sexes  engendra  par- 
tout,  comma  nous  le  verrons ,  un  triple 
ordre  de  symholes.  Faisait-oii  ressortir 
Tidee  de  la  puissance  virile,  alors  uo 
dieu  mdle  pr&idait  i  U  nature;  dans  I9 
cas  contraire,  une  deesse  figurait  comma 
la  mere  universeile  des  etres.  Imagi- 
nait-on  de  rassembler  les  deux  propriety 
dans  une  divinity  unique,  on  la  reprd- 
sentait  sous  la  forme  et  avec  les  attri- 
buts  d*un  androgyne.  Les  hermaphrodi- 
tes ne  sont  pas  moins  frequents  dans  les 
religions  de  TAsie  ocddentale  que  dans 
celles  dont  nous  avons  dej^  traite;  seu- 
lement,  nous  devons  ajouter  que  cette 
figure  bizarre ,  qui ,  dans  les  systemes 
th6olo^iques  de  la  haute  Asie^  renferme 
des  idees  sublimes,  par  exemple,  celle 
de  la  toute-puissanoe  divine ,  se  sufDsant 
k  elle-m^me,  n'a  pas,  a  beaucoup  pres, 
dans  les  cuites  populaires  dont  il  s*agit 


•  ••  • 
•  •  •  • 


SYRIE  AMGIENNE. 


id,  an  sens  auesi  rdev^ ;  elie  eiprime 
simpleiDent  TunioQ  toute  physiaue  de* 
d&dx  puissances  qui  ooncoureut  a  la  gen^- 
ratioodes^tres.  Les  religions  de  la  haute 
et  de  la  moyenne  Asie  se  frayerent  de 
bonne  heure  un  passage  dans  les  contrees 
les  plus  ocddentales  de  cette  partie  du 
moode.  L' Asie  ant^rieure ,  ea  y  com- 
picoant  la  Syrie,  la  Ph^nicie  et  la  Ju- 
dee,  etait  coaime  la  grande  route  par 
ou  circulaientcontiDuellement,  et  les  ea- 
lavanes  et  les  armees  des  nations  puis- 
santes  de  rinterieur.  Les  Assyriens,  les 
premiers,  fireot  de  ces  contrees  le  but  de 
leurs  exp^itions  guerrieres ;  des  peuples 
entiers  furent  transplantes  par  eux  au 
dela  de  FEuphrate  et  du  Tigre.  L'einpire 
ayaotpas^e  dans  d'autres  mains,  Ton 
vit  les  Babyloniens,  les  Medes  et  les 
Perses  se  succeder  tour  a  tour  sur  le 
trone  de  VAsie;  tous  ces  vainqueurs  ea- 
voyerent  des  colonies  dans  les  pays  (|u'ils 
venaient  deeonquerir,  etavec  elless*y  ua- 
turalisereatdes  coutumes  et  des  croyan- 
ees  ou  assyriennes  ou  mediques ,  comine 
on  ies  oommait  dans  Tantiquit^.  Vint 
eosuite  la  grande  domination  des  Perses. 
Les  satiapes,  suivis  d^arm^es  nombreu- 
ses,  ailment  tenir  leurs  cours  dans  TA- 
sie  Mineure.  Mais  T  Europe  parait  sur 
la  scene;  et  rA8ie,bouleversee  par  des 
oonquerants  nouveaux,  vittour  a  tour  les 
longues  dynasties  des  rois  grecs  seper- 
petuer  dans  son  seih;  et,  quand  ellea 
furent  tombees,  les  armees  romainea 
^tablir  leurs  quartiers  en  Asie  Mineure, 
en  Syrie,  et  dans  les  oontr^es  voisinea. 
Ajoutes  les  relations  si  anciennes  et  si 
djverses  que  le  commerce  avait  form^es 
entre  toutes  les  parties  de  T  Asie ,  et  tou- 
tes  les  influences  qui  devaient  en  r^ulter 
snr  les  moeurs  et  les  idees  des  peuples. 
lei  m^me,  dans  TAsie  ant^rieure,etaient 
le  grand  mardie  des  esclaves  et  Tentre- 
pdt  g^n^ral  des  roarchandises  de  TAssy- 
he,  de  la  Babylenie,  de  Tlnde;  les  Ph6- 
nidens  en  furent  les  foadateurs.  De  1^ 
eette  multiplicity  et  ce  melange  des  lan< 
gues  que  SUabon  remarque  en  Asie 
Mineure,    au  commencement  de  son 
douziemelivre.  De  la  aussi  ceUe  multi* 
plicit^  de  eultes  et  de  religions ,  dont  le 
melange  forme  un  tissu  singulierement 
divers.  Toutefois ,  dans  ce  tissu  merveil- 
leux.  Ton  peut  saisir  eomme  une  chatne 
jnysterieuse  qui  en  unit  les  ills  nom- 


breux ,  et  qui  rattacbe  k  la  fois  aux  re- 
ligions du  fond  de  TOrient,  et  les  eultes 
populaires  et  les  systemes  religieux  des 
contrees  plus  rapproch^  de  nous  (*). » 
C'est  ainsi  que  Creuzer  a  signale  d'une 
maniere  generale  les  rapports  qui  exis- 
tent entre  les  eultes  et  les  religions,  en 
appareuce  tres<divers«  quisesont  succe- 
de  dans  la  plus  grande  partie  de  TAsie 
connuedes  anciens.  Mous  aliens  inainte- 
nant  parler  $pecialement  de  la  religion 
des  Syriens.    . 

La  cosmogonie  et  la  th6ogonie  des 
Syriens  sont,  a  coup  sAr,  moinsconnues 
que  celles  des  Pl)6nicicns  et  des  ChaU 
deens.:Nulrenseignementbien  precis  ne 
nous  a  ete  transmis  sur  la  religion  et  le 
culte  oui  ont  domine  dans  le  pays  situ6 
eutre  rAmanus,  TEuphrate,  le  Liban  et 
la  mer  Interieure.  Toutefois,  quelques 
savants  modernes,  parmi  lesquels  nous 
citerons  Selden ,  Hyde ,  Uager,  Gcerres, 
Creuzer  et  Guigniaut,  sont  parvenus, 
a  Paide  de  rapprochements  ingenieux  et 
d'analogies  ,  et  surtout  par  une  habile 
critique  des  textes  anciens ,  a  donner 
sur  ce  point  important  quHques  notions 
qui ,  dans  ce  livre ,  paraltront  peut-toe 
sufOsantes. 

Le  mot  fiaoi chez  les  Syriens ,  comma 
Bel  chez  les  Chaldeens ,  Adon  chez  les 
Pheniciens,  semble  avoir  indique  I'idee 
du  principe  de  toute  chose,  de  la  cause 
premiere.  Baal  etait  le  gouverain  Sei" 
gneur  ou  Dieu.  Ce  mot  s'appliquait  quel* 
quefois  particuli^rement a  Tobjet  qui, 
chez  les  esprits  grossiers,  personniDait 
ridee  de  Dieu;  au  Soleil,  par  exemple, 
a  Jupiter  ou  a  quelque  autre  planete. 
Creuzer  a  remarqu^  que  le  nom  de  Baal 
fut ,  dans  I'antiquite ,  d'un  usage  aussi 
r^pandu  que  va^ue  par  lul-mSnie.  II  re- 
presentait  tour  a  tour,  chez  les  peuples 
orientaux,  habitu^,  si  nous  pouvons 
nous  exprimer  ainsi ,  a  ce  dualisme ,  un 
£tre  mdleet  feraelle.  Ajoutonscependant 
que  les  Syriens  paraissent  avoir  ador6 
une  d^esse,  la  Lune(  principe  passif,  par 
opposition  auSoleil,  principe  aetif),  sous 

(*)  Religions  de  FAntiquiiiy  oQvrase  de 
Creuzer,  traduit.  refooda,  compl^U  eta^ve- 
lopp^  par  M.  Gafeniaut ;  t.  II ,  premiere  partie, 
p.  I  et  saiv.  —  Foy.  aussi  aur  oe  sujet :  Hii^ 
toire  utuvenelle ,  par  uoe  soci^t^  de  geoa  de 
lettres,  traduUe  de  Panglais;  t.  II,  p.  ai  et 
8uiv.;  Amsterdam,  1770.  —  MunlL,  Palestine 
(d^DS  la  collectioQ  de  VUnivers)^  p.  89  et  sulv. 


$ 


L'UNIVERS. 


3; 


le  nom  compose  de  Baal-Cad  ou  Bei" 

Gadn- 

Les  rapports  frequents  que  la  Sjrie 
proprement  dite  eut  avec  les  r^ions 
qui  ravoisiaaient  durent  D^oessairement 
exercer  une  grande  influence  sur  sa  re- 
figion  et  sur  son  culte.  Les  points  de 
rapprochement  entre  la  religion  des 
Syriens  et  celle  des  Ph^niciens  sont 
nombreux.  Nul  doute  que,  sur  les  cdtes, 
depuis  le  Kersas  jusqu'a  la  ville  d'Ara- 
dus,  et  depuis  la  mer  lnt6rieure  jusqu'^ 
r£ujphrate ,  on  n'ait  ador6 ,  comme  dans 
la  Pb^icie  ou  la  M^opotamie,  sous  des 
noms  plus  ou  moins  alter^s,  Astart^,  Mo- 
loch ou  M^lech,  Melkarth,  I^ibchas, 
Tharthak,  etc.  La  Syrie  toutefois  eut  ses 
divinit^s  sp6ciaies.  La  plus  cdebre  de 
toutes  est  la  grande  d^esse  de  Syrie, 
[u!  ne  diffi^re  pas  autant  qu*on  Ta  cru 
le  TAstart^  des  Ph6niciens.  £lle  avait 
son  temple  principal  a  Mabog ,  ou  Bam- 
byce ,  plus  tard  Hierapolis.  Nous  em- 
prunterons  encore ,  a  propos  de  cette 
deess  ,  un  fragment  au  savant  Creuzer. 
«  Strabon  la  nomme  Aiargatis,  dit- 
il,  et  Ct^ias  Derceto;  le  g^ographe 
ajoute  que  son  vrai  nom  ^tait  Athara ,  ce 

^ue  savait  d^ja  le  vieux  Xantfaus  de 
.ydie.  Derceto  n*etant  visiblement 
qu'uue  corruption  d'Atargatis  ou  Ater- 
gatis,  il  est  plus  que  probable  que  les 
trois  noms  d&ienent  une  seuleet  m^me 
divinite.  Gependant  Lucien,  ou  Tauteur, 
quel  qu'il  soit,  qui  nous  a  laisse  I'intd- 
ressant  traite  sur  la  deesse  de  Syrie,  dis- 
tingue express6ment  cette  d^se  r^v^- 
r^e  a  Hi6rapolis ,  dela  ph^cienne  Der- 
ceto ,  se  fondant  sur  ce  que  celle-ci  ^tait 
represent^  avec  les  extremit^s  inf^rieu- 
resd*un  poisson,etrautre,  au  contraire, 
sous  la  figure  entiered'une  femme.  Nous 
Savons,  en  efifet,  par  divers  temoignages, 
que  Derceto  ^tait  adoree  demi-femme 
et  demi-poisson,  a  Jopp6,  en  Ph^nicie, 
k  Ascalon .  h  Azotus ,  chez  les  Philis- 
tins ,  et  ailieurs.  D*un  autre  c6t6 ,  maint 
vestiee ,  mainte  allusion  au  poisson  et 
a  sa  forme,  conserve  dans  de  tres-an- 

(*)  Le  mot  Baaltis,  BeltU,  ou  p]at6t  Baa^ 
loth ,  est  aassi ,  oomme  on  Ta  remarqu^ ,  le  fd- 
miDlD  de  BeuU,  11  signifle  reine  ou  maUrease, 
Baaltii  £tait  un  prf  ncipe  femeUe  qui  r^idait  soft 
dans  la  I  une,  sott  dans  la  planete  de  V^nus. 
Cette  d6esse  des  nations  syriennes  avait  une 
gnnde  analogie  avec  la  Mylitta  des  Babylo- 
niens,  VAlHta  ou  Alilat  des  Arabes  et  la  Mi- 
tra  des  Penes. 


dens  auteurs,  identifient  les  mythes 
d*Atergatis  et  de  Derceto,  aussi  biea 
que  leurs  noms.  Dans  ces  noms  m^mes 
est  renferm^  I'id^  de  poisson,  de 
grand,  d'excellent  poisson.  Comment 
r^oudre  maintenant  la  oontradictioii 
qui  existe,  au  suiet  de  la  d^se  de  Syrie, 
entre  Lucien ,  temoin  oculaire ,  et  des 
toivains  d'une  date  plus  recul^ ,  d*une 
autorit^  non  moins  forte  que  la  sienne? 
Cela  ne  se  pent  guere  qu*en  distinguaal 
les  6poques.  II  est  k  croireque^a  deesse 
de  Syrie  appartient  d'abord  aux  ddesses- 
poissons.  Une  foule  de  circonstances 
tendent  k  le  prouver;  d*abord  la  sc^e 
0(1  nous  conduit  sa  l^ende ,  puis  d'an- 
ciens  usages,  ^ui  subsistaient  encore,  au 
temps  de  Lucien,  dans  le  temple  d'Hi4- 
rapolis,  tels  que  celui  de  porter  de  I'eaa 
dans  un  goufire  sacr<S ;  celui  de  nourrir, 
au  voisinage  du  temple,  des  poissons 
sacr^s  ^galement;  la  d^ense  de  man- 
ger du  poisson  faite  aux  adorateurs  de 
la  d^se,  etc.  Ce  fut  la  premiere  p6- 
riode  du  culte  d*Hi^rapolis.  Dans  la 
seconde  p^riode,  la  forme  de  poisson, 
donnee  longtempsa  Tidoledu  temple, 
tomba  en  d^uetude ;  et  la  deesse  com- 
mence d^  lors  k  se  rapprocher  de  beau- 
coup  d'autres.  Plus  tard,  les  formes  se 
moaifi^rent  encore  :  Tidole  devint  une 
especedePanth^,oik  les  symboles  et  les 
attributs  les  plus  divers  se  donnerent 
rendez-vous.  Aussi  Lucien,  qui  Tap- 
pelle ,  oomme  on  sait>  Here  ou  Junon, 
ne  peut-il  s*emp^er  de  reconnaltre 
qu*elle  a  des  traits  de  Minerve  et  de  VS- 
nus ,  de  la  Lune  et  de  Rh^ ,  de  Diane , 
de  N^m^siQ  et  des  Parques.  Dans  Tune 
de  ses  mains  elle  tient  un  sceptre ,  dans 
I'autreunequenouille;  sur  la  t^e  elle 

Sorte  une  tour,  et  elle  est  environn^ 
e  rayons;  elle  est  encore  par^  de  la 
ceinture ,  ornement  distinctif  de  Ydnus- 
Uranie.  Mais  alors  m^me  que  la  d^se 
eut  revdtu  cette  derni^re  forme,  et  que 
Stratonice  lui  ellt  bdtl  un  temple  nou- 
veau,  les  souvenirs  de  la  forme  primitive 
et  des  vieilles  croyances  qui  8^  atta- 
chaient,  subsist^rentavee  lamdmoire  de 
Tancien  temple.  Le  culte  de  la  divinity 
syrienne  avait  de  nombreux  et  frap- 
pants  rapporu  avec  celui  de  la  Cybele 
de  Phrygie.  Aussi  Lucien  nousapprend- 
il  qu*une  opinion  repandue  de  son  temps 
identifiait  les  deux  dresses;  et  cette  opi- 


SYRIE  ANCIENNE. 


nioa  parAH  mtoie  avoir  trouve  aocte 
dans  Fart,  poiaque  Ton  a  dea  in6dail« 
lea  d'Hierapolia,  aur  leaquellea  eat  re* 
prtenUe  la  d^eaae  de  Syria,  assise  sor 
un  tt6nt  entre  deux  lions.  Les  inscrip- 
tiona  ttooignent   ^alement  de  cette 
identity  En  effet,  a  Hitopolis ,  comma 
eo  Phrygie,  existaient  oes  eunuques 
saer^  etde  saer^s  orgies,  ou  leadeYots, 
formaiit  des  danaes  sauvages,  au  bruit 
da  tambour  et  au  son  des  fldtes,  se 
flagdlaient  mutuellement  jusqu'a  faire 
eoolor  leur  sang,  et  m^me,  dans  le 
transport  fir^n^ique  de  la  ffite,  sous  les 
yeax  dn  peuple  assemble ,  portaient  la 
main  sur  leur  propre  corps ,  et  se  pri- 
▼aient  de  la  virility.  lA  aussi  des  femmes 
lanatiques,  se  passionnant  pour  ces  eu- 
nuques Tolontaires  qui  leur  rendaient 
un  Ddkiant  amour,  avaient  avec  eux  un 
moostrueux  commerce.  U  aussi  le  ool- 
\€ffi  ^  prftres  ^tait  extrdmement  nom- 
breux;  carFauteur  du  traite  d^j^  cit6 
en  eompta  plus  de  trois  cents  occupy 
a  un  sacrifice.  Us  avaient  des  v^tements 
bJancs  et  des  chapeaux.  Le  coll6jge  ^tait 
pr^ide  par  un  grand  prltre,  qui  restait 
pendant  un  an  en  possession  de  cette 
dignity,  dont  les  marques  ext^rieures 
elaient  la  tiare  et  une  robe  de  pour> 
pre.  Le  eonoours  des  Strangers  qui  ve- 
naient  en  foule  de  la  Ph^nicie,  de  TA- 
rabie,  de  la  Babylonia,  de  TAss^rie  et 
de  TAsie  Hineure,  faire  leurs  oSrandes 
a  la  d^esse ,  grossissait  n^cessairement 
le  tresor  du  temple,  non  moins  riche  que 
cclui  de  Cybele.  Beaucoup  d^autres  ins- 
tittttious  communes ,  parmi  lesquelles 
iJ  ftut  remarquer  la  v^n^ration  pour  lea 
pojasona  et  Tabstinence  de  leur  chair, 
tradaient  k  rapprocber  les  deux  divini- 
ty, soit  entre  elles,  soit  de  plusieurs 
autres ;  et  nous  savons  que  ce  dernier 
usage  se  liait  particulidrement  au  culte 
d'Astarte.  Cette  adoration  des  poissons, 
et  cette  dtfensede  s'en  nourrir,  sont  un 
des  traits  les  plus  caracteristiques  des 
religions  de  la  Syria  tout  entiere.  Tou- 
tefois ,  il  eat  a  croire  que  ce  commande- 
ment  si  general  souftrait  de  cerlaines 
restriclions,  que  lesprdtres  seuls  ^taient 
tenus  dVbserver  dans  toute  sa  rigueur 
le  precepte  d'abstinence ;  tandis  que  le 
peuple  avait  aeulement  pour  sacres  et 
uviolablea  les  poisaons  nourris  dans  les 
^tao^  des  temples.  L*exemple  des  Egyp- 


tians eat  une  assez  forte  preuve  en  far- 
veur  de  Cette  opinion,  quoiqu'ils  pa- 
raissent  avoir  attach^  au  poisson  des 
idto  diff(6rentes  de  celles  des  Syriens. 
Ceux-cl  tenaient^galement  pour  aacrees 
les  colombes ,  les  adorant  et  se  gardant 
de  leur  faire  du  mal  (*).  » 

Cette  v6n6ration  pour  les  colombes 
remonte ,  en  Orient ,  suivant  la  remar- 
que  de  Sainte-Croix,  de  Sacy,  deRosen- 
miiller,  aux  epoquea  les  plus  recul^s,  et , 
malgr^  Tislamisme ,  elle  s'est  perp6tu^ 
jusqu'^  nos  jours.  Elle  est  commune 
a  tons  les  peuples  de  race  stoitique. 

Quel  ^tait  le  culte  que  les  Syriens 
rendaient  k  leurs  dieux?  Le  passage 
que  nous  avons  emprunt^  a  Creuzer, 
sur  la  grande  ddesse ,  k  defaut  de  ren« 
seignements  plus  pr6cis,  pent  nous  le 
faire  connattre.  C'etaient  des  sacrifices , 
oQ  coulait  souvent  le  sang  bumain; 
puis  des  ffites  empreintes  tout  a  la  foia 
d*une  profonde  tristesse  et  d*une  joie 
fren^tiaue.  Des  pratiques  lugubres ,  des 
danses  lascives,  la  plus  violente  expres- 
sion de  ce  qui  s'allie  avec  une  singu- 
li^re  vivacite ,  dans  Tesprit  des  Orien- 
taux,  la  douleur  et  la  luxure,  voila  ce 
qui  dut  caract^riser  le  culte  dea  Syrians. 
lit  m£me  ou  n*avaient  point  pen^tre , 
dans  toute  leur  purete ,  les  traditions 
sacrees  dela  Ph^ieie,  les  f(§tes  syrien- 
nes  ressembl^rent  aux  Jdonies.  Nous 
n'avons  pas  besoin  4b  dire,  apres  le 
passage  que  nous  avons  cit6y  que  la 
m^me  analogic  se  manifeste  dans  la 
culte  rendu  ^  Cvb^leeta  Attis,^  Anaitis, 
k  Mj^litta  et  k  Mitra,  en  Phrygie,  en  Ar- 
m^nie,dans  la  Babylonia  et  dans  la  Perse. 

Suivant  certains  critiques,  les  Syriens 
auraient  aussi  plac6  au  rang  des  dieux , 
en  souvenir  de  glorieuses  victoires  ou 
de  bienfaits  re^us,  plusieurs  de  leurs 
anciens  rois.  C'est  amsi  quMis  auraient 
adore  Hadad  et  Hazael. 

Les  croyances ,  les  traditions  et  lea 
pratiques  religieuses  de  la  Syria,  comme 
celles  de  tousles  autres  pays  de  TOrient 
en  general ,  se  conserverent  intactes , 
jusqu*au  moment  ou  parut  Alexandre. 
Le  conquerant  macedonien,  en  impor- 
tant ,  en  tous  iieux ,  k  la  suite  de  son 
arm^,  les  ideea  et  la  civilisation  greo- 


(*)  Religion*  de  rAntiqitiU,  t  H,  prenl^ 
partle,  p.  26  et  suiv. 


to 


LUWIVERS. 


ques,  n'aDeaptiifiasantierement,  il  e$t 
vrai,  les  vieilles  religioos  asiatiques,  mats 
ii  leur  lit  aqbir  una  profonde  altecatH>o. 

CHAPITRE  n\. 

HISTOIBB  DE  LH  SYB1B  DBPUIS  LBS 
TEMPS  LES  PLUS  BECULES  JUSQU'A 
LA  CONQUETE  MACEDONIBRNE. 

FOBMATIOlf  DBS  BOYAOMBS  SYBIEN «. 

—  Les  Syrians ,  connus  dans  rfxriture 
sous  le  nom  generique  d'Arameens,  se 
partageafent  d'abord  en  tribus  indepen*- 
dantes.  Ghaque  peu  pladeavait  son  dief  ou 
roi ,  appel6  Metech  dans  la  langue  du 
pays.  Le  temps  altera  cette  constitutioa 
primitive.  Par  des  ehangements  plus  ou 
moins  rapides,  dont  Fhlstoire  n*a  pais 
rendu  compte ,  quelques  tribus  s*eleve- 
rent,  quelques  autres  d^churent;  les 
plus  favorisees  r^unirent  sous  une  domi- 
nation eommune  des  voisins  moins  heu* 
reux ;  et,  sans  modiQer  Tancienne  consti- 
tution patriarcale,  impos^rent  aax  chefs 
particuliers  leur  suzeraioet^  nouvelle. 

Ainsi  se  formerent  les  £tat8  de  Sobd, 
(Zobah,  Tsobd),  d*Hamatbou  flemath, 
d'Arpad,  de  Maacha,  de  Gueschour 
ouGessur,  de  Beth-Rehob,  de  Dames- 
chek  (Damas). 

L*histoire  de  ces  petits  royaumesreste 
eouverte  iusqu*au'onzieme  siecle  (avant 
J.  C.)  de  la  plus  complete  obscurite.  Le 
silence  de  TEorit^re ,  qui  ne  les  nomme 
pas  avant  le  r^gne  de  Saiil  (Schaoul), 
prouve  seulement  qu*Arame  ne  s*associa 
point  d'abord  k  la  ligue  de  la  race  de 
Cham  contre  le  peu  pie  de  Dieu.  Les 
victoiresdu  premier  roi  d'Israel  lestir^- 
rent  entin  de  cette  dangereuse  indiffi6- 
rence.  Jusque-la ,  battues  et  assujetties 
par  les  P61ichtimes  (Philistins),  les  douze 
tribus  s*6taient  relev^es :  dej^  elles  re- 
poussaient  les  vainqueurs  au  del^  de 
leurs  limites.  Schaoul  allait  ramener  les 
temps  de  Josud.  C'est  alors  que  nous 
▼oyons  les  rois  de  Sobd  Ogurer  pour  la 
premiere  fois  dans  le  livre  de  Samuel. 

Schaoul  obtint  la  royaut^  sur  Israel ; 
et  il  combattit  tous  ses  ennemis  a  Ten- 
tour  :  Moab,  les  fits  d' Amm6ne,  Edome, 
les  rois  deSob§,  et  les  Pelichtimes,  et 
partout  ou  il  se  tournait,  il  r6pandait  la 
terreur  (*). 

(*)  Schemouel ,  liv.  I,  XIV,  47. 


Les  rois  de  Sobt  devaient  gouverner 
dans  une  sortt  d^union  federative  la 
partie  de  la  S^rie  voisine  du  Liban ,  qui 
ftait  borp^e  a  Test,  par  rEuphrate;au 
sud-ouest ,  par  le  pays  de  Chauaan  et  par 
Danoesehek.  Au  nombre  de  ces  rois, 
00  place  Reohob,  p^re  de  Uadadezec. 

BBGNS  DE  0ADAOEZEB.  —  Uadade^ar 
paraitau  temps  de  David*  vers  1 050  avant 
J.  G.  C).  H^ritier  des  projets  de  soq  pere 
contre  les  liebreux»  mais  instruit  par 
inexperience  d'ua  premier  revers,  ce 
prince,  avant  d'attaquer  le  suocesseur  de 
Schaoul,  concentra  dans  sa  main  toutes 
les  forces  du  pavs  4e  Sob4.  II  assujettit 
les  cbefs  de  tribu,  et  regna  seul  avec 
uneautoritequi,  divis^,  se  fdtaffaiblle. 
Bientot ,  recberchant  le  principe  de  la 
grandeur  dans  Tunite,  il  rallie  tous  les 
peuples  syriens  contre  Fennemi  com- 
roun,  et  se  place,  comme  chef  national, 
a  la  t^te  d*une  vaste  confederation.  Mm 
en  poursuivant  oette  grande  idee,  il  ne 
sut  pas  tenir  assez  compte  des  int^- 
r^ts  particuliers.  Deja  TalmaT ,  lils  d' A- 
mihoud,  roi  de  Gueschour,  avait  donn^ 
k  David  sa  Glle  Maacha,  et  montre 
Texemple  de  Talliance  avec  retranger. 
A  son  tour,  Tobi,  roi  de  Hamath,  se  jette 
par  l^aine  d'un  rival  dans  le  parti  d'ls- 
rael,  et  combat  les  envahissements  du  roi 
de  Sobd.  Hadadezer  ne  sVffraye  point 
de  cette  oppositioh  partielle;  sdr  deTap- 
pui  des  Syriens  de  Damas ,  il  s*avanoe 
avec  conOance  contre  David ,  vainqueur 
des  Moabites.  Mais  il  ne  trouya  dans 
cette  expedition  que  honte  et  revers : 
David  lui  enleva  1 ,700 cavaliers  et  20,000 
hommes  de  pied ;  David  ooupa  les  jar- 
rets  a  tous  les  attelages, et  n'en  r^sarva 
que  cent  (**).  La  Chronique  parle  de 
1,000  cbdrriots,  7,000  cavaliers,  el 
20,000  hommes  de  pied  {***)-  Quel  aue 
Boit  le  chiffre  qu*on  adopte  ^  I'etenaue 
de  ce  desastre  compromettait  a  la  fois 
etaum£medegr6,peut-^tre,  la  puissance 

(*)  Tie  Dom  de  oe  prince  revieni  plusiears 
((As  dans  le  livre  de  Scbemouel  et  dans  les 
Chroniquen  &ous  line  forme  dirf(6rente  :  Uada- 
Tfzer  et  Hadadezer,  par  exempie;  Chr.,  I,  eh. 
XYIII,v.8;etSamael,nv  1I,X,  10.  Mate  Hada- 
dezer e&t  la  veritable  ortbograpbe:  hadad  tml- 
ra!t  6tre  le  Hire  commun  de  tous  les  rots  tfA- 
rame-  Ben> Hadad  I*S  Ben- Hadad  II,  etc.;  de 
iD^me  Parau,  PhaniOt  c|i«t9  les  £sypti<)ns»  Ai)- 
iur  cbez  les  Arabes. 

[♦♦)Sara.,  Ilv.  11,  VIII,  4. 

(••*)  Ckrouiques,  liv.  I,  VIII,  4. 


SYRIE  AWCEENNE. 


11 


nouvene  du  roi  de  Sob^  et  rind^pen- 
dance  d^Arame.  Les  babitaDts  de  Da- 
roeschek  comprirent  le  danger;  ils  arri- 
Terent  au  secours  de  leur  allie;  mais 
cette  fois  encore  David  triompha  de 
la  ligue  syrienne  et  battit  22,000  bom- 
mes  d^Aranie  (*). 

Ce  coup  6tait  d^isif.  Hadadezer,  aban* 
donne  par  une  partie  de  ses  serviteurs,  se 
soumit  (**).  Dameschek  re^ut  des  pos- 
ies militaires ,  et  ceux  d'Araine  devinrent 
suieU  et  tributaires  de  David  {***).  Les 
▼ainqueurs  rapport erent  a  Jerusalem  un 
riche  butin ,  les  boucliers  d'or,  les  car- 
quois  d'or  pris  sur  les  serviteurs  de  Ha- 
dadezer,et  Fairain  enlevedans  les  villes 
de  Betah  el  de  Berotha!  (****) ,  de  Tibath 
et  de  Coune  (♦****). 

Ainsi,  le  sort  avail  confondu  les  vas- 
les  projets  du  dominateur  d'Arame,  et 
donne  gain  de  cause  aux  adversairesdesa 
puissance.  Tohi ,  roi  de  Hamath,  en voya 
son  61s  Jorame  k  Jerusalem  pour  felici- 
ter  Dawid  de  la  defaite  de  leur  commua 
ennefDi,  et  lui  offrir  en  present  des  vases 
d*argent,de8  vases  d'or  etdes  vases  d'ai- 
rain  (******).  Le  vaincu , cependant ,  n'e- 
tait  pas  dompl6;  il  oe  renoncait  pas  k  sa 
difDcile  entreprise ,  et  se  preparait  pour 
one  nonveHe  tentative. 

David  r^gnaiten  palx  sur  Israel;  vain- 
queurde  Moab,  d*Amm6ne,  d*Arame, 
des  Pelichtimes  et  d'AmaIek ,  11  ^tendajt 
sur  tous  ses  voisins  une  puissanee  soli- 
dement  affermie. 

Cest  alors  que  le  roi  des  enfants 
d'Ammone  mourut;  et  Hanoune,  son 
fiis,  rcgna  en  saplace  (•******). 

«  David  dit : «  Je  veux  a^ir  avec  bont^ 
envers  Hanoune,  Gls  de  Nahasch,  comme 
son  pcre  a  agi  avec  bonte  envers  moi ;  »  et 
David  en  voya  ses  serviteurs  pour  le  con- 
soler de  la  mort  de  son  p^re.  Les  ser- 
viteurs de  David  arrivcrent  au  pays  des 
enfants  d'Amm6ne. 

'  «  I^s  princes  des  fils  d'Ammdne  di- 
TentaHanoune,leurmaUre:  ttEsl-ceque 
David  veut  honorer  ton  p6re  a  tes  yeux, 
qu*il  t'a  envoys  des  consolateurs?  N'est- 


(•)  Sam.  ibid,,  5.  -  Chr. ,  ibid. .  J^  .   ,  ^ 
(**}  R^zoM,  fils  d*EliQda,  vas'ttablfr^  Da- 
Mocbek  comme  ch^f  de  bande.  Mois,  1. 1,  XI,  SS. 
r*)  Sam.,  Uv.  II,  VIII,  S. 
(— *i  Sam. ,  t6/dr. ,  8. 
(••••*)  Chrvniques.  liv.  I,  XVllI ,  8. 

(••••••)  Sam.,  ibid.,  10. 

(*♦•*♦••)  Sam.,  liv-  II ,  X,  I. 


ce  pas  plutdt  pour  explorer  la  ville,  pour 
I'^pier,  afin  de  la  d^truire ,  que  David  a 
envoy^  ses  serviteurs  vers  toi  ?  » 

«  Hanoune  prit  les  serviteurs  de 
David,  leur  fit  raseria  moitie  de  la  barbe, 
couper  la  moiti^  de  leurs  habits  jus* 
qu'aux  hanches,  et  les  renvoya. 

«  Ils  le  firent  savoir  a  David;  et  tl 
en  voya  au  devant  d*eux ;  car  ces  hommes 
^taieiit  tr^confus;  leroi  dit :  «  Demeu- 
rez  k  Jer^ho  (Jericho) ,  jusqu*a  ce  que 
voire  barbe  ait  repouss^,  et  puis  vous  re- 
viendrez.  » 

Les  fils  d*Amm6oe,  voyant  qu*ils  s*^- 
taient  mis  en  peril ,  chercherent  des  de- 
tours contre  la  vengeance  des  Hebreux. 

lis  prirent  a  leur  solde  de  Bethrehob 
et  de  Sobd  20,000  hommes  de  pied; 
du  roi  de  Maacha,  1,000  hommes,  et 
des  hommes  de  Tob  (Istob),  12,000  {*). 

Ainsi,  le  parti  forme,  dans  Arame,  par 
Hadadezer  se  relevait  de  sa  chute,  pour 
reconimencer,  au  compte  etavec  Tappui 
des  Ammonites,  la  lutte  de  la  race  de 
Cham  contre  les  envahissementsd'Israel. 

David  Tayant  appris,  envoya  Joab  et 
toute  son  armee(**). 

«  Les  enfants  d'Ammdne  sortirent  el 
se  rang^reot  en  bataille  k  Tentree  de  la 
porte.  Arame  Sobd ,  Rehob  el  lea  hom- 
mes de  Tob  et  de  Maacha  ^talent  k  part 
dans  la  campagne  (***). 

«  Joab,  ayant  vu  que  rarm6e  ^tail 
tournee  contre  lui,  devanl  et  derriere, 
choisit  parmi  tous  les  hommes  d*^lite 
d'lsrael,  et  les  rangea  contre  Arame; 

«  £t  remit  le  reste  du  peuple,  qu*il 
rangea  contre  les  enfants  d^Aminone, 
dans  la  maind'Abischai,  son  frere. 

«  II  dit :  «  Si  Arame  est  plus  fort  que 
mot,  tu  viendras  a  mon  secours;  si  les 
enfants  d*Ainmdne  soot  plus  forts  que 
toi ,  hrai  te  secourir. 

«  Sois  fort;  et  agissons  avec  force 
pour  notre  peuple ,  et  pour  les  villes  de 
noire  Dieu,  et  que  r£ternel  fasse  ce  qui 
sera  bon  k  ses  yeux.  » 

«  Joab  et  le  peuple  qui  ^tait  avec 
lui  s'approcherent  pour  le  combat  con- 
tre Arame,  qui  s'enfuit  devanl  lui. 

«  Les  enfants  d'Ammone,  vojant 
qu' Arame  avait  pris  la  fuite^  prirent 

(*)  Sam.,  ibid. ,  6.  -  Chr,,  liv.  J.,  XIX,  6. 
(**)  Sam.,  ibid, ,  7. 

(***)  Cump&i  en  face  de  Medaba,  au  midi  de 
Rabbath-Ammou)  Chr.,  liv.  I,  XIX,  7. 


13 


L'U  RIVERS. 


aussi  lafuite  devaot  Abischai  (*). »  Ainsi 
les  Syriens  h  pea  pres  seuisont  soutena 
le  chocdes  H^breux.Vaincus,  Ieurd6- 
faite  est  pour  Araine  un  echec  national. 
Ce  n'est  done  plus  d^ormais  au  compte 
d'un  alli^, e'est  en  leur  nom,  e'est  pour 
leur  ind6pendance  menac6e  quMls  doi- 
vent  combattre.  Hadad^zer  se  met  a  la 
t^tedu  mouvement,  pour  assurer  le 
triomphe  de  ses  projets;  il  se  sert  du 
danger  commun,  et ,  ralliant  toutes  les 
tribus  des  deuxbords  de  TEuphrate, 
fonde  9  au  profit  de  son  ambition ,  I'unit^ 
momentaneedes  peoples  d'Arame. 

«  Les  enfants  d*Arame,  se  voyant 
battus  devant  Israel,  s*unirent  ensemble. 

«  Hadadezer  envoya  (**)  et  /it  $or- 
tir  ceux  d*Arame  qui  itaientau  deid  du 
fleuve;  ceux-ci  vinrent  h  H^lame.  Scho- 
bab ,  chef  de  Tarmee  d'Hadadezer ,  etait 
devant  eux.  » 

Gette  fois  Fattaque  ^tait  menacante 
pour  Israel.  David  asserabia  tout  son  peu- 
pie  et  passa  le  Jardene  (Jourdain).  Les 
Syriens  rang^rent  en  bataille  leurs  cha- 
riots et  leur  cavalerie;  mais  TEternel 
donna  la  victoire  k  David.  Schobah  perit 
dans  la  m^l^e  :  700  chariots,  40,000 
cavaliers,  suivant  Samuel  (***),  7,000 
cfi^riots,  40,000  hommes  de  pied, 
suivant  les  Chroniques  (*•**),  couvrireot 
la  plaine  de  Helame. 

«  Tons  les  rois,  serviteurs  d'Hada- 
d6zer,  ayant  vu  qu'ils  ,avaient  6te  battus 
devant  Israel,  (irent  la  paix  avec Israel, 
dont  ils  devinrent  les  sujets,  et  Arame 
craignit  de  secourir  encore  une  fois  les 
enfants  d*Amm6ne  (*****).  » 

Ici  se  termine  Tliistoire  et  probabie- 
ment  la  vied*Uadadezer.  R  ien  ne  resta  de 
l^oeuvre  de  ce  grand  chef,  pas  m^me  le 
royaume  que  son  ambition  avait^lev^li 
une  importance  peu  durable. 

Ilavait  r^ve  Tind^pendance  d'Arame, 
fondee  sur  i'unite.  Arame  perd  k  la  fois 
Tunite  et  Tind^pendance.  Ses  peuples,  a 
peine  rapproches  par  les  liens  de  leur  r6- 
cente confederation,  se  morcellent  pour 
s'affaiblir  sous  la  domination  d*Israel. 
Tout  le  pays  en  de^a  de  TEupbrate  jus* 
qu'a  Tiphsah  (******)  (Thapsaque),  recon- 

(*)  Sam.,  Uv.  H ,  X. 


Misit  nuntiofl.  CAr.,  Uv.  I,  XlX,  16. 
•*•)  Liv.  1 .  X »  18. 
*)  Uv.  t,  XlX,  IS. 


nut  la  loi  de  Schelomo.  Seul,  un  senri teur 
d'fladad^zer,  R^ne,  fils  d'£liada,  con- 
tinue la  tutte  contre  les  vainqueurs.  Re- 
zone  avait  d^rte  le  camp  du  roi  de 
Sobd  pour  se  faire<ihef  de  bande,  et  s'^ta- 
blir^Dameschek.  De  cette  place,  comme 
Faigle  de  son  aire ,  dit  la  Bible ,  il  do- 
mina  la  Syrie  et  les  frontieres  de  la  Judee. 

«  11  fut  un  adversaire  d'fsrael  pen- 
dant tout  le  temps  de  Schelomo  (Salo- 
mon); il  eut  de  la  repugnance  pour  Is- 
rael ,  et  r^gna  sur  Arame  (*}.  » 

A  Rezone  succ^da  H^sione.  Ce  chef, 
qui,  sans  doute,  avait  commence  par  ser- 
vir  dans  la  bande  de  Rezone,  n*a  laiss<§ 
dans  rhistoire  aucun  souvenir.  Quelques 
critiques  m6me  (**j  ont  nie  son  existence. 
Ils  ont  pris  Hesione  et  Rezone  pour 
deux  formes  du  m^me  nom. 

Tobrimone,  fils  d'H^sione,  renon^a 
k  toute  hostility  contre  les  H^breux , 
et  v^cut  dans  Falliance  d'Abiam ,  roi  de 
Juda  (Abiam  r6gna  de  958  a  9.i6). 

II  ne  s'occupa  point  d'etendre  sa  puis- 
sance su  dehors ;  mais ,  |iar  une  politi- 
que mieux  entendue,  il  reunit  dans  Tu- 
nite  du  royaume  d'Arame  les  diff^rentes 
fractions  de  la  puissance  syrienne.  Pen- 
dant que  les  Syriens  se  formaient  ainsi 
en  corps  de  nation  sous  Tautorite  d*un 
seul  chef,  les  dix  tribus  d'Israel  se  sepa- 
raient  de  Juda,  et  fondaient,  en  face  de 
Jerusalem,  un  royaume  rival. 

LUTTB  ACHABNBB  CONTRE  LBS  IS- 
RAELITES;  BEN-HABAD  T'ETBEN-HA- 

DAD  11.  — Ben-Hadad  I«%  fiisde  Tobri- 
mone >  sut  babilement  profiter  de  ces 
divisions. 

II  s*unit  d'abord  avec  Baascha ,  roi 
il*lsrael. 

«  Mais  Assa,  roi  de  Juda,  prit  tout 
Targent  et  Tor  aui  etaient  rest^s  dans 
les  tresors  de  la  maison  de  Dieu  et 
dans  les  tresors  de  la  maison  du  roi ,  les 
donna  a  ses  serviteurs,  et  les  envoya  vers 
Ben-Hadad,  fils  de  Tobrimone,  filsd*HeJ% 
siooe,  roi  d'Arame,  qui  demeurait  k 
Dameschek,  en  lui  disant  : 

«  Qu'il  y  ait  une  alliance  entre  moi 
et  toi ,  comme  entre  mon  pere  et  ton 
p^re ;  void  :  je  t'envole  un  present  en 
argent  et  en  or;  va ,  romps  ton  alliance 
avec  Baascha,  roi  dMsrael.  » 

« Ben-Hadad  ecouta  la  proposition  de 


^)  Sam.,  ibid,,  19. 


(*)  JloM,Uv.  I,XI,S5. 
(•♦}  Newton ,  ChronoL, 


p.  S38. 


SYRIfi  AJSCIENNE. 


IS 


Assa,  et  envoya  les  capitaines  de  son  ar- 
mee  coAtfC  les  villes  d'Israel ,  et  battit 
Tioiie,  Dane,  Abel-Betb-Maadia  et  tout 
Kiilroth  n ,  dans  tout  )e  paysdeNeph- 
tali  (939  av.  J.  €.)(*♦).» 

Cetait  le  jour  des  repr^illes.  Ben- 
Hadad  Teogeait  Hadad^r ;  Araoie,  fort 
de  son  unite  nouvelle,  prenait  sa  revan- 
che sur  Israel,  affaibli  et  divise.  Etrange 
aTeugieoient!  Lepeuple  de  Juda  applau- 
dit  au  triompbe  de  I'^tranger ;  seufs,  les 
proph^tes  {Hrotesterent,  au  nom  de  leur 
Dieo,  contre  Talliance  des  ennemis  de 
Jdiova. 

■  Banani,  le  prophete,  vint  vers 
Assa,  roide  Juda,et  luldit : «  Parce  que  tu 
as  mis  ta  eonfiance  dans  le  roi  d'Arame, 
et  non  dans  le  Seigneur,  ton  Dieu ,  c*est 
ponrquoi  rarni6e  du  roi  d'Arame  s*est 
cehapp^  de  ta  main. 

«  £st-«e  que  les  J&thiopiens  et  les  Li- 
byensn'etaie&t|iasbienp]us  nombreux , 
a^ec  lenrs  ehariots  et  leurs  cavaliers , 
6t  ieiir  multitude  ?Tu  t'es  conGe  au  Sei- 
gneur ;  et  le  Seigneur  les  a  li  vr^  dans  tes 


«  Car  les  veux  du  Seigneur  voient 
toute  la  fiice  de  la  terre ,  et  donnent  de 
k  force  a  ceux  qui  se  reposent  sur  lui. 
Tu  as  done  follement  agi ,  et  pour  cela, 
a  partir  de  ce  jour,  des  guerres  s'eleve- 
rent  contre  toi  (***).  • 

Le  people  ^tait  habitu6  a  r^verer  la 
Toil  des  homines  inspires.  U  se  troubia 
des  menaees  d*Hanani.  Mais  Assa,  pour 
riitabVtr  leealme,  fitchdtierle  propliete 
importun  et  mettre  a  mort  quelques  me- 
contents  (****).  * 

Sans  inquietude  du  c6t6  de  Jerusa- 
lem, Ben-HadadF'continuases  hostility 
eontre  le  royaume  d'Israel.  11  enleva  plu- 
sieurs  riilessousleregne  d*Omri  (**^, 
et  obtint  pour  les  marchands  syrlens 
des  privileges  commerciaux ,  le  droit  de 
libre  entrte  et  de  libre  sortie  dans  la 
ville  de  Schomrone  (******),  le  droit  d'y 
▼Ivre  ensemble  selon  les  lois  de  leur 
paysetd'y  bdtirdes  rues.  Ben-Hadad  II, 
fils  de  Ben-Hadad  P%  h^rita  de  la  puis- 
sance de  son  pere  et  de  ses  projets  d'a- 
grandisseroent  (901  avant  J.  G.). 

n  Le  oom  ujcwlerne  est  Gennesarelh. 

«*♦)  Rots,  llr.  I,  XV,  18  el  suiv. 

(••*)  Chrvniques  J!v.  11,  XVI,  7  et  soiv. 

(••••)  Chr.  iluL,  10. 

f*')  Hou,  Uv.  1,  XX,  34, 

r*****)  Samade,  r^cemmcnt  Mlie,  Wl. 


Ben-Hadad ,  roi  d*Araroe,  asseuibla 
toute  son  arm^e  :  trente-deux  rois  (ou 
chefs  de  tribu )  ^ient  avec  lui ,  ainsi 
que  des  elievaux  et  des  chariots.  II 
monta,  dit  r£criture,  assi^ea  Schom- 
rone ,  et  lui  fit  la  guerre. 

«  Et  il  envoya  des  messs^ers  vers 
Acbab,  roi  d'Israel ,  dans  la  viTle; 

«  Et  lui  dit :  «  Ainsi  a  dit  Ben-Hadad  : 
Ton  argent  et  ton  or  sont  a  moi ;  tes  fem- 
roeset  tes  plus  beaux  enfantssonthmoi. » 

A  la  vue  de  eette  multitude ,  cample 
aux  portes  de  Schoiurone,  Achab  se 
troubia.  II  crut  que  le  roi  d'Arame  se 
coutenterait  d'une  simple  suzerainete , 
et  se  reconnut  son  vassal. 

ft  Leroi  d'Israel  r^pondit,et  dit :  kMoh 
Seigneur  le  roi,  comme  tu  dis ,  je  suis 
a  toi,  avec  tout  ce  que  j'ai. » 

a  Les  messagers  retourn^rent,  et  di- 
rent :  «  Ainsi  a  dit  Ben-Hadad ,  savoir  : 
Puisquej'ai  envoy^aupres  de  toi  pour 
dire :  Tu  me  donneras  ton  argent,  ton 
or,  tes  femmes  et  tes  enfants ; 

«  Sache  que,  lorsque  j'enverrai  de- 
main,  a  cette  heure,  mes  serviteurs  chez 
toi ,  ils  fouilleront  ta  maison  et  les  mai- 
sons  de  tes  serviteurs ,  se  saisiront  de 
tout  ce  qui  est  agreable  a  tes  yeux ,  et 
Temporteront  (*).  » 

Achab  avaitcompte  sur  la  moderation 
des  Syriens  :  d6trompe  par  la  repoiise 
de  Ben*Hadad ,  il  refusa  de  se  livrer  sans 
defense  a  la  merci  de  cet  insatiable  en- 
nemi.  11  consulta  les  anciens  d'Israel ; 

a  Et  tons  les  anciens  et  tout  le  peu- 
ple  lui  dirent: « N'obeispas,  et  n'accorde 
pas.  » 

«  Alors  un  prophete  s'approcha  d'A- 
chab,  roi  d'Israel,  et  dit  :  «  Ainsi  a  dit 
r£ternel :  As-tu  vu  cette  grande  multi- 
tude.' Je  la  livrerai  entre  tes  mains  au- 
jourd'hui,  et  tu  sauras  que  moi  je  suis 
I'Eternel.  »  Ben-Hadad  ne  s'attendait 
point  a  la  resistance;  indign^  de  I'au- 
dace  d'Achab : 

«  Ainsi  me  fassent  les  dieux,  s'^cria- 
t-il ,  et  plus  encore ,  si  la  poussiere  de 
Samarie  sufXit  pour  les  pieds  de  tout  le 
peuplequi  me  suit. » 

«  Le  roi  d'Israel  r^pondit :  aCelui qui 
se  ceint  de  Tep^e  ne  se  vante  pas  comme 
celui  qui  la  deiie.  » 

«  Le  roi  d'Arame ,  lorsqu'il  entendit 
ce  discours  ( il  buvait  alors  dans  les 

(»)  Rois,  llv.  1,  XX,  1, 


14 


L'UNIVERS. 


tentes  avee  les  rois) ,  dit  a  ses  servi- 
teurs : «  Commencez;  et  ils  commence- 
rent  le  si^ge  de  la  vHle.  » 

Le  camp  des  Syriens  6tait  rempU  de 
d^sordre  :  les  chefs  eux-m^mes  don* 
naient  Texemple  d'une  aveugte  assu- 
rance. ConBantsdans  leiir  nomore,  dans 
la  force  de  leurs  chariots  et  de  leur  ca- 
valerie,  ilssp  livraient,  dans  lears  tentes, 
^tous  les  exc^  du  vin.  Achab  crut  le 
moment  favorable  pour  tenter  une  sor- 
tie; il  rassembla  une  petite  arm6e  de 
sept  mille  hommes ,  et  donna Tordre  du 
combat.  Une  troupe  d*6lite,  composee  de 
deux  cent  trentendeux  jeunes  gens  de 
naissance,  8'avan<^  la  premiere.  Ben-Ha- 
dad  les  envoya  reconnattre  :  <  Qu*ils 
soient  yenus,  dit-il,  pour  la  paix  ou  pour 
la  guerre ,  amenez-les  vivants.  »  Cette 
imprudentes^curit6perdit  les  Syriens. 
Dans  le  trouble  et  la  confbsion  d*une 
attaqueinattendue,  embarrasses  de  leurs 
chariots  et  de  leurs  bagages,  ilsn'eu- 
rent  pas  le  temps  de  se  reconnattre.  Ben- 
Hadad  lui-m^me  se  sauva  sur  un  cheval 
avec  quelques  cavaliers. 

Honteux  d*un  tel  renversement  de 
fortune,  les  serviteurs  du  roi  d'Arame 
attribuerent  leurd^route^auelque  mys- 
terieuse  Influence.  «  Leurs  dieux,  dirent- 
ils,  sont  des  dieux  de  montape;  voil^ 
pourquoi  ils  ont  ^t^  plus  forts  que 
nous;  mais  combattons  dans  la  plaine, 
est-ce  que  nous  ne  serous  pas  plus  fbrt^ 
qu'eux  (*)?  » 

Ben-Hadad  dut  adopter  une  oninion 

Jiui  consolait  son  amour-propre  numi- 
i6 ;  mais  il  ne  s*abusa  point  sur  la  ve- 
ritable cause  de  sa  defaite.  Aux  chefs 
de  tribu ,  aux  rois  qui  conservaient  dans 
les  camps  une  ind^pendance  g^nante,  il 
substitua  des  officiers  entierement  sou- 
mis  h  Tautorite  de  leur  mattre. 

Quand  il  eut,  par  ce  changement,  r^ta- 
bll  dans  la  confederation  des  troupes 
syriennes  Tordre  et  la  discipline,  il  passa 
son  peuple  en  revue,  et  monta  vers  A[)hek 
pour  la  guerre  contre  Israel.  Achab 
vint  h  sa  rencontre,  anim6  par  les  pro- 
messes  des  proph^tes.  —  «  Un  homme 
de  Dieu  s'^tait  approche  et  lui  avait  dit : 
a  Telle  est  la  parole  de  r£ternel :  Puis- 
«  que  ceux  d'Arame  ont  dit :  J6hova  est 
c  un  dieu  des  montngnes,  mais  il  n'est 
«  pas  un  dieu  des  vallees,  je  livrerai  cette 

[*)  ilow.llv.I,  \X,23. 


«  grande  multitude  entre  tes  mains,  et 
«  Youssaurezquejesuls  r£teniel.  •  ^ 
Les  deux  armies  resterent  sept  jours  en 
pr^ence.  Les  enfants  d'Israel  semblaient 
deux  troupeaux  de  chevres,  et  ceuxd*A- 
rame  remplissatent  lepays.  £nfin,  le  sep- 
tiftmejour,  on  en  vint  aux  mains.  Les  St- 
riens  perdirent  dans  le  combat  cent  mille 
hommes  de  pied.  VInet-sept  mille,  re- 
tires dans  la  ville  dAphek,  p^rtrent 
^erases  sous  la  chute  des  remparts. 

Ben-Hadad  prit  la  fuite  et  tint  dans 
la  ville. 

Ses  serviteurs  lal  dirent  :  «  Mous 
avoos  oul  que  les  rois  de  la  maison  d*Is- 
raei  sont  des  rois  mis^ricordieut ;  tnet- 
tons  maintenant  des  sacs  sur  nos  rein^ 
et  des  cordes  h  nost^tes,  et  sortdris 
vers  le  roi  d^Israel;  peut-^tre  quMl  te 
laissera  la  vie.  » 

lis  se  ceignirent  de  sacs  dtitour  des 
reins  et  de  cordes  autour  de  la  t^te,  et 
vinrent  vers  le  roi  dlsrael  en  disant : 
«  Ton  serviteur  Ben-Hadad  a  dit :  «  De 
«  grdce,  laisse-moi  la  vie !  » il  repondit : 
<  Vit-il  encore?  II  est  mon  frfere(*).  » 

Achab  pardonna  au  suppliant  et  Tae- 
ct^eillit  dans  son  alliance.  Pour  toutes 
conditions,  il  exfgeala  restitution  des 
villes  enlev^es  k  Omri,  et  le  droit  de  se 
faire  des  places  h  Dameschek,  comme 
Ben-Hadad  en  avait  fait  h  Schomrone. 
Les  proph^tes  reproch^rent  am^rement 
au  roi  dlsrael  sa  maladroite  faiblesse. 
Ils  refusaient  de  croire  aux  promesses 
de  retranger^.et  rappelaient  au  peuple 
que  Ben>Hadad  I^,  le  vainqueur  dlsrael, 
avait  d^ja,  par  une  alliance  perfide. 
trahi  Timprudent  Baascha. 

La  paix  ne  dura  pas  longtemps  entre 
Arame  et  Israel.  Troisans  s*etaient  6cou- 
les  depuis  la  conclusion  du  traits,  et 
Ben-Hadad  n*avait  point  encore  rendu 
toutes  les  villes  enlev^es  par  son  pere. 

Sur  ces  entrefaites,  il  arriva  aue  Je- 
hoschaphate(Josaphat],  roi  de  Jehouda, 
descendit  vers  le  roi  d'lsrael. 

«  Le  roi  d'Israel  dit  k  ses  serviteurs : 
«  Savez-vous  que  Ramoth  de  Guilad  est 
^  nous,  et  nous  n^gligeons  de  la  repren- 
dre  de  la  main  du  roi  d* Arame  ?  »  ' 

«  II  dit  k  Jehoschaphate  :  «  Vfen- 
dras-tu  avec  moi  k  la  guerre  contre 
Ramoth  de  Guilad?  »  Jehoschaphate 
dit  au  roi  dlsrael :  «  Moi  comme  toi , 

{*)  Rois,  ibid.,  9S, 


SYRIE  ANOENINE. 


fS 


mon  peuplecorome  ton  peuple,  mes  ehe- 
vaux  eomnie  tes  chevaux  (*).  » 

£a  vain  MicKaiah,  fila  de  Yimla^  osa* 
Mi  predire  la  defaite  et  la  mort  da  roi 
d^Israet  :  Fordre  des  prophetes  appiau- 
dissait  a  Talliance  des  deux  rois ,  et  lear 
promettait  la  victoire :  •  Montez,  disatent- 
ils,  a  Raiuoth  de  Guilad,  rEteroel  la  Ih 
vrera  entre  vos  mains.  » 

Ben-Uadad  euit  pi^t  h  aoutenir   le 

combat.  II  avait  exhort^  les  trente-deax 

cbefe  de  ses  ehariots ,  en  disant :  «  Ne 

eombattes   ni  contre  petit  ni  contre 

grand  <,  mats  contre  le  roi  d'lsrael  seul. » 

Aebab  apprit  le  danger  qoi  le  mena- 

fait;  pour  tromper  les  ennemis,  il  se 

confondit  dans  les  rangs.  Aussi ,  quand 

les  chefis  des  charioU  Yirent   Jehos- 

chaphate  r^ta  de  ses  habits  royaux,  ils 

s^^rierent :  «  C'est  la  le  roi  dUsirael ,  »  et 

ilsrentour^renten  eombattant.  Mais  lui 

Mussa  UQ  cfi  ^ers  le  Seigneur ,  et  le 

Seiencar  le  secourut  et  le  delivra.  Car 

sito(  que  ies  chefs  des  cavaliers  vi- 

reor  que  ee  n^etait  point  le  roi  d'lsrael, 

iJs  se  detouriierent  de  lui.  Alors  quel- 

au'uo  tira  de  son  arc  au  hasard ,  et  fr&ppa 

Adiab  au  defaut  de  la  cuirasse  (**) ; 

et  le  roi  dit  k  celui  qui  conduisait  son 

char  :  «  Tourne  ta  main,  et  fais-moi 

sortir  do  camp ;  car  je  suis  gri^vement 

blessd.  >  —  La  bataille  se  termina  ce 

jour-la;  etie  roi  fut  soutenu  sur  son 

char  en  face  d'Arame  jusqu'au  soir ,  et 

il  mourut  au  coucher  du  soleil  {***).  » 

Ben-Hadad ,  suivant  le  r^cit  de  Jos^- 

phe «  fut  present  a  cette  bataille ;  mats 

il  laissa  le  eorainandement  de  Tarmee  k 

80Q  seniteuT  Naemane. 

Naeniane  ^tait  un  homme  puissant  et 
eonsidere  aupres  deson  mattre;  par  lui, 
r£temel  a?ai  tdonne  la  victoire  k  Arame; 
flnais  eet  homme  fort  et  Taiilant  ^tait 
l^preux. 

Or,  en  ce  temps-la,  nne  jeune  fille 
du  pays  d'Israel,  enlevee  par  une  trou- 
pe d'Arameens^servaitla  femmede  Nae- 
mane. Jalouse  de  faire  eclater  la  puissan- 
ce de  son  Dieu ,  Tlsraetite  dit  a  sa  mat- 
tresse :  «  llest  aSchomroneun  prophete 
aime  de  Jebova.  Puisse  mon  maltre*  al- 


r^ 


.•)  Rois,  liv.  l,XXrT,4. 

(**)  Le  Syrien  qui  toA  le  roi  d'lsrafil  est  appel4 
Aman  Mr  Jos^he. 

(—)  Chron.,  liv.lI,XYni,34.  — l?aif,Uv.  I, 
XXII,  36. 


ier  a  Schomrone!  L*holnmede  Dieu  le 
delivrerait  de  sa  lepra.  » 

Naemane  entendit  ces  pardles;  il  alia 
vers  le  roi  son  seigneur,  etlni  dit : «  Mon 
Seigneur,  le  Dieu  d*lsrael  est  un  DiftU 
puissant ;  peut-ftre  anra-t-il  piti^  de 
son  serviteur;  »  et  il  r^peta  les  paroles 
de  la  jeune  captive.  Le  roi  d*Arame  ai- 
mait  Naemane,  sou  serviteur.  a  Va,  dit- 
il ;  prendsdix  talents  d^argeht ,  six  mllle 
pieces  d'or ,  et  dix  v^tements  de  reehan- 
ge.  Je  te  donnerai  une  lettre  pour  Jo- 
rame,  roi  d'Israel.  «  Naemane  partit 
ayec  ses  chevaux  et  ses  chariots :  il  porta 
la  lettre  de  son  mattre  au  roi  d*lsrael; 
et  cette  lettre  contenait  ces  mots :  «  Je 
t'envoie  Naemane,  mon  serviteur.  Til 
ledelivreras  desa  l^pre.  »  Jorame,  roi 
d'israeljutcesmotsetsetroubia :  «Quoi, 
dit-il,  suis-je  done  un  dieu  pour  faire 
mourir  ou  pour  rendre  la  viel  suis* 
ie  un  dieu  pour  purifier  les  plaies  de  cet 
homme!  Arame  cherche  une  occasion 
contre  moil  >  Et  parlant  ainsi,  il  d6chi- 
rait  ses  v^tements.  Jorame,  fits  d*Achab, 
disait  vrai ;  fifs  impie  d'un  pere  Impie , 
iln*afait  pas  paissance  pour  delivrer 
Naemane;  mais,  suivant  la  parole  de 
risraelite  captive,  un  prophMe,  aime 
de  J^hova,  vivait  a  Schomrone.  £llscha 
( £lisee )  envoya  dire  au  roi  d' Israel  : 
«  Pourquoi  as-tu  d^chir^  tes  vdteraents  ? 
Que  Naemane  vienne  done  vers  moi,  il 
saura  quil  y  a  un  prophete  en  Israel.  » 
Naemane  dit  a  ses  serviteurs  :  «  Aliens 
vers  rhomme  de  Dieu  :  sans  doute  il  sor- 
tira,  il  invoquera  r£ternel,  son  Dieu;  II 
^l^vera  les  mains  vers  le  temple ,  et  le  1^- 
preux  sera  purifi^.  »  II  dit,  et,  avec  ses 
chevaux  et  ses  chariots,  il  se  plaga  h 
Tentr^e  de  la  maison  d*£lischa.  Le 
prophete  ne  sortit  point  de  sa  maison; 
il  n^^leva  pas  les  mains  vers  le  temple ; 
mais  il  envoya  un  messager  k  Naemane 
avec  ces  mots  :  «  Va  et  lave-toi  sept 
fois  dans  le  Jard^ne  :  ta  chair  redevien- 
dra  saine,  comme  la  chair  d*un  jeune  en- 
fant. »  Naemane  s*attendait  k  voir  Pla- 
ter, dans  un  solennel  appareil ,  la  puis- 
sance de  Jehova  :  il  entendit  avec  co- 
lere  les  paroles  du  messager.  «  Partons , 
dit-il  a  ses  serviteurs,  le  prophete  ^tran- 

Ser  s'est  jou6  de  votre  mattre.  Avais-je 
one  besoin  de  quitter  Dameschek  pour 
me  baigner  sept  fois  dans  les  eaux  d'un 
fleuve?    Abna  et  Parpar,  fleuves  de 


16 


L'UNIVERS. 


'^ 


mon  pavs,  ne  sont-ils  pas  meilleurs  que 
toutes  les  eaux  dlsrael?  »  H  panait 
ainsi,  et  s*en  allait  en  grande  colore. 

Les  servitears  de  Naemane  farent 
tooeh^s  de  I'excte  de  sa  douleur.  lis 
attelerent  les  chevaux  pour  le  depart; 
roais,  quand  tout  fut  pr^  et  dispose , 
lis  s'approch^rent  de  leur  mattre,  et 
lui  dirent  :  e  Mon  p^re,  si  le  pro- 
ph^te  t*avait  ordonne  quelaue  grande 
chose ,  n'aurais-tu  point  omi  ?  tu  ne 
connnais  pas  le  dieu  Stranger. « 

Naemane  vit  que  ses  serviteurs  par- 
laient  avec  sens.  II  descendit,  et  se 
plongea  dans  le  Jarddne  sept  fois,  selon 
la  parole  de  Thomme  de  Dieu ;  et  sa 
chair  redevint  saine  comme  la  chair  d'uii 
jeune  enfant. 
Naemane  ^tait  un  homme  sa^e  et  cher- 
^  chant  le  bien.  11  retourna ,  lui  et  toute 
sa  suite,  vers  £lischa,  rhomme  de 
Dieu,  disant: «  Non,  il  n'est  qu'un  Dieu 
en  toute  la  terre;  c'est  le  Dieu  d'Israel : 
reqois ,  je  tjB  prie ,  le  don  que  t'a  destin6 
ton  serviteur.  » 

11  dit :  rnais  £lischa  prit  TEternel  h 
temoin  qu'il  refusait  d'accepter  aucun 
present. 

•  Naemane  cessa  d'inutiles  instances  : 
«  Si^tu ne  veux,  dit-il,ni  or,  ni  ardent, 
ni  v^tements  de  rechange,  si  tu  rejettes 
Toffre  de  ton  serviteur,  prouve  seule- 
ment  que  tu  n'es  pas  irrite  contre  lui; 
.  permets  qu*il  emporte  de  Ja  terre  du 
pays  d*Israel  la  charge  de  deux  mulcts; 
car  ton  serviteur  ne  fera  plus  d'holo- 
causte  ni  de  sacritice  a  d'autres  dieux ; 
mais  seulementa  r£teroeK  Mais  que 
r^ternel  pardonne  en  un  point  a  son 
serviteur.  Quand  mon  mattreentredans 
la  maison  de  Rimone  pour  s*y  proster- 
ner,  et  qu'il  s'appuie  sur  ma  main,  je 
me  prosterne  avec  lui,  dans  la  maison 
de  Rimdne.  Puisse  r£ternel  me  par- 
donner.  » 

Eiischa  dit  k  Naemane : «  Va  en  paix, 
et  que  le  Seigneur  soit  avec  toi !  » 

Naemane  se  disposa  au  retour :  il  prit 
ses  chevaux  et  ses  chariots,  etdescendit 
la  hauteur  de  Schomrone.  D^ja  il  avait 
fait  une  partie  du  chemin;  il  s^entre- 
tenait  avec  ses  serviteurs  de  la  joie  que 
son  retour  allait  ramener  dans  sa  mai- 
son ;  il  leur  parlait  de  la  puissance,  du 
ddsinteressement  de  Thomme  de  Dieu; 
et  il  n'oubliait  pas  non  plus  la  jeune  cap- 


tive Israelite,  qui,  sansdoute,  nes'at 
tendait  pas  a  trouver,  dans  son  mat- 
tre,  doublement  purifi^ ,  un  senriteur 
de  J6hova.  Tandis  que  sa  pens^  se  ' 
partageait  ainsi  entre  Schomrone  et 
Dameschek ,  tout  &  coup  il  vit  acconrir 
derri^e  lui,  Gu^hazi,  serviteurd'£li8cha. 
II  se  jeta  en  has  de  son  chariot ,  et  lui 
cria :  «  Tout va-t-il bien?  »  —  «  Toutva 
bien,  r^pondit  Gu^hazi;  je  viens,  au 
nom  de  mon  mattre,  pour  te  dire :  Deux 
jeunesgens  de  la  montagned'J&phraime, 
des  fils  de  proph^tes,  sont  venos  vers 
moi ;  donne,  je  te  prie,  pour  eux,  un 
talent  d'argent  et  des  v^tcments  de  re- 
change.  »  —  «  Prends,  dit  Naemane, 
f trends  deux  talents  au  lieu  d'un ,  enve- 
oppe-les  dans  deu»  sacs,  avec  deux  v£- 
tements  de  rechange;  deux  de  mes  ser- 
viteurs Jes  porteront  devant  toi.  » 

Arrive  h  la  colline,  Gu^hazi  renvoya 
les  deux  servitears.  II  prit  de  leurs  mains 
le  present  de  Naemane,  et  le  serra  dans 
sa  maison ;  car  il  s*^taitdit  avec  un  esprit 
de  malice : «  Mon  mattre  a  refuse  de  pren- 
dre les  pr^ents  de  TAram^n ;  mais , 
vive  Dieu !  si  je  coors  apr^  ce  Naemane, 
ie  lui  enl^veraiquelque  chose.  »  Safour- 
oerie  n'avait  pomt  eehapp^  aux  yeux  du 
proph^te.  «  D*oiii  viens-to ,  Gu6nazi?dit 
Eiischa.  Parle,  mon  coeur  t'a  suivi , 
quand  un  homme  est  venu  de  son  cha- 
riot au-devant  de  toi.  Gu^hazi,  ce 
n'est  point  le  temps  de  prendre  de  Tar- 
gent  et  des  v^tements ,  aes  oliviers,  des 
vignes ,  des  troupeaux ,  das  serviteurs  et 
des  servantes.  va,  la  lepre  de  Naemane 
s'attachera  a  toi  et  a  ta  post^rit^  k  ja- 
mais. »  Et  Gu^hazi  sortit  de  la  maison 
deson  maftre,  l^preux  comme  la  neiee  {*). 

Ici  setermine  lerecitbiblique.  htm- 
ture  ne  dit  point  si  Naemane  v^ut  long- 
teivps  dans  la  favour  de  son  maftre.  Il 
ne  paratt  pas  qu*il  ait  conserve  le 
commandement  de  Tarm^e;  mais  sans 
doute,  attach^  a  la  personne  du  roi,  il 
continua'de  Taccompagner  au  temple 
deRim6ne  dans  iesc^r^monies  religieu- 
ses.  Sans  doute  aussi,  accordant  avec 
les  obligations  de  sa  charge .  Thomma^ 
quMl  devait  au  vrai  Dieu ,  if  construisit, 

(♦)  Rots,  llr.  n,  ch.  V. — LeToyagear  Th^miot 

Kr6tend  avoir  tu  prte  des  mun  de  Damai  on 
6pUal  de  lepreux  k  qai  la  tradition  donne 
pour  foDdateur  Naemane  I'Arameen.  Toya^f 
de  Tli6venot,  tome  m»  cli.  IV,  p.  62. 


SYRlE  AISCIENNE. 


IT 


avex;  la  terre  apport^e  dlsrael ,  un  aatel 
a  Jehova.  On  ne  salt  si  la  jeane  esclave, 
rendue  a  la  liberty ,  revit  les  rives  du 
Janleoe;  peut-^tre  vieillit-elle  dans  la 
maisoQ  de  Tetranger.  Mais  alors^  du 
moins,  partageant  avec  son  mattre  le 
sein  d'ofrir  a  J^hova  des  prieres  et  des 
sacrifices,  elle  trouva  dans  les  occupa- 
tions de  sa  pi^t^  un  souvenir  de  la  pa- 
trie,  et  se  consola  de  son  exil. 

Leshostilitds  n^avaient  point  cesse  en* 
tre  Ararae  et  Israel.  Ben-Hadad  dressa 
des  embQches  a  Jorame,  son  ennemi. 
II  tint  conseil  avec  ses  serviteurs,  et  leur 
dit :  a  Entel  et  tel  lieu  sera  mon  camp.  » 

Eliscba,  Fhomnie  de  Dieu,  envoya 
dire  auToi  d'Israel :  «  Garde-toi  de  pas- 
ser en  ce  lieu-la.  CA  les  Aram^ens  sont 
descendus.  > 

Lc  roi  d'Israel  envoya  des  troupes  a 
Tendroit  dont  lui  avait  parie  riiomme 
de  Dien ;  U  dejoua  toutes  les  ruses  de 
Ben-Hadad. 

Le  ccrar  du  roi  d*Arame  fut  trouble, 
k  cause  de  cela :  il  appela  ses  serviteurs, 
et  leur  dit :  «  Me  dira-t-on  qui  de  nous 
est  pour  le  roi  d'Israel  ?  » 

Un  de  ses  serviteurs  lui  dit :  «  II  n*y  a 
pas  de  traltre  parmi  nous ,  6  roi  mon  sei- 
gneur !  Mais  Elischa ,  le  proph^te  qui  est 
en  Israel ,  entend  toutes  les  paroles  que 
toproDonces,  Inline  dans  ta  chambre  h 
coucher,  et  les  rapporte  au  roi  d'Israel.» 

Le  roi  dit :  «  Allez  et  voyez  ou  il  est , 
pour  que  je  le  fasse  saisir.  »  —  On  lui  re- 
pondit:  ■  II  est  a  Dothane.  » 

\\  y  envoya  des  chevaux ,  des  cha- 
riots, et  une  troupe  considerable;  lis 
vioreift  de  nuit  et  entourerent  la  ville. 

Lliomnie  de  Dieu  se  leva  de  bon  ma- 
tin pour  s'en  aller,  et  sortit ;  mais  voici 
qu'une  troupe  avait  investi  la  ville  avec 
des  chevaux  et  des  chariots  :  son  servi- 
teur  lui  dit  :  «  U6las  I  mon  seigneur , 
comment  ferons-nous  ?  » 

II  dit :  •  Ne  crains  pas ;  car  ceux  qui 
soot  avec  nous  sont  plus  nombreux  que 
ceux  qui  sont  avec  eux.  » 

Elischa  pria  et  dit :  «  Eternel !  ouvre , 
je  te  orie,  ses  yeux  pour  qu'il  vole.  »  L'£- 
terDel  ouvrit  les  yeux  du  serviteur,  qui 
vit  la  montagne  pleine  de  chevaux  et  de 
chariots  defeu  autour  d' Elischa. 

Les  Aram^ns  etant  descendus  vers 
lui,  Elischa  pria  TEternel,  et  dit :  «  Frap- 
pc,  je  te  pne,  cette  nation  d'eblouisse- 

2*  Livraison.  (syrie  ancienn£.) 


ment ; »  et  Tlfcternel  les  frappa  d*^blouis- 
sement  selon  la  parole  d*Elisch». 

]t:iischa  leur  dit :  «  Ce  n*est  pas  ici  le 
chemin ,  et  ce  n'est  pas  ici  la  viile :  sui- 
vez-moi,  et  je  vous  conduirai  aupr^s 
de  rhomme  que  vous  cherchez ; »  et  il  les 
conduisit  a  Schomrone. 

Quand  ils  furentarriv6s  Ik  Schomrone, 
Elischa  pria  le  Seigneur  :  «  Seigneur, 
ouvre  les  yeux  5  ces  hommes,  pour  qu*ils 
voient.  »  L'Eternel  leur  ouvrit  les  yeux, 
et  ils  virent  qu'ils  ^talent  au  milieu  de 
Schomrone. 

Le  roi  d'Israel ,  quand  il  les  vit ,  dit 
h  Elischa :  «  Frapperai-je,  frapperai-je, 
mon  pere.'  » 

— «  Non ,  tu  ne  frapperas  pas  :  ceux 
que  tu  prends  avec  Tare  et  T^p^e ,  vol  la 
ceux  que  tu  peux  f rapper.  Mets  du  pain 
et  de  Teau  devant  ces  hommes;  qu*ils 
roangent  et  qu'ils  boivent,  et  qu'ils  s*en 
aillent  vers  leur  mattre.  » 

II  leur  fit  un  grand  repas ;  ils  mange- 
rent  et  burent  ^  et  ils  s'en  all^rent  vers 
leur  mattre,  et  les  troupes  d*Aramene 
revinrent  plus  au  pays  alsrael  (*).  Ben- 
Hadad  renoncant  5  des  ruses  mutiles , 
Gontinua  ouvertement  la  guerre  (**). 
II  rassembia  toute  son  armee,  et  monta 
pour  faire  le  siege  de  Schomrone.  La 
ville,  pressee  de  tons  cdtes ,  fut  bien- 
t6t  reunite  ^  une  horrible  famine.  Une 
t€te  d'5ne  se  vendait  quatre-vingts  pie- 
ces d'argent,  et  un  quart  de  fiente  de 
pigeons  cinq  pieces  d*argent.  II  arriva 
que  comme  le  roi  d'Israel  passait  sur  la 
muraille,  une  femme  lui  cria,  en  disant : 
«  Au  secours,  mon  seigneur  le  roi. 
Vois ;  cette  femme  m'a  dit :  Donne  ton 
fits  et  mangeons-le  aujourd'hui;  demain 
nous  mangerons  mon  fils.  Nous  avons 
fait  cuire  mon  fils;  nous  Tavons  manp;6 ; 
jelui  dis  le  jourd'apres :  Donne  ton  fits , 
nous  le  mangerons  :  mais  elle  a  cach6 
son  fils.  »  Jorame  entendit  avec  horreur 
les  paroles  de  cette  femme.  II  d^chira 
ses  v^tements ;  et  le  peuple  vit  qu'il  avait 
uu  sac  sur  la  chair. 

Elischa  ^tait  a  Schomrone  dans  sa 
maison;  il  avait  conseill^  au  roi  defer- 
mer  les  portes  de  la  ville,  et  de  resistor 
avec  Constance.  Jorame  s'en  prit  h  lui 
des  maux  de  son  peuple.  II  envoya  un 
messager  pour  le  tuer.  Mais  I'homme^de 

(')  RoU,  Mv.  n,  VI,  9-23. 
(*«)  Io»Jphe,  AnHq,,  IX,  3. 


u 


L'UNIVERS. 


jDieu  dit  aux  anciens  :  a  Ecoutez  la  pa- 
rolede  T^terDel.  L'£ternel  a  dit :  Demaio 
k  cette  heare  on  aura  uq  seah  de  Gne  hxiae 
pour  un  scbekel,  deux  seahs  d*orge  pour 
un  scbekel,  a  laporte  de  Schomroue.  » 
Un  capitainedu  roi  entendit  ces  mots: 
«  Bon !  ditil ,  quand  Dieu  ferait  des  fe- 
nfires au  del,  est'ce  possible  ?  »  —  f:iis- 
cbar^pondit : «  Tu  Terras  de  tes  yeux cette 
abondance;  mats  tu  n'en  jouiras  pas.  » 
Or,quatre  bomines  lepreux  etaient  k 
Fentree  de  la  porte ;  ils  se  dirent  i'un  a 
Tautre :  Que  faisons-nous  ici?  Irons-nous 
1^  Ja  vilie?  Mais  la  famine  est  dans  Sebom- 
Tone;  nous  y  mourrons. Si  nous  restons 
ici,  c'est  pour  mourir.  Allons,  jetons- 
nous  dans  le  camp  :  s'ils  nous  laissent 
la  vie,  nous  vivrons;  et  nous  mourrons, 
sM  faut  mourir.  lis  se  leverent  done 
avec  Faube ,  et  se  mirent  en  cberain.  Le 
camp  ^tait  plonse  dans  Tombredouteuse 
des  demi^res  neures  de  la  nuit.  Ar- 
rive k  Tenceinte  ext^rieure,  ils  penetre- 
rent  dans  les  tentes  silencieuses.  L'armee 
d*Arame  avait  disparu.  Car  r£ternel 
avait  fait  entendre  dans  le  camp  d*Arame 
un  bruit  de  cbariots  et  un  bruit  de  cbe- 
vaux ,  un  bruit  d*une  grande  arm^e ;  et 
ils  avaient  die :  «  Voila ;  le  roi  d*Israel  a 
engage  contre  nous  les  Uetheeiis  et  les 
rois  d*£gypie  pour  nous  assaillir.  » lis 
s^^taient  leves,  et  avaient  pris  la  fuite 
pendant  le  crepuscule ,  et  avaient  laiss^ 
leurs  tentes,  leurs  cheraux  et  leurs 
Anes,  le  camp  tehquMl  etait,  et  avaient 
couru  pour  sauver  leur  vie.  Les  lepreux 
entr^rent  dqns  une  tente  :  ils  mangerent 
et  burent  avec  les  provisions  abandon- 
n^s ;  puis,  leur  faim  apais^,  ils  se  char- 
g^rent  d'argent,  d'or  et  de  vStements; 
eniin ,  avant  que  le  jour  eclair^t  en- 
ti^rement  la  viUe,  ils  vinrent  frapper  a 
la  porte  de  Scbomrone,  et  ils  appelereiit 
les  gardiens  endormis.  Le  roi  re^ut  avec 
d^Uance  cette  etonnante  nouvelle.  U 
dit  a  ses  serviteurs  :  «  Prenons  garde; 
les  Arameens  se  seront  caches  dans  les 
champs  pour  nous  surprendre.  »  II  en- 
Toya  done  deux  trains  de  chevaux  pour 
reconnattre  le  pays  jusqu'au  Jardene; 
mais  tout  le  chemin  etait  couvert  de 
Y^tements  et  de  bagages  disperses. 
Rassur^  par  le  rapport  des  messagers, 
le  peuple  sortit  et  se  precipita  sur  le 
camp;il  nelaissa  rien  dans  les  tentes 
d^ertes.  Alors  il     eut  un  seah  de  fine 


farine  pour  un  scbekel ,  et  deux  seahs 
d'orge  pour  un  scbekel ,  k  la  porte  de 
Schomrone;  et  la  parole  d*£lischa  fut 
accomplie.  Le  capitaine  du  roi  vit  de  ses 
yeux  cette  abondance.  Mais,  comme  it 
se  lenait  pres  de  la  porte  de  la  ville ,  il 
fut  ^.ras^  par  la  foule,  et  il  mourut  (*). 

B^GNB  d'hazael;  gbandeub  db 
LA  SYRiB.— 'Ben-Hadad  ne  survecut  pas 
longtemps  k  la  honte  de  sa  deroute. 
Quand  il  fut  pres  de  mourir,  £lischa  se 
rendit  a  Dameschek ,  pour  accomplir  ia 
parole  de  r£ternel.  «  Va,  retourne  par 
ton  chemin,  vers  le  d^ert  de  Dames- 
chekzquand  tu  seras  arrive,  tu  oindras 
Hazael  pour  roi  sur  Arame  (**).  » 

Le'roi  apprit  que  rhonim^  de  Dieu 
^tait  venu.  II  dit  a  son  serviteur  Hazael : 
«  Prends  en  main  un  pr^ent,  va  au-de- 
vant  d'Eliscba,  etconsulte  TEternel  au- 
pres  ?le  lui ,  en  disant :  «  Releverai-ie  de 
cette  maladie  ?  »  Hazael  prit  un  pr&ent 
de  tout  ce  quMl  y  avait  de  bon  a  Da- 
meschek ;  c'etait  la  charge  de  quarante 
chameaux.  II  vint  et  s^arr^ta  devant 
Thomme  deDieu,  disant : «  Ton  fils  Ben- 
Hadad,  roi  d' Arame,  m*envoie  vers  toi 

Sour  te  dire :  Releverai-je  de  cette  mala- 
ie?  _  Va,  dis-iui :  Tu  releveras  de  ma- 
ladie; mais  r£ternel  m'a  niontr^  quit 
mourra. »  Ainsi  parla  le  propb^te;  et  ii 
arr^ta  sa  vue  sur  Hazael ,  et  versa  des 
larmes.  Hazael  dit :  «  Pourquoi  mon  sei- 
gneur pleure-t-il  ?  —  Farce  que  je  sals 
que  tu  feras  du  mal  aux  enfieints  d'Israel ; 
tu  mettras  le  feu  a  leurs  villes  fortes  ; 
tu  tueras  par  le  glaive  leurs  jeunes  gens ; 
tu  ecraseras  leurs  petits  enfants ,  et  tu 
6ventreras  leurs  femmes  enceintes.  « 
Hazael  dit :  a  Mais  qui  est  ton  serviteur^ 
ce  chien ,  pour  (aire  de  si  grandes  cho- 
ses?  »  Elischa  dit  :  «  L'^ternel  m*a 
montr^  que  tu  regnerassur  Arame.  »  Le 
lendemam,  Hazael  prit  un  linge  tremp^ 
dans  Teau ,  et  Tetendit  sur  le  visage  deson 
mattre.  Beu-Hadad  mourut  etouffe  (***), 
et  Hazael  r^na  en  sa  place. 

Hazael  fut  une  verge  dans  la  main 
de  Jehova  pour  chdtier  Schomrone  et  Je- 
rouschalaime.  Toutefois  il  ne  comment 
point  les  hostilites  :  elles  6clatent  seule- 
ment  en  884.  Ahaziahou  (Acbazia), 

^^)  Rout,  llY.  I,  XIX,  16. 
V  *)  AoiJ,  Itv.  I[,  VUI,  8-.  15.  —SoivantlOfi*- 
pbe ,  Antiq,,  U,  S,  U  ful  dlraogle  par  HazaAl. 


STRIE  ANGIENNE. 


1» 


JIM  de  Jttda,  et  Jorame,  roi  d'Israel, 
nnouvelaat  cootre  Araine  Talliance 
d'Aebab  el  de  Josaphat,  assi^gent  et  re- 
preooeot  Ramoth  de  Guilad  (*).  Jo- 
nme,  mortellement  blessd«  se  retire  k 
Tezreel.  II  est  assassin^  par  Jebou 
(Jehu ),  61s  de  Jehoschapbate. 

Hazail  eut  bientdt  repar^  la  perte  de 

Ramoth.  II  battit  les  troupes  de  Jehu,  et 

nvagea,  depuis  le  Jardene,  vers  le  lever 

da  soleil,  tout  le  pays  de  Guilad,  le  pays 

de  Gad ,  de  Reoul>eiie  et  de  Menasche, 

depuis  Aroer,  qui  est  sur  le  torrent  d'Ar- 

Dooe,  jusqu^a  Guilad  et  Baschane  C*}. 

La  guerre  contioua  peodant  le  regne 

de  Joachaz,  fils  de  J^hu;  roais  la  colore 

de  Jehova  avait  eclats  cootre  Israel.  U 

De  resta  de  toot  le  peuple  aue  cinquante 

cavaliers,  diz  chanotset  dix  mille  horn* 

mes  de  pied ,  parce  que  le  roi  d*Arame 

les  avait  detruits ,  et  les  avait  broyte 

coimne  la  poussi^  qu*oo  foule  (***)• 

Juda  s*&ait  ligu^  eootre  Arame  avec 
Israel.  Pius  beureux  que  sod  alli^,  il 
ileroiinia  d^abord  la*  vengeance  des  Sy- 
rieos.  Hazael  s^emparade  Gath  et  me- 
aa^a  Jirusaleoi.  «  Mais  Joasch,  roi  de 
Joda ,  suivit  Texemple  donn^  autrefois 
par  Aasa  :  il  prit  dans  le  temple  tout  ce 
que  Joeaphat,  Joram  et  Achazia,  ses  pe- 
ret  f'^avaieut  eoosacrd,  ce  qu*il  avait  con- 
aacre  loi-uitoe;  tous  les  triors  de  la 
maisoD  de  r£ternel  et  de  la  maison  du 
rai ,  et  les  eovoya  au  roi  d*Arame  C*^.  » 
Hazad  ajourna  seulement  ses  projeta. 
Ud  aa  apr^  le  nieurtre  de  Zacharie, 
^It  de  Joiada,  assassin^  par  Joasch, 
let  Syrieosarriverent  et  saccagereot  la 
TJI/e,  tuerent  tous  les  princes  du  peu- 
jale  et  empon^rent  un  riche  butin.  lis 
etaient  veous  en  petit  oombre  centre 
toutes  les  forces  de  Juda ;  mais  le  Sei- 
ffneur  leur  livra ,  comme  aux  ministrea 
de  sa  oolere,  Jerusalem  iofidele,  parce 
qo*ejle  avait  quitl^  le  Dieu  de  ses  pd- 

Eofin,  Jehova  eut  piti^  de  son  peuple, 
h  cause  de  son  alliance  avec  Abraham, 
Isaac  et  Jacob.  II  D*avait  pas  r^lu  d'ef- 
heer  le  nom  dlsrael  de  dessous  les 
.  Hazael  moorut,etlesen£ants  d*Is- 


[*)  Tortpbe,  j4nL,  IX,  6.  —  RoU,  Uv.  U,  Viri, 

'OBois,  U?.  n«X,  83. 
(— )  ilo«.  My.  II,  XIII,  7. 
(•••*)  Am>  ,  llr.  II,  XII ,  19. 
(••*••)  CAron.,  Uv.  U,  XXIV,  M. 


rael  furent  ddlivr^s  du  joug  des  Sy- 
rieos.  «  Les  enfants  d'Israel  parent  ha- 
biter  dans  leurs  tentes  comme  aupara- 
vant  (*)•  » 
BE  action;  sucg^s  d*isbakl   gon- 

TBB  LBS  AB4lfEENS  AU  TEMPS  DE  BEIT- 
HAD  AO  III.— Eiischa,  rhoinme  de  Dieu. 
etait  malade  de  la  maladie  dont  il 
mourut ;  Joasch,  roi  d'lsrael,  descendit 
vers  lui ,  et  pleurant  sur  son  visage,  il 
dit :  «  Mon  pere,  mon  pere ,  chariots  et 
cavalerie  d'Israel !  » 

Klischa  lui  dit :«  Prendsun  ercetdes 
(leches ;  «  et  il  lui  apporta  un  arc  et  des 
(leches. 

II  dit  au  roi :  «  Appuie  la  main  sur 
Tare;  »  et  il  mit  ses  mains  sur  les  mains 
du  roi. 

II  dit  :  «  Ouvre  la  fen^tre  vers  To- 
rient; »  et  leroi  Touvrit.  II  dit : «  Tire :  » 
et  le  roi  tira.  11  dit :  «  Cest  une  fleche  de 
salut  pour  r£ternel ,  et  une  fleche  de 
salut  contre  Arame ;  tu  battras  comple- 
tement  Arame  a  Aphek.  » 

Ilajouta  : «  Prends  lesfleches,  etfrappe 
centre  terre ;  »  le  roi  frappa  trois  fois  et 
s'arrlta. 

£t  rhomme  de  Dieu  se  mit  en  colore, 
disant.  «  il  fallait  frapper  cinq  fois,  six 
fois,  alors  tu  auraiscompletementfrapp^ 
Arame ;  maintenant  tu  ne  le  frapperaa 
que  trois  fois  (**).  » 

La  parole  du  prophete  futaccomplie. 
Joas  attaqiia Ben-Hudad  III,  fils  de  Ha- 
zael ,  et  lui  reprit  toutes  les  places  enle- 
v^s  a  Joachaz. 

Jeroboam  II,  fils  de  Joas,  poursuivit 
la  guerre  contre  les  Syriens,  et  recon- 
quit  tout  le  pays  pres  du  Jourdain ,  de- 
puis Hamath  jusqu'a  la  mer  de  la  plaine 
(la  mer  Morte)  (***) .  II  parait  m^me  s'fitre 
empare  d'Hainath  etde  Dameschek  (***^. 
A  pres  la  mort  de  Jeroboam  II ,  en  784, 
le  royaume  d  Israel  tomba  dans  Tanar- 
chie  et  laissa  aux  Syriens  quelques  an- 
neesde  repos.  Enfin,  Menaheme,  vers 
771,  met  le  siege  devant  Tiphsah  (Tha- 
psaque)  (***"*),  etextnrmine  tous  les  ha- 
bitants de  la  contree. 

CONQUETB  DE  LA  8YBIB  PAB  LBS  AS- 

(♦)  Hois,  liv.  II,  XIII,  6. 

(••)  Hois,  liv.  II,  XIII,  14—19. 

<•••)  /foM.llv.  ll,  XVI,26. 

{•*••)  HoiM,  liv.  II,  ibid.  8a. 

(•****)  Selon  quelques  oommeotatean,  la  viUe 
prise  par  Menaheoie  etait  une  autre  Tiphsah 
du  parlage  d'Ephralme. 

2. 


20 


L'UNIVERS. 


SYBiENS.  —  Mais  deia  s'el^ve  a  TOrient 
une  puissance  nouvelle ,  dont  les  progres 
menacent  k  la  fois  tous  les  pays  voisins  de 
l*Eu|)hrate.  Encore  un  demi-siecle,  et 
Tempire  d*Aschoar  aura  r^uni  dans  une 
servitude  commune  les  peuples  d'Arame 
et  d'Israel.  Poul  (Phul),  roi  des  Assyriens, 
envahit  la  Sy  rie  et  s'avance  contre  Schom  - 
roneavecsoixantemille  hommes.  Satis- 
faitdela  soumission  de  M^naheme,  il  Taf- 
fermit  sur  son  trdne  usurp6 ,  et  reqoit 
en  retour  miile  talents  d'argent.  M6na- 
h^me  menrt  (760).  Son  ills  Pekabia 
est  assassine  (758).  Un  des  meurtriers , 
Pekah,filsdeRemalia,sVmparedutrdne. 
Pekah,  pour  se  soutenir,  avait  besoin 
d'un  allie ;  11  en  trouve  un  dans  Retsine 
(Resin),  roi  d*Arame.  Unis  par  un  com- 
mun  inter^t  contre  Tambitionde  Tiglath- 
Pilesser  (le  dominateur  du  Tigre),  lis 
s'efforcent  d^associer  h  leur  ligue  Jo- 
tham ,  roi  de  Juda.  Sur  son  refus,  ils 
forment  le  projet  de  le  d^troner,  et  de 
mettre  en  sa  place  Ben  Tabeel  (*); 
mais,  arr^t^s  par  les  mesures  de  ce  sage 
et  habile  prince ,  ils  reservent  leurs 
coups ^  sonfils  Achaz.  Retsine  envahit, 
avec  son  alli6,  le  pays  de  Juda ,  et  met 
le  siege  devant  Jerusalem.  II  range  l*ar- 
m^e  d*Arame  autour  de  la  viTle,  et 
deia  Achaz  se  trouble  au  lieu  de  recourir 
a  1  Eternel;  il  implore  Tappui  des  Assy- 
riens ,  et  montre  k  T^tranger  le  chemm 
de  la  terre  sainte.  En  vain  le  prophete 
Isai'e  proteste  contre  cette  alliance  fata- 
le :  tt^Necrainsrien,  dit  Thommede  Dieu ; 
au'as-tu  k  redouter  de  ces  deux  bouts 
ae  tisons  fumants?  »  11  dit;  mais  Achaz 
est  sourd  a  tous  les  conseils ;  il  enleve 
les  triors  de  la  maison  de  r£ternel, 
les  tresors  de  la  maison  du  roi,  et  en- 
voie  des  messagers  avec  des  presents  vers 
Tiglath-Pilesser,  roi  d'Aschour ,  disant: 
<«  Je  suts  ton  serviteur  et  ton  fils;  mon- 
te,  et  d6livre-moi  de  la  main  du  roi  d'A- 
rameet  deia  main  du  roidMsrael.  vHon- 
teuse  et  inutile  lAchet^.  Dej5  les  Syriens 
^puis^s  ont  commence  leur  retraite. 
Retsine  leve  le  si^e  et  se  d^tourne  vers 
£lath  pour  y  retablir  les  Idum^ens. 

Mais  le  dopiinateur  du  ligre  a  enten* 
du  Fappel  du  roi  de  Juda.  II  accourt,  il 
monte  vers  Dameschek,  s*en  empare ,  et 
d'Arame  conquis  fait  une  province  assy- 

(•)  Uaie,  VII,  6. 


rienne.  Retsine, dernier  foi  de  TanetaMie 
Syrie,  est  mis  ^mort;et  soo  peuple, 
transport^  k  Kir,  sur  )e  bord  du  fleuve 
Cyrrhus,  va  se  perdre  obscur6ment  dans 
un  coin  de  i'empire  d*Aschour. 

La  prediction  d* Amos  ^taitaccompiie : 

«  Amsia  parleJ6hova;  Dameschek, 
pour  trois  crimes  et  pour  ie  quatrieme. 
Je  ne  retiendrai  pas  le  chAtimeot,  parce 
qu'ils  ont  foul6  Guilad  avec  des  crochets 
de  fer. 

«  J*enverrai  le  feu  dans  la  maison  de 
Hazaei ;  et  il  consumera  le  palais  des 
fils  de  Hadad. 

«  Je  briserai  la  barre  de  Dameschek. 
Texterminerai  les  habitants  de  Bikath- 
Aven  et  de  Beth-]£den ,  qui  tient  le  scep- 
tre ,  et  le  peuple  d*  Arame  sera  transporte 
k  Kir.  Ainsi  Jdhova  a  |>rononce  (*).  • 

G*en  etait  fait  deia  vieille  race  d'A- 
rame ;  ensevelie  ausein  de  la  domination 
assyrienne,  die  avait  perdu  pour  tou- 
jours  son  independanee.  Le  conqueraut 
avait  disperse  dans  Texil  tous  les  ebds 
du  pays  et  la  moitie  des  habitants;  il 
repeupla  la  Syrie,  en  distribuant  k 
des  colonies  assyriennes  les  maisons  et 
les  terres  des  exiles.  Pour  sorveiller  b 
population  soumise  et  proteger  les  6ta- 
Dlissements  des  colons,  il  etablit  sur  di* 
vers  points  des  gamisons  etdes  postes. 
II  chargea  les  principaux  commandants 
d*imposer  ot  ae  recueillir  le  tribut,  el 
sans  doute  aussi  d*approvisionner  Tar- 
mee;car  la  contr^e,  fertile  en  b\i  eten 
betail  (**),dut6tre  sanscessetraversee 
ou  occupee  par  les  troupes  deTiglath-^ 
Pilesser,  de  Salmanassar,  de  Sargon  et 
de  Sennacherib. 

Tiglath-Pilesser  n'avatt  pas  encore 
acheve  sa  conqa^te,  lorsque  le  roi  de  Juda 
vint^sa  rencontre  k  Dameschek.  Achaz 
vit  le  temple  ou  les  Syriens  sacrifiaient  a 
leurs  dieuxnationaux.  II  envoyaau  srand 

Sretre  Ouriah  le  modele  et  la  figure 
e  i'autel ,  avec  ordre  d*en  construire 
un  semblable.  Le  ^and  pr^tre  obeil; 
et  quand  ie  roi  revint  de  Dameschek , 
«  il  fit  Tencensement  de  son  bolocaaste 
et  de  son  offrande ,  versa  des  libations , 
et  repandit  le  sang  de  ses  sacrifices  pa- 
eifiques  (***). » 
Dans  tous  les  coins  de  Jerusalem ,  dans 

(*)  Amos ,  1 ,  3,  4,  5. 
r*)XtoophoD,  Cyropidie,  VI,  9. 
(•••)  Rois,  llv.  II,  ivi,  13. 


SYRIE  ANQENNE. 


21 


toiites  les  vJlJcs  de  Juda ,  il  eleva  des  au- 
tfis  aux  diTinitesaram^nnes  (*). 

L'iternel  laisaait  triompher  l^iniDie. 
II  retardait  poor  Juda  le  jour  du  chati- 
ment  et  Je  ndtait  pour  Israel.  Ed  721, 
SaJraanassar  prit  Schomrone ,  et  trans- 
portaie  peuple  a  Halah,  sur  le  Habor, 
ileuve  de  Gozane»  et  dans  les  villes  des 
Hedes(**);  mais  il  ne  Toulait  pas  lais- 
ter  le  pays  sans  habitants. 

« II  Gt  veuir  des  gens  de  Babel ,  de 
Coutb ,  d'Ava ,  de  Hamath  et  de  Separ- 
nime,  et  les  etablit  dans  les  villes  als« 
raeIC**).  >AiDsi^Yingtansapr^  la  prise 
de  Damesebeky  une  colonie  de  Syriens 
vient  prendre  dans  Schomrone ,  a  son 
toarconquise,  la  place  des  aneiensalli^ 
de  Retsine.  II  fallait  que  Salmanassar  edt 
pleiiie  eonfiance  ou  dans  la  faiblesse  ou 
dans  la  fidelity  de  ses  sujets.  Da  reste, 
poor  plnsde  sQret^,  ilpla^  dans  la  nou- 
veUe  proTince  une  garnison  assez 
forte,  dont  la  pWisence  devait  arrlter 
toat  eoroplot  entre  les  indigenes  et 
les  colons  etrangers.  Les  Syriens ,  ^ta- 
biis  a  St^bomroae ,  observerent  le  culte 
du  frai  Dieu ,  avec  les  superstitions  de 
leor  patrie ,  et  partag^rent  ieur  hommage 
eotre  Asefaima  et  Jehova  {****),  Gonfon- 
du8,  sous  le  nom  commun  de  Gouth^ens , 
a? ee  let  gens  de  Coutha,  d' Ava  et  de  S^- 
parTainie,  ils  formerent  la  secte  des  Sa* 
marjtains. 

Apresretablissement  de  la  colonie  de 
Schomrone,  le  nom  de  la  Syrie  ne  repa- 
raft  plus  dans  Thistoire  d'Aschour. 
Sans  doQte  les  regnes  de  Sargon ,  de 
Semiachfrib,  et  d*£5ar-Haddon  m^me, 
n'amenerent  aacun  changement  dans  la 
cooditioo  de  cette  province.  Mais  il  est 
probable  qu'apres  la  mort  d'Esar-Had- 
don,  dans  la  decadence  de  Ninive,  les 
habitants  de  la  rive  droitede  TEuphrate 
ne  furent  pas  les  derniers  a  se  detacher 
de  Fempire.  Enfin,  Ascbour  tomba(025). 
Le  moment  ^tait  venu  pour  les  Syriens 
dereconquerir,  par  des  mesures^ner^i- 
ques,ieur  independance.  Les  colonies 
assyriennes et  les  debrisde la  famille  d*A- 
tame  s*etaient  rapprocbes ,  unis ,  nielan* 
g^;  mais  la  fusion  n'avait  pas  eu  le 
Uoips  de  s'achever.  De  raccouplenient 


{•}  CAfoit..  iiv.  11,  xxviii,  aa. 

n  Aw,  Iiv.  II ,  XVII,  24. 
(— )  Aotf,  Iiv.  11,  XVH,  30. 


des  deux  races  sortit  un  peuple  bdtard, 
sans  nationality ,  sans  caract^re ,  destin^ 
h  vieillir  dansTabaissement  et  la  servi- 
tude; prole  sans  defense  offerte  a  Tam- 
bition  de  tous  les  conqu^rants. 

LA  SYBIB  sous  LBS  CHALDEBNS.—  Ge 

fut  Nabopolassar,  roi  chald6en  de  Baby- 
lone »  qui,  le  premier,  menaca  la  Syrie. 
Yainqueur  de  Ninive,  il  allait  traverser 
FEuphrate,  quandN6cbao,  roi  d*Egypte, 
pour  arr^ter  ses  progr^,  r^olut  de 
s*emparer  de  Garchemisch  ou  Girc^ium, 
a  Tembouchure  du  Gbaboras.  Arr^te  un 
moment  par  Josias,  roi  de  Juda,  qu'il 
bat  a  Megiddo,  II  ajourna  son  ent re- 
prise centre  Giraesium ,  pour  soumettre 
la  Svrie  et  la  Palestine,  et  il  s'etablit  k 
Ribla ,  villedu  territoire  de  Hamath  (*). 

Suivant  le  recit  d^H^rodote  (**),  les 
Syriens  tent^rent  une  r^istance  inutile. 
Vaincus  pr^  de  Magdole ,,  ils  ne  purent 
d^fendre,  contre  des  forces  supeneures, 
la  villedeGadytis. 

Quand  le  Pharaon  eut  ^tendii  sa  do- 
mination de  la  Mediterraneea  TEuphrate, 
il  reprit  ses  projets  contre  ^abopolassar. 
Mais,  vaincu  a  Gircesium  (606) ,  il  per- 
dit  toutes  ses  conqu^tes  ( 60.5).  Les  Goal- 
d^ns  le  rejet^rent  dans  les  limites  de 
r£gypte,  et  fonderenten  Syrie  une  puis- 
sance solidement  affermie  :  ils  impo- 
serent  aux  habitants  le  tribut,  sans 
doute,  et  certainement  Tobligation  da 
service  militaire ;  mais  ils  Ieur  aocorde- 
rent  des  chefs  nationaux.  Nous  voyons , 
sous  le  regne  de  Sodekia .  des  rois  d'fi- 
dom,  de  Moab  et  d*Ammone.  Nabuchad- 
nessar,  qui  avait  laiss^  h  tous  ces  pays 
leurs  souverains  particuliers,  ne  dut 
pas  exclure  d'une  faveur  commune  les 
populations  tranquilles  de  la  Syrie.  En 
599,  «  r£ternel  envoya  contre  Joakim 
les  troupes  de  Gardime  (  Ghaldeens  ), 
les  troupes  d'Arame,  les  troupes  de 
Moab  et  les  troupes  des  enfants  d'Am- 
mdne :  il  les  envoya  contre  Jehouda  pour 
le  d6truire(*^*). »  Ainsi,  les  Syriens  com- 
battaieutdans  lesrangs  de  Tarm^e  chal- 
d6enne.  D'ailleurs,  ils  paraissent  avoir 
sunporte  sans,  regret  la  domination  de 
Baoylone.  Soil  prudence,  soit  attache- 
meot  pour  le  maltte.  etranger,   ils  ne 

(*')  fl^rodote,  11, 150.  —  roy.  la  savaole  ^m- 
totre  de  fa  PaluHne  deM.  Munck,  p.  343. 
C— )  Rois,  llv.  II,  XXIV,  2. 


92 


UUNIVERS. 


prirent  aucune  part  aux  compiots  des 
nations  voisines. 

Les  revers  dessucesseursde  Nabuchad- 
nessar  n^^branterent  point  leur  fldetit^. 
lis  prirent  ies  armes  pour  la  defense  deNa- 
tonnede  contre  Cyrus  et  Gyaxare.  Mais 
Babylone  devait  succomber.  Gyrus  r6u- 
nit ,  sous  SOD  sceptre ,  la  Perse,  la  Media 
et  tout  Tern  pi  re  des  Ghaldeens. 

LA  SYBIB  sous  Lk  DOMINATION  DBS 

9BBSB8.  —  La  Svrie  cbangea  encore  une 
fois  de  maltre.  Ktle  perdit  ses  cbefs  natio- 
naux  et  re^ut  un  satrape  perse.  Ge  sa- 
trape  gouvernait  les  habitants,  levait 
les  im^ts,  papit  les  ^arnisoiis  {*).  II 
recueillatt  aussi  des  tributs  en  nature 
pour  les  envoyer  a  la  cour  du  roi  (** ). 
A  cdt^  de  lui ,  se  plaqaient  les  gouver- 
neurs  des  postes  et  des  garnisons  dout 
la  Syrie  etait  couverte.  Ces  comman- 
dants ^taient  sous  la  d^pendance  im- 
mediate du  roi,  et  recevaient  de  la  cour 
leur  grade  et  leursolde(*^*).  Ainsi,  d*un 
cdte,  les  ofOciers  royaux,  de  Tautre, 
une  sorte  de  chef  feodal ,  vassal  du  roi , 
mais  qui  avait  aussi  ses  vassaux.  Sous  la 
suzeraiiiete  du  satrape,  se  groupent  une 
foule  de  seigneurs  qui  ont  re^u  en  re^ 
eompense  de  leur  fidelite  et  de  leur  bra- 
Toure  (****)  des  terres  en  Syrie.  Ges  vas- 
saux sont  astreints  a  Phommage  et  au 
Service  militaire.  lis  levent ,  dans  leurs 
domaines,  un  certain  nombre  de  cava* 
liers  et  les  conduisent  a  Tar'n^e,  sous 
le  commandement  du  satrape  {*****).  ||s 
ne  sont  pas  seuls  possesseurs  du  sol  :  les 
courtisans  recoivent  aussi  a  titrede  pen- 
Stons  des  proprietes  herediuires  (******). 
Chaque  seigneurades  esclaves  attaches 
^  la  gt^be.  Les  serfs,  c*est-a-dire  les 
vaincus,  lesSyriens ,  cuiti  vent  les  champs 
pour  leurs  mattres  {*******).  lis  payent 
des  tallies ,  des  irnpdts  de  toutes  sortes  : 
«  Quand  iis seront  pauvres ,  dit  Gyrus,  il 
sera  plus  faci  le  de  les  assou  pli  r  (********). » 
Ge  n  est  poipt  assez  des  tallies ,  ils  ont 
aussi  les  corvees.  Quand  le  roi,  par  exem- 
ple,  inventa  les  postes,  et  les  etablit  en 

n  X^nopb.,  Cyropedie,  L.  YlU.ch.  6,  g  3. 

(**)  Ibid. 

{***)Ibid.,%\etiyisnm. 

(•*•*)  Llv.  Vll ,  ch.  5.  «  Cyriu  donna  des 
palais,  des  maisons,  des  terres,  distribuaot 
les  meil leurs  lots  aux  plus  braves.  » 

(*»••*, Xen.Jiv.  VIU,  ch.8,  alafm. 

(****"i  Xen.,  llv.  Vir.ch.G,  8*- 

("****•) X6n.,Iiv.  VIi,ch.  5. 

(********)  id.,  ibid. 


Syrie  pour  la  eominodit^  de  son  admiais- 
tration ,  ilsoonstruisirent  les  ^curies  aux 
relais  marqu^,  etquerquefois  mtoie  ils 
fournirent  les  ebevaux  (*).  On  ne  son* 
geait  point  h  les  indemniser.  Quand  le 
satrape  avait  envie  d*un  pare,  ilsenfer- 
maient ,  dans  une  enceinte  de  murs,  des 
for^ts  et  des  lacs  {**") ;  mais ,  quand  ils 
avaient  faim,  ils  n'osaient  toucher  au 
gibier  privil^i^  D*ailleurs,  ils  ne  pou* 
faient  chasser :  il  ^taitd^fendu  aux  serfs, 
sous  peine demortfd^avoirdesarmesO- 

Les  artisans  dc«  villes ,  les  commer- 
cants,  les  bourgeois,  etaient  plus  heu- 
reux.  On  avait  besoin  de  leur  Industrie 
et  de  leur  commerce.  Ils  aoprovision- 
naient  la  cour  du  satrape,  la  cour  du 
roi,  les  armtes.  lis  6quipaient,  dans 
les  portsde  Syrie,  des  triremes  dont  le  roi 
pou  vait  au  besoin  former  une  flotte  C^**)» 
£n  un  mot ,  ils  etaient  utiles  et  point 
dangereux.  Peut-^tre  serait-il  permis 
d^afflrmer  que ,  sur  les  bords  de  la  Me- 
diterranee  et  de  TEuphrate,  les  habi- 
tants des  villes  formerent  une  dasse 
moyenne  entre  les  seigneurs  perses  et 
les  Syriens  esclaves  {*****), 

AInsi  est  tomb^  le  peuple  d'Arame.  II 
avait  perdii  sous  les  Assvriens  et  sous  les 
Ghald^ns  son  indepenoance.  Gette  fois* 
il  perd  sa  nationality.  La  Syrie,  devenue 
province  et  satrapie,  embrasse  sous  une 
m^me  admiuistration  tout  le  pays  com« 
pris  entre  TEuphrate  et  la  mer,  parexem- 
ple,  la  Palestine  et  la  Phenicie  (******). 

Sous  Xerxes,  ies  Pheniciens  el  k$ 
Syriens  de  la  Palestine  fournissent  une 
partie  dela  flotte (***'***).  Cesten  Syrie 
et  en  PhMeie  qu'Artaxerxes  rasseinble 
contre  le  roi  d'figrpte,  Inarus,  une  ar« 
m^  de  terre  et  de  mer.  La  province 
avait  alors  pour  gouverneur  Megabyze, 
beau-fr^re  d'Artaxerx^.  Ge  satrape  se 
r^volte  apres    I'expMition    d'^gypte^ 


\^ 


[*)  Xto.  Cyr.  Uv.  VIU,  ch.  6. 

{**)  ibid. 

(•*•)  Id.  i6.  VII,  ch.  &. 

(**«^)Sur  les  1207  vaisseanx  dela  flotte  de  Xer- 
xte  dans  la  guerre  medlque .  Irs  Phi^nidens  et 
ies  Sv riens en  fournirent  aii»i,  H^rodotp .  V 11 , 80* 

(****)  Nous  devons  ajoater  que,  sous  la  doml- 
oation  des  Perses,  il  y  eut  de  nombreuses  ^rol- 
graUons  de  Syriens ;  ils  se  mJrent  souvent  aussi 
oomme  meroenaires  au  service  des  vllles  grec- 
ques.  Cest  oe  que  nous  appreod  X^oopooii, 
he  feciig,  II,  a. 

(•••••*)  Esra,  111,6. 

(•*»*•*)  Herodole,  Vll,  89. 


SYRIE  ANCIENNE. 


U 


nssembltf  une  armee  considerable,  et 
bat  deux  fois  )es  troupes  royales. 

Son  exemple  devait  trouver  des  imi- 
lateurs.  En  401 ,  Cvrus  )e  Jeune  prit  les 
amies  contra  *on  frere  Artaxerxes  Mne- 
mon.  L^bistorien  Xenophoii,  qui  le  suivit 
dans  cette  guerre,  raconte  te  passage  de 
Tarm^  en  Syrie. 

m.  Dlssus,  dernidre  ville  de  Cilicie ,  Cy- 
ras Yint  en  une  marche  de  cinq  paia- 
ganges,  au  passage  de  la  Cilicie  et  de  la 
Syrie.  Deux  murs  se  pr^sentaient :  Tun, 
en  depict  au-devaot  dela  Cilicie,  ^tait 
garde  par  Syennesis  et  ses  troupes  :  on 
disait  qu^une  garnison  d'Artaxerxes  oc- 
cupait  celui  qui  etait  au  dela ,  du  c6x6 
de  la  Syrie.  Entre  les  deux  coule  le  fleuve 
Carsus  (Kersas),  large  d'un  pleihtr. 
L*espaee  qui  est  entre  les  deux  murs  est 
de  trois  stades;  on  ne  pouvait  forcer  ce 
p»ssg4<ff  ^troit  :  les  murs  descend -i  lei  it 
jusqu'ala  mer :  au-dessus  ^taient  des  ro- 
cbers  k  pic,  et  Voi\  avait  pratique  des 
portes  dans  les  murs.  Pour  s*ouvrir  ce 
passsigB,  Cyrus  avait  fait  venir  sa  flotte, 
afin  dedebarquer  des  hoplites  entre  ces 
deux  marset  au  dela ,  et  de  forcer  le  pas 
de  Syrie,  s'il  6tail  d^fendu  par  les  en- 
nemis.  II  s'attendait  qu'Abrocomas,  qui 
avait  beaueoupde  troupes  a  ses  ordres, 
Ini  disputerait  ce  passage.  Mais  Abro- 
comas  n'en  fit  rien.  Des  quMl  sut  que 
Cyras  ^tait  en  Cilicie,  if  se  retira  de  la 
Pbenicie,  et  marcha  vers  le  roi  avec  une 
armee qu*on  disait  6tre  de  trois  cent  mil- 
kbommes.  De  1^  Cyrus  fit,  en  un  jour 
de  marche.  cinq  parasanges  dans  la  Sy- 
rie ,  et  Too  arriva  a  Myriandre ,  ville  ma- 
ritime, habitee  par  les  Pheniciens.  C*est 
une  viile  de  commerce  ou  moui  I  lent  beau-  ^ 
eoupde  vaisseaux  marchands.  On  s'yar- 
rlta  sept  Jours....  Cyrus  fit  ensuite  vingt 
parasanges  en  quatre  man  hes ,  et  vint 
sor  les  bords  du  Chains,  fleuve  large 
d*un  plethre,  et  rempli  de  grands  pois- 
sons  prives  :  les  Syriens  les  regardent 
comme  des  dieux ,  et  ne  permettent  pas 
qu*on  leur  fassedu  mal,  nonplus  qu'aux 
eolombes.  Les  villages  ou  Ton  campa 
appartenaient  a  Parysatis ,  mere  du  roi. 
usloi  avaient  ^t^  donnes  pour  son  entre- 
tien.  De  la,  aprte  trente  parasanges,  en 
cinq  marches ,  on  arriva  aux  sources  du 
iteuve  Dard^s,  lar^e  d'un  plethre.  La 
^it  le  palais  de  Belesis,  gouverqeurde 
Syrie,  avec  de  tr^-beauxet  tres-vastes 


jardins ,  fronds  en  (ruits  de  toutes  les 
saisons.  Cyrus  rasa  le  pare  et  brdla  le 
palais.  Ennn,  apres  trois  jours  de  mar- 
che, Tarm^e  arriva  a  Thapsaque,  vilfe 
grande  et  riche,  sur  PEuphrate,  large 
en  ce  lieu  de  quatre  stades.  Cyrus  y  de- 
meura  cinq  jouis.  On  traversa  le  fleuve 
k  gne  avec  de  IVau  jusqu'a  1  aisselle.  Les 
habitants  de  Thapsaque  pretendaient 
que  TEuphraten'avait  jamais  6tegu^- 
ble  qu'en  ce  moment,  et  qu*on  ne  pou- 
vait le  traverser  sans  bateaux ;  Abro- 
comas,  qui  avait  devance  Cvrus,  les  avait 
brdles.  On  regarda  cet  ^venement  com- 
me  un  miracle.  II  parut  evident  que  le 
fleuve  s'etait  abaisse  devant  Cyrus, 
comme  devant  son  roi  futur  (*)•  * 

La  Syrie,  reside  indifterente  dans  la 
lutte  d' Artaxerxes  etde  son  frere,  n*eut 
point  de  regrets  pour  Cyrus  vaincu  et 
tue  dans  les  champs  de  Cunaxa  (401). 
Mais  « lie  ne  devait  pas  se  rontenter 
]ong(emps  de  ce  r6le  passif.  En  362,  tou- 
tes les  provinces  de  TAsie  Mineure  se 
souleverent  a  la  fois,  et  proclamerent 
leur  independance.  Dans  cette  vaste 
confederation,  nous  trouvons  au  pre- 
mier rang,  la  Syrie,  avec  la  Lycie, 
la  Pisidie,  la  Pamphylie,  la  Phenicie, 
et  presque  toutes  les  citis  maritimes. 
«  Les  revoltes,  dit  Diodore  de  Sicile,  ^lu- 
rent  pour  leur  chef,  avec  une  autorit^ 
souveraine,  Oronte,  satrape  de  Mysie. 
Mais,  aussitot  que  ce  satrape  fut  investi 
du  pouvoir,  et  qu'il  eut  re^u  Targent 
necessaire  pour  entretenir,  pendant  une 
annee,  une  armee  de  vin^t  mille  hom- 
roes,  if  trahit  ceux  qui  avaicnt  mis  en  lui 
leur  confiance.  Comme  il  se  figurait  qu*il 
obtlendrait  aisemeotdu  roi  de  maguifi- 

aues  recompenses,  et  la  satrapie  geuerale 
es  provinces  maritimes,  s'il  livrait  les 
revokes  aux  Perses,  il  commenqa  par 
envoyer  devant  Artaxerxes  ceux  qui  lui 
avaient  apport^  Targent,  et  livra  egale- 
mentaux  ofQciers,  detaches  sur  les  lieux 
par  le  roi,  un  grand  nombrede  villes 
avec  leurs  garnisons,  compos^es  d*e- 
trangers  a  la  solde  des  conf^deres. 
Rh^pmithres,  envoys  par  les  rebelles 
en  Egypte ,  pres  du  roi  Tachos ,  et  en 
ayant're^u  cmq  cents  talents  avec  cin^ 
quante  vaisseaux  ion^s ,  revint  en  Asie  et 
aborda  a  Leuce.  Arrive  dans  cette  ville, 
il  appela  pres  de  lui  plusieurs  des  prin- 
ce Xenophon ,  Jnah. ,  I,  4. 


24 


L'UNIVERS. 


cipaux  chefs  de  la  lisue,  ies  fit  arr^ter, 
et  les  envoya,  charges  de  chatnes,  a  Ar- 
taxerx^.  Pour  prix  de  cette  perfidie,  il 
obtint  de  faire  sa  paix  avec  le  roi  (*)•  * 
Aiosi  fut  comprim^  ce  mouvemcDt 
qui ,  seconde  par  rfgypte  et  par  Lac^- 
d^mone ,  devait  renverser,  sur  toute  la 
cdted'AsieJa  domination  des  Perses. 
Dix  mille  Grecs  mercenaires,  soudoy^ 
par  Tacbos,  avaient  aborde  en  Phenicie, 
sous  la  conduite  de  Chabrias;  mats  rap- 

Sel^  en  ^gypte  par  la  r^volte  de  son  fils 
Tectan^bus ,  Tachos  abandonna  ses  al- 
lies. Les  Syriens  se  soumirent ;  et  de- 
sormais  convaincus  de  leur  impuissance, 
lis  oublierent  des  souvenirs  importuns 
de  gloire  et  de  liberte. 

C  est  en  vain  que  sous  le  r^ne  d*Arta- 
xerx^s  III,  la  Phenicie,  Chypreet  r£gypte 
renouent  les  liens  de  leur  ligue  dissoute. 
Les  Syriens  restent.sourds  a  Tappel  de 
leurs  anciens  allies  (354). 

Mais  d^ja  les  Perses  touchent  au  ter- 
me  fatal  de  leur  domination.  Encore 
vingt  ans ,  et  la  Syrie  aura  chang6  do 
inaitres. 

Ochus  meurt  en  338  >  son  fils  Ars^s 
en  336,  tous  deux  empoisonnes  par 
Feunuque  Bagoas.  Darius  Codoman 
monte  sur  le  tr6ne  (336).  Ce  prince  edt 
sauv6  Tempire,  si  Tempire  avait  pu  £tre 
sauve.  Mais  la  Grto  s  est  souvenue  des 
^erres  ro6diques  :  Alexandre  s'avance 
a  la  conqu^te  de  TAsie  (334.) 

J^  vaste  empire  des  Perses  ^tait  di- 
vis^  par  le  cours  de  TEupbrate  en  deux 
parties  distinctes  :  TAsie  Mineure  et  la 
haute  Asie.  L'Asie  Mineure,  ou  pays  en 
deca  de  FEupbrate,  formait  elle-mtoe 
deux  regions  S(6par^es  par  la  cbatne  du 
Taurus,  la  basse  Asie,  et  la  Syrie.  La 
Cilicte  ^tait  la  iimite  commune. 

«  Cette  province  est  tel  lement  enferm^ 
par  te  mont  Taurus ,  qu'on  la  prendrait, 
suivant  Texpression  d  un  voyageur,pour 
un  enclos  de  murailles.  Du  c6te  de  Toc- 
cident,  la  montagne  est  absolument  im- 
praticable;  et  il  neparait  pasqu*on  ait 
jamais  tente  de  la  traverser  par  la  Pam- 
pbyiie.  A  I'orient ,  il  y  a  un  autre  bras 
du  Taurus ,  sous  le  nom  d'Amanus ,  ou 
Ton  trouve  deux  passages ,  Tun  au  nord 
et  Tautre  au  sud ,  distants  de  deux  stath- 
mes  ou  de  cinq  parasanges ;  ces  defiles 
donnent  seuls  entree  dans  la  Syrie;  ils 

i    (*)  DIodore  de  SlcUe,  XV,  91  et  saiv. 


86  nomment ,  Tun  Porks  de  Syrie,  Fau- 
tre  Pyles  Amaniques  (*).  » 

Le  passage  du  Granique  avait  ouvert 
aux  Mac^doniens  toute  la  basse  Asie.  Le 
Taurus  seul  pouvait  arr^ter  leur  marche 
et  sauver  la  Syrie.  Darius  vint  camper 
^SochoSjdanslaCommagene.  Cette  posi- 
tion ^tait  bien  choisie ;  elle  permettait 
aux  Perses  de  fermer  les  d^fil^s ,  et  leur 
laissait,  en  cas  de  revers,  une  ligne  de 
defense  derri^re  FEuphrate ,  qui  forme 
un  angle  avec  F Amanus.  Le  roi  se  perdit 
par  une  impatience  maladroite.  II  apprit 
qu* Alexandre  s'avan<jait  a  travers  Jes 
Pyles  deCilicie. «  Lechemin,ditQuinte- 
Curce  ,  pouvait  a  peine  contenir  quatre 
bommes  de  front;  le  sommet de  la  mon- 
tagne dominait  sur  le  passage,  qui  etait 
non-seulement  ^troit ,  mais  encore  rom- 
pu  enplusieurs  endroits,  par  une  infinite 
de  ruisseaux  qui  s*y  repandent  de  tous 
c6t^s  (**).  »  Darius  devait  attendre  aux 
Portes  de  Syrie  ou  au  defile  de  FA  manus 
les  Mac^doniens  fatigues.  Emporte  par 
son  ardeur  imprudente,  il  envoya  ses 
tresors  a  Damas,  sous  la  garde  d'une  fai- 
blegarnison,  et  francbit,  avec  toutes 
ses  forces,  les  Pyles  amaniques.  Il  comp- 
tait  surprendre  Fennemi  dans  sa  mar- 
che ;  mais  il  6tait  trop  tard  :  les  Mace- 
doniensetaientarrivesa  Myriandre,  sur 
la  c6tede  Syrie  C").  Alexandre  vit  le  mou- 

(♦)  Sainte-Croix ,  Examen  critique  det  histo- 
riens  dT Alexandre ,  2"  M.,  p.  681. 

(**)  Quinte  Curce,  III,  4. 

(***W  Aprts  avoir  travers*  les  Pyles  syricn- 
Des,  Alexandre  campa  prte  de  Myriandrus,  ^ille 
mariUme.  Xenophon,  qui  acoompagnalt  \t 
Jeuoe  Cyrus,  en  lit  autant,  et  cet  auteur  oompte 
dans  cet  espace  cinq  parasanges.  La  paras^ange, 
oomme  !*a  *vaiu^  d'AnvineCa),  est  egale  h 
trois  milles  romalns  ancieos;  le  raiUe  ^taut 
de  766  toises,  elle  revfent  a  *l,S68  toises  Or,  cioq 
parasanges  font  li,340  toises,  et  c'est  a  peu  de 
chose  pr^  la  mesure  que  Ton  trouve  sur  la 
carle  de  Nielmhr,  et  sur  oelles  du  Foyaoe 
de  Drummood  (6),  entre  un  chAteau  appera 
Menkes,  qui  parait  «lre  h  Tendroit  m^me  des 
Pylps  syriennes ,  et  la  situation  d'Alexandrette. 
On  doit  done  crolre  que  la  ville  d*AlexaiidrettA 
est  sur  {'emplacement  m6me  du  camp  d*Alexan- 
dre  et  de  Cyrus,  et  que  c'est  IVndroil  au'avalt 
d^iffne  Alexandre  (c)  pour  construire  la  vjlle 
qui  depuis  fut  appelee  Aiexandria-caUi'isaott  {d) 
k  cause  de  sa  siluaUon. 

(a)  D'ABville,  Tr.  da\Mes.  Uin.,  p.  44, 7S  et  7». 
\h)  Niebohr.  ro^ago,  t  11 .  pi.  ss,  p.  U6.  -  Dram- 
nond ,  TravetM ,  pi.  II ,  p.  ao*. 

(c)  Scymo.,  p.  5i. op.  Ceogr.  win.  grec,  t  II.  —  He- 
rod., Ill ,  12. 

(d)  VaillaDt,  Afum.  grac.,  p.  a?  et  97<  —  PlolciB* 
Ceogr.,  V ,  i5. 


SYRIE  ANQENNE. 


35 


remait  des  Parses.  II  pouvait  tomber 
sar  leurarri^re-garde,  et  les  prendre 
eo  queue  dans  le  passage  de  TAmaous; 
mais  il  aima  mieux  repasser,  par  uoe 
Gontre-niarche  rapide,  les  Portes  sy- 
rieooes  :  le  lendemain,  la  bataille  d*Is- 
stts  decida  de  la  fortune  deTAsie  (333). 
.  Tandis  qo' Alexandre  vainqueur  ele- 
Tait,sur  les  oords  du  Pinare,des  troph^s 
et  des  autels,  Darius  fuyaitvers  TEu- 
phrate,  a  travers  ces  plaines  de  la  Syrie 
a  TeiUe  encore  convenes  d*une  immense 
armee,  maintenant  silencjeuses  et  de- 
sertes  (*). 

Alexandre  ne  poursuivit  pas  les  vain- 
cus  dans  leur  retraite.  Avant  de  s'en- 
gager  an  dela  de  TEuphrate ,  il  voulait 
affermir  sa  domination  dans  la  Syrie  et 
soumettre  toute  la  rive  droite  du  fleuve. 
U  s*avanca  vers  la  Coelesyrie ,  en  Ion* 
geant  le  littoral ,  et  se  rendit  maitre  de 
nie  d* Aradus  et  des  villes  de  Mariamne 
etde  Marathe.  En  m^me  temps,  Parm^- 
nion  sVnfon^it  plus  avant  dans  les 
terreselmardiaitsur  Oamas,  pour  faire 
le  si^e  de  cette  ville.  Au  milieu  de  la 
route,  les  edaireurs  trouverent  un  bar- 
bare  qui  portait  une  lettre  adressee  par 
legooverneur  de  Oamas  a  Alexandre. 
Ce  satrape  promettait  de  livrer  tons 
les  tr^Bors  du  roi  si  on  tui  envoyait  un 
d(B  generaux  avec  quelques  troupes.  Le 
prisonnier,  renvoye  sous  escorte  a  Da- 
mas,  s'echappa  des  mains  de  ses  gardes.  Sa 
fuite  jeta  les  Macedoniens  dans  rinqui6' 
tudeet  Tenibarras.  lis  craignaient  q[uel- 
que  secrete  embOche,  et  n'avao^aient 

«  Damee  6M,  oette  ville,  |Mir  sa  position,  de- 
Tiit  le  tfODfcr  fort  prts  de  oplle  de  Myriao- 
droi ;  et  oes  deax  villes  devaieot  en  quelqua 
fa^oo  former  le  fanbuurg  Vuae  de  Tautre.  Ausal 
Ploltai^  les  plaoe-t-il  daos  la  m^e  longitude ; 
■aiaU  mH  an  pea  d^ecart  daos  leur  latitude  (a). 
If^aoaoios  ers  deux  Titles  existerent  coocor- 
nmowot ,  Juaqa^i  ce  qu'eofin  oelle  de  Myrlan- 
dius  o6da  a  sa  rivale;  car  11  n'est  plus  qnea- 
Uoo  que  de  la  ville  d' Alexandria  dans  les  No- 
tkaeeelenastigyeM  lb).  •  ~  Analyte  de  la  carte 
des  marchet  tide  r empire  d* Alexandre ^  par 
M.  Barbi^du  Bocage,  dans  Saiote-Crolx ,  S^ 
cd..  p.  806. 

{*)  Ferioea,  qtue  fro^  immentis  agminibUM 
>  »m^ltventt.  Jam  inania  et  ingenti  eolitudine 
^eUefugiebaC  Pauei  regem  aequebantur :  nam 
/  Mr eodem omnM  fmfom  intenderant ,  et.de- 
fontihrns  eqmut  curaum  eormn  qtiot  ,rex  su- 
^ademuUdai,  ^nuareriMpottnnt,  —  QuiaL 
Out,  jy.  I. 

S'SS3ir.§!S&pi*.*p'  70».-0rteMcbrlst,l.||, 
eiLpdeC9o«. 


qu'avec  prtoution.  Enlln,  Parm^nion, 
plein  de  foi  dans  la  fortune  d^Alexan- 
dre,  prit  pour  guides  des  Syriens  de  la 
campagne,  et  arriva  en  quatre  jours  au 
pied  des  remparts.  Damas  ouvrit  ses 
portes.  Les  tresors  de  Darius ,  qui  mon- 
taienta  deux  mille  cinq  cents  talents  (*) , 
tomberent  au  pouvoir  de  Parm6nion ; 
mais  ce  n*etait  pas  la  partie  la  plus  pr^ 
cieuse  du  butin.  Au  nombre  des  prison- 
niers  se  trouvaient  les  enfants  et  les 
femmes  de  tons  les  seigneurs  les  plus 
nobles  de  la  Perse.  On  cite  les  trois  nlles 
d'Ochus  et  leur  m^re,  la  fille  d'Oxa- 
thris,  fr^re  de  Darius,  Tepouse  d'Ar- 
tabaze  et  son  Ols;  I'epouse  et  le  Ols  de 
Pharnabaze,  satrape  des  provinces  ma- 
ri times;  les  trois  filles  de  Meftor;  T^- 
pouse  et  le  fils  du  faroeux  Meranon; 
enfin  une  jeuiie  femme  de  Pydne,  nom- 
m^e  Antigone,  remarquable  entre  tou- 
tes  les  captives  par  sa  beaut^.  Elle  ^hut 
en  partage  a  Philotas,  Ols  de  Parm^ 
nion  (**).  ^ 

Darius  avait  laiss6  a  Damas,  comme 
dans  une  sdre  retraite ,  les  envoys  des 
villes  grecques.  La  trabison  du  satrape 
les  livra  aux  mains  de  leur  ennemi.  Mais 
Alexandre  se  montra  genereux  :  il  remit 
en  liberty  les  deux  depute  de  Thebes, 
et  le  Ols  d'Iphicrate ,  depute  d*Athe- 
nes  (***). «  Les  cavaliers  thessaliens  Orent 
dans  cette  campagne  un  gain  conside- 
rable; comme  ils  s'etaieiit  distingu^ 
dans  le  combat,  le  roi  les  y  envoya  ex- 
pres  pour  leur  donner  une  occasion  de 
s*enrichir.  Lereste  de  Tarmee  v  amassa 
aussi  de  grandcs  richesses ;  et  les  Mace- 
doniens, qui  godtaient  pour  la  premiere 
fois  de  Tor,  de  Targent,  des  femmes  et 
du  luxe  des  barbares,  furent  ensuite 
comme  des  cbiens  qui  ont  tdte  de  la 
curee :  ilsallaient  avec  ardeursur  tou  tes 
les  voies  pour  decouvrir  a  la  piste  les 
richesses  aes  Perses  (****). « 

Parm^nion,  au  retour  de  son  expedi-* 
tion  de  Damas,  re^ut  le  gouvernement 
du  pays  en  dech  de  TEuphrate. 

La  Syrie  et'la  Ph«*nicie  etaient  sou- 
mises;  seuls,  les  habitants  de  Tyr  fer- 
maient  leurs  portes  aux  Macedoniens. 

(*)  Sainte-Croix ,  s«  ed.,  p.  429. 
r*)  Plutarque,  Fie  d* Alex.,  LXXV. 
(•**)  ^oy.,  pour  cerecit,QuinteCnroe,Hf  13. 
(**•*)  Plutarque,  Fie  d*Alex.,  XXXII,  trad,  de 
Elcard. 


26 


L'UMVERS. 


Pendant  le  sl^e  de  cette  viile,  Alexan- 
dre re^t  one  ambassade  de  Darius. 
Le  roi  de  Perse  ofifrait  a  son  ennemi  la 
main  d*une  de  ses  filles ,  trois  milte  ta- , 
lents  et  tout  le  pays  en  de^a  de  I'Eu-' 
phrate.  Pour  sauver  la  haute  Asie  ^  il 
abandonnait  TAsie  Mineure  et  la  Syrie, 
c'est-a-dire  toute  la  c6te,  et  se  reufer- 
mait  dans  Tinterieur  des  terres.  Alexan- 
dre refusa  «  La  terre ,  dit-il,  ne  pent 
avoir  qu'un  mattre  (*).  » 

cc  Vers  le  milieu  du  siege,  11  alia  faire 
\h  guerre  aux  Arabes  de  TAnti-Li- 
ban.  II  y  courut  risque  de  la  vie  pour 
avoir  attendu  son  precepteur  Lysima- 
que,  qui  avait  voulu  le  suivrea  cette 
6xp6d!tiyi,  en  disant  qu*il  n'etait  ni 
plus  vieux  ni  moins  courageux  que 
Ph^ix,  qui  avait  accompagne  Achilfe  au 
si^^e  de  Troie.  Quand  on  fut  au  pied 
de  la  montagne,  Alexandre  quitta  les 
chevaux  pour  la  monter  a  pied.  Ses 
troupes  le  devancerentde  beaucoup ;  et 
eomme  il  ^tait  deja  tard,  que  les  enne- 
mis  n*^taient  pas  loin,  il  ne  voulut  pas 
abandonner  Lysimaque,  h  qui  la  pe- 
santeur  de  son  corps  rendait  la  marche  * 
difficile ;  mais,  en  Tencourageant  et  le 
portant  a  moiti^,  il  ne  s'apercut  pas  qu*il 
s'^tait  s^pare  de  son  armee",  qu*il  n*a- 
vait  avec  loi  que  tr^s-peu  de  moude,  et 
qne  par  une  nuit  obscure  et  un  froid 
tr^s-pi^uant ,  il  etait  engage  dans  des 
lieux  difficiles.  II  vit  de  loin  un  grand 
nombre  de  feux  que  les  Arabes  avaient 
allum^s  de  e6i€  et  d*autre.  Se  confiant 
a  sa  legerete  naturelle,  accoutume,  en 
travaillant  lui-m^me,  h  soutenir  les 
Macedoniens  dans  leurs  fatigues ,  il  cou- 
rut a  ceux  des  barbares  dont  les  feux 
^taient  le  plus  proches^  en  pervade  son 
^6e  deux  qui  ^taient  assis  aupres  du 
feu,  et  prenant  un  tison  allume,  il  re- 
Tint  trouver  les  siens,  qui  allumerent  de 
grands  feux  dont  les  Arabes  furent  si 
effrayds  qu'ils  s'enfuirent  precipitam- 
ment.  Tel  est  le  recit  de  Thistorien 
Chares  (**). » 

La  prise  de  Tyr  acheva  de  fonder 
8ttr  la  rive  droitede  TEuphrate,  depuis. 
le  fleuve  jusqu'a  la  mer,  la  domination 
maoedonienne.  Alexandre  confia  la  Ci- 
licie  h  Socrate,  et  le  pays  de  Tyr  h  Phi- 
lotas.  Parm^nion  remit  a  Andromaque 

nDiod.sic,xvn,M. 


le  gouvemement  de  la  Coel^yrie,  et 
partit  pour  Tarm^e  (*). 

Mais  les  Samaritains  se  r^volt^rent 
contre  le  nouveau  commandant,  le  pri- 
rent,  et  le  brdlerent  vif.  Alexandre  reve- 
nait  d*£gypte,  quand  il  requt  cette  dou- 
velle ;  aussitot  il  nomma  Memnon  au 
gouvernement  de  la  Syrie,  et  fit  execu- 
ter  les  assassins  d'Andromaque(**).  Ces 
mesures  ne  retard^rent  pas  la  marche 
de  rarm6e;  elle  traversa  TEuphrate  k 
Thapsaque  r***).  La  cavalerle  passa  la 
premiere,  suivie  de  la  phalange  (•***);  elle 
trouva  lefleuvegueableau  milieu  (*****). 

Maz^e  6tait  venu ,  avec  six  mille  ca- 
valiers ,  pour  emp^cher  le  passage.  II 
n*osa  faire  T^preuve  de  ses  forces,  et 
se  retira  derricre  le  Tigre  f  *****♦).  Ainsi 
la  haute  Asie  s'ouvrait  devant  le  conqu^ 
rant :  e'en  ^tait  fait  de  Darius  et  de  son 
empire  (331). 

Nous  ne  suivrons  pas  Alexandre  dans 
sa  marche  au  dela  de  FEuphrate;  mais 

(*)  CilMam  Socrati  tradidertU,  Phiiota  n- 
gioni  circa  Tfpvm  juato  prasidere,  SffHam, 
gum  Ccele  appellalur,  Andromacho  Parmenio 
tradiderat,  bello  quod  tupererat  inter/ulKrus. 
Quint.  Cur..  IV,  V 

(**)  Andromachvm vivum  Samariimcre- 

maveranL  QuiotCur.,  IV.  8.  —  «  Abut -Parage, 
od  aulrement  Gregorius  Bar-Uebrteos ,  dans 
la  fieconde  partie-nonHmprlmee  de  sa  Cknmi- 
que  syriaque,  fait  d*Aiidromaque  un  grand 
pretre,  et  pretend  que  les  Samaritains  le  tuirent 
parce  quMI  avait  reconnu  Alexandre .poar  roi, 
et  l*avait  traite  avec  honnear,  etc.  »  Saiota- 
Croix,  p.  663. 

(***)  «  Alexandra  passa  TEuphratei  Tbapsa- 
que ,  que  M.  d*Anville  croit  Aire  aujourdind 
rend  roi  t  appel^  El-Der  (a) ;  mats  il  se  trompe. 
Thapsaque,  suivant  la  marche  des  DIx  mille  (6), 
etait  a  aoixante-cinq  parasanges  deMyriandrvSk 
et  cette  mesure,  k  partir  dela  ville  d^Alexan- 
dreUe,  tomt)e  assez  bien  sur  Racca,  qui  cat 
encore  un  grand  passage  de  rEophrate.  » 
M.  Barbie  du  Boca^e,  dans  Salnte-Croix ,  p.  Bio. 

«  Pllne  et  Dion  Cassius  (<;)  rapporlent  qa'A- 
lexandre  traversa  le  fleuve  pres  de  Zeugma, 
sur  un  pont  soutena  par  des  chaines  de  fer.  Get 
^Ivains  ont  sans  doute  ^t^  ioduits  en  erreor 
par  Petymologie  du  nom  de  oe  Ueu;  rittn^ 
raire  de  Tarmte  maoedonienne,  depuis  Tyr 
Jusqa'a  Arb^e,  d^montre  la  faussete  de  leur 
r^ll.  »  Sainte-Croix,  p.  296. 

(*♦*•) «  Undecimis casiris  pervenUnd  Eyphra" 
iem  ;  quo  poniibusjuncio,  eqmiUs  primot  sre, 
phalanqem  tequi  jvbeL  Quint  Cur.,  IV,    •• 

(*••*•)  Arrien,  111,7. 

{*•***•)  Mazaoqui  adinhibendumtransUMm 
efu»,  cum  $ez  miUibut  equUum  oceurrerai, 
fum  attso  periewiMm  ttd  facere*  Quint.  Cur. , 
IV,  9. 

la)  n'Anville,  fiifpAra<0  et  Tigre,  p.  li. 
»)X«'noph..^iia6.,  U,4.  ..  ^  ,  „ 
(e)  Plui.,  V.  14.  ~  DLoa  Cass.,  Ut.  XL,  tjl ,  p.  ni. 


SYRIE  ANCIIENNE. 


notre  r^tdans  les  limitefl 
de  la  Syrie,  nous  ^tudierons  TMat  de 
tttte  provinee  sous  la  domination  ma* 
cMontenne. 

La  Syrie,  suee^asWement  goaTerote 
parPaimenion,  Andromaque  et  Mem- 
Bon,  eomprenait,  comme  au  temps  des 
Perses ,  la  Phenicie  et  la  Palestine. 

Lea  habitants,  tenus  en  respect  par 
det  commandants  et  des  garnisona, 
payaient ietribut sans  resistance,  etfour- 
Dtssaienl  k  Tentretien  des  troupes.  lis 
avaieot  d^abord  sapporte  avec  impa- 
tieace  roccupation  militaireC).  L'irri- 
tatioa  g^n^rale  edata  par  la  rdvolte  des 
Samaritains  et  le  meurtre  d'Androma- 
qoe.  Mais  une  repression  rapide  con- 
vainqutt  les  peuples  opprimes  de  leur 
impuissance.  L'ordre  retabli  ne  fut 
phtt  trouble;  insensiblement,  il  s'op^ra 
une  sortede  fiision.  Au  contact  des 
ninqaeurs ,  les  vaincus  modiGerent  les 
eoutumes^lesmceurs,  la  religion  natio- 
nales;  etda  melange  des  deux  civilisa- 
tions, rOrient  sortit  transform^. 

Beja,  s'il  faut  en  croire  la  tradition  rap- 
port^ par  le  sophiste  Llbanius,  Alexan- 
dre afaitpos^  les  fondements  d*Antio- 
dw,  la  capitaie  de  ce  monde  nouveau. 

«  Aleiaodre,  en  traversant  la  Syrie, 
apres  la  bataille  d^lssus ,  s'arr^ta  tout 
pres  des  sources  de  la  fontaine  de 
Dapho^,  y  dressa  sa  tente;  il  trouva 
Tcau de  eette  fontaine  si agreable,  qu'elle 
lui  rappela  toute  la  douceur  da  lait  qui 
eoulait  des  mamelles  d'Oiympias,  sa 
mere.  Aussitot,  il  con^ut  le  projet  de 
fadtir  une  rille  en  cet  endroit,  et  oraonna 
d'en  eommencer  la  construction.  Le 
temple  de  Jupiter-Bottienet  la  citadelle, 
appelee  Emathie,  sont  les  restes  de  ces 
premiers  travaux.  Tel  est  le  r^it  de 
Llbanius ,  confirme  par  Malala ;  mais  il 
repose  sur  une  faus^e  tradition,  imsr 
ginee  pour  flatter  la  vanit6  des  Antio- 
«hieos(**). 

Deja  la  domination  macedonienne 
appelle  la  Syrie  k  de  grandes  et  glo- 
neuses  destmees.  Alexandre,  vainqueur 
deTAsie,  m^ite  la  conqudtedu  monde, 

t*j  iVoMf m  trnperium  Syrif  nondum  belH 
<wi<6iis  domiti  aspemabantur  ;  ted  celeriter, 
^^i ,  obedienter  imperata  fecerunt.  >  Qufot. 

,y*)  Uban.,  Or.  IK  t.  I  op.  p.  296  et  2»7. 
M-RcBke.  ~  Halal.  Chron.,  p.  302.  Cites  par 
SaioteH^nnx,  p.  4o6. 


et  place  sur  la  rive  droite  de  TEuphrate 
le  centre  de  ses  prodigieuses  entreprises. 

«  Les  moyens  ne  Tembarrassaient  pas; 
il  n'avait  besoin  que  de  vivre.  On  ne 
peut  douter  de  ses  projets,  puisquMls 
se  trouverent  consign6s  dans  ses  pro- 
pres  Memoires.  Ephippus  d'Olynthe  de- 
vait  en  avoir  eu  connaissance;  etc*est 
Vraisemblablement  dans  son  ouvrage 
que  DiodoredeSicile  les  apuiscs.  Perdio- 
eas  fit  lecture  aux  Mac^aoniens  assem- 
bles des  principaux  articles  de  ces  Me- 
moires  (*)..D*abordil  s'agissait  defaire 
construire  enSvrie,  en  Cilicie  et  dans  Tile 
de  Cypre,  mille  vaisseaux  longs,  plus 
forts  que  les  triremes^  destines  a  por- 
ter la  guerre  chez  les  Carthaginois  et 
les  peuples  de  la  Numidie ,  jusqu'aux 
-colonnes  d'Hercule  (**)•  Les  Macedo- 
niens  applaudirent  beaucoup  k  ces  vas- 
tes  desseins;  mais  ils  jugerent  qu*il  leur 
6tait  impossible  de  reinplir  5  cet  ^gard 
les  vues  d'Alexandre  (***).  » 

D'autres  projets  nioins  ambitieut 
avaient  deja  recu  un  commencement 
d'ex^cution. 

c  La  d6couverte  des  cdtes  de  la  mer 
Caspienne  ^tait  un  de  ceux  que  le  roi 
avait  le  plus  a  coeur.  II  ordonna  d  He- 
raclide'  de  faire  couper  des  bois  dans 
les  forfits  d'Hyrcanie,  pour  construire 
des  navires  longs,  les  uns  pontes,  les 
autres  sans  pont ,  destines  a  cette  pre- 
miere decouverte  (•***).  Les  preparatifs 
pour  la  seconde  se  Qrent  a  Thapsaaue ; 
on  devait  y  transporter  tous  les  Dois 
coupes  sur  le  mont  Liban,  aUn  d'y 
^uiper  neuf  cents  spptir^mes ;  et  les 
rois  de  Cypre  avaient  ordre  de  les  four- 
nlrde  fer,  de  voiles etde  cordages  (***•*;, 
Tous  ces  details,  que  nous  devons  a 

(*)  ''Hv  &  Tfiiv  (mop.v7iiiaTu>v  Tot  piyioTa  xal 
Mrc  (55ta  T(4«e,   elc.  Diod.SIc,  XVII,  4. 

(**)  Ip9€t  animo  fnjlnita  complextu ,  siO' 
hierat  omni  ad  Orientem  maritima  regione 
perdomita ,  ex  Syria  petere  Mticamf  Cortha- 
gini  infenaus  :  tnde,  ISumiauB  solUudinibus 
peragralis,  cunum  Gadet  dmaere,  HupanioM 
deinde  adire,  et  pralervehi  ^Ipes,  liatias^ue 
Oram,  unde  in  Epirum  brevif  cunut  esL  Quint. 
Cor  ,  X,  I. 

(•**)  Salnte-Crolx,p.  481. 

(•*•*)  Arrien,  VII,  16. 

(•***•)  MaUrtain  Libanotnonie  ccnaydevector 
que  ad  urbem  Syriw  Thapgacum ,  ingentium 
carina*  naviumponere^  septiremes  omnes  eiuc, 
deducique  liabulonem.  Cypriurum  regibuM 
imperalum ,  ut  tes  tluppamque  et  vela  prm- 
l^erenL  qainU  Cur.,X,I. 


98 


L'UNIVERS. 


Quinte-Curce,  ont  ete  vivement  criti- 
ques; il  a  para  inconcevable  au'on  ait 
imaging  de  faire  descendre  a  aes  septi- 
remes  TEuphrate,  qui  est  une  riviere 
tortueuse,  ordinairement  peu  profonde 
et  charriant  beaucoup  de  sable  (*).  £lle 
avait  trois  cents  toises  de  large  a  Thap* 
saque  (**) ,  et  si  peu  de  profondeur  que 
les  Dix  mille  la  passerent  en  cet  endroit 
n*ayant  de  Teau  aue  jusque  sous  les 
bras  (***).  Alexandre  meme  la  trouva 
gu^able  au  milieu ,  lorsqu'ii  la  traversa 
pour  entrer  dans  la  M^potamie  (****]/ 
Au-dessus ,  vers  TArm^nle ,  on  n*y  navi- 
guait  au'avec  des  canots  d'ecorce  (*****) ; 
et  au-clessous,  avecdes  bateaux  de  troncs 
de  saule,  converts  ext^rieurement  de 
peaux  (******).  Enfln,  le  cours  de  I'Eu- 

f>hrate  ayant  plus  de  trois  cents  grandes 
ieues,  depuis  Thapsaque  jusqu'a  son  em- 
bouchure, qu* Alexandre  venait  de  rou- 
vrir,  nepassa  jamais  pour  ^trefaciiement 
navigable.  Comment  done  ce  prince 
aurait-il  pu  concevoir  ie  dessein  d'^ta- 
blir  le  cbantier  de  sa  marine  sur  un  pa- 
reil  fleuve  et  a  une  si  grande  distance 
de  la  mer?  11  avait  sans  doute  compte 
sur  les  crues  d'eau  qui  arrivaient  a  la 
fonte  des  neiges  et  faisaient  deborder 
TEuphrate (***♦•**).  Si  degros  bdtimenU 

Eouvaient  ^tre  alors  mis  a  flot,  il  etait 
ien  hasardeux  de  les  faire  naviguer  sur 
ce  fleuve,  pendant  un  si  long  trajet. 
D'ailleurs ,  quelque  idee  qu'on  sc  fasse 
des  seotiremes ,  elles  tiraient  trop  d*eau 

f)Our  descendre  de  Thapsaque  k  Baby- 
one.  Suivant  Aristobule,  ce  fut  en 
cette  derniere  ville  quese  rendit  la  flotte 
de  N^iirque,  ou  se  trouvaient  deux  pen- 
tir^mes,  trois  quatririmes,  douze  tri- 
remes et  trente  bdtiments  a  trente 
rames.  lis  avaient  €l6  transport's  en 
pieces  et  h  dos  de  chameaux ,  de  Pii'ni- 
cle  a  Thapsaque,  d  ou,  apres  avoir  6t6 
assembles ,  ils  navigu^rent  jusqu'a  Ba- 
bjlone  (********).Cette petite  flotte,  s^n8 
aucunchargement,  et  h  la'faveur  des 

(*)  Deslandea ,  Bisai  sur  la  Marine  des  an- 
ciensy  p.  86. 
(")  D'Anvillc,  rir«pArote  et  le  Tigre ,  p.  44. 

(•••*)  Arrlen,  111,7. 
.    ^••♦•»j  jfji  ,'rf  naves  codicarke  occulta  per 
kyemctn  fabricala:    aderant,    Sallust.  But, 
/mf/m. ,  !.  IV. 

("•*•*)  H^rod.,  M94. 

('*•••••) Strnb.,  XV,p.60».-  Arrlcn,  YII,  67* 

(•••*•*»•)  Aristob,  ap,  Arrian.,  \U,  19. 


crues  p^iodiques  d*eatt,  a  pu  arriver  a  si 
destination,  mais  non  sans  des  peines 
infioies,  et  sans  beaucoup  d'avaries. 
G*est  vraisemblablement  ce  qui  engagea 
Alexandre  a  en  construire  uoe  autre 
avec  des  cypres,  dont  il  y  avait  une 
quantity  considerable  en  Aasyrie.  II  fit 
bdtir,  non  loin  de  Babylone,  un  araeual 
maritime ,  et  creuser  un  port  capable  de 
contenir  mille  vaisseaux.  Tous  les  oo- 
vriers ,  matelots  et  p^heurs  de  la  coo- 
tree  furent  rassembles,  et  il  envoya 
Miccale,  de  Clazomene,  en  Syrie  et  en 
Phenicie  (*),  avec  cinq  cents  talents, 
pour  y  enroler  tous  les  ^ens  de  mer  qu*fl 
pourrait  engager  a  le  suivre  (**).  >  Ainsi 
la  face  du  nionde  va  changer  eous  la 
main  d* Alexandre.  L'lnde  s^unira  par 
TEuphrate  a  TAsie  Mineure  (***);  TAsie 
toucnera  aux  colonnes  d'Hercuie,  el 
bientdt  le  soleil ,  en  parcourant  sa  car- 
riere ,  ne  verra  plus  les  homes  de  la 
domination  macedonienue.  D^a  PAsie 
adore  le  Ills  de  Jupiter  Ammon ;  d^ 
la  Gr^e  m^me,  par  la  main  des  Thdores, 


Py 


,  ,  Arrlcn,  Vll ,  19. 
•*)  Salntc-Crolx,  p.  484-486. 
(***)  I  Alexandre  forma  le  deiaein  d*oiiir  les 
lodes  avec  TOocideot  par  un  ooromeroe  mad* 
time,  comme  il  les  avait  ante  par  des  coJonies 
qu*il  avait  etahlles  daos  les  terres. 

«  A  peine  fut-ll  arrive  des  Indes  qu*n  at 
oooslraire  de  nouvelles  flotles ,  et  navlgua  aw 
TEuleos ,  le  Tigre,  rEuphrate ,  et  la  mer.  U  61a 
les  cataractes  que  les  Perses  avaient  mlaes  sor 
oes  fleuves;  11  d^oouvrit  que  le  sein  PeniqiM 
<^tait  on  golfe  de  rooeao.  Gomme  il  alia  re- 
ooDoaltre  oette  mer,  ainsi  qu*il  avait  rrooom 
cetle  des  Indes  ;  comme  11  lit  construire  oo 
port  k  Babylone  pour  mtlle  vaissseaux  et  des 
arsenaux;  comme  il  envoya  doq  cents  laieols 
en  Syrle  et  en  Ph^ntcle ,  pour  en  faire  veoir 
des  nautoniers,  qoMl  voulalt  placer  dans  les 
colonies  quMl  r^pandait  sur  les  c6les;  oomme, 
enfln,  11  tit  des  tnivaax  immenses  sur  i*Eii- 
phrate  et  les  aytres  (jleuves  de  TAssyrie ,  on  na 
peut  douter  que  son  dessein  ne  fdfde  faire  le 
commerce  des  lodes  par  Babylone  et  le  goUe 
Arabique. 

«  Apres  Alexandre,  les  rois  de  Syrie  laiss^ 
rent  a  ceux  d*£gypte  le  commerce  meridional 
des  Indes,  et  ne  s'aitach^rent  qu*ik  ce  oommeroe 
septentrional  qui  se  falsait  par  l*Oxus  et  la 
mer  Caspieone.  Seleucus  et  Antiochos  eurent 
une  attention  partlculiftre  k  la  reooonaftre  : 
ils  7  entretinrent  desflottes.  Ce  queS^leacus 
reoonnut  fut  appele  mer  S^leudde;  oe  qu'An- 
tiochus  decouvrit  fut  appei^  mer  Antiodiide. 

«  LA  commerce  par  rOxus  et  la  mer  Caspieone 
reQUt  de  nouvelles  facility  par  I'^blissement 
des  colonies  mac^doniennes ;  les  marchandlset 
des  provinces  plus  septentrlonales  de  rimfo 
etaient  port^  depuis  S^ra,  la  lour  de  Pierre  ci 
autres  stapes  Jusqu'&  TEuphrale.  >  Montes- 
quieu ,  Esprit  des  lois,  Uv.  XXI ,  ch.  8  ,  9,  16, 


SYRIE  ANCrfcNNE. 


i& 


le  dieu  de  h  terre  (*)•  Mais 
cedieo  n^est  qu'on  dieu  mortel.  ^.puis^ 
de  debauches,  empoisonn^  peut-etre^ 
Alexandre  meart  a  Babylonef*)(824). 

P41TA6B  DSS  PR0yi!«GE8  APB^S 
LAHOIT  d'ALBXANDBB;  LAOMEDO!f 
GOIIVKBHBUB  BB  LA   SYRIE.  ~  On  8 

dit  qu'a  ses  derniers  instants ,  le  coq- 
qficrant  iDacedooien  voulut  opposer  ua 
obstacle  aux  ambitieux  qui  devaient 
troubler  et  dMiirer  son  vaste  empire ; 
et  paisme ,  aupres  de  lui ,  tnkne  dans 
sa  famille ,  il  ne  voyait  personne  qui 
pdt  maintenir  cette  alliance  entre  TEu- 
rope  et  TAsie  qui  avait  6te  Tobiet  de 
Iras  ses  T^ves  et  de  tons  ses  efforts , 
qi*il  essaya  de  pr^venir,  au  moins  en 
pertie,  nne  dissolution  violente,  en 
eretnt  qoatre  ro^aumes  au  proflt  de 
eeux  an'il  arait  Initio  k  ses  projets  et 
qui,  fNus  que  les  autres,  devaient  parta- 
ker ses  gjrandes  id6es.  Est-il  done  vrai 
S* Alexandre,  sur  son  lit  de  mort ,  ait 
t  on  testament  ?  La  r^olution  qui 
i'aecoroplit,  sous  les  murs  de  Babyione, 
ao  moment  tokne  oik  il  venait  d'ex* 
pirer,  serable  attester  qu'il  ne  put  ou 
oe  voulut  point  r^ler  poor  I  avenir 
les  afiaires  de  son  empire.  11  ne  pro« 
Bonqa ,  avant  de  mourir  qu'un  mot :  Au 
pbu  diqne  !  II  s'6tait  tourn^,  il  est  vrai, 
vers  Perdiecas;  mais  chaque  g^n^ral, 
dans  son  orgudi,  pouvait  croire  que  ce 
motltti  aait  adresse  (*^*). 

Lessoldats,  comme  on  ie  salt,  par  un 
sentiment  de  reconnaissance  et  d'ad- 
mirattoa ,  proclamerent  rois  le  fiis  et 
le  frere  d* Alexandre.  Perdiecas,  qui  ue 
se  croyaJt  pas  encore  assez  fort  pour 
domi'oerses  aneiens  compagnons  d*ar- 

J^)  Avroi  TE  iaTC90cvc&uiyoi  *A>£^x^ci)  npo- 

•$UB«v,  xflu  ivtcf^vouv  auxdv  atssdcvoic  XP^'^^C, 

6(  kaopot  a^Oev  i;  xiiAi^  6«ou  A^iYpivot.  Ar- 

riai,vn,  23. 

(**)  Le  28  da  molft  dcesias  ( htotoinboeoo.) 

(***)  O  ne  fat  que  plus  tard,  k  une  ^poque 

ie  decadenoe,  ^era  le  temps  de  la  conqoftte 

que  les   rols  aaatiqoet,  pour  se 


fnadir  peot-Mre,  imagio^reot  un  testaoK^Dt 
trAleiandre.    lis  pt^teodirent  que  leun  an- 
cMics  ^laieiil  devenus  rois ,  oon  par  la  force  des 
s,  mais  par  aoe  sueeessioo  hggale ,  si  nous 


IWVOQS  nous  aenrlr  de  ce  mot ,  c*esUii-dire  en 
vcfto  des  dispositions  dn  testament  dont  nous 
Mas.  On  a  beaoooup  dlscot^  sur  oe  point. 
voyeiDioysen,  qui  a  rtani  tons  les  textes  et 
JKSciles  opiolons,  dans  an  excellent-ouvrage 


MihiK :  GeMehiehte  des  UelleMitmiu .  t.  I ,  p. 
M,<PjBtfnd.  3;  Hamboorg,  18K. 


mes ,  avait  encourage  et  dirig^  peut- 
6tre  ce  roouvement  militaire.  II  gagna 
alors  le  titre  de  tuteur  et  de  regent,  qui 
sembla  le  mettre  au-dessus  des  autres 
g^neraux. 

fiientdt  il  fallut  pourvoir  a  toutes  les 
ambitions ;  et  on  partagea  les  provinces 
entre  les  chefs  les  plus  influents  et  les 
plus  danffereux.  Dans  ce  partake,  Lao- 
m^on  obtint  la  Syrie.  Celui-ci  n^^tait , 
par  son  titre ,  que  le  delegue  des  deux 
rois  proclames  par  les  soldats ;  mais  lui, 
comme  les  autres  gouverneurs ,  n*avait 
quitt^  Tarmee  que  dans  rintention  de 
se  cr6er  une  position  ind^pendante. 
Tout  nous  porte  a  croire  que  ne  ren- 
contrant ,  pour  obstacle ,  que  la  volonte 
impuissante  de  Perdiecas  ,  il  eut ,  sur 
la  Syrie ,  un  pouvoir  ^gal  h  celui  des 
aneiens  chefs  nationaux  ou  des  rois 
assyriens ,  chald6ens  et  perses  qui,  tour 
a  tour ,  avaient  domine  T Asie. 

Quand  Perdiecas  mourut,  Pithon 
accepta  la  tutelle  des  rois;  puis, II  s'en 
demit.  Antipater  lui  succeda.  On  (it 
alors ,  a  Trisparadis ,  en  Syrie ,  un  nou- 
veau  partage  des  provinces  ( 320 ).  Ce 
fut  5  la  suite  de  ce  partage  que  Ptole- 
mde ,  le  premier  des  Lagides ,  essaya  de 
depouiller  Laomedon. 

II  attaqua  les  villes  maritimes  avec 
sa  flotte,  et  envoya  dans  Tinterieur  du 
pays  une  arm^e  command^epar  Nicanor. 
Avecces  forces  r6unies,  il  soumit  toute 
la  rive  droite  de  TEuphrate  (*)  :  mais  il 
ne  prit  aucune  mesure  pour  assurer 
sa  conqu^te .  Antigone  envahit  ia  Sy- 
rie (315) ,  et  la  trouva  sans  defense  :  les 
vaisseaux  de  guerre  qui  mouillaient  sur 
les  cdtcs  s*etaient  retires  a  son  appro- 
che.  Antigone  s'empara  des  ports  et 
les  changea  en  vastes  chantiers  de  cons- 
truction. Attaqu6  par  Cassandre  (**),  il 
laissa  au  jeune  Demetrius ,  a  peine  !^g6 
de  vingt  ans,  le  soin  d'arr^ter  les  in  vasions 
de  Ptol^mee.  Le  roi  d'£gypte  profita  de 
r^loignement  d'Antigone  et  ae  Pinex- 
perience  de  son  flis.  II  fit  une  descente 
sur  les  c6tes  (313) ,  et  pilla  plusieurs 
villes  pen  importantes  (*  *).  Les  evene- 
ments  de  Tannic  suivante  eurent  uae 

(*)  Champollioo,  £gyple  (Uoiv.  pltiores- 
que),  p.  893,  a, 

(**}  Cliampolllon,  ibid.^  p.  ?95. 

(**•;  W.,  fftirf.,  p.  896,  a,  b.  -  Voy.  aussi  Dio- 
dore  de  SIcile  el  Plutarque,  dans  la  Pie  de  Oc-^ 
metrlus. 


to 


LTJNIVERS. 


influence  d^isive  sur  le  sort  des  pays 
en  de^a  de  l^Euphrate.  L'occupation 
d'une  partie  de  la  Syrie  par  les  6gyp- 
tiens  (312)  permit  a  Ptol^m^ede  secourir 
S(6leucus.  C<^lui-ci,  avec  treize  cents  hom- 
mes,  s*empara  de  Babyloae.  C'est  ici  que 
commence  Fere  des  S6leucides  (*).  tia 
presage  beureux  annon^a  la  grandeur  fu- 
ture du  nouvel  empire.  L'armee  trouva, 
sous  une  roche,  pres  des  bords  de  TEu- 
phrate ,  une  ancre  enfouie.  Ce.tte  ancre, 
signe  de  force  et  de  stabilite,  resta  consa- 
cr^e  par  les  traditions  {**). 

Tandis  que  Tbeureux  Seieucus  s'^ta- 
blissait  dans  les  provinces  babylonien- 
nes,  Ptol6m6e  avait  a  combattre'les  for- 
ces reunies  d* Antigone  et  de  son  fits, 
et  perdait  toutes  ses  conqu^tes.  Anti- 
gone, vainqueur,  fixa  sa  re^iidence  en 
Syrie,  etenvoya  Demetrius  en  Grece.  Le 
jeune  pripce  retablit  dans  Athenes  le 
gouvernement  de  la  multitude.  II  atta- 
qua  Cypre,  oil  commandait  Menelas, 
rrere  de  Ptolemee (***),  et  batlitia  flotte 
du  roi  d'^gypte.  En  m^me  temps ,  son 
p^re  arr^tait  sur  I'Euphrate  les  incur- 
sions des  Arabes.  Proclame  roi  par  les 
Syriens,  Demetrius  partaijea  le  pou- 
voir  avec  Antigone  (306).  Mais  ses  victoi- 
res  a vaient  excite  la  jalousie  des  vieuz 

§6n^raux  d* Alexandre.  Seieucus  qui,  peu 
e  temps  auparavant,  avait  battu  et  tu6 
Nicanor,  le  meilleur  general  d'Autigone, 
forma  centre  la  Syrie  une  redoutable 
coalition. 

C^tait  en  302.  Antigonie  s'elevait 
sur  les  bords  de  I'Oronte.  Des  jeux  so- 
lennels  avaient  attir^  une  multitude  d'e- 
trangers  qui ,  retenus  par  la  beaute  du 
pays  et  la  magnificence  de  la  ville,  s*6» 
tablissaient  avec  leurs  families  dans  la 
nouvellecapitale  (****).  Tout  a  coup  les 
fStes  cesserent.  L'arm^e  de  Lysimaque 
ayait  traverse  la  Pbrygie,  la  Lydle,  la 
Lycaonie,  toutes  les  provinces  au  dela  du 
M6andre ;  Ptolemee  menacait  la  frontiere 
de  Coel^syrie.  II  etait  temps  de  sortir  du 

(*)  BabyloDe  fat  prise  en  8ii.  Cestdono  h 
raotomne  de  eette  annee ,  et  non  eo  3i3,  qu'll 
faul  placer  le  oofDmencement  de  l*^re  des  Selea- 
ddei.  Voy.  Saint  Martin ,  ^i"<;r.  unit;.,  art.  5^- 
leucus ,  torn.  XLI ,  p.  508 ,  nole. 

(**)  Seieucus  prit  pour  armes  une  ancre  de 
navire. 
.  (*'•) Champolllon,  igypie,  p.  898,  a,  6;  899, 400. 

(•*••)  Justb,  XV.  4.  -  tiiod.,  iiv,  xi.  - 
Platarq.,  fie  de  Demetrius, 


repos;  Antigone  quitta  la  viUe  ^u'll  iM 
devait  plus  revoir ,  et  partit  arec  oent 
mille  bommes.  11  esp6rait  arr^ter ,  dana 
les  plainesde  Pbrygie,  Lysimaque  et  Se- 
ieucus ;  roais  Ipsus  d^cida  la  querelle. 
Seieucus,  vainqueur,  s'empara  de  toute 
la  rive  droite  de  TCupbrate  (*). 

CHAPITRE  IV. 

BOYADKE  PB  SYBIS;    aEANDBUm    DS 
L*BMP1RB  DBS  SB{iBUCI]>B8. 

Seieucus  fonda  en  Syrie  la  capitale  de 
son  empire,  et  lui  donna  le  nom  de  eon 
p^re,  Antiochus  (**).  Antioche»  moaa* 
mentd'une  grandeur  jalouse,  ne  devait 
pas  supporter  de  rivale.  Antigonie  fat 
renversee  et  demolie;  ses  habitants,  Ma- 
cedoniens  ou  Ath^niens,  au  nombre  de 
cinq  mille  trois  cents  bommes,  eniporte- 
rent  eux-m^mes  les  pierres,  les  poutres, 
tous  les  materiaux,  et  des  ruines  de  leurs 
maisons  ^levereut  Torgueilleuse   capi- 
tale. Suivant  quelques  auteurs ,  ils  troo* 
v^rent  un  asile  dans  S6leueie.  Cette  ville 
nouvelle  ^tait  unedesquaire  scBurs  fon- 
dees  par  Seieucus^  Antioche,  S6leucie, 
Apam^,  Laodic6e,  portaient  en  effet  la 
nom  de  sceurs.  Ce  titre  leur  est  conserve 
sur  les  m^ailles  C^*).  Leurs  habitaats 
jouissaient  tous  des  nidmes  droits ,  sans 
distinction  de  race  ou  de  religion.  Les 
Juifs ,  profitant  des  bienfaits  de  Tegalit^ 
appQrterent,  dans  ces  villes,  leurs  ri- 
chesses  et  leur  esprit  commercial.  Elles 
aequirent  bientot  un  d^veioppement  si 
complet,  Antioche  surtout,  queduraot 
les  siecles  de  la  domination  roniaine, 
rhistoire  de  Syrie  se  renferme  pres^ue 
tout  eutiere  dans  Tbistoire  de  ces  cit^ 
florissantes. 

Seieucus  jouissait  en  paix  de  ses  con* 
quotes.  II  n  etait  pas  eepeudant  sans  in- 
quietude, et  s'et'ror^ait  de  menager  le 
ressentiment  de  D6metrius,  fils  d*Anti- 

(*)  Voy.,  rar  les  rapports  de  la  Syrie  svce 
I'Egyptn  au  temps  d'Antiffone,  one  trea-savaiiM 
monographic  de  M.  R.  Geier,  qoi  est  inUtulte : 
de  Pwemai  Lagida  vita  et  commentariorum 
fragmeniiscommentatuh  Halts  Saxooum,  I8S8; 
in-i\  Nous  renvoyons  specialemeot  nos  ledeur* 
aux  pages  38  el  suiv. 

(**)  Seton  St^atmn  i  le  Dom  de  son  fits ,  d^a- 
pres  Malala.  Voyez,  sar  la  fondatlon  d'AtiUo* 
Qhe,  Liban.,  p.  349.  —  Malala,  p.  SOI.  —Diod.. 
XX,  48.  —  Dion  Cass.,  «L,  29. 

(***)  EckheU  III,  p.  60. 


I    I 

\  \ 

z    'i  1 
12; 


< 


>•     II 

CO        ■ 


i  ! 


SYRIE  ANCIENNE. 


31 


me.  U  lui  demanda  la  maiade  sa  fille, 
SIratODice  (299). 

D^iD^trius  re^ut  eD  Gr^e  les  envojrds 
da  roi  de  Syrie ;  il  mit  sa  flotteli  la  voile, 
et  rassenibla  toutes  ses  forces  militaires. 
Avec  ce  cortege ,  il  conduisit  sa  fllle  en 
Orient.  Apres  avoir  quelque  temps  lon^^ 
la  cote  de  Cilicie,  il  descendit  ses  troupes 
a  terre,  etd^ola  le  pays  parune  rapide 
incursion.  Gette  province ,  enlevee  a  An- 
tigone, ^tait  tomb^  en  partage  a  Piis- 
tarque;  mais  elle  ne  devait  pas  rester 
loD^temps   aux    mains  de  ce  general. 

Demetrius  ajourna  seuleroent  ses  pro- 
jets  dc  conqu^te ,  pour  cel^brer  h  Rhos- 
sus  runion  de  Seleucus  et  de  Stratonice. 
Quand  les  fStes  furent  terniinees,  il  re- 
prit  la  route  de  la  Cilicie,  et  s'empara  de 
tout  le  pays.  Seleucus  voulait  ^tendre  son 
empire  dans  TAsie  Mineure.  11  proposa  a 
son  beau-pere  de  lui  acheter  ia  Cilicie,  et 
r6clama  la  restitution  des  villes  dc  Sidon 
et  de  Tyr.  Demetrius  refusa ,  ot  se  mit 
en  mesure  de  defendre  ses  possessions. 
1/  ne  put  saiiver  la  Cilicie;  mais  il  ra- 
vagea  fa  Coelesyrie  :  contraint  de  quitter 
rOrient,  il  se  rejeta  sur  la  Maceaoine, 
et  s*en  rendit  maitre  (294).  II  repoussa 
heureusement  les  attaques  de  Lysima- 
que,  et  des  peuples  barbares,  cam  pes  sur 
les  frontieres.  La  Mac^oine  ne  sufGsait 
pas  a  sou  ambition.  En  290,  il  rfl^sembla 
cent  dfz  mille  hommes,  une  flotte  nom- 
breuse,  et  pari  it  contre  la  Syrie.  Pyr- 
Thus  profita  de  son  doignement  pour  ea- 
Tabir  la  Macedoine.  Rappel^  par  les  suc- 
ees  de  son  ennemi ,  Demetrius  rentra  en 
Europe,  li  u^avait  pas  renonc^  a  son 
entreprise.  II  remit  a  la  voile  pour  I'A- 
sk;  maJs,  sans  cesse  inquiete  par  les 
manoeuvres  de  Tarmee  thraee,  surpris 
par  Agathorle,  fils  de  Lysimaque,  il  n  au- 
rait  conserve ,  lorsquM  arriva  en  Cilicie , 
que  onze  mille  bommes.  Cetait  pour  Se- 
leucus le  moment  d^eeraser  son  ennemi : 
le  roi  de  Syrie,  avec  une  generosity,  ou 
feinte,ou  veritable, doima  Tordred^en- 
Toyer  a  Demetrius  d*abondantes  provi- 
tions.  Enfin «  ^clair^  pnr  les  plaintes  de 
•ea  sujets,  dont  Patrocle  se  fit  Tinter^ 
pr&te,  il  reconnut  le  danger,  et  changea 
tout  a  coup  de  politique.  Au  milit  u  de 
Hiivcr,  il  se  miten  marche  avec  des  forces 
eonsiderables.  Demetrius  reprit  Toffen- 
sive.Il  for^  les  defiles  du Taurus,  et  se 
Jeta  au  eoeur  de  la  Syrie.  Arr^t^  par  une 


maladie  de  quarante  jours ,  il  se  vit  aban- 
donn6  d'une  partie  de  ses  soldats.  Mais, 
tandis  que  les  Syriens,  sdrs  d'un  facile 
triomphe,  refusaient  les  secours  de  Ly- 
simaque,  il  se  releva  pour  tenter  un  coup 
de  desespoir.  II  voulait  surprendre  Se- 
leueus,  la  nuit,  au  milieu  de  son  camp, 
et  chercher  dans  cette  entreprise  t^m^- 
raire  la  mort  ou  Tempire.  Un  transfuge 
trahit  le  secret.  Seleucus,  averti,  mit  son 
armee  sous  les  armes.  II  fallut  s^abandon- 
ner  aux  chances  d'une  bataille  ran^^e. 
«  Le  lendemain,  a  la  pointe  du  jour, 
Seleucus  lui  ayant  pr^sent^  la  bataille, 
Demetrius  envoie  un  de  ses  capitaines 
commander  une  des  ailes  de  son  armee; 
et  chargeant  les  ennemis  h  la  t^te  de 
Tautre,  il  les  met  en  fu>te.  Seleucus, 
mettant  pied  a  terre  et  quittant  son  cas- 
que, va,  sans  autre  arme  que  son  bou- 
clier,  se  presenter  aux  soldats  mercenai- 
res  de  Demetrius,  eties  exhorte  k  passer 
dans  son  arm^e,  en  les  assurant  que 
c*est  pour  menager  leur  sang,  et  non 
pour  epargner  Demetrius ,  quit  a  diff^r^ 
si  longtemps  le  combat.  A  1  instant  ils  le 
saluent  tons,  le  proclament  leur  roi,  et 
se  rangent  sous  ses  drapeaux.  Deme- 
trius, quoiau'il  senttt  que  ce  dernier  re- 
vers  etait  plus  terrible  que  tons  les  pre- 
cedents, \ oulut  tenter  encore  de  s'en  re- 
lever;  11  s'enfuit  a  Ira  vers  les  portes 
Amaniques;  et,  suivi  d'un  petit nombre 
d^amis  et  d'officiers,  il  gagna  un  bois 
epais,  ob  il  passa  la  nuit,  dansle  dessein, 
s  il  lui  etait  possible,  de  prendre  le  che- 
min  de  la  ville  de  Cnune ,  et  de  descendre 
au  bold  de  la  mer,  ou  il  esperait  trouver 
sa  flotte.  Mais,  quand  il  eut  su  qu'il  n*a- 
vait  pas  de  vivres  pour  la  journee,  il  vit 
qu'il  fallait  son^zer  a  d^autres  moyens. 
Duns  ce  moment,  arrive  un  de  ses  amis 
nomme  Sosigenes,  avec  quatre  cents 
pieces  d*or  qu^ii  avait  dans  sa  ceinture. 
Esperant  pouvoir,  avec  ce  secours,  se 
rendre  jusqu'a  la  mer,  ils  s'acheminent, 
M*entree  de  la  nuit,  vers  les  passages  des 
montngnes.  Mais  les  feux  que  les  ennemis 
y  avaient  allum^s,  leur  otant  touteesp6- 
rance  de  pouvoir  tenirce  chemin,  ils  re- 
viennent  au  lieu  qu'ils  avaient  quitte,  en 
nombre  moindre  quails  n*en  etaient  par- 
tis; car  plusieurs  de  ceux  qui  le  suivaient 
avaient  oris  la  fuite;  et  ceux  qui  etaient 
restes  n  avaient  plus  le  m^me  courage. 
La,  quelqu'un  ayant  ose  dire  qu'ii  fallait 


M 


LtJNIVERS. 


se  rendi  e  a  S^leucus ,  b^m^trius  tira  son 
^pee;  et  il  allait  8*en  percer,  si  les  amis 
qui  Tenvironnaient  ne  Ten  eusseot  em- 
p^che.  l^tant  parveno  enfin  a  lui  fdirere- 
cevoir  quelque  consolation ,  et  a  lui  per- 
suader de  prendre  ce  parti,  11  envoya  vers 
Seleucus  pour  iui  dire  qu*il  se  reinettait 
entierement  a  sa  discretion. 

« Quand  S61eucus  eut  recu  son  envoys, 
il  dit  a  ses  courtisans  :  «  Ce  n'est  pas  la 
«  bonne  fortune  de  Demetrius  qui  le 
«  sauve,  c*est  la  mienne,  qui  ajoute  a  tant 
«  d*autres  faveurs,  celle  de  montrer  d  son 
«  ^gard  ma  douceur  et  mon  humanite.  • 
En  m^me  temps  il  appelle  les  officiersde 
sa  maison ,  leur  ordonne  de  dresser  une 
tente  digne  d*un  roi,  et  de  tout  preparer 
pour  faire  a  D^m^trius  la  reception  la 
plus  niasnifique.  Seleucus  avait  alors  au- 
pres  de  lui  un  ancien  ami  de  Demetrius, 
Domme  Apollonides ;  ce  fut  lui  qu*il  choi- 
sit  pour  renvoyer  a  Fheure  meme  vers 
ce  prince,  afin  de  lui  inspirer  plus  de 
confiance  de  venir  trouver  un  parent  et 
un  gendre  qui  serait  charm^  de  le  rece- 
Tolr.  Lorsque  les  courtisans  eurent  con- 
nu  ces  sentiments  de  leur  roi  pour  D^- 
m^trius ,  quelques-uns,  d'abora  en  petit 
nombre,  ensuite  la  plupart  desamis  m^- 
me  de  iS^leucus,  allerent  sur-le-cham|) 
au-devant  de  D6m^trius  :  c*^tait  k  qui 
montrerait  le  plus  de  z^le  et  arriverait 
le  premier  aupres  de  ce  prince ,  qu'ils 
s'attendaient  a  voir  dans  un  grand  credit 
a  la  cour  de  Seleucus.  Get  empressement 
changea  bient6t  en  jalousie  la  com[)as- 
sion  que  ses  malheurs  avaient  d*abord  ins- 
pir6e ;  les  courtisans  en  vieux  et  mechants 
en  prirent  occasion  de  d6toufner  et  de 
rendreinutilesles  dispositions  favorables 
du  roi ,  en  lui  faisant  craindre  qu'aus- 
sitdt  que  D^m^trius  serait  arrive ,  il  ne 
vtt  dans  son  camp  des  mouvements  s6- 
ditieux  et  des  nouveaut^s  dangereuses. 
Apollonides  ^tait  arriv6  plein  de  joie  au- 
pres de  Demi^trius;  et  ceux  qui  Tavaient 
suivi,  survenant  Tun  apres  Tautre ,  por- 
taient  a  ce  prince  les  paroles  les  plus  flat- 
teuses  de  la  part  de  Seleucus.  Deja  De- 
metrius, qui  m^me,  apres  un  revers  si 
affreux ,  avait  regard^  comme  la  d-mar- 
che la  plus  honteuse  de  s'^tre  ainsi  livr- 
lui-m^me,  se  repentait  de  la  repugnance 

3u1l  avait  t6moign6e;  il  ne  doutait  pas 
e  la  bonne  foi  de  S-leucus,  et  s*abandoii- 
nait  aux  plus  douces  esp-rances. 


I 


«  Mais  tout  a  coup  on  volt  arriter  i*au- 
sanias  avec  un  corps  d'environ  mille 
hommes,  tant  fantassins  que  cavaliers « 
qui ,  environnant  Demetrius,  et  -cartant 
tous  ceux  qui  ^taient  autour  de  lui,  con- 
duit ce  prince  non  a  S<^leucus^  raais  dans 
la  Chersonese  deSyrie (*).  » 

Enferme  dans  un  chateau  royal ,  non 
loin  de  Laodic^^ ,  Demetrius  niourut, 
apr^  trois  ans  de  captivity  :  il  ne  vit 
pas  le  singulier  destin  de  sa  (ille  Stra- 
tonice,  femme  de  Seleucus,  et  runion 
d'Antiochus  avec  Sa  belle-m^re. 

«  Antiochus  tomba  dans  une  maladie 
de  langueur  dont  les  m-decins  ne  pou- 
vaientdecouvrir  la  cause,  et  qui,  par  cette 
raison,  paraissaitsans  remeae  etne  lais- 
salt  aucune  esperance.  On  pent  juger  de 
la  douieur  d'un  pere  qui  se  voyait  pres 
de  perdre  un  flis  dans  la  fleur  de  son 
dge,  qu'il  destinait  pour  lui  succeder 
dans  ses  vastes  £tats,  et  qui  faisait  toute 
la  douceur  de  sa  vie.  Erasistrate ,  Tun 
des  medecins,  plus  attentif  et  plus  ha- 
bile que  tous  les  autres,  ayant  examine 
avecsoin  et  suivi  de  pres  tous  les  symp- 
tdmes  de  la  maladie  dujeune  prince, 
crut  enGn ,  par  tout  ce  qu*il  avait  remar- 
que ,  ^tre  veriu  a  bout  a'en  decouvrir  la 
vraie  cause.  II  jugeaque  son  mal  n'etait 
qu'un  effet  de  I'amour ;  et  il  ne  se  trom- 
pait  pas ;  mais  il  n*etait  pas  si  ais-  de  de- 
couvrir Tobjet  qui  causait  une  passion 
d'autant  plus  violente,  qu'elle  demeurait 
secrete.  Voulant  done  s*en  assurer,  il 
pnssait  les  journ-es  entieres  dans  la 
chambredu  malade;  et,  quand  il  y  en- 
trait  quelque  femme,  il  observait  attenti- ; 
vement  ce  qui  se  passaitsur  le  visage  diij 
prince.  II  remarqua  que,  par  rapport 
a  toutes  les  autres ,  il  etaittoujours  dans 
une  position  egale;  miiis  toutes  les  foL 
que  Stratonice  entrait  ou  seule  ou  avei 
le  roi  son  mari ,  le  jeune  prince  ne  man 
quait  pas  de  tomber  dans  tous  les  acci 
dents  que  decrit  Sapho,  dit  Plutarque 
et  qui  d-signent  une  passion  violente 
extmction  de  voix ,  rongeur  enflamme< 
nuageconfus  repandusurles  yeux,snei 
froide,  grande  in^alite  et  d-sordre  sei 
sible  dans  le  pouls,  et  d*autres  sympt^ 
mes  pareils.  Quand  le  medecin  se  trou 
seul  avec  son  malade,  il  sut,  par  des  ii 
terrogations  adroites,  tourner  si  bi< 

(*)  Plutaraae,  Fie  de  Demefr.,  di.  68, 69 , 1 
traduction  de  Ricard. 


STRIE  ANCIENNE. 


sa 


too  esprit,  qa*il  tira  de  loi  son  secret. 
Aiktio^os  SToua  qoMI  aimait  la  reine 
Stnrtooice,  sa  beile-mere;  qu'il  avait 
,£iit  tous  ses  efforts  pour  raincre  sa  pas- 
am,  mais  toujoors  inntileineDt ;  qu'ii 
i*c(ait  diteent  fofs  tout  ce  qu'on  poavait 
hri  representer  dans  une  telle  oon- 
jopctore,  le  respect  pour  un  p^re  et  un 
roi  dont  il  6tart  tendrement  aimd ,  la 
lionted*une  passion  illicite  et  contraire 
k  toates  les  r^les  de  la  biens^nce  et  de 
rhono<tet6,la  folfe  d'un  dessein  qu*il  oe 
poufalt  et  ne  devait  jamais  vouioir 
iatisftire;  mais  que  sa  raison,  6garee 
eloocQp^ed^unseul  dessein,  n'ecoutait 
rieo :  qoe  poor  se  punir  d*un  d^ir  invo- 
kntaire  en  an  sens,  mais  toujours  eri- 
minel,  il  avait  r^la  de  se  laisser  mou- 
rir  pea  a  pea ,  en  negligeant  le  soin  de 
son  corps ,  et  en  s'abatenant  de  prendre 
delaoQunitore. 

« C^tait  beaoooap  que  d^avoir  p^n^tr^ 
josqQ*a  la  source  da  mal ;  mais  le  plus 
dffnnle  reslait  a  iaire,  qui  ^tait  d'y  ap- 
porter  le  remede.  Comment  faire  une 
telle  proposition  k  an  pere  et  a  un  roi  ?  Ia 
pramierefoisque  Seleucus  demanda  com- 
ment se  portait  son  fils,  £rasistrate  lui 
r^dit  ooe  son  maletait  sans  remede, 
pireeqo1loaissaitd*une  passion  secrete, 
qui  n*ea  avait  point ,  aimant  une  femme 
9u*il  ne  pouvait  aToir.  Le  pere,  surpris 
et  afllige  de  cette  r^ponse,  demanda 
poarqooi  il  ne  poayait  avoir  la  femme 

?i'il  aimait.  ■  Paree  que,  dit  le  m^ecin, 
ettlamienne,  et  que  je  ne  la  lui  donne« 
nd  pa&.  —  Yous  ne  la  cederez  pas,  repar- 
tit  le  friBoe,pour  aauver  la  vie  k  un  fils 
9»^rmmea  tendrement!  Est-ce  111  I'a- 
nitSqae  roua  avez  pour  moi  ?  —  Set- 
peor,  reprit  le  m^ecin ,  mettez-vous  h 
ma  place :  lui  e^deries-vous  Stratonice  ? 
Kt  si  Yous,  qui  ^tes  p^re,  ne  consen- 
tiez  pas  ft  le  mire  pour  an  fils  qui  tous 
est  SI  Cher,  comment  pouvez-vooscroire 

Si  on  autre  le  fasse?  —  Ah!  plflt  aux 
»i,  8*ecria  Seieucns,  que  la  guerison  de 
■on  fils  ne  dependit  que  de  mon  consen- 
^sneat !  Je  lui  e^derais  de  tout  mon  cceur, 
gStratoniee,el  rempire  rodme.  —  Eh 
M,  dit  Erasistrate ,  fe  remede  est  entre 
^  mains :  e'est  Stratonice  qa*il  aime.  » 
^  pirenli^ta  pasun  moment,  et  obtint 
<>os  peine  le  oonaentement  de  son  ^pou- 
*.  lis  forent  oouronn^  roi  et  reine  de  la 
BOIeAsie.  Jalien  TApostat,  empereur 

«•  UvruUan.  (SYwi  ancibniis.) 


des  Remains,  marque,  dans  un  6crit 
qu^on  a  de  lui  (*},  qu'Antiochus  ne  voulut 
recevoir  Stratonice  pour  sa  femme  qu'a- 
pres  la  mort  de  son  p^re.  » 

Au  moment  ou  Seleucus  donnait  cette 
preuve  de  d^vouement  paternel ,  la  cour 
re^ut  deux  h6tes  royarix  :  Ptol^mee  Ce- 
raunus ,  (lesherite  par  son  p^re  Ptolemee 
Soter,  trahi  par  Lysimaque ,  roi  de  Ma- 
c^oine,  vint  chercher  un  asileen  Syrie. 
II  amenait  avec  lui  sa  soeur  Lysandra , 
femme  d'Agathocle,  fils  a!n6  de  Lysi- 
maque. Les  deux  fugitlfs, encourages  par 
Taccueil  bien  veil  Ian  t  de  Seleucus ,  exci- 
t^rent  le  vieux  r^i  contre  la  Mac^doine  et 
r£gypte.  Seleucus ,  alors  dg^  de  soixan- 
te-treize  ans,  abdiqua  en  faveur  d'Antio- 
cbus,  et  declara  la  guerre  a  Lysima- 
que. II  traversa  I'Asie  Mineure,'  entra 
dans  Heracl^  avec  C^raunus,  se  fit 
reconnattre  dans  toute  la  province  de 
Pergame  avec  le  secours  du  gouverneur 
Philet^re,  et  emporta  d'assaut  la  cita- 
delle  de  Sardes.  II  trouva  dans  cette 
place  tous  les  tresors  du  roi  de  Mac^- 
doine.  Mais  Lysimaque  avait  pris  les 
armes.  Les  deux  armies  se  rencon- 
tr^rent  dans  les  plaines  de  Phrvgie,  h 
CouropedJon.  Lysimaque  et  ses  nils  per- 
dirent  la  vie  dans  le  combat.  Cette 
victoire  donnait  k  Seleucus  la  Thrace  et 
la  Mac^oine.  Rest^  seul  de  tous  les  g6- 
n^raux  d'Alexandre,  il  prit  le  titre  de 
vainqueur  des  vainqueurs,  et  attacha 
au  nom  de  Seleucus  eelui  de  Nicator 
(280).  Pourtant,  malgr6  toutesles  ins- 
tances de  G^raunus,  il  n'avait  point 
encore  tourne  ses  armes  contre  Ptol^ 
m6e  Soter.  II  se  souvenait  de  son 
ancienne  alliance  avec  TEgypte ,  et  ne 
Toulait  pas  attaquer  une  puissance 
amie.  Ceraunus,  irrit6  de  ses  retards, 
m^itait  des  projets  de  vengeance,  et 
attendait  le  moment  oii  le  roi  de  Syrie 
quitterait  FAsie,  pour  passer  en  Grece. 
Sept  mois  apres  la  bataille  de  Couro- 
pMion,  SeleucusdebarqbaaLysimachia, 
ville  de  Thrace  (279).  En  touchant  le  ri- 
vage,  il  offrit  auxdieux.des  actions  de 
mces  solennelles  et  de  pompeux  sacri- 
fices. Mais,  au  milieu  des  cMmonies  sa- 
cr^es,  Ceraunus  Fassassina,  dans  la  con- 
fusion ff^^rale.  Le  meurlrier^  soutenu 
de  qudques  partisans  soudoyds,  se  fit 

(*)  Dani  le  Muopogon, 


u 


LTJNIVERS. 


proclamer  roi  par  les  soldats  et  par  le 
peuple. 

Ainsi  tut  accomplie  la  parole  de  To- 
racle  qui  avail  annonc^  le  destinde  86- 
leucus  :  <  Necberche  pas  TEurope;  le 
rivage  de  TAsie  est  moins  daagereux 
pour  toi.  Tout  en  fuyant  Argos,  tu  y 
arriveras  au  temps  'fatal;  et,  lorsque 
tu  seras  k  Argos,  tu  y  trouveras  la 
mort  (*).  »  Or,  il  existait  ^Lysima- 
chia  UQ  temple  tres-ancien,  appele  Ar- 
gos.  Philetere,  Tanciea  gouverneur  de 
Pergame,  acheta  k  C^rauous  le  corps  de 
Seieucus ,  le  mit  sur  un  bdcher,  et  en- 
Toya  Ifs  cendres  a  Antiochus.  Le  roi  de 
Syrie  eleva  k  son  pere,  pr^s  des  bordi 
de  la  mer,  non  loin  de  Seleucie,  un 
inagnifique  monument,  qui  prit  le  nom 
de  Nicatoriura  (**). 

ADHINIST&ATION  DE  8ELEUGUS;0B- 
GA.NISAT10N   DES   PROVINGBS    DE  SON 

BOYAUME. —  S^leucus  comprenaiit  le 
danger  de  iaisser  entre  les  mains  d'un  seul 
homme  una  vaste  etendue  de  pays,  nior- 
cela  les  anciennes  satrapies  en  petlts 
gouvernements  particuliers.  Son  em- 
pire, qui  ne  formait  gu^re  plus  de  douze 
Srovinces  au  temps  d* Alexandre,  fut 
ivis^  en  soixante-douze  satrapies  C**)* 
La  S.yrie  proprement  ditefutsubdivis^ 
en  hciit  districts  et  peut-ltre  m^me  da- 
vantage.  II  y  en  avait  quatre  au  nord  2 
ceux  de  Seleucie,  d'Antioclie,  d*Apam^ 
et  de  Laodic^e;  la  Ccel^syrie  en  com* 
prenait  quatre  autres. 

Dans  toutes  les  provinces  assez  ^ten- 
dues,  leroi  pla^aitaupr^sdu  gouverneur 
des  m^ridarques  charges  de  contenir  soa 
ambition. 

Le  pouvoir  militaire  etait  presque  tou- 
jours  separe  du  gouvernement  civil. 
Ainsi,  k  cote  de  Teparqae,  se  trouvait  le 
fitratdge.  Cependant,  il  paratt  que  dans  les 
provinces  les  plus  orientales  les  deux  pou- 
Yoirs  6taient  r^unis  dans  une  seule  main. 
Au  temps  de  Polybe,  les  deux  denomi- 
nations destratege  et  d'^arquesembleiil 
avoir  perdu  leor  signification  distincte. 

Le  caractere  du  regne  de  Seleueosi 
c'est  le  soin  de  fonder  des  villes  nou* 

(*)    Argot  fitugleni  Atall  In  tempore  prrgf* ; 
Ar|o«  rum  fttrris,  torn  nrlem  MOitit  •bibia. 

r*>  Applen.  ^  JittUA,  XVII,  I«.--1IMi»tton1fc 
Bxcerpta  apad  Phot.  9.  —  Pausail.,in  Attic, 
p.  18.  —  Oros,  111,  23.  -  PoIyeD,  49.  —  Strabod , 
Xni,  p.  629. 

(•**)  Aypieu,5yr.,62. 


Yelles  et  de  rdpandre  sur  toi^s  leS  poiota 
le  commerce  et  la  richesse.  Un  hameau, 
Botzia ,  consacr^  k  de  gtorieux  desliiis, 
devient  la  grande  Antioche,  sous  Iss 
auspices  d'une  jeune  fille  immol^  (*)• 
Cette  vilie,  construite  par  rarehitecU 
Xenacus,  pritun  sirapideaocroisserosali 

?|u*au  bout  de  trente  anuses  le  roj  Vmh 
erma  d*une  ceinture  de  murailles  (^ 
Seleucie,  sur  le  Tigre,  et  Ct^siphon  n  e<i« 
rent  pas  une  destin6e  moins  briilants 
qu*Antiocbe.  Toutes  ces  viUes^  daos 
la  Syrie  comme  dans  TAsie  MioetirB, 
par  une  imitation  des  constituUcos 
des  cit^s  grecques ,  obtinrent  des  droits 
politiques.  Apamee  et  d'autres  places 
reQurent  m4me  une  certaine  oraaniss* 
tion  militaire.  Un  acropbylax  veillaitala 
police  int^rieure. 

Partout  en  Syrie  et  dans  la  hautS 
Asie,  on  trouve,  apres  la  mort  de  S^ 
leucus,  dans  les  denominations  g^ogra- 
phiques,  une  foute  de  mots  grees  qA 
attestent  la  profonde  influence  de  lao- 
vilisation  bellenique  dans  oes  contrta. 
La  Cyrrhestique  se  distingue  entre  toa- 
tes  les  autres  par  ses  etablissenMBts 
mac^oniens.  (Test  dans  cette  provuh 
ce  que  s'arr^tereot  les  compagnons  4s 
Seieucus*  Le  roi,  en  fondant  des  vil- 
les et  des  places  fortesi  ne  n^ligaait 
aucun  moven  de  faciliter  les  communi* 
cations,  d'6tabli»  des  marches  et  des 
entrep6ts  de  commerce  dans  les  lien 
encore  d^erts,  mais  propres  par  lear 
situation  a  devenir  des  centres  ae.popa* 
lation;  toutefois  il  ne  songea  poioi  a  e»* 
courager  les  sciences  et  les  arts.  Le  mea* 
vement  intellectuel  ne  fut  pas  secmidi 
pariesSeleucides.  A  laverite,AntioehHS 
in  rassen)bla  une  bibliotlieque  a  Antio« 
cbe;  ily  en  avait  une  aatre  a  Ninive.  Ajh 
tiochus  VI  donna  aussi  un  musde  a  la  ea« 
pitale;  mais  oe  n'eiait  \k  9u'une  iinitaiiott 
sans  grandeur  des  institutions  des  La- 
gides.  iAs  Seleucides  paraissent  s*6lfe 
occupy  surtout  de  la  pompe  et  de  to 
dignite  exlerieure.  On  ne  eonnatt  pas 
roi^anisatiouL  de  leur  eour;  mais  oat  sail 

(*)  Le  lOjuin  (22  da  mois  d'aHeroialot)  SSt. 

(**)  Une  IradiUoQ  orientate  rapporte  4  Ad- 
tiechus  la  gloire  d*ayolr  fond^  Antiodif.  Oeftir. 
dM<eUe ,  pour  aoDoaipUr  m  Tora.  Aoetbl«  pm 
une  perpelueUe  ipmMDoie,  il  pronit  d6  baiir 

Vcy,  BroyseD, 
t.  n,  p.  OSS. 


[leuk  lui  rendai«ot  k'  sommeiU 


SYRIE  ANQEkNE. 


d«  moins  qiills  s^entouraienf  de  jeunes 
gardes  (ir9u^t$  oMpLSTc^xaxi;}  (*}. 

autiochus  soter;  ses  guebhbs  con- 
tbb  philad8lphb,  zipoit^s,  nico* 
mede  et  antigoiib ;  il  combat  lbs 
GAULOis. — Antiochus  avait  ^irenger  son 
p^re  assassin^;  a  faire  Talotr  les  droits 
de  S^eucas ,  dont  il  avait  h^rit^  sur  la 
Ma^oine  et  la  Tbrace;enfin,  ^  consoli- 
der  sa  domination  dans  TAsie  Mineure. 
Les  titles  de  eette  contr^e  se  souleTirent 
oontre  la  dottiination  syrienne .  comme 
dies  s*etaieDt  d^lar^es  pen  oe  temps 
anparavant  eontre  Lysimaque;  ellesvou- 
laient  se  reiidre  indcpendantes.  H^racl^e, 
Brzance ,  Chateedoine ,  se  plac^rent  h  la 
tae  de  la  confederation ;  elles  eurent  pour 
allies  Zipoit^  et  flicomede  son  ills ;  rois 
de  Bithrnie,  Mithridate,  roi  du  Pont,  et 
Ptoiemee  C^raunus.  Antiochns  envoya 
Palrode  pour  ramener  a  Tobeissance 
les  habitants  d*Heraciee ;  mais  son  armee 
fut  arrltee  dans  sa  marche  par  le  vieux 
Zipoit^,  et  compietementdetruite  {**) 
(279).  Dans le mSme moment,  Ptoiem^e 
Pbifadef phe  atuquait  la  Syrie  par  le  sud. 
11  rappelait  d^ancienstrait^s,  conclus  en* 
tre  son  pere  et  Sefeucus,  et  fHamait 
Damas  et  son  territoire.  5ieconde  par  les 
Juifs ,  il  sVmpara  facilement  de  la  ville. 
Moins  hetireux  oue  son  fr^f e ,  Cerauntis 
arait  KQcombe  dans  une  guerre  contre 
les  Gaulois;  sa  mort  ne  rendit  point  H 
Antiochus  la  Mac^doineet  laThraee.  An- 
tigone pretendait,  comme  le  roi  de  Syrie, 
*kla  possession  des  provinces  d'Europe. 
nbattit  \a  flottc  de  son  com|>6titeur  (278), 
et  s'empara  de  la  Macedoine.  Mais  les 
incursions  des  Gaulois  rendaient  la  po- 
sition de  tous  les  princes  egalpmeni 
Srpcaire  :  elles  mirent  fin  k  toutes  les 
ivisions.  Antiochus  signa  la  paix  avec 
Nieoiiidde.  Une  afm^e  syrienne  avail 
passe  le  Taums  et  marche  contre  Zipoi- 
tes,  mais  elle  se  contenta  d'observer  Ten* 
nemi.  Un  traitefiitconclu  avec  Antigone. 
Antiochus  lui  donna  en  mariage  sa  soeut 
Phila ,  mie  de  Stratonice  (•**)(  275). 

Les  Gaulois  avaientdevaste  touteTA- 

'  <•)  Voy.  Droysen,  t  TI.  p.  M  et  sulv.  -  Sdlnl- 
■artto.  Biomraphie  untvenetle,  t.  XLI,  p.  511 
ct  ioiv.  -Tpolybe,  Uv.  lY  et  Y.  -  l<Me|itie, 
XB.&. 

(*;  Droyipn,  I.  IT,  p.  «70,  m,  229  el  solv., 
Hsumt  ees  fait^  avec  unegrandeclarte. 

{***) Suldas Cs.  V.  'A{iaT<K)dita i9rt que PfaUa 
«^  fiUe  (fADUpater.  Yoy.  Plut.,  Dttn.y  3i. 


sie  Mineure;  itsallaient  peut-etresejetar 
sur  la  Syrie.  Antiochus  les  prevint,  et 
comment  la  guerre ,  pour  leur  fermer 
ses  ittats.  Les  barbares  avaient  sur  les  Sy- 
rians Tavantage  du  nombre;  leur  centre 
fbrmait  une  piialange  compacte,  eoaisse 
de  vingt-quatre  rangs.  Sur  fa  premiere  H- 
gne,  tous  portaient  la  cuirasse  de  fer. 
Yingt  mllle  cavaliers  se  mirent  sur  les 
ailes.  Quatre-vingts  chariots,  armes  de 
faux,  traf nes  chacun  par  quatre  chevaux, 
et  un  nombre  double  de  chars  de  guerre 
a  deux  chevaux  garnissaient  le  front  de 
bataille.  Antiochus  n^avait  qu*une  faible 
armee,  composee  presque  entierementde 
peltastes  et  de  soldats  ai^mes  a  la  leg^re. 
II  voulutparlementer;  mais  Theodote  de 
Rhodes  lui  montra  tout  le  parti  que  les 
Syriens  pouvaient  tirer  de  leurs  seize 
elephants.  L*ombre  d'Alexandre  appa- 
rut  au  roi ,  la  veille  de  la  bataille.  Pleins 
de  con  fiance  dans  ce  presage ,  les  Sy- 
riens commencerentrattaque;  leurs  ele- 
phants ,  diriges  contre  la  cavalerle  enne- 
mie,  la  mirent  en  deroute;  les  chevaux, 
effrayes,  romp!  rent  les  raiigs  de  la  re- 
doutable  phalange  du  centre.  Les  bar- 
bares  furent  tous  pris  ou  tues.  Les  Sy- 
riens, enivres  de  leur  victoire,  entoure- 
rent  Antiochus  avec  des  cris  de  triom- 
phe.  Mais  le  roi ,  loin  de  partager  cet 
enthousiasme,8*ecria:'«  Rougissons  plu- 
t5t,  car  nous  devons  notresnlut  a  seize 
eiephants.»Les  medailles  destinees^  con- 
server  le  souvenir  de  cette  journee  por- 
taient, au  lieud'inscription,  Tima^e  d*ua 
elephant.  »  Antiochus  re^ut  le  titre  de 
Soter  et  celui  d'Apollon  sauveur.  On 
voit  surquelques  medailles  :  Avnoxov, 

PourjustlQerradmirationdesSyrienSt 
Antiochus  essaya  dereduire  les  villes  de 
la  Coelesyrie,  enlevees  par  le  roi  d'£gypt6 
apres  la  mort  de  Seieucus.  tl  s*allia  avec 
Magas^  roi  de  Cvrene ,  ennemi  de  Pto- 
lemee  Philadelpne  (*  ),  et  chassa  les 
£gyptiens  de  Damas.  Mais  Ptoiemee 
viiit  avec  sa  Qotte  ravager  toute  la  c6te 
de  Syrie  et  d*Asie  Mineure  (363).  Apr^s 
la  mort  de  Philetere,  foadateur  du 
royaume  de  Pergame ,  Antiochus  se  jeta 

(•)  Droyien,  ibid.,  p.  233,  S83.  —  Froelteh , 
Ann.  Seteucid.  p.  26.  —  Mionoet,  8Upp.»  YlII, 
p.  9,n.  48,etp.  Ii,D.  66. 
(••)  Champoflion,  p.  414.— Oroysen,  p.  248  et 
ly.  .  f^oy.  aotti  RolUo,  t  YIl,  p.  182. 


soiv 


u 


LUKITERS. 


dans  une  nouvelle  ffuerre.  11  disputa  k 
Euin^ne  rh^ritagede  son  oncle.  Maisil 
trouva  uoe  vi^oureuse  r^istance.  Vain* 
cu  pr^  d'£phese,  ii  mourut  dans  cett6 
Yille,  k  soixante-quatre  ans,  et  livra 
ses  sujets  k  Tiava^ion  ^trang^re  (  263 
OU  361 ). 

ANTIOCHUS  II  THB08.    —  AntlOCbuS 

Th6os  de^en^ra  de  son  p^re  et  de  son 
aieul.  II  aimait  le  vin  h  1  exces,  et  trai- 
tait  dans  Tivresse  la  plus  grande  partie 
des  affaires.  Bient6tilabandonna  le  far- 
deau  du  gouvernement  k  deux  ireres , 
Aristus  etXb^misoD  (*).L'iDf4me  amiti^ 
qui  liait  le  roi  k  ces  favoris  leur  donna  une 
autorit^  sans  partage.  Th^mison  parais- 
sait  dans  les  cer^mdnies  religieuses  con- 
vert d*une  peau  de  Hon,  avec  Tare  etia 
massue,  attributs  dUercule,  dont  il  pre- 
nait  le  nom,  et  il  obltgeait  le  peuple  de 
sacrifier  k  sa  divinity. 

Au  reste^  Tti^mison  ^tait  peut-ltre  de 
race  royale.  Cypre  eut  un  roi  qui  porta 
le  m^me  nom.  Plus  tard  les  Lagides, 
par  la  conqu^te  de  cette  tie,  depouill^ 
rent  du  pouvoir  royal  la  race  de  Tb^mi- 
son.  Ces  rapprochements  font  penser  k 
Af  •  Droysen  aue  les  deux  fr^res  ^taient 
les  petits-6Is  du  roi  Tb^mison ,  k  qui 
Aristote  dedia  Tun  de  se8  0uvrages,et 
quMIs  vinrent  k  la  cour  de  Syrie ,  dans 
respoir  de  trouver  aupr^  d'Antiochus 
les  moyens  de  reconqu^rir  lli^ritage  pa- 
tcmel(**). 

Abandonnee  aux  mains  de  ces  deux 
hommes,  la  Syrie  d^but  de  sa  grandeur. 
La  paix  oonclue  avec  la  Macedoine ,  sous 
le  regne  pr^6dent ,  fut  raffermie  sous 
Antiocbus  n  par  une  alliance  de  famille. 
Stratonice,  sosur  du  roi  de  Syrie,  ^pousa 
le  fils  d'Antigone  C^).  Leroi  de  Bitbynie, 
Micom^e,  venaitde  mourir(2G4).  II 
avait  laiss^  aux  rois  Philadelpbe  et  An- 
tigone le  soin  de  proteger  son  fils  atn^ 
contre  les  pretentions  de  Zielas,  n^  d'un 
second  mariage.  Gomme  l^iooinede  Ta- 
vait  pr^vu,  une  ^erre  civile  6clata 
aprte  sa  mort.  La  victoire  resta  k  Zielas. 
Antiocbus  laissa  les  fgyptiens,  ses  en- 
nemis ,  proflter  seuls  des  troubles  de  la- 
Bltbynie*  Ainsi  la  Syrie  devenait  de 
jour  en  jour  plus  ^trangere  aux  affaires 

n  KXhMe,  VII ,  p.  M ;  X ,  p.  438.  ^  ^len, 


(■•)  Droysen,  t.  IT,©. 8 
^(••4)Euil,.ifni,i;p 


ssietaas. 

Si5. 


de  I'Asie  Mioeure.  Cependant,  Antio- 
cbus cbercha  k  r<>preiidre  sur  le  Bos- 
.  phore  Tautorite  que  son  aleul  Selaucas 
y  avait  autrefois  exerc^  (262-2^).  D 
equipa  une  flotte  pour  attaquer  Byzance. 
Cette  ville  importante  par  sa  situa- 
tion et  bien  fortiGee ,  avait  dans  set 
murs  une  population  amollie  par  les  plai- 
sirs  et  la  deoaucbe.  Antiocbus  entrepric 
le  siege;  mais  la  vue  des  enneinis  camp^ 
autour  des  murailles  n*ef!raya  pas  les  Iuh 
bitants.  On  avait  peine  k  les  retenir  sor 
les  remparts ;  des  que  les  cbefs  s*^oi« 
gnaient ,  les  soldats  quittaient  leurs  pos-  . 
tes  pour  se  livrer  k  tons  les  eicts  da 
vin.  C*en  ^tait  fait  de  Byzance,  si  les 
babitants  d'H^racI^  n*6taient  point  ar- 
rive avec  un  secours  de  quarante  trire- 
mes. Les  Syriens  se  retir^rent  devant  oe 
nouvel  ennemi,  et  d^toumerent  leurs 
armes^  contre  la  Tbrace.  Cette  cootr^e, 
apres  la  bataille  de  Couropedion ,  etait 
tomb6e,  avec  les  autres  provinces  de 
Lysimaque,  au  pouvoir  de  Seleucas 
Nicator.  Ind^pendante  depuis  la  mort 
de  ce  roi,  elle  s  etait  d6fendue  assez  beu- 
reusement  contre  les  Gaulois.  Apres  ie 
si^e  de  Byzance ,  Antiocbus  se  prints 
devant  Cypsela ,  et  ^ntra  dans  cette  ville 
comma  un  ami  et  un  alli^.  II  menait  a  sa 
suite  une  foule  de  se^neurs  thraees. 
Ces  nobles,  qui  avaient  tait  partie  de  Tex- 
p^ition  contreByzance,  serev^tireotde 
leurs  plus  ricbes  habits,  et  se  cbargerent 
de  cbafnes  d'or  etd*argent;  oe  bril- 
lant  cort^e,  conduit  par  Dromichaites, 
s*avan^  vers  Cypsela.  Les  babitants  re- 
connurent  leurs  concitoyens;  et,  les 
voyant  parattre  dans  un  si  pompeux  an- 

reil ,  lis  concurent  une  baute  id^  oe 
g^n^rosite  U' Antiocbus.  lis  ouvri- 
rent  avec  joie  les  portes  de  Cvpsela. 
Les  autres  villes  grecques  des  cotes  de 
Tbrace,  Lysimacbia,  Ainos,  Maroneta, 
peut-^tre  m^me  P6rintbe ,  suivirent  cet 
exemple.  Tout  le  pays,  iusqu'au  tcrri- 
toire  de  Byzance  et  aux  fronticres  de  la 
Mac^oine,  reconnut  momentan^ment 
le  pouvoir  d*Antiocbus  0« 

Des  malbeurs  accumul^s  au  dela  de 
TEupbrate  et  dans  les  guerres  contre  les 
Egyptiens  effacerent  les  sucoes  obtemis 
en  Europe.  Toutefois,  cette  heureuse  ex- 
p^ition  de  Tbrace  encouragea  peat- 

ni^royiea,  t.  II,  p.  «S4  k sss. 


SYRIE  ANCIONE. 


17 


tn  Antiochns ,  comme  paratt  le  sup- 
poser  M.  Droysm ,  a  rainener  sous  son 
obeissance  les  portions  de  la  Palestine 
et  de  la  Phenicie  alors  soumises  a  Ptold- 
mee  Philadelphe.  Nous  n*avoDS  pres- 
que  aucun  detail  sur  les  ev^nements  de 
cette  guerre.  Le  fait  le  plus  important 
imeroQ  en  connaisse,  c^est  la  revolution 
oe  Milet-Timarque,  oppresseur  de  Tan- 
tique  eapitale  de  I'lonie ,  avait  pour  al- 
lies les  £gyptiens.  Mais  le  peuple,  secon- 
ds par  le  roi  de  Syrie ,  seeoua  le  jpug. 
I^  reconnaissance  des  Milesiens  atfran- 
dus  deceroa  a  Antiochus  letitrede  Dieu 
(ScG^).  Mais,  tandis  qu*il  triomphait 
des  amis  de  i*£gypte  en  Asie  Mioeure, 
it  taissait  la  Coelesyrie  sans  defense.  II 
re^ut  la  paix  des  £gyptif  ns,  sous  la  con- 
dition d'epouser  la  princesse  Berenice , 
et  de  donner  la  couronne,  apr^  sa  mort, 
anx  enfants  de  oe  second  mariage. 

MOBT  b'abtiochiis  theos;  inva- 
sions EGYPTUNN ES  ;  GCEBBB  SRTBB 

LES  FIL8  d'antiochus.  —  Autiochus 
epousa  la  fitle  de  Philadelphe;  mais  il 
▼oulut  laireoublier  la  Yictoire  des  £gyp- 
tiens  por  des  conqu^tes  en  Asie  Mineure. 
Hpartit,  laissant  a  Autioche  Berenice 
et  Tenant  h  qui  cette  reine  venait  de 
donner  le  jour.  Des  que  le  roi  Antio- 
chus se  fut,  par  son  depart,  soustrait  h 
rinfluence  de  sa  nouvelle  epouse ,  son 
aocien  amour  pour  Laodice,  alors  pros- 
crite  et  malheoreuse ,  se  r^veilla  avec 
plus  de  force,  et  il  rappela  la  Glle  d*A- 
diaeas.  Laodice  accourut  aupres  d 'An- 
tiochus, avec  des  projets  de  vengeance : 
elle  craignait  une  nouvelle  diszrdce. 
Pour  eviter  eet  outrage,  elle  r6solut  de 
tuer  le  roi.  Antiochus  fut  empoisonn^ 
a  Sardes,  ou  dans  une  ville  voisine  (*). 
A  son  lit  de  mort,  il  designa  pour  son 
soccesseur  son  fils  Seleucus.  Selon  des 
recits  differents,  Laodice,  mere  de  ce 
jeune  prince,  aurait  eu  recours  a  un  ar- 
tiGce  pour  assurer  la  couronne  a  son  fils. 
On  raconte  que  pour  cacher  la  mort 
d*Antiodui8,  elle  pla<^  sur  la  couche 
rojaJe  an  homme  aont  la  figure  trompa 
tons  les  yeux.  Get  homme,  nomme  Arte- 
mott  C*)  1  prit  la  voix  d'un  mourant,  et 

n  U  tradoctkm  arraenieonis  d'Eosibe  ( I , 

6Mk)  fall  moorir  Antlodiot  k  Eph^;  mail 
.  Droyaen  <U  II ,  p.  34u)  coDlesUla  verite  de 
CdlpaHrrlioo. 
i**}  PUne  evil*  IS)  pvlc  d'ArtemoD  eomme 


reconnut  pour  son  heritier  le  ieaoe  S6- 
leucus.  Laodice  s'empara  de  I  autorit6. 
Elle  fit  mourir  les  Egyptiens  qui ,  To- 
nus en' Syrie  avec  Berenice,  se  trou- 
vaient  aupres  d' Antiochus,  &  la  mort  du 
roi.  Sophron,  Funde  cesetrangers,  des- 
tin<'.  a  p6rir  oomme  les  autres,  ne  dut 
la  vie  qu*au  devouement  de  Dana^,con- 
fidente  de  Laodice.  Dana^,  fille  de  Lton- 
tion,  s*etait^endue  c^l^bre  par  son  amiti6 
pour  ie  philosophe,  dont  elle6tait  I'^l^ve. 
Victime  de  son  devouement,  cette  femme, 
conduite  au  lieu  du  supplice ,  pronon^a 
ces  mots  :  «  Comment  le  vulgaire  ne  se 
plaindrait-il  pasde  la  divinity,  qui  m>n- 
voie  une  telle  r^mpense  pour  avoir 
sauv^  un  homme,  tandis  que  Laodice, 
apres  la  mort  de  son  ^poux ,  est  environ- 
nee  d'honneuret  de  puissance?  »  A  Au- 
tioche, Laodice  trouva  de  nombreux  en- 
nemis  :  elle  fit  assassiner,  par  un  garde, 
le  fils  de  sa  rivale.  B^r^nioe,  pour  ven- 
ger  son  enfant,  prenddes  armes,  monte 
sur  un  char  et  poursuit  le  meurtrier ;  die 
diri^e  centre  lui  sa  lance  mal  assure ; 
saisissant  alors  une  pierre,  elle  le  frappe 
d*un  coup  mortel  et  pousse  ses  chevaux 
sur  le  cadavre.  Elle  traverse  ensuite  sans 
crainte  les  rangs  des  soldats  pour  aller 
au  lieu  ou  elle  espdre  trouver  le  corps 
de  son  fils.  Le  peuple,  admirant  le 
courage  de  cette  mere  au  desespoir,  lui 
donne  une  garde  de  soldats  gaulots. 
Bertoice  recoit  le  serment  de  cette 
troupe,  et,  (Tapres  le  conseil  de  son  me- 
decin  Aristarque ,  va  s^enfermer  dans 
le  temple  de  Daphn^.  Mais  la  saintete 
du  lieu  ne  la  protege  pas  contre  la  co- 
lore de  sa  rivale ;  les  partisans  de  Lao- 
dice la  trompent  par  de  fausses  promes- 
ses,  etregorgentdans  sa  retraite  au  mi- 
lieu de  ses  femmes.  Toutes  les  compa- 
sues  de  Berenice  ne  Tavaient  pas  suivie 
a  Daphn<^;  plusieurs,  restees  dans 
le  palais  d^Antioche,  dirent  que  leur 
mattresse  vivait  encore,  et  qu*elle 
se  retablJssait  de  ses  blessnres.  Pour 
mieux  tromper  la  multitude,  une  de 
ces  Egyptiennes,  prot^ee  par  le  peu- 
ple, jou^  le  role  de  Berenice.  Cette  nou- 
velle fut  port^e  en  toute  h$te  h  Ptole- 
mee  ^vergete,  frere  de  Berenice,  cfui 
venait  de  succ^er  en  £gypt«  a  son  pere 

d*un  honim^  da  people;  au  coDlraira  Ya- 
1^  Maxime  le  fait  de  raee  royale  {regiasUrptiU 


li 


L'UNIVERS. 


Ptol^m^-Philadelpbe.  ^vergete  s'em- 
barqua  avec  tous  les  forces  dont  il 
pouvait  disposer  :  il  traversa  la  Syria , 
donnant  partout  des  ordres ,  au  noin 
de  Berenice  et  de  sod  iils ;  il  passa  TCu- 
phrate  et  le  Tigre ,  et  s'avanQa  jusqu'a 
rlDde  sans  trouver  de  resistance;  les  po- 
pulations et  les  villes  voyaient,  sans 
&'emouvoir,ces  guerres  de  famille.  Les 
historiens  modemes  out  peut-^tre  exa- 
g^r^  le  mouvement  excite  dans  TAsie 
Mineure  par  le  meurtre'  de  Berenice. 
Mais  au  nioins  les  villes  de  Lycie  et 
de  Garie,£phese,  Samos,  Cos,  reconnu- 
reot  alors  la  puissance  des  ^gyptjens, 
et  les  autres  cit^s  demanderent  la  pro- 
tection de  Ptolemee  centre  la  Syrie. 

Enlin,  le  roi  d'£gypte  fut  rappele  dans 
ses  £tats(243)  (*);  il  laissa  des  garni- 
sous  en  Syrie  et  confia  le  gouvernement 
a  Xantippe.  II  donna  la  Cilicie  a  An- 
tioclius,  als  de  Laodice ;  ce  prince ,  en- 
core enfant,  n'avait  pu  prendre  part  au 
meurtre  de  Berenice.  L'Asie  au  dela  de 
r£uptirate ,  rest6e  sans  mattre,  sut  pro- 
liter  des  malheurs  de  FOrient :  de  grands 
royaumes  s'yformdrent  etconsolidereat 
leur  puissance  naissante  :  la  Bactriane, 
la  Drangiane,  la  Perse,  I'Aracosie,  et 
surtout  les  Parthes.  assiir^rent  leur  inde- 
pendance.  La  Syrie ,  naguere  maltresse 
de  toutes  ces  contrees,  maintenantsou- 
mise  aux  Strangers,  paraissalt  condam- 
n^ane  plus  serelever  jamais.  Cependant 
le  fils  aln^du  dernierroi,  Seleucus,  epiait 
roccasioQ  de  reconquerir  le  royaume  de 
son  p^re  Refugi^  en  Asie  Mineure,^  il 
travaillait  a  rassembler  des  allies.  Ce 
fut  lui  sans  doute  qui  s'adressa  au 
seaat  de  Rome  pour  obtenir  sinon  des 
secours ,  au  moius  rassentiment  du  peu- 
ple-roi.  Seleucus,  invo9uant  d'ancien- 
nes  traditions,  r^lamait  au  nom  d'une 
commune  origine  ramiti6  de  la  colonie 
troyeune  duLatiumC*).  Le  s6nat  r^pon- 
dit  par  une  lettre  en  langue  grecque ; 
il  approuvait  le  dessein  de  soustraire 
au  joug  de  T^gypte  la  Troade,  berceau 

(*)  Voy.  poar  les  <UUUa  et  les  r^alUts  de 
rexp^iUoD  de  Ptol^m^  CbampolIioD,  &gypte^ 
p.  418. 

C^*)  Sa^tone,  Claud.,  S5.  II  est  Evident 
poar  M.  Droyseo  que  c^est  a  oe  S^eucas ,  et 
non  k  son  Im,  qa*il  faut  rapporter  la  tenia- 
tiye  faite  auprte  dus^nat  romain.  —  liion  n*ap- 
partenalt  d^a  plus  aax  Seieucides  vers  le  rfegoe 
4e  SeJfiucus  Cerouaus.  Foy,  Polyb.,  li  v.  V,  c. 


des  fondateurs  de  la  puissance  romaiQO. 
Seleucus  avait  en  Asie  des  allies  plus 
utiles  que  les  Romains.  Sa  soeur ,  Stra- 
tonica,  venait  d*epouser  le  fils  atn6,du 
roi  de  Cappadoce.  Quelques  villes  de 
TAsie  Mineure ,  en  petit  nombre  a  la 
verite,  peut-gtre  Smyrne,  Lemnos,  Rho- 
des ,  lui  avaient  fourni  une  flotte  aussi- 
tot  apres  le  retour  de  Ptolemee  £;ver- 
^ete  en  %ypte.  Ces  vaisseaux  avaieui 
a  peine  quitte  le  port,  qu'ils  furent  assail- 
lis  par  une  temp^te  et  engloutis  dans  la 
mer.  Seleucus  ecbappa  avec  quelques 
horames.  Ce  malheur  reveilla  l*inter^ 
des  villes  de  TAsie  Mineure  et  des  pro- 
vinces de  Syrie.  pans  ce  royaume,  deux 
villes,  depuis  la  mort  d*Antioclius 
Theos,  ^taient  4emeur6es  constamment 
fideles  a  son  fils  :  Orthosia  et  Damas. 
£n  242,  la  Cyrrhestique,  la  Chalcidice, 
la  Pierie  et  la  Seleucide  se  declarerent 
pour  Seleucus.  Le  j/eune  prince  fonda , 
la  m^rpe  annee ,  la  ville  de  Callinicus , 
sur  r£uphrate.  Cependant,  la  Coelesyrie, 
ou  Xantippes'etaitetabli,  tenaittoujours 
pour  les  E^yptiens.  Seleucus  rassembia 
une  armee  et  commen9a  la  guerre  (*).  II 
fut  vaincU,  et  n'echappa  qu'avec  des  fati- 
gues inouies  a  la  poursulte  de  Fennemi. 
Enfin  il  traversa  1  Oronte  a  Antiocbe  sur 
un  pont  de  bateaux.  Pour  r^parer  ses 
desastres ,  il  ^orivit  aus$it6t  a  son  fr^ 
Antiocbus,  lui  offrant,  en  ^bang^  de 
quelques  secours,  la  souverainete  de 
FAsie  Mineure.  Antiocbus  accepta  cette 
proposition.  Smyrne  et  Magnesie  don- 
nerent  alors  une  preu  ve  singulis  de  leur 
attachement  aux  Seieucides.  Ces  deux 
villes  se  ligu^rent  entre  elles  pour  se- 
oourir  le  malheureux  roi  abandonn^ 
Ptolem^,  voyaot  son  ennemi  soutenu 
de  tous  c6t^ ,  lui  accorda  une  trdve  de 
dix  ann^.  Delivre  des  £gyptiens ,  Se- 
leucus voulut  disputer  a  Antiocbus  les 
provinces  de  TAsie  Mineure.  Ce  fut  la 
le  commencement  de  la  guerre  entre  les 
deux  freres.  L'atne  avait  pour  lui  son 

§rand-pere  AchsBus,  son  onde.  An* 
romaque,  dont  il  ^pousa  la  fille,  et 
un  fils  d^Andromaque,  qui  s*appelait 
aussi  Acliaeus;  le  plusjeune,  alors  Age 
de  quatorze  ans^  ^tait  soutenu  par 
Laodice,  sa  mere,  et  par  un  de  ses 
ondes,  Alexandre,  gouverneur  de  la 

(*)rusuu,  XXVII,  2, 


SYRIE  AifciEime. 


M 


Foot,  beau-frere  de  Seleucus  et  d'Antio- 
chus,  avail  re^u  la  grande  Phrygie  eo 
dot.  II  se  declara  pour  Seleucus ,  doqt 
it  B^avait   pay  a  craindre  Tambition. 
4iitiocbua«  ne  pouvan^  tii^r  assez  de 
Iroupaa  de  la  Cilicie,  |>rit  les  Gala- 
tea a  ^  solde ;  il  fut  rainca  dan^  ua 
rnwVr  combat  en  Lycie.  Cet^hecne 
rebuta  point.  Una  b^taille  plus  im- 
portante    fat  liyree  dai^;  les  plainei 
tfAo^yre  en  Galatie.Cettefois  la  chaooe 
Ai    combat  tourna  oootre  Seleucus;  il 
perdit   viogt  nulla  hommes  :  ie  bruit 
ONirut  qqe  lui-in^nie  avait  cU  tu^.  4 
cette  QouveltOv  Aotiocfaus  pritdes  ha- 
bits de  deoil ,  et  il  donoa  des  marquea 
d'aoe  douleur  sincere  (*).  Ce  fut  cepen- 
dant  vers  eette  ^poque  qu*il  re^ut  la 
funioin  da  Uiirax  (  ^pervier  )•  Sea 
eontempofains  vouiureot,  par  ceite  epi- 
'  thete,  6temiser  la  sonyeair  de  eette  Iqtt^ 
Iratriioide.  Scleueua  ayait  fui  eo  Syrie.  Il 
y  retrouva  Mysta ,  sa  maltresse,  q^e  les 
^iiod Jens  Jui  renvoyajent.  Cette  iemme 
avait  #te  prisa  a  la  bataille  d'Aocyjre; 
laodoa  a  des   Rbodien^t  elle  se  Qt 
aaooaltra  a  aes  laaUras.  Ceux-ci ,  alli^ 
de  S4EleuaiSt  la  ramen^rent  ayep  boo- 
aaor  a  son  aoiaot  Antioqbui,  depuis  sa 
lictoire,  etait  tombe  dans  de  nouveau^ 
perils.  LeifGaulois,  ses  allies,  avaient 
lante  de  rassassiner;  il  leur  payait  un 
}iibu|«  iSnn)^,  fp\  de  P^rgqoie,  avait 
Ism6  le  deasein  de  detruire  sa  puissance 
Maaante.  Antiocbua,  craignaof;  d'etre 
atlaque  par  son  frere,  au  milieu  de  ees 
oooveaia  embarraSy  Qt  la  pak  avec 
feieoeos  vers  999* 

Setoiqis,  traoauHIa  du  c6t6  de  TAsie 
MiiieHre,  tenta  q»  ri^ablir  son  autorit6 
anrlesbordsduTigre.  Uentreprit  uneex- 
p^ilfoofiontre  lea  Perthes.  Alanouvelle 
de  la  bataille  d'Aneyre,  Arsace,  chef 
de  cetle  nation,  s'^tait  iet^  sur  THvr- 
eanie.  et  Tavait  annexee  au  pays  des 
Perthes.  Mais  eraignant  les  forces  de  ia 
Syriet  il  fit  nae  alliance  avec  le  suc- 
eeaseur  deTfaeodote,  roi  de  Bactriane. 
S^leueoa,  vaincupar  les  torces  r^unies 
des  Baetriens  et  des  ParUies,  fut  rappel^ 
dans  t^  £tats  par  une  revolution  sou- 
daine  (239  ou  238).  Stratonice,  sceur 
da  roi,  et  femme  de  Demetrius,  avait  sou- 

(*)  Atbeo.,  XIII,  p.  5W.  ^  Polyen,  VIU,  ei. 
•-Dnyyica,  t.  II,  853  dsaiv. 


li^ve  Antiocbe.  AFapproche  de  Seleucua 
elle  prit  lafuite,  et  se  retira  a  Seleucie  (*) 
}k  Tembouchure  de  TOronte.  Mais  elle 
fut  prise  et  mise  a  mort,  Probablement 
cette  sedition  avait  ^t^  excitee  par  An- 
tiochus  Hierax.  Capepdant  la  position  de 
ee  prince  dans  TAsie  Mineure  etait  alora 
precaire.  Attale ,  successeur  d'Eumene , 
venait  dp  reniporter  sur  ses  troupes 
uue  vietoire  signalee  dans  le  voisinage 
de  Pergame,  et  de  fonder  une  dy- 
nastic royale.  Malgr^  ses  revers ,  An- 
tiochus  tenta  de  nouveau  la  fortune; 
il  pilla  la  Phrygie,  qui  appartenait  a  Mi- 
thridata ,  allie  de  Seleucus.  Cette  ex- 
p^ition  ranima  la  guerre  entre  les  deux 
fr^res.  Antiocbus  avait  besotn  d'allies ; 
il  cbercha  un  appui  dans  Zielas,  roi  de 
Bithynie,  dont  ii  epousa  la  fiUe;  puia 
il  conimenca  les  hostilites.  II  essuya 
une  premiere  defaite  en  Mesopotamie. 
Poursulviparlesvaindueurs,  il  se  retira 
dans  les  montagnes  de  TArmenie ,  dont 
(e  gouvernement  avait  ete  conG^  a  Ar- 
sanie,  son  allie.  Atteint  par  Androma- 
que  et  par  Acbseus  ,  il  fut  vaincu ,  et 
laisse  pour  mort.  Mais,  aussitdt  apres 
le  combat ,  il  se  porta  sur  une  hauteur, 
et,  pendant  la  nuit,  lit  occuper,  par 
des  d^tachements ,  les  deGles  voi$ins« 
II  se  jervit  d^une  ruse  pour  tromper  les 
ennemis.  Un  soldat,  envoys  par  ses 
ordres,  alia  demander  a  Andromaque 
le  corps  du  jeune  roi ,  pour  lui  rendre 
les  derniers  bonneurs.Le  general  de  Se* 
leiicus  repondit  qu*on  n'avatt  pas  encore 
trouv^  le  cadavre ,  mais  qu*on  le  cher- 
chait.  Andromaque  crut  qu-une  armee 
sans  chef  se  rendrait  a  la  premiere  som- 
matipn;  il  envoya  dans  les  ipontagnes 
quatre  mille  hommes  pour  demander 
aux  soldats  d*Antiocbus  leurs  armes  et 
les  amener  prisonuiers.  Ce.  corps  s'ap* 
procha  sans  defiance  des  ennemis ;  mala 
nientdt,  assailli  par  Antiocbus  en  per- 
sonne,  il  fut  taille  en  pieces  (235)  {*"*). 
Des  liens  de  famille  unissaient  Antio- 
cbus au  roide  Cappadoce,  Ariamne,  son 
beau-pere.  Force  de  quitter  TArmenie, 
il  esp6rait  trouver  un  refuge  en  Cappa- 
doce; mais  ii  courait  le  danger  d'etre 

(*)  Polybe  dit  que  S^Ieacie  fut  saos  inter- 
fQpUon ,  depvls  rinvasion  de  Plolemee  ,  apr^ 
la  roort  de  sa  sonir  Berenice,  au  poavoir  des 
Lagides;  mais  il  se  trompe.  Noire  opioioa  est 
celie  de  M.  Drovsen,  t  II,  421. 

(♦•)  Polyeii,.IV,  IS.  -  Droyseo,  t  II ,  p.  4ia 


40 


LUNIVERS. 


livr^,  a  S^ieucus  ou  assassine  par  les 
Gaulois  meroenaires.  II  se  determina  a 
fuir  un  alli^  d*une  foi  douteuse.  Quoi- 
que  les  troupes  de  S^leucus  ^piassent 
tous  ses  moavements ,  il  fut  assez  heu- 
reax  pour  gagner  Magnesie,  ou  se  troa- 
vait  un  poste  de  troupes  egvptiennes. 
II  voulut  ensuite  passer  a  Eph^se :  il 
rencontra  rennemi  dans  sa  route ;  mats 
avec  le  secours  des  £gyptiens,  ils*empara 
de  son  grand-p^re  maternel ,  Achaeus. 
Gette  ))artieaerhistoire  des  S^leucides 
est  sans  contredit  tres-obscure.  Tout 
porte  a  croire  aue  la  paix  n*^tait  point 
troublee  entre  la  Syrie  et  r£gypte.  Si^ 
leucus  employa  les  courts  moments  de 
tranquillite  de  son  r^ne  a  bdtir  de  nou- 
veaux  quartiers  dans  Antioche.  II  y  ras- 
sembla  des  Etoliens,  des  Eubeens  et  des 
Cretois  (*).  On  netrouve  point  de  details 
sur  les  aventureuses  expeditions  qui  rem- 
plir^nt  la  fin  du  regne  d'Antiochus  Hi^- 
rax.  On  a  mis  en  doute  Thistoirede  sa 
captivity  en  tgvpXe[**),  II  est  certain  qu'ii 
combattit  quelque  temps  pour  defendre 
la  Lydie  centre  le  roi  de  Pergame.  Per- 
dant  enfin  Tespoir  de  retablir  ses  afifaires, 
il  se  d^cida  k  chercher  un  refuge  en 
Thrace.  II  fut  arr^t^  dans  sa  fiiite  par  des 
Galates,suivantcertainsauteurs;suivant 
d*autres,  par  des  brigands  qui  le  tue- 
rent  (226).  Get  Antiochus  laissait  une 
fitle;  nous  la  verrons  plus  tard  epou« 
ser  le  c^lebre  Acbaeus.  Seleucus,  apr^ 
Ja  mort  de  Hi^rax,  n'osa  point  taire 
valoir  les  droits  de  sa  famille  sur  I'Asie 
Blineure.  II  tourna  ses  forces  contre  les 
Parthes.  II  fut  vaincu  et  fait  prisonnier. 
Mais  des  6rudits  de  notre  temps  mettent 
en  doute  cette  expedition  (***).  S^ieucus 
mourut  en  225  (*^**). 

BEGNE  DE  SELEUCUS  III;  OUSBSB 

EH  AsiB  MiNEUBE.  ^  Selcucus,  ap- 
pele  communement  Ceraunus^  mais 
dont  le  veritable  surnom  etait  So- 
ter,  avait  une  sante  faible,  un  corps  d6- 
licat  et  une  intelligence  pea  d6velop- 
pee.  Pendant  son  regne  les  favoris  .et 
les  ministres  acquirent  unpouvoir  ab- 
solu.  Leur  jalousie  causa  a  la  Syrie  dirre- 


(*)  Slrab.,  XVI,  p.  a&5;  ^.  Taacho, 
Dliu,  1 1,  p.  ao9;  ^.  Retske. 


-Llbi- 


(•*)  ^oy.  Droysen,  t.  II,  p  425,  • 

(***)  Saint-MarUn,  Biographie  univertelle, 

I.  XLl,  p.  bSO. 
{****]  Les  historiens  rappellent  otdinairemeat 

CaUmtcui  et  qaelqaefois  Pogonn 


m^diables  maux.Ptoiemee,  mi^ltredeSe- 
leucie,  menaealt  Antioche;  el  les  avant- 
postes  d'Attale,  places  sur  les  versants 
du  Taurus,  iosultaient  la  Syrie  par  leor 
presence.  La  guerre  dtait  inevitable.  Ge 
fut  contre  FAsie  Mineure  que  S^leuciis 
tourna  ses  armes.  II  laissa  le  gouveme- 
ment  des  pays  situ^  au  dela  de  TEopbrate 
Il  son  fr^re  Antiochus ,  et  ceini  de  la  Sy» 
rie  au  Carien  Hennias.  Suivi  d'Acbaeus, 
fits  d'Andromaque  (222) ,  il  traversa  le 
Taurus  et  p^netra  jusqu'en  Phrygie.  Mais 
Targf  n  t  manquait  pour  payer  les  troupes; 
les  soldats  murmur^rent,  et  deux  de  leurs 
shefs,  Nicanoret  Apaturius,empoisonne- 
rent  le  prince.  L*armee  offritlacouronne 
a  Achaeus  :  loin  de  Taccepter,  il  fit  moii- 
rir  les  auteurs  du  crime  et  revint  en 
Syrie,  proclamant  Antiochus  suoesseur 
de  son  fr^re.  Gependant  Seleucus  avait 
laiss^  un  fils,  Antipater,  llge  desept  aos; 
mais  il  fut  dcarte  du  trdne. 

ANTIOCHUS  III  LB  GB AND  ;  HBBKIAS; 
BEYOLTB  DE  MOLON;  GOEBBB  DB  CCB- 

LESYfiiB.  —  Antiochus  avait  h  pdne 
quinze  ans,  lorsque  Epigene,  g^o^ral 
envoys  par  Achaeus,  lui  porta  la  nou- 
velledela  mort  de  son  fr^re,  etdte^^ 
nements  qui  le  faisaientroi  (p. 

«  Des  qu' Antiochus  eut  pris  posses- 
sion de  la  couronne ,  il  envoya  en  Orient 
deux  fr^res ,  Melon  et  Alexandre ;  le  pre- 
mier pour  gouvemer  la  Medie ,  et  le 
second,  la  Perse.  Achaeus  fut  charge  des 
provinces  de  TAsie  Mineure.  £pigdns 
eut  le  commandement  des  troupes  qu'M 
tint  aupr^  de  la  personne  du  roi ;  et 
Hermias  le  Garien  fut  d^tare  son 
premier  ministre  comme  il  Tavait  et6 
sous  son  (rere.  Achaeus  reprit  bient6t 
tout  ce  qu'Attale  avait  enlev^  a  Tempire 
de  Syrie,  et  Tobligea  k  se  r^uire  a  son 
royaume  de  Pergame.  Alexandre  ^ 
Melon,  m^prisant  la  Jeonesse du  rot, 
ne  furent  pas  plut6t  anennis  dan;  leurs 
gouvernements,  qu*ils  ne  voulurent  plus 
le  reconnattre ,  et  diacun  d*eQX  se  ren- 
dit  souverain  dans  la  province  qui  lui 
avait  ^i^  confiee.  Les  sujets  de  meoonten- 
tement  qu'Hermias  leur  avait  donn^ 
eontribuerent  beaucoup  k  leur  r^volte. 

«  Ce  ministre  ^tait  dur.  Des  plus  pe- 
tites  fautes  il  en  faisait  des  crimes,  et  les 

(*)  Nous  donnons  id  le  ricM  de  Rollin,  qid  »- 
prodail  fldelemenl  celui  de  Polybe.  Vby.  BitU 
anc.,  t  Vil,  p.  107  et  luiv.;  Paria,  Dklot,  isn. 


STRIE  ANGENNE. 


4t 


imusnit  avee  la  derni^re  rigoeor.  C^ 
taitun  petit  esprit,  mais  fier,  pleia  da 
hu-onme,  attache  k  son  sentimeot,  et 
mi  aorait  em  se  deshonorer  all  edt 
Mmaiide  oa  suivi  eonseil.  II  ne  poayait 
fiMifiiir  que  persomie  partagedt  avec  lui 
le  erMit  et  Tautorit^  Toat  merite  hii 
etait  suspect,  on,  pour  mieux  dire ,  lui 
etaitodieux.  II  en  voulait  surtout  k  £pt« 
me,  qoi  passait  pour  un  des  plus  ha- 
mles eapitaines de  son  temps,  et  en  qui 
les  troupes  avaient  une  entiere  oon- 
fianee.  Cetait  cette  r^utation  m^ine 
qai  iaisait  ombrage  au  ministre ,  et  il 
ae  pouYait  dissimuler  sa  mauvaise  vo« 
kmti  k  son  ^rd. 

•  AntiodMis  avalt  assemble  son  eon- 
idl  au  sujet  de  la  revolte  de  Molon,  pour 
savoir  quel  parti  il  derait  prendre ,  et  s'il 
Ml  necessaire  qn'il  marchi&t  lui-m^roe 
contre  ee  rebeile.  ou  s^il  devait  tourner 
da  fM  de  b  Coeiesyrie  pour  arrdter  les 
entiepracs  de  Ptoldmde.  Epicene  paria 
]e  premier,  et  dit  qu*ii  n'y  avait  point  de 
temps  a  pnrdre;  que  le  roi  devait  inces* 
sammeot  se  transporter  en  personne  dans 
rorient,  afin  de  proGier  des  moments 
et  des  occasions  favorables  pour  agir 
eootre  les  revoltds;  que,  quand  il  y  se- 
rait,  ou  Molon  n*aarait  pas  la  hardiesse 
deremuer  sous  les  yeux  de  son  prince  et 
4*006  armde,  ou,  s*il  persistait  dans  son 
desseitt,  les  peuples  touches  de  la  prd- 
senee  de  leur  pnnce,  rdveillant  leur  zele 
ft  leur  affection  pour  son  service,  ne 
mapqueiaient  pas  de  le  lui  livrer  bientdt; 
nsisqiie  Timportant  dtait  de  ne  lui  point 
l»sser  Ve  temps  de  se  fortifier.  Hermias 
Be  put  s'empfeher  de  rinterrompre;  et, 
ayee  uik  ton  d*aigreur  et  de  sufiisance ,  il 
drt  que  de  faire  marcher  le  roi  contre 
Molon  avec  si  peu  de  troupes,  c'etait  li- 
ner sa  personne  entre  les  mains  des  rd- 
Tolt^.  Sa  veritable  raison  dtait  la  crainte 
qall  avait  de  eourir  les  risques  de  cette 
expedition.  Ptoldmee  dtait  pour  lui  beau- 
eoop  moins  redoutable.  On  pouvait,  sans 
rien  craiodre,  attaquer  un  prince  qui  ne 
s'occupait  que  de  plaisirs.  L'avis  <l*Her- 
mias  remporta.  II  fit  donner  la  conduite 
delaguerre contre  Molon  et  d'une  partie 
te  troupes  a  Xdnon  et  a  Theodote  C); 

(*1  SomoiiiiD^  ttcmioUitM.  Polvb.,  Hy.  V. 
I5  drui  seo^nojk.  voalunni  prendre  U  roule 
Jrf^a  de  Bajsdad  k  H«aiadao.  Dcoyseo,  t.  II, 


et  le  roi  marcha,  avec  Tautre  partie  de 
Tarmde,  du  cdt^  de  la  Coeld^rie. 

«  En  arrivant  pres  de  Zeugma,  il 
trouva  Laodice ,  fille  de  Mithridate,  roi 
de  Pont,  qu*on  lui  amenait  pour  Fepou- 
ser.  II  s*arrdta  quelaue  tem(>s  pour 
o^ldbrer  ce  manage,  aont  la  joie  fut 
bientdt  troublde  par  la  nouvelle  qu*on 
re^^t  d*Orient,  que  ses  gdndraux,  trop 
faibles  pour  (aire  tdte  a  Molon  et  a 
Alexandre,  qui  s'dtaient  joints ,  avaient 
dtd  obllgds  de  se  retirer  et  de  les  laisser 
maltres  du  champ  de  bataille.  Antiochus 
vit  alors  la  feute  qu'il  avait  faite  de  ne 
pas  suivre  Tavis  a*£pigene,  et  voulait 
abandonner  le  dessein  de  }a  Goeldsyrie, 
pour  aller  avec  toutes  ses  forces  arrdter 
cette  rdbellion.  Hermias  persists  avee 
opintdtrete  dans  son  premier  sentiment, 
if  crut  dire  des  merveilles  en  declarant 
d'un  ton  empbatiquc  et  sentencieux  qu'U 
convenaU  au  roi  de  marcher  en  per- 
sonne contre  des  rots,  et  d*envoyer  ses 
lieutenants  contre  des  rebeUes.  Ia  roi 
eut  encore  la  faiblesse  de  se  rendre  a  IV 
vis  d'Uermias...  il  se  contenta  d'envoyer 
un  gdneral  et  des  troupes  dans  TOrient, 
et  reprit  Texpedition  de  Goeldsyrie. 

«  Le  gdndral  qu*il  envoya  futXendtas, 
Adiden,  dont  la  commission  portait  que 
les  deux  gdndraux  lui  donneraient  leurs 
troupNBS,  et  serviraient  sous  lui.  Xdndtas 
n*avait  jamais  commandd  en  chef,  et  tout 
son  mdrite  dtait  d'dtre  ami  et  crdature  du 
ministre.  Parvenu  k  une  place  a  laquelle 
il  n'avait jamais  osd  aspirer,  il  devint  fier 
k  r^ard  des  autres  ofBciers,  et  plein 
d'audace  et  de  temdritd  a  regard  des  en- 
nemis.  Lesucote  fut  tel  qu'on  devait  Tat- 
tendre  d'un  si  mauvais  choix.  » 

Xdndtas  rdclama  les  secours  de  Dio- 

net  de  Pythias,  Tun  gouverneur  de 
usiane,  Tautre  des  pays  qui  avoi- 
sinent  la  mer  Rouge.  11  alia  camper 
avec  toute  son  armde  sur  les  bords  du 
Tigre.  Molon  Fobservait  sur  le  rivage  op- 
posd.  II  envoya  au  gdndral  d'Antiochus 
un  grand  uorobrede  soldats,  qui  passaient 
lefleuve^  la  nage  comma  des  transfuges, 
et  trompaient  Xdndtas  par  de  faux  ran- 

Krts  sur  Tdtat  et  les  dispositions  de 
nnemi.  Ilsracontaient  que  leur  armde 
dtait  sincdrement  ddvoude  a  Antiochus, 
qii*eile  dtait  prdte  a  passer  sous  les  en« 
seignes  de  Xendtas  des  que  celui-ci  ap- 
procherait  Tronipd  par  ces  rapports » 


i9 


LTUMlVpRS. 


X6n6iQB  traversa  peodant.la  ouit  le  fleu- 
ve,  et  8*^tablit  a  environ  quatre-vingts 
slades  au-dessous  de  Molon,  dans  une 
position  environnee,  d*un  cdte par  le  Ti- 
gre,  de  Tautre  par  des  marais.  lielende- 
main  matin  il  vit  arriver  un  corps  deca- 
valerie  qui  semblait  dispose  a  rattaquefy 
et  k  lui  faire  repa$6er  le  fieuve.  Mais  ces 
cavaliers  prirent  eux-mSmes  la  fuite; 
quelques-UQS  se  perdirentdans  les  mar6- 
cages.  L*arm^d  Antiocbus,  encourages 
par  ce  premier  succea,  quitta  ses  retraa- 
cbements  et  s^approjclia  au  camp  des  re* 
belief.  C'^tait  le  moment  attendu  par 
Molon.  11  Ot  sortir  ses  troupes ,  et  donna 
le  signal  de  la  relraita.  ]>es  ennemis  en* 
trerent  dans  les  tentes  abandonn^es ,  et 
pass^rent  le  jour  entier  dan$  la  plus  folle 
assurance.  Mauf  le  feodemain,  Molon 
rentra  dans  le  camp,  et  tit  un  horriblo 
carnage  des  soldats  sans  defense.  Ceux 
qui  se  r^veillaient,  encore  tout  6tourdia 
par  Torgie  de  la  veille,  couraient  au 
fleuve ,  et  s'y  jetaient  precipitamment 
pour gagnerrautre rive,  (^resistance 
da  X^netas  n'arr6ta  point  Moiou,  et  ne 
Temp^cba  pas  de  passer  au^sitot  le  Tigre, 

Sour  attaquer  Zeuxis  et  l^rriere-garde 
e  rarmi6e.  Molon  entra  sans  obstacle 
dans  Seleucie,  abandonnee  par  le  gou« 
verneur  Diom^don  et  par  la  moitie 
des  habitants.  II  marcba  epsuite  contra 
Suse;  m^is  la  citadelle  ou  commandait 
Diog^ne  opposa  uneglorieuse  resistance. 
Cependant  le  roi,  conduit  par  son  mi- 
nistre,  traversa  Apamee  et  Laodio^e 
(Scabiosa)^  point  de  reunion  deTarniite; 
il  passa  ensuite  le  desert,  et  arriva  dans 
un  petit  canton  appele  Maf^yas;  c*eat 
une  longue  et  etroite  vallee  entre  le  Li- 
hao  et  Tanti-Liban.  Les  eaux  qui  des- 
cendent  de  ces  montagnes ,  9e  r^uissant 
dans  la  partie  la  plus  resserr^e,  et  rendent 
le  terram  fangeux.  Deux  villes,  Gerra  et 
Brocbium,  dominent  le  Marsyas.  Le  roi 
d'£gypte  en  avait  confie  la  deienae  a  r&- 
tolien  Tbeodote.  Antiochua  voulait  d'a- 
bqrd  se  rciidre  maftre  d^  Gerra;  il  fit  cam* 

Ser  son  arm^  sur  les  bords  des  maraia 
ont  nousyenons  de  parler;  mais  il  sa 
lassa  bientot  des  dimeult^  du  si^e.  La 
nouvelle  des  nuilbeurs  arrives  sur  le  Ti- 
gre  decida  la  retraite. 

«  II  assembia  son  conseil  et  remit  de 
Qouveau  Taffiaire  en  deliberation.  £;pi- 
^M ,  apr^s  avoir  dit  d*ua  ton  modeste, 


que  le  parti  le  plus  lage  aunil  M  dt 
marcher  d'abora  contra  les  rebellea  pour 
ne  leur  point  laisser  le  moyen  de  se  (orli- 
fier  comme  ils  avaient  fait,  ajouta  que 
c'etait  une  nouveileraison  maintenantdo 
ne  plus  perdre  de  temps,  et  de  doonef 
tons  $GS  soins  a  une  auerre  qui  pouvait 
entralner  la  ruine  de  rempire  si  on  la  ne- 
giigeait.  Hermias ,  qui  se  crut  offense  par 
ce  ((iscours,  commenga  par  s'emporter 
violemment  centre  Epii^^ne,  en  h  char- 
^eant  de  renrocbes  etd*mjures,  et  eon* 
jurale  roi  de  ne  point  renoncer  a  Teotfe* 
prise  de  la  Coeiesyrie,  qu'il  ne  ponvait 
abandonner  sans  marquer  de  la  legereti 
et  de  Fiiiconstance,  ce  qui  ne  conre-. 
nait  point  du  tout  k  un  prmce  aussi  sajge 
et  efhiv6  qu^il  ^tait.  Tout  le  conseil  bais- 
sait  les  yeux  de  honte.  Antiochus  lui* 
m^me  souffrait  beaucoup.  11  fut  conclu, 
d*uue  voix  unanime,qu*il£allait  marcher 
a  grandesjourneea  centre  les  rebeiles. 
Alor$  Hermias ,  qui  vit  bien  que  la  re- 
sistance serait  inutile,  change  tout  a  coup 
en  un  autre  homme,  embrassa  le  senti* 
meot  commun  avec  une  sorte  d'empres- 
sement,  et  se  moutra  plus  ardent  qu*ao- 
cun  autre  h  en  presser  Texecution.  Lea 
troupes  marcberent  done  vers  Apamte, 
qui  etait  le  lieu  du  rendez-vous. 

«  A  peine  en  etait-on  sort! ,  qu'il  8*e- 
leva  une  sedition  dans  Tarmee  au  sujet 
d*un  reste  de  paye  qui  dtait  dd  aux  sol- 
dats. Un  oontrtt-temp9  si  fScbeu:!  jeta  le 
roi  dans  unegraudeconsternation  et  dans 
uue  morteile  inquietude.  En  effet,  le  pMI 
etait  pressant.  Hermias,  trouvant  le  roi 
dans  ces  embarras,  le  rassura,  ei  lui 
promit  de  payer  sur-le-champ  tout  ce  qui 
etait  dd  a  rarmee;  mats  il  lui  demands 
par  gr4ce  qu1l  ne  menfit  point  £pig^oe 
avec  lui  kcette expedition,  pareequ'apres 
reclatqu'avait  fait  leur brouiUerie,  on  ne 
pouvait  plus  esperer  d^agir  de  concert 
dans  les  operations  de  la  guerre,  comme  le 
bien  du  service  le  demandait.  Sa  vue^tait 
de  comroeocer  par  refroidir  Testime  et 
raffaction  d' Antiochus  a  regard  d*£pi- 
gena  par  son  absence. ..  Celts  propositioa 
ntunepeineextremeau  roi. ..  Maiscomme 
Hernuas  s'etait  etudie  de  loin  k  Fobse- 
der  par  toutes  sortes  de  voies,  en  lui 
fournissant  des  vues  d*economie,  en  le 
gardant  a  vne ,  en  le  gagnant  par  ses 
complaisances  et  ses  flatteries,  ce  prince 
n'etait  point  so|i  maitre.  Le  roi  conseotit 


STRIE  AHCIENNE. 


.^, 


|oiiCiqpiioigitt'aT6C  beaucoup  de  repu- 
gnance, lice  qu'oD  luideniandaitf  et  Epi* 
gene  eut  ordre  de  se  retlrer  a  Apamee. 
Cet  ev^ement  surpril  et  effraya  torn  les 
eourtisans,  qui  craignirent  pour  eux  uq 
pareiJ  sort;  mm  raroie^,  qui  veaait  de 
recevoir  sa  paye,  s'eo  coosola...  » 

Uo  corps  de  sU  mille  homme<,  les  Cy- 
trastes,  continua  la  r^vQlte.  Uais  iis 
liireat  pre^^ue  toua  nij|«sacr^  par  leg 
fioJdaU  qui  etaient  rentres  daos  Tobeis- 
sanee...  «  Alpxis,  gouverneur  de  la 
dtadeile  d' Apamee,  ^tait  entieremenl 
derou^  k  Hermias...  II  ie  charge  de  le 
deDaire  d'£pigene,  et  lui  eo  prescrjt  let 
moyens.  En  coosequence,  A^w^  gagne 
un  des  eselaves  d'l^igeue,  et  a  force 
de  firfeeots  et  de  prooiesse9,  Tepgage 
a  gtisser  daa$  les  papiers  de  son  inal* 
tre  uoe  lettn  qu'il  lui  donna.  £lle  6tait 
ecrite  et  sigoea,  a  ce  qu'il  paraissait, 
par  Moloa,  Tuii  dee  chefs  des  rebelies, 
qui  remerciait  Epigeoe  de  la  coospi- 
ratioo  qu*ilarait  formee  cootre  ie  roi, 
et  iui  commuoiquait  des  moyens  s6r9 
pour  rex6a^f£^.  Quelques  jour^  apr^, 
Alexis  TaJia  trouver,  et  lui  demaodasMl 
avait  reqa  <(Delaue  lettre  de  Melon.  £pi- 
geoe,  surprie  dune  telle  demande,  mar- 
que sou  etoQoeniettt  et  en  lotoe  temps 
foo  indignation*  L*autfe  repondit  qu  il 
avait  ordre  de  foqiller  dans  ses  papiers. 
On  7  trouva  ea  ef&t  la  pr^tei^due  lettre , 
et,  saosautreexamen  ni  autre  formalite, 
tpigene  fut  mis  a  mort.  Le  roi ,  sur  la 
simple  iaspedioQ  de  la  lettre ,  crut  le 
eriBK  \»m  avM  et  Men  prouv^.... 
Quoiqoe  la  saisnn  fdt  fort  avano^ ,  An* 
Hochus^issa  I'Eupbrate,  rassembla  9»9 
troupes,  et  leur  aoona  quaraote  jours 
de  repqe.  »  L'eni»^  continoa  eosuite  sa 
marone.  EJJe  trarersa  ie  Tigre ,  grav|t  le 
mootOricus,  et  deseeadit  dan^  TApol- 
kmie.  liCS  habitants  de  eette  pontrie 
etaicfftt  veous  au-devant  d^Aiytiocbus 
pour  l«i  demaoder  grioe.  Lorsque  (VIq)oo 
apprit  rinvasJon  des  troupes  royales.  U 
eeumt  ji  dies*  esp^ant  les  SMrpr^nqra 
dans  las  bois  4^  i  Apolloaie;  il  ae  YQ^r 
hit  pae  laisaar  aux  nabitaots  de  la  Su- 
iane  ef  de  la  Sabylonie  letempsde  sui vre 
Fcsenple  des  Apollonieos,  et  il  joi^nit 
Wntk  Ajitioehus.  Les  soldats  legere- 
BKat  armes  se  battirent  avec  acharne- 
Sttat  de  cbaque  cot6 ;  on  leur  envoya  du 
imfort;  et  comoie  les  secQurs  se  »ucce- 


3; 


^aient  sane  interruption,  la  m^j^e  allait 
qevenir  une  bataille  g^n^rale,  lursque  les 
chefs doniierentle  signal  de  la  retraite.  Le 
combat  s*arr£ta ;  on  se  pr^para  a  creuser 
des  retranchemei^ts  pour  la  nail :  les  deux 
camps  n'etaient  separes  que  par  une  dis- 
taneedeauarante  stades.  Cependant  Mo- 
loirrefl^issait  avec  inquietude  aux  chan- 
ces du  lendemain.  Comment  ses  troupes 
soutiendraient-elles  la  presence  du  roi? 
11  ne  voulut  donner  a  Antiochus  aucua 
avantage,  et  resolut  de  le  surprendre  la 
nuit  m^me;  il  choisit  done  des  soldats 
d*^lite,  ettraver:sadeslieux  impraticables. 
4fais,eri  chemin,  il  a()prit  que  di^  jeunes 

Sens  s'etaient  detaches  desa  troupe.  Sans 
oute  ils  allaieot  informer  le  roi  du  p^rii 
|u*il  courait.  Des  ce  moment  le  coup 
le  main  etait  manqu^.  Molon  revint  sur 
ses  pas;  mais  son  retour  alarma  toutes  les 
troupes.  Au  lever  du  soieil ,  les  deux  ar- 
mees  se  rangerent  en  bataille.  Dix  ^1^- 
phants  formaient  le  centre  de  Tarmee 
royale.  Antiochus  commandait  Taile 
droite,  compos6ede cavaliers  portent  des 
lances,  et  dont  Ie  chef  etait  Ardys,  des 
Cretois  allies,  des  Gaulois  et  des  troupes 
mercenaires.  Hermias  et  Zeuxis,  ^  la  t6te 
de  la  gauche ,  avaient  toute  la  cavalerie 
sous  teurs  ordres.  L'arm^^e  de  Molon 
ayaitunecontenance  irresoiue;  les  cava- 
liers etaient  m^les  aux  fantassins  dans 
une  confusion  generate.  Lessoldatsd'Aa- 
tiocbus  redoublaieot  de  courage  a  la  vue 
de  leurs  eonemis  troubles.  L^ile  droite 
de  Molon  selani^  sur  le  corps  d'arineede 
Zeuxis :  mais  Taile  gauche  passa  dans  les 
rangs  destrpupesroyales.  Cette  trahison 
decouraffea  completement  ceux  qui  res- 
taient  (ioeles.  Molon,  entqure  d'ennemis, 
se  tua  de  sa  main.  Son  frere  Ndolaus  eut 
le  temps  de  fulr.  |1  courut  en  Perse  por- 
ter k  Alexandre  la  nauvelle  de  cet  ir- 
r^arable  desastre.  Pour  ne  nas  tomber 
yl  vantsa  vec  leur  fami He  ei  Ure  les  mains  du 
vainqueur,  ils  donnerent  la  mort  a  leur 
quere,  a  leurs  enfans,  et  se  frapperent  en- 
suite.  Lecadavrede  Molon  futmis  eq  croix. 
Du  reste,  Antiochus  se  montra  clement 
envers  les  viJlesr^elles.  II  alia  a  Seleucie; 
Hermias,  pour  ch&tier  les  habitants, 
leur  impose  une  contribution  de  mille 
talents;  il  punitde  Texil,  de  la  prison, 
m^me dels  mort,  lesprincipaux  citoyens. 
Le  roi  reduisit  a  cent  cinquante  talents 
le  tribut  demande  par  son  ministre.  il 


44 


rUNIVERS. 


IS 


donna  le  gouvernement  de  la  M^ie  a 
Diogeo6,cttlai  de  la  Susiane^  Apollo- 
dore,  et  conQa  la  garde  de  la  mer  Roujia 
t  Tychon.  Autiocnus  ne  voulut  pasauit- 
ter  la  haute  Asie  sans  avoir  intimide  les 
rois  ind^pendants  de  ces  contrto.... 
«  11  marctia  coutre  les  habitants  de  FA* 
tropat^ne ,  qui  occupaieot  le  pays  siiu6 
a  Toccident  de  la  Medie,  et  qu*onappelle 
k  present  la  G6orgie.  Leur  roi ,  nomm6 
Artabazane,  ^tait  un  vieillard  qui  futsi 
effray6  de  I'approche  d*Antlochus  avec 
one  arni6e  vtctorieuse,  qu*il  envoya 
feire  sa  soumission,  et  fit  la  paix  aux 
conditions  qu*on  jugea  k  propos  de  lui 
imposer...  On  re^ut  dans  ce  tetnps-lli  les 
nouvelles  qu'il  ^tait  n6  un  fils  au  roi ;  oe 
itii  fut  un  grand  sujet  de  joie  pour  toute 
a  cour  et  pour  toute  Tarni^e.  Hermias, 
des  ce  moment ,  songea  aux  moyens  de 
se  defaire  du  roi,  dans Tesp^rance qu*a- 
pres  sa  mort  il  ne  manquerait  pas  d^Hrt 
nomm^  tuteuf  du  jeune  prince ,  et  que , 
sous  sonnom,  ilexercerait  an  empire  ab- 
solu.  II  6tait  devenu  odieux  h  tout  le 
monde  parsa  hauteur  et  son  insolence... 
Apollopbane,  medecin  d'Antiocbus,  en 
qui  il  avait  grande  confiance,  et  qui,  par 
sa  place,  avait  un  libre  acc&  aupres  de 
lui ,  prit  son  temps  pour  lui  repmenter 
le  mecontentement  general  des  peuples, 
et  le  danger  ou  il  ^tait  lui-m6me  de  la 

Sart  d'un  tel  ministre.  II  Tavertit  de  pren- 
re  garde  k  sa  personne,  de  peur  qu^il  ne 
lui  arrivdt,  comme  k  sonfr^re,  en  Phry- 
gie ,  d*ltre  la  victime  de  Tambition  de 
ceux  en  qui  il  avait  le  plus  de  confiance ; 
quMI  ^tait  visible  qu^Hermias  formait 
quelque  dessein,  et  qu*il  nV  avait  point 
oe  temps  aperdre,  si  on  voulait  le  prev^ 
nir.  »  Maisil  ne  s'agissait  pas  seulement 
de  donner  au  roi  des  conseils.  Apollo- 
pbane rassembia  sesamis,  et  convint  avec 
eux  de  r^pandre  le  bruit  qu*Antiochu8 
etait  afflig6  d'un  mal  d*yeux;  c'^tait  un 
moyen  de  signer  du  temps  et  d*assurer 
la  reussltede  leur  dessein.  Enfin,  quand 
on  eut  achet6  des  partisans  d^voues,  le 
mMecin  ordonna  publiquement  k  Antio* 
chus  de  sortir  tons  les  matins  k  la  pointe 
du  jour;  la  fratcheurde  Tair  pouvaitseule 

Suerir  cettemaladie.Suivi  d*un  cort^^ge 
*amis,  Antiochus  sortit  du  camp ,  avec 
Hermias,  qui  voulait  Taccoropagner .  Par* 
venu  a  un  endroit  d^rt,  II  donna  le 
signal  con  venu ;  sa  suite  se  jeta  sur  Her-' 


mias,  et  le  tua.  Acette  nouvell6,toutes 
les  provinces  t6moign^rent  leur  joie. 
Les  fetnmes  et  les  enfants  d*Apam^ 
massacr^rent  les  fils  et  la  veuve  a'Her^ . 
mias. 

TBNTATIYS  D'ACHiEUS   OONTBB   LA 

syhib;  antiochus  assibgb  sblbu- 
cie;  THBopoTB.—Tandis  qu*Antiochu8 
marcfaait  centre  Artabazane,  Achaeusfor- 
mait  le  projet  de  conqu^rir  la  Syrie.  II 
comptait  s'etablir  solidement  dfans  le 
royaume  avant  qu'Antiochus  edtle  temps 
de  revenir. 

Achseus  avait  pris  a  son  serrice  les 
debris  des  Cytrastes,  dont  nous  avons 
parle  plus  haut.  II  quitta  la  Syrie,  et 
vint  k Laodicde  de  Pnrygie,  ou,  pousse 
par  les  conseils  defexil^  Syniride,  U  prit 
avec  la  couronne  le  titre  de  roi. 

II  continua  sa  marche  jusque  sur  les 
fronti^res  de  la  Lycaonie.  L^,  il  reacoo- 
tra  les  anciens  soldats  d' Antiochus  qui 
se  disposaient  a  uneenergique  resistance. 
II  se  detourna  sur  la  Pisidie,  dont  ses 
soldats  se  partagerent  les  depouilles. 
Ce  fut  dans  ces  circonstanoes  que  des 
ambassadeurs  d'Antiochus  amverent 
aupres  d'Achaeus.  Le  roi  de  S^rie,  apr^ 
avoir  pris  ses  quartiers  d'hiver,  etait 
arrive  dans  sa  capitale.  Chaque  jour, 
k  Antioche ,  on  discutait,  dans  le  con- 
seil  du  roi ,  un  plan  d'attaque  cofitre 
les  figyptiens.  Apollophaneproposad*a9- 
sieger  Seleude ,  et  d  enlever  a  rennemi 
Tembouchure  de  TOronte.  Get  avis  rto- 
nit  tens  les  suffrages.  Le  roi  donna 
Tordre  a  Diognete,  commandant  de  la 
flotte,  de  s'avancer  sans  retard  vers 
Seieucie.  Antiochus  en  personne  alia 
camper  prte  d'Hippodore,  li  cinq  sta- 
des  de  la  ville.  II  tacha  de  s6duire  les 
habitants  par  des  sommes  d*argent  et 
des  promesses;  mais  les  principaux  ci- 
toyens  repouss^rent  ses  offres.  Les  of- 
ficiers  n*imiterent  pas  ce  desint^resse- 
ment.  Lejourde  I'assaut  arriva.  Zeuxis 
devait  escalader  la  porte  de  la  ville  qui 
regarde  Antioche ;  Hermog^ne  se  tenait 
place  avec  ses  troupes  sur  la  route  de 
Dioscure.  L'attaque  des  faubourgs  et 
des  quais  6tait  confine  k  Dio^te  et  il 
Ardys.  Cetait  le  cAte  le  plus  faible  de  S6- 
leucie.  Ardys  p^netra  dans  le  faubourg ; 
mals  les  autres  g^n^raux  furent  repous- 
s^s  sur  tons  les  points.  Ardys  meme  ne 
se  serait  pent^tre  pas  mamtenu  dans 


SYRIE  ANCIEI9NE. 


sa  pofiitioo « si  les  officiers  vendas  I  An- 
twams  n*avaient  quiiU  ks  remparts 
poor  se  retirer  aupras  de  L6oDtius,  pre- 
Dier  magistral  oe  la  ville.  lis  repr6- 
sentaient  tous  les  dangers  d*une  re- 
sistance inutile,  et  la  n6cessite  d'une 
prompte  soamission.  Leontius  tromp^ 
sigpa  one  capitulation  sous  la  seulecon- 
diti(m  qoe  les  personnes  seraient  respec- 
ttes.  Antiodius  entra  dans  la  ville;  il 
rendit  sqx  habitants  leurs  droits  muni- 
cipaux  et  rappela  tous  les  exiles.  II  n'a- 
Tait  point  encore  quitte  S^leucie,  lors- 
aa*on  Id  apporta  des  lettres  de  Th^ 
ooteje  g^noral  de  Ptol^m^.  Deux  an* 
n^  auparavant  ce  general  arait  fldele* 
ment  conserve  a  TEgypte  la  place  de 
Gem.  Mais,  accuse  h  la  cour  par  ses 
enoemis,  il  resolut  de  se  venger  des 
soopqons  de  Ptol^m^.  II  envoya  Pane- 
tolus  k  Tyr ,  pour  faire  reconnaltre  An- 
tiochus  (Mtnscette  ville ;  lui-m^me  s*eta- 
blit  dans  PtolemaTs,  au  nom  du  roi  de 
Syrie. 

GDSIBS    CONTBS     l'BGYPTI;    Bii- 

TAOU  DB  BAPHiA.  —  Un  autfc  ^6* 
Deral  de  Ptol^mee,  N6olaus,  £toiien 
eomme  Tbeodote,  ^tait  demeur^  fidele 
k  son  mattre.  II  alia  assi^^er  Ptol^als, 
et  confia  a  Dorvmene  et  a  Lagoras  la 
ddense  des  defiles  qui  conduisent ,  par 
Beryte,  en  Ph6nicie.  Antioehus  repoussa 
fecileinent  ces  deux  generaux,  et  prit 
possession  de  Tyr,  de  Ptolemais  et 
de  qoarante  vaisseaux  qui  stationnaient 
<lans  les  ports  de  ces  deux  villes.  Une 
mite  non  interrompue  de  succes  couvrit 
^  gloire  les  armes  d'Antiochus  jusqu*^ 
la  fjtale  d^faite  de  Raphia  (*).  Quelque 
temps  araot  la  bataille,  Theodote  essaya 
de  se  gllsser  dans  rarni6e  ^ptienne 
et  d'arriYer  jusqu*au  roi.  A  Ta  faveur 
de  la  nuit,  il  entra  sans  obstacle  dans 
latente  de  Ptolem^e;  mais  le  hasard 
voulut  que  ce  prince  ne  s'y  trouvdt  pas; 
Tbfodote  tua  le  m6decin  Andr^us  et. 
I>le8sadent  courtisans.  II  regagna,  sans 
^  reconnu,  le  camp  des  Syriens. 

Enfin  parut  le  jour  du  combat.  Pto* 
wnee  sortit  le  premier  de  ses  retranche* 
nents.  L'aroi&  d' Antioehus  6tait  com- 
post de  differents  peuples.  Les  Da- 

(*)  Hone  miroyoiis  poor  le  detail  des  ^y6- 
MBCMi  qai  MMdercBl  oefte  batoUle.  m  t6- 
•■»  de    M.    CbampoUloo-ri^MCi  ig^pU , 


hes  et  les  Caramaniens^  au  nombre  d'en- 
▼iron  cinq  mitle,  avaient  pour  chef  le 
Mac6donien  Byttacus.  M^n^dme  com- 
mandait  deux  mi  lie  archers  et  fron- 
deurs  perses,  et  mille  soldats  thraces. 
Un  g^n^ral ,  fils  du  Mede  Aspasian,  con- 
duisait  cinq  mille  hommes ,  M^des,  Cis- 
siens  et  Cadusiens.  D*autres  barbares 
ob^issaient  h  Zabdbell  [Zabdibellum)^ 
et  formaient  un  corps  de  pres  de  dix 
mille  hommes.  Theodote  avait  sous  ses 
ordres  les  argyraspides  et  prds  de  dix 
mille  hommes  armes  et  ^quip^s  ^uivant 
I'usage  mae^onien.  Les  g^n^raux  de  la 
phalange,  form6e  de  plus  de  vinst  mille 
nommes,  ^taient  Nicarque  et  Theodote 
Hemiolius;  Hippolocus,  le  Thessaiien, 
avait  amen6  de  la  Grece  cinq  mille  mer- 
cenaires.  II  y  avait  encore  quinze  cents 
Cr^tois  avec  Eurilochus;  mille  archers, 
quinze  cents  frondeurs  lydiens ,  et  mille 
autres  soldats  sous  Lysimague.  Toute  la 
cavalerle  ne  montait  pas  a  plus  de  six 
mille  hommes  :  c*etait  probablement 
dans  cette  partie  de  Tarm^e  que  s'etaient 
enrdles  les  Syriens.  La  cavalerie  ^tait  di- 
vis^e  en  deux  corps ;  Tun,  de  quatre  mille 
chevaux ,  avait  ei€  conft^  au  jeune  Anti- 
pjiter ,  neveu  du  roi.  Ainsi,  les  forces 
d* Antioehus  s'^levaient  a  soixante-huit 
mille  hommes  et  cent  deux  Elephants. 
L'arm^  de  Ptol^m^e  ^tait  superieure 
en  nombre;  mais  ses  ^l^phants^  tir^s 
des  d^rts  de  laLibye,  n*^taieut  pas 
aussi  forts  queceux  d' Antioehus.  Ces  ani- 
maux  commencdrent  la  bataille;  la  trou- 
pe de  Ptol^m^  prit  la  fuite,  et  jeta  le  d^- 
sordre  au  centre  de  Tarm^  dont  elle  de- 
vait  ^tre  le  rempart. «  L'issue  de  la  bataille 
fut  qu*Autlochus ,  h  la  t^te  de  son  aile 
droite,  d^fit  Taile  gauche  des  Egyptiens. 
Mais,  pendant  oue,  par  une  ardeur  in- 
consid^r6e ,  il  s'^chauffait  a  la  poursuite 
des  ennemis,  Ptol6m^ ,  qui  avait  eu  le 
m^me  succes  k  Tautre  aile,  chargea  en 
flanc  le  centre  d'Antiochps  qui  se  trouva 
d^ouvert,et  le  rompitavant  quece  prince 
pdt  venir  k  son  seeours.  Un  vieil  officier 
qui  vit  ou  roulait  la  poussi^e ,  conclut 
que  le  centre  6tait  battu ,  et  le  mon- 
tra  a  Antioehus.  Quoique  dans  le  mo- 
ment m^me  il  fit  faire  volte-face,  il  arri  va 
troptard  pour  reparer  sa  faute,  et  trouva 
tout  le  reste  de  son  arm^  rompu  et 
mis  en  fuite.  II  fallut  songer  a  faire 
retraite.  II  se  retira  k  Raphia,  d'oik 


46 


UUNIVERS. 


il  regagna  ensuite  Gaza,  apr^s  avoif 
perdu  dans  cette  bataille  dix  miile  hom- 
ines tu^s  et  quatre  mille  faits  prison- 
niers.  Se  voyant  par  la  hors  d*etatde  te- 
nir  la  cainpagne  contre  Ptol^m^e,  il 
abandonna  toutes  ses  conqu^tes ,  et  ra- 
mena  k  Antioche  ce  qu*il  put  ramasser 
des  debris  de  son  arm6e.  Cette  bataille 
de  Raphia  se  donna  en  m^me   temps 

?ue  celle  odi  Annibal  battit  le  consul 
laminius ,  sur  le  bord  du  lao  Trasi- 
m^ne,  en  fitrurie  (217)  (*). » 

Antlochus  avait  hdte  de  terminer  la 
guerre.  II  envoya  h  Ptolem^e  deux  am- 
bassadeurs  :  Antipater  et  Theodote  He- 
miolius.  Ilsobtinrentune  annee  de  trSve. 
Sosibius  alia  a  Antioche  pour  faire  ra- 
tiGer  la  cession  de  la  Coelesyrie^  de  la  Pa- 
lestine et  de  la  Phinicie,  abandonnees 
au  roi  d'^gypte. 

GUERRE  CONTRE  AGHJEUS.  —  On  nC 

fit  pas  mention  d'Achaeus  dans  le  traite ; 
depuis  longtemps  le  roi  de  Syrie  cher- 
chait  Poccasion  d'attaquer  ce  prince  et 
de  renverser  sa  domination  en  Asie 
Mineure;  Achaeus  avait  resserr^  les  liens 
de  famille  qui  l*attachaient  dej^  aux  Se- 
leucldes  par  son  mariage  avec  Laodice, 
filled' Antiochus  Hierax.  Cette  princessci 
encore  en  has  Sge  a  la  mort  de  son  pere, 
avait  grandi  dans  Tinfortune.  tin  ancien 
serviteur  de  sa  famille  prit  soin  de  son 
enfance,  et  donna  sa  mam  et  ses  droits  & 
rambitieux  Achaeus.  Celui-ci  cherchait 
par  tons  les  moyens  aconsolider  sa  puis- 
sance. «  Cela  parut  clairement  dans  un^ 
guerre  qui  survint  (quelques  annees 
avant  la  bataille  de  Raphia)  entre  les 
Rhodiens  et  les  Byzantins ,  5  Poccasion 
d*un  tribut  que  ceux-ci  avaient  impost 
sur  tons  les  vaisseaux  qui  passaient 
par  le  d^troit;  tribut  qui  ^tait  fort^ 
charge  aux  Rhodiens,  a  cause  du  grand 
commerce  qu*ils  faisaient  avec  le  Pont- 
Euxin.  Achaeus,  sollicit^  vivement  par 
ceux  de  Bvzance,  avait  promis  de  les 
secourir.  Cette  nouvelle  consterna  les 
Rhodiens »  ajussi  bien  que  Prusias,  roi 
de  Bithynie,  qu'ils  avaient  attir^  dans 
leur  parti.  Dans  Pextrlme  embarras 
oil  lis  se  trouvaient ,  il  leur  vint  dans 
Pesprit  un  expedient  pour  detacher 
Achaeus  des  Byzantins  et  Pengager  dans 
leurs  int^Sts.  Andromaque,.son  p^re, 

[*)  Rollin,  i  VII,  p.  326. 


fi-^re  de  Laodice,  que  S^eucus  Callinl- 
cus  avait  epous^e,  6tait  actuellement 
retenu  prisonnier  h  Alexandrie.  lis 
deput^rent  vers  Ptol6m6e  pour  lui  de- 
mander  en  grdce  sa  liberty.  Le  roi,  qui 
^taitbien  aiseaussides'attacher  Achaens 
de  qui  il  pouvait  tirer  de  grands  ser* 
vices  contre  Antlochus,  avec  qui  il  ^tait 
alors  en  guerre,  accorda  volontiers 
aux  Rhodiens  leur  demande,  et  leur 
remit  entre  les  mains  Androma<{ue. 
Ce  fut  un  present  bien  agr6able  pour 
Achaeus ,  mat's  qui  fit  perdre  courage  aux 
Byzantins.  lis  consentirebt  h  f^tnettre 
les  choses  sur  Pancien  pied,  et  a  dter  le 
nouveau  droit  qui  avait  cause  la  guerre. 
La  paix  fut  ainsi  r^tablie  entre  les  deux 
peuples,  et  Achaeus  en  eut  tout  Phoii- 
neur.  »  Telle  etait  la  puissance  et  Pea- 
nemi  qu'Anliochus  allait  combattre. 
«  Antlochus ,  apr^  avoir  fait  la  paix 
avec  Ptolemee,  donna  toute  son  appli- 
cation a  la  guerre  contre  Achaeus,  et 
fit  tous  les  pr^paratifs  pour  la  com- 
mencer.  It  passa  enHn  le  modt  Taurus, 
et  entra  dans  PAsie  Mineure  pour  la  re- 
duire  (2 1 6).  II  y  fit  une  ligue  avec  Attale, 
roi  de  Pergame,  en  vertu  de  laquelle 
ils  joi^nirent  leur$  forces  contre  leur 
ennemi  commun.  lis  le  press^rent  si 
fort,  qu'il  abandonna  la  campagne 
et  se  retira  dans  Sardes.  Antiochus 
en  forma  le  siege ;  Achaeus  le  soutint 

?ilus  d'un  an.  II  faisait  souvent  des  sof* 
ies,  et  il  y  eut  quantity  d^actions  au 
pied  des  murailles  de  la  ville.  Enfin , 
par  une  ruse  de  Liguras ,  un  des  com*^ 
mandantsd'Antiochus,onprit  la  ville, 
Achaeus  se  retira  dans  le  chateau ,  et 
s*y  defendait  encore  quand  il  fut  livr^ 
par  deux  trattres  cretois.  Cette  his- 
toire  merite  d*^tre  rapportde.  Plolemde 
Philopator  avait  fait  uu  traits  aveo 
Achaeus,  et  6tait  fortfSche  de  le  voir 
si  6troitement  bloqu6  dans  le  chflteaii 
de  Sardes.  II  chargea  Sosibe  du  soin 
de  Pen  tirer,  a  quelque  prix  que  ce  fdt. 
II  y^  avait  alors  ^la  cour  de  Ptol^m^  un 
Cretois  fort  rus^,  nomm^  Bolis,  qui 
avait  demeurd  longtemps  h  Sardes. 
Sosibe  le  consulta  et  lui  demanda  s*il 
ne  saurait  point  quelque  expedient  pour 
reussir  k  uire  ^chapper  Achaeus.  Le 
Cretois  lui  demands  du  temps  pour  y 
soncer,  et  guand  il  revint  trouver 
Sosine,  II  offrit  de  Pentreprendre,  et  lui 


SYRIE,  ANCIENNE. 


47 


cxpliqua  la  maoi^re  dont  il  vouiait  coa- 
duire  TafTaire.  11  lui  dit  qu'il  avail  ua 
ami  intiine,  ^ui  etait  aussi  son  proche 

great,  capitaine  dans  les  troupes^  de 
eteau  service  d^ADtioclTus;  qu'il  com* 
mandait  aiors  dans  un  fort ,  derriere  le 
ehdteau  de  Sardeg;  qu'il  Tengajserait 
a  laisser  sauver  Acbaeos  par  ce  cdte-la. 
Soo  plan  fut  approuve.  On  Tenvoie  en 
diligenee  a  Saraes  pour  Tex^uter,  et 
OQ  lui  coropte  dix  talents  pour  ses  be- 
soins,  avec  promesse  d'une  somme 
plus  considerable,  s'il  reusslt.  Apres 
son  arriv^,  il  communioue  Taftaire 
k  Gambyse.  Ces  deux  mallieureux  coo- 
Tiennent ,  pour  en  tirer  plus  de  proflt« 
d*aller  d^larer  lear  dessein  a  Antiocbus. 
Ds  offrirent  k  ce  prince,  coinme  iis 
Tavaient  resolu ,  de  jouer  si  bien  leur 
T^ie  qu'SQ  lieu  de  faire  sauver  Achsus, 
Us  ie  lui  amdaeraient ,  mojennant  une 
T^mpense  oonsiderable  qu'ils  parta- 

rient  eatro  eux  aussi  bien  que  les 
taieots  que  Bolis  avait  deja  re^. 
Antiocbus  fut  ravi  de  cette  ouverture , 
et  leur  promit  use  recompense  suffi* 
sante  pour  les  engager  k  lui  rendrecet 
important  service.  Bolis ,  par  le  moyen 
de  Gambyse ,  entra  sans  peine  dans  le 
chateau ,  bu  les  leltres  de  cr^nce  qu*il 
avait  de  Sosibe  •  et  de  quelques  autres 
amis  d'Adiaeus  lui  gagnerent  la  conr 
fiance  entiere  de  oe  prince  infortun^.  II 
se  mit  entre  les  mains  de  ces  deux  sc^- 
lerats  qui,  ^  qu'il  fut  bors  du  cb^teau, 
le  Baisirent  de  sa  persoona,  et  le  livr^ 
rent  a  Antiocbus.  II  lui  Gt  aussitdt 
louicber  la  t^te,  et  termina  par  \k 
oette  guerre  d*Asie  (*)•  » 

ODSUUBS  CONTEB   LES  PAHTHES  ST 

US  BACTAIBNS  (211-304. )  —Pendant 
qu*ADtiocbiiacombattaiteB  Asie^Mineur^ 
pour  rteUir  les  anctennes  limitesde  son 
n^auine,  Arsace  s^emparait  de  la  M6- 
die.  Les  pitarages  dece  pays  avaientun 
siogulier  attrait  pour  les  cavaliers  par* 
tbes.  Apres  la  luort  d* Acbaeus,  le  roi  de 
Syrie  disputa  aux  barbares  cette  riche  con- 
qwSlie.  Les  Partlies,  fiddles  a  leur  tactique, 
Mseren t  les  troupes  d' Antiocbus  s'avan- 
car  librement  dans  le  pays;  ils  comp- 
HicBt  que  le  desert,  leur  aiM  naturel, 
devorerait  Taroiee  envahissante.  Gepen- 
dant  la  eon  tree ,  jusqu'a  Ecbatane,  est 
fertile,  bien  arrosee,  et  peut  aisement 

C-}IU>Uio,  t.  YII,  P*  Sisetsuiv, 


fournir  aux  besoins  d^ine  arm^e.  An- 
tiocbus entra  dans  la  capitale  de  la  M^- 
die ;  cette  ville  avait  eu  autrefois  des 
richesses  immenses.  Les  Mac^doniens. 
au  temps  d'Alexaiidre ,  d' Antigone  et 
de  Seleucus,  n'avaient  pu  emporter  tous 
les  trdsorsd* Ecbatane.  Le  temple  d*Anai- 
tis,  lors  de  Texp^dition  d*Antiochus, 
^tait  demeure  presque  Intact.  On  y  voyait 
encore  une  partie  du  toit  convert  en 
argent ;  des  lames  ^paisses  d'or  et  d*au- 
tres  metaux  precieux  reeouvraient  les 
murailles  et  les  colonnes.  Antiocbus 
depouilla  le  temple ,  et  convertit  ses  ri- 
cbesses  en  monnaie  pour  la  valeur  de 

auatre  mille  talents.  Ensuite  il  se  jeta 
ans  les  deserts  situes  au  dela  d'Ecba- 
tane.  Les  Parthes  sehdtiiient  deboucher 
les  puits  et  les  conduits  souterrains  qui 
amenaieot  Teaudes  montagnes.  Mais 
la  prudence  du  roi  et  ie  courage  de 
son  avant-garde  permirent  aux  troupes 
de  p^n^trer  dans  le  p^ys  nieme  des  Par- 
thes (210).  Les  habitants  se  retirerent 
en  Hyrcanie.  lis  voulurent  defendre  fen- 
tree  de  cette  province;  mais  les  passa- 
ges furent  forces  etla  capitale  du  pays , 
Seringis.  fut  assi^ee  et  prise  d'assaut. 
Arsace  coangea  a!ors  ses  plans.  II  forma 
une  arm^  reguliere  de  cent  mille  fan- 
tassins.  Les  forces  toient  6gales  des 
deuxcdtes;  Antiocbus  craignit  de  contl* 
nuer  une  luttedangereuse;ll  traita  avec 
les  Partbesetreconnut  leurindependance 
(208).  U  ue  r^ussit  pasdavantagea  reduire 
la  Bactriane.  Dans  un  combat  centre  Pu- 
surpateur  EuUiydeme ,  il  cut  son  cheval 
tu^  sous  lui.  et  fut  lui-m^me  frapp6 
au  visage.  Alors  il  offrit  la  paix.  Le 
filsd'Euthydeme  vintdans  ie  camp  d' An- 
tiocbus ;  il  obtint  pour  son  pere  le  titre 
de  roi  >  et  pour  lui  la  promesse  de  rece- 
voircomme  epouse  une  princesse  syrien- 
ne  (206).  Eutbyd^me  envoya  au  roi  dc 
Syrie  une  troupe  d'elephants ,  pour  faci- 
liter  son  passage  dans  I'Inde;  avec  cent 
cinquante  de  ces  animaux,  Antiocbus 
traversa  PArachosie  et  la  Drangiane; 
il  passa  Tbiver  en  Garamanie>  et  revint 
au  printemps  de  Tann^  suivante  a  An* 
tioche  { 205).  Malgr*  Tinulilit*  de  ses  ef- 
forts contre  les  Parthes  et  les  Bactriens, 
Antiocbus  merita ,  par  son  expedition 
dans  la  haute  Asie,  Ie  titre  de  Grand, 
qu^l  prit  depuis  cette  ^oque.  II  avait 
surmonte  les  difficultes  que  lui  presen- 


4$ 


L'UNIVERS. 


tail  partout  reimemi,  et  eombatto,  sans 
revers,  des  populations  belliqueuses  (*). 

ALL1A.NCB  D*ANTIOCRUS  AYBG  PHI* 

L1PPE  DE  macbdoinb;  OCBBBB  Gon- 
TBB  l'bgypte.  —  La  mort  de  Ptol^in6e 
Phiiopator  inspira  au  roi  Antiochus  de 
nouv^ut  desseins.  11  ooncut  le  projet  de 
partager,  avec  Philippe,  Tfigypte  qui  ve- 
nait  de  tomber  entre  les  mains  d*un  en- 
fant ,  Ptol^mee  Epiphane.  Ce  traits  fut 
une  des  causes  gui  amen^ent  Tinterven- 
tion  des  Ron?ains  dans  les  affaires  d*0- 
rient.  Antiochus,  assure  du  concours 
actif  de  la  Macedoine,  fit  en  toute  hAte 
la  conqu^te  de  la  Goel^yrie  et  de  la  Pa- 
lestine. Puis,  laissant  Philippe  se  d^ 
battre  entre  Rome  et  la  Grece ,  it  ras« 
sembla,  Tannee  suivante  (201),  une  nom- 
breuse  arm^  de  terre,  ooinniandte 
par  Mithridate  et  Ardys ,  et  les  ehar- 
gea  d*assi^er  ia  ville  de  Sardes.  Lui* 
m^me  s'embaraua  sur  une  flotte  de 
cent  Taisseaux  de  guerre,  sans  compter 
les  bdtiments  de  transoort  (**).  II  alia 
avec  oette  arm^  navale  attaquer  les 
villes  de  Gilicie  et  de  Carie  soumises 
aux  £gyptiens.  Mais  tandis  quMI  s'effor- 
cait  d'etendre  sa  domination  dans  TAsie 
Mineure ,  les  tuteurs  de  Ptol^m^,  pro- 
fitant  de  son  absence,  cberchaient  k 
reprendre  possession  de  la  Conl^yrie  et 
de  la  Palestine.  Ces  provinces  furent 
de  nouveau  pill^  et  ravage.  Antio- 
chus revint  dans  ses  £tats  pour  atta- 
quer les  £gyptiens  et  les  cnasser  du 
pays  {***),  xTn  traite  de  paix  et  un  ma- 
riage  projet^  entre  GI6op§tre,  fille  d' An- 
tiochus, et  le  roi  Ptolem^  £piphane,  mi- 
rent  un  terme  a  cetteguerre  desastreuse. 

CAUSES  DB  LA  GUBBBB  D*ANT10CHU8 
coif  TEE    LBS   BOMAIirS  ;  ANRIBAL    EN 

OBiBNT.  —  L'ambassadeur  d'Antiochus, 
Eucles  de  Rhodes^  charge  de  discuter  h 
Alexandrieles  conditions  de  la  paix.  avait 
tromp^  les  £eyptiens  par  d'artificieuses 
promesses.  11  leur  repr^sentait  qu* An- 
tiochus, en  attaquant  les  villes  grec- 

rpJaiUn.XLf,  s.  • 

(**)  in  prmeipw  vm»,  pfwiNum  terra  cum 
extreiiupiit  duobtu,  Ardpe  ae  MUhridaie, 
Jnsu§fue  SardibtiM  «e  opperiri,  ip$€  cum  claue 
eenium  lectarum  navnun,   ad  hoc 


leviaribui 
ncvigiit  eereurU  ac  temhit  ducentU,  pro/leisei' 
tttt.  Tlle-Uve,  XXXIII.  19. 

p.  4S9,  b.  ^  ChampolUoa-Flgpac ,  ibid,  £|^pte 
•Dcienne,p.4S7,R,  5. 


ques  de  TAsie  Mineure,  se  dMonuut* 
geait  de  la  perte  des  provinces  doonte 
en  dot  ^  sa  fille.  Les  villes  menace,  ne 
pouvant  plus  compter  sur  les  secours 
de  TEgypte,  reclamerent  la  protection  de 
Rome.  Antiochus  6tait  alors  en  Thrace; 
il  cherchait  k  fonder  en  Europe,  sousia 
d^|)endance  de  Tempire  syrien,  un 
royaume  particulier,  dont  la  capitale  se- 
rait  Lysimachia,  et  le  premier  roi  S^ 
leucus,  fils  d* Antiochus.  «  Ce  fuijusie- 
ment  dans  le  temps  qu'il  formait  tous 
ces  projets,  qu*amv^nt  en  Thrace  les 
ambassadeurs  remains.  Us  le  reneon- 
tr^rent  k  Selymbria ,  ville  du  pays.  lis 
^taient  accompagn6s  de  quelques  d^a- 
t^s  des  villes  grecques  d'Asie.  Dans  les 

(premiers  entretiens  qu*eat  le  roi  avee 
es  ambassadeurs,  tout  se  passa  en  civi- 
lity qui  paraissaient  sinc^res:  mais 
{|uand  on  commen^a  k  traiter  d*affoires, 
es  choses  changdrent  bien  de  face.  L. 
Cornelius  ScipLon,  qui  portait  la  parole, 
demanda  qu' Antiochus  rendltli  VUMmbt 
toutes  les  villes  de  I'Asie  qu*il  avait  usur- 
ps sur  lui;  qu*il  6vacuat  toutes  celles 
qui  avaient  appartenu  k  Philippe,  n*e- 
tant  pas  juste  qu'il  recueilitt  les  Ihiits 
de  la  guerre  ^ue  les  Romains  avaient 
eue  avec  ce  prince;  qu*il  iaissAt  en  paix 
les  villes  grecques  de  TAsie  qui  jouis- 
saient  de  Teur  liberty.  11  ajoutaque  les 
Romains  ^taient  fort  surpris  qu'An- 
tiochus  eM  pass^  en  Europe  avec  deia 
armto  si  nombreuses,  de  terre  et  de 
mer.  et  qu'il  r^tabltt  la  ville  de  Lysi- 
machia, entreprises  qui  ne  pouvaieni 
avoir  d^autre  but  que  de  les  attaquer. 
Antiochus  rtoondit  a  tout  cela  que 
Ptolto^  aurait  satisfaction  quaod  son 
mariage,  qui  eUit  deji  arr^t^,  s'accom- 
pllrait;  que  pour  les  villes  srecquei  qui 
demandaient  a  conserver  Teur  libertt, 
c'etait  de  lui  qu'eiles  la  devaient  tenir ,  el 
non  des  Romains.  A  I'^ard  de  Lysi- 
machia, il  dit  qu'il  la  reratissait  pour 
servir  de  r^idenee  k  son  flis  Sdeucos; 
que  la  Thrace,  et  la  Gherson^e  qui  en 
laisait  partie,  ^ient  k  lui;  qu'^etles 
avaient  6t^  conquises  sur  Lyninaqae 
par  S^leucus  Nicator,  un  de  ses  anodties, 
et  qu'il  y  venail  comme  dans  son  lieri» 
tage ;  que ,  pour  I'Asie  et  les  villes  qu'fl 
avait  prises  sur  Philippe ,  it  ne  savait  pas 
sur  quel  titre  les  Romains  pr^teodaient 
lui  en  disputer  la  possession;  qu'il  les 


SYRIE  ANCIENNE. 


49 


iriait  de  Ae  se  pas  plus  m^ler  des  affaires, 
de  TAsie,  qu'ii  ne  se  no^lait  de  cedes  de 
lltaJie.  Les  Romains  ayant  demand^ 
aa'oa  Ht  eotrer  les  ambassadears  de 
amyrne  et  de  Lampsaque,  on  le  leur 
permiL  Ges  ambassadeurs  tinrent  des 
diseoursdoDt  la  liberty  of feosatellement 
Afitioebtts,  qu'il  s'emporta  violemment , 
et  8*toia  que  les  Romains  n'6taient 
poiot  jiH^de  ses  affaires.  L^assemblee 
86  lepara  eo  desordre :  aacun  des  partis 
n'eut  satis&etion,  et  tout  prit  le  train 
d^une  ruptare  ouverte.  Pendant  ces  u^- 
goeiaUons,,  it  se  r^pandit  un  bruit  que 
Ptolemee  Epipbane  ^tait  mort.  Antio« 
chus  se  erut  aussitdt  mattre  de  !*£- 
gvpte,  et  se  mit  sur  sa  flotte  pour  en 
atler  prendre  possession.  11  laissa  son 
Ills  S^cus^  Lyaimaehia  avec  Tarm^, 
poor  acbsver  ce  qu'il  s'^tait  propos6  de 
ce  fdte-la.  U  alia  aborder  a  Ephese , 
ou  il  joigmt  a  sa  flotte  tous  les  vaisseaux 

3u*il  avail  dans  ce  port « daus  le  dessein 
e  s'araoeer,  en  toute  diligence ,  vers 
rig^pu.  En  arrivant  a  Patare,  en 
Lycie,  il  eut  des  nouvelles  certaines  que 
le  bmit  de  la  mort  de  Ptolemee  (gtait 
fiux.  II  alia  done  vers  File  de  Cypre, 
dans  ledestetn  de  s*en  saisir.  Un  orage 
qui  survint  lui  ooula  k  fond  plusieurs 
vaisseaux,  lui  fit  perir  bien  du  monde, 
et  rompit  ses  mesures.  II  se  trouva  fort 
heureox  de  pouvoir  entrer  avee  les  debris 
desa  flotte  dans  Sdeucie,  ou  il  la  tit  ra- 
doober,  et  s'en  alia  passer  Fhiver  a 
Antioehe,  sans  rien  entreprendre  de 
noQVfaacette  anoxia  (196)  (*).  » 

Telles  etaient  les  dispositions  d*An- 
tioebus  a  regard  des  Remains,  quand 
Aonibal  arriva  h  Antioche.  Le  roi  venait 
de  partir  pour  £pbese;  Texil^  deCar* 
tbage  le  suivit  dans  cette  vilie ,  et  recut 
de  son  h6te  royal  un  aceueil  honorable. 
Antiocbus  s^assoda  k  sa  haine  centre 
les  Remains;  roais,  avant  de  commencer 
la  guerre,  il  voulut  se  meoager  Tappui 
des  rois  de  TOrient  par  des  alliances  de 
famille.  II  conduisit  GItopdtre  a  Raphia, 
poor  la  remettre  eiitre  les  mains  de  Pto- 
lemy, et  abandonna  h  son  gendre  la 
Palestine  et  la  Goel^yrie ,  en  se  reservant 
hoioitie  des  revenus,  Ensuite  il  conclut 
le  manage  de  sa  fiUe  Antiochisavec  Aria- 
mfae,  roi  deCappadoce.  Seul,Eumene, 

f')Toy.  RoIUd,  qui  suit  encore  id  avecexactt- 
hifcles  aatears  andens,  t.  VU1,  p.  7,  8,  9. 

4*  Uvraison.  (sybie  ai^gibn r b.  ) 


roi  de  Pergame ,  malgr^  lesconseils  d' A  t* 
tale  et  de  PhileUre,  ses  frdresr,  refusa  la 
main  d*une  prinoesse  syrienne.  11  crai« 
gnait  la  vengeance  des  Romains. 

Quand  toutes  ces  negociations  furent 
termini,  le  roi  de  Syrie  mit  k  la  voile, 
et  arriva  en  Chersonese.  II  subjugua  une 
partie  de  la  Thrace,  etrendit  la  liberty  aux 
villes  de  cette contree.  En  m^me  temps, 
il  sot,  par  des  presents  et  par  Teclat 
de  sa  cour ,  attirer  les  Galates  dans  son 
parti.  II  envoya  son  fils  centre  les  Pisi- 
diens  ,et  iui-m^me  revint  a  £phese.  La, 
il  choisit  les  ambassadeurs  charge  de 
trailer  avec  lesenat  remain  :c'etaient  Ly- 
sius,  £g^ianacte  et  Menippe.  Ces  trois 
envoys  arriv^renta  Rome,  et  se  pre- 
senterent  devant  le  s^nat.  Menippe  prit 
la  parole.  II  reprocha'aux  Romains  leurs 
pretentionsexager^es,et.seplaignitqu'on 
traitdt  Antiocbus,  non  comme  uu  prince 
qui  recherchait  volontairement  leur  ami- 
ti6,  mais  comme  un  vaincu  qui  deman- 
dait  grice.  Le  senat  n'ecouta  point  ces  re- 
presentations; il  decida  settlement  qu'on 
enverrait  en  AsieSulpicius,  Villius  et 
iElius ,  pour  trait^^r  avec  le  roi  en  per- 
sonne.  Les  difficult^,  loin  de  s'aplanir, 
8*aggravaient  chaque  jour.  Rome  avait 
d^couvert  les  projets  nostiles  d'Antio- 
chus  centre  Tltalie,  et  ellesavait  qu*An- 
nibal  avait  envoy^  un  de  ses  agents  k 
Carthage  pour  former  une  ligue  offen- 
sive. En  outre,  on  apprit  que  r£to- 
lien  Dic^arque  s'^tait  present^  au  nom 
de  ses  concitoyens  a  la  cour  d' Antiocbus. 
Les  envoys  ae  Rome,  en  passant  par 
le  royaume  de  Pergame,  trouverent  dans 
Eumene  un  allie  tout  pr^t  a  declarer 
la  guerre  au  roi  de  Syrie.  Sulpicius,  ma- 
lade  ,  resta  a  Pergame.  Villius  continua 
son  voyage ^t  arriva  a  £phese.  Le  roi 
^tait  en  guerre  centre  les  Pisidiens;  pen- 
dant son  absence ,  les  ambassadeurs  ro- 
mains visiterent  souvent  Annibal,  et  par 
des  apparences  d'intimit^  ils  le  rendirent 
bien  tot  suspect. 

Des  que  Villius  crut  avoir  sufGsam- 
jnent  compromis  Annibal  dans  Tesprit 
deson  bote,  il  alia rejoindre  Aptiocnus 
k  Apamee^  et  reprit  les  n^ociations. 
La  mort  du  jeune  Antiocbus  rompit  les 
conferences.  Ce  prince  ^Uit  aim^  de  la 
nation;  on  le  crut  empoisonne par  des 
eunuques.  Antiocbus  temoigna  beau- 
coup  de  regret  de  la  perte  de  son  ills. 

4 


» 


L'UNIVERS. 


Maig,  profltani  do  r^pit  que  les  Ro- 
mains  accordaient  a  sa  douleur,  it  ^uta 
les  coDseils  de  Minias,  son  confident. 
Minias  croyait  son  mattre  invincible. 
II  fut  char^^  de  repondre  a  Villius 
et  k  Sulpicius.  Son  discours  fut  vio* 
lent  et  nautain.  «  Vous  parlez ,  disait- 
il ,  de  readre  la  liberty  aux  villes  gree- 
ques ;  mais  vos  actions  contredisent  vos 
paroles.  Poui^uoi  traiteriez-vous  mieux 
les  cit^  d*A8ie  que  oelles  d'ltalie  et  de 
Siciie,  qui  sont  aussi  d^origine  grecque , 
et  ou  chaque  ann^  vous  envoyes  le 
pr^teur,  avec  la  hache  et  les  faisceaux  ? » 
Sulpicius  repartit  pour  Rome  avec  sea  col- 
legues.  La  guerre etait  imminente.  Antio- 
chus,  aveugl^  par  les  flatteries  d* A  lexan* 
dre  d'Acarnanieetde  toussescourtisans, 
m^itait  une  attaque  oontre  la  Gr^. 
Annibal,par  les  artiflcieuses  menees  des 
ambassacleurs ,  avait  perdu  la  confiance 
du  roi ;  il  futcependant  admisauconseil , 
et  reconquit  toute  son  influence,  en 
conseillant  la  guerre.  Les^toliens  mon- 
traient  la  mime  ardeur.  lis  envoyerent 
des  ambassadeurs  en  Asie,  et  s'eftbrcd* 
rent  de  rallier  tous  les  peoples  de  la 
Grece  sous  le  commandement  d*An-* 
tiochus. 

GUEBBB        D'aITTIOGHUS        CONTBB 

bomb;  combat  des  thebmopyles; 

BATAILLB     DB     MAGNESIB.    —  RomO 

declara  solennellement  la  guerre  h  An- 
tiochus  et  aux  £toliens  en  191.  Le  roi 
de  Svrie  venait  de  prendre  possession  de 
FEub^e;  il  alia  aD^m^triade  avec  toute 
sacour,  et  tint  conseil  dans  cette  ville. 
Annibal  voulait  qu*on  attaqudt  les  Ro- 
mains  dans  leur  propre  pays ,  et  qu'on 
forcdt  la  MacMoine  a  se  declarer  ouverte- 
ment  dans  la  querelle.  On^adopta  d'a- 
bord  cet  avis;  mats  les  g^neraux  grecs 
ou  syriens,  lesuns  par  timidity,  les  au- 
tres  par  jalousie  et  amour-propre,  s'ef- 
fray^rent  d'un  dessein  aussi  audacieox. 
Aussi  Tarm^e  asiatique ,  au  lieu  de  se 
niontrer  sur  les  fronti^res  de  Tltalie, 
fut  amende  par  Polyxenidas  dans  la 
Gr^ce  centrale.  Les  troupes  du  roi 
s'amus^rent  au  si^ge  de  Larissa ;  elles 
furent  repoussees  par  Bebius;  enfia 
le  vieil  Antiochus  ^pousa  la  tille  de 
Cl^optol^me,  a  Chalets;  les  fites  de 
flon  manage  Toccup^rent  pendant  tout 
Thiver  (*).  Cepeadant,  le  danger  de* 

(*)  Tanquam  in  media  pace  nupHas  celehrat. 


venait  imminent.  Le  consol  Adlinv 
s'approchait  a  grandes  journto  :  An- 
tiocnus  alia  camper  aux  Tbermopyies 
pour  Tarrlter.  Sea  allies,  lea  £toliens, 
occnpaient,  en  petit  nombre,  lea  tan* 
teurs  de  Callidh)me,  de  Rhodante  et  de 
Tichiante  (*);  le  roi  de  Syria,  avee 
environ  dix  mllle  hommes,  setenait  ea 
arri^re.  Gaton,  Tun  des  lieutenants  d' Aei- 
lius,  enleva  le  CallidronM ,  et  rejeta  les 
^totiensdans  la  vallte,  sarrarm&d' An- 
tiochus; bleas6  ^latlte,  aa  oominenoe- 
ment  de  la  m(^lee,  le  roi  s'eloigsa  da 
champ  d)e  bataille,  et  aa  retraite  rat  le  at* 
gnai  d'une  deroute  g^n^rale.  Dix  mille 
hommes  p6rirentdans  lea  prtoipicesou 
sous  les  coups  des  Roraaina.  Antlodius 
vaineu  se  retire  k  ^ph^e ;  vainemeniil 
voulut  tenter  les  chances  d'un  combatsar 
mer.  Polyx6nidas,  que  les  vents  contrai- 
res  avaient  emp^he  d*aborder  en  Greoe 
avant  le  combat  des  ThermopyleSt  recut 
Tordre  d'attaquer  la  flotte  romaiiie. 
II  la  rencontre  prte  de  Coryeus^  ea 
lonie;  mais  il  futbattu  parC.  Liviiiiy 
et  perdi t  vi  n^t-trois  vaisseaux.  Cet  ochee 
reveille  Tactiviti^du  roi :  ilenvoya  Anni* 
bal  en  Syrie  et  en  Ph^nicie  pour  6quiper 
une  flotte.  Mais  tous  ses  efforts  rureat 
inutiles.  L.  Cornelius  Scipion ,  le  noa* 
veau  consul ,  prit  terre  dans  le  port  de 
Pergame.  Les  Rhodiens,  surpria  par 
Polyxenidas,  avaient  perdu  vingt^neuf 
vaisseaux.  Pour  v^parercet  ^ohec,  ils 
bloquerent  Annibal  k  M^giste,  en  Pam- 
phylie.  Dans  le  m^me  temps,  i£milias 
atta(|ua  Polyxenidas  sur  les  cdtes  de 
I'lonie,  pr^s  de  Myonn^se;  il  prit  ou 
coula  h  fond  quarante-deux  vaisseaax. 
A  cette  nouvelle ,  Antiochus  donna  Tor* 
dre  aux  garnisons  de  Lysimachia  et  des 
villes  voisines  de  se  retirer  vers  le  midi  : 
c*etait  ouvrir  TOrient  aux  envahisaeurs. 
Les  Romains  trouv^rent  sur  leur  pas- 
sage des  villes  abondamment  pourvues 
d'armes  et  de  vivres.  Ils  traverserent  sans 
obstacle  la  Phrygie.  Voyant  Tennemi  aa 
centre  de  ses^tats,  Antiochus  ne  comp- 
tait  plus^uesur  les  succds  d'une  n^goeia- 
tion;  mais  Scipion  exigeatt  que  le  roi  se 
remit  sans  condition  au  pouvoir  dea  Ro- 
mains. 11  fallat  courir  les  chances  dHia 

Tit.  Ll7.,  XXXV,  If;  el  pins  Md  (I«)  i  ^»- 
hil  se  ex  Grtecia,  prater  anucna  Chakide  At* 
herna  tnfamesnuptia8,peti$9e,^ 
(•)  Tit  Llv.,  tWS.,  Id. 


SYRIEANCIENNE. 


51 


combat.  L^artn^  syrienne,  eampee  a  Ma- 
gn^'e^^tait  foFtedequatre-viDgt-deux 
mille  bommes.  Scipion  n'avait  que  deux 
legioos,  qui  formaieDt,  avec  les  Grecs  et 
les  allies ,  un  corps  de  treute  mille  sol- 
dats.  Mais  Tarm^e  romaine  etait  rassem- 
blee  sur  un  espace  assez  etroit ;  le  general 
poQvait ,  d'un  coup  d*oeil ,  embrasser 
les  moavements  de  toutes  ses  divi- 
aons.  Un  brouillard  epais  couvrait  la 
plaine.  L'humidite  de  Fair  detendit  les 
oordes  des  arcs ;  comme  les  archers  for- 
maientunegrande  partie  des  troupesasia- 
tiques,  cette  circonstaoce  contribua  en- 
core a  la  defaite  d'Antiocbus.  On  aurait 
rem6di^^  ce  desavantage  en  faisant  com* 
battrelessoldats  arm^  de  piques  etde  lan- 
ces. Au  coQtraire,  ils  seformerenten  pha- 
laoge  epaisse.  Les  hommes  des  premiers 
rangs  porent  seuls  prendre  part  a  Taction. 
Antiochos  perdit  plus  de  cinquante 
miUe  hommes  a  Magnesie  (190),  II  pritia 
fiiite,  el  ne  s*arr^ta  qu*en  Syrie  (*).  11  en- 
Toyak  Scipion  sod  neveu  Aatipater  et 
Zeuxis  comme  anabassadeurs.  La  paix 
fut  eondue  aux  conditions  suivantes  :  le 
roi  de  Syrie  abandonnera  toutes  ses  pos- 
sessions d^Europe  et  d'Asie  au  dela  du 
Taurus;  il  payera  tons  les  frais  de  la 
guerre,  c'est-a-dire  quinze  mille  talents 
eubolques ;  il  en  donnera  cinq  cents  comp- 
tant,  deux  mille  cinq  cents  apres  la 
ratification  du  traits  par  le  senat  et  le 
geuple  romain,  et  le  reste  en  douze  ans. 
En  outre,  il  acquittera  les  ancienoes 
dettes  contract^  envers  Eumene ,  ou 
eoTers  son  p^;  il  donnera  vingt  ota- 
ges  dioisis  par  les  Romains ;  il  livrera 
Aanibal,  TlK>as  r£tolien,  rAcarnanien 
Moas/mague  et  les  Cbalcidiens  Philon  et 
Eubalide  f*).  Annibal  avait  d^J^  pris  la 
fuite.  Les  ambassadeurs  d'Antiocbus 
partirent  pour  Tltalie  (189). 

Antiocbus  le  Grand  ne  survdcut  pas 
loogtemps  h  ees  re?ers.  Suivant  Au- 
i^lius  Victor,  il  avait  battu,  dans  I'i* 
Tresse,  queiques-uns  de  ses  officiers,  qui 
le  torrent  par  vengeance.  Une  autre  ver- 
sion^  plus  accr^t^,  raconte  differem^ 

(*}  jfd  quinguagifUa  mUtia  pediium  casa 
»  He  dieutUttr,  eqmittun  hia  millia;  mille 
^fodringenti  eajaif  etjptnuUcim  cum  reetori- 
^elepkanti.  TitUv.,  XXXVIl,  44, 

(•^j  U  roi  d«  Cappadoce,  qui  avait  donni  des 
wtBon  II  Anttochas,  fat  coodamn^  k  payer 
uoeatotateots  aax  Aomaiw. 


ment  sa  mort  (*).  Press^  par  le  besoin 
d'argent,  il  alia  dans  Tl^ymafde,  et  pilla 
le  temple  d'une  divinity  de  ce  pays.  Le 
peuple,  pouss^parle  ressentiment  de 
cette  injure,  se  jeta  sur  le  prince  et  le 
massacra. 

CHAPITRE  V. 

DECAOSNCE  BS  L^EMPIBE  DEB  S^LEU* 
CIDES.  —  CONQU^TB  DE  LA  STHIB 
PAH  LES  BOMAINS. 

BiCNE     DE    SELEUCUS  IV    PHILO* 

PATOB.—  Le  voisinage  des  Romains,  la 
surveillance  qu*ils  exer^ient  sur  les  rols 
de  rAsie,ne  permirentpas  k  S^leucus 
de  tenter  de  grandesentreprises.  II  ?oa- 
lut  soutenir  Pharnace,  attaqu6  par 
Eumene;  RomeVempressa  de  rappeler  au 
roi  de  Syrie  aue,  pourlul,  la  neutrality 
6tait  un  devoir. 

Seleucus  ^pousa  sa  soeur  Laodice,  qui 
6tBit  veuve  oe  son  propre  fr^re,  Antio- 
cbus, flls  atn6  d*  Anttocbus  le  Grand.  Elle 
eut  deux  enfants  de  son  manage  avec 
Seleucus;  un  fils,  D^m^trius,  et  une 
fille,  dppel6e  Laodice ,  comme  sa  mere. 
Lorsque  le  jeune  prince  eut  atteint 
r^ge  de  douze  ans,  son  pere  Tenvoya  k 
Rome .  Demetrius  allait  remplacer,  en 
quality  d'otage,  son  oncle  Antiocbus , 
que  le  roi  de  Syrie  d^sirait  revoir.  Le 
fr^re  de  Seleucus  vivait  en  Italic  depuis 
la  paix.  II  se  dirigea  vers  FOrient ;  maiSy 
lorsquMl  fut  k  Atnenes,  il  apprit  que  S^ 
leucus  venait  d*ltre  assassin^  par  son 
ministre  Heliodore.  La  mort  du  roi  de 
Syrie  arriva  h  la  fin  de  I'ann^e  174  (**}. 

BEGNE  d'ANTIOCHUS  IV  BPIPHA- 
ne;  EXPEDITIONS   AU    DELA  DE  L'EU- 

PHBATB.  —  Attale  et  Eumene  cbass^rent 
du  tr6ne  Tusurpateur  Heliodore,  et 
donnereiit  la  couronne  de  Syrie  k  Antio- 
cbus. Gelui-ci  r^nait  depuis  pen  de 
temps,  lorsgue  son  neveu  Ptol^m6e 
Philometor  fut  d^lare  roi  d'£gypte« 
II  envoya  k  la  cour  d'Alexandrie  Apol- 
lonius,  Tun  de  ses  conseillers,  et  le 
chargea  d'observer  la  disposition  des 
E^yptiens  a  Tegard  de  la  Syrie.  ApoUo- 
nius  d^uvrit  les  projets  bostiles  de  Pto- 

(•)  Jostio,  XXXII,  2.  •-  DIod.,  In  SxeerpL^ 
p.  296. 

i*^')  Fay.  pour  oette  dale  Saint-Marttn,  Bio§r. 
univ.yhtL  &'7eueti«.IV.— Manek,  UnivenpitL^ 
Palestine,  p.  491  et49a, 

4. 


5f 


L'UnIVERS. 


lemee,  et  en  rendit  compte  a  son  maitre. 
La  guerre  eclata  aussitot  entre  i'figypte 
et  la  S;rrie  (*). 

Antiochus  prodiguait  ses  tr^sors  en 
f6tes  el  en  debauches.  Le  boisde  Daphn6 
acquit  sous  son  regne  cette  scandaleuse 
reputation  qu  il  conserva  jusqu'aux  der- 
niers  temps  du  paganisine.  On  peut  voir 
dans  Oiodore  (**)  et  dans  Polybe  (***)  le 
tableau  des  turpitudes  dont  ce  lieu  ^tait 
le  thedtre.  Pour  fournir  aux  frais  de 
ses  plaisirs,  le  roi  d^pouillait  ses  sujets. 
II  alia  en  personne  dans  la  province 
de  Perse  pour  r^lamer  le  tribut.  Enfin, 
us6  par  des  exces  de  tons  genres,  il 
mourut  sur  les  frontieres  de  la  Baby- 
lonie  (****). 

Sous  le  regne  d* Antiochus  IV,  Tibe* 
rius  Gracchus  futenvoye  en  Syrie.  Le 
roi  requt  cet  ambassadeur  avec  respect, 
et  mil  a  sa  disposition  sonpalaisaAn- 
tioche. 

ANTIOCHUS  V  BUPATOR.  —  Lorsque 
Antiochus  V  monta  sur  le  trdne  (164),  il 
n'avait  que  heuf  ans.  Deux  honinies,  pen- 
dant sa  minority,  se  disputerent  le  pou- 
voir.  £piphane  avait  conGe  k  Phiiippe, 
son  ami,  la  tutelle  du  jeune  prince;  roais 
Lysias,  qui  avait  appris  en  Syrie  la  mort 
du  roi ,  proclama  Antiochus  V  succes* 
seur  de  son  pere ,  et  se  constitua  regent 
du  royaume.  Philippe  dut  chercher  un 
refuge  en  £gypte ;  il  passa  ensuite  en 
Perse,  puis  viuta  Antioche,  tandis  que 
Lysias  etait  occupe  en  Palestine ,  et  prit 
encore  la  fuite  lorsque  son  compel  iteur 
menaca  de  Tassieger  dans  cette  viilc.  Eu- 
pator tut  reconnu  par  les  Romains ,  mal- 
gre  lesefforts  de  Demetrius.  Rome,  pour 
donner  plusde  poids  ^sa  decision,  euvoya 
trois  ambassadeurs  en  Orient :  Cn.  Octa- 
vius,  Sp.  Lucretius  et  L.  Aur^iius.  Leur 

Eremier  soin  fut  d'ordonner  un  d^nom- 
rement  exact  dela  flotteetdes  Elephants 
de  la  Syrie.  Le  traite  de  190  avait  deter- 
mine le  nombre  de  vaisseaux  qu*Antio- 
chus  le  Grand  et  ses  successeurs  pour- 
raient  poss^der.  Des  Elephants  ^taient 

n  La  guerre  d*AnUoehas  oontre  l*£gyp(e  a 
66iii  Hi  racontto  dans  celte  coliecUun,  par 
M  Cbampollion  {BaypU,  p.  idA  et  sutv.).  Les 
malheurs  qae  la  Juuee  souffrit  pendant  son 
regne  oot  ele  e^leinent  decrits  par  M.  Mank 
(Palestine,  p.  492et8uiv.). 

(••)  Diod.,  in  Excerp.  Vales,  p.  321. 

^•**)  Polybe,  ap.  Jthen.^  V,  195. 

C*^)  Munk,  Palest.,  p.  409,  a. 


venus  recemment  de  Tlnde,  des  trire- 
mes avaient  ^te  construites  :  les  en- 
voy^s  tirent  tuer  les  uns  et  brdler  les 
autres.  Le  patriotisme  des  Syriens  pa- 
rut  s'irriter  de  cet  affront.  Octavius  fut 
assassine.  Le  senat  refusa  d'ecouter  les 
excuses  des  ambassadeurs  d'Rupator. 
Demetrius  crut  le  moment  favorable 
pour  rappeler  aux  Romains  ses  drpits  a. 
la  couronne  de  Syrie.  Mais  cette  fois 
encore  on  refusa  de  les  reconnaitre.  De- 
courag^ ,  le  pretendant  prit  secrete* 
ment  la  fuite,  et  s'embarqua  a  Ostie. 
Des  que  son  depart  fut  decouvert,  on 
envoya  sur  ses  traces  Tib.  Gracchus,  Luc. 
Lentulus  et  Servilius  Glaucia,  avee  mis- 
sion d'observer  les  sentiments  des  Orien- 
teaux  a  IV^ard  des  princes.  La  S^e 
tout  entiere  passa  du  c6te  de  Demetrius. 
Eupator  %t  Lysias ,  livr^  par  leurs  trou- 
pes ,  furent  mis  h  mort. 

DEMETRIUS  soTEB.— Lcuomde  Soter 
fut  donne  a  Demetrius  par  les  habitants 
dela  Babylonie.  Timarque  etait,  depuisle 
regne  d  Antiochus  Epiphape,  gouver- 
neur  de  cette  province;  Heraclide  reee- 
vait  les  impots.  Tons  deux,  ils  sereunis- 
saient  pour  opprimer  ie  peuple.  Timar- 

3ue  se  proposait  mime  de  s*affranchir 
e  Tobeissance;  D^m^trius  le  Ot  roou- 
rir,  et  bannit  Heraclide ,  qui  6tait  moina 
coupable.  Ce  prince,  pour  obtenir  Tas- 
sentiment  des  Romains ,  fit  degrandes 
promesses  aux  ambassadeurs  que  Rome 
entretenait  en  Cappadoce^  enfin  il  fut 
reconnu  roi.  Demetrius,  pour  t^raoigner 
sa  reconnaissance,  envoya  k  Rome  une 
couronne  pesant  dix  mille  pieces  d*or 
pour  le  senat ,  livra  aux  amis  d^Octavius 
son  meurtrier  Leptine,  et  Isocrate,  ora- 
teur  qui  avait  lou^  pubtiquemeDt  Tas- 
sassinat. 

11  se  forma  des  conspirations  contre 
D^m6trius;  elles  ^taient  eocouragees 
par  Ptolem^e  Philom6tor,  Attale  et 
Ariarathe.  Deux  hommes  y  preoatent 
surtout  une  part  active  :  Holopberne, 
autrefois  roi  de  Cappadoce,  et  Heraclide, 
Fancien  tr6sorier  oe  la  Babylonie.  Celui- 
ci ,  r6fugi6  k  Rhodes,  y  trouva  un  jeune 
liomme  uui  lui  sembla  convenir  en  tout 
point  a  rex^cution  de  ses  desseins;  c*e- 
tait  Balas.  Heraclide  le  fit  passer  pour  le 
fits  d'Antiochus  £piphane,  et  le  oon- 
duisit  k  Rome.  Les  Romains  d^uvri- 
rent  la  fraude,  mais  ils  se  pr^ttont  aux 


SYRIE  ANCIENNE. 


I^% 


MiKeavresd'Heraclide.Balas,  de  r^our 
eo Orient,  sejeta  dans  Ptolemais,  et 
sefit  declarer  roi ,  sous  le  litre  d* Alexan- 
dre, 61s  d*Antiochus.  Les  rois  d'^^pte, 
de  Pergame  etde  Cappadoce  lui  pr^terenl 
aide  et  appui.  II  eut  bientot  rassembl^ 
autotir  de  lui  des  forces  assez  conside- 
rables pour  lutter  avec  succ^s  contre 
celui  qu'il  voulait  d^trdner.  Enfin  il  livra 
une  grande  bataille  qui  6t  perdre  a  De- 
metrius la  couronne  et  la  rie(149). 

ALEXA?(DRE  BALAS.  —  Pour  affcrmir 
sur  le  trone  de  Syrie  Paventurier  quMt 
avail  deja  si  puissamment  aide ,  Ptole- 
meePhilometor,  roi  d*£gvpte,  lui  donna 
€D  manage  sa  fille  Cl^pdtre.  Alexandre 
Balas  ne  devait  pas  se  maintenir  long- 
temps  dans  le  haut  rang  o\i  le  hasafd 
plus  que  son  merite  Tavait  plac^.  II  se 
livra  avec  Aromonius,  son  ministreet 
son  romplice,  h  de  detes tables  exc^. 
Cruel  dans  ses  crafntes,  il  voulut  anean- 
tir  la  race  desSeleucides ;  mais  il  restait 
on  Gls  de  Soter,  qui  portait,  comme  son 
pere,  k  nom  de  Demetrius.  Ce  fut  lui 
aui  entreprit  de  venger  sa  famille.  Tan- 
ais  que  Balas  est  menac^  dans  son  propre 
palais  par  une  conspiration,  D^m^tnus 
p^etre  en  Svric  avec  des  troupes.  Bien- 
tot m^e  if  revolt  des  secours  du  roi 
d*£gypte.Alexandre,abandonn^detous, 
se  sauva  dans  le  pavs  des  Arabes.  Ge  fut 
Iaqu1lfattu^(l46). 

BCGRBS  BE  DEMETRIUS  11  I71CAT0B, 
D*AirTI0CHUS  THEOS,  DB  TRYPHON, 
BE  CLEOPATBB    ET  d'ANTIOCHUS    SI- 

BETtLs.  •-  Demetrius,  prince  faible  et 
corrompo,  montra  dans  Texercice  do 
poQvoir  autant  de  faiblesse  que  son  pr^- 
a^oesseor.  II  abandonna  le  gouveme- 
meot  a  Lastli^es.  Get  Stranger  avait 
rendu  au  roi  d^importants  services,  et 
la  reeonnaissance  de  D^m^trius  ^tait 
le  fondement  de  son  pouvoir.  Mais  Las- 
thenes  avail  on  e^nie  au-dessous  de  sa 
position;  il  affaiblit  la  Syrie  en  vou« 
laot  la  r^ormer.  Inspire  par  des  crain- 
tes  imaginaires  il  licencia  I'arm^e  sy- 
rienne,  etfit  des  anciens  soldats,  natu- 
rellementd^voues ,  des  ennemis  d^]ar68 
du  roi.  Sur  an  simple  soupcon ,  il  or- 
dnma  le  massacre  des  auxiliaires  ^p- 
liens,  et  ne  conserva  pour  la  defense  da 
pavs  que  des  troupes  grecques.  Des 
oiesares  aussi  impnidentes  excit^rent 
dans  Antioche  une  sourde  opposition. 


Jje  roi  et  son  ministre  crurentempdcher 
une  revolte  en  desarmant  tons  les  habi- 
tants ;  mais  ce  nouveau  coup  d'une  ty- 
rannie  ombrageuse  fit  6clater  le  mouve- 
ment.  Gent  vingt  mille  hommes  se  sou- 
leverent.  Leroi,  refugi^dans  son  palais, 
attendait  du  secours  de  Jonathan.  Trois 
mille  Juifs  accounirent  a  son  appel :  lis 
tuerentcent  mille  Syrlens,  etne  (]uitte- 
rent  Antioche  qu*aprea  Tavoir  pillec  et 
brai6e  (*). 

La  capitate  de  la  Syrie  pr^sentait  les 
apparences  du  calme,  mais  la  colere  des 
habitants,  comprim^  un  moment,  n'e- 
tait  pas  apaisee;  les  sanglantes  execu- 
tions qui  se  renouvelaient  chaque  jour 
entretenaient  encore  la  haine  des  An- 
tiochiens  contre  Demetrius;  ils  alten- 
daient  Toccasion  de  se  venger.  Ces  dis- 
positions du  peuple  encouragerent  Pam- 
oition  de  Trypnon  Diodotus,  ancient 
gouverneur  d'Antioche  sous  Alexandre 
Balas.  Tryphon  courut  en  Arabic,  ou 
Zabdiel  el'evnit  1p  fils  d*Alexandre,  et  se 
fit  remettre  lejeune  prince.  Les  troupes 
syriennes,  dont  Demi^trius  avait  me- 
prise  les  services ,  ouvrirent  Tentree  du 
pays  k  Diodotus,  et  le  condiiisirent  h  An* 
tioche.  Le  peuple  reronnut  le  descen- 
dant de  son  ancien  roi,  et  Antiochus 
surnomm^  Theos  prit  la  couronne.  De- 
metrius fut  defait  dans  un  combat  et 
force  de  s^enfecmer  dans  Seleucie  (144); 
il  ne  conserva  que  les  villes  du  littoral. 
Tryphon  songeait  dejh  a  profiter  pour 
son  propre  comptede  la  revolution  quML 
avait  «rig6e  au  profit  d* Antiochus.  1a 
fid^lite  de  Jonathan  6tait  le  seul  obstacle  a 
Fex^utionde  ses  desseins.  Ilfallait  done 
attaquer  les  Juifs  et  s^emparer  de  leur 
chef.  Tryphon  ne  recula  pas  devant  des 
moyens  peu  honorables  pourse  d^barras- 
ser  de  Jonathan,  qui,  fait  prisonnier  par 
trahison,  fut  ensuite  massacre  (**).  Peu 
de  temps  apres,  Antiochus  fut  assassin^. 
Sa  mort  livra  au  meurtrier  toute  la  par- 
tie  de  la  Syrie  qui  avait  abandonne  De- 
metrius. La  fortune  d^barrassa  Tryphon 
de  ce  dernier  adversaire. , 

D^m^trius  marcha  au  secours  des  co« 


(•)  Et  oeciderunt  in  ilia  die  etntum  miUia 
hominuM  et  tuccenderunt  civitatem,  et  ccpc' 
runt  spolia  *multa  in  die  ilia  et  liberaverunt 
eum.  Machab.,  I,  XI.  48.  —  V.  Mask .  p.  506. 

C*)  MuDk,  p.  607  et  606.  —  Machab,,  XII, 
IX,39,54,Xlfl,I,30. 


54 


LTNIVERS. 


lonies  greoques  de  la  rive  gauche  de 
TEuplirate,  et  s'engagea  dans  une  guerre 
contre  tes  Parthes  (142).  D'abord  victo- 
rieux ,  il  esj^^rait  reprendre  Antioche  et 
la  Syrie  orientate;  inais  les  chances  de 
la  guerre,  tournerent  contre  lui;  il  fut 
fait  prisonnier  et  v6cut  longtemps  dans 
une  captivity  honorable.  Ainsi  s*^tabiit 
la  puissance  des  Parthes.  !Nous  verrons 
bientdt  cette  nation  guerriere  traverser 
TEuphrate  et  desoler,  par  ses  incur- 
sions ,  le  pays  que  les  premiers  S61euei- 
des  avaient  ^Iev6  a  un  si  haut  degr^  de 
puissance  et  de  civilisation. 

La  Syrie  continua  a  reconnaltredeux 
inaftres.  CI6op^tre,  femmede  Demetrius, 
r^gnait  dans  S^leucie;  elle  ouvrit  les 
portes  de  cette  ville  k  tous  les  refugi6s 
qui  fuyaient  la  tyrannic  de  Tryphon : 
pour  anermir  sa  puissance,  elle  ^ousa  le 
frere  de  Demetrius,  Antiochus,  appel^ 
Sidetis.  Ce  prince  attaqua  Tryphon,  le 
vainquit  et  le  tua  (139). 

eUEfiBE  CONTRE  LES  PABTHES;  LA. 
aUDEE  INDEPENDANTE  BE  LA  SYBIE ; 
BBTOUB  J>E  DEMETBIUS.  —  AntiochuS, 

seul  mattre  de  la  Syrie,  combattit  les 
Juifsn  etfit  la  guerre  aux  Parthes.  Le 
Toisinage  de  ce  peuple  troublait  la  s^cu- 
rite  des  Syriens;  ii  s*agissait  de  le  re- 
pousser  des  bords  de  TEuphrate.  Une  ar- 
in^de  80,000  hommes  se  miten  marche 
pour  une  premiere  campagne.  Elle  trat- 
nait  k  sa  suite  des  fillesde  joie,  des 
artisans  qui  s*exer(aient  k  eurichir  les 
v^tements  et  ra^me  les  chaussures  des 
soldats  des  m^.taux  les  plus  precieux ; 
enfln  une  foule  de  cuisiniers  qui  prepa- 
raient  dans  des  vases  d'or  et  d'argent 
^e&  mets  exquisetrechercb6s.  Antiochus 
fut  victorieux;  soutenu  par  Hyrcan  et  par 
les  Juifs ,  par  les  populations  de  la  Medio 
et  de  la  Babylonie,  que  les  souvenirs 
encore  r6cents  de  la  domination  des  S6- 
leucides  rattachaient  a  la  cause  des 
Syriens,  Antiochus  repoussa  les  Parthes 
jusque  dans  les  montagnes  ou  ils  avaient 
T^cu  longtemps  inconnus.  Mais  la  mau- 
vaise  organisation  de  farm^e  causa  bien- 
tdt des  malheurs  faciles  h  pr6voir.  Pour 
entretenir  un  luxe  insatiable,  les  sol- 
dats  opprimaient  les  peuples  auxquels 
i)s  devaient  leur9  victoires.  La  reaction 
fut  terrible.  Au  jour  convenu,  les  ha- 

C)  Voyez  poar  ies  alfaires  de  la  PalesUne, 

Muok,  p.  609,610. 


bitants  des  provinces  nouvellement  r&^ 
nies  a  la  monarchie  syrienne  entou- 
rent  les  corps  s6pares  de  Tarm^e  d' An- 
tiochus et  les  enveloppent  dans  un  mas- 
sacre g^n^ral.  Le  roi  accourt  avec  quel- 
ques  troupes  au  secours  des  quartiers  les 
plus  rapproch^s;  mais  il  arrive  trop  tard. 
Les  ennemis  se  jettent  sur  son  escorte 
etle  tuent;  ses  restes  furent  renvoyes  en 
Syrie.  Sa  (ille,  tombee  au  pouvoir  des 
Parthes ,  6pousa  Phraate  H  (130).  I^ 
Parthes  avaient  rendu  la  liberty  a  De- 
metrius; ils  serepentirentbicntot  deleur 
gi^n^rosit^.  Pbraate  voulut  reprendre  son 
prisonnier,  mais  les  cavaliers  parthes  en- 
voy es  a  la  poursuite  du  roi  ne  pureot 
Tatteindre.  uhs  lors  les  Syriens  avaient 
un  chef  pour  arr^ter  les  progres  de  Ten- 
nemi. 

Des  ^vdnements  nouveaux  remuaient 
rOrient.  Les  Juifis  avaient  proclame  leur 
ind^pendance.  Deja  leur  cnef  Hyrcan  se 
rendait  mattre  des  villes  fronti^res  de  la 
Syrie.  Les  Parthes  etaient  engages  dans 
une  guerre  contre  les  Scythes;  en  mtoe 
temps  des  luttes  intestines  ensanglan- 
taient  TJ^g^pte.  Dans  ce  pays  un  parti 
appeiait  Demetrius  au  trone!  Le  roi  de 
Syrie  alia  mettre  le  siege  devant  Peluse 
(128).  Son  depart  fut  le  signal  de  la  re- 
volte  dout  Antioche  et  Apamee  etaient 
le  foyer.  Elle  rappela  Demetrius  de  son 
exp^ition  d'£gypte. 

MOBT  DE  DEMETBIUS  NIGjIlTOB; 
ALEXANDBE  ZEBlNiJS;  GLEOPATBE  ET 

SES  FiLS.—  La  Judee  augmentait  encore 
les  embarras  du  roi  de  Syrie ;  elle  avait 
envoys  une  ambassade  a  Rome.  Sur 
sa  demande  le  scnat  defendit  a  Deme- 
trius de  traverser  la  Palestine  avec  son 
arm^e.  Demetrius  dut  se  soumettre  aux 
volont6s  de  Rome.  Sa  position  dtait  pr6- 
caire;  le  roi  d*£gypte,  Ptolemee  Physoon, 
envoya  aux  vilies  revoltees  le  His  d'un 
petit  marchand  d'Alexandrie  nomme 
Alexandre  Zebinas  (**).  Ceuit  un 
homme  de  talent  et  dont  le  caractto  ne 
manquait  pasdegrandeur.  II  battit  son  ri- 
val pr^  de  Damus.  Demetrius  Nicator, 
force  de  prendre  la  fuite,  espera  trouver 
un  asile  dans  Ptolemals;  sa  femme  y 
commandait.  Mais  celle-ci  n'avait  pas 
pardonne  a  son  epoux  Foutrage  qu'il  lui 

C*)  Monk,  p.  511.  —  JosUn,  XXX VIU,  9, 10; 
XXXIX   I. 

■  (**;  Zebinas^  c*esl-a-djrc  achete  a  Vencan, 


SYRIE  AKCIEimE. 


u 


ifutfait  en  ^pousant,  pendant  son  U- 
jour  diez  les  Parthes,  la  princesse 
Rhodogune.  Elle  saisit  celte  occasion 
de  sa  venger,  et  ferma  lea  poites  de  la  yille 
a  Demetrius.  Le  rot  fugitif  se  dirigea 
vers  Tvr,  ou  il  fut  \u6  (195). 

G^plitre  et  Aieiandre  Zebinaaae  par* 
tagerent  la  Syrie  par  une  convention 
tacite.  La  veuve  de  D6m^trius  fit  re- 
eonnaftre  eomme  roi  son  file  a!ne« 
Seieucus.  Mais  bioitdt  elle  eraignit  que 
lejeuneroi  ne  vouldt  tirer  vengeance 
de  la  mort  de  son  fhre ;  elle  se  debar* 
lasaa  de  cette  inquietude  par  un  meur- 
tre  (134).  Cependant, sa  puissance avait 
beacHD  d'unappui.  LesSyriens  ne  suppo 
taient  qu'avec  repugnance  la  domma- 
tioQ  d'une  femnfie.  Cl^pAtre  tira  d'A« 
thtees  son  second  fils,  pour  le  faire 
monter  sor  un  tr^ie,  souill^  du  sangde 
aes  plus  proches  parents.  AntiochuSt  que 
aes  fUttotrs  nomroer^t  £piphane,  et 
que  le  pcaple  appela  Grypus  (*),  avait 
environ  nngt  ans,  lorsque  sa  mere 
lui  donoa  ie  titre  de  roi.  Elle  esp^rait 
eooserrer  la  suprtoe  puissance ;  elle 
eomptait  m^me  se  d^aire  du  fr^  de  S6- 
leueos  par  un  nou veau  crime,  des  que  Ze- 
binas  ne  serait  plus  h  craindre.  Mais  r£r 
gyptien  se  maintc^nait  en  Syrie.  Quelque 
tempa  apres  la  mort  de  D^m^trlus,  Lao- 
dicee  avait  reconno  Seieucus;  Alexan- 
dre vint  aasi^ger  cette  ville ,  la  prit  et 
pardoiina  aux  habitants.  Mais  enfin 
la  fortune  tourna  contre  lui.  Ptolemte 
Physcon  it  alliance  avec  CI6opdtre ,  sa 
iM^ee^et  lui  envoya  de  nombreux  se- 
eours  contre  un  homme  que  la  protec- 
tion de  rtgypte  avait  ^lev^  au  rang  su- 
Srtoe  en  ^ne.  Poorresserrerks  liens 
e  funion  de  G^opitre  et  de  Ptol6- 
m^,  le  jeune  roi  Antiocfaus  6pousa  Try- 
pbtee«  princesse  d*£gypte.  Zebinas  se 
nrt6parall  a  soutenir  la  lutte.  II  rassem- 
blait  Targent  n^eessaire  pour  TentretieD 
des  troupes  et  pour  les  premiers  be- 
soins  de  la  guerre.  Mais  les  contribu* 
tioos  des  villes  ne  purent  remplir  le 
tresor.  Zebinas  ne  eraignit  pas  de  d^- 
pouiller  ies  dteux ;  il  s'empara  des  ri* 
chesses  renferm^es  dans  le  temple  de  Ju- 
piter. Les  habitants  d*Antioche,  indi- 
goes  de  ce  sacril^,  forc^rent  le  roi  ill 

n  Grtf/nt**  c'ctt-A-dire  qui  a  trn  nez  tiquilinm 
Uhhtorien  Josepbe  loi  donoe  le  Dom  de  Philo- 
■i*tor(Uv.  Xin,  cH), 


guttter  la  ville.  Le  soulevement  enleva 
a  Zebinas  tous  ses  partisans ;  abandonn6 
des  Svriens,  ce  prince  tomba  bientdt 
entre  les  mains  des  ennemis\  qui  le  tu^ 
rent.  Par  la  mort  da  son  adversaire, 
Antiochus  resta  seul  maitre  de  la  Syrie; 
il  entrait  dans  un  Age  oik  la  soumission 
aux  volenti  absolues  d*une  mere  deve- 
nait  plus  difficile.  Gl<k)pdtre  i!*h^ita 
pas  devant  un  crime  :  elle  r^solut  de 
mettre  sur  le  trdne  k  la  place  d*An- 
tiochus ,  son  troisieme  fils  qu'elle  avait 
eu  d' Antiochus  Sidet^.  Mais  le  roi  se 
d^fiait  des  secrets  desseins  de  sa  mere. 
Un  jour  que  Cl^pAtre,  au  retour  de  la 
ohasse,  lui  pinisentait  un  breuvage  em- 
pdsonn^,  i|/>a  pria  de  porter  d*abord 
la  coupe  a  sis  l^vres.  CI6opdtre  h^ita, 
et  d^ja  les  courtisans ,  muets  t^moins 
de  cette  sc^ne,  p^n^traient  le  terrible  se* 
cret  cach^  sous  les  refus  de  la  reine. 
Elle  prit  enfin  la  coupe,  et  mourut, 
120  (*). 

ANTIOCHUS  OBYPnS  ET  ANTIOCHUS 
DB  CYZIQUE;  mort  be  CLiOPATRE 
ET  DE  TBYPRtNE;  RAPPORTS  DE  LA 
SYRIE    AYBG  LA  iUDBB  ET  AYEG   L'i- 

GYPTE.  —  II  ^talt  dans  les  destinies  de 
la  Syrie ,  au  second  siecle  avant  Jesus- 
Christ,  de  se  voir  continuellement 
disput^e  par  des  ambitieux.  Quelques 
ann^s  aprds  la  mort  de  GleopAtre, 
une  nouvelle  guerre  civile  d^chira  le 
royaume  des  Seteucides.  Cleopdtre  avait 
eo'un  fils  de  son  mariage  avec  Sidetes. 
Lorsque  D^m^trius  sortit  de  captivite, 
craig:nant  pour  Ips  jours  de  cet  enfhnt,  elle 
Tavait  confix  a  Teunuque  Crat^re,  qui  le 
conduisit  a  Cyzique.  Le  jeune  Antio- 
chus  prit  de  la  ville  oh  il  avait  trouv^  un 
refuge, le  surnom  de  Gyzic^nien.  Apr^ 
la  mort  de  sa  m^re,  il  continua  a  vivre 
dans  la  retraite  et  dans  Tobscurite ,  jus* 
qu'au  moment  oi^  les  dangers  que  son 
nom  attirait  sur  lui  le  d^termin^rent  a 
sortir  de  sop  exil.  Grypus  avait,  en  ef- 
fet,  tent^  de  faire  empoisonner  son  frdre 

<*)  Le8  aateonaneieiM  oe  s'aooordent  pas  tar 
les  circoDstancet  qui  pr^c^dirent  ou  accom pa- 
snirentia  morl  de  CleopAtre.  JustiD  (  XXXVI, 
XXXVin,  XXXIX  ),  I'auleur  du  Ihre  des  Ma- 
chabiet  { 1. 1,  c.  II,  IS,  li,  16),  Josiphe  ( JnL 
Xni )  et  Appieu  itib.  Syr.  in  fin, )  rapporlent 
d'une  manfere  dilrerente  les  (^'venements  qui  se 
Dass^reot  en  Syrie  sous  Demetrius ,  Tryphoa, 
Sidet^ ,  Grypus  et  CleopAtre.  Nous  avons  pris 
de  ces  historleos  oe  qui  qous  aembie  ie  plus 
vraisemblabte. 


69 


LUNIVERS. 


Ut^rin;  d6s  circonstances  impr^vues 
permirent  au  Gyzic^nien  de  se  venger. 
Ptolemee  Lathvrc,roi  d'j£gypte,  venait 
de  repudier  Cleopdtre,  sa  femme,  soeur 
de  Tryph^ne,  qui  partageait  avecGrypus 
le  trdne  de  Syrie.  Gleopdtre  offrit  sa 
main  a  Antiochus.  Le  mariage  fut  c^- 
l^bre;  et  la  guerre,  cons^uence  imm^ 
diate  de  cette  union,  ecfata  en  Syrie 
(113).  Ijes  deux  fr^res  se  livrerent  ba- 
taitie.  Antiochus  de  Cyzique  fut  vaincu, 
et  contraint  de  quitter  le  pays  oik 
ii  avait  esp^r6  fonder  sa  puissance;  il 
n*eminena  pas  sa  femme  avec  lui ;  mais 
li  la  laissa  aux  Antiochiens ,  oomme  un 
gaffe  de  son  prochain  retour  en  Syrie. 
FoTle  et  imprudente  confiance!  Assie- 
gee  dans  Antioche,  mal  d^fendue  par 
une  population  qu*aucun  lien  d^amour 
n'attachait  a  elle ,  Cleopdtre  esp^ra  que 
les  dieux  la  firotegeraient  mieux  que  les 
hommes.  Elle  se  retira  dans  un  tern* 
pie ,  lorsque  les  ennemis  forc^rent  les 
portes  de  la  ville.  Grypus  ^tait  bien 
d^cid^  a  ne  pas  violer  le  lieu  saint  ou 
Cleopdtre  s'^tait  choisi  une  retraite.  Sa 
compassion  fut  fatale  a  la  reine.  Try- 
phene  soupi^onna  une  liaison  secrete 
entre  Cleopdtre  et  son  mari ;  emportee 
par  une  aveugle  jalousie,  elle  resolut 
la  perte  de  sa  proprc  soeur.  Grypus  ne 
put  arr6ter  les  projets  de  sa  femme. 
Des  soldats  furent  envoy^s  dans  le  tem- 
ple, oijI  ils  trouverent  Ci^opStre  aux 
pieds  de  la  divinite,  dont  elle  tenait  les 
genoux  ^troitement  embrass^  :  pour  la 
detacher  de  Timage  sacree,  on  fut  forc^ 
de  lui  couper  les  poignets ;  elle  fut  im- 
pitoyablement  massacree. 

La  derniere  parole  de  la  victime  avait 
6t€  un  cri  de  vengeance ;  sa  voix  fut  en- 
tendue.  Antiochus  de  Cyzique  revint 
avec  une  armee;  vainqueur  dans  cette 
seconde  lutte ,  il  fit  Trypbene  prison- 
nidre;  et  la  soeur  de  Cleopdtre  expia 
son  crime  dans  les  supplices  ( 112 ).  Le 
Cyzic^nien  gouverna  la  Syrie  pendant 
le  temps  n^cessair«  a  Grypus  pour  ras- 
sembler  de  nouvelles  forces.  Au  bout 
d*un  an,  ce  dernier  quitta  Aspendus, 
ville  de  Pamphylie,  et  rentra  en  Syrie. 
Le  pays  fut  divis^  entre  les  deux  freres. 
Grypus  laissa  a  son  rival  la  Coelesyrieet 
la  Pb^nicie ;  Damas  devint  la  capitale 
du  nouveau  royaume  (111). 

L'ann6e  suivante  ( 1 10 ) ,  le  roi  de  Da- 


mas intervint  dans  les  afifetresdes  Jmfs. 
Son  expedition  sor  Samarie  ne  fut  pas 
beurense  (*). 

Durant  cette  p^ode ,  d'odieuses  in* 
trigueset  une  suite  continuelie  de  crimes 
remplissaient  le  palais  d*Alexandrie.  La 
couronne  d*£gypte  passait  de  mains  en 
mains.  Ptolemee  Lathyre,  chasse  ^ 
sa  propre  mere  de  son  royaume,  Tint 
demander  au  Cyzic6nten  des  secoun 
pour  rentrer  k  Alexandrie.  Ce&  relatipos 
mspiraient  des  craintes  justement  fon- 
dees  ail  nouveau  roi  d'Egypteeta  Gleop^* 
tre,  m^  de  Lathyre.  Pour  Eloigner  la 
guerre  civile  de  r£gypte,  ils  s'efToree- 
rent  de  susciter  en  Syrie  une  nouvdie 
lutte  entre  les  deux  freres.  Pour  arriver 
a  ce  but,  Cl^opKtre  envoya  Selene, 
femme  de  Ptolemee  Lathyre,  an  roi 
d*Antiocbe.  Grypus  ^usa  la  prinoesse 
^jsyptienne,  qui  apportait  a  son  nou- 
veau mari  des  tr^sors  et  une  armee.  Selene 
etait  ambitieuse;  elle  fit  d^larer  la 
guerre  au  roi  de  Damas  (lOt).  Mais, 
apr^s  quelques  ann^es  d*hostilites,  An- 
tiochus Grypus  mourut  assassine  par 
un  courtisan,  nomm^  H^racl6on.  Le 
Cyzic^nien  profita  du  trouble  ou  cette 
mortplongeait  Antioche  pour  s'emparer 
de  cette  ville  (97);  ilvoulutconqucrirton- 
te  la  Syrie,  et  s'appr^ta  h  ecraser  d'an 
seul  coup  tous  les  fils  de  Grypus  (**)• 
Une  bataille  d^isive  fut  livree;  Antio- 
chus de  Cyzique  fut  pris  et  tue  par  ie 
jeune  S^leucus. 

LES  FILS  DE  GBYPUS  ;  TIGBAWB  BOI 
DE  SYBIB ;    LB  PAYS  HBDCIT  EN  PBO- 

viNCE  BOMAiNE.  —  De  nouveauxcom- 
petiteurs  se  disputerent  la  couronne  de 
Syrie,  apr^  la  mort  d'Antiochus.  Les 
enfants  des  deux  princes  rivaux  com- 
mencerent  une  guerre  dont  le  resultat 
fut  Taffaiblissement  complet  du  royaa- 
me.  Antiochus  Eusibe  fut  dans  les  conh 
mencements  plus  heareux  (pie  ne  la- 
vait  6ti  son  p^re,  le  Cyzicteicn.  II  forp 
S^leucus,  son  ennemi  (93),  a  passer  en 


Cilicie.  Li ,  le  fils  de  Grypus  pousM , 
par  ses  intolerables  vexations,  les halH- 
tants  au  desespoir.  II  s'^tait  ^taWi  ^ 


{*)  NooBPenvoyons  Pour  ted^jlls  de  ««• 
guerre  aa  savant  oavrage  de  M.  «an»^  ^  i*» 

628, b. ) 

chaSf 
sias. 


*♦)  Grypus  avait  cinq  fils  :  S6l«ica»,  AdUj- 
18,  Phfifppe,  D&n^lrlus ,  et  AnUochus  Diooy 


SYRIE  ANCIENNE. 


ST. 


llopsoeste,  et  y  levait  des  contributions 
extraonfioaires;  il  esperait ,  a  Taide  des 
bieos  des  particaliers,  se  mettre  ea  ^tat 
de  DouToir  recommeacer  la  campagne. 
Uais  sa  rapacite  excita  an  soulevement. 
Le  peuplede  Mopsueste  prit  les  armes, 
Tiot  eotourer  la  deineure  du  roi  et  y 
mil  le  feu.  Seleucus  mouru  tdans  les  flam- 
mes.  II  trouva  des  ven^eurs  dans  ses 
freres.  Antiochus  et  Philippe  rassembl^- 
reotqoelques  troupes.  Les  revolutions, 
qai  aflligeaient  depuis  longtemps  la 
Syrie,  avaient  rempli  le  pays  d'hommes 
pr^  i  sumt  tous  ceux  qui  voulaient 
les  roeoer  an  pillage.  Antiochus  et  Phi- 
lippe firent  un  appel  a  ces  bandits,  et  les 
j^ereot  sur  Mopsueste.  La  ville  fut  d^- 
traite  a  les  habitants  massacres.  Au 
retoar  de  cette  exp^ition ,  la  petite  ar- 
meerencoDtra  Eusebe,  pres  de  1  Oronte ; 
elte  ae  pat  tenir  centre  des  soldats  biea 
disd^Unes.  Antiochus  perdit  la  vie  dans 
le  fleuve,  mais  Philippe  se  retira  en  bon 
ordre,  avee  laplus  grande  partie  de  ses 
houiiDes  (9?;.  Eusebe  n'ayant  pu  Tattein- 
dre,  Fouiot  au  moins  ruiner  ies  droits 
d*uo  oompetileur  qui  pouvait  devenir 
meoa^t ;  et  il  crut  arriver  h  ce  calcul, 
en  epousant  la  veuve  de  Grypus.  Ce  ma* 
riage  ne  pt  que  lui  creer  des  eoibarras 
inatteodos.  Selene ,  sa  nouvelle  epouse , 
avait,  a  la  mort  de  Grypus ,  retenu  sous 
MODouroir  des  villes  importantes,  d6* 
fenraes  par  des  soldats  qui  lui  ^talent 
d^vooes.  L'alliance  de  cette  princesse  et 
d'Eosebe  excita  la  jalousie  des  pr^ten- 
daois.  Le  premier  epoux  de  S^l^ne,  qui  vi- 
nit  encore,  Ptolem6e  Lath}rre,  comp- 
tait,  en  renooant  des  liens  brisks  depuis 
ioogtemps,  rattacher  la  Sy  rie  au  royaume 
dxgTpte.  Tromp^  dans  sesesp^rances,  il 
prit,  eomme  instrument  de  sa  colere, 
Mniltm  Euchere,  quatrieme  fils  de 
Giypus,  et  le  fit  roi  de  Damas.  Eusebe , 
attaqa^  par  les  £gyptiens  et  par  leur 
protege,  lutta  p^niblement  contrePhi* 
uppe  dont  les  forces  croissaient  chague 
^r.  Vainca,  il  alia  mendier  Thospita- 
nte  et  les  secours  des  Parthes;  ces  W- 
ktres  saisirent  Toccasion  d*attaqoer  les 
Synens.  Euchere  tomba  entre  leurs 
naiiu.  Mais  un  nouveau  prince,  le  plus 
JOiDedes  fils  de  Grypus,  Antiochus  Dio- 
njsos,  s'assit  sur  le  trone  de  son  frere 
p)^  Ainsi,  h  mesure  que  la  guerre 
cnlcTait  a  la  Syrie  un  de  ses  tyrans, 


d'autres  se  montralent  aussitdt  poor 
recueillir  Th^ritage  du  mort.  Les  cir* 
Constances  qui  semblaient  devoir  rame- 
ner  le  calmeet  la  paix  multipliaient  done 
les  fureurs  de  la  guerre  civile.  Le  com- 
merce etaitabandonn^,rancienne  pros- 
p^rite  de  la  Syrie  n'^tait  plus  qu'un  sou- 
venir;  rien,  enfin,  ne  faisait  pr^ager  un 
changement  dans  les  affaires.  Les  peu- 
ples  se  lasserent  de  tant  de  maux ;  ils 
r^solurent  de  chasser  les  Seleucides ,  et 
d'acheter  la  tranquillity  au  prix  de 
leur  ind^pendance.  La  Syrie  ne  se  sen* 
tait  pas  la  force  de  se  gouverner  par 
elte-m^me  et  sans  roi.  Elle  se  donna  k 
Tigrane,roid'Armenie.  Megadate com* 
manda  dans  Antioche  et  dans  Damas  aa 
nom  du  monarque  Stranger  (83).  Philip- 
pe disparut  alors.  Eusebe  trouva  une  re- 
traite  en.Cilicie.  S61eoe,  plus  adroite 

3ue  son  6poux ,  sut  conserver  le  midi 
e  la  Syrie  et  de  la  Ph^nicie.  Elle  ^leva 
en  paix ,  dans  son  petit  royaume,  deux 
jeunes  princes :  Antiochus  I  Asiatique  (*) 
et  Seleucus  Cybiosactes.  Les  autres  pro- 
vinces syriennes ,  reunies  h  I'Armenie, 
eureut  de  longues  annees  de  repos.  Les 
guerres  de  Mithridate  avec  Rome  rom- 
pirentunepaixquiduraitdepuisquatorze 
ans.  On  connatt  les  relations  de  Mithri- 
date avec  Tisrane ;  le  general  armenien , 
Megadate,  futchargdde  porter  secours 
au  roi  du  Pont  (69).  Le  fils  d'Eusebe, 
Antiochus  TAsiatique,  profita  des  evene- 
ments  dont  TAsie  Mineure  ^tait  alors  le 
tb^dtre;  il  apparut  en  Syrie  an  moment 
ou  les  Arm^niens  la  quittaient  pour  al- 
ler  d^fendre  leur  pays.  Son  nom  excita 
un  vif  enthousiasme  parmi  le  peuple,  qui' 
se  pr^cipitait  toujours  avec  ardeur  dans 
les  nouveaut^;  il  ressaisit  le  pouvoir 
que  ses  anc^tres  avaient  poss6d6  au- 
trefois. II  sut  se  maintenir  pendant 
quatre  ans  dans  la  Gommagene.  Mais 
lorsque,  en  65,  Pomp^,  victorieux,  se 
pr^enta  sur  les  hauteurs  du  mont  Ama- 
nus,  Antiochus  ne  put  arr^ter  sa  mar- 
che.  «  Pompee  descendit  dans  la  Syrie  ; 
«  et,  comme elle  n'avait  pas  de  rois  16- 
«  gitimes,  dit  Plutarque  (**),  il  en  fit 

(*)  Aotiochoa  VAnatique  est  aossi  appel^  sar 
les  medailles  Epiphanet,  Philopator^  CaUit^i- 
cuttXCommageniu.  f^off.  YBlllant;Sf/«ficirfa- 
rum  imperium  $ive  hUloria  regum   Syrim\ 


p.  407;  Paris,  1681. 
(••)  n«de  Pompee, Al, 


L'UWIVERS. 


«  uneproTioceromaine. »  Pomp6e  passa 
ensuiteen  Judee;il  visita  une  seconda 
fois  la  Syria,  au  printemps  suivant,  et 
donna  'a  oe  pays  uoe  administration 
toute  romaineC). 

1^  BI8T01BB  Dtt  LA  8YBIB  DBPUIS  LI 
COMQUETB  DB  CB  BOYAUMB  PAB  POM- 

PBE  iusqu'au  moment  ODLBS  PBO- 

VINGES  FUBBNT  PABTAOBBS  BNTBB 

AUGUSTB  ET  LB  strfAT.  —  Apres  le  re- 
tour  de  Pomp^e  en  Italie,  la  Syrie  fiit 
administr6e  successivement  par  Scau- 
rust  Marcius  Philippus,  Lentulus  Mar- 
celiinus  et  Gabinius.  Ges  gouverdeurs 
n'eurent  k  redouter  aucune  tentative 
des  princes  S^leueides.  Antiochus  finit 
ses  jours  dans  I'obscurit^  de  la  vie  pri- 
vee;  son  fr^re,  S^leucus  Gybiosactes, 
apres  avoir ^ous^  Berenice,  reine  d*£r 

/  ) ,  mourut  assassin^  par  sa  femme. 

>  cupidity  et  I'avarice  avaient  ^t^  lea 
seules  passions  de  ee  prince.  Lorsque 
Gabinius  sortit  de  charge,  la  Syria  rut 
6lev6eaiirangdeprovinceconsulaire(55). 
Grassus  en  obtint  pour  cinq  annees  le 
commandement. 

Depuis  guelquesann^s  les  Arabes  fai- 
saient  en  Syrie  des  irruptions  fr^quen« 
tes  (**);  Grassus  tenta  ae  les  repousser 
dans  leurs  deserts.  Sa  demiere  expedi- 
tion fiit  dirig^contre  les  Parthes.  Nous 
raentionnerons  les  faits  qui  se  rappor- 
tent  h  la  Syrie ,  et  qui  se  passerent  en 
de^  de  PEuphrate  (64  et  63). 

«  Grassus,  dit  Plutar  que  (***),  se  con- 
«  duisit  plutdt  en  commer^ant  qu'en 
«ff^n^ral  d*arm^,  ce  qui  lui  attiraun 
«  blAme  universe!.  Au  lieu  de  faire  la 
c  revue  de  ses  troupes^  de  les  tenir  en  ha* 
«  leine  par  des  exercices  et  des  jeux  mi- 
«  litaires,  il  s'amusa  pendant  plusieurs 
« jours  a  compter  les  revenus  des  viiles , 
«  k  peser  lui-oMme  k  la  balance  tousles 
« tresors  que  renfermait  le  temple  de  la 
c  d^se  d*lii^apolis.  II  envoyait  de- 

(')  jib  Jntiochemihua  peeunias  accipient 

Pompeius  civUatem/eeit  fli{rr6vo|iov honart 

mu  kabito  quod  ab  Mkeniemi^ut  oriaittem 
iuam  deducenmi;  aiiquantum  agrorum  Daph' 
ftensibut  dedit  quo  lucu$  quern  consecravit 
ibi  spatioaiarjleret,  delectatus  amtBnitate  loci 
et  a^uarum  abundantia.  Seleuciam  quoque 
Pienamt  vicinam  Antiochi^^  Ubertate  dona- 
wit ,  eo  quod  regem  Tigranem  non  recepUaet. 
Yaillaut ;  Selcucidarum  impei  ium,  etc.,  p*  4o4. 

.  (**)  P'oy.  NoCI  des  Yereen ,  dans  la  coUecUoa 
de  VUnivers:  Arable,  p.  06,  a,  b. 

{*"*)  rie  de  Crastu$,2'2. 


mander  aax  peuples  et  aux  viltes  des 
contributions  en  hommes  pour  recm- 
ter  son  arm6e;  et  ensm'te  il  les  exemp- 
tait  pour  de  Tarcent.  Gette  conduite 
le  rendit  m^prisabie  k  ceux  m^me  qui 
obtenaient  des  exemptions.  Le  pre- 
mier presage  de  ses  malbeurs  lui  vint 
de  cette  d6esse  d*Uierapolis,qui,  selon 
les  uns,  est  V6nus,  suivant  d*autres,  Ju- 
Don ,  et  que  quelques-  uns  assurent  ^re 
la  nature  meme ,  qui  a  tire  de  la  subs- 
tance bumide  les  principes  et  les  se- 
mences  de  tons  les  ^tres,  et  a  fait  con- 
nattre  aux  hommes  les  sources  de  tous 
les  biens.  Gomme  il  sortait  du  tenv 
pie,  le  jeune  Grassus  fit  une   chute 
sur  le  seuil  de  la  porte,  et  son  pere 
tomba  sur  lui.  Pendant  qu'il  rassern- 
blait  ses  troupes  de  leurs  quartiers 
d*hiver,  il  recutdesambassadeursd'Ar- 
sace,  roi  des  Parthes.  »  lis  portaient 
des  propositions  de  paix;  Grassus  les  re- 
poussa ,  et  se  mit  en  marche.  II  dirigea 
son  arm^esur  Zeugma;  1^,  en  passant 
r£uphrate ,  des  pr^sa^es  terribles  acca* 
blerent  encore  une  fois  I'esprit  des  sol- 
dats,  sanspouvoir  changer  les  desseins 
du  triumvir,  qui  s'enfon^a  r^oldment 
dans  le  pays  ennemi.  Peu  de  temps  apres, 
on  appnt  en  Syrie  la  fin  tragique  de  Gras- 
sus et  la  destrucfion  presque  complete  de 
ses  legions  (53).  Le  questeur  Gassius  et 
cinq  cents  cavaliers  avaient  abandonn6 
Grassus ;  ils  donn^rent  les  premiers  de- 
tails du  d^sastre.  LesSyriensse  prepare 
rent  a  repousser  une  invasion  qui  parals- 
sait  imminente.  Les  Parthes  arriY^rent 
en  effet  (52);  mais,  assez  nombreux  pour 
un  coup  de  main,  trop  faibles  pour  soote- 
nir  une  guerre  ouverte,  ils  ne  firent  que 
parattre  et  se  retirerent  presque  aussitdt 
au  dela  de  TEuphrate.  Gette  expedition 
sans  r^sultatne  d^ouragea  point  les  bar- 
bares.  II  paratt  qu*ils  entretinrent  des 
relations  avec  I'lnt^rieur  du  pays  jus- 
qu'au  moment  oil  des  forces  plus  impo- 
santes  leiir  permirent  de  tenter  s^ieuse- 
ment  la  conqu^te.  En  51,  Osac^s  et  Pa- 
corus  J  fils  du  roi  Orod^ ,  traverserent 
la  Svne  et  se  pr^sent^rent  devant  A  n- 
tiocne.  Gassius,  enfecme  dans    cette 
vifie,  les  attendait  sans  crainte.  La  si- 
tuation d'Antioche,    ses  fortifications 
imprenables  rendirent  inutiles  lesassauts 
des  barbares.  Pacorus  leva  le  siege  et 
YOulut  eontinuer  sa  marche;  mais  Gas- 


SYRIE  ANCIEKJSE. 


59 


aa  ^lait  tous  ses  mouvements;  H 
smile  moment  favorable  pour  sejeter 
surles  Perthes,  et  les  attaqua  a  Timpro- 
Tiste.  Osac^  fat  tu^  dans  an  engage- 
ment meurtrier.  Pacorus  retourna  en 
Uesopotamie  avec  une  armee  consid^ 
rablemeot  reduite. 

Bibalus  eut  radministration  de  la  Sy- 
ria apres  Cassius  (50).  II  ne  montra  pas 
eoDtre  les  Parthes  la  fermet^  et  le  cou- 
nge  doot  son  predecesseur  avail  fait 
preave.  Loin  dlnquieter  les  barbares,  il 
Ui  lai»a  pen^trer  dans  sa  province,  et  se 
tint  renferme  derriere  les  murailles 
d'Aotioche  (*),  ou  pneut-^tre  mSme  les 
Parthn  vinreut  Tassie^er  (**}.  Le  gou- 
veraear  teodit  des  pieges  aux  Parthes 
dans  leur  propre  pays,  et  sut  j^  exciter 
la  guerre  eiviie;  par  ce  moyen,  il  debar- 
Rsa  la  Syrie  des  ennemis  qui  la  rava- 
g^aient. 

De  ooaveaiu  malheurs  allaient  fondre 
sur  la  Sjrie.  Lorsqu*elle  fut  rdunie  a  la 
r^bliqueramaioe,  cette  province  res- 
teoUt  toutes  les  commotions  qui  pr^pa- 
r^tla  puissance  des  Cesars ;  et  cepen- 
daot,  elle  oe  fijt  le  th^tre  d'aucune  des 
grai'des  luttes  de  cette  ^poque  (49).  Au 
aomeot  ou  Pooip^e  et  Jules  C^ar 
iooaient  la  fortune  du  moude,  Metellus 
SeipioD  prit  possession  du  gouvernement 
de  Syrie.  Nous  trouvons  dans  C^-ar  (***) 
no  tableau  vivemeat  trac^  des  vexations 
dotti  ce  pompeien  accabla  I'Asie  Mi- 
Beure.  On  peut  soup^nner,  non  sans 
^Klqiie  fondemeot,  que  la  Syrie  fut 
andopn^daos  le  m&ne  systeme  d'exac- 
to  etdetjranDia.  •  II  imposa  de  gran- 
«  dasoaunes  aux  villes  et  aux  tyrans; 

*  i'  cxigea  des  publicains  le  payement 
«  de  dm  sondes  qui  etaient  echues ,  et 
«  Faranee  de  Fannee  suivante  par  forme 

*  d^empmot ;  puis  il  retira  de  ia  Sy- 

« rie  aa  eavakearie  et  ses  legions.  Les 
«  aoniroes  impon^es  k  toute  la  province 

*  Meat  exigees  avec  la  plus  grande  ri- 
•gnenr  :  la  eupidite  s*exer<^ait  sous 
« mille  formes  diverses.  On  mit  une  taxe 
■  nr  les  esdafes  comme  sur  les  hom- 


•jMAtrtNoenrm.  Cic^roo,  Epist,  adJlU  VI,  8. 

(  :HoiUbu$  Part hi§..,  qui poulo ante  M.Cras- 
g*  iwpgrBlorem  imier/eceroHt^  et  M,  Bibulum 

^i?"f  *«*«*»•««'•  Casar,  BeU.  civ.t  111,  «l. 

C")5ett.ciir.,UI,  31,32, 


«  mes  libres ,  sur  les  colonnes  et  sur  les 
«  portes  des  maisons  :  on  de manda  des 
«  fournitures  de  grains,  des  soldats,  des 
«  rameurs,  des  armes,  des  machines, 
«  des  chariots.  Tout  ce  qui  peut  avoir 
■^ «  un  nom  fut  convert!  -en  impdt.  On 
c  ^tablit  des  chefs  non-seulement  dans 
ft  les  villes,  mais  dans  ies  villages  et  les 
«  chateaux  :  le  plus  dur  et  le  plus  cruel 
«  passait  pour  I'homme  le  plus  ferme 
«  et  le  meilleur  citoyen.  La  province 
«  ^tait  remplle  de  hcteurs,  cragents, 
«  d'exacteurs  de  toute  esp^ce,  qui  ex<- 
«  torquaient  des  sommes  pour  leur  pro- 
c  pre  compte ,  outre  celles  qui  Etaient 
«  impos^es.  lis  disaient  que,  chass^ 
«  de  leurs  maisons  et  de  leur  patrie, 
«  ils  Etaient  denues  de  tout,  couvrant 
c  d*un  pretexte  honn^te  leur  infAme  con- 
«  duite.  A  ces  impositions  excessives  se 
«  joignait  encore  renormit^  des  usures, 
«  trop  ordinaire  en  temps  de  guerre, 
c  Le  delai  d*un  jour  paraissait  une  &- 

■  veur (*).  »  Ainsi  commenc^rent 

a  s*etabllr  les  contributions  ruineuses, 
qui,  restreintes  par  quelques  empereurs, 
augment^es  par  le  plus^rand  nombre, 
reduisirent  la  Syrie,  dans  les  sidles 
Suivants,  k  d'aflreuses  extr^mites. 

Cependant,  les  dispositions  de  Metel- 
lus SCipion  inquietaient  C^ar.  II  envova 
en  Orient  le Juif  Aristobule,  prisonnier 
diRome  (**).  L'agent  de  Cfear  fut  tue,  et 
Metellus ,  avec  une  flotte  eompos^e  en 
partie  de  vaisseaux  syriens,  alia  rejoin- 
dre,  en  Grece,  les  legions  de  Pompee^ 
et  combattit  ^  Pbarsale  (48). 

C^sar,  vainqueur,  vint  en  Syrie :  il 
donna  aux  habitants  des  preuves  de  cette 
bienveillancequ'il  t^moignaitaux  provin- 
ciaux,  et  (^ui  est  un  de  ses  principaux  ti* 
tres  de  gloire  (47).  II  confia  la  defense  du 
pays  a  une  legion,  promettant  peut-^tre 
aux  Syriens  de  revenir  bientdt,  ^  la  t^te 
d'une  puissante  arm^e,  et  de  refouler  les 
Parthes  dans  les  deserts  de  ia  haute  Asie. 
Mais  ses  int^r^ts  les  plus  pressants  I'ap- 
pelaient  k  Rome  et  en  Afrique.  O^sar 
traversa  la  Cilicie,  et  s*empressad'aller 
rejoindre  ses  ennemis.  II  confla  le  gou- 
vernement de  la  Syrie  h  Sextus  Cesar, 
son  parent,  homme  faible  et  m^pris^  des 
aoldats.  II  y  avait  aiorsen Orient,  parmi 

(*)  On.,  loc.  clL,  Uad.  Artaad ,  Mlt  Pan- 
coucke,  t.  Ill,  p.  4),  et  suiv. 
C«*}  Munk,  p.  &38. 


<<H) 


UUNiVERS. 


les  restes  du  parti  •de  Pomp^e,  un  che- 
valier romain  nomme  Cecilius  Bassus. 
Depuis  la  bataille  de  Pharsale ,  Tyr  lai 
servait  de  retraite.  De  la^  il  tournait 
avidement  son  attention  sur  les  troubles 
de  la  Republique;  mais  Tetat  de  TOrient 
i'occupait  surtout.  H  ne  voyait  a  la  t^te  * 
de  ces  contrees  qu'un  homme  jeur\e, 
sans  experience,  sans  popularite.  Na- 
guere  encore  Sextos  avait  depouill^  de 
sps  richesses  le  temple  de  THercuIe  phe- 
nicien,  Tune  des  principales  divinity 
de  rOrient.  Cecilius  crut  qu'il  serait 
facile  d'enlever  la  Syrie  a  ce  jeune  im- 
prudent; vaincu  dans  une  premiere  ren- 
contre, il  gagna  les  soldats  de  son  en* 
uemi,  qui  tu^rent  leur  general. 

Jules  Cesar  vivait  encore.  Cecilius, 
qui  craignait  sa  colere,  se  fortlQa  dans 
Apam^e,  et  se  ligua  avec  les  Parthes, 
fiaeles  allies  de  tous  les  ennemis  de 
Rome.  Soutenu  par  les  barbares  et  par 
deux  legions,  ilrepoussaAntistiusVetus, 
envoye  par  ledictateur,  et  pen  de  temps 
apres,  Statius  Murcus,  nomm^  procon- 
sul de  Syrie,  et  les  trois  legions  qui  le 
suivaient.Q.  Marcius  Crispusvint  aiors 
de  Bithynie,  avec  trois  autres  legions, 
pour  renforc^  Tarm^e  du  proconsul. 
Ces  deux  g^neraux  tinrent  Cecilius  en- 
ferrae  dans  Apamee  sans  pouvoir  s'em- 
parer  de  cette  place.  Tel  ^tait  T^tat  des 
affaires  en  Syrie,  lorsque  Jules  C^sar 
fut  assassin^  {*). 

Le  parti  de  Cesar  et  celui  de  Brutus 
se  disputaient  les  provinces.  Le  s^nat 
avalt  donne  la  Svrie  a  Cassius ,  le  peu- 
ple  au  consul  Dolabella,  ami  d*Antoine. 
Cassius  arriva  le  premier  en  Orient.  Son 
nom,  dont  le  souvenir  n'etait  pas  eteint 
dans  ces  contrees,  raliia  autour  de  lui 
toutes  les  forces  militaires ;  et ,  quoiqu'il 
fdt  descendu  en  Asie  avec  une  poign6e 
d'hommes  et  presque  sans  argent,  il  vit 
bientdt  huit  legions  rangees  sous  ses 
^tendards.  Dhs  quMl  parut,  Crispus  et 
Statius  Murcus  resignerent  leur  pouvoir 
entre  ses  mains.  Mais  il  eut  plus  de 
peine  a  se  faire  reconnattre  par  Cecilius , 
qui,  en  prenant  les  armes  centre  Cesar , 
au  nom  de  Pomp^e,  n*avait  entendu 


r*)  you.  ac,  Bpitt  ad  AU,,  XIY,  9;  ^dfa- 
mtV.^Xll.is,  H,-  Kppien,  Bell,  civ,,  IV.-  Dion, 
XLVn.  Ce  deroier  auteur  dilqae  Callus  fut 
aiissi  souteou  par  qd  cbef  arabe,  qu'il  oomine 
Alcoodius. 


servir  que  sa  propre  ambition.  Cepeo- 
dant,  apresde  longs  pourparlers;  CeciHos 
Bassus  ouvrit  les  portes  d*  Apamee.  Do- 
labella etait  alors  en  Asie  Mineure ,  d*oa 
il  se  pr^parait  a  entrer  en  Syrie.  Albi- 
nus>  lieutenant  du  consul,  occupait  la 
Palestine.  La  nouveile  de  la  soumission 
d'Apamee  n'^tait  pas  encore  amvee  en 
Judee,  lorsque  Cassius  Longinus,  par 
une  inarche  rapide,  se  pr6sente  a  Tim- 

{)roviste  devant  Albinus  et  ses  quatre 
egions,  les  force  a  serendre,  e\  les  con- 
duit centre  Dolabella.  Outre  ses  douze  le- 
gions, Cassius  comptait  encore  dans  soa 
armee  des  auxiliaires  parthes;  en  outre, 
toutelaSyrie  lui  etait  soumise,  a  rexoe|>- 
tion  de  Laodic^e  de  Cberonnese,  qui  avait 
appel^  Dolabella  dans  ses  murs.  L.  Fi- 
gulus,  lieutenant  de  Dolabella  (*).  sta- 
tionnait  non  loin  de  Laodicee,  avec  one 
flottenombreuse,  composeedevaisseaox 
rhodiens,  lyciens,  ciliciens  et  pam- 
phyliens.  Pour  pouvoir  combattir  les 
lorces  navales  de  son  ennemi ,  Cassius 
demanda  des  secours  aux  habitants  de 
Tyr  et  d' Aradus.  lis  lui  envoyerent  ieurs 
na vires.  S^rapion,  qui  gouvernait  Tile 
de  Cypre,  au  nom  de  CleopAtre,  favo- 
risa  aussi ,  mais  en  secret,  rennenni  de 
la  reine  d'figypte.  Cassius  voulait  6tet 
a  Dolabella  tout  moyen  de  retraite,  et  il 
le  fit  attaquer  d^abord  sur  mer.  Statins 
Murcus,  qui  commandait  les  alli^, 
bat  tit  Figulus ;  et  cette  victoire  eoleva 
aux  habitants  de  Laodicee  tout  espoir 
de  repousser  Tennemi.  Cependant,  its 
soutenaient  courageusement  les  assauts 
des  assiegeants.  Cassius  avait  tent^  de 
s*emparer  de  la  ville  par  trabison ;  in»s 
Marsus,  qui  veillait  de  nuit  k  la  garde 
des  rem  parts,  avait  r^ist^  a  toutes  les 
propositions.  Le  jour,  Marsus  se  repo- 
salt,  et  la  defense  de  la  ville  etait  alors 
confiee  h  d'autres  ofiiciers.  Ceuz-ci  se 
laisserentseduire;  ils  ouvrirentles  por- 
tes aux  assiegeants.  Des  que  Dolabella 
apprit  Tentree  des  soldats  de  Cassias,  il 
pria  Tun  de  ses  gardes  de  le  tuer,  et  Iw 
conseilla  de  porter  sa  t^te  au  vainqueur, 
afin  de  sauver  sa  propre  vie.  Mais  le 
soldatfrappa  son  maltre,  et  ne  voulut 
pas  lui  survlvre.  Le  fidele  Marsus  se 
per^  aussi  de  son  ^p6e.  Ils  ^vitereot 
ainsi  une  mort  ignominieuse,  et  le  spee- 
ch) Applen  donne  de  gnnds  details  sur  oes 
^venemenU. 


SYRIE  ANCIENNE. 


CI 


fadedes  maiheursqui  accabl^rent  Laodi- 
ett.  Tons  les  quartiers  de  la  viile,  et  jus- 
(|u'aox  temples  des  dieux ,  furent  pilles, 
la  prioeipaux  citoyens  livres  aux  hour- 
rauxetles  plus  heareux  abnDdonn^  aux 
Texationsdes  questeursetdes  publicains. 
L*arin6e  assi^ee  reeonnut  Cassius,et 
solvit  son  nouveau  chef  en  Egypte,  con- 
treQtopdtre.  Plus  tard,  apr^s  la  mort 
de  Brutus  et  de  Cassins,  M.  Antoine  se 
soQTtQt  da  devouemeot  de  Laodio^  ^ 
la  cause  de  G^sar ;  il  la  declara  libre,  et 
Paffranchit  de  tout  iinp6t  (41)  (*}. 

La  guerre  civile  paraissait  eteinte; 
mats  les  partisans  de  Pomp^e  n'avaient 
pas  renonce  a  la  vengeance.  L'un  d'eux, 
Labienus,  refugie  ehez  les  Parthes,  en- 
flammait  les  passions  belliqueuses  de 
ce  people.  Antoine,  qui  soupconnait 
lo  mancBuvres  secretes  et  les  projets  de 
ses  ennemis,  eot  un  moment  la  pen- 
tibt  de  les  pr^venir  en  se  montrant  au 
ddadefEuphrate-^  mats  Cl^pitre  le 
retint  aopres  d'elie.  II  parcourut  rapi- 
demeot  la  Sjrie,  puis  confia  la  d^ense 
de  to  provinoe  a  Decidius  Saxas,  g^n^ral 
d^oiw.  et  aux  anciens  soidats  de  Cas- 
sias. lA%  6veiiements  montrerent  a  An* 
toine  fombien  it  ^it  imprudent  de  lais- 
ser  eo  Orient  une  arm^  d*une  foi  dou- 
teose  (**).  Labienus  entretenait  avec  les 
troopes  des  relations  caehees.  Lorsque 
les  barbares  eorent  traverse  TEuphrate, 
rarmee  romaine,  abandonnant  son  chef, 
pa$sa  dans  leurs  rangs.  Les  villes  m^me 
aceoeillirent  renn^^mi.  D^idius  Saxas 
d«Qciira  seal  in^branlable  dans  son  de- 
voir; il  se  donna  la  mort.  Apres  la  con- 
qo^de  la  Syrie,  les  Parthes  se  divisd- 
lent.  Anti^ouus,  soivi  d*une  f  artie  de 
farm^,  alia  en  Judee;  Labienus,  avec 
le  reste,  entra  en  Cilicie,  et  s'avan^a 
nisqu^a  Stratonicde,  en  Asie  Mineure. 
L'approche  de  Ventidiusi  envoye  par 
Antoine ,  for^  les  barbares  k  se  retirer 
vers  le  Tauras;  une  bataille  s'en^agea. 
Ventidjifs.  avec  des  forces  infeneures 
en  nombre,  avait  pris  une  position 
avantageuse.  Les  Parthes,  pour  Tatta- 
mr,  devaieot  gravir  des  hauteurs.  Us 
nrent  vaincus  dans  une  secunde  ren- 
contre. Bazapharne,  un  des  principaux 
Seofoox  parthes,  fut  tue,  et  la  Syrie,  k 

n  Appien,  BelU  civ,,  Y. 
(••)  Van.  Plul.,  yie  d* Antoine,  —Justin, 
ZU1,4.  -  Dion,  XLIX.  —  Muak,  p.  &42,  a,  b. 


Texception  de  Tile  d'Aradus,  rentrasous 
la  domination  romaine. 

La  pliipart  des  habitants  de  la  Svrie 
preferaient  la  domination  des  Parthes. 
Les  Svriens  d'Aradus  avaient  nagu^re 
fait  perir  dans  lestourments  Gurtius  Sa- 
lassus,  envoy^d* Antoine.  Apr^s  le  depart 
des  barbares,  ils  refuserent  d*ouvrir  leurs 
portes  a  Ventidius,  et  ne  c^d^rent  qu'a- 
prte  un  long  siege.  Ils  avaient  compte 
sur  une  nouvelle  invasion  des  Parthes. 
En  effet,  en  38 ,  les  ennemis  reparurent 
sur  les  fronti^res.  Ventidius  avait  alors 
disperse  son  arm^e.  Une  partie  des 
troupes,  envoyto  a  la  defense  d*autres 
provinces,  avait  quitt^  la  Syrie.  Le  g^- 
n^ral  remain  craignit  d*etre  atta(|u6 
avant  d'avoir  eu  le  temps  de  rtorganiser 
ses  legions.  II  eutrecoursala  ruse  pour 
retarder  Tagression  des  Parthes.  II  leur 
fit  indirectement  parvenir  Tavis  que  les 
bords  de  TEiiphrate,  du  c6te  de  Zeugma, 
^taient  occupes  par  des  corps  nombreux, 
tandis  que,  au-dessous,  le  passage  etait 
libre.  Pacoros  dirigea  son  armee  vers 
rendroit  qu'on  lui  avait  indique ,  et  per- 
dit  ainsi  quarante  jours.  Les  Parthes 
entr^rent  dans  la  Cyrfhestique,  et  ren- 
contrerent  Ventidius,  qui  les  atteu- 
dait.  lis  Fattaquerent  avec  imp^uosit^ 
dans  son  camp ,  oOi  la  crainte  a*enga^er 
une  action  paraissait  le  retenir.  Ventidius 
fut  une  troisi^me  fois  vainqoeur  des 
barbares.  Les  fuyards  trouverent  un 
asile  dans  la  Commag^ne.  Antiochus, 
qui  regnait  dans  cette  province,  se  d^ 
clara  ouvertement  leur  protecteur.  Les 
Remains,  irrit^s,  marrberent  sur  Samo- 
sate.  Antiochus,  assi^g^  dans  sa  capi- 
tale,  offrit  mille  talents  pour  obtenir  la 
paix.  Ventidius  allait  accepter,  lorsque 
Antoine,  qui  accourait  en  Orient,  envoya 
Fordre  de  rompre  toute  n^goclation.  An- 
toine prit  lui-mdme  entre  ses  mains  U 
conduite  du  si^e;  mais ,  moins  heureux 
que  son  lieutenant,  il  dut  se  burner  ^ 
recevoir  trois  cents  talents  pour  s^eloi- 

Ser  de  Samosate.  II  quitta  la  Syrie , 
ssant  Tadministratlon  a  Sosius ,  et  ne 
revint  que  deox  ans  plus  tard  (36);  ce 
fut  apres  son  exp^ition  t^m^raire  et 
malheureuse  centre  les  Parthes.  II  tra- 
versa  toute  la  province,  en  grande  hftte, 
pour  gagner  la  mer,  et  arriva  en  Ph^.ni- 
cie,  oil  il  devait  retrouver  la  reined'E- 
gypte.  11  paraissait  craindre  de  d^rober 


n 


L'UNIVERS. 


UQ  seul  de  ses  momentfi  aux  plaisirs  et 
aux  orgies  qui  rattendaient;  cependant 
la  journ^  (TActiam  ^tait  proche. 

La  defaite  d'Antoine  mit  I'empire 
aux  mains  de  Theureux  Octave.  En  i*an- 
nee  30  avant  J.  C,  le  nouveau  maltre 
du  monde  visita  la  Syrie,  et  y  offrit  un 
astle  au  prince  parthe  Tiridate.  Le  ren- 
Tersementde  la  republique  n'avait  point 
change  T^tat  de  cette  province  et  de  ses 
habitants. 

CHAPITRE  VL 

LA  8YRIB  SOUS  LA.  DOKINATION  BO- 
HAIIf  E,  DEPUIS  AUGUSTS  JUSQU*AUX 
BMPBRBURS  SYBIENS. 

LA.  SYRIE  SOUS  LE8  PREMIERS  CE- 
8A.R8 ;  GUBRRE  GONTRB  LBS  PARTHES. 

—  Le  13  Janvier  de  Tan  27  avant  J^sus- 
Christ,  Auguste  et  le  s^nat  se  partag^ 
rent  les  provinces  de  la  r^publigue. 
L'empereur  se  fit  donner,  en  raison 
mdme  de  leur  importance,  et  a  cause  du 
voisinage  des  Parthes,  la  Syrie  et  la 
Phenicie.  On  salt  qu' Auguste  se  r6- 
serva  toutes  lespnyvinces  ou  ^taient  r^u« 
nies  de  grandes  forces  roiiitaires. 

Quatre  legions,  o'est-^-dire  la  sep- 
tierae  partie  des  troupes  de  {'Empire,  sta* 
tionnaient  en  Syrie  (*).  II  importait  sin- 
gulidrement  aux  Romains  de  conserver 
dans  son  entier  cette  belle  province; 
c'est  par  elle  qu'ils  retenaient  dans  To- 
b^issance  les  piopniations  inauietes  et  fa- 
natiques  de  la  Judee  et  ae  Tltgypte; 
qu'ils  arrdtaient  les  bandes  d'Arabes  ha- 
bitues a  vivre  du  pillage;  quMIssurveil- 
laient  certains  rois  d'Asie ,  ceux  d'Ar* 
m^nie,  par  exemple,  et  m^e  les  popu- 
lations qui  habitaient  entre  le  Pont-Euxio 
etla  mer  Gaspienne.  D'aillenrs,  c'etait 
la  Syrie  qui  devait  defendre  Teinpire 
contre  les  rapides  et  terribles  incursions 
des  Parthes. 

Cette  p^riodede  notre  histoire  s^ouvre 
par  un  traits  de  pais  qui  fut  conclu 
entre  les  Parthes  et  les  Romains ,  sur 
les  frontieresde  la  Syrie.  £n  Tan  1*"  de 


(*)  CdBten  A/rice  per  duaa  legiones,parique 
numero  .^gyptus,  dehinc  initio  ab  Syria  ««- 
que  ad  flumen  EuphraUn ,  qvamtum  ingenH 
hrrarum  Minus  ambitur,  qtuituor  Ugionibut 
99ercUa,  —  Tac,  Jrw-^  IV,  6. 


notre  dre ,  Cai'us  Cesar  avait  ki  envoyf 
dans  cette  province.  Le  jeuoe  prince  m 
dirigea  vers  TEuphrate,  qui  servaitde 
limite  a  T Empire ,  pour  n^ocier  avee 
Phraate.  Au  milieu  du  fleuve  ^tait  uoe 
lie;  ce  fut  \k  le  lieu  choisi  pour  renlre- 
vue.  Phraate  y  vint>  laissant  son  armN 
sur  la  rive  gauche;  Caius,  de  son  edt^ 
qui  marchait  avec  tout  Tappareii  de  ii 
guerre,  rangea  ses  troupes  sur  le  bord 
oppose,  L*historien  Yelleius  Patereu- 
lus,  qui  servait  alors  en  qualite  de  triiMia 
militaire,  assists  a  ees  negociatioM, 

3ui  setermin^rent,  comroe  nousveaoos 
e  le  dire,  par  un  traits  de  paix  0-  Plu 
tard  sous  Tib^re  (16),  une  rcvolutioa 

3ui  ^clata  chez  les  Parthes  compronut 
e  nouveau  la  tranquillity  de  rorieat. 
Cette  nation,  toujours  si  mobile,  avait 
enlev^  le  pouvoir  royal  a  VononJ'f 
mi  des  Romains.  Chass^  de  soo  pays, 
Vonon  ^tait  venu  demander  aux  Ar* 
m^niens  une  noovelle  royaut^.  Ceut 
^te  pour  les  Parthes  uo  ennemi  n^ 
midable,  dans  le  cas  ou  sa  tentative  ao- 
rait  eu  pldn  succ^.  Aussi  Artaban, 
qui  Tavait  remplao^ ,  r^solut  de  le  pou" 
suivre.  Les  Romains  voulaient  la  paiii 
et  cependant  leur  politique  les  forcat 
h  prendre  parti  dans  la  querelle.  iM» 
rass^  du  r61e  que  leur  donnaient  o(f 
nouveaux  ^v^nements,  ils  trancheral 
enfin  la  difGcult^  par  une  trabison.  u 
gouvemeur  de  Syrie,  Cr^ticus  Silanitfi 
attira  Vonon  dans  sa  province,  et  Ty  ^ 
tint  prisonnier. 

L'ann^suivante,  Cr^ticus  fut  RBH 
plac^  par  Pison.  Tibdre,  dans  Ic  meflW 
temps,  envoyait  Germanicus  en  Orieol* 
Sa  popularity,  sa  grande  r^putatK* 
comme  g^n^ral,  en  faisaient  rhorotte » 
plus  capable  d'^touffer  la  guerrre  Ftt 
a  ^ater  sur  toutes  les  f rontie res  dc « 
Syrie,  et  les  d^ordres  qui  menacaien* 
Trnt^rieur  mdme  de  la  province. 
La  Syrie  et  la  Jud^e  souffiraient  iifr 

gatiemment  le  joug  accablant  que  K 
sc  faisait  peser  sur  dies.  En Cilw'J* 
en  Commagene ,  des  factions,  rdveilW* 
par  la  mort  des  rois  Philopator  et  AJ^ 
tioehus,  appelaient  ow  repeussaient  w 
Romains.  Arch^laus  de  Cappadoce,qw 
s'^tait  laiss^  entr^er  a  Rome  psrw 

(*)   Quod  speciaculum....  iribunit  «(/»'«* 
mihi  vUere  coniigiU^  V«U.  PaterculwH,  lOl. 


SYRIE  ANClteNNE. 


fiiBKff  paroles  <rainiti6»  avail  €U  de* 
poatll^  de  son  royaume,  dont  Tempe- 
nor  et  le  stoit  firent  une  province ,  et 
des  lors  il  etait  n^cessaire  de  soutenir 
par  la  foree  des  armes  Toeuvre  de  la 
rase. 

lyaatre  part,  le  patronage  de  Rome 
8*61811  durement  appesanti  sur  la  Comma* 
g^e.  Deax  fr^res ,  Antioehus ,  deuxi^me 
do  oom,  et  M ithridate,  se  disputaient 
la  royaat^de  ce  petit  pays,  tandis  qu*Au* 
goste  et  Antoine  combattaient  pour  Tem- 
mre  da  monde  O-  Mithridate ,  apres  la 
Mtaille  d^  Aetium ,  avait  essaye  de  faire 
Tsloir  ses  droits  4  la  couronne  auprte 
d'Aaguste.  Antioobus  fit  assassiner  le 
messager  qui  portait  a  Teinpereur  les 
redainations  de  son  fr^.  Augusts  vit 
dans  cet  attentat  nn  outrage  k  sa 
puissance.  II  ordonna  h  Antioehus  de  se 
rendre  k  Borne,  od  il  fut  jug6  par  le  s6- 
nat  ct  eondamn^  a  mort.  Son  fils ,  An- 
tioehus If  1 ,  etait  eelui  qui  mouirut  au 
temps  de  TfMre^  et  que  nous  venons  de 
nommer,  Antiodius  IV  fut  le  Jouet  des 
eapHoes  de  Caligula,  quilefitroi  (87  ap. 
J.  C.) .  pais  lui  eoleva  sa  couronne.  II 
^reut  sans  titre  et  sans  pouvoir  jus* 
mCau  moment  oill  Clauoe,  toujours 
equitable  envers  les  provinces  et  les  al- 
lies, lui  readit  sa  royaut^.  Nous  ver- 
rons  bipntdt  comment  la  C<ommagene 
ftit  definitivement  rattaoh^  a  la  pro- 
vince deSyrie. 

Tel  4tait  raspeet  que  pr^sentait  TOrient 
wa  moment  o(k  vint  Germanicus  (**). 

VarriT^de  Pison  ( 18  de  J.  C.)  avait 
aroeoe  de  grands  rbaiigements  en  Syrie. 
Sou3  son  gouvemement,  trop  relAch^  et 
eorrompu,  la  licence  regna  dans  les  viiles 
et  les  campagnes,  quidevinrent  la  prole 
des  soidals.  Plancine,  femme  dePison, 
habftaee  a  Tintrigue,  et  qui  ne  reculait 
pas  devant  un  crime,  contribna  singulis 
rement  h  accrohre  le  d^rdre.  Elle  s'im- 
misf  ait  dans  toutes  les  affaires,  mtoe 
dans  oelles  qtu  eoncernaient  exclusive- 
ment  Tannee.  Cependant  Germanieus, 
apr^  aroir  visits  la  Cllide,  et  donn^  k 
la  Commagene  Quintos  Servaeus  pour  pre- 
mier propr^eur,  se  rendit  en  Syrie.  II 
veoait  demander  compte  a  Pison  de  son 
administration  et  de  ses  actes.  Pison  et 


l\  Dion,  U1,  43 
.  (••)  Tacit,  ^nn.,  II,  56,  60,  »7,  fis, 


Germanieus  se'reneontr&reBt  k  Cyrrhus , 
villealors  babit^par  la  dixidme  legion. 
Uentrevue  ne  fit  que  raviver  leur  hai- 
ne.  Germanieus,  muni  de  pouvoirs  plus 
^endus  que  ceux  de  son  ennemi ,  chan- 
ffea  completement  Tordre  de  cboses  ^ta- 
bli  par  Pison.  Une  ambassade  des  Par* 
thesfournitau  prince  un  nouveau  moyea 
de  satisfaire  son  ressentiment.  Les  en- 
voy^ d'Artaban  demandAient  reloigne* 
ment  de  Vonon.  Ce  roi  detrdn^  inspi- 
rait  des  craintes  s^rieuses  aux  Perthes. 
II  avait  su ,  dit-on ,  capter  la  favour  de 
Pison  et  de  Plancine,  qui  avaient  pro- 
mis  de  raider  dans  ses  projets.  Germa- 
nieus, si  Ton  en  croit  Tacite,  saisit  avide- 
ment  Toccasion  d*humilier  le  gouverneur 
de  Syrie.  II  se  declara  centre  Vonon ,  et, 
dans  ce  but,  il  acquies9a  aux  exigences 
des  Parthes.  Satisfait  decette  vengeance, 
il  quitta  la  Syrie,  visiu  r£gypte,  puis  re- 
vint  a  Antioche.  Pendant  son  absence, 
tout  s'^taitfait  centre  ses  Intentions.  La 
condoite  de  Pison  I'exaspera;  il  Taccabla 
de  reproches,et,  vivementeniu  par  le 
m^pris  qu'on  ttooignait  pour  son  BVh 
torite ,  il  tomba  malade.  Bient^t  on  crut 
k  son  ri^tablissement.  Le  people  et  Tarm^ 
se  pr^paraient  k  en  remercier  les  dieux, 
lorsque  Pison  d^fendit  les  sacrifices  et 
fit  arr^ter  les  fiStes.  Cependant  la  ma- 
ladie  reprit  Germanieus,  et  cette  fois 
il  accusa  hautement  son  ennemi  dePavoir 
empoisonn^.  Pison,  craignant  la  colore 
des  partisans  de  Germanieus,  se  retira  k 
Seieucie.  Cette  ville  est  peu^loign^d*An* 
tioche;  la  hainede  ses  aecusateurs  Ty 
poursuivit.  II  se  d^da  alors  k  quitter  la 
Syrie.  Arrive  a  Cos,  il  y  apprit  la  mort  de 
Germanieus.  Cet  6v^nement  changea  ses 
resolutions.  II  se  d^termina ,  par  les  oon- 
seiJs  de  ses  amis,  k  reparaltre  dans  son 
gouvemement.  C^tait  une  entreprise 
pleined*obstacles  et  de  dangers.  Germa- 
nieus, a  van  tdemourir,  persistant  a  regar- 
der  Pison  comme  son  meurtrier,  avait 
suppli^  avec  les  plus  vives  instances  A- 
grippine,  sa  femme, et  ses  amisde  prendre 
soin  de  sa  vengeance.  lis  le  lui  promirent 
par  serment.  Aprds  les  iiin^rallles,  les 
officiers  song^rent  k  s'acquitter  de  la 
mission  quMIs  avaient  accept^.  Ilstrou- 
vkentunappui  dans  les  dispositions  de 
la  multitude.  Rn  effet,  les  Syriens ,  peu- 
ple  d'une  exaltation  facile ,  pleuraient 
amerement  la  mort  de  Germanieus.  On 


M 


L'UNIVERS. 


8*oecupa  d*abord  des  moyeos  de  fermer 
k  Pison  Tentr^e  de  la  provinee ,  et  pour 
donner  a  la  resistance  plus  d'autorite, 
ranneevoulut  se  choisir  elle-mdme  un 
chef  et  imposer  a  la  Syrie  un  nouveaa 
gouverneur.  Le  choix  flotta  entre  deux  ' 
concurrents :  Vibius  Marsus  et  Co.  Sea- 
tius ;  ce  fut  ce  dernier  qui  i'emporta. 

Cependant ,  Pison  par  sa  douceur 
calculee,  par  sesefforts  a  ne  meicoitteDter 
personne,  s^^tait  acquis,  durant  son 
administratien ,  des  partisans  devoaes; 
lis  etaient  en  assez  grand  nombre  sur- 
tout  parmi  les  soldats.  Lorsqu'ils  eu- 
rentconnaissancedeces  pr^paratifs  bos- 
tiles  contre  le  veritable  del^gu^  de  I'eni- 
pereur,  ils  abandonn^rent  leurs  corps 
et  lis  s'organiserent.  D'autre  part.  Do- 
mitius  Celer,  Pami  et  le  conseiller  de  Pi- 
son,  arriva  de  Cos  a  Laodic^e,  au  milieu 
de  la  sixieme  legion.  U  Qt  aupr^  d'elle  de 
vains  efforts  pour  la  ranger  it  son  parti. 
Sa  tentative  eeliouadevantuae  influence 
plus  puissanteque  la  sienae,  celle  de 
Pacuvius,  lieutenant  de  Cn.  Sentius.  Pi- 
son, informe  par  Sentius  m^me'  de  cet 
^ec,  ne  se  rebuta  pas  et  il  fit  voile  vers 
la  Syrie.  II  rencontra  en  merles  vaisseaux 
qui  Gonduisaient  a  Rome  les  cendres  et 
la  veuve  de  Germanicus,  et  quelques-uns 
de  ceux  qui  Etaient  accuse  d^avoir  pris 
part  a  rempoisonnement.  Pison  laissa 
passer  les  vaisseaux  et  aborda  en  Cilicie. 
Trop  faible  cependant  pour  entrer  en 
Syrie,  il  s'epferma  dans  un  chliteau 
nomme  Gelenderis,  ou  Sentius  vint  Tat- 
taquer.  Pison  n*avait  d'espoir  c^ue  dans 
la  position  m^me  du  fort  qui  lui  servait 
d'asile.  Cependant  il  eQt  6t6  oblige  de 
se  rendre,  si  ses  ennemis  n'eussent  con- 
senti  a  entrer  en  arrangement  avec  lui. 
lis  lui  imposerent,  pour  condition  ,  de 
partir  imm^iatement  pour  Fltalie.  Pison 
ceda  aux  circonstances,  et  les  soldats  de 
Syrie  croyant  alors  avoir  ven^^  Germa- 
nicus, soog^rent  a  immortaliser  sa  m6- 
moire.  lis  lui  deverent  un  arc  de  triom- 
phe  sur  le  mont  Amanus;  et  sur  la 
place  d*Antiocbe  ou  son  corps  avait  ^te 
port^  au  bdcher  on  oontruisit  un  ceno- 
taphe. 

La  Syrie  eut,  apr^ces  6v6nements, 
des  annto  de  calme  et  de  repos.  L'his- 
toire  marque,  en  Tan  88,  la  mort  d*un 
de  ses  gouverneurs,  Pomponius  Flaccus. 
Le  propreteur  de  Syrie,  en  fan  35,  etait 


le  pere  de  Tempereur  Yitellius.  H  ^vaU 
tait  le  consulat ,  lorsqu'il  vint  eo  Orient. 
Son  admioistratioa  fut  sage  et  me- 
sur^ 

Les  pretentions  orgueilleuses  d'Arta- 
ban  se  reveillerent  a  cette  ^poque.  Le 
roi  rtelainait  la  possession  cles  tresors 
que  Vonon  avait  apportes  ea  Syrie. 
Tibere,  au  lieu  de  satisfaire  a  sa  de- 
mande,essaya,  par  une  politique  adroite, 
d'arr^ter  rex^utionde  ses  projets  mena- 
fants ,  en  lui  suscitant  un  enoemi  dao- 
gereux  choisi  parmi  les  Parthes.  Ce  fut 
Pbraate,  princearsacide,  qui  avait  ^cfaap- 
pe  au  massacre  de  sa  fanulle  et  qui  avait 
trouv6  un  refuge  chez  les  Romains, 
Phraate  traversa  la  Syrie,  se  disposant  k 
exciter  une  revolution  au  dela  de  TEo- 
phrate ,  lorsqu'il  tomba  malade  et  mo«* 
rut.  Tiridate  succeda  ^Phraate  dans  les 
▼ues  de  Tibere ,  et  Viteliius  eut  ordre  de 
soutenir  efficacement  ce  nouveau  pre- 
tendant.  Cependant,  les  bostilit^s  avaieot 
commence  en  Armeoie,  et  les  Partbes 
V  avaient  dprouve  deux  defaites.  Arts- 
ban,  quoique  vaincu,  se  pr^parait  a 
souienir  de  nouveaux  combats,  lors- 
que  Viteliius  se  porta  avec  ses  l^ioas 
sur  r£uphrate.  Cemouvemeatmeoa^ 
la  Mesopotamie.  Artaban  eut  peur,  et  8*e- 
loi^a  vers  le  pays  des  Scythes.  Cette  re- 
traite  subite  ae  Tennemi  encouragea  ks 
Remains  k  passer  TEuphrate.  Avant  de 
franchirla  limitenaturelle  des  deux  empi- 
res, on  fit  des  sacrifices  aux  dieux  suivant 
les  rites  religieuxde  I'Asieetde  F  Europe. 
On  offrit  auxdivinites  de  Romeun  pore, 
un  belier ,  un  taureau;  un  cbeval  fut.la  vio- 
time  immolee  a  TEuphrate.  L'armee  tra- 
versa bientdt  le  fleuve  sur  un  pont  de 
bateaux.  Elletrouva  sur  la  riveorientale 
de  nombreux  allies.  L'expedition  ne  fiit 
qu'une  pacifique  promenade  jusqu*aa 
Tigre.  Viteliius,  iugeant  alors  que  cette 
course  lui  avait  ete  assez  glorieuse,  re- 
vint  en  Syrie  avec  ses  legions  (87). 

Dix  ans  apres  ces  evenements,  un  nou- 
veau roi  gouvernait  les  Partbes.  Bardaoe, 
aussi  entreprenant  que  ses  predeoes- 
seurs,  songeait  a  conduiro  encore  one 
fois  ses  cavaliers  en  Armenie,  lorsque 
Vibijs  Marsus,  propreteur  de  Syrie,  1  a^ 
reta  parses  menaces  (47). 

En  Tannee  51 ,  TArmenie  donna  ds 
nouveaux  embarras  aux  gouverneurs 
syrieos.  Une  revolution  avait  edatedans 


SYKIE  ANCIENNE. 


t& 


ce  pays;  le  roi  Mithridate  venait  de  p6- 
rir  assassia^  par  Rhadamiste,  soa  ne- 
Fea,  qui  ^tait  fils  du  roi  des  Ib^res.  La 
justice  eommaDdait  alors  aiu  Roroains 
de  slmmiseer  dans  les  affaires  de  I'Ar- 
m^iie;  le  goavemeur  de  Syrie,  Ummi- 
diusQuadratus,  le  voulait,  mais  se^  offi- 
ciers,  par  one  opposition  calculee,  le 
eootraignireat  h  nnaction;  cependant 
leproeurateurde  Cilicie,  Peii^nus,  avait 
reoda  bommage  k  Rhadamiste.  Gette 
Mcbet^  indigiia  Qaadratus;  il  voulut 
protester  d*une  mani^re  ^ergique  con- 
tre  ane  telle  action,  et  it  envoya  Helvi- 
dins  Piiscus,  a  la  t^te  d*une  legion,  en 
AraieQie.  Mais  la  crainte  de  coatrarier 
les  desseins  des  Parthes  amena  bieotdt 
la  retraite  des  soldats  remains  (*). 

Duraot  ees6v^nements  les  troupes  de 
Syrie  fireot  deux  petites  expeailions 
eontre  les  barbares  du  Taurus.  Les  eli- 
tes desGcndaieot  dans  la  Cappadoce  et 
infestaient  oe  pays.  En  86 ,  Vitellius  en- 
▼oya  k  leor  poursuite  quatre  mille  1^- 
gioooaires  et  relite  des  alii^.  Les  mon- 
ta^qiards  ne  purent  soutenir  le  choc  des 
forces  romaines.  lis  v6curentsoumis  jus- 
qu'en  Pan  51.  lis  prirent  alors  confiance 
ea  leurs  forces  et  battirent  le  pr^fet  Cur- 
tios  ScTerus  avec  la  cavalerie  detaeh^e 
des  l^iofis  de  Syrie. 

Les  Romains  craignaient  toujours  de 
▼oir  rinfluence  des  Parthes  pr^dominer 
dans  r  Arm^Aie.  Ce  fut  pour  contre-ba- 
lancer  oette  influence  qu'ils  envoyerent 
en  Orient  Pun  des  hommes  les  plus  oe- 
lebrcs  de  T^poque,  Corbulon.  Gelui-ci, 
eomme  Germaoicus,  trouva  dans  le  gou« 
remeur  de  Syrie  un  rival  inquiet  et  en- 
▼ieox.  UmmidiusQuadratus,qui,^lat(lte 
de  deux  legiooset  aesallt^,devait  pr6ter 
asnstance  a  Corbulon  dans  les  opera- 
tions de  la  guerre,  aceourut  en  Cilicie  h  la 
rencontre  du  nooveau  general  pour  le  d6- 
toumer  du  projet  de  se  montrer  en  Syrie. 
Qnadratus,  plein  de  vanity ,  souffnt  de 
▼oir  les  Syriens  environner  Corbulon  de 
leurs  iiomniages.  II  laissapercer  son  m^- 
contentement,  et  la  discorde  se  mit  en- 
tre  les  deux  chefs.  Le  gouverneur  de 
Syrie  ^toait Corbulon  dans  ses  plans; 
nais  nen  ne  Tentravait  plus  que  1  indis- 
dptinedes  legions.  Le  tableau  que  fait  Ta- 


nesestdigne  deremarque. « On  tint  pour 
«  constant,  dit-il,qu^ily  avait  dans  cette 
«  arm^e  des  veterans  qui  n'avaient  ja- 
«  mais  ni  veille ,  ni  monte  la  garde ;  la 
«  Tue  d*un  foss^  et  d  un  retrancheinent 
«  les  ^tonnait  comme  un  spectacle  nou- 
«  veau.Sans casques,  sans  cuirasses,  oc- 
«  cupesdese  parer  oudes'enrichir,  c'^- 
«  tait  dans  les  villes  qu'ils  avaient  ac- 
«  compli  le  temps  de  leur  service  (*).  » 

Lasev^rit^  nepouvaitplus  agirsurde 
pareilles  troupes ;  Corbulon  les  licencia, 
et,  au  lieu  de  ces  soldats  eorrorapus,  il 
demaiidaa  la  Germanie,  k  la  Cappadoce » 
k  la  Galatie,  Felite  de  leur  jeunesse.  Les 
legionnaires  nouvellement  recrut^  por- 
terent  au  loin  les  succes  des  armes  ro- 
maines. Corbulon  apprit  au  milieu  drses 
conqu6tes  la  mort  de  Quadratus  (^*).  II 
s*empara  aussitot de  ladministration de 
la  Syrie  (60).  Le  gouvemement  de  cette 
province,  en  Tann^eSfi,  avait  ^te  donn6, 
par  le  credit  d*Agrippiue,  a  un  ancien 
lieutenant  de  Germanicus,  P.  Anteius. 
N^ron  ne  lui  laissa  prendre  que  le  titre 
de  gouverneur  de  Syrie ,  et  il  ne  voulut 
pas  lui  permettre  de  quitter  I'ltaiief  oii 
P.  Anteius  devait  mourir (62).  Corbulon 
et  la  Syrie  jouirent  pendant  pres  de  deux 
ans  d*une  paix  proionde ;  mais  enfin  les 
Parthes,  toujours  dans  la  pens^  de  pla- 
cer TArm^nie  sous  leur  dependanoe,  fi- 
rent  de  nouvelles  invasions. 

Les  attac^ues  des  ennemis  donnerent 
de  graves  mqui^tudes  a  Corbulon ;  le 
poios  de  la  guerre  pesait  en  entier  sur 
lui  :  il  avait  k  d^fendre  une  vaste  ^ten- 
due  de  frontieres ,  et  il  ne  pouvait  se 
decider  k  laisser  exposee  aux  chances 
d'une  subite  invasion ,  la  riche  province 
de  Syrie ,  qui  absorbait  tous  ses  soins. 
II  demanda  a  Tempereur  de  conHer  la 
defense  de  I'Arm^nie  a  un  autre ^^neral. 
Pendant  quMl  attendait  la  reponse  de 
Neron,  les  Parthes  assi^^rentXigrano- 
certe.  Cette  place  demandait  du  se- 
cours;  mais  Corbulon,  sachant  oue  les 
cavaliers  ennemis  ^taient  peu  habiles 
dans  Tart  des  si^es,  r^olut,  avanttout, 
de  pr^munir  la  Syrie  centre  one  brusque 
diversion.  II  fortifla  les  bords  de  TEu- 

{ihrate,  et  profita  m^me,  pour  arr^ter 
'ennenii,  aeTaridit^  du  pays.  Des  re- 


cite de  la  mollesse  des  garnisons  syrien-    doutes,  improvis^  dans  le  voisinage 


S*  Uvraison.  (Syhib  ancibnhb.) 


^  Ta«k,  ^nn.,  XIII,  35,  trad.  Burnoaf. 
;*")Tac., -#»!».,  XIV,  as. 


L'UNIVERS- 


des  principales  sources,  en  d^fendirent 
les  approches;  les  cours  d'eau  moins 
importants  farent  combles.  Corbulon, 
apres  avoir  organist  la  defense  sur  tous 
les  points,  sonuna  Vologesede  s'^loigner 
de  Xigranoeerte.  Les  Parthes  ob^irent 
momentanemeiit  k  cette  inionction ,  et 
eess^rent  les  hostility.  Ge  futalors  que 
Cesennlus  P^tus,  envoys  par  Tempereur, 
vint  en  Asie,  et  re^.ut  fe  eommandement 
d'une  partie  de  Faring ;  Corbulon  garda 
la  8* ,  la  6«  et  la  10«  l^ion ,  et  les  eche- 
lonna  le  long  de  TEuphrate,  oh  les  Par- 
thes reparurent  bientdt  en  armes.  Les 
troupes  romaines  voyaient  de  leurs 
camps  les  cavaliers  ennemis  tourbillon- 
nant  sur  la  rive  oppos^e,  et  elies  ne  pou- 
▼aient  sans  honte  les  laisser  parti r  sans 
combat.  Des  bateaux  converts  de  ^ens 
de  trait  leur  permirent  de  franchir  le 
fleuve.  Cette  vigoureuse  demonstration 
enleva  aux  Parthes  tout  espoir  de  suc- 
e^.  lis  prirent  la  fuite,  et ,  se  dirigeant 
an  nord ,  ils  marcberent  a  la  rencontre 
de  P^tus.  Du  cdt6  de  TArm^nie  les  Ro- 
mains  faiblirent.  Corbulon  se  disposait 
a  les  soutenir,  lorsqu'une  tr6ve  flit  con- 
due.  II  fut  d^cid^  que  les  legions  se  re- 
tireraient  en  de^ ^  de  I'Euphrate  (62)  {*). 

L'ann^  suivante  (63),  on  se  pr^para  de 
nouveau  k  la  guerre.  Corbulon ,  voulant 
se  donner  tout  entier  aux  soins  de  lacam- 
paffne,  demanda  a  Neron  d'etre  dechar;;^ 
de Tadministration  de  la  Syrie.  Le  gou- 
ifernement  de  cette  province  fut  alors  con- 
fix k  Cincius.  On  changea  aussi  les  garni* 
sons.  La  4«  et  la  19*  legion ,  qui  avaient 
^prouv^  toutes  les  fatigues  des  campagnes 
precMentes,  revinrent  dans  Tint^neur  de 
la  Syrie,  d'oili  I'on  tira  la  8«  et  la  6*  16- 
^ion.  Corbulon  passa  TEuphrate  k  M6- 
Jitene.  Les  Parthes  campaient  pres  de 
Q^tte  viile.  Lorsque  les  deux  armies 
furent  en  presence,  au  lieu  de  combattre 
on  ouvrit  des  n^gociations ,  ct  une  nou- 
velle  paix  fut  conclue. 

mucibn;  bbyolution   dans  l'em- 

PIBB    COMMBNGBE  EN  SYRIE.   —  L'eld- 

vation  des  Flaviens  qui ,  apr^s  Galba^ 
Otbon  et  Viteilius,  devaient  bucceder  a  la 
famille  d'Auguste,  fut  pr6paree  en  Syrie. 
Licinius  Mucianus,  ^ouverneur  de 
cette  province,  conduisit  ou  amena  les 
^v^nements   qui    plac^reut    Vespasien 

^•)  Taclle,  Ann.,  XV,  I,  a,  3, 4, 5,  «.et  wlT, 


sur  le  tr6ne  imperial.  A  rav^nement  de 
Galba ,  la  Syrie  etait  encore  tranquiUe; 
ses  quatre  legions  avaient  pr^t6  ser- 
ment  au  successeur  de  N^ron.  Titus,  Q)8 
de  Vespasien  et  lieutenant  de  son  pert* 
etait  parti  pour  Rome,  ou  il  allait  porter 
au  nouvel  empereur  les  homnaai^es  oe 
rOrient.  II  apprit  a  Corinthe  la  mort  4e 
Galba,  victime  d*une  revolution  qui  cocJH 
men^ait,  et  dont  les  suites  ^taient  in- 
connues.  Des  lors ,  le  voyage  de  Titus 
n'avait  nlus  de  but  et  il  reviut  en  Judfie 
aupres  ae  son  p^re.  L^ ,  tous  deux  se  '■ 
concerterent  pour  mettr^  a  profit  les  6v6- 
nements.  lis  comprireni  que,  pour  eux, 
le  succes  dj^pendajt  du  concours  de  Is  : 
Syrie.  Mais  Vespasien  ^tait  Tenneaii  de 
Mucien;  Titus  se  chargea  de  les  reconct- 
tier.  Des  6missaireshabiles  furent  d'abofd 
envoy6s  pour  aplanir  les  premieres  dlf- 
ficult6s ;  Titus  les  suivit,  et  sa  visile  eut 
tout  le  succes  desir6.  Les  gouverneuis 
dc  Jud^  et  de  Syrie  se  commuaiqu&rept 
leurs  proiets.  II  fut  decide  qu*avaut  tout 
on  attendrait  Tissue  de  la  lutte  eoga^ 
entre  Othon  et  Viteilius.  La  Syrie  (c'est  , 
une  remarque  de  Tacite),  depuis  le  jour  ou 
ellefutconquiseparlesRomainsjusqu*4a  ; 
moment   oh  nous   sommes  parvenus,  i 
avait  subi,  sans  parattre  les  sentir,  1^  i 
r^suitats  des  revolutions  de  Rome.  Elle 
avait  salue  avec  apathie  toutes  les  npa- 
velles  puissances.  Cette  fois,  aucontrairet 
les  legions  et  ie  peuple  repondirent  spoo- 
tanement  au  cri  d' insurrection  parti  d*A- 
lexandrie.  Ce  r^veil  des  populations  sf' 
riennes   eut   lieu  dans  le  tliedtre  d'Ao- 
tioche.  Mucien  V  parutau  milieu  des  habi- 
tants rassembles.il  mithabilement  i  pro- 
fit la  bonne  intelligence  qui  r^aait  entre 
le  peuple  et  les  soldats,  et  sut  ef&aya 
les  uns  et  les  autres ,  en  pr^tant  a  rem- 
pereur  le  dessein  d'envoyerbientot  les  W- 
gions  en  Germanic.  Le  sombre  tableaa 


que  les  soldats  se  formaient  des  pays 
qui  avoisinaient  le  Rhin,  et  surtout  fi- 
dee  d'une  separation  qui  allait  briser 
bien  des  alliances  de  famille ,  fit  de  la  re- 
voke ,  aux  yeux  de  tous ,  une  iinp^rieuse 
necessity.  Les  paroles  de  Mucien  se  r^ 
pandirent  bient6t  dans  toute  la  pro- 
vince. Les  Syriens  renoncerent  a  leurs 
habitudes  de  mollesse ;  des  villes  entires 
fabriqu^rent  des  armes*,  Antioche  frappa 
mouii.iie,  el  Vespasien,  plus  capable 
f  ue  Mucien  des  soms  minutieux  de  i'ad- 


SYRIE  ANCIENNE. 


er 


mmistration,  Tint  lui-m^e  surveiller  les 
traraux  et  les  preparatifs  des  insurses. 
L*arinee,  aui  crpyait  travailler  pour  elie- 
mimt  en  4^rvaat  fauibition  de  ses  chefs, 

n'exigearien  audeladela  paveordinairen* 
Uo  descendant  des  Seleucides,  Antiochus, 
roi  de  CommaseDe,  prit  aussi  parti  pour 
Yespasien.  Eonn,  pqur  ne  pas  lalsser  la 
Syrie  eipos^e  aux  ravages  de  I'ennemi , 
QO  envoya  des  ambassadeurs  nour  traiter 
avec  les  Parthes.  Le  inois  de  juiilet  (69) 
sulBt  a  tan td^occupationsdi verses.  Les 
tenements  qui  s'accoinplirent  ensuite  et 
qui  firent  reussir  cette  revolution,  appar- 
tiennent  plutdt  a  rbistoire  de  TEmpire 
qu  a  ceile  de  la  Syrie. 

BAPPORTS   DB   LA    SYBIE    AVEC    LA. 
iUDBS   PBPUIS   AUGUSTS    JUSQU'a  LA 

SLi?iE  ]>B  JBAUSALBM.  —  Les  rela- 
tions nombreuses  et  tres-di verses  qui. 
des  tes  plus  anciens  temps,  existaieui 
entre  les  habitants  de  ces  deux  pay$ 
voisins,  rootiimerent  sous  les  premiers 
Cesars.  I.«s  gouverneurs  romains  qui 
residaieota  Antioche  jouerent  presque 
toujours  un  role  actif  dans  les  querelles 
iotestioes  de9  Juifs.  A  ja  mort  d'He- 
rode,  Archelaus  crut  necessaire  de  se 
mena^er  la  protection  de  Varus, gouver- 
neur  Se  Syrie,  avant  dialler  a  Rome  bri* 
guer  la  rbyaute.  il  obtint  la  couronne: 
niais  Aususle  lui  6ta,  pour  les  reunir  a 
la  province  adjninistree  par  Varus ,  les 
villes  de  Gaza,  de  Cadara  et  de  Joppe. 
Peu  de  temps  apr^s ,  a  la  mort  d* Arche* 
lau&  (6  aores  J.  C.) ,  le  pouvoir  du  gou- 
Terneur  aAntioche  8*eteodit  iudlrecte- 
ment  sur  toute  la  Palestine.  La  Jud^e 
fut  des  lors  adminisiree  par  un  cheva- 
lier roiuain ,  soumis  lul-mtoe  au  gou- 
verneur  de  Syrie.  Vers  Tan  33  ou  34, 
ia  Judee  fut  encore  diminuee  au  profit 
de  Ia  province  lomaine.  Le  tetrarque 
Pbitlppe  veoait  de  mourir;  sa  tetrarchie, 
cVsta-dire  la  Gaulanite ,  la  Tradionite , 
la  Batao«e  et  la  Paneade ,  entra  dans  les 
limites  de  la  Syrie.  Plus  tard  (37),  le 
pere  de  reinpereur  Vitellius  protegea  le 
ietraraue  de  Galilee  contre  Aretas  C*). 
Ainsi  lea  propr^eurs  de  Syrie  tantdt 
deCiejidaieDt  ia  Judee  contre  les  incur- 
sioQs  des  Barbare^  et  tantdt  servaient 
la  eolere  des  empereurs  contre  cette 

n  Tacit.,  fii»i*,  II,  73  el  goiv. 
(•*)  f'oy.  Moei  dot  Versen,  £Mv.  pUL,  Arft* 
We,  p.  ••. 


malheureuse  contree,  comme  il  arriva 
au  temps  de  Caligula.  It  n*aimait  pas  les 
Juifs.  Un  auteur  contemporain  (*)  dit 
que ,  pour  les  accabler ,  Caligula  choisit 
P.  Petronius,et  luidonna,  apres  Vitellius, 
le  gouvernement  de  Syrie  (S9  ou40).  Ce 
nouvel  agent  de  Tempereur  fit  quitter  les 
bordscjelXuphrate  a  deuxl6gions,et  les 
rapprocha  de  la  Judee,  pour  y  assurer,  par 
la  force,  fexecution  des  ordresdeCaliguIa. 
Cependant ,  tandis  qu*on  tyrannisait  les 
Juif$,  la  religion  de  Moise  paraissait  sur 
le  point  de  fairedes  couqu^tes  en  Syrie  : 
Epiphane,  fils  d'Antiochus,  dont  il  a 
i\0  parle  plus  haut  k  propos  de  la  Com- 
roagene,  avait  proniis  d'embrasser  le  ju- 
dalsme  pour  epouser  une  fille  d*A- 
grippa.  Drusille,  qui  o'avait  que  six  ans, 
lui  tut  fiancee.  Mais  lorsqu^elje  fut  en 
dge  de  se  marier,  les  ceremonies  de  la 
circoncision  repugnerent  a  Epiphane,  et 
Prusille  ^pousa  un  autre  prince  de  Syrie, 
Aziz,  roi  d*£mese.   Drusille  q'attendit 

{)as  la  mort  (55)  de  ce  nouvel  epoux  poufr 
e  quitter.  Elle  Tabandonna  |}our  aller 
vivre  avec  Claudianus  Felix ,  mtendant 
de  la  Judee  (**). 

Agrippafutcelebre  parses  aventureset 
par  rainitie  des  d.eux  empereurs  Caius 
et  Claude.  Caligula  lui  donna  le  royauine 
de  Lysanias ;  Claude  se  moqtra  plus 
bienveiilant  encore  (41];  il  mit  la  Judee 
sous  sa  dependance  et  accord  a  la  Chal- 
cidique  a  son  frere  Herode.  Dans  Tan- 
n^e  43 ,  P.  Petronius  fut  rappele  et  rem- 
plac6  en  Syrie  par  Vibiu§  Marsus.  C'e- 
tdit  peut-^tre  le  m^me  que  les  soldats 
voulureut  donner  pour  successeur  a  Ger- 
oianicus.  Vibius  iVlarsus  etait,  dit-on,  un 
homme  instruit  et  lettre ;  et  sa  con- 
duite  avec  Agripua  temoi^ne  qu'il 
avait  une  volonte  ferme.  Agrippa  avait 
jconvoque  a  Tiberiade  les  rois  de  TO- 
rient.  Cetie  reunion  parut  aux  yeux  du 
gouverneur  de  Syrie  une  conspiration 
contre  la  domination  romaine.  II  se 
rendit  lui-m^me  a  Tiberi^dp  pour  dis- 
soudre  Tassemblee.  11  y  trouva  reunisB^- 
rode,  frere  d*Agrippa,  AiUiochus,  roi  de 
Commagene,Sempsigeran,rpid'Eraese, 
Polemon,  roi  du  Pont,  et  Cotys,  roi  d'Ar- 
menie.  Ces  princes  eurent  ordre  de  se 
separer  sur-ie-champ.  Agrippa  protesta 
contre  cet  outrage  a  son  independanoei 


f 


:»*)Jo8.,-<itt,XVUI,  ll;XX,6. 


68 


L*DNIVERS. 


et  il  &srtnt  k  Claude  pour  se  plaindre. 
On  ne  sait  comment  Tempereur  accaeil- 
lit  le  message  du  roi  juif;  mais,  en  Pan 
44,  laSvrie  re^ut  un  nouveau  gouver- 
neur ;  ci^tait  le  c^lebre  jurisconsulte  G. 
Cassius  Longinus  (*).  Agrippa  ne  v^- 
eut  pas  jusqu*^  I'arrivte  de  Longinus. 
II  laissait  en  mourant  un  fils  appel^ 
comme  lu!  Agrippa,  oui  n^a^ait  alors 
que  dix-sept  ans.  L*empereur  le  trou?a 
trop  jeune  pour  succeder  a  son  pere  et 
le  laissa  plusieurs  ann^  encore  sans 
pouvoir  et  sans  couronne.  La  mort 
de  son  oncle  U^rode  fut  pour  le  jeune 
Agrippa  un  evenement  neureux  (48). 
II  obtint  de  Claude  le  gouvernementite 
la  Cbalcidique,  auquel  avAtdes  droits  in- 
contestables  Aristobule,  fils  d*H6rodeet 
de  B^r^nice,.  sosur  d'Agrippa.  Le  jeune 
Agrippa  fut  le  dernier  prince  de  la  race 
d'H^rode.  ToutefOis  ii  n*eut  jamais  la 
Judee  qu'avait  possedee  son  pere. 

La  Palestine,  en  Tann^  49,  fut  d6fini- 
tivement  r^nieavec  le  pays  des  Arabes 
Itur^ns  k  la  province  de  Syrie.  Peu  de 
temps  aprte  (53),  la  Cbalcidique  fut  aussi 
r6unie  a  la  m6ine  province.  Agrippa  re- 
^t ,  en  ^ange  de  ce  petit  royaume,  la 
t6trarchie  de  Philippe  et  TAioil^ae  de 
Lysanias.  Agrippa  surv6cut  k  la  na* 
tionaiit6  juive;  il  mourut  en  90,  a  I'Age 
de  soixante-dix  ans  {**). 

GOLONIBS    SYBIBNNBS.     —   TaudlS 

que  la  Syrie  subissait  ains!  des  change- 
inents  pfutdt  dans  T^tendue  de  son  ter- 
ritoire  que  dans  son  administration, 
quelques  populations  syriennes,^tablies 
dans  les  villes  de  I'ext^rieur ,  oh  elles 
&isaient  un  commerce  actif  et  ^tendu , 
avaient,  par  leur  contact  journalieravec 
des  populations  grecques,  juives  ou  ara- 
bes, une  destine  plus  int^ressante. 
Bans  la  Babylonie,  la  ville  de  S6leucie, 
6ur  le  Tigre,  ^tait,  a  T^poque  oii  nous 
sommes  parvenus,  unentrepdtrenomm^ 
du  commerce  de  llnde.  Le  n6goce  6tait 
Ik,  comme  en  bien  d*autres  villes,  entre 
les  mains  des  Grecs  et  des  Syriens.  Ces 
deux  nations  vivaient  dans  la  m^me  ville, 
autant  qu'elles  le  pouvaient,isoleesrune 
de  TauUe.  La  population  grecque,  plus 

(*)  Selon  TMite,  dlt  TiUemont,  il  semble  qaa 
Tibius  Mamu  goovemait  encore  la  Jadte  ran 
47. 

(•*)  Tadt,  Aimn.,  XII,  SS.  —  Josipbe,  Bell, 
•Jurf.II,  7l\JHi.,  XX,  ft. 


nombreuse,  r6glait  la  police  de  S^leoeid , 
et  les  Syriens  se  soumettaient  oialgr^ 
eux  ace  pouvoir  Stranger.  Ceux-ci  s*UDi- 
rent  aux  Jui£s,  aui  occupaient  an  quar- 
tier  particulier  oe  la  ville.  Les  Svriens, 
devenus  les  plus  forts  par  cette  alliance, 
se  saisirent  du  gouvernement  et  conser^ 
v^rent  pendant  six  ans  Tad  ministration 
de  Seleucie.  Mais  on  peut  croire  que  les 
Juifs,  toujoursdomines  par  leurs  ideespo- 
litiques  et  religieuses,  iddes  exclusi  ves  qm 
leur  faisaient  m^priser  tout  ce  qui  n'^tail 
pas  eux ,  abreuverent  de  degodts  leurs 
allies.  Les  Syriens  se  rappelerent  alors  le 
caractere  sociable  des  Grecs ;  les  moeurs, 
la  langue ,  tout  les  rapprochait  de  leurs 
anciens  ennemis.  lis  se  donnerent  done 
a  eux,  et  les  Grecs  r6unis  aux  Syriens  at- 
taquerent  les  Juifs.  Its  en  tuerent,  seloo 
Josephe,  plus  decinquante  mille.  Cette 
revolution  se  fit  sentir  danstoute  la  Ba- 
bylonie  et  la  Mesopotamie.  Dans  ces 
vastes  pays,  il  ne  rests  d*autres  refuges 
aux  Juifs  que  Nisibe  et  Neerda.  Ges  eve- 
nements  se  passerent  vers  I'an  39  oo 
40C*). 

Les  empereurs ,  les  gouverneurs  re- 
mains en  Syrie ,  avaient  toujours  favo- 
ris^  r^tablissement  de  colonies  ^trang^ 
res  au  milieu  des  Juifs.  O^r^,  qui  ^tait 
apr^  Jerusalem  la  place  la  plus  impor- 
tantede  la  Jud6e,  eut  lon^temps  une  po- 
pulation syrienne.  Les  divinitesdu  paga* 
nisme  avaient  leurs  temples  dans  oette 
ville.  Mais  lorsqu'elle  fut  devenue  un  lieu 
important,  des  Juifs,  a  qui  leurs  riehes- 
ses  donnaient  un  grand  credit,  Tinrent  s'y 
etablir  et  ils  cherch^rent  a  gagner  la  ft- 
veur  des  intendantsromains.  lis  eureot 
bientdt  I'idee  de  remplir  seuls  le  senat 
de  la  ville  Ils  ^talent  riches ,  il  est  vrai; 
mais  les  Syriens,  qui  composaient  en  par- 
tie  la  garnison  oe  C^sarde,  opposatent 
une  forte  resistance  k  leurs  desseins  am« 
bitieux.  II  v  eut  d^slors  des  rixes  fr^ueo- 
tes  eutre  les  deux  populations.  Ges  que- 
relies,  peu  importantes  en  elles-mtoes, 
entretenaient  dans  les  esprits  une  grande 
exaltation  et  la  colere.  Un  jour,  enfin, 
un  corps  nombreux  de  Juifs  attaqua  ies 
Syriens ,  en  tua  plusieurs,  et  for^  les  an- 
tres  k  prendre  la  fuite.  Claudius  Felix, 
intendant  de  Judde,  se  montra  pour  ra- 
mener  Fordre ;  mais  les  vainqueurs  ro6- 


C)}0l.,^iit,XTin,19. 


SYRIE  ANCIENPIE. 


priamaat  son  antorite,  et  continukeut  k 

poursuivre  les  fuyards.  Les  troupes  eu- 

rent  ordre  alora  d*attaquer  les  Juifs,  et 

Felix  abandoDoa  les  maisoos  des  plus 

riches  d^entre  eux  au  pillage'et  aux 

flammes.  I^es  soldats,  excites  par  leurs 

ciiefis,  commireDt  de  grands  exc^.  £o- 

fio  les  Jurfs,  effray^,  fei^nirent  de  se 

soomettre  et  de  se  repentir.  Felix  ar- 

r#ta  aussitdt  ses  soldats.  Malgr^  leurs 

serments,  les  Juifs  reoommencerent  bien- 

t6t  a  exciter  de  nouveaux  troubles  dans 

Cesaree.  Claudius  Felix  eut  alors  recours 

a  Tempereur;  il  en?oya  les  notables  des 

deux  partis  plaider  leur  cause  devant 

n^ron.  Les  S3rriens  achet^rent,  dit-on,  la 

pcotectionde  Berylle^et,  par  cemoyen, 

lis  obtinreot  ce  (|u'ils  dcmandaient  con- 

tre  leurs  ennemis.  Les  Juifs  furent  pri- 

Tfo  du  droit  de  cit^  dans  C^ar^  (59). 

€e  iogement  de  Fempereur  eut  des  con* 

a^queoees  qu'aiors  on  ne  pou  vait  pr^voir. 

n  Goneoarut,  avec  d'autres  causes,  k  faire 

saftre  la  grande  r6volte  qui  se  termina 

par  fa  destruction  de  Jerusalem. 

A  partir  de  Pan  50,  Fagitation  s'ac- 
cnit  dans  les  autres  villes  de  Jud6e^  et 
soQvent  les  ordres  de  M^ron  ne  purent 
ramener  la  paix.  Les  Juifs  agissaient 
soordement  dans  C^ar^e  dans  ie  seul 
but  d^entrelenir  les  troubles;  c'^tait 
pent-^tre  par  haine  religieuse  centre  le 
ctilte  dominant  des  paiens.  En  Tann^ 
66,  la  multitude  sejeta  sur  un  Syrien 
qui  sacrifiait  k  ses  idoles  pres  de  la 
Synagogue.  Les  partisans  du  poly- 
tMtsnie  ^armerent  centre  les  Juifs,  qui 
fbrent  ebasses  de  la  ville.  lis  y  rentr^ 
rent  forsque  Tordre  parut  r^taoli.  Mais 
ee  caJme  ne  dura  qu'un  moment,  et 
aboutit  a  une  horrible  catastrophe :  deux 
mille  Juifs  furent  massacres  a  Cesar^. 
Lorsque  la  nouvelle  de  ce  carnage  se  fut 
repandae  dans  les  autres  villes  de  la 
Palestine,  on  s*y  livra  a  de  sanglantes 
represailles.  Les  habitants  de  Syrie  imt- 
tmBt  k  leur  tour  les  cruaut^  de  leurs 
eompatriotes  de  C^ar6e.  Toutes  les  vil- 
ksToisines  de  la  Palestine,  ou  habitaient 
un  grand  nombre  de  Juifs,  eurent  leurs 
ickies  d'extermination ;  k  Damas,  a 
Joppe ,  a  Gadara,  et  dans  d'autres  loea- 
Hies,  des  cadavres  d*hommes,  de  fem- 
meset  d'eaf  ants  jonchaient  les  rues  et  les 
pteespubiiques.  Quelquesgrandes  villes, 
Apamee  et  Antiocbe,  par  exemple ,  s'obs- 


tinrent  pendant  qaelque  temps  de  ces 
abominables  cruaut^  (*). 

MASSA.GRS  BBS  JUITS  ▲  ANTIOGHI; 
TITUS  EN  SYBIE;LA.COiniAGBNB  BBU* 
If  IB  DBFINITIVBMBNT  A  LA  SY  BIX.—  Lctf 

haines  ne  furent  pas  assouvies  par  tant 
de  massacres.  La  peur  devait  encore  les 
entretenir  et  les  raviver :  de  toute  part 
on  craigiiait  une  reaction.  Le  soup^onc 
planait  aussi  sur  les  Chretiens  et  sur  les 
Syriens,  peu  fervents  dans  les  pratiques 
du  paganisme.  On  se  souvenaitque  qud.* 
ones  ann^  auparavant  les  cnr^tiens 
d'Antioche,  dans  une  famine  qui  d^lait 
la  Judee,a  vaient  envoys  d^abondantes  au- 
mdnes  pour  soulager  la  mis^re  des  Juifs. 
Get  acte  de  charity  n'^tait  pour  les  Syriens 
que  la  preuve  d'une  secrete  complicity 
avec  ceux  qui  voulaient  la  mine  du  pa* 
ganisme.  En  67 ,  Antioche  trouva  enfia 
une  occasion  de  pers6ctiter  les  Juifs.  Elle 
lui  fut  ofFerte  par  un  ren^t.  Antiochus, 
dontle  pere  ^it  regard^  comme  le  chef 
de  la  population  juive  k  Antioche,  vou- 
lut  marquer  sa  conversion  au  culte  des 
paiens  par  une  action  ^latante.  II  ao- 
eusa  son  p^re  et  plusieurs  de  ses  an-> 
ciens  coreiigionnaires  d'avoir  r^olu  de 
mettre  le  feu  k  la  ville.  Sa  d^laratioa 
atteignit  aussi  quelques  Strangers;  An- 
tiocbus  pr^tendit  aue  leur  voyage  n'a- 
vaitd'autrebutqoenncendied'Antioche. 
Le  peuple  en  fureur  se  saisit  de  ces 
Strangers ,  et  ils  furent  immediatement 
conduits  au  bdcber.  Nous  ne  savons  pas 
quel  fut  le  sort  du  pere  d'Antiochus.  On 
employa  centre  les  Juifs,  d'apris  les 
conseilsd*Antiochus  m£me,  le  genre  de 
procedure  dont  on  se  servait  dans  Tem- 
pi re  centre  les  chr^tiens.  On  leur  ordon- 
nait  de  sacrifier  aux  dieux,  et,  sur  leur 
refus,  on  les  livrait  aa  supplice.  On  sou- 
mettait  aux  mimes  ^preuves  les  Grecs 
et  les  Syriens  soupconn^  de  suivre  la 
loi  de  MoTse.  Cependant ,  comme  il  ar- 
rive toujours,  le  zele  des  pers^uteurs  se 
ralentit;  ie  bourreaune  put  atteindre 
tons  les  coupables  et  on  eessa  de  tuer. 
Mais  Antiochus,  aid6  des  satellites  que 
lui  avait  donnds  le  gouverneur  de  Syrie, 
re^ut  Tordre  de  d^fendre  aux  Juira  la 
pratique  de  leur  culte.  II  promena  ses 
soldats  dans  les  villesvoisinesd^Antioche, 

C)  Jo«..  AnL,  XX ,  6  ct^;  Bell,  Jud.,  H,  99^ 


70 


LTOilVERS. 


«t  partOQt  ilseliTra  ^degrandes  cruaut^. 
Bien  cependant  ne  pouvait  assoupir 
lahaine  des  pers^uteurs;  iis  signaferent 
les  Juifsa  lacoiered«Titus,  lorsqu^ii  vint 
€n  Syrity  apres  la  chute  de  Ji^rusalem. 
Le  Cesar,  press^  de  negocier  avec  les  Par- 
thes,  k  Zeugma,  passapar  Antioche,  sans 
8*7  arrSter.  II  n'eeauta  pas  cette  fois  les 
eonseitsde  ceux  qui  demandaient  Pexpul* 
sion  des  Juifs.  Mais  lorsqu'il  reviat ,  11 
trouva  les  espritsdans  unegrande  exalta* 
tion.  Coll^a,  qui  gouvernait la  Syrie  ett 
qoalite  de  lieuteaant,  avait  pr^serv^  avec 
I>eine  les  Juifs  d'une  enti^re  extermina- 
tion. On  les  accUsait  d'avoir  mis  te  feu 
liunquartierd*Antioche.  Le  principal  au* 
teur  de  leurs  maux,  Aotiochus,  avait,  en 
cette  occasion,  reveille  contre  eux  la  cul^ 
re  da  peuple.  dependant  une  enqu^te  s6* 
rieusf  prou?a  qti'ils  ^taient  innocents ;  les 
T^ritables  iacendiaires  et^ent  quelques 
mis^rables  qui,  ^ras^  dedettes,  avaient 
eherch^  dans  Tembrasement  d*Antioche 
UQ  moy'en  d'^happer  a  leurs  engage- 
ments. Le  peuple,  quoique  convaincu 
del'inju&iee  de  Taccusation,  ne  diminua 
rieii  de  sa  violence.  II  deraanda  de  nou- 
Teau  a  Titus  Texpulsiondes  Juifs.  Le€6- 
sar  refusa : «  Leur  pays  est  ruine,  dit*il  au 
peuple,  nulle  eontree  neveut  les  aecueil- 
tir ;  ou  pourrais-je  les  transporter  ?  »  Leg 
babitants  d*Antioche  firent  aussi  dMnuti- 
les  efforts  pour  que  Titus  enlevAt  k  ces 
malheureux  le  droit  de  cit^  et  d6truistt 
les  tables  de  cnivre  qui  eontenaient ,  par 
^rit,  les  garanties  de  leur  sdret^  person- 
nelle(71)  (*).  Titus  quitta  Antioche  pour 
aller  k  Rome  jouir  deshonneurs  du  triom- 

5 he.  Vers  le  m6me temps,  lesucoesseur  de 
lucien,  C^sennius  P6tus,  prit  en  main  le 
gouvernement  de  la  Syrie,  qni  avait  ^t^ 
momentan^ment  cond[6  k  Goll^a.  Petus 
ngnala  son  administration  en  Orient  en 
veunissant  la  Commag6ne  k  la  Syrie  (7d). 
11  voulait  ^tendreau  nord  la  province  syt 
rienne  jusqu'a  TEuphrate;  pour  justiiier 
ses  desseinsambitieux>  il  se  fondasur  les 
rapports  d*Antioehus  avisc  les  Partbes. 
Cependant  Antiochas,  deptiis  Tan  37, 
avait  montr^  durant  plus  de  trente  mi* 
H^es  une  fiddit6  constante  aox  Remains. 
Ifaguere  encore ,  il  avait  envoys  contre 
les  Juifs  des  troupes  d*elite  sous  la  con- 
duite  de  son  fils  £piphane.  Yespasien, 

e 


oubliant  les  services  dn  roi  de  Goukm^* 
g^ne,  donna  plein  pouvoir  a  Petus  {>ottr 
pr^venir  les  dangers  d*une  coalition.  Le 
gouvern^ur  demanda  secretetnent  des 
secour!*'au  roi  Aristobule,  a  Soemc  . 
prince  (Tt^me^e  {*) ,  et  tomba  a  rimpro- 
viste  sur  la  Gommag^ne.  Le  roi  surpris 
n'opposa  point  de  resistance.  SpiphanA 
et  Callinicus,  f^^re  d'Antioehus,  ten- 
terent  seuls  d*arr^ter  la  marche  des  Ro- 
mains;  Antiochus  se  ri^fugia  en  Gtli- 
eie,  mais  il  ne  put  trouver  un  asite.  11  fut 
charge  de  chafnes  a  Tarse ,  et  conduit 
k  Spafte ;  rendu  k  la  liberty  par  Vespa- 
Sien ,  ii  se  retira  k  Rome,  et  y  v^cat  aa 
sein  de  sa  fiimilte,  dans  le  repos  de  la  tib 
priv^. 

Aucun  ^vi^nement  remarquable  ne  si- 
gnala  le  regne  des  trois  empereora  Fla- 
viens  en  Syrie.  lis  donn^rent  leur  nan 
k  plusieurs  viltes;  Chalcis,  Philadelphia 
et  Samosate,  capitate  de  la  Gommageoe', 
appei^e,  depuis  sa  reunion  k  la  Syrie,  pro- 
vince j4ugust€uphrastenne  i  prirent  te 
surnoiki  de  Flavienne  (**).  Antiocbe  fiit 
tranquille ;  on  remarque  sealement  dans 
Tanu^e  79  (***)  une  sedition  amen^par 
rimpmdence  du  gouverneur ,  qui  avut  i 
excite  des  dissensions  entre  les  habi- 
tants. Un  tremblement  de  terre  rappela 
tes  insurg^  au  devoir,  s'il  feut  en  eroiie 
lliistorlen  d' Apollonius  de  Tyanes  (***1.  i 
Ge  messie  du  paganisme  tenta  vainemeiit 
de  remuer  Antioche  par  ses  nouveaut^ 
religieuses,  mais  les  habitants  I'aeeueil- 
Hrent  avec  indiff(6rence. 

LA  SYRIE  sous  LBS  ANTONINS  (^***).— 

Le  commencement  du  second  siede  flit 
maraud  par  le  r^veil  de  la  vieille  baine  dd 
PartbescontrelesRofnains(105).  Lema- 
ment  6tait  mal  choisi  pour  les  eonemis  de 
Rome.  Trajan,  alors  en  paix  avec  les  Da- 
ces, pouvait  se  porter  avec  les  principales 
forces  de  TEmpire  sur  la  fVonti^re  atta- 
qu6e.  L'empereur  traversa  la  Gr^, 
passa ,  au  roois  de  d^mbre ,  par  Stieo- 
eie,  et  arriva  k  Antioche.  11  entra  dans 

(*)  Novfl  Be  oonnaisaons  plas  de  roi  k  taht 
depuis  Aziz ,  qui  mourul  sous  Neron,  el  qui 
laissa  sa  dDuroone  k  uo  fr^e  dont  les  hisb- 
riens  ne  nous  dot  pas  oonserv6  le  nom. 

(*')  Spanh.,Vir;  p.  709-711. 

(***)  Pbllost,  ApoH,  vi<.,  YI,  16. 

(•♦•*)  Philost.,  Jpoll.  vit..  Ill,  12,  IS. 

(*****)  Foy,,  pour  la  oonqu^te  de  VArabie  W* 
tree  par  Cornelius  Palma,  gouverneur  de  Svrie, 
VHisU  des  Arabes  de  M.  Noel  des  Yergen  cCnit, 
pitU\  p.  97. 


X 


\: 


X 


\ 


V 


\ 


^ 


STRIE  ANCIEHmE. 


Tl 


oette  TiUe  la  t6te  eeinte  de  branches  d V 
livier ,  le  7  Janvier,  par  la  porte  de  Da- 

en^.  Gest  a  Antiocne  ^ue  se  r^unirent 
diflerents  corps  deTarniee,  les  l^ions 
et  les  allies ,  veDUS  de  la  Phenicie  et  des 
extremites  de  la  Syrie.  Le  prince  de  TOs^ 
roene  et  Tabgar  <r£desse  envoy^reol  des 
prints  ^  l^mpereur.  Avant  de  partir 

rir  rexp^ition,  Trajao  voulut  s'assttrer 
secoars  des  dieux.  II  pers6cuta  les 
cfaretiens  d*Antioche,  etoftrit  a  Jupiter 
sur  le  montCassius  les  d<^pouilies  des 
Daces  Taincus.  EnOa  il  se  mit  en  marche 

(107)  n-  ^       ,  ^     , 

Les  Parthes  ne  furent  pas  domptes. 
lis  recoDiraencerent  plusieurs  fois  enco* 
re,  sous  le  regne  de  Trajan ,  leurs  incui^ 
sioos  sur  rCuphrate.  Enll5,Tr^an 
revint  en  Syrie  pour  arr^ter  les  progr^ 
desBarbares.  11  paralt  qu*il  consults  IV 
lacle  d'Heliopolis ,  avantde  oommeneer 
la  cainpagne  (**). 

II  fit  prendre  aux  troupes  Inarsquartierl 
d^Ter  et  reotra  a  Antiocfae*  Sa  pr^senc« 
avait  atdr^  dans  la  capitate  de  la  Syrie 
one  grande  foule  d'^trangers.  Antiocha 
^it  rempiied'oilieiers  romains « de  com* 
mer^aiits,  decurieuxi  ded^put6s  des  villeSk 
Tout  le  nionde  se  livrait  saos  inquietude 
aox  affaires  on  aux  plaisirs.  Cependant 
de  violeats  orages  s  des  pluies ,  des  coups 
de  Yent,  annen^aient  rapproehe  d*ua 
terrible  d^sastrer**). 

Eafin^  le  2adeeenibre,  nn  trembiement 

deterre  ren versa  la  Tille;  enquelqueshevh 

lesles  habitants  furent  tous  ecras^soos 

les  A^eonbres.  Les  roes,  les  places  pu* 

bliqnes  €taient  couverte s  de  mines  et  de 

eadavres.  L'empereuravalt  ^  sauv6,  d»> 

saj  t-on,  fwr  une  intervention  c6leste.  Saisi 

par  un  faatdtne « il  ^tait  deseendu  du  baut 

desoa  palais,  etavaitMiapp^par  lafoile. 

Qoand  le  sol  fiit  raffermif  il  fit  eommeo- 

ea*  des  fouiUes  sur  tens  les  points. 

.    On  trouva  panni  ks  morts  le  oonsoi 

PMob;  quelqucs  personoes  vivaienteii- 

oare :  sous  lea  mines  d*une  inaison ,  una 

femose  ^Cait  eoseveiie  avec  son  filstelle 

le  neamssalt  de  son  kit.  Ailleurs ,  nn 

jeime  enfant  ^uit  couch^  sur  le  cadavre 

desa  H>^re,  etso^tenoore  la  mameile^ 

CO  Malala,  p.  %.  * 

{**)  Onuph.^  p.  310b  —  J'aift  oMistttorvt,  G. 

I   (•*•)  Etu^be,  Chron.t  IV,  p.  208 ;  ScaHg.  -  Kva- 
Be,Il,  iti,  D.ao6.  —  Aaceliitt  Victor..—  Dioo, 


Le  mont  Gassius  fut  6branl^  de  eette 
terrible  secousse ;  le  sommet  de  la  mon- 
tagne  se  d^tacha  en  partie  et  se  pencha 
8urAntiodie;raspect  dupays  fut  eom- 
pi^tenient  change  :  des  col  lines  et  des 
sources  nouvelles  sortirent  de  terre, 
k  ou  s'^teodaient  quelques  jours  aupa- 
ravant  des  plaines  arides  et  unies. 

Adrien  etait  gouverneurde  Syrie,  lors- 
qu*il  re^ut  le  9aodt(l17)  la  nouvelle  de 
son  adoption  par  Trajan;  deux  jours 
apreS)  il  apprit  la  mort  deson  p^re  adop- 
tif. 

Cest  a  S^Iinonte,  vitle  de  Cilicie,  que 
furent  o^l^br^s  les  fun^railles  de  Pempe- 
rcur  (*).  Adrien  envoya  ses  cendres  k 
Rome.  II  revint  k  Antioche,  et  remit  le 

rvemement  de  la  province  aux  mains 
Casilius  Servilius.  Avant  de  partir 
pour  ritalie ,  il  fit  combler  la  fontaine 
Castalie.  II  craignait  que  Poracle,  qui  lai 
avaitannono6(k  Iui-m6me  sa  grandeur  fu- 
ture, n'6veillftt  par  d'obscures  predic- 
tions rambitionde  quelques  hommes  im- 
prudents  (**). 

Les  Syriens  vlrent  sans  regret  le  de- 
part d*  Adrien.  La  gravity  dont  rempereur 
faisait  parade  d^laisait  ^  un  peuple  l^ger. 
Lorsqu*il  reparut  en  Syrie,  vers  Tan  135, 
il  trouva  la  m^me  antipathic.  Cette  fbis, 
le  ciel  semhla  s'associer  &  Taversion  des 
Syriens  (***).  Le  lever  dusoleil  pr6sentait 
sur  le  mont  Gassius  un  spectacle  magni- 
fique  que  Tempereur  fiit  curieux  de  con- 
templer.  Le  temps  ^tait  convert  et  ora- 
geux ;  rempereur  entra  dans  le  temple  de 
Jupiter;  mais  pendant  qu'on  accomplis- 
sait  les  o^r^onies  du  culte  ,  la  foudre 
frappa,  sous  les  yeux  d' Adrien,  la  victime 
ctle  sacrificateur  (138).  LVmpereur  eut 
un  moment  la  pens^e  de  d^membrer  la 
Ph6niciedu  gouvernement  de  Syrie ;  mais 
il  ne  paratt  pas  (jull  ait  donn6  suite  k 
ee  projet;  du  moins  il  est  certain  qu*dpr^ 
la  mort  d' Adrien,  les  gouverneurs  de  Sy- 
rie conservaient  leur  autorit^  sur  la  Ph^ 
nicie  (****).  Nous  mentionnerons  la  r6- 
volte  de  Barcochab  qui  se  fit  sentir  jus- 
qu'au  cceur  de  la  Syrie  r*****). 

Jusqu'au  regne  de  Marc-Aurele  les 
histoneos  ne  parlent  plus  de  cette  pro- 


(•)  Spartien,  Fie  d*  Adrien ,  p.  3. 
(♦*)  Amm.,  liv.  XXII,  p.  226. 
{•**)  Spart.,  F'ie  d* Adrien ,  p.  7. 
(***•)  he  d* Adrien,  p.  il. 
(**tf**)  Sulp.  Sev.,  liv.  IL 


7J 


L'UNIVERS. 


viiree;  maison  suppose,  d*dpr^  d*an- 
cieanes  inscriptions,  qu*Antonin  dota 
Antioche  des  droits  de  eolonie  romaine : 
ce  fut  probabiement  pour  encouraser 
les  habitants  k  reblitir  cette  ville,  qu  un 
incendie  avait  en  partied^tniiten. 

Le  resiie  de  Marc-Aurele  fut  une 
6poque  de  tranquillite  et  de  paix  pour 
certaines  provinces  de  l*Empire;  mais 
il  fut  marqu^  en  Syrie  par  les  ravages 
des  ennemis  et  par  des  troubles  int^ 
rieurs.  Les  Parthe^,  vainqueurs  en  Ar- 
m^nie  (162),  passerent  TEuphrate,  et 
forcerent  a  la  retraite  Attidius  Corn^- 
iianus,  gouverneur  de  Syrie.  Le  pays 
qu*il  abandonnait  fut  aussitdt  devast^ 
par  les  baiides  de  Vologese.  Les  habi- 
tants, incapables  de  roister  a  Tinvasion, 
allaient  faire  cause  commune  avec  les 
Parthes,  lorsqu'on  apprit  Tarriv^e  de 
Lucius  Yerus.  II  amenait  avec  lui  des  g^ 
neraux  capables :  Statins  Priscus ,  Mar- 
tins Verus,  illu8tr6  par  Thistorien  Dion , 
et  AvidiusCassius,  oelebrepar  sar6Yolte 
et  sa  mort  (**). 

Les  Grecs  ont  raeont^  sur  le  ton  du 
roman  ou  du  pan^yrtque  les  exploits  de 
ces  g^ner.iux.  Lucien,  bless^  des  inexac- 
titudes de  leur  r^cit,  composa  principa- 
lement  centre  eux  son  trait6  c6lebre :  De 
la  manUre  d'ecrire  rhisioire. 

Ce  iJTre  nous  apprend  que  les  Parthes, 
forces  de  repasser  i'Euphrate  a  la  nage, 
furent  vaincus  dans  une  grande  bataille, 
pres  d^Europus.  Les  troupes  romaines 
remporterent  d  'autres  avantages  dans  des 
combats  livres  vers  Sura,  ville  de  Syrie, 
situ^c  sur  TEuphrate,  aumidi  d'Europus. 
La  guerre  se  termina,  en  Tan  165 ;  elle 
avait  dur^quatre  ann^es;  pendant  lesquel- 
les  Lucius  Verus,  tranquille  a  Antioche, 
jouait  le  rdle  obscur  d'intendant  d*ar- 
ni^;  il  se  bornait  h  surveiller  lesenvoisde 
vivres,  sans  s*inqui^ter  des  railleries  des 
Syriens.  Un  seul  fait  marqua  son  sejour 
en  Orient :  ce  fut  son  mariage  avec  Lu- 
cille, fille  de  Marc-Aurele.  II  alia  recevoir 
sa  fiancee  a  Ephese.  L*empereur  n*osa 
accompagner  sa  fille  en  Asie  :  il  crai- 
gnait  la  jalousie  de  Verus,  qui  Taccuserait 
sans  doute  de  vouloir  s*arroger  les  bon- 
neurs  du  triompbe.  Mais  il  envoys  son 
parent  Ann.  Libo  en  quality  de  lieute- 
nant. Ce  jeune  homme  mourut  a  son  ar- 

(*)Spanh.,  VIII,  p.  76B. 
r)  Dion,  Uv.  LXil,  p.  802. 


ri vee  en  Syrie.  LadusYerus  revint  en  Eu- 
rope, en  176,  accompagn^  d*UQ  cort^ 
d'histrions.  Avidius  Cassius  demeura 
dans  la  province.  Lucius  Yerus  avait 
essays  d'eveiller  les  soup^ons  sur  la  fid6- 
lit^dece  gouverneur.  Mais  Marc-Aureic 
r^pondit  aux  accusations  de  son  geodre 
par  ces  nobles  paroles  :  «  Si  Cassios  a 
«  mieux  que  mes  enfants  I'art  de  se  con* 
«  cilier  Tamour  des  provinces,  p^risse 
«  ma  famille  et  que  Cassius  re^ne!  *  Aa 
reste,  le  gouverneur  de  Syrie  avait  rendu 
d'anciens  services  a  Tarmee;  il  avait 
r^labli  la  discipline  dans  les  l^ions  da 
Danube,  et  continuait  ses  r^formes  en 
Orient.  Cette  province  ^tait  la  patrie 
d* Avidius ;  il  ^tait  ne  a  Cyrrhus ,  ou  H^ 
liodore,  son  pere ,  enseignait  la  rhetori- 
que  avant  d'etre  nomm6  prefet  d'tfyp^' 
Le  fils  d*U^llodore  avait,  au   temol- 

gnage  de  Dion,  des  quality  remarqua- 
les  (*) ;  il  fut  pooss^  a  la  r^volte  par  la 
femme  de  Marc-Aurdle.  LMmperatrice 
Faustina  prevoyait  la  mort  procbaioe 
de  Tempereur,  et  connaissant  le  carae- 
tere  de  son  fils,  elle  ne  voyait  dans  Ta- 
venir  que  des  chances  contraires  a  son 
ambition.  Elle  crut  trouver  un  moycsi  de 
se  maintenir  au  pouvoir  en  s'attachant 
k  la  fortune  d'un  general  ferme  et  habile. 
Elle  choisit  Cassius  comme  le  plus  digne, 
et  lui  6crivit  de  se  faire  declarer  cmpe- 
reur  aussitdt  qu'il  apprendrait  la  mort 
de  Marc-Aurftle.  Pen  ae  temps  a|)resle 
bruit  ser^pandit  en  Orient  que  lempe- 
reur  avait  cess^  de  vivre.  La  nouvelle 
^tait  fausse ;  mais  Cassius  profits  de  fer- 
reur  generate  pour  exciter  des  troables 
dans  rarm^e  et  dans  les  proviuoes.  Lei 
sMitieux  furent  bientdt  detromp^ ;  mais 
il  ^tait  trop  tard  pour  arr^ter  le  inou^e- 
ment.  Tout  TOrient  jusqu'au  Taurus, 
d'une  part,  Calvisius  et  I'Egypte,  de 
Tautre,  avaient  pris  ouvertemeot  parti 
pour  Cassius.  L'msurrection  eUit  sou- 
tenue  des  troupes  de  Bithynie.  Les  w- 
gions  de  Pannonie  araient  proclam« 
Avidius.  Des  rois  Strangers  sarmaieat 
pour  la  cause  de  ce  gto6ral ;  Meticni 
son  fils,  6tabli  k  Alexandria,  fm 
chared  d'entretenir  la  r^volte  en  Rgypte. 
Cassius  annon^it  ouvertemeot  son  fl«s- 
sein  de  d^poss^er  Marc-Aurele.  II  ac- 
cusait  rincapacit6  de  rempereur  quit 

(*)  Dion ,  llv.  LXXI,  p.  802  et  snlv. 


SYRIE  ANCIENNE. 


79 


toot  oeeape  de  vaines  subtilit6s  philo- 
sophiqaes,  abandonnait  les  provinces 
tax  rapines  des  pr^fets ;  mais  tout  en 
se  plaignant  d'une  administration  trop 
faiUe ,  il  m^nageait  la  personne  de  son 
enneini,  et  n*allajt  pas  au  deJa  de  la  criti-* 
quede  soq  gouvemement  etdeses  talents 
politiqaes.  L'empereur,  camp6   alors 
sorle  Danube,  apprit  de  Martius  Verus, 
qui  gouvernait  eu  Cappadooe,  la  premie- 
re nouvelte  du  soulevement.  Son  pre- 
mier soift  futd'en  donner  avis  au  senat. 
Rome  fijt  constern^e.  On  y  redoutait 
Tarrivee  d*Avidius ,  qui  pouvait  parattre 
d*uo  instant  a  Tautre  a  1  emboucnure  du 
Tibre.  Marc-Aurele,  pour  prevenlr  son 
rival,  deployaunegrande^nergie.  Forc6 
de  resisteren  personne  aux  barbares  d'  Eu- 
iope»  il  envoya  centre  Cassius  des  g^ne- 
rauxbabllesetfideles.  Cette  expedition, 
dont  toas  les   details  int^ressaient  si 
vivement  les  Syriens,  nous  est  peu  con- 
nue.   On  sait  qa'un  centurion  nomm6 
Antoine  et  un  soldat  d*un  rang  infe- 
jieur  (iixofx^)  assassinerent  Cassius. 
Quaod  Tarm^  se  vit  sans  chef,  elle 
cfaerdia,  par  le  meurtre  de  M^tien  et  du 
prefet  du  pr6toire ,  k  m^riter  sa  grdce. 
L'empereur  panit  satisfait  de  sa  soumis- 
sion.  Pour  eviter  m^roe  de  connattre  les 
coopables,  ilbrdia  sans  les  lire  les  papiers 
d*Av]dius.  Hare-Aureie ,  en  pardonnant 
«u  rebelles,  sut  recompenser  ses  parti* 
sans.  Albious,  qui  avait  maintenu  dans 
le  devoir  les  l^ions  de  Bithynie,  fut  ^ev6 
an  ooDSulat ;  Martius  Verus  recut  le  poste 
honorable  de  gouverneur  de  Syrie;  Per- 
tinax,  qui  devait  itre  empereur,  rappel6 
d'Orient,  ou  U  etait  all6  combattre  tas- 
iRis,  fat  charge  de  defendre  le  Danube. 
L'empereur  voulut  acbever  par  sa  pre- 
sence la  pacification  de  I'Orient.  llarriva 
en  Sjrrie  probablement  dans  Tannee  m^- 
toe  on  mourut  Cassius.  II  se  montra  plus 
dnr  envers  les  corporations  quit  ne  Ta- 
vait  M  pour  les  personnes  compromises. 
II  enieva  aux  habitants  d'Antioche  leurs 
droits  de  municipe ,  leur  defendant  tout 
atlroapement  et  surtout  les  assemblies 
de  Vagora.  Les  regrets  que  cette  ville 
avail  tpmoignes  h   la  mort  de  Cassius 
pTovoquerent  cet  edit  rigbureux;  Tem- 
pcrear  se  seotit  outrage  du  deuil  et  de 
ladonleurd^un  peuple  leger  et  inconstant. 
Gependant  il  s'adoucit,  et  retablit  les 
Aatioebieos  dans  leurs  droits  de  cite. 


Les  habitants  de  Cyrrhus  le  trouverent 
plus  inexorable.  II  ne  voulut  jamais  se 
rendre  aux  {>rieres  qu'ils  lui  firent  de 
visiter  leur  ville,  patrie  de  Cassius.  La 
revoite  de  Syrie  donna  lieu  a  une  cons* 
titution  imperiale  tres-remarquable.  II 
fiit  etabli  que,  pour  mettre  a  une  raoins 
dangereuse  epreuve  la  fideiite  des  pro- 
vinces, on  ne  confierait  une  prefecture 
qu*^  des  hommes  etrangers  aux  pays. 
Maijzre  cette  sage  precaution,  quelques 
ann6es  plus  tard ,  devait  sortir  de  c^  tte 
meme  Syrie,  une  familled'empereurs  qui 
porterait  ses  coutumes  et  ses  croyances 
relisieuses  de  TOrient  dans  Rome  meme, 
et  (ians  le  palais  des  Cesars. 

Pertinax  fut,  apres  Martius  Verus  y 
gouverneur  de  Syrie  jusqu*en  Tannee 
183.  L*exercice  de  cette  haute  fonction 
corrompit  son  Integrite,  et  Texposa  aux 
moqueries  du  peuple.  Commode  avait 
succede  h  Marc-Aurele ;  sous  son  nom 
regnaient  les  afirancbis.  L'un  d'eux, 
Tathlete  Narcisse,  procura  a  Niger  la 
prefecture  de  Syrie  ( 183).  Niger  gou- 
verna  pendant  dix  ans  cette  province, 
sans  trouver  aucune  occasion  de  s*il- 
lustrer.  Un  citoyen  d'£mese,  nomme 
Julius  Alexandre,  donnait  des  inquie- 
tudes h  Tempereur.  Commode  envoya 
un  centurion  pour  le  tuer.  Mais  Julius 
Alexandre  fut  mforme  de  Tarrivee  de  cet 
ofBcier  a  fimdse ;  il  le  prevint,  et  Tassas- 
sina  pendant  la  nuit.  Au  point  du  jour,  il 
sortit  de  la  ville  avec  un  de  ses  amis,  lis 
furent  bientot  poursuivis ;  Julius  Alexan- 
dre, montesurunboDcheval,gagnait  du 
terrain ,  et  laissait  en  arriere  son  com- 
pagoon  de  fuite.  Mais ,  ne  voulant  pas 
abandonner  son  ami ,  il  Tattendit  quel- 
que  temps.  II  fut  victimede  son  courage. 
Les  cavaliers  qui  les  poursuivaient  pro- 
fiterent  de  ce  retard  pour  lui  couper  la 
retraite.  Alexandre  voyant  que  la  fuite 
etait  impossible,  tuasonami  et  se  donna 
ensuiteiamort^*). 

8BPTIMB      SBVBEB      ET      LBS      BM- 

PBRBURS  STBIBNS.  —  Pertinax  succeda 
a  Commode ,  et  Didius  Julianus  h  Per- 
tinax. Niger  gouvernait  encore  en 
Orient.  II  s'etait  acquis  Test! me  de  tous 
les  habitants  par  sa  douceur  et  son 
babilete.  La  multitude  Taimait ,  parce 
quHl  savait  flatter  ses  goilts.  On  n'a* 

(*)  Dion,]lv.  LXXIIiP.  SM.  -  Umprlde,  Ffi 
de  Commode* 


f4 


LTJNIVERS. 


Tait  jamais  tu  h  Antiocbe  des  jeux 
aussi  fr^uents  et  aussi  inagnifiaues. 
La  poputarite  de  ce  general  setait 
^tendue  jusqu*a  Rome;  fa,  comme  en 
Syrie,  les  voeux  publics  Tappelaient  au 
soaverain  pouvoir.  Niger  se  crut  destio^ 
a  relever  TEinpire.  II  designa  un  jour 
aux  legions  pour  se  rasseinblerdans  une 
graode  piaine.  Le  people  d' Antiocbe, 
qui  penetrait  le  motif  de  cette  reunion 
militairet  vint,  au  moment  convenu,  se 
m^ler  aux  soldats.  Un  tertre  de  gazon 
s^elevait  au  milieu  de  la  plaine;  Niger 
montasur  cette  Eminence,  et,  de  la,  il 
harangua  la  foule,  serev^tit  de  la  pour- 
pre,  et  marcha  vers  le  temple,  precede 
de  la  torcbe  de  pin  qu'on  avait  coutume 
de  porter  devant  les  empereurs.  Apres 
avoir  implore  ie  secours  des  dieux ,  il 
rentra  au  palais.  Quelques  jours  apres, 
le  Douvel  empereur  recevait  les  envoyes 
des  provinces  d'Europe,  et  des  princes 
Grangers  qui  r^gnaient  au  dela  du  Ti- 
gre  et  de  TEuphrate.  11  trouva  un  com- 

r^titeur  dansTAfricain  Severe,  proclam^ 
Rome.  Une  lutte  ^tait  imminente  ea- 
tre  rOrient  et  TOceident.  Barsemes, 
roi  d'Atra,sar  I'Eupbrate,  et  les  Adiab^- 
niens  ,  envoyerent  a  Niger  des  corps 
d'archers  aux ili aires;  les  Partfaes ,  qui 
n'avaient  pas  d'artn^  permanentes,  le- 
verent  ^alementdescavaliers.  Les  babi- 
tants  d* Antiocbe  se  ran^kent  en  masse 
sous  ses  aigles.  L'Armenie  seule  ne  r6- 
pondit  pas  a  Fappel  de  Niger ;  eile  de- 
roeura  neutre  dans  la  guerre.  Toute 
TEurope,  Byzance  exoeptee,  se  d^Iara 
pour  Severe.  Tels  ^taient  ies  forces  et 
les  alli^  d»$  deux  empereurs  au  com- 
mencement de  Tann^  194.  i£milianus, 
proconsul  d*Asie ,  commandait  Tarm^ 
de  Niger ;  il  fut  battu  pres  de  Gizyque. 
Peu  de  tem»s  apres.  Severe  remporta 
une  nouveiie  victoire  k  Nicee.  Les 
OrientauX)  prompts  k  se  d^courager, 
crurent  que  le  destin  favorisait  leurs  ea- 
nemis.  La  rivalite  des  villes  entre  el- 
les  affeiblissait  encore  la  puissance  de 
Niger.  Tyr  et  Laodicee  avaient  proclam^ 
Severe,  par  baine  contre  Antiocbe  et 
Beryte.  Lorsque  Niger  apprit  la  defec- 
tion de  Tyr  et  de  Laodicee,  il  envoya  aus- 
flitdt  contre  oes  deux  villes  tous  les  Mau- 
res  de  son  arm^,  avee  quelques  corps 
d*archers.  Laodicee,  surprise,  fut  re- 
duite  en  cendres.  Tyr  subit  ie  m^me 


cb^timent.  Gependant  Tarmde  de  S6- 

v^re ,  arrlt^  en  Cappadoce ,  se  consu- 
mait  en  vains  efforts,  pour  franchir  la 
defiles  du  Taurus.  Un  secours  iiiespen 
mit  fin  a  ses  fatigues.  Les  pluies  de  riii> 
ver  et  la  fonte  des  neiges,  dont  les  eaoi 
descendaient  des  montagnes ,  empor- 
terent  les  travaux  de  defense ,  et  tn- 
cerent  un  passage  a  travers  le  Taurus. 
Severe  francbit  le  pas ,  et  ne  s^arrte  i 
qu'a  la  plaine  d'Issus  {*).  CTest  dans  d 
vaste  cbamp  de  bataille  que  Tarmee  di 
Severe  rencontra  les  corps  avriensi 
formes  des  jeunes  volontaires  d  Antio* 
cbe.  Ces  enfants,  accourus  depuis  quet* 
q^ues  jours  seulement  du  foyer  domes* 
tique ,  sVJancerent  avec  ardeur ,  mail 
sans  tactique,  sur  les  legions  illyrieft* 
nes  de  Severe ;  celles-ci  reculaient  dal, 
lorsqu'un  cbangement  soudaia  de  ill- 
mospbere  retablit  la  fortune  du  Clsai 
africain  {**).  Le  ciel  se  couvrit  toutl 
coup ,  et  Torage  le  plus  terrible  ^ata. 
Au  milieu  de  la  pluie ,  des  flairs ,  des 
coups  de  tonnerre,  les  Syriens  ne  dq- 
rent  acbever  leur  victoire.  Les  habi- 
tants du  pays  assistaient  a  ce  coodkat 
comme  a  un  spectacle,  et  couvraienl 
toutes  les  coliines  qui  etaient  k  Tentoiir 
comme  les  degres  d'un  amphith^tie 
Mais,  lorsque  les  Sev6riens  rallies  poos- 
serent  vigoureusement  Tarm^  de  Niger, 
toiite  cette  foule  de  curieux  fut  envelei- 
p^  dans  la  confusion  g^^rale,  et  imp- 
toyablement  massacr^e. 

Niger  courut  k  Antiocbe;  mais  il  vit 
aue  les  forces  et  ie  courag^e  de  cette  vilie 
etaient  6puis^.  II  repnt  precipitam* 
ment  la  fuite  vers  TEupbrate ;  maisatlemt 
par  les  cavaliers  de  Severe,  il  fut  Ui^  lei 
armes  a  la  main.  Un  grand  nombrede 
Syriens,  plus  beureux  que  rempereor,  \ 
trouverent  un  asile  cbez  les  Parthes.  Hi 
refils^ent  Tamnistie  de  Severe.  Le  vain*  j 
queur  irrite  souilla  sa  gloire  par  dl- 
nutiles  cruaut^.  II  Gt  executer  toutes 
les  personnes  compromises,  llforqa  lei 
<»*eaneiers  de  Niger  de  pa]^er  le  quadru- 
ple des  sommes  au*ils  avaient  avancees. 

Antiocbe,  privee  de  ses  droits,  fut  pla- 
c^  sous  la  d^pendance  de  Laodio^ 
Cette  derniere  ville,  par  reconnaissance, 

(•)  H^rodicn,  III,  4.  —  *D«wtep  vM  5PW»*»C 

'^)  Dion  (liv.  LXXfv,  p.  848)  OouBdooot  m 
ail,  qol  ne  ae  troave  pas  daia  Hecodieo. 


SYRIE  AWCIEHNE. 


7S 


nrft  le  nom  de  son  bienfeiteur  (Septimia 
fev^riana).  Cependant,  la  puissance  de 
S^ere  n*etait  pas  encore  solidement 
tobKe.  Un  autre  empereurf  Albinus, 
88  forma !t  un  parti  dans  TOccident  et 
d6elarait  ourertement  ses  projets.  S6- 
t^re  quitta  la  Syrie(195),  et  marcha 
eoDire  son  nouveaa  competiteur. 

Avant  de  combattre  Albinus  il  s^etn* 
para  de  Bfzance ,  ou  les  dernrers  par- 
tisans de  Pesoennius  Niger  se  defendi- 
rent  loaf^mps  et  avec  ecu  rage.  Puis 
ii  marcha   sur  la  Gaule.  II  triomplia 
d*Albinas ,  qu*il  fit  tuer,  danS  les  plai- 
ses  de  Lyon.  Apr^  cette  heureuse  ex* 
p^ditiofl,"  11  rerint  en  Orient  (197).  II 
noroma  Venidius  Rufus  propreteur  de 
Syne  et  de  Ph^nicie  pour  gouverner 
eea  proTincea ,  et  s'avanca  en  personne 
aa  del^  de  TEuphrate.  Dans  les  annees 
19S  et  199,  Venidius  Rufus  r^para  les 
anaeiennes  voies  romaines  d'Orient ,  re- 
leva  les  eoiondes  milliaires  et  per^  de 
noureUas    routes    en    Sjrie;   Severe 
^rasa  ies  iuife  syriens ,  insurg^  danS 
^  cantons  voisins  de    la  Palestine, 
f'approcba  avec  son  arm^^  de  rArme- 
nie,  poor  exiger  du  roi  Vologese  Tassu- 
ranee  forroelle  qu'il  n*avBit  pr^t^  aucun 
aecours  a  Peseennius  Niger ,  et  attaqua 
ensoite  Bars^mes,  roi  d'Atra ,  qui  avait 
aontenn  oovertement  te  malheureux  gou- 
verneor  d'Orient.  La  Tille  d' Atra  repoussa 
deox  fois  les  attaaues  des  Romains.  An 
ieeood  si^ge,  les  I^ions  illyriennes,  re* 
bot^es  oar  dinsurmontables  obstacles, 
m  reHreremetabandonnerent  les  legions 
syriennesde Severe.  Celles-ci,  discoura- 
ges k  leor  brar,  fnrent  vaincues  par  les 
troupes  de  Bars^mes.  Les  succes  sur  les 
bonis  da  Tigre  et  la  prisie  de  Ct^pbon 
^ao&rent  la   honte  ^prouY^e  devant 
Atra.   L'empereur  rentra  k  Antioche 
dans  la  premiM^ann^e  da  troisieme  sie- 
de.  Cest  aiors  que  son  fils  Garacaila 
prit  le  titre  de  Pius;  il  obtint,  par  ses 
priferes,  probablement  dans  cette  oe- 
casion,  que  la  eapitale  de  la  Syrie  serajt 
Rtablie  dans  tous  les  droits  dont  Se* 
^tbre  ra?ait  d^pouiUee.  Antioche  s*eni* 
bellit  de  nooveaux  bains  publics,  qui 
porterent  le  nom  de  Tempereur.  Mais  S^ 
vere  tt'^tendit  point  le  pardon  k  tous  les 
partisans  de  son  ancien  ennemi.  II  conti* 
vsale  eonrs  de  ses  vengeances.  Suivant 
FexpressioQ  deTertullien,*c*etoi^  ^(^ 


piUer  apris  la  vendange.  L'empereur 
rests  eneore  environ  deux  ans  en  Syrie. 
Cest  la  qu'en  201 ,  il  rev^tit  Caracalla 
de  la  robe  virile,  qu*il  inaugura  Tannee 
202,  et  quMl  prit  le  consulat  avec  son 
fils.  Puis  il  quitta  TOri^t,  pour  ne 
plus  y  revenir. 

CHAPITRE  Vn. 

LA  STAIB    sous  L4  DOMINATION    BO* 

Mains,  dbpuis  lbs  bmpebeubs  8Y« 

BIBNS  IUSQU'A  la  MOBT  DB  JULIBN. 

S^vdre  avait  ^pous^  deux  femmes ;  la 
seeonde  ^tait  Syrieiine.  Elle  etait  nee  k 
£fnese  et  s*appelait  Julia  Domna;  un 
astrologue  lui  avait  annonc6  que  eelui 
dont  elle  ferait  choix  pour  ^poux  serait 
^leve  a  Tempire.  S^v^re ,  venu  en  Syrie , 
vers  Tan  180,  comme  chef  d*une  legion, 
apprit  cette  prediction,  et  demanda  la 
main  de  Julia  Domna.  Deux  enfants,  Ca* 
racalla  et  G^ta,  naquirent  de  ce  manage. 

L'atn^,  Caracalla*  portait  Tempreinte 
do  caract^re  oriental.  II  avait,  suivant  la 
remarque  des  contemporains ,  Tesprit 
astueieux  et  la  fourberie  des  Syriens. 
LMmp^ratrice  avait  tent6  d'^tbuft'er  les 
funestes  dispositions  de  son  fils;  elle 
ne  r^ussit  pas ;  mais  elle  conserva  tou- 
jobrs  un  grand  ascendant  sur  cet  esprit 
faux  et  ^troit.  Dans  ses  r6ves  ambi- 
tieux,  elle  voulait  ramener  les  temps  de 
S^miramis,  et  relever  Tempire  d'Orient. 

Elle  aceompagna  son  fils  dans  Texp^ 
dition  d'Asfe  (216);  et  pendant  que  Ca- 
racaHa  se  jouait  de  la  bonne  foi  du  roi 
d' Armenie  et  qu'il  harcelait  les  Parthes, 
Julia  demeura  k  Antioche.  Cest  dans 
cette  ville  quelle  apprit  la  mort  de  Tern* 
pereur,  assassin^  |rar  Macrin,  en  M6so* 
potamie.  Cette  mort  ^tait  doublement 
cruelle  pour  Julia :  elle  perdait  k  la  fois 
son  fils  et  son  souvoir;  elle  voulut  se 
tuer,  mais  oh  messager  de  Macrih  cban* 
e^a  seS  r^t)lutions.  Julia  ignorait  pent* 
etre  encore  qUel  i6tait  le  meurtrier  de 
son  fils,  lorsque  Tofficier  envoys  par 
Macrin  virtt  lui  apporter,  de  la  part  de 
son  chef,  des  paroles  pleines  de  respect. 
Enhardieparcette  appar^tesouroissioa^ 
elle  tenta  de  reteoir  le  pouvoir  en  ses 
mains;  mais  elle  re^ut  Tordrede quitter 
Antioche.  Elle  aima  mieux  ae  laisser 
mourir  de  faim. 


76 


LITNIVERS. 


Le  nouvel  empereur  qaitta  Parm6e  de 
M^sopotamie,  et  arriva  a  Antioche  apres 
la  mort  de  Jnlia  Domna  (217).  Le  fils  de 
Maori  n,Diadam^ne,  fut  declare  G^ar,  et 
battit  monnaie  en  son  nom.  II  alia  por- 
ter a  Rome  Ie9eendres  de  Caracalla,  etfit 
sanctionner  par  les^nat  T^lection  de  son 
pere.  Macrin,  pendant  son  s^jour  h  An- 
tioche, nesut  point  gagner  raffection  des 
habitants.  II  retourna  a  Parm^e,  et  apr^ 
plusieurs  ^hecs  signa  la  paix  avec  lea 
Parthes.  II  attaqua  les  Arm^niens  et  les 
Arabes.  Ses  r6f6rme8  dans  la  discipline 
indisposerent  les  16gions.  Les  soldats 
tournerent  alors  les  yeux  sur  la  famille 
de  Julia  Domna  (318).  Julia  Mssa,  belle- 
soeur  de  Tempereur  Severe,  Soaemias  et 
Mammae,  ses  filles,et  les  deux  petits^fils 
de  Julia  Maesa,  venaient  d*dtre  exiles  It 
Emese,  ancienne  pa  trie  des  Bassiens. 
L'aieule  emportait  avec  elle  de  grandes 
richesses;  elle  recueillait  probablement 
sur  son  passage  les  bruits  sourdsdu  me- 
contentement  jG^en^ral.  Bassianus,  fils  de 
Soaemias,  ^tait,  malgr^  son  extreme 
jeunesse,  pr^tre  du  soleil ;  il  avait  pris 
le  nom  de  son  dieu ,  et  s'appelait  Ela* 

§abal.  Les  soldats  du  camp  voisin 
*£mese  venaient  admirer  dans  la  ville 
le  jeune  pontife;  ils  lui  trouvaient  une 
grande  ressemblance  avec  Caracalla. 
M»sa  mit  h  proQteette  circonstance ;  elle 
r^pandit  le  bruit  que  Bassianus  etalt  fils 
naturel  de  Tempereur  assassin^.  Une 
nuit ,  elie  envcioppa  son  fils  du  v^te- 
ment  imperial  de  Caracalla  que  les  le- 
gions avaient  toucli^  tant  de  fois  avec 
respect ,  et  sortit  avec  lui  d'£m^e.  La 
vieille  femme  et  I'enfant  ^taient  accompa- 

§n^s  de  leur  famille  et  d'un  petit  cortege 
e  serviteurs  parmi  lesquels  on  comp- 
tait  un  affranchi,  appele  Eutychius ,  et 
Teunuque  Gannys,  homme  de  talent  et 
de  resolution.  Ils  entrerent  tons  dans  le 
camp,  et  le  16  mai  au  matin ,  ils  entraf- 
nerent  les  soldats.  ^lagabal  fut  salue  Au- 
guste  et  Antonin.  Macrin  re^ut  cette 
nouvelle  le  m^me  jour;  il  envo^a  pour 
r^tablir  Tordre  le  pr^fet  du  pretoire,  Ul- 
pius  Julianus ,  avec  quelques  troupes  ti* 
r6e8  des  l^ions  et  quelques  escadronsde 
Maures  allies.  Malgr6  les  pr6paratifs  que 
lesl^onsd*£lagabal  avaient  raits  pour  la 
defense,  les  troupes  envoy6es  par  Macrin 
enlevirent  en  quelques  heures  plusieurs 
postes  importants;  mais  Julianus  crut 


inutile  ^e  eontinuer  I'attaqiie.  II  fit 
sonner  la  retraite,  bien  persuade  que 
le  lendemain  les  assieg^  viendraient  de 
leur  propre  mouvement  lui  livrer'lElft- 
gabal  f*).  II  se  trompait.  Les  soldats 
travaillerent  toute  la  nuit  a  r6parer  les 
breches.  Le  lendemain,  les  assi^eaols 
trouverent  devant  eux  des  fosses  esear* 
pes  ^  la  place  des  portes  qu'ils  avaient 
rompues.  En  approchant  de  Tenceinle,  ils 
virent  paraitre  sur  les  remparts  le  jeune 
empereur.  Tous  ceux  qui  environnaienft 
£lagabal  tenaient  en  main  des  sacs 
remplis  d*or.  «C*est  ainsi,criaient  lesas^ 
si^^s,  que  le  fils  de  Caracalla  imite  son 
p^reet  recompense  les  services. »  Lesas^ 
si^geantsjet^rent  leurs  armes.  Jnllamis 
comprit  que  tout  etait  fini;il  voulutfuir, 
mais  ses  propres  soldats  coururent  a  at 
poursuite.  lis  avaient  a  coeur  de  m^riter 
aussi  la  bienveillance  du  nouvean  Cesv. 
lis  atteignirent  Julianus  qui  cberdiait  k 
se  cacher,  et  le  tuerent.  L^un  des  assas- 
sins enveloppa  sa  t^te  dans  un  moreeao 
d'^toffe,  scelleavec  le  sceaumtoe  dela 
victime.  II  porta  lui-m^nre  a  Macrin  est 
horrible  trophic,  et  le  lui  remit  comme  si 
c'^tait  la  t^te  d'Elagabal. 

Macrin  6tait  parti  d*Apam^ ;  il  se 
rendait  au  camp  dans  Tespoir  d*arr£ter 
le  soul^vement  de  ses  soldats.  II  cher- 
cha  h  les  ramener  par  des  lib^ralites.  fl 
leur  d^clara  son  intention  de  conferer  a 
son  fils^  le  G^^r  Diadumene,  le  litre 
d*Auguste ;  et  a  cette  occasion,  il  promit 
5,000  drachmes  k  chaque  soldat ;  mille 
devaient  toe  imm^iatement  distri- 
butes. II  paria  aussi,  mais  incidemmeDty 
de  la  revolte  d*£mese,  promettant  Pam- 
nistie  a  tous  ceux  qui  abandonneraioit 
le  parti  d*£lagabal.  Enfin,  il  d^ara  tons 
les  membres  de  la  famille  des  Bassiem 
ennemis  publics. 

Macrin  fit  part  au  s^nat  de  Rome  de 
toutes  ces  dispositions.  L*Italie  ^tait  &- 
vorable  k  Pempereur;  elle  craigpait  P^ 
l^vation  d'un  Syrien  au  pouvoir.  Lea 
Orientaux  6taient  mal  vns  a  Rome;  leu 
fourberie  naturelle  excitait  la  defiance, 
et  leurs  rooenrs  contrastaient ,  d^nnc 
mani^rechoquante,  aveccellesde  l'Oed«i 
dent.  Tout  aevait  done  inspirer  du  et 
rage  a  Macrin ;  il  ne  montra,  au  oontraire^ 

n  H^rodien  nedit  rieii  de  oette  (bote  de  J«^ 
llaoiu. 


STRIE  ANCI£NNE. 


7T 


fsede  la  faiblesse.  En  d^ouvrant  la  Hie 
saof^lante  de  Julianas,  saisi  de  vertige,  ii 
aiait  pris  la  fiiite  vers  Antioche,  abandon- 
Dant  la  l^on  albaoienne ,  qui  courut  k 
la  rencontre  d'l&lagabal,  lorsqii'elle  Yit 
la  d^Mrtioo  de  Macrin.  Les  oenturious 
proelanfvb^nt  tes  premiers  le  nom  d*£ia- 
USabal;  ils  etaient  les  piub exposes,  car  le 
Mmneprinee  promettait,  par  un  edit, a  tout 
Mgioonaire  qui  lui  apporteraitia  t^ted*un 
des  eenlurions  de  Macrin,  la  propri^t^ 
des  biens  de  sa  yictime  et  son  rang  dans 
rarmee. 

£lagabal,  dont  les  forces  grossissaient 
tous  les  jours,  marcba  sur  la  capitate 
de  la  S3rrie.  Macrin  sortit  d'Antioche  a 
aa  rencootre ,  et  le  trouva  pr^  du  bourg 
dlnuna.  La  batallle  s'en^agea  dans  ce 
lieu ,  le  7  juin  SI 8.  Macrin  avait  pour 
lui  les  pr6toriens;  ils  se  montrerent  in- 
vineibles.  Leurs  Evolutions  promptes, 
hardies,  bien  ordonnees,  jeterent  la 
frajeur  parmi  les  ennemis.  Macrin 
crorait  trair  Ja  Yictoire ;  mais  Mamm^ 
et  Sosanias ,  par  des  allocutions  au  mi- 
lieu des  rangs;  Feunuque  Gannys,  en 
dirigeant  avec  la  tactique  d'un  g^n^ral 
les  DiottTements  des  legions;  £lagabal, 
|»r  son  exemple ,  en  poussant  son  cbe- 
val  dans  les  groupes  les  plus  serr^  des 
oofubattants,  r^tablirent  les  chances  du 
eooibat.  La  fortune  passa  dans  les  ran^s 
des  rebdles  rallies ,  et  teur  donna  plein 
sneoes.  Lorsque  Macrin  quitta  le  cbamp 
de  bataille,  sesl^ons,  innabiles  au  com- 
bat et  a  la  fuite,  commencerent  la  re* 
trute;  les  pr^toriens,  demeur^  seuls, 
ne  ae  laissaieot  pas  entamer.  Eiagabal 
antra  en  o^oeiation  avec  eux.  11  s*en- 
gagea ,  jiar  serment ,  h  leur  conserver 
tous  leurs  droits  et  privil^es.  Cette 
brave  troupe  accepta  les  conditions  du 
vaioaneur.  EUe  se  ioignit  a  Tarm^ 
qo'elle  venaitdecbmbattre,  et  sediri- 

£a  vers  Antioche.  Ainsi  fut  termini, 
ns  nne  seule  bataille ,  cette  revolution 
qui  mit  TEmpire  aux  mains  d*un  pr^tre 
syrien ,  k  peine  sorti  de  Tenfance. 

Macrin  avait  vainement  sacriGE  son 
hooneor  pour  sauver  sa  vie.  Apr^  avoir 
lAehemeot  abandonne  ses  d^fenseurs ,  il 
teit  entrE  k  Antioche ,  comme  en  triom- 
phe.  Cependant,  nialgrE  sa  feinte  assu- 
lanee,  il  fit  partir  son  fils  en  toute  hdte; 
Im-wUme ,  se  d^isant  sous  le  costume 
jtua  messager  imperial,  traversa  la  Sy« 


rie  et  FAsle  Mineure.  II  fut  arrltE  a 
Ghalc^oine  et  d^capitE  quelques'jours 
apres.  Avec  lui  pErit  Fabius  Agrippinus, 
gouverneur  de  Syrie. 

L'Orient  Etait  pacific ;  cependant, 
Tempereur  n'alla  k  Rome  que  Tannic 
suivante  (219).  II  porta  dans  la  capitale 
de  FEmpire  des  coutumes  inconnues 
a  TEurope.  LMdole  dont  il  Etait  le  pr^- 
tre  Faccompaena  a  Rome.  £lagabal  lui 
eievaun  temple.  Ilsacrifia  h  son  dieu, 
suivant  certaines  traditions,  des  enfants 
arrach^  a  des  families  nobles.  On  ne 
voit ,  d'ailleurs,dans  songouvernement, 
'  son  culte>  ses  mceurs  et  sps  cruaut6s, 
qu*un  tissu  d'incroyables  folies.  A  sa 
mort,  il  y  eut  une  sortede  reaction;  les 
idees  et  les  pratiques  syrieunes  dispa- 
rurent  pour  un  moment  de  Rome.  Le 
parent  d'£iagabal  et  son  successeur, 
Alexandre  Severe,  essaya  de  desavouer 
son  origine  orientale.  Cependant  sa 
m^re,  Julia  Mammee,  avait  epousE  un 
Syrien  d*Apamde ,  GEn^ius  Marcianus, 
dont  Tempereur  Etait  le  flis  (*}.  Alexan- 
dre montra  un  singulier  soin  a  cacher  sa 
naissance.  II  voulut  se  faire  passer  pour 
un  descendant  de  la  famille  romaine 
des  M^tellus.  II  alia  plus  loin  encore;' 
il  repnt  la  pourpre  et  quitta  le  dia- 
d^me  de  perles  et  la  robe  de  sole,  in- 
signes  du  pouvoir  portes  par  £lagabal; 
il  rel^ua  les  dieux  syriens  dans  leur 
pat  rie,  renvoya  en  Orient  le  simulacre 
du  dieu  d*j£mese,  et  rendit  les  temples 
de  Rome  k  leur  ancienne  destination. 
On  ne  voit  pas ,  toutefois ,  que  ces  actes 
de  m^pris  pour  TOrient  aient  soulevE 
contre  Alexandre  la  population  de  Sy- 
rie, c[uand  il  vint  quelques  ann^es  plus 
tard  a  Antioche. 

Les  Perses,  en  325  et  226,avaient 
inutilement  attaquE  rArm6nie.  En  231, 
ils  tournerent  leurs  armes  contre  la 
Mesopotamie.  Alexandre,  k  la  nouvelle 
de  ces  invasions ,  quitta  Rome.  II  vint 
passer  Thiver  a  Antioche,  8*occupant  du 
soinde  rassembler  les  legions,  d'^qui- 

Ser  etd*exercer  les  nouvelles  recrues  et 
'^tablir  la  discipline.  Le  soldat  s*amol- 
lissait  en  pen  de  iours  sous  le  climat  de 
rOrient.  Alexandre  sut  cependant  com- 
battre  avec  Anergic  la  corruption  de  Tar- 

O  Varius  Marcellas,  marl  de   Soaemias,  et 
pcat-61ra  p^  d'£lagal>a1,  etoit  aussi  de  la  ville 


n 


LUNIVER& 


mee.  Le  courage  qu'il  deploys  contre  la 
licence  fait  peut-^U«  la  gloire  de  son  r^- 

{^ne.  Lorsque  Teoipereur  arriva  en  Syrie, 
es  troupes  ^taient  d^moralisees :  alles 
avaient  fait  du  bois  de  Daphne  le  prin- 
cipal theatre  de  leurs  monstrueusas  de- 
bauches. Alexandre  leur  ioterdit  Tentree 
de  ee  lieu  infAme.  II  defendit  aux  legion- 
naires d'alier  aux  bains  avecdesfemmes, 
et  donna  ordred*arrlter  tousceux  qu'on 
trouverait  en  contravention.  L'ex^ution 
decetordre  irrita  les  soldats.  Alexandre, 
sans  s'inqui^ter  du  m^ontenteraent  gene- 
ral, se  pr^para  a  juger  les  coupables;  il 
monta  sur  son  tribunal ,  environn^  de 
soldats  faetieux  qui  caohaicnt  nial  leur 
colore.  Les  coupables  n'en  furent  pas 
moins  condamiieB  a  mort.Cette  sentence 
fut  accueillie  par  des  murmures.  L'em- 
pereur  essayade  faire  cesser  le  tumuKe , 
en  parlantaux  soldats.  <  Gardez  voseris, 
leur  d  it'll ,  contre  Tennemi;  c*cst  luiseul, 
et  non  votre  chef,  qu'ils  doi  vent  effrayer .  • 
Les  troupes  r^pondirent  k  ces  mots  en 
tirant  leurs  armes.  «  Pourquoi  me  tuer? 
ajouta  Alexandre;  apresmoi,  la  republi- 
que  vous  enverra  un  autre  chef.  »  Enfin, 
il  eut  recours  k  un  dernier  moyen ;  il 
pritle  ton  dePautorite :  «  Citoyens ,  dit-il 
d'une  voix  forte,  posezles  armes,  etreti- 
rez-vous.  »  Cos  paroles  pleines  de  fer- 
meti  effray^rent  les  faetieux ,  et  reta- 
blirent  Tordre  trop  longteinps  trouble. 
La  legion  idsurgee  ne   fut  r^organis^ 

S|ue  qudque  temps  apres.  Malgre  les  ef- 
orts  continucis  de  Tempereur  pour 
rend  re  a  son  armee  le  courage  et  le 
sentiment  de  Tobeissance,  les  succes 
que  les  historiens  anciens  attribuent 
aux  Remains  ont  M  mis  en  doute  par 
les  critiques  modernes.  Les  invasions 
de  Sapoif  en  Syrie  vont  bient6t  donner  la 
preuve,  sinon  des  dtfaites,  au  moins 
du  peu  d^importauce  des  victoires  d'A- 
lexandre. 

INFLUBNGB  BT  DUBBB  DBS  IDBSS 
OBIBNTALB8  APPOETEBS  BT  PBOPA- 
QBES  A  HOME  P  AB  LE8  PBINGB8  SYBIBN S. 

—  11  ne  faut  pas  croire  que  la  ruction 
qui  se  manifesta  dans  TOccident,  apres 
la  mort  d'ltlac^abal,  centre  les  id^  et  les 
mceurs  orientales,  ait  aneanti,  soit  dans 
la  religion ,  soit  dans  le  ^ouvernemeut , 
toutes  les  importations,  si  nous  pouvons 
nous  servir  de  ce  mot  des  princes  syriens- 
Enrepudiant  son  pasb^,  m^mesa  famille, 


Alexandre  ob^tt  Bar  n^ceflgiti  aux  at- 
tipathies  des  Oecidentaux.  Toutefois^  le 
mouvement  qu'£lagabal ,  jusque  daw 
ses  foiies ,  avait  imprime  aux  idte  ne 
pouvait  ^tre  maltrise.  Voici  commeot 
If.  Aroedee  Thierry,  danasa  belle  intro- 
duction a  VHisktire  de  la  Gauie  som 
radministratiou  romaine,  a  parle  dt 
rinfluenee  que  TOrient  a  exero^  suf 
Rome  et  T  Empire,  au  temps  des  prineei 
Syrians  :  «  Apres  le  regne  de  Severe  et 
de  GaEacallai  la  suprematie  continoa 
d*ltre  exerc^e  par  TAfrique  et  par  les 
provinces  d'Orient ,  sous  eeux  du  Haure 
Opelius  Macrinos,  des  Svriens  Antonio 
Eiagabal  et  Alexandre  Severe,  des  deux 
premiers  Gordiens,  qui  durent  la  pour- 
pre  a  una  insurrection  africaine  de  TA- 
rabe  Philippe;  puis  sous  les  cesars  Pal* 
myreniens  Odenat  et  Zenobie ,  jusqu^ 
la  reaction  occidentale  oper6e  par  Aure- 
lien.  Ce  fut  Fepoque  d'une  veritable 
invasion  des  id6os  orientales  dans  la  re« 
ligion  et  dans  la  politique.  On  vii  alors 
le  gouvernement  se  rapproeher  de  plot 
en  {)lusde6  formes  de  la  monarchie  per- 
sane,  les  empereurs  se  falre  adorer, le 

Sais  se  remplir  d'eunuquea,  et  las 
fimes  exercer  une  influence  directs  et 
souverainesur  lesaffaiiresde  T^tat.  Julia 
M»sa  et  Julia  Mammaea  furent,  comme 
on  sait,  toutes-puissantes ;  la  mere  d'fita- 
gabal  siegea  au  s6nat,  comme  e^  fait, 
dans  les  conseils  de  Ctesiphon ,  la  mere 
d'Artaxerxds  oude  Sapor ;  enfin  Zenofate 
fut  proclamee  Auguste.  L'ltalie  latta 
d'une  maniere  souvent  violeote  oontre 
cetle  tendance  a  d^aturer  fesprit  de 
{'Empire;  et  Rome  setrouva  comme  bat- 
tue par  deux  couraotsd'ideescontraires. 
La  rivalit^  entre  les  provinces  d^Orieat 
et  celles  d'Occident  s'aigrit  encore  par 
suite  des  perils  qui  vinrent  menaeer 
le  territoire  remain  ,  k  la  fois  sur  le  Rbia 
et  sur  TEuphratc.  On  s' accuse  mutuel- 
lementd'egoisme,  on  se  disputa  le  ehoiz 
des  princes ,  dans  un  but  de  protectioa 
et  de  sdrete.  Diocletien,  pour  satistere 
a  tous  les  int^rdts,  essaya  d^une  s^a- 
ration  administrative,  qui  deWnt  sees 
Constantin  une  separation  d'eoipires.  » 
M.  AmM^  Thierry  dit  ailieurs :  «  PM- 
tre  d'une  religion  orientale,  et  priixfi 
fanatique,  Varius  Avitus  BassianuSt 
connu  dans  Thistoire  sous  le  nom  d*AA- 
touin  Eiagabal,  se  fit  le  patron  paasioaai 


SYRIE  ANaENNE. 


7« 


defCttltesorientaux.  Qaand  les  l^ions 
4$  Syrie  ei«verent  au  trdue  imperial  ce 
petit-oeveu  de  Severe,  auquel  s  est  atta- 
ebee  iioe  si  hooteuse  cei^brite,  il  des- 
lenrait  ed  quality  de  pootife,  dans  la 
ville  d'£mese,  aa  pied  du  Libao,  uo  dea 
temples  ies  plus  r^v^res  de  1' Asie ,  ou 
lefeu,  eoosiaere  ODOime  principe  g^o^- 
ratear,etait  adore  sous  rembl6ine  d'une 
pierre  noire  et  sous  ia  denonaiDatioa 
d'£lagabal,  Oieu  de  la  montaane.  Pour 
k»  Romains  et  les  Grecs,  £lagabal  ou 
H^iogabale  ^tait  taotot  le  dieu  Soleil, 
taotot  Jupiter. 

«  La  vie  da  e^ar  syrien  fut  un  tissu 
d'infamieft,  decrinaesad'extravagances, 
qo'explique  trop  bien  i'effet  du  pouvoir 
absolusur  uue  ame  d^prav^  et  cruelle;, 
qndques-unes  de  sea  foiies  pourtant 
oat  UQ  earaelere  particulier  qui  n'est 
pas  indigae  d' attention.  Le  fauatisme 
d'Avilu&sVxalta  sous  la  pourpre :  il  prit 
leaom  d'il^abal ;  il  se  fit  declarer  par 
tto  ttoatos^nsulte  pr^tre  de  ce  dieu, 
et  ioserifit  sur  ses  medailles  un  titre  si 
oottreau  a  edte  du  yieux  titre  de  grand 
pontife  de  Jupiter  Capitolin ,  porte  par 
KB  C^rs.  Le  dieu  du  Liban  eut  a  Rome 
on  temple  maguifiqueoii  Fempereur  of' 
ficiasoleanelletneut,  assiste  des  consuls 
et  du  seaat.  Oo  trouve»  dans  tous  sea 
aeies  relatifs  a  la  religion ,  autre  cbose 
eneore  que  i'atta  hemeiitdu  pr^tre  pour 
son  dieu,  pour  le  dieu'de  sa  famille  el 
de  son  pays;  on  ne  peut  y  meconnaUre 
fintemieo  forteipent  inaDifestee  d'ele- 
ver,aUfoceder  Empire,  un  culte  orien- 
tal an  niveau  du  culte  italique,  du  cuite 
politique  de  Rome. 

« Leshistoriens  racontent  que  dans  un 
deses  aee^  d*exaltation  bizarre,  vou* 
iant  fflarier  ce  dieu  quMI  avait  amen^ 
d'Oricnt,  il  lui  cboisit  deux  epouses  : 
I^lias  et  V^nus  Astart^.  Dans  les  tradi- 
tions de  ritalie  centrale,  on  regardait 
PaUas  eonaine  la  protectrice  secrete  de 
Roine;  et  une  idee  de  fatalite,  pour  cette 
ville  et  pour  TEmpire ,  etait  atucbee  a 
It  eooservation  de  sa  statue ,  sauvee , 
toit-oB,  des  flammes  de  Troie  par 
fia6e,  et  tramplantee  par  lui,  au  milieu 
de  perils  sans  nombre,  jusqu*aux  bords 
dBTibre.  Quant  a  Venus  Astart^ ,  ou 

Veaos  GelesU,  c'etait  la  grande  d^esse 
deTAfrique  etla  patronne  de  Carthage. 
Antonin  fit  apporter  et  d^poser   en 


grande  pompe  les  deux  simulacres  dans 
le  temole  d'Elagabal,  sur  des  lits,  pr^s 
4u  lit  du  dieu  syrien,  unissantrainsi,  par 
un  lien  mystique,  les  trois  symboles  re- 
ligieux  de  Rome,  de  Carthage  et  de  TO- 
rient.  Les  fian^ailles  divines  furent  ce- 
lebrdes  dans  tout  Tempire  par  des  f^tes 
et  des  presents.  Le  temple  d'Elagabal 
devint  eomme  un  pantheon  ou  furent 
r^unis  les  attributs  de^  principales  di- 
vinites  du  polytbeisme;  Avitus  voulut 
m^me  y  faire  placer,  si  Ton  en  croit 
Lampnde,  les  signes  figuratifs  des  cuN 
tes  samaritaia  et  juit,  ainsi  que  ceux 
de  la  deooHoH  chrilienne.  C  est  dans 
ces  termes  qu'il  s'expriipe,  «  afin, 
«  ajoute-t-il>  que  les  mysteres  de  toutes 
c  les  religions  fussent  soumis  a  un  seul 
«  sacerdoce ,  dont  il  serait  le  pontife.  » 
Sous  des  formes  assurement  bJen  etrau- 
ges,  etavec  les  predilections  d'un  Syrian 
fanatique,  £lagabal  travaijlait  pourtant 
k  Tunit^  religieuse ;  il  faisait  du  syncre- 
tisme  a  sa  maniere;  il  sen^blajt  aire  au 
inonde  romain,  dans  ce  langage  des 
symboles,  qui  ^tait  le  sien  :  «  La  paix 
•  est  conciue  au  eiel  coiqme  sur  la  terre. 
«  Le  fils  de  Severe  avait  rapprqciie  les 
9  hommes  en  les  faisant  tous  conci- 
«  toyens  :  voila  que  moi  j'ai  rapproch6 
«  les  dieux  (*)  I  » 

LA  SYRIE    ]>BPmS    LBS  BMVBBBIJBS 
SYBIEIfS  JOSQU*A  DIOGLETIBN.  —  Lea 

successeurs  d' Alexandre  ne  s'occuperent 
pas  de  la  Syrie.  EnGn ,  Tempereur  Phi- 
lippe, vers  344,  vint  a  Antioche :  il  pla^a 
son  frere  Priscus  a  la  trades  ii^ions  sy- 
riennes.  Sous  D^ius,  successeur  de  Phi- 
lippe, une  r^volte  eclaUeu  Orieut ;  mais, 
dansce  temps  d'inburrection  geuerale,  co 
soul^vement,  dans  un  coin  ol^cur  de  TA- 
sie,  passa  ina})ei-cu.  Le  chef  s'appelait 
Jotapien,  descendant  peut-toe ,  suivant 
Topinion  de  Tillemont,  de  Jotapes ,  fiUe 
des  anciens  rois  d'&niesa  et  de  Comma- 
gene  ^*).  On  metia  niort  de  Jotapien  en 
rann^e  250.  Ues  evenements  bien  au- 
trement  graves  troublerent  le  repos  de 
ia  Syria  sous  les  regnes  malheureux  de 
Vaierien  et  de  son  lis.  L'Empire,  me- 
Dace  sur  toutes  ses  frontieres ,  etait  in- 

(*)  M.  AmW^  Thierry,  Hutoire  de  la  Cjttfc 
tous  Vadministraiian  romaine,  1. 1,  p.  I»5  fet 
196,  323  et  suiv.  Voyez  au&si,  t.il.  p-  I04  et 

(•*)  Zoelme  ,1,  p.  «42. — loa.,  A%L^  XYllI ,  ^. 


"SO 


L*tJNIVERS. 


capable  de  repousser  les  barbares.  Sa- 
por parut  8ur  les  bords  de  fOronte 
(358)  dans  un  moment  ou  personne  ne 
croyait  avoir  k  redouter  son  approche.  II 
surprit  a  Timproviste  les  habitants  d* A n- 
tioche  reunis  au  th^&tre.  Un  des  acteurs 
8*arr6ta  subitement  et  s^^ria  avec  effroi : 
«  JerivBy  ouje  vols  les  Perses,  »  Tout 
le  peuple  se  retourna  aussitdt  et  d^cou- 
vrit,  sur  le  penchant  d*une  colline,  une 
troupe  nombreuse  de  cavaliers  barbares 
qui  avaientd^jadiri^^leursarcs  vers  eux. 
Les  Antiochiens  prirent  ia  fuite ;  mais, 
avant  qu'ils  se  fussent  disperses ,  les  fle- 
ches  pleuvaient  dans  Teneeinte  du  th6d- 
tre.  La  trabison  avait  conduit  les  Perses 
en  droite  ligne  de  TEupbrate  k  la  capitale 
de  la  Syrie.  Mar^ade,  citoyend'Antioche, 
leur  avait  servi  de  guide.  Les  Perses , 
loin  de  r^ompenser  ce  traftre,  lebr<ll^- 
rent  vif  au  milieu  des  mines  de  la  ville 
qu'il  avait  livr^.  lis  mirent  le  feu  ^ 
tous  les  monuments,  apres  en  avoir  eh- 
]ev6  les  richesses;  ils  ^tendirent  leurs 
pillages  aux  environs  d'Antioche,  et  ne 
respect^rent  que  le  temple  de  Daphn^. 
lis  tu^rent  ceux  de  leurs  prisonniers 
quails  ne  voulurent  pas  emmener  en  es* 
clavage.  Enfin ,  ils  se  retir^rent  au  del^ 
de  TEuphrate  (*)»  laissant  k  Val^rien 
un  dangereux  ennemi  :  c^^tait  un  Ro- 
main,  appel6  Gyriade,  qui  avait  quelque 
temps  vecu  parmi  les  barbares.  N6  dans 
une  condition  ^lev^e,  apr^s  une  faute 
de  jeunesse,  dont  il  craignait  les  suites, 
Cyriade  s'^tait  retire  en  Perse  :  par  ses 
conseils,  il  avaitd^cid^rexpedition  contra 
la  Syrie.  II  rei^ut  de  ses  botes  le  titre  de 
C^sar;  puis,  apr^s  la  prise  d'Antioche, 
celui  d*  Auguste.  Get  empereur,  qui  tenait 
son  titre  et  une  assez  vaste  ^tendue  de 
pays  desennemis  de  TEmpire,  sut,  par 
uneheureuse  audace,  imposer  ii  POrlent 
sa  domination;  mais  ses  partisans,  ef- 
frayes  de  Tapproche  de  Vai^rien,  aban- 
donn^rent  sa  cause,  et  le  tu^rent.  Des  que 
Val^rien  fut  entr^  en  Syrie,  il  porta  ses 

Premiers  soins  sur  la  capitale :  il  alia  bar 
iter  Antioche,  et  surveilla,  aid^  de  son 
prefet  du  pr^toire,  les  travaux  de  recons- 
truction ( 259).  II  quitta  la  Syrie  pour  re- 
pousser les  Scythes,  qui  parcouraient  en 
tout  sens  TAsie  Mineure.  II  les  rejeta 

(*)  Zoslme  pretend  qae  toate  TABie  serait 
lomMe  eo  leur  poavoiri  s^ls  avaieot  qodUdu^ 
leur  marche. 


dans  leurs  steppes;  mais,  moinsheureox 
dans  la  guerre  centre  les  Perses,  tl ftt 
vaincuet  r^uit  en  esclavage.  Sapor  tn- 
versa  la  Mesopotamie,  passa  rEuphrite 
(260),  et  entra  une  seconde  fois  daus  An* 
tioche(*).  Les  Perses  s^avanc^rent  jm- 
qu'en  Cilicie.  Ce  pays  montagneuxn'ebil 
pas  aussi  mal  d^fendu  que  la  Svrie;  Bi' 
liste,  prefet  du  pretoire  sous  Valeria, «t 
Odenatb,  avaient,  dans  cette  provioei, 
F^uni  leurs  forces  contre  les  Perses.  U 
prince  de  Palmyre  compUit  parmi  sesifli*- 
dats  beaucoup  d  habitants  nomadesdfll 
deserts  de  Syrie,  dont  quelques-uus,  Mf 
la  conduite  d'un  Syrien,  nomme  Arti*, 
bassus,  avaient,  deux  ans  auparavaiit,. 
faarcel6  les  Perses  dans  leur  retrain.  Ei^ 
260,  Baliste  rejeta  Sapor  sur  la  SfA 
euphrat^sienne,  oi^  Tattendait  Odenan. 
Les  Perses  n*opposerent  qu*une  molk 
resistance.  lis  prirent  la  fuite  vers Gdo* 
se,  ville  occup^e  par  les  Romatos.  Sap«t 
au  prix  de  Tor  enlev6  k  la  Syrie,  obtiirtk 
passage  pour  son  armee.  Ainsi  se  tern- 
na  I'invasion  des  Perses.  Comme  cclte* 
Tannic  258,  elle  fut  saivie  par  anen- 
volte  en  Orient.  Apres  Cyriade,  n* 
Ma6rien.  Macrien  passa  d'fegypte  en  S^ 
rie.  Il  confia  le  couvernement  dc  cdto 
province  k  son  plus  jeune  fils  Qu'*^ 
et  donna  a  Baliste  le  titre  de  general  di 
la  cavalerie.  Toutes  c<^  dtspositioj 
achev6es.  il  passa  en  Occident;  ib" 
abandonne,enIllyrie,  de  toutes sttw- 
gions ,  il  se  Gt  tuer  par  un  de  ses  sflfr 
teurs.  Lesvilles  de  rorient,  assur^* 
la  mort  de  Tempercur  Macrien,  ^^ 
rent  la  vengeance  de  son  ennemi.  Wj" 
tus  trouva  un  asile  dans  fim^.  Ode- 
nath  vint  presque  aussitdt  Vy  assieg*; 
les  succ^  et  les  talents  militains  ft 
prince  arabe  porterent  le  dccourap* 
ment  dans  les  murs  de  la  ville.  Bali^ 
[ui  avait  suivi  Quietus  k  Eraese,  w 
u  nombre  des  laches  qui  m^itaieol  m 
moyens  de  se  sauver  par  une  trahi«»» 
il  assassins  Quietus ,  jeta  sa  t^tc  aui  »• 
si^geants,  etouvrit  les  portes  de  la  w« 
Odenatb  y  entra ;  bien  qu*il  n^edt  a0i 
en  cette  occasion,  que  par  les  ordrcs  * 
Tempereur  Gallien,  il  ne  d^cida  nft 

(•)  Suivant  one  interpr^toUoa  pirtlcolWj 
el  sabtile  des  documeoU  aacieiM,  ^VS'JSi 
rait  eDtr6  troia  fois  daos  AnUocbe,  dm^ 
tons  Gordiao,  pais  en  268,  enfin  deux  ans  api» 

(260).  *^ 


I 


SYRIE  ANCIENNE. 


81 


aenjet  des  rebelies.  Baliste,  incertaiii 
do  sort  que  I'enipereur  r^rvait  aux  an- 
eiens  partisans  de  Macrien,  redoutait 
egaienieot  Odenath ,  Gallien  et  Aureole. 
IldKrcha  son  salut  dans  uue  audacieuse 
entreprise,  et  se  d^clara  empereur.  II 
prit  la  poarpre  a  £mese ,  et  renferma  sa 
domination  dans  les  murs  de  cette  petite 
ville.  EuGn,  au  bout  de  trois  ans,  il  fut 
assassiae  par  un  ofiQcier  d*Odenath  (264). 
ZeDobie,  veuve  d'Odenath,  prit  le 
gouveroemeDt  de  la  Syrie.  Les  habitants 
reconnurent  avec  joie  Tautorite  d'une 
raae  de  leur  nation.  Lorsque  Aur^lien 
d^r^ ua  en  Orient ,  une  foulede  Syriens 
se  relirerent  a  Palmyre ;  mais ,  toujours 
feibies  et  inconstants ,  lis  netarderent 
fas  a  accepter  Tamnistie  de  Tempereur, 
et  rentrerent  dans  leur  pays.  L'arm^e 
de  Palroyrene  attendait  Aurelien  dans 
lebourgdlmma,  sur  TOronte;  trora- 
peepar  la  fiiite  simulee  des  Romains, 
elle  abaadoona  ses  positions,  et  se  lanca 
alapoorsaited'un  ennemi  insaisissable. 
Arrive  soqs  les  murs  d*Aiitioche ,  Zab- 
das,  geoeral  de  Zenobie,  pour  obtenir  le 
passage  dans  la  ville ,  annonca  aux  ha- 
bitants qu'il  amenait  Aurelien  prison- 
aier(272).  11  fut  recu  avec  des  acclama- 
tions de  joie;  mais  la  ruse  devait  n6ces- 
sairement  se  d^couvrir.  Zabdas  resolut 
de  De  pas  attendre  jusqu'au  lendemain. 
DjuittaAnliocbe,  pendant  la  nuit,  avec 
2enobie,  laissant  seulement  dans  le  bois 
de  Dapbnc  un  corps  de  troupes  charge 
d  artfiter  ia  marche  de  I'empereur.  Au- 
raien  nc  trouva  que  cet  obstacle  sur 
a  route  jus(jtt'a  fimese,  ou  il  joignit 
Tannfe  de  Zenobie.  Les  Palmyr^niens 
a?aient  Tavantage  du  nombre,mais  ils 
wreot  vaincus.  On  dlt  que,  pendant  le 
^mbat,  Eiagabal  apparut,  sous  une 
lorme  diFinc,  encourageant  ses  anciens 
sujets  centre  ceux  qui  defendaient  Tin- 
<lcpendance  de  sa  patrie.  Aurelien, 
^pres  la  bataille,  alia  se  prosterner  de- 
cant rautel  dtlagabal  ^  fimese.  II 
raicievadepuis  un  nouveau  temple  (*). 
AprK  la  prise  de  Palmyre ,  Longin  fut 
fflw  a  mort  dans  les  murs  d'fimese  (273). 
^  de  temps  apres  (275),  Aurelien 
"■^nit;  Tacite  fut  son  successeur.  Le 
^^  fle  Rome  annonija  par  une  lettre, 

riiifj^^^]  poor  l8  suite  delaguerrede  Z^nobie, 
^  Livraison.  (sybie  anciennb.) 


aux  decurions  de  Treves,  de  Carthage  et 
d'Aotioche,r61ection  du  nouvel  empe- 
reur. Tacite  donna  le  gouvernement  de 
Syrie  a  Maximin,  son  parent.  Maxi- 
min  n'avait  pas  les  vertus  de  Tacite.  II 
pressura  les  municipes  syriens  et  excita 
un  soulevement  general.  II  fut  assassine 
par  les  revokes.  Les  meurtricrs,  crai- 
gnant  la  vengeance  de  Tempereur ,  alle- 
rent  attendre  Tacite  en  Asie  Mineure,  et 
le  tuerent,  le  12  avril  276.  Le  frere  de 
Tacite ,  Florianus ,  general  des  legions 
d 'Orient ,  exerc^a  quelques  mois  le  pou* 
voir  imperial  en  Asie;  il  fut  tue  par  ses 
propres  soldats.  Probus ,  demeur^  seul 
empereur,  vint  (279)  en  S}Tie,  pour  com- 
battre  les  Blemmyes ,  peuple  du  desert 
voisin  de  I'^ypte.  L  empereur  revint 
bientot  en  Europe ,  et  conGa  a  Saturnin 
la  defense  de  TOrient.  Saturnin  agran- 
dit  probablement  la  capitale  de  la  Syrie  : 
s'il  faut  en  croire  Eus^be ,  il  bStit  une 
nouvelle  Antioche.  En  280,  ce  gouver- 
neur  fut  ^lev6  a  Tempire  par  le  peuple 
d'AIexandrie.  On  ne  salt  pas  quel  parti 
les  Syriens  embrasserent  dans  cette  re- 
volte.  On  manque  de  details  exaots  sur 
toute  cette  par  tie  de  Fhistoire.  II  serai  t 
mdme  difficile  de  determiner  les  li mites 
qui  separaient  les  Perses  de  la  Syrie,  lors- 
que Diocletien  parvint  arempire(*). 

DIOCLBTIEN;  MAXIllIN;    LICINIUS ; 

CONST ANTiN.  —  Daus  Ic  partagc  de 
rempire ,  en  292,  Tempereur  Diocletien 
se  reserva  toutes  les  provinces  d'Asie. 
Vers  le  m^me  temps  (294),  Narses  mon- 
tait  sur  le  tr6ne  de  Perse.  Ce  prince 
continua  la  guerre  contre  les  Romains  : 
il  fit  la  congu^te  del'Arm^nie;  mais,  en 
297,  Gal^rius,  apres  un  premier  echec, 
hattit  les  Perses,  a  son  tour,  et  forca  leur 
roi  de  conclure  la  paix  avec  Diocletien. 
On  voit,  par  les  dates  de  certaines 
lois,  que  Diocletien  sejournait  assez  sou- 
vent  a  Antioche;  il  y  etait  au  mois  de 
juillet  301  et  de  302.  Un  ^v^nement  im- 
prevu  le  forqa  de  passer  encore  Thiver  de 
cette  derniere  annee  en  Syrie.  Son  pa- 
lais  de  Nicom6die,  qu'il  habitalt  ordi- 
nairement ,  fut  detruit  par  un  incendie. 
Diocletien  quitta  la  Syrie,  avant  le 
soulevement  d' Eugene  et  de  ses  soldats 
(303)  (**).  Cinq  cents  hommes,  tires d'une 
legion ,  creusaient  le  port  de  Seleucie 


*)  Foy.  TiUemoot,  t.  IV,  p.  It 
'")  LibaniUi,  Or.  XIV,  p.  3W. 


6 


S3 


L'lmiVERS. 


(sur  rOronte};un  of  (icier,  nomm^Eu- 

fene,  dirigeait  les  travaux.  Les  sol- 
ats  succombaient  h  la  fatigue;  apr^ 
une  journ^e  d'un  ouvrage  penible ,  ils 
devaient  passer  une  partie  de  la  nuit 
pour  preparer  leur  oourriture.  Enfin, 
pousses  a  bout,  ils  se  saisirent  d'Euge- 
ne,  et  lui  impos^rent  le  titre  d*empe- 
reur.  Antioche  ^tait,  en  ce  moment, 
ouverte  et  sans  defense.  Eugene  prit, 
dans  un  temple ,  le  manteau  de  pour- 
pre  dontle  dieu  6tait  convert,  et  marcha 
a  la  t^te  de  ses  cinq  cents  soldats  con- 
tre  la  capitale  de  la  Syrie.  II  entra  dans 
la  Tille ;  mais  le  peuple,  revenu  de  sa 
surprise,  et  excite  par  ses  magistrats, 
massacra  cette  faible  troupe.  Ge  fut  sur 
Antioche  que  retomba  la  colere  de  Tem- 
pereur.  Diocletien  livra  au  boiirreau  les 
decurions  d' Antioche  et  de  Seleucie; 
I'aieul  de  Libanius  fut  du  nombre  des 
victimes.  Les  Syrjens  furent  delivres 
d'un  prince  qui  les  traitait  avec  cette 
odieuse  s6v^rit6.  Diocl6tien  c^da  TO- 
rient  a  Maximin  (305).  Apr^s  la  mort 
de  Gal^rius,  sa  veuve  Valerie  vint  cher- 
cher  un  asile  en  Orient  (311).  Maximin 
con^ut  de  I'amour  pour  Valerie  ,  et  lui 
demanda  sa  main.  II  avait  dej^  une 

{>remi^re  femme.  Irrit6  du  refus  de  Va- 
erie ,  il  la  chassa  dans  les  disserts  de 
Syrie  qui  s'^tendent  vers  TEuphrate.  La 
femme  legitime  de  Maximin  s'etait  ren- 
due  odieuse  par  sa  cruaut^ :  on  lui  attri- 
bua  le  meurtre  de  plusieurs  dames  d'An- 
tioche,  jet^es  vivantes  dans  TOronte.  Les 
Syriens  eurent  en  outre  a  souffrir  tou- 
tes  les  inquietudes  d'une  guerre  malheu- 
reuse  contre  les  Perses  en  Arm^nie.  II  pa- 
raft  m^me  que  les  ennemis  firent  quel- 
ques  irruptions  en  Syrie.  La  famine  et 
une  maladie  contagieuse  mi  rent  le  com- 
ble  aux  raaux  de  cette  contr^e.  Maximin, 
au  milieu  de  ces  tristes  circonstances,  fai- 
salt  la  guerre  a  Constantin  et  a  Licinius, 
en  Bithynie ;  il  fut  vaincu  et  forc^de  fuir 
vers  la  Syrie ;  mais ,  avant  d'avoir  pu 
atteindre  cette  province,  il  mourut  a 
Tarse ,  dans  d'atroces  souffrances.  La 
Svrie  changea  de  tyran ;  Licinius  rem- 
pia^a  Maximin  (313 ).  II  fit  p^rir  dans  les 
tourments  les  enfants  et  plusieurs  pa- 
rents de  Maximin,  et  precipita  sa  veuve 
dans  rOronte.  II  poursuivit ,  dans  leur 
solitude  ,  Valerie  et  sa  mere,  Tune  fille , 
Tautre  veuve  de  Diocletien.  Ges  femmes 


illustres,  dans  Tespoir  d^^chapper  as 
tyran,  quittdrent  la  Syrie ;  mais  les ea- 
voy^s  de  Licinius  d6couvrirent  bientjt 
leur  retraite  :  elles  furent  d6cdpitees  i 
Thessalonique.  D*autres  condamnatioos 
marqu^rent  encore  le  gouvcrneraent  de 
Licinius ;  une  loi  de  ce  prince  sufBia 
pour  faire  apprecier  toute  sa  cruauU, 
11  interdit  I'entree  des  prisons  aux  amis, 
aux  parents  des  condamnes ,  et  defendit, 
sous  peine  de  reclusion  ,  de  leur  envofer 
des  secours.  Les  debauches  de  Licinraf 
acheverent  de  le  rendre  odieux.  Les  plof 
bonorables  families  d* Antioche  fureat 
souillees  parses  violences  (*).  Nous  nV 
vons  pas  a  raconter  sa  fin  :  elle  fiitboA* 
tense  pour  Constantin  comme  pour  Ur  I 
cinius(S23).  En  824,  Constantin  voulol  | 
visiter  la  Syrie;  mais  des  troubles  intep  | 
rieurs  le  rappelerent  en  Europe.  Aprts 
la  mortd*Heiene  (327),  Constantin  fit 
eiever  en  Thouneur  de  sa  mere  une  sta- 
tue dans  lebourg  sacre  de  Daphne, qn 
prit  le  surnom  d'Jugustalis.  L'elnp^ 
reur  affermit  le  christianisme  en  Syrie. 
C'est  probablement  a  cette  occasion  qae 
le  philosophe  d'Apamee ,  Sopater,  disci- 
ple de  Jamblique ,  vint  h  Constantino- 
ple interceder  en  faveur  des  dieux  de 
Platon.  Sopater  trouva  h  la  cour  de 
Constantin  un  autre  Syrien,  Strate- 
ge ,  originaire  d'Antioche ,  qui  enseh 
gnait  k  Tempereur  les  systemes  phiio* 
sophiques  des  gnostiques  et  des  mam* 
cheens.  La  Syrie  eut,  sous  Conslantiii 
comme  sous  le  regne  precedent ,  use 
peste  et  une  famine  (333 ).  On  papt 
le  modion  de  bie  quatre  cents  pieces 
d'argent.  L'empereureut  pitie  des  raaiB 
des  Syriens;  il  essaya  de  les  adoum 
par  des  envois  nombreux  de  bie  a  An- 
tioche. 

GONST^nCE   EN    SYBIB.  —  'DbUS  K 

partage  de  Fempire  entre  les  trois  fils « 
Constantin  ,  Constance  obtint  les  n- 
ches  provinces  de  I'Orient.  Ce  prince 
eut  bient6t  a  defendre  ses  possessions 
de  FEuphrate  contre  les  attaquessans 
cesse  renaissantes  des  Perses.  II  apo"' 


que  Sapor  assi^gcait  I^isibe,  en 
potamie.  Arrive  a  Antioche  (338) t  >| 
trouva  les  legions  de  Syrie  enti^renaeot 
desorganis^es ;  il  fallait  les  former  de 
nouveau  h  la  discipline,  les  preparer  aux 
(•)Eus6be,  Fie  de  CotuUj,  ^  -  Id.,ffW.X; 


SYRIE  ANCIENNE. 


8S 


de  la  guerre  par  des  exerciees 
[ties,  leur  apprendre  les  manoeuvres 
rQdispen8ablesau*elles  avaient  oubli^es. 
Constance  se  plaisait  a  ces  occupations 
militaires;  ^oand  tous  les  pr^paratifs 
foreot  teraiioes ,  il  traversa ,  au  mois 
d*octobre,  les  yilles  d*£iiiese  et  d'Helio- 
polis.  La  campagne  fut ,  sinon  brillante , 
au  moios  heureuse  pour  les  Remains. 
Eiie  eut  pour  resultat  de  rendre  ia  tran- 
quiiiite  a  la^S}Tie.  Vers  cette  epoque ,  la 
caoitaledecette  province  vit  un  fait  sin- 
Kiilier,  rapporte  par  saint  Augustin. 
Ub  habitant  d'Antioehe  ^tait  debiteur 
du  fisc;  il  fut  emprisonne,  et  me- 
nace de  la  peine  ca|)itale,  par  le  pr^- 
fet  Acyndinus.  Le  prisonnier  n'avait  an- 
eon  moyen  de  sortir  du  peril ;  mais  il 
^lait  mari6,  et  sa  femme  ^tait  belle. 
ATeclecousentenieot  de  son  mari ,  elle 
K  livra  a  un  bomme  riche  pour  la 
sominer^clamee  par  le  fisc.  Mais,  pour 
comble  de  faoote ,  cette  malheureuse 
feoune  recut  de  Tusurier  un  sac  rempli 
de  sable.  Reduite  au  d6sespoir  ,  elle  se 
reodit  aopres  d*Acyndinus,  et  lui  avoua 
tout  ee  qui  s'^tait  pass^.  Le  prefet  du 

Sretoirepayalui-rafime  la  dette,  etcon- 
amna  rhomme  adult^re  k  donner  au 
mari  uue  terre  dont  le  revenu  6galait  la 
dette  du  prisonnier.  Les  incursions 
cootinuellesdesPerses,  entre  le  Tigre  et 
l^uphratejobligerent  Constances  de- 
JMurer  et  Syrie.  Anlioche  fut ,  jusqu'i 
1  auQ^e  350  ,'la  veritable  capitale  de  Tem- 
piw  d'Orient  Elle  s'embellit  de  nou- 
vdles  fontainea  et  de  portiques  magni- 
nqoeg;  poor  t^moigner  a  Tempereur  sa 
f^onaissaoee,  elle  orna  de  deux  belles 
rtatues  de  Persee  et  d'Androm^de  les 
joufeaux  thermes  de  Ck)nstantinople  (*). 
ws  tfa?aux  d'amelioratiou  que  Cons- 
taiice  eutreprit  h  Seleucie ,  furent  en- 
core pour  Antioche  de  nouveaux  bien- 
»it$.  La  capitalede  la  Syrie  s'enrichit  de 
tottt  le  sufcrott  d'aclivile  de  cette  vi lie 
^oisine.  Assise  sur  I'Oronte,  Seleucie 
<^it  le  veritable  port  d' Antioche  et  Ten- 
Iwpdtde  toute  la  Syrie.  Les  navires, 
?*»  tra?erseiit  la  M^diterranee ,  remon* 
j^^efleuvejusqu'a  ses  murs.  Au  dela, 
'Oroiiteest  herisse  de  bancs  de  roches, 
9P»arrftentIa  navigation.  Ainsi,  les  na- 
'^s'arr^taient  k  Seleucie,  et  en  si 

n  Jol.,  Or.  I.  -  liban.,  Or,  XIU.  -  Cedr., 


grand  nombre,  qu'ils  encomforaient  le  pe- 
tit golfe  form^  devant  la  vifle  par  un  de- 
tour de  rOronte.  Constance ,  pour  faci- 
liter  le  commerce ,  fit  creuser  un  port 
large  et  spacieux ,  presque  tout  entier 
taill^  dans  le  roc  vif  Les  revolutions  du 
sol  menac6rent,  pendant  toute  Tan- 
n^e  341 ,  de  renouveler  les  desastres  qui 
avaient  afflige  la  Syrie  a  T^poque  de  Tra- 
jan. Mais  on  ne  marque  aucun  nialheur 
caus6  a  Antioche ,  ou  dans  la  province, 
par  un  tremblement  de  terre  qui  se 
prolongea  plus  longtemps  que  ceux  dont 
rhistoire  a  fait  mention. 

GALLUS  EN  8YBIE.  -^  La  mort  de 
Fempereur  d'Occident,  la  revolte  de 
Magnentius  tir^rent  Constance  de  I'A- 
sie.  II  rei^ut ,  avant  de  quitter  Antioche, 
deux  6v6ques  de  la  Gaule,  envoy6s 
par  Tusurpateur  pour  lui  faire  des  pro  - 
positions  de  paix  et  d'alliance.  Il  re- 
poussa  leurs  d-marches.  En  351 ,  il  c^a 
le  gouvernement  de  la  Syrie  et  des  pays 
voisins  au  jeune  Gallus,  fir^re  de  Ju- 
lieu  TApostat.  Gallus ,  tir6  d'une  espece 
de  prison  en  Cappadoce ,  pour  occuper 
ce  poste  brillant ,  montra  I'enivrement 
d'un  parvenu  et  Tesprit  s6ditieux  d'un 
enfant  fatigu6  du  joug.  Son  premier  acte 
fut  une  concession  a  la  population  chrd- 
tienne  d' Antioche ;  il  sanctifia  le  bois  si 
honteusement  c^lebre  de  Daphnd,  en 
faisant  d6poser ,  sous  ses  ombrages ,  le 
corps  venerd  du  martyr  Baby  las.  Les 
paiens  furent  dedommag^s  de  Tinsulte 
faite  a  leur  culte.  Les  volupt6s  sangui- 
naires  de  ramphilh^fitre ,  favorisdes  par 
Gallus,  firent  oublier  les  mysterieux 
plaisirs  d' Adonis.  Gallus  avaitun  carac- 
tere  assez6leve.  Mais  sa  femme,  Cons- 
tantina  ,  fille  du  grand  Constantin , 
corrompit  ses  heureuses  dispositions. 
Tout  leur  portait  oinbrage;  il  semblait 
m^me  que  Galigs  et  Constantina  pris- 
sent  plaisir  a  vivre  dans  des  terreurs 
imagjinairps.  Magnentius ,  qui ,  apres  sa 
defaite ,  cherchait  encore ,  par  Tanean- 
tissement  de  la  famille  imp^riale  ,  a  reu- 
nir  les  deux  empires  sous  son  pouvolr , 
avail  envoye  un  sicaire  en  Syrie.  Celui 
qui  sVtait  charjje  d'assassiner  Gallus  , 
avdit  fail  eiitrerdans  lecoinplot  phisieurs 
le^onnaires  d'Antioche.  Les  meurtriers 
se  rassembiaieut  la  nuit,  dans  la  chau- 
miere  d'une  pauvre  femme,  situee  dans 
les  faubourgs  de  la  ville.  Un  soir,  6chauf- 
6. 


84 


L'URlVERS. 


fes  probablement  psf  \e  vin ,  ils  parle- 
rent  a  voix  haute  et  sans  d^uisement  de 
leur  projet.  Leur  h6t€sse  ne  perdit  pas 
una  de  leurs  paroles ;  et,  lorsqu*elle  fut 
bien  inform^  du  motif  qui  les  reuois- 
sait ,  elle  s*esquiva,  sans  £tre  aper^ue , 
et  courut,  en  toate  bSte,  decouvrir  a  Cal- 
lus le  secret  de  la  conspiration.  Les 
coupables  fiirent  arrStes ;  et  la  femme, 
qui  les  avait  livres ,  re^ut  une  recom- 
pense ^clatante.  Elle  fut  conduite  dans 
les  places  d*Antioche,  trainee  sur  un 
char ,  avec  tout  Tappareil  r^erve  autre- 
fois aux  triomphateurs.  Depuisce  temps, 
aucun  danger  n'avait  menaced  les  jours 
du  prince,  en  qui  on  ne  voyait  qu'un  de- 
legu^  de  Constance.  Cependant ,  Gallus 
se  plaisait  a  nourrir  ses  soupj^ns.  Un 
espionnage ,  habilement  organist .  p^ne- 
trait  jusque  dans  le  secret  des  demeu- 
res  particulieres.  L'exemple  du  prince 
animait  leshonteux  instruments  de  cette 
inquisition;  Gallus,  I'oreille  tendue  au 
moindre  bruit,  parcourait  le  soir  les 
rues  de  la  ville,  entrait  dans  les  lieux  pu- 
blics ,  et  tenait  note  de  toutes  les  pa- 
roles. EnGn,  il  fut  d^couvert  au  milieu  de 
ces  viles  occupations.  Antioche,  comme 
nos  villesmodernes,  ^tait  ^clair^e  la  nuit; 
Ic  peuple  reconnut  le  gouverneur,  et  se 
joua  de  ses  ruses  inutiles. 

Constince,  craignant  rinexp^rienoe  de 
Gallus,  avait  place  pres  de  lui,  dans  des 
emplojs  Aleves,  des  hommes  charge 
de  rend  re  un  compte  exact  de  la  con- 
duite du  jeune  prince.  Parmi  ces  agents 
de  Constance,  on  remarquait  Thalassius, 
pr^fet  du  pr^toire  d*Orient.  Thalassius 
montrait  impudemment  k  Gallus  les 
rapports  qu*il  envoyait  a  Constance. 
Le  prince  se  consolait  de  la  perte  d*un 
pouvoir  r6el,  par  les  61oges  quMl  exi- 
geait  des  rh^teurs ,  et  en  particulier  de 
Libanius.  11  cut  Thabilet^  de  se  conser- 
ver  sans  partage  le  droit  de  rendre  jus- 
tice, ou  plotdt  de  se  faire  payer  les  ju- 
gements.  Daus  une  famine  d^ Antioche , 
en  354,  il  avait,  peut-^tredans  une  bonne 
intention ,  abaiss^  le  tarif  des  denr^es. 
La  mesure  paruttyrannique,  et  les  d^- 
i*urions  de  la  ville  demanderent  la  revi- 
sion de  redit.  Cette  petition  irrita  Gal- 
lus ;  il  ne  put  souffrir  que  des  magis- 
trats  niunicipaux  apnortassent  aussi  des 
bornes  a  son  autorite.  II  lesjugea  comme 
des  /  criminels  et  prononca  contre  eux 


la  peine  capitale.  Le  comte  d*Orient, 
Honoratus.  emp^eha  seul  que  la  sentence 
fQt  ex^cutee.  Gallus,  c6dant;malgr6  lui, 
k  Tascendant  du  comte,  prit  le  parti  de 
quitter  Antioche  pour  quelque  temps. 
Le  peuple  se  pressa  sur  son  passage, 
pour  le  prier  de  differer  son  depart,  et 
de  ne  pas  abandonner  la  multitude  aux 
tortures  de  la  faim.  Gallus  repondit  aux 
suppliants  qu'il  leur  laissait  dans  Tb6o>  , 
phile ,  gouverneur  de  Syrie ,  un  homme 
capable  de  proven ir  tons  les  besoins  des 
haoitants.  Ces  assurances  caiinereot 
rinquietude  de  la  foule;  elle  permit  a 
Gallus  de  se  diriger  vers  Hidrapolis.  Ce 
pendant,  Th^ophile  etait  devenu  res- 
ponsable  de  toutes  les  mis^res  des  habi- 
tants. II  ne  put  suffire  a  sa  dangereose 
tdche.  Un  jour,  des  malheureux,  a 
qui  la  faim  dtait  toute  raison  ,  coura- 
rent  au  cirque;  animds  par  la  vue  des 
jeux  et  du  plaisir ,  par  ce  contraste  qui 
msultait  a  leurs  maux,  ils  se  jeterent  sor 
le  gouverneur,  et  le  massacrereot 
lis  trouverent  une  autre  victime,  Ro- 
bulus ,  homme  puissant,  h  qui  son  rang 
et  ses  rlchesses  donnaient  dans  la  ville 
une  grande  autorite.  Eubulus  et  son 
fils  echapperent  avec  peine  a  la  pour- 
suite  des  meurtriers,  qui,  ne  pouvaot 
les  atteindre,  livr^rent  tous  leurs  biens 
au  pillage  et  a  Tincendie. 

GALLUS  BSSAIS  DB    SB  BENDBB  15- 

DBPBNDANT  BN  SYBiB.  —  Cependant 
Gallus  ^tait  rentre  a  Antioche;  il  se 
croyait  d^ormais  ind^pendant;  le  peu- 
ple Tavait  d^barrass^  de  Th6ophile,  et 
Thalassius  ^tait  mort.  Quoique  Tempe- 
reur  lui  edt  envoy6  a  plusieurs  reprises 
I'ordre  de  venir  en  Europe ,  Gallus  de- 
meurait  tranquillement  a  Antioche, 
heureux  d'exercer  sur  la  Syrie  un  pou- 
voir sans  partage.  Enfin,  un  nouveao 
pr^fet  du  pr^toire  arriva.  Gallus  le  vit 
passer  devant  son  palais,  suivi  d'une 
troupe  d*agents  subaltemes.  GetofBcier, 
appel^  Domitianus,  avait  contracte, 
dans  les  emplois  de  finances ,  des  habi- 
tudes de  rudesse ;  il  prit  possession  du 
pr^toire,  contre  toutes  les  regies  du 
c^r^monial  usit6,  sans  avoir  pr^veuu 
Gallus.  II  s*occupa  aussit6t  de  recueil- 
lir  les  plaintes  qui  8*^levaient  contre  ie 
jeune  C^sar,  et  les  r^unit  dans  un  tra^ 
vail  ^tendu  qu*il  envoya  a  Constance. 
Enfin ,  foro6  de  venir  au  palais ,  il  in- 


SYRIE  ANCIEi^NE. 


85 


tHDa  a  GaUos,  en  termes  brefs,  et  sans 
preambule,  Tordre  de  quitter  immediate- 
meat  la  Syrie ,  avec  menace  de  saisir  les 
Tims  destine  li  see  ofBciers.  Constance, 
par  an  feint  int^rlt  pour  son  bean-fr^re, 
iQi  a?ait  conseill^  d'doigner  les  legions 
d'Antioche;   Gallus    n*avait    conserve 
aupr^  de  lui  qae  sa  garde ,  trop  faibie 
pour  rien  tenter  Gontre  Tempereur, 
maisassez  forte,  comme  elle  le  montra, 
pour  punir  Finsolence  de  Domitianus. 
Ce  fut  aox  ofBciers  de  sa  garde  que  le 
priooe  eonfia  sa  vengeance.  II  leur  or- 
donna  de  se  saisir  dn  pr^fet ,  et  nomroa 
oomme  juge  dans  le  proc^ ,  le  (jaesteur 
Hontias,  tr^sorier  de  la  province.  Ce 
questeur  courut  aux  soldats  charge 
d'arr^ter  Domitianus,  leur  repr^senta 
(|u'ils  ailaient  commettre  un  crime  de 
lese-majesty  et  persuada  aux  officiers  de 
dedesowira  Gallus.  Ensuite,  Montiusse 
rendit  aupres  du  prince,  et  lui  rap- 
pela  les  Immes  ^troites  de  son  pouvoir. 
Ces  remontrances  6pouvant^rent  Gallus; 
iJ4»mprit  Jes  perils  de  sa  situation,  et  ne 
rit  de  moyens  de  salut  que  dans  un 
ooup  de  desespoir.  II  con^ura  les  sol- 
dats de  sauver  leur  general.  Les  le- 
eioniiaires  s'emurent ;  un  curateur  de 
la  Title  {curator  wrbis\  nomm6  Lu- 
Kos,  se  mit  a  leur  t^te,  et  arr^ta  Mon- 
titts.  Les  furieux  se  jeterent  sur  ce  vieil- 
lard  sans  defense^  et   le   tratndrent, 
pieds  et  mains  li^,  au  pr^toire  de  Do- 
mitianus; le  pr(§teur  fut   attache  aux 
chalnes  de  Montius ,  et  tratne  avec  lui 
dans  \aboue,  a  travers  la  ville.  Les  deux 
cadavres,  meurtris  et  dechires,  eurent 
pour  torabean  les  eaux  de  TOronte.  Mon- 
tius, dans  sa  terrible  agonie,  avait, 
a plusieurs  reprises,  murmur^  les  noms 
d'£pigoaius  et  d'Eus^bius.   La   foule 
avait  reeaeiili  ses  derniers  mots ,  sans 
eonnattre  les  personnes  qu'ils    desi- 
gnaient.  On  sut  depuis  que  Montius,  en 

Erononcant  ces  noms,  pensait  a  deux 
ommes  obscurs,  tribuns  de  Tarsenal  *), 
qui  lui  avaient  promis  au  besoin  (de ' 
mettre  des  armes  a  sa  disj)osition.  Les 
soup^onsde  Gallus  se  porterent  sur  deux 
boounes,  plus  connus  dans  Antiocbe, 
Tun,  tpigonius,  pbilosopbede  Lycie; 
Tiutre,  Eusebius,  orateur  alors  en  vo- 
Soe.  On  les  mit  en  prison ,  et  on  s'ap- 

(*)  Mi  iribunos  fabricarum  ituitnulasiet,.. 
in.  Marc,  XIY ,  % 


Sr^ta  a  faire  avec  6clat  leur  nroces.  Pour 
onner  h  la  vengeance  les  lormes  de  la 
l^aiiti6 ,  le  Cesar  manda  k  Antioche 
Ursicin,bravesoldat,  qui  d^fendait  alors 
I^isibe,  en  M6sopotamie.  Ursicin,  a  qui 
les  combats  avaient  acquis  de  la  cele- 
brite,  avait  toujours  montr6  de  Teloigne- 
ment  pour  les  d^bats  judiciaires.  II  au- 
rait  refuse  de  paraltre  dans  ce  proces,  si 
les  menaces  aes  delateurs ,  qui  pr^sen- 
taientd^ja  h  Gallus  son  refus  comme  une 
trahison,  ne  I'eussent  forc^  a  c6der.  Ce- 
pendant  Ursicin  crut  devoir  informer 
secretement  Tempereur  de  tout  ce  qui  se 
passait  en  Syrie.  Le  jour  solennel  arriva. 
Ursicin  6tait  environn^  de  juees  com- 
nlaisants ,  vendus  au  jeune  Cesar.  Une 
fbule  de  notarii  assistaient  au  pr^toire, 
et  rapportaient  a  Gallus ,  chacun  a  son 
tour,  le  r6cit  d^taille  des  moindres  inci- 
dents. Constantina  elle-m^mevint  secr^ 
tement  ^uter  les  paroles  des  accuse. 
£pigonius  fut  introduit  le  premier;  sa 
contenance  ^tait  suppliante ;  livr^  k  la 
torture,  il  s'avoua  coupable.  Le  tour 
d'Eus^bius  vint  ensuite.  Habitu^  aux 
formes  de  la  procedure,  il  repoussa  avec 
courage  Taction  intent^  centre  lui,  et 
s*attad]a  a  en  d^montrer  Tillegalit^. 
Gallus,  irrit^,  envoya  Tordre  de  le  met- 
tre a  la  torture ;  Eusebius  continua  sa 
defense  au  milieu  des  tourments.  II  ne 
lui  restait  plus  qu'un  soufHe  de  vie, 
lorsque  les  bourreaux  s'arr^t^rent.  Les 
juges  prononcerent  alors  la  sentence; 
Epigonius  et  Eusebius  ^talent  condam- 
nes  a  roort.  lis  firent  place  k  d^autres 
accuse,  parnii  lesquels  on  voyait  le 
jeune  Apollinaire  gendre  de  Domitia- 
nus :  on  lui  faisait  un  crime  de  cette  pa- 
rent6.  Apollinaire,  le  pere,  gouver- 
neur  dePn^nicie,  le  diacre  Maras  et  des 
ouvriers  du  Tyr,  accuse,  pour  un  autre 
motif,  du  crime  de  lese-majest^,  furent, 
s^nce  tenante ,  mis  en  jugement.  Les 
deux  Apollinaire  furent  condamn^s  a 
I'exil.  On  leur  commanda  de  partir  sur- 
le-champ  pour  leur  maison  de  eampa- 
gne,  appel^e  les  CratireSy  a  quelques 
lieues  d*  Antioche;  ils  trouverent  la  mort 
en  arrivant  dans  leur  retraite;  des  en- 
voy^s  de  Gallus  leur  bris^reut  les  metn- 
bres  et  les  ex^ut^rent  ensuite.  Ces 
cruautes  pjuridiques  signal^rent  I'an- 
nee  353.  Constance,  indifferent  aux 
crimes,  mais  inquietdesactes  d'autorit^ 


86 


L'UNIVERS. 


de  Gallus,  craignait  que  le  G^r  ne  se 
rendu  ind^pendant  en  Syrie.Des  eunu- 
ques,  des  inlruants  se  reunissaient 
secretement ,  toutes  Ics  nuits,  autour  de 
Constance,  et  entretenaient  ses  fraveurs. 
On  discutait,  dans  ces  conseils,  las 
moyens  de  ae  defaire  de  Gallus.  Cons- 
tance  r^olut  de  Tattirer  a  la  cour ;  illui 
6crivitunelettre  flatteiise  pour  Tinvitera 
▼enir  en  toute  bdte.  «  Les  einbarras  de 
«  rOccident  r^lamaient  lesconseilset  le 
«  courage  de  Gallus.  »  On  ne  douta  pas  du 
succesdecette  lettre;  mais  les  consei  Hers 
de  rempereurlui  donnerentde  nouvelles 
Inquietudes.  Parmi  eux  ^taient  Arb^- 
tion,  general  de  la  cavalerie  en  Occi- 
dent, envieux  de  toute  sup^riorite  mili- 
taire,  et  Teunuque  £usebe,  chainbellan 
de  Constance.  Ces  deux  hommes  mon- 
traieiit  a  Tempereur  qu*il  serait  impru* 
dent  de  laisser  en  Orient,  apr^s  le  depart 
de  Gallus,  un  g^n^xal  aussi  dangereux 
qu'lTrsicin.  Ursicin,  disaient-il8«  nour- 
rissatt  Fid^  de  detacher  de  rempire  les 
provinces  d'Asie.  II  s'etait  servi  de  ia 
popularity  qui  entourait  ses  fits  a  Tar- 
mee ,  pour  squire  les  legions  prates  k 
le  declarer  empereur.  Ces  accusations 
^talent  denudes  de  toute  vraisemblance , 
mais  elles  troaverent  credit  aupr^s  de 
Constance. 

Le  g^n^al  fut  mand^  h  la  cour,  pour 
arlr^ter  les  plans  d'uue  nouvelle  guerre 
contre  les  Perses.  Ursicin  ob^it  aussitdt; 
Gallus ,  au  contraire ,  n'osait  se  decider 
h  quitter  la  Syrie.  Constantina ,  sa  fein- 
me,  partit  la  premiere.  £lle  esperait  tout 
de  son  pouvoir  sur  son  frere  Constance ; 
mais  elle  mourut  en  Bithynie,  avant 
d'arriver  au  terme  de  son  voyage.  Gallus 
ne  pouvait  sortir  de  ses  irresolutions ; 
il  ne  comptait  pas  assez  sur  le  devoue- 
ment  de  ses  troupes  pour  desob<^ir  k 
Constance.  Sur  ces  entrefaites,  arriva 
a  Antiorhe  un  offlcier  adroit  et  intri- 
gant qui  mit  fin  aux  incertitudes  de 
Gallus  (*).  Le  C^ar  d'Orient  partit 
pour  Constantinople.  II  oublia  dans  les 
plaisirs  toutes  ses  craiutes.  II  continua 
son  voyage  avec  une  insouciante  s^cu- 
rit^.  Mais,  arrive  en  Norique,  il  vit  tout 
h  coup  changer  sa  fortune.  Mpouill^ 

{*)...  Egressusqu€  Aniiochia^  nvmine  lavo 
ductante^prorstuire  tendebat  defumn,  ui  prth 
verbium  loquitur  vetus^  ad  flatnmam...  Am« 
Marc,  XI Y,  II.  —  roy.  aassi  Socrale,  U,  84  ; 
SozomfcDc,  IV,  «;  PWlost,  HI,  4. 


des  insignes  de  son  rang  par  un  offidor 
de  Tempereur,  il  fut  livre  k  une  con* 
mission  militaire ,  condamne  a  la  peine 
capitate,  et  execute  dans  le  plus  bref 
delai.  II  avait  a  peine  viniit-neuf  ans. 

L*£11PBBBUR  CONSTANCB  JLPPBBNO, 
BN  OBIENT,  Lk  BEVOLTB  DE  iULIEIf ; 

8A  MOBT.  —  Antioche,  victiine  du 
gouvernement  faible  et  cruel  de  Gallus, 
eut  k  soiiffrir,  apres  sa  mort,  de  la  se- 
v^rite  de  I'empereur.  Constance  avait 
envoye  en  Syne  le  prefet  du  pretoire, 
Musonianus.  Ce  magistrat  ouvrit  uoe 
enqu^te  -sur  le  meurtre  de  Domitianus. 
Les  vrais  coupables,  craignant  pour  leur 
vie,  couru rent  deposerleurs  ricbessei 
aux  piedsdu  prefet;  Musonianus  lesreo- 
voya  absous.  Mais  II  faUait  a  Tempereur 
des  condamiiations  et  des  supplices ;  oa 
abandonna  au  bourreau  des  citoyem 
obscurs  et  sans  fortune  (*). 

Constance  vint  mourir  dans  le^  pro- 
vinces d'Orient  ou,  vingt  ans  auparavant, 
il  avait  debute  dans  1  exercice  du  pou- 
voir. II  etait  parti,  en  360 ,  pour  rAtte. 
La  guerre  de  Germanic,  confiee  a  sa 
habile  general ,  ne  reclamait  pas  la  pre- 
sence de  I'empereur.  Julien,  frere  de 
Gallus,  vainquenr  des  barbares,  se 
faisait  declarer  Auguste  a  Lutece ,  Fan- 
n^  meme  oii  Constance  6tait  alle,  ea 
M^opotamie,  encourager  les  soldats 
qui  combattaient  les  Perses.  L^empe- 
reur,  qui  avait  accompagn6  ses  legions, 
pendant  la  canipagne  de  860,  vint  passer 
rhiver  en  Syrie.  II  traversa  Hierapolis,  le 
17  decembre,  et  arriva,  quelques  jours 
apres ,  a  Antioche  {**).  Tous  les  magis- 
trats  de  la  ville ,  les  personnages  illus- 
tres  de  la  province  aocoururent  au- 
devant  de  Tempereur.  Parmi  eux ,  ^tait 
Amphilochius,  Tauteurde  toutes  les  di- 
visions de  la  famille  de  Constantin.  La 
vue  de  cet  homme  excita  la  eolere  feinte 
ou  reelle  des  courtisans.  lis  le  repous- 
s^rent  avec  m^pris ,  et  demanderent  sa 
mort.  L'empereur  r^pondit  avec  dou- 
ceur :  «  Cessez  d*accabler  oet  homme; 
«  je  le  crois  coupable;  mais  je  n'en  suis 
« pas  pleinement  oonvaincu.  Sacbei 
«  que ,  s'il  est  criminel ,  sa  conscienee 
«  le  denoncera  a  mes  ^^eux.  »  Le  joor 
suivant,  Con|tanoe  assistait  aux  jeux 
du  cirque  :  Amphilochius    avait  pris 


ra 


Amm.  Marc,  Xl^  |3.  • 
)  Amm.  Marc,  XaI  ,  6. 


SYRIE  AWCIENNE. 


87 


pbee  devaot  lui.  Soudain  la  foule  des 
spectateurs  pousse  un  cri ;  la  lotte  6tait 
cngag^  eotre  deux  cocbers  c^lebres. 
Amphilocbius,  avec  le  rang  des  curieux 
qui  renviroanent ,  se  pencbe  vers  l*a- 
rene.  Mats  tout  k  coop  la  balustrade 
cede.  La  foole  tombe;  quelques  person- 
Des  soot  blessees ;  Amphilochius  seul 
pent  ecrase.  La  credulity  publique  et  la 
uatterie  de  la  cour  virent  dans  cet  acci- 
dent un  arr^  du  destin  qui  avait  con- 
damn^  Ampbilochius.  Les  ^crivains  an- 
cieos  oe  di'sent  pas  ce  que  Constance  fit 
depois  pour  ia  Syrie.  Ce  prince  sans 
energie  passa  dans  le  repos  tout  T^te. 
La  place  de  prefet  d'Orient  ^tait  vacante 
par  la  mort  d^tiermogene.  L'einpereur 
nt  OD  choix  heureux ,  il  nomina  prefet 
le  Paphiagonien  Helpidius;  (fetait  un 
homme  simple  et  grossier,  sans  ins- 
trudioa,  mats  d^une  justice  ^clair^e. 
CoBslance  retoarna  (361),  apres  Thi- 
ver,  ea  M^potamie.  II  y  re^ut  des 
nouvelles  iaaai^tantes  au  sujet  de  Ju- 
'  Ijfp;  force  de  quitter  TOrieut,  il  re- 
passa  I'Euphrate.  A  Hi^rapolis ,  il  ha- 
raoffua  ses  legions  H*  Apres  un  d6but 
modeste,  Constance  paria  de  Gallus  et 
de  Julien ,  des  exces  de  Tun ,  de  Tingra- 
titude  de  Fautre ;  il  ajouta  des  lieux  com- 
IDUDS  siir  les  secours  du  del  et  sur  Tef- 
froi  doot  seraieiit  iofailliblement  saisies 
les  legions  rebelles  a  la  vue  de  Tarm^ 
d'Orieot.  Ce  discours  enflamma  Ten- 
thoiisiasme  des  soldats.Us  brandirent 
leurs  piques ,  et  demanderent  h  mar- 
cher suMe-champ  contre  Julien.  Ces 
vives  demonstrations  dcnnaient  un  peu 
d'assuraocea  Tempereur;  mais,  pendant 
ia  ouir,  son  sommeil  ^tait  trouble  par 
^ts  visions  eifirayautes  {**),  Son  pere  lui 
apparaissait  tenant  par  la  main  un  bei 
eotaot,  qui  jetait  loin  de  Constance  une 

Sre,  tigurant  rerapire.  D'autres  fois, 
it  son  genie  famuier  aue  le  malheu- 
reux  prince  voyait  prendre  conge  de 
hii.  C'est  sous  ces  tristes  impressions 
que  Tempereur  entra  k  Antioche  (***)• 

n  SoUiatut  semper,  ne  quid  re  levi  vel  verbo 
fonmitlam  inculpata  parum  congruens  ho- 
*<*ta(i ,  vtque  cauius  navigandi  magisler,  cla* 
«» Jfronuctum  jnoUbm  erigcns  vel  inctinans, 
ff^llor  nunc  apud  vot,  amantisaimi  viri , 
^VUeri  meos  errores ,  quin  potius  {si  diet 
^i  verum)  humanitatem.  Amm.  Marc., 
HMa. 

(•*•)  /d.,  ibid.,  15* 


II  y  resta  pea  de  temps  :  la  saison  etait 
avanc^e;  rautomne  touchait  asaHn, 
lorsqu'onse  miten  marche.  Les  legions, 
en  sortant  d' Antioche ,  arriverent,  au 
point  du  jour,  a  la  troisi^me  pierre 
milliaire,  dans  un  endroit  appele  Hip- 
pocephalus.  On  y  trouva  un  homme 
assassine;  la  position  du  cadavre  pr^ 
sageait  de  grands  malheurs.  L*empe- 
reur  quitta  la  S)[rie  avec  d^couragement; 
il  succomba  a  ses  inquietudes  dans 
une  bourgade  obscure,  au  pied  du 
Taurus. 

l^empsreub  julien;  il  tisitb 
l'obient;  son  sbjoub  a  antioche; 

IL     SSSAYE    en     YAIN    DE    BANIMEB 

l'ancienne  beligion;  sa  moet.  — 
Julien ,  rest^  seul  maitre  de  feinpire , 
destitua  Helpidius ,  qui  6tait  Chretien , 
et  donna  ia  prefecture  d'Orient  a  Sai- 
luste ;  c'est  apres  ce  cbangement  dans 
radrainistration ,  en  862,  que  Julien 
Vint  en  Orient.  L'empereur  d^sirait  vi- 
siter la  capitale  de  la  Syrie.  II  prit  les 
routes  les  plus  courtes  de  Tarse  a  An- 
tioche; arrive  k  quelque  distance  de 
cette  ville ,  il  rencontra  une  grande  par« 
tie  des  habitants.  Cetait  la  population 
paienne  aui  venait  saluer,  comme  une 
divinite ,  le  restaurateur  de  Tancten  cuU 
te  (*).  Au  milieu  des  acclamations  de 
cette  fouJe ,  Julien  s'entendit  avec  ioie 
appeler  T^toile  de  TOrient.  Cependant 
une  circonstance  fortuite  assombrissait 
la  joie  commune.  Le  cortege  de  Tern- 
pereur  devenait  plus  serieux  et  plus 
^ave  k  mesure  qu'on  approchait  d*An- 
tioche.  En  entrant  dans  ses  murs ,  Ju- 
lien fbt  firappe  par  des  sons  lugubres; 
les  gemissements  avaient  succede  aux 
chants  de  f^te.  On  ceiebralt  la  mort 
d'Adonis.  Julien  trouva  sur  la  liste  des 
personnages  qui  sollicitaient  Thonneur 
d'etre  admis  en  sa  presence  un  certain 
Thalassius,  ennemi  de  Gallus,  frere  de 
Tempereur ;  il  lui  interdit  la  porte  du 
palais.  Les  ennemis  de  Thalassius  ap- 
prirent  aussitot  Taffront  quil  venait  de 
souffrir.  Le  lendemain ,  comme  ils  plai- 
daient  contre  lui,  ils  s'adresserent  k 
Tempereur  en  disant  :  «  Votre  ennemi 
Thalassius  nous  a  enleve  ce  qui  nous  ap- 
partient. »  Julien  comprit  que  ces  hom- 

(*)  Mirahu  voces  mullitudinis  maona,  so- 
luiare  sidus  itUuxisse  Bois  partibue  aadairidn- 
^.  Amm.  Marc,  XXII,  9. 


88 


L'UNIVERS.' 


nies  voulaient  profiter  de  la  disgrace  de 
Thalassius.  II  leur  repondit :  «  Qui ,  cet 
hoinme  m'a  ofTens^;  ii  est  convenable 
que  vous  remettiez  vos  accusations 
au  jour  ou  faurai  re^u  satisfaction  de 
nion  ennemi. » Et  en  m^me  temps  il  d^- 
fendit  au  pr6fet  de  continuer  le  proces, 
avant  que  Thalassius  edt  obtenu  un  re- 
tour  de  faveur. 

Uempereur  passa  Thiver  k  Antioche. 
Applique  tout  entier  aux  causes  judi- 
cial res,  les  plaisirs  et  les  voluptes  de 
la  Syrie  ne  le  detournerent  pas  un  ins- 
tant de  ses  occupations  s^rieuses.  Sim- 
ple dans  son  palais ,  entour6  de  philo- 
sopbes  qui  prenaient  a  t^che  de  se  dis- 
tinguer  par  i'austerite  de  leurs  moeurs 
et  de  leur  costume ,  Julien  ne  s'envi- 
ronnait  des  pompes  asiatiques  que  pour 
aller  aux   temples   honorer  les  meux 
qu'il  avait  retablis  sur  leurs    autels. 
Aussi  saint  Jean  Chrysostome,  qui  n'a- 
vait  pu  penetrer  dans  la  vie  privee  de 
Tempereur,  et  qui  n'a  vu  que  le  c6t6 
exterieur  de  ce  grand  homme,  I'a-t-il 
d^peint  sous  un  jour  peu  favorable. «  Les 
«  magiciens,  dit  Chrysostome,  les  en- 
«  chanteurs,  les  devins,  les  augures, 
M  les  fanatiques  de  Cybele,  et  tous  les 
«  charlatans  de  Timpiet^  s'etaient  ren- 
te dus  aupres  de  lui  de  toutes  les  con- 
«  tr6es  de   la  terre  :  son  palais  ^tait 
«  renipli  de  fugitifs  fl^tris  par  des  ju- 
«  gements.  Des  mis^Tables,qui  avaient 
«  ete  condamn^s  pour  empoisonnements 
«  et  pour  malefices ,  qui  avaiejit  vieilli 
«  dans  les  prisons,   qui  travaillaient 
«  aux   mines,  qui  pouvaient  h  peine 
«  soutenir  leur  mis^re  par  le  commerce 
«  le  plus  infSme,  rev^tus  tout  a  coup 
«(  de  sacerdoces  et  de  sacrificatures ,  te- 
t  naient  aupres  de  lui  le  rang  le  plus 
«  honorable.  Environn^dejeuneshom- 
*c  mes  perdus  de  debauches,  de  vieillards 
«  encore  plus  dissolus,  et  de  femmes 
«  prostitutes,  qui  faisaient  tout  reten- 
«  tir  de  leurs  ris  immoderes  et  de  leurs 
-«  paroles  impudentes  ,  il  traversal t  les 
«*rues  et  les  places  de  la  ville;  soncbeval 
«  et  ses  gardes  ne  le  suivaient  que  de 
«  loin  C).  » 

On  a  vu ,  dans  cette  histoire,  combien 
les  peuples  de  FOrient  t^moignaient  d*6- 
loigneraent  pour  les  empereurs  dont  la 

(*)  Chrysos.,  de  Sanct.  Babyl.  contra  Jul, 
cl  GcnL 


conduile  etait  grave  et  severe.   Dans 
cette  disposition  du  caractere  national 
se  trouve  rexplicalion  de  la  conduitc  da 
Julien.  C^tait  pour  lui  une  necessite ,  il 
le  savait,  de  d6poser  parfois  le  manteau 
du  philosophe,  pour  ne  pas  blesser  ia 
multitude.  Ainsi  peut-on  accorder,  coin- 
me  Tont  d^ja  fait  de  grands  ^ivains  mo- 
dernes,  le  t^moignage  de   saint  Jean 
Chrysostome  a vec  leselogesque  nous  oat 
laiss^s  de  la  conduite  de  Julien  tous  les 
^crivains  i)aTens.  Cet  empereur  tenaita 
la  popularity ,  moins  par  politique  que 
par  amour-propre.  Avec   d*emiaentcs 
qualites,  il  avait  un  g^nie  mimique.  H 
ne  reussit  point  a  exciter  radmiration 
des  Syriens.  Le  peuple  railla  Tempbase 
sophistique  qui  Temportait  toujoun, 
chez  rempereur,surlamajeste  du  pr^tit 
paTen.  Julien  se  livrait  k  la  risee  de  la 
loule ,  en  paraissant  avec  un  exterieur 
malpropre ,  une  barbe  heriss^ ,  au  mi- 
lieu des   prjgtresses  et   des    courtisa- 
nes.  11  n'en  continua  pas  moins  a  dA^ 
brer  de  la  m^nie  maniere    les  rites  #i 
paganisme.  II  voulut  visiter  le  temple  de 
Jupiter,  sur  le  mont  Cassius.  Apres  avoir 
sacrifie  au  dieu ,  il  vit  prosterne  a  ses 
pieds  un  suppliant  qui  implorait  son 
pardon.  L'empereur  lui  demanda  son 
nom.  Le  suppliant  lui  repondit  «  qu'il 
^tait  Th6odote ,  presidial  de  Hi^rapolis, 
qui  av^it  excite  contre  Julien  la  ooiere 
de  Constance.  »  Lorsque  Th6odote  eut 
finl  de  parler,  Julien  lui  dit :  «  Je  savais 
d^ja  ce  que  vous  venez  de  me  dire.  Re- 
tournez  chez  vous ,  et  ne  craignez  phis 
un  prince  aui  a  pour  regie  de  diminuer 
le  nombre  ae  ses  enneniis  et  d'augmenter 
celui  de  ses  partisans  (*).  »  Julien  alia  da     ' 
mont  Cassius  au  temple  de  Daphn^.  Ce-     I 
tait  alors  le  jour  oil,  depuis  des  siecles,     I 
les  paiens  d'Antioche  venaient  en  foule 
adorer  Apollon.  L'empereur  entra  dans     I 
le  sanctuaire ,  ou  il  oomptait  trouver  de 
nombreuses  Tictimes.  Le  temple  ^it 
vide.  Julien  pensa  que  par  respect  pour 
sa  quality  de  grand  pr^tre,  on  n'avait  pas 
voulu  introduire  les  offrandes  avant  son 
arrive.  II  sortit,  et  chercha  vainement 
autour  du  lieu  sacr^  les  troupeaux  qui 
devaient  ^treimmol^.  Frapp6d'etonne- 
ment,  il  rencontra  le  pr^tre  d*Apollon, 
qui  apportait  une  oie  pour  le  sacriilee. 
Cette  vue  dut  le  convaincre  de  Tinati* 
nAmiD.  Marc,  XXn,  14. 


SYRIE  ANCIENNE. 


89. 


lite  de  ses  efforts  pour  rendre  la  vie  a 
Tajicienne  religion. 

Julien  avail  port6 jusqu'a  deux  cents  le 
oomlrredess^Dateursd^Antioche;  iravait 
iaisse  au  peuple  l^election  de  ces  nou- 
Teaux  magistrals  inunicipaux ;  mais  il 
dm  retirer  aussildl  la  faveur  qu*il  ? enail 
d^aocorder. «  Souvenez-Tous,  dil-il  dans 
«  le  Misopogon^  de  ce  senaleur  que  vous 

•  instalidtes,  de  voire  autorile  privee, 
«  avant  que  son  nom  fdl  sur  la  lisle , 

•  lorsque  le  proces ,  donl  sa  nomination 
«  fut  suivie ,  etail  encore  pendant;  el  de 
«  oe  mis^able  que  vous  prttes  dans  la 
1  rue  pour  le  Iralner  au  s^nal.  C'elail 

•  un  booune  sans  bien,  de  la  lie  du  peu- 

•  pie ,  en  an  mol ,  de  celte  espece  de 
«  gens  qu'on  ne  regarde  dans  aucune 
«  ville ,  et  que  vous ,  au  conlraire  ,  par 
«  an  effet  de  voire  rare  discernemenl, 
«  vous  estimez  comme  des  hommes  pre- 
c  cieux  y  qu'U  faut  acheler  au  poids  de 
«  Tor.  Lapluparldevos  elections  elaienl 
<  aussi  peu  judicieuses ,  el  ie  ne  pus  me 
«  jir¥teratoutesvosirr^gulariles(*).  » 

L'indifference  que  les  Antiochiens 
montraient  pour  leurs  d roils  munici- 
paux,  affecla  Julien.  D*aulres  6vene- 
ments,  fincendie  du  lemple  d*ApolIon 
el  la  diselte  qui  aiiligea  TOrienl,  achev^ 
rem  de  lui  rendre  insupporlable  le  sejour 
de  la  Syrie.  La  famine  n'eul  d^aulre 
cause  que  Tavarice  des  sp^culaleurs  el 
le  zele  ininlelligent  de  Julien.  Uempe- 
reur  avail  voulu  signaler  sa  presence  ^ 
Anttochepardes  bienfaits.  II  avail  toul 
d'abord  call  remise  aux  babilants  de 
Tarriere,  et  redoil  d'un  cinquieme  les  im- 
^is  annuls.  Le  peuple ,  encourage  par 
ses  concessions,  s'^lail  ^leve  contre  la 
chert^des  vivres : «  Toul  abonde,  criail  la 
multitude,  el  nous  manquons  de  toul!  » 
Ges  plainles  furent  6cout^s  favorable- 
menl  par  I'empereur ;  il  adressa  des  re- 
roontrances  aux  citoyens  riches ;  les  mar- 
chands  promirenl  de  se  contenler  d*un 
iDoindre  proGl ;  mais  le  prlx  des  denrees 
resta  le  m€me.  Quelques  mois  se  passe- 
reol  sans  que  rempereur  pardt  faire 
atteDtioD  aux  besoins  du  peuple.  De  nou- 
velles  plainles  r^veillerenl  enOn  sa  soKi- 
citode.  II  eul  recours  a  une  mesure  s6- 
^ere,  qui,  deslinee  a  pesersur  les  riches, 
ecrasa  les  necessiteux.  Un  tarif  ful  6ta- 

(%  CEttvrfts  d^Jiili<rn,  traduUps  p»r  Tourlel* 

t>n,p.  116. 


bli  pour  les  denrees.  Chacune  ^lail  laxce 
a  un  prix  tres-minime,  qu'on  ne  pou* 
vail  depasser.  En  m€me  lemps,  Julien 
envoyail  chercher,  k  ses  frais,  aux  exlre- 
mit^  de  la  Syrie,  qualre  cent  mille  bois- 
seaux  de  ble.  Un  peu  apres,  vingl-deux 
mille  boisseaux  arriv^renl  d*£gypie.  Ces 
provisions  Elaienl  achetees  aussildl 
qu'elles  paraissaienl  sur  le  march6.  Des 
accapareurs  enlevaienl  au  prlx  couranl, 
^tabli  par  Tautorit^  imperiale ,  les  mar* 
chandises  deslinees^  soulager  la  mis^re 
du  pauvre.  Les  marchands  de  lout  genre 
emigraienl  plut6l  que  de  vendre  les  ob- 
jets  de  leur  commerce  h  un  laux  arbi- 
Iraire  el  ruineux.  Le  peuple ,  donl  les 
soufTrances  augmentaienl  chaque  jour , 
accusail  I'empereur  des  maux  donl  il 
n'^taitque  la  cause  involontaire.  Julien, 
de  son  c6t6,  aigri  conlre  la  population, 
demeurait  avec  peine  dans  les  regies  de 
moderaiion  el  ae  douceur  ^u'il  s'elait 
Iracees.  Pouss6  par  les  ofOciers  de  son 
palais,  il  se  determina  a  des  violences.  II 
ordonna  Tarrestation  dessenaleurs  d'An- 
lioche.  J^e  sophiste  Libanius,  son  ami, 
le  supplia  de  revoquer  eel  ordre  lyran- 
nique.  Les  conseillers  de  Julien,  Idmoins 
des  prieres  de  Libanius,  oserenl,  en 

{)resence  de  Tempereur,  le  menacer  de 
a  morl.  Le  sophisle  demeura  ferme  et 
oblinl  la  grdce  de  ses  concitoyens.  Le 
malaise  du  peuple  dura  aussi  longtemps 

Sue  Thiver.  Julien  demanda  le  secours 
es  dieux  par  des  sacrifices;  tous  les 
plans  qu*il  formail  pour  assurer  le 
bien  public  Elaienl  lravers6s.  II  avail 
donnedes  lerresau peuple ; les  riches s*en 
emparerent.  Julien  chassa  non  sans 
peine  les  spolialeurs.  Pousse  h  boul, 
rempereur  epancha  sa  colere  dans  une 
salire  contre  les  Antiochiens.  II  ecrivit 
le  Misopogon  ( Tennemi  de  la  barbe ) , 
appele  aussi  le  Livre  Antiochien.  Julien 
rappelle ,  dans  eel  ^cril,  la  froideur  avec 
laquelle  les  Syriens  le  saluerenl,  quand 
il  pril  le  lilre  d'Augusle.  «  Les  Alexan- 
dnns,  dil-il,  envoyerenl  a  Tempereur 
une  ambassade  el  des  felicitations  en  Eu- 
rope bien  avanl  les  Antiochiens.  Ceux-ci 
furcnl  mSme  les  demiers  k  lui  rendre 
hommage.  »  Julien  r^capilule  ensuite  les 
desordres  donl  il  a  el^  l^moin ,  les  in- 
jures donl  il  a  et^  viclime  en  Syrie.  La 
ploparl  des  inveclives  donl  on  Ta  acca- 
ble,  il  ne  les  a  merilees  que  pour  avour 


90 


L'UNIVERS. 


maoqu^  aux  usages.  «  Aussi ,  dit-il ,  le 
«  tribut  qu*exige-de  moi  la  tyrannie  de 
«  Fusage ,  je  le  pa)^e  avec  la  contenance 
«  d'un  fermier  qui  n*apporte  k  un  maftre 
«  dur  qu'une  faible  partie  de  ce  qu'il  lui 
«  doit  (*).  »  Le  Misopogon  fut  I'adieu  de 
Julien  k  Aotioche.  II  annonca  sa  ferme 
intention  de  quitter .cette  vme.  Peu  de 
temps  apr^s  avoir  livr^  au  public  son 
ouvrage ,  il  partit  pour  Hierapolis.  Le 

Seuple  i*accompag[oa  assez  loin ,  faisant 
es  voeux  pour  lui ,  et  le  priant  d'apai- 
ser  sa  colore  et  de  revenir  encore  dons 
la  capitale  de  la  Syrie.  Julien  fut  inflexi- 
ble, ll  preposa  au  gouvernement  de  la 
province  Alexandre,  homme  dur  et  tur- 
bulent. En  faisant  choix  d'Alexandre, 
Julien  disait :  «  II  n*a  pas  m^rite  cette 
«  place;  mais  les  Antiocniens,  raceavare 
«  et  frondeuse,  ont  m^rit^  un  homme  de 
«  cette  espece.  »  Les  jours  de  Julien  cou- 
rurent  quelque  danger,  la  veille  de  son 
depart.  Un  complot  ^tait  form^  contre 
lui ;  des  soldats  avaient  conqu  le  projet 
d'assassiner  Tempereur  :  les  coupables, 
sVtant  enivr6s,  decouvrirent  eux-m^mes 
leursdesseins.  Julien  leur  accordn  le  par- 
don, montrant  plus  de  douceur  a  regard 
dfs  assassins  qu'envers  la  ville  d'Antio- 
che.  Les  s6nateurs,  pour  lui  donnerun 
teraoignage  de  respect,  Faccompagne- 
rent  durant  le  premier  jour  de  marche 
( 5  mars  363 ).  L'eropereur,  arrive  dans 
la  soiree  h  Litarbes ,  bourgade  peu  eloi- 
gn^e  de  Chalcis,  renvoya  les  s6nateurs  k 
Antioche ,  leur  r^petant  que  sa  d6cisioh 
etaitimmuable,  etque  leurs concitoyens 
ne  le  reverraient  plus.  Le  6  mars,  il  arriva 
h.  Beroe;  il  gagna  ensuite  Batna  et  Hie- 
rapolis, lieu  de  reunion  design^  aux  dif- 
f^rentes  l^ions.  L'entreede  Julien  dans 
Hierapolis  fut  marquee  par  un  malheur. 
Cinquante  soldats,  places  sous  un  por- 
tique,  furent  ecras^s  sous  la  chute  de  cet 
edifice.  Julien  passa  la  revue  de  son  ar- 
mee,  traversa  TEuphrate,  et  courut  en  si- 
lence surprendre  1  ennemi,quine  sedou- 
tait  pas  du  mouvement  des  Romains  (**). 
Gibbon  a  raconte,  a  sa  maniere, 
quelques^uns  des  incidents  du  voyage  de 
Julien  en  Syrie.  Nous  les  reproduisons 
ici  :  «  Julien,  dit-il,  doming  par  son 

(*)  CBuvret  d€  Julien ,  trad,  par  Toarlet, 
t.  II,  p.  372.  ,  F~ 

(**)  Amm.  Marc,  XXni ,  2;  Jul. ,  Bp.  27.  — 
Foyex  auMl  Evagr.,  Yl ,  il.  — Thtod.,  Ill ,  17. 


ardeur  guerriere ,  se  mit  en  cami 
d^  la  fin  de  Thiver.  Apres  une  mai  ^ 
laborieuse  de  deux  jours,  il  renvoya,  aiei 
des  reproches  et  des  marques  de  meprif| 
les  senateurs  d* Antioche,  qui  racco» 
pagn^rent  au  dela  des  homes  de  leur  tflf>' 
ritoire.  II  sejourna,  letroisieme ,  a  Ben! 
ou  Alep ,  ou  il  eut  le  deplaisir  de  tn^ 
ver  un  s^nat  com|)ose  presque  en  eolkl 
de  Chretiens ,  qui  ne  repondirent  9» 
par  un  froid  respect  k  T^loquent  disconi 
de  Tapdtre  du  paganisme.  Le  fill  dr 
Tun  des  plus  illustres  citoyens  de  eeMj 
yilie  embrassa ,  ^ar  interSt  ou  par  pcfr 
suasion,  la  religion  de  remperear,et| 
fut  desh6rite.  Julien  invita  le  p^  eCk' 
fils  a  la  table  imperiale;  et,  se  pla(i4 
au  milieu  d*eux.  il  reoommanda,  sai 
succes,  cette  toUrance  qu'il  pratiquil 
lui-m^me;  il  souffrit,  avec  un  dot 
simuie ,  le  zele  indiscret  du  vieox  ^ 
tien ,  qui  paraissait  oublier  les  seot^ 
ments  de  la  nature  et  les  devoirs  d'oi 
sujet;  et,  se  tournant  ^  la  fin  Tend 
jeune  homme  afllige,  «  Puisque  voal 
«  avez  perdu  un  pere  par  attachenMot 
a  pour  moK  lui  dit-il ,  c*est  amoidt 
«  vous  en  tenir  lieu.  » II  fut  recu  d'M< 
maniere  plus  conforme  k  ses  (fesirs,a 
Batna ,  petite  ville  agr^ablement  situ^ 
dansun  bocage  de  cypr^,^environTio||[ 
milles  d'Hierapolis.  Les  habitants ,  qs 
semblaient  attaches  au  culte  d'ApolJoB 
et  de  Jupiter,  leurs  divinites  tutfiaireit 
avaient  prepare  toute  la  pompe  d'lit 
sacrifice ;  mais  le  bruit  de  leurs  applaiH 
dissements  blessa  sa  piete  modeste;  i 
crut  voir  que  I'encens  qu'on  brdlaiiw 
les  autels  etait  Tencens  de  la  flalt«« 
plut6t  que  celui  de  la  devotion.  L*and«i 
et  magnifique  temple  qui  avait  rendu  II 
ville  d  Hierapolis  celebre  si  longlemg^ 
ne  subsistait  plus ;  et  les  riches  (jropnt* 
tes  qui  nourrissaient  plus  de  trois  cents 
pr^tres,  avaient  peut-^tre  h^te  sa  chiitt. 
Au  reste,  Julien  eut  la  satisfacllj 
d'emhrasser  un  philosophe  et  un  an. 
qui  avait  eu  la  fermete  de  r&isler  aoi. 
soUicitations  multiplices  deConstanJ 
et  de  Gallus,  toutes  les  fois  qu'«^'^ 
rent  chez  lui ,  dans  leur  passage  a  IW- 
rapolis.  II  paraft  qu'au  milieu  des  p* 

Saratifs  militalres  et  des  epanchementt 
'un  commerce  familier,  Julien  monlrt 
toujours  le  mfimc  zele  pour  sa  rehgioD. 
11  avait  entrepris  une  guerre  important 


STRIE  ANQENNE. 


91 


Bl  diffidie ;  inquiet  sur  son  issue ,  il  ^tait 
lbs  attentif  a  observer  et  a  noter  les 
Doiodres  pr^ges  d'ou  I'on  pouvait  ti- 
«r  ^que  coanaissaace  de  Taveoir, 
I'apres  tes  r^les  de  la  divination.  II 
Dstruisit  Libaoius  des  details  de  son 
oyage  jusqu'a  Ui^rapolis  par  une  lettre 
|iu  aoDOiice  la  facilite  et  ia  griice  de  son 
Aprit,  et  sa  teodre  amiti^  pour  ie  so- 
»biste  (fAotiocbe.  Les  troupes  romai- 
les  SB  reuflireot  a  Hierapolis,  situee 
vesque  sur  les  bords  de  Thuphrate ,  et 
ttssereDtaiissft6t  ce  fleuve  sur  un  pont 
Ie  bateaax  qui  les  attendait.  Si  Julien 
mit  ea  tes  inclinations  de  son  pr^d^- 
iesseur,  ii  aurait  perdu  la  belle  saison 
la&s  Ie  cirque  de  Samosate ,  ou  dans  les 
IgHsesd'^esse.  Ayant  choisi,  non  pas 
ilODstance,  mais  Alexandre  pour  son 
nodele ,  il  se  reodit  sans  dclai  a  Carrhes, 
riUe  tres-aacienne  de  la  Mesopotaniie, 
I  <)uatfe-viDgu  milles  d'Hi^rapoiis. »  On 
salt  quelle  fut  Tissue  de  oette  campagne. 
Apres  s*6tr8  eogag^  dans  Ie  pays  en- 
nemi ,  JuJieD  reQut  une  blessure  mor- 
telle,  eo  eombatunt  avec  bravoure  h 
Is  t^  de  ses  soldats. 

CHAPITRE  VIII. 

U  STAR  DEPUIS  LA  MOBT  BB  JULIEN 
3USQU'AL*mVAS10N  DBS  ABA.BES. 

SEJOiri    DBS    BMPBBEUBS     JOVIEIf 
*I  TALEJfS  BN   6TBIB.    —   LcS   Antio- 

Aiens  lrou?aient  toujours  des  occasions 
« i«ux  et  de  fttes.  La  population  chr^ 
tienne  lit  ^ater  des  transports  de  joie 
» la  nouvelle  de  la  mort  de  Tempereur. 
Uo  seal  homme  peut-^tre,  Libanius, 
pleura  siooerement  la  fin  malheureuse 
oe  Juiien.  Ls  sophiste  perdait  un  ami 
Plut6t  qu*un  protecteur.  Lorsque  Li- 
«aias  arait  a  prononcer  un  discours 
ft»  public,  Pcmpereur  passait  des  nuits 
tttieres  dans  Pmsomnie,  tant  il  s'int^- 
**»it  aux  succes  de  I'orateur  k  qui 
IJj^ois  il  dounait  Ie  nom  de  fr^re.  Li- 
mm  n*oublia  pas,  apres  sa  raort, 
^oi  qui,  duraot  sa  vie,  lui  avait  donn^ 
>*>Bt  de  preuves  d'affection ;  il  honora 
•OQJoars  courageusement,  au  temps 
^  des  reactions ,  la  m^moire  de 
i^^Djpereur.  Le  peuple  d'Antioche ,  qui 
^  prodigu6  la  raillerie  contre  Ju- 
IJ^rifepargna  pas  dayantage  son  suc- 
*^~^.  Jovien  fit  son  entr^  dans  la 


capitaie  de  la  Syrie,  a  la  fin  de  sep- 
tembre  ou  au  commencement  d*octobre 
(363).  La  populace  turbulente  re(^t  ac- 
cueilli  par  une  r^volte,  si  le  prefet  Sal- 
luste  n'avait  employ^  toute  son  autorit^ 
pour  maintenir  Tordre  dans  la  ville. 

«  Les  affaires  publiques  de  Fempire, 
dit  Gibbon,  se  trouvecent ,  a  la  mort 
de  Julien ,  dans  une  situation  prec^ire  et 
dangereuse.  Jovien  sauva  Tarmee  ro- 
maiue  au  moyen  d*un  traits  honteux , 
mais  peut-^tre  n^cessaire,  et  il  consa* 
era  les  premiers  instants  de  la  paix  k 
rendre  la  tranquillity  a  r£tat  et  a  re- 
alise. La  conduite  de  son  pred^esseur, 
loin  d'adoucir  Tanimosit^  des  factions, 
avait  enflamme  la  violence  des  querelles 
religieuses  par  des  alternatives  de  crainte 
et  d'espoir.  L'une  se  fondait  sur  une 
longue  possession ,  et  Tautre  sur  la  fa- 
veur  du  souverain.  Les  Chretiens  ou- 
bliaient  tout  a  fait  le  veritable  esprit 
de  r^vangile,  et  I'esprit  de  Tl^glise  6tait 
pass^  chez  les  paiens.  La  fureur  aveu- 
gle  du  zele  et  de  la  vengeance  avait 
aneanti  chez  les  particuliers  tons  les 
sentiments  de  la  nature.  On  corrompait, 
on  violait  les  lois;  le  sang  coulait  dans 
les  provinces  d'Orient,  et  Tempire  n'a- 
vait  pas  de  plus  redoutables  ennemis 
aue  ses  propres  citOyens.  Jovien ,  elev^ 
dans  les  prmcipes  et  dans  Texercice  de 
la  foi  cbretienne,  fitd^ployer  T^tendard 
de  la  croix,  a  la  t^te  des  i^ions,  dans 
sa  marche  de  Nisibe  k  Antiocbe ;  et  le 
labarum  de  Constantin  annonca  aux 
peuples  les  sentiments  religieux  du  nou- 
vel  empereur.  Des  qu'il  eut  pris  pos- 
session  du  trdne ,  Jovien  fit  passer  aux 
gouverneurs  de  toutes  les  provinces 
une  lettre  circulaire,  dans  laquelle  il 
confessait  les  v^rit^s  de  Tfivangile ,  et 
qui  assurait  Tetablissement  le^al  de  la 
religion  chr^tienne.  Les  edits  msidieux 
de  Julien  furent  abolis;  les  immunity 
eccl^iastiques  furent  r^tablies  et  ^ten* 
dues ,  et  Jovien  d^plora  le  malheur  des 
circonstances ,  qui  obligeaient  a  retran- 
cher  une  partie  des  aumdoes  publiques. 
Les  cbr6tiens  chantaient  unanimement 
les  louanges  du  pieux  successeur  de 
Julien ;  mais  ils  ignoraient  encore  quel 
symbole  ou  quel  concile  le  souverain 
ehoisirait  pour  r^le  fondamentale  de 
la  foi  orthodoxe;  et  les  querelles  re- 
ligieuses, suspendues  par  la  pers^cu* 


n 


L'UNIVERS. 


tion ,  se  rallumerent  avec  une  nouYelle 
fureur.  Les  6v^ues  des  partis  opposes 
se  hAt^rent  d*arriver  a  la  cour  d'£aesse 
ou  d'Antioche ,  convaincus  par  Inexpe- 
rience qu'on  soldat  ignorant  se  d^ter- 
minait  par  les  premieres  impressions , 
et  que'leur  sort  d^pendait  de  leur  acti- 
vite.  Les  cbemins  des  provinces  orien- 
tates etaient  couvertsde  pr^lats  liomoou- 
siens,  ariens,  semi-ariens  et  eunomiens, 
qui  t^chaient  r^ciproquement  de  se  de> 
vancer.  lis  remplissaient  les  apparte- 
mejits  du  palais  de  leurs  clameurs  ,  et 
fatiguaient  Tenipereur  ^tonn^  d*un  me- 
lange d'arguments  m^taphysiqueset  d'in- 
vectives  personnelies.  Jovien  leur  re- 
commandait  I'union  et  la  cbarite.  Sa 
moderation  passait  chez  les  fougueux 
pr61ats  pour  une  preuve  de  son  indiffe- 
rence; mais  ils  d^couvrirent  bient6tson 
attachement  h  la  foi  de  Nic^e,  par  le 
profond  respect  qu'il  montra  pour  les 
vertus  du  grand  Atbanase ,  Ag^de  soixan- 
te-dix  ans.  Get  intr6pide  oefenseur  de 
la  foi  etait  sort!  de  sa  retraite  d^  qu'il 
avait  appris  la  mort  de  son  persecuteur. 
II  etait  remonte  sur  son  si^ge  archil- 
pisco^al  aux  acclamations  du  peu[>le, 
et  avait  accept^  ou  prevenu  I'tnvitation 
de  Jovien.  La  figure  venerable  d'Atha- 
nase,  son  courage  tranquille  et  son  61o- 

Suence  persuasive ,  soutinrent  la  r^puta- 
on  qu'il  avait  successivement  acquise  h 
lacourdequatresouverains.  Apres  s'^tre 
assure  de  la  oonfiance  et  de  la  foi  de  Tern- 
pereur  cbretien ,  il  retourna  glorieuse- 
ment  dans  son  diocese  d'Alexandrie,  qu*il 
gouverna,  pendant  dix  ans,  avec  sa  sa- 
gesse  et  sa  termete  ordinaires.  Avant  de 
quitter  Antioche ,  il  assura  Jovien  qu*un 
r^gne  long  et  tranquille  serait  la  recom- 
pense de  son  orthodoxie.  Le  preiat  etait 
persuade,  sans  doute ,  que,  dans  le  cas 
ou  des  evenements  contraires  lui  6te- 
raient  le  merite  de  la  prediction ,  il  lui 
resterait  toujours  celui  d'un  voeu  dicte 
par  la  reconnaissance.  Jovien  eut  le  boa- 
heur  ou  la  prudence  d*embrasser  les 
opinions  religieuses  le  plus  accreditees 
par  le  nombre  et  le  zele  d*une  faction 
puissante.  Lechristianismeobtint,  sous 
son  r^gne,  une  victoire  longue  et  dura- 
ble, et  le  paganisme  disparut,  des  qu'il 
ne  fut  plus  encourage  par  la  faveur  de 
Julien.  On  ferma  ou  on  deserta  les  tem* 
pies  de  la  plupart  des  villes;  et  les  phi- 


losophes,  qui  avaient  abuse  d'unefaTnr 
passagere ,  crurent  ou'il  6tait  prudol 
de  raser  leur  longue  narbe  et  de  de^ 
ser  leur  profession.  Les  diretiens semi* 
rent  a  m^me  de  pardonner  oa  de  vei 
les  insultes  qu'ils  avaient  souffertesi 
le  regne  precedent.  Mais  Jovien  disripi 
les  terreurs  des  paiens  par  un  ^it  a^tf 
qui,  en  proscrivant  I'art  sacrilege  deli 
magie,  accorda  a  tous  ses  sujets  I'eici^ 
cice  libre  du  culte  et  des  cereiDonies  i 
I'ancienne  religion.  L'orateor,  enniji 
par  le  senat  de  Rome  pour  rendreboi^ 
mageau  nouvel  em  pereur,  a  oooservil 
souvenir  de  cette  loi  de  tolerance.  11 1^ 
presente  la  ciemence  comme  on  d« 
plus  beaux  attributs  de  la  naturedlTitt, 
et  I'erreur  comme  inseparable  de  Fht* 
manite.  II  reclame  rindependaooe  di 
sentiments ,  la  liberte  de  la  conscieoKt 
et  plaide  eioquemment  en  faveur  (Tdi 
tolerance  philosophiaue,  doot  la  snpcft 
tition  elle-meme  ne  dedaigne  point  din- 
voquer  le  secours  dans  des  moipali 
d'impuissance.  II  observe,  aveciaisoo, 
que,  dans  leur  changement  de fbrtaae, 
les  deux  religions  ont  ete  ^atawot 
deshonorees  par  d'indignes  prosd]fteSi 
par  de  vils  aoulateurs  du  souveraiop 
passaient  avec  indifference  et  sansr» 
gir  du  temple  de  Jupiter  a  la  ooinfll* 
nion  des  Chretiens.  Dans  le  cours  • 
sept  mois.  les  troupes  romainesjj 
arrivaient  a  Antioche  avaient  ^proov^ 
durant  une  route  de  quinze  cents  oiil»i 
toutes  les  infortunes  de  la  ^erre,  tjH* 
tes  les  rigueurs  de  la  famine  el  (T*  j 
climat  brdlant.  Malgre  leurs  ssn«»^ 
leurs  fatigues,  et  Tapprocbe  de ITjJ^ 
Timpatient  Jovien  n^accorda  aux  »* 
mes  et  aux  chevaux  que  six  seDMjJ; 
pour  se  reposer.  L'empereur  sooffl* 
avec  peine  les  railleries  mordantcs* 
indiscreies  des  habitants  d'Antioci*. » 
etait  tres-pressed'arriver  a  Conslaoow' 
pie ,  de  prendre  possession  du  pa»»j 
et  d'eviter  que  quei^ue  connpetiteur" 
s'empardt  du  trone  imperial.  »       . 

D'ailleurs  les  affaires  generales  • 
I'empire  reclamaient  sa  presence  enup 
cident;  il  partit  au  mois  de  decemore, 
mais  il  n^arriva  pas  au  termc  de  sw 
voyage.  II  mourut  en  Galatie ,  l«  ^*  ^ 
vrier364.  ,    i  j-a 

Valentinien,  successeur  de  iovw 
chercha  a  soulager  les  provinces,  i^ 


SYRIE  ANOENNE. 


oopagDessecban^eaieotend^serts;  des 
pnt^lescessaient  de  produire  faute 
ieoraspoar  les  cultiver.  Les  presidents 
des  provinces ,  loin  de  prevenir  ces  nial-' 
fmrs,  les  aggravaieat  en  faisant  peser 
sur  les  rares  habitants  des  campagnes 
lepoidsdestravaux  publics  ou  parlicu- 
fien,eoDfies  autrefois  aux  armees(368). 
ValeDtioien  porta  uneloi  contrece  genre 
d'exactioDS.!!  fut  defendu,  sous  les  peines 
les  plus  fortes,  aux  officiers  imperiaux 
de  prendre  ia  joumee  du  iaboureur; 
ees  m^mes  peines  furent  etendues  aux 
travailleursqai  offriraient  leurs  bras  (*). 
De  pareils  reslements  ne  pouvaient  re- 
tabiir  raboDdance.  LaSyrie  offrit,  i*an- 
i6e  saivaate,  un  triste  exemple  de  de- 
solation n  (369).  Les  habitants  de  Ma- 
latocupros,  bour£  voisin  d'Apamee 
(itoratocupreAi],  (Siercherent ,  dans  un 
^iidadeuxl)rigaDdage,  des  moyens  de 
nbsUter.  Leur  nombre ,  chaque  jour 
crotssanVeties  ruses  qu*ils  employaient, 
les  reodireot  bientdt  formidables.  De- 
guises  eomardiaods,  en  officiers  d'un 
^g^eve,  ils  pillaient  les  maisons 
«artees,  p^n^raient  dans  les  maisons 
decampa^  et  dans  les  cit^.  lis  mar- 
dwienl  separ^meot  au  but  de  leurs  en- 
trepristt,  et  se  trouvaient  reunis  au 
moment  et  au  lieu  indiqu^s.  Une  bande 
de  ces  brigands  entre  un  soir  .dans 
Apainee;  elle  etait  preced6e  d'un  he- 
2«t;  a  la  tfte  de  la  troupe  marchaient 
deiHhomnje8;ran  portait  le  costume 
<ioffi(aer  impiSrial,  Tautre  jouait  •  ic 
5>«  de  receveur  du  Iresor.  Ils  vont 
aroita  la  maison  d'un  riche  habitant  de 
la  vilie.  I^  prescntent  un  ordre  de  Tem- 
P^reur  quicondamne  a  mort  ce  citoyen, 
«  Teieeutent  aussit^t.  Plusieurs  de  ses 
wrvtteure,  jlac&d'effroi,  sont  perc^s  de 
^ps  aepee  aupres  du  cadavre  de  leur 
J^re.  Apres  avoir  pill6  la  maison,  la 
MMe  se  retire,  au  point  du  jour,  em- 
g)rtant  avec  e)le  son  bulin.  Les  habi- 
tants de  Maratocupros  renouvelaient 
2^  cesse  leurs  attaques  sur  les  diffe- 
«nls  points  de  la  Syrie.  L'autorite 
Jjnseaenfin  adetruire  ces  malfaiteurs. 
^esde  toutes  parts,  Us  p^rirent  tons 
JJB exception,  avecleursenfantsen  bas 
"Sjisous  les  mines  de  leurs  maisons.  1 

^'epuis  longtemps  Antioche  n'avait 

!-%  ^^ff*'- "•"'«•»»»  el  «•"• 
'  .  Amm.  Marc.,  XXVIll,  -l 


pas  vu  Tempereur  dans  ses  murs ,  lors- 
que  Valens,  fr^re  de  Valentinien,  et  as- 
socie  au  souverain  pouvoir,  passa,  en 
871,  dans  la  capitate  de  la  Syrie  pour 
aller  combattre  les  Perses.  Le  vieux  Li- 
banius  avait  prepare  uu  panegyrique; 
on  ne  permit  pas  a  cet  ancien  ami  de 
Julien  de  le  lire  jusqu'au  bout  (*). 

Valens  passa  une  partie  des  hi  vers  sui- 
vants  a  Hierapolis ;  il  y  fiSta ,  en  373,  la 
dixieme  annee  de  son  regne ,  et  recut, 
h  cette  occasion ,  les  presents  des  pro- 
vinces. Un  complot  forme  contre  sa  vie 
troubla  son  esprit  d6}h  tres-faible :  dep'uis 
ce  moment,  I  empereur  livra  aux  bour- 
reaux  tous  les  innocents  que  poursui- 
vait  le  zele  inquiet  des  delateurs  (**).  Le 
hasard  avaitfaitdecouvrir  la  conjuration. 
Fortunatien,  comte  du  tresor,  attaquait 
en  justice  Anatolius  et  Spudasius,  tous 
deux  attaches  au  palais ;  il  les  accusait 
d'avoir  detourne  des  valeurs.  Un  intri- 

f;ant,  Procope,soutintau  pr^toire  (]ue 
es  deux  inculp6s  cherchaient  a  ^viter 
rembarras  d'une  justification  en  faisant 
assassiner  leur  accusateur;  il  d^signait 
comme  charges  de  ce  meurtre,  un  cer- 
tain Palladius  et  le  magicien  Helio- 
dore.  On  appliqua  ces  deux  hommes  a 
la  torture.  Dans  les  tourments ,  Pal- 
ladius s'ecria  quMI  avait  les  secrets  les 
plus  graves  a  r^v^ler,  et  il  decouvrit 
aux  ju^es  les  investigations  auxquel- 
les  trois  personnages  respectables,  le 
presidial  Fidustius,  Irenee  et  Perga- 
mius  s'etaient  livr^s  pour  connaltre  le 
nom  du  successeur  de  Valens.  Ils  s'6- 
taient  adjoint  Hilaire  et  Patricius, 
hommes  habiles  dans  Tart  de  la  divina- 
tion, et  tous  cinq  de  concert  avaient  fini 
par  se  persuader  que  le  futur  empereur, 
designe  par  le  Destin ,  ^tait  Theodore, 
d'une  famille  ancienne  des  Gaules,  et  se- 
cretaire pavticulier  de  Valens.  Ils  fireiit 
part  de  leur  decouverte  a  celui  qu'elle 
devait  int^resser  le  plus  vivement ;  Fi- 
dustius chargea  un  nomme  de  science 
et  de  reputation ,  qui,  peu  de  temps  au- 
paravant ,  avait ,  en  Tabsence  du  prefet, 
gouvern^  TAsie ,  Eucaerius,  de  porter  la 
nouvelle  a  Theodore.  Telles  6taient  les 


P 


/)  Ltbanii  Fila.  —  Themist.,  Or.  12. 

(•*)  Amm.,  XXIX,  I.  -  Uban..  Or.  28.-Grvg. 
Naz.,  Ep.  I37»  138.  —  Chrysost.,  y4d.  vtL  Juu, 
et  O'Oi.,  Z  contra  Anomao*.  —  Cedr.,  1 11,  p. 
313.  —  Phllosl.,  IX,  15  —  Zo8.,  Vf,  35.  —  Soc, 
IV,  1». 


u 


LUNIVERS. 


d^larations  dePaIladias,confirin^s  en- 
core par  les  6claircissements  et  les  nou- 
▼eaux  details  que  la  torture  avait  arrach^ 
h  Fidustius  alors  h  Antioche.  Theodore 
n^etait  pas  en  Syrle ;  on  alia  le  chercher 
a  Constantinople,  ou  des  affaires  parti- 
eulieres  I'avaient  appel^ ;  il  fut  ramen6 
en  Syrie.  Mais,  au  lieu  de  le  d^tenir  k  An- 
tioche ,  oh  ses  partisans  auraient  pu  fa- 
ciliter  son  Evasion ,  on  Fenferma  dans 
un  chateau  voisin  de  cette  ville.  Cepen- 
dant  les  prisons  se  remplissaient  d'ac- 
cus^s ;  on  y  jetait  tons  ceux  qui  poss^- 
daient  des  richesses.  Une  insatiable 
avarice  excitait  Valens  et  la  foule  des 
courtisans  qui  se  trouvaient  dans  son 
palais;  les  biens  des  condamnes,  d6- 
tourn^s  du  tresor  public,  devenaient  le 
partage  des  d^lateurs.  Qi  ne  se  donnait 
nfi^me  pas  la  peine  de  prater  des  crimes 
ima^inaires  h  ceux  dont  la  fortune  ir- 
ritait,  Tenvie.  Les  malheureux  propri^- 
taires  appliques  h  la  question,  taisaient 
eux-m^ines,  dans  les  tournients,  des 
aveux  qui  legalisaient  leurs  condamna- 
tions.  Un  des  accuses,  Palladius,  pour 
^chapper  aux  horreurs  du  ch^valet  et  de 
la  roue ,  nomma  un  grand  norabre  de 
complices  qui  habitaient  les  provinces 
de  I'empire  les  plus  ^loignees  de  la  Sy- 
rie. Un  autre  accus6,  Salia,  qui  avait 
rempli  la  charge  de  comte  du  tresor 
en  Thrace,  futfrapp^  de  mort  subite, 
lorsqu'on  le  fit  sortir  de  son  cachot 
pour  paraltredevant  les  iu^es;  Teffroi 
des  supplices  Tavait  tue.  Nous  ne  ra- 
conterons  pas,  comme  Pa  fait  Ani- 
mien-Marcellin  dans  un  recit  emphati- 
que,  ce  proces  monstrueux.  Nous  nous 
Dornerons  5  dire  quetous  les  condam- 
nes furent  Strangles.  Un  seul,  le  philo- 
sophe  Simonides,  dont  la  fiert^  avait 
irrite  les  juges,  fut  brfll6  vif.  Sur  le  btl- 
cher,  comrae  au  pretoire,  il  montra  la 
mfime  serenity.  Les  Antiochiens  ne  fu- 
rent pas  insensibles  h  tant  d'horreurs; 
lis  s'altendrirent  sur  le  sort  des  victi- 
mes,  comme  si  les  malheurs  qu'ils 
pleuraient  les  avaient  atteints  eux^m^- 
mes  (*). 

BEVOLTB   d' ANTIOCHE    SOUS   THEO- 

BOSE.  —  £n  382,  Philagrius,  comte 
d'Orient,  eut  recours  a  dMnexcysables 
cruaut^s  pour  emp6cher  une  revolte. 

[")  roy.  Amm.  Marc.,  XXIX,  I. 


Antioebe  souffrait  de  la  famine;  kpah 

pie  regardait  les  magistrats  comme  m- 

ponsables  de  ses  maux;  des  meoaees  Ai 

mort  retentissaient  deji  contre  les  s^ 

teurs  et  contre  le  comte  d*Oricnt.  Pls> 

lagrius ,  pour  arr^ter  une  s^ition  dan- 

cereuse,  r^solut  de  sacrifier  qneJaoei 

imprudents.  II  fitarr6ter  tons  les  boahi- 

gers  d' Antioche.  Ges  artisans,  cooddili 

sur  une  des  places  de  la  ville,  foral 

appliqu^  h  la  question,  en  presence dl 

pen  pie.  On  leur  demanda  les  noins  dei 

magistrats  aui  s'entendaieot  pour  tear 

h  un  taux  elev6  le  prix  du  pain.  Ll 

foule  se  pressait  autour  des  6rhafaod^ 

attentive  h  saisir  toutes  les  paroles  dH 

patients,  et  prfite  k  massacrer  ceusqi 

essayeraient  de  lui  ravir  ses  victimcs.  01 

homrae  cependant,  si  nous  en  croyMl 

son  propre  recit ,  eut  ce  courage.  I* 

banius  harangua  la   multitude  et  i^ 

dressa  a  la  fois  a  PhilagriusetaQpei' 

pie,  dont  i I  sut  adoucir  la  colere.Il 

comte  d'Orient ,  que  la  peur  avait  reodi 

injustement    severe,  relScha  les/siW' 

cents  6ts  (jue  la  populace  cessa  d'exigtt 

leur  supplice.  Si  une  circonstince  pert 

excuser  ces  concessions  de  I'autoiw 

aux  sanguinaires  caprices  de  lanw™' 

tude,  c'est   la  prosperite  d'AnliooJ 

qui    ^tait   considerable  au    miliw « 

d^p^rissement  general.  La  capitate* 

la  Syrie  a  vait ,  au  temps  de  Th6odose^ 

population   fixe  de  deux  cent  wa 

ames.  On  ne  comptait  pas,  dans* 

nombre,  les  flots  perp^tuels  d'etrangefl 

qui  venaient  sans  cesse  apporter  uneafr 

tation  continuelle  daris  la  viile.  DcJ| 

melange  de  nations  el  dMd^es  tonsw» 

s'^tait  form^e  une  population  indine- 

rente  aux  grands  interdts,  raaisirrilaWi 

irr^fl^chie,  pr^te  a  bouleverser  femp 

pour  un  change meot  dans  les  imptf^ 

En  887,Theodoseavaitdissip^d«D» 

sors  lor)guement  amasses  pour  celebtw 

des  f6tes  anniversaires  en  son  honoeur. 

II  r^solutde  remplir  le  deficit  de  la  cai^ 

imp^riale  en  augmentant  les  contriWJ 

lions.  Antioche  connut  cette  decision* 

Tern  peren  r  a  va  nt  d'en  recevoir  la  coraiw* 

nication  officielle  (26  fevrier887).  W"; 

que  les  ordres  imp^riaux  arrivirent,oM 

sourderumeuragitaitd^j^lavilledepw 

plusieurs  jours.  Le  comte  ^'^"  ."l 
sembla,  immediateraent  aprcs  larnw 
de  renvoyedeTh6odose,les 


SYRIE  ANCIENNE. 


95 


khouL  pour  veiller  de  concert  h  la  per- 
eeptiondanouyeiiinpdt  Les  s^nateurs, 
ioos  rioflaence  du  m^contentement  pu- 
i)iic,eclaterent  en  murmures  contre  les  ?o- 
lontesdeTempereur.  Maisbient6t,  eton- 
nesdelear  propre  audace,  incapables 
d'une  resistance  raisonnee,  ils  quittent 
en  desordre  le  lieu  de  leur  reunion  et  par- 
eourent  la  Yille,  ameutant  la  populace 
par  lenr  silence  mSineet  par  refiroi  peint 
8ur  kurs  visages.  Le  peuple  se  divise  en 
troupes  mena^ntes ;  la  plus  nombreuse 
se  rend  a  la  demeure  de  Tev^ue;  elle  ne 
fj  trouve  pas ;  elle  se  dirige  alors  sur 
la  basilique  que  les  s^nateurs  venaient 
de  quitter;  le  comle  d'Orient  n'en  etait 

Ss  encore  sorti.  Mais  les  portes  de  cet 
ifice  resistent  au  choc  des  assaillants, 
ooi  appellent  en  vain  le  representant 
de  Tempereur.  Grossie  d*un  grand  nom- 
bre  d'esilaveset  d*6trangers,  la  foule  se 
jelte  avec  rage  sur  les  images  de  Fempe- 
reur.  La  statue equestre  de  Theodose,  cel- 
les  d'Arcadius  et  d'Honorius  sont  ren- 
Ters^esetbris6Bs;  enfin,  les  plus  sedi- 
tieux  s'atlroupent  autour  de  la  malson 
o  uosenateurqui  n'avait  pasvoulu  autori- 
jer  lesdesordres  par  sa  presence,  et  Ten- 
farraent  dansun  vaste  incendie.  En  vain 
les  dtoyens  riches  el  consid^r^s  invo- 
quent  lesecours  du  pr^fet;  le  comle  d'O- 
rient restc  impassible,  et  refuse  desortir 
de  la  basilique.  Enfin ,  le  peuple ,  effray^ 
*  son  audace,  tomba  dansTabattement. 
Lorsqu'il  vit  dans  la  boue  les  statues  de 
renipereur,ilcompritque  lacolere  du 
Bjailre  offensi  serait  terrible.  Dans  son 
effroi,iletaitpr^t  a  frapper  les  conti- 
nuateorsdes  d^ordres,  ceux-1^  m€me 
90 'i  avait,  quelques  heures  aupara- 
^ti  soulenus  et  excite.  Grdce  a  ce 
cnangement  soudain  des  esprits,  le 
joujerneur  d'Antioche  traversa  tran- 
pillementla  ville,  suivi  du  comte  d'O- 
nent :  il  se  rendit ,  avec  les  soldats ,  h  la 
jMisondusenateur,  dont  les  revolt^s  ne 
letaieot  pas  encore  6loign6s.  A  Tap- 
p9cne  des  troupes ,  les  plus  acharn^ 
*^nt  la  fuite;  un  |;rand  nombre  de 
<iniavaient  k6  pns  sans  resistance, 
It  jetes  dans  les  prisons.  II  etait 
™*J»  midi;  la  r^volte,  commenc^e  le 
™«a  paissait  6touffee.  Les  rues, 
™}*Jneure  pleines  de  bruit  et  de  tu- 
y'*fi  etaient  devenues  silencieusef. 
*0M  r^agnaient  leurs  demeures,  et 


essajaient  en  vain  de  comprendre  les 
^v6nements  de  la  matin6e.  On  avait 
besoin  de  trouver  un  coupable,  un  insti- 
gateur;  quelques  personnes,  rushes  on 
credules,  inventerent  un  fantdme  ima- 

ginaire  qu'elles  rendirent  responsable 
e  r^garement  public.  Les  paiens 
avaieut  vu  Fantique  Nemesis  planer  sur 
Antioche  la  nuit  qui  prec^da  la  re  volte , 
et  agiter  sur  la  viile  son  fouet  mena- 
cant.  Les  Chretiens  avaient  reconnu 
Satan  Iui-m6me,  qui,  sons  la  forme  d*un 
vieillard,  s'^tait  jete  sur  la  place  publi- 
que  pour  ameuter  les  citoyens.  Le  de- 
mon avait  ensuite  emi3runte  les  traits 
d'un  jeune  homme ;  enfin  la  sedition  s'6- 
tait  calmee,  lorsqu'il  s'etait  ^vanoui  sous 
la  forme  d*un  enfant.  Pendant  que  ces 
pensees  ocrupaient  fes  habitants ,  retires 
au  fond  de  leurs  demeures,  on  faisait  de 
continuelies  arrestations.  Le  soirvint, 
avant  que  tons  ceux  qui  Etaient  soup^on- 
n6s  ou  compromis  fussent  tombes  entre 
les  mains  du  magistral  imperial.  La  nuit 
se  p^assa  dans  le  trouble,  et  les  riches  se 
h^terenl  d'enfouir  leur  or  et  leur  ar- 
gent. Les  habitants  considerables  se 
pr6paraient  a  quitter  la  ville  au  point 
du  jour.  Des  families  entieres  remplis- 
saient  les  rues  le  lendemain  matin.  11 
dependait  du  comte  d'Orient  d'emp^- 
cher  leur  depart.  II  n*osa  arr^ter  que  les 
membres  du  s^nat;  les  portes  de  la  ville 
furent  ouvertes  aux  aulres  fugitifs.  Mais 
les  troupes  de  brigands  qui  infestaient 
le  voisinage  d' Antioche,  se  chargerent 
de  venger  la  majeste  imp^riale  outra- 
gde;  ils  saisissaient  les  malheureux  exi- 
les, les  depouillaient,  et  les  jetaient 
dans  FOronte.  Le  fleuve  rapporta  dans 
Antioche  les  cadavres  mutites.  Dans  la 
ville,  les  magistrats,  qui  s'etaient  caches 
pendant  la  revolte,  esperaient  faire  ou- 
olier  leur  l&chete,  en  se  distinguant  par  la 
plus  cruelle  rigueur.  Des  le  lendemain 
lis  siegerent  au  pr^toire. 

Les  abords  de  cet  edifice  offraient  ce 
jour-l^  un  spectacle  tout  a  la  fois  Strange 
-  et  terrible.  Les  ran^s  ^pais  des  soldats 

i)lac6s  autour  du  preloire  en  defendaient 
'entree  5  la  foule.  Tons  les  citoyens  de- 
meures libres  dans  la  ville  se  pressaient- 
les  uns  contre  les  autres ;  chacun  crai- 
gnait  de  s*entendre  accuser  par  un 
complice ,  et  prtoit  Foreille  dans  une 
douloureuse  incertitude.  Les  femmes , 


96 


UUNIVERS. 


paretites  des  aecuses,  arrivaient  en 
troupes  nombreiues;  quelaues-unes,  agi- 
tees  d'un  d^spoir  insense ,  marchaient 
seules,  cachees  sous  leurs  voiles;  elles 
se  frayaient  un  passage  a  travers  la  mul- 
titude, et  se  jetaient  aux  pieds  des  cen- 
turions ;  des  portes  du  pr6toire ,  elles 
entendaient  le  bruit  des  instruments 
de  torture  et  le  sifflement  des  lanieres , 
garnies  de  plomb ,  qui  d^hiraient  le 
corps  de  leurs  maris  ou  de  leurs  Gls. 
Les  oris  des  patients  retentissaient  dans 
la  foule,  qui  leur  repondait  par  des 
gemissements  lugubres.  Cbacun  croyait 
reconnattre  dans  ces  cris  d*angoisses 
les  accents  d*un  pere  ou  d'un  ami. 
Lorsque  la  nuit  fut  venue ,  on  ex^cuta 
a  la  lueur  des  torches  les  condamnes 
que  la  torture  avait  laisses  mourants. 
Les  femmes  qui  ne  s'etaient  pas  eloi- 
enees  du  pr^toire ,  se  tratn^rent  au  lieu 
du  supplice  ;  brisees  par  d*aussi  fortes 
Amotions ,  la  plupart  ae  ces  infortun^es 
perdirent  connaissance.  On  voulut  les 
transporter  dans  leurs  demeures ;  mais 
on  trouva  le  sceau  de Tlttat  sur  les  por- 
tes ;  la  condamuation  capitate  entralnait 
la  confiscation  des  biens.  En  vain  im- 
ploraient-elles  Fhospitalit^  des  person- 
nes  les  plus  consider^es;  on  n*osait  re- 
cevoir  les  veuves  ou  les  filles  des  con- 
damnes. Pendant  six  jours  des  scenes 
semblables,  recommences  au  pr^toire, 
s'aclievaient  sur  Techafaud  ,  sur  le  bll- 
cher  ou  dans  Tamphithe^tre.  On  de- 
ploya  centre  les  enfants  les  mimes 
rigueurs.  Le  z^le  barbare  des  magis- 
trats  eut  enfin  un  terme  :  lis  cesserent 
leurs  enqultes  le  sixi^me  jour.  Mais  ia 
population  craignait  que  1  empereur  ne 
s'en  tint  pas  aux  ex^utions  faites  en 
son  nom.  On  attendit  pendant  un  mois 
la  sentence  de  Theodose. 

Toute  la  ville,  durant  cet  intervalle, 
demeura  plong6e  dans  le  deuil.  La  voix 
grave  et  harmonieuse  de  saint  Jean 
Chrysostome  rompait  seulele  silence  g6- 
n^ral.  Chaque  jour  le  saint  orateur  don- 
nait  de  nouvelles  consolations  aux  An- 
tiochiens ;  n*osant  les  flatter  du  pardon 
de  Thoodose,  il  leur  parlait  de  la  miseri- 
corde  de  Dieu.  On  apprit  enfin  que  Tem- 
per eur  envoy  ait  en  Syrie  les  ministresde 
sa  vengeance.  II  avait  r^olu  d'extermi- 
uer  les  habitants  et  de  d^truire  ia  ville. 
Cependant,  il  s'adoucit  et  donna  des 


ordres  moins  rigoureux.  II  en? oya  €6- 
saire ,  mattre  des  offices ,  et  Helld>ique» 
homme  de  guerre;  ces  deux  officiers  ar- 
riverent  a-Antioche,  le  29  mars  au  soir. 
La  population  les  recut  avec  de  grandi 
honneurs ;  mais  des'  sanglots  se  ml* 
laient  aux  acclamations  de  la  foufe. 
Hellebique  et  Cesaire  apprirent  qu  uim. 
justice  expMitive  et  impitoyable  avait 
fait  disparaftre  tous  les  coupables.  I 
£&llait  cependant  entrouver;  les  ordi«if!| 
de  Theodose  6taient  clairs  et  prec% 
L'empereur ,  dont  la  plupart  des  bkk\ 
toriens  se  sont  plu  a  louer  la  cl^meiwe^- 
n'avait  pas  pr^vu  le  cas  ou  les  magil* 
trats  d'Orient  auraient  pr^venu  m 
volont^s. 

Le  30  mars  ,  Hellebique  et  Cesaire  tf^ 
gnifierent  au  peuple  Teait  imperial,  qri 
enlevait  a  la  ville  d*Antioche  tous  sal 
droits  et  privileges ;  ensuite  ils  instnmH 
rent  un  proces  nouveau,  dirige  cootit 
tous  les  senateurs  et  les  premiers  d- 
toyens  de  la  ville.  L'issue  de  la  pro- 
cedure fut  reniEse  au  lendemain ;  oo  ft 
passer  la  nuit  aux  accuses  dans  oa  at- 
clos;  ils  etaient  parques  comme  des 
animaux,  sans  aucun  abri  contre  b 
pluie  et  le  froid.  Cependant ,  les  miph 
trats  impitoyables  qui  ne  r^^laieotpv 
devant  de  pareilles  mesures,  avaient,  te 
m6me  jour ,  donn6  des  larmes  au  vm 
heur  des  accuses.  Le  lendemain  on  d^ 
vait  prononcer  les  sentences  et  exeea- 
ter  les  condamnes.  Hellebique  et  G6* 
saire  sortirent  de  leur  palais  avant  k 
jour,  accompagnes  d'un  nombreox  eoi^ 
tege  et  d'une  foule  d'esclaves  qd 
portaient  des  flambeaux;  ils  trave^ 
s^rent  la  ville  pour  se  rendre  au  pr^ 
toire.  LorsquMIs  furent  parvenus  a  II 
place  publique,  une  femme  se  jetaa^ 
devant  de  leurs  cbevaux;  elle^tait  vieille^l 
h  travers  ses  sanglots,  on  lui  entenda* 
demander  grdce  pour  son  fits  ,  homfllb 
universetlement  respect^  dans  Antiocw 
Les  deux  commissaires  imp^riaus  al* 
laient  continuer  leur  marche ;  mais  oii| 
foule  serree  leur  ferma  le  passage, 
reconnut  bientot  les  moines ,  habit 
des  montagnes,  q«ri  demandaient  a^ 
d*instantes  pri^res  un  sursis  pour 
accuses ;  ils  allaient  se  rendre  k  G 
tantinople  pour  arracher  a  Theodose 
grdce  des  ciloyens.  Hellebique  et  C&aii 
leur  r^pondirent  que  la  vengeance 


SYRIE  A1^C1EN1«£. 


97 


fmfemat  ne  jjouvait  soufi&ir  de  re- 
t«d;etilseontinu^reQt  leur  route.  lU 
tnfnt  fait  ^elqaes  pas,  lorsqu'un 
Jk»HD6  eo  hailions,  se  crampoQDant 
aree  force,  iiial^6  son  dge ,  a  run  des 
CDomissaires,  lui  ordonna  de  descendre 
iechefal.Lescommissaires,  outres  de 
eette  bratate  iosulte ,  allaient  se  porter 
i  quelque  acte  de  violence ,  si  on  ne  les 
e4t  afertis  que  oet  homme  audacieux 
M  le  e^lttre  Mac6doniu8  le  Critho- 
|lage.  La  Tie  pieuse  que  eel  homme  me- 
Hrtdanaledaert  lui  avait  attir^  la  v^ 
itaitiondetODtle  people  d'Antiodie;  sa 
ifpitatioQ  de  saintete  s'^tait  m£me  ^teo- 
iMdansrempire. 

Le  solitaire  n'avait  rien  dans  son 
aterieor  qui  commandSt  le  respect  : 
BBS  petite  taille  et  one  figure  commune 
t'anooo^eat  pas  en  lui  Penthousiasme 
nUgieia.  n  oe  eonnaissait  pas  Tart  de 
persuader ;  mais  ses  paroles ,  sorties  du 
eoMirf  ilaieiit  altieres  et  imp^euses  : 
« AUcs,  mestoes,  et  r^p^tez  a Th^ 
« dose  ced :  Yoos  n'^tes  pas  seulement 

•  empereor,  tods  ^tes  nomme  et  vous 
i  ooaHoaodez  a  des  bommes  comme 

•  vm.  LlxMOme  est  Pimage  de  Dieu  , 
« n'est-ee  pas  oo  attentat  eontre  Dieu 
« wim  que  de  d^truire  son  image  ? 
«  Od  ne  peut  outrager  ToeuTre  sans 

<  initer  roavrier.  Consid^rez  a  quelle 

•  eolere  tous  emporte  Fiosulte  faite  k 

<  uoe  figure  de  bronze.  £t  une  figure 
« TiTaate ,  aaim^e  ,  raisonnable,  ne 
«mt-eilepas  davantage?  Nous  ren- 
>  diong  i  rempereur  vinigt  statues  pour 
« one  ttole;  mais,  apr^  nous  a?oir  6i6 
• » '»» qa^ii  nous  rende ,  s'il  le  peut , 

•  Dflseulche?eudenotret«te?» 

Ces  parolei  panirent  dbranler  Hellebi- 
yte  et  Gesaire;  Os  r^pondirent  par  des 
promesses^fasiycs  etarriv^rent  au  pr^- 
H^  Haig  uoe  trooped*^vdques,  adoss^ 
[a porte,  leur  en  d^fendit  Fentr^e ;  les 
{Jjnw?  de  Dieu,  anim6s  d'un  zdle 
"*?efique,  rtelamerent  la  vie  des  pri- 
^Biuers.  Les  ministres  de  Th^ose 
|*««^l  d'abord  avec  colore;  mais 
gr  franchir  le  seuil  du  pr6toire  il  au- 
wnila  ecraser  les  6v^es ;  d*ailleurs, 
2*»pat  6tait  alors  une  magistrature 
gj,  "empire ;  un  caract^re  d'inviola- 
JJM«  I  attacbait  h  la  personne  des  pr«- 
^  Hell^biauc  crut  pouvoir  ceder 
■ « TDtt  de  rhumanit^,  Ce  fut  alors  un 


cri  de  joie  universel.  On  6earle  les  gar- 
des, la  foule  sepr^pite  dans  Fenoeinte 
du  pr^toire.  La  mdre,  qui  avait  demand^ 
la  gr&cede  son  fils,  court  k  lui ,  et  Ten- 
toure  de  ses  bras;  mille scenes  touchan- 
tea  se  r^p^tent  autour  des  prisonniers, 

Lesmagistrats,  un  moment  tent^  de 
reveniraux  voiesd*une  rigueur  aveugle, 
n'osent  raster  au  voeu  g^n^al.  Les  moi- 
nesveulent,r^unis  en  corps,  aller  eux-m^- 
mes  a  Constantinople,  etarracher  a  Tb^o- 
dose  la  gHlce  des  accost:  mais  C^saire 
moderela  g^n^reuse  ardenr  de  ces  vieil- 
lards ;  il  leur  demande  seulement  designer 
une  petition  que  lui-mtoe  se  charge  de 
remettre  k  I'empereur.  Claire,  muni  de 
cette  pjhce  qui  excusait  les  commissaires 
imp^riaux,  se  rendit  en  six  jours  a  Cons- 
tantinople. II  se  pr^nte  sur-le-champ 
au  palais.  II  raoonte  k  I'empereur  les 
malbeurs  d'Antiocbe,  et  lui  expose  tou- 
tes  les  mesures  qu'il  avait  prises  de 
concert  avec  Helleoique.  Th^ose  ver- 
salt  des  larmes;  mais  il  ne  cedait  pas. 
Enfin  ,  r^v^ue  d'Antioche,  Flavien  , 
qui  avait  quitt^  ses  fideles  aussit6t  apres 
la  revolte,  pour  aller  remplir  k  la  cour 
le  r61e  d'intercesseur,  parut  k  son  tour 
devantl'empereur.  Tb6odoseinte(rompit 
le  discours  du  saint  ^v^ue  par  ces  pa- 
roles :  Cest  danc  ainst  que  fai  mi- 
HU  tant  d'msultes!  II  paraissait  surtout 
surprisdesoutragesdont  il  avait  et^  I'ob- 
jet,  dans  le  moment  m£me  oil  il  allait 
porter,  disait-il,  aux  habitantsd'Antiocbe 
des  Umoignages  de  sa  tendresse.  En 
effet,  Tb^ose  avait  form^  le  projet  de 
visiter  ses  provinces  d'Orient.  La  r^- 
lution  de  rlavien  ne  faillit  pas  devant 
les  mauvaises  dispositions  de  Fempe- 
reur;  ilsut  exciter  dans  lecoeurdeTheo- 
dose  une  crainte  religieuse. 

L'empereur  r^pondit  directement  aux 
remontrances  bardies  de  Flavien  >  Pour- 
«  rions-nous  refuser  le  pardon  a  des  bom- 
«  mes  semblables  k  nous,  apres  que  le 
«  mattre  du  monde,  s'^tant  r^uit  pour 
«  nous  k  la  condition  d'esclave,  a  bien  vou- 
«  ludemandergrdce  k  son  P^re  pour  les 
«  auteurs  de  son  supplice  qu*il  avait  com- 
«  bles  de  ses  bienfaits.  >  Ces  paroles  ren- 
fermaient  la  griice  des  malneureux  Sy- 
rians. Desmessagerspartirent  a  Finstant 
m^me  pour  mettre  un  terme  aux^  an- 
goisses  insupportables  des  prisonniers. 
Pendant  que  Flavien  ^tait  a  Constan- 


7*  Uvraison,  (syhib  aiygibnhs.) 


98 


L'UNIVERS. 


tinople,ceux-€idtaient  eti  prole  k  la  plus 
ternbleanxi^t^.  Gependant,  ils  6taient 
traits  aveeasse^  de  douceur;  oh  l^s  arait 
tir^  de  leur  prison  deeouverte,  pour  les 
transporter  dans  une  vaste  demeure ;  its 
^talent  libres  de  trainer leurs  chdtnes  snr 
ies  dalles  des  portiques.  Les  mdmes  al- 
ternatives d'espblr  fet  de  ci'aiiite  tour* 
mentaieiit  les  habitants. 

I^s  lettres  de  grdee  arfivdriint  enfiii  i 
Hell^bique  les  lut  au  peuple  assemble; 
elles  produisirent  une  joie  fr6n^tique 
dans  toute  la  population  :  les  parents 
des  prisonniers,  qui,  la  veille encore, 
en  les  quittant ,  avaient  cru  leur  dire  un 
dernier  adieu ,  allerent  les  d6livrer.  Les 
bains  publics,  ferm^  depuis  la  sedition, 
furent  ouverts  de  nouveau.  Les  Antio- 
cbiens^  au  milieu  des  danses  et  des  fes- 
tins ,  e^l^r^rent  la  cl6mence  de  Th6d- 
dose  et  les  vertus  de  leur  ^v^que.  Lors- 
que  Flavien  revint  si  Antiocne,  il  rC'* 
trouva  sa  sceur,  qu'il  avait  laiss^e  taou- 
rante.  Le  noble  vieillard  se  cfut  assez 
r^Gompense  de  ses  fhtigues,  et  remercia 
le  ciel  de  lui  avoir  accord^  la  consola- 
tion d'embrasser  une  derniere  fois  celle 
qu'il  av^it  tant  aim6e.  Parmi  tant  de 
ro^iateurs  qui  interpos^rent  leur  in- 
fluence entre  Tempereur  et  la  ville  cou- 
pable,  il  faut  surtout  remarquer  les  d<§- 
put6s  de  Seleucie.  Cette  ville  toujour* 
en  lutte  avec  Antioche,  alors  h  demi 
ruinee  et  humili6e,  prit  une  noble  reso- 
lution d  la  voe  du  danger  qui  mena- 
(ait  sa  rivale.  Elle  envoya  une  depu- 
tation a  Constantinople  pour  obtenir  de 
Tb^odose  le  pardon  des  revolt^s  (*). 

L'tmpb&atbigs  Eudoxib  a  AntIo- 
ghb;  la  ville  buince;  trbMUle- 

HB1VTS  DE  TlSBEE  ;  S^DlTIOlfirs  *  tNGUlt- 

sioNS  DES  Sabbasins.  —  Uhe  tongue 
tfanquillite  succ^da  h  ees  fortes  agita- 
tions. En  411 ,  des  tribus  de  Sarfaslns 
inquiet^rent  les  cxtremites  de  la  Syrle. 
Nous  n*avons  aucun  detail  sur  letirs  in- 
cursions (**). 

Antioche  fut,  en  4S9,  le  theatre  d'ane 
scene  nouvelle.  Une  Imperatrice,  l^.u- 
doxie,  femmede  Theodose,  allait  h  Je- 
rusalem visiter  le  tombeau  du  Christ ; 
elle  s*arreta  dans  la  capitate  de  la  Syrte. 
Fille  d'un  rheteur,  Timperatrice  voulut 


se  reporter  aux  occupations  de  te  jea* 
nesse;  elle  pronOnqa  uh  discoQrs  am 
sur  un  trdne  d'or,  seme  de  pierterlSL 
Elle  avait  choisi  pour  stijet  refoge  d*Aft*' , 
tfoche.  Sondiscotirs  seterminaitpdr  # 
allusion  h  la  commune orlgidegreequef 
la  femme  de  Theodose  et  de  la  vflleU^ 
d6e  par  le  genefdl  d^Alexandr^;  Idi 
Eudoxie  cita  ,en  flnissaiit,  Mte  Vm 
d*un  vers  de  l*Iliade  : 

[VMLI 

1^  foule  rep^ndoe  flatou^  d*Hlea| 
dit  avee  enthousiasmei  n  fUt  i 
qu'on  erigerait  une  statue  de  brontfi 
rimperatnce,  dims  le  museed*AMi^ 
et  qiftme  atitre  statue  d'or  seraitj 
dans  le  seuat.  Eudoxie,  a  son  tout, 
lut  meriter  ces  glorieases  mattpB 
reconndisssDce  pai*  d«!ft  bienfkits  f'^ 
elle  combia  de  lafgesses  ies  habil 
d'AntioChc.  Une  partic  des  sommesdi' 
tributes ,  dent  cents  IIV)^  d'Or,  fiM 
destitiees  h  I'embellissemeAtdestheM 
de  Valens;  le  reste  deVait  s«f^»^JjS 
chat  de  provisions  de  bie  (**).  Aattw 
avait  souventbesoin  desddtisgtaiiiiw 
empereurs.  BStiesUi^un  sol  vokaBhf^ 
a  mesure  qu'elle  s'efiricWssalt  dc  tf* 
veaux  edifices,  les  revolutions  so«i* 
raines  renversdlent  fes  aneiens  moM 
ments.Un  tremblenlMit  detefre,  Qtdf 
surtout  sentir  toute  ^A  violence  iMj 
tantinople,  8*etendit  dans  la  dirtrfl 
d'Afitioche  et  renversaune  parti«de«l 
ville  (Janvier  44r  ).  Le  terrible  phw 
mene  se  repeta  entirdti  dix  ids  P 
tard ;  cette  fois  IftThrice  et  lesCycwl 
en  eprouverent  quel(|ues  cbminoi' 
Antioche  fut  plaque  niihee;  h 
neuve,  oii  les  Hch^S  atslieilt  etabli 
demeures,  oh  les  drtSavaietitreaiii 
merveilles ,  fut  reriVWsee.  le  14  w 
bfe468,  idixheuresdUsoif.LesSi 
peuple  fanatique,  disput(jur  et  debai 
attribuererlt  au  dereglemcntdcsnn 
publlques  ce  hialheu!',  qui  leur 
signe  de  \i  colere  ceieSte. 

L'empereuf  Leon,  qui  tegnait 
secourut  geifereusement  la  seconde 
de  remtrii^  poUr  encoufager  les 


(•)  LUMn.,  Or.,  14,  16,  22,  S3.  —  CI 
Mom,,  2,3,5,6,  17,  8,  13,  <8,  H,  W. 

(•*)  Hier.,i&p.  82,  p.318. 


(*)  Levers d*Homfefeest :  TocOtticToltsvs^* 

(*•)  sew.,  VlC  27.  -  Evagr.»  I ».  -.™*» 
18. 7-  Tbeoph.j  p.  74. 


SYRIE  ANCIENKE. 


99 


tMts  k  relever  les  ruines  de  leurs  mai- 
80D8;  il  d^chargea  de  tout  impot  les  pro- 
prietaires  qui  reb&turaient  leurs  de- 
meures;  il  soulagea  la  commuaaat^  ed 
m^  temps  que  les  lodiTidus.  La  vUIe 
obtiatune  remise  de  itiiiie  taleuts  d'or. 
lioD  lyouta  a  oette  grAoe  Vfinvoi  de 
gnodessommesd'oretd'argent.  En  476, 
c'eBt  one  autre  Tille  de  Syrie,  Gabala , 

r'  ^prouveles  eifets  des  perturbations 
8oi.  Le  tyran  Basiliscus,  imitant  la 
g^D^osit^deses  pr^^eesseursi  aeeorda 
cioquante  li?re8  d'or  pour  reparer  le 
doounage.  Un  nouveau  tremblement  de 
twieviatf  ala  fin  da  cinquieme  sitele, 
noD  plus  f rapper  line  senle  Tille,  mais 
a  la  fols  Hi^rapoUs ,  Antioehe  et  Laodi- 
cee  (494).  La  revoke  se  joint ,  ddns  la 
eapitale,  auifl^ux  naturels.  Le  eomte 
d'Orieot,  GaUiopus,  dut  fair  devant  la 
colore  d'une  £aetion  du  eirque  qui  en 
Toulait  a  sa  tie.  II  fallut,  oette  fois,  avant 
de  reparer  les  desastres,  songer  a  rto- 
blirt'ordre.  AnastaseenvoyaConstantius 
deTarse  a  Antioehe,  oomme  rhorome 
ieplus  capable,  par  son  eourage  calme^ 
d'etouffer  la  sedition. 

Pendant  le  cinquieme  si^e ,  la  Syrie 
joQit  d'une  tranquillity  rarement  inter- 
rompue  sur  ses  frodtieres.  £n  450,  les 
Arm^iens,  trouble  par  les  Perses  dans 
Vexereiee  de  leur  culte ,  inyoquerent  le 
seeonn  des  Remains,  attaches eomroe 
eoi  a  to  foi  chr^edne.  Florentius,  oomte 
d'Orient,  et  Syrien  de  naissanoe,  fit 
^chouer  lenrs  demandes  (").  Dans  le 
alme  temps,  les  Sarrasins,  qui  s'^aient 
jei^  sur  la  Syrie,  furent  oompl^tement 
d^ts  par  Artabore,  pr^  de  Damas. 
Des  ambassadeurs  de  la  nation  vaineoe 
ooAclurentdans  oette  rille  (45S)  la  paix 
avecrempire.  Longtemps  aprds  ce  traits, 
^ques  tribus  de  Sarrasins  sc^nites Je-^ 
t^t  r^pouyante  dans  la  proTinee  Eu- 
pbrat^ienne  (498).  Ilsfureut  punisde 
wars  brigandages  par  Eugene,  propose 
alacardede  la  province. 

HieRB  DS  Zbnoh  ;  ihsubkbgtion 
<>  Stsib.  —  Le  regno  de  Z^non 
cit  rempli  d'^^nements  remarquables 
^  ee  qui  eonoerne  la  Sjrrie.  Le  ma- 
>^ede  risaurien  Z^non  avec  la  fiUe 
^  Uoa  lui  permit  d'aspirer  h  Fem- 

,.(*)  Lebeaa,  I.  VI,  p.  286.  Note  deSatrU^Mor- 
f?«  (Paprte  rhtotonea  anntoioi  Lazare  de 
Phaibtt. 


{lire.  Apr^  avoir  contract^  oette  al- 
ianoe,  Z<6non  vint  raider  (469)  a 
Antioehe ;  il  avait  requ  de  son  beau- 
pere  le  pouvoir  des  comtes  d'Orient* 
Quelques  ann^s  pins  tard ,  Leon  mon- 
rut;  Z^noh  lui  succ^a,  mais  il  ne  sut 
pas  s'^tever  au-dessus  des  mis^rables 
intrigues  du  paiais.  N'ayant  pu  r6ussir 
k  faire  assassiner  lilus^  il  lui  donna 
le  eommandement  de  FOrient  et  la 
permission  d*emmener  aveo  lui  toutes 
les  personnes  de  Constantinople  dont 
il  voudrait  s'entourer.  Illus  mit  a  profit 
Timprudence  de  Tempereur,  et  se  fadta 
d'arriver  a  Antioehe,  accompagn^de  son 
frere  Trocondus,  de  Pamprepias,  philo- 
sophe  palen,  savant  dans  Tart  des  pre- 
sages, deMarsus  et  de  L^once,  homme 
instruit  et  bon  soldat.  L^once  etait  n^  en 
Syrie,  k  Ghalcis;  Z^non  compta  le  faire 
servir  k  ses  desseins  aupr^  de  ses  com- 

Satriotes.  Mais  le  principal  instrument 
'une  r^volte  dont  Illus  avait ,  sans  au- 
cundoute,  con9U  le  plan  a  Constantinople 
m^me .  fut  la  veuve  de  L^n ,  Fimp^ra- 
trice  verrine,  que  son  beau-fils  zi^non 
retenait  prisonni^re  dans  un  chdteau  de 
Cilicie.  Verrine  fiit  conduite  avec  hon- 
neur  k  Tarae;  la  on  lui  fit  signer  une 
proclamation  od,  du  plein  gr6  de  la 
vieille  imperatrice,  L^once  6tait  d^clar^ 
empereur,  et  Z^non  d^chu  dtt  pouvoir. 
Cet  acte  produislt  une  grande  sensa- 
tion dans  les  villes  syriennes.  Presque 
toutes  d^sert^rent  la  cause  de  Zenon. 
L^once  choisit  naturellement  Antioehe 
pour  capitale ;  il  y  fit  son  entree  solen- 
nelle  en  juin  484,  et  organisa  aussitdt 
les  di^i^rentes  parties  du  ^ouvernement. 
Lilianus  fut  homme  prdfet  du  pretoire, 
les  l6gions  se  rassembl^rent ;  elles  for- 
maient  un  effectif  de  soixante-di)c  mille 
hommes.  L^once  et  Illus,  qui  Faccom- 
pagnait  toujours ,  marcherent  avec  ces 
forces  sur  Chalcis;  la  ville  fut  prise; 
mais  rempereur  syrien ,  apprendnt  que 
Longin ,  rr^re  de  Zenon ,  se  dirigeait 
sur  Antioehe,  revint  sur  ses  pas  pour 
defend  re  sa  capitale.  Une  bataille  fut  11- 
vr^e  pres  de  cette  ville ;  les  troupes  de 
Longin  furent  mises  en  d^route,  et  lui- 
mlme  tomba  eotre  les  mains  de  L^once. 
Illus  et  Leonce  quitterent  la  Syrie  pour 
traverser  TAsie  Mineure.  lis  poursuivi- 
rent  leur  marche  jusqu'en  Isaurie.  Une 
nouvelle  arm6e,  envoy^  de  Constanti- 

7. 


loa 


L*UMVERS. 


nople,  lesbattit  pre8deS^leucieni<laiis 
uo  combat  d^isif^  et  les  for<^a  de  s'eofer- 
mer  precipitamment  dans  un  chAteau  de 
Cilicie.  lis  y  soutiorent  un  si^e  de  trois 
ann^s.  Eofin  des  trattrea  livrerentia 

Sfiace  et  sea  defeoseurs  (**).  L^DCe  et 
llus  furent  dtoipit^s.  Les  Syriens 
oubli^Qt  leur  empereur  k  partir  du 
moment  ou  L6oDce  les  quitta,  et  reste- 
rent  indifC^rents  a  ses  succte  comme  k 
ses  revers.  n  n'y  avait  eu ,  en  Syrie^  ni 
complot  ni  r6voite  centre  Z^on;  ies 
villes  avaient  subi  aveugl^ment  la  ne- 
cessite.  II  est  vraisemblable  que  Tern* 
pereur  ne  s'irrita  point  de  la  conduite 
des  Syriens.  En  enet,  ]es  historiens  ne 
marquent  aucune  de  ces  sanglantesex6- 
cations  si  communes  dans  les  revolu- 
tions pr^edentes.  A  peine  cet  orage 
s*est-ii  dissip^,  que  nous  retrouvons  les 
Antiochiens  tout  occup^  des  q^uerelles 
du  cirque,  v^ritables  ^uerres  eiviies,  au- 
toris^  par  le  pouvoir ,  qui  mettaient 
en  danger  toutes  les  classes  de  la  so- 
ciety. Ce  sont  les  Juifs  qu'atteint,  en  486, 
la  colere  de  la  faction  verte.  Us  furent 
tous  impitoyablement  ^org^.  Zenon , 
loin  de  veneer  ces  malheureux,  ^couta 
froidement  Te  r^it  du  massacre ;  lors- 
qu*il  apprlt  que  les  cadavres  avaient  ^te 
livr^  aux  flammes  du  bdcher,  il  s'^cria : 
Que  ne  les  oi-on  brides  vifs ! 

Sbdition  ▲  Antiochb;  desohd&b 
BANS  LB  ciRQUB.  —  Dcs  malheurs 
qu*aucune  puissance  nepouvaitni  preve- 
nir  ni  combattre  marquent ,  en  Orient , 
le  commencement  du  sixi^mesi^le.  line 
invasion  de  sauterelles,  fl^au  particulier 
k  r Afrique ,  ^tend  ses  ravages  depuis 
TEupbratejus^u'^la  M^diterranee.  Ces 
insectes  detruisent  toutes  les  moissons 
sur  leur  passage.  Leurs  ravages  pro- 
duisirent  une  disette  g6n6rale.  Les  Sy- 
riens eurent  vainement  recours  k  Fem- 
pereur;  ils  n*obtinrent  que  des  secours 
insufdsiants.  La  famine  lavorisa  les  d^- 
sordres.  Les  brigands  se  recruterent 
de  malheureux  sans  ressource;  mais  ce 
n*etait  pas  assez  :  une  incursion  de  bar- 
bares  vmt  se  joindre  h  tant  de  maux.  Les 
Sarrasins  ^tendirent  leurs  pillages  sur  la 
rivedroitede  I'Euphrate.  Anastase  traita 

(*)  Ed  Uaurie. 

{**)  Foy,  Ev»gr.jn,17.  — Candld.,«P  Phot,, 
p.  78.  —  Asaem.  itlbh  Or.^  1 1,  p.  2«4.  —  Le- 
bera^M.  StMaitio,  L  VII,  p.  IS6  el  suiv. 


Uchement  avec  des  eaneiDb  doat  la 
audacieuses  tentativesanraient  ^  tei 
r^primto   et  punies  par  les  armes 

(502)  n. 

Bientot  apris  une  s^ition  Mata  daai 
Antioche  (507).  Un  cocher,  Galliopu, 
toujours  vainqueur  dans  les  counes  dt 
chars,  s*etait  assure  la  faveurde  lamoltK 
tude.  L'admiration  g^ndrale  eoorguil' 
lit  CaUiopus.  II  fit  Tessai  de  wn  ia- 
fluenoe  pendant  qu*on  ofl^brait  ki 
jeux  olympiques  aDapbn^;  ebarg^Al 
lauriers,  entour^  d'une  foule  eDddin^l 
ordonna  le  massacre  des  Juifs.  Aiiailt 
la  foule  court  a  la  synagogue,  et  v  piariT 
une  crotx,  apres  s'^tre  livr^  a  aodiaK 
excte.  Anastase,  plus  juste  que  Zenoif 
punit  le  comte  d'Orient,  Basue  dt^ 
qui  n'avait  pas  su  pr^venir  ces  d68onlt% 
et  il  lui  donna  Prooope  pour  siicoesaMr*; 
M^as,  lieutenant  du  nooveaa  oonlfi 
poursuivit  lea  criminels.  Un  cottil 
£leuth^rius,  le  seal  des  coupaUa^ 
tomba  entre  les  mains  des  madsM^ 
fnt  arrach^  a  Tautel  de  reglise  deSial* 
Jean ;  il  fut  d^ca^t^  et  jet^  dansP^ 
route.  Gette  execution  excitalaooleffw 
complices  d*£ieuth^us ;  ils  «ortini^ 
leur  retraite ,  et  port^rent  sod  cadM 
avec  pompeeten  prof^^rantdes  meftiM 
Us  livr^nt  un  combat  furieux  i  MM 
dans  Tenoeinte  d'Antioche.  lb  leM 
prisonnier  et  le  pendirent  iuM  stalttr 
au  milieu  de  la  ville.  UsenlevereBli* 
cadavre  pour  lui  faire  subirdepocwg^ 
outrages.  Procope,  pendant  le  trtw 
avait  pris  la  fuite.  Ir6n^,  par  l'«™Jf 
rempereur,  vint  le  rcmplacer.  W* 
punit  les  ooupables ,  et  ne  troan  ii^ 
cune  r^istance  (**).Cetait  toojoflU* 
cirque  que  partaient  les  d^rdrtfjl* 
faction  bleue  d'Antiocbe  ^^^^^^ 
oette  ville  les  mtoes  troubles  qu*a  Gov 
tantinople.  De  518  ^630,  la  violeoceV 
pouss^e  aux  derniers  exces.  J^P' f! 
de  JusUnien,  voulutenfin  i^tabiiriH" 
prix  la  tranquillity  publiqaeetgaraoV* 


sQret^  des  -particulicrs.  fiphrem,  Wr 
a  Antioche ,  interdit  las  spectacioff 
dant  plusieurs  mois;  les  jeux  of 
ques,  c^l^r^s  depuis  Commode 


phn6 ,  furent  detendus;  on  abolMJ 
mtoe  temps  la  charge  des  Al»im^ 

n  AssemiiDi,  BihU  Or,,  1 1,  Pr^ 
(**)llalala,  p.iiletsoir. 


*  \ 


SYRIE  ANaEI^NE. 


lot 


(ii»ttpx»0 ;  c'^taient  les  deax  magis- 
tntsqui  pr^idaient  a  ces  jeux  (*).  Ges 
BKsyres  neeessaires  retabiirent  la  paix 
dans  Aatiodie;  mais  elles  ne  preser- 
vereot  pas  (Pun  a^etix  mali^eur  la  capi- 
tate de  la  Syrie. 

AllTlOCHB  BUINBE  PAB  UN  TBBM- 
BUMIIIT  BB  TEBBB;  hk   SyBIB  EN- 

Yian  PAB  LBS  Sabbasins.  —  En 
526|  Temperear  Justin  venait  d'envoyer 
va  Antioehiens  2,000  litres  d*or,  pour 
i^lHdrer  les  dtestres  d*un  incendie. 
Un  grand  nombre  d'ouvriers  travail- 
iaient  a  relever  les  mines.  La  ville  re- 
penatt  d^ja  une  face  nouvelte,  lorsque, 
R29iDai,  QQ  tremblement  de  terre  ren- 
vena  sobitemeDt  plusieurs  quartiers. 
Lepb^ffl^ne,  ao  lieu  de  eoromencer 
par  des  aeeoasses  mod^r^es ,  ne  laissa, 
aa  boot  d'une  minate ,  que  de  vastes 
roines.  C6tait  Theure  ou  les  habitants 
faisaientleor  repas;  partout  la  flamme 
brillaitdansle  foyer;  les  tisons  roulant 
sor les meublesren verses,  sur  les  poo- 
tres  brisees ,  mirent  le  feu  aux  mati^res 
opmbiistJbles.L*incendie  8*6tendit  bien- 
tot ,  et  gtfoa  les  bdtiments  que  le  trem- 
bfenieBl  de  terre  n'avait  |»as  renvers^. 
LeveottquisoufQait  arec  violence,  porta 
descharboos  ardents  dans  presque  tou- 
tes  leg  parties  d'Antioche.  Les  flam- 
^^  pendant  deux  jours,  entour^rent 
r^Kseprioeipale;  mais  elles  ne  purent 
frowyw  prise  snr  oette  masse  de  marbre 
«  d'or  elev^  par  la  magnificence  de 
^^OMtantin.  Eofin ,  min&  en  dessous 
par  Hnceodie ,  la  basilijpie  s'^croula. 
ws  ricbesaes  des  particuliers  qui  tehap- 
pcreirl  aux  flammes  attirerent  sur  leurs 
P^^**ss«wsd'inevitables  dangers. 

La  iKiordle  du  tremblement  de  terre 
tvadesfoontagnesdes  troupes  de  co- 
lons romaios  et  de  barbares,  habitues 
«  wre  de  pillages;  ils  formcrent  un 
jordon  autour  dTAntioche  ,  et  se  par- 
agereot  tout  ce  que  la  flamme  avait 
Wgn^.  Dans  la  ville  m^me,  des  ha- 
motodetootesles  classes,  assures  de 
rMapunite,  assassinaient  ceux  de  leurs 
tt^toyens  qui  cherchaient  k  mettre 
w«  mens  en  lieu  de  sdreX^.  Un  offi- 
««fdupalais,  Thomas,  avait  forro^, 
f*  8€s  affrandiis  et  ses  esclaves,  une 
woupe  de  brigands ,  qui  lui  rapportaient 

^^Stinl-MarUn,  NoU$  9wr  Lebeau,  t.  Vlll, 


leur  butin  dans  une  maisoA  h  trofs  mil- 
les  d*Antioche;  mais  ii  fut  frappe  d*apo- 

Elexie ;  ii  y  avait  auatre  jours  que  sa 
ande  parcourait  la  ville.  Le  peuple 
d'Antioches'emparades  ricbesses  quelle 
avait  amass^es ,  et  piila  la  demeure  de 
Jhomas. 

Les  malheureux  quirestaientenferm^s 
sous  les  ruinesde  leurs  maisons  trouve- 
rent  seuls  un  abri  contre  la  cupidity  des 
assassins.  On  retira ,  presque  un  mois 
apr^  ceseyenements,  des  personnes  (jui 
sNetaient  nourries  de  provisions  placees 
par  hasard  aupres  d*elles ;  des  enfants 
nouveau-n^s ,  encore  vivants ,  dont  les 
meres  avaient  succomb6;  mais  pres  de 
deux  cent  cinquante  mille  personnes, 
s'il  faut  encroire  les  contemporains, 
avaient  p^ri.  Le  m£me  tremblement  de 
terre  detruisit  S^leucie  et  Daphne;  il 
agita  le  sol,  aux  environs  d'Anlioche, 
pendant  dix-huit  mois.  Justin  d^plora 
sincerement  les  malheurs  de  la  S^rie.  II 
aimait  Antioche  comme  une  patrie.  I^e 
vieil  empereur  se  rappelait  que ,  simple 
soldat,  il  avait,  dans  cette  ville,  commence 
sa  carriere.  Carinus,  envoye  par  lui,  alia 
porter  les  premiers  secours  a  Antioche  et 
a  la  Syrie  (*). 

Le  tremblement  de  terre  de  526  fut 
le  cinquieme  deceux  qui  desolerent  An- 
tioche ;  un  sixiemefltde  nouvelles  ruines 
deux  ann^es  plustard.  La  catastrophe  de 
528  detruisit  les  edifices  que  celle  de  526 
avait  6pargnes.  Gomme  en  526,  un  in- 
cendie pr^ceda  le  tremblement  de  terre. 
II  eclata  le  15  novembre.  Le  29  novem- 
bre,  les  secousseis  du  sol  tuerent  quatre 
mille  huit  cent  soixante-dix  personnes; 
Seleucie  et  Laodic^e  compterent  sept 
miliecinq  cents  victimes.  Pour  conjurer, 
a  Tavenir,  le  retour  de  ces  revolutions 
souterraines ,  on  donna,  d'apres  le  con- 
seil  d*un  solitaire  de  Syrie,  le  nom  de 
TMopoUs  (ville  du  Seigneur)  a  Antioche. 

Justinien  regnait  alors.  Ce  prince 
suivit  les  fdees  de  ses  pr6d6cesseurs.  II 
crut ,  comme  eux ,  que  la  $<lret6  de  Tem- 
pire  dependait  des  fortifications  etablies 
autour  des  villes.  Chalcis,  Cyrrhus, 
Sura,  Europus,  Hi^rapolis,  Zeugma, 
T7toc^r6e,  rcQurent  de  nouveaux  ou- 

r)  Evag.,  IV,  5,  6.  —  Procop^  Pen,,  Ul,  14. 
—  Thdoph.,  p.  147,  148.  —  Cedren.,  1. 1,  p.  365, 
306.  —  Malala,  part  i,  p.  140  -  146—  Lebeau, 
M.  Saint'Marttn,  t  Till,  p.  75  et  suiv. 


102 


LUHIVEBS. 


▼rages  de  dtfeose  (*)  :  oes  traTaux, 
cependant,  n'arrfitaient  pas  le9  cour- 
ses des  Arabes.  Les  tribus  errantes, 
poussees  plutdt  par  Famour  da  pil- 
lage que  par  le  d^r  des  conqu^tes, 
tombaient  a  Tiraproviste  sur  les  lieux 
ou verts  et  sur  les  bourgades  saus  de- 
fense. ^Q  581 ,  le  chef  arabe  Al-Mon- 
dar  ravagea  les  faubourgs  de  Chalcis, 
menaca  Antioche ,  et  se  retira  au  dela 
de  r£uphrate ,  emportant  avec  lui  uq 
butin  considerable,  et  tratnant   a  sa 
suite  de  nombreux  prisouniers.  Al-Moa- 
dar ,  de  r^tour  en  Arabie ,  fit  trancher 
la  t^te  h  plusieurs  de  ses  captifs,  et 
menaQa  tous  les  autres  du  m^me  sort, 
si,  dans  un  d^lai  de  soixante  jours,  on 
ne  venait  paver  leur  rancon.  Les  pri- 
sonniers  s  aaresserent  a  leurs  compa- 
triotes  de  Syrie.  On  lut  leurs  lettres 
dans  la  grande  6glise  d'Antioqbe  :  elles 
attendrirent  les  citoyens  de  cette  viile. 
Les  doos  volontaires  s'eleverent  a  Tins- 
tant  m^me  a  la  somme  exigee;  on  Ten- 
voya  en  toute  h^e  au  chef  Al-Mon- 
dar,  qui  rendit  la  liberty  a  ses  prison- 
niersr"^).  La  mSmeann^e,  Al-Mondar  ou 
Mondhir,  suivi  des  Perses,  fit  une  inva- 
sion plus  s^rieuse  en  Syrie.  Belisaire  (***) 
lui  livra  bataille  a  Callinicus.  Apres  un 
combat  sanglant  et  glorieux  pour  les 
deux  armies ,  les  ennemis  se  retirerent 
au  dela  de  TEuphrate.  Al-Mondar  me- 
naca encore  la  Syrie  en  537.  L'empire 
acheta  la  paix  par  de  riches  pr^ents. 

Chosboes;  il  soumet  et  bayage 
LA  Sybiv.  —  Chosroes  essaya,  en  540, 
avec  des  forces  imposantes  ^  la  conqu^te 
de  la  Syrie.  La  premiere  viUe  dont  les 
Perses  s'emparerent  fut  Sura ,  sur  I'Eu- 
phrate;  quelques  auteurs  disent  qu'iis 
s'en  rendirent  maitres  par  la  ruse ;  d'au- 
trcs  pretendent  quMIs  Venleverent  d'as- 
saut  (****).  Chosroes  abandonna  Sura 
au  pillage.  Une  femme,  entralnee  par 
les  soldats,  attira  ses  regards.  II  fut 
Irapp6  de  sa  beauts  pleine  de  noblesse, 
et  Tepousa  aussitot.  Chosroes,  a  Toc- 
casion  de  son  manage,  crut  faire  un 
acte  de  generosite ,  en  offrant  a  Candi- 

(*)  Malala,  part,  2,  p.  159.  —  Procop.,  de 
Aidif.,  Hv.  II,  passim^  et  liv.  HI,  c.  8. 

/<r*tMflln1a    n.  If    n    TOtt 


r*)  Malala,  p.  II,  p.  198. 
(♦**)  /'oif,  pour  left  detal 
11.  No«l  des  Vergers,  Arabic,  p.  83  et  84  {Vni- 


*)  f'oif^  pour  left  details  de  celte  bataille , 


Vfr»  pilU/resqm). 
(»♦>*)  PTPOop.,  de  j^dif.,  II,  9. 


dos,  6v6giie  de  Sergiopolis  (a 
Resapha  ou  Risapba ) ,  da  lui  remettn 
douze  mille  prisonniers  syrienseaMuD- 
ge  de  deux  cents  livres  d'or.  Caodidtt 
ne  put  trouver  cette  somme ;  mais  il  ^ 
mit  de  compl6ter,  dans  rann^e,  ce  fri 
manquait,  Le  roi  so  cootenta  de  la  pa* 
role  de  I'^v^que;  il  renvoya  les  prisoB- 
niers ;  mais  ceux  dont  on  venait  de  bri- 
ser  les  chatnes  etaient  presenile  tous  k> 
duits  a  la  plus  af&euse  misere;  la  pig* 
part ,  converts  de  blessures ,  expirerot 
avant  de  rentrer  dans  leur  pays. 

Cependant,  le  roi  de  Perse  s'svan^ 
vers  Hi^rapolis.  Pr^  de  cette  vilie,  i 
rencontra  r^vdque  Megas,  eharg^,pff 
les  villes  syriennes .  de  lui  proposer  b 
paix.  Le  roi  regarda  cette  ne^^tioD 
comme  une  insulte.  11  ordooDa  a  Mesu 
de  le  suivre.  Les  Perses  arrivcreot  (!•• 
vant  Hi^rapolis.  L'aspect  de  la  filld 
que  protegeaient  des  fortificatioos  tn- 
cees  avec  art,  fit  hesiter  Cbosro^  fl 
ofirit  aux  habitants  de  contiauer  » 
marohe  sans  lea  attaquer,  s'ils  Tooiaiot 
acheter  la  paix  au  prix  dedeux  nuile  fi- 
Yres  pesant  d'argent.  Le  mard»^  w 
conclu.  M6gas  profita  des  dispo6iti<n> 
duroi  pour  I'engagerll  trailer  af«l«ij 
autres  villes  de  la  Syrie.  Cette  im,Om;  { 
roes  eoouta  ses  conseils;  il  oonaeotiti 
se  retirerde  la  province,!  oondltioi 
qu'on  lui  donnerait  milie  livres  dV. 

M^as  quitta  imm^diatenient  leoif 
de  Tennemi  pour  faire  part  aux  Aot»- 
chiens  des  conditions  du  roi  de  Pent 
L'evdgue  marchait  a  pied.  L'arin^  pff« 
le  suivait  a  petites  journees.  Elie  pj- 
rut  devant  les  rours  de  Chalcis  aTaniK 
retour  de  Megas.  Comme  la  conventwii 
n'etait  pas  encore  ratifiee,  le  roi  d«- 
manda  aux  habitants  un  tribut  assa 
lourd.  La  ville  etait  trop  faibie  pour « 
d^fendre,  et  trop  pauvre  pour  payer  J 
somme demandee;  elle offirit deux»"* 
livres  d argent;  Chosroi^  les  tmi 
R^uits  au  d^sespoir,  les  habitants  »• 
tendirent  la  nuit.  Lorsqu'clle  f^^^^ 
lis  se  refugierent  sans  bruit  dans  la  oj 
tadelle,  emportanl  leurs  richesses  «w 
eux.  Le  lendemain  matin ,  rann^  P^ 
rangee  en  bataille,  s'approchade  la  n[»i 
les  portes  Etaient  fermto;  inaisattc^ 
soldat  ne  paraissait  sur  la  morailJ^- 1^ 
ennemis  reconnurent  bicnt^t  q^^^Jr!: 
6tait  dfeerte;  ils  la  livrerent  aux  fljor- 


STRIE  ANCIENNE. 


103 


n&Soreesaitrefeites,  M^asrevint  II 
o'apportait  pas  Targeot  quM  ^tait  all^ 
dM)er,etilTitavec  douleur  les  rui- 
oes  de  Cbalcis.  H  se  rend  it  a  la  cita- 
ddk;  il  y  trouva  les  r^fugies  reduits  h 
ftm  desoif  :  la  aource,  qui  aufG^it 
nxbesolDsdelagarnisoD,  s'etait  dea- 
s^ehee.  Megas  eourut  a  Cbosro^,  et 
obtiot  par  ses  prieres ,  pour  le«  ha- 
bitaoli  de  Ghalcis ,  la  liberty  de  se  reti- 
itr.  Les  soldats  romains,  mal  paye$ 
deremperenr,  vinrent  daos  le  caipp  des 
Penes  et  s'atUcUrent  k  leur  service. 
Qiosroes,  avee  ce  reofprt,  marcha  §ur 
iotioche. 

L'ioeertitiide  et  la  peur  r^aient daos 
CBtte  viUe.  Germain ,  neveu  de  Justin , 
9>  premier  bruit  de  riovasion,  ^tait  ar* 
nveaintioche,  avec  trpis  cents  hommes. 
fl  vouiaitatteodre,  dans  cette  ville, 
Parm^  qua  Tempereur  devait  eqvoyer 
mtreks  Parses.  Le  jeune  prince  mit 
u  place  ea  etat  de  defense.  Antioche 
etaitottneiQeQseaiept  situ^e  pour  sou* 
tcnir  uo  sioe.  L'Oronte,  d^un  c6t^» 
darocfaeis  a  pic  de  Tautre,  rendaient 
Ml  alMrds  de  la  Tille  iqaccessibles.  11 
DyavaitgD^uQ  seol  poipt  ftible  :  un  ro- 
BMT,  appel^  Orocasias ,  ^tait  placid  k 
jjoelques  pieds  seuleipent  de  Feneeinte. 
Uf  Perses,  ea  s'emparant  de  cette  po- 
ntioQ^pottvaient  doininer  un  cdte  de  la 
nile  et  ecraser  eeux  qui  voudraient  d^- 
Mretamiiraille.  Germain  imagina  de 
»n  lerrir  ee  roc  ^  la  ^ifewe  d  Antio- 
f^  Qve^aes  outrages  aocessoires  au- 
'uentsom  poarattacher  I'Orocasias  au 
Vtteme  g^al  des  fortiflcations.  Les 
was  o*aar»entpa8  manqu^  a  oe  travail ; 
>ui8  Jes  iidies  calculs  des  ingenieurs 
ureat  rejeter  les  plans  de  Germain.  Les 
mdea  sootinrent  que  le  temps  man- 
ittit  pour  acfaever  les  ouvtages  avant 
vriveedes  Perses.  Germain,  gagne 
tf  la  erainte,  qaitta  Antioche,  et  se 
*>ra  en  Cilicie. 

M^,  r^vdqve  de  Bero^,  arriva 
v^,  le  depart  de  Germain.  Les  An- 
iens, abandonn^,  6tajent  tomb^ 
IDS  rabattement.  lis  applaudirent  aux 
>yai8  propose  par  Megas  pour  rache- 
r  War  vie  et  leurs  richesses.  D^ja  ils 
Waipaient  de  payer  la  contribution  k 
i^nrMs,  lorsque  deux  ambassadeurs 
-  JosUnien  drang^rent  la  face  des  cho- 
f-  /ean,  fils  de  Rufin,  et  Julien ,  secr6. 


taire  du  conseil,  travers^rent  Antioche 
pour  se  rendre  au  camp  des  Perses.  lis 
apprirent  les  dispositions  des  habitants. 
Aussitdt  ils  protesterent  centre  tout  ac- 
commodement  avec  Tennemi,  Sauver 
moyennant  ran^on  la  seconde  vilie  de 
Fempire ,  c'etait  a  leurs  yeux  une  Idche 
trabison.  Les  Antiochiens  cederent  a  la 
volonte  des  ambassadeurs,  et  Megas  re- 
vint,  sans  les  sommes  |)romises,  au 
camp  de  Cbosroes.  Les  habitants  ne  son- 
g^rent  plus  alors  qu*a  quitter  leurs  de- 
meures.  Deja  un  certain  nombre  d'entre 
eux  avaient  oris  ce  parti  quand  Tarriv^e 
d'un  corps  ue  six  milic  hommes ,  com- 
mand^ par  les  chefs  preposes  a  la  garde 
du  Liban,  rendit  aux  Antiochiens  tout 
leur  courage.  Cbosroes  envoya  un  inter- 
prete  pour  traiter  aux  conditions  deja 
propose.  Cette  d-marche  paciGaue  fut 
repoussi^.  Les  habitants  accanlerent 
d'outrages  le  messager  emiemi;  comme 
il  6*obstinait  a  entamer  des  negocia- 
tions,  ils  lui  lancerent  une  gr^Ie  de 
pierres ,  et  le  forcerent  a  se  retirer.  Cbos- 
roes se  d^cida  k  commencer  le  si^e.  II 
comprit  bientot  le  parti  qu'on  pouvait 
tirer  de  TOrocasias;  par  ses  ordres  un 
corps  de  Perses  s'empara  de  ce  rocher. 
De  leur  c6te,  les  assieges,  aOn  de  placer 
un  plus  grand  nombre  de  combattants 
en  face  de  rOrocasias,^tablirent  sur 
la  muraille  un  piancher  suspendu  au- 
dessus  du  precipice,  et  se  presserent  en 
masse  sur  ce  pomt.  Les  eonemis  demeu- 
rerent  immobiles  dans  leur  position. 

Cependant  le  nombre  des  assieg^ 
grossissait  k  chaque  instant  sur  la  fragile 
sail  lie  du  mur.  Cet  echafaudage,  elev^  a 
la  hSte,  rompit  sous  le  poids ;  tons  ceux 
qu'il  soutenait,  pr^cipites  d'une  grande 
hauteur,  perirent  dans  la  chute;  les  plus 
beureux  oeserterent  leur  poste  et  r^pan- 
dirent  dans  la  ville  ipie  terreur jpanique, 
en  criant  qu*une  breche  ^tait  faite  a  la 
muraille.  Les  Antiochiens  crurent  deja 
voir  les  Perses  dans  leurs  murs.  lis  pri- 
r^pt  la  tuite  vers  la  porte  de  Daphne , 
la  seule  qui  ne  fdt  pasbloqu^e  par  les  as- 
si^geants .  Pendant  ce  tumulte,  les  Per- 
ses escaladaient  sans  obstacle  les  rem- 
parts.  Arrive  au  sommet ,  ils  s'arr^te- 
rent,  contemplant  avec  surprise  ce 
qui  se  passait  dans  les  rues.  Les  fuyards, 
dans  leur  precipitation,  s'^rasaient; 
les  morts  jonchaient  le  terrain  comme 


104 


L'UNIVERS. 


sur  an  champ  de  bataille.  Cbosro^  crai- 
gnait  de  se  faisser  attirer  par  une  ruse 
de  guerre  dans  des  rues  ^troites  et  si- 
nueuses  C).  II  re^arda  tranquillement 
la  retraite  des  Antiochiens.  Enfin  il  s'a- 
vanca  au  centre  de  la  viile,  et  reocontra 
quefque  resistance.  Lk  s*^taient  r^unis, 
sur  une  ligne  serr^,  les  jeunes  gens  oui 
avaient  entretenu  et  conserve  dans  les 
querelles  du  cirque  queloue  courage.  lis 
engagerent  avec  les  Baroares  une  lutte 
glorieuse  mats  inutile.  Cette  brave  jeu- 
nesse  p^rit  accablde  sous  le  nombre.  Le 
roi  de  Perse,  t^moin  de  leur  valeur,  eut 
un  moment  la  pens^e  de  les  sauver ;  mais 
il  enfut  detourn^  par  un  de  ses  officiers. 
Lorsqu'il  n'y  eut  plus  de  vaincus  h  mettre 
en  fuite  ou  h  massacrer,  les  vainqueurs 
songerent  au  pillage;  apres  avoir  reuni 
un  immense  butin,  its  mirent  le  feu  k  la 
vitle.  La  p^rincipale  ^lise,  depouilide 
par  Chosroesde  tons  ses  ornements  et  de 
ses  marbres  prdcieux,  et  le  quartier  d*Aii- 
ttoche  appel6  le  Ceratseum  C^},  tohapp^- 
rent,  soitd^apres  Tordre  du  roi,  soit  par 
basard,  a  Tincendie.  A  Faspect  des  cen- 
dres  encore  fumantes,  les  ambassadeurs 
Jean  et  Julien,  qui  avaient  si  raal  inspire 
les  habitants  de  la  ville  d^truite ,  obtin- 
rent  audience  du  roi.  lis  conclurent  un 
traits  de  paix  avec  les  Perses.  On  con- 
vint  quel'empereur  payerait,  non  h  titre 
de  tnbut,  mais  sous  le  nom  de  pension, 
une  somme  annuelle  au  roi  de  Perse. 

Quoique  la  paix  f^lt  sign^e,  Chosroes 
promena  son  arm^e  dans  toute  la  Svrie. 
Il  visita  S^leucie  et  offrit,  sur  le  bord 
de  la  mer,  des  sacrifices  au  Soleil.  I(  tra- 
versa  ensuite  Daphne;  un  de  ses  cava- 
liers fut  tu6  dans  ce  bourg  par  un  bou- 
cher  qu'il  poursuivait.  Ghosrods  fit  met* 
tre  le  feu  a  I'^lise;  puis  il  continua  son 
voyage  par  Apam^.  Les  habitants  trem- 
bl^rent  lorsqu'ils  virent  approcher  lesen- 
nemis.  D^jh,  avant  d'entrerdans  la  ville, 
le  roi  avait  demand^  une  somrae  de 
mille  livres  d'argent.  Ilpromettait,  d  ce 
prix ,  de  prendre  la  route  la  plus  courte 
pour  retourner  en  M^sopotamie.  Le 
people  se  soumit  h  cette  contribution; 
mais  Chosroes,  entr6  dans  Apam^,  d^* 
pouilJa  r^glise  de  toutes  ses  richesses. 


(*)  Un  htotorleo  dit  mtoieque  les  Perses  fai- 
saient  sigoe  k  leuraennemis  de  sVloigner. 
(*')  To  >.ey6|j.£vov  KspaxaTov. 


II  voulutprofiterdesons^iourdanseette 
ville  pour  voir  les  jeux  du  cirque.  La^ 
deux  factions ,  la  verte  et  la  bleoe, 
pr^arerent  aussitdt  k  lutter  en 
du  roi.  Ghosro^  connaissait  1 
renoe  accordee  par  Justlnien  a  la 
bleue ;  un  cocher  de  cette  li  vr^  etait 
le  point  de  gagner  le  prix.  Cfaosrote 
cria  de  s'arreter ,  et  lui  dtfendit  de  ^ 
set  dans  sa  course  les  chars  conduitS[ 
les  verts.  Un  citoyen  d'Apam^  Tint 
plaindre  d'un  soldat  perse  qui  avait  i 
trag6  sa  fille;  le  ooupable  futimme^ 
mentcondamn^  h  mort.  On  le  com 
aulieu  de  rex6cution,  odl  une  foule 
breuse  demanda  sa  grdee ;  le  eoi  ' 
fut  ramen6  au  palais ,  et  pendo 
secretement.La  volont^  arbitrairedi 
maintenait  ainsi  la  discipline  dans 
m^;  on  en  eut  la  preuve  ioi 
Perses  repass^rent  TEuphrate. 
avait  fait  Jeter  un  pont  sur  !c 
Obban^  (') ;  il  fit  proclamer  que  les: 
dats  pourraient  traverser  le  pool  p# 
dant  trois  jours ;  au  bout  de  ee  tenne^l 
lefitcouper:  beaucoup  de  corps  nV 
dataires  regagnerent  Tarm^e,  coittei^ 
purent,  pard^autresroutes,  pluslov  "^ 
et  plus  p^nibles,  non  pastoutefoii 
pilier  les  cantons  syriens. 

Gependant  le  roi  en  quittant  Apai 
voulut  encore  une  fois  ran^nner' 
cis ;  il  demanda  aux  habitants  de 
la  gamison  sHls  ne  voulaient  voir 
ville  saccag6e.  Ces  menaces  n'intii 
rent  pas  les  Svriens :  lis  cacb^reot  bi 
nison  dans  des  caveaux,  et  assurt^ 
par  serment  qu'il  n*y  avait  pas  no 
soldat  dans  feurs  murs.  Chosrt)^ 
pouvant  avoir  des  esclaves,  voulut 
rargent ;  il  parvint  h  obtenir,  dod  i 
peine,  deux  cents  livres  d'or.  Enfll 
auitta  la  Syrie,jivec  un  grand  non 
ae  prisonniers;  il  en  peupla  one 
nouvelle ,  oui  porta  le  nom  d'. '  "^ 
de  Chosroes, 

On  voit  avec  peine  rindiflfercnce 
.  les  ambassadeurs  de  Justinien  vnr 
rent  pour  ces  malheureux ,  ai 
leur  pays.  Mais  Fempereur  n'avait 
tresocsque  pour  la  construction  de  d_ 
veaux  Edifices.  II  vint  cependant  en  «• 

(*)Appele  fiate*  par  les  Aral)e».r<>y.  ««>«■# 
de  Saint-Martin ,  dans  YHitU  du  Bat-Bmh^ 
Lebeao ,  t.  IX,  p.  S6. 


SYRIE  ANCIENNE. 


105 


anxS^ens,  etoontribua  g^nereusement 
a  relever  Antioche.  Au  moyen  des  dons 
fiiitspar  Justinien,  Antioche  eutde  nou- 
veaux  palais ,  des  thermes  magnifiques, 
deux  ^lises  nouvelles,  monuments 
somptQeux  d6di6s  k  la  Vierge  et  a  saint 
Michel.  Les  travaux  f arent  ex^cut^s  avec 
iotelligence;  on  donna  une  nouvelle  di- 
raetion  au  cours  du  fleuve;  i'Oronte 
roala  ses  eaux  dans  un  lit  plus  large , 
et  mieux  dispose  pour  la  d^ense  de  la 
TiUe.  Les  rues  furent  bien  pav6ea ;  on 
apiaoit  oelles  dont  une  pente  trop 
rode  rendait  Faeces  difficile;  les  eaux 
D^oessaires  aux  besoins  des  habitants 
fiirent,  par  des  ouvrages  d*art ,  babile- 
meDtdistribute  dans  les  diff^rents  quar- 
tien.  La  viUe  haute ,  blitie  sor  des  ro- 
chers,  eutdes  paits  en  nombre  suifisant. 
Eofin  les  ing^nieurs  previnrent  les  d^bor- 
deipentsqui  inondaient,  pendant  I'hiver, 
la  partie  d' Antioche  voisine  de  I'Oro- 
eaaas.  Les  eaux  qui  desoendaient  par 
torrents  des  hauteurs  s'arr^taient,  dans 
h  siison  des  pluies,  entre  ce  rocher 
et  ime  autre  montagne  appel^  Stauris. 
Hetenues  en  oet  endroit ,  elles  s'amas- 
saient  jusqu'au  sommet  des  remparts 
else  piedpitaient  ensuite  sur  la  ville,  ou 
elles  eausaient  somrentde  grands  d^^ts. 
Itae  d^iie  du  cdt^  des  marailles,  de  Tau- 
tre  edte  des  trou^s  faites  dans  le  roc, 
Miiterent  r^nlement  des  eaux.  Mais 
de  torn  eestrafaux  celui  qui  fait  le  plus 
dlionneur  h  JustinieD,  e*est  asBurement 
la  oonstmction  de  trois  hdpitaux ;  il  y 
ea  a?ait  un  pour  les  hommes ,  un  ^ur 
leifemnies;  le  troisidme  ^tait  sp^iale- 
ment  destine  aux  voyagears  malades.  II 
pantt  toutefois  qu*on  ne  se  pressa 
poiot  d'achever  ces  ^ifices.  Les  malades 
n'eotrerent  en  possession  des  trois  hopi- 
taoxqa'enl»69. 

Cbosrote  86  pr^rait,  en  542,  ^  faire 
me  nouvelle  expedition.  B^lisaire  vint 
e&  Orient  pour  combattre  les  Perses. 
^rmi  les  autres  g6n6raux  envoy^s  en 
Sfne  on  comptait  un  neveu  de  Justi- 
ttBQ,  et  Buz&,  qui  eommandait  les 
forces  de  la  province  lorsque,  deux  an* 
^auparavant,  Ghosro^^tait  venu  la 
^t^er.  Buzhs ,  pen(|ant  toute  la  du- 
\^  de  cette  invasion ,  se  cacha  avec  Fe- 
iile  de  ses  troupes.  II  voulait  cette  fois 
^(MitraindreB^lisaire  ^  attendre  Fennemi 
dmi^re  les  muraillesdes  villes.  B^lisaire 


repoussa  ces  lllches  conseiis,  et  ii 
montra,  malgr6  le  decouragement  des 
troupes,  une  contenance  si  fl^re ,  que  le 
roi  aemanda  k  trailer.  Une  suite  conti- 
nuelle  de  troves  et  d'hostilit^  dont  la 
M6sopotamie  fiit  le  th^tre  laissa ,  pen* 
dantvingtann^,  la  Syrie  dans  une  com- 
plete tranquilJite.  Rien  ne  presageait 
que  cet  ^tat  de  paix  dtit  cesser  bientdt. 
Les  Remains  assi^geaient  79isibe;  et 
d^ja  ils  esperaient  se  rendre  mattres 
de  cette  ville  importante;  mais  Chos- 
roes  leva  une  armee  pour  la  d^ager ,  et 
11  envoya  une  partie  de  ses  troupes  vers 
la  Syne  pour  op^rer  une  diversion. 
Adaarmanes,  avec  six  mille  hommes,  pas- 
saFEuphrate,  et  parol  brusquement  de- 
vant  Antioche  r);  sur  son  passase  il 
n*avait  trouve  que  des  tribus  arabes, 
toujours  prdtes  au  pillage.  Le  comte  Ma- 
gnus prit  la  fuile  avec  ses  soldats;dan8 
sa  precipitation,  il  faillit  tomber  aux 
mains  de  Fennemi.  Ainsi  Antioche, 
sans  defenseurs  ,  d^ert^e  par  une  partie 
de  ses  habitants,  allait  devenir  encore 
une  fois  la  proie  des  barbares ;  Finexp6- 
rience  d'Adaarraaneslasauva.  Les  Perses 
craignirent  de  trouver  une  resistance  de- 
sesp6r^e;  ils  s'eloignerent  d' Antioche, 
et  se  rejet^nt  sur  H^racl^e,  bourgade 
qui  touchait  a  Daphn6 ,  et  la  brdl^rent. 
Adaarman^s  n^avan^a  pas  plus  loin; 
Apani^e,  menacee  au  relour  de  Far- 
m^  perse,  voulut  se  racheler  du  pil- 
lage. Adaarmanes  accepta  Fargent  que 
les  Apameens  lui  pr^ent^rent,  et  cal- 
ma  leurs  inqui^udes;  lorsqu^il  les  vit, 
comptant  sur  la  foi  de  ses  promesses , 
plough  dans  la  plus  complete  s^curit^, 
il  entra  dans  la  ville,  rait  le  feu  aux 
maisons,  et  emmena  les  habitants,  char- 
ges de  chatnes ,  au  dela  de  Ffiuphrate 
(573).  La  Syrie  ne  devait  pas  avoir  de 
tr^ve  a  ses  maux  :  soixante  mi  He  per- 
sonnes  p^rirent  par  le  tremblement  de 
terre  de  Fannie  589  (**). 

r^OUVBAUTBEMBLEMBNTDB  TEBBB  ; 
LBS  BHPBBBUBS  PHOGAS  BT  HeBA- 
CLIUS;  COIVQUiTBDB  LA   SYBIE    PAB 

LES  Ababes.  — Le  dernier  jour  du  mois 
Hyperb^retaeus  (seplembre),  trois  heures 
apres  le  coucher  du  soleii ,  on  sentit  les 

f)  TMophane  dcril  Ardtananes  et  Artahan^ ; 
—  Kkc^b.  CaUist,  OuardaarmattM;  —  Tbto- 
vibjISAmoctiit&.Adormaanis. 
'^^*)Eva«re,VI,7.-Klc*ph..XVni,  13. 


106 


L'UHIVERS. 


premiereasecoiisses;  qoelques  instants 
apr^s ,  les  plus  beaux  edifices  de  la  viile 
n  6taient  plus  que  des  monceaux  de  rui- 
nes.  La  grande  ^glise  fut  presque  entie- 
remeat  detruite ;  ie  dome  seul  deroeura 
intact ;  cette  lourde  masse  de  charpente 
et  de  metal,  d^tacb^ede  sa  base,  tomba 
8ur  des  murs  solidement  construits  et 
restadaiu  uq  parfait^auilibre,  comme 
si  la  mail)  des'nommes  redt  suspeodue. 
On  ne  vit  point  se  renouveler  |es  de- 
sordres  qui  avaient  suivi  Ie  tremble* 
meat  de  terre  en  526 ;  neanmoins  e'en 
6tait  fait  de  la  Syrie :  cbaque  jour  lea 
Perses  s'approcbaieot  de  TEuphrate, 
en  vahissaient  V  A.sie  MIneure,  §t  isolaien) 
la  province  d'Antioche. 

Au  milieu  de  tQus  ees  dangers',  Tu- 
surpateur  Pbocas  s'efforcait  d'obtenir 
la  protection  du  ciel ;  il  menacait  les  Juifs 
des  plus  rigoureux  tourments  s'ils  n*a- 
bandonnaientlaloideMoise.  Ceqx  d*An- 
tioche,  exasp^res,  tralnerent  Tevfique 
Anastase  sur  u^  bOcher,  et  Ie  brdlerent 
Tif.  XjC  massapre  des  Juifs  d'Antiocbe 

Eunit  cette  barbare  execution.  Au  lieu  de 
ourreaux,  Pbocas  envoya  toute  une 
arm^ecommandee  par  Bonoseet  Cotljont 
mattres  de  la  miiice  (610). 

Pbocas  la  m^me  annee  fut  renvers^  du 
tr6ne  par  H^raclius.  I^a  Syrie  gagna  h  c^ 
changement  de  maitre.  Heraclius  se  fit  rd* 
douter  des  Perses*,  il  vint,  en  632,  a  Da- 
mas  pour  defendre  la  province  centre 
une  armee  de  Cbosroes.  Mais  Ie  danger 
n'^tait  pas  du  cdt^  de  la  Perse;  les  enne- 
mis  vraiment  redoutables  venaientd^ja 
de  VArabie.  E^unis  en  corps  de  nation 
depuis  quelques  ann^es ,  les  tribus  d^ 
desert,  par  1  ordre  de  Mahomet,  avaient 
essay^  leurs  forces  contre  les  Romaips. 
Une  petite  troupe  d'Arabes  s'^tait  avan- 
cee  jusque  sous  les  murs  de  Moutah , 
bourg  situe  sur  la  frontiere  de  la  Pales-: 
tine,  de  la  Syrie  et  du  desert  arabique. 
Arr6t<^s  par  les  Rpmains,  bien  supe- 
rieurs  en  nombre,  les  Arabes,  probable- 
ment  vaincus  q^ais  nop  d^cqurages,  ^e 
retirerent. 

Cette  tentative  avait  tourn^.  leufs  re- 
cards  du  c6t6  de  la  Syrie  ^apres  la  mort 
du  prophete  ils  commencerent  leur?  in- 
cursions. £n  633,  tandis  que  Tempereur 
Heraclius  observait  toujours  les  Perses 
h  Damas ,  Abou-Bekr ,  successeur  de 
Mahomet,  donna  la  conduite  de  Farm^e 


des  croyantsa  trois  chefs :  I6zid,filsd'iL* 
bou-Sophian,  Abou-Obaida,  fits  de  Djar* 
r&h ,  et  SchoUrah,  fils  de  Hassaa&h.  lb 
marcberent  en  droite  ligne  si^r  Laim 
Leurs  exploits  et  la  conqu^te  di|  payi, 
rapidement soumis  au  croissant,  o'aBr 
partiemient  plus  ^  Pbistoire  ^qciepmili: 
la  Syrie. 

CHAPITREIX. 

I 

HftSTOlBB  DU  COMltfBBGB  CSBC  If 
SYBTBIfS,  DBPUIS  LES  TEHPS  lU. 
PLUS  BB€UL)^S  JUSQU*A  LA  P!K  If 
LA  DOMINATION  BOMAIHB. 

Nous  avons  essays  jusqa'tei  d8  Ml 
conaattve  les  nombveuses  r^IoM 
jpii ,  depuk  les  temps  les  plus  imM 
jusqu^ii  rinvasion  des  Arabes,  ODt  il> 
oa  moins  modifi^  l*^t  social  et  pM 
que  des  populations  de  l^ncieoacSjiift 
Nous  TouloBs,  dans  les  pages  qui  vfli 
suivre,  rassembler  un  certain  nmbnk 
fttits  qui  se  rattachent  directaiBiiiC  i 
Dotre  r^cit ,  et  qui  peuvent  v^aadnM 
ses  diverses  parties  une  vive  loini^r)' 

Le  commerce,  cneoreplus  Mhg^ 
culture,  a  foit,  dans  Tantiqum,  |a  rt* 
obesse,  la  splendeor  et  la  prospMtftdi 
la  Srrie.  Qnelles  eUient  la  natureetrf 
tendfue  de  oe  commerce?  Cest  likpwl 
historique ,  tr^-grave  1  netre  seos^  # 
Kous  nous  proposoos  d'examiDei. 

II  y  a  lieu  de  s'^nner  peat<to# 
nos  rechercbes  portent  ici  occIostmm^. 
sur  le  commerce.  Poarqnoi  ne  fieo<M 
de  rfndustrie?  Ce  sont  la  deosdNil 
^ue  rhistorien  des  temps  mod^rses  n 
jamais  s^panto.  On  ne  peat  gaere  «* 
jourd^hui  se  rendre  comple  des  aflWw 
commerciales  d'un  grand  £tat,  sanseoie 
nattre  les  r^^ultats  de  son  action  in^ 
trielle.  £n  voici  la  raison  :eeioDtleiv 
briques,  ou  phitdt  c^est  le  tranil  libnti 
rhomme  sans  cesse  snrexoit^  P?"*  '^  ^ 
currenoequi,  de  notre  temps,  alimatej 
commerce.  II  y  a  bien ,  comme  sQtnm 
des  echangesd^objets  non  manafaetiinl^ 
d*un  pays  k  Tautre.  Tel  peuple  modffij 
comme  les  Ph^niciens  dans  rantiquiw» 
parcourt  les  terras  ou  les  mers  pour  *; 

(*)  Nous  regreUoDfl  de  tfavolr  I»vJLS? 
do  plan  et  des  dimeosions  de  cette  hWoWf* 
donner  id  plua  d*e(endoe  k  ce  chapitrt^pow 
l«qael  nous  aviiHU  fait  de  nombrema  rtoa* 
cl^ea. 


SYRIE  AWCIEIf NE. 


107 


I  piMoier Jm  pfodaedons  naturelies  d'une 
contr^  plus  ou  moins  lointaine;  mais 
\  e'est  encore  rindustrie  qui  vivifie  ce 
I  commeroe,  et  qui,  si  nous  pouvons  nous 
I  servir  de  cette  expression,  centuple  sss 
forces.  Les  vaisseaux  qui  oouvrent  no9 
ports,  les  lonrdes  voitures  qui  roulent 
kfitement  sur  nos  routes,  necontiennent 
soQvent  que  des  denr6fts  exclusivement 
i^rf^  a  DOS  fabriques.  JN'eu  (^tait-il 
done  point  ainsi  dans  Fantiquit^ ,  et  ne 
pourrait-oQ  comparer  le  commerce  de 
TAngleterre  ou  de  la  France  h  celui  de  Tyr 
ou  de  Cartbage  ?  Non  assur^ment.  II  y  a 
e&treiecommerce  moderne  et  le  commer? 
ttancien  cette  grave  difference  que  le  der^ 
Dier  n'a  jamais  eu  pour  base  Tindustrie. 
Eng^n^ral,  les  objets  d'une  consom* 
naatioQ  generale  et  de  premiere  n^es^ 
aU,\%&  eioffes,  par  exemple,  de  laineou 
decotOQ,  sortent  aujourdWi  de  nos  ma- 
Bufiictures  pour  passer  dans  les  maga* 
m  du  marchand.  G'est  la  que  le  ricbe 
etle  pauvrevont  cbercber  la  toile  et  le 
drap  qui  servent  k  les  couvrir  et  a  les 
iubiUer.  RIen  de  semblable  dans  Tantir 
quit6 :  il  y  avait  alors  deux  classes  bien 
digtioctes ,  eelle  des  bommes  liores  ^  et 
edle  des  esclaves.  C^^tait  Tesclave  qui 
travaillait  les  toiles,  les  draps,  les  infr- 
truroeats  aratoires,  les  armes,  eto.;  enuB 
mot,  tout  ce  qui  6tait  de  premiere  n^ces- 
sitepoiij'Ja/aini//e  sortait  des  mains  des 
esciares.  Voili  ee  qui  explique  le  discr^ 
ditoj^  tomba  Tindustrie  dans  Tantiquit^. 
U  J  eut,  en  effet,  dans  eertaines  villes  po- 
puleuses,  des  artisans  libres  par  leur 
naissance,  qui  travaillaient  pour  eeuxqui 
o'avaient  point  d'esdaves  et  qui  ^taient 
paavres  corame  eux.  Cette  petite  Indus- 
trie, nous  le  croyons,  preserva  plus  d'une 
fois  des  crises  sociales,  c'est-a^iire  des 
plus  violentes  perturbations,  les  republi- 
<|oe8  de  Tantiquite.  £lle  occupait  etnour- 
fittait  toute  cette  foule  qui,  a  Rome  par 
exemple ,  ne  pouvait  trouver  tnujours , 
dangle  ^stemede  la  clientele,  dans  les 
dttordres  poiitiques ,  les  moyens  de  sub- 
venir  h  ses  premiers  besoins.  Les  ^ri- 
^liiig  de  la  Grece  et  de  Rome  ne  nous 
<N>t  malheureusement  transmis  que  des 
^l8  rares  et  tres-incomplets  sur  cette 
lodostrie  des  grandes  villes.  Rien,  dans 
one  society  ou  regnait  resclavage,  ne 
poB^ait  leur  donner  une  id^e  de  In  qigni^ 
^  des  avantages  du  travail  libre.   Us 


m^prisaient  celui  qui ,  de  son  plein  gr6, 
devenait  artisan.  Travaiiler  pour  autnii, 
c'^tait,  dans  leur  opinion,  se  rapprocher 
deT^tre  qu'iis  consid^raient,  non  comma 
un  bomme,  mais  comme  une  ohose:  c'e- 
tait  s'assimiler  a  Teselave. 

Or,  dans  une  6oei^t6  ainsi  organist, 
eu ,  g^n^ralement,  \zfamiile,  au  moyen 
du  travail  servile ,  pourvoyait  k  ses  pro- 
pres  besoins ,  quelle  devait  dtre  la  nature 
du  commerce?  II  est  facile  maintenant 
de  repondre  a  cette  question  :  le  com- 
merce des  anciens ,  a  de  rares  et  insi- 
gnifiantes  exceptions  pres,  s'appli^na 
exclusivement  ^  la  transmission  et  a  la 
vente  des  objets  de  luxe. 

C'etait  en  Asie,  on  le  oon^it,  que 
devaient  se  rencontrer  les  marchands 
par  excellence,  et  surtout  dans  cette  par- 
tie  de  I'Asie  qui ,  avoisinant  la  M^diter- 
ran^e,  etait  admirablement  plac^e  pour 
mettre  en  contact  TOrient  et  FOecldent. 
L'Europe  foumissait ,  11  est  vrai ,  ram- 
fare  de  la  Baltique  et  retain  des  ties  Cas- 
siterides;  eertaines  contr^  derint^rieur 
de  TAfrique,  la  poudred'or,  de  Tivoire, 
et  des  esclaves  noirs ;  mais  peut-on  com- 
parer ces  objets  pour  leur  quantity  et 
leur  valour  a  oes  cachemires ,  ^  ces  v^- 
tements  de  soie ,  k  cette  profusion  d'^pi- 
ees  et  de  parfums  qu'envoyait  cheque 
jour  le  myst^rieux  Orient? 

Cetait  I^Asie  qui,  dans  nn  temps  ou 
Ton  ne  transpoTtait,pour  les  vendre,  que 
les  objets  deluxe ,  devait  avoir  le  mono- 
pole  du  commerce  dn  monde. 

Les  Pb^niciens,  se  trouvant  h  rextr6- 
mit^  du  continent  asiatique,  dans  une 
position  telle,  qu'ils  pouvaient  commu- 
niquer  sans  interm^diaire  avec  TAfri- 
que  et  TEurope,  absorberent  lOngtemps 
tons  les  profits  de  ce  commerce.  Leurs 
riches  et  populeuses  cit^s  ^talent,  comme 
ledevint  plustard  Alexandrie,  I'entrepdt 
de  ces  miile  dearies  qu'on  tirait  de  Hnde, 
de  la  Chine,  de  la  Sib^'ie,  des  pays  qui 
avoisinent  la  mer  Caspienne,  de  I'Asie 
oentrale,  de  TArabie  et  de  eelles  que  de 
hardis  navigateursrecevaient  par  6chan- 
ge  dans  les  contr^s  septentnonales  de 
rAfrique  et  sur  les  cdtes  de  I'Espagne, 
de  la  Gaule ,  de  fltalie  et  de  la  Gr^ce. 

Les  Ph^nidens  tiraient  d'immenses 
ricbesses  du  commerce  par  mer.  La  na- 
vigation ,  a  IVpoque  de  la  splendeur  de 
Tyr  et  de  Sidon,  n'etait,  il  est  vrai ,  ni 


lOS 


LTOnVERS. 


aiissi  sdre  ni  aussi  rapide  mi*aa  temps 
des  Alexandrins,  ou,  grdce  a  la  science, 
die  prit  un  grand  essor.  Mais  ce  qui  fit 
la  puissance  des  Ph^niciens ,  c*est  que 
sur  ce  vaste  bassin  de  la  Mcditerran^ 
ils  ne  rencontraient  point  de  rivaux ,  et 
que  TAsie,  1' Europe  et  TAfrigue  ne  pou- 
vaient  communiquer  qu*^  I'aide  de  leurs 
vaisseaux. 

II  ne  faudrait  pas  croire  que  ractivit^ 
des  Ph^niciens  e6t  ^t^  absorbs  tout  en- 
tiere  par  la  navigation.  Le  commerce 
qui  se  faisait  par  mer  ne  pouvait  subsis- 
ter  qu'a  la  condition  d'etre  aliment^  par 
un  autre  commerce,  celui  qui  se  faisait 

Sar  terre ,  en  Asie,  et  qui  fournissait  les 
enr^es  que  les  vaisseaux,  partis  des  ports 
de  la  Ph^nicie,  allaient  6cbanger  contra 
les  produits  de  fOccident. 

Quelles  ^taient  la  nature  et  T^tendue 
de  ce  dernier  commerce?  Quels  en  etaient 
Jes  principaux  agents?  Ce  sont  la  des 
questions  qui  concernent  sp^cialement , 
il  est  vrai,l  histoire  de  la  Phenicie,  mais 
qui  n^anmoins  ^  en  Tabsenoe  de  docu- 
ments relatifs  a  la  Syrie,  peuvent  seules 
nous  eclairer ,  nous  le  croyons ,  sur  le 
role  que  joua  cette  derni^re  contr^edans 
les  affaires  commercialesde  la  haute  an- 
tiquity. D'aiileurs,  plus  tard,  la  Syrie 
devait  h^riter  au  moms  en  partie  du  cona- 
merce  de  la  Phenicie,  et  se  mettreen  rap- 
port, pour  son  propre  compte,  avec  TA- 
rabie,  la  Babylonie  et  les  autres  pa^rs  de 
I'Asie.  On  peut  done,  par  une  legitime 
induction,  appliquer  quelquefois  aux  Sy- 
riens  ce  que  les  auteurs  anciens,  h^reux 
ou  autres,  nous  ont  dit  des  voyages  entre- 
pris  ou  des  commissions  donnas  aux  ca- 
ravanes,  par  les  marchands  de  Tyr  et  de 
Sidon. 

Quand  les  Pheniciens  ou  les  peuplades 
qui  les  avoisinaient  voulaient  penetrer 
en  Arabic  pour  y  acheter  les  aromates 
ou  les  denrees  de  rextr^me  Orient  qu'on 
apportait  dans  cette  contr^e  par  le  eolfe 
Persique  ou  la  mer  Rouge,  ils  s'aares- 
saient  aux  Arabesdu  ddsert  qui  iouaient 
aux  marchands  et  aux  voyageurs  des 
chameaux,  des  guides  et  des  escortes 
armies.  «  Tons  les  6mirs  de  C^dar,  dit 
£z^chiel  en  s'adressant  a  Tyr,  traiiqud- 
rent  avec  toi  et  famen^rent  leurs  dro- 
madaires  (*), » Les  principales  tribusara- 

n  l^tehid ,  XXTII ,  21  et  S7. 


bes  qui  farsaient  le  commerce  par  can* 
vanes,  et  se  trouvaient  dans  des  rapporti 
assidus  avec  les  Pb^niciens,  etaient  edkt 
des  Madianites  et  des  Idumeens.  Gt 
demiers  eurent  en  leur  possession  l| 
ports  d^Elath  et  d'Aziongaber  et  Pelii; 
ville  fortifi^  dans  Tiuterieur  des  tofl 
qui  servait  d'entrepdt  aux  deorte  i 
r  Arable. «  Toutescestribus,ditM.B« 
ren ,  toient  les  m^mes  que  les  Greesi 
d^tgn^es  sous  le  nom  d*Arabes  Ad 
theens ,  nom  que  Ton  a  longtemps  apt 
que  a  tons  les  peuples  derArabieM 
tentrionale  et  que  Ton  a  restrdDt  I 
puis  aux  habitants  de  THedjaz.  Diodoi 
qui  d^peint  si  fiddement  leur  maoi^ 
vivre,  se  garde  bien  d'oublierlear( 
merce  de  caravanes  vers  TY^eo.  .^ 
assez  grande  partie  (f  entre  eux,  ^ 
s'occtq)erU  a  transporter  jusq^d  li 
diterranie  I'encens,  la  m^he,  H 
tree  prMeux   aromates ,  qt^w  i 
am^ne  de  l' Arabic  Heweuse,  D  i 
blerait  par  la  que  ces  Arabes  n'M$ 

Easeux-m^mes  dans  rY^men;  q8%i 
ornaient  a  foumir  une  traite  ' 
diaire  jusqu^a  la  rencontre  des 
nes  venant  de  ce  pavs ,  et  en  re 
les  charges  qu'il  lallait  transfwrter] 
loin.  Mais  cette secondesuppositioD' 
dut  pas  Tautre ;  car  le  trafiqnantdh 
de  oonducteurs  en  route  suivant " 
sion  ou  le  motif :  a  auoi  nous  aj< 
qu^il  y  eut  mime  plus  d'une  ibis 
ravanes  formes  dans  I'Arabie  H^ 
pour  se  rendre  en  Phenicie,  pui 
proph^te  dit  expressdment  que  iei 
ciants  de  Javan  et  de  Vadan  p' 
des  marchandises  de  FY^men  a 
Ilyavaitaussi,  autempsdela 
de  la  Phenicie,  des  caravanes  qui 
rigeaient  vers  le  golfe  Persiqoe.  C( 
les  caravanes  de  D6dan,  dont  pf'*' 
prophetes.  Sur  cette  route,  la 
Gerra  servait  d>ntrej[»6t  aux 
discs  de  Textrlme  Asie,  qu*on 
tait  de  la  c6te  orientale  de  la  . 
arabique  aux  bords  de  la  M^ii 
En  resumant  ses  considerations 
commerce  des  Pheniciens  avecl  Ai 
Heeren  s'exprime  ainsi :  «  r  H 
dent  que  TArabie  fut  ie  si^ej)] 
du  commerce  continental  des 

(♦)  Heeren,  Politique  et  eammff^JSl 
olet  de  t*antiqmU,  t,  II  de  la  H*"" 
* '",  p.  IIS. 


plee  de  i 
firan^aiae, 


SYRIE  AlfCIENNE. 


100 


et  k  eeotre  de  Irars  eommonicatioiis 
amrfohiopie  etFInde.  Les  yastes  d^ 
aats  de  sable  qui  pr^serverent  de  tout 
toDperArabie  de  I  avidity  des  <x)iiqu^- 
nuts,  n*arr^reDt  pas  celle  des  mar* 
ehaads  ^tnogers.  Des  caravaoes  4:oin- 
poski  de  divenes  peuplades  la  trayer* 
sereat  dans  tousles  sens,  et  y  trafiyue- 
nntdiieetemeDtou  indirectement  ywn 
fecoinpte  des  Pbtoieiens,  doot  les  yilles 
flurftimes  deviorent  enfin  les  entrepots 
dese8deorees,qu'ils  repandirent  ensuite 
aiee  d'immenses  b^n^fices  dans  touies 
la  eoDtrees  de  TOccident.  T  Gecom- 
iMrce  dot  hre  pour  eux  d'autant  plus 
lKratif,qa*it  o'etait  foode  que  sur  des 
Mnnges,  coiume  on  pent  le  yoir  dans 
Ezechiel.  U  n'est  jamais  question  que  d*e- 
cbanges  dans  toutes  leurs  transactions , 
ftlesm^axpreeieux  n*yentraientaussi 
^  comme  marchandises.  Combien  le 
mareband  ph^icien  ne  devait-il  pas  ga- 
gnersorleslingotsd^argent  de  rlb^rie, 
qv'UedBDgeait  eontre  de  Tor  dans  TYe- 
men, o&  ee  dernier  metal  ^tait  si  abon- 
daot!  Combien  gagnatt-il  ^encore  sur 
fnatm  decrees  que  1' Arabe  ^tait  forc^ 
depreodredesa  main,  puisqu'il n^avait 
st&irequ'ii  lol  senl !  Mais  tandis  que  les 
i'b^nicieng  D*a?aient  a  soutenir  aucune 
coaeorreoee,  ils  en  ^blissaient  one 
P^rlesArabes,  en  faisant  venir  h  la 
UNs  de  divers  pays  les  mtoes  produe- 
tiOQS  qoe  fArabie  leor  fournissait.  Ils 
cttp^efiaieDtpar  la  qu'on  ne  leur  fit  des 

fix  arbitraires.  lis  pouyaient  se  passer, 
la  ngueur,  des  marchands  de  Saba  oa 
a  Adok,  puiiqu'Os  receyaient  de  Gerra 
les  dearies  de  ees  deux  pays ;  et  si  les 
^J'l'^cfaandsde  Gerra  avaient  voulu  ren- 
mtrcesdeor^,  ils  auraient  ^t^sup- 
pontes  par  eeox  de  TY^men.  3«  Les  rap- 
ports des  Pbteiciens  ayec  les  Arabes  fu- 
f:  teot  extr^mement  facilit^s  par  la  grande 
[  I^^Uanee  de  langage  de  ces  deux  peu- 
Jl^L'Dn  etPautre  parlaient  un  dialeete 
{wnf^  do  ni6nie  idiome ,  et  les  differen- 
|Ma  n'etaieot  pas  assez  grandes  pour  les 
^  •™^'*'"''' "'entendre.  Quel  ayanta^e 

le  marchand  ph^nt- 

servir  de  sa  propre 

contr6es  lointaines, 

*«  dtre  oblige  de  se  mettre  k  la  roerci 
tfWerpretes  pcrtides !  Get  avantagc  seul 
wwisuffi  pour  assurer  aux  Pheniciens 
Jeeommerce  exciusif  de  toute  FArabie, 


lors  mtoie  que  la  position  de  ce  pays 
n'en  edt  pas  rendu  I'entree  difficile  k 
des  concurrents  (*). » 

Nous  le  r^p^tons,  le  passage  que  nous 
yenons  de  citer  peut  s*appliquer  aux  Sy- 
riens,  qui  setrouyerent,  eux  aussi,  en  re- 
lations directes  avec  TAcabie  dds  Tios- 
tant  oin  d^lina  la  Phenicie. 

Les  Pheniciens  faisaient  aussi  un 
grand  commerce  ayec  I'figypte.  lis  y 
transportaient  prineipalement  les  den- 
rto  venues  de  rOccident,  et  aussi  les 
produits  naturels  des  proyinces  qui  tou- 
chaient  au  mont  Liban.  Cest  ainsi  qu'iis 
emportaientd'abord  par  la  yoiede  terre, 
et  plus  tard ,  au  temps  d' Amasis ,  par 
mer,  le  yin  de  la  Syrie.  Celui  de  la  Gna- 
lybonitide,  suiyant  Strabon,  ^it  tres- 
recherche.  C*^tait  le  meilleor  de  TAsie  : 
on  le  servait  sur  la  table  du  grand  roi. 
Plus  tard,  apr^  la  cbute  de  la  Phenicie, 
les  Syriens,  comme  nous  le  dirons, 
exporterent  eux-m^mes  les  produits  de 
leur  sol,  fertile  en  bl^  et  en  vms,  sans  re- 
courir  comme  autrefois  k  des  agents 
Interm^iaires. 

Hdtons-nous  d'ajouter  que  d^  les 
temps  les  plus  anciei^  les  Pheniciens 
acAietaient  en  Syrie  de  belles  laines,  sur- 
tout  dans  les  proyinces  qui  avoisinaient 
le  d6sert.  G'etaient  ces  laines  qui  ^taient 
mises  en  -eeuvre  et  teintes  en  pourpre 
dans  les  ateliers  deXyret  de  Sidon,  et 
qui  formaient,  quand  elles  ^talent  «on- 
yerties  en  ^toffes  d'un  grand  prix,  une 
des  principales  branches  du  commerce 
de  la  Phenicie. 

aeeren  a  dit,  en  parlant  de  la  grande 
race  qui  occupait  TAsie  occidentale : «  En 
Arable ,  elle  mena  la  yie  nomade ;  en 
Svrie,  elle  connut  Tagriculture  et  des 
demeures  fixes  ;«n  Babylonie,  elle  fonda 
la  vilie  la  plus  magnifique  de  rantiquit^ ; 
sur  Jes  cotes  de  la  Phenicie ,  elle  coos- 
tniisit  les  premiers  ports  et  ^quipa  des 
flottes  qui  lui  assurerent  le  commerce 
universel.  «  II  est  evident  que  si  ce  ta- 
bleau est  exact,  les  habitants  de  la  Sy- 
rie ,  vou^s  par  n^essit^  a  Tagriculture , 
durent  tirer  du  sol  qu'ils  exploitaient 
leur  prtncipale  richesse.  Mais  il  faut  re* 
marquer  que  parmi  les  provinces  de  la 
Syrie  il  y  en  avait  qui  ^taient  i>eu  ferti- 

(*)  HeereD ,  De  la  politioue  et  du  commerce 
des  pevpUs  de  rantiquile  ,\  11 ,  p.  128  et  saiVi 


no 


L^IflVERS. 


leSf  et  que  les  habitants  de  ces  prorinoos 
durent  cbercher  aiileurs  que  dans  la  cul- 
ture des  terres  un  aliment  a  leur  aetivite. 
Ceox-I^  principalement  se  liTrdrent  au 
commerce ,  et ,  dans  les  aneiens  temps , 
lis  devinrent,  il  n'en  faut  pas  douter, 
sur  les  deux  grandes  routes  oommercia- 
les  qui  aboutissaient  a  leur  pays,  les 
aeheteurs  de  ses  diverses  denr6es ,  quHls 
revendaient  aux  Ph^niciens. 

Les  marchands  des  bords  de  la  M^i- 
terran^  firent,  d^s  la  plus  haute  anti- 
quit^,  avec  la  Babj^lonie,  un  commerce 
tres-actif.  lis  en  tiraient  des  tissus  de 
Hn,  des  v^tements  qui  n'etaient  pas 
moins  renommes  et  recherches  que  les 
robes  m6dlques,  des  tapis  d^uoe  grande 
beauts,  et  millepetits  obiets  de  luxe,  par 
exemple  des  pierres  taili^es.  II  y  avait, 
comme  on  salt,  des  tisserandenes  dans 
toutes  les  villes  et  bourgs  qui  aroisi- 
naient  Babylone. 

D'autre^part,  les  Babyloniens  ten- 
daient  aussi  les  denrto  de  Textr^me 
Orient  lis  faisaient  ainsi  une  active  con- 
currence k  ces  Arabes  dont  nous  aTons 
parl^  plus  baut ,  qui  ^taient  les  posses- 
sears  de  rentrep6t  de  Gerra.  On  voyait 
arriver  h  Babylone ,  par  la  voie  de  terre 
ou  par  le  golfe  Persique,  la  cilnneile,  les 
perles  et  les  ^tofTes  de  I'lnde  et  du  Ca- 
chemir  teintes  de  couleurs  ^elatantes. 
C^taient  des  caravanes  qui  transpor- 
taient  en  Syrie,  d'abord  les  denr^s 
achet^es  a  Bafc^lone ,  ou  bien  encore  on 
ehargeait  des  Bateaux  qui  remontaient 
TEuphrate  jusqu'a  Thapsaque  (*).  11  y 
arait  affluence  de  marenands  dans  eette 
demidre  vilie.  lis  s*y  rendaient  de  tous 
les  points  de  la  l^rie,  de  la  Ph^nicie  et 
de  la  Palestine.  Pour  ceux  qui  organi- 
saient  leurs  carayanes  k  Damas ,  U61io- 
polls  (Baalbeck)  et  Palmyre  ^taient  les 
deux  principales  stations  (**).  On  a  re- 

(*)  La  roate  de  Babylone  en  Syrie  a  ^t4  in- 
diqu^  avec  asset  de  pr^slon  par  Strabon 
(p.  1084). 

(•♦)  Nous  renvoyons  id  a  Thistoire  de  la  Pal- 
myrene,  qoi  doit  avoir  une  place  sp^ale  dans 
la  collection  de  VUnwers.  Rous  noas  borne- 
ronn  a  signaler  t,  oeux  de  nos  lecteun  qui 
voadraient  avoir,  avant  la  publicaUon  doot 
nous  parlons,  des  notions  sanisantes  sur  rim- 

Sortance  commerciale  de  Palmyre,  Ponvrage 
eHeereo,  que -nous  avons  Aii\k  cit^  {jippeti' 
dice  y  du  volume  cinquieme  dela  traduction  fran- 

Sise ,  p.  308  el  auiv. ).  On  y  trouvera  un  extrait 
It  par  Tailor  d'on  mdmoire  etendu  sur  le 
eommerot  de  Palmyre  et  de  quelques  autref 


marque  que  toutes  les  caraYsna  qui  si 
dirigent  aujourd'hui  de  Damas  vters  FEa- 
phrate  s'arrdtent  encore  aux  niiaes  di 
Palmyre.  G'est  \k  g^^ralement  qu'ellM 
se  s6parent.  Entre  Heliopoiis  etl^lmjn 
il  y  avait  une  station  ^^m^.I^onuooat 
encore  deux  Yllles  syriennes,  situdeiDlui 
au  nord,  qui  durent  au  oorameroeloir 
prosperite,  Gyrrhus  et  surtout  Hierap 
lis,  la  cit^  la  plus  florissante  de  la  Kgya 
qui  touchait  a  TEuphrate,  grand  eeotn 
religieux,  dont  le  temple  celebre  ofiyi 
sans  doute  aux  marchands,  comme  cent 
d*H^liopolis  et  de  Palmyre,  un  asileas* 
sur6. 

£nfin,  nous  savonsj[ue  lesPh^ideu 
entretenaient  des  relations  commeraaitt 
avec  les  contr^  voisines  de  lamo 
Caspienne  et  avec  TArm^nie.  Us  vk^ 
taient  sur  ce  point,  entre  autres ehoso^ 
des  esclavesetducuiyrebrutoutravailiL 
G'6tait  par  la  Syrie  que  passaient  as 
marchandises.  11  nous  &lt  permis  de 
croire  que  dans  les  aneiens  tem|M,poar 
une  partie  des  denr^es  qui  veoaieot  i6 
Test  et  pour  toutes  celles  qui  arriraieol 
de  la  mer  Caspienne  et  de  r  Armaiie,  ks 
Syriens  ^taient  au  nord  ce  que  1«  Ma- 
dianites,  lesldumeens  etd'autresthbos 
^ent  au  midi  pour  les  produiUdelU- 
rabie,  les  agents  intermMiaires  duo(» 
merce  des  Ph^iciens. 

II  est  vraisemblable  qu'k  T^poQ*^ 
mime  oii  la  Phdnieie  embratfait  * 
monde  entier  dans  ses  relations,  IdSf* 
riens  ne  se  bomerent  das  a  transiwiUf 
deTEuphrateala  MMiterranee,  mop 
nant  salaire,  les  denr^  qui  arrivaiail 
de  raiile  points  divers  a  leurs  frootiott* 
lis  achetaient  directemeot  pour  refct* 
dre  aux  Ph^niciens  et  k  d  autres  dm- 

Eles.  De  1^  un  commerce  lucratif  doal 
;8  profits  ne  firentque  s'aoerottre,!^ 
qu'a  la  suite  de  la  conqulte  aceomiw 
par  les  rois  de  la  haute  Asie,  TyretSi- 
don  perdirent  leur  ind^pendance  ^i^ 
prosp6rit6.  Les  Syriens  sc  ii^'^'r 
des  tors,  par  eux-memes  etpoure«x-«^ 
mes,  a  un  n^goce  etendu ,  qui  acanBuH 
dans  leurs  villes  de  grandes  ricbws*. 
Les  Perses  n'arrSt^rent  point  ce  me*' 
vement,  qui  augmentait  rimportaaee 
d'une  de  leurs  plus  belles  provinces. 

villes ,  qui  a  m  ins^ri^  dans  le  lome  VH  drt  Me- 
moires  de  I'Acad^mle  des  8cleoo«  de  W"* 
tingae. 


.  SYRIE  ANaENNE. 


Ill 


h$tm  kB  lottai  qoi  sahrif  etit  la  mon 
iTiJanDdie,  matNl  l6  pays  eessa  de 
tepartiede  fempire  macedonien  poor 
j«  de  riDd^pebdanee  doUs  le  goUver- 
MDeot  des  S^eucides,  ie  eommeirce 
jirit  on  nouTel  essor.  Lea  inarchands 
iffluaient  daoa  tootes  lea  parties  de  la 
flfrie.  Onimportait,  on  exportait  saha 
cnie,  aoit  da  c^^  de  l*£uphrate  par 
Thapuque,  soit  du  o6t^  dd  la  mer  par 
Laodio6e.  Cdtat  un  immense  mouve- 
WDt  depuis  les  deserts  de  la  Palmyr^ne 
fmi'i  fa  Pi^rie  et  a  la  Gassiotide,  et 
tBINiiala  Qodia^e  jusqU'a  la  C^^j- 
rie;  riea  o'^alait  la  splendeur  et  la  ri- 
abew  dea  Tillea  Syriennes ,  parml  les- 
faeiles  Antiocb^,  d'origine  nouTelle, 
aaeupa  bieotdt  le  premier  raog.  MaiS 
tttODs-iioQa  d'arriTfer  a  une  autre  6po- 
iM,  g«r  laquelk  des  documents  nom^ 
ORtti,  au  iDoiiis  pour  notre  sojet ,  nous 
foaraiBaeBtde  preeieux  renteignements. 

La  S3fm,  ea  detenant  province  ro- 
maioe,  ne  podit  nen ,  dans  les  premiers 
temps,  de  aa  nrosp^rit^  mateneile.  Le 
^niflieree,  qui  faisait  sa  richesse,  loin 
da  deerohre  alors ,  reQut  une  impulsion 
iaatteDdue,  et  troava  dans  ie  luxe  des 
cmqu^reDta  un  aliment  considerable. 
Quand  les  vainqueurs  eurent  godt^  des 
tteeaderAsie*  etquMIs  se  furent  <sr66 
dea  bescHDB  iDcomius  a  lean  p^res,  an 
Mx>och6  Boofeau  a'oaYrit  aux  n^o- 
^ota  sfrieos.  L'ltalie  demanda  h  V'O- 
iMit  lea  parfdflQS,  la  pourpre^  la  sole,  les 
pReries,  et  les  paja  avec  lea  d^pooilles 
da  mottde.  La  Syne  deTint  an  immense 
<*>^t.  De  tootes  parts  afflu^rentdans 
MS  ▼ulealestrtera  de  I'Asie.  Antioche, 
Bamas,  ImeUide  Jupiter,  ia  htrnHre 
f^timi  r Orient,  la  ptOssofUe  et  saifUe 
»^n0#,  eomme  diaait  Tempereur  Ja- 
waO,  Heliopoiis ,  Laodicee  sur  la  mer, 
gfoc,  Cyrriius,  Hlerapolis,  etc.,  etc., 
»^t  ieurs  marcb^  et  leors  relations 
gnmereiales  prendre  an  nouveau  d^- 
Woppemcnt. 

iluea  expoliaient  dans  tout  Tempire 
■•  denrees  indla^oes  de  la  Syric  et  les 

Cults  de  llncfe.  «  Les  marcbands  de 
le  venaieot  diercher  sur  les  rivages 
JWqoes  des  aromatcs,  des  6toffes, 
^P*'*^!  <*e8 esclates.  lis  les  transpor- 
*«wen  Europe,  ou  ils  employaieot  I'ar- 


gent  qu'ils  en  retiraient  a  acheter  les 
meilleares  productions  de  ritalie  et  des 
(iotitr6es  roisines  ou  tributaites.  Horace 
exprime  nne  partie  de  ce  mouvement  du 
commerce  quand  il  dit : 

Dives  et  aureis 
Mercator  exsiccet  culullis 

Viaa  Syra  repai-ala  merce  (*). 

Sifra  merce f  arr^tons-nous  un  instant 
aur  ces  mots*  lis  ont  donne  lieu  a  une 
discussion.  Les  parfums  connus  en  Ita- 
lie  sous  le  nom.  de  $yriens  etaient-ils 
reellement  de  Syrie  ou  n*acqu6raient-ils 
cette  d^neminatioa  que  parce  qu*on  les 
apportaitdana  les  eatrepotade  cette  pro- 
vmce,  la  ou  les  n^gociants  romains  tc- 
naient  let  prendre?  II  eat  certain  que  la 
plupart  des  denr^s^  que  les  aromates 
en  particulier,  quirecoiventehez  lesau- 
teurs  romains  la  qualification  deproduits 
syriens,  venaient  de  diff^rentes  contr^es 
de  TAsie.  Ifous  lisons  frequerament  par 
exemplecinTiamttm  syrium,  et  pourtant 
la  Syrie  n'a vait  pas  Tarbrisseau  qui  donne 
le  cmname;  mais  elleavait  certainement 
du  galbanum,  du  nard,  et  mtoe,  quoi 
qu'on  en  ait  dit,  du  malobatfare.  Piine 
atteateque  le  raalobathre  natt  en  Syrie ; 
il  le  decrit ,  il  leeompare  auxautres  aro- 
mates de  la  m^me  espece ,  il  donne  la  pr6- 
f^rence  h  quelques-una  d'entre  aux ;  il 
place  atant  tout  celui  de  llnde.  Gela 
prouve  qu'il  les  distinguait ,  qu*il  n'a 
pu  les  coofondre.  Cela  est  encore  plus 
elair  pour  le  baurae,  quidtait  un  produit 
indigene  de  la  Syrie  comme  de  la  Ju- 
dee  {**).  » 

Les  entrepdts  de  la  Syrie  recevaient 
encore  le  sairan  do  mont  Olympe  en  Ly- 
cie,  et  du  mont  Coryce  chez  les  Ciliciens, 
le  pardalium  de  tarse ,  etc.  Les  en viroos 
de  Damaa  fournissaient  Tonyx  qui  ser- 
vait  k  renfomer  les  aromates.  II  etait 
de  la  premiere  qualite,  suivant  Isidore ; 
Pline  ne  lemetqu'au  troisl^merang  pour 
la  blancheur  et  pour  la  beaute  (***).  La 
murrbine  ^tait  apport^e  de  toutes  les 
parties  de  I'Orient  (****).  Toutes  ces  pro- 

(•)  Horace.  Odes,  I.  M.         

(**)  M^moire  de  M.  ae  Pastoret  sur  VHtstotre 
du  commerce  chez  les  Romains  insqii*au 
temps  de  riUUius,  dans  le  RecQCif  de  TA- 
cademie  det  inscripUoDS.  ««,   . 

("•*)  PUn.,  XXXVI,  8.  ~  Isid.,  Xyi,  5. 

{****)  f'oy,  le  M^molre  de  M.  de  Paaloiet  (111 , 
III.) 


il3 


LU£iIV£BS« 


dactions  formaient  la  branohe  ia  plus 
lucrative  peut-^tre  du  n^oce  des  Syneos 
avec  ntalie;  car  les  Aomains,  comme  le 
prouTC  le  t^moij^DQge  des  poetes ,  em- 
ployaieot  une  mcroyable  quaotite  de 
parfums  venas  de  la  Syrie  {*). 

Parmi  les  plus  bri Hants  objets  de  ee 
commerce  de  luxe,  il  faut  encore  nom- 
mer  la  pourpre  de  Tyr.  L'usage  de  la 
poorpre  ^ait  tr^s-r^andu  chez  les  Ro- 
inains.  Sous  le  consulat  de  Giceroo ,  un 
^ilecurule,  Publius  Lentulus  Spinther, 
avait  M  blime  pour  en  avoir  le  premier 
bord^  sa  robe.  Mais  son  exemple  n*en 
fut  pas  moins  imit^.  Dhs  les  premiers 
temps  de  TEmpire  la  pourpre  servait  a 
couvrir  les  tables  et  les  lits ,  et  parfois, 
comme  le  dit  Horace,  elle  cacnait  les 
draps  mal  lav^s  de  Tindi^ent  orgueiU 
leux  C*).  Dans  le  septieme  sieclede  Rome, 
elle  se  vendait  milie  deniers  au  moins 
la  livre  (***).  Son  prix  ^tait  trop  elev^ 

rur  qu'oD  ne  s'effor^t  point  de  Pimiter 
moins  de  frais.  Vitruve  indique  les 
moyens  employ^  pour  la  falsifier  (****). 
Le  cedredeSvne  foumissaitaussi  aux  de- 
meures  des  Roroains  et  aux  temples  des 
Dieux  de magnifiques ornements.  II  don- 
nait  a  la  fois  une  r^tne  exoellente  et  un 
bois  incorruptible.  On  en  tirait  une  sub- 
stance qui  garantissait  les  livres  pr^eux 
de.la  moisissure  et  des  vers  (*****) .  Avec  le 
bois,  on  fabriquait  des  statues,  des  meu* 
bles ,  et  parfois  des  gal^es ,  comme  Tat- 
teste  Su6tone(*****^.Le  bitume  de  Si- 
don,  comme  le  bitume  et  le  terebintbe  de 

(*)        Coblle 

Serlts  ac  Syrio  flagrant  oUvo. 

(Catall.  6.  8.) 
CoronalQS  nttentes 
MalobaUiro  Syrlo  capUlos. 

(Hor.Od.  11,7,7.) 
Stlllabat  Syrio  myrtea  rore  coma. 

(Tibull.  Ill,  4,  28.) 
Jam  dudmi ,  Syrlo  madefactus  tempera  nardo. 

{Zb,  6,  62.) 
....  Orontea  crines  perfundere  myrrha. 

(Propert.  I,  2,  3.) 
Quum  dabltur  Syrio  monere  plenum  onyx. 

{Ibid.  U,  10,  30.) 
(♦•)  Hor.,&i/.,  11,2,84. 
[***)  Plln. ,  IX .  39. 
(•*♦')  Vilruv.,  vn,  14. 

{*****)  Carmlna 

Lincnda  cedro,  et  levi  lervanda  cupreaae 
{Rot.  Art  Poet,  ZZ%,) 

Cedro  dlgoa  locfltt. 

(Pcre.  Sat.  r,42.) 
'    t**"**)Su«one,ri>rfeCottpttte,87. 


Jud^,  ^tait  souvent  employ^iKir  la  «• 
tisans  dltalie.  Les  senurier8.eD  uttiol 
pour  vernir  les  t^tes  de  dous  et  mi 
enduire  les  barres  de  fer.  II  rempla^ 
aussi  la  cbaux  pour  cimenter  les  on 

Parmi  les  productions  indig^ 
sol  fertile  de  la  Syrie,  les  fromeoto,! 
exemple,  entraieot  comme  deoreeiei 
merciales,  dans  les  mtrepdts  desil 
de  la  o6te.  Tyr,  Beryte,  Tripoli,  n'oq 
diaient  pas  seules  du  bl6  et  des  m 
chercb^;  Laodio^  sur  ia  mcr  ei< 
voyait  par  grosses  car^aisons  a  Akfl 
drie.  Les  dattes  de  Syne  ^talent  eom 
dans  la  m6decine;  uaiieD,  dans  obi 
ses  traits,  parlede  leurs  propriet<i| 
les  compare  k  celles  d*£gypten.£i 
les  prunes  de  Damas  paraissaieatwrl 
tabIe8lesplu8  8omptueuse8C*).£oijl 
tant  a  ces  fruits  une  espeoe  de  pM 
dont  la  Gultuie  fut  introduite  en  ltd 
et  que  Virgile  mentionne  daosleseoi 
livre  des  Giorgiques  (***),  nous  M 
donn^  une  liste  exacte  des  prodi  ' 
indig^es  foamies  par  la  Syrie  au 
gociants  de  I'empire. 

II  nous  reste  a  parler  de  la 
la  plus  considerable  da  comoKntM 
Svrie,  c*est-a-dire,  de  ia  veote  dfli  ^ 
claves. 

Les  Gaulois  et  les  Germaias  m 
ni&saient  pas  seuls,  aux  RomaiBS, 
nombrables  families  entassto  ' 
rours  de  la  ville  ^temdle,  ou 
pour  la  mine  de  I'ltaiie,  dans  les 
les  iatiJufuUa.  La  guerre  et  la 
ne  recrutaient  pas  aeules  les  mar 
claves.  Les  Syrlens,  raceneepovn 
vUude  (****),  se  chargeaicnt  tfap 
sionuertous  les  trafiquantsdeclwi 
roaine,   sans  parler  des  mereflM 
qu'ils  envoyaient  en  Grece,  des  le 

(♦)  Galea.  H,  De  alHn.  fac.  26.  - « Pi-^a 
lie  dtvfdit  Galeoiu,  at  JEgyptUt  «(»^! 
triogeoteSfSyriacas  vel  iadticu cujvBM 
nucales,  molies,  tumidas  et  duloes  a»J 
maret.  E  quibas  apud  Orieotes  qaadr* 
Buuin  imprimis  dbos  erat,  4eft8  Ptioio,  J 
( Ex  scholia  &einesi ,  ad  Petfoo.  ixt" 
pAA-  60.) 

("♦)  t  Faenintettomacalasapracraticalii 
▼eDtia  posita,  infra  orattcalam,  StTfaeafi* 
cam  granis  puoioi  mali.  »  {Foy-  Peifooe./ 

(♦•*)  Hec  aorcniBi  Wwi 

Crustaodla  Sfriisque  pirtt,  gravttosque  tp- 
(Vir0L,C«)f9'» 

(**•*)  Jadsi  et  Syri,  oaUooes  naU»« 
(Cio6roo,  De  prov,  10.) 


SYBIE  ANCIENNE. 


113 


de  X^phon.  lis  faisaient  avec  la  veiite 
des  esclaves  an  commerce  tres-produc- 
ti£  «  Les  venaliUarii  avaient  plus  d*ar- 
not  que  tous  les  Scipions  et  les  Le- 
nos  Oi  *  ^  Icurs  fortunes  efTa^aient  par- 
fois  ropulence  de  ces  proconsuls  qui 
avaient  mis  au  pillage  les  plus  belles  pro- 
▼ioees  de  la  r^pablique.  Nous  ne  decri- 
roDs  pas  ici  le  marche  ovi  les  esclaves,  ex- 
poses dans  une  cage  de  hois  (**),  ou  pla- 
ds  sur  le  lapis  mancipiorum,  le  cou 
charge  d'un  ^riteau  qui  indiquait  leur 
quality,  les  pieds  marques  de  craie  ( ffSp^ 
tati  pedes  )  (***)*  etaient  offerts  au 
choix  des  acheteurs;  mats,  prenant  les 
Syiiens  a  leur  entree  dans  la  famille  ro- 
maine,  nous  ^udierons  leur  physiono- 
mie  distinctive,  au  milieu  des  autres 
barbares  qui,  achet^  en  diverses  parties 
deTEmpire,  vivaient  ^  c6t6d'eux. 

Dans  les  comedies  de  Plaute  et  de  T6- 
noce,  le  valet  intrigant  et  f  ripon  est  tou- 
joars  on  Syrien  (****).  Syrus  etait  deja  un 
nom  d*esclave  (*****).  Plautedonne  quel- 
Ques  details  sur  leservice  d*une  Syrienne 
dansla  maison  d'un  honn^te  bourgeois.  II 
nous  montre  une  robuste  menagere,  rude 
an  travail ,  et  fort^trangere  aux  manges 
galants  des  soubrettes  (******).  Terence 
aocoDtraire,  place  savieille 5yra  aupres 
d'une  courttsane  d*Athenes ,  et  lui  prete 
un  langage  d*une  singuli^re  amertume  : 
«  0  ma  mattresse,  dit-elle,  je  t'en  prie, 
n'aiepitiede  personne;d^pouiHe,  mine, 
d^ire  tout  ce  qui  tombe  entre  tes 
mains.  Ahl  que  n'ai-je  ta  jeunesse  et  ta 
beaut^.'Commeresciave  alors  se  ven- 

(*)  «  DiTitilB  omnes  AMcanos  ac  LftUos  malii 
fenalitUrti  mercatoratqiie  aapertrunt.  »  (Cice- 
Rn,  OraL  70.  > 

(**}  ....  Qaem  acpe  eoegft 

Barbara  gipsatot  ferre  eatasta  pedes. 

Cnballe,  BL  II,  6, 41.) 
(***)  Ifnper  to  hanenrbeai  pedlbns  4|al  Tenerat  albii. 

(Javteai,  Sath  ni-) 
(**•*)  RuiMiian  ren ;  fades.  Abll  netds  tneaeare 
[  boinines , 

^  UD  de  oes  etclaves  dftDs  la  Adelpbes ,  t.  asi. 

{**••*}  Hae.  Qafcl  est  tibl  nomen? 

Pa.  Scrras  est  bole  lenonl  Synu ; 

Boa  esse  mt  dicam.  Syrus  sum.  Hae.  Syrns? 
Pa.  Id  eat  nonaen  mlhl. 

{PMudolus ,  VfO,) 
«**•*•  DsMiPBO....  Recte  ego  emero  matrl  tuc 
j^BsflB  TiraglnciD  allquam  Don  ins  lam,  rorma  mala, 
i^WitraDaddecet  famiUas,  vaXS^rom.  aul  lE^j- 

[ptiara  ; 
■■■•let,  eonflclet  penaam,  penaetor  flasro:  neque 
'*»pCeream  qutcquam  eve  Diet  nostrls  (ortbosnagllu. 
(MercaL  434—438.; 

8*  Livraison,  (syrir  ancibnne.) 


gerait  de  tant  de  souffrances  (*)!  » 
La  Syria  pourvoyait  aux  piaisirs  des 
jeunes  debauch^  de  Rome,  et  leur  en- 
voyait  ses  courtisanes  et  des  eunuques. 
Properce  jparle  de  ces  femmes  venues  des 
boras  de  POronte  et  de  I'Euphrate  (*^) ; 
Lucien,  dans  ses  dialogues,  fait  interve- 
nir  aussi  des  Syriennes,  sorcieres  et  en- 
tremetteuses.  Partout  cette  race  d'escla- 
vesse  fait  reconnattre  aux  m^mes  traits ; 
partout  elle  paratt  vile  et  depravee,  mais 
singuli^ment  entreprenante  et  habile. 
Quelques-uns,  il  est  vrai,  les  plus  robus- 
tes  sans  doute,  s'employaient  aux  tra- 
vaux  grossiers  qui  n'exigent  que  de  la 
force.  Toute  dame  romaine  a  des  Syriens 
pour  porter  sa  chaise  (***);  ^^^^  ^ 
general  le  valet  syrien  se  |}latt  dans  les 
emplois  les  plus  vils;  il  p^netre ,  comme 
le  dit  Juvenal ,  dans  les  entrailles  des 
grandes  maisons.  Nul,  mieux  que  lui,  ne 
oonnatt  Tart  d*une  adroite  seduction. 

II  use  dans  Tintrigue  les  ressources 
de  son  esprit,  cultive  et  corrompu  par 
une  instruction  cnii  pare  ses  vices  et  les 
entretient  (***^.  Il  se  ^lisse  dans  la  faveur 
du  maltre,  il  s'enrichit;  et ,  devenu  libre 
par  Taffranchissement,  il  s'^tablit  a 
Rome,  se  place  dans  les  rangs  du  peuple, 
^tale  auxyeux  de  ses  riches  patrons  un 
luxe  qui  excite  Tenvie  (*****) ;  ii  brigue 
les  charges  et  les  di^ites,  et  obtient 
avec  le  tribunal  le  droit  de  jeter  du  haut 
de  la  roche  Tarp^ienne  et  de  livrer  au 
bourreau  descitoyens  (******)!  Bient6t  les 

(*)  ....Ergo  propterea  te  sedolo 

£t  moneo.  et  bortor.  ne  cnjusquam  mlsereat; 

Snin  spoUes ,  rantUrs ,  laceres,  qaemque  nacta  sis. 
en  I  me  miseram !  Car  non  aut  Istcc  mlhl 
JEtas,  et  /orma  eat,  aot  tibl  bac  senlentla? 

{Heeyr,  63—74.) 
{**)  Et  qnas  Bopbratca,  et  qoas  mibi  mlsit  Orontea 

Me  capiant 
(***)  ....  LoDgonim  Tehllnr  e«moe  Syroram. 
(Jav.,  YI.  360.) 
Octo  Syria  anfhilta  dator  lecUca  paelUe. 

(MarUal,  IX,  3.) 
(«**«)  Le  pire  de  Clo^roo  disait,  en  oomparant 
les  RomalDs  de  sod  temps  aux  esclaves  syrieos  : 
Vtquisque  optime  grwcesciret,  ila  esse  nequis' 
iirnunu  ( Cioeron ,  de  OraL  II ,  66. ; 

(•*•**)  Neqae  me  divltis  movent,  neqae  ves- 
tls  aot  cslalum  anrum  et  argentom  quo  nostros 
▼eteres  Marcellos  Maximosqae  maitl  eunucbi 
e  Syria  iEgyploque  vicerunt ,  neque  vero  or- 
namenta  ista  villanim  qailms  L.  Paulum  et 
L.  Mummiam  qui  rebus  bis  Urbem  Italiamque 
orooem  rererseruot,  ab  aliquo  video  uerfacile 
Deliaco  aut  ^ro  potuisse  superari.  { Cicoron , 
Orat.  70. ) 
*»*•«.  tq  Qe  5yH  Demie  out  Djronlsl  Alius  aodes 

8 


114 


L'UNIVERS. 


tribuns  m^mes  cedent  le  pas  a  ces  parve- 
nus (*) ,  dont  la  race  odieuse  envahit 
Rome  enti^re.  «  L'Oroute  m^le  ses  eaux 
a  celles  du  Tibre.  >  11  apporte  avec  lui  la 
langue  et  les  moeurs  de  i'Asie ,  ses  de- 
bauches (**)  et  ses  danses  (***). 

Des  le  temps  d*Auguste ,  Ovide  parle, 
dans  ses  Pastes,  de  la  veneration  des 
Syriens  pour  les  poissons ,  donnant  a  ce 
my  the  travesti  par  son  imagination  poe- 
tique  une  forme  eldgante  et  gracieuse; 
il  le  rattache  aux  traditions  du  regne  de 
Jupiter  (****).  Quelques  siecles  apres, 
le  soieil,  le  dieu  oriental,  avaita  Rome 
ses  autels  et  son  grand  pr^tre,  Helagabal 
etaitempereur.  JNous  a  vons  examine  ail- 
leurs  cette  epoque  singuliere  ou  Rome 
fut  envahie  par  fOrient.  Nous  ne  revien- 
drons  pas  ici  sur  les  d^veloppements 
que  nous  avons  emprunt^  h  M.  Amed^e 
Thierry;  mais,  en  nous renfermant  dans 
la  question  qui  nous  occupe  ici,  celle  du 
commerce ,  nous  emettrons  une  hypo- 
tliese  qui  nous  semble  fondle  sur  la  verite 
historique.  G'est  que  cette  perpetuelle 
immigration  des  Syriens  dans  rltalie, 
cette  fusion  des  esclaves  devenus  libres 
dans  le  peuule  ab^tardi  deRome ,  amena 
lentement  rintroduction  des  moeurs  et 
des  croyances  orientales  dans  la  capi- 
tate de  rCmpire.  Le  commerce  des  den- 
rees  de  la  Syrie,  et  surtout  la  traite  des 
esclaves,  etablirent  entre  deux  races  de 
tout  point  opposees  des  rapports  ^troits 
et  suivis,  et  prepar^rent  cette  etrange 
revolution  qui  changea  Rome  pour  un 
temps  en  une  cit^  orientale. 

Le  commerce  de  la  Syrie  ne  se  bor- 
uait  pas  a  Texportation  de  ses  produc- 

Dejicere  e  saxo  elves  ct  tradere  Cadmo. 

(Horace,  5at.  I,  «,88.) 
(*)Llbertlnaapliore8t :  «  Prior ,  tnqaU,  eso  adsuiD. 
Cur  Uineam,dubltexnTe locum defeDdere?  quamvls 
Natiuad  Euphratero,  mollesquod  In  aurefeoestrs 
Arguerint,  Acet  ipse  negem?  Sed... 
«,.....  ...  ego  possldeo  plus 

Pallantc ,  et  LIcf nls.  »  Bxpectent  ergo  tribunl : 
Vincant  dlvltlc :  aacro  nee  cedat  honor!, 
Noper  in  bane  arbem  pedlbtn  qal  renerat  albls. 
CJuvenal,!,  loa— ill.) 
r*\Jtin  dodam  Syras  In  Ttberlm  defluxit  Orontei. 
Et  Itnguam ,  et  mores,  et  cam  Ublclne  ebordas 
Obliquas,  necnon  genOUa  tympana  secum 
\exit,  et  ad  Clrcam  Jiissaa  prostare  puellas. 

(Juv.,ni,6»-66.) 
(***)  «  Ipse,  erectlB  supra  frontem  manibas , 
Syrum  hlBtrlonem  exlilb«Mit,ooDciiieDte  tota  fa- 
mllia.  »  \  PetroD.  fragm.  Tragor.  Lipsis,  1676, 
p.  34.) 
♦♦"  Ovid.,  FoiUy  11 ,  461—474. 


tions  indigenes  et  des  esciaves.  Les  il- 
lations entretenues  de  tout  temps  {  ' ' 
les  traCquants  de  la  S)Tie  avec  les «( 
tr^es  les  plus  recul^s  de  rOrie&l,  j 
furent  pas  interrompues  apres  le  i 
des  Seieucides ,  qui  leur  avaient  d 
tant  d'ex tension.  Les  cara vanes  qui  1 
versaient  Tinterieur  de  TAsie ,  les  f  ' 
qui  suivaient  la  route  de  )a  mer  Roi 
contiuuerent  leurs  periodiques 
tions. 

La  soie  resta  toujours  la  bn 
plus  importante  de  ce  commerce.  Gei 
taitqueparde  longs  et  peoibles  vojai 
a  travers  les  regions  centrales  et^ 
plus  difGciles  de  rAsie  (*),  qoe  FoDji 
vait  se  procurer  une  marchandise  ( 
les  pro^res  du  luxe  et  de  la  richesseK 
daient  mdispensable  chez  les  natioH| 
TAsie  et  de  TEurope  Stabiles  sur  le 
de  la  Mediterranee  (**).  Les  Assyi 
les  Medes  avaient  ^t^  longtempsj 
possesseurs  exclusifs  de  ce  con 
c'est  la  ce  qui,  dans  la  haute  aotiifl 
avait  fait  donner  le  nom  de  robes  o 
ques  aux  v^tements  fabriques  avec  bfl 
Les  Perses  leur  avaient  succedeiui4 
D^goce ;  ils  y  attachaient  une  1 
portance,  et  ne  n^gligeaient  rien  pottl 
conserver  le  inonopole.  Cest  d'eulf 
les  marchands  grecs  et  syriens  de  fii 
recevaient  la  soie,  qu*ils  transports 
ensuite  dans  TOccident.  EUey  etaitj 
et  chere.  Ce  ne  fut  ju'au  rc^  deJ[ 
tinien  que  les  Romains  songer^tii 
franchir  de  la  d^pendance  ou  wj 
trouvaient  des  Perses  pour  cette  In 
che  de  commerce.  lis  caercfaerent  ( 
h  faire  baisser  le  prtx  de  la  soie  p 
concurrence,  so  it  en  rachetanlio#| 
tres  que  les  Perses ,  soit  en  la  tM« 
rectement  du  pays  qui  la  produit.  •'* 
Chinois  ont  conserve,  dans  les  anDil^ 
Tempire,  le  souvenir  de  plusieursti 
tives  faites  par  les  Romains  oour  el 
avec  eux  des  relations.  Ces  faits  dcS 
pas  racont6s  par  les  historiens  \ 
que  le  temps  a  respect^ ;  les  mooua 
de  Textr^me  Orient ,  micax  conr" 
supplant  ici  au  silence  de  Tanti 

(*)  Foy,y  dans  le  premier  Uvre  de  laG 
de  l>toleni^  la  route  que  les  niardi 
yaient  pour  pMtrer  Juaqu'i  I'ezti^tl  c 
talederAsle.  ^    ,^. 

(•*)  Foy.,  sur  rusue  de  la  sole  chei  »■ 
mains,  Gibbon ,  t.  YlTp-  269-S7I. 


SYRIE  ANCIENNE. 


115 


les  Obfflois  rapportent  que  les  ^isi  et 
hs  antres  peuples  scythes,  6tablis  h 
ftneDtde  la  mer  Gaspienne,  entre  la 
flene  et  leor  pays,  et  depuis  longtemm 
lipo^ession  exclusive  du  commerce  ae 
i  sole,  8*opposaient  de  toutes  leurs 
krees  aux  communications  que  les  peu- 

edu  FaThsin ,  c'est-a-dire  les  Ro- 
ns, Toulaient  6tablir  avec  la  Chine , 
iont  ils  eachaient  la  veritable  route. 
iCesdiffieoltes,  eontinuent  les  annales 
tehinoises,  oontraignirent  les  Romains 
;fc  tenter  une  autre  vote ;  ils  essayerent 
ile  se  mettre  en  relation  avec  la  Chine 
lisriesmers  du  Midi,  ou  ils  se  rendaient 
to  traversant  la  mer  Rouge  et  I'ocean 
ifidien.  lis  parrinrent  ainsi  dans  les 
ilt>Tinces  mdridionales  sous  le  regne 
con  empereur  romain  que  les  Chinois 
tppellent  An-Ton ,  et  qui  est  le  mfime  que 
Marc  Aur^e  Antonin  le  phiiosophe  (*). 
Ces  details ,  consisn^s  dans  les  annales 
ofiieieQes  de  la  Chine  par  des  auteurs 
contemporains ,  datent  du  temps  m^me 
OQ  Ptol^^  d^rivait,  h  Alexandrie,  les 
^lies  et  les  ports  du  pays  des  Sinx, 
sansdonted'apres  les  r^cits  des  naviga- 
teurs  syrieas  que  le  commerce  avait 
conduits  jiisqu'aux  extr^mit^sdumonde 
a|ors  conna.  Les  historiens  chinois 
ibot  mention  de  plusieurs  ambassades 
^  de  dtverses  tentatives  faites  post^- 
rieuremeot  pour  mettre  les  Romains  en 
relation  ayec  Tempire  de  la  Chine.  Ces 
efforts,  rest^  inconnus  a  nos  historiens, 
tvodent  raison  des  guerres  et  des  n^go- 
ciations  entreprises,  sous  le  regne  de 
Justinini,  pour  faire  directement  le 
commerce  de  la  soie  (**). 

Le  rigne  de  Justinien  nous  offre  un 
fflflgul/cr  exemple  de  ces  tentatives. 
•Pendant  qu'flellest6e  regnait  en  Ethio- 

Pie  et  Esimipb^e  sur  les  Homerites, 
empereur  leur  deputa  Julien ,  un  de 
>e8  secretaires ,  et  T^Iomose ,  pour  repr^- 
«enter  k  ces  deux  princes,  qu'^tant  d^ja 
unisavec  loi  par  la  profession  du  chris- 

J!j/oy.,  sur  ee  voyage,  qui  est  de  Tan  les  de 
■Jw'  ere,  le  JVrfm.  histor.  et  gSographique 
Jjrr^nn^fnie,  par  M.  Saint-Martin,  II,  80  et  43. 
"n  peat  coDlaiter  sar  le  m^me  sujet  un  m6- 
■jwde  M.  Abel  Remusal,  inUtule  :  Memar- 
g*  nr  VeilensUm  de  Vempire  chinois  du 
y  fkroceident  (t.  VHI  dMnouveaux  M4- 
T5*<le  rAcadteiie  des  iascriptions,  p.  eo-iso). 
-P  Wwtt ,  Silt  du  BaS'Smpire ,  IX ,  M2- 


tianisme ,  ils  devaient  le  secourir  contre 
les  Perses.  Les  depute  6taient  charge 
d'inviter  en  particulier  le  roi  d'Ethiopfe 
h  se  rendre  mattre  du  commerce  de  la 
soie,  qui  jusqu*alors  se  faisait  par  la  Perse, 
et  k  tirer  irom^diatement  des  Indiens 
cette  marchandise  pour  la  transporter 
par  le  Nil  a  Alexandrie;  ce  qui  procure- 
rait  h  ses  £tats  un  profit  immense  et 
aux  Romains  Tunique  avantage  de  ne 
pas  faire  passer  leur  argeut  entre  les 
mains  de  leurs  ennemis...  Les  envoy^s 
allerent  d'abord  en  Etbiopie,  ou  ils  furent 
bien  re^us.  Malala  d^crit  ainsi  cette  au- 
dience : «  Le  roietait  mont^  sur  un  char  h. 
quatre  roues  convert  de  lames  d'or  et 
atteledequatre  Elephants.  11  ^tait  nujus- 
qu*^  la  ceinture,  ne  portant  sur  ses  ^pan- 
ics qu'une  tunique  ouverte  par  devant 
et  semee  de  perles.  II  avait  des  bracelets 
d'or.  Sa  tSte  etait  couverte  d'un  turban 
de  toile  de  lin  broch^e  d'or,  d*ou  pen- 
daient  de  chaque  cdte  quatre  chatnettes 
d*or.  II  portait  un  collier  de  mSme  m^tal, 
et  tenait  d'une  main  une  rondache  dor^e 
et  de  Tautre  deux  demi-piques ;  autour  de 
lui  6taient  ranges  les  courtisans  sous  les 
armes,  entrem^l^  de  musiciens  qui 
iouaient  de  la  fl(!lte.  Les  ambassadeurs 
le  saluerent  les  genoux  en  terre;  leroi, 
les  ayaiit  fait  relever  et  approcher  de  lui, 

Eritde  ses  mains  la  lettre  de  Tempereur, 
aisa  Tempreinte  du  cachet,  recut  les 
pr^ents  qui  lui  ^taient  offerts,  et  a^res 
avoir  fait  lire  la  lettre  h  un  interprete, 
il  expedia  sur-le-champ  des  ordres  pour 
faire  marcher  les  troupes,  etenvoya  par 
^crit  au  roi  de  Perse  une  declaration 
de  guerre...  Mais  ce  grand  empresse- 
ment  ne  fut  suivi  d*aucun  effet.  Les 
£thiopiens  ne  pouvaient  enlever  aux 
Perses  le  commerce  de  la  soie ,  ceux-ci , 
par  le  voisinage  de  Tlnde ,  attirant  cette 
marchandise  dans  leurs  ports.  lis  ne 
pouvaient  non  plus  p^netrer  dans  la 
Perse  qu'apres  un  long  et  p^nible  voyage 
au  travers  des  sables  et  des  vastes  de- 
serts de  r Arabic  (*).  » 

Cette  difficult^  sauva  la  Syrie  de  sa 
mine.  Si  la  soie  avait  suivi  la  route  du 
Nil,  les  villes  commer^antes  des  bords 
de  TEuphrate  auraient  perdu  la  princi- 
pale  source  de  leurs  ricbesses.  Mais  les 
Perses  devaient  conserver   longtemps 

[*)  Hist,  du  BaS'Bmpire,  t.  VIII ,  p.  IB6-15S. 
8. 


116 


L'UNIVERS. 


encore  le  privilege  lexclusif  de  oe  com- 
merce, doot  les  Syriens  ^taient  les  fac- 
teurs. 

Vers  la  -fin  du  sixieme  siecle,  les  So^- 
diens,  devenus  sujets  des  Turcs,  envoye- 
rent  a  la  cour  de  Perse,  avee  la  permis- 
sion du  grand  khakan ,  des  d^put^  <]ui 
demanderent  a  Chosro^s  Tautorisation 
de  faire  sans  obstacle  le  commerce  de  la 
soie  dans  son  empire.  Chosro^  amasa 
lon^emps  ces  ambassadeurs  par  des 
d^lais  calculi.  Ceux-ci ,  las  des  retards 
apport^s  k  leur  negociation,  presserent 
eiiOn  le  roi  de  s'expliquer  et  de  faire  as- 
sembler son  conseil  pour  lui  soumettre 
cette  affaire.  «  II  existait  alors  k  la  cour 
de  Chosro^  un  Nepbtalite,  nomme  Ca- 
toulf ,  qui  jouissait  d*un  grand  credit. 
Catoulf  conseiila  au  roi  de  ne  pas  laisser 
sortir  la  soie  qui  avait  ^te  apport^e  par 
les  envoy^s  sogdiens ;  mais  de  la  mettre 
a  prix  et  de  Tacheter,  puis  de  faire  venir 
les  ambassadeurs  etde  brdler  cette  mar- 
chandise  en  leur  presence ,  non  pour 
leur  faire  injure,  mais  pour  montrer 
qu'on  n'avait  aucun  besoin  de  la  soie 
des  Turcs.  Les  ambassadeurs  ne  purent 
parvenir  a  fajre  expliquer Chosro^ ;  il  ne 
te  fit  qu'en  acbetant  toute  la  soie  dont 
lis  avaient  apport^  une  grande  quantite, 
et  en  la  faisant  brdler  en  leur  presence. 
Les  d^put^s  se  retirdrent  ensuite  dans 
leur  patrie ,  ou  ils  rendirent  oompte  au 
grand  khakan  du  peu  de  succ^s  de  leur 
mission...  Le  grand  khakan  resolut  de 
se  venger  :  pour  5tre  plus  en  etatd'yr6us- 
sir,  il  crut  devoir  traiter  avec  les  Ro- 
mains,  ennemis  naturels  des  Perses.  Ma- 
niach,qui  etait  alors  le  chef  des  Sogdiens, 
iui  avait  le  premier  remontr^  que  les 
Turcs  devaient  pr^erer  Tamiti^  des  Ro- 
mains  k  celle  des  Perses;  quil  valait 
mieux  leur  transporter  les  avantages  du 
commerce  de  la  soie,  parce  que  cette  na- 
tion en  faisait  un  plus  jjrand  usage  que 
le  reste  du  monde.  Maniach  avait  oftert 
dese  joindre  k  Fambassade  qu'on  pour-* 
rait  envoyer  pour  cet  objet,  et  il  pro- 
mettait  d  employer  tons  ses  efforts  pour 
^tablir  une  soJide  alliance  entre  les  Ro- 
mains  et  les  Turc«.  Le  grand  khakan  fut 
convaincu  par  les  raisons  de  Maniach, 
et  il  Tadjoignit  aux  ambassadeurs  quMl 
envoyait  onrir  k  Justin  le  secours  de  ses 
armes  contretous  ceux  qui  attaqueraient 
Tempire,  et  lui  proposer  le  commerce 


de  la  soie.  Les  ambassadeurs  eoretttfam 
des  difficult^  a  surmonter  avantdi 
parvenir  dans  la  ville  imp^riale.  Le 
min  qu'il  fallait  parcourir  pour  alter 
campement  des  Turcs  a  Constantii 
6tait  long  et  dangereux.  Ils  eureot 
franchir  des  montagnes  couvertes 
neiges  et  de  brouillards,  des  plaines 
sertes,  des  for^ts  etdes  mar^ges,at 
de  traverser  le  Caucase ,  d'oii  ils  se 
dirent  aupres  de  Tempereur  (*). »  Ci 
par  eux  que  fut  signe  le  premier 
eotre  les  Romains  et  les  Turcs. 
cette  alliance  resta  sans  resuitat. 
Turcs,  quoique  plac^  aux  confins  de 
Chine,  ne  purent  enlever  aux  Perses 
monopole  de  commerce  de  la  soie;  eai 
fet  ce  n^ooe  se  bornait  presqaei 
ports  du  midi,  ou  les  navires  veoiii 
s'approvisionner  sans  obstacle  par 
golfe  Persique  etl'Oc^an  (**). 

Les  invasions  de  Ghosroes  ne 
rent  pas  a  porter  le  dernier  coap  if  { 
commerce  de  la  Syrie.  Quand  les  Am 
arriverent,  ils  ne  trouverentplusrioii 
pilleret  ^d^truire.  Les  Romains  cepn* 
dant  avaient  conserve  dans  le  golfe  Ara* 
bique  un  comptoir  important,  qu'ilsde- 
fendirent  avec  couraee  :  c'etail  lite  de 
Jotab^,  dont  les  habitants  faisaieotll 
commerce  de  la  mer  Rouge.  lis  segn^j 
vernaient  en  republique  et  ne  pay  ''* 
k  Teinpereur  qu'une  taxe  sur  les 
chandises  qu*ils  recevaient  deslndes(^ 
selon  un  tarif  qui  avait  6t^  dresse.  Nesi 
devons  citer  encore  la  foire  d'Abyh, 

2ui  se  tenalt  k  environ  trente  roiliesi' 
>amas,  et  r^unissait  chaque  aDnwIJ 
produits  naturels  ou  fabriques  9 
toute  la  Syrie.  Les  Juifs,  les  Grecsette 
Arm^niens,  les  Sjjriens  et  les  habita* 
de  rfigypte  s'y  reunissaient  de  tootoi 
parts  :  cette  foire ,  qui ,  cr^ce  aui  «»• 
tions  religieuses  que  les  evfiques  syrirti 
entretenaient  avec  les  contrees  sitaw 
au  dela  de  TEuphrate ,  devenait  de  p» 

.  (*)  Hist,  du  B/u-Empire,  t  X,  p.  *^^ 
(♦*)  Nous  ne  devons  point  ooLiier  de  »] 
llonner  id,  en  termfnant,  les  1»^  JJ 
Heeren  a  ecriles  sur  le  commerce  ae»^ 
dans  rantlquit6.  —  Voy.  De  lupoliUmie,  «»f 
(.  I,  p.  115  el  sulv.  de  la  Irad.  francalsf 

oOtovoiko^  olxeTv  t9|v  vijffov,  Kai  tA  *jj^ 

otXeT  96pov  elcoYeiv.  ( Tbeoph.»  l>.  !*'• ) 


«YRIE  AISaENNE. 


117 


aipitt  active  et  fr^quentee  dura  jusqu'a 
idesArabesC). 


[*)  foy-  Lequien,  Orienackristianus,  c.  683et 
■T^  sar  In  rapports  de  la  Syrie  chr^tipooe 
mc  la  M^potamie,  la  Perse,  rArm^ie, 
Rnte ,  et  peai-«tK  les  provmces  occidentaiea 
lihCliiDe. 


Tout,  en  effet,  devait  disparattre  de- 
vant  ces  farouches  envahisseiirs :  ce  fu- 
rent  eux  qui  frapperent  et  an^ntirent 
d'un  m^me  coup,  en  Syrie,  ce  qui  avail 
fait  lagloire  et  la  prosperite  decette  belle 
contree,  le  conimerce,  la  doininatioo  ro- 
maine,  et  le  chri2)tiaDisiue. 


SYRIE  CHRtTIENNE. 


CHAPITRE  !•'. 

miGffl  BU  CHBISTIIWISMB  EN  SY- 
BIB.—  COHSTITIJTION  DB  L'EGUSB 
SYBIBRNB. —  HBBBSIBS. 

PEBMIEBBS  PBiDICATIOWS  ;  BAE- 
JUiSk,  PAUL  BT  PIEBBE  ;  OPIWION 
]>B  CEWNTHB  EELATIVBMENT  A  LA 
CIBCOHCISIOK  ;  BOUSES  d'ANTIO- 
CHS  ET  DB  DAMAS  ;  LA  PBBDICATION 
iTBNDUB  AUX  GBHTILS.    —    On    Sait 

ipie  des  les  temps  les  plus  recul^s  il 
If  ait  exists  entre  Arame  eX.  Israel 
de  continuds  rapports.  Les  Jiiifs,  atti- 
res parte  commerce,  se  transportajent 
en  grand  nombrc  dans  les  villes  syrien- 
nes.  Les  guerres  et  les  conqu^tes  des 
kssmeos,  des  Chaldtens,  des  Perses  et 
des  Grecs  n'avaient  pas  interrompu  ces 
rdations.  Les  S6leucides,  par  int^rdt 
sans  doute,essay^rent,  en  la  favorisant, 
de  rendre  durable  Falliance  des  deux 
pays. 

Les  Juife,  sous  les  rois  grecs  de  la  Syne, 
sefixerent  en  grand  nombre  ^  Antioche. 
La  i\s  ^taient  en  possession  de  tous  les 
privileges  de  la  population  heiI6nique.  Us 
dorent  bientdt  au  credit  dont  ils  jouis- 
saient  et  a  leurs  grandes  richesses ,  et 
peut-SlTeanssi  \  rindiffereuce  du  peuple 
au  milieu  duquel  ils"vi  vaient,  de  pratiquer 
librementla  religion  de  leurs  aleux.  Sui- 
Tant  ie  temoignage  de  Jos^pbe,  its^leve- 
rent  dans  la  capitale  de  la  Syrie  une 
magnifique  synagogue  (* ). 

Cc  fat  au  sein  de  cette  population 
jajve  que  le  christianisme  fit  a  Antio- 
cbe  ses  premieres  conquSt^.  Apr^s  la 
mort  de  saint  £tienne,  comme  nous  Tap- 
fireiment  les  Actes  des  Ap6tres ,  plu- 
neurs  de  ceux  qrui  croyaient  en  larais- 
lion  dirine  du  Cnrist  aoandonn^rent  Je- 
rusalem ,  et  se  rendirent  dans  les  pays 
voisins.  Quelques-uns  s'arr^terent  en 
MienicicBt  dans  Tile  de  Cvpre ;  d'autres 
se  fixerent  a  Antioche.  Ceux-ci  ne  s'a- 
droserent  d'abord  qu'aux  Juifs ;  mais 

(*)  Joi^he,  de  Bello  judaico,  VII,  21 . 


bientdt  ils  annonc^rent  le  Quirt  aux 
Grecs  eux-mtoes,  et  ils  enseign^nt  a 
tous  indistincteraent  la  nouyelle  doc- 
trine- Ils  oper^rent  ainsi  de  nombreuses 
conversions.  La  nouvelle  en  Yint  k 
Jerusalem.  Aussitdt  TEglisc  de  cette 
ville  se  bflita  d'envoyer  en  Svrie  Tun 
de  ses  membres  les  plus  zel6s.  C'6- 
tait  un  ancien  Invite,  qui  avait  cbang^ 
son  nom  de  Josephe  en  celui  de  Bar- 
nabe  (fils  du  propkite).  II  se  rendit 
a  Antioche,  et  la,  en  voyant  ce  qui  avait 
ae  fait,  il  fut  rerapli  de  joie,  et  il  cxhorta 
vivement  ses  nouveaux  fr^res  a  per- 
sev^rer  dans  la  foi  du  Christ.  Bamab^ , 
seul  d'abord,  puis  avec  Taide  de  Paul,  or- 
ganisa  I'figlise  d' Antioche,  dont  les  mem- 
bres furent  les  premiers  qui  s'appelerent 
Chretiens  (*). 

Une  autre  tradition  veut  que  samt 
Pierre  ait  fond6 1'feglisede  Syrie ,  et  qu'il 
ait^tele  premier  6v6que  d' Antioche,  en 
Tan  de  J.  C.  44.  II  fit  dans  cette  ville, 
selon  saint  Chrysostome,  un  s^Jour  de 
sept  ann^es.  Basile  de  Seleucie,  d'un  au- 
tre c6t6,  qui  ecrivait  vers  450.  parle  des 
miracles  faits  par  saint  Pierre  a  Antioche 
comrae  de  choses  g^neralement  recon- 
nues  et  qu'il  est  inutile  de  r6p6ter.  Tou- 
tefois  saint  Luc  ne  dit  nuUe  part  oue 
saint  Pierre  ait  ^t6  ^v^que  d'Antioche. 
II  estbonderemarguerd'ailleurs  qu*au- 
cundesap6tres,sil  on  n'enexcepte  saint 
Jacques ,  eveque  de  Jerusalem ,  n'a  ^te 
d'abord  particulierenient  attach^  a  une 
Eglise.  lis  se  partageaient  les  diverses 
provinces  deTempire  romain,etparcou- 
raient  guccessivement  les  villes  princi- 
pales ,  oil  iis  s'arr^Uient  un  temps  plus 
oumoins  long,  suivantlescirconstances 
et  les  besoins  des  fideles.  Antioche,  par 
son  importance  et  par  la  proximity  de  Je- 

(•)  Jet.  Jpott.  XL,  19.  —  M.  DoeUinger  se- 
rait  porl^  k  croire,  par  la  termlnaiaon  lattne  du 
mot  Chretien  (christiamu),  que  ce  nom  ful  em- 
ploy* la  premiere  fols  par  des  Romains.  Ortgt- 
nesdu  Christianisme  (ir&6,  franc),  1. 1,  P-M- 
— Leqaien  {Orievs  ckristianus,  t.  II,  c  673 ) diu 
PrimamJntiochicB  ecclesiam  in  PalaaseU  urbe 
veteri  posit/im  faisse  Thcodoretus  Chrysost^ 
musque  tradunt. 


120 


L'UNIVERS. 


rusalem ,  devait  ndcessairement  attirer 
line  des  premieres  Tattention  des  apd- 
tres.  Aussi  voyons-nous  saint  Paul  et 
saint  fiamabe  parti  r  de  cette  cite  comine 
d*un  centre  d^ja  form^  de  population 
chr^tienne  pour  aller  6vang^liser  les  vil- 
les  et  les  provinces  voisines.  Apres  leurs 
premieres  excursions,  les  ap6tres  retour- 
nerent  a  Antiocbe ,  ou  lis  assembl^rent 
rEglise,  et  racont^rent  aux  fideles  les 
grandes  choses  que  Dieu  avait  faites  avec 
eux ,  et  c(/mment  lis  avaient  ouvert  aux 
gent i  Is  les  portes  de  la  foi  (*).  lis  y  reste- 
rent  un  temps  considerable,  etsamt  Paul 
ne  quitta  la  ville  que  pour  aller  pr^cher 
TEvangile  a  ceux  qui  n  avaient  point  en- 
core entendu  parler  de  J.  C,  et  jusqu'en 
Uiyrie.     , 

Tout  nous  porte  done  a  croire  que  si 
saint  Pierre  passe  pour  le  premier  ^v^ue 
d' Antiocbe ,  c*est  uniquement  parce  qu*il 

}r  fit  un  sejour  continu ,  ou  plus  long  que 
es  autres  apotres.  II  est  constant  qu^il  ne 
s'v  trouvait  pas  lorsque  s'^leva  dans  Vtr 
gfise  de  cette  ville  une  espece  de  schisme 
qui  donna  lieu  au  troisieme  concile  de 
Jerusalem. 

Cerinthe,  faux  frere  et  faux  apdtre,  s'e- 
taitnHs(**)^la  t^ted'un  parti  qui  voulait 
obliger  les  fideles  a  la  circoncision  et  a  tou- 
tes  les  observances  de  la  loi  de  Moise  (***). 
Saint  Paul  et  saint  Barnab^s'opposerent 
fortement  ^  cette  doctrine,  qui  faisait 
rentrer  les  peuples  dans  une  servitude 
dontleChristetait  venu  les  deli vrer (****). 
On  resolut  d'aller  a  Jerusalem  consulter 
les  apdtres  et  les  pr^res  sur  cette  ques- 
tion. Saint  Paul  partit  done  avecTituset 
liarnabe ,  et  retourna  a  Jerusalem  qua- 
torzeans  apr^s  sa  conversion.  II  y  trouva 
saint  Pierre,  saint  Jacques  et  saint  Jean. 
L'assembl^  des  fideles  se  rangea  a  Tavis 
de  saint  Paul ,  de  saint  Pierre  et  de  saint 
Barnab^  ,  qui  condamnaient  les  C^rin- 
tlilens,  et  une  lettre  fut  adress^e  par  le 
concile  aux  fideles  d'Antiocbe,  de  Syrie 
etde  Cilicie;  elle  se  terminait  par  ces 
mots  :  «  II  a  sembl6  bon  au  Saint-Esprit 
«  et  a  nous  de  ne  vous  imposer  d'autre 
«  cbarge  que  celle-ci,  qui  est  n^cessaire , 

(•)  Fleury,  liv.  I,  ch.  30. 

(*♦;  Fleury,  1. 1,  c.  32. 

(*'*)  Quidam  descendentes  de  Judsa  docehant 
fratret ,  nisi  cf rcumciderentur  secuDdum  legem 
Movsls,  salvari  noD  posse.  AcU  Ap.  XV,  i, 

r**)  S.Paul.  Bp,  ad  Gal.,  ch.  if,  v.  «. 


«  de  vous  abstenir  des  viandes 
«  lees  aux  idoles,  du  san^  des  Mm 
«  6touff^s  et  de  la  fornication. » 

On  voit  qu'en  deli vra  nt  les  fideles  deltj 
plupart  des  observances  judaiqnes,  lei 
cileenlaissaitsubsisteruneSaiDt    , 
tin  a  voulu  ex pliquer cette d^isioa. 
G'est  que,  dit-ii,  la  d6fensede  mangeri 
sang  venal  t  de  plus  baut  que  la  loi  de " 
se,  puisqu'elle  avait  ^t6  d6claree  a  N< 
sortir  de  Tarche :  ainsi  ellesemblait 
der  toutes  les  nations.  II  est  done  a 
que  les  ap6tres  voularent  laisser  d'al 
cette  seule  observance  l^ale  assex 
cile,  pour  reunir  les  gentils  aree 
Israelites  et  les  faire  souvenir  de  Pi 
de  No6,  figure  de  l'£^lise,  qui  n 
toutes  les  nations.  Ajoutonsacela, 
pres  Origdnef**),  que  Topiniong^ 
6tait  alors  quelesraux  dieux,  c'est- 
les  demons,  se  repaissaient  du  saog 
victimes. 

Une  seconde  remarque  oous  est 
ger6e  par  le  texte  de  la  lettre  du 
«  II  a  sembl^  bon  au  Saint-£spnt 
nous,  »  disent  les  Peres;  preuww 
nifeste  que  des  tors  il  y  avait  un  poofV 
fortement  constitue  dans  r^lis^n 
voir  qui,  en  toutes  matieres,  dradi| 
sans  contr6le  et  en  dernier  ressortjl 
qui  le  prouve  encore  davantase,  e'em 
prompte  soumission  des  fidaeselM 
respect  pour  les  paroles  du  concile,  M 
la  bauteuret  Tautorite  nedonnerentfi 
lieu  a  des  reclamations. 

L*£glise  de  Damas  est  aussi  aueieMl 
guecelle  d* Antiocbe.  Nous  savoDS,eB» 
ret,  qu'on  y  voyait  d^ja  des  fideles  co  i * 
n6e  36  de  notre^re.  C'estrepoaue*! 
conversion  de  saint  Paul,  qui  aliait* 
trer  dans  la  ville  pour  y  rechercbff  j* 
Chretiens,  lorsqu*u  fut  miraculeus^ 
convert!.  Ananias,  ce  disciple  qui  i^ 
la  vue  a  Paul ,  est  considere  «>™JJJ* 
premier  6v^ue  de  la  ville.  Paul,dei||Bi 
Chretien,  apres  un  court  sejour  dinsjl 
rabie  voisme,  revint  a  Damas  «! 
enseigna  longtemps  (•**).  U  y  reparut» 
core  souvent  dans  le  cours  dews  tow 
Aussi  Ton  peut  dire  que  si  Barnabcl 
Pierre  furent  les  apdtres  d*AnUod»i 
Paul  fut  Tapdtre  de  Damas. 


*)  S.  Aug.  ConL  Fami.,  cap.  13. 
"  Orl£.,  Cont,  CeU.,  livTvilI. 
***)  Gal,  1, 17. 


SYRIE  ATIGIENNE. 


itn 


Pendant  son  s^jour  a  Antioehe,  saint 
Fierre  nola  une  decision  de  r£glise 

Lloi-mlme  avail  sanctionn^.  II  ne 
it  d'abord  aucune  difficult^  de 
.  coQTerser  avee  les  gentiU  et  de  manger 
tree  eux.  Mais  quelques  circoncis  ^tant 
[foiDide  la  part  de  saint  Jacgues,  saint 
^Fierre  eraignit  de  leur  d^plaire  et  eom- 
■HQ^  a  86  s^parer  des  gentils.  Tons  les 
[Jnifs  eonvertis  d*Antioche  imit^rent  la 
iinioiubtion  de  saint  Pierre,  et  saint 
Janiabe  lui-m^me  s]y  laissa  entrafner. 
£*cit  alors  que  saint  Paul ,  voyant  qu'ils 
[IB  o»rchaient  pas  droit  snivant  la  v£- 
[M  de  rfivangile  [quod  rum  recte  am-- 
mtreiUadveritatem  EvangeHi(*)],  re- 
Mit  saint  Pierre  devant  tout  le  monde , 
P  loi  rMsta  en  face.  Saint  Pierre  re- 
iinnut  sa  faate,  et  des  lors  les  decrets 
p  condie  fiirent  ponctuellement  ex6- 


Gefut  aossi  k  Antioehe,  comme  nous 
ra¥OQft  (tit,  qoe  les  fideles  commence 
wot  a  Be  faire  appeler  Chretiens  et  a  for- 
njer  T^taUement  une  secte  a  part,  se 
dtftioguant  des  juifs,  qui  y  vivaient  en 
tres^gnnd  oombre.  Dans  Torigine,  on  les 
avait  nipeks  ceux  de  la  voie,  ou  simple- 
mmt  disciples  ou  croyants.  On  les  d6si- , 
mit  aossi  sous  le  nom  de  nazar^ens. 
p  nit  ^ilement  a  Antioehe  que  se  fit 
la  premiere  qu^e  ou  collecte  pour  sub- 
vepir  aox  necessites  des  fideles,  a  la 
wrted'oDefiuninequidesola  touteTAsie 
Hmeure  eo  Tan  44.  Saint  Barnab^  et 
Rtat  Paul  furent  charges  de  porter  a  J^ 
nrailein, poor seeourir  les  Chretiens  de 
Judee,  les  aum^nes  de  ceux  d' Antioehe. 
Us  revinreot  peu  apres,  ramenant  aveor 
eux  Jean  Marc,  cousin  de  Barnab^,  quMl 
Miaut  pas  oonfondre  avec  saint  Marc 
l^nraitti^te,  et  qui,  oomme  eux ,  s'oc- 
"g  «  r^pandre  la  foi  en  Syrie  par  la 
pwdication.  Saint  Paul  eut  encore  de 
PBBsaotsaiixiliaires,dans  Judas  notam- 
■ttt,  qtfil  ramena  aussi  de  Jerusalem  a 
"«  Klour  da  ooncile  en  51  (**). 

ITODS  BT  IGNAGE  ;  L*EGL1SE  d'AN- 
nOCHE,  DANS  l'o&igihb,  BMBRASSAIT 
•WTi  LA  SYBiB-  —  Saint  £vode  passe 
pu  le  second  6y^ue  d' Antioehe.  Cest 


r^  J.  PmI  ,  Jd  Gal,  cap.  2,  v.  U. 
rfLir'^**"''^!^'  *<■'  1»  oommeDoemeots  du 
2jMaiMie  h  Aotiodieet  en  Syric,  J .  C.  L.  Gle- 
^r;Ukrbuck  der  iCfrckengeKhichte,  I.  I, 


du  moins  Topinion  d'Eusebe ,  qui  a  et^ 
suivie  par  saint  Jerdme.  Le  chroniqueur 
dit  qu'£vode  fut  etabli  par  saint  Pierre 
sur  le  siege  d* Antioehe,  en  43,  au  mo- 
ment oh  ce  dernier  allait  parti r  pour  se 
rendre  k  Rome.  D'un  autre  cote ,  saint 
Chrysostome  assure,  avec  la  chronique 
d'Alexandrie,  que  saint  Ignace  fut  lait 
6v6que  d'Antioche  par  les  apotres :  il  af - 
firme  m^me  que  saint  Ignace  fut  fait  ev^ 

Jiuepour  remplir  la  place  quesaina  Pierre 
aissait  vacante.  Saint  Manius ,  saint 
Athanase ,  Jean  d' Antioehe  et  plusieurs 
autres  confirment  ropinionde  saint  Jean 
Chrysostome. 

Pour  accorder  des  assertions  si  diffe- 
rentes,  lesavantauteur  des  Annales  eccl^ 
siastiques ,  Baronius ,  ne  trouve  d*autres 
moyens  que  de  faire  de  saint  £vode  et  de 
saint  Ignace  deux  ^v^ques  contemporains, 
ordonn^  en  m^me  temps  par  saint  Pierre 
et  par  saint  Paul,  Tun  pour  les  juifs,  I'au- 
tre  pour  les  gentils,  k  cause  de  la  division 
qui  s'etait  dev^e  entre  eux  et  dont  nous 
avons  parle  a  propos  de  C^rinthe.  Lors- 
que  cette  division  eut  etc  heureusement 
apais^e,  saint  Ignace  ceda,selon  lui,  1*6- 
piscopat  entier  a  saint  £vode,  et  lui  succ6-> 
da  apr^s  sa  mort,  en  68.  D'autres  auteurs, 
le  pdre  Halloin,  j^uite,  dans  la  Vie  de 
saint  Ignace  ,  et  le  protestant  Hamont, 
dans  son  ouvrage  pour  la  defense  de  Te- 
piscopat,  pretendent  qu*j£vode  et  Ignace 
ont  exere^  Tepiscopat  en  m^me  temps ;  et 
que  la  difference  de  moeurs  des  juifs  et  des 
gentils  necpssita  Telection  des  deux  ^v^<- 
^ues  pendant  les  premiers  temps  du  chris- 
tianisme.  Enfin,  une  autre  opinion,  qui 
est  totalement  d^nu^  de  probabiiite,  mais 
que  nous  mentionnons  parce  que  nous  la 
trouvons  consignee  dans  les  Memoiresec- 
clesiastiques  de  Tillemont,  c'est  que  saint 
Evode  mourut  tr^s-peu  de  temps  apres 
son  ordination,  et  que  saint  Pierre,  avant 
de  partir  pour  Rome,  passa  par  Antioehe 
et  y  sacra  saint  I^ace  pour  remplacer 
£vode,qu*il  avait  deja  saer^  lui-mlme  peu 
de  temps  auparavant.  Mais  comment  ac- 
corder ce  recit  avecoelui  d'Eusebe  et  des 
autres  auteurs ,  qui  font  mourir  £vode 
en  68. 

I^ous  Savons  tres-peu  de  chose  de  saint 
£vode.  II  en  est  fait  un  grand  eloge  dans 
une  epitre  attribute  a  saint  Ignace,  mais 
qu'on  a  de  fortes  raisons  de  croire  sup- 
posee.  Saint  Chrysostome  le  met  au  nom 


122 


LIJNIVERS. 


bre  des  plus  grands  evdques,  Fappelant 
kparfum  de  r^glise  e(  le  successeur 
des  apdtres.  L*historien  grec  Nic^phore, 
qui  6crivait  vers  le  milieu  du  douzieme 
siecle,  lui  attribue  divers  ^rits  et  entre 
autres  une  lettre  intitul^e  :  Lumiire. 
Ges  ouvra^es  paraissent  entierement  sup- 
poses. Selon  la  Chronique  d'Eusebe, 
saint  ^.vode  finit  par  le  martyre ;  s*il  en 
est  ainsi,  il  dut  mourir  sur  la  fin  de  la 
persecution  de  N^ron. 

Cest  a  partir  de  saint  Ignace  que 
r£glise  d'Antiocbe,  d^j^  fondle  par  les 
travaux  des  ap6tres  et  par  le  sang  de 
plusieurs  martyrs ,  commence  a  devenir 
un  cbeMieu  important  et  r^v^r^ ,  ou  re- 
side le  chef  du  souvernement  spirituel 
aussi  bien  que  ceiuidu  gouvernement  ci- 
vil de  toute  la  Syrie.  I^int  Ignace  s*ap- 
pelle  lui-m^me  i'evdque  d^  Svrie  dans  son 
^pttre  aux  Romains ;  ce  qui  fait  pr6sumer 

Sue  toute  cette  province  reconnaissait 
es  lors  I'^vfique  d'Antioche  pour  m6- 
tropolitain,  comme  elle  Fa  reconnu  de- 
puis  sous  le  titre  d'arcbev^que  et  de  pa- 
triarche. 

Nous  devons  ajouter  ici  que  les  Feres 
du  concile  de  Nicee  donnerent  k  Antio- 
cbe  le  troisi^me  rang  parnii  les  £glises 
chr6tiennes.  lis  la  pla^aientapres  Alexan- 
drie  et  Rome. 

Quelques  auteurs  modernes  ont  pre- 
tendu  que  sous  Ignace  r£glise  d'Antio- 
che  contenalt  deux  cent  mnle  Chretiens, 
lis  s'appuient  sur  un  texte  de  saint  Chry- 
sostome,  qui  donne  a  cet  ^v^ue 
cette  louange,  d'avoir  pu  gouverner  une 
ville  de  deux  cent  mille  habitants  (*). 
Mais  pour  admettre  ce  chift're  il  fau- 
drait  supposer  que  des  le  premier  sie- 
cle toute  la  population  avait  embrasse 
la  foi.  II  est  certain  que  les  progres  de 
TEglise  furent  tr^srapides.  Au  milieu 
du  quatrieme  siecle,  Fempereur  Julien 
reproche  a  la  ville  d'Antioche  son  atta- 
chementau  christianisme  :  «  Vousaban- 
donnez,  dit-il,  les  temples  de  Jupiter  et 
d'Apollon  pour  les  autels  de  Christ; 
tout  votre  peuple  me  fait  un  crime  de 
rester  fiddle  aux dieux  de  nos  p^res C*). » 

(*)  AfjjJLOv  6lc  etxoffi  fett€iv6|uvov  jjiupi(i8a«, 
Horn,  in  Ignatium. 

(**)  'O  i*lv  ydtp  dfjvuoc  dx^etai  (jlo(  t^  ttXe(- 
«T(|>  \iigtit  iaSXXov  d'dicocc,  diftedrnta  7rpoeX6|ievoc, 
&n  xqXq  «aTp(oic  6pql  Tf};  AYtarsCac  Oe<r(AoT<;  npoa- 
xeifievov.  Utisopogon. 


Dans  la  Goel^-Syrie.  la  religion  nouvdie 
s'etablit  plus  dimeilement.  Au  temps  de 
Sozomene,  les  pr^tres  et  les  rooiw 
6taient  encore  ooursuivis  par  la  haitt 
des  paiens  (*).  Sous  Tempereur  Ji 
il  y  eut  des  ^lises  profanto,  des 
gues  massacrS,  dans  les  villas  d'HeG,, 
ns,  d'Ar^thuse,  d*Apam6e,  d'£me^; 
derriiers  temples  des  dieux  ne 
renverses  que  sous  Th^dose. 

SAINT  IGNAGB  ;  IL  EST  JU6E  A  ifr 
TIOCHB  PAH  TBAJAN  ;  IL  BST  |% 
YOYE  A  ROME  ;  SON  VOYAGE  ; 
MARTYBE  ;  IMPORTANCE  DB  SES 
TEES  POUR  l'HISTOIRE  DES  n^^ 
MIERS  TEMPS  DU  GHBISTIANISMI. 

Saint  Ignace  est  connu  pri 
ment  par  ses  ^pttres  et  par  le  gli 
supplice  qui  termina  sa  longue 
Ces  6pttres,  Rentes  pour  la  plupart 
dant  son  voyage  a  Rome,  ou  il  allait 
martyris6,  sont  pr^cieuses  par  lesrei 
gnements  qu'elles  nous  fournissent  (V 
les  moeurs  des  premiers  chr^i^DiiJ 
sur  les  nombreuses  berries  aui  r# 
vaient  alors  de  toutes  parts, et  float  ^ 
tioche  et  r^glise  de  Syrie  tout  so^ 
eurent  beaucoup  a  souffrir.  £D(iiu|t| 
montrent  aussi  que  la  suprematit 
tuelle  de  Tev^que  d'Antioclie  n'etyit 
restreinte  dans  les  limites  g^ 
ques  de  la  Syrie ,  mais  qu'elles'e 
dans  toute  TAsie  Mineure.  Aussi  d^i 
vra-t-on  pas  s'etonoer,  quoique  i' 
que  nous  avons  entreprise  soi(  ^ 
cialement  celle  de  r£glise  de  SyiUb: 
rencontrer  ici  beaucoup  de  details  " 
tifs  aux  £glises  voisines. 

La  persecution  sous  laquelle  ^0f 
Fut  martyrise  est  celle^de  Trajan.  '*'^ 
fut  ^rite ,  comme  on  le  sait,  Ja  " 
lettre  de  Pline  le  Jeune  a  rempenor. 
fut  Trajan  lui-m£me  qui  fitsubirai 
Ignace  son  premier  interro^atoire. ' 
me,  h  la  suite  d'une  exp^itioo,  il" 
en  Orient,  Fann^  106  de  J.  C.  et 
son  r^gne ,  il  s'arr^ta  q[oelqu« 
a  Antioche ,  d*ou  il  allait  partir 
t6i  pour  combattre  les  Parthes. 
Ignace  fut  amen^  devant  lui ,  et 
dit  avec  un  ^rand  courage  aux 
tions  multiplies   de  Fempereur 
interrogatoire  nous    a   ^te    col 
dans  les  actes  qui  portent  son  nom*  m 

(*)  Sozomene,  Hist,  eecl.,  VI,  34. 


SYRIE  ANCIENNE. 


138 


Ifliliniik  il  est  impossible  de  ne  pas  son- 

fr  am  paroles  que  GorDeille  itiel  dans 
bouche  de  Poiyeucte,  lorsqu'il  vient 
de  renverser  la  statue  de  Jupiter,  et 
BOOS  croirions  Tolontiers  aue  notre 
grand  tragique  s'est  inspire  des  r^pon- 
ses  de  r^v^que  d'Antioebe.  «  Tu  crois 
done,  dit  Trajan,  aue  nous  n^avons  pas 
dans  le  coBur  les  dieux  qui  combattent 
aree  nous  contre  nos  ennemis.  »  — 
•  Vous  ?ous  trompez  de  nommer  dieux 
ksdemoDS  des  gentils.  11  n*y  aqu'un  Dieii 
qui  a  £ait  le  eielet  la  terre,  et  la  mer,  et 
tout  06  aa*ils  contienoent,  et  il  n'y  a 
qu*Qii  seu  J6sus-Christ,  le  fils  unique  de 
Diea,  aa  royaume  duquel  /aspire.  »  — 
« Tu  paries,  reprit  Trajan,  de  celui  qui  a 
eteerueifie  sous  Ponoe  Pilate. »  —  «  Cest 
hu^repoodit  le  saint,  qui  a  cruciGe  le  p^- 
die  avec  le  demon  auteur  do  pech^,  et 
ooi  met  toute  la  malice  du  d^mon  sous 
les  pieds  de  ceux  qui  le  portent  dans  leur 
ooeur.*  AloTS  Trajan :  «  Tu  portes  done 
entoileCnidfi^?  »  —  «  Oui;  car  il  est 
eerit : « J'habiterai  et  je  raarcherai  en 
All.  *  IVajan  pronon^a  cette  sentence : 
NoQs  ordonnons  qu'Ignace,  lequel 
pretend  oQ'ii  porte  en  iui  le  Crucifix, 
aoit  eaenatne  et  conduit  dans  la 
gnode  Rome,  par  les  soldats,  pour 
m  d^n§  par  les  b^tes  dans  les  plai- 
iin  do  peuple.  >  C^tait  un  usage 
d^aiiyofer  a  Rome  les  grands  criminels 
detoutealesproYinces. 

Saint  Ignace,  en  entendant  prononcer 
lOB  arrit,reiidit  grdce  au  ciel  de  Iui  avoir 
accoTdece^'il  d^irait  depuis  si  long- 
temps.  11  pntia  ehatne,  disent  les  Actes, 
el  s*en  ehargea  avec  joie  comme  de  pier* 
nnes  spif itoelles  avec  lesciuelles  il  sou- 
naitaitdemsusciter.  Aussitdtapresilfut 
mkfi  par  les  soldats  pour  £tre  emmen6 
iRoiiie.  Tootefois,  il  n*y  alia  ni  vite  ni 
nreetement  II  semble  qu*on  ait  pris  k 
liefae,  poor  lasser  sa  patience,  de  faire 
Mner  son  voyage  en  longueur,  et  par 
Mitedeprolongerautant  que  possible  les 
■Bovais  traitements  dont  Taccablaient 
SUM  cesse  les  dix  soldats  ou  plut6t , 
ttmme  ille  dit  lui-mtoe  dans  ses  lettres, 
*BS  dix  leopards  qui  Taccompagnaient. 
we  eooduite  ne  eontribua  qu*a  faire 
"(^  davantage  sa  s^rtoite  dans  la 
gffiapce,  sa  diarit6  envers  les  nom- 
2[cn  chr^ens  qui  venaient  baiser  ses 
'**'"^-  et  son  impatiente  ardeur  de  Onir 


par  le  martyre.  11  ne  se  choisit  pas  de 
successeur  comme  avait  fait  saint  Pierre ; 
il  laissa  k  I'figlise  de  Syrie ,  comme  il  le 
dit  dans  une  epftre  aux  Romains,  Jesus- 
Cbrist  m^me  pour^vdque  au  lieu  delui, 
avec  la  protection  dela  cbarit6  etdes 
pri^res  quMI  demandait  pour  elle  a  ton- 
tes  les  autres  l^glises. 

D'Antioebe  saint  Ignace  alia  d'abord 
Ik  S^leucie>  oil  il  devait  s'embarquer. 
Philon,  diacre  de  Cilicie,  et  Asatbopus 
ou  Agathopode  de  Syrie,  ses  disci  pies, 
Taccompagnerent.  Quelques-uns  leur  joi- 
gnent  encore  Reus,  qui  passe,  aux  yeux 
de  quelques  savants,  pour  ^tre  la  mtoe 
personne  qu*Agathopus.  Les  deux  pre- 
miers sout  inscrits  au  catalogue  des 
saints.  lis  passent  pour  les  auteurs  des 
Actes  de  saint  I^ace.  Saint  Clement 
d'Alexandrie  (*)  cite  une  lettrede  There- 
siarque  Valentin  a  un  Agathopode  qu'on 
croit  6tre  celui  dont  nous  parlons. 

Apres  de  grandes  fatigues,  le  saint 
aborda  a  Smyrne,  ou  Polycarpe,  disciple 
de  saint  Jean  comme  Ignace,  gouvernait 
alors  rfiglise.  L'ev^que  d*Antiocbe  se 

{(lorifiaaupres delui  de  ses  chatnes,  et 
e  supplia ,  ainsi  que  tous  les  fldeles  de 
Smyrne,  de  hdter  par  leurs  pri^res  Tac- 
complissement  de  son  sacriGce.  Jusqu'a- 
lors,  sur  sa  route,  Ignace  avait  6te  vi- 
site  par  les  cbretiens  qui  accouraient 
en  foule,  et  Iui  prodiguaient  leurs  soins 
pendant  que  lui-mSme  les  exhortait  et 
les  instruisait  dans  la  foi.  A  Smyrne, 
il  fut  visite  par  Onesime,  6v^que  d'Eph^- 
se,  parBurrhus.  diacre,  par  les  Gdeles 
Crocus  et  Fronton,  et,  au  nom  de 
rfglise  de  Magnesie,  parDamas,son 
6v^que,  et  quelques  autres  membres  du 
clerge.  L'£glise  de  Tralles  Iui  deputa 
aussi  Tev^que  Polybe,  Cest  de  Smyrne 
que  saint  Ignace  6crivit  k  ces  trois  Egli- 
ses  des  lettres  qui  sont  parvenues  jus- 
qu'a  nous. 

Ces  lettres,  que  nous  ne  devons  pas 
examiner  sous  le  rapport  de  la  doctrine 
et  des  sentiments  cbretiens  qui  y  ^da- 
tent,  ne  sont  pas  k  negliger  au  point 
de  vue  de  Tbistoire.  Bien  qu*elles  ne  con- 
tiennent  aucun  detail  precis  sur  les  b^- 
r^tiques  du  temps ,  que  le  saint  se  fait 
un  devoir  de  ne  jamais  nommer,  elles 
nous  montrent,par  la  nature  des  recom- 

(*)Clein.  d'Al.  flom.  III. 


124 


L'UNIVERS. 


mandations  et  des  doges  qu*Ignace  donne 
aux  £glises ,  combien  il  y  avait  alors 
defaux  interpretes  del'^vangiiede  J.G. 
et  combien  de  schismes  tendaient  sans 
oessea  se  produire.  «  Vous  devez ,  ecrit- 
a  il  aux  £ph6siens,  concourir  k  la  vo- 
«  1ont<^  de  l^^v^que  comme  vous  faites. 
«  Car  vos  pr^tres  sont  d'accord  avec 
«  r^v^ue,  comme  les  cordes  d'une  lyre, 
tt  et  votre  union  fait  un  concert  mer- 
«  veilleux  pour  chanter  la  gloire  de 
«  J.  G....  Que  personne  ne  se  trompe  : 
«  quiconque  est  s^pare  de  Tautel  est 
«  priv6  du  pain  de  Dieu ;  car  si  la  priere 
«  d*une  ou  deux  personnes  a  une  telle 
«  force ,  combien  plus  celle  de  T^v^ue 
«  et  de  toute  l*£glise!  —  II  y  a  des 
«  trompeurs  qui,  se  parant  du  nom  de 
«  Dieu,  font  des  choses  indignes  de  lui. 
«  Vous  devez  les  ^viter  comme  des  b^tes 
«  farouches.  Ge  sont  des  chiens  enrages 
cL  qui  mordent  en  cachette...  J*ai  su 
«  aue  vous  aviez  re^u  parmi  vous 
«  des  gens  qui  tiennent  une  mauvaise 
«  doctrine :  mais  vous  avez  bouch^  vos 
cc  oreilles  pour  ne  la  pas  recevoir.  »  £t 
dans  Tepttre  aux  Magnesiens  :  «  Ne  vous 
«  egarez  pas  dans  les  opinions  etrang^- 
«  res  ni  dans  les  auciennes  fables  qui  sont 
«  inutiles.  Si  nous  vivons  encore  selon 
«  la  loi ,  c'est  avouer  que  nous  n*avons 
«  pas  re^u  la  grdce.  »  Cette  phrase  est 
dirigee  ^vjdemment  contre  les  c^rin- 
thiens,  dont  les  partisans  s'etaieut  perp^ 
tu^sdepuis  saint  Pierre,  et  qui  m^laient 
obstinement  les  pratiques  judaiques  au 
culte  nouveau  (*).  Le  saint  ajoute,  pour 
rejeter  de  sa  communion  tons  les  Chre- 
tiens qui  portaient  les  noms  des  diverses 
sectes :  «  Apprenons  a  vivre  selon  le 
«  christianisme ;  car  celui  qui  porte  un 
«  autre  nom  n'est  point  de  Dieu.  » 

(*)C^rinthe  8*6talt  renda  h  £ph«8P,  ou  il  essayalt 
de  propaser  aes  opinions  et  oii  il  devint,  du  vl- 
vaot  de  rapdtreJean.  le  foodateuret  le  chef 
d'ane  secte  aaaez  nombreose.  Les  historieos  ec- 


servaUon  ooostante  de  la  loi  mosalque  est  fort 
controversy.  Saint  Ir^n^  garde  le  silence  k 
ce  so^et,  mais  fiplphanes  pr^eod  qull  attrilMia 
ane  autorit6  obllgatoire  a  une  parUe  de  cette 
m^me  loi  (peut-^tre  h  la  jparlie  morale,  tout  en 
refetant  les  c^r^mooiesV  Que  saint  Jean  ait  6crit 
son  ^vangile  oontre  les  Nioolalles  et  prindpale- 
meot  ooDtre  C^rinthe,  c*est  oegu'attesteDt  uoaoi- 
mement  saint  Irtete ,  saint  fplpbanes  et  iaiot 
J^me. » 


Dans  Tepltre  aux  Tralliens,  saintlgna* 
ce,  apres  leur  avoir  recommand^Fom 
sance  a  F^v^que,  aux  prStres,  aux  diacRii 
les  pr^munit  contre  les  erreurs  des  ioi»  \ 
nandriens,  dont  ilne  prononoe  mlme|ill.  \ 
le  nom,  selon  son  habitude:GesbeF^qae^  j 
qui  6taient  tres-nombreux  a  Aatiodn^^ 
avaient  pour  chef  M^nandre ,  disciple^ 
Simon  le  Magicien.Sadoctrine^ittaii^ 
me  que  celle  de  son  mattre,  sauf  qudqni: 
changements,  qu'il  avait  introduitspos. 
fonder  une  secte  particuli^re;  ilsoutoaNi^ 
entre  autres  choses,  que  quiconque  wif 
ferait  point  baptiser  en  son  noroneixMN 
rait  6tre  sauve,et  que  ceux  qui  reoevrM 
son  baptdme  ne  mourraient  poiiit;f 
niait  que  JesusGhrist eAt  ete veritiUi'i 
ment  horn  me ,  et  il  re^ardait  sod  ooiph 
mortel  comme  une  simple  appanafll] 
On  fait  g^neralenient  remonter,  eosMl 
on  salt,  toutes  les  sectes  gnostiques  iflp 
monet^  M^nandre. 

0  Soyez  sourds ,  dit  saint  Ignaottf 
Tralliens,  quand  on  vousparlerauuJf 
sus-Ghrist ,  qui  est  de  la  race  de  Danl( 
qui  est  n€  de  Marie  v^ritablementjjift 
buet  mang6;  qui  a  et6crucifievdl» 
ment,  et  qui  est  mort  a  la  vuedetoiAtt 
qui  est  au  ciel,  en  la  terre  et  souslitt^ 

re Ous'il  n'a  souffert  qu'cnappa* 

oe,commedisentquelguesimpie8ijefMI- 
dire  les  incredules,  qui  ne  sont  euxHiiM. 
qu'en  apparence ,  pourquoi  suifrJB* 
chatne  ?  Pourquoi  desire-je  eombitti 
les  b^tesPJe  meurs  done  en  vain?  Noii,* 
sur^meiit,  je  ne  meurs  pas  contre  kBt 
gneur. » 

De  Smyrne,  oii  il  resta  encore  q^H^ 
temps,  le  saint  ^crivit  aux  Romaini^ 
huiti^me  ^pftre,  qui  fut  portee  P**  . 
£phesieus  qui  allaient  le  devancerM 
lagrande  ville.  II  y  exhorteses  frefff  # 
Rome,  avecTinsistancela  piustouchi^ 
et  dans  les  termes  les  plus  forts, 
ne  faire  aucune  d-marche  poor  le  i 
traire  ausupplice.  «Jevous6crisvi^ 
amoureux  ae  la  mort,  leur  dit-il. 
amour  est  cruciGe.  Je  n'ai  poiot 
feu  materiel,  mais  uneeau  vive  qui  j 
en  moi  et  me  dit  int^rieurement :  Al 
au  P^re,  » 

-  De  Smyrne ,  saint  Ignaoe  fut . — -^ 
enTroade,  oikW  fut  visiteparr^vA|ue« 
Philadeiphie  ,  en  Asie.  U  adrejsa  «» 
une  6pttre  aux  frircsde  cette  W*^ 
ceuxaeSmymeet  a  saint  PoJycarpe.  Sob 


SYRIE  AWaENNE. 


125 


bitre  aax  Philadelphiens  est  encore 
jKooe  d'allusions  aux  schismes  qui  d^so- 
kient  alors  toute  I'Asie  Mineure,  quoi- 
QQ'ellefiltenquelquesorte  undes  centres 
de  lafoi.  C^Uit  surtout  i*  ^lise  de  Syrie, 
tl(%ile  d'Antioche  en  particulier,  qui 
avait  a  en  souffrir;  mais  c'etait  aussi 
de  cette  demiere  que  sortaient  les  plus 
nlides  enseignements.  Les  lettres  de 
eet  ^6que  qui  allait  mourir  pour  ses 
eroyances  sent  un  recueil  des  exhorta- 
tioos  les  plus  puissantes,  les  plus  ten- 
dres,  et  quelauefois  les  plus  61oquentes, 
anmaintien  de  ce  qull  regardait  comme 
Fortbodoxie;  elles  sont  un  modele  d'humi- 
lite,d*abD^tion,  de  m^pris  de  soi-m£me 
pour  tout  ce  qui  ne  regarde  que  Thom- 
me,  que  !e  simple  frere  des  autres  dis- 
ciples; inaislorsque  Ignace  parle  comme 
ev^e,  comme  gardien  de  la  foi,  comme 
depositaire  des  traditions  apostoliques, 
sa  parole  ae  respire  plus  qu  une  dignite 
ferme,  la  sey^jite,  et  m6me  la  hauteur. 
Angsi,  8«  lettres  furent-elles ,  des  To- 
rigine,consid6r6es  comme  un  des  monu- 
meots  les  plus  importants  de  la  doctrine 
cathofiqoe.  Pendant  plusieurs  siecles,  on 
fesiutpobliqaement  dans  toutes  les  All- 
ies d'Orieot  comme  les  6pttres  de  saint 
Paul  et  des  aatres  ap6tres. 

Itans  r^pitre  aux  Smyrniens,  saint 
Ignace  combat ,  mais  cette  fois  en  les 
nommant,  les  h^r^tiques  connus  sous  le 
Dom  de  fantastiques  ou  dor.ites,  qui  at- 
taquaient  le  myst^re  de  Tlncarnation, 
eommeles  m^DandrienSfdont  ils  n'^taient 
Bins  doute  qu'un  demembrement ;  ils 
joutenaienlque  J6sus-Christ  n'avait  souf- 
lertetn'itaitressuscit^  qu'en  apparence. 
« llsnesonteax-ra^mes  qu'en  apparence, 
wt  saint  Ignace  ;il  leur  arrivera  suivant 
Kors  opinions ,  puisqu'ils  sont  fantasti- 
loes  et  d^moniaques ;  pour  moi ,  je  sais 
111*11  a  ea  sa  chair,  mdme  apres  sa  r^ur- 
•ction,  et  je  crois  qu'il  Pa  encore....  Je 
[JUS  donne  ces avis,  mes chers  fr^res..., 
HO  oue  vous  puissiez  vous  garder  de 
»  betes  a  figure  humaine,  que  vous  de- 
Kz  noo-seuleroentne  pas  recevoir,  mais, 
^se  peut,  ne  pas  rencootrer ,  et  vous  con- 
nter  seolement  de  prier  pour  eux,  afin 
►^•Isse  convertissent...  »  Et  ailleurs  : 
»Si  Jteis-Christ  n'a  fait  tout  cela  c|u*en 
^Ktrenee,  je  ne  suis  done  aussi  lie  que 
priaiagination.'»  11  trace  ensuite  un 
wau  dela  vie  des  h^r^tiques  qui  n'ont 


point  de  charity,  n*ont  soin  ni  de  la 
veuve  ni  de  forphelin,  ni  de  rafflige,  ni 
de  celui  qui  est  en  prison,  ni  de  celui 
qui  a  faim  et  soif. 

Saint  Ignace  se  proposait  d'^rire  en- 
core aux  autres  £glises  d'Asie,lorsqu'on 
le  fit  subitement  embarquer  pour  la  Ma- 
c^doine.  II  n'eut  que  le  temps  d'adresser 
a  Polycarpe,  ^v^que  de  Smyrne,8a  septie- 
me  et  demiere  epttre :  elle  est  pleine  de 
ses  recommandations  ordi  naires.  Mais  en 
outre  it  y  remercie  Dieu  de  la  paix  nou- 
vellement  rendue  ^  r£glise  d'Antioche, 
et  conseille  a  Polycarpe  d'envoyer  un 
Chretien  en  Syrie  pour  fellciter  ses  Wres 
dans  la  foi.  «  II  faut,  bienheureux  Po- 
«  lycarpe,  assembler  un  concile  et  choi- 
«  sirquelqu'unqui  voussoitcher,que  Ton 
«  puisse  nommer  le  courrier  de  Dieu, 
A  afin  quMl  ait  Thonneur  d*aller  en  Syrie 
«  et  de  faire  parattre  la  ferveur  de  votre 
«  charity.  »  II  recommande  encore  k 
saint  Polycarpe  d^ecrire,  comme  instruit 
de  la  vofont^  de  Dieu,  aux  figlises  qui 
sont  au  dela,  pour  qu'elles  f assent  aussi 
la  m^me  chose  :  «  Ceux  qui  pourront  y 
«  enverront  par  terre;  les  autres  ^criront 
«  et  ehargeront  de  leurs  lettres  ceux  que 
«  vous  enverrez ,  afin  que  vous  receviez 
«  de  cette  oeuvre  immortelle  la  gloire 
«  que  vous  m^ritez.  * 

On  volt,  par  Timportance  extreme  que 
saint  Ignace  attache  a  la  fraternelle  d-- 
marche quMl  conseille,  combien  -tait 
grande  Tunion  des  premiers  chr-tiens. 
lis  regardaient  comme  un  devoir  de 
se  visiter,  de  s*encourager  les  uns  les 
autres,  a  quelque  distance  et  dans 
quelques  circonstances  quMls  se  trou- 
vassent,  surtout  dans  les  temps  de  perse- 
cution. II  faut  remarquer  encore  quelle 
-tait  rinfluence  de  saint  Ignace  dans 
ses  lettres,  qui  renferment  non-seulement 
des  conseils  mais  des  ordres  adress-s 
a  tous  les'6v€que$  de  I'Asie,  soit  que  le 
si-ge  d'Antioche  edt  deja  toute  Timpor- 
tancequ'il  poss-da  plus  tard  sous  le  titre 
de  patriarcat,  soit  que  saint  Ignace  fQt 
moins  consider-  comme  un  simple  -vg- 
que  que  comme  un  apdtre  instruit  par 
ceux  m^mes  qui  avaient  vu  J.  C,  et 
ajoutant  ^  Tautorit-  qu*il  tenait  de  saint 
Pierre,  son  predecesseur,  celle  du  mar- 
tyre  qu'il  allait  comme  lui  subir  pour 
la  foi. 

Du  lieu  oti  il  venait  de  d^barquer, 


126 


LOJNIVERS. 


saint  Ignace  vint  ^  Philippes,  traversa 
toute  la  Mac6dome  jusqu'a  £pidamne , 
od  il  s'embarqua  enfin  pour  ritalie. 
Apres  avoir  d&ir6  vainement  de  des- 
cendre  a  Put^oII,  suivant  la  trace  de 
saint  Paul ,  il  arriva  k  rembouchure 
du  Tibre ,  et  de  \h  h  Rome.  Les  freres 
vinrent  au-devant  de  lui;  Ignace  leur 
fit  la  priere,  qu*il  leur  avait  dej^  adres- 
see  dans  la  lettre,  de  ne  tenter  aucune 
demarche  pour  le  sauver.  II  fut  exauc^ 
et  m^me  au  deia  de  ses  voeux ;  car  il 
n'eut  pas  le  temps  de  s'entretenir  des 
choses  de  Dieuavec  les  Chretiens,  comme 
il  avait  fait  jusqu*alors  dans  toutes  les 
villes  ou  il  passait.  Au  moment  m6me 
ou  il  entrait  dans  Rome,  les  jeux  ou  il 
devalt  dtre  livre  aux  b^tes  allaient  finir : 
aussi  fut-il  presl^ue  aussitdt  conduit  a 
Tamphith^atre,  ou  il  consomma  son 
martyre,  le  treizieme  jour  des  calendes 
de  Janvier,  c*est-a-dire,  le  20  d^cembre. 
Tan  107  de  J.  C,  de  Rome  860,du  regne 
de  Trajan  le  dixieme. 

Les  reliques  de  saint  Ignace  furent 
rapport^es  a  Antioche  par  ceux  qui  Ta- 
vaient  accompagne  jusqu'a  Rome.  Elles 
furent  d^posees  dans  le  cimetiere  de  sa 
ville  6piscopale.  Trois  cent  trente-un 
ansjplus  tard,  en  438,  Th^odose  le  Jeune 
les  nt  transporter  dans  un  vieux  temple 
de  la  Fortune  dont  il  venait  de  faire  une 
^glise,  sous  rinvocationde  saint  Ignace. 
Lors  de  Tinvasion  des  Sarrasins,  ces  re- 
liques furent  transport^es  h  Rome ,  si 
Ton  en  croit  Raronius.  Enfin  saint  Ber- 
nard, dans  un  de  ses  sermons,  fait  enten- 
dre que  Tabbaye  de  Clairvaux  en  poss6- 
dait  au  moins  une  partie  au  douzieme 
slecle. 

C'est  k  saint  Ignace  que  Ton  attribue 
rintroduction  dans  TEglise  du  chant 
alter oatif  des  psaumes.  Un  jour  que  le 
saint  ^tait  en  prieres ,  il  eut  une  vision: 
les  anges  lui  apparurent ,  ranges  autour 
du  trone  de  Dieu  et  cbantant  ses  louan- 
ges,  partag6s  en  deux  choBurs  qui  se  r^- 
pondaient.  Cest  cette  vision  qui  donna 
a  saint  Ignace  Tidee  d'adopter  pour  son 
Egiise  cette  sorte  de  chant.  Elle  devint 
bientdt  gen^rale.  Th6odorat,  tout  en 
laissant  a  PEglise  d'Antioche  I'honneur 
de  cette  innovation,  I'attribue  a  deiix 
pr^tres  de  cette  ville,  Flavien  et  Theo- 
dore, qui  vivaient  vers  Tan  350. 

l'evIqub    ehos    successeub    de 


SAINT  IGNACE.  —  Le  sucoesseuf  de 
saint  Ignace  fut  £ros,  sur  la  vie  et  k 
pontificat  du^uel  on  n'a  que  des  notioni 
tr^-incompletes.  Dans  des  lettres  (p 
Ton  attribue  h  saint  Ignace,  mais  doi; 
Fauthenticit^  est  fort  contests,  il  ii 
trouve  une  adresseea  £ros.  Le  saint 
saluedunomdediacreetlui  recommi 
r£^lise  d'Antioche ;  et,  nedoutant 
au'ii  doive  lui  succMer,  il  loi  t 
diverses  instructions  (*).  Baronius . 
d'une  priere  a  saint  Ignace,  composee; 
te  nouvel  ^vdque  d'Antioche.  U  h 
r6e,  dit-il,  d'un  manuscrit  du  Vatii 
mais ,  dans  notre  opinion ,  elle  est 
d'etre  authentique.  Umard  et  h 
entre  autres,  le  mettent  dans  leur 
logue  de  martyrs  et  marquentsa 
au  17  octobre.  lis  se  contentent  de  ^ 
qu'ayant  imite  saint  Ignace,  son  prit* 
cesseur,  Tamour  qu'il  avait  pour  J.C 
lui  fit  donner  sa  vie  pour  le  troufW 
qui  lui  avait  ^t^  confix,  en  128,  m 
les  persecutions  d'Adrien.  11  araitdti 
occup^  le  si^ge  Episcopal  pendant  itt$ 
ans  environ. 

HERESIES.  —  Avant  de  ptfsar  i 
rhistoire  des  successeurs  d'£ros,il«J 
bon  de  faire  connattre  les  diverses  ter 
sies  qui  s'dtaient  ^lev^es  dans  le  prefliC: 
siecle  et  dont  la  Syrie  et  Antuiche  m 
particulier  etaient  le  foyer.  Nousaijli 
dej^  parl6  a  propos  des  lettres  de  # 
Ignace ,  des  m^nandriens  et  des  dod» 
Les  autres  sectes  se  produisireotf 
tres-grand  nombre;  nous  verroasjr 
pendant  que  sous  des  noms  et  desdift 
differents  les  doctrines  ont  prcnj 
toutes  entre  elles  quelques  pomls  ■ 
ressemblance.  ^, 

LES  nicolaTtes.  — SansparlerJ^h 
men^e,  de  Philet  et  d'Aiexandre, 
nomme  saint  Paul  dans  les  deux ' 
a  Timoth^e  et  qu'il  d^voue  k  Satan 
Simon  le  Magicien,  dont  les  opinions 
p^t6es  par  M6nandre  se  pr^sentr 
encore  a  nous  sous  de  nouvelles 
raes(**),  nous  trouvoosdans  le 

(*)Bar.  no,  §8-9. 

(**)  Dans  ses   Origines  du  Chi 
DoelilDg«>r  dit  que  le  samarltaio  Simon,  v 
par  les  anctens  auteurs  eccl^iastiqao  e 
le-pere  de  toos  les  h^r^Uqaes,  peot  £ 
a  bon  droit ,  le  jn-icyneur  du  gnos 
lUoule :  c  SeloD  les  AcUs  des  Jpdtm, 
nommaitlui-m^e  la grande  force  de  I 
pr^Dtalt  oomme  ane  vertu  da  Wea  vffh^\ 
etsa  femme  H^l^ne  ^tait,  disait-UJ^^*< 


SYRIE  ANCIENNE. 


127 


temps  rh^r^sie  des  nicolaltes,  qui  prit 
naissance  k  Aotioche. 

Elle  regut  sod  nom  de  Nicolas,  un  des 
sept  diacres  dont  il  est  parl6  dans  les 
Actes  des  Ap6tres  (*) :  c'etait  un  horarae 
(Tune  grande  piet^  et  d'une  ^minente 
vertu.  Aussi  quelques  P^res,  et  entre  au- 
tres  saint  Clement,  d'Alexandrie  le  regar- 
dent-ilscommeenti^rement  innocent  des 
desordres  de  la  secte  qui  porta  son  nom. 
Selon  iui,  les  her6tiques  se  fondaient  sur 
une  parole  indiscr^e  de  ce  diacre ,  dont 
lis  croyalent  que  la  saintet6  reconnue 
autoriserait  leur  doctrine.  11  avait  dit 
qu*i(fallait  abuser  de  sa  chair, « par  ou  ce 
•gen^reux  diacre,  dit  saintCl^ment,  nous 
«  apprenait  que  nous  devons  reprimer 
"  les  mouvements  de  la  volupt^  et  de  la 
"  concupiscence  et,  parcet  exercice,  mor- 
« tifier  les  passions  et  les  imp^tuosiles  de 

■  la  chair,  au  lieu  que  ces  disciples  de  la 
« volupte  ( les  nicolaites )  expliquaient 
« ces  paroles  selon  leur  sepsualite,  et  non 

■  selon  la  pensee  de  cet  homme  aposto- 
•  lique.  »  TSous  devons  ajouter  que  Ni- 
eolas  avait  amm6  un  jour  sa  femrae 
dansrassembl^  deschr^tiens,ses  fr^res, 
et  Tavait  offerte  a  qui  voudrait  F^pouser 
a  sa  place. 

Quoi  qu'il  en  soitde  Tinnocence  du 
diacre,  les  nicolaites ,  comme  on  le  foit 
dija  par  ce  passage  de  saint  Cl6ment, 
avaient  entierement  renonce  a  la  sevd- 
rit6  et  k  la  purete  des  moeurs  6vangeli- 
jues.  lis  admettaient  la  communautedes 
lemmes,  les  pratiques  des  paiens  (**);  ils 
ne  mettaient  aucune  difference  entre 
les  viandes  ordinaires  etcellesqui  avaient 

■onde  pareiUenient  Hn&n^  de  Dieu,  mals  ret«- 
piK  captive  dans  la  oiati^re.  II  avait  mission  de 
Is  d^ivrer  en  m^me  temps  que  de  i^tablir  par- 
tool  Tordre  et  Kharmonie.  On  ne  peat  plus  de- 
terminer k  quel  decrt  les  doctrines  des  sfmo- 
Diens  viennent  rteliement  de  Simon.  £n  loos 
cai,  ces  sectaires  ne  peuvent  6lre  regardefi  coia- 
■e  repr^ntant  une  h^r^fe  chr^lienne,  car,  k 
proprement  parler,  on  trouve  k  peine  cheE  eux 
00  sent  dogme  du  chrlsUaoisme,  bien  que,  dans 
wr  syncr6tisme,  lis  reconnussent  une  r6» 
Jjlatlon  de  DJeu  dans  le  Christ.  Le  mCme 
wm  unique,  dlMent-ils,  8*est  r^v^I^ comme 
Pere  chez  lee  SamariUins,  oomme  flis  de  Dieo 
2  J.  C  cbez  les  Juifs,  et  oomme  Saint-Esprit 
2«  les  paiens.  Une  secle  issue  d*eux,  les  Eu- 
«lnMei ,  THetait  la  loi  morale  oomme  un  ti" 
iwmeot  arbitraire  impost  par  les  esprito  H' 
gjlateurede  cemonde,  et  ouvrait  ainsi  on  Ubre 
2^P  ^  la  volupte  et  1^  rimmorallt^  la  plus 

H  StinX  iugostto,  De  httr,,  6. 


6t6  immol^es  aux  idoles.  C'est  aux 
moeurs  des  nicolaites  que  saint  Pierre 
fait  allusion  dans  sa  seconde  ^ttre ,  et 
Dieu  lui-mlme,  dans  rApocalypse  de 
saint  Jean,  fi6Iicite  T^v^que  d'£puese  de 
ce  quMl  d^teste  ieurs  erreurs  O. 

Les  nicolaites^  dont  il  est  fait  mention 
pour  la  premiere  fois  vers  Tan  64,  ne 
subsisterent  pas  longtemps  sous  ce  nom. 
lis  se  fondirent  peu  apres  dans  la  secte 
des  cainites. 

LES  CAINITES.  —  Les  camltes  recon- 
naissaient  une  vertu  sup^rieure  a  celle  du 
Cr^teur.  lis  donnaient  a  la  premiere 
le  nom  de  sagesse,  et  h  Tautre  celui  de 
vertu  posUrieure,  a^irjc*  6<rrepav.  Selon 
eux.  Cam,  Cor6,  Datban  et  Judas  ap- 
partenaient  Ilia  Sagesse,  et  tons  les  au- 
tres  au  Cr6ateur*,  pour  cette  raison  Cain 
a  surmont^  Abel ,  et  Judas  a  et^  un  Juste. 
Les  cainistes  niaient  la  resurrection  et 
vivaient  dans  le  d^sordre.  A  cote  des  ni- 
colaites et  des  cainites,  il  faut  placer 
des  sectaires  plus  celebres,  nous  voulons 
parler  des  ^bioniles. 

Ici ,  sans  rappeler  ce  que  nous  avons 
dit  de  Cerinthe  et  de  ses  disciples,  nous 
nous  trouvons  amen^  naturellement  a 
parler  de  certaines  ecoles  ou  sectes  judal- 
santes. 

SECTES  JUDAiSANTES;  LES  EBIO- 
NITES,    LES  MAZABBENS,   LBS    BLXAl- 

TEs ,  etc.  —  II  existait  parmi  les  Juifs, 
avant  T^poque  ou  parurent  Jesus-Christ 
et  les  apotres ,  diverges  Ecoles  aui ,  par 
Ieurs  croyances  et  Ieurs  moeurs,  aevaient 
subir  aisement  Tiniluence  du  christia- 
nisme.  Celle  des  ess^niens  ^tait  la  plus 
remarquable.  Ce  fut  du  sein  de  cette 
ecole  que  devaient  sortir  ies  ^bionites  et 
les  nazareens. 

Dansleprincipefles^bionilesresterent 
fideles  aux  croyaoces  et  aux  pratiques 
juives :  seulement  llsreconnaissaientque 
Jesus  etait  le  Messie.  Pius  tard,  dans  la 
contree  qui  avoisine  le  Jourdain,  il  y  eut 
un  melange  qui  s'opera  entre  ces  semi- 
Chretiens  et  aifferentes  sectes  d'origine 
essenienne.  Cest  1^ ,  si  oous  pouvons 
nous  servir  de  oe  mot,  quese  eonstitua  la 
doctrine  des  ^biooites. 

D'apres  cette  doctrine,  Jesus  ^tait  n^ 
homme  de  Joseph  et  jde  Marie.  II  o'etait 
devenu  Dieu  que  longteoops  apres  s« 

(*)  Jp,  11.  6.  15. 


138 


LUNIVERS. 


naissance,  par  sa  vertu.  G*^tait  au  mo- 
ment de  son  baptlm^  dans  le  Jourdain 
J[ue  le  Messie ,  sous  la  forme  d'une  co- 
omb6f  6tait  entr6  en  lui  et  Favait  divi- 
nise. Contrele  Christ,  qui  gouvernait  le 
monde  celeste,  setenait  Satan,  qui  avait 
6tabli  sa  domination  sur  le  monde  inf6- 
rieur  et  visible.  On  le  voit :  les  ^bionites 
admettaient  Jusqu'^  un  certain  point  la 
coexistence  necessaire  du  bienet  du  mal. 

Si  dans  le  culte  iis  rejetaieot  et  con- 
damnaient  tes  sacrifices,  ils  etaient  res- 
tes  juifs  en  d'autres  points.  Ils  obser- 
vaient  la  circoncision,  le  sabbat  et  pres- 
que  toutes  les  prescriptions  de  Pancienne 
loi.  Saint  Paul,  dileursyeux,  ^taitunapos- 
tat.  Pourquoi,  disaient-ils,  abolir  la  cir- 
concision, puisque  le  Christ  lui-m^me  a 
et^  circoncis.  lis  avaient  aussi  leur  6van- 
ffile  particulier,  VEvangileselon  les  Hi- 
oreux. 

Les  ebionites  se  r^pandfrent  dans  la 
Sjnrie. 

Les  nazareens,  autre  secte  judaTsante, 
diffi^rait  de  la  precedente  en  ce  qu^eile 
reconnaissait  Paul  comme  Tapdtre  des 
gentils.  Elle  n'imposait  point  aux  nou- 
veaux  convertis  les  pratiques  ordonn^es 
par  la  loi  mosaique.Les  pnarisiens ,  dont 
elle  attaquait  Thypocrisie  avec  violence, 
Etaient   ses    ennemis    irreconciliables. 

«  La  secte  des  elxaite^,  dit  un  des  his- 
toriens  modernesde  rfgtise,  paratt  avoir 
peu  diff^re  de  celle  des  ebionites.  Elle 
etait  issue  d*un  ancien  parti  judaique  qui 
tirait  son  nom  d'Elxal.  Elle  subsistait  ae- 
puis  le  commencement  du  deuxieme  sie- 
cle;  mais  eenefutqu'au  troisi^me  qu'elle 
oommenca  k  trouver  acc^s  dans  guelques 
^lises  cnr^tiennes.  Alors  elle  tut  com- 
battue  par  Origeneet  par  Alcibiade  d'A- 
pam^.  Au  rapport  de  Th^doret,  les 
elxaites  admettaient  deux  Christ,  Tun 
sup^rieur,  Tautre  inf^rieur,  c'est-a-dire 
Fhomme  J^us  et  TEsprit  divin,  qui  de- 
meura  d'abord  dans  Adam  et  les  patriar- 
ches,  puis  s'unit  6galement  a  Jesus.  lis 
possraaient  un  pr^tendu  livre  tomb^  du 
del  auqoel  ou  aux  doctrines  duquel  ils 
attachaientune  vertueffa^ant  les  p^ch^s. 
lis  detestaient  aussi  Tapdtre  saint  Paul ; 
mais  ce  qui  frappait  surtout  en  eux ,  c*e- 
tait  leur  assertion  que  Ton  pouvaitrenier 
le  Christ  pendant  les  pers^tions,  et  sa- 
erifier  aux  idoles,  pourvu  que  Ton  garddi 
seulement  la  fol  au  fond  de  son  coeur. 


Cela  joint  aux  arts  magiqnes,  k  Vartro* 
logie  et  aux  invocations  des  esprits  es 
usage  chez  eux,  fait  soup<^nner  qa*Hi 
s'etaient  plus  ^loign^  du  judaisme,ll  ; 
qu*ils  avaient  plus  emprunt^  aax  idte 
paiennes  que  toutes  les  autres  secteijfr 
daisantes.  » 

Les  elxaites,  comme  les  nazar6eai» 
avaient  de  nombreux  partisans  dans  id 
principales  villes  de  la  Syrie. 

LES  SECTES  GNOSTIQUES  ;  SATUElil 
ST  BASILIBE;  lb  GNOSTICISMB  BV  ST' 
BIB ;  LES  MILLBN  AIBBS,  CtC.  —  Lecfafil* 

tianisme,  dans  Torisine,  euta  oombattii 
un  ennemi  redoutable :  ce  fut  le  goorii* 
cisme.  Pour  caract^riser,  en  un  mot,ll: 
doctrine  des  gnostiques,  nous  diroos  qM 
c'^tait  un  melange  des  idees  paiennestf 
des  idees  chretiennes.  II  y  a  millenuanoi 
dans  le  gnosticisme  que  les  autearsm^' 
dernes  out  essay^  de  saisir  et  d^appr^eia. 
A  nos  yeux,  cette  doctrine  varia  smn$j 
les  €ontr^s  ou  elle  s^introduisit :  e'dl 
ainsi ,  par  exemple ,  qu*en  certains  » 
droits  elle  porta  plus  particulimaal 
Tempreinte  de  la  pnilosophie  greoq(ie,6t 
qu'aiUeurs  elle  se  compl^ta  suilnit  i 
Taide  des  systemes  religieux  delXtoieot 

Nous  ne  parlerons  pas  des  preimen 
gnostiques,  que  d'ailleurs  onconoattpeiL 
II  nous  sufiStd^avoir  nomme  Simon,  G^ 
rinthe,  M6nandre,  et  mentionn^lesnifli* 
laites.  Nous  allons  nous  transportir 
maintenant  a  une  ^poque  od  nous  m^ 
vons,  sur  les  hommes  et  les  doctrines, It 
assez  grand  nombre  de  renseignenierii 

Parrai  les  disciples  de  M^aodi^t 
sur  lequel  nous  ne  reviendrons  pas,  ai 
trouva  Satumin  d*Antioche,  qui,  i» 
vant  certains  auteurs,  ne  fit  que  icp^ 
ter  son  maftre,  et  que  nous  Dooseoa* 
tenterions  de  nommer  dans  oe  coiiiif6-  j 
sum^,  s*il  n*avait  puissamment 
bu^  k  propager  deux  erreurs 
un  r6le  important  dans  les 
sidles  suivants. 

II  pretend  it  que  les  homnoes 
bonsou  m^hants  en  naissant.  Cari 
lui ,  les  anges  avaient ,  dans  Toi 
forme  deux  hommes ,  I'un  bon , 
m6chant,  dont  tous  les  autres 
ensuite  descend  us ,  divis^s  en  oes 
categories.  Le  dualisme  dont  nous  ^ 
Ions  n'6tait  pas  vague  comnae  oeluf 
Ebionites ;  c^^tait  un  systeme  precis  H] 
arr^te. 


SYRIE  ANCIENNE. 


1^ 


f  Saturnin  fut  le  premier^  selon  Theo- 
doret,  qui  enseigna  qoe  le  manage  et 

la  g^n^ratJon  des  eofants  viennent  de 
satan.  On  voit  qu'il  deyao^a  ]a  secte 
des  orig^nistes. 

BasiOde  d'Alexandrie ,  cootemporaio 
et,  suiTant  guelqnes^uDB,  disciple  de  Sa- 
turnin ,  avait  invent^  un  s^steme  dans 
iequel  il  faisait  entrer  et  le  Dieu  des  Juifs 
et  tes  anges  de  TAncien  Testament ,  et 
les  abstractions  des  phtlosophes  n^opla- 
toniciens.  Le  dieu  supreme,  le  Pere, 
^tait  ^ternel ;  de  lui  6tait  sort!  If oO( , 
c^est-shdire  rintelligence,  qui  avait  pro* 
doit  le  Verba;  A070C,  leauel  ^tait  le  trere 
de  <»peviimc,  c'est*ii-dire  la  prudence,  d'od 
descendaient  ^  leur  tour  2o(pia  et  Auva* 
}ui,  la  sagesse  et  la  puissance ,  etc.  Le 
Dieu  des  Juifs  n'^tait  que  le  chef  des  an- 
ges du  troisi^me  ordre,  qui  avait  voulu 
soumettre  toutesles  nations,  etoontre  ie- 
quel le  P^re  avait  envoye  if  oOc,  son  pie- 
fflier  ni6.  Ce  Ncuc  etait  IeCbrist,qui  n*avait 
soufTert  et  n'^tait  mort,  selon  Basilide, 
Qu>n  apparence;  opinion  d^j^  soutenue 
des  les  premiers  temus  de  TEglise,  et  r^ 
fut6e,  comma  nous  1  avons  vu,  par  saint 
Jean  dans  ses  ^pttres.  II  niait,  en  ou- 
tre, la  resurrection  de  la  chair.  Sa  mo- 
rale, s'il  faut  en  croire  certains  ^rivains, 
^lait  tr^-reldch^.  II  est  avM  que 
parmi  les  basilidiens  plusieurs  se  livr^- 
rent  aux  excds  qui  fiirent  reproch^s  plus 
tard  a  toute  la  secte.  Le  d^r^lement 
ebez  eux  d^rivait  de  Torgueil.  lis  se  re- 
gardaientcomme  des  ^his^etsecroyaient 
sdrsd'arriver^  la  felicity  ^ternelle.  G'est 
poorquoi  ils  se  livraient  sans  crainte 
sax  plus  grands  d^rdres. 

Cest  h  peu  pr^  an  m^roe  temps  que 
ft  rapporte  Forigine  d'une  erreur  qui 
devint  tr^-commune  dans  les  premiers 
siecles  de  Vt^gUse^  et  qui  se  repandit  en 
Syrie,  mais  qui  ne  eonstitua  jamais 
UDe  her^sie;  nous  voulons  parler  de 
I'opinion  des  millenaires.  L^  mille- 
naires  prenaient  h  la  lettre  plusieurs 
passages    de  T Apocalypse,  ou   il  est 

rstion  de  la  nonvelle  Jerusalem,  ou 
justes  seront  rassembles  apr^s  la 
i^rrection.  lis  croyaient  que  la  ca- 
pitale  de  la  Jud^  serait  rebdtie  dans 
toute  son  ancienne  splendour,  et  que  les 
saints  y  regneraient  un  jour  pendant 
nille  ans.  De  1^  lenomqu'on  leur  donna. 
Ces  mille  premiss  ann^  de  la  r^sur- 

9*  Uvraison,  (sybib  A5CiEN?fE.) 


rection  devaient  se  passer  dans  des  fes- 
tins  continuels  et  toutes  sortes  de  de- 
lices  cbarnelles.  Chose  singuliere ,  ce  fut 
un  saint  qui  introduisit  le  premier  cette 
erreur,  etelle  fut promptement  adoptee 
et  soutenue  par  beaucoup  d'autres.  II  est 
difficile  de  croire  toutetois  ^u*elle  n'ait 
pas  ^i6  a^ravee  par  lesh^retiaues,  qui 
i'embrasserent  en  foule.  Vers  la  Gn  du 
cinauieme  si^cle  on  vit  disparaltre  les 
millenaires. 

T^ous  ne  dirons  rien  des  adamites,  qui 
avaient  la  pretention  d'imiter  Finuo- 
cence  primitive  en  priant  nus  dans  leurs 
^lises.  Les  ophites  supposaieut  que  le 
serpent  qui  poussa  les  premiers  hommes 
a  violer  les  commandements  du  Crea- 
teur  etait  une  Emanation  de  Dieu.  D*au- 
tres  supposaient  que  le  Christ  lui-mlme 
avait  pris,  dans  le  paradis,  la  forme  du 
serpent.  Cest  pourquoi,  disaient-ils, 
Mo'ise  6]eva  dans  le  d^ert  un  serpent 
d'airain.  Tons  ces  sactaires  rendaient 
une  sorte  de  cuite  au  serpent,  d'ou  leur 
viut  la  denomination  d'ophites.  lis 
avaient  avec  les  s^thiens  et  les  cainites 
des  traits  nombreux  de  ressemblance. 
Quant  aux  carpocratiens,  qui  tiraient  leur 
nom  de  Carpocrates  d'Alexandrie,  lis 
n'avaient  conserve  qu*un  petit  nombre 
d'^l^ments  Chretiens  dans  leur  syncre- 
tisme.  Suivant  eux,  tout  6tait  sorti  du 
Pere  supreme  et  universel,  etdevait  ren- 
trer  un  jour  dans  son  sein.  Le  monde 
que  nous  habitons  et  que  nous  vovous 
avait  ^teform6  par  des  esprits  orgueiileux 
et  mechants.  Ce  sont  eux  qui  le  gouver- 
nent :  mais  leurs  lois  ^tant  contraires  a 
celies  du  P^ie,  on  doit  les  m^connattre 
et  les  violer  pour  arriver  a  la  v^rite.  D'oii 
il  suit  que  les  carpocratiens,  n'hesitant 
point  a  se  soustraire  aux  lois  qui  r^gis- 
sent  ce  monde ,  durent  tomber  dans  lea 
bonteux  desordres  dont  les  contempo- 
rains  ont  parte.  X^ousnous  abstiendrons 
de  citer  ici  d*autres  gnostiques ,  qui 
avaient  des  doctrines  morales  analo- 
gues a  cetle  des  carpocratiens. 

VALENTIN   BT  LBS    YALENTINTBNS. 

—  Valentin,  que  Ton  croit  originaire 
d'hgvpte,  et  probablement  disciple  de 
r^cole  d'Alexandrie,  ^tait  tr^vers^  dans 
la  philosophic  ancienne,  et  particuliere- 
ment  danscelle  dePlaton.  Cequi  le  jeta 
dans  rh^r^ie,  ce  fut  le  depit  de  ne  pou- 
voir  arriver  h  T^piscopat  malgr^  tout 

9 


1^0 


L'UNIVERS. 


son  g^nie  et  ion  Eloquence.  11  imagina 
un  syst^me  de  religion  dont  les  quatre 
61ements  principaux  ^fent  la  Tn6orie 
des  Id6es  de  Platon ,  les  Nombres  de 
Pylhagore ,  la  Th^ogonie  d'H^iode  et 
TEvangilede  saint  Jean,  le  leul  qu'il  vou- 
Idt  reconnaitre.  On  TOtt  que  son  h6r^ie 
reposait  sur  les  m^mes  bases  que  celle  de 
Basilide  et  des  gnostiques.  Cest  en  d^- 
nitive  T^cole  d^lexandrie  qui  s'efforee 
de  lutter  par  son  mysticisme  avec  les 
mysteres  de  la  religion  chr^ienne. 

"Valentin  reconnaissaitleProow(«prfov), 
le  pr^existant,  qu'ii  d6signait  aussi  sous 
les  noms  de  npotraTYip  et  oe  Bu6oc,  profon- 
deur,  pour  le  pere  de  tous  les  ^tres  : 
£vvoia,  la  pens^e;  Zi-p,  le  silence,  habi- 
taient  avec  lui.  Le  Sig^  Bythos  avait  en- 
gendr^  Nous  ( ivouc),  qui  6tait  egal  a 
lui.  Cest  ce  fils  qui  avait  cre6toutes 
choses.  Les  personnes  divines  que  nous 
venons  de  nommer  talent  d^sie;n6es 
sous  le  uom  e^n^ral  d'Eons  ou  d'^tres. 
De  Nous  et  d'AXtieiia,  la  Verite,  sa  soeur, 
^aient  sortis  deux  autres  tons  :  A070C, 
le  Verbe  et  Zo'in,  la  Vie,  qui  ^taient  p^res 
d'Avepwico;,  et  d'iwtXiioiflt,  rhomme  et 
r£^lise. 

11  est  inutile  de  suivre  plus  loin  la 
e^nealogie.  11  sufQt  de  savoir  que  le  nom- 
bre  total  des  £ons  ^tait  de  trente,  dont 
la  reunion  formait  le  nxiipuua  ou  pleni- 
tude spirituelle.  Tous  les  £ons  s^6taient 
r6unis  pour  donner  naissance  k  J^sus, 
qui  6tait  comme  la  fleur  de  tout  le  PIS- 
rome,  et  portait  a  lafois  le  nom  de  tous 
les  Eons,  et  particuli^rement  celui  de 
Christ,  Tun  d'entre  eux,  et  celui  de  Verbe, 
parce  qu'il  proc^dait  d'eux  tous.  Cest 
ainsi  que  Valentin  et  sea  disciples  expit- 
quaient  cette  parole  de  saint  Paul,  que 
toutestrassembl^en  J^us-Christ  (*). 

Infiniment  au-dessus  des  fons  et  du 
PWrome  6tait  le  Demiurgue  (Atjuioup- 
70;,  cr^ateur),  dont  il  est  inutile  de  sui- 
vre la  descendance.  II  avait  cr^  le  d^ 
mon  et  tous  les  esprits  m<ichants ,  ainsi 
que  I'homme.  Ce  n^^tait  pas  le  veritable 
Christ  qui  avait  souffert ;  raais  un  autre 
Christ,  quele  veritable  avait  cr^lison 
image.  Les  cons^encesde  la  morale  des 
yalentiniensetaitunfatali8mepur,direc- 
tement  oppose  aux  cnseignementsderjS- 
glise.  lis  divisaient  les  hommes  en  trois 

(•)  GokM.  1. 9. 


eat^ories;  les  charoels,  qdnewNmiiiit 
jamais  to«  sauv^,  qooi  qu'ils  finert^i 
a  qai  las  p^nitenees  toieni  inutiki;  b 
psychiques,  tela  qu'^ient,  ielon«B, 
les  cathoiiques,  qui  ne  ponvaicnt  jaml 
arriver  k  la  gnose  ra  sdeiwe  paraili, 
et  it  quila  fol  et  les  oaavres  ^ieotneo* 
aaires  pour  6tre  saovte;  «t  les  spiiitadii 
parmi  lesqoels  ils  ae  eomptaientOM^ 
ei ,  &  la  difference  dea  |>87cluqQeiclli 
ehamels,  ne  ponvaientjaniaistovte! 
n^s,  quelles  que  fussentleurs 


Aussi,  leur  vieetaitrelle  remplie  deM 
dales  et  ne  dif£6rail-elle  en  rieo  deflill 
des  paTens. 

Cette  b^resie,  favorisee  par  le  mjiil 
dont  ses  doeteurs  renTeloppaieat,iei^ 
pandit  rapideroent  dans  la  S^fltil 
beaucoup  de  partisans :  elle  rat  oool# 
tue  notamroent  par  saint  Iren^,  all 
Justin,  et  par  Tertullien. 

Le  systeme  dont  nous  venoBsdepii 
ler  etait  eomplique  et  obscur  en  bin  ii 
points ;  mais,  on  ne  saorait  le  nM 
nattre,  il  etait  plein  d'art  et  0^  * 
po^tie. 

Valentin  enseignait  k  AkxaadwMtt 
Tan  133.  D*£gypte  il  vint  k  RemtiMl 
fat  exclu  oendant  Dluaieun  sDoen  II 


fat  exclu  pendant  plusieurs 
la  communion  des  fideles. 

Tertullien  parle  d*un  disciple  <le  it 
Icntin,  nomoM  Axionique,  qui  detf 
temps  enseignait  encore  a  Antiodili 
doctrine  de  son  mattre  sans  Taroir  m 
r6e.  L'hcresledes  yalentinieo8  8epr# 
gea  principalement  k  partir  de  Kan  1# 

HAaCION    ET  LBS  MABGIOmTB**^ 

Queiques  annto  plus  tard,  ten  m 
se  produisirent  lea  mardooites,  i^ 
aecte  dont  les  doctrines  se  compoMP 
d'opinions  philosophtqueset  chr^ticii^ 
Marcion,  ne  pouvant  expliquer  ronp 


du  mal ,  se  rangea  k  Topinion,  bI 
en  Asie.  dedeux  dieux  enoemist 
auteur  au  bien ,  Tautre  auteur  du  1 
Les  ^crivains  qui  Font  eombttui 
leaquels  il  faut  compter  saint 
saint  Denys,  saint  ^pipbane,  saini 
de  Jerusalem,  Tertullien,  lui  attri 
une  foole  d'autres  erreurs.  Cequi 
constant,  c'est  qu'il  admettait lea 
de  Valentin;  mais  sa  morale  ^it 
diff6rente :  il  eoodamnait  le  marr" 
baptisant  que  ceux  qui  i^iisaleot 
aion  de  continence,  ordonoait  im  j< 
rigoureux ,  et  enseignait  it  ses  d[  ~ 


SYRIE  ANCIENNE. 


Ul 


)fliareberd*eux-iD^ines  a  la  mort  et  h 
tmt audevant du  martyre.  Cette h^- 
1^0,  qui  avait  las  dehors  aus^es  de 
laeroyance  vraimeDtchr^Ueone,  ou  plu* 
t(kqui  le^exag^rait,  eutun  grand  nom* 
bre  de  sectateam  et  de  martyrs ,  et  dura 
plusieurs  siecles. 

Le  p^rede  Marcion  ^ait^v^que  de  Si- 
nope.  (T^tait  ]ui*m6ine  qui  avait  exclu 
son  fils  de  U  communipn  des  tideles. 
Mardon  viot^Rome,  ou  il  8*associa  k 
DDgoostique  syrien ,  et  cefut  alors  qu'il 
isTenta  son  systeme.  Suivant  certaines 
traditions,  il  rentra,  a  la  fin,  dans  le  sein 
de  rtgtise. 

U  STBIBII  BAJIDBSANBS;   MOIVTAN 

IT  sig  BISCIPI.B8.  —  Avant  d'arriver 
iMontan,  et  sans  parler  d*une  foule 
d1)6resie8  sembtables  h  celles  que  nous 
venoDsde  signaler,  oui  se  produisirent 
et  subsist^rent  en  meme  temps  dans  la 
Sjrie,  nous  devous  dire  un  mot  du  Sy- 
nen  Bartlesanes.  CTetait  un  gnostique 

Srofondemeot  verse  dans  les  questions 
e  philosof^e  et  qui  ^crivait  avec  abon- 
dance.  II  u  declarait  ortbodoxe ,  et  ce- 
pendant ,  a  £desse,  dans  des  reunions 
ieoretes,  il  faisait  des  proselytes  au  ^nos- 
ticisme.  11  propageait  surtout  ses  id^es 
i  Paide  d^hymoes  religieux  qu'il  repan- 
dait  parmi  les  populations  syrieunes. 
tphralm  le  comoattit  avec  ses  propres 
armes,  en  recourant  h  son  tour  a  la  po^- 
aepour  le  rtfuter.  Euscbe,  dans  sa  Pri- 
paration  hangiiioue,  nous  a  conserve 
on  fragment  oonsia^rable  d*un  livre  pr6- 
iente  par  Bardesanes  k  Tempereur  An- 
toninus V^rus. 

Montan  eul  cela  de  commun  avec  Mar- 
cion, qu'il  poQssa  I'austerite  au  point  le 
§iexageri.C6taituneunuquede  Phry- 
nouvellement  convert! ,  qui ,  plein 
ibilion  et  irrit6  de  ne  pas  arriver  aux 
ites  ecel^iastiques,  se  mit  a  prophe- 
Qier.  Deaxfemmes,qui,ellesaussi,  se  di- 
Inent  prophetesses,  sejoignirenl  bientdt 
■mi.  Ifsedonnait  commeleParac 


B  Para  clet  pro- 
spar  Jesus-Christ  II  prescrivit  de  nou- 
l^ux  jednes,  ^tablittrois  car^mes  au  lieu 
liin,  et  ioterdit  comme  une  d^bauche  les 
Munds  mariases.  Comme  Marcion,  il 
Ifdonnait  de  cnercher  le  martyre.  Mon- 
roe recevait presque  point  de  pecheurg 
ahp^nitence.  II  paratt  cependant  que  les 
pophetesetaientmoins  austeres  (ju*iisne 
fcparaissaieDt;  un  auteur.eccl^siastique 


du  temps,  Apollonius,  leur  reproobe  de 
se  couper  la  oarbe  et  les  cheveux^  de  se 
peindreles  sourclls,de  preterausure,de 
jouer  aux  d^s  et  de  recevoir  des  pr^ents. 
On  croit  que  Montan  et  ses  deux  prophe- 
tesses, jpo$sed6s,disent  certaines  tradi-. 
tions,  ou  malin  esprit,  se  pendirent.  Ce 
qui  n'emp^ha  pas  leur  doctrine  de  se 
repandre,  particuli^rement  en  Syrie ;  et 
nous  verrons,  au  siede  suivant,  saint  S^- 
rapion,  ev^que  d'Antioche,  terire  contre 
les  montanistes  qui  troublalent  son 
£glise. 

Teis  6taient  les  dangers  sans  nombre 
et  incessants  dont  la  croyance  chre- 
tienne  ^tait  entouree  dans  le  pays  niS- 
me  ou  les  ap6tres  Tavaient  te  plus  soli- 
dement  ^tablie;  telles  furent  aussi  les 
causes  des  nombreux  coociles  qui  se 
linrent  en  Asie  des  que  la  fin  des  per- 
secutions edt  permis  aux  Chretiens  de 
se  r^unir  publiquement.  Mais,  si  les 
h^r^tiques  se  roultipliaient ,  lesdocteurs 
4e  r^lise  paraissaient  en  aussi  grand 
nombre.  Les  Iguace,  les  Justin,  les 
Clement  d' Alexandria,  les  Ir^n^e,  6gaux 
en  science  aux  principaux  des  her^siar- 

3ues,  et  instruits  comme  eux  aux  ^coles 
e  Fancienne  phtlosophie ,  ne  cesserent 
de  lutter  pour  faire  triom^er  la  doc- 
trine des  apdtres.  lis  r^ussirent ;  et,  il 
importe  de  le  rcmarquer,  jamais  en  Sy- 
rie les  sectes  m^me  les  plus  influentes 
ne  parent  balancer  la  pr^popderance  de 
r^Iise  m^re. 

CHAPITRE  n. 

L*EGLISE    DB    SYBIE     PENDAV?    tBS 
FEBSECUIpION^- 

SUITE  DES  ivAfiUES  P'AWTIOCHB  ; 
COBNEIUiB,  ifiOS  II,  THEOPHILE, 
MAXIMIN,  SEBAPION,  ASCLEPIADE  , 
PHILETUS  ET  ZEBENNE.  —  ErOS  ^talt 

iport  martyr,  comme  nous  Favonsvu, 
sous  la  persecution  d'Adrien,en  128; 
son  successeur  fut  Corneille,  qui  gou- 
verna  treize  ans  et  dont  la  vie  nous  est 
rest^e  inconnue.  11  roourut  en  142.  Un 
aecond  £ros  fut  ^v^que  apr^s  lui ;  tout 
ce  qu'on  salt  de  son  ^piscopat,  c'est  qu'il 
gouveroa  vingt-sept  ans  el  moorut 
fa  huiti^me  ann6c  du  r^ne  de  Marc- 
Aurele  (de  J.  C.  168),  Son  successeur 
saint  Th6ophile,  s'etait  distingu^,  en- 

9. 


Id) 


L'UNIVERS. 


corebien  jeune,  dans  les  ^oles  paien- 
nes ,  ou  if  avail  puise  un  grand  mepris 
pour  le  christianisme.  Mais ,  ayant  etu- 
die  les  livres  saints  et  surtout  les  pro- 
ph^tes,  dans  Tintention  d'y  trouver 
des  armes  pour  combattre  les  Chretiens, 
11  fut  convert!  par  cette  lecture,  et  devint 
d^  lors  Tun  des  plus  z^les  et  des  plus 
^loqueuts  d^fenseurs  de  la  religion. 

L*£glised'Antioche  lerecut  avec  joie. 
II  se  ndta  d*attaquer  les  *nombreuses 
h^r6sies  quicommen^aient  k  y  r6gner,  et 
ecrivit  principalement  contre  Marcion 
et  Hermog^ne.  Apres  avoir  refute 
ces  deux  her^siarques,  11  travailla  a  trois 
livres  que  lui  demandait  un  pa'fen.  Le 
premier  traitait  de  la  nature  de  Dieu  et 
de  la  resurrection ;  le  second  avait  pour 
but  de  signaler  les  erreurs  et  les  absur- 
ditesdu  polytheisme;  le  troisieme,  en- 
fin ,  prouvait  Tantiquite  des  flcritu- 
res  (*).  C'est  le  seul  de  tons  les  ouvrages 
de  saint  Tb6ophile  qui  nous  soit  rest6. 
II  sufiQt  pour  nous  donner  une  haute 
opinion  de  son  esprit  et  de  sa  science,  et 
merite,  dans  Topinionde  certains  ecri- 

fait 

sunouvrage 
tout  divih. 

Saint  Th^ophile,  suivant  certains  au- 
teurs,  est  le  premier  qui  se  servit  du  mot 
Trinity  pour  designer  les  trois  personnes 
divines. 

SI  Ton  en  croit  Nic^phore,  il  mourut  en 
181,  la  seconde  ann^  du  regne  de  Com- 
mode (***).  Maximin  lui  succeda,  et  gou- 
vernatreize  ans.  Apr^  celui-ci,  saint  S^- 
rtpion  fiit  nomm^  ev^ue  d'Antioche ;  sa 
vie^tait  austere,  son  esprit  vigoureux  et 
ind^pendant.  II  6crivit ,  contre  Th^r^ie 
des  montanistes,  des  lettres  fort  estim6es 
de  saint  J^r6me.  Mais  son  principal 
ouvrage  est  la  refutation  de  1  evangile 
attribue  k  saint  Pierre,  et  compost  par 
des  h^retiques  qui  avaient  voulu  r^- 
pandre  leurs  doctrines  au  moyen  de  cet 
Evangile. 

A  Serapion,  qui  gouvernal'figlise  d' An- 
tiochede  199  k  211  environ^  succeda 
saint  Ascl^piade.  On  ne  sait  nen  de  son 

(*)  Voy.,  8ur  Thfophilc ,  Aag.  Neander,  All- 

g*meine  Getchichie  der  christtichcn  Reliaion 

nnd  Kirch;  t.  TI,p.  Ilfl3.  Hamhourg,  1843. 

(")  Bar.  13  od.  F.  divinas  illntlucubraUones, 

{***)  II  Mt  plus  vraiseml>lable  qu*U  vteutjus- 

qa*en  186, 


vains  ecclrsiastiques ,  T^loge  qu'en  fait 
Baronius(**)quand  11  Tappelleun  ouvrage 


episcopal,  si  ce  n'est  quUl  dut  ^tre  renaf' 
quable.  Saint  Alexandre  de  Jerusaleoo, 

3ui  etait  en  prison  lors  de  Telectioo 
'Asclepiade,  ait  que  la  nouvelle  de  cette 
election  |ui  avait  rendu  ses  cfaatnes  le- 
geres.  ficrivant  k  r£glise  d'Antioche  a 
ee  sujet ,  il  lui  donna  le  noai  de  6i^ 
heureuse.  On  croit  que  cet  ev6qae  mou- 
rut en  219. 

II  eut  pour  successeur  Philetus  (Sid- 
280 ) .  Apres  lui  Zebenne  ou  Z^bin,  aooh 
me  aussi  Rabune,  fut  ev^que  d*AntiodK 
Tespace  d^environ  neuf  ans.  Saint  J^ 
r6me  place  sous  son  episcopal  le  prttrt 
d'Antioche  Geminus  ou  Geminianus, 
auteur  de  quelques  ecrits  celebres,  quioe 
nous  sont  pas  restes. 

SAINT  BABYLAS;  SON  EPISCOPAi; 
SON  MARTYBB  ;    LEGBKDES.  —    SaiOt 

Babylas,  successeur  de  Zebenne,  (237- 
251)  gouverpatreize  ans,  durant  lesqueb 
il  acquit,  diSent  les  anciensauteurs,ott 
gloire    peu   commune,    et    demt  le 
saint  le   plus  populalre   de   toute  Ii 
Syrie.  Apres   avoir  ete   temoio  de  b 
prise  d'Antioche  par   les    Perses,  en 
241  ou  242  ,  il  vit  sur  le  trone  ksein- 
pereurs  Gordien,  Philippe  et  Dece.Le 
premier  de  ces  princes,  neureux  du  d^ 
part  des  Perses,  n'inquieta  pas  TEglisi  \ 
d'Antioche;  le  second  donna   liea^U 
scene  eclatante  ou  brilla  Babylas,  et  ^ 
devait  le  designer  plus  tard  k  la  ookit  | 
de  Dece.  Le  samedi  saint  de  Taimee 
244,  Philippe  et,  suivant  quelques  at*  ; 
teurs,  rimperatrice  s'avancaient   poir  ^ 
entrer  dans  TEglise :  saint  Babylas,  pi^ 
venu  de  leurs  desordres  et  des  scandakf 
qu'ils  donnaient  aux  fideles,  leur  bam 
le  chemin,  et  dedara  a  Fempereur  qsIS 
devait  se  mettre  au  rang  des  jpenittols  ; 
publics ;  que  dans  le  royaume  de  Dieufl  | 
n'y  avait  pas  de  distinctions ,  mais  aoe  | 
egalite  parfaite,  et  qu'il  estimait  ploi  | 
la  moindre  de  ses  brebis  repentaatel  ' 
qu'un  empereur  qui  vivait  dans  le  vies 
sans  remords  et  sans  intention  de  s'a- ; 
mender.  Cette  conduite  fut  admiree  ^ 
tons   les  ev^ques  d'Orient ;    et  sauA 
Jean  Chrysostome,  dans  le   discoois 
qu'il  pronon^a  plus  tard  k  Antioche,  re- 
leva  iusqu'aux  cieux. « Ce  grand  ev^qae, 
dit-il ,  montra  que  les  pretres  de  la  reli- 
gion du  Christ  ne  sent  esclaves  de  per- 
Sonne  sur  la  terre,  et  qu'ils  doivent  etre 
si  jaloux  de  cette  sainte  elevation  et  de  ce 


SYRIE  ANCIENNE. 


133 


vni  earaeteredeleurdi^nite  qu'ils  soient 

eitdt  disposes  a  prodi^er  sainteanent 
r  viequ'^  perdre  ce  privilege.  » 

Philippe  ne  se  vengea  pas  de  saint  Ba« 
b)ias,  inais  Dece  le  comprit  parmi  les 
vieiimesdesa  premiere  persecution.  L'6- 
T^ne  d*Antioche  fut  emprisonn^  avec 
troisjeanesenfaDts  dont  il  faisaitTedu- 
cation  et  qui  devaient  partager  son  mar* 
tvre.  11  fut  mis  a  mort  en  251 ,  et  enterr^, 
comme  ii  IVait  touIu,  avec  ses  chalnes : 
il  se  glorifiait  de  les  avoir  portees  pour 
J^us-Cbrist.  Les  trois  enfants  furent 
pbees  avec  lui  dans  un  m£me  tombeau. 

Qo'il  QOQS  soit  permis  de  rappeler  ici 
quelqoes  traditions  relatives  aux  mtra« 
eles  operas  par  les  reliques  de  saint 
Babylas. 

Aoboot  d*aD  sitele,  ses  oendres  furent 
transport^  par  le  C^ar  Gallus  au  tem- 
pte  de  Dapbue ,  afin  de  rem^dier  aux  d6- 
lordregiDseparables  des  fStes  impies  et 
obscenes  qui  avaient  lieu  pres  de  ce  tem- 
ple. Nooioin  de  la  ^tait  la  fameuse  fon- 
taioedeCastalie,  ouApollon  avaitrendu 
l^td'oraelesdans  Tantiquit^.  Le  temple 
deDapho^lui-m^meavaitjoui  jadis  d*une 
gnnde  c^lebrit^.  Le  plus  grand  triom- 
pUe  de  Babylas ,  disent  les  l^geodaircs 
cbretieos,  fut  celai  qu'il  remporta  sur 
led^oqui  yavait  abus^  les  hommes 
durant  taot  de  siecles  :  k  peine  les  cen- 
dres  du  martyr  furent-eiles  a  Daphn^, 
queled^oD  se  tut  et  devint  muetjus- 
qu'ao  r^^pe  de  Julien.  L'an  362 ,  ce  prmoe 
ordonna  a  roracle  de  parler;  et  celui-ci 
•yant  dit  quMI  ne  le  pourrait  qu'apres  la 
ti^slatioDdesmorts  qui  6taientaans  le 
teiople,  Julien  appela  quelques  citoyeus 
d'Afltioche,  afin  qu'ils  ramenassent  dans 
u  T///e  les  cendres  de  Babylas.  Cette 
traoslation  eut  lieu  au  milieu  d'un  im- 
n^nse  concours  de  peuple.  Hommes, 
ummes,  vieillards,  enfants,  formaieot 
w»  long  cortege  qui  accompagnait  les  re- 
iiqu^  venerees.  Aux  cris  de  joie  de  la 
Bultitode  repondaient  des  choeurs  qui 
Bisaient  retentir  Pair  des  hymnes  et  des 
critiques  et  rep^taient ,  de  temps  en 
tops,  ces  paroles  du  psaume  96 :  «  Que 
tous  eeux  qui  adorent  les  idoles  soient 
^ondus ;  que  eeux  qui  se  confient  en 
de  (ausses  divinites  soient  couverts  de 
boDte.  »  Julien  entendit  ces  paroles 
mk  fois  r^p^tees  au  milieu  de  cette 
K<e,  qui  ressemblait a  un  veritable  triom- 


phe.  II  entra  dans  une  grande  colere,  et, 
s*il  faut  encroireRuGn,  il  fitsaisir  le  len- 
demain  tons  les  Chretiens  que  Ton  ren- 
contrait  dans  les  rues  d'Antioche  et  ii 
ordonna  de  les  jeter  en  prison.  Le  pref<pt 
&illuste,  quoique  paien,  essaya  de  re* 
sister  a  Tempereur.  Toutefois,  a  la  fin, 
il  ex^cuta  ses  ordres.  II  arr^ta  un  jeune 
homnie  nomm^  Theodore,  et  le  fit  tortu- 
rer, depuis  le  matin  jusqu'au  soir,  avec 
tant  de  cruaute,  qu*on  fut  oblige  de  chan- 

§er  plusieurs  fois  de  bourreaux.  Th^o- 
ore  supporta  les  plus  atroces  douleurs 
avec  un  courage  invincible.  Ii  ne  changea 

§oint  de  visage;  il  souriait,  et  ne  cessait 
e  redire  le  psaume  qui,  la  veille,  avait 
excite  la  colere  de  Julien.  Salluste,  qui 
ne  voulait  point  sa  mort,  le  fit  reconduire 
en  prison,  etquelque  temps  aprds  on  lui 
rendit  la  liberty.  «  Depuis  lors,  dit  This- 
torien  que  nous  avons  nomm^,  nous 
avons  vu  plus  d*une  fois  k  Antioche  le 
vaillant  Theodore.  Et  lorsqu'on  lui  de* 
mandait  si  durant  la  longue  et  doulou- 
reuse  torture  il  souff  rait  beaucoup,  il  re- 
pondait  que  le  supplice  lui  avait  paru 
supportable.  II  ajoutait,  k  la  v^rite,  qu'un 
jeune  homme  se  tenait  toujours  pr^s 
de  lui  essuyant  la  sueur  qui  coulalt  de 
son  visage  et  versant  de  Teau  fratche 
sur  ses  biessures .  Ce  qui  lui  causa  une 
esp^ce  de  plaisiret  lui  fit  regretter  leche- 
valet  lorsqu'on  Ten  fit  descendre.  « 

Les  reliques  de  saint  Babylas  reste- 
rent  dans  la  ville  jusqu'au  jour  ou  fut 
terminee  Feglise  que  construisait  en  son 
bonneur  saint  M^lece,  «  yportant  les 
pierres  de  ses  propres  mains  et  prenant 
port  k  la  fatigue  des  ouvriers.»  Cette 
6glise6taitsituee  par  dela  TOronte,  ou  on 
la  voyait  encore  k  la  fin  du  sixieme  siecle. 

Unnouveau  miracle,  op^r^par  saint 
Babylas,  disent  les  anciennes  tradi- 
tions, vint  mettre  le  sceau  a  sa  gloire. 
Le  lendemain  dela  translation  de  ses  cen- 
dres, le  tonnerre  tomba  sur  le  temple  de 
Daphn^  et  en  d^truisit  la  couverture.  I^ 
statue  d*Apollon  fut  renversde.  En  vain 
Julien  voulut  faireavouerau  grand  prd- 
tre  qu'il  etait  Tauteurde  rincendie :  tout 
le  raonde  s'accordait  a  dire  que  c'^tait  le 
feuducielqui^tait  tomb^  sur  le  temple. 
L'empereur,irrit^,  invenla  alors  une  fa- 
ble fortingenieuse,  assurant  que  la  statue 
d*Apollon  lui  avait  dit  la  veille  que  ce 
temple  ne  lui  plaisait  plus  et  qu  elle  le 


tu 


LUNIVERS* 


quiltait.  li  prenait  le  mieii  h  ttooin  de 
la  verity  de  aes  paroles. 

Left  habitants  d'ADtioehe,  ajmitent  les 
l^gendliires,  ^merveilles  de  ees  ^v^ne- 
menis,  gard^ent  avee  plus  de  y^nera- 
tioii  <|ue  jamais  les  reliqueB  du  saint. 
Oa  croit  les  possMer  encore  ii  Crimone, 
ou  eiles  furent  apportees,  dit-on,  par  les 
erois^s. 

■PISCOPAT  Dl  fiJilUS  BT  DE  Di* 
MBTRIAirOS  ;  LBS    IIOVATIBlfS  BN  ST* 

RIB. -^  Fabiiis,  nomm^  assei  souvent 
Flavius  ou  Flayien,  suco^a  a  saint  Ba- 
bbles dans  la  eonduite  de  r^glised'An- 
ttoebe.  II  adopts  les  opinions  des  noTa- 
ticBS,  arec  piusieurs  autrespersonnes  de 
oettenilen.  Lepape  Corneille  lui  ^ri* 
vit  qaelques  lettres  k  ce  sujet  ^  lui  ap*- 
prenaot  la  decision  de  tons  les  ^viques 
d'Occident  contre  les  novatiens.  Eusebe 
rapporte  aussi  que  Fabins  re^t  d*afi- 
tres  lettres,  de  saint  Dents  d' Alexandrie, 
sur  Tutilit^  et  Tefficacit^  de  la  p^i- 
tenoe.  Ces  lettres  flrent  pen  d*effet ;  on 
r^olutderassemblerii  Antioche  ungrand 
ooncile ;  et  saint  Denis  y  fut  invite  par 
B€\tne  de  Tarse ,  par  saint  Sirmilien  de 
Cappadooe,et  Hieoctiste  de Ci^sar^  en 
Palestine,  ^^ques  qni  eraignanent  que 
rheresie  ne  passdtdans  leurs  dioceses. 
Fabius  mourut  sur  ces  entrefaites,  et  ftil 
renoplac^  par  Mm^triamis  (262).  Le 
concile  eut  lien  n^anmoins,  si  nous  en 
croyons  Baronius,  et  Novation  v  fut  oon- 
damn^  comme  feuteor  de  b^ch^s.  Le 
grand  concile  d*Antioche,  en  ranniSe  S>6t 
ou  270,  rend  k  Dem^trianus  un  illustre 
tetnoignage,  et  le  qaalifiedu  titre  de  blen* 
heureiix  en  ^tablissant  Dommis  poor 
^vdque  de  la  m^me  ville. 

PAUL  DB   SAKOSATE    l^VBIQfUB  D'Alf* 

tiochb;  sbs  mobubs;  sa  doctbine; 

BBS  BAPPORTS  AVBC  SAINT  DENIS  D'a- 
LBXANDRIB  ;  GOICCTLES  QUI  OlfT  POUR 

(■)  Ifovallen  ^taitmembre  de  l^figllse  de  Rome. 
11  essaya  en  Yatn  de  devenir  ^v^que-,  m  se  fai- 
aanl  aider  p«r  un  parti  ou  flffuraitle  pr«lr« 
c/irlhaginoi8  Novat  NovaUeii ,  admirateur  de 
la  philoiophle  des  stolciens,  affecUlt,  en  toule 
chose,  de  m  niontre»d*tine«xtr6me  rlgidlW.  ll 
sontenaK  que  rfiglise  nc  deralt  ni  ne  poovall 
aocorder  Ic  pardon  ^  ceai  qui  avalent  reni^ 
leur  fol  pendant  les  pers^uUons.  11  n'y  avail 
jcHir  ceiit  qui  avalenl  ftiilH  nul  moven  cT eipia- 
tion.  On  troave  en^  la  dodiine  des  novallens 
«  celle  des  raontanisles  une  graode  aDaloftte. 
routes  deux  comptdrent  en  Asie  de  nombreux 
putisam. 


HUT    LA  GOlCDAMIf ATTOH    DB     VAUl; 
tL  BST  OBPOSB,  BT  D0MNU8   LUI  50C- 

CEDE.--'Lepr6d^B8eiir  deDomnuset 
lesucoesseurde  D^m^trien  fut  Paul,  ori- 
ginairede  la  riUe  de  Saniosale,  BurrCo- 
phrate.  Ses  parents  netui  avaient  laiirf 
aucune fortune,  et  eependant  il  fiiteitii' 
mement  riobe,  durant  son  ^iscopat,  ti«  ^ 
rantderargentdetouslesedt^  pnrsese^ 
torsions ,  les  sacril^es  et  les  dons  qa*l  ! 
exigeait  des  fideles.  Nans  connaissM 
les  scandales  quMl  donna  k  son  Egliie, 
par  les  reprocnes  qne  lui  adresse  un  c^  I 
lebre  concile.  Jamais  on  u'arait  phi 
affich^  I'oubli  de  la  religion.  II  remplif-  | 
salt  diferses  fonctions  qui  talent  \xk 
de  conyenir  k  sa  dignite ,  Toffioe  de  di* 
collier,  par  exemple,  que  lui  avail  dend 
la  reine  de  Palmyre,  Z^nobie,  et  doiit  3 
se  glorifiait  plus  qne  deson  titre  d*M 
que ',  il  6tait  suivi  d*une  foule  de  fennM 
qui  chantaient  ses  lonanges ;  et  s'il  pif 
ehait,  on^tait  forr6  de  Tapplaadir  coam* 
on  faisait  au  thedtre  pour  les  acteon 
eh^ris  de  la  foule. 

11  payait  m^ie  des  bommes  poertfon- 
ner  ie  signal  des  applaadissements. 
Quand  il  passait  dans  les  rues  d'An^ 
ehe,des  lieteurs  6cartaient  la  fonle;  H 
avait  un  pr6toire  ainsi  <ine  les  juges  i^ 
cullers,  et  un  trdne  ainsi  que  les  rois.  Stf 
moeurs  ^aiefnt  encore  plus  scandaletisn: 
II  avait  piusieurs  femmes ,  et  forcait  ta 
prdtres  d'Antioclie  k  imiter  son  'exes* 
pie ,  pour  qu'its  ne  lui  fissent  honte. 

Bientdt  il  prit  place  parmi  les  hen^ 
ques.  Sabellius  avait  soutenu,  ters  r« 
255,  que  le  Pere,  le  Fils  et  le  Saint-Es- 
prit  n*^taient  qu'une  seule  personne: 
que  le  Verbe  et  le  Sakit-fisfHrft  ^taiert 
dans  le  P^re,  mais  sans  avoir  d^iis- 
tence  r^elle  et  personnelle ,  et  secdemeot 
comme  la  raison  est  dans  rbomme:  M 
sorte  qu'il  nV  avait  veritablement  oi 
P^re,  ni  FIls,'  ni  Saint- Esprit,  noaisin 
seul  Dieu.  Paul  de  Samosate  ado^  la 
ra^me  erreur :  il  ne  s'en  Eloigns  qu'en  vb 
point,  lorsqu'H  pn^tendit  que  le  P^ 
prodmsaft  son  Verbe ,  mais  seulemenl 
pour  operer  bors  de  lui  :  qiielques  au* 
teurs  dtsent  que  c'est  seulewent  ce  Verbe 
produit  et  operant  qu'rl  appeialt  Fils  de 
Dieu.  D'autres  assurent  mi*il  ne  recon- 
naissait  point  d'autre  Fils  qnte  J^us- 
Oiristhomme,quiex^ulalttesordresd« 
Dteu,  ni  d'autre  Saint-Espritque  la  grace 


STRIE  AffOEirNE. 


186 


nr  ta  ap^hres,  et  qa'ainai  il 
■'admettait  que  le  F^. 

Eas^fee  nom  rapporte  qu'il  nes*^* 

rait  pas  moins,  au  point  de  r£glise,  sur 

nncamatian ;  elc'^tait  le  resiiltat  nataroi 

lie  sa  preni^e  dodrine.  Lui  qui  Toulait 

qu*OD  rappelM  nn  ange  desoendu  du  ciel, 

ne  pensait  pas  que  ie  Christ  edtt  une  ort- 

l^ne  divine.  H  aoatenait  que  par  sa  na^ 

tttre  J^8U8*Ghrift  n'avait  rien  de  sop^* 

neor  aa  reste  des  hommeSj  et  touterois 

ti  a  vouaitqu'il  etait  ne  du  Saint-Espritet 

de  la  Ytei^  Marie.  11  eofifessait  ainsi 

qu'ii  aTaiten  lai  le  Yerbe,  la  sagesse  et  la 

Ittini^Te  ^melle,  roais  seulement  par 

operation  et  par  babitatioo,  et  non  par 

aae  imioii  pmooneile;  eo  sorte  que  le 

Verbe  favait  qaitt^  et  etait  remonte  vers 

leeiei ,  a  sa  mort.  £n  un  mot ,  il  mettait 

CO  JdsQB-Christ  deux  persomies,  dont 

Tune  6tait  File  de  Dieu  par  sa  nature  et 

coitemeUe  ao  P^e  (e'est-a-dire  le  Pere 

im-in^iae),  et  f  autre  fils  de  Marie  et 

deseendjot  de  la  race  de  David.  Cette 

derm^re,  seloo  Paul,  n'6tait  eternelle 

que  dans  Tordre  de  ia  predestination ;  en 

aorteqneJtos-Chrisl^tait  juate,  non  par 

aa  Batui«,oequi  eat  essantiel  a  Dieu ,  mais 

seufement  paree  qu'il  («er^it  la  ver^ 

ct  la  juatiofe ;  non  par  son  union  ,  mais 

par  aa  eommunieation  avec  le  Verbe 

divin. 

L'li^^Bie  condnisait  Paul  direetement 
aa  judannne.  Tb^odoret  pretend  qu'tl 
avait  eeobrasse  oette  doctrine  pour  plaire 
k  ta  reine  Zenobie,  qui  etait  juive ;  et  c'est 
p<HiT([|uoi\eseontemp|orains  rrurentqu*il 
«riseiffnait  la  eirconcisioii.  Mais  le  con- 
dJe  fTAotioehe  oe  lai  reprocbe  pas  eette 
folie. 

Quoi  qo'tl  en  soit,  les  ^v^quesd'Orient, 
^i  avaient  eraint  d'abord  de  s'attaquer 
il  lui,  aedeciderent  a  refuterses  opinions. 
Saifit  Denis  d* Alexandria  ayaiit  connu, 
par  one  lettre  de  Paul,  tout  ce  qu'il  pen- 
aait,  lai  r6pondit  en  termes  tres-aifec- 
tueux.  Mais  on  voit  sa  colore  parattre 
▼ers  le  milieu  de  la  lettre ;  alors,  s'en- 
flammant  d*aa  saint  zele,  il  appellePauI 
tm  serpentaui  rampe  sur  le  ventre  et  qui 
oe  se  nourrtt  quedeterre.  II  I'accusede 
fouler  aux  pieds  la  relision  et  de  d^sbo- 
aorer  T^glise  d'Antioche. 

Paul  lui  proposa  dix  questions  centre 
ia  doetrine  de  TEglise;  saint  Denis  les 
dwcata  r«oe  apr^  I'autre  dans  un  long 


ouvri^ :  eette  r^fotation  aeauffisait  pas. 
Les  ^T^ques  d*Orient,  mtoe  les  plus  eloi> 
gn^,  arriverent  en  foule  a  Antioche  pour 
guerir  les  plaies  de  oatte  iilustre  £glise. 
A  laur  t^te  ^taient  par  leur  saintet^  et 
leur^loquenoesaint  rirmilien.de  G^ar^ 
e»  Cappadoce,  saint  Gr^goire  Thauma- 
turge et  saint  Ath^odore,  son  frere. 
EuMba  nomme  ensuite  Hd^nns  de  Tarse, 
If  icomaque  d'lcooium ,  Hym^ee  de  Je- 
rusalem ,  et  Maxime  de  Bostra.  Entre 
les  diacres  on  remarque  saint  £us^ 
d'Alexandrie,  qui,  au  retour  du  concile, 
fiit  fait  ev^que  de  Laodic^.  Saint  Denis 
d' Alexandria  ne  put  s'y  trouver,  k  cause 
de  son  grand  dge;  il  mourut  durant  le 
concile  (en  septembre  264).  Bollandus 
dit  que  c'^taient  les  pr^tres  d'Antiocbe 
avec  les  ^v^ques  voisins  qui  avaient  de- 
mande  ce  concile  centre  Paul  de  Samo« 
sate. 

D'aprAs  Eusebe  et  Rufin,  Ton  est 
porte  a  croire  qu'il  y  eut  plusieurs  con- 
eiles  k  Antioche  au  sujet  de cet  her^tique ; 
toujours  eat-il  certain  qu'il  yen  eut  au 
mo'ins  trois  :  le  premier  a  la  fin  de  Tan 
164,  le  second  un  peu  plus  tard,  et  le 
dernier  k  la  fin  de  269.  Les  deux  pre* 
ffiieres  fois,  les  ^v^ques  firenttoua  leurs 
efforts  pour  detacher  Paul  deson  b^r^ie; 
et  il  cacha  ses  sentiments  avec  une  sf 
grande  habilete,  oue,charm^desacon* 
version ,  ils  s'en  alierent  tous  en  rendant 
des  actions  de  grdces  a  Dieu.  Bientot, 
cependant ,  Firmiiien  condamna  formel- 
lement  la  doctrine  de  Paul ,  et  n'at- 
tenditplusqu'un  nouveau  scandale  pour 
le  d^poser.  La  conduite  de  Tev^que  d'An- 
tiocbe lui  en  atirait  bian  vite  fourni  Toc- 
casion ,  s'il  n'^tait  mort  k  Tarse,  en  se 
rendant  au  troisieme  concile,  qui  fut 
preside ,  en  son  absence,  par  U^lenus  de 
Tarse.  Jusque-la  Pauln'avait  pasoomple- 
tement  profess^  ses  erreurs.  Mais  en  fin 
il  fut  pousse  a  bout  par  un  bomme  fort 
eloquent  qui  avait  jadis  enseign^  la  rhe- 
tongue  k  Antioche,  et  avait  ete  fait  pr£- 
tre  a  cause  de  Tardeur  de  sa  foi.  II  an- 
tra en  conference  avec  Paul,  et  lui  fit 
avouer  qu'il  regardait  J^us-Cbrist 
eomme  un  homme  qui  avait  recu  de  Dieu 
plus  de  graces  que  les  autres!  Paul  fut 
depose  unanimement.  Donmus ,  fils  de 
Demetrien ,  fut  mis  en  sa  place.  Paul , 
apres  avoir  ^^  ainsi  excommuni^  par  le 
concile,  ie  fut  encore  par  tous  les  ^v^- 


136 


LIJIflVERS. 


ques  du  monde  et  principalement  par  le 
pape  F61ix ,  successeur  de  saiDt  Denis. 

11  resta  dans  sa  maison  dpiscopaled'An- 
tioche,  tant  que  Z^nobie,  sa  protectrice, 
regna  a  Palmyre.  Aurelien,  vainqueur 
de  Z^Dobie,  le  chassa  de  cette  maison. 

Saint  Augustin  [)arle  d'une  secte  de 
pauliens,  ou  paulianistes,  a  laquelle  Paol 
de  Samosate  aurait  donn^  naissance.  II 
njoute  qu'ils  ne  reconnaissaient  proba- 
blement  pas  le  bapt^me,  puisque  le  con* 
cile  de  Nic^e  ordonne,  dans  son  dix-neu- 
vieme  canon,  quMlsseront  rebaptisdsdans 
r&glisecatholique.  Le  pape  Innocent  I*' 
dit  clairement,  dans  son  Epitre  22", 
qu*ils  ne  baptisaient  point  au  nom  du 
Pere,  du  Fils  et  du  Saint*Esprit. 

LES  EVEQUES  TIMEE  BT  CYBILLE; 
LES  PERSECUTIONS  EN  SYBIE.  —  Tlm^ 

succeda  a  Domnus  en  274,  et  gouverna 
sopt  ou  huit  ans,  selon  la  Cnronique 
d'Eusebe;  ou  dix,  selon  Nicephore.  Saint 
Cyrillc^  dixhuitieme^vSque  d*Antioche, 
gouverna  vingt  ans.  Un  an  apres  sa 
niort(303)  commen^ala  nouvelle  perse- 
cution de  Diodetien. 

n  Parlerons-iious ,  dit  Eus^be ,  de  ce 
qui  se  passa  alors  a  Antioche,  et  ne  de- 
vons-nous  point  craindre  de  reraplir  Tes- 
prit  deslecteurs  de  trop  d*images  funes- 
tes ,  et  de  les  fatiguer  par  le  n^it  de  tant 
de  cruautes?  On  etendait  les  uds  sur  des 
grils  de  fer,  on  les  y  laissait  expirer 
peu  h  peu ,  et  on  retardait  leur  mort  le 
plus  qu'on  pouvait,  pour  faire  durer 
plus  longtemps  leur  supplice.  On  en  vit 
d'autres  inettre  ieurs  mains  dans  les  bra- 
siers  ardents  pour  ne  les  pas  souiller  par 
Tattouchement  sacrilege  des  victimes  of- 
fertes  aux  idoles.  U  y  en  eut  enfin  qui, 
voyant  approcher  des  soldats  envoyes 

Eour  se  saisir  d'eux ,  se  pr^cipiterent  du 
aut  de  Ieurs  maisons,  aimant  mieux 
se  Jeter  entre  les  bras  de  la  mort  que  de 
toniber  entre  les  mains  de  ces  ministres 
deFiinpi^te.  v 

M4KTYBE  DE  SAINT  LUGIEN.  —  DC 

Tavis  des  principaux  auteurs  eccl6sias« 
tiques,  saint  Lucien,  pr^tre  d'Antiocbe, 
est  un  des  plus  illustres  martyrs  de  cette 
epoque.  N6  de  parentschr^tiens,  dans  la 
ville  de  Samosate, il recutune  education 
a  la  fois  cbr<^tienne  etpaienne,  c'est-a- 
dire  qu'on  lui  apprit  a  comprendre  les 
Ecrilures  et  qu'on  Tcxerga  a  ecrire  la 
langue  des  anciens  auteurs  de  la  Grece 


et  de  Rome.  Ayant  perdu  ses  parents  a 
rdge  de  douze  ans ,  il  alia  achever  sei 
Etudes  a  £phese,  puis  embrassa  la  vie 
roonastique.  II  se  donna  ensuite  a  It* 
glise  d'Antioche,  ou  il  devint  pr^tre. 

Saint  Alexandre  d'Alexandne  assure 
que  saint  Lucien  fut  s^par^  de  la  com- 
munion de  r£glise ,  sous  les  trois  sue- 
cesseurs  de  Paul  de  Samosate,  doot  i: 
avait  d^fendu  les  opinions  avee  trop  (Tns 
deur.  II  effaca  cette  faute  en  se  retrafr 
tant  et  en  soufTrant  le  martyre.  li  ^iU 
I^icom^ie,  avec  Eus^  (303),  au  eon- 
mencement  de  la  pers6cution,  lorsqut 
saint  Anthyme  v  souffritle  martyre;  car « 
la  Chronique  d^Alexandrie  rappbrte  eei  i 

f>aroles  d*une  lettre  qull  ^crivik  aux  fide* 
es  d'Antioche :  «  Toute  la  troupe  saer^ 
des  saints  martyrs  vous  salue.  II  fau| 
que  j*ajoute  encore  qu'Anthyroea  adtevi 
sa  course  par  le  martyre.  » 

Les  actes  de  saint  Lucien  portentqw, 
8*^tant  cach^  pour  ^viter  la  persecu- 
tion ,  il  fut  d^couvert  par  un  pretre  (TAo- 
tioche,  nomm^  Pancrace.  II  futeooduil 
d*Antioche  a  Nicomedie,  ou  ^taitron- 
pereur  Maximin  (311).  II  prouon^uoe 
admirable  apolosie  de  sa  ibi ,  devanlle 
magistrat  charge  de  Tinterroger.  Aprei 
Tavoir  inutilement  expose  a  plusieoit 
tourments,  on  T^prouva  par  lafium. 

«  Son  pers6cuteur,    dit  saint  Jen 
Chrysostome  dont  nous  reproduisoos  le 
recit ,  s*^tudia  k  inventer  une  tortoreoi 
la  longueur  et  la  cruaut6  se  trouvasseot 
reunies,  afin  que  Tdme  du  martyr,  (Aa» 
16e  par  la  violence  du  supplice,  acherit 
d'etre  abattiie  par  sa  dur^,  et  perdit 
tout  le  merite  desa  Constance.  Yoici  dooc 
comme  il  s*y  prit.  li  exposa  le  saint  prf- 
tre  a  toute  la  rigueur  et  toutes  lessuit^   | 
horribles  de  la  ^im.  Est-ce  la,  me  dirf^  ; 
vous ,  ce  supplice  si  affreux.'  Oemandez- 
le  a  ceux  qui  Tout  eprouve,  ils  vous  di-   | 
ront  que  de  toutes  les  morts  c'est  la  plus  I 
horrible.  On  laissa  done  longtemps  )c  \ 
saint  sans  lui  apporter  a  manger;  et lors^  i 
qu'on  vit  au'en  une  si  grandcextremite  ; 
i  1  ne  se  relachai t  point,  on  mit  devant  lui  > 
des  viandes  qui  avaient  et6  offertes  9xa 
idoles.  On  ne  doutait  nulleinent  (|ue  rex-  ; 
tr^me  n^cessit^  ou  il  se  trouvait,  et» 
facilite  qu'il  avait  d'y  remedier, ne I'ejn- 
portassent  enfin  sur  toutes  ses  ri^olu- 
tions.  II  est  certain  que  la  presence  rm^ 
des  objets  a  tout  une  autre  farce  sur  nos 


SYRIE  AINCIENNE. 


197 


esprits  que  la  simple  Image  que  nous 
nous  en  formons.  Le  saint  martyr  sortit 
eependant  victor ieux  d'un  danger  aussi 
pressant ,  et  ce  que  le  diable  croyait  ^tre 
propre  a  le  terrasser  fut  ceia  ni^me  qui 
lui  releva  le  courage  et  lui  facilita  la  vic- 
toire.  Car,  bien  loin  aue  la  vue  de  ces 
viandes  le  touchdt,  elle  ne  faisait,  au 
contraire,  quehii  donner  pourellesune 
plus  forte  aversion.  II  en  haissait  encore 

EIqs  et  les  idoles  et  Tidoldtrie.  Ainsi  que 
I  vue  co]itinuelled*un  ennemi  entretient 
et  fortifle  en  nous  la  haine  que  nous  lui 
portons,  de  m^me  plus  Lucien  jetait 
ies  yeux  sur  ces  offrandes  impures  et  sa- 
crileges, plus  il  sentait  augmenter  en 
lui  le  degodt  et  Tborreur  au'il  avait  pour 
elles.  La  faim  avait  beau  le  solllciter,  le 
presser  de  porter  la  main  sur  ces  mets 
defendus,  il  fermait  Toreille  a  cette  voix 
importune,  il  la  faisait taire;  et,  n*ecou- 
tant  que  la  voix  de  Dieu  qui  lui  d^fen* 
dait  d  y  toucher,  il  oubliait  sa  faiblesse,  et 
ne  sentait  plus  la  faim.  Cette  table  souil- 
lee  et  ce  pain  ex^rable  qu'il  y  apercevait 
ne  servaient  qu'i^  renflanimer  davantage 
du  d6sir  d'etre  assis  a  la  table  de  J^us- 
Christ,  de  pouvoir  manger  de  ce  pain 
celeste  dont  le  Saint-Esprit  nourrit  les 
fideles;  et  cette  pens^  le  soutenait  de 
telle  soTle,  quil  protestait  qu'il  ^tait  pr<St 
a  endurer  tons  les  tourments  imagina« 
bJes ,  piut6t  que  de  prendre  un  seul  mor- 
oeau  sur  la  table  des  demons.  II  se  re- 
mettait  aussi  dans  la  m^moire  la  con- 
duite  des  trois  jeunes  H^breux  qui ,  dans 
un  ilge  faible ,  se  trouvant  captifs  dans 
one  terre  6tran^^re,  sans  appui  et  au 
milieu  d'nne  nation  barbare,  montr^rent 
une  sagesse  si  grande  et  si  sublime,  que 
leur  fiMlitda  i'observation  de  leur  loi  les 
read  encore  aujourd*hui  Tadmiration  de 
toote  la  terre.  Ces  diverses  reflexions  que 
faisait  notre  saint  pr^trel'affermissaient 
de  plus  en  plus  dans  le  dessein  de  demeu- 
rer  fidele  i  Dieu.  II  se  rrait  de  la  malice 
impuissante  du  demon ,  il  meprisait  ses 
ruses,  et  il  d^concertait  tous  ses  artifi- 
ces par  une  patience  infatigable.  Cet  en- 
nemi declare  des  hommes,  voyant  done 
qa'tl  n'avan^it  rien  avec  tous  ces  efforts, 
et  qu*il  ne  pouvaitabattre  le  saint,  le  ra- 
mena  une  seconde  fois  au  tribunal  des 
juges  ;  il  t^cha  de  le  fatiguer  par  les  di- 
vers interrogatoires  qu'il  lui  fit  subir,  et 
de  le  faire  succomber  sous  la  rigueur  des 


tourments  qui  suivaient  toujours  chaque 
interrogatoire.  Mais  le  martyr,  a  toiites 
les  demandes  qui  lui  etaient  faites ,  ne 
repondait  autre  chose,  sinon  :  Je  suis 
Chretien.  De  quel  pays  kes-vous?  lui  de- 
mandalt-on.  Je  suis  Chretien,  repondait- 
il.  De  quelle  profession.'  Je  suis  Chretien. 
Votre  lamille ,  vos  parents  ?  Je  suis  Chre- 
tien. C^taient  la  les  seules  armes  dont 
il  se  servait  pour  se  defendre  du  d^mon, 
pour  I'attaquer  a  son  tour,  et  pour  le 
valncre.  Quoiqu*il  joigiitt  les  sciences 
^trangeres  a  Teloquence  de  son  pays,  il 
ne  crut  pas  devoir  s'en  servir  en  cette 
rencontre;  et  il  savait  fort  bien  que  dans 
un  pareil  combat  ce  n'est  pas  Teloquence 
qui  remporte  la  victoire,  mais  la  foi ;  et 
que  le  moyen  le  plus  sOr  pour  vainere 
n'est  pas  de  savoir  bien  parler,  mais  de 
savoir  bien  aimer...  Ennn  cette  parole 
fut  la  derni^re  qu*ii  prononga ,  et  ce  fut 
en  disant ,  Je  suis  Chretien ,  qu*il  finit  sa 
vie.  II  fut  ^gorg^secrdtement  dans  la  pri- 
son par  Tordre  de  Maximin,  qui  n'osa , 
a  cause  du  peuple,  le  faire  mourir  pu- 
bliquement.  » 

«  Ainsi,  ajoute  Eusebe,  ce  saint  et 
savant  homme,  apr^s  avoir  annonce  le 
royaume  deJ^sus- Christ  par  ses  paroles, 
et  Favoir  defendu  par  une  ^loquenteapo- 
logic ,  en  confirma  encore  la  verity  par  sa 
mort.  L*on  compte  ensuite  parmi  les 
martyrs  de  Ph^nicie ,  Tvrannion ,  ^v^que 
de  Tyr,  Zenobius ,  pretre  de  Sidon ,  et 
Sylvain,  ^vSque  d*£mese :  ce  dernier  fut 
expose  aux  betes  dans  6a  ville  ^piscopale, 
et  les  deux  premiers  rendirent  un  illus- 
tre  t^moignage  h  la  foi  chrdtienne  dans 
Antioclie  :  Tvrannion  fut  \et€  dans  la 
mer ;  et  ZenoBius ,  leauel  h  fa  science  de 
la  religion  joignait  cefle  de  la  m^decine, 
expiraau  milieu  des  tourments.  » 

SAINTE  PBLAGIE;  HISTOIRB  DE 
SAINTS  DOMNINE  ET  DE  SES  DEUX  FIL- 
LES  BEBEI41GE    ET   PBOSDOGE.  —   An- 

tioche  avait  une  telle  importance,  au 
temps  de  Diocl^tien,  que  cet  empereur 
y  fit  conduire  beaucoup  de  condamn^s 
Chretiens  pour  donner  plus  d'^clat  a  sa 
vengeance.  Les  fideles  qui  habitaient 
cette  ville,  au  bruit  de  la  pers^ution  qui 
les  menacait,  se  tu^rent  en  grand  nombre 
pour  se  soustraire  aux  tortures.  Parmi 
les  plus  c^Iebres  exemples  de  ces  morts 
volontaires,  il  faut  citer  celle  de  sainte 
Pelagic.  Cette  jeune  vierge,  flg^e  alors  de 


138 


L'UNIVKRS. 


qnince  ans  tmdiiiieiit,  avail  M  hntmite 
par  saint  Loci^n.  A  peine  sut-elJe  que  la 
persecution  allaH  eommenoer,  qu*elle 
s*eiifernia  ehez  elle ,  esp^rant  sauver  en 
m^me  temps  et  sa  foi  eisa  vie.  Bient6t  une 
troupe  brutale  de  sotdats  vint  la  surpren- 
dre  seuie,  sani  ancun  soutien ;  le  moin- 
dre  mat  qa'elie  poavait  attetidre  de  ces 
soldats  ^taii  d'^re  trainee  au  tribunal  oo 
Ton jugeai ties  chr^iens.  Mais  la  crainte 
de  perdre  sa  virginity ,  et  aussi  le  d^s- 
potr,  lui  flrent  prendre  la  resolution  de 
se  donner  elle-rotoe  ia  mort.  Paraissant 
au  seuil  dela  porte,  elle  demenda  d'un  air 
enjou6  aux  soldats  de  la  laisser  changer 
de  vetements ,  afin  qu'elle  pardt  devant 
ses  juges  sous  un  costume  plus  convena- 
ble.  Les  soldats  la  laisserent  entrer  dans 
sa  chambre.  Li,  apr^s  avoir  longtemps 
prie  Dieu ,  elle  monta  sur  le  toit  de  la 
maison  et  se  pr^cipita  aux  pieds  de  ses 
pcrs^cuteurs. 

Trompesdans  tear  attente,  les  soldats 
paietis  chercherent  satnte  Domnine  et 
ses  filles  Berenice  et  Prosdoce,  que  saint 
Ambroise  suppose  avoir  ete  la  m^re  et 
les  sceurs  de  sainte  P61agie.  Domnine , 
craignant  que  la  beaute  de  ses  filles  ne 
les  designdt  aux  persecuted rs ,  8*etait 
retiree   a    £desse,   en    Mesopotamie. 

«  Au  milieu  des  malbeurs  de  Tfiglise, 
ces  trois  illustres  femmes  donnereirt, 
dit  saint  Chrysostome,  un  exemple  inou! 
d*une  grandeur  d'dme  plus  qu'heroTque; 
si  toutefois  on  dQit  dooner  le  nom  de 
femmes  k  ces  admirables  creatures  qui, 
dans  un  corps  et  sous  la  figure  de  fem- 
mes, non-seulement  renfermaient  un 
courage  viril,  mais  qui,  s*eievant  au-des- 
sus  des  forces  ordinaires  de  la  nature , 
firent  parattre  une  vertu  dont  les  intelli- 
gences celestes  sont  seules  capables.  Ri- 
les abandonnerent  leur  patrie,  leur  fa- 
mille,  leur  propre  maison,  pour  aller 
chercher  dans  un  pays  eioigne^la  liberie, 
qu'on  leur  refiisait  dans  leleur,  d*adorer 
et  de  servir  Jesus-Christ.  Ce  fut  par  un 
motif  si  noble  et  si  releve  que  la  fidele  et 
genereuse  Domnine  avec  ses  deux  filles, 
Berenice  et  Prosdoce,  quitta  le  lieu  de  sa 
naissance.  Arretons-nous  d'abord  etcon- 
siderons  des  femmes  de  qualite,eievees 
delicatementet  parmi  toutesles  commo- 
dites  de  la  vie ,  qui  vont  s'exposer  k  ton- 
tes  les  suites  facheuses  d'uu  long  et  pe- 
nlble  voyage.  Si  des  bommes  robustes 


aoeoatames  k  voyager,  ne  lanMrtp 
d*eprouver  dans  le  coun  de  lean  tmh 
ges  d'asaez  grandes  fatifpei,  qumfn 
aient  des  voitures ,  qo'ils  sient  a  la 
suite  pluaieurs  esolaves,  que  la  tamu 
bonne,  stbre,  aisee  a  teoir,  que  la  inl 
ne  soit  pas  longue ,  qu'iis  aieat  ■( 
toute  liberte  de  retounier  ebei  m 
quelle  doit  etre  la  foi  deDomniaMii 
solution ,  son  amour  poor  J^»^ 
loraque  nous  la  voyons  marebcr  a  ji 
sans  suite,  enbarrasseedelajeooetf 
de  la  beauie  de  ses  fillei,  abandooa^ 
ses  amis,  trahie  par  ses  prochei,<i 
ronnee  d'ennerois ,  se  sauver  par  daa 
tiers  detonmes ,  k  travers  millediql 
oraiffnant  pour  ses  filles,  peur  fKe^pi 
leur  nomieur,  pour  sa  vie;  dasideeai 
auelies  alarmes,  dans  rappnbai 
d'^re  suivie,  deoouverte,  reeooroti 
prise?  Elle  sort  de  son  pays  aatal^ 
ville,  de  sa  maison ,  et  elle  bmik  IM 
elle  deux  fillesd'un^  merveilleuiebea^ 
comment  etod  les  caclier?Q»Mn^ 
gardien  de  la  virginitede  scallbsM 
•era  le  eiell  Ge  sera  jesw^hartflj 
mlmel  Trois  tirebis  eDtrepraio^^ 
traverser  des  pays  eouverts  ile^* 
deserts  habttes  pardes  IJoDa,iaBK«i| 
les  lions  ni  les  Imips  osentieuienaAN 
diepuler  le  fmssage.  Tout  iesboiMW^ 
pourelles  lesyeux  cliB8tes,^plflwDI 
snspend  en  leur  faveur,  duraot  toot 
chemtn  qu'elles  ont  a  fairer  !<*  m 
naturels  de  la  beaute.  Ge  cbesua  ni 
mino  enOn  k  fcdesse.  Oette  ville  eM 
verite,  bien  moins  erviliseeqwi^li*" 
autres;  mais  on  pent  dire  astti,!* 
avantage,  que  la  piete  y  est  biaw 
plus  estimee  qtt'ailleurs.  Aoisi,  vmm 
tres  voyageuses  y  treuverwt-eHs' 
asile  contre  les  poursuites  de  Tin^ 
et  un  port  oh  ^es  orurent  po«^ 
tendre  en  sfirete  le  rcloar  d'ua  I* 
plus  calme.  Oette  ville  teate saiolil 
cut  done  ia  mere  et  les  fiWes,  non  tm 
aes  etrangdres,  mais  comme  wj 
toyennes  du  ciel ,  et  elle  se  charfea  in 
les  comme  d'un  depdt  sacrf  que » 
lui  confiait.  Que  plersonne,  as  rel 
n'accuse  ces  saintes  femmes  de  p* 
couitge,  pour  avoir  pris  ainsi  a» 
devant  leurs  persectttcure;ellc8«*w 
en  cette  rencontre  qu'obeir  au  pr«^ 
du  Seigneur,  qui  veut  que,  loJ*?'*'!! 
persecute  dans  !ine  fille,  Too  m» 


SYRIE  ANCIRNNE. 


189 


one  autre.  Bien  loin  que  cette  fuite  tear 
At  honteuse ,  elle  leor  procora ,  au  eon* 
traire,  une  couronne.  £t  quelle  couronne  ? 
Gelle  qui  est  promise  a  ceux  qui  m^- 
prisent  tous  les  avantages  du  si^cle... 
Kn  un  instant  toutes  les  viiles  se  rempli- 
rent  de  traftres ,  de  meurtriers ,  de  par- 
ricides. Les  peres  offraient  leors  mains 
aox  ju^es  pour  6^orger  leurs  enfants ; 
les  enfants  tratnaient  leurs  p^res  aux 
piedsdes  tribunaux,  les  Mres  vendaient 
ie  sang  de  leurs  fr^res ,  tout  ^tait  plein 
detumulte  et  de  confusion.  £desse  ne 
fiit  pas  exempte  de  cet  orage ,  pendant 
lequei  nos  saintes  femmes  jouissaient 
d'une  profonde  tranquillity.  Eties  ne  se 
r^ardaient  pas  comme  fugitives  et  exi- 
les de  leur  pays ;  elles  ne  s'apercevaient 
pas  qu*elles  ^taient  dans  la  disette  de  la 
ptupart  des  choses  qui  rendent  la  vie 
agr^able;  I'esperanee  des  biens  futurs 
leur  fournissait  abondamment  tout  ce 
qui  leur  6tait  n^essaire ;  la  foi  etait  leur 
patrie,  et  la  charite  leur  servait  de  forte- 
resse  pour  les  mettre  h  couvert  des  insul- 
tes  de  Tennemi  common  des  hommes. 
Affermies  dans  ces  trois  vertus,  elles  vi- 
rent  sans  Amotion  arriver  a  fidesse,  Tune 
son  mari ,  les  autres  leur  pere ,  accom- 
pagn^  de  soldats  pour  les  enlever  de  leur 
retraite;  si  du  moinsnous  devons  don- 
oer  des  noms  si  doux  et  si  honorables 
i  un  liomme  qui  s'^tait  charg6  d'une  si 
cruelle  et  si  honteuse  mission,  l&par- 
wons-le  toutefois  en  faveur  dune 
ipoijse  et  de  deux  filles  martjres,  et 
n'augmentons  point  p^r  nos  reproches 
la  peine  qu'il  ressent  peut-^tre  de  se  voir 
obliee,  malgr^lui,  de  livrer  cequ*i'l  a 
deplus  cher  au  monde.  Consid^rons  plu- 
tdt  la  sage  condoite  de  Domnine.  Lors- 
qtfil  a  nllu  6viter  la  persecution ,  elle 
s'est  prudemment  retiree;  maintenant 
JQ'il  taut  combattre,  elle  ne  songe  plus 
a  fuir.  La  voila  prCte  a  suivre  ceux  qui 
Pemmenent ;  elle  les  suit  sanscontrainte, 
quoiqu*elle  sache  bien  qu'ils  la  condui- 
senta  la  mort.  Apprenons  de  lii,  nous 
autres ,  ce  que  nous  devons  faire  dans 
l^differentes  conjoncturesoii  nous  nous 
Irouvons;  car  comme  nous  ne  devons 
point  t^m^rairement  aller  au-devant  du 
peril ,  aussi  ne  devons-nous  pas  reculer 
lAchement  lorsqu'il  se  presente.  Mais 
JJjivons  nog  saintes  martyres.  On  leur 
w  prendre  h  chemin  de  Hierapolis.  Ce 


fiit  enfin  d*uQ  endroit  pioehe  de  cette 
ville  qu^elles  partireiit  pour  arriver  a 
la  ville  qui  doit  seuie  porter  Ie  nom  de 
sacr^e,  c'est'i-dire  h  Ie  e^leste  Jeru- 
salem ,  et  qo'ielles  teimiii^reQt  glorieu- 
sement  toutes  ienri  courses  de  la  ma« 
niere  que  je  vais  raeonter  en  pen  de  mots. 
Une  riviere  odtoie  Ie  grand  eliemin  d'£« 
desse  a  Hi^apolis.  Les  soldats  qui  les 
conduisaient  s'afrMrent  pour  monger 
sous  quetques  arbres  qui  se  trouvaient 
\h  par  hnsard.  Pendant  qa'ils  prennent 
leur  repas,  et  qu*ilsDe  songent  <fu*k 
boire,  nos  saintes  femmes  pensent  a  se 
mettre  en  liberty.  On  dit  que  Ie  mari  de 
Domnine  y  donna  les  mains,  et  qu'il  les 
aida  a  tromper  leurs  gardes ;  je  suis  assez 
de  oe  sentiment,  et  if  y  a  bien  de  Tappa- 
rence  quil  en  usa  ainsi,  afln  de  pouvoir 
se  mettre  en  quelque  sorte  h  eouvert  de 
la  colere  da  sonverttn  JMge,  et  d'avoir 
quelque  ctiose  a  all^guer  au  jour  du  ^ge- 
menl ,  qui  pdt  Ie  d^iiai^r  en  partie  da 
erime  de  trelmoii  qu'il  avait  commis  ea 
Kvrant  sa  femme  et  ses  filles  aux  tyrans. 
II  est  certain  qu'il  amusatt  les  soldats 
pendant  que  les  saintes,  s'^loignant  in- 
sensiblement  d'eux,  entrdrent  dans  Ie 
4euve  ponr  s-y  noyer.  Que  les  meres 
pr^teiit  Torellie,  que  les  filles  soient 
attentives,  que  les  unes  et  les  autres 
apprennent  ici  leurs  devoirs.  Que  celles- 
el  cotYiprennent  jusqu'oi!i  doit  aller  leur 
6^6issanee ,  et  que  celles-la  considerent 
quelle  fbree  ont  leurs  exemples.  Dom- 
nine entre  done  dans  Ie  fieuTe ,  tenant 
ses  deux  filles  par  la  main ;  elles  se  lais- 
sent  toutes  trols  aller  au  courant  de 
I'eau  qui  tesemporte,  les  sirffoqae,  et 
les  baptise  d*un  bapt^me  nouveau  et  peu 
usit6 ,  de  ce  baptlme  dont  parlait  Jesus- 
Christ  avx  deux  fils  de  UbM6e^  lors- 
qu'il  disait :  Vous  boirez  Ie  mime  calice 
que  je  boirai ,  ef  vous  seree  ba^ises  du 
m^me  bapt^me  dont  je  serai  bapti«$. 
Ainsi  cette  admirablefemme  fut  trois  fois 
martyre ;  une  fois  par  elle*ni4me,  et  deux 
fois  dans  ses  filles.  » 

LE  MABTYBB  DE  SAtNT  BOMAIN.  — 

Mous  emprunterons  encore  k  Eus^be  un 
r^t  du  m^me  genre : 

«  L'£glise  d^Antioche  ^tait  expose 
h  une  viotente  persF^cution ,  lorsque 
Romain,  qui  voyageaiten  Asic,  y  arriva. 
II  fut  sensiblement  touch^  de  I  etat  ou 
n  la  fit.  n  trouva  que  plusieurs  ohre- 


140 


L*UN1VERS. 


tiens  avaient  deja  donne  de  tristes  mar* 

ques  de  la  faiblesse  humaine ,  et  il  ne 

put  souffrir  que  led^mon  triomphdt  plus 

longtemps    des    serviteurs   de   J^us* 

Christ.  11  aborda  hardiment  le  juge,  qui 

s'applaudissatt  de  la  victoire  qu'il  ve- 

nait  de  remporter.  Ascl^piade,  lui  dit-* 

il  (c*^tait  le  nom  de  ce  magistrat),  vo- 

tre  victoire  D*e8t  pas  complete,  Dieu 

a  encore  de  braves  soldats  qu*il  ne  vous 

sera  pas  si  facile  de  vaiocre.  Ascl^piade, 

qui  se  voyait  ravir  par  un  nouveau  venu 

.  sa  gloire,  qu*il  crojrait  avoir  inise  en 

sOret^,  fut  un  peu  emu  de  ce  premier 

d6but  de  Remain;  toutefois,  jugeant, 

par  le  peu  de  resistance  qu'il  venait  d*e- 

prouver  dans  quelques-uns ,  ^ue  celui-ci 

n*aurait  pas  plus  de  fermete,  il  le  fit 

approcher;  et  il  n'^tait  pas  juste  que 

Jesus-Christ    se    retirAt     devant  son 

ennemi  sans  avantage ;  il  fallait  qu'il  se 

trouvAt  quelqu'un  qui  combattit  pour 

lui ,  et  qui  triomphit  en  son  nom.  Le 

juge  m^ditait  d6ja  en  lui-m^me  de  faire 

souffrir  k  cet  Stranger  tous  les  suppli- 

ces   au'il    avait  destine  aux  autres, 

pour  le  punir  d'etre  venu  troubler  son 

Iriompbe.  £n  effet,  il  le  fit  tourmenter 

cruellement;  d'abord  il   se  contentait 

d*animer  ses  bourreaux  du  geste  et  de 

la  voix ;  mais,  comme  ils  ne  le  servaient 

Eas  a  son  gr^,  et  que  leurs  bras  sem- 
laientsereldcher,  il  descendit  de  son 
tribunal ,  et  sans  avoir  ^ard  a  la  honte 
qui  en  rejaillissait  sur  sa  dignity,  il  se 
m^la  narmi  eux,  et  tdcha  par  son 
exemple  de  ranimer  leur  vigueur.  Mais 
enfin  il  fallut  que  lui  et  ses  bourreaux 
se  retirassent  confus  et  ^puis^  de  for- 
ces ,  mais  pleins  de  rage ,  et  qu*ils  c^- 
dassent  la  victoire  k  Remain  :  le  fer 
m^me  fut  bien  contraint  de  la  lui  ceder. 
Apres  ^uelaues  nouveaux  efforts  que 
fit  Asdepiade,  mais  toujours  inutiles, 
pour  vaincre  la  Constance  du  saint,  le 
soldat  de  J^sus-Christ  lui  cria  :  Cessez 
enfin  de  vouloir  tenir  contre  celui  qui 
est  tout-puissant;  quoi !  pr^tendez-vous 
resister  a  J^sus-Christ ,  qui  est  le  veri- 
table et  le  seul  roi  de  tout  Tunivers? 
Le  juge  Tenteudant  parler  de  la  sortc, 
et  croyant  qu'on  faisait  injure  h  Tem- 
pereur  d*appeler  un  autre  que  lui  roi  et 
maltre  du  monde,  condamna  surle- 
champ  le  saint  k  £tre  brdl^,  ajoutant 
ainsi  une  troisieme  couronne  aux  deux 


premieres  dont  sa  cruaute  venait  de 
couronner.  Romain,  pleiAdejoie,e| 
vert  de  son  sang  qui  brillait  de  toi 
parts  sur  ses  habits,  et  portant  sur  i 
epaules,  sur  ses  c6t^  et  sur  sod  fm 
Je  signe  royal  de  la  croix,  est  mk 
hors  de  la  ville.  li  y  trouva  le  bild| 
prepare  pour  servir  aautel.  On  appoj 
quantity  de  sarments  et  de  roseaui  si 
qu'on  ro^la  avec  le  bois,  a6nque  ie 
se  communiqudt  plus  aisfoieotetf 
vite,  et  sur  cet  amas  de  matieres  a 
bustibles  on  pla^  la  victimequidi 
y  ^tre  consumee.  Comme  ce  lieoB^ 
pas  eloign^  de  la  ville,  plusieara' 
etaient  accourus  comme  a  un  sjh 
qui  ne  leur  etait  pas  moins  agri 
qu*aux  patens.  Ou  est  maintenant 
J^us-Cnrist ,  disaient-ils;  que  ne  ^ 
ii,  ce  Dieu  des  Chretiens,  delimr< 
ci  du  feu  ?  Pour  le  n6tre,  on  saiti 
sauva  les  trois  enfants  de  notre  Dife 
de  Ja  fournaise  de  Babylone;  m 
Dieu  des  Chretiens  les  laisse  Ml 
Comme  ils  disaient  cela,  ce  ^oMif 
dont  ils  ne  veulent  pas  recoafiiibv 
pouvoir,  commanda  auxnuaga* 
joindre;  leciel  s'obscurcit,Iesnuto>< 
vrent,  et  une  pluie  m^l^  dejrflet 
avec  tant  de  force  et  d'aboodanee 
bdcher,  qu'elle  arr^te  tout  d'un 


che,  que  le  ciel  se  dMare  pourRoM 
qu'il  a  marqu^  sa  colere  par  cet  onfi 
soudain.  L'empereurenvoya  direa  tf 
piade  d'abandonner  cette  affaire;  ijo* 
voulait  rien  avoir  a  demSler  aree «» 
du  ciel  qui  lui  defendait  de  se  coam 
da  vantage  avec  lui,  et  qu'il  n'ctait 
sdr  de  faire  p6rir  un  homme  dont  le 
prenait  si  hautement  le  parti.  * 

LBS  ^vAqDES  TYKANNUS,  VlTi 
BT  PHILOGONE.  —  La  tradjUOD  «■ 
siastique  place  tous  ces  fails  so* 
piscopat  de  Tyrannus,quiavajtsiio 
k  saint  Cyrille,  en  303.  Vitalis  ftjt^ 
cesseur  ie  Tyrannus ,  et  prit  po^ 
du  si^e  d'Antioche  en  314.  D  ib« 
en  319  ou  320 ,  apres  avoir  assisw 
conciles  d'Ancyre  et  de  KA)cesar« 
les  avoir  peut-^tre  presides,  w  ] 
aussi  qu'il  retablit  a  Antiocww 
ancienne  de  toutes  les  ¥^m 
6tait  tomb^e  en  mine,  et  que i»«l 


SYRIE  ANCIBNNE. 


141 


tienscberissaient  particutierement,  parce 
^e  les  Apotres  ravaient  fondee.  Gette 
eglise  fut  acbev^  par  son  successeur, 
le  patriarche  Philogone. 

CHAPITRE  III. 

l'arianisme. 

ABIUS;    COMMENCEMENTS  BE    l'a- 

RiANiSME.  —  G'est  durant  son  patriar- 
ral  que  les  premiers  germes  de  Faria- 
nisme  se  developperent  en  Orient,  et 
Antioche,  que  les  person tions  de  Laci- 
nius  n'avaient  gu^re  ^pargnee,  ne  fut  pas 
^  Pabri  des  troubles  suscit6s  par  Arius. 
L'Orient  devait  €tre  le  foyer  des  here- 
sies ;  les  subtilit^s  de  Fesprit  grec  avaient 
corrooipu  Antiocbe,  Alexandrie  et  tou- 
tesces  grandes  cit^s  asiatiques,  d'ail- 
leurs  enerv^  par  une  mollesse  que  les 
Romains  leur  avaient  si  souvent  repro- 
ch^.  La  philosophie  d'Alexandrie  etait 
ia  plus  ^nergique  protestation  du  paga- 
Disme  ancien  contra  le  christianisme 
naissant  (*).  Ce  fut  a  Alexandrie,  dans 
I'etude  de  cette  philosophie,  qu' Arius 
coD<^t  sa  doctrine ,  si  f^conde  en  luttes 
€t  en  combats. 

Arius  ^tait  tr^babile  dans  la  dialec- 
tiq«c;  cet  energique  novateur ,  douze 
cents  ans  avant  que  Luther  edt  paru,  met 
en  oeurre  le  principe  de  la  liberty  d'exa- 
meo.  Esprit  fier  et  audacieux ,  il  rejette 
toutce  qu'il  ne  comprend  pas.  Le  clerg6 
d' Alexandrie  se  divise  :  la  fureur  de  dis- 
poter  sans  regie  et  sans  frein  s'empare 
des  esprits  :  c'est  en  vain  que  le  concile 
<f Alexandrie ,  assemble  par  T^v^que 
Alexandre  ( 319  ou  320 ),  fulmine  i'ana- 
Iheme  centre  cet  h^r^iarque  qui  attaque 
ladiviniteduVerbe. 

Arius  avait  cette  taille  devee,  cet  air 
iDelancolique,  cette  demarche  grave  qui 
parleni  auxyeux  des  peuples :  la  douceur 
de  sa  parole  lui  gagnait  les  plus  rebelles. 
Poete  et  musicien ,  il  mit  sa  doctrine  en 
Mques  :  bientdton  la  chants  partout; 
wyeut  des  ariens,  des  demi-ariens,  des 
*^iens.  Des  ^v^ues  mtoe  prirent 
prti  pour  le  reformateur.  Cependant 
Anw,  ehass6  sans  doute  d' Alexandrie 
par  Fevfique  Alexandre,  se  dirigea  vers 
'8  Palestine,  et  parcourut  les  provinces 

n  Voir  lur  cfUe  qnestioQ  le  rapport  d< 
■•  Barth^icroy  Saiot-Hilaire. 


voisines ;  mais  il  avait  ^t^  pr^ced^  en  Sy- 
rie  par  une  lettre  d* Alexandre  a  Tev^que 
d' Antioche.  Arius  avait  connu  dans  cette 
ville  Eus^be  de  Nicomedie,  autrefois  son 
condisciple  dans  V^ole  de  saint  Lucien 
et  bientot  son  plus  ardent  proselyte.  La 
lettre  venue  d' Alexandrie  ne  produisit 
pas  tout  Feffet  qu'on  en  attendait;  car 
on  voit  Alexandre  se  plaindre  bientot 
apres  de  la  faveur  avec  laquelle  plusieurs 
ev6ques  de  Palestine  et  de  Syrie  avaient 
reju  Arius  dans  la  communion  de  FK- 
glise.  En  vain,  Philogone,  qui  gouvernait 
Ffiglise  d* Antioche  dans  ces  temps  diffi- 
ciles,  cherchait  a  r^parer  les  maiheurs  de 
la  persecution  :  Fher^sie  menacait  son 
clerg6  des  plus  grands  maux.  O'eorges , 
pr^tre  d' Alexandrie,  d^pos^  pjrr  Alexan- 
dre ,  porte ,  a  son  tour,  le  trouble  dans 
celte  feglise ,  d'oii  il  est  chasse  par  Eus- 
tathe,  le  digne  successeur  de  Philogone, 
mais  ou  le  rappelleront  plus  tard  les 
ariens,  devenus  Jes  plus  forts,  en  331 , 
par  Fexpulsion  d'Enstathe. 

CONCILE  DE  NICEE;  BOLE  DES  EYK- 

ques  de  sybie  a  ce  concile;  eust\- 
the;  ses  ouyrages  de  polemique; 

LUTTB  des  ABIENS  ET  DES  CHRETIENS 

A  ANTiOGHB.  —  Coustantin,  vainqueur 
de  Licinius,  intervint  dans  les  affaires 
de  Fi^lglise  par  la  convocation  du  concile 
de  Nic^e.  Tillemont  cite  des  autorit^s 
d'apr^s  lesquelles  Eustathe  aurait  pre- 
side k  ces  trois  cents  ^v^ques  rasseni- 
bl^s  de  tous  les  dioceses  d'Orient  et 
d'Occident.  Ainsi  Antioche  ^tait  publi- 
quement  reconnue  comme  une  des  pre- 
mieres £glises  du  monde  chr^tien :  on 
salt  d*ailleurs  qu'elle  faisait  remonter  sa 
fondation  jusqu*5  saint  Pierre,  et  tous 
les  historiens  eccl^siastiques  s'accordent 
a  la  placer  imm^iatement  aprc^s  Alexan- 
drie. Presque  tous  les  6v^ques  de  Syrie 
figur^renta  Nicee  dans  les  rangsdeceux 
qui  s*appelaient  les  orthodoxes,  Eusta* 
tne  composa  m^me  plusieurs  Merits  con* 
tre  les  ariens.  Geux-ci  ne  Foublierent 
pas  :  la  participation  qu'il  avait  prise  au 
symbole  de  Nic^e,  la  fermete  avec  la- 
quelle il  avait  maintenu  la  foi  et  le  siege 
d' Antioche  centre  les  entreprises  d'E- 
tienne,  de  L^nceet  d'Eudoxe,  qui  fu- 
rent  successivement  ^v^ques  par  le  cre- 
dit des  ariens,  le  d6signaient  a  leur 
haine :  on  resolut  de  le  perdre. 
«  Eustathe  ^tait  aussi  distingu^  par 


142 


L'UNIVERS. 


son  profond  jugement  oue  par  Telegance 
de  son  style.  II  avait  publie  plusieurs  ou- 
vrages  contre  les  anens.  Mais  11  s^etait 
montr^  surtout  m^oonteot  d^EuBcbe  de 
Gesaree.  11  ^vitait  avec  soin  les  eviques 
ariens ,  et  ne  dissimulait  pas  sa  baine 
contre  eux.  Ceax-cis*a8semblerent  a  An- 
tioche  en  330,  et  le  deposereot.  lis  Taccu- 
saient,  du  moins  a  ce  que  Ton  suppose, 
de  sabeilianisme,  ainsi  que  d'une  liaison 
criininelle  avec  une  femme  de  mauvaise 
vie ,  qui ,  gagn^  par  les  heretiques ,  de- 
claraque  T^v^qued'Antiocbe  Tavait  ren- 
due  m^re.  Selon  Athanase ,  ils  iui  repro- 
chaient  aussi  une  conduite  peu  respec- 
tueuse  envers  la  mere  de  I'empereur  (*}• 
Plusieurs  pr^tresetdiacres  furent  excom- 
munies  etbannis  en  nomine  temps  qu'£us- 
tatbe,  tandis  que  Ton  accueiUait  tous 
ceux  que  Tev^que  avait  priv^s  de  la  com- 
munion de  ri!;glise  (**).  Les  catboliques 
d*Antiocbe  en  eprouverent  un  grand 
mecontentement,  et  il  y  eut  dans  la  ville 
une  telle  fermentation,  qu*au  dired'Eu- 
sebe  lui-m^roe  elle  failnt  entratner  la 
destruction  de  la  capitale  de  la  Syrie. 
Ce  malbeur  ne  put  ^tre  Mi6  que  par 
les  plus  grands  efforts  de  la  part  des 
magistrals  et  m^me  de  Fempereur,  qui 
^cnvit  lettre  sur  lettre;  il  fallut  faire 
Intervenir  la  force  arm^.Eusebe  de  Ge- 
saree refusa  Tev^h^  d'Antioche,  qui  Iui 
fut  offert...  Eup^ration de Balaneh, Ky- 
mace  de  Paltus,  Asclepas  de  Gaza,  Cyrus 
de  Bero6  et  plusieurs  autres  ^veques  par- 
tagerent  le  sort  d'Eustathe.  La  |)lupart 
furent  accuses  de  sabeilianisme;  a  quel- 
ques-uns  on  reprocba  d'autres  crimes, 
lis  furent  deposes  et  bannis  par  les  conci- 
les,  ou  m^me  sur  une  simple  injonction 
de  Tempereur  (***).  Car  les  ariens  etaient 
alors  tout-puissants  k  la  cour.  Les  ev^- 

(*)  Eus^be,  de  Fita  ConsL  111,  M,  passe  en- 
tf^rpnipnt  sous  silence  la  cause  de  sa  deposi- 
tion, parce  quMl  ne  veut  |MS  renoaveler  l« 
souvenir  dn  roecbants.  Socrate,  1.  I,  c.  x&iv, 
rcmnrijue  qu*EusUithe  avait  ete  accuse  de  sa- 
beilianisme, mais  selon  d'autres,  de  fails  peu 
honorables  ( oux  dtyaf^  alria; ) ,  mais  il  re- 
grelte  que  les  ev6ques  se  coatentassent  de  d6- 
poser  sans  dooner  les  raisons  de  leurs  resolu- 
tions. Saint  J6r6iDc  (  Contra  inf,  I.  HI,  c.  xt) 
et  Tbtodoret  ( 1. 1 ,  c  xxi )  disent  posiUvement 
qu'une  femme  de  mauvaise  vie  avail  ete  pay^e 

S^ur  rendre  un  faux   t^moignage.  {Note  de 
ofhler, ) 

{"*)  Ath.  HiMt  jir,  admonack,  c.  IV. 
(***)  AUiao.  1. 1,  0.  t;  Socnit  1 , 94; Tb^odo- 
cetl,  30. 


ques  d^pos^s  ftirent  remplac^  pari 
partisans  d'Arius  ou  du  moins  ptf| 
nommes  qui  ne  Iui  dtaieot  point  c 

res  (*). » 

L'EYI^QUE     PL  ACILLE ;     D^POSI^ 

d^athanasb;  lbgbndr;  deplobJ 

BTAT    DE  l'eGLISE  D^ORIEVT.  —  | 

cille,  qui  avait  ete  eleve  sur  le ! 
d'Antioche,  a  Finstigation  des  arj 
presida  le  concile  de  Tyr,  en  936.  [ 
recuse  par  saint  Athanase.  Celui-d] 
alors  depose  au  milieu  d'incroyabia 
lences.  11  paratt  que,  dans  ces  asseuL 
tumultueuses ,  la  dignity  d'^v^uej 
tait  pas  une  sauvegarde  contre  les  r 
des  partis;  et  peu  s'en  fallut  qu*ea| 
concile  les  ariens  furieux  ne  se  jeU 
sur  Athanase. 

Les  pressentiments  de  saint  Anti 
disent  certaines  16gendes ,  ne  rav| 
pas  tromp^.  Un  joUr,  ^tant  asf' 
entra  en  extase ,  et ,  faisaut  un 
soupir,  il  dit  k  ceux  qui  rentooraif 

(*)  Athanait   le  Grand  et  Figtiae  t 
temps   en  lutte    avec  t*arianitmtj  pirl 
Adam  Mnhler ;  Uaduit  de  raUemairiptfl 
Gobeo,  ia4o;t  n«p.  179. 

On  lit  dans  M.  de  Potter :  f  Sozootee  i 
porte  pas  d'autre  motif  de  oe  qalt  ap] 
pera^ctttion  dlric^  oontra  Eustathe,  r 
opinions  professees  par  celui^  el  w 
aux  opinions  d'Euscbe  de  C^sarde,  dc  1 
de  Tyr,  de  Patrophile  de  Scytbopolis  rt  6 
las  ^vdqnes  orientaux .  ^galemeDt  foMi-- 
oonsubstantialisme.  Cela   ferait  wppoiffl 
guatre  k  cinq  ans  seulement  apres  W  aW 
Wic^  les  decisions  de  celte  assemble  mJ 
vaient  d^j^  presque  plus  que  des  eootnucir 

«  D'autres  historiena  ailment  del  fiiU  « 
coup  plus  graves,  et  qui,  d  aprte  le  memeS 
mtoe  que  nous  venons  de  citer,  ne  farrBil 
le  pr^texte  dont  les  ariens  se  servlreot  poorP 
dre  Euslalbe.  Us  aocusent  reTtqueaMwl 
d'avoir  d^shonor^  son  caract^re  par  ukJ 
duite  scandaleuse ,  de  s*6tre  rendu  coof' 
viol ,  et  d'avoir  vecu  en  uo  commerce  i 
par  r£glise  avec  une  Jeune  flUe.  11  avail  >i 


dj 


.  raanqu^  de  respect  k  la  m^re  de  I W 
ans  des  propos  qu*il  avait  tenus  sur  son  <^ 
En  outre ,  une  femme  se  plaignit  pubJiqii 
devant  les  evdques  assembles,  d«  Tiaipc 
lite  ou,  di.sail-elle,  elle  se  trouvalt  dew 
un  enfant  qu'elle  avait  eu  d*Eustathe,n1 
lequei  cet  tfv^ue  avail  cease  As  Iui  w^ 
neoe>S'>ire.  ,  .^ 

«  rheodoret,  en  rapportant  celle  mwa 
ajoiite  que  cetle  femme,  «ant  au  lit  de  laO'JJ 
confessa  qu'elle  avait  calomni«  Tev^que^w 
tioclie;  que  c'ctalent  Eusebe  de  Cesaree  aJ 
^v^ques,  ses  complices,  qui  i'avaientsuwnj 
pour  commettre  ce  faux  t^molgnajse^  tw  »v 
eu  un  enfant  k  la  verity  d*un  EusUlM*  JJ 
marechal  de  son  metier,  et  noii  pas  cb***.?' 
tuel  de  rftglise.  »  ( De  Potter,  Hist,  du  t»n 
iitiH.  ,  t.  If,  p.  204.  ) 


SYRIE  AJHQENNE. 


148 


« 0  mei  mfantf ,  il  vaut  mieax  que  je 
mnire  avant  que  ce  que  j'ai  vu  s*aecoo»- 
pliMe ; »  et,  oomme  on  le  pressait  eneore, 
il  dit  ea  pleuraDt :  «  La  colore  de  Dieu 
va  totnber  sur  i*£gli8e ;  eile  va  Itre  li- 
Tree  a  dM  faromiaaa  aemblables  aux  Mtei 
brutes;  car  j'ai  vu  la  sainte  table  envi- 
ronn^e  de  mulets  qui  renversaient  k 
eoups  de  pied  ee  qui  etait  desaus,  comoie 
quand  ces  animaux  sautent  et  ruent  en 
coufusion ;  ft  j'eDtendais  une  Toix  qui  di* 
sail :  Mon  autel  sera  profane.  » 

Cependant,  r£glise  avait  encore  ses 
joors  de  f^te  :  la  grande  basilique  que 
Gonstautin  avait  conimencee  h  Antioche 
veoait  de  s'achever :  on  en  fit  la  dedicace 
en  341,  en  pr^noe  d'un  grand  nombre 
d'ev^iies. 

ATHANA8S     PODRSUIYl     PAB      LBS 

iDSBfiisfis;    CONGILB    d'antioghb; 

mfOBTANCB  BB  BBS  CANONS  AU  POINT 
ax  YDB  DtJ   DOG  MB   BT  DB  LA    DISCI- 

HiNB.  —  «  £n  341 ,  lea  eus^biens, 
apres  avoir  fait  a  Rome  de  vaines  d6- 
narches  contre  Athanase,  s'effore^rent 
<ie  faire  reussir  leurs  projets  dans  un 
eoneile  convoque  a  Antioche.  Le  pre* 
texte  de  oette  assemble  fut  la  dedicaee 
de  Teglise  dont  Gonstantin  avait  fait 
eommenoer  la  construction  dix  ans  au- 
paravant.  On  c6l^rait  en  m^me  temps 
le  Gtuauieme  anniversaire  de  i'av^ne- 
uient  dias  fils  de  Gonstantin  le  Grand. 
Athanase,  que  Tempereur  avait  rappel6 
de  Texil  et  r^tabli  dans  son  diocese ,  fut 
d^s6  par  les  ^v6ques,  pour  avoir  repris 
possession  de  son  si^e  sans  permission 
pr6alable  d'un  concile.  On  lui  nomma 
BB  Riiccesseur.  Le  ehoix  tomba  d*abord 
ivrEus^bed'fimese,  hommetres-savant, 
originaire  d'F^desse ,  et  forme  a  Tecole 
d'EQsebe  de  G^sar^.  Mais  li  ^tait  troo 
nge  et  trop  Suitable  pour  eonsentir  a 
prendre  la  placed' Athanase.  II  ^tait  sur- 
Kmt  retenu  par  la  pens^  de  I'attache* 
■sent  des  haoitants  d'Alexandrie  pour 
lew  illiistre  ev^ue  (*).  il  fut  fait  ev^que 
iHEmese.  En  revanche ,  un  certain  Gr^- 
Seire  devint  ^v^que  d' Alexandria ,  et  fut 
were  a  Antioche. 

•  Gependant,  les^v^esassembl^sen 
ooaeile  publldrent  quatre  syniboies.  Dans 

(*)  Aia  t6  (jqpoSpdc  (mh  tou  tfiv  'AXe|oevdpea>v 
«oy  «ficoujao6ai  xir*  'AOovoaiov.  Socrale,  1,  II, 
cIX. 


le  premier,  qui  fut  joint  aux  lettres  sy- 
nodiales,  ils  disaient :  «  Nous  ne  sommes 
point  les  disciples  d*  Arius ;  car,  comment 
nous  qui  sommes  ^vSques pourrlons-uous 
suivre  un  simple  prctre?  Nous  n'avons 
pas  Don  plus  adopte  d'autre  ioi  que  celle 
qui  nous  a  ^t^  transmiat  depuis  le  com- 
mencement. Nous  a  vons  ^te,  au  eontraire, 
les  ju|;es  de  la  foi  que  nous  avons  ap- 
prouvee.  Mais  c'est  nous  qui  avons 
adopts  Ariuslui-m6me,et  nous  nera  vons 
pas  suivi.  Vous  reconnaltrez  cela  vous* 
m^mes,  par  ce  qui  suit.  Nous  avons  des 
le  commencement  appris  k  croire  en  un 
seul  Dieu  et  un  fils  unique  de  Dieu  qui 
est  avant  tous  les  temps,  qui  est  avec  son 
Pere  qui  Ta  engendr^,  par  qui  tout  a  etc 
fait. »  Une  autre  for  mule,  jomte  a  une  au- 
tre lettre,  s'exprimeavecun  fort  grand  de- 
tail ,  en  serapprochant  beaucoup  du  sym- 
bole  de  Nic^.  La  void  :  «  Nous  crovons 
en  un  Dieu ,  en  un  Seigneur  Jesus-Glirist 
son  fils,  unique  Dieu,  par  qui  tout  est, 
engendre  par  le  Pere  avant  tous  les  temps, 
Dieu  de  Dieu ,  Tout  du  Tout ,  Unique  de 
rUnique,  Parfait  du  Parfait,  Roi  du 
Roi ,  Seigneur  du  Seigneur ,  le  Ve rbe 
vivant ,  la  Sagesse  vivante ,  la  vraie  Lu- 
miere,  la  Yoie,  la  Verite,  la  R^urrection, 
le  Pasteur ,  la  Porte «  rimniuable  et  Vh 
nalt^rable,  Timage  qui  ne  differe  en  rien 
de  la  divinity,  de  la  substance,  de  la  vo- 
lenti, de  la  puissance,  de  la^loire  du  Pere; 
le  Premier-n6  de  toute  creation ,  qui  a 
6t^au  commencement  avec  Dieu,  le  Dieu 
Logos,  dequi  il  est  ecrit :  «  Et  Dieu^tait 
le  Verbe  » ,  par  qui  tout  a  ^te  fait  et  en 
aui  tout  existe ;  et  au  Saint- Esprit,  qui  a 
m  donn6  pour  la  consolation,  la  sane* 
tification  et  la  consecration  des  fideles. » 
Le  reste  s*etend  sur  rinoarnation  de  J4* 
sus-Gbrist  et  sur  la  personnalit^  du  Pere, 
du  Fits  et  du  Saint-Esprit.  A  la  fin,  il  est 
prononc^  un  anathema  sur  ceux  ^ui  sou- 
tiennent  qu'il  fut  un  temps  «  ou  le  fils 
n'^tait  pas  «...  etc.  Du  c4te  des  catholi- 
ques,  on  n'^tait  nas  absolument  me- 
content  de  cette  formule.  A  la  verity, 
on  n'y  trouve  pas  Vhomousios;  mais  on 
ne  tenait  pas  particulikement  au  mot, 
pourvu  que  son  sens  fdt  exprim6  pleine- 
ment  On  combattit  cependant  une  des 
formuies  ^ui  faisaient  partie  des  anatbe- 
roes  et  qui  disait : «  Si  quelqu*un  pretend 
que  le  Fils  est  une  creature  comme  une 
a'entre  les  creatures,  etc. . . »  parce  qu'eJle 


144 


I;UNIVERS. 


doDDait  toujours  a  entendre  que  le  Fils 
est  une  creature,  quoique  difrerente  des 
autres  (*).  En  outre,  leP^re,  le  Fils  et  le 
Saint-Esprit  sont  d6sign6s  corame  ^tant 
trois  par  Vhvpostas^,  mais  un  par  leur 
accord  ( Tf  fk  ouu^cdYta  fO-  Or  dans  le 
sens  des  ariens  Vhypostase  signiGe  sub* 
stance  (**). » 

Apres  ces  regies  de  foi,  le  concile  com- 
posa  vingt-cinq  canons  de  discipline.  Le 
plus  remarquable  est  le  cinquieme  :  «  Si 
un  pr^tre,  ou  un  diacre,  au  m^pris  de  son 
^v^nue,  seseparede  Tfiglise,  tient  uneas- 
seniblee  h  part  et^rige  un  autel ,  qu'il  soit 
depos^.  SMI  continue  de  troubler  rfiglise, 
qu  il  soit  r^prim^  par  la  puissance  ext^- 
rieure  comine  seditieux.  »  Remarquons 
cetappel  a  i'intervention  de  la  puissance 
temporelle ,  ce  recours  au  bras  s^culier, 
apres  que  le  diacre  ou  le  pr^tre  a  ete  mis 
au  ban  deTfeglise  (***). 

Citons,  en  passant,  quelques  autres  ca- 
nons touchant  la  residence  des  6v6ques , 
les  jugements  eccl^siastiques ,  le  tern- 
porel  des  £glises ,  et  Tordre  de  la  hie- 
rarchie.  Ainsi  ri^glise  s'organise  et  eta- 
blit  sa  discipline. 

Les  droits  du  m^tropolitain  sont  hau- 
tement  d^fendus ;  11  prend  soin  de  toute 
la  province,  et  precede  les  autres  ev€- 
c^ues  en  honneur  :  mais,  si  rien  de  con- 
siderable ne  se  pent  faire  sans  lui ,  lui- 
m6me  ne  peut  rien  sans  le  concours  des 
autres  ^veques.  Rien  n'^gale  rhabilet6 
avec  laquelie  sont  r^gl^es  les  affaires  de 
radministration  temporelle.  Les  ev^- 
ques  ne  sont  que  des  economes  qui  doi- 
vent  rendre  leurs  comptes  et  se  rappe- 
ler  cette  parole  du  divin  ap6tre :  «  Pour- 
vu  que  nous  ayons  de  quoi  nous  nour- 
rir  et  nous  v^tir,  nous  devons  ^tre  con- 
tents. »  Les  biens  de  I'^glise  sont  tou- 
jours appeles,  dans  les  canons  d' An tio- 
che,  les  biens  des  pauvres,  dela  veuve 
et  de  Torphelin;  le  clerg6  n*est  qu'un 
d^positaire  int^gre  et  vigilant.   Aussi 

(*)  Socrat.  F ;  11;  Sozora.  Ill,  B,  Alhau.  De  sy- 
nod, ,  fol.  735etsqg.  HHar.  De  synod,  fol. ,  21. 

(-*)  Mffihier,  t   11,  p.  25b-258. 

(**')  Un  autre  codoii  defend  k  l'6veque  d^posd 
de  s'adresser  h  I'empereur  sous  peine  de 
perdre  loule  esp^^ce  de  droit  a  son  r^tabiisse- 
menl :  finalise  veut  iitre  Independante  du  pou- 
voir  civil,  lout  en  profitant  des  services  qull 
peut  lui  rendre.  On  reconnaft  la  les  preimers 
trails  de  la  politique  qu'ellosuivra  peudant  tout 
le  inoyen  Age. 


fortement  constituee  a  I'int^ieor,  d^ 
i'^glise  tend  a  s'accroftre;  elle  sorl^ 


murs  et  s*arr6te  dans  la  campagne.  FtH 
de  la  cite,  dit  M.  Michelet,  eiie  compit 

Sue  tout  n*6tait  pas  dans  la  cite ;  elle  o^ 
es  ^v^ues  des  champs  et  des  boiii|i»; 
des ,  des  chor6v^ues,  toO  xt^^wt  £«ioiu««. 
Le  concile  d'Antioche  r^gta  leurs  attri* 
butions,  qui  avaient  d^ja  ete  d^finies  |Mr 
celui  d'Ancyre,  et  qui  ne  doivent  m 
d^passer  le  pouvoir  d^ordonner  des  te» 
teurs  etdes  sous-diacres,  jamais  depfCJ 
tres  ni  de  diacres  sans  F^v^ue  dont  Hj 
dependent.  Le  r^seau  de  radministrati« 
ecclesiastique  s'^tend ,  nous  TaTcms  S^ 
8ur  la  ville  et  la  campagne ;  mais  la  eaa{ 
pagne  depend  de  la  ville,  ou  r£gliseafli 
plus  fortes  racines. 

La  conformite  des  provinces  eedesali 
tiques  avec  celles  de  rEmpire  futreaoa^ 
nue  en  principe  au  concile  d*Aiitioehir' 
Le  IX"*  canon  declare  que  r^^qoeAJ 
la  metropole  civile  est  juse  sup^rieunkl  \ 
affaires  eccl^siastiques  de  la  pniviiiei,  i 
toutes  les  affaires  en  general  aboutissal  j 
h  ce  chef- lieu,  et  qu'en  consequaoeeaihl 
cun  ^v^ue  provincial  ne  doit  riMieatre' 
prendre  d'important  sans  le  coiMxmrsdi. 
son  metropolitain. 

«  Mais  dans  le  m^me  canon  il  vnk 
^t^d^cid^,  conform^ment  a  I'esprit  de  l*fr 
glise  et  a  la  marehe  suivie  des  rortgioe^ 
que  ie  metropolitain  ne  prononeeraitsff 
rien  d'important  sans  en  aroir  ddibdi 
avec  ses  ^vSques  suffragants.  Aiusi,cooi> 
nue  M.  Doeflinger  (*),  a  qui  nousenipn» 
tons  cette  remarque,  rorgaaisatioo  dn 
m^tropoles  coincide  exactement  avee 
celle  des  svnodes  :  comme<^qae^t^ 
a  son  college  de  pr^tres  ou  chapitr^ 
de  m^me  ehaque  metropolitain  a  soo  ^ 
node  provincial  ou  s^nat  eceJesiastiafll 
dans  lequel  toutes  les  affaires  gdimNl 
sont  debattues.  Le  synode  ressortesa 
tiellement  du  g^nie  de  I'^glise  uni 
selle;  par  la  est  maintenue  Tunite 
^glises  et  des  evSques  dans  la  foi ,  daaj 
la  discipline  et  Tamour.  Souvent  ies  i^ 
nodes  nrent  cesser  des  divisions  d^pM 
rabies,  sauverentde  Tanarchie  des  dioeM 
ses  entiers,  etparde  solennelsjugementv 
terrasserent  ou  paralyserent  rberesicj 
Chaque  ev6que  ^tait  au  synode  le  repre* 
sentant  naturel,  Torgane'des  pensees  de 

(♦)  Doellinper,  1. 1,  p.  37(». 


SYRIE     ANCIENNE 


SY]U£  ANCIENNE. 


145 


IM  Egitie;  cat  eUe  dtalt  en  hii  oomiiie 
in  en  eik.  Penonne  ne  sonseait  k  en- 
fDj«r  aa  eoncile  an  autre  dq>ut^;  oela 
cdtioppos^  an  disaccord  entre  lepas- 
teor  et  100  troapeaa,  ane  scission  des- 
trndire  de  la  eonfianoe  mntuelle  et  de 
hwni^  oae  plaie  int^ieure  que  les  au- 
I  Irs  ^t  Cqnes  aoraient  arant  tout  cherch^ 
i  gn^rnr.  Gomme  suceesseur  des  apdtres 
M  des  homines  apostoUques  qui  avaient 
feod^  SOD  ri^e  et  y  avaient  mis  le  d^pdt 
ide  la  foi,  chaqne  ev^ue  6tait  en  outre 
k  principal  depositaire,  le  t^moin  au- 
flbfotiquedelarraiedoctrine.  Lesynode 
^^itaiasi  ia  representation  d'une  partle 
|io8  on  moins  grande  de  I'figlise.  Quant 
a  one  repr^otation  complete,  univer- 
idle,QD  D*y  poovait  encore  songer  dans 
tttempide  persecutions.  Le  synode  pro- 
vineialexprimaitdoncreellement  la  pen- 
ite  4e  tmites  les  ^glises  de  la  province 
oad'oaesrele  plus  etendu,  ettous  ceux 
9a  eo  fiusttent  partie  devaient  s'y  sou- 
mettie.' 

USMORASTiKSS  8*SLiTBlCT  EN  ST- 
>U;  SAIHT  HILABION  ;  BTIBNNB  ,  ivt- 
({ffBB^AHTIOCHS,  CONDAMHB  LB  PAPB. 

^  Vers  la  m^me  6poqae,  la  renoromee 
poblimentouslieux  les  miracles  oue 
jaittit  lepieux  solitaire  Hilarion  en  Pa- 
winej  les  peoples  de  Syrie  acconraient 
areDTipour  le  voir;  et  plus  d'un  des 
fiMin  visiteurs  resuit  aupres  de  lui.  C'est 
"Miqoes'elcvircntles  premiers  monas- 
^tt Syrie;  Hilarion  en  fut  lefonda- 
w.  II  fit  ee  que  sunt  Antoine  avait 
tentt  ea  Egypte. 

GepeadantAthanase  prononce  d'^ner- 
09<W8  pttoles :  justifie  une  premiere 
lois  par  le  eoocile  de  Rome ,  il  le  tut  en- 
ttre  daas  ud  autre  eoncile  tenu  en  347. 
w  socccsseor  de  Flacille,  fitienne ,  d^j^ 
Aa^aux  troubles  d'Antioche,  et  devenu 
J^eque  de  cctte  ville,  y  fut  d^pos^  corarfie 
l^des  ehe&  de  la  faction  arienne. 
i*™nnc  protesta  avec  soixante-treize 
et  preside  le  conciliabute  de 


§^ 


[nihppopolis,  oil  T^vdque  de  Rome  fut 
\^m€  avec  Athanase. 
JCe  fait  est  grave :  il  nous  montre  V6- 
]|Jj«.  d*Antioche,  chef  des  Orientaux , 
JJ  da  moins  de  soixante-treize  ^v^ues 
•ynept,  s'elevant  contre  le  chef  de  Vfe- 
P*s*Occldent ,  repondant  par  une  sen- 
inxQ  d'excommunication  a  celle  qui 
*^«et^  lano^  contre  lui  :  le  schisme 

10*  UvrcUson,  (Sybib  ahciennb 


et  l*hMsie  ae  r^nissent  contre  rfglise. 

TBOUBLBS  DANS  L*BOL16B  D'ARTIO- 
CHB;  INTBIGUBS  n'BTIBNRB;  FLAVIBN 

ET  diodobb;  i.'bv£qub  lborcb,  — 
Aussi  voyoos-DOus  Tempereur  Cons- 
tant, le  defenseur  d'Atfaanase,  ecrire  a 
son  frere  Constance,  qui  ^tait  alors  a 
Antioche,  de  s'informer  des  crimes 
d'fitienne,  ^v^ue  d'Antioche,  et  de 
faire  executer  la  sentence  portee  contre 
lui :  les  envoys  de  Constant  ^tant  arri- 
ve a  Antioche ,  fitienue  entreprit  de  les 
perdre  de  reputation  pour  leur  6ter  tout 
credit. 

«  La  deputation  se  composait  de  deux 
vieillards,  Euphrate,  ^v^ue  de  Cologne, 
etVicence,deCapoue,qui  avait  autrefois 
assist^  auconcilede  Nic6e.  Constant  leur 
avait  donn6  des  lettres  de  recommanda- 
tion,  et  avait  m^me  menace  son  frere  de 
lui  fiiire  la  guerre  s*il  ne  retablissait  pas 
les  evdques  destitute.  £n  attendant,  une 
ruse  ooieuse  ^tait  pr^par^e  pour  faire 
manquer  le  but  de  leur  voyage.  Un  homme 
d^r^ie  toit  alie  chez  une  femme  de 
mauvaise  vie.  et  lui  avait  dit  de  se  ren- 
dre  chez  les  evdques ,  comme  si  ceux-ci 
I'avaient  fait  demander.  Cette  femme 
etait  entr^  la  nuit  dans  la  chambre  d*£u- 
phrate ;  il  s'^veilla,  et,  la  prenant  pour  un 
fant6me,  il  appela  k  son  secours  Jteus- 
Christ,  en  le  priant  de  le  ddivrer  du 
d6mon.  Iji  prostitute  reconnut  alors 
que  ce  lieu  n^tait  pas  fait  pourelle,  et 
se  mit  k  pousser  de  grands  cris,  disant 
qu'on  avait  voulu  lui  fairedu  mal.  Aus- 
sit6t,  le  jeune  homme  qui  etait  h  Taffdt 
antra  precipitamment  dans  la  chambre 
avec  plusieurs  autres  personoes  pour 
dtre  terooins  du  crime  de  Tev^uue.  On 
esp^rait,  par  ce  moyen,  accabler  de  honte 
la  deputation  et  la  faire  renvoyer.  Mais 
le  grand  bruit  qui  se  faisait  dans  la  niai- 
son  y  attira  d'autres  spectateurs,  et 
toutes  les  personnes  qui  avaient  eu  part 
k  cette  affaire  furent  conduites  devant 
le  commandant  de  la  ville.  L'^v^que 
£tienne  d'Antioche,  qui  avait  ete  k  Phi- 
lippopolis  avec  les  ariens,  insista  vaine- 
ment  pour  qu'on  lui  rendtt  sespr^tres; 
car  on  reconnut  alors  que  c'6Uient  eux 
qui  avaient  dress^  cette  embQche  a  la 
deputation.  La  prostituee  raconta  par 
qui  elle  avait  cte  appciee;  ceux-ci  avou^ 
rent  qu*f:tienne  avait  dirige  tout  le 
complot,  dont  ils  n'avaientete  que  les 


146 


LVMTlSftS. 


instramems.  £tieiiiiefiitdefltini^(^.  » 
Mais  les  artens  eur«Bt  eneove  le  cr^it 
defaire  ^tire  ^dque  (FAncioche  Tewv- 
que  I>oBee,  on  des  appuia  de  teor  parti ; 
et  le  si^  d'Antioebe ,  aui  avait  M  bo- 
nor6  par  lesTerlna  de  Phtlogone  H  d*Ka^ 
tathe,  fut  occup6  par  an  ^eqoequd  s'toit 
Vehement  molile  pour  ^ehapper  au  y<e- 
proche  d«  eoneabinage.  L*£giise  d«  Sy- 
rie  d^^to^rait  rapidemeDt  entre  les  maias 
de  ces  ^v^oes  h^rdsiar^aes  et  oorrom- 

{ms.  Ldonee  n'ordonnait  auouD  eatho- 
ique;  il  craignait  la  multitude;  et,  en 
effet,  le  clcrge  de  Syrie  etai  t  beaucoup  plas 
entacb^  d'bdr^sie  que  le  people. 

«  Du  roBte,  Ltouee  fut  assez  prudent 
et  asses  sage  pour  ne  point  eommettre 
des  injustices  trop  criantes ,  et  pour  ae 
pas  pnicher  drrectement  ooiitre  les 
croyances  catbeft^fues  i  il  se  oontenta 
de  suivre  la  route  detournee'^ui  devait 
les  miner  iefttement.  11  ne  eboisit  pour 
entrer  dans  le  elerg^  auenne  pmrsomte 
qu'il  soupoonnftt  de  catholicisnie,  et  ne 
doma  les  ovdres  qa*a  des  ariens.  U  ^tait 
Evident  que  Tortbodoxie  f  priv^  de  pt^- 
dieateurs,  devait  bientdt  d*elle-mdme 
eesser  d'exister.  On  con^it  que  le  but 
de  ees  efforts  n'eebappait  podnt  aux  ea- 
tholiques.  Mais  les  cboses  en  dtaieat 
d^ja  venues  an  point  qu'ils  n'avaient 
plus  pour  appuis  qu^un  petit  ndmbre 
de  laiques ,  comme ,  par  exemple ,  Dio- 
dore,  qui  se  rendit  plus  tard  si  c^lebve 
eomme  ^v^ue  de  Tarse,  et  Flarien, 
qui  devint  par  la  suite  lui-mtoie  M- 
[ue  d*Antioche.  L'un  et  Tautre^  dignes 
-u  plus  grand  respeet  parr  leaf  pi^  et 
jouissant  d'une  grande  infhieoce  par 
ieurs  vastes  connaissances ,  r^unirent 
les  catholiques  qui  ne  faisaient  ^int 
partie  de  la  communion  des  eustatbiens, 
tantdt  dans  Ieurs  propresmaisons,  tan- 
t^t  pr^s  des  tombeaux  des  martyrs,  et 
entretinrent  ainai  la  flamme  de  la  vraie 
foi.  Les  catholiques  auraient  ou  se  rea- 
dre  aussi  dans  les  assemblees  des  ariens, 
s'ils  Tavaient  voulu;  maisilscbantaient: 
«  Gloire  au  Pere,  au  Fils  et  an  Saint*fis- 
prit ;  »  tandis  que  Ieurs  adversaires  di- 
saient :  «  Gloire  au  Pere  par  leFils  dans 
le  Saint-Esprit.  >  Ce  fut  ains?  ^e  les 
fideles  voulurent  poser  une  distinction 
bien  nette  entre  eux  et  les  ariens.  Car 

(*)Hshler,tn,p.  287. 


I 


«•  deraleffs  abosBlMit  de  UmlM^ 
gie  p(Mr  appoyer  tovr  synHne.  OnMrii 
que  eTeat  Flatiiis  ffui  iMrMJNrisit  fr 
bord  h  Affiioiebe  la  tfoxologie  ml  Mi 
par  la  saite  eelle  de  louteTfi^ 
Quand  L4oiieetoai«l^l«Tei#  AM 
au  dlaoMiat,  ee  iitfeot  FItvieii  il 
dor»  ifm  s^y  opMseremt.  Pla^* 
Dio^re,  qui  mamteBiieHt  st 
ment  les  droiu  et  tes  firaueM 
primitive  £glise,  avaientloa< 
bvass^  la  v^  aso^tque.  Diodcve 
pauvre,  qu^il  nopossMait  nen 
terre.  ni  maiaon,  ili  table,  ai 
amis  le  Dourrissaieat ;  at  il  di 
son  temps  k  la  pri^e  et  h  Tn 
La  pAleur  de  son  visage  et  toot 
rienr  l^moignaient  de  la  %^kM 
moears.  U  avait  ^tudl^  k  Atb^att 
losophie  el  la  rh^riqtte,  et 

(•)  Btobler,  t  HI,  p.  7S-7«.  ^^ 

Od  Ut  dans  M.  de  Potter :  <  LAonee  avail 
grad4  de  Ui  prMrise  paroequ'li  l^'^^i!!!. 
geoe  il  8'^lait  chAU^  de  ses  maioi,  oeqra 
deot  les  eaooot  •pcstoUqueB,  souspdoeM 
tfltioti ;  car,  diseDt-Us,  ci*e»t  we  moMnrlflli 
de  floi-iiieme  et  enoeflii  de  PcDutre  dt  U^ 
BoiD9  let  nenei  caacMu  decttmt  r 


qui  oe  le  soat  pas  par  lear  iaute, 
Mrvlr  le  nAinist^re  des  auteb,  ler 
an  corps  sans  d4fwU,  aiaia  ade 


lemmci 

«  IVaJileors le Inilde UooM &m «<, 
ble  rouUiation  avaU  ^te  bteo  differttt  ^ 
du  savant  p6re  de  i*£glitt.   Ongenefl 
Toula  que  w  aouttraife  aux  taiMBkn^ 
M  qui  Mirait  pale  dtBtrake  deaei  mm^ 

{>huosoptuques  et  religieuaes.  Uoooe*  i 
ralre,  pr^tendtt  se  mettre.  parsoQiiDplL 
reocHitiae ,  au-deasoa  de  todte  crRlqae  aa 
Ber,  an  prix  <te  oe  vloteot  MO^fi^*.  "^ 
frequenter  d^sormais  en  pleiiie  liMmiUi^ 
quilaimaitet  dontonavait  vooloqaiiseii 
Won  saint  Athanaae,  eel  «n«»f»rj*7 
eooMBe  il  ae  i&aiK|ae  Jtfnais  d^^PPSfJ 
par  d^risiOD,  quoique  iVupercur  eftUf 
par  un  ^it  de  Tappeler  ^vOque,  recta 
d^  ce  moment  k  coedwr  »vee  «•  i 
(c'eUit  le  aom  de  «ltoMDpa0De)t<|a'U  ««a 
Dommer  vierge,  quoiqo*il  o*te^<>^fi£rJ 
avait  depuis  longtemps  cesse  oe  I  cw  r 
fait      »'"*»-  _,     ^j 

€  a  B'y  a  ik  ^'line  bUarruie.  q« j 
jamais  qu'un  bien  petit  ooiPDre  dW 
Les  autres  crimes  de  Ltonce ,  oaeiuiP 
saint  AUianase ,  et  que  I'^vAqoe  Tbeoj 
rappof40  qoacomBW  iQi  etant  iopaw  f 
que  d'Alexandrie,  aoBltimplciBenl  flafl 
litolodques,  de  Tariaiiisme  en  unffloj 
alnt  Athanase  aeouse  l'*v«que  d  AiiMJ 


saint  ». ,-    , 

Yolr  «t«  no  ptftisan  ^''"^^^g^^ 


qu'Uraait 
nisTM 


ru  raaitpiiu  aeeretemenu » n***-" 
EsnM  par  de  Potter,  t.  U ,  Pjftl. 
(•*)^«iu8,  instruft  klwledes 
IMKiM  son  m^Uer  de  dlspUler  :  tt 
rianiime  jusqu'a  MS  der'»i*'*li25fi 
comme  de  tniter  le  pdcfaA  de  nkMl^ 
dueorpa. 


SYRIE  ANCIETKNE. 


i4f 


fyafit  de  Sjrivain  de  Tarse.  L'un  et 
Fautre  ifappliqaafent  jpxxr  et  nuit,  du 
temps  de  LeoDce,  k  exciter  dans  les  fid^ 
let  le  z^le  de  la  religion.  ITs  les  assem- 
biaieot,  commeledit  Mshler,  aux  tom- 
beaax  des  martrrs,  et  v  passaient  les 
avits  arec  eax  ^  toner  Bfeu.  Leonce  n'd- 
tatt  les  empfeher  h  eaose  de  la  multf- 
fode  qui  les  saiTait  d*rme  grande  affee- 
fioQ;  noais,  aree  une  doiioemr  apparent6> 
11  les  pria  de  faire  ee  lervicc  dans  Vt- 
lise.  Qaoiqu'ilsconnussent  bien  sa  ma- 

t^  iis  ne  laisserent  pas  de  loi  ob6ir. 

Athaflase ,  apr^  avoir  quitt^  Rome , 
tt  avant  de  rentrer  dans  son  diocese  d* A- 
lexandrie,  visita  Pempcreur  Constance , 
qui  r6sidait  encore  k  Antioche.  L'evlque 
tt  rempereur  se  r6conciti^rent ;  mais  de 
aoufeiles  perflations  attendaient  en- 
core Athanase.  Pendant  Ye  sejonr  qu'il 
fitk  Antiocbe,  if  ne  comnmniqtta  point 
•wlioMe,  et  r^vita  comene  un  ficr^tl- 
qoe;toatefo[8,  il  entrettnt  des  rapports 
a^  Ie8  eostathiens ,  qui  latent  fa  phis 
pureprnfeda  peuple  catfaoliqtie,  et  as- 
s^  a  lears  assembles  qui  se  tenaient 
daw  des  maisons  ^articnli^res.  L'em- 
pcRsr  Id  demandatt  an  jour  de  laisser 
one  despises  d'Alexandrie  h  oeux  qui 
B*et»ent  pas  de  sa  eommonion.  Atha- 
oaser^ndit  qa*il  le  ferait;  mais  il  pria 
rempereor  d'aecorder  la  m^me  favcur 
m  castathiens :  et  les  ariens,  qui  cral- 
fBaient  lev  grand  nombre,  consei  ll^rent 
•  rempeeur  de  n'en  rien  faire.  Leonce 
hiHn&ne  tf^it  pas  tranquille :  »l  enten- 
dait  les  eatholiques  chanter,  k  la  fln  des 
p^auroes,Gloire  au  Pere,  au  Fils  et  au 
Sa'olEsprit; et  11  disait quelquefois ,  en 
touchaai  ses  cheveux  blaucs  :  «  Quand 
wtteneigc  sera  fondue,  il  y  aura  bien 
jw  'a  boue  dans  les  rues  d  iintioche.  » 
U  niarquait  aiosi  la  division  du  peuple 
V^  devait  Plater  apr^  sa  mort. 

GAuus  k  ai«tiocrb;   il   pbend 

fan  POUB  LB8  ABISNS;  MOBT  DB 
UORCB;  lUDOXB  1J8UBPB  LB  SIBGB 
^KSCOPAI  ©'ANTIOCHB;  il  K8T 
J«A8&£  DB    LA  TILLS.   —   Cette    pr4- 

jljttion  devait  s'acoomplir.  Dechiree  par 
2f^esie,  la  Syrie  devait  n^liger  la 
^se  de  Teropire,  que  les  Perses  at- 
*|naientenOrient.  Sapor  s'etaitmontr^ 
"^Bsles  mursdeWi&ibe  :  et  Constance, 
V^e  la  re  volte  de  Magnence,  apres  la 
Biort  ^  son  firdre  Conaflant,  app^ait  swr 


d*auires  points,  eut  h  peine  le  Mmps  de 
pourvoir  h  la  sOret^  deS  piffces  de  la  Sy- 
rie. Ce  ne  fat  on'en  861 ,  au  moment 
d'engager  une  affaiire  d^sive  avee  Ma- 
gnence, qu'il  envoya  h  Antioche  son  pa- 
tient Gailus « et  le  dtehira  Gter.  Gallus , 
h  son  arrivee ,  sans  doute  pour  se  ren- 
dre  agr^able  aux  cbr^iens,  fit  transpor- 
ter dans  le  fttubourg  d6  Daphn^  les  re- 
liqnes  de  ^aint  Bab^as,  ponr  purger  ce 
lieu  des  impuretfe  qufs'y  cMnmettaient, 
et  farmer  la  bouche  h  ApoUonf  qui  y  ren^ 
dait  encore  sesoraeles.  Ifals  bientdt  Gal- 
lus ,  dit  M.  de  Gbflteaubriand ,  pass^  de 
la  solitude  h  la  puissance,  devint  un  ty- 
ran  bas  eteruel.  Arrive  ^Antiocbe,  avec 
Tbahissius ,  qui  dtait  pv6fet  du  diocte 
d*Orient,  il  se  laissa  emporter  I  la  vio- 
lence,  a  la  eruaut^,  a  la  suite  de  quelques 
sucres  obtemis  sur  les  Perses  et  sur  les 
Jutfe  r^voltes :  en  m^me  temps  il  s*atta- 
ehait  aux  ariens  Adtius  el  Thtophile.  II 
s'en  aHait  d^guis^  da&s  les  Heux  pubises ; 
soil  travestissement  ne  KempAjhait  pas 
d'^re  reconnu :  car  Antioche  ^it  Mb^ 
T^  h  nuft  d^mie  si  grande  quantity  de 
luml^res ,  qu'on  y  voyait  <>omme  en  pleih 
Jour  (*).  Ce  d^ail,  que  nous  empruv- 
tons  a  Ammnen  Marcellin ,  est  confirm^ 
par  le  t^moignage  de  saint  J^r^roe ,  qui 
parle  des  feux  quron  aliumait  sur  la  place 
publique,  h  la  luenr  desqueis  on  se 
rassemblait,  pour  disputer  sur  les  int^- 
rlts  du  moment.  II  est  curieux  de  voir 
ce  people  disputeur  ainsi  r^ni  sur  les 
places  de  cette  grande  et  belle  ville,  qui 
avait  d^ja  une  police  comme  nos  villes 
modernes. 

Le  s^jour  de  Gallus  k  Antioche  ne 
fut  pas  de  longue  dur^.  Mand^  k  ik 
COOT  de  Milan ,  apres  le  massacre  des 
deux  ministres  que  lui  avait  envoys 
Tempereur,  il  fut  depouillede  la  pourpre 
des  C^ars  et  ex^cut^  en  855.  Quant  k 
I^once,  Tev^ue  arien  d' Antioche,  il 
mourut  en  857.  Ce  fut  alors  qu'Eudoxe, 
6v^qtie  de  Germanicie,  un  des  chefs  du 
m^me  parti ,  qui  avait  assist^  aux  con- 
ciles  de  Sirmium ,  en  851,  et  de  Milan, 
en  855,  ayant  appris  sa  mort,  demanda 
son  conge  a  Pempereur ;  et ,  au  lieu  de 
retourner  ^  Geimanlcie,  serendit  ^  An* 
tioche.  II  8*y  fit  reconnaitre  comme  par 

(*)  Vbt  pemoKtantitm  luminum  clarUudo 
mftt  imitari  fulgorem, 

10, 


146 


LTJNIVERS. 


ordre  d«  reroperear,  et  Burtout  j^r  le 
erMit  des  euDugoes  de  la  cour  qui  pro- 
fessaient  les  metnes  opinions  que  lui. 
A^ius,  doDt  oousavonsd^j^  parl^,  s*eiii- 
pressa  de  revenir  k  Antioche,  dont  la 
vie  molia  et  voluptueuse  6tait  en  g^n^al, 
disent  les  catholigues,  tr^-godtee  des 
ariens.  Antioche  etait  par  excellence  le 
pays  des  parasites  et  des  filles  de  joie. 
Les  entreprises  d'Eudoxe  devaieat  tdt 
ou  tard  trouver  de  la  r^istanee  :  il  ue 
s'^it  pas  fait  reconnattre  par  les  prin- 
cipaux  eviques  de  Svrie,  George  de  Lao- 
dicee,  et  Mare  d'Aiethuse.  George  ^rivil 
k  Maoedonius  de  Constantinople,  k 
Baslle  d'Apcyre  et  k  Cecropius  de  Ni- 
comMie  :  «  Pranes  soin  de  la  grande 
Tille  d*  Antioche,  qui  est  menacde  dunau- 
frage  par  Eudoxe  et  A^tius,  de  peur 
que  la  chute  de  cette  grande  ville  n*en- 
tratne  celle  de  tout  le  monde.  »  Basile 
assembla  ausait^t  guelques  ^v^ues ,  et 
tint  le  GODcile  dTAncyre,  qui  6tait 
compose  de  demi-ariens.  Puis  il  partit 
pour  informer  rempereur  du  malheu- 
reux  tot  de  Tfiglise  d* Antioche.  Cons- 
tance, qui  venait  de  donner  des  lettres 
an  £iveur  d*£udoxe,  en^rivitd*autresoik 
il  le  d^savouait,  et  traitait  A^tius  de 
charlatan  :  il  est  vrai  que  ces  deux 
hommes  ^taient  le  fl^u  ae  rEgtise  de 
Svrie  :  I'^v^ue  de  Rome  lui-meme  fut 
oblige  de  se  justiflerdes  calomnies  qu*il8 
avaient  r^pandues  sur  son  compte.  £nfin 
accuses  de  crime  d'£tat  etd'avoir  tremp<^ 
dans  la  conluration  de  Galtus ,  Eudoxe 
fut  cliass^  d  Antioche,  et  Aetius  exil^  en 
Phrygie. 

NOUYBADX  TBODBLBS  A  ANTIOCHE  ; 
PABTIB  QUI  DrVISBNT  LA  TILLB  ;  NOM I- 
IVATION  DB  MBLBCB.  —  Msis  CettCdOU- 

hle  oondamnation  ne  rendit  pas  la  paix  k 
r£glise  d'Antioche.  En  vain  deux  con- 
ciles  furent  assemble,  Tun  en  Occident 
et  Tautre  en  Orient.  La  nomination 
d'Anien  par  le  concile  de  S^leucie  fut  il- 
lusoire :  les  partisans  d*Acace,  un  des 
chefs  ariens,  se  saisirent  de  lui  et  leire- 
mirent  aux  d^put^  de  Tempereur,  qui  le 
•lirent  garder  par  des  soldats  et  le  con- 
damnereut  eusuite  a  Texil ,  malgr^  les 
protestations  des  ^v^ues  qui  Tavaient 
^lu.  Athanase  neignait  r£glise  desol^ 
sous  les  traits  cle  cette  femme  d'un  U' 
vitequi,  ^tant  morte  des  outrages  qu*elle 
avait  re^us ,  fut  coup^  en  douze  mor* 


ceaux  que  Ton  envoya  aox  dome  tiibii 
dlsrael.  La  Syrie  etait  diYis6e  eaariw, 
semi-ariens,  eusd>ieiis,  acacieos, « 
anom^ns  et  eustathiens;  Antioche  r» 
fermait  dans  ses  raurs  six  oa  sept  fi^ 
ttons ,  qui  souvent  avaient  failli  ennrir 
aux  mains;  tout  foisait  eraiodnji 
r£glise  de  Syrie  ne  suecombAt  aumifa 
de  ces  dissensions  intestines,  fm 
rh^r^ie  allait  devenir  perstotrice:! 
nomination  de  M^ece  au  concile  fil* 
tioche  devait  exciter  de  nouveaux  tni» 
bles.  Constance  vint  y  passer  l*biTer  pit 
r^ler  les  affaires  de  Syrie.  AussitdttM^ 
les  partis  se  mirent  a  Toeuvre  :  i* 
trouva  qu*ils  avaient  travaill^  cootie  oi^ 
et  qu*au  lieu  d'une  cr^ture  lis  nam 
trhteni  dans  M^lto  un  bomine  jsilei 
craignant  Dieu(*}.  Son  premier  wnMI 
dont  ConsUnce  avait  dono^  le  tedi, 
confondit  les  her^tiques,  aux  applarft" 
sements  de  la  multitude »  roaisaugnai 
m6contentement  des  ariens,  oonrMtf 
le  croit  sans  peine.  Des  lors  iisaW 
rent  plus  qu*un  but,  ce  fut  (foliMJr 
sa  deposition.  Constance,  avenjKiir 
les  v^ritables  int^i^ts  de  FEglise,  wImi 
un  nouveau  schisme  en  faisaot  in^Mr 
les  mains  a  Euzoius.  Ce  fut  le  flSri 
d*une  grande  defection ;  tous  oesip 
depuis  trente  ans  avaient  soufifert  I» 
soience  des  ariens  se  s^par^reotdMr 
vement  de  leur  communion,  et  tioni 
desormais  leurs  assemblies  dans  P^ 
PalSa.  Mais  les  eustathiens.  qui  etM 
les  cathollques  |Hirs,  refusdreat >  • 
r^nir  aux  mel^iens,comme^taolM 

r ) «  M^ltee,  seloD  Socrate.  avait  M  flo  iirjB 
ariens  d'Antiocbe ;  U  avait  sisn^  la  formaaCI^ 
eaoe.  PhilostorKe  pretend  qoMI  antft ,  au  flM 
de  Rimini,  donne  aoo  aiseDttmeat  an  ao^ 
de  t'eoU^re  disaiinUitode  des  deux  penonia 
divioes,  et  qu*ll  neoesaa  Jamais  defeiDdnkpP 
grand  i^le  oour  les  opinions  anomeeniKii  IMF 
meme  qa'llse  fat  mis  k 


coosubsUnUalit^  da  Fils  et  da  P^.  ^^^]t 

Coe  et  r^v^ue  Th^odoret  soot  en  coBWjf; 
manifeste  avfc  oes  ttaioignaftei :  le  ^^ : 
m«me  appelle  Pivtoue  d'Aotfocbe  l»9f^,^K'\ 
ceUbre,  Udivin  M61tee.  Nous  oppoMWOiMJ. 
historlen  les  ^rlto  de  saint  J^rdme,  QOiorM^ 
de  fair  la  oommunion  de  rdvtoue  d'Anlioaf^  i 


on  aaralt  fait  du ohefdes arfeMiJ* 

chroniqae  d'Alexandrie,  qai,  pariaot  <k  Mm 
h  son  retour  de  Tezirsous  rempereor  JiflWi 
dit  que  ce  pasteur  avait  m  depose  pomm 
tmpl^  et  set  aatres  crimes,  et  que.  t^^JSL 
son  si^,  sa  ooodulte  ne  fat  oi  pnis  '^J''" 
nl  molns  violente  —  (S.  HIerooydi.  fp»^  J* 
•d  Damas.  pap.  t  IV,  part,  s,  p^  lo;  ^pw- » 
ad€mm4.  p.  as.)*  I>e  PotUr,  1 11,  p. «it>*^ 


SYRIE  ANOENNE. 


149 


otocbte  d'arianisme :  et  les  fiddles  eux- 
atees  86  trouveraot  divises  en  deux 


BliTATION     DB     JULIBN    A     L*BM- 

n».  —  Pendant  que  le  fils  de  Cons- 
tiatia  raffioait  sur  les  gubtilites  th^ 
logiques,  ioveotees  par  les  membres  de 
•00  parti,  le  g^oie  de  renipireapparaiseait 
iJQlieD:quelques  roois  plus  tard  il  etait 
prodame  empereur. 

HAT  DB  L'BGLISB   DB  SYBIB  ;  JU- 

UIR  ▲  antiochb;  sbs  baillbbibs 
conTiB  LBS  habitants;  8 a  colebb; 
IBACTioif  PAiBNRB .  —  Ainsi  longtenips 
kittaes  par  les  flots  de  Th^resie,  Antio* 
cbe  et  son  Eglise  Tont  6tre  victimes  de 
Qttte  reaetioo  paienoe  dont  Julien  futle 
chef  et  lephUosopbe.  Quel  etait  l*^ut  de 
r£^ise  de  Sjrie  a  rav^oement  de  Ju* 
fiea?  Nous  Tenons  de  le  voir.  L'b^r^ie 
f  Arioi  arait  tout  divis^  etd^suni;oe 
tf^entqa'aoathemes  lances  et  re^us. 
U%  eatbolimies  mteies  ne  s'enten- 
daieat  pios :  |es  6v6ques  se  disputaient 
^  sj^es;  et  le  scnisme  ajoutait  ses 
^im  a  eeuz  de  Tb^rteie  :  ces 
9wrelle>  daos  toutes  les  villes «  dans 
lout  les  Tillages ,  dans  tous  les  bameaux, 
•BafTaibliasaDt  les  provinces  d'Orient, 
iffidUinaieat  Tempire  au  dehors,  pa- 
nljriaieot  le  pouvoir  au  dedans  et  ren- 
saMotradmiQistraUoii  impossible.  Vtr 
S^ittirAntioclie  s*6tait  distingu^  entre 
Iwtea  par  la  violence  de  ses  querelles , 
etladn^  des  heresies  qui  Tagiuient : 
mi  Jalien  d^testait  par-dessus  tout  les 
nfailaBU  d*  Antioche.  Ge  fut  contre  eux 
qo  il  compMa  le  Misopoaon ;  il  les  pour- 
auiTit'toojoiirs  de  sa  haine  et  de  ses 
raJUeriei :  11  est  vrai  que  ceux-oi  ne  les 
lot  ^pai^paient  gu^re.  A  peine  arriv^  k 
Antioetie  (363),  on  le  voit  aller  sacrifier  k 
^ter,  sur  le  mont  Cassius,  donner  des 
>ws  paFeones  pour  attirer  les  Chretiens 
Mp^isnie.  Mais  bient6t  il  s'aper^it 
freest  i  peine  si  Fancienne  rehoion  a 
w6  quelques  traces :  le  jour  ou  Ton 
mit  emner  la  Uie  d* ApoUon  a  Da- 
I  W^i  il  aceoarty  oomnie  11  le  dit  lui- 
MM,  rimagiiiation  rempliede  victi- 
2"*^  libations,  de  danses,  de  par* 
Widejomesgenshabilles  de  blancet 
"■pabement  pam,  en  un  mot,  de  toute 
"ittgolficenee  qu'Antioclie,  la  briliante 
^1  poavait  diployer.  Mais  quelle  fut 
>  <vipnse  de  ne  troaver  dans  le  temple 


que  le  saerifieateor ;  pas  on  gftteau,  pas 
un  grain  d'enoens,  une  oie  pour  toute 
victime?  Encore  le  sacrificateur  I'avait-il 
apportee  de  chez  lui.  Aussitdt,  Julien  en- 
tre au  senat ;  et  ses  historiens  lui  pr^tent 
une  belle  harangue,  digne  assurtoient 
de  I'apdtre  dn  pagaaisme.  L'empereur 
voulut  se  vender  ou  m^pris  que  les  ha- 
bitants d'Antioche  avaient  t^moign^ 
pour  Tancien  culte  k  roocasion  du  sa- 
crifice a  Apollon  :  des  lors  il  n'offrit 
plus  que  des  htoitombes ,  et  Ton  crai- 
gnait  que  Fespece  des  bceuft  ne  vfnt  a 
manquer,  s'il  revenait  vamqueur  de  la 
guerre  de  Perse.  Saint  Jean  Cnrysostome 
nous  le  montre  promenant  par  la  ville 
des  troupeaux  de  prostitu^s  aux  fiStes  de 
y^nus  n.  M«s  cesfltes  mimes  ne  poa- 
vaient  lui  gainer  ce  peuple  vain  et  1^ 

ger  :  on  savait  que  sil  bonorait  la  d6- 
auche  en  paien,  il  6*en  absteoait  en 
philosophe.  Antioche  aimait  le  platsir 
pour  lui-mlme,  et  voyaitde  mauvaisoeil 
raust^rit^de  ce  reformateur.  La  gros- 
sieret^  qu*affichait  Julien  ^ayait  rhu* 
meur  caustique  de  ses  habitants  :  sa 
barbe,  les  insectes  qu'il  y  laissait  errer, 
ses  ongles  d'une  longueur  d^mesiir^, 
ses  doigts  noircis  par  la  plume^  tout  son 
ext^rienr  ^tait  un  sujet  de  continuelles 
railleries  :  «  Vous  autres,  leur  r^pond 
Julien,  vous  autres  de  vie  eff^min^  et  de 
monirs  pu6riles,  vous  voulez  jusque  dans 
la  vieillesse  ressembler  k  vos  enfants : 
ce  n'est  pas  comma  chez  moi  aux  joues, 
mais  h  votre  front  ridi  que  Thomme  se 
fait  reconnaltre. »  Mais  ces  railleries  fin* 
quietaient  peu ;  ce  qui  Tindignait,  c*etait 
de  voir  les  chr^tieos  escorter  en  foule 
et  avec  des  chants  pieox  les  reltques  de 
saint  Babylas,  c(u'il  avait  faitenlever  de 
8ontombeau;c'etaitd*entendrela  veuve, 
k  la  tite  de  toute  sa  oommunaut^,  enton- 
ner  le  psaume : «  Que  Dieu  se  live,  et  que 
ses  ennemis  soient  dissip^s  »,  toutes  les 
fois  que  Julien  passait.  Son  indignation 
Temportait  alors  sur  son  habilete  ordi- 
naire. Cest  ainsi  qu'ilordonna  defermer 
la  grandedglise  d' Antioche  et  d'en  porter 
lesrichessesautresorimp^rial.Cest  ainsi 
que,  tout  en  les  dtovouant,  il  ne  s*op- 

(*)  Ammien  MuoelUn  lal-mfnie  ooDflrme  ie 
Itaioigoafle  de  utnt  Jetn  Chrydottoa 
tatioDis  graUA ,  Tcbens  llMnter 
taera, 
(xxu 


saoerdoUboi 


ms  graUA ,  Tcbens  Uixiiter  pro  saoeruouDoi 
I,  sUpatoMpw    mattercolu   Istabatvr.  » 


160 


LUNIVE&S. 


posa  poitat  rax  «ote  cominis  par  mo 
gncte  Juiien,  comte  d'Orient^  qui  dMoya 
dans  radmimstfatkiB  des  affaires  a* Aa* 
tioohe  aiitant  de  violeiioe  et  de  oruaiiU 
que  Salluite,  son  oolite,  mitde  douceur 
et  de  mod^ratioQ*  On  vit  la  comte  Jtt'- 
Iten  changer  le  oaradi^  paoifiqae  de 
la  r^etion,  ro^ii^  par  son  n»eu,  en 
ikes  sanglantes  et  en  odieuses  pers^- 
tions.  Onle  vit  salir  Tautel,  faire  trancber 
la  t^  an  pr^tre  Th^odoivt,  et  bientdt 
apr^s  nourjr  sous  le  poids  de  I'anailitoe 
lAip^rial. 

SOULIYBM SNI   D'AIITIOCHB.  —  XU" 

tioohe,  qui  jusqu'alors  s'toit  oontentde 
de  faire  assaut  de  raiiiertes  avec  iulien, 
indi(|;ndede  ees  exo^  et  presses  par  una 
fsminedoAtrampsrettravait,  pardefeos^ 
ses  mesures,  m  |a  cause  involontaire, 
ser^volta.  Juiien  ordoaaa  rincare^ation 
du  s^nat  en  masse :  mais  k  c.6t6  des 
flatteurs ,  Juiien  avait  aupr^  de  hii  le 
rh^teur  Libanius,  disne  repr^sentantdes 
lettires  antiques,  qui  sut  le  fl^ehir  par 
ses  prieres,  et  obtenir  par  son  doquenos 
la  grAee  de  ses  concitoyens.  Juliea 
oomprit  qu*il  se  vengerait  mieui  par  la 
plume  que  par.  T^p^;  et  il  torivit  le 
MUopogon.  Libanius  i  qui  re&sait  de 
servir  les  venseanoes  du  tyran,  applau- 
dit  a  celies  de  Thomme  d*espnt.  On 
Dense  qu^il  Paida  dans  la  compositibn 
de  eette  satire  et  de  ses  pan^yriques 
de  la  religion  paienne,  demiers  monu- 
ments du  paganisms  o^  se  retrouvent 
ks  objections  de  Gelse^d'Hierodesetde 
Porpli3rre,  dans  ua  style  picin  de  grftoe 
el  d  enjouement,  et  quelquefois  d*^er* 
gie.  Ainsi,  Tempereur  attaquait  I'Sglise 
sur  tous  les  points  :  ses  pamphlets  res* 
taient  sans  r^^ponse,  et  sa  plume  sem- 
Uait  Tietorieuse.  Atbanase,  le  rempart 
des  £glises  d'Orient,  leb^ros  de  la  foi 
chr^tteane,  parcourait  sans  doute  alors 

Suelque  solitude  ignore  sous  le  poids 
'un  nouvel  exil.  Ghrysosteme  se  fonnait 
h  la  rude  6eole  des  dtterts ;  mais  sa  boo- 
ehe  d'or  ne  s*etait  point  encore  ouverte 
pour  eonfondre  les  ennemis  du  Christ. 
Basils  et  Gr^goire,anciens  condisciples 
de  iulien  aux  denies  d'Ath^es ,  n'^taient 
pas  a  Fabri  de  ses  arrets.  Juiien  leur 
avait  defieodu  d'enseignar  les  lettres 
profanes,  dans  la  crainte  d*utie  rivalit^ 
qui  blessait  son  orgueil. 

GBAYE  SITUATION   Dfi  L*EaUSB  ML 


SVmn;   CABlCriRB  OBS  ItABRiHM 

]>*aiitiochb;  ut  PAeAmsm  a  sui' 

YBGU  DANS  LBS  MCBUBS.  —  ktMH 

atait-elle  du  moins  dans  la  paret^di  a 
im ,  dans  raust^riti  de  ses  mceurs,  m 
garantie  centre  Tenfahisgenient  do  fii 
gantsme?  Antiocbe,  au  oeDtnire,M^ 
nous  rayons  vu ,  le  centre  de  touusli 
h^r^ies  qu'eile  d^fendait  avec  toutik 
subtitit^  de  Tespritgrec.  L'extr^i 
eence  de  ses  oianirs  orientates  en  M 
une  nouvelle  Babyione.  Le  triornphtil 
paganisme  paraissait  assure.  U  eit  fl» 
rieux ,  a  ce  eujet,  de  lire  les  pr^t  • 
tails  qui  nous  ont  ^t^  transmis  pir  ii 
eontemporains  :  nous  y  verroos  Xmt 
.ment  paten  qui  fermentait  encore  4 
fond  mime  de  la  society  chretiemii 
qui  infectait  ses  mceurs;  mais  bou81# 
rons  aussi  comment  cette  lutteeiehi 
un  secret  travail  de  r^organMatJMP 
devait  assurer  la  victoire  dtf fiili«» 
r^glise  de  Syrie  et  la  d6iiiite  deJiM 
eomment   la  rdaction   paienne  it« 

J|u'arrtor  les  propes  de  ThMiit  • 
on^nt  r£glise,  jusqoe-la  diiiiM' 
ses  d^ireinents  iM^eors,  ai^ 
pour  ainsi  dire ,  ses  forces  su  aMni 
comment,  enfin ,  de  cette  lutte  fMI 
sortirent  tous  ces  beaux  gdaiei  otW 

flise  d*Orient  et  entre  autres  I'cM 
'Antiocbe ,  VJth^net  de  f^sky  lig 
tre  Chrysostome,  qui  r^nit  a  op  ■• 
degr^  les  richesses  de  rantiaaite  fi* 
queaux  tr^rsder^oqueneechriUNi^ 
Mais,  avant  d'atteindre  eesr^l>l^ 
que  nous  si^nalons  de  loin,  il  fagW| 
Terser  la  ense  qoi  ^ranlesi  fortom 
les  racines  de  la  foi  cbr^tienoe  ea  OiM 
Nous  ne  parlerons  plus  des  btfwii 
Antiocbe  ne  dispute  pas  sur  le  do^ 
sous  Tempire  de  Juiien ;  ThdresieflMi* 
pait  ddlicieusemeatsesloissrssouiw 
pereur  arien  Constance;  mais  Jw* 
tranche  toutes  les  questions  ea  >»P 
sant  comma  le  restaurateur  da  ^ 
nisme.  II  n'en  reste  phis  4|a*uae  fA^ 
raande  une  solution  a^nitive : « Ag^ 
che  redeviendra4-eUe  pai^nnef  »  £o  WK 
nous  Tavons  dit :  si  eHedtaitchi^WSP 
par  les  pompes  du  ealH  exterieor,iP 
tioche  etait  demeurte  naiame  ^J^ 
moeurs.  Placde  sur  les  bords  dssesii 
Oronte,  dans  use  plaina  eadisBttfiiJ 
oette  ville  paisibie,  oi^  rdgaait  us  v* 
lalige  dc  moUesse  et  d'lmaKioatioB,  avas 


8TBIE  AlKSDDniE. 


M 


Ikida^iUtMtmiseBeta  aiaitpla- 

eto  i  cM  da  M  thMtjre*.  Le  christian 

woie  avait  tout  obteDU  d'elle,  axcept^ 

kacrifiae  du  eirque  etde  aea  ^eanoo^ 

tonws;  U  lea  clveticpa  eux-okdinea  m 

pouTaient  a'emp^dier  d'etre  paleoa  fiar 

aaiour  d'Homerep  Le  aaoetuaupe  ret«tt* 

tinait  dea  i^plaodiaaementa  qu'em* 

Uieat  lea  diaeoufs  de  libaoiua.  Oa  aui* 

lak ie rbetaur dana  lea  oao^gaea,  am 

portei  de  la  villa  :  da  vaataa  toaka 

euuDt  tenduaa  daoa  ks  airs  pour  de- 

feodrede  Taideur  du  soleil  uo  nombreax 

Mditoirpeiuvr^  dii  afaarQie  de  sea  paro- 

ki.  Sur  iiea  Aprea  aommata  q^l  couroii* 

aeot  la  plaine  d'Antiocbe,  ^ieot  ^j^ra 

fKlqocs  selltaires;  maia  de  cea  solitai- 

■s  comma  Gregoire  de  Nazianze ,  qui 

aimaieat  i  seiner  daoa  leur  eorrespon* 

laace  d^a^reaUea  peintures  at  de  po^- 

fKt  aUiiflOBs ,  el  qui  ae  mootraient  seo- 

MblaauKcbariaea  de  U  vie  cooteoipla- 

tne,  pi^tsd'aiUeiirs  h  epdurer  toutes  lea 

utteril^  ntoB  Ie  caprice  de  leur  ima- 

gnatioa.Qy'eUit-e£  dooc  dea  habitaata 

iD^danipoleQle  et  voluptueuae  An« 

Iwclie?  On  e'v  vayait  que  palaia  de  o^ 

dnet  de  peiy&yre;^  que  feromea  riches, 

RmpiimBt  lea  ruea  de  leur  cort^e 

raoaqueg  et  d'aselavea;  que  philoso- 

fbtt  orguailleux,    se  promeuant  avee 

m  iBaoteaa,leor  loagoe  barbe  et  leur 

Mumioiudevaatea  galeriea.  La  ebaire 

cvetieiuie  D*etaU  paa  eooere  parvenue 

monaer  rescla  vage  dofuestique ;  il  n*e^ 

^it  pasextraordiaaire  de  compter  dana 

uie  opidentfi  maiaon  deux  ou  trois  milie 

cieiMes^dettiB^  k  aervir  toutes  lea  fan- 

^«^  da  laze  Ie  ^ua  capricieux.  Uoe 

n<^  natiaae,  imt^  eontre  quelquea 

f^  Sika  esdavea,  lea  faiaait  atUcfaer 

aulitiereatbattre  de  veigea,  aoua  aea 

7«u.  La  plopart  avaient  uae  er^ulit^ 

^te  paieane  pour  lea  augurea  et  tea 

P^es;  a  la  aMiadiieiiialadie«  ils  cou- 

^^k  la  synagogue,  eoaaultaieotdea 

Miaoteora  on  aortaient  dea  amulettea, 

pnailesqaeis  figuraient  dea  m^ailles 

v^AJexandre,  dont  la  gloire  elait  reatee 

I  J^mioe  im  merveiileui  talisaian  diez 

^  ^  Grecs  d*Aaie.  11  ^tait  m^me  peraua 

«rare aervir  Ie  chnatiaoianM  k  la  au- 

Mition :  on  portait  ansai  pour  anuilea* 

^des  feuilleu  de  r£vangile :  on  en  sua- 

Mait  w  eeu  dea  patiu  enfanU;  m 

''^>i(alamagia«Lp  coneiM  de  Laiedi* 


afe  ddisniit  aut  waMaiaatiqqai  d^todier 
Faatrologie  el  defirifedeaenehantenients 
et  dea  poiltrea.  Dea  cnmea  bizarrea  se 
■itiaieDt  aox  folaea  auperatitieoaea.  Dana 
rid)6eque  lea  Ames  de  ceux  qui  mouraient 
de  mort  violente  eehappaient  au  d^on , 
auelqua£oi8  oai  ^orgeait  de  jeunes  en- 
£mt8. 

L'^ueation  6tait  paienne;  et,  dans 
lea  ^lea  d^iloqueooe ,  lea  mattres  con- 
aervaient  la  plupart  une  pr^ereooe  ca* 
eh^  pi»ur  Tancten  culte,  qu'ils  confon- 
daieat  avee  I'ancieane  litterature.  En 
vain  Ie  chriaUanisme  avait  arraeb^  qoel- 
ques  viergea  aux  ddicea  d'Antioefae. 
ftiea  n'^galait  Ie  luxe  et  la  moUesae  dea 
femmea  d'Orient ;  ellea  etaient  ^lev^s 
au  milieu  dea  parfiima  et  dea  roses, 
omte  de  toutes  lesparurea  de  Tlude  et 
dea  tiaaua  pr^ieux  de  Bybios  et  de  Lao- 
dic^.  Laceremoniedu  mariageae  faiaait 
souvent  prcaque  avec  la  licence  dea  fi^es 
nuptiaieadu  pa^aniame.  De  jeaues  chr^ 
tiens  Ie  diaputaient  avec  lea  femmes  de 
molleaaa  et  de  vanity.  On  les  voyait 
trainer,  dana  lea  lieux  publics,  leura 
cfaauasures  brodtod*or  et  de  soie.  Aiusi 
les  restes  vivacea  du  paganisme  a'etaient 
r^fugi^a  dans  les  moeurs.  Juiieu  ne  s'e* 
tait  pas  tromp^,  quand  il  ^tait  venu  se 
fixer  a  Aotioohe,  corame  pour  v  com- 
mencer  la  r^etion  paTenne  qu*il  medi- 
tait;  et  cependaut  11  echoua.  Bientdt 
Libanioa  va  prononeer  son  oraiaon  fu- 
nebre  sur  lea  ruiaea  du  paganisme  qu'ii 
avait  tent^  de  relever^  cA  Flavian  s'as* 
seoir  aur  ee  si^ge  patriarcalgue  la  puia- 
sanoe  impi^riaAe  avait  en  vain  tent^  de 
d^truire. 

TIGTOUE  BE  L'EQLiaB  DB  aTBIB; 
COHTBB*BBAGCION  CHBBnBNIIB;  AP- 
PBBCUTION  DE  hA  TEHTATITB  DB  JU- 
UBN  ;  POBTBAIT  DB  CBT  BMPBBBDB.  — 

Quand  on  recherche  lea  causes  de  oette 
defaite,  on  voit  d^abord,  comffle  nous  Ta- 
vons  d^  £ait  remarquar,  qua  Julien , 
dont  Dooa  ne  aauriona  d'ailleura  contaa- 
ter  rhabilet^,  eompromit  Ie  auoote  de 
aa  rtforme ,  ea  a^ienacit  Ie  peuple  d' An- 
tioehe  par  ud  melange  de  rigueur  el 
dindulgenee;  par  uae  affectation  d'au- 
stddt^et  de  pManterie;  par  une  osten- 
tatien  de  pratiquea  uperatitieuses,  qui 
l8  rendireat  ridicule  ou  os^prisable  aux 
yeux  de  ce  peuple  vaia  eC  Idger ;  on  voit 
siAltoul  que  aa  rtfonne  ne  pouvait  paa 


11^9 


ri}Nrv£B:s» 


r^ussir,  paroe  fue  la  philoaophie,  en 
s'attaeKsDt  au  paganisme  et  en  voulant 
ressusciter  un  eadavre,  devait  necessai- 
rement  suecomber  eomme  lui.  Sana 
doute  lea  Grecs  d'Asie  etaient  encore 
^nerv^s,  et  preaque  paiena;  mais  toua 
les  jours  Faction  de  la  religion  nouvelle 
se  faisait  plus  vivement  sentir.  Sans 
doute  les  nKeurs  Etaient  corrompues, 
les  moines  parcsseuz  et  le  clerg^ 
amolli;  mais  des  rangs  de  ce  clerge, 
du  milieu  de  ces  moines,  sortirent  des 
hommesouifurentles  appuis  del'^glise , 
et  ses  r^tormateurs.  Lea  lettres  Etaient 
palennes;  mais  Cbrysoatome  saura  les 
rend  re  chr^tiennes.  Ainsi ,  cette  crise 
solennelle ,  que  vient  de  traverser  r£glise 
de  S}[rie ,  est  pour  elle  una  dre  de  r^e- 
n^ration.  Ghrysostome  lui  est  donn^  en 
quelque  sorte  comme  un  gage  aaaur^  de 
sa  victoire  sur  lepaganisme. 

Ainsi  se  sont  evanouies  les  esp^ran- 
ces  de  Julien.  Le  Galil^n  a  triomph^ , 
et  le  yaincu  reste  vou^  a  Tex^ration  de 
r£glise,  qui  le  condamneet  lecalomnie : 
«  Julien,  dit  un  habile  et  impartial  ^ri* 
vain ,  a  le  double  malfaeur,  en  ce  qui 
conceme  sa  m^moire ,  d'avoir  ^te  ca- 
lomni^  par  ses  ennemis  ou  flatt^  outre 
mesure  par  ses  pan^gyristes.  Saint  Gr^ 
goire  de  Nazianze  et  Zezime  sont  egale- 
ment  suspects  :  Tun  pour  ses  datama- 
tions violentes ,  Tautre  pour  son  aveu- 
fle  admiration.  Libanius  est  plus  mo- 
6r6.  Le  rb^teur  connaft  et  avoue  les 
fautes  de  son  h6ros;  mais  enfin  c'est 
un  pan6gyriste.  Ammien-Marcellin  est 
le  seul  hifitorien  dont  le  t^oignage  m4- 
rite  confiance.  Homme  de  guerre  et  d*ad- 
ministration ,  il  ne  voit  en  Juliep  que 
Fhomme  politique,  et  le  juge  avec  beau- 
coup  de  sens  et  de  mesure.  Grand  ad- 
mirateur  de  ses  exploits  militaires  et  de 
son  genie  politiaue,  il  n'aimeen  lui  rien 
de  ce  qui  sent  le  pr^tre  et  le  aophiste. 
II  lui  reproche  sa  superstition  et  sa  lo- 
quacity, un  go^t  excessif  pour  la  louange 
et  la  popularity,  un  oubli  trop  fr^uent 
de  la  dignity  imp^riale.  11  toue  g^erale- 
ment  la  tolerance  et  la  justice  de  son 
ffouvernement ,  sans  approuver  la  d^ 
tense  faite  aux  Chretiens  d'enseigner  les 
lettres  anciennes.  Ammien-Marcellin  a 
bien  iug^  I'empereur.  Julien  fut  un 
crand  prince ,  en  d^pit  de  son  temps  et 
de  son  ^ucation.  Il  eut  le  g6nle  da 


gOQveraement :  il  n'en  eat  pas  la  no- 
blesse et  la  digjnit^  ext^eures... 

...  Ce  serait  mal  eomprendre  «i 
prince  que  de  ne  voir  dans  son  efltn>< 
prise  que  le  calcol  d'un'homme  d'fcot 
11  est  tr^-vrai  que  de  puissantes  conlft 
derations  ont  dd  frapper  son  esprit  pol^; 
tique.  II  avaitvu  legouvernemeDtinpi* 
rial  aux  prises  avec  lea  chefs  de  Ttglift 
nouvelle ,  impuissant  a  roister  a  leon 
pretentions ,  aussi  bien  an*a  calmer  hi 
querelles  tbtologiques  (font  ils  titn- 
biaient  Tempire  et  le  palais.  Le  poV 
th^isme,  au  contraire,  n'avait  janali 
porte  ombrage  ni  impost  de  Joog  i  li 
puissance  des  empereurs.  Le  priott^ 
6tait  a  la  fois  le  chef  de  remptre  et  ^ 
culte ;  il  r^nissait  en  sa  persooae  m 
les  pouvoirs  de  la  terre  etdu  eiei.EI: 
revenant  aux  dieux  de  Tempire,  Jofiei 
6mancipait  le  ^uvernement  irop^i 
la  tutelle  hautainedes^v^eschr^tieH, 
et  le  fortifiait  par  Tadjonction  d'oDli* 
tre  et  d'un  pouvoir  spiritoei.  D'aolit 
part,  la  restauration  du  polytbte 
etait  un  retonr  aux  traditions  qui  aiaiait 
fait  la  force  et  la  gloire  de  Tempir^  i> 
roomentod  les  barbaresd^Orientetdtle- 
cident  mena^aient  toutealesfrootieres, 
n'^it-il  pas  opportan  de  leur  moDtnr 
ces  vieux  msignea  de  la  victoire,  ces  iH» 
ges  des  dieux  qui  lea  avaieot  tant  defiw 
frapp^  d'^pouvante?  Pour  rdever  P» ' 
pire,  n'etait-il  pas  n^cessaire  de  rdcjer 
ses  vieux  autels?  Enfin  les  querdlesotf 
orthodoxes  et  des  ariens  Etaient,  i 
faut  le  dire,  un  ^and  scandaie^ 
Tempire.  Elles  avaient  divis^  la  socwt 
chr^tienne  en  deux  camps  et  wAu'JJ* 
feu  des  persecutions.  Qu'^tait-ce  m 

Su'une  society  qui  se  dechirait  «^«f.*^ 
efureur  de  sespropres  mains  ?Qbw* 
ce  qu'une  doctrine  qui  ne  Bavait  pi« 
rallier  et  relenir  toutes  les  opinw« 
dans  son  symbole  ?  Lc  diristianisme  pro- 
mettait  au  monde  la  paix,  i'anoo^ 
rharmonie  universelle  au  sein  dc  ruw* 
religieuse,  et  le  volli  qui  a  P«j?*PJJ' 
veno  a  Tempireseme  parioutladiirifl* 
la  haine  et  la  guerre!  Avait-il  ^fj!*  5. 
droit  de  d^clamer  eontre  I'anarrfue « , 
la  violence  du  polyth^israe,  apres »», 
tristes  scenes  du  rftgnc  de  Constance?  w 
les  amis  de  Temptre  nouvaienwls  w« 
augurer  de  la  nouvelle  religion  jp^ 
rordre  et  I'unite  de  la  soci«e  fiiturt? 


SYRI£  ANCIBMNE. 


U3 


Toutes  ees  raisong  pouvaient  faire  im- 
pression sur  le  g^Die  politique  du  jeune 
C6sar;  mais  ce  n'est  point  la  qu'il  faut 
chercber  Texplication  de  son  apostasie : 
e'est  dans  sa  nature  enthousiaste ,  dans 
les  pers^utions  auxquelles  son  enfance 
et  sa  premiere  jeunesse  furent  en  butte, 
dans  son  ^daeation  toote  classique.  £l6v6 
daiis  la  pratique  de  la  religion  nouvelle, 
lecteur  de  ITglise  de  Nicom^die,  11  n'a 
pas  ptut6t  touch^  I'antiquite  qu'il  a  re- 
coonu  sa  mere.  La  foi  aox  mvtbes  da 
polytb^isme  p^n^tre  dans  son  ame  avee 
legodt  des  mu»es...  Autant  la  sincerity 
de  la  conversion  de  Constantin  paratt 
^oivoque ,  autant  VapostaHe  de  Julien 
ftt  faeue  k  expliquer.  Julien  etait  una 
^meardente ,  spontanea,  h^Tque,  exa- 
geraot  la  foi  jusqu*^  la  superstition, 
reotbousiasme  jusqu'au  fanatisme,  le 
courage  iusqu'^  la  t6m^rit^.  On  a  trop 
▼0  en  Julien  le  politique,  et  pas  assez  le 
pricre  et  Tapdtre.  11  est  tr&-vrai  qu'il 
mootra  dans  son  r6le  toutes  les  ressour- 
ees,  toutes  les  ruses d'une  politique oon- 
tommde;  mais  il  ne  fit  qu'employer 
tootes  les  ressources  de  son  iB^^ie  poll- 
tiqaea  preparer  et  k  aoeomplir  une  res- 
tawation  qu'il  a?ait  r^v^  avec  la  fer- 
veor  d'un  initio.  S'il  fut  habile  dans  le 
ehoix  des  moyens,  11  fut  enthousiaste 
^passionn^ dans  la coneeption du des- 
sein.  Chretien ,  il  edt  6te  martyr;  empe- 
Rur,  il  fut  un  h^ros.  Une  lois  sur  le 
trtfne,  il  fut  k  la  hauteur  de  sa  destine, 
etgourema  eomme  les  plus  grands  em- 

rrars  de  Rome.  Dans  la  oourte  durte 
son  T^ne,  il  rtforma  I'arm^,  la 
joitice,  les  finances,  le  |)alai8,  toutes 
W  parties  de  Tadministration  imp^riale. 
Son  activity  rappelle  Cesar;  sa  douceur, 
Mare-Aor^e;  et  pourtant,  malgr^  oes 
^mnentes  quality,  on  pent  douter  s'il 
fatrMlement  n^  pour  I'empire.  On  volt 
^  le  pouvoir  n'est  pas  son  but ,  et  que 
la  politique  n'est  qu'un  Episode  de  sa  des- 
lin6e.  La  mission  de  pretre  et  d'ap6tre 
M  tient  a  coeur  beaucoup  plus  que  sa 
^M  d'empereur ;  il  porte  mal  le  v^te- 
Kent  imperial ;  le  manteaude  philosophe 
hii  lied  bien  autrement  Sous  ce  vete- 
nent,  II  roarcfae,  il  agit,  il  fMirle,  il 
Mt  librefDent.  11  n*a  nul  soud  de  son 
nng;  U  remplit  dans  les  temples  les 
fonetions  les  plus  hombles  du  diTin  mi- 
oiit^  Ud  joor^  il  descend  brusquemsnt 


du  tribunal  oCk  il  rendait  la  justiee ,  pour 
oourir  au-devant  de  Maxiine.  Ses  enne- 
mis  se  moquent,  ses  amis  rougissent 
d'un  tel  oubli  de  la  majesty  iroperiale. 
Pour  Julien ,  il  est  indifferent  aux  sar- 
casmes  des  nns ,  aux  conseils  des  autres ; 
11  renvoie  ironiquement  k  Constantin  le 
godt  et  le  m^rite  de  la  representation. 
Cest  tr^sincdrement  qu^il  se  plaint 
de  sa  destin6e,  qu'il  parle  des  ennuis  et 
des  d^godts  de  la  vie  imp^riale,  qu'il 
regrette  sa  vie  d^^udes  et  de  m6aita- 
tions.  Julien  eAt  v^cu  volontiers  dans 
une^cole,  commeun  sage,  ou  dans  un 
temple ,  oomme  un  d^vot;  cette  destinee 
edt  sufQ  k  son  genie,  bien  sup^rieur  a 
son  ambition.  II  ne  d^ira  le  pouvoir 
que  comme  un  moyen  de  retablir  et  de 
restaurer  des  croyances  qui  lui  ^talent 
chores  avant  tout.  Les  nistoriens  qui 
n'ont  vu  dans  Julien  que  le  genie  poli- 
tique s'^tonnent  au'un  homme  aussi 
sup^rieur  se  suit  devout  avec  tant  de 
zele  et  de  censtance  k  une  tAche  ingrate 
et  impossible;  lis  regrettent  qu'il  n'ait 
pas  6\ev^  la  politique  imp^iale  au-des- 
8U8  des  partis,  et  appliqu^  a  I'adminis- 
tration  aes  affaires  publiques  ce  sys- 
tole de  haute  neutrality  et  de  tolerance 
universelle,  dont  nous  avons  vu  I'^lo- 
quente  expression  dans  une  lettre  de 
Themistius.  Rien  n'^tait  moins  dans  le 
caractere  de  Julien  qu'uu  tel  r6le.  II 
avait  horrcur  de  la  violence  et  de  la  per- 
secution ;  il  pouvait  £tre  et  il  fut  tol^ 
rant  par  bienveillanoe  et  par  humanit^, 
maisjaraais  par  la  neutrality  d'un  ju^e 
indifnrent.  C'est  un  pr6tre  alexandnn 
sur  le  tr5ne ;  seulement  il  se  trouve  que 
ce  pretre  a  le  genie  d'un  grand  empereur 
et  le  courage  d'un  h^os.  On  s'etonne 
de  le  voir  sans  cesse  occupe  de  sacrifices 
et  de  tb^urgie;  mais  il  nefait  que  sui« 
vre  sa  vocation.  II  accepte  et  il  remplit 
oomme  un  devoir  ses  lonctions  publl- 
ques ;  mais  si  les  affaires  de  I'empire  lui 
laissent  un  moment  de  liberte,  avec 
quelle  joie  il  retoume  a  ses  Etudes  et 
k  ses  pratiques  de  pr^ilection!  Quand 
on  le  voit  prteider  publiquement  aux  sa- 
crifices et  aux  e^remonies  du  culte,  on 
peat  croire  qu'il  est  \k  pour  I'exemple. 
Mais,  lorsqu  on  le  surprend  la  nuit,  dans 
les  endroits  les  plusseca^ts  de  son  palais, 
invoquant  lesdieux^^voquant  lesdemons, 
passsntdetonguesbenresdanslacontem* 


IM 


L'Um?ER& 


plalioaci  4aitt  TeilMe ,  «i  a  le  apcetaol* 
d'un  mysticisme  tineere  et  d'wae  vraie 
d^votioo... 

«...  Geth^roisine  at  oet  emhouakiMie 
religieiix  font  de  luNen  uo  pareonaagje 
a  pari ,  an  miltau  de  caa  fig^aa  Impaaai- 
bies  da  la  jpolitiqua  imp^iale ;  c*aat  ca 
qui  jaUa  un  int^rit  a  dramatifae  sur  ia 
oastiA^de  cat  homaM  eitraei^tnaire , 
iDd^pendanmieiit  das  graadea  choaea 
qu'il  a  feitea.  S*il  n*^tait  qu'uo  grand 
poiidque ,  aoaime  DiacKtian  ou  Gaoafeaft- 
tin,  on  na  hii  pardonnerait  |>a8  d'avoir 
d^lay^  tant  da  rarea  quality  an  aerYioa 
d'lHia  mauvataa  cauae.  Maia  oo  pluot 
tant  de  gdnia  at  de  verta  am  prisea  avae 
)%hwL  et  rimpoasiMe;  od  plaint  eel 
antbouaiaame  aolitaire  qui  raoeoatre  ai 
peu  d'^choa,  aa  d^fovcfneDtinfati^abia 
qui  trouve  ai  peu  de  seoaura  dana  ana 
aoei^e  indif ^entia ,  ou  iivr^e  I  un  esprit 
oaniraire.  Quelle  ardeur,  queUa  aetivit^, 

SuellaaanataBcedana  raecompliiaaniant 
e  sea  deaaainsl  A  vac  quelle  aoUieitude , 
avec  quelles  angoiasea  il  suit  lea  vieisal- 
tudea  diveraea ,  lee  baanea  oo  lea  mau- 
vaisaa  foitunea  da  l^entrepriael  Quelle 
joie  il  ressent  du  triamphe ,  quelle  dou* 
ieur  de  llmpuissaMel  il  se  rait  iliusioa 
tout  d'abora  :  parca  qe'il  voit  I'armae^ 
radmiaistralion,  la  cour,  revenir  k  aa 
voix  au  culte  dee  tioux  aotels ,  il  aa  croit 
attr  de  la  victuire.  Maia  cette  r^aetioa 
se  renferme  dana  la  aod^t^  offtdalle; 
elle  D*a  point  gagn4  la  grande  aociM 
de  rampire.  lA,  te  polytbeitma  eat  ton- 
joura  mort,  et  la  ehrietianiama  de  plus 
en  plus  ¥ivant.  L'uu  teste  insenoble  k 
rentbousjaame  de  Julian  et  de  ses  pr^* 
tres:  Tautre  se  ritde  \mn  efforta.  Ju- 
lian trouve  dea  obstacles  de  tous  odtes; 
11  n'avait  compt^  que  sur  la  r^istanoa 
de  ses  ennamia ;  il  d^oouvra ,  a  meaura 
qu*il  poursuit  sa  restauration,  lea  fai- 
blesseset  lesmislresdeson  proprepartt. 
II  est  fore^  de  recammander  k  aas  pr^S^ 
tres  la  vie  pore,  la  efaarfl^,  lea  vertoa 
des  Chretiens.  «  Si  rbett^nHsme  na  fait 
pas  autant  de  progrte  que  noua  Teap^-* 
rions,  c*e8t  la  &ute  de  oeux  qui  le  pro- 
itessent  aojoindliui.  Ne  loufiierona*fi<iQa 

gMDt  noB  regaids  sur  lea  aausea  qui  ont 
▼oris^  raecrofanamant  de  ta  relifiott 
impie  de  noa  adversaina ^  je  faux  aire, 
aor  Ieur  philattttiropla  envera  lea  dtNn* 
gera ,  sor  Ieur  aotlMtada  i  aaaafaltr  ot 


honorar  las  oMrta,  sur  la  s^Ml6<p» 
qua  feinte  etafiGBct^)dal«oniBQBHi 
Voil^  eoefllSptautaiitdev«rtuiqa*flifl 
appartient,  ae  semble,  ds  flMUnrl 
lenient  en  praiiqua.  il  nete  wffii  f»\ 
tandne  a  aebut  aaMiBke;  miii  il  m 
ton  devoir  d>  ramener  pear  Um 
tooa  les  prdtraa  r^psadias  daas  la  Gdn 
suit  per  la  perauasiaa ,  sait  parksi 
nacea ,  aoit  mtoe  en  ks  iestituidki 
Ieur  miniate  aaer^,  s'ils  ae^ 
paa,  eux,  leurs  fenunes ,  l««ifs ail 
et  laura  serriteuia,  rexeoipl«<li 
peet  eoTers  lea  diaux ;  s'ili  n'mfk 
point  lea  sarTiteurs^  les  aafiiBtid 
tisauBes  des   Gatil^anB  diasoilff 
diaux,  en  substibiant  Ieur 
( ^MTara)  aa  culte  qui  Ieur  01IM.1 
maaqua  pas,  aa  outre,  da  dflfndi 
tout  prdtre  de  firequeaier  lei  a^ 
de  boire  dana  lea  taveities,  et  ^em 
un  au^ier  vil  ou  ignoble.  Bmn0 
qui  t'oMront,  liannis  ttmpfamm 
te  rMater;  ^toUis  dans  ebaqoaaw 
hoapieea,  poor  «ia  les  geas  vmm 
00  aans  oiojFena  da  virre,  jr  jp<>i"!jj 
nos  bieniuts ,  quelle  que  soil  #<' 
la  religion  qo'ila  professenl.  B 

Ssr  trop  hooteux  que  nos  sujett  i 
6peor?us  de  toot  seeoarB  ^ 
part ,  taodis  qu'on  ne  toH  «««■  > 
diaat,  ni  ehes  iea  Jutfis,  oi  nimp 
la  aeete  impie  dea  Galil^oi ,  ^  ^ 
Bon-aeulement  sea  pauvres,  am 
vent  iea  n6tres.  » 

«  L'indiffi^reBcede  son  parti  on 
rage  point  cet  infttigable  athleUt 
liement  lea  obstadea  cwamni»A^ 
Titer.  Toajoura  tolerant  pow^^ 
mea  qui  a'adresaent  a  sa  perioM^  fj 
r^ond  aux  inaulles  desbsbitaBUia 
tioche  qoa  par  uae  satire,  akia  1"^ 
core  qu^amera,  ou  perca  la  aiat* 
de  sadifaite,  bienplutdtqaeiacnii 
▼anit6  bteasee.  Maia  y  ne  f^f^l 
les  outrages  k  aca  diaux :  li  iWM^^ 
reaaeat  lea  chrdttena  ooavaioeui  oui 
lenieat  aoupqonnte  d'arair  detiw 
templea.  II  ne  para^cute  paiatlespi 
aaaa  de  la  religioB  aaavelle;  a  »* 
iaterdit  ni  I'axeraioe  de  Ieur  calta,  ■ 
pr^icatioa  de  laar  doattiaa;  lattS* 
aejffta  dea  foaotioaa  pubii<pitt-  ^ 
partiality,  bltoaWe  dans  mtmi 
tat,  ^lait  ijien  aatuidle  a«  ^ 
L'apltoe  da  ia  faatauralian  du  m 


STRIE  AHcnsvins. 


16S 


thtisme  poomil-il  maiiM  faSre  dans  Tin- 
t^t  de  u  cause?  II  ioterdit  aax  chr^« 
tieas  rensMgDemenl  d«s  iattres  greo- 
.  ques;  inais,  n*Mt-ee  pas  autant  la  {>iM 
pour  sea  dieox  qua  la  politique  giii  lui 
lOfipira  cette  mesure?  H  faut  bien  f«- 
eomialtre,  du  reate,  que  Julien  oubHa 
plus  d*une  foia  £a  tolerance  et  son  ha- 
maiiite  daaa  rentrafnement  ^e  la  lutte. 
U  ferine  lea  yen  su  r  lee  aandantes  repr^- 
nilles  du  people  d'Aleiandrie;  il  pour- 
ntc ,  sous jpreteste  da  vepos  public ,  la 
hina  de  TEgliae,  lef^rand  Atlianaae;  il 
d^pooille  les  Chretiens  d'Alexaadrie  de 
leurs  biena ,  et  ijoute  la  raillerte  h  4a 
eonfiseatton.  On  voit  que  les  suce^s  des 
Chretiens  Finritent  encore  plus  que  leurs 
violeaees ;  lea  pasiions  du  prdtre  rempor- 
teat  sur  la  sagessede  TeinpereHr.  Julien, 
iadifii6rent  li  to«t  ce  qui  s'attache  a  sa 
personne,  perd  toute  mesure  guand  il  8*a- 
ijt  de  venser  lea  offenses  faites  k  ses 
dieui.  Enbn  son  g^nie  ae  ressent  des 
tristes  n^cesait^  de  son  rdle.  Toute  cause 
desesp^ea  force  plus  ou  moins  lecarao- 
ttre  de  ses  h^roa.  L'^toquence  de  Dtoos- 
th^oe  est  iin  peu  d^amatoire ;  la  verta 
politique  de  Brutus  et  de  Gatoa  a  quel- 

L chose  de  roide  etde  faroudie.  Uar- 
rde  Julien  maoci^ue  de  mesure;  et 
comme  la  violence  lui  r^pugne,  il  des* 
oend  gvelquefois  a  la  mse,  pour  vaincre 
•w  fanemis. 

«  Malgr^  tout  cela,  iuKen  n'en  eatpaa 
moins  ub  prince  plein  de  douceur  et 
fhomanite,  dans  un  temps  06  ces  vertus 
toient  fort  rares  sur  le  tr6ne.  La  poli- 
lique  de  Constantin  fut  quelquefois 
cruel le;  la  violence  ^ait  habituelle  k 
C(mstance;  Vaientinien  aimait  k  verser 
le  sang ,  on  salt  eomblen  la  eolfre  du 
pand  Th^odose  tut  terrible.  VAxm  des 
Aotooin  se  retrouve  dans  iulien ;  H  ne 
lui  manqua  aue  d'avoir  vecu  dans  les 
^ux  lours  de  rempire.  II  tient  sans  doute 
dtt  pretre  et  du  sophiste;  il  a  toute  la 
ftrveurde  Tun  et  toute  la  subtilit^  da 
I'autre ;  mais  sous  ie  pretre  et  le  sophiste 
tt  revele  toujours  le  ndros.  Sa  vie  est  un 
combat  perpetual;  emperaur^  il  iutte 
cootre  les  ennemisde  Tempire;  paien,  il 
jutte  contra  le  chriatianisme ;  homnie,  il 
wtte  contra  les  passions  da  son  caraa- 
jcre  mobile  et  ardent;  il  Iutte  sans  i«- 
lacbe,  avecune  activity  infatigabie  et 
UBS  indomptabie  ^nargia,  jusqu*ii  la 


mort.  Sa  fin  fitt  dfgne  de  aa  vie.  Au 
moment  du  p6nl,  toutpr^occup^  du  sa- 
lut  de  Tarm^e ,  il  n^giige  la  aom  de  sa 
dtfenae  peraonnelle;  et  quand  il  est 
bless^,  il  ouWie  aa  foleasure  pour  volar 
au  plus  fort  de  la  m^Me.  (^ueis  nobles  et 
touchantsadieax  itsesoompagnoDS  d'ar- 
mes!  Quelle  r^ignation,  quelle  douce 
B^renite  dans  ses  derniers  moments! 
Julien  fat  le  dernier  grand  emperenr  de 
Rome :  il  eut  toutes  lea  vertus  du  sage 
ettoutea  les  qualites  du  ii^s.  Profon* 
d6ment  Stranger,  par  son  esprit  ec  son 
earactere ,  k  la  society  nouveilie,  il  ne 
put  ni  la  comprendre  ni  Palmer;  son 
ame  ^ait  toute  paienne,  en  ce  sens  qu*elle 
fut  le  type  vivent  dea  vertus  et  des  aua* 
lit^s  de  la  vieiile  societ6  qui  allait  ftiire 
place  au  christianisme;  il  <ut  le  dernier 
nls  de  oette  noble  antiquity,  qu'H  d^en- 
dit  avec  tant  de  devouement  ("),  » 

«  JuJien  suoeoml^a,  k  Tdga  de  trente- 
deux  9in$ ,  dans  uile  bataille  centre  fes 
Parses,  apnds  un  regne  de  vrngt  mois.  Sa 
mort  prMervu  Tl^glise  des  malheurs  qui 
la  menacaient.  En  effet,  daps  les  der- 
niers temps  de  aa  vie,  ranimostte  de  Tern- 
pereur  contre  leschn^tiens  if ^tait  telle* 
nent  accrue,  qua.^  selon  toute  apparence, 
k  son  retour,  II  aurait  employ^  les  plus 
violentee  meaures,  et  la  r^sistarce  qu'il 
aurait  rencontr^e  etlt  sans  doute  amen^ 
una  pers^ution  sanglante.  Mais  d^  lors 
s'ecroula  d'elle-m^me  roenvre  p^nibla* 
nnant  commane^a  de  la  restauration  do 
paganisme.  Cette  foule  d'apostata  qui 
avaient  vendu  leur  religion  a  la  foveur 
imp^iaie ,  et  qui ,  suivant  {'expression 
de  Th^mistius  «  adoratent  non  pas  la 
divinity,  mais  la  pourpre  »  ae  virent  ame> 
rement  deeus;  car  Jovten,  auceesseiir  de 
kur  mattre*,  ^ait  chr^tien.  A  peine  montd 
sur  le  tr6ne^  il  manifesta  ses  seiHiments 
d'una  manik«  ^Utanta,  an  ordonnant 
aux  gouverneura  des  provineea  de  pro* 
t^er  les  ebr^ens  dans  le  Nbre  exercice 
de  leur  culte,  et  de  randre  aux  ccci^sias- 
tiquea,  aux  vierges  et  aux  veuves  consa* 
areas  k  Dieu  tous  les  privileges  qui  leuv 
avaient  M  accordds  par  Constantin  et 
H6  fila,  mais  que  Julien  leur  avait  reti- 
res. En, mime  tamps,  il  aasurait  atix 
paiena  la  libertedaconsoiance,  leur  per- 


in  M.  Vacb«rot,  tiisioire  de  Vecole  d^AUxan-^ 


IM 


UUN1¥ER& 


luettait  les  saerifioes  et  nlnterdisait  que 
la  magie.  Auasi,  le  paien  Themistius,  dans 
son  diseoura  pronooce  devant  Jovien, 
loue-t-il  la  sagease  de  cet  empereur,  <|iii 
semble  seul  comprendre  que  la  religion 
nedoit  toe  soumise  k  aucune  violence; 
puis  il  peiat  en  terroes  6nergiques  la  1^- 
geret^  avec  laguelle  la  plupart,  k  cette 
epoque,  passaient  des  tables  sacr^es  des 
Chretiens  aux  autels  des  dieux  et  fetour- 
naient  de  oes  autels  aux  tables  quails 
avaient  abandonn^es.  11  blSme  aussi 
tres-clairement  la  conduite  de  Julien  : 
«  Cette  loi  de  tol^rance<»  dit-ii,  n*est  pas 
moins  important^,  ni  moins  prdcieuse  que 
le  traits  coiiclu  avec  lesPerses;  car  jus- 
qu*a  present  nous  avons  6t6  plus  hosti* 
les  les  uns  contre  les  autres  que  les  Per-, 
see  ne  I'ont  ^t^  contre  nous,  et  nous  avons 
moins  souffert  des  incursions  des  bar- 
bares  que  de  nos  dissensions  reli- 
gieuses.  »  Libanius,  au  contraire,  oonti- 
nua  d*exalter  sans  restriction  Julien,  son 
b^ros,  son  demi-dieu,  etde  trouver  tout 
en  lui  excellent  et  divin.  II  avait  concu 
avec  ceux  qui  parta^eaient  ses  idees  le 
bril'ant  espoir  de  voir,  apr^  la  victoire 
de  Julien  sur  lesPerses,  les  tombeaux  (il 
veut  dire  lestglises  chr6tiennes)  ceder 
si  compl^tement  la  place  aux  temples 
des  dieux  que  tons  ailaient  de  nouveau 
se  pr^cipiteraux  autels  et  offrir  des  sa- 
crifices. Or,  cet  espoir  ^ait  tout  a  fait 
an6anti.  Une  nuit  profonde,  ce  sont  ses 
paroles,  couvrait  rempire  oomme  avant 
Julien. «  Les  temples,  s^^rie-t-il,  les  tem- 
ples que  Ton  avait  commence  de  bAtir 
sous  le  grand  empereur,  restent  inache- 
ves  ou  Dien  sont  detruits  de  fond  en 
eombleau  milieu  des  risdes  des  Chretiens. 
Les  pr^tres  et  les  philosophes  sontt)bll- 
g^  de  rendrecompte,  oeux-la  de  Targent 
employ^  par  eux  aux  sacritioes,  ceux-d 
des  sommes  gu'ils  ont  revues  de  la  muni- 
ficence du  prince.  »  Sans  doute  on  n*^- 
couta  pas  partoutle  sage  conseii  donn^ 
aussitdtapres  la  mort  de  Julien  par  Gr^ 
goire  de  Nazianze,  de  ne  pas  abuser  de 
M  preponderance  que  les  fideles  venaient 
de  reconqu^rir,  et  de  ne  point  se  livrer 
k  des  represailles :  mais,  dans  tous  les  cas, 
lar^etion^dut  ^tre  assez  faible,  puisque 
les  charges  importantes  6taient  encore 
entre  les  mains  des  paiens  (*).  » 

n  DolUafer,  Orig.  du  chrUL,  t  n,  p.  96 . 


Moai:  d'ath^nasb;  bvstbsdV 

lilSME  EN  SYRIB;  b6lB  PACIVICill 
DU  PATBIABCaE  d'aNTIOCHB  ] 
AYENBMBIIT  DB  THBODOSB.  —  ] 

gnede  Jovien  fut  court,  et  Valeosit 
vela  bientdt  les  persecutions 
catholiques.  Athanase,  intr^pided 
ttur  de  la  foi  de  Nic^,  le  rempa 
j^lises  d*Orient,  revenu  a  Aleiai 
out  le  rappellait  une  demiere  . 
termina  une  vie  pleine  de  combatifll 
perils  (378)  sans  avoir  pa 
rh^r^ie  quM  avait  tantoombatUK.1 
lui,  c*en  etait  fait  de  r£glise  i 
envahie  de  tous  cdt^  par  lea  i 
Tarianisme.  Cependant,  en  381 1 
veau  concile  s'assemble  k 
pie.  Mdece  occupait  le  siege  <  ^ 
d'Antioche  depuis  vingt  aas;] 
pr^id6 ,  en  87:1 ,  le  concile  ip 
reconnut  le  pape  Damase.  £o  : 
presida  celui  de  G>nstantinople, 
que  par  le  nouvel  empereur  T 
Th6odose,  n*etant  encore  que  (, 
Gratien,  avait  cm  voir  en  songen 
lard  venerable  le  rev^tir  du  ma 
perial.  Quand  les  Peres  du  ( 
Constantinople  vinrent  le  saluer, 
d*abord  frapp^  de  Fair  maje 
vdque  d*Antioche;  puis,  en  1 
ses  regards,  il  reconnut  ou  fei^ii. 
connaltre  le  vieillard  mysteneiij 
avait  vu  jadis  dans  ses  r^ves ;  il  Ti 
aussitdt,  baisant  avec  ferveur  < 
qui  lui  avait  presents  la  < 
riale :  il  lui  raconta  publiquemeoth 
prophetique  qui  avait  promis  Ta 
la  race  de  Theodose ,  et  il  pria  H 
chercher,  avec  les  autres  evequcs,i 
cifier  r£glise.  Ce  fiit ,  eo  effet,  a • 
cile  que  ce  vertueux  patriarcbe,  Mj 
Gr^goire  de  Nazianze,  termina  I 
schisme  d'Antioche  (*)•  Pour  la  { 

(*)  (c  Th^odoret  a  minUesU  u  parttaBMl 
Melece ,  et  enoora  plus  poor  FlaTleii ,  s 


fldelw  eo  Tabsence  de  Meitee,  peodaatlu 
B^oaUon  de  rarlen  Vaieos.  Aiud  TModoMK| 
dil-il  que  Meltee  aeol  se  mooln  nM 
dan»  le  difT^rend  entre  lei»  deux  ffUictJ 
doxes.  II  avaU  propose  h  Paniln  m  ftf* 
radmtnistraUon  spiriUielle  dei  fiddes,  Qt 
lement  serait  dentearte  tout  eDtttre  aai 
Yant  dfs  deux  pailean;  maia  Paiilio  i<4j.  - 
ooodiUons,  et  provoqua  de  cette  oiaiiKni 
icbiame.  ^_J, 

«  Socrate  et  SoatMitee,  Mhi  an  eoouii^ 


SYRIE  AlfaENIfE. 


1«7 


ibis  depaU  Goitttantiii,  rempereur  et 
les^v^ues  trayaillaieDi  de  coocert  k  la 
padfleation  de  rfglise.  M^ldce  mourut 
aa  oiiJieu  du  concue,  apr^  avoir  long- 
temps  honors  le  si^e  ^pisoopal  par  sea 
Tertoa. 

GHAPITRE  IV. 

arSTOIBB  DE  l'bOLISE  DB  SYBIB 
DBPOrS  LA  MOBT  BB  KBLBGB  (881) 
iU8QU*4    lMnTASION  DBS    ABABBS. 

TBIOKPHB  DBS  BNNBMIS  DB  PAU- 
UN ;  FUTIBN  SUGCkOB  A  MBLEGB  NOR- 
OBSTANT  L*0PP0S1TI0N  DB  GBBGOIBB 

BB  NAZiANZB.  —  Cette  mort  devait  re- 
eondlier  lea  deux  partis  rivaux ,  et  met- 
tre  finaa  loDg  schisme  de  l'^.glise  d'Ao- 
tioche.  Paulin  aemblait  done  assure  de 
jooir  en  paix  de  sa  dignity ,  lorsqu'il  ap- 
prit  tout  k  coup  que  de  si  justes  pr6ten- 
tioDsvenaient  a^bouer  contre  la  haine 
ioTet^e  des  Orientaux ,  et  que  le  concile 
de  Constantinople  avait  design^  Flavian 
poorsucceder  aM^lece.  Voici  comment 
tt  ebose  s'^tait  pass^e  :  a  la  mort  de  ce 
patriarche ,  v^^r^  dans  tout  TOrient, 

tondent  tar  unaeoord,  seloo  eax  rfellemeot 
eoMlQ  «Dtra  M6Mce  ei  PaaUn ,  imnMlatemeot 
•prii  let  troQbles  aaxqoels  avait  donn^  lieu  le 
frtoar  de  eelul-d  k  Antioche,  las^paraUon  des 
nd/Meiu,  qui  pretend! rent  que  Ton  ne  pouvalt 
>a  tooMleace  dI  oommuniqiier  ni  traiter  en 
■aoQoe  naaitee  aveo  M^Uoe ,  quoique  oonrab- 
itaoUiligte,  pour  cela  seul  qa*l]  avait  m  61a  et 
mdooo^  par  lea  ariena,  qui  dtaient  Ice  lapses  de 


Jependaat  leocravelarraDsement  avait  ^t^ 
eoofinn^  par  rfigliae  enUtee  d^ADtiocfae ,  tant 
■i^MtieQiie  que  paoliaieDDe ,  et  on  avait  des  deux 
luii  solennellemeot  luri  d^attendre  la  mort 
«i  dcttx  ^v^queaeonsabaUDtlalistes  avaat  d'en 
nan  uo  qui  les  remplaoerait  Tan  et  Tautre. 
Mab  oe  serment ,  persoonellement  prftt^  par 
RtTleD  et  par  tlinq  autres  pr6tres  anUochiens 

BI*on  eroyalt  les  plus  dignes  de  moDler  aprds 
lee  et  Paulin  sur  le  aleae  d*Ant]ocbe,  fat 
one  Irop  foible  digne  oontre Tambltion  saoerdo- 
Me.  A  to  mort  de  M^ltee,  dont  saint  Gf^olre 
de  Baiianxe  fait  d^river  le  nom  de  dou9,miel» 
te,  Flavlen,  61a  dvtaoe,  aocepta  sausdlflicull^ 
el  UBS  scrupule,  maigre  les  plalntes  et  les  r6- 
daoiatlons  de  Damase.  «v«qae  de  Rome :  oelui- 
d  etait  tenement  attache  k  Paolio ,  aveoletfuel 
seal  U  avait  ooottna^  k  oomnnaoiqaer,  qu'il 
ovt  devoir  se  s^parer  de  rSgllse  de  Nectalre, 
^taie  de  Constantinople,  etde  eelle  de  Diodore 
deTkne,  qui  s'aaient  dtelarte  pour  rfiglise 
•oliodilennedesM616Ueas,quoique  reoipereur 
~  '  '     I  eOt  dter^ti  que  c*^taitae  Tunlon  avec 


FK  que  tous  les  ev6ques  oh^lrent  h  ses  ordres, 
mis  Men  que  saint  6f^ire  de  Nasianxe ,  l*an- 


aoas  le  nom  da  dMn  M4lice,  les  jeunes 
^v^uea  de  son  parti  crurent  ^u*ii  se- 
rait  d^honorant  de  c^r  si  facilement 
la  vietoire  k  Paulin ,  at  ils  r^soiurent  de 
mettre  en  deliberation  pubHoue  le  choL 
d'un  autre  succeaseur,  ^us  digne  de  re- 
pr^senter  rfcliae  d'Asie.  En  vain ,  les 
plus  sages  6v£|ae8  et  le  plus  v^n^able 
detous,  CMgoire  de  Nazianze(*),s'oppo- 
s^rent  k  oette  d^tennination,  au'ils  ju- 
ffeaient  fatale  aox  int^r^ta  g^neraux  de 
FEglise.  En  vain^  le  saint  pr^at  fit  en- 
tendre en  favour  de  Paulin  cette  vmx 
tant  aim^  des jpeuples  et  si  habile  k  la 
persuasion  :  «  Pourquoi  done,  diaait-il, 

Srendre  plalsir  k  perp^tuer  les  divisions 
es  Chretiens  ?  Vous  ne  oonsid^rez  qu'une 
seule  ville,  au  lieu  de  regarder  Tflglise 
universelle.  Quand  ee  seraient  deux  an- 
^es  qui  contesteraient ,  il  ne  serait  pas 
mate  que  le  mondeentier  fdt  trouble  par 
leur  querelle.  Laissons  Paulin  dans  le 
si^e  qu'il  oeeupe ;  il  est  vieux,  et  sa  mort 
termlnera  bientdt  cette  affaire :  il  est  bon 
quelquefois  de  se  laisser  vaincre.  *  Mais 
eet  avis  si  sa^e  et  si  inodM  ne  put  rien 
contre  robstination  des  jeunes  ev^ues 

deo  parUsan  de  M^tee ,  se  signala  par  sod  op- 
position opini&tre  k  ce  qui  paraissalt  etre  si  bien 
d*aooord  avec  ses  sentiments  inlimes. 

«  Saint- Giiioira  se  plaignait  amtoement  k 
cette  occasion  da  schisme  que  les  troubles  de 
rBgllse  d*AntiocheavaieDt(ait  nattre  et  avaient 
fSoment6  entre  lea  Orientaax  et  les  Ocddentaux, 
sehtsrae  dont  iui,  Gr^aolre,  ftatpenonnellement 
la  victtme. 

«  A  oe  m^me  propos ,  saint  Baslle ,  scandalise 
des  querelles  oontinuelles  et  des  haine»  qui  se 
renouvelaient  sans  cesse  entre  les  deux  iSallses, 
t^oiana  aussi  tout  son  chagrin  d*avolr  ^  dtoi 
dans  respolr  qa*il  avait  ooo^u  de  remettre  la 
paix  dans  l^Clglise,  au  moyen  du  secoars  quMl 
attendait  k  cet  effet  des  cathollques  oeddentaox, 
et  nommdment  des  Bomaios.  II  fut  bient6t , 
nous  avoue-t-il,  d^sllluslonnd  de  ses  preventions 
ffsvorables  k  rjEgllse  de  Rome,  qui  n*etait  ani- 
mte  que  par  Teapritme  bautaur,  de  m^pris  et  de 
durete  avec  lequel  elle  traitalt  toutes  les  autres 
Sgllses  et  sortoot  oelles  d*Orient.  Cependant, 
dtt-ll,  les  Ocddentaux  ne  oonnaissent' rien  de 
DOS  anaires ;  ils  ne  savent  ni  ne  veulent  pas 
savoir  la  v^rite,  oomme  ils  Font  si  bien  proute 
dans  raffaire  du  sabelUen  Marcellus,  que  rfialise 
de  Rome  a  soutenu  oontre  ceux  qui  voalalent 
s*oppoeer  k  son  beresie;  elle  a,  de  oette  maniere, 
oonUnue-t-II,  fond^  dle-meme  une  doctrine 
h6retlque.  Saint  Baslle  se  plaint  fortement  de 
la  superbe  des  evdques  de  Rome,  de  cette  su- 
perbe  qui  rend  les  hommes  ennemis  de  DIeu ; 
lis  prennent,  i^oute-t-U ,  ce  vice  pour  de  la  dl> 

liW,  et  rappcllent  verlu.  —  Saint  Basil.  epiU. 

19  (alias  10)  ad  Euseb.  n.  2,  t.  Ill,  p.  369.  • 
(/>*/»olter,t.lI,  p.  "I.) 


t 


ll 


ii8 


qui  feiiaieni  de  eetle 
fit^  UDe  outation  die  pr^taiteaM  entre 
leg  deux  Sgliato ,  oalie  d'On«i»  at  caMe 
d'Ooekleat.  Leur  inaillcure  raisoB  poar 
doDoer  im  suoaeaseiir  k  IMtee  et  on  ri- 
val k  Paulm ,  tok  «  qua  rOnent  devait 
remparter,  puiaqua  J^tua-Chriat  avait 
Toultt  paraltre  en  Orient.  »  A  de  tela  ar 
gumeata  oo  n*avait  rieu  k  r^udre,  et 
F£glise  d*Aotioehe  ajant  M  conaolt^, 
ie  dtoix  preaque  unaMoie  dea  evdques 
d^igoaFlafien ,  diacjple  et  ami  de  M^ 
keee.  Gette  Section,  qui  mena^t  d'un 
nouveauaobisma  la  capitale  de  TOrient, 
m^oootenta  vivement  ie  saint  TieiHard 
Gr^offe^  et  le  eenfirma  phia  que  ja- 
mais dans  la  r^lution  de  quitter  le 
ai^edeConstanttiiople:  aussi  refiiaa-t-il 
dMmpoaer  les  mains  it  Fdv^ae  elu;  et 
Flavien  fiit  eblig^  d'alkr  se  faire  or- 
doHuer  a  Antioche,  par  les  ^v^ues 
qui  ^taieat  de  son  parti:  aprte  quoi ,  it 
Urit  possession  de  son  siege.  Les  catlio- 
iques  de  la  eommunion  de  Metdee  le 
r^urent  avee  grande  ioie  dans  cette 
nouvelid  digttite ;  ear  ila  le  eonnaiaaaieot 
depuis  longtemps  pour  un  pr^tre  fid^e 
et  devout;  et  au  temps  de  la  persecution 
de  Valens  il  avait  gouTern^  le  petit  trou- 
penu  de  M61^ce  exil^,  avec  une  sagesse 
et  une  moderation  qui  kil  avaient  gagn^ 
tous  les  coeurs. 

CABA.GTEBS  DB  FLATlBZf;  aBS 
MOBUBS;  SA  CONDDITB  A  L'BPOQOB 
DB  LA  SEDITION  D^ANTIOGHS;  JBAW 
CHBYSOSTOMB  GOUYBBSIB  L'BGLISB 
D*ANTIOGHB  FBNDANT  L'ABSBNGB   DB 

FLAVIEN.  —  Cependant  Flavien  ne  fut 
'pas  longtemps  h  s'apercevoir  du  vice  de 
son  ordination.  Le  schisme  continuait 
dans  son  £glise ;  et  le  parti  de  Paolin  Fac- 
cusait  ouvertement  d^avoir  vide  la  foi 
juree,  et  c'^tait  ToccasioB  d*un  |>raBd 
scandale  dans  toute  la  vitle;  mais  si  Fla- 
vian commit  une  faute  en  acceptant  une 
digniU  k  laquelle  il  n'avait  pas  droit, 
II  eut  du  moms  la  gloire  de  Texpier  ;  sa 
pidte  et  la  douceur  exemplaire  de  ses 
moeurs  commen^aient  deja  a  lui  recon« 
eilier  les  esprits  les  plus  rebelles.  La 
sedition  d'Antioche  donna  bient5t  a  son 
d^vouement  une  illustre  occasion  de  se 
produire  au  grand  jour.  Vers  Tann^e  887, 
un  Mit  de  Th^dose,  qui  ordonnait  de 
nouvelles  impositions  fut  public  dans  les 
principales  villas  d'Orieot;  maia   lea 


VUMWEBS^ 


peuples  4Calenl  hm^  4$mmiM 
auj&ion  ^\  llvratt  leurs  fofrtooesll 
kes  oaprioes  de  remperrar;  ec  \itii 
ieeteiirs  ayam  voulu  demflerlaii 
tanoe  par  des  suppliees,  Aadodm 
mut.  Les  statues  de  rempereor,  c 
sa  premiere  femme  PlaoiHi,  de 
Arcadius  et  Honorius  tomberest 
aeolamations  du  peupie,  at  furerti 
boiior^ea  aur  ka  places  pobli^ 
dans  tous  lei  oarrefours ,  saas  qil 
magistrals  osassent  se  roontrar  at 
lieu  de  la  sMition.  lie  premiers 
6tant  apais*,  toute  la  viHe  tomhi^ 
la  consternation ,  et  retfrol  fct  ^ 
parmi  cette  fonle  qui  allatt  ttre 
tans  defense  k  la  col^e  da  iM 
Les  bruits  les  plus  sinistres, 
par  les  ofSciers  de  Temperetir,  M 
Cerent  a  circulcr.  Sa  vengeance 
Itre  terrible.  La  vitle ,  disait-oB, 
Itre  ras6e ,  et  la  chamie  derait  | 
sur  ses  murs.  D^j^  les  habitantt^ 
taient  en  fDule  cette  cit6  i  janais 
due.  Dans  ce  d^sespoir  eomnntt 
prdtres  chr^tiens  flrent  6claterk* 
et  Flavien  sauva  Antiochc.  LefiW 
Que,  tremblant  pour  son'  txwp^ 
aevoua  au  salut  de  tous ;  et,  malpl 
grand  Age,  il  n'h^ltapaSfeoniffli 
ravons  dit  plus  baut  daaslerta 
6v^ements  poUtiques,  i  se  oetti 
route  poor  Constantino]^;  Mtt^ 
di^e  d'one  grande  dme,^lj 
chir  la  colere  de  rempereur,oua 
frir  eomme  In  premfere  victhw 
chdtiments.  II  fltune  telle  diligeo^ 
ce  voyage,  qu'il  diepassa  les  e 
charge  de  porter  jkliyodose  It 
de  la  sedition. 

Cependant,  Antiocbe  ^it  dair 
extreme  affliction,  et  ron  aorartr 
voir  ce  silence  de  mort  et  cetabattt 
de  la  ville  entiere,  qu'uo  grand 
devastart  ses  murs.  Les  roes  eC  a 
oes  publiques  6taient  abandoone^ 
foule  se  refugiait  au  pied  des  luwi 
mandant  k  Dieu  I'espoir  d'ua  sorti 
leur.  Dans  ces  tristes  circonstano4| 
fideles  ^M>utaient  aveoavidit^lespi 
de  consolation  que  leur  donnsitlel 
Jean,  auquei  Flavien  avait  rerais  IJ 
vernement  de  son  troupeaa.  U 
digne  de  ce  ministere  par  la  vatlf 
sa  vie,  longtemps  ^prouvce  dans 
litude ,  et  par  ta  douceur  ds  S0a  * 


SYRIft  AMCRlrNE. 


lit 


qoence,  mi!  M  m^r ita  plut  tai^  le  sur** 
Dom  de  Ghrytofltome  ou  bovche  cPw, 
Diserple  de  Libanms,  fl  avait  quftt^  son 
koie  poor  s'instroire  aux  saintes  iettres 
nas  le  ditin  M6ldee.  Depaitf,  H  ati^ 
vto  goatre  ana  sotia  fe  discfptme  d^un 
Tfeillard  syrfen ,  au  fbM  d'ane  solflnde 
^gnor^e  du  reste  dea  hommes.  Mais  aa 
sant^,att6rto  parcef^me  aosldre,  Pa« 
?aK  forcii  de  rerenir  a  Antioche :  il  avait 
alors  tfngt-six  ans.  II  aervit  pendant 
cinqannees  dms  le  aous-diaconat ,  fiat 
ordonn^  dtacre  k  trente  et  on  ans^  et 
pr^tre  peu  de  temps  aprds.  Flavien  le 
eonsacra  an  mintstere  de  la  parole,  et 
depais  ee  temps  Jean  fiit  charge  d'tns* 
truire  le  peuple  et  de  le  former  a  la  eon- 
oaissance  des  Ventures.  A  T^poque  de 
la  sedition  d* Antioche,  il  ayait  environ 
ouarante  ans.  Le  peuple  tronvait  un 
oarme  particnlter  a  Tentendre;  ear 
e'etait  la  seule  consolation  qui  loi  fKH 
permise  dans  cette  grande  calamity. 
Le  car^me  venait  de  coromeneer ;  Jean 
en  prit  occasion  pour  exhorter  les  fiddles 
aux  larmes  et  a  la  penitence;  il  letnr  moii^ 
trait  que  le  malheur  public  d'Antiocb^ 
^tait  une  iuste  punition  du  ciel,  qui  se 
rengeait  aJnsi  des  blasph^mateurs.  II  les 
detournait  des  spectacles  et  des  plaisirs 
profanes,  et  les  elcitaft  k  se  convertir : 
« La  pietf ,  disait-il ,  pent  seule  vons  san- 
«  ver  et  suspendre  le  chfttiment  qui 
«  menace  la  ville  coupablc;  prie«  et 
<  faites  de  bonnes  (£uvi'es;^ratiquez  les 
«  Tertus  chr^tienneS ,  et  Dieu ,  qui  est 
«  plus  puissant  que  les  rols  de  la  terre, 
« touchera  neut-^re  le  coeur  de  Th6o- 
«  dose ,  6t  fui  persuadera  de  conserver 
« Antioche.  » 

Maigr^  ces  pieoses  exhortations ,  la 
terreur  redoublait  tous  les  jours  dans  la 
y  lie ;  car  on  venait  (f  apprendre  que  Theo- 
dose,  instniit  de  la  sMition  par  fe  ru- 
Dieur  publique,  avait  envoye  des  com- 
missaires  pour  informer  exactement  c^ 
chdtier  les  plus  coupables. 

Qu'il  nous  soit  permisde  fappelei*  iel, 
^  Quelques  mots,  ce  qui  a  6t^  dit  dans  les 
P^ges  qui  precedent  cette  histoire  de  ?£• 
glise  de  Syrie  (*).  CT^taient  Hell^biqne, 
loattrede  la  millce,  et  Claire,  mattre  des 
offices :  Tempereur  avadt  i^sohi,  disait- 
00,  d*6ter  a  Antioche  toUs  ses  privil6ges 

(OYoy.  plus  haot  p.  90  et  miv. 


dt 4^ cransf6ff«r lla  tillo do LacMMe  la 
dlgn^dem^iropotede  laSyrie  etdetovt 
F  wieHl.  Le  saint  4vdq«eFkivieB  nneoo« 
tra  sor  sa  feittte  ms  deos  offlciers,  char- 
ges de  la  venffeanee  de  reoapeMor ;  eS, 
Dfr6voyant  rdBtetion  de  mm  troapeao « 
n  r6dkHd)la,  diseat  les  andeos  raeits, 
ses  pri^res  k  Diea.  Onad  Heildbiqae  el 
Gdsaire  arrif^rent  dans  ki  liMe,  its  y 
forent  refiis  dans  un  motoe  rilanee,  et 
Antioebe  perdtl  tent  espoir  de  sakit; 
ear  les  oomrnissmras  m  dMar^rent 
ddchoe  de  tons  ses  privileges,  iren| 
fermer  le  th^re,  rbippodrome ,  les 
bains  pnbKes .  el  CDimtBoneerent  a  infer* 
mer  contra  les  eoopables ,  et  d*abord 
eontre  les  magistrals.  Autoar  de  ee  tri* 
bunal  oh  eomparaissaient  les  premiers 
eitoyens  de  la  viHe ,  on  voyait  errer  leurs 
femmes'et  leurs  enfants.  Tous  gdmis* 
saient  en  entendant  les  ens  des  bouiw 
reaux  et  leson  des  lonets,  speetaele 
lamentable  mime  peer  les  jnges  et  poor 
les  soldats. 

(Test  aiorS  qu'on  vtl  desoendre  des 
montagnes  qui  avoinnent  Aniiodie  les 
solitaires  et  les  motnes,  tout  eouverts 
de  oendre  et  de  poussiere.  Hs  deraan*- 
d^rent  grAce  pour  la  ville  eondamn^; 
its  neeraignafeotrien  ponr  enx-iia^mes, 
ear  leurs  corps  ^taient  depuis  lengtemps 
habitu^  aux  supplices  :  aussi  Ks  par^ 
laient  llbrement  aux  magistrals ,  assis 
sur  leur  tribonal. 

Les  efforts  de  ces  moines  pr^pav^ent 
le  salut  d' Antioche.  Quaod  flavien  Ail 
arriv^  h  Constantinople,  H  se  rendit  aus- 
sitdt  au  palais  de  rempeteur;  et  II 
il  se  tint  loin  du  trdne,  la  t^te  couverce 
et  dans  la  posture  d*im  supplimit.  Theo- 
dose  Papergul,  el,  s'dlant  asproehd  de 
hii,  il  ne  montra  pas  de  colore,  mats 
une  |rande  donleur  de  lingratitude 
d*Anttoehe  :  «  Quelles  platntes  peuveiil- 
ils  faire  eonire  moi ,  dit-il ,  et  pourquoi 
s'en  prendre  a«x  morts?  If  ai-Je  pas  too- 
jours  pr6fdr6  cette  vltle  k  toutes  Its 
autres?  »  Alers  r6v4que  rdpondil  en 
g^missam  ;  «  Seigneur,  nous  recon- 
naissons  raffection  que  vous  avee 
toujours  t^moignte  k  notre  patrie,  et 
e*est  ce  qui  nons  alQige  le  plus,  en 
rendanl  notre  crime  plus  grand.  Qu'y 
a-t-ll  de  plu^amer  que  d*Mre  reconnus 
k  la  face  de  tonte  la  terre  pour  coupa- 
bles de  In  dernidve  mgraikode?  »  Puis 


tM 


L*UH1V£RS« 


le  saint  ^tque  obatioue,  ea  r«i«taiit 
le  erime  sur  tos  d^oiOBs,  «  qui  out 
toat  mis  en  Otti?re«  dit-il,  pour  pri- 
vet de  votre  bienveillance  oelte  villeqat 
vous  ^tait  si  chdre.  Si  vgus  nous  par* 
donnez,  vous  kur  ferez  souffrir  le 
suppliee  le  plus  rigoureux.  » Ensuite, 
il  rexborte  a  m^dter  par  la  cl^eoce 
oetie  cQwronne  de  la  vertu ,  plus  glo- 
rieuse  que  celie  qu'on  doit  aux  autres 
hommes.  «  On  a  reavers^  vos  statues; 
mais  vous  pouves  en  dcesser  de  plus 
pr^euses  dans  le  cceur  de  eeux  que 
vous  gouvernez ,  et  avoir  autant  de  sta- 
tues qu'il  y  aura  jamais  d'hommes  sur  la 
terre.  Pais  il  all^ue  a  Th^odose  ses 
propres  k>is  pour  o^livrer  a  Pdoues  les 
prisooniers,  et  cette  belle  parole  qu'il 
avait  ajout^ : «  Pldi  a  Dieu  que  je  pusse 
aussi  ressusciterlesroorts. »  —  «  Vousle 
pouvez  maiutenant,  dit-il,  et  vous  res* 
susciterez  toute  la  ville  d'Antioehe;  car 
elle  est  maintenant  dans  un  ^tat  pire 
que  la  captivity.  »  Enfin  il  int^resse  la 
pi^t^  de  Tb^odose  au  salut  d'Antioche : 
«  II  ne  s'agit  pas  seulement  de  cette  vilie, 
mais  aussi «  et  surtout  de  la  gloire  du 
christianisroe.  Les  Jui&  et  les  patens 
regardent  attentivemeiit  quel  parti  vous 
allez  prendre  :  montrez-leur  qu*un  em- 
pereur  chr^tien  sait  pardonner  les  in- 
jures et  les  oublier ,  a  Vexemple  de  notre 
divin  mattre,  qui  est  J&us-Cbrist. 
Honorez  done  notre  religion  par  votre 
cl^menee,  et  permettez  que  je  retourne 
avec  confiance  dans  notre  ville;  car  si 
vous  la  condamnez  je  n'y  rentrerai 
plus,  et  je  la  renierai  pour  ma  pa- 
trie. » 

(  A  la  pridre  du  saint  dv^ue ,  Theodose 
out  peine  k  retenir  ses  larmes,  etrevoqua 
la  terrible  sentence  qu*il  avait  portee 
eontre  Antioebe.  Cest  ainsi  que  le 
ebristianisme,  pare  de  si  grands  exem- 
pies,  se  reoommandait  h  Tamour  et 
a  la  reconnaissance  des  peuples.  Fla- 
vien  revint  h  Antioebe  pour  y  celebrer 
la  Pdque  avec  ses  fideles;  et  ron  aurait 
pu  croire,  k  voir  la  joie  commune  de 
oe  grand  peuple  et  la  reception  triom- 
phale  qu*il  avait  pr^parde  k  son  dvdque, 
quMI  n'y  avait  plus  dans  toute  la  ville 
ni  paiens  ni  bdrdtiques,  mais  seule- 
ment des  cbrdtiens.  Flavien  ordonna 
dans  toutes  les  ^lises  des  pridres  publi- 
ques  pour  la  prospdritdde  Tempereur; 


irefiM 


et  la  vietolre  que  ThMlese 
peu  de  temps  aprte  sur  W 
Ifaxime  parut  aux  peuples  uae 
signal^  du  ciel ,  qui  le  rdcofli[ 
sa  eldmence  par  le  succes  de  les 

USS  MOmSS  DB  JsA  SYBIB;  U 
TBBTBNTIOR  DANS  LBS  AFTAIXV 
BLIQUBS;     ILS     SONT    BBPBWiS 
L'BMPBBBOB    BT  lbs  BViQCBS. 

paratt  que  Tintervention  r^eente 
moines  et  des  solitaires  dans 
res  d* Antioebe  avait  d^lu  k  Vemi 
Cdtait,   en  effet,  un  desordn 
^rave  et  dont  la  freguente  r^i 
importunait  les  mazistrats, 
dans  une  ville  on  allait  coi 
coupable,  oes  moines 
leurs  moutagnes ,  et  venaient 
sagrdce.  Si  les  mazistrats  la 
le  peuple  s^ameutait  eontre  eux.  i 
oours  naturel  de  la  justice  rests 
pendu.  En  390 ,  Theodose  fit  im 
qu'il  adressa  au  pretet  du  pretoin 
rient ,  par  lequel  il  enjoignait 
nes  de  ne  pas  sortir  de  leurs 
JDu  reste,  cette  loi  n*eut  pas  le 
d'etre  executde,  card^  Tann^e 
Theodose  la  revoqua. 

Parmi  ces  moines  vagabonds  qni 
blaient  le  repos  de  la  Syrie,  il 
compter  les  messaliens  ou  rosi 
secte  de  fanatiques  qui  faisaieot 
sion  de  renoncer  au  monde.  L* 
de  cette  hdr6sie  6tait  un  nommi 
gui ,  par  une  piete  mal  eotendiie, 
a  la  lettre  quelques  passaoes  de 

§ile  ou  il  est  recommande  de  se  d 
e  tout,  et  de  ne  travailler  point  pi 
nourriture  qui  pdrit,  mais  poor 
qui  demeure  dans  la  vie  dternelle.  1 
se  (it  eunuque,  vendit  ses  biens,  ^ 
fit  une  loi  de  demeurer  dans  la  plail 
goureuse  oisivetd.  II  fit  consister  R 
senoe  de  la  religion  dans  la  priere.  U 

Sue  par  la  priere  rbommes*etaitd^ 
u  ddmon,  qui  Tobs^ait,  seloii  Sal 
depuis  rbeure  desa  naissance,  il  nafli 
tenait  plus  de  cause  de  p6che,  flt 
Saint- Esprit  descendait  alors  dans  rl 
purifi^  A  force  de  prier  fliOiM 
egalait  Jesus-Christ  lui-m^me. 

Ces  eotbousiastes  s'etant  dtabos 
£de$se  menacaient  toute  la  Syrie; 
Flavien  6tait"  decide  k  rdpriraer 
leurs  dfeordres.  II    se  fit  arpener 
principaux  cbe£5  par  une  troupe  deiaor 


SYRIE  ANCIENNB, 


161 


nes,  et  te  repentir  peu  sincere  que  quel- 
oues-uns  teinoigDerent  ne  les  sauva  pas 
oe  la  condamnation.  Plusieurs  6v6ques, 
parmi  iesquels  se  trouvait  celui  de  S^- 
ieucie,  s'assfmbl^nt  en  concile  avec 
Flavien  et  trente  pr^tres  ou  diacres 
d'Antioche.  L'anatMme  eccl^siastique 
discr^ita  dans  tout  FOrient  cette  secte 
inotiie  et  dangerease. 

MOBT  DB  PA.UL1N ;  LBS  DISSrDBNTS 
LUI  DOIfNBNT  EVAGHB  POUR  SUCGES- 
SEUR ;  IBS  EViQUES  d'OCCIDENT  AG- 
CCSBNT   FLAVIEN,    QUI    EST    DEFENDU 

PAB  THi^oDOSB.  —  La  pi6t^ ,  la  yigilance 
dont  Flavien  avait  doniie  tant  de  gages  k 
TEglise  d*Antioche  n*avaient  pu  encore 
faire  oublrer  le  yice  de  son  Election.  Pau- 
)in,quelqne  temps  avant  sa  mort,  arrive 
en  388 ,  avait  ordonn^  pour  son  succes- 
seur  £vagre,  fils  de  Pomp^ien;  et  les 
Ocddentaux,  comme  T^v^ue  de  Rome, 
Tavaient  re^u  sans  difficult^  dans  leur 
communion.  Fort  de  cette  protection, 
(vagre  eut  la  hardiesse  de  citer  Flavien 
au  concile  de  Capoue,  en  891,  pour 
dtfendre  son  droit  au  si^e  d'Antioche. 
Leconcile  renvoya  J'affaire  h  la  d^sion 
des  ^vdques  d'£gypte ;  mais  Flavien  ne 
▼ottlut  pas  les  reconnaftre  pour  ju^es. 
Le  pape  s'etant  plaint  de  cette  OMtma- 
tioOfWodose  maoda  Flavien  a  Gons- 
taiitinople,  et  le  pressa  d*aller  k  Rome 
pour  se  disculper  aupres  des  Occiden- 
taux.  Flavien  refusa ,  et  offrit  de  ci6der 
la  place,  mais  de  bon  gre ,  et  sans  juge- 
ment.  Theodose ,  touchy  de  cette  g^n6- 
rosite,  le  renvoyadanssaville,  promet- 
tant  de  le  defendre  contre  les  ^vdques 
d'Orcident.  L*occasion  ne  lui  manqua 
|M :  itvagre  niourut  peu  de  temps  apres, 
tt  Flavien ,  favorise  par  les  ofBciers  im- 
p^riaux,  emp^cha  que  les  dissidents  ne 
lui  donnasspnt  un  successeur.  £o  894 , 
les  Occidentaux  se  plai^nirent  encore ; 
mais  Theodose  les  reduisit  au  silence, 
en  leur  couselllant  d'entretenir  la  paix 
de  l^iise,  au  lieu  de  la  troubler,  et 
Flavien  resta  seul  et  tranquille  possesseur 
da  siege  d*Antiocbe. 

LA  8UPBBMATIE  DE  L*EV£qUE  DB 
CONSTANTINOPLE  8UR  LBS  AUTBBS 
BV^UES  DE    l'OBIENT    GOMMBNGE    A 

s*BTABLiR.  — Vers  394  il  se  tint  ii  Cons- 
tantinople un  concile  auquel  Flavien  as- 
>ista ,  avec  presque  tous  les  m^tropoli- 
tains  des  provinces  de  TOrient :  Fleury 

11*  Livraisan,  (Syrib  angibnne. 


remarque  avec  etonnement  que  Nectaire 
de  Constantinople  pr^ida  h  ce  concile 
avant  les  patnarcnes  d'Alexandrie  et 
d'Antioche.  La  ville  imp^riale  eommen- 
cait  a  s*attribuer  sur  tout  I'Orient  une  su- 

{')r6matie  spirituelle  qu'elle  devait  garder 
ongtemps.  On  discuta  dans  ce  concile 
un  point  d^licat  du  droit  canon,  h  sa- 
Yoir  si  trois  ^v^ques  suffisent  pour 
deposer  un  pr^lat.  II  fut  d^cidd  qu'une 
deposition  ne  pouvaft  se  faire  qu'en 
presence  d'un  concile  proYincial  :  Fla- 
vien approuva  cet  avis. 

MOBT    DB    THEODOSE.  —  Tb^doSC 

mourut^  Milan,  en  donnantses  derniers 
soins  h  r^tat  des  £glises.  Ses  deux  fils  se 
partag^rent  Tempire  :  Arcadius  eut  TO- 
rientetHonoriusrOccident.  Flavien,  qui 
devait  tant  a  Theodose,  le  recommanda 
aux  pri^res  publiques  de  son  £glise,  et 
rhonora  par  )es  larmes;  car  cet  illustre 
empereur  avait  6te  pour  lui  plus  qu*uii 
protecteur  :  c^etait  un  ami  d^voue,  qu'il 
regretta  toujours.  La  ville  enti^re  pleura 
Theodose;  car  elle  lui  devait  son  salut, 
et  le  souvenir  de  sa  cl^mence  ^tait  encore 
present  h  resi)rit  de  tous  ceux  qui  avaient 
failli  p^rir  victimes  d'une  iroprudente 
rebellion. 

SAINT  JEAN  GHRYSOSTOME  PREND 
POSSESSION  DU  SIEGE  BP18G0PAL  DE 
CONSTANTINOPLE;  MOBT  DE  FLAVIEN. 

—  Peu  de  temps  apr^s,  T^lise  d'An- 
tioche eut  un  autre  sujetd'afuiction.  En 
898  Nectaire  ^tant  mort ,  Tempereur  Ar- 
cadius pensa  h  le  remplacer  par  le  pr^tre 
Jean  d'Antioche,  que  nous  d^ignerons 
maintenant  sous  le  nom  (jui  le  rend  it  il- 
lustre, Chrvsostome.  Mais  il  6tait  si  cher 
h  la  ville  enti^re,  qu'il  fallut  I'enlever 
secr^tement  d'Antioche.  Sans  cette  pr^ 
caution,  une^meute  edt^lat^;  car  Jean 
Chrysostome  ^tait  I'ami  de  tous  les  pau- 
vres  et  le  consolateur  de  tous  les  aflliges. 

Le  premier  soin  de  Chnrsostome, 
dans  sa  nouvelle  dignity,  fut  encore 
pour  sa  cliere  £glise  d'Antioche  :  par 
son  entremise,  rev^ue  de  Rome  et 
les  Occidentaux  consentirent  enfin  a 
recevoir  Flavien  dans  leur  communion , 
et  la  paix  fut  ainsi  r^tablie  entre  les 
deux  capitales  du  monde  Chretien;  ce 
qui  etait  le  voeu  de  tous  les  fideles,  et 
le  souhait  de  Th<k>dose  inourant. 

Les  derniersjours  de  Flavien  ne  furent 
pas  heureux.  Les  malheurs  de  Chryso8« 

)  It 


162 


LUWIVERS. 


3 


tome,  que  nous n*avons  pas  h  racouter 
ici ,  curent  un  lon^  ct  douloureux  re- 
tentissement  h  Antioche  :  sa  m^moire 
y  ^tait  encore  vivante ;  et  Flavien ,  mal- 
gr^  toutes  les  instances  que  les  Orien- 
taux  Grent  aupres  de  lui,  ne  consentit 
jamais  h  la  condamndtion  d*un  ev^que 
que  pentlant  douze  ans  it  avait  trait6 
en  frere  et  en  ami.  Ce  triste  6venenient 
aiHigea  sa  vieillesse,  et  Ton  peut  croire 
uMI  h<1ta  sa  mort  (404)  apr^s  (Jix-sept  ans 
'un  piiniblp  mais  plorieux  episcopat. 
Si  nousavons  particulierenienl  insist^ 
sur  cette  periodede  Tlustoire  de  Ttglise 
de  S^'rie,  c*est  qu'il  nous  semble  que 
Flavien  doit  y  tenir  le  premier  rang  : 
ses  rapports  avec  Theodose ,  mais  sur- 
tout  la  saintet^  de  sa  vie  toute  devouee 
k  son  flglise,  le  recommandai'^nt  k 
notre  attention.  Nous  devions  honorer 
Ic  sauveur  d'Anlioclie,  et  representer 
en  lui  ce  type  de  I'^vfique  chrelien  des 
premiers  siecles  de  rfglise,  qui,  pen- 
dant que  les  paiens  s'eiifuient  ae  la 
viile  condamn^e,  se  devoue  seut  au  saliit 
de  son  troupeau,  et  s'oftVe  a  la  colere 
de  Fempereur,  viclime  volontaire  d'un 
crime  quMl  n^a  pas  com  mis. 

POBPHYRE  S*EHPAI&E  BU  8IEGS 
EPISCOPAL  d'AISTIOCUE  PAB  LA  Rl'SE; 
SA  HAINECONTRR  SA1^T  JEAW    CHBY- 

SOSTOaJB;  SES  mgeubs  depbavees. — 
Constance,  prdlre  d'Antioche,  amide 
Flavien  et  de  Clirysoslonie,  6lait  de- 
si$;ne  par  le  vqcu  de  tous  les  Gdeles  et 
par  Teclat  de  sa  vertu  au  rhoix  du  peu- 
ple  el  du  clerge;  mais  le  pr^ire  Por- 
phyre  euncmi  personnel deClirysostome 
r,  etdeorie  depuis  loniitcmps  par  I'infamie 
•'  de  ses  mccurs,  iutriiina  aupres  des  of- 
ficiers  imperiaux  et  obtint  centre  Cons- 
tance un  edit  de  bannissement.  I)e- 
livre  de  ce  puissant  rival,  il  avisa  aux 
moyeiis  de  tromper  le  peuple  :  il  choisit 
le  jour  d'lme  fete  soleniielle  ou  toute  la 
ville  d'Antioche  6tait  hors  des  mnrs,  et 
sYtait  portee  au  bourg  de  Daphne, ou  se 
celebraient  des  jeux  chers  a  la  foule.  II 
eiitra  secrelemrnt  dans  Teglise,  et  se  fit 
ordonner  par  trois  evfiques;  mais  avec 
tant  de  precipitation,  qu*ils  ne  purent 
pas  finir  les  prieres  d'usage.  Le  peuple, 
a  la  nouvelle  de  cette  furtive  Election, 
qui  donnait  pour  suecesseur  au  pieux 
Flavieu  un  homme  perdu  de  debauehe, 
.  assiegea  sa  muison ,  et  voulut  le  brOler 


\il\  maU  Porphjrre  appt la  a  soi 
le  comte  Valentin  avec  ses  laaium, 
attaquerent  le  peuple,  etpiUvett 
sieurs  villes  aux  environs  4'AAtii 
Les  armes  de  ces  bligafids  ne  Mi 
rien  oontre  rindignation  des  Sdcfai 
s'assemblerent  secretement  dm 
nrincipales  maisons  d'Antioche,  €lij 
donnerent  T^glise  :  oe  fut  eo  ^m 
le  prefet  du  pretoire  de  ConstantiMi 
publia  un  edit  centre  les  dissidnls, 
parti  des  lideles  d'Antioche  fut  er»-" 
par  le  pape  Innocent  I ,  qui  oe 
jamais  communiquer  a>ecrevteie 
trus.  La  inaiheureosef^lise  dAl 
che  semblait  6lerneileDieut 
au  schisme  (*). 

Elle  eujt  bientdt  un  noaveaa  | 
d'nflliction  dans  la  mort  d'ua  #  ^ 
plus  chers  enfants ,  J«aa  ChryiocM 
qui  mourut  en  407,  malbeureus  <lf^ 
secute  iusqu*a  son  dernier  jour,  ftf  < 
a  ses  funerailles  une  foule  iouMM 
viergeset  de  moines,  auietaieoiaM 
de  tous  ies  points  de  fa  Syrie. 

Porpliyre  n'avait  pas  ^pargn^ 
sostome,  et  Ton  peut  croire  q/MMi 
fut  pour  lui  un  eveneineut  hci~ 
car  if  le  detestait  et  k  oraignaitd 

r)«M«roe1lmi,  «v«(|iie  d*ATwm<eaJi 
eotre  auVr(«,  te  nit  eu  mtrdie,  a  UW' 

troupe  dt*  giadutpurs  armesi,  pour  doT 
temple  d*AuIon  [a).  Les  pfiTens,  «>'«*• 
desacim,  I'aauitUrtfnt  avecdn  forcfs  »ir 
aux  kit*Dfit«,  et  le  valnquirmt  oumii 
d<'<ns  uii  coml)at  ou  re\^uf  paja  ik  n  « 
\1olenoe  qu'il  avail  voulu  comiuellWi* 
divalent  condamner  tous  ies  coAn  ' 
aunbi  bleu  que  la  vraie  oiorale.  Ut<---_^ 
Marcellus  iivaleiU  form*  le  projel  <J«*<«JJ 
mort,  lorM(u'un  ronrll«  R'oppo»a«wip 
lui'Heit  read  foils  de  haines  el  de  mass^cjj 
meiia^aieol  d^armertuus  lei  dtoy<^o^ JJi! 
ctM.ire  les  autres  elde  uoj'er  reuijdrtjrw 
dans  le  sang  (|ue  fal.s;ill  VerstT  UiitOt  mw 
rautns  faualisine.  Le  coiicile  declara ,  pro* 
meal  pour  calnrier  lea  eftpritt,  car  on  »*rF™ 
croire  qu'il  fut  ooiuaincu  de  ce  quU  « 
que  la  mort  de  Peveque  Marreilus  w« 
belle  pour  gaon  se  permit  de  la  *'*''*'5 
moinJre  ven^teanoe;  el  il  onkMina  wj" 

graces  a  DIeu  d'axoir  app»-l6  a  lui  son  ""JJ 
ans  une  occasion  si  glorleuae,  Wj^niJ^ 
temoigner  le  plu»  peUl  regret  fic  «  p«»'"^ 
Potter,  L  11,  p.  640. 


••(«)  Anion  00  Aii!ocr*n«,  temple  bW 

fontalne  ou  Apoltoo  dUiNita  te  prU  de  H 

Marsyas.  nun  lotn  d'Apjioec.  .«»ni/ic. 

Marceflu*  avail  dt"]*  rciiverrt  le  brao  SS  S 

dVau  binlle,  le  dlabip  qui.  di!«i4-oivIe  t«am 
p.aaa. 


SYBIE  AllGIENNE. 


168 


mf&.  H  surr^ciH  quelqucs  aoata  a  oe 
laiut  evique,  H  mourut,  comme  W  avait 
li^  dans  le  m^pris  4«  tous  l«8  fidelea. 

Dais  elles  ne  fureut  pas,  oomme  eellft 
deJean  CbrTsostonM,  oro^parleiieuU 
et  leg  larmes  publioiiea ,  qui  sont  la  plus 
beil€  decoratioD  cruu  tombeau  (413). 

L'BT^QUI  ALBXAROBB;  SBS  BOSIBrBS 

iNTsmrrons ;  sa  piAtb;  il  bxcoso 

UK  L'EGLlJiS  D  OEIBNT  AVKG  GBLLS 
D^OCCIDENT;  S£S  aappobts  avbg 
L*BGUSB  DB  lOKB.  —  On  kit  douna 
pour  niceesseur  Ahsxandro,  hamme 
pieix ,  nourri  dans  la  vie  nroaastique , 
et  dont  ia  charite  promettait  k  toute  la 
Syrie  le  meilleur  den  patriar^es.  Son 
^fMoopat  fut  signale  par  deux  eT^uementa  * 
^i  attirerent  sur  r^slise  de  Syrie  lea 
iegards  de  tous  ks  fldeles  r  nous  vou* 
Was  parler  du  r^tablissement  de  la 
eommumon  d^Occident  avec  Antiocbe, 
etdaeoQciiede  Diospolia  ou  fut  jug^ 
Pdage. 

ii  ^it  Thery6  b  Tardente  oharhd 
d*Aieundre  d^^teindFe  ee  long  scbisme 
qui  dirisait  Antioclie  depuis  Texil  &^ 
saint  EusiBlhe,  c*est-a-dire ,  depuijT 
<|uat^^Titt$n<inq  aas:  ses  exhortations, 
pieioes  de  piete  et  de  douceur,  touchd' 
rent  les  c(£urs  des  rebetles ;  et  Antioc))6 
^  Ufl  spectacle  dont  eHe  se  souvi n  t  long- 
l^nps.  Alexandre,  s'^tant  mis  a  la  t^te 
<fe  100  clerj?^,  iraversa  la  ville,  et  se 
rendit  k  ia  maisoo  oOt  les  eustathiens 
s'eiaienl  fjssembles. 

l^Tsqne  le  saint  ev^e  entra ,  II  les 
Irouva  qui  chantaient  les  louanges  da 
S^'gneur;  il  s'unit  a  leurs  chants  avec 
tous  ses  pr6tres ,  et  s*  remettant  en 
niarche,  if  les  ennnena  processionnelle* 
jWfflt  a  I'eglise  nrincipafe  au  milieu  de 
la  loule  dcsjuirs  et  de>  heretiques  qui 
gemissaient  de  cette  heureuse  rennion. 

Mais  un  tel  succ^  ne  sufOsait  pas 
« ia  piete  d'Alexandre  :  c*6tait  un  grand 
Kandale,  dans  toute  la  chretient^,  de 
»oir  divisecs  de  communion  les  deux 
g/andes  metropoles  de  Tftglise,  celle  de 
I  Orient,  et  cclle  de  I'Occident,  Rome 
wAntioche.  Alexandre  saisit  cette  heu- 
IJuse  occasion  de  la  reunion  des  eusta- 
Jjtns  pour  demander  la  communion 
fl^lonocenl.  Cetait  le  plus  vif  desir  de 
jc  saint  ponlife ;  aussi  la  reponse  ne  se 
ut-elle  pas  attendre.  inuoceiit  r^oudit 


i  la  lettre  d' Alexandre  par  une  epttre 
fynodaie,  souserifee  par  vingt  ev^quea, 
4tti  approuvait  lout  oe  qu'avait  fatt 
Aknandre ,  et  r^CabliaKtt  l*£glise  d'Aa- 
tioehe  dana  la  eonsmunkm  d'Oocideat. 
Iniiocent  toivit  k  Alevandre  uoe  lettre 
partieulidre  ou  il  le  f<61icitait  de  cet  heih 
reux  suGoes  et  lui  t^moigoait  la  plus  Tive 
amiti^ :  «  Je  te  saiue,  maH-iK  ^  oaon 
«  frere  ea  Jesus-Christ,  toi,  et  toute 
«  cette  figliae  qui  t*esi;  si  unie  :  j*es« 
t  p^qwe  DieuHous donnera  de  repa- 
«  rer  la  parte  du  pass^.  et  d^entreten  r 
«  notre  amiti^  par  no  doisx  oomnaeree 
c  de  lettres  (*).  *  P^u  de  temps  apres. 
Innocent  ecrivit  enoore  k  Alexandre  une 
lettre  decretals  pour  fixer  quelques 
points  de  discipline  :  par  oette  lettre  il 
remet  les  6v^ues  de  Chypre  sous  la  d^ 
pendanee  immediate  du  patriarehe  d'Aa* 
tioche.  U  defend  nue  Tfiglise  suive  tous 
iss  cbangeinents  du  gouvernement  tern* 
porel ,  et  qu'une  proviace  divis^  em 
deux  ait  pour  cela  deux  mdtropoles.  En- 
fin  ,  il  defend  d*admettredans  lerainistere 
eccl^jastiqueles  elercs  des  ariens  ou  dea 
autres  heretiques  qBi  revieaneot  k  VA- 
glise :  car,  encore  que  leur  bapteine  soit 
▼alabie,  if  ne  leur  eonfere  paa  la 
grflce  (**). 

Une  des  conditions  impos^es  par  In- 
nocent k  Alexandre  pour  rentrer  dans 
la  commnnion  des  Oceidentaux  ^tait  de 
r^tablir  le  nom  de  Chrysostome  dans  les 
diptyqueseccl^siastiques.  €*^ait  un  doux 
devoir  pour  Alexandre ,  qui  ven^rait 
d^une  piete  filiale  la  m^moire  do  saint 
^v^que  persecute  II  rendit  sans  examen  a 
Eipide  de  Laodic^e  et  k  Papon's  leurs 
^lises ,  dont  ifs  avaient  4t6  u^pouill^ 
par  Porphyre,  et  ne  re^ut  k  sat  commu- 
nion AcaciusdeBero^^enrteml  de  Chry- 
sostome, que  quand  il  fut  eonvaincu 
dela  sincerity  de  son  repentir.  Lezele 
d'Alexandre^tait  si  vif,  que,  dans  un 
voyage  qu'il  fit  k  Constantinople,  il  ne 
craignit  pas  de  parler  hardimeiK  devant 
le  pen  pie,  et  de  rappeler  les  vertus  de 
Clirysostome ,  injuslemcnt  condamn^ 
dans  cette  £glise  qu'il  avait  vouiu  re- 
former. 

(*)  Epist.  XVI  Innocfnt.  Papa  I ,  ad  Alexan- 
drim  Antiochenum,  de  pace. 

(•♦>  Nqh  vi$mn  est  ad  nutbiiUaUm  ntcettHa- 
turn  mundaiiarum  iMi  BicleMtam  rpmmttian, 
etc.,  etc  ( EpUL  XVUl  InnocentU  Papaj. )' 

11. 


1<U 


LTJNIVERS, 


LB    Pil.A6IANI8KB;    CONGTLB     DB 
BIOSPOLIS:  GOIfDUlTB  DB  PBLAOB;  IL 

EST  ABSous.  —  La  reconciliation  d^fl- 
nitive  des  deux  m^tropoles  chretiennes 
comUa  tons  les  voeux  des  fideles :  cVtait 
iear  plus  cher  espoir,  et  ils  se  f^liciterent 
que  I'^^ltse  r^uott  toutes  ses  forces  par 
cette  paix  inesp^r^ ;  car  elle  avail  assez 
a  fahre  contre  ses  ennemis  du  dehors ,  les 
h^r^ques ,  qui  mena^ient  tous  les  jours 
la  puret^dela  foi  catholique. 

La  doctrine  de  Pelage  commen^it 
k  se  r^pandre  dans  TOrieat.  Le  p^ril  etait 
imminent;  ear  Pelage  dtouisait  les 
crojranoesuniversellement  aocept^s  par 
r£glise.  L*homme>  selon  lui,  nattbon, 
et  par  Teffort  de  sa  propre  vertu  il  peut 
se  rendre  impeocable;  mats  alors  que 
devient  le  dogme  du  p6che  originel  et  de 
la  n^essit^  de  la  grdce?  Par  le  p^h^ 
originel ,  I'homme,  dechu  de  ses  hautes 
destinees,  est  condemn^  a  la  mort  et  au 
pech^;  mais  la  ^rdce,  qui  est  un  don 
de  Oieu,  le  reieve  de  cet  abaissemeiit 
et  lui  rend  Tespoir  en  lui  rendant  la 
purete  perdue  par  la  faute  de  son  premier 
pere.  La  grdce  a  6t^  introduite  dans  le 
monde  par  les  mantes  infinis  du  saogde 
Jesus-Cnrist ,  immol^  pour  le  salut  des 
hommes  :  tel  est  Tenseignement  de  r£- 
glise.  Mais  si  Thomme  par  son  propre 
effort  peut  s*exempter  de  tout  p^^, 
la  grkee  devient  un  don  inutile,  et  le 
sacrifice  divin  perd  tout  son  prix.  Cette 
doctrine  attaquait  Tl^liseetia  minait 
par  sa  base,  en  rejetant  le  dogme  le  plus 
sacre  quelle  enseigne,  le  dogme  de  la 
R^emption.  Aussi ,  r£glise  s'emut  a 
Tapparition  du  p^lagianisme,  qui  faisait 
de  rapides  progr^  en  Occident  et  en 
Orient,  et  tous  les  plus  i  I  lustres  per- 
sonna^es  qu*elle  comptait  alors  parmi 
ses  defenseurs  s^empresserent  d*ecrire 
contre  le  novateur  et  de  le  designer  k 
Tanath^me  des  ^v^es.  Saint  Au^ustin 
s'illustra  dans  cette  grande  querehe;  et 
saint  J6r6me  lui-roeme  ne  voulut  pas 
mourir  sans  condamner  cette  redouta- 
ble  h^r^ie.  Oil  tint  un  concile  k  Jerusa- 
lem, auquel  assists  Orose.  II  ne  s'y  fit 
rien  de  bien  remarquable,  et  les  Orien- 
taux  soupconnerent  Tev^que  Jean,  qui 
pnteidait  rassembl^e ,  de  n  avoir  pas  lui- 
m^nie  une  foi  tres-pure. 

En  415  on  convoqua  un  autpe  concile 
h  DiospoliSy  ville  de  Palestine  comprise 


dans  le  patriarcat  d' Antioche :  qnatom 
^v^ues  y  assistaient,  parmi  lesquds  on 
remarouait  Euloge  de  G6saree,  Jeande 
Jerusalem,  Ammonien,  Porphyre  de 
Gaza ,  Jovin  d*Ascalon  et  tieutnert  de 
Jericho.  L*objetde  ce  concile  ^i(  i'exa- 
men  des  doctrines  de  Pelage,  aue  denoo- 
caient  dans  un  libetle  deux  ^yeqoesgu* 
lois  chass^  de  leurs  sieges,  Erosd'Arlei 
et  Lazare  d*Aix.  Pelage  fvX  cit^;  mais  il 
sut  si  bien  prendre  son  temps,  qa'il  k 
pr^enta  dans  Tassembl^  pendant  r«li> 
seneede  ses  denx  accusateurs,  dontrn 
▼enait  de  toniber  grieveroent  malade.Le 
jugeroent  commenca  aussitdt;  mais  Pe- 
lage avait  tout  Tavantage  :  TabsefKedi 
ses  accusateurs  et  sa  facility  a  parlerli 
languegrecQue  lefavorisaientbeaucoop: 
car  le  Tihelle  ^tait  ecrit  en  latin,  eti 
fallait  en  traduire  cheque  article  nn 
^v^ques.  Vcici  les  principaux  pomtsdeli 
doctrine  de  Pelage  qui  y^taient  exposes: 

P  Qu'Adam  avait  ^t^  cr6e  mortri,  et 
qu*il  serait  mort  m^me  sMl  n'eOt  pas 
p^ch^; 

2»  Que  son  p^^n'^tait  ntaM(f» 
sur  lui-mlme,  et  non  sur  le  genie  to* 
main ; 

3""  Que  les  enfants,  k  leur  naissiiia. 
sont  dans  Tetat  de  purete  primitiTeoQ 
Adam  etait  avant  son  p^e; 

4*  Que  par  la  nriort  ou  la  prewricatifln 
d*Adam  tout  le  genre  bumain  ne  nieiBt 
pas ;  et  que  de  m^me  par  la  resurreetiw 
de  Jesus-Christ  tout  le  genre  bamaiaac 
ressuscite  pas ; 

b'*  Que  les  enfants  m^me  sansbaptMie 
peuvent  avoir  la  vie  ^ternelle ; 

6«  Que  les  riches  qui  oot  ete  baptiKS 
s*ils  ne  renoncent  pas  a  tous  leurs  bieasi 
ne  peuvent  avoir  le  royaume  de  Dieu; 

7»  Que  la  grflce  de  Dieu  nous  estdoa- 
n^  selon  nos  m^rites; 

8*  Que  le  libre  arbitre  n'exlstc  ptf 
s'il  a  besoin  du  secours  de  Dieu; 

9«  Que  notre  victoire  depend,  non* 
secours  de  la  grftce ,  mais  du  libre  aw 

Tout  cela  ayant^^  lu  successivemem, 
Pelage  se  disculpa  sur  tous  ies  artiHes, 
soit  en  6ludant  les  difGcuItes,  soit  « 
condamnaiit  les  doctrines  qu'on  lui  i^ 
putait.  11  protesta  de  la  puret^  de  sa 
toi ;  il  fit  sa  confession,  en  reprenaolfW* 

O  CoHciL  gen.t  t.  U  P-  MS. 


SYRIE  ANCIEVflSE. 


f6S 


am  des  artides  )'un  apres  Taatre;  et 
oette  confession  fut  si  coDforme  aux 
do^mes ,  que  le  concile  le  renvoya  ab- 
loos ,  et  le  r^tablit  dans  la  comniuDioa 
ecclesiastique  et  catholique.  Mais  Pelage 
aTait  trompe  tous  lea  ^v^ues,  et  sa 
eoofessioii  n'^tait  pas  sincere :  aussi  ce 
concile  o'a-t-il  aucune  autorite  dans  r£- 
fiise.  On  condamna  la  doctrine  attri- 
bueea  Peiage,  maisrheresiarque^happa 
a  ranathenie  :  saint  Jerdine  ( £ptt.  79 ) 
appelle  ce  concile  misiraUe  ( misercbi' 
km  iynodum ),  a  cause  de  la  ruse  de  Pe- 
lage; et  le  pape  Innocent  ne  voolut  ja< 
mais  en  confirmer  les  actes.  Toutefois, 
il  s*y  refusa  sans  accuser  les  ^v^ues 
prints  a  dl  concile,  et  11  mit  a  cette 
aflaire  delicate  une  louable  moderation  : 
«  Nous  ne  pouvons ,  dit-il ,  ni  accuser  ni 
«  condamner  le  jugement  de  cet  evdque : 
•  il  parattrait  que  Pelage  s'est  soustrait 
«  par  fraude  a  ranatheine  plut6t  que  de 
«  se  justiGer  en  toute  verite  (*).  » 

LES  BTiQUBS  ALSXANDBX  ET  TBJBO- 

BOTE.  —  L'^glise  de  Syrie,  delivree  du 
perfl  de  Fberesie,  jouit  d*une  paix  f)ro- 
ibode  sous  le  sage  gouvernement  du  pa- 
triarche  Alexandre,  et  sous  celui  de  1*^- 
▼6que  qui  le  rempla<^  en  422 ,  le  pieux 
Tbeodote ,  que  recommandaieut  aux  fi- 
deles  la  puret^  de  sa  vie  et  sa  profonde 
eoonaissance  des  dogmes  de  la  foi.  11  si- 
gnala  son  episcopal  par  la  reunion  a 
fEgiise  de  ce  qui  restait  des  anciens 
apollinariste8,sectetombee  depuis  long- 
temps  dans  un  discredit  universel. 

A  la  mort  de  Theodote,  qui  arriva 
en  42S,  rhistoire  de  r£glise  de  Syrie 
denent  eonfuse  et  difGcile  a  suivre  : 
d'ailleurs,  elle  perd  peu  a  pen  de  son  in- 
t^r^t  :  Antioche  est  reduite  au  troi- 
ociBe  rang  des  patriarcats  orientaux  : 
son  si^e  est  occupe  tour  a  tour  par 
plusieurs  ev^ues  her^tiques,  et  toute 
factivite  de  ses  pr^lats  orthodoxes  se 
reportesur  de  miserabies  subtilites  theo- 
logiquesqui  marquent  dans  tout  TOrient 
les  dermers  siecles  de  la  domination 
imperiale.  Le  temps  n*est  pas  loin  ou 
FAsie  va  subir  Tinvasion  musulmaue; 
K ,  a  mesure  que  la  foi  s'altere  dans 


(*)  Non  pouumuM  illomm  epUoopomm  nee 
aiptnye  nee probare  Judicium ,  cum  netciamuM 
•irum  vera  Mint  gftta,  out  ri  vera  nonsint; 
eemMUt  -magis  Muhterfuaiste  guam  ae  iota  ve« 
«Uale^«ry«riMe.B«ioiuiu,^«fi.  416* 


rOrient,  elle  se  porifie  dans  TOccident. 
C'est  de  TOrient  que  s*est  lev^e  la  lu- 
niiere  du  cbristianisme,  mais  c*est  dans 
rOccident  qu'elle  brillera  de  tout  son 
eclat.  La  fiireur  des  berries  se  propage 
dans  cette  malbeureuse  £glised*Asie,  et 
la  divise ,  comme  pour  la  livrer  plus  fa- 
citement  aux  coups  des  musolmans. 
Mous  serons  bref  sur  cette  triste  p6- 
riode  de  I'^glise  de  Syrie. 

JEAN,  BviQUB  D'ANTIOGHB,  PBBND 
PABTI  POUE  NBSTOBIUS  ;  SA  CONDAM- 

hation.  —  Le  pr^tre  Jean  succeda  a 
Th^ote  sur  le  siege  d'Antioche,  en  438. 
Ce  fut  de  son  temps  que  se  propag^nt 
les  doctrines  de  Mestorius ,  ^vdque  de 
Constantinople,  dont  il  avait  ete  le 
condisciple  et  Tami,  et  qui,  niant  IV 
nion  bypostatique  du  Verbe  avec  la  na* 
ture  bumaine,  siipposait  deux  person- 
nes,  en  Jesos-Cbrist.  Selon  Mestorius, 
la  nature  divine  s'est  unie  k  la  nature 
bumaine  comme  un  bommequi  veut  en 
relever  un  autre  s*unit  a  lui :  mais  elle  est 
restee  ce  qu*elle  etait  avant  cette  union : 
c^est  done  une  absurdite  d'attribuer  au 
Verbe  ce  qui  convienta  la  nature  bumai- 
ne; mais  I  £gliseenseigne,  au  contraire, 
Sue  le  Verbe  est  uni  a  I'bumanite  dans 
esus-Cbrist,  de  mauiere  que  rHomme 
et  le  Verbe  ne  font  qu'une  seule  per- 
sonne.  Cette  grande  querelle  de  Funion 
bypostatique  enflamma  tout  I'Orient. 
Samt  Cyrille  et  les  plus  illustres  ^v^ues 
6crivirent  contre  r«estorius  :  car  les 
consequences  de  sa  doctrine  attaquaient 
Tessence  m^me  du  cbristianisme.  S'il  est 
vrai  qu'il  n*y  ait,  comme  le  pr^tendait 
Mestorius,  qu'une  union  morale,  et  non 
substantielleentre  la  nature  divine  et  la 
nature  bumaine,  toute  feconomie  de  la 
religion  cbretienne  est  detruite  :  il  est 
clair  que  J^us-Cbrist,  mediateur  re- 
dempteur,  n'est^  en  d^nitive,  qu*uo 
bomme,  ce  qui  renverse  le  fondement 
de  la  foi  catbolique,en  attaquant  le  dog- 
me  de  la  divinite  du  Verbe.  Nous  n^en- 
trerons  pas  dans«rbistoire  des  srandei 
luttesquesouleva  cette  fameuseb^r^ie. 
Nous  atrons  seulement  que  Jean  d* An- 
tioche sembia  besiter  quelque  temps  en- 
tre  la  doctrine  de  son  ami  Nestorius  et 
celle  de  T^glise  catbolique.  Le  premier 
concile  d'Ephese  contre  Nestonus  s*^- 
tant  assemble  (431),  Jean  ne  s'y  trouva 
qu'apres  la  publication  des  dwrets  oon- 


LUNITEBS. 


tre  Th^rMarque,  et  foirma,  aree  ses 
ev^ues,  un  nouveau  concile  ou  il  aceusa 
GyriiJe  et  proD(w^  sa  deposition.  Le 
ooucile  legitime  le  fit  oiter  k  son  tour; 
et  oooiine  il  ne  se  pr^senta  pas  pour 
se  justilier,  les  ^vlqaes  le  deelar^rent 
avec  tous  ses  adherents  s^par^  de  la 
communion  de  fj^lise.  Mais  peu  de 
temps  apres,  soit  qu*il  reconnQt  la  v6- 
rite,  soit  quil  obeit  aux  instances  de 
ses  amis ,  it  fit  enfin  h  paix  avee  saint 
Cyrillje,  <t  condamua  IXestorius.  ii 
mourait  en  441 ,  apres  onze  ans  d'^pis* 
copat. 

LBS     SYiQUBS     DOMIfUS,     MAXIMS 

BAsiLB,  AGACIU8.  —  Domnus  II ,  neveu 
de  Jean,  gouverna  Antioclie  pendant  buit 
ans  et  fut  ensuite  relegii^  en  Palestine 
par  le  faux  eoDoiie  (plus  oonnu  sous  le 
noiil  ^ebriffmndageaEpMse)^  qui  sou- 
tenait  Th^ff^sie  d^Eutycti^s.  Sous  Maxi- 
me ,  qui  lui  succeda  eontre  toutes  les 
r^les,aaos  rassentimentdu  peupleni  du 
cterg^  d'Aotioche,  rabaissementdeeette 
£gliseoommen^  a  se  manifester.  Apres 
quelqoe  nfeistance,  ce  patriarche  inlidelo 
a  son  devoir  el  a  ses  droits  eut  la  fai- 
blesse  de  permettre  que  son  si^ge  ne 
ttnt  plus  que  le  troisi^me  rang  entre 
les  ^lises  de  TOrient.  Basile  et  Aca- 
ckis  lui  succMerent  sans  laisser  aucune 
trace  de  leur  administration  dans  r£- 
clise  de  Syr!€.  Sous  le  dernier,  en  469, 
la  ville  if  Antiocbe  fut  renvers^e  par 
un  horrible  tremblement  de  terre. 

MABTYBfUS;    PIBBBB  FOULON;   Vir 
OLtSB  DB  8YBIE  EST  DIYISBB.  —  L'l6* 

glisedeS^rie  avait  perdu  tout  son  credit 
ans  rOrient :  elie  ^tait  tout  eiitiere  di- 
vis^e  entre  Marty rius,  ^v^que  legitime, 
et  Pierre  Foulon,  her^tique,  qui,  par  ses 
intrigues ,  for^  son  rival  k  quitter  son 
si^e :  Martyr ms  se  retire  avec  de  nobles 
parole^  :  «  Je  renonce,  dit-il ,  k  un  cierg^ 
«  d^sob^issant ,  h  un  peuple  obstin6 ,  k 
«  une  j^^^lise  souill^,  me  r6servatit  la 
A  seule  dignity  du  saoerdoee.  »  Ges  sim- 
ples mots  peignent,  mieux  que  ne  le 
feraient  de  longs  discours,  mat  cor* 
rompu  et  miserable  de  Tl^glise  de  Syrie 
k  eette  4poque.  Nous  n*entrerons  pas 
dans  le  r^eit  fastidieux  des  intrigues  de 
Pierre  Foolon ,  trois  fois  chasse  d' An- 
tiocbe ,  et  trois  fois  installe  par  la  force 
deaaranetsur  oe  siege  episcopal  qu'a- 
▼aientlionori  lesyertus  deFlavien.  De 


470  k  48S  ee  ne  farent  que  des  4fo- 
sensions  et  des  guerres  dans  toute  h 
Syrie ;  a  Pierre  Foulon  succ6da ,  en  490, 
on  autre  b^rettque,  Paliadius,  ardent 
monopbysite  :  Flavien  II,  Severe,  aug- 
ment^rent  encore  le  mal  que  Pierre 
Foulon  avait  fait  h  Vt,^}ise  de  Syrie. 
£n  626  un  nbuveau  treinblemt^nt  de 
terre  renversa  Antiocbe  :  Euphrasiin, 
aiors  patriarche,  fut  ecras6  sous  les  rui- 
nes  de  la  viite. 

PAIX  A    ANT10CHB  SOUS    L*iF1SC0- 
PAT    d'BPHBBMB,    DOMNUS    til,   ETC. 

—  ^plir^me,  comte  d'Orient,  qui  avait 
soulasi;^  de  tout  son  pouvoir  le  p^- 
pie  d' Antiocbe  dans  cette  gramie  in- 
fortune,  fut  cboisi  par  lui  pour  IVpis* 
copat :  sous  ce  patriarche ,  la  Syrie  fut 
plus  tranquille  ouVlle  ne  Tavait  rt^, 
sous  lesautres  ^veques ,  deputs  Flavien. 
£pbreme,s*6taDt  joint  avec  lepalriarrhe 
de  Jerusalem,  assembla  un  synode  poor 
depose r  Paul  d'^AIexandrie  et  condaiuner 
les  tents  d'Origene  :  il  moorut  eu  54a. 
Uiie  p^riode  beureuse,  mais  trop  couiie, 
s'ouvre  pour  rftj;lise  d^Antioche.  Dom- 
nus HI,  Anastase  1^,  Gregoire,  qdi  se 
justifia  des  calomnieS  d'un'infdme,  fa- 
rent  tous  ortbodoxes ;  et  les  fideles  esp^ 
r^rent  quelque  r^pit.  Mais  te  massacre 
d* Anastase  II  par  les  Juifs  et  la  fai- 
blesse  du  gouvernement  de  Phocas  leur 
firent  pre.ssentir  de  nouveau x  malbeurs. 
Le  siege  d'Antioche  vaqua  longtemps, 
a  cause  des  incursions  des  Perses ,  ^ui, 
sous  leur  roi  Oiosroes ,  ravagerent  im- 
pun6nient  la  Syrie. 

invASiort    DES    ababbs;    pin  dI 
l'histoibb   db   l'bglisb  de   STfilt 

—  Ce  n'eiait  la  que  Tan  nonce  d*une  plus 
grande  infortune  :  Mahomet  ^tiit  mort 
au  milieu  des  pr^paratifs  d*une  expedi- 
tion centre  la  Syrie  (632);  Abou-Bekre, 
apr^  lui,  pr^cha  la  guerre  sainte  :  *  A 
qui  combattra  pour  l)ieu,  Dieu  comp- 
tera  pour  chacun  de  ses  pas  sept  cents  bon- 
nes actions,  ii  luf  pardonnera  sept  cents 
pech^s  et  luiaccoroera  sept  c^ntsdegrcs 
d*hoiineur.  »  Aux  chretieus ,  il  disalt : 
«  Nous  vous  apportons  le  paradis  oa 
Tenfer;  choisissez  entre  Pislamisme ,  le 
tribut,  ou  la  mort  par  le  glaive.  »  Us 
Arabes,  rendus  invincibles  par  rentiioo- 
siasme  religieux ,  ne  devaient  pas  Itre 
arr^tes  longtemps  par  les  troupes  ener- 
vees  de  Tempire  gree.  «  Les  ByxantiDS 


STRIE  ANCIENWE. 


167 


oerfeistafent  gu^re  qo*a  Taidede  soldats 
topgers ;  comme  on  coupe,  disaient-ils, 
ie  diamanl  avec  le  diamatit,  ainsi  ils  op- 
posaient  aux  Arabes  musulmans  des 
Arabes  Chretiens.  Mais,grey^sdfmpdts 
Uminees  par  Tesprit  iJe  secte,  ia  Syne  et 
n£g>'ple  ^taieiit  devenues  pour  le  mains 
indifi'i^reiitess  nn  chaiigeinf  nt  de  domi- 
aation.  Piil6es  par  ieurs  propres  garni- 
BODs.  des  f illes  et  des  provinces  accej)!^* 
rent  m^e  avec  joie  lejoug  arabe,  espe- 
raotlrouver  plus  desecuntesous  iegou- 
vememeDt  des  kalifes  n.  » 

Damasfut  prise,  en  634,  le  jour  m^me 
iela  mortd'Abou-Bekre.  Bient6t,  aban- 
doROfc  par  Heraeiias ,  la  Syrie  emiere 
flit  tinre  sans  defense  aux  mains  des 
eoMiierants  (638),  et  Damas  devint  la  ca- 
pitate du  ooilvel  empire. 

•  Les  ren>eigi)ements  exacts  man- 
que t  sur  la  situation  des  cbr^tfens  son- 
mis  a  la  puissance  musulinane;  les  liis- 

C)  Otm.  U  ehtisi.  par  Id  D'  DaUInger, 

tIl,II.«8L 


toriens  arabas  n'en  disent  rien,  par  suite 
de  leur  m6pris  pour  tons  les  infideles,  et 
les  sources  chretiennes  de  Tbistoire  d*0- 
rient,  pour  le  septieme  9iecle,  sont  tout 
^  fait  insiiffisantes.  D'apres  Alinak3^n, 
Mahomet  aivait  accorde  des  g:aran!ies 
aux  chr^tiensd' Arable;  mais  en  inourant 
il  recommanda  a  ses  disciples  dene  plus 
tolerer  deux  religions.  La  disp.intioii  du 
christianisme  du  sdn  de  T Arable,  quoi- 
qu*on  n'en  puisse  precist  r  Tepoque,  fut 
complete.  Dans  les  paysconquis,  lesdes- 
tinees  des  Chretiens  furenl  tres*di verses; 
Bur  divers  points,  on  les  depoinlla  m^me 
de  Ieurs  eglises  C);  on  n'en  bissa  subsis- 
ter  que  septa  Damas,  et  la  defense  d'en 
Mtir  de  nouvelles  ainsi  que  de  nouxedux 
monasteresfaisaitespererauxvaiiiqtieurs 
qu'avee  le  temps  IVxlinction  de  TKvan- 
gile  suivrait  la  chule  de  ses  temples (**). » 

(♦)  En  666,  lea  Arabe»  brAlerent  Veviqne  d*i- 
inese. 

(••)  Ihid,^  p.  291 .  —  fmV  Ockley,  Cnnqitesi  of 
Pyria,  Pertia  and  Egypt  by  the  Saracens,  Lund., 
1707. 


APPENDICE. 

OmSIOlfS    SCCLiSIABTIQUES   D«  LA  SYBIE;   JURIDIGTION  d'ARTIGGHB; 
LISTES  D*BV£qUB8. 


Rousavons  dit  que  dans  la  hi^rarchie 
^  fglises  chretiennes  Antioche  au  con- 
Ql«deSic6e(32l)  occupait  le  troisi^me 
rang;eUele  conserva  )usqu*en  38  f.  Au 
tecooA  condle  oecumeniuue,  Flavien, 
nicoesseurde  Mel^iius,  ceaa  le  pas  au  pa- 
triarfiKde  Constantinople.  Malgr^  Top- 

C)sltioD  des  ^v^ques  de  Rome  et  d'A- 
laadrie,  cet  abamlon  des  droits  de 
r^lise  d' Antioche  fut  confirme  air  con- 
ale  deChalc^doine  (48 1). 

La  jurid.ctioD  ecct^iastique  de  laca- 
Ijtale  de  la  Syrie  n>n  res^  pas  moins 
wt  cousiderable  :  elle  s*etendait ,  des 
je  temj^  des  apdtres,  sur  la  Phenlcie  et 
b  Cilide.  Bientdt  elle  embrassa  tout 
'Orient,  et  iinit  par comprendre  treize 
iwvinces : 

r*  La  Syrie  premiere, 
T  La  Syrie  seconde, 
%"  La  Tbtodoriade. 


4*  La  Cilicie  prem?^, 

&•  La  Cilicie  seconde, 

6«  L'lsaurie, 

7«  ]>a  Commngene, 

8*  L'Osrhoeiie, 

9*  La  Mesopotamie, 
10®  La  Ph<  nicie  premise, 
It*  La  Plienicie du  Liban, 
12«  L'Arabie  Petree, 
13*  L'ile  de  Chypre. 

LaSyrie^taitseulesoumSsearadmims- 
tration direite  du  patriarche;  les  autres 
provinces  avaient  chacune  un  metropo- 
litaiu  presque  indepen>lant,  qui,  sous  la 
simple  suprematie  d'Antioche,  consa- 
crait  lul-indme  ses  suffrapnts. 

Au  sixiemesiecleretenaue  dupatriar- 
cat  fut  dimiuuee.  Laodic^,  detach^e 
de  la  Syrie,  fut  elevee  a  la  diguite 
de  m^tropole  de  la  Th^odoriade,  et 
TArabie ,  avec  le  consentement  du  pape 


168 


LTJNIVERS. 


Virile,  fut  reunia  par  remoereur  Jus- 
tinien  a  Feglise  de  JerusaleQi.  Deja 
rile  de  Cbypre  s*etait  rendue  inde- 
pendante,  auroxt^aXoc,  au  concila  d'£- 
phese  (481). 
L'Isaurie ,  a  son  tour,  fut  r^unie  par 


ViUc«. 

Abida. 
Abila. 
Adana. 

Alala. 

Alexandretle. 

Anasaiihe. 

AlTAZARBa. 


Antaradus. 

ANTIOCHE. 

Apamek. 

Aradus. 

Arethuse. 

Augustopolis. 

Balaoaea. 


Barbaliasus. 
Beroe. 
Beryle. 
Botrys. 
Byblos. 
Gastabala. 
Chalcis. 
Citidiopolis. 
C3iomoara. 
Corada. 
Coryciis. 
Cyrrhus. 
Da  MAS. 
Danaba. 
Dulichium. 
l^Diese. 
l^piphaiiie. 
^piphanie 
(  Uemaih }. 
Evaria. 
Eiiropus. 
FlavioiH>lis. 
Gabala. 


l*rovlncM. 


M«tropoles. 


Phenicie  a«. 

Damas. 

id. 

id. 

Ciliciti  i". 

Tarse. 

Ciliiie  a*. 

Anazarbe. 

Phenicie  a". 

Damas. 

Cilicie  a«. 

Anazarbe. 

Syrie  i'*. 

Antioche. 

Cilicie  ik\ 

l^leveeatirang 

de  metropole 

par    Tempe- 

reur  Jiulin. 

Phenicie  i'*. 

Tyr. 

Syrie  i". 

m 

Syne  a*. 
Phenicie  i'*. 

i> 

Tyr. 

Syrie  a*. 

Apamee. 

Cilicie  i«. 

Tarse. 

Syrie  a«,ct 

Apamee,  Lao- 
dicee. 

plus  tard , 

Hierapolis. 

Syrie  i". 
Phenicie  i". 

Antioche. 

Tyr. 

id. 

id. 

id. 

id. 

aiicie  a«. 

Anazarbe. 

Syrie  i'^. 
Cilicie  a«. 

Antioche. 

Anazarbe. 

Phenicie  a*. 

Damas. 

id. 

id. 

Cilicie  x". 

Tarse. 

Commagene. 

Hierapolis. 

Phenicie  a«. 

w      • 

id. 

Damas. 

Commagene. 

Hierapolis. 

Phenicie  a". 

Damas. 

Cilicie  a*. 

Anazarbe. 

Syrie  a«. 
Phenicie  a*. 

Apamee. 

Damas. 

Commagene. 

Hierapolis. 

Cilicie  a  . 

Anazarbe. 

Syrie  i". 

Antioche.  Ga- 

bala  fut  reunt 
par  Juslinien 
a  la  Th^do- 
riade. 


Tempereur  L6on  risaurieo  au  patriar- 
cat  de  Jerusalem. 

Nous  donuerons,  d'apres  Lequien,  la 
liste,  par  ordre  alphabetlque ,  de  toates 
ies  ^iises  qui  coutiouerent  a  relevcr 
d* Antioche  : 


VlUes. 

Gabba. 

Geruianicia. 

Gindanis. 

Helio|)oli8. 

Hierapolis. 

Jambruda. 

Irenopolis. 

LAODicix. 


Laodiceedu 

Li  ban. 
Larissa. 
MalUis. 
Mariamne. 
Mopsueste. 
Keocesaree. 
Palmyre. 
Paltiis. 


Paneas. 

Perrha. 

Pompeiopolis. 

Porpbyreon. 

Piolemais. 

Rachlena. 

Raphanee. 

Rhosus. 

Saniosate. 

Sebaste. 

Seleucie. 

Seleucobelus. 

Sergtopolis. 

Sidon.  ^ 

Sura. 

Tarsk. 

Tripolis. 

Ttr. 

Zephyrium. 

Zeugma. 


ProTlaeei. 


MMropolM. 


Syrie  I"* 

Antioche. 

Commagene. 

Hierapolis. 

Syrie  i^'. 

Antioche. 
Damas. 

» 

Phenicie  a*. 

Damas. 

Cilicie  a*. 

Anazarbe. 

Syrie  i". 

Antioche.  La*- 

diceefuta».. 

▼^  au  Tu(^ 

de  metropoH 

parJusliniM. 

Pheniciea*. 

Damas. 

Syrie  a«. 

Apamee. 

Cihcie  I**. 

Tarse. 

Syiie  a*. 

Apames. 

Cilicie  a*. 

AuaiaHx. 

Commagene. 

HterapdiL 

Phenicie  a*. 

Damas. 

Syrie  i**. 

AnlioGfacPil- 

tosfutraoit 

iiallwadb^ 

riade. 

Phenicie  i*". 

Tyr. 

Commagene. 

Hierapolii. 

Cilicie  I". 

Tarse. 

Phenicie  i". 

Tyr.    ' 

id. 

id. 

id. 

id. 

Syrie  a*. 

Apamee. 

Cilicie  a*. 

Anazarbe^ 

Commagene. 

Hierapoik 

Cilicie  i". 

Tarse. 

Syrie  i**. 

Antioche. 

Syrie  a«. 

Apamee. 

Hierapolis.      < 

Phenicie  i". 

Tyr. 

Commagene. 

Hierapolia. 

Cilicie  I ". 

» 

Phenicie  a*. 

Tyr. 

id. 

» 

Cilicie  i". 

Tarse. 

Commagene. 

Hierapolis. 

SYRI£  Al^CIENNE. 


169 


SYBIE   I'*. 

PATRIARCHES   D'ANTIOCHE. 

Saint  PiVrre,  ap6lre,  vers  44. 

tvode,  premier  suocesseur  de  taint  Pierre. 

Ignace,  martyr,  mouriit  le  90  deceoihre  107; 
rn  TaDiiee  xx6,  suivant  qiiel(|ues  auteurs. 

Eros,  apres  Ignaoe ,  occupa  le  siege  d*Antio- 
che  pendaut  viugt  ans;  mort  en  laS. 

C^rneibe  ful  le  qualrieme  suocesseur  de  Fa- 
pdtre  saint  Pierre;  mort  en  14a. 

Mw  gouverna  viugi-huit  aus  Teglise  d'An- 
lioch«';oiorlen  z68. 

Tkeoj^hlle  \  ivail  aous  Tempereur  Marc-Aurele. 

itaximifi,  de  177,  oiiplutotde  x86  a  199. 

Seraoion,  199-3x1. 

dscUpiade,  9x1-9x9. 

Pkiietitt,  919-930. 

Zehenne  succede  a  Philettu.  Eiuebe  ne  doone 
poiDi  la  dale  exacie  de  sa  mort. 

Bohrlast  987 -9&x. 

Fabha,  95 1. 

DeautrianuSf  959-969. 

Patti  tie  Samosate ,  960-969 ,  eiivirou. 

DoHuius  /,  969-974. 

'Tame,  974-983. 

Crrilte,  983-3od. 

Tyrannus,  3o3-3x4. 

^''a/(«i  3x4-3x9. 

Philogone,  319-394. 

Euitathtj  evdque  de  Beroe ,  puis  d'Autioche, 
vers  395 ,  assista  an  concile  de  Nicee.  Les 
trieni  parvioretit  a  le  faire  depoier  et  exi- 
JBT  en  33  X ,  suivaot  Tiiiemout  et  Lequien ; 
il  nourut  vers  389. 

Ealaiien  hit  eleve  au  siege  d*Aotioche  par  les 
«rieos,  33 1. 

£tui6e  fut  elti,  mais  refusa  de  quitter  C^ree. 

Eupkron'ms fut  nommc  a  sa  place. 

PbcUie,  appele  Klacillus  par  Sozomene, 
Placentius  par  Th^idoret,  suoceda  a  £u- 
plux>nius  vers  333.  II  assista  au  syoode  de 
Tyr,  avec  les  arieus,  en  33$;  ii  presida 
celui  d*Antioche  en  34i. 

iiknne  fut  cbas«e  d'Antioche  en  348.  Theo- 
dore!, Hist,  II,  9,  xo. 

Leonce,  348-357. 

Stdaxe,  357-359. 

^mtn  e^i  compie  parmi  les  iv^ues  d'A»* 
(ioche  par  Nicepbore  et  Theophane. 

ViUee  eutra  a  Antioche  en  36  x.  11  en  sor- 
tit  presque  aussitdt,  et  fut  remptace  par 
Eusoius.  Apres  la  mort  de  Fempereur  Cuns- 
Unce  il  renira  dans  son  siege ,  vers  le  niois 
de  decembre  369.  line  partie  des  catho- 
liques  refus^nt  de  le  reconuaitre ,  et  pri- 
reot  pour  ev^ue  PauUo.  II  mourut  au  pre- 
ttier concile  cecum^nique  de  Constantino- 
plC}  38x .  Son  corps  fut  rapporte  k  Antioche. 


Flavien  succ^da  a  M^lece,  38  x.  Patilin 
mourut  en  388.  Ses  partisans  loi  douiie- 
rent  pour  successeur  Evagre.  Ainsi,  la  dis- 
sension continuait  dans  Teglise  d'Autiorhe. 
Evagre  mourut  en  394.  Quafre  ans  apres , 
398  ,  Flavien  fut  reconcili^  par  saint  Jean 
Chrysostome  avec  les  ev^ues  d'Occident. 
II  mourut  en  4o4« 

Porohyre,  404-4 13,  fut  un  des  ev^ues  qui 
signerent  la  condamnation  de  saint  Jean 
Chrysostome. 

jilexandre ,  4i3-4>i  ou  499. 

Theodote,  499-498. 

Jean  I,  498-44X. 

Domaus  //,  44  x -449. 

MaxtmCf  449*456. 

Basile,  456-458. 

j4cacius^  459. 

Marty  rius,  459-473. 

Pierre  Fouion  (  Peirus  Fullo )  hii  dispute  le 
siege  d'Auiioche.  Trois  fois  cbasse ,  il  est 

.    trois  fois  retabli. 

Juliatius ,  successeur  l^lime  de  Martyrius, 
nieurt  vers  476,  apres  le  premier  relour  do 
Pierre  Fouion. 

Aiienne  Ii,  evdque  ortbodoxe,  meurt  en 
480. 

iiieiuu  III,  martyr,  481. 

Jean  II,  ev6que  beretique^  abjure  ses  opi- 
nions, suivant  Tbeopbane. 

Caiaudion,  patriarcbe  legitime,  nomme  Jean 
II  au  siege  de  Tyr.  11  est  exile  en  485. 
Pierre  Fouion  revient  a  Antiocbe,  et  meurt 
en  490. 

Paiiaduu  ^  hrdeai  monopbysile,  490-498. 

Flavien  II,  498-6x9. 

Sevire,  5x9-5x7.  Apres  sa  mort ,  le  siege 
^     d* Antioche  resta  quelques  mois  vacant 

Paul  II,  5x8-59X. 

Eupluxuiiu ,  591-596. 

iplurkme,  597-545. 

Domnus  III,  S/^S-SSg, 

Anastase  I,  559-669. 

Gregoire ,  569-584. 

AnastMe  I,  apres  la  mort  de  Gregoiro,  est 
retabli  sur  le  ai^ge  d'Antiocbe.  II  meurt 
en  598. 

Anastase  II,  598-610.  Apres  sa  mort  le  siege 
d* Antioche  resta  vacant ,  pendaut  trente  et 
un  aus  suivant  les  uns,  et  vingt-huit  ans  sui- 
vant les  aulres.  La  Syrie  etait  alors  abau- 
donuee  aux  incursions  des  Perses. 

Atlianase ,  699.  Lequieu  besite  a  le  compter 
parmi  les  patriarcbes. 

En  640  ou  trouve  sur  le  t|:6ne  arcbie- 
pisoopal  uncertain  Macedouius,  que  Lequien 
qualifie  d'beretique.  Antioche ,  comme  on 
le  sait,  etait  deja  au  pouvoir  des  musul- 
mans.  JusquVn  749  ses  evdques  rusidereot 
k  Constantinople. 


170 


LIJNIVEM. 


t^rtC^CES  BE  BtRO^. 

Eustathe,  ev^ue  de  Beroe,  fut  eleve  «u 
siege  d'Antiocbe  eo  i^S, 

CjTut ,  successeur  d*E«sU(he,  fut  parseciile 
par  I'efnpeieur  Coii&Uoce. 

Meitce  I  qiiitta  le  »iege  de  Sebaste  pour  oeliii 
de  Rente  ^Socrate,  II,  44),  puU  pour 
oeliii  d'AotiQchay  36i. 

Anatplim  lui  succeda  a  Beroe. (SocraC^, III,  a5.) 

TlieoHote  vivait  sous  Teropereur  Valetis. 

Acacius  fut  sacre  ^^ue  par  Eiisebe  de  Samo* 
sate  vers  379  ou  38o.  11  assista  au  premier 
concileoBciimeoiquedeConstanliaoplev'^Si. 
II  fut  un  des  eunemis  de  saint  Jean  Cbr^- 
sostome.  En  43  c  il  defendit  Nestorius 
oontre  Gyriile  d'Aleundrie.  Sofi  ige  l*ein- 
pdcha  d'&ssbter  au  concile  d'^phese.  Ea 

•  43a  tes  ev^ues  d 'Orient  tinreiit  uoe  as- 
.semblee  a  Beroe.  Acacius  mourut  en  437. 

Theoctistut  buceede  k  Aeacius  en  438.  II  as- 
siste  an  concile  de  Chalcedoine,  4^c. 

AntoititMu  ftit  exile  per  I'efnpcreur  Justin  eo 
5(8. 

Megas  en  54o  fut  envoye  par  les  habitants 
a  Antiocfae  vers  Chosroea,  qui  s*avau(ait 
en  Syrie.  Ses  prieres  ne  furent  point  mu- 
tees.  ( Procope,  De  bftL  Pers.^  U,  6  el  7.) 
II  assista  en  586  ftu  synode  de  Constanti- 
nople. 

ift^lfeQUES  OE  CHALCIS. 

Trtmt/miltti  eft  le  firemier  ^Aqve  ooobo  de 

Ghalcis. 
Thdlapltius  panit  avoir  suivi  le  parti  des 

ariens. 
Mognia  assisti  au  synode  d'Antiocbe,  864. 

(Socrafe,  III,  i5.) 
Kusehe  fut  sacre  ev^ue  par  Ensebe  de  Saoio- 

sate,  sous  Tempereur  Vatens.(Theodoret, 

y,  4.)  II  parut  au  premier  concile  cecum^- 

nique  de  Constantinop}e,  38  c. 
Apringius  se  rendit  avec  Jean  d* Antiocfae  an 

concile  d'£phese,  43x ,  et  d^fendit  les  opi* 

nions  de  Nesloriiis. 
Antoine  ,  successeur  d'Aprfngius,  resta  fidele 

k  I'^lise. 
JamMiiftte  assfistt  iu  synode  d'Antiocbe  tenu 

par  Domnus  II ,  en  435. 
Romulus  Vint  an  concile  de  Chalcedoine,  45 1. 
Domnus  en  456  prolesta  eontre  fe  meurtre 

de  saint  Proterius. 
Romanus  fut  chasse  de  son  siege  sons  Tenipe- 

reiir  Zenon  Tlsaurien  ,  en  485. 
Isidore  fut  depose  en  5 18. 
Domiiius  assisia  au  cinquieme  concile  Qtenm6- 

nique,  553. 
Proffus  fut  enToye  par  rempereur  Maurice 

▼ers  Chosro^,  roi  des  Parses.  (Theophv- 

bicte.V,  i5.)  ^  ^    r  J 


iftV^QCES  DB  SlitiCITCn. 


DosUhSe  vivait  au  Iroisiene  liecle.  U  ioftg 
▼it  eontre  les  beretiques,  qui  de  son  U 
etaient  nombreuz  en  Syrie.  On  ne  «m 
pas  les  noms  de  ceux  qui  TaVaieDt  pita 
sur  le  siege  episcopal  de  Seleucie. 

Zenobius  ou  Zenonius  nut  au  cuQcSe  lie  I 
cee,  3a  5. 

Eusebe  fut  Tun  des  membres  du  synode  a 
voque  eu  Isaurie  par  Teiupereur  " 
en  359. 

Blzus  porie  le  titre  d*ev6que  de  Seleutiei 
la  lisle  de  ceux  qui  assistereut  sousTi ' 
se,  en  38  c  et  38a,  au  concile  de 
tanlinople.  On  le  voit  parailre,  plisi 
dans  un  synode  convoque  a  Aniiochc! 
vint  k  Constantinople  eu  394.  B'wuM 
etait  uue  forme  du  noin  BesiU. 

Maxime ,  qui  avail  etudie  a  Aniiocbe 
saint  Jean  Clirysostome,  fut  peut-elief 
cesseurde  Bizns. 

Dosiihee  ne  put ,  k  cjiuse  de  sesdii 
avec  les  habitants  de  Selen^  resteri 
session  du  siege  episcopal.  1)  fut, 
temuignage  de  Socrate  (TH,  36).ui 
re  a  1  arse  en  Ciiicie  par  le  pilriarnei 
tioche.  1^ 

G^rontius  fut  un  des  membres  du  tptkiy\ 
phese  en  448. 

Ifonnus  occupait  ven  5o5  le  siegie  cp 
de  Seleucie. 

Constantin,  suivant  Th^phaoe,  diK| 

Sue  vers  la  dix-haitieme  annee  da  li 
'Auastase. 

Denis  assista  au  concile  de  553. 

Antoine  fut  peut-^tre  le  succesfeorde 
nis, 

ThSodore  est  post^ieur  a  oeia  qM  1 
venons  de  nommer.  

Agapius  vivait  au  temps  de  rempeitnrli 
Porphvrog^nele.  Suivaotles  uns,ilquilf 
siege  episcopal   dn  S^leude  (wur  fid* 
Jerusalem ;  suivani  les  autres,  il  deiiilff 
Iriarche  d*Antiodie. 

iftVftQDES  DE  GINDAHUS. 

II  y  avail  un  siege  episcopal  a  Gii^ 
Pierre  est  designe  oomme  ev^ue  deeel*' 
dans  la  lisle  de  ceox  qui  aasistti«iit  a>  i^ 
d'Antiocbe  en  34  x. 

^Y&QUES  DE  LAODia^ 

Lucius  fut  le  premier  ev^ue  de  Laodic^ 
Thelymidres  est  nommi  par  Eusebe,  BiA. 
46.  n  siurvkut  k  U  persecutiiiii  r 

CilM. 

Heitodore  sucoMa  k  TbelymWrei.  ( B 
Socrau  succ^  k  Raiodore<Eusebe,  TH, ' 


SYRI&  AUCIENNR. 


in 


life  fhot  looi  rcmperaur  Anr^ieii. 

mSm,  ncceneur  d*£asebe,  occupait  le 

^rfeLaodicee,  ^crsaSo. 

Btf  /  renia  la  foi ,  pendaot  la  fiersccu- 

pa  de  Dioeletien.  (Eiis«be,  VII ,  3« . ) 

iieit,  sdcresMur  d'^Ciehhe^  wsMia  au 

ndk  de  Niece,  3ttS. 

Ipef,  partisan  d*Ariiis,  BMNinit  en  363. 

ft  aidtia  an  conciie  <Bcumeni(|iie  de 

iitiwiino|tle,  5^t.  II  fiA  clMis»e  de  «bn 

K  soQf  lempefvur  Valens. 

feMfre  panit  avoir  succede  k  Pelafpe. 

fin  {CMvemait  Vt^Vtse  de  Laodicee  m>iu 

Bpnenr  Areadiui; 

M»,  eieve  au  nrge  de  Laodieee  ea  4«9  * 

jrpara  de  Cynlle  d*Alex»iidne  ,  et  nuvH 

prii  de  Jran  d'Aniiodie.  It  aniMa  au 

aodc  d'Antiocbe  en  43a ,  et  au  codctte 

fClutcfdiitne  ea  45i. 

me  proiesia  coMre  ie  menrtre  de  saint 

Menus  en  456. 

il,  evcqoe  bereftiqoe,  mait  sons  I'empe- 

•r  Aoailase. 

mttiu ,  qui  arait  ete  maitre  de  la  milice, 

t  eleve  au  »i^  de  Laodicee  en  5io.  li 

It  depott  en  Si8,  par  I  'eiD|)ereiir  JuUin  1^'. 

wte  II  assttia  au  deiaxicme  concile  oacu- 

cw^  de  GoQBtanunople,  en  553. 

SY&[E  II*. 
Mques  d*apam£e. 

^Btf,  discijkle  de  saint  Faid,  occupa 

p^niicrle  siege  d'Apamee. 

mroi  est  compt^  parmi  lea  premiers  ev^ 

iwdccellefcjiisc. 

f^ile  paraii  tui  aroir  snccJde. 

WW  as«ista  au  concile  de  Nicee,  Sa5,  el 

I  synode  d' Antiuche,  3  4 1 . 

•»»/ wail  sous  Tempen^ur  Jovien. 

r  I  aisista  au  premier  concile  cecuiuenique 

^  CoDiiantinople ,  en  38 1. 

»^,  success«>ur  de  Jean,  de^ruisil  Fes  tein- 

s  de$  £iiix  difux  el  fiit  lue  par  les  |)aTens. 

i^p/,  (rereetauccesseur  deMarrellns.  com- 

'tit  rbereue  des  arieus.  (Theodorel ,  Hist. 

y  di.  3.) 

ndre  se  s^para  dn  concile  d*lSphese«  el 

'  aroiainunie»  eo  43c .  La  paix  fui  rela- 

e  dan^  Dfeglise  en  434- 

IK  aasiaa  an  concile  de  Chalccdoine^ 

< ;  ^  456  il  signa  la  proteaUtion  des 

Ifdfs  de  U  Sjrrie  oontre  le  meurire  de 

*»  Prolerius. 

P  M  UR  des  chefs  de  la  faction  Isaiirieniie 

l^feoipereur  Zeuon.  (l^vagre.  III,  35.) 

//.  evfqiie  hrretique ,  fui  chasse  d'Apa- 

^fftr  1«»  babiuuu  en  47?.  U  a'eaapara 

Mge  d'Aniiodie. 


Mfu-lniu  viTait  tons  fenp^rcur  Anastase. 

Pierre^  auocessenr  de  Mariuus,  parvini,  par  la 
comiption  et  la  rimonie,  au  aiege  d*Anlio- 
cbe.  II  fut  depose  parTeinpereur  Justin. 

Isaac  ancc^da  k  Piem;. 

Paul  occnpa  le  siege  d*Apan^  apr^  Isaac. 

Thomas  a.^isia  au  cinqnieme  concile  oecnme- 
uique,  553.  II  se  rend  it  anpres  deCYiosroes, 
(pii  meiia^iit  Apam^.  Qtiand  rctte  ville 
ftif  prise,  ilful  enimt-n^  prisonnier  en  Perse. 
(Procope,  DebeiL  Pers.,11, 1 1;  lEvagre,  IT, 
ad.) 

Thomarichus  niourtiten  648. 

^l^^QtJES  D^ARMniUAC. 

Eitstathe  assista  au  concile  ^e  Nicee,  3a5. 
IHarc  I  Fut  lue  par  les  pakns,  sous  Teuipe- 

reur  Julieu  TAfioslat. 
ISarc  II  parut  au  concile  de  Chalccdoine , 

45i. 
Eusibe  protesta  avecfe  ev^qncs  de  la  seconde 

Syrie contre  le  meurire  de  saint  Proteiius, 

456. 
Sevenanus   occupail  Ic  siege  ^'Arelliuse  au 

commencemeut  clu  sixieme  sierle. 
Abraham    vivait    avant   le  j^iieme   coacile 

oecumenique  de  6$  x . 

^fiQUES  DK  MAAIA.MNe. 

Pau/asaisU  au  concile  de  Ctialcedoine ,  45 1. 
Uagnus  sigoa  Ja  lettns  adreaaee  4  Tempereur 

Leon ,  en  456. 
Cyrus  fui  uo  de  tea  auccesaeurap 
OEtherius  assiista  an  syoode  de  Coostanti- 

noplci  lenu  en  536. 

CILICIE  IP. 

iftVtQtJES  D'l^PIPHAlVIE. 

lHaurice  assistn  au  concile  de  Nio^t  3a5,  et 

au  ay  node  d'Antioche,  34 1. 
Kustatlu  suivil  les  opinions  d'Ariiu.  II  mou- 

ml  sous  le  regne   de  rempcreurJuli«1i, 

apres  avoir  vu  ion  4^ite  profiem^  par  )es 

paieus. 
Eusibe  assista  an  premier  concile  Ks^anak- 

nique  de  Constantinople,  en  38 1. 
iiieime  aaaiata  au   8)node  d'Aniiodie ,  en 

435. 
Eutychlen  parut  au  concile  de  Chalbedoine, 

45x. 
tplphane  signa  la  protettatian  adress^  far 

les  ev^uea  k  rem}iereur  l^n,  en  456. 
Cosmos »    d'aocopd  av«c   ScT^ien ,    ev^ie 

d*Areihuse,  refusa  de  reeonnaifre  Sev^e 

d'AntiQcbe ,  et  fut  souieiMi  par  les  tkaH- 

tants  d'^piphanie  conlre  le  ressentlMemde 

rempereur  Aaastaae. 
Skrgius  vivait  sous  renaperear  Jaatiaien. 


i7t 


L'UNIVERS. 


COMMAGfeNE. 

^VfeQUES  D'HI^RAPOLIS. 

Phiiotime  est  cite  parmi  les  ev^ucf  qui  assis- 
tereiit  au  ooDcue  de  Nio6e.  D*aiitres,  comme 
on  pent  le  voir  dans  le  recueil  de  Labbe , 
Tappelient  Philoxine. 

TfteoJoie  fut  ordonne  secreiemenl  ^v^ue 
d'UierapoUs  par  Eusebe,  ev^ue  de  Saono- 
sate,  au  iemp  de  Yalens.  ( Theodoret,  V, 
z4. )  II  visita  Marcien,  solitaire  de  Chalci- 
dis.  II  assista  au  premier  concile  oecuuieui- 

3uedeCon&tantiQopie»38i.  Dans  la  liste 
es  eveques  il  est  oomiue  TlUodore. 

Alexandre ,  i'un  des  plus  ardents  defenseiirs 
du  neslorianisme ,  fut  chassi  de  son  siege. 

Panolbe  lui  succ^a. 

Jean  fut  invite  par  les  ev^ues  du  synode 
d'Anlioche  preside  par  Domnus  IX  k 
deposer  Atiianase  de  J^errha,  435. 

jktUnne  I  fut  sacre  ev^ue  par  Domiius,  pa- 
triarche  d*Antioche.  I!  nomma  Sabinien 
a  la  place  d'Athauase  en  446.  Deux  aiis 
apres  il  assisia  a  un  nouveau  synode  d'An- 
tioche,  dans  Taffaire  d'Ibas,  d*^e.sse.  II 
prit  part  au  ooncile  de  Chalredoioe  en  45  c. 
II  protesta  centre  le  meurtre  de  saint  Pro- 
tenus  d*Alexaudrie,  en  456. 

Cyrus  ^  vers  la  dixieme  annee  du  regne  de 
Zenon ,  fut  chasse  de  son  si^e ,  ainsi  que 
Nestor  de  Tarse  et  plusieurs  autret  ev^uet 
ortbodoxes. 

Philoxine  s^appdait  d*abord  Xenaias ;  c*e- 
tait  un  eMilave ,  Perse  d*origine,  qui  s'ctait 
sauve  des  environs  d'Anlioche.  Qtioiqu'il 
flit  attach^  k  Terreur  des  manicbeens,  et 
qu'il  n'eikt  pas  re^u  le  bapt toe ,  il  fut  eleve 
au  siege  d'UierapoUs  par  Pierre  d*Antiocbe, 
et  prit  le  nom  de  Pbiloxene  (vers  la 
seizieme  ann^  de  Z^non ).  Pbiloxene  fut 
appele  k  Constantinople  par  Tempereur 
Auastase ,  5o7 .  Il  presida  Tasseroblee  de 
Sidon,  509.  L*empereur  Justin  Texila  en 
5 18.  (  Assemani,/?!*^/.  orient,,  II,  p.  zo  et 
suiv.  ) 
i  ThSadore  panit  au  cinquieme  coucile  oecume- 
I       nique  de  553. 

AUenue  U  est  nomme  par  ^vagre,  VI,  ao. 

/  ]^v£ques  de  CYEHHUS. 

Jfp'icius  assista  au  concile  de  Nicee,  3a5 ,  et 
(       au  synode  d*Antiocbc,  34  z. 

>  jiugarus^  au  synode  de  Seleucie,  suivit  le 

>  parti  de  Tarien  Georges  d' Alexandrie  el  d'A- 
i   '    cacius  de  Cesaree. 

Mterius  etait  arieu.  U  fut  nomme  par  i'em- 

pereur  Yalens. 
Isidore  est  cite  par  Tfaeodoret,  Hist,  eecL  T , 

4 ;  ii  assista  au  premier  ooodie  de  Cons* 


BtliideBl 


tautioople ,  38z.  On  ne  lut  ^  la 
son  introaisation,  ni  oelle  de 
Theodoret  parait  avoir  succUe 
presume  qu*il  fut  sacre  ev^ue 
en  4i3.  Il  fut  en  quereUeafeeiUttl 
au  sujet  de  Nestorius ,  dont  il  n'app 
pas  les  opinions ,  mais  qa'il  def«i»i 
tre  la  vbleoce  des  orthodoics.  Hisi 
cilia  avec  lui.  Mais  le  zele  sfse  le 
combattit  les  eutydieens  lui  itlin 
grioe  de  la  eour  de  GoostaotiMpIc; 


damue,  en  44^,   par  le 

brigandage  dEphese^  il  fut  depouiflei 

siege.   It  implora  la  proiedioo  di 

Leon,  et  renira  dans  son  eglise,  mb 

den  ( vers  45o  );  ne  a  Antiocbe  <b 

il  niourut  vers  458. 

Jean  convoqua  un  synode  a  Cyribk 

Sergius  I  fut  cbasse  de  son  siege  rt  oe 

nie ,  comme  partisan  de  Neslorifii. 

Sergius  II  fut  envoye  en  exil,  par  lei 

de  Cbalcedoine,  5 18.  II  tuivaiiian 

monopbysites. 

tvtQVES  DE  SAMOSATL 

Peperius  assista  au  concile  de  Nick,  I 
au  synode  d'Antioche,34i. 

Eusibe  I  gouvemait  Teglise  de  Sami 
36z.  Ii  signa  en  37a  la  lettreaiM 
Melece  d* Antiocbe  aux  ev^' 
dent.  Exile  en  Tbrace  par  ^ 
lens,  il  eut  pour  successeur  uo 
nomios,  que  les  babitaats  n 
reconnaitre,  puis  un  arieo  "w**^^ 
En  378 ,  apres  la  mort  de  yaleiis,l| 
dans  son  eglise.  II  assists  au  sjm^ 
tiocbe,  tenu  en  379  par  Meleoe, 
tue  pen  de  temps  apres,  par  bmI 
arienne.  (Tbeodoret,  IT,  U;  W 

jintioclius  assisia  au  concile  oecoaar^ 
Constantinople ,  en  38 x . 

Andre  suivit  le  parti  de  Jeatfd'i 
en  43  z.  II  assista  au  syoode  di 
en  43a. 

Rufin  assista  au  brigandage  Hp^^ 
mais  il  abjura  ses  crreun  au  ooa 
Cbalcedoine,  45 1. 

Eus^  II  fut  depose  par  rcopefetf 

l^ytQUES  DE  ZEUGMA. 
Bassus  est  cite  parmi  les  eviqiiei  *» 


Aphihonius,  moine  illuatre  pirtt  P*^ 
deve  au  siege  de  Zeugma,  oA  il  port*" 


SYRIE  ANCIEJSNE. 


173 


tf rit^  de  scs  mcrars ;  il  ne  quitta  pas  le  cilice. 
Beiiade  i  atlarba  a  Theresic  de  Nestorius.  II 

ne  persista  pas  dans  ses  enreurs. 
I  iweitts,  Doram^  a  tort  ^volcius,  assista  au 

ceocile  de  Chalcedoine ,  45 1. 
Julien  prit  part  an  cinquieme  conrile  opcu- 

n^iqiieeD  553 ,  sous  Tempereur  Jiistinien. 

ItvftQUES  D*EUROPUS. 

La  Tille  d*Europiis  etit  aussi  ses  ev^es. 
DttPid  d*Eoropiis  eft  cite,  aTec  Heliade  de 
Zeagma,  parmi  lea  partisans  de  Nestoriiis. 

PHENIGIE  IP. 

^y^QUES  DE'DAMAS. 

.^MiTMu  est  considere  comme  le  premier  h^ 
qoe  de  Dainas.  C  est  Itii  qui  baptisa  I'apd- 
trp  saint  Paul.  II  fut  inartyri3e. 

Mognus  assista  au  coneile  de  Niece,  3»5 ,  eC 
lu  s)T)ode  d'Antioche  eo  34o. 

Phiiipffe  siegea  au  premier  coneUe  oacumini- 
qiie  de  Constantmople ,  en  38 1. 

/«M  /,  avec  Jean  d'Anlioche  et  les  aiitres 
ev^nes  d'Orient,  se  s^para  du  coneile  d'£- 
phese,  43i ,  et  defendil  Nestorius. 

TkMon  sncceda  a  Jean.  II  assista  au  synode 
d'Antioche ,  435,  et  au  coneile  de  Chalc^- 
doine,45i. 

/ma  //  re^ut  en  456  la  letlre  adressee  par 
Fefflpereur  Leon  a  tons  les  ev^ues  d*Orient, 
In  sQJet  dn  meiirtre  de  saint  Proterius. 

Werre  /  vifait  vers  la  fin  du  cinquieme  siecle. 
Craignant  la  pers^tion  d'Anastase  I ,  le 
Sileotiaire,  il  abandonna  son  siege  et  se  re« 
tin  en  Palestine. 

f^omas,  successenr  de  Pierre,  adopta  les  er- 
Kun  des  monophysites.  II  fut  chasse  de 
Tkmt»  |iar  reinpereur  Justin  en  5i8.  (Fb/r 
Anemani,  Dissert,  de  monophjrs.  ex  Dionr' 
diPatriarcha  ehronico;  Biol,  orient,  torn.  II, 

^lutrie  parait  avoir  vecu  avant  le  cinquieme 

eoQcile  oecumeiiique. 
Mastathe  assista  au  cinquieme  coneile  oecn- 

■euique,  553. 
^^nanus  vi^ait  sous  Tempereur  Maurice. 
^m  fi  fui  conleniporain  de  saint  Jean  Da- 

nsMene.  II  fut  martyrise  vers  743 ,  par  le 

UUfeWalid. 

l£vfcQUES  D'Hl^LIOPOLIS. 

^Wo/r,  evdque  dlf6liopo1is,  baptisa  satnte 
Ettdocie,  qui  fut  martyris^  au  tem|M  de 


Tempereur  Trajan.  Lequien,  nous  devons 

le  dire,  semble  ne  pasrroire  a  Tautbenti- 

cite  du  document  oil  se  trouve  consigne  le 

nom  de  Tbeodote. 

Eusebe  nous  apprend  qn'on  etablit  un 

^v^ue  k  Heliopolis  au  temps  de  Constan- 

tin :  il  ne  le  nomme  pas. 
Joseph  etiit  ev^que  vers  45o. 
Pierre  oocupait  le  siege   episcopal  d'Helio- 

polls  au  temps  de  I'empereur  Ijcon. 

AvftQUES  D'ABILA. 

Jordanes  elait  cv^ne  vers  le  milieu  du  cin- 
quieme siecle.  , 

Jean  signe,  comme  evfcque  d*AhiIa,  unc  let- 
tre  adressee  k  rempireiir  Leon  par  les  ev^- 
ques  de  Syrie  en  456. 

Alexandre  en  5 18  fut  depose  par  ordre  de 
Temperenr  Jnstin. 

iSV^QUES  DE  LAODICl^E. 

Placon  assista  au  roncile  d'^phese,  43  r.  Dans 
certains  manuscrits  on  Tappelle  Placciis  ou 
Flaocus. 

ralerius  tsX  nomme  parmi  les  eveqnes  qui 
assisterent  au  coneile  de  Chalcedoinr,  45  r. 

Jean  fut  contemporain  de  Jean  Damascene. 

6vfeQUES  D*^feSE. 

Silvoin ,  martyr,  peril  dans  la  persecution  de 

Diocl^tien. 
jinatoie  est  cite  parmi  les  ^v^ues  du  coneile 

deNicee,  3a5.Il  assista  an  synode  d*Anlio- 

cbe,  en  34x. 
Eusibe,   arien  zel4,  vivait  sons  Vempereiir 

Constance. 
Paul  I,  suocesseur  d*Eusebe,  suivit  le  parti 

des  evdques  ariens. 
Nemesius  fut  un  ami  de  saint  Basile  et  de  saint 

Gregoire  de  Nazianze. 
Cjriacus  defendit  saint  Jean  Chrysoslome, 

el  fui  exile  a  Palmyre  par  Arcadin^. 
PaulII'9vm\  vers  43a. 
Pompeianits  assista  au  synode  d'Antioche  ron- 

voqu^  par  le  patriarche  Domnus  en  435. 
Uranius  fut  represente  par  Taivhidiacre  Por- 

phyre  au  coneile  de  Chalcedoine,  45i.  II 

retrouva,  suivant  certaines  traditions,   la 

tite  de  saint  Jean-Baptiste ,  en  45a. 

En  665  un  evdqne  d'^mese ,  dont  Tbeo- 

pbane  ne  donne  pas  le  nom ,  tut  brdle  par 

les  mahometans. 


FIH  DE  LA  STEIE  ANCIENIVE. 


■»■»<»<>—»>•■><■■#■■■#—#■•■■■■■•■>— ■•■•■•■•—•<•■•••■•■•■•—••■•■•"•— »•*< 


TABLE  DES  MATIERES. 


Abila,  yille  de  la  Coel^yrie,  p.  b,  a;  ses  ^v«- 

ques,  p.  17%  b. 
Jbischai,  frtrede  Joab,  yalDqueor  des  Syriens, 

p.  II,  b. 
Abyda  (la  folre  d*)«  remarqualile  par  Taboo- 

danoe  et  la  vari^  des  marcliaodises  de  toute 

laSyrie,  p.  lie,  b,  et  I17,  a. 
Acaciun,  dvdqoe  d'Antloche,  p.  166,  a. 
jichab,  rot  d^srael ;  ses  guecrea  avec  las  Syrtens ; 

sa  mort,  p.  13,  b,  16,  a. 
Aehaz,  lils  de  lotham,  tmplora  ralHance  des 

Assyriens;  ^l^ve  des  aatels  auxdieux  Stran- 
gers, p.  20,  a  et  b. 
Achazia,  roi  de  Juda,  en  gaerre  contre  Ha- 

zael,  p.  19,  a.  * 
Acyndintu    (le  prSfet);  Jage  Equitable  dans 

une  affaire  sfnguliere,  p.  83,  a. 
Adaarmanh    brOle  HSraclSe;   8*empare    par 

trahSson  d*Apam^,  p.  105,  b. 
Adamites  (Ln) ;  croyanoedes  Adamites,  p.  129,  b. 
Adrien,  gouyerMurde  Syrte,  neoitianoufelle 

deson  adoption  par  Trajan,  p.  71,  b. 
Aitiut  pousse  rarianismejasqu'k  ses  dernl^res 

cons^ueoues,  p.  146,  b,  et  notesr. 
Albimu,  elev6  au  coosulat  par  Marc-Aor^le, 

p.  73,  a. 
Alexfmdre,  roi  de  MacMoine,  s'emparjB  de  la 

Syrie,p.  24,  a,  etboiv. 
Alexandre,  goaverneur  de  la  Syrie,  p.  OO,  a. 
Alexandre ,  Sv^ue  d*Aleiandrie,  excominunie 

Ariu»,p.  141,  a. 
Alexandre^  Sv6que  d*Antioehe,  Sleint  le  schisme 

qui  divisait  Antioche,  p.  103,  a;  obtient  d'lo^ 

nocent  la  reconciliation  de  r£glise  d'Orienl 

avec  celle  d'Oocidenl,  p.  163,  b;  defend  la  mS- 

niolre  de  Chrysoslome,  ibid. 
Alexandre  Balas  parvieot  par  Craude  aa  tjrdne 

de  Syrip,  p.  6i,  b;  sa  mort,  p.  63,  a. 
Alexandre  Severe ,  suocessear  d*Elagabal ,  p.  77, 

b;  rSlabllt  par  sa  fermetS  la  discipline  parini 

les  troupes  dSmoralisSfs ,  p.  78,  a. 
Alexandre  Zebinas  defait  DSroStrias  Nicator; 

parvlenl  k  la  royautS  de  Syrie;  sa  mort, 

p.  %4,a,et  suiv. 
Al'Mondar,  clierarabe,  ravage  la  Syrie,  p.  103,  a. 
Alylarquea  (  Les )  son!  supprimes,  p.  100,  b,  et 
.    101 ,  t. 


Aman,  aoidat  lyitaoi,  lii«  Adiab,  nidi 

p.  16,  a. 

AmpMJachius,  aatear  de  UmtesksdiviMl 
famille  de  Constaotlo,teras^  p.  16.  b,' 
Ananiae,  premier  6v«qae  de  Damti,p>1 
Anastaae  (  L*emperear  )  achMe  la>pali 
rasins ;  punit  le  oomte  d*Orieot.  p.  W, 
^n<utoM /«^,ev^oe  d* Antioche,  p. 
AnasUue  II,  masaacri  par  lea  Juih,  f-i 
Andromaque,  goaveroeur  de  la 

mort,  p.  26,  a  et  b. 
AtUen,  6v«qued'AnUoob«,eiieKlU^^i 
Anthyme  ( Saint )  nearl  raariyt,  p.  IS 
Antigone  s>mpare  de  -la  Syria,  pu  tt44 
Antioche;  maasaene  des  Juifo,  p.  6B,  ii  ' 
entree  trlomphanle  de  Trafan  daas 
p.  71 ;  elTe  ebt  renversfe  par  on  In 
de  terre,  ibid, ;  dotSe  par  AoloirtaAf  I 
de  colonle  romaine,  p.  72,  a ;  prliif  *«w 
par  Severe,  p  74,  b ;  r«abUc  di«  tei* 
p.  76,  a;  Ilvr6e  au  pillage  partati 
p.  80,  a;  eprouve  la  colore  de  Diodiliai 
a;capitale  de  rOrient ;  embellie  et  ~  '^ 
par  les  soins  de  I'enipereur  CodsUsci, 
a  et  b;  gouffre  de  la  famine,  p.  94,b;s 
cootre  rempereur  Tbeodose;  wnvcnn 
sa  statue  eqoestre,  p.  96,  a,  iw,b<il 
doute  la  veiigcanoe  de  Tbeodose,  p- 
tures  el  eiecutiona,  p.  96,  a ;  «w«*^ 
des  minislres  de  la  veB^eaao^  *  Tli 
proclamation  de  TfdH  imperial  ;ioib^ 
procfes,  p.  96,  b;  lettres  degrtee.  iet»«* 
des  Antiochlens;  llsoeiebrent  la 
Tbeodose,  p.  98  ;<y>mbieed«l«i 
pSralrlce  Eudoxie;  eprouve  de 
blements  de  terre,  p.  98,  b,  el  99,  t 
pale  eglise  8*ecroule,  p.  lul,  a 
celte  ville,  p.  100,  a  et  b;  inceodie 
blerarnl  de  terre;  pillage  de  cettr  ^ 
les  barbares,  p.  iOl,  a;  incendif  «lt« 
menl  de  terre,  p.  lOI,  b;  assiegee  pif » 
aes  et  bhiiee,  p.  103  el  104 ,  a ;  rrlet^rt 
doDs  de  Jaslhiien,  p.  106,  a ;  eprou«  ■■1 
blemeot  de  terre  qui  wloe  ses  pl«J| 
ediUcet,  p.  106,  a ;  converUe  au  cbritli*" 
p.   119,  aet  b;  litr^canxbourreatti^l 
nouvplle  persecution  de  Dlodetlm,  K 
a  et  b;  expi)8ee  k  une  vlolenle  pfff^* 
p.  139,  b,  el  buiv. ;  uieuacee  de  desUueii*! 


TABLE  D£S  MATIERES. 


175 


ks  dUfleoeloM  des  catholkivei  e(  4«s  ariieos, 
p.  J42,a,MMi£gUKeeiiagll^parlMiMsaoDfli 
dai  b^kpies,  p.  J48et  saiv.  ;Maoaldveooii« 
tre  remperear  Jalfen,  p.  IBO,  a ;  moMin  de  aet 
liaUUola»p.  l(0,b,«laiiiv.trtd«lleMitroi- 
ridne  nog  des  patriarcaU  orientaax  ^  p.  M6, 
a.  reoTenfo  par  uu  tremblemeol  de  terre» 
en  459,  p.  1C6,  a ;  reof ante  par  on  noaveaa 
tremblemeot  de  terre,  eo  tss,  pb  IM,  b ; 
K»  paUiaichm,  p.  IM,  a  et  b* 

i^K/ibcAtf  c(<;  ChotroiB,  bAtie  par  le  Koi  de  Pane, 
^  104,  b. 

JnUochia ,  ville  de  la  Casslottde,  p.  4,  b. 

Jniiochia  ad  Taurum,  TUie  de  la  Coamagtoe, 
p.  3, a. 

Jntioelnu,  SU  de  SOeiiciis,  Spouse  sa  belle- 
ffl^,  p.  33;  ea  guerre  avec  PbUadelptae,  Zl- 
poUte.  Nicomide  et  Anttgoiie^  P-  SKw  •;  vaki- 
qoeur  des  Gaulola,  p.  3»,  b;  sa  mort,  p.  36,  a. 

Antioehua  II  TMm  ld?e  le  aft^  de  Byiance ; 
M  taoote  eo  Europe ;  tea  revers  ea  Cfleleay ria ; 
n  mort,  p.  36  el  37. 

jhttiochiu  Hiimx,  en  guerre  avee  aon  Mf^ 
S«ieucui,  p.  38  et  sulf . 

JniiochuM  III  U  Grand,  roi  de  gyrie,  p.  40,  b , 
et  suiv. ;  live  le  li^  de  Gerra,  pi  4^  a;  d4^ 
fall  MoloQ.  p.  43,  b ;  s'einpare  de  Seleuoie,  p.  46, 
a;  eo  guerre  oonlre  l*figypte^  p.  46  el  48^ 
niocn  k  aaphU,  p.  46;  (alt  p^r  Acbsus; 
dlt  la  guerre  aui  Parthes  et  auK  Bactriena, 
p.  47:  expose  des  cauaea  de  la  guerre  d^Antio- 
cbu  centre  lea  RomalDs,  p.  48  et  49 ;  sa  d^alte 
et  sa  Dort,  p.  60  et  61. 

dntiochut  IF  ^pipkans  meurt  par  aoite  da 
MS  exote,  p.  61, b,  et  62,  a. 

jUfiochuM  V  gupator  est  sals  6  noft,  ph  62. 

Antiochu*  ThioM  est  aia«u»ln4^  p.  63,  b. 

A^tiochtts  SidHes  defall  lee  Partbei,  p«  64,  a ; 
aa  mort,  p.  64,  b. 

AnUochHS  de  CyziquB,  en  guerreavea  aon  fr&re, 
inUorbus  £pipbaoe>  est  tu6  par  S^Jeucus, 
p.  66,  b,  et  66. 

AHtioehits  ipiphane  (  Gtyput),  eo  guerre  avec 
«on  frere  Antlocbus  de  Cyzlque,  est  aasMSin^ 
par  H^racleon,  p,  K6,  b,  et  66. 

Antioeku* ,  fils  de  Grypua,  peed  la  vie  dans  I'O- 
rante,  p.  66,  b,  et  67,  a. 

Anliocfiua  Eua^be,  Ills  d*AnUochus  de  Cyxjk|ae, 
rejetle  en  Cillrie  Seleucus,  flis  de  Grypua; 
bat  pr^  de  rOroote  Antiocbua  et  Philippe, 
freres  de  Seleucus -,  Spouse  Seltoe,  veuve  de 
Grypus;  vaincu  par  les  £gyp|iena  et  par 
Pfailippe,  U  ae  retire  ohea  1^  Parlbes,  p.  6g 
et  67. 

AntiochuM  Dionyriui,  roi  des  Syrieos,  p.  67,  a. 

AhHocHus,  roi  deCommageue,  preud  parti  pour 
Vespasien,  p.  67,  a. 


JuHochut ,  f  uif  ren^t,  accuse  les  Juifs  de  vou* 

loir  incendier  Antiocbe;  sopplice  des  Juifi, 

p.  69,  b,  et  70,  a. 
jinioine  fait  la  guerre  aax  Partbsai  p^  eo  et  61. 
AnUnne  { Saint) ;  sespressenttDieDtssur  les  trou- 

blesqul  mena^aieot  nSglise,  p.  143,  b,  et  143,  a. 
Apami;  vUle  de  I'Apaantoi  p-  i«  a;  ach^e 

la  paix  aux  Perses,  p.  104,  a ;  ses  ^v6ques,  p.  171. 
ApanUne;  yiiles  de  TApanstoe,  p.  i,  a  et  b. 
Aphaca,  Yillede  la  Ccel^yrie,  p^  6,  a. 
Aphek ;  bataille  sous  ses  murs  eotre Ben-Hadad II 

et  Achab,  p.  14,  a  et  b. 
ApoUinari3te$  (Les)  se  ctepiseent  h  F^glise, 

p.  166,  a. 
ApoU<miut  adresse  des  reprocbea  aux  monta- 

nistes,  p.  131,  b, 
Arabe$  (Les )  menacent  laSyrie,  p.  106;  mattres 

de  la  Syrle,  persteuteot  les  cbf^ens,  p.  166, 

b,  et  167. 
Arcane ,  sl^ge  principal  du  oommeroe  des  Ph6- 

niciens,  p.  106,  b,  et  sulv. 
Aramiens,  nom  gdo^rlque  des  Syrieos  danf 

rOcriture,  p.  10,  a. 
Atf^kuu,  ville  dc  la  Chalyboottide,  p.  4,  a ;  «ef 

^vdques,  p.  171,  b. 
AmntMme;  oomaKooeoBenls  et  progrte  de  oette 

b^r^sie,  p.  141  el  suiv. 
ArUns  (Les);  ^poqnede  leur  apparitfon,  p.  I4i, 

a ;  deviennent  tout-puissants  a  la  oou»;  d^- 

sent  plusleurs  dv6ques,  p  142. 
Arms  6inet  sa  doctrine;  portrait  de  oe  r^lorma^ 

teur,  pu  141. 
Arra ,  ville  de  la  Cbalddice^  p.  3,  b. 
Artahun  d^fait  les  Sarrasins,  pres  de  Dvunas, 

p.  99.  a. 
4rUsaiM  llbres  dans  l'anU(ittli6,  p.   107 ;  arti- 
sans esclaves ,  ibid, 
AscUpiade  (Le  Juge)  persecute  les  cbrelieiis, 

p.  140. 
AMcUpiade ,  ^v^ue  d*Aotioche,  p.  132. 
Asi  (Les)  s'efroroent  de cooserver  ieinoDopole 

du  commerce  de  la  sole*  p.  II6,  a. 
Atsa,  roi  de  Juda,  alli^  de  Ben-Uadad  I*';  ckH- 

tie  le  prophite  Hanaoi,  p.  18,  b,  et  13,  a. 
Athanase  ( Saint ),  4v^ue  d*Alexandrie,  est  dd- 

pos6,  p.  142,  b,  et  143,  a;  est  justifie  par  deux 

oonciles ;  ooodamd6  par  le  eoncitiabule  de  Phi- 

llppopolis,  p.  146,  a;  se  rteoncilie  avec  iVm- 

pereur  Constance,  p.  147,  a;  peint  la  desolation 

de  rfiglise,  p.  148;  meurt,  p.  166.  b. 
Attidius  ComiliantUy  gnuvemeur  de  la  Syrie, 

est  vaincu  par  les  Parthes,  p.  72,  a. 
AuriliBn,  vainqueurde  Zenobie,  p.  61,  a. 
AvidiuB  Caaama,  gouverneur  de  la  Syrte,  as- 
pired rempire,  et  cberche  6  d^possMer  Morc- 

Aur6le,  p.  72,  b;  meurt,  p.  73,  a. 
Axiottique ,  diselple  de  YaleBlio,  p.  130,  b. 


<76 


TABLE  JDTES  MATIfiRES. 


Babijlas  (Saint),  4r^e  d'AnUoche ,  emptehe 

Pempereur  Philippe  d'mtrpr  dans  Pegllse  de 

cctte  vUle,  p.  i«,  b ;  meurt  martyr,  p.  133, 

a;  miracles  op^rte  par  ses  reliques,  p.  133  et 

134,  a. 

Baliste,  pr^fet  da  pr^ofre,  repoosse  Sapor, 

p.  80,  b;  se  dfolare  eropereur;  assassin^, 

p.  81,  a. 

Barbalissus,  villa  de  la  ChalybonlHde.  p.  3,  b. 

Bardeaanei  ( Le  Syricn )  propage  le  gnosUdsme, 

p.  131,  a. 
Bamabe  (Saint),  anden  Invite;  Tan  des  fon- 
datears  de  PP^lise  d'Antioche,  p.  119,  b,  et 
lao,  a. 
Barsemes^  rot  d*Atra.  repousse  les  attaques  de 

Septime  S^v^re,  p.  75,  a. 
Basile  d'Ancyre   tient  le   ooncile  d'Ancyre, 

p.  148,  a. 
Basile  d*£desse,  oomte  d*Orient,  destitu^  par 

Anastase,  p.  lOO,  b. 
Basilide  d'Alexaodrie  invebte  an  syst^e  rell- 

gieax,  p.  129,  a. 
Bnsiliscus  (Le  tyran  )  seooart  Gabala,  vtetime 

d'un  tremblement  de  terre,  p.  99,  a. 
Etitncg,  Yille  de  la  Cyrrhestiqae,  p.  8,  a. 
Belisaire  combat  Al-Mondar,  p.  io2,  a ;  fait  an 

tralli  avec  les  Perses,  p.  106,  b. 
Ben^Hadad  /«•,  fils  deTobrimone;  alll^d'Assa, 
roi  de  Jada;  attaqae  Baascba;  obtient  des 
prfvil^es  poor  les  commer^nta  syriens,  p.  I  j, 
a,  et  13,  b. 
Bttn-Hadad  II  assise  Samarlel;  vainca  par 
Achab,  rol  d'lsraei,  p.  13  et  14 ;  obtient  lapalx, 
p.  14,  b;*vainq«eur  de  Josaphat,  roi  de  Juda, 
p.  16,  a ;  attaqae  Samarie,  p.  17,  b ;  leve  le 
sl^gc,  p.  18,  a ;  sa  mort,  p  ib,  b. 
Berenicit  femmc  d'Antlochas  11 ;  sa  ven^^eanoe 

p.  37. 
Birinice  fille  de  sainte  Domnlne  meurt  mar- 
tyre,  p.  138  et  sulv. 
Biroi  ( Liste  des  ^v^ues  de),  p.  no,  a. 
Berya,  vilje  de  TApamtoe,  p.  4,  b. 
Bibulus,  gouTerneur  de  la  Syrle,  excite  la 
guerre  civile  chei  les  Parthes,  p.  59,  a. 


Cainitet  (Les);dogme8  des  calnltea,  p.  127,  b 
Calliopus,  comte  d'Orlent,  ^happe  par  la  fuite 

k  la  colore  d»uoe  faction  da.  cirque,  p.  99  a. 
Callwpiu,  babilccocher,  faitmassacrer  les  Juifi' 

p.  100,  b.  ' 

Candidus,  ev«qae  de  Serglopolis,  rach^te  des^ 

prisonniers  a  Cbosroes,  p.  102,  b. 


Caracalfa,  assassin^  par  Macrin,  p.  7S,a. 
Carinm  porte  des  secoars  h  Antioche,  p.  loi.  k 
Carpocratiefu(Ln ) ;  doctrine  des  carpocndaL 
p.  129,  b. 

CaMliM  Senriiius,  nomn«  par  Adrin 
'     near  de  Syrie,  p.  71. 
Caatiotide;  Tllles  de  la  Cassiotide,  p.  4,  h, 
Casaitts  ( IjB  mont )  «i>ranl«  par  an  grand 

blement  de  terre,  p.  71,  h, 
Caaaiua,  gouyemeor  de  la  Syrie,  deWlL-— 

et  Padoros,  His  d*Ofod«s,  roi  des  tM 

p.  58,  b,  et  59,  a;  en  gaore  aTec 

p.  60,  aetb. 
Caatiua  Longinua  (C),  c«ibie  Joi 

gouTerneur  de  Syrie,  p.  es,  a. 
Ciaaire,  maftre  des  offices,  ettrftsik  A 

par  reroperear  Thfodosepoar  timrav-. 

des  babitantsde  oette  ?ille,  sfot«resK«d 

cas^  et  va  &  Constantinople  imploRf  kl 

mence  de  I'empereur,  p.  M,  b,  et  r. 
Ciaarie,  colonic  syrienne ;  massacre  da 

p.  68,  b,  et  69,  a. 
Ceaenniua  Peius,,  goayemear  de  Syrie,  M 

la  Comroag^ne  k  cette  province,  p.  m 
Ckaleidiee;  vUles  de  la  Chalddlce,  p.  \h. 
Chaleique  (U )  est  rftinie  Tan  53  i la 

de  Syrie,  p.  68. 
CA«/cM,ville  de  la  Chalddioe,  p.t,k;f*e 

par  Uonce,  emperear  syrien,  p.  H^  b;bHflte 

par  les  Perses,  p.  102,  b ;  liste  de  aes  Mi^ 

p.  170.  a. 
Chalyhon,  ville  de  la  Chalyboni!idc,p.J,li' 
Chalybonilidei  vlllesde  la  ChalybOBftldcVl,^ 
Ckoaroia,  roi  de  Perse,  abandonoe  Sara  N|^ 

lage,  p,  102,  a ;  vend  la  palx  k  menpdkih 

vre  aux  flamnies  Chalds,  p.  ioi,b;Hdf 
Antioche,  p.  108;  y  fait  meltre  le  fw,  ^li^ 
a;  braie  r^gllse  de  Daphnd,  ibid.;  verfM 
palx  k   Apamde,  i6Mf.;  ran^ne  CM*; 
fonde  une  ville  nomm^  Antioche  H*  Q^ , 
roH,  p.  104,  b;  refuse  aox  Sogdiens  rautoili* . 
tion  de  faire  le  commerce  de  la  sole  dsaiM 
empire,  p.  IT6. 
CbrlsUani8me(Le)  s'^tablit  k  Antioche,  p.  lA 
Chrysostome  ( Saint  Jean )  console  les  Aili^ 
chiens,  p.  96,  a;  fait  Tdoge  de  saiot  Blb^ 
las,  p.  132,  b,  el  134,  a;  raoonte  le sappffn* 
saint  Lucien,  p.  136,  b,  e(  137;  exdle  l«Ai- 
tiochiens  k  se  convertir,  p.  168,  b,  et  I59,t; 
nomm^  ev^e  de  Constantinople,  p.  lid 
b;  pers^cutd,  p.  162 ;  meurt,  p.  Ma,  h. 
Cineiua,  gouverneur  de  la  Syrie,  p.  66. 
Cirque  ( Le )  cause  des  troubles  it  Antiodie :  tie* 
tion  Verte,  faction  Bleue,  p.  100;  riralWah 
tre  ces  deux  fiidions,  p.  I(i4,  h. 
Claudiua  Filixy  intendantide  la  Jodfe,  p. «,  h, 
et  69,  a. 


TABLE  DES  MATltRES. 


Oiafdire,  femoM  d'Antiochos  de  Cyziqae 
Mfte  ptr  rofdre  de  Tryphtee,  sa  ftoeur, 

CUopdin,  femme  de  IMm^Arios,  r^ae  dans  S^ 

kuck, !».  64,  a;  aes  crima;  sa  mort,  p.  56. 
CmUtfrk ;  Tfllet  de  la  Codesyrie,  p.  &,  a. 
tMtgOy  goavemear  de  la  Syrie,  pr^rve  lea 

luUi  4*0110  eDti^  extermlnaUoD,  p.  70. 
Cmmasau;  ▼Ulet  de  la  Commag^ne,  p.  3,  a. 
Ummmt  (Do)  cbez  les  Syrieos ,  p.  106,  b,  et 
MiT. ;  via,  laioei,  p.  109,  b ;  Uasns  de  lln,  ta- 
pis, pienvi  taUlcea,  p.  IIO,  a;  cannelle,  perles, 
ttoOade  Ifnde  et  da  Cachemir,  ibid. ;  esda- 
va,eulTre.  p.  IIO,  b;  parfams,  ponrpre,  aoie, 
.yiemriet,  aromates,  p.   Hi,  a;  dDoame, 
'  ffdbuumi,  nard,  malobatbre,  baume,  safran, 
«yx,  morrbioe,  p.  Ill,  b;  pourpre  de  Tyr, 
rtuaeetbolsde  cMre,  bitame,  p.  112,  a;  fro- 
■CBt,  dalles,  prooea,  polrea,  p.  II2,  b;  veote 
dacMUTes,  ibid. ;  doiiiestlqaefl»  valeU,  cour- 
ItaBcs,  CQUKiaes,  eovoy^  a  Rome,  p.  113; 
pMlnii  da    valet   syrleo  parvena,   ibid.; 
BoeancicroyaiieeftorlentaleB,  inlrodoitesdaDS 
Rome,  p.  m,  b,  etsaiv. 
CM^i/f d*Alexaodrle, p.  UI,  a;  ooDdle  de  Dios- 
poiiswnUetdeP^tage^p.  IM  et  165,  b;  con- 
die  dtphtee  aa  sqjet  de  Nestorias,  p.  166,  b; 
eoodle  de  If ks6e,  p.  I4I,  b;  concile  de  Tyr, 
pi  M2,  b;  Qondle  d'Aotiocbe,  p.  184,  a;  135, 
b;  I43etsuiv.;  ooDcUe  deCoDstaolloople, 
p.i6fl^  b,l6l;ooncae  de  Jerusalem,  p.  120, 

114,1. 

Gmnthn^iOiiu  sor  let  Id^  poUUques  et  rell- 
gkoKsappoit^  de  rOrieot  i  Rome,  p.  78  el  79. 

GBMtoiiee.  prttic  d' Antiocbe,  oondamae  aa  baa  - 
otaeaieDt,  p.  162,  a. 

Csmtaace  (L*empereor)  r^lablit  la  disdpline 
BittUinfanii  let  Ugioiis  de  la  Syrie ;  assare 
M  traBqiilUlie  de  oette  proviooe;  fait  d'An- 
ttodiesa  capitate,  p.  83,  b,  et  83,  a ;  oMe  k  Cal- 
ioi  le  goavcTDemeDt  de  la  Syrie,  p.  83,  b; 
cberebe  a  le  (aire  p^rir,  p.  86,  a;  refuse  de 
poolr  Aapbiliochias,  p.  86,  b ;  baraogae  sea 
l^Sioiis,  ior  le  point  de  oombaltre  Jalien, 
P  87 ;  fa  rtooociUe  avee  Athanaae,  6veqoe 
f  Alexaodrie,  p.  U7,  a;  ^crit  poar  et  contra 
Endoxe,  p.  im,  a;  fait  impoaer  lea  mains  k 
tuolaa,  p.  148,  b. 

<^MteiU   (L'emperair)     defend    Mhanase, 

P.145,b. 

C<«><mlMi  affermit  le  chrlatlaniame  en  Syrie, 

P-8J,b. 
^^■"^teA^iaa,  iemme  de  Gallos,  oorrompt  les 

^nufows  dispositions  de  son  mari,  p.  83,  b, 

«t»a.iT'.',  meorl,  p.  86,  a. 
CtmatatitiuM,  de  Tarse ,  enTojti§  k  Antiocbe  pour 

•touffer  uoe  sMiHoo,  p.  99,  a. 

13"  lAoraUon,  (syrie  anciemne.) 


Ml 


Corbulon  organise  one  arm^ ;  s^empare  de  l*ad- 

ministralion  de  la  Syrie*,  ^loigne  lea  Pactbes 

de  la  Syrie,  p.  65  et  66. 
CarneiUe,  Areqae  d*Antioche,  p.  131,  b. 
Conteille  ( Le  pape )  tefit  a Fabias,  «v6qae d'An- 

tioche,  p.  194,  a. 
Crasnu,  goaYerneur  de  la  Syrie,  dtfait  par  les 

Parthea,  p.  58. 
Criticut  Silanus,  goaverneor  de  la  Syrfe,  p.  62. 
Cyriade  ( L'empereur )  est  tad,  p.  80,  a. 
CyriUe  (Saint),  6v6que  d'Antiocbe,  p.  136,  a; 

terit  oontre  Nestorias,  p.  165,  b;  fait  ddposer 

Jean ,  ^^ue  d'Aotloche,  p.  166,  a. 
Cyrrheslique ;  villes  de  la  Cyrrhestique,  p.  3,  a. 
Cjfrrhus,  ville  de  la  Cyrrhestlqae,  p.  3,  b;  sea 

dreqaea ,  p.  172. 
Cynu  It  jeurut  traverse  la  Syrie,  p.  S3. 


Dama»,  ville  de  la  Ccelteyrie^  p.  5,  a;  prise  par 
Tiglath-Pilesser,  p.  20;  par  Parm^nion,  p.  25; 
par  Ptoldmde  Pbiladelpbe,  p.  35;  massacra 
des  Julfs  dans  oette  ville,  p.  69,  a;  prise  par 
les  Arabes;  devieot  la  capltale  du  noavel  em- 
pire des  Musaimans,  p.  167,  a;  sea  eveques, 
p.  173,  a. 

DaphfU  ( Le  bourg  de ),  dans  le  voisinage  d*An- 
tiocbe,  p.  4,  b ;  ddtroit  par  an  tremblement  de 
terra,  p.  loi,  b;  son  ^lise  est  brttl^  par  les 
Perses,  p-  104,  a ;  silence  de  I'oracle  dd  temple 
de  Dapbod,  p.  133,  a ;  destrnction  de  la  couver- 
tara  de  ce  temple  par  le  tonnerra,  p.  133,  b. 

David  remporte  plasleurs  victoires  sur  les 
Syriens,  p.  10—12. 

mce  CL'empereor)  fait  p6rir  saint  Baby  las, 
p.  133,  a. 

DemitriantiSy  dv6qae  d'Anlloche,  p.  134,  a. 

Dimitrius,  roi  des  Syriens,  combat  con  Ire  Sd- 
ieucas ;  sa  mort,  p.  29  et  suiv. 

Dimetrius  Soter,  vainca  et  tue  par  Alexandra 
Balas.  p.  53,  a.        ^ 

Dimitrius  lINieaior,  en  guerre  avec  ses  sa- 
Jets,  p.  53,  b ;  captif  cbez  les  Partbes,  p.  54,  a ; 
son  retour,  p.  54,  b;  sa  mort,  p.  5b,  a. 

Denis  (Saint)  ecrit  k  Fabius,  dveque  d*Antio- 
cbe,  p.  134,  a;  bl&me  laoonduite  de  Paul  de 
Samosate,  et  combat  sa  doctrine,  p.  I35. 

DiadunUfu,  tils  de  Macrin,  est  dtelard  C^ar, 
p.  76. 

DiocUlien  (L'empereur),  irrite  de  la  rdvolte 
d*Eug^ne',  fait  retomber  sa  colere  sur  Antio- 
cbe, p.  81,  b,  et  82,  a ;  persecute  les  Chretiens 
de  cette  ville,  p.  136. 

Diodore  embcasse  la  vie  asc^tique  et  maintlent 
les  drolls  et  les  franchises  de  la  primitive 
£glise,  p.  146  et  suiv. 


178 


TABLf:  pES  MATI$RES. 


DolabtUa,  gottveroeur  de  la  Syiie ,  en  guerre 

avec  Cassiiif,  p.  60;  i|e  (lonne  la  mort,  ibid. 
Domitianus  (Le  pr6teur)  iQ£ulle  Gallas;  est 

tQ^,  p.84,  b,  et  8&,  a.  * 
Domnine  ( Sainte)  voyage  avec  ses  lilies  poar 

tebapper  a  la  pers^ution,  p.  138  et  suiv.; 

echapp«  aux  fiirepn  des  boarreaux  en  se 

Doyaht  avec  elleg,  p.  138,  b.      ' 
Vomnua ,  4v^ue  d*A.ntiocbe,  p.  136,  bi 
Domniu  It,  ^vdque  d*Antioch^,  p.  166,  a. 
IhmnutlJl,  ^v«qae  d'AnUocbe,  p.  166,' b. 


ibioniUs  ( Les } ;  doctrine  des  ^blonites ,  p.  127, 

b,et  128,  a.      * 
Alagahalj  emperear,  p.   76,  a;  vainqueur  de 

Macrin,  p.  77,'  a;  meurt,  77,  b. 
£leulherhiSt  dteapite  ot  Jete  dans  i'Oronte, 

p.  100,  b. 
Jtlianha  ( Le  propji^^e )  gu^it  Naemane  de  la  I^ 

pre,  p.  15 ,  b,  el  16 ;  ses  miracles,  p.  17  et  18, 

a;  ses  pr^ictions,  p.  18,  b,  et  19,  b. 
Elxaitea  ( Les ) ;  doctrine  des  elxaltes,  p.  128. 
JSmeset  ville  de  TApameoe,  p.  4,  b;ouvre8es 

portes  k  Odenath,  p.  80,  b;  ses  6vdques, 

p.  173,  b. 
iphrem,  prtfet  d'Antioebe,  interdit  les  tpeo- 

tacles,  p.  100,  b. 
itphrime .  ^v^ae  d*Antioche,  assemble  un  sy- 

Dode  pour  d^poseir  Paul  d*Alexandrie;  oon- 

damne  les  terits  d'Origtoe,  p.  166,  b. 
£pigoHiui,  pbilosopbe  de  Lyde,  mis  k  la  torture 

et  d^pil^,  p.  86. 
ipiphanie yy\\\e  de  I'Apamtoe,  p.  4,  b;  ses  <$v4- 

ques,  p.  171,  b. 
irot ,  ^v^ue  d*Antiocbe,  p.  ISI,  b. 
itienne,  6v^ae  d'Antioche,  r^pond  par  one 

sentence  d*exoommnoication  k  celle  que  le 

pape  avait  lanoee  oontre  lul,  p.  146,  a ;  ^irige 

one  odieuse  machination  qui  tourne  contre  lui, 

p.  146,  b ;  est  destitu^,  p.  146,  a. 
Eudoxe ,  ^vdque  de  G«*rmanicie ,  se  fait  recon- 

nallre  ^v^ue  d* Anlloche,  p.  147,'  b,  et  148,  a ; 

cfaass^  de  celte  ville ,  ibid. 
BudoxiCf  femmede  Tempereur  Tb^odose,  pro- 
nonce  an  discours  k  Antioche ;  re^it  de  gran(!ts 

honneurs ;  ses  bienfalts,  p.  08. 
Sugine,  offlder  de  Diocl^tieo,  sedtelare  empe- 

reur,  est  tu^,  p.  8i,  b,  et  82,  a. 
Eugene,  pr6po6«  k  la  garde  de  la  province  Ea- 

phrat^lenne,  panitde  leucs  brigandages  quel- 

ques  tribus  de  Sarrasins  sc^nltes ,  p.  M ,  a. 
Euphrasius,  «v^e  d'Antioche;  ^as^  sous  les 

ruine:4  dela  ville,  p.  166,  b. 
Euphrate,  4v^que  de  Cologne,  tebappe  k  une 

odieuse  macbioation,  p.  I45,  b. 


Eurontu,  ville  f\e  la  Cyrrttestiqae,  p.  S,  a,  M 

^v^ues,  p.  173,  a. 
Euiiti  de  C6ut6e  refuse  t*^v«ehe  d'AottodK, 

p.  142,  a. 
Eiuibieht  (Les);  ^poqoe  de  leor appaiWos, 

p.  141,  a;  ils  oonvoquent  OD&AdfekAoOb- 

Che,  p  143  et  suiv. 
Eu$ebiu$,  orateur  dlstlDga^ ,  mis  a  la  tortveff 

dteapit^,  p.  86.     '     ''    '        '  "  " 
^ustathe,  6vftque  d*Antioche,oombitlaitia^ 

p.  141,  b ;  eA  d^pos^,  p.  141,  a.*'^   * 
ivode  ( Saint ) ,'  ^v^a^  d*An(locfte,  p.  Ill 


/'oAitM,  ^vdqued'A.nUoehe,  adoplela«|iliio» 
des  novations,  p.'  134,'  a. 

FeUiz  (  Le  pape^  excbmmbnie  Paol  de 
p.  136,  a. 

FirmilUn'  condamne  la  condoite  dePnlMr 
mosate,  p.  I3b,  b.  '    ' ' 

Flacille,  6v^ue  d* Antioche,  prfeide  k  fioril 
deTjT,  p.I42,b.  •    '     "•'  '"" 

Flavien,  «v«qiiB  d*Antloche,  obtleotdeM' 
pereor  Tbfodose  la  irrftce  dn  Anlloettii 
p.  97^  b ,  168  e(  sUlv. ;  fnqalM^  ao'i^ 
sl^ge  d*Antiocb«,  (riobpbe  de  ses  ^Bkt^^ 
Tassistance  de  cet  emperear," 'p.  f6l,i;Ji^ 
Aa  concile  de  CoDStantlnopte ,  P^'l^tiV 
itieart,  p.  162,  a. 

Flavien  11,  ^v«qae  d*Alltloch^  p  ll*,^ 

FUtrianui,  frfcre  de  l*etnpei«ar^ridle,Cft  W^ 
ses  soldats,  p.  6i,  b. 

Foulon  fPierre),  h^i««qtte  IntrigiDt,  enH** 
Marty ilus  le  sf^e  d'Andbche,  j^.  I«,i. 


Gcditm,  lille  comprise  ^fons  la  piofittt*^ 
rie,  pi  6^,  a ;  massacre  des  loift,  p.  ^^ ^ 

Galtns,  ft^rc  de  Jdlieh  TAposUt,  gooTirt** 
la  Syrie,  p.  88,  b;  iHStiMt  d'u»  tM^^ 
sassfnat  sur  sa  ptersdon^  p.  84;  sn  o*^ 
Juridiqaes,  p.  85,  b ;  maoiM  k  laooordeUJ 
p.  86 ;  preod  parti  poiir  lea  ariensel  p«^ 
lesdiiMeOs,  p.  147,  b;  esttxtaiti,P-I^K 
it  1*7,  b, 

Ganntfi  (L'eonuque),  p.  7«,  a;  coDlut  « 
Macrin  pour  £lagabal,  p.  77,  t- 

Qazd,  ville  oompffie  daM  la  provinoe  4eS^ 
p.  67,  a. 

GinUnut,  pr*twd»Antloche,AjriTilnd«W* 
p.  132,  b. 

George,  de  Laodlo6e,  6crlt  contre  Eudoxf,*^ 
d*Antlocbe,  p.  148,  a.  '     ' 

Georges,  pr«tred*Alexandrie,estd*pos*,p.i*jj^ 

Germtun,  nevea  de  Justin,  propose  d«  pW 


TABLE  DES  MATURES. 


tH 


iris-DtJies  h  la  defense  d'AoUoche,  p.  io3,  a. 
Semanicia,  ville  de  la  Gommagene,  p.  3,  a. 
Gfrmnicks,  nYaj€  par  Tibere  en  Orient,  p. «, 
b;  iodigo^  de  la  oonduite  de  Pisoo ,  qa*il  ic- 
COM  de  Patolr  ebpokoniKS,  tteort;  iiioaii- 
mnils  devte  k  sa  m^moffe,  p.  6S  et  64. 
Cma,  entn^e  del  mareimndfagfc  dt  rMLh, 

Cinddnii,  Ttlle  de  la  MUodde,  p.  8,  b ;  tea  ^«- 

(nm.  p.  no,  b. 

€no$ticime'{U);  dbctritie  deft  gtiottkyaes, 
p.iM,bi 

l^fmn  de  Ha^anM  padfM  I'Kgllie;  p.  M, 
b;  parieeo  ftvear  de  PanllD,  p.  IS7,  b ;  reHttse 
dImDOwrlctmaiMJihttvieflfP.  I68,b. 


122;  subit  un  lDt<?rrogaloJre;  condamin!  h  6(re 

devot^  a  Rome  |)ap  les  b^tes,  p.  i^s,  a;  sod 

voyage,  p.  m,  b;  iSctil  plusieurs  leltres  fort 

iot^ressaDtes ,  ibid,  ei  salv. ;  Invente  le  chaiil 

alleroaUf  des  ^tim«6,  j).  laj;  a;  p^ril  mar- 

•tyr,  ibid. 

lilm  excite  en  iyrie  dfae  Mrdtte  eobtre  reni- 

^  perear  Zenpn,  p.  99,  b;  dtoipft^,  p.  loo,  a. 

/mma ;  balal lie  litrte  |irte  de  oe  booig,  enlre 

Macrin  ei  £la^abal,  p.  77,  a. 
innocent  ( Le  pape )  cbi-Ptopond  avec  Alexandre, 
^v^que  d'Antioche,  p.  163,  b;  refuse  de  con- 
flrmer  les   actes  da  doncile  de  DIospolis , 
p.  166,  a. 
Irinie,  oomte  d'Orient,  p.  100,  b. 


W«rf,  DOB  oomman  des  rols  d'Arame,  p,  10,  b. 
uMaer,  fljs  d^  Richob,  fott^e  I'tlnit6  en  Sy- 

Ife,  organise  ooii  ifgde  cbnlT«  IM  &6breax; 

t«loaiparbaTid,p.  It),  b,  rt,  a. 
|»*«wr^TO3r.  Hadadeze^. 
MMAl  (U  proph^ )  r«j>rlminde  AMU,  rdl  He 

J«i«.p./3,a, 
Bnom,  lai  «t  ^oec^tieor  dd  m  IfabtoeN, 

*M/telBi Berrlteoh  fle  Bavkli  tkftea,  p.  ii, 

^«/,  looeptiter  de  Ben-Hadrid  11,  attaqiM 
&^  etitida;  Mtoeilift  l«niiataB;  m  mote, 
M8,b,ecrt.a: 

»^*,  vnie  de  la  GoBMsyrle,  p.  6,  a;  Ms 

**ini«,p.i87. 

Mihifue,  mofi  k  Antloalie  par  I'eiiipefeiir 
JwfaMpeutUrtt  teDgeaow  del  habitants 
«.  ortteTUie,  aociHrde  aH  tusls  aux  aecoste, 
P*«,b»Hf7,a. 

*ft««^.wlf«thtoplei  cl«iD6  audienoe  aox 
©pattinmaini,  p.  ii5. 

■jO^w.aomoAprtfol  (telaSyiiepar  Coat- 

ww/w  mooide  k  Pboeas;  se  fait  mkmter 

£/«»«,  p.  106,  a. 

^i*^*  BrioMffe  d'AnUocbtia  III,  p.  40,  b,  et 

•*^;ttinort,p.44. 

^,  Neceishttde  R«ft>iMv  p.  19,  li. 

■^'i* ,  tllic  de  la  Cyrrhestlque,  p.  3,  a; 

*<^la  pail  ^Gboarotevp.  loa,  !>;  seaev^ 

T|^  (Silnl),  foodateor  das  nooast^m  en 
^*.P-  t4«,a. 


^m  (Les)  foBt  le  oommeroe  par  caraTa- 

■».  p.  WW. 

"^^tSainl),  «v«qae  d'Antloche,  p.  12I  et 


Jefn,  lllsde  RjatiD,  oonclaion  traits  avec  les 

Perses,  p.  104,  a. 
Jean,  ^vAqae  d*ADliocbe,  sospeet  de  nestotia- 
nisme,  est  s^par^de  la  commifDioD  de  l'£gllse, 

,  p,  ,166,  b,  et  166,  a ;  se  r^tracb ,  ibid,  ^ 

Jehu,  Toi  d^Israel,  en  guerre  centre  Hazael, 

.p.  19,  a. 
Jiroboamll,  fits  de  Joas;  vainqueur  des  Sy- 

,  riens,  p,  l^,  b. ..    , 

«(^nita(em,;saccagte]i)ar  jes  Syriens,  p.  I9,  a. 
Jeuzolympiquee  (Lesj  sent  d^endos  k  Daphbd, 

P-  '«>»  b,    .   . 
Joab,  yainqueur  des  Syriens,  p.  Ii ,  b. 
Joa^haz,  iils^deJ^hu,  en  guerre  avecles  Sy- 

riens,  p.  19,  a. 
Joag,  rold^Urael,  yainqneur  de  6en-Hadad  III, 

..P.  !?»»>. 
Joasch ,  roi  de  juda,  solUdte  ralllance  de  Ha- 

zael,  p.  19,  a. 
Joppe,  ville  comprise  dans  fa  province  de  la 

Syrie,  p.  67,  a ;  massacre  des  Juifb,  p.  69,  a. 
Jorame ,  fils  de  Tobi,  roi  de  Hamalb,  porte  des 

presents  k  t>avid,  p,  li,  a. 
Jovien  (L*emperear;  entre  dans  Antloche;  raf- 

fermlt.le  cbristianisme,  p.  91,  b,  92,  a ;  155, 

b,  et  156,  a;  accorde  tiuji  palens  le  Ubre  exer- 

cioe  de  leur  culte ;  meurt,  bs,  b. 
Ju^9  C  Leg) ,  ^gorges  par  la  faction  vcrte,  p.  loo, 

a ;  paf  la  faction  bleue,  p.  loO,  b ;  brCklent  vif 

Teveque  Anastase;  sont  massacres,  p.  I06,  n. 
Jfdee  Ciear  donne  des  marques  de  sa  bienveil- 

lanpe  aux  Syriens,  p.  59,  b. 
JulMi  Domna,  femme  de  Temperear  Severe,  se 
,  laisse  joaoarir  de  fabn«  p.  75,  a. 
Juli^  UtBsat  belle-soeur  de  Tempereur  Severe, 

^liveBassianas  ( £lagabal )  a  ('empire,  p.  76,  a. 
Julien  (L'empereur)  poursuit  de  sa  haine  et 

de  ses  railleries  les  habitants  d* Antloche;  fntt 

toos  ses  efforts  pour  ranlmer  le  culte  dea 
12. 


iso 


TABLE  DES  ALLTT£RES. 


palensy  p.  87  et  raiv.,  U9;  se  veoge  des  An- 
tiocbiens  par  le  Misopogoo,  p.  ibo,  a;  appr^ 
dattoD  de  la  condaite,  du  caract^re,  du  g^oie 
et  des  moears  de  oet  empereur,  p.  88  et  suiv., 
I5f,  b,  etsuiv.;  meurten  h^ros,  p.  91,  a,  et 
156,  b. 

Julius  Mesander,  vicUme  de  soo  ooange, 
p.  73,  b. 

JutHn  tAche  de  r^tabUr  la  paix  dans  Antioche, 
p.  100,  b;  lai  eDvoiedes  seooun,  p.  loi. 

Jusiinien  oootribae  gto^feasement  k  relever 
Antioche ,  p.  I05,  a. 


LabiSnus^  an  des  partisans  de  Pomp^,  engage 
ies  Partbes  k  faira  la  conqu^  de  la  Syrle, 
p.  61,  a. 

Laodice,  femme  d'Antiochus  H ;  see  cruautte, 
p.  37. 

Laodicfie,  ville  de  la  Laodic^ne,  p.  4,  a;  ses 
^vdques,  p.  173,  b. 

Laodicie,  ville  de  la  Cassiotide,  p.  4,  b;  livrte 
aa  pillage  par  Cassias,  p.  80,  b;  affraochie 
plas  tard ,  par  Marc-Antoine ,  de  tout  impOt , 
p.  61,  a;  ridaite  en  oendres  par  Niger,  p.  74, 
a;  sarnomm^  Septimia  Severlana,  p.  74,  b, 

'  et  75.  a ;  tf proave  un  tremblement  de  terre, 
p.  99,  a;  ses  ^?^es,  p.  170,  b,  et  171,  a. 

Laodicene;  villes  de  la  Laodioine,  p.  4,  a. 

LaomSdon  goaverne  la  Syrie,  p.  39,  b. 

L^on  ( L*empereiir)  seoourt  la  vJUe  d*Antioche, 
presqae  totalement  rtiinte  par  on  grand  trem- 
blement de  terre,  p.  98,  b,  et  99,  a. 

Leonce,  proclam^  emperear ,  dlspote  Tempire 
k  Z^non,  p.  99,  b;  d^pit^,  p.  lOO,  a. 

lAonee,  ev6que  d*AnUoche,  favorise  Ies  ariens 
et  cherche  k  antontir  Ies  croyances  catholl- 
ques,  p  146  et  suiv.,  146,  b,  etnote  I. 

Zi6ani«5  (Lerh^teur)  obtient  dePeropereur  Ju- 
lien  la  grAce  des  Antiochlens,  p.  89,  b,  150,  a; 
honore  sa  m^molre,  p.  91,  a;  est  vivement 
applaud!  k  cause  de  sou  eloquence,  p.  i&i,  a. 

Xtcmt«»,empereur  d*Orient,  d^bauch^et  cruel, 
p.  82. 

Licinius  Mudanua,  gouvemeur  de  la  Syrie, 
conduit  Ies  ^venements  qui  placent  Yespasien 
sur  le  trOne  Imperial,  p.  66. 

Longin ,  fr^re  de  Tempereur  Z^non,  vaincu  et 
pris  par  Ltence,  empereur  syrien,  p.  99,  b. 

Lucien  ( Saint ),  pr^lre  d' Antioche,  est  exoommu- 
nie;  se  r^tracte;  fait  Tapologie  de  sa  foi, 
p.  136;  triomphe  du  tourment  de  la  faim, 
p.  136,  b,  et  187 ;  meurt  martyr,  ibid. 

Lucius  Ferns,  gouverneur  de  la  Syrie,  Spouse 
Uicille,  fiUe  de  Marc-Aarele,  p.  73. 


Maacha ,  tille  de  Talmal ,  epoose  de  DsvU, 

p.  10,  b. 
MacidoHtus,  le  Critbophage,  demande  la  grte 

des  Antlochiens,  p.  97,  a. 
Macrien{  L*emperear }  se  donne  1amorl,p.8Q,k 
Macrin  assassine  Caracalla,  p.  75,  b;  oomM 

£lagabal,  p.  76;  vainon,  p.  77 ,  a;  decsfitti 

p.  77,  b. 
Madianiiu  (Les)  foot  le  oommeroe  par 

vanes,  p.  108. 
Magnentius  envoie  on  tleaire  en  Svrie 

tuer  Gallua,  p.  83,  b. 
MaTak>cupfot\  brigandage  et  cbAtimeot  ds4 

habitants,  p.  98,  a. 
MaroAutile,  en  guerre  oontre  le  rebdle  i\ 

ditts  Casslos;  cbAtte  Antioebe  et  CyrriiBi 

p.  73  et  73. 
MdMon,  fils  de  T^v^que  de  Sinope,  W 

an  syst^me  de  religion,  p.  130,  b,  el  ilk^ 
MarciorUtes{lM)\  doctrine  des  miiuuJ% 

p.  130,  b,et  131,  a. 
Mariamne,  riUe  de  U  CoBl^yrle,  p.  5,  «;• 

^T^ues,  p.  171,  h. 
MarHm  Ferns,  wmaA  par  Marc-Anrihf* 

vemeor  de  la  Syrie,  p.  73,  a. 
Martyrius,  ^6qae  d* Antioche,  est 

d^poesMA  deaon  stdge,  p.  168,  a. 
Maxime,  «v6qae  d*Aotioche,  lalase  abttevk 

si^ge  de  son  £igliie,  p.  166,  a. 
Mazimin,  goavemear  de  la  Syrie, 

p.  81,  b. 
Maxiimn  ( Uempereor) ,  Tilnoa  piir  Goarfw 

tin  et  lidnloi;  meurt,  p.  81,  a. 
Maxinwn ,  6v«qae  d'Antiodie,  p.  I3J,  •- 
Migabize,  beaa-frftred'Artaxerxte,  goaw«* 

de  la  Syrie,  p.  93,  b ;  bat  lea  troapes  Wf^ 

p.  33,  a. 
ii^gas,  ^v^qoe  de  IMro^,  propowla  pais*  O*' 

rote  de  la  part  des  villes  syrienofls,  h  1* 

et  lOS. 
MeUce,  ^v«que  d* Antioche,  coofond  le»H"r 

tiques;  p.  148,  b;  padfie  rfigUae,  p.  !<*>¥ 

meurt,  157. 
Melech,  nom  des  cheb  detritiasdans  laSj^ 

p.  10,  a. 
Memnon^  gODveroeurde  la  Syrie,  p.  S6,  ^ 
MinahhM  sVmpare  de  Tiphs^,  p.  19, 1'i  ** 

roort,  p.  30,  a« 
Min4Ut  lieutenant  da  oomte  d^rient,  nl«tt 
dans une r^volte k  Antioche;  pividu,  p.  i«»^ 
Messaliens  (Les);  doctrine    des  Mesi^kMe 

p.  160,  b. 
mtellvs  Sdfripn,  gooveraeur  de  la  Syift^ 
exeroe  de  grandet  vexations,  p.  i8* 


TABLE  DES  MATlfeRES. 


mi 


JKBeiMt»«i  (Lm);  doctrine  des  milleoaires, 

Mmet  ( Lei)  habitants  des  moDtagnes  deman- 
tet  grtee  pour  Aotioche,  p.  96,  b,  et  97 ; 
tf0,  b;  soipendeot  le  ooan  natarel  de  la  Jos- 
tiOB,  p.  iflO,  b,  aoot  aoathtoiatis^i  p.  16 1,  a. 

IMm  le  i«Tolle  contre  A.Dtiocbiu  HI,  p.  40, 

.  ^  etnUv.  ;Uest  vaiDCU  et  meurt,  p.  43. 

H»teJi  ledtelare  propli^te,  p.  131. 

lba/im(Leqaeiteur),  cootraire  aa  dessein 
de  Gallns.  est  aasassin^,  p.  85,  a. 

fcpweOr,  d^tralte  par  Antiochos  el  Pbilippe, 
friffi  de  S^leoeoa,  |>.  57,  a. 

^imwanw(Le  pr^et)  se  laisse  oorrompre 

;  |ir  let  neurtrien  de  DomiUanus,  p.  86,  b. 

^yriM4ihr«,  Tiilede  la  PiMe,  p.  3,  b. 

I  11 

%l^iumT  i*empare  de  la  Syrie,  p.  3i,  b. 
RMaoM,  Taioqaear  d*Acbab,  gaM  de  la  1^ 
^'  fRpu  £liscba.  p.  16, 1 7,  a. 
lUoKk,  roi  d^Amm^De;  la  mort,  p.  II,  a. 
Amnmi  (  Lei ) ;  doctrine  des  nazar^ens , 

p.  «».». 
/VfcAffo^  nf  dtgypte,  attAqae  les  Syriens,  p.  2I,b. 
Netiarva;  appr^atlon  de  sa  doctrine,  p.  165,  b. 
IKeotMiia  ( Les) ;  origine  de  rh^rtele  des  nloo- 

Ula,p.  127,  a. 
IHevlai,  Ynh  dca  sept  premiers  diacres,  donne 

SOD  son  &  rh^rtsie  des'  nioolaltes,  p.  127,  a. 
IHfer,  eDoremeiir  de  la  Syrie,  se  dtelare  em- 

yenor,  et  dispate  Femplre  k  Mrtee ;  est  ta6, 

pi73Ct74« 

ffSnA*  crt  aisl^gte  par  les  Romalns,  p.  105,  b. 
MttaHen ;  n  doctrine,  p.  134,  note  I. 


Oeeonm,  mt  de  la  Ccelteyrle,  p.  5,  a. 
^Mraa/Adbpcnetes  Perse8;entredanifim«se» 

^»,b. 

OMtfe>(Les);doctriDedes  opbites,  p.  129,  b. 
QrMir,  tatrape  de  M ysie,  trahit  les  provinces 

dirAsieMineare,p.S3,  b. 
Otaeu,  lllsd*Orodes,  roldesPartbes,  esttainca 

ctloeparGMsios,  p.  58,  b,  et  69,  a. 


P 


ftfmut,  fils  d^rodte,  roi  des  Perthes,  l^e  le 
ri<8e  iTAntloGiie;  est  d^Cait  par  Cassias,  p.  58, 
•>ct&9,  b. 

^,  rille  de  la  PIMe,  p.  3,  b. 

f^intme  (La)  est  rtenie  k  la  province  de  Sy- 
*,p.68. 

NOsifau^  «veqtte  d'Anttodie,  p.  166,  b. 


Palmyre,  Tllle  de  la  Palmyr^ne,  p.  4,  a. 
Parmenion  s'emparede  Damas,  p.  25,  b. 
Patrocle,  g^o^al  d'Antiochos,  est  derail  par  Zi- 

poit^  p.  35,  a. 
Paul  (Saint),  Tun  des  foodatears  de  I'l^g^i^tc 

d'Antiocbe,  p.  119,  b,  et  120,  a. 
Paul,  de  Samosate,  6v^ue  d'Antioche,  mene 

one  vie  scandalease;  se  fait  partisan  de  I'here- 

sie  de  Sabellins,  p.  134,  b ;  sonerreur  sar  V'uy 

carnation ;  embrasse  le  Judalsme,  p.  135,  a ; 

est  d^posd,  p.  135,  b,  et  136,  a. 
Paulianutes,  voy.  Puuliens. 
Pauliens  (Secte  des ),  p.  136,  a. 
Paulirif  en  contestation  avec  Flavien  pour  I'e- 

plsoopat  d^Aotioche,  p.  157,  b,  et  158,  a;  sa 

mort,  p.  161,  a. 
Pekahia,  filsde  Menabtoie,  est  assassin^,  p.  20,  a. 
Pelage,  cit£  an  condle  de  Diospolis,  se  soustrait 

par  fraude  k  ranatbtese,  p.  164 ;  est  absoos, 

p.  165,  a. 
PilagianUme  (Le ) ;  apprMation  de  oette  b^r^ 

sie,  p.  164;  oondamnation,  p.  165,  a. 
Pelagie  (Ste>  meurt  martyre,  p.  137,  b,  et  138,  a. 
Pitronius  ( P. ),  goavernear  de  la  Syrie,  p,  67,  b. 
Pheniciens  ( Les ),  principauz  commer^ants  et 

nayigateurs  dans  Tantiquit^,  p.  I07,  b,  etsuiT. 
PhilagriuSfCOtaXe  d*Ori«nt,  cherche  a  calmer  one 

r^yolte  k  Antiocbe,  par  dMnexcasablei  craau- 

tte,  p.  94 ;  s*occape  de  la  perception  d^un  nou> 

▼el  imp6t  qui  fait  r^volter  lesbabitants,p.  95. 
PhiletuM,  ^v6qae  d'Antiocbe,  p.  132,  b. 
Philippe  ( L*emperear ),  excommani^  par  saint 

Babylas,  p.  132,  b. 
Philwfone,  6v6qae  d^Antiocbe,  p.  HI,  a. 
Phoca»  fait  massacrer  les  Joiii^  p.  106»  a;  est 

ddtr6n«,  ibid. 
Phul,  roi  des  Assyriens,  envabit  la  Syrie ;  revolt 

la  soumission  de  M^nahtaie,  p.  20,  a. 
Pierie;  vHles  de  la  Pi6rie,  p.  8,  b. 
Pierre  (  Saint ),  6v«qae  d'AnUoche,  p.  119,  b, 

et  120,  a. 
PiMon,  gonverneorde  la  Syrie,  p.  62,  b^ennemi 

de  Germanicus ;  est  accuse  de  Tavoir  empoi- 

sonn^,  p.  63  et  64. 
P^mpee  rMait  la  Syrie  en  province  romaine, 

p.  57,  b,  et  58,  a. 
Porphyre  s*empare  da  «t^e  ^iscopal  d'Antiocbe 

par  rase,  p.  162,  a ;  excite  ane  sMition,  p.  162,  b ; 

meurt,  p.  163,  a, 
Paul,  voy.  Phul, 
Pretariens  (Les)  d^fendent  Josqa'au  boat  la 

caase  de  Macrin  coutre  Slagabal,  p.  77,  a. 
Procope,  oomte  d'Orient,  p.  100,  b. 
Pro9doc4,  flUe  de  saiote  Domnine,  meart  mar- 
tyre,  p.  138  et  suiv. 
PMemee  ^verg^te  se  rend  maltre  de  U  Syri^ 

p.  38,  a. 


183 


TABLE    bfes  MATlfeRES. 


Quietus,  gouverneur  de  la  Syrie,  assassine, 
p.  80,  b. 


Eechob,roi  de  Damas,  pfere  6e  Itadadezer,  p.  lo,  b. 
Hisin,  roi  d^Arame,  leve  le  si^e  de  Jerusalem ; 

sa  mort,  p.  20. 
Rizoue,  filg  d*£lia(ia,   8*£tabiit  k  tiamescbek, 
,p.I2,b. 

ilhosus,  Title  dela  t^ierie,  p.  3,1). 
Ittfite^t/A  (Saiot)  Tole  an  martyre  ek  t^ibmphe 

de  toos  lea  supplicea,  p.  139,  b,  ei  stiir. 


S 


Sdbai  fonde  onto  sedtfe  de  molbes,  f).  160,  b. 
Sabellius ;  soil  h^r^le ,  jl.  134 ,  b. 
SalAminias,  villedfe  la  CNalyboDlUde,  {i.  i,  ji. 
ialluste,  t)r«ret  d^6rieD(,  p.  87,  b;  nialotieftt  Tor- 

dre  k  Antioche,  p.  oi,  b. 
Salmamtssat  s'empare  de  ^amarie,  ad  11 4Uib]Xt 

desSyrlens,  p.  21,  a. 
Sdmarie,  assl^^  P^  ^  S^rieiui;  p.  18 ,  b ,  et 

17,  b. 
Sdmosdte,  Tilled^  M CooiDdageDe,  ^.  S,a;  sea 

6v^ae8,  p.  172,  b. 
Sapor  enVaTiK  H  Sfhti;  iefe  saeote ;  Ml  ^eri, 

p.  80. 
5flrdM,  piisfe  par  Amibfettii  III,  <).  4<1,  b. 
Sarrasm{lM)  font  Qojj  fAcanlob  ^ri  9f ti^, 

p.  100,  a. 
Saturnin,  fcbarK*  fjat  rertpfrear   PtObaS  ^ 

la  d^rebae  de  POfient;  ^Ifev^  i  r«iK(«lte  |>af  le 

peuple  d*AI«xandnp,  j).  ^I,  b. 
Ai/ufnjn;aoiiopfnioi}  sd^  fe  marfa^e,  |i.  \^\i, 
Schobah,  chef  derarm^  d'Hadadezer,  est  vailica 

par  David;  p«rit  d^m  la  niftlM,  p.  li,  d. 
Siflkne,  reibe  de  la  Syrie  ^t  de  li  Pbenfdfe,  p.  66 

et  67. 
5^/<»tfc/(fe ;  tllles  delA  Sefe^cide,  p.  8,b. 
Seleucie,  ville  dela  Seleucide,  p.  3,  U;  gouver- 

n6e  par  les  Grecs,  paf  lei  aiyrleni*  ;  milssacfe 

des  Jaift,  p.  88;  d^trdlte  t>ar  dn  trettfbletifent 

de  lerre,  p.  lOI,  b ;  ses  ev^ucs,  p.  170,  B. 
Sileucua  Itr  se  rend  mai Ire  de  la  ^yrle,  p.  36'; 

seji  d|^m6t^  avec  D6ia6(rla8,  ff.  3i  et  81;  soh 

d^voueitient  pateniel,  p.  33,  a ;  setf  vtctolres 

en  Asie;  M  mort,  p.  83,  b,  el  34,  a. 
Mleucus,  fila  irtb^  de  S^lencua  !•*,  eb  ifaf^te 

avecsodfrere,  Antiochas  Hl^rax,  i^.  38  el  atriv. 
MeucHs,  flla  d*Ah<lochaa  (Jrypaa,  p6rlt  dana 

lea  flammea,  p.  66,  b,  et  67,  a. 


Seleucus  Phitopator,  asaasalnii  p.  61,  t 

Serapion,  ev^que  d*Antioche,  tott  codlrt  la  i 
her^llqiies,  p.  132,  a. 

Seriane,  ville  de  la  Chalyboolll^e,  p.  4,  a. 

Severe,  ^vftque  d'AnliocHe,  p,  ilA,  h. 

irfbere  (SepUroe)  tlispute  l^rorirtl^li l«g^^^ 
▼alliqaeur,  p.  H ;  sWpare  de  Byzaoea;  Ir 
phe  d'AIbihiia,  qbi  liii  dispqiidl  Teifipe 
fait  les  Jaffa;  I^ve  le  ai^^e  ifitra;  sl4 
de  h^lpbon;  fiStablli  Arillo^e  daosis 
depa  droita,  p,  7&,  a;  j^nnd  \h  oa&^ ' 
iou  Hi^  Caracaiia,  p.  71^,  b. 

Sexiui  Cesar,  godv^meilr  Sa  la  $yrie,St 
par  sea  aoldata,  p.  62^  b,  <^  00,  a. 

p.  137,  b. 
SimatUdes  (Le  pbiloaopbe)  bnye  la  mod 

bdcber,  p.  84,  a. 
SopaUr  va  k  Coaatantinople  ioterc^er  m\ 
^  veur  dea  dieiix  de  Platoo,  ^.  8^  L 
Siratonice,  fiUe  de  D^m^trius,  ^poaael 

P>  3^^  a ;  ^poaae  Antiochas,  flla  de  \ 

p.  33,  ^ 
iura,  ville  de  la  t:halyl>oaitide,  p.9i^*, 

par  lea  Peraea  et  Uvr6e  aa  pflUce^  p.  vk 
$yrU ;  dc^ripUoD  g^raj>bique«  j^. \ii 

dlvisiooa  poliUqaea,  p.  2,  b;  reliKi<M|,  f  S 

aaiv. 


TathM  abtndaniw  I6i  Syrieot,  p.  9l,a. 

Tadte  (L'emperear),  aaaaasind  ea  Asle 
..p.  81,  b. 

Talmai,  fila  d!A]nibood,  rol  de 
beaa-p^re  de  David,  p.  ID,  b. 

ThalassiuSf  pr6fet  da  prMoire ,  aarveOM 
Galloa,  p.  84,  a;  diagraci^  par  Pempefeor  ] 
lien,  p.  87,  b. 

rhapkunu,  ville  de  la  Cbalyboaitide,  ^lil 

Theodore,  llvr6  oomme  chr^Uen  h  la 
Irlomplie  dea  ploa  atrooes  doalean^  p.  Vk^ 

TMMUne  ( L*eBipereoff )  aagmente  lea  ooibi*; 
Uona  k  Antioche,  p.  94,  b;  r^voMe 
tanta;  aa  atatufe  ^estra  eat  rentenft 
brla^,  p.  95,  a;  il  eovoie  en  Syrie  les  ol 
trea  de  aa  vengeance,  p.  96;  aeeordein- 
Tien,  6v«que  d'Antioehe  « la  grtoe  dea  Aofio* 
chiena,  p.  97,  b,  et  160,  a;padfie  It^ 
p.  166,  b;  ae  plaint  de  nngraUiate  dai  Aa- 
tiochlena,  p.  169,  b ;  prot^  Flavlen,  p.  Wli  ^ 
meort,  p.  I6i,  b. 

Thiodote,  prfeidial  de  HMnpoUt,  oMieat  m 
pardon  de  rempereor  loli6ii*p-  88,  b. 

TModoUy  6v6qae  d'Antiocbe.  fait  renlttf !« 
apolMaHMteadoBa  te  aeiii  defEgtbe.  p-  i^  ^ 


TABLE  DES  MATI£RES. 


183 


fUfkOe  (SaiDt),  ^«qae  (TAotloche,  combat 
'■]  la  bMrici  de  too  lnn|w,  p.  I3I,  b,  ct  193,  a. 
iMMt,  oOder  da  palais  d*ADtk)cbe,  pille 
^00  iDoeodie  let  babitanla  de  oette  YlUe; 
Mart,  p.  101. 

mk'Pileaaery  roi  d*AMho«r,  iPenipare  df 
Syrie,  p.  20. 
mi,  rot  d*Armtete,  devient  roi  de  Syrie , 

PS7,  Ik. 

^(q«  d'Anttoche,  p.  1 30,  a. 
iOs  de  Yespasien »  reooncille  son  p^  et 
p.  M,  b;  reAiM  de  i^Tir  cobire  les 

rimoM^  Ills  d'BMope,  vtqnttlea  ^jrriepi  eq 
i9ideDatioQ,p.  la,  b. 

i  rat  de  Hamath,  ie  Jette  daos  le  parti  dls- 
p.  10,  b;  CDToie  de  riches  presents  k 
l,p.ii,b. 

catRksRomains  et  les  Tores,  concer- 
MkcoQunerce  dela  soie,  p.  I|6. 
iWn  (L*€mperear)  fait  soblrun  intenoga- 
^^^ttintl^aee,  p.  193,  a;  serendentriom- 
ffeedm Ja lUte  d*ADtloclie;  oomlnat  1<«  far 
^; Maori;  aes  fon^rallles, p.  7i. 
te*«v,  nine  de  la  Syrie,  fait  p^rir  QtopA- 

V^  Didioim  s'^live  k  la  royaiit^  de  la 

^rie,  p.  u;  est  ta«,  p.  54,  a. 

y»  i^mte  en  oendfes  par  Niger,  p.  74. 

«f€gq#  <i|e   Tjr,  meur^  ipartyr« 

^117,  Ik 

\  hh^M  d'Antioche,  p.  140,  b. 

U 

\k*  i^ihmuy  Tainca  par  £lagabal ;  ta^  par 
jMipropga  loUats,  p.  76. 
^•j***  ^MdraXaia,  gOQvemeac  de  la  Syr|«, 
^■tn'wIesdaKinsdeCorbalon;  meart,  p.  66. 


wmf 


X'tUenm  ;ef^QfiUion  et  appreciation  de  son  ays- 

teme  de  religion,  p.  129,  b,  et  130. 
Falentinien  ( L'emperear )  cbercbe  k  soulager 

les  provinces  en  proie  k  la  plus  grande  d^ 

trease,  p.  08,  b,  et  93,  a. 
FaUrie,  veave  de  GalMos ,  refiise  la  main  de 

Maximin,  p.  82,  a;  d^aipit^,  p.  89,  b. 
FtUerim   ( Ueippereqr)    d^fait  les    Scythes; 

yaiocu  par  les  Perses  et  r«duit  en  esclayage , 

p.  80. 
^*»^.  gouferneqr  4e  U  Syrie,  p.  67,  a. 
Fenidius  J^vJ^us,  goQverneqr  de  la  Syrie,  p.  76,  a. 
Feniidtus,  gign^ral  romain ,  d^fait  les  Parthea 

en  pliisiears  i^encontres,  p.  61. 
Ferrtne  { Limpdratrlce )   devlent  rinstrument 

prtncJi^  d'o^  revolte  fpntre  Tempereur  U- 

non,  p. «,  bi 
Fespuien ;  orlgine  des  ^vtoements  qoi  r^l^vent 

k  l*emptre,  p.  66.  ' 
FibiMM  Martu9,  flouveroeqr  de  la  Syrie,  p.  67. 
FitaliSy  0v^ge  d'Antioche,  p.  l4o,  b,  et  141,  a. 
FitflUus,  propr^teur  de  la  Syrie,  p.  64. 


Xaniippe,  goavernenr  de  la  Syrie,  p  38,  a. 
Xen4tai,  g^^ral  d*Antiochus  HI,  est  batlu  par 
Molon,  p. 4 let 49. 


i  { LVmpereor ) ;  complot  form^  contre  sa 
p:  diiUiiMiit  dea  oondamn^s,  p.  93,  b,  et  94, 
Vf  fcntoite  les  catboliqaes,  p.  166,  b. 


Z 


Zabdiu,  gto^ral  do  Zteobie;  vainca  par  Aur^ 

lien,  p.  81 ,  a. 
Zacharie,  assassin^  par  Joasch,  p.  19,  a. 
Zebenne,  ev^que  d'Antioche,  p.  132,  b. 
ZenobiOy  ville  de  la  Cbalybonltide,  p.  4,  a. 
ZenoUe^  veave  dXMenatb,  gouverne  la  Syrie; 

vaincoe  par  AureUen,  p.  81,  a. 
Zenobius,    pr^tre  de  Sidon,  meurt  martyr, 

p.  137,  b. 
Zhum,  sacoesseor  de  Temperear  Lton,  en  guerre 

avec  Ltonce,  p. 90,  b;  il  est  vainqueur,  p.  loo,  a. 
Zeugma,  ville  de  la  Cyrrhestlque,  p.  3,  a;ses 

^Aques,  p.  179,  b,  et  173,  a. 


TABLE  GENERALE- 


HISTOIRE  DE  LA  SYRIE  ANCfENNE. 


m 


Chapitre      I.  —  Description  g^ographique  de  la  Syne  andenae 

-->  II.  ^  Religion  des  Syriens '. 

—  III.  —  Histoire  de  la  Syne  depuis  lea  temps  les  plus  recul^  jusqu^i  la  eoo* 

quMe  macMonieDBe 

—  IV.  —  Royaume  de  Syrie;  grandeur  de  Fempire  des  S^leockles i 

—  V.  —  D^dence  de  T  empire  des  Sdleucides*  —  Conqudte  de  la  Syrie  pv 

led  Romains 1 

—  VI.  ^  La  Syrie  sous  la  domination  romaine ,  depnis  Augoste  jusqu^aoi  «■• 

pereurs  syriens 

—  VII.  —  La  S>Tie  sous  la  domination  romaine,  depnis  les  empereors  sjiios 

jusqu^li  la  mort  de  Julien •  •  ^ 

VIII.  —  La  Syrie  depuis  la  mort  de  Julien  jusqu*^  rinrasion  des  Arabes. . .  % 

—  IX.  —  Histoire  du  commerce  chez  les  Syriens,  depuis  les  temps  les  phtf  iv-    , 

cul^  jusqu'lL  la  fin  de  la  domination  romaine ^^ 

i 
SYRIE  CHRftTIENNE, 

Chipitre      I.  —  Origine  du  christianisme  en  Syrie.  Constitution  des  ^glisessyrienBei. 

H^r^es 

->         II.  —  L'£glise  de  Syrie  pendant  les  persecutions 

—  III.  —  L'arianisme ** 

—  IV.  —  Histoire  deTEgUsede  Syrie  depuis  la  mort  der^vAqueM^^jwqn^ 

Tinvasion  des  Arabes '^ 

APPENDiCE.  —  Divisions  eccl^astiques  de  la  Syrie.  Juridiction  d'Antiocbe.  Lisle  d*^ 
Ydques ^* 


riM  nE  Li  TABLE. 


I 

i 


\ 


L'UNIVERS, 

HISTOIRE  ET  DESCRIPTION 

DE  TOUS  LES  PEOPLES, 

DE  LEURS  RELIGIONS,  MOEURS,  COUTUMES,  btc 

'  SYRIE  MODERNE, 

(X>NTENANT  L'HISTOIRE  DES  CROISADES, 
PAR  JULES  A.  DAVID. 


i       INTRODUCTION. 

^enwd  est  bon  pour  laSyrie,  nous 

■aitUD  joar  un  archev^ue  maronite, 

BOCHis  fantant  les  magnificences  du 

Aao,  les  richesses  de  la  vallee  de 

Iftaha,  la  fecondit^  des  plaines  d'Alep 

tde  Damas;  mais  en  g^missant  sur 

IB  depredations  des  pachas,  sur  la  U" 

■cite  des  Druzes,  sur  le   fanatisme 

Undde  taut  de  sectes  idolStres  qui  four- 

toillent  dans  )a  montagne.  La  parole  de 

Wtarcber^^  estvraie  depuis  Fan  pre- 

verde  Jli^ire  jusqu'a  nos  jours;  elle 

H^cterise  tout  aussi  bien  le  pass^  que 

voque  actuelle.  £n  tons    temps,  en 

wti  les  biens  de  la  Sj^Tie  iui  vinrent 

^Dieu,  ses  manx  Iui  Yinrentdes  horn- 

tt.  Cette  contr^e,  qui ,  d^  Torigine  des 

^^,  fat  le  champ  de  bataille  de 

ttde  eonqu^rants,  la  terre  promise  de 

popart  des  Emigres,  est  devenue  au- 

Nbui  un  asile  de  proscrits,  et  de- 

^toujoursune  proie  facile  pour  les 

MKtleux.  Chaque  peuple  de  passage  y 

W»e  des  trainards, chaque  arm^e  des 

wandeurs ,  chaque  ancien  possesseur 

w  descendants ;  on  y  rencontre  a  la 

W  des  Juifs  et  des  Perses,  des  Grecs 

V*  Uvraison,  (svuie  modebne.) 


et  des  Latins,  des  Francs  et  des  Arabes ; 
puis  des  r^fugi^s  des  persecutions  chr6- 
tiennes  et  musulmanes,  les  Maronites 
et  les  Metualis;  des  victimes  des  desti- 
nees  les  plus  ^transes ,  les  Samaritains 
et  les  Kedam6c^s ;  des  fous  des  esp^ces 
les  plus  honteuses,  lesKelbidhs,  qui 
adorent  le  chien ,  et  les  J^zidis,  qui  ado- 
rent  lediable;  des  independants  venus 
du  nord  commedu  nridi,  les  Turkomans 
et  les  B^ouins ;  enfin  des  despotes ,  les 
Ottomans ;  des  fanatiques,  les  Druzes; 
des  brigands,  les  Kurdes. 

De  tant  d'elements  hdt^rogenes, 
comment  former  un  tout?  a  ces  indige- 
nes de  races  si  opposes ,  comment  de- 
mander  de  la  concordance  dans  les 
vues  et  dans  les  int^r^ts  ?  II  n'y  a  done 
pas,  a  proprement  parler,  de  nation  sy- 
rienne.  On  uetrouve  dans  cett^  belle  con- 
tr^e  que  des  habitants  differents  d*origi- 
ncy  de  caractere  et  de  moeurs ;  point  d*u- 
nite,  point  de  nationality.  Si  les  Grecs 
ont  laisse  en  heritage  a  la  Syrie  Tesprit 
du  commerce ,  les  Juifs  y  ont  apport<^ 
la  passion  de  Fusure ;  si  les  Arabes  y 
ont  montre  Tamourde  Tindependance, 
les  Kurdes  y  ont  introduit  Tardeur  du 
piilnge;  si  les  Chretiens  ont  dote  leurs 

I 


L'UKIVJERS. 


montagaes  du  sentiment  de  Ifi  charity, 
les  Druzes  ont  infecte  les  leurs  des  exces 
der^go'isme :  contrastes  affligeants,  ou  le 
bien  est  etouffe  par  le  mal ,  ou  les  plus 
gCDereuses inspirations  ont  a  combattre 
les  plus  cruels  instinets! 

Puis,  en  regard  de  ces  mis^res  humai- 
nes,  une  nature  opulente  et  superbe : 
des  terres  toujours  fertiles,  maigre  Ta- 
bandoD  ou  elfes  demeurent  si  sou  vent; 
des  champs  qui  donnent  a  i'homme, 
presque  sans  sueurs,  dufroment  pour  sa 
nourriture,  du  coton  pourses  v^tements, 
de  Torge  pour  ses  bestiaux ;  des  col  lines 
verdoyaates  ou  le  m(!lrier  en  abondance 
entretient  des  milliers  de  vers  a  soie;  des 
montagnes  ou  les  bois  poss^dent  toutes 
les  qualites  sup^rieures,  depuis  le  cedre 
jusqu'au  cb^ne ,  depuis  le  platane  jus- 
qu'au  sapin;  des  sycomores  prodigieux, 
qui  couvrent  de  leur  ombre  une  carava- 
neentiere;  des  vallees  grasses  et  luxu- 
riantes;  des  vergers  ou  Tolivier,  le  ci- 
tronnier  et  le  pommier  rivalisentd 'ex- 
cellence et  de  fecondite :  voiia  pour  le 
n^cessaireet  Tutiie,  voila  pour  les  besoins 
du  corps;  pour  I'agreable  niaintenant, 
pour  la  satisfaction  de  Tdme, :  des  jar- 
dins  ou  le  jasmin  et  la  fleur  d'oranger 
le  disputent  en  parfums,  ou  la  rose  et  la 
tulipe  le  disputent  en  beaute;  des  cam- 
pagnes  oil  le  pin  parasol  s'entrem^le  au 
palmier,  ou  des  naies  de  nopal  courent 
le  long  des  chemins,  ou  des  ouissons  de 
lauricrs- roses  suivent  lecoursdes  eaux, 
oil  des  gazons  a  fleurs  rouges  diversi- 
Aent  le  tapis  des  prairies ;  des  rivages 
ou  les  lames  ^cumeuses  de  la  M6diterra- 
D^  se  brisent  sur  des  roches^.tinoeiantes; 
un  horizon  ou  des  neiges  eternelles  sur- 
montent  la  sombre  muraille  du  Liban  ; 
et  au'dessus  de  toutes  ces  somptuosit^, 
un  air  pur,  un  ciel  bleu.  Telle  est ,  dans 
sa  plus  grande  partie,  la  Syrie,  odeur 
de  paradis,  comme  disent  les  poetes 
turcs ,  jardin  trace  par  Dieu  pour'  le 
premier  homme,  ainsi  que  Tont  pens^ 
les  poetes  h<6breux,  contree  b^nie,  ou  , 
selon  les  poetes  arabes,  chaque  monta- 
gne  porte  Thiver  sur  sa  t^te,  le  prin- 
temps  sur  ses  epaules,  Tautomne  dans 
son  sein ,  tandis  que  V^t^  dort  noncha- 
lamment  a  ses  pieds. 
I*  La  Syrie ,  il  est  vrai,  n'est  point  par- 
tout  aussi  britlante,  aussi  feconde,  aussi 
belle :  elle  preseute  bien  des  contrastes: 


«ne  mer  lioi4eu$e  iur  ses  plages  dm 
donn^es,  de  Said^  h  Ytfa ;  le  d^sertf 
sa  frontiereorientale,  etr^preJoi" 
Tune  de  ses  extr^mites.  Pourtai 
qu'elle  contient  de  territoires  arid 
qu'elle  renforme  de  cantons  ni^ 
ses  tristesses  et  ges  deaolitioDltj 
bien  plut6t  Touvrage  de  rhommej 
Toeuvre  du  Createur.  Ses  cotes  i' 
autrefois  les  premiers  bavres  des  J 
miers  marchands  :  I'industrie  y 
des  ports,  la  barbane  les  a  combi 
la  prevoyanee  greeque  v  ^eva  des  n 
rinc'urie  ottomane  les  laissa  rouler| 
les  Hots.  La  campa^ne  de  Damas  i 
m^tairie  des  khalifes ;  elle  ne  sert| 
depuis  le  seiziemesiecle,  quedef 
il  oes  tribus  nomades.  Apres  Tyti 
don,  ces  metropoles  d'un  coinn 
connu,  ces  societes  qui  ont  a  peioel 
quelques  traditions  apres  dies ,  a 
perdus  de  la  chalne  des  civilise 
la  ncbe  Antioche,  la  voluptueusel 
la  puissante    Ramlah,  sont  devi 
des  villages  raiserables  et  sordidei,J 
cabanes  de  boue  et  de  paille ,  aoj" 
boteux ,  ou  vegetent  quelques  | 
p^cheurs  et  quelques  pdtres  en  ( 
nilles.  Eh  bien,  ces  mines  qui  les  I 
tes  F  La  guerre,  fl^u  de  rOnent,! 
terrible  et  plus  ordinaire  encore C 
peste.  Sous  les  satrapies  coromes 
proconsulats,  avec  Alexandre  o 
avec  Pompee,  sous  la  doniioaUoi 
Seleucides  comme  sous  la  verged 
des  empereurs  d'Oocident,  par  Iei4 
bes  comme  par  les  Francs,  la  f  ^ 
toujours  exploit^  ainsi  qu'une  in 
puisable.  Decim6e  par  les  Orecs,  i 
par  les  Romains,  ptilee  par  les  Ai 
ravag^e  par  les  Francs  ,  quelle  I 
dite,  quelles  richesses  natureiles, 
puissance  nVt-il  pas  fallu  a  oetlai 
exposee  depuis  tant  de  sieclesa  tt 
de  tons ,  pour  renaftre  sans  eesse  i 
cendres,  v^ritab4e  phenix  entreksl 
trees ! 

II  n'existe  peut-^tre  pas  de  | 
▼ue   otk  Dieu  paraisse  plus  gn' 
rhomme  plus  petit  que  decettetr' 

(*)  En  1760,  dans  salutteoQotif  la  F  „  . 
dmze  Fakr^Kddin ,  pour le meltre ••■l^j 
vaiweauz   de  CoosUnUnople,  ^  "wSI 
bateaux  charge  de  plerres  a  Venlrtt  «■  f" 
de  Sour  ( Tyr )  et  (jto  Saldili  ( Sidoa ).  ri 
Volney, 


SYAIE  MODERJVC: 


M»Bar  lecid, si  con voitde  par  les  peo* 
if.  Iiulle  put  fes  rois  ne  se  son!  moo- 
nplus  avides,  les  soldats  plus  cruels^ 
■  cooqu^tes  plus  dnsastreuses.  Depuis 
Doze  ceots  ans  surtout,  la  face  de  ce 
qrs  a  change  cent  fois;  les  gouverne* 
Hots iy  sQDt  succede  tous  plus  despo- 
tpies  les  UQS  que  les  autres ;  les  irrup- 
oos  lui  soot  venues  de  tous  cdtes ;  ila 
I  tour  a  tour  prendre  place  a  son  soleil 
s habitants  des  deux  hemispheres  mau- 
to^du  Nord  et  du  Midi,  duaesertde  nel- 
(et  du  desert  de  sable,  les  aventuriers 
^rHedjaz  dess^che  et  ceux  des  steppes 
i«Vs  de  la  Tartaric ;  et  tous  res  bar- 
Kwront  traverse  comme  des  torrents, 
is'y  soot  r^pandus  comme  des  marais 
fKts.  En  Tain ,  apres  les  ravages  des 
Hides  de  Khaled ,  la  civilisation  des 
biifes  avait-elle  acruraul^,  en  deux 
ides^autantdemerveilles  quelesGrecs 
Idix,  les  Romains  en  douze,  uoe  ar- 
aittduie  ddicieuse ,  un  luxe  ^blouis* 
ttot,  unelangue  pittoresque,  une  gran^ 
■aire,  chef-d'oeuvre  de  logique,  une  po^ 
lie,  chef-d'oeuvre  d'eloquence;  en  vain 
^nas  trempait-elle  ses  aciers  les  plus 
i^;  en  vain  Alep  filait-elle  ses  soies  les 
ns^iatantes;  en  vain  le  Hauran 
Vy^il-il  ses  col  lines  reprendre  leur  pa- 

K<  ses  arbres  leurs  fruits  d'or ,  sa  po- 
HoD  son  industrieuse  activity;  les 
Jvdes  caucasiennes ,  plus  ignorantes, 
ivs  farouches,  plus  avides  que  tous  les 
■cicos  oooqu^rants,  incendierent  sans 
ftnords  les  monuments  de  Tart  et  de 
pscienoe,  detruisirent  les  manufactu- 
1*81  (nassacrerent  les  ouvriers,  et  pulv^ 
"SCrentcequ'elles  ne  pouvaientdevorer. 
Jetofls  on  rapide  coup  d'ceil  sur  les  r6- 
Jwotions  nombreuses  et  radicales  qu'a 
jrooveeslaSyrie  depuis  I'an  !•'  de  rh6- 
pejusqu'a  oos  jours.  Les  m^mes  luttes 
fclrfbuatribu,  qui  caracterisent  I'etat 
iB  Arabes,  dans  lUedjaz  et  dans  TY^* 
•en,  avani  Mahomet,  se  reproduisent 

EiD  Galilee,  au  cinquieme  siecle  de  notre 
<  entre  les  Ghassanides ,  ces  anciens 
irpateurs  nomades,  et  les  cavaliers 
NaudeuEs  des  princes  de  Hira,  eta- 
psd^is  les  plaines  de  rCuphrate.  Les 
|tt  comme  les  autres  ont  le  goQt  des 
J^tares,  la  soif  du  pillage,  la  rage 
m  combats ;  et^  sous  le  pretexte  de 
H^ir  une  grande  puissance ,  celle  des 
Aomaios  ou  celle  des  Perses,  ils  entre- 


tieooent  sans  C6SS(B  la  guerre  sur  les 
frontieres  des  deux  empires.  Ce  sont  des 
bandes  sans  diseipline,  qui  vonl  et  vicn* 
nent  constamment  de  province  en  pro- 
vince, volant,  brQlant,  ^orgeant,  par 
Sassion  comme  par  represailles ,  avec 
es  chances  diverses  de  victoires  et  do 
deroutes ,  et  pr^parant  peu  a  peu ,  par 
leurs  rapines  et  leurs  saccagements ,  la 
depopulation  des  plus  fecondes  con- 
trees,  la  ruine  des  cites  les  plus  riches : 
v^ritables  enfants  du  desert,  qui  ne  sa- 
vent  faireque  la  solitude  atitour  d'cux, 
sorte  d'auxiliaires  des  sables  envaliis- 
seurs,  qu'ils  augmentent  et  de  la  pous- 
si^re  des  generations  et  de  la  ceudre 
des  villes. 

L'invasion  de  Tislam  ne  fut  pas 
moins  funeste  a  la  Syrie  que  les  incur- 
sions des  compagnons  d'Amrouben- 
An)er,  apres  la  rupture  de  la  digue  de 
Mareb.  Conquerants  vagabonds,  les  mu- 
sulmans  s'eparpillerent  dans  le  pays; 
or,  c'etait  precisement  ce  genre  de  guerre 
qui  devait  entratner  les  plus  irrepara- 
bles  maux  :  courses  spoliatrices  et  con- 
tinues, rasto^  successives,  perpetuelles 
attaaues  on  mille  endroits  diifereots, 
ou  lennemi  d^truisait  pour  detruire, 
ou  Tarbre  fruitier  etait  inhumaiiif  uient 
arrachedu  sol  quMl  avait'si  iongtemps 
enrichi ,  ou  les  moissons  etaient  rasees 
en  herbe.  La  montagne  seule  alors ,  le 
majestueux  Liban,  grdce  a  ses  pics  ina- 
bordables ,  a  ses  ^troits  sentiers  sur  de 
profonds  ablmes ,  a  sesetages  de  roches 
si  faciles  k  defendre,  demeura  a  Tabri 
du  fleau.  Partout  ailleurs,  voyez  quelle 
misere!  Et  comme  ces  pauvres  Syriens 
tremblent  devant  les  Arabes,  troupeau 
de  gazelles  pourcbass^s  par  d*ardentes 
et  agiles  panlheres!  Les  uns  deniandent 
grdce  agenoux ,  et  servent  de  guides  k 
leurs  tyrans;  les  autres  se  laissent  ^gor- 
ger,  comme  si  le  ciel  leur  avait  com- 
mande  ce  sacrifice ,  Chretiens  sans  en- 
thousiasme,  martyrs  sans  couronne. 
Les  villes  se  rachetent  pour  un  ao  a 
force  d'oret  de  robes  de  soie.  Tout  fuit , 
tout  s'epouvantc.  et  le  faible  empereur 
de  Constantinople  s'enferme  dans  sa 
capitate ,  abamlonnant  la  Svrie  comme 
on  abandonnait  na^u^re  les  bouches 
inutilesdans  les  sieges  barbares.  Puis, 
si  Tindolent  Heraclius  se  reveille  enfin , 
s'il  couvoque  ses  meilleursg6neraux,  s'il 

I. 


L*UmVERS. 


assemble  ses  plus  nombreux  batalUons , 
s'il  inspire  quelqueinquietudeauxsoldats 
d'Omar,  qui  se  replient,  c'est  pour  voir 
sa  formidable  arm^e ,  demi-victorieuse 
deux  jours  durant,  tomber  letroisi^me , 
tout  entiere,  sous  le  fer  musulman ,  !e 
long  des  bords  de  I'Yarmouk. 

Quelques  historiens  ont  trop  b6n<5vo- 
lement  fait  gloire  aux  Arabes  de  Pern- 
pire  universel  ou  tendait  le  mahom6tis- 
me ;  c*est  comme  si  Ton  imputait  au 
premier  peuple  qui  fut  chr6tien  la  do- 
mination qu  a  obtenuc  le  christianisme. 
II  n'existe  en  reality  aucun  rapport  en- 
trelcs  conqu^tes  deRome,  par  exemple, 
et  celies  de  la  Mekke.  Dans  I'^tabiisse- 
ment  du  mahom^tisme,  il  y  a  deux  cbo- 
ses  distinctes  :  le  sabre  et  le  Koran , 
Taction  et  la  parole.  Les  deux  puissances 
fiirent  d'abord  dans  une  seule  main , 
elles  tendirentau  m^me  but,  ellesregn^- 
rent  ensemble ;  mais  bientdt  les  exi- 

fences  du  sabre  susciterent  les  disputes 
e  U  parole  :  des  lors  il  y  eut  schisme 
religicux  et  desunion  politigue.  L*unit6 
colossale  rSv^e  par  les  khalifes ,  et  dont 
Haroun-al-Rachid  demeure  pour  nous 
la  personnification  la  plus  *^clatante, 
n'est  cju^une  fiction  historique.  L*Arabe, 
pas  plus  que  le  Goth  ,  n'a  pu  mainte- 
nir  son  pouvoir  dans  les  nombreuses 
contr^es  qu*il  a  successivement  enva- 
hies  au  galop  de  son  cheval  et  dans  la 
fievre  de  son  sang  :  il  a  pu  conqu^rir , 
mais  il  n*a  pu  conserver.  II  a  fallu ,  k 
son  tour ,  qu*il  fQt  vaincu  par  le  re- 
pos ,  par  le  bien-£tre ,  par  le  climat ;  il 
a  fallu  qu'il  vtnt  se  perdre ,  lui  aussi , 
dans  cette  masse  compacte  des  popula- 
tions asiatiques,  molles,  parce  qu^elles 
sontfacilemeutsatisfaites,  inoffensives, 
parqe  qu*elles  sont  heureuses ,  contem- 
platives  et  paresseuses ,  parce  que  leur 
ciel  est  pur  etque  leur  terre  est  leconde. 
11  ne  convient  done  pas  de  n'attribuer 
qu'au  ^6n\e  des  successeurs  d'Omar 
1  extension  si  rapide  du  mahom^tisme : 
le  mahometisme  a  trouve  en  Asie  des 
hommes  faciles  a  toute  croyance ,  voila 
le  secret  de  son  pouvoir. 

La  relieion,  a  vrai  dire,  n'est  que  le 
mode  unitorme  par  lequel  ont  pass6 , 
en  Orient,  des  peuples  essentiellement 
homogenes ,  frires  par  les  besoins ,  par 
les  gouts,  par  les  mocurs  avant  de  Tetre 
par  une  croyance  unique.  Le  mahome- 


tisme, en  taat  que  ciilte  d*OQ  seul  Diei,, 
fut  comme  un  creuset  sublime  ou  ml 
sVpurer  Tdme  r^veuse  des  races  asi» 
tiques.  Les  pr6iug^  de  quelques-ini 
les  toirterent  de  la  nouvelle  sodefe^ 
tels  furent  les  Guebres,  entetes  di|r 
leur  formule  etroite ,  fanatiquesdcletj 
my  the  incomplet;  les  iut^r^ts 
moins  grand  nombre  encore  les 
lutter  sans  espoir  comme  sans  graodi 
tels  furent  les  chefs  d^possedds,  lesiiM 
ces  et  leurs  courtisans  :  mais  la  tm 
calme ,  insouciante,  instinctivemeol 
vee  dans  ses  idees,  se  sentant,  d*ailli 
toute  sorte  de  sympathies  pour  Texj 
sion  nouvelle  de  la  reconnaissdaoe< 
I'homme  en  vers  son  cr^teur,  alia 
suite  vers  les  propagateurs  de  la  foiai 
plifiee,  etse  courba,  sans  regret oon 
sans  honte,  sous  le  joug  rousulmaa. 

Quant  k  TArabe  proprement  dit,ft 
ses  deux  nobles  passions ,  les  armes  i 
la  po^sie,  il  ne  conserva,  en  Sniii 
des  le  regne  des  Abbassides,  que  nil' 
conde:  mais  c'est  celle-la  qaiestlaci* 
vilisatrice  par  excellence;  c'est  iviO 
celle-laque  I'onfondele  bonheuriotei 
c'est  iprace  a  cette  sublime  passion  fM 
la  Syne  put  recouvrer  alors  cette  tr»^ 
quillite  matdrielle  et  cette  qui^tudftj| 
r^me  qui  disposent  Fcsfjrit  a  s'^tes^ 
et  le  genie  a  crcer.  Aussi,  la  Syrie 
elle,  a  cette  ^poque,  une  ere  de  prosp^ 
01^  la  science  lui  dut  des  lumieres,  fr 
dustrie  des  progres.  Tart  des  mooi- 
ments ,  la  langue  des  poetes. 

Malheureusement  Tempire  deskbiip 
fes,  en  voulant  se  prolongerd^unefajfli 
gigantesque  le  long  deTAfriquep 
qu'en  Europe >  a  travers  les  desertip; 
qu'aux  Indes,  perdit  en  puissanee#, 
qu'ii  gagna  en  6tendue.  0mar,cem9 
lion  qui,  du  temple  de  la  Kaaba ,  soe^i 
tre ,  avait  pu  dinger  ses  arra^  aiB^ 
bien  contre  le  Grec  et  le  Perse  quei^ 


.  tpromu]_ 
lols.  Ses  successeurs,  mvestis  — ^ 
luidu  pouvoir  spirituel  et  temporeli» 
fois,  ou  plutdtde  la  direction  religM^ 
et  du  despotisme  militaire,  nc  port* 
bientdt  plus  faire  entendre  leur  voi^t 
faire  parvenir  leurs  ordrcs  aux  iiaB** 
si  recul^s,  aux  bornes  fantastiqws* 
leur  empire.  Le  despotisme  flechil « 


STKIE  MODERNE. 


imier;  et  il  ne  resta  plus  aux  Abbas* 
iktes ,  sortes  de  papes  mahometans,  que 
li  direction  reiisieuse.  Desormais  sur 
otte  pente  il  fallut  rouler  :  a  tout  ins- 
tant des  ambitieux,  nomm^,  par  la 
eonfiaDce  iosens^  des  kbalifes,  gouver- 
oeurs  de ieurs  plus  belles  provinces,  se 
dfelaraieiit  independants.  La  Syrie  eut , 
eomme  la  Perse  et  r£gypte ,  son  tyran , 
Tbouloun,  roid'un  iour,  dont  le  despo- 
tiime  fat  d*autant  plus  pesantquil  arait 
pttts  b^te  de  jouir  desa  criminelle  usur- 
pation. Puis,  dans  cette  decadence, 
dEwon  voulut  venir  a  la  curee.  Apres 
ThoQloun,  Seidjouk;  apres  ie  purga- 
iDire,  Teofer,  pour  les  malbeureuses  po- 
paiatioDS  syrieones. 

A  dater  de  eette  epoque ,  les  ev^ne* 
vents  se  pressent,  les  perip^ties  s*ao* 
umulent,  la  guerre  devient  permanente. 
Us  Seldjookides  sa  disputent  la  Syrie 
nrome  one  proie  afec  les  Fathimites, 
tout  ensemble  kbalifes  et  sultans,  mas- 
sacraot  et  damnant  h  la  fois.  Enfin , 
eooiioe  si  I'Asie  ne  suf6sait  pas  pour 
nettreenlaflobeaux  cet  infortun^  pays, 
voiei  venir  des  fins  fonds  de  TEurope 
des  bommes  bard^  de  fer,  k  Tesptit 
Quite,  auooeurbarbare,  qui  foulent  les 
pplessoos  Ieurs  piedscommeune  pons- 
•i^e impure,  qui  tuent  par  vengeance, 
jw  haine  religieuse,  par  fanatisme  chr6- 
^:Cestlagrande  ruction  du  moyen 
«ge,  ee  sont  les  croisades. 

Qoel  r^soltat  definitif  doit  surgir  de 
^  deox  sieeles  de  croisades?  Si  elles 
i^portcnt  avec  elles  quelques  6l6ments 
'ny'i^neQx  de  progr^  politiques  et  so- 
^aox ;  si  de  la  fusion  de  tant  de  nations 
diverses,  si  du  frottement  de  ces  deux 

e^wndes^rorientet  TOccident,  il  doit 
'lir  quelques  Eclairs  de  civilisation, 
consequence  la  plus  immediate  pour 
■  Syrie  fut  celle-d  :  en  place  d*un 
y«ome,  IcsFrancsnelaiss^rent,  sur  les 
wiesde  la  Mediterranee,  qu'une  tribu, 
P'sqae  toujours  errante,  d^eim^par 
K  fer  et  par  le  feu ,  6puisee  par  un  cli- 
B^tqui  n  est  pas  le  sien,  narguee,  trom- 
F^t  exploit^  tour  a  tour,  aoandonn^e 
l^ce  qu*elle  fut  toujours  sans  ressour- 
^1  fatigante  parce  qu*elle  se  plaint 
*>Bscesse,  mendiantdessecourspartout 
tt^  tous,  etqui  a  invente  pour  son  usage 
Puiiculier  la  langue  franque,  le  plus 
pitoyable  peut-^re  d^  patois  counus. 


Au  depart  des  derniers  eroises,  tors- 

3ue  les  sultans  d'£gyptede  la  dynastle 
es  Babritesdevinrent  libres  possesseurs 
de  la  Syrie,  le  calme  de  cette  province 
fut  pluti^t  dd  a  raffaissement  de  Tagonie 
qu*au  retour  de  la  prosp^rit^.  II  edt 
tallu  pr^  d'un  si^le  de  paix  pour  ren- 
dre  la  sant^  a  cette  belle  convaJescente ; 
mais  la  guerre  civile  entre  les  pr^ten- 
dants  k  la  domination  de  Damas ,  entre 
les  Babrites  et  les  MamloulLS,  vint  bien- 
t6t  rouvrir  les  plaies  encore  saignantes 
de  la  malbeureuseSvrie.  Les  Manilouks, 
▼ainqueurs,  furent  des  mattres  m^ants, 
rigides  et  insatiables  :  dans  tout  cbre« 
tien  lis  croyaient  voir  un  crois6,  dans 
tout  montagnard  ind^pendant  un  en- 
nemi,  dans  tout  juif  un  th^sauriseur ; 
lis  molestaient  run,  its  attaquaient 
Tautre  et  volaient  le  dernier;  Aussi,  lors- 
que  tomba ,  des  plateaux  de  la  mer  Cas- 
pienne,  ce  rumb  infernal  qui  d^vasta 
en  Asie  toutes  les  terres ,  ^branla  tous 
les  trdnes,  eerasa  tant  de  populations, 
renversa  tant  de  villes,  lorsque  Timour 
le  boiteux  et  ses  Tartares  au  front  botnbd 
se  repandirent  depuis  les  campagnes 
d'H^rat  jusqu'aux  murs  de  Constanti- 
nople, lesSvriens  partag^rent  h  peine 
la  terreur  g^n^rale,  tant  d  leur  6tait  in- 
different sous  quelle  domination  ils  de- 
vaient  v^geter  dans  la  mis^re  et  dana 
les  alarmes.  1a  teuiplte  septentrionale 
alia  eclater  sulr  TAsie  Mineure,  et^puisa 
sa  rage  en  la  diss^mioant.  Alors  revint 
pour  la  Syrie  la  tyrannic  ^yptienne ; 
alors  recommencerent  pour  les  Chretiens 
les  persecutions  musulmanes.  C*est  alors 
aussi  que  le  Liban  devint  le  refuge  de 
tousles  opprimes,  et  que  la  moiitagne 
eut  tout  d'un  coup  un  accroissement 
considerable  d*habitants,  formes  de  tous 
les  orphelins  de  Jerusalem ,  de  tous  les 
proscrits  de  GaliI6e,  des  victimes  de 
toutes  les  calamites. 

Cependant,  parmi  les  races  qui 
avaient  envabi  1  Orient ,  parmi  les  am- 
bitieux  qui  s'en  etaient  dispute  les 
provinces ,  il  s'etait  ^lev^  un  jour  une 
race  plus  forte  que  les  autres ;  il  s'^tait 
d^lar6  tout  a  coup  des  ambitieux  plus 
6nergique8que  Ieurs  comp^titeurs :  cette 
race  ^tait  la  race  turque,  ces  ambitieux 
Etaient  les  Osmanlis.  Habiles  dans  Ieurs 
attaques,  prevoyants  dans  Ieurs  vie- 
toires,  ils  avaient  d*abord  assiege  Cons* 


I/UNIVERS. 


<aiitiaople;ils  s'dtaient  rendus  mflttres 
^  la  Tnraee  et  de  la  Bithjnie ,  de  la 
Maoedoine  et  de  THeliespont ,  bien  sdrs 
ou'ila  etaiant  qu*une  fois  posaesseurs  de 
lAsie  Mineare  et  des  provinces  de  la 
haute  Gr^e,  apres  avoir  trace  u.i  cercle 
de  trois  cents  lieues  de  coiiqu^tes  autour 
de  leur  mognifique  capitate,  iis  n'au* 
raient  qu'a  passer  par  la  Syria  pour  la 
soumettre,  qu'h  marcher  sur  T^grpte 
pour  la  vaimsre.  Le  projet  qu'ils  avaient 
eon^  des  14df  se  reahsa  en  I5t7. 
Malheureusement  pour  la  Syrie,  si  S6» 
lint  l***  ^lit  dou^  des  qualites  d*on  con- 
euerant,  il  ne  poss^ait  point  cedes 
d'un  legislatenr.  L'orgamisation  qu'il 
miposB  a  M  Sjrrie,  et  qui  a  dur^  jusqu'i 
nw  jours ,  a  tous  les  vices  du  despo* 
tismesanseiravoir  la  stability.  Les  pa- 
chas deSyrie,  trop  puissants  pour  ^tre 
si  ^  ^lotgiies  du  ceutre  de  Tempire,  trop 
faiblesvis-i- vis  des  populations  s*ils  ri 
▼ent  Tind^pendance,  furent  peu  a  peu 
min^  dans  leur  pouvoir,  trains  par  leurs 
conseillers,  et  se  trouv^rent  bientfit  en 
hittes  perp^tuelles  dans  leur  gouverne* 
■lent. 

L'anarchie  qui  r^sulta  de  oe  deplo- 
rable etal  de  choses  fiit  le  plus  irrepa* 
Mble  fleau  qui  edt  jamais  ravage  la 
Syrie :  les  races  se  di vis^rent ;  les  sectes 
fompirent  avec  ^lat;  les  families  prin- 
eipales  m^mes  se  s6parerent,  les  unes  se 
laitacliant  au  gouvemementdefait,  les 
autres  excitant  la  r^istance,  fomentant 
des  troubles,  appuyant  tout  hommeau- 
dacieux  qui  osmx  dune  main  ferme  le- 
ver I'etendard  de  la  r^volle.  Ainsi,  vers 
1740.  on  vit  un  Bedouin  energique,  le 
eheik  Dhaher,  comba;tpe  les  pachas, 
les  vaincre ,  entamer  leurs  provinces ,  et 
se  declarer,  dans  la  place  de  Saint- Jean 
d'Acre,  sultan  de  la  Syrie  m^ridionate. 
II  ne  fallutrien  moins  pour  venir  ^  bout 
de  ce  t^m^raire  qu'un  homme,  moitirf 
penard  et  moitie  tigre,  fourbe  et  ftroce 
a  la  fois ,  Ic  fiosniak  Ahmed  acha,  sur- 
nomme paries  populations  dont  il  avait 
*gorge  froidement  un  si  grand  nombre 
d'individus ,  Djezzar  ( le  Boucher ). 
I  Pour  aue  la  Syrie  edt  vu  dans  ses  cam- 
pagnes  les  luttes  des  plus  grands  con- 
qii^rants,  il  fallait,  apr^  Alexandre  et 
Pomp^,  que  NapoWon  y  pardt  k  son 
tour ;  et  si,  selon  rexpression  d'un  poete 
eoDtemporain , 


Tyr  bra  v«  deux  ceofs  Jonri  le  e«iirtottx  d'Aleuirfr^ 

il  appartenait  a  Saint- Jean  d'Acre  d*» 
voir  rhonneur  d'arr^ter  Bonaparte. 

Comment ,  dans  les  temps  modeniei^ 
le  Liban  fut-il  livrea  des  troubles, Ji4tt 
reactions  et  a  des  malheurs  si  granW 
comment  cet  ancien  asile  des  cbr^iql 
fut-il  devaste.  par  la  guerre  civW 
comment  i'immdmoriale  protfcUonde]| 
France  devint-eile  un  jour  entiereiMi' 
inefGcace?  VoiJa  ce  que  nous  auroMi 
racoiit«r  dans  la  derniere  partie  de 
ouvrage  :  lamentable  fin  cTune 
pleine ,  il  est  vrai ,  de  faits  comj 
d*intrigues  puissantea,  de  caraetMi; 
^nergiques,  de  combats  m^morabkl| 
mais  aussn  toute  mouiUee  des  lanod} 
tout  easanglantee  dea  raassacreiAl 
malheureux  indigenes. 

En  r^ume,  trois  grandes  races,  defril 
douze  siecles,  possed^reut  alterDatin* 
ment  la  Syrie  sans  la  peupler  pourtaUt 
les  Arabes,  les  Francs,  k^ lures. Ul 
Turcs.  actuellement,  ne  format » 
core  qu'un  dixi^me  de  la  populatiofl^ 
rienne,  300.000  limes  sur  environ  Ml 
millions.  Mais  si  aucune  race  n'f  aB» 
m^riquement  predomine,  chaeunefl 
laissd  des  descendants,  r&gyptieBOON^: 
leCircassien,  lessoldatsd'OmarcefM 
ceux  deSeldjouk,  les  Crois^  coowielll 
Ottomans.  Et  main  tenant,  si  ronajoeW 
h  ces  families  sMentaires*  dVigiatsi 
di verses,  des  tribus  nomades,  teiiesfft 
les  Bedouins  et  les  Riirdea,  et  phif  II 
quinze  sectes^  tant  chretiennes  quea^ 
sulmaneset  idoldtres,  on  ne  sera|M 
^tonne  des  divisions ,  des  tiraiiieineolir 
des  haines  .et  des  luttes  qui  font  deb 
nature  la  plus  riche  une  valli^  dedfH^ 
lation,  des  montagnes  les  plusbdkl 
une  contr^e  toute  pleine  d'embdek% 
dela  campagne  la  plus  fertUe  unebaop 
de  carnage  :  Dieu  $§ul  a  iii  hwftHf 
la  Syrie, 

DBSGBlPTIOtlf  DB  LA  STBlB. 

Comme  Fa  Syrie ,  depuis  douze  ce* 
ans,  a  6ie  le  thdStre  de  bouleverseineatt 
radicaux,  de  revolutions  multiplieeif 
de  quelques  fondations  de  villas,  maj 
de  la  destruction  d'un  bieo  plus  ^m 
nombre;  comme,  d'ailleurs,  I'objetdJ 
cet  ouvrage  est  ITiistdr©  moderne  de 


SYRIE  MODERNE. 


fttte  contr^,  nous  nous  bornerons  a 
(Kerire  le  pays  tel  qu'H  est  aujour- 
(Thui,  nous  reservant  de  donner  quel- 
qaes  details  historiques  de  pfus  sur  les 
dtPs  ruin^a ,  a  mesufrfl  qu^elles  se  pr6* 
senteront  dans  noire  rccit.  Notre  tra- 
rail  ^tant  divis6  en  trois  parties  princi* 
pales,  ajant  trait  aux  actes  divers  des 
trois  grandes  races  qui  ont  domine  en 
Sfrie  :  la  race  arabe,  la  race  franque, 
h  race  turque,  nous  r^umeroiis  cha^ 
eone  de  ces  parties  en  mentionnant  h 
oepropos  les  transformations  physiques 
aussi  oien  que  les  variations  politique^ 
ct  morales. 

Pcrsonne  ne  conteste  T^tendue  ac- 
toellede  la  Syrie,  app^lee  par  les  Arabes 
Barr-at-Cham ,  le  pays  de  la  gauche,  par 
opposition  a  l*Y6men,  lepays  de  la  drojte, 
«  prenant  |K)ur  centre  de  1  Asie  la  myste- 
rietiseetsainte  Raaha,  eten  se  tournant 
eomme  tout  bon  musulman  ne  manque 
pas  de  le  faire  vers  le  soleil  levant. 
Cette  raste  province  de  Tempire  otto- 
man renferrae  lesneuf  contr^es  ancien- 
Des  connnes  sous  les  noms  de  Syrie  pre- 
miere, Syrie  deuxieme  et  Syrie  Euphra- 
tesienne,  de  Palmyr^ne,  de  Ph^nicie 
maritime  ct  Libanique  et  de  Pales- 
tine, divis^,  ainsi  que  la  S]^rie  des 
Crecs,  en  trois  parties.  Situee  entre 
les  31«  et  37"  de  latitude  nord  et  entre 
les  32"  et  zr  de  longitude  orientale  au 
meridien  de  Paris,  la  Syrie  moderne  a 
pourliraites,au  nord  PAsie  Mlneure,  la 
Caramanie ,  I'ancienne  Cilicie  deuxieme ; 
&rouesl,la  raer  Mediterran^e,  depuis 
les  derniersmamelons  du  Taurusjusqu'i 
''tgypte,  jusqu'aux  premieres  dunes  de 
Bab.t^  mouvants  d'EI-Arich,  cent  cin- 
quanie  lieues  de  c6tes  environ;  au 
nord-est,  puis  h  Pest,  par  TEuphrate 
jusqu'au  confluent  du  Khabour,  pres 
Kerkisich ;  la  la  Syrie  s'enfle ,  et  s'^tend 
jusqu'l  une  largeur  de  cent  lieues  du 
cap  Ouedj  jusqu'a  Manieh  sur  la  ligne 
de  Tadraor  (Palrayre) ;  enfin  au  sud-est 
et  an  sud ,  elle  se  resserre  entre  des 
murailles  ou  des  plaines  de  sables, 
Dornee  au'elle  se  trouve  par  des  monts 
y  des  champs  incultes,  par  le  desert, 
wral-al-Cham. 

Geologiquement  la  Syrie  est  one  vaste 
cbatne  de  montagnes,  dont  fun  des 
Tenants  regarde  I  ouest,  et  descend  de 
couches  en  couches  jusqu'au  niveau  de 


la  M 6diterran^ ,  tandis  que  Tautre  ver- 
sant ,  qui  appartient  ^  un  sol  plus  61eve , 
aboutit  h  un  plateau  borni6  par  TEu- 
phrate  au  nord-est  et  par  les  sables  du 
BarraT-al-Cham  au  sud-est.  Cette  chatne 
de  monta<imes,  qui  s*6tend  de  PAsie 
Mlneure  a  PArabie,  du  sauva^e  Tau- 
rus au  morne  d^ert  de  TEgarement, 
presente  une  immense  variety  dans  son 
cours.  Tan  tot  elle  borde  les  c6tes  du 
golfedeSkanderoun  (Alexandrette)  jus- 
qu'a Antakieh  (Antioche) ;  tant6t,  fuyant 
versle  sud-est  d'Antiochea  Balbek ,  elle 
s'eloigne  du  rivage  en  y  poussant  sett- 
lement plusieurs  suites  de  collines ,  qui 
vont  toujours  s'amoindrissant;  puia 
elle  revieiit  brusquement  vers  la  mer, 
enchevdtrant  ses  monts,  entassant  ses 
sommets,  etse  divisantendeux  larges 
branches  :  le  Liban  et  FAnti-Liban; 
plus  loin,  tout  en  se  dirigeant  sans 
cesse  vers  le  sud,  elle  etend  un  bras  co- 
lossal qui  finit  perpendiculairement  au- 
dessus  des  lames  qui  s'y  brisent  :  c'est 
le  Carmel;  plus  loin  encore,  elle  lance 
vers  leciel  unvasle  cone  isol^  :  c'est  le 
Thabor;  enGn  ses  Elevations  diminuent 
peu  a  pen,  ses  pentes  s'adoucissent ,  ses 
versants  s'annudent  et  n'offreiit  plus  que 
des  anfractuo>iti^s  au  lieu  d'6ta^es,  des 
rochers  au  lieu  de  mamelons;  la  terre 
disparatt  pour  faire  place  au  sable  : 
c'est  la  nature  infertile,  c'est  le  de- 
sert. 

Ces  montagnes  subissent  done  des 
transformations  infinies.  Des  deux 
grandes  chalnes  princi  pales,  comme  de 
deux  larges  fleuves,  s'echapperit  mille 
chatnons  divers,  dont  les  uns  vontrouler 
dans  les  flots,  dont  les  autres  sYga- 
rent  dans  les  plaines,  dont  quelques 
autres,  tournant  sur  eux-m^mes ,  for- 
ment  des  cercles  resserres,  emprison- 
dent  des  vallons  et  ouvrent  des  abtmes. 
Cette  disposition  g^ologique  offre  d'ail- 
leurs  tons  les  climats  et  tontes  les 
variet^s  de  sol  :  ici  des  rivages  depouil- 
16s  et  presque  torrides ,  la  des  plateaux 
fertiles  et  temp^res,  plus  bout  des  som- 
mets hoists  et  ne!.i;eux;  puis  d^  lon- 
gues  et  creuses  vallees;  puis  encore 
des  esrarpements  surmonles  de  ver- 
doyants  mamelons;  puis  des  pics  qui 
d^passent  les  nuages;  et,  enfin,  a  Pest, 
des  campagnes  fertiles  ou  le  soleil 
dardeses  plus  f^condants  rayons. 


L'UMVERS. 


Cette  muraitle  protectriee  de  monta- 
gnes ,  si  utile  contre  le  decbainement 
des  vents  ou  contre  les  ardeurs  de  la 
lumiere  solaire,  rend  le  sol  propice  h 
presque  toutes  les  cultures,  et  voit 
nattrc  sur  ses  larges  gradins  des  pro- 
ductions  des  especes  les  plus  differen- 
tes,  des  arbres  de  toutes  les  tempe- 
ratures. Ainsi,  au  pied  du  Liban, 
se  rencontrent  en  abondance  le  coton , 
le  s^ame,  le  tabac  et  m^ine  la  canne 
k  Sucre ;  puis,  le  palmier  et  Talons,  I'oli- 
Tier  et  1  oranger  y  forment  des  bois 
touffus.  Sur  le  premier  flanc,  aucon- 
traire, audessus des  collines les moins 
elev^s,  le  Gguier  apparaft,  et  la  vigne 
s'attachc  aux  rameaux  des  chines  et 
des  mOriers,  des  platanes  et  des  pins- 
parasols.  Plus  haut  encore,  aux  appro- 
ches  de  la  region  des  templtes,  les 
arbres  du  Nord ,  le  sapin  et  le  cypres, 
poussent  a  c6te  du  colossal  sycomore 
et  du  cedre,  ce  roi  des  v^getaux  :  c*est 
la,  du  reste,  qu*on  voit  des  troncs 
de  quatre-vingts  pieds  de  largeur  lancer 
des  oranches  dont  quelques-unes  attei- 
gnent  une  longueur  phenom^nale.  Enfin 
descendez  dans  les  terrains  les  plus  has , 
et  vous  trouverez  le  riz  dans  les  mare- 
cages  qu'il  aime ;  remontez  sur  les 
plus  larges  plateaux,  et  vous  trouverez 
des  champs  tout  oouverts  de  froment 
et  de  mats. 

L*as|}pct  et  la  forme  de  ces  montagnes 
ne  different  pas  moins  que  leur  cours 
et  leur  vegetation.  Formdes  en  general  de 
terrains  calcaires,  el  les  sont  ici  blanchll- 
tres  et  pelees,  la  verdoyantesetfecondes, 
parfois  couvertes  de  pelouses  menues, 
parfois  toutes  noires  de  forlts  ombreu- 
ses;  au  centrede  la  Syrie,  enfin,  aux  lieux 
ou  s^ei^vent  les  cimes  les  plus  hautes , 
chacun  de  leurs  Stages  domie  un  spec- 
tacle contrastant,  d*abord  une  ver- 
dure douce  et  tendre ,  puis  des  cou- 
leursplus  prononc6eSi  puis  la  region 
nebuleuse,  puis  au  sommet  les  frimas 
eternels.  Nous  ne  donnerons  point  ici 
la  seche  et  inutile  nomenclature  des  dif- 
ferentes  appellations  que  prennent  ces 
montagnes  si  nombreuses ;  contentons- 
nousdenommer  les  principales,  qui  sont, 
a  partir  d  Antioche,  les  mpnts  Douman- 
dour,  Aldar,  Schaik,  qui  forment  Tune 
des  branches  principales ;  puis  de  Tripo- 
li a  Acre,  leLibon,  TAnti-Liban,  le 


Kestravan,  le  Cannel,  le  Thaboret  ia 
monte  si  connus  de  la  Palestine.  Lahn* 
teur  moyenne  des  sommets  varie  de 
huit  cents  aquatorze  cents  toises;  quart 
au  Sanntn ,  le  plus  &e^€  des  pics  Ef> 
riens,  ii  n*a  jamais  6t6  mesure;  fomi 
k  Teloignement  d'ou  Ton  commenosij 
Tapercevoir,  surtout  k  la  neige  qttiM 
eouvre  constamment,  on  peut  presonNI 
que  sa  hauteur  doit  Itre  de  quinze  I 
seize  cents  toises  :  hauteur  secoiidaii% 
du  reste ,  aupres  de  celle  oil  atteignol 
certains  pics  des  Pyrenees,  des  Alpafl 
surtout  des  Cordilleres. 

La  structure  de  la  Syrie,  c'esta*di«| 
ses  mon  tajjnes  une  fois  decrites,  passoii 
pour  ainsi  parler,  aux  art^s  del 
grand  corps ,  c'est-a-dire  a  ses  fleimi^ 
La  S^^rie  n'a  que  deux  Oeuves,  six  lid 
priocipaux,  quelques  petites  rivieres,  4 
un  grand  nombre  de  torrents  qui,  pfltf 
la  plupart,    se  dessechent  en  ete.  i  1 
peine  ces  eaux,  saumdtres  en  bien  d8 
lieux,  et  par  cons^uent  nonpotabbt 
sont-elles  sufilsantes  pour  la  eoimi^ 
mation  humaine;  aussi  les  p\m  in 
ciel  sont-elles  conserv^es  avecsoindan 
des  citernes  mur^es.  II  est  k  pr^iMT 
que  rindustrie  des  premiers  peufileh 
syriens,  en  canalisant  les  rivieres, « 
creusant  leurs  lits,  en  dirigeaot  Nft 
cours ,  a  su  tirer  un  plus  grand  parlii 
de  cet  element  si  n6cessaire  et  si  proi* 
table;  toujours  est-il, a  Theure q|u'ile8li7 
que  rincurie  mahometane*a  laiss^  taii 
cascades  tomber  dans  des  gouffres,!!'; 
lieu  de  s'^pandre  dans  des  bassios;  If 
torrents  se  creuser  des  voies  souterriK 
nes,  miner  les  terresau  lieu  de  les  an» 
ser;  les  fleuves  s*encombrer  de  roseaff 
et  d*herbes  parasites  qui  resserrentletf ' 
courant  et  altdrent  la  qualite  de  M\ 
eaux.  Le  Jourdain ,  par  exemple,  si ; 
n'est  pas  large  est  tres-profond,  s'll  b"^  ' 
en  moyenne  que  soixante  pieds  eniiroi 
d'un  bord  a  Tautre,  a  par  endroitt  viSA 
vingt  pieds  de  profondeur  k  six  po^ 
ces  de  ses  berges;  TOronte  fuit  aiee 
une  telle  rapidity  a  travers  des  plaioel 
dont  les  pentes  n^anmoins  o*ont  ned 
d*extraordiuaire,  que  les  Arabes,  q« 
donnent  si  souvent  des  noros  signifies 
tifs  a  tout  homme  comme  k  toute  cbose, 
appellent  ce  fleuve  Al-Asi,  le  rcbcnt 
Oui  rebelle ,  mais  pour  rignorancc  rt 
la  paresse  :  le  Hhdne  chez  nous  est  re- 


SYRIE  MODERNE. 


belle  aussi,  et  pourtant  dous  avons  su  le 
dompter,  dous  TaTons  rendu  naviga- 
ble. 

Le  terrain  le  plus  ^leve  se  trouvant 
au  milieu  de  la  Syrie,  vers  Damas, 
dans  La  region  du  Liban,  ce  sent  de  ses 
inoatagQ<>s  que  rouleut  le  plus  de  tor- 
rents, que  descendentleplusde  rivieres, 
aue  prennent  naissance  les  deux  seuls 
eaves  du  pays.  UOronte,  echapp^  des 
sommets  de  rAnti-Liban  en  deux  bran- 
ches, dont  I'une  part  de  Touest,  et  Pautre 
du  sud,  offre  un  coursd*une  centaine  de 
lieues,  du  midi  au  nord,  sans  trop  de 
ineandres  et  d'ecarts.  Tout  d*abord  il 
^tend  ses  eaux  sur  un  assez  grand 
espaee,  forme  un  lae  long  et  etroit 
oon  loin  de  son  embouchure;  puis ,  re- 
prenant  une  marcbe  plus  r^uliere,  aro- 
se Hemscrancienne  Emese  des  Crois^), 
longe  Hamah  ( m^tropole  eteinte  d'un 
empire  mahom^tan),  se  m^le,  a  Famieh, 
a  un  petit  lac  de  deux  lieues  environ , 
et  reprend  bient6t  sa  course  pour  rece- 
Tolr  au  dela  de  Chough  une  petite  ri- 
viere sans  importance.  Arrive  k  Ser- 
kin,  ouon  le  passe  sur  un  vieux  pont 
romain,  il  s'elargit;  puis  il  se  divise  au- 
dessus  d*Antioche,  abn  d'aller  d'un  cot^ 
alimenter  le  lac  des  Kurdes,  tandis  que 
de  Taatre  cot^  il  forme  un  coude,  s'a- 
vance  tout  pr^  d^Aotioche ,  et  revient 
sur  iui-m^me,  c'est-a-dire  du  nord  au 
8<id ,  pour  courir  se  perdre  enfin  dans 
legolfedeSouaidi^h.  Dans  ce  long  cours, 
qui  n'est  vraiment  rapide  que  sur  cer- 
taines  pentes  de  TAnti-Liban,  les  eaux 
de  rOronte  varient  de  teintes  et  de 
qualit^s  :  claires  et  l^eres  en  sortant 
des  montagnes,  el  les  deviennentquelque 
'  peu  Acres  en  bordant  les  monts  Akkar , 
et  prennent  des  lors  une  couleur  blan- 
chatre  pour  ne  la  plus  quitter ,  m^me 
en  traversant  les  terres  rouges  fonc^es 
du  lerriloire  d'Alep. 

Quant  au  Jourdain,  le  fleuve  bi- 
wiique  et  ^vangelique,  il  n'a  reellement 
qu'ttne  valeur  de  convention ,  la  religion 
ct  Thistoire  Tout  seules  fait  iilustre.  Sa 
source  est  constest^;  les  uns  le  ferment 
de  trois  ruissraux  qui  tombent  d'un 
groupe  de  montagnes  pr^  d'Hasbeya; 
^  autres  le  font  secretement  sortird'une 
^Ite  pr^s  de  Banias.  Ces  premiers  pas 
^^}>  du  reste,  aussi  momes  que  mys- 
^"leux  ;  des  joncs  gigantesques  dissi- 


mulent  sa  presence,  et  ses  rives  buisson«^ 
neuses  sont  le  repaire  des  serpents  et 
des  sangliers.  II  vient  ensuite  aegorger 
ses  eaux  dans  le  lac  f^tide  d*££Hou- 
l^h,  puis  au  bout  de  deux  lieues  et  de- 
mie,  il  en  sort  pour  p^netrer  dans  Fan- 
cienne  Galilee,  tk,  quoiqu'il  n'ait  en- 
core que  trente-cinq  pieds  de  largeur 
sous  le  pont  celehre  des  fits  de  Jacob , 
ils*epure,  il  s'assainit,  il  se  debarrasse 
de  ses  herbes  epaisses ,  de  ses  noirs  ro- 
seaux,  et  va ,  apr^  quelques  detours  a 
travers  de  fecondes  vall^es^  tomber  dans 
le  lac  de  Tiberiade  (  Tancienne  mer  de 
Galilee).  Ce  lac  de  six  lieues  de  long  sur 
une  lieue  et  demie  de  large  est  vlrita- 
blement  encbanteur.  Des  montagnes 
aux  formes  pittoresques,  aux  teintes  di- 
verses,  les  unes  noires,  les  autres  grises, 
et  avec  les  nuances  les  plus  variees, 
forment  autour  de  ses  flots  d'a2ur  un 
amphitheatre  grandiose,  drgne  cadre 
du  plus  charmant  tableau.  Peuplez  main- 
tenant  les  bords  fertiles  de  ce  beau  lacdes 
quatre  villes  et  des  cent  villages  bibli- 
ques;  multipliez  les  accidents  dupaysa- 
gepar  la  diversitedes  cultures  et  par  les 
ombrages  d'arbresde  toute  espece  grou- 
p^s  avec  art,  et  vos  yeux  ravis  ne  recon- 
nattront-ils  pas  la  Tun  des  plus  merveii* 
leux  cantons  de  la  terre  promise  f  Le 
Jourdain,  apres  s'^tre  puriG^  dans  les 
eaux  limpides  dece  lac,  s*en  6cbappe  au 
sud-ouest.  Ici,  nous  c^erons  le  pinceau 
h  un  grand  poete,  M.  de  Lamartine,  aussi 
habile  coloriste  que  profond  penseur.  , 
«  Le  Jourdain  sort  en  serpentant  du 
«  lac,  se  glisse  dans  la  plaine  basse  et 
«  mar^cifgeuse  d'Esdraelon,  a  environ 
«  cinquante  pasdu  lac;  il  passe,  en  bouil- 
«  lonnant  un  peu ,  et  en  faisaot  enten- 
«  dre  son  premier  murmure ,  sous  les 
«  arches  rum^es  d'un  pont  d'arcbiteo* 
«  ture  romaine.  C'est  la  que  nous  nous 
«  dirigeons  par  une  pente  rapide  et 
«  pierreuse^  et  que  nous  voulons  saluer 
«  ses  eaux  consacrees  dans  les  souve- 
«  nirs  de  deux  religions!  En  peu  de 
c  minutes  nous  sommes  a  ses  bords ; 
«  nous  descendons  de  cheval,  nous  nous 
«  baignons  la  t^te,  les  pieds  et  les  mains 
«  dans  ses  eaux,  douces,  tiedes  et  bleues 
«  corome  les  eaux  du  Rh6ne ,  quand  il 
«  s'6chappe  du  lac  de  Geneve.  Le  Jour- 
«  dain,  dans  cet  endroit,  qui  doit  ^tre  a 
«  ped  pres  le  milieu  de  sa  course,  ne 


10 


L'TJWrVERS. 


<t  serail  pas  digne  du  nom  de  flfuve 
«  dans  uit  paj^s  h  plus  larges  dimen- 
«  siofis;  mats  il  snrpasse  eependant  de 
a  beatieoup  FEurotas  et  1«  G^phise ,  ^t 
«  tous  ces  fleuves  dont  les  noms  fabu- 
«  leux  oa  historiques  retentisseut  de 
«  bonne  beure  dans  notre  m^nrioire,  et 
«  nous  presentent  uiie  image  de  force, 
A  de  rapiditeet  d*abondance,  que  Taspect 
'  de  la  realite  detruit. 

«  Le  Joiirdain  id  mtoe  est  plus 
«  qu'un  torrent ,  quoiqu*a  h  fin  d'ua 
«  automne  sans  pluie,  il  roule  douce^ 
«  ment  dans  un  lit  d*environ  cent  pieds 
«  de  large  une  nappe  d*eau  de  deux 
«  ou  trois  pieds  de  profondeur,  elaire, 
«  Itmpide ,  transparente,  laissant  comp- 
«  ter  les  cailloiix  de  son  lit,  et  d*une  de 
M  oes  belies  couleurs  d'eau  qui  rend 
«  toute  la  profbnde  couleur  d*un  Gr- 
«  nmment  a'Asie  ,  plus  bleu  m^me  que 
«  le  ciel ,  comme  une  Image  plus  belle 
•  que  Tobjet ,  comme  une  glace  qui  co- 
«  lore  ce  qu'elle  refl^chit.  A  vingt  ou 
«  trente  pas  de  ses  eaux ,  la  plage,  qu'it 
A  laisse  h  pr^ent  a  sec ,  est  semee  de 
«  pierres  roulantes ,  de  joncs  et  de 
«t  quelques  touffes  de  l<iurier>-ro8es  en- 
«  core  en  fleiir.  Cette  plage  a  cinq  k 
ff  six  pieds  de  profondeur  au-dessous  du 
«  niveau  de  la  piaine,  et  ti^moigne  de  la 
«  dimension  du  fleuve  dans  la  saison 
«  ordinaire  des  pteines  eaux.  Cette  di- 
«  mension,  selon  mol,  doit  ^tre  de  huit 
«  k  dix  pieds  de  profondeur  sur  cent  h 
«  cent  vingt  pieds  de  largeur.  II  est  plus 
«  ^troit,  plus  haut  et  plus  bas  dans  la 
<  piaine;  mais  ators  il  est  plus  eocaiss^ 
«  et  plus  profond ,  et  rendroit  oi^  nous 
«  le  contemplions  est  un  des  quatre 
«  gues  que  le  fleuve  a  dans  tout  son 
«  cours.  » 

Apres  avoir  ainsi  serpent6  afln  de  pas- 
ser dans  chacun  des  vallons  des  monta- 
§nes  cahotees  de  la  Palestine,  le  Jour- 
ain  finit  par  arriver  au  sol  pierreux, 
aux  collines  arides,  pleines  de  rochers 
BUS  et  de  cavernes  profondcs ,  qui  con- 
dulsent  au  lac  Aspualtite. 

On  a  tout  drt  sur  ce  lac  d^sol^,  s'^- 
talant  sur  ses  rivages,  plut^Jt  quil  ne 
tes  baigne  :  monstrueuse  tached  huile, 
qui  gagne  de  jour  en  jour  plus  de  ter- 
rain, dont  Tahmentation  est  un  des  se- 
crets de  la  nature,  et  la  quality  du  liquide 
un  ph6nomene ;  mer  bitumineuse ,  aux 


Hots  pesants  et  vide8,qmn'a, 
senti  ni  polssons  ni  coquillages 
saillir  dans  son  sein,  qui  tue  toute 
g^tation  sur  ses  bords;  lae  infernal 
ne  vomit  que  du  aoufre, 
ventdu  desert  vient  par  basard 
ses  eaux,   habituelfement 
comme  la  mort. 

Nous  voici  arriv^  afix  borofS 
Syrie,  et  nous  ne  sui%rofis  pas 
sables  les  cours  d*enu  sans  nom  qnij 
chappent  de  Pextr^miti  merii ' 
lac  Asphattite. 

Quelques  geographes,  outre  Vi 
et  le  Jourdain ,  deeorent  du  wm\ 
fleuve  le  Kasmi^h ,  qui  prend  sa 
dans  les  montagnes,  au  nord  de~ 
fuit  au  centre  de  la  riche  vatlee  ^ 
kaha,  serpente  a  trnvers  des 
ombreux,  roule  parmi  des 
d'orge  et  de  froment,  ettrav( 
bois  de  mdriers,  pour  aller 
dans  la  mer,  entre  des  laurien  i 
des  orangers ,  k  quelqaes  cinq  eMH 
au-dessus  de  Tyr,  apr  es  un  couis  * 
trentaine  de  tieues.  Quant  a  noos 
bitu^  en  Europe  k  ne  pas  prodi^ 
nom  de  fleuve  au  moindre  nl 
nous  appeilerons  a  i^eine  rivieres 

3ue  les  anciens  avaient  peupl^dei 
e  naiades  charmantes,  et  qo'ils  "^ 
nommees  le  L6ont^s. 

En  suivant  les  rivages  de  la 
nord  au  sud ,  on  trouve  jusqa^i 
une  vitigt!)ine  de  rivieres  dans  le 
du  Kasmidh,  dont  quelques-uofs'i' 

f)as  m^me  de  nom  et  dont  les  prir'' 
es  sont :  ftl-Rebir(la  grande),  . 
jettc  dans  la  mer  k  six  Keues  df 
poli ;  £l-Kelb  ( ia  riviere  du  chien),; 
ach^vp  son  cours  entre  DjebaTI  rt  " 
b^h;  £)-Salib,  dont  IVmbouehure 
un  mille  de  Bayrouth ;  le  Dhamour, 
baigne  le  bourg  des  Druzes,  Utr 
Kamar  (maison  de  la  lune);  TAb 
^ui  se  perd  dans  les  flots  mediterrai 
a   une  lieue   avant  SaTdeh    (Sidi 
Nahr-Haifa  (la  riviere  d*HaTft),  qoi. 
gne  rapidement  le  golfe  de  Saint-/ 
cPAcre;  le  Kanah,  qui  tombedans  la^ 
k  une  lieue  nord  de  Ydfa;  enPn  le"  ' 
qui  serpente  non  loin  de  Gnza 
pourtant  traverser  cette  vllle.  F 
toutes  ces  petites  rivieres  ont 
sources  dans  le  versant  occidental  dei 
chalne  du  Liban;  queiques-unes 


S^Rm  MODERNE. 


a 


sentent  deux  branches  en  quittant  les 
montagnes,  ou  plutdt  de  deux  ruisseaux 
torrentiels,  il  se  forme  plus  tard  un  seut 
eoars  qui ,  en  general ,  n'a  qu'une  ern* 
boiichure  unique. 

Le  Tersant  oriental  des  montagnes, 
oui  fournit  les  eaux  des  deux  fleuves^ 
lOronte  et  le  Jourdain,  a  beaucoup 
moins  de  ces  petltes  rivieres  gue  le  cdte 
qui  regard  e  la  Medi  terra  nee.  On  en 
compte  la  a  peine  sept  ou  huit,  en  com- 
prenant  h  part  les  princinaux  bras  de 
la  riviere  de  Damas,  qui  rorme  h  deux 
lieues  est  de  cette  ville  un  lac  assez 
important  et  d'une  etendue  a  peu  pr^g 
esaie  a  cetui  de  Tibe rlade.  Mentionnons 
encore  la  riviere  d'Alep,  qui  descend  en 
deux  branches  des  dernieres  chafnes  du 
Taurus,  et  fiuit  par  un  petit  lac  dans 
on  vallon  entoure  de  coiiines.  Pour  d0 
rien  oublier,  11  fiut  parter  aussi  des  sa- 
lines de  Djeboul ,  et  des  trois  lits  de 
torrents »  pleins  en  hiver  h  la  fonte  des, 
neiges ,  vides  en  ele ,  dks  que  les  rayons 
du  soleil  reurennent  leur  ardeur,  et  quf 
vont  se  perare  dans  les  terres  grasses  et 
feriilfs  des  plaines  du  Hauran. 

£n  somme,  uiie  mer  interieure,  fa  mer 
Morte;  six  lacs  principaux ,  les  lacs  d'Aa- 
lioche,  d'Alep,de  Fam'ieh,  de  Damas, 
de  Ilouleh  etde  Tib(^riade;  deux  fleuves, 
I'OroQte  et  le  Jourdain,  une  vingtaine  de 
rivieres,  de  torrents  etde  ruisseaux,  tel 
est  le  total  general  des  eaux  de  la  Syrie. 
Si  Ton  compare  maintenant  ces  etroltes 
rivieres,  ces  fleuves  sans  etendue,  ces 
bes  de  mediocre  grandeur,  ces  torrents 
saus  eaux  la  molt iede  famine,  aux  grands 
flfu\es,  aux  larges  rivieres  et  aux  mil- 
Ic  ruisseaux  qui  silionnent  certaines 
provinces  europeennes,  il  est  permis 
^hie  quelque  peu  etonn^.  de  la  fecondit6 
*i  vaoiee  des  contreessyriennes.  Cepen- 
daut  ce  phenomene  est  explicable ,  d'a- 
lH)ni  par  la  rapidity  avec  laquelle  tout 
germe  et  tout  mQrit  dans  cette  terre  de 
prpdJIection  j  grdce  aux  rosees  abondan- 
jesqui  couvrent  lesol  toutentierdurant 
>^ Quits  d'et6 ,  et  ensuite  par  trois  mois 
de  pluies  presque  consecutives  peudant 
I  hiver  de  ces  cli mats. 

,Avantd>8quisser  les  regnes  mineral, 
vegetal  et  animal  de  la  Syrie,  afin  de 
^pieter  nos  details  purement  geolo- 
Siques,  ilnous  reste  a  direquelques  mots 
du  dessin  et  des  accidents  de^  rivages  de 


la  Mediterranee.  Au  premier  ai)€r^u ,  la 
mer  semble  creuser  la  Syrie  au  nord ,  et 
ia  laisser  envahir  ses  doniaines  h  partir 
de  Tripoli  jusqu*5  i'figypte.  En  ne  con- 
sultant qiie  la  carte,  la'iM^iiterran^  pa- 
raft  aussi  ne  point  s'etendre  bten  pro- 
fondement  dans  les  terres ,  sauf  au  golfe 
d'Alexandrette,  quiappartient,  du  reste, 
poor  moitieau moins,  a TAsie  Mineure. 
Cependant,  en  y  regardant  de  plus  pr^s, 
et  ^ri!ice  h  la  faiblesse  des  or^anes  hu- 
mains,  pour  qui  les  moindres  echancru- 
res  sont  des  baies,  et  les  poinCes  d'une 
lieue  deviennent  des  caps,  on  reconnatt 
ais^ment  que  les  rives  syriennes  sont 
fort  accidentees.  Ainsi  on y  pent  compter 
quatre  baies  principales  qui  sont,  en 
commencant  par  le  nord ,  les  baies  de 
Souaidien,de Tripoli,  deBayrouth,  etde 
Saint- Jean  d'Acre,  et  six  caps,  les  cap$ 
Kansir,Ziaret,  Hesn,  OuedjJecapBfanC 
et  le  cap  Carmel,  sans  faire  mention  des 
pointes  de  Bayrouth,de  Sarfend  et  dc 
Tyr,  lesquelles  n'ont,d\iilleurs,  aucune 
importance  serieuse  pour  la  navigation. 
Malgre  ses  quelques  petits  golfes,  Iac6tc 
deSyrie  presque  tout  entiere ,  est  d*un 
abord  dimcile  et  d*un  sejour  dangereux; 
les  vents d'ouesty acquieren tune grande 
violence,  etie  fond,  generalementform^ 
de  rocbes  aigues,  y  use  prpmptement 
les  cables  pour  d^vorerensuite  les  vais- 
seuux.  Aussi,  quelle  que  soit  la  grdce  de 
certains  rivagCN  bordes  d'herbes  brillan- 
tes  ou  de  sable  dore ,  ils  sont  inbospita- 
liers  pour  la  marine  qui  n*y  atterrit 
qu'en  tremblant,  et  n'y  demeure  qu'avefi 
mefiaoce. 

On  pense  bien  que  notre  intention  en 
donnant  quelques  renseignements  sur 
les  regnes  mineral ,  vegetal  et  animal  de 
la  Syrie,  nVst  pas  de  parler  comme  la 
science  avec  une  metbode  severe  et  un 
systeme  arr^te :  nous  n'analysons  point 
ici  des  ^l^ments,  nous  ne  classons  pas 
desindivldus;  nous  devons  nous  borner 
a  mentionner  les  choses  seion  qu'elles 
ODt  affecte  les  bommes,  a  parler  des 
produits  du  sol  selou  les  rapports  quMIs 
out  eus  avec  les  babitants  du  pays.  Com* 
ment  laProvidenceadistribu^  ses  bien- 
faits  a  la  Syrie;  quelles  ressources  la  na- 
ture a  ofTertes  a  Thumanite  dans  cette 
partie  du  monde ;  aueis  spectacles  elle  a 
presentesaux  yeuxde  POriental ;  de  quels 
notes  divers  elie  a  peupl^  ses  montagnes  ^ 


12 


L'UNIVERS. 


ses  plainest  ses  bois  et  ses  eaux  :  votll^ 
notre  tdche :  essayons  de  la  remplir  avec 
conscience,  sinoii  avec  eclat. 

Le  regne  mineral  n*est  pas  aussi  riche 
en  Syrie  que  le  rtgne  v6g^tal ;  il  ne  prc- 
sente  ni  unegrande  vari^t^,  niune  utility 

f6iierale.  La  pierre  calcaire,  le  gres,  le 
asalte ,  le  scniste,  le  sel  gemme  entrent 
dans  la  charpente  des  montasnes  que 
nous  avons  d^crites.  Si  done  le  Synen 
trouve  en  abondance  des  corps  solides 
pour  bdtir  sa  demeure,  s*il  fabrique  facile- 
inent  de  la  chaux  pour  unir  les  roches 
qu'il  emploie,  le  luxe  lui  est  interdit ,  k 
Dioins  qu'il  n'ait  recours  ^  ses  voisins , 
puisqueson  sol  nelui  fournitni  marbre, 
ni  porphyre.  L'or  et  Fargent,  non  plus, 
ne  naissent  point  autour  de  lui ;  en  re- 
vanche, le  Kesrouan  produit  du  fer,  et 
Ton  rencontre  dans  les  environs  d*Alep, 
in  Antab^,  une  mine  importante  de 
cuivre.  Ceax  qui  veulent  absolument 
demander  h  la  nature  la  r^Ie  de  la  con- 
duite  humaine  sont  done  en  droit  d*ao- 
cuser  d'incons^quence  et  de  pusillani- 
mite  les  peuplesde  la  Syrie;  car,  d'une 
part,  amoureux  du  luxe,  ils  ont  recher- 
che par  le  commerce  le  briihntsupernu 
que  leur  contr^  leur  refusait,  et,  d  autre 
part ,  ils  n'ont  jamais  su  defendre  leur 

fatrie  avec  le  fer  qu'elle  leur  prodiguait. 
Is  devaient  ^tre  pasteurs ,  ils  se  sont 
montr^  commercants;  au  lieu  de  de- 
meurer  dans  leufs  belles  montagnes, 
ils  ont  pref6re  descendre  sur  leurs  ora- 
geux  rivages :  la  persecution  seule  leur 
a  fait  repeupler  leurs  monts  abandonn^s. 
Et  pourtant  ces  montagnes ,  si  lon^- 
temps  deiaissees,  offrent  les  perspecti- 
ves les  plus  enchanteresses ,  produisent 
la  vegetation  la  plus  riche.  Le  flguier 
et  Tolivier  y  presentent  a  Tenvi  leurs 
fruits  delicats,  le  chine  etle  cedre  leurs 
bois  solides,  le  sapin  sa  resine,  Taloes 
son  baume,  lemdrier  sesfeuilles  nutri- 
tives ,  la  vigne  ses  grappes  savoureu- 
ses;  tandis  que  les  c6tes  maritimes 
s'enorgueiilissent  avec  raison  de  To- 
ranger  et  de  ses  pommes  d*or,  du 
palmier  et  de  ses  rameaux  flexibles , 
du  dattier  et  de  ses  fruits  sucres ,  du 
grenadier,  du  bananier,  sans  compter 
la  canne  5  Sucre  et  le  tabac,  ces  deux 
modernes  sources  de  richesses.  Les 
plaines  d*Alpp  et  de  Damas  ne  sont 
pas  moins  bien  dot^es  :  Alep  a  ses 


pistacfaes  renommees  dans  le  moodi 
entier;  Damas  possede  les  mdnav 
fruits  de  nos  climats,  la  pomme,  ^ 
poire,  la  prune,  la  cerise,  la   " 
et  vingt  especes  d*abricots,  aiasfqie 
constate  Volney;  puis  Gaza  ledispsH 
Ydfa  pour  la  quality  de  ses  melooi 
de  ses  pasteques.  Comroe  prodnils, 
faut  ajouter  au  froment ,  au  cotoBi 
a  I'orge  qui  poussent  partout,  le  (f 
sortede  millet,  le  mais,  Ieriz,lali 
la  f^ve,  la  laitue,  Toignon,  le  cooooiii 
si  estime  pour  sa  fraicheur  et  sonar 
puis  le  sesame  oleagineux,  la  piai 
cochenille  vers  la  Mediterranee etl 
digo  vers  le  Jourdain.  En  un  root,i 
d*utile  ne  manque  h  ses  montagnol 
nies,  rien  de  savoureux  k  sesvergoi 
vorises ,  rien  de  succulent  a  ses 
gnes  almees  du  soleil. 

Si  tout  ce  qui  flatte  le  goOt, 
que  les  aliments  les  plus  sains, 
abondamment  fournis  au  Tolopl 
Syrien ,  tout  ce  qui  r6cree  la  nieet 
resse  Todorat  ne  lui  est  pas  poliv^ 
digue.  Les  valiees  du  Liban  MOteBHi 
lees  de  (leurs  naturelles ,  dontteiMi 
leurs  vives  etles  parfums  exqoisdiif 
siflent  le  paysage  et  embaumeot  raUi 
phere.  Les  myrtes  et  les  lauriers-rort 
remplacent  nos  tristes  buissonsdeh 
et  nos  ignobles  chardons.  £nfin,to 
tant  vantes  dans  les  saintes  £aitt 
pour  leur  purete,  lesnarcissespoorl 
elegance,  les  anemones  pour  Ifur 
les  roses  que  Saadi  affectionnait 
les  jacinthes,  les  jonquilles  et  les  tfll|^ 
qui  out  si  souvent  servi  aux  congjj 
sons  de  la  poesie  orientate ,  embeW 
les  jardins  et  peuplent  les  parW 
Pays  d*abondance  et  dMvresse,  cofl 
on  le  voit,  ou  il  sufBt  d'ouvrir  )tif 
pour  apercevoirdes  merveilles,*! 
are  la  main  |>our  cueillir  un  iruHj 
quis,  de  se  laisser  vivre  pour  eirel 
reux.  Mais  aussi  ces  productioai'' 
riees  et  delicateSy  ces  aromes  cnivni 
ce  climat  salubre  et  temper^,  sootf 
cisement  les  causes  de  la  conwitaf 
peuples  et  des  malheurs  des  Sjn 
La  rertilite  attire  les  parasites;  w 
chesses  attirent  les  voleurs. 

Les  animaux  neoessatres  a  f 
abondent  en  Syrie;  les  animaux 
siers  y  sont  rares.  Debarrassons- 
tout  d'abord  des  demiers.  On 


SYRlfi  MODEtlNE. 


U 


a  peine  dang  cette  eontrde  le  loup,  si 
commun  dans  les  foists  europeennes , 
et  Tours,  cet  habitant  ordinaire  des  val- 
loos  alpins.  Quelques  lions ,  egares  h  la 
poursuite  des  gazelles,  viennent  parfois 
errer  sur  la  lisiere  du  desert ;  pourtant 
ils  ne  depassent  jamais  les  sables  de  la 
Palestine orientale.  La  Bible  parled'hye- 
068  et  de  pantheres ;  mais  les  caravanes 
modernes  repoussent  faciletnent  les  at- 
taques  de  ces  h^ies  aussi  farouches  que 
cruelles.  Une  seule  espece  hideuse ,  fe- 
roce ,  espece  bdtarde,  qui  taent  du  loup 
et  du  chat  sauvage ,  s'y  rencontre  en 
assez  grand  nomore.  Le  chakal ,  c[ui , 
du  reste,  prefere  les  cadavres  a  la 
viaode  fratche ,  va  par  troupes  de  cin- 
quante ,  de  cent  et  mdme  de  deux  cents , 
roder  la  nuit  autour  des  bourgades, 
poussant  de  lamentables  eris  aigus  et 
prolonges ;  mais  ils  deterrent  les  morts 
pour  les  devorer  avec  une  gloutoone  avi« 
dit^ ,  plut6t  quMIs  n*attaquent  les  vi- 
vants  par  godt  du  sang  et  par  amour 
du  carnage.  Ces  animaux  immondes, 
h6tes  des  cimetieres  et  des  champs  de 
bataille,  sont  done  plus  d^oQtants 
que  redoutables ;  et  Ton  s'en  oebarras- 
serait  facilement  si  lesOrientaux  avaient 
moins  d'insouciance ,  si  les  guerres  ei- 
viles  et  les  meurtres  particuliers  n'of- 
fraient  pas  a  ces  b6tes  sauvages  des 
appdts  nombreux  et  presque  quotidiens. 

Parmi  les  animaux  utiles  il  en  existe 
peu  d'exclusi  vement  origtnaires  de  Syrie; 
seuiement,  certaines  especes,  connues 
dans  d'autres  pays ,  ont  dans  cette  coa- 
lite des  vertus  particulieres,  et  y^  pren- 
nent  un  developpement  prodl^'eux. 
Ainsi ,  les  cb^vres  y  ont  une  qualite  de 
lait  aussi  salutaire  qu'excellent ;  et  les 
moutons  elevds  dans  les  pacages  du 
Hauran ,  ou  dans  les  vall6es  du  Lifoan , 
yatteignentunegrosseurdnorme;  leur 
queue,  tr^s-epaisse  et  termini  par  une 
oottle  de  graisse,  devient  si  lourde  qu'a 
peine  ils  peuvent  la  trainer.  La  chair 
<le  ces  moutons  est  exquise,  et  avec 
^r  laine  on  confectionne  des  etoffes 
aossi  fines  que  solides.  Le  pore,  anrmal 
impur  pour  les  mahomdtans  aussi  bien 
que  pour  les  juifs,  y  devient  babituel-. 
lement  sauvage,  et  va  rejoindre  les  san- 
fliers  qui  se  vautrent  k  leur  aisedans  les 
unges  du  lac  Houl^h. 

Le  bocuf  n*est  pas  d'une  qualite  aussi 


superieurc  que  le  mouton ;  il  ne  se  ren- 
contre d*ailleurs  que  sur  le  versant 
oriental  du  Liban,  dtant  par  sa  nature 
fort  difGcile  h  dinger  et  a  nourrir  sur 
des  sommets  presque  aigus.  L*dne,  au 
contraire ,  et  le  mulct ,  au  pied  tou- 
jours  silr,  et  a  la  prudence  reconnue, 
se  plaisent  dans  ces  montapes,  ety 
deviennent  d'autant  plus  estimds  auMis 
sont  plus  ndcessaires  com  me  o^tes 
de  somme  et  de  monture.  D'une  race 

Klus  grande  que  la  race  europeeniie, 
!s  does  ont  la  robe  plus  brillante,  le 
port  plus  hardi,  la  t^te  plus  intelli- 
gente.  Guides  des  caravanes ,  on  s'en 
remet  h  leur  experience  pour  trouver 
une  route  a  travers  les  fondri^rt^s  et  les 
precipices.  Leur  instinct  est  tel  qu'on 
ne  les  sent  pas  broncher  une  seule  fois 
dans  les  chemins  les  plus  escarpes  et  les 
pIus6troits;  ils  posent  invariablementle 
pied  dans  la  trace  form^  par  le  sabot 
deleurs  preddcesseurs;  et  laou  Thomme, 
saisi  de  vertige,  trd)ucherait  et  roule- 
rait  dans  le  gouffre,  ils  passeht  avec  le 
calme  de  la  security.  Rien  de  plus 
curieux  que  de  les  voir  tdter  le  terrain , 
s'avancer  avec  une  precision  mathe- 
matigue^  etconserver,  en  marchant, 
r^quilibreleplus  parfait  dans  toutes  les 
parties  de  leur  corps.  Le  cheval ,  plus 
mquiet,  tend  lecou,  roiditlejarret,  s'ar> 
riXe  ou  quelquefois  recule ,  de  la  fa^on 
la  plusdangereuse;rdue,  au  contraire, 
ne  s'etonne  de  rien,  et  quand  le  pied 
qu'il  a  lancd  en  avant  ne  se  trouve  pas 
satisfait  du  terrain  qu'iltouche,  Tani- 
mal  prudent  relive  ce  pied ,  et  se  met 
d'aplomb  sur  ses  trois  autrcs,  avant  de 
cheroher  de  nouveau  la  trace  qu*il  avait 

{>erdue.  Et,  pour  le  dire  en  passant, 
es  calomnies  centre  Yhie ,  dont  se  plai- 
gnait  Buffon,  sont  plutdtdues  dans  nos 
pays  a  Fignorance  qu'a  la  malice  hu- 
rtiaine.  On  ne  connaft  point  cette  belle 
race  des  Sues  d'Orient;  on  n'a  pas  recon- 
nu  son  utilit6,  dprouve  son  intelligence, 
et  Tesp^oe  degendrde  qu'on  voit  chez 
nous  n*est  certes  point  de  nature  h  d6- 
truire  le  prdjugequilacondamne.Seule- 
mentnousne  pardonnons  point  h  ouel- 

aues-unsde  nos  artistes  les  plus  cdlenres 
'avoir  reprdsentd  Jesus-Christ  les  jam- 
bes  ballantes  sur  on  petit  dne,  le  jour  de 
de  son  entree  triomphale  a  Jerusalem  : 
c'est  faire  a  pl^isir  de  la  divinity  une 


14 


rUWVEBS. 


Image  ridieule,  c'estravaler  Tart  en  le 
montrant  ignorant. 

L'dne  et  le  rnuiet  sont  ausai  indispen- 
gables  a  I'homme  dans  la  montagne  que 
le  cheval  et  le  chameau  dans  le  desert. 
Lecheval  d'Orientaete  luille  fois  de- 
crit;  le  poeteanibeTachanteJes  prophd- 
tes  hebreux  Pont  propose  comme  un 
modele  d'activit^,  de  vaillance  et  de 
sobriete;  incapable  que  nous  sommes  de 
lutteravec  de  pareils  peintres,  nous  em- 
prunterons  la  description  qu'en  afaite  un 
de  nospius  grands ecrivains,  M.  deCbd- 
teaubriaud. 

«  Les  jutnents,  selon  la  noblesse  de 
«  leur  race,  sont  traitees  avec  plus  ou 
«  moins  d'bonueurs,  mais  toujours  avec 
«  une  rigueur  extreme.  On  ne  met  point 
«  lescbevaux  a  Tombre,  ou  ies  laisse 
a  exposes  aPardeurdu  soleil,  attacb^ 
«  en  terre  a  des  piquets  par  Ies  (|uatre 
«  nieds ,  de  nianiere  a  Ies  rendre  iinmo- 
«  biles;  on  neleur  dte  jamais  la  selle; 
«  souvent  ils  ne boi vent qu*uneseule  fois, 
«  et  ne  mangenc  qu' unpen  d'orge  en 
«  vingt-quatre  beures.  Vn  traitement 
«  si  rude,  loin  de  Ies  faire  deperir,  leur 
«  donue  la  sobriete,  la  patience  et  la 
«  Vitesse.  J*ai  souvent  admire  un  che- 
m  val  arabe  aiusi  enchaine  dans  le  sable 
•  brdlant ,  ies  crins  descendant  epars , 
«  la  t^te  baissee  entre  ses  jambes  pour 
ft  trouver  un  pen  d*ombre ,  et  laissant 
«  tomber  de  son  ceil  sauvage  un  regard 
ft  oblique  sur  son  mattie.  Avez-vous 
«  degage  ses  pieds  des  entraves ,  vous 
«  £tes-vous  elanc^  sur  son  dos,  // 
9.  ecume,  ilf remit*  il deoore ia  terre ; 
ft  la  ti  ompeUe  sonne ,  il  dit :  Mom  I 
«  etvousreconnaissezlecbevalde  Job.  » 

Sans  avoir  Telegauce  des  formes  et 
la  vivacite  des  mouvements  qui  font  du 
cbeval  Tun  des  plus  beaux  animaux  ter- 
restres ,  ie  cbameau  ne  mauque  pour- 
tant  ni  de  tournure,  ni  de  rapidite.  Son 
cou  flexible,  qui  se  pr^te  avec  facilite  k 
des  oudulations  diverses ,  sa  t^te  Intel- 
ligente ,  son  oeil  doux  et  r^signe ,  corri- 
gent  Ies  defauts  de  sou  corps  pansu ,  de 
son  dos  moutueux  et  de  ses  larges  ex- 
tremites.  Puis  la  longueur  de  ses  pas 
et  sa  marcbe  perpetuelle  lui  permettent 
d'atteindre  tdt  ou  tard  le  cbeval  qui  d'a- 
bord  Ta  devance  :  or,  il  vaut  mieux  aller 
toujours  que  courir  quelquefois  et  s'ar- 
r^ter  ensuite,  surtout  pour  des  peupl^ 


qui  prennetU  k  iUvr^  tn,  amba  i 
ainsi  qu*iU  diseot  proverlNaleouat) 
obameau  seul ,  du  reste ,  peut  s' 
et  regulierement  craTerser  les<k 
yobriete,  qui  supportejusqu'aqu 
€inqjour8aabstmeuoe;8oucour9L . 
domptela  fatigue  des  plus  tongues  t 
tes ;  son  pied ,  en  fa^on  d'^n|lfl 
s'elargit  ou  se  resserre  a  voloote.r 
Ies  terrains  ou  il  s'appuie;  U  soi^ 
de  ses  enorm^s jambes,  sa  robeayi 
g^neralement  dur  et  ras,  tout  esf 
qualites  physiques  comme  iostinct,  j 
bie  fa^oune  expres  pour  son  roie  icr 
de  compagnou  et  d'aide  de  rboml 
travers  Ies  sables  arides  et  biHU 
sait,  en  outre,  se  mettre  a  Tabrl  d 
ardents  ravons  du  soleil  en  plo 
naseaux  cfans  le  sol,  etson&)rp6l 
jette  alors  de  Tombre  sur  sou  emf 
teur;  il  saitaussi,  quaud  vieDtlijf 
p^te,  eviter  ses  chocs  Ies  plus  f 
A  peine  le  kamainn  a-t-il  cof 
^  souffler,  a  peine  des  teinlei  j 
glantes  se  sont-elles  monUfo^l! 
rizon ,  que  la  caravane  s^arr^le  (t  ( 
lescbameaux  se  reunissent  cfloot 
Ies  jarrets  enfonce8dansrareDe,bll 
basse,  la  croupe  au  vent ,  series  cti 
puyes  Ies  uns  contre  Ies  autres.  Dei| 
Ies  rumbs  Ies  plus  violents  viei 
briser  dans  leur  impuissauee 
cette  tour  anini^;  lestrombesv 
et  se  divisent  sur  ce  dome  ooloi 
vivant,  et  bient6t  la  temp^teesti 
cue.  Le  chameau  estg^jieralemeitl 
patient,  attache;  pourtant  U  ael 
porta  ppint  Ies  injures  ni  ies  auM 
traitements  :  si  vous  Ites  injuitti 
vers  lui,  ii  se  venge,  quandToee 
le  lui  permet,  en  vous  |etaQt  au  i 
du  sable  ou  de  Teau ;  si  vous  avtfj 
cruel ,  il  vous  lance  uo  coup  der 
d'autant  plus  terrible  queoepied^ 
en  frappant,  pour  ainsi  dire.  Eur 
le  chameau  est  sobre,  brave,  g>i 
aiusi  que  r Arabe,  son  maitre;! 
est  vindicatif  comme  lui. 

Pour  completer  nos  renseig 
sur  le  regne  animal  de  la  Syrie, H i 
reste  a  mentionner  Ies  habitaotf^ 
plaines  de  Pair  et  ceuz  des  pt>i'*2 
quldes.  Dans  Ies  lacs  d'Alep  ^^^ 
mas  se  rencontrent  un  grand  i 

(*)  Sorte  de  chariot ,  XxtM  le  plu  fl 
meat  pv  d«  Ixaiiii. 


SYia£  MODEHN£. 


la 


^pousoD8it*e^ptos  varies;  dans  le 

pifAotJoche  u  tn  existe  de  rouges 

noe  quality  contestable.   Quant  au 

V  fee  de  Tiberiade,  c*est  celui  de  la  p^be 

yiiraculeuse  de  rfivaogile.  Sous  les  om- 

joges  des  jeuses  et  des  sycomores  vol- 

^enl  des  oiseaux  au  chant  le  plus  doux, 

R  plumage  le  mieux  peint;  sur  les  pics 

eigeux  du  Libau,  Faigie  place  son  aire 

accessible, et  Ton  voit  parfois  le  vau- 

ur  cruel  poursuivrt*  a  tire-d'aile  des 

rfombes  aussi  blanches  aue  ceile  qui 

oou^a  a  Noe  le  retour  ae  la  s^renit^ 

>te. 

I^VaiSfdirez-vous,  dans  cet  ensemble 

moDieux  n*existe-t-ii  pas  quelques 

ODaoces?ce  tableau  admirable  n'a- 

I  pas  quelaues  de£auts  ?  Nous  som- 

^  oblige  davouer  que  deux  fleaux. 

lliereineotind6pendaiits  de  la  volonte 

jrbomnie,  impossibles  a  pr^voir  et 

fiique  a  eviter,  menacent  sans  cesse 
^yrie.  Ges  deux  fleaux  sout  les  Irem- 
Meinffiis  de  terre  et  les  nuees  de  saute- 
lellfs.  fl  nVst  pas  de  siecle  dont  This- 
Mre  ae  rapporte  plusieurs  tremble* 
Ideots  de  terre  generaux  ou  partiels; 
[Aelques-uns  ont  fait  d*epouvantables 
pw^iges^bouleversant  les  viiles,  englou- 
nuant  les  moissons,  entre-choquant 
Kcollines  pour  les  pulveriser  Tune  par 
litre,  emportant  les  ceps  de  vigne 
line  uoe  poussiere,  arrachant  les  ar- 
i  comme  de  menues  herbes.  De  pa- 

K Res  catastrophes  sont  rares,  et  les 
mhlempnts  de  terre  habituels  sont 
ttot  de  fortes  secousses  que  des  ca- 
lysmes  destrucleurs, 
Quaot  aux  nuees  de  sauterelles,  11  faut 
«i  avoir  ru  pour  se  Ggurerleurs  ravages. 
|Dia£ioez-vous  une  tache  soudaine  sur 
h  ciel  le  plus  pur  :  cette  tache  vous 
|^nne,aucun  nuage  sans  templte  n'ap- 

E'aissaat  jamais  en  Syrie  durant  les 
is  mois  d'ete.  Cette  tache  grandit;  un 
^  litetrange,  froissement  aigu,  diquetis 
(riard,  Taccompagne  :  ce  nVst  eucore 
fM  singulier  et  inquietant.  5Jais  bien- 
|otl*borizon  tout  cntiers'obscurcit,  un 
^e  plus  compacte,  plus  sombre  que 
toutesles  va))eursconclens^es,  vous  jette 
Ims  les  t^ebres,  dont  un  fracas  perp^- 
Mi  plus  terrible  que  les  eclats  du  ton* 
■Krre,  parce  qu'il  est  plus  continu ,  aug- 
i&eote  encore  Phorreur.  Le  nuage  s'a- 
^sse  progressiveoient,  et  Unit  par  cou* 


vrir  les  j^iaines  et  lea  coliines  d'une 
couche  gnsAtre  quigrouilleet  bruit  tout 
a  la  foU.  Les  animaui  fuient  ^pouvaa« 
t^ ,  les  ari>re8  craquent « la  terre  g^mit. 
L'on  entend  un  bourdonnement  si  ge- 
nial que  le  sol  tout  entier  sembW  avoir 
une  voix  ou  plutot  des  milliards  de  voii, 
assez  semblables  aux  sobs  precipit^s 
d'uue  immense  ebullition. 

Heureusement  le  bleu  du  oiel  a  re* 
paru,  et  Ton  voit  arriver  de  toutes 
parts,  avecla  plusmerveiUeasec^ierite, 
des  troupes  de  cigognes  et  d^innom- 
brables  baudes  de  samarmars,  oiseaux 
plus  petits  que  la  cigogne,  et  qui  se 
rapproohent  assez  de  notre  loriot.  Le 
sent  remede  contre  le  mal  qui  vous  est 
tombe  du  ciel,  vous  est  aussi  envoys 
par  lui.  Le  combat  commenee  ou  plus 
tdt  le  carnage  :  la  cigogne  au  long  bee 
to'asea  la.foi8et  broie  une  douzaine 
de  sauterelles;  le  sainarmart  plus  pres- 
to, arrive  presque  dans  le  mi^me  temps 
k  la  m^me  destruction.  Ces  animaux , 
une  fois  repus,  n'en  continuent  pas 
moins  leur  oeuvre;  mais  i Is  ont  beau 
faire,  la  couche  des  sauterelles  est  telle- 
ment  epaisse  qu'ils  peuvent  a  peine 
Tentamer  et  Teclaircir.  Cependant  le 
nuage,  qui  s'etait  abaisa^,  se  releve, 
Tobscurite  recommence  ainsi  que  le 
bruit  strident  et  continu  ;  puis,  quaod 
Fhorizon  est  a  la  fin  debarrasse  deces 
nuees  vivantes,  c^uand  le  jour  a  reparu, 
rien  n'est  plus  desolant  que  Taspect  du 
canton  ravage  :  la  terre,  eotierement 
anudee ,  ne  pr^sente  plus  a  Toeil  le  plus 
clairvoyant  le  moinare  brin  d'herbe; 
les  arbres  se  montreiit  eompletement 
d^pouilles  de  feuilles  et  mSme  dVcorce; 
le  grain  des  epis  a  ete  devord  aiissi  bieii 
que  la  paille ,  le  fruit  aussi  bieo  f^e  la 
fleur  :  c*est  le  spectacle  de  Thiver,  qui 
succ^e  lamentablemeQt  au  printemps, 
c*est  une  metamorphose  aussi  rapide 
que  desastreuse. 

Les  Syriens  ont  en  vain  cherche  dif* 
ferents  nmyens  de  detourner  le  cours  de 
ce  fleau  :  quand  une  nuee  de  sauterelles 
apparatt  dans  le  ciel ,  ils  allumeot  de 
grands  feux  de  paille  mouill^e ,  ils  cher- 
chent  h  creuser  de  norabreux  fosses ; 
mais  les  torrents  de  fum^  ne  prevalent 
que  rarement  contre  ces  pluies  d'insec- 
tes ,  et  les  milliers  d'cntre  ces  saute- 
relles qui  s^engioutissent  dans  les  foss^ 


I« 


L»UNIVERS. 


ne  sont  rien ,  tant  les  masses  se  succe- 
dent.  Quant  a  Teau  bouillante,  em- 
ploy^ dans  les  villafies,  elle  ne  sert  tout 
au  plus  qu'a  garantir  le  seuQ  des  mai- 
sons.  Si  ce  fl&u  ^tait  plus  r^p6t^,  rien 
n*y  pourrait  tenir ,  et  la  famine  suivrait 
les  plus  belles  proniesses  de  recolle. 
Voiney  constate  une  double  remarque 
dii  pays ;  c'est  que  les  pluies  de  saute- 
relles  n'ont  lieu  qu*a  la  suite  des  hive rs 
trop  doux ,  et  que  leurs  nuees  vienneiit 
toujours  d*Arabie.  «  A  Taide  de  cette 
«  double  remarque,  ajoute-t-il,  i'on 
«  explique  tres-bien  comment  le  firoid 
«  ayant  m^nag6  les  oeufs  de  ces  insec- 
•  tes ,  ils  se  multiplient  si  subitement, 
«  et  comment  les  herbes  venant  k  s'6- 
«  puiser  dans  les  immenses  plaines  du 
«  desert,  il  en  sort  tout  a  coup  des  1^- 
«  gions  nombreuses.  >  11  n'est  presque 
aucune  partie  de  la  Syrie  qui  ne  soit 
expos6e  a  cette  calamite;  beureux  est  le 

{»ays ,  lorsque  le  vent  du  sud-est  pousse 
es  nuages  de  sauterelles  jusque  dans  la 
Mediterran6e ,  ou  elles  se  noient.  Mais 
la  encore  leur  apparition  est  funeste ; 
car  leurs  inDombrables  cadavres ,  rap- 
port^s  par  la  lame,  empestent  au  lorn 
les  rivages. 

Tels  sont  les  deux  fl^aux  qui  viennent 
de  temps  a  autre  prouver  douloureuse- 
ment  aux  Syriens  que  leur  contr^  n*est 
plus  le  paradis  terrestre.  Qu^nt  a  la 
peste,  nous  croyons  qu'on  Ta  pourrait 
eviter  par  une  bonne  administration , 
par  une  grande  prudence ,  par  une  pro- 
prete  quotidienne  et  obligatoire.  Qu'on 
ne  laissc  plus ,  au  milieu  des  rues  dans 
les  villes ,  et  sur  les  routes  dans  les  cam* 
pagnes ,  les  cadavres  d'animaux  se  pu- 
trefier,  les  ordures  de  toutes  especes 
8*amoneeler,  lesd^tritus  de  plantes  pour- 
rir  au  soleil;  qu*on  impose  certaine 
quarantaine  aux  voyageurs  que  les  cara- 
vanes  abandonnent  sur  leur  chemin; 
et  la  peste  disparattra  a  son  tour,  comma 
a  d^ja  disparu  la  lepre,  cette  atroce  ma- 
ladie  du  moyen  dge. 

En  r^um^,  la  Syrie,  longue  langue 
de  terre  entre  la  mer  et  le  d^ert ,  toute 
bossu^e  de  montagnes  du  nord  au  midi, 
comprend  trois  r^ions  diverses  de  sol 
et  de  temp6rature ,  et  ou  sont  r^unis , 
en  moins  de  six  mille  lieues  carrees,  les 
produits  des  zones  les  plus  ^loign^s  les 
unes  des  autres.  La  c6te  forme  une  con- 


tra ^tendue ,  baste ,  ctroite ,  dont  lA- 
mospbere  est  toujours  chaade  tiooo 
toujours  saine,  dont  les  terrains  huim- 
des  sont  propices  a  toute  esp^e  de  coi- 
tnre,  ou  la  vegetation  attaint  en  certain 
endroits  une  vigueur  tropicale.  La  moih 
tagne  rassemble  dans  son  sein  tous  leg 
avantages  des  pays  temp6res :  lalabriti 
de  Tair,  abondance  de  fruits,  arhrti 
nombreux  sur  ses  mamelons,  herta^ 
^paisses  dans  ses  vallto.  La  plaine,siir 
le  revers  oriental  de  F Anti-Doan ,  ausd 
bien  aue  d*Alep  a  Damas,  jouit  d'uae: 
f^condite  qui  lui  permet  de  mdm^ 
sans  repos,  sans  jamais  tomberdui' 
cet  engourdissement  plus  ou  moins pn*' 
long^  des  r^ions  mitovennes;  lesi^^ 
coltes  peuvent  s'y  suoc^er  presque  sans 
intervalles;  apr&  le  grain  Tieaneotia 
legumes,  apres  les  legumes  de  QOUTesox 
grains ,  et  tous  ces  produits  sontd'oai 
qualitequ'il  ne  d^pendrait  que  du  in- 
Tail  de  rendre  sup^rieure.  LaSyrie,eoiii 
mot,  c*esta  la  fois  la  Provence,  Ttcom 
et  la  Sicile,  a  dix  lieues  de  distaner.£t 
maintenant  que  de  pareils  cbamfvns- 
tent  en  f riche ,  que  des  terrcs  si  foon- 
des  ne  rapportentqued^inutilesroseam, 
que  des  plantations  de  bois  bien  dbtri- 
buees  ne  viennent  pas  assaioir  I'air  et 
former  des  pluies  bienfaisantes,  que  les 
eaux  dirig^s  avec  pr^voyanee  oe  doo^ 
blent  point  encore  une  fertility  d^at 
grande,  estce  la  faute  de  Dieu  ooli 
laute  de  Thomme?  Aussi,  k  cbaquep0 
qu'on  y  fait ,  la  Syrie  pr^entet-elleei 
regard  la  magnincence  de  la  nature ^ 
la  mis^re  humaine.  j 

DIVISIONS   ACTUBIXES   DB  LA  STIIL 

PachaUk  d'JUp, 

Depuis  la  conqu^te  des  Ottonaof 
( 1507),  la  Syrie  a  conserve  lesdiviaoBi 
que  lui  avait  impos^es  son  dernier  ?aiih 
queur,  Sdlim  V\  Separ6e  en  quatre  pi- 
cbaliks ,  tout  son  territoire  sc  trourt 
compris  dans  ces  limites  politiques,  ie 

(>ays  de  Jerusalem  excepte.  Ces  pacha- 
iks  sont  divers  d'^tenoue  et  d^impor: 
tance :  ceux  de  Tripoli  et  d'Acre ,  q« 
bordent  la  mer,  nW  gucre  cbacus 
qu*une  quarantaine  de  lieues  delongjff 
une  douzainede  large,  tandis que  cdoi 
d*Alep  compte  au  moins  cent  qual^^ 
vingts  lieues  de  tour,  el  cclui  de  Ds^wi 


-■^-.3^ 


.-i   >J^" 


SYRIE   MODEI^NE. 


17 


oAt  lieties  de  long  et,  en  quelques  en- 
droits,  ceot  lieues  de  large ;  il  est  vrai 

roe  dernier  contient,  k  parti  r  du  sud 
fancienne  Palmyre,  le  Barrai-AI- 
Cbam,  le  d^rt  de  la  Gaacbe.  Commen* 
fODs  notre  excinrsion  au  nord ,  et  en- 
troDsen  Sjriepar  la  route  de  Constan- 
tinople ,  par  les  goi^es  du  Taurus. 

JjC  pacnalik  d*Alepa  pour  bornes,  a 
jfouest,  le  ^olfed*Alexandrette,  puis  la 
I'V^iterranee  jusqu*a  six  lieues  au-des* 
iioas  de  Souaidien  (S^leucie);  a  Test, 
^fEophrate  depuis  Bir  jusqu'a  Kelat-* 
^])jabar;  au  nord,  if  fait  UDe  pointe  vers 
He  Taurus,  coroprend  Aintab,  pousse  jus* 
•fB'aux  environs  de  Bazardjik ,  et  redes- 
.aoid  jusqu'a  Merkes ;  au  sud ,  il  entre 
ijtes  le  desert  jusqu*aux  monts  Usche- 
^too,  remonte  jusqu*a  Marrah,  passe 
'fOronte  a  Djesr-Chughr,  et  de  la  va  en 
iroite  ligne  a  la  wer. 

Cette  vaste  province,  dont  les  d^- 
manatioos  vers  lemidi  surtout  sont  pu- 
rameDt  de  convention,  et  ont  vari^  plu* 
mirsfojs,  fut  jadis  toute  remplie  de  ci- 
tdvetdetiilages,  fut  neuplee  de  plusieurs 
niilioos  d'habitants.  La  seule  viIied*An- 
tioche,  Tanelenne  capitale  de  toute  la 
%f ie  du  temps  des  Grecs,  contenait  en- 
lore,  un  siecle  avant  la  domination  des 
Tares,  pres  de  trois  cent  mille  habi- 
lasts;  etSeleucie,  Tun  des  havres  les 
|dus  considerables  de  S^leucus-Nicanor, 
irojrait  autrefois  mille  vaisseaux  dans 
iOQ  port  et  cent  mille  marins  et  com- 
merqants  dans  son  enceinte.  Antioche 
(Antakich)  estaujourd'huiunbourgqui 
n'a  pas  qtfinze  cents  habitants ;  Seleu* 
cie  (Sooeidieh).n'est  qu'une  plage  ou 
iioe  dizaine  de  bateaux  p^cheurs  tout 
iD  plus  fiennent  s'abriter.  La  vall6e  de 
fOronte,  qui,  h  T^poque  des  S^leucides, 
Mrrissait  cinq  cents  Elephants ,  dix 
Wile  cbevaux  et  des  troupeaux  innom- 
liables,  dont  les  villages  seregardaient, 
inn  mille  de  distance,  sur  une  6tendue 
is  vitigt  lieues,  nVst  plus,  a  Theure 
W£\\  est,  que  tacbet^e  a  de  lointaiiis 
fttervalles  par  les  tentes  noires  des  Be- 

uios  et  les  tentes  blanches  des  Tur- 
.  Encore  ces  reunions  d'hommes 

u-elles  essentieltement  provisoires, 
[ftr  dans  les  camps  de  ces  tribus  noma- 
|ia,  lesquels  forment  invariablement  le 
slDod,  les  moutons  restent  parques,  les 
Ichevaux  selles ,  les  chameaux  charges, 

2*  IdvraUon.  (Syrie  hodebnb.) 


et  les  chiens,  seules  sentinelles,semblent 
toujours  pr<§t8  h  donner  Talarme  par 
leurs  glapissements,  ou  par  leurs  aboie- 
ments  le  signal  du  depart. 

Quelle  desolation  s^tend  ou  r^gnait  la 
prosperite !  Et  pourtant  le  sol  presque 
entier  de  ceitte  province  est  d'une  fecon- 
dit6  proverbiale  :  gras  et  argileux ,  1^ 
ou  la  main  de  rhomme  ne  Va  pas  seme, 
il  produit  une  herbe  ^paisse  et  vivace, 
qui  snrgit  de  toutes  parts  aux  premie- 
res pluies  de  Tautomne;  la  ou  la  charrue 
a  trace  les  moindres  sillons,  les  bles 
sont  aussi  drus  que  dans  notre  Beauce, 
et  les  cotonniers  presque  partout  mon- 
trent  une  fertility  extraordinaire.  Mai* 
gre  cette  abondance  de  fruits  dune 
terre  a  peine  travaill^e ,  les  deux  gran- 
des  plaines  d'Alep  etd' Antioche  restent 
aux  trois  quarts  en  fricbe.  Lesnombreux 
canaux  d'irrigation  etde  transport  sont 
combles  ou  dess^ch^;  les  voies  qui  tra- 
versaient  la  campaene  en  tons  sens  ne 
laissent  plus  c^  et  1^  que  des  vestiges; 
les  ponts  ne  mon trent  plus  que  quelques 
arches  croulantes ;  ce  ne  sont  partout 
que  ruines  de  chateaux  gothiques  ,  de 
cirques  romains,de  basil  iquesgreeq  ties, 
de  colonnes  de  temples  et  de  clochers 
d'6gllses. 

Une  seule  ville  est  rest^e  debout  de 
toutes  ces  magnificences,  la  B^rhoe  des. 
Grecs,  I'Halab  des  Arabes,  Tenlrepot 
de  TEurope  etdes  Indes,  i'une  des  Stapes 
desgrandescaravanes.Merveilleusement 
placee  entre  Erzeroum  et  Bagdad ,  en- 
tre Alexandrie  et  Tr^bisonde,  Alep  voit 
8*arr^ter  dans  ses  murs  les  ricnesses 
de  toute  FAsie,  depuis  les  noix  de  galle  du 
Kurdistan  jusqu'aux  cachemires  des  In- 
des,  depuis  les  polls  de  chevre  de  TA- 
natolie  jusau'aux  aciers  de  Damas ,  de- 
puis les  cates  de  Moka  jusqu'aux  tapis 
de  Brousse.  Situ^e  dans  une  plaine  on- 
duleuse,  aux  coteaux  fertiles  et  aux  ver- 
gers converts  de  pistachiers,  Alep  pos- 
sede  dans  son  sein  une  petite  riviere  d>au 
douce  qui  ne  tarit  jamais,  avantage  inap- 
preciable en  Orient.  Ses  domes  elegants, 
ses  minarets  eleves,  les  hauts  c^'pr^s 
de  ses  cimetieres  tranchent  de  lorn  de 
la  fa^on  la  plus  pittoresque  sur  la  terre 
rougedtre  de  la  plaine,  et  sur  la  verdure 
aux  mille  teintesdesooUines.  Gontraire- 
ment  5  ce  qui  arrive  d*ordinaire  en  Tur- 
quie,  on  n'eprouve  aucun  d^sencban- 

2 


18 


fUNIVERS. 


tement  en  p^^trant  dans  Alep :  la  ville 
est  bien  batie,  ses  rues  soot  propres  et 
assez  laraes,  ses  places  sont  vastes  et 
plant^es  d'orbres ;  deux  cents  fontaines 
y  r^pandent  des  eaux  eiaires  et  mormu- 
rantes ;  et  le  chateau  en  mine,  qui,  du 
baut  d'une  montagne,  au  centre  d'un 
faubourg  ,  domine  les  pignons  des  mat- 
sons  et  les  fleches  de  cent  mosquees, 
produit  Teffet  le  plus  original  et  le  plus 
earact^ristique :  veritable  clt6  orientale, 
toute  pleine  d*arbres  verts  et  de  blancs 
minarets,  encombr^  de  ddmes  et  de 
kiosques,  arec  des  cigognas  sur  ses  terras- 
ses,  des  pigeons  dans  ses  carrefours,  des 
hirondelles  partout,  avec  de  tongues 
caravanes  de  diameaux  sur  ses  routes, 
de  nombreuses  cavalcades  sur  ses  pro- 
menades, et  ses  100,000  habitants  au 
costume  bariol^ ,  ies  uns  brod^s  d*or , 
les  autres  ^clatants  de  couleurs. 

D*Alep  a  la  mer  on  rencontre  d*a bond 
des  champs  incultes  jusqu*^  Andjara , 
petit  village  sans  importance  et  sans 
caract^re.  Puisapr^  cesquelques  huttes 
informes  de  pauvres  laboureurs  maho- 
m^tans,  le  paysdevient  montueux,  les 
oollines  se  rapprochent  et  s^unissent; 
plus  loin  elles  s^eartent  et  courent  au 
sud-est  pour  laisser  passage  a  de  vertes 
prairies  que  parcourent  dans  tous  les 
sens  les  Turkomans  avec  leurs  troupeaux 
de  muutons ,  de  ch^vres  et  de  chamelles. 
Au  dela  de  oes  prairies  dans  lesquelles 
rOroiite ,  formant  deux  bras ,  entretient 
une  frafcheur  perpetuelle,  commence 
une  plaine,  maintenant  en  friche,  qui 
aboutitau  midi  ^des  montagnes,  oilkles 
mOriers  en  quinconces,  les  figuiers  en 
Stages ,  les  vignes  en  espaliers,  ^ayent 
le  paysage  en  offrant  de  toutes  parts 
le  doux  spectacle  de  la  prosperite.  La 
route  sur  laquelle  nous  marchons  est  une 
voie  romaine  que  le  temps  et  les  inusul- 
maiis,  bien  plus  destructeurs encore,  ont 
^pargnee.  Cette  route  se  termine  par  une 
accumulation  de  chaumes  miserables, 
avec  des  fumiers  devai itchaque  porte,  des 
trou^s  caverneuses  au  lieu  de  rues ,  des 
mares  infectes  au  lieu  de  places  ^  un  pont 
ruin^  a  Tune  des  extr^mites ,  une  forte* 
resse  aux  pierres  mena9antes  a  Tautre  : 
c*est  Antaki^h. 

Maintenant  regardez  au-dessus  de  vo- 
tre  tdte  ces  hautes  murailles  qui  mon- 
tent  avec  tant  de  hardiesse  sur  lacolline; 


B  quittonsee  spectacle  amipl 
lence ,  c  est  pour  en  retnnC 
I  plus  aflligeant  encore  a  qn^i 
es  de  la ,  sur  iesbordsdetaflffi 


suivez-lessur  ee  plateau  jusqu^aeesdov 
tours  colossales  que  ne  hantent  deM^i 
mais  que  le  fsuve  vautour  et  le  aoiri^ 
bou ;  redesoendezdans  un  valioo 
monter  deux  fois  encore  deux 
elev^s ;  remarcfues  ees  quatre  gran 
ouvertures,  qui  fureotdes  portesoM 
men  tales,  ees  innombrablet  essiies 
form^reot  trois  cent  sotxante  tourd 
decombat;  admirez  cesnombre  uxfdM 
eolonnes  qui  entouraietit  jadis  unpd 
imperial ,  oes  marbresdissdmioesqaii 
naient  une  ^glise  patriarcale ;  etffl 
Tous  aures  fait  trois  lieues  en  suiraH 
earr^  long  des  murailles,  vous  , 
vous  imaginer  ce  que  c'^tait  que  n 
eienne  Antioche  et  oe ju'elle  estderoi 
Notre  recit  dira  par  quelle  suite  (ie 
mit6s,  desi6ges,  de  sacs  et  d'ineni 
Torgueilleuse  capitate  de  SeleucmJ 
canor  s'est  transform^  en  une 
bourgade  turque. 

Si  nous  quittonsee  spectacle 
de  decadence 
un  autre 

ques  lieues , 

Cette  douzaine  de  caf As  (bateau )i" 
cfaes  sur  le  sable  aupreb  de  ees  m 
^croul^  et  en  dec^  ae  ces  deux  jete^ 
dont  il  reste  k  peine  quelques  traoai 
remplacent  lesmillegaleresqultenaieri 
raise,  dans  un  port  creus^  a  Mi 
d*hommes,  et  artistejnent  protege  «tf 
tre  la  fureurdes  flots  par  une  doubted 
ceinte  de  pierres.  Gee  quelques  masmi 
accoud^es  a  de  larges  pansde  murs4)f| 
des  debris  de  pilastres,  c'est  la  eetteit' 
leucie  naguere  si  opulente ,  si  miMA' 
ble  aujourd'hui.  .    j 

En  remontant  vers  le  nord  l«  rifli 
tortueux  qui  forme  le  Raz-el-KanBr(l 
cap  du  SangMer ),  on  trouve  le  baaMil 
de  Rhosos,  ainsi  appel^  sansdoute|«i 

3u*il  fut  bdti  au  pied  des  moDUgil 
u  Rhosus,  qui  longentlegolfedeSkM 
derounjusqu  aux  environs  dePayo8(iil 
eienne  Issus).  Puis  s'apereoit  a  ga 
le  village  deBailan,  qui,  lui,  aempi 
son  nom  aux  autres  montagnes  qui  «■ 
retrouver  leTaurus.  Entre  ces  deux  «■ 
nes  de  monts  escarp^  s'ttend  one  ilj 
l^e  fort  accident^  que  les  Kurdes  WJ 
tent  seuls ,  et  dont  its  parteot  P^^"*] 
attaquer  les  daravanes  qui  se  d\rm\ 
d*Alep  a  Marash.  Plus  on  p6nclre  o»* 


SYRIE  MODERNE. 


1!) 


one  natiirerude ,  aux  inontagoes  pelees , 
aux  campagoes  incultes ,  aux  cotes  oO 
rougit  la  temple.  EnOo,  on  parvient  k 
la  rade  de  Skanderoun  ( Alexandrette ), 
assez  bien  garantie  contre  la  vague  du 
large,  dontl«  fond  de  sable  est  appr6ci6 
par  l6s  marins,  mais  qui  est  dangereuse 
en  hiver  a  cause  des  trombes  qui  tom- 
bentdu  pic  neigeux  des  noonlagnes,  et 
en  et^  a  cause  des  miasmes  fievreux  qui 
s'echappent  des  marais  du  voisinage. 

Malgre  son  asse^  bonne  situation,  la 
petite  ville  d'Alexandrette  n*a  done  ja- 
mais pu  fleurir,  et  quoiqu'elle  semble  le 
port  le  plus  conimo'le  pour  Alep,  le 
cominerce  pr^fere  habituellement  entre- 
prendre  un  plus  co<lteux  voyage,  fairs 
mn  long  detour ,  et  porter  ses  marchan- 
dises,  destinies  a  la  vole  maritime,  a 
Latakieh,  ou  a  Tripoli.  Aussi  Skande- 
roun, blitie  sur  une  plaine  d'aliuvions, 
eotour^e  d*eaux  croupissantes,  v^ete- 
t-eiie  de  plus  en  plus,  et  voit-elle  tons  les 
jours  diminuer  sa  population  au  visage 
bdve,  a«i  teint  jaune,  aux  veux  ternes, 
et  a  Talidomen  gonll^.  Si  les  habitants 
d*Alexandretteressemblent  a  des  ombres 
languissantes  ^  ceux  de  BaTlan ,  au  con- 
traire,  ont  Tasfyect  de  la  sante  ia  plus 
brillaote.  Leur  village,  du  reste,  est  plac^ 
coinme  par  enchantement  h  mi-c6ic 
d'un  manielon  pittoresque,  tout  en- 
toure  de  precipices  ombreux  et  de  ro- 
chers  couverts  de  fougeres,  d*ou  tom- 
bent  plusieurs  cascades,  dont  le  bruit 
plait  tant  aux  Onentaux.  La  salubrity 
et  la  fralcheur  de  Tair  foot  de  cejoli 
endroit  une  retraite  charmante  a  par- 
tir  de  mars.  Malheureusement  il  devient 
iaquietant  d*y  sejourner  en  Janvier  Pt 
fevrier,  tant  les  eaux  se  pr^cipitent  avec 
fiireur  de  tons  les  sommets,  k  travers 
toutes  les  pentes,  emportant  quelquefois 
lesmaisons  a  vec  leu  rs  vergers,  et  les  rou- 
Unt  p^le-m^le  dans  d'insondables  abf- 
QU'S.  Les  habitants  de  ce  village ,  vivant 
du  produit  que  leur  donnent  le  lait  de 
leors  chevres  et  les  legumes  de  leurspota- 
gers,  sont  en  general ,  et  coinme  presque 
tous  les  agrirulteurs  turcs,  simples  et 
bons,  et  font  un  contrasle  frappanl  avec 
lecaractcre  farouche  et  les  moeurs  depre- 
datrices  des  Kurdes ,  qui  les  entourent. 

Au  nord-est  de  Skanderoun  le  pays, 
de  plus  en  plus  sauvage ,  n'est  travers^ 
qu'a  ia  hdte,  et  sous  bonne  garde,  par 


les  caravanes  qui  n*y  sejoument  jamais. 
Les  pdturages  qu'on  y  trouvc  sont 
entierement  abandonn^s  aux  Turko- 
mans; et  lesrochers  servent  de  repai- 
res  aux  Kurdes,  ces  incorrigibles  voleurs 
de  grands  chemins.  II  faut  remonter 
jusqu'a  ATntab  pour  retrouver  quelques 
Turcs,  quelques  chr^tiens  armeniens, 
un  aga,  un  bazar,  et  des  karavan-s^rals, 
c*est-a-dire  un  protecteur  tel  quel,  un 
march^  et  des  auberges. 

Pour  touriier  autour  du  padialik  que* 
nous  d^crivons,  il  est  n^cessaire  main- 
tenantdegagnerPEuphrate,  et  dedes- 
cendre  jusqu*a  K^lat-Djabar,  a  Test 
d'Alep.  Ce  vaste  pays,  coui>6  encore  par 
une  ligne  de  montagnes,  presente  k  peu 
pres  le  m^me  aspect  que  la  j^laine  d'An- 
tioche,  quant  a  rabandon  ou  on  le  la'sse 
sur  presque  tous  les  points.  Cependant 
les  tribus  nomades  qui  y  amenent  leurs 
troupeaux,  quoinue  venant  pour  la  plu- 
part  de  Van  et  d'Ormiah,  c*eht-a-dire 
appartenant  a  la  race  des  Kurdes,  sont 
moins  voleurs  et  moins  intraitabies  que 
leurs  fr^resdes  montagnes  de  BaTlan. 
Di  vises  en  families  puissantes.  tellos  que 
eel  les  des  Moucabeylis,  des  Kiziks  et 
des  Bezikis,  ces  Kurdes  maintiennent 
entre  eux  une  certjine  police,  et  payent 
assez  r^gulierement  a  la  Sublime  Porte 
des  droits  de  douane  et  de  pacage,  en  te- 
nant vendre  leurs  brebis  ou  leurs  cha- 
meaux  Jusque  dans  Tinterieur  des  vi:les 
de  Syne.  A  deux  journ<^es  au  sud-est 
d*Aint<ib,  sur  la  rive  occidenialede  TEu- 
phrate,  se  rencontre  un  village,  appel^ 
Yaraboulos,  fameux,  dit-on,  parce  qu'il 
est  bdti  sur  Templacement  de  Tantique 
Hierapolis.  Pourtant,  malgr^  cette  re- 
nommee,  que  semble  justifier  d*ailleurs 
la  resseniblancedu  nom  moderne  avec  le 
nom  ancien,  aucun  vestige  certain, 
aucun  reste  remarquable  n*ont  6te  cons- 
tates par  les  voyageurs.  Volney  m6me 
pretend  que  c'est  a  iVIambedj,  a  six  lieues 
au  sud  de  Yaraboulos,  qu'il  faut  cher- 
cher  les  ruines  de  Hierapolis.  II  ne  se 
voit  cependant  dans  cettederni^re  bpur- 
gade  rien  autre  chose  qu'un  de  ces  ca- 
naux  souterrains  tels  qu'il  en  abonde, 
du  reste,  dans  toute  Tetendue  du  pacha- 
lik  d*Alep ,  et  qui  prouveut  que  les  M^- 
des  et  les  Perses,  avant  les  Grecs  et  les 
Romains,  avaient  reconnu  la  n^cessit^ 
de  faire  courir  les  eaux  tout  k  travers 

2. 


20 


LTNIVER^;. 


un  sol  natureliement  fertile  et  doDt  on 
multipliait  ainsi  la  valeur. 

It  ne  serait  pas  juste,  par  Pexemple  de 
cet  abandon  partiel  d'un  ouvrage  si  utile, 
d'accuser  legouvernement  de  la  Sublime 
Forte  d'une  insouciance  et  d*une  impr6- 
voyance  coupables  relati  vement  a  Tentre- 
tien  descanaux  :  on  connatt,  d^une  part, 
les  prescriptions  du  Koran  qui  ont  trait 
h  Temploi  frequent  de  Teau  pour  les  ab- 
lutions religieuses,  et  qui  par  consequent 
•excitent  a  en  6tendre  et  a  en  coirterver 
le  bienfait ;  et,  d'autre  part,  Tetude  des 
moeurs  ottomanes  nous  a  appris  quels 
soins  on  prenait  a  Constantinople,  a  An- 
drinopleet  iiBrousse,  en  Thrace  comme 
en  Bithynie,  des  cours  d'eau  de  toutes 
sortes,  sources,  citernes,  chutes,  ^tangs 
et  rivieres,  et  comment  certaines  corpo- 
rations sont  devenues  tres-habiies  dans 
Fart  de  la  canalisation.  Mais  la  Syrie 
est  trop  loin  du  centre  gouvememental, 
]e  systeme  de  fermage  des  pachas  ne 
pent  y  £tre  assez  effieacement  inspects ; 
eile  est  pauvre,  d'ailleurs,  et  ne  pourrait 
point  subvenir  elle-m^me  aux  depenses 
considerables  que  n^cessite  la  repara- 
tion de  ses  canaux.  Le  pachalik  d  Alep 
en  particulier  est  en  pleme  dtodence  : 
les  tribus  nomades  le  peuplent  k  peine; 
quelques  Turcs  et  quelques  Chretiens 
en  sont  les  seuls  cultivateurs,  et  de  jour 
en  jour  les  populations  agricoles  tendent 
a  abandonner  un  pays  ou  la  propriety 
manque  de  s^aranties  et  la  recolte  de 
silrete.  Voila  la  raison  de  la  deplorable  ab- 
senced'eau,  durant  les  chaleursde  juillet 
etd'aodt,  dansune  contr^e  toute  sillon- 
n^e  pourtant  de  mines  de  citernes  et  de 
conduits  souterrains ,  dans  une  contr^e 
oil  naguere  TOronte  etait  joint  k  TEu- 
phrate,  ou  plusieurs  petites  rivieres,  in- 
g^nieusement  dingoes,  fournissaient  des 
tributs  a  un  grand  nombre  de  canaux  de 
communication  e t  h  des  milliers  de  re- 
servoirs d'irrigalion. 

Plus  que  toute  autre  partie  de  la  Sy- 
rie peutetre  ,  le  pachalik  dWlep  pre- 
sente  done  le  spectacle  continue!  de  la 
magnificence  de  la  nature  et  de  la  mi- 
sere  humaine;  et  si  nous  voulons  le 
parcourir  jusqu'au  bout,  nous  ne  trou- 
yerons  k  chaque  pas  que  des  preuves 
nouvelles  et  repetees  de  ce  que  nous 
avons  etabli  comme  conclusion  de  notre 
description  geologique.   De  Mambedj 


aux  limites'meridionates  do  paysd'Alep, 
ce  ne  sont  dejii  plus  que  des  |MiS 
immenses,  fai^ns  de  steppes,  T( 
tes  il  est  vrai ,  mais  deja  assez 
bles  au  desert ,  et  qui  ne  sont  i 
tees  que  par  une  suite  de  room 
portant  k  ieur  sommet  des  di 
ecrouiees.  Les  villages  y  sontde 
plus  eioignes;  les  camps  des  tri 
8*y  pressent  qu*aux  approcbesdeli 
pitale  de  la  province.  La ,  les  nprk 
tants  de  tons  les  peuples  nomidetj 
FAsie  semblent  s'etre  donne  nr 
Yous :  outre  des  Turkomans  etdes 
des ,  se  rencontrent  des  Bedooioi;] 
parmi  ces  peuplades  que  de  nua 
narmi  ces  tribus  que  de  families! 
les  Richanlis  du  Diarbekir,  doat 
grand  nombre  se  disperse  depois  ^ 
rdh   sur  le  Tigre,  jusqu'a  As 
sur  rOronte ,  cent  vingt  lleues  de 
cours;  voici  les  Barakhs,  orlgir 
du  Kurdistan ,  qui  s'en  voot  n 
dant  sans  cesse ,  sur  plus  de  dix 
lieues  carrees ;  voici  des  Arabes  1 
teOk,  qui  remontent  le  lonffdefS* 
phrate  depuis  Bassora  iusou  i  tm 
trente  journees  de  soleii ,  de  pou^ 
et  de  solitude ;  voici  les  Arabes  Br*^ 
qui  amenent  des  frontieres  de  TAi 
leurs  chevaux  si  precieux  de  la  01 
Kchel. 

La  plupart  de  ces  emigrants  n^ 
d'autres  occupations  que  de  paitre  k 
troupeaux ,  et  de  les  presenter  am  Ij 
zars  d*Alep.  Mais,  s'ils  enrichissoitl 
marche  de  cette  ville,  s'ils  yoflM 
bas  prix  de  superbes  moutons,  i 
chameaux  de  mille  esp^ces,  def*i 
grand  chameau  noir  de  TAsie  Minjj 
jusqu^au  maigre  dromadaire  blancdel 
Nubie ,  et  surtout  des  chevaux  adaj 
bles,  supportant  les  fatigues  et  les  0 
tions  de  toutes  sortes,  ardents  etM 
les,  rapides  et  patients  k  la  fois;(ai 
vanche  ils  devastent  les  contrees  p«J' 
ils  passent ,  s'approprient  les  nwis« 
quand  ils  en  trouvent,  ioquietait 
populations  sedentaires ,  et  repr«* 
parfois  aux  cara vanes ,  dans  les  gojf 
des  montagnes ,  ce  qu'ils  Ieur  oot 
du  sur  les  places  de  la  ville.  ^      ^^ 

Pour  en  finir  avec  le  pays  d'AlepjJ 
n*avons  plus  qu'amentionnerlcssjni 
de  DjebonI,  enfermees  dans  un  ceroe^ 
collines  elevees,  et  dont  ie  rapport  vj 


SYRIE  MODERNE. 


21 


pour  la  Porte,  dans  cette  province,  le 
jjroduit  tout  entier  du  Karatch  (capita- 
tioD).  En  somme,  que  contient  ce  pa- 
dKilik^  le  second  pourl^tenduede  toute 
b  Sjrrie,  le  dernier  pour  le  nombre  des 
habitants?  Des  terras  excellentes,  mais 

Si  restent  en  friche  faute  de  bras  pour 
cultiver;  de  luxuriantes  prairies, 
jinais  que  les  campements  desordonn^ 
iKles  tribus  nomades  ravagent  a  tout  ins- 
tant; d^  champs  au  sol  gras  et  fecond , 
pais  qui  ne  produisent,  dans  leur  aban- 
P9U,  que  de  hautes  herbes  inutiles; 
Itaelques  montagnes  productives  au  sud 
VAotioche,  et  quelques  beaux  vergers 
Mtonr  d'Alep.  Si  ce  pachalik  possede 
ibie  richecapitale,  il  ne  renferme  dans 
flout  son  territoire  aucane  ville  iuterme- 
ftnn,  aucun  port  frequent^;  ce  ne 
^^OQtpartoutqueruines  d  antiques  cites, 
^  vestiges  d'une  civilisation  eteinte ; 
€est,eDuo  mot,rimage  la  plus  frappante 
et  la  plus  triste  de  la  barbaric.  Quant 
an  oofflbre  des  habitants  indigenes ,  il 
est  prfsque  impossible  a  determmer :  par 
cxfinpie,  Alep  compte  parmi  ses  cent 
milie^mes,  plusde  la  moiti^  d*etran- 
gers  allant  et  venant  sans  cesse  pour  les 
xffaires  de  teur  negoce  ;  les  campagnes 
Be  voient  que  des  tribus  de  passage , 
et  Yon  peut  a  peine  admettre  que  les 
JxMirgs  et  bameaux  du  territoire  entier 
toientpeuples  de  plus  decent  cinquante 
nillpmalheureux  iaboureurs  ou  pauvres 
pfrheurs  :  partant ,  fort  peu  d*agricul- 
toe,  point  d'industrie,  el  pour  la  seute 
Alcp  un  commerce  de  transit  et  les  avan- 
^^es  d  an  entrep6t  considerable. 

Pachalik  de  tbipoli. 

Le  pachalik  de  Tripoli  ( Taraboulousi- 
^ni)  nous  doit  interesser  a  plus 
J^n  titre :  c'est  h  Tune  de  ses  extremi- 
^leo  effet,  qu^habitent  les  Maronites, 
•ont  la  France  a  ^t6  si  longtemps  la 
protectrice  chateureuse  et  desinteres- 
jfc;  Cette  colonic  catholiquerappelle, 
■ailleurs,  par  sa  charite ,  par  la  simpli* 
^  de  ses  moeurs,  par  sa  naive  indus- 
^e  et  ses  travaux  en  commun,  la 
pwni^  society  chretienne ,  society  de 
freres  anis  et  laborieux ,  ou  Ton  parta- 
g^it  les  peines  de  la  vie  pour  en  sentir 
noins  le  poids,  ou  Ton  partagealt  les 
bicufaits  do  ctei  pour  en  rendre  de  plus 


generates  actions  de  grdces  au  Sei* 
gneur  r  sincere  egalite  devant  Dieu, 
veritable  communion  dont  T^glise  etait 
le  centre  sublime.  Ce  qui  ne  manque 
pas  non  plus  d'un  autre  genre  d'inte- 
r^t,  c'est  cette  nature  admirable,  qui 
resume,  dans  un  cadre  assez  etroit 
pour  ^tre  perceptible  aux  facultes  hu- 
maines ,  toutes  les  majestes  terrestres : 
ces  montagnes  lumineuses  et  diverse- 
meot  colorees  qui ,  d'etage  en  ^tage,  d*e- 
chetons  en  echelons ,  vous  rapprochent 
da^antage  de  rablmeeth^re,-font  cir- 
culer  dans  vos  poumons  un  air  de  plus 
en  plus  vif  et  salutaire ,  ^levent  votre 
dme,  et  servent  a  vous  mieux  pen^trer 
de  la  bonte  et  de  la  grandeur  de  la 
Providence.  C'^tait  un  noble  instinct 
des  populations  antiques  que  d'aller  s*a- 
genouiller  sur  les  hauts  lieux ;  c'est  un 
sentiment  pareil  qui  a  pouss^  ces  reli- 
gieux,  simples  et  honnStes,  a  bdtir 
teurs  convents  sur  des  sommets  acces- 
sibles  quoique  escarpes.  De  la,  en  effet, 
ils  dominent  un  monde  quMls  ont  vo- 
lontairement  quitte,  de  la  ils  veillent 
sur  un  plus  ^rand  nombre  de  leurs 
freres;  et  la  voix  sonore  de  leurs  saintes 
maisons,  r^petee  par  les  echos  des 
monts,  appelle  autour  d*eux  les  fldeles 
h  la  priere. 

Ce  n'estpasque  le  pachalik  de  Tripoli 
ne  soit  habite  que  par  des  Chretiens; 
mais,  avantde  revenir  a  nos  chers  core- 
ligionnaires,  qui  ne  peuplent  que  la 
partie  meridionale  du  pavs,  il  nous 
taut  retourner  vers  le  nord,  a  la  fron- 
tiere  du  pachalik  d*Alep.  Renferme 
entre  les  montagnes  et  la  mer,  borne 
au  nord  par  une  petite  chalne  transver- 
sale  des  monts  Doumandour  qui  va 
se  perdre  dans  la  mer,  le  pachalik  de 
Tripoli  se  termine  a  la  petite  rividre 
d'fel-Kelb  (Fancien  Sydnus).  ^.troit 
d'abord,  et  n'ayant  parendroit  qu'une 
dizaine  de  lieues  de  large ,  il  s'etend  au 
centre  de  son  territoire  jusqu'a  avoir 
plus  de  vingt  lieues  du  port  de  Bcitrouu 
au  versant  occidental  des  monts  Akkar. 
Ce  pays,  presque  partout  montueux, 
ne  presente  que  sur  le  rivage,  de  La- 
takieh  a  Tripoli,  une  longue  plaine 
fertile,  ou  coulent  plusieurs  rivieres  et 
un  grand  nombre  de  ruisseaux  et  de 
torrents. 

Ce    qui   prouve  ici   T incontestable 


It 


L'UIWYERS- 


sup^riorite  de  Pesprit  Chretien  mir 
Tesprit  musulman ,  cVst  que  les  mon- 
tagnes  du  Liban,  malgre  les  difflcul- 
tes  du  sol  el  malgre  leurs  arides  ro- 
chers ,  soot  bien  mteux  cultiv6es  que  la 
e6te  plane  et  feconde  qui  s'allonge  au 
nord  de  Tripoli;  mais  aussi,  dans  le 
Liban,  Tiiidustrie  est  venue  en  aide  a 
la  nature,  et  les  terres  que  Ton  a  sou* 
tenues  par  des  murs  et  des  terrasses, 
sont  toujours  travaillees  avec  activite  et 
intelligence.  Quoi  qu'ii  en  soit  de  Tindo- 
lence  mahometane,  le  canton  de  Lata- 
kieh  n'en  est  pas  nK)ins  tres-productif 
en  orge ,  en  froment,  en  colon ,  et  sur- 
tout  en  labac,  dont  la  quaiite  est  d*un6 
superiorite  telle,  qu*on  le  r^rve,  ea 
partie,  pour  rapprovisionnemenl  du  st- 
rait de  Constantinople.  Du  temps  des 
Grecs,  on  vantait  en  lous  Heux  les  vins 
de  Laodicee  ( Latakieh ) ;  et  auiourd'hui 
encore,  quand  la  recolte  de  Chypre  n'a 
pas  ete  assez  considerable  pour  satis- 
faire  a  toutes  les  deniandes,  on  s'adresse 
aux  coleaux  vinicoles  de  Latakieh. 

Laodicee  ful,  du  reste,  la  troisieme 
viliefohdee  par  SeleucusNicanor;  il  lui 
donna  le  nom  de  sa  mere,  el  la  pla<^  h 
la  base  d'une  pointe  qui  s'avance  assez 
avantdans  la  iner,  sortedejetee  natu* 
felle  qui  garanlissait  le  port  des  lem- 
p^tes  occidentales.  Aussi,  gr^ce  a  un 
in6le  solidement  biti,  une  centaine 
de  galeres  s'abritdient-eiles  a  Taise  le 
long  des  quais  de  la  ville.  Laodicee  a 
eu  des  maitres  de  toute  espece ,  depuis 
Tepoque  ou  les  Grecs  en  avaient  fail 
line  de  leurs  plus  gfacieuses  cites; 
mais  ces  maitres  divers,  loin  de  I'em- 
beilir  et  de  raugmenter,  ont  laisse 
toinber  une  a  une  ses  elegantes  colon- 
nes  eorinthiennes ,  eclatants  fleurons 
de  sa  couronne  murale.  Aujourd'hui 
c'est  bien  pis  encore;  les  sables  de  la 
Mediterran^  enoombrentde  plus  en  plus 
ce  port  si  artisteineut  ereuse ;  le  nidle 
en  mine  est  devenu  un  ecueil,  et  k 
peine  quatre  de  nos  iroU-mdts  osent- 
lis  8*aVentarer  a  la  fois  dans  ce  bassin 
r^tr^ci. 

A  Test  de  Latakieh ,  sur  le  versant 
de  plusieurs  hautes  montagnes,  habitent 
les  Ansariehs,  peuplade  d'idolAtres, 
dont  nous  parlerons  en  detail  a  leur 
premiere  apparition  dans  Thistoire. 
Conteatons-nous  de  dire  ici  qu'assez 


d( 


bons  agriculteurs,  ils  eultiveot  pasu- 
blement  leurs  montagnes;  g^nereux  et 
hospitallers  chez  eux  comme  tous  leg 
Orientaux ,  ils  se  montrent  au  debon 
vindicatifs  et  pillards.  Plus  loin,  ploi 
enfoncds  dans  les  gorges  interieurei, 
rodent  les  Ismaelites,  farouche  el  crueiJt 
engeance.  I>e  voisinage  inquietant  dfcti 
fribus  force  le  mousselim  de  Latakieh 
a  tenir  constammenl  sur  pied  une  pe* 
lite  troupe  de  Barbaresques ,  presqae 
aussi  red  ou  tables  pour  les  populations 
tranquilles  que  les  Ansariehs  et  la 
Ismaelites  eux-m^mes;  c*e^t  ainsi  qua 
Turquie  le  remede  est  quelquefois  piit 
que  le  mal.  Une  chose  elrange  a  r* 
marquer,  du  reste ,  c'est  que  les  gm 
de  la  basse  police  en  Syrie  ap|)artj(s< 
n^nt  presque  tous  a  la  race  africaiae, 
tandis  qu'a  Tunis,  qu'au  lUaroc,  et 
|u*autrefoisen  Alger  on  venait  recroUr 
les  soldats  parmi  les  montagnards  Itf 
plus  feroces  du  Liban ;  tant  11  est  vral 
que ,  si  nul  n'est  propliete  en  son  pa}i, 
Gonuiie  le  dil  saint  Maithieu  Tevaoge- 
lisle ,  nul  non  plus  n'y  peut  ^tre  impo- 
nemenl  lyran. 

En  sui\anl  la  cole,  ou  une  houle  pro* 
nue  continuelle  vient  jeter  son  ecune 
eclatante  et  son  bruit  harmouie(u,(A 
arrive  au  petit  havre  de  Djebileli.  Qud* 
ques  minarets  blancs,  au  sommetdet- 
quels  tranche  la  cigogne  plus  bbocbe 
enrore,  annoncent  de  loin  une  cite; 
quelques  m^ts  eleves  de  voliks,  petits 
bdtiments  a  antennes,  et  a  poupe  liault 
et  f>late ,  indiquent  une  plage  bospita- 
li^re.  Puis  en  rade,  couch6es  sur  li 
lame ,  apparaissent  les  deux  voiles  lafi- 
nes  ou  piutot  les  deux  ailes  dr*  ces  ba- 
teaux pecheurs  si  pittoresques ,  et  q« 
les  Orientaux ,  toujours  peiatres  dans 
leur  langue  ricbe  et  sonore,  appelleol 
kulanguiichs  (hirondelles).  Penetra 
mainteuant  dans  la  ville,  au  deia  dc 
eette  fontaine  Elegante,  et  qui  porte 
en  lettres  d'or  sur  sa  facade  gradeo- 
semen t  sculpt^e  la  phrase  facramei- 
telle  qui  commence  le  Koran  :  Bum 
iUahU-rahman  (U-rahim,  au  now  d« 
Dieu,  le  clement,  le  misericordieux 
( par  excellence) ;  suivez  cette  rue  loo- 
gue  et  elroite  qui  mcne  au  port;  reganw 
ces  hommes  gravement  aiwircs*  Q***  ? 
saluent  en  posanc  leur  main  droite  aK 
ternativement  sur  leur  froutet  sur  toff 


SfRLE    AN  CIEKNE 


^rrui^v   JtDvt 


y^7yt:*fn/'rf/ft*i'-     tt '  ^J^.t/'>/f-ff'^     i^ToTWSf.) 


SYRIE  MODERNE. 


13 


emst ;  MS  hamaU  ( portefaii ) ,  charges 
d*uoe  loarde  balle  de  eoton ,  qui  a  van- 
cent  d'un  pas  compte  et  majestueux ; 
oes  jardiniers,  les  jantbes  croisees  et  le 
HUfWck  (pipe)  aux  kevres,  a  eote  de 
kur  pile  de  concombres  et  de  pasteque s; 
068  (actioonaires ,  aux  jambes  nues ,  au 
jwptaloD  blane,  a  ia  veste  rouge,  a  la 
eeinture  garnie  de  pistolets  et  de  kand' 
jart  ( poignards  ) ,  qui  montent  la 
prde  accroupis,  la  pipe  d'une  niain^ 
leur  loDgue  carabine  aans  Tautre;  r^ 
marauez  surtout  ce  sobre  echange  de 

E rotes,  ees  rapports  en  signes  iorsque 
i  mots  sont  inutiles ;  et  a  eette  trao* 
<piilliteiualterable ,  a  ce  silence  presque 
reiiuieux ,  a  cette  absence  de  femroes  et 
d'enfants,  c'est-a-dire  d'oeil  curieux  el 
de  ym  criarde ,  vous  reconnaltrez  une 
viile  cntierement  turque. 

Au  dela  dfs  deux  grosses  bourgadeS 
de  Beinias  et  de  Markab,  apres  avoir 
tramse  pliisieurs  rivieres  torreotueu- 
ses,  ft  apres  avoir  lon^^  du  nord  au 
sod  uo  littoral  dejh  pleind'eacarpe ments 
et  de  roches  colossales,  on  i>arvient 
eolin  a  Tortose  ( Tancieone  Orehosias). 
Cette  petite  vilk  offre  tout  d'abord  le 
eonstraste  le  plus  saillant  avec  la  mo- 
derne  Djebileh.  Si  la  premiere  est  une 
dte.toute  turque,  la  seconde  est  une 
cite  toute  grecque.  A  voir  ces  mouve- 
ments  si  vifs  et  si  rep^t^ ,  a  entendre  ce 
bourdonnement  eontinu ,  k  suivre  le 
pas  press^  de  ces  hommes  a  Tample 
fottstaoelle,  au  justaucorps  serr^  ijui 
coiitieat  plus  kidbitueliement  a  la  cein- 
ture  un  encrier  en  corne  qu'une  arme 
CO  aeier,  a  ^uter  ces  explications  in- 
fioies,  ces  exclamations  perpetuetlea, 
ces  disputes  souvent,  a  suivre  de  Toeil 
dans  les  nombreux  cordages  de  leurs 
narirfg  ou  sur  leurs  calks  ^troits  ces 
mariiis  audacieux  et  rapides,  qui  ne 
reconnahrait  les  Hellenes ,  ces  Proven- 
cauxderOrient?  Lesmille  habitants,  qui 
sejoumeiit  sur  les  quais  eirculaires  et 
dans  les  rues  montueuses  de  Tortose, 
sont  presque  tous  Grecs,  scbisniatiques 
ou  latins;  quelques  Arro^niens  y  servent 
de  sara/Sf  banquiers  et  gardes- notes  k 
la  fois,  et  le  gouveroement  de  la  Porte 
y  est  represeote  par  un  simple  naib , 
magistrat  du  einquiemeordre. 

Ke  quittoos  |)as  le  rivage  de  Tortose 
sans  regarder  ea  raer  ce  vaste  roc  qui 


fut  la  republique  phenicienne  d*Aradus, 
et  qui  71  est  plus  qu'un  immense  ^cueil. 
Jamais  disparution  de  cite  n'a  6t6  plus 
generate ,  jamais  effacement  humain  n*a 
^te  plus  coinplet :  aucun  vestige  d*ha- 
brtation,  aucune  pierre  taillee,  aucune 
assise  enfouie  ne  sont  rest^  sur  cette 
tie  rase,  nue  et  deserte.  Et  pourtant 
ce  rocher  d'une  lieue  de  tour  etait  na- 
guere  tout  couvert  de  maisons  plus 
hautes,  selon  Strabon,  que  les  plus 
hautes  de  Rome  mtoe;  les  echancrurei 
de  la  roche  formaient  des  havres  oili 
venaient  s*f  ntasser  les  ^aleres  de  T}t 
et  de  Sidon ,  et  Tindustne  des  Aradiens 
avait  deeouvert  entre  Tfle  et  le  conti- 
nent, au  fond  des  flots  amers,  une  source 
d'eau  douce,  doiit  on  s'abreuvait  en 
temps  de  guerre  ao  moyen  de  tuyattt 
en  bronze  et  d*une  cloclie  en  plomb. 
Les  Aradiens,  habiles  constructeurv 
maritimes,  fournissaient  des  vaisseaux 
aux  riches  marchands  de  la  c6te  pheni- 
cienne, et  ils  prospererent  cinq  ou  six 
siecles  a  oet  endroit  ou  les  goeiands  el 
les  mouettes  viennent  seuls  auiourd'hui 
cbercher  un  abri  daus  la  tempete. 

De  llle  de  Rouad  on  apercoit  dej^  les 
largespans,  les  piedestaux  gigantesques, 
les  ddmes  et  les  fleches  de  cette  colos- 
sale  architecture  terrestre  qu*on  appelle 
le  Liban.  Cependant  en  redrsrendant 
sur  le  rivage  il  faut  encore  faire  plus 
de  quinze  lieues  pour  y  atteindre.  La 
cdte  s'arrondit  jusqu'au  cap  Hesn ;  des 
^colliiiesde  toutes  con  leurs  la  bordent, 
les  unes  de  gres  blanc,  les  autres  de 
sable  rouge ,  celies-ci  couvertes  d'oli- 
viers  au  feuillage  grisltre,  eelles*l^  de 
noirs  sapins.  Des  rividres  de  plus  en  pins 
nombreuses  roulent  entre  deux  murail- 
les  de  rochers ,  ou  s*etpndent  sur  iks 
champs caillouteux;  quelques  villages  sur 
des  mamelons ,  quelques  huttet  au  pied 
des  vagues,  apparaissent  de  place  en 
place  jusqu'a  ee  qu'apres  avoir  touriie 
une  langue  de  terre,  qui  saille  assez  pro- 
foodement  dans  la  mer,  vous  apercevies 
tout  a  coup  une  plaine  gui  verdoie ,  et 
derriere  une  muraille  qui  flamboie,  une 
grandecit^qui  poudroie.  Ces  expressions 
nai ves  d'un  de  nos  contes  les  plus  naifs 
expriment  parfaitement  Teffet  prismati* 
que  que  produitTripoli,  assise  au  pied  de 
sa  roontagiie,aunedemi-lieuedela  Me- 
diterraD(6e,avec  sa  prairie  ^tincelante  et 


24 


L'UNIVERS. 


toute  moiree  de  courants  d'eau  devant 
eile ,  sa  couronne  de  pin^-parasols ,  et 
ses  murs  blanchis  a  la  chaux  ou  les 
rayons  du  soleil  viennent  sans  cesse  se 
briser  en  petillant. 

Taraboulousi-Cbam ,  autrefois  Tri- 
poli, c'est-a-dire  les  trots  viUes  formees 
par  les  colonies  de  Sidon,  de  Tyr  et 
a*Aradus ,  est  une  veritable  ^chelle  du 
Levant.  Cettecit^,  eneffet,  contient  ua 
echantillon  de  tous  les  peuples ,  des  in- 
dividus  de  toutes  les  races ,  des  secta- 
teurs  de  toutes  les  croyaoces,  des  sujets 
de  tous  les  gouvemenients.  Cbaque 
nation  y  a,  pour  ainsi  dire,  son  quar- 
tier  ou  au  moins  sa  rue;  et  cette  partie 
de  la  ville  qui  s'est  port^  jusqu'a  la 
naissance  de  la  vague ,  a  Textr^me  em- 
bouchure de  la  riviere  Kadicha^  dont 
les  maisons,  bdties  sur  pilotis,  ont  des 
degr6s  qui  desoendent  jusque  dans  la 
mer,  dont  le  rez-de-cbaussee  est  a  un 
pied  de  I'eau ,  et  dont  la  cave  est  une 
chaloupe ;  voila  ce  qu'on  nomme  avec 
une  certaine  raison  une  ^helle  du  Le- 
vant. Les  ProvenQaux  appellentcequar- 
tierla  Marine^  sans  doute  pour  le  dis- 
tinguer  d'un  port ;  car  il  n*y  a  sur  cette 
cote  qu*une  rade  a  fond  de  rocbes,  et 
expos6e  aux  violences  du  vent  de  nord- 
ouest  qui  s'6chappe  avec  furie  des  gol- 
fes  de  Tarsous  et  d*Alexandrette.  A  Pe- 
poque  des  Crois^s,  cette  rade,  toute 
dangereuse  qu*elle  soit,  ^tait  fortement 
d^fendue  :  sept  tours  encore  debout, 
et  un  grand  nombre  d'autres  6croui^es 
maintenant  ou  disparues,  formaient  un 
redoutable  ouvrage  avanc^,  et   indi- 

3uaieat  une  cit6  importante  et  riche 
ont  on  avait  fait  d^ailleurs  la  capitale 
d  un  comt^  franc. 

Rien  de  plus  oriijinal  que  Taspect 
d'une  de  ces  villes  mixtes ,  moiti^  asia- 
tiques ,  moiti^  europ^ennes,  avec  toutes 
les  nuances  qui  ditfi^rencient  les  peu- 
ples divers  de  ces  deux  parties  du  monde. 
Au  sommet  de  la  ville,  sur  des  plateaux 
couverts  de  vergers,  campent  les  Ara- 
bes,  qui  ont  des  tentes  piutdt  que  des 
maisons :  a  quelques-unes  de  ces  families 
indigenes  il  suffit  mdme  d*une  peau  de 
cbameau  pour  se  garantir  k  la  fois 
contre  les  rayons  du  jour  et  les  ros^es 
de  la  nuit.  Plus  bas  est  le  quartier 
turc,  avec  ses  maisons  aux  ren6tres 
grillag^es ,  sesfontaines  toutes  remplies 


de  versetsdu  Koran,  sculpture  religieuse 
qui  rappelie  a  chaque  pieux  masulmao 
j4llah  teala  (Dieu  tres-baut)  a  Tinstant 
ou  il  s'appr^te  a  jouird'un  de  ses  bien- 
faits,  avec  saceinture  de  noirs cypres, 
tacbet^  de  place  en  place  d'une  pierre 
blanche  surmontee  d'un  turban,  o^Q^ 
ment  ordinaire  des  tombeaux.  Os  (to 
quartiers,  le  quartier  arabe  et  le  quartier 
turc,  ont  le  m^me  caractere  de  tran- 
quillitesilencieuse,  que  vient  seulenieDt 
interrompre  cinq  fois  par  iour  la  voixda 
muessin  appelant  les  Gdeles  a  hi  priera 
du  haut  de  la  galerie  des  minarets.  Pitii 
bas  est  le  quartier  des  Francs  avec  sa 
vastes  enclos  remplis  d*orangers,<le 
grenadiers  et  de  limonjers ,  et  divises 
par  des  haies  de  nopals,  avec  ses  te^ 
rasses  ou  Ton  dtne  toujours ,  od  Ton 
couche  sou  vent,  avec  ses  magasiosoo 
s*entassent  les  balles  de  cotou,  avecses 
bazars  bruyants,  et  ses  grands  mits 
ou  flotteiit  les  pavilions  cDnsulaires. 
Ici  une  activity  mcessante  a  remi^aoi 
la  gravity  ottomane  et  rindolenceasiati- 
que:  chacun  y  semble  press6d*agir,de 
vend  re  ou  di*acheter;  rArm^nien  i 
Tample  robe  brune  y  coudoie  rooTrier 
grec  aux  bras  et  aux  jambes  iHis;le 
matelot  hollandais  a  la  peau  blanche  et 
mate  s'y  croiseavec  r£thiopien  d  la  peaa 
noire  et  luisante;  toutes  les  races  y  toot 
melees,  tous  les  idiomes  y  sont  paries. 
A  la  Marine,  les  mouvements  scat  eo- 
oore  plus  prompts,  le  bruit  y  devienttth 
multe,  le  frdlement  y  devient  rise;  oi 
s*y  dispute  tout  colts,  on  s'y  arradK 
toute  marchandise. 

II  faut ,  du  reste ,  observer  que  cette 
activity  ne  dure  guere  que  trois  mois, 
durant  la  saison  ou  la  cbalear  n*est  pas 
^touffante ,  ou  un  vent  de  nord  rfsu* 
lier  permet  Tarrivage  et  Tappareille- 
ment  des  navires.  Le  reste  du  temps^ 
les  £urop6ens  ^tablis  a  Tripoli  s'eo- 
fuient  dans  la  montagne  pour  y  troo- 
ver  un  climat  temnere  et  un  air  salo- 
bre.  Ainsi ,  malgre  ses  parterres  em- 
baumes ,  ses  vergers  oili  les  fruits  les 
plus  delicieux  surabondent,  son  beau 
paysageet  son  ciel  inalterable,  Tripoli 
se  voit  abandonne  buit  mois  sur  douxe : 
c'est  que  le  grand  nombre  des  eaos 
que  rbiver  a  accumul^  dans  la  plaine, 
charge  Fair  de  miasmes  pesants  et  pu- 
trides ,  des  que  les  rayons  du  soleit  ont 


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C/5 


SYRIR  MODERNE. 


25 


aeguis  toute  leur  puissance;  de  la  des 
fimes  epid^miques,  qai,  apres  vous 
aroir  firappe  une  ^ois,  vous  laissent  daos 
Bn etat  datome contmuelie,  et  font, se- 
lon  Fexpression  de  ^'oiney,  que  la  santi 
%'esi  qm'ane  convalescence, 

Ladestinde  de  Tripoli  est  loin  d'avoir 
tODJours  €vk  heureuse :  peu  inquietee 
d*abord  par  les  Arabes  et  les  Seldjouki- 
des,  qui  se  disputaient  avant  tout  fes 
dbux  riefaes  cites  de  Damas  et  d'Alep, 
die  no  tax  expose  a  une  guerre  desas- 
treusaifQ'il  la  fin  du  onzieme  si^te  de 
jMtrem,  lors  de  la  premiere  croisade. 
DeveiHie  eiisuite  petite  capitaled'un  pe- 
ilit  £tat  independant,  elle  prit  de  Fim* 
ance>  grace  a  la  frequentation  des 
1  genoises  et  v^nitiennes,  qui 
latent  a  sa  plage  pour  approvision- 
jMr  les  Emigrations  bellig^antes  des 
CnMs.  PIvs  tard ,  conquise  par  Se- 
im  f^  eUe  vit  an  pacha,  tout-puis- 
aaot  don,  loi  imposer  un  regime  de 
tBrmr  foi  la  mata  pour  lon^temps. 
Ca  das^ifime  violent  fut ,  d'ailleurs , 
da  hii  ptaire,  et,  chaque  fois 
Telle  eo  trouva  Foccasion,  elle  secoua 
ijoiig  de  aes  mattrespassagers,  arbora 
^  Iffdiaieot  le  drapeau  de  la  revolte ,  et 
ieae  rendit  jamais  qu*a  composition. 
la  bardiesse  despeuples  efrarouche 
itdu  commerce,  amoureux  de  la 
Anssi  Tripoli  trouva-t-elle,  durant 
treafoles  temporaires ,  deux  rivales 
altnealeTerent  unepartie  majeure  de 
ica  aJE&ires.  Ces  deux  rivales  furent, 
dans  le  aiMe  pass^,  Latakieh,  dont 
sous  avoHideja  parie,  et»  au  commen- 
^eroent  do  siecle  ou  nous  sommes, 
Senoirth ,  la  premidre  grande  ville  au 
mA  9  an  deU  du  Kesrouan. 
'^IVipoli  perd  done  tous  les  jours  de  son 
i|K»rtaDoe.  a  cause  du  caractere  mutin 
—  habitants,  \  cause  de  Torgueil  de 
^  les-uns  des  indigenes  musulmans 
port^rent  longterops  le  turban  vert 
eousins  de  Mahomet ,  et  se  qualifie- 
\  du  titre  de  cherifs ,  a  cause  surtout 
la  d^En^rescence  de  sa  principale  ex- 
-^ntioD,  les  soies,  qu*on  attribueau  d^- 
sement  pro^ressif  des  mdriers  qui 
iaovrent  ses  environs.  Yolney  explique 
«e  deperissement  de  la  fa^on  suivante : 
m  Si  les  mdriers  ne  pr^ntent  plus  que 
•  d€>s  souches  creuses ,  un  Stranger  s*e- 
«  die  sur-le-champ  :  Que  n'en  plante- 


«  t-on  de  nouveaux  ?  Mais  on  lui  repond : 
«  Cest  la  un  propos  d'Europe.  Ici  on 
«  ue  plante  jamais ,  parceque  si  quel- 
i  quVjn  bdtit  ou  plante ,  le  pacha  dit  : 
«  Cet  homme  a  de  I'argent.  U  le  fait  ve- 
«  nir,  il  lui  en  demande;  s'if  nie ,  il  a 
«  la  bostonnade ;  et  s*il  accorde ,  on  la  lui 
«  donne  encore  pour  en  obtenir  da- 
c  vantage.  »  Ces  traitements  odieux  se 
nomment  en  Turquic  des  avanies ;  les 
rayas  y  sont  en  eftet  souvent  exposes, 
surtout  dans  les  pays  eloigncs  de  la  ca- 
pitale ,  et  ou  la  puissance  des  seigneurs 
ottomans  demeure  presque  sans  con* 
tr61e.  Aussi  verrons-nous  dans  notre 
histoire  que  le  gouvernement  des  pa- 
chas fut  peut-^tre  pour  la  Syrie  la  pire 
de  toutes  les  tyrannies. 

A  peine  est-on  sorti  de  Tripoli  qu'on 
entre  en  plein  Kesrouan,  cet  antique 
refuge  des  Maronites.  Tout  change  a  la 
fois  :  la  nature  et  Thomme.  Les  monta- 
gnes  s*entremllent,  les  cimess*amoncel- 
lent,  de  larges  pans  de  gres  fonc^  s*^l^ 
vent  perpendiculairement ,  des  vallons 
etroits  et  profonds  descendent  dans  des 
abtmes,des  rochers  les  surplombent, 
dont  les  uns  sont  aigus  comme  des  la- 
mes de  pierre,  dont  les  autres  sont 
massifs  et  ronds  comme  de  gigantes- 
ques  boulets;  des  pics  percent  les  airs  h 
une  hauteur  prodigieuse ,  des  c^nes  plus 
hardis  encore  montent  au  dela  de  rat- 
mosphere  terrestre,  etdemeurent  cou- 
verts  de  neige,  malgre  un  ciel  d'azur  et 
un  soleil  d'or.Dans  ce  majestueux  a  mas 
de  montagneSfCertaines  vallees,  empri« 
sonnees  entre  de  colossales  murailles , 
ne  reqoivent  que  quelques  rayons  obli- 
ques qui  DC  les  eclaircnt  qu*^  certaines 
heures  du  jour ;  les  eaux ,  prdcipitees  de 
toutes  parts ,  tombent  de  pentes  en  pen- 
tes  en  nappes  epaisses  et  oruyantes ,  je- 
tant  autourd'elles  une  poussiereliquide, 
qui,  se  renouvelant  sans  cesse,  produit 
sajis  cesse  un  nuage  prismatique  et  une 
pluie  de  la  finesse  la  plus  exigue. 

Les  details  ne  sont  pas  moinsausteres 
que  Fensemble :  ici  ce  sont  de  larges  cre- 
vasses quiont  fendu  la  montagne  a  trois 
et  quatre  cents  pieds  de  profondeur, 
effrayante  entaille  du  glaive  de  Dieu , 
suite  terrible  destremblementsdeterre; 
la  ee  sont  des  rochers  ironies  des 
somniets  les  plus  ^lev^s ,  et  qui  out 
laisse  une  trace  devastatrice  sur  un  ver* 


2G 


L'UNIVERS. 


saut  tout  entier;  plus  loia  c'est  une 
noire  for^t  desapinsqui  jette  sa  sombre 
melancoliesur  le  paysage.  £b  bieo,  mat- 
gre  ]es  rigueurs  de  cette  nature ,  malgr^ 
ces  horreurs  sublimes  qui  ue  plaisent 
qu'au  poete  qui  passe^  etnon  au  prole- 
taire  qui  demeure ',  qui  ne  semble  bonne 
tout  au  plus  qu^aux  abstraites  medita- 
tions du  solitaire,  cette  ri^ide  Theb.iide 
est  devenue  le  eeutre  d'uiie  population 
qui  va  toujours  croissant  Escaladez  ea 
effet  cette  premiere  enceinte  de  monta- 
gnes,  suivez  sans  vertige  ces  sentiers  a 
pic  ou  le  pied  pent  ^lisser  a  tous  les  pas 
sur  (les  cailloux  polis  ou  sur  des  rocnes 
luisantes ,  roontez  une  a  une  ces  mar- 
ches que  la  main  des  proscrits  a  tailiees; 
et,  parvenus  au  premier  sommet,  au 
de\h  de  quelques  larges  plateaux,  vous 
apercevrez  uii  spectacle  aussi  grandiose 
que  consolaut. 

D'aulres  montagnes  se  presentent  li 
vos  regards,  dont  chaquc  ^tage  est 
peuple  :  cette  tacbe  blanche  sur  ua 
niamelon  boise ,  c*est  un  village;  cette 
tache  brune  sur  une  roche  olanciie^ 
c'est  un  couvent;  cette  murailie  au- 
dessus  de  laquelle  s'eleve  une  vegeta* 
tion  nuanc^e ,  c'est  un  verger:  ce  grou- 
pe  d'arbres  dispose  a?ec  art ,  ce  soni 
des  mdriers;  ces  branches  grimpan- 
tes  6taldes  avec  soin  sur  un  talus,  c^ 
sont  des  vignes ;  cette  ligne  grisdtre  qui 
descend  dans  un  valloo ,  ce  sont  des  oil- 
viers ;  ce  morceau  de  terres  maintenu 

Sar  une  solide  b^tisse,  c'est  un  champ 
e  ble;  ces  silions  profond^meul 
creuses,  et  oii  route  une  blanche  ecume, 
ce  sont  des  canaux ;  ces  palissades  au- 
tour  d'un  carre  vert ,  c*est  une  prairie; 
toutes  ces  merveilles ,  c'est  rceuvre  d'uo 
peuple  patient,  laborieux,  uni,  en  uo 
mot ,  Chretien. 

A  coup  sdr  une  sori^t^  toute  chr^ 
tienne  pouvait  seule  vaincre  tant  de 
difDcultes  premieres,  surmonter  tant 
d*obstacles  renaissants.  Ces  terrains 
cultivables  ont  et6  conquis  un  par  un , 
ces  terres  fl6condes  ont  ^.t^  apporteea 
poignee  par  poign^,  chacun  de  ces 
arbresa  coilteplusdesueurs  a  planter 
quVn  Europe  une  fordt  ne  codte  k  en- 
tretenir.  El  une  fois  eea  immenses  la- 
beurs  terminus,  pour  recueillir  le  fruit 
des  arbres  et  le  ^rain  des  moissons , 
quede  veilles  contmuelles,  quede  soins 


attentifo!  les  neiges  de  Thiver,  les<l»> 
ffels  du  prin temps,  les  rochergquin» 
tent,  les  torrents  aui  tombeDt,iiMnaail 
successtvement.  ll  a  done  £illa,  a  fow 
de  travail  et  d'industrie,  oreusrm 
chemin  a  riinpetuositedeseauXtOUtti 
ser  des  digues  a  la  chute  des  rdcwi, 
ici  soutenir  le  sol,  1^  le  deblayer,  u  g^ 
rantir  contre  les  temp^tes,  et  pretfli 
mime  les  cataclysmes. 

Malheureusement  les  Marooites,!! 
travail  lent  aue  de  corps.  Sans  doute  U 
pratiauent  fa  primitive  fraternite.iDai 
une  rraternite  toute  materielle,  pttf 
ainsi  dire,  ou  le  cceur  se  montreM 
et  gen^reux,  mais  ou  Tespritsans 
lation  demeure  froid  et  iraprodi 
Aussi,  que  trouvet-on  dans  le  li 
un  peuple  dont  les  mains  sonloocoj 
mais  dont  le  genie  est  iuerte*,  un  jM . 
bon,  mais  indolent;  un  peuplequi,B# 
gr6  ses  vertus  patriarcales,  m  tt 
aucun  proselyte ,  qui  vit  s^par^  des  ^ 
plades  orientales,  sans  go()t  pourM 
relations  Internationales,  sans  (MkM 
pour  le  commerce ,  et  qui  reste  eoiM 
dans  ses  montagnes,  seoourable  eoiMI 
ses  compatriotCJi ,  inutile  a  ses 


Ce  peuple  excelleiit  s'endort  do«  M 
r ignorance;  son  bas  clerg^  ^^^P'!-* 


peine  les  prieres  de  r£glide;  ses^v^M 
sont  sans  action ,  son  patriarebe  sr 
force;  et  de  son  sein  sto'ik  jaoMis  11 
s*el^ve  une  de  ces  individuality  actii«|f, 
audacieuses ,  puissantes ,  dont  U  d^ 
n^  est  de  faire  faire  lui  pregvcs  < « 
civilisation,  un  pas  a  rhQinauite  Ul 
Maronites  se  croient  arrives,  et&esi* 
vent  point  les  nationseuropeenu<«/iM 
leur  marche.  La  religion  fatholNlMi 
chez  eux,  est  bien  la  religion  du  J 
lut  c^este,  mais  elle  n'est  pas  oeiNtt 
salut  terrestre. 

rtous  pensons  done  que  M.  de  Lao'^ 
tine  se  fait  illusion  en  attendant  (|V<W 
diose  de  ce  grand  oouvent  iibauicn,  wi 
tueuz  assurement,  mais  4|uis'csteo^' 
damnelui-mlme  ane  pas  avoir  d*aT«tikj 
comme  ses  moines  se  sont  coodaoiodt. 
ne  pas  avoir  de  post^rite.  Nous  '***|J^ 
roBs  dans  le  oourant  de  w)tre  bj^ 
Torigine  et  les  louables  coromencrts^ 
de  ce  <uple  solitaire,  nous  n'*"r**Jr 
des  ^loges  pour  ses  efforts  nsateriels  oor 
tre  une  nature  ingrate;  maisen  P****|T 
ses  malheurs  modernes,  nous  fflost'^ 


SYIUK  MODERNE. 


27 


roDS  comment  its  ne  sont  oes  que  de  son 
manque  d*aetion  sur  ceux  qui  Teniou* 
rent ,  que  de  son  honn^te  mais  regret- 
table passtvite.  Qtielle  difference  entre 
cette  colonic  d'emi^res  froids  et  impuis- 
Bants,  qui  s*est  enfouie,  il  y  a  douze 
cents  anSfdans  tes  montagnes  de  la 
l^yrie,  et  cette  autre  colonic  d'esprits 
ardents  et  fiers  qui  s'est  elano^  i  ii  y  a 
moins  d*uu  siecle,  a  travers  les  immen^ 
ses  plaines  de  la  Pensylvanie :  les  pre- 
miers sont  encore  des  presents »  les  se- 
conds soDt  deja  une  grande  nation ! 

La  partte  du  Liban  nommee  le  Kes- 
rouan  est  presque  exolusiTement  habitee 
par  les  Maronites ;  lis  y  sont  done  plus 
tranqu tiles  et  plus  beufeux  aue  dans  le 
pachalick  d'Acre.  Assez  nombreux  pour 
8*oppo8pr  ciox  attaques  des  Druzes ,  ils 
se  trouvent  en  outre,  derriere  ieurs 
montagnes  escarp^es,  a  Tabri  des  incur- 
sions des  peupiades  nomades;  aussi 
tous  Ieurs  villages  presenteot-iis  Timage 
du  cahiie  et  de  la  prosperite.  La  vallie 
des  Saints  en  est  remplle ;  et  le  patriar- 
che,  qui  s^journe  dans  le  vaste  convent 
de  Kanoubin ,  peut ,  de  la  hauteur  d'oil 
il  domiiie,  suivre  les  travaux  journaliera 
de ses ouailles ,  comme  it  peut  entendre, 
le  soir,  le  murinure  de  Ieurs  actions  de 
grdces.  Kanoubin  est  un  lieu  vener^; 
on  en  attribue  la  fondation  ii  Th^odose 
le  Grand.  R»en  encore  de  plus  anim^  et 
de  plus  riche  aue  les  vallons  ou  roule 
r^cumante  Kaoicha.  Ces  vallons  com- 
meiicent  par  des  bois  toufTus  d'oran- 
sers  et  de  caroubiers ,  et  flntssent  par 
oes  for^ts  ombreuses  de  peupliers  et  de 
cypres.  Pius  loin,  au  nord,  void  le 
bouru  dT.df  n ,  qui  ne  justifie  son  nom 
gue  dans  les  chaleur»  qui  durent  de  juin 
a  septembre;  ear  des  que  rautonioe 
ereve  ses  prei»ieres  nii^,  un  manteaa 
de  neige  couvre  tout  entler  ee  plateau 
elev^,  les  arbres  qui  y  soni  plants  e( 
les  toits  qui  y  sont  bdtis. 

En  avam^ant  toujours  de  I'ouest  I 
l^est ,  remarquez  ces  sortea  de  oeliules 
r  taill^ea  dans  lee  flancs  du  rocher,  ces 
nnaisons  suspendues  les  ones  sor  les 
ftotres  au-dessus  des  precipices,  ces  ca- 
banes  creus^s  dans  les  vastes  racincs 
de  quelqoes  tronrs  s^ulaires ,  c'est  Bes- 
^bierai ,  dont  les  habitants  sont  ausii 
rt)dss^  tous  les  hivers  pir  d'indompta- 
Dies  frimas.  Enfin,  redoublez  vos  ef- 


forts ,  ayez  le  courage  d'empjoyer  sept 
beures  pour  faire  trois  lieues,  tant  les 
cbemins  sont  escarpes,  tant  ils  descea- 
dent  dans  des  gorges  profondes  pour  re- 
monter  sur  les  crates  les  plus  ^levdes , 
et  tout  a  coup  vous  aliez  apercevoir 
les  bras  gigantesques  ^  le  feuillage  som< 
bre,  le  tronc  rugueux,  la  tournure  ma- 
jestueuse  de  ces  rois  du  rh^Ln^  vegetal 
qu'on  appelle  les  cedres.  \olney,  par 
un  esprit  de  contradicuioo  peu  sense, 
a  trouve  sans  doute  qu'il  serait  original 
de  deni^rer  ces  botes  venerubles  du  Li- 
ban ;  voici  dans  quels  terines  de  dedain 
il  en  parle  :  «  Ces  c^res  si  reputes  res- 
«  semblent  a  bien  d'autres  merveilles ; 
«  ils  soutienneiit  mal  de  pres  leur  repu- 
«  tat  ion  :  quatre  ou  cinq  gros  arbres , 
«t  les  seuls  qui  restent,  ft  qui  n'ont  rien 
«  de  partieulier,  ne  valent  pas  ia  peine 
«  que  Ton  prencT a  frnnehir  les  precipices 
«  qui  y  menent.  »  Telles  sont  les  paroles 
ironiques  d'un  froid  philosophe;  rap- 
procbons-les  des  pages  inspirees  d*un 
.  poete  plein  de  chaleur,  rantidote  aupres 
du  poison : 

«  Ces  arbres  sont  les  monuments 
«  naturels  les  plus  ceiebres  de  Tuni- 
«  vers.  La  religion ,  la  po^ie  et  Phis- 
«  toire  les  out  egaleinent  consacres. 
«  L'Ecrituresninte  les  cflebre  en  j}lu- 

•  sieurs  endroits.  lis  sont  une  des  ima- 
«  ges  que  les  prophetes  emploient  de 
«  predilection.  Salomon  voulut  les  con- 
«  sacrer  a  rornemeut  du  temple  qu'il 
«  ^leva  le  premier  au  Dieu  unique ,  sans 

•  doute  a  cause  de  la  renommee  de 

•  magniGcence  et  de  saintete  que  ces 
«  prodiges  de  la  vegetation  avaient  des 
a  cette  ^poque.  Ce  sont  bien  ceux-la  : 
c  ear  Ezechiel  parle  des  cedres  d'^den 

•  oomme  des  plus  beaux  du  Liban.  Les 
<  Arabes  de  toutes  les  sectes  ont  une 
«  v^n^ration  traditionnelle  pour  ces  ar- 
«  bres.  lis  leur  attribueut,  non-.seule- 
«  ment  une  force  vegetative  qui  les 
«  fait  vivre  eterneUement,  mais  encore 
«  une  ime  qui  leur  fait  donner  des  si- 
«  gnes  de  sagesse  *  de  prevision ,  sem- 
«  blables  h  ceux  de  Tinstinct  chez  les 
«  animattx,  de  Tintelligence  chez  les 

•  hommes.  lis  connaissent  d'avance  les 
«  saisons,  ils  remueut  Ieurs  vastes  fa- 
«  meaux  comme  des  membres ,  ils  ^ten- 
«  dent  ou  resserrent  Ieurs  coudes ,  ils 
«  tievent  vers  le  ciel  ou  inelineot  vers 


38 


L'UNIVERS. 


«  )a  terre  leurs  branches ,  selon  que  la 

«  neige  se  prepare  a  tomber  ou  a  fondre. 

«  Ge  sont  des  dtres  divins  sous  la  forme 
«  d'arbres.  lis  croissent  dans  ce  seul 
u  site  des  p*oupes  du  Liban;  ils  pren- 
«  nent  racine  bien  au-des^us  de  la  r^- 
<c  gioQ  oil  toute  grande  v^g^tation  ex- 
ci  pi  re.  Tout  cela  frappe  d'etonnement 
«  rimagination  des  peuples  d'Orient , 
*  et  je  ne  sais  si  la  science  ne  serait  pas 
«  etonneeelle-m^me.  Helas  Icependant, 
«  Basan  languit ,  le  Carmel  et  la  fleur 
«  du  Liban  se  fanent.  Ces  arbres  di- 
V  minuent  chaque  si^le.  Les  voyageurs 
«  en  compterent  jadis  trente  ou  qua* 
«  rante ,  plus  tard  dix-sept ,  plus  tard 
«  encore  uue  douzaine.  II  n*y  en  a  plus 
«  que  sept ,  que  leur  masse  peut  taire 
«  pr^sumer  coutemporains  des  temps 
«  oibliques.  Autour  de  ces  vieux  te- 
«  moins  des  dges  ecoul^,  qui  savent 
«  Phistoire  de  la  terre  mieux  que  This- 
«  toire  elle-m^me,  qui  nous  raconte- 
«  raient,  s'ils  pouvaient  parler,  tant 
«  d'empires ,  de  religions ,  de  races  hu- 
ff maines  evanouies,  il  reste  encore  une 
«  petite  for6t  de  cedres  pliis  jeunes  qui 
«  me  parurent  former  un  groupe  de 
«  quatre  ou  cinq  cents  arbres  ou  arbus- 
«  tes.  Cbaque  annee,  au  mois  de  juin, 
«  les  populations  de  Beschi^rai,d'Eden, 
«  de  Ranoubin  et  de  tous  les  villages 
«  des  vallees,  voisines  montent  aux  ce- 
«  dres  et  font  c^l6brer  une  messe  a 
«  leurs  pieds.  Que  de  prieres  n'ont  pas 
«  resonn^  sous  ces  rameaux !  et  quel 
«  plus  beau  temple,   quel  autel  plus 
«  voisin  du  ciel!  Quel  dais  plus  majes- 
«  tueux  et  ^lus  saint  que  le  dernier  pla- 
«  teau  du  Liban ,  le  tronc  des  cedres  et 
«  le  ddnie  de  ces  rameaux  sacres  qui 
«  ont  ombrage  et  ombragent  encore 
«  tant  de  generations  humaines,  pro- 
«  non^ant  le  nom  deDieudiffi^remment, 
«  mais  le  reconnaissant  partout  dans 
«  ses  oeuvres,  et  Tadorant  dans  des 
«  manifestations  naturelles!  » 

II  faudrait  plusieurs  mois  pour  par- 
courir  tout  le  Kesrouan^  sarr^ter  a 
tous  les  beaux  sites,  visiter  tous  les 
villages.  Ce  sont  toujours  des  monta- 

§1^8,  il  est  vrai ,  mats  avectoutes  sortes 
e  vari6tes  de  couleurs  et  d'aspects  : 
les  unes  grises,  pelves  et  aigues;  les 
autres  larges  et  rondes ,  d*un  ysrt  fonce 
jusqu*^  la  moiti^  de  leur  hauteur,  et  a 


leur  cime  d*un  ton  violet  clair  qui  se 
fond  merveilleusement  avec  le  bleu  do 
ciel.  Les  villages  ne  sont  pas  moins  di* 
vers  d'attitude  que  les  monts;  eeuxHi 
sont  jetes  au  fond  d'une  gorge  ver-^ 
doyante ,  ceux-la  s'avanoent ,  pour  aioa 
dire,  au  milieu  del'^ther,  places  qo*^^ 
se  trouvent  sur  une  facon  de  proiiHHH 
toire  en  rocailles.  La  voix  humainepar- 
vient  d'un  de  ces  villages  a  I'autre,  et  o^ 
pendant  on  ne  peut  y  alter  au*eii  dns 
ou  trois  beures  :  la  route  de  V air  n*aa- 
rait  pas  une  demi-lieue,  celle  de  h 
terre  en  a  parfois  jusqu'ii  quatre.  Lm 
sentiers  sont  des  laoyrinthes  qui  t4MV- 
nent  sans  cesse  autour  des  larges  flaooi . 
de  la  montagne.  Sans  nous  et^agirl 
dans  ces  sinuosites  infinies,  bomoai^i 
nous  a  reprendre  notre  direction  4i, 
nord  au  sud ,  en  regagnant  le  littoraL 
Apres  6tre  descend  u  assez  longiempsli 
long  des  rives  encaissees  de  la  tufta* 
lente  Kadicha,  le  cbemin  s'ouvre  lo«t 
a  coup  sur  une  ^tendue  bleue,  mim» 
tante  et  sonore :  c'est  la  MMitei 

Parvenu  surle  rivage,  on  est 
de  rimposante  magnificence  de  c 
grandes  choses  face  a  facet  la  mer  eiki, 
montagnes.  La  chatue  du  Kastravas' 
borde  la  plage  durant  plus  de  quiim.' 
lieues,  et  lette  son  ombre  immense 
lesfluts,  lorsque  le  soleil  se  li^e 
riere  elle.  Ainsi ,  pendant  toute  la 
tinee,  tes  vagues  du  large  paraissaft 
d*un  bleu  sonwre ,  i6gerement  jn^  d» 
blanc ,  lorsqu*elles  moutonnent ;  a  midi, 
ce  sont  des  lames  d'or  dans  le  lointaia, 
des  lames  d'argent  sur  le  premier  plan; 
dans  la  toiree  enfin ,  quand  la  bnse  m 
calme ,  quand  le  soleil  decline  vers  Too- 
cident ,  c*est  une  nappe  claire  et  imre, 
un  sublime  miroir  ou  se  dessineot  les 
aretes  des  monts  avec  une  douceur  ift 
une  nettet^  sans  ^gales.  Puis  I'astre  H. 
jour  s'abaisse  de  plus  en  plus ,  la  amst 
passe  alors  du  bleu  au  violet,  du  violil 
au  pourpre,  par  toute  la  gamme  dm- 
couleurs,  par  toute  Tharmooie  det 
nuances,  jusqu*a  ce  qu'enOn,  grSeea 
ce  pbenomene  des  pays  orientaux,  b 
nuit  succede  brus^uement  au  jour,  las 
t^nebres  a  la  lumiere. 

Ce  beau  rivage  de  Tripoli  a  BayrooHi^ 
sans  Itre  compl^teoientaccideQte,  pr^ 
sente  pourtant  plu&ieurs  potutes  et  plti» 
sieurs  golfes.  Voici  d*abord  le  capOoedg 


SYRIE  MODERNE. 


39 


fm  s*avanoe  du  sud  au  nord ;  puis  Ja 
jlointedeBarroun,  assez^levee  pour  vous 
offirirun  eoup  d'oeil  presque  ^^n^ral  de  la 
Syrie,  depuis  le  promontoire  de  Lata- 
kieh  jusju'au  golte  d*  Acre ,  pres  de  cio- 
ouante  lieues  d^^tendue  de  chaque  cote : 
•eraot  vous  Fhorizon  plan  et  sans 
borne,  derri^re  tous  la  ligne  onduleuse 
des  montagiies,  qui  de  loin  ressemble 
aux  vagues  immenses  d'un  ocean  petri- 
fie.  tlD  grand  nombre  de  ruisseaux  rou- 
kot  sur  des  sables  fins  jusqu'a  la  mer ; 
nais  le  seul  cours  d'eau  important  est 
la  riviere  d'Ybrabim,  naguere  d'A- 
donis.  Cest  dans  une  valiee  des  envi- 
.nms,  en  efTet,  que  ce  type  de  la  beauts 
paienoe  repandit  son   sang  limpide  et 

Cr,  et  depuis  ee  temps  des  anemones 
lUaotes  naissent  sans  cesse  sur  les 
fralehes  berges  de  la  riviere.  A  Pembou- 
(ikUT6  de  ITbrahim  est  situ^  Djebaii , 
rftDfieQDe  B]^blos.  D'abord  residence 
d'uD  p«tit  roi  de  la  Ph^nicie ,  dont  le 
jnlais  n'a  laiss^  aucun  vestige,  les  Ro- 
loajus  plus  tard  la  choyerent  aussi  h 
Cfiose  de  sa  ravissante  position ,  et  y 
^vereotun  th^dtre  dont  les  ruines  s'a- 
per^ivent  encore.  Puis  vinrent  les  croi- 
s^)  qui  y  bdtirent  sur  un  rocher  un 
cblt^aa  gotbique  d*une  telle  hauteur 
que  lesTurcs  pr^tendent  qu'un  cavalier 
pent,  au  soleil  levant,  mnrclier  une 
knre  a  son  ombre.  Eiifin ,  lors  de  la  do- 
nination  musuimane,  un  sultan  du 
noin  dTbrahim  dota  Djebail  d*uo  bd- 
pital,  d'ane  vaste  mosquee  et  d'un  pont 
dune  remarquable  l^geret^,  61eve  k 
plus  de  trente  pieds  au-dessus  du  fleu- 
ve,  et  form^  d  une  seule  arche  de  cin- 
yunte  pas  de  large.  Malgr^  ses  gran* 
oeurs  ^teintes,  Djebail  n'a  guere  que 
lu  miile  habitants ;  mais  sa  baie  gra- 
Ofuse,  son  pont  Elegant  sur  sa  jolie 
rivi&re,  les  colonnes  de  marbre  dor6 
qui  restent  de  son  ancien  thedtre,  et 
lurtout  les  mors  creneles  de  son  chd- 
{^Qi  d'ou  ne  sortent  aujourd*hui  que  des 
Bouquets  de  feuilles  et  de  fleurs ,  les 
glei  de  cette  forteresse  aux  toits  ebou- 
ws  d'ou  se  sont  ^lanc^  des  pins  et  des 
^comores ,  les  lierres  qui  tapissent  les 
mjoDs,  les  lianes  qui  tombeut  des 
^rs,  toutes  ces  ruines  pittoresques ,  au 
Btilieu  de  cette  admirable  nature ,  font 
•e  Djebail  le  plus  agreable  des  sejours. 
t  De  la  riviere  d'Ybrahim  a  la  riviere 


du  Chien  (Nahr-el-Kelb)  on  ne  trouve 
qu*un  petit havre appele  DjaferDjouni, 
oik  se  balanoent  quelques  polacres  grec* 
ques ,  ou  sont  tir^  sur  le  sable  quelques 
caiks  de  p^heurs.  Puis  dans  la  monta- 
gne,  au  milieu  d*un  site  tout  verdoyaut , 
plein  des  vignes  et  des  mdriers  habi- 
tuels,  avec  sa  couronne  accoutum^  de 
pins-parasols  et  de  svcomores ,  un  assez 
gros  bourg ,  nomme  Antoura.  C'est  la 
qu'il  y  a  environ  deux  slides  les  jesuites 
avaient  voulu  former  un  ^tablissement. 
Un  convent  fut  bdti  par  eux  avec  de 
nombreuses  annexes ,  destinees  a  uu  s6- 
minaire  de  Jeuiies  gens  maronites  et 
grecs-cathoiiques.  Mais ,  une  fois  le  col- 
lege termini,  les  etudiants  ne  vinrent 
pas,  soit  meGance  contre  la  trop  cel^- 
Dre  compagnie,  soit  plutdt  insouciance 
pour  Finstruction  qu*OQ  voulait  leur 
donner.  Puis ,  ce  aui  prouve  combien  les 
Innovations  sont  aifficiles  chez  ce  peuple 

2ui  s'est  retir^  du  monde,  pour  ainsi 
ire,  et  qui  repousse  toute  science  nou- 
velle,  sacr^  coinme  profane,  c'est  que 
les  nouveaux  venus,  loin  de  trouver 
Tappui  quails  ^taient  en  droit  d'attendre, 
rencontrerent  une  sorte  de  pers^ution. 
On  leur  fit  d'abord  une  guerre  sourde , 
ensuite  on  entrcprit  contre  eux  une  con- 
currence desastreuse :  lesjesuites  avaient 
voulu  fonder  un  convent  de  filles,  les 
Grecs  les  d^poss^erent ,  et  bdtirent  en 
facedu  leur  un  couventqu'ils  nommerent 
la  P'isUation.  Enfin  les  jesuites,  entra- 
ves  dans  leurs  actes,  emp^ch^s  dans  leur 
oeuvre,  abandonnes  de  tons,  furent 
obliges  de  se  retirer.  Les  lazaristes  les 
remplacirent;  mais ,  malgr6  leur  bonni!- 
tet^  partout  proclam^e,  malsre  leur 
sincere  esprit  de  charite,  malgr^  les 
succ^s  auxquels  ils  etaient  habitues 
dans  les  autres  contr^es  du  Levant ,  ils 
ne  r6ussirent  point  non  plus  a  Antoura. 
Du  temps  de  Volney,  en  1785,  ils 
^Uient  dej^  en  dtodence ;  et ,  en  1832 , 
M.  de  Lamartine  n'a  plus  trouve  que 
deux  jeunes  freres  dans  le  vaste  endos 
desert.  La  position  pourtant  6tait  tres- 
bonne  pour  avoir  une  action  facile  sur 
tons  les  Chretiens  du  Liban ;  mais  les 
Chretiens  du  Liban,  comme  presque 
tons  les  rayasorientaux ,  sont  m6fiants, 
et  il  parait  mime  qu'ils  se  defient  de 
leurs  propres  coreligionnaires,  ainsi  que 
de  tous  eeux  qui  viennent  s'etablir  chez 


ao 


L'UNlVEBJi. 


mx  pour  leor  donner  des  comeils  on 
leur  offn'r  des  secours. 

L(^  Marofiites  ne  eonservent  done  de 
relatione  r^uli^res  avec  TEurope  que 
grdce  h  un  legat  du  pape  qui  habite  une 
charmante  vilfa  itaiienne,  bfttie  sur  ud 
mainelon  en  face  d^Antoura.  Ge  pretat , 
du  resre,  isol^  comme  il  est,  ne  peat 
avoir  tout  au  plus  qu'une  certaine  auto- 
rite  religifiise,  et  son  iiifluenr e  comme 
repr6sentant  politique  ne  doit  sans 
doute  pas  plus  sVxercer  sur  les  Maro- 
nites  que  sur  les  Turcs.  L'orgnnisalion 
de  ces  Chretiens  orieiitaux  est  d'ailleurs 
demeuree  toute  feodale.  Des  cheiks 
her^itaires  sont  leurs  chefs  temporels. 
Des  cv^ques ,  presides  par  un  patriar- 
che ,  et  assistes  par  des  rur6s,  sont  leurs 
chefs  spirituels.  Mats  comine  il  j  a  eu 
souvent  conflit  entre  les  deux  auto- 
rites  ,  comme  en  outre  les  cheicks  ne 
sont  pas  assez  puissants  pour^trejuges 
reconnus  pendant  la  paix  et  g^neraux 
obeis  petidant  la  guerre ,  il  ea  est  t6- 
sutt^  qu'on  a  eu  souvent  recours  h  un 
tiers  pour  d^ider  certains  cas  difHciles 
ou  pour  r^unir  nne  arm^e.  De  la  toutes 
les  calamites  qui  ont  pes^  sur  les  pauvres 
Maronites.  Une  fois  T^tranger  adtnis 
dans  leurs  montagnes,  h  quelque  titre 

3ue  ce  fdt ,  ils  out  eu  h  subir  des  maux 
^  e  toutes  sortes.  Ce  n'est  pas  encore 
ici  le  lieu  de  donner  tout  son  develop* 
pement  i  noire  peusee;  contentons- 
nous  de  dire  que  les  Maronites  sont 
mat  gouvernes  ou  plutdt  ne  sont  pas 
gouvernes  du  tout,  et  qu'il  sufllt  d'un 
seul  mauvais  esprit  pour  troubler  leur 
quietude,  d'un  fait  passible  de  la  plus 
l^gere  r(^pression  pour  autoriser  une 
intervejition  mahometane  qui ,  loin  de 
rameiier  lordre  parmi  eux,  n'a  jamais 
su  qu'y  exciter  Tanarchie. 

Aquelques)ieuesau-dessousd*Antoura 
coule  si.encieusement  dans  une  fforge 
profonde  la  riviere  du  Chien  (Nahr-el- 
Kelb}.  C*est  la  la  limile  toute  conven- 
tionnelie  du  pachalik  de  Tripoli;  car  en 
realite  la  montagne  continue  toujours, 
!e  pavsnge  ne  change  pas ,  les  cultures 
sont  les  ni6mes ,  les  valines  sont  aussi 
ft'condes  et  aussi  belles,  les  sommets 
aussi  hauts ,  tes  versants  aussi  rapides , 
les  eaux  aussi  torreotueuses ,  et  le  San- 
nin ,  le  pic  le  plus  ^leve  du  Liban ,  mon- 
tre  sa  tete  neigcuse  au  del^  de  la  riviere 


qoi  sert  de  frontiereeu  goaveraement 
lies  habitants  aussi  ont  les  m^ones  morars 
et  le  in^me  caract^  que  oeux  du  Kes- 
rouan ;  seulemeot  an  dela  de  Baynutii 
les  DruzesapparaissenMears  villain N 
n^^lent  aux  villages  maronites  :  dcf  Ion 
les  Maronites  n'^ant  plus  se«la  se  trad- 
vent  inqui^tes  dans  leurs  propri^^,  g^i 
dans  leurs  travaux ,  molest^  de  toutai 
les  fa<^ns;  c*est  la  que  commence  lepaii 
des  troubles  et  des  guerres  continaelles. 
En  resume,  une  capitale  qui  perJ 
tons  les  lours  deson  importance,  Tripoli; 
deux  viUes,qui  n^onta  peinechacune  qoe 
six  mille  habitants,  Lataktehet  DjebajT, 
deux  petits  ports  ou  abordent  des  m- 
seaux  de  cent  a  deux  cents  tonrwwB 
tout  au  plus,  Djebil^h  etTortose;  mail 
des  villages  en  grand  nombre  et  presqM 
les  uns  sur  les  autres  dans  le  Kfsrouao, 
des  eou vents  surtous  les  plateaux, fhs 
ermitMges  sur  tous  les  mameloAs,Toili 
ce  qu^offre,  dans  sa  mMloere  ftendiif, 
le  pachalik  de  Tripoli.  Une  nature  fer- 
tile au  nord,  mais  abandonn^  dsm  b 
plaine  par  Tindolence  des  Ansaridi; 
une  nature  ingrate  au  sod ,  mais  adni- 
rablement  cuftiv^  par  raetivit^  da 
M  aroni  tes  \  des  gorges  escarpees,  au  noftl- 
est ,  qui  servent  de  retraites  aux  mn- 
terieux  Isma^tis;  des  cimes  ele?^,  aa 
sud-est ,  otli  s'entassent  les  laboriattM 
populations  chretiennes ;  enfin,  on  litto- 
ral tout  plein  d'anses  et  de  baies  oa- 
turelles  ^  Touest,  que  nefaantpatqai 
quelqies  soldats  turcs,  quelqoes  fM- 
chands  arabes,  quelques  n*go«ants  tf| 
meniens  et  quelques  marins  grooa;  w 
est  Faspect  de  cette  partie  de  ii  Sjftie. 
Deces  elements  divergentspeut-ilsa^ 
une  unit6  future?  Parmi  ces  weal  w" 
Ides  peut-il  s'6lever  tout  a  coup  uoaraei 
pr6ponderarite  qui  doive  engtolier  to 
autres ,  leur  imprimer  une  impabioa; 
creer  un  ordre  nouveau ,  fonder  flw* 
vilisation  ?  nous  en  doutons.  Les  Ar^ 
bes  y  sont  trop  deg^nerds ,  les  T»rfS 
trop  impuissants,  et  les  Maronites* 
soot  malheureusement  habjtues ,  d^fw* 
un  trop  long  temps,  a  ne  vivrc  qu*ffltrc 
eux ,  corame  de  meBants  prosorits  oo 
Cpmme  de  timides  rayas. 

PACHALIK  JD'ACBK. 

Le  pachalik  d'Acre  a  eprouv*d'a»« 
fortes  vicissitudes  et  d^assex  granw 


SYKLE     IV10DER^^E 


€^^/^/>■^^^^.  Arr.i  /A'    frifu'Ii 


SYRIE  MODERNE. 


at 


dimi^iitt  ddfrnif  S^lim  P'.  II  eut  d*a- 
bard  Said^  poor  ville  firincipale ,  et  fut 
ap^M  de  06  nom;  mais  depais  ^  le 
hardi  aveoturier  Dhaher,  au  milieu  du 
dix-buid^e  si^le ,  souleva  les  Druzes , 
r^krt  pea  i  peu  le  repr^aentant  da  la 
SttbNme  Porte  h  n'aToir  pins  d*autorltd 
(}oe  sur  ia  garnison  de  Said^h ;  depuia 
MTtout  quMI  fortifia  raneienne  Ptol^ 
nan,  et  en  fit  une  place  asaez  redouta« 
Me  pour  des  arm^  turquf  s ,  apres  le 
f^e  ^pMmere  de  ee  vaillant  monta* 
faard ,  Diezzar,  qui  Tavait  vaineu ,  alia 
retablir  oans  sa  eapitale ,  dont  il  fit  le 
leuTeau  chef-lieu  de  son  pachalik.  A 
Pheure  qa'jl  est  le  pachalik  d'Acre  a 
loe  asses  f^rande  ^tendue,  borne  qu'it 
cstau  nord  par  la  riviere  d'El-Kelb; 
pais  s'^tendant  a  Test  le  long  de  I'Anti- 
Ltban,  sans  y  eomprendre  Balbek 
Bbnmoira,  suivant  la  vallee  de  fiekaha 
iwqu'aux  sources  du  Jourdain,  etbor- 
dant  ta  rive  droite  de  ce  lleuve  en  y 
oiglotMiflt  le  lae  de  Tiberiade,  Tan- 
dfone  mer  de  Galilee;  &  Touest  la  M^« 
diterran^  en  bai^ne  les  rivages  de 
hmth  h  Kaisarieh,  qui  le  linute  aa 
nd. 

Ce  pachalik,  eoniroe  celui  de  Tripoli , 
a  dem  natures ,  Tune  dpre  et  s^^re , 
Tautre  Kracteuse  et  riante;  il  a  aiissi 
deux  climats,  Tun  presque  torride, 
Tautre  temper*;  d'une  part  des  vall^s 
am  oroductions  tropicales,  d*autre 
part  des  montagnes  aux  escarpements 
aridfs ,  aux  flancs  peniblement  cultiv^s. 
Tout  feU ,  du  rests ,  ne  formerait  qu'un 
eontraslcmt^ressant  et  agreable,  et  en 
varfant  les  produits  du  sol  assurerait  la 
|nt>sp^te  eenerale,  si  ce  pachalik 
o'avait  aussi  deux  populations,  Tune 
tarbulente  et  Tautre  tranquille,  Tune 
ferooche  et  I'autre  douce,  Tuueidold- 
^  et  Tautre  chretienne,  les  Druzes  et 
^  Maronites.  Ce  qui  fait  le  mailieur 
«s  Maronitps  dans  ce  canton,  c'est 
^*ils  soot  m^l^  aux  Druzes ,  ennemis 
ttns  foi  et  sans  pitie;  oe  qui  fait  Tin- 
fcmie  des  Druzes ,  c*est  qu'ils  ont  at- 
M  les  Maronites  par  des  promesses 
nensong^res ,  c*est  quMIs  ont  concM^ 
fe  terres  de  leur  plein  gr^  aux  ehr6« 
l^s,  et  qu*ils  les  leur  arrachent  en- 
ftite  avec  violence,  c'est  quMls  d^pouil- 
KDtdela  moisson  ceux  qui  ont  r^pandu 
^  semence.  Peuplade  perGde  et  aange- 


reose  que  ces  Druzes,  dont  rhistoiro 
nous  apprendra  les  trahisons  et  les  cri- 
mes sttooessifa;  dure  aux  petits,  indo- 
lente  et  volease,  eraelle  et  IMie  tout 
ensemble!  Piutdc  valets  de  bounreaux 
que  bounreaux  eux*ni6nias ,  les  Druzes 
poussent  k  bout  les  Maroaites  a  force 
d*avani€s;  et,  lorsqoe «0uz-ot  le aoul^- 
vant  enfln ,  s'uniasent  poiir  ae  defendre, 
les  DniEes  les  vont  denonoer  a  la  vin- 
diete  turqua,  et  se  font  lea  ex^cuteurs 
des  hautes  oeuvres  du '  pacha.  Tant 
qu'une  politique  bumaine  et  ^nergique 
k  la  fois  n'aura  pas  separ^  a  toujours 
les  Druses  des  Maronites,  Tivraie  du 
bon  grain ,  les  troubles ,  ies  depreda- 
tions, lea  meurtres  ne  oesseront  pas 
dans  cette  malheureuse  eontree. 

II  y  a  enoore  d*autres  peupiades  que 
les  Maronites  at  les  Druzes  dans  le 
nachalik  d*Acre.  Au  fond  du  desert  de 
Balbek,  dans  les  gorges  de  rAnti-Lifoan , 
se  trouveiit  en  assez  f^rand  noinbre  lea 
M^tualis,  race  inoffensive  quoique 
brave,  calme  et  eraintive  depots  que  la 
tyrannie  de  Djezsar-pacba  s*est  appe- 
santie  sur  elle.  Proscrits,  du  reste, 
eoinnie  sectateurs  d'Ali ,  Tanti-khaiife , 
les  M6tualls  se  cachent  dans  leurs  mon- 
tagnes  ou  ne  demeurent  que  dans  lea 
plaines  les  plus  ^loignees  de  toute 
grande  ville.  Avee  eux  s'^rtent  aussi 
des  grands  centres  de  populations  quel- 
ques  sectes  idoliltres,  dont  nous  detail* 
lerons  les  mceurs  dans  un  chapitre  par- 
ticulier,  mais  dont  influence  n'est  pas 
assez  importante  pour  Itre  mentionnee 
ici.  EnGn,  aux  environs  de  Kaisarieh 
se  rencontre  une  nombreuse  tribu  arabe, 
dite  de  Sakr,  Keprenons  maintenant 
notre  description  politique ,  sans  nous 
inqui^ter  davantage  de  quelques  indivi- 
dus  isoles  qui  se  refugieot  dans  les  ca- 
vemes  de  TAnti-Liban,  oomme  des  b^- 
tes  fauves  dans  leurs  tanierea* 

On  entre  dans  le  pachalik  d*Acre  en 
traversant  une  gorge  celebre  par  son 
^tendue,  par  sa  profondeur,  et  par  la 
dtfUculie  de  ses  cnemins.  Des  rocbers  k 
pic  la  bordent  de  toutes  parts ,  et  ces 
roehers  sont  devenua  historiques  par  lea 
inscriptions  dont  ila  sont  eou verts.  Des 
eonqu^rants  divers  y  ont  laias^  leur 
empreinte  :  S^sostris  y  a  fait  sculptor 
quelques-uns  de  aes  soldats  immolant 
aux  aieox  des  eaptift;  Trajan  y  a  laisse 


33 


L'UNIVERSi 


siir  le  roc  la  preuve  de  ses  travaux  de 
deblayement  :  rupibus  imminentiims 
iter  liberavU ;  enfin  Djaffar  El-Mansour 
y  fit  graver  sur  la  pierre  la  date  de  son 
glorieox  passage.  Outre  les  vestiges  de 
oes  iilustres  tueurs  d'hommes,  se  trou- 
vent  aussi  les  traees  toutes  charitables , 
au  contraire ,  des  premiers  anachor^tes 
Chretiens :  ce  sont  des  cellules ,  creusto 
dans  la  montagne,  ou  Ton  voit  encore 
Je  banc  de  pierre  des  meditations  reli- 
gieuses,  et  quelquefois  Timage  naive- 
ment  sculpt^e  du  Sauveur.  Une  fois  le 
defile  traversd,  on  arrive  de  pentes  en 
pentes  k  une  merveilleuse  vail^ ,  celle 
de  Bayiouth.  Nous  vous  avons  deja 
bien  souvent  parte  d'orangers  aux 
branches  elegantes  et  parfumees ,  aux 
fleurs  d'argent  auxquelles  succ^ent 
des  fruits  d*or;  de  nopals  aux  feuilles 
lai^cs,  velout6es  et  luisantes;  de  ca- 
Toubiers  a  la  verdure  forte  et  aceen- 
tuee;  de  platanes  k  T^corce  aussi 
brillante  que  le  feuillage;  de  pins  k  la 
t^te  haute  et  ombragee;  d*oliviers  a 
la  couleur  grise  et  tendre;  de  palmiers 
aux  rameaux  souples  et  gracieux ;  nous 
vous  avons  vant^  aussi  ces  gazons  tout 
^mailles  de  jacinthes,  d'an^mones  et 
de  girofl^es;  nous  vous  avons  dit  en- 
core le  dessin  vari^  des  coteaux,  les 
oouleurs  changeantes  de  la  mer,  et  les 
majestueuses  cimes  qui  s'dchelonnent  k 
rhorizon ;  nous  vous  avons  parle  de  tou- 
tes ces  magnificences  en  detail,  k  mesure 
qu'elles  se  pr6sentaient  a  nos  yeux;  eh 
bien ,  imaginez-les  r^unies  dans  un  seul 
tableau ,  et  vous  pourrez  vous  figurer 
Taspect  de  la  piaine  enchants  de 
Bayrouth. 

Bayrouth  (Tancienne  B^ryte)  est 
digne  d'etre  la  ville  d'une  aussi  belle 
eampagne.  £l6gamment  ^tendue  vers 
la  mer,  descendant  d'une  coliine  douce 
et  gracieuse ,  la  t^te  dans  les  nues,  les 
pieds  dans  Teau ,  elle  ressemble ,  selon 
rexpression  orientale ,  a  une  charmante 
sultane  accoudee  sur  un  coussin  vert , 
et  regardant  les  flots  dans  sa  r^veuse 
indolence.  Ses  terrasses  toutes  charges 
de  fleurs,  ses  maisons  aux  sveltes 
ogives,  ses  toits  plats  surmontes  de 
creneaux  en  pierre  ou  de  balustrades 
en  hois,  ses  murailles  moresques  aux 
mines  fleuries  et  feuillues,  la  couleur 
^latantede  ses  fortifications  modernes, 


ses  rodiers  par  ffroupes  qui  pointat 
sur  la  mer,  sa  raoe  ferm^e  par  aa  pro- 
montoire  aigu ,  les  mQriers  biases  qoi 
s'^tendent  sur  ses  flancs,  les  t^tes  co- 
quettes de  palmiers  qui  s'^^vent  de  sei 
places ,  les  tofis  harmonieux  de  ses  man 
peints  en  bleu  ou  en  rouge. les  mioarets 
de  ses  mosquto,  les  domes  de  sci 
paFais ,  et  avant  tout  son  ciel  toojoon 
pur,  son  air  Hmpide  qui  permet  i  k 
vue  de  tout  saisir  «t  de  tout  d^UiUer  a 
la  fois ,  cet  ensemble  forme  un  specta* 
cle  ra  vissant.  Cette  cite,  queles  Rocnaitf 
avaient  appel^e  Felix  (THeureuse), 
dont  le  sol  est  imm^morialementfertllc, 
dont  Tori^ine  se  perd  dans  la  fable, (knt 
la  fondation  est  attribuoe  a  SatonKi 
cette  cite  detruite  par  Typhon,  fiit 
rebdtie  par  Auguste,  qui  ne  trounpK 
de  meilleur  emplacement  pour  sa  coio* 
nie  romaine,  et  qui  lui  doona  le  doo 
si  cher  de  sa  fille  Julia.  Favorisee  par 
toutes  les  civilisations,  embellie  par 
tons  les  maltres  de  la  terre,sar»k 
bien  abritee  serable  appeler  leoomome 
et  tendre  les  bras  au  monde;  mais 
roalgr^  ses  aceroissements  quotidieos, 
malgre  Taugmentation  progressive  de 
ses  habitants ,  cette  cite  n'en  est jas  ■ 
moins  aujourd'hui  un  sejour  d'afflie- 
tion.  Point  central  du  Libaa,  Bay- 
routh est  devenu  le  quartier  general  w 
troupes  envoyees  de  ConstantiDO|)le 
pour  imposer  la  paix  a  la  montagoe. 
Cest  de  la  qu'en  oes  Verniers  \m^» 
sont  eianc^s  ces  bandes  d*Aroauts 
indiscipline,  qui,  acoomf»gnes  da 
Druzes,  leurs  feroces  auxiliaires,  oat 
porte  le  fer  et  le  feu  dans  les  villi^ 
maronites.  Ainsi,  une  contree  « 
lliomme  seniblait  pr^estin6  au  boa- 
heur  s'est  changee  en  une  de  ces  vailees 
de  larmes  dont  parlent  les  propbetes,c8 
rigides  augures. 

Au  sud-est  de  Bayrouth  on  reoceeW  i 
Delr-el-Kamar,  Taire  redoutable  de  c«  j 
avides  vautours  qui  dcvorent  le  p^vs*  j 
la   capitale  des  Druzes.  On  arri«  a 
I'ancienne  residence  de  Tcmir  Bescmr, 
qui  seul  a  jamais  pu  maintenir  les  po- 
pulations idolAtres  de  ces  montagiKSi 
par  une  route  vraiment  infemale,d«i« 
avenue  de  cette  cit^  de  demons.  IQ 
nous  ne  pouvons  roister  encore  « 
plaisir  de  citer  un  tableau  de  plits  as 
notre  grand  peintre,  de  Lamariii»«. 


•  V* 

•  • ••      •••  • 

•  *,  •  •  •  • 


I    • ••         ,• 

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••••   ••• 


SYRIE      ANCIENNE. 


fHt  ji%eitnnt 


C 


-j^  j^^  T'ry-^y  ■— 


y*'f^/y/A^i<      fi     3aSrout . 


SYRIE  MODERNE. 


13 


un  bieo  lutter  avec  fui  seratt  uae  trop 
fiiHeteroerite :  «  Nous  arrivAmes ,  apra 
i  deox  heores  de  marefae,  k  une  valine 

•  plus  profonde,  plas  ^trotte  et  plus 
« jpittoresque  qo'aueune  de  celles  que 
« nous  avions  deja  parcourues.  A  droite 
« et  a  gauche  s'elevaient,  comme  deux 
«i«flipart8  perpeodiculaires  hauls  de 
« trois  h  quatre  cents  pieds ,  deux  chat- 
foes  de  moDtagpes  (|ui  semblaient 
;«  afoir  ^te  separees  recemroent  Tune 
:«  de  Tautre  par  un  coup  de  marteau 
^ds  fiibricateur  des  niondes,  ou  peut- 
•Are  par  le  tremblement  de  terre  qui 
« tecoaa  le  Liban  jusque  dans  ses  fon- 

•  demeats  quand  le  Filsde  rhomme,  ren- 

•  dant  son  tme  a  Dieu ,  non  loin  de  ces 

•  m^mes  monta^nes ,  poussa  ce  dernier 
tsoupirqui  retoula  resprit  d'erreur, 
«i  d'oppression   el   de   mensonge,    et 

•  souffla  la  Yerit^,  la  liberie  et  la  vie 
«  dans  an  inonde  renouvel^.  Les  blocs 
«  cigaQtesques ,  detaches  des  deux 
« flancsdes  montagnes,  semes ,  coinme 
«  deseai'iioQx  par  la  main  desenfanls, 
«dai)sielil  d'un  ruisseau,  formaient 
«fe  fit  horrible,  profond,  immense, 

•  herifise,  de  ce  torrent  a  sec :  quel- 

<  ques-ones  de  ces  pierres  ^laienl  des 
t  masses  plus  elevto  el  plus  longues 
<4ue  de  haules   maisoos.  Les  unes 

•  etaieot  pos^s  d'aplomb  comme  des 

•  eobes  solides  et  6temels;  les  autres, 
( sttspendnes  sur  leurs  angles  et  sou- 
itenues  par  la  pression  d*autres  ro- 
tehes  invisibles,  semblaient  tomber 
(encoTe,  rouler  toujours,  et  presen- 
I  taient  rimage  d'une  mine  en  action , 
I  d'une  ebute  incessante ,  d*un  chaos 

<  de  pierres,  d*une  avalanche  intaris- 
i  sable  de  rochers  :  rochers  de  couleur 
>  fuoebre,  gris,  noirs,  roarbr^s  de  feu 

et  de  blanc,  opaques;  vagues  pelri- 
iees  d*ua  fleuve  de  granit;  pas  une 
tgoutte  d'eau  dans  les  profonos  inter- 
tiUces  de  ce  lit  calcine  par  un  soleil 
kknUaot;  pas  une  herbe,  une  lige,  une 
» Ijaate  grimpante ,  ni  dans  ce  torrent , 
^aisur  les  peotes  crenelles  el  ardues 
lies  deux  coles  de  Tablme;  c*etait  un 
^9thn  de  pierres,  une  cataracle  de 
fnebers  h  laquelle  la  diversite  de  leurs 
•fcrmes ,  la  variety  de  leurs  poses ,  la 
*tizarrerie  de  leurs  chutes,  le  jeu 
f^  ombres  ou  de  la  lumiere  sur 

•  inn  flancs  ou  sur  leur  surface »  sem- 

3"^  Uvrcuson,  (syrib  modsbrb. 


«  blaient  prates  le  mouvement  et  la 
«  fluidity.  Si  le  Dante  edt  voulu  pein- 
«  dre  dans  un  des  cerctes  de  son  enfer, 
«  Fenfer  des  pierres ,  Tenfer  de  Taridit^, 
«  de  la  ruine,  de  la  chute  des  choses, 
«  de  la  degradation  des  mondes ,  de  la 
ft  caducite  des  dges,  voila  la  scene  quMl 
«  aurait  dQ  simpleroent  copier.  C'est 
«  un  fleuve  des  dernieres  neures  du 
«  monde  quand  le  feu  aura  lout  con- 
«  sum^,  el  que  la  terre,  d^voilant  ses 
«  entrriilles ,  ne  sera  plus  qu'un  bloc 
«  inutile  de  pierres  calcin^cs  sous  les 
c  pas  du  terrible  juge  qui  viendra  la 
«  visiter!  » 

Deir-el-Kamar,  situ^e  dans  une  val- 
1^  assez  bien  cultiv^e,  n*a  rien  par 
elle-m^me  qui  m^rite  d*Stre  mentionne. 
Ses  maisons  basses  et  grillees ,  ses  rues 
non  pavees  elmal  entretenues,  les  restes 
insigniGants  d*un  chlileau  qui  ne  pos- 
sede  point  T^legance  ordinaire  de  rar- 
chitecluremauresque,  lui  donnent  beau- 
coup  plulot  Taspect  d'une  grosse  bour- 
gade  que  d'une  capilale.  (Test  bien  U 
le  centre  d'une  peuplade  sauvage,  qu*on 
ne  peut  gouverner  que  par  la  terreur, 
qu*on  ne  peut  conlenir  qu'avec  le  sabre, 
qui  ne  sail  lirer  aucun  parti  des  riches- 
ses  qu*elle  derobe,  qui  n'a  d'aulre  luxe 
que  celui  des  armes ,  et  quelquefbis  ce- 
lui  des  vStemenls  toujours  ^clatants 
d*or,  toujours  brillants  de  couleors.  Ce 
qui,  au  conlraire,  captive  Tattenlion, 
en  prouvant  toute  Finstabilit^  des  for- 
tunes orientales,  c'est  le  palais  vide 
de  Tancien  dominaleur  du  Liban ,  I'e- 
mir  Beschir. 

Yoyez  surcc  mameloncette  enceinte 
immense,  toute  pleine  de  lours  carries, 
de  galeries  qui  s'ela^ent,  d*arcades  qui 
oourent  de lous cotes,  de  vastes  dcu- 
ries ,  de  larges  eours ;  remerquez  cette 
chapelle  catnolique  face  k  face  d'une 
mosqu^e  musulmane,  ce  bdtiment  par- 
ticulier  qu'au  petit  noinbre  de  ses  fenf- 
ires grillagees ,  qu*a  ses  porles  basses  et 
lourdes,  qua  ses  jardins  inlerteurs  tra- 
ces avec  soin,  on  reconnatt  facilement 
pour  un  harem ;  jetez  les  yeux  sur  ces 
fonlaines  d'ou  Teau  ne  coule  deia  plus , 
sur  ces  parterres  de  fleurs  que  des  her- 
bes  parasites  reroplissent  seules  desor- 
mais;  considerez  cette  morne  solitude, 
ecoutez  ce  silence  lugubre,  et  vous 
comprendrez  avec  quelle   rapidity  les 

)  « 


u 


L'UNIVERS. 


niioGS  86  font  en  Syrie ,  au  milieu  d*ua 
peuple  barbare,  lea  Drazes,  et  avec 
dea  mattrea  indiff^renta,  lea  Turea.  Ce 
deaert  da  inonumeiita  encore  debout, 
mais  qui  deia  chancellent  de  toua  c6t^, 
c'est  Dpteain,  l*ancienne  residence  de 
la  famille  Shaab  deportee,  en  1840,  a 
Malte,  par  PAngleterre. 

R^escendons  maintenant  sur  le  ri* 
vage  sablonneux  de  la  Mediterran^,  et, 
a  sept  ou  huit  lieues  au  sud  de  Bayruth , 
apr^s  avoir  traverse  aur  un  greasier  pont 
en  boia  Timpetueux  Dhamour  ( Tanciea 
Thamyris  de  la  my  thoiogie  greoque)  et  le 
ruisseau  d*El-Aoulasurun  troncd'arbre, 
nous  allona  trouver  Saideb,  abaodonn^ 
pour  la  derniere  fois  sans  doute,  d^cou- 
ronnee  k  jamais.  G*est  ici  qu'il  nous 
faudrait  ^voqiier  le  genie  de  Thistoire 
pour  nous  raconter  des  grandeurs  dont 
il  ne  reste  que  le  vide  emplacement ,  dea 
magnificences  disparues  si  complete- 
ment  qu*on  en  chercbe  en  vain  quelquea 
vestiges.  La  ville  actuelle  s'amoindrit 
tous  les  jours,  laisse  toraber  des  maisons, 
perd  des  babitants  et  voit  s'effacer  jus- 
qu'a  ses  ruines.  (^t  amphitheatre ,  jadia 
toot  convert  d*6difices ,  et  qui  embras* 
aait  deux  ports  plains  de  vaisseaux  ,  ne 

Sorte  plus  que  la  luxuriante  vegetation 
e  la  nature  syrienne;  les  demons  de 
Fancien  palais  gotbique,  k  Tarchitecture 
fine  et  riche ,  ont  et^  disperse  il  y  a 
moins  d'un  siMe  par  les  boulets  turcs ; 
le  chateau  mauresque,  qui  commandait  la 

rsse ,  et  dont  lea  tours  se  rattachaient 
la  ville  par  un  pont  aussi  hardi  que 
pittoresque,  a  croule  bier  sous  les  bom- 
oes  an|[;laise8.  Quelques  rues  sales,  quel- 
ques  plaees  encombrees  de  pierres^rou* 
lees ,  une  rade  nue ,  une  darse  combl^ 
de  sables ,  voil^  ce  qui  reste  de  toutes  les 
richesses  accumul^es  tour  a  tour  en  eea 
lieux  par  les  Pheniciens ,  les  Grecs  et 
les  Romains.  Sous  le  gouvernement  dea 
premiers  pachas,  Saideh  contenait  en- 
core vingt  mille  dmes;  depuis  cinquante 
ans  elle  a  perdu  deja  les  trois  quarts  de 
cette  population.  Le  commerce  s*en  est 
all^  aborderailleurs;  les  Europ^ensont 
quitt^  peu  a  peu  cette  plaee  depossed^, 
et  avec  eux  sent  partis  leurs  consuls, 
leurs  correspondants,  la  vie  active. 

Avant  de  visiter  Tyr  (Sour),  Tantique 
livale  en  prosp^rit^  de  Sidon  (Saideh), 
aujourd'hui  sa  soeur  en  decadence ,  je- 


tons  eacoie  uneoop  d'oeii  lur  lerinfi 
Les  souvenirs  .hiatoriquea  on  relirai 
a'y  presaent  ii  tous  les  pas  :  void  h. 
montagne  ronde  qui  servait  de  sepiik 
lure  aun  anciena  Sidoniens.  EUe  aval 
^t^ereus^de  toutes  parts  poor  y  le^M 
la  morne  nation  dea  trepass^;  chafi 
corps  homain  avait  sou  alv^e 
cette  ruche  de  la  mort.  Certains  e 
orgueilleux  ont  voulu  oouserver  im 
distinctions  aoeiales  iusque  daos  eitt 
cit6  de  Tegalit^  ^melle;  des  caraetMl 
traces  en  couleurs  vivea ,  disaieat 
doute  leur  nom  et  leur  ee\€btiti; 
la  langue  que  ees  caract^res  re[ 
taient  adisparu  comma  eux,  et  leur 
h  rimmortalit^  n*est  plus  qu'oa  fig 
dessin  sans  signification.  IraulM  « 

Sr^tendu  etaler  leura  richesses  jasqiA 
ela  de  leur  tombe  :  le  marbre  blaae^ 
leur  sarcophage  est  encore  la; 
leurs  OS,  ou  sont-ils?  Sortons  de 
montagne  funebre,  et  regardons, 
portea  de  Saideh ,  cette  petite  fka 
isolee  au  milieu  des  jardina  :  de  i 
maronites  Tont  ^levee  en  memoire^ 
Marie,  fille  de  Lazare,  qui  eat  la  » 
son ,  oQ  elle  est  morte.  Plus  loin  A 
musulroans  ont  b^ti  une  moaqn^  a 
ddmea  sur  le  point  de  la  cdte  o^i 
baleine  biblique  deposa  Jonas,  seloal 
tradition  juive  et  cbr6tienne  aossi  Ul 
que  mahom^tane. 

C'est  dans  les  environs  de  eette  Ml 
quee  que  commence  la  r^on  dct  i 
Dies  qui  m^ne  jusqu'a  Sour  (Tyr). 01 
ne  sait  comment  8*expliquer  ce  pM 
mene  singulier,    oe  moroeau  da  H 
hara ,  jete.  k  travera  une  nature  a  ndl 
el  si  verdoyante.  Les   Arabes,  te 
leur  simplicite ,  pr^tendent  qu!^\ 
des  sources  de  sable  comme  il  y  A 
d*eau;  ils  croient  aussi  que  del  c< 
rants   souterrains  transportent  a  r^ 
grande  distance,  d'El-Arich  parol 
pie  au  centre  de  la  Syrie,  des  floti 
sable   auxquels  les  trembiementt  < 
terre  donnent  ensuite  dea  issues  tf  f 
se  r^pandent  sur  le  sol  comme  ii 
mar^e  moutante.  Toujours  est-ilf 
oes  sables ,  qui  presque  tous  soat  A 
rouge  fone^^  s'amoncelteiit  en  eolliii| 
ferment  des  dunes  monvantes,ibili 
ficiles  a  traverser,  et  qui  vous  engM 
raient  si  un  veut  imp^toeux  s*defi 
tout  a  coup,  si  un  simmtn  venait  f^ 


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SYRK  MOD£RKE. 


35 


«.  Bkn  Be  pfloratt  dono  pto 
I,  aa  jnUieu  de  ee  petit  desert, 
Roasisd'Al-Kantara :  ee  o'est  poor- 
l^i'ane  foataine  d'eau  limpide, 
maffiOBS  et  quelqoes  jardins 
i  plage,  et  un  karavanserai  aux 
\  coun,  aux  ^curiee  spacieoses , 
nx  murailles  enti^rement  nuea. 
Moid,  du  reste,  arrives  sur  la 
Mies  eara?aiieB;  les  montagnes  soot 
I  escarp^,  les  lits  des  torrents 
liaticaoMs;  le  diameau  reparalt; 
Wtfaaodises  afQuent  et  se  iaissent 
r  par  eette  pompe  soeiale  ^u'on 
I  Doe  eapitale.  Damas  est  la  der- 
;£i!itj-Lioaii ,  Damasqui,  a  elle 
^vida  ptusieiirs  porta,  Tripoli, 
til,  eemme  Saint- Jean  d'Acre. 
syi'on  a  ^vi  plusieurs  cdtes  ro- 
ta et  andes,  qui  s'^tendent  au 
PAl-Kaotara ,  on  deboucbe  enfin 
lipliifiemie^  brdl^,  plane,  aux 
gamnet^pineux,  qui  s'en  va, 
^MetdiRBt ,  jusqu^ll  la  mer,  ou 
~~ee  a promontoire  aigu.  Puis, 
dees  promootoire ,  par  mi  les 
iifairirage,  00  voit  un  point  bril- 
^  reneaude  a  un  vaisseau  engrav^ 
vase,  e'estTyr,  la  eit^  nau- 
en  effet.  Une  jet^e  en  mine, 
'  eabanes  de  boue  adoss^es  a  des 
croabntes,    quelques  trou- 
de  chevres  noires  pour  toute  ri- 
U  quelques  Arabes  d^guenill^ 
iMte population,  la  Toila  telle  fue 
KdieUoBil^Ez^hiei  Va  faite,  cette 
its  mm.  Pas  une  6cole  dans  Ten- 
Idela  rillD  qui  inveuta  Tecrilure ; 
B  lamJbeaB  de  soie  sur  le  dos  des 
idaots  de  eeux  dont  la  pourpre  ha- 
NbiKMsC);  pasuii  soldat  sur  la 

te  a  fot  de  graTes  dbaertations  sar  le« 
i  4ii*einployaieol  tis  Tyrkns  pour 
»la  coalear  du  coqnillage.  Quoi  quMl 
L  BQ  usage  qui  exMe  d**  temps  imm^- 
Idans  ics  «fov irons  de  Tvr  amdnerait 
tK  la  flofulioii  de  csette  difliculte.  Vera 
id«  iuin  el  Jusqu*au  milieu  de  Juillct 
JrejelU  un«?  assez  grande  quaiilite de 
■fBi,  peut-etre  le  murex  purpureus; 
tfwive  dans  les  sables  de  la  plaj^e ,  k 
i  no  pled  de.  profondeur  sous  IVau  A 
poqoe,  oa  c^elmia  f«te  du  Cheik*Ma- 
anfioo  CB  ruine  ifeiev^  sor  uoe  buUe 
Hie  M  miiieu  de  la  pUiine,  el  k  cMA 
Ifei  de  raqiKduc  qui  conduisail  an- 
it  les  eaaK  h  la  vllle.  L«s  enfants 


to  p^ciie  de  oe  ooooi  liaise ,  (pii ,  retirt 
n,  reJeUe  une  matiere  baveuse  de  cou- 
Mea-p&Ie  oa  Tlolelte.  qa*il5  essuient 


plage  de  la  derail  posaessdon  des 
Crois^s  en  Syria ;  pas  un  faisseau  dans 
le  port  de  la  grandb  cit^  aavigatrice  des 
premiers  tees,  de  la  Venise  antique! 
Mais^  que  di»je?  Yeoise,  qu'est-elle  de- 
venoe  elle-mlme  ? 

Parmi  lea  deoombres,  infonnes ,  qui 
entourent  la  plaine  oh  fut  Tyr,  on  re« 
connalt  encore,  qiioique  a?ee  peine,  des 
arcades ,  sous  les  quelles  se  distinguent 
de  place  en  place  les  cavit6s  a  moiti^ 
con^bldes  d'un  oanafr :  c'etait  Paqueduc 
<]ui  porta  it  des  eaux  fratches  et  puree 
jusque  dans  Tisthme  pb^nicien.  En 
suivant  les  traces  de  ce  canal  on  arrive 
h  des  reservoirs  dits  PuUs  de  Salomon 
par  les  Chretiens  ,  et  Ras^l-JiUf  tSte 
de  la  source,  par  les  Musulmans.  U 
existe  trois  puits  principaux  et  plu- 
sieurs petits.Leur  ensemble,  forme  d'un 
ciment  plus  dur  que  la  pienre ,  s'eleve  k 
plus  de  quinze  piedsdu  sol.  On  parvient 
a  la  margelle  de  ees  puits  par  une  pent^ 
douce  que  peuvent  mooter  les  animaux, 
tout  aussi  bien  que.  les  hommes ;  et  \i 
ce  qui  frappe  1  esprit  d'etonnementy 
,  c'estqu*au  lieu  d^apercevoirTeau  profon* 
dement  enfoiiie,  vous  la  voyez ,  au  eon- 
traire,  au  ras  de  la  plus  haute  maconne- 
rie ,  bouillonnante  et  6cumante  ebmme 
un  iorrent ,  et  s*^pandant  a  travers  plu- 
sieurs canaux.  Comment  cette  eau  si 
abondante  et  si  limpide  sorgit-elle  ainsi 
au  milieu  d*une  plame  dessech^e?  c*est 
oequ'aurait  dD  nousapprendre  Salomon, 
qui  fit,  dit-on,  construire  ces  puits  pour 
reconnattre  les  services  que  lui  avait 
rendus  le  roi  Hiram  de  Tyr,  et  sa  ma« 
rine ,  et  ses  architectes ,  lors  de  la  cons- 
truction du  temple  de  Jerusalem. 

An  dela  des  puits  de  Salomon  les 
montagnes  reco^nmencent  h  s'elever, 
sans  se  peupter  pourtant,  et  sans  offrir 
souvent  Vaspect  de  la  culture.  Quelques- 
unes  s*avancent  dans  la  mer,  entre 
autres  le  Ra%-M-Abiadj  laT^te  blan- 

c  sur  dM  linges  blanes,  en  fnrmant  des  bandes 
«  regulleres;  lis  y  ajoutent  un  peu  de  soude, 
K  et  expriment  le  Jus  d'un  petit  llmoii ;  leun 
«  llnges  soni  aussildl  feints  des  plus  vives  cou- 

•  leurs-  Chaque  enfant,  a  la  fde  tlu  Cheik-Ma- 

•  chou,  porte  au  bout  d'un  bAtoo  son  peUt 
«  drapeau  a  couieun  vives  et  vari^. 

«  Cette  remarque  a  el^  envoyee  k  une  soci^td 
«  scientttique  de  Naples,  par  M.  Jionis,  direc- 
«  teur  de  la  quarantaioe  a  Sour.  » 

\ExiTfiU  du  livre  de  M,  Ferdinand  Pettier, 
ancten  aide  de  camp  de  Soliman-Pacha, )    ^ 

8. 


36 


fUNIVERS. 


che,  qui  forme  Uii  cap  tres-^lev^  et 
tres'etendu.  On  est  longtemps  a  le  fran- 
chir,  et  longtemps  on  est  poursuivi  sur 
le  rivage  par  le  retentissement  continu 
des  lames  qui  se  brisent  sans  cesse  sur  ses 
larges  flaocs.  Dans  ces  parages,  d'aiU 
leurs ,  la  mer  est  presque  toujours  hou- 
leuse.  Ne  pouvant  entamer  le  roc  solide 
du  Raz-al-Abiad,  elle  s*en  venge  sur  le 
littoral  sablonneux,  et  creuse  dans  des 
collines  en  terre  noirdtre  des  trous  pro« 
fotids,  de  longues  caveroes ,  ou  elle  s'e- 
lance  en  musissant. 

Au  bout  d*une  dizaine  de  lieues  sur 
cette  cote  sauvage ,  le  rivage  toume  tout 
a  coup  vers  Test ,  s'arrondit ,  s'dtend 
dans  les  terres,  et  forme  un  large  demi- 
cercle,  qui  aboutit  au  cap  Carmel.  A 
rextremit6  sud  de  la  baie  est  situ^  le 
petit  village  de  Kaiffa ,  qui,  malgr^  Ta- 
vantage  d'etre  accot6  au  mont  Carmel , 
et  de  po6s6der  le  meilleur  ancrage  des 
environs,  n'a  pourtant  jamais  joui  d*une 
pro8p^rit6  reelle.  A  Textr^mite  nord,  au 
contraire,  s'^tend  la  viile  d'Acre,  qui, 
apr^  des  destinies  bien  diverses,  a  re- 
pris  depuis  soixante  ans  environ  une 
assez  j^rande  importance.  Les  juifs  la 
connaissaient  sous  le  nom  d'Haco ,  les 
Grecs  sous  celui  d'Accon;  Ptolem^ 
Taf fectionna ,  et  Tappela  Ptolemais. 
Apres  avoir  6t6  ^recque  et  ^gyptienne, 
elle  devint  colonic  romaine  sous  Fern- 
pereur  Claude;  puis  les  Arabes  la  con- 
quirenten  638;  les  Croises  la  reprirent  au 
commencement  du  douzieme  si^de,  et, 
a  cette  ^poque,  nous  la  ver  rons  dans  toute 
sa  force  etdans  toute  sa  c€l€britL  Deux 
sidles  piQS  tard ,  elle  fut  saccag^e ,  brd- 
16e,  ruin^  par  ces  m^mes  l^yptiens  qui 
nagudre  Tavaient  embellie.  Enfln  elle 
v^^ta  dans  la  misere  et  dans  Toubli  jus- 

gu'ace  que,  vers  1760,  Ahmed-Pacha  en 
t  sa  residence.  Acre  eut  le  don  d'appri- 
voiser  cette  b^te  f(6roce;  Djezzar  (le 
Boucher) ,  tout  en  etalant  quelques  t^tes 
couples  sur  ses  fortiGcations  k  la  ma- 
ni^re  des  tyrans  orientaux,  la  dota 
pourtant  d'une  mosquee  digne  de  Cons- 
tantinople, d*une  fontaine  digne  d'A- 
lep ,  d'un  bazar  digne  de  Damas.  Quoi 
qu'il  en  soit,  Acre  ne  peut  jamais  deve- 
ner  une  capitale ,  car  sa  rade  est  dange- 
reuse ,  son  port  est  comble ,  et  ses  rou- 
tes de  terre  sont  presque  impraticables. 
La  campagne  qu'elle  commande  est 


fertile,  il  est  vrai,  mais  elle  futt 
mai  cultiv^  ou  exploit^  avee  : 
ffencd.   C*est  qu'aussi  Djezzar 
donn^  le  plus  mauvals  des  exe 
il  avait  aoeapare  tout  le  ble  de  b  j 
et  monopolist  tout  le  coton  qa'ef 
duisait.  On  ne  pouvait  vendreqif| 
on  ne  pouvait  achetef  qu*a  lui :  * 
pulations  agricoles  et   comme 
etaieut  a  la  fois  pressurees.  Em 
Europeens  r^lamerent-iis  aupresj 
Porte  par  Fentremise  de  leiirs  s 
deurs;  la  Porte  etait  deja 
pour^influer  sur  la  volonte  du 
d'Acfe.  Aussi ,  on  avait  beau  sH 
sur  des  traites  avec  le  divan ,  sel 
sur  des  capitulations  librementc 
ties,  le  pitoyable  gouvememe 
pachas  emp^hait  la  justice  d*aii 
oours,  les  lois  internationalesd'^ 
qu6es.  Ces  satrapes,  trop  puii 
laient  les  provinces  pour  s*e 
une  fois  possesseurs  des  trteitij 
massacre  de  leurs  proprietaJres  1 
rantissait,  ils  mena^aient  la  Vot 
declarer  ind^pendants,  si  elie  oel 
sait  pas  contmuer  leur  system^ 
predations,  d'avanies,  de  meurti 
vols.  Le  r^sultat  deplorable  d'o 
systeme  survivait  mime  au  ty 
pays  devast^  n*of!rait  plus  aa  ; 
seur  d*un  pacha  despotique  les  i 
ces  necessaires  pour  payer  It  i 
de  sa  ferme.  Qu*on  ne  s*e 
plus  a  pr^ent  de  la  misere  ^ 
pauvre  Syrie ,  de  la  decadence  I 
villes  et  des  larmes  de  ses  f 

Reposons-nous  sur  le 
tristes  Amotions  que  le  soun 
Djezzar-Pacha  nous  a  fait  ^pr 
son  sommet  est  une  chapelie  ( 
prophete  l&lie.  La  se  developf 
regards  la  grandeur  des  monl 
tendue  des  eaux,  Fimmensile  i 
Le  spectacle  de  Foeuvre 
Createur  peut  seul  consoler  des  i 
humaines  qui  grouillent  ^  vos  j ' 
monastere  de  chari  tables  carme 
y  donnera  une  hospitalite 
tienne.  Les  religieux  qui  Font  I 
eu  k  lutter  jusqu'a  nos  jours  < 
vidit6  des  pachas  :  on  leur  < 
'que  pierre  qu'ils  apportaient,  i 
tarifait  chaque  pan  de  mur 
vaient :  pour ouvrir telle  croisici 
payer  telle  somme;  pour 


SYRIE  MODERINE. 


17 


porte  il  fallait  solder  le  double;  chaqae 
coup  de  marteau  ruinait  la  congrega- 
tion ;  et  quand  Targent  manquait ,  Yes 
bons  freres  carm6lites  sospendaient 
leurs  travaux ,  s'en  ailaient  qu^tant  par 
)a  montagne,  demandaieot  des  secours 
k  Rome  et  a  la  France,  au  centre  da 
catbolicisme  et  au  centre  de  la  gen6ro- 
site.  Enfin  un  jour  le  toit  fut  plac^, 
Douvelles  exigences  de  la  part  des 
Turcs,  nouveaux  sacriOces  de  la  part 
des  chr6tiens.  Mais  alors  notre  pavil- 
ion national  vint  couvrir  de  ses  plis 
Srotecteurs  I'ouvrage  desreligieux,  et 
esormais  tout  put  ^tre  termini ,  et  un 
nouveau  refuge  s'ouvrit  h  la  chretient^ 
tout  entiere. 

Le  cap  Carmel  est  la  limite  de  la 
Syrie  fertile,  cultivee,  hospitaliere. 
Une  fois  la  montasne  saiixte  descendue, 
pour  atteindre  lelong  des  rivages  aux 
bornes  du  pacbalik  d'Acre,  il  faut  s'en- 
gager  dans  des  defile  de  collines  nues, 
sedies,  arides ,  noires  de  rochers,  ou 
blanches  de  poussiere.  Cest  deja  comme 
un  avant-gout  du  desert,  c*estdeja  la 
nature  usee ,  d^pouiliee ,  ^teinte  de  la 
Jud^e.  Seulement  aux  decombres  de 
toutes  especes  que  Ton  rencontre ,  on 
est  oblige  de  reconnattre  qu*autant  cette 
terre  est  abandonn^e  aujourd'hui,  au- 
tant  elle  fut  peupl6e  autrefois ;  autant 
elle  est  triste ,  autant  elle  fut  riante.  Ici 
ce  sont  des  colonnes  de  marbre  de 
Paros  dont  vous  poussez  du  pied  une 
brillanteparcelle,  mines  grecques;  1^ 
ce  sont  les  gradins  circulaires  a'un  cir- 

J|ue  immense,  ruines  romaines;  plus 
oin  ce  sont  des  murailles  d^coupees  a 
jour  h  la  mode  mauresque,  ruines  maho- 
metanes;  plus  loin  encore  un  faisceau 
(lispers6  ae  colonnettes ,  ruines  chrd- 
tiennes.  Toutes  les  grandes  races  ont 
laisse  des  vestiges  sur  cette  terre.  Mais 
h  qui  demander  le  nom  de  ces  villes 
disparues  ?  Derriere  ces  pans  de  murs 
on  ne  trouve  que  le  chakal  accroupi ; 
sur  le  sommet  de  ces  colonnes  on  ne 
voit  que  Tai^le  r^veur.  Le  premier 
endroit  habite  par  ^uelques  Arabfs,  a 
moitie  nomades,  etsimplement  converts 
de  leurs  longs  manteaux  de  laine  blan- 
dhe,  est  le  bourg  que  les  Grois^s  avaient 
nomm^  Castel  Peregrino  (le  Cbdteau 
des  p^lerins).  Le  chateau  est  detruit, 
le  lK)urg  s*eD  va  pierre  a  pierre. 


Enfin,  apres  avoir  travers6  un  eours 
d'eau  sans  importance,  que  Pline  avail 
appel^  ie  Fleuve  des  Crocodiles,  et  que 
les  Syriens  nomment  Zirka ,  on  arrive 
en  vue  d'une  ceinture  de  murailles  hau- 
tes  et  cr^nelees ,  qui  pourraient  defen- 
dre  une  cit6  de  20,000  &mes.  On  ap- 
procbe,  quelques  tours  apparaissent ; 
queiques  colonnes  de  porphyre  se  d6ta- 
chent  sur  le  ciel  bleu.  On  avance  en- 
core ,  on  penetre  dans  Tenceinte  for- 
tifi^e  :  pas  un  Itre  vivant,  des  rues  d6- 
sertes  et  pletnes  de  d^ombres.  Et 
pourtant  ces  murailles  sont  celles  que 
saint  Louis  fit  reiever,  ces  colonnes 
sont  les  debris  du  temple  d'Herode,  ce 
fouillis  de  ruines,  c*estce  qui  restede  la 
splendide  C^sar^e  .  la  ville  ou  prichatt 
saint  Paul ,  la  ville  d'ou  partirent  les 
ap6lres  pour  renouvder  la  face  de  la 
terre.  Arrachons-nous  aux  souvenirs  re- 
ligieux  et  bistoriques  (|ui  nous  assail- 
lent  dans  ces.  lieux  ou  le  silence  des 
temps  accomplis  a  remplace  le  bruit  des 

generations  vivantes ;  et  nous  parvien- 
rons  bientdt ,  en  suivant  toujours  les 
rives  de  la  M^diterran^ ,  a  une  vaste 
fordt  de  chines ,  la  plus  belle  de  toute 
la  Syrie  :  c'est  1^  la  limite  m6ridionale 
du  pacbalik  d'Acre. 

En  remontant  a  Test,  a  travers  des 
roches  calcaires,  et  des  montagnes  qui , 
au  lieu  des  grands  arbres  du  Liban, 
n'ont  plus  que  des  buissons  racbitiques, 
onsetrouveenpleineGalilee.  Quelle  pro- 
digieuse  transformation!  En  place  oe  la 
nature  riche  des  saintes  £critures,  une 
nature  pauvre;  en  place  de  forlts,  des 
sables;  en  place  de  la  culture  g^nerale, 
Tabandon  le  plus  complet ;  en  place  de 
villes  florissantes,  de  mis^rables  villa- 
ges. Ces  bourgades,  que  n'babitent 
plus,  du  reste,  que  quelques  Chretiens , 
quelques  juifs,  et  aes  bandes  d'Ara- 
bes  pillards,  ont  presque  toutes  une  his- 
toire  celebre  et  un  nom  illustre.  Ainsi 
Nazareth,  sanctifiee  par  la  residence  de 
Jesus-Christ;  Kana, le  lieu  du  premier 
miracle  du  fils  de  Dieu ;  Tiberiade,  puis- 
sante  d^  le  r^ne  de  Tibere,  importan- 
te  encore  a  Tepoque  des  Croisades ,  et 
dont  la  destruction  vient  d'6tre  presque 
achev6e  par  le  tremblement  de  terre  de 
1B37 ;  enfin ,  au  nord,  non  loin  de  la  val- 
lee  de  Bekaha,  qui  borde  le  pacbalik 
d^Acre  a  Test,  Sapbet,  une  des  quatre 


ts 


L'UniVERS. 


vitles  saintes  des  H6breax ,  village  arabe 
aujourd*hui  k  moiti^  abandonnn^.  Nous 
ne  nous  ^tendrons  pas  davantage  sur 
Tancienne  Galilee,  parce  que  le  savant 
M.  Munck  nous  avail  pr^venu ,  dans  sa 
Palestine,  et  a  fait,  d'aitleursja  descrtp- 
tioQ  la  plus  exacte  et  la  plus  conscien- 
cieuse  qu*il  soit  possible. 

En  resume,  lepachaiikd'Acre.avecses 
deux  villes  princi pales  de  15,000  dmes 
cbncune,  Acreet  Bayruth,  et  sps  mines 
memorables  de  cites  a  peine  frequenteesa 
I'heure  qu'il  est,  Sidon  et  Tyr,  ne  compte 
guere  plus  de  400,000  habitants.  Lesol 
de  ce  pachalifc  est  fertile  dans  le  canton 
de  Bayruthet  d'Acre,  aride  dans  lescolli- 
nes  rocbeuses  du  sud,  mais  quelques- 
uncs  de  ses  vailees  seraient  admirables 
si  la  tranquillity  du  pays  nVtaita  tout  ins- 
tant compromise  par  des  Metuaiis  affa- 
mes,  des  Bedouins  pillards  etdes  Druzes 
aussi  avides  que  f^roces. 

PACHALIK  DE  DAMAS. 

Nous  voici  arrives  a  une  nature  plus 
^gale,  a  un  climat  plus  r^gulier,  a  une 
contree  plus  homogene.  Les  grandes 
montagnes  sont  a  Fouest,  le  desert  est 
au  sud,  TEuphrate  est  a  Test;  quant  aux 
bornes  septentrionales  du  pachaiik  de 
Damas,  c'est  une  ligne  tout  adminis- 
trative, qui  n'a  aucune  barri^re  natu- 
relle  et  distincte.  Les  gouvemements 
de  Damas  et  d'Alep  n'ont  d'ailleurs, 
sur  cette  ligne,  aucune  ville  importante 
h  se  disputer;  car  il  ne  se  trouve  sur 
leur  froiitiere  que  des  terrains  va$rues, 
que  de  vastes  solitudes.  Une  longue  Ian- 
gue  de  terre,  qui  s'etend  de  Djesr  Chou- 
ghr  a  Bostra ,  est  seule  cultiv^e  dans  ce 

fmchalik,  qui  pnsse  pour  le  premier  de 
'empire,  et  donneenabondance  un  fro- 
ment  exquis ,  un  coton  recherche ,  el 
toutes  sortes  de  plantes  oleagineuses. 
Plusieurs  villes,  heureusement  situees  et 
travers^es  presque  toutes  par  TOronte , 
peuptent  cette  contr6e  favoris^e.  Ainsi^ 
au  nord  de  ce  pachaiik,  h  partir  du  ver- 
sant  des  montagnes  jusqu*a  quinze  k 
vingtiieues  a  Test,  s*allongentde  grasses 
et  abondantes  prairies :  c'est  la  vallee  de 
rOronte.  En  arrivant  k  Damas,  le  sol 
devient  plus  sec,  plus  maigre,  et  ne  pro- 
duit  avec  avantage  que  des  fruits  de  tous 
genres  et  du  tabac  renomm6.  Au  sud  de 


la  capitate,  enfin,  commeDeent let 
gues  plaines  du  Hauran,  d'oDeftt 
proverbiale.  Si  ce  pays,dontDOi 
nons  de  detacher  la  meitleure  partic 
r^gulierement  travaille,  il  nourrii 
cilement  six  millions  d  dmes  si 
quatre-vingts  lieues  d'etendue;  i 
compte  aujourd'hui  k  peine  qd  ( 
en  y  comprenant  les  penplades  on 
des' Bedouins  au  sud  et  des  Turiw 
au  nord. 

I  a  premiere  ville.  qu'on 
sortant  du  pachaiik  d  Alep  est 
Fancieniie  Apamee.  Straboni 
prend  que  les  Seleucides  avaieot 
dans  cet  endroit  une  eeole  im 
de  cavalerie,  tant  le  local  etait 
pos^  pour  cet  objet,  tant  les  pill 
etaient  nombreux,  tant  leseaoi 
des.  Quel  deplorable  changemeil 
lieu  de  clairs  rutsseaux,de  ni* 
recdges;  au  lieu  defougueuses 
de  lourds  buflfles;  au  lieu  d^herliei 
rantfs,  de  fetides  roseaux.  U 
fondateur  Seleurus  Nicanor  in 
Apnm^e  en  Thonneur  de  sa 
Arabes  ruinerent  cette  ville  idi 
I'honneur  de  leur  prophele.  (ji 
pauvres  paysans,  de  races  diven 
darobent  avec  peine  a  ravidit^des' 
etaux  ravages  des  Arabes quelqM 

{;res  moissons  d'orge  et  de  oiais.  \ 
es  habitants  de  Famiah  sont-ils  i 
droit  que  tout  autre  de  rep^trrfl 
verbe  des  rayas  de  la  Sublime  Pl 
Partout  oil  un  Osmanii  met  ^ 
rherbe  cesse  de  croUre. 

Quittons  ces  licux  desol6s,rti 
la  route  des  cara vanes ,  qui  d'«* 
uu'unechauss^romaine.  EHeMl 
duit  d*abord  par  un  pavs  presqae 
bite,  tant  il  est  expose  auxij"^ 
des  B^ouins  Maoudtis,  jusqu'a 
historiquement  celebre,  mais 
d'hui  petit  village  sans  imporM 
frequente  seulement  par  des  plW" 
bes.  A  quclques  lieues  au  dela  de 
meau  de  pares  et  d'etables,  appart 
campagne  plus  cultivee.  A  mesuii^ 
avaiice,  le  paysage  devientde 
plus  pittoresque;  lescoteaux  sec 
de  la  verdure  la  plus  vari^ :  w 
c6t^  du  palmier,  le  lau^ic^rose  i  w 
cypres.  Rienn'offre  un  aspect ?'•»* 
ge  et  plus  agri^^ble  a  la  fois  J* 
diversity  de  dessins,  cette  confua*' 


STRIE  MODERNE. 


t9 


eoiilear0,  ce  melange  de  parfums  qui  ca- 
ract^risent  certaines  oontrees  orienta- 
les.  Ce  caractere  est  sensible  surtoutdans 
I'endroit  ou  nous  somines  parvenas  : 
voici  dans  le  m^me  verger  Toranger  at 
ledattier  a  rexposition  du  midi,  le  pom- 
mier  et  le  jpoirier  h  Texposition  da 
Dord;  voici  dans  ce  jardin  des  piantes 
grasses  et  frileuses  non  loin  de  la  vio- 
lette  et  de  la  primevere  de  nos  climats; 
voici  le  saule  pleureur  sur  les  bords  de 
rOronte;  voici  des  bananiers  sur  ce  co- 
teeu  ^leve.  Cette  riche  v^g^tation ,  cette 
culture  soign6ey  ces  vergers,  cesjardins 
annoncent  un  grand  centre  de  popula- 
tion. Ce  n'est  pourtant  pas  une  puissan- 
te  cit^  que  nous  aliens  rencontrer,  c'est 
aeulement  une  petite  ville  riche  et  heu- 
reuse,  exception  presque  unique  en  Sy  rie. 
£n  avanqant  encore  a  travers  une  val- 
ine ^troite  et  accidentee ,  au  fond  de  la* 
quelle  roule  TOronte  sur  un  lit  de  blancs 
caiiloux,  a  un  detour  du  chemin,  sur  une 
petite  hauteur  domi nan te,  nous  allons 
apercevoirle  plus  jolt,  sinonle  plus  majes- 
tueux  des  paysages.  On  dirait  une  vuede 
ia  basse  Seine  :  e*est  la  m^me  verdure 
^latante,cesont  les  m^mes  coteaux,  a  la 
forme  gracieuse,  aux  sommets  boisea, 
aux  Danes  emailles  de  fleurs,  ou  brou- 
tent  de  blanches  ch^vres  etde  gras  mou- 
tons.  Mais,  a  Tavantage  de  la  Syrie,  le 
fond  de  ce  vallon  rharmant  contieiit  une 
ville  bien  plus  pittoresque  que  la  rouge 
Caudebec  ou  la  grise  Quilleboeuf.  Les 
domes  de  plomb  de  ces  mosqu^es,  les 
fleches  de  pierres  de  ces  minarets,  ces 
kiosks  aux  bandes  bleues  et  blanches, 
aux  toits  pointus  et  surmont^s  d'une 
boule  doree,  ces  maisons  aux  jalousies 
vertes  et  aux  stores  roses,  ces  rotoudes 
aux  cent  colonnettes  qui  s*avancent  sur 
i'Oronte,  ces  places  de  terre  battue,  en- 
tour^es  de  deux  lignes  de  paimiers,  ces 
lilas  qui  courent  sur  les  murs,  ces  jas- 
mins qui  entourent  les  portes,  ces  toiles 
peintes  qui  ombragent  les  rues,  et  sur- 
tout  ces  roues  hydrauliques  les  plus 
grandes  que  Ton  connaisse,  et  qui ,  en 
elevant  sans  cesse  Teao  du  fleuve,  la  font 
rejaillir  en  mille  cascades  6cumantes  et 
en  mille  jets  graeieux ,  toutes  ces  H^ 
gances,  tous  ces  charmes,  toutes  ces  har- 
monies reunies  font  de  Hamah  une  vM- 
table  ville  des  Miile  et  une  ntdts.  C'est 
qn'auni  Uamah  est  la  residence  habi- 


tuelle  des  n^ociants  tores  qui  se  sont 
enrichis  h  Damas  :  c*est  la  quils  ont 
reuni  tout  ee  qui  plait  ^  leur  godt,  tout  ce. 
qui  nourrit  leurs  longues  reveries,  toot 
ce  qui  flatte  leurs  sens  delicats  :  des  eauif 
murmurantes,  des  jardins  embaum^, 
et  le  luxe  interieur  le  plus  6blouissant. 
Entrons  maintenant  dans  une  de  oes 
demeures  de  la  f^licite  orientale.  Cbaque 
salle  a  son  bassin  et  son  jet  d*eau ,  son 
sopha  circulaire  et  son  estrade  de  fleura. 
Quelques-unes  de  ces  sal  les  sont  pavees 
en  raarbre  blanc,  quelques  autres  en 
mosaiques,  et  le  plus  grand  nombre  sont 
cou vertes  d'un  cle  ces  riches  tapis  dont 
les  couleurs  sont  si  vives,  la  laine  si 
^paisse  que  Toeil  croit  voir  et  le  pied 
croit  seiitir  une  pelouse  a  Pherbe  haute 
et  aux  fleurs  harmonipusement  distri- 
buees.  Mais  ce  n'est  rien  encore :  pen^ 
trons  un  instant  dans  le  kiosk  ou  le 
mattre  de  ceans  fait  son  kiefy  c'est-^- 
dire s'abandonne  a  cette  reverie  vague, 
a  ce  repos  ^tudie ,  a  cette  demi-somno- 
lence  qui  permet  a  Tdnie  d*errer  it  son 
aise  a  travers  Toeuvre  du  Creaieur,  par- 
mi  le  monde  des  idees  et  Tunivers  dea 
songes.  Avec  quels  soins  tout  a  ^te  pr^- 

f)arS  pour  satisfaire  les  sens  et  bercer 
'imagination!  Dans  une  salle  ronde, 
a^r^  par  cinq  fen^tres  en  ogive ,  aux 
grillages  dor^s,  et  qui  montent  et  bais- 
sent  a  volenti,  des  socles  en  albdtre 
portent  des  vases  de  fleurs  ou  des  casso- 
lettes de  parfums;  piusieurs  colonnettes, 
peintes  alternativement  en  bleu  et  en 
rouge,  soutiennent  un  nlafond  ovale  oil 
sont  repr^sentes  des  arores  d*or  sur  un 
fond  d'azur.  Entre  chacune  des  colonnet- 
tes sont  ecrits,  dans  ces  beaux  caracteres 
qui  sont  un  des  luxes  de  TOrient,  des  sen- 
tences arabes,  des  poesies  persanes  etdes 
versets  du  Koran.  Puis,  d'un  cdte,  brille 
un  faisceau  d*armes  ou  les  fines  lames 
de  Damas  et  dlspahan  s*echelonnent  sur 
les  pistoiets  daniasquines  deStamboul, 
sur  les  larges  espingoles  barbaresaues  et 
les  longues  carabines  albanaises ;  ae  Tau- 
tre  c6t6,  en  pendant,  s'^tale  un  rdtelier 
de  pipes,  dont  Tambre  jaune,  la  sole 
pourpre,  les  chemin^es  dories,  les  tiiyaux 
de  merisier  poll  font  la  richesse.  Enfln , 
un  tapis  de  Brousse,  un  sopha  de  ve- 
lours et  un  bassin  d^eau  limpide  com- 
pletent  Tameublement  deoe  delicieux  re- 
tiro. 


40 


L'UNIVHRS. 


3: 


I  ]^tonnez-vous  maintenant  que  le  ri- 
cbe  en  Orient  s*abandonne  si  facilement 
a  la  moliesse;  quMl  ne  songe  ni  h  aug- 
menter  sa  fortune,  lorsqu*eIle  lui  offre 
le  bien-^tre  que  je  vous  ai  esquiss^,  ni  a 
rechercber  ies  {E;randeurs  dangereuses 
du  vizirat,  ni  a  s'i n quieter  d'aut res  soins 
ue  de  jouir  en  paix  de  son  doux  climat, 
e  sa  belle  nature,  de  sa  parfaite  quie- 
tude. £n  Orient,  Ies  marques  honorifi- 
ques  ne  servent  qu'a  hierarchiser  le  pou- 
voir,  et  non  a  flatter  I'amour-propre  de 
cehii  qui  en  est  rev^tu  :  aussi ,  ceux  qui 
ont  acquis  de  quoi  vivre  a  leur  gre  n*ont 
plus  aucun  souci  de  ce  qui  pr^occupe 
notre  existence  en  Occident,  le  rang  so- 
cial, la  position  dans  J e  nionde.  L*egalit6 
est  r^eile  en  Torquie ;  on  rencontre  pres- 
que  autant  d'orgueil  et  de  dignity  per- 
sonnelle  dans  le  simple  soldat  ottoman 
que  dans  le  plus  puissant  pacha :  la  race 
entiere  des  Osmanlis  se  croit  noble. 

£n  quittant  la  ville  heureuse  et  char- 
mante  de  Hamah ,  qui ,  malgre  son  ^ten- 
due  materielle ,  ne  compte  pas  plus  de 
cinq  mil  le  habitants,  tant  Ies  jardins  y 
sont  entrem^les  avec  Ies  maisons,  on 
trouve  encore,  durant  quelques  lieues, 
une  campagne  cultivee  avec  soin,  une 
v^etation  brillante  et  variee;  ce  sont 
comme  Ies  faubourgs  dela  cit6  du  bon- 
heur.  Mais  bientot  reparaissent  Ies 
champs  enfriche,  lescailloux,  Ies  sables, 
et  aussi  los  Kurdes  rddeurs,  sortesde  b^- 
tesfaroiiches  sans  cesse  en  qu^te  de  leur 

Eroie.  Quelques  hameaux  miserables  s'a- 
ritent  dern^re  desbuttes,  ou  secachent 
dans  Ies  roseaux  du  fleu ve ;  quelques  rui-. 
nesde  temples  grecs  apparaissenti^aet  I^, 
lan<^nt  vers  le  del  leurs  colonnes  sans 
chapiteau,ou  faisant etinceler  au  soleil 
leurs  flits  brises  ou  leurs  fragments  de 
marbre.  Passez  vite  sur  cet  elegant  pont 
en  pierre,quidatede  Tepoque  memorable 
des  Abbassides,  et  ne  vous  arr^tez  pas  au 
petit  bourg  deRussain,  de  peur  d^Stre  en- 
glouti  par  une  Eruption  soudaine  de  boue 
noire  etinfecte,dont  Todeur  sulfurique 
seule  est  mor telle.  Encore  une  demi-jour- 
n^  de  marche ,  et  vous  allez  atteindre 
Hems ,  Fantique  Emese. 

Les  Grecs  anciens  avaient  fait  de 
cette  ville  un  comptoir  considerable  : 
une  population  nombreuse  s'y  pres- 
sait,  une  population  non  moins  nom- 
breuse la  traversait  sans   cesse.   Les 


Arabes,  au  contraire,  rabaodoimeff 
apres  Tavoir  devastee.  Mais  ajant,] 
sa  position  sur  les  rives  fecbodei 
rOronte ,  excite  la  convoitisc  des  Q 
s^s ,  elle  fat  conquise  par  qudqw 
d*entre  eux,  repeuplee  etchoisif  ^ 
capitale  d'un  comte  franc.  Maigre 
honneur,  elle  ne  put  jamais  relir 
son  ancienne  prosperity.  Tout  an 
traire,  elle  suivit  la  fortune  essot 
ment  variable  des  Crois^s;  tantot 
la  s^curite,  tantdt  dans  les  alannes;! 
t6t  dans  la  joie ,  tantdt  dans  la  d«  "^ 
prise  et  reprise ,  et  en  definitiye  t 
an  pouvoir  des  Mamloucks  ala 
tretzieme  siecle.  Amoindrie  deskm, 
pouillee  et  r^duite  pen  a  peu  aritt 
elle  se  trouve  aujourd'hui,  de  ville 
est  devenue  gros  bourg,  aveeqod 
Grecs  pour  artisans ,  quelques  if 
pour  proprietaires,  quelques  Tores | 
maitres,  et  un  aga  assez  puissaot  a 
le  pacha  d^Alep  sous-loue  la  cootree 
s*etend  de  TOronte  aux  ruines  de 
myre.  Mais  visitons  d'abord  la  Til 
▼ante,  la  ville  mahom^taneparescdn 
la  ville  sainte ,  la  porte  de  la  Md 
Damas,  qui  le  dispute  au  Kaiie 
^tendue,  a  Alep  en  richesse,  a  Good 
nople  en  importance  comme  cr*"^ 
commerce  de  la  basse  Asie, 
entrepot  des  Indes ,  comme  anDew  < 
qui  lie  TEurope  k  PAsie ;  plus  tan!  1 
reviendrons  sur  nos  pas,  et  now" 
contemplerces  deux  admiraWescai 
d$  cites  qu'on  nomme  maintauflM 
mor  et  Balbek ,  et  qui  furent  P* 
et  Helios-polls. 

A  partir  de  Hems  les  villages* 
c^ent  assez  nombreux  et  assez f^ 
sur  le  versant  de  TAnti-Liban,* 
rives  de  TOronte ,  et  mime  siir 
autre  ligne,  a  Test,  quisertdei 
ordinaire  aux  caravanes.  Pourtaal 
diff6rents  villages  n'ont  rien  qui 
une  mention  particuliere,siDOD(ii) 
ruines  grecques  ou  franqoes, 
nes  ou  tourelles.  Quelques  sites 
^rdce  k  la  frafcheur  de  leur  vegetal 
a  leurs  coteaux  ombreux  et  a  *^" 
rizon  de  montagnes,  sont  eft 
aux  yeux,  et  semblent  offrir  une  r* 
aussi  delicieuseqo  ignore :  vaaXm 
sement  Iib  voisinage  des  peuflai 
mades  enl^ve  toute  sMunt^ 
beaux  lieux.  Cependant  les 


Z 

oi 

c 


'f 


1 


L*UN1VERS. 


meroe  de  Damas.  Imaginez,  dans  le 
style  arabe  ie  plus  pur  une  voDte  im- 
mense, comparable  par  sa  hardiesae 
et  sa  hauteur  a  celle  de  Saint-Pierre  de 
Rome ,  selon  Topinion  de  M.  de  Lamar- 
tioe;  une  coupole  de  la  plus  parfaite 
^l^ganre  entoure  le  ddme  principal, 
et  le  tout  porte  sur  des  piliers  de  granit. 
L'interienr  de  ce  monument  grandiose 
est  compost  d'une  rotonde  immense; 
puis  derrt^re  cba<|ue  pilier ,  sont  dis- 
tribu^  des  roagasins  ou  s'^chelonnent 
des  marchandises  de  toutes  espies ,  et 
des  escaliers  qui  mdnent  a  plusieurs 
Stages  de  cliambres  et  de  corridors. 
Voila  pour  Tensemble  du  monument; 
quant  aux  details ,  outre  des  arabesques 
d'un  caprice  inflni,  outre  un  systeme 
d*ornementation  aussi  original  que  gra- 
cieux,  ui  ne  peut  trop  admirer  une 
porte  dont  les  oattants  colossaux  sont 
all^g^s  par  des  dentelures  et  des  dessins 
qui  feraient  bonneur  h  nos  plus  grands 
artistes.  Et  qu'on  vienne  aire,  aprhs 
avoir  appiaudi  a  cette  meryeille ,  que 
le  peuple  qui  Pa  ex6cut^e  est  ennemi  des 
arts  :  propo^  de  civilisation  la  louse 
qu'il  est  indigne  de  TEurope  de  repi^tt^r ! 
Cette  o&uvre,  d*une  incontestable 
beauts ,  ne  sufGt  pas  k  la  gloire  inonu- 
mentale  de  Damas.  Ce  qui  fait  au  con- 
traire  la  honte  morale  de  cette  cite,  c*est 
le  fanatismede  ses  habitants.  11  n*y  a  pas 
vingt  aiis  encore ,  tout  Chretien  ne  pou- 
vait  entrer  dans  cette  ville  sainte  que  la 
t^te  nue  et  le  dos  courb6;  aussi  n*y 
trouvait-on  que  des  Arm^niens  parqua 
dans  un  quartier,  ferme  comme  une 
citadelle,  et  qui  dissimulaient  leurs 
richesses  sous  Tapparence  de  la  mi- 
s^re.  Leurs  v^tements  ^taient  sombres 
et  negliges,  lorsqu*ils  allaient  par  la 
ville;  quant  h  leurs  maisons,  quoique 
luxueuses  a  Tinterieur,  elles  n'avaient 
sur  la   me  qu*une  facade   en  boue, 

{)erc6e  de  quelques  rares  fen^tres  gril- 
les du  haut  en  has,  avec  des  folets 
peints  en  rouge  fonce,  et  des  portes 
tenement  ^troites  et  basses  qu'on  ne  les 
pouvait  prendre  r6ellement  que  pour  des 
ouvf rtures  de  cabanons.  II  y  avait  aussi 
h  Damas  quelques  rayas  grecs  de  la  pire 
esp^,  fourbeset  Irenes  comme  des  es- 
claves,  m6pris^  comme  des  filous,  expo- 
ses quotidiennement  aux  injures  des  fem- 
mes  musulmanes ,  aux  coups  de  pierrea 


ide 


des  enfantf,  aux  coups 
hommes.  Avec  un  pareil 
comment  nepas  tomber  dan 
sement  le  plus  abject?  La 
plus  fibres  n*y  r^isteraieii 
Ton  ne  con^it  pas  comment 
qui  se  laissent  domincr  dans 
tale  par  une  poign^  de  Tun 
jamais  de  retour  sur  eux-" 
s'indignent  ainsi  centre  )a 
quelques    Cht^tiens.   Ces 
Musu.mans  sont  pourtant 
soumis  aux  Osmanlis  que 
craintifs  rayas. 

Nous  verrons  dans  le  coui 
bistoire  Damas  puissante,  gi 
conqu^rante  sous  les  Ommii 
la  verrons  riche  et  florissan 
facturiere  du  premier  ordre 
en  acier,  sous  les  Abbasside 
verrons  ruinde  et  dteimfe  pi 
Lenk  (Tamerlan),  qui  enamen 
leurs  ouvriers  et  massacra  le 
pilla  ses  palais  et  dispersa 
tion ;  nous  la  verrons  reoall 
cendres  sous  lea  Osmanlis,  tii 
tion  est  importante  comme  gral 
entre  T  Europe  et  les  Inde8;airt 
elle  n'est  pins  que  mercanliieJ 
tieuse  et  perfide.  Elle  a  beaoj 
les  richesses  dans  ses  basars 
font  que  passer  :  Ispahan 
qu'elle  aujourd'hui  tremper 
Brousse  teindre  les  laines, 
no  pie  faconner  les  ^toffes : 
reputations  se  sont  ^teinta 
Elle  a  beau,  h  chaque  noaveall 
rhamadan,  voir  son  eni 
d'un  peuple  de  p^lertns;  ei 
grossiers  pour  la  plu{»rt 
dans  leur  intolerance,  loin 
par  leur  frottement  Tesprit 
tion  et  de  progres.  Elle  a '  ' 
foire perpetuelie ou  se 
les  nations  asiatiques,  la 
imm^moriale  de  aes  indig^eii 
pas  moins  de  force  a  ce  jeu  de 
miurieux  pour  les  Damasquias: 
Choumi,  c'est-^-dire,  les  haw  » 
Cham   (nom  arabe  de  Daniai 
des  perfides.  , 

On  n'a  jamais  pu  connate  « 
exact  des  habitants  de  cettt 
ville;  mais  vn  le  nombredesai 
on  peut  lui  attribucr  hawijj 
millc  proprietaires;  vu  Ic  nofflbr 


SYR1E  MODERNE. 


iserails,  cent  mille  Strangers. 
\  total  des  s^dentaires  les  deux 
N)t  Arabes,  yinp.  mine  Arme- 
Hincs  schlsmatiques  et  jaifi, 
DiHe  sealement  Ottomans. 
It  de  continuer  notre  marche 
^d  dn  pacbalik  que  nous  par- 
K,  il  nous  faut  faire  une  pieuse 
do  aux  deux  antiques  ri vales 
las :  I'une,  perdue  dans  ies  sables , 
«,  Tautre,  cach^e  dans  les  ro- 
lialbek.  Nous  n*entreprendrons 
Hirtant  de  vous  expliquer  toutes 
veilles  quf  gisent  en  lambeaux 
d^ert  da jpoudre  ou  parmi  de 
rocailles.  (Test  k  Thistoire  an- 
I  vous  apnrendre  les  noms  de 
i  ont  eleve  ces  temples  si  nom- 
8t  si  riches;  c'est  k  rarcheo- 
lous  faire  connattre  le  sens  de 
Siptions  et  de  ces  eniblemes  si 
:« c'est  a  i'arcliitectonique  k  re- 
jiUo  de  ces  superbes  edifices , 
u  km  ensemble ,  a  leur  rendre 
9ute.  Si  nous  ne  consultions, 
|s,  que  les  mis^rables  habitants 
.  de  ces  ruines  magnifiques ,  ils 
feiaient  la  fondation  de  Tune  et 
de  ces  deux  grandes  villes  au 
')moo ,  le  plus  grand  des  mo- 
selon  les  historiens  arabes,  le 
g^ies  (Djins)  selon  les  Musul- 
ipoetiquesjusque  dans  leur  igno- 

bpeut^dureste,  visiter  Palmyre 
I  graode  suite  et  de  copieuses 
pons;  le  voyage  est  penible  a  tra- 
"^  desert  de  plus  en  plus  aride;  il 
IX  si  Ton  rencontre  une  de 
errantes  de  Bedouins  dont 
ituel  est  la  guerre,  qui  ne  vi- 

ri  (ie  rapines  et  de  brigandages, 
vue  des  ruines  vaut  toutes  les 
on  se  donne  pour  les  attein- 
%z-vous  une  vaste  plaine  toute 
de  debris  merveilleux,  de  mar- 
jnifiquement  travailles ,  entas- 
iBos  sur  les  autres.  Figurez-vous 
~nes  rues  de  colonnes,  toutes 
ffloins  attaquees  par  le  temps, 
rvant  encore  cette  belle  cou- 
qui  charme  sans  dblouir, 
ineore  toute  la  grdce  de  leur  pose, 
fbarmonie  de  leurs  proportions. 
Kn  y  a-t-il  de  teaiples ,  de  porti- 
de  galeries ,  d'arcs  de  triomphe 


d^truits  dans  eet  amas  sublime?  A 
quel  degr6  de  civilisation  fallait-il  que 
le  peuple  de  Zenobie  fdt  arriv^  pour 
entasser  ainsi  les  somptuosites  PLesRo- 
mains  nous  ledisent  a  peine ,  et  la  reine 
qui  possedait  un  si  grand  nombre  de 
palais  n^eut  pas  un  seul  historian. 

En  debouchant  par  les  collines  de  sa- 
ble ,  d*ou  Taspect  de  cette  cite  morte  em- 
prunte  ^  sa  chute  m6me  une  majesty 
qu'elle  ne  poss^da  peut-^tre  pas  dans  sa 
prosp^rit^,  on  est  frapp^  tout  d'abord 
de  la  confusion  de  decombres  precinix, 
de  I'etendue  decertains  monuments  dont 
les  colonnes  debout  vous  doonent  encore 
ridee  la  plus  grandiose,  de  certains  p^ 
ristyles  qui  out  encore  toute  la  beauts 
gue  des  architectes  de  genie  leur  ont 
imprim^  pour  une  longue  suite  de  sf6- 
cles.  Puis ,  si  Ton  veut  se  rendre  compte 
par  le  detail  de  son  impression  si  saisis- 
sante,  si  Ton  veut  raisonner  son  enthou- 
siasme  et  classer  ses  sujets  d*admiration, 
▼oici  ce  que  Ton  trouve  en  avan^ant  pas 
k  pas  dans  cette  capttale  d*un  art  dispa- 
ru.  On  laisse  de  c6t6  tout  d*abord  les 
restes  d'un  chdteau  arabe,  qui  seraient 
pittoresques  e t  curieux  en  tout  autre  en- 
droit ,  mais  qui ,  dans  ce  rendez-vous  de 
merveilles ,  attire  k  peine  les  regards. 
Quelques  s^puicres  carres,  aux  pilas- 
tres  elegants  ,'*m^ritent  deja  vos  eloges. 
Passez  vite  pourtant,  afin  d'arriver  plus 
t6t  a  cette  avenue  admirable  de  colon- 
nes, les  unes  a  moitieenfouies,  les  au- 
tres mutil^es  par  le  haut,  d*autres  en- 
core presque  mtactes,  celles-ci  isolees, 
celles-la  rattachees  encore  par  la  plus 
Elegante  architrave.  Est-cc  la  une  suite 
de  monuments,  ouun  seul  ^ifice.'  L'^- 
rudition  artistique  pourra  trouver  un 
jour  le  mot  sublime  de  cette  ^nigme  de 
marbre. 

Avan^ons  encore,  et  nous  alions 
rencontrer  le  dief-d'oeuvre  sans  doute 
entre  ses  chefs-d'oeuvre ,  le  temple  du 
soleil  qu*on  adorait  a  Palmyre  aussi 
bien  quia  Balbek.  On  y  avait  prodigu^ 
toutes  les  richesses  de  la  sculpture:  tou- 
tes les  pierres  en  sont  fouillees  avec  un 
soin  et  un  godt  parfait,  et  Tensemble 
prdsente  n^anmoins  le  spectacle  de  Tu- 
nite  dans  la  variety,  de  Tordre  dans  la 
magnificence.  La  facade  du  portique  est 
form6e  de  douze  colonnes  colossales,  et 
mene  k  une  cour  carree  de  soixante-dix- 


^ 


L'UNIVERS. 


neuf  pieds  sur  cbacuoe  de  ses  faces, 
orn^e  d'un  double  rang  de  nouvelles  co- 
lonnes;  puis  se  voit  un  peristyle  avec 
<juarante  et  UDe  colonnes  encore,  perc^ 
d'une  large  porte,  dont  le  soffite,  qui 
git  dans  ia  poussiere,  nous  montre  un 
zodiaque  semblable  au  notre,  et  un  oi- 
seau  mysterieux ,  aigle  ou  pb^nix ,  sur 
un  fond  parsem^  d'etoiies.  Cette  porte , 
sans  doute,  ouvrait  sur  le  sanctuaire, 
dans  lequel  on  ne  rencontre  plus  aujour- 
d'hui  que  decombres  amonceles ;  et  pour- 
tant  le  dieu  qu*on  adorait  dans  cette 
enceinte  y  darde  toujours  a  profusion 
ses  rayons  .^clatants  :  ses  pr^tres  ont 
disparu  pour  jamais,  etseul  desormais  il 
remplit  la  solitude  de  son  temple.  II  nous 
paratt  inutile  de  continuer  la  descrip- 
tion de  cespompes  eteintes,  nous  craiu- 
drions,  d'ailleurs,  de  tomber  dans  une 
aecbe  et  froide  nomenclature;  cx)nten- 
tons-nousde  mentionner  encore  les  qua- 
tre  siiperbes  colonnes  de  granit  que  les 
trembiements  de  terre  ont  ^pargn^, 
et  Tare  de  triompbe  qui  termine  Ta ve- 
nue de  colonnes  dont  nous  avons  parl6 
en  commeii^ant.  Parmi  ces  marbres 
somptueux,  dont  le  travail  prouve  si 
bien  la  puissance  de  Tesprit  bumain^ 
s*aper^oivent  quelques  huttes  informes 
de  terre  et  de  paille :  c'est  la  demeure  ac- 
tuellede  quelques  pauvret  Arabes.  Com- 
parez  maintenant  la  Syrie  ancienne  k 
la  Syrie  moderne ;  nuUe  part  decadence 
ne  fut  plus  manifeste! 

Les  mines  de  Balbek  sont  nioins  nom- 
breuses,  sinon  moius  magnifiqups  que 
celles  de  Palmyre.  Au  lieu  de  former 
on  cercle  vaste  et  allonge  comme  celles 
dont  nous  venons  de  nous  occuper,  elles 
sont  plus  ramass^es,  pour  ainsi  dire,  et 
se  trouvent  enceintes  d'un  mur  de  sept 
h  huit  pieds  de  bauteur  qui  figure  un 
carre  long.  En  escaladant  cette  muraille 
aux  i)ierresenormes,  dont  quelques-unes 
ont  jusqu'a  trente  nieds  de  largeur,  on 
parvientau  milieu  d'une  a^loin^ration 
prestigieuse  de  marbres  bnses,  de  cha- 
piteaux  renverses,  de  corniches  et  d*en- 
tablenicnts  ^pars  sUr  le  sol,  de  voOtes 
dont  il  ne  reste  qu*un  nan,  de  colonnes 
dont  il  ne  reste  que  le  nit.  Cest  qu*aussi 
a  Balbek  Taction  de  Fair  n*a  pas  seule 
a^i  centre  les  monuments  bumains,  la 
vegetation  a  fait  aussi  son  oeuvre  de 
destruction:  elle  a  ^teudu  ses  lierres  vi- 


vaces  qui  ont  disjoint  les  nninlef 
solides,  elle  a  disstoioe  ses  pari 
sur  les  ornements  ardutecua 
plus  elev^s,  elle  a  ^rase  lesjj 
avec  ses  buissons  de  nopal,  dk! 
les  plafonds  avec  la  t^te  de  sesi 
res.  Ce  melange  de  uiarbreedi 
de  verdure  brillante  est  iim 
coup  d*OBil,  il  est  vrai;  inaisQ 
de  beaut^  cette  nature  luxoiii 
t-elle  pasdeja  divorces! 

II  existe  pourtant  quelqoesifl 
core   debout,  et  un  temple 
intact.  Ces  restes  sont  sii 

Sigantesques  d'une  pierre  ii 
ore.,  moins  blatant  que  le 
moins  mat  (}ue  le  travertin : 
lonnes  ont  ete  fouillees  arec 
infinr;  leurs  architraves  et 
niches  sont  digues  de  Corintbe. 
que  ces  colonnes  colossalesfaia 
tie  d'un  temple,  aux  enonnei 
tionSy  qui  aurait  6te  abattupif 
blemeut  de  terre,  et  qu'apres  ti 
cet  immense  monument,  oo^ 
ilev^  un  autre  a  cote,  sur  lei 
sin,  mais  considerablement 
Cetteconjecture,  tout  ing6nic8i 
soit,  ne  nous  paraft  pas  proh 

Sourquoi  des  architectes,toujM 
e  leurs  predecesseurs,  sipip' 
leur  merite,  auraient-ilslaisse'' 
face  de  leur  oeuvre  teriuio^ 
ments  d'un  art  plus  audadcfl 
leur,  des  preuves  d*un  plaobeM 
grandiose?  N^est-il  pas  pluss 
penser  ^ue  la ,  comme  a  PaloR 
nie  si  fecond  des  anciens  avv 
temples  grands  et  petils  dans 
de  leur  ville  sacrte ,  et  en  Hij 
la  foule  de  leurs  dieux  ?  QuoiqB 
une  inspection  raisonneedtf 
Balbek  a  fait  ju^er  au'il  ti 
Tenceinte  de  la  ville  des  delfi 
sieurs  dges  :  ainsi  quelques  bl 
mes,  aux  sculptures  roysterici 
pr^sumer  une  architecture  t 
presqueantediluvienne ;  qudf 
nes  massives  aux  chapiteaux 
mes  annoncent  un  art  pbefli< 
de  celui  d'Egypte ;  enfin  cert 
ques  sont  grecs,  certaines  t 
maines. 

Le  temple  le  mieux  cm 
6videmment  de  I'^poqueanti 
feuilles  d*acantbe  de  ses  cor 


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S^rRIE     AKCIENNE. 


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/!:.'y.'    ./.:<ra'^..,./^    K  ,r /-/^   .,..',./ .    , .  .  .'r    ,    A,  .A  ,  / 


SYRlE  MOOERNE. 


4i 


■I  de  sa  frise,  les  oraements  de  ses 

■Ires,  toot  ie  prouve  surabondam- 

H.  Void,  OD  outre,  des  caissons  scalp- 

[qui  indiqaent  que  ce  monumeat 

Medieaux  dieux  paiens  :  ici  c'est 

[igure  de  d^esse,  la  de  dieu  ou  de 

p;  plus  loin  c'est  Ganym^e  enlev^ 

^faigle  de  Jupiter;  partout  ies  syin- 

fctiYants  de  la  roythologie.  En  som- 

p'enaembie  de  ces  mines  doit  ravir 

^imagination :  pour  Tartiste  ce  sont 

lirablesmodeles,  pour  le  poete  un 

Hses  inspirations,  pour  le  philo- 

i  an  sujet  de  profondes  reveries  : 

*ks  barbares  seuls,  qui  en  habi- 

In  environs ,  elles  sont  froides  et 


maintenant  jusqu*au  boot 

myage  du  nord  au  sud  de  la  Syrie. 
ton  de  Damas  est  une  oasis  de 
lieues  de  tour  dans  un  desert  im- 
qai  va  rejoindre  a  Test  les  solitu- 
Hrak-Arabi,  et  au  midi  les  sables 
laz.  U  y  a  bien  encore  quelques 
otil^  quelques  terres  noires  et 
fa  plaine  du  Hauran,  par  exem- 
r  que  oous  avons  deia  plusieurs  fois 
lee;  mais  on  est  bien  loin  de  lirer 
un  parti  avantaceux  de  ce  sol 
It :  les  Bedoui  ( ies  nommesdu  de- 
Bont  trop  mena<^ants,  et  les  cul- 
~r%  sont  en  trop  petit  nombre; 
mil  faudrait  presque  tenir  gar- 
dans  cbaque  champ  depuis  le  temps 
Isemailles  jusqu*au  temps  des  mois- 
iftt.  Pourtant  autour  des  villages  de 
f^,  d'Adrdath  et  de  Djerash  le  pays 
i^CDitiTe  et  productif.  Au  dela  com- 
Vttot  les  paturages  du  Jourdain  h 
^1  et  ies  sables  du  Barrai-Al-Cbam 
isst.  11  faut  aller  jusqu'^  Naplous 
rtroQver  un  pays  ricbe  et  une  ville 
Ue.  Naplous  est  bdtie  non  loin  de 
Knne  Siehem,  et  sur  les  debris  de  la 
^lis  des  Grecs  :  c*est  la  retraite  de 
toes  Musulmans  puissants,  amou- 
de  riodependance ,  mais  assez  bons 
BDlteurs;  aussi  font-ils  rendre  a  leur 
^SBueoop  de  bl^,  de  coton  et  d*oli- 
Onn'aurait  qu*a  louer  leur  maniere 
^ne  patriarcale  et  leur  caract^re 
fiert6,  s'ils  n'avaient  mallieu- 
it  an  d^faut  qui  gdte  bien  de 
quality,  rintolerance  religieuse. 
i^OQt  jamais  voulu  souffrir  de  Chr^- 
^~  parmt  eux,  et  les  pelerins  doivent 


^viter  de  passer  par  leur  ville,  dans  la 
crainte  d'etre  injuri^^  et  molestes. 

Sauf  la  vall^  du  Jourdain ,  la  contree 
est  presgue  partout  montueuse  et  aride. 
Les  collines  de  la  Jud^  sont  grises,  in- 
cultes ,  tristes ,  aux  flancs  a  pic ,  aux 
noires  cavernes,  aux  ravins  sombres  et' 
creux  ;quelques  figuiers  rachitiaues  pous* 
sent  a  travers  d'enormes  charoons  et  de 
norabreux  arbrisseaux  epineux.  Plus  on 
avanee,  plus  la  vegetation  di mi nue,  plus 
les  cailtoux  comblent  les  champs,  plus 
une  poussiere  voicaniaue  s'eleve  de  tou- 
tes  parts,  et  attriste  rhorizon.  Encore 
un  pas,  et  nous  aliens  arriver  h  la  cite 
sainte ,  pour  la  possession  de  laqueile  les 
Francs  ont  si  longtemps  et  si  inutile- 
ment  combattu.  Jerusalem  est  entouree 
d'un  desert  de  pierres  gris  de  cendre; 
des  rochers  noir§tres  torment  conmie 
des  avenues  funebres  a  la  ville  des  lar* 
mes  et  des  desolations.  Les  yieux  oli- 
viers  contemporains  des  douleurs  de  Je- 
sus-Christ ne  sont  plus  que  de  colos- 
sales  racines  p6tri(iees.  Les  jardins  des 
orgueilleux  pnarisiens  ne  sont  plus  que 
des  terrains  vides  et  nus.  Poussiere  som- 
bre ,  pierres  lugubres ,  p&les  oliviers,  ro- 
chers noirs ,  tacbet^s  de  bianc  com  me 
un  drap  mortoaire  sem^  de  larmes,  lit 
desseche  du  torrent  Cedron,  collines 
^boulees  du  Calvaire  et  de  Sion  sembla- 
bles  h  Tamoncellement  horrible  des  os- 
sements  de  cent  generations,  source 
intermittente  de  Siloe,  valine  profonde 
et  rigide  de  Josaphat,  oil  le  ciel  lui-meme 
semble  prendre  une  teinte  funebre ,  tel 
est  le  paysage  actuel  de  Jerusalem. 

Nous  ne  vous  fcrons  pas  ici  la  descrip- 
tion d'u  ne  vil  leque  presque  tout  le  raonde 
connatt ,  que  tant  de  voyageurs  ont  de- 
crite,  que  tant  de  poetes  ont  chant^e, 
et  que  dailleurs  nous  verrons  dans  notre 
histoire  a  bien  des  &^es  divers ,  k  plu- 
sieurs epoques  caracteristiqnes ,  qui  exi- 
gent chacune  son  tableau .  Laissons  done 
derricre  nous  les  remparts  creneles,les 
portes  monumentales,  le  ddme  du  Saint- 
Sepulcre  et  les  arcades  d'EI-Sakkara  (la 
raosqu^e  bdtie  par  Omar),  les  clochers 
et  les  minarets  m^les  de  la  cit^  qtic 
les  Arabes  eux-m^mes  appellent  ^l- 
Kods,  la  Sainte.  Au  sud  oe  Jerusalem 
c*est  la  m^me  tristesse  et  la  m^me  ari- 
dite  :  vallees  brdl^es  par  les  rayons  du 
soleil ,  montagnes  calcindes  par  le  feu 


ttrmvERfl. 


des  volcaoB,  mer  Mcnrte  k  ilionzon,  voi- 
Ik  ce  qu'on  rencontre  deJ6richo  k  Saint- 
Saba.  Pour  retrouver  la  verdure  des  ar- 
bres  et  Tor  des  moUeons,  il  faut  redeg* 
cendre  vera  la  mer,  et  nous  diriger  vers 
Touest.  Nous  pouvons  tout  d'abord  re- 
poser  nos  yeux  sur  la  vall^  de  K&riat* 
£I-Anep ,  autrefois  de  J^remie.  Ici  les 
mOriers  reparaissent,  et  des  jardins,  en- 
tour^  de  haies  de  cbevrefeuilles  odo- 
rants,  sout  divis^  en  vergers  et  en  par* 
terres ,  et  arros^  par  d^abondants  ruis- 
seaux. 

Avant  d'arriver  a  Raml&h ,  il  faut  en- 
core traverser  des  defiles  esoarpes,  ta- 
nieres  de  bStes  feroces,  repaires  de  bri- 

Sands.  EnOn  on  parvient  a  la  plaine  de 
Latnlah,  qui  a  deux  aspects  bien  dif- 
ferents,  eelui  du  printemps  et  eelui  de 
Tele.  Au  printemps ,  c'est  la  verdure  U 
plus  variee,  des  tulipes,  des  anemones^ 
des  prime veres ;  puis  de  jaunes  et  belles 
moissons,  ou  les  episont  plus  de  six  pieds 
de  tige.  En  ^te,  au  contraire,  le  soleil  de- 
vore  jusqu*aux  moindres  plantes,  pompe 
Teau  des  ruisseaux ,  ecorcbe  la  terre  et 
la  laisse  feodue  de  toutes  parts ,  et  avec 
ce  ton  rougeStre,  particulier  au  sol  de 
la  Palestine.  Raralan  est  Taneienne  Ari- 
mathie,  la  patrie  de  Samuel;  elle  n*a 
aojourd'hui  qu'un  millier  d'draes,  elle 
est  sans  caractere  propre  et  original. 

Aquelqueslieuesde  i^^surlesbordsde 
ki  Med  iter  ran^  se  repose  mollement  la 
voluptueuse  Ydfa.  G'est  la  une  veritable 
merveille  orientale,  mer  bleue,  ciel  bleu, 
fordt  de  palmiers,  de  grenadiers,  de  ei* 
tronniers  et  de  cedres  maritimes,  jar- 
dins  deticieux,  cbemins  jonch^s  de  fleurs 
d*orani^er,  murs  couverts  de  jasmins , 
fontaines  jaillissantes,  terrasses  crene- 
ls ,  blancs  minarets «  6clatantes  cou po- 
les, balcons  mauresques,  le  tout  sed^- 
tachant  sur  le  fond  blanc  du  desert  et 
sur  les  sables  onduleux  de  la  c6te. 

Au  sud  de  Ydfa  xisent  les  ruines 
d'Ascalon,  que  nous  verrons  prise  et  re- 
prise tant  de  fois  durant  Tepoque  des 
Croisades.  Puis  Gaza,  ville  d^ja  egyp- 
tjenne,  admirablementsituee  entre  TA- 
frique  et  TAsie,  avec  les  restes  de  son 
opulence  d'autrefois  qui  s'apercoivent 
encore  dans  le  marbre  blanc  qui  sert  de 
lit  a  ses  ruisseaux ,  avec  son  sol  noirft- 
tre  si  fertile  en  grenades,  en  oranges, 
en  dattes ,  avec  ses  jardins  qui  produi- 


80ot  dee  oignoiis  de  nnoaealeifti 
Dttte  qu'on  en  exp^die  dnqneaoofoi 
lee  parterres  dQ8^aildeC(msisi  ' 
Apr^  Gaza,  le  grand  desert 
commence ,  et  la  Syrie  fioit  au 
teaufort  de  Rbao- xoaaes. 
^  En  r^um6,  eomme  let 
liks  de  Syrie ,  le  paduilik 
fre  plus  de  vilies  detnutea 
florissantes,  plus  de  terres  < 
de  champs  cultiv^,  plus  de 
de  r  ichesses.  Damas  est  enceieJ 
sante,  Hamah  bienagr^aUe; 
decadence  dans  Hems ,  el 
ces  cites  qui  naguere  \ 
bords  de  TOronte,  et  qui  a , 
passer  aujourd'hui  pourde'sii 
gades !  A  ussi  malgr^  son  iKit 
chalik  compte  tout  au  plos 
mille  lmes.Deux  fl^ux,da 
neat  sans  cease,  et  Tenval 
enpius,ledteortetlesBr ' 
viendra,  si  elle  n'y  s< 
Damas  elle-m^roe  sera 
ou  par  les  autres.  Quanta  la 
une  partie  de  son  littoral  avee 
charmanteYAfa,  sauf  deuxoV 
tes  vallees,  sauf  one  plaine 
de  Ramlah,  tout  le  reste  est 
appauvri ,  us^ ,  4teint ,  qu*oo  a  fl 
s  ima^iner  qu*en  ces  iieux  d^oM 
cut,  il  y  a  <]Qelque  viogt  sier*'^ 
grande  et  puissante  nation,  les 


CONQUlfeTES  DE  UISL* 
Atat  de  la  syrib  eh  IA 

Que  noua  repr^sente  la  Sf«^ 
mier  de  Th^ire,  date  obscure  1^ 
contemporains ,  lumineuse  po^ 
toi  re  ?  Une  grande  prosp^rit^ <!">$" 
des  campagnes,  toujours  feim* 
qu*abandonnent  peu  a  pea  1^ 
tants;  d*anciennes  capitalA«  n>J 
ches.  mais  qui  commenceiit  a  «  W 
de  toutes  parts,  signe  de  £H^' 
les  frontteres  de  TEmptre,  dw 
source  des  natiens  en  dw«** 
littoral  encore  rempli  dehafrts,! 
dont  le  commerce  diminua  par  taj 
croissante  de  ateuritc;  deswnipw 
perp^tuelles,  des  extr^mites  auwi 
dea  agglomerations  d*hoiiiin«  sari 


-W 


^mm 


SYRIB  MODERl^E. 


47 


lou  ik  ae  gtoeiit;  det  terres  en 
If aon  faute  de  bras,  mais  faute 
MM  TolonU  pour  les  cultiver  (*). 
|M  lecolosse  lomain  se  d^traque 
vcdt^^e'estqueles  colonnes  les 
Boi^eefl  de  rempire  s'ebranlent 
im  BRorts  reputes ,  c'est  que  le 
e  le  midi  sont  ravag^  a  la 
reux spectacle!  Moment  fa- 
tes plus  grands  courages  se  las- 

*  ce  (}oi  &isait  la  force  dans  les 
devouement  et  d'uDloo,  le 

des  provinces ,  fait  la  faiblesse 
temps  d'egoisrae  et  d'anarcbie  I 
Teosemble  d'affaissement  et 
ince  qn'offre  cette  partie  ddja 
de  Tempire  byzantin ;  le  detail 
'  t  plus  affligeant  encore, 
dans  toute  sa  nudit^  :  une 
a  Tagonie^  Antioche,  ex- 
d'on  royaume  d^truit ,  ville 
|uedu  feste,  mats  grecgue 
Ibnpire,  c'est-a-dire  pusillanime 
tf nrekelliqueuse ,  defenduepar 
'ttredenourailles  beaucoup  plus 
iepatriotisme  de  ses  citoyens, 
i^puur  le  luxe,  pr^ferant  les 
du  Mgooe  a  la  ^loire  des  arts, 
ttte  a  la  domination  souveraine, 
<]oe  MS  triors  soient  bien  gar* 
IBS  iooissances  toujours  nouvel- 
'^  oe  ses  habitants  que  Tamour 
etiesoin  deleurs  plaisirs  n'ab- 
Ipas  Umt  entiers  ont  un  vice  de 
>pws  (|ui  Taut  tous  les  vices  du 
t»  maiiK  de  la  eontroverse  reli- 
l^teiiien*,  les  nestoriens,  les 
KMtt  dlotich^,  les  monotli^lites 
Ijtt  coiutamment  de  la  dispute  au 
tt.  lis  se  pers^eutent  r^ciproque- 
i*loa  qae  la  force  et  la  majority 
wrent  |H>urun  parti  om  pour  I'au- 
idiristiaDisme  est  devenu,  dans 
8il€,  une  doctrine  plutot  qu'une 
*j  un  scandale  plutdt  qu'une 
Mais  ee  n'est  la  que  la  preoccu- 
fcdu  petit  nombre ;  celle  du  grand 

*  wt  Favidit^  pour  Targent ,  la 
JWf  les  plaisirs.  Les  campagncs 
wurent  Aotioche ,  ayant  les  m^- 
[wts,  lui  ressemblent  par  les 
^ttlesactes.  Le  port  de  Seleucie 
leneore  one  grande  activity,  mais 
pour  les  operations  commerciales 

Fles  jeux  de  la  fortune.  Ainsi, 
zTWophaneelC^fiuus. 


aa  nord  de  la  Syrie,  des  Grees  abHtar- 
dis,  m^ang^  de  races  diverses,  ro- 
maine,  byzantine,  juive,  mais  unis 
par  des  int^r^ts  dgaux,  par  des  vices  de 
m^me  nature ,  se  proposant  un  but  com- 
imin  et  unique,  le  gain. 
f  Pour  se  reposer  de  ee  ^bteaa  hon- 
teux ,  il  faut  mooter  jusques  au  sommet 
du  Liban.  Icise  rencontrent  d'excelleuts 
montagnards,  au  coeur  noble,  a  Thos- 
pitalite  immenioriale,  hommes  simples, 
caodides ,   insoucieux   serviteurs  des 

Suissances  terrestres ,  sectateurs  zeles 
e  la  divine  omnipotence,  ces  Chretiens 
sinceres,  ces  sages  anachor^tes,  ces 
moines  d^voo^s  sous  les  disciples  dc  For- 
thodoxe  Marroun ,  qui  protesta  si  ferme- 
ment  du  fond  de  sa  solitude  contre  les 
heresies  du  cinquieme  si^cle  ,  et  parti- 
culierement  contre  celle  d*£utiches.  Les 
couvents  de  ces  braves  religieux,  diss6- 
mines  dans  la  montagne,  furent  de  tout 
temps  les  Stapes  despderins,  leurs  ^gli- 
ses  des  champs  d'asile,  leurs  presbytd- 
res  des  hopitaux  (*).  Cette  contree,  se- 
reinecomme  leciel  qui  la  couvre,comme 
Tairqui  Tentoure,  n'estd'ailleursqu'une 
exception. 

Au  versant  occidental  de  la  chalne 
Libanique,  sur  les  cdtes  orageuses  de 
la  MMiterran^e,  voici  des  villes  jadis 
florissantes,  Tortose,  Tripoli,  B^- 
ryte,  Sidon,  inquietes  aujourd'hui, 
laissant  a  Tabrt  ae  leurs  mdles  leurs 
galeresvides ,  sans  agrds  et  sans  rames; 
puis  Tyr ,  encore  tout  6mue  de  sa  r6- 
volte  oes  Juifs ,  qui,  au  nombre  de  qua- 
rantemille,  avaient  projete  le  massacre 
des  vingt  milte  Chretiens  de  la  ville; 
enfin,  tout  le  long  du  littoral  ,de  Seleu- 
cie k  C^ar^e,  une  suite  de  petits  ports 
abandonn^s,  de  rades  qui  se  ferment 
sous  le  sable qu'apportent  journellement 
les  lames  de  la  haute  mer,  de  rivages 
d^pouilles  et  brdlants,  que  n'babitent 
plus  que  quelques  pauvres  p^heurs, 
sans  cariictere  propre,  sans  race  dis- 
tincte,  sans  nationality,  comme  tous  les 
proletaires  de  ce  monde. 

Contraste  manifestel  Au  versant 
oriental  des  montagnes ,  les  plus  doux 
des  climats ,  la  plus  suave  des  atmos- 
pheres, la  plus  fifeconde  des  natures  ^ 

(♦)  Vovez  AboalfSiPadJ,  damsa  Chroniqus  »• 
riaquej  *et  ka  ecriU  de  Faosle  fiairoo,  da 
P.  Lequien  et  d'Ass^aoi. 


48 


L^UKIVERS. 


une  grande  ville  tout  asiatique ,  entre- 
pdt  des  richesses  les  plus  prodigieuses  , 
rendez-vous  de  toutes  les  fortunes  hu- 
inaines,  reunion  de  toutes  les  families 
favorisees,  inolle  et  heureuse,  trauquille 
et  satisfaite,  Damas,  que  les  Peraes 
out  ^pargn^,  que  les  Ommiades  agran- 
diront  encore.  La  campagne  qui  l*en- 
vironne  est  comme  aujourd*hui  un  jar* 
din  de  fruits  et  de  fleurs.  Mais,  si  cetle 
ville,  avec  son  vaste  jardin,  est  encore 
toute  Grecque,  les  plaines  fertiles  qui 
s'etendent  audela  ne  sont  deja  peu- 
plees  que  d*Arabes.  Et  plus  on  avance 
vers  le  sud ,  plus  les  descendants  dls- 
niael  sont  nombreux,  Chretiens  aujour- 
dUiui  pour  devenir  Musulmans  deinain, 
intrus  successifs  qui  viennent  vers  les  fo- 
r^ts  d'orangerset  lescbampsdefroment 
de  cette  terre  de  predilection ,  de  m^me 
que  Taiinant  se  tourne  vers  le  nord. 

Puis  commence  T^pre  Palestine, 
cent  fois  ravagde ,  avec  ses  tristes  ha- 
bitants, et  sa  sainte  capitale,  qu'hier 
encore  Gbosroes  potluait  et  d^pouillait. 
Au  deia  sont  les  domaines  des  Ghassa- 
uides,  cavalerie  l^^ere  des  empereurs' 
de  Byzance ,  la  ou  ii  faudrait  des  garni- 
sons  sedentaires,  peuplade  nomade  et 
guerriere  d'ailleurs,  tropavidede  pillage 
et  d'aventures  pour  rien  respecter  et 
rien  ^difier.  Au  sud  de  Damas ,  se  ren- 
contreut  encore  quelques  grandes  villes, 
mais  dont  Topufence  n'existe  plus  que 
dans  leur  architecture,  Paimyre  et  Bal- 
bek.  Les  autres  cites  plus  modernes, 
exposees  qu'elles  sont  sans  cesse  aux 
incursions  des  ennemis  de  Constanti- 
nople ,  tremblent  et  g^missent  comme 
Apamee  tant  de  fois  envabie,  ou  s'etour- 
dissentdans  desfStes  d'un  jour,  comme 
£mese,  lors  du  passage  de  rempereur. 

Ainsi  une  population  abattue,  un  lit- 
toral aue  fuit  le  commerce ,  dos  villes 
centrales  sans  defense,  une  capitale 
eorrompue,  une  populace  esclave  de 
quiconque  la  nourrit,  une  aristocratic 
Idche  et  dissipatrice,  des  cites  qu'on 
verrouille  le  soir  comme  la  porte  d'un 
coffre-fort ,  des  campagnes  de  plus  en 
plus  abandonn^s,  tel  est  le  tableau  de- 
plorable que  pr^sente  la  Svrie,  la  six 
cent  vingt-deuxieme  anneede  notre  ere. 
L'homogeneite  manquait  a  ces  debris 
de  royaumes ,  a  ces  restes  de  cites ,  a 
ces  peupies  d^6n6r^ ;  pour  les  reiier 


et  les  relever ,  il  eAt  fallu  um 
puissance  etun  grand  homme. 
tait-ee  alors  que  Tempire 
qu'ctait-ce  que  son  chef?  ^ 
i^pondre  a  ces  deux  qoestiooL 

L'eoipire  bvzantin  a  eo 
neste  que  sa  fbndation  ellc 
6tre  considerde  comme  uoe 
tantinople  est  un  centre 
c'est  vrai;  mais  e'est  un 
que,  et  non  europ^n.  Or,  les 
n'avaient  jamais  valu  que 
europeenne ;  en  transplantaotl 
coup  cette  nation ,  qui  fut  si  ^ 
forte  sur  son  terrain  et  dans: 
on  lui  fit  perdre ,  au  bout  di 
ration,  toute  sa  seve  et  toute  a 
Les  legions  romaines  de 
epuiserent  leur  energie  avee 
dite  desastreuse.  La  mollesi 
dolence  asiatiques  chaogerat 
d'un  siecle  le  caractere  ai 
tif  des  dominateurs  do 
gion  Chretien  tie  elle-m^me 
sante  pour  les  reg^ncrer ;  H 
ment  progressif  de  deoxra 
pathiques,  d'instinct  et  <f< 
essentiellement  divers,  foron 
tion  hybride ,  pour  ainsi  dire, 
jamais  une  veritable  puissance, 
romain ,  d*ailleurs,  ^taitdejatnf 
pourrajeunir  la  iympbe  asiatiooft 
est-il  impossible  de  trouver  <M 
toire  du  monde  entier  une  pl« 
et  plus  p^nible  d^adence  qat 
premier  peuple  de  ruoivers.  0 
cadence  dura  plus  de  douzer' 
son  premier  jour  est  certiii 
jour  de  la  translation  da  poQVM 
tral  de  Rome  a  ConstantiDO|ij^ 
poque  qui  nous  occupe,  celiim 
avait  done  pres  de  quatre  m^ 
dur^e,  et  elle  en  etait  amT^> 
ses  crises  les  plus  graces. 

L'ignoble  tyran  Pbocas,  q» 
usurp6  le  sceptre  par  ua 
et  qui  n'avait  rachete  ses  --^- 
aucune  vertu,  avait  cotn^ 
tons  les  points  le  salut  de  r£ 
Les  finances  i^taient  ^uisees; 
6tait  sans  discipline,  le  peuplea 
ranee.  LesPersesen  AsleetlWiUii 
Europe  pillaient  toutes  les  ?ilH' 
saient  Tinsolence  jusqu'a  venir  i 
les  Byzantins  sous  les  murs  (K 
pitale.  La  corruption  la  plus''* 


SYBlt.  MODEftNE. 


49 


la  plus  g^Derales'^tablit  impudemment 
dans  tous  les  centres  de  population. 
L'bonneur^taitmoins  qu'un  mot,  c'^tait 
un  ridicule.  Le  courage  ^tait  une  vertu 
releguee  dans  les  temps  fabuleux.  La 
patrie  ^tait  une  charge  pesante  dont  on 
fuyait  les  devoirs.  Les  troupes  ne  se 
rainissaient  que  pour  exiger  de  iVmpe- 
reurqu'elles  avaient  fait,  de  nouvelles 
largesses;  en  faee  de  rennerai,  elles  ne 
savaieut  que  se  debander.  La  Thrace 
^tail  un  incendie  permanent,  la  Syria 
un  sac  continuel.  Jerusalem  aval t'ete 
r^uiteen  poudre,  £dessedevastee,  Apa- 
mee  presque  detruite  Partout  enlin  r^- 
gnait  la  terreur;  Tesclavage  oula  mort 
sembiaient  luenaeer  toutes  les  popula- 
tions (*).  Tel  etait  le  lamentable  (tat  de 
Tempire  byzantin,  aucommencementdu 
septi^me  siecle.  Mais  Phocas  fut  enfin 
pnni  par  le  glaive  d^Ueraclius  :  il  s^etalt 
encore  trouve  dans  le  peuple,  mais  la 
seuiement,  un  reste  d'^nergie;  et,  malgre 
les  riches  et  les  coUrtisans,  le  peuple  s*e- 
tait  d^l  ivr6  par  Tinsurrection  de  la  plus 
honteuse  tyrannic.  Malheureusement  il 
n'etaitpasdonn^aU^raclius  de  reparer 
tous  les  maux  qui  accablaient  TEmpire. 

I  HZBACLinS    ET    MAHOMET. 

H^raelius,  c'est  la  contradiction  cou- 
ronn^«  Du  temps  du  premier  empire 
remain ,  du  grand  ,  on  avait  vu  sur  le 
trdne  la  toute-puissance  avec Trajan,  la 
bonte  avec  Titus ,  la  philosophic  avec 
Marc- Aurele;  ii  ^tait  r^erv^  au  Bas*Em- 
pire  d*y  voir  le  paradoxe  avec  Julian, 
rimpuissance  avec  Maurice,  le  crime 
avec  Phocas.  Successeur  imm^diat  de 
ces  deux  derniers,  il  edt  fallu  ^H^raclius 
le  genie  des  premiers  Remains  uni  a  IV 
dresse  des  premiers  Grecs.  Loin  d'etre 
sublime  par  rintelligence ,  il  ne  se  mon- 
tra  seuiement  pas  remarquable  (>ar  Tha- 
bilete.  Doux  et  humain ,  il  condamna  k 
mort  une  pauvre  servante  qui  par  m6- 
garde  avait  crach^,  du  toit  d'une  maison, 
sur  leconvoi  funebrede  Timperatrice; 
eourageux,  t^meraire  m^me  dans  ses 
combats  centre  les  Perses,  on  le  vit  plus 
tard  fuir  de  ville  en  ville  devant  une 
poignee  d*Arabes ;  sincerement  attach^ 
an  christianisme,  il  se  laissa  engager 

n  VoyczPanl  DIacre,  Zooare  etNlc^phore. 
4^  LivraUon.  (Syrie  modeenb.) 


dans  la  doctrine  des  raonothelites,  sorte 
d*6clectisme  religieux  aui  tenait  k  la  fois 
des  trois  grandes  heresies  dominantes 
d*Arius,  deNestoriusetd*Eutych^ ;  mou 
par  nature,  il  fut  energique  par  circons- 
tance ;  voluptueux  pargoOt,  il  futsobre 
par  n^eessit^. 

La  m^me  contradiction  qui  forme 
son  caractere  eclate  dans  ses  actes. 
Trouble  par  P^tat  pitoyable  ou  il 
trouve  Tempire,  son  dmes*abat,  et,  faute 
de  r^olution,  il  sVndort  dans  lamol- 
lesse ;  accabl^  par  la  fureur  de  ses  enne- 
mis ,  son  eoeur  faibtit,  et  il  regarde  d'un 
oeil  hel)f  te  ChalrMoine,  qui  bridle  en  face 
de  sonpalais;  la  famine  sur prend  Cons- 
tantinople, sa  iSte  s'egare,  et  il  veut  s'^- 
chapperen  Afrique.  Orgueilleux  avec  les 
Perses ,  il  est  humble  avec  les  A  bares. 
De  la  m^me  main  qui  vient  d*ecraser  ses 
adversaires  les  plus  redoutables ,  il  signe 
de  honteux  traii^s  en  faveur  d'ennemis 
sans  puissance.  Strange  destined  bon 
^Idat,  mais  pitoyable  politique ,  il  perd 
avec  la  plume  tout  ce  qu*il  gagne  avec 
r^pee.  Knfin,  grdee  k  Tamour  de  son 
peuple,  il  se  rassure,  il  reprend  toute 
son  audace;  comme  le  san^^lier  accul6 
qui  se  retourne  contre  la  meute  qui  Ta 
longtemps  poursuivi ,  il  ^ventre  les  pre- 
mieres lignes  des  Perses ,  attaque  Cnos- 
roes  dans  le  coeur  de  son  reyaume^  s'em- 
pare  de  sa  capitate;  mais,  tout  ^tonn^  de 
de  sa  victoire,  il  n'ose  ^touffer  le  tyran 
qu*il  foule  a  ses  pieds.  En  somme,  son 
regne  de  trente  ans  se  divise  en  trois 
pdriodes :  dans  la  premiere,  il  ne  se  mon- 
tre  que  d^ourage  et  impuissant ;  dans 
la  seconde,  il  se  relive  et  grandit  tout  k 
coup;  dans  la  troisieme,  il  retombe  plus 
bas  que  jamais.  Cest  a  la  Gn  de  la  se- 
conde que  commence  notre  histolre. 

Cependant,  au  fond  d'un  desert  que 
les  Remains,  dans  leur  toute-puissance, 
avaient  dedaign^deconqu^rir,  il  pointait 
une  lumiere  morale ,  Tlslam ,  il  naissait 
un  prephete,  Mahomet  (Mohammed). 
Rien  de  plus  obscur  et  de  plus  difGcile 
que  les  commencements  de  Mahomet. 
Orphelin ,  sans  fortune,  sans  preponde- 
rance, il  est  oblige  d'entrer  au  service 
d'une  riche  veuve.  Son  emploi  est  d'a- 
bord  dela  plus  commune  nature :  il  con- 
duit les  chameaux  de  sa  mattresse  de  la 
Mekkeaux  frontieres  de  Syrie.  Puis,  au 
contact  des  hommes ,  son  intelligence 

4 


k6 


vmwa^ 


ae  d^  velopfM ;  11 1'applique  au  oommeroe, 
et  ses  services  preoaent  de  jour  en  jour 
plus  d'imfK>rUiaee,  Bientdt  de  cbame- 
lier  il  devient  intendaat  de  Fopwlente 
Khadidja.  Eofio,  il  Spouse  oette  Kba- 
didja;  mais  son  existence  ne  change  pas 
encore  :  il  ne  semble  avoir  jusqu'a  aua- 
rante  ans  ni  Tidte  qui  oocupera  les  der- 
nieres  annees  de  sa  vie,  ni  le  but  vers  le- 
guel  il  teudra  plus  tard  avec  uoe  si  in- 
tatigable  perseverance.  Ses  voyages  la* 
vaieiu-ils  instruit?  Les  meditations, 
auxquelies  on  le  voyaitse  livrerhabituei- 
lement  avaient-elles  mQri  son  esprit  ou 
tourn^  88  t£te?  Un  jour  il  arrive  auprcs 
de  sa  femme,  les  yeux  ^latants,  la  d^ 
marcbe  furibonde,  Pair  inspire,  et  pre- 
tend avoir  re^u  la  visite  de  Tange  Ga« 
briel.  Oe  ce  iour  il  se  dit  prophete. 

Trois  ansaurant,  ses  predications  ne 
8*etendent  pas  au  del^  de  sa  famille ;  il 
y  trouve  m^me  plus  d'incr^ules  que 
de  disciples.  II  n'en  continue  pas  moina 
son  ccuvre,  gagne  des  partisans  hooinie 
par  bonime ,  et  en  vient  a  exposer  publi- 
quenient  sa  doctrine.  Des  lors  il  nlesse 
les  prejug^  et  surtout  les  inter^ts  de  sa 
tribu  :  ses  prejug^ ,  en  attaquaut  Ti- 
dolStrie;  sesiuterdts,  en  enlevant  son 
prestige  au  temple  de  la  Kaaba,  qui  atti* 
rait  des  visiteurs  de  toutes  les  parties  de 
FArabie.  Cette  tribu  r^agit  coutre  Ma- 
liom(*t ,  le  chasse  et  le  persecute.  La  fuite 
k  Medine  du  prophete  proscrit  est  celle 
d'un  homme  qui  ne  paraissait  avoir  ni 
puissance  ni  avenir.  Sa  victoire  de 
Bedr  n'a  aucune  importance  reelle  : 
d'ailleurs,  en  clierchaiit  h  arr^ter  une 
riche  caravane ,  il  commettait  plutot  le 
crime  d'un  brigand  qu*il  n'accomplis- 
sait  Tacte  d'un  eiivoye  de  Dieu.  Sa  d^ 
faite  d'Uhud,  si  elle  ne  Tabat  pas,  lui 
dte  au  rooins  du  credit,  et  forme  un 
nouvei  obstacle  a  sa  marclie  en  avant. 
Quant  a  la  vengeance  qu'i I  tirede  la  tri- 
bu des  Benou-Koraizha ,  elie  est  atroce : 
les  sept  centt  t^tes  qui!  fait  tomber  froi- 
dement  gdtent  bien  des  pages  de  sa  mo« 
rale  elastique  (*). 

£nignie  singuliere  que  le  caractere 
de  cet  homme  1 11  crott  avec  sa  fortune , 
mais  en  sens  inverse  des  aveiituriers  or> 
dinaires :  plus  il  moute,  moins  il  s*aban« 

')  Voyex  rexoeIlent«  tradoctioD  d*Aboal- 
ru  de  Mohammed,  par  M.  Noel  de«  Ver- 


f^ 


donne  k  aeapaaaioas ;  plot  ilflonqsol,  < 
moins  il  paralt  ambitiwx;  iitail| 
a'eldve ,  mouu  il  se  «iontn  np«M.|||f 
premieres  giienres  ne  sont  pas  i 
chose  que  des  luttaf  de  tiibusa  t 
rien  n*est  change  a  eette  opaque  diK| 
habitudes  de  la  nation  anhe,  ou  p' 
il  n*y  a  pas  encore  d«  nadofi  i 
Mais  Texp^dition  du  prophetic 
Mekke  avec  roille  homines  toutd 
et  surtout  son  traits  de  paii  i 
Kor^ischiteSy  ses  plus aneiMis eta 
Impiacables  eimcous,  soot  det  i 
politique  habile,  et  aussi  d'd 
resolution;  car  il  agit  malgrekii 
et  les  cons^'ils  de  ses  compasiwDt. 
La  prise  de  la  riche  viUe  joi 
Khaibar  decida  du  sort  de  V 
dater  de  ce  jour,  il  ne  eessa  de  | 
tel  que  nous  Tavons  esqaisse  i 
rheure  -.  sa  clemenoe  ioepuisil 
aussi  adroile  que  gte^reuse;  ii 
quesa  puissance  seoonsolide,i« 
a  Dieu  le  plus  constant  boii) 
mesure  que  ses  enuemis  les  plus  i 
n^  lui  sont  ameo^  prisonoten,) 
de  se  montrer  d*autant  plus  Mi 
plus  cruel  qu'il  a  ete  naguerepkKll 
milie  et  plus  persecute,  il  agit,aa'~ 
traire ,  avec  eux  comme  avec  da  I 
^ar^,  mais  toujours  chprs.  A  { 
sentiment ,  a  quelque  cause  que  \ 
attribulez  cette  conduite ,  die  est  l 
louable  que  rare.  Mahomet,  d'aiV 
Gommandait  k  des  biies  fproca.d 
lui  failaitavant  tout  les  apprivo 
est  un  lion ;  Raled  est  un  tigre;  i 
Tun  des  meilleurs ,  tue ,  de  sa  (i 
torit^ ,  un  Arabe  qui  jadis  a  fn 
de  ses  parents.  Tels  sont  les  d» 
gez  des  soldats.  II  n'y  a  pas  ju 
enfants  qui  ne  soient  d*uue  cruai 
f^me  :  le  jeune  Rabia,  par  eiei 
^orge ,  uendaut  la  guerre  cifile«l 
vieillard  de  cent  ans ,  enferm^daofi 
litiere,  en  empruntant  m^meleir 
de  ce  venerable  patriarchs.  PeupiflV 
ment  barbare  que  ces  Arabes,  ~ 
quelques  quality  nobles,  une  ( 
grandeur  tarouohe ,  une  geo^rositek 
pitaliere,  mais  avec  les  passiossj 
plus  violentes  et  les  plusenrdn^: 
niour  de  la  vengeance,  Tardeur  la  | 
excessive  au  pillage,  le  m^ia  ^  I 
profond  pour  la  viede  leurs  sefDbia^ 
rorgueil  de  Taigle ,  Tavidite  do  \ 


StKlE  MODERNfi. 


Mafaomet  avait  done  beaaooopafaire 
pour  plier  au  sentiment  de  Tordre  eea 
ners  ind^pendants,  au  sentiment  de  la 
nationalitil  ces  fils  raneunien  de  tribus 
rivales ,  au  sentiment  religieux  ces  ido- 
]Atres  entlt^s.  Est-ce  dans  la  prevision 
de  ces  difficult^  qu*il  attendit  rexp6- 
rience  de  Vhfi^e  mOr  pour  exeeuter  son 
orojet  de  riforme?  Cette  r^forme  fut, 
fl  est  vrai ,  ineompi^e  et  inefficace  sous 
bien  des  cdt^ ;  mais  elle  paratt  ph^no- 
menaie ,  si  Ton  cousidere  les  obstacles 
qu'elle  a  rencontr^  et  les  progres  qu'elie 
a  accomplis.  Avait-il ,  du  reste,  la  con- 
fiance  de  son  sucoes  colossal ,  ce  Maho- 
met r^veur,  grave,  taciturne,  sobre, 
couraj2;eux,  mais  passionn6  pour  les 
femmes  jusqu*au  mlire,  et  passionn^ 
materiel lement  et  brutalement,  car 
eelui  qui  les  aimait  tant  les  a  asservies  ? 
Est-ce  le  promoteur  d'une  idee,  ou 
n*est-C6  qu  un  bras  qui  frappe  que  cet 
homme,  moitie  prophete,  moiti^  soldat? 

Le  Koran  a  rallie  les  Arabes,  mais  ne 
les  a  pas  modlGes.  Les  tribus  de  Ghas< 
Ban  et  de  Hira ,  6tablies  sur  les  conOns 
meridionaux  de  la  Svrie,  avaient  les 
m^mes  iustincts ,  le  mime  caractere ,  les 
m^mes  moeurs  que  les  tribus  de  THedjaz 
et  de  l*Temen.  Aussi,  apres  quelques 
combats  insigniflants,  prirent-elles  fait 
et  cause  pour  leurs  freres  des  Arables 
Pifttree  et  Heureuse.  Par  la  Tunion  si 
difficile  des  tribus  independantes  com- 
men^a  a  s'operer;  par  la  les  peuplades 
de  m^vne  origine  o  ue  les  Romai  ns  a  vaient 
soumises,  se  detaeherent  de  Tempire 
byzantin.  Les  ardeurs  de  la  guerre ,  les 
benefices  de  la  conqu^te  devaient  ache* 
ver  ce  que  la  foi  avait  ^bauche ,  tant  ii 
est  vrai  que  le  Koran  ne  fut  que  le  dra- 
peau  autour  duquel  vinrent  se  grouper 
des  populations  ambitieuses,  aventu- 
ri^res ,  pour  qui  la  guerre  offrait  tous 
les  a  vantages  possibles  :  IVspoir  du 
butin ,  et  la  conqulte  de  contrees  pro- 
ductives. 

Tout  semblait  preparer,  en  outre, 
la  domination  des  Arabes.  Le  des- 
potisme  insupportable  des  rois  de  la 
Perse  avait  fini  par  sonlever  les  popula- 
tions les  plu<  soumises.  I^  corruption 
de  la  cour  byzautine  avait  gagne  toute 
les  provinces  i  et  les  deux  puissances 
d*Asie  venairnt  d^^puiser  leurs  financfes 
et  leurs  soldats  par  sept  cauipagoes 


51 

cons^ntives.  Mahomet ,  ayant  aperf u 
et  compris  cet  6tat  de  d^dence,  voulut 
traiter  de  puissance  h  puissance  avec 
He  radius  comma  avec  Chosroes.  Le 
premier  re^ut,  dit-on,  avec  honneur, 
rambassadeur  arabe;  le  second  ne  voulut 
pas  m^me  Fadmettre  en  sa  presence  (*). 
U^raclius  avait-il  un  va^^ue  pressenti- 
ment  de  i'avenir?  Chosroes  ^tait-il  d^k 
frappe  de  cet  aveuglement  qui  precede 
la  cnute  des  rois  ?  Ces  ambassades ,  en- 
voyees  vers  les  differents  souverains, 
sont  les  premiers  actes  de  Mahbmet  a 
Texterieur.  Elles  affectent ,  il  est  vrai , 
la  forme  de  la  predication ;  elles  annon- 
cent  une  foi  nouvelie;  elles  essayeut  de 
eonvertir  les  rois  et  les  peuples;  mais 
ce  n'est  la,  en  realite,  qu'uue  apparence : 
au  fond ,  elles  ont  un  but  tout  politique , 
celui  d'^tudier  le  terrain,  de  sojider 
rdmede  chacun,  etde  disjoindre,  autant 
que  possible,  les  parties  heterogenes  oui 
concouraient  a  for n)er  les  deux  grandes 
unites  chanrelantes  de  cette  epoque, 
Tempire  byzantin  et  le  royaume  des  Per- 
ses.  Mahomet,  en  agissant  ainsi,  se  mon- 
trait  habile  et  pr^voyant.  Le  peu  de  con- 
cordance qui  existait  dans  le  caractere  des 
Arabes  Chretiens  et  des  Grecs  de  Syrie 
ne  lui  avait  point  ^chappe;  la  soumis- 
sioo  vague  et  capricieuse  des  Ghassani- 
des  aux  ordres  ae  Tempereur  de  Cons- 
tantinople, et  surtout  Tesprit  dMnde- 
pendance  et  de  domination  a  la  fois  de 
ces  peuplades  meridioaales,  lui  firent 
compter  sur  des  allies  aussi  douteux, 
sur  des  tributaires  aussi  turbulents 
dlieraclius. 

II  ne  s^agissoit  done  que  de  trouver  un 
pretexte  pour  se  mettre  en  rapport  avec 
eux  :  la  proi  agande  religieu^e  etait  le 
meilteur de  tous.  Aussi ,  c'est  aupres  des 
tribus  syriennt-s  qu'il  exjiedie  ses  plus 
adroits  partisans.  Uu  cliei  des  GUassani- 
des,  secroyaiit  menace  dans  son  autorit^ 
par  cette  puissance  incoonue  qui  surgit 
du  desert ,  rassembie  des  troupes  pour 
se  defendre.  Mahomet  s>n  inquiete  k 
peine,  et  continue  ses  tentatives  sur 
aautres  points.  EnGu,  la  nieGame  cen- 
tre le  nouveau  prophete  gagne  de  proche 
en  proche ;  mais  en  in^me  temps,  comnie 
on  le  verra  plus  tard ,  son  influence  s'ac- 
crutt  sur  certains  groupes  d'hommes , 

(*)  Voyez  Ockley,  HUtoire  de$  Sarratint, 
4. 


5S 


L*U]VIVERS. 


sur  les  plus  impatienls  du  joug  romain, 
sur  les  plus  auaacieux,  sur  les  plus  actifs. 
Vi\  descendant  de  la  race  des  rois  de  la 
froatiere  de  Syrie,  alii6  a  la  famille  des 
emirs  de  Ghassan,  commet  un  crime: 
it  assassine  Fenvoy^  du  niaitre  de  THed- 
jaz  aupres  du  gouverneur  de  Bostra; 
c*en  est  assez  pour  allumer  la  guerre, 
que  Mahomet  appelait  sans  doute  de 
tous  ses  vceux. 

Mahomet  a  tout  prepare ,  en  vue  de  ce 
conflit,  avec  une  patience  et  une  suite 
dans  sa  conduite  qui  6tonnent;  il  a  ex- 
cite seer^tement  les  populations  par  la 
bouche  de  ses  ^missaires ;  ii  a  essay^ 
sur  les  chefs  TefTet  de  ses  paroles  ^lo- 
quentes,  sur  hs  cr6dules  la  puissance 
de  sa  mission  divine ,  sur  les  ambitieux 
la  promesse  des  con^u^tes.  Heraclius, 
au  contraire ,  grdce  a  son  esprit  habi- 
tuelde  contradiction,  ne  s*est  bientot 
plus  occupy  de  ceux  qui  en  moins  de 
sept  annees  devaient  le  depouiller  de  la 
Syrie  tout  entiere.  Durant  sa  prome- 
nade triomphale  a  travers  son  empire, 
apres  ses  victoires  sur  Chosroes ,  il  n*a 
fait  attention,  dans  les  pays  qu*il  par- 
courait,  qu'a  Tenthousiasme  de  com- 
mando dent  il  ^tait  Tobjet.  Que  lui  im- 
portent  ces  Sarrasins  qui  errent  sur  les 
confins  asiatiques  de  ses  immenses  pos- 
sessions! It  laisse  ses  intendants  leur  re- 
fuser la  solde  qu'ils  ont  gagn^  dans 
leurs  derniers  combats;  il  permet  qu'on 
les  insulte,  lorsquMIs  r6clament  a  piu- 
sieurs  reurisesce  qui  leur  est  dO  comma 
prix  de  leur  sang.  II  institue  une  f^te 
religieuse  a  Jerusalem,  en  y  rapportant 
le  bois  de  la  sainte  croix ;  il  s*abandonne 
aux  festins  et  aux  jeux  dans  la  molle  et 
charmante  £mese;  mais  quant  a  Bostra, 
la  yiile  de  guerre,  il  n'a  que  faire  de  la 
visiter;  quant  aux  autres  places  de  la 
Palestine,  il  n*ira  pas  s'en^ager  dans  des 
sables  brdlants  pour  les  mspecter  Tune 
apr^s  fautre  (*).  Cest  qu'aussi  mainte- 
nantil  ne  s'ima^ine  ptusqu'on  puisse  ja- 
mais rien  avoir  a  craindre  de  cette  coali- 
tion de  tribus  qui  s'agitent  dans  le  desert. 
Aussi,  s'informe-t-ila  peine,  une  fois 
retourn^  dans  sa  capitale,  de  ce  qui  se 
passe  au  fond  de  la  Syrie.  II  faudra  des 
coups  de  foudre  pour  le  reveiller;  mais 
oes  coups  de  foudre  f^pouvanteront  tel- 

(*)  Voyez  Nicephore. 


lement,  qo'il  se  sentira  incapable  f« 
^▼iter  les  atteintes. 

PBEVIBRBS     HOSTILITES    KHTIE   LE 
ARA.BES    ET  LES  BOVilKS. 

Cependant,  Mahomet  avait  rasseni 
trois  tnille  de  ses  compagnoDs  ks  im 
6prouv^;  et  leur  ayantdonn^pourdlj 
son  cher  affirancbi  Zaid,  le  premier fj 
crut  a  la  parole  inspiree  du  propheM 
les  lanca  vers  la  Syrie,  bien  sOrfil 
^tait  que  Tindolent  Beradius  oe 
rait  leur  opposer  que  des  scldats ' 
a  vaimre.  Cette  petite  troupe 
nee  entra  avec  resolution  eo  S] 
aux  environs  de  Moutah,  elle joij 
arm^  romaine ,  considerable,  si  U 
croit  les  historiens  niusulnuBS, 
superieure  en  nombre  aux  sddsM 
propbete,  au  dire  m^me  deseeml^ 
grecs.  Ce  premier  combat  de  Mwi 
assez  brillant   pour  qu*oo  iMm\ 
qu*au  fanatisme  rimpetuosit^haip 
des  Mahometans.  Zaid,  a  la  t^te^M 
les  siens,  se  precipita  au  miliflidei 
ennemis  avec  une  ^nersie  et  one  aii 
adroirables.  II  fut  Uie.  Djaafar,  d 
sin  de  Mahomet,  saisit  alorsretcfldi 
de  rislam  que  Zaid  avait  laiss^Mflf 
de  ses  mains  mourantes.  Djaafarr 
cinquante  blessures  sans  tooiber;3[ 
dit  tour  a  tour  la  main  droite  et  lai 
gauche,  sans  quitter  son  drapeio 
appuyaitcontre  sa  poitrioeavecsesl 
gnons  sanglants;  un  dernier  eoif 
sabre,  qui  lui  fenditle  cHloe,  lui  ill 
abandonner  le  eommandement  aitf 
vie.  Abd-Allah^  ills  deRawahah,!^ 
ce  eommandement  et  mourut  a  soaM 
apres  avoir  donn^  un  nouvel  eiem 
cou rage  etde  perseverance  EnfivH 
led,  le  plus  jeune ,  sinon  le  moia}* 
lant  des  chefs  arabes,  voyantqof' 
compagnons  decim^s  allaientserti 
drea  la  retraiie,  le&rallie,  IcseilM 
les  enflamme;  et.  entreprenaat  uai 
taque  ddsesper^e,  il  rejoiot  lei  Boaii 
avec  plus  de  fureur  qae jamais,  les  <* 
ne ,  les  fatigue,  les  debande et  les  i 
en  d^route. 

Apres  avoir  poursuivl  les  fujarw, 
que  dans  les  teuebres,  Kbaied  oesV* 

3ue  quand  lis  s'arrlterent ;  et,  apres 
dnne  le  jour  de  h  batailie  tant  de ' 
ves  dUntr^pidite,  il  en  doonak 


SYRIE  MODERNE. 


&3 


in<iin  de  ruse  et  d*habilet^  militaires. 
Tout  vaincus  qu*ils  fussent,  les  Romains 
etaient  encore  supprieurs  en  nombre  a 
leurs  vainqueurs.  Khaled  sentit  ce  grave 
inconvenient,  et  voici  comment  il  y 
para  :  des  Taurore,  11  reconnut  le  ter- 
rain; et.  comme  ce  terrain  ne  manquait 
ni  de  mouvements  ni  de  vegetations ,  et 
se  pr^tait  merveilleusemeut  au  strata- 
geroe  qu*il  avait  imagine,  il  fit  faire  h  sa 
troupe  mille  evolutions ,  afin  de  donner 
]e  ciiange  aux  Romains.  Ceux-ci  cru- 
rent ,  en  effet^  que  de  nombreux  ren- 
forts  Etaient  arrives  aux  Musulmans 
pendant  la  nuit,  et  comme  ils  etaient 
deja  accabl^  sous  la  lassitude  et  le  d& 
sespoir,  its  s*epouvanterent  facilement, 
et  s  echapperent  p^le  m^le  vers  les  mon* 
tagnes  voisines.  Khaled  tomba  sur  eux, 
en  atteignit  un  ^rand  nombre,  et  les 
massacra  sans  pitie,  si  bien  que  la 
plaine  en  demeura  toute  baignee  de  sang 
et  toute  couverte  de  cadavres.  Les  ba- 
gages  des  Romains  resterent  entre  les 
mains  des  Musulmans  :  ils  les  pillerent; 
ma  is,  sans  pousser  plus  avant,  ils  s'en 
retournerent  en  Ara(bie  avec  leur  riche 
butin. 

'    Cette  agression,  aussi  prompte  que 
bardie,  n'eut  point  sans  doute  un  resul* 
tat  imm^diat;  maisellefit  connaltreaux 
soldats  de  Mahomet  leur  superiorite  sur 
ceux  d'Beraclius;  elle  augmenta  le  lus- 
tre d*un  chef  d6ja  renOmme  et  (]ui  avait 
precedemment  m^rit^  le  beau  titre  par- 
mf  les  siens  de  Saif-AUah,  Tepee  de 
Dieu;  elle  apprit  la  guerre  contre  les 
masses  a  des  hommes   qui  jusque-la 
n*av.aieut  eu  k  deployer  leur  courage  que 
contre  quelques  gros  d'ennemis ,  et  uui 
n'avaient  encore  lutte  qu'individuelie- 
ment.  LesGrecs,  comme  toujours,  ont 
cherche  a  diminuer  Timportance  de  ce 
premier  exploit  des  Arabes;  a  les  eu 
croire,  uncertain  Theodore,  lieutenant 
du  gouverueur  de  Palestine,  aurait  tailie 
en  pieces  les  troupes  de  Mahomet,  et 
Khaled  aurait  seul  echappe  au  carnage. 
Mais  ce  qui  pent  faire  douter  de  la  v^ra- 
cite  des annalistes  ofHcielsde  T Empire, 
cVst  que  des  Tannee  suivante,  630,  les 
Grecs  rassemblerent  une  armee  pour 
fondre  sur  T Arabic.  Si  le  combat  de 
Moutah  edt  ^te  favorable  aux  Grecs,  ils 
n'eussent  pas  a  coup  sdr  songe  a  se  met- 
tre  eu  depenses  d'nommes  et  d'argent 


I 


pour  tirer  vengeance  d'une  invasion  sans 
succes.Ils  Etaient  accoutumes,d'ailleurK, 
a  ces  courses  de  barbares  j usque  sous  les 
mur^  de  leurs  viiles  fronti^res,  et  tant 

u*ils  etaient  sdrsde  les  r^primer,  ils  ne 

pvaient  point  sans  dmite  s'en  prcoccu- 
;>er  vivement.  Aussi ,  croyons-nous  que 

'expedition  des  Grecs  centre  1* Arabic, 
lon^ement  et  serieusement  projetee, 
etait  une  revanche  militaire,  et  non  une 
simple  repression  de  police  Internatio- 
nale. 

Les  pr^paratifs  des  Romains,  du 
reste,  leur  porterent  maiheur,  et  furent 
une  grave  faute  aui  ne  petit  rencontrer 
son  excuse  que  dans  Torgueil  national 
blesse  par  la  defaite  de  Moutah.  Maho- 
met^ en  effet,  trouva  dans  Tintention 
des  Syriens  le  motif  d'une  le\  ^e  d'hom- 
mes  considerable.  II  s'a^issait  cette  fois 
de  repousser  Tinvasion  etrangere,  etde 
punir  de  leur  audace  d'insolents  enne- 
mis.  Trente  mille  Musulmans,  enflam- 
roes  par  les  discours  du  prophete  et  par 
ses  promesses  tout  a  la  fois  terrestres 
et  religieuses,  le  pillage  pour  les  vivants 
et  le  paradis  pour  les  morts,  se  r^unirent 
autour  de  lui,  et  affront^rent,  avec  une 
Constance  inebraolable ,  les  difficultes 
d'une  longue  et  penible  route.  Cette. 
marche  rapide  intimida  les  Romains. 
lis  laisserent  Mahomet  s'avancer  jus- 
qu'a  Tabouk,  lieu  situ^  a.  la  mSme  dis- 
tance de  M^dine  que  de  Damas.  C'^tait 
presenter  hardiment  la  bataille  que  de 
camper  ainsi  entre  les  deux  pays,  a 
nioitie  chemin  des  deux  capitales.  Pour- 
quoi  done  les  Grecs,  slls  n*avaient  pas 
encore  ^prouve  la  force  des  armes  ara- 
bes, auraient-ils  ainsi  refuse  d'en  venir 
aux  mains?  Preuve  nouvelle  qu'ils 
avaient  €i€  battus  a  Moutah. 

Cependant,  sans  combat,  sans  vic- 
toire,  Mahomet  en  arriva  a  ses  fins  :  il 
avait  r^uni  la  plus  puissante  arm^e  qui! 
poss6da  jamais,  dix  mille  cavaliers  et 
viugt  miiie  fantassins;  il  les  avait 
eprouves  de  toutes  famous.  Dix  jours  de 
marche  cons^cutifs  dans  le  desert  n'a- 
vaient  point  epuis^  leurs  forces;  les 
traits  brdlants  du  soleil  n'avaient  point 
abattu  leur  courage;  la  soif  et  la  faim 
n*avaient  point  lasse  leur  patience.  So- 
briete,  Anergic,  perseverance,  voilli  les 
conqu^tes  que  Mahomet  avait  fait  faire 
a  son  peuple  dans  cette  expedition  sans 


S4 


L'UIWVERS. 


b^n^fice  pour  des  yeux  vulgaires.  A 
Tabouk,  ce  n'^taient  plus  des  tribusr6u- 
Dies  ^ui  campaient ,  c  etait  une  nation. 
Aussi  y  la  seule  presence decettearm<^6, 
toute  devouee  h  son  chef,  toiite  con- 
flante  en  son  avenir,  tout  assuree  de  sa 
force,  produisit  des  miracles  pour  la 
cause  musulinane.  Plusieurs  princes 
envoyerent  des  deputes  au  camp  de 
Mahomet;  plusieurs  vilies  de  Syrie  vin- 
rent  solliri  er  sa  protection.  Youhanna, 
fits  de  Raubah,  maitre^ie  la  vtlle  d^AI- 
lalh,  s'en  vint,  de  IVxtr^mite  du  golfe 
Arabique,  lui  offir  son  hommage,  et 
sVnga^ea  a  lui  payer  un  tribut  annuel 
de  trcfis  mille  dinars  (pieces  d*or. )  LfS 
cit^s  syriennes  de  Djara  et  d'Adraa  lui 
propos'ferent  aus>l  un  tribut  de  deux 
^ cents  dinars.  D^jii  Tun  des  pr^c^ptes  da 
Koran  etait  applique  :  ceux  qui  ne  se 
faisaiont  pas  Musulmans  s*eu$?a<ceaient 
a  payer  leur  independance  reiigieuse, 
toTit  en  reconnaissant  la  suzerainet6 
politique  de  Tempire  des  Ar  bes. 

II  faut  remarquer  ici  la  prudence  de 
Mahomet,  et  recoimaltre  que  sa  tongue 
station  hostile  sur  les  terres  de  Tempire 
byznntin  est  p<  ut-^ire  facte  le  plus  ha- 
bile et  le  plus  sage  de  toute  sa  vie.  Un 
conquerant  ordinaire  eilt  pouss6  en 
avant;  mais  alors  la  destinee  de  TArabie 
^tait  remise  a  la  chance  des  armes :  une 
bataille  perdue  detruisait  tout  le  pres-> 
tige  de  la  nouvelle  nation ;  des  homnies, 
tout  redout. bles  qu'ils  fnssent  un  a  un, 
n'inspiraient  plusdecraintes  s^rieuses, 
si  on  les  pouvail  vaincrereunis.  JusquV 
lors  les  Arabes  n'avaient  piisse  que  pour 
de  hardis  aventuriers;  leurs  excursions 
^taient  aussi  rapides  que  d^sastreuses ; 
ils  pillaient,  mais  n'envahissairnt  pas: 
semblables  aux  torrents  de  leurs  monta- 
gnes,  on  les  voyait  fondre  en  hiver  du 
sud  au  nord ,  detruire  lout  sur  leur  pas- 
sage ;  mais ,  au  bout  de  quelques  mois  de 
devastation, -ilsallaients'engouffrer  dans 
le  desert  comme  les  torrents  dans  les  ab!- 
mes.  Mahomet  voulut  faire  une  arm^e 
r^guliere  de  ces  bandes  indisciplinees, 
comme  11  avait  d^ja  fait  une  societe  uni- 
que de  taut  detribus  ennemies  :  il  r6us- 
sit  au  dela  de  ses  souhaits.  Aussi,  ne 
voulut-il  pas  exposer  cette  premiere 
armee  aux  hasards  d'utie  invasion  hdti  ve. 
Les  Arabes,  dans  leurs exp^itions,  ne 
devaient  pas  proc^er  comme  les  bar- 


bares  des  plaines  sept^trionales :  Is 
n*avaient  pas ,  comme  eesderafers.il 
masses  renaissantes  dernere  eex;  ibii 
pouvaient  pas  amonceler  iini 
devant  leurs  p3S  les  cadavresde leurs (i^^ 
res;  ils  ne  devaient  pas  abaodoiuiiri. 
toujours  le  pays  dont  ils  80rtaieBl,ll 
con  tree  benie  qui  contenait ,  selffli  U  |S» 
role  du  prophetc ,  les  deux  villes 
par  excellence,  la  Mekke  etMedine 
Arabes  etaient  peu  nombreui,  ilM 
lait  conqu^rir  et  non  emigrer;  ilM 
lait  se  crier  avant  tout  des  pi 
et,  comme  iis  portaient  avfceai 
livre  saint  et  leur  code,  il  kur' 
coiistituer  plutot  que  vatnere, 
plutot  que  tuer.  Mahomet  tra^i 
Tabouk  la  conduite  que  devait 
sa  nation  dans  Tavenir  :  il  inspin 
Son  attitude  menai^nte  une  lermti  _ 
lui  fut  tout  avantageu^e,  etpitftilK' 
gner  des  adherents  que  de  s'wni*tw" 
quelques  villages,  txcnllente  t«**^ 
qui  lui  permit  deretournerdaDsl'l 
plus  fort  et  mieux  consolidiqw  ji  ^^ 

Ce  grand  fait  accompli,  Mahomet^ 
Yait  mourir ,  son  ceuvre  etait  ach^ 
Depuis  longtemps  deja  W  ne  vivail 
que  par  la  t^te.  Un  empoisonnMM 
combattu  assez  a  temps  pour  n'litt 
innnediatement  mortel ,  avait  rmni 
sante  et  augmente  encore  sa  roalKfiel 
bituelle,  Tepilepsie  (*).  La  lumiwe^f 
corps  alia  d^s  lors  toujours  en  '•'_ 
jusqu'a  ce  quVlle  s'<^t*»ignit  compllj 
mentle  8juin  632.  Hiraclius,  wi^ 
tant ,  put  se  croire  d61ivr6  d'un  mil*' 
quietant,  du  seul  chef  capable  dertw- 
les  Arabes  ^  la  victoire;  il  dut  uajj 
tant  s*enorgueillir ;  il  dut  se  felicitf} 
ne  s^itre  pas  compromis  en  jicnlij 
contre  des  ad^ersaires  indignes^ 
majesty,  contre  de  misirablesca! "' 
h  peine  converts  d'un  maufais  ^--^ 
de  poll  de  chamelle ,  arm6s  de  laMi 
pour  la  plupart ,  faute  d*ep^;  il  **w 
rendormir  plus  que  jamais  dans  soi^ 
dolente  8ecurit6.  Irapp^voyantemperti 
qui  avait  laisse  se  fonder,  dans<{uel(|^ 
une^  de  ses  provinces,  une  autorilcog 
See  a  la  sienne,  qui  avait  traW  unejfr 
gion  nouvelle  comme  une  obscure  hflf 
sie,  qui  ne  voyait  qu'un  hoinnw  <wHiff 
Ih  ou  naissait  une  nation  f         ;  . 

Dans  la  suite  des  iges,  daos  I'hisl**'* 
C)  Voyei  Alwu'ttMla ,  Fie  de  liohmmii 


SYRIE  MODERNS. 


55 


Abs  penptos,  la  9tipertont6  humaine  se 
tanifestesous  des  formes  diverses;  niais 

Es  n*a jamais  qu'nn  but  unique,  la  do- 
nation. Mahomet  s'adresse  a  una  na- 
il, qu'il  fornne  lui-mdme,  qui  a  toutes 
les  aualites  primitives,  Tenthousiasme 
;iMi  plut6t  Tardeur  en  toutes  choses,  i*ar- 
jleur  guerriere ,  Tardf  ur  de  propagande, 
lardeur  des  jouissances  materiel  les. 
ibhomet  cherche  done  la  guerre;  il  in- 
iteune  religion ;  il  promet  a  ses  dis- 
les  des  voluptes  de  toute  sorte  dans 
fiei  coinme  sur  la  terre.  Mais  est-ce 
la  seule  cause  de  son  prodigieux  suc- 
'  Non ,  ce  surces  tient  aussi  a  la  fai- 
de  Tadversaire  du  prophete.  H6- 
lius  lie  sa?ait  pas  gouvemer.  Gou- 
ler,  e'est  prevoir;  et  H6raclius  n'a 
h  la  puissance  des  Arabes  que  lors- 
ils  euren^  termini  la  conqu^te  de  la 
ic  tout  entiere.  Gouverner,  c'est 
roir  se  servir  dps  Elements  qu'on  pos- 
||Ue;Heruclius,  s'il  ne  trouvait  parmi 
^wpopulationsabdtardiesni  vertu  puis- 
lie,  ni  g^n^reux  elans ,  ni  noble  en- 
Jbousiasme,  pouvait  y  rencontrer  du 
IfioiQs  le  sentiment  de  la  conservation 
inelie  qu'il  fallait  exalter,  relever, 
Ibnoblirpar  la  necessity  de  Tunioncom- 
^  ne  pour  la  defense  du  sol ,  de  la 
Htle,  de  la  patrie.  Ainsi,  faute  de 
lie  dans  son  chef,  voila  une  grande 
ition  asservie  par  une  peuplade,  voil^ 
nombre,  la  discipline,  la  puissance 
're  vaincus  par  une  poign^e 
les,  sans  art  militaire,  sans  res- 
I  source  d*aucune  esp^ce ,  et  qui ,  pour 
I  ^osi  parler,  ne  trouve  des  amies  et  des 
llvres  que  chez  ses  ennemis.  Et  qu*oo 
Ite  dise  pas  qu'il  n'y  avait  rien  h  faire 
V^  les  Grecs  du  Bas- Empire,  et 
^Q*Heraclius  est  assez  grand  pour  avoir 
[gincu  les  Perses,  Qu'importent  les  dif- 
'ieultesqu*on  rencontre  sur  son  chemin.' 
*»  empereur  n'a  de  g6nie  qu'autant 
[jQ^il  atteint  son  but.  Heraclius ,  loin  de 
Titteindre,  n'en  a  pas  mfimc  approch^ : 
;  ril  a  sauv6  quelques  parties  eloigu^s  et 
'ttns  importance  de  rAsie  Mineure,  il  a 
■perdu  sans  espoir  sa  plus riche province 
orientale,  laSyrie.  Voyons  mainteoant 
■  avec  quelle  rapidite. 

SVCCfcS  BAPIDSS  BBS    ABABBS* 

Abou-Bekr,  premier  successeur  de 


un  de  ces  patriarehes  des  temps  primitits 
qui  inspirent  k  tons  I'obeissance  par  le 
respect.  Quoiqu'il  edi  rencontre  bien 
des  obstacles  k  son  dl^vation  au  khalifat, 
malgr^  son  grand  dge  et  son  dos  courb6 , 
il  trouva  encore  en  lui  assez  de  fermet^ 
pour  Temporter  sur  son  redoutable 
comp^titeur,  Ali,  gendre  de  Mahomet. 
Omar,  d'ailleurs,  cet  autre  veteran  des 
^erres  salutes,  appuya  le  choix  d'Abou- 
Bekr,  et  devint  bienlot  son  plus  silr  et 
son  plus  habitiiel  coiiseiller.  Os  deux 
homines,  aussi  priidents  qu'^nergiques, 
cominencereiit  parsoumettre  riiiterieur. 
Du  vivant  in^me  de  Mahomet ,  une  par- 
tie  de  TYemen  avait  cru  a  ia  parole  |)r6- 
tendueprofihfligued'Asouad,uno  partie 
de  ITemania  a  celle  de  MozaTlama; 
Texemple  de  Mahomet  avnit  tente  res 
deux  imposteurs.  Abou-Bekr  sut  les 
vaincre,  quoiqulls  fussent  deja  assez 
puissaiits,  de  meine  qu*il  etoufia  les  re- 
voltes  conlre  la  dime. 

L' Arable  une  fois  paciO^e,  Punite  une 
fois  im|)osee  a  toutes  les  croyances  et  i 
tous  les  interets,  Abou-Bekr,  se  trouvant 
h  la  t^tede  cent  vingtquatre  mille  Mu- 
sulmans ,  se  crut  mattre  de  forces  assez 
considerables  pour  entr^^rendre  des 
conqu^tes.  Le  vieux  scheik  du  desert 
avait  raison :  ces  cent  vingt-quatre  mille 
Musulmans  valaient  les  quinze  millioDS 
de  Syriens.  Jusque-la  Tlsiam  avait  eu 
des  armies  d^observation ,  pour  ainsi 
dire,  sur  les  frontieres  de  la  Syrie  et  de 
la  Me^opotamie;des  le  commencement 
de  Taniiee  633  oes  armees  combiuerent 
leurs  mouvementset  commencercot  des 
hostilites  regulieres  et  suivies. 

Tandis  que  Khaled  penetrait  dans  TI- 
rak  arabique(*),avecson  impetuosite  or- 
dinaire, 09ama  entrait  en  Syrie.  Ce  qu*a- 
vait  prevu  le  prophele ,  arriva :  a  mesure 
qu'Ocama  avnncait  dans  le  pays,  les  Ara* 
bes  desertaient  la  cause  des  Grecs  et  ve- 
naient  en  foule  grossir  Tarmee  des  Mu- 
sulmans. Oi^ama  penetra  jusqu'a  la  ville 
d^Obna  sans  coup  ferir ;  il  la  pilla,  et  s*ea 
revint  eu  Arable  avec  des  ricbesses  nom- 
breuses  et  des  hommes  de  plus.  Les  deux 
tentatives  d'Abou  Bekr  a^ant  r^ussi  sur 
rirak  comme  sur  la  Sj^rie,  il  se  decida 
h  une  expedition  g^nerale,  rassembia 
une  arm^e  noaibreuse  autour  de  Mediae, 


BUiioroet,  ctait  un  de  ces  chefs  pasteurs ,     .  o  yoycz  Thtopbaoe. 


$6 


L'UNIVERS. 


et  Texhorta  lonffuement  comme  faisait 
MahoiTiet.  Sa  figure  austere  et  noble 
dans  sa  maigreur,  son  front  ^lev^ ,  son 
oeii  vif  et  prbfond  donnaient  a  la  parole 
de  ce  vieiliard  quelque  chose  de  la  puis- 
sance prophetique.  Ses  conseils  etaient, 
d'ailleurs ,  m6les  de  geiierosite  et  de  bar- 
barie ;  s*il  recommandait  aux  chefs  de  trai- 
ler leiirs  soldats  comme  des  freres ,  aux 
soldiits  de  combaltre  avec  vaillance,  de 
jnourir  plutot  que  de  fuir,  niais  de  ne 
tuer  ni  les  vieiltards,  ni  les  enfants,  ni 
les  femmes,  de  ne  detruire  ni  les  pal- 
iniers,  hi  les  bles ,  ni  le  betail ,  i\  n'en 
designait  pas  moins  une  race  a  la  haine 
mortelle  oes  Musulmans ;  s*il  coiisentait 
h  ^nargner  les  moines  Chretiens,  11  n'en 
parlait  pas  nioins  aussi  d'extermination. 
Voici  la  (in  du  discours  qu'on  lui  pr^te, 
et  quM  a u rait  adresse  a  Yezid ,  frere  de 
Moawiah,  qui  fonda  la  dynastie  des  Cm- 
miades  :  «  Vous  trouverez  sur  votre 
«  route  des  hoinmes  qui  vivent  en  re- 
«  traite,  et  qui  se  sont  consacres  a  Dicu ; 
«  ^pargnez-les,  eux  et  leurs  inonastere^ : 
«  mais  pour  ces  membres  de  la  synago- 
«  sue  de  satan ,  que  vous  reconnaltrez  h 
«  feur  tonsure ,  fendez-leur  la  t6te ,  et  ne 
«  leur  failes  point  de  quartier,  It  moins 
1  quits  ne  se  fassent  Musulmans,  ou 
«  qu'ils  ne  consentent  a  payer  tribut.  »  * 

Siuels  sont  les  membres  de  la  synagogue 
c  satan  ?  Sont-ce  les  Juifs  ou  les  sim- 
ples prStres  grecsPToiijours  est-il  que 
les  Musulmans  montrerent  tout  d^abord 

{>lus  d*aversion  pour  les  Juifs  que  pour 
es  Chretiens,  et  quMI  en  est  encore  ainsi 
aujourd'hui  danstoute  Tctendue  deTem- 
pire  ottoman. 

II  partit  d'abord  d' Arabic  vingt  mille 
homines  seulement  (*).  Abou-Bekr,  mal- 
greles  avantages  qu'avaient  deja  rempor- 
tes  les  Musulmans,  ne  se  hdtait  pas  de 
frapper  le  coup  decisif,  et  il  voulait 
qu^une  suite  deconibats  brillants,  de  pe- 
tites  victoires  produclives,  entrafnfit  peu 
a  peu  tons  \es  croyants  et  augmentdt  de 
jour  en  jour  les  nouveaux  convertis. 
AbouBehr  avail  biencalcule;  patient  et 
prudent  comme  tons  les  vieillards  orien- 
taux ,  il  voulait  que  ses  compatriotes  sol- 
jicitasseiiteuxm^mes  Thonneur  etravan- 
tage  d'aller  guerroyer  en  Syrie.  II  confia 
le  commandement  de  son  avant-garde  a 
AbouObaida,  homme  grave,  r^flechi, 

(*)  Voycz  Elmacin ,  Hist,  sarac. 


doux  et  genereux ,  plus  capable  encoi^ 
de  conqu^rir  des  pros^lytesliruiarnqoe 
des  provinces  a  Tempire  arabe.  Ge  der- 
nier pourtnnt  etait  aussi  unsoldatva- 
leureux,  un  chef  habile ;  et  il  trouva  bieo- 
tot  Toccasion  de  le  prouver. 

Cependant  Heraclius  avait  fiai  pars*e- 
mouvoir  quelque  peu  de  Taudace  erois- 
sante  des  Arabes ;  et,  comme  si  sa  pre- 
sence en  Syrie  devait  seule  suffire  poor 
retablirTordresi  fortementcomproiBSi 
et  faire  reculer  de  tem6raires  aventi- 
riers,  il  alia  s*6tablir  a  Damas.  Mais  Ik, 
au  lieu  de  r6unir  des  troupes  aguerria, 
au  lieu  de  relever  les  esprits  et  de  donas 
Texempie  de  la  prevoyance  sinonduooi- 
-rage,  il  s*abandonna,  des  sonarrivee, 
aux  plaisirs  et  a  la  dissipation ,  traita  de 
mensonges  ou  d^exagerations  les  r^ 
qu'on  lui  faisait  de  la  bravoure  et  da 
progres  de5  Musulmans ;  et,  loin  de  fear 
opposer  une  digue  puissante,  il  a'vm 
contre  eux  qu'un  vieillam ,  Sergiis,  A 
un  simple  detachement.  Sergius  Wl 
un  de  ces  anciens  soldats  ush  par  la 
interminables  guerres  contre  les  Persa, 
et  a  qui  on  avait  donn6  pour  retraite  k 
gouvernement  de  la  ville  de  C«a- 
ree  en  Palestine.  II  ne  put  done  fonaa 
son  corps  d*observatlon  que  de  Sanuih 
tains  sans  habitude  des  combats;  (i; 
c'est  a  peine  s'il  put  trouver  trois  cpsH 
Ro mains  pour  servir  a  la  fois  d1nstni6 
teurs  et  de  chefs  de  file  a  ces  quelqaa 
milliers  de  soldats  inexj)^rimentcs.  AWJ 
qu'arriva-t-il?  Ayant  reconnu  le  nornW 
superleur  de  ses  ennemis,  il  luifutio- 
possible  de  se  replier  sur  une  fortcKSJft 
tant  ses  troupes  se  montrerent  inop*' 
bles  de  marcues  rapides  et  contiai*  , 

Pour  n'^tre  point  d&honor^  par*^ 
debandade  honteuse,  il  resolut  doQC" 
combattre ,  malgre  des  chances  fort  pa 
favorables.  Ce  t«it  dans  les  environs* 
Thadoun,  non  loin  de  Gaza,  queSergi« 
se  trouva  entoure  par  les  Arabes,  etqun 
les  attaqua  en  desespoir  de  caux-^^ 
malgre  le  courage  personnel  qu'iljj*' 

?iloya ,  sa  troUpe  ceda  de  touies  p3n«» 
ut  taillee  en  pieces ;  et  blesse  grievem«[^ 
demonte  a  deux  fois,  le  malheurnix bej 

Jius  se  laissa  prendre,  quoiqu'il  con«jJ| 
a  haine  implacable  que  lui  portaieni'^ 
Arabes.  C'etait  lui ,  en  elfct,  qui,  coh'"* 
I'un  des  gouverneurs  de  la  ^'^."^'f?;' 
avait  6t6  charge  de  mettre  a  execution 


f. 


\ 


SYRIE  MODERNE. 


57 


wdre  imperial  qui  defendait  aux  tribus 

amises  a  Teinpire  byzantin  de  com- 

Breer  avec  leurs  &eres  de  THedjaz  et 

i  TYemen.  Get  insolent  et  tyrannique 

iffdil  avail  violemment  irrite  les  Ara- 

|;etmalgre  ies  ordres  de  clemencede 

IT  cbef  Abou-Obaida,  malgre  ies  re- 

lunandatioDS  gen^reuses  de  leur  kha- 

Lles  Musulmaus  se  veogerent  de  Ser- 

idela  fa^n  la  plus  cruelle  en  le  cou- 

(dans  uoe  peau  de  chameau  nouvel- 

0itta^qu*ils  exposerent  au  soleil ,  et 

^sedessechant  peu  a  peu ,  Gt  subir 

Kice  aussi  horrible  que  prolong^ 
iureux  gouverneur  de  Cesar6e. 
peioe  eut-on  appris  h  Medine  les 
piers  succes  de  Favant-sarde  maho- 
ne,  que  cbacun  voulut  prendre 
;  h  one  expedition  qui  promettait 
fois  une  gloire  assuree  et  un  ri- 
jbttUn.  On  Tint  de  toutes  parts  r^- 
Mra  Abou-Bekr  la  faveur  aaller  re- 
Nte  corps  d^arm^e  d*Abou-ObaIda. 
Ml  la  la  manifestation  g6nerale  que 
hiffli»attendait,  et  qui  lui  garantis- 
Tteatboiisiasme  et  le  devouement  de 
IWHipes.  Une  nouvelle  masse  d'Ara- 
Bitra  done  en  Syrie,  en  m^me  temps 
ks  soldats  de  K  haled  recevaient 
te,  apres  leurs  courses  victorieuses 
iers  le  royaume  de  Hira ,  de  se  reu- 
to  forces  d^ja  si  nombreuses  des 
idtMiis.  H^raclius  fut-il  enfin  eclair^ 
H  iDoaTements  divers  de  ses  enne- 
|FU^I  convaincu  cettefois  qu'il  ne 
Mt|kis  d^une  incursion  momen- 
*tM||bien  d'une  invasion  en  r^- 
MMMhent  rodrie  et  prudemment 
PjWj?  Pas  encore;  car,  loin  d'op- 
ff  des  masses  contre  des  masses, 
,ffOt^  a  une  annee,  il  laissa  les 
(ttoeurs  de  ses  places  fortes  se  ti- 
|MDaie  lis  pourraient  de  ce  danger, 
;i*iDe  leur  envoya-t-il  quelques  se- 
S  insigiiiflants. 

^»«Mlaut,Abou-Obaiiane  montrait 

jeulem<*ni  du  courage,  mais    de 

»lcii  niilitaire«  Pour   assurer  un 

w a  MS  operations  futures,  il  reso- 

ws'cmparer  d'une  villa  tortiflce, 

psante,    qui  lui  ofTrtt  en    m€me 

W5  un  point  d'appui  et  un  lieu  de 

wtaillpmeut.  Dans  cette  intention  il 

«  mettre  le  siege  devant  Bostra ,  si- 

w  sur  la  route  de  Damas ,  a  (rente 

*<s  sud  de  cette  capiiale ,  et  qui  com- 


mandait  les  plaines  fertiles  du  Hauran. 
II  paratt  qu^U^raclius  n'avait  pas  seu- 
lement  abandonn^  ses  villes  frontieres , 
mais  qu'il  en  avait  encore  tres-mal  choisi 
les  gouverneurs.  Celui  de  Bostra ,  par 
exemple,  qui  s*appelait  Romaio ,  a  I'ap- 
proche  de  Tarmee  qui  le  mena(^ail, 
commenca  a  s*inquieter  vivement,  et 
s'en  alia*  vers  les  premiers  postes  des 
ennemis  trailer  de  la  livraison  de  la 
ville ,  sous  le  pretexte  de  savoir  ce  que 
les  Arabes  venaient  faire  sur  les  posses- 
sions byzantines. 

On  recut  tout  d'abord  Romain  avec 
hauteur  et  mepris  dans  le  camp  des  Mu- 
sulmans;  et  il  luifut  r^pondu  qu'on  ve- 
nait  apporter  aux  habitants  de  Bostra 
ou  le  paradis  ou  tenfer.  Determine z- 
vousj  ajoutait  -  on,  d  vous  faire  maho- 
metans,  ou  a  payer  le  fribut,  ou  a  mou- 
rir,  Romain,  dont  ce  langage  hardi  avait 
augmente  la  frayeur,  fit  aupres  de  ses 
concitoyens  les  efforts  les  plus  grands 
pour  les  engager  a  payer  le  tribut.  On 
repoussa  ce  conseil  pusillanimc;  on 
s'exhorta  h  la  defense ,  on  s'arma ;  et  le 
ISche  gouverneur  fut  oblige  de  sortir  de 
la  ville  avec  ses  douze  mifle  cavaliers  de 
garnison  et  une  troupe  assez  forte  d'in- 
fanterie ,  compos^e  du  plus  grand  nom- 
bre  des  habitants  de  Bostra.  Alors  se 
passa  une  com^die  aussi  Strange  que 
nonteuse. 

Romain ,  profitant  de  la  coutume  en- 
core en  vigueur  des  combats  singuliers 
entre  les  chefs  d'armee ,  precipita  son 
cheval  au  galop,  s'avanca  seul  vers  les  li- 
gnes  ennemies ,  et  appela  Khaled ,  qu'il 
savait  commander  I  avant-garde  arabe. 
Ce  dernier  piqua  des  deux  de  son  cote, 
approcha  de  son  adversaire;  mais,  au 
lieu  d'une  provocation,  il  en  entendit  la 
proposition  suivante  :  «  Je  desire  depuis 
«  longtemps ,  lui  dit  le  fourbe  Byzantin, 
«  embrasser  votre religion,  etfai  donn6 
«  le  m^me  conseil  aux  habitants  de 
«  Bostra ;  mais,au  lieu  de  les  persuader, 
«( je  n'ai  fait  que  m*attirer  leur  haine  : 
«  accordez-nous  encore  quelques  jours , 
«  je  vais  retourner  dans  la  ville,  et  re- 
ft nouveler  mes  efforts  pour  les  engager 
a  ^  se  rendre.  *  Khaled  promit  a  ce 
tra!tre,s'il  se  ddclarait  musulman,  de 
lui  conserver  tous  ses  biens  personnels 
selon  les  prescriptions  de  la  loi  maho- 
metane.  Alors  Romain,  qui,  tout  eo 


58 


L'tfWIVERS. 


faisant  bon  n)ardi6  de  son  bonneur, 
Touiait  aoqu^rir  une  reputation  de  vaii- 
lanoe,  demanda  a  Khaled  de  simuler  en- 
tre  cux  un  eombat ,  afin  d'en  imposer 
plus  facilement  aux  habitants  de  Bostra. 
Khaled  accepta  oetteoffre;  mais,  sort 
qu'il  voulut  prouver  sou  mepris  a  Thy- 
pocrite  gouverneur,  soit  qu*il  ne  pdt 
calmer  son  impetuosite  naturelle^  il 
porta  a  Romain  de  si  rudes  coups,  tout 
en  ^pargnant  sa  vie,  ainsi  qu*il  etait 
coDvenu,  que  celui-ci ,  tout  meurtri, 
fut  oblige  de  s*enfuir,  et  perdft  ainsi  te 
benefice  de  son  ignoble  tromperie. 

Malgr^  ses  nouveaux  efTorts,  Romain 
ne  parvint  pas  h  faire  abandonner  les 
arines  a  ses  concitoyens;  bien ,  au  eon- 
traire,^  ses  disc<)urs  deshonorants  on 
ne  repondit  quepardes  injures,  par  un 
soulevement ,  et  par  le  chuix  d*un  au- 
tre chef.  Malheureusement  ce  nouveau 
commandant  voulut  trop  t6t  se  rendre 
digne  des  suffrages  de  la  multitude.  II 
alia  imprudeminent  d^fier  un  des  chefs 
de  Tarmeearabe.  Abd-Er-Rahman,  Ols 
d*Abou*Rekr,  repondit  a  son  appel ,  et  le 
chargea  avec  tant  de  vigucur  qu*il  le  mit 
en  fuite «  comme  Khaled  avait  fait  de 
Koniaiu.  Ce  premier  echec  futsuivi  d'un 
autre  beaucoup  plus  grave.  Les  deux  ar- 
mees  en  etant  venues  aux  mai  ns,  les  Grecs, 
malgr6  leurs  charges  reil^rees,  furenfc 
battus  et  repousses  dans  la  ville ,  dont 
les  hautes  muraillerdevinrent  d^sormais 
leur  seule  chance  de  salut. 

Le  si^e  de  Bostra ,  du  reste ,  aurait 
pu  durer  longtemps ,  tant  les  fortifica- 
tions etaient  solides,  tant  la  terrenr 
qu'mspiraient  les  Mahometans  avait 
excite  le  courage  de  chacun ;  mais  Ro- 
mains,  bat'ou6,  honni,  emprisonn^  dans 
sa  maison,  songeait  non-seulement  h 
sauver  sa  t^to  et  sa  fortune,  mais  encore 
h  se  venger.  Pour  arriver  plus  vite  k 
ses  fins  criminelles,  il  eut  Tinfamie 
de  passer  plusieurs  jours  a  percer  la 
partie  des  murs  de  la  ville  qui  donnait 
sur  son  jardin,  et,  cela  fait,  d'envoyer 
un  emissaire  chercherles  Arabes.  Ceux- 
ci  s'etant  introduits  chez  Tancien  gou- 
verneur,  y  trouverent  des  costumes 
semblables  aux  costumes  des  Grecs>  et, 
d'apr^s  les  indications  de  Romain,  les 
uns  se  repandirent  dans  certains  quar* 
tiers  de  la  ville,  tandis  que  les  autres 
s'en  all^rent  surprendre  le  chdteau  prin- 


cipal. Pais,  h  nn  signal  d«n&^,l«0 
comment  sur  plusieurs  pmnts  Ihl 
les  Dortes  furent  oovertes,  et  f  ' 
entiere  des  Arabes  se  precipitin 
ville.  Bientdt  les  MusufmaosTsiai 
mi  rent  h  mort  tous  ceux  qui  ne^ 
derent  pas  raman(le  pardon) 
ne  s'engag^rent  pas  h  payer  iel 
(le  rachat  de  leur  tdte). 

Une   partie   seutement  de ! 
mahpmetane  avait   et^ 
siege  de  Bostra ;  un  autre  ( 
le  commandementd'Amrou-l 
Mait  reste  en  arricre,  avec  I'oi 
si^er  Gaza.  lei  se  passa  ondeo 
qui  prou\ent  la  hardiesse  et  bl 
fiance  en  soi  qui  faisaient  h  p 
des  Arabes.  A  rapparition  des  I 
mans  devant  la  place,  le 
grec  voulut   obteuir  une 
avec  Tun  des  chefs  de  Farmtta 
Aussitdt  Amrou  lui-m^roe  ( 
la  ville,  et  se  presenta  ao  g« 
Celui-ci  lui  ayant  demande  ct\ 
nait  les  Mahometans  devant  Ini 
Gaza,  lechef  arahe  lui  repoodit:t| 
«  dre  de  Dieu  et  de  notre  rnlll 
«  vous  embrassez  notre  rdigi«ij 
«  deviendrez  nos  freres.  Si  TOttSl( 
«  conserver  la  vdtre,  engaga-* 
«  nous  payer  ^  perp^uite  Ml 
«  annuel ,  et  nous  vous  defend 
«  tre  vos  ennemis.  Autremolt 
«  aura  que  Tep^e  entre  vousrti 
A  ces  paroles  si  fieres,  le  gf 
se  duuta  qu'il  avait  affaire  aue 
des  troupes  agressives ,    et 
imm^iatement  qu'on  le  mlt  afl 
sortie  de  la  ville.  Cette  inlT 
odieusement  contraire  auxl 
guerre,  ne  fut  pas  suivied'0 
grdce  a  la  presence  d'esprit  do  i 
gnon  d*Amrouqui  s'appelaitWil< 
Get  ancien  esclave,  d'originej 
nienne,  comprenait  la  languef 
et  aussitdt  il  traduisit  en  >r3v 
chef  Fordre  infime  que  veoalt  dlj 
der  le  gouverneur  de  Gaza.  AlofM 
rou,  tout  en  conservant  son  isr 
lit^  premiere  pronon^ ,  en  se  r 
les  paroles  suivantes  : «  Seigneur,] 
«  suis  que  le  dernier  desdix  ca|Hti 
«  qui  commandent  Farmee.  Ctttj 
«  leur  ordre  que  je  vous  parle. ' " 

(*)  Voyez  Hainaher. 


SYRIE  MODERNE. 


39 


venirtous  ensemble  pour  trai- 

BravecToiis,  si  je  leur  porte  un 

Hf-conduit  de  Yotre  part.  »  A  ces 

li,  le  soufenieur,  toujours  per6de« 

h  vouTant  se  d^barrasser  a  la  fots 

I  dix  capitain^s  dont  on  lui  parlait, 

onfa  a  Tassassinat  d'Amrou,  et  le 

in  tranquilie<»«ot  rejoindre  son  ar- 

I.  Apres  quplques  iours  d'atteote , 

mix  dVoir  ^te  joue  par  un  barbare, 

Mjverneur  de  Gaxa  sortit  avec  toute 

irnison  pour  alter  fondre  sur  les 

M.  Ceux-Gi  le  laisserent  epuiser 

nmiere  ftirie,  lui  eouperent  la  re- 

le,  et,  Tattaqaaut  ensuite  de  toUS 

I,  reraserent  ses  ineilleures  troupes^ 

mien  deroute  le  reste,  et  poursui* 

Bl  les  fuyards  jusqu'aux  murs  de  J^- 

tBm,ou  lis  trou  verent  heureusement 

|tfiu(^  L«s  Arabes,  apres  cette  vio* 

I,  retournereiit  sur  leurs  pas,  et 
^KO^ni  raeilenient  d'uiie  vilie  qui 
l»tpt«  ni  garnison  ni  gouverneur. 
k»  foil  possesseurs  (ie  Gaza  et  de 
|fen,  les  elefs  de  Toccident  et  de 
l6nt  de  la  Syrie  meridionale,  les 
Inimans  tournerent  Damas  coinme 
Inaient  ioum^  Jerusalem ,  et  se  diri- 
Bt  vers  le  nord-est,  se  rendirent  mat- 
IMoeessirement  de  Tadmor  (Tan- 
M  Palmyie),  de  Soknab,  au  nord 
tadiDor,  et  deRakkah,  plaee  forte 
fEuphrate.  Ainsi,  dans  leur  pre- 
n  eampegne,  les  Arabes  avaieat 
i  ealefi6aux  Romahis  cinq  villes  im- 
^tft-,  les  communications  leur 
Ittt  (Hifertes  avec  leur  pap  par 
Btctftes  differents,  par  Gaza  et  par 
in;rt,  grSce  ^  leurs  possessions 
I  te  nord ,  ils  pouvaient  dorenoTant 
Br  Damas,  emp^cAitr  le  facile  ravf- 
innent  de  cette  capilaie,  et  Tassi^ 
•ffc  totttes  les  cbaooes  de  siicces  (*). 
(Melius  ouvrit  enfin  les  yeux ;  mais 
kit  trop  tard.  Les  Syriens,  effray^ 
b  rapidiu§  des  conqu^tes  de  risiam, 
ifoyaient  de  toules  parts ,  abandon- 
nt  leurs  champs  d^astes,  quittatent 
f%  Tillages  et  s*aliaient  renfermer 
H  les  places  fortes  du  sud  ft  du  lit- 

II.  Les  Arabes,  jadis  trihutaires  des 
liains ,  ^etaicDt  presque  tous  fa  its 
lalmans.  Plus  de  cavalerie  lj6g^re  a 
|N)seraQx  Irruptiom  qui  allaientdo- 

feaTant  se  succeder  sans   intervalle; 

C)  Toyei  Wak^y,  Conquile  de  la  Syria. 


plus  de  secours  a  esperer  de  la  Syrie 
m^ridionale,  dont  la  majeure  partie 
d*alli^e  etait  devenue  hostile  \  des  gar- 
nisons  en  prison  dans  les  villes  qu'elles  < 
devaient  defendre,  telles  que  les  garni- 
sons  de  Cesar^e,  de  Jerusalem,  de 
Keapotis,  de  Joppe  et  de  Jericho;  des 
communications  inquiet^s  entre  les 
deux  capita  les  syriennes^  Antioche  et 
Damas;  les  villes  situees  sur  TOronte 
menacees  par  les  attaques  qui  devaient 
leur  venirde  Tadmor,  deSoknah  etde 
Rakkah ;  enfin,  le  decoijragement  parnai 
les  troupes ,  la  terreur  panni  les  popu- 
lations. Que  fit  Heraelius  dans  une  p«- 
reille  extremity?  llmiitUi  Damas,  ou  il 
craignait  pour  sa  sQrete,  et  suivit  la 
foule  des  fuyards  a  Antioche. 

SIEOS  BK  D4MAS. 

Aprfts  taot  d'cclairs ,  il  fallait  un  coup 
de  foudre.  Pour  que  IMslam  imposAt 
son  aulorit^  au  reste  des  dissidents, 
^pouvantdt  les  monarques  et  courbftt 
les  peuples  sous  son  joug,il  ne  s'agissait 
point  de  se  borner  a  vaincre  les  petits 
rois  de  Hira  et  deGhassan,  a  jeler  la 
terreur  parnii  les  populations  liinitro- 
phes;  rheure  de  la  conquete  de  rAsle 
6tait  Teiiue,  il  fallait  suivre  IVntrat- 
nanie  destinee.  Abou-Bekr,  tout  phthi- 
sique  qo'il  6tait,  conservait  dans  leg 
souflfrances  de  son  corps  T^nergie  de 
son  Ame;  et  cefiit  encore  lui  qui  poussa 
sa  nation  en  avant,  et  qui  ordonna  le 
siege  de  Damas.  Des  le  mols  de  f^vrier 
cheque  corps  d'amidese  mit  en  niarche; 
les  sept  mille  hommes  d'Amrou   s*u- 
nirent  aux  trente-sept   mille  d'Abou- 
Obaida;  et  Khaled  s'elan^a  en  avant 
avec  quinze  cents  cavaliers  aguerris, 
qui  venaient  de  ravager  la  basse  M^so- 
polamie.  Contre  cette  formidable  ar- 
mee ,  Heraelius,  toujours  imprevoyant, 
n'envoya  que  cinq  mille  hommes,  sous 
le  commandement  dn  plus  bravache  et 
du  plus  incapable  des  g^n^raux.  Les 
annalistes    grecs    n'ont    pas    m6me 
mentionn^  ce  miserable  chef,  et  Hiiv 
toire  ne  le  connatt  que  sous  le  nom  de 
Khalous,  ainsi  que  les  Arabes  Tappe- 
laient.  Ce  piloyable  courtisan,  rencon- 
trant  i  Balbek  et  h  Emese  des  popu- 
lations terrifiees,  les  rassuralt  en  leur 
annoni^nt  qu'il  s'en  allait  pourfendre 


eo 


ce  Khaled  redoute,  et  qu'avant  peu  il 
rentrerait  dans  leurs  murs  avec  la  t^te 
du  barbare  au  bout  de  sa  lance.  Cotnme 
les  Musutmans  n'^taient  pas  encore  ar- 
rives devant  Damas,  il  put  y  entrer. 
Lk^  nouveliefanfaronnade,  nouvetle  van- 
terie  de  sa  part.  Sa  vanite  Tamena 
m^me  a  disputer  ie  commandement  g6- 
n^ral  de  la  ville  cii  Ismail,  ie  gouver- 
neur.  II  perdit  done  un  temps  pr^cieux 
dans  de  ridicules  disputes,  au  lieu  de  se 
concerter  avec  cet  Ismail,  et  preparer 
avec  lui  les  moyens  de  defense  f). 

Bientdt  parurent  les  Arabes ;  les  trou- 
pes romaines  sortirent  immediatement 
de  Damas,  se  rangerent  en  bataille  de- 
vant leurs  ennemis,  et  les  masses  se  me- 
surerent  de  Toeil ,  tandis  que  les  chefs 
se  provoquaient  en  luttes  particulieres. 
L'un  des  plus  intr^pides  Musulmnns, 
Dherar,  nls  d'Azwar,  se  Janca  tout 
seul  contre  les  bataillons  damasquins, 
frappa  de  mort  six  fantassins  et  qua- 
tre  cavaliers,  et  s'en  retourna  sans 
blessure  dans  ies  rangs  de  ses  frdres. 
Abd-Er-Rhaman ,  ce  tils  valeureux  da 
kbalife  Abou-Bekr,  que  nous  avons  dej^ 
vu  se  distinguer  a  Bostra,  alia,  de  son 
c6te,  proposer  Ie  deli  a  quiconqueaurait 
Taudace  de  I'accepter.  Les  Grecs  alors 
jeterent  les  yeux  sur  leur  vantard  com- 
mandant ;  et  oelui-ci  se  vit  forc6  de  r^- 
pondre  au  voeu  imperatif  de  son  armee. 
Mais  Khalous,  toujours  vain,  ma]gr6 
son  effroi  qu'il  dissimule ,  semble  de- 
daignerlajeunessed'Abd-£r-Rliaman,et 
appelle  Khaled  h  grands  cris.  Celui-ci 
s*avance ;  Khalous  i'injurie ,  Ie  menace, 
excite  son  chevai,  et  se  precipite  au 
galop  comme  pour  terrassersonennemi. 
Khaled  D*eut  qu'a  lever  sa  lance ,  a  en 
frapper  une  seuie  fois  Khalous  pour  ie 
demonter,  et  Ie  saisir  dans  la  pons- 
siere  ou  il  rouiait.  Le  gouverneur  Is- 
mail voulut  ven^^er  Khalous;  mais  il 
eut  bientdt  ^prouve  le  meme  sort.  L'ar- 
m^e  romaine  se  sentlt  d6courag^  par 
la  perte  de  ses  deux  chefs ;  et  elle  renira 
sans  combattre  dans  les  murs  de  Da- 
mas, ou  les  Arabes  lui  jeterent  les  t^tes 
d'IsmaTi  etde  Khalous.  JN*6tait-ce  pns  la 
un  veritable  combat  de  Tlliade?  seule- 
ment  si,  d'un  cdte,  se  trouvaient  un 
Achille  et  un  Ajax,  de  Pautre  il  ne  s*^- 
taitpresentequ^uuThersiteetun  Oolon. 
.    nvoyczl 


L'UNIVERS.  I 

Les  Damasquins  avaient  reiumeemj 
sorties ;  mais  les  Arabes,  qui  anient  -^ 
pris  des  anciens  aaxiliaires  d'Herae 
a  se  servir  des  machines  de  gun^ 
commeucerent,  d^  le  lendemaio^a ' 
tre  la  ville  sur  plusieurs  points. 
Grecs,  de  plus  en  plus  ofraycs, 
voyaient  courrier  sur  eourrier  i 
empcreur  pour  lui  demanderdesseesal 
Ces  secours  se  firent  attendre 
maines.  Alors  les  habitants  de 
croyant  non  sans  raison  qu'oo  lei  a 
donnait  ainsi  qu*on  avail  foitde  li 
et  de  Palmyre,  eurentlafaiblesse 
frir  a  Khaled  mille  onces  d*or  et 
cents  habits  de  soie ,  s*il  oooseoHi 
lever  le  si^e,  m£me  temporairea 
Pusillanimite  inutile!  Damas  etait 
trop  belle  proie  pour  que  les 
en  suspendissent  la  prise.  Absa 
reponau   aux  pressantes  pnoa 
Grecs  que  rarinee  arabe,  si  A 
douee    d'un    invincible   couni|^' 
mannuait  pas  non   plus  de  p  ' 
qu'elie  saurait  bleu  abattre  les 
les  les  plus  fortes,  et  que,  d'i 
elle  ne  se  retirerait  qu^aataotqoe 
Damasquinsserendraientmusulmaail 
tributaires. 


Cette  premiere  phase  da  si^  de  1 
mas  fit  ifaire  a  Heraclius  de  lardiiii 
forts.  II  leva  des  troupes ,  et  en 
le  commandement  a  son  frere  TbeodH 
qui  donna  dans  cette  occasioa  tesfri 
ves  d*une  complete  incapadte.  lJ» 
toriens  arabes  6levent  jusqu*aeeiitr 
bommes  le  chiffre  de  rarmee 
mais  on  a  eu  raison  de  le  dimti 
moitte,  en  consid^rant  le  tempts 
vait  perdu  Heraclius  au  comi 
de  la  campagne,  ies  difficuliei 
avait  dd  rencontrer  dans  la 
l^ions  nombreuses  a  une  des 
tes  de  son  empire ,  et  prive  des 
ces  que  lui  auraient  ocfertes  ~ 
nople  et  sa  riche  province.  T<  . 
est-il  qu*en  se  dirfgeant  a  mardifi 
c6e8  sur  Damas,  Tli6odore,  avec 
cinquante  mille  soldats,  aurait 
Jeter  dans  la  ville,  et  choisir  son 
et  son  terrain  pour  combattre. 
loin  de  la,  avec  la  presomption 
naire  aux  Byzantiiis ,  il  crut  qu'il  »< 
rait  qu'a  paraltre  pour  vaincre,  w^ 
hdta  aucuneiDent,  et  s*arrdta  en  sol 
chen)in  dans  toutes  les  villes  ou  il  i* 


SYRIE  MODERNE. 


61 


ipnoait  pour  un  prochain  ]iberateur. 
Ce  fureot  les  Arabes  qui  vinreot  au- 
>ant  delui.  Quelques  cavaliers,  sous 
loadaite  de  DMrar,  pousserent  jus- 
raux  premieres  lignes  de  Thtodore; 
eomme  ils  etaient  en  fort  petit  nom* 
fe, les  Grecs,  avec  leurs  masses,  par- 
irent  a  les  eutourer  et  a  faire  Dh6rar 
konnier.  Les  Musolmans,  emus  de 

Erte  de  leur  chef,  allaient  se  debander 
ir,  lorsque  Rafy ,  fils  d*OmeTrah , 
D  dps  beros  de  la  famfuse  tribu  de 
qr«  remonta  leur  courage  par  ces 
Dies :  >  Quoi  done,  avez-vous  oubli6 
pe  guicorHjue  tourne  le  dos  a  Ten- 
ami  ofren.se  Dieu  et  son  prophete  ?  « 
fertournez  a  la  charge ;  je  marcberai  de- 
Hit  Tous.  Quimporte  que  votre  chef 
Rtmortou  prisonnier?  Votre  Dieu 
A  vivaiit ,  et  il  volt  ?otre  Idchet^.  » 
aes  mots,  la  petite  troupe  arabe 
iit  de  nouveau  sur  les  Grecs ,  et 
liintiotrepidement  le  combat  jusqu'a 
tmea  de  Kbaled  et  de  son  corps 
imecr). 

ClBMeces  d'avant-garde,  qui  cut  para 
H  importance  k  un  g^,nera1  experi- 
Ui,  aagmenta  a  tel  point  la  con- 
IMe  de  Theodore ,  que ,  sans  faire  re- 
ler  ses  troupes,  sans  choisir  son 
vaia ,  il  marcha  a  la  rencontre  des 
Kbes.  Son  impetuosity  n'^tait  que 
lice,  et  elle  s'amortit  bientdt  contre 
\  rangs  serres  des  Musulmans.  Puis , 
lx-€i,8*dan^nt  a  leur  tour  contre 
(Grecs,  les  ^craserent,  les  s^pare- 
M,€ilc8mirent  en  d^route  complete. 
Iinoteette  bataille,  qui  s'^tait  donn^e 
Ml  un  lieu  appele  Gabatha,  un  deta- 
mneot  d' Arabes  s'^tait  elanc^  a  la 
iBrsuite  de  Tescorte  romaine  qui 
Uneoait  DhSrar  a  Antioche.  Cette 
RMrtefut  atteinte,  taillee  en  pieces, 
DMrar,  avec  son  liberateur  Rafy, 
■atgnit  Rhaled ,  qui  avait  eu  la  pru- 
"^  et  Tbabilete  de  retourner  au  si^ge 
Damas,  plutot  que  de  poursuivre 
»ilement  les  debris  de  Tarm^e  enne- 
Apres  sa  honteuse  d^route ,  Thro- 
ne reparatt  plus  sur  la  sc^ne.  Quel- 
historiens  pretendent  qu'il  fut  tue 
abatha ;  d'autres  disent  qu'^tant  re- 
lu  a  Antioche  aupres  d*Heraclius ,  il 
fut  naturellenient  fort  raal  requ ,  et 
'  d^pouill^  de  ses  grades ,  il  fut  reu- 

DVoyezTheopbane,  Cedreoas  et  ockle}. 


voy^    sans  emploi    a  Constantinople. 

Priv6  sucoessivement  de  ses  g^ne- 
raux ,  desillusionne  sur  son  fr^re ,  Hera- 
clius,  qui  baissait  de  jour  en  jour,  et  qui, 
au  milieu  de  tant  de  desastres  si  inqui^- 
tants  pour  son  empire ,  ne  se  tourmen- 
tait  que  de  la  jalousie  que  lui  iiispirait 
sa  femme ,  n'eut  pas  le  courage  de  se 
mettre  lui-m^me  a  la  t^te  d'une  nouvelle 
armee.  Avec  les  restes  des  bataillons 
vaincus  de  Theodore,  avec  quelque« 
nouvelles  levies  hdtivement  et  misera-' 
blement  faites,  il  crut  encore  quil 
pourrait  sauver  Damas.  Seulement  au- 
cun  e^neral  habile  ne  se  presentait  k 
son  cnoix,  et  il  se  trouva  dans  la  triste 
necessitede  confier  Thonneur  des  aisles 
romaines  a  un  ^tran^er,  a  un  certain  • 
Yahan,  Perse  d'origme.  Le  comman- 
dement  en  second  fut  donne  a  son  sa- 
cellaire,  Thtodore  Trithuhus.  Ces  deux 
generaux  serendirent  d'abord  h  ltme.se, 
ou  ils  trouverent  tout  ce  (]u'on  avait 
pu  ramasser  d*Arabes  Chretiens  sur  les 
rivages  de  la  Syrie;  masse  confuse, 
sans  discipline  et  sans  art  militaire ,  et 
dont  on  pouvait  craindre,  d^allleurs ,  la 
defection  une  fois  en  presence  des  Mu- 
sulmans. 

Cependant  telle  etait  la  p^nurie  des . 
Grecs,  que  ces  bandes  de  soldats  de 
toutes  sortes  de  tribus  formdrent  un 
renfort  de  dix  mille   hommes,  qu'on 

1>laca  en  avant  de  Tarm^  (*).  Soit  que 
es  deux  generaux  ne  pussent  s'entendre, 
soit  qu*il  f<lt  dans  la  destinee  des  Grecs 
de  commettre  faute  sur  faute,  loin  de 
marcher  ensemble  sur  Damas,  Vahanet 
Trithurius  se  s^parerent  en  deux  corps , 
etemployerent  un  tempspr^cieuxacom- 
battre  et  a  chasser  devant  eux  tous  les 
maraudeurs  quMIs  rencontrerent.  Etant 
enfln  arrives  devant  Damas,  un  accident 
ridicule  leur  Gt  encore  perdre  des  hom- 
mes. Le  nouveau  gouverneur  de  la  ville, 
qui  devait  paver  leur  soldo  aux  troupes 
imp^riales ,  chose  fort  n^essaire  sur- 
tout  pour  les  nombreux  auxiliaires 
qu*on  avait  enrdl^ ,  voulut  manifester 
son  mecontentement  de  Tabandon  ou 
Ton  avait  si  longtemps  laiss^  Damas , 
en  differant  de  quelque  temps  le  paye- 
ment  dont  on  Tavait  charge.  Au  bout 
d'une  quinzaine  seulement  il  s'executa ; 
mais  au  lieu  d'aller  pendant  le  jour  au 
n  Voypz  EulychluBetElmacln. 


«) 


L'umv£R& 


camp  d«8  Romains ,  i\  choisit  une  nuit 
noire ,  et  se  fit  accompagaer  par  une 
troupe  nonibreuse,  avec  force  trompet- 
tes  et  instruments  retentissants.  A  ce 
bruit  inaceoutum^  les  Grecs,  reveilles 
eo  sursaut ,  s'effray^rent ,  et  crurent  a 
une  surprise  des  Arabes.  U  s^ensuivit 
done  un  tumuite  et  une  confusion  tels 
qu'un  grand  nonibre  de  Grecs  ef£ares 
se  jetdreot  et  se  noyerent  dans  les  eaui 
de  la  riviere  El-Baradi,  aupres  de  la- 
queileetiit  place  leur  camp. 

La  leiiteur  de  la  marche  des  deux 
corps  de  troupes  romaines,  la  perte 
considerable  de  temps  jusqu'aux  portes 
mimes  de  Damas,  permirent  a  Khaied 
de  reunir  toutes  ses  bandes  dispersees, 
dedemander  a  Abou-Bekretd'en  reee- 
voir  des  renforts,  de  tout  preparer  pour 
une  iutte  deruiere  et  definitive.  Le  ren- 
dez-vous  general  des  Musulmans  fut 
fix^  a  Adjaadin,  lieu  situe  a  quelques 
roilies  au  sud  de  Damas.  Pour  se  rendre 
h  eet  endroit  Khaied  et  AbouObaida 
furent  forc^  de  se  retirer  de  devant  les 
murs  de  Damas.  Cette  sorte  de  retraite 
donna  lieu  a  quelques  combats  qui  m^ 
ritent  ici  une  courte  mention.  Deux 
Damasquins,  jeunes  gens  pleins  d*ar- 
deur  et  de  courage,  tomberent  sur 
rarriere*g&rde  aral^,  la  (ireui  reculer, 
et  lui  enleverent  ses  bagages.  Malheu- 
reusement  Khaied  fut  ayerti  assex  a 
temps  pour  rejoindre  av^'c  sa  cavalerie 
les  Greet  a^resseurs.  Or,  Tun  des  deux 
intrepides  jeunes  gens,  nomral  Paul, 
iiit  pris,  tandis  que  son  frere  Pierre 
emmenait  a  Damas  une  asaez  grande 
guantit^  de  femmes  prisonniercs.  Ces 
femmes,  du  reste,  se  moutrerent  les 
dignes  oompagnes  des  h^ros  de  Tlslam. 
A  la  premiere  halte  que  firent  les  trou- 
pes de  Pierre,  comme  elles  etaient  en- 
rorm^  seules  dans  des  tentes ,  ell^ 
se  saisirent  des  piquets  de  ces  tentes , 
se  serrirent  les  unes  contre  les  autres 
et  tpnterent  ainsi  de  reioiodre  Tarmee 
musulmane.  L'etonnement  des  Grecs 
fht  bientdt  remplace  dans  leur  coeur 
par  lacolere;  on  se  battit  vigoureuse- 
ment,  et  les  heroines  arabes  se  defen- 
dirent  avec  tant  de  bravoure  que  Khaied 
eut  le  temps  d*arriver,  de  delivrer  ces 
audacieuses  femmes,  et  de  massacrer 
leurs  ravisseurs.  Pierre  et  Paul  eurent 
la  tite  trauch^e,  et  sur  six  mille  cava-  , 


Hers  il  n*en  reatra  pag  c«ta&iaiL 
(Test  par  de  pareUles  ( 
c'est  par  des  tentatives  aossi  impn 
tes  que  malheureuses  que  lea  Di 
quins  perdaient  de  plus  enplu 
hommes ,  et  que  cette  suite  de  i 
leur  6taient  toute  confiaoce  en  i 
tout  espoir  dans  Tavenir. 

Une  fois  toutes  les  troupes  arabeiil 
nies,  Abou-Obaida  et  Klialedi*avi 
rent  vers  les  Romains,  qui,  de  l«ur<| 
dtaient  venus  au*devant  de  leun  i 
mis.  Les  deux  armees  se  renoonti 
vers  les  derniers  jours  de  juillet  633ti 
une  plaine  sablonneuse  au  sudde  T 
Les  Musulmans  Etaient  pleins d> 
siasme;  les  femmes  elfes-m^iDtt^ 
lurent  s'ar mer  et  prendre jpartau  c 
Leur   o£fre  fut  aoceptee; 
on  les  placa  sur  la  derni^re  ligae  di| 
m^  avec  1  injonction  de  frapper  de  r 
tons  les  fuyards.  Vahan  vouiut  f ' 
propositions  de  naix  a  Khaied  etii, 
Obaida ,  mais,  dans  la  dispositioili 
trouvaientleurs  troupes,  lescbe&fl 
mans  repous&erenttoutacconimodi 
On  s'appr^ta  done  k  en  venir  auxa 
et  comme  un  vent  assez  violent  i 
eieve  qui  poussait  des  tourbill 
poussiere  dans  les  yeux  des  J 
Kbaled  fit  faire  plusieurs  mouven 
ses  troupes  pour  tAcher  de  i 
vent  a  dos,  et  pour  que  les  7 ' 
trouvassent  pas  d'obstacles  maU 
moment  du  choc  general.  Mais  | 
que  ces  evolutions  se  fai6aient,uoh 
Ion  d*habiles  archers  armeaiens  d ' 
les  Arabes;  ce  que  voyaot,  Kh 
d^ida  a  marcher  en  avant  Lee 
deux  armees  fut  terrible ,  et  oe  f 
tot  une  suite  de  combats  corps  hi 
ou  les  Musulmans ,  prodigues  i' 
vie  et  allies  de  leurs  membres,  < 
gaient  a  avoir  Tavantage,  Ion 
sacellaire  imperial  Trithurius  < 
suspension  o*armes  Jusqu  au  I 
qui  fut  aoceptee.  Inutile  r^p  t!  Mai 
repos  de  la  nuit,  les  Chretiens, i  i 
deoourages ,  se  defendirent  a  peioe  j 
ques  heures  apres  le  lever  du  soli  *' 
les  vit  bientdt  ceder  de  toutes 
particuiierement  a  Taile  coron 
Trithurius ;  enfin ,  avant  midi ,  toui  I 
bataillons  romains  etaient  d^ttdc««  t 
le  massacre  commen^it  de  tous  edtesO  i 
n  Voyei  Thtephuieet  AImmT  lindj- 


SYRIE  MOD£&N£. 


M 


Quoiqiie  l«s  histarieas  byzantins  e\ 
araSes  ne  soient  d'accord  zu  sur  la  date 
de  cette  bataille ,  ni  $ur  le  nom  des  chefs 
qui  commandaieat  les  Roraains ,  ni  sur 
les  hostility  qui  suivirent,  nous  n'en 
pr^sumons  pas  moius  que  les  g^n^raui 
qui  furent  vaiocus  aupr^s  d'Adjnadin 
sont  kes  m^mes  que  nous  avons  vus 
partir  en  dernier  iieii  d*Antioche,  arri- 
ver  apres  une  suite  d^escarmoudies 
iusqu'aupr^s  de  Damas,  et  demeurer 
la  pres  d'un  moisen  attendant  la  solde  de 
leurs  troupes.  11  n'est  pas  probable,  en 
efifet,  que  les  deux  chefs  que  nous  avons 
Bomm^  aient  ^te  revoques  avant  d'a* 
voir  livre  une  grande  bataille ,  ou  qu'ils 
fussent  reutr^  dans  Tinterieur  de  Tem- 
pire  sans  avoir  jou^  la  partie,  sans 
avoir  t^nte  de  sauver  une  oapitale. 
Toujours  est-il  que  deux  fortes  armees 
^rent  detruites  par  les  Arabes,  de  f6- 
vrier  a  juillet  633 ,  et  qu'iks  se  retrou- 
verent  au  coininencement  d'aodt  de  la 
oi^e  anuee  devant  les  murs  de  Damas, 
cette  malheu reuse  cite  plus  faible  et  plus 
d^courag4^  que  jamais.  Deja,  les  plus 
abattus  parlaient  de  se  rendre,  lorsque 
les  derniers  efforts  d'un  bomine  de 
«  cceur  prolong^rent  encore  quelque  peu 
Tagonie  de  la  place.  Get  homme,  nomm^ 
Thomas,  et  qui  etait  gendre  de  Tempe* 
reur,  quoique  sans  titre  militaire  et 
«ans  emploi  positif ,  iuvoqua  avec  tant 
d'6loqueoce  la  religion  et  Thonneur, 
qu'il  put,  pour  un  instant,  r^veiiler  les 
Damasquins  de  leur  engourdissement 
desespere.  Puis ,  joignant  Texemple  aux 

Sreoeptes ,  il  se  mit  k  la  tdte  des  plus 
raves ;  il  entreprit  une  vigoureuse 
sortie,  et  revintavec  un  oeil  crev^d'un 
«oup  de  flecbe ,  mais  ayant  rendu  quel- 
que espoir  aux  assieges.  Le  courage  est 
communicatif  ;d'autres  partisans  hardis 
se  rencontrerent  qui  fireat  encore  deux 
sorties  sanglantes. 

Malheureusement  la  moiti^  de  la 
garnison  et  des  habitants  perdit  la 
vie  dans  ces  luttes  partielles  et  sans 
fruits;  et  comme  aucun  secours  ne 
venait  plus,  on  fut  contraint  de  de- 
inander  une  suspension  d'armes  pour 
traiterde  la  reddition  de  la  place.  Kha- 
led  la  refuse ,  Abou-Obaida  Taccorda, 
Alors  se  passa  un  fait  aussi  6trange 
que  deplorable.  On  rend  it  la  ville  h 
Abou-Obaida,  moyennant  la  vie  aauve 


des  habitants,  la  conservation  de  sept 
^lises ,  et  la  tolerance  du  culte  Chre- 
tien; tandis  que  Khaled,  sur  un  au- 
tre point,  combattait  toujours  et  avec 
une  vigueur  croissante.  Puis  il  se  trouva 
qu*au  m^nie  moment  oik  Aboa-Obaida 
entrait  paciOquement  dans  Damas,  dont 
on  lui  avait  ouvert  une  des  portes, 
Khaled  y  penetrait  par  une  breche,  et 
la  parcourait  le  sabre  a  la  main ,  mas- 
sacrant  tons  les  malheureux  qui  se  pr^- 
sentaient  devant  lui.  Les  deux  troupes 
se  rejoignirent  au  milieu  de  ia  villa. 
Khaled ,  exall6  par  le  sang  qu*il  avait 
deja  r^pandu  k  Hots ,  voulut  ^oontinuer 
le  carnage ;  11  s'emporta ,  il  rugit  comme 
un  tigre  a  qui  on  veut  arracher  sa  proie , 
et  ce  ne  fut  qu*a  force  de  prieres  et  d'6« 
nergie  tout  ensemble .  qu^Abou-Obatda 
put  desarmer  sa  rage.  Qu*importe  Tin* 
tr^pidite  de  ce  Khaled  tant  vante ,  son 
atroce  feroeite  le  deshonore  a  jamais ! 

PBOOBte   DB  PLCS  BN  PLUS  BAPIDBS 
DBS  ABABB8. 

L'IsIam,  comme  une  maree  mon- 
tante,  avait  deja  envahi  la  moitie  de 
la  ISyrie ;  ses  Hots  se  pressaient  de  plus 
en  plus,  et  s^ils  semotaient  se  retirer 
par  instants,  c'6tait  pour  revenir  ensuite 
plus  puissants  et  s Vtendre  plus  loin. 
Heraclius  ne  songeait  d^ja  plus  h  op- 
poser  une  digue  k  ces  formidables  va- 
gues  humaines ,  et  cet  empereur  d^chu, 
eet  indolent  et  pauvre  monarque ,  lors- 
qu*on  lui  apprit  la  reddition  de  Damas,  ne 
trouva  rien  autre  chose  a  dire  que  cette 
parole  desesp^ree  :  ^rfieu  la  Syrie  (* ), 
rien  autre  chose  a  faire  que  cette  action 
pusillanime,  s'enfuir  a  Constantinople. 
Cen  etait  fait,  TEmpire  remain,  dans 
une  de  ses  crises  capitales ,  avait  a  souf- 
frir  le  plus  funeste  des  interregnes,  celui 
de  la  Idchete. 

Une  des  plus  douloureuses  remar- 
ques  que  Thistoire  ait  a  faire,  c*est  que 
les  nations  douces  et  inoffensives  sont 
presque  coostamment  vaincues,  et 
que  les  nations  cruelles  et  avides  Tem- 
portent  toujours ,  par  la  vigueur  mtoe 
de  leurs   mauvaises   passions.    AinsI 

n  Teas  let  historiens  orieotaux  s^accordent 
pour  rapporter  cc  propos  d*Heraclius.  Voyez 
Saint-MarUn,  notes  tor  rbtatoira  de  LelMao 


64 


L'UNIVERS. 


fut-il  des  Syriens,  ainsi  des  Arabes. 
Loin  de  racbeter  par  ieur  magnani- 
roit^  Tinjustice  de  Ieur  agression,  les 
Arabes  se  montrerent  aussi  perfides 
que  feroces.  Dans  la  cepituiation  qui 
Ieur  avait  livr^  Damas,  les  chefs  mu- 
sulmans  avaient  donn^  trois  jours  aux 
families  (*far^tiennes  pour  se  retirer.  Ce 
ne  fut  d'abord  que  larnies  et  d^sola^ 
tion ;  des  femines  epiorees  s'en  allaient 
ii  pied  par  les  campagnes  avec  leurs  en- 
fants  aansies  bras,  des  vieillards  avec 
Ieur  or.  Mais^  peine  les  Emigres  de  Da- 
mas  furent-ils  parvenus  aux  premieres 
eollinesde  PA  nti-Liban  que  K  haled  r^so- 
lut  de  les  poursuivre.  Pour  ajouter  en- 
core la  dissimulation  a  la  mauvaise  foi, 
pour  que  son  m^chnnt  coup  ne  fdt  pas 
entravc  par  la  rencontre  de  troupes 
grecques ,  11  Ot  v^tir  a  ses  quatre  mille 
compagnons  le  costume  des  Arabes 
Chretiens,  qui  etaient  encore  rest^ 
fideles  a  Tempire  byzantin.  A  la  faveur 
de  ce  deguisement,  les  Musulmans  pu- 
rent  passer  librement  a  travers  les  pos- 
sessions romaines;  et»  comme  ils  n*ins- 
piraient  de  loin  aucune  deGance,  les 
malheureux  fugitifs,  qu'ils  atteignirent 
pres  de  Laodic6e,  les  laisserent  ap- 
procher  sans  se  mettre  en  defense,  et 
furent  des  lors  facilement  vaincus. 
Thomas,  le  dernier  h^ros  de  Damas, 
qui  se  trouvait  parmi  les  Emigres ,  eut 
beau  faire  des  prodiges  de  valeur ,  les 
horames  quMl  commandait,  embarrasses 
par  la  masse  des  bagages  et  par  le  grand 
uombre  de  femmes  et  d*enfants  qui  les 
entouraient,  ne  purent  longtemps  lut- 
ter  centre  les  (}uatre  milie  sdldats  de 
Khaled,  montes  sur  d'excellents  che- 
vaux,  et  furent  tues  un  par  un  jusqu'au 
dernier.  Alors  les  Arabes,  au  lieu  de 
se  borner  h  piller  les  richesses  qu'ils 
avaient  vues  avec  tant  de  ref^rel  parlir  de 
Damas,  massacrerent  impitoyablement 
tousles  Chretiens, sans  ^pargner  ni  le 
sexe  ni  Tdge.  Cette  soif  du  sang  humain 
est  aussi  atroce  que  le  mepris  des  traites 
est  infdme;  et  ce  qui  prouve  a  quel  point 
de  cruel  abrutissement  les  peuplades 
arabes  en  Etaient  encore,  cest  que, 
malgr^  les  prescriptions  de  Ieur  pro- 
phete,  les  recommandations  de  Ieur 
khaiife,  les  prieres  d'un  de  leurs  gene- 
raux,  Abou-Obai'da,  il  Ieur  suffisait 
d'une  mauvaise  excitation  pour  revenir 


a  lear  nature  sauvage ,  pour  s^abandot*  | 
ner  a  Ieur  instinct  sanguinaire.  i 

Pour  reprimer  la  ferocite  native  ie 
Arabes  il  exit  falla  plusieurs  dwfs  ani 
^nergiques  qu'humains  :  Mahomet  ifil 
vait  fait  qu'ehaucher  Ieur  apprinM 
ment;  Abou-Bekr  ne  vecot  {as  aMi 
longtemps  pour  achever  Tceavre  do  pi 
phete.  Ce  khnlife  mourut,  en  e!le!,l 
jour  m^me  de  la  prise  de  Damas,  ^ 
un  re^ne  de  deux  aiis ,  deux  mois  Hii 
jours.  On  loue  avec  raison  la  uoliliii 
ducaractere,  Tau sterile  des  nwDtirs,! 
surtout  riiialterable  integrite  (I'M 
Bekr.  II  possedait  les  deux  grandes  fd 
lites  qui  donneiit  toujours  aux  bomil 
une  incontestable  superiorite  sur  lea 
sen)blables,  lem^^  ris  de  la  mort  ftlefl 
pris  de  I'argent.  Aussi  prodi$;updesa^ 
dans  les  premieres  luttes  de  Hslafflfl 
desinteress^,  dans  ses  premieres  fi«H 
res,  ils'^tiiit  montre  brave  dag  a  jg^] 
nesse ,  dans  sa  vieillesse  il  fut  OBrnflMj 
de  simplicity  patriarcale.  Des  iiiMiJ* 
brables  butins  qu'on  lui  envoyaitdeial 
cotes,  il  fit  des  distributions  ^lfs« 
gens  de  guerre  et  aux  gens  de  plume;! 
malgr^  I'accroissement  progressif  i 
tr6sor  musulnicin,  il  ne  s'altribuajl 
mais  que  trois  dirhems  par  jour,  eoffl^ 
cinquante  sous  de  notre  monnaie.Oi 
modique  somme  d^passait  encorej 
modestes  besoins ;  et  tout  ce  qu'ilM 

fnait,  il  le  distribuait  en  aumdnev 
ien  qu'il  ne  laissa  h  son  fils  Abd-&Bf 
man ,  deja  illustre,  qu'un  mantcau,* 
chameau  etun  esclave  (*). 

Abou-Bekr  a  vait  d^si§[ne  Omarjijj 
son  suc^esseur.  Celui-ci  avait  (Tww 
refuse  ia  dignity  qu*on  lui  offiAj^ 
clarant  dans  son  noble  desinter«»i|* 
qu'il  n'en  avait  pas  besoin  :  /e  k" 
bien,  lui  r^pondit  le  khalife  mourw 
tna'fs  cette  dignite  a  besoin  de  /oi.0* 
justifia  en  partie,  mais  exclusivefflfflW 
point  de  vue  arabe,  la  haute  opiwj 
qu'en  avait  concue  Abou-Bekr.  V^vi^ 
gide  que  ce  dernier,  violent  par  aft* 
inexorable  dans  sa  justice  comme  W 
sa  vengeance,  ilmontraladroituretptj^ 
nergie  de  la  puissance:  s'il  pwsei" 
rinnexibilit^  du  despotisme ,  il  eoli»J 
tes  les  qualit^s  nobles  du  lion,  com* 

(*)  Vovez  Eatvchloa ,  AlKwiTfeda,  AlJ«rt* 
rftdj  et  filmaoiD. 


SYRIE  MODERNE. 


65 


il  en  eut  parfois  les  fureurs  :  grand , 
fort  et  souple  au  physique,  g^i^reux 
en  vers  ses  ennemis  mStnes,  iuste,  quand  il 
o'avait  pas  soif  de  conquete ,  humain , 

?|uand  il  n'avait  pas  faim  de  c^rnage;  tel 
ut  Omar,  veritable  chef  de  barbares,  plus 
crand  que  bon ,  plus  beau  de  loin  que 
de  pres. 

Le  premier  acte  d*Omar  fut,  du  reste, 
un  acte  de  justice.  Indigue  de  la  froide 
cruaute  de  Khaled ,  il  lui  enleva  le  com- 
mandement  sup^rieur,  qu'il  partageait 
en  Syrie  avec  Abou-Obaida,  et,  sans  le 
rappeler  en  Arabic ,  il  ordonna  qu1l  ne 
fdt  traits  que  comme  un  chef  secoo- 
da  ire.  Ce  farouche  soldat  montra  alors 

aues'il  n*^tait  pasdou^  du  sentiment 
e  rhumanit6,  il  avait  au  moins  ce- 
lui  de  la  discipline  hierarchique.  Quand 
AbouOhaida  lui  apprit  sa  disgrace, 
celui-ci  s^attendait  a  des  emporte- 
ments  furieux ;  mais  Khaled  ,  au  con- 
traire,  conservant  toute  sou  impassibi- 
lite,  se  contenta^  de  lui  r^pondre  : 
«  Gommande ;  j*obeirais  h  un  enfant  si 
«  le  khalife  lui  avait  confix  la  direction 

•  de  Tarmee.  Tu  me  trouveras  toujours 
«  pr^t  h  suivre  tes  ordres.  Je  te  respecte 
«  encore  a  un  autre  titre :  tu  as  profess^ 
m  avant  moi  la  veritable  religion.  »  Cest 

•  avec  une  pareille  resignation ,  c*est 
avec  un  pareil  caractere ,  q^u^aucun  ca- 

Krice  de  la  fortune  ne  pouvait  abattre  ou 
umilier,  que  les  Musulmans  se  sont 
trouv^s  si  souvent  sup^rieurs  a  la  mau- 
vaise  fortune. 

Si  les  Arabes  se  montraient  de  plus  en 
plus  audacieux  et  hardis ,  les  Syriens 
semblaient  s*abattre  et  s*affaisser  de 
Jour  en  jour.  Loin  de  s'unir  centre  Ten- 
nemi  commun ,  lis  s'abandonnaient  r^ 
ciprbquement ,  s'accusaient  les  uns  les 
autres,  et  plaignaient  ^  peine  les  vie- 
times.  Un  vieillard,  consulte  par  Fempe- 
reursur  Fetat  de  la  Syrie,  lui  ditavec 
une  deplorable  franchise :  «  Qu'on  ne 
«  pouvait  attribuer les  victoires  des  Ara- 
«  DCS  qu*a  la  colere  de  Dieu  irrit6  con- 
«  tre  les  Syriens,  qui,  foulant  aux  pieds 
«  les  lois de  r£vangile, s'abandonnaient 
«  aux  plus  honteux  d^sordres,  et  se 
«  faisaient  une  guerre  intestine,  plus 
«  opiaidtre  que  oelle  des  Arabes,  par 
m  leurs  concussions,  leurs  violences, 
«  leurs  injustices  et  leurs  usures.  »  Ce 
vieillard  avait  raison  :  desormais ,  chez 

&"  Livraison,  (  Syrie  modebne.  \ 


les  Grecs,  T^goisme  individuei  avait 
remplac^  le  patriotisme.  La  corruption 
des  moeurs  et  Tardente  passion  de  Tor 
achev^rent  la  perte  de  cette  miserable 
population.  Les  viltes  aux  murailles  les 
plus  ^lev^es  et  les  plus  fortes,  aux  garjni- 
sons  les  plus  nomoreuses,  n^eurent  pas 
honte  d  acheter  des  troves  au  lieu  de 
combattre. 
Les  Arabes,  n^eCaot  nullement  in- 

Sui^tesdans  leur  possession  d*une  moiti^ 
e  la  Syrie,  ne  songeaient  qu'a  s'emparer 
de  cette  contr^  tout  entiere;  et,  en 
attendant,  c*etaient,  de  leur  part,  d^^ 
attentats  de  toutes  sortes  contre  les 
propri6t^ ,  des  attaques  quotidiennes, 
des  courses  d^vastatrices  a  trente  lieues 
autour  de  Damas.  Dans  ces  expeditions 
les  Musulmans  faisaient  un  grand  n om- 
bre de  prisonniers,  et  Ja  politique 
adroite  d*Abou-Obaida,  loin  de  les  trai- 
ler brutalement  comme  aurait  fait  Kha- 
led, et  de  les  massacrer  lorsqu*ils  resis- 
taient,  s'effor^it,  au  contraire,  de  ga- 
ffner  leur  esprit  en  leur  rendant  leurs 
femmes ,  leurs  enfants  et  leurs  biens, 
a  la  condition  qu'ils  payassent  le  tribut. 
Cette  conduite  conciliatrice  fut  fort 
avantageuse  aux  Musulmans.  Les  Chre- 
tiens pauvres ,  (iu*ils  avaient  ^pargnes , 
leur  servirent  d  interpr^tes,  oe  guides 
et  d'espions.  Aussi  plus  le  temps  se  pas- 
sait,  plus  Heraclius  tardait  ill  tenter  un 
dernier  effort  pour  sauver  au  moins 
Antioche ,  Alep,  et  leurs  riches  campa- 
gnes;  plus  la  puissance  des  Arabes  crois- 
sait,  plus  les  orages  s*amonoelaient  au- 
tour de  la  malheureuse  Syrie  (*). 

Parmi  les  villes  qui  avaient  obtenu 
un  repit  dans  Tinvasion  generale  a  force 
de  pieces  d*or  et  de  robes  de  soie,  outre 
^^mese,  Hamah,  Aestan,  Chizar,  il 
y  avait  aussi  Kinesrin  et  Al-Hadhir, 
les  premieres  villes  situ^es  sur  TOronte, 
les  secondes  placees  au  uord-est  de  Da-  * 
mas,  sur  la  lisiere  du  desert,  chemin 
d* Antioche  ou  d*Alep,  comme  on  volt. 
Toutes  ces  cit^s  furent  tranquilles  pen- 
dant la  duree  de  la  trSve  accordce ; 
mais  Tardeur  des  Arabes  s'^tant  a  peine 
satisfaite  par  des  excursions  sans  im- 
portance ,  rien  ne  put  les  arr^ter ,  une 
fois  le  terme  des  conventions  arrive. 
£mese  fut  la  premiere  attaqu^  :  elle 

n  Voyez  AbouMTaradj, 


66 


L'UNIVERS. 


se  d6fendit  avec  tant  de  vigueur,  elle 
^tait  81  bien  pourvue  de  munitions ,  sa 
garnison  ^tait  si  nombreuse ,  qu'Abou- 
Obaida,  d^^espt^rant  de  la  preridre  de 
▼ive  force,  [^roposa  au  gouverneur  de 
se  retirer ,  moyennant  qu'on  iui  fbur- 
nirait  pour  ses  troupes  cinq  Jours  de 
yivres  et  pour  ses  chevaux  cinq  jours  de 
fourrage.  Cette  condition  fut  consentife; 
et  les  habitants  eurent  encore  la  niaise- 
rie,  voyant  qu'oti  lespayait  en  bel  et 
honor,  de  vebdre  une  partie  de  leur 
subsistance  :  faute  grave ,  impr^voyant 
inarch6  qui  devaient  les  livrer  plus  tard 
h  un  ennenii  qui  ne  cessait  pas  de  les 
couverderceil. 

Cependant  Abou-Obaida ,  en  desceti- 
danttoujours  le  cours  de  TOronte,  ren- 
contra  bieutdt  la  place  de  Restan ,  qui , 
bien  fortiO^e  et  bien  gard6e,  refusa  de 
se  rendre.  Malheureuseitient  Tiricapacite 
de  son  gouverneur  la  perdit,  el  voici 
comme  :  Abou-Obaida  promit  h  cet  im- 
b^ile  de  ne  point  attaqtier  sa  ville  a  la 
condition  qu'il  Iui  permit  d'y  laisser 
quelques  gros  bagages  embarrassatits 
pour  son  arm^e  en  marche.  I^e  gouver- 
neur grec,  ne  se  mefiant  aucunemetit  de 
cette  demande  extraordinaire,  y  con- 
sentit.  AlorsAbou -Obaida  choisitvingt 
de  ses  plus  braves  guerriers,  parmi  les- 
quels  se  trouvaient  Fintrepide  Dherar, 
Abd*Er-Rhaman,  et  Abd'AHah,run  ills 
et  I'autre  beau*fils  d'Abou-Bekr,  les  en- 
ferma  dans  vingt  caisses  qui  s'ouvraient 
en  dedans,  et  les  fit  transporter  ainsi 
dans  lacitadelle.  Puis,ayant  laiss^Kba- 
led  dans  un  bois  pres  de  la  ville  avec 
quelques  troupe^  aguerries,  il  continua 
sa  marche  vers  le  nord.  A  peine  eut-il 
disparu  a  rhorizon  avec  le  gros  de  son 
arm^e  que  les  habitants  de  Restan  s'en 
all^rent  dans  leur  ^glise  remercier  Dieu 
de  leur  d^livrance.  Les  Arabes  profite- 
rent  de  cette  occasion  pour  se  saisir  de 
la  femme  du  gouverneur,  la  forcer  de 
leur  livrer  les  clefs  de  la  ville ,  ouvrir  les 
portes  a  Khaled ,  et  venir  en  masse  tom- 
ber  sur  les  Restaniens ,  qui  chantaient 
totijours  leurs  actions  de  grdces,  et  qui 
furent  egorges  sur  leur  autel  mtoe. 

L'histoire  ne  rapporte  pas  comment 
Hamah  se  rendit.  Chizar  ne  voulutpas 
se  d^fendre,  tua  son  gouverneur^  qui 
sommait  les  habitants  de  prendre  les 
armes,  et  se  livra  sans  combat  aux  Ara- 


bes. Quant  h  Kinesrin,  sa  pdmA 
d'Alep,  trois  lieues  tout  au  phn ,  hii  A 
permis  de  recevoir  des  secours  dE!"^ 
grande  ville;  mais  ud  difiKreDdorf 
deux  gouvernetirs  le^  emp^ha  dei 
pour  la  defense  commune;  et  afntsi 
sortie  malheureuse,  Kioesrio  ctf"" 
Abou-Obaida  retouma ,  aassit^t  ^ 
cette  redditiofl,  Ters  Emese,  fBMi 
quelques  mois  rendu  mattre  delaf 
grande  partie  du  cours  derOroati! 
A  rapparition  nouvetle  dei  ^ 
mans,  les£m6siens  comprireot 
fbute  qu'ils  avaient  commise,  en  HI 
garnissant  de  leurs  provisions poorr 
quespi^ces  d*or  qui  ailaient  leur  <* 
si  difflciles  a  conserVer .  Gepeodani 
par  la  sorte  de  trahison  dent  ils 
vibtimes ,  encouriig^s  par  leur  ^ 
gouverneur,  leur  attitude  futaoril 
qu'honorable.  Chose  Grange !  cY 
ville  du  luxe,  des  plaisirs,  qui« 
donner  Texemple  du  courage  Ai 
votlemeut  aux  cit^  du  eaiculet 
faires.  11  reste  parfois  plus  de 
d(gbauch6s  qu'aux  atares.  La 
m^me  des  Em^iens  alia  d'abori 
qu'a  la  t6m^riti6.  Au  lieu  de  h 
Arabes  fatiguer  leur  premiere 
eontre  des  murailles ,  ils  t'dai 
tout  de  suite  sur  rarm^  afisiei 
ia  surprirent  par  leur  brusque  ai 
Iui  tuerent  un  grand  nombre  d**" 
et  Tauraient  culbut^e  sans  les 
ce  puissant  Khaled ,  aussi  subluoei 
la  oataille  qu'il  dt^it  hicleux  daaslg 
toire.  Ce  heros  de  I'Age  de  fer  raif 
braves,  arr^ta  lea  fuyards,  etfitij 
de  sa  iiersonne  quil  ^vita  uae '' 
d^faite  a  Tlslam.  Sa  vie  daosce 
cdurut  toutes  les  sortes  de  rii 

?|ue  le  danger  le  plus  imminent . 
rayer  ou  mdme  le  refroidir;  ii 
plusiears  chevaux ,  il  rompit  pli 
epi^es,  et,  d^arm6  un  moment  es 
d*un  hardi  adversaire,  il  auraitcert 
ment  p^ri ,  si  comme  le  tigre  il  r 
bondi  sur  son  ennemi ,  et  ne  Teflt  '" 
dans  son  etreinte. 

Quelques  prodigefe  deeourageque 
led  accumuldt,  les  Musuimans,  en< 
rencontre,  n'en  eurent  pas  moinste* 
sous ,  et  les  Grecs  rentrercnt  ^  r"*" 
en  triomphateurs.  Pitts  tard,  leur 

(*)  Voyez  AbonTrWa, 


L 


SYRIE  MODERNE. 


67 


ranee  les  perdit,  tandisque  la  pirudence 
des  Arabes  les  sauva.  Ces  derniers  se 
consulterent  apres  le  combat  qui  leur 
avait  ^t^  si  fuoeste,  et  poss^dant  d6jli 
rexp^rience  de  leurs  adversaires ,  con- 
naissant  leur  yaDiteuse    pr6somption 

aue  le  moiDdre  succes  enuait  encore , 
s  ne  douterent  pas  que  la  garnison 
de  la  viiie  ne  fit  prochainement  une 
nouvelle  sortie,  et  voici  quel  plan  ils 
imagin^rent  pour  venir  a  bout  de  leurs 
ennemis  :  ils  rdsolurent  de  se  laisser 
d'abord  comme  surprendre  de  nouveau, 
de  se  d^fendremollement;  puis  bientdt 
de  reculer  jusqu*a  un  mouvement  de  ter- 
rain ,  oil  se  serait  place  en  embuscade 
K.haled  avec  ses  plus  braves  soidats; 
alors  les  Grecs,  entour^^  de  toutes  parts, 
fort  ^lolgnes  de  la  ville,  leur  refuge, 
coupes  dans  leur  retraite.  devaient  ni- 
cessairement  €tre  extermined. 

Une  fois  ce  plan  adopts ,  les  Arabes 
n^euredt  pas  un  long  temps  ^  attend  re. 
Par  une  belle  matinee ,  lis  virent  sortir 
d*£m^se  une  troupe  tout  6clatante  de 
soie  et  d'or,  gu'un  soleil  radieux  faisait 
reluire  au  lorn,  toute  brillante  d'eten- 
dards,deflammesetdepanacbes,qu*une 
brise  leg^re  soulevait  gracieusement; 
c^etaientles  voluptueux  Emesiens,  par^s 
de  leurs  plus  riches  atours,  d^ployant 
toutes  les  coquetterles  militaires ,  s'a- 
van^ant  au  combat  comme  on  marche  h 
une  f(8te.  Helas  1  cette  fiSte  devait  6tre 

Eour  eux  celle  des  fun6railles.  Les  Ara- 
es  cxecuterent  la  manoeuvre  dont  ils 
^talent  convenus;  ils  felgnirent  d*abord 
la  frayeur,  et  battirent  en  retraite  jus- 
qu'aux  lieux  oik  se  tenaient  caches  Kha* 
led  et  les  siens.  Des  lors  le  combat  chan- 
gea  de  face;  attaques  a  la  fois  en  t^tc  et 
en  queue,  harceles  de  tous  les  cdtes ,  les 
Grecs  virent  bientot  leurs  beaux  habits 
siouill^s  de  poussiere  etde  sang,  et  leur 
gouverneur  ainsi  que  leurs  principaux 
ofQciers  ayant  et^  tu^,  ils  finlrent  par  se 
laisser  6£orger  presque  sans  r^istance. 
Les  habitants  de  la  vlUe ,  h  la  nou- 
velle de  cette  defaite,  furent  aussl 
prompts  h  sedecourager  gu'ils  Tavaient 
^te  a  compter  sur  la  victoire.  Des  le 
lendeniain  ils  s'occuperent  de  trailer 
avec  les  Musulmaus.  Grftcd  &  la  valeur 
qu'ils  avaient  depioyee  dans  leurs  diff6- 
reuts  combats ,  ils  purent  obtenir  deS 
conditions  honorables.  Abou-Obaidn  se 


contenta  de  leur  r^damer  le  tribut 
accoutum^,  leur  laissa  toute  libert^  indl- 
viduelle ,  et  ne  voulut  ni  entrer  dans 
leurs  murs, ni  leur  imposer  degamison. 
Quelque  temps  aunaravant ,  dans  cette 
m^me  annee  634 ,  la  15  «««  de  Ph^ire , 
Balbek  avait  aussi  traits  h  des  condi- 
tions avantageuses.  Son  gouverneur 
Herbis ,  tout  en  commettant  la  faute 
ordinaire  des  Grecs  de  s*61ancer  au- 
devant  des  Arabes ,  avait  pourtant  fait 
plier  une  partie  de  leurs  troupes ,  et 
avec  plus  de  prudence  il  serait  peut'^tr« 
parvenu  a  leur  faire  lever  le  siege.  Mais 
s'il  poss^ait  les  qualitds  d*un  bon  com- 
mandant d*avant-garde ,  il  n*avait  au- 
cune  de  celles  d*un  g^n^ral.  II  fut  t^m6- 
raire  a  tel  point  dans  une  de  ses  sorties 
qu'on  luicoupa  la  retraite,  et  que,  pri- 
sonnier  dans  les  mines  d*un  monastere, 
oh  il  s'^tait  refugi^  avec  la  plus  grande 
partie  de  la  garnison  de  Balbek ,  il  se 
trouva  forc^detraiter  de  la  reddilion  de 
la  ville  pour  avoir  le  droit  d'y  rentrer. 
Cette  capitulation  fut  aussi  douce  que 
possible :  aucun  Musulman  ne  pouvait 
iranchir  les  portes  de  Balbek^  et  le 
percepteur  meme  du  tribut  ne  devait 
s'^tablir  qu*en  dehors  de  la  place,  et 
attendre  que  les  habitants  lui  appor- 
tassent  la  somme  qu*ils  ^taient  conve- 
nus  de  payer.  Il  se  passa  a  ce  propos 
une  suite  de  faits  singuliers,  et  qui  du- 
rent  prouveraue  Ton  commen^it  par- 
faitement  h  s*nabltuer  au  changement 
de  domination,  et  que  le  ioug  musul- 
man n'6tait  pas  plus  lourdf  a  certaines 
villes  de  Syrie  que  le  joug  byzantin. 

Abou-Obaida  avait  laiss^  ^^|y «  ^^^^' 
gique  et  prudent  capitaine  k  la  fbis ,  de- 
vant les  murs  de  Balbek ,  avec  Tinjonc- 
tion  de  se  montrer  tolerant  pour  les 
Chretiens,  facile  dans  ses  rapports  avec 
eux,  fidele  a  ses  engagements.  Rafy 
avait  ordre  avant  tout  d'enipecher  ses 
troupes  d'entrer  dans  la  ville  et  de 
ravager  son  territoire.  Les  Musulmans 
devaient  done  s*abstenir  de  toute  course 
sur  les  proprietes  de^  habitants  de  Bal- 
bek ,  et  ce  n'etait  que  contre  les  villes 
qui  n*avaient  pas  encore  traits  avec  Ils- 
1am  qu*ils  devaient  dlriger  leurs  razias. 
Ses  prescriptions  furent  ex^cut6es  avec 
ponctualit6,  et  il  s*ensuivit,  entre  les 
Arabes  et  les  Grecs,  une  bonne  intelli« 
gence  qui  alia  toujours  en  s'ameliorant. 


i;8 


L'UWIVERS. 


Les  Chretiens  vinreat  bientot  au  carop 
des  Arabes,  firent  avec  eux  qudques 
echauges ,  et  finirent  peu  a  peu  par  trai- 
ter  de  v^ritables  affaires.  Les  Arabes , 
charge  de  butin  de  toutes  sortes ,  ven- 
dircnt  aux  Grecs  les  objets  qui  les  em- 
barrassaient  ou  dont  ils  n'avaient  que 
faire;  les  marches  devenant  de  plus  en 
plus  profi tables  aux  habitants  de  Balbek, 
lis  excitaient  les  Musulraans  a  entre- 
prendre  des  expeditions,  et  leur  indi- 
quaient  les  bonnes  prises  a  effectuer. 
Alliance  monstrueuse,  du  reste,  n6goce 
infdme,  ou  des  freres  aidaient  a  la  mine 
de  leurs  freres,  et  speculaient  sur  leurs 
d^pouilles!  Puis,  non  contents  de  eette 
cooperation  secrete  au  pillage  des  Musul- 
mans ,  ils  voulurent  s'associer  coinpl^- 
tement  avec  eux.  Pour  ^tre  plus  libres 
dans  leurs  coupables  actions,  ils  assas- 
sin^rent  leur  brave  gouveriieur  Herbis, 
et  ouvrirent  leurs  portes  a  Rafy.  Les 
Arabes  profiterent  de  cet  egoTsme  dis- 
solvant,  ils  sMnstallereut  dans  la  ville , 
et  de  1^ ,  par  des  coups  de  main  habi- 
lement  diriges ,  ils  s*emparerent  tour  a 
tour  de  Tortose,  de  Djebil^h  et  de 
Laodic6e  (*). 

Ainsi,  en  moins  de  trois  ans.  les 
Musuimans  s'6taient  deja  rendus  maftres 
des  deux  tiers  de  la  Syrie.  lis  en  poss6- 
daient  une  des  capitales ,  Damas.  Plu- 
sieurs  villes  importantes  leur  payaient 
tribut.  IJn  grand  nombre  de  peuplades 
sVtaient  jointes  a  eux,  en  adoptant  la 
religion  de  Mahomet.  Des  butins  consi- 
derables avaient  au^ment^  leur  fortune 
d'nne  facon  prodigieuse.  S*ils  avaient 
laiss^  defri^re  eux  quelqucs  grandes  ci- 
tes, telles  que  Jerusalem,  Cesaree,  Tyr , 
et  Tripoli ,  c'est  qu*ils  ^taient^drs  que 
CCS  villes  seraient  forcoes  de  capituier 
lorsquc  les  conqu^tes  musulmanes  s*^- 
tendraient  encore.  Leur  envahissement 
avait  et^  aussi  prompt  que  bien  entendu. 
Tout  semblait  prochainement  pr^t  k 
tomber  sous  leur  pouvoir;  Alep  et  An- 
tioche  treniblaient  deja ,  lorsque  Tem- 
pire  byzantin  sentit  enfln  son  orgueil 
se  r^volter ,  et  se  d^cida  h  une  nou- 
velle  lutte,  sufGsante  peut-6tre  pour 
satisfaire  la  vanity  romaine ,  mais  trop 
tardive  pour  sauver  sa  plus  belle  pro- 
vince. 

(*•  Voyej5  Aboiri'fMa. 


BATULLB    D'YiAIUMIi. 


A  son  depart  de  la  Syrie,  Henefiv 
avait  h  tel  point  le  sentiment  de  sob  l» 
puissance  et  de  sa  honte,  qu'il  etaitaK 
se  cacherdans  un  desespalais,8Qriaote 
d'Asie,  et  quMl  n'avait  pas  016  re ' 
dans  sa  capi  tale,  ou,  quefque  tempsainrH 
ravant,  on  avait  montre  tant  (Tattteb 
ment,  on  avait  ^lev^  tantd'arcsdeUiM^ 

Che,  on  avait  ^g^  tant  de  statues  4 
rillant  vainqueur  des  Perses.  (Test ' ' 
eette  retraite,  appel^  H6r6e,  quH 
appris  les  progrcssuccessifsderi 
sion  arabe,  progr^  qui  justiGiicrti 
bien  son  deplorable  mot :  Jdieu  /a/*^ 
Plonpe  dans  une  sombre  m^iai 
il  laissait  son  empire  s'ecrouler 
ses  yeux,  ses  provinces  lui  t' 
ville  par  ville ,  incapable  d'une 
tion  vigoureuse,  mort  pour  le 
vernement  comme  il  Tetait  . 
gloire.  L'aspect  d*une  si  hootM. 
olesse,  le  m^pris  qu*on  portaitif 
ombre  d*empereur,  soulev^rento 
lui  le  peu  de  coeurs  haut  places  gn 
taient  h  Constantinople.  On  cor 
son  tils  naturel  Athalaric  et  son 
Theodore,  Ills  du  general  incapaUej 
avait  d^pouille  de  ses  titres ,  se  r"' 
a  la  t^te  des  m^contents.  Ou  avait 
rhonneur ,  la  erainte  r^ussit :  B( 
se  r^veilla  de  son  miserable 
sement ,  comprima  la  eonjuratiosi 
se  decida  h  rentrer  dans  sa  ville  ir 
riale.  Mais  pour  passer  d*Asiea 
rope,  il  fallait  traverser  la  nier,  dl 
raclius  la  redoutalt  autant  que  leii 
bes.  On  fut  done  oblige  &itM 
pont  de  bateaux ,  dont  les  haatt 
pets,  couverts  de  feuiliages,  ifii. 
terent  au  miserable  empereur  k 
des  flots  qui  Tauraient  fait  e^ 

£tait-il  possible  qu*un  pareil 
pQt  lever  une  arm6e  v6ritableme9t; 
sante,  et,  sinon  la  commander  hi 
me,  du  moins  lui  cboisir  un  chef 
et  capable  ?  Aussi  oelui  sur  lequel  t 
son  choix  n*avait-il  aucune  qualitt 
eAt  pu  lui  m6riter  cet  honneur.  Cf 
un  certain  Vahan,  Arm^nien  d'onf 
au*il  ne  £aut  pas  confondre  avec 
Perse  Vabao,  qui  s'etait  fait  moine  "^ 
sa  d^faite  par  Khaled.  Ce  g^oen 
hasard,  bien  plut6t  courtisan  que 
litaire,  n*obtint  d^ailleurs  qu'ao  '^' 


SYRIE  MODERNE. 


6D 


f Asiatiqoesetd'Europeens  plus  embar- 
tassants  par  leur  turbulence  qu'utiles 

Eleur  nombre.  Cette  armee,  aussi 
isciplinee  que  colossale^  qui  eomp- 
lait  pres  de  deux  cent  mille  nommes « 
Wis  qui  D*avait  de  redoutable  dans  ses 
inigs  confus  que  quelques  coinpagnics 
#habiles archers,  tralnait  a  sa  suite des 
tegages  considerables  et  une  foule  de 
vagabonds,  aussi  Idches  que  dangereux. 
^tte  masse,  en  tombant  sur  la  Syrie, 
pcrasa  de  son  poids.  Elle  se  r^pandit 
jlirtootes  les  cam|)agnes ,  ravageant  les 
prres  comme  auraient  fait  des  ennemis, 
iadonnant  k  tous  les  vices ,  s^abandon- 
wuX  atoas  tes  exc^.  Son  slupide  §6ne- 
'^  ne  sut  ni  la  ri^prinoer  ni  la  mainte- 
ir;  et  elle  devint  tout  d'abord  un  fl6au 
r  le  pays  qu'eile  venait  d^livrer.  Ce 
nltat  tat  d'autant  plus  deplorable 
^  les  populations  syriennes  en  vinrent 
qu'^  faire  des  ycbux  pour  la  disper- 
adeces  soldats  ivrognes,  craputeux 
tlNSards,  et  pour  le  triompne  des 
I,  qui,  une  fois  le  tribut  pay^, 
Qt  en  paix  leurs  tributaires. 
[J^peodant,  au  bruit  que  faisait  en 
ant  cette  foule  immense,  fleuve 
6,  dont  le  courant  augmentait  de 
sen  plus  d'ampleur  et  d*impetuosite, 
K  Araoes  s^murent.  Etablie  a  fm^se, 
nn^  (Dusulmane  se  crut  trop  eioi- 
jNe  de  soli  centre  national ;  les  chefs 
prassemblerent ,  tinrent  conseil,  etle 
piiQIaiit  Rhaled  lui-m^me  opina  pour 
*telraite.  Cette  retraite,  du  reste ,  ne 
flwaititre  que  momentanee.  Par  pru- 
vRice  eomme  par  science  militaire ,  il 
^aftmieux  se replier  sur  la  Palestine, 
P^Pprocher  des  renforts  quY)n  avait 
^apdes,  choisir  son  heure  et  sa  place 
w  jouer  le  va-le-tout  de  Tlslam ,  que 
fcrester  a  Tune  des  extremites  des  der- 
s  conqultes ,  avec  de  grandes  villes 
wiles  derri^re  soi,  et  Te  desert  de 
'^potamie  pour  tout  refuge.  Ce  qui 
uietait  en  outre  les  Musutmans,  c'est 
,  d*unc  part,  le  reste  des  Arabes 
Jtiens,  entratnes  par  les  promesses 
Jl  empereur,  s'^taient  joints  h  rarm^e 
^Vahan  en  lui  amenant  la  cavalerie 
;ere  dont  il  manquait,  et  que,  d'autre 
%Con8tantin,  nis  d'Heraclius,  avait 
,  Di  jBsqu'i  quarante  mille  hommes 
nns  la  place  de  cesar^e.  Menaces  an 
*>a  commt  au  nord ,  les  M usulmans  se 


repli^rent  done  au  dela  de  Damas  jus- 
qu'a  une  petite  riviere,  appelee  Yar- 
mouk,  qui  tombe  dans  le  Jourdaia  au- 
dessous  du  lac  de  Tiberiade  (* ) . 

La  partie  etait  belle  pour  les  Grecs  , 
s'ils  avaient  suimmediatement  la  jouer. 
II  edt  fallu  atteindre  a  marches  forcees 
Tarmee  hesitante  et  inquietedes  Musut- 
mans, et  tomber  sur  elle  avant  qu'clle 
eilt  repris  ses  esprits  et  re^.u  ses  ren- 
forts.  Vahan,  dont  les  instructions  por- 
taient  de  rechercher  la  paix  avant  tout, 
instructions  bien  dignes  de  la  pusilln* 
nimite  de  celui  qui  les  avait  donnees  et 
d€  rincapaciie  de  celui  qui  les  avait  re- 
vues ,  alia  etablir  son  camp  en  face  de 
celui  des  Arabes,  et  entama  aussitot 
les  conferences.  Ses  premieres  proposi- 
tions de  paix  furent  rejetees ;  mais,  loin, 
decommencerleshosttlites.  il  reclamade 
nouveaux  pour  parlers.  Les  Musulmans 
accept^rent  oes  deiais  :  lis  avaient  a 
attend  re  les  troupes  que  leur  khalife 
Omar  leur  annoni^ait,  et  ils  vouiaient 
tenter  le  detachement  des  Arabes  Chre- 
tiens de  l^armee  byzantine.  lis  s'adres- 
serent  dans  cette  vue  a  Djabalah,  der- 
nier roi  des  tribus  de  Ghassan.  Celui-ci 
repoussa  leurs  offres ,  et  K  haled ,  indi- 
gne,  se  porta  la  nuit  m^me  contre  son 
quartier,  I'attaqua  avec  fureur,  y  tua  un 
grand  nombre  d*hoiiimes ,  mais  malheu- 
reusement  y  laissa  prisonniers,  apr^s  sa 
retraite,  trois  d*entre  les  plus  braves  des 
Mahometans,  Dherar,RafyetYezid.  Pour 
deiivrerces  heros,  on  crut  encore  devoir 
negocier ;  nouveau  retard  favorable  au\ 
Musulmans.  Khaled  lui-meme  voulut 
aller  au  camp  des  Chretiens.  Vahan,  dans 
cette  occasion,  au  lieu  de  montrer  sa  puis- 
sance, ne  sut  qu^etiler  son  luxe.  Pour  re- 
cevoir  le  chef  arabe ,  il  se  couvrit  de  ses 
robes  les  plus  precieuses,  se  fit  elever  un 
tr6ne  de  poiirpre  et  d'or,  et  fit  preparer 
un si6ge  eclatant  pour  son  visiteur .  Mais 
Khaled  re|)oussa  le  siege,  et  s*asseyant 
par  terre  amsi  que  sa  suite ,  repondit  u 
rorgueilleux  Armenien  qui  lui  demaii- 
dait  la  raison  de  cette  singularity  : 
«  La  terre  est  le  siege  que  Dieu  a  destine 
a  h  Mahomet  son  envoye ,  et  le  Prophete 
«  Ta  leguee  aux  Musulmans  ses  disci- 
«  pies.  » 

Cette  conference  f ut  longue  et  pleine 

(*)  Voyez  Th^phane. 


TO 


LinnvERS. 


de  p^rip^ties.  On  se  mena^a*  on  ge  ca- 
ressa  tour  k  tour.  Un  moment  Kbaied, 
irrit6  par  la  discussion,  dit  avec  colere 
h  Vahan  qu'il  esp^rait  bien  un  jour  le 
voir,  la  corde  au  oou,  conduit  a  Omar 
pour  ^tredecapit^ensa  pr^eoce.  Vahan 
s^emporta,  et  deciara  que,  pour  punir 
I'msoleuce  de  Khaled,  il  allait,  lui,8ur 
rheure,  faire  trancher,  la  tdte  aux  trois 
Arabts  prisonniers.  A  cesmots,  Kbaied, 
qui  ne  conservait  pas  dans  sa  fureur, 
comme  le  general  grec,  le  sentiment  du 
droit  des  gens,  brandit  son  sabre,  et 
s'^cria  :  «  Prends  bien  garde  a  ce  que  tu 
«  vas  fairQ ;  je  jure  par  le  nom  de  Dieu, 
«  par  Mahomet,  et  par  la  sainte  Kaaba, 
«  que  si  tu  les  fais  mourir,  je  te  tuerai 
«  tout  a  1  heure  de  ma  propre  main,  et 
•  que  les  Musulmans  qui  sont  ici  tue- 
«  ront  chacun  leur  homme ,  auoi  <^u'il 
«  puisse  enarriver.  »  Getteauaace  reus- 
sit  a  Kbaied  :  Vahan  eut  peur,  et  loin 
d'egorger  les  prisonniers,  il  les  remit 
au  chef  arabe.  Khaled  en  retour  lui 
fit  present  d'une  tente  d*ecarlate,  et  les 
deux  rivaux  ses^parerent  en  se  comblant 
de  marques  de  consideration,  raaissans 
rien  conclnre.  Les  Musulmans  avaient 
gagn6  du  temps ,  ce  qu'ils  avaient  cher- 
che :  buit  mille  hommes ,  sous  les  or- 
dres  de  Said-Ebn-Amir,  leur  ^talent 
venus ,  charges  de  troph^s ,  c^est^a-dire 
avec  des  t^tes  cbr^tiennes  au  bout  de 
leurs  lances.  L'espoir  revint  done  au 
camp  des  Arabes,  et  d^sormais  on  n'y 
songea  plus  qu*a  combattre  {*). 

Le  lendemain ,  des  que  les  premieres 
teintes  de  Faurore  apparurent  a  Tho- 
rizon,  des  qu'on  put  reconnaftre,  selon 
les  prescriptions  du  Prophete,  un  fil 
blanc  d'un  fil  noir,  Tarm^e  musulmane 
se  prosterna  la  t£te  contre  terre,  en  se 
tournant  vers  TOrient,  et  r^cita  d'une 
voix  grave  et  accentuee  le  tekbir,  cette 
affirmation  r^p^teede  ia  grandeur  et  de 
Tunite  de  Dieu :  «  Dieu  est  grand,  Dieu 
«  est  grand!  11  n'y  a  pas  d'autre  Dieu 
«  que  Dieu,et  Mahomet  est  son  propbete; 
«  Dieu  est  grand,  louanges  a  Dieu!  « 
Puis  Its  cbefe  passerent  de  rang  en 
rang,  di^nt  cette  parole  significative 
du  Koran  :  «  Musulmans ,  entrez  dans 
«  la  terre  sainte  (^ue  Dieu  vous  a  des- 
«  tin^  1  »  Ce  n'etait  plus  ici  une  incur- 

n  Voyez  Eimadn. 


sion  de  brigands ,  ee  n*tei(Dt  plu  hi 
escarmouches  individuelles  deqiH!k|iN( 
tribus  en  maraude ,  c*dtait  la  baUli 
decisive  d^une  nation  jeuue  contieoil' 
nation  vieillie,  c'etait  ud  duel  eDti|' 
deux  religions,  entredeuxespnte,eDb|; 
deux  mondes.  Le  combat  fut  dipil£ 
cette  grande  cause,  il  dura  trois  jor* 
et  fut  aussi  sanglant  aue  prolonge. 

Les  Grecs  aussi  s  adressereotA 
Seigneur?  L'histoire  ne  le  rapport£[ 
d'ailieurs  etait-eile  vraimentchreUi 
pouvait-elie  se    niontrer  sinceri 
religieuse,  cette  tourbe  d'bommes 
nus  de  tous  les  coins  de  TEmpire,  ' 
tis  par  les  vices,  di vises  paries' 
obeissant  a  peine  aux  ordres 
de  leurs  officiers  ?  Gependaot  on  ne 
Quelle  excitation  mysterieusectfa 
nt,  en  cette  occurrence,  lutter  les 
mains  avec  autant  de  perseveraneei 
de  courage. 

Dans  ce  choc  de  deux  peoples, 
^tait  grave  du  cdte  des  Arabes, ' 
fut  soiennel.  Abou-Obaida,  a; 
conscience  de  son  inferiorit^sur 
o^a  k  ce  dernier  la  conduite  de  lai 
taiile  :  abnegation  admirable,  doot 
plus  grands  caract^res  sont  seuls  <s^ 
olesl  Puis,  cboisissant  lui-meme 
poste  dans  le  combat,  il  alia  se 
sur  la  derniere  ligne  de  Fannie, 
k  la  main  le  drapeaujaunequeMal 
faisait  porter   dans  ses  exp6dl 
G  r^ce  k  cet  etendard  v^ner^,  grke 
k  sa  cootenance  aussi  pleine  de  (T 
que  de  confiance,  AbouObauia 
rait  avec  raison  emp^ber  les  A: 
reculer,  quels  que  fussent  les  cai 
la  fortune.  Derriere  le  general 
se  placerent  aussi  les  femmes, 
comme  nous  les  avons  deja  vu 
fois,d'arr6ter  les  fuyards  par  les 
et  les  exhortations,  ou  par  les 
et  par  la  force. 

Les  Musulmans  «err^ent  leurs 
afin  d*opposer  le  plus  de  ri^i 
possible  a  la  foule  compacte  des 
mains.  Mais  qu'6taient-ce  que  qm 
mille  hommes   aunres  de  deux 
mille  et  plus  peut-etre?  Aussi 
les  deux  arm&s  s'ebranldront,  la 
cession  des  masses  grecques ,  ai 
tees  en  puissance  par  rentrafi 
de  la  course,  d^fon^a  let  lignes  sr^ 
s^para  leur  cavalerie  de  leur  in&Bten^ 


SYBIK  HOBEIUNE. 


U 


et  fotqsk  les  plus  bgraveg  h  se  repller  4<h 
vant  les  coups  repet^s  de  cette  iiiimen^ 
catapulte  qui  lan^it  des  hommes  au  lieu 
4e  traits.  C'est  alors  que  lesfemmes 
musulmanes  eurent  un  rdle  important 
a  jouer.  Elles  commencereut  par  insul- 
ter  de  touteg  les  facoos  les  Idches  qpi 
chercliaient  a  prenare  la  fuit^;  puia 
ieurs  flots  se  pressant  de  plus  en  plus, 
elles  les  frappereot,  les  unes  avec  de^ 

{)ieux ,  les  autres  ayec  des  batons.  Dans 
eur  indignation  elles  ne  distinguerent 
mSme  pas  entre  ceux  qui  battaient  mo- 
mentanement  en  retraite  pour  se  rallier 
ensuite,  et  ceux  qui  ne  voulaient  qu'a- 
bandonner  le  combat.  11  leur  arriva 
ui^me  dMnjurier,  puis  de  blesser  Abou- 
Sotian,  Tun  des  plus  intr^pides  capi- 
taiues  musulmans,  celui  auquel,  avant 
i'engagement,  avait  ^t^  confix  le  soin 
d'eiiflammer  les  soldats,  et  qui  s>n  aU 
lait  de  groupe  en  groupe  s'^criapt  : 
*«  Musulmans,  soneez  que  le  paradis  est 
a  devant  vous,  etle  feu  de  1  enfer  der- 
«  ri^re!  »  Quelque  deplorable  qu*ait 
^te  leur  erreur  partielle,  ces  heroines, 
si  resolues  et  si  ardentes,  reudirent  du 
CQBur  aux  plus  abattus.  Chaciin  prefera 
se  Jeter  de  nouveau  dans  la  m^lee  que 
d'eudurer  plus  longtemps  les  affronts 
deshonorants  dontn6tait  accable  {*)• 

Trois  fois  les  Musulmans  fmrent  re- 
pousses ,  trois  fois  ils  retoumerent  a  la 
charge.  Les  Arabes  avaientla  reputation 
d'apprehender  les  premiers  chocs,  et  de 
ne  s  echauffer  que  pen  k  peu :  ils  la  con- 
firroerent  dans  cette  terrible  journ^. 
A  force  de  se  succ^der,  pourtaiit,  les 
masses  romaines  s'epuiserent,  a  force 
de  f rapper,  les  ^p^ss^br^herent.  Cest 
alors  que  les  Musulmans,  decides  a  ga- 
gner  la  Syrie  ou  le  ciel,  a  vaincre  ou  k 
niourir,  deploy^rent  une  ardeur  si  crois- 
8ante,que  la  bataille  dix  fois  suspendue, 
recommence  dix  fois ,  se  trouva  ind^ 
cise  lorsque  les  t^nebres  s^parerent  les 
combattants. 

Cette  nuit  pleine  d'angoisses  oij  per- 
Sonne  n'^tait  sdr  de  vivre  jusqu'au  se- 
cond soleil,  Abou-Obaida  la  passa  dans 
la  priere  et  dans  Pinspection  de  son 
camp.  Apres  s'^tre  humblement  pros- 
terne  devant  le  souverain  distributeur 
des  victoires,  il  alia  consolant  l^s  bless^, 

n  Voy«  WakMy. 


«6oQnfqr(9nt  li^s  faibles,  encourageant 
les  forts ,  et  disant  aux  moribonds  que 
leitrs  dottleurs  pr^ntes  ^taient  pour 
%iki  autant  d'esperances  de  fdieit^s  fu- 
tures, et  qu'At-Borak,  la  jument  ce- 
leste du  Proph^te,  redescendrait  sur 
terre  pouremporter  plusvite  Ieurs  dmes 
au  sein  de  Dieu.  Ces  diseours,  ou,  pour  la 
premiere  fois  peutr^tre,  Tenthousiasme 
religieux  remplace  les  promesses  de  pil- 
lage, les  assurances  de  butin,  exaltd- 
rent  a  tel  point  les  esprits  que,  des  que 
la  pdle  lumiere  de  Taube  vmt  efQeurer 
la  plaine  de  TYarmouk,  on  put  voir  les 
deux  arm^s ,  rang^es  en  face  Tune  de 
Fautre,  et  attendant  Tapparition  du  jour 
pour  se  d^vorer. 

Aucun  annaliste  ne  nous  a  racont^  les 
Evolutions  di verses  de  cette  bataille 
epique,  plus  acbarn^  sinon  plus  grande 
qu'Arbelles  et  Pbarsale.  Quand  deux 
peuples  se  disputent  une  terre,  quand 
deux  religions  se  disputent  un  monde,  on 
lutte  toutautrement  encore  que  lorsque 
deux  monarques  veulent  s'arracher  un 
trone,  ou  lorsque  deux  ambitieux  com- 
battent  pour  une  domination  Ephemere, 
que  ces  monarques  mtoe  sappellent 
Alexandre  et  Darius,  que  ces  ambitieux 
se  nomment  GEsar  et  Pomp^ !  Figurez- 
vous  quelque  chose  comme  Marius  avec 
les  Gimbres,  comme  Charles-Martel 
avec  les  Sarrasins,  comme  Charlemagne 
avec  les  Saxons ,  un  choc  immense ,  une 
m^l6e  furieuse ,  une  lutte  corps  a  corps, 
membre  k  membre,  pour  ainsi  dire; 
des  Epees  qui  s*EbrMhent  eontre  des 
crdnes ;  des  lances  aui  se  brisent  dans 
des  poitrines ;  des  soldats  desarm^  qui, 
faute  de  fer,  se  servent  de  Ieurs  bras; 
des  bless^  qui  se  relevent  pour  forger 
Ieurs  vainqueurs;  des  mourants  qui  s*at- 
tachent  a  Ieurs  ennemis,  comme  des 
dogues  au  taureau;  des  groupes  de  com- 
battants qui  essayent  une  lutte  supreme 
derri^re  des  barncadesdecadavres;  des 
d^espEr^  qui  se  pr^cipitent  t^te  baiss^e 
eontre  les  bataillons;  des  audacieux  qui 
r^pondent  seuls  a  dix  adversaires;  aes 
ohevaux  en  fiirie ,  privEs  de  Ieurs  cava- 
liers ,  qui  courent  au  hasard ,  ^rasant 
des  t^tes  a  chacun  de  Ieurs  pas ;  des  inn* 
prEcations,  des  prieres,  des  oris  de 
douceur,  des  exclamations  de  joie,  des 
vAles  et  des  rugissements  :  Urates  les 
borreurs  et  toutes  les  sublimit^s  p^Ie- 


ti 


LlJiaVERS. 


m^le ,  tou8  les  courages  avec  toutes  les 
Idchetes ! 

Un  seul  fait  nous  a  €x€  conserve  qui 
caract^riseadmirablementcette  seconde 
journ^e.  A  un  moment  donn^,  une  com- 
pagnie  d'archers  arm^niens  se  d^ploya 
sur  une  hauteur,  et  ils  lancerent  leurs 
fleehes  avec  tant  de  pr^ision  et  d*a* 
dresse  qu*en  peu  d'instants  ils  eurent 
eborgne  ou  aveu£l6  sept  cents  des 
plus  braves  Musulmans.  II  fallut  des 
efforts  inouis  pour  debusquer  ces  re- 
doutables  ennemis ,  et  les  Arabes  ont 
conserve  le  souvenirde  cette  lutteachar- 
n6e ,  en  Tappekant  :  La  jourrUe  de  I'A-- 
veuglement  Plus  tard,  lorsque  les  mu- 
tiles  de  Yarmouk  rentrerent  dans  leur 
pays,  ce  fut  pour  eux  un  titre  de  gloire 
d^avoir  perdu  un  ceil  ou  les  deux  yeux 
a  ce  second  acte  de  la  sanslante  trage- 
die  syrienne.  La  nuit  seule  suspendit 
la  rage  des  combattants,  sans  T^puiser 
ndannioins  {*). 

Durant  cette  lugubre  nuit,  ce  furent 
parmi  les  Arabes  de  nouvelles  prieres 
et  de  nouveaux  encouragements  :  eux 
seuls  semblaient  avoir  la  conscience  du 
grand  6v6nement  qui  s'accomplissait. 
Les  Grecs,  au  contraire,  s'abandon- 
naient ,  chefs  et  soldats ,  a  toutes  leurs 
depravations.  Semblables  h  des  debau- 
ches qui  vident  leur  dernier  verre,  leur 
camp  devint  comme  la  salle  immense 
d'une  gigantesque  orgie.  Queloues  ofli- 
ciers  memes  rencherirent  sur  la  bruta- 
lite  soldatesque,  et  leur  infamie  fut  le  len- 
demain  une  des  causes  de  la  pertede  Far- 
m6e.  Ivres  de  sang  et  de  vin,  ils  ctaient 
all^s  faire  une  excursion  jusqu*^  la  pe- 
tite-ville  d'Yarmouk,  plac^e  derriere 
I'arm^e  romaine.  Un  riche  habitant 
de  cette  cit^  leur  offrit  rhospitalit^, 
et  ils  en  abusdrent  jusau'a  violer  la 
femme  de  leur  bote  et  a  ^or^er  son 
enfant,  qui,  par  ses  cris,  cherchait  a  em- 
p^cher  1  attentat  centre  sa  mere.  Cette 
execrable  atrocite  ne  trouva  pas  m^me 
dans  le  genial  en  chef  un  vengeur.  La 
mere  d^sp^r^  eut  beau  avoir  le 
courage  de  aemander  ven{;eance»  la  t^te 
de  son  fils  a  la  main ;  lorn  de  lui  faire 
justice,  Vahan  la  fit  brusquement  jeter 
a  la  porte  de  sa  tente.  Alors  le  man  ou- 
trage, ne  connaissant  (>lus  de  bornes  a 
sa  douleur,  prit  en  haine  Farm^  tout 

n  Voyez  Rlmadn. 


entiere  et  jura  sa  perte.  Poor  | 
sdrement  a  son  but,  il  sutrefoulerw  j 
larmes  d'indignation,et,  feignantr' 
gnorer  le  crime  dont  sa  fomille  T 
victime ,  il  s*en  alia  proposer  a  Yd 
de  lui  procurer  le  moyeo  de  ui 
Farm^e  arabe.  11  s'agissait  de  i 
Felite  des  troupes  romaines  a  ooj 
jusqu'alors  ignore  de  la  riviere  d"^ 
mouk.  Vahan  approuva  ce  jpjfM 
promit  a  celui  qui  lui  en  faisait  pr^ 
nombre  d^hommes  qu*il  desirait. 
fois  tout  prepare ,  celui -ci  alia  s> 
dre  avec  les  Musulmans  pour " 
dans  sa  vengeance. 

Le  jour  venu ,  les  coloones  [ 
et  arabes  s'^branl^rent  ensenTtte|-i 
reeommenc^rent  un  combat  aussi  a 
que  la  veille.  Mais  bientot  il  sal 
tacha  de  Famiee  romaioe  une  i  ^ 
tout  entiere  qui  remonta  le  knfl 
bords  du  fleuve.  Cette  legion 
un  gros  de  cinq  cents  cavaKeis  I 
qui  s'enfuirent  a  toute  bride  coi 
etait  convenu ,  et  se  precipiteredtj 
la  riviere  en  traversant  le  gue.  1 
voulurent  les  poursuivre,  etct 
lui  qui  les  avait  men^  jusque-ta, 
montrait  un  endroit  aussi  gueablelj 
dire  que  le  lieu  ou  avaient  travi  ' 
Arabes,  sans  deliberer  davantage,] 
s'elancerent  dans  le  fleuve.  Or,  fli  i 
endroit ,  les  eaux ,  loin  d^£tre  I 
Ctaient  tres-profondes  et  tr 
et  Jes  Grecs  se  noyerent  pres^l 
Ce  qui  devait  decider  la  victmref 
veur  des  Remains ,  entraf na ,  i 
traire,  leur  d^faite.  Priv6  de  Fdito 
troupes ,  Vahan  ne  |)ut  roister  I 
vel  elan  des  Musulmans ;  ses  lif 
rent  bientdt  defoncees ,  ses  legia 

fj^es,  ses  innombrables  soldats o 
es  uns  sur  les  autres  par  des  dl 
consecutives;    puis,   la    d^fectioiS 
Djabalahetdeses  Arabes  chrdteosf 
survenue  au  milieu  de  ce  desaMik 
d^route  des  Romains  fut  compUttiJ 
ils  laisserent  sur  le  champ  de  \  ' 

{>lus  de  cinquante  mille  roorts ,  et  c 
es  mains  des  Musulmans  un  ^ 
6gal  de  prisonniers.  Vahan,  atteint  d 
sa  fuite,  fut  conduit  k  Damas,  out 
inconnu  Fassassina.  £tait-ce  oieore^ 
mari  outrage  qui  se  vengeait  O^ 

(♦)  ToyezEImado. 


STRIE  M0D£EII9E. 


73 


Cen  etait  fait!  la  san^laote  fortune 
des  combats  avait  favonse  les  Musul- 
mans;  et  dMormais  la  Syrie  leur  ^tait 
destin6e,  oomiue  le  leur  avait  predit 
Mahomet.  On  n'est  pas  d'accord  sur  la 
date  dela  baCailled'Yarmouk ;  les  ^v^ne- 
ments  qui  la  suivireut  prouvent,  du 
reste,  qu'elle  se  donna  vers  la  fin  de  i'an- 
n^e  636  de  notreere,  la  16^  de  Fh^gire. 
On  differe  aussi  sur  le  nombre  de  jours 

?ue  cettebatailledura.  Nousavons  choisi 
hypotb^se  la  plus  probable.  Que  cette 
lutte  prodigieuse  se  soit  prolong^e  plu- 
sieurs  semaiues  au  lieu  de  trois  jours, 
toujours  est-il  que  son  retentissement 
fut  immense  et  son  resultat  d^linitif.  Si 
Mahomet  forma  une  nation,  la  batailie 
d'Yarmouk  lui  donna  une  contr^.  De  ce 
jour  les  Romains  ne  furent  plus  de  force 
a  disputer  Tempire  k  ces  bommes  aussi 
sobres  que  braves ,  aussi  actifs  que  pru- 
dents ,  et  unis  entre  eux  par  la  chalncr 
de  fer  d*une  religion  martiale.  De  ce 
jour,  le  monde  eut  de  nouveaux  mattres; 
et  I*antagonisme  de  TOrient  et  de  FOcci- 
dent,  de  FAsie  et  de  FEurope,  rena- 
quit  avec  toutes  ses  alternatives ,  avec 
toutes  sea  p^rip^ties.  Le  vautour  avait 
bri^^  son  oeuf ,  et  en  moins  d*un  deml- 
si^le  il  allait  prendre  son  vol  de  M^ 
dine  a  Grenade,  de  FOronte  ^ FOxus. 

OMAB    A  JEBUSALBH. 

Apr^  quelques  joors  de  repos,  Abou- 
Obaida ,  qui  avait  repri's  le  commande- 
ment  de  son  arm^e,  la  mena  h  Damas , 
ou  elle  rentra  en  triomphe.  Mais,  de  peur 
de  laisser  se  refroidir  sa  ferveur  conqu^ 
rante,  Omar,  du  fond  de  FArabie,  lui  or- 
donna  d'aller  prendre  Jerusalem.  Elle  se 
remit  done  en  marche  avec  son  elan 
accoutum^,  et  on  la  vil  bientdt  apres 
entamer  le  si^e  de  la  cite  sainte.  Toute 
sommation  de  se  rendre  ayant  ^t^  re- 
pouss^e  par  les  Chretiens,  on  se  pr^para 
de  part  et  d'autre  a  la  lutte.  DIx  jours  de 
suite,  on  combattit  des  deux  c6t^  avec 
ttii  ^al  courage ,  sans  perdre  ni  gainer 
un  pouce  de  terrain.  On  en  ^tait  arnv6  k 
Fhiver  de  Fannie  637;  le  froid  fut  tres- 
^pre  sur  le  plateau  glac^  de  Jerusalem; 
les  assi^geauts ,  comme  les  assieg^,  en 
souffrirent  sans  se  lasser,  sans  se  decou- 
''?g«r.  Enfin ,  apres  quatre  mois  de  re- 
sistance continue ,  les  Chretiens,  snns 
«spoirde  rnvilaiUpmcnt,  abandonri^s  a 


cux-m^mes  au  milieu  d*un  pays  deja 
conquis,  furent  oontraints,  malgre  leur 
amere  douleur,  de  songer  k  capituler. 
Ud  jour  done,  au  soleil  levant,  au  lieu 
deguerriers  en  costume  de  combat,  on 
vit  apparattre  sur  les  murallles  des  pvS- 
tres  en  habits  sacerdotaux :  le  patriarche 
Sophronlus  pr^o^ait  son  clerg^ ,  et  de- 
mandait  k  parlerau  chef  des  Arabes. 
Abou-Obaida  se  rendit  a  cette  invitation, 
et  se  presenta  imm^diatement  devant 
Sophronlus. 

Ce  dernier  crut  devoir  eommencer  par 
des  sortes  de  menaces,  en  faisantdire  au 
g^n^ral  musulman  :  «  Que  Jerusalem 
«  6tait  la  cite  sainte ,  et  que  quicongue 
«  entrerait  en  ennemi  sur  son  territoire, 
«  consacr^  par  les  pas  du  Fils  de  Dieu, 
a  s'attirerait  la  coiere  du  ciel !  »  Mais 
Abou-ObaTda,  loin  de  s*intimider  de 
ces  paroles,  assez  maladroites  dans 
une  drconstance  si  critique  pour  les 
Chretiens,  r^ponditavec  fierte :  «  Mous 
«  Savons  que  Jerusalem  est  une  ville 
«  sainte ;  que  Mohammed  y  fut  trans- 
«  port^dans  cette  nuit  miraculeuse  pen- 
«  dant  laquelle  il  monta  au  ctel  et  s*ap- 
«  procha  de  Dieu  m^me  a  la  port^  de 
«  deux  traits  d'arbalete.  Mous  savons  que 
«  c'est  le  berceau  et  le  tombeau  des  pro- 
«  phetes  :  et  c'est  k  tous  ces  tltres  que 
«  cette  ville  nous  est  sacree.  Nous  som- 
«  mes  plus  dignes  que  vous  de  la  posse- 
«  der.  Aussi  ne  cesserons-nous  de  Fas- 
ti sieger,  jusqu*5  ce  que  Dieu  Fait  mise 
«  entre  nos  mains,  comme  il  nous  a 
«  livr^  tant  d'autres  places.  »  Quoi  qu1l 
ait  essays,  le  patriarche  B*en  fut  pas 
moins  forc^  de  parler  de  capitulation,  il 
en  obtint  une  assez  fiavorable;  mais. 
pour  gagner  du  temps,  sans  doute,  it 
demamla  que  la  cit^  sainte  ne  flh  rendue 
qu'au  khalife  en  personne  (*). 

Abou-Obaida  nt  pn6venir  le  khalife  de 
la  resolution  des  habitants  de  J^rusa* 
lem.  Omar  rassembia  son  conseil,  c*est- 
a-dire  ses  plus  anciens  oompagnons, 
ceux  qui  avaient  eu  Fhonneur  de  coni- 
battre  avec  le  Prophete.  Othman ,  Fun 
d*eux,  qui  devait  ^tre  un  jour  le  succes- 
seur  d'Omar,  ne  pensait  pas  qu*on  dOt 
foire  aux  Syriens  cet  honneur  de  leur 
d6puter  un  khalife  pour  entrer  dans 

(*)  Voyez  Eatychius  et  Tb^ophane,  AbooT- 
foralclM'tCodrenas. 


74  LTJNlYEftS. 

leur  ville  sainte.  Ali,  a\i  contraire,  pen- 
cha  pour  uae  sorte  de  poliQque  oonci- 
liatrioe,  qui  pAt  prouvar  aax  Chretiens 
qu*on  ne  vonlait  pas  rompre  avec  eux 
pour  tou}oan,  et  <nie  e'fttait  une  alliance 
mile  et  non  une  domination  rigoureuse 
qu'on  renait  leur  imposer.  D'aprcs  cette 
opinion ,  que  inanif(^sta  si  nettement  fe 
gendre  da  prophete  dans  cette  circons- 
tance  im|>ortante,  auelle  edt  done  6U 
sa  conduite ,  s'il  I'eat  emport6  sur  ses 
rivaux  ,  et  qu'il  fttt  devenu  le  premier 
khalife  de  I'lsiam  ?  Ou  bien  Tesprit  de 
eonau^tea  edt  ^t^  ^teint  par  lui ,  et  la 
reTolutioQ  sociale  de  Mahomet  se  fdt 
boru^  ^  renouveler  la  face  de  i'Arabie; 
ou  bien ,  si  Ali  avait  laiss^  se  develop- 
per  Fardeur  guerriere  de  ses  peuples, 
le  fahatisme  religieux ,  qui  leur  fut  un 
mobile  si  puissant,  n'^tant  pas  ne  ou 
ayant  ^t^  etouff(^  tout  d^abord ,  que  se- 
raitdevenu  lemondesans  Tantagonisme 
des  deux  grandes  races  du  nord  et  du 
midi?  A  quoi  tient  le  sort,  non  pas  des 
empires,  o'est  trop  peu  de  chose,  mais 
des  religions! 

Revenoos  a  Omar,  et  jogeons  les  €y&- 
nements  tels  qu'ils se  sont  passes,  sans 
demander  compte  k  Dieu  de  leur  fata- 
lity. Le  khalife ,  qui  voulait  sans  doute 
inspeoter  son  arm^e,  Ju^er  son  people, 
tout  aussi  bien  que  renidre  hommage  a 
Jerusalem ,  se  rangea  de  Tavis  d'Ali ,  et 
pr^para  son  depart  pour  la  Syrie,  apr^s 
avoir  laissele  ^ouvernement  de  Tinte- 
rieur,  les  uns  disent  k  Othman ,  les  au- 
tres  disent  k  Ali.  Omar  donna  alors  le 
spectacle  de  la  plus  noble  et  de  la  plus 
grandiose  simplicity.  Tandis  que  les  des- 
potes  de  Constantinople  ou  de  Perse  ne 
se  mettaient  en  voyage  qu'avec  des  gar- 
des nombreuses,  tandis  que  le  luxe  et  la 
niollesse  les  suivaient  jusqu'4  la  guerre, 
qu'ils  nequittaient  jamais  ni  leurs  v^te- 
inents  de  pourpre  et  d'or,  ni  les  d^lica- 
tesses  de  leurs  habitudes,  ni  la  profusion 
de  leurs  tables ;  Omar,  tout  au  contraire, 
partit  presque  seul,  mont^sur  un  chameau 
roux,  avec  deux  sacs  devant  lui.  Tun 
contenant  de  Torge,  du  riz  et  du  fro- 
ment  monde,  Tautre,  quelques fruits  sees, 
et  derri^re  lui  une  outre  pleined'eauet  un 

frand  plat  de  bois.  A  chaque  halte .  le 
halife  descendait  de  son  chameau,  rai- 
sait  preparer  Forge  et  le  riz,  ^talait  quel- 
quea  fniita  #ur  soo  plat ,  et,  s^accrou- 


I 


Et  pourlant  ce  patriardiedwL 
prlmitifs  ne  commandait  plus  |1 
seule  ikmille,  mais  k  unenatkBy 
troupes  avaient  deja  vaincv  b] 
dats  d*up  empire  de  douze  i 
et  on  le  recounaissait  commeli 
qu^rant  de  la  Syrie  et  de  la  I 
tamie.  Omar  prouva,  du  rest^  U 
puissance  dans  ce  memorabf 
Sa  simplicity,  sa  sobriety,  | 
plus  d*effet  sur  les  populatioi 
traversa  le  pays  que  n*edtfeill 
du  luxe  le  plus  ^bloiiiss^pt.  Par 
accourait  a  sa  rencontre,  jeaoffl 
marques  de  respect  et  dlionnea^ 
ce  n*etait  pas  au  milieu  de  deoij' 
de  soldats ,  c*^tait  a  travers  r«^ 
haie  de  peuple  qu*il jpassait 
les.  On  venal t  a  la  fois  le  ( 
lui  ^cmander  justice.  CitoD§  | 
traits  qui  caraet^risent  sod 
vernement. 

Ce  ne  fut  pas  seulement  d^ ji , 
[u'Omar  eut  a  rendre ,  mais  il  cS^ 
les  idees  de  moralili  et  dIjQiB'' 
faire  pr6dominer.  Le  premier  (le*! 
divers  fut  un  rappel  vigoureiix ' 
du  Koran  :  lepropMte  ayant  ah 
interdit  k  un  seul  homme  d*^ 
m^me  temps  les  de4ix  so^ri, 
on  vint  dire  dans  un  village  a  ( 
quelqu'un  ctait  dans  ce  cas,  il  1 
rheure  comparattre  a  son  triboa 
qui  avait  si  ouvertement  tranr 
Ordres  de  Dieu,  et  luicominai 
ter  imm^iatement  une  descsf 
L'apcuse  se  plaignlt  de  cette  i 
reclama,  murmura,  et  finit  pa 
quMl  ^taitaudesespoird'avoirl 
la  religion  mahometane.  Alors  I 
se  leve  avec  indignation,  saisitsQB]| 
blanc  de  voyage,  en  dfchargew 
sur  la  tiSte  du  blasph^mateur,  etf 
«  Quoi !  tuoses  mepriser  Hslamtfl 
«  la  religion  de  Dieu,  de  ses  angfl 
«  ses  ap6tres?  Apprendsqull  yaf 
«  t^te  pour  ceux  qui  y  renoncefltp, 
ces  mots,  I'accus^  demeura  terrlne^ 
comme  d'ailleurs  il  edt  ete  lapidc ! 
fdt  r^volt^  contre  les  ordresde  m 
il  fut  contraint  d'obeir  (*}. 


O  y  oya  AboaTftdA  et  ElaMiiii 


SYHIE  MODERNE. 


ton ,  aY«e  non  moins  d*^ner- 

Ml  r^prima  un  d^sordre  honteux, 

M  Bouillant  I'd  me  de  80Q  peuple, 

^  pu  TaMtardir  s'il  filt  passe  en 

Un  vieillard,  aussi  idche  que 

,  avail  6pou8^  une  jeune  femme 

dition  de  lui  laisser  son  amant. 

%t  f 'autre  poss^aient  alternative- 

eette  femme,  qui  n*avait  ete  ven- 

"^3  par  Pavanee  de  ses  parents. 

it  la  deux  cfaoses  graves  k  r^ 

\  on  scandale  ignoble  et  un  mar* 

me.    Le    khalife,    aussi    ri- 

etait  noble  de  caract^re,  or- 

aa  jeune  homme  de  cesser  tout 

^e  avec  la  femme  du  vieitlard, 

Inenaca  de  la  niort  s'il  prolon- 

adult^re.  C'etait  attaquer  par 

lyens  violents  an  vice  qui  entrat- 

"^  his  Tignominie  et  la  corrup- 

inHSurs. 

Hoin  encore,  au  milieu  d*un  d^- 
le  khalife  rencontra  plusieurs 
Itoecix  attaches  a  des  palmiers,  et 
k  aux  rayons  brdlants  du  soleil 
'^eeouMlsen  mourussent.  Le  coeur 
I  do  kfaatife  fut  emu  par  ce 
ded'unecniaute  barbare,  et  s'^- 
hforme  de  la  cause  d'un  aussi 
ble  ebifttiment,  on  lui  r^pondit 
^ient  de  pauvres  d^biteurs  qui 
BDtpas  pusatisfaire  aleurs  dettes 
(que  fix^.  Aussitot  le  khalife  flt 
ees  malheureux,  et  ayant  mand6 
tr^aneiers,  il  leur  reprocba  avec 
'  Im  conduite  inhumaine,  leur 
i>i  OQoique  ees  gens  fussent 
!8,  de  les  laisser  d^ormais  en 
I  et  de  ne  les  plus  punir  ainsi  : 
itjouta-t-il,  j*ai  souvent  entendu 
^  au  prophete  :  N'affligez  pas  les 
iiDes;oeux  qui  les  afOigent  en  ce 
Kle  aoront  dans  I'autre  le  fen 
demeure.  » 

i,  ^  chacune    de   ses   Stapes, 

AHfe  rendait  justice,  r^rimait 

•ordres,  ou  promulguait  des  lois. 

n^i'ii  fut  enfin  arrive  en  face  du 

des  Arabes  devant  les  murs  de 

iiem,  quelques   soldats,  qui  ne 

'~ot  \as  se  douter  que  leur  kha- 

venir  en  un  si  simple  equipage, 

'"^.rent  passer  avec  un  sourirod^ 

sur  let  levies,  une  bouteille  de 

a  la  main,  et  des  habits  de  soie  sur 

Avps.  A  eette  me,  I'aust^re  kha- 


life frott^a  le  sourcil,  et  quelques  heu- 
resapr^,  afinque  leluxeet  lad^bauche 
ne  s*etendissent  pas  davantage  parmi 
les  Musulmans,  il  ordonnaque  tons  les 
habits  de  soie  fussent  d6chir6s  en  lam^ 
beaux,  que  tousceux  auis'eo  6taient 
v^tus  fussent  tratn^  dans  la  boue  le 
visage  contre  terre,.  et  que  tous  ceux 
qui  avaient  bu  du  vin  re^ussent  quatre* 
vingts  coups  de  bUton  sous  la  plante 
des  pieds.  C*est  par  ees  rigueurs  que 
le  khalife  s'appr^tait  a  trailer  avec  Je- 
rusalem, et  pouFtaot  11  se  montra  avee 
les  habitants  de  la  dt^  sainte  aussi 
juste  que  g^n^reux  {*). 

II  existe  un  texte  du  traits  entre 
Omar  et  les  habitants  de  Jerusalem, 
que  certains  orientalistes  croyent  sup- 
pose, mais  pourtant  que  plusieurs  his- 
toriens  ont  conserve  et  aonnent  pour 
authentique.  Ge  texte  aurait  servi  de 
modele  a  toutes  les  capitulations  sui- 
vantes ,  toujours  selon  ees  historiens. 
Le  fait  est  quMl  contient  la  plupart  des 
defenses  et  la  plupart  des  concessions 
que  les  rayas  se  sont  vu  imposer  ou 
ont  obtenues  des  Musulmans,  leurs 
vaiiiqueurs.  Aussi,  malgr^  sa  v^raciti 
contestee,  nous  n'en  donnons  pas  moins 
ici  cette  piece ,  vraie  dans  le  fond  sinon 
dans  la  forme,  caracterislique  sinon 
historique.  La  voici  telle  que  la  rap- 
porle  Lebeau,  dans  son  Uistoire  du 
Bas-Empire  : 

«  Au  nom  de  Dieu,  clement,  mis^ri-* 
«  cordieux ,  de  la  part  d'Omar  aux  ha- 
«  bitants  de  Jerusalem :  lis  seront  pro* 
«  t^6s ;  ll»  conserveront  la  vie  et  leurs 
«  biens.  Leurs  eglises  ne  seront  pas 
«  demolies;  eux  seuls  en  auront  Tu- 
ft sage,  mais  ils  n'empdcberont  pas  les 
«  Musulmans  d'yentrer  nijourni  auit; 
«  ils  en  ouvriront  les  portes  aux  pas- 
«  sants  et  aux  voyageurs ;  ils  n'^rige- 
«  ront  point  de  croi;t  au-dessus ;  ils  ne 
ft  soimeront  point  les  cloches,  et  se 
ft  eontenteront  de  tinter;  Us  ne  b&ti- 
R  ront  de  nouvelles  ^^lises,  ni  dans  la 
ft  ville,  ni  sur  son  terriloire.  Si  quelque 
ft  voyageur  musulman  passe  par  leur 
ft  cite ,  ils  seront  oblige  de  le  loger 
ft  et  de  le  nourrtr  gratuiteinent  pen- 
«  dant  trois  jours.  On  ne  les  obligera 

(*)  Voyei  vauidtn^  dt  JirmMim,  M0  par 
OcUey. 


n 


L'UNIVERS. 


point  (Tenseigner  le  Koran  a  ieurs 
enfanU ;  mais  ils  ne  parleront  point 
ouvertement  de  leur  religion  aux 
Musulmans,  ne  solticiteront  personne 
k  l*embrasser,  et  n'emp^cheront  point 
Ieurs  parents  de  la  quitter  pour  faire 
profession  du  musulmanisme.  lis  ne 
montreront  pas  publiquement  dans 
les  rues  Ieurs  croix  et  Ieurs  livres. 
lis  t^moigneront  du  respect  aux  Mu- 
sulmans,  et  cederont  Ieurs  places, 
lorsque  ceux-ci  voudront  s'asseoir.  lis 
ne  seront  pas  v^tus  comnre  eux ;  ils  oe 
porteront  ni  Ieurs  bonnets,  ni  Ieurs 
turbans,  ni  leur  chaussure;  ils  gar- 
deroiit  partout  un  habillement  dis- 
tinctif,  et  ne  quitteront  jamais  la 
ceinture.  lis  ne  partageront  pas  Ieurs 
cheveux  comme  les  vrais  fiaeles.  lis 
ne  parleront  pas  la  m^me  langue, 
ne  prendronC  pas  les  indmes  noms,  et 
ne  se  serviront  pas  de  la  langue  arabe 
dans  les  devises  de  ieurs  cachets.  Us 
n'ironl  pointacheval  avec  des  selles. 
lis  ne  porteront  aucune  sorte  d'ar- 
mes.  lis  ne  vendront  point  de  vin. 
lis  ne  prendront  chez  eux  aucun  do- 
mestiquequi  ait  servi  un  Musulman. 
llspayerontponctuellement  letribut. 
lis  reconnaftroiit  le  khalife  pour 
leur  souverain,  et  ne  feront  jamais 
ni  directement  ni  indirectement  rien 
de  contraire  k  son  service.  » 
Gertes ,  quelques-unes  de  ces  condi- 
tions sont  dures ;  mais  la  permission 
de  conserver  ouvertes  les  ^iises  cbr^- 
tlennes ,  le  droit  d'^lever  les  en&nts 
dans  la  religion  de  Ieurs  pares,  sont 
^es  concessions  bien  fortes  de  la  part 
d*un  peuple  qui  tendait  autant  que 
possible  a  imposer  k  la  fois  son  culte 
et  sa  domination.  Quelques  articles  de 
la  capitulation  que  nous  venons  de 
citer  nous  semblent  avoir  6t^  d^tour- 
n^  de  leur  sens  primitif,  entre  au- 
tres,  Us  ne  parleront  pas  la  mime 
langue;  les  Maronites  se  sont  tou jours 
servis  de  la  langue  arabe,  ils  Temploient 
mdme  dans  Ieurs  prieres,  et  jamais  on 
ne  leur  en  a  fait  un  crime.  Quant  k 
oette  injonction  singuli^re  :  Us  riirorU 
point  a  cheval  avec  des  selles^  il  faut 
entendre  sans  doute  des  sellesde  guerre, 
des  caparacons. 

Quoi  qu^l  en  soit,  malgre  des  alte- 
rations evidentes  dans  certaines  par- 


ties ,  ce  texte  n'en  eontieat  i 
le  r^sum6  de  Tetat  des  nju  iof 
premieres  conqu^tes  de  ildam  y 
nos  jours.  Les  lois  somp^ 
exemple ,  ont  toujours  w  eni 
les  rayas  ont  constamment  { 
Ieurs  v^tements  des  couleurs  I 
le  rou^e  et  le  vert  leor  soot  I 
interdits.  Aussi  eette  diitini 
t^rieure ,  jointe  au  respect  m'i 
imposait  pour  le  moindre  Hid 
quels  que  soient  d*aiUeon  ' 
tune  et  leur  rang  entreeax,lesfl 
vite  habitu^  h  cette  allure  de  I 
vage,  timide  et  souple,  I 
contourn6e,  t^te  basse,  doij 
regards  fuyants,  qui  lescan 
core  aujourd'hui.  Faut-ii 
maintenant  <pie  Fbumilite  desC 
orientaux  soit  devenue  de  pliail 
profonde,  Torgueil  des  mil  ' 
plus  en  plus  insolent :  f 'a  t 
dans  Ieurs  oontr^es  le  i ' 
Ruerre ;  ce  sont  toujours  < 
de  valnqueurs  k  vaincus  (*). 
Omar  se  conduisit  persoei 
k  Jerusalem  avec  autaot  del 

Sue  de  g^n^rosite.  11  ne  s(M^ 
ans  la  cite  sainte  qa'a?ee  r 
nombre  de  ses  compagnons.  P 
trouver  le  patriarcne  Sopbn 
traita  dignement,  et  lui  pn 
alter  avec  lui  les  divers  monai 
la  ville  et  les  endroits  ooosacrei| 
tradition  religieuse.  II  entn  t 
bord  dans  Teglise  de  la  Rei ' 
et  s*assit  un  instant  au  miliead 
A  cet  aspect ,  Sopbronius  w  f 
primer  sa  douleur  ni  arrto  I 
mes ,  en  se  souvenant  de  li  f* 
de  Daniel,  qui  avait  annooeef 
minatUin  de  la  desolation  dff 
blir  Un  jour  dans  le  lieu  saint! 
pieux  patriarche  ce  jour  f 
arrive ;  et  la  presence  de  oe  ^ 
tout-puissant  quoiqu'en  bailloMrj 
sa  robe  de  poil  de  chameau  salef 
chir^,  sa  barbe  inculte  et  soa  f 
d*oiseau  de  prole,  repr^scntaita 
du  patriarcne  le  d^rdre  supr^ 
le  royaume  de  Dieu ,  le  renrei 
de  la  domination  ehretieoae. 
dant  rbeure  du  second  i 
venue,    Omar  daigna  deoiai 

C)  Yoyn  Thtopbine. 


SYRI£  MODEKNE. 


U 


line  place  ou  il  pdt  prier. 

CI  lui  iDdiguarendroit  m^me  ou  il 

orart ;  mats  Omar  n*accepta  point 

Ifffn,  SophroQius  alors  le  mena 

ide  CoDStantin,  et  fit  disposer 

nterieur  une  natte  pour  le  kha- 

m  ca  dernier  refusa  encore  de 

I  priere  dans  cet  endroit,  et  il  se 

^<eul  sur  les  degr^s  du  portique 

il,  ou  il  se  prosterna  en  se  tour- 

sla  Mekke.  Son  namaz  achev^, 

orna  aupres  du  patriarcbe,  et 

Que  ma  conduite  ne  vous 

1  pas  un  caprice,  je  n*ai  agi 

i  que  par  egard  pour  votre  culte : 

\  afin  de  vous  laisser,  exclusive- 

\  h  tout  autre,  la  possession  de 

giises;  car  si  je  m'6tais  prostern^ 

I  rioterieur  de  Tune  d  elles ,  je 

( plus  ^U  le  mattre  de  vous  la 

ter :  les  Musulmans  vous  Fau- 

t  disputde ,  et  s'en  seraient  em- 

rle  droit  quMls  ontde  faire 

^e  dans  les  endroits  oh  le 

:  a  fait  la    sienne.  »  On  rap- 

que,  pour  donner  plus  ae 

lies  paroles,  iJ  ajouta  a  la  capltu- 

\  UD  article  par  lequel  il  etait  d^- 

1  a  tout  Musulman  de  dire  son 

i  suT  le  parvis  d'une  ^lise  chre- 

» et  d  tout  muezzin  d'appeler  a  la 

I  sur  les  marches  ou  dans  les  ga- 

|de  ces  mtoes  ^giises. 

'  I  avoir  visits  en  detail  les  diff(6- 

^monuments  de  Jerusalem ,  Omar 

'  I  a  Sophronius  de  lui  montrer 

I  qui  avait  servi  d*oreiller  a  Ja* 

|B*il  eut  sa  vision  de  P^chelle 

Le  khalife  fut  indign^  de 

i  eet  endroit  une  accumulation 

indices,  et,  pour  qu*^  Tavenir  on 

Uee  lieu  le  respect  qu'il  m^ritalt, 

t  dans  le  pan  de  sa  robe  autant  de 

mondices  qu'elle  en  pot  tenir,  et 

[  Jeter  au  loin.  Son  exemple  fut 

latement  suivi  par  tous  les  Musul- 

[presents  a  cette  scene;  et  en  peu 

s  le  terrain  fut  deblay^,  nettoy^, 

Iput  y  poser  les  fondements  d'une 

B  belles  mosqu6es  qu'ait  jamais 

;rislamn. 

»ique  les  habitants  de  M6dine 
f  cralut  un  moment  que  le\ir  kha- 
"i  fit  de  Jerusalem  le  siege  de  son 

hVoye/Theophane. 


empire »  Omar  n'en  quitta  pas  moins 
cette  ville  et  la  Syrie,  apr^s  avoir  di- 
vise  sa  nouvelle  conqu^te  en  deux  ^ou* 
vernements,  celui  du  nord  et  celui  du 
sud ;  le  premier  s*6tendant  des  plaines 
du  Hauran  (rAuranitis  des  anclens) 
jusqu^a  Alep ,  tout  le  cours  de  TOronte ; 
le  second  comprenant  la  Palestine  et 
les  rivages  de  la  mer.  Abou-Obai'da 
obtint  lun  de  ces  gouvernements, 
Yezid ,  fils  d*Abou-Sofian ,  obtint  Tau- 
tre.  Abou-Obaida  devait  immediatement 
se  Dorter  sur  Alep,  Y<^zid  sur  C^sar^. 
Quant  a  Omar,  en  retournant  en  Ara- 
ble avecquelques  troupes,  il  se  pr^senta 
devant  la  petite  ville  de  Ramlah ,  dont 
le  gouverneur,  Artenon ,  lui  ouvrit  les 
portes,  sans  essayer  la  moindre  resis- 
tance. Ydzid  ne  fut  pas  si  heureux  de- 
vant C^ar^.  Ce  port  venait  d*^tre  ra- 
vitaill6,  et  on  venait  d*y  debarquer 
deux  mille  hommes  de  renfort.  Or, 
comme  cette  place  6tait  la  derni^re  qui 
se  maintenait  derriere  les  possessions 
arabes,  que  d^ailleurs  I^aplouse,  Lydda, 
Yflfa  venaient  de  suivre  Texemple  de 
Ramlah  et  de  traiter  avec  les  Musul- 
mans, Yezid  ne  voulut  point  entre- 
prendre  un  siege  long  et  difficile,  et 
alia  rejolndre  avec  ses  meilleures  trou- 
pes rarm^ed'Abou-ObaTda  (*). 

LB  CHATEAU  D*ALEP. 

Les  forces  des  Arabes ,  encore  une 
fois  r^unies,  marcherent  sur  Alep,  et 
s*etendirent  bientdt  dans  la  plaine  mon- 
tueuse  qui  entoure  cette  ville.  Alep 
etait  d^ja  ricbe  et  commercante;  elle 
e^t  bien  desire  moyennant  finance  s*e- 
pargner  les  pertes,  les  reactions,  les 
pillages  qui  suivent  d'ordinaire  un  siege 
vivementsoutenu.  Mais,  outre  ses  nom- 
breux  maj^asins  de  marchandises ,  elle 
avait  aussi  h  ses  portes  un  chdteau  fort, 
situe  sur  une  hauteur,  et  aussi  redou- 
table  gue  bien  piac6;  mais,  outre  ses 
negociants  pacifiques ,  elle  avait  douze 
mille  hommes  de  troupes  compos^es 
d'Arabes  Chretiens  resolus  et  oatail- 
leurs;  enfin,  elle  avait  ete  longtemps 
gouvernee  par  un  des  plus  orgueilleux 
et  un  des  plus  puissants  courtisans 
d'Ueraclius ,  qui  avait  lalss^  a  sa  mort 
son  gouvernement  a  ses  deux  ills.  Ces 

(*)  Voycz  AbouTfecla. 


a 


UUNITERS. 


deux  Jeanes  gens  prtontaient  du  r^te 
ie  plus  frappant  des  contrastes  :  Tun , 
appel^  Toukiilna,  ^tait  d'un  esprit 
martial ,  f^roce  et  superb^ ;  I'autre ,  ap- 
pele  Jean,  simpte^doux  et  modeste,  ne 
s'adonnait  qu'a  la  priere  et  a  la  lecture. 
Le  danger  commun  divisa  les  deux 
freres,  loin  de les  unir.  Celuici  voulait 
la  paix,  celuNrli  la  guerre.  Jean  pro- 
posa  de  traiter  avec  les  Arabes;  xou- 
kinna ,  indigne ,  d^lara  qu'il  n'y  avait 
qu'un  nioine  qui  pdt  p^nser  ainsi ,  et 
que,  pour  lui ,  bien  loin  de  sonser  a  se 
rendre,  il  voulait.  au  cohtraire,  se 
d^fendre  avec  la  piu^  grande  vigueur. 
Comme  toujours ,  en  pareilles  circons- 
tances ,  Tenergie  Temporta  sur  Id  pru- 
dence :  Jean  ne  fut  pas  ^cout^ ,  tandis 
qu*on  s*asseinbla  en  masse  autour  de 
Youkinna  (*). 

Des  que  celui-cl  se  vitseul  chef  d*une 
troupe nombreuse,  il  rdsolut,  avec  I'im- 
pr^voyance  de  la  jeunesse ,  doublee  en- 
core par  la  pr^somption  romaine,  de 
faire  une  sortie  et  aaller  attaquer  les 
Musulmans.  Son  audace  eut  pourtant 
plus  de  succes  qu'on  n'aurait  pu  s*y 
attendre.  Avant  appris  qu'un  detache- 
ment  de  mille  bommes,  sous  les  ordres 
de  Kaab ,  fils  de  Damarah ,  avait  ^t^ 
envoye  en  avant  par  Abou-Obaida,  il 
tomba  avec  pres  de  dix  mille  hommes 
sur  cette  petite  troupe,  et  malgr^  le 
courage  ordinaire  des  Arabes,  quoi- 
quMls  se  defendissent  avec  acharne- 
ment ,  il  en  tua  plus  de  deux  cents , 
biessa  la  plupart  des  autres  et  ne  s'ar- 
r^ta  qu'a  la  noit.  Alors  Youkinna, 
esp^rant  le  lendemain  avoir  aussi  boo 
marche  d*une  autre  troupe  de  Mosul- 
mans  ,  au  lieu  de  rentrer  dans  Alep , 
campa  a  Tendroit  mtoe  ou  il  se  trou  vait, 
aCn  d'etre  plus  k  m^me  de  poursuivre 
Favantage  d^cisif  qu'il  croyait  avoir 
rem  porta. 

Mais  tandis  gue  Fimp^tueux  jeune 
homme  se  flattait  de  la  victoire ,  les  ha* 
bitants  d'Alep,  qui  tenaient  beaucoup 
plus  a  ieur  tranquillity  qu'^  leur  foi 
politique,  a  leurs  richesses  qu'^  ieur 
nonneur,  detach^rent  cette  nuit-Ut 
m^me  trente  d'entre  eux  qui  furent 
charges  d'aller  traiter  avee  Abou- 
Obaida.  Ce  dernier  ^tait  alors  a  Kines- 

(*)  Yoyez  Ockiey,  hist,  des  Sarr. 


rin ,  et  les  d^at^  d'Alep  fonut  I 
^onn^s ,  en  pi6n6traDt  daos  a'' 
d'y  voir  r^er  le  ealme  le  [ 
fait :  les  Musulmans  £U!i!8t,dil 
en  priere  ou  en  causeries  eatie^T 
les    indigenes    a'abandoooa*  ' 
crainte  aieurs  occupations  I 
A  cette  vue,  les  deputes  d'Alep  i 
n^rent»d^unepart,quelepi ' 
de  Youkinna  ^tait,  au( 
d^faite,  et,  d*autre  pait. 
musulman  n*avait  rien  en  1 

{)dt  les  efi&ayer  et  les 
eur  projet.  Aussi  se  i 
Slus  soumis  encore  qu*ils  n*ettj 
'abord  Tintention.  lis 
taux  du  tribut  qu'on  voolutli 
ser ;  lis  s'engagerent,  en  outie, 
des  vivres  aux  Musulmans,  a  I 
nir  de  tout  ce  qui  pourralt) 
utile  de  savoir,  tant  que  d« 
guerre;  mais  ils  d^larereDt| 
pourraient  remplir  la  den 
tion  qu'on  exigeait  d'eux,  c 
cher  Youkinna  de  rentrer  ( 
teresse.   II  leur  paraissait 
de  lutter  contre  un  homffle  ^ 
acquis  laconfiance  detoussesf 
par  sa  bravoure  et  ses  largesses,  i 
A  peine  furent-ils  de  retottfil 
que  le  bruit  de  la  capitnlatioj| 
et^  r^pandu,  ils  virent  rcrenirr 
na  furieux,    les   appelant  ft 
traltres,  et  ordonnant  qu'on  liij 
tons  ceux  qui  avaient  traits  i 
nemi.  Au  refus  qu'on  fitdesf' 
ses  inionctions ,  u  deciara  la  | 
cit^  elle-m^me.  En  cons^uen 
cendit  de  sa  citadelle  avec  sdj 
les  rangea  sur  la  place  pri 
la  ville ,  et  raena^a  de  tout  r 
ct  k  sang  si  Ton  n'en  pas; 
champ  par  ses  volont6s.  Son ! 
rut  alors,  et  s'efforca  de  le  a 
de  lui  expliquer  la  r6olution  del 
Mais  le  tyran  ne  voulot  rien  *| 
et  ordouna  que  les  habitants  ie  J 
sent  sur  Theure  contre  les  Mb 
Son  frere  lui  fit  observer  qoet 
•ainsi  un  trait6  qu'on  avait  soltt 
tait  se  rendre  eoupable  de  paq 
attirer  sur  la  cite  les  plus  teiru 
pr^sailles.  Youkinna ,  pousse  i 
imposa  silence  k  Jean.  Jeay  com 
le  soMat ,  dans  le  d^lire  du  despom 
tira  son  sabre  du  fourreau  eo  r 


SYRlfe  MODERNE. 


W 


,  Le  moid6  ibsista  toujours ;  et 

Da,  aussi  f^rooe  tyran  qii*il  ^tait 

id^oatur^ ,  abattit  la  t^te  de  Jeaa 

1^  faire  taire.  Le  plus  Idche  de  ces 

nmesen  cette  circonstance  n*6- 

alneineDt  pas  le  moine. 

suite  de  cet  acte  odieux,  uli 

f  trouble  eut  lieu  dans  la  ville.  La 

m  se  pr6cipita  sur  les  citoyeos; 

Ik-ci,  poor  se  d6fendre,  ne  trou- 

\  pas  d'autre  moyen  que  de  sV 

'raux  Arabes.  Klialed,  pr^venu, 

I  d'accourir;  mais,  apr^s  avoir 

quelques  dtres   inoffensifs, 

Da  etajt  rentr^  dans  sa  forte- 

[Kbaled,  avec  sod  impetuosity  or*. 

e,  r^lut  de  Ty  assieger  sans  re- 

""^  lore  comment  une  lutte 

gue  que  cruelle.  Les  deux  hom* 

7  pr^idaient  ^taient  dignes 

ter  a  la  fois  de  courage  et  de 

i:  lutte  inutile,  du  reste.  de  la 

^Toukinna,  puisque  la  ville  ^tait 

':  des  Araoes;  lutte  inflame , 

I  CD  considerant  la  ilh ,  elle  ne 

f  avoir  d^autre  but  que  de  t-ep^U^ 

\,  Toujours  est-ii  que  le  fra- 

Igouvemear  combattit  cinq  mois 

ne  bravoure  qui  ne  se  lassa  Ja- 

[Bans  sotk  aire  inaccessible,  ce 

bumain  sembiait  se  moquer 

[»mde  tout  entiere;  et,  la  nuit 

\ildescendait  de  son  rocber  pour 

bnlever  les  corps  dont  il  nourris- 

nrage. 

on  le  vit  choisir  les  t^nebre^ 
^aisses  pour  fondre  sur  un 
du  camp  musulnian  dont  la 
l^ait et6  negligee.  La,  11  mass2i- 
Isoixantaine  d  Arabes  endormis , 
i  emmeoa  un  pareil  nombre  avec 
flendemain,  par  un  rafGnenient 
rote  execrable,  i  I  attendit  que  Ife 
liiDt  lev^,  que  les  Musulmans, 
[termine  leur  priere,  se  fussent 
\  en  bataille ,  pour  faire  cohduire 
impart  les  prisonniers  qu'il  aVait 
f  Teille  et  les  decapiter  un  par  un 
lie  de  leurs  freres.  Cette  atroce 
atioD  ameha  son  fruit  sanglant. 
que  temos  de  la,  Youkinna  etant 
IjContre  des  Arabes  qui  fourra- 
il  eut  d'abord  Tavantage ,  en 
nt  trente ,  et  fit  couper  les  jarrets 
"^  leurs  cbevaux ;  mais  avant  ete 
i  dans  sa  retraite  par  Knaled ,  il 


perdit  un  grand  nombre  de  ses  soldats, 
et  on  lui  fit  trois  cents  prisonniers. 
Ces  malheureux  pay^rent  pour  leur 
chef.  Khaled,  qui  ne  le  c^dait  h  qui- 
conque  en  cruaut^ ,  leur  fit  a  tous  tran- 
cher  la  tite  aux  yeux  du  gouverneur, 
qui ,  sans  doute ,  n^eii  fut  que  m^dio- 
crement  emu  (*). 

Quo!  qu1l  en  soit,  ce  si^e  d'une  for- 
teresse  inutile  employait  tine  partie  de 
rarm6e  musulmane,  et  Tarr^tait  dans 
ses  conqu^tes.  Abpu-Obaida  songea* 
done  k  laisser  de  cot^  cei  obstacle  in- 
signifiant.  II  en  ^rivit  au  khalife;  mais 
celui-ci  insista  pour  qu'on  s'empardt  de 
cette  citadelle;  et  comme  il  lui  venait 
de  tous  les  cdt^s  de  nouvelles  tribus 
mahometanes  demandant  a  combattre 
oontre  les  Chretiens ,  il  envoya  ces  ren- 
forts  a  Abou-Obaida,  avec  1  injonction 
d'enlever  codte  que  codte  le  chateau 
d^Alep.  On  recommenga  done  le  siege . 
mais  la  force  comme  Tadresse  ^taieni 
touiours  impuissantes  contre  des  niu« 
rallies  h  pic  qu'on  ne  pouvait  franchir, 
eontredes  ennemis  mi^fiants,qui  ne  sor- 
taient  plus  de  leur  place  inexpugnable. 
La  forteresse  ne  pouvait  done  c^der 
qu'li  la  famine,  et  Abou-Obaida  com- 
mencait  a  desesp^rer,  Khaled  h  se  las- 
ser,  lorsqu'un  des  derniers  venus  d'A- 
rabie  se  vanta  de  prendre  le  chateau  si 
on  vouiait  bien  lui  confier  trente  com- 
pagnons.  Cet  audacieux  se  nommait  Da- 
mes ;  il  ^tait  aussi  remarquable  par  sa 
force  physique ,  par  sa  taille  gigantes- 
que  que  par  sa  resolution  et  son  cou- 
rage. L'olf re  de  Dames  fut  acceptee  par 
Ab^u-Obaida ,  et  on  le  laissa  libre  aa- 
gir  comme  il  Tentendrait  (*). 

Dam^  commen^a  par  recommander 
h  son  g^n^ral  de  lever  momentanement 
le  siege ,  de  s'ecarter  au  moins  de  quel- 
ques milles,  et  de  ne  laisser  derriere  lui 
qu*une  troupe  determine  qui  se  cache- 
rait  aux  yeux  des  assi^^.  Puis ,  grdce 
aux  renseignements  que  lui  avait  don- 
nas un  Grec  prisonnier.  Dames  sut  sur 
quel  point  on  pouvait  tenter  une  esca- 
lade, et  il  resoiut,  le  soir  m^me,  de  met- 
tre  son  projet  a  execution.  Voici  comme 
il  s'y  prit :  il  se  rev^tit  d'un  habit  fait  en 
peau  de  chevre,  et ,  h  Taide  de  ses  mains 
et  de  ses  pieds,  il  grimpa  de  roche  en  ro- 

C*)  Voye/  Ocklev. 

(•*)  \oycz  KemalEddio,  Histoirt  cTJUp, 


L'UNIVERS. 


che  jusqu'a  ua  endroit  ou  la  muraille  de 
faforteresse,  appuyee  iiunepenterapide, 
n*avait  qu'une  dizaine  de  pieds  de  nau- 
teur.  n  avail  donne  ordre  a  ses  compa- 
gDons  de  venir  le  rejoindre  h  la  nuit 
tombante,  par  un  detour  qa*il  leur  avait 
indique.  Une  fois  r6uni  k  tous  leg 
siens,  s'^tant  assure  que  la  partie  des 
fortiGcations  aupres  de  laquelie  il  ^tait, 
ne  pr^sentant  aucun  danger  probable , 
n'^ait  pas  bien  gard^,  il  6t  accroupir 
ses  soldats  les  uns  sur  les  autres  et  a^- 
^paule  en  6paiile  ilatteignit  les  creneaux. 
lA ,  apres  avoir  ^gorge  Tunique  senti- 
nelle  au  bastion ,  iljefp  une  corde  a  ses 
soldats,  qui  monterent  Tun  apres  Tau- 
tre. 

Ce  nVtait  encore  rien :  il  fallait  main- 
tenant,  a  force  de  ruse  et  d*adresse, 
s'emparerd'uneporte,  fouvrir,  etfaire 
un  signal  convenu  a  Khaled  et  .a  sa 
troupe.  Ces  difGcult^s  presque  in$ur- 
roontables  n'arr^terent  pas  Daroes.  11 
alia  seul  h  ladecouverte,  rampant  plu- 
tdt  qu'il  ne  niarchait,  et  s'assura  par 
lui-mdme  que.conime  on  lelui  avait  dit, 
les  Grecs,  se  croyant  d^livres  de  leurs 
ennemis,  8*^taient  abandonn6s  a  la  de- 
bauche ,  et  etaient  presque  tous  ivres 
ou  endormis.  Malheureusement  Toa- 
kinna ,  avec  la  plupart  de  ses  officiers , 
fesioyait  encore,  et  Damte  fut  con- 
traint  d'attendre.  Enfin  ,  au  petit  jour, 
il  fallut  se  resoudre  a  brusquer  Tentre- 
prise.  Pam^s,  quoiquUl  e&t  ^t6  enfin 
aper(.u,  s'empara  o^une  porte,  fit  k 
Khaled  le  signal  attendu ,  et  se  retouma 
avec  ses  compagnons  vers  les  Grecs, 
qui  se  pr^.cipitaient  en  masse  contre  la 
poign^  de  Musulmans.  Ces  dernters 
combattirent  ainsi  avec  tant  de  bra- 
voure  et  de  perseverance  qu'enfin  Kha- 
led arriva ,  affiua  avec  tout  son  monde 
par  la  porte  toujours  ouverte,  et,  nial- 
gre  les  efforts  de  Youkinna ,  put  vain- 
cre  facilement  les  Grecs,  terrifies  par 
Faudace  des  Arabes  et  affaiblis  par  une 
nuit  d'orgie.  Youkinna,  se  voyant  vain- 
cu ,  demanda  lui-m^me  a  se  faire  ma- 
hom^tan ,  apostasiant  sans  scrupule 
comme  il  avait  assassin^  sans  remords(*). 

I*)  \oyn  EIroadn ,  qal  rapporle  lea  mdims 
d^ails. 


PJklSB  o'lHTlOCHS. 


Les  Musulmans  o'eorent  oas  fa 
de  demander  k  Youkinna  des  pi 
d*attachement  a  sa  noovdle  i 
bien  sdr  que  ses  crimes  ravaieDtfi 
tester  de  ses  compatriotes,  11  laiii| 
lui-meme  une  bame  lmpiacaUe,r 
tudia  a  les  tromper  comme  Ij 
efforc6  de  les  dominer.  Ce  fair 
exemple,  qui  conseilia  toatf 
Abou-Obaida,  avant  de  mar 
Antioche,  ainsi  qu'il  en  avait  II 
tion ,  de  s*emparer  d'une  fottof 
pelee  Azaz,  dont  les  troupes  a 

1»u  sans  cesse  hareeler  rarmeea 
am.  AboU'Obalda  se  rangei  il 
du  ren^gat,  aui,  d*aiIIeur8,eMi 
parfaitement  le  pays,  quMl  af»t| 
a€.  Azaz  ^tant  une  place  9 
que  bien  munie,  Youkinna  p 
s*en  emparer  par  ruse.  H  dei 
bommes,  qui,  d^guises  en  G 
vraient  dans  son  expedition,  e 
avec  lui  dans  le  chdteau, et,a 
gn^s  k  distance  de  mille  cifi 
chargeraient  de  leur  manager  a 
Mal^e  ropposition  de  "' 
voyait  a  la  fois  dans  rancieog 
d*Alcp  un  rival  inquietanteta 
man  douteux,  AbouObalda  a 
Youkinna  ce  qu'il  demandalL  I 
apostat  obscur  trahit  le  plan  def 
celebre.  Theodore ,  gouvemeurl 
une  fois  prevenu  des  inteotioast 
kinna,  alia  au-devant  de  et^ 
comme  pour  le  recevoir  awe  I 
mais  en  realite  pour  envelofi 
des  troupes  nombreuses  lui  cti 
Tentratner  dans  la  place  etlef 
sonnier  (*).  . 

Malheureusement  les  GretfJ 
pas  k  se  feliciter  longtemp 
joue  le  complot  qui  les  m^ 
dore  avait  demaiide  des  see 
cas ,  gouverneur  de  Ravendoi^ 
ville  situee  k  huit  ou  dix  lieo^ j 
Ge1ui-ci  lui  envoya  cinq  cents* 
qui  eurent  la  deplorable  chaj«J 
ber  precisement  sur  les  milled 
araMs  qui  s*appretaient  a  en^^ 
Ayant  tue  presque  tous  s^  w*^ 
ou  les  ayant  fdits  prisonnfmi 
de  la  troupe  musulmaiie,  qui ' 

(*)  Voyex  WaWdy,  Conqu^te  dt  l»  ^ 


SYRIR  MODEftNE. 


«t 


pb  Tinsucces  de  Toukinna,  fit  rev^tir 
Neg  soldats  les  d^poailles  de  ceax 
ib  venaient  de  vaincre,  et  chargea 
pion  qui  6tait  all6  ehereher  des  se- 
ns a  navendon  de  faire  entrer  cinq 
Its  Arabes  dans  la  place  d*  Azaz,  en  les 
iamt  passer  pour  les  renforts  qu'on 
tedait.  Outre  la  rase,  le  crime  vint 
Mre  en  aide  aax  Musulmans. 
k^odore  avait  deux    fils,  Luc  et 
n,  digues  tous  deux  d'appartenir  a 
Hniile  deToukinna.  Ces  deux  ieunes 
\  atmaientdepuifflongtemps  la  fille 
^acieo  gouverneur  d'Alep;   mais 
{•d  la  leur  avait  toujours  refuse. 
Ibis  prisonnier,  il  fit  pr^venir  Leou, 
I  promit  sa  fille  8*il  le  d^livrait,  s'il 
"^isait  Musulman ,  et  s'il  livrait  la 
>  Ce  L6on,  aussi  infime  que  per- 
aocepta  eette  offre ,  et,  afin  d'en 
irTex^eution,  il  eut  I'atrocit^  de 
IT  ao  poigoard.  Futur  parricide, 
Idiemiiia  la  nuit  vers  la  couche 
lb  pen ;  mais  il  le  trouva  mort  et 
at  de  sang  :  son  frere  Luc  Favait 
tfe,  avait  assassine  Theodore  et 
i  Tookinna.  Quand  les  cinq  cents 
tt  d^ffuis^  se^  pr^senterent  aux 
s  de  la  place, Mis  n*eurentdone 
esoia  de  stratageme  pour  y  entrer, 
inrriverent  que  pour  hdter  le  nias- 
^  de  la  gamison.  Quelques  histo- 
pr^teodent  que  Luc  et  L^n  se 
Ifaiiom^ns,  et  obtinrent  des 
■mdemeiits  dans  Tarm^  arabe  : 
ASttrtion  manque  de  vraisemblance 
Wm  par  de  telles  recrues  qu'on 
lM>reetqu*on  compromet  ^jamais 
ittose;  et  il  nous  paratt  extraor- 
reqoe  le  loyal  et  doux  Abou-Obaida 
I  commettre  une  faute  aussi  grave , 
He  aussi  bonteux. 

Arabes  n^avaient  plus  qu'une 

B^e  a  feire  |>our  posseder  toute  la 

eelle  d'Antiocbe,  Fopulente  capi- 

'  Antiodie  qui  rfeumait  toute  Tac- 

tOQtes  les  richesses ,  mais  aussi 

la  pasillanimlte,  tous  les  vices  de 

'..  Aoiiocbe  une  fois  prise^  le 

perdait  son  centre;  etles  villes 

[tticore  soumises,  coupto,  tour- 

etreiotes,  n'avaient  plus  qu'a  pas- 

le  joug  de  leur  nouvean  mat- 

^Aussi ,  lorsqae  Antioche  fut  serieu- 

leot  nsenae^,  il  yeut  de  la  part  des 

tts,  de  ceux  qui  perdaient  le  plus  au 

6^*  UvraUon.  (sybis  modbbnk. 


changement  de  domination ,  de  la  part 
des  hommes  d*argent  et  de  n^oce ,  un 
dernier  mouvement  belliqueux ,  comme 
une  r6volte  d*avares  qui  voudraient  sau- 
ver  leurs  tresors.  De  toutes  parts,  de- 
puisC6sareejusqu'a  Laodic^,  desgrou- 
pes  se  form^rent,  ne  demandant-  qu'un 
chef  pour  marcher  en  avant.  Les  riches 
fournissaient  leur  or;  les  pauvres  four- 
nissaient  leurs  bras.  Chacun  sentait 
non-seulement  sa  vie  compromise,  mais 
encore  ses  moeurs,  ses  habitudes,  et 
pour  quelques-uns  leur  fortune,  chose 
plus  precieuse  que  la  vie  chez  certains 
peuples  en  decadence.  Ge  n'^tait  pas  le 
soulevemeat  glorieux  d'une  nationalite 
qui  revendique  ses  droits,  c'^tait  la  coa- 
lition, non  moins  redoutable  parfois, 
d'une  banque  qui  defend  sa  caisse.  A 
cette  manifestation  evidente ,  h  cet  ef- 
fort supreme,  H^raclius  fut  forc^  d'ac- 
corder  une  attention  s^rieuse.  II  cher- 
cha  longtemps  un  chef  dont  le  talent 
pdt  apporter  quelques  chances  de  vic- 
toire  aux  populations  syriennes.  Faute 
d'homme  capable,  de  ^en^ral  habile, 
pour  prouver  a  tous  qu*il  reconnaissait 
Vimportance  du  mouvement  qui  s'o- 
p^rait,  il  envoya  son  fils  Constantin  se 
mettre  h  la  t^te  de  cette  reaction  du  d^ 
sespoir. 

Avant  de  partir,  le  jeune  prince  equipa 
uneflotte  puissante,  donna  rendez-vous, 
h  S^leucie,  aux  soldats  qu'il  avait  appe- 
16s  d*£^ypte,  etse  pr^para  de  toutes 
les  manieres  h  produire  un  grand  ef- 
fet  en  arrivant  a  Antioche.  Ce  qu*il  avait 
pr^vu  se  realisa.  A  son  d^barquement 
a  Seleucie ,  k  Tarriv^e  de  ses  nombreux 
vaisseaux,  a  sa  marche  vers  Antioche 
avec  une  garde  toute  brillante  d'or,  avec 
des  bataillons  converts  de  fer,  avec  ses 
innombrables  instruments  militaires, 
ses  trompettes  et  ses  6tendards,  avec  les 
legions  romaines,  qui  avaient  encore 
Taspect,  sinon  la  vafeur,  des  legions  de 
Pomp^e,  la  Sjrrie  se  crut  sauv^e.  La  pr6- 
somption  revint  aux  Grecs ,  et  avec  elle 
la  folie.  Des  troupes  levies  au  hasard, 
sans  discipline  et  sans  commandement, 
qui  formaient  des  masses  plutdt  que  des 
arm^,  se  ruerent  contre  les  Musul- 
mans. Quelques  petites  villes,  entre  au- 
tres  Kinesrin  et  Gna!k,massacr^rent  leur 

Samison  mahom6tane;  et  les  Arabes 
e  la  trlbu  de  T^noukh,  toujours  pr^ts 

)  .    ^ 


82 


L^DNIVERS* 


a  se  tourner  vers  le  parti  du  plas  fort, 
se  d^clar^rent  pour  les  Grecs.  Ces  par- 
tisans de  toute  espece  remonterent  le 
cours  de  TOronte,  et  vinreot  provo- 

auer  Abou-Obaidajusqtt*2^  £in^,  doDt 
avaitfaitle  centre  desesop^ations(*). 
D*un  autre  cdt^,  Khaled,qui  s^^tait  em- 
pare  de  la  petite  ville  de  Bir,  situ^ 
sur  rCuphrate ,  se  vit  tout  a  coup  ea- 
toure  par  treiite  mille  hommes  accou- 
rus  de  la  Mesopotamie.  Cechef  si  bardi 
n'eut,  en  cette  circonstaoce,  que  ie 
temps  de  se  replier  au  plus  vite  et  d'aller 
rejoindre  Abou-Obaida  a  fUn^e.  Une 
fois  reuni  a  son  cbef ,  Kbaled  retrouva 
toute  SOD  audaoe,  et  fiit  d*avis  de  mar- 
cher a  la  rencontre  des  Grecs  et  de 
leur  livrerbataiiJe.  Mais  Abou-Obaida, 
plus  prudent,  ne  songea  avec  raison 
qu'a  se  retrancber  fortement  jusqu'li 
rarrivee  des  secours  qu*il  avait  deman- 
ds en  Arabic.  Pour  la  seconde  fois, 
les  Musulmans,  comme  avant  les  jour- 
nees  d'Yarmouk,  se  trouv^rent  dans 
une  position  critique ,  et  dont  un  en- 
nemi  sense  aurait  su  profiter.  Mais  les 
Grecs,  au  lieu  d*essayer  un  grand 
coup ,  ne  Grent  que  de  vaines  demons- 
trations. Aucune  de  leurs  escarmou- 
clies  ne  put  devenir  importante;  ils 

{)erdirent  un  temps  precieux ,  et  ils 
aisserent  arriver  de  Medine  les  ordres 
du  khalife  aul  devaient  tirer  d*embar- 
ras  ses  coretigionnaires. 

Omar  avait  alors  deux  armies  d'opd- 
ration,  celle  d'Abou-Obaida,  en  Syrie, 
centre  les  Romains ,  et  celle  de  Saad , 
filsd'Abou- Wakkas,  dans  Tlrak,  contre 
les  Perses.  £n  apprenant  le  danger  de 
son  armee  de  Syne,  le  khalife  ordonna 
a  Saad  de  revenir  brusquement  sur  ses 
pas ,  d'essayer  une  diversion  contre  la 
Mesopotamie ,  et  de  detacher  quarante 
milie  hommes  pour  les  envoyer  a  Abou- 
Obaida.  La  lenteur  des  Grecs  k  atta- 

?uer  les  Musulmans  en  bataille  rang6e, 
indecision  de  Constantin,  qui  etait 
reste  a  Antiocbe ,  loin  de  se  diriger  sur 
Emese,  servirent  au  succes  du  plan  du 
khalife.  Quarante  mille  hommes  sous 
les  ordres  de  Kaakaa,  Ills  d'Amrou,  ar- 
riverent  au  lieu  ou  Abou-Obaida  avait 
amasse  ses  troupes.  Des  lors  tout  chan- 
gea  de  face.  Les  Grecs,  eflfray6s,  recu- 
lerent  de  toutes  parts;  Cliaik  et  Kines- 
es) Voyex  Ockley  et 


ria  rouvrirent  leurs  pcfftes  am  Ma 
mans,  et  toute  la  Syrie  sei^tiir 
retomba  en  leur  pouvoir.  Ceiii-ci,e 
rag6s  par  la  desertion  romaiue,  ^« 
oerent  alors  rers  Antiocbe  avee  c " 
solution  qui  leur  avait  toajonrs  i 
et  qui  allait  decider  encore  iu»i 
pour  la  dernieret  du  sort  de  laSjfi 

Tandis  que  Tarmee  mosalmai! 
eo  marche ,  Youkinna ,  doat  Tl 
oebreuse  ne  savait  forger  que  [ 
sur  perfidie ,  songea  a  s^emAMtri 
tiocne ,  au  moyen  de  la  pios  ill 
des  ruses.  II  demaoda  deux  obbH  ' 
gats  pour  tenter  son  intoate  \ 
ture.  Comme  toujours,  les  /  ' 
serupuleuz,  lui  aeoorderenttt^ 
II  partit  done  aveo  la  lie  des  i 
mais,  en  mdme  temps,  aveo  des  h 
adroits  et  audaeieux ,  eooune  i 
que  tous  les  fripons.  A  Ts . . 
ville «  il  distribua  ainsi  lesi 
ses  complices  :  quatre  des  [ 
devaient  raooompagner ;  et  le  4 
la  bande  avait  ordre  de  leT ' 
Antiocbe,  par  la  ^rande  roote,^ 
sant  semblant  d^tre  pow'^ 
lance  dans  les  reins,  par  les  i 
gui  avait  ^te  decide ,  (iit  fat  1 
tuyards  furent  admis  dans  la  \ 
d'autant  plus  de  facilite,  q 
aGcoutumetChezlesGrec8,aS  . 
deroutes.  Quant  k  Youkiaaitl 
donna  aux  avant-postes  i 
I'aucien  gouvcaroeur  d'Alep. 
tout  le  monde  ne  <xwiaa»sait| 
trahison,  on  le  recut  av«e< 
ment,  et  on  le  meoa',  ainsiqs^ 
mandait,  aupresdeCons 

A  son  aspect,  le  prince, 
n'ignorait  point  la  oooiiduited'I 
au  lieu  de  lui  faire  de  san  ' 
ehes,  s*attendrit  et  laissa  i 
mes.  Loin  de  faire  bonte  «•  i 
ne  pensait  qu'a  pleurer  ie 
Alors ,  Youkinna,  prenant  soi  I 
plus  llatteur  etsa  voix  la  plus« ' 
s'excusa  de  toutes  les  famous,  et  4 
mula  les  protestations  de  devr 
11  pr^tendit  que  c'^ait  pour  m 
per  les  Aralies  qu'il  avait  klvti  ^| 
dre  leur  religioD;  ju'il  s's^' 
leurs  de  sauver  sa  vie,  qui  pouvailfl 
6tre  utile  It  rEmpire.  II  ^jouar 

{*)  Tejres  KMMa*Eddla. 


STaiE  MODERNE. 


8$ 


«  Qa*ayanttrouv^  Poccasion  d*Miapper 
«  d'Azaz ,  il  Tavait  saisie  avec  joie ,  pour 
«  rentrer  dans  le  seiD  de  la  vraie  rdigion; 
«  enOn ,  que  la  vigoureuse  defense  d'A- 
«  lep  prouvait  assez  sa  fidelite.  »  II  fit 
tant,  qu'il  parvint  a  tromper  compl^te- 
oient  le  candide  jeune  homme.  Ge  der- 
nier, en  effet,  lui  rendit  toutes  ses  bon- 
nes grdces,  et  alia  mdme  jusqu'^  lui 
donner  le  commandement  des  deux  oents 
ren^gats  qu'on  avait  incorpor^  k  la 
garnison. 

Une  fois  dans  la  place,  tout  servit  d 
Toukinna.  Un  jour,  des  Arabes  Chre- 
tiens ,  qui  couraient  la  campagne ,  tom- 
b^rent  en  grand  nombre  sur  un  gros 
de  Musulmans,  en  tuerent  quelques-uns 
et  firent  les  autres  prisonniers.  G'^taient 
des  recrues  pour  Toukinna,  au  moment 
oh  11  faudrait  agir  centre  les  Grecs. 
Ainsi,  tout  tournait  a  la  fois  centre  les 
Syriens.  Llmp^ritiedes  populations,  qui 
avaient  su  se  soulever,  mais  qui  ne  sa- 
vaient  pas  eombattre,  Fincapacit^  des 
diefs  fideles  k  I'Empire,  la  trabison  des 
chefs  habiles,  et  surtout,  rinexp^rience 
de  Gonstantin  et  la  Idcbe  insouciance 
d'Heraclius  faisaient  pr^sager  d'avance 
la  perte  prochaine  d'uue  des  plus  belles 
provinces  que  les  Romains  eussent  ja- 
mais eonquises.  On  pouvait  bien  reculer 
)a  catastrophe;  roais  il  ^tait  d^ja impos- 
sible de  Templcher. 

Adater  du  commencement  de  Tannfe 
638,  les  derni^res  d^faites  des  Roroains 
en  Syrie  se  succWferent  avec  une  ef- 
frayante  rapidity.  Y^zid ,  qui ,  comme 
nous  I'avons  dit  ,commandait  h  la  Syrie 
m^ridionale ,  et  qui  avait  renonc^  k 
prendre  Gfear^e  de  vive  force ,  venait 
de  faire  sa  jonction  avec  AI)ou-Obaida. 
Les  deux  armto  r^unies  s'einpar^rent 
facitement  d'un  pont  sur  TOronte,  dtS- 
fendu  par  deux  tours  qui  renfermaient 
trois  cents  hommes.  Quelqueshtstoriens 

{>retendent  que  ces  tours  furent  m^me 
ivrees  sans  combat.  La  garnison  aurait 
et^  s^verement  r^primand^  quelques 
Jours  auparavant  pour  la  n^gli^ence  de 
sa  garde,  et,  indign^  centre  les  prece- 
de de  Gonstantin,  elle  se  serait  rendue 
aux  Musulmans  a  leur  apparition.  Qu'elle 
fihle  fait  de  la  trahison  ou  de  la  Idchet^ , 
cette  reddition  irrita  tellement  le  jeune 
prince  qu*il  voulut  se  venger  sur  ses  pri- 
sonniers ,  et  ordonna  qu*on  les  mft  k 


mort.  Mais  Toukinna  fit  de  si  vives 
instances  aupres  de  Gonstantin  qu'il 
parvint  k  lui  faire  r^voquer  son  ordre 
oarbare,  et  garder  les  Arabes  pour 
op^rer  des  Ganges.  Ge  n'etait  pas,  du 
reste,  Thumanit^ ,  c'^tait  le  ealcul  seul 

aui  faisaitagirainsi  Tancien  gooverneur 
'AJep  :  nous  avons  vu  plus  haut  quel 
cas  il  faisait  dela  vie  des  homines  Chre- 
tiens ou  musoimans. 

La  derni^re  barri^re  qui  s^parait  les 
Arabes  d'Antiocbe,  I'Oronte  etait  fran- 
chi.  Gonstantin  perdit  la  t^te.  Au  lieu 
de  lutter  avec  noblesse  et  courage,  il 
ne  recula  pas  devant  le  crime  pour  conv 
battre  ses  adversaires.  Tandis  que  son 
arm^e,  cample  devant  Antioche,  avait 
ordre  de  gainer  du  temps  en  ne  livrant 

3ue  de  petites  escarmouches ,  il  sou- 
oya  un  Arabe  ren^gat  qui  devait  aller 
il  Medine  assassiner  Omar.  Gecriminel 
appartenait  k  I'ancienne  tribu  de  Ghas- 
san ,  et  se  nomraait  Watek^,  fils  de  Mai- 
safer.  S'il  edt  r^ussi,  Gonstantin  esp^- 
rait  que  r^motion  des  Musulmans, 
que  la  perte  de  leur  khalife,  uue  leur 
inquietude  sur  le  sort  de  rAraoie,  leur 
feraient  lever  le  si^e.  II  s'agissait  done 
pour  lui  d'eviter  une  affaire  decisive, 
et,  faute  de  Pep^e,  de  se  sauver  par  le 
poignard.  Ge  honteux  projet  ne  reussit 
point.  A  Taspect  du  kaliie,  1* Arabe  se 


prosterna  au  lieu  de  frapper  (*). 

Quelques  auteurs  arabes ,  qui  accep- 
tent  votontiers  le  fabuleux,  quand  il  est 
poetiuue,  racontent  ainsi  cette  scene  : 
WateK  aurait  appris  k  Medine  que  cha- 
que  jour,  apr^ssa  priere  du  matin,  Omar 
allait  se  promener  seul  dans  la  campa- 
gne ,  en  un  lieu  ecart6.  Watek  serait 
aiors  alie  I'attendre ,  et,  pour  dissimuler 
sa  presence ,  se  serait  cache  entre  les 
branches  d'un  arbre  touffu.  D'apres  la 
chronique  arabe,  apr^s  quelques  tours 
de  promenade,  le  khalife  vint  s*eten- 
dre  precisement  sous  Tarbre  d'oii  le 
guettait  son  assassin ,  et  s*y  endormit. 
Watek  avait  Toccasion  belle,  et  il  s*ap- 
pretait  dejl  k  descendre,  lorsque  debou- 
cha  tout  a  coup  d*un  sentier  voisin  un 
lion  colossal.  Watek,  effraye,  grimpe 
plus  haut  quejamais.  Le  lion  s*approche 
du  khalife,  le  daire,lui  l^che  lespieds,  et 
tourne  gravement  autour  de  lui  comme 

(*)  Voya  TMophane  et  Gedmoi. 


S4 


L'UNIVERS. 


goar  le  d^fendre  de  ioute  attaque.  En- 
n ,  le  khalife  se  reveille,  le  lion  dispa- 
ralt ,  ft  Watek ,  persuade  ()ue  Mahomet 
lui-m^me  prot^eait  les  jours  de  son 
saccesseur,  va  se  ieter  aux  pieds  d'O- 
roar,  lai  d6nonce  Todieux  forfait  qu*on 
I'avait  oharg^  d*ex^cuter ,  iui  demande 
grdce,  et  I'obtient.  Quels  que  soient  du 
reste  les  details  de  la  scene  qui  se  passa 
entre  Omar  et  Watek,  toujours  est-il 
que  le  khalife  se  montra  aussi  g6ne- 
reux  que  le  fils  de  Tempereur  grec  8'6- 
tait  montr^  perflde. 

Est-ce  la  bonte  de  son  crime  ou  Fef- 
froi  de  la  guerre  qui  poussa  Constantin 
k  prendre  led^honorant  parti  d'abandon- 
ner  Anttoche?  Craignait-il  que  les  pri- 
sonniers  arabes  ne  lul  reprochassent  sa 
Idche  et  ignoble  politique?  Redoutait- 
il  autant  le  bUme  taeite  de  ses  soldats 
que  le  m6pris  de  ses  ennemis  ?  Quoi  qu'il 
en  soit,  sans  pr^venir  les  autorites  de 
la  ville  et  de  Tarm^e ,  il  s'enfuit ,  une 
nuit,  presque  seul,  suivi  a  peine  de  qu^ 
ques  esclaves,  et  alia  s'embarquer  sur  un 
vaisseau,  dans  Fintention  sans  doute  de 
8'6chapperjusqu'a  Constantinople.  Mais, 
une  fois  en  mer,  le  remords,  ou  plutdt  la 
crainte  d'etre  traits  dans  la  capitate 
de  l*Empire  comme  il  Tavait  ete  dans 
la  capitale  de  la  Syrie  ,  6t  que  tout  a 
coup  il  rebroussa  chemin  ,  rentra  dans 
le  port  de  S^leucie,  et  ordonna  ^  sa  flotte 
de  le  suivrc  ^  Cesar6e. 

Ge  depart  de  toutes  les  gaTeres  romai- 
nes,  cette  fuite  clandestine  du  prince  qui 
devait  les  proteger,  acheverent  de  jeter 
le  decouragement  dans  Tesprit  des  ha- 
bitants d^Antioche.  Pourtant  il  se  trou- 
Ta  parmi  eux  quelques  hommes  energi- 
ques  qui  arr^t^rent  la  migration  des 
timor<^s ,  et  conseill^rent  a  leurs  con- 
citoyens  d'employer  Tarm^e  qui  cam- 
pait  devant  les  portes,  de  s'y  joindre  en 
grand  nombre  et  de  tenter  les  chances 
d'une  grande  bataille.  Malheureusement 
des  trattres  se  mSlerent  encore  une  fois 
aux  hommes  de  coeur  en  cette  circons- 
tance  solennelle.  Parmi  ceux  qui  pous- 
saient  le  plus  \k  la  defense  on  remar- 
quait  Youkinna,  ^ui »  grdce  ^  la  faveur 
que  Constantin  lui  avait  rendue ,  passait 
alors  parmi  les  Grecs  pour  sinc^rement 
converti  a  la  religion  chretienne  et  ^  la 
politique  imp^riale.  Youkinna,  qui  avait 
son  projet,  que  nous  le  verrons  incessam- 


ment  6x6cater,  fit  done  peneherlak^ 
lance  pour  la  bataille,  poussa  tooski 
hommes  valides^sedirigerTerftleaif 
des  Grecs;  et,  afin  de  mieax detouic 
les  soupfons,  8*enga^ea  a  rester  daai' 
ville  et  k  la  difendrejusgu'irert-^-^ 
si  la  fortune^tait  contraireaaxR( 

Gependant ,  Farmde  chretienne 
demeur^  plusieurs  semaines  en  fiv 
Tarm^e  musnlmane,  6vitanttoute 
contre  d<^cisive  et  employant  le 
en  provocations  et  en  tuttes 
res.  Entre  ceux  qui  se  distil 

filus  dans  ces  combats  singali'eis,  . 
ait  an  premier  rang  le  gdnMi 
troupes  grecques ,  que  les  hist 
arabes  appellent  Nestorius.   V\ 
et  r^nergie  de  oe  clief  lui  teoaieotl 
de  talent  militaire ,  et  il  ^tait  vei 
ment  excellent  pour  executer 
qu'on  avait  arr£t^.  Connaissafitl&l 
voure  person  nelle  des  Arabes,  eoi 
avec  raison  sur  leur  orgueil ,  disi. 
bataillons  musulmans  se  mettaiMl] 
mouvement,  au  lever  du  soletl,  i^ 
tait  des  lignes  de  son  arm^,  ' 
sant  sa  lance ,  Jan^ant  son  c 
galop  et  appelant  au  combat  les 
braves  d'entre  ses  ennemis.  C^it 
parmi  les  Arabes  h  qui  jouterait 
cet  audacienx  adversaire,  et  N< 
profitan^  de  cette  ardeur,  pre 
la  lutte  avec  habilet^  occupait 
armees  comme  k  un  spectacle , . 
du  ^emps  et  savait  toujours  se 
vainqueur. 

Nestorius  avait,  du  reste, 
ment  calculi  ses  chances  : 
qu*Abou-Obaida  etait  plutot  on 
nistrateur   qu'un  guerrier;  il 
aus«i  queKnaled,  fatigu^  d^ 
ann^es  de  campagnes  oons^il* 
voulait  plus  risquer  dans  un 
sans  Importance  une  vie  si  utile 
compatriotes  dans  les  batailles  r 
ou  dans  les  si^^es  difficiles;  il  sa^ 
outre  qu'on  laissait  g^neralemeat 
ieunes  gens  ces  occasions  de  d^j ' 
leur  vaillance  et  d'acquerir  une 
tration  si  recherchee  parmi  les  ' 

(*)  Nous  appeloDS  Indtetlnctemeot  la 
du  Bas-Binpire,  les  Gm»,  let  HomM^  ^_ 
^taieot  ea  enet  Gncs  par  le  fait  de  rorM 
RomaiDS  par  le  fait  de  la  eonqaMf.  l»  ' 
hes  les  nommaieot  et  les  Domment  esc^ 
Boumi  (RomaiDS);  de  la  fiottnit/i , fAat 
neure  ( le  pays  des  Romalos). 


SYRIE  MODERNE. 


85 


n  n'y  avait  done  pas  dejour  que  Nes- 
torius  ne  trouvdt  de  nouveaux  adver- 
saires,  et  jusqu'alors  il  les  avait  tous  fails 
prisonniers ,  apr^  une  iutte  plus  ou 
moins  longue.  Enfin,  Dam^,  cet  escla- 
ve  qui ,  grdee  au  courage  qu'il  avait 
d^plove  a  la  prise  du  chateau  d'Alep, 
^taitdevenu  capitaine^  Dames,  cegeant 
aussi  brave  que  vigoureux ,  reclama  de 
son  general  lliooneur  d'aller  eombattre 
riestorius.  L'assaut  fut  terrible;  les 
coups  que  se  portaient  ces  deux  adver- 
saires,  si  dignes  Tun  de  I'autre,  lais- 
sajent  entre eux  deux  la  victoire ind^cise; 
etdejailss'^taieut  reprisa  plusieursfois 
sans  pouvoir  se  vaincre,  lorsaue  le  che- 
Yal  de  Oam^s  s^^tant  abattu,  le  g^n^ral 
grec  profita  de  cet  accident  avec  tant 
de  prestesse  qu'il  desarma  le  g6ant  mu- 
sulman,  et  eut  la  gloire  de  remmener 
prisonnier  dans  son  camp. 

Le  lendemaiu ,  les  Araoes,  humili^s , 
envo^erent  contre  Nestorius  un  de  leurs 
plus  intr^pides  et  de  leurs  plus  babiies 
cavaliers.  Nouvelle  Iutte  pleine  de  pe- 
ripeties.  Mais,  cette  fois,  les  diff<6rents 
chocs  des  deux  adversaires  furent  a  la 
fois  si  admits  et  si  ^ner^ques,  leurs 
coups  port^  avec  une  si  egale  sup^ 
riorite ,  que  la  victoire  ne  se  d^clara  ni 
pour  Tun  ni  pour  Tautre,  et  que  les 
deux  cbampions,  tout  converts  de  pous- 
sidre,  de  sueur  et  de  sang,  bors  d*ha- 
leine  tous  les  deux,  tous  les  deux  ^pui- 
ste,  convinrent  reciproquement,  apres 
plusieurs  beures  de  combat,  de  se  retirer 
chacun  de  son  c6t^.  Or,  cette  ioute  si 
prolong^e  avait  tellement  excite  fa  curio- 
site  de  Tarm^e  grecque,  que  tous  les 
soldats  tour  k  tour  voulurent  en  suivre 
les  chances  diverses.  11  y  eut  done,  parmi 
les  Remains,  une  sorte  de  tumulte  du- 
rant  lequel  on  renversa  la  tente  de 
r^estorius,  oit  Dames,  les  mains  liees, 
etait  gard6  a  vue  par  trois  esdaves  du 

general.  Ces  trois  hommes,  incapables 
e  relever  h  eux  seuls  la  tente  de  leur 
mattre,  propos^rent  k  Damds,  dont  ils 
connaissaient  la  force  musculaire,  de  les 
aider  dans  leur  travail.  Cette  impru- 
dence leur  codta  cher  :  k  peine  Dames 
eui-il  les  mains  d^li^  qu'au  lieu  d*em- 
ployer  sa  force  prodigieuse  a  venir 
en  aide  aux  trois  esclaves,  il  la  tourna 
eontre  eux,  lesterrassaTunapresrautre, 
6*empara  d'un  des  habits  de  Nestorius, 


monta  Fun  des  dbevaux  du  g^eral  des 
Romains,  et,  grftce  a  son  d^uisement, 
parvint  k  s^entuir,  a  travers  les  Grecs, 
jusqu'au  camp  des  Arabes,  ou  son  retour 
inattendu  futsaluede  mille  acclamations 
de  joie  (*). 

Telles  ^taient  les  vaines  et  inutiles 
luttes  dont  les  Grecs  se  montraient 
seulement  capables :  luttes  funestes,  oar 
elles  habitnaient  la  plus  grande  partie 
de  Tarmee  romaine  a  ne  rien  fairs 
qu'assister,  les  bras  crois^ ,  k  des  sortes 
oe  tournois;  tandis  que  les  Arabes, 

Elus  actifs,  et  accoutumes  k  ces  com- 
ats  d'homme  a  homme ,  accroissaient 
de  jour  en  jour  leur  buUn  par  des 
courses  arm^s  autour  d'Antiocbe, 
entretenaient  ainsl  leur  ardeur,  et  se 
cr^aient  des  partisans  par  la  force  des 
armes,  ou  par  Tapp&t  des  promesses.- 
Aussi,  quand  le  moment  de  eombattre 
en  masse  fut  arrive ,  quand  tout  retard 
devint  d^rmais  impossible,  et  qu'il 
fallut  jouer  la  destinee  de  tous  dans  un 
seul  jour  et  en  uneseule  bataille,  Farmee 
romaine  se  trouva  diminuee  et  ap- 
pauvrie  de  toutes  les  facons.  La  deser- 
tion s*^tait  mise  parmi  les  soldats ;  la 
trahisongagnait  les  officiers.  Youkinna, 
pour  qui  tous  les  moyens  etaient  bons , 
avait,a  force  d*insistance,d'adresse,  d*or 
pour  quelques-uns,  entrain^  un  grand 
nombre  desprits  douteux,  de  cceurs 
chancelants,  de  consciences  larges,  et 
avait  m^me  laiss^  a  tous  ces  renegats 
futurs  la  double  chance  de  demeurer 
au  service  de  Fempereur,  si  la  fortune 
^tait  favorable  k  ses  armes,  ou  de  se 
fairemahometans,  siceux-ciobtenaient 
Favantage. 

Ce  fut  done  un  spectacle  r^ellement 
deplorable  que  celui  de  Farmee  ro- 
maine se  rangeant  en  bataille  pour  la 
derniere  fois  sur  le  sol  de  la  Syrie.  Des 
l^ions  a  Feffectif  consid^rablement 
diminu^,  des  chefs  a  I'esprit  inquiet, 
les  plus  braves  soldats  k  Fair  d^courac^, 
durent  produire  un  bien  triste  eftet 
sur  leur  general  qui  les  passait  en  re- 
vue. Pourtant  le  premier  choc  fut  rem- 
pli  de  vigueur  et  de  puissance,  et  les 
Arabes,  comme  k  Fordinaire,  se  re- 
plierent  d*abord  devant  ces  tron^ons, 
redoutables  encore,  de  Farmde  romaine. 

(*)  Voyez  Ocley. 


S6 


LTJNIVERS. 


Mais  bient^t  eesderniers  reprirent  cou- 
rage, tandk  qu'au  contraire  les  Grecs 
commen^aieat  k  se  fatigoer.  Nestoriot 
eut  beau  d^ployer  toute  sa  vaiilaooe 
penBonnelte,  il  eut  beau  encourager  les 
UDS  par  son  exeraple,  les  autres  parses 
paroles,  ses troupes  fl^hirent  peu  a  peu, 
et  se  d^andereot  sur  les  deux  ailes. 

Au  moment  critique  de  la  batatlle , 
Youkiiina ,  qui  avait  M  instruit  de  la 
position  des  Grees,  m(t  en  oeuvre  toute 
son  astuce  et  toute  saperfidie :  sous  pr6- 
texte  d'aller  porter  seeours  h  rarm^ 
compromise,  il  sortit  de  lavilSeavee 
ses  renegats  et  les  prisooniers  arabes 
qu*ii  avait  secr^tement  delivr^.  Ces 
guelques  centaiiies  de  cheyaux  vinrent 
rondre  par  derri^re  sar  Tarm^  d^ 
faillante,  et  ki  placerent  entre  deux 
attaques.  Nestorius  se  sentit  alors  com* 

f>l^tement  perdu,  et  eut  encore  la  dou- 
eur  de  voir  une  grandepartlede  ses  o^ 
liciers  passer  du  c6U  de  I'ennemi ,  et  se 
j/r^ipiter  avec  furie  sur  lui  et  ses  sol- 
dats.  hes  Chretiens  fiddles  furent,  mal- 
^rjre  leur  d^ense  vigoureuse,  enfonces  de 
loutes  parts ,  et  bient6t  la  boucherie  la 
pfus  sanglante  succ^a  au  combat.  Les 
aniialistes  du  temps  ne  disent  point  quel 
fut;  Jeeort  de  Nestorius;  ils  nous  appren* 
nent  seulement  que  la  plaine  o^  se 
donna  cette  foneste  bataiile  resta  long- 
temps  toute  couverte  de  cadavres,  et 
plus  tard  toute  blanche  d^ossements  {*). 
A  la  nouvelle  de  cette  terrible  defaite, 
Antioche  se  d^sola,  g6mit ,  aecusa  Tern* 
pereur,  maudit  son  nis,  mais  ne  songea 
pas  d  se  defend  re.  £lle  se  racheta  da 
pillage,  moyennant  trois  cent  mille 
pieces  d'or,  formant  plus  de  quatre 
millions  de  notre  monnaie;  et  tandis 
qu'Abou-Obaida  entrait  par  une  des 
portes  monumentales  de  la  malheureuse 
ctt6 ,  une  foule  de  ses  habitants  sortait 
par  les  autres,  emportant,  ceux-ei  les 
reliques  de  leurssamts,  ceux-la  leurs  tr^« 
sorsaccumul^.  Ces  Emigrants  de  toutes 
sortes  8*en  allaient  vers  la  mer  pour 
passer  en  Occident ;  mais  la  plupart  de 
ces  malheureux  retomb^rent,  a  quelque 
temps  de  1^ ,  entre  les  mains  de  leurs 
ennemis,  qui  les  traiterent  avec  d'au- 
tant  plus  de  rigueur  qu'ils  se  croyaient 


(*}  Voyez  H^Uioam ,  b*storien  arm^olen  do 
quatorzteme  sitele. 


fniscrte  detMtes  lesrichsMeiqaervt 
a?ait  emportte  d^Antioche. 

COMBATS  DARS  U  LIBAN. 

Le  sort  des  fiigitifi  qoi  le  ding^ 
rent  vers  les  montagnes,  fut  momil 
plaindre  que  le  sort  de  ceux^ifoint 
vers  la  mer.  Les  premiers  etaieotd'a^ 
leurs  de  panvres  geos  qui  s^toblM 
dans  le  Liban,  et  vinrent  nmoM] 
le  nombre  des  solitaires  et  des  CM 
tiens  primitifs ,  premier  no3rau  des  1 
ronites  actuels.  D*autres  etaient  desi 
dats  qui  se  reunirent  au  nombre 
trente  mille  bommes,  parffiiteineat 
pablesde  se  d^endredansdes  roebers  d 
carpus  et  sur  des  cimes  abrupteL  ^ 
soldats  se  seraient  sans  doiite  loo8tM|i 
maintenus  dans  oe  pays  accideole, 
eussent  form^  oomme  une  eok 
litaire ,  si  Abou-Obaida ,  pour 
de  Toccu nation k  ses  troupes,  [ 
les  point  laissers'amoUir  dens lesdM 
d'Antioche,  n'avait  resolu  d'ei 
une  exp^ition  dans  le  Liban.  La 
d^ja  avanc^  empteha  que  ie  ^oed 
arabedisposdt  d'ungraodaombred'hQfli 
mes.  Ce  ne  furent  que  les  plnsiotn^ 
des  qui  se  pr^enterent  poor  '— -*■ 
un  corps  d^^claireors. 


Maissarab-Ebn-Et*As,  jenne 
aussi  brave  que  d^rmin^,  se  mit  i 
t^te  des  trois  cents  Arabes  les  plusiv 
(focieux,  et  fut  suivi  par  Danes,  ^ 
commandait  miUe  eselaves  noirs.  Gd^ 
petite  troupe,  pleine  d'ardenr  eidW 
tbousiasme ,  s'^fanca  aussitdt  k  b  fotf! 
suite  des  d^ris  de  rarm^  roodi^ 
Mais  k  peine  furent-ils  engages^ 
la  montagne,  qu'un  froid  troef"^ 
atteignit.  La  nelge  survint  ^^^ 
ils  se  eouvrirent  de  tout  ee  qu*il8  tvM( 
apport^  de  vdtements;  mais  ecsito 
ments  furent  bientdt  insnffisaati;^ 
ils  eurent  d*autant  plus  ^  spuffiiryjt 
Etaient  aocoutuma  k  on  dinainv 
lant ,  k  un  soleil  torride. 

Ponrtant ,  ils  parvinrent  enfto  kmi 
vall^  asses  bien  aorit^;  mais  quel  ne  Ml 
pas  leuretonnement,  lorsqu'unjoflrihii 
virent  entour^  d'une  arm^  toul  ej 
tiere  I  Pleins  de  resolution^  ils  sefbrtiif  1 
rent  dans  leur  camp,  d^ides  a  teoif, 
ferme  jusqa'^  Tarrivie  des  seconrsoow 
firent  deroander  en  toute  bite  k  Abot* 


STRIB  IfODBRNE. 


87 


Obafda.  Lean  premiere  combats  furent, 
du  teste,  malheareux,qiioi({ue  yiveineiit 
dispute  :  OQ  leur  fit  plusieure  prison- 
niers,  parini  lesqoels  Abd- Allah-Ebfi-Hd* 
dafahf  un  des  vieux  compa^ons  de  Ma- 
homet, son  cousin  geroiain^  cetui  qu'il 
avait  autrefois  d^puw  aaprte  du  roi  de 
Perse  pour  rinformer  de  sa  mission 
divine. 

II  fallut  une  suite  de  d^vouemants  et^ 
d'actps  courageax  de  tous  les  genres  h 
Maissarah  et  a  ses  compagnons  pour 
d^iidre  leur  camp  contre  Jes  assaats 
r^p^t^  de  trente  mj|l»  Grecs.  £nfin , 
Rhaled  arriva  a  leur  secours  avec  Afadli- 
Ebn-Ghanem,  l\in  des  parents  d*A* 
bou-Obaida.  K haled  avait  trois  mille 
cavaliers,  Aiadh  deux  mille  pistons; 
c*^tait  assez  pour  vaiocre  les  restes  de 
Tarm^  romaine,  quelque  ooosidera* 
hies  qu'ils  fussent.  Les  Greos,  d'ailleurs, 
ne  donn^rent  pas  aux  Arabes  le  temps 
de  di&ployer  leur  valeur ;  k  la  senle  oou* 
velle  que  Kbaled  marchait  contre  eux  y 
ils  s'enfuirent,  durant  la  nuit,  avec  une 
telle  rapidity,  qu'ils  laissMvntsurle  ter»-  \ 
rain  leurs  tentes,  leursbaga^^,  etnne 
partie  de  leurs  armes.  Les  Musuimans 
n'eurentalorsqu*^  parattrepours*<mpft« 
rer  de  plusieurs  places  situte  dans  les 
montagnesseptentrionalesdelaSyrie  (*), 
teiles  que  Tizin^  Dolouk,  Coihous, 
Rdban ,  Marascfa,  Hadath;  mais  toutes 
ces  conqu^tes  de  peu  d'importanoe  n*^* 
quivaleient  pas  pour  Kbaled  k  la  settle 
perte  d'Abd-AHab,  anden  favori  de 
Mahomet.  Kbaled  fit  des  efforts*  inouls 
pourrattraper  ceux  qui  avaient  enlev^ 
un  des  doyens  de  Tarm^  musnlmane ;  U 
courut  nuit  et  jour,  franehit  les  pr^i- 
pices ,  escalada  les  cimes  les  plus  eto- 
vees,  tout  eela  en  vain.  Quand  il  ellta^ 
teint  les  Grecs  sur  les  bords  de  b  mer, 
Happrit  qu*Abd- Allah elait  deja  dirie^, 
sur  un  vaisseau ,  vers  Gonstantmople. 
Alors  il  ^rivit  h  Omar  pour  lui  faire 
connattrecette  perte  si  grave,  son  cha- 
grin personnel ,  et  ses  enorts  inutiles. 

La  douleur  d*Omar  ne  fiit  pas  moios 
grande  que  celle  de  Kbaled,  lorsqu'il 
apprit  qu'Abd-AUab  toit  prisonnier 
des  Aomains.  Abd- Allah  ^tait  son  vieux 
compagnon ;  Abd-Allah  avait,  oomme 
lui ,  assist^  aux  premiers  combats  de 

(*)  Voye2  AboaTf&Ia,  Ann,  mtw. 


rislam ;  Abd-AUah  avait,  oomme  lui , 
M  appr^ci^  par  MabomeL  Omar,  deja 
sdr  de  sa  puissance,  bien  sdr  aussi  de 
la  faiblesse  d'H6raclius,  luleerivit,  pour 
lui  redemander  Abd- Allah,  la  lettresui- 
vaiite ,  curieuse ,  parce  qu'elle  prouve  k 
quel  point  ^aient  arriveis  Torgueil  des 
Musuimans  et  le  m^pris  qu'ils  portaient 
aux  Grecs : 
«i  Au  nom  de  Dieu,  element,,  mis^ri- 
eordieux.  LouangeiiDieo,  raattre  des 
mondes(*).  Quels  benediction  deDleu 
soit  sur  son  proph^te !  Le  servkeur  de 
Dieu,  Omar,  k  H^raclius,  empereur 
des  Grecs.  Dte  que  vous  aurez  re^u 
oette  lettre ,  ne  manquez  pas  de  me 
renvoyer  le  prisonnier  musulman  qui 
est  aupres  de  vous  et  qui  se  nomme 
Abd*Allah-Ebn-Hodafah.  Sivousfai- 
tes  cela ,  j'aurai  I'esp^ance  que  Dieu 
vous  oonduira  dans  le  droit  chemin ; 
si  vous  le  refusez ,  Taurai  soin  d*eo* 
voyer  contre  vous  des  gens  que  le  n6- 
goce  et  la  marcbandise  ne  d^tournent 
pas  du  souvenir  de  Dieu.  Que  la  sant6 
et  le  bonbeur  soient  sur  eelui  qui 
marcbe  dans  le  droit  ehemin  1  • 
A  la  r^eeption  de  cetteiettue,  le  Idche 
empereur  de  Constantinople  ne  se  hdta 
paa  seulement  de  renvoyer  Abd-Allah , 
mais  il  fit  encore  de  nombreux  et  con- 
siderables prints  au  khalife ,  qui  les 
re^ut  avec  d^dain.  La  noblesse  et  la 
^ndeor  d'Ame  etaient  passees  d^fini- 
tivement  des  Aomains  aux  Arabes. 

LB9  BOMAINS  GHASSlia  DB    8YBIB. 

En  m^me  temps  qnll  avait  envoys 
son  imperative  missive  k  Heraclius, 
Omar  avait  ordonne  k  Abou-Obajfda  d'en 
finir  avec  la  Syria,  et  d'en  ehasser  le  reste 
des  Grecs.  L'arniee  d'Abou-Obaida  se 
porta  done  vers  le  sud ,  tandis  qu'Am* 
ron-Ebn-EI- As,  post^  sur  les  frontieres 
de  la  Palestine ,  pour  marcher  centre 
r£a;ypte  apres  la  eonqu^tedeloSyrie, 
s'avan^a  vera  Cesar^e.  Bientdt  toutes  les 
forces  musulmanesse  trouverent  r^onies 
dans  les  environs  de  la  derniere  ville 
importante  qui  tfnt  encore  pour  les  Re- 
mains. Selon  la  coutume  ordinaire ,  les 
deux  armies  carap^rent  en  face  Tune  de 


(*)  Ces  paroles  sent  les  deux  premiers  vwsets 
4e  la  premiere  Suraie  da  Horan. 


88 


L'UJOVERS, 


Tautre.  Constaotni,  qti  coitiraandait 
les  Chretiens,  soUicita  une  entrevue 
nveo  i*un  des  chefe  arabes.  Amrou  ne 
fit  aucune  difficult^  poor  se  rendre  lai* 
rn^me  au  camp  ennemi.  Gette  conferenoe 

*  ^t ,  comme  touUs  leg  autres,  sans  r6- 
sultat.  On  rapporte  seulement  que  le 
jeune  prince  grec  ayant  ridiculement 
deinande  h  Amrou  quel  droit  les  Arabes 
se  cro^raient  k  la  possession  de  la  Syrie, 
celui-ci  lui  r^ponait : «  Le  droit  que  con- 
afn-e  le  mattre  des  mondes;  la  terre 
<t  appartient  h  Dieu ,  il  la  donne  en  h^ 
«  ritage  a  qui  il  veut ,  et  c'est  le  succes 
«  des  armes  qui  manifeste  sa  volonte.  » 
Cette  derni^re  id6e  est  encore  demeurde 
tenement  forte  dans  Tespritdes  Arabes 
que  la  victoire  leur  semble  toujours 
comme  une  benediction  celeste.  Its  ont 
encore  du  respect  pour  le  victorieux , 
quel  quMl  soit,  et  parfois  m^me  du  d^ 
youement. 

A  la  suite  de  Tentrevue  d' Amrou  et  de 
Constantin,  il  fallut  bien,  malgr^Ten* 
vie  contraire  de  ce  dernier ,  que  Ton 
se  prepardt  h  en  venir  aux  mams.  Le 
lenaemain  done,  les  deux  armies  ^taient 
dej^  en  pr6sence,  et  attendaient  Tordre 
de  la  lutte ,  lorsqu*il  sortit  tout  a  coup 
des  ran^s  des  Chretiens  un  chef  rev^tu 
d'une  riche  armure,  qui  provoqua  en 
combat  singulier  les  Musulmaas  les 
plus  braves.  Trois  accepterent  le  defi;  en 
quelques  instanU  ils  furent  tu^  tous 
les  trois.  £tait-oe  r^estorius  echapp^  aa 

,  carnage  de  ses  troupes?  £tait-ce  un 
nouveau  heros?  Aucun  historieo  ne  le 
dit.  Enfin  Schourahbil,  chef  c61ebre, 

3ui  commandait  aux  deux  rives  du  Jour- 
ain ,  irrite du  succes  de  ee  Grec,  s'a- 
van^  pour  le  combattre.  iMalgr^  son 
adresse  et  sa  valeur ,  il  trouva  un  mat- 
tre dans  cet  inconnu.  II  allait  mSme 
p^rir  sous  un  dernier  coup  que  lui  avait 
porte  son  invincible  adversaire,  lors- 
qu'un  cavalier  sortit  des  lignes  de  Tar- 
m^e  chr^tienne,  et  sauvala  vie  k  Schou- 
rahbil, en  abattant  par  derri^  la  t^  de 
son  vainqueur.  Get  actede  trahison  avait 
ete  commis  par  un  Arabe  transfuge, 
du  nom  de  Tolaiah ,  qui ,  apres  s'^tre 
fait  passer  pour  prophete,  s'^tre  fait 
battre  par  Khaled ,  8*etre  r^^gi^  chez 
les  Grecs ,  voulait  rentrer  dans  la  reli- 
gion de  Mahomet  en  obtenant  sa  grdce 
Var  une  action  d'eclat.  Apres  ce  coup 


hardi ,  sinon  loyal,  les  deaxamieeseB 
vinrent  aux  mains.  Le  cboc  des  Grecs 
ne  fut  pas  si  puissant  qu'a  roidinaire; 
et,  apres  une  m61^  confuse,  lestroupn 
byzantines,  formees  en  partiede  noovet- 
les  milices,  lachereat  piedde  U>asc6ta. 
La  nuit  prot^ea  les  fu}ranis,  etCoos- 
tantin  put  se  retirer  a  Gesaree,  a 
abandonnant  aux  Arabes  son  camp«l 
ses  bagages  (*). 

Les  Arabes  ne  oommirent  poiot  b 
faute  de  s'acharner  contre  les  sofids 
rempartsde  G^sar^.  Bien  oertaiosqa 
cette  ville  tomberait  tdt  on  tard  sm 
leur  domination ,  ils  la  tinrent  bioqw 
par  terre  avee  une  partie  de  ieurs  trot; 
pes ,  et  avec  Tautre  ils  remontereDt  II 
littoral,  pour  s*emparer  tour  a  tourdt 
Tripoli  et  de  Tyr,  qui  dtaieat,  a  cdH, 
^po^ue ,  avec  Gesaree,  les  plus  forler 
places  maritimes  de  la  Syrie.  Mais,  t» 
dis  qu'Abou^Obaida  se  |Mr6parait  afii» 
marcher  des  troupes  sur  Tripoi,  i 
apprit  gu'une  nouvelle  rusedeToi^^ 
na  avait  ouvert  les  portes  de  cette  die 
aux  Musulmans.  £n  constataat  k 
rdussite  de  la  plupart  des  perfidies  dii 
Tancien  gouverneur  d^Aieu,  rblstoai 
n'en  donne  pas  toujours  les  oxtails.  Aas- 
si ,  i^norons-nous  par  quelle  voie  soi* 
terrame  Youkinna  s'^t  glisse  dan 
IVipoli.  Khaled  vint  au  secoursde  Yoo- 
kiona,  et  vint  a  propos.  On  coimaes* 
eait,  dans  la  ville,  a  murmurer  cootrt 
fapostat,  aussi  despote  apres  la  n^ 
toire  qu'il  toit  fouroe  dans  la  lutte. 

Malgr^  son  succes .  cet  bomi»e,too* 
jours  acttf  et  prompt  dans  ses  pedtdioi 
songeait  dijk  a  prendre   Tyr  cqihk 
il  avait  pris  Tripoli.  Le  hasardlei^ 
vit  a  point,  tandis  que  la  fatalitebfiA0 
d^astreuse  s'appesantissait  sur  Is  K^ 
mains.  Un  jour,  on  vit  entrer,  a  foRttt 
rames,  dans  la  baiedeTripoli,eiDq«9tt 
galeres ,  ^uip^s  dans  les  ties  d«  Crelt 
et  de  Ghvpre,  et  cbarg^  de  provisoBS 
de  boucne  et  de  munitions  de  gmrf^ 
L'amiral  grec,  qui  ignorait  la  sarpi^ 
de  Tripoli ,  vint  k  terre  sans  dH^ncttA 
recu  avec  empressement  par  Toukiwai 
qui  ^tait  parvenu  a  letromper,  poift  ^ 
moment  opportun,  cet  omcier  eredw 
fut  emprisonn6  avec  une  partie  de^ 
marins.  Gette  chance  d'un  inccmoefabii 

(*)  Toyez  TbfophaM  et  Ocktey. 


SYRIE  MODERNE. 


83 


Nibeur  n'endormit  pas  YoukiDua.  A 
idque  temps  de  la  il  moota  avec  oeuf 
otshommes  h  lui  sur  ces  m^mes  galcres 
M  dirisea  vers  Tyr.  Costhab,  le  gou- 
riieur  de  cette  place,  fut,  comme  tous 
taatres,  lroin|>e  d*abord  par  Youkin- 
lybissalesgalerea  entrerdans  leport, 
I  troupes  debarquer;  mais  bientdt, 
^  qii*i]  se  mell&t  de  YoukiaDa ,  soit 
n  edx  6t§  avert! ,  il  fit  mettre  aux 
liran^at  etsesueuf  cents  bommes. 
'  'una,  cette  fois,  se  croyait  ▼ain- 
\  le  destin ,  qui  voulait  la  perte 
^,  le  sauva  de  leur  vengeance. 
IS  empires  en  decadence,  la  trahi* 
\  eoQtagieuse.  Youkinna ,  dans 
parent  du  gouverneur  de 
..a  UQ  complice  qui  macbina 
i  one  conjuration ,  au  lieu  de  le 
[  avec  soin ,  comme  il  en  ^tait 
I  Cet  bomme  infdme ,  du  nom  de 
,  iTune  part  emp^ba  Costbab 
XBourir  imm^iatement  You- 
it,  d'autre  part,  pr^venir 
pprocher  des  murailles  de 
,^^al  musuiman  fit ,  en  effet, 
» et  apparut  bientdt  dans  la 
ecdeux  millebommes.  Aussi- 
IgOQvemeur,  accompagn^  de  sa 
'  in,  sortit  de  la  ville  pour  aller 
'  les  Arabes ,  et  laissa  le  com- 
.Jieot  int^rieur  au  traitre  Bazile. 
I premiire  action  de  celui-ci  fut  de 
'  Yottkinna  et  ses  neuf  cents 
s  de  pr^venir  les  marins  musul* 
i\a  faire  descendre  a  terre,  et 
f  flrdonner  d'aller  ^rossir  les 
"""lind.  Ce  complot  reussitd'au- 
-I  que  les  Tyriens ,  pen  scru- 
^B  leur  naturel ,  se  firent  pres- 
I  mahom6tans.  A  cette  nouvei  le , 
in  deaesp^ra  comme  aWlit  fait 
,  iors  de  la  ^se  de  Damas.  II 
cette  fois  pour  Constan- 
.Jie;  et  C^aree,  abandon- 
.^j  environ  trois  millions  aux 
,  e*estr^-dire  deux  cent  miile  pie- 
,  pour  se  sau ver  du  [tillage  (*). 
'e  une  fois  au  pouvoir  des  Mu- 
.,  toutes  lea  autres  villes  de  la 
i  maritime  et  de  la  Palestine  ou- 
lenrs  portes  sans  combat,  Acre, 
^,  Dj^baTI,  aussi  bien  quelibe- 
iK^polis,  AscalonetRamlab.  Les 


autres  places  du  nord,  qui  se  r^voltaient 
naguere  contre  les  Araites  a  Tannonce 
des  moindres  succesdes  troupes  romai- 
nes,  renono^ei\td6sormaisa  toute  ten- 
tative de  soulevement.  Les  gens  des  cites, 
par  calcul,  les  gens  des  campagnes ,  par 
n^ssit^ ,  se  soumirent  sans  murmure 
aux  tributs  d^finitifs  qu*on  leur  impo- 
sa.  Les  ambitieux ,  les  iiiteresses ,  les 
mauvaises  natures  de  toutes  especes,  et 
il  y  en  avait  beaucoup  dans  une  nation 
aussi  m^lang^  et  aussi  corrompue  que 
la  nation  syrienne  du  septieme  si^ie , 
se  firent  mabom^tans,  et  se  mootre- 
rent  plus  rigoureux  et  plus  durs  envers 
leurs  anciens  coreligionnaires  que  les 
Musulmans  eux-m^mes.  Tout  etait  con- 
somme :  une  nouvelle  domination  s*e- 
tendait  sur  cette  malbeureuse  contr^ ; 
une  nouvelle  ere  d'infortune  commeu- 
^ait  pour  elie. 

Les  propres  vainqueurs  de  la  Syria 
ne  jouirent  pas  longtemps,  du  reste,  de 
leur  oonqudte.  A  peine  le  pays  entier 
etait-il  pass^  sous  le  joug  de  Tlslam, 
qu*une  peste  terrible,  g^n^rale,  de  la 
plus  violente  intensite,  se  declara  tout 
a  coup,  fit  les  progres  les  plus  rapides 
et  les  plus  effrayants ,  atteignit  Tarmee 
etsesauxiliaires,  les  Arabes  de  toutes  les 
tribus  a  la  fois.  Ce  fleau  ,  qui  avait  sans 
doute  pris  naissance  dans  ces  champs  de 
carnage  oii  la  guerre  avait  arooncel6 
tant  de  cadavres ,  frappa  les  generaux 
comme  les  soldats.  Les  plus  grands  capi- 
taines,  qu'avaient  ^pargn^s  tant  de  com- 
bats, tomberent  tour  a  tour  sous  les 
coups  de  la  faux  invisible :  Abou-Obaidat 
Y^zid,  Scbourabbil  et  tant  d*autres. 
La  Providence  semble  par  fois  bien  s^ 
vere  dans  ses  justices  :  elle  avait  puni 
par  les  Arabes  les  Syrieos  de  leur  cor- 
ruption, elle  punit  presque  aussitot  par 
la  peste  les  Arabes  de  leur  cruaute. 


)TflrcaWakedy. 


90 


L*UWIVERS. 


LA  SYRIE  SOUS  LES  OMMIADES. 

CilBACTiBB  DBS  PBBIII^BBB  CO^TQUA- 
TBB  ABiUIBS. 

S'il  nous  falkit  r^mer  la  premi^ 
phase  des  conquftes  de  Tlslam ,  boos  y 
trouverions  un  rn^ange  de  grandeur 
et  de  barbarie ,  de  perseverance  ^  d'ins- 
lability,  de  demeneeet  derigueur,  dV 
vidite  et  de  desint^ressement,  qui  pr6- 
sente  une  suite  de  contfastes  plutdt 
qu'un  earact^e  g^n^ral.  Aussi  |M>ur 
rexpliquer  la  prodigieuse  ouantite  de 
victoires  qui  6teiidit  si  vite  la  domina- 
tion  mttsuhnane,  pour  se  rendre  un 
compte  ch»fr  et  exact  des  causes  succes- 
sives  qui  firent  triompher  les  Arabes , 
it  est  indispensable,  d'une  part,  de  bieD 
constater  la  faiblesse  de  rempire  bjrzan- 
tin ,  c'est  ce  que  nous  avons  fait  en 
conimen^ant  eette  histoire,  et,d'autre 
part,  d'analyser  les^^ments  vitaux  qui 
vinrent  tour  a  tour  se  d^velopper  daus 
]e  sein  des  tn'bus  mahom^tanes. 

L'empire  de  Tlslam  sur  FOrient  est  un 
fait  bien  autrement  puissant  et  merveil- 
leux  que  Fenvahissement  de  POccident 
par  les  races  septentrionales.Les  Barba- 
res  du  Nord  vinrent  par  irruptions  irr6- 
guli^res,  par  masses  compactes;  c'est 
leur  continuity  oui  fit  leur  force ,  c'est 
leur  nombre  qui  nt  leur  succ^.  Les  Ara- 
bes, au  oontraire,  sont  d'abord  une  poi« 
gn^e  d*hommes  centre  dea  arm^s,  quel- 
ques  cavaliers  contra  des  peuples.  Mais 
lesBarbares,  sansid^  pr^pond^rante , 
sans  constitution  qudconque,  avec  dea 
moeurs  diverses  et  souvent  oontradio- 
toires,  acceptentia  religion  qu'ilstrou- 
vent  Stabile,  remplacent  leurs  lois  gros- 
sieres  par  les  lois  romaines,  faconnent 
leurs  habitudes  aux  ooutumes  quails  ren- 
contrent ;  tandis  que  les  Arabes  appor- 
tent  avec  eux  un  culte  absolu,  un  code 
rigoureux ,  des  usages  imperatifs.  Les 
Barbares  ont  peut>gtre  modifi^  la  face 
de  TEurope ;  a  coup  sdr,  les  Arabes  ont 
change  radicalement  la  face  de  TAsie. 
De  la  domination  des  Arabes ,  d'ail- 
leurs ,  est  n^e ,  au  bout  d'un  si^cie ,  une 
civilisation ,  celle  des  Abbassides ;  de 
Tirruption  des  Barbares,  iln'est  r^sulte, 
au  boutde  cinq  cents  ans ,  qu'une  anar- 
chie,  celle  du  moyen  Age. 


Attila ,  Hermanrie ,  Odoacre  soBli 
fl6aux;  Mahonaet  est  un  fondateur.r 
rois  barbares,  eiev^s  sur  leorl 
pavois ,  n*ont  jamais  vaiueu  que  | 
roroe  brutale ;  les  khalifes,  du  t 
leurs  chaires  sacr^es,  ont  eonquis  | 
conviction  autant  que  par  les  i 
voill  le  secret  de  leur  superiority.  \ 
serait  done  paa  sense  de  eonfoi  ' 
vantage  la  turbulenoe  iBlnte"'. 
races  septentrionales  et  Tardeiir  i 
chie  des  tribus  de  THeiiyaz  et  <'  ' 
men.  Voy ez  comme  tout  se  C ' 
rapidement  chez  les  Arabes  : 

filme  militaire  par  la  r^^  ' 
liabilete  guerriere  par 
combats ,  la  sobriete  par  let  | 
renei^ie  par  les  fatigues.  Certq 
les  qualites  ordinaires  des  nati« 
nes,rimpetuositeet  la  Tigueor,k 
bes  ont  encore  grAce  h  Punite  i 
maintient  et  les  dirige,  la  [ 
et  lecalcul.  Le  fanatismeaheza 
pas,  comme  on  I'a  oru  longtesi^ 
consequence  foreee  de  leur  oolts^l'^ 
un  resultat  fatal  de  leurs  gueiT«}_ 
exaltation  les  a  soutenus  daaski^ 
bats ,  leur  rigorisme  leur  a  ftit  i 
toute  resistance. 

Tout  d'abord  Mahomet  ae 
qu'ii  grouper  des  tribus  divis60v| 
religion  qu'il  leur  impose  ^^\ 
dment  de  leur  union.  Plus  tarti 
fortifier  la  nation  qo*ii  a 
il  cherche  &  raugmenter  fli  i 
pintdt  qu'en  provinces.  Sest 
sont  tout  aussi  babiJes  que  loi.  J 
Bekr  ne  se  hAte  pas  de  poosscrs' 
pagnons  \  la  conquete,  il  sepa 
beaucoup  plus  de  la  propafj^mdij 
la  guerre ;  il  laisse  volontieisi 
veaux  proselytes  soiliciter 
Phonneur  de  combattre  les  ! 
il  pense  moins  a  tracer  des  pisaii 
taille  qu*a  reunir  les  ehapltrei  ^ 
ses  du  Koran,  A  etablir  Punft6 1 
mane ,  ^  fonder  un  gouv 

Omar ,  sans  Atre  moins , 
plus  belliqueux  :  il  excite  sans  ( 
Arabes  A  marcher  en  avant,  i 
mande   leur   indolence 
reprime  leur  mollesse  naissante, 
leurs  vices ,  ordonne  aux  tr 
mouvements,  organise  les 
vaincre,    mdne  les  generaux' 
les  soldats,   imprime    k 


stuie  mdderihe. 


91 


TOit  rensemble  des  operations 

iires  da  fond  de  TArabie ,  et  y  pre* 

I  en  souverain.  Si  an  idche  assassi- 

si  la  venganoe  d'un  barbare  in* 

^B*aTait  pas  brusquement  mis  fin  k 

ojets ,  Oinar ,  par  son  ^nergie ,  sa 

m^M  et    son  ambition  nationale. 

pMnpi^  Mabomet.  CT^tait  bien  la 

'  mais  puissant  eh^f  qa'il  fallait  k 

atiofi  a  i^ineform^,  fascin^ed^ja 

I  rapidite  de  ses  oonqu^tes,  ^blouie 

'elatdesridiesses  qa*elle  avait  ar- 

;  aux  vaincos.  Qilme ,  infati^a* 

Btftt^resse,  Omar  ne  s'^tonne  ja- 

^lle  Paccrofssement  prodigieux  de 

_are,  il  ne  songequ'd  accumuler 

oonpbes  d«  Tlslam :  apres  la  Syne 

\  ITgypte ;  aprds  la  Mesopotamie, 

f  jusqa'li  rOxus ;  et  de  oes  butins 

ienz  qo'on  lai  expediede  tons  c6- 

|doAoe  avec  integrity  nne  part  k 

selon  leg  services ,  selon  rAge^ 

[  faneiennete  dans  \t  devouement 

Aigion  nouvelle.  Quaiit  ^  lui ,  it 

eneore  de  simplicity ,  de  so- 

1$  poor  insptrer   le  m^ris^  des 

parnres,  il  porta  avec  orgaeil 

obe  donze  fois  rapi^cee;    pour 

Texemple  du  respect  aux  presh 

ons  du  Koran ,  il  ne  boit  que  de 

^et  sa  table  est  un  module  de  fro- 

Et  eependant  il  a  accepte  le 

[tigoificatif  de  commandeur  de& 

nts,   titre  qui  n*im|)ose  aucune 

I  a  sa  puissanoe  et  qui  tui  accorde 

^  \  tons  ies  pouvotrs,  civils,  miii- 

jet  religieax  (*)• 

^a  Abou-Bekr,  I'esprit  de  pro* 

guerriere  s'^ait  r^pandu  de 

tribu;  grAoe  k  Omar,  Farm^ 

titaa,s'aguerrit,  se  disci  plina.Les 

bandes,qai  suivirent  Ozama 

rie,   ne  faisarent  la  piupart  do 

|qu*une  guerre  d'aveiitures,d«raa- 

|de  sac*  et  de  pillages;  Ies  tronpea^ 

i-Obaida  agirent  avec  plus  de  con- 

^sansrien  perdre  pourtant  deleur 

''"'  Man.  Les  g^neranx  se  forme- 

im  rndme  temps  qne  Ies  soldats: 

]  se  joignit  bientdt  au  courage. 

avelles  recrues,  celles  surtoutqui 

appris  des  Romains  on  des  Per^ 

^art  des  combats,  apport^rent  aux 

ignorants  leurs  observations  et 

)  Toy«E  AboaT  fMa. 


lear  science :  dds  lesi^e  de  Daroas  Ies 
Syriens  virent  aveceffroi  lesMusulmans 
attaquer  ieurs  rourailles  avec  des  ma- 
chines, dont  lis  se  servaient  d^s^avec  au- 
tant  d'adresseque  Ies  Grecsenx-mdmes. 
A  la  bataille  d'Yarmook,c*Mt  bien  en- 
core une  luttef^roce,  sauvage,  d'homme 
h  homme ,  une  m£l^  gigantesque ,  ou 
Tone  des  deux  arm^  devait  p^rir  tout 
enti^re;maisau  sieged* A ntfoebe,  dans 
I'exp^dition  des  montagnes ,  a  Cesar^e, 
c*est  d^ja  de  la  tactique ,  ce  sont  des 
stratag^mes  anssi  inteltigemment  con- 
gas qu*habiiement  ex<^cut^s. 

Tous  Ies  moyens ,  du  reste ,  ^taient 
bons  aux  Arabes;  tons  Ies  anxiliaires 
^taient  bien  re^s  par  eux  :  its  n'a- 
vaient  pas  encore  le  sens  moral ,  qui 
n'est  le  propre  qne  des  nations  h  leur 
apogee.  Les  Arabes,  au  septi^e  si^- 
oie ,  ne  se  faisaient  faute  ni  de  ruses 
ni  de  fourberies,  ni  de  dissimulations 
de  toutes  especes;  ils  acoeplaient  ^gale* 
ment  les  services  destrattres  etdes  apos- 
tats ,  des  gens  perdus  de  dettes  et  de 
crimes,  des  Idches  comme  des  ambitieux . 
Aussi,  si  en  moins  de  sept  anneesilsrem- 
placdrent  Ieurs  premidres  troupes  d*a- 
venturiers,  mont^  sur  de  maigres  cava- 
les,  k  neine  armes  de  lances  au  fer  mal 
aiguise,  par  des  masses  r^u litres,  dis- 
ciplin^es,  compos^es  tout  ^  la  fois  d*a- 
droits  archers,  de  fantassins  anx  piques 
et  aux epeesredoutables^de cavaliers  aux 
GOttes  de  mailles  et  au  sabre  recourb^ ; 
si  en  moins  de  sept  annees  ils  se  rencK- 
rent  aussi  propres  k  \a  guerre  que  Ieurs 
plus  savants  ennemis,irieurfaltut  beau* 
coup  pins  detemns  pour  oraantser  leors 
conqu^tes,  itablir  en  Syrie  un  ordre 
nouveau,  tirer  parti  de  Timmense  terri- 
toireet  des  richessesinnombrables  dont 
ite  s'^taient  si  rapidement  rendus  mat- 
tres.' 

Dans  les  premiers  jours  de  leur  em- 
pire legonvernement  nit  facile  aux  Ara- 
nes  :  ils  laissaient  k  chaque  villeses  k)is 
partfculi^es,sa  police,  ses  coutumes,  ses 
cfiefs  civils  et  ses  magistrats.  Leurpos- 
session  consistait  tout  simplement  k 
^bNr  une  Jamison  dans  la  citadelle, 
et  k  percevoir ,  k  des  6poques  dites ,  le 
tribut  qu'iis  avaient  impos6.  Mais  plus 
tard ,  auaod  ii  fallut  rappeier  les  habi- 
tants des  cartipagnes  pour  cultiver  les 
terres  en  frlche,  qaand  ii  falint  afifer- 


91 


L'UNIVERS. 


mer  de  grands  terrains ,  exploiter  les 
monopoles  dont  les  empereursde  Gods- 
tantinople  s'etaient  reserve  la  jouis- 
sance,  tels  que  les  salines,  les  mines 
de  fer,  les  for^ts  ^bois  de  construction, 
alors  les  difficult^  surgirent  de  tons  co- 
tes. Puis  le  nomhre  des  adherents  k  TIs- 
lain  augmentait  tous  les  jours,  et  k 
ces  nouveaux  Musulmans  il  fallait  des 

I)rivileges  ou  des  emplois,  une  solde  dans 
'armee,  ou  des  franchises  dans  le  com- 
merce, des  terres  enfin  lorsqu'ils  n'e- 
taientrienetn*avaient  rien.  Pour  cons- 
tituer  le  pays ,  un  bomme  aussi  bon  ad- 
ministrateur  qu'babile  politique  etait 
necessaire :  cet  bomme  se  rencontra. 

COMMENCEMENTS  DE  MOAWIAH. 

Parroi  les  guerriers  celebres  qui  se 
distin^u^rent  enSyrie,  parmi  ceux  qu*^- 
.  pargnerent  les  combats ,  et  surtout  la 
peste  cruellequi  ravagea  toutes  les  {pro- 
vinces conquises  Tan  18  de  Th^ire, 
ce  qui  flt  appeler  par  les  Orientaux  cette 
6poquefuneste :  lanndedela  mortality; 
parmi  ces  braves  etces  heureux,  dison»- 
uous,  on  avait  remarque  Moawiah,  frere 
de  ce  Y^zid  que  nous  avons  vu  comman- 
der avec  tant  de  valeur  Tun  des  grands 
corps  de  Texp^dition  arabe.  Moawiah 
avait  donne  des  preuves  de  courage  an 
siege  de  Cesar6e ;  plus  tard,  son  habilet4^ 
dans  les  negociations  fut  fort  utile  a  la 
prise  de  possession  g^nerale  de  la  Syrie. 
Cetait  un  jeune  bomme  erave,reserv6, 
d*une  apparence  froideet  o'un  esprit  r^ 
flechi,  meditantau  fond  de  sa  tente,  lors- 
qu'ii  ne  combattait  pas,  aj^ant avant  V&ge 
cette  dignity,  cecalme,  qui  inspirent  ton- 
jours  du  respect  auxArabes.  Soncarac- 
tere  ^tait  de  ceux  qui  r^ussissent  en 
Orient :  mattre  deses  passions,  il  6tait 
certain  de  dominer  un  jour  celles  des 
autres ;  sdr  de  ses  sentiments  commede 
ses  moindres  sensations ,  il  paraissait 
toujours  n^^tre  mu  ^ue  par  la  justice, 
et  n'agir  que  par  laraison.  Son  ambition 
fut  un  feu  qui  couva  vingt  ans  pour^a- 
ter  tout  h  coup  comme  un  incendie  in- 
domptable.  Cet  bomme,  dureste,  comme 
les  bommes  les  plus  puissants,  grandit 

Seuapeu,  se  forma  lui-m£me,  atten- 
it  les  occasions  avec  intelligence,  s*en 
servit  avecmesure,  et  ne  fut  jamais  im- 
patient nide  la  fortune  ni  dela  gloire: 
sa  vie  etait  si  logique  qu'elles  devaient 


t6t  ou  tard  lui  arrim  toates  ( 
Descendant  des  ancieos  princes 
Mekke,  filsd'Abou-Sofiaa^qaianit 
chef  du  temple  de  la  Raaba,  lonqK 
pere,qoi  fat  d^abord  un  eanoniidi 
de  Mahomet ,  ne  put  plus  i^sisttri 
tratnement  g6n6ral  et  se  dedara  la 
man,  le  jeune  Moawiah  eat  Tesprit^ 
faire  attacher  h  la  persoDoedeMi 
comme  simple  secr^ire.  II  coa  ^ 
les  allures  de  I'envoye  de  Diea 
peut-^tre  quelques  secreU  in 
se  fit  estimer  par  les  premien 
a  rislam,  et  se  montra  si  mod 
serv6,  sidiscret,  qu'onne  vitqne! 
titude  sans  voir  son  ambition,  i; 
loua  que  son  z^le  sans  tedouter 
tes  capacity.  Lorsquesonfrere 
tit  pour  la  Palestine ,  il  ne  sei* 
tout  de  suite  h  le  suivre.  Moai 
hAtait  jamais  :  il  avait  eocorai 
le  caractere  des  suocesseursdofH 
il  voulait  peut-^tre  que  nsUift* 
solidAt  avant  de  lui  sacrifier  a" 
les  pretentions  de  sa  femillesar 
vemementde  la  Mekke  Eofin'" 
puissancedu  mahoro^tismefuti 
pour  tous,  lorsque  les  pr^^  .. 
propb^tie,  Mosallama  et  Asm\ 
rent  ^t^vaincus  par  Aboa-Bekr, 
FArabie  enlidre  fut  pacifist  | 
prit son  parti.  Pour  rtoersurte 
arabe ,  il  comprtt  qu  il  lui  oB 
vertus  guerri^res ,  et  il  r&oWJ 
avoir.  Pour  r^ver,  un  jour,  on 
personnel,  il  reconnut  que ei 

§as  en  Arabic  m^mequMl  pou»  " 
er,  et  il  partit  pour  la  Syrie, 
lament  afin  de  se  rendre  par 
di^ne  de  ses  aieux ,  mais  ew 
suivre  de  plus  pres  les  progrS' 
lam.  Homme  adroit ,  tete  p«r 
se  modelait  d'abord  sur  ceux 
lait  dominer  plus  tard  :  il  se 
ri^idedans  ses  mceurs,  religi«a 
tailleur,  selon  Pusage  oomnme 
selon  lego  At  du  temps.  Toutecf' 
tique,  tous  ces  calculs  fureoi 
r^ultats  des  reflexions  soliuii 
jeune  bomme  ?  Les  consells  de 
avaient-ils  inspire  k  Moawiah  ia< 
qu'il  tenait?  Les  annalistes  oe  k 
pas ;  mais  tout  fait  presumerqa  u' 
complicite  patemeile  dans  oes  "* 
vreshabiles,  dans  ce  plan  '^' 
m6dite. 


SYRIE  MODJERNE. 


$3 


les 


i  etrooostanees,  du  reste^servirent 

sblement  Moawtah :  le  sort  loi 

I  favorable ,  ee  qui,  ehez  ies  Arabes, 

Ine  les  suffrages  des  plas  r^calci- 

,  et  double  la  puissance  du  pr6- 

'.  Moawiah  n'avait^prouv^aucune 

I  de  cette  peste  terrible,  qui  avait 

!  rarm^e  musulmane  en  ran  637, 

surtout  attaqnee  aux  guer- 

plus  iilusires.   De  tous  ces 

Bux<,  aussi  actifs  qu*babiles .  a  ^ui 

vait  iaeonqu^te  de  la  Syrie,  a  peine 

tstait-il  deux  ,    Amrou-Ben-EI- 

Khaled.  Encore  ce  dernier  avait- 

si   ioDgtemps  malade,  qu'il  fut 

!  de  se  retirer  a  £m^se.  La,  par 

de  son  attaque   de  peste  ,  par 

^aussi  des  fatigues  que  dix  ans  de 

its  p^p^tuels  avaient  aecumul^es 

t^te,  on  vit  le  brillant  cavalier 

('affaiaser  tout  ^ coup,  ses  forces 

'  oaoer  peu  k  peu  et  son  dme  ^ner- 

1  survivre  que  trois  ans  a  la  des- 

.  de  son  corps. 

a  fbt  nomm^  par  Omar  ^ouver- 
i  la  Syrie  tout  entiere;  mais  pour 
ir  dans  la  d6pendance  musul- 
j  aussi  vaste  pajs,ii  fallaita  Am- 
j  second  dans  Vhabilet^  duquel  il 
air  loute  confiance.  Moawian  agit 
,  il  montra  k  son  sup^ieur  tant 
j>icacit6  et  tant  de  devouement  h 
,  il  d^loyatant  d*activit^'et  de 
^toot  en  se  conformant  aux  indica- 
a'on  lui  donnait,  qu'Amrou,  d^ 
leors  par  les  antecedents  de 
I ,  le  choisit  pour  le  rempiacer 
)  occurrences,  et  le  chargea 
«nent  de  lever  et  de  former 
Dpes  nouvelles.  Moawiah  fit  mer- 
il  6tait  d*un  caractere  doux  et 
i  ensemble ,  il  avait  une  con« 
pr^matur^  des  hommes ,  il 
Hix  que  tout  autre  s^adresser 
r  passion  bonne  ou  mauvaise,  et 
liter  a  son  profit.  Grftce  h  son  ^lo- 
» aupr^  des  indigenes  les  plus  iu- 
,  grftce  aux  promesses  dont  il 
ligue  envers  les  masses ,  grdce 
;  a  nne  condescendance  bien  en- 
les  trtbtts  des  Arabes  nou* 
at  rang^es  sous  leslois  de  TIs- 
;  parvint  en  un  assez  court  espace 
dps  a  rcuoir  une  arm^  presque 


\  tout  4 


[  mieux 


I  ToycK  Etmaein. 


aussi  nombrense  quecelle  que  les  guer- 
res  de  la  conqu^te  et  les  ravages  de  la 
peste  avaient  d^truite. 

Ce  premier  succ^  du  jeune  lieutenant 
d'Amrou  prouva  k  tel  point  son  in- 
fluence sur  les  populations  que ,  quand 
rarm^^,qu*il  avait  r^onie,  eut  ordre 
de  marcher  sur  Tfigypte,  le  kbalife  vou- 
lut  reconnattre  les  efforts  heureux  de 
Moawiah  en  lenommant  gouverneur  de 
la  Syrie,  en  place  d'Amrou  partant  pour 
une  expedition  qui  devait  ^e  aussi  lon- 
gue  qu  importante.  A  peine  en  posses- 
sion de  son  gouvernement,  Moawiah , 
loin  d*essayer  son  pouvoir  sur  les  Chre- 
tiens en  les  accablant  d'impdts ,  loin  de 
fatiguer  les  troupes  qui  lui  restaient  dans 
de  vaines  expMitions,  se  montra,  au  con- 
traire,  genereux  et  facile  envers  les  tri- 
butaires ,  et  s'appliqua  tout  d'abord  k 
discipliner  ses  soldats,  a  chercher  pour 
eux  des  instructeurs  parmi  les  renegats 
et  parmi  les  Arabes  qui  avaient  servi 
Tempire  byzantin.  Patient  et  persev6- 
rant ,  il  eu^  bientdt  des  legions  organi- 
s6eslila  romaine,  des  compagnies  d'ai^ 
chers,  des  machines  pour  les  sieges,  et 
des  hommes  capablesde  manoeuvrer  ces 
machines.  Tolerant  et  juste ,  il  obtint 
Taffection  des  Musulmans  de  Syrie,  tan- 
dis  que  sa  police  rigoureuse  rendait  la 
s^urit6  aux  villes,  et  que  son  adminis- 
tration ni  exigeante  ni  tracassi^re  rap- 
pelait  le  commerce  que  la  guerre  avait 
^arte. 

Quoiqu'il  ait  eu  d^s  lors  une  predilec- 
tion marquee  pour  Damas ,  et  qu'il  edt 
fait  de  cette  capitale  sa  residence  habi- 
tuelle,  il  n'en  inspectait  pas  moins  lui^ 
m^me  les  autres  districts  de  son  gouver- 
nement, y  maintenait  un  ordre  s^v^re,  et 
chercbait  k  leur  rendre  leur  ancienne 
tranquillite.  Grdce  a  sa  main  ferme  et 
a  son  oeil  vigilant,  la  Syrie  put  assez 
vite  effocer  les  ravages  de  la  guerre. 
Soumise  presque  tout  entiere,  elfe  n*a- 
vait  plus  a  craindre  oes  courses  d^sor- 
donnees  que  les  Arabes  maraudeurs 
entreprenaient  sur  tous  les  points,  du- 
rant  fa  lutte  entre  les  Musnlmans  et  les 
Remains.  Cette  infortunee  province 
put  done  reprendre  haleine;  les  agri- 
jpulteurs  revinrent  dans  les  campagnes , 
les  industriels  dans  les  cit^s,  les  n^go^ 
ciants  sur  le  littoral.  Ce  calme  momen- 
tan6  fut  aussi  salutaire  k  la  Syrie  qu*il 


94 


L^UhivMS. 


fiit  utile  a  son  gouvenieur.  La  Syrie, 
naturellement  letionde  et  riche,  guerit 
peu  a  peu  ses  blessures,  repara  ses 
pertes,  et  se  reprit  a  vivreaans  soq 
BieD-^tre  prdc^ent;  Moawiah  se  Ot  des 
partisans ,  dout  le  nombre  augmenta  de 
jour  en  jour  et  qui  lui  servirent  au  mo- 
flient  decisif  de  sa  vie  beaucoup  plus 
que  n'auraient  fait  des  troupes  nombreu- 
ses.  11  vaut  toujours  mieux  s^appuyer 
sur  un  peuple  que  sur  une  arm^.  Moa- 
wiah, peoetr^  de  la  y6tii6  de  ce  pr6- 
cepte,  oe  cessa  jamais  de  le  mettre  en 

Sratique,  et  liu  dut  en  partie  sa  graa- 
eur  dans  Tavenir. 

HOBT  D'HBJaAGUUS    (*). 

Tandis  que  Moawiah  adminlstrait  la 
Syrie  avec  une  sagesse  aussi  noble  que 
rare,  Amrou-Ben-EI-As  s'emparait  de 
r.Egypte  avec  une  rapidite  merveilleuse. 
Tout  devait  c^er  desorinais  a  cette 
nation  arabe,  dans  le  sein  de  laquelle 
se  rencoutraient  a  la  fois  de  grands  ge* 
ne.raux  et  d'habiles  adininistrateurs. 
L*enipire  byzantin,auoontraire,  voyait 
annee  par  annee  ses  plus  belles  provin* 
ces  oonquises,  ses  ridiesses  dispers^, 
ses  troupes  battues,  et  ses  plus  belles 
^glises  changees  en  mosquees*  Hera- 
clius,  accable  dechagriua  et  d  mflnnit^, 
se  mourait  au  milieu  de  ses  eunuques, 
et  n'osait  plus  interroger  ses  ministres, 
de  peur  d'apprendre  oe  nouvelles  d^fai- 
tes ,  de  nouveaux  malheurs.  II  vegeta 
•insi  dans  risolementetdansrignorance 
jusqu'en  Tannee  641  ^  et  s'eteignit,  inu* 
tile  a  son  peuple,  funeste  a  son  empire^ 
a  cliaree  a  lui-m^me.  Tout  semblait,  da 
restej'^.raseret  le  desesp^rer :  son  Gls 
alne  Constantin,  u^  desa  premiere  femme 
Eudoeie,  n'avait  montr^aucunegrande 
qualii^,  auoune  vertu  de  prince,  et  nc 
meritait  point  le  titre  d'erapereur,  quMl 
avait  re^u  presque  des  sa  naissance.  Sa 
sante,  d'ailleurs,  etaitd^ja  chancelante, 
et  faisait  craindre  qu'il  ne  surv^()t  que 
peu  de  iours  a  son  pere.  Le  second  fils 
d'Ueraclius,  Beracl^onas,  etait  un  jeune 
horame  de  dix-neuf  ans,  aussi  faibie  de 
corps  aue  d'esprit.  Sa  mere,  Timpera* 
trice  Martine,  ^tait  une  femme  aussi  le- 
gere  qu*ambitieuse:  o'^tait  elle  qui  avail 

.(*)  Voyez  Tbtopbaoe,  Gedrenas  et  Nic^- 
phonu 


MLoit^  jadis  la  jalousie  4oii«l« 
reur;  et  depois  elle  rat  veil 
haine  profonde  au  fils  (fKadocie,! 
lequel  elie  ne  voolait  pasfiT' 
nas  partigeAt  Tempire  seloalesi 
d*Heraclius.  Ainsi  les  t 
rieurs  venaient  ajouter  leon  i  ^ 
aux  souffranoes  imp^ates  qn^ 
biaient  H6raciiu8.TnstepriDee^l 
in  du  regne  teraissait  la  gioinf 
eampagnes  oontre  les  Purses  li ' 
aoquise  I  Actif  et  brave  par  t 
avait  reneootr6en  hii  asseidepi 
pour  Tainere  un  despote  d^toli  J 
roes,  un  peuple  en  diesdeBCfl,)! 
aes;  mais  il  n'avait  pu  latter,  1 
•es  premiers  et  ridicules  dedaroiij 
un  nomme  de  gdnie,  sorti  (foaf 

Effrayante  p^6tie  desjnM 
fortune!  le  vainqueurd'hier^'^ 
vaincu  d'aujourd'hui ,  let 
des  armtedii  grand  rois'ei 
sement  devant  ies  premi^k 
discipline  des  Arabes.  Maisa 
radius  ^tait  trop  au-desseusde^ 
il  lui  edt  fallu  autant  d'ardeorqi 
denoe,  aotant  de  persev^raoeal 
aoudainet^,  etii  nWtauGaeel 
grandee  vertus  prinei^res.  "' 
nous  Tavons  d^a  dit,c'estiae 
tionoouronn^:  o'estdomsfirr 
dans  les  conseila,  le  doateq 
d^ider,  etc|uiplsestgua«l(»l 
d^ ,  la  mollesse  ouand  u  faet  a 
eonstanoe  quand  il  faut  | 
mobile  que  la  boussole,  iii . 
moindre  impuision;  il  eedeiti 
mouvements  qui  Tattireat  saT 
nattrela  cause.  II  luisuffitdef 
sanoe  occulte  pour  se  ercMfM 
fatalement  par  un  pouvoirtpn 
etqu*il  appelle  ledestia  ou  iaP 
afin  de  lui  laisser  la  respoD 
torts. 

Mahomet,  au  eontraire,  lep 
versaire  s^eux  dH^racU^Jl  ■ 
est  rikomme  ardent,  mais  ww}n 
me  qui  salt  attendre,  etoe  sed 
jamais;  Thomme  qui  a  etudie  1 
mouvements  du  eoeur  et  de  Pes 
sait  a  quelle  6poque  nalt  la  i 
id6es ,  d  nuel  eigne  on  la  r( 
eorobien  il  est  important  ^^^* 
qui  devine  quand  ii  foot  parier  < 
taire ,  ^uand  il  faut  s*arrlter  ooi 
qui  voit  une  beUe  oocasion  et  #• 


STRI£  MODfi&NE. 


9a 


UtoorDe^parce  qu*il  y  manque  encore 
pe  condition  de  ^ucces ;  dont  la  pro- 
Mde  prevoyaace  peoetre  TaveDir :  pro- 
pete,  parce  qaHl  lit  au  food  du  coeur 
^D  at  qii^ii  en  mesure  les  batte- 
mtB ;  tour  a  tour  le  olus  doux,  le  plus 
pd.  le  plus  clement,  le  plus  implaoabie 
%  chefs  de  peuule ;  le  plus  brave  des 
lainaDdants  d  arm^e,  mais  le  moins 
IBse  de  vainere.  Or  Mahomet  creait 
K nation,  et  il  la  fit  ^  son  image;  H^- 
Kuspr^idait  a  une  decadence,  et 
e  parTiQt  qu'a  en  precipiter  la  chute. 
Wideux  hommes  avaient  bouievers^ 
paoode  au  commencement  du  sep- 
RKsiecle,  Tun  par  son  genie,  Tautre 
^  SOD  incapacity.  Sans  Mahomet ,  il 
^T>it  pas  de -nation  arabe;  avec  un 
R  ^u'Heradius  peut-^tre ,  Tempire 
itiQ  ne  perdait  pas  la  Syrie  et  Vt,- 
sa  grande  manufacture  et  son  ine- 
\e  grenier.  Les  Romains,  qui  a*^ 
encore  trouv^s  assez  d^^nergie 
ft  de  puissance  militaire  pour 
les  armees  nombreuses  et  regu- 
des  Perses,  auraient  certes  bien  pu 
)ser  victorteusement  a  Tinvasion 
iusiilmans.  Mais  leur  prince  sans 
ijaoce,  capricieux  et  leger,  incons- 
et  vain,  crut  avoir  m^rite  sa  gloire 
umiliantson  rival  Cbosroes,  et  des 
il  s'eodormit  sur  ses  faeiles  lauriers. 
recounaitre  le  danger ,  il  lui  fallait 
cagement  d'une  province  tout  en- 
Dans  lamieux  combing  des  coa- 
ilne  vit  longtempsqu'unelutte 
:il  n*opposa  que  des  digues 
iQtes  centre  les  premiers  flois 
n ;  et  quand  vinrent  eniin  les 
romaines,  il  ^tait  trop  tard,  et 
OS  se  garda  bien  de  les  comman- 
oipersonneJl  dedaiguait  les  Arabes 
^inmeneementdela  guerre,il  les  crai- 
italafio;d'abord  ce  tut  de  sa  partsuf- 
■  B,  ensuiie  ce  fut  Idchete.  La  Provi- 
semble,li  certaines  ^poques,  coo- 
ler des  peuples  a   Tmaction    en 
jjant  leurs  chefs ,  et  renouveler  la 
\  de  la  terre  en  faisaut  surgir  du 
leu  des  sables  briUaots  des  esprits 
-neuraqui  rallient  leurs  semblables, 
unpriroent  le  mouvemenl,  leur  ins- 
nt  desidees,  leur  proposent  un  but. 
oeslin^d'Hdracliusetait-elied'abais- 
lon  empire,  de  m^me  que  celle  de 
mtd'endleveron? 


'  Rien  n*68t  plus  prompt  gae  la  crois^ 
sance  d*une  nation  predestinde  k  la  gran- 
deur. A  peine  Mahomet  a-t-il  r^uni  des 
tribus  ^rpill^s  etbostiles  en  un  corps 
compacte  et  uni,  que  les  hommes  utiles 
se  pr^entent  en  foule,  et  selon  les  be- 
soins  t^uccessifs.  Apr^  les  generaux  , 
les  organisateurs ;  apresKhaled,  Moa- 
wiah.  Quand  un  peuple  en  est  arrive  k 
cet  6tat  d'extr^e  eoullitton  d^oii  nais- 
sent  les  revolutions  ou  les  transforma- 
tions sociales ,  les  gloires  et  les  profits 
nationaux ,  11  nalt  ooup  sur  coup  dans 
son  sein  les  aptitndee  et  les  talents  les 
plus  divers,  les  plus  nobles devouements, 
les  plus  grands  courages.  Tout  mOritvite 
sous  Toeil  d'un  homme  de  g^nie ,  ce 
soleti  humaln ;  chacun  suit  avec  enthou- 
siasme  sa  lumineuse  direction.  Sa  pen- 
s^e  enfante  des  merveilles,  sa  volofit^ 
cree  des  vertus,  et  les  masses  recon- 
naissantes ,  dans  leur  stupefaction  admi- 
rative^  nomnient  ces  hommes  de  genie 
despropheteset  leurs  aetes  des  miracles; 
tanais  que  leurs  adversaires,  les  envieux, 
les  vaincus,  les  appellent  des  imposteurs , 
ettraitent  de  fanatisme  Texaltation  qu'ils 
allument  dans  le  coeur  de  leurs  parti- 
sans. Quoi  qu'on  dise  ou  qu*on  fasse  au- 
tour  d'eux ,  ces  hommes  de  g^nie  vien- 
nent  toujours  a  point  pour  r^ussir :  les 
chemins  seniblent  leur  avoir  ete  prepa- 
res; lescapaciiesdetoutessortesleur  font 
cortege.  Voyes  Mahomet :  dans  ses  pre- 
miers adherents  il  y  avait  Tetoffe  dedeux 
khali fes  capables  d'achever  son  oeuvre, 
Abou-fiekr,  Tunitaire,  Omar,  le  conqu6- 
rant ;  dans  ses  premiers  compagnons  il 
y  avait  des  beros  qui  s'illustrerent  tour 
a  tour,  Ali,  Zajd,Ozama,  Dherar,  Schou- 
rahbil,  Abou-Obaida,  Kiialed,  Amrou- 
Ben-Ll-As ,  et  tant  d'autres ;  dans  un  de 
ses  secretaires  enfiii,  Moawiah,  un  futur 
fondateurdedynastie :  c'est  dece  dernier 
que  nous  avons  maintenant  a  nous  oc- 
euper. 

PBfiMlkRBS  BXPBDITI0N8  MABITIMBS 
DBS   ARABES. 

Une  £ois  qu'il  se  fut  cr^^  un  grand 
nombre  de  partisans  par  ses  avances  ju* 
dicieusement  faites,  une  fois  qu*il  se 
fot  forme  on  tr^sor  par  ses  economies, 
une  armee  parson  babilete,  Moawiah 
parvint  k  pacifier  preaqiie  entidrement 


06 


L*ITNlVERS. 


la  Syrie,  et  forca  le  reste  des  8o1dats  de 
Tempire  byzantin  k  sejeter  danslesmon- 
tagoes  du  Liban.  II  ne  commit  |)as  la  faute 
de  les  poorsuivre  dans  ce  dernier  refage, 
etillaissase  former,  derri^re  ees  roches 
inaccessibles,  un  noyau  de  dissidents 
({u'il  paraissait  avoir  envie  de  ne  point 
inquieter,  soit  quil  songedt  h  les  faire 
revenir  h  lui  k  force  de  longanimity^  soit 
qu'i  1  voul  dt  conserver  un  foyer  de  guerre, 
propre  a  entretenir  le  courage  et  Tacti- 
vit6  de  ses  troupes.  Pour  occuper  les 
plusardents,  il  piensa  alors  k  pousserdes 
reconnaissances  en  AsieMineure,  et  il 
chargea  Habib,  Tun  de  ses  lieutenants, 
commandant  de  la  place  de  Kinesrin , 
de  s'avancer  jusqu'en  Armenie.  II  savait 
que  cette  province  6tait  en  perpetuelie 
agitation,  qu*une  foule  de  petits  princes 
s'y^taient  declares  ind^penoants  aeCons- 
tantinople ,  et  s'y  disputaient  la  domi- 
nation. 

Habib  obtint  les  succes  que  Moawiah 
avait  prdvus;  ce  chef,  aussi  bardi  que 
rapide ,  p^n^tra  sans  difficult^  dans  ce 
pays  divis^,  entra  dans  plusieurs  vil- 
,  les,  enleva  de  nombreux  butins,  et  vint 
enfin  mettre  le  si^ge  devant  Dovin ,  la 
capitale ,  cit^  riche  et  r^idence  du  pa- 
triarche  grec.  Apres  quelques  combats, 
oil,  faute  d*unit^  dans  le  pouvoir,  les  Ar- 
m^niens  furent  facilement  vaincus,  Ha- 
bib forca  Dovin,  la  saccagea,  et  diri^ea 
sur  la  Syrie  trente-cinq  mille  captifs. 
Puis,  non  content  de  cette  premiere  vic- 
toire,  le  bouillant  g^n^ral  arabe  entre- 
prit  la  conguSte  de  rlb^rie,  s*empara  de 
Tiilis,  cher-lieu  actuel  de  la  Georgie, 
montadaiis  le  Caucase,  et  y  vainquitplu* 
sieurs  peuplades  barbares  (*).  . 

A  mesure  qu^Habib  avancait  vers  le 
nord ,  il  soumettait  au  tribut  les  popu* 
lations  qu*il  avaitdomptees,  et  envoyait 
de  temps  a  autre  des  prisonniers  et  des 
d^pouilles  k  Tbeureux  gouverneur  de  la 
Syrie.  Moawiah  futfort  satisfait  de  son 
lieutenant;  mais,  plus  prudent  que  n'^ 
tait  Habib,  il  lui  donna  I'ordre  de  s*ar- 
r^ter  enfin.  Get  ordre  arriva  trop  tard: 
Habib  avait  franchi  Bab-alAbouad^ 
la  Portedes  Partes,  led^file  de  Derbend; 
et  avec  une  arm^  6puis^e  par  ses  propres 
succes  il  eut  encore  la  t^m^rit6  de  s^en- 
gager  dans  les  steppes  immenses  qui 

(*)  Voyez  Asolik,  histuHen  arm^nien,  et 
Deoys  de  Talmahar,  bistorieii  syrieb. 


longent  la  mer  Caspieime.  U,  dit< 
il  fut  bient6t  entour^  par  lo  fuo 
Khazars ,  et  lot  vaincu  et  mis  ii 
par  leur  khakan.  Malgr^  son  ism 
cheuse,  cette  expMitioD  n'en  aa^ 
pas  moins  la  terreur  qaUnspinierti 
armes  musulmanes,  etservit  am    ' 
que  Moawiah  avait  form^  0* 

Tranquille^  en  effet,  du  o6te  (h< 
nent,  certain  de  son  ascendant 
Syrie,  Moawiah,  le  premier  d'l 
Arabes,  pensa  a  la  roer,  et 
^tendre  sa  domination.  II  demaula 
Il  Abd-Allah-Ben-Saad,posiesseiiri 
lexandrie,de  lui  envoyer  tons  la' 
seaux  qu'il  avait  trouv^  dans  k 
de  cette  grande  eit^.  Celui-d  iuia^ 
diadix-sept  cents,  nombrecoi  '" 
mais  qui  s  explique,  en  faisant 
ligne  decompte  les  bateaux  de 

f  grandeurs ,  les  galores  de  ^erre( 
es  simples  barques.  Moawiab '' 
formidable  flotte,  trouva  des 
la  diriger,  sV  embarqua  lui- 
porta  a  abord  sur  File  de  Gbyprt. 
v^  de  cette  colossale  expedition, 
Byzantins  s'dtaient  bien  gard^ 
voir ,  jeta  T^pou  vante  dans  IDe 
A  peine  les  Ghypriotes  se  d^e 
lis :  on  saccagea leurs  propria 
vagea  leurs  champs,  on  pilla  lenri' 
et  dans  Gonstantia,  la  ea{nta)e,Qi 
tit  la  grande  ^ise  fond6e  pv] 
Epiphane.  Mais  la  bataille  une'^ 
min^e,  quand  les  habitants  nefii 
aucune  resistance,  Moawiah  se 
aussi  r^erv^,  aussi  cl^meot, 
n^reux  qu*il  avait  €l6  fougueux 
tion.  II  arr^ta  le  pillage,  ii 
massacre ,  il  traita  ses  noaveaisi 
avec  douceur  et  justice,  et  se 
d*imposer  aux  Ghypriotes  un  ^ 
nuel ,  qui  n'^uivalait  qu*k  la 
imp6ts  que  Hie  payait  il  r( 
Constantinople  (**). 

DeChypre,  Moawiah,  avantdeil 
neren  Syrie,  dirigea  sa  flotte  ncK^ 
vers  la  petite  tie  d'Aradus,  dopk 
nait  k  s^emparer.  Nous  avons  ditl 
notre  description  du  pachalick  f 
poli ,  que  ce  vaste  rocner ,  qui  n^ 
aujourd'hui  qu^un  ^cueil,  avait/' 
un  petit  £tat  florissant.  L*ui 

(*)  Voyez  roavra«edeMoaridJtd]Ob« 

tnUtuI^  :  Des  Peuplea  du  CMtcM;,J^-, 

r)  Voyei  Enlychlus  et  IHcM  d'AaW" 


SYRIE  MODERNE. 


97 


avail  enriehi  les  Aradiens;et,  lors  des 
grandes  conqu^tes  des  Perses,  des  Ma- 
cedoniens,  aes  Romains,  pour  conser- 
Ter  leur  fortune,  ils  sacrifierent  leurin- 
dependance,  et  se  soumirent  tour  a 
touraux  differents  vaiaqueurs  du  conti- 
nent. Pourtant  ils  ne  voulurent  pas  agir 
avec  les  Arabes  comme  avec  les  pr6e^ 
dents  dominateurs  de  TAsie.  Assures  de 
la  force  des  murailles  de  leur  cit^ ,  ils 
ne  repondirent  aux  sommations  de  la 
flotte  musulmane  que  par  Ic  refus  posi- 
JLii  de  se  rendre.  Alors  Moawiah  com- 
inen^a  Tattaque ,  et  fit  battre  la  ville 
aux  endi*oits  qu'il  crut  les  plus  faibles. 
Les  murailles  r^sisterent  aux  efforts  des 
machines;  et  comme  il  n^^tait  pas  pru- 
dent de  demeurer  trop  longtemps  en 
mer,  expos^  a  une  temp^te  qui  aurait 
pu  d^tniire  tons  les  navires  musulmans, 
Moawiah  d^puta  vers  les  Aradiens  un 
certain  Thomaricle ,  ancien  ^v6que  d*A- 
pam^ ,  avec  la  mission  d'engager  ses 
coreligionnaires  a  se  rendre ,  s'lls  vou- 
laient  ^viter  la  mort ,  comme  punition 
de  leur  resistance  obstinee. 

Les  Aradiens,  loindese  soumettre,re- 
pouss^rent  toute  proposition,  et  conser- 
verent  parmi  eux  1  ev^que  qu*on  leur 
avait  envove.  Quoi  gu'il  en  fdt,  Moawiah 
'ne  s^abandonna  point  k  un  ent^tement 

?ui  aurait  pu  lui  ^tre  funeste ,  et  comme 
biver approchait,  ilfit  rentrer  ses  vais- 
seaux  dans  les  ports  de  son  littoral , 
retourna  de  sa  personne  k  Damas  ,  et 
remit  k  Tann^  suivante  la  prise  d'Ara- 
dus.  L'ann^  suivante,  en  effet,  il  in- 
vestit  de  nouveaa  la  petite  place  mari- 
time. Cette  fois  les  Aradiens,  effrayes  de 
la  persistance  des  Musulmans,  se  soumi- 
rent, a  condition  qu'on  les  laisserait  se 
retirer  ou  bon  leur  semblerait.  Moawiah, 
qui  ne  se  souciait  pas  d'avoir  sur  ses  c6- 
tes  une  place  ennemie ,  un  refu|y(e  pour 
les  Clottes  romaioes  qui  pourraient  un 
jour  debarquer  sur  ses  rivages,  n^^tant 
pas  d'aiileurs  assez  sdr  de  pouvoir  ti- 
rer  parti  lui-m^me  de  ce  poste  maritime, 
fit  detruire  par  le  feu  la  ville  d*Aradus, 
^sa  ses  murailles ,  et  d'un  port  fit  Te- 
Weil  actuel  (*). 

Duraut  ces  hostilites  r^p^t^,  durant 
^f  courses  d^vastatrices  dans  TAsie 
Mineure,  ce  pillage  de  FA rmenie ,  cette 

C*)  Voyez  Thoopbane. 

7"»«  Livraison.  (Syrib  Modebne 


prise  d'une  tie  importante,  Chypre, 
cette  destruction  a*une  place  forte, 
Aradus,  que  feisait  done  Fempereur 
romaln?  L*empereur  romain  ^tait  un 
enfant.  Constant  II,  couronne  a  onze 
ans,  orphelin  et  abandonn^.  Constan- 
tin,  fils  ain^  d'H^raclius,  ^tait  mort  a 
rUge  de  vinj^-huit  ans,  min6  par  Fair 
de  Gonstantmople,  qui  ^tait  funeste  a  sa 
ch^tive  sant^ ,  et  en  tremblant  pour  les 
jours  de  deux  enfants  en  bas  dge  que  lui 
avait  donnas  sa  femme  Gregoria.  Ce 
prince  debile  n'avait  pas  r^gn^  quatre 
moi8,et  Fon  accusa  encore  sa  belle-mere, 
Marti  ne ,  d'avoir  avanc^  sa  fin  par  le  poi- 
son (*). 

Dans  Fespace  si  court  durant  lequel 
il  avait  ete  empereur,  Constantin  n  eut 
que  le  temps  de  commettre  une  action 
odieuse,  qui  sans  doute  lui  porta  mal- 
heur.  Le  tr6sor  de  Fempire  ^tait  vide, 
et  le  tresorier  Philagrius  conseilla  a  son 
mattre  de  violer  le  tombeau  d^Heraclius 
pour  en  enlever  une  couronne  d*or  de 
soixante-dix  livres  pesant,  dont  le  triste 
adversaire  de  Mahomet  s'etait  orn^  dans 
son  sepulcre.  On  brisa  done  le  cercuciJ 
de  Fempereur  d^ced^,  et  la  couronne 
d'or  tenait  tellement  k  la  tSte  du  cada- 
vre,  qu'il  fallut  Farrachcr  avec  effort, 
et  qu'il  y  resta  fix^  quelques  cheveux 
blancs  du  malheureux  prince.  Deplora- 
ble et  honteux  moyen  de  se  procurer  un 
peu  d'or  que  le  fils'impie  n'eut  pas  mdme 
le  loisir  d*employer !  Ueracl^onas ,  qui , 
dans  le  principe,  devait  partager  Fem- 
pire avec  son  frere  atne«  fut  incapable 
de  gouverner  seul.  On  se  souleva  cen- 
tre lui ,  on  le  d^posa ,  et  le  jeune  Cons- 
tant fut  elev6  a  sa  place.  Puis,  ajoutant 
Foutrage  k  la  d^possession ,  la  cruaute 
a  la  rigueur  pohtique ,  on  fit  le  proces 
du  fils  et  de  la  m^re,  de  Fimbecile  Ue- 
racleonas  et  de  Finfdme  Martine;  on 
coupa  la  langue  a  Fune,  le  nez  a  Fautre, 
et  on  les  exila  ainsi  mutil^.  Les  hom- 
mes  obscurs ,  qui  conseillerent  le  jeune 
empereur  Constant  II ,  loin  de  songer  a 
se  defendre  contre  les  Arabes ,  ne  pen- 
serent  qu*aux  disputes  theologiques  qui 
divisaient  alors  le  miserable  empire  by- 
zantin :  les  pr^tres  seuls  regnaient  la  6u 
il  aurait  fallu  des  guerriers. 

Moawiah  n*avait  plus  que  queiques 

(*,  Voyez  Nic^pliorc  et  Ceclrfnite 


^ 


L'UNIVEM. 


coups  a  frapper  pour  abattre  le  colosse 
romain ,  qui  d^ja  chancelait  de  toutes 
parts.  A  dater  des  Ommiades  (Om- 
mayyades,  devrait-ondire),  la  puissance 
romaine  n'exista  plus  ni  en  Asie  ni  en 
Afrique.  Defk  elle  avail  ete  remplac^e  en 
Syrie,  en  Mesopotamieeten  £gypte,  par 
la  puissance  arabe.  B^k  une  arm^e  mu- 
sulmane  avail  pouss^  )u^u*a  Tripoli  de 
fiarbarie;  plus  lard,  la  m^me  arm^  de- 
vait  marcher  de  victoireen  victoirejus- 
qu'au  detroit  de  Gibraltar,  el  en  lever 
un  des  plus  riches  fleurons  de  la  cou- 
ronne  imperiale ,  la  Sicile.  Les  ev^ne- 
ments  avaienl  toute  la  ri^ueur  et  toute 
la  promptitude  de  la  fatality  :  Fempire 
byzaiitin  etait  condamiie,  el  on  ne  le 
faisailpoiDl  languirdans  son  execution. 
Moawiah  etant  Thomme  auquel  ^tait 
destine  ce  pouvoir  gigantesque ,  il  8*ap- 
pr^tait  a  s'en  rendredigne. 

Moawiah  ne  voulut  pas  laisser  respirer 
TAsie  Mineiire,  etdes  le  commencement 
de  Tannee  651 ,  il  r^unit  de  nouveau  ses 
bataillons,  les  partagea  en  deux  corps, 
ordonna  a  Tun  de  ces  corps  de  se  porter 
au  nord-est ,  vers  les  provinces  transti- 
gritanes,  tandis  mfil  se  mettait  lui- 
m^me  a  la  tete  de  ('autre,  traversail  le 
Taurus ,  et  entrait  dans  la  Cappadoce 
pour  mettre  le  si^ge  devant  G^saree. 
Cette  vilje  resisla  a  son  premier  choc; 
et,  selon  son  habitude,  au  lieude  per« 
dre  son  temps  devant  une  place  ,  Moa- 
viah  repaudit  ses  troupes  dans  le 
pays ,  porta  le  ravage  dans  toutes  les 
campagnes,  et  revint  bient6t  snr  C^a- 
ree.  Cette  cite,  alors,  investie  par  une 
armee  victorieuse,  sans  communication 
avec  le  pays,  sans  espoir  de  secours, 
se  vit  contralnte  de  trailer. 

Moaviah ,  touiours  politique,  se  borna 
5  imposerle  triou  ordinaire  a  Cesaree, 
et  consentit  h  ne  point  y  laisser  garni- 
son.  £n  visitant  la  viile,  en  la  voyant 
toute  remplie  de  superbes  monuments 
et  de  nombreux  Cilices ,  quetques  chefs 
arabes  exprimerent  le  regret  de  ne  point 
s'^tre  em  pa  res  par  la  force  de  tant  de 
richesses.  Mais  Moavriah ,  qui  avail  d^ja 
les  vertus  d'un  grand  prince,  malgrd 
les  observations  qu*on  lui  fit,  n'en  fut 
"las  moins  fidele  a  la  capitulation.  Son 
lut  etait  moins  d'augnienter  son  tr6- 
sor  que  de  jeter  Tepouvante  au  cceur 
du   gouvernement  do  Constantinople. 


I 


Laissanl  done  C^sar^  dee0ti,iltt4 
rSgea  snr  TArmdnie,  dans  laqodeC 
tanl  II  avail  conserve  uoe  oeitamef 
sance,  malsr^  les  pr^cMentes  i  , 
lions  musuTmanes.  Son  apparitioil 
rifia  les  populations,  et  les  it  i 
presque  aussit6l  sous  son  jooi 
succes  fdl  re^me  si  grand  que  I 
renr,  de  plus  en  plus  emray^  loide 
une  tr^ve  de  deux  ans.  MoawialJ 
cepta ,  car  elle  lui  donnait  le  loisi 
peeler  la  Syne,  de  faire 
armees ,  el  de  poursuivre  le  b 
plan  qu'il  avail  conibii)6  (*). 

Moawiah,  qui,  commenoosF 
d^j^  vu,  ne  se  eontentait  pas  del 
ner  sur  le  continent,  se 
cr6er  une  marine  capable  de  | 
guerre  au  centre  rawnedereo 
de  jeter  une  arm^  autoar  deC 
linople.  entail  vouloir  eo  yr  j 
coup  avec  les  Romains ;  mais  t 
jel  etait  Irop  audacieux  et  trop? 
pour  reussir  encore.  Oe  tffUi 
Moawiah  qu*il  appartenait  de  « | 
maftre  de  cette  capitale  des  r 
pourtant  Fessai  qu'il  en  fit  pro 
grand  effet ,  el  lui  fit  un  grand  h 
Tout  immense  qu'etait  son  am 
elle  n'en  ^tait  pas  moins  pr 
r^ee  :  il  ne  se  hasarda  doitfj 
brusquemenl  k  mettre  en 
qu*il  avail  con^u ,  et  il  foultrtq^ 
ses  marins  avant  de  leur  imp** 
si  rude  tdche.  En  deux  ans  I 
avail  ^uip^  une  nouvelle  flotteiJ 
cents  bdtiments ;  et  la  tr^ve  ar 
pereur  termini ,  il  donna  le  e 
dement  de  celle  flolle  a  AboaT 
lui  prescrivantd*attaquerrar( 

AbouTawar  se  porta  d^aT 
de  Cos,  et  h  peine  ses  vatssearafl 
ils  arrives  que  la  trahison  d'|H 
livra  lile  au  g^n^ral  rousuhiiafl.* 
y  trouva  de  nombreuses  riches 
ravitaillements  de  toutes  ^^f^^ 
truisit,  avant  de  se  relirer,  a  «^ 
qui  commandait  la  ville.  DelaHfl 
vers  ia  grande  tie  de  Crete;  rnatfjj 
dil  pas  s'il  la  conquit,  eton  I? 
queique  temps  de  la ,  revenir  a  ri 
rile  de  Rhodes,  dont  ils'crop8«| 
trop  de  difficult^s.  Panni  ie  jjoMJ 
trouva  dans  Cette  derniere  ne, 

(*)  Voycx  Elmacin  el  Aboa'  I' Wi 


SYRIE  MODKRNE. 


09 


nalepSusles  Arabes,cefut  keele- 
Mosse  en  bronze  qu'on  attribue  k 
fii  de  Linde,  ^eve  de  Lysippe. 
IB  statue,  qui  n'avait  de  valeur  que 
\n  grosseur  prodigieuse,  demanda 
|n  aos  de  travail,  et  codla  trois 
li talents,  environ  treize  cent  cin- 
iBte  mille  livres  actuelles.  Un  de  scs 
jj^  surpassait  en  ampleur  le  corps 
""io ,  et  sous  ses  deux  jambes  pas- 
sans  peine  les  plus  fortes  galores, 
a  Fentr^  du  port  de  Rhodes  , 
demeura  intacte  que  cinquante' 
;  an  bout  de  ce  demi-siecle  un 
mentde  terre  abattit  cette  mons- 
merveille.  Les  Musulmans  ad  mi- 
les debris  ^normes  du  colosse, 
!nt  d'en  extraire  le  bronze,  de 
ter  ea   Syrie,  et  on  pretend 
joif  d'fimese  en  acheta  les  mor-* 
i  Moawiah ,  et  en  chargea  jusqu'a 
qoatre-viQgts  chameaux. 
sa  flotte  fut  rentree  a  TripoK 
Moawiah   r^para  les  pertes 
vrMt  eprouv^s ,  Taugmenta  en- 
:9e  piques  vaisseaux,  en  laissa 
^mandement  a  AbouT  awar,  et  lui 
<les  instructioiis  pour  aller  atta- 
CoDstantinople ,  tandis  que,  lui 
liih,  feralt  one  diversion  en  Asie 
.  ToQS  les  preparatifs  ayantite 
ftement  termines,  la  flotte  n'at- 
Rt  plas  qu*un  bon  vent,  lorsque 
Tripolitains,  qui   ^aient  rest^ 
an  ehristianisme  et  a  Tempereur, 
It  on  projet  aussi  noble  qu*au- 
llfallait  que  lecoeur  de  ces  deux 
i,qui*taient  frires,  f At  bieo  baut 
^pourqoe,  dans  un  siecie  ou  leurs 
itnotes  ^taient  tomb^  si  bas ,  se 
^^X  toujours  si  faibles  et  quel- 
ii  a  llcbes,  ils  tentassent  de  sau- 
\  eox  deux  Tempire  meoac^,  et 
pirer  aiosi  a  tous  les  Grecs  le  cou- 
de  repousser  Tenvahissement  de 
Bl.  Affrontant  les  dangers  les  plus 
iif  d^id^  k  tout  braver  pour  leur 
to  cause,  lis  choisirent  une  nuit 
ifdorant.laquelle  les  Musulmans, 
ides^urit^  au  eentre  de  leurs  con- 
kfS'etaientreldches  de  leursurveil- 
t>pour  forger  les  gardien&d'unedes 
^s  de  la  ville ,  pour  d^livrer  les 
ins  captifs ,  pour  les  armer  comme 
,^  rent,  et  les  entratuer  a  leqr  suite, 
^audace  m^me  de  ce  coup  de  inaiu , 


la  promptitude  avec  laquelle  il  fut  ex^ 
cut^,  la  surprise  des  Arabes,  Tepou- 
vante  des  autres  habitants  dela  cit^, 
toutes  ees  causes  r^unies  servirent  au 
succ^  de  rheroique  entreprise  des  deux 
freres.  Loin  d'ailleurs  d'occuper  ceux 
au*ils  avaient  delivr^s  a  tirer  vengeance 
de  leurs  enneniis,  a  piller  la  ville,  k 
massacrer  la  garnison ,  ils  se  hSterent , 
au  contraire,  de  diviser  leur  troupe 
en  deux  bandes ,  afln  que  Tune  se  por- 
\At  sur  la  deiTieure  du  gouverneur  ma- 
hom^tan,  et  le  mtt  a  mort,  co()te  que 
ooilte^  pour  emp^cber  qu*aucun  ordre 
superieur  ne  rallidt  les  Arabes,  et  aOn 
que  Tautre  division  pOt  se  frayer  le  plus 
rapidenient  possible  une  roqte  jusqu*au 

Rort.  La  premiere  bande  parvint  a  tuer 
)  gouverneur,  et  jeta  la  confusion  dans 
son  palais;  la  seconde  bande  arriva  au 
port  malgre  mille  obstacles,  v  alluma 
un  grand  feu ,  et  incendia  la  flotte  mu  • 
sulmane.  EnGn,  tous  ces  mouvements 
fiirent  si  vivement  et  si  habilement 
ex^cut^s,  que  les  deux  freres  eurent 
encore  le  temps  de  d^gager  un  des 
meilleurs  navires,  de  s'y  embarquer 
avec  les  Romains ,  et  de  s'enfuir  a  Con- 
stantinople. Les  ingrats  oontemporains 
de  ces  deux  heros  ne  nous  en  ont  point 
conserve  le  nom  (*). 

Moawiah  avaitdeja  assezde  puissance 
pour  reparer  promptement  les  domma- 

fes  que  rincendie  avait  faitsa  sa  marine, 
ourtant,  quelle  que  ftit  Tactivite  qu'il 
d^ploya,  les  deux  Tripolitains  eurent  le 
temps  d'aborder  a  Constantinople ,  d'y 
Jeter  ralarmeetd'exciler  teilenient  Thon- 
neur  de  leurs  compatriotes,  qiiMIs  se  de- 
ciderent,  de  leur  c6t6,  h  equiper  une 
flotte,  et  a  s'opposer  a  Tattaque  dos  Mu- 
suimans  sur  terre  comn^e  sur  mer. 
L*empereur  Constant  it,  qui  avait alors 
vingt-eihq  ans,  se  vit  force  par  Topinion 
publique  de  se  mettre  lui-meme  a  la  t^te 
de  son  armee  navale.  Les  deux  flottes 
flrent  chacune  la  moitie  du  chemin ,  et 
se  rencoittrerent  sur  les  rivages  de  la 
Cilicie ,  entre  Rhodes  et  legolfe  dePam- 
phylie.  Les  Romains,  les  premiers, 
s'^lanc^rent  contreles  vaisseaux  arabes : 
le  choc  fut  des  plus  violents ,  les  epe- 
rons  de  presque  toutes  les  galores  grec- 
ques  penetrerent  dans  le  flauc  des  ga- 

(*)  Voyex  Tli^pbane. 


100 


LUNIVERS. 


I^resmusulmanes,  et  dolors  commen<^ 
un  immense  combat  d'abordage.  Les 
Arabes  avaient  soutenu  avec  im  grand 
sang-froid  et  une  grande  Intr6piafit^  la 
premiere  attaque  des  Romains ,  et  bien- 
t^t  les  baches  et  les  sabres  Orent  mu- 
tuellement  leur  devoir.  La  met,  au 
bout  de  queloues  heures,  etait  toute  cou- 
verte  de  deoris  de  navires  et  toute 
rouge  de  sang  humain.  La  m616e  se 
montrait  surtout  furieuse  autour  du 
vaisseau  que  montait  I'empereur  byzan- 
tin.  Quels  que  fussent  les  efforts  qu'il 
lit  sur  lui-m6me,  le  jeane  prince,  peu 
habitue  a  de  semblables  batailles ,  fut 
saisi  d'effroi ,  et  aOn  de  sauver  sa  vie  <, 
qu*il  se  repentait  maintenant  d'avoir 
compromise  dans  une  pareille  bouche- 
rie,  il  eut  la  Idchetede  changer  d^babit 
avec  un  soldat.  Malgr^  ce  honteux  de- 
guisement,  il  n*aurait  pas  encore  ete 
sdr  de  s^^chapper,  si  Tun  des  deux  fre* 
res  tripolitains  ne  s*etait  pas  trouve 
aupres  de  lui ,  et  ne  Teilt  pas  transport^ 
sur  ses  6paule8  dans  un  autre  navire. 
Le  h6ros  qui  venait  de  retirer  du  car- 
nage  un  prince  pusillanime  eut-il  honte 
de  la  decadence  des  siens ,  de  Tignomi- 
nie  du  rejeton  imperial;  oubiendeses- 
perait-il  de  la  victoire ,  et  ne  voulait-il 
pas  survivre  a  une  d^faite  qui  devait 
rendre  inutile  son  magnanime  devoue- 
ment?  Dieu  le  salt.  Toujours  est-il  que 
ce  brave  entre  les  braves ,  soit  desespoir, 
soit  intention  ignor^,  retourna  sur  le 
vaisseau  le  plus  expos(6  de  la  flotte  grec- 
gue ,  et  s'y  fit  tuer  en  combattant  une 
loule  d'ennemis,  et  au  moment  m^ine 
ou  les  debris  de  la  flotte  romaine  s'en- 
fuyaient  a  toutes  voiles  et  a  toutes  ra- 
mes  (*). 

GUEBRES  GlYILSS  ENTRE  LES  ARABES. 

LMmp^ritie  allait  perdre  Tempire  by- 
zantin ,  le  basard  le  sauva.  Au  lieu  de 
profiler  du  desastre  de  ses  ennemis ,  on 
vit  tout  a  coup  Moawiah  rappeler  sa 
flotte  h  Tripoli,  revenir  lui-mSme  de 
TAsie  Mineure,  et  rassembler  toutes  ses 
forces  dans  Tattente  d'un  grand  ev^ne- 
ment.  Cest  que  la  pens^e  de  toute  sa 
vie  allait  se  r^aliser  pour  Tambitieux 
gouverneur  de  la  Syrie,  c*est  qu*il  allait 
avoir  a  jouer  sa  grande  partie. 


Othman  avail  suee^de  k  Omar  i 
le  khalifat;  mais  ce  vieillard,  qoii 
yait  obtenu  qu'une  faiUe  iUm 
parmi  les  siens,  qui  ne  s^etait 
tout  an  plus  qu  homme  de  boo  i 
dans  les  oonseils  de  son  pr^dceesa 
ne  trouva  pas  assez  d*energie  povi 
monter  les  difficult^  de  sahaiitel 
tion ,  k  laquelle  d'aiileurs  il  parrimi 
tard.   Quoique  son  r^e,  (Ta  * 
douze  ans ,  edt  €t&  marque  par  i 
velles  conqu^tes,  ces  conqiietes  ] 
tinrent  plutdt  k  la  valeur  des  ch' 
bes  qu*a  sa  propre  impolsioa. 
comme  kbalife  a  Vige  de  pres  ( 
tre-vingts  ans,  entour^.  tout^Tal 
des  gens  avides,  assailli  par  kse 
d*une  famille  nombreuse,  wq{ 
nement  alia  balssant  d'ann^  cna 
II  en  arriva  m£me  h  destituer  dsf 
fonctions  des  hommes  dignesct^ 
bles,  pour  les  rempiacerparqi  ' 
uns  de  ses  parents,  a  separ^i 
creatures  les  butins  que  lui  i 
ses  g^^raux  vainqueurs ,  i  < 
toutes  les  fa^ns  le  tresor  pubfie^ 

Gontre  ces  fautes  et  ces  depr^ 
Moawiah  se  garda  bien  de  se  i 
il  ^tait  trop  politique  pourcela;iJ 
lai  t  iusqu'au  dernier  moment  seal 
fidele  a  son  souverain.  Mais  les  ] 
nois  ne  pens^nt  point  cominel 
circonspect  d*Abou-Sofian.  A|iia^ 
longtemps  murmur^  contreleff^ 
kbalife,  outr^  de  ses  damiersi 
d'arbitraire  etde  dissipation, ni 
nombre  d'entre  eux  quitt^rent  b] 
avec  colere  et  m6pris,  ets'mi 
camper  dans  la  campagne  a  i 
distance.  De  jour  en  jour  kf 
mecontents  s^augmentait ; 
d'£gvpte  une  deputation  re 
tre   le  despotisme  d'Abd-Al^  i 
d'Othman ,  et  exiger  son  n 
par  Mohammed ,  fite  d*Ab 
khalife,  inquiet^  oar  la  r^voltei 
sante,  conceda,  ann  de  les  apaisi 
que  lui  denuindaient  les  Arabes f 
gypte.  Les  deputes  s'en 
done  satisfaits,  lorsqu'ils  fureotr 
pres  d*ATlath  par  un  oourrifr  { 
d'une   lettre    pour   Abd-Allab. 
lettre  les  intrigua ;  ils  en 


^^,    ^  .  (0  Voyci  Rlmado,Ockley  rt  tTHii 

(*)  Voyez  Thtophane  et  Abou'l-faradJ.  Bibiiotheque  ontntak. 


SYRIE  MODEIUSE. 


(Of 


Mbet,  et  lis  V  lurent  I'ordre  de  inuti- 

ir  Mohammed  et  ses  partisans ,  et  de 

M  peodre  eDsuite  h  des  pakniers.  Get 

nrebarbare  ne  venait  pourtant  pas  du 

isox  khalife;  par  une  negligence  im- 

irdoonableil  ravait  sign^sans  en  pren- 

eonnaissance,  et  avait  et^  tromp^ 

80Q  secretaire  Marwan. 

A  cette  epoque  de  grandeur  exterieure 

lie  debifite  intime  de  I'lslam,  une 

iled'ambitieux  recherchaient  iekbali- 

t,et  Y  tendaient  par  tous  les  moyens. 

lue  toutes  les  villes  importantes 

Dt  leurs  candidats ,  dont  elles  ap- 

}9ientles  intrigues :  Alexandrie  avait 

m  All,   ie  gendre   du   prophete, 

Vrah  tenait  pour  Thasbah,  Koufah 

^yait  Zobair,  enfin   Damas  faisait 

Tceux  pour  Moawiah.  Mais  outre 

competiteurs  presque  avou6s,  il  y 

ivait  d'autres  qui  s'agitaient  dans  les 

tores,  et  parmi  ceux-lli,  Marwan. 

ftieede  flatterie,  il  s'etait  fait  nom- 

MtieeKtaire  d'Othman;  a  force  d*a- 

Une,  il  avait  surpris  sa  confiance ;  a 

IRde  ruse,  iietait  parvenu  a  le  trom- 

tSi,du  reste,  il  avait  envoye  Pordre 

lei  doQt  nous  avons  parie  plus  haut, 

H  ie  but  de  perdre  son  maitre,  il  ne 

mrait  mieux  faire.  Les  ^^ptiens, 

,ef!et,pleins  de  haine  et  de  rage, 

norent  avec  Mohammed  sur  M^dine, 

joi^rent  aux  revolt^sde  la  plaine, 

ttsi^erent  le  khalife  dans  son  pa- 

^Ce  siege  dura  un  mois;  enffn, 

KNunmed,  suivi  de  deux  autres  Mu- 

■Uflis,  put  un  jour  s*ouvrir  une  issue 

Ip'aiipres  d'Othman,  et  quoique  ce 

pN  venerable  par  son  dge,  par  ses 

Mlents  militaires,  et  par  son  ca- 

Iteresacre,  sinou  par  son  g^nie,  fdt 

*ope  a  lire  le  Koran ,  qu'il  tenait  sur 

P.gcooux,  Mohammed  n'en  eut  pas 

JOtele  triste  courage  de  Tegorger  (*). 

Gefut  un  grand  malheur  pOur  Ali, 

■  avait  eertaioement  des  droits  s^- 

Jxau  khalifat,  d*y  parvenir  sur  un 

wvre.  Sa  nomination,  d'ailleurs  tu- 

wtueuse  et  partiellef,  souleva  bien  des 

fpositions.  La    plus  dangereuse   de 

»les  ces  oppositions  fut  celle  d'ATes- 

J»wi  la  veuve  v^neree  du  prophete. 

fie  en  voulait  toujours  a  Ali ,  qui  avait 

'™ojgne  dans  sa  jeunesse  contre  sa 

n  Voyei  Abott'Pfdda, 


fideiite  h  Mahomet;  elle  ne  voulait  pas 
avant  tout  ^e  son  calomniateur  r^gndt, 
et  elle  excita  Zobair  a  s*armer  contre 
celui  qu*elle  appelait  Tusurpateur  du 
khalifat.  Bientdt  Thashah,  cet  autre 
ambitieux,  vint  se  joindre  k  Zobair, 
quitte  k  se  disputer  plus  tard  ensemble 
la  proie  pour  laquelle  ils  allaient  com- 
battre.  Aieschah  etait  le  lien  entre  eux 
deux;  elle  les  excitait  et  les  enflammait 
par  ses  declamations;  elle  accusait  Ali 
aavoir  ete  Tun  des  assassins  d'Oth- 
man  :  ce  qui  n'etait  pas  plus  vrai  que 
son  adult^re  a  elle>  calomnie  pour  ca- 
lomnie,  la  loi  du  talion  appliqu^.e  a  la 
vengeance.  Cette  femme  arrogante  et 
exaltee  Ot  tant  que  la  guerre  civile  s'al- 
luma.  Ali  fut  force  de  marcher  avec  une 
nombreuse  armoe  contre  les  re  voltes, 
et  les  ayant  rencontres  non  loin  de 
Basrah ,  il  eut  le  bon  esprit  de  faire 
des  propositions  de  paix  avant  d'en  ve- 
nir  aux  mains.  Mais  il  comptait  sans 
Afeschah  :  une  femme  blessee  dans  son 
honneurne  pardonne  jamais.  Aieschah 
meprisa  les  avancesdrAli,  les  fit  reje- 
ter  par  ses  complices,  et  la  bataille  eut 
lieu.  Elle  fut  sanglante  :  dix-sept  mille 
Arabes  resterent  sur  le  terrain ,  et  un 
si  grand  nombre  d*entre  eux  fut  tue 
autour  du  chameau  qui  portait  la  veuve 
du  prophete ,  que  cette  journee  en  garda 
le  nom  de :  Journee  du  Chameau.  En  fin, 
ce  chameau  si  vaiilamment  defendu  fut 
pris  par  les  soldats  d*AIi :  celui  ci  etait 
vainqueur,  et  il  eut  la  generosite  de 
traiter  avec  respect  A  leschah ,  son  im- 
placable ennemie,  et  de  la  laisser  ache- 
ver  ses  jours  a  Medine  (*). 

Le  moment  d'a^ir  etait  venu  pour 
Moawiah;  il  le  saisit  avec  promptitude 
et  resolution.  II  se  hdta  d'accorder  une 
nouvelletrevede  trois  ans  k  Tempereur 
de  Constantinople ,  qui  craignait  deja 
de  voir  sa  capitale  assail  lie.  D'apres  la 
Chronique  syriaque  d*Aboul-Faradj , 
ce  fut  un  certain  Ptoiemee  qui  vint 
conclure  cette  paix  menteuseet  momen- 
tanee,  et  qui  laissa  entre  les  mains  des 
Musulmans  son  fils  Gregoire  pour  otage. 
Selon  les  annalistes  grecs,  au  contraire, 
c'aurait  ete  Moawiah  qui  aurait  solli- 
cite  la  suspension  d'armes,  dont  il  se 
trouvait  avoir  le  plus  absolu  besoin ,  et 

(*)  Voyez  AboaTfMa ,  et  Goiutaotin  Por- 
pbyrof^D^,  de  Adw^  imp. 


102 


L'UKIVERS. 


qui,  pourrobtenir,auraitof!ffert  de  four- 
nir  a  rempire,  chacun  des  jouM  que 
durerait  la  tr^ve,  un  esdave,  un  cheval 
^t  mille  pieces  d'argent.  II  n'est  guere 
possible  qu'un  vainqueur  ait  pu  t>ro- 
poser  de  pareitles  conditions,  quels 
qu'aieilt^t^ses  nouveaiix  proj<sts,qaelle8 
qu'aietit  (5t^.  les  pertes  qu'un  terrible 
tremblement  de  terre,  qui  ravagea  eti 
659  la  Syrie  H  la  Palestine,  et  y  detruisit 
plusleurs  tiiles ,  lui  ait  fait  iftprouver. 
Cette  fable  est  une  nottvelle  raison  de 
deGanc^  eontre  les  ^brivaina  du  Bas- 
Emplre^  qui,  faute  de  traits  heroTques , 
d'actions  liohorables,  de  victoires  et  de 
conqu^tes  k  citer  en  Thonneur  de  leurs 
deplorables  princes,  accumulent  par- 
fois  les  niensonges  pour  avoir  la  rare  oc- 
casion de  les  louer. 

Quoi  qUMl  eii  soit,  il  y  eut  tr^TC 
entre  les  Arabes  et  les  Romains,  et  Moa- 
wiah  l^ertiploya  k  grouper  ses  partisans 
les  plus  chauds,  a  r^utur  ses  troupes  les 
plus  aguerries,  k  les  harangueir  et  a 
leur  faire  comprendre  que  le  khaiifait 
etait  mal  pl^ce  entre  les  mains  d*Ali. 
II  representait  le  gendre  de  Mahomet, 
commen'ayantquelabravoure  commune 
d'un  soldat  et  non  le  g^nie  puissant 
d'un  chef  de  nation,  comme  ne  pouvant 
que  compromettre  la  grande  cause  de 
r islam  ,  raute  de  vnes  ndutes  et  targes . 
faute  d'une  ^nergique  perseverance.  II 
rappelait  que  trois  fois  deja  Ali  avait 
eu  la  presomption  de  se  mettre  sur  les 
rangs  pour  etre  procldm6  khalife,  et 
que  trois  fois  lasagessedes  vieillards  6lec- 
teurs  I'avait  repousse,  en  portant  touir 
a  tour  leurs  suffrages  sur  Abou-Bekr, 
sur  Omar  et  sur  Othman.  U  s'enor- 
gueillissait  avec  adresse  de  sa  parent)^ 
avec  ce  dernier,  aecusait  les  partisans 
d'Ali  d'etre,  tons,  les  assassins  de  Tan- 
cien  khdiife,  disant  que  si  Mohammed 
avalt  porl6  le  coup  niof'tel ,  les  autrcs 
avaienl  approuve  son  crime,  excite 
sa  ra^e.  Pour  parvenir  plus  sdrement 
a  inculquer  cps  idees  au  peuple  tout 
entier,  il  se  procura  la  robe  ensan* 
glantee  d'Othman,  et  la  fit  suspendre 
dans  la  principale  mosquee  de  Damas. 
Puis,  quand  il  disait  lui-m^me  la  priere, 
il  faisait  suivre  ses  invocations  a  Dieu 
par  des  impr^ations  eontre  Ali.  Mais 
il  nc  se  bornait  pas  a  endoctriner  les 
masses,  il  chereliait  aussi  des  appuis 


parmi  lbs  hommes  les  plus 
bles,  parmi  les  guerriers  les  plus 
bres.  Cesi  ainsi  quMl  attira  dam 
parti   rillUstre   Amroa-Befl-EI-As^ 
conquerant  de  r£g\'pte.  Cdut-d 
a  se  plaindre  des  habitants  de  M( 
qui  le  laisssientsans  emploi.Moa^ 
consola,  le  flatta,  et,  ce  qui  vabit 
tnieux ,  lui  garantit  pour  toate  si 
en  cas  de  succes  centre  Ali ,  le  { 
vernement  de  TEgypte  (*). 

Toutes  ses  m^sures  prises.  Mi 
aocompagn6  d'Amrou-Bea-EI-As, 
de  Damas  avec  une  armee  de 
tnille  hommes  et  s'en  vint  ven 
pour  traverser  I'Euphrate,  et 
attaquer  Ali  dslns  Tlrak,  P; 
M^so|}Otamie.  Desoncdt^,  Ali, 
plus  serieusement  cette  fois  qoe 
une  fetnme  colore  et  deux 
subalterne^ ,  rassembia  quaU 
mille  combattants,  et  maroiaibi 
eontre  de  son  rival.  Les  deuxl 
etaient  bien  diffi^rentes  :  oelle  del 
wiah  ^tak  reguli^re  et  dtsci^ 
ob^issant  avec  ponctualite  k  son 
apnt  dee  ren^gats  habiles  poor 
ciers,  des  Arabes  distingue  pour  r 
raux ,  des  compagnles  exereees  i 
de  Tare  et  a  toutes  les  manceuneil 
temps;  celle  d'Ali  possedait  encored 
son  sein  quelques-uues  de  ces  tribosi 
mades  bonnes  tout  aU  plus  pour  lese  " 
mouchesi  on  gfand  nombre  deeavi 
vaillants  mais  t^m^raires,  des 
braves  ihais  cohfuses,  et  vingl-sif^ 
ces  veterans  de  Tlslam  ^  bommes  "" 
giques,  il  est  vrai ,  rtiais  qui  n'l 
pour  tout  iti6rite  que  d'avoir  asuii 
combat  de  Bedr^  oe  premier  exptal'' 
prophete,  que  nous  avons  dit 
bier  plut6t  a  une  attaque  de  L_^ 
qu'a  une  veritable  batailie.  Aiosi^M^ 
cdt^,  le  talent  et  Thabilet^  mil 
de  Tautre  le  courage  personnel, 
rinexp^rience  de  la  gaerre  {**>. 

Moawiah  eut  beau  falre,  il  ne 
vint  pas  k  combattre  en  batailie  nugt 
les  troupes  de  son  adversaire.  Lon4| 
les  premieres  lignes  des  Syriens  sei 
veloppaient  dans  la  vaste  plaine  i 
Siffin,  situee  entre  Palmyre  et  Ftt 
phrate,  les  Alidesse  retiraientdaoski'i 


(*)  Voyez  AbouTfMa,  Am*,  i 
(**)  Voyez  Th6ophaoe. 


SYRIE  MODERNE. 


108 


imp;  Idrsqu'au   contraire  Moawiah 

Ivtait   dans   le    sieo,    ses    ennemis 

iaaient  Ty  attaquer.  Ce  n'^tait  done 

rune  suite  de  petits  ccmibata,  doot 

lean  ae  pouvait  ^tre  d^fioitif ,  qui  se 

tesaient  presque  enti^rement  en  luttes 

ji?iduelies,  et  qui  n'aboutissaient  qu*a 

tre  perir  ded  homraes  sans  utilite. 

iraot  trois  mois  et  demi ,  on  resta 

toi  eo  presence,  sans  faire  un  pas 

ayant,  sans  amener   le  moindre 

bJtat  pour  les  deux  causes  qui  se 

^Qtaient  la  sou?erainet^.  Dej&  quatre* 

^-dk  combats    B'6taient   donn^, 

il  semblait  que,    pour   remporter 

^oire,  il  fallait  tuer  jus(]u'au  der* 

w  eDDemi,  lorsqu*une  nuit,   tandis 

les  Syriens  ne  s'attendaient  a  re- 

ke  les  hostilit^s  que  le  lendemain 

iuatin,  All  Tint  fondresur  leur  camp, 

Sttivi  de  presque  tous  les  siens, 

bmen^a  une   des   luttes  les   plus 

^Dtes  qui  se  soient  iaroais  livrees. 

ito  armies,  animees  de  la  mdme 

Sear,  combattaient  dans  le  silence  et 

f  t^res;  cbacun,  en  rencontrant 

adversaire,  le  harcelait  jusqu'a  la 

rt  sans  passer  ^  un  autre ;  on  frap- 

t,on  tombait,  on  etait  victorieux, 

mourait,  sans  se  lamenter  ou  se  glori- 

r,  saos  foir  son  ennemi :  combat  de 

iKts,  od  Ton  n*entendait  que  le  bruit 

BKiaives  qui  s'entre-choquaient,  oik  I'e- 

enirieuse^teignait  le  rSle  dans  la  gorge 

I  mourant;  duel  de  cinquante  miUe 

QMS  centre  cinquante  mille  autres, 

t'ils'^tait  prolonge,  aurait  amen^ 

iaation  des  deux  armees  a  la  fois ! 

it  ee  lugubre  carnage ,  All,  qui 

it  int^rieurement  de  toute  cette 

(ion  de  sang,  voulait  arr^ter  ces 

^rtres  individuels  et  inutiies ,  et  fit 

^ler  Moawiah  en  combat  singulier, 

n  de  vider  h  eux  seuls  la  querelle 

Ki  separait  les  Musulmans.  Mais  Moa- 

iahne  commit  pas  iafaute  d'accepter 

^  deli,  et  comma  Amrou  s'en  6ton- 

tft,  il  lui  r^pondit  :  «  Us  bras  d'Ali 

est  plus  fort  que  le  mien;  jamais  il  ne 

8*est  abattu  sur  un  ennemi  sans  I'e- 

eraser;  mais  c'est  la  tdte  et  non  le 

bras  qui  fait  le  capitaine ,  et  je  lui 

.  prouterai  que  e'est  moi  qui  le  suis.  » 

Cependant  corps  k  corps  Tavantage  sem- 

biait  se  declarer  pour  les  Alides ,  lors- 

4ue,iesoleils'i^tantleve,  Moawiah  fit 


attadier  quatre  korans  au  bout  de 
cjuatre  piques ,  et  les  fit  placer  au  milieu 
de  la  bataille,  en  s*^riant  :  «  Que  oe 
«  livre  des  livres  juge  entre  nous!  »  A 
cette  vue,  chacun  s*arr^ta,  frapp^  de 
respect  et  d'irresolution  a  la  fois ,  et 
Moawiah  profita  dece  repit  pour  deman- 
der  que  deux  arbitres  pronon^ssent 
entre  les  deux  pretendants  au  khalifat. 
Get  arbitrage  solennel  fut  accept^ :  Am- 
rou-Ben-El-As  fut  choisi  par  Moawiah, 
Abou-Mou^  fut  nomm^  par  Ali.  Puis 
les  armees  se  repli^rent  chacune  sur  le 
pays  d'ou  elles  etaieiit  sorties. 

Amrou ,  par  ruse  autant  que  par  habi- 
lete,  fitobtenir  Ta vantage  a  Moawiah; 
mais,  a  la  suite  de  ce  jugement  peli 
loyal,  les  choses  n*en  resterent  pas 
moins  oh  elles  en  etaient  auparayant, 
et  la  guerre  allait  recommencer,  lors- 
que  trois  hommes  se  conjurerent  pour 
mettre  fin  aux  deplorables  dissensions 
de  leur  patrie.  Ces  trois  homines  ne 
trouverent  pas  d*autre  moyeo  d'en  finir 
que  de  mettre  a  niort  les  trois  chefs  qui 
divlsaient  Tlslam,  Ali,  Moawiah  et 
Amrou.  Amrou  dut  la  vie  a  une  me- 
prise :  on  tua  pour  lui  un  de  ses  officiers 
qui  lui  ressembiait.  Moawiah  re^ut  une 
blessure  qui  ne  fut  pas  morteile^  mais 
qui  le  rendit  impuissant.  Quant  a  Ali , 
il  fut  assasaine  et  succomba  dans  la 
mosquee  de  Koufab  (*)• 

Quelques  Alides  ent^t^  ^roclame- 
rent  khaiife  a  sa  place  son  fils  ain^ 
Hasan.  Mais  ce  ieune  homme^  d'un 
caracterefaibleetdoux  ,d'un  esprit  sans 
portee,  se  laissa  bientdt  circonvenir  par 
Moawiah.  Ge  dernier  proposa  a  Hasan 
de  lui  c^er  le  revenu  de  la  province 
persane  de  Darabdjerd  et  le  tresor  de 
Koufah  s'il  consontait  k  renoncer  a  ses 
pretentions  au  khalifat.  Hasan,  dont  Tes- 
prit  etait,  k  ce  qu^il  paratt,  plus  inte- 
ress6  que  belliqueux,  accepta  cette 
abdication  payee.  Mais,  soit  aue  cet 
amour  de  raraent  eilt  indigne  Moa- 
wiah, soit  piutot  qu*il  edt  voulu 
6ter  toute  chance  d'avenir  a  son  rival , 
voici  comment  il  oonserva  une  pro- 
vince et  d6pouilla  Hasan  :  ^tant  en- 
tres  tous  deux  a  Kou£ah,  Hasan  declara 
5  ses  partisans  r^unis  qu'il  renongait  a 
toujours  au  khalifat,  et  qu*il  c^dait  k 

(♦)  VoyeE  Abou'rWda. 


104 


L1JN1VERS. 


Moawiah ,  plus  capable  de  reniplir  les 
devoirs  difficiles  ae  cette  dignite,  le 
pouvoir  religieux,  civil  et  militaire. 
IMoawiah  prit  la  parole  i  son  tour,  et, 
apres  avoir  accept^,  la  souveraine  puis- 
sance, il  termiDa  ainsi  sod  discours  : 
«  Je  suis  convenu  avec  Hasau,  de 
«  certaines  conditions  pour  r6tablir  ia 
«  paix ;  maintenant  qu'il  n*est  plus  be- 
«  soin  de  ces  conditions,  je  les  r^voque 
«  en  vertu  du  pouvoir  dont  je  suis  re- 
«  v^tu.  On  abat  T^cbafaudage  quand 
ft  r^difice  est  bdti.  »  Goinme  on  le  voit, 
Moawiah  etait  un  homme  de  genie  bar- 
bare  :  s'il  calculait  bien ,  s'il  agissait 
avec  prudence ,  s"\\  savait  tour  a  tour 
montrer  de  Tenergie  et  de  Tbabilet^ ,  11 
ne  comprenait  ni  la  foi  des  traites  ni 
la  saintete  de  la  parole.  La  grandeur 
caracterisait  sou  vent  sesactes,la  mora- 
lite  presque  jamais.  Ses  d^tracteurs  Fac- 
cusent  encore  d'etre  alie  plus  loin  que  le 
mepris  des  conventions  :  Hasan  s*6tait 
retire  a  M^dine ,  confus  et  ruine ;  huit 
ans  apr^s  la  scene  que  nous  venons 
de  rapporter,  il  y  mourut  par  le  poison, 
et  Ton  reprocha  a  Moawiah  la  fin  violente 
du  fils  dUli.  Rien  ne  prouve  pourtant 
que  le  khalife,  alors  tout-puissant ,  ait 
eu  besoin  de  ce  nouveau  crime  pour 
consoiider  una  souverainet^  que  per- 
sonne  ne  lui  contestait :  Hasan  etait 
annuls,  et  son  fr^re  Housain  restait 
dans  la  retraite  et  Tobscurit^. 

A  peine  parvenu  au  rang  supreme, 
Moawiah,  toujours  preoccupy  oagou« 
vernement  int^rieur  de  son  empire, 
voulut  frapper  au  coeur  Tanarchie,  et 
empdchcr  tout  schisroe  et  toute  dissi- 
dence  entre  les  Musulmans.  Nous  avons 
vu  qu'Abou-Bekr  avait  vaincu,  avec 
fruit  pour  Tlslani,  les  pretentions  de 
deux  faux  proplietes.  Mais  si,  du  temps 
de  Moawiah,  le  fond  de  la  religion 
mahometane  n'^tait  plus  contests,  en 
revanche  il  s'^tait  fait  de  si  nombreux 
commentaires  du  Koran ,  des  interpre- 
tations si  di verses  k  la  loi primitive,  que 
rislam  courait  risque  de  n*^tre  plus 
bientdt  qu'un  tas  de  contradictions  de 
tous  genres ,  et  le  livre  sacr^  un  texte 
vague,  propre  k  tous  les  gouvernements, 
k  toutes  les  habitudes ,  a  toutes  les  di- 
vergences nationales.  Cette  tendance, 
funcste  k  coup  sdr  k  Tautorit^  des 
khalifes ,  etait  d^ailleurs  un  obstacle  r6el 


setdeill 


k  VunM  que  r^rait  Moawiah.  Uimak 
des  traditions  au'avaientlaisi^les 
pagnons  de  Manomet,  lesi; 
explications  des  passa^am] 

3ues  du  Koran,  s'appelaieotm 
ition).  Cette  soitnna  preaait 
jour  un  developpement  deptoseij 
monstrueux,  on  en  avait  oeja '^ 
assez  de  parchemins  pour 
la  charge  oe  deux  cents  chan 
que  Moawiah  voulut  mettre  ud 
cette  fureur  de  gloser  et  d'ioti 
il  dppela  done  a  Damas  les  deux 
alfakis ,  ou  docteurs  de  la  loi, 
dus  sur  tout  le  territoire  desoa 
en  choisit  six  des  plus  sa^ 
intelligents,  et  leur  enjoignit 
duire  aux  homes  les  plus  etn 
colossal  amae  des  reveries  dedcoxj 
rations.  Les  six  docteun  de 
travaill^rent  eo  consdenoe :  ill 
rent  en  six  livres  Tenorme  bil 
qu'ils  avaient  compuls6e.  Tout 
qui  restait futjeie,  paries  or 
Moawiah,  dans  la  riviere  de  Dai 
acte  de  bon  sens  et  d'adroite  { 
apporta  au  nouveau  khalife  da 
de  rhonneor  k  la  fois  :  son  f 
ment  devint  plus  facile,  sod 
tration  plus  rtoiliere,  et,  grftt 
tranquillity  interieure,  il  pot  H 
songer  a  de  nouvelles  cooquto 
C^tait  I'an  41  de  Th^ire  '^ 
Moawiah  s'^tait  vu  libre  pos 
khalifat.  Constant  II  r^nait 
k  Constantinople  :  Tenfant  io 
avait  fait  place  k  un  homme  de 
deux  ans,  violent  dans  ses  paf~ 
la  plus  cruelle  Irascihilite,  ei( 
ses  idees,  qui  avait  embrasselii 
thelisme  avec  un  ent^lement  '^ 
poursuivait  les  orthodoxes 
L*an  660,  oe  prince ,  aussi  m^ 
capable,  pour  se  debarrassor de 
sition  religieuse  que  lui  fai^ 
ftkre  Th^dose,  ravait  &it 
ner.  Ce  crime  iofftme  souleri 
Constant  n  la  liaine  de . 
les  habitants  de  Byzance.  L\ 
exa8p6r6  de  voir  ses  sujets, 
capitale,  Nviter  avec  borreoT] 
her  ia  t^te  sous  sa  tvraonie 
murmurer  dei  paroles  oe 
tout  en  se  prosternant  devaot  sod 
voir,  prit  en  execration  cette  viw 
tement  rebelle,  et  r^lutdela'" 


Mmi 


I  presq*' 


SYRIE  MODERNE. 


iOS 


et  d'aiier  s'etablir  ea  Italie.  Ge  d^pla- 
cemeot,  sans  cause  politique,  de  la  r^si* 
dence  imp^riale,  ne  pouvaitdtre  favora- 
ble qu*aux  ennemis  des  Byzantins  : 
qu'importait  k  leur  prince,  qui  leshais- 
sait  autant  qu*il  ^tait  m^pns^  par  eux ! 
Gonstaot  II,  d*ailleurs,  voulait  fuird'^- 
pouvantables  r^ves  qui  venaient  chaaue 
nuit  assaillir  son  sommeil.  Uomore 
san@[lante  de  son  fr^e  lui  apparaissait, 
disait-on,  tenant  h  la  main  la  coup>e 
que,  de  son  vivant,  sa  charge  lui  faisait^ 
pr^enter  li  Fempereur,  et  lui  criait  d*une 
voix  lamentable  :  «  Buvez  done ,  mon 
«  frere ,  c*est  mon  sang !  »  Constant  II 
esperait-il  que  le  spectre  lugubre  ne 
le  suivrait  pas  dans  ses  voyages?  Tou- 
jours  est-if  qu'il  abandonna  TOrient 
avec  une  flotte  considerable;  et  le  peu- 
ple  de  Constantinople  s'^tant  soulev^ 
pour  emp^her  Timp^ratrice  et  ses  fils 
d'aller  rejoindre  Tempereur  sur  ses 
vaisseaux,  Constant  II  n'en  ordoana 
pas  moins  de  mettre  h  la  voile,  en 
cracbant  sur  sa  capitale  et  en  Tacca- 
blant  des  plus  grossieres  invectives. 

Rien  ne  pouvait  Itre  plus  utile  aux 
desseins  de  Moawiah;  le  nouveau  khalife 
fit  done  ses  preparatifs  pour  atta^uer  k 
lafois  Tempire  byzantin  en  Asie-Mmeure 
et  en  Afrique.  Constant  II  ne  s'inqui^ta 
point  de  cette  nouvelle  reprise  d'hostili- 
t^  de  la  part  des  Musulmans :  dans  sa 
ridicule  pr^omption,  il  s'^tait  imaging 
quMl  lui  serait  tacile  d'arracher  Tltalie 
aux  Lombards,  et  il  voulait  r^tablir  la 
capitale  de  Fempire  h  Rome.  Aucun 
de  ses  projets  insens^s  ne  r6ussit :  il 
fut  battu  par  les  Lombards,  et  ne  pas- 
sa  par  Rome  que  pour  la  piiler, 
et  enlever  a  ses^lisesieursornements 
les  pluspr^ieux.  Avec  cesd^pouilles, 
Fempereur  sacril^e  alia  se  fixer  en  Si- 
cile.  Les  habitants  de  cette  tie  opulente 
furent  d*abord  heureux  de  la  presence 
de  leur  souverain ;  mais  bient6t  Cons- 
tant les  accabia  de  tels  impdts ,  fit  pe- 
ser  sur  eux  un  joug  si  lourd,  em- 
pioya  des  moyens  si  cruels  pour  leur 
extorquer  leur  argent,  comme  par 
exemple  d'arracher  aux  p^res  leurs  en- 
fants ,  aux  maris  leurs  femmes,  que  les 
Siciliens,  aussi  indign^  que  d^espe- 
res,  s*enfuirent  en  grand  nombre ,  et 
s'en  all^rent  demander  au  maltre  de  la 
Syrie  un  refuge,  un  appui,  une  patrie. 


En  m^me  temps  cinq  mille  Eselavons 
s'en  vinrent  grossir  Tarmee  musulmane 
qui  op^rait  sur  TAsie-Mineure.  Ainsi , 
servi  par  Todieuse  tyrannic  de  Cons- 
tant II ,  Moawiah  voyait  tons  les  jours 
ses  partisans  augmenter ;  et  les  popula- 
tions nouvellementconquises  lui  obeirent 
d'autantplus  volontiers,  qu'elles  crai- 
enaient  davantage  de  retomber  entre 
les  mains  avides  de  leur  ancien  souve- 
rain. 

A  cette  ^poque ,  sauf  la  satisfaction 
de  r^me,  dont  ses  generations  abdtardies 
ne  ressentaient  que  faiblement  la  perte, 
la  Syrie  fut  heureuse :  a  Tabri  de  toute 
insulte  etrang^re ,  grdce  h  la  puissance . 
de  ses  conqu^rants ;  a  Tabri  des  depre- 
dations quotidiennes ,  grdce  h  Tordre 
qu'avait  etabli  le  khalife  dans  son  gou- 
vernement.  C*etait  la,  pour  les  Svriens,* 
un  repos  d'autant  plus  doux  quele  trou- 
ble precedent  avait  ete  plus  terrible. 
Les  nabitants  des  villes,  en  retrouvant 
leur  securite ,  avaient  repris  leur  acti- 
vite  industrieuse;  lis  se  montraient  de 
nouveau  les  plus  habiles  manufacturiers 
de  rOrient,  seulement  ils  avaient  chanse 
de  marches  et  d'acheteurs  :  au  lieu  de 
diriger  les  produits  de  leurs  fabriques 
au  nord,vers  Constantinople ,  ils  les  di- 
rigeaient  vers  le  sud,  vers  la  Mekke, 
vers  Medina,  vers  Bassora;  au  lieu  de 
vendre  aux  Grecs,  ils  vendaient  aux 
Arabes. 

Autour  de  Moaviah  s*etaient  rassem- 
bies  tons  les  hommes  energiques,  qui , 
joints  aux  jeunes  et  impetueux  Arabes , 
formaient  une  armee  toute  pr^te  h  en- 
vahir  de  nouvelles  contrees,  ou  ^  se 
porter  comme  renforts  aupres  des  corps 
neliigerants,  en  Asie-Mineure  avec  Abd- 
Er-rahman ,  le  fils  intrepide  de  Fintrc- 
pide  Khaled ,  avec  Bousour  et  FadhI ,  en 
Armenie.  Le  destin  se  montrait  de  plus 
en  plus  favorable  a  Moawiah :  outre  des 
troupes  nombreuses ,  qu'il  avait  parfai- 
tement  su  discipliner  et  exercer,  de  bons 
generaux  s'etaient  aussi  preseutes  a  lui , 
et  il  s'etait  hiite  de  leur  offrir  des  occa- 
sions de  se  distinguer.  Cependant  le 
khalife  etait  aussi  prudent  quMI  etait 
ambitieux,  etilneyoulaitpas  entrepren- 
dre  h  la  leg^re  de  difficiles  et  lonaues 
expeditions.  Mais  Constant  II  semBlait 
are  ne  tout  expr^s  pour  lui  preparer 
les  Toies.  Get  ignoble  empereur,  apres 


106 


L'DNIVERS. 


avoir  ruiii6  la  Sicile,  tourna  aes  Tuea 
depr^datriees  vers  i*Afrique.  Sous  le 
pretexte  de  punir  ses  sujets  africains 
d'avolr  trdite  avec  les  Arabes,  il  leur 
intima  Tordre  de  lui  envoyer  uoe 
somme  ^^^e  k  celie  au*ils  payaieot  eba* 
que  annee  aux  Musulmans. 

Cette  exigence  de  I'enipereur  indigna 
Carthage ;  et  pour  ^chapper  aux  mena- 
ces de  son  tyran ,  elle  resolut  de  se  jeter 
dans  les  bras  du  khalife.  Elle  envoya 
done  une  deputation  k  Damas  pour 
offrir  la  domination  d^une  partie  d<| 
TAfrique  a  Theureux  Moawiah.  Ceiui-ci 
accepta  la  proposition  des  modernes 
Garthaginoi^,  etdirigea  sur  leur  terri- 
toire  Telite  de  ses  troupes  et  un  g^oe- 
ral  habile, du  mdme  nom  que  lui,  Moa- 
wiab-Ben-Amir.  Ce  Moawiah  se  porta 
avec  rapidite  sur  I'Afrique,  et  ne  ren- 
contra  des  ennenus  qu'aux  environs  de 
Tripoli  de  Barbaric.  Constant  II,  aussi 
exaspere  qu'effray^  de  la  revolte  de  TA- 
frique,  avait  iramediatement  exptkii^ 
trente  mille  hommes  pour  chdtier  ses 
sujets  rebelles.  Mais  cette  arm^,  au 
lieu  d'avoir  affaire  a  une  tourbe  confuse 
de  r^volt^s,  fut  obligee  tout  d'abord  de 
se  defendre  centre  tes  Musulmans.  Elle 
fut  battue,  decimee,  dispersee.  A  la 
suite  de  cette  victoire,  Moawiah-Ben< 
Amir  entra  dans  I'ancienne  Byzaceue* 
et  assiegea  Djeloula,  ville  forte  sur  |e 
bord  de  la  mer,  et  situee  en  face  de  rile 
de  Circene.  Ce  siege  fut  long;  mais  un 
jour  un  pan  de  mur  ayant  ced6  sous  les 
efforts  des  assiegeants,  il  y  eut  un  com- 
bat terrible  sur  la  breche ,  et  les  Musul- 
mans se  succederent  avec  tant  d'opini^- 
trete,  que  les  habitants  furent  obliges  de 
reculer  contre  les  masses  renaissantes 
de  leurs  ennemis.  La  cite  prise,  elle  fut 
pillee  par  les  Musulmans,  et  le  butin  fut 
assez  considerable  pour  enrrchir  les 
vainqueurs.  Moawiah-Ben-Amir  aurait 
desire  pousser  plus  loin  ses  conqudtes ; 
mais  le  prudent  khalife ,  satisfait  que  le 
but  de  Texp^dition  edt  et^  promptement 
atteint,  ne  jugea pas  a  propos  d  avancer 
da  vantage  en  Arrigue,  et  rappela  en  gi 
Syrie  Tarmee  victorieuse  et  son  general,     la 

L'ann^  qui  suivit  eette  expedition 
(666),  un  nouveau  fait  vint  grouver  de 
quelle  reputation  de  force  jouissait  d^ja 
1  empire  naissant  des  Aralies.  A  la  suite 
de  la  destruction  da  royaume  de  Perse, 


plusieurft  g^^raux  persans  avaicit  of* 
lert  leurs  services  aux  Remains.  MaSif 
faiblesse  des  souverainsdeByzanee*! 
conduite  aussi  folie  que  coupble 
Constant  11  pousa^rent  bieototali! 
volte  les  Douveaux  auyets  de  TEoif ' 
L'un  des  plus  iiardis  et  des  plus  hm 
qui  gouvernait  la  troisieme  Gappadi 
alia  juscpi'a  nourrir  le  prpjet  de  ie< 
clarer  mdependant  dans  sa  proni 
Pour  arriver  a  ce  but,  il  ne  cnlj 
mieux  faire  que  de  solliciter  T 
khalife.  Cetahsbitieux,  nomme 
pour,  envoya  a  Damas  uti  de  ses 
dents,  appeM  Sergius.  En  Fabj 
Constant  II,  un  nomine  qui  ^ 
plus  de  souoi  de  TeiBpire  que  Fi 
empereur,  Teunuque  Andr^,  le 
qui  avait  garde  a  Constantinople  hil 
et  la  femmede  Constant,  ayant  a{ 
projet  de  Schahpour,  voulut«  | 
traverser,  serendreaussi  danslai 
de  la  Syrie.  II  venait  demander  M 
au  khalife  contre  les  rebelles  de  Fa 
byzantin.  Demande  Strange, 
prouve  que  des  dbux  parts  on  n 
salt  Tomnipotence  musulmaDe  i  (*} 

Moawiah  declara  qu'il  se  deti 
rait  en  faveur  de  celui  qui  lui  ( 
le  plus.  Quelle  que  fdt  done  la  j 
blesse  de  lan^age  d' Andre,  le  f 
donna  raison  a  Schahpour,  qui,  a 
independant ,  lui  promettait  de  iuif 
tribut.  On  envoya  une  armee  alliea 
rebelles,  et  quoiqu'un  accident  eiti 
ch^  brusquement  la  vie  a  Sehahpoarj 
Musulmans,  dej^  arrives  en  /  ' 
neure,  n'en  continuerent  pas  m 
expedition.  lis  saccaeerent  le  , 
s'empardrent  de  la  ville  d'Amori 
tu^e  sur  le  fleuve  Sangarius,  en  ( 
et  y  laisserent  une  fl^rnisoB  #1 
mille  hommes,  a  leur  depart  poarlif| 
rie.  Cette  gamison  se  troava  ifl 
sante ;  car  Thiver  suivant,  Andi^  J 
trant  autant  de  courage  oomoie  i 
ral  qu'il  avait  fait  preuve  de  i    ' 
comma  ministre,  se  pofta  contre  i 
rium  avec  un  grand  corps  de  trouptti 
zeres,  enescalada  les  mursduraotlai^ 
ia  prit,  et  egorgea  les  cinq  mtile  An ' 
Un  empereur  iaisait  la  honte  de  Byz 
un  eunuque  en  fit  la  gloire;gloin  i 
mere,  malheureosementJ 


(*)  Voyez  Th^phane. 


SYRIE  MODERJNE. 


107 


Van  668  fut  une  aonee  heureuse  pour 
I  Grecs :  elle  commen^  par  une  victoi- 
^ellefinitparuned^livrance.  A  force 
platitudes  et  de  crimes ,  Constant  II 
lit  attire  la  haine  de  tous  ses  sujets ; 
ji,  coQspira-t-on  de  toutes  parts  con- 
lui,etiut-il  assassin^  dans  son  bain 
rIeOlsdu  patriceTroIIus.  Ce  meurtrede 
iDpereur  fut  un  vrai  soulagemeiit 
|r  ses  peoples.  Constant  s'etait  servi 
|a  religion  comrae  d'ua  moyen  de  per- 
iition,  Constant  ^tait  Idche,  Constant 
[tavide,  il  depouillaitchacun,  et  tuait 
eonque  luifaisait  resistance;  la  mort 
Donstant  fut  une  fete  [)opulaire.  Mais 
Imauvais  prince  avait  regne  assez 

remps  pour  faire  a  sa  pa  trie  un 
irreparable;  et  durant  les  vingt- 
taas  qu'il  demeura  sur  le  trone,  en 
mant  de  plus  en  plus  le  coeur  de 
leuples,  il  nnit  par  leur  faire  pr6ferer 
uemusulman  a  sa  propre  tyrannie. 
uf  les  persecutes  consentent  a  sa- 
ttleur  national ite  a  leur  vengeance, 
pays  est  bient6t  perdii.  Aussi  Tem- 
tbfuniiii  u'est-il  dejti  plus  qu'une 
nreeo  668;  et  si  Constantinople  ne 
Ai,  comme  ville,  que  beaucoup  plus 
I)  oapeut  dire  que  des  cette  epoque 

tetait  tombee  comme  capitate  :  cles 
elleavait  perdu  I'empiredu  monde(*). 
ia  revolution  qui  avait  delivre  les 
bins  d'un  tyraa  n'aboutit  malbeu- 
teinent  qu*a  une  folic :  faute  de  can- 
ats  serieux  a  la  puissance  imperiale, 
eouroona  une  sorte  d' Adonis,  admi- 
lie  au physique,  stupide  au  moral, 
ll^riD^iiieo  Mizize.  Le  ills  de  Cons- 
lit  J/,Constantin  IV,  surnonime  Po- 
ttt,  le  Bartfu ,  eut  bon  marcu^  de  cet 
Sttige  usurpateur.  II  rassembia  de 
|i  cotes  les  troupes  byzantines,  dis- 
^  en  Campanie,  en  Sardaigne  et 
4frique  I  et  il  lui  sufiit  de  marcher 
Itre  son  bell^tre  competiteur  pour  le 
iwre.se  le  faire  livrer  et  s'en  debar- 
icrpar  la  decapitation  (**). 
)urant  ees  discordes  int^rieures, 
iBwiah,  prompt  a  saisir  toutes  les  oc- 
ions  favorables,  envoya  d'Alexan- 
eune  flotte  coutre  la  Sicile,  que  Cons- 
itin  IV  avait  laiss^e  degarnie  de  de- 
fieurs.  Les  Musulmans  s'emparerent 


%' 


\  Voyez  Cedr^DOs. 

')  Yoyei  le  patriarche  Michel ,  hwtorien 

flKD. 


presque  sans  coup  f6rir  du  port  de 
S^Tacuse.  La  ville  etait  opulente ;  ils  la 
pillerent;  et,  outre  ses  ricbesses  par- 
iiculieres,  ilsy  trouverent  les  ornements 
luxueux ,  les  statues  et  les  vases  d'or 
et  d'argent  que  Constant  II  avait  enle- 
ves  aux  6glises  de  Rome  (*).  C'est 
avec  de  pareils  butins,  si  facilement 
conquis,  c'est  avec  Un  tr^sor  sans  cesse 
augment^  par  le  produit  d'attaques 
heureuses  et  continuelles,  que  Thabile 
khalifede  Damas  se  preparaitles  moyens 
de  mettre  a  execution  le  plus  hardi 
de  ses  projets :  le  si^ge  de  Constantino- 
ple. Avant  de  marcher  centre  la  capi- 
tale  de  ses  ennemis,  il  avait  merveilleu- 
sementpris  toutes  ses  mesures :  11  s'etait 
parfaitement  assure  de  toutes  ses  forces ; 
sa  puissance  etait  a  jamais  consolidee 
parmi  les  siens ;  son  empire  s'etendait 
deja  sur  les  plus  importantes  provinces 
des  Byzantms ;  il  avait  la  Svrie  et  ViL- 
gypte;  TAsie-Mineure  tremnlait  a  Tap- 
proche  de  ses  soldats;  et  une  recente 
expedition  ou  son  lieutenant  Okbah 
avait  pousse  de  Carthage  jusqu'a  Tanger, 

3vait  achev6  de  detruire  les  restes  de  la 
omination  romaine  sur  les  cotes  d'A- 
frique.  Moawiah  ne  trouvait  done  plus 
aucun  scrupule  dans  son  esprit  ra6aita- 
tif  et  prudent :  toute  difliiculte  etait  sur- 
mont^e,  toute  chance  contraire  etait 
paralyser ,  il  n*y  avait  desormais  que 
respoir  de  la  yictoire  a  nourrir :  Theure 
du  destin  etait  sounee.  Sans  plus  de  re- 
tard^ Moawiah  sedecida,  Tan  53  deThe- 
gire,  672  de  I'ere  chretienne. 

EXPEDITION  CONTRB  CONSTANTINOPLE. 

L'exp^dition  des  Musul mans  fut  prece- 
dee  par  des  prodiges :  la  nature  seniblait 
d'accord  avec  les  hommes  dans  cette 
crise  capitale.  £n  cette  annee  memora- 
ble, 672,  Tordre  des  saisons  parutbou- 
levers6  en  Orient :  des  temp^tes  et  des 

{>luies  continuelles  desolerent  les  popu- 
ations ;  des  tremblements  de  terre  les 
6pouvanterent.  Tout  phenomene  devint 
un  pronostic  de  malbeur :  un  arc-en-ciel 
qui,  chose  extraordinaire  en  Orient, 
survint  au  mois  de  mars  et  dura  plu- 
sieurs  jours,  fut  regarde  comme  un 
avertissement  de  la  colere  celeste.  Les 

(♦)  Yoyez  Paul  Diacre. 


108 


L'UNIVERS. 


Arabes,  comroe  les  Byzantins,  ^prouvd- 
rent  les  effets  de  ces  derangements  at- 
mospheriques.  Les  Arabes  eurent  k 
souurir  en  £gypte  une  6pid6mie  caus^ 
par  les  brusi^^ues  changements  de  tem- 
perature. Mais  si  Jes  Byzantins,  Crap- 
py d'une  terreur  panique ,  s'abaodon- 
naient  au  d^couragement  le  plus  deplo- 
rable»  et  s'imaginaient,  dans  leur  fai- 
blesse,  que  le  chaos  allait  remplacer 
les  mondes ,  que  le  regne  de  la  mort 
et  du  n6ant  allait  commeneer,  les  Ara- 
bes, au  contraire,  soutenus  par  leur 
esprit'  d*avenir,  encouraeds  par  leurs 
cheiks ,  endoctriD^  par  leurs  imans , 
se  releverent  bientdt  du  premier  affais- 
sement  ou  les  avaient  jetds  les  ca- 
taclvsmes  terrestres,  et  repondirent  en 
foufe  a  t*appel  de  icur  khahfe  Moawiah. 
La  flotte  la  plus  considerable  qu*on  ait 
vue  sur  les  c6tes  de  la  Syrie  depuis  les 
premiers  jours  de  Tlslam  fut  r^unie 
dans  les  ports  de  Tripoli ,  de  Tyr,  de  Si- 
don  et  d'Aere  (*).  La  Syrie  avait  foumi  k 
cette  flotte  une  partie  de  ses  habiles  ma- 
rins ;  car  d^j^  les  Syriens,  n'ayant  plus 
aucune  conGance  dans  les  destines  de 
Tempire  de  Byzance,  s*etaient  tournes  en 
grand  nombre  vers  Thomme  nouveau 
qui  leur  promettait  la  gloire  et  la  fortune, 
smon  la  liberie.  II  y  a  une  attraction 
fatale  qui  entratne  les  peuples  vers  le  g6- 
nie ,  quels  que  soient  leurs  scrupules , 
leurs  voeux  tacites,  leurs  regrets  et 
leurs  esperanees. 

Au  temps  ou  se  passentles^venements 
que  nous  racontons,  les  nationalit^s 
n'etaient  pas  aussi  tranch^es  que  de  nos 
jours.  L'unite  etablie  paries  conquerant5 
anciens,  la  continuite  d'un  despotisme 
variable  dans  ses  affents,  immuable  dans 
ses  principes,  la  fusion  que  Fad  minis- 
tration romaine  avait  imposee  aux  ra- 
ces asiatiques,  fusion  qui  avait  r^ist^ 
si  loDgtemps  h  Tincapacit^  adminis- 
trative des  Byzantins,  toutes  ces  causes 
reunies  avaient  6teint  les  sentiments  di- 
vers qui  caract^risent  et  s^parent  les 
nations.  On  s*etait  tellement  habitud 
a  ne  consid^rer  les  repr^sentants  de 
r  Empire  et  leurs  soldats  quecomme  des 
Strangers,  que  ce  lien  intime  entre  les 
gouvernants  et  les  gouvemes  qui  existe, 
malgre  quelques  abus  temporaires,  mal- 


gr^  m^me  une  tjrrannie  ded^by 
mi  les  peuples  regis  par  eox-m^mes;! 
ce  lien  sacre  qui  produit  ruDatiiniilc] 
efforts  dans  les  grandes  occasions,  I 
nanimite  contre  reavahissemeatdBl 
ritoire ,  Funanimite  pour  la  d 
institutions;  que  ce  lien,  aussi fi 
le  lien  religieux,  n'eiistait  pta^ 
comme  un  souvenir  dans  le  efl*i 

Plus  nobles,  quecomme  an  regret j 
esprit  des  plus  intelligents.  m 
lution  que  les  Musulmans  avaieot^ 
en  Syne  n'avait  done  pas,  k  profKV 
parler,bless6bien  protond^meoti 
pie  qui  nesupportaitqn'avecd' 
r^ne  sans  gloire,  le  gouveraeni 
s&urit6  des  Byzantins;  et  one  I 
plaies  de  la  conqu^te  cicatris^ll 
Hens,  qui  avaient  trouv^daDsHm 
un  maitre  assez  facile  et  sortonti 
ganisateur  puissant,  avaient  i 
pour  la  plupart  lejougnouvi 
leur  imposaitet  avaient  fini|»r|l 
et  par  servir  la  domioatioii 
mane. 

Moawiah,  qui  sans  doote  anitj 
oeretour  du  peuple  cooquisTer 
conqu6rant ,  exploita  avec  noe  g 
habilet6  ses  sentiments  qui  luieH' 
vorables.  11  admit  parmi  les  ( 
dants  de  navires  un  grand  no 
Syriens  qui  avaient  plus  qae  lei  i 
rexp6riencedela  mer,  etdoooaj 
la  direction  g^n^rale  de  Texp^ 
deux  ren^ts,  nomm^ 
et  Khais.  Ces  deux  chefs,  i, 
ambition,  se  partagereot  IcSii 
bles  vaisseaux  de  la  flotte  tnaiii 
et  se  dirig^rent  vers  I'Archipd*] 
toyantFAsie-Mineare.  Maisiw' 
6te  leur  diligence,  la  n^cessil^i 
rent,  a  cause  du  nombre  de  M* 
de  toutes  dimensions,  deratflf 
tamment  lescdtes,  pour  que  iesir 
dispersassent  pas  leurs  foroeSt  ^ 
cha  d*arriver  en  temps  utiledeva 
tantinople.  Aprds  avoir  jet^  1>  ^ 
tout  le  long  des  rivages  bf»Bir 
saison  trop  avanc6e  les  oblisei  ^ 
ner  en  partie  dans  le  golfe  de  Sn 
en  partie  aux  abords  dfe  la  Lvctefl 
la  Cilicie. 

L'empereur  de  Constantinopl** 
vait  plus  avoir  dedoute  sur  les  inl«" 


n  Voye*  Tbdopbane. 


(*)  Voyei  GoDslaDtio  Porpbyro***- 


SYRIE  MODERNE. 


100 


des  Musulmans  :  ces  deux  flottes  qui , 
a  force  de  raoies  et  de  voiles,  bordaient 
ies  rivaj;es  de  ses  possessions,  et  qui 
m^prisaient  de  faciies  victoires  sur  des 
edtes  abandonnto  pour  se  proposer  de 
frapper  h  la  t^te  son  empire  chancelaDt, 
lui  apportaient  dans  ses  flancs  Ies  enne- 
mis  Ies  plus  redoutahles  qui  jusqu*alors 
eussent  menao^  ies  successeurs  abdtar- 
dis  de  Ck)nstantin.  Cependant ,  ce  r6pit 
d'un  hiver ,  accord^  rorc^ment  par  ses 
adversaires,  permit  a  Tempereur  de 
faire  de  nouveaux  pr^paratifsde  defense, 
de  oonvoquer  le  reste  de  ses  soldats ,  de 
faire  appel  au  d^vouement  de  ses  sujets. 
Les  solaats  vinrent  en  assez  grand  nom- 
bre ;  mais  leurs  efforts  eussent  €xi  inu- 
tiles  sans  le  devouement  personnel  d*un 
inventeur  de  genie.  Chose  Strange,  mais 
bien  caract^ristique!  Tandis  que  les 
Byzantins  se  livraient  k  de  vaines  dispu- 
tes th^ologiques ,  dissertaient  sans  fin 
et  sans  profit  sur  les  attributs  de  Dieu, 
perdaient  leur  temps  dans  de  vaines  lut- 
tes  de  paroles,  il  y  avait,  au  fond  de  la 
$yrie,  k  H^liopolis,  un  homme  isol^, 
qui,  demeur^  fidele  au  gouvernement  ro- 
main ,  soutenu  dans  ses  travaux  par  les 
plus  nobles  sentiments  de  patriotisme , 
employait  toute  la  science  ae  son  temps 
h.  chercher  une  invention  capable  de  ren- 
dre  aux  Byzantins  leur  courage ,  en  leur 
mettant  a  la  main  une  arme  sup^rieure 
et  terrible,  qui  ptlt  jeter  la  terreur  et 
porter  la  mortparmi  leurs  ennemis.  Get 
Domme  s*appelait  Callinicus ;  son  inven- 
tion s'est  nomm^  feu  gr^eois  (*). 

Mais  qu*etait-ce  que  ce  feu  gr6geois  ? 
Sa  composition  est  un  mystere.  Les  his- 
toriens  du  temps  expriment  sur  son 
compte  des  opinions  diverses ,  donnent 
des  explications  contradictoires.  Les  sa- 
vants de  toutes  les^(>oqCies  en  ont  pr6- 
8ent6  des  recettes  qui  n'ont  aucun  rap- 
port les  unes  avec  les  autres ,  mais  dans 
l^uelles  il  entre  toujours,  selon  tous, 
du  soufre,  du  bitume,  du  naphte,  de 
la  poix  et  de  la  gomme.  Quelques  ehimis- 
tes  ont  detaiile  longuement  les  ingre- 
dients qui  devaient  entrer  dans  la  com- 
position dece  feu  si  redoutable,  mais 
n'ont  jamais  pu  le  recomposer.  On  n'est 
m^ine  pas  d'accord  sur  son  origine ,  ni 
sur  Tauteur  de  son  invention  :  les  uns 

(*)  Voyez  AbouU'faraiU. 


Tattribuent  k  Gallinieus ,  les  autres  a 
un  certain  Babinicus,  ^ui  ^tait  anssi  un 
Syrien.  Nous  avons  cboisi  le  nom  propre 
le  plus  r^p^te ;  et  nous  avons  constat^ 
que  le  plus  grand  nombre  de  versions 
s'accoroaient  k  fixer  la  date  de  cette  in- 
vention, de  Tan  670  k  Tan  680,  pr6cis6- 
ment  a  Tepoque  du  premier  si^e  de  Cons- 
tantinople par  les  Musulmans. 

On  a  confondu  longtemps  le  feu  ^e- 
geois  avec  d'autres  moyens  incendiaires 
employes  de  toute  antiquite  dans  les 
Indes  et  en  Chine.  Les  partisans  de 
cette  id^e  pr^tendent  que  Ies  Grecs  ont 
eu  communication  de  ces  mati^res  de- 
vastatrices  par  Tentremise  des  carava- 
nes,  qui  necess^rent  jamais  leurs  voya- 
ges entre  le  golfe  d*Oman  et  rAsie-Mi- 
nenre.  D*autres ,  plus  amoureux  encore 
des  traditions  lomtaines,  veulent  ab- 
solument  que  le  feu  gr^eois  ou  un 
agent  analogue  ait  €t€  connu  des  As- 
syriens ,  des  Medes ,  des  H^breux ,  aussi 
bien  que  des  Indiens  et  des  Chinois. 
Mac-Culloch,  illusUe  savant  anglais, 
s'efforce  de  nous  convaincre  que  Te  feu 
gr^eois  n*est  pas  grec,  et,  pour  prou- 
ver  son  assertion,  il  avance  que  ce  n'est 
que  sur  le  plateau  de  la  Perse,  dans  les 
environs  de  la  mer  Caspienne,  qu'on 
trouve  en  abondance  du  naphte,  un 
des  principaux  ingredients  du  feu  gre« 
geois.  On  ne  peut  que  douter  d'une  as- 
sertion aussi  absolue.  II  est  indubitable 
que  des  compositions  diverses  ont  €te 
invent^es  bien  avant  la  d^couverte  du 
feu  gr^geois  pour  incendier  les  camps 
ennemis,  les  machines  de  guerre  des 
assi^geants,  ou  les  flottes  par  le  moyen 
de  brdlots.  -On  salt  que  Genseric  de- 
truisit,  par  un  feu  artinciel  quelconque, 
la  flotte  romaine  qui  lui  ^tait  oppos^e. 
L'historien  Jules  Africain ,  contempo- 
rain  de  Tempereur  Alexandre  S^v^re, 
mentionne  un  feu  artificiel,  compost 
de  soufre  vif ,  de  nitre ,  et  de  la  pierre 
de  tonnerre.  11  est  aussi  question  d^espe- 
ces  de  feux  d'artifice,  employes  dans 
les  jeux  do  cirque  k  propos  du  consulat 
de  Th^odose  ("). 

De  tout  temps,  les  hommes  ont  dQ  se 
servir  du  feu  comme  moyen  de  defense 

(*)  VoyoE  Th^ophane ,  G^dr^nus ,  Constaolin 
Porphyrog^a^e,  Auoa  Comnene ,  la  chronl- 
qae  d^kUyerl  le  Grand .  Scallger  et  Joinvilie, 
Hisioire  de  saint  Louis. 


tio 


LTTNIVERS. 


ou  d'attaoue ;  mais ,  si  on  ne  eonsidere 
que  lea  enets  de  cea  inventiona  deatruo- 
tivea,  il  faut  reconnattre  au'aucun  de 
cea  feux  artificiela  n*approcnait  des  ra- 
vages occasionn^  par  le  feu  gregeois 
proprementdit.  La  principale  et  la  plus 
temble  quality  de  ce  feu,  que  nous  con- 
tinuerons  d'attribuer  a Caflinicus,  etait 
de  s'avi  ver  dans  Peau  au  lieu  de  se  consu- 
mer, desuivre  toutes  les  directions  qu'on 
lui  imprimait,  de  plonger  ou  de  s'dever, 
d'alier  en  ligne  directe  ou  de  former  des 
m^andres.  Sa  force  ^tait  si  puissante, 
qu'il  tordait  le  fer ,  pulv^risait  les  pier- 
res,  qu'il  s'attachait  I  une  matiere  quei- 
conque  ju$qu*a  ce  qu^elle  fdt  dissoute. 
Rien  ne  pouvait  T^teindre  que  le  vinai- 
gre  ou  le  sable.  Pour  le  projeter  hori- 
zontalement  ou  parabotiquement,  il  suf* 
fisai t  d'employer  des  instruments  divers. 
II  y  en  avait  de  grands  et  de  petits,  des 
sortes  de  sarbacanes  et  des  siphons  a 
main.  On  le  lan^ait  aussi  avec  dea  mor- 
tiers  de  differentea  dimensions;  on  Je 
projetait  par  blocs,  par  pelotes  de  toutes 
grosseurs,  depuis  la  grosseur  d*une 
olive  jusqu'a  celle  d'un  tonneau.  Son 
explosion  au  depart  ^tait  bruyante ,  et 
en  sillonnant  Fair  il  laiasait  une  trace 
lumineuse  aasez  semblable  it  la  queue 
d'unecomete.  £n  en  perfectionoant  I'em- 
ploi ,  on  put  Tenvoyer  d'une  fa9on  con- 
tinue par  le  moyen  de  pompca  foulaates, 
et  on  ralimentait  par  des  matieres  bui- 
leuses.  Apres  ne  s'en  ^tre  servi  que  con- 
tra les  machines  de  guerre  ou  les  vaia- 
seaux,  on  Tenvoya  contre  les  bommes 
en  troupe,  on  le  pr^x^ipita  sur  les  batail- 
lons  par  le  moyen  d'arbaletes  et  d'une 
arme  particuliere  appelee  par  les  Latins 
phialie,  Mais  soit  qu'on  le  souffldt  par 
des  tuyaux  de  cuivre ,  soit  qu  on  le  lan- 
^it  dans  des  vases  de  terre  vernisses , 
soit  qu'on  en  garnlt  des  ^pieux  de  fer 
environn^s  d'etoupes  imbibeesde  sa  li- 
queur, soit  qu'on  le  lanedt  par  le  moyen 
de  la  baliste  et  de  Tarbalete,  toujours 
est-il  que  son  bruit  ressemblait  a  ceiui 
du  tonnerre>  et  que  ses  effets  se  rappro- 
chaient  de  ceux  de  la  foudre. 

Cettedecouverte,  aussi  extraordinaire 
que  redoutable ,  devint  un  secret  d'£tat 
entre  les  empereurs  byzantins  et  Tin- 
▼enteur.  On  dit  gue  Constant!  n  IV,  h 
qui  Galiinicus  conna  le  premier  son  pro- 
&d6,  lui  fit  jurer  de  ne  le  communiquer 


k  personne  au  monde.  Let 
de  Constantin  IV  garderent  pT^ek9»| 
ment  le  secret,  et  ne  rap^ire&t  ji 
qu'a  un  seui  ing^ieur,  qmetaitr 
pour  la  vie  et  devatt  sans  eesse 
a  Constantinople.  Si  un  monar~ 
ger,  al  li^  et  ami  des  Byzantins, 
avec  instances  le  secret  da  fen 
on  lui  envoyait  de  la  matiere  t 
par^.,  sans  rinstruirede  sacomj 
A  en  croire  Fbistorien  Cedi 
preparateur  du  feu  gregeois 
son  temps,  un  desoemiant  del 
lui-m£me ;  et  il  edt  repousse  les 
les  plus  avanta^euses  pour  ne  pss 
m^me  one  partie  de  son  secret.  Ui 
dition  repandue  dans  le  bas 
Constantinople  disait  qu'un  aogc 
apport^  I'invention  da  feu  gregi 
grand  Constantin ,  quece  prinee 
Tex^ration  celui  qui  en  ferait  "* 
Strangers ,  qu'il  le  d^lara  inj 
commanda  de  lui  donner  la  n 
il  empereur  ou  patriarche. 

SI  nous  avons  rapport^  la 
populaire  en  m^e  temps  que  IV 
des  divers  historiens ,  si  nous  -^ 
aist^  sur  cette  invention  ph^i 
c'est  parce  qu'elieBiit  une  infloeiwej 
nifeste  et  continue  sur  le  sort  if 
Empire.  Sans  le  feu  gr^eois,  qui 
sit  tantde  vaisseanx  musulmans, 
tantinople  n'aurait  pas  manque 
prise  par  les  Arahes.  Une  fois  ia 
el  TEgypte  conquises ,  une  fois  Fi 
6tabli  parmices  fractions  diverge  ' 
peuples  gui  se  rangerent  si  vite 
domination  deTIslam,  une  fois  T 
de  Torganisation ,  Moavriah,  r 
oM^  aux  homines  de  la  conqu^ 
Khaled,  Amrpu,  les  Arabeso^ 
qu*li  vouloir  pour  s*emparer  delai 
sion  enti^re  des  Romains.  Lffi 
avaient  toute  T^nefgie   d'ane 
jeune  et  habitu^  d^ji  au  triompb^; 
Byzantins  avaient  toutes  les  faibje 
d  une  nation  vieiIHe  et  deeourasK 
des  revers  successifs.  Les  Arabes 
daient  un  ^l^ment  toot-palssaot 
tence ,  une  religion  unitaire  et 
nelle;  les  Byzantins  nounrissaimt 
plus  terribles  6l^ments  de  dissoluf 
resprit  de  secteet  d'^golsme.  An 
les  Byzantins  ^taient  perdus ;  et  i 
pour  les  sauver  une  puissance  toute] 
mat6rielle ,  le  feu  gregeois. 


SYRIE  MODERNE. 


lit 


Salei  DB  GONSTANTINOPLB. 

Ge  hi  raon^  678 ,  la  cinquante-qua- 
derhegyre,  que  les  Musulmansar- 
it  devant  Constantinople.  En  ee 
la  Constantinople,  moms  ^tendue 

'aujourd*hui,  n'en  etait  pas  moinsune 
^  leeoloasale.  Elle  couvrait  tout  le  pro- 

Creeurop^en  qui  s'avance  profon- 
;daosleseaux,  lesresserre,  les  se- 
•,et  forme  ces  deux  eanaux  admira- 
I :  le  Bosphore,  qui  fuit  a  Test,  et  la 
fee  d'Or,  qui  se  perd  au  nord-ouest 
•ksterres  grasses  de  la  Thrace.  Ce 
■ontoire,  qui  n'avait  pas  moins  de 
I  nille  metres  de  long,  presentait  un 
B^le  dent  la  base,  bien  lortiGee,  s*ap- 
PHt  smr  des  plaines  accidentees ,  qui 
fl  k  Vest  le  long  de  la  Come  d'Or,  Tan- 
I  gplfe  de  Ceras,  tandis  qu'il  bordait 
weit  la  mer  actuelle  de  Marmara , 
IMQoe  Propontide.  Les  deux  cot^s 
r  tt  mte  triangle ,  baign^  par  les 

ri,  itiient  defendus  par  des  centai- 
de  toars  reliees  entre  elles  par  de 
Mnet  fortes  murailles  (*). 

flottes  r^uaies  des  Arabes ,  aug- 
encora  par  un  renfort  nouveau, 
Dd^  par  rinvinclble  Kaleh, 
Moawiah  avait  donn^  la  direc- 
gentle  du  si^e,  se  trouvaient 
Qombreuses  pour  enserrer  la  ville 
e  qn'elles  venaient  attaquer^ 
lire  pour  eouvrir  de  vaisseaux 
dedouzemille  metres,  a  partir  du 
ittttdes  Sept-Tours,  sur  la  Propon- 
jh,  jusqu'i  rautre  extremity  de  la 
Me  Mfod  da  golfe  de  Ceras.  Ce  gi- 
piaiqiw  d^plotement  de  forces,  ce 
pmele  mena<^ant,  qni  semblait 
iHsIr  ^raindre  dans  ses  milliers  de 
tH  la  eapitale  d'un  empire  en  deca- 
Ifese,  tous  ces  ennemis  si  dpres  au 
Mat,  si  avides  des  depouillej  ro- 
pies,  ne  porterent  pourtant  point 
la  eapitale  des  Byzantins  Tepou- 
t  et  le  d^coaragement  qu'ils  s'at- 
lient  a  produire.  Les  Byzantins 
I  toute  conOanee  dans  leurs  dou- 
remparts ,  leurs  remparts  de  pier- 
d'abord,  et  leurs  remparts  de  soldats 
Mite.  La  ville  ^tait  pleine  de  trou* 
ii;  il  y  en  avait  assez ,  rapporte-t-on , 

O  Voyei  AboaYfeJa  et  Nic^phore. 


pour  former  trols  rangs  serr^  de  lan- 
ces tout  le  long  du  circuit  onduleux  des 
murailles.  Quanta  I'empereur,  il  comp- 
tait  sur  un  auxiliaire  tout-puissant  : 
le  feu  gr^^eois. 

A  I'aspect  de  ces  murs  ^normes,  de 
cette  for^t  de  maisons  qui  montaient 
et  descendaient  sept  coliines,  de  ces 
monuments  diss^mm^s,  de  ces  temples 
de  marbre ,   de  ces  ^tises  aux  ddmes 
Aleves ,  de  ce  majestueux  spectacle  en 
un  mot  que  pr6sente  une  eapitale  im- 
mense, et  peut-^tre  la  mieux  situ^e  des 
capitales,  les  Arabes  aval ent  bien  com- 
pris  qu'une  pareille  ville  ne  tomberait 
pas  en  un  jour,  qu'il  surgirait  de  cette 
lourmiliere  humame  des  milliers  de  ba- 
taillons,  oue  des  obstacles  inconnus, 
que  des  dinlcultes  de  toute  espece  s'of- 
mraient  aux  assi^geants,  qu*il  faudrait 
des  efforts  inouis  et  successifs  pour 
trouer  tous  ces  blocs  de  pierres ,  pour 
6craser  toutes  ces  masses  d'hommes. 
On  s'observa  done  de  part  et  d'autre  as- 
sez  longtemps ;  on  se  rangea  ayec  sym^ 
trie;  on  divisa  ses  forces ;  on  se  s^para  la 
t^che :  les  chefs  haranguerent  leurs  sol- 
dats, les  pr^lres  enflammkent  les  esprits; 
chacun  s'encouragea,  s'exalta,sepromit 
la  victoire  avantde  combat tre.  Spectacle 
presque  unique  dans  les  siecles!  Deux 
races  allaient  s'^treindre  corps  h  corps; 
deux  religions  allaient  se  disputer  le 
monde;  deux  esprits,  I'esprit  domina- 
teur  et  orgueilleux  de  FOccident ,  Tes- 
prit  eiiti  eprenant  et  tout  aussi  superbe 
de  rOrient,  se  retrouvaient  en  presence, 
et  recommen^aient  une  lutte  qui  de- 
vait  encore  durer  huit  siecles.  Quoique 
les  Byzantins  fussent  bien  d^eu6r6s, 
il  coulait  encore  du  sang  romain  dans 
leurs  veines,  du  sang  desmattres  du 
monde.  A  Icur  t^te  ils  avaient  un  em- 
pereur,  descendant  de  ta^it  d'illustres 
conqu^rants;  dans  I9  sefn  de  leuc  ville 
ils  avaient  plus  de  ricbesses  accumulees 
qu'il  ne  s'en  trouvai^  peut-^tre  dans 
FEurope  tout  entiere.  On  pouvait  s'at- 
tendre  que  dans  cette  crise  gigantesque 
de  grands  courages  se  d^velopperaient 
tout  a  coup ,  que  dans  cette  bataille 
definitive  le  d^espoir  d'un  peuple  cqiii- 
vaudrait  aux    vertus    militaires    qu*il 
semblait  avoir  perdus.  Tous  les  grands 
mysteres  de  puissance  qui  dormant  au 
fond  d'un  peuple,  pouvaient  spontan^- 


412 


L'UJNIVERS. 


meat  se  nianifester  dans  ce  combat  ter- 
rible ,  et  6toDner  de  nouveau  Tanivers. 
Les  Arabes,  de  leur  cot^,  avaient 
a  soutenir  la  reputation  d'audace  et  de 
pers6v6rance  qu  ils  avaient  si  prompte- 
meat  acquise.  Si  leurs  antecedents  guer- 
riers  les  soutenaient,  leurs  traditions 
religieuses  augmentaient  encore  leur 
ardeur.  Leur  propbete  ventre ,  Mabo- 
met,  avait  declare ,  croyaient-ils ,  que 
Tarmee  musulmane  qui  s'emparerait  de 
la  capitale  des  cesars,  ainsi  qu'ils  appe- 
laient  Constantinople,  verrait  tous  ses 
p^cbes  remis  parson  succes,et  que  tous 
ceux  qui  succomberaienfc  dans  la  lutte 
jouiraient  imm6diatement  des  delices 
du  plus  Toluptueux  des  paradis  (*).  Leur 
khalife ,  Tbabile  Moawiab ,  leur  avait 
donne  ses  meilleurs  generaux,  leur  avait 
coufie  son  fils  cberi  Yezid ,  et  leur  avait 
fourni  en  armes ,  en  macbines  de  guer- 
re ,  en  vaisseaux ,  tout  ce  que  son  genie 
administratif  avait  pu  r^unir  de  plus 
redoutable  etdeplus  excellent.  Enfin , 
ce  qui  prouvait  que  cette  expedition 
etait  pour  Tlslamd'une  importance  aussi 
baute  que  sacree,  c*est  que,  parmi  les 
Musulmans,  trois  vieillards  respectes 
par  la  nation  tout  enti^re  avaient  voulu, 
malgre  leur  grand  §ge,  s'embarqucr 
avec  Tarmee ,  et  courir  tous  les  basards 
qu^elle  courrait.  Ces  trois  patriarcbes 
etaient  d'anciens  compagnons  de  Maho- 
met, les  premiers  d'entre  les  Arabes 
qui  avaient  cru  a  la  mission  divine  du 
propbete ,  les  premiers  qui  avaient  suivi 
les  prescriptions  du  Koran,  bommes 
eminents  qui,  depuis,  avaient  interprete 
les  passages  obscurs  du  livre  sacre, 
avaient  fait  la  nomination  des  premiers 
kbalifes,  avaient  ete  consul tes  dans  tou- 
tes  les  grandes  occasions  oij  il  s'agissait 
de  la  destinee  de  Tlslam.  L'un  d'eux 
meme  avait  acquis  une  illustration  et 
une  preponderance  presque  egale  a  celle 
du  khalife,  pour  avoir  offert  un  asile  k 
Mahomet  lorsqu*il  s'etait  enfui  de  la 
Mekke,  pour  avoir  devine  dans  Tbomme 
le  prophete,  dans  le  proscrit  le  con- 
querant.  Ce  dernier  s*appelait  Abou- 
Ayoub ,  et  sa  memoire  est  restSe  dans 
une  telle  veneration  que ,  depuis  I'ori- 
gine  de  Tempire  Ottoman,  les  sultans 
de  Stamboul  viennent  sur  son  toinneau 

(♦)  VoyeE  AIwuTl^a. 


ceindre  Tepee  imperialea  leur  mt^, 
ment  au  trdne.  Qu*on  juge  maintoi 
de  Tautorite  que  devait  avoir  de  i 
vi  vantun  homme  aussi  saint,  et  coaT 
sa  presence  au  si^e  de  Coastaotift 
devait  enflammer  les  courages  ei  i 
.ter  les  imaginations  (*)• 

Soit  negligence  de  la  oartdes  I 
riens  byzantms,  soit  ouUi  dehj 
des  bistoriens  arabes,  les  detadsf 
siege,  si  memorable  et  si  lot 
prepare,  ne  nous  ont  point  etec.. 
Tout  ce  que  nous  en  savons,  €n 
pres  un  essai  d'assaut  dirige  c 
fortifications  maritimesde  Con 

f»le,  les  Arabes,  n'esperantpliBC 
a  ville  par  mer,  jeterent  des  t 
de  debarquement  sur  lac6teeiii 
ne  de  la  Propontide ,  et  vinrent  i 
leurs  macbines  et  porter  leurs  a9 
a  I'ouest,  centre  les  muraiila  i 
rantissaient  la  ville  ducdtedel 
Les  combats  se  suooederenti 
sans  intervalle,  de  plus  en  plus  a 
Rien  ne  pouvait  decouragerleil 
ni  les  masses  progressives  de  ki  , 
nemis,ni  les  projectiles  nombnui 
leur  lan^it  du  haul  des  iii8n.i 
lorsqu'un  jour  on  employa  le  ki 
geois,  lorsque  Tenceinte  eotieiei 
ville  slllumina  tout  a  coop,  et.^ 
une  pluieenflammee  sur  lesbataif 
sur  les  vaisseaux,  lea  effi^atn 
naires  et  terribles  de  ce  mojeD  i 
de  destruction  emurent  les  i 
mais  ne  les  fireot  pas  reculer. 
perfectionna-t-on  rempioi  da  i 
geois ;  en  vain  le  lan^a-t-on  ea 
milieu  de  Farmee  musulmaDe;  i 
les  bommes tombaient-ils  less 
autres,  devores  par  oe  comb 
fernal.qui  neldcnaitsa  TictinL, 
Tavoir  entidrement  consumee;^ 
Tincendie  se  communiquait-il  M 
en  navire,  portant  le  ravage  SBflT 
ligne  mabometane;  en  vainle  n 
Alou-Ayoub  fut-il  frappe  de 
son  tour,  les  Arabes  neselassereDly 
tant  ils  avaient  foi  dans  rimmoil 
bienbeureuse  qu*ila  meritaient  eay 
suivant  leur  oeuvre ! 

Au  bout  de  cinq  mois ,  rhi^ef  i 
put  suspendre  cette  batallle  genenlr 
quotidienne;  mais  encore,  pouro'i^ 

{*\  Voyez  Theophane  et  TiiciphON. 


SYRIE  MODERNE. 


IIS 


{las  Fair  d^abandonner  le  si^ge,  oour  ne 
pas  moRtrer  m&ne  Tapparence  de  la  re- 
traite,  les  Arabes  ne  voulurent  point 
retoarner  dans  leur  patrie,  et  ils  se  con- 
tenterent  de  desr«ndre  quelque  peu  la 
Propontide ,  et  de  s'emparer  sur  la  c6te 
asiatiquede  la  petite  ville  de  Cyziaue, 
aGn  d^  attendre  k  Taise  le  retour  de  la 
saison  des  combats.  Sept  ans  durant,  les 
Arabes  persisterent dans  leurs  attaqufs 
contre  Constantinople.  Chaque  annee, 
an  commencement  d'avril,  ils  revenaient, 
plus  ardents  que  jamais,  devant  l.i  capi- 
tale  byzantine,  se  battaient  pendant  six 
mois  avec  une  rage  infatigable,  et  re- 
toumaient  k  Cyzique,  au  mois  de  sep- 
tembre,  pour  revenir  encore  Tann^e 
suivante.  Gombien  de  traits  de  valeur 
duieot  sesucc^der  dans  un  si  long  es- 
pace  de  temps!  Que  d'actions  d'eclat 
illustr^rent  sans  dbute  les  deux  partis , 
ou  plutot  les  deux  peuples!  Quelle  ^ner- 
gie  de  la  part  des  Arabes  dans  leurs  at- 
taques  cons^cutives!  Quelle  patience  de 
)a  part  des  Byzantinsdans  leurs  defen- 
ses perp^tuelles !  Quelle  perseverance 
des  deux  cdtesi  Mais,  encore  unefois, 
les  p^ripeties  de  ce  grand  drame  nous 
sont  inconnues :  cette  epopee  en  action 
n*a  pas  eu  de  poete  pour  la  chanter. 

Avant  de  raconter  comment  se  ter- 
miaa  cctte  partie  grandiose  engagee  en- 
tre  deux  nations,  il  nous  faut  expliquer 
quelle  diversion  inattendue  vint  au  se- 
cours  de  Tempire,  si  gravement  meuac^, 
et  quelle  faute  fit  perdre  aux  Arabes 
Tavantage  d'un  renfort  considerable. 
Voici  la  faute  :  Moawiah,  dans  sa  sage 
prevoyance,  avait  leve  un  erand  nombre 
de  troupes  en  excitant  l^nthousiasme 
religieux  de  ses  sujets  au  profit  tie  Tex- 
pedition  sainte  de  Constantinople.  Le 
khalife  avait  en  outre  rassembie  une 
flotte  assez  forte  pour  contenir  dans  ses 
vaisseaux  tous  ceux  qu'il  destinait  a 
augmenter  son  armee  de  siese.  11  avait 
donne  le  commandement  de  ce  corps 
et  dc  cette  flotte  au  fils  dej^  ceiebre  de 
Kais ,  appeie  Abd*Allah-Kais.  Ce  jeune 
bomme,  tout  brave  quMl  etait,  manquait 
d'experiencemilitaire;  et,  au  lieu  de  se 
porter  sans  retard  vers  Cyzique,  il  per- 
dit  du  temps  et  des  hommes  a  attaquer 
|a  grande  lie  de  Crete,  et  a  penotrer 
jus  ]ue  dans  Tinterieur,  rempli  de  mon- 
tagues  et  de  difficultes  de  terraiu.  Une 

8^  Livraison.  (syrie  hodebne.) 


fois  m^me  qu'il  fut  engage  dans  le  mont 
Ida,  il  y  trouva  une  resistance  a  la- 
quelle  il  ne  s'attendait  pas  de  la  part 
de  la  race  energique  qui  de  tout  temps 
a  babitecessommets  neigeux.  Abd'Allab 
craignit  pour  sa  conqu^te;  et,  afin  de 
la  consolider,  il  voulut  detruire  tous  les 
obstacles  qu*oii  lui  presentait.  C'etait 
encore  employer  un  temps  precieux, 
gu'il  edtete  plus  politique  deconsacrer 
a  remplir  sa  mission.  Eofin,  de  retards 
en  retards,  Thiver  le  surprit :  il  ne  put 
se  rembarquer,  etTarmeede  Constanti- 
nople perditravantaged*un  reufort  qui 
lui  edt  peut-eire  fait  porter  aux  Grecs  le 
coup  mortel. 

OBIGINE  ET  PBOGB&S  DBS  MABONITES. 

La  diversion  qui  fut  si  utile  aux  By 
zantins  venait  de  la  part  d'une  nation 
nouvelle,  ou  plutdt  a*une  reunion  de 
clans  qu'on  nommait  dej^  lesMaronites. 
Leurs  attaques,  aussi  audacieuses  que 
repetees,  leurs  mouvements,  aussi  vifs 
que  bien  diriges,  leurs  forces,  reparties 
avec  intelligence ,  eurent  Thonneur  d'oc- 
cuper  d'abord  Moawiah.  puis  de  linquie- 
ter,  et  enfin  de  remp^cner  de  donner 
tous  ses  soins  au  si^ge  de  Constantino- 
ple, d'y  envoyer  toussrn  soldats,  d*y  ex- 
pedier  tous  ses  vaisseaux.  Comment  ce 
petit  peu  pie  s'^tait-il  organist  ?  comment , 
dans  le  decouragement  de  pres(]ue  tous 
les  Chretiens  de  Syrie,  s'6tait-il  trouv^ 
renereie  de  resister  ^  un  conquerant  in- 
Tincible?  comment,  dans  la  detresse  ge- 
nerate, s*etait-i  I  forme  une  sortede  pros- 
perite?Cesont  lades  faits  aussi  curieux 
qu'importants,  qui  demandentdesdeve- 
loppements  particuliers,  et  exigent  que 
nous  redescendions  quelque  peu  dans  le 
passe.  Aussi  bien ,  il  faut  que  ce  petit 
peu  pie  ait  eu  en  lui  un  grand  fonds  de 
vitalite,  pour  resister  de  siecle  en  siecle 
aux  efforts  continus  des  Musulmans, 
pour  traverser  tant  de  destinees  diffe> 
rentes,  pour  avoir  conserve jusqu^a  nos 
jours  sa  nationalite,  sa  religion  et  ses 
coutumes  (*)• 

L'origine  deregroupede  heros,qui 
devint  un  peuple,  est  diversement  rap- 
porteepar  rhistoire.  Quelquesaunalistes 

n  Voyw  C^renas,  ConsUnUn  Porphyro- 
geoete,  GuiUaame  de  Tyr. 

8 


114 


L*DNIVERS. 


les  eonibndent  av6e  \es  MardaTtes,  po- 

Sulation  ancienne,  mais  non  originaire 
e  Syrie,  qui  avail  toutes  ies  vertus  dea 
moDtagnards,  la  sobriety,  le  courage, 
I'amour  de  Tind^pendance,  augmentees 
encore  (I'un  certain  esprit  d'aventurequi 
la  porta  en  diff6rentes  occasions  a  en- 
treprendre  des  expeditions  lointaines. 
Ces  Mardaites  occupaient  en  partie  un 
district  de  la  C^l^syrie,  ou  Syrie-Creuse, 
nomm^e  Maronia,d'otk  leiir  serait  venu  le 
nom  de  Maronites.  Ge  qui  fait,  du  reste, 
douter  de  cette  assertion  historique, 
c*est  qu'aucuiig^ogrnpheancien  ne  men- 
tionne  ce  district  particuli%r  de  la  C^I^- 
syrie,  et  quMl  pnrait  impossible  qu'une 
de  ces  profondes  valines  qui  s'etendent 
entre  le  Liban  et  TAnti-Liban,  ait  ^te 
inconnue  des  diverses  nations  qui  con- 

Siirent  tour  a  toar  la  Syrie,  depuis  les 
recs  d*Alexandre  jusqu*aux  Romains 
de  Titus.  Quoi  quMI  en  soit^  que  le  petit 
peuple  dont  nous  nous  occupons  se 
soit  form6  d'un  noyau  de  MardaTtes, 
qu'il  fdt  originaire  de  toute  antiquity 
des  montagnes  du  Liban,  ou  qu'il  ne 
fdt  que  le  resuitat  d*une  Emigration  de 
proscrits  Chretiens,  a  Tepoque  de  la 
conqu^te  persane  d*abord  et  musulmane 
ensuite,  toujours  est-il  que  vers  la  fin 
du  septieme  siecte  il  avait  une  assez 
grande  valeur  en  Syrie;  que  Moawiah 
tut  oblige  de  compter  avec  lui ;  et  que 
rhistorien  TheophaneafGrmequMI  eten- 
dait  ses  possessions  depuis  le  Mont- 
Maurus,  a  rextr^mit^  nord  de  la  Syrie, 
jusqu*en  Galilee,  aux  environs  de  la  viile 
salute,  Jerusalem.  Voici  maintenant 
ce  que  les  chroniqueurs  Maronites  eux- 
m^mes  rapporteot  des  commencements 
de  leur  nation,  r^cit  qui  nous  paralt 
le  plus  lo^ique  et  le  plus  acceptable. 

Sous  Tepiscopat  de  Jean ,  vicaire  da 
pape  en  Orient,  quelques  peuplades 
chretiennes  vinrent  se  joindre  aux  ha- 
bitants de  Byblos,  actuellement  Djeball, 
petit  port  de  mer  situe  entre  Tripoli 
et  Bayruth.Ces  Chretiens  s'adress^rent 
It  Jean  pour  avoir  un  6v5que;  et  celui- 
ci  leur  envoya  un  certain  moine,  du 
nom  de  Maroun,  qui  sortait  d'un  mo- 
nastere  Etabli  sur  les  boi  ds  de  TOronte, 
La  principaute  de  Byblos  comprenait 
une  grande  partie  du  Liban,  et  posse- 
dait  deux  villes  deja  importantes,  By- 
blos et   Botrys.  Maroun  fut   nomm6 


^v^e  de  Botrys.  Anssi  savant  qoe 
modeste ,  profond^ment  prfocciipi  to 
inter^ts  moraux  de  ses  ouailles,  il  s'cf- 
fOr^a  de  ne  pas  laisser  peoetrer  pann 
les  montagnards  dont  il  etait  le  |m»* 
teur  les  sectes  nombreuses  et  conta- 
d  ictoires  qu  i  se  d  ispu  I  a  lent  alors  U  SQitf^ 
matie  religieuse  dans  les  capitals  II 
Tempire  byzantin,  a  Constaotinop!e*i 
Alexandrie,^  Antioche.  S^etantd^il^ 
tingu6par  des  ecritscontreles 
de  Nestorius  et  d'Eutvches ,  il  In 
facile  derefuter  toutes  ies  oouveOea 
tes  qui  tendaient  de  jour  en  jour  i 
viser  la  chretiente;  et  ses  services 
vinrent  si  utiles  a  r£glise,  que 
on  lui  accorda  le  tit  re  de  patriardne 
Liban ,  et  le  droit  de  sacrer  les '  ' 
xlans  toute  T^tendue  de  la  Hante-I 
Sa  dignity  et  son  pouvoir  tui  ava« 
acquis  pour  avoir  ramen^  a  TudIiIi 
tbolique  un  assez  grand  nombit  ' 
r^siarques;  maissa  puissance 
ne  fit  qu'accrottre  son  zele ,  et 
il  envoya  des  missionnaires,  d'n 
jusqu'a  Jerusalem,  de  Tautre  ji 
Taurus. 

Cet  homme,  excellent  du  reste, 
bornait  point  a  porter  des  secours 
raux  aux  dmes  roenac^es  par  la 
gion  her^tique,   mais  encore  fl 
blait  de  soins  temporels  les  malh< 
qu'il  rencontrait  et  qull  attirait 
ses    montagnes  hospi  ta I ieres;  Q 
tiquait,  en  un  mot,  la  veritable  c' 
de  r£van^ile.  Ses  vertus  et  ses  bi( 
augroenterent  en  pen  de  temps  \n 
ces  de  la  principnute  dont  il  etait  kj 
triarche.  Les  proscrits  de  tous  les ' 
voisins,  les  orthodoxes  opprimes," 
claves  des  peuples  idoldtres, 
en  foule  derriere  les  pics  ina« 
du  Liban ,  au  sein  de  ta  peupladri' 
organisee  et  sibien  administreefa 
roun.  Cedigne  pasteur  leur  devinV 
si  cher,  qu'ils  prirent  le  nom  de ' 
nites  pour  exprimer,  avec  leur 
naissance  pour  leur  chef  reli^ieui 
prit  d'independance  et  de  cliarite 
devait  distinguer a  toujours  leurso 
Jean  Maroun  avait choisi  [>ourresi< 
le  monastere  de  Kanoubm,  situr 
la  belle  vall^  de  Tripoli ,  arrose  pr; 
Wahr-Kadis,  ie  Jletwe  saint,  et  for' 
par  Theodose  le  Grand.  Cest  de  la, 
ce  centre  reel  de  la  contree  lif 


SYRIE  MODERNE/ 


115 


pelean  Maroon  vefllait  sur  son  peu- 
^  etse  prtoccupait  de  son  avenir  (*). 
Ge  out  fait  de  cet  evSque  un  vrai  pas- 
Bur  (Tbommes,  c'est  qu'il  leur  faisait 
to  bieo  de  toutes  les  manieres.  Outre 
IK  exhortations  religieuses,  outre  les 
Bemples  de  fraternite,  il  les  excitait  en- 
iore  au  travail  manuei  et  a  la  disci- 
loe  miiitaire.  Grdce  ^  lui ,  ce  petit 
inple  fit  en  peu  de  temps  des  prodi- 
■I.  Amoureuxde  leur  ind^pendance, 
Khes  sinoereinent  h  leur  religion, 
Maronites   repousserent  avec   vi- 
tor  les  premieres  bandes  d'Arabes  qui 
dispersaient  dans  leur  pays.  En  fai- 
Itla  guerre,  ils  apprirent  Tart  des 
nbats.  Bientdt  ils  devinrent  soldats 
iles,  adroits  archers,  excellents  ca- 
iers.  Non  contents  de  reoousser  Tin- 

00  etrangere,  ils  songerent  m^me 
^ndir  ieurs  possessions.  Ce  fut  ainsi 
tl  s'etablirent  deflnitivement  depuis 
)lttTtts,au  nord,jusqu'au  Carmel,  au 

{Dfldils  troQvaient  chez  les  Ara- 
tropde  resistance,  ils  se  refugiaient 
Blcsprofondes  cavernes  de  rAnti-Li- 
b,ouderriere  ies  forteresses  naturelies 
^nn  montagnes.  Aussi ,  peu  a  peu^ 
elans  disperses  forni^rent  une  na- 

Sous  rinspi ration  de  leur  6v6que 
^uie,  ils  ne  se  contenterent  pas  de 
»usser  Tennemi,  ils  b§tirent  les  vil- 
RttvaDtes :  Baskhontah,  sur  le  versant 
bUldu  Liban,  h  ini-cote  de  la  cliatne 

domine  la  vallee  luxuriante  de 
>*a;  puis  Haddelh  fut  elevee  par 

dans  un  des  vallons  ombreux  du 
r-Kadir;  enfin,  BescierraT,  au  pied 
ie  du  Liban.  Cette  derniere  ville, 
^enx  situee  peul-^tre  des  trois  que 

1  avons  nientionn^es,  placee  en 
Itt  d'une  plaine  fertile,  dans  un  bas- 
eotour^Je  nionta(<iies  qui  la  ^aran- 
fcni  k  la  fois  des  ravages  de  la  leni- 
t  et  des  incursions  des  barbares ,  fut 
outre  defendue  par  une  forte  citadelle, 
^vint  la  capitale  des  Maronites. 
i^rsque  les  Arabes  eurent  conquis  la 
fie,  leur  rapide  victoire  jeta  d'abord 
ipuvante  dans  la  Montague  :  les  Ma- 
litesse  fortiGerent  et  laiss^rent  passer 

pagnn.  Mais  plus  tard ,  quand  les 
pes  musulmanes  se  disperserent  sur 


il  Voyex  Fauste  !«airoQ  et  Thfophane. 


le  monde ,  quand  les  ennemis  des  Chre^ 
tiens  diminuerent  en  nombre  et  en  bar- 
diesse ,  les  Maronites  se  montrerent  de 
Douveau  au  dela  de  Ieurs  frontieres ,  et 
commencerent  avec  les  Mahometans 
une  guerre  qui  ne  cessa  plus.  Les  Ma- 
ronites neconnaissaient  ni  paix  ni  tr^ve; 
et  lorsque  les  grandes  cites  de  la  Syrie 
suspendaient  les  hostilites  avec  les  Ara- 
bes, ies  Maronites  n>n  combattaient 
pas  moins.  lis  all^rent  meme  jusqu'k 
mepriser  Tautorit^  de  Pempereur  de 
Constantinople;  et,  malgre  ses  ordres, 
ils  ne  deposerent  jamais  les  armes.  Ce 
fut,  d  apres  les  traditions  du  pays,  cette 
persistance  a  agir  iiidependamment  des 
princes  byzantins  qui  les  fit  appeler 
par  les  Arabes  les  rebislies.  La  cour  de 
Constantinople  les  traitait  comme  des 
sujets  r^voltes,  et  le  gouvernement 
des  khalifes  comme  des  ennemis  mor- 
tals C). 

Vers  Pan  660,  Jean  Maroun  mourut : 
son  peu  pie  le  regretta  vivement ;  mais 
Maroun  avait  assez  vecu  pour  achever 
son  oeuvre ,  pour  constituer  une  society 
d'autant  plus  durable, qu'elleetait  fon- 
dee  sur  la  fraternity  .et  sur  findepen- 
dance.  II  laissa  une  m^moire  r<^ver^e, 
et  qui  balance  en  Syrie  la  memoire  de 
saint  Maroun,  patron  de  Jean  Maroun, 
et  Tun  de  ces  premiers  solitaires  Chre- 
tiens qui  choisirent  un  asile  dans  les 
montagnes  d'Of lent.  Prive  des  conseils 
et  de  la  direction  unique  de  leur  ^veque 
modele,  les  Maronites  elurent  pour 
chefs  deux  hommes  d'audace  et  de  reso- 
lution ,  nommes  Paul  et  Fortunat.  A 
peine  ces  deux  hommes  furent-ils  a  la 
t^te  de  cette  bouillante  nation,  qu'ils 
songerent  a  faire  une  expedition  centre 
les  Arabes,  laqueilt*,  leuracquerant  de 
la  i^ioire,  leur  donnerait  de  Tautorite. 
lis  reunirent  quelfues  troupes,  parti- 
rent  de  leur  ville  de  Haddeth,  et  taille- 
rent  en  pieces  le  premier  detacheinent  de 
Musulmans  gu'ils  rencontrerent.  Moa- 
wiah,  indigae,  voulut  imm^diatement  ti- 
rer  vengeance  de  ces  deux  temeraires,  et 
ordonna  qu'oii  assie^edt  Haddeth  avec 
une  forte  armee.  Ce  siege  fut  toute  une 
epopee;  il  dura  sept  ans  conmie  le  si^ge 
de  Constantinople  :  les  Arabes  rabaor 

(^    VoypR   GooftaDtin   Forphyrogtotte  ft 
AbouTfdfadj, 

8. 


.116 


LIIJVIVERS- 


donnerent  pliisieurs  fois,  et  y  revinrent 
plusieurs  fois  avec  un  nouvel  acharne- 
oient ;  les  traits  de  bravoure  se  multi- 
pliereut  dans  les  deux  camps ;  en6n , 
apres  la  mort  h^roique  de  Paul  et  de 
Fortunat,  la  ville  ne  fut  livr^e  aux 
Arabes  que  par  trahison.  Elle  fut  pill6e, 
incendiee,  rasee.  £lie  avait  deja  dix- 
sept  cents  maisons ,  doot  il  ne  resta  pas 
pierre  sur  pierre. 

A  pres  ia  chute  d'uae  de  leurs  villas  prin- 
cipales,  les  Maronites,  qui  craignaieut 
que  les  Musulutans  ne  se  preparassent  h 
leur  enlever  toute  la  Ph^mcie ,  k  leur  d6- 
truire  leur  port  d^ja  prospere  de  Byblos, 
Il  leur  couperainsi  toute  coinmuuication 
avec  la  roer,  et  h  les  r^duire  k  vivre 
au  sominet  de  leurs  montagnes,  sV 
dresserent  h  Tempereur  de  Constantino- 
ple, comme  a  leur  protecteur  naturel. 
Mais  Constantin  IV,  dit  Pogonat,  nV 
vait  pas  assez  de  sentiment  de  Tavenir 
ni  de  genie  militaire  pour  cornprendre 
ni  quelle  utilite  pouvait  lui  ^tre  contre 
ks  Arabes  uiie  aiversion  puissante  en 
Syrie ,  et  combieu  il  devait  lui  ^tre  plus 
avantageux  de  porter  la  guerre  au  coeur 
in^me  de  ses  ennemis  que  de  Tattirer 
jusque  sous  les  murs  de  sa  capitale.  La 
flotte  musulmane  s'appr^tait  a  niettre  h 
la  voile  pour  TArchipel ;  une  tempSte 
terrible  s'ainoncelait  conlre  Tempire 
byzantin  :  cette  temp^te  effraya  Cons- 
tantin, et  il  laissa  sans  reponse  la  de- 
mande  des  Maronites.  Ces  deriiiers  fu- 
rent  done  dans  la  necessity  de  se  suflire 
a  eux-mSines.  Tout  d*abord  ils  elurent 
un  nouveau  chef,  doiit  le  nom  ne  nous 
a  pas  6te  conserve.  Tel  etait  Tattache- 
ment  des  Maronites  pour  leur  religion, 
qu'avant  de  remettre  le  pouvoir  a  leur 
nouveau  prince,  ils  lui  firentjurerqu*il 
ne  laisserait  nul  Musulman ,  uul  her6- 
tique  s'^lablir  dans  le  Liban ,  et  qu'il 
n'en  prendrait  aucun  a  son  service, 
m^ine  a  titre  d'esclave.  On  lui  signifia 
en  outre  qu'en  cas  de  inanquement  a  sa 
parole,  il  encourrait  rexcointnunication 
du  patriarche.  Le  premier  acte  politique 
du  nouveau  p'-ince  fut  de  d(4)uter  vtrs 
Constantinople  des  envoyes,  avec  la 
mission  de  jurer  obcibsaiice  a  Tempe- 
reur,  de  lui  lieman  \er  la  connrmation 
de  son  election  pour  lui,  et  pour  son 
peuple,  sinon  des  secours  en  homines, 
au  moins  quelques  secours  ea  argent,  qui 


permissent  aax  Maronites  de  se  procu- 
rer des  machines  et  quelques  vaisseaox, 
et  de  oontinuer  la  guerre  contre  Fidoli- 
trie  musulmane.  ainsi  qu*ils  appebieit 
risljm.  On  ne  sait  comment  remperai 
recut  les  envoys  maronites  :  le  «|i 
de'Constantinople ,  qui  avait  comnm' 
c^,  Fabsorbait  sans  doute  tout  e&lier, 
et  emp^eha  de  longtemps  les  tam^ 
des  Chretiens  de  Syrie  deretouroeriia 
leur  patrie  (*). 

A  la  mort  du  dernier  prince  eta 
Byblos,  qui  ne  r^gna  que  quelques 
on  choisit  son  filsSaiem  pour  soi 
cesseur.  Cejeune  homme  etait  arobiti 
et  entreprenant ,  et  esp^rant  augasei 
tout  d*uD  coup  la  population  de  sa 
tite  principaute,  il  ne  tint  aucun  en 
du  serment  solenoel  qu*on  atirt 
proQoncer  a  son  pere,  et  ouvrit 
fuge  dans  ses  inontagnes  aux 

heretiques  ^tablis  sur  le  versaal 

dional  du  Liban ,  et  qui  ne  suppoM 
qu'avec  Qpine  lejou^derhlam.  CA^ 
si  contraire  a  ropuiton  generate,  \ 
duisit  un  grand  scandale  punni  les  II 
nites;  leur  patriarche  excoinmuoii 
lem,  et  des  lorsles  Maronites  refusal 
d'obeir  a  leur  prince,  chasse  du  giroa^ 
rEgii&e.  Ces  dissensions  rendireot  I 
Arabes  Tespoir  de  s'emparer  du  IM 
Tout  pr6occup^  du  si^e  de  Const 
nople  que  fdt  Moawiah,  il  n>o  ri 
pas moinsune armee  po.r saisir fi 
tion  favorable  de  retablir  sa  doniioil 
et  de  fonder  Tunite  musulmane 
Syrie  tout  entiere.  II  divisa  ses 
en  trois  corps,  et  leur  ordonna  d'al 
en  m^me  temps  B)bios,  BaskM 
et  Bescierrai.  Ces  viiles  se  oefe^ 
avec  une   vaillance  admirafakt^ 
force  d'energie  et  de  pers^verM 
obligerent  les  Arabes  a  lever  )ii^- 
Une  fois  cet  a  vantage  obteou ,  Vsl 
ro nites  se  rassembierentde  toutfs^ 
formerent  une  masse  de  plus  de  tra 
mille  hommes,  et  s'etabiirent,sefl 
commaodement  dedifferentschpfeiW 
des  postes  bien  fortiGes,  bien  8:tutti 
d'ou  iU  pouvaient  faire  drt  desrti' 
coutinuelles  dans  les  valleesde  r<W 
et  daus  les  plainer  ue  Uamas.  Ces  tra 
mille  homines  determines  occu^<eQt 
moins  soixante  mille  Arabes,  qui,  tf 

n  Yoyez  Fauste  Ifairooet  Asstoaoi. 


StRIE  MODERNE. 


117 


ces  attaques  perpetaelles,  sans  cette 

coerre  de  partisans  faite  avec  autant 

fl'babilete  que  de  courage ,  se  seraient 

saos  doute  portes  sur  Constantinople,  et 

I  <araiea^pfut-^tre  determine  la  prise  de 

\h  capitate  byzantine :  telle  est  la  diver- 

j.lioQ  importante  dont   nous  parlions 

'^fius  haut,  et  qui  n'a  pas  peu  servi  k 

MY?x  la  derai^re  capitale  de  TEmpire 

pomain. 

Cependant  les  Maronites  ne  se  borne- 
it  pas  a  porter  le  ravage  sur  les  pos- 
lons  musulmanes,  a  escarmouoher 
les  frontieres ;  ayant  appris  qu'un 
sassez  considerable  d'Arabes  etait 
ipt*  sur  les  bonis  de  la  mer,  non  loin 
Tripoli,  dans  Tin  ten  tion  sans  doute  de 
ibarquer  pour  la  Propontide,  lis  r6- 
rent  de  I'attaquer.  En  consequence, 
n  prompts  a  executer  leurs  resolu- 
losqu'ales  former,  ils  se  diviserent  en 
isieurs  bandes,  fondirent  tout  k  coup 
lie  camp  musulman,  et  s'^lancerent 
ir  kurs  enneinis  avec  tant  defurie, 
niBttirent  avec  une  si  aiflente  intr^- 
Wte,  qu'ils  mirent  en  fuite  les  Arabes, 
bpoursuivirent,  T^peedansles  reins, 
iquaux  eaux  d*un  fleuve  torrentiel, 
i^d'AlGdar.  Leur  butin  fut  immense; 
lis  firent  plus  de  quatre  mille  prison- 
iers.  Aquelque  temps  de  la,  Salem,  qui, 
epuis  SOD  excommunication ,  n*avait 
Msatitourdp  lui  (]uequetquesserviteurs, 
i  qui  se  desesperait  de  ne  pas  prendre 
irtauxexploitsdesescompatriotes,  se 
pKipita  avec  plusieurs  nommes  de 
Phnevoloute  centre  un  gros  d'Arabes, 
^pendant  la  grande  bataille  des  iVIaro- 
1»  avail  penetre  dans  le  Liban  ,  et  les 
■aajusqu'aux  aientours  d*£mese.  Cet 
tededevouemeiitetdevigueurluifitre- 
fnerrestime  des  Maronites:  et  bientot 
I  chassant  a  leur  tour  les  h^retiques, 
pis'etaient  disperses  dans  la  Montague, 
p  en  les  obligeant  a  deveuir  catlioli- 
pes,  Salem  reconquit  son  autorite,  etfut 
*iev6  de  son  excommunication.  Salem, 
wniegre  dans  sa  puissance,  ne  s'aban- 
irouna  point  a  un  coupable  repos;  il 
fconira,  au  contraire,  plus  d'activit6 
pe  jamais  dans  seshostilites  coiitre  les 
Jrabe8,les  inquiela  toujours  de  plus  en 
>«us,  el  fut  tres-certainement  pour  beau- 
|«oup  dans  la  d^livrance  de  Constanti- 
nople, et  dans  la  dur^  de  Tempire  by- 
^^>n,  qui,  corame  nous  I'avons  dit,  ne 


pouvait  plus  compter  que  sur  un  auxi- 
liaire  materiel,  le  reu  gregeois,  et  sur  la 
diversion  d'uu  peupU  ind^pendant,  les 
Maronites  (*), 

LEYEB  DU  SIE&E  DE  CONSTANTINOPLE. 

Un  des  malheurs  de  Moawiah  fut 
d'avoir  un  fils  indigne  de  lui.  Depuis 
quil  etait  libre  possesseurde  riieritage 
si  agrandi  de  Mahomet;  depuis  quUi 
n'avait  plus  de  rival  capable  de  lui  dis- 
puterle  khalifat;  depuis  que  la  puissance 
colossale  qu'il  avail  ac(iuise  a  force  de 
patience  et  dMiabifete,  avail  donne  a  son 
genie  assez  d'espace  pour  deployer  ses 
ailes,  devenant  de  jour  en  jour  plus  am- 
bitieux ,  au  faite  de  la  puissance  person- 
nelle  qu'il  pouvait  acquerir,  ii  songeait 
a  laisser  dans  sa  famille  cet  em  pi  re  gigaa- 
tesque  qu'il  avail  conquis  pied  k  pied.  II 
lui  eOl  fallu  un  heritier,  sinon  aussi  su- 
perieur  qu*il  8*6lait  montre  lui-m^me, 
au  moins  d'un  sens  eleve  et  prompt;  et, 
par  une  fatality  singuliere,  son  GIs  ch^i, 
Yezid,  n*^lait  qu'un  homme  furt  ordi* 
Daire,  d'un  esprit  court  et  apathique, 
d'un  courage  vulgaireetsans^lan.  Moa- 
wiah dut  soufTrir  bien  souvent  en  cons- 
tatant  rincapacit^de  son  fils :  pourtant il 
esperait  toujours,  etildisait,  dans  le  Ian- 
gage  figure  de  TOrient,  que  si  le  fruit 
de  cette  jeune  5me  etait  long  a  mdrir,  ii 
n'en  serait  que  plus  savoureux.  Mais, 
malgre  une  culture  intelligente  et  des 
soins  quotidiens,  cette  dme  sans  activity, 
cet  esprit  sans  seve,  ne  profita  jamais  de 
tout  ce  que  fit  pour  lui  un  pere  de  genie, 
precepteuraussi  uarfait  qu'il  etait  tendre 
parent.  Les  preceptes,  quoique  toujours 
rapproches  aesexemples,  ne  prod  nisi  rent 
sur  lui  ancune  impnssioii  durable.  Les 
plus  belles  occasions  lui  fureiit  inutile- 
ment  proiliguees.  On  le  fit  vovagerdans 
I'empirearabe;  el  Teducation  des  voyages 
ne  lui  fut  pas  plus  profitable  que  Ten- 
tretien  des  bouimes  d'experience  et  de 
savoir. 

Enfin,  son  pere  crut  im  Jour  avoir 
trouve  le  secret  de  le  r^veiller  dfe  son  indo- 
lence, et  d'exciter  son  amonr-propre«  en 
lemettanta  m^me  d'assistera  un  grand 
6venenient,  et  d'y  prendre  la  part  qui  ap-» 

(*)  Voypz  Focste  ^■nl^on  et  AsF^irnnl, 


118 


L'TJNIVERS. 


})artenait  k  son  rang.  II  Fadjoignit  k 
"expedition  centre  ConstantJDople,  dans 
I'espoir  quMl  se  d^clarerait  bieiitot  capa- 
ble de  la  dirigor.  Cette  exceileute  ^coie 
d'art  militaire ;  ce  s'^ge  si  ardent  et  si 
]ong,oules  deux  camps  luttereDt  saiis 
cessed^habileteet  de  bravoure,d*audace 
et  de  patience ;  ce  combat  qui  si  vite  prit 
les  pro  portions  d*une£uerre;cesba  tallies 
successives,  ou  tousles  mo v ens  de  de- 
fense et  d'attaque  qu*inspire  le  coeUr 
et  que  combme  Tesprit,  furent  d^velop- 
pes  a  l^nvi ;  en  un  mot  ce  spectacle  ter- 
rible, mais  grand,  qui  terriGe  les  natures 
vulgaires  et  qui  eleve  si  baut  les  natu- 
res (I'elile ,  n'eut  pas  sur  le  coeur  de  Yezi  d 
Teffet  qu'en  attendait  son  pere.  Pendant 
toute  la  dur6e  de  ce  siege  iuternn'nable, 
qui,  depuis  le  premier  jour  jusqu'au  der- 
nier, fut  aussi  acbarne ,  aussi  vif,  aussi 
violent,  Yezid  ne  donna  aucune  preuve 
de  puissance  guerriere.  Les  bommes 
se  forniaient  autour  de  lui  avec  une  ra- 
pidite  merveiileuse;  les  jeunes  soldats 
aevenaieiit  veterans  au  bout  d'une  seule 
annee  de  ce  siege  continue!;  cbacun 
y  donnait  carriere  a  toutes  ses  facultes; 
et  quiconqueavait  un  talent  a  deployer^ 
une  superiorite  a  manifester,  rencon- 
trait  cent  occasioiis  pour  une  de  me- 
riter  Testimeet  lesapplaudissementsde 
ses  freresd'armes.  Yezidseulsemonira 
toujours  indifferent  et  impassible,  non 
de  cette  indilference  d'un  bonnne  supe- 
rieur,  qui  se  reserve  pour  les  cas  extre- 
mes; non  de  cette  nnpassibiliie  d*un 
hommc  de  grand  cccur,  qui  ne  se  laisse 
^mouvoir  ni  par  le  danger  imminent,  ni 
par  le  peril  imprevu,  ni  par  la  defaite, 
ni  par  la  victoire;  mais  de  C(  tte  indiffe- 
rence terne  et  froide,  qui  est  le  propre 
des  esprits  apatbiques,  de  c.  tte  impas- 
sibilite  instinctive  et  fatale,  qui  est  le 
vice  des  coeurs  muets.  Toutes  les  peri- 
p(^>ties  (le  ce  grand  drame  qui  se  jouait 
entre  Byzance  a  Tagoiu'e  et  Damas 
a  Tapogee ,  n  obtinrent  de  lui  qu'une 
attention  va^ue;  et  son  dme  alanguie 
n'en  comprit  jamais  toute  rimportance. 
Jamais  il  ne  trouva  un  mot  d  encoura- 
gement k  dire  aux  beros  qui  venaient 
lui  rendre  compte  de  leurs  exploits; 
jamais  il  ne  sut  adresser  a  Tarinee  une 
de  ces  harangues  ou  la  cbaleur  du 
cocur  equivaut  souvent  a  Fart  de  Telo- 
quence. 


eur  araft  J 
nvaioeM 
anUDopM 
»caladtf1 
'les  r»  I 
^rreorfr 


Peut-^tre  faut-il  attribaer  unegnnde 
part  du  resultat  malbeureux  de  cette 
expedition  gigantesque  a  rmcapacite 
dont  le  tils  du  khalife  donaa  le  triste 
spectacle  a  Tarm^.  Toujours  esl-il  qv 
lorsque  les  Arabes  virent  que  leurs  ef- 
forts se  multipliaient  en  pure  perte^qoe 
tous  leurs  actes  de  courage ,  que  tow 
leurs  devouements  n^aboutissaieut  qu*a 
de  vains  a  vantages,  et  qu*ils  n^avaieit 
pas  m^me  la  satisfaction  de  meritfr  Vi^ 
probation  de  leur  fatur  khalife;  lofs- 
qu'ils  virent  aussi  uulls  ne  receraiol 
plus  deSyrie  les  rentorts  qu*on  leur  araft 
promis;  lorsqu'ils  se  furent  convair  " 
que  les   murailles  de    Constantifi 
etaient  trop  bautes  pour  les  escaladtf 
par  surprise,  trop  solides  pour  les  r* 
verser  avec  des  machines  de  guerre orfi- 
naires,  qu'il  n  y  avait  ju'un  nouvdesa 
d'attaque  generale,  oil  les  masses^** 
siegeaiits  sesucc6deraient  sansiotimf^ 
tion ,  (jui  pouvait  decider  celle  •  ie»«t 
sanctin6ed'avancepar  le  prophctc,iW 
le  decouragjBnient  commen^a  a  penettv 
dans  les  rangs  musulmans,  onseotitte 
fatigue,  on  perditlVspoir,  etdescetiofp 
tantilnyeutplus.  dans  les ran^ des plui 
exaltes,  que  des  bommes  uui  remplis- 
saient  un  devoir  penible,  aoot  lebut,i 
k  force  d'etre  eloigne,  paraissail  i» 
possible  k  alteindre.  Pour  combledr 
mallieur,  aux  maux  que  leur  faisaiMt 
les  armes  si   meurtrieres  des   Bv* 
tins,  a  la  destruction  qu'operait  prf 
leurs  vaisseaux  et  dans  le  sein  deMi 
bataillons  le  feu  gregeois,  donti'ussf 
deven  lit  de  plus  en  plus  re pel6  et  ln» 
ble,  vinrent  aussi  se  juindre  les  rdvi|S 
de  la  peste.  Ce  dernier  coup  fut  fM 
aux  Arabes  :  ils  se  crurent  abandonn^- 
par  le  ciel.  Mahomet  semblait  avoir  ri- 
tire  sa  main  protectrice  qui  jusuuV 
lors  les  avait  soutenus  dans  les  combatSi 
Une  fois  persuades  de  cette  id6e,  ^ 

?|ui  faisait  leur  force  fit  leur  faiblesse:!* 
anatisme,  qiii  avait  si  puissammentd^ 
veloppeleur  energie,  tut  remplace  par 
une  superstition  funeste,  qui  les  suivait 
jusqu'en  face  de  leurs  adversaires,  leaf 
grossissait  le  danger  et  les  faisait  son- 
vent  mourirsans  profit  pour  leurs  coo* 
patriotes,  sans  honneur  pour  eux.  Ce 
fut  comme  une  metamorphose  com- 
plete et  generale ;  et  ce  people ,  qui  jus- 
que-la  n'avait  song^  qu'a  marcher  en 


STEIE  MODERNS. 


119 


arant,  pensa  poor  la  premiere  fois  k  la 
retraite  (*). 

Les  pertes  des  Arabes  leur  furent  ^ 
d'ailleurs,  d^autant  plus  sensibles,  que 
c'etaieiit  les  meilleurs  dVntre  eux  qui 
^taient  rcstes  sur  le  champ  de  bataille. 
lis  ne  se  souvenaient  de  leurs  freres 
morts  les  ann^s  pr^cedentes,  que  pour 
envier  leur  sort,  et  pour  plaiiidre  le 
leur.  Abou-Ayoub  n*etait  plus  la  pour 
relever  leur  courage,  pour  rendrea  leurs 
Ames  Tesfioir  dans  ravenir  :  lui  aussi 
avail  ^t^  t\i6  dans  ce  long  carnage;  et 
son  tombeau ,  qui  devint  prophetique 
pour  les  generations  vivantes,  restait 
muet  pour  ses  contemporains ,  gour 
une  arin^e  d^im^e  et  abattue.  Rais  et 
Mohammed,  les  premiers  chefs  de  I'ex- 
p^ition;  lebraveKaleh,  qui  avail  amene, 
la  secondeanneedu  siege,  on  renfort  con- 
siderable ;  Phnbile  Sonan ,  qui  etait  de- 
venu,  dans  les  demiers  temps,  le  chef  ge- 
neral des  troupesdeterre;  TincapableY^- 
zid,  que  des  victoires  partielles  n*avaient 
pasenflamme,  etqui  s*etaitmontrecom- 
pletenient  nul  dans  Fadversite  :  tous  les 
chefs  principaux  de  Texp^dition  parta- 

Seaient  le  d^coiiragement  de  leurs  sol- 
ats.  Ces  derniers  resolurent  done  de 
lever  le  siege ,  et  au  bout  de  sept  ans 
de  combats  quotidiens,  de  luttes  perp6- 
tuelles,  les  Arabes  s'^loii^nerent  de 
Constantinople,  au  commencement  de 
Tann^  679. 

Ce  fut  une  joie  sans  Gn  parmi  le 
peuple  de  la  capitate  byzantine;  ce  fut 
un  veritable  tnomphe  pour  Tarm^e 
romaine,  qui ,  du  reste,  a  Tabri  de  ses 
murs,  avait  souvent  deploye  une 
grande  valeur,  et  toujours  montre  une 
active  vigilance.  Le  neuple  attribua  le 
succ^s  de  la  defense  ae  la  vilie  a  la  pro- 
tection de  la  Vierge,  Panaia,  la  Toute- 
SaiDte;ilserapperaitquecinquantetrois 
ans  auparavant  les  secours  de  leur  toute- 
puissante  protectrice  les  avaient  sauves 
des  efforts  unis  des  Perses  et  des  Arabes. 
L'arm^e .  tout  en  rend  ant  a  la  protec- 
tion celeste  les  hommages  qui  lui  ^talent 
dus,  ne  s*en  pr6valut  pas  pour  diminuer 
d'energie  et  d'activit^ :  elle  eombattit 
avec  le  m^me  devouementjusqu^ace  que 
ledernier  descs  ennemis  edt  quitt^  les 
murs  de  la  capitate,  et  s*appreta  m^me 

•  (*)  Vayez  Tb^opliane. 


^poursuivre  ses  adversaires  dans  leur 
retraite. 

Or,  les  Arabes  avaient  dd  necessaire- 
ment  se  diviser  pour  fuir.  Les  vaisseaux 
epargn^  par  le  feu  gregeois  nVtaient 
pas  assez  nombreux  pour  porter  toutes 
les  troupes  musulmanes.  Sofian  fut 
done  oblige  de  se  mettre  k  la  tite  de 
trente  mille  hommes,  et  de  gagner  la 
Syrie,  a  travers  TAsie,  a  travers  un 
pays  hostile ,  a  travers  des  contr^es  dif- 
nciles.  L*armee  de  terre,  malgr^  ses 
miseres,  fut  moins  malheureuse  encore 
^ue  la  flotte.  Les  vaisseaux  musulmans, 
a  peine  parvenus  aux  cotes  de  la  Pam- 
phj^lie,  furent  assaillis  par  une  temp^te 
lurieuse,  qui  les  poussa  sur  le  pro- 
montoire  de  Sylee,  entre  la  ville  de 
Perge  et  celle  d'Attalia.  Les  rivages  ne 
pr^entaient  que  des  rocs  mena^ants  : 
presque  toute  la  flotte  vint  s'y  briser 
et  y  couler. 

Durant  ced^sastre,  les  troupes  de 
SoGan  etaient  poursuivies  a  outrance 
par  une  arm^e  grecque,  commandee 
par  trois  generaux,  Florus,  Petronos 
et  Cyprien.  A  force  de  marches  lon- 

fues,  penibles  et  multipliees,  les  Ara- 
es  se  fatiguerent  et  furent  joints  pres 
de  Cibyre.  L'armee  musulmane  pre- 
sentait  le  spectacle  le  plus  affligeant: 
des  blesses,  des  mourants,  des  hommes 

3ui  avaient  souffertr  la  faim  et  des  maux 
e  toute  espece,  des  estropi^s  qui 
avaieut  perdu,  qui  une  jambe,  qui  un 
bras,  tous  affuiblis,  languissants,  deses- 
peres.  Rien  ne  les  soutenait  plus  dans 
leur  retraite,  ni  le  fanatisme,  qui  leur 
avait  promis  le  paradis  dans  la  victoire, 
ni  rhonneur  militaire,  dont  ils  n'avaient 
plus  le  sentiment,  ni  Tamour  de  leur 
patrie,  qu'ils  avaient  quittee  pleins  d'or- 
gueil,  et  qu'ils  ne  pouvaient  revoir  que 
pleins  de  honte.  L^armee  byzantine,au 
contraire ,  Tesprit  allege  par  la  deli- 
vrance  dela  capitate,  le  coeur  enflamme 
par  un  succes  d'autant  plus  attrayant 
qu'il  etait  plus  rare,  enoouragee  sur  son 
chemin  et  traitee  avec  largesse  et  devoue- 
ment  par  les  populations  des  contrdes 
quVlle  traversait,  augment^e  tout  le 
long  de  sa  route  par  les  renforts  que 
lui  envoyaieut  les  garnisons  des  places 
fortes  et  les  camps  des  divisions  mili- 
taires,  cette  armee,  disons-nous,  avait 
un  aspect  aussi  fier  que  I'armee  arabe 


120 


L'UOTVERS. 


Favait  abattu.  Daas  d^  pareilles  cir- 
constances,  ni  la  lutte  ne  fut  longue, 
ni  la  victoire  disput^e.  Les  Arabes  se 
laisserent  entourer  par  des  troupes  frat- 
ches  et  nombreuses,  ne  firent  qu*une 
resistance  partielle,  et  se  laisserent  tail- 
ler  en  pieces ,  ainsi  que  des  blesses  qu*on 
dgorgerait  dans  leur  ambulance.  II  n*ea 
codta  a  leurs  ennemis  que  la  peine  de 
lever  le  bras  pour  les  tuer  (*)• 

PAtX    ENTBB   l' ISLAM    ET     L'eMFIAB 
BYZANTIN. 

Quelquesfuyards,  parmi  lesquels^tait 
Yezid,«cbappesau  naufrage  ou  au  mas- 
sacre, arriverent  a  Damas,  pour  ap- 
{)rendre  a  Moawiah  jus(|u'a  quel  degr6 
a  fortune  avait  frappe  son  peuple  et 
avait  voulu  Teprouver.  Moawiah  pour- 
tant  fut  encore  plus  fort  que  la  fortune  : 
it  ne  laissa  point  son  esprit  flecbir  sous 
ce  coup  terrible ;  les  alarmes  de  son  flis 
Y^zid ,  la  vive  Amotion  de  son  peuple,  ce 
premier  echec  important  et  complet 
qu*6prouvait  Tlslam ,  Hen  ne  put  ^bran- 
ler  la  confiance  que  IVIoawiah^  malgre 
son  dge  avanc^,  conservait  en  lui-m^me. 
Dans  cette  grande  crise  seulement ,  pour 
se  conformer  aux  usages  de  ses  pred^- 
cesseurs  dans  le  khalifat,  il  assembia 
un  conseil  compost  des  emirs  de  Syrie, 
et  des  homme^  les  plus  considerables 
des  autres'contr^es.  Mais,  dans  ce  con- 
seil solennel,  il  demanda  moins  des  avis 
qu'il  ne  donna  des  encouragements,  et 
n'indiqua  des  vues  nouvelles  et  ^nergi- 
ques.  Tpujours  politique,  il  voulait  que 
les  chefs  et  les  anciens  dii  peuple,  re- 
monies  etenseignes  par  lui,remontassent 
et  enseignassent  a  leur  tour  ceux  dont 
ils  6laient1es  reprdsentanls.  Toujours 
habile,  il  consentit  a  faire  une  paix  de 
trente  ansavec  lesByzantins;  et  s1l  la 
falsait  aussi  longue ,  c'etait  pour  aff'er- 
mir  sa  domination  en  Syrie,  en  Pense, 
en  Epypte  et  en  Afrique;  c'^tait  pour 
etabtir  Tlslam  sur  des  bases  inebranla- 
bles;  c*6tait  pour  fonder  une  dynastie. 
Les  h  storiens  du  Bas-Empire  ont 
cherch^  encore,  a  propos  de  celte  paix, 
a  calomnjer  les  Mahometans ,  et  a  rele- 
ver  quelque  peu  leur  faible  gouverne- 

(*)  Voye?  Ocklpy, 


ment.  lis  pretendent  que  lekha1ifeeoi*J 
sentit  a  payer  tribut  a  rempereor  i 
Constantmople;  ils  pretendent  que  Sb 
wiah  s*eQ!fagea  a  envoyer  a  la  r^i 
Osarstrois  mille  livresd*orj)araBtl 
lui  rendre  einquante  prisonmers,  el| 
lui  faire  present  d'autaot  de  dieq 
arabes  de  la  meilleure  race.  Outnll 
possibility^  fondainentale  de 
conditions  acceptees  parun  pribajl 
puissant  que  celui  avec  iequel  iltn ' 
et  pour  un  cas  de  guerre  qui  6ulti 
une  d^faite  qu*un  malheur,  moins  4 
faute  qu'un  accident,  il  sufGtde  [ 
la  valcur  des  articles  du  pretendu  i 
pour  se  con  vaincre  qu'il  est  aussi  fwifj 
ridicule.  Comment sefait-il,  pared 
pie,  que  le  prince  qui  a  PavaDtafedi 
la  negociation  ne  reclame  pas  tooti 
coup  les  prisonuiers  (|u*oo  lui  aT 
permette  qu'oane  lui  en  rende^ 
quante  a  la  fois  :  ce  qui  devaite 
trente  ans  de  servitude,  la  viae 
d'un  horame,  pour  les  dnquaotti 
niers,  en  admettant  m^me  qull  oy<| 
eu  que  quinze  cents  Byzantins  p*^ 
niers  des  Arabes  pendant  aiie[ 
qui  venait  dedurer  sept  ans.  QfUDtl 
einquante  chevaax  de  race ,  c*esl  p"" 
un    present   d^mpereur  h  empt 
qu*une  condition  de  paix.  ResteDtj 
trois  mille  livres  d'or,  qui  nc  repra 
tent  pas  pour  Tempi  re  musulmao  I 
entier  ce  que  telle  ville  de  la  Sniel 
donne  pendant  la  conqu^te  poursiifli 
de  tr^ve.  Lorsqu'on  a  si  peu  (fia^PT 
tion  et  de  bon  sens ,  on  ne  dPTrait|| 
in  venter  d'aussi  d^plorablestraitff^ 
en  faire  gloire  a  son  pays.  Oquiei 
dit,  d'ailleurs,  la  maladroite  a ' 
des  ecrivains  byzantins,  c'eslj 
clarent  que  le'  n^gociateur  ai 
Moawiah  fut  un  patrice  du  mm 
Pitzigandes,  vieillard  de  lalentfl* 
perience,  d'^loquenceet  d*habilete;e^ 
que  cet  homme  sage  et  eminent  fiM 
leur  dire,parfaitemenl  re^u  par  Moa^ 
et  qu'il  se  fit  tellement  esliraer  duk 
life,  que  celui-ci  le  combla  de  prcsfi 
C'edt  ^te  par  trop  fort,  de  iapart^ 
Moawiah ,  de  se  montrer  reconnaia* 
et  gfinereux  pour  un  bomme  qui  v* 
rait  humilie  par  un  traitd,  '*?"**  ^ 
tout  stupide  qu'il  soit,  ifen  iraplif 
pas  moins  le  pavement  d^bonorantdfl 
tnijut. 


SYRIE  MODERNE. 


131 


STATION    B'TEZID    AU    KHALIFAT. 

ons  1^  les  r^ves  de  presomp- 
finsensee  que  des  annalistes  sans 
veulent  faire  passer  pour  des 
I,  et  revenons  ^  Moawiah    et 
E&torieos  arabes.    Moawiah,  ce 
tkhalife,  qui  regnait  deja  depuis 
^tans,  etqui,  dans  chacunede 
oees,  avail   accomule  tant   de 
t,  commencait  a  se  fatiguer.  Sa 
favait  ete  alteree  par  plus  d'ua 
>Ie  de  guerre,  par  une  ad  mi- 
en aussi  difficile  que  le<  com* 
|it*il  donna  etaient  chanceux ,  par 
'  ation  gigaotesque  d*uQ  empire 
I.  Une  lassitude  etrange  s'em- 
at  a  coup  de  cet  homme  puis- 
tCt  se  seotant  desormais  trop 
;  trop  malade  pour  ne  pas  ^tre 
:  a  lui-m6me,  on  Tentendit  un 
Diner  ainsi  un  discours  public  : 
tomme  le  bl6  que  l*on  va 
noer,  mdr  et  bon  a  £tre  pul- 
LHon  regne  a  ^t^  long;  peut-^tre 
les-nous  las  les  uns  des  autres, 
naisesde  nous  s^parer?  Du  reste, 
irpasse  tous  ceux  qui  me  sui- 
,  comme  j'ai  ete  surpass^  par 
ieeaxquim*ont  precede.  »  Etran- 
oles  oil  forgueil  resiste  au  de* 
nt,  oil  le  sentiment  de  Ta- 
quivaut  presque  a  la  prophetic, 
"^cment  du  passe  est  aussi  noble 

t^cu  khalife  avait  raison  :  Ma- 
Abou-Bekr,  Omar,  Othman, 
"snt  plus  forts,  sinon  plus 
\  Moawiah ;  celui-ci,  en  etfet, 
nplace  dans  bien  des  cas  leur 
ar  Thabilit^,  leur  divination  par 
Moawiah  a  dd  dtre  bien  mal- 
de  comprendre  qu'apres  lui 
InWait  plus  de  g^nies  aussi  im- 
"(qu'Omar,  de  politiques  aussi 
^  que  lui-meme.  Et  cependant, 
i  Cfttte  penetration  sublime ,  Moa- 
qui  voyait  si  juste  et  si  avnnt 
p  occur  humatn,  etait  aveugle  h 
vit  de  son  Gls.  II  eut  bien  queiques 
bles,  puisquUI  consulta  un  des 
brds  les  plus  respectables  et  les  plus 
^  d'entre  les  Mahometans  sur  les 
ftites  et  le  savoir  de  Yezid;  mais 
Nf  ce  vieillard,  voyanr  iin'ii  ne 


pouvait  pas  dessiller  les  yeux  prevenus 
du  khaiife ,  s'etait  abstenu  de  tout  ju- 
gement,  le  kbalife  passa  outre.  II  eut 
bien  aussi  queiques  craintes,  comme 
nous  le  verrons  par  la  suite;  raais  il  ne 
crut  jamais  completement  a  leur  reali- 
sation. Toujours  est-il  que  cette  m^me 
annee  679,  la  soixantie4ne  de  Th^ire, 
anneequi  vit  la  levee  du  siege  de  Cons- 
tantinople ,  la  perte  de  la  flotte  musul- 
mane,  le  massacre  de  trente  mille 
Arabes,  se  termina  par  un  evenement 
plus  desastreux  nour  Tlslam  que  ces 
trois  premiers,  rinstallation  d'Yezid 
comme  heritier  presomptif  du  khalifat. 

La  ceremonie  du  partake  du  khalifat 
entre  Moawiah  et  son  fils  Yezid  fut 
fort  pompeuse  et  fort  belle.  Le  vene- 
rable khalife,  qui,  malgresa  vaste  cor- 
pulence, n'en  possedait  pas  moinscctte 
dignite,  qui  est  Tapanage  de  toutes  les 
grandes  natures,  presenta  au  people , 
Sans  la  principale  mosquee  de  Damas, 
son  fils  Y^id ,  jeune  homme  k  la  taille 
haute  et  svelte,  h  la  barbe  noire  et 
epaisse,  a  I'oeil  vif,^  sinon  intelligent. 
Le  fait  m^ine  qui  Tassociait  a  Tempi  re, 
avail  jete  sur  les  traits  dTezid,  natu- 
rellement  nobles,  une  gravite  c|ui  leur 
seyait  h  merveille.  II  avail  enhn  toute 
Tapparence  d*un  digne  heritier  de  son 
pere,  et  le  peuple,  trompe  par  cette 
apparence,  attendait  deja  du  regne' de 
son  nouveau  khalife  une  prosperite 
egale  a  celle  dont  il  avait  joui  sous  le 
gouvernement  de  Moawiah.  Tout  se 
passa  done  avec  ces  esperances  d'ave- 
nir  et  cette  satisfaction  intime  ^ui 
caracteriseiit  les  heureuses  soleunites  : 
les  voeux  etaient  un.mimes,  les  esprits 
d'accord,  les  coeurs  battalent  a  Tuuis- 
son.  Un  seul  homme  peut-^lre,  dans 
cette  illusion  generaie,  voyant  plus 
Clair  et  plus  loin,  conservait  queiques 
doutes  et  queiques  inquietudes  (*). 

Cet  homme  itait  Moawiah.  Bien 
s6r  de  la  Syrie ,  se  rappelant  tout  ce 
qu'il  avait  fait  pour  elle,  Pattiliide  de 
ses  habitants,  qu'il  s'^tait  attaches  par 
quarante  ans  de  bienfaits,  ne  Teton- 
nait  pas ,  et  ne  suffisait  pas  a  lui  re- 
pondre  des  eventualites  inenacantes.  II 
songeait  deja  au  complement  indispen- 
sable de  la  ceremppie  qui  se  p^ss^i.t;^ 

(»)  Voyex  Aboiri-hrarlJ.' 


122 


LTJNIVERS. 


c'est-li-dire  a  rapprob^tion  des  nom- 
breuses  provinces  de  Tlslam.  L'Yrak 
e^  rHedjaz.  le  pr^occupaient  surtout. 
II  savait,  d*une  part,  que  les  Alides  nV 
vaieut  ei^  qu'a  moiti6  vaincus,  et  d'autre 
part,  il  se  mefiait  avec  juste  raison  de 
presque  tous  les  habitants  de  la  Mekke. 
bans  la  premiere  de  ces  deux  provinces, 
I'esprit  religieux  s'^tait  chang^  en  un 
esprit  de  secte  ^troit  et  exclusif ;  dans 
la  seconde ,  c'^tait  bien  pis  encore.  La 
Mekke  et  M^ine  n^avaient  jamais  par- 
donn^a  Moawiahd*avoirfait  de  Oamas 
la  residence  du  khalifat,  la  capitaledeFIs- 
lam^  Ces  deux  villes,  berceau  ettoinbe 
de  Mahomet,  honneur  de  TArabie  par 
leurs  enfants  invincibles,  espoir  de  la 
religion  par  leurs  fanatiquesde  genie, 
etaient  devenues  depuis  quelques  an- 
nees  le  refuge  de  tous  les  dissidents,  qui 
y  trouvaieat  facilement  des  sympathies. 
II  fallait  done  s'attendre  de  ce  c6t6  a  la 
lutte,  lutte  oil  Tadresse  etait  plus  utile 
que  la  force.  Moawiah  pourtaut  avait 
prepare  les  voies  avec  sa  prudence  ordi- 
naire :  il  avait  fait  le  voyage  de  la 
Mekke  et  de  Medine;  il  s'etait  en- 
tret  enu  de  ses  projets  avec  les  hommes 
les  plus  considerables  du  pays,  les 
avait  ^tudi6s,  les  avait  penetr^s; 
mais  son  Gls  serait-il  capable  de  savoir, 
comme  lui,  comment  les  prendre?  Tel 
^tait  le  fond  des  pensees  au  vieux  kha- 
life;  teilos  etaient  les  reflexions  qui  as- 
sombrissaient  parfois  les  nobles  traits 
de  Moawiah  au  milieu  de  la  joie  gene- 
rale.  Yezid  n'avait  devine  aucune  des 
preoccupations  de  son  pere;  et,  en  cette 
circonstance  solennelle,  son  orgueil 
satisfuit  etait  le  seul  sentiment  qui  oc- 
cupdt  son  dine. 

Apres  la  c^r^monie  d*investlture , 
Moawiah  eut  avec  son  fils  un  entretien 
de  la  plus  haute  importance.  II  sonda 
r^me  du  jeune  homme,  il  la  trouva 
vide;  il  interrogea son coeur,  il  le  trouva 
sourd.  Ce  dut  etre  pour  ce  pere  si  ten- 
dre ,  pour  ce  prince  si  superieur,  une 
bien  triste  confirmation  de  ses  doutes. 
Pourtaut  IVIoawiah  ne  d^sesp^.ra  pas  en- 
core :  il  apprita  son  filscombien  il  6tait 
difliciie  de  regner;  ne  pouvaiitlui  don- 
ner  des  preceptes  de  conduite,  qu'il 
n'aurait  pas  compris ,  il  lui  donna  des 
conseils  effectifs  et  particuliers ;  ne 
pouvant  pas  faire  saisir  sa  pensee  par 


des  g^n^ralit^ ,  il  en  vm  \ 
suite  k  des  details  precis  et  |i 
nous  a  conserve  les  traits  p 
ce  grave  entretien.  Moaviah  i 
itianda  d*abord  a  sod  fils  den 
danssa  patrie  d*adoptioD,  laS 
en  sesouvenantsanscessedesc 
arabe,  et,  en  eoDservantla[l 
fonde  deference  pour  les  noi' 
dontil  tirait  son  origioe.  11  b 
qu'en  cas  de  dissension  civile,^ 
rien  a  craindre  des  Syrieos,  4 
^te  tout  devout  a  sa 
famille.  II  rarmaensuitecoDtn 
vaise  volonte  des  tribus  de  F 
en  lui  apprenantque.pannisi 
les  plus  acharnes,  il  auraitcerf 
dans  cette  contr6e,  quatreh 
conservaient  chacun  des  p ' 
khalifat.  Ces  quatre  bora 
HosaTn,filsd'Ali;  AbdAlttJ 
mar;  Abd-Errahman,  filsd'lT 
et  Abd- Allah,  tils  de  Zobaa.j 
I.e  premier  n'etait  pas  kf 
table,  quoiqu*il  Mt  le  plusr 
pulations  qui  le  souu 
inoffensif,  sans  ambition  ( 
devait  avoir  besoin  qu'oal 
cla merle  pouvoir;  etson^ 
plut6t  aboutir  au  martynf 
toire.  Aussi,  Moawiah  r^ 
k  son  fils,   s*il  etait 
battre  Hosain ,  de  ne  ooiM 
parent^  avec  lui ,  et  s  il  lei 
sonnier,  de  lui  rendreiirf 
la  liberie.  Quant  a  Abd-AM 
mar,  il  n'avait  de  son  peref 
devotion ,  son  integrity  in 
son  honn^tet^  de  coeur  et( 
tion  et  de  pensee ;  mais  ii  tfj 
venir  un  adversaire  dai 
tant  qu*on  en  agirait  arecN 
et  sans  consideration.    '^^ 
fils  d'Abou-Bekr,  n'tifUit  ] 
bien  a  craindre  :  n'ajant) 
de  preuves  d'energie  eiU 
aurait  sans  doute  le  boa  I 
point  I  utter  centre  uo  priM 
que  lui;  c'6tait  un  disa*j^ 
point  un  rival.  Abd-Aliabtl 
bair,  au  contraire ,  etzii  ■ 
dont  il  fallait  se  m^Ger  saosa 
actif,    perfide  dans  Tooum 
les  moyens  devaient  lui^JJ 
atteindre  un  but  qu*il  nenw 
tant  pas  par  ses  uaates  < 


SYRIE  MODERNE. 


lis 


avail  du  tigre  et  da  renard  dans  cet 
homme  tel  que  Moawiah  Tavait  vu. 
Sans  Eloquence  pour  se  creer  des  par- 
tisans en  plein  soleil,  il  etait  capable 
pourtant  d'agir  en  secret  et  souterrai- 
nement,  de  Cacon  a  exciter  les  plus  mau- 
vaises  passions  et  a  faire  fermeiiter  dans 
le  cceur  de  la  multitude  Tdcre  levain  de 
ses  sentiments  haineux.  Sai)s  aller  provo- 
quer  dans  son  autre  cette  bSte  farouche 
et  m^hante,  il  fallait  s'apprdter  a  la 
repousser,  si  elle  bougeait,  et  ne  la 
point  laisser  empoisoiiner  de  son  ve- 
Din  i'liine  des  Musulmans  fiddles. 


I 


MORT  PB  MOAWIAH  (*). 

Ges  enseignements  aussi   profonds 

Ijue  complets  furent,  pourainsi  parler, 
e  testament  de  Moawiah.  A  quelque 
temps  de  la ,  au  mois  de  redjeb  de  Tan- 
n^  60  de  rhegire  (679),  Moawiah  mou- 
rut.  Ton  pourrait  direde  fatigue,  tant  il 
s'etait  occupe  jusqu*a  ses  derniers  mo- 
meuts.  II  etait  dge  d'environ  soixante- 
quinze  ans,  en  avait  regn^  dix-neuf 
comme  khalife,  apres  avoir  ete  gou- 
verneur  de  la  Syne  pendant  plus  de 
vingt  et  un.  Les  travaux  successifs  qu*il 
s'imposait,  ses  preoccupations  quoti- 
dieiines,  avaieiit  certai nement  a breg^  ses 
jours;  car,  quoique  sa  corpulence  fdt 
enorme ,  sa  sante  n'en  etait  pas  moins 
robuste;  et,  quoique  las  d'une  vie  si  rem- 
plie,  si  a<?itee,  sans  les  inquietudes 
dernieres  que  lui  causa  son  tils,  il  edt 
certai nement  consenti  a  regner  encore, 
et  edl  trouve  assez  de  force  pour  vivre. 
Sa  mort  fut  une  veritable  calamite  pour 
la  Sy  I  ie :  ^rdce  a  lui,  cette  vaste  proviuce 
avait  repris  son  activite  premiere,  et  ses 
habitants,  desormais  tranquillessur  leur 
sort,  avaientaccepte  son  gouvernemeut 
comme  un  bienfait ,  et  avaient  Gni  par 
6'attacher  reellemeut  a  sa  personne. 

II  avait,  en  effet,  toutes  les  qualites 
d*un  prince  accompli  :  d*une  nun)eur 
toujours  egale ,  d'un  acces  facile ,  il  se 
montrait  juste  et  poli  avec  tons ,  affable 
avecceux  qui  avaient  bien  m^rite  de  sa 
part,  g^n^reuxenversceux  qui  lui  avaient 
rendu  des  services.  Sans  dtre  prodigue, 
83  magniOcence  avait  tous  les  caracteres 
de  la  grandeur.  II  aimait  les  aru  et  les 

(*)  Toyes  Ockley,  AboaU-fanOJ  et  Tb^ 
pbaoe. 


lettres ,  et  lea  bonorait  de  sa  constante 
sollicitude.  Selon  la  coutume  orientale, 
ses  hdtes  etaient  traits  d'apres  la  puis- 
sance de  celui  aui  les  recevait ;  apres  les 
avoir  combl^  des  margues  de  sa  gen^ 
rosite  pendant  leur  visite ,  a  leur  depart 
il  les  mvitait  a  prendre  dans  son  palais 
ce  qui  leur  a||[reait  davantage^  soit  en 
pierreries,  soit  en  ouvrages  precieux 
nart,  soit  en  manusorits  de  po^sie.  Au- 
dessus  detous  lesprejuges  de  son  temps, 
il  nese  tit  aucun  scrupule  d Wfrir  du  vin 
dans  les  repas  quil  donnait,  et  de  porter 
des  v^tements  de  soie.  Les  Mu&ulmans 
rigoristes  lui  reprochirent  toujours 
cette  derogation  aux  pretendues  lois  de 
rislam;  mais  nefailait-il  pas  qu'il  pro- 
teeedt  Tagriculture  qu'il  avait  fait  re- 
naltre,  le  commerce  auquel  il  avait  ren- 
du son  ancienne  prosp^rite?  Moawiah 
avait,  avant  tout,  le  sentiment  du  pro^res 
et  la  tendance  vers  la  civilisation.  Una 
fois  les  Arabes  reunis  en  corps  de  nation, 
sa  tSche  a  lui  n'^ta  it-el  le  pas  de  trans- 
former cette  nation  k  peine  policee  en 
un  pen  pie  digne  de  succeder  a  la  prepon- 
derance romaine  ?  Les  efforts  quMl  Ot 
pour  detruire  jusque  dans  sa  capitale 
rempire  Byzantm  sont  une  preuve  qu*il 
tendait  a  la  domination  du  monde,  et 
que  c' etait  la  sa  pensee  fondamentale. 
Les  Arabes,  a  son  ^poque,  6taient  la 
partie  hi  plus  turbulente  et  la  plus  ac- 
tive de  la  natiou  musulmane  tout  en- 
tiere.  Aucun  khalife  ne  sut  mieux  que 
Mo.iwiah  tirer  parti  de  ses  forces  vives 
du  khalifat.  Les  Syrieas.  plus  calmes, 
plus  casaniers ,  plus  attaches  a  leur  ri- 
che  nature  et  a  leur  beau  ciel ,  etaient 
plusciipablesde  perfectionner  rindustrie 
et  de  developper  les  arts  utiles.  Moa- 
wiah ,  qui  avait  compris  le  caractere  de 
cette  population,  encouragea  parmi  elle 
les  travaux  de  la  terre  et  les  eutreprises 
commerciales.  Or,  pour  veiller  de  plus 
pres  a  ces  deux  sources  fecondes  de  la 
prosperity  d*une  nation ,  il  dut  choisir 
pour  residence  une  des  villes  les  plus 
manufacturieres  de  Syrie ,  centre  na- 
turel ,  du  reste ,  de  son  empire,  qui  ten- 
dait vers  Constantinople:  La  Mekke  se 
montra  ialouse  de  Damas ,  mais  par  un 
esprit  d'egoTsme  et  d^imprevoyanoe. 
Moawiah  ne  s'en  inquieta  point;  et  il 
eut  raison.  A  la  Mekke,  le  gouverne- 
ment  des  Arabes  serait  reste  barbare; 


124 


LnONIVERS. 


a  Damas,  avec  un  peuple  intelligent 
pour  executer  ses  idees ,  Moawiah  crea 
en  peu  de  temps  un  ordre  stable ,  uue 
administration  reguiiere,  une  arinee 
discipline,  des  villes  industrielles. 
Les  nistoriens  qui  lui  sont  le  moins  fa- 
vorables,  lui  attribuent  pourtant  deux 
creations  qui  sufOraient  pour  Timmor- 
taliser  :  une  marine ,  et  des  postes.  Ces 
deux  ^tablissements  ne  sont-ils  pas  la 
preuve  d*un  genie  puissant  qui,  voulait, 
d'une  part,  se  cr^r  un  instrument  de 
plus,  et,  d'autre  part,  centra  I  iser  ses 
ordres  suivant  ses  besoins  ou  les  falre 
parvenir  rapidement  aux  demieres  li- 
mitesde  son  empire?  Toutes  ies  qua- 
lites  que  nous  vrnons  d'enumercr  ne 
suffisent-elles  pas  pour  dire  avec  justesse 
oue ,  si  Mahomet  fut  le  createur  de 
1  Islam ,  Moawiah  en  fut  Torganisateur. 

YEZID,  PREMIER  SUGCESSEUBDUKH 1- 
LIFAT  PAR  HEREDITE  (*). 

Ce  qu'avait  prevu  Moawiah  arriva: 
deux  des  concurrents  quMl  craignait 
pour  son  Ols  commeno^rent ,  a  la  nou- 
velle  de  sa  mort,  leurs  intrigues,  sinon 
leurs  hostility.  Ueureusement,  leurs 
efforts, en divergeant,  perdirent  deleur 
puissance.  Loin  de  s*unir,  ils  rest^rent 
separ^s.  Chacun  voulut  conserver  ses 
chances  pleines  et  entieres;  chacun 
chercha  d'abord  a  renforcer  ses  parti- 
sans et  a  grossir  le  groupe  qui  pouvait 
un  jour  le  couronner  de  la  tiare  islami- 
^ue.  Tous  deux,  avant  d'agir,  songerent 
a  trouver  a  la  fois  un  refuge  et  un  appui 
dans  leur  capitate  future;  tous  deux  se 
retirerent  a  la  Mekke,  la  ville  turbu- 
lente,  orgueilleuse  et  jalouse.  Aussi 
bieii,  c'etait  agir  avec  prudence;  car 
Y^zid,  malgre  son  incapacite  gouver- 
nementale,  sa  flicheuse  reputation  et 
son  caructere  negatif ,  pour  ainsi  dire, 
^tait  a  la  t^te  d'un  peuple  tout  devoue , 
les  Syriens;  d'une  arm^  disciplinee , 
celle  qu'avait  formee  avec  tant  de  soin  et 
d*li<ibilete  son  illustre  pere;  d'un  pou- 
voir  enlin  tout  cre6,  fort  et  respect^, 
ferme  et  etablisur  les  plus  larges  bases. 
Yezid  n'avait  qu*a  vouloir  eiiergique- 
ment,  et  ses  ordres  avaient  des  milliers 
de  voix  pour  ^tre  transmis,  des  milliers 

{•)  VovezCpdrfinus,  Th^ophane  et  Ocklpy. 


de  bras  pour  ^tre  eiecotes.  Yind  p 
dait  en  outre  tout  le  prestige  donlli 
nie  deson  pere  avaitentourelek' 
de  Damas.  Et  non-seuleaient  lafl 
et  r£gypte  appartenaient  de  c 
d'esprit  au  successeur  de  Nos 
mais  la  famille  des  Ommiadesa 
partout  des  raciues ,  a  Mtiioeir 
a  la  Mekke :  c'etait  un  arbre  m 
rejetous  innombrables,  auxr 
fondes  et  6tendues ;  il  devait^Ui 
la  gloire  comme  il  etait  deja  Ul 
rislam. 

Les  tergiversations  de  ses  8 
furentplus  favorables  encore  ij 
que  sa  cruaute  ne  lui  ful  fiwr 
peine  possesseur  du  pouvoir, 
donn^  Tordre  barbare  de  lui  r 
tete  de  tous  ceux  qui  oe  lai  p 
pas  serment  d'obeissance,et|i 
ment  eel  les  des  quaU'e  dissd 
son  pere  lui  avait  d^noDce&l 
ment  il  ne  trouva  pas  de  s^ 
sez  infSmes  et  assez  impri 
conformer  en  tous  points  a  c 
prescription.  Mais ,  quoique  lei 
pas  suivi  la  pensee,  oo  aof^' 
la  rigueur  que  le  nouveaa  t 
voulu  deployer  contrc  les  opp 
ses  droits ;  et  loin  de  jeter  If 
parmi  les  Arabes  de  THedjat, 
parvint  qu'a  s'aliener  les  espr^ 
differents  et  a  augmcotcr  la  Ir* 
lui  portaient  ses  rivaux  et  1~ 
rents. 

D^ja  les  deux  villes  saioUsJ 
et   Medine,    conspiraient  M 
Deja  Kouffa,  celte  capitate  M 
dont  les  habitants  avaient  U  f" 
chaude  aue  leur  brQlant  i 
tait,  meprisant  son   gouff 
rien,  organisant  la  guentfl 
etat  permanent  de  trouble HW 
Cette  derniere  ville  avait  ^ 
Hosain  des  emissaires  noa 
mission  d'engag  r  le  GIs  d'AM 
fils  du  prophet''  par  Fatime,!'^ 
ses'murs,   oii  les   Ajides  e' 
grande  majority ,  et  oii  I'honcw 
qu'on  appelait  Tusurpation  desC 
des  permc'ttait  de  compter  sur  ir 
sant  parti.  Centre  cet  orage  >«« 
grossissaut,  Yezid ,  qui  navait « « 
on  le  sail,  aucune  des  qualiie*J 
pere,  ne  sii»  pas  prendre  ass*!  J 
llcaces  pre- amioi'S.  H  p<?r<i'*  *1 


SYRIE  MODERiSE. 


135 


titaant  d^i  goa^erneurs,  pour  les 
sr  par  d'autres  qui  n'ontinreut 
;  de  succes  que  leurs  predeces- 
urdes  populations  exaltees.  Y6zid 
i  pas  mime  d'eoergie  daos  sa  f^- 
,  de  continuity  dans  sa  colere;  il 
vaot  tout  apathique  et  debauehe. 
ailledans  sa  ville  fidele,  a  l*abri 
I  tentative  directe  contre  sa  per« 

I  les  dissensions  lointaines  d'une 
de  ses  £(ats  i'iiiipatientaient 

u'elies  ne  Finquietaient.  1)  lais- 
;  faire ,  tant  qu*on  ne  veuait  pas 
uner  de  Tagraiidissement  pro- 
^du  parti  de  ses  adversaires,  tant 
esoiiicitait  pasde  lui  de  mettre 
le  a  teur  audaee.  Ce  earact^re 
C,  cet  esprit  sans  suite,  I'auraient 

II  si  I'inconstance  mSme  des  habi- 
p  Kouffa  n*etait  venue  fort  a  pro- 
oa  secours. 

is'ltre  montr^s  pleins  d'ardeur 
jkcause  d*Hosain,  les  Kouffiens 

fit  tout  a  coup;  et  les  pre- 

iult^sles  ayant  rebutis,  ils 

taussi  V  ite  clans  leur  enthou- 

:  leur  khalife  preteodu  legi- 

lij>avaientete  promptsa  lui  offrir 

memeut.  D*un  autre  cdte ,  en 

,  antlejeu  des  intrigues  civiles, 

Bmiades,  toujours  atlentifs  a  la 

I  prireat  enfin  le  dessus,  et,  tout 

Dt  le  plus  profond  respect  pour 

ne  sacree  d*Hosain,  ils  s'apprl- 

}  k  detourner  les  esprits  de  sa 

^  tt  a  le  £sure  trahir  a  Tinstant  du 

-  n  a'appartient  point  a  notre 

fadoettre  ici  les  diverses  compli- 

'  (pt  se  multiplierent  a  Kouffa  et 

lie.  Toujours  est-il  que,  lors- 

un ,  malgre  les  conseils  de  ses 

I  et  de  ses  plus  sages  amis ,  se 

^a  quitter  la  Mekke,  son  refuge, 

**ercourir  les  hasards  de  la  guerre 

ansportant  h  Kouffa,  au  lieu  de 

'  en  cheinin  une  foule  de  parti- 

^une  escorte  populaire,  sinon  une 

f )  il  se  vit  entierement  abaudonne 

Bitaux  quelques  compagnons  qui 

Btquitte  la  JVIekke  avec  lui.  Tout 

;clleinent,  et  selon  I'habitude  des 

perlide.s,  ks Kouiliens avaitnt 

ar  se  ranger  sous  la  dominatiua 

pas  fort,  et  une  partie  d'enlre  eux 

"Cut  infime  enregimentes  panni  les 

■*""»  d'Yezid,  qui  allaient  s'emparer 


du  temeraire  comp^titeur  au  khalifat. 

Une  fois  qu*Hosain  se  vit  trahi,  en 
perdant  son  espoir,  il  ne  perdit  rien  de 
sa  noble  Gert^.  11  se  laissa  entourer  par 
I'arm6e  de  son  heureux  adversaire ,  en- 
tra  en  communication  avec  les  chefs  de 
cette  arraee ,  parlementa  longuement , 
non  point  avant  de  se  rend  re,  inais  pour 
ne  point  se^rendre,  et  refusa  avec  une 
telle  ^nergie  de  reconnattre  son  rival 
comme  khalife,  qu'il  fallut  bit>n,  mal- 
gre la  repugnance  que  montraient  les 
K-ouffiens,  employer  la  force  pour  vain- 
ere  riuviucible  entltement  du  Ills  d'Ali. 
Ne  pouvant  plus  negocier  en  prince, 
Hosaln  r^solut  de  mourir  en  h^ros,  Ses 
compagnons  et  lui  etaient  campes  dans 
la  plaine  de  Kabil^  avec  leurs  femmes 
et  leurs  enfants;  et,  malgre  ces  obsta- 
cles a  une  defense  acharnee,  ils  n*en 
resolurent  pas  moins  de  se  laisser  tuer 
plutot  que  de  tomber  vivants  eutre  les 
mains  de  leurs  ennemis.  Uosaln  fit 
creuser  des  foss^  tout  autour  de  son 
camp;  il  fit  ensuite  remplir  ces  fosses 
de  broussailles  auxquelles,  durant  Tac- 
tion ,  on  devait  mettre  le  feu ;  chaque 
tente  fut  rellee  a  la  tente  voisine,  sous 
forme  de  barricades,  eton  n'ou  vrit  qu'un 
passage  ^troit  ou  Ton  ne  pouvait  com- 
battre  qu'homme  h  homme  comme 
dans  un  defile.  Ces  precautions  prises , 
auxquelles,  du  reste,  Tarmee  adverse 
ne  s  opposa  pas ,  taut  elle  ^tait  sQre  de 
la  victoire  et  tant  elle  respcctait  en 
Hosain  le  sang  du  prophete ,  on  se  pr^- 
para  au  combat. 

L'attitude  pleine  d'^nergiedes  parents 
et  compagnons  d'Uosain,  le  respect 
qu'on  portait  eucore  au  dernier  descen- 
dant direct  de  Mahomet,  cette  resolu- 
tion bien  prise  de  mourir,  qui  donne 
taut  de  force  aux  hommes  dans  tous  les 
temps  et  pour  toutes  les  causes,  arre- 
terent  d*abord  les  soldats  d*Yezid  et 
detacherent  mSme  de  leurs  rangs  une 
treutaine  d'hommes  que  le  remords  fit 
rentrer  tout  a  coup  dans  le  parti  des 
Alides.  Personne  n*osait  attaquer  le 
premier 'cette  poign^e  de  braves,  ce 
groupe  de  martyrs  qui  devaient  che- 
rement  veiidre  unt' vie  sacrifiie  li'avance. 
Les  principaux  d'cntre  les  Rouffiens 
furent  doiic  obliges  de  relever  le  moral 
de  leur  troupe  si  nombreuse ;  et ,  pour 
les  eijipccjier  de  se  retirer  comme  de^ 


13^ 


LIJNIVERS.' 


Tant  one  voix  d'en  haut,  ils  les  eneou- 
rag^rentjles  exciterentde  toiites  les  fa- 
cons,  et  leurdoniierentrexemple.  Ils  al- 
fi^rent  done  Tun  apres  t'autre  provoquer 
en  combat  singulier  les  rares  partisans 
d*HosaTn.Quelleque5oit  la  force  du  bras, 
rexaltation  dePesprit  Tcmporte  presque 
toujours  :  les  Alides,  resolus,  calmeset 
fermes ,  tuerent  un  grand  nombre  de 
leurs  adversaires  dans  ees  luttes  indi- 
viduelles.  Effray6  dece  resultat,  lechef 
des  quatre  mille  Koufliens,Oinar*ben- 
Saad,  ne  permit  plus  que  ses  soldats  les 
plus  vaillants  tombassent  un  a  un 
sous  les  coups  desesperes  des  Alides. 
U  fit  reculer  sa  troupe,  et,  au  lieu  de 
la  lance,  n*empioya  plus  que  les  fleches. 
£11  peu  d'instaiits  fine  grSle  de  traits 
eut  aemonte  et  crible  les  intrepides  ad- 
versaires du  khalifat  de  Damas.  Bientot 
Hosain  se  vit  presque  seul  debout 
parmi  les  siens ,  avec  des  femmes  qui 
gemissaient  au  fond  des  teutes,  avec 
des  enfaats  qui  poussaient  des  cris  la- 
raentables  au  bruit  du  carnage  (*). 

L'iucendie  avait  gagn6  tout  le  tour 
des  fosses,  les  premieres  tentes  du 
camp  tombaient  en  lambeaux  sous  les 
ileches,  et  un  monceau  de  caiiavres 
avait  encore  diminue  le  passage  ^trolt 
qui  avait  6te  pratiqu6  pour  sortir  du 
camp  dans  la  piaine.  Alors  on  vit  un 
homme,  tout  couvert  deja  de  sang  et  de 
biessures,  se  prosterner  trois  tois  du 
cdte  de  la  Mekke ,  se  relever  calme  et 
digne ,  la  Ogure  rayonnante  de  foi  et 
de  resolution ,  rejeler  loin  de  lui  son 
6pee  ebreclie^^,  e»itrer  un  instant  au 
fond  d«  sa  tente,  et  en  revenir  presque 
aussildc,  un  petit  enfant  dans  les  bras  : 
c'etdient  Hosain  et  sou  plus  jeune  tils. 
II  s'avanqa  gravement  jusqu'a  Tentree 
de  son  camp  et  s'y  assit,  la  t^te  tournee 
du  cote  de  ses  ennemis,  les  bras  croises, 
et  son  Gls  appiiye  centre  sa  poitrine. 
On  ne  sait  quel  barbare  tira  une  fleche 
centre  ce  groupe  sacre.  L*enfant  avait 
ete  perce,  el  son  sang  rejaillit  sur  son 
pere,  qui  le  rejeta  vers  le  ciel  pourdeman- 
der  vengean<e  sans  doute.  Puis  d^sor- 
mais,  seul  et  aecable ,  Hosain  changca  de 
posture,  laissa  tombcr  sa  t^te  sur  ses 
deux  mains ,  et  attendit  aiusi  le  coop 
de  la  raort,  qu'on  vint  lui  porter  eu  lui 

n  Voyez  Ockley  et  A.hoa*l-fara4|., 


fracassant  le  er&ne.  Uae  to  lij 
des  hommes  sanguinaires  aliaineei 
ne  s'^teint  plus.  On  coupa  i&digMi 
la  t^te  de  ce  martyr;  oo  moiili 
teusemeut  le  corps  de  eeheroi'.i 
fut  en  voy6e  a  Yezid ;  son  corptM] 
donn^  aux  chakals.  Quant  aux  nd 
reuses  femmes ,  dont  Tune  etaitlt 
pre  sceur  d'Hosain ,  Zeinab,  do 
prophete,  elles  aussi  fareateoi 
Damas,  la  chatneaucouetaiui 
Y^zid,  malgre  son  iosoueia 
tuelle,  fut  saisi  par  le  recitdei 
fdme  boucherie.  L'aspeetdelil 
p^  de  son  arlversaire  le  troubii; 
de  la  petite-dlle  de  Mahomet 
II  regretta  sincerement  que  ses 
impitoyableseussent  et6executfii 
titua  legouverneurde  &ouf&,iiii 
cha  amerement  sa  feroceconduitei 
les  pri&onnieres  qu'il  avait 
fers  au  lieu  de  les  traiter  iwi 
mats  il  etait  trop  tard :  Fativi 
des  lieutenants  de  Tezid  '^ 


famille  respectee ,  quoique 
leva  un  grand  nombre  de  Mualil 
de  ce  jour  naquirent  des  ^ 
invincibles,  un  scbisme  eM 
sang  de  deux  victiraes ,  Ali  et " 
et  de  ce  jour  les  Schiites,  j 
d'Ali ,  sont  demeures  conatamtf 
pares  de  tradition,  de  re^le^dej 
pes  religieux ,  avec  les  Sunnitai 
Sans  de  Moawiab  etdeson  filt 
L'impression  du  supplice  d'l 
du  massacre  de  ses  compagiw 
traitement  odieux  de  ses  feou^ 
des  lors  tellement  protonde,  i|b1 
absolument  ccarter  le  sou?enirr™ 
sanglante  tragedie  de  Fespnld 
bes.  Yezid, qui  craignaiiqB* 
tant,  rindignationdesespeiifto' 
nSt  h  la  re  volte,  songrai^ 
a  des  expeditions  lointainei^u^ 
done  Salem-ben-Ziad  audeb^J 
et  Okbah-ben-Naf  en  Afrique.^ 
version  essayee  avec  solennil*w| 
asspz  puissunte  pour  arriveratt" 
tendait  Yezid.  II  restait  enareW 
life  de  Damas  un  adversaire d* 
plus  redouiable  qu'il  6tait  a  lajj* 
adroit  ei   prudent  :  c'elait  Cflia 
Moawiah  craignait  leplus  pours* 
c'etait  Abd-Allah-ben-Zobair.  ^ 
nier  avait  habilement  prolite  du  a 
d* Arabic  qu'Uosain  avail  si  iiupni> 


STRIE  MODERNE. 


127 


tfttssL  La  mort  du  fils  d^Ali  lui  fut 

'  iplas  favorable  :  ii  le  plaignit, 

tfes  bourreaux  a  Tex^cration  des 

ans,  maudit  Y^zid,  Fusurpateur, 

'   ,  rin^Hgieux ,  etsut  se  faire 

jattre  pour  khalife  a  la  Mekke 

i  limine.  Cette  audace    surprit 

Ji^uepourtaiit  avail  si  bieo  averti 

t\  et  comme  ses  deux  principa- 

'  Betaient  Tune  en  Afrique ,  Tau- 

fond  de  la  Perse,  ne  pouvant 

^larevolte  a  sa  naissance,  il  lui 

Btrer  en  negociation  avec  elle. 

ntetourna  rapidemeotd  sbnpre- 

i  habitants  indecls  de  THedjaz 

nvoy6  a  Dainas   des  deputes, 

^fortbien  recus  par  le  khalife, 

lulroans  rigides  furentatel  point 

I  des  allures  de  la  cour  d*Y^zid , 

iinsolent  qu'on  y  d^plovait,  du 

{j)U'on  y  anichait  pour  les  pres- 

do  Goran ,    des   nombreuses 

lis'ysuec^aient,  que  le  rapport 

ent  de  ces  monstruosit^s  vint 

llndeclamations  d' Abd- A  llah- 

rsonlre  Yezid  et  accroltre  la 

BiDnnourrissait  a  la  Mekke  pour 

*i  de  Daraas  (*)• 

stilites  cominencerent  bientot, 
lllut  quTezid  envoy^t  une  puis- 
'  nte  dans  le  pays  m^me  dont  il 
pn  originc.  Cette  armee  vint  met- 
iegedevant  Meiline,  investit  de 
hparts cette  ville;  et,  apres  plu- 
l»inbats  dont  la  fortune  fut  di- 
[Medine  tomba  au  pouvoir  des 
>  Soit  haine  entre  les  Arabes  de 
kla Arabes  de  THedjaz,  soit  fana- 
Ifiireurreciproques,  toujoursest- 
LJItiineune  fois  prise,  Tarmee 
"  se  porta  coiitre  la  population 
'~l  deux  cit6s  saintes  aux  exces 
Icruels.  Tous  les  habitants  furent 
|.au  fil  de  Tepee;  on  n'epargna 
tiillier  de  femmes  enceintes. 
Jlaterreur  qu  auraitdil  inspirer 
Ml  traiternent,  la  INIekke  n'ouvrit 
t  portes  aux  Syriens.  Abd-Allah- 
bair,  plus  fort  qu'il  n'avait  ja- 
*6.  s  y  etait  renferme  avec  tous 
is,  tous  ses  partisans  et  tous  ses 
1  Les  inurs  etaient  solides,  et  les 
es  de  guerre  des  Syriens  les  bat- 
kloDgtemps  sanssucces.  Pourtant 

f Toyez  Ockley  et  Aboul'-faradj, 


les  perfectionnements  dans  la  gaerre, 
au*avaient  pousses  fort  loin  les  Arabes 
ae  S^Tie,  donnaient.une  grande  activity 
au  siege,  et  y  firent  emplojrer  tous  les 
moyens  connus  de  destruction.  Parmi 
ces  derniers  le  feu  jouait  un  grand  role ; 
du  bitume  enflamm^  ^tait  lanc^  sur  la 
vitle  et  ?  portait  a  ebaque  instant  Tin- 
cendie.  tJn  jour  la  Kaaba  elle-nrj^me  fut 
atteinte,  et  une  partie  des  voiles  sacres 
furent  consumes.  Grande  fut  la  desola- 
tion des  Arabes  orthodoxes;  mais  les 
Syriens  n'en  continii^rent  pas  moins  le 
siege,  et  deja  la  position  de  la  ville  et  le 
sort  d'Abd-Allah-ben-ZobaTr  dcvenaient 
de  moment  en  moment  plus  critiques, 
lorsque,  Y^zid  etant  venu  a  mourir, 
toute  bataille  cessa,  et  I'arm^e  assie- 
geante  reprit  la  route  de  Damas. 

Qu'avait  fait  ce  Yezid  dans  son  court 
regne  de  quatre  ans?  rien  de  saillant, 
sinon  des  cruautes,  le  massacre  des 
Alides,  le  sac  de  Medine.  Qu'etait-ce, 
d'ailleurs,  quece  jeune  homnie  enleve, 
h  rdge  de  trente-trois  ans ,  par  les  exces 
du  libertinage?  Un  Stre  faible ,  dont  la 
plus  admirable  education  n'avait  pu 
transformer  un  esprit  sans  ^lan,  un  cceur 
sans  chaleur,  une  dme  bien  vite  eteinte 
dans  la  debauche.  Ceux  qui  veulent  ab- 
solumentlui  fairequelques  ^logeslouent 
son  goOt  pour  la  po^ie  et  sa  generor 
site  pour  les  poetes ;  mais  ^tait-ce  la  la 
seule  quality  que  devait  montrer  le  fils 
de  Moawiah,  le  premier  successeur  a  un 
trone  a  peine  fonde,  qui  avait  des  ja- 
lousies de  toute  sorte  contre  lui ,  un 
competiteur  respecte,  Hosain,  un  ad- 
versaire  habile,  Abd-Allah-ben-Zobair? 
Son  existence  fut  done  plus  funeste 
aux  Arabes  de  THedjaz  qu'utile  h  ceux 
de  Damas ;  et  si  la  Syrie  ne  fut  pas  le 
th^dtre  de  la  guerre  civile,  elle  n'en  fut 
pas  moins  einue  par  les  sentiments  fra- 
tricides des  Arabes,  inquietee  ()ar  leurs 
exces ,  troublee  dans  sa  quietude  par  de 
violeules  reactions  (*)• 


SITUATION  DE  LA  STRIE  AU  COMMEN- 
CEHE^iT  OE  LA  DYNASTIE  DES  OH- 
MIADES. 

Au  debut  des  conqu^tes  il  y  a  tou- 
jours  despotismedes  vainqueurs  envers 

(*)  Voyez  Aboa'l-feda  et  Ockley,  Hutoin 
des  Sarrasins. 


128 


LTJJSIVERS. 


les  vaincus,  baine  des  vaincus  contre  les 
vainqueurs.  Toutes  les  mauvaises  pas- 
sions ,  que  la  guerre  a  allumees,  n'etant 
pas  encore  satisfaites,  d^uae  part,  Tavi- 
dite  se  gorge  de  rapines ,  la  cruaute  se 
baigne  dans  ie  sang,  Torgueil  se  fait 
un  pi6destal  des  cadavrcs  qu'elle  a 
amonceies;  d*autre  part,  la  vengeance 
se  trame  dans  Toinbre,  la  perGdie  de- 
nonce  et  trompe,  T^goisme  se  nicinifeste 
par  des  Idchetes  et  des  trahisons.  Plus 
tard,  quand  Ie  temps  a  passe  sur  toutes 
les  auimosites,  quand  Tbabitude  a  fait 
accepter  Ie  nouveau  joug,  chacun  se 
supporte  plus  facileinent ;  on  se  fait  des 
concessions  peciproques;  on  se  rappro- 
che  peu  a  peu.  Le  despotisme  n^etant 
plus  te  moyen  unique  et  souverain  de 
poss^er  et  de  jouir,  la  rigueur  se  reM- 
che,  et  bientot  les  calculs  de  TifiterSt 
prennent  la  place  des  brutality  de  Ja 
force  inaterielle. 

II  n'est  pas  dans  Tesprit  de  la  majority 
des  hommes  de  \ivre  loi.gteinps  en  enne- 
niis ;  et,  une  fois  les  premieres  luttes  ter- 
minus, chacun  tend  a  se  grouper  pourse 
porter  aide.  La  difference  des  races,  il 
est  vrai ,  a  ete  souvent  un  obstacle  a  ces 
fusions  aussi  utiles  que  naturelles :  sou- 
vent  aussi  certaine  antipatbie  instinctive 
a  ^rte  violemment  entre  elies  des  po- 
pulations qui  tendaient  a  revenir  Tune 
vers  Tautre.  Toutefois,  ces  exemples 
sont  rares  :  ils  ne  se  $ont  rencontres 
en  Orient  qu'a  de  longs  intervalles,  et 
dans  des  cas  exceptionnels.  Les  Ro- 
mains,  peuple  d*Occident  relativement 
aux  populations  d'l^gypteetd'Asie,  ont 
trouve  beaiicoup  plus  de  resistance  a 
leur  etablissemt-nt  niilitaire  a  Alexnn- 
drie  et  a  Antioche,  que  les  Arabes  dans 
les  premieres  annees  de  Thegire.  Mais 
aussi,  c'est  que  les  Arabes  avaient  pres- 
que  les  m^mes  godts ,  les  mSmes  ten- 
dances, les  m^mes  habitudes  que  les 
Syriens,  dont  ils  envahissaient  le  pays, 
line  fois  qu'il  n*y  eut  plus  de  chancesdans 
la  lutte,  plus  de  contestation  dans  la  con- 
qu^te,  les  rapports  entre  les  vainqueurs 
et  les  vaincus*  s'ameliorerent  prompte- 
ment ;  et  par  ce  besoin  ni^me  de  fusion, 
dont  le prinr.ipe  est  une  dts lois  je  I'esnrit 
humain,  on  en  vint,  plus  vite  pput-etre 
quepartout  ai.leurs,  a  un  rapprochement 
complet  et  general.  Voila  comment  une 
des  raisons  de  la  guerre,  la  difference  de 


religion,  s'amortlt  dejoiirttJQn,d 
comment  taat  de  SyrieosarriveRr^ 
si  rapidemeot,  a  embrasser  laj 
leurs  adrersaires.  Quaod  la  n 
cesse  d'etre  un  lien  saere,eUe(l 
un  calcul  int6res>e ,  un  moyeo  dtflj 
slon  tout  humatne,  un  pretextedii 
pathie  dont  il  peut  resulterdttM 
ges  immediats,  que  personne  if 
donne  de  propos  delib^.  Cij 
point  de  vue  uu'on  peut  dire 
martyrs  sont  des  guerrifrs; 
temps  de  paix,  ies  martyrs  s 
exceptions. 

Telles  sont  les  causes  seDenle^ 
prompte  pacification  deiaSyrie| 
est  la  rason  du  succes  prod^ 
Moawiah,  le  grand  administntfl 
prevoyances  de  cet  homine  def 
realiserent  m^me  atel  point, ( 
eapacite  de  son  fils  et  I  audaeil 
vaux  qui  vinrent  a  Ydzid  di| 
r  A  rabie ,  ne  purent  detacher  h 
tionssyriennes  de  sa  personnfrt 
des  horreurs  de  la  guerre,  pM 
pour  le  repos  qu'elles  a?aieQt0 
par  tant  de  sacriGces,  redwilirtl 
tout  unchangement  dedomioatf"* 
qu'il  flit,  elles  demeurerenl  I 
la  famille  d'Ommeyyah,  etr« 
pour  khalife  le  Gs  dTeada^ 
d'entratnement  que  d'unaniniil 
heureusement  leur  tranquillity  1 
core  compromise  par  la  ousilh 
de  Moawiah  II,  Gls  dTezid.  Ce| 
sans  caractere,  d^vot  plul^r 
ffieux ,  couard  plutot  qae  ir 
faible  plutot  que  bon,  nepati 
que  quelques  inois  la  pesaotaf| 
voir  supreme.  L'existence  f 
la  Syrie  allait  done  iin  de  t 
en  (question,  lorsqu'un  li 
adroit  que  resolu ,  d  une  cooi 
toujours  habile,  sinon  touji 
ambitieux  depuis  sou  adolesgHjg 
sans  cesse  rfive  la  puissance  soay 
devint  Tobjet  des  supplications* 
riens,  qui  lui  offrirent  le  khaliiW 
descendant  de  la  famille  r^»* 
homme,  c*6uiit  rastucieux 
Tancien  secretaire  d'Othman, 
Moawiah  Tavait  et^  de  Wahod 
succes  de  toutes  ses  d^marchtf » 
riva  bien  un  peu  taid ;  Ie  vceu  dej 
sa  vie  ne  s*accomplissait ,  coinwj 
une  derision  celeste,  qtfauflwina! 


SYRffi  MODEtUNE. 


129 


II  allfldt  quitter  la  terre ;  mais  un  reste 
de  jeiinesse  aidant,  et  surtout  les  encou- 
ragements et  leg  prieres  de  son  fits, 
Abd-el-MeKk ,  ayant  vaincu  ses  derniers 
scrupules,  il  accepta  la  souverainet6 
qu'oii  lui  offrait  (*). 

A  peine  sur  le  trdne  du  khalifat ,  une 
pensee  de  fourberie  et  d'usurpation 
s^empara  de  son  esprit,  et  le  domina  h 
tel  (K>int,  qu'il  songea  plus  a  la  mettre 
a  execution  qu'a  repousser  les  rivaux  qui 
s'agitaient  autour  de  lui.  Merwan  tut 
cous^uentavec  lui-m^me  jusqu'au  bout 
de  sa  carri^re ;  il  etait  ne  pour  trom- 
per,  et  il  trompa  jusqu'a  son  dernier 
soupir.  Les  deux  conditions  de  son  Ele- 
vation au  khalifat  avaient  EtE  la  promesse 
de  prendre  pour  successeur  un  des  des- 
cendants directs  de  Moawiah  plutdt 
Sue  sonpropre  fils,  etd'epouser  la  veuve 
'Y^id.  1^  derni^re  de  ces  conditions 
futimm^iatementremplie  par  Merwan, 
malgr^  son  dge  avancE;  mais  il  ne  satis- 
fit  en  cela  le  voeu  des  partisans  de  Moa- 
vf'iahj  qu*afin  d*toe  plus^  portee  d*Eviter 
Fex^utlon  de  la  seconde  condition,  qu'il 
avait  pourtant  solennellement  accept^. 
£n  Epousant  la  veuve  d*Y^id ,  il  n'a- 
yait  pas  a  craindre  son  opposition ,  qui 
eOt  pu  devenir  trte-puissante ,  et  en 
inline  temps  il  se  trou  vait  naturellement 
le  tnteur  du  dernier  petit-fils  de  Moa- 
wiah, Khaled-ben-YEzid ,  et  pouvait 
facilement  T^arter  du  trdne  au  lieu  de 
I'y  placer.  Des  lors  toutes  les  pensees 
et  tous  les  efforts  de  oet  bomme, 
aussi  rempli  d'astuce  que  d'ambilion , 
furent  tourn^s  vers  ce  butd^lojal.  Loin 
d'Epuiser  ses  forces  a  ^eraser  imm^ia- 
tement  des  rivaux  qui  ne  lui  semblaient 
pas  fort  redoutables  sans  doute ,  Abd- 
Allah-ben-Zobair,  lechef  de  la  Mekke, 
et  un  certain  Mokhtar,  qui  s*Etait  mis 
a  la  tdte  du  parti  des  Alide^,  il  chercha 
au  contraire  a  gagner  du  temps  avec 
eux,  au  risque  de  les  renforcer,  et  ne 
pensa  d'abord  qu*a  s'attacher  les  habi- 
tants de  Damas  par  ses  largesses  et  les 
Syriens  par  ses  concessions.  Pour  lui , 
pour  ainsi  dire ,  il  s'agissait  en  premiere 
ligne  decoiiqiierir  moralement  la  Syrie, 
avant  de  revendiquer  ses  droits  sur 
rirak  et  THedjaz. 
Toutefois,  li  ne  fut  pas  assez  long  a 


(*)  Yoyez  Aboan-i^da,  Aim.  MosUm, 

9«  LivraUon.  (syaib  moderns.) 


s'assurer  de  la  Syrie  pour  compromettre 
son  pouvoir  au  deia  de  cette  province. 
Heureusement  servi  par  les  circons- 
tances  et  par  Tesprit  calme  et  sens6  des 
Svriens,  il  put  en  quelques  mois  s'atta- 
cner  tous  les  partisans  du  khalifat 
de  Damas,  et  vaincre  par  la  ruse,  plu- 
tdt que  par  la  force,  rarmee  envanis- 
santed*Abd-Allah-ben-Zobair.  Une  fois 
done  les  Damasquins  ranges  dans  son 
parti ,  une  fois  1  armee  de  -son  plus  sd- 
rieux  rival  dispersee,  grdce  a  un  stra- 
tageme  d^loyal ,  qui  avait  consist^  en 
fausses  propositions  de  traits  et  en  une 
attaque  contre  des  troupes  debandces, 
le  vieux  khalife  songea  a  TEgypte  et  a 
TArabie.  II  eut  promptement  raison 
des  £gyptiens.  Geux-ci,  assez  indif- 
ferents  au  mattrequi  ies  devait  dominer, 
ne  soutinrent  que  faiblement  les  efforts 
d'Abd-errahman ,  leur  gouverneur  pour 
Abd-AUah  ben-Zobair ,  le  khalife  ae  la 
Mekke  et  de  Medine.  Abd-el-Aziz,  se- 
cond filsde  Merviran,  suffit  pour  chasser 
Abd-errahman ,  que,,se]on  Thabitude 
orientale  desetoumer  toujours  du  cote 
des  victorieux,  les  Arabes  d'£gypte 
abandonnerent  It  sa  premiere  bataille 
perdue  (*). 

Apr^s  ces  deux  revers  de  S^rie  et 
d*£^pte,  Abd-Allab-ben-Zobair,  au 
lieu  de  redoubler  d*efforts  contre  ce- 
lui  qu'il  appelait  Tusurpateur  de  Damas, 
s'endormit  dans  sa  d&faite ,  et  laissa 
Merwan  consolider  son  pouvoir  sur  les 
plus  belles  provinces  musulmanes;  et 
grAce  a  ses  triomphes  rapideset  repetes, 
grdce  k  la  reputation  que  le  sort  heu- 
reux  de  ses  armes  lui  acquit  en  Syrie, 
arriver  aux  fins  qu'il  ddsirait,  c'est-adire 
a  transmettre  a  son  fils  Abd-el-Melik 
le  trdnedont  aurait  dO  legitimement  h^ 
Titer  Rhaled,petit-filsde  Moawiah.  Ainsi 
Merwan  put  voir  toutes  ses  ru^es  reus- 
sir,  et  son  pouvoir,  en  moins  d'une 
ann^,  parvenir  a  son  apogee.  Sin- 
gulier  hoinme  que  ce  Merwan ,  d6vore, 
durant  toute  sa  jAunesse,  par  une  am- 
bition impuissante;  imm^iatement  de- 
pass^  ,  du  vivant  de  Moawiah ,  en  bar- 
diesse,  sinon  peut-£tre  en  habilet^; 
malheureux  dans  son  premier  gouver- 
nemeiit  de  Medine,  ott  il  fut  oblige 
de  fuir  devant  le  soulevement    de  la 

1*)  Yoyez  Bf .  £UeDne  Qualrem^re,  loc,  laud^ 


190 


.'L'UJMIVEIUL 


population,  et  oik  son  eri^dit  d'bomme 
fin  et  intelligent  fut  ruin^  par  la 
Tolonte  d'un  soldat  sans  haute  capa- 
citeet  saos  instruction  r^lle;  singulier 
homme,en  verity,  qui  ne  sed^coura^e 
jamais  :  patient  contre  les  ^venements, 
plus  fort  que  sa  destinee,  pour  ainsi 
dire ,  et  qui,  no  pouvant  satisfaire  ses 
propres  tendances,  ses  propres  voeux, 
sa  propre  ambition;  qui,  ne  pouvant 
jouir  de  la  longue  et  tranquiile  domi- 
nation qu'il  avait  si  longtemps  rlv^, 
la  prepare  pour  son  Ols  par  tons  les 
inoyens  licites  et  illicites,  et  meurt,  le 
dixieme  mois  de  son  regne  dispute,  en 
laissant  a  Abd-ei-Melik  un  trdne  conso- 
lidc  h  Damas ,  una  grande  province  re- 
conquise,  TEgypte,  et  un  rival  presque 
abattu,  Abd-Al-lah-ben-Zobair! 

Certes  si  Toccasion  favorable  s'^tait 
plus  vite  offerte  a  Merwan,  il  Taurait 
saisie  avec  tout  autant  d*a-propos  et  de 
resolution  que  Moawiah ,  et  il  n'aurait 
sans  doute  pas  tromp^  pour  parvenir, 
il  u^aurait  pas  ruse  pour  vaincre,  il 
n'aurait  pas  employ^  des  moyens  d6- 
loyaux  qui  ont  sufG  a  certains  historiens 
pour  ie  decrier  et  pour  attaquer  sa  m^- 
nioire.  Quant  h  nous,  ennenii  de  Texa- 

f Oration  dans  ie  panegyrique  comme 
ans  la  critique,  tout  en  desavouant,  au 
nom  de  la  morale  ^ternelle,  les  fourbe- 
ries  de  Merwan,  saconduite  si  bidmable, 
comme  secretaire  du  vieux  Othman, 
lorsqu'au  prolit  de  ses  inter^ts  secrets 
il  lui  faisait  signer  des  ordres  cruels  et 
contradictoires ;  tout  en  condamnant 
son  manque  de  foi  a  regard  du  petit-fiis  de 
Moawiah ,  nous  n'en  louons  pas  moins 
5a  perseverance  comme  horonie,  et  com- 
me prince,  son  esprit  d'ordre  et  de  pr6- 
voyance.  II  sut,  en  effet,  achever  Toeuvre 
du  premier  des  Ommiades,  tout  en  pri- 
vant  de  la  couronne  le  descendant  le  plus 
direct  de  la  famiile  adoptee  en  Syrie. 
Merwan,  a  soixante-trois  ans,  epoque 
ou  il  fut  appeie  au  khaiifat  de  Damas, 
avait  Texperience  la  plus  sdre  et  la  plus 
complete.  II  connaissait ,  pour  les  avoir 
longtemps  pratiques,  les  rudes  habi- 
tants de  THedjaz ;  et,  se  meGant  avec 
raison  de  leur  violence  reli^ieuse  et  de 
leur  farouche  ent^tement ,  il  avait  com- 
pris ,  lui  au.ssi ,  que  Tavenir  de  Tlslam 
n'appartenait  pas  a  ces  peuplades  guer- 
.rieres  mais  indisciplioees ,  dont  le  joug 


etait  dor,  parce  qoe  leur  vpA  k 
indomptable;  dootleearaemMi 
teuret  severe  pouvait  D»it-te«te«| 
cellent  pour  la  eonquete,  mail  mi 
la  it  rien  pour  For^saDiBation  (fvn  n 
empire  et  pour  ramaleameiMit 
provinces  oonobreuses  etdiventt.  k 
avait-il  toume  toutes  ses  vuei  v«| 
Syriens,  et,  sous  le  pAle  regne  dTI 
setait-il  efforc6,  en  place  du"^ 
incapable,  d'eneouragercet 
h^sion  et  de  sagesse  aui  cara( 
les  Damasquina.  Grace  h  lui,  il 
done  en  Syrie  un  parti  dt  Mi 
moderns »  tolerants,  instruits, , 
des  lors  le  parti  le  plus  wM  i 
lam,  dignes  Aleves  de  Moawiah, h 
et  s^rieux  partisans  de  Iferfnj 
lait  il  laisser  son  oeuvrc  i  ~ 
failait*ii  la  compromettre  en  c 
trdne  au  jeuoe  khalife?Neiaa 
pour  eviter  cette  faute,  qoil 
pr^f^ra  a  un  enfant  saos  geoiiM 
atne  Abdei-M^lik,  qui  avaitii 
donn6des  preuves  rep^teesdel 
et  de  talent?  Alors  Tacte  deT 
au  lieu  d'etre  traite  de  bi8»  ( 
devrait  s*appeler  un  boa  cakiL 

▲CGBOISSBMSNT     DB   LA 
MOBALS  DBS  KHAUVBS  01 1 


IquelesS 


Quel  qu*il  en  soit  de  la 
Merwan ,  toujours  est-il  qv 
adopterent  avec  cbakur  Al 
pour  nouveau  khalife  :  on 
fiance  dans  sa  vaillanoe  comote 
dans  son  babilet6  comme 
teur,  et  dans  son  intelligence 
tingu^  et  amoureuse  des  cbi 
magination.  D^ja  lesSyrieos, 
le  sentiment  de  leur  supa'ii 
lectuelle  sur  les  Arabes  de 
preferaientun  prince  eclaire^fl^ 
des  preoccupations  dvilisatrtct^ 
de  ces  rudea  et  grossiers  jonW 
la  force  ne  reside  que  dais  k 
dont  lesprit  superstiiiem etin 
ne  salt  qu^interpreter  avec  ligu* 
lois  divines  et  faire  execatcr^ 
rete  lesloishuroaines.  Abd-el-Mow 
d'ailleurs  un  homme  mdr  ?***'** 
son  pere,  ran66derhegire,685«« 
ere,  il  n'avait  pas  moins  dc9aarin" 
ans ,  et  les  nombreux  succcs «'«" 
qu'ii  avait  obteous,  la  pnid«fl«  f 


uptt-iaijj 


SYiaiE  MOD£RN£. 


131 


ilinontrfe  dans  la  victoire,  laoon- 
Mnee  parfaite  dea  homines  et  la  far* 
^de  son  earactere  ^taient  autant  da 
ints  de  son  bon  gouvernement.  II 
( d'ailleurs,  presque  aussit6t  a  don* 
des  preuYefi  de  ses  talents,  et  mature 
teines  eirconstances  graves  et  in* 
jKantes ,  il  ne  s'abandonna  jamais  a 
l^aragement  funeste,  et  sut,  an 
raire,  profiter  avee  promptitude  de 
slit^  des  ^v^nements.  A  son  av^ne- 
aa  tr6ne  de  Damas,  son  rival  de 
Ike  6tait  parvenu  a  la  pluagrande 
fencequMledt  jamais acquise.  Grdce 
lestruction  du  parti  des  Alides , 
\  Burtout  au  courage  beureun  de 
l^Blosab,  Abd-Allali*benZobair, 
ridu  farouche  mais  hard!  Mokhtar, 
|:^Ddu  sa  domination  sur  1  Irak 
CBtiere,  et  de  la  semblait  menacer 
hronoe  contest^e  des  Ommiadea. 
IM-Mefik  ne  perdit  point  un  ins- 
t»SQr6  de  In  Syrie,  il  comment 
iivo^erdes^missaires  secrets  pour 
IMrean  compte  exact  de  T^tat  da 
y^tie  ia  situation  de  Kouffa,  sa  ca- 
I.  Les  premiers  rapports  qu'on  fit 
Mife  furent  compietement  favora- 
ises  projets :  les  habitants  deJ^Irak 
lai<^naient  tous  de  Tavidit^  da  leur 
erneur  mekkois.  Mosab,  luxueux 
ebauche,  distribuait  aux  femmes 
1  Tor  qui)  d^robait  a  ses  nouveaux 
b<Sf8  depenses  toient  excessives, 
Mr  obtenir  de  quoi  j  satisfair e  il 
Mt  sorte  d'avanies  null  ne  se  per- 
^m  les  bommes  les  plus  tran- 
K8  et  les  plus  estimfe.  Bientdt  sa 
■uitede  plus  en  plus  coupabie,  sa 
iwtion  deplus  en  plus  tyrannique, 
jcbirent  de  son  parti  le»  coeurs  les 
'patients.  Aussi ,  lorsque  les  6mis« 
»»  (TAbd-el-M^lik  flrent  entendre 
^  K  khalife  de  Damas ,  grand  justi- 
^frand  redresseur  de  lorts,  avait 
«niioa  de  r^primer  les  d^sordres 
l^oels  Hrak  eiait  en  proie,  ils  trou- 
Jnt  aupres  des  habitants  les  plus  con- 
soles de  cette  province  desencoura- 
jents  et  des  promesses  d'appui  qu'ils 
Bttrent  dialler  rapporter  a  celui  qui 
^^J'^^nvoy^.  L'heure  6tait  sonn6e 
f«  Abd-el-M^lik :  11  se  mit  en  personne 
£♦1     ^*  ^'arm^e  nombreuse  qu'il 
?J^  levte,  et  marcha  tout  droit  vers 
''^^  pour  le  eombatue  au  cceur  m^me 


de  son  goavernement  Poortant  ce  der- 
nier nese  laissa  point  surprendre,  et,  a 
la  premiere  nouvelle  de  la  marche  de 
son  ennemi,  ilpartit  lui-m^me  deKouffa 
avec  toutes  ses  troupes  disponibles,  et 
s'avan^a  jusqu^aux  bords  du  Dodjail, 
daos  la  vaste  plaine  de  Maskou  (*). 

Dha  que  les  deux  armies  furent  en 
presence,  Abd-el-Melik,  fidele  k  la  po- . 
litique  prudente  et  astucieuse  des  Om- 
miades ,  se  garda  b  en  d'engager  imm^- 
diatement  le  combat,  et  de  jouer  la 
partie  sans  en  avoir  longuement  calcui(§ 
les  coups.  Bien  au  contraire,  il  amusa 
assez  longtemps  Mosab  en  vaines  et  le- 
geres  escarmoucbes,  tandis  quil  faisait 
sender  les  intentions  de  certains  chefs 
de  son  parti.  Le  khalife  trouva  plusieurs 
consciences  lar^es ;  et  oe  que  le  mecon- 
tentement  avait  commence,  Targent 
Tacbeva.  Puis,  lorsqu^il  fut  sdr  qu'au 
moment  d^istf  ses  nouveaux  allies  sau-  \ 
raient  vigoureusement  Tappuyer,  il  li-  [ 
vra  enfin  cette  bataille  generate  si  d^- 
sir^e  par  Mosab.  Elle  fut  acharn^e, 
aanglaute^  pleine  de  peripeties  Tout 
d*abord  la  ca  valeric  impetueusedu  Rouf- 
fien  Ibrahim  jeta  le  trouble  dans  les 
rangs  de  favant-garde  Syrian  ne,  com- 
maiid^e  pourtant  par  le  brave  Hadjadj- 
ben-Yousouf,  qui  devait  procbainement 
s'illustrer  deVant  la  Mekke.  La  cavale- 
rie  d'Abd-el-M^lik ,  sous  les  ordres  dn 
brillant  Mohammed-ben-Merwan,  pro- 
pre  frere  du  khalife,  n'aurait  m^rae  pas 
sufiQ  peut-^tre  pour  retablir  les  chances 
du  combat  si  la  trahison  d'uu  certain 
Attab-ben-Warka  n'^tait  encore  venue 
ausecoursdesSyriens.Cet  Arabe,  avide 
et  dissimul^ ,  gagn^  par  les  promesses 
du  khalife,  fit  donner  le  signal  de  la 
retraite  sur  I'aile  gauche  des  Kouffiens^ 
permit  ainsl  aux  soldats  d* Abd-el-Me- 
lik d*^craser  la  cavalerie  qui  les  mena- 
cait ,  et  decida  par  sa  defection  du  suc- 
ces  delaioul'nee. 

Le  lendemain,  la  sc^nela  plus  d^ses- 
p^rante  pour  Mosab  se  passait  dans 
son  camp.  Toutes  ses  troupes  indiscipli- 
n^es,  mal  attachees  a  son  parti,  d*inter^t 
et  de  pays  differents,  presenterent  Ti- 
mage  du  plus  pitoyable  chaos  :  les 


(*)  Yoyez  le  Mtoioire  tm  Abd-illlah-beD- 
Zobalr  par  M.  Qaatrem^ ,  dam  le  Jourtiai 

9. 


J8J 


t'UNIVERS. 


nns,  sdDS  foi  et  sans  scrapule,  pass«reDt 
impudemment  dans  le  camp  ennemi; 
les  autres,  m^^ontents  et  inquiets,  re- 
fuserent  d*obeir  aux  sommatioos  de 
leurs  chefs ;  les  deraiers,  enfin ,  decou- 
rages  par  Tecbec  de  la  yeillo ,  restaient 
indecisetn^osaientpas  marcheren  avant. 
G'^Uit  pis  qu^uoe  d6route,  c*etait^  la 
fois  une  r6 volte  et  une  trahison.  £a 
apprenant  ces  faits,  qui  lui  assuraient  la 
victoire,  Abd-el-M^iik  montra  quelle 
^tait  la  g^n^rosit^  de  son  coeur  :  ii  d^ 
puta  vers  Mosab  son  frere  Mohammed, 
avec  la  mission  d'offrir  a  son  ennemi  la 
vie  sauve, les  honneurs  dus k  son  rang, 
et  une  part  detous  les  biensde  Tempire, 
excepte  du  khalifat ;  mais  Mosab  etait 
trop  orgueilleux  pour  cMer  a  son  ad- 
versaire  et  pour  accepter  ses  bienfaits. 
II  refiisa  toutes  les  onres  qu'on  lui  fit, 
ets'en  remit  aDiea  surson  sort.  Abd- 
el-M61ik  fut  done  oblige  de  le  soumet- 
tre  par  la  force ,  et  le  combat  recom- 
menca.  11  ne  fut  ni  long  ni  important : 
Mosab  ne  restait  entoure  que  par  aUel- 

3ues  serviteurs  fideles.  Gependant  rau- 
acieux  Mekkois  ne  voulut  pasentratner 
son  fiis  Isd  dans  la  catastrophe  aui  le 
menacait :  il  Ten^agea  a  quitter  lecnamp 
de  bataille;  le'jeune  homme  repoussa 
cette  proposition  comme  honteuse.  Le 
pere  insista ,  supplia  son  fils  de  retour- 
ner  aupr^s  de  son  oncle  Abd-Allah-ben- 
Zobair,  afin  de  d^fendre  les  droits  du 
khalife  des  villes  saintes;lejeune  homme 
d6clara  qu'il  se  croirait  deshonore  en 
abandonnant  son  pere  dans  le  danger, 
et  que  sa  fuite  le  couvrirait  d'opprobre. 
Le  p^re  alors  se  r^signa,  prit  ses  armes, 
et  alia  giorieusement  se  faire  tuer  au 
milieu  desSyriens,  en  defendant  jusqu'au 
dernier  moment  sa  vie  et  celle  de  son 
fils.  Ainsi  tomba  un  des  adversaires  les 
plus  redoutabies  du  khalifat  de  Damas. 
Abd  el-Melik  avait  montr^  dans  cette 
circonstance  autant  d'adresse  que  de 
resolution,  et  comme  il  Tavait  prevu  et 
pr^par^ ,  k  la  suite  de  cette  bataille  il 
se  rendit  mattre  sans  combat  de  Kouffn, 
de  Bassorah ,  et  de  la  province  de  TI- 
rak  tout  entiere  (*). 

Mais  ce  n'etait  15  que  la  moitie  de 
FoDuvre  qu'Abd-el-M<^lik  devait  mener 
h  lin.  Son  rival  guerrier  ^tait  vaincu ,  et 

(*)  Vovez  le  M^^moire  de  H.  Quatremere  sar 
AbdXIlah-ben-Zobalr. 


maintenant  il  faMt  abittie  bob  m 
pr^tre.  Abd-Allab-ben-Zobair,dB 
de  la  chaire  sacrtode  la  Mekke,iK 
quait  pas,  chaque  fois  qu*il  racitiil 
prieres  devant  le  (leuple,  de  les  tens 
par  des  imprtotions  centre  U  U 
desOmmiades,  et  particuliereaxoii 
tre  Tusurpateur  regnant.  Or, 
temple  de  la  Mekke  etait  le  but  dBf 
rinage  de  tous  les  Arabes,  il  | 
dtre  p^illeox  ^ur  lepouvoiriTi 
M^lik  d'etre  ainsi  maudit  qootii 
roent  dans  la  sainte  Kaaba.  Pour 
plaire  a  Fesprit  pacifique  des  ^ 
Abd-ei-M^lik  cfaereba  d*abord  a " 
contre  son  rival  autrement  que  | 
armes ;  et  voici  ce  qu'il  imagiDi :  ( 
Jerusalem  etait  aussi  une  viile 
selon  le  culte  musulman,  il 
^ever  une  mosqu^,  et  d'y  .-^ 
lui-mdme  les  Synens  aa  tempsk ; 
rinage.  Malheureusement  ubil 
force  de  Thabitude,  surtout 
nations  orientates,  que,  mal^l 
que  donnait  le  khalife,  il  ay  eil 
que  les  Svriens  qui  cbaogereotie| 
nage  de  fa  Mekke  en  celui  de  Jena 
L'id6eingenieused' A  bd-el-MelikB' 
done  pas  eu  le  succ^  qa'il  eo  ami 
il  se  trouva  contraiut  d*fa  app^ 
armes  pour  faire  cesser  le 
mena^t  Tavenir  de  rislam,et 
blissait,  pour  ainsi  dire,  unf^' 
neste  a  tous  les  Musulmaas. 

Les  Syriens  penskent 
prince,  et  le  soutinrent  daassa 
Abd-el-Melik ,  se  senlant  aimi 
par  Fopinion  g^nerale ,  se  h&ta  A 
une  armee,  tout  en  se  garM 
d*en  prendre  lui-mtoe  le 
ment,  de  peur  de  compn 
caractdre  de  chef  reJigieui' 
porter  en  personne  la  gM0^|, 
territoire  sacre  de  la  MekkiCft 
iladjadj-ben-Yousouf,  que  ooiff 
deja  vu  se  distinguer  cootre  I 
qu'il  mit  a  la  t^te  de  Texp^itioB 
Abd-Allah-ben-Zobair.  Ce  gcoeri 
n'flvait  pas  Ws  scrupules  Je  soom 
s*avanca  hardiineitt  jusque  sat  M 
tieres  du  territoire  de  la  MekkfTS* 
dans  la  ville  de  Taief,  ct  de  la^ 
de  jour  en  jour  de  plus  ooniwt 
troupes  contre  la  ville  sainlepar*! 
lence.  Bient6t  cette  cite  famcuse,fifl 
a  Fapathie  d'Abd-Allah,  fut  ccrfleii 


SYRIE  MODERNE. 


1S3 


toutes  parts.  L'audacieux  Hadjadj  com- 
menca  des  lors  le  siege ,  quoiqu  on  fi)t 
dans'  le  mois  de  ramadhan ,  etabiit  des 
batistes  toutautour  de  la  ville,  et  lan^gi 
des  pierres  jusque  sur  la  Kaaba.  Le  feu 
■Celeste ,  appele  par  Abd-Allah ,  ne  vint 

§as  foudroyer  le  sacrilege ;  et  au  bout 
e  plusieurs  mois  la  ville ,  presque  rui- 
nee  de  fond  en  combte  par  les  machines 
de  guerre  desassiegeants,^puisee  de  res- 
sources  de  toute  espece,  songeait  a  se 
rendre  pour  ^viter  la  famine  et  la  destruc- 
tion. Mais  le  superstitieux  Abd-Allah 
voulait  mourir  eu  martyr,  et,  afin  de  re- 
sister  jusqu'au  bout,  ilautorisa  lesMek- 
kois,  decourag^,  k  accepter  ramnistie 

3u'on  leuroffrait,  et  ne  conserva  auiour 
e  sa  personne  que  ceux  qui  voulaieot 
gagner  le  ciel  avec  lui.  Quelques  chefs  et 
quelques  soldats  exaltes  accepterentcette 
proposition  desesperee ;  ils  sui  virent  leur 
sbalife  dans  Tenceinte  de  la  Kaaba,  pas- 
serent  la  nuit  dans  la  priere ,  et  au  petit 
jour,  ayant  invoque  une  derni^re  fois 
Allah  etson  prophete,  ils  jeterentau  loin 
les  fourreaux  de  leurs  epees  et  se  pr^ci- 
piterent  t^te  baissee  contre  les  Svriens, 
qui  avan<^ient  d^jh  en  foule  vers  le  tem- 
ple. Bient6t  une  gr^le  de  pierres  eut 
raison  de  ces  martyrs  volontaires.  Abd- 
AUah  re^ut  ainsi  le  coup  de  la  mort , 
et  sa  t^te  fut  envoys  au  vainqueur,  (]ui, 
selon  la  coutunie  orientale,  fit  diriger 
ce  triste  trophee  vers  Damas,  comme 
preuve  de  sa  victoire.  Avec  Abd-Allah 
p^rirent  les  derniers  compagnons  de 
Mahomet,  hommes  energiques,  mais 
stationnaires ,  qui  se  plaisaient  dans  les 
m&les  m»is  sau  vages  vertus  des  premiers 
temps  de  Tlslam ;  vieillards  inutiles,  du 
reste ,  car  ils  n^avaient  pas  compris  les 
nouvelles  destin^  de  leurs  descen- 
dants (*)• 

A  dater  de  ce  triomphe,  Abd-el-MdIik 
vit  croltre  de  jour  en  lour  sa  puissance 
morale.  II  n*avait  plus  d^sormais,  dans  un 
coin  de  son  empire,  des  opposants rigou- 
reux  qui  niaient  son  mfaillibilite  et 
bidmaient  ou  coodamnaient  chacun  de 
ses  actes.  Toutes  les  prerogatives  du 
khalifat  lui  furent  acquises  incontestable- 
ment.  Makre  souverain  des  corps  et  des 
limes  de  ses  sujets ,  il  pouvait  facilement 
abuser  de  sa  toute-puissance,  et  ce  fut  un 

C*)  Yoyez  Muoadi,  Hakrlsi  et  Tel)rizl. 


grand  m^rite  a  lui  de  se  montrer,  au  con- 
traire,  plus  juste,  plus  liberal ,  et  plus 
^lair^que  jamais.  Toutd*abord  il  recom- , 
pensa  diguement  le  vainqueur  d'Abd- Al- 
lah ;  et  pour  lui  donner  de  nouvelles  occa- 
sions de  se  distinguer,  il  confia  a  Hadjadj 
Je  gouverneinent  difficile  de  Tlrak,  du 
Khora^an  et  du  Sedjestan.  II  fallait  r^pri- 
mer  dans  ces  pays  quelques  troubles  qui 
venaient  d'y  eclater,  et  malntenir  d'une 
main  ferme  des  habitants  au  caractere 
turbulent  et  fourbe  a  la  fois.  Hadjadj 
se  montra  digne  de  la  confiance  du  kha- 
life,  et  lui  conserva  ses  provinces  orienta- 
les,  taiidisqu' Hassan  etendait  en  Afrioue 
la  domination  musulmane.  Ce  dernier, 
apres  di verses  alternatives,  remporta 
une  victoire  complete  contre  les  Berbers 
qui  habitaient  les  monta^nes  de  TAuras, 
et  les  soumit  au  kharadj.  Ainsi  le  litto- 
ral de  TAfrique  aussi  bien  que  ses  con- 
trees  montagneuses  appartenaient  dejk 
aux  Musulmans,  et  d'un  autre  c6t6  leurs 
possessions  allaient  jusqu'aux  frontieres 
de  rinde. 

Cependant  Abd-el-Melik ,  qui  avait 
coufie  k  des  g^neraux  habiles  rhonneur 
de  sesarmes,  s'occupait  h  Damas  de 
Tadministration  compliqu^e  de  son  co- 
lossal empire.  Deja  possesseur  de  riches- 
ses  considerables,  mattre  d*une  contr^e 
Uianufacturiere,  la  Syrie,  d^une  contree 
agricole,  r£gypte,  il  s*aper(ut  que,  dans 
le  vaste  commerce  de  ses  nombreux 
sujets,  un  inconvenient  grave  pouvait 
resulter  de  la  confusion  des  monnaies. 
Chaque  province ,  pour  ainsi  dire ,  avait 
la  SKnne.  La  Syrie  et  r£gypte  avaient 
celle  des  C^sars,  rlrak  et  la  Perseavaient 
celle  des  Cosroes.  A  peine  guelques  me- 
nues  pieces  de  cuivre  porta ient-el les  une 
legende  arabe.  C'etait  la  comme  un  tri- 
but  deshonorant  a  payer  a  Tindustrie 
et  a  la  puissance  etrangeres.  Abd-el- 
Melik  resolut  de  s'en  affranchir.  Un 
modelede  monnaie  musulmane  fut  done 
choisi  par  lui ,  et  le  type  en  fut  envoye 
a  tons  les  gouverneurs  de  provinces. 
Chose  etrangel  Tempereur  de  Constan- 
tinople, qui  n'avaitjamais  reclame  contre 
les  agrandissements  de  territoire  de  TIs- 
1am ,  eieva  une  vive  altercation  a  pro- 
pos  de  cette  fabrication  de  monnaie. 
Comme  son  opposition  ridicule  fut  me- 
prisee,  ainsi  qu*elle  le  meritait,  Justi- 
nien  II  commit  la  faute  de  rompre  |q 


114 


Ii*UIfIVERS. 


traits  qui  assoraft  la  traDquillit^  de  Fem- 
pire  byzantin,  et  la  guerre  recommenca 
eotre  les  Grecs  et  lea  Arabes.  Cette 

§uerre,  comme  tant  d'autres  depuis  pres 
'UD  siecle,  leur  devait  toe  fatale  if). 

'  NODYELLB  BBFAITB  DBS  eiBCS. 

Qu'^tait-ce  eo  efTet,  k  cette  heure, 
que  Tempire  byzantin  ?  Une  sorte  d*a- 
narchie  sanglante  pr^sidee  par  un  prince 
au  coeur  de  tigre.  Justinien  U  avail 
montre ,  des  sa  jeunesse ,  sa  cruaute  et 
sa  perGdie.  En  renouvelant  ie  traite  de 
CoDStaniin  Pogoiiat  avec  les  Arabes,  il 
leur  avait  promis  de  faire  cesser  les  in- 
cursions des  Maronites,  qui  iuquietaient 
de  plus  en  plus  la  Syrie  niusuiinane  par 
leur  audace  et  l^nr  activity.  Ces  bardis 
moiitagnards ,  enuemis  nes  des  Arabes, 
furent  sacrifies  sans  scrupule  pur  un 
empereur  de  vingt  ans  qui  n'avait  pas 
plus  de  urevoyunce  que  de  gen^rosite. 
Au  lieu  ae  se  montrer  francbetnent  pro- 
tecteur  de  ses  braves  coreligionnaires 
du  Liban ,  il  les  vendit,  pour  la  security 
d'un  moment,a  leurs  plusirrcconciiiables 
adversaires  II  ioignit,  en  cette  occasion, 
la  fourberie  a  ra  lAcbet^,  a  la  cruaute  la 
trabison.  Son  general,  Leonce,  eut  ordre 
d'attirer  a  lui  par  des  Qatteries  le  cbef 
des  Maronites ,  de  lui  remettre  des  pre- 
sents et  une  lettre  affectueuse  de  la 
part  de  Tempereur;  et,  apres  Tavoir 
ainsi  trompe,  de  le  massacrer  sans  pi  tie. 
Cette  honteuse  et  barbare  mission  fut 
stricteraent  executee  par  Leonce  :  le 
cbef  des  Maronites  re^ut  sans  defiance 
le  general  byzantin  et  ses  principaux 
ofGciers,  les  invita  a  un  repas,  et  ce 
fut  au  milieu  mSme  de  ce  festin  qu'il  fut 
assassine  par  ses  hotes.  D'abord  le  peu- 
ple  de  la  moulague  s'indigna  d'une 
prcille  conduite,  se  souleva  contre 
les  bourreaux  envoyes  par  Justinien, 
et  lea  menaga  de  la  peine  du  taliou. 
Mais  Leonce ,  a  force  de  menaces  d'une 
part ,  et  d'ar^ent  distribue  de  Fautre, 
calma  la  revoke  pr^te  a  ^clater. 

Ainsi  la  trabison ,  le  meurtre ,  et  en 
dernier  iieu  la  corruption  ,  voila  ce  aue 
I'empereur  byzantin  apporta  vers  1  an 
697  dans  le  Libaii.  I£t  encore  non  content 
de  tous  ces  maux  dont  il  accabia  des 

(*)  Yoyez Sylveslre  de  Sacy , JimrnalJLna- 
tique. 


sujets  qui  auraient  dA  ki  Itn  (ihcn,i 
les  trompa  par  les  plus  fallaeieuMs 
messes ;  et  sous  pretexte  que  leur 
tauce  lui  etait  utile ,  il  tira  de  la 
tagno    douze   mille  des  plus 
Maronites,  et  les  envoya  dansdil 
provinces  de  son  empire.  CeUe 
fut  a  la  iois  une  infamie  et  une 
une  infamie,  d'avoir  abuse  de  la 
plicite  de  plusieurs  niilliers  de 
guards*,  unefaute,  d'avoirdisp 
cellents  soldats  qui  teoaieat 
ment  en  6  hec  les  Arabes,  eni 
gieux  et  politiques  des  Grecf  f). 
II  fallait,  du  reste,  oue  Justir^ 
fdt  autant  d6pourvu  de  bon  seat 
grandeurd'dme,pour  avoir  aiasii 
son  empire  vis-avis  des  Arabes,  nj 
ment  de  ronipre  avec  eux.  Depui* 
que  temp« ,  en  effet,  ce  jeooe 
aussi  presoniptueux  que  leroot, 
cbait  tous  les  moyens  defaireii[ 
aux  Musulmans  :  la  fabricate 
monnaies,  dont  nous  avoaspiii 
baut ,  lui  fut  un  pretexte.  Ji 
avait  r^uni  a  sa  cavalerie  ^ 
corps  de  trente  mille  Esciavoos; 
oomptait  avec  cette  arm^,  doot' 
tant  les  ^l^meats  h^terogenes  poo 
se  disjoindre  au  moment  de  ia 
battre  facilement  les  Arabes  et' 
prendre  quelques-unes  des 
possessions  de  Tempire  byzani 
Tenement  se  chargea  de  lui 
severement  la  fausset^  de  son 
D'abord,  soit  adre$se,>oit 
reel  de  bonne  foi,  le  kbalife  Abd- 
commen^a  par  declarer  que  e« 
pas  lui  qui  ronripait  les  traiiesi 
son  plus  grand  desir^tait  lar^ 
tion  de  la  paix.  Cependant  il  o'( 
salt  pas  mo  ins  une  armee  qu*il< 
a  son  frere  Moliammed-ben-T 
D'apres  les  prescriptioDS  do 
Mobammed ,  en  presence  de  fi 
byzantin,  renouvela  ses  prob 
pacifiques ,  et  mena^a  de  la  ciM 
vine  les  parjures ,  quels  qu'ils  to* 
Justinien  U ,  sacbant  sao  arnK 
forte  que  celle  des  Arabes,  <**** 
missaire  de  Mobammed ,  et  attag 
camp  ennemi.  Apres  plusieurs  W 
de  lutte,  les  Mu>ulmans,  en  Dotfl 
nombre ,  allaient  ^tre  icnsk  par » 

{•)  Yoyez  Eimadn,  Hist.  Stme, 


SYRIE  MODERNE, 


185 


|rersaires,  lorsque  Mohammed,  qui 
nit  ddja  essays  de  corrompre  le  chef 
'}$  Esciavons ,  lui  envoya  un  carquois 
Knpli  d^or.  Ce  riche  cadeau  d6cida  te 
ffdes  Esciavons,  qui ,  d'ailleurs,  etait 
n  d'etre  satisfait  de  fempereur  byzan- 
\iUse  tourna  done  du  cole  des  Ara- 
il  avec  vingt'mille  de  ses  soldats,  et 
'^  apporta  la  victoire.  Le  vanileux 
iiuen  II  en  fut  pour  ses  menaces 
intes ,  pour  ses  ridicules  projets  de 
^te,  et  n'eut  que  le  temps  de  s'en- 
a  centre  de  ses  possessions.  l»k , 
vengea  d*une  fa^on  horrible  des 
BTonSy  en  faisant  precipiter  du 
d'un  roeber  dans  la  roer  les  fem- 
^6t  les  enfants  de  ceux  qui  Tavaient 
L  II  S6  consdait  d*une  d<^faite  par 
|«niaut6  n. 

fmOfiPBBITB     ACCWBTITBLLE 
DE  LA  SYRIB. 

I  que  Fempire  byzantin ,  ]ivr6 
ces  sanguinaires  de  Justinien  IT, 
'se  deVeiopper  dans  son  sein  les 
ans  les  plus  brutales ,  et  de  jour  en 
^ies  exactions  des  courtisans  augmen- 
"line  faqon  effrayante,  le  khalifat  de 
;  deveaait,  au  contraire,  de  plus 
jius   puissant.  Par  ses  g^neraux, 
I  habjies  qu'audacieux,  Alid-ei-Melik 

rDusse  ses  conqu^tes  en  Afrique 
Carthage,  en  Perse  jusqu*au  fond 
"  orassan;  r£ffypte  etait  pacifiee  et 
tive;  rArabie,  nagu^re  si  tur- 
B,  reconnaissait  sans  trop  de  r^- 
la  suprematie  des  Ommiades ; 
e,  a  rabri  de  toute  guerre  et  de 
ll inquietude  depuis  que  Tincapable 
ireur  de  Constantinople  avait  de- 
P  lui-ro^me  le  foyer  libanique  de 
'^tfonisme  entre  le  Chretiens  et  les 
umans,  la  Syrie,  naturellement 
Hique,  s'abandonnaittranquiliement 
'  B  douce  Tie  de  loisir  et  de  luxe :  elle 
ait  d^autant  plus  les  charmes  d*un 
ent  prosp^re,  que  le  pass^  avait  6t6 
calanaiteux  et  que  i'avenir  toit 
E  iueertain. 

province,  en  effet,  en  ^tait 
;  h  repoque,  qui  dura  malheureuse- 
Bt  si  peu ,  pendant  laquelle  elle  put 
duire  sans  trouble,  jouir  sans  con- 


n  Yoyez  Tbtopbaoe. 


testation,  rendre  h  sa  nature  toute  sa 
f(6condite  et  toute  son  activite  a  son 
esprit.  Le  s^jour  des  khalifes,  en  assu- 
rant  la  s6curit^  generate,  avait  peu  a  peu 
fait  revivre  les  qualites  natu relies  des 
habitants  de  ce  pays ,  si  bien  dou6  par  le 
ciel  :aussi,  quand  chacun  fut  complete- 
ment  assure  de  la  libre  possession  du  sol 
qu*il  exploitalt,  la  Syrie  luttaen  produc- 
tions terrttoriales  avec  la  feconde  Egy pte, 
en  produits  manufactures  avec  Tindus- 
trieuse  Perse.  II  lui  vint  aussi  de  toutes 
parts  des  richesses  et  des  lumieres  :  la 
courdes  khalifes  attirait  a  elle  les  for- 
tunes en  encourageant  les  plaisirs,  et 
le  souverain  maitre  Abd-el-Melik,  ayant 
montre  du  godt  pour  la  po^sie ,  se  vit 
bientdt  entour^  d'une  sorte  d'academie, 
ou  les  savants  arriverent  a  leur  tour 
disputer  aux  lettres  les  bonnes  graces 
du  tout-puissaot  dispensateur  des  boo- 
neurs  et  des  biens.  Peu  a  peu  se  pr6pa- 
rait  cette  ere  de  culture  oe  Tesprit  ou 
lesMusulmans  montrerent  qu'eux  aussi 
^talent  dignes  de  Tempire  du  monde.  l( 
semble quils  aient  voulu  justifier, sous 
les  derniers  Ommiades  et  sous  les  pre- 
miers Abbassides,  les  conau^tes  de  teurs 
khalifes  de  THedjaz ,  rigicfes  reiigieux  et 
infatigabies  soldats.  Le  re^ne  d'Abd-el- 
Melik  fut  i'aurore  de  ce  siecle  eclataiit. 
Ce  prince ,  qui  avait  quelques-unes  des 
vertus  de  son  aieul  Moawiah ,  tout  en 
se  livrant,  sans  exces  pourtant,  aux 
iouissances  du  luxe  et  aux  douceurs  de 
la  poesie ,  n*oublia  point  de  mettre  de 
I'ordre  dans  TinimeDse  administration 
dont  ii  etait  le  chef  supreme.  On  Gt,  d'a- 
prds  sa  volont^,  un  recensement  general 
de  tous  les  habitants  de  ses  nombreuses 

f)rovinces;  les  r6les  furent  dresses  avec 
e  plus  grand  soin,  et  il  en  resulta  F^ta- 
blissement  le  meilleur  possible  du  kha- 
radj  (capitation),  seul  impdt  r^guUer  et 
stable  qui  fut  jamais  en  ^vigueur  en 
Orient. 

GABAGTkBB  D'ABD-BL-HBLIK.. 

Ce  qui  caract6rise  avant  tout  Abd-el- 
M^lik  ,  et  ce  qui  a  certes  ^te  un  des 
elements  les  plus  f^-conds  de  la  prospe- 
rity de  son  regne,  c'est  sa  tolerance 
religieuse.  Remarquons  que  cette  qua- 
lite,  en  Orient  et  a  cette  epoque,  est 
un  grand  progres,  et  prouve  tout  a  la  fois 


S36 


LUWIVERS. 


la  mansu^tude  et  rintdligenee  du  prince 
qui  la  montre.  Un  siecle  alors  s'etait  a 
peine  ecouM  depuis  que  les  Arabes 
etaieiit  sortis  du  oeaot,  grdce  aux  pre- 
dications d'un  hommede  genie,  Matio- 
met,  et surtout  gr^  a  leur  exaltation 
pour  les  croyances  nouvelles  quails 
avaient  adoptees.  Leurs  conqu6te8 
avaient  ^te  faites  tout  autaiit  avec  la  pa- 
role qu*avec  ie  sabre,  ou  plutot  avecla  pa- 
role appuyee  par  le  sabre;  c*etaient  moins 
des  provinces  quails  voulaient  |>osseder 
que  des  proselytes  qu'ils  voulaient  ac- 
querir;  c  etait  moins  un  territoire  qu'une 
nation  qu'ils  se  proposaient  de  creer. 
Tous  les  vieuxcompagnons  du  propbete,. 
dont  les  plus  forts  ont  eu  leurs  anoees 
de  domination «  dont  chacun  a  eu  son 
jourdegloirCf  tous  ces  hardis  etvio- 
lents  aventuriers  ^taient  des  hommes 
iliettres,  pour  la  plupart,  et  cbacun  d'eux 
se  faisait  un  devoir  de  la  rigiiiite  dans 
les  principes,  de  la  severite  dans  les 
moeurs,  de  rinflexibilite  dans  les  idees 
religieuses.  Le  fanatisnie  ^tait  leur 
force,  le  despotisme  ^tait  leur  gou- 
verneroent. 

Or,  n'etait-ce  pas  comme  une  revolu- 
tion radicale  dans  les  idees,  de  vouloir 
gouverner  un  pareil  peuple  avec  les 
moyens  adoucis  de  la  civilisation,  la 
mansuetude  dans  les  lois  civiles ,  la  to- 
lerance dans  les  lois  religieuses ,  le  luxe 
pour  encourager  Tindustrie,  la  pro- 
tection des  poetes  pour  honorer  les  let- 
tres?  (^tte  revolution  sociale,  Moa- 
wiah  Tavait  commencee  :  Abd-el-Melik 
Tacheva.  Dans  lesderniers  temps  de  son 
re^ne,  quand  il  fut  bien  assure  de  sa 
puissance  materielle,  il  ne  songea  plus 
qu*a  entourer  son  tr6ne  de  toutes  les 
pompes  qu'fl  put  rdunir.  11  fut  prodigue 
des  richesses  que  lui  avaient  accumulees 
les  victoires  de  ses  generaux;  il  fut 
liberal  autant  qu'il  fut luxueux ,  et  sur- 
tout il  s'effor^a  d*attirer  a  sa  cour  les 
poetes  et  les  docteurs,  les  hommes 
de  rimagination  et  ceux  de  la  science. 
Par  mi  les  premiers,  il  favorisa  mSme 
U'une  fa<^on  toute  particuliere  un  certain 
Akhtal ,  quoiquMl  fdt  et  peut-^tre  parce 
qu'il  etait  Chretien.  La  poesie  etait  alors 
le  seul  orf^ane  des  idees  du  siecle  :  elle 
rempla^ait  Thistoire  par  ses  chants 
neroiques,  la  philosopnie  par  ses  pre- 
^eptes  de  morale,  la  politique  par  sea 


critiques  ou  ses  apo)<^es  del , 
et  de  leurs  ministres.  Elle  etait  ea 
tres-populaire  sous  un  soioietdass 
nature  ou  presquetouslesbomnMSH 
sent  avee  Tinstinct  sinon  avec  le  t 
poetique.  Encourager  la  po^ 
done  alors  pour  le  kbalife  Abd-4] 
se  fortifier  dans  le  present  autafll 
s*bonorer  dans  Tavenir  (*)• 

LA  POESIV  BT  LBS  P«£TBS  . 

Si  la  poesie  arabe  brillait  d^ 
tout  son  eclat,  si  ses  images  vj  ' 
hardies,  si  ses  roetaphores  ooa 
et  originalesavaientdeslorscecanc 
etrange  et  vigoureux  qui  la  (''"' 
les  poetes  de  oette  epoqae,eD 
comprenaient  assez  peo  leard 
et  cooservaient  assez  roal  tear  m 
temps  des  premiers  khalifes,  eCi 
avant  Mahomet ,  la  poesie  &aiM 
du  ciel  dont  on  n'usait  quefl 
gloire ;  du  temps  d' Abd-el-Melilii 
deja  un  metier  dont  on  dierda 
vivre.  Lesplusgrands  poetesmooiil 
meme  une  avidite  qui,  daostooti 
pays,  avee  de  tout  autres  nMeois, 
eOt  deshonores  a  coup  sdr :  lis  d 
taient  pour  le  plus  otrraot;  ils  se 
vaientaes  vers,  soit  pour  loaer  oatit 
sure  des  hommes  sans  bautes  *a^ 
soit  pour  invecti ver  les  eooemis  de 
aui  les  payait.  L'hyperboiedaDsiV 
1  injure  dans  Tenigramme,  voilali 
fauts  ou  ils  tomoaient  sans  scrupui 
sans  honte.  Farazdak,  Tun  despltf 
lebres,  faisait  de  ses  vers  auui 
traits  aigus  et  envenimes  dontd 
ses  adversaires  :  chacun  le  d 
comme  un  mechant,  quel^oefg 
redou  taient  comme  un  fleaiLip 
digne  de  ri  valiser  en  verve  et  cB^^g 
poetiques  avec  Farazdak,  s'etailW 
chantre  ordinaire  de  Badjadj,  ^^ 

3ueur  de  la  Mekke;  puis,  ctofl^ 
oute  que  ce  heros  n  etait  pas  a^ 
nereux  k  son  ecard ,  il  n'cut  MsdeP 
lorsque  sa  cefebrite  grantw^.JJJ!" 
fQt  presente  et  pensionne  ricMB* 
par  le  kbalife  lui-roeme,  preferanU 
lors  habiter  I'opulente  Damas  qw  * 

(*)  Yoyez  If.  CaoMta  de  Perwjjd*"* 
exoellent  m^moire  sur  les  trois  V^^r^ 
Farazdak  el  Djirir.AoifV.^«»fW'''^"^     j 


STRIE  MODERNE. 


187 


i0ion  premier  protecteur  an  fond 
'lorassan  et  dans  ses  expeditions 

,  c^etait  bien  pis  encore;  h  Fa- 

r  de  Targf^nt  il  joignait  celui  da 

Jn  sa  quality  de  Chretien  il  n'avait 

Xeacber  son  ignoble  passion ,  et, 

lie  la  dissimuler  par  pudeur,  il 

iiantait  avec  effronterie.  Mature 

Bbonteux,  il  n'en  avait  pas  moins 

pU  par  Abd-ei-Melik.  Ce  khalife 

ait  venir  dans  son  palais,    le 

kavec  somptuosite ,  et  lui  deman- 

1  lui  rteiter   quelques  chants 

oir  une  occasion  nouvelie  de  le 

r  de  ses  faveurs.  Cette  frequen- 

de  la   cour  musulmane,  ces 

t^te-a  t^te  avec  le  comman- 

eroyants  auraient  bien  dd  le 

[de  son  ivrognerie.  Eh  bien, 

;  Toici  une  anecdote  qui  prouve 

Bntlecontraire : «  Un  jour  qu'il 

^e  aupresdu  khalife,  lepre- 

tqu'il  pronon^a  fut  pour  de- 

rlMre;  Abd-el-Melikordonna 

lies  serviteurs  d'apporter  de 

•De  Teau ,  s'6cria  Akhtal,  roais 

boisson  des  lines!  —  Qu'on 

idu  lait,  reprit  ie  khalife.  — 

I  e'estla  boisson  desenfants!  ^-> 

Mui  doQoe  de  feau  mieilee.  —  De 

Diellee,  e'est  la  boisson  des  ma- 

i  —  Eh!  que  veux-tu  done?  dit 

'     illustre  interlocuteur.  —  Du 

ondit  impudemment  Akhtal. 

'}  pouvait  faire  ch^tier  comme 

lit  le  poeto  saus  vergogne 

it  ainsi  mepriser  les  pres- 

Ida  Koran  et  les  moeurs  de  son 

|ttaii,  pardonnant  a  sa  folic  en 

'etOD  talent,  il  le  renvoya  satis- 

io  de  ses  yeux ,  sa  sale  passion 

I  encore  la  bonte  de  lui  faire  re- 

-  des  habits  d'honneur   et  une 

Dmed'argent.  •  Cette  indulgence 

l*Meiik  pourrait  ^tre  critiqu6e 

ine  se  souvenait  pas  que  ce  kha- 

'~^it  aux  commencements  dune 

tion,  et  qu'il  lui  fallait  accepter 

^r  les  poetes,  quels  qu'ils  fus- 

|:  e'etait  la  poesie,  ce  n^^tait  pas 

e  souvent  qu'il  honorait.  D^ 

s  chose,  etqui  montre  ^ue  Tins- 

on  ne  regarde  pas  touiours  au 

sor  le^oel  elle  descend!  Triste 

set  qui  expUque  poorquoi  sou- 


vent  Fceuvrevautmieux  que  l*homme! 
Est-ce  la  un  bien,  ou  est-ce  un  mal? 
P(*est-il  pas  hontpux  que  la  poesie,  qui 
vient  du  ciel,  se  souille  en  touchant 
la  terre ;  mais  aussi  n*e8t-il  pas  conso- 
lant  que ,  quelle  que  soit  la  faiblesse 
de  Tinstruuient,  le  chant  soit  toujours 
grand,  pur,  moral?  Laissons  la  voix, 
voyons  Tid^. 

HOBT  I>*ABD-BL-MELIK. 

Au  commencement  de  Tannee  86 
de  IMiegire  (705  de  J.  G.)  Abd-el-M61ik 
mourut  a  soixante  ansddge,  et  apres 
quatorzeans  de  regne.  Sous  ce  khalife, 
lesepti^me  apres  Mahomet ,  lequatrieme 
derheureuse  fainilled'Ommeyah,  Tunit^ 
du  khalifat  fut  retablie.  On  doit  a  IV 
dresse  autant qu'a  I'^ne rgied* Abd-el  M6- 
likce  r^l tat  important,  quiconsolidait 
alors  la  puissance  des  Musulmans  Mais , 
par  ce  lait ,  le  pouvoir  avait  change  de 
mains.  Ce  n*etaient  plus  les  rigides  ha- 
bitants de  THedjaz  qui  gouvernaient 
Tempire  quails  a  vaientcr66;  ce  n*etaient 
plus  les  fondateurs  d'une  religion  plus 
politique  oue  morale  qui  devaient  a  Ta- 
venir  pronter  de  Textension  colossale 
de  rislam.  Par  son  alliance  avec  les  Sy- 
riens ,  la  maison  des  Ommiades  avait, 
pour  ainsi  dire,  abdiqu^  son  origine 
et  cbang^  de  nationality.  D'arabe  elle 
s'etait  laite  syrienne;  et  des  lors  elle 
avait  tenement  modlG^  les  habitudes 
et  le  caractere  de  ses  aieux,  qu^elle 
devint  naturellement  Tadversaire  de 
ceux  qui  restaient  attaches  a  la  tradi- 
tion pure.  Par  une  fatality' fUcheuse, 
elle  en  arriva  m^me  a  lutter  contre 
I'esprit  hostile  que  lui  montraient  ses 
Y^ritables  compatriotes;  et  pour  vaiur 
ere  cette  opposition  elle  en  fut  bientdt 
reduite  a  braver  les  pr^juges  les  plus 
vivaces,  a  exciter  les  passions  haineuses 
et  les  rivalit^  de  tribus,  et,  tout  en  eta- 
blissant  Tunit^  du  gouvernement ,  a 
scinder  les  peuples.  II  y  avait  la  une 
grande  politique  pour  le  present;  mais 
il  y  avait  aussi  de  grands  dangers  pour 
ravenir  C). 

Le  khalifat  perdit  deson  pouvoir  sur 
les  esprits  en  se  dedoublant,  mSme 
temporairement  :  il  ne  s'agissait  plus 


138 


LUNIVERS. 


en  effit,  daps  ia  guerre  entre  Abd-el- 
Metik  et  Abd-Allah-ben-Zobair,  de  la 
lutte  orduiah*e  de  plusieun  comp^ti- 
teurs  a  la  puissance  supreme  comme 
a  i'epoque  d'Othman;  le  eas  ^tait  bien 
autrement  grave.  £nlre  Abd-el-Melik 
et  Abd-Aiian-btn-Zobairilexistait  beau- 
coup  plus  qu*une  difference  d*hom- 
ines ,  il  s*elevait  un  conflit  de  princi- 
pes  :  Tun  eta  it  khalifa  par  droit  de 
naissaiice ,  Tautre  par  droit  d'election. 
Or  rejection  avait  et6  le  premier  mode 
d'elevation  au  khalifat;  par  Section, 
abandonnee  aux  aneiens  compagnons 
de  Mahomet,  on  rattachait  le  present 
au  passe;  et  les  hautes  fonctions  du 
ehoix  d'un  khalife,  confiees  a  Texp^- 
rience  des  vieillards,  rappelaient  aussi 
Tantique  autorit^  patriarcale,  qui  fut 
toujours  en  Arabic  aussi  sainte  que 
reelle.  L'heredit^,  si  elle  ne  preseutait 
pas  les  difiicultes  sans  cesse  renaissantes 
de  Telection,  maiiquait  ^videmment 
et  de  Tappui  de  la  tradition  et  de  la 
sanction  reli^ieuse.  Aussi,  peut-ondire 
qu'^  partir  d  Abd-el-Meiik,  Tempire  des 
Arabes  pferdit  sa  force  divine ,  s'il  ^ta- 
biitpiussolidement  que  jamais  sa  force 
politique.  Desormais  il  ne  poss^dait  plus 
ce  qui  Tavait  fait  nattre ,  le  fanatisme 
reiigieux ,  Tesprit  de  propagande  domi* 
natrice  et  absolue;  il  lui  tallait  se  passer 
des  raoyens  surnaturels ,  ideals ,  c^es* 
tes;  il  lui  fallait  durer  par  les  moyens 
ordinaires,  inat^riels,  terrestres. 

Abd-el-Melik  montra  done  qu'il  com- 
prenait  bien  sa  position  particuliere  et 
qu'il  possedait  parfaitement  le  sentiment 
desonepoque,encbangeantlatentegros- 
siere  des  premiers  khalife^  en  unpalais 
somptueux.  La  prodigality  et  le  luxe 
dont  certains  bistoriens  arabes  Taccu- 
sent  sont  au  contraire ,  de  sa  part,  de 
la  finesse  et  de  la  provision.  II  lui  fallait 
ebluuir  par  les  richesses,  ne  pouvant 
plus  briller  par  Taureole  des  prophetes. 
II  lui  est  done  pardonnable  <l*avoir  en- 
toure  de  magniucence  sa  couronne  im- 
periale,  et  d'avoir  pris  place  sur  un  tr6ne 
d'or  comme  les  ancieus  princes  de  TO- 
rient,  faute  de  pouvoir  mooter  sur 
la  chaire  sacr^e  de  la  Mekke.  II  lui  est 
pardonnable  de  n'avoir  plus  voulu 
compromettre  sa  personne  dans  les 
chances  de  la  guerre;  et  il  ^talt  im- 
possible de  Taccuser  de  lAcbet^,  car 


etant  b^rilier  pr^niptif  da  \ 
avait  donn6  des  preoTes 
de  courage  et  d'intrepidit^.  Cett^ 
avee  raison  qu'tl  laissa  don 
lieutenants  le  soind'etendrdfsl 
de  son  empire  :  il  profitait  uuf  j 
▼ictoire,  et  il  n'^tait  pss  mpoofl 
la  defaite.   Homme  hd)ile,  iri 
spirituel ,  Abd-el-M^lik ,  uraW 
grand  nom,  n'en  fut  pas  moinsD^ 
utile  a  sa  nation,  approprieasi 
11  fut  rhomme   de  la  codi 
comme  Omar  Favait  Hi  de  ia  t 
et  Moawiah  de  retabtissemeaL 

CONQUiTS  DB  h'UBk 

A  la  mort  d'Abd  el-Mdik  I 
des  Arabes ,  tout  imnMOse  ( 
deja,  tendait  encore  as*agn 
que  fiii  done  la  vaieur  j, 
khalife »  il  lui  soffisait  de  I 
ses  lieutenants  pour 
rberitage  de  sesano^res'.  in 
dre  intelligence  des  grandest 
pouvaity  par  de  simples  autoc 
par  des  enooaragemeots  doanfai 
pos.  ^veiller  TemulatioD  da  eeij 
actiis  et  entreprenantsqai  toi 
geaient  qu'a  s'llhistrer  eti  s^a 
Walid ,  fils  ato^  d' Abd-el-lldikJ 
r^gna  le  prennier  de  ses  troi$ii 
a  un  haut  degn^  le  sentiment  deb 
deur,  et  tout  d'abord  il  le  fit  r^ 
facon  telatante.  Pour  pimir  i 
A£d-el-Aziz  de  I'avidit^  qull  sr 
tree  en  diverses  oecurrenoes,  1 
avait  retir^  le  gouvemeoieDtdell 
et  de  toutes  les  possessions  der 
Afrique ,  et  en  avait  investi  i~ 
Piozair.   Ce  dernier,  aussi  i 
justifier  le  chotx  que  le  kbalft 
de  lui,  que  pour  niettre  sooiii 
grande  entreprise ,  proposa  aijj] 
rain  d^essayerla  con^iMtedern 
Ge  gigantesque  projet,  loind 
le  nouveau  confimaiideur  dei0 
fiit  compris  et  approuv^  par  Inl 
accorda  tout  pouvoir  d'agirM 
ben-Nozair ,  en  se  bomant  a  I»  |{ 
mander  la  prudence  et  la  tin 
les  plus  rigoureuses ,  afio  de  oe  p 
sertomber  dans  un  pi^e  les  Mar 
qu'il  oommandait  O. 

C)  Voyei  Now«rt,B«-lttiMow,A«i 


;  SYRIE  MODERNE. 


1S9 


iMein  de  respect  pour  les  instmctions 
kihalife,  Mouza,  quoiquMi  fQt  excite 
BSOQ  invasion  de  la  Peninsule,  d'une 
Fpar  les  divisions  des  Visigoths,  et 
Itre  part  par  Tappel  d'un  des  chefs  de 
1 ,  le  comte  Julian ,  ne  voutut  pas 
promettre  les  Arabes  dans  sa  pre- 
B  reconnaissance.  11  s*adressa  done 
^rbers  pour  lenr  proposer  cette 
Htion  hasardeuse.  Parmi  ce  peuple 
,  entreprenant ,  aux  moeurs  pres- 
iffi3ides ,  il  se  trouva  un  chef  aussi 
i  que  brave,  nomme  Tharik ,  qui 
la  la  proposition  du  gouverneur 
B^  et  s^embarqua  incontinent  pour 
f  u'tle  d*Aig^siras.  Ce  fut  Tan  92 
pre,  710  de  notre  ere,  que  le 
)tr  Musulman  mit  le  pied  sur  le 
rEurope.  C'etalt  un  aventurier 
«  qui  venait  essayer  une  raz" 
f'lnais  cet  aventurier  avait  der- 
bf  un  peuple  immense  et  une  dy- 
tfde  huit  sidles.  Tharik  reussit  a 
A  et  rapporta  un  tel  butin ,  que 
Fetborta  h  retourner  imm6- 
_eoten  Espagne,  et  cette  fois  lui 
lioaze  mille  bomroes.  Cette  pe- 
fan^e  suflit  pour  vainere  les  Visi- 
4  tant  cette  nation  ^tait  d^ener^e 
Kt6t  dtvis^  par  les  haines  civiles. 
!k  ^  son  premier  d^barquement 
jirope  n'avait,  pour  ainsi  dire, 
irencontre  d'ennemis  :  les  popula- 
fdu  littoral  s'etaient  enfuies  devant 
Itiraliers  maraudeurs,  com  me  on 
i  decant  une  bande  de  brigands. 
„,conde  apparition  il  trouva  sur  le 
i  one  armee  et  un  roi  qui  Tatten- 
.  Mats  le  destin  ^tait  pour  les  Mu- 
js :  enflamm^  par  leur  precedent 
;  lis  attaquerent  avec  impetuosity 
ames  bardes  de  fer  qui  les  d^fiaient 
.t  de  leurs  lourds  chevaux ,  les  en- 
ent  de  leurs  escadrons  volants, 
preel^rent  trois  lours  entiers,  et 
iit  par  eofoncer  fes  murailles  hu- 
s  qu'on  leur  opposait,  par  les 
^eoulea  disperser.  Roderik,rusur- 
r,  mourut  en  heros ;  et  sa  l^te  ser- 
\roph^6  a  ses  vainqueurs  et  de 
^  de  leur  conqu6te  auprcs  de  Wa- 
aquel  elle  fut  cnvoy^e :  triste  lara- 
oyal  qui  fit  plus  de  six  cents  lieues 

lakari,  *crt  vaiM  arabes;  I'Espagnol  FaasUno 
liQ|o7f.t  at.  Rosaeeaw  Saiat-AiUlre, ^^gftnt 
Mien  fran^ai*. 


pour  alter  rouler  aux  pieds  dedaigneux 
du  superbe  kbalife  de  Damas! 

Rien  ne  pouvait  arr^ter  Tlslam  dans 
sa  course  conquerante,  ni  les  efforts 
des  Visigoths  pour  se  d^fendre ,  ni  les 
fautes  des  Arabes,  que  la  jalousie  divisa. 
Tharik,  qui  s'etait  aperi^u  que  Mouza 
enviait  son  succes,  eut  beau  resister 
auxordres  de  son  chef  immediat;  au 
lieu  de  s'unir  aux  dix  mille  cavaliers  et 
aux  huit  mille  fantassins  que  le  gouver- 
neur de  I'Afrique  amenait  comma  ren- 
fort,  il  eut  beau  marcher  tout  seul  en 
avant  avec  une  armee  deja  decimee  par 
des  luttes  furieuses,  la  victoire  n'en  ac- 
compagna  pas  moins  les  Musulmans  a 
chacuii  de  leurs  pas.  Tandis  que  Tin- 
dependant  et  audacieux  Tharik  forcait 
la  ville  d'i&cija ,  assi^geait  Cordoue  et 
mena^ait  Tolede,  Mouza,  d'un  autre 
c6te,  s'emparait  de  Seville,  de  Carmona , 
et  s'avan^ait  vers  la  Lusilanie.  Tout  c^ 
dait  devant  ce  torrent  de  vainqueurs ,  et 
les  populations  terrifies  se  hdtaient  dans 
leur  fuite,  comme  si  elles  etaient  chas- 
sees  par  le  glaive  de  Dieu. 

Quelle  que  fdt,  du  reste,  la  rapidity 

▼ictorieuse  de  Tharik,  Mouza  finit  par 

le  rejoindre  devapt  Tolede.  La  la  colere 

du  g^n^ral  ne  fut  point  desarmee  par  la 

gloire  du  lieutenant.  Mouza  depouilla 

Tharik  de  tout  commandement,  le  rae- 

naca  de  verges,  et  le  jeta  en  prison. 

Dur  chStiment  a  coup  sAr :  mais  c'est 

avec  celte  main  de  fer  qu'il  fallait  con- 

duire  la  nation  belliqueuse  et  quelque 

pen  barbare  des  Berbers;   c'est  avec 

cette  energie  qu'il  fallait  r^primer  un 

allie  nouveau ,  qui ,  apres  avoir  ete  au- 

jourd'hui  un  rival  en  exploits,  pouvait 

devenir  demain  un  ennemi  par  ambition. 

La  rude  discipline  des  Arabes  youlait 

une  severe  repression  de  la  desobeissance 

de  Tharik,  tandis  qu'il  appartenait  a 

Pinfaillibletoute-puissanceausuccesseur 

de  Mahomet  de  casser  le  jugement  du 

gouverneur  d'Afrique.  Ainsi  fit  Walid. 

Le  khalife,  considerant  le  capitaine  vic- 

torieux  et  non  le  soldat  mutm,  fit  elar- 

gir  Tharik  ,  et  lui  fit  rendre  ses  hon* 

neurs  et  ses  pouvoirs  militaires.  De  cette 

faQon,  le  khalife'  put  jouir  des  avan- 

tagesdela  clemence,  tout  en  proBtaiit 

de  rinflexibilite  de  son  gouverneur  d'A- 

ftique,  qui  avail  maintenu  la  disciphne 

k  force  de  vigueur  et  d'6galite  dans  les 


140 


L'UNIVERS. 


panitions.  Qiose  merveilleuse,  du  reste, 
et  qui  prouve  toute  Tautori^  morale 
qu'ayait  alors  le  commandeur  des 
croyants!  A  peine  Walid  eut-il  parl^,  que 
Mouza  reodit  lui-m^me  a  Tharik  sa  li- 
berte  et  ses  troupes ;  et  tout  aussitdt  ces 
deux  habiies  guerriers  ne  songerent  plus 
qu'a  se  concerter  pour  poursuivre  ieur 
conqu^te.  Ainsi ,  c'etait  de  la  Syrie ,  k 
Tautre  extr^mite  de  ia  M^iterran^e, 
que  venait  Timpulsion  qui  faisait  agir 
tous  ces  fiers  Musulmans;  c*etait  de 
Damasque  venait  la  parole  supreme  qui 
rapprocnait  deux  rivaux,  Ieur  Eaisait  ou- 
blier  Ieur  haine ,  et  Ieur  ouvrait  una 
nouvelle  carriere  d*exploits  (*)• 

U  avait  fallu  sept  ans  a  quelques  tri- 
bus,  sorties  d'un  desert,  pour  oonqu^rir 
la  Syrie ;  il  n'en  fallut  que  trois  k  quel- 
aues  bandes  de  Berbers ,  descendues  de 
1  Atlas, pour  conquerir  TEspagne.  Tha- 
rik et  Mouza  ne  s'arr^lerent  qu^aux 
Pyrenees;  encore  pretend-on  que  ce 
dernier  con^ut  le  projet  colossal  de  tra- 
verser cette  chatne  de  montagnes ,  et 
dialler  rejoindre  TAsie  par  les  Gaules  , 
I'Allemai^ne  et  la  Thrace ,  d^etendre  la 
domination  de  1* Islam  de  TOrient  a  TOo- 
cident,  et  de  faire  de  la  M^iterran^ 
le  veritable  lac  de  Tempire  musulman. 
Mais,  soit  que  le  khalife  n*eOt  point  foi 
dans  le  rive  titanique  de  son  lieutenant, 
soit  qu*il  vouldt  s'assurer  par  la  pru- 
dence la  noovelle  proie  qu*ou  lui  offrait, 
li  revint  tout  a  coup  sur  la  rivalit^  qui 
avait  separ^  Mouza  et  Tharik;  etsous  le 
pr^texte  de  juger  leurs  di£ferend8  en  les 
questionnant  Tun  et  Tautre,  il  rappela 
brusquement  k  Da  mas  ces  deux  gen6- 
raux ,  tout  converts  de  gloire  et  tout 
charges  de  butin.  Mouza  et  Tharik  ob^i- 
rent  immMiatement  k  riiiionction  de 
Walid.  Admirable,  obeissancequimontre 
a  quel  point  Tautorit^  du  khalifat  etait 
alors  respectde!  Mais  c'est  que  le  khalife 
n'^tait  pas  seulement  un  prince ,  c'etait 
un  pontife :  il  unissait  aux  pouvoirs  ma- 
teriels  de  Tun  le  caractere  sacr^  de  Tau- 
tre ;  il  pouvait  a  la  fois  punir  ou  r6com- 
penscr  dans  le  ciel  comme  sur  la  terre! 

F0BTUJI8E  DB  WALID  I. 

Avec  ce  pouvoir  et  ce  bonheur  Walid 
devait  Itre  le  plus  fortune  et  le  plus 

(*).ld.,  ibid. 


puissant  prince  de  son  siede.  Scsf 
verneurs  de  province,  guerriers  o 
Dimes  et  infatigables,  n'eUient  I 

()r^('cupes  qu'a  ^teiidre  dejoareiK 
es  limites  de  son  empire.  S 
rislam  passait  en  K8pagDe,de( 
p^n^trait  daus  les  lodes,  de  Sfr 
r^pandait  dans  VAsie-MiDeure.! 
Tharik  s'etaient  illustr^  en  Oc 
Hadjadj,  qui  pour  premier  explo^ 
eo  vain<]uant  Abd- Allah -ben*!! 
rafiernu  la  dynastie  des  Oi 
rendu  Tunite  au  klialifat,  ( 
comme  gouverneur  de  rirak,il 
vrir  de  gloire  en  Orient  et  a  y  i 
ter  encore  les  possessions  piesq 
lenses  de  Flslam.  Par  lesordresK 
la  direction  de  ce  dernier,  unei 
nombreuse  et  aguerrie  tramalT 
et  s^empara  avecune  rapidity  r 
leuse  de  la  Bockarie ,  du  V" 
du  Khasgbar;  puisbieotdte 
formidable  se  divisa  en  dfl 
dont  I'un  eut  pour  missioo  #1 
le  roi  de  Kaboul,  et  doot  I'ldM 
fon^  avec  la  plus  ^imaptei 
dans  les  contrees  les  plus  mjr*^ 
de  llnde.  Ces  deux  corps 
comme  le  faisaient  partoat  leil 
rousulmanes  :  le  roi  'de  KalM"^ 
jusqu'alors  s'etait  cm  toutii 
fut  oblige  d'entrer  encompositii 
conserver  sa  couronae;  ettM 
riches   contrees   que  bai^  I 
depuis  les  montagnes  qui  bor 
vall^  de  Kachemyr  jusqu'auxl 
de  I'Oc^n,  furent  subjugi'"" 
par  enchantement  par  res  i 
cibles,  dont  elles  adopterentil 
la  domination  et  le  culte  (*)• 
UardeurcoDquerantedesA 
insatiable  :  tout  en  avao^j^l 
jour  vers  les  limites  de  TiAj 
vaient ,  parmi  les  plus  bn*j 
les  nations  qu'ils  soun  '^ 
troupes  fralches  et  gui  < 
pays ;  ils  se  recrutaient  par  laf 
Leur  khalife  ne  poovait  quV 
cet  esprit  militaire  et  cette  pn 
religieuse,  dont  ii  lui  revenaitdaj 
de  nouveaux  sujets  et  des 
nouvelles;  aussi,  loin  de  s'ai 
armees  musulmanes  oe  peD 
mais  qu'^  marcher  en  avaat,  etij 

(*)ToyeiBeIadoii.  - 


SYRIE  MODERNE. 


141 


Inded  il  leur  falldit  la  Chine.  Dej^  m^me 
dies  s'apprStaient  a  penetrer  dans  le 
Celeste  empire,  et  a  troubler  Tordre 
immuable  aui  y  r^nait  depuis  des  miU 
Jiers  d'annees  ^  loraque  Hadjadj  fut  re- 
tenu  par  la  main  de  Dieu  mime ,  et 
mourut  tout  a  coup,  saos  que  ses  histo- 
riens  nous  aient  rapporte  comment  il 
fut  frappe,  a  quelle  epoque  praise,  et 
en  quelle  centime  particuliere  des  im- 
menses  possessions  qu'ii  avait  conquises 
ou  quMl  gouvernait.  Cette  mort  d'Uad- 
jadj,  qui  coincidait,  du  reste,  avec  ceJIe 
deiWalid,  suspendit  la  conqulte  islami- 
que ;  tant  il  est  vrai  au'il  faut  toujours 
une  impulsion  supreme  aux  hommes 
les  mieux  dou^,  un  commandement 
unitaire  aux  soldats  les  plus  braves. 

Mais  Fheureux  Walid  ne  devait  pas 
seulement  Itre  reconnu  khalife  depuis 
FEspagne  jusqu'^  la  Chine ,  sur  plus  de 
quinze  cents  lieues  d'^tendue;  par  une 
singuliere  predilection  du  destin ,  il  lui 
appartenait  encore  de  voir  sous  son  regne 
la  puissance  arabe  s*etendre  au  nord  ^ 
plus  loin  que  ne  Tavaient  port^e  et  la 
fougue  de  Khaled  et  Thabilet^  de  Moa- 
"wiaii.  Son  frere  Moslemah  avait  assieg^ 
et  pris  la  ville  de  Tyanes,  clef  de  la  se- 
eonde  Cappadoce :  le  Taurus  seul  lui  fai- 
sait  obstacle ;  car  les  Grecs  se  mon- 
traieut  pluseffrayesetplus  inquiets  que 
jamais.  C*est  que  la  terreur  du  nora 
arabe  commencait  a  se  repandre  d'un 
bout  du  raonde'  a  Tautre.  Cette  terreur 
devint  mime  si  g^n^rale,  que  les  faibles 
Byzantiiis  se  reluserent  un  instant  k 
combattre  contre  ces  guerriers  bouil- 
lants,  dont  ils  avaient  naguere  m^pris6 
les  ancltres  comme  les  derniers  des  Bar- 
bares.  Moslemah  alors  profita  de  Teffroi 
de  ses  ennemis,  s'avan^a  dansle  Pont, 
s'empara  d'Amasee  et  des  chateaux  voi- 
sins,  ruina  la  rontree;  et  qui  salt  ou 
seseraittenitineesa  marche  victorieuse 
si  la  mort  du  khalife  neilt  suspendu 
pour  quelque  temps  toute  operation 
miiitaire  sur  le  territoire  entier  defem- 
pire.'  Bardane,  dit  Philippique,  empe- 
reur  de  hasard,  qu'une  faction  avait 
eleve,  qu*uue  obscure  conspiration  de- 
rail abattre ;  le  cynique  Bardaoe ,  qui 
ne  voyait  dans  le  pouvoir  imperial  de 
Constantinople  qu*une  facilite  pour  ses 
vices  honteux,  Tivrognerie  et  la  debau- 
che,  aurait-ii  pu  resister  aux  Arabcs, 


venant  cette  fois  attaquer  sa  capitale  par 
terre,  apres  avoir  traverse  lAsie-Mi- 
neure,  inviol^  jusqu*alors  (*)? 

Walid  ne  regna  que  dix  ans  et  dans 
ces  dix  ans  il  fut  temoin ,  sinon  acteur, 
deTaccroissement  infini  deTlslam.  Son 
pere  Abd-el-M^lik  avait  fait  faire  un 
recensement  de  ses  provinces  qui  avait 
dur6  plusieurs  annees,  tant  I'empire des 
Arabes  etait  deja  considerable;  sous  son 
Ills  le  recensement  des  nouvelles  conqu^ 
tes  auraitetepresqueaussi  long,puisqu*il 

Jf  avait  d'a^oute  aux  possessions  de 
'empire  trois  cents  lieues  en  Europe, 
et  six  cents  en  Asie.  C*est.  du  reste ,  en 
cette  ann6e  716,  la  96"*  de  Th^gire, 
que  la  domination  rausulmane  atteignit 
son  apogee.  Elle  formait,  pour  ainsi 
dire,  dans  le  monde  un  croissant  colos- 
sal, dont  une  des  extr6mites  allait 
aboutir  aux  Pyr^n^es ,  et  Fautre  aux 
confms  des  Indes,  en  traversaut  la 
Perse,  la  M6sopotamie,  laSyrie,  F^ffvpte 
et  tout  le  littoral  de  TAfrique.  £t  c  etait 
Damas  le  centre  ^blouissant  de  ce  demi- 
cercle  prodigieux;  c'^tait  dans  cette 
ville  fortunee  que  s*accumulaient  les 
richesses  de  la  moiti^  de  Tunivers  connu; 
c'etait  dans  ses  murs  que  revenaient 
tons  les  vainqueurs  du  levant  comme 
du  couchant ;  c'^tait  elle  qui  s*enorgueiI- 
lissait  de  toutes  les  victoires,  qui  profi- 
tait  de  toutes  les  conqu^tes  I 

Cependant  les  anciens  habitants  de  la 
Syne  ne  devaient  point  prendre  part  a 
cettefortune  sans  exemple.  Pau  vres  Chre- 
tiens, dont  le  culte  etait  tolere,  mais 
dont  la  nationality  avait  eteeteinte,  ils 
regardaient  d'en  has  tout  ce  faste  de  la 
cour  des  khalifes ,  et  ce  spectacle ,  en 

()assant  devant  ieurs  yeux ,  arrachait  de 
eur  coeur  toute  esperance  d'iudepen- 
dance  etde  liberte.  Plus  les  Musulmans 
grandissaient  en  puissance,  plus  -les 
Chretiens  devaient  desespererdel'avenir. 
Plus  les  Grecs,  Ieurs  coreligionnaires , 
6*abaissaient,  plus  ils  se  sentijient  con- 
dainnesa  une  inferioriteeternelle.  Leurs 
dominateurs  etaieut  elements,  leurs  mai- 
tres  actuels  etaient  doux ;  mais  pour  dtre 
leger,  ce  n'en  etait  pas  moins  un  joug 
Qui  pesait  sur  leurs  epaules;  et  puis,  qui 
devait  leur  repondre  de  l*avenir  ?  Ne 
leur  pouvait-il  pas  arriver  tout  a  coup 

{^)  Voyez  Theopbane. 


142 


LtJNIVERS. 


des  menaces,  dte  avanies ,  des  exigences 
fnconciliables  avec  les  devoirs  de  leur 
conscience?  Quelle  que  fdt  done  la 
tranquillite  apparente  des  Syrlens ,  ils 
n*en  etaient  pas  moins  miserables  et 
craintifs  au  fond  du  coeur.  Tel  etait  le 
sort  des  meilleurs  d'entre  eux^de  ceux 
qui  Etaient  rest6s  fiddles  a  leur  foi,  k 
leurs  traditions  et  k  leurs  moeurs.  Quant 
a  ceux ,  au  contraire,  qui  avaient  abjur6 
le  christianisme,  qui  niaieat  leurs  anc6- 
tres,  et  qui  avaient  adopts  les  habitudes 
de  l^urs  vainqueurs,  ils  n*etaient  qu'en 
petit  nombre,  et  la  destinde  de  pareils 
homines  ne  m^rite  pas  d'ailleurs  d*oc- 
cuper  rhistoire.  Dans  tout  pays  et  en 
tout  temps,  11  y  put  des  Inches,  qui  ven- 
dirent  leur  patrie,  des  intrigants  qui 
exploiterent  la  d^Jaite  de  leurs  freres , 
des  ren^gats  qui  v^curent  de  leur  infa- 
mie  :  la  post6nt^  les  m^prise  autant  que 
leurs  conteinporainslesont  maudits! 

Walid  fut  declar6  srand  khalife  de 
son  vivant  :  on  Tappela  sans  doute  le 
Victorieux,  k  cause  des  conqu6tes  de  ses 
g^n6raux;  le  Magnanime,  a  cause  des 
richesses  qu'il  distribuait ;  le  Tout-Puis- 
sant, a  cause  de  Tautorit^  que  son  titre 
lui  avait  acquis ;  nous  nous  contente- 
rons,  nous ,  de  le  nommer  le  Fortune? 
Sans  quitter  Damas,  il  remua  Tunivers; 
sans  former  person nellement  la  moin- 
dre  entreprise,  11  se  trouva  maltre  de 
nombreiises  provinces  nouvelles.  Exista- 
t-il  jamais  prince  plus  heureux  et  a 
moindres  frais?  Son  seul  maltieur  peut- 
£tre  fut  de  mourir  a  auarante-deux  ans, 
dans  la  force  de  son  flge  et  dans  lapros- 
perite  de  son  tr6ne,  d  une  maladie  dont 
un  ne  nous  a  pas  conserve  le  nom. 

NOUVEAU  SIBGB  DE  CONSTANTINOPLE. 

Le  refine  de  Souleyman  (vulgaire- 
ment  Soliman),  successeur  de  Walid, 
fut  court,  deux  ans  et  huit  mois,  et  ne 
fut  rempti  que  par  un  uouveau  sie^e  de 
Constantinople ;  mais  c'elait  peut-^tre 
la  tentative  la  plus  terrible  qui  Jusqu*a- 
lors  eilt  menace  Tempire  byzantiu.  Gette 
expedition,  en  effet,  n'etait  pas  seule- 
ment  redoutable  parsa  force,  elle  T^tait 
encore  par  la  faiblesse  deses  adversaires. 
Depiiis  plusieurs  annees,  rempire  by- 
zanti n  se  decimait  Iui-m6nie  par  la  guerre 
civile.  Justiaieull,  le  dernier  des  Hera- 


dides,  ou  pnooes  de  lafamille  da 
H^raclius,  s'^it  OKHitr^  si  vi 
et  si  cruel,  qu'on  ne  cherehiit , 
d^livrer  d^un  aossi-iofftmedespote, 
par  des  eomplots  individuels,  i ' 
des  soulevements  de  viiles  etde 
ces.  II  fut  reavers^  ime  foil ;  poij 
incapable  rival  se  laissa  f  aiacre,  rt^ 
tinien  remonta  surle  trdne  pov  ~ 
gner  k  Taise  dans  le  sangdesei 
Enfin  Ton  paryint  k  se  rendre  m 
ee  monstre  :  rbumanit^  respira 
Fempire  ne  fut  point  sauv^.  Le 
^tait  aux  conspirations;  les 
montraient  sans  cesse  en 
verte.  Chacun  avait  son  candiditl 
souverainet^  et  Ton  combattait 
ce  qu'on  eOt  obtenu  son  eroperMrl 
lour.  Apr^  Bardane  rivrogne,  "' 
lippique,  on  couronna  tour  i 
administrateur  sans  g^nie, 
dit  Anastase  li,  et  un  fini 
coeur,  du  grand  nom  de 

Dans  une  pareille  anarcfaiCi 
possible  de  s'opposer  avec  urn 
an  ennemi  qui  s'avan^it  sor  n 
dix-huit  cents  vaisseaux ,  sar  ter 
pr^s   de  deux   cent  mille  boi 
L*arniee  de  terre,  command^  pi 
lemah ,  ^tait  arri v6e  jresque  inta 
qu'aupres  des  murs  de  Cons 
pie ;  chacune  de  ses  Stapes  avait 
victoire,  et  bientot  elle  forma  a 
immense  qui  s'etendatt  de  laCoi 
k  la  Propontide.  L*alarme  dfs 
6tait  au  comble;  les  Arabes  se 
sdrsde  la  victoire.  Mats  lefea^ 
seul  protecteur  k  cette  6poque 
pire  bpantin,  sauva  encore  Is 
de  rOrient  Chretien  en  TanneeTU. 
plusieurs  tentatives  de  la 
lorcer  les  chafnes  du  port, 
sieurs  attaques  des  forces  dt     ,^^ 
feu  gr^^eois,  conduit  contre  bio^ 


desbrdlots,  lance  contre  les 
de  si^ge  par  des  tubes  en  airaia^f 
ta  un  tel  ravage  au  milieu  des  Km 
qu  ils  renoncerent  a  enlever  i 
tement  la  ville  sans  cesser  pourtaa 
Tin  vest  Ir.  Ce  blocus  etait  disastl 
pour  les  Grecs ;  car,  outre  qu*il  tn 
toute  communication  entre  la 
dencc  du  gouvernemeut  byzantis 
les  provinces,  il  permettait  aux  Moi 

(*}  Yofez  Thtepbane  et  Cednau. 


SYRIE  MODERNE. 


148 


tas  de  se  r^pandre  au  loin  dans  la 
impagne,  de  la  piller,  de  la  miner. 
klArabesr^solurent  d'hivernerdevant 
iir  prole  future,  et  pour  se  la  partager 
^"i  6quitablement  its  appelerent  leur 
life,  a  qui  ils  -r^ervaient  Thonneur 
t  dans  ropuleute  cite  des  Ro- 
et  d*6n  distribuer  lui-m^me  ie$ 
illes. 

khalife,  attendu  si  impatiemment 
[6  arbitre ,  avait,  en  effet ,  la  r6- 
n  d'etre  Juste,  quoiqu'il  ftlt  d'une 
farouche,  ainsi  que  le  prouve  le 
£caract^ristique  que  nous  allons  con- 
On  se  souvient  que  Mouza-ben-No- 
et  Tharik  avaient  6t^  i^ppeles  tons 
;,au  milieu  de  leurs  victoires,  pour 
compte  ^  Walid  de  leur  conduite. 
partit  sent  sur  son  petit  cheval  de 
charge  simplement  de  quelques 
pr^cieuses  qu*il  devait  deposer 
Is  du  commaiideur  des  croyants. 
llere^utavec  bienveillance,  ecouta 
'''deses  exploits,  ne  lui  reprocha 
peioe  son  acte  d'iusubordinatlon 
sope^n^ral  en  chef,  et  s*appr£tait, 
t  a  le  recompenser  dignement, 
e  la  mort  vint  arr^ter  sa  main 
itriee.  Mouza-  ben-Nozair,  au  con- 
,  serendit  a  Dainas  avec  la  pompe 
victorieux,  avec  le  deploiemeot  de 
d'un  tout-puissant  gouverneur. 
uneianombrable  caravane  de  de- 
s  luxueuses,  il  tralnait  a  sa  suite 
roille  captifs ;  et  ce  fut  a?ec  le 
^d'un  coiiquerant  et  le  faste  d'un 
qull  entra  en  Syrie.  Mais  il  n'e- 
pas  encore  parvenu  a  la  capitale  de 
^1  que  la  cnaire  sacr^e  du  khalifat 
ehaog^  d'organe.  Souleyman  futr 
weou  contre  Mouza-ben-Nozair? 
ik,  le  vindicatif  Berber,  fit-il  au 
eau  khalife  des  denonciations  se- 
contreson  ancien  rival?  Le  luxe 
?ainqueur  des  Visigoths,  Torgueii 
floininateur  de  TEspagne,  sa  marche 
"Tiphale  a  travers  la  Mauritanie,  TE- 
.e  et  la  Syrie,  deplurent-elles  au 
pdecommandeurdescroyants?  Avait- 
I  accuse  aupres  de  lui  Mouza-ben- 
»air  dravoir  voulu  se  declarer  iiid^ 
Want?  Le  khalife,  qui  n'avait  pas 
*ore  pris  les  arines  en  person  ne,  re- 
l^utait  il  ce  fier  guerrier,  tout  convert 
wpils,  tout  entoure  de  troupes  qui 
pataissaient  lui  ^tre  devouees,  qu'il 


avait  illustr^es  et  enrichies'  tout  en- 
semble? Souleyman,  en6n,  jalousait-il 
Mouza-ben-Nozair?  Toutes  ces  suppo- 
sitions sont  possibles  vis-^-vis  dufait 
qu'il  nous  reste  a  rapporter. 

Au  premier  abord  Souleyman  dissi- 
mula  :  il  re^ut  solennellement  et  avec 
honneur  le  glorieux  gouverneur  d'A- 
frique,  Tinterrogea  longuement  sur  ses 
combats,  curieusement  surlesmoeurs 
des  pays  nouvellement  acquis  h  Tlslam, 
le  sonda  sur  ses  projets ,  puis  le  con- 
g6dia  sans  lui  faire  savoir  de  vive  voix 
la  decision  quMi  preiiait  a  son  ^gard. 
Le  lendemam,  par  un  incroyabie  re- 
virement  d'opinion,  il  ordonna  qu'on 
depouill^t  Mouza-ben-Nozair  de  tons  ses 
biens,  qu*on  le  battlt  de  verges,  qu'on 
I'exposSt  un  jour  entier,  t^te  nue,  au 
soleil  de  Fete,  sur  une  des  places  prin- 
cipales  de  Damas,  et  enGn  il  le  frappa 
d'une  amende  considerable  de  cent  h 
deux  cent  mille  pieces  d*or,  en  rendant 
sa  famille  solidaire,  pour  la  ruiner  ainsi 

aue  son  chef.  Mouza-ben-NozaIr,  dg6 
^ja  de  plus  de  soixante-dix  ans,  mais 
yieillard  au  corps  energique  et  au  coeur 
inebranlable,  supporta  avec  la  plus  no- 
ble resignation  le  chdtiment  oarbare 
qu'on  lui  infligeait.  Ce  stoTcisme  herol- 

{[ue  blessa-t-il  encore  le  khalife,  si  cruel- 
ement  susceptible  ?  11  le  faut  croire,  car 
sa  vengeance  ue  se  montra  pas  encore 
assouvie  (*)• 

Quelque  temps  apr^s  ce  supplice, 
dont  la  veritable  cause  est  restee  un 
mystere,  Souleyman  apprit  que  le  fits 
de  Mouza,  Abd'el-Aziz,  demeure,  de- 
puis  Tabsence  de  son  pere ,  gouverneur 
de  TEspagne,  tout  en  etendant  le  long 
des  Pyrenees  ct  sur  les  rives  du  Tage 
la  domination  arabe,  avait,  dans  Ta 
ville  de  Seville,  sa  residence,  epous6 
avec  eclat  la  belle  £gisona ,  veuve  de 
Roderik,  le  roi  vaiiicu  de  Visigoths, 
qu'il  lui  avait  permis  de  consefver  sa 
religion ,  et  qu'il  lui  avait  laisse  des  ser- 
▼iteurs  Chretiens  pour  sa  ma ison.Saufle 
manage  avec  une  infid^le,  la  tolerance 
d'Abd  el'Aziz  n'avait  rien  de  contraire 
aux  habitudes  et  a  la  politique  musul-  ( 
manes.  Mais  les  ennemis  de  Mouza  ajou- 
taient  a  ce  rapport  contre  son  fils,  que 
celui-ci  etait  plein  d'orgueil  comme  fion 

(*)  Voyez  NowaIrL 


144 


LtmiVERSi 


p^re,  et  qu'il  songeait  aussi  a  se  rendre 
md^pendant.  Sans  prendre  de  plus  am- 
pies  et  de  plus  s^rieuses  infonnations 
8urlaconduited'Abd*el-Aziz,Souleyman 
dep^ha  Tordre  au  commaDdant  en 
second  de  TEspagne  de  se  d^faire  k 
tout  prix  et  par  tout  mo?en  d'Abd'el- 
Aziz  y  et  d'envoyer  sa  tete  a  Damas. 
Abd'eUAziz ,  en  se  rendant  a  la  mos- 

Suee ,  fut  done  assailli  par  une  troupe 
'assassins  et  massacre  sans  piti^. 
Quand  le  khalife  eut  la  t^te  du  fils  il 
manda  le  p^re.  Mouza  arriva  au  pa- 
lais  de  son  souverain,  en  v^tements  de 
bare,  le  bdton  blanc  du  kalendery  ( voya- 
geur)  a  la  main,  et  la  besacedu  derwich 
(mendiant.)  sur  le  dos.  Le  khalife  eut 
la  cruaut6  de  lui  presenter  la  t^te  coup6e 
d'Abd'el-Aziz,  et  de  lui  demander  s'il 
reconnaissait  ces  traits  deformes  par 
une  mort  violente:  «Oui,jeles  recon- 
«  nais,  repondit  le  malheurcux  pere,ce 
«  sont  ceux  d*un  brave  et  fideie  musul- 
«  man ,  d'un  bomme  qui  te  vaut  mille 
«  fois!»  Puis  le  Belisairearabe  retourna 
dans  Taride  Hedjaz,  sa  patrie,  pleurer 
son  fils  et  mendier  sa  vie  (*). 

Telle  etait  la  justice  de  Souleyman. 
Eilt  elle  ^16  aussi  barbare  envers  les 
Grecs  gu'envers  les  Arabes?  Sa  mort, 
qui  arriva  tout  a  coup ,  et  presque  d^s 
son  depart  de  Damas  pour  se  rendre  ^ 
Tarmee  qui  assi6geait  Constantinople , 
ne  permit  pas  de  le  savoir.  Cest  h  un 
neveu  d*Abd*el-M^lik,  et  non  h  uh  de 
ses  fils,  que  Souleyman  avait  destine  sa 
succession.  Soit  respect  pour  les  dernid- 
res  volontes  du  khalife,  soit  confiance 
dans  Omar-ben-Abd*el-Aziz ,  toujours 
est-il  que  le  choix  de  ce  dernier  ne  ren- 
contra  aiicun  obstacle.  Ge  retour  a  I'an- 
cien  mode  de  designation  au  khalifat 
fut  d'ailleurs  approuv6  par  le  reste  des 
partisans  du  regime  primitif,  et  eut  en 
outre  Ta  vantage  de  conserver  le  khalifat 
dans  la  fanulle  d'Ommeyyah.  Autant 
Abd'el- Aziz-bcn-Merwan  a » ait  ete  avidc , 
interesse,  amoureux  de  Tor  dans  son 
gouvernement  de  Tfegypte,  autant  son 
fils  Omarse  montra  probe,  austere, 
dedai^neux  du  luxe  etdes  richpsses  dans 
la  chaire  sou veraine.  1 1  eut  quelques-unes 
des  vertus  de  son  celebre  homonyme  : 
ii  fut  comme  lui  juste  pour  les  autres , 

^n  Voyez  Murphy  et  Nowalrl, 


rigide  pour  lai-mtoe.  Sa  \n(^ 
^tait  extreme;  et,  loin  de  nuire  I 
pouvoir,  cette  piet^  vint  fort  a 
pour  rendre  aux  habitants  de  I 
et  de  ITemen  quelque  pea  de 
pour  lecaractere  pontifical  drsk 
et  pour  d^truire  en  partie  le  prfjane 
pulaire  de  la  Mekke  et  de  MeduK 
les  Ommiades.  Les  poetes  seulsn' 
rien  a  gagner  au  nouveau  r^e. 
qui  se  refusait  parfois  k  lui-n 
n^cessaire ,  afin  ae  distribuer  da 
aux  pauvres,  les  pri  va  des  fortes 
qu*iis  touchaient  k  la  eourde  ses, 
cesseurs  depuis  Abd'el-Melik.  Tooti 

§ea  a  Damas  :  de  salle  de  fSte  le 
u  khalifat  devint  une  retraite  de 
teurs ;  de  demeure  de  plaisirs,  dc 
et  d'abondance,  un  lieu  d'ai 
privations  et  de  jednes. 

Le  d^vot  et  rigide  conrniaidar 
croyants  n'en  fit  pas  moins 
si^ge  de  Constantinople.  Se 
lieu  d'une  opulente  proie,  il  vit 
espoir  de  conqudte  raceomi" 
des  traditions  religieuses  de  list 
promettaient  aux  Musuimans 

{irise  de  cette  magnifique  dti 
e  retour  du  printerops  I 
envoya  une  Ootte  de  quatre  cents 
h  Tarmee  arabe  qui  avait  hiTerae 
de  la  capitale  byzantine.  Mab 
flotte ,  mont^e  par  des  fig^tiens, 
que  tons  Chretiens,  et  c}ui  craf^ 
que  la  piet^  d'Omar,  imitee 
gouvemeurs  et  par  une  partie 
pie,  ne  reveilldt  le  £anatisaie 
et  ne  compromtt  leur  tranquillil^i 
g^rent  a  se  rendre  aux  Grecs,  \ 
ravitailler  les  Arabes.  Leur 
odieuse  par  ellem^me  et  quel 
le  motif,  touma  contre  eux  tg 
quecontre  les  Musuimans.  Esl 
arriver  a  force  de  voiles  et4i 
vers  le  port  de  Constantinople,  ies 
crurent  h  une  attaque,  et,  n  ' 
signes  des  £gyptiens ,  ils  lf«nr 
une  telle  quantitede  feu  gr^eois, 
incendi^rent  les  quatre  cents  vais 
et  extermin^rent  tons  ceux  qui  les  . 
tatent.  Bien  plus,  glorieux  du  sod 
qu'ils  venaient  de  remporter ,  enooa 
ges  par  leur  empereur,  qui ,  oetle^ 
n^e-la,  sans^tre  un  homme  de  genie  H 
au  moins  un  bon  soldat,  LjBon  III, 
Byzantins  aborderent    tax 


SYR1E  MODERNE. 


145 


'i«ste  des  vaisseanx  arabes,  lea  disper- 
a^rent,  et  mi  rent  le  feu  a  tous  ceux  quits 
purent  alteindre  (*). 

Gependant  rarmi^e  de  terre  des  Mu- 
sulnians ,  qui  avail  eu  beaucoup  a  souf- 
frir  d'un  hiver  des  plus  rigoureux ,  pri- 
Y6e  des  vivres  frais  qirelle  attendait, 
ne  put  supporter  la  famine  apr^s  te 
froid.  Elle  commenQattli  se  d^courager 
et  a  cbercher  sa  vie  en  courant  fjar 
bandes  les  campusnes  de  la  Bithpie, 
lorsque ,  pour  eviter  une  desertion  g^- 
n^raie ,  Moslemabr^olut  de  la  ramener 
enSyrie  et  d'abandonner  une  fois  encore 
le  si^ge  de  cette  ville ,  qui ,  toute  cor- 
rompne  qu*elle  fdt,  trouvait  une  pro- 
tection puissante  dans  la  Providence; 
qui,  toute  d^^n^rf  e  quMle  se  montrftt, 
avait  un  moyen  de  defense  presque  in- 
surmoutable  dans  le  feu  gregeois.  Con- 
trairement  aux  provisions  de  Moslemah, 
la  retraite  des  troupes  musuimanes  fut 
encore  plus  desastreuse  aue  ne  Favaient 
^\jk  les  glaces,  que  ne  Tetait  la  famine. 
La  temp6te  d^truisit  les  na  vires  qu'avait 
epargnes  le  feu  gr^eois^  il  f^llut  prendre 
la  voie  de  terre.  Alors,  en  Tabsence 
des  Grecs,  les  Bulgares,  excites  par  eux, 
tomb^reut  sur  les  derri^res  de  Tarm^ 
arabe,  et,  en  la  barceiant  sanscesse,  lui 
tu^nt  jusqu'^  vingt*deux  mille  bom* 
mes. 

£n  apprenant  ce  dOsastre,  d*autant 
plus  sensible  h  Torgueil  musulinan 
qu'il  avail  etO  pr^6d6  par  de  si  prodi- 
gieux  triomphes  en  Espagne  et  dans  les 
fndes,  Omar  passa  de  la  devotion  an 
fanatisme.  II  crut  voir  dans  Tdchec  de 
ses  troupes  une  punition  du  ciel  pour 
leur  foi  atti^ie,  ordonna  un  redouble- 
menl  de  zele  islamique,  el  voulut  forcer 
tous  ses  sujets  sans  distinction  a  em- 
brasser  la  religion  mahomOtane.  De  1^ 
une  pers^ution  des  Chretiens,  qui  sans 
doute  aurait  longtenips  durO,  et  aurait 
augment^  de  rigueur  de  jour  en  jour, 
si  tout  a  coop,  soil  par  une  main  chr6« 
tienne ,  soil  par  la  vengeance  d'un  en- 
nenii  des  Alides  qu'Omar  etait  accusOde 
protO^er,  le  khaiife  n'edt  re^  un  poi- 
son violent  dont  il  mourul.  Cette  catas- 
trophe sauva  les  Syriens  d'un  r^ne 
qui  avait  justifiO,  des  son  commence- 
ment, leur  crainte  perpOtuelle,  el  qui 

(*)  Voyez  Thfophane  et  Cedrencu. 

i^  lAvraiam.  (stbie  modsrnb.} 


mena^it,  en  continuant,  de  leur  faire 
souffrir  plus  de  maiix  que  n*en  avaient 
apportOs  h  leurs  anc^tres  les  farouches 
cavaliers  de  Khaled. 

BBBANLEMEIfT   DE   lA   PUTSSANCB 
DBS    OBIMIADES  (*}. 

Nous  voici  arrives  a  I'Opoque  oOi  le 
khalifat  des  Oinmiades  sembe  con- 
damnO,  mal^re  la  puissance  colossale  de 
rislam,  malgre  les  efforts  des  parti- 
sans d*une  maison  puissante,  dont  le 
Sremier  membre  couronnOfut  un  homme 
e  gOnie,  Moawiah.  Une  sorte  d'instabi- 
litO  fata  If  avait ,  depuis  quelques  aiinOes , 
6branl6  le  pouvoir  des  6 is  a*Abd'el-MO- 
lik.  Apr^  rheureux  Walid,  qui  avait 
vu,  en  dix  ans  de  regno,  plusieurs 
royaumes  conquis  h  Tlslam  et  des  ri< 
chesses  fabuleuses  accumulOes  dans  son 
palais  de  Damas,  ses  successeurs  de- 
vaient  Oprouver  toutes  les  difficultes 
qu^entratnentdcs  6tablissements  innom- 
brables  et  le  gouvernement  de  cent  pro- 
y'lnvfis,  Souleyman,  malgr6  son  inflexible 
justice,  Omar,  malgrO  le  respect  que  sa 
pi6te  lui  avait  attire,  avaient  send  tout 
le  poids  de  ce  monde  qui  pesait  sur  leurs 
dpaules.  Ilsy  purent  a  peme  suffire  Tun 
et  Tautre.  Le  premier  mourul  au  com- 
mencement de  sa  tilche ;  le  second  fut 
victime  de  la  vertu  m^me  qu'il  avait 
montree.  Si  sa  piete  lui  avait  fail  des 
partisans  nombreux ,  elle  lui  avait  fait 
aussi  d'irr6c«nciliables  ennemis,  et  le 
poison  arr^tases  projets  ^  peine  form^, 
d^truisil  brusquement  Tempire  quUi 
8*^tait  cr^6  sur  les  esprits.  Le  succes- 
seur  immediat  de  ces  doux  princes,  qui 
n'avaient  fait  qu'apparaftre  dans  la 
chaire  sacree  de  Damas,  sans  r^gner 
plus  longtemps  qu*eux ,  sembia  vouloir 
fuir  les  soucis  qui  avaient  accompagn^ 
le  passage  au  khalifat  de  ses  deux  pr6- 
d^cesseurs.  Ce  fut,  pour  ainsi  dire,  un 
khatife  faineant.  Caract^re  faibieet  in- 
d^is,  dme  sans  orgueil,  esprit  sans 
ti^vation ,  il  laissa  faire  autour  de  lui , 
sans  sMnquieter  presque  des  ^vi^nements 
nombreux  qui  se  succ^daient  dans  son 
immense  empire.  li  s*6tudia  k  Eviter 
toute  preoccupation  ficheuse ,  tout  tra- 
vail (Hinible  et  difficile,  el  ne  songea 

(*)  Toyet  Aboon-fMa. 

10 


14« 


LnEimVERS. 


I 


^'jks'abandonner  k  Faise  a  son  amour 
pour  ies  femmes  et  h  cacher  ses  Intri- 
gues k  la  faveur  de  sa  toute-puissanea. 
L'empire  arabe  pouvait  mareher  quet- 
que  temps  sans  un  chef  dirigeant  :  ses 
soldats  etaient  encore  assez  braves « ses 
generaux  assez  beureux,  ses  gou  verneura 
assez  habiles,  et  Ton  eut  a  peine  le 
temps  de  connaltre  d'un  bout  des  pos- 
sessions musuimanes  a  Tautre  la  nul* 
Ht^  du  khalife,  lorsquecelui-cimourut 
d*une  peine  de  coeur,  du  chagrin  amou- 
reux  que  lui  causa  la  perte  (Tune  de  ses 
amantes  Ies  plus  belles  et  Ies  plus  che- 
ries.  Mais  quelque  invisible  que  fdt  en- 
core la  decadence  du  khalifat  de  Damas, 
ou  pour  raieux  dire  de  la  domination  des 
Ommiades,  eile  n'en  existait  pas  moins  : 
c'6tait  un  Ver  au  coeur  du  ch^ne  islarai- 
ue;  et  il  appartenait  au  su^cesseur 
u  tendre  et  incapable T6zid  II  d'extirper 
ce  ver,  ou  de  le  laisser  continuer  son 
intime  et  secret  ravage. 

Hescbam  regna  vingt  ans ;  mats  son 
rSgne  fut  rempli  de  p^ripeties  nom- 
breuses  et  inattendues.  Hescham  ne  fut 
depourvu  d'aucune  des  qualites  indis^ 
pensables  h  un  grand  prince  :  activity , 
intelligence,  dignit^.,  justice,  resolution } 
et  pourtant  Tlslam  sous  son  khalifat 
ne  fit  point  un  seul  pas  en  avant.  La^ 
destinee  des  amies  musuimanes  devint 
journaliere;  certains  ambitieux  tenterent 
de  sc  rendre  independants ,  et  Ies  Alides 
recommencerent  a  rfiver  Tempire.  Un 
des  coups  Ies  plus  funestes  ,  smon  en- 
core a  la  puissance ,  au  moins  a  Torgueil 
des  Musulmans,  fut  la  victoire  si  celebre 
que  Charles-M  artel  rem  porta  contre  eux 
dans  Ies  environs  de  Poitiers.  II  n'entre 
pas  dans  notre  cadre  oe  suivre  Ies  Ara- 
nes  dans  leurs  diverses  incursions  au 
dela  des  Pyrenees  :  le  drame  de  leur  eta- 
blissement  europeen  appartient  a  una 
autre  histoire  que  celle  cfe  la  Syrie.  Bi- 
sons done  sommairementqu^apres  avoir 
pris  ^arbonne,  pour  s*en  faire  un  port , 
Carcassonne,  pours'en  faire  une  place 
de  guerre,  Ies  Arabes  et  siirtout  ies 
Berbers,  leur  avant-garde  ,ne  cesserent, 
pendant  plusieurs  annees,  de  courir  Ies 
campagnes  du  beau  pays  qui  fut  plus 
tard  la  France.  lis  y  trouverentde  rudes 
et  vai Hants  adversaires.  £udes  leur  op- 
pose d'abord  une  armee  d*Aquitains  et 
de  Yascons  qui  Ies  arr^terent  quelle 


temp« ;  raais  a  foree  deMriiar  cdh 
eontre  leshommes  d'arnws  do  6\ 
quitaine,  Ies  Arabes  fifiirentpat  f 
Ies  bras  et  baraaser  Ies  libevaQt  i 
enneniis.  Geux-ei  se  retirarent 
derriere  Ies  murs  de  Bcrrdeaui.  Ma 
Miisulmans  se  pr^ipttaieot 
murailles  de  pierres  des  villei  < 
.nes  avee  aatant  tfardear  qae  < 
Bturailles  de  fer  que  leur  oppo 
lignes  des  ebevaliers  aquitaios.! 
suooed^nt  done  en  si  groad 
aur  Ies  remparts  de  Bordeain^  < 
cite,  malgre  son  herdlque ("' 
tous  ses  guerriers  naoorir  snr  sal 
Ies  uns  apres  Ies  autres ,  et  bie 
fut  prise,  pill^,  brfllee,  sareij 
Le  lamentable  sort  d^une 
pitales  des  Gauies  jeia  FepeoT^ 
cent  lieoes  a  la  ronde.  La 
nobles  ne  putr^veilier  lepat 
paysans.  Les  eampagnes  se  di, 
tes  villes  tremblaient,  V^\§ 
c6dait  Tarrivte  des  Arabes.  liftf 
lations  eredulesde  tttte  ^pwfott  ^ 
dans  Ies  MUsulmans  des  dHnoss'l 
par  I'enfer ;  elles  eroyaientque I 
nissait  par  leur  entreroise  Ies  i 
la  perversity  du  sieele  :  lea  plus  < 
pel'es  aUeadaient  la  mort 
dans  Ies  couvents  on  dans  i 
Ies  plus  alertes  fuyaient  de  toutes^ 
jusqu'a  ce  qu'ils  eussent  mis  i 
et  leurs  ennemis  de  grands  fleuret^ 
hautesmontagnes,  leRhoneou  i 
lea  Alpes  ou  Ies  Vosges.  Ge  fota 
Ies  Arabes,  presque  sans 
entrerent  dans  plus  de  ringt  ^ 
traiairent  des  miliiera  de  roo 
s'emparerent  tour  ii  tour  de 
Chdlons-sur-Sa6ne  et  de 
r^unirent  d'inimenses  buUtt.1 
sement  que  Ies  riche^ses  in 
dont  lis  se  ^orgerent  avee  i 
toujours  croissante  embarrasxreaill 
a  peu  leurs  marches ,  et  dterait  i 
nioMvementacette  spontan^l^c 
gne,  cet  ensemble  qui  jusqne-l 
avaient  rendus  invineibles.  Cest  i 

Sue  Charles  d*Ac^rasife  et  de  Ne 
out  chacun  omoaissarit  i'dner;^ 
courage,  fut  implore  eomme  na  saa 
Ce  rnde  soldat^  aosai  r^selti  ^oe  I 


{")  Toyez  Abott*l-(Ma,  Aboa*l-lanulJ  etC 
ley.  hist  3«rr. 


SYRIE  MODEHNE. 


147 


0  faiQit  pas  k  la  mission  qii*oa  lui  de- 

pBodait  de  remplir.  li  appela  autour 

I  sa  perso:ine  tous  les  hommes  puis* 

Dts  et  valeurcux  entre  les  Chretiens  : 

[eo  Vint  du  nord  et  du  midi ,  de  I'est 

de   Touest,  des  Aliemands  et  des 

tirguigiions  autant  que  des  Gaulois; 

ivec  le  reste  des  A  qui  tains  pt  desVas- 

tous  ces  gens  d^armes  formerent 

Ideces  armws  puissaiites  qui  vien- 

t  jouer  d^uu  coup  le  sort  de  plusieurs 

'ms,  la  destine  du  monde.  Les 

itiens  etiient  presque  tous  a  pied, 

(Gouveits  de  larges  boucliers;  les 

.1  k  ebeval,  mais  sans  cuirasse.  Ku 

at  dans  la  plainede  Poitiers  les  I ignes 

lites  et  ^tendues  commandoes  par 

rles  d*Austrasie,  les  Musulinans  cru- 

tqu^avecleursrapideschevaux  il  leur 

dt  d'une  seule  charge  pour  de- 

r  en  oiille  tron^ns  le  long  serpent 

'  qui  leur  barralt  le  passage,  lis 

sereot   done  avec  impOtuosite; 

\  le  long  serpent  de  fer  se  tordit, 

da ,  inais  ne  fut  point  eutain^. 

.^seeonde  attauue,  rieo  encore;  eu* 

\  apres  les  plus  bouillants  combats , 

S  miUe  traits  d*audace,  de  vigueur  et 

i ,  les  Arabes ,  doni  les  dievauK 

Uit  harasses,  furenta  leur  tour  en- 

s  par  lesCliretiens,  pourfendus  par 

i^outables  francisques,  teras^ 

louMs  marteaux  de  combat 

nuels  Charles  a  dil  son  sumom  iin- 

_  iblede  Martel.Cette  bataiJIe  avait 

|d*autant  plus  solenuelle,  qu'elte  se 

att  en  octobre,  au  moment  ou  la 

*  ,8ur  son  declin,  semble  avoir  plus 

andeur  et  de  majeste ;  elle  avait 

Taiitant  plus  decisive,  que  les  forces 

}4bux  partis  s^^taient  reunies  detous 

^  I  pour  ce  grand  fait,  et  s'etaieut  ob- 

'     buit  jours  durant  avant  de  se 

a  combattre  en  massse ;  etie  fut 

It  plus  iinportante  que  le  general 

y  fut  tuO,  cet  Abd'-er-rahman 

on  craignait  la  vaillance,  doiiton 

lait  les  talents,  dont  on  parlaitsans 

;  eorame  du  plus  redoutable  d*ea- 

Jes  Arabes. 

grand  desastre  retentit  doulo«i< 
^meiit  jusqu'eii  Syrie  :  il  avait  en 
1  Tan  lUdePhegire  (732  deJ.  C); 
M^  eette  ^poque  le  khalife  Hescbam 
it  rencontre  des  difGcult^,  avait 
oav^desrevers  que  ses  predecesseurs 


^taient  loin  de  pr^volr.  Les  Indes  Otaient 
un  foyer  de  revoltes.  La  Maurita- 
nie,  apres  s*£tre  souniise  en  apparence, 
prolitait  de  toutes  les  occasions  pro- 
pices  pour  inquieter  ses  conqu6rants , 
leur  causer  des  embarras ,  se  soulever 
contre  eux.  Dans  oe  pays,  la  guerre 
permanente  fatiguait  a  la  lougue  les 
plus  determines.  Eniin,  ce  qui  €iait 
plus  grave  que  tous  ces  obstai-l«»s  a  la 
domination  de  lAfrique,  c'Otait  Patti- 
tude  de  THedjaz  et  de  Tlrak,  Fun  re- 
devenu  hostile,  Tautre  se  declarant  en- 
core une  fois  pour  les  Alides.  Certes , 
cette  conspiration  des  Irakiens  n*^tait 
pas  fort  redoutable  au  fond.  Comme 
toiijours  les  Irakiens  devaient,  aprte 
s*6tre  prononees  avec  exaltation  pour 
les  droits  immemoriaux  des  descennants 
directs  du  prophete  ,se  refroidir  tout  a 
cou^ ,  abandonner  leur  r^ve  en  sacrifiaat 
celui  qui  le  leur  avait  fait  concevoir. 
Mais  la  froide  haine  des  rigides  Musul- 
mansde  la  Mekke,  haine  excit^epar  une 
famille  dont  nousaurons  incessamment 
h  nous  occuper;  mais  ce  levaiu  perp^tuel 
de  revolte  qui  fermentait  dans  cette  ville 
aust^,  voila  qui  avec  raison  pouvait 

Sorter  le  trouble  dans  lecoeurdu  klialife 
e  Damas,  quelle  que  fOtson  ^nergie  per- 
sonnelle ,  quelle  que  fdt  sa  confianoe 
dans  sa  force  materiel  le  et  dans  le 
aombre  de  ses  partisans  (*). 

Avant  la  calastroplie  qui  menaqa  les 
Ommiades ,  il  se  |)assa,  du  reste,  un  fait 
important  sur  lequel  nous  devons  nous 
arreter  quelque  peu.  Ce  fait ,  c*est  1*6- 
mis^ration  d^oii  grand  nombre  de  Sy- 
riens  pour  TEspa^ne.  Kemarquons,  d*a- 
bord ,  que  ces  Emigres  ^talent  des  Mn- 
sulmans  :  c^etai^nt,  contrairement  aux 
faiuanalogiies,  les  descendants  des  vain- 
queurs,  et  aon  les  descendants  des  vain- 
cusqui  fuyaientau  loin.  Cesderniers, 
au  coiitraire,  Chretiens  pour  la  plupart, 
se  montraient  aussi  attach^  au  sol 
qu'ils  Tavaient  iti  a  leurs  idees  reU- 
gieuses.  Cet  evenement  singulier  sen»- 
blait  done  comme  un  avant-coureur 
d'un  cataclysroe  politique  :  il  ^Cait 
6trange,  en  effet,  que  des  hommes  qui 
av  aient  combattu  si  ^nergiquement  pour 
conquertr  une  contr6e,  la  quittassent 
tout  k  eoup  et  ai  laoileflMBt  pour  eoo- 


OYoyeBAboa'l-iMa, 


1(W 


14B 


!;UNIVERS. 


rir  de  nouveaux  hasards,  pours*exiler 
san.s  proGt  immediat ,  sans  intdr^t  po- 
sttif.  Ce  qui  n'etait  pas  nioiiis  singulier, 
eVst  que  ces  Emigres  semblerent  11*3* 
bandoiiner  qtj*avec  r«>gret  leur  etablis- 
senient  oriental,  etpour  preuve de  ce 
sputiment ,  c'est  qifils  donuercnt  aux 
nouveaux  lieux  quails  allaleut  habiter 
les  noms  de  ceuv  qu*ils  venaient  de 
quitter.  Us  eliercherent  ni^medans  Tas- 
pect  de  la  nature,  dans  des  ressem- 
blances  de  climat,  des  rapports  avec  le 
pays  qu*ils  regrer  taient  au  fond  de  Tdme. 
A'lnsi,  les  emigres  dc  Damas,  de  ses 
plaines  fertiles ,  de  ses  vergers  feconds, 
s'arr^t^rent  dans  les  environs  d*£lbira, 
et  dona^rent  a  cette  contree,  toute 
remplie  de  jardins  abondaiits  en  fruits, 
le  nom  de  Damas  et  sa  cbarmaute  ^pi- 
th^te  de  maUson  de  diUce$ ;  ceux  qui  ve- 
naient  de  Hems ,  la  vitle  opulente  et 
granieuse,  choisirent  pour  sejour  la  co- 
quette et  riche  Seville,  et  Tappelerent 
la  nouvelte  Hems ;  ceux  qui ,  partis  de 
Hamah ,  se  souvenaient  de  la  beaut6 
de  rOronte,  de  ses  luxuriantes  prairies, 
de  ses  berges  4maiilees  de  fleurs,  trou- 
v^rent  dans  le  Guadalaviar  un  fleuve 
comparable  h  TOronte ;  les  autres ,  qui 
s'^tablirent  soit  a  Malaga,  soit  ^  X^res , 
chang^rent  aussi  le  nom  de  ce  pays  en 
oeux  d'Andar  et  de  Palestine,  et  ne  les 
choisirent  que  parce  qu*ils  leur  rappe- 
laient  leur  patrie  syrienne.  Comme  on  le 
voit,  il^  avait  unmyst^re  dans  cette 
Emigration  :  ce  n'Etait  ni  la  misire  ni 
rambitioQ  qui  Tavait  provoqu6e,  et  loin 
de  plaire  au  khalife  etle  devait  Tinqui^ 
ter  et  lui  ^tre  comme  un  funeste  aver- 
tissemeut  de  decadence. 

Une  8orte.de  vertigo  saisit  m6me 
Hescham  vers  la  fin  de  son  r^ne.  Sans 
se  preoccuper  serieusement  ni  des  r6- 
voltes  de  ses  possessions  eloign^s,  nide 
la  sourde  mais  implacable  naine  de  la 
Mekke,  il  nesemblait  son;^er  qu*a  Cons- 
tantinople, qu*^  TAsie-Mineure,  qu'aox 
Orecs,  ses  moins  redo  itables  ennemis. 
Apr^  avoir  6chou^  coiitre  eux  en  per- 
sonne  des  le  commencement  de  son 
khalifat,  grdce  sans  doute  h  son  inex- 
perience militaire,  au  bout  de  dix-huit 
ans  il  forma  encore  contre  la  Paphlago- 
nie  uneentreprise  qui  nVutpasde  suite, 
etqui  se  bornaa  une  mauvaise  comedie, 
dont  rinsucc^s  jeta  presque  da  ridicule 


surlecotnmandear  descroyaDts^TJnecfi 
tain  aventurier,  comme  re,oqtie  duli^' 
Empire  en  offrit  un  grand  nombre, 
a  Pergame,  et  qui  se  disait  61s  de  II 
fdme  Justinien  II,  s*avisa  de  rgfcr 
pourpre,  et  de  se  faire  appeler  Ti 
reur  Tibere  dans  un  viliaue  ofasas^ 
la  frontiere  musulmane.  Brsefaaia 
au  serieux  ce  miserable  cooivelil 
et  en  admettaat  son  r^ve,  en  a| 
ses  pr^entions,  il  crut  avoir 
rival  a  Leon  III.  Mais  Tarmee , 
khalife  lui  confia,  ret  ambitieux 
talent  ne  sut  pas  la  dinger;  et 
se  creer  des  partisans,  eo  atan^ 
les  terres  de  Tempire  il  suuievaei 
lui  les  populations,  qui,  levoYUt 
les  Araoes,  le  pri rent  pour  untraltn, 
combattirent  avec  un  tel  achar 
qu'il  fut  bientdt  oblige  de  fuir 
taut  de  rapid  iti^  que  de  honte.  U 
life  ne  recolta  que  confusion difr 
^rossiere  dans  laqiielle  il  isak^ 
a  Tendroit  d*un  fourbe  saiis  bi 
douta  de  son  intelligence ,  et  ft 
tique  perdit  de  la  consideratioa 
tant  que  ses  armes  (*)• 

Trois  ans  apres  cette  ^ipee, 
cham  mourut.  Tan  1 25  del  hef ire 
de  J.  C).  Sans  que  IMslam  ait 
regne  rien  perdu  encore  de  sa 
materielle,  il  avait  pourtaut 
des  revers  signiGcatifs.  La  ' 
Poitiers  Tavait  mis  fa(%  I  face  r 
religion  rivale  dont  il  ne 
jusqu*alors  que  de  faibks 
ra^eux  disciples;  apres  les  mai 
la  foi  chr^tienne,  c  etaieut  a  ses 
gue  les  Musulmans  devaient  a< 
faire,  et  ces  derniers  leur 
par  une  uctoirc  eclatante,  <]ue 
dent  n*etait  pas  aussi  facile  aer 
que  rOrient.  Les  progres  dr 
semblaient  done  bomes  en  E««|& 
projetde  Mouza,qui  voulaitreis 
lesGaulese.trAilemagcieenAsJe, 
plus  d^ormais  qu'un  rive  bcA  fi 
un  poete  entbousiaste,  ridioufi 
un  general  exp^rimenie.  Getle  (^ 
mer  montante  sortie  d'Arabie  qn  a 
envahi ,  m  ir^epar  maree,  la  Per«^ 
Indes.  la  Mauritania  et  TEspagiM.  v 
enfin  trouve  dans  les  plaines  da  Pofl 
une  digue  assez  puisaaote  pourarrSw 

n  Voyez  Mxml-fMa. 


SYRIE  MODERNE. 


14» 


flots;  il  lui  fallaitrevenir  sur  elle-m^me, 
afiii  d'aller  s'^pandre  ailleurs.  Cest  ce 
reflux  deTIslam  que  le  kbulifeUescbam 
ne  sut  pas  dinger. 

II  ne  s'agissait  plus  mainteoant,  ea 
effet ,  d*entreteuir  sans  cesse  cette  iie- 
vre  de  couau^tes  qui  avail  si  rapide- 
ment  port^  la  terreur  des  armes  musul* 
manes  d'un  bout  du  monde  a  Taiitre; 
il  ne  s'agissait  plus  de  pousser  toujours 
en  avant  ces  Arabes  avides,  amoureux 
de  la  gloire  autaot  q[Qe  du  pillage  :  il 
fallait  organiser  ces  immenses  posses- 
sions Gomme  le  grand  Moawiab  avalt 
organise  laSyrie;  il  fallait  inspirer  k 
ces  batailleurs  ardents  Tamour  de  la 
paix,  a  ces  cavaliers  infatigabies  Tii- 
mour  du  repo8,a  ces  orgueilleux  ind6- 
pendants  Tamour  de  Tordre.  Cette  tlicbe, 

ElusdifGcile  cent  fois  que celle  des  com- 
ats,  la  famiile  des  Ommiades  en  etait 
incapable :  elle  n*avait  eu  qu'uo  bomme 
de  genie,  qu*un  grand  politique,  le  chef 
de  sa  dvnastie.  Gdtee  a  son  soniroet 
par  rhaBitudedes  succ^  militaires,  elle 
s'etait  trop  vitehabituee  dans  ses  degr^ 
inferieurs  aux  douceurs  du  commai.de- 
ment,  aux  volupt^  du  luxe ;  aussl,  la 
voyous-nous,  cette  famiile  un  moment 
si  puissante,fuirles  complications  poli- 
Uques,  ecbapper  aux  difUcultes  cen- 
trales, pour  aller  cbercber,  d^le  r^ne 
d*Hescliam,  uneretraite  au  loin,  dans 
la  plus  belle  et  la  plus  6cartee  en  mdme 
temps  des  conqultes  arabes ,  en  Espa- 
gne,  oil  elle  esperait  jouir  a  son  aise  de 
ses  richesses  incalculables.  C'en  est  fait : 
il  ne  reste  plus  d^elle,  a  Damas,  des 
Fan  125  de  fbegire,  que  ses  membres 
les  plus  61ev^,  ceux  que  ieur  rang  su- 
preme, que  Ieur  position  fatale,  coiidam- 
neot  h  expier  sur  un  trdne  cbancelant 
les  fautes  de  quelques-uns  de  leurs 
anc^tres,  Tiiicapacite  du  plus  grand 
Qonibre.  Ge  ne  sont  done  plus  que  des 
fantoines  de  khalifes  que  nous  aliens 
voir  se  succ^er  dans  la  cbaire  arri^ree 
de  Damas ;  les  Abbassides  les  minent 
de  jour  en  iour,  jusqu*a  ce  qu'ils  les 
ecrasent  enfm  sous  les  ruiues  de  Ieur 
pouvoir  (*). 

COMMENCEMENT  DES  ABBASSIDES. 

Les  historiens  modemes  ne  savent 
(*)  Voyez  Ockley. 


comment  expllquer  ces  groapes  d*ambi- 
tieux  qui  se  disputent  rempire  chez  les 
Arabes ,  et  qui  formejit  une  sorte  de 
noblesse  turbulente  et  active.  Gomme  le 
Koran  ne  reconnatt  d'autre  superiority 
sociale  que  celle  de  la  science,  de  la  va« 
Ieur  ou  de  la  fortune;  oomme  le  prin- 
cipederaristocratie  ne  futjamaisetabli 
fondamentalement  par  les  dironiqueurs 
arabes,  on  est  toujours  tente  de  voir 
dans  Thistoire  de  Tlslam  le  contre-pied  ^ 
decelledelafcodalite.  Etpourtantilya  f' 
beaucoup  plus  de  rapports  qu'on  ne 
pense  entre  les  hauts  barons  du  moyen 
age  et  les  parents  de  Mabomet  au  com- 
mencemeut  de  Th^ire.  Ainsi  que  les 
hauts  barons,  les  descendants  du  pro- 
pbete,  a  quelque  degr^quMls  le  fussent, 
moiitrereiit  des  pretentions  k  Tempire, 
et  se  pr^valurent  orgueilleusemeut  de 
Ieur  ancltre.  Mais,  outre  cet  element 
toutnouveaud*aristocratle,rislameutaf« 
faire,dds  son  d^ut,ad'ancieni)es  famil- 
ies prepond^rantes,  dont  Tautorit^  da- 
tait  de  repoaue  m^me  du  gouvernement 
patriarcai.  Ces  families  avaieut  des  es- 
claves,  des  clients,  des  amis,  des  alli^ 
qui  tons  formaient  des  partisans  d^vou^ 
quand  il  s^agissait  de  reclamer  des  privi- 
leges, des  combattants  acharn^s  quand 
il  s*afi[issait  de  conqu6rir  ou  de  defendre 
un  droit.  Voil^  comment  s^etait  for- 
m6t  cette  grande  faunille  des  Koreis- 
chites,  qui  se  trouva  assez  forte  pour 
luttermeme  centre  Afahomet;  ainsi  s'^- 
tait  elev^  la  famiile  des  Ommiades , 

tui  etait  parvenue  jusqu'a  la  chaire  du 
halifat ;  ainsi  grandissait ,  au  siecle  ou 
nous  en  sommes,  la  famiile  des  Abbas- 
sides  ,  qui  devait  renverser  celle  des 
Ommiades. 

II  faut  remarquer,  du  reste,  que  cette 
puissance  de  la  noblesse  arabe  gtt  bien 
moins  dans  riUustration  d*un  nomme 
que  dans  ia  force  et  le  nombredes  mem- 
bres de  la  famiile.  LeGlsd*Omar,legraod 
khalife,  est  moins  influent  que  les  des- 
cendants d*Abbas,  bieninfeneur  en  m^- 
rite  a  Omar.  Pourquoi  cette  auomalie.' 
Faroe  que  lefils  d'Omar  n'a  pas  des  f  reres 
et  des  parents  puissants,  des  allies 
nombreux  groupes  autour  de  lui,  au- 
taut  de  clients  et  de  serviteurs  que  le 
fils  d' Abbas.  G*est  done  plutdt  des 
maisons  que  des  feimilleB  illustres  qu'on 
tfou  ve  au  d^but  de  Tlslain ;  et  c'est  pr6< 


tftO 


LTJNIVERS. 


cis^ment  paree  que  ees  maisons,  plus 
difliciles  a  former  qu*une  fainille  feo- 
dale,  sont  aussi  plus  riches  el  plus  rares, 
qu>ilP8  am^nerit  plus  fataleineiu  des 
revolutions  int^rieures  et  eapitales. 

On  peut  distinsuer  ces  maisons  en 
deux  classes,  la  classe  religieuse  et  la 
dasse  politique.  Dans  la  premiere  se 
ningeut  les  descendants  directs  de  Ma- 
homet, All  et  Hosafii,  dont  nous  avons 
racont^  le  deplorable  sort.  Dans  la  se- 
conde  il  faut  placer  hors  ligiie  les  des- 
cendants d'Ommeyali  et  ceux  d'Abb'as. 
Ces  deux  derni^res  maisons,  qui  se  re- 
crutaient  chaque  annee,  pour  ainsi  dire, 
non-seulement  par  des  alliances  de  pa- 
rente,  mats  encore  par  des  alliances  d^n- 
t^r^ts,  de\aient  necessaireinent  se  com- 
battre,  soit  secreteinent,  soit  ouverte-' 
inent,etrune  et  i*autreavaient  dansleur 
destin^e  de  former  une  dynastle  de  kha- 
lifes.  Plus  on  allait^  plus  les  families  se- 
condaires  se  rattachaient  h  Tune  ou  a 
Tautre  des  deux  maisons  rivales,  et  il 
aurait  fallu  aux  Ommiades  plusieurs 
hommes  du  g^niede  Moawiah  pour  vain- 
cre  la  puissance  croissante  des  Abbas- 
sides. 

Le  destin  ne  lenr  accords  pas  cet  avan- 
tage ;  et,  n)atgr6  les  m^rites  de  quelques- 
uns  des  khatifes  ommiades ,  ils  ne  fu- 
rent  jamais  assez  forts  pour  dter  tout 
espoir  a  leurs  rivaux.  Les  dernt^res  lut- 
tes  qui  nous  restenti  d^criresont  done 
eel  les  de  la  faiblesse  contre  P^nergie,  de 
rininteiligence  contre  riiabi.ete.  f^ous 
avons  vu  par  la  mort  tragiqae  d*Abd- 
Allah  ben-Zobair  la  fin  de  raristocra- 
tie  religieuse  des  compagnons  du  pro- 

Shete ;  nous  avons  vu  dans  les  combats 
esesper^  des  Alides  la  fin  de  Taristo- 
cratie  des  descendants  directs  ^e  Ma- 
homet. Ces  derniers  ne  forment  d^ja 
plus  une  famine  en  quelque  sorte  :  ils 
n'ont  plus  h  songer  h  fonaer  une  dynas- 
tic, et  c*est  tout  au  plus  un  schisme  qui 
r^sultera  de  leurs  efforts  malheureux. 
D^sonnais,  si  on  les  respecte  toujours, 
on  ne  compte  dej&  plus  sur  eux.  A  Tave- 
sir,  ils  senriront  encore  de  drapeau  buk 
dissidents,  de  pr^texte  aux  ambitieux; 
mais  on  ne  pensera  plus  scrieusenoent 
a  reamer  en  leur  nom  Tempire,  et  a 
les  prendre  pourgeo^raux  d'une  armee 
ou  pour  chefs  d*une  conspiration. 
Ce  qui  avait  donn^  longtetnps  une 


sorte  de  puissance  an  parti  des  Alite, 
c*est  Tappui  que  ieur  avait  offerttet^ 
mille  des  Abbassides.  L*ud  de  ses  pisi 
illustres  membres,  Abd-AUah-beB-Ab» 
bas,  fut,  dit-on,  tellcment  attache  a  AS, 
qu*apres  s*£tre  fait  remarqaerau&nicK 
comoat  du  Chameau,  il  ne  esssa,inal|~'' 
la  d^faite  du  geudrede  Mahomet,  dt 
montrer  son  partisan,  et  de  di 
contre  les  usurpateursdeDamas, 
vait  vu,  dans  la  bataille,  ralUrr 
de  la  robe  de  soie  noire  dont  ii 
convert  les  derniers  partisans  d«  It 
^itimit<^  arabe;  on  le  vit  plus  tard,  I 
jours  convert  de  cette  longue  robs 
soie  noire,  qui  devint  la  eouleur  et  lea 
tume  de  ses  descendants  former! 
Mekkeun noyau  de  dissidenisqui 
sit  de  jour  en  jour.  Ospendant  H 
toujours  restd  fidele  .1  la  cause  dis 
des ;  et  lorsque  Abd-Aliah-bei&iir 
se  crut  en  droit  de  pretendrew"  ^ 
I'empirp,  sans  se  toumer  contre U 
Allal]-ben-Abbas  ne  lui  pardoi)Qa[ 
d*avoir  travaille  pour  soi-mlme,  m 
de  se  borner  a  defeodre  la  cau^e  des 
d'Ali.  Abd-Allab-ben*  Abbas  avait 
de  vertus  que  de  m^rite.  Outrela 
profondequ*il  avait  aequisedans  les 
de  rislam,  il  etait  encore  renooiuidi 
sa  liberaliteet  pour  la  satfessede  ses* 
sells.  II  ne  tenait  qu'k  lui  deviser 
la  domination  souveraine;  mats 
se  montrant  d^pourvu  d'ambitki 
n*en  augmentapas  moins,  parses  tri'' 
et  le  respect  qu'il  avait  conquts,  It 
dit  de  sa  maison  et  rillostratioa  U  , , 
nom.  Apr^s  une  longue  exisleace»i|. 
rant  laqueile  il  ne  cossa  de  pnHitt 
contre  rusurpation  des  Ommiaiiif  i 
lalssa  plusieurs  enfants ,  qui  MM 
de  sa  naine  contre  les  desoeiidii^* 
Moawiah. 

L'un  d'eux,  nomm^  All,  vanttlsMi 
de  sa  devotion  extreme,  qui  lui  avail  itf( 
de  nou  veaux  partisans,  se  crut  asses  iMi 
pour  aller  braver  les  OmmiadfS /osiift 
dans  Ieur  capitale.  Abd*el-Melik,  wm 
distingu6  parse  finesse d'esprit^ptf 
son  courage,  cut  Tadresse  de 
d'abord  avec  honneur  Fun  des  i  . 
tants  d'une  des  ^andes  maisons  de  tt 
Mekke ,  et  le  laissa  pendant  guelqoi 
temps  italer  a  Taise  son  oipieii.  Aiais 
Walid,  fils  d^Abd^el-M6lik,  n*eut  pas 
Tadroite  patience  de  son  pere.  Jadipt 


SYRIE  MODERlSrE. 


151 


feiaftem  liaataiiieavtelaqueUe  Ali 
fctraitait  ftirieux  contre  ceUe  protes- 
btioo  risible,  quoique  tacite,  coutr«  sa 
pdssauce,  ii  resoiut  de  dompter  le  fiev 
lU^asside.  IJ  fiiUut  des  snppiices  pour 
Ipvenirabout,  et  Waiid  ne  leshii  epar- 
I  point.  II  ie  fit  tour  a  tour  battre 
vei^es,  exposer  aux  rayons  brdiaots 
sot€il,  t£te  Due  et  le  crftue  arrose 
DJie,  pour  donoor  encore  plusde  force 
feu  qui  le  devorait.  Ce  cruel  traite- 
iieot  aurait  dure  sans  doute  jusqu^a 
[«iort  du  patient  si  Walid  n'eiltisuo- 
be  avaut  9Sl  victime ,  et  si  Souley- 
I,  SOB  frere  et  son  successeur,  o'a- 
eomniu6  la  peine  atroce  d'Ali  en 
exildansun  dfsert  d'Arabie.  Malgre 
i-clijneace  de  Souleyman,  le  filif 
Ii,  Mohammed,  n*en  jura  pas  moins 
Qimmiades  une  haine  inextinguible. 
r,  pour  se  venger  de  la  dynastlede  Da* 
it  faliait  songer  a  la  renverser,  el 
'  eaoiment  Mohammed  s'y  prit  pour 
-  a  ses  fins,  ou  ie  ressentiment  et 
m  £6  mllaient  (*). 
bpRmi^edifRcultequ'ildevait  ren* 
iUisr  daos  TexecutioQ  de  son  bardi 
Iftt,  c'^tait  Toppositiondes  partisan^ 
lAlidtt.qui  espieraient  encore  lekha* 
btpourUurehef.  Mohammed  profita 
pede  la  qnort  mysterieuse  du  dernier 
tlt-filsd'ili,aupres  duqueliUe  trou- 
Iti  poor  Bupposer  um  cession  de  toua 
(droits  an  khalifat  que  iui  aurait  faite 
I  iBoriboBd.  Aveo  ces  titres  faux  ou 
ids  ii  rattaebait  k  sa  cause  les  oom- 
Mx  partisans  d'Ali,  et  pouvait  desor- 
PMlsaTooer  son  but,  et  faire  agir  direc? 
^■flrtses  partisans  to  sa  i^veur.  Des 
fwsaires  lurent  done  envojfes  par  Iui 
fMtt  les  provinces  ou  il  savait  la  domi* 
H^  m  Ommiades  ebranlee.  Les 
tables  de  I'Afrique,  Tesprit  indepen- 
■ot  des  h^tants  du  Kiiora^san  ser- 
Ijreot  i»$  preteatioos.  Mecontent  des 
muades,  let  peoples  de  ces  contrees 
gppr^aient  a  combattre  en  faveur  de 
mn  tk  Dmu»  deseemdeuU  de  Itffamille 
mpropkite^dinBi  quese  faisait  designer 

tMaiDiBed.  Pourtant,  malgre  toutes 
Beatcs,  Mohammed  mpurut  avast 
Avoif  pu  profiler :  elles  ne  devoienl; 
Ittrvir  (^'h  ses  btotiers. 

D  Yoyei  Fakr-Eddin  Haz^. 


I.ES  DBBNIBBS  OMMlABSS. 


Cependant  ie  tr6ne  des   Ommiades 
cbanceiait  Ae  plus  en  plus.  Les  prin- 
ces qui  s'y  succed^rent  en  quelques  an* 
nees  se  montr^rent  de  moins  en  moins 
capables  de  relevcr  le  credit  de  leur 
maisonsouveraine.  Walid  II,  successeur 
de  Hescbam,  d^consid^ra  autant  la  chaire 
de  Domas  qu'il  Tafr'aiblit.  Paresseux , 
ivrogne,  debauche,  il  negligeait  le  gou- 
vernement  pour  ne  s'occuper  que  deses 
bonteiix  plaisirs.  Mais  ce  qui  porta  a 
rextr6melem6pris  qu'onlui  avaitvou6, 
cefut  rmobservationdes  pr^ceptes  reli- 
gieux  du  Koran  qu'il  aflicha  sans  pu- 
deur.  Les  Abbassides  se  falsaient  re- 
marquer  par  leur  devotion :  il  se  fit  une 
gloire,  lul,  de  son  impiete.  Gbacun  de 
ses  actes  ^it  comme  un  outrage  aux 
croyances  et  aux  moeurs  de  ses  sujets. 
£nnn,  comme  pour  mettre  le  comble  a 
ses  m^falts,  il  eut  Taudace  de  trailer  en 
derision  le  pelerinage  de  la  Mekke.  On 
Ie  vitun  jour  arriver  daus  laville  sainte 
avec  une  meute  de  chiens  de  chasse, 
une  bande  de  debauches  et  une  suite 
de  oourtisanes.    fion  content  d*avoir 
60uill6  le  territoire  sacre,  il  s'y  livra  a 
toutes  les  especes  d'orgies,  buvant  du 
vin  de  Chiraz,  avec  ses  fcmmes,  jusque 
dans  Tenceinte  du  temple  de  la  Kaaba. 
C'etail  mettre  lui-mSme  ie  comble  a 
Finjure,  et  autoriser  le  comble  de  U 
vengeance.  Peu  de  temps,  en  effet, 
apres   cette    provocation  audacieuse, 
Yezid,  Tun  des  cousins  de  Walid,  se 
mita  lat^tedes  mecontents,  els'ayan^a 
contre  Damas.  LesAbl)assidesn'avaient 
pas  encore  voulu  se  declarer  ouverte- 
ment  contre  les  Ommiades,  et  pr^fe- 
raient  les  laissersedevorerentre  eux(*). 
Grace  k  Fabscnce  de  Walid,  Yezid 
s'empara  de  la  capitale  presque  sans 
coup  f^rir.  11  s'y  fit  declarer  khalife; 
et,  avec  les  nombreuses  ressources  que 
Iui  offrait  Damas,  il  ravitailla  el  aug- 
menla  son  arm^e,  el  se  mil  incoalinenl  a 
la poursuitede Walid.  La mortdece der- 
nier fut  moins  honteuse  que  sa  vie  : 
quoique  abandonn^  par  ses  soldats,  il 
ne  se  d^fendit  pas  moins  avee  courage 
dans  un  chateau  fori  ou  il  s'6tait  retire, 
et  peril  sur  la  brcche  apris  avoir  loog- 

(•)  yoyez  AboaM-fWeu 


152 


LUKIVERS. 


temps  eombattu.  Ce  fat  Tan  126  de  Th^ 

gire  que  se  passa  cette  tragedie. 

Loin  de  raffermir  lepouvoir  des  Om- 
mindeSfUne  pareille  guerre  civile  leur 
porta  un  coup  funeste.  Cetexempleder^ 
volte  jusque  dans  la  famille  souveraine 
fut  suivi  par  tous  les  ambitieux  qui  sou- 
vemaient  les  provinces  61oign6es.  Abd'er- 
Rahman-ben-Kabil  se  d^lara  indepen- 
dant  en  Afrique.  L'Rspagne  reconnais- 
sait  a  peine  Ta  suzerainet^  de  Damas. 
Les  Aubassides  gagnaient  de  plus  en 

{>Iu8  du  terrain  dans  le  Kborassan ;  et 
a  Syrie  ni^me,  tout  enti^re,  ne  reconnut 
pas  le  nouveau  khalife.  Au  nord  de  Da- 
mas, la  villed'Uems  (I'ancienne  £messe) 
sespuleva  la  premiere :  les  habitants  mar- 
cberent  contre  la  capitale  du  khalifat ; 
et  cenefut  qu*apres  un  combat  sauglant 
qu'Yezid  III  put  avoir  raison  deces  re- 
voltes.  A  peine  vainqueur  deceite  cons- 
piration, Yezid  en  eut  une  autre  beau- 
coup  plus  importante  a  dejouer.  La  Pa- 
lestine s*etait  declare  contre  lui,  et 
avait  choisi  pour  khalife  un  de  ses  cou- 
sins. L'Irak  mena^ait  de  se  jolndre  a 
la  Palestine;  et  contre  une  pareille  me- 
nace il  fatlait  a  la  fois  se  servir  des  ar- 
mes  et  de  la  politique.  Les  Arabes  de  la 
Palestine  furent  done  sondes  sur  leurs 
intentions.  On  Gt  des  concessions  au 
peupie,  des  cadeaux  aux  chefs,  des  pro- 
messes  ^  tous;  mais  ce  ne  fut  qu*avec 
grand'peine  que  cette  revolte  fiit  apai- 
see,  et  certainement  au  prejudice  de 
la  fortune  et  de  la  puissance  des  Om- 
miades. 

Inauiet  de  son  empire  chancelant, 
Y^^id  crut  qu*il  se  fortilierait  en  cban- 
geant  les  gouverneurs  des  provinces, 
et  en  mettant  a  leur  place  ses  favoris. 
C'etait  la  un  remade  dangereux,  et  qui 
(d'ailleurs  venait  trop  tard.  Les  favoris 
d'Yezid  ne  valaient  pas,  pour  la  plu- 
part,  ceux  qo'ils  rempla^ient,  et  les 
plus  hardis  d  entre  ces  deruiers  refuse- 
rent  mtoe  de  leur  ceder  la  place.  Ce 
qui  devait  done  consolider  le  trdne  de 
Damas  le  perdit.  Parmi  les  provinces 
bostiles  au  nouveau  khalife ,  le  Kboras- 
san se  montra  la  plus  redoutable.  Son 
gouverne4ir,  Nasr-ben-Sayyar,  nesecon- 
tenta  passeulementde  renvoyer  sonsuc- 
cesseur ,  mais  il  suscita  un  nouveau  rival 
k  Yezid.  Ce  rival  ^tait  Merwan,  petit- 
fils  de  fancien  khalife  de  ce  nom,  gou* 


yemeur  Itil-nitoie  de  li  Mi 
et  homme  det^te  et  d' 
s'apprtoitdeja  il  marcher oootreT 
lorsque  ce  dernier  mourut  a  "^ 
apr^cinq  mois  a  peine  de  regiK,et 
sant  son  tr6ne  oontest6  a  sob 
Ibrahim,  homine  nul,  et  dont  le 
fut  aossi  court  qu'epbteereO- 

Avant  de  raconter  les  dernieni 
Tulsions  de  la  dynastie  des 
il  nous  fant  constater  I'eut  do 
dont  nous  traitons  particulien 
oette  epoane,  la  Srrierecomi    . 
^tre  troiibi6e,divisee,  naalbeoreoA] 
Arabes  qui  s*v  ^taientetablis  fei 
deja  des  families  ennemies  les 
autres  et  gui  allaient  latter  ii 
par  ambition  autant  que  par 
Les  Chretiens ,  qui  avaient  penta 
esp^rance  de  revoir  le  gOQ' 
entre  les  mains  de  leurs  coreli|, 
ne  pouvaient  que  soufTrirdees 
sions  intestines  dont  etait  tra^ 
pays.  liCS  richesses  que  les 
de  rislam  avaient  nagu^  aoeoii 
a  Damas  S'^ient  dispersfe  dm! 
plaisirs  ou  dans  les  gaerres  civila,r 
profiter  au  peuple  et  encore  moii 
Chretiens.  Les  montagnards  de ' 
d^eimes,    ruines  par  Piofiftme  Ji 
nien  II,  veg^taient  sur  leurs  pics 
La  hideuse  mis^  et  la  triste 
aocablaient  les  paavres,  tandisqwl 
baucbe  hfttait  Texisteoce  des 
Damasavaitete  firappeed*une 
qui  Tavait  d^peuplee  :  Antioche 
plus  que  le  pdle  fant^me  d*< 
Le  regne  df  s  Ommiades,  si  edal 
d^but,  si  opulent  au  milieu  desoB< 
finissait  dans  la  honte  et  dans  le 
les  flairs  de  prosp6ri 
demi-siecle  avaient  brilt^'  sur  ii 
n*en  devaient  faire  parattre  qs 
6paisses  les  t^nebres  qui  allaienti 
Inlortun6  pays ,  qui  bientdt  derA 
trouter  reduit  k  i^retter  ses 
conquerants ! 

Ce  quMl  y  a  desingulier  dans  la 
n^edes  princes,  c*est  que  les  nMisscrt 
pables  portent  souvent  la  peine  de  M 
pr^d^cesseurs.  Merwan,  dernier  * 
Ommiades ,  en  est  un  des  miUe  eicai 
pies.  D'abord  vietorieux  dlbrahia 
apres  une  batailte  sanglante,  on, 

r)  Toyez  Aboo'l-fMa. 


SYRIE  MODERJSE. 


153 


?; 


Ilnfi^iortt^des forces,  i1  dispersa  Tar- 
m^  de  son  competiteur ,  il  fut  bieii- 
t6t  victime  d*im  bien  autre  desastre. 
Eotre  dans  Damas,saluesolennellemeiit 
comme  khalife  dans  la  principale  mox- 
qu6e  de  cette  ville,  vainqueur  de  tons  les 
princes  de  sa  maison  qui  pouvaient  lui 
aisputer  Tempi  re,  il  putcroire  un  instant 
lu'il  re^meraitsans  obstacle.  Get  instant 
ut  court.  Bieiitdt  la  villa  d*Hems,  qui 
devenait  aussi  factieuse  que  la  celebre 
Kouffa ,  se  souleva.  II  lui  fallut  mar- 
cher contre  elle,  la  prendre  d*assaut,  en 
raser  les  murs,  et  d^truire  ainsi  une 
des  forces  de  son  empire.  Puis,  comme 
pour  montrer  rinstabilit^  de  son  pou- 
voir,  h  la  porte  de  sa  capitale  il  rencon- 
tra  des  ennemis.  Le  canton  deGhoutah , 
aussi  fertile  en  bommes  qu*en  produits, 
se  r^volta,  et  vint  mettre  le  si^^e  devant 
Damas.  Merwan  fut  obiig^  de  detacher 
dixmille  cavaliersdesonarm6edu  nord 
pour  aller  mettre  ces  nouveaux  rebelles 
a  Id  raison.  Puis,  cette  insurrection 
apaisee,  c'est  encore  la  Palestine  qui  se 
souldve.  Et  apres  la  Palestine,  Rinesrin 

Sresd'Alep!  Enfinlenord  comme  leroidi 
e  la  Syne  etaient  en  feu ;  et  a  peine 
Merwan  avait-il  une  viile  qui  lui  fAt 
fiddle  un  moment  pour  se  reposer  entre 
deux  combats. 

Ma]jsr6cette  effervescence  desesprits, 
grdoe^  Factivite  qu*avait  d^ploy^e  le  kha- 
fife,  Tempire  put  jouir  encore  de  deux 
ann^es  de  tranquillity.  Mais  ce  n'^tait 
la  qu*une  acatmie  dans  la  temp^te.  M- 
sormats  il  n'y  avail  plus  de  security  pos- 
sible pour  on  prince  dont  le  prestige  avait 
disparu ;  il  n'y  avait  plus  d*ordre  possi- 
ble dans  un  pays  ou  la  r^volte  ^aitper- 
manente.  L'instabilitepour  le  tr6ne,  Ta- 
narchie  pour  Tempire ,  telle  ^tait  aiors  la 
destin^edu  khalifat  de  Damas.  Que  vou- 
liez-vous  que  f!t  Merwan  dans  ce  cbaos  ? 
Moawiab  lui-m^me  n'edt  pas  suffi  pour 
le  debrouiller.  Mais  ce  qu*il  v  avait  de 

Slus  terrible  dans  la  position  du  dernier 
es  Ommiades ,  c*est  que  dans  ces  an- 
n^es  de  paix  menteuse,  de  calme  trom- 
neur,  il  na  pouvait  user  de  ses  brillantes 
tacult^s  :  il  6taitactif,  et  personne  ne 
se  montrait  digne  de  seconaer  son  zeie; 
il  ^tait  brave,  et  personne  ne  le  provo- 
quaat  au  combat ;  il  6tait  habile  politi- 

Sue,  et  personne  ne  lui  ofifrait  Toccasion 
e  developper  ses  talents.  Entour^d'une 


courinquiete,d*une  armee  mecontente, 
d'un  peuple  desaffectionne,  Merwan 
voyait  se  former  Pora^esanspouvoir  en 
prevenir  Teclat.  C'etait  comme  un  lion 
pris  dans  un  inextricable  Oiet  :  il  en 
voyait  se  former  chaque  jour  les  mailles 
nouvelies;  mais  c'etaient  des  mains  invi- 
sibles qui  travaillaient  ainsi  a  sa  perte. 
Toutse  faisait  dans  le  secret,  dans  le 
silence,  dans  les  tenebres.  On  conspirait 
sourdement.  Les  emissaires  des  Abbas- 
sides,  prudents  comme  le  renard ,  dissi- 
mul^  comme  le  serpent,  fourbes 
comme  le  tigre ,  agissaient  souterraine- 
ment  centre  lui.  La  Syrie  se  reposait 
danssa  haine,  T  Afrique  s'acharnait  dans 
sar^volte ,  Tlrak  conservait  son  attitude 
mena^nte,  TArabie  maudissait  tout 
haut  la  famille  usurpatrice,  le  Khorassan 
ourdissait  de  jour  en  jour  sa  trame  de 
vengeance.  Dans  cette  derniere  province, 
le  vfeux  etexp^rimentegouvemeur  Nasr- 
ben-Sayyar  ecrivait  au  khalife  ces  paro- 
les fatidiques : «  Je  suis  eotourc  d  etin- 
celles  qui  eclatent  sous  la  cendre,  et 
de  ces  etincelles  pent  naitre  un  immense 
incendie.  Hdtons-nous  de  les  ^teindre 
si  nous  voalons  6chapper  au  d65a>tre 
qu^elles  peuvent  causer.  "»  Ce  conseil 
venait  trop  lard.  En  voulant  ^teindre 
des  etincelles  mena^antes,  Nasr-ben- 
Sayyar  foula  aux  pieds  la  cendre  dont 
ilavatt  parley  Merwan;  etau  lieu  d*6tin- 
celles,  cefurentdesbrandousenflamm^ 
qu'il  rencontra  (*)• 

Les  Abbassides,  au  contraire,  Etaient 
bien  servis.  Non-seulement  leurs  parti- 
sans ne  se  laissaient  ni  p^etrer,  ni 
^mouvoir,  ni  surprendre ,  mais  encore 
les  chefs  du  complot  avaient  autant 
d'energie  que  de  mse.  L'un  d*eux, 
Abou-Moslem ,  avait  travaill^  dix  ans  a 
son  oeuvre,  et  avait  formedes  lieutenants 
aussi  distinguds  que  lui.  Tout  etait  done 
prdt,  et  c'etait  moins  un  pr^texte  qu'on 
attendait  pour  eclater,  qu'une  circons- 
tance  favorable  aux  vceux  des  innom- 
brables  conspirateurs.  Malheureuse- 
meut  la  principale  brauche  de  la  famille 
pour  laquelle  on  voulait  le  trone  etait 
toujours  sous  la  main  de  Merwan.  Le 
chef  de  cette  lamille,  qui  aliait  devenir 
souveraine  ,  ibrahimben-Mohammed , 
habitait  les  confins  de  la  Syrie  et  de  [%» 

{*)  Yoyei  AboQ'H^da. 


154  L'UJidVEIlS. 

rabie  Tet  Merwan  le  surveillait.  Aussi, 
lorsque  Nasr-ben-Sayyar  voulut  agir 
ouvertement  aMerou,  capitale  duKho- 
rassan,  Abou -Moslem,  en  se  devoilant 
tout  a  coup,  ne  parvint  qu'a  Tetoaner  et 
a  Tarrltf  r  dans  ses  projets  de  repression, 
Mais  la  conspiration  una  fois  ^lat^, 
Merwan  pt't  facilement  se  saisir  d'(- 
brahiip-ben-Mobammied ,  e(  ^arder  8« 
personne  comme  otage.  Jusqu  a  present 
le  kbaiife  de  Danias  avait  bien  lou^  sa 
partly ;  le  destio  pourtantoe  vouiail  pas 
qu'il  la  gagnit ;  et  il  nou$  re^te  a  voir 
par  auellis  faiite  ii  la  perdi^  complet&- 
n^eni. 

CATA«TILP?PJ(  DBS  OlflflAPBS. 

Le  Kharassan  et^it  ^  feu;  les  ha- 
bitants de  cette  province,  pleins  de  force 
et  devaleur,  aiipant  d'ailleurs  les  com- 
bats par  instinct,  et  voyant  dans  le  sou- 
levement  contre  le  kballfat  de  Damaj9 
line  cbance  pour  eux  de  dev^n|r  a  la 
fois  les  dominateurs  et  les  arbitres  de 
risiam,se  rangerentenfoulesous  ledra* 
peau  noir  qu'avaitarbore  Abou- Moslem. 
Avec  son  armee,  qui  grossiss^itdejour 
enjour,  Aboq-Moslem  put  done  s  em- 
parer  de  piuiiieurs  places,  et  cominen- 
cer  dans  tous  les  cantons  k  la  fois 
une  guerre  de  jpartisans  fort  embar- 
rassante  poi^r  m$r-ben-$ayyar,  que 
ses  quatre-vingt-quatre  aps  d  dge  ren- 
daient  presque  entierement  inhablle  a 
ces  sortes  d*hostilites.  Ci^tait  la  un  de* 
but  de  campagne  bien  menacant  pour 
le  kl)9life  ge  Dam^s:  tOMtetois  on  a 
peine  a  comprendre  avec  quelle  rapi- 
dite  effrayante  le  vertige  le  saisit.  Se 
croyant  tout  pres  de  &a  perte,  lors<]u'il 
pouvait  encore  nourrir  tant  d^esperao- 
ces ,  il  commit  TincoQcevable  faute  da 
faire  mettre  i  mort  sou  competiteur, 
Ibrabim-ben-Mohammed.  Par  ce  crime 
Merwan  crut  se  sauver,  il  se  suicidait. 
D'un  cdte,  Abou-Moslem  devint  plus 
ardent  que  jamais  j  U  s'empara  de  Me- 
rou,  apres  en  avoir  chasse  Nasr-ben^- 
Sayyarj  d*un  autre  c6U^  les  Abbassi- 
des,  qui  praignirent  tous  le  mem^  &ort 
que  leur  cbef,  s*enfui  rent  dans  le  KLborau^ 
san^  et  sanctionn^ent  ainsi  la  revolution 
qui  se  declarait  en  leur  fav^r.  Ibrahim 
mort,  son  fr^re  Abou'l-Abbas  herita  de 
ses  pretentions  a  rempure;  niais*  au  lien 


d*un  adversaire  gMtt ox,  Ucmi 
vait  tro^verdan8  ce  dernier  as  la 
cable  ennemi.  Abou^l-Abbas  avail 
de  vengeances  a  assouvir  \  ilse 
d*Stre  si  cruel  dans  leur  aeeompli 
qu'il  allaitmeriter  rborriblenirMii 
Saffab/lesanguinaire.  Ainsi,  e'el 
giierr<!  d^extinction  qui  veoait  ifi 
non  pas  d'homme  a  bomme, 
a  rival ,  4'AbouM-AbbasaMen 
de  famine  a  famille,  de  maison 
son,  des  Abbassides  aux 

Apres  les  premiers  socees 
Moslem  dans  leRhora65an,apresf 
de  Kbahtabah-benChabib  to  I 
les  Abbassides,  sdrs  de  lenrspn 
prodam^ ,  d'ailleurs,  par  hv^ 
dont  le  cr^it  fut  toujours  Is^ 
sant  sur  les  races  orientaief , 
rent  publiquement  leur  amhiti  .^ 
jour,  dans  laprincipale  mosfki 
rou,  au  milieu  d*une  BomJtti 
tance,  uo  boinme,  v^tu  d'uneM 
desoie  noire,  sedirigeasoM 
vers  la  cbaire  sacree,  ety  [ 
khotbah ,  cette  priere  que  ie 
rtote  k  voix  haute.  CetbonoM,! 
Abou'l-Abbas  le  SanguiBaiR;it 
jour,  qui  toit  le  cinquieaw<lBJ 
rebi-el-aoual  de  Tanoee  iSSiifii 
(octobre 749 ),  allait  daler uaeii 
dyaastie.  Cetta  dyaasda  deni 
uoe  plus  Jongue  destioee  qm  r 
Ommiades:  coiiimeoceedaBiM 
les  suppticea,  elle  devait  s't{H»t 
science,  brjller  quelqueteippil 
met  de  la  civilisation  dst^] 
teindre  enGn  dans  les  vaias  boi 
rimpuissanne  politique. 

Maigr^  la  r^volte  de  dm 
provinces ,  flrak  et  le  w 
malgre  r^ivation  d'uo  kbM 
malgre  renthousiaame  dei  aM 
et  rabattemeot  des  Onamim 
wan  II  raontra  asses  d]aeMf 
ver  uoe  demiere  ^^'"••'fj?, 

giepourlivrer  un  ^^^'^^^rjj 
evaleurpoor  tomberaveop^ 
trdne  depuiasi  longtemps  ovai'" 
m6me  auHdevant  de  ses  w^I^ 
sur  le  poiat  de  lassorprcoditi  &  w 
pes  avaient  valu  le  capitaiM*  m^ 
sidas  eussent  M  toas^.  Masw 
marcbait  aur  an  sol  qui  oMnap* 
ioataat  de  s'ou  vrir  sous  sw  p*  • " 
les  se  uisaleot  a  aea  ptfMS*) "  ^ 


SYRIE  MODERNE. 


i« 


rnit  d^s  qnelfg  derniersbataillons 
fiatife  de  Damas  avaient  quitt^ 
mars ;  les  populations,  loifi  de 
mpagner  de  leurs  voeux,  loin  de 
w  de  leur  z^le,  loin  de  Tappuyer 
IT  attacheraent,  s'^eartaient  a  soa 
lohe  (xinnme  d'un  homm^  frapp^ 
,  malediction  contagieuse.  Cetait 
ce  n*etait  plus  un  peuple 
ssedait.  II  arriva  ainsi,  triste  et 
I  jusque  §vat  les  frontieres  du 

BO. 

iaat,  8oit  inquietude,  soft  pu- 

ite,    Abou'l'Abbas ,  le   khalife 

I.,  n'osa  pas  venir  lui-m^me  au* 

de  son  redouttble  ennenii :  il 

la  iTy  envoyer  sou  onele  Abd- 

i-Ali,  le  lutteup  de  la  famille, 

teerf^que,  maisferoce  ,hardi  sol" 

eruel  oooqu^rant.  Ca  dernier 

riunir  que  vtngt  mille  bonn- 

II  divisa  en  trois  troupes,  et  qui, 

inieriorite,  attendirent  de 

les  Syriens.  Lorsqu'ii  aper- 

nonibre  de  ses  adversairee, 

^tendit  ton  armee  en  demi- 

is  toute  la  largeur  d'une  vaste 

aftn  d'entourer  pen  a  peu  see  en- 

et  de  lee  toaser  dans  un  ear* 

fer.  An  dixienie  jour  du  mois  de 

i  deuxitoe,  I'an  1S2  de  Tb^ire 

750  de  J.  C),  se  Uvra  enfln  cetta 

one  dee  plus  solennelles,  une  das 

rtantes,  une  des  plus  aebar- 

lis  I'^tabitssemeni  de  l^Islam, 

k*teit  Diusl'raaltationreligieuse 

iflH  de  pree^dentes   Tictoires 

leot  alors  les  Arabeede  Syrie, 

riMbaine  freide  et  implacable  qui 

,  dttaaufceoait :  sentiment  farouitie 

lorobrit  les  traits  de  la  faee  kn^ 

in  lien  de  les  7iviAer,  qui  eteiot 

IK  aa  lien  de  iee  enOamm/er.  Som- 

tattle,  eti  les  Syriens,  abattus  per 

urse  lesgue  et  p^nible,  vinrent  se 

.  inf  cfillMusiasme  aofitre  les  Itf gn- 

^  fttaUlooe  des  Abbassidas,  aux  v^- 

I  Is  et  aax  Standards  de  deuil  I  Uqe 

'i  IS  d'ttn  mois  a  travars  les  deserts 

iM^ao^otanMe  avait  fl^tri  lea  eo«- 

JUii  briHaateostiwie  des  Syrieas , 

Iror  et  I'argeat  de  leurs  armes ;  la 

i^  les  aecaUait;  k  d^eeuragemeat 

piM^t  a  eoiifdre  an  fond  de  leur 

^\  et  auboot  d'liae  tralte  ^puisante, 

fbeatiaeaieivt  a  une  Apre  Tall4e  du 


plateau  de  la  Perse,  au  fond  de  laqueile 
lis  voyaient  s'agiter  trois  legions  de 
DoirsJemonsI 

Quelle  oue  fflt  pourtant  leur  impres* 
•ion  terrioante,  ils  n*en  att^qu^rent  pas 
inoios  vigouregsement  leurs  ennemis. 
Leur  premier  cboc,  eomine  toujour?, 
fut  terrible;  niais  une  fojs  cet  effort 
prodait,les  troupes  syriennes,  bares* 
8^s,  ne  purent  lutter  qu'^vec  qesavan- 
tage  coQtre  ragilild  infatigable  etl^ar^ 
deur  croissante  des  troupes  abbassides , 
eliie  des  populations  agi les  et  bell iqueu- 
sesdu  Kborassan.  A  meiureque  le  com- 
bat se  prolongeait,  les  Syrians  se  decou- 
rageaieot  done  de  plus  en  plus.  Mer^ 
wan  eut  been  accumuler  les  prodige^ 
de  valeur  et  d'babilete  militaire,  il  eut 
beau  se  multiplier,  se  porterj^ur  tous  les 
points  menaci^s,  son  cercie  imniense, 
«u  lieu  d*avancer,  reculait  d1n«tant  en 
instant.  £n  vain  youlut*il  changer  Tor- 
dre  de  sa  bataille,  former  une  colonne 
eompaote  et  puissante  de  son  demi- 
eerefe  trou4  en  plusieurs  endroits,  ces 
comoiandemeots  furent  mfA  compris 
et  mal  executes,  le  vartjge  s'etait  saisi 
des  chefs,  la  stupeur  dessoldats.  Ce  qui 
devait  amener  le  aucces  de  Merwan 
eausa  sa  perte.  Loin  de  presenter  une 
colonna  invincible,  son  arm^e  ne  fot- 
pna  bient^t  qu*une  m^sse  in^puissante. 
jAa  premiaref;  lignes  seules  bouvaient 
eombattre;  les.  rangs  du  m'mm  deve- 
paient  inutileset  encombrants.  Les  trois 
troupes  d' Abd-Ailab-f)ea-A)i  voltigeaiejit 
eur  las  flancs  du  colosse  sycien,  Ui  por- 
taot  das  coups  assures ,  et  evit^nt  ses 
eoiips  indicia.  Las  c^avres,  qui  s'amon- 
^aient  de  piMS  en  plus ,  servaient  de 
remparts  aux  Abbassides  et  d'obstacles 
aux  Syriens.  Bient6teesder/)iers,  aecu- 
]ea  h  la  riviere  de  Zab,  n'eur^t  d*au- 
tre  alteraative  que  la  mort  par  le  fer 
^  per  Teav.  Tout  aJ^rs  bit  perdu,  et 
Merwio  se  vit  fsontraint  de  se  laisser 
^gorger  ca^ame  un  de  $es  atupides  so|- 
diats,  ou  d'eseayer  ui^ia  &i^de$;9streuse. 
C'est  cette  demiar/Q  rejisoyrce  qix'il 
<eboleitO* 

Mervaa  inayait,  an  retovr^ant  vers 
saeapitate,  iretcoji^vardas^ovinces  fi- 
deles,  et  ri^ormer  une  aroiee;  il  ne  ren- 
contra  que  i'abandoa,  le  in^pris,  la  per- 

*'    (*)  Yoyec  Abotf'l-fMa. 


JW 


L'TimVERS, 


s^cution.  Arrive  a  Mossonl ,  en  Meso* 
potamie,  il  ne  vit  qu'one  eit6  dans 
la  joie  de  la  defaite  des  Sjrriens,  ft  qui 
lui  ferroases  portescoinme  a  unrnnemi. 
Harran,  iiid^se,  ie  laissa  p^netrcr  dans 
sesinurs;  mais  Tapproche  de  Tarm^ 
victorieuse  d'Alxl-Aliah-ben-Ali  de  bien- 
Teillante  la  rendit  hostile.  II  lui  fiiUat 
encore  fuir  a  Hems.  II  ^tait  la  en  pteine 
Syrie;  il  devaits^attendre  k  une  bonne 
reception;  elle  fut  mauvaise.  Cen  etait 
fait ;  Ie  prestige  de  la  victoire  Tavait  aban- 
donne ,  la  defaite  semblait  lui  avoir  en- 
Iev6  a  la  fois  Tdclat  de  la  couronne  et 
Tautorit^  du  sacerdoce.  De  ces  deux 
pouvoirs  tempore!  et  spirituel,  il  nc  lui 
restait  plus  que  Timpuissanoe  d*un  sou- 
verain  abattu  et  Ie  m^pris  d*iin  pon- 
tife  interdit.  Damas  lui  (lit  aussi  cruelle 
que  Hems :  il  n*y  passa  (|ue  pour  lire  la 
trahison  sur  tous  les  visages,  que  pour 
y  voir  son  palais  ferme  et  ses  richesses 
au  pillage. 

Dans  cet  abandon  g^ji^ral,  Merwan 
ne  trouva  un  refuge  qu*en  Palestine. 
Ge  pays,  encore  tout  peuple  de  Julfs , 
ne  lui  fut  d'ailleurs  favorable  que  par 
hainpcontre  les  Abbassides,  qui  sevan- 
taient  d'etre  descendants  directs  dePim- 
posteur  Mohammed.  II  fallait  que  Mer- 
wan fQt  bien  aveugle  par  son  malbeur 
Sour  avoir quelques  instants  Tesp^rance 
e  resister  avec  d'aussi  faibles  p.irtisans 
et  dans  une  aussi  petite  province  contre 
Ie  colossal  empire  qui  lui  echappait  La 
Jud6e,  en  outre,  n*avait  plus  dans  son 
sein  les  soldats  de  David  et  de  Salomon ; 
c'etait  une  nation  en  pleine  decadence, 
et  dont  Pappui  devait  perdre  plut6t 
que  sauver  1  infortun^  prince  ommiade. 
En  vain ,  en  effet ,  sa  famille  chercha- 
t-rllede  tous  cdtes  a  rejoindre  son  om- 
bre d'armee;  en  vain  essaya-t-il  k  rem- 
Slacer  la  force  par  I'adresse,  Ie  nombre 
es  troupes  par  leur  disposition;  en  vain 
voulut  il  exciter  Torgueil  et  enflammer 
Tesprit  deses  miserables  soldats :  Ie  seul 
approche  de  Farm^  des  Abbassides  les 
terrifia,  et  k  IVntr^e  d*Abd-Allab-ben- 
Ali  sur  leur  territoire  lis  se  disperscrent 
de  tous  c6t6s,comme des  feuillesmortes 
balay^s  par  un  vent  dunord.  Merwan, 
abandonn^  de  tous,  n*eut  que  Ie  temps 
de  se  cacher  dans  une  eglise  du  rite 
Gophte.  Cet  asile  6tait  loin  d'etre  invio- 
lable aux  yeux  d*un  musulman.  Aussi 


un  homme  de  la  plos  basse  efasK,  j 
vendait  des  fruits  sur  uo  ^  nlake^ij 
reeonuu  Ie  khalife  depossttie,  s 
lanoe,  et  vint  egorgor  Herrai  n  j 
m^ne  de  Tautel.  Sa  t^  fiit  e 
portee  a  son  vainqueur,  oui,  v 
laire  passer,  comtne  tropberdel 
toire,  au  khalife  de  la  ooincBeil 
ordonna  (]u*elle  fQt  embtDinaJ 
Here  fatalit^l  durantroperatioi 
baumement,  un  chatafiame  i 
langue  de  celui  qui  avait  etc  a 
deur  des  croyants,  soaTeraiBjtl 
que  et  de  TAsie,  Ie  plus  puistalr 
de  son  temps.  Get  aoddeot  fiiti 
par  ses  ennemis,  et  Ton  ecrintlj 
pos  ces  yers,  que  dte  AboQ^fi^ 

«  Sa  langue  est  dcvenoe  hfi 
«  chat,  vengeance  toutedivir' 
c  p^  rorgaiie  de  sa  parole  i 

La  deplorable  fin  de  V 
signal  de  la  perstotion  c 
On  les  rechercha  en  tons  I 
mit  k  mort  partout  ouoo  ieifl 
nom  fut  maudit,  leur  racem 
^jamais.  Deux  des  fils  de  r 
Merwan  se  refiigiereot  en  i 
L*un  fut  indignement  lirreMl 
Fautre,  appeleOb6id-AUah,a> 
gloire  les  armes  a  la  main 
amis  des  Ommiades,  eominele 
dres  parents,  furent  enief' 
cutes.  Des  poetes  infSmes,  ( 
a  la  fois   leur  liaine  oontrej 
miades  et  leur  servile  i 
Abbassides,  conseillaientifl 
de  quitter  leurs  €f^  po^ 
fouet,  seule  arme  digne  deo^ 
les  Ommiades.  Apr^  Ie  r 
yivants,  on  en  vint  a  la  pro 
tombeaux.  Les  ossemeots  M 
kbalifes  ommiades  furcnlWT 
cipit^  aux  ^outs,  livresl" 

Krofanations.  Les  cendresi 
loawiah  et  d'Abd'eMI«iik«| 
m^me  pas  eparen^es  :  on»r 
vent,  comme  cdles des  plos  f 
minels.  Aucune  reaction  hw 
gala  en  fureur  cellc  des  An»l 
Ie  supplice  de  plus  de  sonwy 
ftmes ,  apres  roille  actes  de  < 
giies  des  cannibales,  voiflW* 
trait  qui  les  surpasse  tous, 
sangtante  d'une  scric  de  fluss 

Cet  episode  atrocc  se  pas»  *  fl 
dans  laviUeperfidc  qui  avail  a  ■ 


SYRIE  MODERNE. 


157 


t  abandonne  Merwan.  Cette  ville 

pieine  d'Ommindes;  quatre-vingt- 

les  leurs  eurentla  malheureuse  idee 

idressera  lagen^rositedu  vaiDQueur 

kir  famille,  Abd-Allah  ben-Ali.  Ce 

^les  caressa  avant  de  les  devorer. 

laccufiliit  avec  une  feinte  bonte  et 

[  sourire ,  Gt  preparer  un  im- 

^repas,  les  y  invita  tous,  eut  Tin- 

ie  se  mettre  a  table  avec  e ux  ,  et 

Imilieu  du  fpstio  ilordonna  a  ua 

tserviteurs  de  r^iter  un  de  ces 

cruels  cootre  les  Ommiadee 

urtisan  avail  eu  la  Idchet^  de 

[  injures  contre  la  fainille  d6* 

Qoerentd'abord  lesh6tesd'Abd- 

i-Ali.  Puis    vint  une  strophe 

( qui  inauieta  le  roeur  des  moins 

'  Des.  ADd-Allah-ben-Alispmblait 

I  terreur  croissantedes  Oinmia< 

I  |)dleur  de  leurs  fronts,  de  la 

BtioD  de  leurs  traits.  EnGn  Tex- 

^  plus  violente  k  la  vengeance 

leette  oeavre  satanique,  que 

ux  avaient  ordre  de  mettre 

nent  en  action.  En  effet.  des 

i  portes  de  la  salle  afOudreot 

Ks,  armes  de  foupts  et  de  cd- 

i  firent  perir  sous  leurs  cou|w 

blades  consternes.  La  lutte  etait 

>le ;  les  vietinies  ^taient  desar- 

Ift  \fs  bourreaux  se  succMaient 

he.  Quand  les  Ommiades,  tous 

^de  blessures  sanglantes,  furent 

JQsqu'au  dernier,  le  feroce 

kb  fit  couvrir  d'un  larj^e  tapis 

linlpitants  de  ses  victiines,  et 

I  aor  ces  chairs  fr^missantes 

tpffie  des  Atrides  (*)• 

*1  te  nouveau  gouverneur  gue 

iquins  s'etaieut,   pour  ainsi 

lip^  a  eux-mlmes  en  trahissant 

lifeHerwan.  Au  lieu  d'un  prince 

•  inais  bienveillant,  ils  allaient 

I  chef  barbare,  qui  ne  devait  se 

)  la  civilisation  de  son  epoaue 

r  rafBner  les  supplices.  Uobeis- 

I  plus  absolue  ou  la  roort  la  plus 

,  tel  ^tait  le  sort  qui  attendait 

idents.  Damas  fut  done  punie 

^Idchete  temporaire  par  un  des- 

le  sans  frcin.  Le  reste  de  la  Sy- 

rnit  pas  plus  heureux.  Au  milieu 

**''  tuene  continuelie,  litravers 

^oyecAbouMedfti. 


ces  haines  implacables  qui  frappaient 
partout,  sans  repitni  piti^,  la  securitede 
ceux  m^me  qui  furent  Strangers  a  ces 
luttes  etait  h  lout  instant  com.  romise , 
et  leur  existence  comme  netrie.  Les 
Syriens  mahometansperdaient  Tempi  re , 
les  Syi  iens  Chretiens  perdaientledr  tran- 
quillite.  C^taient,  pour  les  premiers,  des 
noinmes  d'une  autre  province  qui  al- 
laient iesdominer;  c'etaient,  pour  les 
seconds  ,  des  schismatiques  rigoureux 
et  intolerants  qui  aitaieut  les  per>ecu- 
ter.  Ainsi,  cette  malheureuse  Syrie 
ne  goiltait  un  moment  de  repos  que 
pour  retomber  brusauement  dans  les 
inquietudes  et  les  catamites.  A  peine 
avait-eile  joui  de  quelques  annees  de 
cairoe  qu*une  temp^ie  nouvelie,  plus  vio- 
lente que  les  pr6cedentes,  lui  venai  du 
sud  ou  de  IVst,  de  THedjaz  ou  de  Tlrak. 
Apres  avoir  et6  le  champ  de  bataille 
des  Grees  et  des  Arabes,  des  Chretiens 
et  des  Mahometans,  elle  devetiait  le 
champ  de  supplice  des  Ommiades.  Heu- 
reusement  cette  ^re  nouvelie  de  carnage 
etde  vengeance  ne  deviiitdurer  que  pen- 
dant la  courte  domination  dAbou'i- Ab- 
bas le  Sanguiuaire;  heureusementc|u'une 
sorte  de  predilection  de  la  Providence 
devait  doter  la  fiamille  des  Abbassides  de 
plusieurs  princes  au5si  grands  que  g6- 
n^reux,  protecteurs  des  sciences  et  dea 
lettres ,  et  dont  le  regne  allait  ^tre  as- 
sez  long  pour  cicatriser  encore  une 
fois  toutes  les  plaies,  et  faire  refleurir  la 
prosperity  sociaie  par  la  culture  des 
esprits. 

LES  PBBMIEBS  ABBASSIBES. 

Apres  la  chute  des  Ommiades ,  apr^s 
Fextermination  g^n^rale  de  cette  fa- 
mille,  qui  passa  si  brusquement  du 
tr6ne  aux  g^monies ,  la  Syria  cesse  de 
devenir  le  si^ge  de  la  dommation  isla- 
mique.  C'en  est  fait!  Cette  province 
n*aura  plus  sous  les  Abbassides  cet  ^clat 

Sue  le  s^jpur  des  khalifes  y  repandit 
urant  un  s\Me\  elle  ne  sera  plus  le 
centre  d*un  immense  empire;  elle  ne^ 
sera  plus  le  but  du  voyage  de  tous  les' 
ambitieux ,  Tentrepdt  de  toutes  ces  ri- 
ches es  d^robees  a  la  moitie  du  monde 
connu,  la  province  imp^riale  par  excel- 
lence. Des  le  rigne  d'Abou-Djaffar-al- 
Maosour,  premier  successeur  d'AbouU* 


15ft 


rUKITEIkS. 


AbbaH-el-Saffeh,  Sa^deid  Va  enlever  k 
Damas  son  litre  de  ett^  des  khalifea ,  et 
partant  sa  splendeur,  son  orgueil ,  sa 
puissance.  II  ne  lui  refttera  bi6nt6t  plus 
que  son  doux  climat,  ta  f^itiliiede  son 
sot,  et  sesjardins  parftimes,  quiont 
conservii  jusqu*lt  nos  jours  a  son  terri^^ 
toire  ce  litre  gracieux  et  significatif  : 
cdeur  de  paradis. 

Nous  n'avons  done  plus  h  suivre  pas 
k  pas  la  marche  cenqu^raiite  de  rtslatn ; 
car  ce  n'est  plus  de  Sjrie  que  panent 
les  premiers  bataiilons;  ce  ii'eist  plus 
<^n  Svrie  que  les  ehefe  Tienneijit  rece* 
voir  les  ordres  suprCmes,  que  les  vain* 
queurs  viennentdeposer  leursinnombra-^ 
bles  butins.  Nous  ii*avons  desormais  ^ 
rapporter  que  ies  ^v^nements  qui  se 
passent  dans  la  province  doiit  nous  ra- 
contons  Thistotre,  les  id^es  qui  en 
moditient  Tesprit,  les  institutions  qui 
en  reglent  la  destine.  Le  commence- 
ment du  regne  des  Abbassides  fut, 
comme  nous  I'avous  i\6jk  vu,  un  vrai 
d^astre  pour  la  S^rie.  Apr^  avoir  M 
ie  champ  des  dernik'es  iuttes  de  Mer* 
wan  II,  apres  £tre  devenue  le  th^tre  des 
rt^actions  les  plus  crudles ,  eUe  eut  to 
malheur  d*^tre  ffouvem^  par  le  feroce 
Abd-Allah-ben-Ali.  Le  diespotlsme  te 
plus  rigoureux  pesa  alors  sur  la  pauvbe 
province  di^couronn^ ;  liiais  heureuse^ 
mentqu'apr^ta  mortd'Abou'1-Abbas-ei 
Saffah,  qui  ne  r^gna  que  quatre  ans^ 
Abd'Atlah-ben-Ali,  homme  aussiambi- 
tieux  que  barbare,  songea  k  disputer  ie 
khalifat  a  son  neveu  Abou-Djaffar-al- 
Mansour,  et  quitta  la  Syrie  pour  n'y 
plus  revenir. 

Vers  le  milieu  de  Tanuee  1 36  de  Th^- 
gire ,  on  le  vit  sortir  avec  une  puisaante 
armee  des  murs  de  Damas,  se  dirigeant 
audacieusement  vers  la  residence  des 
khaltfes  abbassides,  en  1  rak-A  rabi ;  mais 
foientdt  il  fut  rejotnt  par  les  trouptiis 
d'Abou-Djaffar-al-Mansour ,  eomman* 
d^es  par  Abou-Moslem ,  Tun  des  plus 
aneiens  et  des  plus  actifs  partisans  de 
Ja  nouvelle  dynastie,  capitaine  missi 
^crgique ,  homme  aussi  d^termin^ 
qu^Abd-AHah-ben-Ali,  coeur  de  fer 
comme  ce  dernier.  Ces  deux  rivaux, 
qui  avaient  eombattu  si  longteinps  eii^ 
aemble  pour  ie  m^me  prince,  s'attaqu^- 
nnl  avec  impetuosity  dans  la  plaioe  de 
i$[isibe.  Mais,  aoitque  les  Khorassameiii 


d*Abou-Moslem  fottent  mdllcin 
dats  que  les  Damasquins  d'AU-i 
ben-Ali ,  soit  plut^t  qoe  ees  ' 
n'^prouvassent  que  peu  d'entfa 
pour  le  rigide  et  dur  ambitini . 
avail  peut-^tre  attaches  de  fail 
cause,  toujours  est-il  qu'sMi 
el6  quelque  temps  iodeeise^  laii 
nnla  tout  entiere  a  AboihModaM 

L*orgueiileut  Abd -Allah 
eompl^temeot  vaiacu ,  count 
sous  ie  proteation  de  Soal^ 
d'Abou-Djaffar-aliMansour,  qiii 
dans  la  vilte  de  ja  importaateder 
Ce  refuge,  du  teste,  oele  mit 
temps  a  Tabri  de  la  vengeaaeedil 
Pour  le  frapper  plus  sQreiiKiit, 
DJafrar-aI'MaBsour  feigaitde'" 
donner,  et  lui  enjoi^nit  uxk 
biter  la  demeure  qu*il  hii  &I 
Allah-ben-Aii  ei»?pta  eetti 
lui  semblaiigitoereii8e;inahi 
le  Irouva  ^as^  sous  les  f 
maison  :  les  fondemeots 
m^  de  Moos  de  sel  gerniK 
d*une  aouree  myM^rieuaear 
peu  d^truit  le  perfide  cadew 
life  n*  Aifisi  nil  delivite  li 
son  lyran ;  et  oonime ,  gnoe 
tere  de  ses  habitants,  ikt 
sa  nature ,  a  ia  ftounlHe  de 
il  lui  6tait  facile  de  r6pwer  ssj 
lie  gui^rir  ces  biesauras^  die  ^ 
k  peu  sa  quietude  iastia^i 
goUter  Weniot,  oomnie  twt  ie 
populations  musuhnamSH^^ 
la  civiKsation  croissaDtedcCi 

Ce  qui  earacterfee  fcs  i 
c'est  d'avoir  comprisfaeleiirj 
r^dait  nmins  dans  rioianiit 
Tarmee,  dens  ie  livre  que 
Les  Abbassides,  au  contni^ 
montres  plutdl  pontic  qiip 
Moawiah  avail  raison  :  V^ 
eonqu^e  etait  1  element  d' 
progres  de  Tlslam  ,  11  faUaits' 
«ur  les  homines  d'arnes;  ^ 
obez  eux  seuls  que  se  trouvvt  t 
]M  du  nouvel  empire.  D'an** 
les  Abbassides  n'avaieot  pas  ivU 
qu'il  £alloil  aonger  eofin  a  ^ 
ordre  imnmable,  seulgaraatde" 
p^it6  netiooale.,  dans  le  ip 
des  empires  de rcpeqiK.  Qf»»^ 

(*)YoyezEl-]tadD. 


SYRIE  MODERNE. 


isr 


lent  le  brobl^nie  ^talt  insoluble;  que 
en  deflnitive ,  le  khalifat  devait  se 
iver  fatalement  perdu  entr  e  Une  con- 
Ite  interminable  et  une  administra- 
I  impossible,  il  ne  devait  pas  moins  en 
liter  des  annees  de  tranquillity  bien* 
cieuses,  de  bonheur  sans  nuage  pouf 
^peuples  d'Orient. 
I  Syrie ,  comme  la  plupaft  des  au- 
\  provinces  de  I'lslam,  eut  aussi  sa 
ide  oette  fi^licit^  g^n^rate.  Elle  aussi 
jiuisit  des  poetes ;  elle  aussi  vit  sor- 
ijde  son  sein  quelques-iins  de  cesi 
eurs  mahometans  moiti6  nhilo^ 
;et  moiti^  poetes,  ouplutotau- 
I  d'une  pliilosophie  toute  poetique, 
:lesaxiomes  perdaient  de  leur  s6- 
esse  en  empruntant  a  la  langue 
|ues-unes  de  ses  images  les  plus 
intes,  dont  les  precept es  perdaient 
ur  rigldite  en  empruntant  a  la  belle 
asiatique  quelques-Ones  de  ses 
plendides  couleurs.  Mais  avaiit  d'6- 
siecle  par  siScle  les  horlimes 
I  que  la  Syrie  eut  la  gloire  de 
'h  la  civilisatioh  orientale,  afin 
i  de  mieux  saisir  toute  leur  valeur 
Qte  leur  originality,  il  nous  paratt 
Bpensable  danalyser  le  caraci6r€l 
h  pens^e ,  de  Tart  et  de  la  po^sie 
^  Orient.  Ce  caractere ,  d'ailleurs ,  a 
DU  v6peu  de  variations  en  dix  slides ; 
:peinare  les  Orieutaux  comme  ils 
Dt  sous  les  premiers  Abbassides, 
faire  un  portrait  auquel  ils  out 
liembl^  a  toutes  letirs  ^poques  de 
;  et  de  prosperity. 

BE  lA.  JPENS^E  OAISNTAIB. 

peuples  primitifs,  h  teurs  jours 
combats,  ne  tratnaient  pas  a  leur 
te  des  fabricants  de  bulletins  mili- 
res;  on  ne  distribuait  point  encore 
^leurs  pas  les  itineraires  de  leurs  vie- 
tes ;  de  m€me,  h  Theure  des  premiers 
Nivements  intellecluels ,  h  la  nals- 
iiee  de  la  pens6e ,  il  n*y  dvait  p9s  une 
ilbsophie  toute  Cr66e  pour  en  classer 
Sprit ;  et  chariin  sait  que  les  philoso- 
les  orientates  s^appelleraient  plus  jus- 
nent  des  theologies.   L'OMeut   n'a 

fiais  compris  la  pens^e  d*avenir,  ddns 
sens,  qu  il  ne  s*est  jamais  employ^ 
I  la  recherche  des  idees  nouvelles. 
ion  monde  le  satisfait ;  il  n'ea  exige  pas 


un  autre  de  son  imagination.  II  sent^ 
il  chante ,  II  symbolise;  mais  e*est  de 
Faspect  philosophique  seulemefit  qu'on 
petit  dire  qu'il  svnibollse;  lui ,  il  reflate 
ce  qu'il  voit ;  if  est  affbci^,  11  est  heu- 
rent ,  il  dit  son  bonheur  oq  sM  sotlf- 
franccis ;  il  sepassionne  pour  Thumanit^ 
ou  la  nature ;  puis  il  traduit  avee  les 
mille  cduleurs  resplendlssahtes  de  son 
ciel ,  de  sa  lumi^re  et  de  6e^  fleurs ,  lei 
passions  gtii  Tont  a^t^. 

En  Orient,  la  philosophie  se  r^oit 
volontiers  au  rdle  de  morale,  d'bygi^ne : 
la  religion  recottimdnde  des  ablutioba 
pour  la  saht^  terrestre ,  t)uis  elle  pro* 
niet  dans  le  ciel  les  plus  sensuelles  f4h 
\\c\t6s  dti  corps,  jimalgam^es  k  eelles  dd 
rdme.  Yoyet  le  paradi^  de  Mahomet : 
ce  dernier  paradis,  r6vel^  pat  un  prtH 
phete,  chant6  par  un  inspirfi^  ce  r^sum^ 
splendide  des  plus  sublimes  r^teriei 
tn^loeiques .  a-t-ll  rien  ekelu  des  ^mO* 
tions  htimaines,  des  beaut^s  iblouis*i 
Santes  de  la  terre?  Certes  non!  ear  il 
prodiglie  aux  61us  de  son  dieu^  pendant 
retertiit^,  sans^d^godt,  sans  lassitude  i 
ce  qui  ravit  Thomme  si  admirablement 
ici-bas  :  le  diamsmt,  cette  luini^re  deft 
6t^mentssolides ;  la  gloii'e,  cette  lumi^ri 
des  r^ves  de  T&me.  II  immortalise  la 
virginity  des  fetnmes;  II  leur  verse  k 
boire  daiis  Id  m^me  edupe  la  vertu  et 
la  volupt6.  Cette  supi^noritd  relative 
du  paradis  de  Mahomet  n>st-elle  point 
dan^  cette  allianee  de  Tenivrement 
du  corps  et  de  Fenebantemeht  de  TdmeP 
Si  vous  le  comparez  k  notre  paradlft 
Chretien ,  qui  n^a  ka  criier  ni  formte 
arr^t^es  ,  ni  coUleurs  fixes,  vous  com- 
prendrez  facileitient  que  \k  monoto«- 
nie  de  ce  dernier  ait  pr^te  a  rire  atlt 
philosophes  negateut*s.  L'autre,  au  eon- 
traire,  pldlt  k  tous,  s^adreese  aux  mas- 
ses, et  flatte  mime  eet  instinct  de  vo- 
luptlft  inseparable  faiblesse  de  la  matiere 
humaine.  Ainsi  done ,  sensuaiisme  e& 
poesie,  sensuaiisme  en  religion,  sen- 
suaiisme eti  tout,  paree  que  le  mondie 
exterieuir  est  been  et  bienfaisant,  paree 
que  Tessence  de  Tesprit  oriental  est  la 
joie.  Arrive  k  cette  questien  vitale  des 
litt^ratures  asiatiques,  nousresquissoiis 
rapidi^ment  ici. 

La  pens^  humaine,  sous  quelque 
forme  quelle  se  pr^nte,  n'est  jamais 
que  le  reflet  du  monde  ext^iftur  Bur  le 


160 


LUNIVERS 


miroir  de  TAme.  Mais  chez  \es  uns  ce 
reflet  est  teme  ou  pMe;  chez  les  autrt^ 
il  est  faux  et  incertain;  chez  queiques- 
uns ,  ri^oureux  et  correet :  voili  pour 
le  vulgaire  et  les  hoinmes  de  bon  sens. 
Quantaceux  dont  Piiiiag  nation,  comme 
uii  cristal  a  ni*lle  facettes,  entoure 
d'une  aur6ole  prisma tique  les  images 
qa'elle  reproduit ,  nous  les  avons  sa- 
lu^  du  nom  de  poetes.  La  premiere  io- 
fluence  que  la  pensee  poetique  ait  eu  k 
subir  est  done  celle  du  climat ;  car  le 
climat,  c'i'st  la  lumi^re;  le  climat, 
c*est  ia  couleur  :  influence  toute  mat6- 
rielle,  ^ui  domine  6terneilement  le 
inonde  mtellectuel ,  et  sous  laquelle 
Thomme  a  courbe ,  non  pias  seulement 
sa  po^ie,  mais  encore  ses  lois,  ses 
moeurs,  sa  civilisation.  Voyez  aussi 
avec  quel  immense  avantage  la  pensee 
orientale  vient  lutter  contre  la  ndtre ; 
?oyezcombien  ce  reflet  6blouissantd'une 
nature  ricbement  6panouie ,  d*un  ciel 
ardent  et  pur,  fait  pdlir  les  froides  ima- 
ges de  notre  nature  appauvrie.  Et, 
oomme  le  g^nie  du  langage  r^pond  tou- 
jours  k  celui  de  la  pensee ,  comparez  ces 
idiomes  si  harraonieux,  si  nches,  si 
.hardis ,  avec  nos  langues  du  Nord ,  ra- 
pides  et  alK^briques!  Cest  que  chez 
nous  rimagination ,  c'est-^-dire,  etymo- 
logiqaement  parlant,  la  faculty  de  refl6- 
ter  les  imases  du  monde  exterieur,  est 
retr6cie  le  plus  sou  vent  dans  Tdtre  d'une 
cfaemiu^e,  ou  tout  au  plus  dans  Thori- 
zon  d'un  cabinet  de  travail  :  aussi  ce 

Sue  nous  appelons  poesie  n*est-il  d*or- 
inaire  qu'une  sonribre  inspiration  ou  se 
reflechissent  les  fa<*ta8ques  accidents  du 
cliarbon  que  le  feu  decoupe  en  festons 
bizarres. 

Mais  rOrient  est  la  terre  natale  de  la 
grande  poesie.  La  rien  n'arr^te  Ten- 
thousiasme ,  la  rien  ne  force  la  pens6e 
h  se  conceutrer  en  elle-m6me.  L'lmagi- 
nation  s*^lance,  rieuse  et  foldtre,  h 
travers  les  riches  jardins  de  la  nature. 
Sans  cesse  entra!n&  par  le  charme  d*une 
jouissance  nouvelle,  ou  distraite  par 
Tespoir  d*un  nouveau  plaisir,  elle  prend 
ses  ebats ,  elle  se  diaulYe  au  soleil ,  et 
s'impreenp ,  pour  ainsi  dire ,  de  Tatmo- 
sphere  rortementsatur^  de  lumtdrequi 
Tentuure  de  toutes  parts :  alors  Tdnie , 
dilatee,  se  d^veloppe  au  dehors  en  mille 
fleurs  de  puesie. 


Cl)ez  nous ,  an  contraire ,  la  pniBi^ 
ne  se  colore  qu'a  grand*()eine ,  faote  dl 
lumiere  :  on  dirait  un  trait  linraiie 
quel  la  gradation  des  nuances  B*a  (M 
ennore  donn^  la  vie.  Notre  line  »  m 
serredans  des  limites  etroites.et 
6puisuns  toute  notre  activity  ao«isi» 
plier  sur  nous-mdme.  Quelle 
preuve,  en  effet,  de  notre  escUi^ 
boutique ,  que  ce  travail  aride  que 
laisons  sans  cesse  sur  nos  p 
id^es .'  Singuli^re  inspiration  de  ^ 
que  cette  dissection  de  la  pens^l 
(|ueUe  nous  nous  acharnons!  Om 
jamais  TO  rien  t  ne  vit  naltre  lu 
physicien ;  jamais  uu  poete  ne 
a  penetrer  les  secrets  du  roe 
dout  il  se  servait  par  instin  t  Ai 
tandis  que  nos  bons  esprits  ebbari 
peniblemrnt  les  regies  du  beau ,  ctaii 
daieut  la  profondeur  de  TinteBMb 
lepeuple  en  Orient,  floumisatK 
irr^sistibles  de  la  nature,  s'lM 
nait  a  son  insu,  dans  ses  moeurs  m 
dans  son  langage,  a  uue  poesie  I 
sensualiste.  De  notre  c6te,  noosii 
Tart  et  la  science  :  les  OrieaUux 
pour  eux  Tinstinctet  le  genie.  Nei 
plaignons  pas :  cVst  la  nature  ^Mok 
qui  a  fait  les  parts;  et  ses  decf«U 
sages  autant  qu^immuables. 

J'ai  dit  que  la  pens^  orieatile,! 
▼oris^  par  le  soleil ,  tendait  sans-" 
k  sVpanriier  au  dehors ,  a  se  n\t . 
formes  de  la  matiere,  parcequeM 
ti^re  c'est  la  beauts.  Remarquezfll 
que  la  philosophie  asiatique,  sol 
et  si  digne  de  1 6tre,  a  toujoarsirii 
m^me  voie.  Point  de  ces  dispots 
lastiques  sur  les  mysteres  ioor 
hensibles  de  notre  vie  interieurei 
de  ces  combats  achames  sur  hid 
exacte  d'un  abtme  sans  fond,  ft' 
plus  utile,  et  par  cons^uent^ 
ole ,  6tait  propose  aux  me  liutisM^ 
sages,  et  les  vaines  sp^tations'^ 
th^orie  futile  n'etouffaient  pas  dmji 
germe  une  philosophie  qui  se  fonnn 
surtout  en  preceptes  de  condtritc  i 
n'est  pas,  du  reste,  que  les  OtiaXA 
n'aient  aussi  un  grand  fonds  de  i 
cisme ;  mats  au  milieu  mime  de 
plus  sublimes  contemplations  c*est 
images  qu'ils  pro<'edent ,  c'est  pars 
boles  qu  ils  parlent :  car  toutes  les 
que  le  poeie  cherche  un  autre  lai 


SYRIE  MODERNE. 


161 


sa  toLt  tombe  et  faiblit ,  ses  accents  ne 
se  font  plus  comprendre.  G'est  que  la 
pens6e  cherche  toujours  ses  aises,  et 
qu*elle  a  horreur  de  rabstraction. 

Ce  n'est  pas  ici  le  lieu  de  comparer  le 
mysticisme  asiatique  avec  celui  que  la 
civilisation  chr^tienne  nous  permet.  Je 
ne  puis  r^sister,  cependant,  au  d^sir  de 
citer  quelques  vers  de  Ferid-Eddin- 
Attar,  qui  roontrent  combien  la  po6- 
sie  orientale,  lors  m^me  qu'elle  se  perd 
dans  les  nuages  de  la  plus  haute  spiri- 
tuality, se  rattacbe  encore  k  la  terre  par 
le  mat^rialisme  des  images.  S*agit-il  de 
peindre  Thomme  mystique,  Tnomme 
aimant^  par  la  lumi^re  de  Tessence  di- 
vine ,  c'cst : 

«  Un  papiilon  qui  se  pr6cipite  au  mi- 
lieu des  llammes. » 

Ou  encore, 

c  Un  amant,  brdl^  de  passion,  qui 
supplie  sa  bien-aim^e. 

c  Un  buveur,  qui  demande  h  son 
^chanson  une  gorgee  de  la  liqueur  eni- 
yrante.  » 

Plus  tard  lliomme  aimant^  traverse 
les  sept  vallees  qui  le  s^parent  du  pa- 
lais  de  Simorg.  Dans  la  sixieme  valine , 
celle  de  la  contemplation  : 

«  La  respiration  est  pour  lui  une 
«  ^p^  trancnante,  etle  bruit  deson  ha- 
«  leine,  un  cri  de  douleur !...  de chacun 
«  de  ses  cheveux  d^coule  une  goutte  de 
«  sang ,  qui  trace ,  en  tombant ,  les 
«  lettres  du  mot :  hSlas!,..  et ,  une  fois 
«  parvenu  dans  cette  vall^ ,  Thomme , 
«  dont  rdme  est  raturie,  demeure  stu- 
«  pide  et  ne  retrouve  plus  son  che- 
«  min  (*).  » 

T^ous  nMnsistons  pas  ici  sur  le  sens 
de  ces  mysticit^s  :  peut-^tre  seralt-il 
curieux  de  comparer  les  poemes  de  cet 
ordre,  le  Pend-Namih.  par  cxemple, 
avec  notre  Imitatipn  ae  Ji9U$-Chr%$t; 
mais  maintenant  nous  n'avons  hi  nous 
occuper  que  de  Tesprit  g^n^ral,  que 
de  rexpression  po^tique.  II  est  done 
facile  de  voir  qu*en  Orient ,  la  pens^e 
est  toujours  exclusivement  sensualisee 
par  rimage ,  toujours  pompeuse  et  6le- 
v^e ,  mais  contenue  cependant  dans  les 
bomes  du  monde  materiel. 

C'est  un  fait ,  du  reste ,  sur  les  cons6- 
quences  duquei  on  s'abuse  commun^- 

*  Toya  le  Pend-Namid,  livre  des  oonselU, 
MiUoD  de  M.  de  Sacy. 

!!•  Livraison,  (Syris  modbbnb.) 


ment ,  que  cette  sorte  d*esc1avage  de  la 
pens^e  asiatique.  Accoutum6s  que  nous 
sommes  h  joindre  incessamment  les 
mots  de  bonheur  et  de  liberty ,  nous 
concevons  h  peine  que  Tintelligencen'ait 
pas  chercb^  asecouer  les  chatnesdu  sen- 
sualisme.  Et  cependant ,  en  Orient, 
vous  avez  oe  ph^nom^ne  moral ,  que  le 
scepticlsme  n*est  entr6  dans  aucune 
dme.  ITest-ce  pas  1^  un  caract^re  bien 
saillant  de  cet  esprit  de  nui^tude  et  de 
contentement?  Jamais  lOriental  ne 
pense  k  renverser  I'^difice  bdti ,  h  rayer 
de  son  cceur  la  croyance  traditionnelle ; 
jamais  il  ne  s*est  r6volt6  centre  une 
pens^e ,  contre  une  forme  sociale ,  parce 
que  toute  pens^,  toute  forme  sociale, 
sont  venues  a pr^un  bien-^tre  phvsique, 
parce  que  la  loi  humaine  n*a  ^te  ^levee 
que  pour  consolider  un  bienfait  de  la 
nature ,  comme  une  fontafne  de  pierre , 
pour  proteger  la  source  qui  vient  de 
laillir,  contre  les  sables  du  desert.  La 
loi,  en  un  mot,  est  une  action  de  grUces, 
une  hymne,  une  harmonle.  Le  plus  ghi- 
losophe  et  le  plus  penseur  des  poetes 
orientaux ,  Saadi ,  est  un  derviche ,  reli- 
gieux  juscpie  dans  ses  passions  les  plus 
effr^n^s,  qui  exalte  et  purifie  cet  amour 
voluptueux  que  condamnent  les  moeurs 
chr^tiennes  et  la  soci^t^  occidentale. 

Mais  h  cette  id6e  de  religion  si  r^an- 
due,  n*allez  pas  vous  fa^onnerun  monde 
d*humilit^ ,  de  larmes  et  de  repentir ; 
n'allez  pas  croire  h  un  peuple  ext^nu^ 
de  pridres,  pcile  de  mortifications,  sans 
cesse  agenouill^  dans  la  poussi^re  et  la 
face  contre  terre.  En  Orient ,  la  pridre 
se  r^it^re  souvent,  mais  se  fait  rapide. 
Le  monde  ext^rieur  tout  entier  sert  k 
cette  rdlgion  du  coeur  qui  n'abandonne 
jamais  le  serviteur  de  Dieu.  Le  corps 
estsanctifi^  aussi  bien  querdme;ses 
plaisirs ,  sa  sant6 ,  sa  beauts ,  ses  jouis- 
sances  les  plus  sensuelles,  sont  recher- 
che avec  d^lices,  et  permis  avec  pru- 
dence et  sagesse.  L  exces  n'est  con- 
damn6  que  parce  qu'il  derange  et  d^truit 
lebien-etredu corps  et  le  reposde  Tdme  : 
la  maladie  est  le  plus  grand  des  fl^aux, 
et  la  mort  du  corps  ne  se  supporte 
qu'^  cause  de  sa  renaissance  en  paradis. 

On  accuse  les  Orientaux  d'etre  sta* 
tionnaires,  et  en  cela  je  les  admire.  Oh ! 
sans  doute  nous  ne  comprenons  pas , 
nous  autres ,  qu*une  society  puisse  reu* 
11 


i62 


VWmERS. 


Qir  de  pareilles  conditions  d6  dur^e. 
t.6s  peuples  du  Nord,  toujonrs  agiUs , 
toujours  Discontents,  se  remuent  sans 
cesse  sur  le  roauvais  lit  que  la  nature 
leur  a  fait,  et  quails  s'Spuisent  h  relaire. 
Cest  en  vain  quMls  chercbent  una  po- 
sition commode,  uo  tennealeur  douiou- 
reuse  insomnie.  Dans  leur  case  de  fer, 
ils  ne  peuvent  se  tenir  ni  debout  ni 
coucbes.  II  est  vrai  que,  pour  donner 
]e  change  au  malaise  social  qui  nous 
dSvore,  nous  Tavous  orgueilleusement 
d6cor6  du  oom  de  progres.  II  est  heu* 
reux  que  ce  mot  nous  sufQse.  Je  ne 
sais  cependant  si ,  dans  notre  m^pris 
affects  pour  les  constitutions  asiatiques, 
il  ne  se  glisse  pas,  a  notre  insu,  un  peu 
de  jalousie.  rf*envions-nous  pas  quel- 
quefois  ce  bien-Stre  immSmorial  qui  ne 
permetpas  de  revolution  dans  les  moeurs, 
ce  repos  politique  que  le  ciel  prodi&ue 
a  tant  de  generations  ?  Je  suis  pret  a 
rendre  hommage  aux  laborieux  efforts 
de  nos  ISgislateurs  oour  nous  crSer  un 
bien-Stre  qui  nous  fuitsans  cesse;  inais, 
franchemeiit,  j*aime  niaux,  pour  ma 
part,  celui  que  I  iiomma  ne  cherche  pas, 
et  que  la  nature  donr.e. 

Si  de  Tordre  politique  nous  passona 
k  Tordre  moral ,  il  faut  encore  iv^poa- 
dre  a  une  accusation  du  radme  ^onro. 
On  refuse  quelquefois  Tesprit  au^>  littS* 
rateurs  orieutaux.  En  vSritS ,  je  les  en 
felicite.  Remarquez,  en  effet,  que  c*est 
toujours  la  mSme  question  de  bien-Sire 
reproduite  sous  unc  autre  forme.  Ils 
n*ont  pas  d*esprit,  soit ;  niais  en  ont* 
ils  besoin  ?  qu*ei)  feraient-ils ,  je  vous 
prie?  sont-ils  obliges,  comme  nous, 
de  cacber  la  nuditc  du  monde  qui  les 
entoure  sous  d«*s  parures  de  faux  bril- 
lants,de  fermer  les  yrux  pour  rSver? 
P^on,  sans  doute;  ils  iront  pas  Tesprit 
qui  clierche,  mais  ils  ont  le  genie  qui 
trouve.  Depuis  quand  faut  il  mepriser 
la  grdce,  parce  qu*ellp  est  nuturelle;  les 
rapprochements  ingenieux,  parce  qu'ils 
naissent  du  contraste  des  idees  et  non 
du  choc  des  mots;  le  bien-Stre  enfin, 
parce  qu'il  n'est  point  cherche?  Oui, 
gloritions-nous ,  vraimeiit,de  ce  que 
nousavons  la  triste  t'acuitede  rire.  CVst, 
a  mou  seos ,  le  cachet  essontici  de  la 
misere.  01)  1  les  heureux  habitants  de 
TAsie,  qui  nejouent  p;is  sur  ies  mots, 
qui  ne  prenneni  point  le  souci  de  se  tor- 


turer le  eerresn,  goi  m 
fu'4  peine  ce  spasme  conndsif  qp 
appelle  le  Hre  i  et  qui  nous  sert  c 
Tivresse  au  miserablel  Le  hve 
des  pleors,  le  rtre  fatigue;  il  9A 
simple  qu*oa  reproche  aex  Oi* 
d^Stre  ^ves ;  iis  sont  gravn 
resse ,  ils  sont  paresseux  par  "^ 

Mous  avons  done  appele  Th 
notre  aide  :  c'est  fort  bien  fait 
des  efforts  soutenus  et  pSoiblam 
avons  supplee  au  bien  qui  neoij 
quait  par  les  mille  nuances  du  k 
et  du  grotesque.  Nous  avons crtti 
derniers  temps  une  litteratun 
commune,  malgr^  toute  son 
assez  froide ,  malgr^  son  d^i 
effront^;  nous  avons  eleve  oq 
d'ignoble  et  de  ridicule  sur  ies  * 
nos  passions  faetices;  nousai 
tons  les  vices  et  toutes  les  in 
de  riiomme  int^rieur  Com[ 
tenant  Pesprit  qui  eherehe  ao 
trouve. 

Au  reste,  lee  ecrivains  les  pte 
c^s  dans  le  spirituaiisme,  lespo' 
moralistes  mime,  nese  sont  past 
efforces  de  fronder  cetie  paretse 
cette  torpeur  de  Tesprit  qui 
la  civilisation  orientate;  et  i 
retour  instinctif ,  ua  regret 
leur  arrache  Teloge  de  la  vie 
qu*ils  semblent  repudier  si  f^ 
ment.  LMiomme  est  un  aiige 
dont  les  ailes  se  fati^ent  im 
dans  le  vide ;  la  terre  est  te  di 
grd  de  sa  chute ,  roais  c*€St  le 
repus.  Cest  done  en  vain  ifof 
s^elance  dans  un  espace  ou  n^e 
le  soutenir;  card  faut  toujours 
lombe.  Cest  done  pour  ceU ^ 
lieu  du  plus  vague  idi^lisine, 
trouvons encore  une  tienseed'< 
Texistence  bo r nee,  mais  sans  il 
des  enfaiits  de  TAsie 

Cependant,  oes  reOets  da  folii< 
rient  sur  nos  dmes  cliagrioes  sal 
raient  conserver  leur  iiuanee  fi ' 
leur  eclat  si  vif ,  si  soutenu ;  1'  4*^ 
du  fatalisme  se  denature  au  costi^ 
notre  insatiable  activity ,  et  ee  biee' 
passager,  qui  ne  sufHt  jamais  a  eor 
sirs  devorants,  ne  nous  permH  ~^ 
bonheur  piein  de  larmes ,  ou  la 
france  Intime  devient  une  JoutssaiM 
rdme,  et  s*appelle   melancolie.  1 


SYRlti  AldblfiftNE- 


m 


duaud  le  bien-^^tre  est  constant  et  dura- 
file;  quand  Vime  peut  se  iivrer  auchaF* 
me  de  la  contemplation,  sans  esp^ranc^ 
comme  sans  regret ,  la  melancolie  n*est 
^u'un  mal.  Les  Orictitaux  ne  la  connate* 
sent  pas  :  cbez  eux,  la  iouissance  u'e$t 
pas  ude  douleur  affaibiie ;  le  bien  et  U 
mal  sont  des  contrastes ;  ils  existent  k 
part)  ind^pendants,  ennemis ;  il  n*appar- 
tient  qu*a  nous  de  les  faire  transiger, 
de  les  nuancer  Tup  parTautre,  d'eo  For- 
mer une  sorte  d'alliage.  C^st  done  a  tort 
que  1^  plupart  des  orientalistes ,  et  sur* 
tout  les  orientalistes  anglais ,  ont  priti 
aux  chants  asiatiques  quails  essayaient 
la  teinte  sombre  de  leur  propre  coeur. 
Au  lieu  de  se  mettre  a  ronisson  des 
ponies  orientales ,  ils  les  ont  trop  sou* 
vent  ramen^es  a  leur  propre  diapason, 
sans  songer  que  chai)ue  mot  dttvenait 
une  dissonance  >  que  cnaque  peos^e 
cnangeait  de  nature ,  des  qu  op  y  ajoa* 
lait  un  Element  etranger. 

0B  li'ABT  OatBNTAI.* 

Si  notreconduitedans  la  vie  ddpend 
beaucoup  de  la  mani^re  dont  pons 
envisageons  les  enoses  eontemporaines, 
nos  jugements  sqr  les  diversites  de  Te** 
prit  et  de  Tart  s'impr^nent  gravement 
aussi  de  notre  fai^on  de  concevoir  le^ 
cboses  d*autrefois.  deux  qui  tendeat  k 
la  poesie,  choisissent  lepr  aspect  d'eo 
baut :  I  espace  leur  divinise  le  spectacle 
des  nations.  Quelques-uns  s'acnarnent 
i  ue  voir  que  d'en  bas,  avec  mepris  et 
scepticisme;  ils  voilent  de  noir  tout 
obiet  et  tout  sentiment;  ils  se  froissent 
a  fegolsme  individuel,  «u  lieu  de  n  em- 
brasser  jamais  que  des  masses,  qui  sont 
toujours  belles  et  nobles  dans  leurs 
mouvements.  Le  plus  grand  nombre, 
les  petits,  regardent  devant  eu]^,  terre 
iterre,  selon  la  surface,  et  alors  les 
moindres  accidents  de  terrain  leur  obs^ 
truent  la  vue ,  les  moindres  obstacles 
bor nent  leurs  regards ;  et  si  des  horizons 
se  deploient  tout  a  coup  devant  eux , 
iU  s'en  6blouissent  ou  s  en  Usseat,  Ge 
D^est  done  ni  pour  les  sceptiques  de 
coeur,  ni  pour  les  myopes  d'iateltigencef 
que  nous  entreprenons  notre  voyage 
poetique  a  travers  TOrient.  Les  pre- 
miers ne  seront  point  eo  droit  de  nous 
reprodier  an  enthousiasme  exclusif  et 


irraisonnable ;  et  nous  topou^ns  d'a* 
vanoe  la  oondamnation  que  peuvajit  ful- 
miner  les  seconds  contre  une  par  tie  du 
monde  tout  entiire,  parce  que  c^tte 

Sartie  du  monde  se  separe ,  avec  de$ 
ifferences  brusquement  tranchees ,  de 
SOS  moeurs  de  nos  iois ,  de  nos  arts , 
e  nos  poesies. 

A  eonsidi^rer  Tart  et  ses  d^vetoppe** 
ments  comma  reehelle  metrique  de 
rintelligence  sociale ,  il  taut  rec^nqat- 
tre  que  la  civilisation  europienne  a\  de- 
passe  de  bien  loin  la  civilisation  asiati* 
que.  Et  cependaht,  ^'est  de  10riei|t 
que  les  arts  nous  sont  vonus ,  avee  la 
lumidre,  avec  la  vie  peut-^tre.  Llpde , 
rCgypte^  la  Syricsedisputeal  Thon- 
qeur  d'avotr  et^  la  premiere  ^eole  de 
Tunivers.  La  Chine,  fiere  de  ses  cohsti- 
ttttipris  immemeriales,  se  flatte  de  nous 
avoir  dsvanc^s  dans  la  route  de  la 
science ,  et  d'avoir  anticip^  sur  la  plu^ 
part  de  nos  d^uvertes :  et  nouS)  qui 
ne  sommes  ^ue  d^hier,  nous,  que  quel** 
ques  siecles  a  peine  ont  dejii  faits  vieux 
et  presque  decrepits ,  nous  les  avons 
laiss^  eii  arriere,  emprisonnes  par  la 
nature  ell^m^me  dans  un  cerole  qu'il 
ne  leur  est  pa^s  permis  de  francbir ;  car 
la  nature,  en  im^ant  aux  civilisations 
asiatiques  une  existence calme  et  station- 
aaire,  nous  donnait,  comma  un  (larmo* 
nieux  contraste,  cette  activite  qui  devore 
le  temps  et  Tespace*  Cast  ainsi  que  les 
nations  occidentales  ont  v^cu  rapide* 
ment ;  c'est  ainsI  qu'eliee  se  sont  gran- 
dies  en  peu  oe  jours  de  toute  la  hauteur 
de  rexoerience  asiatique.  L'l^umanite 
n*est  done  pas  vne^  et  Tart^  dans  son 
essence  |a  plus  intime*  sedivise  oomme 
elle  en  qcmx  par^,  sons  rinflueiioe  des 
climate,  c'esl>^-dire  des  bepoins  nat^ 
riels«  Verity  trop  d6daign^^e  par  ceux 
m^mes  qui  ont  le  plus  etudi^  I  nistoire , 
la  marcbe  et  les  progr^  de  Fart;  verite 
que  nous  voulons  rendre  triviale ,  en 
observant  a  notre  tour  le  flux  et  le  re- 
Iftuxdela  eivilisationi  eettegrande  mer 
dont  les  courants  impetueux  ont  si 
soudainem^nt  envahi  TOccident. 

Ne  semble-t-il  pas,  en  effet,  ^ue  la 
nature  nous  ait  donn^  la  supreinatie 
dans  les  arts  oomme  une  suave  eonso* 
lation  de  nos  sonfiTraDees  sociales  ?  £1 
pouvonsHMMis  m^nnatlre  le  sublime 
rapport  de  ces  joies  intellectuelles  a  nos 

11. 


ie4 


LTTNIVERS. 


mis^res  pbysiqnes?  Remarquez  que 
Jean-Jacques  Rousseau  a  senti  ce  rap- 
port saos  vouloir  )e  com  prendre.  Plac6 
par  son  humeur  chagrine  h  un  autre 
point  de  vue,  Jean«Jacques  s'est  obstin6 
a  regarder  les  arts  comme  les  fruits  de 
Dotre  dorruption ,  destine  a  r^sir  sur 
elle  et  h  ia  perp6tuer.  De  oe  qirils  ne 
▼enaient  qvrapr^s  elle,  il  a  cru  devoir 
eoncture  quails  venatent  d'elle :  e'est  d 
cause  (TeUe  qu*il  fallait  dire;  car  la 
consolation  ne  vient  qu'apres  la  doulenr, 
comme  le  rem^e  h  cause  de  la  maladie. 
Ne  Yoyez-vous  pas  que  Tart,  c'est-ii- 
dire  le  centre  raaieux  de  la  civilisation, 
n*arrive  a  nous ,  dans  sa  marche  toute 
fatale ,  qu'apr^  avoir  essa^^  la  vie  sous 
le  ciel  d  Orient  ?  Cest  qu'il  a  besoin  de 
s'impr^ner  d*abord  de  parfums  et  de 
lumi^re;  puis ,  quand  il  a  fait  sa  provi- 
sion de  vie  et  de  force,  il  quitte  son  ber- 
cean ,  il  laisse  derri^re  lui  ces  royan- 
mes  do  bien-^tre ,  et  s*avance  comme 
un  conqu^rant  dans  les  regions  barbares 
dont  il  doit  briser  lescbatnes,  diercbant 
partout  une  misto  k  oombattre,  un 
ulcere  k  voiler. 

Telle  est  chez  nous  la  noble  mission 
de  Tart;  sa  fin  est  de  r^baufTer  notre 
existence  glac^e,  de  supplier  d  ce  qui 
nous  manque ,  de  combler  le  vide  de 
nos  cceurs,  enfin,  d*amuser,  s'il  se  peut, 
nossouf^noes  infinies.  L'art  ne  pouvait 
done  pas  rester  en  Orient,  ou  il  edt  ^t6 
sans  but.  Si  nous  Ty  retrouvons  encore, 
ce  n*est  plus  comme  moyen,  c*est  comme 
expression.  rToubiions  done  jamais 
cette  diffi^rence  essentielle  dans  le  tra- 
vail intellectuel  de  ces  deux  mondes  si 
distincts.  En  Europe,  l'art ,  consid^r^ 
comme  moyen ,  affecte  les  proportions 
de  I'industrie ;  c*est  alors  un  veritable 
travail ,  oOl  Tesprit  se  propose  un  but , 
s'cfforce  de  produire  un  effet  pr^vu  et 
combing.  En  Orient,  l'art  ne  se  propose 
point  de  but,  ne  prevoit  pas ,  ne  com- 
bine pas  d'effet.  Ce  n'est  pas  k  vrai  dire 
un  travail,  encore  moins  une  Industrie; 
c'est  une  expression  instinctive ,  un 
^panchement  fatal,  involontaire ,  o^ 
le  plus  ordinairement  I'esprit  s'ignore 
lui-m^me. 

Mais,  dira-t-on,  pourquoi  h  soleil, 
gui  avait  fait  ^lore  ce  germe  pr^cieux 
des  arts,  n'a-t-il  pas  favoris^  sa  crois- 
sance  ?  Pourquoi  le  jeune  arbre  n'a-t-il 


^tenda  ses  rameanx  que  sous  k 
Stranger,  ses  racioes  qae  dans  la 
dtrang^e?  Nous  venons  (Ten  ' 
la  raison  morale,  et  la  raifion  ^ 
ne  nous  nsanquera  pas.  Ooan^, 
effet,  que  I'intdligenee  humaioe, "' 
d6e  de  Inmi^re  et  de  cbalear,  lit 
Orient    son  premier 
Mais  la  pena^e  est  un  fluide 
qui  devient  ^nergique  et  vio 
qu'il  est  comprim^,  oui  peid  sa 
se  dilatant.  Ce  floioe  ne  pov' 
6chapper  a  Paction  ardentedo 
I'Arabie,  et  I'efQorescence  \M 
nouissement  pr^coce  da  genie 
a  laiss^  6chapper,  daos  le  vague 
la  poussiere  i6condante  de  la 
poesie.  Qui  peut  dire  les  ad 
visions  de  I'Arabe,  ainsi  ran 
pens^?  Quelle  formale  homaiaei 
^e  de  fixer  les  r^ves  briliaM 
imagination,  d'arrfiter les '^^ 
gitire  des  tableaux  qui  la 
de  recueillir  les  parfoms 
I'enivrent?  Gertes,  il  nefaQt|iaii 
dre  de  sa  force  intellectQelie,aflf 
k  une  autre  force  toute  fatate^ei 
sur  elle-m^nne  qui  est  poar  Doosi 
du  g6nie.  Son  g6nie,  a  lui,  nel 
partient  plus;  et,  s'il  lai  anive 
renfermer  dans  une  fonmile 
saisissable ,  c'est  encore  par 
a  un  ordre  fatal.  Aussi  1' 
homme  deg^nie,  ne  I'estqo' 
ment.  Mais  voyez  combien  sa 
qui  se  retrouve  parmi  ses '' 
encore  satur^e  de  ia  lumi^ 
aux  espaces  ^th^r^ ;  voyei 
jet  de  la  statue  est  pur  et 
que  le  bronze  coule  sans  eesei 
qu'une  lave  briliante;  c'est  qa(| 
la  formule,  c'est-^-dire  le ' 
pas  un  moule  trop  6troit 

Que  si  vous  compares  «i 
ranee  magnifique  de  Un  et  • 
cette  animation  qui  s'^ncfaeaf 
ment  au  dehors ,  k  notre  tosixr 
t^rieure  de  I'Occident,  a  ootzv 
qui  se  condense,  qui  se  replie  ^ 
mtoe,  comme  pourser^offiTi 
anticiperez  peut-tee  sur  toj^ 
d^adence  qui  s'approchenMt 
verrez  comme  nous  que  rOcddw 
duit  a  se  d^vorer  lui-nwroe,  don 
tdt  p6rir  d'inanition.  C'est 
se  ronge  les  bras. 


SYRIE  MODERNE. 


165 


En  Orient,  I'art  n'a  ^t^  qu*une  sa- 
perflalt^  intellectuelle.  En  tace  d*une 
nature  si  majestueusement  fertile ,  a  la 
lumiire  du  plus  resplendissant  des  so- 
leils,  h  Tombre  des  verdures  las  plus 
embaum^es ,  que  voulez-vous  que  fosse 
rOriental  ?  II  regarde  et  r^ve.  £t  n'est* 
ce  pas  la  le  plus  sublime  emploi  de  ses 
facult^s?  La  contemplation  solennelle 
des  beaut^s  si  splendideroent  groupees 
autour  de  lui ,  n*est-ce  pas  son  hymoe 
a  Dieu  la  plus  6loquente,  ia  plus  haute  P 
Tout  lui  platt :  la  moindre  paillette  de 
lumi^re  jaillissant  a  travers  les  arbres ; 
la  fa^on  diverse  dont  les  ombres  sont 
projeties  sur  le  sol,  ou  d^oupees  par  les 
feuilles ;  les  bruits  de  Pair,  les  magnifi* 
cences  du  eiel,  tout  devient  aliment  sa- 
voureux  pour  ses  sens ,  joies  et  d^lices 
pour  son  drae.  Eh  bien ,  quand  voulez- 
vous,  au  miKeu  de  cette  rotation  de  jouis- 
sanees  enivrantes ,  quand  voulez-vous 
qu'il  trouve  la  place  d*etudier  tout  le 
technique  de  Tart?  Dans  notre  Europe, 
sitdt  qu*il  nous  apparalt  une  splendeur 
de  la  nature  ou  de  Thumanite,  de  peur  de 
la  perdre  a  tout  jamais^  de  peur  de  n'en 
plus  rencontrer  d'autres,  nous  nous  ba- 
tons de  la  fixer  svtr  la  toile  ou  dans  le  mar- 
bre.  Et  pour  nous  la  traduire  ainsi  que 
d'ennuls  nous  acceptons!  que  de  de- 
goOts !  quelle  longue  attente !  L'Oriental, 
au  contraire ,  n*a  pas  le  triste  besoin  de 
s'enqu6rir  de  la  composition  des  cou- 
leurs,  de  Pagencement  des  nuances, 
lui  qui  en  suraoonde  si  in^puisablement 
dans  sa  nature  exterieure  et  dans  son 
monde  mtime.  Voila  pourquoi  Tart,  en 
Orient,  n*est  qu*une  superfluity  intellec- 
tueile;  on  ne  8*en  va  pas  choisir  une 
seule  beauts,  s'arr^tera  une  perfection 
unique,  lorsque,  sous  vos yeux  comme 
dans  votre  dme,  ii  en  passe  dMnnombra- 
bles ,  rivalisant  chacune  de  griice  ou  de 
grandeur. 

L'artiste  oriental ,  c'est  celui  qui  vit 
de  soleil ,  de  parfums  et  d'images ;  c'est 
celui  qu*un  reflet  de  lumiere  enchante; 
c'est  celui  a  qui  la  vue  d'un  arbre, 
d'uDe  fleur,  donne  des  heures  d'admi- 
ration ,  d*enthousiasme.  II  ne  lui  feut 
qu*une  brise  fratche  et  odorante  a  tra* 
vers  un  bois  de  sycomores ,  une  algue 
roulant  sur  sa  mer  dor^,  des  touffes 
d*arbres  et  de  fleurs  parsemees  dans  les 
plaines ;  moins  que  cela !  il  ne  lui  faut 


3u'un  buisson  odorant,  ou  les  eaux 
'une  source  ^gouttant  du  tronc  d'un 
palmier,  pour  le  fisire  r^ver  tout  un 
jour,  r^ver  des  choses  du  ciel,  rSver  les 
ddices  de  son  paradls  :  des  virginity 
renaissantes  et  des  tables  de  metsexquis. 
Vous  le  verrez  passer  de  longues  heures 
a  contempler  la  nature  aspect  par  aspect, 
feuille  par  feuille,  herbe  par  berbe;  car 
c*est  a  s'arrdter  sur  les  moindres  details 
que  son  eceur  8*emplit  et  s'el^ve ;  c'est 
k  partir  peut-toe  d  une  branche  ramas- 
see  quMl  en  viendra  k  comprendre  les 
prodigieux  d^veloppements,  la  structure 
sublime,  la  splendide  variety  de  la  na- 
ture; et  de  la  a  Dieu  il  n'ya  qu*un 
pas. 

Maintenant  dotez  d'un  g^nie  f^cond 
quelques-UDS  d*entre  ces  contempla- 
teurs,  et  ne  concevez-vous  pas  qu'il  se 
succedera  en  eux  une  suite  merveilieuse 
de  r^ves,  de  pensees,  d'exaltations? 
C'est  lorsqu'un  lac  est  tranquille ,  lors- 
que  le  calme  de  sa  surface  ne  s'inter- 
rompt  d'aucune  ride,  qu'alors  le  bleu 
des  cieux  et  les  verdures  d*alentour  s*y 
refletent.  Tun  plus  splendide,  les  autres 
plus  el^antes  et  plus  gracieuses.  Le 
m^me  phenomene  arrivera  sur  la  lim*^ 
pidite  de  leur  dme ;  ils  se  seront  choisi 
des  spectacles  de  beaute  etd'ail^gresse; 
ils  auront  ^cout^  avec  extase  le  concert 
des  Elements ,  et  les  inoombrables  bar- 
monies  de  la  nature;  n*en  doit-il  pas 
naltre  au  dedans  d'eux-m^mes  une  con- 
tinuity d*^lans  vers  la  nature,  de  retours 
k  rhumanit^,  de  louanges  a  Dieu,  en  un 
mot  de  quoi  faire  du  lyrisme  toute  une 
vie  ?  Ne  doit-il  pas  s*etablir  un  Change 
de  sublimites  entre  leur  dme  et  la  na- 
ture ?  Ils  opposent  aut  magnificences 
partielles  qu  elle  etale  devant  eux  les 
souvenirs  des  beaut^s  d6ja  vues ;  puis 
les  richesses  humaines,  puis  les  opu- 
lences sensuelles  leur  reviennent  aussi  I 
Ils  convoquent  k  la  fois  leurs  songes  les 

EIus  respfendissants.  C'est,  comme  ils 
s  disent ,  les  ruisseaux  de  leurs  inspi- 
rations diverses  qui  vienncnt  chacun 
apporter  un  tribut  d'emotions  k  leur 
fleuve  int^rieur  de  po^sie ;  alors  le  voila 
ce  fleuve  qui  roule  a  travers  des  campa- 

J;nes  et  des  jardins ,  s'enrichissant  de 
eurs  couleurs  et  de  leurs  parfums, 
jusqu'a  ce  qu'il  se  perde  plus  tard, 
comme  toute  chose  et  touta  pens^. 


I$d 


vmm»B. 


dans  rimnaensiui  jnMla^tueUt,  tfaos  la 
mar  aupr^ipe  i^  poeaie,  daoa  Diea. 

11 9at  logigue  que  ^Orient  noua  aait 
ififerieur  dans  Tart,  puisqu'il  a  la  cod- 
tmuiU  dana  rinipiratioQ,  ei  que  par 
consilient  i)  d^a^ne  le  cboi)(  eotre  ses 
iQiagin^^ioBS  diveraes  at  le  iravail  sur  le 
r^ve  pr^fer^..  Que  iui  importe  una  aeule 
perfeotipn  ^teriiisee  par  le  pinceau! 
Celui-la  ue  s'approvisionne  point,  en 
place  publique,  de  quelques  roses  ^touf- 
lees  (fans  dee  vases ,  qui  possede  chez 
lui  des  parterre  Si  da  rosiers.  L*art  ne  vit 

fue  d*etudes  :  rOri^ntal  les  repousse, 
/artii^te  dqit  £tre  minutieux «  attentif 
^  tout  instant  au  progres  deson  type  ou 
a  la  verite  de  son  caique ;  rOriental  passe 
rapidemfnt  d'une  pensee  a  uue  autre, 

f)arce  qu'il  a  la  certitude  de  la  joie  et  de 
a  beaute.  L'arliste  doit  caresser  son 
luspiratipni  la  veiller  sana  cesse,  en 
avoir  tputes  les  sortes  de  soucis  et  de 
soins ;  rOriental  ne  clioie  pas,  il  aime. 
D'apres  les  restes  qui  nous  en  de- 
meurent)  etd'apres  les  raisons  nr^orales 
que  j'ai  tooncees ,  je  n*ai  pas  peine  k 
^oire  aue  dans  les  civilisations  prlniiti- 
ves  de  1  Orient  la  peintureet  la  statuaire 
nefleurirent  que  inediocrement.  Sana 
doute  ^n  en  abandonna  la  culture  a  des 
eaprits  sBOQudaires ;  sans  doute  il  dut 
I'en  suivre  un  dedain  assez  g^eral  de 
oes  arts  ainsi  raval^.  Aussi,  a  Tbeure 
de  la  predominance  dea  Arabes ,  Maho* 
metordonna-t-ii,  de  ia  part  de  Dieu»  de 
ne  (ilus  representer  la  face  bumainet 
4e  Be  point  davantage  caricaturer  Thu- 
manite.  Ches  oe  grand  prophete  ceUe 
defense  ful  un  acte  sa^e  et  ^leve  :  il 
avait  mission  de  reliabi liter  le  corps ,  il 
ue  dt>vait  pas  permettre  qu'on  en  imitiit 
maladroitetnent  les  formes.  L'Arabie 
cria  done  anatbeme  a  la  peinture  et  a  la 
statuaire;  mais,  en  revanche,  I'arcbi-* 
tecture  y  atteignit  une  sommite  admira- 
ble. Si  llnde olioisissait sa  montagne la 
plus  liauiedans  N  cieux,  la  plus  large  de 
base,  pour  v  taiiler  interieurement  une 
pagode;  si  r£gypte  peupla  les  deserts 
de  aes  pyramides  inimenses,  TArabie 
oonserTa  dignentent  la  tradition  de  oes 
audaees  de  pierre.  Elle  aussi  eleva  par- 
tout  $e$  aveltes  minarets  et  bbs  domes 
majestueux;  elle  les  s«ma  sur  ia  route 
de  ses  conqu^tt^s.  Voyeis  la  Syrie,  elle 
en  eat  pUioe.  Maia  p#urquoi  oet  art 


deviaMI  magnHiqin,  tsMfii  ^t 
autrea  restaient  saoi  frogrte?  r 

2uMl  eat  le  aeul  qui  sa  eon^iei 
omroe  de  g6nie,  en  one  nw 
ealme  et  sans  efforts,  et  qui  s'e 
par  dea  nianGcuvriers;e*estqiKl^ 
tecture  est  le  lyrisme  dans  lei  i 
Permettes-nouB  de  revcoir  e 
oette  gradation ,  que  nous  c 
o*avoir  paa  suffisaromeat 
et  de  r^unier  ees  observation  f 
lea  sur  lea  arts  par  quelques  i 
la  musique  en  particulier.  Lci^ 
taux  n*ont  pasdemusique^  etnef; 
pas  en  avoir.  Leurs  moeun  not 
res ,  les  el^nents  multipli^  M 
physique  qui  les  entoureot,  b*i 
necessite  cbez  eux  cet  art  n  i 
consolations.  Et,  en  efTet,  i 
ojel  paifum^  tout  cbante,  tout  if 
nise  :  c*est  un  vaste  ensenUii 
de  tons  lea  ^trea  orM ,  une  i 
d*aecord8  sans  dissonoaacei,  I 
lodie  abondante  oik  s'sgeneeotJ 
les  sons  les  plus  pure ,  toutei  Ir 
de  la  matidre.  Que  feraicatn 
denotre  muaiquePLeurssem 
seraient  bless^  sans  doute  pv J 
flatte  lea  nAtres,  et  leur  im  , 
n*aurait  plus  de  oouleurs  biiUaDtl 
pensees  gracieuses  a  prater  a  ee>| 
que  noua  animons  oomme  ler^ 
gage  du  bonheur, 

D*un  autre  o5td,  lea 
Nord ,  en  proio  aux  besoiss  ] 
gjrossiera,  aux  misses  les 
tisaantesi  eombattaient  isolii 
tre  les  rigueurs  de  la  nature, 
cher  dans  la  civilisation  an  a 
roent  ^oign^  a  des  maux  i 
niforniite  du  mal,  oomme  ceUe  i 
devaient   emp^clier   la 
deux  extr^mitea  du  noondec 
£n  italic,  au  contraire,  si  leal 
morales  commencent  k  peserj 
ccBur,  si  lea  souvenirs  du  Vm 
Tfitna  vienneiil  attnster  Vkmd 
la  pens^  sombre  par  inataotB,ea 
contraster  aveo  le  oalmede  VUi 
et  la  limpidite  de  PArno :  voilki 
mieredissonnanoe,  voila  la  musil 
musique  devait  naitre  en  ItalM^ 
avait  tout  juste  assez  de  soutii 
tout  juste  assex  de  bonheur  pear  I 
tar ;  puis  a  mesure  qua  la  civibl 
d6liait  les  chatnes  da  oiiiare  pbjl 


SYRIE  MODERNE. 


167 


qui  eourbaient  les  peoples  septentrio- 
oaux  y  eux  aussi  se  cr^ient  un  bien-^tre 
moral,  en  se  errant  des  jouissances  ma- 
t^rielles.  La  musique,  non  plus  aban- 
donn^e  h  riospiration  toute  sensuelle 
d'un  eondolier ,  ni  au  savoir  p^antes- 
que  aun  maltre  de  chapelle,  mais 
cultiveeavec  soId,  avec  amour,  se  na- 
turalisait  en  Allemagne,  parce  que 
rAIIemagne  a?ait  besoia  d*elle.  £h 
bieQ*  Tart, dans  sod  acception  la  plus 
abstraite ,  a  suiri  la  m^me  marche.  Ea 
Orient ,  c*est  un  reflet  souvent  insaisis- 
sable  de  la  lumi^re  qui  inonde  le  monde 
^xt6rieur;  en  Italie,  ce  n*est  plus  que 
l*^ho  de  la  brise  du  soir,  le  murmure 
du  flot  qui  vient  mourir  sur  la  plage; 
dans  le  Nord  enfia,  c*est  un  monde 
ideal  qu*il  faut  rSver  pour  ne  point  as- 
sister  au  monde  reel.  Voila  pourquoi 
rinspirationallemande  est  plus  bardie, 
plus  eaergique,  plus  riche  d  barmonies; 
voila  pourquoi  Tinspiration  italienne 
est  plus  suive,  plus  passionnee,  plus 
ui^lodieuse;  voila  pourquoi  Tiyispiratiop 
orieDtale  est  plus  ^levee,  plus  piire, 
plus  ravonn^nte,  £a  ^rop^  Tar^  ep 
Orient  k  g^ie. 

J>B  1.4  MB91B  OIUBNTAUi. 

Nous  avons  present^  le  sensual isme 
eomme  le  earaetere  le  plus  saillant  de  la 
po^sie  orientale,  comme  la  raison  dt  sa  ' 
superiority  sur  la  n^tre,  sans  oublier 

Sue  notre  oonvietioa  pouTait  irriter 
'autres  eonvictions,  que  nos  preferen- 
ces pouvaient  blesser  les  fibres  de  la 
susceptibility  nationale;  mais  lorsqu*une 
T^ite  puissante,  ineontestable^  vient 
M  ranger  h,  notre  systdme,  lorsqu*un 
fait  materiel  vient  se  Joindre  k  notre 
proposition  comme  un  corollaire  im- 
m^iat,  eomme  ub  rapport  de  haute 
loglque^  nous  ii'avons  plus  qu'li  laisser 
parler  la  raison  :  elle  saura  biea  nous 
dire,  en  eflfet,  que  le  sensualisme  de  la 
po^sie  asiatique  devait  avoir  pour  Acho 
hpopularUe.  Et  mainteoaot,  poetede 
roecident,  n'esp^res  pas  nous  ^lap- 
j^rl  II  faut  que  votre  troot  se  oourbe, 
il  faut  que  votre  or^eil  s'bumilte  de- 
vant  cette  popularity  qui  ne  saurait 
4tre  votre  partage;  car  voos  n'oserez 
pas  meeonnattredaos  la  g^n^reuse  sym- 
pathie  des  masses,  dans  le  oulte  uni- 


versel  de  tout  ce  qui  pense,  cette  aureole 
qui  vous  manque.  Eh  bien,  non  I  ce 
n*est  pas  h  vous  qu'il  a  6te  donne  d'e- 
inouvoir  les  masses;  ce  n'est  pas  a 
vous  que  le  peuple  appartient.  Jetpz  les 
yeux  sur  vos  OBUVres ,  reporte^-les  sur 
celles  d'Orient,  et  comparez* 

En  Occident,  le  poeteest  un  homme 
d*exception.  Sans  cesse  froiss^  par  les 
prosaiques  douleurs  de  notre  monde  gla- 
cial,  son  premier  besoin  comme  son  pre- 
mier desir  est  de  s'elever  au-dessus  de 
la  foule,  c*est-a-dlre  de  s*isoler.  Alorsil 
plane;  et,  de  toute  la  hauteur  de  son 
lodividualite ,  il  jette  en  bas  quelques 
regards  de  ^itie.  Mais  bientot  son  or- 
fueil  s'est  devor^  lui-m^me,  et  devieat 
impuissant  a  remplir  le  vide  cruel  de 
son  coeur.  II  tourne  done  les  yeux  vers 
cette  foule  tant  meprisee :  il  revienta 
elle,  il  la  flatte,  il  lui  demande  son 
admiration.  Mais  la  fou|e  aussi  a  son 
or{;ueil ,  elle  liii  rend  niepris  pour  m& 
pris.  «  Tu  as  voulu  te  retirer  de  mol , 
ft  dit'^elle  au  poete ,  eh  bien  I  reste  dans 
ji  ton  empyr^e;  desonnais  nous  ne 
«  saMrioqs-nous  entendre.  »  Cest  ainsi 
que  le  poete  d66es|)er^  se  plaint  de  n*e- 
tre  Das  compris,  et  que  rhomnie  po- 
sitir,  loin  de  s*off^nser  des  dedains 
qu'ou  lui  prodigue,  les  accepte  comme 
un  brevet  de  sagesse.  II  en  resulte  que 
ehez  nous  un  lioumie  de  genie  passe 
le  plus  soMvent  pour  un  persounage 
ridicule,  d'autant  plus  que  les  gens 
veritablenient  ridicules  savent  fort  bien 
sedonuer  poui  hommesde genie.  Enlln, 
soit  qu'il  y  ait  une  guerre  aiiiarnee  en- 
tre  las  deux  principes  du  beau  et  du 
bien,  soit  que  Tivraie  de  i*espnt  ait 
^touffi6  parmi  nous  les  gernies  de  la 
haute  poesie,  il  ne  faut  que  de  la  bonne 
foi  poor  reoonn&^tre  combien  elle  est 
impopulaire. 

Mais  le  poete ^  en  Orient,  cVst 
rhommedu  peuple «  e'est  Ic  bien-aim^ 
du  peuple.  11  ne  s'est  point  retire  de  la 
foule,  lui;  il  n'a  pas  pris  le  vulgaire  en 
piti^;  il  n'a  pas  dit  dans  son  orgueil : 
«  Ces gens-la  ne  mecomprendrontpas  I* 
Sait-ilseulementqu'ilest  poete?  sait-il 

3u'il  a  trouv^  d'admirables  paroles  pour 
'admirables  pensees?  Esclave  d'une 
inspiration  toute  fatale,  il  ob^it  uis- 
tinctivement  k  une  sorte  de  besoiB 
sensuel ,  et  sa  voix  qui  s*^ldve  dans  le 


168 


LTOaVERS. 


silence  de  la  nuit  comme  tin  soupir  de 
bonheur,  module  avec  emphase ,  mais 
sans  orgueil^  des  vers  pletns  de  dou- 
ceur en  m^me  temps  que  d*4^ner^ie.  £t 
le  poete  est  compris,  vous  dis-je;  car 
cette  voix  est  Techo  de  la  pensee  de 
tons ,  car  chacun  de  ses  vers  est  une 
coupe  destin^e  a  recueillir  les  gouttes 
eparses  de  la  rosee  qui  flottaient  en- 
core dans  le  vague  des  airs.  Avec  quel 
charme  TOriental  retrouve  dans  les 
accents  du  poete  ses  plus  douces  illu- 
sions ,  ses  raves  les  plus  chers ,  non 
plus  dilate,  pour  ainsi  dire,  par  la 
chaleur  et  le  oien-^tre,  non  plus  in- 
saisissables  et  vaporeux,  mais  fixes  par 
une  formule  appreciable ,  arr^t^ ,  des- 
sines  par  des  contours  moins  fugitifs ! 
Quelles  delices  pour  lui  d'accumuler 
sans  peine  les  tresors  de  son  imagina- 
tion ,  de  les  rassembler  sans  efforts ,  de 
les  compter  sans  d^odt  I  La  melodic 
qui  frapoe  ses  oreilles  est  pour  lui  la 
source  aune  jouissance  toute  passive, 
et  il  s'abandonne  volontiers  k  ce  plai- 
sir  sans  fatigue.  Comment  le  poete  ne 
serait-il  pas  compris  f  Ne  devinez-vous 
pas  qu*en  Tdcoutant  TOriental  s'^ute 
penser? 

II  ne  faut  pas  croire,  d'ailleurs,  qu*une 
telle  popularity  soit  incomoatible  avec 
la  majesty  et  la  {prandeur.  Ce  qui  serait 
vrai  dans  notre  civilisation  sans  dignity, 
sans  haut  caractto,  deviendrait  une 
erreur  dans  la  society  orientale,  si 
magnifique  de  noblesse.  Gardons-nous 
bien  de  juger  la  popularity  de  la  podsie 
en  Orient  d'apres  la  valeur  que  nous 
attachons  le  plus  souvent  k  ce  mot ;  car 
alors  nous  ne  saurions  nous  attendre 
qu'a  des  chants  grossiers ,  k  des  inspi- 
rations triviales.  Mais  rappelons-nous 
incessamment  que  nous  avons  traverse 
la  M^iterranee  et  Iaiss6  derriere  nous 
les  bonteuses  mis^res  de  I'Occident. 
lei  la  lumi^re  regne,  ici  le  poete  n'a  pas 
besoin  de  descendre  au  peuple,  parce 
que  le  peuple  est  a  son  niveau. 

La  poesie  des  sens  devait  done  6tre  la 
po^sie  populaire ;  mais  elle  ne  pouvait 
naltre  que  dans  ce  monde  de  bonheur, 
oQ  rhomme  physique  domine  si  com- 
pletement  Fbomme  moral.  Les  nations 
occidentales  n'^taient  pas  faites  pour 
cette  contemplation  tranquille ,  pour  ce 
calme  fortune  de  la  poesie  asiatique; 


elles  ont  snivi  lear  voie  d*actmtii 
cl*inqui6tude,  en  n^accordaDt  a  \ 
poetes  qu'un  pen  d^envie  et  bea 
de  m^pris.  Ce  n'est  pas  que  ks  < 
taux  n'aient  senti  comme  nous  (^ 
poete  etait  quelque  chose  de  ploi  < 
moins  que  le  reste  des  bommei;i 
ils  n'ont  p9S ,  comme  nous ,  i 
superiority  avec  jalousie  ou  i 
avec  dedain.  Peut-^tre,  apres  t 
raient-ils  en  droit  de  le  prendre  es^ 
car  ce  besoin  de  formuler  les  i ' 
bles  idees ,  cette  activity  qui  s 
concentrer  les  rayons  epars  de  1 
mi^re,  est  sans  doute  aux  yeux  i 
riental  une  Strange  maladie :  oefi 
il  la  respecte.  £t  nous,  que  ] 
monte  a  la  hauteur  du  poete;] 
qui  rampons  au-dessous  de  lui^ 
avons  trouv^  pour  lui  plus  d*ei 
d'admiration,  plus  de  m^rii  i 
que  d'envie;  il  semble  que  le  T 
cette  arme  empoisonn^  qui  i 
particttlite,  se  soit  essayte  d*al 
les  hommes  qui  devancaient  to  I 
Aox  yeux  du  vulgaire ,  le  nom  de| 
n'est  plus  que  celui  d'unc  -^"^ 
tincte  de  fous,  dont  la  mon 
class^  comme  une  autre  dans  Tsi 
g^n^al  des  affections  maladi? eid8l| 
prit,  dont  le  traitement  sp^al  c  *, 
soins  extraoidinaires,  que  sais-je  ?  | 
dtre  mdme  un  corps  de  logis  i 
dans  les  maisons  de  sant^  En  i 
lant  le  poete  au  fou ,  nous  av 
fait  pour  Tavilir,  parce  qu'il  st| 
toujours  dans  notre  coatpassioal' 
vain  de  mepris  et  de  ridicule.  I' 
traire  est  arrive  en  Orient. 
:  Si  le  rapport  qui  existe  entitk 
du  poete  et  la  fidvre  du  foa  r 
^happ^  au  bon  sens  popuraire, 
insuftant  n'a  pas  accueilli  les  t 
de  rhomme  inspir^y  au  sou? 
transports  de  1  homme  en 
Tout  rOrient  respecte  le  fou  a  ( 
poete.  Tout  TOrient  resarde 
comme  une  cr^ture  sacree,  pai 
le  poete  est  un  fou.  Peut-ltre«  i 
tournant  sur  nos  pas ,  troave 
dans  ce  respect ,  aans  cette  n 
une  arrlire-pens^  de  vanit^ 
tive,  une  logique  d'amour-propre.  1 
avons  dit  que  le  peuple  s  eeootaiti 
mime  en  ecoutant  la  parole  du  ] 
il  devait  done  manager  Jes  . 


SY^I£  MODERIO;. 


t      d*inspirations  •  et   prendre  garde  au 
B      oontre-coup  du  mepris  qui  aurait  pu 
e      frapper   la  demence.    Au  reste,   leg 
ft      OrientauXy  et  g^ndralemeat  les  peuples 
SI      primitifs ,  ont  pouss^  le  respect  pour 
(      les  fous  jusqu*^  les  asslmiter  aux  sages. 
B      Les  Persaos  appellent  medjzoub,  ou 
w      illuming,  rhomme  aimanU  par  la  gr§ce 
a      de  Dieu,  rhomme  qui  fait  profession  de 
i      piet^  et  de  contemplation ,  ce  qui  n'em- 
lE      p^che  pas  ce  m^me  mot  de  signifier, 
I      dans  le  langaee  usuel,  un  idiot,  un 
s.      bomme  dont  rintellig^nciB  est  malade. 
»      Us  ajoutent  m^me  que  le  fou  est  conduit 
^      par  Dieu,  de  mSme  que  le  poete  est 
k      mspir^  par  lui :  de  fa^n  que  ce  der- 
I!      nier,  a  leur  sens ,  ne  8*appartient  pas 
I      plus  au  moral,  que  le  premier  ne  s'ap- 
«      partient  au  physique. 
}         Mais  il  u  est  pas  besoin  de  reporter 
s      sans  cesse  nos  regards  sur  nous*m£mes, 
it      sur  notre  Europe ,  pour  sentir  ces  puis- 
i     sants  contrastes  des  civilisations  et  de 
g     mceurs.  Au  milieu  des  regions  les  plus 
u      fortunees  de  TAsie,  la  Jud<6e,  pauvre  et 
t     souffrante,  se  montre  comme  une  lepre 
i      hideuse.  La  nature  semblc  Tavoir  acca- 
(      bl6e  k  plaisir  de  toutes  les  mis^res  ex- 
1      eeptionnelles.  Un  pays  aride ,  des  mon- 
\      tagnes  d^pouillees,  un  fleuve  triste  et 
i      sans  majeste ,  devaient  isoler  la  nation 
i      juive  des  autres  nations  de  TOrient.  En 
I      effet,  avaut  d'etre  les  esclaves  de  leurs 
f       voisins,   les  Juifs  sont   les   esclaves 
I       d'une  nature  rude  et  sauvage ;  ils  sont 
ignorants,  grossiers  et  cruels  comme 
tons  les  peuples  mis^rables.  Comment 
alors,  aux  jours  de  la  domination  6tran- 
gere ,  ont-ils  pu  conserver  leur  natio- 
nality, si  orgueiileuse  et  si  m^pris^? 
G'est  qu*ils  etaient  eux-m^mes  nes  Stran- 
gers en  Orient ;  c  est  aue  les  chatnes  de 
misere  qui    les  accaoiaient   servaient 
aussi  ^  les  unir.  lis  n'ont  done  jamais 
pu  se  confondre  avec  leurs  oppresseurs, 
et  c'est  ainsi  quMls  ont  traverse  des  sie- 
cles ,  agglomeres  par  Toppression  elle- 
m^me.  Et  voulez-vous  comprendre  par 
un  seul  mot  combien  ils  sont  Strangers 
arOrient  ?  Ouvrez  leurs  livres  :  ils  par- 
lent  de  Vavenir.  Or  ce  mot  A^avenir  est 
un  abtme ,  que  rien  ne  saurait  combler, 
^tre  la  veritable  sociStS  orientale  et  la 
sociStS  juive.  Pour  esperer,  il   fout 
iM)u0rir ;  TespSrance  est  une  larme. 
Tandis  que  lerestedeTOrientjouis- 


169 


sait  sans  inquietude  du  bonheur  present 
que  la  nature  lui  prodiguait,  la  JudSe 
seule  nourrissait  une  pensSe  d'avenir, 
une  espSrance,  parce  qu'elle  etait  mise« 
rabie  et  opprimee.  Suivons  mainlenant, 
dans  son  reOux  en  Europe,  cette  civilisa- 
tion si  dSplacee  en  Asie.  On  voit  dSjk 
que  les  Hebreux  se  trouvent  dans  le 
mSme  rapport  d*opposition  que  nous- 
mSmesavec  la  sociStS  orientale,  essentiel- 
lemenl  basSe  sur  le  bien-Stre  matSriel. 
Or ,  nous  ne  pouvions  aller  a  eux ;  ils 
sont  venus  a  nous.  Sans  doute,  aux  yeux 
dela  politique,  leur  dispersion  par  toute 
la  terre  est  le  dernier  coup  aui  pdt  les 
frapper  comme  peuple,  et  le  aernier  de- 
gre  ae  leur  ruine ;  mais  aux  yeux  de  la 
philosophic,  ce  jour-1^  est  le  premier 
de  leur  triomphe.  Croyez-vous  que  la 
societe  juive  soit  ensevelie  sous  les  murs 
de  Jerusalem  ?  Croyez-vous  que  ses  (Slq^' 
tinees  soient  accomplies  ^  jamais?  Non. 
La  voilaaui  serSpand  par  toute  TEurope, 
qui  envanit  I'Occident  sans  combat.  Le 
genie  qui  prSsidait  ^  oette  bizarre  ci- 
vilisation se  trouve  k  False  dans  notre 
monde;  il  se  modifie,  il  s'agrandit,  et 
lechristianismevainqueurnaitdujudals- 
me  persecute.  C'est  que  la  loi  hebraique 
semblait  faite  pour  nous  au  moyen  dge, 
grossiers,  cruels  et  inquiets  comme  la 
peuplade  exceptionnelie  qui  nous  Fappor- 
tait  de  Palestine ;  c*est  que  le  principe 
social  des  Juifs,  comprimS  dans  son  es- 
sor  par  le  bien-Stre  asiatique ,  ne  pou- 
vait  se  dSvelopper  que  parmi  les  souf- 
frances  et  les  misSres  d*une  autre  con- 
tree. 

Et  cependant,  chose  bien  remarquable, 
malgreieur  dispersion,  malgre  le  triom- 
phe de  leurs  doctrines,  les  Juifs,  aprSs 
tant  de  siecles,  ont  dA  rester  unis  enlre 
eux.  Paruneetrangefatalite,  le  mepris 

?ui  les  avait  maintenus  dans  un  coin  de 
Asie  les  separe  encore  du  reste  des 
nations  que  leurs  doctrines  ont  soumi- 
ses.  Nous  acceptons  leur  civilisation, 
leurs  dogmes,  leurs  livres  sacres,  et 
nous  accablons  leur  secte  de  persecu- 
tions et  de  haine.  Pour  expliquer  une 
telle  anomalie ,  il  Caut  se  reporter  au 
temps  ou  ce  peuple  apprenai  t  dans  la  ser- 
vitude ^  detester  lesetrangers.  11  a  con- 
serve dans  i'exii  cette  haine  des  nations 
a  laquelle  les  supplices,  les  vexations 
sans  nombre,  les  plus  hideuses  tortures. 


170 


LTJNIVERS. 


ont  trop  bien  i^pondQ.  Wats,  apr^  tout, 
en  Europe  comme  en  Asle,  les  Juifs, 
unis  par  les  Hens  d*une  foi  oommune, 
Font  et^  bien  plus  encore  par  la  com* 
munion  da  m^pris  et  du  martyre :  c^est 
la  tout  le  secret  de  leur  natiDnalit6.  Et , 
d'ailleurs,  malgr^  ce  m^pris,  cette 
haine ,  ces  persecutions  infamantes ,  ils 
sont  encore  nos  vainqueurs  :  le  peuple 
est  avili ,  sans  doute ,  mais  le  dogme 
estgiorieux;  et  Titus,  en  renrersant 
leur  temple ,  n*a  fait  que  les  placer  au 
pointde  depart  d^une  immense  conqu^te. 

Or,  si  la  lot  chr6tienne,  qui  n'est 
qu*une  modification  du  judalsme .  nous 
a  trouv^  si  faciles  h  soumettre ,  11  faut 
bien  reconnattre  des  rapports  frappants 
entre  le  g^nie  social  de  PEuroije  ou  dix 
au  quidzl^me  si^cle  et  celui  qui  malnte* 
nait  en  Asie  la  petite  population  b^ 
braTque :  ces  rapports  sont  reux  des  ml- 
s6res  materielles.  Nous  ne  devons  done 
pas  nous  ^.tonnerde  trouver  dans  iespoe- 
tesh^breux  ce  psychisme  6tranger  a  rA- 
sle,  et  qui  a  dd  se  naturaliser  dans  notre 
Europe.  Les  poetes  h^breux  sont  des 
propn^tes ,  des  voyants.  Tandis  que  le 
peuple  vainqueur  cnante  avec  une  noble 
insouciance  le  repos  et  le  bonheur  du 
moment  present,  les  poetes  du  peuple 
valncu  s*elancent  dans  les  espaces  de  ra- 
venir  pour  y  chercher  cette  liberty  qui 
les  full.  Leur  dme  se  tournesans  cesse 
vers  ces  illusions  ch6ries  de  r^g^n^ra- 
tion  et  de  vengeance ;  leur  imagiuation 
s'^puise  k  formuler  des  promesses  de 
bonheur  et  de  sloire. 

«  Israel  a  mis  sa  confiance  dans  le 
«  Seigneur,  disent-ils, et  leSeigneurd^- 
«  livrera  Israel.  Les  ennemis  du  peuple 
«  saint  seront  cou verts  de  confusion, 
«  et  le  Seigneur  leur  brisera  la  t^te.  » 

C'est  toujours  ainsl  qu'un  chef  re- 
muant  et  ambitieux  parlera  h  un  peuple 
dVsclaves  qu'ilveut  exciter  li  la  revolte; 
on  lui  promet  sans  oesse  le  secours  de 
Dieu,  on  exalte  ses  souffrances  pro- 
genies par  Taspect  du  bonheur  k  venjr, 
et  on  lui  livre  d*avance  tous  les  objets 
de  sa  haine.  A  la  v0rit6,  les  Juifs, 
continuellement  d^us  dans  leurs  esp6- 
ranees,  n*ont  eu  d'autres  re^sources 
que  de  leur  assigner  un  terme  certain , 
mais  eloign^.  C*est  ainsi  que  leur  attente 
du  Af  pssie  est  devenue  le  fondement  de 
leur  religion,  et,  par  contre-coup,  de 


la  ndtre;  mais  par  mie  Uzamrie 
s'attache  obstinement  aux       ' 
ce  peuple,  il  CautqiieMp 
toument  coatre  laVmliBt 
ment  Pbeure  de  la  d^HmM 
pas,  non-seulement  il  n'est  fn 
aux  Juift  d'aliumer  lebAcher^r 

Seance,  mais  leur  esdtngeie 
e  gOnOration  en  g^entioB, 
supplices ,  les  persecutions  la 
bre,  sont  les  seules  rinses 
hommes  h  leors  eiis  d*espolr 
haine. 

Puis  la  fatality  tembte  y 
rironie.  Plus  tard,  lorsgrobi 
chrOtlenne  est  devenue  rorte  tfi 
nante^  lorsqu'elle  se  charge  dsi 
les  tortures  et  les  bOdien  rW! 
Juifs,  e'est  pour  eux  qve  ia 
du  bourreaurougissent  danslsl 
ardents,  c*est  pour  eux  qne  k 
s'allume.  Attendez ,  la  fbrtov 
serve  encore  un  sarcasne  ' 
Lorsque  rinauisition  ti 
le  fanatisme  des  tem^\ 
Telle  Texemple  horrible  dtf 
humains,  c*est  en  rOpOtantld 
d'espoir  que  Ton  etouffeieaB 
gome)  Quelle  moquerie croeMI 
^e  la  flamme  dOvore  do  r-"'*^ 
raOlites,  quelques  moioes 
leur  jettent  &  la  bee  eette 
psalmodie: 

«  Isra3  a  mis  sa  conllaMi 
Seigneur,  et  le  Seigneurn'j 
pas  Israel ;  les  ennemis  do 
Seront  converts  de  confunoo. 
gneur  leur  brisera  la  t^te.  * 

Et  le  juge  qui  les  condaaiae 
SUIT  le  texte  m^me  de  leur  In: 

«  Vous  les  ^orgerrttwB, 
serez  sans  pItiO  pour  eux.  Mi 
ch.  VII,  V.  i.) 

Mais,  sans  insister  tatwi 
leurs  poemes,  c*est-Jl-dire  il«r 
ph^ties ,  11  faut  voir  commeid 
me  exalte^  ces  satires  violeM^ 
accueillisde  leurs  contempofT* 
blions  pas  que  chez  les  Juifi 
restait  aux  mains  des  pr^tres, 
m^me  homme  parlait  so  nott 
gneur  et  au  nom  du  peuple- 
puissance  ne  devaient  doncpss< 
poesies  proph^tiques,  ^tnaoto 
luaire,  clans  cette  constitution 
tiquel  Ui  toix  des  poites  m^ 


STRVS  MODERNE. 


171 


111 


mentun  levier  politiqnci,  un  moyen  de 
goavernement;  c'ftaitla  trompctte  des- 
tin^e  a  r^veiller  le  courage  du  peuple^ 
k  I'appeler  a  la  r^volte.  On  eoncoit  alors 
jueie  metier  de  proph^te,  Intlmement 
\U  h  la  religion,  et  surtout  a  la  boliti- 
que  de  I'ttat,  dut  ^tre  parfois  fore  dan^ 
^ereux. 

En  cffet ,  |e  peuple  juif  est  le  senl 
peuplede  rOrientqui  seioitfamaisavis^ 
de  pers^cuter  ses  poetes.  Parmi  ceux 
m^me  dont  on  r^vera  depuis^les  ecrits 
et  les  visions,  it  en  est  oien  pen  qui 
n'aient  paye  cher  le  respect  quon  leur 
porta  danfi  la  suite,  lilz^chfel,  J^6nile, 
soiit  lapid^s  par  le  peuple.  IsaTe,  qui 
)robablement  s*6tait  permis  de  fatre  de 
^opposition  contreMcinass^,  rot  deJuda, 
(>st  6ci^  en  deux  par  ordre  de  ce  prince. 
Nos  rapports  arec  les  Hcbreux  s'arrl- 
tent  1^  ,  et  Ton  pent  dire  qu*il  y  a  pro- 
gres;  mais,franchement,  les  peuplesde 
"Orient  n'ont  pas  eu  besoin  ae  ce  pro- 

fres.  Je  ne  sache  pas  que  Haflz ,  Per- 
oussi  ouSaadi  aient  jamais  excite  autre 
chose  que  de  Fad  miration ,  ce  qui  n'est 
pas  moms  glorieux  pour  leur  nation  que 
poureux-mdmes. 

En  rt^Sumant  ici  les  ^l^ments  les  plus 
Tari^s  de  notre  conviction,  II  sera  facile 
de  feiire  remarquer  leur  concordance. 
Kous  avons  attVibu^  d'abord  k  I'heu- 
reuse  influence  du  eliniat  ce  caract^re 
de  naivete  sensuelie  si  profond^ment 
cmpreint  sur  la  pens^  orientale;  nous 
avons  vucette  pensee  eneffi^t  se  modifier 
avec  le  soleil,  avec  Paspect  des  terrains, 
et  subir,  eomme  Fair  le  plus  subtil,  les 
yariations  infinies  de  la  nature  physi- 
que. Puis,  en  la  sufvant  dans  sa  formula 
la  plus  mat^rielle ,'  nous  avons  encore 
reconnu  combien  Texc^s  de  bien-^re 
et ,  d*autre  part ,  Texces  de  mis^re  nui- 
saient  a  son  d^veloppement  par  les  arts. 
En  dernier  lieu,  en  consid^rant  la  po^- 
sie  comme  un  fpanchement  involon- 
taire  et  instinctifdenmagi nation,  c'est- 
^-dire  du  souvenir,  nous  en  sommes  ar- 
rives h  ce  r^sultat,  #galement  confirm^ 
par  Texp^rience,  que  la  po^sie  devait 
etre  exclusivement  sensuelie  ehez  un 
peuple  oh  te  bien-6tre  des  sens  est  le 
veritable  ^at  des  faculty  humafnes; 
tX  nous  avons  dd  conclure,  sans  crainte 
d^^tre  dementis  par  la  rt^alit^,  que  la 
poesie  orientale  toit  vraiment  la  po^- 


sie  populaire.  Nous  nous  attendons 
bien  h  nous  voir  aecus^  par  quelque 
raisonneur  tres-occidental  d*etaolJr  en 
principe  ce  qui  n'est  qu*en question,  lors- 
que  nous  pr^sentons  la  popularity  de 
la  no^sie  asiatique  comme  un  signe  in- 
faillible  de  sa  sup^iorit^  sur  la  n6tre. 
Notre  reponse  sera  fttcile.  Traversez  la 
M^diterran6e ,  messieurs,  chaneez  de 

Soint  de  vue  :  ceiui  qui  est  a  l*ombre 
eia  montagne  ne  voit  pas  le  soleil ;  mais 
doitMl  le  nier^ 

il&B  DB  LA  61VILI8i«I0rV  ItfcAMIQUB. 

Maintenant  au'on  pent  comprendre 
par  quelle  loi  nitate,  par  quelle  union 
materielle  de  la  nature  et  de  rhumani- 
t^,  la  vie  sensuelie  a  toujours^td  si  fa- 
cile en  Orient ,  si  calme  quand  elle  n'est 
pas  troubl^e  par  la  guerre,  si  douce  quand 
elle  pent  s'abandonner  sans  obstacle 
au  courant  limpide  de  Texistence  pas- 
sive, nous  n'aurons  plus  k  nous  arr^tcr 
longuement  sur  ces  ^poques  de  f^licit^ 
inalterable  qu*on  a  sppeHes  Tere  de  la 
civilisation  fsjamique.  Nous  laisserons 
h  d'autres  hlstoriens  ce  r^it  des  phases 
diverses  de  la  destin^e  des  Abbassides ; 
nous  ne  suivrons  pas  les  Abou-Djafar- 
al-Mansour,  les  Uaroun-al-Raschid  et 
les  AI-Mamoun  dans  leurs  derniercs  lut- 
tes  centre  Tesprtt  de  d^sordre,  dans 
leurs  conqu^tf  s  int^rieures  et  extdrieu- 
res.  A  dater  du  jour  oh  la  rende  Bag- 
dad fut  fondle  avec  son  rempart  de  bri- 
ques ,  ses  cent  solxante^rois  tours,  son 
canal  int^ieur  oh  coulaient  les  eaux 
du  Tigre,  ses  portes  de  W asset,  rappor- 
t^es  soiffneusement  de  Perse  pour  em- 
bellir  l>ntr^e  de  la  nouvelle  capitale 
des  khalifes,  a  dater  de  cette  ahnee  145 
de  rhcglre  (762  de  J.  C.) ,  Tempire  is- 
lamique ,  qui  avait  prefere  les  chaudes 
campagnes  de  la  M^sopotimie  aux  frais 
jardins  de  Damas,  n'eut  plus  sur  la  Sy- 
rie  une  action  immediate  et  quotidien- 
ne.  Cc  fut  desormais  pour  la  province 
d^tr^n^e  moins  de  gioire  et  moins  de 
riehesses ,  il  est  vrai,  mais  aussi  moins 
d'inqui^tudeset  moitts  delroubies.Tout 
bientdt  dans  cette  feconde  terre ,  door- 
mats etoignee  du  centre  ra von nant  niois 
brdlant  ou  pouvoir  supreme,  tout  re- 
prit  cette  allure  tranquille,  cet  nspect 
fepos^  qui  catactelrisent  la  prespitite 


i72 


L'UNIVERS. 


publique  cbez  les  peuples  orientaux. 

II  y  a  d'ailleurs  cela  de  particuiier 
daDS  les  revolutions  musulmanes  a  par- 
tir  de  cette  epoque,  qu^elies  D*atteigDent 
et  n*affecteQt  que  ceux  qui  y  preonent 
part.  Les  Ommiades  avaieut  complete 
roeuvre  de  Mahomet.  De  toutes  ces  tri- 
bus  noinades  ou  au  moins  iad^pendan- 
tes  qui  s'agitaient  daus  les  deserts 
d*Arabie  Mahomet  avait  fait  une  na- 
tion. Ses  successeurs  imm6diats,  le 
grave  Abou-Bekr,  F^nergique  Omar,  en 
proposant  la  conqu^te  du  monde  a  ses 
races  reconciliees,  leur  avaient  ouvert 
une  carriere  ou  elles  s'^parpill^rent  a 
Tenvi.  Enfin  Moawiah,  par  son  g^nie 
d*ordre  et  d^avenir,  6*etait  hSt^  de  cons- 
tituer  une  portion  de  la  conquSte,  la 
plus  riche,  la  plus  centrale,  la  Syrie. 
D^  lors,  pour  une  grande  partie  des 
vainqueurs,  une  propri^t^  stable  et  po- 
sitive remplaga  un  outin  variable  et 
chanceux;  une  hierarchie  paciiique  rem- 
pla^a  Tegalit^  militaire  des  temps  ant^- 
rieurs.  Lerepossucc6daa  la  lutte,  Tin- 
dustrie  a  la  a^vastation ;  de  mdme  que 
Section  des  premiers  khalifes  etait  d^ 
truiteau  profit  de  Theredit^  dans  la  famil- 
le  d*Ommeyyah.  Des  cette  epoque  la  na- 
tion arabe  rut  irr^vocablement  fondle. 
Chacun  y  trouva  son  emploi,  la  satis- 
faction de  ses  godts  ou  le  developpe- 
ment  de  ses  passions.  Ceux  que  leur 
ardeur  guerriere  appelait  a  la  vie  des 
combats  eurent  sans  cesse  devant  eux 
le  champ  le  plus  vaste  et  la  facility  la 
plus  grande  de  s'y  pr^ipiter.  Ceux,  au 
contraire,  dont  Fesprit  pluscalme,  dont 
le  caractere  plus  tranquille,  pr^feraient 
jouir  incontinent  du  bonheur  que  la 
victoire  leur  avait  pr^par^,  eurent  k 
choisir,  depuis  Fembouchure  du  f^ond 
et  charmant  Oronte  jusqu*au  territoire 
embaum^  de  Damas,  leur  place  au  plus 
vivifiant  et  au  plus  doux  des  soleils. 

QuMmportaient  k  ces  derniers  les  p6- 
ripeties  de  la  guerre,  les  vicissitudes 
de  la  cour,  les  wranlements  du  pouvoir! 
Tant  qu*un  fleau  de  Dieu  ou  des  nommes 
ne  les  frappait  pas,  Us  demeuraient 
dans  la  plus  facile  et  la  plus  heureuse 
indolence.  Nourris  par  une  terre  prodi- 
gue,  charmds  par  une  nature  ravissan- 
te,  ils  n*avaient  qu'^  se  laisser  vivre 
pourgodter  cette  telicit^  que  Ton  res- 
pire sous  un  ciel  azur^,  dans  un  climat 


d^licieux,  en  face  des  plus  ^ 
pavsages  de  la  terre.  Grke,  cq 
k  leur  croyance  au  dogme  de  I 
lite,  (jui  dispense  rhomme  de 
sollicitude  s'll  le  dispense  aussi' 
remords,  ils  n*avaient  rien  a 
rien  a  craindre,  aucune  ioqi ' 
ventive  k  se  cr^er.  Ce  soot 
sont  ces  paresseux  mais  ft 
tels  que  nous  avions  particul 
vue  lorsque  nous  avons  1 
nos  trois  chapitres  precedents, 
ner  une  idee  de  la  pensee ,  de 
de  la  poesie  en  Orient.  Leur  dooj 
menta,  d'ailleurs,  pendant  toatej 
du  regne  des  Ommiades.  lis 
terent  parmi  les  anciens  iodi 
prementdits,  cesvoluptueox 
qui  avaient  profite  tour  ^t 
hsation  grecque,  de  la  rii 
leucides,  de  Findustrieeffeffli 
zantins;  etbientdtils  foi 
me  le  noyau  du  peuple  h[ 
done  un  contraste  traoche 
moeurs  des  rudes  habitants  di 
montagne  chretienne  et  i 
etcelles  des  molles  popub 
talent  fixees  sur  les  bords 
FOronte,  et  dans  ces 
del  ices :  Hamah,  Hems,  Fj 
De  la  Fener^ie  des  uns  a 
toutes  les  arcoostaoces  ~ 
leur  liberte  ;  de  la  aussi 
Fingratitude  des  autres 
nier  des  Ommiades,  auqi 
fut  ferme,  tout  secours 
ceux-la  memes  quiavaientkj 
de  Fetablissemeut,  de  Fi  ' 
et  de  la  fortune  de  ses  ac 

Dans  ce  drama  sanglant 
des  Ommiades,  oous  Favf 
eut  bien  des  vlctimes; 
la  vengeance  abbasside 
fois  la  faraille  qui  avait 
k  Damas  eteinte  dans  ses 
cipaux,  proscrite  jusque 
tele  la  plus  eioignee,  il  v  eat 
du  bonheur  encorepour  la 
ment  dotee  par  la  Pro 
cette  nature  81  fertile^  ea 
soleil  si  bienfalsant ,  il 
ques  anuees  de  culture 
a  la  terre  toute  sa  fecoodii 
rer  les  desastres  les  plus 

D  Yoyez  AboaVFdda. 


datfj 


STRIE  MODERIHE. 


173 


IS 

L 


plus  eruels  rayages  des  r^volutiong  int^ 
rieures.  Puis  la  reaction  des  Abbassides 
eontre  les  Ommiades  n'etait  apr^  tout 
qu*uiie  calamity  locale  et  particuliere. 
Cette  guerre  civile  ne  ressemblait  poiut 
h  la  guerre  deconqu^te,  oj^  le  vainqueur 
p^netre  et  fonilie  partout ,  se  r6pand  k 
travers  les  campagnes  comme  un  fleuve 
d^bord^,  descend  jusque  dans  les  val- 
ines les  plus  profondes,  ou  monte  jus- 
que sur  les  plateaux  les  plus  ^lev6s. 
Elle  n*inqui^tait  tout  au  plus  que  les 
grandes  villes ;  elle  ne  frappait  que  les 
partisans  de  la  dynastic  dechue.  Qu'im- 

gorte  done,  dor^navant,aux  insouciants 
y liens,  quel  khalife  regne  a  Bagdad! 
Que  leur  importent  les  luttes  6Ioign^es 
des  Grecs  et  des  Arabes  I  Desormais  les 
arm^s  bellig^rantes  ne  combattentplus 
dans  leurs  contr^es ;  a  peine  les  troupes 
arabes  y  passent-elles  quelquefois  en  se 
rendant  en  Asie  Mineure.  Les  plaines 
de  FEuphrate  et  du  Tigre  ont  a^tr5n^ 
les  prairies  de  rOronte;mais  ces  derni^ 
res  y  ont  gagn^  une  s^urit^  qui  les  rend 
plus  verdoyantes,  p\u8  grasses,  plus 
delicieuses  que  jamais. 

Aprds  les  quatre  ann^es  oh  Abou-'l- 
Abbas-al-Sanah  accumula  tant  de  sup- 
plices ,  ^tablit  une  inouisition  si  vio- 
lente,  dans  lebutde  ne  laisser  vivre  au- 
cun  de  ceux  qui  pouvaient  s'opposer  k 
r^l^vation  de  sa  famille,  son  fr^re  Abou- 
Djafar,  plus  humain  parce  qVil  ^tait 

I^lus  fort,  dont  les  nomoreux  succ^  mi- 
itaires  lui  valurent  le  titre  d'AlrMan^ 
sour  (le  Victorieux),  demeura  vingt- 
deux  ans  en  possession  du  khalifat.  Ge 
long  r^e  fut  favorable  k  Tempire  tout 
entier,  et  narticulierement  k  la  Syrie. 
Si  les  annates  de  ce  dernier  pays  ne  pre- 
sentent  point  k  cette  ^poque  de  faits  di- 
gnes  d'etre  rapport^ ,  c^est  la  preuve 
la  plus  ^vidente  de  sa  prosp^rite  int^- 
rieure.  Gomme  nous  Tavons  ^tabli  plus 
haut,  rOriental  est  facile  au  bonheur; 
il  cueille  aveo  ravissement,  sans  s*in- 
qui^ter  de  Tavenir,  les  heures  de  f61icite 

J|ue  le  ciel  lui  envoie.  Mais  aussi,  quand 
es  jouissances  de  toutes  sortes  se  pres- 
sent  autour  de  lui,  Tapathie  le  gagne, 
son  corps  se  repose ,  son  esprit  reve  au 
lieu  d'agir,  son  dmeamollies*endort  dans 
rivresse  des  plus  indolentes  volup- 
t6s.  Tel  fut  le  Syrien ,  il  faut  le  croire, 
surtout  k  ce  moment  du  khalifat  ou  la 


certitude  de  la  puissance  des  Abbassides 
et  les  richesses  de  la  conqu^te  peupl^ 
rent  en  si  pen  de  temps  Bagdad  d*un  mil- 
lion d*imes,  et  y  entasserent  en  un 
quart  de  sidcle  toutes  les  somptuosit^s, 
toutes  les  magnificences,  tout  1  or  et  Tar- 
gent  de  I'Asie  et  de  TAfrique.  La  Syrie, 
qui  n'avait  fourni  aucun  g[uerrier  fa- 
meux  aux  armies  arabes  r^unies  en  M^so- 
potamie ,  et  Ianc6es  de  tons  cdt^  par 
Abou-Djafar  eontre  ses  ennemis;  la 
Syrie,  qui,  assez  indiffi6renteaux  querel- 
lesreligieuses  ou  aux  finesses  mystiques, 
n*avait  encore  envoys  a  la  nouvelle  capi- 
tate de  rislam  aucun  c^lebre  docteur  en 
th^Iogie  musulmane,  la  Syrie  n*en  par- 
ticipa  pas  moins  au  bien-^tre  general ; 
et  Damas ,  sans  chercher  h  Temporter 
sur  Topulente  Bagdad ,  se  fit  pourtant 
remarauerpardenombreuses  construc- 
tions ae  palais  et  de  mosqu^es ,  par  le 
luxe  des  v^tements  et  des  Equipages 
d'un  grand  nombre  de  ses  habitants. 

LUXB  OBIBNTAL. 

On  a  beaucoup  abus^  du  luxe  orien- 
tal :  les  uns  pour  Fexalter  et  en  faire  le 
texte  d'interminables  descriptions;  les 
autres  pour  le  blSmer  et  le  fletrir  avec 
non  moins  d'emphase  et  de  declama- 
tions. Gertes ,  un  luxe  excessif  est  une 
preuve  de  mollesse  chez  les  grands  et 
une  chance  de  misere  chez  les  pet  its. 
G*est  du  moins  ainsi  que  cela  se  passe 
dans  nos  climats  rigoureux  d'Occident , 
sous  un  soleil  qui  ne  feconde  C[u'avec 
grand'peine  une  terre  maigre  et  incons- 
tante.  Mais  en  Orient,  avantque  les  lut- 
tes r^p^t^es  des  generations  successives 
eussent  remplace  les  campagnes  pleinea 
de  moissons  par  des  champs  pleins  de 
ronces ,  les  villes  toutes remplies  d'habi- 
tants  par  des  mines  ^parses ,  au  temps 
ou  la  Mesopotamie  etait  fertile ,  et  la 
Syrie  dix  fois  plus  peupiee  qu'elle  ne 
Test  de  nos  jours,  k  repoque  des  pre- 
miers Abbassides  enfin,  le  luxe  de  quel- 
ques-uns  n'entralnait  pas  forceitienta  sa 
suite  le  d^ndmentdu  plus  grand  nom- 
bre. Plus  tard,  sans  doute,  le  luxe  amena 
la  faiblesse  dans  les  coeurs,  la  pusillani- 
mity dans  les  dmes.  Durant  le  premier 
siecle  si  brillant  des  Abbassides,  au  con- 
traire ,  le  luxe  fut  la  consequence  lo- 


174 


LtmiVERS. 


^que  du  climat,  de  la  victoire,  de  Tordre 
r^tabli  en  Orient. 

On  Dous  pr^e  d6s  Tenfance,  dn 
Kurope ,  le  rn^pris  du  corps ,  la  supe- 
riority de  l*esprit  sur  la  matiere.  Ce  sont 
de  continuelles  declamations  sur  la  va- 
nity des  avantages  physiques,  sur  la  fu- 
tility des  soins  qu*ils  ntossitent;  en 
sorte  que  Pinfluence  de  ces  doctrines  se 
fait  sentir  Jnsque  dans  nos  habitudes. 
II  semble ,  en  ef fet ,  que  ce  soit  faire 
injure  hi  la  noblesse  denotre  intelligence 
que  de  nous  ocouper  de  la  moitie  non 
pensante  de  notreetre.  Sans  ob^irabso- 
lument  h  cette  austerity,  qui  declare 
coupable  et  condamne  les  soins  niinu- 
tieux  du  corps  y  nous  les  m^prisons , 
pourtant,  comme  vils  et  grossiers,  nous 
les  dlsavouons  comme  indignes  denous- 
memes.  En  Orient,  au  contraire,  le  cli- 
mat, les  moeurs,  la  religion  elle-meme, 
tendent  h  relever  ces  habitudes  que  nous 
fletrissons,  et  le  culte  de  la  beauts  fi- 
nitparidealiserla  matiere,  ou  du  moins 
par  la  replaoer  «u  niveau  de  Pesprit. 
Pourjuger  lescoutumes  asiatiques  avec 
impartiality «  il  ne  faut  done  pas  les 
prendre  aujpoint  de  vue  de  nos  nropres 
coutumes.  Sojons  fiers,  s'il  le  faut,  de 
notre  vie  d^abstractions ;  mals  ne  crai- 
gnons  pasde  reconnattre  que  la  tie  sen- 
suelle  est  conforme  aux  lots  primitives, 
et  partant  tr^s-logique.  Et  vraiment, 
en  bonne  conscience,  est-ce  done  un 
si  mauvais  emploi  des  facult^s  intellec- 
tuelles,  que  d^augmenter  la  somme  de 
bonheur  mDterierque  la  nature  nous 
accorde?  If 'est-ce  pas  h  d^faut  de  ce- 
lui-li  que  nous  cnerchons  Tautre  a 
ttrand'peine,  dans  ce  que  nous  appelons 
les  plaislrs  de  Tesprit  ?  Soyez  de  bonne 
foi:  s'il  vous  est  jamais  arrive  d'envier 
anx  Orientaux  leUrcieletleurs  parfums, 
que  croyez-vous  qu'ils  vous  cnvient  en 
retoup?  Plus  sages  que  nous  peut-^tre, 
ilsont  perfcctionne  la  science  du  bien- 
ftre,  et  tant  que  les  khalifes  ontmontr^ 
de  rintelligence ,  de  la  forc^  et  de  la  re- 
solution, leur  magnificence  n*a  fait  au- 
eun  tort  k  leur  politique  :  ce  n'etait  pas 
le  luxe  qui  devait  d^truire  leur  pou- 
Toir  et  ebranler  leur  empire. 

Cette  magnificence,  du  reste,  alia 
toujours  en  croissant  depuis  Al-Mansour 
jusqu*5  Moktader.  Malgr6  des  guerres 
presque  consecutives  pour  fonder  sa 


dynastie,  Al-tfansoUt  edtai^di| 
voyance  pour  61ever  un  mod 
d'edifices,  pour  entouret  Ba^dai 
double  enceinte  f  qui  la  rendit  di 

Su'eile  merita  dte  lor6  le  titndkl 
e  la  Paix.  Malgrd  ses  depeoM  f 
mes  et  repet6es,il  eut  asses f 
economic  pour  laiss^  k  sa  t    ' 
sept  cents  millions  dans  !e  1 
faf.  Al-Mahadi,  son  sucoesseufj 
pas  moins  prodigue  sans  eesiefj 
geoereux.  Son  pelerinage  ft  la  ltt| 
presque  fabuleux  :  il  y  depensaftl 
lions  de  dinars  d'or.  Mais  ^^  *■ 
transporter  sur  une  troupe  de  e 
des  blocs  de  elace  pour  raM 
un  soleil  brulant  Jes  sorbets 
fruits  qu*on  apportait  sur  Sa  1 
en  songeant  a  lui  il  n'oublla 
peuple.  On  lul  doit  de  non" 
ternes ,  quil  fit  creuser  de 
distance  dans  le  desert  sut  i 
de  pres  de  deut  cents  lieues^  c 
caravanserails  vastes  et  eon 
les  peierins  pouvalent  t'l 
la  enaleur  du  jour  (*). 

Le  grand  Haroun-al-Ka 
cinquieme  des  Abba^ldes,  M 
point  ses  prodi^alltes  a  son  | 
en  fit  part  aussi  aux  Occidentainu] 
tea  nos  histolres  contlennent  f 
des  presents  qu'il  envojra  ^  < 
gne,  parmi  lesquels  oil  ren 
parfums  de  touted  esptes, 
et  des  bijoux  ft  {Profusion,  d^ 
Fencens,  un  elephant  splendid 
en  guerre,  etsurtoiit  one  horlogU 
rut  une  merveille  h,  l^Etlrope,  fliN 
bare  malgre  son  grand  emperetf,! 
fut  placee  dans  la  tiath^rale  f^ 
Cbapelle.  Haroun-al-Kaschid,  \ 
efit  solde  des  armees  de  ciftq  0 
hommps,  quoiquMtedtfaitbdUf  ^ 
palais  en  diverses  provinces  de  f 
mense  empire,  n'en  faissa  pas  tm 

r!tit-fils  Al-Hamoon  de  quoi  dis 
son  avenement,  deux  millioos^ 
cent  mille  dinars  d'or  avant  di 
cendre  de  cheval.  Mais  quand  ce  | 
magnifique  se  maria ,  ce  fut  our 
autre  liberalite  :  on  versa  sur  la  1 
sa  femme  mille  perles  de  la  plus  ^ 
eau ,  et  on  etablit  une  loterie  od  ehi 
numero  gagnant  donnaltuaeterre(»i 

nVoytsAboQ'l.P^diL 


SYRIE  MODERI^E. 


175 


itiai^oii.  Or  chacun  aVait  qu^tre-vlngt- 
dJx-neuf  chances  centre  une  de  gagner. 

Tout  ce  luxe  pourrait  parattre  un$ 
toxag^ration  de  poSte  s!  un  historien 
tres-v^Hdique  et  trfts-positif,  Abou'l- 
F^da ,  ne  nous  avail  donn^  lui-m^me  1^ 
detail  suivant  de  la  cour  d*un  khalife : 

«  Toute  farm^e  du  khalife  ^tait  sou? 
4l  les  armes;  la  cavaferie  et  hnfanteri^ 
«  fonnaiertt  un  corps  de  cent  soixante 
«  mille  hoitimes;  les  grdnds  offlclers, 
«  T^tus  de  la  hinniere  la  plus  brillante. 
«  avant  des  baudriers  qui  ^tinceiaient 
tt  d'^or  et  de  pierrferies,  se  trouvaient 
<t  rang^  autour  de  leur  chef  supreme. 
«  On  voyait  ensuite sept  niille eunuques, 
«  parmi  lesquels  on  eil  comptait  quatre 
«  mille  blaucs;  puis  sept  cents  gardes 
*  d^apbarteraent.  bes  chaloupes  et  des 
4i  gonaoles ,  d^cor^es  de  la  maniere  la 
«  plus  riche,  ^talaient  leurs  banderoles 
«  sur  le  Tigre.  La  somptuosit^  r^nalt 
«  partout  dans  Tint^rieur  du  palais ;  op  y 
«  remdrquait  trente-huit  mille  pieces  de 
«  tapisserie,  parmi  lesquellra  dotize 
«  niflle  cinq  cents  ^talent  de  sole  brod^e 
«  en  or;  on  y  trouvait  vlnst-deux  mill^ 
«  tapis  de  pied.  Le  khalire  entretenait 
«  cent  lions  avec  un  garde  pour  chacun 
«  d'eux.  Entre  autres  raffinements  d*un 
«  iuxe  merveilleux,  il  ne  fautpas  oublier 
«  un  arbre  d'or  et  d'argent  qui  portait 
« dix-huit  branches,  sur  lesquelles, 
%  dinsi  que  sur  les  rameaux  naturels , 
«  on  apercevait  de$  oiseaux  de  toute 
«  espece  :  ces  oiseaux  et  les  feuilles  de 
«  Tarbre  ^talent  faits  des  m^taux  les 
«  plus  pr^cieux.  Get  arbre  se  balancnlt 
«  comme  les  arb^es  de  nos  bois ,  et  alors 
«  on  entendait  le  ramage  des  differents 
«  oiseaux.  CVst  au  milieu  de  tout  cet 
«  appareil  que  Tambassadeur  grec  fut 
<«  conduit  par  le  vizir  au  pied  dii  tr5ae 
«  du  khalire.  » 

Ainsi  la  magnlQcence  ^tait  ce  quMl  y 
sivalt  d*apparent  et  de  caract^risticnie 
dans  la  domination  des  Abbassides.  Le 
prestige  oe  manquait  done  pas  a  ces 
elorieux  khalifes;  et  comme  Ton  ne 
discutait  plus  leur  autorit^,  elle  em« 
pruntait  a  la  pompe  aui  Tentouralt  une 
grandeur  qui  tit  longtemps  sa  force,  et 
^ui  ne  put  se  perdre  que  par  des  fautes 
Dombreuses  et  des  incapacit^s  flaj^ran- 
tes.  Au  second  siecle  ae  rh6$;ire  tout 
servait  la  domination  des  khalifes  :  Tu* 


nit^  d^ufi  poutclr  s<jln«  corttr^le ,  la  i^Ui. 
nion  dans  Une  seule  maiti  de  la  pu!§^ 
sapce  tenlporelle  et  de  la  puissance 
spirituelle,  les  risUltatd  merveilleut 
de  cent  ann^es  de  cotiqndtes,  les  ri'^ 
chesses  qu*ava!ent  accumul6«8  tant  de 
victoires.  II  sufllsait.  pour  afnsi  dire,  atf 
fiouverain  d*avoir  le  sentiment  de  ce  pou- 
toir  Immense  et  incontest6 ;  il  sufGsait  a 
tin  khalife  de  jeter  un  coup  d'ceil  intelli^ 
gent  sur  I'etat  de  son  empire  pour  r^gner 
sans  trouble  et  sans  ditBcult^.  Mais  si 
le  prince  ^tait  puissant,  le  peuple  ^tait- 
il  heureux?  Tout  nous  le  fait  pr^umer. 
Les  Arabes  ^talent  mattres,  ^taient 
riches ,  i^taient  forts ;  dans  une  pareille 
situatidn,  il  ne  dependait  <]Ue  de  rindi* 
vidu  de  iouir  avec  s^urit^  des  biens 

2ui  s'ofrraient  natureliement  a  lu! 
luant  aux  Chretiens ,  comme  la  certi- 
tude de  la  domination  rend  d*ordinaire 
les  Orientaux  faciles  h  vlvre  et  tolerants ; 
comme,  d'ailleurs,  les  industries  que 
les  vaincus  cqltivaient  ^talent  utiles  aut 
jouissances  de  leurs  vainqueurs ,  on  le$ 
prot4^eait  volontiersdans  leurs  travaux, 
et  on  les  taissait  pratiquer  leurs  devo- 
tions ^  raise.  L'esprit  tranquiilis^  sur 
leur  existence  mat^rielle,  assures  de  la 
remuneration  de  leur  travail ,  jamais 
tnquietes  daPs  leur  conscience,  its  ne 

Souvaient  8*en  prendre  qti'a  eux-mdmes 
u  bonheur  qu^tls  ne  trouvaient  point. 
En  Syrie ,  particulidrertient,  on  pent 
croire  que  le  peuple  etait  heureux.  On 
laissait,  dans  la  grande  ville  byzantine 
d'Antioche,  trdner  tranquillement  un 
^v^que  grec  et  un  ^v^que  latin.  Les 
habitants  de  la  cite  pouvaient,  sans 
deplaire  h  leur  mattre,  sans  etre  par 
eux  molestesen  aucune  fai^on,  se  par- 
lager  entre  les  deux  tgllses  chreliennes, 
se  disputer  tout  h  leur  guise  sur  Tinier- 
pretation  des  dogmes  et  sur  Tesprit  des 
Ecritures.  Les  autres  villes  chretiennes 
iouissaient  pour  leur  culte  de  la  m^me 
liberte;  et,  tout  en  se  preoccupant  de 
leur  beatitude  celeste,  elles  pouvaient 
arrondir  avec  facilite  leUr  fortune  ter- 
restre.  Beaucoup  d'entrc  elles  avaient 
des  marches  fort  importants ,  Seieucie , 
Tripoli,  Siaon  et  Tyr.  Jerusalem  elle- 
meme  etait  devenue  une  place  de  com- 
merce :  elle  avail  une  foire ,  k  la  mi- 
septembre,  od  se  donnaieol  rendez-vous 
TAsie  et  TAfrique,  el  ou  venaienl  memo 


176 


LUiaVERS. 


det  marehands  eorop6ens  sous  le  pr6- 
texte  de  p^6rinage.  La  Montagne,  Taus- 
t^re  Liban,  se  tenait  en  repo8;ses  soli- 
taires y  protestaient  sans  dangers  contre 
]a  demoralisation  du  siecle,  contre  la 
corruption  des  Wiles  et  contre  le  triom- 
phe  de  Tlslam. 

Si  les  Chretiens  Jouissaient  de  cette  s^ 
curit^  gui  rendait  leur  sort  supportable 
au  moms,  les  Mahometans  poss^aieiit 
cet  ordre  puissant  qui  a  fait  leur  civili- 
sation. Le  Koran,  admis  par  tous,  de 
code  religieux  ^taitdevenu  un  code  civil. 
Les  interpretations  uombreuses  qu'on 
en  avait  aonn^es  le  rendaient  applica- 
ble a  toutes  les  circonstances  de  la  vie 
sociale.  La  politique  y  trouvait  sa  force ; 
la  justice,  son  autorite.  Tout  y  avait  ete 
r6gle  :  les  rapports  des  hommes  entre 
eux,  et  retaolissement  de  la  famille. 
Ici  nous  touchons  h  une  question  deli- 
cate, et  gull  nous  sera  permis  de 
traiter  rapidement ,  celle  de  la  condition 
des  femmes  musulmanes.  Vovons  com- 
ment etait  etablie  leur  destinee. 

CONDITION    DBS    FBlfMES 
MUSULMANBS. 

Ge  qui  nous  cheque  le  plus  dans  la  loi 
asiatique,  «'est  assurement  la  polyga- 
mie.  Le  Koran  conseille  de  n'avoir 
qu*une  femme,  mais  il  permet  d'en 
prendre  autant  qu'on  en  pourra  nourrir. 
Cependant  il  faut  distinguer,  parmi  celles 
qu  un  bon  Musulman  recueille  dans  son 
harem ,  diverses  classes  d'epouses  et  de 
femmes.  Groyez-vous  done  qu'elles 
soient  moins  protegees  par  la  loi  que 
celles  dont  un  maire  revolt  le  serment  fC) 

^apparition  de  Mahomet  fut  le  signal 
d*une  rdforme  dans  les  moeurs.  Avant 
lui  la  polygamic  n*etait  qu*un  mons- 
trueux  abus  de  la  force  et  I'absence 
totale  de  morality.  G'etait  beaucoup  que 
de  regulariser  un  etat  de  choses  aussi 
defectueux.  Le  legislateur  ne  pouvait 
pas  heurter  de  front  des  usages  consa- 
cres  par  le  temps ;  il  fit  tout  ce  qu*il  y 
avait  a  faire  :  il  toUra  le  principe,  mais 
en  restreignit  les  applications.  D'abord 
il  etablit  des  distinctions  entre  les  fern* 
mes  legitimes  et  les  femmes  esclaves.  II 

^  (*)  yoja  le  Koran,  Sarate  lY,  tradacUoD  de 


assura  anx  premieres  des  avurtasBiiL 
qu*a  moins  de  poss^der  une  gnMi| 
tune,  un  Musulman  userarane ' 
faculte  accordee  par  la  kn  d'l 
mdme  temps  quatre  epooses  I 
ou  nikiahbts, 

Le  pouvoir  de  divorcer,  k  I 
sage  et  si  exorbitant,  fut  eooti 
par  des  stipulations  de  ie( 
des  etablissements  de  dot.  <^ 
esclaves,  il  les  recommanda 
nite  de  leur  mattre,  el  on  saHl 
vaut  une  recommandatioa  di  f 
On  ne  vit  plus ,  comme  ao, 
malheureuses  femmes  Inttcr  i 
misere,  et  disputer  k  la  fusil 
leurs  enfants  et  la  leur.  En  doa 
femmes  une  existence  legale,! 
raviva  aussi  le  feu  de  ramoori 

?ui  s'eteint  si  vite  dans  la  u 
.'homme  retrouva  ses  en£uib| 
temps  que  son  6pouse;  etiaf 
reforms  sur  des  bases  noov  " 

Puis,  oomme  cette  loi 
concession  auxfiiiblessesi 
cesnon  que  Ton  ne  sauiait  I 
qu'elle  portait  alors  des  fndlsl 
ration  morale,  I'lslam  peniM(| 
une  autre  sorte  de  mariage,Br 
le^^al ,  non  moins  sacre,  mais  i 
prit  est  si  eioiene  de  nos  raor 
nous  ne  chercbons  pas  a  le  < 
Nous  voulons  parler  du 
habin^  par  lequel  rhomme  etj 
se  prennent  a  loyer,  et  <^ 
entre  eux  un  veritable  bail.  1 
et  conditions  une  fois 
epoques  fixees,  les  prix 
manage  est  consacre.  Puis  le  I 
cet  engagement  arrive,   ksJ 
sont  reglei,  et  chacun  des^ 
rentre  dans  sa  liberty 
surplus,  il  est  bon  de 
le  plus  sou  vent  les  oont 
de  cette  liberty  que  pour  Ve 
nouveau,  comme  si  la  penseei 
indissoluble  etait  plus  pesante^ 
lui-meme. 

On  nous  saura  gr^,  sans  < 
rapporter  quelques  fragments  i 
de  la  loi  qm  r^git  les  femuDesc 
on  en  comprendra  mieux  1% 
ce  qu1l  ne  taut  pas  oublier  i 
que  Mahomet  avait  li  oombattrel 
mes  abus ,  et  qu*il  fit  tout  ce  < 
humainement  possible  de  faife 


SYKIE  MODERNE. 


17T 


resserrant  dans  les  bornes  d'ane  l^galit^ 
telle  quelle. 

Ain^i,  lorsquMl  ierlt  (Koran^  chapitre 
IV)  :  «  Vous  n'^pauserez  ni  vos  meres, 

«  ni  vos  filles ,  ni  vos  beltes-filles, 

«  ni  deux  soeurs,  »  fl  ajoute  :  «  Si  le 
«  crime  est  commis,  le  Seigneur  est  in- 
«  dulgent  et  mis^ri<x>rd]eux.  »  D*apr^s 
ce  seul  verset,  on  peut  iuger  Tensemble 
de  la  loi  :  on  sent  que  rautorit^  de  Ma- 
homet ^tait  bien  douteuse,  puisqu'ii  ne 
promulgiiait  pas  une  loi  sans  laisser  en- 
trevotr  le  pardon  de  sa  violation. 

Gomme  la  loi  chr^tienne,  Trslam 
Dfoclame  hautement  la  superiority  de 
rhomme  sur  la  femine.  «  Les  homines 
«  (vers.  88)  sont  sup^rieurs  aux  fem- 
«  mes.  »  Et  le  legislateur,  qui  veut  bien 
nous  en  dire  la  raison ,  continue  ainsi  : 
n  Parce  que  Dieu  leur  a  donne  la  pre^- 
«  minence  sur  elles,  et  qu'ils  les  dotent 
A  de  leurs  biens.  Lesfemmes  doivent  ^tre 
«  obeissantes,  et  garder  le  secret  de  leurs 
«  6poux ,  lorsque  le  ciel  a  permis  qu*elles 
«  le  connaissent.  Leur  d^sob^issance 
«  pourra  €tre  punie  par  le  mari,  qui  se 
«  retirera  d*elles,ou  qui  usera  desa  toroe. 
«  La  femme  soumiseevitera  ces  mauvais 
a  traitements.  « 

Au  surplus,  le  legislateur  n'a  pas 
livre  la  femme  au  despotisme  arbitraire 
du  man  :  «  Si  vous  craignez  la  dissen- 
«  ston  entre  les  deux  ^poux ,  dit  le  verset 
«  39 ,  appelez  un  juge  de  chaquee6te;  si 
«  les  parties  consentent  k  vivre  en  bonne 
«  intelligence,  Dieu  assurera la  paix  de 
a  la  famille.  « 

En  general,  le  legislateur  ned^taille 
ses  preceptes  que  pour  en  fixer  le  prin- 
cipe.  Quant  aux  especes,  il  les  aoan- 
donne  a  la  sagacity  du  juge  charg6  d'ap- 
pliguer  la  loi.  L'autorite  du  juge,  c'est- 
a-clire  la  puissance  arbitrate,  devient 
done  d'autant  plus  forte,  que  les  regies 
trac^es  par  le  texte  sont  moins  ^troites. 
Or,  dans  les  circonstances  qui  accompa- 
gnerent  la  venue  de  Mahomet,  c'etait 
beauooup  que  de  substituer  la  volont6 
d'un  horame  h  I'anarchie  qui  r^gnait 
parmi  les  peuples  orientaux.  Voil^  pour- 
quoi  le  Koran,  comme  la  Bible,  nV 
borde  gu^re  les  points  de  droit,  et  en 
reserve  la  solution  h  Tequit^  naturelle. 
II  n'en  faut  pas  conclure,  cep«ndant, 
que  les  expressions  de  la  loi  soient  tel* 
wment  vagues  qu^n  puisse  en  denaturer 

12*  Uvraison,  (sybis  hodebne.) 


le  sens,  et  que  ce  pduvoir  conf^re  au 
juge  soit  une  lacune  dans  la  disposition 
du  texte.  Par  exemple,  en  permettant  le 
divorce,  en  Tentourant  de  sages  res* 
trictions,  Mahomet  n'oublie  pas  qu'il 
n'a  encore  rempli  que  la  moiti^  de  sa 
tdcbe.  II  vient  de  r^gler  Texercice  de 
cette  faculte,  il  lui  reste  k  en  r^gler  le 
r^sultat. 

«  Que  les  femmes  r^pudiees,  dit-il 
«  (ch.  II,  V.  228),  laissent  passer  trois 
«  mois  avant  de  se  donner  a  un  autre 
«  epoux.  »  Puis ,  de  peur  que  Thomme 
ne  soit  tente  d*abuser  de  sa  force,  il 
ajoute  ( V.  232)  :  «  Lorsque  la  femme 
«  que  vous  aurez  r6pudi6e  aura  laiss^ 
«  passer  le  temps  que  je  vous  ai  fix^, 
«  vous  ne  Femp^cherez  pas  de  se  don- 
«  ner  a  un  autre  ^poux.  » 

II  faut  remarquer  que  la  loi  mahom6- 
tane «  si  indulgente  pour  les  infractions 
de  fait  qu'elle  pr6vient,  Test  bien  da- 
vantage  pour  les  fautes  qu'on  peut  avoir 
Tintention  de  eommettre.  Gomme  nous 
Tavons  dit,  c*estune  concession  conti- 
nuelle  aux  faiblesses  de  rhumanit6. 
Ainsi ,  tandis  que  le  rigorisme  Chretien 
proclame  que  la  pens^  du  mal  est  aussi 
coupable  que  Taction  du  mal ,  Tlslam 
8*empresse  de  pr^venir  toutes  craintes 
k  cet  ^ard : 

(V.  235.)  ft  Le  d^sir  d^^pouser  une 
ft  femme,  soit  que  vous  rexprimiez, 
n  soit  que  vous  le  cachiez  dans  votre 
«  coeur ,  ne  vous  rend  pas  criminels  a  la 
ft  face  de  Dieu.  II  salt  que  I'image  des 
ft  femmes  est  toujours  devant  votre 
ft  pens^e.  » 

On  remarquera  gue  le  legislateur  ne 
precede  que  par  voie  de  conseils ,  et  que 
ces  conseils  se  r^sument  k  peu  pres  par 
ces  mots  :  Faites  ce  que  vous  voudrez. 

Le  nombre  des  versets  du  Koran  ou  il 
est  pariedu  manage  des  femmes  est  im- 
mense; mais  ils  se  repetent  souvent. 
Mahomet  aocordait  bien  aux  femmes 
une  existence  legale,  mais  il  ne  leur 
donnait  pas  Texistence  publique;  en 
sorte  que  le  code  de  Tlslam  est  beau- 
coup  moins  riche  que  le  n6tre  en  dispo- 
sitions k  leur  egard.  En  effet,  il  a  fallu 
r^ler,  chez  nous,  les  rapports  de  la 
£emme  mari6e  au  reste  de  la  soci^t^;  en 
Orient,  on  n'avait  ^  r^gler que  ceux  de 
r^pouse  k  r^poux.  Nous  avions  a  con- 
si<ferer  les  relations  d'affaires  et  d*in-i 

12 


m 


LTJNIVERS. 


t^r^U  qu'elle  peut  avoir  dans  notie 
monde  agit^,  k  determiner  sa  position 
dans  le  commerce,  k  limiter  I'exercice 
du  droit  de  contracter.  Mais  le  Koran 
n*avait  point  k  s'occuper  de  pareilles 
choses,  parce  que  la  femme  musul- 
mane  appartient  exclusivement  k  la 
famille,  et  qu*elle  ne  sort  jamais  de  la 
vie  interieure  et  paisible  qu*on  lui  a  faite. 
Pour  elle,  point  d'affaires,  point  de 
travaux  manuels ;  elle  laisse  aux  Juifs  et 
aux  Francs  le  commerce  de  ses  bijoux 
et  de  ses  parures ,  aux  raias  grecs  le 
soin  de  cultiver  la  terre  qui  la  nourrit* 
Sa  magniGque  indolence  Tannule  pour 
le  reste  du  mqnde :  elle  ne  vit  que  pour 
son  mari,  pour  ses  enfanls  et  pour 
elle-ra^me. 

Sauf  las  femmes  musulmanes  mari^ 
chose  rare,  a  des  hommes  sans  avoir 
aucun ,  les  autres ,  le  plus  grand  nom* 
bre ,  n'avaient  jadis  rien  a  envier,  rien  a 
craindre,  rien  a  penser,  pour  ainsi  dire. 
A  Tabri  de  toute  apprehension,  elles 
vivaient  mat^riellement,  mais  heureuse- 
ment,  au  fond  de  leur  harem ;  et  pourvu 
qu'eiles  appartinsseiita  une  position  so- 
ciale  au-aessus  de  la  misere,  elles  de- 
meuraient  s6questr6es,  ainsi  que  des 
fleurs  dans  uue  serre.  Leur  destinee  en 
etait-elle  plus  malheureuse?  I^ous  ne  le 
croyons  pas.  On  ne  souffre  en  ce  monde, 
autrement  que  par  les  besoins  du  corps, 
qu'autant  qu*on  a  les  idees  du  mieux  ou 
au  moins  du  cbangement.  £h  bien, 
lorsque,  de  generation  en  geoeration, 
les  femmes  ont  v^cu  dans  un  bien-^tre 
physique  evident,  quoique  dans  Tes- 
davage  apparent  de  TSme,  peuvent-elles, 
quelle  que  soit  leur  intelligence ,  cooce- 
voir  une  position  differente  et  meilleure, 
ou  elles  Jouiraieut  a  la  fois  de  la  satisfac- 
tion des  sens  et  de  la  liberie  de  Tesprit? 

Et  ne  dites  pas  qu'il  leur  ^tait  tacile 
d'apprendreque  dans  d'autres  contrees, 
k  cote  d*eHes  quelquefois,  leurs  sembla- 
bles  dtaient  libres.  Quand  cela  eQt  et6, 
.lesauriez-vous  crues  bien  a  plaindre? 
Tons  les  jours  nous  voyons  des  oiseaux 
s'ebattre  a  leur  gre  dans  les  plaines  de 
Tair,  soufTrons-iious  pour  cela  de  n*a- 
voir  point  des  ailes?  Que  savons-nous? 
t.e  juge  supreme  du  genre  humain  n'a 
pas  encore  dit  son  dernier  mot  dans  cette 
question.  II  a  fait  les  ^tres  differents, 
leurs  instincu  presque  oontradictoires , 


Itars  moears  divenes,  et  il  a  sa  d 
bonte  n'accorder  ^  cbacan  que  hi 
d'idees  necessairespoor  pofXToirtetli 
reux  dans  le  oerde  oik  il  Ta  fiii  1 
tion  facile  poor  les  brutes, 
materiel  pour  Fes  Orientaux, 
d'aetion  et  d'esprit  pour  llioaunei 
ment  civilise,  voila  ce  que  Dtcai 
offre  k  tons  pour  traverser  ee  i 
que  les  ingrats  seals  caiomnieoL 

Or,  entre  la  digestion  des  1 
liberti^  d'action  et  d'esprit  de  < 
peoples  europ^ns,  il  y  a  ce  ( 
ment  du  corps,  ce  repos  de  riocd 
incapacite  de jouissances,  a  vous  i  ' 
qui  ont  constitq^  et  constiuieatc 
le  bonheur,  ou  plut6t  la  destisff  i 
plete  des  femmes  orimtales.  0 
les  femmes  d'Europe,  elles  oot^ 
g^n^ral,  et  presque  dans  tous  ksi, 
faibies  de  corps  et  pusiUanimei  i^ 
En  consequence,  contre  ks  i 
d^hommes  brutaux,  grossiers,! 
mSme ,  elles  avaient  a  rinteriorii 
tection  du  barem ,  de  ses  _  ~  _ 
ses  murs,  comme  elles  avai»t«| 
blic  centre  Tinsolence  de  o» 
bommes  la  protection  de  kur 
Groyez-vous  que  les  gazelles  a'l 
raient  pas  voiontiers  d'etre 
dans  certaine  for^t,  a  laooad 
ne  tomber  jamais  sous  la 
tigres  ?  Les  femmes  d*Orie&t~j 
gazelles ;  elles  en  ont  les  grawkj 
les  jambes  fines ,  Teldganee  etb 
et  de  plus  elles  jouissent  da  I 
d'etre  a  Tabri  des  hommes ,  qiff 
aussi ,  sont  des  tigres. 

Ne  vous  Imagines  pas 
cette  r^clusion  acceptee  soit 
chementaux  satisfactions  deUi 
aux    douceurs  de  Tamour.  £ii 
comme  en  Occident  les  femmtfl 
coquettes,  et  quelques-ones  ( 
Le  voile,  si  bermetiqaement  ftiAf 
rinjure,  8*entr'ouvrait  fadleniati 
laflatterie;  les  grillages  du  haita»1 
jours  lev^  contre  un  appetit  i 
baissaient  devant  Tamour.  11  f  a  i 
quelque  chose  de  plus  mjstercr 
plus  tatal  entre  le  rapprochement  d 
etres  qu'un  obstacle  materiel  sif\ 
cesse,  pour  qui  les^eux  de  tous  i 
yeux  jaloux,  et  am  s'isoleot,  nc 
ment  par  ce  gout  inn^  des  an 
mais  par  prudence ,  par  devoir. 


SYRIE  MODERNE. 


179 


obstacles  sont  la  pierre  de  touche  de 
I'amour;  et  dans  quel  pays  y  a-t-ii  ja- 
mais eu  plus  d'obstaclesentre  les  amants 
que  dans  cet  Orient  ou  les  deux  sexes 
ont  toujours  v^cu  sans  melange,  sans 
rapports  perpetuus ,  ou  la  nature  invite 
si  maenifiquementa  Tamour,  ou  la  so- 
ci^te  la  toujours  ^pi^  si  ardemment  et  Fa 
souvent  poursuivi  avec  tant  de  rigueur! 

IV0UTSAI7X  TBOUBX.XS  ENSYBIB. 

Kous  avons  chereh6  k  pr^enter  le  ta- 
bleau de  la  civilisation  en  Orient,  ou  plu- 
tdt  de  I'epoque  d'ordre  social  le  plu^ 
oomplet  cnez  les  Mahometans ;  et  sans 
nous  arrSter  maintenant  sur  les  vices  ou 
les  vertus  des  kh allies  qui  se  succederent, 
d'Abou-Djafar-al-Mausour,  le  second  des 
Abbassides,  k  Al-Mamoun,  leseptieme, 
et  peut-^tre  le  plus  ^lorieux ,  nous  en  ar- 
riverons  tout  de  suite  a  M otassem  ^  Toc- 
tonaire,  appel6  ainsi  parce  quil  r^gna 
huit  ans  huU  mois  et  Am7  jours,  qu'il 
laissa  huit  fils  et  huit  filies ,  et  qu-il  etait 
d'ailleurs  le  huitieme  prince  de  sa  race. 
Cest  sous  ce  dernier  khalife  seuiement 
que  la  tranquillite  dela  Syrie  fut  de  nou- 
veau  troubl^e,  et  que  Tempire  des  Ab- 
bassides commenca  k  s*approcher  de  cette 
pente ,  sur  laquelle  il  devait  roller  sans 
cesse  jusqu'a  sa  ruine  complete  (*). 
Yoj^ons  d*abord  quel  coup  fut  porte  a  la 
Syrie,  qui,  depuis  presd*un  siecle,  s*ac- 
coutumait  si  bien  au  repos ,  et  qui  n'a- 
vait  fait  que  gagner  a  u^Stre  plus  le  cen- 
tre de  la  domination  arabe. 

Certes ,  si  la  Syrie  pouvait  s*attendre 
a  une  nouvelle  attaque,  ce  n'etait  pas  de 
la  part  des  Byzantins.  Depuis  Heraclius, 
qui  avait  si  rapidement  perdu  cette  belle 
province ,  il  s'^tait  succed^  sur  son  trdne 
deshonor6  si  peu  de  princes  dignes  de  la 
couronne ,  que  ce  fut  presque  un  mira- 
cle, au  milieu  du  neuvieme  siecle,  de 
voir  Tavenement  de  Th^ophile,  aussi 
brave  soldat  qu'habile  politique.  Th^o- 
phile,  honteux  d'etre  comme  le  vassal 
support^  des  Arabes ,  honteux  surtout 
du  tribut  que  ses  pr^decesseurs  avaient 
consent!  a  payer  aux  khalifes  de  Bagdad, 
Toulut  s'affranchir  de  ces  indiguites, 
et  declara  hardiment  la  guerre  au  tout- 
puissant  successeur  de  Mahomet.  Ciog 

O  Yoyez  Elmacin  et  Ockley. 


fois  il  marcha  eontre  les  Arabes ,  et  mal- 
wt€  ses  alternatives  de  succ^  et  de  d^ 
faites,  il  sut  si  bien  proGter  des  circon- 
stances  favorables,  qu'il  acquit  uiie  repu- 
tation merit^e  de  vaillance  et  d*audace. 

La  deruiere  de  ses  expeditions  ne  fut 
pas  la  moius  glorieuse  :  apres  avoir  re- 
pousse ses  ennemis  sur  les  fronti^res  de 
leurs  £tats,  il  parvint  jusqu'en  Syrie, 
et  vint  mettre  le  si^ge  devant  Sozopetra. 
Cette  ville  etait  ebdrea  Motassem  comme 
lieu  de  sa  naissance.  Son  illustre  p^re 
Haroun-al-Rascbid ,  qui  voyageait  sou- 
vent  dans  son  empire ,  emmenant  avec 
lui  sa  eour ,  ses  femmes  et  ses  tr^sors , 
avait  vu  nattre  ^  Sozopetra  un  enfant 
qui  devait  etre  le  second  beritier  de  sa 
puissance.  La  cite ,  favorisee  par  cette 
naissance,  avait  done  ete  Tobjet  des  ge- 
nerosites  des  deux  princes,  dupere  etdu 
fils.  Elle  etait  riche,  elle  etait  ornee  de 
plusieurs  palais  et  dotee  de  plusieurs 
privileges.  Ce  fut  preciseinent  pour 
ces  raisons  que  Tbeophile ,  voulant  at- 
teindre  son  ennemi  dans  ses  affections 
aussi  bien  que  dans  son  orgueil ,  porta 
tons  ses  efforts  eontre  la  ville  cnerie 
par  le  khalife. 

Or,  Motassem ,  occupe  k  qette  epo- 
({ue  au  fond  de  la  Perse  k  chatier  un 
imposteur,  ne  put  se  porter  lui-m^me 
avec  ses  meilleures  troupes  au  secours 
de  sa  ville  natale;  et,  pris  ainsi  au 
depourvu,  il  essnya,  pour  sauver  sa 
bien-aimee  Sozopetra,  de  la  ressource 
desnegociations.  L^audacieux  Theopbilo 
repoussa  toute  ouverture,  attaqua.  |u 
ville  avec  plus  d'ardeur  que  jamais ,  la 
prit  d'assaut,  et  la  traita  avec  la  plus 
extreme  rigueur.  Rien  n'y  fut  epargne, 
ni  les  habitants,  ni  leurs  demeures.  Tou- 
tes  les  maisons,  tous  les  palais  furent  in- 
eendies  ou  rases ;  tous  les  Syriens  ma* 
hometans  furent  gorges,  mutiles,  ouau 
moins  marques  d'une  maniire  ignomi- 
nieuse.  Non  content  de  ces  cruautes, 
Theophile  permit  k  ses  soldats  de  se  re- 
pa  ndre  dans  les  environs  pour  piller  et 
detruire ;  et  ce  ne  fut  qu'apres  avoir  reuni 
plus  de  mille  captives  jeunes  et  belles 
qu'ii  songea  a  quitter  lepays  {). 

Une  pareille  conduite  appelait  des  re- 

Sresailles.  Elles  furent  terriblesdela  part 
es  Arabes.  Apr^s  en  avoir  fini  avec  la 


OYoyeiAboan-Faradl.. 


13. 


180 


L1JNIVERS. 


revoltepersane,  Motassem  r^unit  une 
arm^  considerable,  dans  la  composition 
de  laguelle  quelques  annalistes  font  en- 
trer  lusqu'^  cent  trente  niille  chevaux. 
Puis  rayant  dif  is^e  a  Tarseen  trois  corps , 
il  se  mitlui-m^mea  la  tdte  d'un  de  ces 
corps,  et  les  fit  marcher  tousles  trois  smr 
Amorium,  en  Phrygie.  Or  cette  ville  gree- 
que  etait  la  patne  de  Michel  le  Begue, 
pere  de  Tbeophile.  En  la  menacant  de  la 
destruction ,  le  khalife  d^voilait  un  pro- 
jet  de  vengeance  qui  devait  toucher  aussi 
vivement  Tempereur  de  Byzance  qu'il 
Tavait  6i6  lui-mSme  par  le  sac  de  Sozo- 
petra  :  c'etait  la  ioi  du  talion  appliqu^e 
a  une  expedition  militaire.  Malgr^  les 
efforts  desesp^res  de  Theophile ,  malgr^ 
une  bataille  meurtriere  et  dont  les  chan* 
ces  furent  loogtemps  balanc^es,  les 
Arabes,  plus  nombreux  que  les  Grecs, 
forcerent  ces  demiers  a  la  retraite.  Des 
lors  Amorium  n'avait  plus  qu'a  subir 
tot  ou  tard  la  Ioi  cruelfe  de  son  vain- 
queur.  Presageant  le  sort  affreux  qui 
lui  etait  reserve,  cette  ville  se  defendit 
avec  unheroTsme  admirable.  Cinquante- 
einq  jours  de  suite »  elle  repoussa  les 
Arabes  qui  se  ruaient  en  masse  contre 
ses  murailles.  Elle  avait  lasse  leur  cou- 
rage ,  elle  avait  ebranle  leur  espoir  de 
succes ,  et  deja  Tarmee  mahometaoe  son- 
^eait  a  se  retirer,  lorsqu'un  trattre  vint 
mdiguer  au  khalife  rendroit  le  plustiEiibie 
des  fortifications ,  et  lui  donna  ainsi  les 
moyens  d'essayer  un  dernier  et  defini- 
tif  assaut.  En  apprenant  la  prise  de  la 
ville,  pour  laquelle  ii  avait  une  sorte 
d'attacnement  filial,  Tbeophile,^  son 
tour,  voulut  conjurer  la  vengeance  de 
Motassem.  II  envoya  deputes  sur  depu- 
tes, accumula  les  promesses,  en  vint 
meme  jusqu'aux  prieres ;  tout  fut  inu- 
tile. L'empereur  byzantin  eut  la  douleur 
de  voir  Amorium  detruite  de  fond  en 
comble ,  le  palais  de  son  p^re  impitoya- 
blement  rase,  les  habitants  de  sa  viile 
fidele  passes  au  fil  de  repee  ou  emmenes 
en  esclavage.  Theophile  n'avait  pas  de 
memoire  :  les  mines  de  Sozopetra  fu- 
maient  encore !  (*) 

Gependant,  dans  la  lutte  terrible  qui 
venait  d'avoir  lieu  entre  les  Arabes  et 
les  Grecs,  il  y  avait  uo  fait  bien  plus 
grave  qu'une  nouvelle  guerre  des  Ma- 

(*)  Voyez  les  Annales  de  Baronios  et  de  Pagi. 


hometans  comre  ies(MieDi,|Kl| 
sac  de  deux  vilies,  qaelamortoit 
davage  pour  plusiears  miUienf^ 
mes  :  oe  foit,  le  voici.  Dans  la  s 
bataille  livree  par  ' 
tassem ,  en  Galatie  deaxieme,  aaa 
de  Tempire  Byzantin ,  ea  dm\  itH 
rium ,  roalgre  les  troupes  nom^ 
ses  de  Grecs  et  d'Arabes,  ee  1 
trente  mille  Persans,  refu^eal 
Mineure  et  soldes  par  Tei 
Constantinople,  qui  rompirat^a 
mencement  de  Taction,  les  mfii 
des  Mosulmans  de  la  M^  , 

1>lus  tard ,  c'est  aux  cavalien  I 
eur  habilete  dans  le  maniemeDtd 
k  Timpetuosite  de  leurschar^fl 
sives,  que  le  khalife  dat  it  ^ 
Ainsi  les  deux  peuples  riyau  i 
desormais  besoin  danxiliairesp* 
cider  entre  eux!  Ainsi  ces  f 
bes^  qui  pendant  plus  de  deii]| 
avaient  ete  la  terreurdesCrT 
neres ,  dont  la  seule  ap[K 
les  campagnes  byzantioes  I 
au  loin  les  populations,  dooll 
mier  choc  etait  si  puissant,  di 
deur  etait  infatigable,  leswl 
tenant,  sinon  aussi  posilia 
eeux  quils  avaient  seuls  etc 
Taincus  jusqu*alors,  du  moiosi 
h  leur  tour,  ayant  perdu  uwjj 
partie  de  leurs  vertus  militairtr 
riers  sans  energie  sinon  sans  ( 
C'est  qu'a  leur  tour  la  cifilis^ 
sur  eux.  C'est  qu'en  lent  ( 
partage  ses  richesses  et  ses  i 
c'est  qu'en  rendant  par  iffi  I 
eontinu  leur  esprit  plus  padlij' 
demi-civilisationsi  predeuse,a 
que  peu  corruptrice,  a  petit  kf^ 
leur  corps ,  ramolli  leur  ime,! 
cendus  latalement  au  rans  dflj 
en  decadence  pour  lesauellesl 
saient  jadis,  du  temps  de  I'aof" 
ou  de  1  actif  Moawiab,  un  r 
neral  et  si  profond. 

APPAniTION   DBS  TUBCS  S94 

Mais  quel  est  oet  element  i 
qui  leur  procure  aujourd'boi  i 
toire  ephemdre?  Quels  sont  ca 
race  forte ,  sobre,  ardente,  coo 
talent  nagu^re  les  fils  de  PBe^ 
qui,  comme  eux,  va  dcfeDira 


SYRIE  MODERNE. 


181 


fidre«  exigeaDte,  despotique?  Ce  sont 
des  homines  dur4ora,ils  sortent  des 
montagnes  ueigeuses  et  des  plateaux 
arides  de  la  haute  Asie,  au  dela  ae  TOxus 
et  du  Jaxarte.  L^-bas  aussi  s'etendent 
des  deserts ,  la-bas  aussi  une  nature  ma- 
rdtre  repousse  les  hommes  de  son  sein , 
en  ne  leur  accordant  pour  tout  avautage 
qu'un  corps  de  far  et  une  dme  de  glace. 
Les  hordes  du  Nord  viennenta  leur  tour 
offrir  leurs  bras  aux  hordes  du  Midi , 
devenues  une  nation  puissante ,  riche , 
dominatrice.  Comme  nous  avons  vu ,  il 
y  a  deax  siecles,  lesGhassanides  se  met- 
tre  au  service  des  Byzantins,  ainsi  les 
Turcs,  a  cette  heure,  demandent  d'abord 
aux  Arabes  la  nourriture,  rhabillement 
et  le  gite,  et  mettent  leurs  corps,  qu'on 
garantit  du  froid  et  de  la  faim,  au  ser- 
vice de  leurs  sauveurs.  Mais ,  a  I'instar 
des  auciens  Ghassanides  vis-a-vis  des 
Grecs,  les  Turcs,  vis-^-vis  des  Arabes, 
conservent  Tindependance  de  leur  esprit, 
leurs  vertus  primitives  :  la  sobriete  et 
Tardeur  militaire.  lis  se  pritent,  iis  ne 
se  vendent  pas :  march6  dangereux  dont 
les  Arabes  auront  plus  tard  ase  repentir. 
Cette  milice  indomptable,  quoique  fi- 
dele,  aura  un  Jour  plus  de  puissance  (|ue 
les  Arabes  eux-m^mes.  £lle  choisira, 
d*ailleurs, son  moment,  agira  avec cette 
prudence,  cette  longanimite,  cette  perse- 
verance qui  caracterisent  les  enfants  des 
deserts.  Plushes  maitres  temporaires  s*a- 
moUiront,  plus  eliesereiiforcera ;  plus  ils 
s'abandonneront  au  luxe,  k  la  mollesse, 
plus  elle  fuira  le  contact  des  superfluites 
exigeantes ;  plus  ils  secreeront  de  besoins 
nouveaux,  plus  elle  r^trecira  le  cercle 
des  siens.  Puis  cette  milice,  qui  a  le 
sentiment  de  la  grandeur,  qui  a  la  con- 
science de  sa  souverainete  future,  segar- 
dera  de  tout  melange  avec  la  race  arabe. 
Elle  vivra  isolee  jusqu'a  ce  qu'elle  do- 
mine  a  son  tour  et  impose  des  lois  h 
ceux  qui  la  traitaientd*aDord  en  infimes 
merceuaires.  Cette  tactique  si  ancienne, 
81  repetee  dans  le  cours  des  dges,  si  con- 
Dueet  si  simple,  r^ussiratoujours :  c*est 
pourtant  unmstinctplutot  qu'un  calcul ; 
mais  cette  fatal  ite  pesera  sans  cesse 
sur  les  peuples  d'Orient.  Al-Mamoun 
le  genereux  ne  vit  en  Thaher  qu'un  de 
ses  lieutenants  magnifiquement  recom- 
pense, et  ce  lieutenant  enrichi  devint  le 
chef  d*uDe  dynastie,   les  Thahehtes. 


Motassem  le  perplexe  ne  vit  dans  les 
Turcs  ^ue  des  auxiliaires  utiles ,  et  ces 
auxiliaires  indispensables  allaient  deve- 
nir,  pour  les  successeurs  du  khalifa  oc- 
tonaire,  des  maitres  despotiques. 

Quelies  que  soieut ,  du  reste,  les  con- 
sequences futures  de  Tengagement  des 
Turcs  en  vers  les  Arabes ,  toujours  est- 
il  que  rintroduetion  de  ces  hommes 
primitifs,  de  ces  soldats  feroces  dans  les 
armees  musulmanes  eut ,  d^s  le  regne  de 
Motassem,  une  bien  deplorable  influence 
sur  la  facon  de  se  conduire  k  la  guerre. 
L«s  Turcs,  plus  dedaigneux  encore 
de  la  vie  humaine  que  ne  I'avaient 
jamais  ete  les  Arabes ,  egorgeaient  sans 
pitie  leurs  ennemis  en  deroute.  Plus  de 
troves  possibles  entre  les  corps  bellige- 
rants ,  plus  de  pardons  a  attendre  du 
vainqueur.  Une  mort  cruelle  ou  une 
servitude  plus  cruelle  encore,  voila 
quel  etait  )e  sort  des  vaincus.  La  haine 
personnelle  des  deux  princes,  Theophiie 
et  Motassem ,  TafTront  qu'ils  se  nrent 
reciproquement  en  blessant  leur  orgueil 
mutuel  et  en  detruisant  le  berceau  Tun 
de  Tautre,  la  rage  qu'ils  mirent  tons  deux 
a  rivaliser  de  rigueurs  et  d'atrocites, 
toutes  ces  causes  d'implacable  animad- 
version donnerent  a  la  guerre  entre  les 
Chretiens  et  les  Mahometans  plus  d'a- 
charnement  que  jamais.  Des  deux  parts 
les  prisonniers  fiirent  done  sacrifies 
sans  pitie ;  et  si  les  Musulmans  condam- 
nerent  les  leurs  ^  d'horribles  tortures , 
Tempereur  byzantin  Constantin  Por- 
phyrogenete  se  complatt  de  son  c6te  a 
raconter  qu'en  Crete  des  Arabes  furent 
ecorches  vifs,  et  d'autres  precipites  dans 
des  chaudieres  d^eau  bouillante.  Suppli- 
ces  infdmes ,  qui  font  la  honte  des  deux 
peuples,  et  qui  entralnaient  en  outre 
rexecrable  consequence  d'allumer  entre 
les  Chretiens  et  les  Mahometans  une 
haine  inextinguible ! 

DOMINATION  BBS  XUBCS. 


La  cruaute  militaire,  toieree  par  les 
khalifes ,  employee  meme  au  profit  des 
armes  musulmanes  par  Motassem,  ne 
tarda  pas  a  se  tourner  contre  ses  succes- 
seurs. Le  neuvieme  Abbasside,  Wattek- 
Billahy  fut  un  prince  debauche  et  nul ;  le 
dixieme,  Motawakkel,  fut  un  fleau. 
L'empire  tout  entier  eut  h  aouffrir  de 


1S2 


L'UOTVERS. 


son  esprit  fantasque  et  m^bant.  fl  8'6- 
tait  eotoar6deTurcs ;  et,  com  me  il  arrive 
souvent  aux  tj^rana,  ses  propres  gardes 
r^orgerent,  a  rinstigation  de  son  fils 
aioe.  Mais  le  khalife  parricide ,  Montas- 
ser,  ne  v^ut  pas  longtemps.  Victime  a 
son  tour  de  Tambition  des  Turcs,  il  fut 
massacre  par  euxauproOtde  Mostain(^). 

Heureusement  le  d^ordre  n^eut  d*ae- 
tion  devastatrice  que  sur  la  M^opota* 
mie.  La  Syrie,  trop  naturellement  pai- 
sible  pour  prendre  part  k  ces  guerres 
civilesy  n'en  ressentit  que  le  contre- 
eoup.  Fidele  et  soumise  aux  chefjs  que 
lui  imposaient  les  khalifes  qui  se  sue- 
o^d^rent  alors  si  rapidement  dans  la 
chaire  ensanglantee  de  Mahomet ,  elle 
n'eut  h  souffrir  que  de  rinstabilite  du 
pouvoir  central,  qui  detruisait  toute 
s^curitedans  les  transactions,  etfermait 
h  ses  produits  leur  plus  vaste  debouch^. 
Cependant  eile  se  serait  encore  remise 
de  ces  maux  passagers,  si  la  domination 
deplorable  des  Turcs  ne  se  fdt  trop 
longtemps  prolongee. 

Un  grand  malheur  Tavait  aussi  me- 
nac^e ,  et  n*avait  pas  ^te  non  plus  pour 
peu  dans  le  retour  de  ses  inquietudes. 
Outre  le  mal  que  la  rivalite  de  Th^o- 
pbile  et  de  Motassem  lui  avait  fait ,  ou- 
tre le  sac  de  Sozopetra ,  la  fondation  de 
Samarah  ne  lui  avait  pas  ete  une  moin- 
dre  source  de  craintes.  Motassem ,  fati- 
gue du  sejour  de  Bagdad,  ou  plutot  in- 
quiet  de  Tesprit  de  cette  ville ,  ia  quitta 
tout  a  coup,  et  alia  se  bdtir  un  palais  sur 
les  frontieres  de  la  Syrie  Euphrate- 
sienne.  Autour  du  palais  du  khalife 
▼inrent  bientot  s*eiablir  le^  courtisans ; 
puis  il  fallut  plus  tard  loger  cette  redou- 
table  milice  turque  que  Motassem 
avait  creee.  De  ces  besoins  divers  naquit 
une  cite,  qu'on  nomma  Samarah ,  et  qui 
sembla  tout  d'abord  ramener  pour  la 
Svrie  avec  les  honneurs  du  sejour  des 
khalifes  les  dangers  qui  les  suivent.  Sous 
Motawakkel  ce  fut  bien  pis  encore  ;  ce 
prince,  aussi  inconstant  que  cruel,  s'en- 
nu]^a  un  iour  de  Samarah ,  et  songea 
il  retablir  le  siege  de  Tempire  h  Damas. 
Mais  les  Damasquins ,  soit  ealcul ,  soit 
effroi,  requrent  si  froidement  le  de- 
bauche  Motawakkel ,  qu*au  bout  de  deux 
mois  il  retourna  k  Samarah.  Les  Turcs 


partirent  avec  loi ;  et,  grke  I oti 
Dement ,  Damas  et  la  Syrie  fvrait 
renavantaTabri  des  troubles  peipC 
qui  firent,  durant  une  trentalK 
nees,  de  Samarah  la  yille  dest^TaM 
khalifales  C). 

Si  les  Syriens  mabomtos,  toi 
souffrant  de  la  decadence  des  ie 
de  rinsolence  de  plus  en  plus  gnd 
Turcs,  pouvaient  poartantencon^l 
se  meiant  en  aucune  oceasionas 
ffues  du  temps ,  vivre  tran^ 
leur  prosperity  passde ,  pour  aiosi 
n'en  etait  deja  plusde  mtoe|N 
Chretiens  et  pour  les  Juifs.Ces 
d^s  le  regne  de  Motassem  IT 
avaieut  cfe  persecutes  paruo 
audacieux ,  que  la  Chroniqoe 
singulier  nom  d'Abou-Harb. 
arabe ,  signifie  la  guerre;  ' 
trad  ui  rait  par  conseqaent  pari 
le  Pere  de  la  guerre.  We^t-ciJ 
sumom,  qa'un  titre  que  le* 
serait  donne  k  lui-m^me  pom 
la  terreur  ?  Toujours  estil  qoei 
Harb,   grdce  aux  preoocupi 
khalife   guerroyant  tantot  ei 
tantdt  dans  rAsie-Mineorc,  n 
autour  de  lui  une  masse  coofuscj 
gands,  de  fanatiques  et  de  gcii&< 
race,  ranqonna  d'abordlesw' 
s'essaya  dan  s  des  sortes  de  petite 
puis,  lorsqu'il   eut  aguerri  Si 
dans  les  gorges  de  la  Jud^e  ll| 
des  bords  abandonnes  de  la  r^ 
lorsqu*il  I'eut  composeed'eari 
mille  hommes,  il  entrepHtah 
importantes  fxpedittons.  SfitJ 
la  loi  a  certaines  villes ,  (|Qi  ^ 
daient,   k    cause  de  la  gw 
g^re ,  que  de  faibles  gan ' 
posa  des  contributions  eotf 
acelles  qui  se  soumettaieotJ 
saccagea  sans  scrupule  eellesif 
rent  de  lui  resister.  Son  r 
crut  avec  ses  succes ;  et  un  j 
jusque  dans  Jerusalem, 
detruire  tons  les  temples,  de  j 
cite  sainte,  si  elle  nesei 
fallut  rlen  moins  que  Tinti 
patriarche  pour  sauver  jerusa'^ 
versement  immediat  d'une  forV 
a'argent.  CJcs  brigands  associfeq| 
alors  la  capitale  de  la  Paier^'^ 


O  Voycz  Khondemlr. 


C^  Voy«  AbOQi-Feda. 


STRIE  MODERNE. 


18t 


\fMie  dt  nooTeaa  dans  les  campa- 
ie$,  et  iis  j  continu^rent  leurs  meurtres 
[kuTS  depredations  jusqu'a  ce  aue  le 
piilife,  de  retour  d'Amorium,  eAt  en- 
N  centre  eux  une  armee  qui  en  tua 
Rt  miile,  8*empara  de  leur  chef,  et 
^  le  f  este  en  deroute.  Mais  ce  n'etait 
Q*ail  orage  local  y  dent  la  duree  fut 
I  longue,  il  est  vrai ,  mais  qui  dispa- 
^m  vite  encore  qu'i)  ne  s'etait  form^. 

I  somJ^xcaiaes  db  uoxawakksl. 


«^  qui,  ati  contrailre,  devait  inqui6ter 
I  ceux  qui  ne  professaient  pas  le  ma- 
i^tisrtie,  ce  qili  devait  troubler  a  tout 
[is  leur  existence ,  c'etaient  des  lois 
gueur  et  d'exception.  Sous  les  Otn- 
Jcs,  qui  ne  songeaient  (|u'a  acr^- 
Idus  les  elements  6onstitutifs  J'un 
ire,  sous  les  premiers  Abbassides, 
:  la  puissance,  ^tant  sans  bornes, 

Euvait  aucune  de  ces  inquietudes 
'lent  les  ordres  les  plus  durs,  par- 
i#es  inspirent  une  m^flance  per- 
-Je,  les  Chretiens  et  les  Juifs  avaient 
irait^s  generalement  avec  douceur, 
■^"un  pied  d'egalite,  apparente  aU 
_,  avec  les  Musulmans.  Le  tyran 
awakkel,  qui  voyait  partout  des 
Kpirateurs ,  changea  brusquement  le 
i  d'une  ffrande  partie  de  la  Syrle, 
par  defiance,  soit  par  haine  rell- 
we,  soit  plutdl  par  ce  raffinement  du 
Dotisuie    qui   humilie  les  homines 
*  les  mieux  dominer.  Cet  execrable 
Ife  ordonna  que  tous  les  Chretiens 
JUS  les  Juifs  de  Tempire  arabe,  fus- 
cootraints  de  porter  une  large  cein- 
de  cuir  appelee  Zonnar.  Cette  loi 
luaire,  aussi  tyrannique  que  f6- 
.«  en  d^plorables  r6sultats ,  devait  k 
•nir  distinguer  outrageusement  ceux- 
^s  Musulmans ,  et  les  priver  d'un  des 
i^fices  de  la  fortune  les  plus  appreci^s 
Orient ,  celui  de  se  montrer  en  public 
^  de  riches  v^tements.  On  ne  peut 
I  douter,  du  reste,  de  TintentioB 
ite  malveillante  qui  animait  Motawak- 
';  car,  comme  complement  et  cons6- 
bace  de  sa  loi  tracassi^re  sur  le  cos- 
fee  de  ses  sujets  non  mahometans,  il 
Kcrivit  en  outre  leur  ^loignement  de 
[ite  charge  de  justice  on  de  police  ur- 
ine, les  parqua,  pour  ainsi  dire,  dans 
IT  isolement,  et  teadit  a  en  faire  une 


r 


population  a  part,  tol^r^e  plut6t  qu'ad- 
mise,  abandonn^e  k  elle-m^me  plutdt 
que  protegee.  Ce  fut  Tan  235  de  Thegire 
que  cette  loi  somptuairefut  promulgu6e; 
et  Ton  a  remarqu^  avec  raison  qu*elle 
avait  r^siste  aux  croisades  et  aax  diffe- 
rentes  dominations  de  laSyrie,et  qu'elle 
existe  encore  en  partie  (*). 

Non  content  de  son  cfeuvre  premiere, 
Motawakkel  se  complut  a  la  developper, 
k  y  ajouter  d*ann6e  en  ann6e  quelques 
n6uvelles  prescriptions  de  plus  en  plus 
vexatoires.  Ainsi  il  d6fendit,  en  239,  aux 
Chretiens  comme  aux  Juifs,  d'adapter  k 
leurs  selles  des  ^triers  de  fer.  Puis  il 
alia  encore  plus  loin ,  il  ordonna  k  ces 
sortes  de  parias  de  s'abstenir  de  Tusa^e 
des  chevaux  et  de  ne  monter  d^sormais 
que  des  mulets  ou  des  dnes.  Agir  avec 
une  telle  rigueur  6tait  refuser  k  la  fois 
aux  Chretiens  et  aux  Juifis  leluxe,  la 
dignity,  et  partant  toute  consideration. 
On  fut  oblige,  tout  en   murmurant, 
d'en  passer,  en  Syrie,  par  la  volont^ 
du  tyran.  La  lutte  individuelle  eAt  ^t^ 
trop  dangereuse ;  le  soulevement  g6n6- 
ral  edf  6te  trop  chanceux.  L'odieux  cal- 
cul  du  khalife  se  trouva  malheureuse- 
ment  fort  juste  :  en  humiliant  ces  ad- 
versaires  religieux ,  il  leur  6lait  toute 
puissance  actuclle  et  future.  Car  s'ils  se 
r^voltaient  imm^diatement,  il  6tait  en 
mesure  de  les  contraindre  k  lui  ob^ir 
par  la  force;  s'ils  acceptalent,  au  con- 
traire ,  Toutrage  sans  en  demander  rai- 
son, il  les  habituait  peu  a  peu  a  se  con- 
siderer  comme  d'une  race  inferieure,  k 
prendre  bientdt  Failure  des  esclaves, 
comme  ils    en   avaient  accepte  I'uni- 
forme.  Infernale  logique,  qui  devait,  en 
effet ,  aboutir  a  former  en  Orient  la 
classe  faible,  debonnaire  et  m^prisable 
qu'on  nomme  encore  les  rayasl  Triste 

origine  de  la  decadence  continue  des 

Chretiensdu  Levant,  deleurimpuissance 

et  de  leurs  malheurs! 

'  Dl^GADEHCE  mMlHBNTBDU  KHA.LIFAT. 

II  n'est  rien  de  plus  difficile  a  mourir 
qu'un  gouverneraent,  k  moins  que  son 
agonie  ne  soit  brusquement  traneh^c 
par  le  fer  d'un  conguerant.  Dans  Tordre 
ordinaire  des  decadences,  il  v^ctelong- 
temps,  se  tralne  de  faute  en  faute, 

(*)  Voyez  Abou'l-Fara^J. 


IS4 


L'UNIVERS. 


rouie  de  chute  en  chute,  et  ne  finit  qu'a 
force  d'iiiipuissancechez  les  goureruants 
et  de  lassitude  chez  ies  gouvern^.  Les 
80ci6t6s  hierarchisees  craignent  les  chan- 
gements.  II  n*y  a  que  les  bandes  d'a- 
venturiers,  les  hordes  demi-sauvages , 
fuyant  le  d^ert,  qui  savent  facilement, 
apr^  la  victoire,  passer  d'un  ordre  de 
cnoses  h  un  autre ,  ou  accepter  le  joug 
du  chef  a  qui  lis  doivent  leur  conqu^te. 
Uue  fois,  au  contraire,  qu*une  grande 
puissance  personuelle  s'est  impos&  a  un 
pays^  une  lois  c|u'un  principe  a  ete  admis 
et  mis  en  pratique  avec  le  concours  des 
plus  entreprenants ,  11  faut  que  les  stic- 
cesseurs  du  chef  courono^  soient  bien 
faibies ,  il  faut  que  les  consequences  du 
principe  accepte  soient  bien  df6piorabie8, 
pour  qu'on  se  d^barrasse  d'une  famiLie 
importune ,  pour  au'on  renverse  un  gou- 
vernement  incapable.  De  pareils  revlre- 
ments  radicaux  et  interieurs  sont  rares 
partout,  et  principaiemeiit  en  Orient. 
La  ce  soot  des  conqu^tes  qui  se  font,  et 
non  des  revolutions.  La  ce  sont  les 
Strangers  qui  renversent  un  ordre  de 
choses,  et  non  les  peuples  qui  en  souf- 
frent.  La  ce  sont  les  nouveaux  venus  qui 
imposent  un  gouvernement ,  et  non  la 
volonte  publique  qui  le  cree. 

Cette  difference  dans  Thistoire  des 
nations  asiatiques  avec  certaines  na- 
tions europeennes  est,  du  reste,  tres- 
concevable.  Comment  se  sont  form^es,  en 
effet ,  la  plupart  des  nations  asiatiques  P 
DHrruptions  success!  ves,  du  nord  comme 
du  midi,  op^rees  par  des  hommes  fa- 
tigues de  leur  misere,  mecontents  de  leur 
climat,  extenues  de  leur  regime  de  pri- 
vations ,  qui  se  sont  ru^s ,  t^te  baissee , 
centre  les  obstacles ,  si  nombreux  qu'ils 
fussent,  qui  les  emp^chaient  de  jouir 
des  biens  materiels  qu'offrent  une  terre 
feconde  et  un  soleil  radieux.  De  pareils 
hommes  affroiitant  tout,  la  mort  instan- 
tauee  leur  etant  preferable ,  d'ailleurs ,  a 
une  vie  presaue  impossible ,  ils  sont  na- 
turellement  oraves,  tenaces;  ils  devien- 
nent  futalement  invindbfes.  Puis,  re- 
ducation  rigidc  que  la  nature  leur  a 
donnee  fait  quelque  temps  durer  leur 
energie  au  milieu  d6  la  jouissance  :  ils 
sont  assez  longs  a8'amollir,as'e£feminer. 
Or,  si  le  desespoirlesa  rendus  victorieux, 
leur  rudesse  native  les  rend  despotes  c 
jls  imposent  brutalement  leurs  lois  ^ux 


vaincus;   et  voila  un  goavt 
fonde.  Plus  tard,  h  Tavv^e  deh 
chefs ,  lis  eprouveront  rinfloeDtt  i 
blen-^tre  continu;  et  si  leunn 
s'adoucissent,  si  leur  cara^  i 
manise,  ils  perdrontpar  lai 
son  de  leur  force  premi^,  de  J 
activity,  de  leur  valeur.Qae  wk 
mes  alors  soient   mal  gouTi 
n'auront  plus  Tenerjpe 
joug  quails  se  sont  impose  a  < 
mes,  qu*ils  sont  venus,  pomaiDsil 
chercher  du  fond  de  leurs  d6serts.ii 
nous  le  r^petons,  en  OrieDt,  ptatj 
partout  ailleurs ,  il  n'e^t  rieii  de  | 
diflicile  h  mourir  qu'un  gouT( 

A  repoque  ou  nous  en  soido»| 
ves,  bien  desfautes  s'^taieot  dqil* 
muiees  du  fait  des kbalifes ;  et  cS^* 
leur  pouvoir  actuel  n'en  avail  pas  i 
ete  aifaibli.  La  tyraonie  {amk 
tawakkel  ne  rebranta  pas  daosl 
sent;   Tinflme  et  absurde  kbi 
put  en  prevoir  les  desastreQsesI 
quences.  £t  cependant  la  saBeooti 
anarchic,  sinon  d^une  revolutiw; 
rieure ,  avait  ete  repandue  aa  b ' 
conduite  dissolvante.  Les  ^pdl 
veaux  qui  devaient  se  predpitail 
tour  sur  TOrient  n'etaient  pas  «■ 
formes  sur  les  plateaux  neigetu J 
Tartaric ,  et  dans  les  fordts  i 
deTHimalaya;  une  nouTellee 
etait  encore  eioignee;  etpouj 
populations    meconteates  de  I 
arabe  sembIaients*appreterdQf|^ 
division  de  forces,  a  cette  di^ 
d'eiements ,  a  cette  lulte  daos  to| 
rets ,  a  cette  contradiction  daosh 
qui  devaient  preparer  la  vole  ami 
bisseurs  futurs,  qui  devaieotr*' 
jetor    le  gouvernement  de  IV 
premier  occupant  (*). 

Une  sorte  de  fatalite  pesaits 
les  institutions  des  derniers  1 
Motassem  avait  forme  une 
milice  pour  renforcer  sonar 
garder  sa  personne.  Cette  raili«« 
cause  de  raftaiblissemeot  milittfH 
son  successeur  Wattek-B'illali*  J[Jr 
mort  du  successeur  de  WatlekFJ" 
Motawakkel.  Ce  dernier  avait  ^^JJ 
tinguer  les  Chretiens  et  les  Joi»^ 
les  Musulmans ,  afin  de  mieux  sas 

(*)  VoyczOcWey. 


SYRIE  MODERNE. 


185 


la  Syrie;  et  sa  stupide  loi  somptuaire  fit 
naUre  une  haioe  qui  fut  pour  beaucoup 
dau9  la  reaction  des  croisades ,  et  de- 
vait  entratner  pour  le  khalifat  la  perte 
momentan^  6%  la  Syrie.  Les  d^auches 
de  Motawakkel  ne  fureut  pas  uoins 
pernicieuses  au  goaveroemeDt  des  Ara- 
bes  que  son  iuepte  tyrannie.  En  se  per- 
mettant  tons  les  exc^  il  fit  perdre 
a  sa  puissance  reiigieuse  son  prestige 
le  plus  6clatant.  Les  esprits  les  plus 
obtus  se  refusdrent  k  croire  a  Tinfail- 
libilite  d*un  bomme  en  qui  ils  voyaient 
r6unis  tous  les  vices  de  ia  nature  hu- 
maine.  La  cmaute  pent  se  pallier;  la 
corruption  des  moeurs  jamais.  Lesang 
qu'on  verse  peut  parfois  s'interpr6ter  en 
riffueur  utile,  en  ^nergie  faroucne,  mais 
salutaire;  les  d6bauches  qu*on  accumule 
sont  toujours  regard^es  par  les  peuples 
comme  une  preuve  de  ldcbet6  de  coeur 
et  d'abrutissement  d*esprit  de  la  part 
des  souverains.  On  redoute  la  cruaut6, 
on  m^prise  la  corruption. 

Avant  la  quatorzldme  et  derniere  an- 
n6e  du  regnede  Motawakkel,  son  pouvoir 
religieux  ^tait  done  tellement  discr^dit^ , 
oue  Torthodoxie  musulnjane  en  fut  pro- 
fondement  atteinte,  etqu'il  en  r6sulta  de 
toutes  parts  leravivement  des  sectes  an- 
ciennes,  et  la  formation  de  sectes  nouvel- 
les ,  donl  quelques-unes  devaient  avoir 
les  plus  fiinestes  d^veloppements.  Plus 
de  r^les  communes  d^ja  parmi  les  Mu- 
sulmans,  plus  de  respect  general  pour 
les  anciens  rites ,  plus  d'unanimit^  dans 
la  faj^on  de  comprendre  le  Koran  et  de  le 
pratiquer.  Le  kbalife  avait  donne  Texeni- 
ple  du  ro^pris  des  coutumes  religieuses. 
Gelui  que  son  sacerdoce  appelait  pre- 
eisement  h  pratiquer  avec  le  plus  de  ri- 

{[ueur  ie  culte  ^tabli  par  le  Koran,  celui- 
h  semblait  vouloir  se  d^ager  de  jour 
en  jour  d*une  nouvelle  entrave  qui  g^ 
nait  ses  monstrueuses  passions.  Ce  mau- 
vais  exemple,  donn6  de  si  baut  et  si  pu- 
bli||uemeot ,  porta  bientdt  des  fruits  em- 
poisonnes.  Tout  en  m^prisant  le  kbalife, 
on  en  vint  peu  ^  peu  ^  suivre  avec  moins 
d'exactitude  les  prescriptions  dont  il 
s*exemptaitsi  scandaleusement.  Delaa 
reninction  de  la  foi  reiigieuse  il  n'y 
avait  plus  qu'un  pas  :  des  nommes  au- 
dacieux  se  reneontrereitt  pour  le  faire  (*). 

(*)  Yoyei  Elmadn. 


Mais  comme  cette  raaladie  de  Flslam 
n*en  est  encore  parvenue  qu'a  sa  pre- 
miere periode ,  nous  la  laisserons  s*in- 
filtrer  secr^tement  dans  les  veines  de 
tous.  Nous  ne  devons  rigoureusemeut  en 
parler  que  lorsqu*elle  aura  atteint  la 
Syrie.  Maintenantc'est  d'une  autre  plaie 
du  kbalifat  qu'il  iaut  nous  occuper,  c*est 
de  Taction  de  plus  en  plus  fuoeste  des 
Turcs ,  qui  se  sont  attaques  tout  de  suite 
au  coeur  de  Tempire ,  a  la  cour  des 
Arabes ,  et  qui  vont  bientdt  envahir  les 
provinces ,  et  la  Syrie  a  son  tour. 

DSSPOTISMB  DES  TURCS. 

U  y  a  cela  de  singulier  dans  la  domiua- 
tion  des  Turcs  que,  contrairement  k 
toutes  celles  que  nous  avons  vues  et  qua 
nous  verrons  encore  regner  en  Orient, 
^Ue  ne  8*est  pas  ^tablie  a  la  suite  d'une 
invasion.  Les  autres  dominations  sont 
venues  d'elles-m^mes,  oelle-la,  oo-est  all^ 
la cbercber,  pour  ainsi  dire;  les premi^ 
res  se  sont  imposees,on  s'est  offertli 
cettedemi^e.  Cette  remaraues'applique 
Burtout  a  la  conduite  des  knaiifes  :  cW 
Tun  d'eux  qui  a  attir^  les  premiers  Turcs, 
qui  en  a  compost  une  mil  ice,  qui  s'en  est 
servi  k  la  guerre.  Motawakkei ,  rench6- 
rissant  surMotassem,ena  forme  d'abord 
une  garde  poor  sa  personne.  Plus  t^ird  il 
a  ^t€  bien  plus  loin  encore  :  des  chefs  de 
eette  garde  privil^iee  il  fit  les  con- 
seillers  de  sa  couronne ,  les  compagnons 
de  ses  orgies ,  les  complices  de  ses  cri- 
mes. 

Ces  bommes  sortis  bier  de  leurs  de- 
serts ,  a  peine  ddgrossis  par  les  jouissan- 
€66  d'un  luxe  prodigieux,  sans  croyance 
et  sans  morale,  ont  brise  Tinstrument 
qui  les  avait  Aleves ,  ont  assassine  sai^js 
scrupule  leur  bienfaiteur  interesse.  C'e- 
taient  des  natures  grossieres,  des  b^tes 
farouches,  a  peine  apprivoisees.  11  y 
avait  bien  plutdt  en  ces  bommes  des 
bourre;iux  avides  que  des  gardes  fideles; 
et  il  a  fallu  a  Motawakkei  tout  t'aveugle- 
ment  de  Torgueil ,  tout  Tabrutissement 
de  la  debaucbe  pour  ne  pas  distinguer 
tout  de  suite,  dans  ceux  dont  il  s'etait  si 
imprudemment  entoure,  les  griffes  sous 
les  caresses,  la  trahison  sous  les  pau- 
pi^res  baissees,  la  ferocity  sur  des  l^vres 
qui  murmuraient  k  regret  des  protesta- 
tions de  respect.  Etcependant,  lorsque 


186 


LTJNIVERS. 


le  khalife  se  plaisait,  aa  milieu'd'unfestin, 
a  faire  entrer  tout  k  coup  dans  la  sallf 
Aimantedemetsexquisunlion  ou  un  ti- 

r*e  affam6 ,  ordonnant  imp^rieusemeat 
ses  hdles de  ne  pas  changer  de  place; 
eh  bien,  quelle  que  fHx  la  terreur  des  con- 
vives ,  its  ne  tremblaient  pas  plus  alorg 
que  quand  un  autre  caprice  du  mattre 
tout-puissant  ouvrait  la  porte  de  la  salle, 
resplendissante  d'habits  d'or  etde  sole, 
a  un  soldat  turc,  dont  les  yeoi  flam- 
bants  couvaient  la  richesse  de  chacun 
avec  autant  d*avidit6  que  les  lions  et  les 
tigres  se  pr^cipitaient  avec  rage  sur  les 
chairs  saignantes.  Cette  horrear  ^ale 
de  certains  courtisans  pour  les  Turcs  et 
pour  les  animaux  carnassiers  ne  dessilla 
pas  les  yeux  du  khalife.  Jusau'a  son  der- 
nier moment  II  joua  avec  les  £tres  lea 
plus  redoutables  de  la  creation ,  lions  et 
Turcs ;  il  les  m^la  h  ses  plaisirs  f^roces , 
jusqu'a  ce  qu'il  en  devint  la  victime. 

L'assassfnat  de  Motawakkel  fut  d'une 
signiGcation  si  terrible  et  d*une  conse- 
quence si  deplorable  pour  TOrient,  que 
nous  y  revenons  sans  craihte  de  nous 
r^petcT,  afinde  biencaracteriserce  point 
de  depart  de  la  domination  des  Turcs.  Eh 
Tan  247  de  Th^gire  done,  Motawakkel, 
qui  avail  alors  quarante  ans,  et  qui  sans 
doute  avail  tant  abuse  deson  imagination 
perverse,  qu'il  etait  ^bout  de  sanglantes 
mvenlions,  etait  un  joura  festoyer,  sans 
avoir  rien  con^u  celte  fois  pour  faire 
succeder  une  perlp^tie  violente  a  la  joie 
qui  eriatait  detoutes  parts.  Ses  convives, 
en  effel ,  doues  de  la  plus  complete  ex- 
perience, ne  pouvaient  plus  6tre  trou- 
bles par  une  irruption  soudaine  de 
lions ,  oupar  le  bris  d'un  vase  de  la  ta- 
ble rempli  de  scorpions  vivants ,  on 
enfln  par  des  serpents  venimeux  qu'on 
faisait  couler  par-dessous  le  si^ge  des 
convi^s ,  et  qui  s'enroulaient  le  long  de6 
nieubles,  en  menacant  deleursmorsures 
ceuxaupresdesquelsilsapparaissaienten 
sifflant.  Le  repas  semblail  celte  fois  de- 
voir se  passer  sans  details  de  blessures 
morlel les,  sans  assaisonnement  de  dou- 
leurs  aigues  et  de  cris  forcenes,  lorsque 
tout  a  coup  se  precipitcrent  dans  la  salle 
une  bande  de  Turcs  armes.  Par  la  raison 

Sue  nous  avonsditeplus  haul,  la  frayeur 
es  convives  ne  fut  pas  moindre  que  si 
Ton  cdt  vu  entrer  des  bfitcs  farouches. 
Cependant,  un  des  courtisans  les  plus 


braves  troava  encoremi  mot  \  iEc,f 
resume  parfaitement  les  borK8ii|' 
nous  venons  de  raconter :  «  Ah!  s^ci 

<  t-ilenraiilantavecamertume,eeii 

<  plusaujourd'huiiajoameeoidesi 
c  ni  des  serpents,  ni  des  seorpioai,^ 
«  celle  des  ^f6e&\  »  Ge  motkte 
r^inoelle  qui  fait  aanter  la  mioe. h 
eut-il  ^te  pronono6  que  le  1 
8*appr6tatt  il  en  demanderrapl 
fiit  assailli  par  les  Turcs,  coupe,] 
par  leurs  ciraeterres.  ClioseetniM 
sc^nedemeurtre  devait  avoir  i  111 
partie  b^oique  et  sa  partiei 
L'on  vit ,  en  effet ,  le  visir  Fal 
server  ^  son  prince,  malgr^rij 
ract^rede  ee  dernier,  une 
sancesans  bomes  et  du  d6vou 
qu'a  la  mort ;  on  le  vit  defeadicl 
life  tant  qu^il  put,  parer  de  soaei' 
premiers  coups  qu*on  Ittipona,^ 
cu  par  le  nombre ,  s^ecrier  r^ 
tion ,  et  pour  provoquer  les  c 
«  O  Motawakkel ,  je  ne  veux  ] 
«  apr^  vous!  >  Puis  vint,  ( 
rodie  de  cette  noble  action.  111 
couarde  et  railleuse  a  la  (m$4»k 
eh^ri  de  Motawakkel,  sec 
une  estrade  a  la  vue  des  ipees, 
4  la  lutte,  et,  lorsque  le  meuitn 
mattre  et  du  g6nereux  Fathaki 
que  consomnie ,  se  moquant  f 
paroles  du  visir  6dele  :  «  0  T 
«  kel,  je  serais  fort  aise  del 
*  vous!  »  (*) 

Fy  a-t  il  pas  dans  les  < 
nes  de  ce  drame  horrible  i 
Yolonte  providentiellequilese 
qui  en  tire  une  haute  m 
I  histoire ,  et  qui  seinblait  i 
frir  comme  un  avertissemeDt  i 
temporains  P  ff  est-ee  pas,  and 
ne  orgie,  entour^  de  ses  eon  ' 
debauches,  que  devait  moos»v 
sangau*il  avaitsi  sou  vent  ver^^ 
khaliredoutlejoug  pesaqu 
rislam?  M'^tait-il  pas  juste  ( 
de  sa  mort  Motawakkel  s  eatei 
Cher,  sous  forme  d'ironie,  les  i 
cruelles  qu*il  avait  faitessisoa 
convives?  N'est-ce  pas,  non  ] 
preuve  bien  ^vidente  du  reliidM 
mceurs  de  sa  cour,  que  la  pr 
ce  bouffon  qui  raille  quand 

(*}VoyezAboal.p«a. 


SYKI£  M0DERI9E. 


V  18f 


% 


se  moque  quand  on  se  d^Toue?  En- 
fin,  pour  quiconque  aorait  r^fl^chi,  n'y 
avait-il  pas  une  grandele^n  pour  le  kha- 
lifat dans  la  r^volte  de  ces  barbares 
;org68  de  biens,  qui  sefont  lea  bourreaux 
ie  leur  maltre,   pis  que  cela  m^me, 

3ui  agissent  avec  tant  de  fourberie  et 
'audaoe'  k  la  fois  qu'ils  soul^vent  le 
p^re  contra  le  fils ,  t)ervertissent  ce  der- 
nier, Texcitent.  au  parricide,  et  exd- 
cutent  incontinent  ce  crime  execrable , 
d^s  que  Montasser  en  exprime  le  pre- 
mier voeu?  II  ne  manquait  plus  h  ces 
gardes  insolents  que  de  [reclamer  leuf 
salaire  au  fils,  ia  t^te  du  p^re  h  la  main. 
C'est  ce  qu*ils  firent ,  c'est  ce  qui  carac- 
terise  toute  leur  cruaut6,  c'est  ce  qui 
etait  pour  le  khalifat ,  qui ,  d'apres  son 
origine ,  devait  parattre  aussi  saint  que 
puissant  et  qui  se  montrait  aussi  faible 
que  criminel,  la  preuve  que  la  decadence 
la  plus  inevitable  et  la  plus  honteuse  le 
mena^ait,  non-seulement  dans  la  per- 
sonne  de  ses  princes,  mais  dans  soh  hon- 
neur  et  dans  son  autorit^. 

Ainsi,  cruaute  f^roce,  perfldie  inn^e, 
exploitation  impudente  des  passions  des 
khalifes ,  compression  de  tous  sous  un 
r6gimedeterreur,  lelssont  lescaract^res 
distinctifs  de  la  domination  des  Turcs. 
Que  leur  importe  la  dignity  du  souverain  ? 
c'est  en  Tabaissant  qu'ils  ont  le  plus 
de  chances  de  se  rendre  puissants.  Que 
leur  importe  Pa venir  de  V  Islam  ?  ils  n'ont 

f)as  assez  de  foi  pour  y  tenir  comme  re- 
igion,  pas  assez  de  g6nie  pour  en  pen6- 
trer  la  politique,  lis  sontvenus,  d'ail- 
leurs,  trop  tard  pour  saisir  le  veritable 
esprit  et  Timportance  du  khalifat. 

Dans  son  commencement  si  glorieui, 
le  khalifat  fondait  avant  tout  sa  prepon- 
derance sur  son  autorite  sacerdotale : 
Abou-Bekr  et  Omar  sont  de  veritabies 
pontifes,  ce  sont  les  chefs  presque  saints 
d'une  religion  mUitante.  Sous  Moawiah 
le  pontife  a  fait  place  k  Tadministrateur, 
sous  Abd'el-Melik  au  soldat,  enfin  sous 
fiaroun-al-Raschid  au  prince  tempo- 
rel,  fameux  par  ses  victoires,  par  ses 
etablissements  sociaux,  et  principale- 
ment  par  son  luxe  mondainet  sa  justice 
tout  humaine.  Al-Mamoun,  le  glorieux, 
le  vainqueur,  le  magnifique,  soutient, 
k  force  d'eclat,  le  pouvoir  tout-puissant 
des  khalifes ;  mais  ce  pouvoir  a  d^ja  fle- 
chi  du  c6te  religieux  au  profit  du  e6i6 


militaire.  Mai  conseille  par  son  vizir 
Fadhal ,  sentant  son  insuffisance  comme 
pontife,  s*il  ne  fait  quelques  conces- 
sions Jk  Tesprit  tradilionnel,  Al-Ma- 
moun commet  la  fame ,  d^s  le  commen- 
cement de  son  regne ,  de  se  rapprbcher 
de  la  famille  d'Ali,  de  changer  la  livree 
noire  de  se^  ancdtres  pour  la  livree  verte 
de  la  famille  de  Mahomet ,  de  declarer 
meme  que  Fiman  schiite  Rizeh  devra 
lui  succeder  dans  la  chaire  de  Bagdad. 
Heureusemeot  les  Alides,  trop  presses  de 
jouir  dela  puissance  souverairte,  provo- 
querent  a  tel  point  les  Abbassides,  qui, ; 
ayant  prospere  depuis  soixante-dix  ans, ' 
etaient  dejk  au  nombre  de  trente-trois ' 
mille,  que  ces  demiers  menacerent  de 
se  soulever  contre  Al-Mamoun,  mar- 
cherent  d'eux-mfimes  contre  les  Alides , ; 
et  forcerent  le  khalife  h  rendre  sa  suc- 
cession h  un  des  leurs.  QuoiquMl  ait  re- 
pare  depuis  par  dei^  conquetes  sur  les 
Bvzantins,  par  une  conduite  hautement 
genei^use  et  edairee,  lafaute  de  sa  jeu- 
nesse ,  Al-Mamoun  n'en  fut  pas  liioins 
considerejusqti'^lavingtiemeetderniere 
annee  de  son  regne  comme  nn  prince 
p^u  orthodoxe.  Les  docteurs  les  plus 
rigides ,  et  par  consequent  les  plus  re- 
veres de  la  loi  musulmane,  fulminerent 
souvent  contre  lui ;  et  il  resultd  de  ces 
declamations  un  doute  dans  bien  des  es- 
prits  sur  le  caractere  sacre  du  khalifat, 
une  diminution  evidente  dans  son  auto- 
rite  religieuse  (*). 

Motassem  sentit  tout  le  poids  de  cette 
degenerescence  du  khalifat.  II  eut  tout 
d'abord  h  cntreprendre  une  guerre  reli- 
gieuse :  un  imposteur  s'etait  rencontre 
assbz  puissant  pour  menacer  son  trdne. 
Ici,  par  une  fatalite  bien  funeste  h  Tem- 
pire  arabe ,  il  se  trouva  que  le  succes- 
seur  d'AI-Mamoun,  etant  loin  d'etre 
doue  des  vertus  ^uerrieres  de  son 
illustre  frere,  failht  perdre  h  la  fois 
les  deux  pouvoirs,  le  pouvoir  militaire 
avec  le  pouvoir  sacerdotal.  Qu'est-ce 
qui  sauva  Motassem ;  qu'est-ce  qui  le 
couvrit  de  son  epee  ?  Un  ancien  esclave, 
un  Turc ,  Haidar ,  fils  de  Khaous ,  sur- 
nomme  Afchin.  Ainsi ,  le  remede,  s'il 
n'etait  pirequelemal,  etait  un  mal  aussi. 
Les  rapides  progres  de  la  roil  ice  turque 
nous  I'ont 'assez  fait  voir.  £t  puis  ua 


n  Yoyex  Aboa*l-F6(Uu 


188 


L'UNIVERS, 


grand  fait,  deplorable  dans  ses  oons^- 
auenoes ,  surgit  en  m^me  temps  de  cette 
faiblesse  de  Motassem  :  ]a  division  dans 
les  deux  ponvoirs  primltifs,  absolus 
na^udre,  inattaquables ,  du  khalifat. 
Si  Tun  fl^hit  au  profit  de  Pautre  sous 
le  regned'Al-Mamoun ,  les  deux  fl^chisr 
sent  sous  celui  de  Motassem ;  et  ddsor- 
mais  le  khalifat  chancellera  sans  cesse 
entre  oes  deux  pouvoirs,  jamais  plus 
il  ne  les  sentira  aussi  forts,  aussi  eroca- 
ces  Tun  que  fautre,  dans  la  m^me  main. 
Desormais  le  khalifat  rentrera  dans  la 
condition  ordinaire  de  tous  les  empires 
despotiques,  il  lui  faudra  un  prince  guer- 
rier  pour  dtre  grand ,  et  les  Turcs  sont 
la  pour  empdcher  de  longtemps  un  pareil 
ev^nement. 

Comme  on  le  voit  par  cette  rapide  es- 
quisse  de  la  nature  du  khalifat,  nous 
avions  raison  de  dire  que  les  Turcs  ne 
surent  point  en  saisir  le  veritable  esprit. 
Tout  en  dominant  Tun  de  ses  pouvoirs , 
lis  n'essayerent  point  de  renforcer  I'autre. 
£n  divuiguant  la  faiblesse  militaire  des 
khalifes,  leurs  creatures,  lis  n'eurent  pas 
la  provision  de  rendre  son  prestlae  a  leur 
autorit^religieuse.  De  la  le  mal  s^tendit, 
sans  pouvoir  un  jour  ^tre  gu^ri ;  de  cette 
epoque  commence  la  d^dence  de  Tern- 
pire  arabe ;  de  la  se  prepare  cette  anar« 
chie  de  I'Orient ,  qui  fut  si  favorable , 
deux  siecies  plus  tard,  k  Tinvasion  des 
croisades. 

Ge  qui  prouve  encore  Tinfluence  per- 
nicieuse  de  la  domination  turque,  c*est 
le  reene  ^h^m^re  et  impuissant  des 
khaliies ,  dout  ils  se  constituerent  les 
sanguinaires  parrains.  Les  longs  re- 
gnes  en  Orient,  comme  partout  ailleurs, 
sont  g6n6ralement  les  bons  regnes. 
Dans  un  gouvernement  despotique 
surtout ,  plus  longtemps  le  mattre  sou- 
verain  tient  les  rmes ,  plus  il  a  de  chan- 
ces de  mener  Tempire  droit  et  ferme. 
L'unitesociale  gagne  a  la  prolongation  de 
I'unit^  des  vues.  Or  cette  chance  de  pros- 

E^rit6  fut  entierement  perdue  pour  TIs- 
im  k  Tarrivee  des  Turcs ;  et  apres  Mo- 
tawakkel ,  en  dix  ans ,  les  Arabes  virent 

guatre  khalifes  passer  comme  des  om* 
res  dans  la  chaire  degradee  de  Bagdad. 
Tout  Tempire  se  ressentit  de  ces  eleva- 
tions et  de  ces  chutes  r6p^l6es  :  la  Syrie, 
non  moins  aue  les  autres  provinces.  La 
temp6te,    it  est  vrai,  ^clata  d*ai>ord 


sur  la  M^.sopotamie ;  mais  die  n^a  n> 
vint  que  plus  mena^nte  et  ^os  fmiev 
sur  Damas  et  son  ncke  temtoiren> 

LBS  KHALIFES  GBB ATUABS  BBST 

Le  parricide  Montasser  ae  fit  qiK| 
rattre  sur  le  trdne.  Ses  remords,^  '^ 
caus^rent  la  plus  noire  des  mela 
en  eurent  bientdt  d^barrass^  sod  pi 
indiffn^.  dependant,  durant  lei  sn  J 
qu'ilsurv^ut  a  Tassassinat  de  soo^ 
par  sa  plate  et  Idche  condesoesdar' 
augmenta  encore  le  pouvoir  des  T 
leur  insolence,  leur  aodaoe.  D'i| 
leurs  ord  res  il  disherits  sonfrerel 
selon  leurs  d6sirs  il  distriboa  ksl 
neurs  et  dispersa  les  tresors  daki 
Mostain ,  r usurpateur  da  kbaiiil 
detriment  du  fils  de  Motawakketr 
prince  entierement  devoue  a  fal 
qui  Tavait  couronne.  Mais  la  prr^ 
sonautorite,  tout  appuy6e(f^ 
sur  la  force  mat^nelle,  n'avait| 
rdalit6  de  bien  solides  fon~ 
que  dds  qu'il  se  crut  khalife  obIi 
ce  titre.  Les  Alides  songerent  ill 
veau  a  faire  va  loir  leurs  droits  lesi 
a  la  main.  11  fallut  toute  riiQ 
des  troupes  turques,  et  toate  f 
du  gouvemeur  de  Bagdad,  pourM 
cette  revolte.  Mostain  eAt  ete  f 
ble  de  vaincre  lui-rafime  de  | 
versaires ;  et  il  le  montra  [ 
dans  la  rebellion  bien  aati 
rieuse  qui  eclata  tout  a  coups 
II  fut  dans  cette  occasion  aus 
aussi  timor^9  aussi  domineparli 
ments  que  possible. 

Les  Turcs,  plus  avidesao 
plongeaient  plus  avant  dans  I 
ces  du  luxe  et  des  richesses,  oe^ 
qu^avec  ialou^ie  ceux  d'enire  i 
le  hasard  des  armes  ou  la  M^l 
cour  avaient  combl^s  aa 
leurs  compagnoas.  lis  se  t 
done  un  jour  contre  leurs 
chefs,  se  diviserent  en  deux  j 
combattirent ,  et  se  disputereB^Jj 
Sonne  du  malheureux  knalife.  Cr 
effray6  tout  d'abord  et  aya»!'^j^- 
tement  perdu  en  cette  oc(»»«J! 
nime  part  de  bon  sens  et  d'e^"*" 

n  Yoyez  Oednniis. 


SYRIE  MODERNE, 


189 


?; 


la  nature  Tavait  gratifi^,  erra  d'ane  id^ 
k  une  autre,  accumulales  contradictions, 
favorisa  tour  a  tour  cbaque  parti,  les  m^ 
contenta  tousdeux,  et  fit  tantqu'on  crat 
que  se  d^barrasser  d*un  pnreii  8oli?eau 
etait  le  meiileur  parti  h  prendre.  II  fut 
done  enlev6  de  sa  r^idence  de  Samarah. 
conduit  a  Basdad,  et  livre  k  Mothaz,  qu*il 
ayait  d^possed^.  Grdceacet  actedetrahi- 
son  envers  un  des  princes  les  plus  faibles 
pi  soient  monies  dans  la  cnaire  khali- 
ale ,  les  Turcs  parent  tratter  k  leur  aise 
de  leur  accommodement  avec  le  non- 
vel  6iu ,  et  eurent  encore  un  chef  de  Vtr 
tat  de  leur  fa^n, 

Bougha  TAncien,  Bou^ha  le  Jeune , 
Wassif  et  Bagher,  tels  ^taient  les  noms 
de  quatre  chefs  turcs,  dont  Taudace  etait 
sans  bornes  et  Finsolence  sans  frein. 
Mothaz  aurait  bien  voulu  s'en  d^barras- 
ser.  D'un  esprit  m^fiant,  d'une  intelli- 
gence born^e,  ce  khalife,  qui  avail  com- 
mence sa  carri^re  par  renoncer,  de  son 
Sropre  mouvement  ct  par  pure  couar- 
isCt  a  la  succession  immediate  qui  Pat- 
tenilait,  parvenu  par  une  revolution  inat- 
tendue,  parun  revirenient  bizarre  du  ca- 
price de  ses  soldats ,  au  trdne  auquel  il 
ne  devait  plus  songer,  n'avait  rien  tant  k 
coeur  quede  se  mettre  d^sormais  k  Tabri 
des  entreprises  de  sa  milice.  Or  pour  at- 
teindre  ce  but  tant  desire  il  chercbait 
tousles  moyens  desed^fairedeceuxqull 
redoutait  au-dessus  de  tout.  Apres  avoir 
machine  centre euxck  Bagdad,  loin  de 
leurs regards ,  ce  pauvre  prince,  k  peine 
en  leur  presence ,  ressentit  dans  son  es- 
prit plus  d*h6sitationquejamai8,  dans  son 
coeur  plus  depusilianimiie;  et,  loind'exi- 
ler  ou  de  faire  mourir  les  lyrans  dont  il 
sentait  le  joug  lourd  et  honleux  sur  ses 
epaules,  il  les  combla  tout  aucontraire  de 
faveurs  nouvelles ,  de  cadeaux  et  de  di- 
gnit^s ,  il  augmenta  de  plus  en  plus  leur 
puissance.  Mothaz  r^servait  son  energie 
pour  frappersa  propre  famille.  On  le  vit, 
en  effet,  ieter  successivement  dans  les 
fers ,  sur  de  vagues  soupcons ,  ses  deux 
freres  Mouiad  et  Mouafrea.  Le  premier 
mSme  serai t  mort  en  prison,  par  le  fait 
d*un  fratricide :  quelqueshistoriens  i'ont 

pens6  (*). 
Cependant  les  Turcs,  toujours  barba- 

resjtoujourscupides,  et  furieux  desqu'ils 

(*)  Voyec  AlKml-FMa. 


n^etaient  pas  gorges  d'or,  ne  trouvant 
qui  ddpouiller,  ni  quelle  nouvelle  victime 
laire  tomber  sous  leurs  coups,  s'en  pri- 
rentencore  unefois  k  leurs  propres  chefs, 
attaqudrent  Wassif,  et  regorgirent* 
Mothaz  ne  chercha  pas  k  r^tabKr  Tordre 
dans  sa  milice,^  punir  les  coupables. 
II  profita  d'une  sedition  qui  le  delivrait 
d'un  de  ses  mattres  ex^cres ,  el  la  benit , 
loin  de  la  reprimer.  Un  an  apr^s ,  Tan 
2S4  de  rh^gire ,  fiougha  TAncien  jfut  k 
son  tour  Tobjet  de  Y'ani  mad  version  de 
ses  soldats .  Pour  fuir  sans  doute  la  fin 
tragique  de  son  compagnon  Wassif,  il 
quittatout  a  coupSamarab,et  sedirigea 
▼ersMossoul.  Mothaz  laissa  piller  le  palais 
de  ce  dernier  par  set  troupes  irritees; 
puis,  profitant  de  la  detresse  momentanee 
de  Bougha,  il  le  fit  surprendre  dans  une 
embdche,  se  le  fit  amener  et  plus  tard 
ordonna  sa  mort.  Mais  toutes  ces  perfi- 
dies ne  profiterent  pas  au  Idche  knalife 
qui  s*en  rendit  coupable.  Loin  de  lui 
tenir  compte  de  sa  faiblesse  a  leur  ^gard , 
les  Turcs,  qui  n*avaient  plus  de  chefs  k 
qui  s*en  prendre,  marcherent  un  jour 
contre  le  propre  palais  imperial,  et  exig^ 
rent  arrogammentde  Mothaz  lespreten- 
dus  arri^r^s  de  leur  solde.  Cetait  le  mo- 
ment de  trembler,  pour  le  triste  khalife : 
il  n*avait  pas  la  somme  qu*on  reclamait 
de  lui,  il  promit,  il  supplia,  il  se  desho- 
nora  de  millefacons;  maistout  fut  inu- 
tile ,  et  bientdt  il  se  vit  contraint  d'abdi- 
quer  en  faveur  de  Mohammed ,  fits  du 
khalife  Wathek,  qui  fut  appele  par  la 
suite  Mohtadi.  Apres  trois  ann^es  d*un 
ignoble  r^e,  k  peine  dg^  de  vingt-qua- 
tre  ans,  Mothaz  expia  ses  turpitudes  par 
un  supplice  affreux  :  on  le  fit  mourir  de 
soif  en  prison. 

Un  Strange  hasard  fit  que  le  nouveaa 
khalife,  cre^  par  les  Turcs,  etait  un  homme 
de  coeur,  de  resolution  et  de  vertu.  Dans 
son  court  passage  par  le  khalifat,  Moh- 
tadi ,  grand  jusiicier  et  severe  musul- 
man,  rendit  a  la  Justice  son  int^grit^  et 
ji  la  religion  son  empire.  S'ilf(!il  resl^  un 
plus  long  espace  de  temps  qu'onze  mois 
sur  un  tr6ne  dont  il  etait  Thonneur, 
que  n'edt-il  pas  ex^cut^  de  grand,  de  no- 
ble, de  ^^n^reux ,  de  reparateur !  Mais  le 
mal  ^tait  d^jk  trop  violent ,  trop general, 
pourqu*un  sful  homme  pdt  le  vaincre; 
la  ganj^^ne  etait  a  la  plaie  de  Tlslam ,  et 
le  khalife ,  qui  voulut  Textirper,  ne  par* 


too 


LUNIVERS. 


Tint  qu'^  en  itre  victime.  D^  son  av^e- 
inent,  Mohtadi  reoonnut  les  deux  vices 
qui  sourllaient  la  domination  des  Turcs* 
la  cupidity  et  la  debauche.  U  r^solut  ioh 
m^diatement  de  les  altaqurr  ensemble. 
II  mit  done  a  ia  fois  uoe  barri^re  h  la 
cupidite  des  che£s,  en  supprimant  une 
partie  des  tributs  doot  ilsaccabiaient  le^ 
populations;  uoe  barriere  a  leur  debau- 
che, en  abolisaantFusage  du  Tin,desjeux 
et  des  dan$es  defendues  par  la  loi  su- 
preme. Mais  une  pareille  conduite,  si 
eoergique  et  si  noble ,  en  trorapant  Tat- 
tente  de  ceux  aui  avaient  elev6  le  khalife 
aur  le  trdne ,  cfevait  bientdt  attirer  leur 
haine  sur  sa  t£te,  et  six  mois  nes'etaient 
pas  encore  ^ules  depuis  la  prumuiga* 
lion  des  sages  ordonnances  de  Mohtadi , 
que  la  r^volte  groodait  d^ja  autour  de 
son  palajs. 

Mohtadi  ne  se  laissa  pas  intimider  : 
il  y  a  toujours  un  bonune  de  coeur  dans 
un  homme  vertueux.  Jugeant  de  toute 
la  perversity  de  la  milice  turque ,  il  lui 
declara  franchement  et  bardlment  la 
guerre.  Quoique  cette  resolution  du  kha- 
life edt  rapproche  les  rivaux,  eOt  faitou- 
blier  les  dissentiments  particuiiers  dans 
rinter^t  commun ,  Mohtadi  eut  d'abord 
Tavantage.  Malgr6  railiance  redoutable 
de  Moussa ,  ills  de  Bougha,  et  du  ferooe 
Bankial,  Taustere  khaiife  crut  indigne 
de  son  rang  et  de  sa  moralite  de  cher- 
cher  k  emp^cher  ce  rapprochement  en- 
tredeux  brigands,  parce  qu'il  eilt  fallu 

Sardonner  a  Tun  ou  a  Tautre,  et  que, 
ans  Tesprit  rigide  du  khalife,  ils  ^taient 
^alementcoupables.  Pas  de  concessions 
aux  r^voltes,  pas  de  clemence  pour  des 
inf^mes,  telle  etait  la  politique  du  nou- 
Yeau  commandeur  des  orqyants.  Ulime 
noblement  stoTque  du  grand  Omar  sem- 
blait  animer  le  cQpur  de  Mohtadi.  La 
loyale  Anergic  de  ce  dernier  fut  d'abord 
couronnee  par  le  succes  qu'elle  m^ritait  k 
tant  de  titres  :  il  put  s'emparer  de  Ban- 
kial,  et  lui  faire  subjr  le  chUtiment  de 
ses  attentats.  Mais  cet  exemple  severe, 
loin  d'arr^ter  les  seditieux,  lojn  de  les 
faire  reflechir  et  de  les  ramener,  ne  par- 
vint  qu'k  exciter  leur  rage.  Plutdt  que  de 
Yi  vre  sous  la  loi  d'un  homme  de  bien ,  ces 
bandits  prefererent  mill6  fois  la  mort, 
et  ils  s'acbarn^rent  si  longtemps  centre 
les  troupes  du  khalife,  ils  se  succdderent 
en  si  grand  nombre  aprds  les  murailies 


4e  SOB  palais,  quHls  finiroit  par  fati^Hr, 
lesunes  et  escalader  les  autres.  Uoet  ^ 
mattres  de  la  place,  les  Turcs,  loin  del 
iDUser  cette  fois  au  pillage,  IoId  ' 
eompiaire  a  des  vengeances  de  i 
cbercherent  avant  tout  Mohudi, 
Tayant  trouv^ ,  ils  lui  infligerat 
une  joie  de  b^tes  feroces  le  plus 
suppiices  {*). 

Quoiqu'elle  n'edt  pa  sauver  a 
Sonne,  1  opini^tre  r^istancede  Ma| 
fut  du  plus  heureqx  r^sultat  pour 
torite  khali&le.  Iflalgr^saiaiblesi 
sqccesseur  Motamea,  quatri^ 
Motawakkel,  put  se  consolider 
trdne ,  et  n'eut  point  repheroexeet' 
testee  puissance  de  ses  quatre  prai, 
seurs.  La  lutte  heroique  de  Mohtadii 
tre  la  depravation  des  Turcs,  a 
reuse  resolution  de  combattiela 
nation  honteuse  d*une  milice 
et  insolente ,  le  sentiment  de 
du  pouvoir,  qu'il  sut  elcTer  si 
susciterent  des  vengeurs.  Si  lei 
commandeur  des  croyants  n 
des  qualites  n^essaires  poor 
son  fr^re  puln6,  Mouaffek,  eneta^ 
largement,  lui !  Courage,  eDer|ie^* 
lete  militaire ,  Mouaffek  reanisa 
trois  vertus,  sans  iesquelles  H  est 
que  impossible  de  gouvemer  les 
mes.  Aussi,quoiqu'uneveneroentj 
et  dont  nous  parlerons  posterieore 
e(lt,  en  ^braniantd'unautrecoteni 
isiamique,  n^cessit^  tout  d'; 
cooperation  des  Turcs,  Moua^i 
maintint  pas  moins  avec  fenafltf 
une  discipline  rigoureuse,  etn'ttl 
tra  pas  moins  d  ^loignement  ~^ 
tout-puissant  chef  d'alors.  Mo 
des  assassins  de  Mohtadi.  Ge  ttl 
pea  k  peu ,  par  une  severite  frfj 
reldcha  jamais;  ce  fut  par  le  aei 
prit  d'^carter  de  la  cour  chacvl 
soldats  parvenus,  ]orsqu*il  6m 
une  recompense;  ce  fut  en  leur 
des  commandements  eloign^  o« 
leux,  que  Mouaffek  parvintikk!  ' 
d'anneeenann^e.  et  Ik  mater  ies 
tins.  £n  sept  ans  d'adresse  et 
v^rance,  Mouaffek  avait  presi}ue; 
son  but :  les  Turcs ,  qui  formaieiit^ 
la  ^arnison  principale  de  ia  ville  aii 
daitle  khalife,  ^ientdeTenasplalj 

(*)  Voyez  Elmadn ,  O&Stnom  cC  i 


SYRIE  MODERNE. 


101 


lies,  moiBS  dissolus,  moins  avides, 
ps  tyrans. 

n  hasard  heureux  vintfort  k  propos, 
264  de  I'begire ,  achcver  Tceuvre  si 
liment  commenc^e  par  Mohtadi.  Ce 
inqiii^tai  t  encore  de  la  part  des  Turcs, 
ui  laissait  constainment  I'avenir  in- 
9,  c'^tait  raulorit^  qu'avait  su  con- 
rir  sur  ces  barbare^  Tuq  dcs  chefs 
phis  polssaots  qu'ils  eurent  jamais , 
Ksa,  fils  si  dignedurude  Bougha. 
}oussa  mourut  a  point  nomm^,  sept 
^res  le  meurtre  de  Mohtadi,  quUl 
llsi  erueilement  fait  ex^cuter.  D^ 
pk  pri  vi  de  sa  t^te,  le  corps  de  cette 
pebe  nulice  perdit  plus  de  la  moiti^ 
p  force  ipenai^ante.  Tronc  mons- 
IDC,  mais  sans  intelligence,  il  ne  de- 
|lus  ^tre  de  lonjgtemps  la  terreur 
pialifat.  D^capite,  pour  ainsi  dire, 
**»^  plus  si  aifGcile  k  d^couper  en 
,  travail  que  ne  cessa  d'op^rer 
»vA  durant  les  vjnst  ans  qu'il  gou- 
Veinpire.  Grdce  done  a  Teoergie 
iVeiitabl^  souverain,  de  cette  sorte 
'fi  du  palais  oriental,  le  khalifat 
e  pour  un  temps ;  etil  n'y  eut  plus 
pipais  que  les  provinces  qui  eurent 
fi  a  souffrir  de  la  tyrannie  de  ces 
II,  qui  aval ent  pen  a  pen  envahi  pres- 
bus  les  Gommandements  militaires 

IQNATION  DBS  THOULOUNIDBS. 

ittd  les  provinces,  martvres  d'une 
loiede  detail.  Tune  des  plus  a  plain- 
tat  eertalnement  la  Syrie.  JNous 
hUMBmes  complu,  durant  les  sept 
MB  rogues  des  ^bassides,  h  vous 
jlrer  les  faciles  prosp^rites,  les  joies 
lesde  la  douce  Syrie ;  joies,  du  reste, 
Writes  qui  tiennent  bien  plus  a  sa 
•  qu*a  ses  gouvernements,  qui  sont 
sntes  a  son  sol ,  k  son  solei)  fecon- 
a  ces  delices  mat^rielles  :  un  cli- 
sujoufs  ^al ,  une  terre  fertile  en 
I  saisons,  les  plus  splendides  et  les 
Bries  paysa^.  D^s  le  d^but  de  cet 
Ipe  nous  avions  dit  que  Dieu  seul 
ttS  boD  pour  la  Syrie ;  et  certes 
*e8t  plus  vrai.  Toujours  la  Provi- 
£emble  avoir  vouiu,  k  force  de 
its,  de  copieuses  moissons,  de  sa- 

ijesAboQl-Y^da. 


Toureuses  vendanges,  de  beaux  jours, 
r^parer  tout  oe  que  Tambition  et  Tavi- 
dite  bumaine  ont  accuroul6  de  maux, 
porte  de  troubles ,  dans  ce  pavs  trop 
favoris6  du  ciel  peut-^tre.  L  histoire 
nous  offre,  de  siecle  en  siecle,  des  preu* 
ves  r^pet^es  de  cette  v^rite.  Nous  devons 
les  enregistrer  les  unes  apres  les  autres; 
et  Ton  comprendra  alors,  mieux  sans 
douteque  nous  ne  Tavonsexpliqul,  con)- 
qaent  rinsouciance  de  Tavenir  a  ii6  de 
tout  temps  le  caract^re  des  peuples  orien- 
taux ;  comment  cette  insouciance,  joints 
Il  une  puissante  facul te de  sentir,  d'aimer, 
dejouir,  est  devenue  la  cause  du  bonheur 
relatif  de  ces  borames ;  comment  enOn 
cette  insouciance  fut  un  don  precieux 
que  Dieu  leur  a  accorde  k  cette  On 
m^me  de  pouvoir  prgOter  sans  inquie- 
tude de  toutes  les  au^es  graces  dont 
il  les  comblait.  Un  an  par  generation, 
une  heure  par  jour,  suffisent  an  Syrien 
ponr  goOter  dans  toute  sa  plenitude  cette 
felicity  qu'ii  porte  en  lui,  qui  fait  de  son 
imagination  un  poete  interieur  qui  co- 
lore, embellit,  decuple  tons  lesplaisirs; 
de  son  coeqr,  un  r^sum^  de  toutes  les  de- 
lices *,  de  ses  sens»  les  agents  delicats  de 
toutes  les  volupt^s.  Que  ce  soit  la  le  der- 
nier terrae  du  bonheur  humain,  nous  ne 
le  pretendons  pas;  mais  il  faut  avouer 
que  cette  faculte  de  jouir  du  present 
sans  trouble  est  bien  la  plus  heureuse 
faculte  dont  ait  pu  etre  dou^  le  Syrien. 
toujours  en  butte  aux  ravageurs  du  nord 
et  du  midi.  Sans  cette  faculty  precieuse, 
rhistoire  d'un  nareil  peuple  ne  serait 
qu'une  lon^ue  elegie;  car>  a  part  les  qua- 
tre-vingt-cinq  annees  qui  se  sont  ^cou- 
lees  depuls  Tav^nemeht  au  khalifat  d'A- 
bou-Djafar-al-Mansour  jusqu'a  celui  de 
Motassem  TOctonaire,  il  n'est  pas  de  sie- 
cle, moins  que  cela,  il  n*est  pas  de  lus- 
tre,  que  la  Syrie  n'ait  eu  a  ^prouver  quel- 
ques  cataclysmes  sociaux,  quelques  jougs 
politiques,  quelques  pillages  militaires. 
La  tyrannie  qui  la  mena^ait  k  I'^po- 
que  oik  nous  sommes  arrives ,  sans  ^tre 
aussi  d^vastatrioe  que  bien  d'autres  mat- 
beurs  qui  plus  tard  vinrent  fondre  sur 
elle ,  n'en  a  ^as  moins  eu  des  consequen- 
ces funestes  a  son  repos  cb6ri,  a  sa  molte 
v^etation  bumaine.  Pour  faire  saillir 
ces  consequences  dans  toute  leur  force 
nous  avons  dd  nous  arr^ter  sur  la  domi- 
nation des  Turcs,  sur  leur  grossieret^ 


1*2 


L»UmVERS. 


native,  sur  leur  cupidity  croissante,  sur 
I'action  fatale  quMls  eurent  en  ce  temps 
surles  destinies  du  khalifat.  lid  Syrie, 
dependants  encore  du  sort  de  Teropire 
islamiqoe,  devait  6tre  affect^e  h  son  tour 
de  oe  qui  blessait  au  coeur  Bagdad ,  sa 
mattresse,  et  Samarah,  sa  voisine.  Etie 
eut  done,  dds  le  principe  de  cette  usur- 
pation d*une  tribu  du  desert ,  sa  part  de 
souffrances  et  d^avanies.  Mais  plus  mal- 
beureuse  que  le  khalifat ,  ses  douleurs 
devaient  se  prolonger  au  dela  du  jour 
de  la  d^liYrance  de  ce  dernier.  Comme 
nous  i'avons  vu ,  c^etait  presque  une 
bonne  poiitiaue,  c'^tait  du  moins  un 
juste  calcul  d Y^oTsme,  de  la  part  des  kha- 
lifes,  d'^carter  de  leur  capitate  les  Turcs 
les  plus  hardis  et  les  plus  braves,  sous 
pretexte  de  les  gratifier  d'une  haute  fa- 
veur,  d*un  riche  gouvernement.  L'un  de 
ces  exiles  les  plus  celebres  fut  un  certain 
Ahmed-ben-Thouloun.  Le  khaiife  Moh- 
taz ,  pour  se  debar rasser  de  sa  personne 
bien  plus  que  pour  ^Fbonorer,  lui  avait 
offert  le  gouvernement  militaire  d'une 
partie  de  l£gypte.  Ahmed-ben-Thou- 
loun ,  non  moins  ambitieux ,  mais  plus 
intelligent  que  ses  frdres,  accepta  Toffre 
ambigue  de  Mohtaz,  parce  qu'il  ^tait 
sOr  d^n  tirer  bon  parti .  comme  il  tit  (*). 
Ahmed-ben-Thouloun  agit,  en  effet, 
avec  autant  d'adresse  que  de  resolution. 
Sa  volenti  ferme  lui  fit  vaincre  peu  k 

fieu  tous  les  obstacles  moraux  qu'on 
ui  opposa;  son  audace  belliqueuse  lui 
fit  vaincre  ensuite  tous  les  obstacles 
mat6rie]s  qu*on  r^unit  contre  lui.  Au 
bout  de  dix  ans  de  gouvernement  en 
Egypte,  il  s'^tait  entoure  d'une  foule  de 
partisans ,  s'etait  cr^  une  armee,  s*etait 
fond^  un  tr^or.  Avec  ces  moyens  habi- 
lement  combines,  il  marcha  contre  la 
Syrie,  qui  lui  semblait  une  proie  digne 
de  son  app^tit  de  conqu^tes.  La  Syne , 
surprise  dans  sa  mollesse,  troubl^e  dans 
sa  quietude,  reveill^e  brusquement  dans 
sa  demi-somnolence  voiuptueuse,  ne 
sut  opposer  presque  aucune  resistance  k 
cet  envahissemeiit  inattendn.  Kile  laissa 
done  p6netrer  dans  ses  riches  campa- 
gnes  cette  armee  de  mercenaires,  mat 
pay^s  par  calcul ;  elle  laissa  entrer  dans 
ses  opulents  palais  cette  foule  de  parti- 


(*)  Voyez  AJ)OU*l-FaradJ ,  AboaM-Feda  el  El- 
mado. 


sans  avides  qui  swvaieiit  leur  Mi 
cur^e.  Elle  oe  tarda  [las ,  dn  restt,k| 
repentir  de  &.  faci  ht6  a  changer  de) 
Ahmed-ben-Thouloun  aimait  ie  \ 
devint  exacteur ;  Ahmedben-T 
aimait  Tautorite,  11  devint  tyiai,| 
I'avait  vu  doubler  en  qodqiies ; 
les  imp6ts  de  FSgypte,  et  eo  r' 
norme  revenu  de  trois  cents  a 
voulut  traiter  de   la  m6nK 
Syrie,  et  la  pressura  taot 
Alors  la  malbeureuse  proviiitt,] 
s^e  par  son  nouveau  joug, 
de  la  ruine  par  son  nouveaa 
songea,  dans  sa  mis^re,  a  aMi 
elle  avait  si  facilement  trahi  III 
le  regretta ,  et  finit  par  s'ai 
comme  a  un  sauveur. 

II  etait  trop  tard  :  en  luttaatfl^ 
Thouloun,  le  khaiife  Motanieddl| 
lementcompromis  le  reste  desi 
\i.  CeM  ete  d^montrer  son  w 
de  la  fa^on  la  plus  roanifeste, 
vait  pas  non  plussMmmiscerdi 
tique  de  ce  soldat  usurpatair, 
laisse  pr^cedemment  gouvemerl 
sans  contr61e,  rexploiterasagd 
poser  k  merci.  DejaThoulouoiei 
rait  plussa  position  vis-a-vis  dn 
que  comme  un  vasselage  d'eti 
ne  consultait,  dans  aueun  cas, 
rain  fictif,  Mdtamed,  et  n'agt< 
que  d'apres  son  propre  et 
caprice.  II  aurait,  a  coup  si; 
Tempire  arabe  un  seooursnT' 
une  expedition  qu'il  n'eiltpasj 
La  seule  apparence  de  poufoif  < 
blait  admettre  encore  dans  saai 
de  ma1tre,c'etaitcelledu  [ 
a  je  ne  sais  quel  scrupule,  fii 
plique  que  par  la  resolution  ' 
entraversa  conqu^emaf  '^ 
dissensions  religieuses^  T 
naissait  la  quatite  pontifiealeif^ 
Aussi  contmuait-il  de  fiiire  i%i 
les  mosquees  de  Syrie,  la 
lennelle  au  nom  de  Mdtai 
part  cette  vaine  marque  de 
dance,  et  celle,  plus  insignifiantt^ 
de  faire  battre  la  monnaie 
khaiife ,  il  ne  rendait  aucun 
mage  au  commandeur  des  c 
ne  lui  offrait  aucune  autre 
sou  mission  mivae  morale. 

Dans  une  parei  1  le  situation,  ioBi 
etaient  bien  mal  inspires,  biea  ^ 


SYIU£  MODERNE. 


193 


9,  bien  mal  venus  a  adresser  des  piain- 
\  k  un  bomme  impuissant  contre  uo 

gme  fort,  k  Mdtamed  contre  Thou- 
.  Poartant,  si  le  khalife,  naturelle- 
it  indolent  et  pusiliaoime,  ne  pensa 
lit  a  faire  quelqae  r^primande  sacer- 
ple  ou  quelque  demonstration  mill- 
ft  en  faveur  d'une  de  ses  provinces 
lent  tyrannise ,  apres  avoir  ete 
[emment  confisquee,  son  frere 
fek,  coeur  fernoe,  esprit  prompt, 
irit  d'intimider  Tbouloun  par  une 
derigueur.  II  le  fit  excommunier 
lement  k  Bagdad,  fit  invoquer 
lui  la  vengeance  celeste  a  d^aat 
desarmes,  le  fit  maudire  comme 
Cette  vaine  tentative  de  r^pres* 
tfaffecta  que  fort  peu  Thouloun,  et, 
J  r^pondre  d*une  maniere  ^quiva- 
le  dominateur  de  la  Syrie  employa 
'  lesmovens  contre  son  adversaire. 
lenneilement  maudire  Mouaffek, 
tara  indigne  de  Tautorite  qn*il 
sar  le  kbalife.  Cette  sorte  de 
de  sacristie  n'eut  point  d^autre 
'que  de  reofbrcer  la  puissance  de 
et  de  manifester  aux  yeux 
a  quel  degr^  dlnf^riorit^  tom- 
plus  en  plus  le  pouvoir  du  khali- 
qui  le  prouva  bientdt ,  ce  fut , 
ui  lutte  ouverte  entre  Tbouloun 
imed ,  la  resolution  que  prit  ce 
de  transferer  de  nou  veau  le  si^ge 
empire  de  Samarab  a  Bagdad. 
:e  retraite  forc^e ,  par  cette  fuite 
live  au  coeur  de  sa  province  la 
i^e,  Motamed  abdiquait,  pour 
,  tout  droit  sur  les  campagnes 
par  roronte  et  le  Jourdain.  En 
one  ville  frontiere  de  cette 
il  d^non^ait  h  la  fois  ses  crain- 
es  et  sa  renonciation  presente. 
,  Tavait,  deux  slides  auparavant, 
Vehement  Heraclius  ,  le  trente- 
suoeesseur  de  Mahomet  put 
aussi :  Adieu  la  Syrie  (*). 
nter  de  Tan  264  de  I'hegire,  per- 
fe  ne  contesta  la  domination  de 
lloun.  Les  Syriens  n'eurent  done 
|Q*a  se  soumettre ,  et  k  payer  sans 
iiores  les  enormes  impdts  dont  leur 
jaa  souverain  les  accablait.  Puis 
It  son  ambition  grandissant,  Thou- 
>ongea  k  fonder  un  empire.  11  fal- 

^oyet  Ockley,  HisL  dn  Sarr. 
W  Uvraisan.  (Sybib  modbbnb.) 


lut  en  consequence  que  Ic^  Syriens, 
malgreau'ils  en  eussent^  jurassent  fide- 
lite  au  ok  atne  de  leur  ^an.  Leur  for- 
tune, leor  liberie,  avaleotdejk  ete  la 
proie  de  I'avide parvenu  qui,  d'enfant 
d'unesclave  ture,  s'etaitfait  le  maltre 
d'une  vaste  province  etlefondateur  d'une 
dynastie.  lis  n'avaient  plus  pour  toute 
consolation  que  leur  conscience,  pour 
tout  refuge  que  leur  for  interieur,  pour 
toute  ressource  que  ieurs  plaintes  k  la  Di- 
vinite.  Ces  derniers  biens  leur  furent 
meme  contestes  par  leur  insatiable  des- 
pote.  II  les  mit,  en  effet,  dans  la  neces- 
site  de  mentir  a  Dieu,  ou  de  se  declarer 
rebelles ;  il  les  pla^a  entre  un  crime  reli- 
gieux  et  un  attentat  politique.  Void 
dans  quelle  circonstance  :  etant  tombe 
malade,  Thouloun  ordonna  que  tons 
les  Syriens,  quel  que  fdt  leur  culte^ 
montassent  par  bandes  separees  sur 
la  mentagne,  appeiee  en  arabe  Mokat- 
tham ,  lieu  sanctifie  par  un  crand  nom- 
bre  de  monasteres  mahometans  et  de 
retraites  de  personnes  pieuses,  et  \k 
invoquassent  publiquement  et  a  haute 
voix  la  Providence  en  faveur  de  leur  ty- 
ran  et  du  retablissement  le  plus  prompt 
de  sa  sante.  Jamais  pareille  pretention 
n*avait  ete  exprimee  par  les  precedents 
souverains  du  pays;  jamais  surtout 
pareil  pelerinage  n'^avait  ete  impose  a 
toute  une  nation.  Les  Chretiens  et  les 
Juifs  aussi  bien  que  les  Musulmans  furent 
contraints,  sans  exception,  k  aller  invo- 
quer Dieu  pour  Thouloun  sur  ce  haut 
lieu.  Quels  que  fussent  les  scrupules 
de  certaines  consciences,  il  fallait  obeir 
sous  les  pcines  les  plus  sev^res.  Quoique 
les  Chretiens  dussent  traiter  de  supers- 
tition cette  piete ,  que  leur  derge  n'avait 
pas  admise,  ils  ne  pouvaient  se  dispen- 
ser de  ce  peierinage  equivoque  que  par  le 
martyre.  Thouloun,  apres  avoir  fait  pas- 
ser sous  le  joug  les  corps  de  ses  sujets , 
voulait  aussi  courber  leurs  dmes.  Exi- 
gence impie  qui  n*en  fut  pas  moins 
satisfaite,  despotisme  d'un  raffinement 
coupable  autant  qu*odieux  (*)! 

Malgreson  incessante  tyrannie,  Thou- 
loun n  en  regna  pas  moins  dans  la  plus 
profonde  securite  six  longues  aunees 
sur  la  Syrie.  En  270  de  rhegire  (884 
de  J.  C),  ce  malheureux  pays,  tout 

(*)  Yoyes  de  Gaigoes,  MisUrirt  det  Huns. 
13 


194 


L'UKIVERS. 


appauvri  par  lui,  opprim^  dans  ce  au'il 
avail  de  plus  cher^  sa  foi ,  trouble  aana 
chacun  de  sen  enfants,  lea  plua  humbles 
comme  les  plus  ^lev^,  fut  eDfin  d^li- 
vr^  d*une  dominatioD  d*autant  plus 
lourde  qu'il  ne  B*y  rattachait  aueune 
grande  id^e,  aucun  grand  sentiment, 
ni  ^loire  militaire,  ni  triomphe  religietix. 
Mais  il  n  etait  quitte  du  p^e  que  pour 
tomber  entreles  mains  du  GIs.  IJne  fois 
Thouloun  mort,  Khamarouiah  lui  succ^ 
da  sans  obstacle.  LesSyriens  ^talent  d€}k 
incapables  de  s'opposer  a  qui  que  ce  fQt. 
Revenus  sur  le  compte  du  khalife, 
n'ayant  plus  de  secours  k  esperer  de 
Bagdad ,  sans  espoir  de  Tamcre ,  sans 
appui  serieux,  pourquoi  se  seraient-ils 
80ulev68  oontre  ieur  mattre  actual  avec 
la  chance  de  rencontrer  pire  dans  le 
mattre  futur  ?  II  y  a  dans  la  destine  des 
nations  des  moments  de  lassitude  invin- 
cible, d'insurmontable  deoouragement 
qui  les  font  accepter  tel  joug  qu*on  Ieur 
veut  infliger.  La  Syrie  en  6tait  a  un  de 
ces  moments.  Eile  n'aurait  pas  vers^  une 
goutte  de  san^,  eile  n*aurait  pas  fait  un 
pas  pour  sortir  de  son  esclavnge ,  pour 
chancer  de  place  sur  son  lit  de  douleur. 
Aussi  Khamarouiah  r^na-t-il  douze  ans, 
jusqu'a  Tannic  182  de  rhegire.  Son  pere 
lui  avait  laisse  en  mourant  dix  millions 
de  dinars  et  un  tres-grand  nombre 
d'esclaves,  de  chevaux,  de  chameaux 
et  de  mulcts,  c'est-^-d ire  autant  de  ri- 
chesses  qu'un  poufoir  sans  bornes, 
qu'une  avidit6  insatiable,  <(u'un  pillage 
or^anis^  de  tout  le  pays  lui  avaient  per- 
misd'en  rnssembler.  Si  facilement  posses- 
seur  de  tant  de  biens,  Khamarouiah 
pensa  plutdt  k  en  jouir  qu'k  en  amasser 
de  nouveaux.  Ce  fut  la  une  consolation 
pour  les  Syriens.  lis  furent  moins  de- 
pouill^,  moins  tour  men  t^  sous  le  gou- 
?f  rneraent  du  fils  que  sous  celui  du  pere. 
Malgre  Ieur  torpeur  morale ,  ils  purent 
encore  r^tablir  pen  a  peu  ieur  biennStre 
materiel :  c'^tait  dej&  quelque  chose  pour 
eux.  Mais  ct^tte  tr^ve  d  leurs  maux,  dont 
ils  se  felicitaient  publiauement,  ne  de- 
vait  pas  durer  au  deid  du  r^gne  de  Kha- 
marouiah (*). 

La  faiblesse  du  khalifat,  le  succ^s  de 
quelques  aventuriers  heureux,  imprim^- 
rent  un  nouvel  elan   a  Tambition  des 

C*)  Yoyex  d'Herbelot,  BiblioiMpte  orientate. 


Turcs.  Vaincus  k  Bag^,  i  Ucmii 
Tempi  re  arabe,  et  dans  toute  ia  " 
tamie.  Us  n'en  devinrent  que  pi 
eieux dans  les  autreapronneesdel 
Le  sort  briilant  de  Tnouloune) 
par  plus  d*un  chef  mil itairei  {m 
d*un   gouverneur  de  ville.  Un 
derniers  que  Thouloun  avait  iA 
de  Topulente  Damas,  loin  de  r 
trer  reconnaissant  envers  la  £ 
son  bienfaiieur,  n*attendit  quN 
sion  favorable  pour  usurps  a 
la  domination  qu*il  r^vait  ' 
moyens  sont  bona  pour  des 
aans  coeur,  pour  des  soldats 
cience.  Khamarouiah,  ub^  pa 
che,  mourut  en  283,  laissant 
un  fils  en  has  dge  du  nom 
enfant  fut  attaqu6,  dq, 
mort  par  le  peu  scnipuleux ' 
Mais  le  gouverneur  de  Damai 
ses  d^irs  et  ses  efforts,  ne  | 
k  se  fiaire  accepter  aussi  fai 
Tavait  esp^r6.  Les  Thouloa 
d^ja  tres-nombreux  et  tr^-p 
Syrie.  Thouloun  avait  laiss^  f 
part,  trente-trois  enfants  I 
tons  ces  enfants  6taient  ridioi^i 
taient  attach^  une  forte 
une  grande  suite  d'esdaves.  1 
avec  quelques  troupes  levies  i 
quelques  partisans  de  reocontie,! 
pareille  partle,  c'edt  M  la  ploif 
imprudence.  Thagadj  ne  la  ( 
Apres  son  l&che  attentat  c 
fant  sans  defense,  il  serap, 
il  put  des  Thoulounldes  et'i 
roun ,  Tun  des  leurs ,  pour  i 
et5*enrichir  impnn^ment  soost 
Puis  une  fois  cet  iastrumeati 
ses  mains,  Thagadj  le  brisa4 
mords.  De  \k  denouveaoxf 
Syrie,  de  perp^tuelles  s^ditioosJ 
zias  oper^es  par  Tun  et  rautra|| 
impdts  de  plus  en  plus  oo 
coup  sur  coup  parfois,  selool 
des  armes.  Le  meurtre 
profita  pas  encore  i  Thagadj.  i 
de  Thouloun,  le  premier «  i 
usurpatrice,  monta  sur  k  trdoe^ 
lant  de  son  neveu ,  mais  sans  j 
s'y  maintenir  plus  d*une 
pouvoir  s'y  d^fendre  centre 
tidme  Abbasside  Moktafi.  i 
s'empara  en  effet.  Tan  292,  deiap 
du  dernier  prinee  Thoulottiiidei 


SYRIE  MOOERNE. 


196 


enfants  de  sa  maison.  Puis  lea  ayant 
eminent  a  Bugdad,  il  les  fit  bient6t 
mourir  impitoyablement.  Aioai  il  ne 
resta  plus  un  seul  rejeton  de  cette  dy- 
nast ie  d'aventuriers,  quin'avaiteuqu'un 
hommed'^neri^ie,  son  fondateur,  etqui 
iravait  dure  que  vingt-six  ans,  juste  as- 
sez  de  teinps  pour  peser  de  tout  son 
poids  sur  une  g^n^ration  syrienne,  pour 
faire  beaucoup  de  mal,  et  aucunbien. 

BRSLBMBHBMENT  BB  l'eMPI&B  ABABB. 

Malgre  la  victoire  du  khalifeMoktafi,  la 
Syria,  delivree  d'une  tyrannie  aussi  vexa- 
toire  qu*epuisante,nejouitpa8longtem()S 
du  repos  sur  leauel  elle  comptait .  Son  pro- 
tecteur  nature!,  le  mattre  qu'elle  jugeait 
alors  comme  seul  legitime,  n'avait  plus 
d^sormais  assez  de  puissance  pour  as- 
surer la  s6curitM'une  province  separ^e 
de  sa  capitale  parun  plateau  desert,  Bar- 
rai-al-Cham,  et  Incapable  desed^fendre 
elle-mdrne  centre  la  premiere  invasion 
venue«  Ctiaqueanneeamenait  pour  le  kha- 
lifat une  complication  fune^iteou  une  ine- 
vitable diminution  dahs  sa  supr^matie. 
Tout  remede  qui!  essayait  lui  devenail 
un  nial  nouveau.  Les  Arabes,  qui  avaient 
fait  sa  force  premiere,  s'etaient  amollis 
a  te!  point  qui  I  avait  fallu  appeler  une 
arm^e    ^trang^re    pour    sauver   Tem- 
pire,  former  une  garde  d'esciaves  pour 
prot^ger    le    souverain.    Ces  esclaves 
ne  furent  pas  longtemps  h  devenir  les 
mattres.On  a  vuquel  emploi  ils  flrent  de 
leur  autorit^;  et  les  dissensions  interieu- 
res,  les  troubles  perp^tuels,  les  revolu- 
tions de  paiais  que  les  Tares  excit^rent, 
furent  certainement  une  des  premieres 
causes  de  la  decadence  du  kbalifat.  Sous 
un  pouvoir  si  chancelant,  quelle  sou- 
mission  pouvaientmoQtrer  ces  puissants 
gouvern§urs  de  province  qu'un  orasd'ai- 
rain  seul  aurait  pu  maintenir  dans  To- 
belssance  ?  Plusieurs  d*entre  eux  se  ren- 
dirent  ind^pendants ;  les  plus  audacieul 
fond^rent  des  dynasties.  Les  Abbassi- 
()es  avaient  vu,  d^  leur  av6nement  au 
khalifat,  TEspagne  leur  ^ebapper,  et 
bientdt  un  dernier  Ommiade  braver  de 
cette  contr^e  lointaine  leur  vengeance 
inassouvie.  Cinquanteans  plustard  TAfrf- 
<j[ue  se  montra  comme  TEspagne  impa- 
tiente  du  joug  de  Bagdad,  et  le  ills  d  un 
des  lieutenants  du  grand  Haroun-al- 
ftaschid,  lbrahim-ben*Aglab,  crea  dans 


la  maison  des  Aglabites  Find^pendance 
et  rh^r^dit^  du  pouvoir.  Apr^s  Al-Ma- 
mouO)  successeurillustre  encore  de  Til- 
lustre  Haroun,  ce  fut  le  tour  de  TOrient. 
Thaher  entama  de  ce  cdt^  Tempire  de 
rislam;  et,  au  boutde  quatre  genera- 
tions ,  ce.  ne  fiit  pas  un  khalife  qui  re- 
prit  le  Khorasaan  aux  Tbah^rites,  mais 
un  aventurier  d^^nergie,  qui  de  chau- 
dronnier  s*etait  fait  voleur^  et  (]ui  finit 
sa  carridre  par  d^rober  un  trone.  Le 
ooeur  m^me  de  Tlslam  fut  bientot  atta- 
qu^.  Les  Turcs  s'etaient  empar^s  de  la 
Syrie,  ainsi  que  nous  Tavons  rapport^; 
et  une  familie  arabe  de  la  tribu  de 
Thdieb,  les  Hamadanites,  se  flt  un 
royaume  avec  une  oartie  de  la  Mesopo- 
tamie,  avec  la  villa  oe  Mossoul  sur  le  Ti- 
gre,  et  celle  de  Raccab  sur  TCuphrate. 
Plus  tard  mdme,  pour  s'etendre  et  s'en- 
nehir,  les  Hamadanitesajout^renta  leur 
conqu^te  la  puissante  cit6  d*Alep,  enta- 
Bfiant  ainsi  la  Syrie,  d^tachant  un  des  dia- 
mants  de  son  collier,  s'appropriant  une 
des  places  de  commerce  les  plus  impor- 
tantes  de  TOrient,  entrepot  continental 
de  TAsie  Mineure  et  des  Indes  (*). 

PILLAOB  DBS  KHABMATHES. 

Outre  la  transformation  de  certaines 
provinces  en  royaumes,  outre  la  domina* 
tion  passagire  mais  si  humiliante  des 
Turcs ,  ^v^nements  aui  attaquaient  le 
pouvoir  temporel  des  khalifes,  leur  pou- 
voir spirituel,  compromis  par  les  vices 
et  rimpi^te  de  Motawakkel ,  fut  forte- 
ment  6Dranl6  parunesecte  idol^tre,  les 
Kharmalhes.  Cette  secte,  cr66B  par  Tim- 
posteur  qui  lui  donna  son  nom,  s'en  pre^ 
nait  aux  fondements  m^mesde  Tlslara. 
Pour  elle  Mahomet  avait  fait  son  temps. 
Loin  d*€tre,  k  leur  sens,  le  dernier 
des  prophetes,  il  n'6tait  tout  au  plus 
qu*un  envoys  temporaire  de  Died,  dont 
roouvre  incomplete  devait  ^tre  achev^e 
par  Kharmath.  Le  Koran  nMtatt  plus 
qu'un  livre  ephdmdre,  et  non  la  lot  defi- 
nitive. La  p}uj)art  de  ses  pr^ceftteSf 
traites  d*all^ories  et  de  paraboles,  etaient 
expliqu^parles  Kharmatbes  selon  leurs 
caprices  ou  selon  lerirs  besoins.  Ces 
nouveauj^  schism  a  tlqaes  ne  consid^ 
raient  la  prifere  que  comme  le  sym- 
boie  de  robeissance  due  d  leur  chef,  lis 

(*)  Yoyez  Ab'al-F^  j^nnai.  motlnn, 
18. 


196 


L'DNIVERS. 


ne  ooDsidtoieDt  lejedoe  que  oomme 
le  symbole  du  silence  et  du  secret  qu'il 
est  bon  de  garder  Yis-i-visdes  Strangers, 
lis  ne  consideraieDt  la  defense  de  Ta- 
dultdre  que  comme  le  symbole  du  crime 
d'apostasie.  Gette  fagoa  d'iDterpretation 
de  la  loi  les  amena  peu  a  peu  ^  regarder 
comme  des  superstitions  la  plupart 
des  prescriptions  morales  et  religieuses 
"  de  llslam,  et  h  s'en  abstenir.  Le  chef  de 
cette  secte,  qui  s*^tait  d^claree  Tan  270 
de  I'b^gire,  avait  vteu  dans  une  grand«» 
aust^riS^.  Loin  de  Timiter,  ses  disciples 
se  permirent  tootes  les  debauches  et 
tous  les  vices.  lis  s*adonnaient  aux  bois- 
sons  d^fendues  par  le  Koran;  ils  roan- 
geaient  sans  scnipule  de  la  chair  de 
pore;  lis  n'^taient  arr#t^  dans  leurs  do- 
bordements  par  aucun  des  liens  sociaux. 
Strange  contradiction  de  Faspece  bu- 
maine!  Ges  hommes  aux  moeurs  disso- 
lues  se  croyaient  conduits  par  des  an- 
ges,  tandis  qu*ils  donnaient  pour  guides 
a  leurs  adversaires  des  demons.  Pares- 
seux ,  corrompus ,  pillards ,  ils  ne  son- 
geaient  qu'^  s^mparer  de  vive  force  des 
terres,  des  femmes  et  des  tr^rs  des  Mu- 
sulmans. 

Une  pareille  secte  devait  se  recruter 
parmi  le  rebut  de  la  soci^t^  orientale;  et 
comme,  a  T^poque  oik  nous  ensommes,  la 
faibiesse  du  Khalifat  et  le  succesde  tant 
d'aventuriers  avaient  fait  perdre  aux  de- 
voirs de  leur  s^v^rit^,  a  Tobeissance  de 
sa  rigueur,  aux  moeurs  de  leur  puret^, 
il  8*ensuivit,  pour  le  malheur  des  g^n^ 
rations  vivantes,  une  augmentation  pro- 
gressive de  la  bande  des  Kharmatnes. 
Unis  par  les  liens  du  crime  et  les  exigen- 
ces des  passions,  ils  tenterent,  des  la  fiu 
du  regne  de  M6tamed,  lequinzieme  Ab- 
basside,  un  soul^vement  general  dans 
la  ville  imm^morialement  turbulente  de 
Rouffah.  A  partirde  cette  lev^  de  bou- 
cliers  qui  tourmenta  les  derniers  jours  du 
pusilianime  M^tamed ,  les  Kharmathes 
prirent  de  plus  en  plus  d^extension,  et 
devinrent  bientdt  le  fl^u  de  Flslam. 
Durant  ores  de  cinguante  ann^es,  en  ef  • 
fet,  ils  firent  la  desolation  de  tous  les 
pays  qu*ils  travers^rent  ou  quMls  exploi- 
terent.  Nomades  du  crime,  on  les  voit 
d*abord,  plus  terribles  que  le  simoun, 
ce  vent  temp^tueux  dud^rt,tomber 
sur  les  caravanes  de  pelerins,  les  de- 
pouiUer,  les  accabler  d'avanies,-  et  les 


abandonner  eosaite,  f 
etsans  vivres,  dans  les  sables aiidei^ 
rArabio-P6tr6e.  Une  autre  s 
andaeieux  encore ,  ils  vienneat  i 
les  pelerins  dans  les  murs  i 
leur  viile  sainte.  La  Mekke  est  i 
par  eux,  prise,  8accag6e..Us  \ 
plus  de  trente  mille  personnel,! 
sent  le  puits  de  Zem-Zem  de  i 
souillentle  temple  sacre  en  y  ( 
trois  mille  morts,  et  pousseotlei 
de  la  religion  islamiguejusqu^a  ft 
la  pierre  noire  si  rev^ree  oe  k1 

E)ur  en  couvrir,  dans  leur  cap  ' 
trines  publiques  Q. 
Toutes    les    provinces   de 
arabe  eurent  a  souffrir,  diaoan 
tour,  la  domination  immonded 
mathes.  La  Syrie,  si  tentante  ac 
ses  ricbesses  naturelles  ^fut  i 
gnee  encore  oue  les  autres.  I 
n^trerent,dte  rannte  290  de  f 
remontant  le  cours  de  TEop 
qu'a  Annah.  Puis  de  oette  ville  I 
Cerent ,  comme  des  Tautoun  i 
k  travers  les  plaioes  si  fertiksj 
mas.  La  mort  et  la  d^TasUtionk 
virent.  Blalgr^  siB  cent  mille  i 
mas  ne  crut  pjs  pouvoir  le  i 
avec  succes  contre  oette  nuees 
grossissante  de  voleurs  aussie 
satiables.  £lle  capitula;  eilea'a 
bonte  de  se  racheter  du  piU  , 
d'argent.  Mais  que  de  sacriiM 
fallut-ii  pas  pour  satisfaire  mw 
avides  qui  se  succedaient  saattf^ 
ses  murs !  EnGn  elle  put  ks  (' 
les  unes  apres  les  autres.  Lesl 
thes,  gorges  d*or  sans  en  6tR  r 
se  rabattirent  sur  Baalbek  et  f 
Ces  deux  derni^res  cites  opp 
vaine  resistance  :  eilesfurentp 
saut,  devast6es,  incendiees.  i 
formidables  du  Liban  purents 
ter  les  Kharmatbes ,  et  ils  s*aii 
nerent  tout  charges  de  butio  ,s ' 
des  milliersd'esciaves,  dansF 
et  dans  leur  capitale,  Uadjar,^ 
tait  autre  que  la  ville  grto>-r<  " 
Petra.  Comme  les  brigands  < 
Age   dans  la  campagne  de  1 
avaient  choisi  pour  refuses  J 
magnifiques  de  Tantiquite.  Deli 
leurs,  ils  pouvaientattendre  lei  | 

C*)  yoy«  Ab'al-F^da,  Anmal. 


L 


SYRIE  MODERNE. 


197 


de  la  Mekke  comme  d*une  embuscade 
toute  trouv^e,  puis  les  d^trousser  sans 
mis^ricorde.  Quoi^^e,  la  plupart  du 
temps ,  les  caravaDes  fussent  armies  et 
escort^es,  elles  n'en  ^taient  pas  moins 
presque  toujours  extermin^es  par  les 
Kharmathe8,qui  fondaient  sur  elles  par 
milliers ,  au  grand  galop  de  leurs  cne- 
vaux  agiles. 

LeuT  audacefut  telle,  lear  certitude 
de  vaincre  devint  si  complete,  qu'il  se 
fit  a  leur  occasion  une  sorte  de  revolu- 
tion religieuse  en  Orient.  Desesp^rant 
de  parvenir  jusqu'll  laMekke,  lespelerins 
musuimans  se  rendirent  k  J[6rusaleni, 
et  fireot  leurs  pri^res  dans  la  mosqu^ 
d'Omar,  au  lieu  de  lesfaire  dans  la  Kaaba. 
II  ^tait ,  en  effet ,  plus  facile  d*^viter  les 
Kharmathes  en  Syrie  qu*en  Arabic ;  Ijp 
Barrai-al-Cham  6tait  moins  long  a  tra- 
verser que  le  d6sert  de  r£garement;  il 
6tait  plus  ais^  de  se  d^endre  dans  les 
gorges  de  la  Palestine  que  le  long  des 
buttes  de  sable  de  THedjaz;  Jerusalem 
enfin  ^tait  presque  aussi  sainte  que  la 
Mekke;  le  Koran  le  disait :  cela  dta  tout 
scrupule  aux  divots  mabom^tans. 

Une  partie  seulement  des  habitants 
de  Jerusalem  profita  de  ce  changement 
dans  les  habitudes  musulmanes ,  ce  fu- 
rent  ceux  qui  appartenaient  a  la  religion 
islam ique.  Quant  aux  Chretiens,  ils  n'eu- 
rent  rien  a  gagner  a  ces  processions  d'en- 
nemis  religieux  qui  ne  les  regardaient 
jamais  d*un  bon  oeil ,  et  dont  les  plus 
exait^s  les  mena^aient  et  les  molestalent. 
Ces  visites  annuelles  k  la  mosqu^e  d*0- 
mar  dur^rent  vingt  annees,  et  le  retablis- 
sement  des  auciens  usages  ne  s*eJEfectua 
que  lors  de  la  disparition  de  la  secte  des 
Kharmathes.  Leur  disparition,  du  reste, 
ne  fut  pas  moins  singuliere  que  leur  forma- 
tion. Outre  leur  esprit  de  d^sordres  li- 
bidineux  et  de  brigandages  infdmes,  les 
Kharmathes  ^taientde  plus  fanatis6s  par 
leurs  chefs.  En  voici  un  exemple  bien 
frappant  :  dans  une  de  leurs  courses 
d^vastatrices,  un  certain  Abou-Thalier 
ayantamen^une  petite  troupe jusqu'auz 
environs  de  Bagdad,  cette  troupe  se 
trouva  enveloppee  tout  k  coup  par  un 
corps  considerable  d'Arabes  que  Je  kha- 
life  Moktader  avait  envoys  contre  elle. 
La  resistance  semblait  impossible,  et  le 
g^n^ral  arabe  d^uta  un  des  siens  pour 
engager  Abou-Tbaher  a^d^poser  les  ar- 


mes.  Ce  dernier,  B'€iant  informe  aupres 
de  Tenvoy^  des  Musuimans  du  nombre 
de  ses  ennemis,  et  ayant  appris  qu'ils 
^taient  trente  mille ,  lui  r^pondit  avec 
fiert6  :  «  Si  ton  g^ntol  a  trente  miile 
«  hommes,  je  lui  d^e  d*en  atoir  trois 
«  du  courage  et  du  d^vouementdeceux- 
<i  ci!  »  Puis  il  fit  venir  trois  dei  siens, 
oommanda  k  Tun  de  s'enfoncer  son  poi- 
gnard  dans  la  gorge,  au  second  de  se  Je- 
ter la  t^te  la  premidre  dans  un  tourbillon 
du  Tigre,  au  troisieme  de  se  pr6cipiter 
dans  un  abtme.  Les  trois  tanatiques 
ob^irent ,  et  le  chef  kharmathe  ajouta  a 
Tenvoy^  stup^fait :  «  Ya  dire  k  ton  g^- 
«  n^ral  qu'avec  de  pareils  hommes,  quel 
«  que  soit  leur  nombre,  je  veux  demaio 
«  le  mettre  li  la  chatne  avec  mes  chiens. » 
Le  soir  m^me ,  en  effet ,  Abou-Thaher 
battit  les  Arabes ,  les  mit  en  (iiite,  8*em- 
para  de  leur  g6n^ral ,  et  le  fit  atUcher , 
comme  il  I'avait  promts,  entre  deux 
dogues  (*). 

Ce  fanatisme  des  Kharmathes  pour 
leurs  chefe  semblait  devoir  assurer  a  ja- 
mais la  domination  de  ces  derniers.  Pour- 
tant  ce  fut  pr^cis^ment  sous  le  oomman- 
dement  de  cet  Abou-Tbaher  que  la  secte 
8*^lipsa,  pour  ainsi  dire,  apr^  avoir 
pr^lablement  rapport^  ii  la  Mekke  la 
pierre  noire  puritiee  au  feu.  Jie  resta- 
t-il  rien  par  mi  les  populations  orientales 
de  cette  race  si  violente  et  si  dissolue? 
Tant  d*hommes  crapuleux  et  f^roces  qui 
la  composaient  purent^ils  s*amender  ou 
s'^vanouir  en  un  instant?  Les  Druzes, 
et  plus  tard  les  Assassins,  nous  prouve- 
roiit  bientdt  que  ces  Elements  de  perver- 
site,  excites  et  mis  en  ceuvre  pour  la 
premiere  fois  par  les  Kharmathes,  furent 
bien  loin  de  disparattre  compl^tement 
de  rOrient  ve^  Tan  340  de  Th^ire , 
sous  le  khalifat  de  Mothi ,  le  vingt-troi- 
sieme  Abbasside. 

UBS  ikchiditb;  bt  lbs  hamadanites. 

La  faiblesse  croisslinte  des  khalifes , 
les  troubles  renaissants  de  leurs  provin- 
ces ,  le  d^membrement  successif  de  leur 
empire,  devaient  porter  les  fruits  les 
plus  amers :  Tanarchie  pour  TOrienttout 
entier ;  la  division  pour  la  Syrie.  A  peine 
cette  demiere  contr^,  en  effet,  encore 
ridie  noalgi^  les  piilajges  qu'elle  avait 

(*)  Yoyei  d^BetUAoirBibHoihique  onemkUe. 


19S 


L'UNIVERS* 


soufferts,  encore  inrosp^,  malgr6  les 
devastations  des  brigands  qui  Tavaient 
traverse ,  fut-elle  remise  de  la  domina- 
tion des  Thoulounides  et  de  I'irraption 
des  Khannatbes,qu'elletoniba  sousle 
sceptre  de  fer  de  noUYeaoK  oonquerants. 
Mais  cette  ibis  ces  nouTeaux  oonquerants 
ne  lui  vinrent  pas  d*ua  seul  c6te,  mais 
bien  de  deux  en  mdme temps,  d'^^pte 
et  d' Arable.  Elle  n*en  arait  pas  (ini  avec 
les  Turcs.  Ces  audacieux  aventuriers  ne 
se  contentaient  plus  depuis  Ions  temps 
dedominer  le  fantome  du  khalifat,  de 
lui  arracber  quelques  villes  et  quelques 
campagaes,  de  lui  soustraire  mime  une 
vaste  eontree  comme  Tancien  royaume 
des  Pbaraons  :  une  fois  maitres  souve- 
rains  d*une  province ,  ils  voulaient  che- 
que jour  ajouter  a  leur  puissance,  et  guer- 
royaieut  sans  cesse ,  non-seulenient  par 
goQt,  mais  nar  ambition.  Aussi,  apres  les 
Tbouiouniaes,  ce  furent  les  Ilicbidites 
qui  fondirent,  d^Alexandrie  06  ils  re- 
gnaient,  sur  Jerusalem  et  Damas,  et 
oui  s'etablirent  bientot  en  Palestine  et 
dans  la  grasse  vallee  de  Hauran.  Les 
Ikchidites,  d'ori^ine  turque  comme  les 
Thoulounides,  turent  comnie  eux  ty- 
rans  etspoliateurs.  Leur  avidite  uesem- 
blait  jamais  satisfaite.  Ils  pompaient  la 
sueur  des  Syriens  comme  le  sable  des 
deserts  absorhe  Teau  du  ciel.  Comme 
le  sable  aussi,  leur  coeur  n'en  demeu- 
rait  pas  moins  aride.  La  civilisation, 
qui  ieur  offrait  tous  ses  travaux ,  toutes 
ses  industries,  tout  son  luxe,  ne  parve- 
nait  ni  k  aroollir  leur  caractere  barbare  ni 
a  adoucir  leur  f6rocite  native.  C'etaient 
toujours  des  chefs  de  brigands  qui  se 
gorgeaient  d'or;  ce  ne  furent  jamais  des 
princes  qui  deployerent  une  magniO- 
cence  royale.  Les  peuples  elaient  tyran- 
nises, et  non  gouvernes  par  eux.  Aussi, 
malgre  les  pompes  de  leur  cour,  le  nom- 
bre  immense  de  leurs  gardes,  il  y  avait 
toujours  dans  ces  usurpaleurs  quelque 
chose  de  farouche  et  de  ni^ant  a  la  fois : 
aussi  vit-ou  Tun  d*eux,  quoique  envi- 
ronnedequatrecentmillesoldat5,cacher 
a  ses  premiers  ofti(  iers  ainsi  qu'a  qui- 
conque  la  chambre  obscure  ou  il  re- 

{)osait.  Cest  qu  il  savait  que  la  baiue 
*entourait,  que  la  vengeance  epiait  sa  so- 
litude pour  Tassassiner,  que  fien  n'etait 
reconnu,  accept^,  aim^  dans  son  autori- 
te,  et  que  la  terreurseule  faisait  sa  force. 


comme  le  sabre  avait  lait  sa 
Sous  de  pareils  malties  les  peoplei'ali 
qu'acourberlefrontetag^mir  "^ 
sement  pour  les  Syrieda,  toutlesri 
toire  n*etait  pas  tombe  sou  b 
execree  des  Ikchidites ,  et  avant  i 
vasion,  les  Hamadanites  s' 
empares  du  pays  d'Alep  et  d^unsj 
des  valines  de  TOronte  (*). 

Les  Hamadanites  sont  Ton 
brillants  exemples  de  la  couslit 
dale  des  andens  Arabes, 

3ui  r^sista  victorieusement  au 
espotique  des  khalifes.  Mal^l 
tion  au  trone  de  Tlslam,  tout  a  la  I 
liti^ue  et  sacerdotal «  des  deux  _ 
maisons  d'Ommeiah  et  d'Abbai;i 
la  soumission  detant  de  peuples,! 
qu^te  de  tant  de  contrees,  oui 
rent  d'autant  la  puissance  kha 
augmentant  son  prestige,  ils'cij 
pas  moins  dans  les  peuplaides  k\ 
jaz  et  de  FYtoien ,  instincl*— * 
tach^  a  leurs  moeurs  prii 
esprit  de  liberty  et  dlud( 
sans  refuser  Tob^ssance  , 
parente  qu'on  lui  demandait , 
princes  de  Damas  ou  de  Bagdii^ 
conservait  pas -moins  touteikir 
et  toutes  les  allures  du  passe. 

Su'en  Syrte  et  en  Mesopotamiel 
es  Moawiah  et  des  Uaroui 
organisait  une  ad  minis  tratioai 
er^ait  une  discipline,  fondait 
eeux  m^mes  dont   ^taieut 
grands  bommes  conservaient  1 
tudes  arri^rees,  leurs  divisioos  il 
hales  en  tribus  et  en  families. ' 
dents  ent^tes  vou  laient  bien  [ 
nattrela  supr^matie  spirituelle^ 
fes ;  mais  leur  autorit^  im| 
I'attaquer  ouverteutent,  ils  sat 
jours  s'y  soustraire.  Voiia 
Ommiades  renoootr^rent  pli 
vaux  de  leur  puissance  dans  Vl 
prement  dite ;  voila  comment  ki 
politico-religieux  des  Alides  se 
constamment,  malgre  ses  reveRi 
malheurs  si  nombreux;  voiia  . 
il  fallut  toujours  oouipter  aveei 
qu*oo  avait  cru  tant  de  fois  eiv 
et  qui  renaissait  sans  cesse  do 
des cendresetdu  sang.  Chose sii 
le  temps,  en  agissant  fatalemeati 

n  VoyeE  AbHil-FMa,  dnuaL  i 


SYRIE  MODERNE. 


199 


t 


tes  famines  dont  nous  parlons,  la  dvi- 
lisation,  en  adoucissant  leurs  moeurset 
en  apportant  des  modiGoatioas  a  leurs  ha- 
bitudes, ae  d^truUirent  pourtant  ni  leur 
fiert^  ni  leur  independance.  Elles  re«- 
ftentirent ,  oomme  toutes  les  autres  po- 
pulations ,  le  besoin  de  godter  k  leur  tour 
les  douceurs  d'uq  bien-ltra  plus  assure, 
d^une  positioo  plus  stable ;  mais  ce  ue 
fut  jamais  aux  depeua  de  cette  liberty, 
donfc  elles  avaient  puis6  Tamour  dans  la 
Yie  nomadCt  dans  les  institutions  patriar^ 
eales  de  leurs  ancftres.  Tant  que  le  kha- 
lifat resplejidit  oomoie  un  soleil  au  som- 
met  de  Vlslam,  elles  s*en  tinrent  61oi- 
n^Bfi ,  pr^fi^rant  n'^prouver  jamais  les 
ienfaits  de  sa  chaleur,  que  d*^tre  ex- 
poa^  a  sa  lumiere  dgale  et  dominatrice. 
Puis ,  lorsque  ce  soleil ,  a  son  d^in ,  ne 
jeta  plus  sur  le  monde  que  de  pdles  et 
impuissants  rayons,  elles  s'avancerent, 
elles  8*en  approchdrent  alors ,  non  pour 
lui  reodre  un  cuke  ironique  mais  pour 
reclamer  leur  part  des  terras  qu'il  avait 
€aoondees. 

Parmi  les  plus  empress^es  au  partajje 
des  debris  de  Tempire  khalifat ,  on  doit 
Qompter  les  Hamadanites.  Descendante 
de  Uareth  le  Thil^ite ,  oette  famille 
etait  taute*puissante  deja  sous  Mota- 
dhedyleseisieme  Abbasside.  Soussesdeux 
•uccesseurs,  Moktafl  et  Moktader-Bil- 
lab,  elle  s'aocruteneoreavec  une  remar- 
quable  rapidit6.  Tons  les  jours  ellovoyait 
sa  clientele  augmenter,  et  la  resistance 
qu'elle  put  faire  aux  entreprlses  d^vasta* 
trices  des  Kharmathes  porta  an  comble 
sou  credit  et  son  autorit^.  Cependant, 
originaire  de  TY^men,  on  I'avait  vue 
pen  a  pen  tendre  vers  la  Mesopotamie. 
Ses  serviteurs  ^taient  si  nombreux ,  ses 
equipages  de  chevauxet  deehameoux  pre- 
uaient  de  jour  en  jour  une  telle  exten- 
sion ,  quelessablonneuses  et  arides  cam- 
pagnes  de  TArabie  ne  suffirent  bientdt 
plus  pour  nourrir  son  camp  inoessaro- 
ment  agrandi  de  tentes  nouTelles.  II  lui 
fallut  pousser  petit  k  petit  vers  Tlrak , 
cbercher  le  long  du  Tisre  les  eaux  et  les 
pdturages  dont  Tabondance  lui  devenait 
de  plus  en  plus  n^essaire.  Enfin  d*^tape 
eu  etape,  cette  famille  considerable,  ou 
plutdt  cette  trtbu  gross issante ,  arriva 
dans  la  riche  vall^  de  Mossoul.  Elle  s'y 
fixa  plus  longtemps  qu'ailleurs,  s'y  fit 
eneare  des  partisans  nouveaux ,  et  flntt, 


un  beau  jour,  par  entrer  dans  la  ville, 
par  s'y  etablir,  par  8*en  rendre  ipattresse. 
Le  khalife  impuissant  de  Bagdad  ferma 
les  yeux  sur  catto  usurpation  progressive. 
11  n'avail,  du  reste,  ri^  k  direjus- 
gu'alors :  les  Uamadanites,  c'etaientdes 
mres,  c'^taiealdebons  Musulmans.  lis 
n'avaient  pas  chass^  les  MossoulienS; 
e*^taient  les  Mossouliens  qui  ^taieni  ve- 
nus  k  eux ;  ils  n'avaient  pas  expuls^  les 
autorites  de  la  vi||^,  c'^taient  les  auto- 
rit^  de  la  viUe  qui  avaient  recounu 
d'elles-m^raes  la  superiority  des  Darna- 
danites ,  et  qui  avaient  rendu  hommage 
k  leur  esprit  de  justice ,  k  leur  g^nero- 
site ,  k  leur  supr^matie  morale.  Tant  que 
les  Hamadanites  n*eurent  point  trouve 
Toccasion  de  refuser  ob^issance  au  kha- 
life ,  celui-ci  n'avait  rien  k  r^damer, 
et  il  se  garda  bien  de  provoquer  cette  oc- 
casion. 

Durftnt  plusieurs  r^gnes,  tes  Hamada- 
nites purent  done,  sans dtre  inquiries, 
fonder  leur  pouvoir  en  etendant  pro- 
gressivement  leur  clientele.  £tant  de- 
veous  tres-ricbes,  6tant  naturellement 
luxueuxet  prodigues,  ce  qu'ils  prenaient 
d*une  main,  ils  le  rendaient  de  Tautre. 
Aussi  lesSyriens  n'eurent-ils  pas  trop  a 
souffrir  de  la  domination  de  celte  famUle 
puissante,  et  durent-ils  pr^f^rer  de  beau- 
coup  son  joug  k  celui  des  Thoulounidcs 
et  des  Ikcnidites.  En  tout  temps,  les  races 
arabes  montr^rent  plus  de  qualites  mo- 
rales, sinon  militaires,  que  les  races  tor- 
ques. Les  habitants  de  rY^men,  instinc- 
tivement  nobles  et  grands,  k  V&me  rigide, 
mais  juste,  au  cceur  orgueilleux,  mais 
droit,  furent  longtemps  intr^pides  dans 
les  combats,  ettou  jours  mattres  genereux 
pour  les  peuples  quits  dompt^rent.  Les 
Turcs,  race  bAtarde,  rami)ssis  de  bri- 
gands plut6t  que  corps  de  nation ,  furent, 
au  contraire,  a  toutes  les  ^poques  de  leur 
puissance,  aussi  cruels  ill  la  guerre  que 
piKards  durant  hs  troves  qu'ils  accorric 
rent  aux  pays  envahis  par  leurs  bandes. 
Or,  les  Hamadanites  ^talent  d'ori^ine 
arabe ;  ils  venaient  de  TY^men ,  et  il  se 
rencontre  it  encore  en  eux  quelques-uiies 
des  vertus  primitives  et  fondnmentales 
d«  leurs  ancdtres.  Ces  demi^res  lueurs 
des  moeurs  patriarcales  rendirent  Tes- 
poir  aux  Syriens,  et  calmerent  quelques- 
uns  de  leurs  maux.  Aussi,  c'est  a  rattaehe- 
ment  seul  d<«  populations  qu'ils  avaient 


90O 


L'UNIVERS. 


conquises  beaueoup  plus  par  leur  carac- 
tere  que  par  leur  ▼aillaDoe ,  que  les  Ha- 
madanites  durent  la  force  de  roister  aux 
arnies  de  pluaieurs  khalifes,  et  le  pouvoir 
de  regner  assez  tranquillemeut  sur  une 
partle  de  la  Syria,  k  UQe  ^poque  de  deca- 
dence oik  ranarchie,  oomme  uue  tacbe 
d*huile  sur  une  ^toffe  de  soie,  s'^tendait 
a  travers  FAsie  en  la  souillant  et  en  la 
perdant  {*). 

IfOUTELLES    OUEaRBS    DE8    GREGS 
GONTBE  LES  ABABES. 

Cette  anarchie  grandissante  avail  d^j^ 
telleineot  min^  rempire  arabe;  elle  avail 
tellemenl  d^pr^ci^  la  valeur  morale  de 
rislam,  que  lesGrecssongerentarepren- 
dre  quelques-unes  des  provinces  que  las 
Arabes  avaienl  si  rapidement  arrachees 
a  la  domination  byzantine  Irois  sidles 
auparavant.  Ge  qu'il  y  eul  de  caract^risti- 
que  dans  cette  nouvelle  guerre,  c*est  que 
ce  furent  les  peuples  qui  la  commencerent 
d'eux-m^mes,  et  ind^pendamment  de 
la  volonte  de  leurs  princes.  U  y  eut 
toujours  autagonisme  de  race,  haine  de 
religion  entre  les  Grees  el  les  Arabes.  Get 
antagonisme  instinctif,  cette  haine  aveu- 
gle,  avaient  pu  se  calmer  par  instants, 
grdce  aresprit  pacifiqueet  tol^raiit  dece^ 
tains  chefs,  a  leurs  tendances  civilisatri- 
ces;  ipais  ralUance  n*avait  iamais  ^t^  ni 
g^n^rale  ni  sincere.  Si  le  calme  ^tait  au 
sommet  des  deux  soci^t^s ,  la  discorde 
rugissait  toujours  an  fond.  C^tait  une 
treve  de  fr^res  ennemis  :  on  ne  pouvait 
dissimuler  tout  au  plus  que  jusqu'a  la 
mort  du  p^re.  Aussi,  a  chaque  r^ne  nou- 
veau ,  la  paix  etait-elle  imm^iatement 
compromise ,  el  il  fallait  d*6oergiques  ef* 
forts  de  la  part  des  deux  souverains  pour 
Tempteher  d'toe  desastreusement  rom- 
pue.  Or,  au  temps  ou  nous  sommes  arri- 
ve, les  deux  souverains  avaient  perdu 
peu  k  pen  presque  toute  leur  auloriU  pri- 
mitive, el  ne  possedaient  quasi  plus  que 
Fombre  de  Tinduence  de  leurs  anc^tres, 
Les  deux  cours  ^talent  aussi  amollies, 
luxueuses,  pusiilanimes  Fune  que  Fautre ; 
les  deux couronnes, aussi  chanoelantes.  A 
peine  ces  fantdmes  d'empereurs  avaient- 
ils  la  force  de  se  maintenir  quelques  an- 
n6es  sur  leur  trdne  m^rise,  et  pouvaient- 
ils  couvrir  quelques  favoris  et  quelques 


serviteurs  d*on  Tain  sceptre  qui  n'mft 
de  valeur  que  For  de  sa  matiere  et  bob 
le  prestige  de  son  s^mbole. 

Rhadi-B*illah,  le  vingtiime  i 
esprit  encore  iumineux,  maishomnei 
ble,  n*avait  su  durant  ces  sept  a 
regne  que  prot^er  les  lettr^  etk 
teurs,  que  former  une  phalaogedej 
les  el  non  une  arni6e  oe  soldat&r 
taotin  Vll ,  dit  Porpbyrog^nto  11,1 
Ira  les  mtoesqualil^sintelligeatflEil 
la  mtoe  insuffisance  de  caract^^' 
khalife.  II  ne  sut  faire  a  i 
que  ce  que  falsait  son  rival  a  ]  . 
Prince  (Fune  douceur  inalterable,  ( 
tantin  Vll  attira  lescceurs  a  lui,  o 
les  enflammer.  Esprit  d'une  i 
tinction ,  il  sut  raviver  le  godt  o 
lettreset  la  culture  civilisatrieed 
mais  en  songeant  plutdt  an  I 
des  individus  (|u'a  la  grandeur  4i I 
the.  Ges  essais  de  moralisatiai| 
philosophic  el  la  litt^rature  < 
reste,  si  peu  desuccte,  qu'ilsnep 
m^me  pas  k  inculquer  k  son  i 
les  preoeptes  les  plu8ei6roeDtaii 
tus  sociales.  Remain  le  Jeune,  Oil 
lure  du  meilleur  des  hommes,  i 
passe  son  adolescence  dans  la  i 
epousa  par  libcrtinage  la  trop  1 
Theophano ,  fiUe  d*on  simple  esL 
Messaline  des  rues  avant  de  TA 
cours ,  el  dont  Feievation  in 
ne  fit  au*accro!tre  les  vices.  Gettel 
dont  1  ime  crapuleuse  ne  pouvaM 
ter  que  des  crimes,  impatienteiiil 
pour  satisfaire  a  False  ses  plv  i 
trueux  instincts ,  commen^,  (lb* 
parition  au  palais  imperial,  i»r  f ' 
poisonner  le  pere  par  te  fils.  Go 
Porphjrrogenele  par  Remain  leJ 
Qu'on  juge  du  rdgne  de  Femp 
ncide ,  conseilie  par  une  telle  f 
debauche  fut  glorifi^e,  la  luxurea 
nee  :  la  cour  devint  un  maufaisi 

NIGSPHOBB    PHOCAS. 

Desi  abominables  exemples^ 
si  baut ,  par  un  de  ces  pbenoa. 
prouve  a  quel  point  le  peuple  estM 
tivement  genereux  el  grand,  loiti 
trainer  les  masses  dans  le  vice  etlftC 
les  retremperent  quelque  peu ,  m 
traire,  par  le  sentinoent  du  tatpmi 


(*)  Yoyez  Ab'ol-Feda,  AimmLmotUm. 


(«)  Yoyei  Lebera^  BiUoirt  4h  i 


SYRIE  MODERNE. 


201 


Thidifniatioii.  Foyant  cette  sentined^im- 
moralit^  dont  Constantinople,  infect^ 
par  la  eour,  offrait  le  repoussant  spec- 
tacle ,  tous  les  hommes  de  ooeur  se  refii* 
gi^rent  a  I'arm^,  et  le  peuple,  dans  sa 
partie  la  plus  saine  et  la  plus  ^nergique 
par  consequent)  les  suivit  avec  entratne- 
ment.  Bient6t,  grdee  a  cette  Emigration 
des  grands  cceurs,  TarmEe  devint  plus 
puissante,  plus  capable »  plus  nombreuse 
one  jamais.  La  perpetuelie  guerre  des 
tronti^res  aidant,  11  se  forma  d*babiles 
g<^Eraux  et  de  bons  soldats.  Parmi  les 

I  premiers,  le  plus  illustre,  celui  dont 
'existence,  quoique  fort  contradictoire, 
eut  pourtant  uue  influence  considerable 
sur  son  temps,  fut  I<iicEphore  Phocas. 
Fils  d*un  homme  qui  s'etait  montr6  tac- 
ticien  distinguE  sous  le  r^ne  du  malheu- 
reux  prince  utopiste  Gonstantin  Porphy- 
rog^n^,  elevE  h  la  meiileure  des  Eooles 
miJitaires ,  c*est-^-dire  dans  les  camps  et 
au  milieu  des  batailles,  il  fut  bien  vite 
guerrier  experimente,  etprit  goOt  de  plus 
en  plus  aux  expeditions  aventuri^res.  Ce 
caractere  de  franchise  et  d*dpretE  de 
moeurs  qu*ont  d'ordinaire  les  soldats,  et 
qui  briliait,  d'ailleurs,  en  NicEphore 
Pbocas,  lui  fit  prendre  en  telle  aversion 
les  turpitudes  ae  la  cour,  qu'il  quitta, 
d^  que  Romain  le  Jeune  monta  sur  le 
tr^ne,  la  capitale  souiilee  de  tant  de  cri- 
mes et  de  bassesses,  et  s'en  retourna  au 
milieu  des  hommes  qu'il  avait  deja  menes 
plusieurs  fois  a  la  victoire. 

II  ne  lui  fut  pas  difficile  de  s'y  former 
un  groupe  de  partisans  quMl  augmenta 
de  plus  en  plus ,  qu'il  sut  s*attacner  par 
des  projets  de  conqu^tes ,  et  qui  finit  par 
lui  former  une  sorte  d*arm&  toute  de- 
vouee  et  impatiente  des  combats.  Mais 
il  lui  failait  k  la  foi«  recruter  et  solder 
les  troupes  qui  se  donnaient  a  lui.  Pour 
les  recruter,  il  s*adressa  hardiment  h 
tous  les  aventuriers  qu*il  reocontra  :  ii 
prit  tout  aussi  bien  des  Esclavons  et  des 
Russes  que  des  Grecs  a  son  service.  Pour 
les  solder ,  il  pensaa  leur  mena^er  le  pil- 
lage d'un  pays  ricbe ,  d*une  ville  opvh 
lente;  et,  sans  s'inquieter  de  la  volontE 
de  son  souverain ,  il  alia  de  lui-m|me  at- 
taquer  Ttle  de  Cr^te.  GrAce  a  la  nromp- 
titudede  ses  mouvements,  il  dd>arqua 
sans  grande  difficult^  danscette  conqu^te 
des  Arabes,  ou  ces  derniers  se  croyaient 
en  pleiu'e  sEcuritE,  la  poss^apt  deja  de* 


puis  trente-septans,  et  vint  r^olument  in* 
vestir  la  plus  grande  cM  de  Hie,  Candie. 
Le  si^e  de  cette  place  dura  dix  mois  : 
il  fut  poursuivi  ayte  perseverance  par 
Ii^icephore,  dont  la  destin6e  se  jouait 
sous  ses  murailles;  il  fut  soutenu  avec 
courage  paries  Musulmans,  qui  devaient 
perdre  I  tie  tout  entiere  en  perdant  sa 
capitale*  La  rigueurde  Tbiver,  si  sensi- 
ble aux  Arabes ,  la  famine  et  le  manque 
de  provisions  de  toute  espece ,  furent 
les  v^ritables  auxiliaires  a  qui  Nicephore 
dut  la  victoire.  Or,  cette  victoire ,  c'etait 
une  couronne  pour  son  orgueil ,  et  pour 
son  arm^e  la  plus  magnifique  des  remu- 
nerations. Candie  fut  prise  d*assaut,  pil- 
leede  fond  en  comble.  Chacun  des  assie- 
geantsy  trouva  sonlot.Celui  de  Nicephore 
tut  unbutin  considerable  et  une  foule  de 
captlfs  quMl  emmena  k  Constantinople. 
L*empereur,  quoique  secretement  irrite 
sans  doute  cootre  Tinsubordination  de 
son  general,  ne  Ten  re^ut  pas  moins  avec 
toutes  les  apparencesde  la  satisfaction 
et  avec  tout  Vappareil  du  triomphe  (*). 

BNTHBPBISB    DB  NIGBPHOBB    PHOCAS 
GONTBB  LA  SYBIB. 

Ce  premier  sucois  nourrit  Taudace  de 
Nicepnore.  Sans  perdre  un  seul  instant 
dans  Byzance,  qu*il  ne  se  jugeait  pas 
encore  capable  de  dominer ,  if  se  hdta  de 
retourner  aupres  de  ses  soldats,  repus  de 
Candle,  mais  plus  avides  que  jamais  de 
nouveaux  pillages;  et  cette  fois,  ce  fut 
vers  la  Haute-Syrie  qu'il  les  entratna. 
Cette  province  fut  d*abord  desoiee  de 
cette  irruption ,  loin  d'en  etre  satisfaite. 
Ce  n*etait  point,  en  efTet,  des  fr^res  qui 
arrivaient  vers  les  Chretiens;  c*etait  une 
tourbe  d*hommes  sans  foi  ni  loi ,  qui  ne 
songeaient  nullement  k  venger  Thonneur 
romain,  k  rendre  au  culte  de  jesus- 
Christ  son  ancienne  splendeur,  mais  bien 
a  satisfaire  leurs  plus  grossiers  appetits, 
a  se  gorger  de  richesses,  indistinctement 
arrachees  aux  Syriens  d'origine  grecaue 
oomme  aux  Syriens  d'originearabe.  Cna- 
cun  se  defendit  done  pied  a  pied  contre 
ces  sortes  de  pirates  de  terre,  contre  ces 
pillards  venus  les  uns  des  Spres  monta- 
gnes  de  la  Slavonie,  d'autres  des  mareca- 

ges  de  la Crimecd'autres enfin des  plaines 
yperboreennes.  Mais  une  armee  ainsi 

(*)  Yayez  Meniiis,  Crekt. 


209 


L'UNIVERS. 


I 


compost,  qoi  saittoot  affronter  dans 
I'inter^t  de  ses  violentes  passions,  est  bien 
difficile  a  vaincre.  Les  Syriens  ni  les 
Arabes  ne  parvinrent  a  la  repousser;  ei 
apr^s  avoir  pris  successivement  plusieurs 
villages  desrronti^res,  lessoldatsde  Nie^ 
phore  tinirent  par  s^emparer  d*Al6p. 

Ici  Mic^phore,  mattre  d'une  ville  im- 
portante ,  possesseur  de  richesses  et  de 
ravitaillements  nombreux,  d6veloppauiie 
capacite  administrative  et  une  ^nergie 
niilitaire  o^ui  racheterent  en  partie  ses 
premiers  tnomphes.  Ses  vues  s'6tendirent 
avec  son  ambition ;  son  g^nie  grandit  an 
milieu  des  succes.  II  comment  par  met* 
tre  de  Tordredans  son  arm^e,  lui  im|)osa 
une  discipline  qu'elle  avait  ignor^e  jus- 
au^alors,  appela  1^  lui  tous  les  hommes 
de  tdte  et  ae  coeur,  et,  second^  par  son 
frere  L6on  Pbocas,  s'effor^a  de  changer 
Tesprit  de  son  expedition.  Ce  fiit  aux 
Grecs  quMl  s*adressa  alors;  ce  furent  les 
sentiments  de  confraternite  religieuse 
qu'il  evoqua  pour  continuer  les  hostility 
oontre  les  Musulmans.  Cette  habile  con- 
duite  lui  vaiut  de  nouveaux  triomphes. 
Toujours  vainqueur,  il  poussa  vigoureu- 
sement  les  Arabes,  les  accula  jusqu'i 
TRuphrate,  etil  serait  sans  doute  parvenu 
jusqu'^  Bagdad ,  il  aurait  renouvei^  une 
nouvelle  fois,  en  s'emparant  de  cette  ca- 
pitate ,  la  face  du  monde ,  il  aurait  pris 
rang  parmi  les  plus  grands  capitaines,  si 
Dieu  et  Tempereur  de  Bvzance  I'avaient 
voulu.  Mais  Dieu  flt  tomber  sur  lui  et  les 
siens  les  plus  ardents  rayons  de  son  so- 
leil,etlui  envoys  de  plus  la  faimetiasoif, 
ces  deux  anges  exterininateurs  des  plus 
invincibles  armees.  Quant  a  Tignoble  Re- 
main le  Jeuoe,  jaloux  de  la  gloire  de  Nic6- 
phore  auoique  incapable  de  la  compren* 
dre,  il  tulmina  contre  lui  les  plus  injustes 
arrets  de  reprobation,  suspita  des  In- 
ches contre  le  brave,  amenta  la  populace 
contre  Tarmee,  et  forca  le  general  con- 
querant  d'interrompre  brusquement  ses 
oonqu^tes ,  de  congedier  ses  troupes  vic« 
torieuses,  et  de  fuir  dans  un  coin  de  I'A- 
sie  le  poignard  des  sicaires  byzantins  (*)• 

Ainsi  avorta  une  grande  guerre,  aa 
moment  m6me  ou  elle  ennoblissait  son 
but ;  ainsi  s'eteignit  la  premiere  reaction 
serieuse  des  Grecs  du  Bas-Empire  cen- 
tre les  successeurs  de  Mahomet.  Heu- 

(*)  VoyeE  ZoDara& 


reasement  que  rmfiSiroe  aiilar  deii 
avortement  oe  tarda  pas  kte  puni,(i 
le  del ,  de  la  platitude  de  soneaneiii 
et  de  rhorreur  de  ses  vices.  Sa  fam, 
qu'il  avait tir^  de  la  fange  dos  pliant 
vais  lieux  pour  r^ever  josqu*ai  ttk 
qu*ell6  soutlla,  inassouvie  dcKuni^ 
avec  son  mari  ^uis^,  avide  du  pomi 
supreme  pour  les  moyess  qu1l  ofiiei 
satisfaire  les  plus  insatiables  ^mm^ 
reconnut  par  le  poison  lei  bN|ft| 
ignominieiix  dont  VavaitcomUeil^ 
main  le  Jeune :  tant  il  est  vrti  qmlui 
Gonnaissance  ne  peut  germer  qiiM 
les  dmes  les  plus  purest  A  la^vwl 
bas  dge  de  ses  enfanta ,  Th^opiuM  m 
rait^ouverner  seule  Tempire.  "«•■*' 
prisee  pour  ses  vices  P*f  le . 
la  capitals,  d^test^e  pour  son  onni 
par  le  peu|>le  des  provinces,  elle  him 
t6t  oontraiiite  de  cberdier  autovli 
un  bras  fort  pour  s'y  appo ver.  Kia|li 
Phocaseut  la  Iftcbete  d'of&ir  bai 
cette  femme  pervertie,  adults  rt 
micide.  II  gfttait  ainsi  sa  visMI 
ti^re,  et  prouvait,  a  ses  eonteiiyr^ 
comme  k  I'histoire,  qu'il  n*y  ifst 
qu'un  ambitieux  vulgaire,  ne  ftifl 
bien  que  par  hasard ,  pr^  i  fm^i 
au  premier  appel  de  son  mlMl^^ttM 
de  tout  sens  moral ,  sans  ve^!^ 
sans  honneur.  Les  Cinciniiatiii  fli 
Washington  sont  rares  dansoesM 
et  il  faut  des  milliers  de  sMap^ 
produire  de  pareils  earaetmkUIPl 
de  la  guerre ,  g^nie  brutal  et  aiaftijl 
rencontre  souvent  dans  lasnte^' 
le  g^nie  de  la  vertu ,  g^nie  ama 
clairvoyant,  n'apparaft  qu'a  da 
vallesimmenses,  et  oommepoff 
cher  rhumanite  de  deaespenr^ 
et  de  douter  de  Dieo. 

Nicephore  avait  done 
Theopbano;  et  ne  pouvantpto 
son  existence  entim  dans  m^ 
eurieux,  d'allleun,  de  eonasiR^ 
foire  jouer«a  son  tour  let  i 
plus  compliques  et  les  plus  . 
gouvernement,  il  eonfia  ii  on  4es  I 
tenants  qu'il  avait  formes  dtfl 
premieres  expeditions  une  Nitii 
I'armee,  et  le  lan^a  en  Gilicie.  Ge  lii 
nant  etait  un  hoimne  de  petite 
mais  de  ^nd  courage ,  soldat  ii 
ble  et  dej^  expMmente,  plemde 
tion  au  combat  comme  oe ^ 


STRIE  MODERNE. 


90< 


dans  ses  butt.  On  Tappelait  Zimisc^s; 
et,  quoique  ce  ne  fut  \k  qti'un  suruom, 
motive  pr^cis^nnent  par  I'exiguTt^  de 
sa  taille ,  c'est  ainsi  qu'il  fut  connu  dans 
ses  conquetes,  sur  le  tr6ne  ou  ii  par- 
vint  a  son  tour,  dans  la  tradition  o^  il 
a  laisse  un  souvenir  assez  ambigu ,  une 
reputation  assez  ^uivoque.  Conime  Ni- 
c^phore  Phocas,  son  maftre  en  Tart  mi- 
litaire  et  son  souverain  par  la  grdce  du 
sabre ,  il  commen^  par  des  victoires. 
Marchantavechardiesseau-devantd'une 
armee  musulmane  plus  considerable  que 
la  sienne,  par  la  promptitude  de  son  at- 
tague  il  lasurprit,  la  divisa,  et  en  eut 
raison  fraction  par  fraction.  Aussi  cruel 
que  brave,  acharn6 ^  la  perte  de  ses en- 
nemis,  apr^s  plusieurs  jours  de  carnage, 
cinq  mi  lie  d'eiitre  ces  derniers  s*etant 
r^fugi^s  dans  une  montagne  couverte 
de  bois  et  de  rochers,  Zimisc^s ,  malgr6 
le  danger  de  forcer  dans  leurs  derniers 
retranchements  des  hommes  decide  h 
vendre  leur  vie  le  plus  cherement  possi* 
bie,  marcha  contre  eux  a  la  t^te  de  son 
infanterie,  et  ne  redescendit  des  monts 
escarp^  oik  il  s*etdit  engage  qu'apr^ 
avoir  massacre  le  dernier  Arabe  survi- 
▼ant.  Cette  tuerie  fut  si  affreuse,  que  la 
montagne  oCk  elle  s'executa  fiit  cou- 
verte d*ossement8,  et  qu*il  s'y  forma  des 
torrents  de  sang  qui  roul^rent  jusque 
dans  les  vallons  d*alentour  :  ee  qui  fit 
donner  au  lieu  oil  sVtait  pass^e  cette 
terrible  tragedie  le  nom  de  montagne  du 
sang.  C/est  pourtnnt  {(ar  de  seniblables 
exc^s,  cVst  par  cette  rage  execrable,  di- 
gne  tout  au  plus  des  sauvages  les  plus 
feroces,  qii'onentretenait  une  haineinex- 
tinguibleentre  les  Chretiens  et  les  Maho- 
metans, aii'on  eioignait  a  jamais  les  ra- 
ces, et  qu'on  s'appr^tait  des  represailles 
qui  devaientdurer  des  si^cles  en  tiers !  \]\\ 
general  qui,  loin  d'arr^ter  de  pare* lies 
scenes,  lesprovoque,  au  contraire,  les  ex- 
cite, y  mene  ses  troupes,  nVst-il  pas  le 
pluscoupable  de  ces  cannibales?  Cest 
cependant  1^  le  fait  de  Ziini.sccs;  cVst 
1^  ce  qui  lui  valait  des  trioinplirs  dans 
le  cirque  de  Byzance  la  degencree  (*>! 

Quoi  qu'il  en  soit  du  caractere  de  la 
guerre  conduite  par  Zimisres,  elle  n>n 
cut  pas  moins  uneassez  grande  influen(!e 
wr  Tavonir  des  deux  peuples  qui  se  dis- 

(*)  Yoyez  EMICadn,  HiMi.  Saraeen, 


putaient  de  nooveau  TOrient  et  ses  ri- 
cbesses,  elle  u'en  fut  pas  moins  fevo- 
rable  au  Bas-Empire,et  n*en  eveilia  pas 
moins  la  jalousie  de  Nieephore  Phocas. 
D'abord  ce  sentiment  se  manifesta  avec 
une  certaine  grandeur  dans  Time  du 
chef  supreme  de  TEmpire.  11  ne  reagit 
pas  contre  son  lieutenant ,  ne  lui  enleva 
rien  de  son  autorite ;  mais  il  se  contenta 
de  se  mettre  lui-meme  k  la  tete  d'une 
expedition  plus  considerable  que  ia  pre- 
cedente,  et  de  ne  conGer  a  Zimisces 

2u^une  division  de  son  armee.  Cette 
mulation  entre  deux  ardents  capita  ines, 
tout  en  etant  funeste  aux  armes  musul- 
manes ,  ne  fut  aucunement  avantageuse 
h  la  Syrie  et  k  ses  Chretiens  affaiblis. 
Deveniie  le  theatre  d  'une  guerre  qui  pou- 
vait  longtemps  se  prolonger,  grdce  aux 
prises  et  reprises  perpetuelles  des  forte- 
resses  importantes,  la  Syrie  allait  avoir 
a  souffrir  presque  autant  des  vengeances 
musul manes  que  des  exigences  byzan- 
tines.  Ce  n*etait  pas  la,  en  effet,  une 
guerre  de  conquetes ,  oi  les  vaincus  ce- 
dent a  la  fois  aux  vainqiieurs  le  sol  et  le 
Souvernenient ,  oik  les  vainqueurs  gar- 
ent  les  vilies  k  mesure  quails  s*en  em- 
parent  :  e'etait  plut6t  une  promenade 
triomphale,  oik  rempereur  gree ,  pour 
ne  point  diminuer  son  corps  d  armee 
principal,  ne  mettait  dans  les  cites  sur« 
prises  que  d'insignifiantes  garnisons, 
tournait  les  places  fortes,  et  laissait  de 
c6te  les  grandes  vilies.  Ce  qui  le  prouve 
evidemment,  c'est  qu'apres  etre  entre 
dans  Alep  et  dans  Laoaicee,  il  ne  6t 
aucun  effort  serieux  pour  penetrer  dans 
Antioche,  veritable  clef  de  la  Haute-Syrie 
pourtant;  c*est,  en  outre,  qu*il  retourna 
a  Constantinople,  apres  avoir  evacue 
completement  la  Phenirie ,  qu*il  venail 
de  traverser  en  vainqueur,  ne  laissant 
qu'une  partie  de  son  armee,  sous  le 
commandement  de  Zimisces,  devant  les 
murs  de  cette  Antioche,  si  longtemps 
metropole  grecque,  et  depuis  trois  siedes 
capitate  musulmane. 

A  peine  Nieephore  fut-il  de  retour  dans 
son  palais  imperial,  (|ue  Zimisces,  mal^re 
les  ordres  qu*il  avait  recus  de  ne  point 
pousser  trop  vivement  le  siege  de  la 
grande  cite  syrienne,  et  de  n^  point 
sacrifier  trop  de  nionde,  lion  dechatne, 
ne  songea  qu'a  s*emparer  de  la  proie 
opulente  qu^on  laissait  sous  ses  griffes. 


304 


LnraivERS. 


II  mena  le  si^ge  avec  plus  de  vigueur 
que  jamais.  Mais  les  Arabes,  aui  savaient 
aussi  cequ'iis  avaieotlid^fenare,  repous- 
serent  les  plus  chaudes  attaques  da  sen^ 
ral  byzantin.  Ce  dernier  renon^t  deja  k 
cette  conqu^te,  dont  il  s'^tait  cependant 

Eroinis  tant  de  profits,  lorsque  la  tra- 
ison  lui  vint  en  aide.  On  lui  indiqua 
le  c6t6  faible  des  murailles,  il  en  fit  Tas- 
saut,  et  apres  une  lutte  acharn^e,  il 
parvint  enfin  dans  la  ville  et  8*y  mafn- 
tint.  Loin  de  lui  m^iter  un  nouveau 
triomphe,  cette  victoire  sangiante  valut 
une  disgrace  a  Zimisces.  ISe  fallait-il  pas 
un  pr^texte  a  Nic^pbore  pour  se  debar- 
rasser  de  son  rival  de  ^loire?  Tout 
pitoyable  que  fOt  ce  dernier  pr^texte, 
remperear  le  saisit,  et  eut  bientdt  iieu 
de  s  en  repentir;  car  une  haine  irrecon- 
ciliable  ^lata  des  lors  entre  le  cbef  et 
son  lieutenant ,  et  cette  haine ,  pour  se 
satisfaire,  devait  aller  jusqu*au  crime, 
selon  Todieusc  coutume  de  cette  epoque 
de  d^g^o^rescence  sociale  (*}. 

MEURTBB  DB  NIG^PHOBB  PHOGAS. 

Zimisc^  avait  plu  k  Tb^ophanp.  Cette 
femme ,  singuliere  encore  dans  son  11- 
bertinage,  tout  en  s'abandonnant  aux 
debauches  les  plus  dehontees,  voulait 
s*attacher  par  des  liens  adulteres  tout 
honime  qui  avait  attir^  Tattention  de  la 
foule.  II  lui  fallait  aussi  bien  le  g6n^- 
ral  vainqueur  que  Tatblete  applaudi. 
Elie  jeta  done  les  yeux  sur  Zimisces,  et 
lasse  de  Nic^phore,dont  T^toile  pAlissait, 
e)le  employ  a  tons  ses  charmes  et  toute 
sa  puissance  a  subjuguer  le  rival  de 
fi[loire  de  Tempereur.  Elle  y  parvint 
facilement  :  Zimisces  n'etait  pas  de 
trempe  a  se  conserver  pur  dans  la  boue. 
Bien  plus,  une  fois  que  Th^phano  eut 
seduit  celui  pour  lequel  elle  r^vait  deja 
la  couronne,  elle  n  eut  point  de  cesse 
qu'elle  ne  Tedt  perverti  compl6tement, 
qu'elle  ne  lui  edt  inspire  Tidee  du 
plus  Idche  assassinat.  Zimisc^  fut, 
entre  les  mains  de  cette  furie ,  Tinstra- 
ment  cruel  et  docile  qu'eile  cherchait. 
Avec  auelques  sicaires  de  bas  etage ,  il 
s*en  alia  lachement  frapper  Tempereur 
dans  son  sommeil,  et  ajoutant  la  fe- 
rocity de  la  b£te  sauvage  au  crime  d'un 
homme  d^prav^ ,  il  fit  endurer  a  sa  vic- 


time  le  supplice  le  plus  barbire,  Taoe^ 
blant  de  reproches  et  de  coops  a  la  fai| , 
lui  brisant  les  os  un  par  un  avec  le  p  ^ 
meau  de  son  6p6e  O. 

Chose  Strange!  Ce  soldat 
dont  la  vietoure  avait  eommeoce  I 
tune ,  qui  n*eut  pas  honte,  i 
k  rempire,  de  passer  pari 
le  meurtre ,  semola,  d&  quit  frti 
trdne  d^honor6  des  Byzantins,i 
ger  d*dme  en  changeant  de  da 
L*energie  qn'il  avait  montr6e  ^  lag 
il  s*en  servit  tout  d*abord  pour  ill 
rasser  de  son  inflme  coinpli«t! 
phano.  II  eut  le  courage  de  kitterl 
diatement  avec  elle ;  et,  loin  de  U 
partager  la  couronne ,  il  parvintili 
mer  dans  un  monastere  d  Anner^ 
soi  t  remords,  soit  religion,  soitc 
sonnel,  il  s'efTorQa  d'etre  jiUto  4 
tons,  charitable  envers  les  nM 
Nicephore  Phoeas  avait  ^t^avmij 
qu'avide;  Zimisc^  fut  aussi  lil' 
g^nereux.  Nic^pbore,  quoiqueli 
ral,  n*avait  jamais  ete  qu*ua  f 
pereur;  Zimiso^  donna ,  a  la  r 
chacun,  des  preuves  non  ' 
bilet^  administrative.  Sanssoii 
c'edt  et^  un  grand    prinoe; 
autre  peuple  que  les  ByzantiBS, 
rendu  son  Mat  k  Tempire  d  '^ 
Constantin.  Mais,  des  qii*il  <}Q 
m^,  elle  n'^tait  plus  Victoria 
fut  k  la  suite  de  ladefaitef 
lieutenants,  Temelicus  Mel 
par  les  Arabes  sur  les  bordsiij 
qu*il  entreprit  sa  secondeei 
Syrie.  Cette  expedition  fut  < 
jugee  par  leschroniqueurs;  i 
Mathieu  d'l^esse  nous  a 
recit  que  Zimisces  lui-m^meeal 
nous  donnons   int^raleoient  i 
avant  de  nous  prononcer  a  Ml 
sur  le  compte  du  prince  gree  rtl 
irruption. 

LBTTRB  DB  ZIMISGKS  A  ALCHQDf 
HIN,  BOI  DBS  BOIS  DB  hk 
ABMl&NIB. 

«  Roi  desrois,  cette  lettie^ 
apprendre  les  grandes  iiMrvdta| 
Dieu  a  daign6  op^rer  en  notre  i 
Les  vietoires  que  nous  nvons  i 
t^  sont^tonnantes  et  prtsqvei 


(•)  Voy«  LebMa ,  ffittoin  du  Bas-Bmpirt.        (")  Toyw  Zonsm. 


SYRlfi  MODERNE. 


205 


bles.  Le  Dieu  de  iius6rieorde  agit  pour 
ses  enfjBints,  dans  ie  courant  de  cette 
ann6e ,  par  i'instrumeiit  de  notre  puis- 
sance. Nous  avoDS  Youlu  faire  part  de 
ces  heureuses  nouvelles  ^  V .  M. ,  notre 
fits  cheri  Alchod  Pacratide  (*),  parce 
que  nous  safons  que  vous  partagerez 
notre  joie,  comme  chr^tien  etcomme 
ami  de  notre  empire. 

«  Vous  serez  charm6  d'apprendre  les 
saliltaires  effets  de  la  protection  de  J€- 
sus-Christ,  et  de  vous  convaincre  que 
Dieu  est  tomours  venu  au  seeours  des 
Chretiens.  Cestlui  qui  a  rendu  les  Per- 
sana  tributaires  de  notre  empire.  Vous 
saurez  que  nous  avons  arrach^  de  la 
main  des  Turcs  les  reliques  de  saint 
Jacques  deMisibe,  qui  se  trouvaient  dans 
cette  ville;  que  nous  avons  mis  les  ha- 
bitants k  contribution,  et  leur  avons 
emmen^  beaucoupdeprisonniers.  L'emir 
Ali-Moumni,  prmce  des  Africains  ap- 
pel^s  Mokrs ,  Arabes ,  eut  Taudace  de 
venir  au-devant  de  nous  k  la  t^te  d'une 
arm^e  nombreuse.  Les  deux  arm^s  en 

Sresence,  on  se  battit  aussit6t  avec  tant 
e  bra  voure  et  d*opinidtrete,  que  Taffaire 
devenait  tr^s-incertaine  et  que  nous  nous 
vtmes  un  moment  en  grana  danger.  Mais 
enfin  nous  avons  vaincu  par  Tassistance 
divine,  et  nous  les  avons  obliges  de 
prendre  comme  les  autres  ignominieu- 
sement  la  fuite.  Nous  avons  p^n6tr^ 
dans  leur  pays,  nous  avons  pris  plu- 
sieurs  cantoris ,  et  pass^  les  habitants  au 
fil  de  Tep^e,  a^rhs  quoi  nous  sommes 
entr^s  en  quartier  d^niver.  Au  commen- 
cement du  mois  d'avril ,  notre  arm^e , 
ay  ant  la  cavalerieen  t^te,  est  entr^  dans 
le  pays  des  Pheniciens ,  dans  la  Palestine 
et  dans  les  terres  Canan6ennes.  Nous 
n*avons  fait  grdce  a  aucun  des  Africains 

3ui  s*etaient  rassembles  dans  les  environs 
e  Damas. 

«  Partis  de  la  avec  notre  arm^e,  nous 
avons  marcb6  du  cot^  d*Antioche,  par- 
courant  les  divers  cantons  de  notre 
royaume ,  que  nous  avons  reconquis ,  et 
ou  nous  avons  fait  un  grand  nombre  de 
prisonniers.  Nous  avons  ensuite  diri^^ 
uos  pas  vers  la  ville  de  Hems.  Ses  habi- 
tants, nos  tributaires,  nous  ont  bien 
recos.  De  la  quelques  paysans  de  ces 
cantons  nous  dht  conduits jusqu'a  la  ville 

(*)  Pacratide,  nom  de  la  dyustie  qui  rtgnait 
alors  en  Armenle. 


de  Vadeivoeka,  qui  s*appelle  aussi  H61io- 
polls,  ou  Ville  du  Soleil  (*).  Cette  cit^, 
tr^-renomm^  et  fort  riche,  n'^tait 
point  dispos6e  a  nous  recevoir.  Sa  garni- 
son  sortit  pour  nous  attaquer. 

«  Nos  troupes  Teurent  bient6t  re- 
pousse, et  lui  tuerent  beaucoup  de 
monde.  Apres  quelques  jours  de  si6ge, 
la  ville  s*est  rendue.  Nous  avons  fait  pri- 
sonniers quantite  d'habitants,  hommes, 
femmes  et  enfants,  que  nous  avons  em- 
men^  avec  un  butin  considerable  et 
beaucoup  de  b^taii.  Nous  avons  continue 
notre  marche  vers  la  ville  de  Damas^  que 
nous  avions  I'iutention  d*assi^er.  Mais 
son  gouvemeur ,  vieillard  experiment^ 
et  prudent ,  nous  envoya  une  amputation 
cbarg^  de  nous  offrirde  riches  presents 
et  de  nous  prier  de  ne  point  faire  subir 
a  la  ville  qu'il  eommandait  le  sort  de 
Vadeivoeka,  dene  point  emmener  les  ha- 
bitants en  captivite,  et  d*emp^her  qu'on 
ne  devastdt  leurs  campagnes.  Us  nous 
firent  present  d'un  grand  nombre  de 
mulcts  dechoix  et  de  superbes  chevaux, 
converts  d'or  et  d*argent.  Apr^s  avoir 
Iev6  sur  eux  une  contribution  de  4,000 
tahiqans  {**)  en  or  arabe,  nous  leur  ac- 
cordames  un  d^tachement  de  nos  trou- 
pes pour  garder  leur  ville,  et  ils  con- 
tract^rent  par  ecrit  Tengagement  de 
demeurer  toujours  soumis  a  notre  em- 
pire. Nous  confiAmes  le  commandement 
de  Damas  k  un  nomme  Tourk ,  natif  de 
Bagdad,  honime  d*un  grand  merite, 
aui ,  accompagne  de  cinq  cents  cavaliers, 
etait  pass^  a  notre  service  et  avait  em- 
brass^  la  religion  chr^tienne.  II  nous 
avait  d^ja  servi  utilement  en  diverses 
circonstances.  Dans  leur  transaction  les 
habitants  de  Damas  s*engagerent  aussi 
a  nous  payer  un  tribut  annuel.  Flatt^  de 
faire  partie  de  notre  empire ,  ils  promi- 
rent  de  se  battre  centre  nos  ennemis. 
En  recompense  de  cette  bonne  conduite , 
nous  n'avons  pas  laiss^  plus  longtemps 
leur  ville  en  6tat  de  guerre.  Nous  par- 
times  done  pour  Tib^riade,  lieu  oi^  Notre- 
Seigneur  J^sus-Christ  opera  le  miracledes 
cent  ciuquante-trois  poissons.  Comme 
nous  nous  disposions  aassieger  cette 

(*)  (Test  la  ville  oomm^  par  les  Arabes 
Balbek. 

(**)Tah^D,  nom  d*ane  monoaie  arine- 
nieooe.  II  y  avait  des  tabegans  d'or  et  des  tahe- 
gans  d'argeot 


306 


vimvnsBs. 


ville,  |e8  habitants  imit^reoteeuxde  Da* 
mas :  ils  se  soumireot,  nous  apporterent 
de.  riches  pr^ents,  at  nous  payerent 
30,000  tah^ans.  lis  nous  demanderent 
^alemeat  un  d^tacbementde  nos  troupes 
pour  former  la  garnison  de  leur  ville ,  et 
pro  mi  re  lit  de  rester  constamment  sou- 
mis  a  notre empire,  et  de  nous  payer  le 
tribut  annuel.  En  consequence,  nous  ne 
ftmes  pointde  prison nierscbezeux;  nous 
avoiis  quitt^  ce  canton  sans  y  commettre 
le  moiiidre  d^dt,  parce  que  e*est  la  pa- 
trie  de  ptusieursdes  saints  apdtres.  Nous 
avoiis  tenu  h  m^me  conduite  envers  la 
ville  de  Nazareth,  ou  la  ^nte  Yierge 
Marie ,  Mere  de  Dieu ,  recut  I'annonce 
de  la  part  de  I'ange. 

«  £nsuite  nous  nous  rendimes  sur  le 
moiit  Thabor,  dans  Tendroit  in^e  ou 
J^us-Christ,  notre  Dieu,  fut  transfi- 
gure. Pendant  que  nous  etions  la,  des 
habitants  deRamlah  etde  Jerusalem  vin- 
rent  implorer  notre  clemence,  nous  de- 
mander  d'etre  gardes  par  nos  troupes,  et 
sedonner  entierement  a  nous.  Nous  leur 
avons  aecorde  Tobjet  de  leurs  demandes ; 
mais  nous  avons  voulu  que  le  saint  se- 
pulcre  fi)t  delivr^  de  la  main  profane  des 
Turcs,  et  nous  avons  mis  des  garnisons 
dans  tons  les  cantons  soumis  a  notre  do- 
mination. Nous  avons  agi  de  ra^me  avec 
les  habitants  de  Beniata,  qui  s'appelle 
aussi  Decapolis,  avecceux  deG^neSareth 
et  d'Irace,  ^ui  se  nomme  aussiPtolemais. 
Ils  s'enj^agerent  par  un  acte  solennel  a 
nous  rester  soumis  et  a  nous  payer  tri- 
but. Nous  arriydmes  a  G6sar^,  qui  est 
sur  le  bord  de  la  mer;  les  habitants  se 
donnerent  entierementa  nous.  Si  les  Afri- 
cains,  dans  la  consternation  ou  ils  etaient, 
et  pour  ^chapper  a  notre  poursuite ,  ne 
se  fussent  retire  dans  dies  forteresses 
sur  le  rivage,  nous  serious  enUres.dans 
la  sainte  ville  de  Jerusalem,  et  nous 
aurions  fait  a  Dieu  nos  prieres  sur  les 
saints  lieux  m^mes;  mais,  comme  ils 
s'etaient  sauv^s  vers  les  cdtes  de  la 
mer,  nous  avons  gagn^  la  partie  sup6- 
rieure  du  pays  dont  nous  nous  sommes 
empar^s ,  et  nous  y  avons  mis  des  garni- 
sons de  troupes  grecques.  Nous  avons 
pris  d'assaut  toutes  les  viiles  qui  refu- 
saient  de  se  soumettre. 

«  En  avancant  vers  les  c6tes  jusqu*^ 
la  ville  de  Wridon ,  cite  fameuse  et  tres- 
fortifiee ,  qui  s'appelle  aujourd'hui  Bey- 


routh, nous  avons  rencoiitre  l*arA6e^ 
Africains.  Nous  leur  avons  Uvr6 
nous  en  avons  fait  on  carnage 
et  mille  d'entre  eux  sent  nAh 
niers.  lis  ne  furent  pas  plusi 
Mousui-Emir-Ali-Moumni. 
mis  des  troupes  dans  Wridon, 
avons  |)ris  la  route  de  Sidon.  Liil 
niens,  informes  de  nos  vi 
envoys  au-devant  de  nous  les 
les  plus  kgees  de  la  ville  jpour  i 
frir  leur  soumission ,  une  lorte  e 
tion ,  et  nous  promettre  fidd 
avons  accept^  le  tribut  et  leur  I 
sion.  Nous  avons  mis  gamisoor 
chez  eux ,  et  nous  sommes  [ 
r^duire  laforteresse  de  Byblostj^ 
cienne  et  plus  fortifiee.  Noatl 
prise  apres  quelques  heures  del 
Ses  habitants  out  6t^  faits  i 
et  nous  avons  enlev^  un 

«  Nous  avons  traverse  plusii 
maritimes,  en  passant  par  voki 
etroit,  que  jamais  eavaleneT 
s*y  engager;  ear  ce  cbemia  ciljj 
tueux  etsi  difGeile,  qu*onn*fil 
rait  pointde  plus  mauvais.  JJm 
rencontie  plusieurs  belles  vill 
chdteaux  dont  la  garde  avait  i 
h  des  Africains.  Nous  avons  { 
toutes  les  viiles  et  forteresaesf  i 
avons  fait  prisonniers  tous  Icit ' 
Avant  d*arriver  a  U  ville  del 
nous  avons  envoye  un  corps  i 
compost  de  Tymatzw  et  de  1 
madotzy,  pour  s*emparer  T 
s'appelle  Korered ,  ou  nous  ( 
s'etaient  retires  ces  sctieratsd*! 
J'avais  fait  placer,  de  edfe6etd 
troupes  en  embuscade  pooti 
d'eux.  Mes  ordres  furent  bteal 
DesquMls  aper^urent  notre  av 
dpux  mills  Africains  vinrent  ( 
mais  bientdt  mes  troupes  < 
horrible  boucherie,  et  le 
prisonnier.  Mous  en  agissions  i 
tout  ou  nous  passions.  Nous  nes 
dissimuler  que  nous  avons  | 
rement  detruit  les  environs  < 
tu^  les  bestiaux,  d^vaste  les 
coup^  les  arbres.  D  autres  Afri 
rent  encore  Faudace  de  venir  i 
quer;  mais  ils  ne  tarderent  pasi^ 
ver  le  sort  de  leurs  compatriotei; 
rent  tous  tallies  en  pieces. 

«  Nous  primes  ensuite  la  ville  db] 


SYR1£  MOD£R]N£. 


aor 


▼el ,  qu'on  nomme  Gabooa ,  ei  celles  de 
Paiona ,  de  Seoo ,  et  rn^me  la  viile  odle- 
bre  d'Oursay ;  de  sorte  que,  deuuis  Ram* 
lah  et  C^sar6e ,  il  oe  reatait  plus  rien  a 
eonqu^Hr.  La  mer  et  la  terre  se  soumi^ 
rent  egalement  a  nous  par  Tassistanoe 
divine.  J  usqu*a  Babylone  m^nrie  (Bagdad) 
tous  les  peupies  sont  nos  sujets  et  nos 
trlbutaires.  Nous  stods  employ^  sept 
mois  a  parcourir  ees  contrto  avec  nos 
troupes.  Nous  avons  ruin6  quaiitite  de 
villes  et  de  Tillages  qui  s'^taient  mon- 
tr^s  rebeiles. 

«  L*^mir  Ali-Moumni  ^  enferai^  dans 

Babylokie,  o'a  plus  ose  en  soitir  pour 

lever  de  noovelles  troupes  centre  nous ; 

si  nous  n'eussions  pas  rencontre  dee  ter- 

res  8t6riles  et  sans  eau ,  comme  V.  M 

salt  qu'ii  s'en  trouve  am  environs  de 

Babylone ,  nous  eussions  conduit  jus- 

qu'a  cette  ville  nos  arm^s  Tictorieuses. 

«  Du  edt^  de  r£gypte,  nous  n'avons 

laissi^  aueun  ennemi.  Par  la  grdce  de 

Dieu,  tous  ces  (leuples  nous  sont  fiddles 

et  sounois.  A  present  ^  toute  la  Ph^nicie, 

la  Palestine  et  la  Syria  font  partie  de 

notre  empire,  et  ne  g^mSSsent  plus  sous 

la  servitude  des  Tufcs.  Les  babitants  du 

mont  Liban  sont  Sous  notre  ob^issance^ 

Nous  avons  fait  prisonniers  quantity  de 

Turcs  que  nous  y  avons  trouves,  et  nous 

les  avons  incorpores  dans  nos  troupes. 

Nous  avons  traits  avec  beaucoup  d'hu- 

manit^  et  de  douceur  les  habitants 

d'Assyrie.  Nous  en  avons  eminent  eo- 

viron   vingt  mllle  bommes  que  nous 

avons  transports  k  Gabaon.  Voila  les 

victoires  que  le  Dieu  des  Gbr^tiens  nous 

a  fait  remporter  :  bienfeit  sienal^  qu'il 

accorde  h  notre  empire  et  du  il  refuse  k 

d'autres.  Nous  avons  trouvidans  la  ville 

de  Gabaon  les  saintes  cbaussur es  avec  les- 

J[uelle8  J.  G.  voyagea  sur  la  terre.  Dans 
e  courant  du  mois  de  septembre ,  nous 
avons  retire  nos  troupes  dans  la  ville 
d'Antioche;  et  puis,  nous  avons  voulu 
doiiner  k  V .  M.  ces  d6tails  qui  T^tonae* 
ront  sans  doute ,  et  Pengageront  k  ren- 
dre  des  actions  d^  grdce  k  la  Divinity. 
Vous  connaitrez,  par  cette  lettre,  les  fa- 
veurs  que  Dieu  nous  a  accord^s  et  V^- 
tendue  du  pouvoir  qu'il  a  mis  entre  nos 
mains ,  par  la  vertu  de  sa  sainte  croix. 
A  pr^ent  le  nom  de  Dieu  est  lou6  par- 
tout  :  et  notre  royaume  devient  floris- 
sant  par  son  assistance.  Nous  ne  ces- 


sons  de  Ten  remercier  et  de  le  louer ; 
c^est  par  lui  seul  que  nous  avons  pu  sou* 
metue  tant  de  pays,  et  c'est  a  lui  que 
nous  adressons  toujours  nos  louanges. » 

CABACT^BB  DBS  BXPl&DITlOnS  DS  NI- 
CBPHOBB  PHOCAS  Bt  Ht  ZlMlSCES. 

Ge  qu'il  y  a  de  plus  caraet^ristique 
dans  la  lettre  que  noQs  venons  de  citer, 
c'est  ce  sentiment  religieux,  reel  ou 
feint,  qui,  pour  le  prince  greo,  justifie 
son  invasion, absout  ses  cruautes,  sane- 
tifie,  pour  ainsi  dire,  sa  guerre.  Loin 
de  dissimuler  les  exces  de  son  armee, 
Ziraisofes  sen  vanteau  contraire.  II  cons- 
tate avec  orgueil  qu'il  a  completement 
ravagiS  les  environs  de  Tripoli ;  il  avoue 
qu'il  a  agi  en  veritable  barbare,  qu'il 
a  tue  les  bestiaux^  arracb^  les  vignes 
et  coup^  les  arbres  au  pied.  Beaux  ex-  • 

{>toits  assurementl  Et  pourtant  tel  sera 
ortgtemps  le  seul  genre  de  guerre  entre 
les  Chretiens  et  les  Musulmans;  telle  est 
en  quelque  sorte  Torigine  de  ces  exp^ 
ditions  violentes,  de  ces  luttes  aveugles, 
deoes  combats  sauvages  qu*on  a  decorS 
en  Occident  du  beau  nom  de  croUades, 
Les  Musulmans,  indignS  du  traitement 
que  les  Ghr^tlens ,  un  instant  victo- 
fieux  apr^s  trois  sieeles  de  d^faites ,  fai- 
Saient  subir  a  leurs  adversaires  vaincos, 
k  leUrs  prisonniers  et  mdme  aux  femmes 
et  aux  enfants,  reprirent  centre  eux  cette 
haine  f^roce  et  inextinguibte  que  Tes- 
prit  de  civilisation  des  grands  khalifes 
s'etait  effo^e^  d*extirper  du  coeu  r  de  leurs 
sujets.  Le  sang,  r6pandu  ^  profusion, 
poussa  de  nouveau  ce  cri  de  vengeance 
entendu  tdt  on  tard  par  les  fr^res  de  ceux 
qu'on  ^orge.  Des  repr^saifles  terribles 
se  projet^rent  dans  les  esprits;  et  le 
fanatisme,  excite  ebez  les  Grecs,  devait 
bientot  rallumer  le  fanatisme  musul- 
man ,  bien  plus  implacable  encore.  Ge 
n'etaientd^J^  plus  des  nations  qui  secom- 
battaient  soit  par  ambition »  suit  parri- 
valite,  c'^tatent  deux  i^ces  qui  preludaient 
a  un  antagonismede  plusieurs  sieeles  (*). 
Quant  aux  Syriens  calholiques,  ^cras^s^ 
chetifs  qu*ils  ^tnient,  entre  les  deux  puis- 
sants  lutteurs  qui  s*6treigrtaient  de  nou- 
veau et  avec  une  ^age  qui  alia  toujours 
en  croissant,  d^  rexpwlittort  de  Zimis- 
ees,  ils  n'eureflt  plus,  pour  ainsi  parler, 

(*}  Yoyei  Bl-Maeiii,  Ui$L  Saracen, 


206 


L'UJNIVERS. 


one  aoD^e  de  paix  et  de  pro8p^rit6, 
un  jour  de  security  veritable.  Joug 
pour  jottg,  ilsauraient  prefM  peut-6tre 
celui  de  leurs  Mres  en  J^sos-Christ. 
Mais  chao^r  k  tout  instant  de  domina- 
tion ,  se  voir  tour  k  tour  sous  la  verge 
de  mattres  divers,  d'autant  plus  avides 
qu'ils  ^talent  moins  assures  de  leur 
puissance,  d'autant  plus  ricides  quMIs 
craignaient  partout  la  trahison,  une 
pareille  situation ,  c'^tait  une  anarchie 
permanente,  une  pareille  existence, 
c*^tait  une  agonie  prolong6e.  lis  eureot, 
du  reste,  ^  pressentir  le  triste  sort  qui 
etait  riserytk  un  grand  nombre  de  leurs 
g^erations,  a  dater  de  Tann^  976.  A 
cette  ^poque,  en  effet,  Zimisc^  toniba 
du  trdne  comme  il  y  etait  mont^,  par 
une  mort  violente.  Celui  <iui  avait  tu6 
avec  si  pen  de  scnipule  Micephore  Pho- 
cas,  son  ancien  g6n^l,  son  ancien 
bienfaiteur,  fut  empoisonn^  par  un  ieno- 
ble  eunuque,  roinistre  corrompu ,  aont 
il  avait  menace  le  pouvoir  usurpe  et  la 
fortune  scandaleuse.  Ge  general  hardi , 
plut6t  que  grand  prince,  ainsi  que  I'ap- 
pellent  certains  historiens  du  Bas-Em- 
pire  volontiers  prodigues  d'un  ^loge 
que  si  pen  ^'empereurs  byzantins  ont  su 
meriter,  n'eut  pas  m^rne  un  successeur 
capable  de  conserver  les  contr^es  qu*il 
avait  reconquises.  Antioche,  par  la 
trahison,  retombaaux  mains  des  Ara- 
bes;  une  partie  de  la  Syrie,  par  la  fai- 
biesse  des  garnisons  cbr^tiennes ,  se  vit 
reJuite  de  nouveau  par  les  Musuimans. 
Ainsi,  cette  pr^tendue  delivrance 
que  les  Byzantins,  dans  leur  vanity, 
avaient,  disaient-ils,  apportee  aux  po- 
pulations des  lieux  saints,  fut  plutdt 
UQ  desastre  ^u'un  bonheur  pour  la  Sy- 
rie. Traversee  par  des  troupes,  tantot 
arabes,  c*estra-dire  ennemies,  tantdt 
grec^ues,  ou  plutdt  composeesde  mer- 
cenaires  de  toute  nation  et  de  toute  ori- 
gine;  exploit^  aujourd'hui  par  un  con- 
querent  ezigeant;  refoulee  le  lendemain 
par  un  ancien  maltre  qui  se  vengeait; 
tiraill^e  des  deux  parts  i  la  Syne  vit 
la  population  industrieuse  de  ses  villes 
inqui^tee,  dlss^min6e,  parfois  arracb^e 
avec  violence  au  pays  qu'elie  enrichis- 
sait,  la  population  de  ses  campagnes 
ruinee  par  les  ravages  de  la  guerre,  la 
population  de  ses  montagnes  enfin  pour- 
suivie  m^me  dans  ses  retraites  si  long- 


temps  inaecesaibles.  Ansa 
tions  persecotto 
fiiir,  a  quitter  une  eontrte 
ofi^ait  plus  aueunesdcorite. 
gration  qui  fot  la  cause  ds  oet 
des  terres  les  plus  fertiles ,  de 
denee  si  prompte  d'un  pavs  «^ 
piein  de  villes  et  de  peuples  C). 

La  nouvdle  lutte  entre  Vi 
zantin  et  Tlslam  €tmi ,  du 
d'etre  termini  par  la  moitde 
cte,  et  les  Syriens  pr^voyants 
raison  de  s*ecbapper  d'un 
bataille  qui  allait  oe  plus  en 
sanglanter.  Les  expMitioos  i 
de  Nic^phore  Phocas  et  de 
tant  prdn6es  par  dea  6crivaioi 
tique ,  avaient  produit  un  mat 
irr6m6diabie.  Ges  deox  g^n^ 
durs  soldats  I'un  que  Tautre , 
et  bourreaux  des   contrto 

Ear  leur  sabre,  semblaient,  pMKJ 
eur  de  la  Syrie,  avoir  rivali ' 
de  toutes  especes.  Us  avaieat 
a  Tenvi  les  outrages,  les 
les  vols.  Par  exemple ,  Ni( 
la  prise   de  Mopsueste, 
tante  de  la   frontiere  cili 
fait  d^une  mosqu^  une 
ironiquement   livr6   aux 
cbaires  sacrto  des  docteurs  de 

Euis,ne  se  oontentant  point 
)s  ricbesses  des  palais,  i' 
enlever  jusqu'aux    portes 
de  la  cite  pour  servir,  a 
preuves  perpetuelles  de  sa 
encore  ravide  empereur  d 
se  borna  point  a  depouiller 
mans:  son  avarice  avait  e 
qu'aux  biens  des  Chretiens 
et  ce  que  les  Arabes  avaie 
les  croix  des  eglises  catholi 
pbore,  tent^  par  Tor  et  ' 
qui  les  decoraient,  les  em] 
sans  ^ard  pour  les  recla 
freres  en  religion,  sans 
ce  d^tournement  sacrilege. 

Zimisces,  de  son  c6te,  en 
rantd'Alep,  outre  le  sac  qa'il 
du  palais  des  princes  Hamad: 
vant  dans  la  ville  trop  de 
pouvoir  Temporter  tout  eolier, 
ler  sur  les  places  pubiiques  toot  c 
semblait  mf^^ieur  en  prix,  cs 

(*)  Yoyez  Ab'uUFMa  d  ▲b'Ql-Fandl. 


SYRIE  MOD£EM£. 


206 


Mus  de  somme,  en  nombreinsuffisant, 
,ne  pouvaieot  pas  emporter.  Une  pareille 
oonduite  ne  ressemble-t-elle  point  h  celle 
d'un  barbare  de  la  plus  execrable  espdce? 
Mais  ee  ne  sont  la  que  des  ravages  mat6« 
riels ,  et  cela  ne  satisfaisait  pas  entiere- 
ment  T instinct  de  destruction  du  con- 
querant  byzantin.  II  voulait  que  le  mas- 
sacre pr^oed^t  le  pillage  :  aussi,  dans 
presque  toutes  les  villes  (]u'il  prit  d'as- 
saut ,  les  bommes  furent-ils  tous  cruel- 
lement  ^org^s,  tandisque  les  femmes 
^taient  emmeneesen  esclavage.  Des  aetes 
aussi  odieux,  rep6t^  dans  plusieurs  des 
contr^es  qu'il  traversa ,  ne  produisirent 
pas  seulement  un  mal  temporaire,  ils 
amenerent  aussi ,  daris  Tavenir,  des  ca- 
tastrophes terribles,  des  vengeances  ir- 
rassasiables,  et  rallum^rent  pour  toujours 
oette  haine  eternelle  entre  le  cbristia- 
nisnie  et  Tlsiam  dont  nous  parlions  tout 

I       k  rheiire  (*). 

Et  maintenant  en  face  de  pareils  faits, 
est-on  bten  venu  de  dire  que  ce  sont 
les  mauvais  traitements  que  les  IV^usul- 

I  mans ,  daos  le  dixieme  siecle ,  out  fait 
^pDroaver  aux  Chretiens,  aui  ont  cause 
et  justilie  les  croisades!  liy  a-t-il  pas, 
au  contraire,  soiidarite  de  crimes  d'un 
odt^  comme  de  Tautre?  £t  les  princes, 

2ui  ODt  donn^reiempie'de  la  f^rocit6 
ans  cette  guerre  interminable  des  races 
occidentales  oontre  les  races  orientales , 
n*ont-ils  pas  devant  la  post^rite  une  res- 
ponsabilit^  qui  doit  ecraser  leur  re- 
Domm^,  ternir  la  gloire  de  leurs  armes, 
effacer  chacun  de  leurs  exploits?  A  tous 
ils  ont  fait  un  mal  non  encore  repare 
dans  les  temps  modernes;  aux  Syriens, 
en  particulier,  ils  ont  porte  le  coup  de 
la  mort  comme  nation.  Ces  derniers ,  en 
effet,  quoique  longtemps  ballott^s  d*une 
domination  a   une   autre,  trouvaient 
dans  la  race  arabe  des  afGnites,  des 
rapports  de  caract^re  dont  un  homme 
de  genie  aurait  pu  tirer  le  plus  civili- 
sateur  des  partis.  On  a  beau  faire ,  la 
'        m6me  religion  a  beau  rapprocher  les 
'        Ames,  le  Syrien«)'a  pas  naturellement 
de  sympathie  pour  I'Europeen.  Le  Sv- 
'         rien  est  asiatique  dans  toute  la  force  du 
terme,  et  les  envahisseurs  qui  lui  ve- 
'         naient  du  fond  de  Tancienne  Scythie 
'         avaient  plus  de  chances  de  concorder 

(*)  Yoyez  Zonaras  et  Cedrenos. 

14*  Livraison.  (SvRiB  modsbne 


un  jour  avec  lui  que  leGermain ou  le 
Gaolois.  £b  bien,  ayoir  jet^,  par  nn 
fanatisme  sauvage,  des  brandons  per- 
pdtuels  de  discorde  entre  le  Syrien  ma- 
nom^tan  et  le  Syrien  chr^tien,  n'est- 
ce  pas  avoir  prepare  un  chaos  au  lieu 
d*un  monde:  n'est-ce  pas  avoir  s^par^, 
par  la  folic  humaine,  des  frdres  que  la 
nature,  dans  sa  sagesse,  devait  tdt  oo 
tard  rapprocher?  Mais  nous  n'en  som- 
mes  pas  encore  a  juger  de  la  hitte  entre 
I'esprit  de  I'Occident  et  Fesprit  de  TO- 
rient :  avant  lescroisades,  la  Syrie  a  d'au- 
tres  malheurs  k  supporter. 

LBS  FATHIMITSS. 

Comme  si  la  fetalite  la  plusdesastreuse 
eOt  preside,  dans  le  dixieme  si^le,  aux 
destinees  de  cette  contree  d^ja  si  pers6- 
cutee ,  il  se  trouf  a ,  pr^is^ment  a  cette 
^poque ,  que  la  decadence  rapide  du  gou- 
vernement  des  khalifes  fit  sortir  de  tous 
les  coins  de  I'empire  de  nouveaux  am- 
bitieux,  ardentsi  arracher,  dans  cette 
dissolution  g6n^rale,  un  lambeau  du 
cadavre  abbasside.  II  vint  de  ces  ol- 
seaux  de  p^oie  humains  de  tous  les 
points  de  Thorizon.  Quand  une  bande 
6tait  rassasiee ,  une  autre  bande  s'abat- 
tait  immediatement  sur  les  endroits 
^pargnes  par  la  premiere.  Apres  les 
Turcs ,  descendus  du  nord ,  ^taient  ac- 
courus  de  Touest  les  Kharmathes;  c'6- 
tait  maintenant  le  tour  du  midi.  11  four- 
nit  les  plus  terribles  peut-^tre  d*entre 
ces  devastateurs.  Originaires  du  lit- 
toral africain,  ils  avaient  cette  Anergic , 
cette  avidite,  cette  dorete  qui  caract^- 
risent  les  indigenes  de  I'Atlas.  Mahom^ 
tans  par  calcul  plutdt  que  par  convic- 
tion, ils  n'adoptaient  du  Koran  que  les 
Id^s  de  guerre  et  de  ravage.  Longtemps 
k  i*affut  d*une  occasion  de  conqn^te, 
d'un  pretexte  de  saocagement,  ils  ecou- 
terent  les  propositions  que  quelques 
sectaires  sdiiites,  refugies  dans  leurs 
deserts,  leur  firent  un  jour  dans  Tes- 
poir  de  former  une  nouvelle  arm66  pour 
combattre  leurs  ^ternels  ennemis,  les 
Sunnites.  Comme  on  le  voit,  c'^tait  tou- 
jours cette  vieille  querelle  de  Th^ritage 
de  Mahomet  entre  les  partisans  d'Omar 
et  ceux  d'Ali.  Cette  pomme  de  discorde 
avait  toujours  fructifi6  au  coeur  de  TIs- 
1am,  et,  malgr^  la  puissance  successive 
des  Ommiades  et  des  Abbassides,  mal* 


310 


L'UNIVERS. 


gB^  lea  vietoirai  remport^es  ti  souveot 
8ur  les  Schiites  par  its  Sunnites,  malgr^ 
tant  da  massacres,  tani  d'ex^utiona 
sanglaotes,  U  restait  touJQUrs  4es  hom- 
mes  attach^  au  adiisina  das  Alides, 
oatures  faibles  el  eatSiees,  sans  cesse 
h  la  disposition  du  premier  ambitieux 
venu.  Cette  fois  rarooitieux  qui  se  pre- 
seau  se  moatra  aussi  habile  que  per- 
s^verant. 

Un  certain  Obaid-AUah- Abou-Mo« 
hammed  eut  Thabilete  de  persuader  h 

Suelques  gens  creduies  qu*ii  descerwlait 
JrectemeiU  d'Ali  et  de  Fatbimah,  iille 
du  propliete.  Selon  la  [coutuine  orien- 
tate, coutume  aussi  vietlleque  les  plus 
vieilles  traditions,  coutume  que  nous 
retrouvoDS  dans  notre  Biule»  ObaiJ- Allah 
se  Ct  une  genealogie  aussi  complete  que 
possible,  et  il  eu(  le  talent  de  la  faire 
adopter.  Puis,  outre  cette  genealogie  qui 
^tablissait  ses  droits  au  khalifat,  il  fit 
r^pandre,  parmi  les  Alides  uUsemines 
daiu  tout  Tempire,  une  pr^tendue  pre- 
diction qui  aunonQait  que  vers  I'aa 
300  de  rhcgire  devait  venir  le  madhy 
(clief  des  ildeles),  sorte  d'antechris'( 
mahometan ,  doi\t  la  mission  etait  de 
reiidre  a  la  succession  du  propliete  sa 
purete  et  a  Tlslam  son  eclat.  En  suite 
de  Ja  decadence  des  Abbassides,  cette 
promessa  de  renovation  ne  pouvait  pas 
manquer  de  piaire  a  tons  les  esprits 
alQ'ges  de  la  laibiesse  de  Tempi  re  :  elle 
devait,  en  outre,  sonner  bien  agreable- 
u)ent  a  Tor^ille  de  tous  ces  aventu- 
riers,  avides  de  combats  etde  piitage, 
dont  ulors  i^O^ient  etait  renipli.  Aussi 
Obaid-AihiU  vit-il  cliaque  jour  augmen- 
ter  le  cortege  de  ses  clients.  Son  S'icce^ 
Cut  m^tne  si  rapide,  que  le  kbaiile  ab- 
l>asside  Muktaly,  menace  a  la  fois  dans 
son  pouvoir  spirituel  et  dans  son  pou- 
voir  tempore] ,  s'inquieta  d^  ce  preteii- 
dant,  le  pers^cuta ,  et  le  for^a  bientot  ^ 
s'eufuir  au  fond  ^eTEgypleavecses  plus 
devoues  aims  (*). 

Loin  deteindre  le  schisme  renais- 
sant  des  Alides,  la  persecution  ne  lit 
que  lui  doiiner  ce  prestige,  cette  au- 
Keole,  pour  ainsi  dire,  que  le  mat  tyre 
^meue  usa  suite.  En  Afriijue,  Obaid- Al- 
lah rencontra  encore  de  pius  chauds  par- 
tisans qu'en  Mcsopotamie.  J^  puissunc^ 

(•)  Voycz  (rHorbelol,  BibUoth.  orUnU,  elEI- 
MaclQ ,  Hist.  Saracen, 


des  Aghlabites ,  chanoelants  deiniill 
temps,  avait  reca  le  cou^  de  1 
des  mains  d*un  r^ToUe 
nom  d'Abou-Abd-Allah.O  1 
barrasse  sans  doute  de  sa  Irop  « 
vietoire ,  eut  Tidee  toange  de  1 
a  oe  demi-propbite  a  aui  ih 
plus  qu'un  trdne  pour  devenir  t 
sant.  Obaid-Allah  aooepU  Tofiir 
Abd-Allab;  et,  a  peine  sur  let 
cain  des  Aghlabitee,  pour 
son  pouvoir,  il  ne  trouva  n 
utile  que  de  faire  perir  1^ 
Boanque,  qui  Tavait  ^eve  ^r  i 
par  sottise.  Puis  il  rompit  ai 
inent  avec  le  gouvernement  del 
en  usurpant  le  titre  khaliiair 
ui-Moumenin,  appeia  a  luit 
dents  de  Flslam.  et  pour  les  s 
faci lenient,  fonda  la  ville  i 
Mahdyab,  qu*il  eleva  pen  i 
de  cap  It  ale. 

Ainsi  commen^it.  Tan  103  4 
une  iiouvelte  dynastie  qui  aJ 
sur  la  Syrie  la  pins  funesle  id 
D^  la  mort  d*Obaid-Allab,  i  ' 
Syrie  aurait  d<l  se  tenir  en 
ces  iniposteurs  nouveaux, 
taquant  au  khalifat  de  Bagdadvi 
naturellement  songer  ik  la  eenf  ^ 
pays,  clef  de  Tempire  a  Fouestl 
Mais  la  Syrie,  a  force  de  roaf  ' 
devenue  impr^voyante.  Hab 
deja  si  longtemps  a  devenirl 
tous  les  ambitieux  ^ergiqwfl 
les  peuples  avides,  ellf  se  f  "^ 
qu6rir  presque  sans  resists 
chercher  h  pre  venir  les  iiir 
a  pen  ces  generations  suoeesfiv 
faites aux  dominations  les  plosi 
toires.  (Tetatt  conime  une  t 
pays  d*aceepter  sans  munninfl 
rents  jougs  qu*on  voulait  la" 
De  ia  point  d*iinion  entre  1 
aucune  trace  de  federalisme  i 
dt verses  cit^s,  entre  Jes  divoi | 
nements  qui  s^eievaient  d^uisl 
L*imlividuali>me  au  lieu  defi 
tel  etait  des  lors  le  caracten  < 
contree  vouee  a  la  servitude,  ( 
deplorable,  qui  n'etnit.,  du  i 
consequence  de  ses  infortunes(*j 

Les  Fathimiles  he  furent  j 
se  faire  une  large  part  dans  ia  i 

(*)  Yoyez  El^acio ,  BiMi,  Saraemk 


SYRIE  M0DERI9E. 


211 


D^ale  de  Tenipire  mmbe.  Ge  n^^taient 

point,  en  effet,  de  simples  destnicteurs 

Gomme  les  Turcs  :  \\s  montrerenl,  an 

contraire,  quelqites  qualit^s  cr^trices. 

n  y  avait  en  eux  un  germe  de  puissanca 

r^eUe,  un  peu  du  sang  g^n^reaxdesOmar 

er  des  Moawiah.  T^e  chef  de  leur  dynastie 

arait,  eomme  nous  Tavons  dit,  fonde  la 

▼ille  de  Mahdyab;  ie  troisi^me  prince  de 

leur  race,  Al-Mansour  b*lliah,foDda  oelle 

de  Mansouriah,  ou  Tint  plus  tard  ^bouer 

notre  magnaninie  saint  Louis.  Le  success 

seur  d^Al-Mansoup-b-Illah ,  Moez  Ledin- 

Ulah,  pour  ne  pas  restfrau^essousdesea 

pr^ecesseurs ,  fonda  a  sou  tour  Ai-Ka- 

hirab ,  le  Caire,  devenue  si  fameuse  de- 

puis.  Mais  ee  ne  fut  la  ou'une  partie 

bieii    l^g^re  de  son  ceuvre.  La  partie 

principale,  au  eontraire,  fut  la  oonqulte 

de  i'^gypte  que  lui  fit  son  general  Djau« 

bar,  qui,  cbose  singuliere,  6tait  Gree 

d'origme ,  et  reprenait ,  an  profit  d'un 

homme  ennemi*n6  de  sa  race,  la  eit^greo* 

Sue  parexcelienee,  rorgueiileuse  Alexan* 
rie.  Une  fois  maltre  tout* puissant  da 
r£gypte,  Moez  Ledi»lllati  put  mettre 
a  execution  le  projet  de  son  ancltre 
Obaid-Allah ,  en  suppnmant  solanneli»' 
ment  dans  les  pri^i^s  publiques  le  nom 
du  khalife  abbasside  de  Bagdad ,  Al-Mo- 
tbi,  et  en  se  d^laiant  lui-mdme  le  ^^ri- 
table  imam,  le  auooesseur  direct  de 
Mahomet. 

D^s  Fannie  de  Tb^ire  862 ,  la  puis- 
sance des  Fatbimites  tut  done  reconnue 
aussi  bien  k  Alexandrie  qu'^  la  Mekke 
et  a  Damas.  Les  Syriens  musulmana, 
Toyant  poindre  une  nouvelle  iueur  dstns 
rislam ,  se  tournereat  vers  elle  avec  fer- 
vour et  esperiince.  Les  Syriens  chr^ 
tiens,  deleur  cdt^,  tnsQuciants  et  fai* 
bies  comme  touiours,  ne  demand^rent 
pas  niieux  que  d^obeir  dfeormais  a  Tim- 
pulsion  d'Al-Kabirah  plutdt  qu*a  celle 
de  Bagdad;  et  dte  lors  la  domination  dee 
Fatbimites  fut  fondle  sur  les  deux  plus 
opuientes  provinees  d^Orient,  sans  quHls 
aient  eu  oesoin  dune  expMitioo  mill* 
taire  pour  arriver  k  oe  but  ma^nifique. 
II  r^ulte  de  ce  £ait  que,  malgr^  les  m^ 
langes  si   b^ttlrogdnes  qui  avaient  en 
lieu  en  Syrle  parmi  les  races  mabome- 
tanes,  il  n*^tait  pas  moinsrest^  dans 
cette  eontr^e  un  certain  esprit  musul- 
man  ^ui  tendait  sans  cesse  a  Tunite  de 
doGtrme  et  de  pouvoir.  11  r^sulte  ea  ou- 


tre que ,  malgr^  les  pr^tendues  conquA* 
tes  de  Nic^phore  Pbocas  et  de  Zimisces, 
les  Grecs  netairnt  pas  assez  bien  relev^ 
de  leur  dech6ance  trois  fois  s^ulaire 
pour  pouYoir,  non  pas  dominer  a  leur 
tour  aans  la  province  perdue  par  H^ra- 
clius,  mais  y  avoir  assez  de  credit  pour 
peser  dans  la  balance  de  ses  destines, 
et  faire  admettre  leurs  vceuz  sinon  leur 
volenti  O. 

,  TYftANNTB  DB  HIUM. 

Moez-Ledin-lllah  ne  fut  pas  un  mau- 
vais  prince;  son  Ills  Aziz-b*lilab  ne  le 
fut  pas  non  plus.  Gomme  plusieurs  des 
chefs  de  race  arabe,  il  se  montra  g^n^ 
reux,  clement,  ^uitable.  La  Syrie, 
voyant  les  quality  du  khalife  fatbimite, 
s*agr^gea  de  plus  en  plus  h  rfigypte. 
Cette  cpnfianoe  devait  bientdt  lui  etre 
funeste.  Le  successeur  d*AziZ'b'lllah, 
en  effet ,  fut  aussi  exterable  tyran  (|ue 
son  pere  avait  ^t6  juste  et  facile  domina* 
teur.  N6d*unecbretienne,  Hakem-Biam^ 
Allah  fut  pourtant  Tun  des  pers^uteurs 
les  plus  acharn^s  des  Chretiens.  Quel* 
ques  historiens  modernes,  et  surtout 
quelques  voyageurs ,  amoureux  du  para- 
doxe,  ont  voulu  rebabiliter  Hakem  et 
la  secte  k  laquelle  il  donna  naissanee , 
les  Druzes;  mais  leurs  efforts  nous  sem- 
blent  impuissants.  II  y  a  trop  d*unanl- 
mit^  dans  les  maledictions  des  con  tern* 
pNorains  pour  croire  que  ces  maledio- 
tlons  furent  toutes  excuses  par  la  baine 

Sue  les  Abbassides,  presque  valncus  et 
epouill6s  de  leurs  plus  belles  provinees, 
avaient  vouee  aux  Fatbimites.  Uaccord 
gu*on  rencontre  dans  les  r^its  des  dif- 
lerents  chroniqueurs  orientaux  prouve 
d^ailleurs  la  v^rit^  de  leurs  dires.  -Enfin 
la  suite  des  ^v^nements,  le  earactere 
constant  de  ferocity  et  de  piilage  qu*^ 
diverses  ^poques  ont  montr^  les  Druzes, 
sufCraient  k  les  faire  condamner  par 
rhistoire,  et  h  iustifier  ropiiiioh  qu'oQ 
a  coiiservee  de  leur  crimiHclle  origine. 

Hakem,  pour  lemaiheur  de  son  sieele, 
herita  du  khalifat  h  Tdge  de  onze  an». 
II  ne  put  done  pas  profiter  des  conseils 
de  son  p^re,  et  livre  aux  courtisans  des 
son  adolescence,  il  lui  fut  loisibiedes*ar 
bandonner  a  tous  les  caprices  de  son  es- 
prit et  a  toutes  les  passions  de  sa  nature. 


(*)  Yoyex  Macel  el  El-tticin. 


14. 


212 


L'UNIVERS. 


Or,  lonque  la  nature  orientale  est  fibre 
de  tout  trein,  rimp^osit^  du  sang,  la 
chaleur  da  dimat,  rentratnent  souveat 
k  tous  les  exces.  Quant  a  Tespritde  cette 
epoque,  il  n*avait  pas  encore  des  r^ 
gles  assez  sllres,  aes  barrieres  assez 
puissantes,  pour  ne  pas  se  laisser  empop 
ter  k  toutes  les  extravagances  eta  toutes 
les  monstruosites.  Uakem  fut  un  exem- 
ple  de  la  depravation  du  corps  et  de  fes- 
prit  la  plus  complete  peut-etre  dout  les 
bommes  eurent  jamais  a  souffrir.  La 
premiere  circoDStance  ou  se  dessina  le 
earactere  de  Hakein  dans  toute  sa  per- 
versity, fut  UD  acte  de  vengeance.  Des  le 
commencefloentdeson  regiie,  un  rebelle 
bardi ,  qui  se  donnait  comme  descendant 
desOmmiadesparHesobam,  Tundesder- 
Diers  princes  de  cette  d?nastie,  apres 
avoir  iongtemps  et  vailfamment  com- 
battu  contre  les  troupes  plus  nombreu- 
ses  du  kbalife  fathimite,  fut  un  jour 
fait  prisonnier  et  amene  devant  le  jeune 
Hakem.  La  jeunesse  est  ordiuairenient 
facile  a  oublier  les  torts,  et  a  les  pardon- 
uer :  le  kbalife  de  quinze  ans  se  montra 
aussi  impitoyableque  rancunier.  La  jeu- 
nesse, d  ordinaire,  n'aiine  point  Faspect 
des  tortures  :  Hakem  annonca  a  son  pri- 
sonnier qu'il  assisterait  lui-m^me  a  son 
supplice.  L'imagination  de  la  jeunesse 
est  par  nature  riante  et  douae :  celle  du 
jeune  despote  s'appliqua,  buit  jours  du- 
rant,  a  recbercber  pour  son  ennemi  la 
mort  la  plus  cruelle  et  la  plusoutrageante 
k  la  fois.  Indecis  entre  plusieurs  genres 
de  supplices ,  Uakem  finit  par  s*arrdter 
a  celui  qui  pr^sentait  dans  son  atrocity 
assez  de  ridicule  pour  ^ayer  le  bour- 
reau,  noble  fonctionqu'il  s'etait  r^servee. 
II  fit  attacber  son  prisonnier  pieds  et 
poings  li^s  sur  un  cbameau,  et  pla^a 
derriere  lui  un  sin{B[e  de  la  race  la  plus 
m^hante,  qui,  lui  frappant  constam- 
roent  sur  la  nuque  avec  une  pierre,  fit 
mourir  le  patient  aux  eclats  de  rlre  du 
jeune  bourreau  (*). 

Ce  n^etait  la  que  le  commencemenlMe 
Toeuvre  d^montaaue  du  despote  musul- 
man.  Bient6t  on  le  vjt,  alliant  la  luxure 
alacruaute,  s'abandonner  avec  la  plus 
cynique  impudence  aux  goQts  les  plus 
monstrueux.  Puis  Tdcre  desir  de  taire 
le  mal  se  developpant  de  plus  en  plus 

(*)  Yoyei  d'Herbelot,  Biblioth,  orient. 


L 


en  loi,  ii  d«Tinl  poor  tons  ses  i 
plus  odleuz  des  tyrans.  Pleia  de 
pour  les  femmes ,  il  ordoana  ^*i 
sortissent  jamais  de  leur  logn; 
que  son  orare  f&i  strictemeot 
il  defendit  aux  cordonniers  4e 
empire  de  faire  aucune 
leur  usage.  Ce  ne  fut  pas  tout 
Youlut  qu*on  les  tint  enfermeei 
des  oiseaux  en  cage ,  et  qu*<» 
pr^entit  des  aliments  qu*en 
vraut  la  porte  de  leur  prison, 
des  palettes  k  manche  lon^,dil 

Jiu'elies  ne  fussent  pas  vues  par 
eur  donnaient  k  manjger.  Celte 
tre  les  femmes  venait ,  disait-oat  j| 
preference  qu'il  aceordatt  aui ' 
dans  ses  ignobles  plaisirs. 

Apres  avoir  et(6  letourmentenr^ 
ses  rivaux,  le  perstoiteur  d*un 
entier,  il  ^tait  dilBcile  d'imagi 
pdt  aller  plus  loin  encore.  Mais 
du  mal  semble  encore  plus  £m 
le  g^nie  du  bien ,  et  Hakem  n'( 
pr^t  d*avoir  ^puis^  ia  somme  d« 
mes.  II  y  avait  une  ville  qn'mi' 
ancdtres  avait  fondee,  que  sot 
pere  avait  dot^  avec  muntfioeaei,^ 
ricbe  d^ja ,  beureuse  de  la  pro! 
kbalifes,  ville  tout  arabe  A\ 
Caire.  Eh  bien,  sa  prc^p^te 
tout  k  coup  k  Hakem,  et,  par 
de  passe-temps,  il  ordonna 
le  feu  a  Tune  de  ses  parties , 
ses  soldats  saccageaient  rautraj 
mieux  aue  N^ron  :  le  tyran 
oubtie  le  pillage. 

Qu*on  juge  matntenant  de  la 
que  ce  tigre  enrag^  inspira  aox 
Les  Cliretiens  furent  les  premi 
souffrir.  II  les  persecuta,  aioa 
JuiCs ,  de  la  facon  la  plus  ci 
plus  continue.  Non-seuleroent 
ac(»ibler  d'avanies   par  les 
leui  Jmposa;  non-seulement  il 
gea  d'imp6ts  exorbitants ;  mais 
voulut  les  humilier  dans  leur 
qu'avait  pr^c^demment  fait  M^ 
TAbbasside.  Les  monstressen 
parfois  dans  leur  imagination 
Hakem ,  dans  Tincendie  de  la 
avait   imite   Tatroce   fils  d\ 
il  lui  restait  a  profiler  de  Vm 
d'un  autre  tyran ,  quitte  plus  tard  i 
depasser  tous  deux.  On  se  souvieacl 
lois  somptuaires  que  jMotawakkel 


SYUE  MODEimE. 


213 


mkBsaiCht^enB :  elleseurent  poar 
lUat,  tout  en  frappant  )es  contempo- 
isy  de  djvlser  a  jamais  les  generations 
ires;  d*babituer  ies  Musulnians  a  trai- 
oomme  d'une  nature  inferieure, 
8  conipatriotes  qui  ne  pratiquaient 
ia  m^me  religion  qu'eux;  d^exciter 
deux  partsHntol^rance;  d'emp^cber 
ipprochementdes  vainqueurs  et  des 
icvfl;  de  niettre  un  obistacle  invin- 
eii  cette  fusion  naturelle  qui  suit  une 
|u^te  vieiile  d^ja  de  plusieurs  si^- 
k  Hakem  n'eut  done  pas  Fex^rable 
re  d'amener  la  separation  des  races 
stales  :  ee  mal  etait  dej^  fait ;  mais 
iggrava  et  le  rendit  irreparable.  Tout 
itaqaaiit  les  families  dans  leur  ave- 
il  chereha  encore  a  traiter  les  indi- 
iile  plus  cruellement  possible.  Ainsi, 
nfut  que  les  Juifis  portassent  au  col 
lioe  de  bois,  de  la  forme  d'une  t^te 
teu,  en  m^moire  du  culte  condamh6 
kors  proph^tes.  Cetait  doublcment 
hpper  :  en  premier  lieu  leur  infli- 
pe  distinction  grossi^re ,  en  second 
■I  faire  passer  comme  ^tant  tou- 
limbus  des  superstitions  dequel- 
^aos  de  ieurs  anc^tres.  Quani  aux 
itiens,  it  leur  ordonna  de  porter, 
i  au  col ,  une  <;roix  en  bois  d*uno 
fe  et  demie  de  long,  et  do  poids  de 
re  li?res :  leur  faisant  de  cette  mani^re 
ipplioe  ou  au  moins  une  g^iie  per- 
«e  du  slgne  m^me  de  leur  r^emp- 


^taient  les  lois  de  Hakem ;  yoici 
imant  ses  passe-temps.  Sous  pr^- 
Rle|)olice ,  il  se  d^isait,  et  parcoo- 
fcraot  la  nuit,  certainesTilles  de  son 
P^Mais  loin  de  r^prlmer  les  desor- 
jMnde  punir  les  attentats  a  la  vie  et 
f9prietes  de  ses  sujets,  ii  se  plai- 
mAt  k  laisser  ^cbapper  des  crimi- 
lantdt  k  condamner  des  innocents. 
progressant  de  plus  en  plus  dans 
MS  les  phis  mauvaises ,  il  s'amusait 
Mberl'usage  de  certains  aliments, 
tains  fruits ,  de  certaines  herbes,  et 
•per  de  mort  tons  ceux  qui  enfrei- 
it  ces  ridicules  ordonnances.  Une 
fots,  <^^tait  aux  animaux  domes- 
iqu'il  s'en  prenait :  un  chien  avait- 
peur  a  sa  monture ,  il  proscrivait 
e  canine  tout  enti^re  et  la  faisait 

pftt  tea  ^nnaUMde  Barooicu  et  de  Pagi. 


abattre  en  masse ,  quelle  que  i6t  Futility 
de  quelques-uns.  Enfin  les  chroniqueurs 
de  son  6poque ,  entre  autres  Makrisi ,  af- 
flrment  qu  un  jour,  entendant  de  la  rue 
des  femmes  qui  riaient  dans  Finterieur 
d*un  bain  public,  il  fit  murer  les  portes 
de  ce  bain ,  et  se  complut  a  ecouter  les 
cris  de  desespoir  de  ses  nombreuses  vic- 
times. 

Outre  le  despotisme,  la  cruaut^  et 
la  demence,  Hakem  montrait  une  contra- 
diction et  une  inconstance  qui  mettaient 
dans  le  plus  grand  embarras  tous  ceux 
qui  avaient  Tesprit  assez  corrompu  pour 
courtiser  un  pareil  tyran.  Aujourd  hul, 

Sar  exemple,  il  affectait  les  pratiques 
*un  pieux  musulman,  faisait  elever  des 
mosqu^es  et  des  colleges,  dotait  ricbe- 
ment  le^  ^tabiissements  de  la  religion 
mabometane,  et  Ton  outrait  la  devo- 
tion pour  lui  plaire.  Demain ,  au  con- 
traire ,  il  fermait  tout  a  coup  les  colle- 
ges, condamnait  a  mort  les  professeurs, 
pillait  les  lieux  consacr^s ,  et  d^fendait 
tout  exercice  de  religion,  m^me  Timm^- 
morial  pel^rinage  de  la  Alekke.  N*etait- 
ce  pas  d^router  les  courtisans  les  plus 
achames  ,tout  en  commetlant  des  actes 
d'une  barbaric  impitoyable?  Ce  ca- 
ractere  versatile  dans  son  borreurat- 
teignait  tous  ses  sujets;  mais  les  Chre- 
tiens, comme  tou jours,  eurent  plus  de 
maux  a  supporter  que  les  aulres.  Non 
content  de  leur  avoir  inflige  un  costume 
qui  blessait  n  la  fois  leur  bonneur  et  Ieurs 
inter^ts ,  nou  content  de  faire  souvent 
main  basse  sur  les  meubles  et  les  terres 
de  Ieurs  eglises ,  il  leur  enjoignit  enfin 
d*embrasser  rislamisme,sous  peine  d*exil 
et  de  mort.  Puis,  lorsqu'il  eut  vu  cer- 
tains d'entre  eiix  pr^ferer  Ieurs  biens  et 
leur  vie  a  leur  conscience,  il  ordonna  a  ces 
apostats  d'apostasier  de  nouveau ,  et  les 
for^a  a  employer  une  partie  de  la  fortune 
qu'iis  avaient  sauv^e  a  rebStir  des  tem- 
ples Chretiens.  Cest  ainsi  qu'apres  avoir 
detruit  de  fond  en  comble  T^glise  de  la 
Resurrection,  elevee  a  Jerusalem  sur 
Templacement  du  saint  sepulcre,  il  per- 
mit, quelque  temps  avantsa  mort,  qu'on 
la  reedifiSt  (*). 

Un  pareil  monstre  m^ritait  Texecra- 
tion  de  sa  nation  tout  entiere ;  et  pourtant 


Ju 


*)  Voyci  S.  de  Sacy ,  Mimotfta  de  VAcadt- 
des  iHMcriptiont  et  b*lUs-UUre$, 


214 


LURITERS. 


il  trouvades  ministres  de  ses  croaot^, 
des  executeurs  de  ses  tnoindres  caprices, 
des  garde<(  pour  le  defend  re^  des  fous  pour 
rencensek*.  Sa  d^menee  a'aui^menta  de 
la  faibte6s6  dto  eeuk  qui  rentouraient. 
6an»  foi  rti  loi^  convaiocu  par  lea  exem* 

Klea  hombreux  i|U'on  lui  en  donnait  de 
i  platitude  des  hotnmes,  ni^prisant 
toute  idee  morale  ou  religieuse,  il  iui 
prit  up  jour  fa  fantaisie  de  sd  faire  ado- 
rer eomm^  Uit  dieu.  Pour  la  bonte  de 
rhiimanit^f  le  projetde  Hakem  r^ussit. 
lltrou?a  touid'abord  seize  mille  person- 
ties  qui  le  prockimerent  dincarnation 
divine.  Puis  viiirent  les  proph^tes  de  ce 
dieu  de  la  folie  fVirieuse.  Le  pnpmter  fut 
un  ei^rtain  Mohammed  Nechti^ghin « ture 
d*origine,  etsurnomme  Dutzi.  Gethom- 
me,  SuSSi  violent  que  deprave,  apr^ 
avoir  detruit  tout  ce  que  Tislamisme 
avait  de  respectable,  la  prii^l-e6  un  Dieu 
unique  el  raumdne,  permit  tous  les  excis 
ti  tous  leS  crimes,  en  t  re  aut res  le  manage 
(*ntr«  pi^re  pt  Glle  et  m^re  et  GIs.  On 
rapporte  kn^me  que  cet  ignoble  sectaire 
hlla  si  loin  que  le  khalife,  soti  dieu,  Ait 
eontfaliit  de  le  d^voueK  C*est  pour- 
tant  de  lui  que  les  Druzes  bnt  pHs  leur 
nom.  Sans  vouloir  accuser  oes  derulers 
de  pratiquer  les  preeeptes  de  feur  infer- 
nal prophete,  toujour^  est-il  Singutier 
quMts  conservent  encoi-e  respectueusb- 
nient  Sa  ^li^moire.  Blais  eomme  Thistoire 
doli  ^viter  avnht  tout  de  catomnier  les 
populations,  nous  ne  voulons  pasici  d^- 
tarller  tdutes  les  infamies  de  la  premiere 
religion  des  Druzes ,  et  nouS  reniettons 
h  en  parleraTepoqueou  elie  sVstquelque 
peu  puriGee ,  ou ,  apr^s  de  nombreuses 
modifications,  el  les' est  euGh  Gxee. 

Aussi  bien  llamzah ,  second  prophete 
du  dieu  Hakem ,  fut  ji  la  fois  plus  con- 
tenu ,  plus  adroit,  plus  humaln  qde  son 
pr^decesseur  Durzl.  Peut-^tre  m^me 
eut-il  la  gloire  d'adouctr  queique  peu  le 
caractere  feroce  de  Hakem ;  car  dds  qu'il 
fut  consid^r^  par  ce  khalife  comme  son 
pontife  supreme,  on  aper^dt  queique 
diminution  dans  les  accis  hirieiix  et 
dans  les  caprices  sanglants  de  Hakem. 
Malheureusement  cette  transformation 
▼enait  trop  tard  :  le  vase  de  la  liaine  et 
des  maledictions  ^tait  plein ,  et  il  deborda 
sur  celui  qui  Tavait  erapii.AGn  dimposer 
Il  l*esprit  des  cr^dules,  Hakem  se  reti- 
rait  seul  tous  les  matins ,  au  point  du 


Jour,  sur  une  n>otttagm  dH  iMtimi  i 
Caire  nomm^  MokatUm ,  pour  t 
dre,disait-il,  83  nature  diviDe.C 
litude  feforisa  le  projet  quei 
breux  ennemisaTalentfornM^deM 
de  sa  personne  esnfer^e.  La  <    ^ 
fut  presque  gi^n^aie ,  le  chefdd'l 
et  la  propi^  sceur  de  Haknn  j«  " 
et  le  soi-dlsant  dieu  ftit  ass«  * 
lieu  m6me  ou  il  pnctendail  i 
substanee  Immortelle  (*). 

DB  HARElE. 

Le  r^edeHakem-Biaair'-i 
avait  dure  vingt-sept  ans,  el 
cessa  que  Tan  411  de  rb^giitj 
coup  de  mort  de  la  Syrie.  Lestf 
.  despotismes  qu'elle  avait  suiNSj 
lors,  maUre  dea  guerrei  i 
malgre  dliorribles  massacres, 
tant  de  pillages  et  de  devnstati 
vaient  bien  moins  d^peupleef 
que  nele  fit  le  systeined*exli,tf 
nations  individuelles,  de  ^ 
rale  que  le  klialUe  fatbiraite  j 
sur  tous  ses  sujets.  Deja  kn  i 
d'union  et  de  prosperity  di  I 
avaient  M  succ6Ssivenoent  < 
par  des  iava«ioiis  et  des  < 
repetees;  iU  nepureniresisttfl 
dissolvant  d'un  tvran  oomiMii| 
a  peu  Tu  de  semblabies.  i 
sion  il  y  a  toujours  la  cbano 
veaux   venus .  subissent, 
ment  m^me  de  leur  vo 
cliose  des  moeurs  el  des  I 
pays  sur  lequel  ilsse  sont} 
d'une  generation  ou  deux,le< 
produits  du  sol,  la  nature,  i  ' 
cement  sur  lea  ills  des  don 
les  agregent  aiasi  euz  masifsd 
peu  ils  se  fondeot.  Oana  lesc ' 
n*y  a  souvent  qut  le  nom  ( 
cbang^,  au  moins  pcwr  les  1 
pratiquent  le  tnkne  oulte.  Or,  I 
au  ottzieme  sieele  de  notre  i 
lalt  beaueoup  de  Mahometans.! 
bometana  eomme  Qiretiens,  t 
atteintsparla  barrede  fere 
Hakem  semblait  avoir  pour« 

Hakem,  d'ailieursy  avait tf 

^  (•)  Voyex  S.  de  Sacy ,  Mimoim  *l 
de*  tntpripl, 
(••)  Voyez  Ab'ul-reda,  jinn,  •wt 


SYRIft  MODEBNE. 


915^ 


Mt,  ineendi^  par  pfaisfr,  ifigoi*g6  par  be^ 
tD);  et  comme  h  ces  instincts  de  b^te 
JlTDce  it  joignait  encore  le  calcul  de  Id 
uaot^  innee ,  rimagination  du  crimi- 
H  par  nature^  rien  tie  put  r^siater  a  Tac^ 
hn  continue  de  6e  destructeur.  Les  po^ 
Hiltions  qui  ne  furent  point  disperseefi 
1^  ordtt  in^nie  du  tyran  ^enfuirent 
I  ioio  pour  ^diapt|er  h  abs  fantaisiefl 
lllgladtes.  Aiiisi  disparurent  d*abord 
I  Ctiretiens  d^origitle  gr^cque ,  dont 
JMostrie  enrichissait  Damas,  Alep  et 
I  cites  de  i'Anti-Liban.  Puis  ce  fUt  16 
im  ded  Juifs,  induatrieux  aussi,  oil 
leulteurs,  od  marlns.  Enfin,  le$  Mu- 
ns  suivirent  bient6t  cette  ^mi^ra- 
fen^rale.  Lfs  families  retournaienk 
1  lis  contr^es  d*ou  lieurs  peres  ^taient 
IS  jadis.  On  pref6roit  le  desert  et  sa 
^i  aax  jardins  de  i'Oronte  avec  le 
da  plu)  bat-bare  des  princes.  Oii 
donnait  les  chemp^  IM  plus  fcrtllea, 
Hiissait  les  herb«^  parasites  ^toiiffer 
iries  merveilleuses  de  la  vall^  du 
in,  on  la  d^pouillait  dea  tronpeaui 
peuplaient,  on  emport^it  aiUeurt 
nences  qui  devaient  \A  f^onder; 
la,  Gena^C)  eea  deux  fleaux  de 
Dour  I'Europe, quellea  qiie  fussent 
devastations,  quels  qbe  fussent  leurs 
,  amenai^nt  au  moins  une  ar- 
avec  eux.  Or  (:ette  arm^e  6tait  un 
,)Ve :  id  lea  Huns,  la  les  Vandales ;  el 
ft  Huns,  de  n)€nie  que  ces  Vandales i 
Ibpla^aient  les  lK>tiinies  qu'ils  avaient 
IjiaiRort,  rendaient  aux  contrees  quails 
"'  it  eovahies  des  bras  nouveaux  et 
pour  les  eultiver.  Uakem ,  au  con* 
,  n'avait  avee  luf  que  des  hour- 
Son  arme  n'titait  pas  une  masse 
ou  des  filches  :  c*(6tait  une  torielie 
aire.  Ainsi  que  le  feu  sous  la 
^*^,  sa  nature  perverse  eouvait  quel- 
le temps  les  plus  abominabies  pro^ 
|>;  puis  tout  h  coup  die  ^ctatait,  elle 
wn^it  de  tons  cotes  en  tourbi lions 
wructeurs,et  nkluisnit  en  cendres  un 
^toutentier.  Ainsi  il  fit  de  la  Judee, 
fe^i  de  Jerusalem ,  oQ  il  s'attaqua  aux 
■htagnes  m^mes  et  aUx  cavernes ,  em- 
jgrant  les  efforts  d*unefou1ed>sclaves 
•"•aciner  les  rocs  de  la  grotte  du  Saint- 
^Icrc,  I  disperser  les  lerres  du  Gol- 
a,  aniveler  leCalvaire.  11  ne  lui  suf- 
it  pas  dcfrapperlechrislianisme  dans 
w  fiocles,  d'abattre  ses  ^glises ,  de  rui- 


ner  ses  ^tabtlssements;  plein  de  rage 
contre  une  religion  qui  r^tstatt  par  ses 
martyrs  aux  vfolenees  de  ses  enuemis, 
il  erut  qu'il  lui  porterait  un  coup  plus 
faneste  en  Tattaquant  dans  sa  tradition^ 
en  changeant  la  decoration  du  grand 
drama  numano-diirin,  en  depouiliant 
non-seulement  tatit^  sointe,  mais  encore 
la  campagne  qui  Tentourait ,  du  prestige 
qui  leur  avait  vaiu  les  hommages  dc 
tant  de  generations.  Insens^,  qui  croyait 
que  la  tradition  vivait  davantage  dans  les 
objets  materiels  que  dans  Tesprit,  et  qu'il 
ne  fallait  pour  eteindre  la  lumiere  reieste 
que  dediirer  le  tableau  qu'etle  edairel 

£n  resume,  Uakem,  dans  un  quart 
de  siecle,  fit  un  mal  plus  irreparable  h 
la  Syrie  que  n*a\raient  fait  les  Arabes  du- 
rant  leurs  conqu^tes,  les  Turcs  h  leurg 
premieres  invasions,  les  Kbarmatlies  eux* 
monies  dans  leurs  pillages  continuets. 
Les  Ommiades  avaient  conserve  dix  miU 
lions  d'habitants  dans  une  province  ott 
les  Roniains  avaient  eu  jusqu*n  quiuze 
millions  de  sujets;  apres  les  Turcs  et 
les  Kharmathes,  a  la  decadencede  plus  ea 
plus  desastreusedes  Abbassides,  lorsque 
tout  Tempire  klmiifal  dtait  ouvert  aux 
premiers  conquerants  venus,  la  Syrie  ^ 
que  se  di^puterent  tant  d'ambitieux , 
comptait  encore  hutt  millions  d'indi- 
genes.  Ces  derniers  etaient  reduitsa  cinq 
millions ,  lorsqu'eniin  le  plus  juste  peutr 
etre  des  com  plots  debarrassa  TOrient 
de  la  plus  infdme  etmaUieureusement  de 
la  plus  longue  de  ses  tyrannies.  Ainsi 
Tern igrat ion  forc^e  est  pour  un  pays 
plus  fatale  encore  que  le  decimation  (*). 

LES  SELDJOUKIDES. 

L'heritage  que  Hakem  laissa  5  la  Sy" 
rie  fut  peut-^ire  pour  oette  province 
plus  pernicieux  encore  que  le  rcgne  de 
cet  abominable  insense.  Malgr6  la  folie 
grossiere  de  sa  pretendue  divinite,  il 
avait  tenement  flatte  les  app^tits  des 
mauvaises  natures  orientales,  que  son  d^ 
testable  culte  lui  survecut  dans  les  sales 
foods  de  la  populace.  Son  successeur  eut 
beau  revenir  a  Tislamisme  pur,  il  eut 
beau  trailer  d'impies  ceux  qui  conser- 
vaient  les  pratiques  d*une  religion  ia- 
ventee  dans  un  caprice  d'orgueil  et  dans 
un  accesde  cruaut6,  il  eut  beau,  apres 

(•)yoyaAb'Ql-FtradJ,  Dyttatt. 


Il» 


L'UNIVERS. 


les  premiers  avertissemeDts,  poursaivre 
les  nouveaux  sectaires ;  ces  derniers  pr^- 
fi^rerent  s'exiler  eux-m^mes  d*£gypte  que 
de  renoncer  k  leurs  absurdes  et  immora- 
les  croyaoces.  Or,  pour  6chapper  a  Tau- 
torit6  du  khalife  fathimite,  lis  ne  trou- 
Terent  pas  de  meiiieur  refuge  que  la 
cbatne  au  Liban.  En  se  dispersant  dans 
ces  montagnes  chr^tiennes ,  its  y  port^- 
rent  le  trouble,  le  vol,  les  vices  qu'ils 
tratnaient  apres  eux.  Les  Maronites, 
plus  inqui^t^  de  ces  enaemis  indisci- 
plines que  de  toutes  les  armees  qui 
avaient  traverse  leurs  valines,  s'efforce- 
rent  de  les  repousser  de  leurs  sommets 
^jusqa'alors  ^pargn^s.  Mais  il  est  plus 
difbcile  encore  de  vaincre  des  bandes  qui 
se  succedent  (ju'une  exp6iition  en  regie; 
et  apres  avoir  vaillamment  lutt^,  les 
Maronites  furent  contraints  de  faire, 
com  me  dans  un  incendie,  la  part  au  feu , 
et  d*abandonner  quelques-unes  de  leurs 
terres  k  ees  hommes  feroces  et  perfides 
qui  sont  les  v^ritables  anc^tres  des 
Drnzes  actuels.  Ainsi  Hakem,  apr^ 
avoir  ravage  la  Palestine,  d^truit  le  saint 
sepulcre,  ruin6  Jerusalem,  fut  encore 
celui  des  dominateurs  de  la  Syrie  qui 
atteignit  le  plus  profond^ment  et  le  plus 
fatalement  le  christianisme  dans  la  pro- 
vince qui  fut  son  bereeau. 

Cette  fiers^ution  continue  de  la  reli- 
gion europeenne  par  les  religions  asia- 
tiques  ^mut  les  peuples  au  loin.  Rome  et 
la  papaute  compatirent  aux  maux  de 
leurs  freres  d'Orient.  Gertaines  nations, 

3ui  commenqaient  k  d^brouiller  le  chaos 
e  leurs  origines  barbares ,  ^prouverent 
une  sorte  de  contre-coup  des  outrages 
faits  au  cathoiicisme.  II  y  eut  alors  dans 
le  monde  cbr^tien  un  mouvement  d'indi- 
gnation  qui  devait  un  jour  produire  un 
des  plus  grands  soul^vements  de  masses 
que  rhistoire  ait  conserves  dans  ses  an- 
nales.  Mais  la  coupe  n'etait  pas  encore 
pleine,  et  il  appartenait  a  de  nouveaux 
conquerants  des  contr^es  orientales  d'y 
verser  la  derniere  goutte  et  de  la  faire 
deborder.  Ceux-la  furent  les  Seldjouki- 
des ,  qui  appartiennent  a  la  race  turque 
dans  ce  qu'elle  a  jamais  eu  de  plus  ener- 
^que,de  plusaudacieuxetde  plus  violent 
a  lafois. 

Seldiouk,  selon  certains  historiens, 
avait  ete  esclave.  Par  un  grand  courage 
allie  k  uneadresse  des  plus  habiles,  il  de- 


partki 
ille.Prii 


vint  favori,  confident, iieutttaatdbHi 
mattre.  Tun  des  princes  du  IbonsBB*.^ 
Selon  d'autres  historiens,  auoontiui^  * 
c*^tait  un  chef  de  tribu  tout^isiaot,^ 
avec  lequel  les  rois  de  rextremeOiiql 
aussi  bien  au  deU  de  rindus  qv'aB  P 
de  rOxus,  durent  serieasementcu 
Quoi  qu'il  en  soit,  esclave  oa  < 
Selcyouk  n'en  devint  pas  raoins  i 
soonage  capital  et  le  fondatcurj 
dynastie  qui ,  en  nn  siede ,  i 
tresse  de  toutes  les  anciennes  i 
qu'avait  poss^ees  le  khalifat 
Ommiades,  et,  en  outre,  de  <_ 
provinces  d'Asie  Mineure  que  les  i 
n'avaient  jamais  conquises.  II  n'e  ' 
dans  notre  cadre  de  sui vre  le  pet 
Seldiouk,  le  vaillant  TbogroulB^  I 
ses  luttes  contre  les  Gazn^vida,} 
chassa  de  Tlrak- Adjemi , 
trionale  de  la  Perse  aetuelfe.  I 
teur  et  guorrier  ji  la  fois, ' 
nait.au  loin  on  peuple  avec  »il 
peaux,  et  ses  guerres  furent  dei' 
Dies  migrations  oonquerantes. 
done  les  Turcs,  conduits  par  lai 
invincible  des  Seldjoukides,  I 
pdturages  de  TOxus  aux  p 
i'Euphrate.  lis  s*emnarerent 
TAderbidjan  ou  M6die,  et  p 
bientdt  jusqu*aux  frontieres 
d'un  cdt6  et  jusqu'aax  frontiens  i 
tiennes  de  Tautre.  Ge  fut  ^  cette  a 
de  grandeur  eommen^nte  que  Icfj 
qui  jusqu'alors  n'avaient  foumiilr 
que  des  corps  d'aventoriers  p 
dire ,  se  masserent ,  s^unirent,  <    ^ 
rent  une  veritable  nation,  iaqoielStl 
bien  des  elevations  et  des  dtoidtaof 
eessives ,  bien  des  transformatioMil 
perip^ties ,  devait  £tre ,  en  6q  dee 
la  dominatrice  d^nitive  de  TO ' 
Chose  Strange,  mais  qui  se  i 
quelquefois  pourtant  dans  les  p 
do  soleil  et  chez  les  races  privik 
Ja  nature,  il  y  avait  a  la  fois 
groul-Bey,  ills  d*un  chef  de  trill 
pendantes,  un  conquerant  et  oai 
nistrateur.  Assez  habile  pour  sens 
tr^-attache  a  Tislamisme,  qu*il  fiti 
ter  a  toos  ses  soldats,  dans  cha^oei 
dont  il  s'emparait  il  elevait  une 
j[u6e  avant  de  se  bdtir  un  palais.  i 
wtelligent  pour  faire  servir  a  ses 

{*)  Yoyei  de  Guisoct,  Butoirtd^  Hm^^ 


SYRIE  MODERNE. 


217 


6 tout  hoflime  et  toute  chose,  on  le  vit 
«r  a  lui  ceux ,  quelles  que  fussent 
inorigines,  qui  mootraient  des  ta- 
lU,  et  profiler  de  ranarcbie  de  Tempire 
Ijbe  pour  s'emparer  du  pays  de  Bag- 
"  derni^re  possession  des  Abbassides. 
tout  en  se  rendant  mattre  des  ter- 
il  oe  disputa  pas  au  khalife  sa  pre- 
'  ance  sur  les  esprits.  Bieu  au  con- 
f.  ii  affecta  )e  plus  profond  respect 
ia  puissance  sacerootale  de  Kalm. 
jugeaot  avec  autant  de  justesse 
)  penetration  qu*ii  lui  serait  plus 
dedominerle  khalifat  moriboud  de 
que  le  vivace  khalifat  du  Cairo, 
!lara  pour  les  Abbassides  centre 
ithimites. 
oui-Bey  s'^tait  etendu  au  sud; 
ilan,  son  successeur,  s^tendit 
.  Aussi  brave  qu^un  lion ,  ainsl 
m  nom  oi^me  I'lndique ,  le  nou- 
snltan  des  Turcs  conquit  successi- 
it  TArmenie,  la  Georgie,  une 
de  la  Cappadoce ,  portant  ainsi 
ureux    empire  byzantin   un 

J  plus  funestes.  Ce  qui,  d*ail- 
aitla  victoire  desSeldjoukides 
iportante  que  les  pr^cedentes  vic- 
i^s  Arabes,  c'est  qu'a  leur  exeinple 
Digeaient  des  peuples  conquis  une 
Mnce  temporelle  et  spirituelle  a  la 
Us  ne  purent ,  il  est  vrai ,  en  Ar- 
I  et  en  Cappadoce,  presque  rien  sur 
iretiens,  et  renonqant  a  leur  faire 
ie  Christ,  lis  en  6gorgereut  un 
oombre;  mais  en  Georgie,  pays 
'saavage,  ils  acquireot  des  recrues 
uses  pour  leurs  armies  et  de  nou- 
Benriteurs  pour  ie  Koran.  C'^tait 
nae  fo'is  la  lutte  entre  le  chris- 
jeet  rislam  :  c'etait,  des  deux 
h  menie  ardeur  que  quatre  siecles 
Ifant.  Deplorables  guerres  apres 
rail  donnent  naissance  aux  passions 
pi  violentes,  le  fanatisme  et  la  ven- 

SI  Recrudescence  fatale  d'une  des 
ss  humaines  ,  qui  a  peut-^tre  fait 
pde  victimes,  la  haine  religieuse! 
fistianisme  allait  avoir  le  dessous 
t  toute  la  seconde  partie  du  on- 
sieeie  de  notre  ere ;  mais  quelle 
Bhe  il  devait  reprendre  des  le  com- 
Nuent  do  douzieme ;  k  quelles  ter- 
represailles  il  devait  se  livrerC)! 

ijres  Goiflaaioe  de  Tyr, 


LB  SULTAIf  TUBG  ET  L'BMPKRBUB 
GBBG. 

Les  Turcs,  dans  leurs  conqu^tes ,  ren- 
eontrerent  plus  d'avantages  que  n'en 
avaient  trouv^  les  Arabes.  L'Orient ,  au 
cinquieme  siecle  de  Thegire,  jouissait 
d'une  civilisation  avancee.  II  ^tait  reste 
de  la  longue  domination  des  khalifes 
un  bien-etre  presque  general ,  et  la  cul- 
ture des  sciences  et  des  lettres,  que  les 
souverains  avaient  prote^^es,  portait 
des  fruits  precieux.  Parmi  ces  peuples 
naturel  lenient  inteltigents,  Tetude  devait 
developper  certains  esprits ,  et  offrir  a 
chacun  Temploi  de  ses  aptitudes.  Or, 
dans  un  pavs  ainsi  fait,  il  suffisait  qu'un 
prince  e6t  le  bon  sens  d'attirer  a  lui  les 
gens  capables  pour  gouverner  avec  au- 
tant de  facilite  que  de  grandeur.  Ce  bon 
sens  fut  Tune  des  qualites  d'Alp-Arslan : 
il  reunit  a  sa  cour  des  poetes  et  des  phi- 
losophes,  des  politiques  et  des  savants. 
Aussi.ce  petit-hls  d'un  berger  fut-il  bien- 
tot  un  grand  roi.  Ne  connaissant  que 
Tart  de  la  guerre,  il  se  rdservait  de  com- 
mander lui-m^me  ses  armees ;  mais  il 
laissa  administrer  son  peuple  par  un 
bom  me  aussi  habile  que  consciencieux, 
qui,  grdce  a  la  confiance  qu'on  lui  mon- 
trait,devintbientdt  un  ministre  excellent. 
Ce  ministre  s*appela|t  Nizam-el-Mulk  : 
il  organisait  chaque  contree  a  mesure 
que  son  mattre  laconguerait;  et  il  por- 
tait tant  de  soins  a  son  oeuvre,  il 
savait  si  bien  se  servir  des  Elements  que 
lui  offraient  la  nature  et  les  moeurs  des 
populations,  qu'il  consolida  partout  le 
pouvoir  des  Seldjoukides ,  et  ne  fut  pas 
pour  pen  dans  Tetablissement  de  leur 
puissance. 

Outre  d*habiles  administrateurs,  Alp- 
Arslan  sut  former  aussi  de  hardis  lieute- 
nants. Parmi  ces  derniers.  Fun  des  plus 
illustres  fut  un  certain  Atsiz,  qui  mar- 
cbait  a  Toccident  du  Tigre,  tandis  que 
son  mattre  s'avan^ait  vers  Torient.  Cet 
Atsiz  entra  en  Sv  rie ,  arracha  aux  Fathi- 
mites  lesud  de  cette  province,  tandis  qu*il 
reprenait  au  nord  quelques  cites  aux  By- 
zantins.  Les  Fathimites  furent  assez  pru- 
dents  pour  ne  pas  entrer  en  lutte  plus 
longtemps  avec  cette  puissance  nouvelle 
et  invincible.  lis  se  renfermerent  dans 
leur  £gypte ,  sans  provoquer  davantage 
les  Turcs,  qui  grandissaient  de  jour  efi 


21S  L'tmiVEM. 

jour.  Les  Byzantlns,  au  contraire,  plus 
imprevoyants  et  plus  pr^omptueux ,  s*i- 
maginerent  qu'ils  pourraient  dompter 
ceseiivahisseurs  de  leurs  Etats,  et  se  ven- 
ger  d*un  coup  de  la  perte  de  piusieufs  de 
leurs  possessions.  Ilkavaient  alors  un  em- 
pereur  ffUerrier  Romanus  t>iogenes.  tis 
levereof  une  arm^e  que  quelques  bisto- 
riens  portent  au  nombre  de  trbis  cent 
mille  hommes ;  mais  cette  armee,  comme 
toujours,  etait  un  ramassis  de  peuples  de 
toutesesp^ces,  uue  cohue  Sans  discipline 
et  presque  sans  cqurage.  Cette  hiasse 
confuse,  malgr^  Hntrepidit^  de  son  cd- 
pitaine ,  ne  put  pas  tenir  contre  quarante 
mille  cavaliers  commandos  t)ar  Alp-Ars- 
lan.  Ceux-ci,  en  effet,  barcelaierit  tene- 
ment les  Grecs,  quails  leS  s^parerent  en 
mille  tron^ons,  et  jet^rent  Tepouvante 
dans  leurs  rangs.  Komanus  Diogenes 
chercha  a  ralliet  sps  troupes  6parses ;  et, 
malgr^  sa  priemiere  defaite .  malgr6  un 
traite  avantageux  que  lui  ofrrait  le  sul- 
tan turc,  il  eut  Timprudence  de  presenter 
un  nou  veau  combat  21  son  heureux  adver- 
Saire  (*)• 

La  desertion  U  joignit  encore  d  la 
peur  panidue  dans  Tarm^e  byzantlne. 
Romanus  Diogenes  n'en  persista  pas 
Jiiolnfi  dans  la  Tiitte  avec  Un  ent^teraent 
inconcevable.  Puis,  lorsqu'on  en  virit 
aux  mains,  T^mpeireurde  Constantinople 
montra  la  plus  grahde  inbabilet^  mill- 
tuire.  Au  lieu  d  etendre  ^es  troupes  en 
plusieurs  lignes,qui  SeSeraient  apf  uy^es 
les  unes  siir  les  autres;  aulieud  etablir 
une  reserve,  utile  surtout  dans  un  com- 
bat contre  des  cavaliers,  Romanus  Dio- 
genes crut  faire  merveille  en  formant  de 
son  arm^e  tout  enti^re  un  colossal  ba- 
taillon  carr^.C'etait  donnertoute  liberty 
aux  allures  rapidesetdi verses  de  la  cava- 
lerie  turque.  AuSsi,  malgr^  la  vigueur 
du  premier  clioc  des  Grecs,  leurs  ennemis 
n*eurent-ils  aucune  peine  a  les  d^cimer, 
sans  courir  eux-m^mes  de  ffrands  dan- 
gers. Alp-Arslan  avaitdonne  a  ses  trou- 
fes  Texemple  de  la  resolution.  On  rap- 
orte  quMl  releva  lui-mfime  la  queue  de 
son  cheval ,  qu'il  rejeta  son  arc  et  s^ 
Heches  pour  ne  prendre  qu'une  rnassiie 
et  un  cimeterre,  ua'il  se  revfiiit  enflu  d'un 
habit  blanc  serre,  indiquaot  ainsi ,  par 


la  toilette  de  son  ehml  et  dellii•B^ 
et  par  le  cholx  de8esarni«s,qQebv| 
toire  6tait  dans  la  l^g^etidesnuirt 
ments  et  Aih^  la  raplditf  des  (Ml 
Alp-Arslad  avait  Hison :  \timi 
£atigu&rHit  des  sttagues  perfH 
des  Turcs.dU'ils  supportertottMll 
long  Jour  d'6te,  ti  fM  lesbit,  loM 
vouiurent  hntrer  dads  lebf  «lg 
ne  purent  roister  atuubttVelks 
vres  de  leurs  ennemit,  qui  fin 
oontre  eiix  un  croissaat ,  dobt  b 
pointes  fihirent  par  se  reJoindltH 
lopper  entierenienl  rariDc«  Ijtl 
Romanbs  Diog^deS,  qui,  s'il  nil 
bile  general,  ireri  aaitp^sinoiA 
soldat ,  se  defendit  avec  raiii ' 
troupbs  Jusqu'a  laooitSood 
tue  sous  lui ,  ses  j^rdes  fdrtit 
cr^s  jusqu'au  dernier ,  et  rt  wi 
fcouvert  de  blessures,  etsMlp^l 
dans  des  mains,  qu'oo  put  lett^ 
sonnier.  ,  ' 

ici  se  montra  le  eirsct^rtjw 
rent  du  sultan  turc  et  de 


(•)  Voyei  El-Madn,  HitL  Saraeen^,  etMioi- 
pDoro  BrieDoiut. 


gee.  Alp-Arslan  fotpleindel 
ns  ^a  cbnduite,  Romaotfli 
pldii  de  vanit6.  La  geoMt  i 
lie  fut  surpass!^  que  par  riflp 
d^  I'autr^.  Alp-Arslan,  a  ^  » 
amed^  Romanus  Diogteel,lAii 
niilier  dan^  sa  defaite,  lefeWi^ 
coui-age  personnel,  luiimah 
aiTection ,  et  lui  promit  qirti 
rait  ni  a  ses  joiii*  rti  a  sa  ng 
ayantcritiqui;  a?ecautanl*IJJ 
de  dignity  le  plandebatailkkj 
tal,  Alp-Arslan  finit  p^r  tf* 
ce  qu'il  aurtiit  fait  de  loi  JlJ*" 
i'^tait  prononc^e  en  feTC«r* 
«  J*aurais  ordonne^u'wteftr 
r^pohdit  le  ridicule  ct  insoleol 
de  Constantinople.  Alp-ArtjJ^ 
et  ne  se  Tengea  qu'en  tnoem 
consideration  que  jamais  ^^^ 
sonhier ,  et  en  acceptant  de  !•' 
bon  d'un  million  de  p«<^''5[\j|| 
deux  hommes  quel  etait  le  IsrtJ 
Nous  avons  racoiiti^  avecq*f 
tails  les  rapports  d*Alp-Ar8li» 
manus  Diogenes  parce  qa^H  i 
caracteristiques,  et  parre  que » 
sement  ils  d^montrent  am^ 
Bup^orit^  de  Tun  sor  Tautre.  Orl 

n  Yoyex  ZoBarat  et  RtoiphonV 


SYRIE  MOD£RNE. 


21* 


ir  de  Constant inople  etait  le  ch^f  des 
fetiens  en  Orient ;  et  ii*etait-oe  pas  uae 
Htable  caUmite  pour  )e  christronisnie 
ftd'avolrun  pareit  representant?  Tous 
rdiseiples  du  Christ  devaient  soufTrir 
ll  faibiesse  croissante  de  I'empire  hy^ 
mD,  et  de  Tirremediable  stupidite  de 
[priooes.  Les  fldeles  de  Syne  furent 
paussi  abattus  qu'humilies  de  la  de^ 
I  da  Romanus  Diogeoes,  et  la  croiK 
|ri)la  de  noureau  devant  le  croissant, 
ioti  quelevfeil  Omar,  qui  reste  tou- 
I  im  des  plus  grands  libalifes  de  TIs- 
lAlp-Arsian  etait  rigide  mais  juste, 
re  mais  liberal ,  g^nereux  parce  qu*il 
i  fort,  perseverant  paree  qu'il  etait 
viflcu.  Dans  ces  deux  hoinmes  il  y 
i  a  la  fois  de  la  fougue  et  de  la  prll- 
t.  deTaudace  bt  dela  sagesse.  Seu- 
Omar  brillait  surtout  par  son 
Dce,  AI^Arsian  par  sdn  mspira- 
L'un  etail  un  esprit  longuement 
par  la  reflexion ,  Taut  re  un  esprit 
Irat  fait  par  la  nature.  Tous  deux 
'le  pastorale,  ils   dooquirent  le 
sanss'enorgueilliret  presquesans 
er.  Tous  deUx  de  mceurs  auste- 
Bs  surent  dompter  leurs  propres 
M)s,aTant  derepriiner  ceiles  desau- 
etvecurent  au  milieu  du  luxe  sans  se 
amollir.  Nobles  et  grandes  natu- 
us  df  ux  Grent  des  merveilles  dignes 
comparees !  Omar  erea  un  enopire, 
desArabes;  Alp-Arslanen  ressus- 
autre,  celui  des  Persans.  Par  ses 
cueffet*  qui  servaient  de  mode- 
IX  qui  Toiilaient  lui  plaire.  Alp- 
outre  qu' ll  fa^onnait  les  Turcs, 
iers  sujets ,  sut  rend  re  aux  Per- 
^>lBor  ancienne  valeur.  II  y  eut  des 
itre  ces  deux  peuples  alliance  d'in- 
!,  sinoa  fusion  de  races.  Mais  ee  qui 
te  cbup  le  plus  violent  au  clirls- 
M,  oe  hit  queceshomniesdu  iiord 
'Asia, ease  mClantainsi  alacivilisa- 
fislaraique.  pour  la  mieux  dominer  se 
Ik  mahometans ,  etapporterentainsi 
religion  ritale  de  celle  du  Christ  un 
lent  nouveau  de  vigueur  et  de  jeu* 
t.  L*Orient  desormais  ^tait  a  TIs- 
•  le  ehristianisme  indigene  ne  pou- 
plus  songer  a  lutter  tout  seul  contra 
oran  vainqueur,  et  il  ne  faliait  rien 
us  que  les  hommes  du  nord  euro- 
I  pour  renouTder  la  combat,  et  ba- 
er  la  ?tttmre. 


En  voyant  ees  puissances  diverses  si 
vite  Stabiles  et  si  promptement  conso- 
lidees ,  en  assistant  aux  triomphes  si  ra- 
pides  de  tant  de  conquerants  improvi- 
ses ,  en  admirant  oe  spectacle  d*unit^  et 
de  variety  a  la  fois  que  presentent  las 
annales  asiatiquea,  unite  par  la  religion, 
variete  par  les  races  dominatrices ,  on 
serait  tente  de  croire  a  la  superiority 
definitive  du  croissant  sur  la  croix,  n'e- 
tait  rinstabilite  de  ces  fortunes  d'un 
jour ,  fortune  de  peuple  comme  fortune 
de  prince.  Alp-Arslan,  4Aes6  sous  la 
tente  victorieuse  et  au^t^re  deThogroul- 
Bejr,  son  oncle,  general  habile  a  vingt 
ans^  empereur  tout-puissant  atrente, 
que  nVdt-il  pas  fait  a  cinquante ,  lors- 
que  rdge  aurait  encore  eugmente  ses 
qualites  naturelles^  si  ane  mort  violente 
ne  TeOt  emport^,  Tan  465  de  I'begire, 
Il  peine  dge  de  quaronte-quatre  annees? 
Un  assassin  obiscur  trancha  le  fil  de 
cette  existence  merveilleuse ;  et «  mal- 
gre  les  vertus  singulieres  de  son  succes- 
seur  pt  fils,  Melik-Schah,  cette  catastri»- 
nhe  ebranla  jusqUe  dans  ses  fondements 
I'empire  dts  Turcs.  Alp-Arslan ,  frapp^ 
d'un  coup  de  couteau ,  ne  mourut  pas 
immediatement  de  sa  blessure :  il  eut  le 
temps  de  donner  a  ton  fils  de  pn^oienx 
conseils;  il  conserve  jusqu'au  dernier 
moment  la  beauts  de  ses  traits «  I'itttDl- 
ligence  de  son  regard,  la  hauteur  de 
son  esprit;  et,  inspire  par  ce  qu'il  y  avait 
de  pluk  eieve  dans  les  priceptes  du  Ko- 
ran ,  H  ordonna  qu*on  inscrivtt  sur  son 
tombeau  ees  paroles  vraiment  philosophi- 
ques  :  «  Vous  tous  qui  avez  vu  la  gran- 
«  deur  d' Alp-Arslan  elev^  jusqu'aux 
«  nues ,  venez  a  iVl^ou ,  et  vous  la  ver- 
»  res  enseveliedans  la  poussiereC). » 

MELIK-SGHAH. 

L*empire  des  Turcs ,  fond^  par  deux 
conquerants  au  lieu  d*un,  Thogroul-Bey 
et  Alp-Arslan,  parvint  a  son  apo^fee 
sous  Melik-Schah.  Ce  prince  l^tait  digne 
d'une  si  opulente  succession.  £ieve  par 
son  p^re  au  milieu  deS  camps;  ^loigne 
des  capitales ,  oii  les  fits  des  rois  trou- 
vent  tant  d 'aliments  pour  leurs  pas- 
sions et  d*cpuisement  pour  leur  esprit; 
heritier  d'un  sang  pur  et  d'un  caractere 
fier,  il  savait  des  Tdge  da  dlx-huit  ana 

(*)  Toyez  AbNU-Pura^t*  I>9*^»L 


220 


L'DNIVERS. 


inener  au  combat  une  troupe  de  eava- 
iiers;  il  eomprenait  et  r^fl^hissait,  il 
avait  a  la  fois  rintelligence  du  coeur  et 
eeiie  de  rdine.  Grandf  et  beau  comme 
son  pere ,  sa  verte  jeunesse  ne  connut 
aucun  de  oes  vices  qui  eteignent  tant  de 
lumieres  en  nous,  il  n'avait  d'autres 
plaisirs  que  oeiui  de  la  chasse,  et  sa 
pens^e,  toujours  chaste,  devait  tendre 
naturellement  aux  aspirations  les  plus 
nobles  et  les  plus  elevees.  Ce  jeune 
homme  accompli  devint  bien  vite  un 
grand  empereur.  Plein  de  gravite  et  de 
sens ,  il  se  confia  tout  d'abord  au  genie 
experiments  du  ministre  de  son  p^re, 
Nizam-el-Mulk.  II  etudiait  de  longues 
heures  avec  lui ,  p^Strait  avec  resolu- 
tion dans  les  arcanes  de  )a  politique  et 
dans  lesieplisde  I'administration,  vou- 
lait  tout  savoir  pour  tout  ju^er,  tout 
apprecier  d'abord  pour  tout  diriger  en- 
•uite  (*). 

Get  apprentissage  severe  et  conscien- 
cieux  ne  fut  pas  long  a  Itre  utile  a 
Melik-Schah.  L'el6yatioQ  pbenomenale 
de  la  fa  mi  lie  des  Seldjoukides  avait  fait 
en  elle  germer  Tambition.  La  jeunesse 
m^me  de  Melik-Schah ,  ce  pouvoir  im- 
mense entre  les  mains  d*un  adolescent, 
eveillerentTenviedans  le  coeur  de  Tun  de 
ses  onc4es.  Get  homme,  nommS  Ka-* 
derd ,  deja  gouverneur  de  la  Karamanie 
persique,  malgre  les  bienfaits  dont  Ta- 
vait  comble  Alp-Arslan,  se  revolta  oontre 
son  fils.  Ce  Kaderd,  aussi  habile  in- 
trigant qu'intrSpide  general,  se  crSa 
un  grand  nombre  de  partisans ,  et  leva 
une  armSe  considerable.  II  ne  fallut  rien 
moinsque  les  meilleures  troupes  de  Tem- 
pire  turc,  eel  les  du  Khorassan,  pour 
vaincre  les  multitudes  qu'avait  ameutees 
Toncle  contre  le  neveu.  Encore  la  ba- 
taille  que  se  livrerent  les  deux  rivaux, 
dura-t-elle  trois  jours  et  trois  nuits,  et 
fut-elle  une  des  plus  sanglantes  que  les 
plaines  de  la  Perse  virent  daus  aucun 
temps.  Le  courage  du  jeune  sultan, 
rbabilete  de  ses  genSraux,  fardeur  de  ses 
soldats  d*eiite  lui  valurent  la  vietoire, 
et  decouragerent  les  autres  pretendants 
en  ailermissant  sa  puissance. 

Mais  Melik-Schah  etait  aussi  genereux 
qu'il  etait  brave :  il  se  contenta  (Tenvoyer 
Raderd  dans  un  chAteau  qui  devait  lui 

n  Voyeid'Herbelot,  Biblioth.  orient. 


servir  de  prison  jusqu'a  la  fin  d» 
bles.  Get  acte  de  veitu  fot  uoe  fand 
litique.  LesseditieuxamnistiesB*e&i 
tinuerent  pas  moins  leurs  intri^Ni;] 
agirent  avec  tant  d*adresse,  qnv 
nerent  de  leur  parti  les  troapes 
qui  les  avaient  vaineus.  Les 
Kliorassan,  incessamment 
les  partisans  de  Raderd,  le 
rent.  lis  exigerent  qu'on  dooM 
solde,  et  menacerent  de  del  ' 
lik-Schah  au  profit  de  K^aderd,  ij 
les  satisfaisaitpas.  Meiik-Schahf 
d'ordonner  en  pleurant  ia  mort 
onde,  tant  les  necessites  gouva 
tales  oommandent  parfois  aox 
des  actes  contraires  a  leurs 
Gette  mort  apaisa  toote  seditej 
elle  fut  un  tel  sujet  de  regret  p< 
Schah,  que,  plus  tard,  il  ne  la 
rer  qu'en  rendant  au  fils  de  U 
gouvernement  de  la  Karamaw] 
que. 

Une  fois  son  empire  affc 
lik-Schah,  loin  de  s'endormir, 
s'abandonner  mime  un  instaat 
sipations  que  son  ige  edt  en 
songea  qu*a  agrandir  llierit^ 
pere ,  et  a  marcher  sur  ses 
eonquete  du  monde  oriental. 
Ian  avait  a  la  fois  chercbe  a  si 
I'est  et  k  Touest,  Melik>Sehah 
example  difticite  et  glorieux.  Bi 
done.  Tan  467  de  Fhegire, 
Souleyman  en  Syrie  avec  mt 
nombreuse,  tandis  que 
van^  au  dela  de  TOxus 
deux  armees    conqu6rantes 
extremites  de  son  empire,  a 
cinq  cents  lieues  Tune  de  Ti 
leyman  reussit  au  dela  mftne 
ranees  du  jeune  sultan.  II 
Fathimites  jusqu*au  fond  de 
s*empara  des  valiees  du  Utei^ 
I'Anti-Liban,  mit  des  gamiMfti 
toutes  les  villes  de  la  cdte  syiitf 
enfin  prit  I>ama8,  Alep  et 
trois  capitales.  Ce  gu'Atsiz 
d'Alp-Arslan ,    avait    eommenal 
des  fortunes  diverses ,  fl  le 
un  succes  constant.  Pais,giieea 
periorite  incontestable  du  vizir  "* 
el-Mulk,  qui  d'lspahan,  ou  il  sej 
savalt  faire  rayonner  sur  tout  V 
loisTegulatrices  de  son  admii 
en  moins  d*ua  an  destributs 


SYRIE  MODERNS. 


S21 


'^      farent  Qxh,  et  Tunit^  gouvernemen- 
^      tale  se  trouva  6tablie  (*). 
^'         Les  populations  syrieDnes  pr6feraient 
^      un  ordre,  guel  qu*il  fttt,  a  Tanarchie  qui 
■^      les  avail  si  longtemps  accablees ,  et  ir^- 
"      taient  les  inconv^ients  d'un  culte  dif- 
^      f(6rent,  les  Chretiens   eux-m^mes  au- 
^      raient  pu  respirer  quelque  peu  apreg 
'      tant  de  malbeurs.  Mais  Fantagonisme 
'       entre  les  deux  religions  durait  toujours. 
(Tetait  le  fruit  des  expeditions  malencon* 
'I      treuses  de  Nic^phore  Phocas  et  de  Zi- 
^'      misces.  Ausst ,  quoique  les  princes  do- 
'      minateurs   fussent   elements,  quelque 
>**      tolerance  personnellequ'ilsmontrassent , 
r      la  lutte  entre  les  deux  cultes  n'en  demeu- 
■      rait  pas  moins  vive,  la  baine  profonde,  la 
'■      separation  perp^tuelie.  D^ormais  il  ne 
^      s'agtssait  plus  de  rigueurs  temporaires, 
^'      d'exigences  politiques,  d'affaires  de  prin- 
f      ees  h  peu  pies;  la  ruction  grecquedela 
f      fin  du  dixieme  si^cle  avait  tellement  d*un 
e6t6  reveille  les  pretentions,  et  de  I'autre 
ralhime  les  dissent! ments,  qu'il  y  eut  d^ 
^      lors  en  Syrie  deux  nations  divergentes, 
I      enneniies,  les  Cbr^tiens  et  les  Mabooi^- 
{      tans.  Mplorables  consequences  d'une 
r      lutte  oil  le  vaincu  ne  sut  pas  prendre  son 
I       parti,  ou  la  guerre  civile  hit  regardee 
h      comme  une  guerre  sainte ,  ou  surtout  la 
r       barbare  Ineptie   des  deux   empereurs 
i       grecs  ouvrit  f^re  des  vengeances  et  des 
I       persecutions.  La  Syrie  catholique  ne 
I       trouva  done,  dans  la  domination  de  M^ 
I       lik-Schab,  aucun  adoucissement  a  ses 
maux.  Si  le  gouvernement  turc  etait 
juste  et  genereux,  ses  officiers  subal- 
ternes,  sa  mliice,  et  jusqu'a  ses  par- 
tisans dans  le  |)euple,  conserverent  con- 
tre  les  Chretiens  tant  d'animosite,  les 
accabierent  de  tant  d'avanies,  les  tour- 
menterent  de  tant  de  faqons,  que  leur 
sort  fut  aussi  pitovable  sous  une  bonne 
administration,  celle  de  ^lizam-el-Mulk, 
que  sous  la  plus  mauvaise  de  toutes, 
oelle  de  Hakem. 

Melik-Schah  r^ussit  aussi  bien  au  deU 
de  rOxus  qu'au  dela  de  TOronte.  II  exe« 
cuta  le  projet  gigantesque  de  son  pere, 
soumit  les  villes  de  Bokharah  et  de  Sa- 
markande,  s'etendit  jusqu^auxconflns  des 
Indes ,  et  fit  graver  son  nom  sur  les 
roonnaies  du  ro^aume  tartare  de  Kas- 
gtiar.  Ainsi  voism  d'un  c6te  des  peuples 


de  la  supreme  Ame .  lea  Gbifioifi,  il  n'a- 
vait  de  rautre  o6te  que  le  deplorable 
empire  de  Constantinople  qui  le  separait 
de  TEurope,  tandis  qa*au  sud  il  poss^ 
dait  la  Mesopotamie ,  la  Syrie ,  et  lea 
trois  Arables.  Cet  empire  eolossal  ne 
fati^ua  point  lecourageux  et  perseverant 
Melik-Scbah.  Conseilie  par  son  excellent 
vizir  Nizam*el-Miilk,  il  sut  donner  d'e- 
quitables  lots  aux  populations  innom- 
brables  de  ses  immenses  posseasions* 
Puis,  non  content  des  bons  rapports 
qu'on  lui  faisait,  il  voulait  tout  voir  par 
ses  yeux.  II  entreprit  done  le  tour  de  sea 
£tats,  visitant  toutes  les  villes,  sVnque* 
rant  de  la  facon  dont  on  rendait  la  jus- 
tice, et  faisant  rentrer  lui-meme  les 
imp6t8.  Cette  noble  maniere  d'agir  eta- 
blit  partout  un  ordre  parfait,  et  surtout 
augmenta  enormement  le  tresor  pu- 
blic. Avec  lessommes  considerables  qu'il 
reunit ,  avec  les  trtbuts  qu'on  lai  payait 
de  toutes  parts,  Melik-Schah,  loin  de 
s'abandonner  k  des  plaisirs  futiles  et 
toujours  onereox,  loin  de  se  livrer  aux 
depenses  de  luxe,  dont  la  oour  de 
Constantinople  off  rait  depots  des  sie- 
des  le  plus  scandaleux  spectacle,  reso- 
lur'^d'employer  au  profit  du  bien-^tre 
general  les  richesses  dont  il  regorgeait. 
Apres  avoir  traverse  tous  les  pays  ha- 
bites  de  son  empire ,  il  voulut  se  baaar- 
der  aussi  dans  les  deserts,  afin  de  lea 
transformer  autant  qu'il  lui  serai t  poe- 
sible.  II  commenca  done  son  peleri* 
nage  de  la  Mekke ,'  emmenant  avee  lui 
d'habiles  ouvriers  au  lieu  d'oisifs  pele- 
rins.  A  cheque  etape  il  fit  creuser  dea 
citernes;  de  distance  en  distnnce  il  fit 
bdtir  des  bourgades  :  repandant  ainsi 
sur  sa  route  des  bienfaits  qui  devaient 
etre  eternels.  Sa  caravane  laborieuse  prit 
au  retoun  un  autre  chemin,  perqa 
dans  un  nouveau  desert  de  nouveaux 
puits,  eieva  de  nouveaux  villages, 
et  ouvrit  des  routes  qui  durent  en- 
core (*). 

C'est  par  de  pareils  actes,  c*est  par 
un  gouvernement  aussi  eauitable  que 
prevoyant,  que  Melik-Scnah  •^s'attira 
le  coeur  des  populations,  et  centupla 
sa  force.  Malneureusement  les  Musul- 
mans  seuls  devaient  profiler  de  ce 
grand  r^gue.  Nous  en  avons  dit  deja 


C*)  Voyez  El-Madn ,  Hist,  Same. 


(*)  Yoycs  Ab*alFeda,  AnnaL  mo$lem. 


m 


vmavBW. 


ouelquesHUMS  d«s  raiaoos :  la  derm^ce 
tut  la  lutte  que  rempereur  bysantio 
eut  encore  la  pr^oaption  d*engager. 
Loin  de  ae  tenir  dans  una  r^rve  pru- 
dante,  le  prince  grec  commit  la  sottiae 
d'attaquer  ie  aul^in  dans  une  de  ses  pe- 
vegrinationa  civiiiaatricea.  Uujour  iiilmQ 
il  eut  la  chaiioe  de  le  voir  tomber  dana 
une  de  aea  embuacadea.  Mais  lea  aoldata 
qui  a'emparereot  de  Melik-Schah  oe 
se  douterent  paa  de  la  priae  qu'ila 
avaient  faite*  Le  aultan^  plain  defiuease, 
diasimula  aon  rang  :  il  ae  fit  passes 
pour  un  homme  de  peu  d'importance, 
ainsi  que  eeux  qui  le  auiYaient.  S^uler 
ment  ifae  hiita  de  [w^venir  son  ministre 
Nizam-el-Mulk  da  la  poaitioa  ou  ii  se 
trouvait.  Le  vizir,  tluasi  adroit  que 
son  mattre,  fit  placev  la  garde  ordinaire 
a  la  tante  imperiale  et  parti t  incontinent 
en  qualite  d'ambaasadeur  vera  Temper 
reur  byzantin.  Ntzam-el-Mulk  offrit  la 
paix  k  des  conditions  fevorablea.  Sa 
proposition  tut  acceptee ;  et  le  souve-* 
rain  grec,  pour  faire  montre  de  ma- 
gnanimity, declare  qu'il  ailait  rendre 
au  vizir  turc  quelqued  prisonniers  que 
sea  troupea  avaient  faits.  On  amena  en 
consequence  le  aultau  et  sa  auite  a 
Kizam-el-Malk.  Ce-  dernier,  conti- 
nuant la  comedie  dont  le  premier  acta 
avait  si  bien  reussi,  jeta  un  ceil  de 
dedain  sur  le  sultan  et  sembla  Temme- 
ner  avec  indifference.  Ce  ne  fut  qu*a 
queloue  temps  de  la  que  la  paix  n'ayant 
pas  et6  rati  Gee,  et  que  Tempereur  greo 
ayant  i  aon  tour  et6  fait  prisouuier, 
apres  la  defaite  comnl^te  de  son  armee, 
reconnut  a  son  grana  regret  Terreur  qu^il 
avait  commise ;  niaia  le  sultan,  toujours 
gen^reux,  compU  au  chef  des  Chr^iens 
comma  une  bonne  oeuvre  de  sa  part  ce 
qui  n'avait  ^te  que  Tefff t  d'une  meprise, 
et  le  renvova  a  Constantinople. 

Kizam-el-Mulk,  dont  lliabilete  avait 
aauv^  son  prince,  devint  plus  inHuent 

aue  jamais.  Malheureusement  cetle  in- 
uence  croissanie  augmenta  le  iionibre 
de  ses  envieux.  On  se  ligua  centre  lui , 
et  il  compta  m§me  parmi  ses  ennemis 
la  propre  femme  de  Melik-Schah,  la 
sultane  Tarkhan-Khatoun.  Voici  a  quel 
aujet  il  s*etait  fait  un  adversaire  de  cette 

Srincesse.  L'histoire  constate.  Tan  47$ 
e  riiegire,  le  manage  de  Melik-Schah 
avec  Tarkban-Kbatoun;  et  cependant, 


aana  parler  d*ane  autre  aaltane, 
clare  aussi  que  le  fils  de  Tar! ' 
toun  n'etait  que  le  cadet  des 
Melik-Schah.  La  sultane  euit 
et  ambitieuse,  elle  s*efl6r^ 
ment  de  faire  designer  son  fib  i 
comme  suocesseur  de  son  marv 
des  enfants  de  Melik-Schab,  i 
Berkiarok ,  ^tait  le  plus  pres 
et  aemblait  en  outre  a  ^" 
le  plus  digne  de  re^ner.  De 
ment,  rupture  et  animosite  ~ 
tane  et  le  vizir.  Le  vizir 
doute  que  Tb^ritage,  trai 
au  cadet,  ne  fdt  unecausiB 
futura  ddos  rttatt  et  qu*il  ^\ 
des  guerres  eiviles  comme '' 
eu  avait  eu  a  aoutenir  au  001 
de  son  regno.  La  aultantt 
jeunesse  de  son  fils,  s'en 
vantage  a  son  opiDion;  et  pevri 
aon  but ,  die  ne  trouva  pi|i 
kur  moyen  que  de  renversir ' 
Mulk.  £lle  s-mgenia  done  a  1 
tar  dans  I  esprit  de  Melik-Seh 
de  denunciations ,  dlotrigiMl 
lomntes.  Ces  premises  al 
impuissantes ;  mais  Ion 
a  prouver  au  sultan  que 
da  it,  par  aea  douze  enfisnta 
d'autrea  membres  de  sa  f 
les  grandea  charges  de  V 
Schah ,  qui  jusqu*alors  n> 
oes  hommea  que  des  servi 
prit  enfiu  ombvage  du  pow 
de  Nizam^eUMukk  (*). 

II  iui  fit  en  ooBsequensi 
par  un  de  ses  ofliciers^  des( 
cat^goriques.    Cet    ofiieMr 
creature  de  Tarklian-Khal 
necessairement  au  dela  de 
menaca  faussement  le  vizirj 
du  sultan,  de  lui  enleverla 
r^icritotre,  marques  distil 
dignite.  Nizam-eUMulk,  M 
quatre-vingt-dix  ans,  patri 
de  genie  ct  de  grandeur,  «e 
ment  blesse  de  oette  iniustiwl 
prince  et  de  rinsolenee  de  i 
et  il  repondit  avec  hauteur  . 
net  qu'il  portait  et  la  charge  qu' 
dait  etiient  tellement  lies  par  fa 
de  la  Providence  a  la  courooi 
trdne  du  sultan,  que  ces  q 

(*)  Voyeid'Herbelot,  BibhoiAiqM* 


Draoa'd 
ue  Ml 


SYRIE  MODERNS. 


333 


j»  poQvaieDt  subtler  ]\me  6ans 
(re.  Cette  r^ponse ,  si  juste  luais  si 
L  fui  rapportee  aTec  toute  sorte  de 
ineoUires  calomnieux  h  Melik- 
^ ,  giii  s'en  offensa ,  destitaa  son 
^^,  vizir,  et  donna  sa  charge  h  Tadj- 
'krKaipi ,  chef  des  conseils  de  ra 

[f i^ir  destitu4 ,  grdce  h  sa  haute  et 
pte  reputation,  n'en  restait'pas 
ijn  personnage  tres-important 
at,  un  exeiDDle  de  Tinjustice 
et  une  critique  vivante  de 
.aigne  successeur.  Celui-ci,  au 
btein  de  jalousie  et  de  haine ,  mit 
liUe  a  son  forfait  en  faisant  assas- 
|,19izaiD-ei-Mu(k.  Ni  cet  homnie 
^  Di  Tambitieusesultane,  n'avaient 
\  d^arm^s  par  la  vie  si  noble- 
»^plie  da  vieux  vizir.  En  vain . 
\me  jeunesse  studieuse,  avait-!I 
'  toute  sa  science  au  bien  de 
:  en  rain,  en  protegeant  les 
l(ettres,  avait-ii  avanc^  la  civiH- 
I  en  vain,  en  ^l^vant  des  colleges 
gcandes  villes.  a  Baghdad ,  k 
,  Ji,  i  Herat,  k  Ispahan,  avait-il 
l^te  rinstruction  dans  )e  peuple; 
ik>  ^  co|iseillant  son  prince,  lui 
I  fait  remporter  des  victoires ! 
>  ce^  vertus  et  tous  ces  services 
t  des  vices  et  des  trahisohs  aux 
i^nvieuse  sultane  et  de  son 
iininistre.Nizam-elMuIk,au  nii- 
J  ses  travaux  ^olitiques ,  avait 
(^l^loisir  de  ternxiner  un  livre  ou  il 
}  princes  des  prteeptes  et  des 
pour  bien  gouverner  leurs 
letengn  ii  eut  le  temps ,  avant  de 
%  de  laisser  cet  adieu  touchant  et 
iMeliknSchah  : 
fraod  monarque,  j'ai  pass^  une 
w  de  ma  vie  a  bannir  r injustice 
•osEtats,  fort  de  votre  autorit^. 
^le  aveo  moi^  et  je  vais  presenter 
<<UTcraiu  roi  du  del,  les  comptes  de 
^  adiiiinistration ,  les  temoignages 
!»  fidelite,  et  les  titres  de  la  repu- 

EQue  j'ai  acquise  en  vous  servant, 
ae  votre  royale  main.  Le  terme 
de  ina  vie  ^f  rencontre  dans  la 
^viugt-treiziemp  annee  ie  mot\ 
tfA  c'est  un  coup  ^e  Qouteau  qui  en 
>we  le  fil.  11  ne  tne  resle  plus  qu'k 
f^ttre  a  mes  fils  ia  continuation  des 
8»  services  que  je  vous  ai  rendus,  en 


les  recommaodant  k  Dieu  et  a  votre 
majeste  (*).  » 

Melik-^Schah  fut  tr^-affeet^  de  la 
perte  de  Nizam-el-Mulk.  Cette  mort  si 
r^ignee  et  ce  noble  testament  lui  ou« 
vrirent  enGn  les  yeux.  Qoe  se  pessa^t41 
alors  dans  V&vne  de  ee  grand  prince? 
Fut-il  biess^  du  caraei^re  de  sa  nmme? 
Se  d^goOta-t-il  tout  k  coup  du  pouvoir 
suprmne  ?  Ses  idees  mahometaiies ,  ren- 
forc^es  par  les  ^v^nements ,  lui  prouvd- 
rent-elles  evidemment  Tinstabilite  des 
choses  hiimaines?  Ou  bien,  JNizam-el- 
Mutk  n'aura!t-il  pas  emportlft  dans  le 
tombeau  la  plus  large  part  du  geoie  de 
son  mattref  Toujours  est-il  que,  du 
jour  de  Passassinatde  sen  mlntstre,  on 
Tit  le  sultan  sombre ,  charge  4*ennuis 
secrets,  accabl^  d'un  mal  int^rieur.  Sans 
int^r^  pour  la  vie  et  le  goaverQement, 
il  allait  quotidiennemenl  k  la  ohasse, 
pintdt  pour  chercher  la  solitude  que 
pour  s'adonner  a  son  plaisir  favori.  Sa 
m^lancoiie  m#me  augmenta  tellemf^nt 
qu'elle  Temporta  quetques  mois  apres 
son  vizrr,  raq  485  de  Fb^ire.  Apres 
vingt  ann^es  d'un  regne  illustre,  Melik- 
Schah  mourait  dans  la  force  de  T^ge,  k 
trentehuit  ans,  et  son  pouvoir  colossal 
allait  s'eteindre  avee  lui. 

])«  LA  SYBl^. 

Soit  gen^rosit^  excessive,  soft  m^- 
fiance  de  son  successeur ,  Melik-Schab 
commit  la  m^me  faute  que  Charlemagne: 
il  partagea  son  empire.  Son  fils  atn^ 
BerkiaroK  en  eut  la  plus  forte  part; 
niais  son  frere,  ses  cousins,  obtinrent 
aussi  chacun  up  royaume.  Dans  ce  par- 
tage  la  Syrie  fut  litteralement  moroelee. 
Souleyman,  son  dernier  conquerant , 
n'en  garda  que  la  vilte  d'Antioeiie,  dont 
il  en  fit  encore  qu*un  chef  lieu  de  pro«- 
vince  pour  decorer  du  titrede  sa  capilale 
Krzeroum  en  Armenie.  Toutouoh,  fr^re 
de  Melik-Schah,  devint  le  mattre  de  la 
Syrie  meridionale;  un  certain  Aksankor 
eut  pour  domaine  le  pays  d'Alep.  On 
^tait  fait  :  la  Syrie,  deja  s^par^e  en 
deux  camps  ennemis,  celmdes  Chretiens 
et  celui  des  Mahom^ns,  par  ses  domi« 
natious  etrangeres  et  diverses  se  trouva 
encore  subdivis^e ,  incapable  desormais 

(*)  Yoyez  d'BabiAoUBibliotheque  orieniaU^ 


234 


LUfilVERS, 


de  former  on  corps  de  nation,  m^ang^ 
de  races  ^ui  d^truisirent  h  jamais  son 
homogi6n^t^. 

II  y  cut  cela  de  fatal  dans  la  destine 
de  Tempire  turc,  qu'une  fois  prive  d'u- 
nit^  par  le  partage  qu*en  fit  Melik-Schah, 
la  civilisation  orientale  se  concentra  en 
Perse ;  et  ies  royaumes  moins  bieu  affer- 
mis  demeur^rebt  daos  un  etat  mixte» 
entre  la  guerre  offensive  et  la  guerre 
d^ensive,  ^tat  fort  peu  favorable  au 
d^veloppement  de  Tordre  et  des  lumie- 
res.  Tous  Ies  £tres  turbulents,  toutes  Ies 
natures  aventurieres  affluerent  dans  ces 
royaumes,  ou,  i  la  faveur  des  combats 
sans  cesse  renaissants,  jQorissaient  le 
vol  individuel  et  le  pillage  public.  Les 
Turkomans,  race  bdtarde  des  Turcs, 
quittdrent  leurs  plateaux  arides  de  la 
mer  Caspienne  etser^andirent  jusgu'en 
Syrie.  lis  amenaient  avec  eux  cet  esprit 
d'lnd^pendance,  ou  plut6t  cette  haine  de 
toute  autorit^ ,  cette  ardeur  guerriere , 
ou  plutdt  cet  app^tit  de  butio ,  qui  ont 
t6ujour8  caracterise  les  tribus  nonia- 
des.  Or  il  y  avait  sans  cesse  des  degdts  a 
faire  en  Syrie,  et  les  Turkomans  ne 
manqu^rent  pas  de  s'y  abandonner  a 
toute  la  violence  de  leurs  passions.  Les 
exces  auxquels  ils  selivrerent,  surtout 
en  Palestine,  furentexcessifset  continus. 
Le  gouvernement  de  la  cit^  sainte  avait 
et^  c^e  a  un  de  leurs  chefs  les  plus  f<6- 
rooes,  du  nom  d*Ortok.  Ce  barbare,  as- 
ses semblable  aux  barons  feodaux  de 
TEurope ,  faisait  main  basse  sur  tout  ce 
qu'il  convoitait,  accablait  les  popula- 
tions d'impdts  et  d*avanies ,  et  employait 
tous  les  moyens  licites  et  illicites  d*ex- 
ploitation  {*). 

line  nouvelle  source  de  tyrannic  ve- 
nal td'ailleurs  de  s'offrir  aux  Turkomans. 
L'usage  des  pelerinages  Chretiens  ,  qui 
n'a vai t  iamais  €U  suspendu  depuis  les  rap- 
ports d  amitie  entre  Haroun-AlRascbid 
et  Charlemagne,  prit  tout  a  coup  uiie 
extension  considerable.  Apres  avoir  et^ 
des  expeditions  moiti^reli^ieuses,  moi- 
ti^  commerciales,  ces  pelermages  6taient 
devenus  de  v^ritables  emigrations  que 
les  pauvres  entreprenaient  tout  aussi 
bien  que  les  riches.  Or ,  11  n*est  sorte  de 
vexations,  de  vols  et  de  mauvais  traite- 


(*)  Yoyez  de  Gulgnes,  HUtoire  generaU  des 
Buns,  etc. 


meats  auxqaela  ces  nombreux  | 
ne  fussent  expose  dans  leur  p 
Syrie.  Les  Turkomans  les  atl 
dans  Ies  gorges  du  Taurus  oadal 
et  les  depouiUaient  sans  piti^t^ 
atteignaient  une  ville,  ils  n'y  p6 
qu'a  la  condition  d'y  payer  leori 
Beaucoup  d'entre  eux  mouraioH 
de  fatigue,  et   quelquefois  4ft^^ 
avant  <raniver  au  but  de  leu 
ges ;  et  ceux  qui ,  plus  favo 
nasard,  avaient  pu  eviterle< 
des  Turkomans  et  satisfaire  ai 
ces  de  leurs  chefs,  ceox  qui  t 
le  bonbeur  de  parvenir  jusqiA  I 
lem ,  n'en  franchissaient  la  po ' 
donnant  une  piece  d'or  par  i 
difficultes  pre^que  insurmoii 
pelerinages,  loin  d*en  diminn 
ore,  Taiigmenterent  an  ooi 
jour  en  jour.  On  s^imposait  i 
le  voyage  de  la  cite  sainte 
plus  rude  des  penitences ;  et ; 
avait  de  dangers  a  oourir,  pin 
saituu  merited'essayer  a  less 
II  semble  que  le  tyran  Ortok  i 
alors au'illui  etait avanta^eoil 
cuter  les  Chretiens;  car  bieidftl 
borna  pas  a  imposer  arbitr  ~ 
pelerins,  il  outragea  leurs  { 
sulta  a  leur  religion,  et  tronUai 
fois  les  ceremonies  du  culte 
du  Saint-Sepulcre.  Un  jo 

f)oussa  rinsolence  jusqu'a  s\ 
a  personne  du  patriarcbe,| 
f^iire  trainer  par  les  cbeveux  I 
prison.  Puis  il  le  retint  dans  i 
cachot  jusqu*a  ce  que  les  C 
fussent  cotises,  et  eussent  ^ 
ses  mains  la  ran^on  qu*il  lui  | 
ger.  Ce  fut  ainsi  que,  sous  lad 
de  ce  feroce  brigand,  le  Liban4 
coupe-gorge ,  et  Jerusalem  one 
supplices. 

PkLEBIIIA&B  DBS  CS 

C'est  une  tr^-ancienne  < 
celle  des  pelerinages.  Depuis^ 
jusqu'a  repoque  ou  nous  sonuneia 
lis  n'avaient  jamais  oesse.  D'ift 
fiirent  des  reines  qui  firent  ie 
pieux  :  apres  sainte  Helene,  n 
Constantin,  au  quatrieme  siede, 
rimperatrice  Eudoxie,  femme  de  1 
dose  le  jeune,  au  commenceme^ 
cinquieme  siecle.  En  ce  temps-la  I^ 


SYRIE  MODERNE. 


ns 


Milem  ^tait  tranquille;  Tordre  polittqne 
6t  Fordre  religieux  y  wgnaient  k  la  fois. 
En  politique  c*etait  une  ville  ^pargn6e; 
en  religion  c*etait  une  sbrte  de  terrain 
neutre.  La  guerre  en  ire  tes  schismes  cbrd- 
tiens  ne  s'y  faisalt  pas  sentir,  at  le  per> 
8onnage  r^v^re  appel^   patriarche  8*7 
onontrait  en  m6me  temps  Pami  du  pape  et 
rami  de  Fempereur  de  Constantinople. 
L.*exerople  des  imperatrices  fiit  corita- 
gieux*  11  entratna  des  foutes  si  conside- 
rables en  Palestine,  que  certains  ^rd- 
ques,  hommes  d'autant  de  bon  sens  que 
ae  veritable  pi^te,  s^^lev^rent  contre  ces 
Emigrations  inutites.  L'^v^que  d*Hip* 
pone,  entre  autres,  dit  dans  un  de  ses 
sermons  cette  parole,  aussi  juste  que  spi- 
rituelle :  Jdeum  qui  ubique  est  amando 
venitur,  non  navigando,  Malheurease- 
ment  tous  les  saints  ne  pens^rent  pas 
comme  saint  Augustin,  et  Ton  vit  succes- 
sivement  saint  Porphvre,  saint  J^rdme, 
saint  Kusebe,  sainte  Paule,  saint  Sylvain, 
saint  Antonin,  saint  Wilpbage,  saint 
Arculphe,  saint  Guillebaut,  donner  aux 
p^lerinages  un  caract^re  d'asc^tisme  qui 
en  aug'menta  encore  le  nombre,  Les  pre- 
miers y  vinrent  avant  la  conqu^te  niu- 
sulmane,  les  deux  derniers  apres.  Or, 
ce  qui  prouve  la  tolerance  des  Mahome- 
tans, c  est  que  saint  Arculphe  est  celui 
qui  constate  dans  son  recit  que  le  15 
septeinbre  de  chaque  ann^  il  se  tenait 
une  foire  sur  la  montagne  mdme  du 
Calvaire.  Ainsi  on  se  sanctifiait  tout  en 
faisant  fortune.  Une  autre  preuveda 
caract^re  g^nereux  de  la  eonqu^te  arabe, 
e'est  gue  saint  Guillebaut,  traversant  la 
Tille  aHems,  fut  conduit  avec  ses  com- 
pagnons   devant    T^mir  du  lieu.   Get 
emir,  qui  ^tait  un  vieillard,  apr^  avoir 
interroge  le  pelerin,  le  laissa  partir  sans 
diflicuiuS,  en  disant  k  cetix  qui  Tavaient 
amen^  :  «  J*ai  sou  vent  vu  venir  de  ces 
«  hommes;  its  ne  chercbent  pas  le  mal, 
«  mais  d^irent  acromplir  leur  loi.  » 
L'usagedespderinages  ne  paraissait  pas 
'         eitraordinaire  a  un  peuple  dont  les  pr6- 
'         ceptes  religieux  le  prescrivent  aussi.  Seu- 
leraent  les  sectateurs  du  Koran  faisaient 
'         ces  p^lerinages  k  travtrs  leur  propre 
I         pays,  tandis  que  les  Chretiens  s'en  ve- 
,         naient  accomplir  leurs  devotions  au 
'         coeur  m^me  de  Tlslam  (*). 

(*)  Toyes  ta  GUmaire  de  Dacange. 
16*  LkraUon,  (Sybix  hodebnb.) 


Du  temps  de  Charlemagne » nous  Ta- 
▼ons  vu,  lesort  des  ChreUens  fut  r6gl6 
par  capitulations.  On  pretend  mime 
qu*Haroun-al-Ra8chid  eut  la  gracieusete 
dVnvoyer  k  Fempereur  d'Occident  les 
cleft  de  Jerusalem,  indiquant  ainsi  qu*il 
laissait  aux  Chretiens  la  fibre  disposition 
de  leur  cit^  sainte.  Les  Chretiens  us^rent 
de  cette  permission  en  y  Levant  des  bos- 
prces  et  des  couvenu.  C^taient  1^  des 
ndtelleries  pour  tes  pdlerins;  oe  leur  fut 
aussi  dans  les  temps  mauvais  des  lieux 
de  refuge.  Cette  certitude  de  reneontrer 
hospitalitlet  protection  k  Jerusalem  don- 
nait  de  Tardeur  aux  personnes  pieuses , 
de  mime  oue  les  cnances  de  quelques 
benefices  dans  un  commerce  tolerl  atti- 
raient  toujours  la  foule.  11  arrivait  done  k 
Jerusalem  des  gens  de  toute  sorte,  moi- 
nes,  n^gociants,  seigneurs  et  hommes  du 
peuple.  II  en  venait  du  nord  comme  du 
midi  de  I'Europe,  Anglais  et  Itaiieos,  Al< 
lemandset  Espagnol8,Suedoiset  Proven* 
caux.  Aussi  quelle  calamity  pour  les  p^ 
lerins  comme  pour  les  Chretiens  d'Orient 
que  le  r^ne  du  fathimite  Hakem ,  que 
nous  avons  racont^l  Les  crimes  deoe 
monstre,  les  persecutions  qu'il  fit  ^prou- 
ver  aux  disciples  de  Jesus-Cbrist,  sa 
destruction  de  fond  en  combie  de  Tl- 

glise  de  la  Resurrection  excit^rent  au 
ernier  point  les  ressentiments  de  TEu- 
rope  catnolioue.  Si  Grigoire  VU  n'avait 
pas  eu  tant  de  riformes  a  faire,  tant  de 
combats  k  soutenir  contre  Tambition 
des  empereurs  d^Allemagne,  peut-ltre, 
en  conduisant  la  premidre  croisade,  au* 
rait-il,  lui,  dllivreles  Chretiens.  Mais  la 
coupe  d*amertume  n*etait  pas  encore 
pleine,  et  il  fallait  qu*Ortok  et  ses  Tur- 
komans y  versassent  la  demise  goutte. 
Lorsque  le  sucoesseur  de  Hakem,  Dha- 
her,  eut  laiss^  rebAtir  Teglise  de  la  Re- 
surrection ,  les  pelerinages ,  suspendus 
pendant  trente  ans,  reprtrent  avec  plus 
d*ardeur  quejamais.  Seulement  cen*etait 
plus  isolement  au'on  les  iaisait,  e*^tait 
en  troupe.  L'abnl  de  Saint-Viton ,  Ri- 
chard, partit  en  1046  pour  la  Palestine 
siilvi  de  plus  de  sept  cents  pterins. 
Dix  ans  plus  tard,  Lietbert ,  evdque  de 
CambrajT,  se  fit  accompagner  aussi  par 
une  partie  de  son  clerge  et  de  ses  ouail- 
les.  Quel  que  fdt  le  nombre  de  ces  pe- 
lerins,  qui  s'appelaient  eux*m^mes  Var- 
mie  du  Sdgnewr,  leur  caract^re  de  mo- 

16 


VUfttVERS. 


m 


destie  et  de  doocear  Atait  touto  ioqui^    inspirar  le  respeet  de  ^  peR<iQBi.Q^  I 

tude  aux  populations  parmi  lesqueliaa    -" ' '  —  *••—  ^ 

iis  passa  lent.  Cou verts  de  v^tements  de  la 
plus  graode  simplicity,  ne  portant  a?e« 
eux  aue  la  paoiietiere ,  la  gourde  et  le 
bouraoQ ,  its  n^inspiraieot  de  oraiote  k 
personne.  Dans  les  pays  eathoUques  oa 
les  traitait  toujours  avec  egards  :  les 
seigneurs  devatent  leur  ouvrir  leurs  cha- 
teaux ,  les  gens  d'armes  de^aieat  les  d4" 
fendre.  Ite  etaient  exempts  de  tous  p^ 
ges,  et  on  ne  leur  demaodait  aucuoe 
retribution  sur  les  navires  oik  ils  8*em« 
barquaient.  Ces  usages  etaient  bons  pour 
les  peleriiis  isoles;  mais  pour  une  troupe 
de  sept  cents  homnies  et  au  dela,  il  ^tait 
difficile  en  certains  endroits  de  Vi\^ 
berger  et  de  la  nourrir.  Aussi  les  com- 
pagnons  de  Lietbert  eouffrireut  ils  de 
toutes  fa9ons  dans  leur  long  voyage. 
Lietbert  etait  aussi  patient  que  bon ;  sa 
venerable  figure  d^armait  les  plus  ir- 
rit^s ,  et  souvent  il  lui  avait  sufli  de  se 
presenter  pour  retablir  la  bonne  bar* 
•monie  entre  les  pelerins  et  ks  popula- 
tions de  TAllemagne.  Mais  en  entrant 
en  Pannonie,  les  souffranees  de  la  pieuse 
caravans  redoublerent.  Les  Uuiis,  qui 
habitaient  encore  les  for^tsdu  Danube, 
prirent  m^fiance  contre  ces  Strangers 
qui ,  sous  le  pretexts  d'un  acte  religieux » 
semblaient  vouloir  envabir  leur  pays. 
Le  saint  ^v^que  sauva  encore  une  rois 
son  troufMau.  Quand  le  roi  de  ces  coa* 
tr^es  le  vit  si  debile  quoique  si  digo^, 
si  sincere  dans  sa  piet^,  si  egal  dans 
sa  mansuetude,  il  le  crut  sur  parole  et 
le  laissa  passer  outre ,  lui  et  les  sieas. 

En  Bulgarie  ce  furent  eucore  de  nou- 
velles  tribulations.  Les  oompagnous  de    marcbe  k  travers  l^urope, 
Lietbert  vinrent en  pleurant  lui  anoonoer    faaueux  n'avaient  iospirequsfl 
qu*ilsnepouvaient  poursuivreleur  rou-     ^-    -    ••         •  .  .    -j 

te ,  menace  qu'ils  etaient  par  des  embd^ 
ches  conttndelles,  et  accabl^  par  dea 
maux  sans  cesse  renaissants.  L  (§v6que 
alors  les  reunit ,  et  leur  paria  avec  tant 
d*eloquence  et  d'onction  qu'il  les  recon- 
forta  presque  tous.  Puis  la  troupe  catli(H 
lique  ayaut  reocontr^  dans  les  profoii* 
deurs  d^une  foi^t  une  masse  d  bomiiies 
montes  sur  de  noirs  chevaux  et  arm^ 
d*arcs  h  longues  Qeches,  la  terreur  se 
repandit  de  nouveau  parmi  les  pelerios* 
L'^v^que  alors  alia  seul  vera  les  homines 
farouehes  qui  lui  barraient  le  passage « 
et  fut  eucore  assez  beureux  pour  leur 


de  pouvoir  personnel ,  que  d*! 
gue  de  vertus  perdus  pour  une 
inutile  I  Encore  cette  exp^ditioa 
t-elle  point  au  but  qu'elle  n 
Parvenus  a  Laodicee,  les  pd( 
barquereot  pour  Jerusalem; eti 
p6te  les  rejeta  dans  Ttle  de  ^ 
ne  voulaient  pas  dtre  veous 
aooomplir  leur  pelerinage 
se  reinbarquerent  pour  la  Pal 
les  marins  grecs ,  pius  p 
au  lieu  de  les  conduire  a 
ramenerent  a  Laodic^.  ] 
les  nouvelles  persecutions 
mans,  et  convaincus  de  " 
d'atteindre  Jerusalem,  iis 
leur  de  retourner  dans  l( 
avoir  visite  la  cite  sainte  (*). 
Apres  ce  bon  ev^ue  et 
troupeau,  eo  1064  on  vit 
veritable  aruybt  de  sept  mill 
dont  les  cheDs  etaient  Si 
v^ue  de  Maieoce;  Guill 
d*utrecbt;  Gumher,  evi 
berg ;  Otlion ,  ev£que  de 
y  avait, en outare,  des' 
et  des  chevaliers  de 
Autant  les  premiers  pei< 

eir  rexcellent  Lietbert, 
es  et  modestes  ^  autant 
meues  par  d*orgueUleux  ev< 
Sers  et  superbes*  Autant 
Etaient  vStus  simplement 
Gonds  Tetaient  avec 

{^r^tres  avaient  des 
es  laiques  des  cottes  en 
devait  exciter  la  convoitissT 
fois  ridicule  et  iinprudeot 


Orient,  ils  souleverent  la  < 
peine  furent-ils  eotres  sur  1 
nom^Unes,  que  de  toutes  | 
bes  erraiits,  les  Turkomans! 
les  Bedouins  du  desert,  i 
leurs  traces.  Us  fureut  < 
Ramlab  par  ces  baiides,  qui  | 
k  tous  les  coins  de  bois ,  a  t 
1^  de  montagnes.  Dans  oetle| 
ville  enOn ,  Ta  vant*  veille  de  f 
masse  de  ces  brigands  s'ef 
coup  sur  les  pelerins.  Malgre  1 


(*)yoyezletoHieiy  da  reoocU  da  1 
dislei. 


SYRIE  MODERNE^ 


m 


de  cbarit^  et  de  patience,  il  fallut  bien 
quails  86  defeDdissent.  Superieurs  en 
nonibre,  ils  crurent  d'abonJ  que  leurs 
bras  suftirai'nt  pour  repousser  leurs 
agresseurs.  Mais  que  peuvent  ies  poings 
les  plus  solides  centre  des  lances  bien 
effiiees?  Plusieurs  des  pi^lerins  turent 
viclimesde  leur  courage  :  ils  tomb^rent, 
tout  couverts  de  blessures ,  et  parmi  eux 
Guillaume,  ev^que  d'Utrecbt.  Alors, 
pour^cliapper  k  une  mort  certaine,  il  fal- 
lut  ramasser  des  pierres;  et  cVst  ainsi 
que  peu  a  peuon  eii  venait  aux  bostilit^s 
que  dans  le  principe  on  avait  voulu  evi- 
ter.  Les  brigands,  acharn^  apies  cette 
troupe  luxupuse ,  la  forceretit  b  se  re- 
trancber  derrieredes  murs  en  ruines.  Ge 
fiit  d^s  lors  un  siege  en  regie.  Les  as- 
saillants  couvrirent  les  retranchements 
d'uiie  gr^le  de  fleches;  les  assieges, 
pousses  p  r  le  desespoir,  firent  plusieurs 
sorties ,  arrach^reiit  des  amies  a  leurs 
ennenifs,  et  h  leur  tour  r^pandirent  le 
sang,  contrail ement  au  pr^cepte  de 
ri^vangile  et  a  la  loi  impossible  quails 
sVtaierit  imposee.  Ceo  6tait  fait,  la 
guerre  dtait  allumee. 

Apres  uiie  nuit  passee  dans  leur  place 
improvis^e,  les  Chretiens  se  virent  le 
lendemain  attaqner  par  douze  milte 
bommes;  et  encore  cette  masse,  loin  de 
vouloir  les  forcer,  les  entoura  de  tous 
cotes  afin  de  les  prendre  par  la  famine. 
Quoi  qu'on  en  eOt,  il  fallut  done  triiiter. 
Les  assiegeants  se  montrerent  trte-ri- . 
goureux,  et  le  combat  dut  recommencer. 
Enfin ,  apres  trois  jours  de  souffrances, 
les  pelerins  n'avaient  plus  qu*a  succom-. 
ber,  lorsque  Tun  d^entre  eux  put,  a  la 
faveur des  tenebres,  aller  a  Ramlab  s'a- 
dresser  h  IVmir.  11  se  trouva  que  ce 
chef  voulut  bien  arr^ter  Pelfusion  du 
sang ,  disperser  les  brigands ,  et,  nioyen- 
nant  une  ran^on,  delivrer  les  Chretiens 
et  leur  donner  uneT  escorte  jusqu'a  J^ 
rusalem.  Comme  on  le  voit,  le  basard 
seul  les  avait  sauv^,s.  Peu  contents,  du 
reste,  de  leurs  iniprudenoes  repetees  du« 
rant  leur  longue  route,  ils  commirent 
encore  la  fuule  d'entrer  a  Jerusalem  en 
triompbe.  Ce  fut  au  son  des  cymbales,  h 
la  lueur  des  torches,  avec  un  grand  ap- 
pareil  et  un  grand  luxe,  qu'ils  visiterent 
les  lieux  saints.  Une  pareille  cooduite 
ne  devait-elle  pas  btesser  Torgueil  des 
VMiues  du  pays?  K^etait-ce  pas  idissi 


une  sorte  de  proTOcation  faite  par  la 
religion  chretienne  a  la  religion  musul- 
mane?  Heoreusement  pour  les  pelerins 
qu'ils  ne  renouvelerent  point  le  specta- 
cle de  leur  joie  maladroite,  et  qu'ils 
profiterent  de  Tarriv^e  d'une  flotte  ge- 
noise  pour  retourner  en  Europe  (*). 

Malgre  la  fdcbeuse  expedition  que 
nous  venons  de  rapporter,  le  goQt  des 
pelerina<;es  fut  loin  de  diminuer.  II  ^tait 
d'ailleurs  excite  par  le  cferg^,  qui  en  vint 
k  remplacer  les  penitences  canoniques 
par  des  voyages  a  Jerusalem.  En  outre, 
dans  le  onzieme  siccle  les  temps  (^taient 
durs  et  les  homm(  s  6taient  rudes.  Les 
malheureux  et  les  opprim^^  aimaient 
done  mieux  fuir  leur  mardtre  patrie  que 
d'y  mourir  de  faim  ou  dans  les  tortures. 
Aussi,  outre  les  pelerinages  de  devotion, 
voyait-on  des  pelerinages  d'expiation 
et  des  pelerinag[e8  de  misere.  L' Europe, 
en  effet,  v^getait  alors  dans  des  ten^bres 
sanglantcs.  La  ir^oe  de  Uieu ,  qui  fut 
pr^chee  par  le  clerg^  des  Gaules ,  prouve 
a  quel  point  la  barbaric «sn  et«iit  arriv6e 
vers  Tan  1060.  Grdce  aux  deplorables  r^« 
sultats  du  systeme  f^dal,  il  n'y  avait 
plus  en  Occident  qu*une  classe,  les  no- 
bles, qui  comptdt  dans  Tliumanite.  Or 
quand  ces  nobles « tous  ambitieux,  gros- 
siers ,  jaloux  les  uns  des  autres ,  se  dis* 
putaient  les  lambeaux  d*un  pavs,  ils 
^rasaient  le  peupleeoinme  lecaillou  des 
chemins,  ils  pillaient  les  villes,  et  lais- 
saient  leurs  bommes  d'armes  commettre 
toutes  les  exactions ,  tous  les  vols ,  tous 
les  crimes  que  leurs  passions  dechaln^es 
leur  iuspiraieut.  Ou  en  vint  au  sacri- 
lege; alors  le  clerge  s*emut ,  il  se  reunlt 
en  concile,  et  proposa  cette  trive  de 
DieUf  f  jible  remede  contre  tant  de  maux, 
barriere  de  pldtre  oppos^e  k  des  bommes 
de  fer.  II  ne  s*agissait ,  en  effet ,  que  de 
suspendre  cette  guerre  pcrpetuelle  de  la 
feoaalit^,  d'abord  quatrc  jours  p«ir  se- 
maine,  ensuite  deux  seulement ,  le  sa- 
medi  et  le  dimanche.  Gependant,  tout 
impuissant  qu*etait  cet  expedient,  on 
s'efforca  de  le  maintenir.  Ce  fut  alors 
qu'on  nnposa  le  pelerinage  aux  infrae- 
teurs  de  la  trice  de  Dieu,  de  m^me 
qu'on  Pavait  impose  pr^cedemmeut  k 
ceux  qui  avaient  detourn^  ou  pille  les 

(•)  Yoyez  Ganiaume  de  Tyr,  BkL  d*<9  qui 
^§H  pom  an  4$la  du  msrtf  elc^ 

16. 


)28 


LtJNlVERS. 


biens  de  I'EgUse ,  et  a  eeux  qui  avaient 
comrais  des  meurtres ,  et  qui  etaient  as- 
sez  forts  pour  qu'on  ne  pQt  pas  leur  ap- 
pliquer  la  peine  dii  talioD  (*). 

Parmi  ces  deriiiers  on  en  compte  un 
tr^s-grahd  noinbre.  Ne  parlons  que  des 
plus  c^lebres.  Ce  fureut  d'abord  un  cer- 
tain seigneur  de  Frotmond,  qui  avait  as- 
sassine  son  oncle  et  le  plus  jeune  de  ses 
freres,  et  un  certain  Cencius,  prefet  de 
Rome,  qui  avait  insults  le  pape  a  Sainte- 
Marie- Majeure,  et  qui,  Tayant  arr€te  au 
milieu  d*une  ci^r^monie  religieuse ,  Ta- 
vait  ensuite  jet^  en  prison.  Le  meurtrier 
et  le  sacrii^e  fureut  frapp6rde  la  m^nie 
peine.  Seulementcomine  lesire  de  Frot- 
mond avait  commis  deux  fois  un  crime 
sen)blable ,  lorsqu*apres  son  premier  p^- 
lerinage ,  il  s*en  vint  demander  au  pape 
Tabsolution ,  ce  dernier  lui  imposa  un 
second  pelerinajio  qu'il  ex^uta  avec 
autant  de  soumission  que  le  precedent. 
Plus  tard  on  alia  m^me  jusqu*a  exiger 
trois  pelerinaffes ,  aiusi  qu  on  fit  a  Foul- 
que  III ,  dit  cfe  Nerra  ou  le  Noir.  Mais 
aussi  ce  comte  d*Anjou  ^tait  un  gueux  de 
la  pire  esp^.  Outre  Texploitation  de  ses 
malheureux  sujets ,  outre  mille  ^uerres 
injustes,  mille  sacs  de  villes  et  pillages, 
outre  le  meurtre  d'Hu^ues  de  Beauvais, 
fisivori  du  roi  Robert,  il  avait  fait  broiler 
sa  premiere  femme,  et  avait  contraint 
la  seconde  a  se  r^fugier  en  terre  sainte. 
Que  de  crimes  a  expier!  et  cependant 
avec  trois  voyages  a  Jerusalem  il  se  crut 
quitte  avec  Dieu  et  avec  les  hommes. 

Robert,  due  de  Normandie,  pensa 
eomme  Foulque  le  Noir;et  accuse  d*a- 
Toir  em[>oisonn6  sonfrere,  il  s'imagina 
avoir  satisfait  a  la  justice  divine  et  hu- 
maine  en  allant  faire  une  priere  pour 
riime  decefreresur  letombeau  du  Christ. 
Seulement,  loin  d*aller  en  Palestine  sent, 
comme  avait  fait  le  comte  d'Anjou,  il  ne 
se  mit  en  route  qu*accompagne  de  ses  ba- 
rons, et  voulut  qu*ils  parlageassent  toute 
sa  jM^nitence,  les  for^ant  de  marcher 
pieds  nus ,  et  couverts  du  cilice.  Quelle 
opinion  devaient  donner  aux  Orien- . 
taux,  des  chevaliers  d'Occident,  ces  suc- 
cessions de  fiers  guerriers  deguises  en 
peJerins.  Ces  actes  de  contrition  outr6e 
pour  quelques-uns ,  ces  humilit^s  feintes 
par  d*autres,  ne  pouvaient  que  les  faire 

(*)  Yoyes  deSiiiiioiidi*  HisMn  det  Fhmfais, 


traiter  de  pusillanimes  et  dliypoenta 
par  des  hommes  qui ,  ne  compiciutt 
pas  la  raison  de  leurs  peniteooes,  o'j 
voyaient  qu'une  comedie,  qui  deieus 
fastidieuse  a  force  d'etre  r^tee. 

En  r6sum6,  les  pelerinages,  entiepn 
d*abord  par  quelques  t^teseialtmnii 
raisonnaoles  puurtant,  par  des  ka 
devotes  mais  generalement  monks, 
cbang^rent  peu  a  peu  de  caractocet 
devmrent  au  ouzieme  siecle  la  nssom 
des  malheureux ,  le  but  des  afentans, 
la  penitence  des  plus  grands  couftato. 
Cet  Strange  ^baotillon  des  nenoeo- 
dentales  n'aurait  encore  fait  qu*acilar 
le  dedain  des  Orienlaux,  si  petiuprtit 
le  nombre  des  pelerins  ne  tdt  dcroi 
alarmant,  si ,  enQn,  les  expeditioasdB 
^vSques  aliemands  et  du  due  de  Kv 
mandie  n'avaient  ressemble  a  dsasas 
d'invasion.  Mais  lorsqu*on  vitUSjiif 
ouverte  k  tout  venant,  lorsqoc  sas 
avertissement  prdalable  des  trospa 
d^hommes  se  crureut  permis  detnnnff 
plusieurs  royaumes  mahomeUos  pir 
aller  visiter  une  cite  qui  ne  ieurap^* 
tenait  m^me  pas ,  alors  la  patieace  to 
bons  fut  pouss^  k  bout,  les  passions  ds 
mauvais  se  ralluin^rent,  etIadivisioBft 
la  Syrie  ainsi  que  la  brutalite  desTaik^ 
mans  aidant,  les  persecutioascootitll 
Chretiens  repri  rent  le  plusfuDesledM* 
loppement.  Alors  les  deceptions^ 
grand  nombre  de  pelerins  qui  mf^ 
vaieut  plus  parvenir  jusqu'a  Jens^ 
les  soutfrancesreellesdequelqufsii^fs, 
Tetat  de  plus  en  plus  intolerabk  des 
Chretiens  d^Orient ,  les  mauvais  tnit^ 
nients  infliges  a  tous  les  pr^trescst^ 
quesde  Syrie,  les  avanies  rep&etsW 
le  patriarche  de  la  cite  sainte  df^ 
rbabituetle  victime,  le  reveil  piusiitf 
que  jamais  de  cet  anla^onisroeiiit' 
morial  entre  TAsie  et  TGurope  deeiM 
enfm  ces  lon^ues  et  deplorables  g«ntt 
qu'on  a  appelees  les  croisades  (*;. 

GABAGTBRBS  DIVBBS  DBS  GBODiMi' 

Certains  historiens  ont  eu  le  tortdtj 
croire  que  les  croisades  avaient  un  or 
ractere  unique,  des  moeurs  particuli^ 
des  allures  homog^nes  {**).  Ces  bis» 

(•)  Voyez.  les  j4nnale$  de  Baianioi.fl*^ 
eantfe,  v-  Peregrinante$. 

fy  Voy.  MiduuMt,  BiiL  dM  Cni^ 
torn.  YI.  I 


SYHIE  MOD£RK£. 


229 


riens,  pour  exalter  ces  expeditions  de 
trois  siecies  consecutifs,  citent  des  fails, 
louables  saiis  doute,  mats  rares  et  a  la  dis- 
tance de  cinquante  etsoixiinle  annees  par- 
fois  les  UQS  des  autres.  Rien  iiVst  moiiis 
veridique  et  moins  juste  qu'une  telle 
maniere  de  proceder.  Les  croisades  ont 
sui vi  TimpulsioD  des  temps.  Ellesont  uae 
grande  diversite  dans  leur  esprit,  dans 
leurs  actes,  dans  leurs  vertus  comme 
dans  leurs  vices,  parcec|u'elles  eprouvent 
naturellement  les  inodiOeations  des  epo- 

3ues  qui  les  volent  nattre,  les  revolutions 
es  pays  dont  elles  sortent.  Elles  sunt 
variables  coinme  toute  chose  liumaine , 
et  d'autant  plus  peut-^tre  qu'elles  of- 
frent  a  la  fois  la  creiiie  et  la  lie  des  ge- 
n<^ralions,  qu'elles  se  composent  d'hom- 
mes  divers,  d'origine  et  d  habitudes  dif- 
ferentes,  etrangers  les  uns  aux  autres, 
et  allies  temporairement  par  le  seul  lien 
retigieux  et  par  un  but  seinblable.  Les 
croisades  sout  done  multiples;  leurs 
causes,  leurs  tendances,  leurs  resultats 
sont  essentiellement  tranches;  et  c'est 
separement  qu'il  ies  fautjuger. 

C*esl,  en  outre,  du  point  de  vue oriental 
quMI  noussemble  le  plus  juste  de  les  con- 
siderer.  PourquolP  parce  que  Thomoge- 
neit^  de  races,  de  moeurs,  d'intei^ts,  se 
trouve  ^videmment  chez  les  populations 
envuhies.  Qu'etles  fusseut  plus  ou  moius 
separees  par  desdissidences  temporaires, 
qu'elles  tussent  divis^es  induie  par  des 
ambitionsgui  sejalousaient,  qu'iuiporte! 
Elles  n'en  rormaient  pas  moins  un  peuule 
unique ,  parlant  la  rn^me  laiigue ,  aj^aht 
les  m^mes  coutuines ,  se  seutant  freres 
par  Torigine,  par  le  ciimat,  par  des 
godts  etdes  besoius  semblables,  et  dont 
le  cara<  tere  particulier  a  resiste  jusqu*a 
nos  jours  a  tant  de  guerres ,  de  revolu- 
tions, de  siecies  vari£,  de  fortunes  chau- 
geantes.  Les  croises, au  contraire,  n*ont 
pour  se  ranprocher ,  nous  le  rep^tuus  , 
qae  la  meme  croyance  religieuse  :  le 
siffiie  de  la  croix  est  leur  seui  moyen  de 
rsJIiement.  Us  ne  se  communiquent  pas 
leurs  peusees,  ibse  comprenueut  a  peine ; 
leurs  lan^ages  sont  divers,  leurs  ha- 
bitudes et  jiisqu'^  leurs  gestes  dift^rent 
radicalement.  lis  viennent,  en  eftet,  du 
I<iord  coinme  du  Midi :  les  uns  »ont  pe- 
tulants,  les  autres  sont  apatliiqucs;  et 
lis  ne  doivent,  d*ailleurs,  vaioir  dans 
raveoir  que  par  leurs  earacteres  oppo- 


ses. Comment  voulez-vous  done  qu'on 
puisse  les  apprecier  rigoureusement, 
^uitablemeiit,  sans  les  trier,  saus  les 
jugfr  un  par  un,  pour  ainsi  dire,  epo- 
que  par  epoque ,  expedition  par  expedi- 
tion ? 

Ce  qui  diffi^rencie  les  croisades,  ce 
sout  les  revolutions  qui  se  succederent 
en  Europe  a  la  fin  du  onzieme  siecle,  du- 
rant  le  douzieme  tout  entier  et  pendant 
la  premiere  partie  du  treizieme.  Le  on- 
zieme siecle  est  un  veritable  siecle  de  fer. 
C  est  Tere  des  efforts  prodigieux  de  la  pa- 
pautecontre  Tempire,  c'estlc  regne  de  la 
leodalite,  c'est  1  epoque  de  la  lutte  de 
toutes  les  iudependances :  Tindependance 
du  clerge,  qui  ne  veut  plus  accepter  Fin- 
vestiture  imperiale ,  nndependancc  du 
vassal  vis-a-vis  de  son  suzerain ,  Tind^- 
pendance  des  communes  qui  reclament 
lies  privileges  municiuaux.  Siecle  de 
guerres ,  de  haine ,  de  tanatisme ;  siecle 
ou  les  hommes  de  Dieu  eux-m^mes  ont 
quelque  chuse  d*intraitable  dans  Tesprit, 
de  feroce  dans  le  coeur ;  mais  aussi  sie- 
cle d'iiiusion  et  de  courage.  Ce  qull  y 
a  done  de  plus  caracteristique  dans  la 
premiere  croisade,  c'est  Tinsouciance 
des  mis^res  a  supporter,  le  mepris  des 
dangers  a  courir ,  rimprevoyance  pliysi- 
que Ta  plus  absolue.  On  s'enUamme  pour 
une  idee,  on  s'^vertue  apres  un  r^ve  de 
bonheur,  on  court  a  une  conqu^te  chi- 
roeiique;  et  Ic  tout  sans  s*inquieter  un 
instant  de  vivre  jusque-la.  Le  corps  est 
oubtieau  profit  dei'dine.L*dme,  d'anord,  ' 
nialtrise  cette  chair  infdme,  corrompue, 
condainiiee  d'avance  par  Texpiation  ter- 
restre  du  peche  originel.  Mais  le  corps 
prendra  sa  revanche  ensuite  :  il  aura  des 
besoins  renaissants,  des  appetits  de  mrlle 
sortes,  et  il  fera  tout  pour  assouvir  les 
uns  et  les  autres.  11  sera  cruel  pour  se 
procurer  des  aliments,  sanguinaire  pour 
se  procurer  un  gtte,  atroce  pour  se  pro- 
curer desjouissances  bestiales.  Meurtre, 
pillage  et  viol,  voila  la  premiere  conse- 
quence d'une  expedition  sainte  et  benie. 

Le  douzieme  siecle  pr^ente  deux  p^- 
riodes  distinctes.  La  premiere  est  toute 
de  reaction  :  c*est  le  reflux  social  apr^ 
le  flux  religieux.  Les  papes  avaient  ebau^ 
che  leur  puissance  temporelle  et  afferrai 
leur  terreur  morale,  le  clerge  se  croyait 
fort  et  se  sentait  riche ;  un  moine  d*^- 
nergie,  un  r6volutionnaire  bardi,  Ar- 


380 


LTINIVERS. 


naud  de  Brescia ,  se  fait  Fap^M  du  peQ<« 

i)le  contre  le  despotisme  clerical ,  sou- 
eve  les  Italiens  rontre  la  popaut^,  et 
'  demande  dans  sa  rigidity  republicaine 

3ue  le  pr^tre  ne  puisse  plus  neu  posse- 
er  en  propre ,  que  le  pasteur  ne  soit 
entretenu  que  par  les  offrandes  volon- 
taires  de  ses  ouailles  Les  Roinains  sou* 
leves  allerent  jusqu'^  lapider  un  pape, 
Lucius  II.  Puis  Teinpereur  d*Allemagne 
se  veiigea  de  ropposition  que  lui  faisait 
Ic  pape  reguli^rement  du,  en  lui  susci- 
tant  uo  rival.  Or  pour  emp^clier  une  di- 
tision  deplorable,  pour  ^touffer  uq 
schisme  menacant,  et  d'autre  part  pour 
eombattre  Abelard ,  c'est-a-dire  la  reac- 
tion pliilosophique ,  il  ne  fallut  rien 
moins  que  toute  la  rude  eloquence  et  la 
superiority  d'intelligence  et  de  coeur  de 
saint  Bernard.  La  seconde  periode  est 
le  renfcrcoment  du  pouvoir  central, 
e*est-a^jire  de  Tautorit^des  rois  et  de 
Tefflpereur,  en  Allemagne  par  Fr^derie 
Barberoufise,  en  Angtetf  rre  par  Henri  II, 
en  France  par  Philippe- Auguste;  puis 
la  nalssanoe  d  un  nouveau  pouvoir,  celui 
du  commerce,  chez  les  deux  ri vales 
en  habilet^t  en  adres&e,  en  ruse,  G^nes, 
vassale  du  pape ,  et  Venise ,  sans  vassa- 
lile,  chose  unique  en  ces  temps. 

Ainsi  entre  la  premiere  et  latrotsi^me 
croisade  la  face  de  TKurope  change  :  la 
barbarie  du  onzi^me  siicle ,  les  guerr(*8 
fanatiques  entre  e  tempo rel  etlespirituel, 
Fanarcliie  feodjie ,  la  niis^re  de  tous ,  la 
lutte  incessante  dans  les  tenebres,  ont  fait 
place  ill  une  organisation  qui  se  prepare. 
be  tous  cdtes  les  pouvoirs  se  cons- 
tituent. Vers  la  fln  du  douzieme  si^le, 
la  Pologne  et  la  Boh€ine^)assent  au  rang 
de  monarchies;  la  Hongrie  a  des  rois 
independants;  lapapaute  a  desdoinaines, 
grdce  a  la  muniticenre  de  la  reine  Ma- 
thilde.  Si  la  Riissie  n*est  encore  qu^un 
campde  farouches  soldats,  Waldemar  I, 
roi  de  Danemaik,  fonde  Dantzick,  et 
£ric ,  roi  de  Su^de,  dote  sa  patrie  du 
premier  de  ses  codes.  Si  le&  factions  d6- 
chirent  encore  Tltalie,  Venise  crott  et 
possede  deja  Tlstrie,  les  cdtes  Daimates 
et  le  port  de  Raguse;  G^nes  prend 
chaque  jour  une  consisUnce  nouvelle, 
enleve  la  Corse  aux  Arabes,  et  lutte  d'a- 
dresse  commerciale  avecsarivale  de  TA- 
driatique;  Lucques,  Pise  et  Florence 
sont  de  plus  en  plus  industrieuses,  et  en- 


trevoient  la  liberty.  Enfin  n  \ 
a  perdu  le  Cid,  elle  agagne  TiA&i 
Saragosse ;  et  le  royaunie  de  Pofti|pl 
a  ete  loud^  par  Alpbonse  lifonijdli 
apres  une  grande  victoire  sur  les  Uitm ! 
et  la  prise  de  Lisbouae.  Au  oianllij 
ehan|i^uient  n'est  pas  moios  eridfouie 
indep«*ndanoes  ont  vaincu ;  les  arts,li 
industries,  les  metiers  put  obtmft 
liberies ,  les  villet  des  frauclu:ies;fiii 
er^tion  de  la  dime  salaJine  le  Mpi 
Jusqu'alors  libre  des  cb«n(es  publi|[ij| 
a  pay 6  ses  premieres  contributi 
university  grandisseot,  et  B< 
riiouneur  de  voir  s^ouvrir  daas  fioai 
par  le    celebre  Irnerius,  la 
ehaire  de  jurisprudence  roroaiae. 
le  repetons,  la  difC^reuee  nett'dlii 
bien  trancb6e  entre  le  temps  de  TA 
rite  la  plus  g^nerele,  c'esl  a  difili 
zieine  siecle,  et  le  douzieme,  qua '^ 
justement  gratifie  du  pom  de 
renaissance ,  ou  plutoi  de  . 

Le  treizt^ne  siecle  8*auvr~ep^ 
erudescence  de  fanatisme  et  d" 
Le  sentiment  du  libre  arbitre,  < 
dans  ses  interpretations,  les  ef 
la  raison  ,  qui  avait  deborde  de 
mites  en  voulant  ressaistr  loa 
respritd*indiscipline,justiiied« 
lesactesdu  pouvoirreligieuxei 
avaient  fait  naitre  une  foule  4 

2u'it  etait  du  devoir  de  la  pap 
attre,  maie  non  d^^toufler  < 
Cependant  Innocent  III,  qui) 
violence  pour  la  voionte,  la  eiii 
r^nergie,  n'eut  pas  honte 
Tinduigence  pleniere,  reserveej 
aux  guerres  contre  les  inliileks,! 
saereurs  du  Lanniedoc,  et  des  b 
ont  appeleles  aides-bourreauidel 
de  Moutfort  d^croU^s!  11  etl  y 
lesac  de  Constantinople  futi 
du  nom  de  croisade. 

Heurf  usement  pour  Tbe 
sait  k  cettemlme  ^que  del 
rieuse  un  homme ,  ou  pluiot  t 
qui  devait  rendre  a  la  royaui^i 
t^re  primitif  de  soltidtude  pate 
la  politique  sa  haute  droiture,  a  taj 
tice  son  incorruptible  eqmte,  aatf 
sades  enfln une  noblesse, ane('  ^ 
et  une  grandeur  qu'ellet  u'avaieots 
Jamais  presentees.  Comme,  pour  I 
neur  des  nations,  la  vertu est  qec 
foie  oontagteuae  ainsi  que  le  viae,i 


SYRIE  MODERNE. 


231 


Louis,  par  bod  blatant  example,  produi- 
8it  te  plus  grand  des  biens.  Au  milieu 
de  ce  treizieme  siecie,  si  abominable- 
ment  commene^ ,  tea  esprits  se  ealme- 
rent;  Ifs  haines  ae  fireiit  aourd^s  pour 
n*avoir  pas  k  rougir  de  leur  ferocite;  la 
traDquillit^  de  TAme,  sinon  encore  le 
bien-^tre  du  corps ,  se  r^pandit  sur  les 
masses  populaires,  et  les  rapports  des  Oc- 
cidentaux  aveo  les  Orientaux  devinrent 
des  rapports  d*hommes  h  hommes,  sinon 
de  freres  h  Mres.  Saint  Louis,  eomtne 
un  astre  bienfaisant,  eclaire,  assainit, 
fto>nde  T^poqae  entidre  de  son  rj^e. 
Cest  h  la  ibis  ie  module  des  guemers 
braves  et  g^reux,  le  grand  juge  de 
TEurope,  Parbitre  entre  les  rois  et  les 
peuples,  le  saint  par  excellence. 

Yoila  le  cdte  moral  de  ce  slide  des 
demieres  eroisades;  le  e6i€  politique 
n'offre  pas  moins  de  transformations 
dans  r^tat  de  rOcddent.  En  premise 
ligne,  le  colosse  d'Allemagnes^^branleet 
semble  pr6t  h  s^affaisser.  Fr6d^ric  II , 
malgre  son  habilet^  et  ses  talents,  tr6bu- 
che  de  Tictolres  en  victoires,  de  tr^es 
en  troves ,  et  voit  de  toutes  parts  son  au- 
torit6  ruin^ ,  son  existence  compromi- 
se, ses  peuples  ind^cis  ou  factieux.  Son 
assassin  Mainfroid  achive  la  desorgani- 
sation  deTempire;  Tanarchie  feodale  re- 
nalt  de  ses  mines  immenses.  Mais  aussi, 
a  la  faveur  de  ces  troubles,  les  peuples 
tributaires  secouent  leur  jou^ :  le  Dane- 
mark,  la  Pologne,  la  Hongne,  devien- 
nent  des  £tats  compl6tement  ind^pen- 
dants.  Le  droit  public  prend  nais- 
sance  -,  la  Hgue  Hanseatique  se  forme , 
les  villes  d^impiriales  ^u'elles  6taient  se 
font  libres ,  et  ces  cites  affranchies  en- 
trant dans  une  vole  de  prosp^rit6 ,  fon- 
dle sur  une  alliance  f6d6ratiYe.  Quant  h 
fAngleterre,  son  faibleroi  Henri  III  en 
compromet  la  puissance;  mais  saint 
Louis  la  sauTC  des  dissensions  intestines 
par  ses  conseiis  et  son  jugement.  L*£s- 

Ea^ne  aussi  a  M  trouble  par  des  am- 
itions  insatiables ;  cependant  le  trei- 
zieme si^le  8'ou?re  pour  elle  par  la  £a« 
meuse  bataillede  Tolosa,oi]k  les  Maures 
essuient  une  d^faite  presque  egale  a  cdle 
que  leur  fit  ^rouver  naguire  Charles 
Martel.  Puis  les  r^nes  successifb  de  Fer- 
dinand III  de  Castille  et  d'Alpbouse  X 
le  Sage,  eeiui  de  Jacques  I  d'Aragon,  o^ 
sont  conquis^  tour  a  tour,  Gordoue,  S^* 


ville  et  les  ties  Majoraue  et  Minorque, 
donnent  enfin  une  vafeur  a  TlCspagne 
dans  Tensemble  de  I'Europe,  et  anienent 
Pere  moderne  tout  aussi  bien  par  des 
tjctoires  que  par  des  institutions. 
'  En  resume,  epoque  de  troubles  et  de 
p^nibles  enfaiitements ,  le  onzi^me  sie- 
ele  impriine  son  caractere  k  tout  ev^ne- 
meiit  et  k  tout  bomme;  et  sa  croisade 
surtout  est  corome  une  effervescence 
sans  ralson  qui  cherclie  un  6tablissement 
quetconque,  etfait  effort  pour  engendrer 
une  nouvelle  soci^td.  Le  douzienie  siecle 
a  d^ja,  an  eontraire,  la  conscience  de 
ce  quil  fait  et  de  ce  qu*il  veut :  les  ten-^ 
dances  se  contrarient,  les  opinions  se 
partagent,  les  passions  se  combattent 
encore;  mais  ruuit^  se  fait  jour,  le 
monde  moderne  se  degage  du  chaos  feo- 
dal.  Le  treizieme  si^cie,  enfin,  offre  d'a- 
bord  la  lutte  des  reactions  ordinaires  k 
Tbumanite;  mais  il  ecoute  le  g6nie,  il 
v^n^re  la  saintet^,  il  travaille ,  il  s*orga- 
nise,  il  cr^.  Les  eroisades  du  douzi^me 
siecle  ontune  voiont^  determin6e,  un 
chef  supreme,  unbut  caracteris^,  sinon  . 
encore  la  science  des  exp^itions.  Les 
eroisades  du  treizieme  siecle  enfin  mon- 
trent,  grdce  k  saint  Louis,  la  generosity 
militaire  des  peuples  civilis6s,  et  le  sen- 
timent du  droit  des  gens  et  des  rapports 
interna tionaux.  Aussi  r6sulte-t-il  tie  ces 
derni^res  une  veritable  extension  du 
oommerce,  une  heureuse  Emulation  d^in* 
dustrie.  Montpellier,  Narbonne,  Mar- 
seille devlennent,  a  daterdecette  epoque, 
les  correspondantes  ordinaires  de  r£- 
gypte  et  de  la  Syrie.  Cest  la  un  bienfait 
reel :  il  nous  sera  difficile  d*en  constater 
d*autres  pendant  les  cent  soixante-quinze 
annees  que  dura  la  lutte  colossale  de 
rOccident  centre  TOrient  (*). 

Et  maintenant  on  ne  s'etonnera  pas 
sans  doute  de  notre  s^verite  en  jugeant 
les  croises.  Gertes  nous  louerons  sans 
restriction  Louis  IX ,  sa  liberalite ,  sa 
▼aillance ,  son  caractere  doux  et  ferme 
k  la  fois,  ses  intentions  toujours  pures  et 
grandes,qui  rach^tent toutes  ses  fautes ; 
nous  ferons  saillir  avec  joie  et  orgueil  la 
noble  et  sainte  figure  de  Gerard  de 
Provence,  Tinfatigable  Hospitalier,  le 
coeur  le  plus  haut  et  le  plus  charitable 
d'une  epoque  de  passions  basses  et  de 

(*>  Yoyei  Galzot,  de  Slsmondi ,  Michelet. 


282 


LUOTVERS. 


hidease  intol^raoce^  cet  ange  parmi  tant 
de  demons.  Mais  aussi  oous  serons 
sans  piti^  pour  la  eruaut^  et  la  vaaite 
barbare  de  Richard  Coeur  de  Tigre  et 
non  de  Hon.  Nous  deooooerons  les 
petitesses  ambitieuses  et  les  fourberies 
militaires  de  Philippe- Aususte,  qui  ne 
porte  ce  dernier  nom ,  il  taut  8*ea  biea 
souvenir,  que  parce  qu*il  ^tait  n^  en 
aodt ,  et  noD  parce  qu  il  avail  une  res- 
semblance  quelconque  avec  le  premier 
empereur  romain.  Nous  montrerons 
dans  la  papaut6  l^intelligence  rarement 
alliee  malheureusement  a  la  grandeur 
du  caract^re  etau  d^iuteressement  dans 
les  vues.  Nous  analyserons  la  foule  aui 
s*est  pr^cipit^  a  la  premiere  croisade^ 
et  sans  excuser  ses  vices ,  nous  plain- 
drons  ses  misses.  Nous  serons  severe 
pour  Boh6mond  et  Beaudouin ,  ces  vo- 
leurs  de  trones,  pour  Louis  VII,  le 
cagot  sans  m^rite,  pour  Fr^^ric  Bar* 
berousse,  le  vieux  rou,  pour  Dandolo, 
Tusurier-doge,  pour  les  conqu6rants,  co- 
vers et  contre  touteloyaute  et  justice,  de 
I'empire  Byzantin ,  pour  les  saccageurs 
de  Constantinople.  Nous  serons  indul- 

§ent  pour  la  foi  respectable  de  Godefroy 
e  Bouilloix,  pour  Fardeur  suerriere, 
quoiqu'un  peu  folle,  de  Tancrede,  pour 
le  g^nie  de  saint  Bernard,  quoique 
trop  rigide  et  trop  entier  dans  ses  vo- 
lontes.  Nous  expliquerons  surtout  com- 
ment les  papes  Urbain  II  et  Eusene  III 
sauv^rent  peut-^tre  TEurope  eiiTa  pons- 
sant  sur  TAsie.  En  uu  mot,  nous  nous 
efforcerons  de  chercher  la  v6rit^  dans 
un  siecie  de  meosonges,  de  couronner 
la  vertu  dans  un  siecie  de  crimes ,  de 
louer  le  peu  de  bons  et  de  fustiger  tous 
les  mauvais.  Aussi  bien  il  n*y  a  guere 
dans  le  fait  des  croisades ,  si  inhumain 
d*ordinaire ,  si  injuste,  que  deux  fortes 
et  souveraines  vertus  repr^sent^  par 
deux  heros  que  nous  avons  d6ja  nom- 
m6s,  la  grande  charite,  Tinepuisable 
amour  des  hommes ,  par  Gerard  de  Pro- 
vence, la  grande  justice,  Tinalterable 
equity  dans  tous  les  actes  de  la  vie,  par 
saint  Louis  C). 

(*)SI  noasvoalioDS  appayer  notre  opinion 
sur  oelle  des  pi  as  grands  historlens ,  les  cita- 
Uons  ne  nous  manqaeraient  pas.  Nous  noat 
borneroos  k  en  invoquer  une  seule,  qui  nous 
suflit.  Voici  comment  M.  Guizot  oondamno 
L4>uis  Yll  :  « ...  Tun  des  souverains  les  plus 
n  lUbles,  les  plus  d&ordonnto,  les  plus  donii- 


Noos  coQSttlterons,  da  re8te,leichN2i 
Diqueurs  eux-mtoes  des  croisades;  c 
fautse  souvenir  que  beauooupd'entita 
attribuent  les  defaites  des  arnitadijj 
croix  a  la  oonduite  d^ordonntedas 
8^.  Nous  feroos  remarqaer  la  i 
de  conqu^raut  ou  plutot  rhon 
Chretien  de  quetques chefs,  noble i 
felair  de  grandeur  d*autant  plus  k 
qu*il  sort  de  t^n^bres  plus  . 
mais  nous  dirons   aussi   leur 
dans  la  separation  des  d^ulUciJ 
rivalite  dans  le  partage  des  trdiM^I 
scandaleuses  disputes  qui  oot  ] 
amen^  des  guerres  intestines ,  i 
fratricides,  d6plorables  scandalesQ 
au  peuple  des  pelerins.  Combia, 
outre ,  ne  doitron  pas  s'lndigDer  ( 
oette  cruaute  des  croises  qui  sefa  ' 
avec  d^lices  dans  le  sang  des 
mans,  d^  la  prise  d*AoUochectd 
rusalem ,  et  qui  s'eo  vtmt  i  '  ' 
se  justifier  :  Jinsi  ont  eti  i 
demeure*  des  infidiiei,  ou  oieiif 
clarent  que  les  Sarrasios  ne  i 
des  cMens  immondesi  oe  qn| 
verait,  par  parenth^se,  que  ' 
kiopek  ( chien)  dont  nous  i 
core  a  cette  heure  les  Orieataox  J 
qu'une  simple  reaction. 

It  faut  distinguer,  du  reste, 
differentes  masses  d'hommcs  i 
maientla  migration  complete:! 
tout  aussi  bien  que  des  soil'" 

fieux  quoique  baroares ,  des4 
riques,  qui  avaient  fui  la  r" 
convent  pour  jouir  de  la  ( 
la  croisacle ,  des  religieuses  i 
bien  dignes  de  marcher  avee  I 
tu^es  des  goujats  de  Tarmee.  < 
importe  que  ces  soudards  et  t 
las  d*orgies ,  repus  et  fatigues, 
au  si^e  d'Antioche ,  par  exer 
repenteut  tout  a  coup ,  ecout 
deux  vins  les  exhortations  de  1 

c  nte  parses  godts  pef80iiDel8,les|i__ 
«  k  Urate  penstepuollqae,  qui  aleot  i 
«  France. »  Void  oomment  il  Jnge  Pl_ 
guste  :  «  Qaoiqtt*on  ne  dtai^le en  Ml 
«  veritable  intention  morale,  paint  i 
«  cupatlon  puissante  de  la  Justice  a 
«  Hre  des  hommes ,  il  avail  reaprit 
R  Ur.  eto. »  Void  oomoMBt  il  tone  sal 
« llarc-A.nrMe  et  saint  Loals  sonl  , 
«  les  deux  spois  princes  qui,  eo  loale  c.^ 
<c  afent  fait  de  leurs  crovances  moraksi 
«  mi^re  r^le  de  lear  condoile  :  Mano-lk 
a  stolden;  saint  UmiB,  cbrMen.  » 


STRIE  MODERNE. 


38S 


^  fassent  miDe  de  revenir  k  la  vertu,  pour 
se  repionger,  quelque  temps  apr^,  et 
plus  avaiit  que  jamais ,  daos  leur  era- 
pule  ignoble.  li  u^jr  a  eu,  pour  les  gu^rir 
et  ea  purger  Tarmee,  qu*un  veritable  re* 
m^de,  la  peste.  Heureusement  que  dans 
toute  cette  canaille  les  pires  n*6taient 
jamais  des  Fraucais  proprement  dits, 
aiiisi  que  Tattestela  cbroniquede  Tours. 
En  somme ,  nous  n*aurons  a  louer  d*en- 
semble  dans  les  croisades  que  le  senti« 
ment  de  la  fraternity;  encore  oe  noble 
sentiment  n'est-il  reelleiuent  concu ,  et 
surtout  n*e8t-il  excite  que  par  r£gtise  et 
ses  organes ,  papes,  pr^dicateurs  et  pr6- 
tres. 

STAT    DB   l'sUROPB  AY  ANT    LA   PBB- 
Ml^BB  GBOISADB. 

L'^poque  dite  du  moyen  dge  est  pent* 
£tre  pour  TEurope,  dans  tous  les 
sidles,  ia  plus  deplorable  et  la  plus  t6n4- 
breuse.  Deux  causes  de  d^adence  d6* 
passent  toutes  les  autres  :  Tignorance 
des  dominateurs,  Tabrutissement  des 
domines.  L'^lair  trop  precoce  de  Cbar* 
lemagne  une  fois  ^teint ,  la  faiblesse  de 
son  fils,  rineptie  grossidre  de  ses  succes- 
seurs,  divis^rent  fatalement  un  empire 
trop  immense,  et  disseminerent  lesforces 
de  r  Europe.  Mais  ce  qui  la  perdit  d6- 
finitivement,cefuteetten6cessit6funeste 
ou  tomba  Cbarles  le  Chauve  d'admettre 
I'her^dit^des  comt6s.  De  Ik  en  France, 
comme  prec6deroment  en  Alleroagne,  la 
ftodalite  avecses  vices,  s<>s  tyrannies,  son 
impuissanee  :  plus  de  patrie  commune, 
des  fiefs  particuliers ;  plus  de  villes ,  des 
chdteaux  forts ;  plus  d  armies ,  des  ban- 
des  de  partisans ;  plus  de  rois,  des  barons ; 
plus  de  peuples,  des  serfs.  Heureuse- 
ment ,  au  moyen  ige ,  la  barbaric  n'a 
jamais  et6  compile.  Au  onzieme  si&cle, 
du  temps  de  la  toute- puissance  feodale, 
durant  le  r^ne  brutal  du  fer,  sous 
la  domination  de  la  force  hereditaire, 
il  y  avait  de  par  le  monde ,  dans  des 
coins  recules,  adossto  a  des  montagnes 
abruptes,  ou  au  fin  fond  de  vall^  so- 
litaires, des  maisons'defendues  comme 
des  forteresses,  avec  une  vaste  enceinte 
de  pierre,  un  large  enclos,  de  bonnes 
murailles ;  et  1^  des  hommes  devoues  qui 
enseignaient,  qui  conservaient  le  culte 
de  la  tradition  et  Tamour  de  la  pens^ : 
ainsi  Quny.  Et  de  ce  Cluny  sortait  un 


jour,  arm^  desa  pers^vtoncereligieuse, 
de  son  intelligence  d^velopp^,  de  son 
Anergic  virginale,  un  Uildebrand,  moine 
respect^  avant  d*dtre  pape  revolution* 
naire.  II  arrivait  k  propos,  du  reste; 
car  la  papaut6 ,  en  se  o^adant ,  me- 
naj^it  mine.  VevMk€  de  Rome  avait 
^te  mis  a  I'encan ;  des  courtisanes  Ta* 
cheterent  pour  leurs  amants.  La  famille 
descomtesdeTusculum  fit  ia  surencbere 
deeette  papautesimoniaque :  Benolt  VIII, 
de  cette  famille,  fut  pape  (1013  a  1024); 
son  fr^re  Jean  XIK  lui  sucoeda;  et 
en  1083  Benolt  IX,  leur  neveu  ,  porta 
la tiare  k  son  tour,  fut  tyran  execrable, 
debauch^  sans  pudeur ,  et  partagea  la 
souverainete  pontificale  avec  ses  deux 
rivaux,  Gregoire  VI  etSilvestre  HI.  Sous 
pr^texte  de  parer  a  ces  seandales ,  Tem- 
pereur  feodal  d'Allemagne  imposa  cinq 
fois  de  suite  a  Rome  son  ^vdque ,  a  la 
religion  son  cbef,  k  Dieu  son  vicaire. 
II  eut  fallu  alors  deux  hommes  de  g^nie 
pour  sauver  le  monde  Chretien,  I'un 
guerrier,  Tautre  pr^tre;  il  n'en  vint 
qu*un,  le  moine  Hudebrand  (*). 

Hildebrand  eut  une  action  continue 
sur  son  siecle,  comme  moine  d*dbord, 
comme  cardinal  ensuite,  comme  pane 
enfin.  Comme  moine  de  Cluny,  par  la 
sev^rit^  de  ses  mceurs  et  les  efforts  de 
son  intelligence,  il  reoonquit  en  faveur 
de  rhomme  de  Dieu  le  respect  des 
masses.  Comme  cardinaUarchidiacre,  il 
frappa  k  mort  les  deux  vices  qui  mena- 
faient  r£glise  tout  entiere  :  le  con- 
cubinage des  pr^tres,  et  la  simonie. 
Comme  pape,  sous  le  glorieux  nom  de 
Gregoire  VII,  il  d^fendit  contre  Tern* 
pereur  d'Ailemagne  les  prerogatives  de 
fa  papaut^  et  Tind^pendance  de  Rome. 
Ainsi,  r^forme  du  pr^tre,  r6forme  da 
r£glise,  reforme  de  la  politique ,  \Qi\k 
son  ceuvre.  Quel  qu'en  fdt  le  succes , 
quels  que  fussent  les  obstacles  qu*il  ren- 
contra,  il  n*en  parvint  pas  moins  k 
rendre  a  la  justice  son  pouvoir,  a  la  vertu 
son  ^clat.  J  ustice  un  peu  farouche,  il  est 
vrai!  vertu  un  peu  rigoureuse,  assure- 
ment  I  Mais  se  moutrer  juste  et  vertueux 
dans  le  onzidme  siecle,  quel  m^rite 
n*^tait-ce  pns?  Quoi  qu*on  puisse  done 
reprocher  a  Gregoire  VII  dans  ses  rap- 

n.Voyez  Miehelet,  OiMtoire  de  France,  et  S*» 
gsur,  HistottruniveneUe^ 


M4 


LUNIVERS. 


ports  avec  Henri  IV  d'AHenagne,  il 
n'en  sauTa  pas  moins  la  papaute  de 
rabsorption  par  I'aoipire;  quoi  qu^oa 
disesur  son  oespotisme  d^rieal,  iio'en 
chassa  pas  moins  les  Yendeursda  temple, 
oomme  sTait  fait  aon  divin  niattre.  Get 
exemple  d'energique  morale  fut  suivi 
par  ses  sucoesseurs  dans  Ja  ehaire  de 
Saint-Pierre,  au  grand  profit  de  I'Egiise. 
Urbain  II  eontiniia  ce  qu*avait  si  bien 
oommenoi  Gr^oire  VII  :  il  combattit 
vigoureusement  aussi  les  eoneubinaires 
et  les  simoniaques;  il  lutta  aussi  contre 
i'empire,  et  lit  k  la  fois  respecter  et  ie« 
douter  la  ppaut^. 

II  y  a  deux  hommes  dans  un  pape  ; 
le  souverain  pontife  et  le  prince  electif. 
Le  souverain  pontife,  par  la  force  de  la 
foi  dans  les  po|nilations  au  moyen  Age,  par 
I'intelli.^enoe  dont  son  Section  ^tait  pres« 

3ue  toujours  le  garant,  par  la  puissance 
e  la  tradition ,  par  Tuuite  du  eatholi* 
eisme,  par  les  grands  principes  m^mes 
qui  sont  la  base  de  la  religion  chr^ 
tienne,  avait  toute  force  morale ,  et  de- 
vait  fonder  son  autorit^  sur  la  justice 
envers  tous,  sur  la  protection  du  faible, 
sur  les  droits  des  peupies,  sur  les  nobles 
et  souveraioes  id^s  de  la  cbarit^  et  de 
la  fraternity.  Le  prince  Electif,  au  con« 
traire,  sans  prMdents  dans  la  conduite, 
sans  int^rlts  de  famille  et  d'avenir,  sans 
aieux  et  sans  posterity,  devait  agir  an 
hasard,  fairs  des  concessions  aujonr* 
d'hui ,  cbercher  a  les  retirer'demain , 
flotter  sans  cesse  et  v^ter.  Aussi  le 
prince  temporel  toiMI  souvent  plein  de 
contradiction  et  de  faiblesse ;  tandis  que 
le  souverain  spirituel  brillait  toujours 
par  Tunite  et  Tinfaillibiiit^.  L'un  tendait 
sans  cesse  a  secr^r  un  £tat;  Tautrepos- 
sMait  le  plus  vaste  des  empires ,  oelui  des 
Ames :  et  oela  en  montant  dans  la  ehaire 
pontificale,  sanscraindre  les  armdes  par- 
dessus  Ifsquelles  il  passait  pour  attain- 
dre  ses  enneniis,  sans  reeours  It  la  foros 
mat^rielle,  aux  armes  des  hommes,  a  leurs 
moyens  ordinairesdedomination. 

Cette  omnipotence  mentale  de  la 
papaot6,  Gr^oire  VII  Tavait  renfor- 
oee.  Ses  suocesseurs  n'eurent  plus  qu*A 
suivre  ses  traces.  Aussi  la  premiere 
id^e  des  eroisades,  c'est-a-dire  d*uiie 

guerre  que  la  papaute  pourrait  mener 
e  Rome,  m  elie  serait  repr^entde  par 
des  l^ats ,  oil  elle  pourrait  avoir  uoe 


iofluenoe  presque  sooreraiBe, 
o^ceasairement  k  Tespritj 
profond  du  moine  Hlblebrand.  i 
tea  achamta  contre  les  rices  ^ 
^que,  aon  rude  duel  eontra  I 
Templcb^nt  de  mettre  a  i 
cette  idee.  Mais  il  Tavait  eon^l 
developpee  dans  ses  eorits;  T 
elie  fruetlfia.  Ge  n>dt  M 
pour  faire  acta  «le  leur 
ideale  (]ue  lea  panes  anraieaftj 
mettre  a  la  tADe  de  reudtation  r* 
qui  entratnait  les  peuples 
vers  TAsie ;  la  politique  le  i 
seillait  tout  autant  que  lews  I 
propres.  Aussi ,  une  fois  Uffaa 
cide,  sessuccesseurs  saisireot-i 
que  tous ,  i*occasioo  de  ees  j 
taines  pour  ^carter  leurs  i 
lemagne  et  de  Sidle,  et  pours 
plus  que  jamais  dans  le  cooseil 
Du  reste ,  il  £aut  le  dire,  il  ■*! 
chez  chacun  des  papes  que  M 
raisons  toutes  d'^oiame;  ii  fj 
core  des  sentinienu  vraisMialf 
etmoraux,  qui  les  iaspirtmai 
sions  :  les  secours  dus  an  ■■ 
fraternity  entre  Chretiens ,  tas| 
de  rEvangile. 

Faut-il  oondore  de  Ul 
des  eroisades  c*est  la  pap 
absolument.  £lle  s*en  serrit  a 
elle  en  accepta  I'id^e 
approuva  rexeoation 
tout.  Les  aentimeota  qui  i 
enflammeot  les  homoses  a  I 
pies,  le  sentinMot  rdigieax,f 
et  le  sentiment  national,  i 
eoLcks  :  Tun  petit  nsener  < 
comme  I'autre  a  la  haina 
papautA  ignoraift-dle 
possibles  des  exaltatioot 
Que  non  pas;  mais  entre  { ' 
elie  crut  cboisir  le  nMModre,« 
rOccident  raalade  sur  IT  ~ 
Urbain  II,  d'ailleurs,  fut 
tratn^  par  renthousiasose  j 
la  croisade  qu*il  ne  la  < 
chef  et  ne  rexdta.  I9*ea 

nr^umer  (|no  eet  elan  ( 

trayait,  qu*d  en  pr^voyait  lesi 
ees  funestes  a  Tesprit  de  • ' 
dvilisatioB,  et  qu'il  fut  be 
eonvaincu  qu'oa  ne  pease 
clamatlons  violeotes  de  Ter 

En  resume,  mal^  le  geam  < 


I  lA  omJ 
apauii?! 


SYRIE  MODERWE. 


1S5 


^  d'une  part  et  malj^^ranarchie 
de  Tautre ,  la  civilisation  ou  la 
nous  te  repetons,  n'a  jamais  ea^ 
au  moyen  dge  :  tantdt  ce  sont 
qui  sont  gens  d'inteliigen^ , 
[Hods  et  d^tudes,  tantdt  lea 
couventit,  tatitdt  lesprofes- 
uniyprsit^;  queiquefois  ces 
!e  sont  ensemble  et  se  dispu- 
"  ection  des  esprits.  Les  peti- 
eoDtraire,  aceablfs  sous  le 
lervage,  les  barons  f<iodaux, 
par  la  guerre ,  les  princes  et 
iveugl^  par  Pambition,  demeu- 
Pi^norance  et  la  fn^rocit^  bar- 
laibeureuseineot  ce  sont  dea 
fi^odaux  et.de  la  popuiaee, 
iDaiorit6,  qui  vont  aller  en 
^  car  Inline  des  causes  des  migra- 
'oyantes  du  onzi^me  siecle, 
la  premiere,  c'est  pour  la 
ta  mis^re  croissnnte ,  1  oppres* 
lusen  plus  rigoureuse,  la  faim 
$poir;  et  pour  les  chevaliers 
e  est  le  fait  qui  avait  r^sult^ 
lit^  des  flefs,  arrachee  aa 
les  le  Chauve.  Depuis  le  neu- 
Je.en  elTet,  chaque  seigneur, 
lire  absolu  d'une  pHrtie  du  sol 
srtaln  nonibre  de  serfs,  laissa 
tout  son  pouvoir ,  toutes  ses 
t ,  et  rieu  h  ses  aotres  fils. 
done  des  cadets  de  malsons 
oil  des  inal-partag6s  dedifffr- 
lui  en  1095  forment  eo 
le  GodefVoy  de  BouiHon, 
partai;^^  lui-m^me.  Ainsi 
but  secret  et  s^rieux  des 
sont  d*abord  des  masses  fa- 
tutant  par  la  doulenr  que  par 
sont  ensuite  de  hardis  aveiita* 
qui  la  religion  n'est  qu*aQ 
\  Tesprlt  de  conqu0te. 

Ift'OBURT  4U  ONXliSMS  Blicls. 

apprteier  les  bommes,   pour 

.  I  laits  si  souvent  contradictoires 

Micc^ent  dans  les  dges ,  pour 

Mre  Thistoire ,  il  est  bon  quel- 

de  recbercber  des   ezemples 

porains  de  ce  que  Tftude  des 

LOffre  k  nos  mSlitations.   Les 

■nx  caractdresde  Fhumanit^  n'ont 

■M  •'  r6nergie  dans  ia  sobriM, 

M  dans  la  mollesse ,  Tabnitis- 

t  dans  Tesclavage ,  i'orgueil  daos 


la  domination,  la  fausset^  dans  la  fai- 
blesse,  se  repn^entent  toujours  parini 
les  bommes,  avee  qoelques  variations 
sans  doute,  mais  avec  uti  fond  esseiitiel- 
lement  uni forme.  L'&ine  est  une  lyre 
qui  n'a  qu'un  certain  nombre  de  cordes 
ail  son  unique ;  la  m^ine  oorde  vibre 
d*une  &9on  ^ale  aussi  bien  aujourd'hui 
qn'il  y  a  mille  ans,  at  vibrera  ainsi  jus- 
qu'a  la  fin  des  mondes.  Voyez  les  Grecs 
au  mayen  Age  et  les  Annenieos  ac» 
tuels  :  monies  qualites,  mimes  vices. 
Les  Armeoiens  sont  oommercants  ha- 
biles,  mais  gensde  peu  de  foi;Vuses  par 
s^ssit6 ,  lettres  par  interit ,  ils  cber- 
ebent  a  snrprendre  ki  eonflanee  pluldt 
qu'd  la  nuiriter;  ils  servent  d^inter- 
aaediaires  k  tous ,  comme  baaquiers  ou 
comme  hommes  d'affaires  :  Targent  el 
la  chieane  aont  leurs  seules  for«es« 
Sans  dtre  toinbes  aussi  bas  comme 
corps  de  nation,  lesByiantins  du  onzieme 
sitele  en  Itaient  au  mtoe  point  comme 
individus.  Constantinople  avait  encore 
des  hatHtants  nombreux  ^  mais  plus  un 
seul  citoyen.  Oux  que  le  negoce  n'ab* 
•orbait  pas  s'abandonnaient  k  des  occu- 
pations rutilas  ou  a  des  debouches  raffi- 
b^s.  Les  uns  etaient  des  iibertius  s<)ns 
Arein ,  les  autres  des  devols  sans  raison. 
Vantards ,  bavards ,  superstitieux  ,  on 
^yaitceux-ei  se  livrer  a  des  discussions 
ridicules  sur  la  vie  presente  et  sur  la 
Tie  future .  ceux*44  s  adonner  aux  pra- 
tiques du  eulte  de  tous  les  saints  a  la 
Ibis ,  tous  enfin  se  eroire  dans  ia  verity 
aussi  bien  que  s'aceorder  en  partage 
toutes  les  quality  et  tous  les  talents.  Us 
traitaient  les  Occidentaux  de  barbares, 
et  ne  s^aperoevaient  pas  que  si  ces 
demiers  se  di^attaient  dans  le  chaos 
d'une  soci6t^  ii  veair,  eux-mSmess'ever- 
tuaient  sur  les  mines  d'une  society 
pass^  (*). 

Quant  k  la  eour  byzantine,  c'6tait 
bien  pis  encore  (|ue  le  bas  peuple  si 
mll6  de  Constantinople,  que  ses  clas- 
ses interm^di  aires  qui  n'avaient  plus 
qu'une  seuie  aptitude^  celle  des  affaires. 
Corruption  denont^e ,  liberiinage  scan- 
daleux,  platitude  vis-a-vis  des  sup^ieurs, 
arrogance  vis*2hvis  des  inferieurs ,  tra- 
hison ,  fourberie ,  bassesse ,  tels  etaient 
les  ptebes  mignons  qui  se  oommettaient 


386 


LTJNIYERS. 


hi 


dans  eel  antre  da  despotisme  le  plus 
Idche  et  le  plus  ignoble  qu'oa  ait  ja- 
mais peut-^tre  encens^  sur  la  terre. 
Mais  aussi  les  princes  et  les  princesses 
offraient-ils  impudemment  Texemple 
des  vices  et  parrois  intoe  des  crimes. 
Nous  avons  vu  que  Tassassinat  donna 
le  trdne  a  plusieurs ;  cette  usurpation 
sanglante  passa  presque  a  I*^tat  de  cou- 
tume.  Nous  avons  vu  Theopbano  d^ho« 
norer  le  rang  supreme  par  sa  crapuleuse 
conduite ;  Zoe  depassa,  s'il  est  possible, 
sa  rivale  en  infamie.  Theopbano ,  d*ail- 
ieurs ,  n'elait  au  moins  qu*une  flile  de 
rien,  arrachee  au  cabaret  de  son.p^ 
par  le  caprice  d'un  fou ;  Zo^>  au  oon- 
traire ,  ^tait  la  propre  nitee  d*un  empe- 
reur ,  Basile  II ,  petit  Gis  de  Constantin 
Porphyrog6nete.  Cette  demiere  avait 
^p^se  Romain  Argyre,  a  qui  on  ri^mit 
la  couronne  en  1028;  mais  s*etant  un 
our  prise  d'une  passion  subite  pour  un 
lomme  de  la  plus  basse  extraction, 
Blichel  le  Paphlagonien ,  elle  r^olut 
immediatement  de  se  debarrasser  d'uo 
mari  incommode  et  de  placer  son  amant 
sur  le  trdne.  Presste  d*atteiodre  son 
criminel  but ,  et  impatient^  de  la  len- 
teur  que  le  poison  mettait  a  d^vorer  les 
entraillesde  Romain  Argyre,  elle  leOt 
noyer  dans  un  bain.  Ge  n*etait  la ,  da 
reste ,  que  le  premier  acte  furieux  de 
cette  meg^re  dissolue. 

Dans  ses  clioix  adult^res  Theopbano 
avait  montr6  une  sorte  de  pudeur  intel- 
lectueile  :  c*etaient  de  grands  guerriers, 
des  vainqueurs  qu*elle  couronnait ,  Zi- 
misces  apr^  Nic^phore  Pbocas.  Zo6 
avait  les  ^oi)ts  plus  bas.  Apres  son 
Paphlagonien ,  aussi  use  de  corps  que 
d*dme,  et  qui,  rong^  par  les  mala<fie8 
autant  que  par  les  remords,  alia  cacher 
son  agonie  sous  le  froc  d'un  moine, 
elle  jeta  les  yeux  sur  un  homme  aussi 
m^prisiible  sinon  aussi  miserable  que 
le  premier.  Cetait  le  fils  d'un  calfateur 
de  vaisseaux,  appel6  aussi  Michel  et 
surnomm^  Calaphate.  Ce  dernier,  d'une 
nature  brutale  et  imperieuse ,  ne  per- 
mit pas  longtemps  a  Timperatrice  de  le 
gouverner.  11  voulut  £tre  mattre  ,  il 
exila  Zoe.  Gelle  ci ,  a  force  d'argeut  et 
de  promesses ,  souleva  la  populace  en 
sa  favour.  Calaphate  ne  sut  pas  se  dd- 
fendre.  II  fut  pris ,  et  on  lui  creva  les 
yeuz,  Alors  Zoe,  qui  commeo^t  a  re- 


dooter  ses  amants,  voolat  rcpv 
trouble ,  et  s'adjoignii  sa  soiv " 
dora.  Les  Byzantins  souffrinat 
nbd  tout  entiere  cette  parodis 
nemeutale.  Mais  les  deui ' 
f utiles  que  dissolues,  devinimi 
dale  pour  Constantinople 
fallut  que  Zoe  dierchdt  uo 
cboix  tomba  sur  un  certaio 
tin  Monomaque ,  qui  jadis 
deses  favuris  d*un  jour.  Pour; 
Tesprit  de  ce  nouvel  empereor, 
Tinramie  de  lui  permetlre  une  i 
du  nom  de  Selereue,  et  elle 
dace  de  partager  avec  cetts 
titre  d*Auguste. 

Cepeudaut  Gonstantino|de 
veine  de  morality ;  on  s*y  soaf 
oet  arran;:ement  ignoble.  ~ 
prefera  son  epouse  couroDnee 
tresse  chargee  de  la  baine 
et  gr^oe  a  oette  concession, 
regner  douze  ans  pour  la 
Tempire.    Ge  fut    lui,  en 
adieva  la  ruine  du  tresor  ^ 
rapacity.  Ce  fut  lui  aussi  (^ 
les  provinces  frontieres  par  i 
Ces  provinces  etaient  ex 
p6ts,  aOn  de  pouvoir  toi^ 
i'endre  contre  les    Barbaits, 
contre  les  Turcs,  en  Europe 
Russes.  Constantin  Monoi 
qu'elles  payassent  coinine 
s'enga^eant  par  serment  ^ 
seoourir.  Mais  il  prit  re  ^ 
gent,  et  a  la  premiere 
voya  point  de  soldats. 

A  la  mort  de  eel  abjjeel 
pire  semblait  pr^t  ^  s^r 
avait  ^us  qu^une  ressoune 
plir  le  tr^or ,  c*etait  de  del 
moines,  qui  re£orgeaieot  dt 
unp  petite  part  deleursupf  " 
nes,sollicit6s,  refusereni 
Isaac  Comn^ne ,  eut  le 
coutraindre  a  venir  en  aide  a 
Tappelle   alors  sacrilege, 
rexcommuiiie.  L'empereur 
que  temps  a  ces  maledictions 
Mais  sa  faible  t^ie  se  truublei' 
bourrele  de  remords, 
ciel  la  remission  du  gros 
avait  cru  com  met  t  re,  il 
pour  se  Itvrer  a  Taise  aux  prai 
la  devotion  la  plus  outree.  Sm 
seur  Constantin  Ducas  fut  lii«l 


I  ai>a«iael 


!$oel 


SYRIE  MODBRNE. 


287 


frivole ,  le  plus  incapable ,  le  plas  nul 
des  princes.  Se  croyant  beau  parleur , 
il  disrourait  a  tout  venant ;  et  tandis 

auMI  Idchait  ainsi  la  bonde  au  vain  flux 
e  ses  paroles,  les  Turcs  ravageaient  ses 
provinces  sans  rencontrer  de  r^istance. 
Le  peu  qu'il  faisait  finit  cependant  par 
lasser  Constantin  Ducas  :  il  cr6a  ses 
trois  fiis  empereurs ,  et  laissa  le  ^ou- 
vernement  h  sa  m^re  Eadoxie,  a  la 
condition  qu*elle  ne  se  remarierait  pas. 
€elle-ci  ne  fut  pas  longtemps  k  man* 
quer  h  sa  promesse.  Elle  vit  un  jour 
un  condamne  a  mort  qui  lui  parut  avoir 
bonne  mine ,  et  qui  partait  pour  Teter- 
nit^  avec  une  insouciance  assez  bardie : 
au  lieu  de  le  faire  tuer,  elle  Tepousa. 

Cest  1^  ce  Remain  Diogcne,  brave 
soldat  mais  empereur  sans  talent,  que 
nous  avons  Vu  si  ridicule  dans  ses  rap- 
ports avec  le  sultan  turc  Alp-Arslan. 
Le  suppiice  auauel  cet  bomme  avait 
^happe  si  singufi^rement  une  premiere 
fois,  pour  ^tre  ditfi^re,  n*en  eut  pas 
moins  lieu.  On  se  r^volta  centre  lui 
aprdsses  d^faites  en  Asie :  il  fut  blcss^ 
dans  la  lutte ,  et  au  lieu  de  panser  sa 
plaie,  on  eut  Tinfamiede  Fempoisonner. 
11  ^tait  dans  sa  destine  de  p^rir  de 
mort  vielente ,  comme  il  etait  dans  son 
caractere  d'expirer  avec  courage.  Du- 
rant  sa  longue  agonte,  il  ne  montra 
aucune  faiblt^sse,  il  ne  fit  aucune  recri- 
mination :  il  s'etait  babitue  depuis  long- 
temps a  ridee  de  la  mort.  11  n*y  avait 
pas  m^me  dans  le  successeur  de  Re- 
main Diogene  le  courage  que  ce  dernier 
montra.  Micbel  Parapinece  ne  fut  qu'un 
pedant  sans  m^rite ;  on  8*en  lassa  bien 
vite  ,  et  on  mit  h  sa  place  un  vieillard 
cacochyme,  ancien  soldat  revolte ,  Ni- 
c^phore  Botoniate ,  qu'Alexis  Comn^ne 
d^trdna  bientdt  (*)• 

Nous  voila  arrives  au  prince  que  les 
croises  trouv^rent  k  Gonstantmople. 
Nous  aurons  a  revenir  sur  lui  et  sur  ses 
actes.'  Coiistatons  seulement  ici  a  quel 
triste  ^tat  en  ^tait  r^uit  Tempire 
Byzantin  au  commencement  du  regne 
d'un  bomme  bien  diversement  jug^. 
L*ombre  de  pouvoir  que  le  gouverne- 
ment  ^rec  avait  conserve  en  Italic  jus- 
qu*a  la  seconde  moiti^  du  onzieme 
sitele  8*etait  ^vanouieen  1071.  Les  Nor- 


mands  avaient  alors  d^nitivementfond^ 
leur  royaume  de  Sicile.  Non  colitents 
d'etre  maltres  de  la  basse  Italic,  ils 
^taient  venus  inquieter  les  Byzantins 
jusque  sur  le  continent  de  Tancienne 
Grece,  a  Durazzo.  Telle  ^tait  la  position 
deplorable  de  Toccident  de  Tempire.  Le 
nord  ne  valait  guere  mieux.  Les  Bul- 
gares ,  quoique  devenus  Chretiens,  n*en 
etaient  pas  moins  de  tr^-inquietants 
allies ;  les  Russes  poussaient  despolntes 
jusqu'en  Tbrace.  Le  lien  religieux  ^tait 
aussi  reldche  que  le  lien  politique  entre 
Rome  et  Constantinople.  Apres  bien  des 
luttes  de  preponderance  entre  levSque 
de  Rome  et  le  patriarche  de  Byzance,  on 
en  etait  venu  a  la  fin  a  s'anaihematiser 
mutuellement.  CVn  etait  fait !  les  deux 
eglises  avaient  rompu ,  et  le  schisme  s'e- 
tait  declare  irrem»cliablement  en  1054. 
L*empire  des  Grecs  n'avait  done ,  ^ur 
ainsi  dire,  nlus  qu'une  capitale  en  Eu- 
rope, capitale  monstrueuse  d*un  gouver- 
nement  en  dissolution,  capitale  qui  n'a- 
vait filus  qu*un  grand  noui  pour  soutie n, 
et  qu*une  populace  effrenee  pour  defen- 
seur.  Yoyoos  maintenant  ce  qui  lui 
restaiten  Asie. 

Ce  qui  prouve  evidemment  la  fai- 
biesse  i^nominieuse  de  Teinpire  Byzan- 
tin, ce  fut  la  faute  ineoncevable  que  ces 
princes  commirent  de  s'adresser  aux 
Turcs  dans  leurs  querelles  interieures. 
Cetait  reconnaitre  la  superiorite  de  ces 
nouveaux  venus ,  auxquels  il  avait  suffi 
de  trols  grands  princes  pour  etablir  leur 
puissance.  C*etait  abdiquer  toute  domi- 
nation future  sur  des  provinces  remplies 
de  Grecs  nourtant ,  dont  les  ricbes  cites 
auraient  dd  etre  defend ues  une  par  une, 
comme  autant  de  joyaux  de  la  cou- 
ronne  de  Constantin.'  Malgre  tant  de 
raisons  de  lutter  jusqu'au  dernier  sou- 
pir,  les  armees  byzantines  avaient 
recuie  pas  k  pas  devant  la  cavalerie 
d' Alp-Arslan  et  de  Melik-Schah;  el, 
lors^ue  Soiiman,  cousin  de  ce  dernier, 
devint  mattre  de  TArmenie  et  de  la 
Pbry^ie ,  loin  de  le  combattre  encore, 
on  vit  des  competiteurs  du  tr6ne  de 
Constantinople  s^adresser  a  leur  en- 
nemipour  iuger  entre  eux,  et  ne  devoir 
leur  regneaun  jour  qu*a  Tappui  interesse 
d'un  sultan  maliometan.  Aussi  adroit 
politique  qu^habile  soldat,  Soiiman  re- 
connutTavantage  qu'il  avai^a  s^occuper 


2S8 


vutmHA. 


'  des  affaires  des  Byaotlns.  Or  tandia 
que  les  empereura  de  ceux-ei  etaieni 
6ocup^  en  Europe  9  Soliman  promana 
dans  TAsie  mineure  abandoniiee  ua 
faux  prince  Romain ,  r«v6tu  de  la  pour* 
pre  et  des  brodequina  rouges,  ooa« 
tume  distioctif  des  einpereurs  de  Cona- 
tantinople ;  et ,  ii  la  faveur  de  eelte  four- 
berie  grosat^re,  il  entra  sans  eoup  ferir 
dans  piusreurs  villas  grecques,  qui 
ne  savnient  plus  k  qui  ofoir.  Puis ,  dea 
qu'il  s'etait  empar^  de  eea  cites  d^ou* 
ra^^es,  Soliman  les  fortiOait,  et  leur 
laissait  garniaon.  £n  m^.me  temps,  en 
approchant  de  plus  en  plus  de  Constan* 
tinople,  il  rendait  les  d^lil^a  dea  mon- 
tagnes  et  lespassag[e8des  rivieres  infiran- 
chissables  ^  Vavenir.  Aussi,  k  mesura 
qtie  les  Turcs  s*avan^ient«  ne  pouvait* 
on^liis  esp^rer  ni  leur  retraite,  ni  leor 
expulsion  (*). 

Eiifln ,  lorsgue  les  diverges  r^voln- 
tions  de  palais  fiirent  terminies  dans 
Byzance,  le  perplexe  empereur  Alexia  aa 
Tit  obli^6  de  conflrmer  a  Soliman  sea 
acquisitions  faites  par  la  ruae,  ausat 
bien  que  ceiles  obtenues  par  les  armea. 
Malheureux  prince,  qui  ne  s'apercevait 
pas  que  ces  acquisitions  8uocessi?es  for- 
maient  TAsie  mineure  presque  tout 
enti^re;  que  Tenipire  des  Turcs  s'^ten- 
dait  alors  juBqu*a  Nicom^die,  c*es^lNtire 
jusqu'a  soixante  milles  de  Byxa^ice ;  que 
cet  empire  possedait  trois  capitales 
chretiennes,  Nicee,  Iconiom,  C^sarto, 
et  que  Trebizonde  seule,  d^fendue  par 
ses  monts  escarp^a  et  aes  rivages  dif- 
ficiies,  demeurait  eomme  unique  colonic 
grecque ,  mats  s^par^  de  sa  m^tropole 
parune  masse  mfranchissabledVnnetnis. 

Quant  a  la  Syrfe ,  divisee  entre  plu- 
aieurs  ^mirs,  elle  n*avait  plus  aucun 
rapport  avec  Constantinople  :  Antioche 
avaitfait  sa  soiimission;  Jerusalem  etait 
la  proie  des  Turkomans ;  Tyr ,  Sidon , 
Ascaion  et  quelques  autres  villas  mari- 
times  appartenaient  aux  musulmans 
d'Egypte :  d^sormais  il  n'y  avail  plus  de 
communications  possibles  ni  par  mer 
ni  par  terre  entre  Tempire  Byzantin  et 
ses  freres  en  religion.  Un  miracle  seul 
pouvait  sauver  la  chr^tienU  en  Orient  : 
ce  ne  fut  pas  un  empereur  qui  le  tenta, 
ee  fut  un  moine ,  Pierre  TErmite. 


PIBBIB  X^BftlDll. 


Pierre,  surBomm^  dans  f 
mite  el  par  ses  contemporaias  ( 
pietre^c'est^^ire  Piemre 
etait  un  honrnie  d*une  taiUe  c 
igvre  commune ,  d'une  aHuri  t 
d'uns  tournure  gn>s»iere. 
fiamme  interieure  s'aUuauitp 
ses  yeux,  et  imprioiait  uni 
gique  a  sa  phyaionoaiie ;  niaiti 
cite  faabitueile  dans  le  gesle ,  i 
dance  diffuse  mais  eoatuMti 
parole,  donnaient  a  toute  la  | 
un  caractere  singulier  de  i  ' 
d'entrafnement.  Nature  ' 

geante,  Pierre  avait  lour  a  twd 
I  bonheur  dans  la  vie  des  c 
la  vie  de  famille,  dans  la  vie  dad 
Soldat  sans  talent,  marisaoa 
il  n  avait  trouv6  sa  voeatien  (, 
les  pratiquea  auateres  de  Tetat^ 
tique.  Son  esprit ,  cftef^rossi  par| 
annees  d'^ude,  Uroova  dass  I 
tiona  daustrales  un  aliflNat  i 
mais  puissant.  II  a'esalta  ] 
il  8*attacfaa  i  la  religioa  jo 
tisme ;  et  o'est  par  le  jedoe,  I 
silence,  la  solitude  et  lesa 
qa'il  se  prepare  au  peleriaap-j 
vatt  rimmoruliser  C).  r 

On  n'a  pas  oouaerve  la  drtai 
mier  d^rt  de  Pierre  poori 
Cet  ermite  de  Picardie ,  wki 
retire  sans  doute  dans  «l 
oette  ville  ou  des  covii 
core  trop  obscur  pour  i 
temporains.  Toujours 

parveiiir  juaqu'a  la  eit6 1 .._ 

frapp^  plus  que  tout  autre  del 
des  Chretiens,  de  I'^at  daf 
des  objets  de  leur  culte,  dsl 
et  de  Tavarice  des  Turke — ^ 
aviditd  ^uand  on  leur 
cruaut^  a  la  moindre  i^ 
timeiit  de  la  desolation  i 
son  ooeur  k  uae  aorte  de 
vengeance.  Si  le  moine  se  I 
hii,  Tancien  soldat  se 
avec  ces  Amotions  diver 
trouver  le  palriarcbe  SimeoB/i 
nier  etait  un  vieillard  d'a 
nerable  qu*il  avait  souficrt  avee| 
courage  de  nombfeueea 


P)ToyexdeGuIgDeB,ir»Mvd0iAmt,ela.       C}Tefei 


dal^veli 


SYRIE  MODERNE. 


S8d 


C^tait  Ini  qa*Ortok  avail  un  jour  av- 
rach^  a  sod  ^glise ,  trains  par  lea  cbe* 
veux  jusqu*eD  prison  et  dont  la  longii# 
et  penibie  iiicarceration  a*avait  6t^  pouf 
r^ir  qu'ua  moyen  nouveau  d'eidor- 
quer  de  Targent  aux  ouaities  deaesp^* 
rees  (iu  malheureux  pasteur.  Pierre,  k 
la  vue  de  Siin^oo ,  s^abandonaa  a  tout^ 
Taffliction  de  son  Ame  et  k  toute  la 
fougue  de  sa  nature,  n  pleura , '  il  d^ 
clania,  et  fiait  par  promettre  au  pa-* 
triarciie  que  \es  guerriers  de  TOccideot 
viand raient  au  secours  de  la  cit^sainte. 
l^traoge  promessa,  plus  etrangenient 
faite  ei icore  par  un  moine  sans  nussion, 
aaas  c^l^brite,  sans  g^nie ,  et  qui  pour-* 
'  taat  ae  real! sal  Simeoo,  electrise  par 
renlhousiasoie  de  Pierre ,  s'engagea  k 
^rira  au  pape  et  k  certains  princes  de 
r£urope;  Pierre  jura  d^interesser  las 
masses  aux  malheura  des  Chretiena 
d'Orieot,  et  de  les  entrainer  a  la  deli* 
vrance  du  saint  sepuicre.  Puis,  s*echauf* 
faut  pour  sou  idee ,  n'en  considerant  »i 
les  obstacles  ni  les  r^sultats  douteux , 
la  poursuivaat  dans  ses  prieres  aussi 
bien  que  daas  sas  r^ves,  Pierre  finil 
liar  se  persuader  a  lui-oitoe  <)ue  Dieu 
lui  avait  remis  sa  cause  eii  oiain.  Eufia 
soa  esprit  s*exaitant  de  plus  en  plus « 
ii  arut  entendre  Jesus-Christ  lui  disant  t 

•  Pierre,  marcbe;  va  anaonoer  lestribu* 

•  latioiis  de  mon  peuple :  il  est  temps 
«  que  mes  serviteurs  soient  secourus  el 

•  les  saints  lieux  delivrea  (*).  » 
Pierre  trouva  T  Europe  dispose  et  la 

papaute  prdie.  Le  godt  des  pelerinages 
ailant  toi^jours  eo  augmentant,  on 
^prouvait  alors  plus  viveraent  que  ja- 
mais le  desappointtment  de  ne  pouvoir 
parvenir  qu'avec  grand  peine  lusqu'li 
Jerusalem,  et  de  n'j  entrer  qu  a  force 
d'argent.  Tout  le  monde,  d'ailieurs,  Jes 
grands  comme  les  petits,  lesbons  comma 
tesmauvais,  desiraient  voir  U  citesainie : 
o'^tait  la  le  remede  a  tons  les  raaux,  la 
remission  pour  lous  les  p^bes.  Or,  a  V^ 
poque  descroisades,  les  observancesreli* 
gieuses  tenant  lieu  de  vertus  pratiques^ 
on  toHibait  dans  les  desordres  les  plus 
abjeets  comme  dans  les  plus  sanglants^ 
ei  Ton  s'imaginait ,  apres  avoir  comnils 
ees  manstruositas,  les  laver  complete* 


(*)  Yoyez  Albert  d*Aix,  Bistoire  de  I'expHli' 
turn  d€  Jmu^km, 


ment  par  la  p^itence.  Ainsi  ^talent 
tourn^es  les  rigueurs  de  la  religion,  ainsi 
etaient  elud^es  ses  lois.  ^interpretation 
m^nie  qu*on  eo  donnait  servait  le  vice, 
et  permettait  aux  passions  de  se  d6- 
chainer,  quitte  ^se  latsser  renchalner 
de  temas  a  autre.  On  faisait  deux  parts 
de  soi,  rune  demoniaque » Tautre  catho- 
lique  :  c'etait  toujours  le  diable  qui  vous 
entratnait  au  mal,  et  Dieu  ne  servait 

2u'^  enregistrer,  par  un  des  sacrements 
e  son  £glise,  le  nombre  des  revoltes  de 
la  cbair  1  Le  fanatisme  des  esprits  etant 
done  m^e  a  la  corruption  des  mceurs,  on 
regrettait  doublement  de  ne  pouvolr 
plus  faire  le  voyage  en  Palestine ,  qui , 
aunepart,  flattait  Tinstinct  aventurier 
du  plus  grand  nombre,  et,  d'autre  part, 
accordant  d'avance  Tinipunite  a  tous  les 
vices.  Quant  au  pape  auquel  s'adressa 
Taudacieux  ermite,  c*^uit  Urbain  II, 
^leve  de  Gregoire  VII,  sentant  comme 
lui' qua  des  expeditions  religieuses  en 
Orient  ne  pourraient  Itre  que  favorables 
a  la  papaute.  Aussi  iut-il  avec  attention 
les  leltres  pathetiques  du  patriarcbe 
Simeon,  ^couta-t-if  avec  patience  les 
declamations  de  Pierre,  et  autorisa-t-il 
ce  dernier  k  prober  les  peuples,  et  k 
Les  appeler  a  la  vengeance  de  leurs 
freres  de  Syrie.  Fort  de  cctte  autorisa* 
tiou,  Taveotureux  pelerin  cominen^a  in- 
continent son  oeuvre. 

Cetait  bien  Tbomine  qu'il  fallait  pour 
tourner  tous  les  esprits  en  Europe  que 
ce  Coucoupietre  moitie  moine,  moiti^ 
soudard ,  ou  [ilutot  soldat  converti,  qui 
avait  conserve  sous  le  froc  les  allures 
brusques  et  vlolentes  des  camps.  II  s*en 
allait  par  les  cbemins,  en  Italic  et  en 
France ,  moate  sur  une  mule ,  tdte  et 
pieds  nus,  avec  un  mauteau  de  bure 
par-dessus  une  robe  de  bure  aussi  et 
ceinte  d'une  corde  ^paisse.  Son  passage 
seul  par  les  villas  et  les  villages  faisait 
deja  ^venement.  On  le  suivait ,  on  s'at- 
troupait  autour  de  lui;  et  quand  il  s*^ 
tait  forme  un  auditoire,  aussitdt  il 
prenait  la  parole,  et  commen^ait  ses  elo- 
quenies  jeremiades.  A  ceux-ci  il  repro- 
chait  avec  vehemence  leurs  vices ,  leur 
apatbie  a  sortir  de  la  voie  infernale; 
a  ceux-la  il  peignait  les  malbeurs  des 
Chretiens  de  Jerusalem,  les  outrages  r&- 
nouveles  chaque  Jour  centre  les  lieux 
que  la  mort  du  Qurist  avait  sanctifies. 


240 


L'DNIVERS. 


li  prenait  les  ons  par  la  terreur,  leg 
autres  par  la  vengeance.  11  s*adressait 
k  la  pusillanimity  comme  au  courage. 
II  promettait  k  tous  le  paradis,  s^ils 
venaient  a  delivrer  le  tombeau  de  leur 
divin  mattre.  Ces  discours  n^^l^  de 
promesses  et  de  menaces ,  de  larmes  et 
de  cris ,  de  malMictions  et  de  pri^res, 
de?aient  n^oessairement  produire  un 
grand  effet  aur  les  masses.  C'^talent 
des  draroes  auxquels  les  spectateurs 
^taient  appeles  a  prendre  part.  Aussi , 
plus  Pierre  avan^ait,  plus  la  foule  Ten- 
tourait,  ^coutant  avec  avidtt^  les  paroles 
hyperboliques  par  lesquelies  11  Invoquait 
tour  a  tour  Dieu,  les  saints  et  les  anges, 
par  lesquelies  il  ^voquait  Sion  et  le  Cal- 
vaire,  le  mont  desOliviers  et  la  grotte  du 
saint  s^pulcre,  toutes  id^es  qui  frap- 
paient  resprit  des  multitudes,  toutes 
images  qtie  chacun  saisissait  avec  trans- 
port. Bient6t  le  suce^  de  Pierre  fut  td 
qu'on  le  pritpour  un  saint,  presque  pour 
un  prophete.  On  iui  demaodait  sa  l>^n6- 
diction;  on  voulait  au  moins  toucher 
son  grossier  manteau  :  les  plus  fana* 
tisds  arrachaient  quelques  poils  k  sa 
mule,  et  les  conservaient  comme  des  re- 
liques.  La  fi^vre  populaire  en  ^tait  a  son 
paroxvsme ,  et  il  ne  fallait  plus  qu*un 
signal  pour  soulever  les  masses  (*). 

GONGILBS  DB  PLAISAIICB  BT  BB  CLBR- 
MONT. 

Gependant  la  predication  de  'Pierre 
I*Ermite  n*avait  ^branl^  que  les  Gns 
fonds  de  TEurope;  il  fallait  aussi  que 
le  falte  orgueilleux  des  nations ,  c'est-d- 
dire  les  fiers  suzerains  et  leurs  puissants 
vassaux  fussent  a  leur  tour  int^ress^s  , 
touches,  entratn^s.  Ce  fut  I'enipereur  de 
Constantinople,  Alexis  Comnene,  qui  se 
char^ea  de  cette  tAche.  De  plus  en  plus 
in(]uiete  par  les  Turcs,  voyant  son  empi re 
Iui  echapper  lambeau  'par  lambeau , 
il  ^rivit  des  lettres  lamentables  a  plu- 
sieurs  seigneurs  d*Orient ,  leur  annon- 
cant  en  quelle  decadence  ^tait  la  chr6- 
tiente  dans  les  lieux  ou  s^^tait  accompli 
le  martyre  de  Thomme-Dieu,  ou  r£van- 
gile  avait  trouv^  ses  premiers  disciples, 
ou  la  vieille  £glise  avait  ^te  naguere  si 
puissante  et  si   d6vou^.   Abdiquant 

r)  Toyei  I'abb^  Goibert,  Guta  Dn  per 
tramoi. 


m£me  tout  orgueil  pmonnel ,  i 
miracle  pour  un  prince  byzati 
consentaitli  perdre  la  ooaroniK,| 
e^er  k  un  plus  digne ,  fAt-ee  on  f 
plutdt  que  de  voir  les  sectatems  i 
hornet  trdner  dans  sa  capitate.  [ 
phenomenale  humilit^!  Museei 
pas  lit  ie  seul  mobile  que  le  i 
eraiotif  Alexis  invoquait  en  f 
son  empire  en  dissolution.  II  8*ai 
aussi  k  la  devotion  de  toos,  i 
rant  de  sauver  des  mains  du  < 

reliques  saintes   dont    

^Uit  remplie.  Puis,  ne  eroyanli 
core  assez  faire  en  excitant  b  [ 
Tambition  de  ceux  qu*il 
secours,  il  leur  pariait  aussi  J 
que  renfermaient  ses  treson,t 
diacun  de  leur  cd  distribuer  i 
et  en  venait  m^me  jusqu*a  ^ 
beauts  des  femmes  grecqoes,  qui 
payer  de  leur  amour  les 
leurs  liberateurs.  Tout  etait  i 
oeuvre ,  toutes  les  passions  < 
t^k]ai  fois  C). 

Outre  ces  lettres  par 
▼oy6es  k  divers  barons  et ; 
Alexis  adressa  an  pape 
par  rentremise  de  pfusieiirs 
deurs.  II  chercbait  a  attendrir  I 
d*Urbain  II  en  fiiveor  de  la 
Sion,  et  en faveur  des  C 
dansdes  pays  oh  leurs  p^i 
mand^.  Cette  supplique 
coincidait  d*ailleurs  avee< 
triarche  de  Jerusalem  et  an 
tion  de  Pierre  TEroiite ,  dk  . 
k  coavoqaer  un  eoncile  davM 
Plaisance.  Quoiqull  vtot  oaa^ 
foule  a  rappeld*Urbain  II,  j 
cents  prelats,  de  quatre 
et  de  trente  mille  laiques,  i 
M  oblige ,  vu  ie  grand  *doi 
sistants ,  de  s'assembler  dans  i 
voisine  de  la  ville,  quoi  quV^ 
dangers  de  la  cbr^ieate  les 
deurs  d'Alexis  d'abord  et  le  ] 
suite,  le  eoncile  n*arriu 
lution  relative  a  la  auerre  < 
Musulmans.  Leclerge  av^it 
reunion  bien  d*autres  affaira  ( 
plus  pressdes,  plus  inqutetaa 
envabissements  du  spiritiiei   { 
pereur   d'Ailemagne,    et  kt 


OYcjttkaxtt 


SYRIE  MODERNE. 


241 


anarchiques  de  TaDtipape  Guibert. 
Le  secours  que  r^lamait  si  {>iteuse- 
nient  Alexis  Comn^efut  done  ajourne. 
C*est  qu'aussi  Plaisance  n*^tait  pas  la  ville 
a  laquelle  il  fallait  demaoder  uue  guerre 
lointaine,  guerre^  qui  ne  lui  paraissait 
ni  utile,  di  juste  peut-^tre.  Ostqu'aussi 
les    Italiens   o'^taient  pas  une  nation 

3u*on  pouvait  si  facilement  detourner 
e  ses  affaires ,  enlever  a  ses  fecondes 
campagnes,  distrairede  son  avenir,  qui, 
malgre  les  troubles  feodaux  et  les  diffi- 
cult^s  de  la  papaut^,  pointait  dejk  bril- 
lant   et  productif.  Les  Italiens,  d'ail- 
leurs  ,  ceux  des  c6tes  et  des  ties  parti- 
culidrement,  avaient,  au  onzieme  siecle, 
d'habituels  rapports  de  commerce  avee 
les  Arabes  tant  d'Espagne  que  de  Syrie. 
lis  leur  achetaieat  directement  les  pro- 
duits  de  leur  Industrie,  allaient  chei 
eux  etudier  les  sciences  exactes  et  la  m€' 
decine ,  et  empruntaient  m^me  de  la 
poesie  a  leur  imagination  comme  de 
rel^gance  a  leurs  moeurs.  Les  deux  es- 
prits,   Toccidental  et  Toriental,  pou- 
vaient  ainsi  profiter  Fun  de  I'autre,  au 
benefice  de  leur  destine  r^ciproque  et 
de  leurs  progr^particuliers ;  tandisaue, 
par  des  irruptions  fanatiques  etsanglan- 
tes ,  tout  tendait,  au  coi\traire,  a  s  eloi- 
gner,  a  se  diviser  :  les  ^l^ments  civilisa- 
teurs  devaient  ainsi  se  disjoindre  pour 
longtemps,  loin  de  s'amalgamer  pour  le 
bonneur  de  Thumanit^.  Les  Italiensdonc 
ne  pou vaient  qu' toe  sourds,  soit  par  ins- 
tinct ,  soit  par  prevision ,  lorsqu'ou  leur 
parlait  d^expeditions  Equivoques,  de  lut- 
tes  violentes,  et  dont  ils  ne  distinguaient 
pas  le  profit  (*). 

Mais  Urbain  II ,  soUicitE  de  plus  en 
plus  par  les  ambassadeurs  du  prince 
byzantin,  Emu  des  souffrances  que  cha- 
que  pelerin  de  retour  de  Jerusalem  eta- 
lait  aux  yeux  de  tons,  decide  d'aii- 
leurs  par  Tagitation  frenEliqueque  les  pr6- 
cbes  de  Pierre  TErmite  avaient  soulevEe 
au  deia  des  Aloes,  convoqua  un  second 
coiicile,  cette  fois,  seulement,  au  centre 
m^me  des  pays  fanatises ,  a  Clermont 
en  Auvergne.  La  foule  fut  aussi  consi- 
derable qu'a  Plaisance ;  bien  diffErente 
neanmoins  quant  k  la  composition ,  k 
Tesprit ,  aux  intentions.  Plus  de  vaine 
curiosite ,  plus  de  preoccupations  per- 

[,*)  Voyez  la  GoUectioii  des  conciles. 

16*  Uvraison.  (Sybis  moderne.) 


soniielles,  plus  de  calculs  individuels : 
une  ardeur  et  une  abnegation  generales, 
une  devotion  farouche ,  Fatten  te  so- 
lennelle  d'un  grand  Evenement.  Dans  les 
prEambules  du  concile,  le  peuple  montra 
une  indifference  profonde,  quoique 
pourtant  il  se  soit  agi  d*excommunier 
un  roi,  Philippe  I  de  France,  de  mettre 
un  frein  aux  vengeances  particulieres  en 
renouvelant  la  trive  de  Dieu.  Qu*im- 
portait  a  ce  peuple  qu*on  frapndt  un  des 
plus  petits  et  des  plus  incapables  prin- 
ces de  FEurope !  Que  lui  im[>ortait  de 
mEme  qu'on  lui  assurdt  la  vie  sauve, 
cette  vie  terrestre  de  misEre  et  de  priva- 
tions qu'il  ne  demandait  au  Createur  qu'a 
quitter  pour  Fautrel  G'etait  bien  de  tro- 
ves qu*il  fallait  s'occuper :  tout  respirait 
la  jjuerre,  et  la  guerre  la  plus  longue, 
la  plus  haineuse,  la  plus  barbare !  Cetait 
bien  la  tranquillite  ici-bas  quMl  fallait 
chercher  :  le  peuple  ne  tendait  qu'au 
ciel  (*)  I 

Enfin,  ^  sa  dixieme  seance,  le  con- 
cile prit  tout  a  ooup  une  attitude  popu- 
laire.  On  vit  sortir  de  leurs  palais  le 
ppe  et  ses  cardinaux ,  les  chevaliers  et 
leurs  Ecuyers.  lis  s'assemblerent  sur  la 
grande  place  de  Clermont.  La  foule  les 
yattendait.  EUe  Etait  sombre  quoi- 
que  exaltee,  etle  Etait  taciturne  quoi- 
que  impatiente.  Pierre  TErmite  parut 
avec  son  manteau  de  bure ,  son  froc  et 
sa  corde,  ses  pieds  nus ,  sa  tEte  chauve^ 
Un  fr&nissement  courut  dans  la  place, 
et  dans  les  rues  etroites  et  toutes  rem- 
plies  qui  y  aboutissaient.  Le  peuple  etait 
satisfait,  son  saint  allait  parler.  Pierre 
reproduisit  avec  plus  de  verve  que  ja- 
mais ses  v^h^mentes  d^lamations ,  ses 
apostrophes  ^nergiques ,  tout  le  reper- 
toire qu  il  avait  promene  un  an  durant 
par  les  chemins.  L'emotion  devint  g^- 
n^rale.  On  pleuralt  sur  les  nialheurs  de 
Sion,  on  injuriait  ses  ennemis ,  on  jurait 
leur  extermination  :  le  lion  populaire 
se  ramassait  sur  lui-m£me  en  gringant 
des  dents.  Apr^s  Fapdtre  de  la  violence, 
le  vicaire  de  la  justice  prit  a  son  tour  la 
parole.  11  fut  adroit  et  eloquent.  Sans 
calmer  le  delire  de  la  multitude ,  il  sut 
le  diriger.  II  invoqua  le  Seigneur  des 
amines,  et  denonca  en  sou  nom  les 

(•)  Voyez  Ordiric  VlUil  Hisloire  icclesiaa- 
tigue. 

16 


Ul 


LUinVERS. 


maudUs  qu'il  faliait  frapper ,  le9  fU$  de 
CEgypte  eselavey  oeux  qui  ne  devaient 
ressusciter  que  ^[ir  servir  de  paiUe  au 
feu  iiemel.  Puis  il  appela  a  son  tour  la 

Fiti^  de  touB  aur  lea  c<mciioyen$  de 
Homme*  DIeu.  II  montra  le  temple  du 
Seigneur  traiU  comme  un  homme  in- 
fdmCy  et  iee  arnements  du  sanctwure 
enlevis  comme  descaptifs.  Puis  encore 
il  ^voqua  les  ombres  des  Machab^,  et 
promit  que  le  courage  des  guerriers  du 
Christ  deviendrait  plus  fort  que  la  mort 
m^me,  Enfin  11  termina  par  ces  paroles 
du  Seigneur  :  Celui  qui  aime  son  p&e 
ou  sa  mh^  plus  que  moi  n'est  pas 
digne  de  moi,  Quiconque  abandonnera 
sa  maison  ou  sonp^e^  ou  sa  m^re,  ou 
saje:nme ,  ou  ses  enfants,  ou  son  he- 
ritage, pour  mon  nam,  sera  recom- 
pense au  ctniuple,  et  possidera  la  vie 
iterneUe  (*). 

Dieu  le  veid  !  r^pondit  unanimement 
la  foule ;  et  cette  exclamation,  r^p6t^  de 
vjlle  en  ville,  devint  le  mot  d*ordre 
dNine  guerre  qui  dura  pres  de  deux 
cents  ans.  L'exaltation  des  assistants 
^tait  a  son  comble;  Tindignation,  Tar- 
deur  guerri^re,  le  fanatisme,  unissaient 
tous  les  esprits  dans  la  m^me  id6e  :  le 
combat.  Urbain  II  voulut  sanctifier  eet 
^lan  general ,  ordonna  le  silence ,  Fob- 
tint,  et  pronon^a  une  formule  de  con- 
fession ^6n6rale.  Alors  cette  multitade, 
aussi  pieuse  cju'ardente,  se  prosterna 
dans  la  poussiere,  se  frappa  la  poitrine, 
et  r^clama  I'absolution.  Elle  lui  fut  ac- 
cord^ :  et  cette  remission  de  tous 
p^ch^s  devint  d^s  lors  le  privilege  des 
expeditions  en  Palestine.  Adhemar  de 
Monteil,  6v6que  du  Pu^,  supplta  le 
pape  de  lui  remettre  la  croix  qu*il  tenait 
a  la  main,  llle  fit;  et  chacun  imm^dia- 
tement  voulut  aussi  avoir  sa  croix.  On 
s'en  attacha  en  drap  ou  en  soie  rouge  sur 
Tepaule  droite.  Les  barons  s'en  plac^- 
rent  sur  le  front  du  casque.  Les  plus 
superstitieux  s*en  appliqu^rent  sur  la 
chair  avec  un  fer  brdlant.  Tous  s'ap- 
pelerent  croisSs^  et  Tinvasion  qu'ils 
ailaient  entreprendre,  croisade. 

Cependaiit  un  chef  ^tait  indispen- 
sable a  rimmensc  mouvement  qui  se 
preparait.  La  foule  aurait  voulu  le  pape ; 


(*)  Voyez  Robert  le  Moine ,  Histoire  de  J4ru- 
talem. 


il  sV  reiusa  ;  emgme  i 
est  bien  dif&oile  d^eipliqner.  A  mi 
tant  il  la  tto  de  la  r6vot«li0BfBf 
tait,  Urbain  II  aurait  [«  ^a    " 
mattre.  Toujours  aa  moins 
pMie  ranarchie  premi^  d 
elle  tomba.  Mais  la  papavti  i 
encore  assise  en  Europe;^ 
sonnabie  de  la  transporter  I 
en  Asie?  Mais  Tempereur  < 
Tattaquait,  I'antipape  GuibectI 
blait ;  le  vicaire  de  Dieu  poav; 
la  present  mena^nt  pour  un  i 
certain?  Urbain  II  deelina  la  i 
Inlit^  qu*on  voulait  fatre  pesvi 
et  se  contenta  de  nommer  Ad'  ^ 
Monteil,  ev^que    du  Puj, 
apostolique  auprfts  de  la 
6v^ue  etait  un  homme  de  < 
le  Terrons  a  Poeuvre. 

Sans  participer  persoan 
Texp^ition ,  le  pape  ▼oolut 
I'ordonner.  La  sc^ne  que  nous  \ 
de  raeonter  se  passait  en  I 
bre  1095.  On  flxa  le  depart  del 
sade  k  TAsaomption  aoiTaote.  C 
temps  necessaire  yontr  reuur 
mee  r^ltere.  Mais  le  peuple  i 
presae  et  raoint  clairvovant  qoa  I 
et  il  devait  devancer  llieore.  F 
s'occupa  avec  z^le  des  pn  , 
la  discipline  de  la  crotsade.  Bi 
la  protection  de  r&gltse  ct  dsj 
de  Rome,  saint  Pierre  et  i  ' 
personne,  la  famiileet  lest 
des  croises.  II  fit  declarer  | 
que  tout  aete  de  violence  i 
soldat  du  Christ  serait  paid  < 
theme.  II  r^^la  les  rapportf  i 
avec  les  soldats ,  et  leur  reeaa 
secours  mutuel,  c'eat-adirelal 
de  r£vangiie.  Ces  di verses  | 
^aient  bonnes  :  mais  n\ 
passer  en  m^me  temps  les 
pouvoir  reiigieux  et  de  la  ^ 
maine  que  (Tetablir  que  toot  i 
pourrait  ^tre  poursuivi  poor  if 
dant  tuute  la  dur6e  de  son  « 
NVtair-ce  pas  compromeCtrer^ 
que  d'affranchir  les  eroise«  de  1 
p6ts?  N'etait-ce  pas  ^ranlerl 
voir  politique  quede  ne  remettre^ 
juridiction  religleuse  la 
crimes  et  d^lits,  et  jusqa^a  Vi 
entre  le  seigneur  et  son  vassal?  I 
reils  privileges  ^taient  trop 


SYRIE  MDDERNE. 


U3 


poar  Itre  maiDtmuis «  et  il  ne  pouridt 
ea  r^ulter  que  I'anardiie  d'abont  et  le 
despotUme  ensuite  (*). 

Ainsi,  en  voulaot  trop  faire,  le  pape 
d^passa  son  but  au  lieu^it  ratteindre. 
Mais  Urbain  II  ne  pr^Toyait  pas  Tin- 
cenciie  qui  eouTait ,  et  dont  le  premier 
brandon  a*^it  allum^  en  sa  prince. 
11  se  m^fiait  de  la  perseverance  popu- 
laire  ;  et  de  eralnte  de  voir  avorter  la 
croisade,  il  auspendit  le  glaive  de 
rexcommunication  sur  la  tite  de  ceux 

aui  ne  tiendraient  point  lear  promeasa 
e  depart.  11  doutait,  le  prudent  et  me* 
fiant  Italien ,  il  doutait  encore ,  et  cinq 
mois  aprds  son  discours  sur  la  place  de 
Clermont,  un  million  d'Ames  s*6chap- 
paient  de  Ffiurope  avant  le  j<mr  quit 
avait  flx6. 

BBBl.NLX]fSNT  PB  I.'b17B0PB. 

Aiicun  ebranlemeot  soeial  ne  fut  ploa 
profond,  aucune  r^olution  popuiaire  ne 
iut  plus  prompte,  aucune  unanimity  ne 
fttt  plus  miracuteuae  que  rebranlemant, 
la  r^lution,  ruaanimitede  rOceideat 
h  la  fin  du  onzi^me  sidele.  Une  fois  ap- 
peiee  de  son  nom,  la  croisade  fut  im- 
mediatementridee,  la  volonte,  le  but 
de  tous.  La  Palestine  devenait  eneore 
une  fois  la  terre  promise.  Le  pauvre  y 
eap^rait  les  aliments  qui  lui  manquaient, 
le  serf  y  voyait  des  terres  f(6condea  au 
lieu  desa  sterile  fflebe,  le  seigneur  mine 

Jf  r^vait  un  fief,  le  baron  un  eomte, 
e  comte  un  trdne.  Cette  rage  des  com- 
bats que  Pfiglise  s*etait  efforc^e  de  re- 
primer  jusqu  alor8,elle  Tautorisait  enfin. 
La  plupart  de  ces  nobles,  aussi  pil- 
lards  qu'insolenta ,  liomicides  parfois , 
despotes  toujours,  avaient  la  conscience 
chargee  de  crimes,  et,  comme  dit  Mon- 
tesquieu, on  leur  promettaU  de  les 
eaaker,  en  suivani  leurs  passions  do- 
winantes.  Aussi  ee  fut  avec  la  rapidite  de 
reclair  que  la  sanction  papale  se  r^pan* 
dit  de  pays  en  pays,  de  ville  en  ville,  de 
bourg  en  bourg,  de  boucbe  en  bouche. 
GVtait  la  guerre  pour  les  belliqueux ; 
c^etait  remigration  pour  les  miserables; 
c'etait  la  liberty  pour  les  esclaves  : 
chacun  se  prepara  a  partir.  Le  mari 
s*appretait  &  laisser  sa  femme,  le  pere 


mia$t\ 


Voyez  Fleury,  Discours  tur  PHiiioire  «?- 
'-'ique. 


aes  ao&nts ;  et  la  femme  d^solde,  et  les 
enfants  inquiets,  ae  promettalent  de 
Buivre  le  chef  de  la  ftmille.  11  y  avait 
encore  en  ces  tempa  confession  et  pe- 
nitence publiques;  les  coupal^les  pre- 
feraient  ae  Joindre  a  Texpedition  sainte 
qua  d*a?ouer  leur  honte  k  la  face  du 
soleil.  Souvent  le  clerge,  scandalise 
des  desordres  des  seigneurs ,  leur  inti- 
mait  Tordre,  pour  se  reconcilier  avec 
le  ciel,  dentrer  dans  uo  cloltre;  ces 
aeigneura  cboisissaient  natureilement 
la  guerre,  leur  pas9ion,  plutdt  que  la 
retraite,  leur  terreur.  Les  moines  aussi, 
fatigues  des  rigueurs  de  leur  couvent , 
et  apprenant  qu*on  pouvait  faire  son 
aalut  en  se  dirigeant  vers  Jerusalem,  de- 
mandaient  immediatement  la  croix.  Les 
predicateurs  de  la  croisade ,  afln  d^agir 
aelon  leurs  paroles, pren^ient la  resolu- 
tion de  auivre  leur  troupeau  dan$  le 
peierinage  arme.  Les  pretres  ambitleux 
songeaient  a  un  evech^  en  Asie ;  les  er- 
mitea  eux-memes  esperaient  s*y  sanc- 
tifier  plus  vite :  aussi,  seigneurs  et  serfs, 
pretres  et  moines,  criminels  et  cenobites, 
tous  faisaient  leurs  apprSts.  Ceuxci  en- 
cageaient  leurs  terres ;  ceuxla  vendaient 
leurs  meubles.  Le  pauvre  echangeait  son 
diaume  pour  une  arme  quelconque ,  le 
riche  son  chateau  pour  un  equipenient 
militaire  et  de  Tor.  Les  juifs  gagnerent 
enormement;  ils  payerent  bien  cher 
plus  tard  ce  gain  inatteudu  (*). 

Le  deiire  general  s'accrut  pendant 
tout  rhiver  de  i'an  1095;  et  des  le  prin- 
temps  suivant  toutes  ces  masses  8*e- 
branlerent  a  la  fois.  Cetaient  par  toutes 
les  routes  des  bandes  confuses  et  suc- 
eessives.  La  piupart  ailaient  a  pied; 
quelquesHins  B*en  venaient  sur  des  cha- 
riots tratnes  jpar  des  boeufs ;  le  plus  |)etit 
nombre  etait  a  cheval.  Ceux-cl  cotoyaient 
les  rivages  de  la  mer  sur  des  barques 
pontees ;  ceux  la  descendaient  les  fleu ves 
sur  des  trains  de  bois.  De  mceurs ,  de 
langage,  de  costume  difterents ,  ils  of- 
fraient  le  niciaiif^e  le  plus  inextricable. 
On  en  voyait  tout  cou  verts  de  four ru res ; 
d'autres  a  peine  v^tus  d'un  haillon  de 
toile.  Tels  etaient  anaes  de  tances,  ou 
d'epees ,  ou  de  javelots ,  ou  de  masses  de 
fer ;  tels  seulement  de  pieux  et  d'instru- 

(")  Vov<«  Robert  le  Moine ,  Nistoir,-  de  Jeru- 
$alem;  Baadri ,  HUtoire  de  la  ftrise  de  J^ru- 
•iUMi;etral>M  GuUiert ,  Ge$ta  Dei  per  Francoe. 

16. 


244 


L'UNIVERS. 


meDts  aratoires.  II  y  en  avail  qui  mar- 
chaient  au  son  des  clairons  et  des  trom- 
pettes ;  if  y  en  avail  qui  chantaienl  des 
psaumes  el  des  cantiques.  Depuis  la 
mer  du  Nord  jusqu^au  Tibre,  depuis  ies 
bouches  du  Rhin  jus({U*aux  Pyrenees, 
ce  n*elait  que  populalionsi  en  marche. 
€es  masses  s  augmenlerent  encore  en 
allanl.  Leur  exemple  ^lait  conlagieux  : 
on  Ies  suivail  malgre  soi.  Des  villages 
entiers  se  mirent  en  roule,  emportanl 
provisions ,  me ubies  el  uslensiles.  Mais 
celte  foule  s'enlendail  a  peine  :  on  ne 
se  reconnaissail  souvenl  comme  chr6- 
lien  qu*en  formanl  une  croix  avec  deux 
doigts  de  la  main.  Geux  qui  pouvaienl  se 
parler  s*excitaient ,  s'enllammaienl,  en 
se  raconlanl  des  miracles.  Les  uns 
avaienl  vu  des  ^toiles  se  lancer  vers 
rOrienl  en  lombant  des  cieux.  D'au- 
tres  avaienl  ele  diriges  pendanl  la  nuil 
par  des  feux  qui  couraienl  dans  Tair. 
Ceux-ci  avaient  remarqu^  des  nuages 
sanglants  se  grouper  a  rhorizon  orien- 
tal.  Ceux-la  avaienl  apergu  une  comete 
sous  la  forme  d*un  glaive  colossal.  Puis 
c^^laient  des  lours  el  des  remparts,  des 
armees  se  combatlanl  qu*on  dislinguail 
dans  le  ciel.  Puis  des  apparilions  de 
guerriers  religieux  :  David  el  les  Ma- 
chab^es,  Conslanlin  el  Charlemagne. 
Ge  dernier  m6me  aurail  encourage  les 
Chretiens  a  la  bataille,  el  leur  aurail 
promis  de  se  metlre  a  leur  Idle.  Illu- 
sion de  lous  les  esprits,  accord  de  loutes 
les  volontds ,  enlrafnement  universel  de 
TEurope  vers  TAsie ,  voila  le  spectacle 
qu'offrail  TOccidenl  au  printemps  de 
rannee  1096.  ^ 

L'aRMBE  DB  PIEERB  l'BEMITE. 

Pierre  TErmite  n'avail  uas  cess^  de 
prober  la  croisade  apres  le  eoncile  de 
Clernionl.  11  s'en  allait  toujours  par  ies 
chemins,  avec  le  m^me  costume  d*or- 
gueilleuse  humilite,  enlralnanl  a  sa 
suite  une  foule  ^lectris^  par  ses  paro- 
les. Enfin,  lorsquMi  fut  parvenu  entre  la 
Meuse  et  la  Moseile,  cette  foule,  grossie 

Sar  des  groupes  successifs,  comme  un 
euve  par  des  affluents  nombreux ,  for- 
mail  (feja  presque  une  armee.  Armee 
singulidre,  assurement!  composee  tout 
aussi  bien  de  femmes,  d'eufanls^  de 
vieillards,  que  d'bommcs  capables  de 
porter  les  armes !  Armee,  ou  plutot  mi- 


gration de  pauvres  heres  se  i 
pour  vivre,  de  serfs  fuyant  fe 
de  vUaiM  fuyant  la  misere,d'a] 
de  bas  ^tage  trop  tarte  poor  : 
dans  leur  propre  pays,  de  mendia 
vagabonds ,  de  gueux  de  toute  ( 
qui  se  promellaienl  le  massacre,! 
lage  et  le  viol ,  el ,  en  petit  ood 
quel(]ue8 braves  gens  exaltes,  deq 
esprits  fiaibles  fanalises  par  les  | 
lions !  Cette  populace ,  en  etat  i 
nent  d'^meute ,  ne  se  contents  i 
plus  d'^uter  Pierre   rErmiti 
voulut  marcher  en  avant ,  . 
sa  conqu^e;^  et,  dans  son  ii; 
grossiere,  a  Id^ut.de  chef,  i 
lendait  qu*ane  cb^vre  el  une  oiel 
firaient  pour  la  mener  a  J6nu 
gre  ou  de  force  il  failul  bien  (, 
/Ermite  c^dl  a  la  tourbe  qolj 
excitee.  De  moine  il    pa 
Plus  de  cent  mille  Ames, 
Champagne,  de  la  Bourgogiie,j 
Lorraine ,  de  la  Flandre ,  se  i 
sous  son  oommandenDenl.  ] 
mite  eul  pourlant  le  bonhenr  dftfl 
un  homme  dans  oette  multii 
d*avoir  ainsi  un  lieutenant  sorl 
pouvait  se  reposer.  Get  homme  |. 
chevalier  appel^  Gauthier  Som^ 
Son  surnom  disail  sa  misers;! 
major  prouvail  sa  £aiblesse  : ' 
avec  lui  que  huit  cavalien. ! 
fut,  il  devinl  fort  utile k  C — 
Celui-ei  le  chargea  de  dir 
vements  ;de  ravant-ffarde,  ( 
seule  chose  diflicile  et  d 
rexp^itionjusqu'^sonarriTi 

A  leur  passage  en  France  eie 
gne,  les  masses,  qui  suin' 
rErmite,  ne  rencontrerent  i 
et  protection.  Eiles  vivaient  i 
et  pouvaienl  jusqu*a  un  certais  j 
permettre  le  vol  au  detriniest  ( 
acte  qui  n'etait  alors  regardeq^ 
une  application  permise  de  I 
talion.  La  route  pourtaDl  j 
au  plus  grand  nombre.  L'a 
parlout  des  tralnards ;  les^fa 
tout  et  les  vieillards 
coup  et  restaient  pour  la  i 
chemin.  Et  cependant  les  [ 
taient  recus  encore  qu*avecalk 
favour,  ifs  etaient  en  pays  ehreti 
dc  uouvelles  recrues  arrivaieot  sa 
pour  remplacer  les  infirmes  et « 


SYRIE  MODERNE. 


S45 


se  d^coarageaient.  Mais  une  fois  par- 
venue  en  Hongrie ,  rarmee  de  Pierre 
TErmite  fut  tout  etonn^e  de  trouver 
sur  les  rivages  du  Danube  el  de  la  Save 
des  cavaliers  qui  lui  barraieiit  la  route  (*). 
Quoique  devenus  cbretiens,  quoi- 
qu^ayant  eu  a  leur  t^te  un  roi  caoonise, 
saint  £tienne,  les  Hongrois  n'en  god- 
taient  pas  plus  (a  croisade.  lis  n'avaient 
point  compris  cette  e\p^ition  si  loin- 
taine.  lis  ne  se  souciaient  pas  trop  d'ail- 
leurs  de  voir  leurs  prairies  envabies  ^ar 
cette  nu6ede  gens  ae  toute  nationaliteet 
de  toute  origine,  qui  deroandaient  im- 
p^rieusement  leur  subsistance ,  et  dont 
le  passage  devait  avoir  pour  moindre  in- 
convenient de  reudre  infertiles  les 
canipagnes  pietin^es  par  une  foule  im- 
mense. Malgre  les  efforts  de  Gauthier 
Sans  Avoir ,  son  avant-garde ,  mal  dis- 
ci plin^e  ,  commit  quelques  m^faits ,  et 
supporta  en  consequence  plusieurs  re- 
presaiiles !  Gauthier  fut  assez  prudent 

Eour  n'en  pas  tirer  vengeance ,  et  pour 
dter  de  plus  en  plus  sa  marche.  Mais 
apres  les  piaines  de  la  Hongrie,  les  pele- 
nns  trouverent  les  for^ts  epaisses  de  la 
Bulgarie. 

Quoique  Chretiens  aussi,  mais  de 
quelle  faQon!  ies  Bulgares  n'en  avaient 
pas  nour  cela  plus  d'affinit^s  avec  les 
Occidentaux.  Farouches,  ind^pendants 
jusqu'ala  barbaric,  les  Bulgares n'avaient 
jamais  eu  qu'a  scuff rir  de  leurs  rapports 
avec  ceux  qu'on  appelait  encore  les  Ko- 
mains.  Le  Bas-Empire  leur  avait  fait 
une  longue  guerre.  Basile  avait  eu  la 
cruaut^  d'ordonner  qu'on  crev^t  les 
veux  a  quinze  mi  lie  de  leurs  prisonniers. 
De  leur  c6te,  les  Bulgares,  ayant  tu^  un 
empereur  byzantin,  avaient  encbdss^  son 
crdne  dans'  de  Tor ,  et  s*en  servaient  de 
coupe  d'honneur  dans  leurs  orgies.  En 
un  mot,  Slaves  d^origine^  ils  d^tes- 
taient  aussi  bien  les  Grecs  que  les  La- 
tins ,  et  ne  virent  qu'avec  des  yeux  hos- 
tiles  Tarriv^e  chez  eux  de  la  premiere 
bande  des  croises. 

Cependant  Gauthier  Sans  Amir  mon- 
trait  toujours  Tintention  de  maintenir 
Tordre  et  la  paix ;  mais  sa  troupe  etait 
trop  aftam^e  pour  ecouter  d^sormais  la 
voix  de  la  raison  et  de  la  justice.  Le 


Souverneur  de  Belgrade  ayant  refuse 
es  vivres  aux  pelerins,  ceux-ci,  pouss^s 
par  Tindignatlon  et  le  besoin,  quitterent 
lejs  rangs  confus  qu'ils  formaient  en- 
core ,  et  s'^parpillerent  dans  les  canipa- 
gnes. Libres  alors  de  tout  frein ,  ils  en- 
leverent  des  troupeaux,  et  6gorgerent 
impitoyablement  ceux  qui  voulurent 
d^iendre  leur  bien  ou  leur  maison.  Ces 
exces  pousserent  a  bout  les  Bulgares. 
Leur  cavalerie  tomba  sur  ces  bandes 
spoliatrices  et  meurtrieres,  les  pour- 
suivit  avec  acharnement ,  les  massacra 
sans  misericorde.  Une  eglise ,  ou  cent 
quarante  croises  avaient  cm  trouver  un 
asile,  fut  livr^e  aux  flammes  par  les  Bul- 
gares eux-m^mes.  Gauthier  Saru  Avoir ^ 
loin  de  reparer  cette  d^faite  m^ritce 
de  quelques-uns  de  sessoldats,  s'en- 
gagea  imm^diatement  dans  les  bois  et 
les  marais  avec  le  reste  de  sa  troupe. 
La  repression  que  leur  avait  attir^e 
leur  premier  foriait ,  les  lassitudes  de  la 
route ,  les  angoisses  de  la  faim  avaient 
rendu  aux  croises  plus  de  souplesse  et 
de  resignation.  lis  se  grouperent  de 
nouveau  autourde  leur  chef,  lui  obeirent 
avec  soumission,  et  ce  fut  en  suppliants 
qu'ils  s'adresserent  aux  gens  de  Nissa. 
On  fut  touchy  de  leur  misere;  on  vint 
a  leur  secours ;  et  ils  purent  traverser 
les  Balkans  avec  beaucoup  de  peine 
sans  doute,  mais  au  moins  avec  des 
vivres.  Enfin,  apres  plus  de  soixante 
jours  de  privations,  de  fatigues,  de  froi- 
dure  excessive  dans  les  montagnes  de 
la  Bulgarie ,  de  chaleur  accablante  dans 
les  piaines  de  la  Thrace ,  ils  arriverent 
devant  la  prenftere  enceinte  de  Constan- 
tinople, oil  Tempereur  Alexis  Comn^ne 
leur  permit  d*^tablir  un  camp  jusqu*k 
ce  qu  ils  fussent  rejoints  par  leurs  ire-  ' 
res  (•). 

La  troupe  de  Gauthier  Sans  Avoir 
avait  ^te  plus  que  d^cimee.  La  rigueur 
dessaisons^  les  tortures  de  la  faim,  les 
repr^saiHes  de  ceux  qu'elle  avait  atta- 
ques,  Tavaient  r^duite  de  moitr^.  Elle 
avait  sem6  toute  sa  route  de  cadavres , 
et  la  depouille  de  quelques-uns  de  ces 
derniers  devait  causer  le  malheur  de 
Tarm^  de  Pierre  TErmite.  En  entrant 
en  Uongrie,  les  pelerins,  dont  Tesprit 


(*)  Voycz  Guillaame  de  Tyr ,  Histoire  de  ce 
9«»  ^estpaaee  au  deld  det  men^  etc 


(*)  Voyez  Tadd)0de,  HitUnrt  du  voyage  a 
Jiruialem, 


346 


LTJTIIVERS. 


dMndisciplme ,  de  licence,  d^avidit^ 
n'avait  fait  qu'augmenter  ^  travers  la 
Bavike  et  VOsterreich  (TAutriche), 
commsncaient  d^ja  k  se  lasser  des  paroles 
creuses  ae  leur  general  missionnaire, 
qui  De  suffisaieDt  plos  pour  les  aourrir. 
Le  premier  eathousiaime  religieui  ^tait 
pass^ ,  te  z^le  ^vanooi ,  toute  provende 
2puis^  :  marcher  eu  avant  dans  la  las- 
situde et  la  mis^re  paraissait  bien  dur ; 
s*en  retourner  a  travers  des  pays  d^il- 
luslonn^  sur  le  compte  de  la  croisade 
paraissaitimpossible.  Desrumeurs,  sour- 
des  d^abord,  se  repandirent  de  grou- 
pes  eii  groupes  *,  puis  on  en  vint  a  se 
plaindre  tout  haut,  h  murmurer,  k 
blasphemer :  uiie sedition  terrible sembla 
imininente.  Le  premier  pretexte  devait 
la  faire  eclater.  On  trouva  ce  pretexte 
devant  Semlin,  dont  les  habitants 
avaieot  eu  riroprudence  de  susoendre 
a  Tune  des  portes  de  leur  ville  les  d^- 
pouilles  de  seize  crois^  pillards.  A  cette 
vue,  les  plus  mutins  se  soulcv^rent. 
Pierre  L'Lrmite  perdit  la  t^;  et,  au 
lieu  de  comprimer  la  i^volte ,  tl  excita 
encore  les  passions  de  la  multitude. 
Le  soi-disant  saint  prdcha  la  guerre , 
poussa  au  carnage;  et  son  armee  se 
rua  Imm6diatement .  sur  Semlln.  Ef- 
fray^s  par  cette  subite  agression,  les 
habitants  s'enfuirent  h  travers  les  bois 
et  ies  rochers  qui  d6fendaient  Tun  des 
cdtes  de  la  cit^.  Les  retardataires ,  au 
nombre  de  quatre  mille,  furent  ^org^s 
par  la  foule  furieuse ,  et  le  courant  du 
Danube,  eiitrafnant  les  cadavres  de 
tant  de  victiines,  alia  donner  h  la  Bui- 
garie  d*horribles  nouvellesde  la  croisade. 
C*^tait  desormais  Textermi nation  au 
lieu  de  la  fraternity.  Les  Hongrois 
prirent  incontinent  les  armes.  Leur  roi, 
Koloman,  reunit  cent  mille  homines,  et 
marcha  contre  les  massacreurs  de  Sem- 
lin.  Gependant  apres  plusieurs  jours  de 
debauche  et  de  pillage,  les  faux  soldats 
de  la  croix,  aussi  Inches  que  cruels,  loin 
d'attendre  leurs  s^rieux  adversaires, 
bVnfuireut  en  d^sordre  in  travers  la  Bul- 
garie.  lis  esp^raient  se  reposer,  se  ravi* 
tailler  a  Belgrade.  Cette  ville  ^tait  aban- 
donnee.  II  fallut  fuir  encore  comme  des 
bandes  de  loups  pourchass^s.  Entin  de- 
vant I>Iissa  Tarmee  de  Pierre  trouva  des 
remparts  et  des  soldats.  Ella  n*eut  pu 
d*abord  le  courage  d*attaquer.  On  par- 


;  inteotioni 


leroenta.  La  ville  vouhit  bien  \ 
quelques  vivres.  Mais  avaot  de  i 
mettre  en  route,  one  oentaine dec 
teutons  se  prirent  de  queretlea 
ques  meuniers  bulgares;  el,  i 
rien  en  obtenir  par  les  nw 
mirent  le  feu  k  sept  mofuliot. 
cendie  exasp^a  les  habitants  del 
et  ayant  march^  contre  Parr" 
de  Pierre,  its  en  eurent  fadk 
son ,  8*emparerent  de  deux  i 
riots  et  d*un  grand  oombre  d«| 
niers.  Pierre,  qui  etait  d^ji  , 
le  gros  de  sa  troupe,  s'empr^l 
venir  sur  ses  pas.  II  voulut  enlii 
n^^ociation;  malheureusementflii 
aucuiie  autorite  reelle  sursooj 
et  tandis  qu*il  rappelait  aox  < 
Nissa  le  but  sacr6  et  les  intent 
fiques  de  son  exp^ition^  deux  i 
ses  bommes  cherdiaient  deja  as 
les  remparts,  inalgr^  la  tr^e.  C 
contre  de  pareils  brigands , 
combattrea  mort?  Les  Bol^ 
gn^,  sortirent  en  masse  oontisi 
rieux,  lesattaquirentene  „ , 
divis^rent,  et  s'en  defirenfaveeli 
ou  les  noyerent  dans  des  1 
La  d^route  des  croises 
Les  femmes,  les  en£ants,lesi 
ies  chevaux ,  les  Mies  de  i 
qu*aux  troncs  des  aumdnes  dil 
tomberent  entre  les  mains  deff 
Pierre  TErmite  s'enfuit  av«d 
des  plus  sages  sur  une  moo 
virons ;  et  ce  ne  fiit  qu*avec  I 
peme,  en  faisant  sooner  si 
clairons  et  les  trorapettes,  q8*fl 
sieurs  jours  d*attente  ii  pot  n 
tour  de  lui  sept  miile  rojardkJ 
reduite,  Tarm^e  de  Pierre  seil|| 
marcbe  a  petites  journto.  Dixd 
mes  avaient  ^t^  tu6s  devant  Ma 
les  bagages  enleves;  toutes  les  c 
des  crois^  i^taient  pr 
n'etaient  alors  dans  oette  troopei 
que  lamentations ,  pleurs  en" 
Elle  se  sou  vint  enfin  de  Dieu : 
elle  se  repentit ;  elle  devint 
mod^r^.  Son  6tat  deplorable  etfi 
elle  le  bonheur  d*inspirer  la  pidlj 
nouvelles  populations  qu'elle 
On  indiquait  aux  baodes  di& 
le  rendez-vous  commun  ;  on 

(*)  YoyarabMGoibcH,  Cmt^Dm^ 


SYRIE  MODERNB. 


147 


lanrs  seeours ;  on  les  mettait  dans  lear 
chemin ;  et  ce  fiit  au  nombre  (k  trente 
,  mille  hommes  r^unis  qu*ils  entrdrent 
dans  la  Thrace.  La ,  Fempereur  byzan- 
tin  leur  envoya  des  deputes  pour  se 
plaindre  de  leors  d^sordres,  et  en  m6me 
temps  leor  annoncer  leur  pardon.  La 
praaent  et  habile  Alexia  pouvait  avoir 
besoiii  d'eux ,  et  les  traitait  en  conse* 

3uence.  Pierre  l^rmite,  qui  desesp^rait 
e  son  expedition,  rendit  au  ciei  des 
actions  de  grdces  de  la  conduite  du 
souverain  grec.  II  pr^ba  de  nouveaa 
son  arm^;  et  cette  tois  Tayant  trouv^e 
docile  et  humble ,  ce  fut  au  ch<)ut  des 
cantiquea  et  des  palmes  a  la  main  qu'il 

lui  fit  continuer  sa  route. 

I 

LA  CBOISADB  DU  Cl^IMB. 

Outre  les  premiers  pelerins  qui  8*e- 
tatent  ^lano^  a  la  suite  de  Pierre  TEr- 
mite  et  de  son  lieutenant  Gauthier  Sans 
yivoir,  il  en  partit  bien  d'autres  bandes, 
dont  les  principales  furent  meo^s.  Tune 

{>ar  un  missionnaire  nomme  Gottsehalk, 
^autre  par  ua  indigne  pr^tre,  appel^ 
Foikniar ,  et  par  un  certain  comte  £mi- 
con.  Gottsehalk  etait  un  fanatique  dans 
le  genre  de  Pierre  FErmite,  eloquent 
a  force  de  licence ,  ^nergique  h  force  de 
volonte.  II  reunit  autour  de  lui  une  ving- 
taine  de  mille  hommes,  compost  cette 
fois  de  soldats  hardis  ,  mais  grosslers ; 
infatigables,  mais  debauches.  Ces  sou- 
dards  en  ddire,  venus  p^esque  tons  dit 
Paiatinat,  et  pr^venus  peut-Stre  des 
hostility  qui  avaient  eu  lieu  entre  les 
premiers  croises  et  les  Hongrois ,  agi- 
rent,  des  qu'ils  furent  arrives  sur  les 
bords  du  Danube ,  comme  s'ils  ^talent 
en  pays  ennemis.  Ces  derniers  n'avaient 
pas  de  femmes  avec  eux ;  lis  en  enlev^ 
rent.  Puis  ils  s'abandonn^rent  a  tant  de 
d^sordres,  h  tant  de  rapines,  a  tant  d'as* 
sassinats,  que  le  roi  Koloman ,  sans  de- 
claration pr^lable,  les  attaqua  avec  fu- 
rie.  lis  se  d^fendirent  courageusement 
en  plusicurs  rencontres;  et,  comme 
on  craignait  autant  leur  f^rocite  aue  leur 
audace ,  en  m^me  temps  que  la  force  on 
I  emplova  centre  eux  la  ruse.  Queiques 
chefs  oongrois  vinrent  dans  le  camp  de 
ces  etranges  croises ,  feignirent  de  les 
traiter  en  fr^es ,  et  leur  promirent  le 

Sassageetdes  vivres,  sMIs  consentaient 
se  laisser  momentan^ment  desanner. 


Ces  lourds  Teutons ,  aussi  stupides  que 
brutaux,  se  laisserent  prendre  a  cette 
amorce.  Mais  a  peine  eurent-ils  remis 
leurs  armes  qu'on  tomba  sur  eux  avec 
rage,  et  que  malgr^  leurs  prieres,  leurs 
promesses,  leurs  larmes,  on  les  exter- 
mina  sans  scmpule  :  severe  mars  juste 
punltion  de  leurs  erimes  (*) } 

N^nmoins  on  voyait  toujours  en  Eu- 
rope s'assembler  iiea  pelerins  arm^, 
cherchant  un  chef  et  se  dirigeant  vers 
Jerusalem.  Seulement ,  de  plus  en  plus , 
ces  pr^tendues  arm^s  de  Dieu  se  com- 
posaient  d'hommes  per  vertis  et  barbares. 
Apres  r^cume  des  populations  venalt 
leur  lie.  Apres  les  fanatiques,  les  pau<* 
vres,  les  tons  command^  par  Pierre 
I'Ermite;  apr^  les  soudards  entrain^ 
par  Gottsehalk,  on  vit  s'acheniiner 
vers  la  Palestine  de  veritables  hordes 
de  brigands.  lis  s'assemblerent  sur  le 
Rhin ,  et  prirent  pour  chefs  un  prtoe 
sans  conscience  et  un  chevalier  sans 
honneur,  Folkmar  et  £micon.  Ces  bStes 
feroces ,  dechatn^s  ,  s'en  prirent  tout 
d'abord  aux  juifs.  lis  les  attaquerent 
dans  le  sein  m^me  des  plus  grandes 
villas.  Apres  les  avoir  pill^s,  ils  les  assas- 
sinaient,  disant,  pour  s'excuser  que,  les 
juifs  etaient  les  veritables  ennemis  de  la 
croix,  les  meurtriers  de  Jesus-Christ.  Le 
peuple ,  qui  detestait  la  race  Israelite,  les 
laissait  faire.  Cetait  partout,2i  Verdun,  a 
Treves ,  a  Mayence ,  a  Cologne,  a  Spire, 
k  Worms,  des  se^es  de  carnage  ^  de  viol 
et  de  debauches.  La  terreur  ^tait  telle , 
qu'avant  Tarriv^  de  ces  bandes  furieu- 
ses,  on  voyait  des  families  juives  au 
desespoir  se  pr^ipiter  dans  les  eaux  ou 
dans  les  flammes  pour  echapper  aux 
traitements  infftmes  dont  les  soldats  de 
Folkmar  et  d*£micon  les  meua^aient. 
L'anarchie  ^tait  a  son  comble.  tieureu- 
sement  que ,  dans  ce  siecle  de  fer  et  de 
sang,  le  cleige  pr^sentait  queiques  hau- 
tesvertus,onrait  queiques  grands  coeurs, 
qui  lui  conservaient  la  superiorite  sur 
les  masses  intol^rantes  et  farouches. 
Plusienrs  ^v^ues  vinrent  au  secours 
des  juifs  persecutes.  lis  leur  ouvrirent 
leurs  palais,  qui  leur  servaient  d*asiles : 
et  pour  en  arracher  d*autres  a  leurs 
bourreaux  ils  pr^tendirent  qu'ils  s*e- 


(*)  Voyei  Albert  d»AU.  HUtoire  4§  Vempidi- 


248' 


L^UNIVERS. 


taient  convertis  au  christianisme :  saint 
mensonge  qui  sauva  la  vie  a  bieo  des 
Yictimesl 

Ainsi.qu'une  tronibe  d^sastreuse, les 
derniers  pelerins  arriverent  k  leur  tour 
jusqu'ea  Hongrie.  On  les  y  attendait  de 
pied  ferme.  lis  rencontrerent  une  yive 
resistance  dans  la  ville  de  Mersebourg , 
dont  lis  firent  le  si^e.  Mais  leurs  masses 
successives  allaient  enfin  lasser  le  petit 
nombre  de  Hongrois  qui  defendaient 
les  murs ,  lorsque  la  chute  de  quelques 
tours  ^branl^es  par  les  beiiers  jeta  un 
tel  effroi  parmi  les  assi6geaDts,  au'ils 
s'entuirent  dans  la  campagne  en  pleine 
d^route.  On  les'y  sui?it,  ie  glaive  a  la 
main ;  on  profita  de  leur  honteuse  lli- 
chete  pour  les  accoler  a  des  tourbillons 
et  a  des  pr6cipices,  ou  lis  p^rirent  en 
tr^s-grand  nombre  (*). 

Tout  crueliement  atteints  qu'ils  eus- 
sent  et6  par  lefer  vengeurdes  Hongrois 
et  des  Bulgares ,  quelques-uns  des  bri- 
gands de  Folkmar  et  d'£micon  n'en 
arriverent  pas  moins  jusqu'a  Constanti- 
nople. Plus  robustes  d*ailleurs,  plus 
endurcis  a  la  fatigue  que  la  plupart 
des  honn^tes  gens,  lis  avaient  mieux 
supports  les  souffrances  de  la  route.  Us 
auluerent  dans  le  camp  de  Pierre  I'Er- 
mite  avec  quelques  femmes  de  mauvaise 
vie  quMIs  avaient  tratn^s  jusque-la,  et 
leur  presence  funeste  acheva  de  perver- 
tir  les  pelerins .  que  le  bien-^tre  dont 
ilsjouissaient  depuls  quelque  temps  avait 
remis  en  godt  de  debauches.  Alexis 
Gomnene  avait  commis  une  imprbdence 
en  etablissant  aussi  pr^  des  richesses 
de  sa  royaie  ville  une  arm6e  indiscipli- 
nee,  composee,  dans  le  principe,  d'un 
ramas  de  fanatiques  et  ae  vagabonds, 
augment6e  ensuite  d*aventuriers  qui  lui 
vinrent  de  Pise,  de  Venise  et  de  G^nes , 
perdue  enfin  par  uno  irruption  de  ban- 
dits et  de  prostitutes.  Les  plus  mauvais 
sujets  entratnerent  les  douteux;  et  bien- 
tot  cette  masse,  qu'une  main  ferme  ne 
savait  pascontenir,  s'abandonna  a  tous 
les  desordresimaginables,  pillantindis- 
tinctementmaisons,  palais  et  eglises,  et 
poussant  ses  excursions  d^  vastatrices  jus- 
que  dans  les  faubourgs  de  la  ville  qui  lui 
av^it  accord^  une  si  coQteuse  hospitality. 

i") Yoyez  rabMGaibert,  Getta  Dei perFfan- 
cos,  et  Albert  d'Aix ,  HUL  de  I* expedition  d« 
Jeruaalem, 


Les  ByzantinstremblaieatLrarj 
employa  un  dernier  moyen  poor 
rasser  sa  capitale  d'un  daneer  peai 
nent;  et  ce  mojen  eut  le  booail 
r^ussir.  II  fit  offrir  aux  crois6s  dai 
seaux  pour  les  conduire  au  ddalii 
phore.  II  leur  vanta  le  biitm  qa'ili 
vaient  faire  dans  les  eampagna 
ques.  Les  Turcs  etaient  la,  __ 
^etait  pour  les  combattre  que 
sade  s'^tait  miseen  marche.  Les 
accepterent  cette  o£fre,  s'l 
au  nombre  de  cent  mille  w 
vinrent  pla^oer  leur  nouveau 
les  environs  du  golfe  de  Micoi 
h  peine  en  Asie,  ils  en  traitem 
les  habitants  en  ennemis,  qa*ib 
latins ,  grecs,  ou  rousulmans. 

Une  arm^  ou  se  trooniat 
m^le  des  Italieos  et  des  Ti 
Gascons  et  des  Gallois,  des 
^ux  et  des  Anglais ,  qui  n* 
le  m^me  langage,  ni  les  mlmei 
pouvait  agir  avec  unit^  Ella 
une  sorte  de  guerre  de . 

3ue  matin  plusieurs  troupes 
u  camp,  partaient   en 
s'en  allaient  de  divers  e5t^ 
lant,  ^orgeant.  Les  uns 
chance  poureux,  etfaisaieol 
pine;  les  autres  ne  renooBi 
de  pauvres  laboureurs  H  de 
cabanes :  alors,  dans  la  ragedai 
tement ,  ils  commettaieiit  di  . 
ex^crables.  Anne  Cooinene,!^ 
fille  de  Tempereur  de 
rapporte,  dans  son  AUxiaii, 
JHormands  hach^rentdes 
ceaux,  et  en  mirent  d'autresi 
On  serait  tent^  de  croire  de 
faits  lorsque  tous  les  chi 
onzieme  et  douzieme  sideles 
pour  maudire  les  premiers 
lorsque  Guillaume  leSage, 
de  Tyr,  les  appelle  lui-mtoe 
fantj  de  BiUcU. 

Quoi  qu'il  en  soit  de  oes  df 
de  barbaric,  toujours  est-il  que 
venu,  les  differentes  bandes  de 
deurs  rentraient  au  camp;  les 
main^  rougies  seulement ,  les  ar 
mains  pleines.  De  la,  jalousie, 
discorde.  Pui8,qaand  il  s'a^ssitl 
partager  le  butin ,  les  querela  4 
taient ;  on  s'injuriait ,  on  se 
Les  Gascons  et  les  Provea^iux , 


SYRIE  MODERNE. 


249 


lement  railleurs  et  pr^somptueux ,  se 
inoquerent  des  Teutons  avec  tant  de 
malice  et  de  coatinuite,  que  ceux-ci, 

{lousses  a  bout ,  se  separerent  enfin  de 
'armee.  Sous  la  conduite  d'un  certain 
Renaud,  lis  s'engagerent  hardiment  dans 
les  montagnes  qui  roenent  k  I<Iic^. 
Puis  J  ayant  trouv6  une  forteresse  sur 
leur  chemln,  ils  Tassi^gerent,  la  prirent, 
et  s'y  installerent  (*). 

Cependant  le  sultan  seldiouckide  de 
Koum  ,  KJlidj-Arslan ,  fils  de  Soliraan , 
qui^devait  son  empire  a  la  ^^n^rosite  de 
M^lik-Schah,  avert!  de  rinvasion  des 
crois^,envoya  une  armee  contreenx. 
Cette  arm^  voulut  reprendre  la  forte- 
resse, que  lecbroniqueur  Baudri  Guibert 
appelleExerogorgon.  Mais,  loin  de  tenter 
Fassaut ,  les  Turcs  se  content^rent  d'en- 
tourer  la  place.  Au  bout  de  quelques 
jourSf  les  assi^i^s,  qui  n'avaient  ni  eau, 
ni  vivres ,  soutfrirent  de  la  soif  et  de  la 
faim.  lis  vinrent  jusqu'd  saigner  leurs 
chevaux  et  leurs  mulets  pour  en  boire  le 
sang.  Enfin ,  lorsqulls  furent  k  toute 
extr^mit^,  leur  chef  Renaud ,  qui  ^tait 
un  soudard  sans  foi  ni  loi ,  les  vendit 
secretementanx  Tares,  ouvrit  les  portes 
de  la  forteressQ,  et  se  fit  musulman.  Ge 
fat  111  le  premier  ren^at ,  ce  ne  sera 
pas  le  dernier.  Quant  k  ses  compagnons, 
lis  avaient  massacre  la  garnison  turque, 
ils  furent  massacre  ^  leur  tour. 

Loin  de  jeter  le  d^uragement  dans 

rarni6e  de  Pierre  I'Ermite,  la  nouvelle 

du  desastre  des  Teutons  n'^  excita  que 

des  sentiments  d'indi^nation  et  de  fu- 

reur.  On  les  raillait  vivants,  on  voulut 

les  venger  morts.  Gauthier  Sans  Avoir, 

qui  savait  la  guerre,  conseil  la  d'atteudre 

les  Turcs  dans  la  bonne  position  ou  se 

troQTait  le  camp  chr6tien.  Ses  troupes 

Vaccuserent  de  idchet^ ,  et  il  partit.  On 

se  dirigeait  a  la  debandade  vers  Nicee. 

I         Le  sultan  profita  de  ce  d^ordre :  i  1  caeha 

une  partie  de  son  arm^  dans  une  for^t, 

et  rangea  fautre  dans  une  plaine.  Les 

j         Chretiens   atta<iuerent  vivement;  les 

(         Turcs  se  ddfendirent  avec  habilete.  Gau- 

I         thier  fit  des  efforts  inouTs  pour  gagner 

I         une  bonne  position  et  Favantage ;  il  ne  put 

,  que  mourir  firapp^par  sept  fleches.  Apr6s 

I         sa  mort,  les  croises,  coup^  en  milie 

\ 

\  (*)  Yoyez  Anne  Comn^e,  AUx,^  etGaillaume 

^  de  Tyr,  Bitt.  de  ce  qui  s'est  paasiy  etc. 


troncons,  entour^  de  toutes  parts,  nt- 
taques  a  la  fin  du  combat  par  des  trou- 
pes fratches,  furent  compl^tement  tallies 
en  pieces.  Trois  mille  des  leurs  seule- 
ment  parvinrent  a  s'echapper  dans  une 
forteresse  voisine  dela  mer.  Les  Turcs, 
apres  leur  victoire,  amasserent  les  osse- 
ments  des  vaincus  et  en  form^rent  une 
pvramide,  qui  devait  servir  aux  pro- 
cnains  croises  de  lugubre  jalon  sur  la 
route  de  Jerusalem. 

OPINION  DBS  GHBONIQCJEUBS  SUR  LES 
PBEMIEBS    CBOISES. 

En  moins  d*un  an  s'epujserent  les 
divers  torrents  humains  qui  s'^taient 
precipit^s  vers  TOrient.  Et  quelle  triste 
et  funeste  idee  a  la  fois  donn^rent-ils 
aux  Musulmans  des  Chretiens  qui  ve- 
naient  leur  disputer  Fempire  du  monde! 
Hordes  indisciplinees,  ne  sachant  ni 
attaquer  ni  se  aefendre ,  cruelles  et  pil- 
lardes  plus  que  ne  Tavaient  jamais  et6 
les  Bedouins,  les  Kbarmates,  les  Turko- 
mans; engeance  perfide  et  dissolue^ 
qui  ne  proc6dait  que  par  le  viol ,  Tin- 
cendie  etie  meurtre;  rebus  des  nations, 
bonte  de  rbumanit^  1  Qu'on  ne  croye 
pas ,  d^ailleurs ,  que  nous  ayons  outre 
la  folic  des  uns  et  les  crimes  des  autres. 
Lisez  les  cbroniques;  consultez  les  con- 
temporains;  tons  sont  d*accord  dans 
leurs  maledictions.  Albert,  chanoinede 
r^lise  d*Aix,  dans  son  Histoire  de 
texpiditiondeJerustjUem,  quoique  ecri- 
vain  plein  d'indulgence  d*ordinaire  pour 
les  croises ,  dont  il  approuve  les  inten* 
tions,  ne  dissimule  aucun  des  exces 
de  la  foule  conduite  par  Gauthier  Sans 
Avoir  et  Pierre  TErmite.  Quant  aux 
soldats  de  Gottschalk  et  d'Emicon ,  il 
dit  que  c'est  Dieu  lui-m^me  qui ,  dans 
leur  terrible  d^route,  les  a  punis  de 
leurs  mefaits.  Baudri,  archevdque  de 
Dol,  aui  assista  au  concile  de  Clermont, 
pour  lequel  il  ne  cache  point  son  en- 
thoysiasme,  va  bien  plus  loin  qu' Albert 
d'Aix  dans  son  m^pris  pour  certaines 
bandes  de  crois^  :  il  les  compare  k 
des  juments  qui  se  vautrent  dans  Tor- 
dure  {computruerant  Uliy  tanquam 
jumenta,  in  stercoribus),  et  il  ajoute 

3ue  leur  ooeur  €ta\t  aussi  dur  que  celui 
e  Pharaon ,  le  type  biblique  de  Tin- 
humanite.  Bernard  leTr^orierestaussl 
deFavis  de  ses  pr6d^sseurs;  dans  sa 


360 


L'UKIVERS. 


chroniqiie\  il  traitede  foUt  la  muHitude 
qui  suivit  le  premier  pr^dieateur  de  la 
croisade  :  Menue  gent  qui  ne  vouloleni 
avoir  ni  endurer  ia  maistriie  des  preud- 
hommes  sur  eulx ;  et  ii  avoue  qu'il  j 
avait  dans  les  autrea  bandes  des  malfat- 
teura  qai  commettaient  toutea  les  sortes 
de  violence.  £nfin  nous  avons  deja  rap- 
ports oe  que  pensait  des  premiers  croises 
te  severe  mais  juste  arcbevdque  deXyr  (*). 
Mais  n'y  a-t-il  pas  d^excuse,  bistorique 
au  moins,  a  la  barbarie  de  ces  masses 
qui  se  rucrent  p^le-mdle  sur  TOrient 
a  la  voix  du  fanatisme?  Si,  une  grande : 
la  desolation  et  Tabrutissenient  de  Tepo- 
que  qui  vit  Plater  ce  eataclysme  social. 
Laissons  parler  un  eonte mporain,  Foul- 
cher  de  Chartres,  ne  en  1059.  Voiei 
comment  il  resume  les  raisons  qui  firent 
adopter  au  pape  )a  croisade  :  «  Urbain, 
vovant  que  la  foi  chretienne  etait  con- 
sidSrablement  diminu6e  dans  le  elerg6 
et  dans  le  peuple ;  que  les  princes  de 
la  terre  Staient  sans  cesse  en  guerre 
les  uns  contre  les  autres ;  qu*on  violait 
par  tout  les  lois  de  la  paix;  que  les* 
campagnes  ^talent  alternativement  ra- 
vagees  et  pillSes ;  quf  plusieurs  etaient 
injustement  trafnes  en  captiviU^,  cruel- 
lenient  maltrait^  dans  leur  prison, 
et  ne  se  rachetaient  qu'a  un  prix  exor- 
bitant,  ou  perissaient  de  faim,  de 
soif,  de  froid;  que  les  lieux  saints 
Staient  soui lies,  les  mouasteres  et  les 
habitations  particuli^res   livres  aux 
flammes ;  que  personne  n'etait  epar- 
gne;  qu'on  se  faisait   un  jeu  des 
cboses  divines  et  humaines ;  apprenant, 
en  outre,  que  les  provinces  intSrieures 
de  la  Romanic  (Asie  Mineure]  avaient 
subi  Finvasion  des  Turcs ,  et  que  les 
Chretiens  y  etaient  victimes  dela  fero- 
city de  ces  barbares,  touche  de  pitie 
(pietate  compatiens) ,  et  plein  de  Ta- 

mour  dcDieu,  il  passales  Aipes 

Le  tableau  est-il  assez  complet?  Ne 
peut^on  pas  en  conclure  que  retat  des 
Chretiens  d*Occident  n'6tait  pas  moins 
deplorable  que  Tetat  des  cbrStiens 
d*Orient  ?  Ge  n'est  pas  tout  pourtant. 
Voici  maintenant  le  spectacle  que  prS- 


(•)  Voyei  les  difKrents  djronlquears  :  Ro- 
bert ie  Moloe,  Baudrl.  Raymond  d*Agil«s  ,  Al- 
bert d^AiiL,  Fouloberoe  Chartres,  Tudebode, 
Raoul  de  Caea.  Tabbe  Guibert,  GuiUauaie  de 
Tyr,  Bernard  le  Tr^sonerf  etc. 


smta  Rome  au  m€me 
rann^  1096: 
«  Nous  autres  tous.  Francs  ooad» 

«  taux noos  aHdmes  par  Rone  M 

«  partant  pour  la  croisade);  m| 
«  nous  fidmes  entr^dans  la  basili^S 
«  Saint-Pierre,  nous  trouvflflitedeiprti 
«  sans  de  fantipape  Guibert  qai, 
«  r^pee  (Tune  mam,  enlevaieiit  de 
«  les  offrandes  que  I'on  avail 
«  sur  Fauiel.  lyautrea  eouraifttl 
•  poutres  de  la  Toilte  de  Pt , 
«  jetaient  des  pierres  sur  noos  ^ 
<  que  nous  Caisions  nos  pri^itt)  ( 
«  lorsqu'ils  voyaient  qaelqiirim  ' 
«  d'Urbain,  ils  voulaient  le  trnr. 
«  hommes  attaches  k  Urbais 
«  fidelement  une  partie  de  la 
«  et  ils  se  d^fendalent ,  comoie 
a  Taient,  contre  les  attaqoa^ 
«  ennemis.  »  Puis  Foulcherde 
termiue ,  sous  forme  de  rdlexiaa, 
ces  mots :  «  Qtfy  a-t-il  d'i 
«  que  le  monde  soil  sans  eeaae 
c  jorsque  f£glise  romaine, 
«  pourtant  r^ident  toute 
a  toute  surveillance,  est  ell 
a  ment^  par  la  guerre  civile.' 
a  le  memnre  principal  soafli 
a  ment  les  antrei  n*^prov 
«  pas  dedouleurP  »  DouleBr 
efret,  douleureontinuelie,  ~ 
neralel  douleur  qui  ex&sp< 
tits,  qui  perverassait  les  . 
avait  jete  la  rage  dans  tons' 
douleur  qu'on  alia  porter  aa 
Tespoir  de  la  gu^rison ,  et  q|ri  att 
qu'uQC  intensite  plus  grande,  H 
seul  remMe :  la  mort ! 

MOUYBiailT  J>BS  ABMBBS  i 


Cependant ,  outre  a 
donnas  que  nous  avons  vaes  \ 
confiisement  vers  TOrimt  sm 
texte  de  croisade ,  la  veritable  i 
tion  se  preparait  a  mardier  k  i 
Excepts  les  rots,  Tempereiir,  I 
ceux  enfin  qui  possedaient  dl 
stables  et  importants  ou  qui 
une  grande  tAcbe  a  remplir,  I 
petits  princes,  dues  et   cool 
n'entrevoyaient  aucune  ebanee  i 
dissement  en  Europe ,  tous  ics  I 
et  chevaliers  ambitieux,  8*ap 
partir  en  Palestioe,  pays 
se  divlsait  d'avanee,  terre  de 


SYRIE  1dODERN£. 


»t 


pour  les  UDs,  de  oonvoitise  pour  les 
autres ,  de  salut  ^ternel  pour  tous.  On 
6*exhortait  muttteUement  a  la  croisade, 
OD  8*^crivait,  oo  se  donnait  rendez-vous 
k  Constantinople.  Puis  pour  arriver  \k 
on  faisait  argent  de  tout :  (m  engageait 
aes  terres,  on  vendait  see  chateaux; 
tou8  ces  sacrifices  afln  de  s'^uiper  soi 
et  les  siens,  afin  de  se  procurer  armures, 
^p^,  chevaux.  Bientot,  a  cause  m^me 
du  besoio  genial ,  toutes  les  choses  uti- 
les a  la  guerre  de?inrentd*une  cherts  ex- 
cessive; et  Ton  vit  tel  petit  seigneur 
avoir  h  peine  assez  de  tous  ses  domaines 
pour  payer  son^uipement,  tel  autre  sans 
fortune'  s*adresser  a  la  charite  publique 
pour  lui  demander  de  quoi  coinbattre, 
tel  autre  eofin  ^  Guitlaume ,  vicomte  de 
Meiun,  par  exemple ,  piller  ses  bourgs 
et  ses  villages  pour  armer  ses  dcuyers  et 
leur  suite  r). 

La  premiere  faute  de  ces  crois^  f6o* 
daux  fut  de  n'^re  pas  partis  ensemble 
du  centre  de  TEurope.  Les  uns,  en  etfet, 
arriverent  k  Constantinople  eu  triom- 
phateurs,  les  autres  en  maraudeurs,d*au- 
tres  en  prisonniers.  lis  formerent  quatre 
armies  principales  que  nous  aliens  sui  vre 
tour  a  tour.  Gelle  qui  se  mit  en  niouo 
vement  le  joor  mdine  fix6  par  le  concile 
de  Clermont,  le  15  ao()t  1096,  ^tait 
composee  deLorrains ,  de  Bavarois,  de 
Saxons  au  nombre  de  quatre-vingt  mille 
hommes  et  de  dix  mille  ebevaux,  et 
commandee  par  le  c^lebre  Godefroy 
de  Bouillon.  Nous  n*essayerons  point 
lei  le  portrait  de  ce  due  de  la  Basse- 
Lorraine;  nous  ne  r^p^terons  pas  les 
eloges,  int^ress^  sansdoute^  qu*ont  faits 
de  lui  la  plupart  de  ses  contemporains  : 
c'est  k  Toeuvre  que  nous  le  Jugerons. 
Ses  antecedents  seuls  doivent  mainte- 
nant  nous  occuper.  Or,  ils  ne  sontpas  ir- 
r^procbabies,  sinonbrillants;  car,  selon 
la  propre  opinion  de  Godefroy  lui- 
m^me,  il  avait  k  expier  k  Jerusalem  quel- 
ques-uns  de  ses  exploits.  N6  h  fiavsy , 
pr^s  de  Fleurus ,  Godefroy  de  Bouillon , 
dont  le  grand-p^re,  due  de  Brabant, 
avait  echou6  centre  la  Lorraine ,  dont 
le  p^e  s'etait  fait  battre  par  Guillaume 
le  Conqu^rant,  fut,  lui  ,'l7iumble  servi- 
teur  de  Tempereur  d'Allemagne.   En 


(•)  Voy« 
rrancoM, 


rabb«  Guibtrt,   Cuia  Dei  per 


cette  quality  il  portait  le  drapeau  de 
Tempire  a  la  bataille  entre  Rodolphe  de 
Rheinfeld ,  due  de  Souabe ,  et  Henri  IV , 
le  constant  adversaire  de  Gr^oire  Vll ; 
et  ce  fut  lui  qui  eut  le  triste  honneur 
de  tuer  le  rival  de  son  mattre.  Puis  ce 
fut  encore  eomme  soldat  de  Tempire 
teutonique  quMl  se  prooonca  en  faveur 
de  I'antipape  Anadet,  et'qu'it  entra 
dans  Rome  prise  et  saccagee  par  le 
m^me  Henri  IV.  Poor  ces  services  divers, 
Godefroy  de  Bouillon  avait  et^  gratifie 
du  marquisat  d' An  vers  en  t076,  et 
en  1093auduch^  de  Lorraine,  par  Tem- 
pereur  d'Allemagne ,  qui  en  depouillait 
son  ills  Conrad ,  r^volt6.  Godefroy  de 
Bouillon  etait  done  une  sorte  de  favori 
de  Henri  le  Germanique,  un  parvenu 
qui  ne  pouvait  avoir  ni  racines  ni  au- 
torit6  positive  en  Lorraine,  et  qur 
partait  pour  la  croisade,  faute  pent- 
etre  de  pouvoir  se  maintenir  dans  un 
pays  dont  on  avait  dispose  pour  lui  par 
caprice ,  et  en  Tabsence  d*un  autre  can- 
didat  qui  ait  consenti  a  se  charger  de  la 
d^pouiUe  d'un.  prince  du  sang  imperial. 
Aussi  fit-il  ben  marche  de  ses  demaines : 
il  vendit  son  duche  de  Bouillon  a  Teve- 

aue  de  Liege  pour  la  miserable  somme 
e  trois  cents  marQS  d'argent  et  quatre 
marcs  d'or ,  et  sa  principaut^  de  Stenay 
k  I'ev^ue  de  Verdun  pour  un  prix  eu- 
eore  moindre.  Quant  a  la  ville  de  Metz, 
dont  il  tolt  suzerain,  il  lui  permit  de 
se  racheter  elle-m^me.  Mais  s'il  cedait 
pour  presque  rien  ses  terres  en  Europe, 
il  avait  une  assez  forte  arm^  pour  en 
reconquerir  en  Asie.  Cetait  bien  1^  son 
esperance,  ainsi  que  celle  de  ses  parents, 
d6possedes  com  me  lui ,  et  qu*il  emme- 
nait  a  sa  suite,  Eustache  de  Boulogne  et 
Beaudouin,  ses  fr^res,  Beaudeum  du 
Bourg,  son  cousin.  La  politique  etait 
d*accord  avec  lafoi  pour  entratner  sur  la 
route  de  Jerusalem  ces  princes  ftodaux 
sans  eonsistance  r^ile  daus  leurs  Etats. 
Godefroy  de  Bouillon  avait  appris  k 
conduire  des  troupes,  et  il  sut  tout 
d*abord  maintenir  une  discipline  severe 
et  un  certain  ordrede  roarcne  parmi  ses 
soldats.  Ce  fut  le  30  septembre  au'il 
arrivaa  Tollenburg,  ville  d'Autriche , 
sur  les  fronti^res  de  la  Hongrie.  La,  loin 
de  demander  raison  aux  Hongroisd*avoir 
massacre  les  bandes  de  Teutons  menses 
par  le  moine  Gottschalk  et  celles  du 


nr 


L'UNIVERS. 


comte  l^mioon,  il  s'adressa  en  ami 
au  roi  Koloman,  lui  demandant  le 
libre  passage,  et  Tachat  r^ulier  des  vi- 
vres.  it  DC  put  pourtant  obtenir  ce  qu'il 
d^sirait  que  moyeonant  caution  et  po- 
lice. L'orgueilleuxducet  ses  fiers  barons 
feodaux  se  virent  obliges  de  remettre 
en  olage  Beaudouin  et  sa  famille,  et  de 
se  laisser  escorter  par  les  troupes  hon- 
groises,  tanton  se  mefiait  encore  des 
crois^s.  En  Bulgarie,  les  sages  prece- 
dents de  i'arm^e  allemande  la  firent 
recevoir  sans  trop  de  suspicion  et  de 
mauvaise  volont^.  Elle  y  trouva  de  quoi 
se  nourrir,  gr&oe  au  soin  que  prirent 
ses  chefe  de  faire  payer  constamment 
toutce  dont  on  avaitoesoin.  Enfin,  elle 
n*eut  r^ellement  k  souffrir  que  dans  les 
raontagnes  de  Tancien  Hemos ,  ou  la 
saison  dej^  avanc^e  et  le  depart  des 
pasteurs  la  laiss^rent  ]ivr6e  a  elle-m^me 
dans  des  deserts  de  neige.  Mais  au  ver- 
sant  des  monts  Balkans,  la  feconde 
Thrace  dedommagea  les  Teutons ,  el  ils 
pufent  se  rallier  et  se  reposer  quelque 
temps  dans  la  riche  ville  de  Pniiippo- 
polis  (*). 

£trange  contradiction  dans  les  es- 
pritsde  cette  6poque!  Philippe  Vy  ce 
laible  roitelet  de  France,  dont  les  do- 
mainess'^tendaient^  peine  de  Paris  a  Or- 
leans, homme  sans  Anergic  commesans 
franchise,  ne  sachant  d*ordiaaire  aue  se 
vautrer  dans  les  orgies  et  noyer  sa  nonte 
dans  le  vin,  tout  excommuni^  qu'il 
edt  ete  en  1095  par  le  pape  Urbain  II, 
ne  sVn  montra  pas  mo  ins  partisan  de 
la  croisade.  II  pr^ida  une  assemblee  de 
barons  ou  devait  s*organiser  la  sainte 
exp^ition;  il  engagea  son  frere  Hu- 

f^ues ,  comte  de  Vermandois ,  a  partir  k 
a  t^te  de  ses  vassaux,  et  fit  tous  les  sa- 
criOces  d'argent  et  d'hommes  qui  lui 
fureot  possibles.  Malhcureusement  cet 
Hugues ,  qui  n'avait  que  sa  haute  taille 
pourjustinersontitre  de  Grand,  montra 
autant  d* inexperience  que  d'ent^tement 
des  les  debuts  de  la  carapagne.  Robert , 
surnomme  Courte-Heuze,  due  de  Nor- 
mandie,  fils  indigne  de  Guiliaume  le 
Conquerant,  accompagnale  fr^re  dePhi- 
iipne  T'.  Prince  gros  et  lourd,  indolent 
et  aebauch6,  dissipateur  etsuperstitieux, 


ipartki 


Robert  ^tait  revenu  derexil  poorp 
possession  delaNormandie.  Hal 
de  tern ps  i I  trouva  Rioyen,  avee  ii 
tisanes  et  les  bouffous,  d'^puiser  a^ 
province;  et  ce  ne  fut  quegitei 
nrere,  homme  prudent  et  habile,^ 
pr^ta  dix  mille  marcs  d*argeot  i 
nant  la  souverainet^  d^uoe  part* 
domaines ,  qu^il  put  prendre  i 
guerre  sainte.  Ce   fut  dooe  i 
corps ,  de  bourse  et  de  rqwtal 
s'achemina  vers  Jerusalem.  II  f 
du  reste ,  par  une  graude  [ 
noblesse  normande,  aocouU 
guerre ,  amoureuse  des  gnn 
prises,  et  qui  avait  deja  foi 
rope  d'heureux  aventuriers. 
Robert)  celui-la  comte  de  Flan 
aussi  ruin^  pour  partir.  Eoinl 
comte  de  Blois  et  de  ( 
riche  que  les  deux  prec^eatt] 
pauvres,  qui  comptait  autaatr 
teaux  qu'il  y  a  de  Jours  dans  f 
d6cida  de  son  cot^  k  acoon 
fr^re  de  son  suzerain  Philip 
diff^rents  renforts  vinrent ! 
pos   au  petit   prince  Iran 
peine  commandait-il  en  ] 

gies    cavaliers    et  a   un 
ntassins.  Quoi  qu*il  en  j 
partit  pas  rooins,  plein  d*e  ^ 
d*illu8ions ,  pour  I'Orient ,  A^ 
ffiier  pas  devait  donner  daaii 
oik   son  premier  acte  dtmif 
faiblesse  (*). 

L'aspect  de  la  croisade  III 
gneurs,  aussi  ignorants  qaef 
tueux  pour  la  pTupart,  etaiti 
rent  de  Taspect  qu^avait  offa 
de  Pierre  l^rmite.  Plus  de  I 
plus  de  mis^re ;  mais  aussi 
exaltation  et  de  cette  foi 
traverser  des  brasiers 
dissipation,  au  contraire^  dela| 
luxe  dans  les  armes ,  de  la  f  '* 
^uipages.  Le  plus  grand 
cheminaient  avec  tous  leurs  i 
chasse  et  de  p6cbe,  lignes  et  i 
et  faucons.  C^tait  une  cc 
croyable  de  valets,  de  Mtesi 
de  chariots.  Puis  encore ,  a  I 
ces  bagages  interminaliles,  T 
suivaient  leurs  maftres  k  toot  I 


I  prom] 


iSoil,j 


(*)  Voyez  Bernard  le  Tresorier,  Hist,  d^ 
Croiiades, 


n  Yoyes  OrdMc  Vital,  iK»L 
Robert  leMoiiie,  HtML  de  " 


SYRIE  MOD£R]S£. 


263 


lie  sans  discipline,  sans  chefs,  sans 

naissance  de  la  guerre ,  mal  arm^e 

lieiix  et  demassues ,  et  qui  s*en  ailait 

lire  tuer  par  les  infid^les,  afin  de  ga- 

rplas  Tite  le  paradis. 

iijpeodaDt  cette  arm^e ,  embarrassee 

des  bagages  de   toutes  especes , 

Wfie  par  la  foule  qui  Taccompagnait 

ir  d'autres  foules  qui  venaient  au- 

|it  d'elle  aux  faubourgs  de  chaque 

flQx  frontieres  de  chaque  pays, 

par  les  femnaes  et  les  enfants 

ins  qui  ^migraient  avec  les  chefs  * 

feifiilie,  n'en  traversa  pas  moins 

es  sans  graves  accidents.  Arn'v^e 

|ues,  elTe  j  trouva  le  pape,  qui 

,  la  benit ,  et  confia  a  Hugues 

andois  T^tendard  de  r£giise. 

lie  parvint  h  Rome ,  ou  les  crois^ 

tranquillement    leurs  devotions 

^tres  saint  Pierre  et  saint  Paul , 

que  les  soldats  d'Urbain  II  et  de 

_ie  Guibert  de  Ravenne  se  dis- 

It,  comma  nous  Tavons  dit,  la 

du  monde  Chretien.  Ces  trou- 

iigieux  n'^taient  pas  faits  pour 

ttger  la  croisade  :  les  plus  sages, 

lioon^,   dteerterent.   Le    plus 

aombre  perdit  un  temps  pr^cieux ; 

l^u'ils  entr^rent  a  Bari ,  port  de 

Ibqne  ou  ils  d«vaient  s*emoarquer 

iHaute-Gr^ce,  Thiver  ^tait  venu, 

:  etait  mauvaise.  Malgr6  ces  ob- 

mat^rieis,  qui  aoraient  dQ  arr^ter 

Dine  sen3e,  Hugues  n'en  per- 

moins  a  passer  immediatement 

!,  jet  il  entralna  avec  lui  ses 

d*armes  et  ses  plus  devours 

5.   £tait-ce  le   zele  religieux 

ient  qui  Tavait  decide?  On  pent 

Her  quand  on  se  rappelle  le  peu 

He  que  faisait,  a  la  t^te  de  ses 

les  soldats,   le  frere  du  roi  de 

ty  grand  titre  ,  mais  bien  lourd 

louvoir  et  sans  richesse  pour  le 

r.  On  peut  se  eonvaincre  du  con- 

4orsqu'on  lit  dans  les  chroniqueurs 

nporains  que  le  comte  de  Verman- 

2ui  ignorait  Tinsucces  de  Fexp^ 
le  Pierre  TErmite,  esp^rait,  en 
isant,  se  mettre  k  la  t6te  de  ces 
•  nombreuses.  II  avait  done  hdte 
juste  raisoD  :  c'^tait  un  capitaine 
lerchait  une  arm6e.  Quel  que  fOt, 
Bte ,  son  mobile ,  il  n'en  fut  pas 
i  puni  de  son.  imprudence.  La  tern* 


pSte  Tassaillit,  dispersa  ses  navires,  et 
le  jeta  sur  la  cdte  de  Durazzo  presque 
entierement  d^pouilt^.  La,  sous  les  de- 
hors du  respect,  on  Tentoura,  on  se 
rendit  maltre  de  sa  personne  et  de  sa 
suite,  et  cVst  en  veritable  prisonnier 
qu'on  le  diri^ea  vers  Constantinople. 
Quel  d^appomtemcnt  pour  ce  jiauvre 
comte  de  Vermandois!  mais  aussi  c'est 
que,  dans  son  inintelligence,  il  n'avait  pas 
prevu  a  qui  il  aurait  anaire ,  et  qu'il  avait 
prevenu  lui-m^me  le  perfide  Alexis  Com- 
ndne  de  son  prochain  ddbarquement  (*). 
Tandis  que  le  malencontreux  Hugues 
ailait  servir  d'ota^e  k  la  cour  de  1  em- 
pereur  byzantin ,  il  se  passait  une  sin- 
guiJere  comedie  entre  les  Normands  de 
France  et  les  Normands  d'ltalie.  Ces 
derniers,  qui ,  c^rdce  h  Tun  de  leurs  chefs 
les  plus  hardis,  Robert  Guiscard  le 
Ruse,  ou  plut6t  lAvisiy  etaient  venus 
s'^tabtir,  sous  le  pretextede  pelerinage, 
a  Textr^mite  de  la  peninsule  italique, 
ne  virent  pas  sans  un  oeil  d'envie  Tex- 
p^dition  oe  leurs  jfreres  de  race.  Ils 
s'enthousiasmerent  h  leur  tour  pour  la 
croisade ,  surtout  au  point  de  vue  tout 
particulier  du  gain  qu  elle  pouvait  rap- 

garter.  Or,  Tun  des  fils  de  Guiscard, 
oh^mond ,  apres  s'6tre  distingue  dans 
des  excursions  en  Grece ,  s'etait  vu,  par 
un  effet  tout  naturel  de  reaction ,  con- 
tester  sa  conqu^te  italienne  a  Amalfi. 
Possesseur  seulement  de  la  Pouille  d^- 
peuplee  et  de  la  Sicile  a  peine  remise 
de  la  longue  domination  sarrasine,  il 
n'avait  pas  alors  grand'chose  a  esperer 
en  Italic.  Avide,  ambitieux,  arrogant, 
n'ayant  plusde  chances  de  s'enrichir  dans 
la  Peninsule,  ni  de  s'attirer  la  oonfiance 
des  populations,  il  ne  songea  d^ormais 
qu'dichercher  fortune  ailleurs.  Or,  la  croi- 
sade se  prdsentait  pour  lui  conimeunesu- 
perbe  affaire  :  d'une  part,  il  pouvait  hu- 
niilier  les  Grecs,  qu'ildetestait  de  longue 
date,  en  traversant  leur  territoire  a 
main  arm^e ;  de  Tautre,  il  comptait  bien 
se  tailler  un  bon  royaume  dans  la  vaste 
Asie. 

Mais.il  fallait  dissimuler  les  raisons 
toutes  humaines  qui  le  decidaient  a  pren- 
dre la  croix;  aussi  joua-t-il  a  merveilie 
la  conversion  subite.  Au  lieu  de  pousser 

f*)  Voyez  Foulcher  de  Chartrw,  le*  G<:»te» 
de$  Francs  allant  armet  en  pelerinage  i  Jerw 
talem. 


164 


LUmVERS. 


avec  vi^ear  le  si^ed'Amalfi,  qu'il  avait 
entrepna  avec  son  frere  et  soa  on- 
cle  Roger,  il  ae  mit  tout  a  coop  a  pr£- 
cher  la  guerre  sainte  dans  son  camp  et 
dans  celui  de  ses  auxiliairea.  Lea  Nor- 
mands ,  aussi  Gns  que  leur  prince ,  sans 
se  laisser  prendre  a  ses  dehors  de  foi 
impromptue,  n'en  acoepterent  pas  moiiis 
Toffre  qu*on  leur  faisait.  lis  crierent 
avec  un  enthousiasme  tout  beliiqueux 
le  mot  d'ordre  ordinaire  :  Dieu  le  veut! 
Dieu  le  veut '  Et  Bob^mond  repondit  a 
c«t  entratnemeut  calcule  par  une  nou- 
velle  scene  non  moins  ingenieuse  que 
les  pr6cedentes.  II  fit  apporter  deux  de 
ses  manteaux  les  plus  precieux .  et  les  flt 
decouper  pour  en  fa^nner  aes  croix 
qu'il  aistrinua  de  sa  main.  Mais  la  co- 
m^die  n'^tait  pas  termini;  et  il  ^tait 
indispensable  que  le  d^vouement  fdt  fa- 
vorable a  celui  aui  Tavait  iraaginee.  Il 
fallait  un  chef  a  la  nouvelle  expedition  : 
on  ne  put  pas  faire  autrement  que  d'of- 
frir  cet  honneur  a  celui  qui  Tavait 
concue,  conseiliee,  orgauis^e.  Bohemond 
fit  d  abord  la  sourde  oreille  vis-a-vis  des 
seigneurs;  mais  quand  les  soidats,par 
leurs  cris ,  exprim^rent  a  leur  tour  le 
voeu  qui  etait  secr^tement  si  cber  au 
maliu  JNormand,  ilfit  semblant  de  ae 
laisser  entralner ,  ayant  ainsi  tout  d'a- 
bord  consolide  son  nouvoir  et  emp6ch^ 
a  Taveoir  qu*on  osat  le  lui  contester. 
Dix  mille  cbevaux  et  vingt  mille  fantas- 
sins  forraerent  Tarmee  du  prince  de 
Tarente.  Richard,  prince  de  Salerne, 
se  rangea  sous  le  commandement  de 
riiabile  Bohemond ,  ainsi  que  le  brave 
Taucrede,son  cousin,  iSormand  par  sa 
mere,  Sicilien  par  son  pere;  puis  tons 
s'embarquerent  pour  les  cotes  de  la  Gr^ 
ce,  au  printemps,  par  une  boune  brise,et 
non  en  hiver,  par  uu  ouragan,  coramc 
riinprudent  Ungues  de  Vermandois  C). 

HOHMAOB     BBNDU    PAR    LES    ALLIES 
FBODAUX  A  ALBXIS  COM NEMB. 

Ce  dernier  n'en  avait  pas  lini  avec 
ses  maiadresses.il  lui  restaii  a  compro- 
mettre  rhonneur  des  princes  croi^es. 
L'aete  odieux  de  I'empereur  b}'^anlin  a 
regard  du  frere  du  roi  de  France  etait 
parvenu  aux  oreilles  de  Godefroy  de 
Bouillon ,  tandis  qu'il   etitit  encore  k 

(*3  Yoyez  Raoal  de  Caen,  le$  GesUsde  Tai%- 
crfdr. 


PhllippopoUg.  CeUti-a  at  bHa 
la  reparation  de  cet  oQtnfi^ 
auasi  pr^mptueux  que  pcmb, 
du  haut  de  aa  grandeor  les 
prince  lorrain.  Godefroy  r'i 
adon  reaprit  de  oea  temps 
d*explicatioQa ,  il  comoienca  i 
ment  lea  bogtilites  centre  les 
Thrace, qui  avait  ai  bieo  re^  k$ 
ae  vit  tout  a  coup  expoa^e  a ' 
ques.    Cette    province    t^i 
grand  nombre  de  ses  habii 
vers  Constantinople,  et  y  jela 
Mors  Alexis,  qui  ne  se  aiiila 
taille  a  se  defendre  eoBtrc 
dix  mille  Teutons,  esaava  deH 
ilatta  son  prisonnier,  lui  proa 
berte,  implore  sa  noediatioapoar^ 
aon  redoutable  alliedu  Brabant-f 
^ues  de  Vermandoia  se  soit 
a  ces  beaux  semblants,  eda 
mais  qu*il  ait  consent! ,  lui, 
de  haut  lignage,  d'ua  esn 
leurs  plain  de  morgue  et  d'i 
a  rendre  bommage  d  ua  priaae] 
k  passer  par  toutea  lea 
tons  les  sermenta  qu* Alexis  tt 
voila  qui  est  impardonnaUe, 
lui  fut,  du  reste,  vivemeot 
par  ceux  a  qui  on  le  renvop^ 
au*il  se  fut  aoumia  a  cette  " 
cnevaleresque.  Huguea , 
vait  pas  meme  le  aentimeiH  di 
miliaiion;  car  il  insista  aipi 
Jiberateur  pour   lui   £aire 
exemple.  Mais  Godefroy  de 
refusa  tout  d'abord  avec  [ 
Alexis,   voyant  rent^tement 
veau  venu,  crut  pouvoir  le . 
la  famine ,  et  refusa  des  virm 
mee.  Mais  les  Teutons  avaieot 
ne  furent  pas  patients;  ce  qifoa 
donnait  pas  de  bon  gre,  ils  la 
de  force.  Voila  la  guerre  r  " 

8ur  ce%  entrefaites,  3o1 
d^barque  a  Durazzo.  II  appril 
duitecauteleuaeet  l«s  exiisences 
d' Alexis  ,  la  r^istance  de  Gi 
s'en  rejouit ,  se  promit  la 
la  Grece,  qui  lui  edt  beaucoup 
venu  que  celle  de  la  Palestine 
mtoe  jusqu'^  engager  le 
Basse-Lorraine  de  s'emparer  dei 
tandis  que  lui  ravagerait  I'^pire 
ci^oine.  Godefroy  eut  le  bon 
repousser  cette  etrange 


deej 


L 


SYIUE  MODEaNE. 


355 


•▼«it  fait  Ja  paix  aveo  rempereur,  qui  le 
oomblait  de  carasaes  et  qai  lui  avait  an- 
toyi  aon  propre  ila  eomnie  otag£.  Bo- 
h^oiond  n*eii  Gontinua  pas  moina  k 
traiter  m  aonaiiiia  las  baoitanta  de  la 
Hauia-Grdoe,  at  k  marcher  sur  Gonatan- 
tiDople  tn  pillant  toot  le  long  de  aa 
roate.  11  y  avak  plus  de  ben^ces  pour 
lui  et  les  aiens  k  eontinuer  la  guerre , 
et  euGore  une  foia  lea  Mormands  cher- 
ehaient  a?8nt  tout  a  gaignier,  aiosi 
qo*ile  le  diaaieot  nalvement. 

Les  Teutons,  plus  d^sint^resa^  sinon 
plus  fios ,  ae  laisserent  duper  de  plua  an 
plua  par  Taatucieux  Byzantin.  Alexis  ar- 
riTa  mtoe,  par  la  Toie  d^urn^  des  fa- 
reurs  et  des  preaents,  k  obtenir  au  moias 
Tapparence  de  rhommage  qu'il  desirait. 
On  oe  aatt  ici  ce  qu'il  y  a  de  plus  ridi- 
cule, ou  de  rentltement  du  prince  grec  a 
exiger  un  vain  e^emonial  de  respect , 
ou  de  la  stupidity  deees  tiers  seigneurs 
f<todaux,  qui  inirent  toua  par  acquieacer 
k  6e  qu'ila  avaient  d'abord  si  arrogam- 
ment  repouas^.  Laa  ebefs  eroises,  Gode- 
ftoy  en  t^,  entrerent  a  Constantinople, 
pen^tr^nt  dans  le  palais  imperial  a 
travers  tout  le  luxe  et  la  ponape  qu'on 
avait  pu  Staler,  rest^rent  quelque  temps 
i^blouis  i>ar  des  richesaes  quHls  n'^taient 
paa  habitues  k  Toir  reunies  dans  leqr 
rude  patrie ,  et  se  laisa^nt  prosterner 
par  des  courtiaans  aux  genoux  de  la 
majesty  immobile,  silencieuse  et  fourrie 
d'hermine  qui  r^nait  sur  les  Grecs  d^- 
g^n^r^s.  Dana  cette  cer^monie,  k  la- 
quelle  les  bona  Teutons  ne  comprenaient 
paa  malice,  Alexis  adopta  Godefroy  pour 
aon  file ,  rait  son  empire  sous  sa  protec- 
tion, et  en  retour  demanda  que  les 
croi»68  luirendissent  les  villes  asiatiques 
qui  lui  avaient  jadis  appartenu.  Jus- 
qu*ou  s'^tendait  cette  exigence,  c'eatee 
que  ni  Godefroy  ni  sea  compagnons  ne 
surent  alors,  et  ce  qui  devoit  ^e  un 
jour  si  difficile  k  r^ler.  En  touteas  Tern- 
pereur  byeantin  en  etait  arrive  a  ses 
one  ;  il  s'^tait  fait  rendre  hommage  par 
leaehevaliersde  rOccident,etleur  arm^ 
allait  servir  sea  inter^ts.  Au  mains  Tea- 
p^rait-il  ainsi  (*). 

Une  fois  le  premier  pa«  fait,  uiie  fois 
la  coutume  de  rhommac^e  ^tablie ,  tous 
les  nouveaux  arriTants  ^y  oonform^rent. 

(*)  Voyes  iinDeComD^iie,  AUmiade. 


QuelqueS'Uns  essayireot  bien  de  lege- 
rea  objections;  aoaia  oe  fuf  le  petit 
nombre.  Robert »  due  de  Normandie , 
Tautre  Robert,  comie  de  Flandfe, 
Etienne, comte de  Cbartres et  de  Blols, 
ex^ut^ent  sans  murmures  ce  a  quoi 
Godefroy  de  Bouillon  avait  consenti. 
Que  leur  importait  a  la  plupart  d'en- 
tre  eux ,  ignorants  bommea  de  guerre,  de 
se  soumettre  a  une  arJ;ion  qu'on  traitait 
d'etiquette  pour  en  dissinuiler  laport6e! 
Mais  quand  vint  le  tour  de  Bobemoud , 
il  fallut  8*y  prendre  di^feremment.  II 
ne  s'aglssait  pas  dele  tromper,  le  fin 
etraneunier  Normand:  on  ne  pouvait 
que  Tacbeter.  Tantdt  guerroyant,  tantdt 
ecoutant  les  envoys  d'Alexis,  il  avait 
traverse  la  Mac^oineen  I'exploitant,  et 
Ja  Thrace  en  ne  s'y  refusant  rien  de 
ce  qu'il  convoitait.  Arrive  aux  portes 
de  Constantinople ,  on  fut  oblige  de  par- 
lementer  avec  lui.  Lea  conditions  furent 
longues a itt%  accept^;  mais  enfin,  un 
beau  jour,  on  vit  Boh^mond  entrer 
danala  capitale.  Alexis  I'attendait  la. 
II  lui  fit  traverser  plusieurs  apparte- 
ments  somptueux,  et  enfin  une  salle 
toute  remplie  de  tr^rs.  «  Ah!  s'ecria 
i'avide  prinee  de  Tarente,  il  y  aurait  la 
de  quoi  oonquerir  bien  des  pays !  »  — 
«  Tout  celaest  a  vous,  lui  reponditron.  » 
Des  iors  ses  derniera  scrupulea  s'eva- 
noujreut  comine  par  enoliantement,  et 
il  se  montra ,  au  grand  ^ahissement 
de  tous ,  le  plus  respectueux  et  le  plus 
devoue  en  apparence  des  sujets  d' Alexis. 
L'un  et  I'autre  ^taieni  contents  :  I'empe- 
reur  de  Constantinople  jouissait  dans 
son  orgueil;  Boh^mond,  plus  positif, 
a'applaudissait  de  sa  bonue  aubaine. 

Raymond,  comte  de  Saint-Gilles  et 
de  Toulouse ,  avait  promis  par  ambas- 
aadeurs  de  prendre  la  croix  aes  la  tenue 
du  concile  de  Clermont.  II  fut  pourtant 
le  dernier  k  s'equiper.  Cest  qu'aussi 
e'^tait  le  plus  dge  peut-4tre  des  pelerins 
armea.  Veteran  de  guerres  religieuses , 
il  avait  rxmibattu  les  Maures  en  Espagne 
aux  cdt^s  du  Cid.  Par  aa  puissance  effec- 
tive, par  ses  richeasea,  qui  durerent 
audelide  toutesceliesqu'avaientappor- 
tees  les  plus  oputents  croises ,  par  son 
experience  des  combats  entre  Chretiens 
et  Mahometans,  il  eOt  dd  £tre  raison- 
nablement  le  chef  de  la  croisade ;  il  ne 
parvint  qii'd  en  £tre  le  doyen.  C'est 


3S6 


L'UNIVEIUS. 


qu'aussi  le  vieax  Raymon  avail  encore 
toutes  les  passions  et  toutes  les  fareurs 
de  la  ieunesse  :  plein  de  superbe  et  de 
durete,  il  etait  inflexible  dans  ses  vo- 
lont^s,  et  d*ane  violenoe  sans  pareilledes 
qu*on  lui  r^istait.  De  semblables  defauts 
1  avaient  fait  redouter  de  ses peuples  tout 
le  long  du  Rh6ne  et  de  la  Durance ;  ils 
furent  loin  de  lui  acqu^rir  la  confiance 
sinon  I'estime  des  croises. 

Heureusement  que  pour  temperer  la 
fouguede  Raymond,  il  vintavec  lui  Adhe- 
mardeMonteil,  Tev^queduPuy,  nomme 
solennellement  nar  Urbain  II  son  legal 
apostolique.  Adn^mar  n*6tait  pourtant 
pas  un  de  ces  pr^tres  tendres,  doux,  d^ 
voues,qui  ne  comprennent  surtout  dans 
Icur  mission  que  la  fraternity  vis-a-vis 
des  autres  et  Thumiiite  vis-a-vis  d'eux- 
m^mes.  II  appartenait  au  contraire,  corps 
et  dme,  k  ce  rude  cathoficisme  qui  mitune 
masse  d'armes  entre  les  saintes  mains 
de  Louis  IX,  une  6p^  invincible  k  celles 
des  chevaliers  de  Saint-Jean  de  Jeru- 
salem ,  et  qui ,  du  trone  papal,  b^nissait 
la  vilie  et  le  monde  avec  un  bras 
bard^  de  fer.  Adh^mar  portait  tout 
aussi  bien  la  robe  du  pontife  que  Tar- 
mure  du  chevalier.  S'it  pr^chait  la  dis- 
cipline, Tordreet  la  morale,  il  offirait  en 
m^me  temps  i*exemple  de  la  vaitlance. 
En  outre  1  egalite  de  son  caractere,  la 
franchise  de  sa  parole ,  Tautorite  de  sa 
mission,  lui  donnaientune  grande  valeur 
dans  les  conseils ,  et  une  grande  puis- 
sance dans  les  arbitrages.  II  n'etait  pas, 
du  reste,  le  seul  prelat  qui  se  filt  crois^; 
mais  il  ^tait  ^videmment  le  plus  intel- 
ligent, et  celui  dont  la  position  etait  la 
^Fus  elevee.  L'archev^que  de  Tolede, 
les  ^vdques  d*Apt,  de  Lodeve,  d'Orange, 
ne  pouvaient  6tre  consideres  que  comme 
des  chefs  de  troupes  que.  d'ailieurs, 
ils  avaient  eux-m^mes  levees  (*). 

Ce  fut  avec  sa  femme  £lvire,  son 
fils  et  toute  sa  maison ,  que  Raymond 
se  mit  en  route.  II  avait  reuni  pr^s  de 
cent  mille  hommes,  auxqueis  il  avait 
donne  rendez-vous  a  Lyon.  De  cette 
ville  ils  s'aehemindrent  par  les  Aloes, 
la  Lombardie  et  le  Frioul.  Jusqu  aux 
fronti^res  de  la  Dalmatie  les  chemins 
leur  furent  ouverts,  les  approvision- 
nements  faciies.  Mais   une  fois  dans 

(♦)Voyez  Raymond  d'Aglles,  HUtoire  des 
Francs  qui  prir&nt  JertuaUm. 


le 


cette  contree,  sanvage  alon,  ce  tmn 
des  deserts  et  des  eanemisqo^ils  i»«^j 
trerent.  Diffi^nts  des  leurs  y  c 
de  veritables  dangers.  Les 


€  da  m4 
ttaqiie,M 


les  for^ts  s*y  pr^sentaient  i^ 
bdches.  Adhemar  de  Monteil  I 
s'^tant  un  jour  toirt^  da  ; 
troupe,  fut  surpris,  att 
de  sa  mule  et  grievement  i 
les  indigenes.  Enfin  rarmte  ( 
de  Toulouse  arriva  a  Scodn{k| 
modeme )  et  put  traiter  avinl] 
avec  le  roi  du  pays.  "  " 
Alexis  n'etait  pas  aussi  sino^  ^ 
chef  quasi  barbare  des 
trompa  le  vieux  Raymond,  Pal 

Sue  seul  a  Ck>n8tantioople,  i 
onna  ensuite  Tarm^  prov 
mtoe.  Malffr^  les  instances '< 
le  comte  de  Toulouse  s'^tait  i 
d'abord  k  Tbommage  qu*a 
rendu  a  I'empereur  tons 
vaient  prMde  dans  la  eapit] 
tine.    Lorsqu*il  appiit   ks 
nouvelles  qu'avait  rencontitei 
ro^e  sur  le  territoire  gree,i 
fut  bien  plus  explicite  eoen 
ment  se  fait-il  n^annooins  qp'fll 
c^er  comme  les  autres?  Ses  < 
porains  se  taisent  sur  oe 
ses  pn^gyristes  en  aoeusant  1 
d* Alexis ,  les  chroniqueuis  i 
pr^tendentqu*il  fut,  iuiausavl 
corrompu.  En  un   motj 
gueilleux  princes   et   bail 
fl^chirent  run  apres  raobcfi 
iierent  devant  la  puissance  [ 
norainale  et  traditionneUedsi 
d'aiK)rd  les  avait  appeles  a  soifl 
et  aui  plus  tard  cherebait  a  ksi 
en  les  achetant  comme  des  1 
mercenaires.  Le  seul  Taneredt^ 
sister  aux  prieres  fiiilaeieosttj 
offres  deshonorantes  d'Alexis} 
fut-il  oblige  de  se  d^iserj 
joindre  au  camp  de  CbaU 
mitres   troupes  de  croises 
Tempereur  avait  fait  passer  lei 
sur  ses  propres  vaisseaux, 
retenait   les    principaux 
les  delioes  ^nervantes  de  sax 
Maintenant  suivons  la  foule  etl 
Tancrede  en  Asie  Mineure  (*)• 

{*)  Voyez RaoQl  de  Cmb,  ia  Gakii 


SYRIE  MODERIME. 


257 


CB0I8ES      FBODAUX      EN       ASIB 
MINBURB. 

)  premier  spectacle  qui  s'ofTrit 
yeux  des  crois^  dans  les  plaines 
I  Bithynie  fut  horrible.  On  ^tait 
rintemps  de  1097 :  la  nature  orien- 
commen^it  h  rev^tir  son  nouveau 
fieau  vert  tout  parseme  de  fleurs , 
ri  teit  pur  et  ti^e,  les  parfums 
yjent  les  airs ,  renchantement  et 
Iiipi6  semblaient  devoir  s*emparer 
Itte.  Maissur  ces  peiouses  naissantea 
ycevaient  de  place  en  place  des 
iients  blanchis;  mais  ceite  brise 

•  apportait  avecelle,  et  par  ins- 
{^Tflcre  odeur  des  bites  carnassi^res 
iBhevaient ,  dans  le  creux  des  val- 
KHis  le  taillis  des  bois,  leur  repas  de 
Ires;  inais  a  travers  les  jasmins 
i  roses  se  rencontraient  des  eten- 
I  ensangiantes ,  des  debris  d'armu- 
lisfers  de  lances  rouilles;  mais  cette 
he  ^ale    et  douce  eciairait  un 

•  de  carnage.  Les  chevaliers  les 
lirs  furent  emus.  Puis,  Ton  vit 
Leo  se  tratnant  avee  peine ,  des 
Eos  hAves,e8tropi^,  couverts  de 
JMix  souili^s  :  c'etaient  les  deplo- 
I  restesde  la  troupe  du  malheureux 
\ier  sans  Jvoir.  Parmi  ces  mi- 
les s'avan^  Pierre  TErmite  lui- 
Ldeeourage,  arfaibli,  et  qui  avait 
[tout  son  prestige  dans  Tesprit  des 
nodules.  11  se  joignit  a  Farm^; 
iftbormais  son  regne  Itait  passi, 
Mivait  guere  plus  que  Texemple 
liipoir  a  donner. 

Igte  le  deuil  passager  qu'eprou- 
l  les  croises  a  la  vue  d*un  tel 
Ire,  au  reeit  de  tant  de  mal- 
p  Ms  n*en  poursuivirent  pas  moins 
laarche.  Cetail,  du  reste,  une 
i^re  armee  que  la  leur  :  des 
leB  de  tons  pays ,  de  toutes  races, 
ttes  langues;  des  £cossais  avec 
recs ,  ues  Prisons  avec  des  Ar- 
as,  des  Iberes  avec  des  Daces, 
luitains  avec  des  Apuliens ,  des 
vis  avec  des  Bretons ,  des  Gas- 
ivec  des  Anglais,  des  Normands 
ra  Teutons ,  des  Champenois  avec 
orrains,  des  Bourguignons  avec 
kvarois  et  des  Lombards  :  en  un 
ix  neuf  nations  differentes,  scion 
ler  de  Chartres.   Puis,   comme 

17*  Livraison.  (Sybib  modernb, 


detail, des  femraeset  des  enfants,  des 
raoines^et  des  valets ,  des  Ivlques  en 
mitre  et  des  barons  am  casques  d*a^ 
cier,  des  cavaliers  aux  cottes  de  raatlles 
et  des  pistons  presque  nus  ,  des  prin- 
ces au  manteau  d*or  et  des  goujats  eu 
guenilles,  de  nombreux  chevaliers  avec 
leur  suite ,  ecuvers  avec  des  chevaux 
de  rechange,  tauconniers  avec  leurs 
faucons,  veneurs  avec  leurs  meutes, 
tout  ce  monde  plle-mAe ,  roulantcomme 
un  fleuve  diborde.  lis  Itaient  cent  miiie 
cavaliers  cuirasses ,  et  six  cent  vnilfe 
gens  de  pied  des  deux  sexes,  dit  la 
chronique.  Beaucoup  d^exp^itions  ont- 
elles  reuni  une  pareille  toule ,  si  rien 
n'est  exaglrl  dans  ce  chifl're? 

Toute  terrible  (jue  fdt  cette  irruption, 
elle  n*inquieta ,  a  ce  qu*il  paratt ,  que 
les  Turcs  de  Roum.  lious  avons  expli- 
qu^  pr^^emment  comment  MIlik* 
Scfaah  avait  laisse  la  disioorde  pour 
heritage  a  ses  successeurs.  Preoccupy 
seuieuientde  leurs  querel  les  intlrieures, 
ils  s'inquieterent  a  peine  de  la  venue  de 
tant  d'ennemis  nouveaux;  et,  loin  de 
s*allier  pour  opposer  masse  contre  masse, 
ils  n'en  continu^rent  pas  moins  leurs 
guerres  particuli^resentrerEuphrate  et 
le  Tigre,  abandonnant  Daoud',  sur- 
nomiue  rJEpie  de  Han  (Kilidj-Arslan), 
k  son  malheureux  sort.  Celui-ci ,  pour* 
tant,  fit  des  efforU  desesp^res.  11  for- 
tifia  Nio^,  sa  capitale,  r^para  ses 
soixante-dix  tours  et  sa  double  enceiute 
de  murailles,  remplit  d'eauses  larges 
fosses,  la  foumit  de  toutes  provisions 
de  bouche  et  deeuerre,  ct  lui  laissa 
pour  garnison  Tllite  de  ses  soldats. 
Puis,  conliant  dans  sa  fortune,  plain 
de  resolution  et  d*energie ,  il  alia  atten* 
dre  les  croises  avec  cent  mi  lie  hommes 
sur  les  montagnes  voisines  de  Nicee,  et 
qui  en  defendaient  Fapproche.  Le  plan  du 
sultan  ^tait  bon;  il  nous  reste  h  voir  par 
quelle  fatalite  il  ne  lui  valut  pas  la  vie- 
toire  (*). 

SIEOB  DE  I9ICBB. 

L'armee  chretienne  avait  mis  quel- 
que  ordre  dans  sa  primitive  confusion 
lorsqu'elle  arriva  sous  les  murs  de  la 
capitale  de  la  Bithynie.  Elle  r^solut  tout 
d*abord  d*llever  un  vaste  camp  dans  une 

(•^  Vovez  Kemal-Eddln,  Hittoin  tPAlep. 
)  t7 


sss 


LUmYERS. 


grande  plaine,  situde  entr«  It  lae  Asca- 
nius,qui  baignait  la  villeiroocident, 
et  les  coUines  qui  rentouraient  aox  troii 
autm  points cardinaux.  Mais  les  pierres 
et  ie  bois  manquant  pour  les  retranche- 
meots,  les  crois^  eniplov^nt  les  osse- 
oients  de  leurs  frerrs,  egorg^  Tannte 
precMente  non  loin  du  lieu  ou  eux-m^ 
mes  s*etablissaient.  Qiaque  nation  oo- 
cupa  un  quartier  s^pare,  cliaque  chef 
de  corps  une  teote  somptueuse;  et,  pour 
maintenir  une  division  qu*on  croyait 
necessaire  dans  les  combats ,  on  convint 
de  cris  divers  de  ralliement,  de  m^me 
qu*on  varia  les  bannieres  des  princes 
et  des  chevaliers.  Puis  on  s*eihorta  mu- 
tuellement  a  la  lutte ,  les  pritres  b^oi- 
rent  les  armes  et  offrirent  Ie  sacrifice 
divin,  les  chefs  donn^rent  Texemple  de 
Tardeur  guerriere,  et  Ie  siege  commen^. 
Les  premiers  assauts  furent  repousses. 
Kilidj-Arslan  ne  boiigeait  pas  de  sa  mon- 
tagne,  et  se  contentait  d*envoyer  des 
messages  a  la  garnison  de  Nic^  pour 
louer  son  courage ,  et  l*exciter  a  la  de- 
fense* Mais  quaiid  il  crut  que  les  pre« 
miers  efforts  Inutiles  des  crois^  contra 
la  ville  pouvaient  les  avoir  auelque  peu 
d^couraf*6s ,  il  s'elan^^a  sur  feur  camo  ii 
la  tete  de  dix  miile  cavaliers  intr^pides, 
Leur  choc  fut  terrible  :  couverls  d*ar- 
mures  en  fer,  monies  sur  d*agiles  die- 
vaux ,  ils  jeterent  un  instant  Ie  trouble 
parini  les  Chretiens.  Ceux-ci  cependant 
etaient  de  m^me  bien  amies,  et  leurs 
lourds  die  vaux  soutinrent  la  lutte  avec 
fermet^.  Alors  toute  la  cavalerie  des 
deux  parts  s^engagea ,  soixante  mille  ca- 
valiers musulinansd'un  c6t^,  cent  miile 
chevaliers  de  Tautre.  Les  Turcs,  plus 
faibles  par  Ie  nombre,  eurent  beau  es- 
sayer  de  toutes  leurs  plus  habiles  ma- 
noeuvres :  feindre  la  retraite,  se  retirer 
en  masse,  revenir  tout  a  coup,  faire 
preceder  leur  uouvelle  attaque  dune 
foule  de  traits  et  d*une  gr^le  de  fledies 
lanc^es  de  leurs  longs  arcs  de  come,  ils 
ne  |)urent  entamer  les  ^pnis  batailions 
Chretiens.  Tout  Ie  long  du  jour,  sans 
se  lasser,les  Turcs  lutterent  avec  ardeur. 
Mais  enfiii,  Ie  soir  venu,  ils  retournerent 
dans  leurs  monlagnes  en  laissant  quatre 
mille  des  leurs  sur  Ie  champ  de  bataille. 
Les  crois^,  ivres  de  leur  succes,  eurent 
la  barbaric  de  couper  la  t^te  a  tous  les 
blessds  mabometans,etderetouroer  dans 


leur  camp  aree  ces  sanvages  t 
dus  h  la  sdle  de  leurs  chevaox.' 
Ie  lendemaio ,  ils  rafOn^rait  i 
leur  cruaut6  de  la  veille,  el  1 
guise  de  proiectilea,  un  roiltel 
sanglantes  dans  Fint^lenr  di J 
qu'ils  assi^eaienL  La  guerre  r 
e  est-inlire  furieuse  et  ac*^ 
en  train ;  et  ea  fiurent  les 
donnerent  Fexeniple  de  la 
envoyerent  ensnite  la  reste  des| 
preuves  de  kur  victoire  li  Ah 
nene ,  premier  hommage  I  * 
Tempereur  auqud  ils  Ie  fai 
qui  out  inquieter  sa'lMieti,  i 
sonorgueil(*), 

Une  fois  la  cavalene  ennemiii 
s^e,  les  Chretiens,  qui. dans  hi 
n*avaientperdu  que  deux  mille  I 
auraient  dd  aai  ver  Ie  si^ge,  et  r^ 
tesleursforoesoontrelesmuraill 
fut  pas  ainsi.  Qiaque  nation  %'e 
Fattaque,  avalt  cnoisi  un  point  | 
porter  a  false  et  ycombattres 
caprice.  Ce  n'^tait  pas  une  " 
gulidre  qui  investissait  une  [ 
taient  des  troupes  diverses  qui  i 
proposees,  chacune,  unbittr 
et  qui  s'lnquietaient  fort  peu  4i%\ 
fiiisaient  leurs  allies.  Lorsqus  ^' 
une  bande  partait  a  Tassautf 
loin  de  Tappuyer  par  des  real 
I'aider  par  des  diversions,  d*« 
des  la  suivaient  souvent,  ea  ^ 
pour  juger  des  coups.  Puis.aU 
prolon^^eait ,  les  pelerins,] 
spectacle,  sortaient  du  campi 
s  installaient  a  Tabri  des  projr 
fa^on  a  ne  rien  perdre  du 
a^n^ral  et  des  details  de  1> 
femmes  venaient  avec  leurs  < 

Er^tres  plle-m^e  avec  les  i 
>uait  les  braves ,  on  plaignait  I 
mes,  les  devots  ^levaient  les  ■ 
del,  les  meilleurs  soignaient  lesj 

Il  se  passa  ainsi  pfusieurs  i 
captivereut  Tattention  de  la  i 
Un  jour,  c'^taieut  de  hardls) 
qui  6diangeaient  des  milliersi' 
dies  avec  les  assises.  Une  aiiti 
d'iatrepides  soldats  couvraieai  | 
t^tes  da  leurs  boudiers,  et^b 
dales  en  osier  par-dessus ,  et  { 

{*)  Voyez  Btathted  cTAdene,  Haieirt  i 
Hie.  el  Albert  d'Aii  MiM»9krr49t^ 
UeJirmaaUm* 


SmUL  MODERIfE. 


M9 


5 


«0tte  fa^OB  des  pi^rres  aigues  at  des  bran- 
dons  brdlants  qu'on  lan^it  sur  eux  de 
Ja  ville ,  ils  arrivaient  jusqu'au  pied  daa 
remparts ,  les  battaient  avee  des  b^Uers, 
ou  cherchaient  k  les  demolir  avec  la 
pioche.  Uoe  autre  fois  encore,  d*habiles 
charpentiers  construisaient  des  tours 
aussi  bautes  que  eelles  de  la  place,  les 
roul^ient  jusqu'aux  murailless  et  de  Ik 
■'engageaient  entre  les  chevaliers  et  les 
Musulmans  des  combats  presque  corps 
it  corps,  jusqu*li  ceque  cesderniers,  aveo 
de  rhuile  bouillante  e^  de  la  poix  enflaoH 
m^  eussentenfin  ineendie  les  macbines 

3ui  les  mena^aient.  C^taient,  en  outre, 
es  Episodes  particuliers  :  un  g^ant  en- 
nemt  qui  provoquait  en  combat  sineu- 
lier  les  Chretiens  les  plus  braves;  Peffroi 
|ue  cet  homme,  aussi  courageux  que 
ort,  jetait  dans  les  rangs  du  gros  de 
I'armee ;  son  m^pris  pourses  adversaires 

3ue  ce  Goliath  musulman  exprimait  en 
^couvrant  sa  poitrine  devant  les  traits 
impuissants  qu'on  dirigeait  centre  lui; 
et  enfin  Godefroy  de  Bouillon,  impa* 
tient^deeette  fanfaronnade,  lui  d&ochant 
lui-m^me  d'une  main  vigoureuse  una 
fleche  mortelle.  Le  due  lorrain  fut  ap* 
plaudi  pour  son  adresse,  jusqu^ace  qu*un 
nouvel  acteur  Vedt  fait  oublier.  Cet 
acteur,dont  le  rdlemalheureusement  ne 
fut  que  tragique,  etait  un  chevalier  nor^ 
mand ,  qui ,  un  jour  de  lassitude  uoiver- 
selle,  de  decouragement  general,  s'avisa, 
apres  avoir  gourmand^  ses  compagnons, 
de  marcher  tout  seul  contre  la  vilte.  Son 
audace  n*entrntna  personne.  On  se  borna 
a  le  reffarder  franchir  les  fosses,  com* 
battre  quelque  temps  avec  un  courage 
inutile,  et  tomberenfln  percede  coups. 
Ccpeiidant  les  Alusulmans ,  ayant  saisi 
son  cadavre,  T^talerent  quelque  temps 
sur  les  remparts;  puis,  sous  forme  de 
reprisal  lies,  le  Jancerent  ensuite  dans 
le  camp  de  ses  frerps  qui  Tavaient  si  ld« 
chement  nbandonn^  dans  lep^ril,  etqui 
se  contenterent  de  prier  pour  son  dme 
et  d*enterrer  son  corps  avec  pom pe  (*). 
>  Conduit  de  cette  sorte,  ce  siege  res> 
sembiait  ptut6t  a  un  vain  tournoi  qu*^ 
une  guerre s^rieuse.  II  durait  dpja  depuis 
sept  semaines ,  et  il  aurait  pu  se  prolon- 
ger  ind^fluiment.  Les  assises,  en  effet, 

(*)  Voy«E  GuiUMugM  d«  Tyr,  I7»t  de  oe  qui 


gr^ee  aux  attaguas  cpiotidieoiies  siur  de^ 


les  bribes  qu*on  faisait  a  lews  fortifi- 
cations; el  lis  avaient  eo  outre,  par  le  lac 
Ascanius,  des  oommunioations  constan- 
tes  avec  leur  sultan ,  qui  tenait  toujours 
la  campagna  et  qui  ne  laissait  manquer 
de  rien  sa  riche  capitale,  k  laquelle, 
d*ailleurs  il  avait  eonfie  sa  femroe  et  ses 
enfants.  Les  croises,dans  leur  iucapaciti 
native,  auraient  pu  perdre  ainsi  toute  une 
annee,  si  les  quelques  auxiliaires  grecs 

gu^Alexis  leur  avait  envoys,  liommes 
abilesetindustrieux,  sinon  redoutables 
aoldats,  ne  leur  avaient  indiqu^  ua 
excellent  moven  de  d6sesp^rer  leurs  en- 
iiemis.  II  s  agissait  de  porter  la  lutte 
jusque  sur  le  lac  Ascanius ,  dMsoier  ainsi 
la  place,  et  de  la  prendre  ensuite  soit 
par  la  famine,  soit  par  un  assaut  gen^ 
ral.  Pour  executer  ce  plan,  qui  fut  adopts 
par  les  plus  sailsfaits  d'eux-m^mes,  on 
iroagina  de  transporter  des  barques 
grecques  du  bord  de  la  mer  au  plus  pro- 
ebe  rivage  du  lac. 

L*entreprise  ^tait  dlfOcile :  on  y  r^us- 
sit  pourtant.  Uoe  eentaine  de  petits 
navires  furent  plac^  sur  des  planchers, 
auxquels  ^talent  adapt^s  des  roues,  et 
k  force  de  bras  et  de  chevaux ,  dont 
les  crois^s  ne  manquaieut  pas  encore, 
on  parviiit  a  transporter  ces  navires  sur 
le  lac.  En  voyant  voguer  la  flottille  chr^* 
tienne,  toute  rempliedeguerriers,  toute 
bri Haute  des  enseignes  et  des  bande- 
roles de  diff^rents  corps,  les  assises 
furent  frappes  de  decouragement.  D^ 
sormais  ils  ne  pouvaient  plus  ni  se  ra- 
Titailler ,  ni  r^parer  leurs  pertes  par  des 
renforts.  La  fatalit6,  toujours  si  redou- 
J6e  en  Orient,  sembiait  s'€tre  tourn6e 
contre  les  sectateurs  de  Mahomet.  Jus- 

aue-ia  les  tours  qu*on  avait  construites 
ans  le  camp  chretien ,  avaient  ^t^  in- 
ceiidiees  plus  ou  moins  vite  par  les  as- 
sieges ;  un  Lombard  Gnit  par  en  bAtir 
une  qui  r^sista  au  feu,  aux  projectiles  en 

Bierre,  qui  tint  bou  toute  une  journ^e. 
aymond  de  Toulouse  Tacheta ;  puis  il 
monta  sur  la  plate  forme  pour  combat- 
tre  les  Musulmans,  tandis  qu*au-dessous 
de  lui  et  de  ses  soldats,  des  ouvriers  mi- 
naient  les  fondements  de  la  tour  enne- 
roie.  La  besogne  des  sapeurs  fut  si  bien 
faiteque,  la  nuit  venue,  la  partie  des  for- 
tifications attaqu^  8*  tooulaaveo  fracas. 

17, 


Md 


L'UIWVERS. 


Cette  br^he,  plos  considerable  >  ne  pot 

K8  6lre  r^paree  aussi  promptement  que 
I  prec^dentes.  Dejii  les  crois^  8*ap- 
priStaient  h  Tassaot,  d^ja  lafemme  de 
Kilidj-Arslan,  effrayee,  s'^chappait  de  la 
ville,  et  tombait  avec  ses  deux  jeunea 
eofanta  au  pouroir  des  Chr^ens ,  lors* 
que  le  soleil  radieux  de  la  victoire  s^^tant 
tev6,  les  crois^  virent  ayec  autant  de 
surprise  que  d'indignation  le  drapeaa 
grec  flotter  sur  les  monumeots  de  la 
ville. 

Le  lieutenant  d* Alexis  n'ayait  pas 
perdu  de  temps  :  d^  quMl  avail  vu 
r9ic^  en  p^il,  il  avait,  d'apr^s  les  or* 
dres  de  son  mattre,  penetr6  dans  la 
viiie,  offert  aux  assieges  de  se  rendre  a 
I'empereur  de  Constantinople  pour  8*6- 
pargner  le  sac  que  les  Francs  se  propo* 
saient ,  trace  un  portrait  terrible  de  la 
cruaute  de  ces  barbares ,  comme  il  les 
appelait ,  obtenu  une  capitulation  avan- 
tageuse ,  fait  entrer  de  nuit  les  auxiliai- 
res  byzantins,  et  pris  possession  de  la 
place.  Le  matin  du  jour  ou  les  Chretiens 
s*attendaient  au  triomphe  et  au  pillage , 
on  leur  signifia,  du  haut  des  remparts, 
que  Nic^e  appartenait  desormais  a  leur 
seigneur  suzerain;  quMIs  eussent  h  la 
respecter ,  et  quails  debarrassassent  ses 
abords  le  plus  t6t  possible.  Les  crois^s 
etaient  pris  au  pi^ge.  lis  murmur^rent, 
lis  menacerent ;  mais  Alexis  distribua 
quelques  largesses  aux  principaux  chefs, 
quelques  aum6nes  aux  chevaliers  les  plus 
pauvres ,  et  la  masse  en  fut  pour  ses 
esp^rances  de  butin :  on  ne  lui  permit  que 
d^entrer  par  groupes  de  dix  individus 
dans  la  ville  qu*elle  avait  conquise  (*). 

BAT^ILLB   DE  DORYLBE. 

Quelque  mefiance  et  quelgue  haine 
que  durent  d^ormais  ressenlir  les  croi- 
si6s  h  Tendroit  des  Grecs ,  ils  n*en  furent 
pas  nioins  oblige  de  les  prendre  pour 
guides.  lis  ne  connaissaient  rien  du  pays 
qu*ils  avaient  h  traverser;  ils  se  dou- 
taient  k  peine  de  la  longue  et  p^nible 
traite  qu*ils  avaient  k  faire  pour  parve- 
nir  m^me  en  Syrie.  Plus  de  deux  cents 
lieues  dans  une  contr^e  ennemie,  rava- 

§6e  par  les  guerres  pr^c^dentes ,  aban- 
onn^  par  ses  habitants  le  long  du  che- 
min   pr^ume  de  Tarm^   chr^tienne! 

• 

(*)  Voy«  Aoae  Gooin«ne,  Alexiade. 


Plus  de  deux  cents  lieiies  atni«s| 
fordts ,  des  montagnes ,  anedvi 
effondrte ,  detniites  expres  par  t 
militaire !  Plos  de  deux  cenis  Gi 
une  foule  diargee  de  bagagese 
8^  de  femmes,  d*enfant8  et  de  v 
Puis  les  Turcs  allaient  rerenir.] 
tan  ne  s'toit  pas  deooarage.  Ho 
bien    poursoivre   les  enval^^ 
ses  provinces,  les  escorter  a  < 
ches  et  de  cimeterres ,  les  an 
que  defile ,  les  aoeabler  da  1 
collines.  Gefut  done  avecoad 
tement  cruel  et  une  secrete  1 
les  p^lerins  s'acfaeminerent  k  ha 
chevaliers  (* }. 

Dte  leur  depart  de  Nkee,  lai 
comnurent  une  faute  qui  maaqM ' 
dtre  funeste  :  ils  se  divisereatc 
colonnes,  esp^rant  ainsi  ssj 
plus  facilement  des  vivres.  " 
Arslauy  qui  apprit  par  ses  <  , 
disposition  maladroite  de  Tai 
tienne,  sut  bientdt  en  profifovj 
les  deux  divisions  s'engag^ 
et  quand  il  crut  qu'dles 
eioign^s  Tune  de  rautre,3l 
la  plus  faible  avec  toute  i 
Gelte  division  etait  fortnei 
mands  de  France  et  dltalie,  eti 
d6e  par  le  due  Robot, 
Tancr^e.  A  rapprocbe  desi 
mondise  hdta  de  former  una 
que  comme,  de  rentoorerd 
chariots,  degros  baga^^lt4 
k  un  marais  et  k  une  nviott 
sius  devaient  d^fendre  on  I 
ments;  les  femmes,  les  enfioisi 
mes  s'y  renfermer,  tandis  i 
valiers,  en  trois  corps,  deva' 
devant  des  ennemis ,  et  disj 
sage  de  la  riviere.  Mais  i 
s'engag^rent  que  peu  a  pea. 
d'entre  eux  s'elanfa  d'abonl  4 
goes,  poussant  de  grands  en^i 
pour  lancer  leurs  traits,  et  r 
ensuite  leur  galop  forieux.  ~ 
n'avaient  pas  traverse  Inootr 
des  chevaliers ;  mais  dies  1 

grand  nombre  de  leurs  ct 
ans  ce  temps-la ,  n*6taient  m 
bard^  de  fer.  Un  inevitable  r^ 
s'ensuivit  dans  les  rangs  < 


(*)  Voyex  Robert  le  Kfoine ,  ir«««MR  ^ 

ruwlem. 


SYKIE  MODERNE. 


261 


Turcs  en  proflterent,  harccldrent  les  ca- 
valiers demontes,  et  fireut  forcemeut 
traverser  la  riviere  a  ceux  qui  s*etaient 
promis  d*eii  empdcher  le  passage.  Puis, 
par  mi  lie  evolutions,  ils  ratiguerent  les 
lourds  chevaux  d'Occtdent,jusqu'a  ce 
qu'une  nouvelle  et  fralcbe  ))ande  de  leur 
'  reserve  viot  remplacer  celle  dont  les 
forces  commencaient  a  s*6puiser  et  i*agi- 
lite  a  diminuer  (*). 

Plusieurs  heures  durant,  la  m^me  ma- 
noeuvre fut  employee  avec  succes  par 
les  Turcs.  Deja  les  chevaliers  se  las* 
saient ,  Tancrede  avait  bris^  sa  lance , 
perdu  son  pennon;  son  fr^re  Guil- 
iaume  avait  et^  tue;  Boh^mond  sentait 
son  courage  cbanceler,  lori>qiie  le  sultan, 
voyant  le  trouble  de  la  cavalerie  chre- 
tienne ,  porta  tout  k  coup  sa  principale 
attaque  sur  le  camp  presque  abandonne. 
II  detruisit  facilement  les  fortiGcations 
improvisees,  culbuta  non  moins  faci- 
lement  les  archers ,  les  frondeurs  et 
les  arbaletrters ,  dont  les  armes  deve- 
naient  inutiles  dans  une  m^lee ;  puis  11 
commen^a  a  s*emparer  des  femmes  chr^- 
tiennes,  qui,  a  Papprocbe  des  Musul- 
nians,  loin  de  se  lamenter  sans  raison , 
loin  de  s'arracher  les  cheveux  de  deses- 
poir,  s*^ient  parees  de  leurs  plus  beaux 
atours,  afln  sans  doute  de  frapper  agrea- 
blement  les  yeux  de  leurs  vamqueurs, 
et  d'obtenir  ainsi  un  plus  doux  escla- 
vage.  La  d^route  des  croises  6tait  im- 
minente,  Tenlevement  des  femmes  et 
le  massacre  des  hommes  allaient  avoir 
lieu ,  lorsqu'au  sommet  de  ces  m^mes 
montagnes,  qui  avaient  vomi  toute  la 
matinee  tant  de  batailloos  ennemis,  on 
vit  tout  a  coup  Hotter  les  eoseignes  de 
Godefroy  de  Bouillon  et  de  Raymond 
de  Saint-Gilles ,  on  vit  luire  au  soleil 
les  epees  nues  des  Lorrains  et  des  Pro- 
ven^aux.  L'espoir  revint  au  coeur  des 
,  chevaliers  les  plus  decourag^,  et  le 
combat  cbangea  imm^iatement  deface. 
€e  fut  au  tour  de  Kilidj-Arslan ,  dont 
Tarmee  devenait  moins  nombreuse  que 
celle  de  ses  adversaires ,  k  donner  le 
signal  de  la  retraite.  Malheureusement 
cette  retraite  fut  lente  :  les  chevaux 
arabes  euient  harasses.  Godefroy  de 
Bouillon  put  les  atteindre.  II  entoura 


> 


(N  Voyes  Eftoal  deCaeo,  let  Gesk»  d§  ron- 
crtde^  et  Baodry,  Huloire  de  Jirutalemn 


les  Turcs  d*une  ceinture  de  fer,  et  cette 
ceinture ,  en  se  retrecissaut  de  plus  en 
plus ,  Unit  par  ^touffer  tous  ceux  au*elle 
euserrait.  Les  Turcs  en  furent  reaults  a 
abandonner  leurs  montures,  as^^apper 
a  travers  des  taillis  et  des  rochers  ou 
vingt  mille  des  leurs  trouverent  la  mort. 
Quelle  que  fdt  la  victoire  des  Chre- 
tiens ,  ils  ne  la  devaient  ()u*a  un  hasard 
favorable,  a  la  precipitation  des  Turcs  a 
les  attaquer.  Si  ces  derniers  avaient  at- 
tendu  un  jour  de  plus,  la  colonne  de 
Godefroy  aurait  ^te  assez  ^loignee  du 
champ  de  bataille  pour  n'y  arriver 
qu'apres  la  deroute  complete  des  Nor- . 
mands.  Quoique  les  crois^  n'attribuas- 
sent  qu'a  Dieu  leur  nouveau  succes , 

auoiquMls  aient  cru  que  la  delivrance 
e  leur  cam|)  apparttnt  surtout  a  saint 
Georges  et  a  saint  Demetrius,  qu'on 
pretendait  avoir  vus  combattant  au  mi- 
lieu des  Chretiens ,  ils  ne  commirent 
pourtaot  plus  a  Tavenir  la  faute  de  se 
s^parer.  Toute  vive  ^u*^tait  leur  foi, 
toute  dominante  qu'etait  leur  super- 
stition, il  restait  encore  dans  leur 
esprit  quelque  place  pour  y  loger  Texpe- 
rience. 

Les  premiers  rdsultats  de  la  bataille 
de  Dorylee  furent,  du  reste,  tr^s-eodtes 
par  Tarm^.  A  quelque  distance  au  lieu 
du  combat,  elle  avait  rencontr^  les 
tentes  abandonn^s  des  Turcs.  Elle  les 
pilla  completement.  (Juant  a  la  masse 
des  pelerins,  ils  allaient  sur  le  champ 
de  bataille  depouillant  les  cadavres  des 
Musulmans ,  s*armant  de  leurs  cinieter- 
res,  s*affublant  de  la  robe  tralnante 
des  uns ,  se  couvrant  de  Tarmure  des 
auires ,  preoant  a  pleines  mains  le  bieu 
que  le  ciel  leur  envoyait,  ou  plutdt  que 
le  courage  des  chevaliers  leur  avait 
valu.  Puis,  apres  avoir  rendu  graces 
a  Diea  et  avoir  enterre  leurs  quatre 
mille  morts,  ils  reprirent  leur  route, 
bien  repus ,  satisfaits  de  leur  butin ,  et 
quelque  peu  tranquillis6s  sur  Tavenir. 

SOUFFEANCBS  DBS   CBOISBS  BR    ASIB 
MIUBDEB. 

.  Les  illusions  des  croisds  ne  durerent 
pas  longtemps.  Kilidj-Arslan,  ju^eant 
quMl  ne  pouvait  detruire  les  Chretiens 
en  bataille  rang^,  employa  d^s  lors  la 
terrible  tactique  dont  nous  avons  parl^, 
c*est-a-dire  ravagea  tout  ie  pays^  sur  la 


Ml 


LDNIVERS. 


route  de  Jerusalem.  On  ^tditen  jain  1097 : 
les  moissons  6taient  copieuses  et  dories, 
il  les  incendia ;  les  arbres  fruitiers  com- 
meD^ient  h  motitrer  des  fruits ,  il  les 
abattit.  Puis,  comme  les  tilles ,  bour^ 
et  villages  de  la  Phrygie  et  de  h  Pisidie 
avalent  pour  princiDaux  habitants  des 
Grecs  et  des  Latins,  u  piila  leurs  denieu- 
res,  detruisit  leurs  ^lises,  et  emmena 
la  plupart  de  leurs  femnies  et  de  leurs 
entants.  Ainsi,  pour  premier  r^sultat 
la  croisade  faisait  te  maiheur  des 
Qir^tiens  d^Asie  Mineure.  La  cruaut6 
avec  laquelle  les  Francs  avaient  entam^ 
la  guerre  mit  la  rage  dans  le  cocur  de 
leurs  ennemis.  On  rdagit  contre  les 
croises  avec  autant  de  fureur  qu'iis  en 
avaient  eux-mSmes  montre  devant  Nicee : 
ils  avaient  sem^  la  baine ,  ils  recolt^- 
rent  la  vengeance. 

II  sembie  que,  loin  de  prot6ger 
Pexp^ition  sainte,  le  del  Tait  aban- 
donuee  a  elle-m^me ,  h  son  inexperience 
et  a  ses  fautes.  En  se  divisant  en  deux 
corps,  les  croises  manquerent  de  se 
faire  vaincre  separ6mcnt.  En  se  reunis- 
sant  de  nouveau  en  un  seul ,  ils  cointni- 
rent  pr^isement  k'imprudence  qu*i|s 
avaient  voulu  d*abord  eviter  :  I'agglo- 
merationd*un  tel  nombre  dlndividus  que 
les  approvisionuements  devenaient  pres- 
que  impossibles.  Pieins  d^imprevoyance 
d^ailleurs,  ils  ne  mettaient  rien  en 
reserve  dans  les  moments  d*abon- 
dance ,  et  s^acheminaient  insoucieuse- 
ment  a  travers  les  deserts ,  attendant 
la  manne  que  devait  leur  en^'oyer 
J6sus-Clirist,  leur  supreme  poarooyeur. 
Apres  quelques  jours  de  mardte,  ils 
commencerent  done  a  souffrir  de  la  cha- 
leur  d'abord,  de  h  soif  ensuite.  Les 
premiers  villages  qu'ils  rencontrcrcnt 
etaient  inhabites  :  il  n'y  trouvcrent  ni 
provisions  ni  secours  d'aucuhe  eSpece. 
La  faim  les  prit;  la  p^nurie  la  plus 
complete  les  accabla.  Comme  il  n*y 
avait  pas  plus  d'herbe  dans  les  prcs 
que  d  epis  dans  les  champs ,  its  obe- 
vaux  pdtirent  autant  ^e  les  hommes. 
Pour  trainer  Jeurs  nobles coursiers  quei« 
ques  pas  plus  loin,  les  chevaliers  furent 
oblige  de  les  mener  par  la  bride,  et 
encore  en  tombait-il  k  chaque  pas.  On 
mit  les  ba^ages  sur  des  bdies  de  ren- 
coutre,  b^hers,  chevres,  pores  et  cliienS. 
Les  tiers  barons,  vaincua  par  la  lassi- 


avatl 


tade,  farent  cMg6s  die 
etdesboeafo  (*). 

Bientdt  le  d^sespoir  est  m 
dans  Tarm^e,  la  mortalne 
parmi  les  pterins  ii  ta  suite, 
instant  il  en  tombe ,  de  ces  ' 
Les  una  meurent  dans  les 
!a  faim ;  \ta  autres  a' 
font  musuimans  pour 
reste  d*existence.  D'autres 
t6s  par  leurs  croyances 
8*etendent  sur  la  terre,  les  bm 
la  face  tourn^  vers  le  cieJ,ji 

Su'aux  yeux  de  leurs  freres  i 
eurs  ennemis,  la  pire  espeea 
mes  dans  tous  pays,  egor^eatfl 
pi  tent  ces  martyrs  de  Vi ' 
denQment.  Ge  n*est  pas  tout : 
mes  enceintes  accoudiedt 
sur  le  sol  brdlant,  sans  attirer 
dre  secours,  sans  ^rovoquer  ia 
piti^.  Des  m^res ,  mcapables  da 

1)lus  lonstemps  leurs  enfants 
a  mort  a  grands  cris.  Ces  ~ 
atroi-es,   ces   extinctioqs 
d'impmdents  et  dMnaenses^ 
apparaissant  i  peine  sur  la 
tale  pour  y  mourir  dans  les 
les  plus  aflfreuses  :  telle  fat 
eous^uence  la  plus  ii 
entlionsiasme  popul»ra  ^ 
dlrig^,  ni  cahne,  ni  onkmnel 
tant  quVIie  voudra,  peal  * 
roisme  de  eette  expeaiM 
fhistoire  doit,  avanl  M 
damoer  ta  demence. 

II    faut  representer  les 
qu'ils  furent  :  incx, 
la  folic  9  imprevoya'nts  y 
tise,  se  niant  sur  ie  naodi 
comme  une  bfte  affam^e  aar 
et  venant  ae  perdre  dans  ertte 
neure ,  tombeau  imintoiorial  i 
qu6rants  anciens  et  modemcs.! 
leur  arm6e  louroyant  a  trav 
tagnes  et  les  precipices, 
flotte  battae  par  la   tcmpdc^^ 
dans  un  dedale  de  rocbars 
sombres  ravins ,  de  deeerti 
laissant  un  homme  ft  tons  las  | 
masse  de  moria  a  chaque  I 
tant  a  la  fois  contre  la  nature  i 
riiumanite ;  mala  aUaait 


(*)  Toyez  PoolDlier  da 


^m 


STEIfi  lfDD£RIfE. 


9t  la  laim  aotti  bteqnele  efmeterre, 
rmonUDt  les  obstacles  J usqu'li  ce  que 
obstacles  la  tuent,  passant  de  jour 
jour  du  deiire  des  r^ves  aux  rigueurs 
la  reality,  oreueilleuse  au  depart « 
^le  k  rarrivM«  quittaot  rKuropt 
la  une  masse  de.pras  d*un  miUioa 

Pss  pour  aiteiiidre ,  r^uite  k  vingt 
bommes  tristes ,  d^urag^,  ivres 
Haouflrances ,  le  but  dtovant  de  sea 
irts  surhumains.  Mais  n'aoticipons 
Tda^antage  sur  les  malbeurs  qu1i 
ki rested  raconter. 
bra  privations  avaieat  fait  bien  du 
Paux  croises,  Tabondance  neleurfut 
^noina  funeste.  Apres  plusieurs  jours 
pttarclie,  ou  ils  ne  trouverent  ni  la 
iadre  source  sous  la  terre ,  oi  la  moin- 
\  goutte  d'eau  dans  le  creux  des  ro- 
m^  ils  Tirent  venir  k  eux  des  cliiens 
pa  le  poil  6tait  roouille.  Ils  les  suivi- 
et  oes  chiens  les  menerent  a  una 
I  qae  leur  instinct  leur  avail  fait 
.  ivnr.  Tousles  pelerinsse  pr^ipit^ 
^dlana  ees  eaux  froides,  qui  coulaient 
.  une  vall^  ecartee ,  et  en  burent 
meaiire*  Trois  cents  d*entreeux  fu<- 
frappes  de  mort  subite.  Un  plus 
IhI  iiombre  encore  ae  couch^rent 
Mas  aor  les  berges  bumides,  et  furent 
pdono^  par  leurs  oompagnons  vali* 
k  Enllfl ,  quand  ils  arrtverent  a  An- 
iwCte^  capitale  de  la  Pisidie,  ce  fut 
iice  pour  y  souffrir  des  exoes  de  iiour* 
Im  et  da  boissons  auxauels  ils  se  li- 
■ant.  Raymond  de  Toulouse  manqiia 
ifMNmr.  L'armte  pleural t  deja  un  de 
nhefs  las  plus  liabiles;  mais  la  ville  etait 
toa  de  ressourees,  habttee  par  des 
M  amia,  sttu^  dans  une  vallee  sa*- 
Pbi»  «t  keeomte  de  Saint-Gillesfinit  par 
ier  eo  convalascence.  On  attrtbua  sa 
paoii  a  uo  oiirade,  et  Ton  crut  que 
I  i^tron  avait  soiUcit^  pour  lui  one 
jsr  avee  ia  mart,  Dans  ie  in^me  temps 
icroiste  eraignirent  de  perdre  leur 
Miime  due  de  Bouillon.  £iant  ali^  k 
liaase,  Godefroy  e»tendit  les  oris  de 
ieur  d'un  de  ses  compagnons  atta- 
[  par  un  ours  d'une  tailie  gigantes- 
i  Le  brave  Lorrain  fondit  aussitot 
la  Mte  feroce.  Son  ehevai  ayant  6t^ 
boiti^  d^vor6,  il-  n*en  continua  pas 
OS  la  lutte  a  pied,  accepta  I'^treinte 
moDStre ,  eut  la  force  dj  roister  et 
ided^gager  son  bras  arm^d^une 


^peeavee  laqoalle  il  ou?rit  le  dos  de  Ta- 
nimal  furieux.  Mais  sa  victoire  lui  avait 
▼alu  a  la  cuisse  une  blessure  si  profonde 
qu*oo  le  ramena  mourant  k  la  ville, 
et  qu'il  fut  oblig6,  pendant  plusieurs 
semaines,  de  ne  poursuivre  son  expedi- 
tion que  port6  sur  une  litiere(*}. 

DiPLOBABLt  CONVLn  ENTRB  TAll-      * 
CBEOB  BI  BAUDOUIN. 

Apres  s*^tre  repos^e  et  ravitaill^^e  a  • 
Antiochette ,  rarinee  s*etait  remise  en 
route,  bien  ditninueedeja,  quoique  tou- 
jours  ardente  et  enthousiaste.  Seulement 
plusieurs  troupes  s'en  etaient  detacliees 
el  s'etaient  lancees  en  ^laireurs  vers  la 
Sy rie.  Deux  des  principales  ^talent  com- 
mandoes, Tune  parTancrede.  Tautre 
par  Baudouin ,  frere  pulne  de  Godefroy 
de  Bouillon.  Ce  Baudouin,  soldat  aussi 
brutal  qu'ambitieux.  songeait  beaucoup 
plus  a  gagner  une  province  que  le  ciel,  et 
pour  y  parvenir  tous  les  moyens  devaient 
lui  £tre  bons.  1)  s'en  allait  done  a  la  d6- 
eouverte  pour  son  propre  compte,  lors- 
qu*aprcs  avoir  traverse  Iconiuin,  aban* 
donnee  par  ses  habitants,  il  aVriva  en&n 
devant  Tarse  ea  Gilicie.  Tancrede  Ty 
avait  devanoO  et  avait  in  vest  i  la  place, 
d^endue  par  unefaible  garnison  turque; 
et  on  lui  avait  promis  de  lui  en  ouvrir 
les  portes  si  au  bout  de  quelques  jours 
aucun  renfort  n'arrivait  aux  assieges. 

Les  deux  troupes  chrOiiennes  fra- 
teruiserent  devant  Tarse;  mais  lorsque 
le  lendemain  de  son  arrivee  Baudouin 
vit  Tetendard  de  Tancrede  Hotter  sur 
les  murs  de  Tarse,  ilseorut  frustrO, 
et  reclama.  11  prOtendait  que  ses  soldats 
Otant  plus  nombreux  Cjue  ceux  de  Tan- 
crede avaient  seuls  determine  par  leur 
presence  la  reddition  de  la  ville.  Tan- 
crede pssa  outre  a  ces  observations 
singulieres;  et  Baudouin  eut  beau  s'em- 
porter,  le  chevalier  normand  ne  ceda  ^ 
pus  au  lorrain.  Alors  ce  dernier ,  outre 
de  rage,  s^adressa  aux  ArmOniens  qui 
remplissaient  la  ville  et,  autaut  par  les 
menaces  que  par  les  promosses ,  les  de- 
cida  a  remplacer  le  drapeau  de  Tancrede 
par  le  sieu.  Puis  ajoutant  Toutrage  k  la 
deloyaute,  il  fltjeler  avec  mOpris  laban- 
aiere  de  son  rival  dans  ia  booa  d*ttn  fossd. 

,  Yoyw  Albert  d*Aix,  HitMn i*  tespMi- 
^mn*4eJ^nuaUm\  «t  GolltaumM  ds  Tyr,  1M»- 
lotfv  dec$qui  t^€$t  pattd »  ete. 


J?J 


264 


LTJNIVERS. 


Tancr^e  fut  assez  g^n^renx  pour  ne  pas 
tirer  una  vengeance  immediate  de  cet 
acta  si  grossierement  hostile.  11  laissa 
la  m^tropolede  la  Cilicie  k  son  rival,  at 
s'en  alia  chercher  p\u%  loin  one  autre 
victoire  a  remporter  (*)• 

Baudoiiin ,  maftre  de  Tarse ,  et  voyant 
desormais  dans  tout  croise  un  ami  dou- 
teux  sinon  un  eniiemi,  eut  rinfamie  de 
refuser  Tentree  de  la  ville  k  une  bande 
de  pelerins  harasses  qui  lui  demandaient 
rhospitalite.  Dans  la  nuit,  les  Chretiens, 
au  noinbre  de  trois  cents  seulement, 
furent  surpris  et  ^gorges  par  la  cavale- 
rie  turque  qui  tenait  la  campagne.  Le 
lendemain ,  les  soldats  de  Baudouin  eux* 
ro^mes  sMndignerent  contre  I'egoisme 
cruel  de  leur  chef,  rassaillirent  de  fl^ 
cbes,  et  le  forcerent  a  se  refugier  dans 
une  tour.  Mais,  aussi  fourbe  que  per- 
lide,  Baudouin  ailegua  pour  excuse  de 
son  odieuse  conduite  le  traits  conclu 
avec  les  indigenes ,  et  pourtant  il  fut 
oblige,  pourse  rehabiliter  quelquepeu, 
de  proposer  k  sa  troupe  de  venger  leurs 
freres,  dont  les  cadavres  etaient  encore 
4tendusen  facedes  murailles.  On  attaqua 
done  les  queiques  Turcs  qui  defendaient 
encore  un  des  quartiersde  la  ville,  on  les 
vainouit,  eton  les  passa  tous  au  fil  de  Te- 
pee. Puis,  comme  les  Lorrains  etaient 
sortis  pour  ensevelir  les  vietimes  de  la 
veille,  lis  aper^urent  une  flotte  qui  s*ap- 
prochaitdela  cdte.  G*etaient  descorsai- 
res  flamands ;  ils  venaient  se  joindre  k 
lexp^ition  sainte,  et,  grAoe  a  oe  renfort 
inattendu ,  Baudouin ,  tout  en  conser- 
vant  Tarse,  put  coutinuer  ses  explora- 
tions toutes  personnelles  sous  le  saint 
convert  de  la  croix. 

Par  une  deplorable  fatalite,  Baudouin 
prit  precisemeut  la  m^me  route  que  Tan- 
crede ,  et  ne  tarda  pas  k  le  rejoindre. 
Tancrede  venait  de  s*emparer  de  Mal- 
mistra ,  lorsqu'il  vit  la  troupe  de  Bau- 
douin s'approcher.Quoi  qu'il  tit, line  put 
cette  fois  calmer  Tirritation  de  oeux  qui 
Taccompa^naient.  Chevaliers  pour  la 
plupart,  lis  n'accordaient  k  Tancr^e 
de  supr^matie  que  dans  le  cc^mbat;  vio* 
lents  et  grossiers  de  leur  nature ,  pour 
decider  leur  chef  a  se  venger  de  Bau- 
douin ,  ils  allerent  jusqu^a  Trnjurier.  Al- 

n  Voyez  Raoul  de  Caen ,  U$  Geslet  de  Tan^ 
ariac ,  et  Foulcber  de  Cbartres ,  fes  GesUs  d€s 
Franctt  etc. 


bert  d'Aix,  iedironiqaear,  rap^oiiMB 
paroles  que  Richard ,  princr  de  Srim^ 
tint  k  ce  propos  k  Tancrede  son  f 
«  Va ,  tu  es  devenu.  aujoord  kn 
le  plus  vil  dfi  tous  les  bomimsl 
y  avait  qudque  couraj^e  en  loi , 
retomber  sur  Baudouin  les  our 
tu  en  a  recos !  »  A  ces  mots, 
ne  put  repondre  qu'en  tiraot 
et  en  se  mettant  k  la  t^te  des ' 
se  pr^paraient  a  partir  sans 
bien  Baudouin  semblait  avoir 
pousser  k  bout :  il  s'^tait  etabii 
des  murailles  de  Malmistra .  ct 
fait  dresser  ses  tentes  oorome 
voulu,  atnsi  qu*a  Tarse,  attcodn 
sion  d*une  trahison.  Malgre  sob  i 
inferieur ,  la  troupe  de  Tancredt i 
pr^cipita  pas  moins ,  la  ianee 
contre  les  Flamands  de  Bau ' 
brusque  attaque  surpril  ces 
jeta  d'abord  quelque  oonfu>wi 
eux.  Mais  bient6t  ds  se  rallicm 
tourerent  leurs  assaillante ,  et, 
une  lutte  acharn^,  les  foroerol 
trer  p^le-m^le  dans  la  ville  elll 
donner  plusieurs  prisonniea^ 
autres  Tinsolent  prince  de  "  ' 

Le  lendemain,  la  raisoo 
fous.   Ils   s'envojereot 
des  depute,  et  afia  d*i 
conduite  haineuae  et 
rejeterent  sur  une  iospinitiai 
qui  les  aurait  pouss^  les 
les  autres.  Pour  ne  pas  « 
cuses  reciproques,  oes  pieail 
pref<6raient  accuser  la  Prov" 
sauver  leur  honueur,  ils 
taient  sans  scrupule  la 
Quo!  qu'il  en  soit,  les  deux 
iurerent  pas  moins  solenni " 
biier  leurs  torts.  Les  deux 
r^nies,  Tancrede  et  Baudouin i 
s^rent  devant  leurs  soldats. 
tion  factice ,  qui  etail  bien  Im( 
un  crime  aussi  odieux  que 
odieux  comme  lutte  entre 
prejudiciable  comme  exempfe 
donne  a  Tarm^  (*}. 

DBSBBTION  DB  BAUDOVA  j 

Cependant,  dans  cette  qacMlli| 
cide,  Tancrede  etait  le  moins  < 


{*)  Yovez  Baoul  de  Caen,  Its 
Albert  a*AlK ,  Histoire  de  Vexfi 
fa4em* 


Pexpeditimi 


SYRIE  M0DERI9E. 


965 


in  Tavail  provoqoes  outrage, 

iv^.  Tous  les  crois^  ie   pensereot 

isi.  Qtiand  les  deux  avant-gardes  eu- 

}t  ete  rejointf s  par  Tarmee,  Godefroy 

^ocha  a  sod  frere  sa  cooduite  dpvant 

f$6.  Ces  reprocbfs  du  due  de  Bouillon, 

de  changer  Tesprit  de  Baudouin, 

vinreot  qu*a  Tirriter.  Toujours 

p^  de  toute  autre  chose  que  de  la 

ice  du  saint  sepulcre ,  il  ne  rSvait 

one  conqu^te  personnelle.  Arrogant 

petits,    dissimule   avee   ses 

;,  il  s  attira  bientdt  Tantipathiede 

Aiors  son  dnie  s*ulcera  de  plus  en 

it,  et  malgr^  les  bons  conseils  de  son 

nse  Gundescbilde ,  femme  sainte, 

avait  pris  la  croix  autant  par  reli- 

p  que  par  devoueinent  a  son  marl, 

idoijin  n'en  persista  pas  moins  dans 

projets  contraires  a  Tunit^de  Tex- 

itioii.  Cest  que  pour  lui,  a  cdte  de 

r,  il  y  avait  un  denoon;  et  quil  pre- 
ecouter  les  paroles  tentatrices  de 
les  recoinn)andatlons  paciliques 
ire.  Ce  demon  etaii  un  aventurier 
qui  se  disait  prince  detrdn^ 
propres  sujets,  et  aui ,  refu^sie  a 
Jitinople ,  y  avait  tenement  intri- 
pi'on  avait  ^te  contraint  de  I'inear- 
f*  Puis  ^ant  parvenu  a  s'ecbapper  de 
^,  i]  n^avait  rien  trouv^  de  niieux 
t  mal  faire  que  de  s*attacher  d  la 
pde.  Habile ,  actif ,  dou^  de  oe  ver- 
I  que  ses  pareils  possedent  presque 
rvrs,ilcherchaitdes  dupes,  il  trouva 
l^in.  Grdce  a  sa  perversite  intelli- 
%U  i^netra  facilement  le  caractere 
Nbbftieux  chevalier:  par  ses  flatteries 

Esa  confiance ;  par  ses  sugges- 
iflamma  de  plus  en  plus  la  pas- 
inante  de  celui  qu*il  voulait  ex- 
Itr.  Gundeschilde  avait  beau  faire, 
erdait  cbaque  jour  du  terrain  dans 
nr  pervert!  desonepoux.  EnGn  le 
g6)ie  c^a  au  mauvais  :  abreuv^e 
i»grins ,  desesperee  comme  les  dmes 
es  qu'on  repousse,  Gundeschilde 
ut. 

lieu  d'etre  une  douleur,  cette  perte 
I  dcbarras  pour  Baudouin.  Libre 
enir  de  tout  lien «  il  ne  chercha 

Sue  roccasion  d*abandonner  la 
ereligiense,  etd*en  eutreprendre 
son  profit.  Pancrace,  tel  ^tait  le 
de  Taventurier  armenien,  avait 
§  an  Mre  de  Godefroy  la  mauvaise 


pensee  de  la  d^rtion,  et  il  put  d^sor- 
mais  la  d^velopper  sans  obstacle.  II  lui 
parlait  sans  cesse  de  la  richesseet  de  la 
i^odit^  des  pjays  d*Orient.  II  critiquait 
Texpedition  sainte,  qui ,  loin  dese  din- 
ger vers  les  grasses  plaines  de  la  M^o- 
potamie,  aliait  se  lourvoyer  dans  les 
apres  niontagnes  du  Liban  pour  aboutir 
aux  cliamps  d^ol6s  de  la  Palestine.  II 
se  moquait  du  Jourdain,  fleuve  sans 
vertu  et  sans  eau ,  et  vantait  TEuphrate 
qui ,  h  Tinstar  du  I9il ,  laissait  sur  les 
terres  quMl  traversait  un  limon  epais  et 
f^nd.  II  faisait  entrevoir  k  Baudouin 
la  gloire  unie  a  la  fortune.  II  exaltait  a 
la  fois  toutes  ses  passions.  Le  cadet  de 
Lorraine  ne  tarda  pas  a  se  laisser  con- 
vaincre,  et  en  arriva  h  ne  plus  cacher 
ses  projets. 

Mais  un  scrupule  auqnel  il  ne  s'atten- 
dait  pas  surgit  tout  a  coup  dans  le 
cocur  de  ceux  qui  Tavaient  accompagn^ 
jusqu'alors.  Ses  plus  Gdeles  chevaliers, 
lorsquil  leur  parla  de  quitter  Tarmee, 
refuserent  de  le  sui\re.  Malgre  ses  ins- 
tances, ses  priereSf^seisemportemenls, 
aucun  d'eux  ne  lui^c^a.  Force  lui  fut 
de  s'adresser  aux  soldiits  les  plus  obscurs 
et  les  plusavides.  II  promitdenombreux 
butins  a  la  tourbe  grossiere  vers  laquelle 
il  fut  r^uit  a  tourner  ses  vues,  et  en- 
core ne  put-il  reunir  qu*environ  quinze 
cents  fantassins  et  deux  cents  cavaliers. 
Lorsque  cet  embauchage  fut  connu ,  il 
indigna  toute  I'armee.  Godefroy,  qui 
avait  encore  la  faiblesse  de  compter  sur 
Fhonneur  et  sur  la  piete  de  son  frere ,  lui 
d6puta  plusieurs  ev^ues  et  piusieurs  • 
prmces  pour  le  rameuer  a  de  meillcurs 
sentiments.  Mais  les  efforts  des  uns  et 
des  autres  furent  inutiles  :  Baudouin 
n*avait  jamais  et^sincerementreligieux, 
et  il  ne  mettait  son  honneur  qu*a  con- 
qu^rir  comme  que  comme  une  princi- 
paute  quelconque.  La  raison  ^tant  im- 
puissante ,  on  voulut  employer  la  force. 
II  fut  d^fendu ,  sous  les  peines  les  plus 
s^veres ,  k  tout  crois^  de  quitter  Tarmee. 
La  nuit  m^me  ou  cette  decision  fut  prise, 
Baudoiun  s'en  alia  du  camp  avec  la 
horde  de  pillards  qu'il  avait  enrdlee  (*)• 

La  croisade,  parvenue  k  Marasch, 
devait  desormais  se  diriger  vers  le  sud , 


(*)  Voyez  Goillanme  de  Tyr,   IHtioin  de  ee 
^ui9*eit  pamif  etc 


L'UNIVERS. 


Baadouin  8%  hAu  de  pointer  mn  Vmt, 
Le  basard  le  servit  tout  d*abord  :  lea 
Tufca  avaient  fui  du  paya  quMI  traveraa. 
li  put,  preaqueaans  coup  rerir,  sVmpa- 
rer  des  villea  de  Turbeasei  et  de  Ravnel. 
Pancrace  voulut  avoir  le  prix  de  ses  per* 
idea  eonseila :  il  reclama  Tune  dea  aeui 
citea.  Baudouin,  aussi  avide  qu'ambi- 
tieux,refu8a.  Alora  Panerace  employa 
la  ruae.  BaudouiA  lui  r^pondit  par  la 
force.  Pancrace,  qui  tenait  la  forteresae 
de  Ravnel ,  tardait  a  la  rendre  au  rude 
Flamand.  Celui-ci  Vy  obligea  en  le  char- 
geant  de  fers,  eten  I'accablantde  coupa. 
Apres  ce  rigoureux  traitaiient  Pancrace 
et  lea  aiens  abandonn^rent  Baudouin ; 
mafs  ce  dernier  n'en  trouva  pas  moina 
des  guides  pourlenrenfrjusqu^a  £des8e. 
Gette  ville  avail  ^chappe  par  un  sin- 
gulier  basard  I  la  conau^te  des  Turcs. 
Aneienne  m^tropole  de  la  Mesopotamie, 
apres  avoir  perdu  son  royaume,  elle 
^tait  rest^  comma  une  tie  cbretienne 
au  milieu  d'un  ocean  musulman.  Mais 
le  petit  prince  ^ec ,  du  nom  de  Tbto- 
dore,  qui  y  regnait  ne  pouvaft  con- 
aervcr  de  security  sur  son  6troit  terri- 
toire  qu*en  payant  aux  Turcs  des  tributs 
de  plus  en  plus  6Jev^s.  £desse  ^tait 
done  inquiete  et  tremblante,  et  sans 
a'informer  de  la  moral! t6  de  ceux  qui 
venaieiit  k  elle ,  en  les  s^chant  Chre- 
tiens ,  elle  les  prit  pour  des  sauveurs. 
Elle  envoya  done  vers  Baudouin  douze 
de  ses  principaux  habitants  et  son  ^v£- 
que  pour  demander  assistance.  Bau- 
douin ,  enchante  de  oette  demarche ,  qui 
lui  donnait  des  airs  de  libcrateur,  se 
pr^para  aussitdt  k  passer  TEuphrate, 
qui  ie  s^parait  du  territoire  d^l^esse. 
Comme  il  avait  laisse  garnison  sur  toute 
sa  route,  et  qu*i1  n*avait  plus  avec  lui 
qu'une  centaine  de  cavaliers,  il  chercba 
a  eviter  les  Turcs,  et  put  arriver  sans 
combat  jusqu*a  la  ville  grecque.  Le 
peuple  le  re^ut  avec  des  acclamations 
d^aliegresse  :  c*^tait  un  defenseur  Jeune 
et  brave  qui  lui  venait ,  et  sou  prince 
^tait  vieux  et  pusillanime.  Ce  prince, 
ioquiet  de  la  reception,  triompnale  de 
cet  ^.tranger,  fut  pourtant  force  de  lui 
offrir  la  seconde  place  a  sa  cour  et  le 
partage  de  ses  tresors.  Alais  ce  n*6tait 
pas  la  I'affaire  de  Tambitieux  Lorrain. 
Son  orgueil  ae  toolevait  k  I'id^e  d'etre 
a  la  ioTde  d'un  prioce  ^tratngtr,  et  M 


repoassa  avec  m^rit  leioffirei4en»> 
dore  d*£desse.  Le  peuple  Bramnin:! 
ne  voulait  pas  laisser  reparlir  mb  *• 
fenseor.  Tli^odore,  qui  n  avail  pis  to 
font ,  proposa  alors  a  BaodouB  k  h* 
dopter.  Celui-ci  aocepta,  et,  idoah 
ooutume  des  Byzantins ,  posa  ettrt  k 
chemise  et  la  cnair  nue  de  ThMn^ 
puis  lui  donna  Taccolade  de  lapeai 

Le  r^ve  de  Baudouin  sermatttf 
il  ne  songea  plus  qu*^  defcadnai 
augmenter  la  principaut6  qui  deiill 
apparteoir  un  jour.  AUi6  k  m  fm\ 
annenien  appele  Constantia,  teaii 
eontinuer  le  tribut  aux  nMisttlnjai,! 
marcha  eontre  eux,  et  alls  m0 
leur  ville  voisine  de  SaoMKite.  Iaii| 
douin ,  assez  mai  seconde  par  aes  ai^ 
veaux  sujets ,  et  voyant  le  W  i 
Samosate  se  prolonger,  reviat  Ml 
a  £desse.  On  y  6tail  monte  eoDlrelWri 
dore;  on  I'accosalt  d*intdligi»eci 
les  Turcs.  Baudouin  se  garda  biesdi 
tifler  son  p^re  adoptif,  et  m^meii 
famie  de  laisser  comploter  oo' 
eontre  ceiui  qu'il  etait  de  aoa  i 
de  d^fendre.  L'emeute,  d^aM 
i)eniKne,  devint  bieiudt  furieu^Oil 
voulait  d*abord  qu*expulser  iMl 
on  finit  par  le  precipiter  da  hal ' 
remparts.  Puis  son  corps  fut  tnW 
les  rues ,  et  insulte  de  toutes  le  '^^ 
aux  yeux  de  son  ills  adoptif. 
li*eut  garde  de  s*indijnier: 
qu'il  fut  proclam^  maltre,  fl  ftfg 
sur  £desse  une  main  de  for.  U^vp 
avait  change  son  soliveau  inoliasfflt 
tre  une  grue  vorace  (  * ).  ■ 

Baudouin,  au  combledesetf 
onblia  compl6temenl  ta  rroisiit 
pensant  plus  qu*a  dtendn  sa  |il 
paut6,  il  acheta  Samosate,  qalli) 
pu  prendre  par  les  armes.  Puis, 4 
aussi  oublieux  que  chretieo  sav 
il  6pousa  la  niece  d'un  prioce  a 
nien  ,  ce  qui  reciila  ses  lin]itesi|if 
Taurus.  Ce  perGde  allie ,  ce  art 
sans  honneur,  qui  avait  quitlcsa^ 
pagnons  dans  fe  p6nl,  aiiraitdi 
maudit  par  tons  les  cruises;  aa 
avait  r^ussi ,  tout  lui  fut  pardoaoi 
jour  en  Jour  Baudouin  vit  anii 
lui  de  nouveaux  cbevaUen  qu  ^ 


J2J*^ 


5YRIE  MODE&NE. 


M7 


rent  son  arm^,  et  atigment^r^t  sa 
oour ;  plus  tard  eufin  ii  devait  le  premier 
profiler  de  la  conqu^te  d*une  artn6e 
qu'il  avail  desert^  :  la  destinee  r^r« 
vait  le  trdiie  de  Jerusalem  a  ceiui  qui 
avail  irahi  son  sermeDl  el  abandonn^ 
ses  freres  avant  le  siege  de  la  ville  sainle. 

LES  CBOI6S8    DEYANI  AHTIOCaB. 

Jje  si^ge  d'Antioche  se  divise  en  deux 
parties  :  la  honte,  la  gfoire.  Au  com- 
mencement, une  abondance  momentanee 
amene  avec  elle  I'orgie  et  les  debauches 
de  toutes  especes;  puis,  coninie  r^- 
SMJtat  d'un  gaspillage  insens^,  une  mi- 
s^re  plus  profonde  qiie  jamais ,  et  a  sa 
suite  la  crapule  la  plus  ignoble,  la  de- 
sertion la  plus  deshonorante.  Deux 
bommes  sauverent  alors  Tarm^e  clire- 
tienne,  Adheraar  par  ses  vertus,  Tan- 
crede  par  son  courage.  Grdce  a  leur 
exemples  les  croises  se  reieverent  de 
leur  riuge  et  de  leur  desespoir ,  et^  par 
des  actes  r6p^tes  de  vaillance,  ils  par- 
vinrent  k  se  sauver  d'une  destruction 
complete.  Entrons  dans  les  detals. 

Ce  ne  fut  qu'en  septenibre  1097  que 
les  crois6s  arriverent  en  SyrSe ,  et  dans 
quel  6tat !  lis  avaient  abandonne  presque 
lous  leurs  chariots  dans  le  mont  Taurus 
ou  dans  le  mont  Amanus.  Apres  les 
chariots,  ce  furent  les  bagages  quMis  lais- 
serenl  rouler  dans  dts  ravuis;  apr^  les 
bagages,  ce  furent,  pour  auelques-uns , 
leurs  armes  m£mes  quails  rejet^rentf 
faute  de  pouvoir  les  porter  davantage. 
Puis,  comme  leurs  vetements  s'etaient 
tout  dechir^s  aux  rochers  de  la  route, 
plusieurs  d'entre  eux  6*etaient  habilles 
des  depouilles  de  Tennemi ,  qui  de  la 
longue  robe  du  juif ,  qui  du  turban  des 
sectateurs  de  Mahomet.  Cetail  done 
harass^  de  fatigue ,  ^uise  de  besoins , 
presque  sans  armes ,  et  dans  un  degui- 
semeut  moitie  grotesque,  moitie  lamen- 
table, que  le  gros  de  farmee  arhva  de- 
vaol  les  murs  d'Antioche. 

La  foule  des  pelerins  aurail  voulu 
touruer  la  ville ,  et  passer  outre.  Elle 
o'avail  plus  de  force  que  pour  marcher 
jusqu'a  Jerusalem;  rideeseule  d*un  long 
siege  Telfrayait,  la  desesperait.  Lea 
chevaliers  en  jugirent  autrement ;  et  la 
foule ,  abrutie  par  les  souffrances ,  in- 
capable de  fkire  un  pas  sans  set  defeo- 
seurs ,  fut  obligee  d'ea  passer  par  ou 


ces  demiers  voulureot.  Lea  chevaliert 
avaient  peuMtre  raison  de  ne  point 
laisser  derri^re  eux  une  cit^  de  Timpor- 
portance  d'Antioche.  Peut-^tre  ausai 
etaii-il  bon  de  frapper  un  grand  coup , 
de  ne  pas  permeitre  k  Tennemi  de  se 
remettre  de  son  emotion  premiere?  Mais 
dans  ce  eas  il  edt  faliu  entreprendre  le 
ai^ge  avec  intelligence  et  le  pousser  avee 
Tigueur.  Or ,  comment  le  commencer  sans 
machines  de  guerre ;  comment  le  hAter 
en  ne  s*effor^nt  pas  m^me  d'investir 
la  place  tout  enti^re?  Les  chefs  croises 
he  surenl  ni  entourer  la  ville ,  ni  lui 
couper  les  communications  avec  la  cam- 
pagiie. 

Le  siege  d'Antioche,  du  reste,  devait 
presenter  d'assez  s6rieuses  diflicuit^. 
Sans  6tre  aussi  puissante  et  aussi  peu- 
plee  que  du  temps  de  la  domination 
romaine ,  ou  sous  le  r^ne  des  Ominia- 
des ,  cetle  capitale  avait  encore  trois 
lieues  de  circuit,  des  muraiiles  d*une 
solidity  extreme,  trois  cent  soixante 
tours  de  combat,  unecitadelle  au  sommet 
d'un  roc ,  des  fosses  profonds,  un  fleuve 
sur  un  de  ses  c6tes ,  un  marais  sur  Tau- 
tre,  et  enGii  des  collines  impraticables  de 
distance  en  distance.  11  suflisait  d'une 
garnison  de  quelques  milliersd'hommes 
pour  y  tenir  longtemps  centre  une  armee 
bien  approvisionnee,  et  bien  munie.  Or 
Baguisian,  emir  presque  independant 
qui  possedaitcettevilieetson  territoire, 
s'y  etnit  renfenne  avec  sept  niille  cava- 
liers et  vingt  mille  fnntassins.  11  avail 
su,  en  outre,  se  d^f[)ire  des  bouches 
inutiles  ,  en-  mettant  hors  de  ces  murs 
la  plupart  des  Grecs  et  des  Arm^niens 
qui  habitaient  la  ville.  Enfin ,  grdce  a  la 
maladresse  des  croises,  il  put,  comme 
on  le  verra ,  se  menager  sans  cesse  des 
communications  avec  Texterieur.  Plein 
done  de  resolution  el  d*espoir,  il  se 
prom  it  de  se  defend  re  vigoureusement 
derriere  ses  liauts  remparts,  tandis 
qu'il  envoyait  ses  deux  tils  demander 
des  secours  a  ses  allies  de  TAnti  Liban 
6t  de  la  Mesopotamie,  a  Kerbo^ha,  mattre 
de  Mossoul,  et  a  Dekak,  niaitre  de  Da- 
mas  (*). 

Sans  s'inqui^tf r  ni  des  forces ,  ni  des 
projets  des  Bssi6g^s ,  les  croises ,  aprte 
s'^tre  empares  de  quelques  villages  en- 

(*)  Voy0S  JLemaUFdrtln,  Bi$loire  drjUp, 


MS 


LUIflVERS. 


vironnants,  s'approcherent  des  murs 
d'Antioche  bannieres  depioyees*  au 
80Q  des  lambours,  des  dairoos  et  des 
tronipettes,  aux  oris  tumuttueux  de  la 
multitude.  Mais  leurs  bruits  divers, 
tout  prodigieux  qu'ils  fussent,  ne  Greot 
pas  tomber  les  rem  parts  d*Aatioche 
eomme  ceux  de  Jericho ;  et,  apr^  cette 
scene  inutilede  jaetanoe  il  leur  tallut  sod- 
ger  a  s'eublir  autour  de  la  ville.  Divises 
toujours  en  quatre  nations  priuoipales, 
ils  iorinerent  quatre  camps  qu'iis  en- 
tourerent  de  foss^.  Le  premier  de  ces 
camps,  appuye  a  lOronte,  place  au  nord 
de  la  ville ,  etait  celui  des  Lorrains  et 
des  Teutons  de  Godefroy ;  puis  venaient 
les  Proven^ux  de  Raymond ;  puis  les 
Fran^ais  et  ^ormands  de  Uugues  et  de 
Robert;  enQn  les  Italiens  de  Boh6- 
jnond  et  de  Tancr^e.  Quelle  que  fdt  1*^ 
tendue  de  ces  divers  quartiers,  ils  ne 
couvraietit  environ  qu*un  tiers  de  la 
ville.  Les  croises  avaient  completement 
neglige  la  partie  occidentale  d*Antioclie, 
d^^ndue  par  TOronte,  et  la  parlie  m^« 
ridionale  par  des  collines  elevees.  II 
n'y  avait  done  en  r^.ite  rien  de  bien 
terrible  dans  cette  arm^e,  qui  n'emp^- 
cbait  pas  les  assieges  de  recevoir  des  se- 
cours  par  la  montagne  et  des  provi- 
sions par  le  fleuve.  Aussi  les  Turcs , 
lors  du  mouvement  general  des  assie- 
geants  ne  se  doniierent-ils  pas  m^me  la 
peine  de  pnrattreen  nombresur  les  rem- 
parts,et  de  repondre  aux  provocations 
chretieunes.  Cette  solitude  et  ce  silence 
etaient,  d*ailleurs,  un  piege  oil  les 
croises  ne  manquerent  pas  de  tomber. 
Des  qu'Hs  virent,  en  effet,  que  la  ville 
semblait  unetombe  et  que  la  campagne 
leur  etait  abandonnee,  ils  ne  songdrent 
plus  qu'a  se  dedommager  brutalement 
des  privations  qu*ils  avaient  endurees, 
Leur  camp  tut  presque  laisse  sans  de^- 
feaseurs ,  et  le  plus  grand  nombre  de 
ceux  qui  pouvaient  marcher  le  quit- 
tereut  pour  aller  en  maraude  a  droite  et 
a  guuche,  pour  se  repandre  de  tous 
cotes.  Les  fruits  pendaient  encore  aux 
arbres ,  les  raisins  aux  ceps  :  ils  les  ar- 
racherent ,  et  les  devorerent  avec  avi* 
dite.  II  y  avait  dans  les  champs  des  silos 
remplis  de  grains,  ils  les  pill^rent;  il  y 
avait  dans  les  pres  des  troupeaux  nom* 
breux,  ils  les  emmen^rent.  Puis,  dans 
cette  abondance  extreme ,  loin  de  con- 


sorver  mesure  et  prinsion ,  loiB  de » 
server  quelque  chose  pour  leunbeniH 
a  venir,  ilSf(dcherenttootesiapnj» 
sions  quails  n'absorberent  pai  inm 
tement  :  ilscboisissaieotdaosJeNtfl 
et  le  mouton  les  parties  les  plus deiGi|: 
jetant  aux  chiens  les  autres. 

A  la  suite  de  la  gloutoiinerieTiinll' 
jeu  et  la  debauclie.  La  lioenceMfaJI 
oomble.  La  voix  des  chefe  et ' 
tions  des  pr^tres  n'6taient  plosi 
Quelques-unsm6medeces ' 
nuient  Texemple  du  vice  le  plus 
Ainsi  Alberon,  arcliidiacre  de 
laissait  surprendre  par  les  Tm 
les  berbes  d'une  verdoyante 
jouant  aux  des  avec  une  iiame 
d*une  grande  beauti  et  dunek 
sance,  dit  la  (hronique.  llnesc 
pas  de  jour  que  les  assieges  oc 
main  basse  sur  des  couples  d*sn 
ou  sur  des  croupes  d'ivrognes.  Oi! 
salt  k  toute  beureles  MusulmiBir' 
d*  Aiitii>che ,  tomber  sur  les 

Snees  du  camp ,  et  terminer  ks 
es  crois^  dans  des  flotsdesaog.] 
les  Turcs  n^egorgeaieot  pas  ml 
ceux   quMIs  surprenaient,  ilsKj 
menaient  a  la  ville,  les 
sur  les  remparts,  et  iangaieot 
dans  les  rangs  des  ChretieDS. 
eotre  autres,  ie  sort  d'Alberoi 
compagne  ( * }. 

Ces  entreprises  r^petees  del 
nemis  Gnirent  par  ouvrir  b,' 
croises  abrutis  par  la  debar^ 
faute  de  machines  de  siege, 
vaient  tenter  un  assaut,  ils 
les  cooseils  et  sui virent  les 
que  leur  donna  le  brave  Ti 
uns  chercherent  k  demolir 
sur  un  marais  et  qui  sernit 
des   assieges;   d'autres,  cfl 
Tancrede  luimdme,  se  ioettaieal| 
buscade  et  attendaient  ainsi  ks 
geurs  ennemis.  Un  jour  ils  eai 
soixaiitedix ;  une  autre  fois  ^ 
perserent  en  plus  grand 
C'etait  toujours  Tancrede  qui 
ces  petites  expeditions ,  doat  te 
plus  serieux  ^tait  d^eotreteoir 
de  rarm6e.  Singulier  bomme  qi 
crede,  qui  avait,  outre  labraW*' 

(•)  Voyex  Albert  d'AU ,  HulMit  it  t 
Hon  de  jirumUtmm 


SYR1&  MODERNE. 


SCO 


mune  h  tantde  chevaliers,  une  modestie 
contraire  aux  moeun  de  son  epoque! 
Ctant  une  fois  parti  en  inspection  avee 
un  seal  ^uyer ,  it  tomba  dans  on  gros 
deTurcs  ,  en  tua  plusieurs,  les  mil  tons 
en  d^route,  et  apres  le  combat  fit  jurer 
k  son  compa^on  de  ne  rien  dire  de  sa 
yictoire.  £ta]t-ce,  du  reste,  pur  acte 
de  modestie  de  la  part  du  preux  che* 
valier  ?  M'^tait-ce  pas  plut6t  pour  ne  pas 
laisser  rarm^  se  reposer  sur  le  courage 
de  quelques  hommes  comme  lui ,  que 
TancrMe  ordonnait  qu*on  ne  divulguHt 
pas  ses  exploits  tout  personnels?  Quoi 
qu'il  en  soit,  gloire  k  lui ,  car  il  fut  le 
seul ,  dans  un  moment  donne ,  qui  prit 
a  coeur  Thonneur  de  Tarm^  et  le  but 
de  la  croisade. 

•IISERE   ET    FAMINE    DANS    LE    CAMP 
CHRETIEN. 

Gependant  durant  ces  festins  et  ces 
debauches,  durant  ces  escarmonches 
sans  r^sultat ,  deux  mois  s*^taient  ^ou- 
l^s ,  et  rhiver  ^tait  venu.  Ce  fut  un  bien 
triste  r^eil  pour  les  crois^  :  la  nature, 
de  belle  devint  affreuse ;  le  ciel  si  pur 
se  couvrit  de  nuages ;  des  pluies  torren- 
tielles  et  continues  inonderent  les  prai- 
ries, ramollirent  tellement  les  terres 
que  les  pieux  ny  tenaient  plus.  Les  pa- 
vilions s'ecrouterent;  les  tentes  flecni- 
rent ;  Thumidit^  attaqua  a  la  fois  iacorde 
des  arcs  et  le  fer  des  ep^s.  On  voulut 
construire  des  cabanes  :  le  bois  ne  r^- 
sista  pas  plus  que  latoile  h  Timpetuosit^ 
des  eaux  et  au  souffle  des  vents.  Une 
froidure  p^n^trante  et  sans  remede  at« 
teignit  Tarmee ,  et  la  fit  souffrir  de  jour 
en  jourdavantage.Bient6taussi  la  faim 
se  joignit  au  froid.  Les  environs  d'An- 
tioche  etaient  ^puis^s;  la  v^g^tation  des 
montagnes  avait  ^t^  emport^e  par  les 
vents,  celle  des  plaines  submerge  par  les 
eaux. 

De  la  detresse  g^nerale  naquit  T^ 
goTsme  particulier.  Ceux  qui  trou- 
vaient  quelques  provisions  lesgardaient 
pour  eux  el  en  cachaient  le  siiperflu, 
loin  de  le  partager  entre  leurs  freres.  La 
disette  devint  telle  qu*il  ne  fallut  plus 
songer  qu*^  chercher  des  vivres ,  codte 
que  codte,  en  quelques  lieux  ^loign^ 
(]uMl  fallut  aller.  Malgr6  le  danger  de 
-aisser  le  camp  d^pouryu  de  ses  meil- 
leurs  soldats ,  une  exp^ition  lointaine 


pour  se  procurer  les  aliments  les  plus 
necessaires  futresolue  en  conseil.  Le 
matin  de  rtoel ,  aprte  la  premiere  messe, 
vingt  mille  crois^s  quitt^rent  le  camp 
et  se  dirigerent  vers  rOrient,  sous  le 
commandement  da  prince  de  Tarente 
et  du  eomte  de  Flandre.  Avant  leur 
retour,  ce  qu'on  avait  redouts,  arriya : 
les  assi^^  firent  en  grand  nombre  une 
sortie  visoureuse,  et  eurent  flscilement 
raison  diiommes  ^puis^  de  fatigues  et 
de  besoin.  Le  combat  fut  meurtrier 
sans  beoreosement  6tre  declsif ,  et  les 
Italians  de  Boh^mond ,  tout  revenus 
avee  des  provisions ,  rendirent  la  force 
et  Tesp^rance  k  Tarm^ ,  et  retinrent 
dans  les  murs  d'Antioche  les  Turcs  qui 
s'apprdtalent  k  une  nouvelte  attaque  {}), 

Mais  la  saison  ne  s'ameliorait  pas;  les 
expeditions  a  la  recherche  de  vivres 
avaient  beau  se  r^p^ter ,  elie  n'avait  plus 
de  chances  heureuses :  tout  le  pays  a  dix 
lieues  k  la  ronde  ^tait  ravage  ou  aban- 
donn^.  On  avait  espdr^  des  secours  par 
mer  de  Constantinople :  mais  la  temp^te 
^tait  permanente ,  et  empdchait  toute 
flotte  deserisquersur  les  cotes.  Celle  des 
Genois  et  des  Pisans  avait  quitte  le  pe- 
tit port  de  Saint-Simeon,  situ6  k  trois 
lieues  ducamp  Chretien.  Toute  ressource 
etait  perdue,  tout  espoir  d^truit.  Alors 
tomberentsurrarm^edes  calamity  sans 
pareilles  :  lamaladie,  la  faimjarage  fu- 
rieuse.  La  plupart  des  cruises  n*avaient 
plus  ni  pain,  ni  abri,  ni  v^tements.  lis 
en  etaient  r^duits  a  devorer  des  rats  et 
descrapauds,  a  mdcher  desracines,  a 
boire  le  sang  de  leurs  chevaux,  a  s'en 
arracher  les  membres.  Et  ce  n'etait  pas 
tout :  pour  pouvoir  mauger  cette  viaude 
coriace  ouces  animaux  immondes,  faute 
de  branches  d*arbres,  de  roseaux  sees,  de 
combustibles  ordinaires ,  ils  etaient  con* 
traints  a  brOler  le  bois  de  leurs  arcs ,  le 
cuir  de  leurs  selles ,  la  toile  de  leurs 
tentes,  la  laine  de  leurs  manteaux.  Ce- 
tait  une  desolation  universelle,  qu*aug- 
nientait  encore  uue  mortality  terrible. 

Eh  bien !  dans  cette  mis^re  epouvanta- 
ble,  au  milieu  de  cesagonisants,  k  travers 
ces  cadavres  qui  pourrissaieiitsur  la  terre 
humide,  il  y  avait  encore  place  pour  la 
prostitution,  pour  les  vices  les  plus  infd- 

(*)yo7ef  Raymond  d*AcUes,  HigMn  dft 
Ftanct  qui  frireni  Jerwalem, 


ffO 


LUinVERS. 


nie8.  Le  eanp  to  peleriBS  ressemblait 

a  une  StKiome  affanU^.  Tous  ceux  k 
qur  il  rcsUit  enoore  quelque  peu  de 
foreeet  un  sentiment  de  d^odt  fuyaient 
06  cloaque  de  la  lubricity  unie  k  la  fa- 
mine. Lea  una  rebroussaient  cbemia 
vers  la  Ciiicie;  les  autres  fuyaient  du 
c6i6  de  la  Mesopotamia.  Robert  Courte- 
heuze  se  retira  a  Laodic^;  Tatice,  ge- 
neral des  Grecs  auxiliaires,  retourna  k 
Constantinople.  Guillaume,  ce  vicomte 
de  Meiun  que  nous  avons  vu  piller  les 
habitants  de  ses  domaines  pour  partir 
en  croisade ,  deserta  a  son  tour ;  enfin 
Pierre  TErmite  lui-m£me,  le  premier 
auteur  de  cette  expedition  malheureuse, 
le  premier  pr^h^ur  du  p^lerinage  arm^, 
Pierre  TKrmite  dont  la  saintete  n'avait 
dure  qu*un  an,  le  courage  on  jour ,  s*e- 
chappa  nuilaniment  du  eamp  des  Chre- 
tiens. II  fallut  que  Tanerede,  Thomme 
de  la  rfsolution  et  deTesperanee,  se  mil 
k  la  poursuite  de  celui  dont  la  presence 
^tait  encore  quelque  chose  pour  les  mas- 
ses Tanerede ,  s'ii  etait  brave,  etait  aussi 
quelqueppu  brutal  etviolent:ilaccabla  le 
Ideheermite  Piei  re  d'invectives  de  toutes 
sortes,  et  le  ramenaaii  camp  a  coups  do 
plat  d'ep^e.  Ce  retour  d*un  fanatique 
desiliusionnif  ne  (it  pas  tout  le  bien 
au*en  attendait  Tanerede.  Les  che£s 
etaient  aussi  desesperes  que  les  soldats  : 
Godefroy  etait  malade,  Raymond  de 
SaintGilles  et  Bohemond  da  Tarente 
attendaient  la  mort  dans  leur  armure. 
L*arniee  allait  s'eteindre  peu  a  peu  dans 
le  desespoir,  dans  le  blaspheme  et  dans 
lacrapuie ,  lorsqu'un  pr^tre,  bien  autre- 
ment  saint  que  Pierre  TErmite,  aussi 
sas[e  que  vailiant,  aussi  reli^ieux  que 
r^solu ,  qui  avait  donne  jusque-la  auiant 
de  preuves  de  bravoure  que  de  veritable 
pieti^,  dur  a  la  fatigue,  infatigable  an 
combat,  chaste  et  sobre  toujours ,  grand 
C(cur  et  noble  esprit,  Adhemar  de  Mon- 
tell,  ^v^que  du  Puy,  legat  du  pnpe,  se 
leva  enCn ,  et  commeni^  son  rdle  ma- 
gna nime. 

it  fallait  h  Adh^mar  autant  dVnergie 
miiitaire  que  de  mansu^tude  cl^ricale. 
II  lui  fallait,  avant  tout,  reprimer  des 
▼ices  hideux,  arr^ter  une  demoralisation 
contagieuse.  C'^taient  lesfoudresder£- 
glise  dontil  avait  besointout  d'abord  :  il 
f'enservitavec  vigueurcoutre  les  debau-  ^ 
ch^  et  les  Inches.  II  mena^a  eeux-ei , 


il  fit  hoBte  a  oetM^ii;  il  ordonaa  stM 
des  jeilues  et  des  prieres  ttpiatains.lii 
tremblement  de  terre  viat  a  pnw> 
pour  juatiQer  les  paroles  de  com4» 
teste  qui  sortaient  joamelleoieBt  diH 
bouehe.Les  erois^iurent  aussi  «MI: 
par  ie  cataclvsme  physique  qoe  pm. 
anath^ines  de  leur  chef  religpenL  |^ 
commencerent  a  s'amender,  a«||fc 
pentir,  a  mettre  on  frein  a  lewi "  "~ 
dres.  Alors,  afin  que  la  plaia 
ferniait  ne  se  rouvrit  plus, 
composa  un  tribunal  des 
pr^tres  et  chevaliers  pour  , 
punir  les  futurs  coupables.  Ce 
lilt  tres-rigoureux  :  il  marquait 
rouge  ceux  qui  se  iivraient  a  la 
du  jeu  et  ceux  qui  blasphemaieat 
nom  du  Seigneur;  les  moines' 
etaient  frappes  de  verges ;  les 
Etaient  condamnes  a  de  terriblei 
ces.  Enfin ,  pour  barter  toule 
h  venir ,  on  enferma  les  femoHi 
uncampsepare  (*). 

Outre  la  prostitution,  !'«, 
portait  aussi  k  Tarmee  le  pinij 
des  prejudices.  Bohemond  se  < 
d'en  delivrer  les  eroises.  II  r^-* 
tout  espion  fOt  coup(6  en 
r6ti  pour  servir  a  la  noarritBiti 
soldats    affames.  Quoique  ks  1 
du   prince  de  Tarente  n'aieBtj 
mang^  de  chair  huniaine,  oil 
on  s'en  ^pouvanta ,  et  le  no 
pionsdiminuacommepnre 
Ce  iitratageme  reussft  nn^mei 
Turcs.  lis  s*imaginerent  qu  ibi 
affaire   dor^navant   a  des 
et  respecterent  le  quartier  des  I 
beaucoup  plus  gue  ceux  des  auti 
tions.  C  etait  la  uii  expedient  dii 
f^roce  et  grossier.  Le  uioyenqoV 
Adhemar  pour  prouver'aux 
perseverance  des  Chretiens  fnt  I 
genieux  que  productif.  II  or' 
les  terres  qui  environnaient 
fussent  labourees  et  ensemenee^l 
sure  que  les  enux  les  aband 
On  fit  ce  qiril  demandait ,  et 
chr^tienne  fut  rassur^  contre  I 
mine  en  mdme  temps  que  ses  < 
s'inqui^taient  de  la  prolongatiet| 
sible  du  si^ge.  Ainsi ,  par  sa 

(*)  Toyei  rabbA  Gaibert,  Gmi^  IMJ 


L 


STRIE  MODEimE. 


STt 


aostte,  1^  SM  mmeM  do  courroui 
divin ,  par  set  utiles  eonsdls ,  Adb^inar 
de  Honteil  avail  eommenoA  la  reg^^a- 
tion  de  Tarm^;  le  del  flt  le  reate.  Le 
£roid  cessa  tout  k  coup,  les  ^id^mies 
perdirent  de  leur  iDtensit^ ,  des  vivres 
arriverent  des  ties  de  Ghypre ,  de  Chio 
et  de  Rhodes,  enfin  Godefroy,  remis 
de  ses  blessures ,  se  montra  aux  yeux 
detous;  et,  pour  lea  pelerina  supers- 
titieux,  ce  dernier  apparut  coinme  Tastre 
de  la  victoire,de  mlinequ*Adhtoaravait 
semble  celui  de  rexpiation. 

AMBA8SADB  DU    KHALIFB  D*liGYPTX. 

Malgr^  lea  malbeurs  successifs  des 
crois^ ,  malgre  ia  lenteur  de  ieur  expe- 
ditioD ,  Ieur  perseverance  u*en  jeta  pas 
moins  Teffroi  daoscertaiDes  populations 
musulmanes,  et  nen  (it  pas  moins  r6- 
flechir  ceux  qui  prevoyaient  les  rdsultats 
de*  la  croisade.  Parmi  ces  derniers  il 
s*en  trouva  qui  vouiurent  proflter  de 
cet  ebranlemeut  de  TOccident ,  de  cette 
^ouvante  de  TOrieut  asiatique,  Les 
Fathiniites  d'£:gyptp,  les  plus  politi^ues 
peut-^tre  n'entre  les  Mahometans,  avaient 
prudeinmentrecui^  devaut  lesconqu^tes 
prodigieuses  des  trois  grands  sultans 
seldjoukides;  mats  lorsque  Melik-Schah 
eut  detruit  Tavenir  de  sa  dynastie  en 
separant  son  empire  entre  tous  6e$  oa- 
rents,  les  Fathiuutes  relev^rent  latete, 
intrigu^rent  avec  adresse,  exciterent 
sous  main  la  jalousie  des  differents 
^mirs  de  TAsie  Mineure,  les  diviserent, 
les  pousserent  les  uns  contre  lesautres, 
tout  cela  pour  propter  de  ces  haines,  de 
ces  discordes,  de  ces  guerres  intestines, 
Les  ev^nements  Ieur  furent  favorables 
au  dela  m^ine  de  leurs  esp^rances.  Le 
khalife  de  Bagdad  u'etait  plus  qu*une 
ombre  de  souverain  :  les  gouverneurs 
turcs  de  son  palais  ne  lui  avaient  laiss^ 
qu'une  vaine  autorit^  spirituelle;  et, 
grdce  au  schisme  d*Ali,  dont  les  Fa- 
'  tbimites  ^taient  les  plus  puissants  re- 
^  pr^ntants,  Tlslam  se  divisait  ddsor- 
'  mais  en  deux  grandes  sectea  au  profit 
[  des  ambitieux  descendants  d*Obaid- 
I  Allah.  SOrs  de  Ieur  preponderance  en 
^  Afrique,  les  Fathimi tes  recommenc^rent 
I        done  h  jeter  les  yeux  sur  la  Syrie  et  son- 

g^renta  en  faire  une  annexe  deflnitive  de 
ur  empire.  Avec  leurs  flottes  nom- 
r    .    breuses  il  ne  Ieur  fut  pas  difficile  de 


a'emparcr  de  f^lnsieiirs  viUes  maHtimea 
de  la  c6te  syrienne ,  Saint- Jean  d'Acre, 
Tyr,  SidoB.  Puis,  pour  se  diefaire  des 
Ortokidea ,  ils  n*eurent  hesoin  que  de 
Bousser  lespopuiations^EJIesabhorraient 
la  tyrannic  des  farouobes  Turkomans ; 
elles avaient  oubliecelledu  fatbimite  Ha- 
kern,  bien  plus  terrible  pourtant,  et  elles 
se  li  vrdrent  denouveau  aux  £gyptiens.  La 
Palestine  tomlia  ainsi  au  pouvoir  des 
kbalifes  du  Raire;  et  ils  pouvaient  d^jk 
esperer  la  conqu^te  du  reste  de  la  Syrie, 
lorsque  de  nouveaux  comp^titeurs  Ieur 
vinrent  tout  k  coup  d'Occident(*). 

Combattre  les  croises  paraissait  fort 
ehaneeux  aux  prudenu  Fathiniites  :  ils 
essayerent  d*abord  de  s*entendre  avec 
eux.  Leurs  perpetuels  rapports  commer- 
ciaux  avec  les  races  meridionales  de  TEu- 
rope,  Ieur  tr^ve  int^essee  avec  rempire 
byzantin,  Ieur  avaient  donn6  la  connais- 
aanee  du  caractere  des  Chretiens ,  et 
lis  comptaient  bien  exploiter  la  naivety 
proverbiaie  des  Francs,  lis  r^olurent, 
en  eons^uence*  de  Ieur  envoyer  des 
ambassadeurs  pour  les  troinper,  s'll 
etait  possible,  et  pour  savoir  tout  au 
jnoins  k  quoi  s*en  tenir  sur  Ieur  force 
militaire ,  Ieur  organisation  inlerieure  • 
leurs  tendances  futures.  Des  le  prin- 
temps  de  1098  ,  ils  expedierent  un  en- 
voye  pour  annoncer  Tarrivee  prochaine 
de  leurs  d^put^  au  camp  des  Chretiens, 
et  reclamer  pour  eux  sdret^  et  protec- 
tion. Les  chefs  crois^  vouiurent  bien 
recevoir  Tambassade,  et  firent  repondre 
qu'elle  pouvait  se  presenter  sans  crainte. 
II  y  eut  des  lors  parmi  les  Chretiens  une 
Emulation  trea-habile  pour  dissimuler 
les  souffrances  qu'ils  avaient  endurees , 
lea  pertes  qu*ils  avaient  ^prouvees,  tous 
les  dommages  de  la  famine  et  de  Tbiver. 
Les  tentes,  que  les  vents  et  la  pluie 
avaient  rendues  inutiles,  ils  les  dresse- 
reutde  nouveau ,  et  les  parerent  avec  le 
plus  grand  soiri.  Toutes  les  epees  furent 
fourbies,  toutes  lea  armes  nettoy^es, 
toutes  les  banni^res  et  banderoles  ^ta- 
lees.  On  attacha  des  ^us  a  dts  pieux 
pour  se  li  vrer  a  I'exercice  de  la  guintaine ; 
on  prepara  des  terrains  pour  des  cour- 
ses a  cheval.  Aussi,  quand  les  envoyesdu 
Kaire  entrerent  au  camp  des  crois^ , 
ils  ne  virent  partout  que  jeux  et  joie , 

(*)  Yoyez  AbouT-F^a,  Ann,  tnotUm. 


att 


LUNIVKRS. 


abondanoe  apparente ,  tranquillite  d'es- 

S^rit  et  oomme  certitude  de  la  victoire. 
la  8*att»ndaient  a  trouver  dea  affam^s 
et  des  mia^rablea;  quel  ne  fut  paa  ieur 
^onnement  d'ltre  promen^s  a  travera 
una  foule  rieose  et  active ,  parmi  des 
jeunes  gena  qui  a^exercaient  a  la  lance , 
qui  faisaient  toornoyer  leurs  chevaux  ri- 
chementharnaeh^,  ou  qui  s^oceupaientf 
sans  pr^eupatiOD  aucune,  d'amuse- 
ments  de  toutea  sortes  m^l^  d*exer- 
cicea  utiles,  qui  alternaient  entre  des 
joutes  et  des  parties  d'echecs.  Le  stra- 
tag^me  r^ussissait  a  menreilte :  lestrom- 
peurs  ^taient  tromp^  ( *). 

Ce  fut  dans  une  tente  somptueusement 
orn^  qu'eut  lieu  la  conference  entre  les 
chefs  principaux  de  I'armee  et  les  ain- 
bassadeursdu  kbalife  fathimite.  Ceux-d 
se  rtoierent  d*abord  centre  cette  nii^e  de 
pelerins  se  dirigeant,  le  glaive  an  poing, 
vers  la  ville  sainte.  Cela  Ieur  sem- 
blait  coutralre  aux»usages  ^tablis,  aux 
habitudes  des  Orientaux,  qui  n*allalent 
jamais  ainsi  a  la  Mekke,  au  respect 
qu'on  doit  k  la  maison  de  Dieu,  dans  la- 
quelle  il  ne  faut  se  printer  qu'avec 
humility.  Apr^s  avoir  blSun^  le  p^leri* 
nage  arm6 ,  ils  promirent  aux  crois^  y 
au  nom  de  Ieur  maltre,  possesseur 
actual  de  Jerusalem,  que  tous  les  Francs 
qui  viendraient  avec  la  besaoe  et  le  bd- 
ton  dans  la  cite  sacr6e  seraient  desor- 
mais  re^us  avec  honneur  et  prodigality, 
d^fray^  abondammentdetoutes  enoses, 
libres  de  parcourir  tous  les  lieux  saints 
de  la  Palestine.  Que  si ,  au  contraire , 
les  Francs  persistaient  a  se  rendre  par 
force  h  Jerusalem ,  la  colore  terrible  de 
rislam  toinberait  sur  eux.  Les  chefs 
crois^ ,  loin  de  s*^pouvanter  de  ces  me- 
naces ,  n*en  furent  que  blesses ,  et  r6- 
pondirent  arrogamment  qu*ils  ^taient 
envoys  pour  rendre  au  Christ  son  ancien 
heritage ,  ajoutant ,  selon  la  chronique : 
«  Nous  nous  confions  en  celui  qui  a 
«  instruit  notre  main  h  combattre ,  et 
«  qui  rend  notre  bras  fort  comma  un 
«  arc  d'airainHe  chemin  s'ouvrira  k 
«  DOS  ^p6es ,  les  scandales  seront  efiao^, 
«  et  Jerusalem  tombera  en  notre  pou- 
«  voir.  » 
Cependaot,  la  conference  ne  se  termina 


(•)  Voyex 


Robert  le  Ifoloe,  UiiUnre  de  Jeru- 


pas  que  parde  Taine8pwtmti<«.I(a 
crois^  ronaeotirent  a  Uamt  a 
uns  d*entre  eaz  aocompagoer  i 
tiens  au  Kaire.  On  ne  rmoosia 
finitivement  Toffre  deu  pttK,4l 
voulait  ^tudier  ce  cpie  poaiait  i 
raliiance  deaFathimites.  Avm'i 
envoys  des  Alides  fosseot  r 
un  ^v^nement  heureux  viot  Mli 
eorroborer  la  haute  opinion  ( 
portaient  de  la  croiaade.  On  ai 
au  camp  Chretien  que  DekkakM 

3ue  Redouan  d'Alep,  que  Sob 
'Ortok,  et  plusieurs  autres  ( 
environs  venaient  avec  viagt  ( 
valiers  au  secours  d*Antioehe.  r 
et  ses  infatigables  Italiens  i 
^k  la  rencontre  de  la  troupe  a 
lui  livrerent  bataille  entre  le  I 
et  rOronte,  et  la  vainquireaL  i 
demain  de  ce  briilantcoiiibat,li 
envoydrent  sur  quatre 
cents  t^es  de  leurs  ennemis  i 
sadeura  ^yptiens,  qui  ^taieall 
au  port  Saint-Sim^n.  Get  br' 
tout  oriental  dans  la  forme,! 
Alides,  qui  voyaient  dans  ces/ 
sangtantes  rhumiliatioo  de  la 
tuels  adveraaires  les  Sunnita,! 
estime  pour  les  Francs  s*eB  ] 
d'aatant.  L'ambassade  avaiti 
n^  pour  les  Latins  :  ils  avi 
oeux  qu^on  Ieur  eoToyait  ftmi 
milier. 

PAISE  d'ANTIOCHS  PAJl  IttC 

Le  retour  du  printempii 
hostility  Ieur  ardeur  preMlj 
si^^  faisaient  dea  sorties  a  ^ 
et  avec  des  chances  divenesJ 
tait,  des  deux  parts,  avec  pias^ 
de  fanatisme  que  jamais.  Pour  I 
les  cruises,  les  soldats  deP 
^ui  dans  un  combat  avaient  ( 
image  de  la   Vierge,  Tinsa 
toutes  facons  du  haut  de  leurs* 
Les  Chretiens  r^ndirent  a  i 
vocation  en  exposant  sur  des  | 
t^tes  de  leurs  prisonniers;  Cd 
guerre  a  mort,  une  ettermin  * 
proque.  Les  assises  profitaicBt^ 
tes  les  fautea  des  assiegeants.  Jk 
cesdemiers  ^tantalies  en  masses 
au-devant  d*une  flotte  genoise  ^i 
taillement,  les  Turcs  tombereot  r^ 
lorsqu*ils  re  venaient  charges  de  i 


SYRIE  MODERNE. 


278 


en  firertt  un  gf and  carnage.  Bofatoiond 

!        et  Raymond  de  Saint-GiUes  eureot  beau 

faire ,  ils  ne  purent  emp^her  la  d^route 

des  leurs.  v^jk  les  Musalmans  etaient 

oecup^s  h  oouper  les  t£tes  des  Chretiens, 

I        lorsque  Godeiroy,  suivi  de  son  fr^re  £us- 

I        tache,  de  Ungues  de  Verinandois,  de 

I        Robert  de  Flandre  et  de  leurs  chevaliers, 

I        86  pr^ipita  sur  les  massacreurs,  et  leur 

fit  expier  ch^rement  leur  premiere  vic- 

1        toire.  Bagui-sian  envoyades  renforts  k 

I        ses  soldats  qui  pliaient.  II  en  r^sulta  une 

m^lee  de  plus  en  plus  grande ,  oik  Tavan- 

I        tage  demeura  toujours  aux  crois^.  Cette 

bataille  dura  toute  la  Joum^ ;  il  s*y  fit 

I        nombre  d'actes  de  valeur ;  tons  les  chefs, 

I        Tancr^de  et  Adhemar  en  t^te,  s'y  d istin- 

I        guerent  tour  h  tour  :  mais  la  pal  me  du 

courageet  de  la  force  resta  a  uodefroy. 

Ce  fut  lui  qui  porta  les  plus  rudes  coups , 

I        ce  fut  lui  qui  s'adressa  aux  plus  redouta- 

bles  ennemis.  On  le  vit,  entre  autres 

t        exploits,  attaquer  un  Turc  d*une  stature 

I        eolossale,  et  d'un  coop  de  sa  puissante 

^pee  couper  en  deux  le  colosse,  si  bien 

qu*une  des  parties  de  son  corps  alia  tom- 

berdans  TOronte,  tandis  que  Tautre, 

restee  en  selle ,  porta  dans  Aotioche  la 

preuve  de  la  puissance  du  bras  et  de  I'a- 

dresse  de  Godefrov  (* ). 

Gependant,  mal|pr^  leurs  prodigieux 
efforts  <,  malgr6  la  victoire  aui  se  touma 
de  leur  cdte ,  la  perte  des  Chretiens  fiit 

Kresque  aussi  considerable  que  celle  des 
[ahom^ns.  En  comptant  les  victimes 
du  combat,  les  crois^  s*effrayerent  de 
leur  multitude,  et  en  accuserent  ores* 
que  le  ciel.  Uss^^taient  attendrisetddso- 
lesquelques  instants;  mais  leur  Amotion 
dura  peu,  et  leur  caraet^re  f^roce  et 
plllard  reparut  bientdt.  Comme  lesTurcs 
avaient  profit^  de  la  nuit  pour  enterrer 
leurs  morts  avec  leurs  armes  et  leurs  ri- 
ches v^tements ,  d^  le  matin  la  popu- 
lace chr^tienne  fouilla  les  tombes  de  ses 
ennemis,  exhuma  leurs  cadavres,  les 
d^apita  et  les  vola.  Puis,  apres  s'^tre 
emparee  des  sabres  dor^s,  des  boucliers 
d'acier,  des  habillements  8omptueux» 
qu'elie  trouva,  ellejeta  dans  rOronte 
les  troncs  de  ceux  dont  elle  avait  viol^ 
le  dernier  asile,  et  ^tala  leurs  tdtes  eoa- 
pees  devant  les  murailles  d*Antioche. 

I8»  lAvraUon,  (Svwb  modbbnb.) 


Get  horrible  spectacle  acheva  de  de* 
courager  les  assi^^s.  lis  ne  firent  plus 
de  sorties;  iis  laissdrent  former  leurs 
commonications ;  et  comme  les  assie- 
geants,  d6nu^  toiyours  de  machines  de 
guerre,  ne  pouvaient  £aire  de  br^ches 
et  tenter  un  assaut,  il  v  ent  alors  une 
sorte  de  suspension  d'hostilites.  Mais 
en  place  de  combats  au  grand  jour,  d'une 
lutte  franche  et  loyale,  aii  lieu  d*une 
tr^ve  ce  nefurent  que  surprises,  pieges, 
assassinats  dans  rombre,  une  guerre 
honteuse  et  f^roce  h  la  fois.  G'en  ^tait 
fait,  la  haine  des  deux  races  etait  allu- 
mee  pour  ne  plus  s*eleindre ,  et  des  deux 
parts  Ton  rivalisait  de  cruaute.  Les  chefs 
Chretiens  semblaient,  du  reste,  avoir  ap- 
prouv^  ce  systeme  d*extermination.  11 
y  avait  k  la  suite  de  leur  arm^  des  gueux 
de  toutes  especes,  mendiants,  vagabonds, 
criminels.  Jusqu*alors  ils  avaient  comme 
que  comme  reprim^  leurs  m^falts.  lis 
parurent  desormais  les  autoriser,  en 
les  laissant  s'enr^imenter  sous  le  com- 
mandement  de  Tun  des  leurs,  qu'on  ap- 
pela  le  roi  des  Tmands.  Ce  chef  de 
brigands  employait  sa  bande  a  fouiller 
les  tombeanx ,  k  depouiller  les  cadavres, 
^assassiner  If  nuit,  a  combattre  en  ban- 
dits et  nonen  soldats.  Leurs  actes  nom- 
breux  defroideet  lAche  tuerie  exasp^re- 
rent  les  assieg^.  Si  les  Truands  inspire- 
rent  la  terreur,  ils  avaient  aussi  excite 
I'ex^ration  musulmane.  Cette  execration 
rejaillit  bient6t  sur  tous  les  crois^i,  qui 
en  vinrent  peu  ^  peu  a  imiter  les  actes 
les  plus  odieux  de  leur  plus  vjle  canaille. 
Ainsi,  ayant  fait  prisonnier  le  fils  d*un 
^mir,  ils  demanderent  pour  sa  r|incon 
qu'on  leur  livrdt  une  tour  de  la  ville. 
Cette  exigence  ridicule  fut  repoussee. 
Alors,  durant  un  mois tout  entier ,  ils 
accabldrentdetraitements  affreux  lepau* 
vre  enfant  inofifensif,  et  finirent  par 
Tegorger  devant  les  remparts,  sous  les 
yeux  de  ses  parents  d^sesp^res. 
'  Cette infamie  meritait  des  represailles. 
Elles  tomb^rent  sur  un  brave  chevalier 
du  nom  de  Raymond  Porcher.  On  le 
conduisit  sur  les  murailles,  en  face,  du 
camp  Chretien ,  et  on  lui  ordonna,  pour 
sauver  sa  vie,  d'exhorter  ses  fr^res  a  le- 
ver le  si^e  d'Antiocbe  et  a  payer  sa  ran- 
^on.  Raymond  Porcher,  avec  une  ab- 
n^tion  et  un  courage  dignes  de  R6- 
guTus ,  s'^cria  avec  force  :  «  Regardez^ 

13 


974 


LUNIVERS. 


«  moi  coinme  un  homme  mort,  et  ne 
«  faites  aucun  sacrifice  pour  ma  liberty. 
«  Tout  ce  que  je  vous  aemande ,  6  mes 
«  fr^rea  I  c*e8t  que  vous  poursuiviez  tos 
«  attaqneacontre  cette  viUeinfidde,  qui 
«  ne  peut  roister  loogtemps,  et  que 
«  vous  restiez  fermes  dans  la  foi  du 
«  Christ;  car  Dieu  est  avec  vous  et  y sera 
«  toujours.  »  Un  Idohe,  oomme  il  s'en 
trouve  partout,  traduisit  oes  beJIes paro- 
les a  Bagui-sian.  Gelui*ci  exigea  que 
Raymond  Porcher  se  fh  musulman.  Le 
noble  chevalier,  loin  d'ob^ir,  a'apprto 
au  martyre;  et  bientdt  sa  t^te  roula  du 
haut  des  remparts  {*), 

SCBPBISB    D*ANTI0CHB. 

Le  si^e  se  prolongeait  toujours ,  et 
une  querelle  deplorable  entre  Boh^mond 
et  Godefroy  de  Bouillon ,  a  propos  de  la 
possession  d*une  ricbe  tente,  aurait  en- 
core rendu  les  hostility  plus  longues 
et  moins  d^cisives ,  si  la  trahison  d'un 
habitant  d'Antioche  n*etait  venue  au  se- 
cours  des  Chretiens.  Ce  fut  le  prince  de 
Tarente  qui  la  provoqua.  I.es  diff(6rent8 
chrooiqueurs  cnr6tiens  rapportent  pres- 
que  tous  de  la  m^me  fa^on  oet  incident 
capital ;  etcomme  ils  sont  d'acoord  avec 
les  historiens  orientaux,  nous  nous 
bornerons  a  citer  le  recit  plus.net  et 
plus  ooncis  de  Kemal-Eddin  : 

«  11  y  avait,  dit-il,  dans  Antioehe  un 
homme  oonnu  sous  le  nomde  Zerrad , 
oufaUeur  de  cuirasses.  On  Tavait  pro- 
pose h  la  garde  de  Tune  des  tours.  Cet 
homme,  voulant  se  venger  de  Bagui-sian 
^ui  iui  avait  enlev^  ses  richesses ,  ^rivit 
a  Tun  des  chefs  de  I'armee  chretienne, 
appeie  Boh^mond,  ces  paroles :  «  Je  suis 
dans  telle  tour;  je  te  livrerai  Antioehe 
si  tu  me  promets  avec  la  vie  telle  et  telle 
chose.  9  Boh^mond  souscrivit  h  tout; 
mais  il  se  garda  bien  de  parler  de  cette 
oorrespondance  aux  autres  chefs;  il  se 
contents  de  les  faire  assembler,  et  ieur 
dit :  «  Si  nous  prenons  Antioehe,  qui  en 
aura  la  souverainet^?  »  Ldhdessus  il 
8*eleva  un  vif  d^bat,  et  chacun  voulut  Itre 
mattre  de  la  ville.  Alorsil  reprit :  «  Que 
obacuki  de  nous  commando  le  si^ge  pen- 
dant une  semaine,  et  que  la  ville  soit 
au  pouvoir  de  celui  sous  le  commande- 


ment  de  qui  elie  aura  cie priie.tft| 
se  rangerent  de  cet  avis.  Qni  hd 
maine  de  Boh^mond  futfcne,M 
seur  de  cuirasses,  que  Dicn  hmI 
jeta  une  oorde  aux  sokbUdeiifii 
On  ^tatt  alors  dans  la  nuit  (hiMp 
de  regeb  ( commeacemeotdcjii^il! 
Francs  escaladerent  lei  mni^l! 
qui  arriv^rent  les  piemioiaiiiM' 
autres;  et  des  qails  fiireot  ctl 
suffisant ,  ils  attaqutent  les  a  '' 
et  les  massacrereot.  VoiU 
Boh^mond  prit  Antioehe.  ( 
parut  les  Francs  se  dis[ 
r^pandre  dans  la  ville.  An  Ml 
leva,  Bagui-sian  s'imaginaqMl 
delleaussi^taitaupouYoirdesC  ' 
il  sortit  aussitdtde  la  villas 
fuyards,  et  eourot  quelqueb 
plus  qu*un  de  ses  gensaveeloil 
de  cheval ,  oet  homme  lerelen;f 
encore,  cet  homme  Taf 
moment  apr^ ,  un  bdeheroo  i 
passa  pr^  de  Bagai-siaD,  Ini  i 
t^te  et  la  porta  a  AntioebeCVt 

Kemal-Eddin  termiae  ureal 
paroles  :  «  On  ne  saurait«rebe 
c  des  Musulmans  qui  seal 
« jour  le  martyre.  »  II  y  ( 
dix  miile  de  massacres.  Polil 
tuerie  vint  Forsie.  Les 
du^tiens  reprocneot  aux  < 
festins,  dans   leaqueis 
danseuses  des  ptOens  { i 
ganorum }.  Mais  leuis  i" 
pas  de  loiwue  dur^.  Une  i 
doable  s^prochait.  Elle  i 
mand^  par  Rberboghali , 
soul,  vieui   soldat  blandil 
guerres  intestines ,  qui  f 
profond  mepris  pour  les  < 
qui  marchait  aveo  orgueii  k  1 
cent  mille  hommea,  et  aeooaf, 
princes  d*  Alep,  de  Damas,  etik  vi 
toirs  de  la  M^sopotamie »  dik 
tine  et  de  la  Syrie.  Ods  qaefir^ 
de  Kherbogbah  apparut  k  1 
Godefroy,  TancrMe ,  leeooMi 
dre  et  leuni  chevaliers  sortiif 
ville  pour  Taller  combattre.1 
malgr^  leurs  efforts ,  iis  re 
d^oute.  Le  d^ouragement  aloNi 
para  des  Chretiens.  Ifayaat  puf 


(*)  Voyez  Tudebode,  Hisioire  du  voyage  a 


C*)  Voyei  Kemal-Edd«ii,flMl«nfrf*ilfl 
ducUoo  de  M.  Bdoaud. 


SYRIE  M0DERI9E. 


376 


rendr«  mattres  de  la  citadelle  qui  domi- 
nait  la  ville,  ils  se  voyaieotdana  une 
position  bien  plus  p^ritleuse  que  celle 
^  oil  s'^taient  trouv^s  les  premiers  assi^^. 
Puis,  comme  ils  avaieot  gdoh^  lears  pro- 
visions dans  I'abondaaoe,  ils  avaient 
aussi  a  redouter  la  disette. 
r  Eile  Vint  en  effet,  plus  affreuse  et 
plus  complete  que  jamais.  Tous  les  crui- 
ses indistinctement  fiirent  de  nouveau 
expose  auK  horreurs  de  la  famine, 
lis  d^vor^rent  d'abord  leurs  b^s  de 
somme,  mulets  et  chameaux;  ensuite 
les  animaux  domestiques,  ebiens  et 
ehats;  enfin  certains  chroniqueurs  font 
entendre  que  les  plus  miserables  fiirent 
r^duits  a  se  nourrir  de  cadavres  humains. 
Comme  devant  Antioche,  la  disette 
amena  avec  elle  la  d^sertioB  et  Taposta- 
fiie.  Sous  le  pr^texte  d*aller  combattre  les 
Turos ,  certains  crois^  sortaient  de  la 
▼ille ,  se  rendaient  au  camp  ennemi ,  et 
8*y  faisaient  musulmaos  pour  un  mor- 
fteau  de  pain.  D'autres  fuyaient  au  loin, 
et  tratnaient  quelque  temps  une  vie  d^ 
plorabl^,  jusqu'^  cequ'ils  tombassent 
sous  le  cimeterre  mahom^tan.  Les  bra- 
ves voulurent  emp^ber  cette  desertion 
croissante ;  ils  tinrent  les  portes  de  la 
ville  ferm6es.  Mais  cette  resolution  ne 
fot  funeste  qu'aux  plus  d^termin^ ,  qui 
8*6puis6rent  dans  nnterieur  d*Antioelie 
sans  combattre ,  tandis  que  les  lliches , 
k  Taide  de  cordes,  trouvaicnt  encore 
moyen  de  descendre  par  les  remparts  et 
de  s'echapper  un  par  un(*). 

Tous  les  malbeurs  semblaient  fondre 
h  la  fois  sur  les  infortun^  Chretiens. 
L'empereur  Alexis,  qui,  d  la  nouvelle 
des  premiers  succ^s  de  la  croisade,  avait 
r^uni  une  arm^  et  s'^tait  mis  en  marche 
pourrejoindre  les  vainqueurs,  rebroussa 
chemin  en  apprenant  leur  misere  de  la 
bouche  du  comte  de  Blols,  I'un  des 
d^serteurs  d'Antiocbe.  Ainsi  plus  d'es« 
poir  de  secours,  plus  de  cbancesde  ra- 
vitaillement.  Et  pourtant  de  jour  en 
jour  la  d^tresse  6tait  plus  grande  dans 
Farm^e  chr^tienne.  D^jili  les  plus  vail- 
iants  ^uerriers ,  ext^nues  par  la  faim , 
pouvaieiit  h  peine  tenir  la  lance  et  ma- 
nier  Tep^.  On  n^giigeait  de  veiller  aux 
murailles,  et  souvent  des  bandes  de 
Turcs  parvenaient  a  escalader  une  tour 

(*)  VoyezSaudri,  UitL  dMjirmUem. 


abandonn^ ,  et  h  porter  la  mort  et  Tin* 
cendie  jusque  dans  les  rues  d'Antioche. 
Boh^^mond ,  dont  le  pavilion  rouge  flot- 
tait  tou jours  sur  la  ville ,  qui  en  avait 
pris  la  souverainet^  et  le  commande- 
ment ,  avait  beau  faire  sonner  les  trom« 
pettes,  battre  les  tambours,  les  soldats , 
aux  forces  6pnis^,  a  Time  abrutie, 
restaient  dans  les  maisons  attendant  la 
mort  dans  I'apatbie  et  le  desespoir.  Go- 
delroy  de  Bouillon  avait  beau  montrer 
une  perseverance  invinoible,  Adh^mar 
de  Monteil  avait  beau  joindre  Texemple 
aux  exbonations^  presque  aucun  croise 
n'avait  le  couraae  de  se  lever  afin  de 
mourir  au  moins  les  armes  ^  la  main. 

Pour  derniere  reasource ,  pour  forcer 
les  pelerins  a  paraitre  enfin  sur  la  place 
publique,  on  fut  oblige  de  mettre  le 
feu  a  la  ville.  Alors  ee  fut  un  spectacle 
deplorable :  des  homines  amaigns ,  bdves, 
d'une  faiblesse  sans  pareille,  trebuchant 
k  tous  les  pas,  pr6feraient,  quelques- 
uns ,  se  precipiter  dans  les  flammes  que 
de  maroner  a  Tennemi.  L'incendie  n'eut 
d'autre  resultat,  rapporte  Aaoul  de 
Caen,  que  de  detruire  de  magnifiques 
^lises,  de  superbes  palais  c&nstruits 
avec  des  cadres  du  lihan,  et  ornes  de 
marbres  de  VAtliis,  de  cristal  de  Tyr, 
et  d'airain  de  Chypre,  La  foi  seule 
soutenait  encore  les  Chretiens.  Plus  lis 
souffraient,  plus  leur  esprit  s'exal- 
tait  :  ils  s*imaginaieot  devoir  attend  re 
du  ciel  protection,  secours,  salut.  II  y 
en  avait  qui  avaient  vu,  la  nuit,  dans 
line  eglise,  descendre  J^us-Christ  et 
la  Vierge ;  a  d*autres  saint  Ambroise  avait 
Apparu.  Ces  illumines,  pour  prouver  la 
sincerity  de  leur  declaration ,  propose- 
rent,  qui  de  se  jeter  du  haut  d'une  tour, 
qui  de  traverser  les  flammes ,  qui  d'a- 
bandonner  sa  t^te  au  bourreau.  La 
di^tresse  poussait  les  crois(te  au  fanatis- 
me :  oe  fanatisme  les  sauva. 

Ici  apparalt  la  saint6  lance,  la  m^me 
qui  aurail  perc^  le  flanc  du  Sauveur 
sur  la  montac^ne  du  Galvaire ,  et  qui  se 
sorait  trouv^e,  onze  sideles  apres,  a 
douze  pieds  sous  terre ,  dans  les  ionde- 
ments  d^une  eglise  d'Antioebe,  tout 
exprte  pour  sauver  les  debris  de  la 
croisade  et  pour  rendre  I'avantage  aux 
soldats  du  Cbrist.  Ce  miracle  fut-il  ima- 
ging par  Tastucieux  Raymond,  bless^ 
dans  son  amour-propre  et  dans  sou  es*' 

IS. 


S76 


rUNlVERS. 


prit  de  eottTOfitise  par  le  snoees  de  Fin- 
trigant  Bobemond  ?  Le  oomte  de  Tou- 
louse en  profita  en  effet ;  ayant  donn^  la 
relique  a  garder  a  Raymond  d'Agiles , 
son  cbapelain ,  il  tronva  son  benefice 
dans  les  oftrandes  qn'etle  attira ,  et  elle 
lui  servit  plus  tard  h  contester  la  pos- 
session d  Antioejie  au  prinee  de  Ta* 
rente;  car,  pretendait-if,  si  ce  dernier 
avail  pris  la  eapitale  de  la  Haute-Syrie , 
lui,  il  Pavait  delink,  grdce  a  son  strata- 
geme  pieux,  d*une  arm6e  assi^eante  qui 
allait  la  reprendre.  Raymond  de  Saint- 
GiJles  fill  le  premier  a  jurer  rautbentieit^ 
de  la  lance  divine.  Adh^mar,au  contraire, 
douta  d*abord ,  et  ne  sembia  se  ranger  de 
Tavis  des  fanatiques  que  lorsau'il  vit  que 
dans  la  detresse  g6n^rale  c^^tait  la  le 
seul  moyen  de  rendre  quelque  confianoe 
aux  ercHses.  Et  en  e£fet)  k  lire  toutes  les 
chroniquesdes  oontemporaius,  il  r^sulte 
que  la  tol  seule  dans  un  prodige  celeste 
pouvaitrallumer  Tespoirclanslecoeurdes 
Chretiens.  £coutons  done  ces  cr6dules 
et  naifs  temoins.  Voici  comment  Robert 
le  Moine  rapfwrte  I'origine  du  miracle  : 

«  Un  p^lerin,  du  nom  de  Bartb^lemy, 
s'adressa  au  peuple  assemble ,  et  lui 
parla  ainsi :  «  Peuple  de  Dieu ,  eeoute 
«  ma  voix :  tandis  que  les  croises  as- 
«  siegeaient  Antiocne ,  Taodtre  saint 
«  Andr^  m'apparut,  et  me  dit :  — Bon« 
«  homme,  eeoute  etcomprends-moi.  Je 
«  lui  r^pondis :  —  Qui  6tes-vous  ?  —  Tu 
«  vols  devanttoi,  poursuivit-il,  Tapdtre 
«  saint  Andre.  Le  saint  ajouta  :  —  Mon 
«  flls ,  quand  la  ville  sera  prise ,  tu  iras 
«  sur-le-champ  k  T^lisede  Saint-Pierre, 
«  et  dans  Tendroit  que  je  te  montrerai 
«  tu  trouveras  la  lance  avec  laquelle  on 
«  per^a  le  flanc  du  Sauveur.  \o\ik  ce 
«  que  m'a  dit  rap6tre.  Pour  moi,  je 
•  n*ai  voulu  parler  a  personne  de  ma 
«  vision ,  eroyant  que  ce  n'etail  qu'un 
«>  vain  songe ;  maiscettenuit  m^me saint 
<  Andr^  m*a  apparu  de  nouveau  y  en 
«  me  disant :  —  Viens,  et  je  te  mon- 
«  trerai  le  lieu  ou  la  lance  est  cach^e , 
«  comme  je  te  Pai  promis.  Hdte-toi  de 
«  ia  decouvrir;  car  la  victoire  doit  ae- 
«  compagner  ceux  qui  la  porteront.  » 

li  paralt  que  ce  fut  le  comte  de  Tou- 
louse qui  jSt  proceder  k  la  rechercbe  de 
la  sainte  lance ,  et  qu'il  assista  iui-m^ma 
a  eette  operation,  accompagn^  de  douze 
Qommissaires  cboisis  saos  doute  par 


lui.  Les  pioniiiers  employes  a  faiRb 
fouilles  travaillerent  inutilemeatMeli 
joum^.  Us  avaient  dfja  enakkm 
pieds  en  terre,  et  riea  n'appniaiL 
Eufin ,  la  nuit  venue,  les  ooninctt 
d^courag^ ,  k  comte  de  TovloaR  (M 
sorti  sous  un  pr^texte  de  sonefliK 
militaire,  les  portes  dePeglise  cM  # 
ses ,  selon  Taveu  mime  de  Rijiai 
d'Agiles,  rbomme-lige  du  conki 
Toulouse,  Pierre  BartiielemT,dacaii 
les  pieds  nus  et  en  cbemise  dan  b  te 
qu'on  avait  creus^.  T&odis  qoekte 
ti^ue  Marseillais  cherchait  la  laoeetM 
desiree,  le  petU  nombre^wm 
^tait  agenouille  et  priait.  •  Toai  i(nf 
le  Seigneur,  ajoute  RaymoDdlApiB, 
toucbe  de  la  pi^  de  ses  senitan, 
nous  montra  sa  lance  {lanceom  tm 
nobis  ostendU)\  et  moi  qui  men. 
aussitdt  que  le  fer  sacresoiiitieh 
terre,  je  le  baisaid^votemeotlMoiiH 
tus  turn  eum){*),  9 

La  ruse  6tait  grossiere,  elle  I'a 
r^ussit  pas  moins.  Le  peuple  dfif^ 
lerins,  a  vide  de  prodiges,  p  iMk 
des  miracles  nartont ,  am  siaiipii' 
qu'une  l^on  d'anges  halbilles^^ 
oombattait  de  temps  a  autre  mitIb 
croises ,  accepta  tout  d'oo  eoupa  W 
utile  qui  devait  le  sauver.  Od  pm* 
par  toute  la  ville  le  fer  saeii  Is^ 
s'enflammerent;  la  pi^terepritfeM 
sur  la  ddbauche  et  le  desefin* 
Anergic  febrile  redonna  desi>tf.' 
chacun.Cette  transformatioDfni^^ 
ment  un  miracle.  DansceU^eoM 

Senerale,  on  ne  chercha  pastes pR^ 
e  la  verity ,  on  Tadmit  d'entiiooo* 
Ce  ne  fut  que  plus  tard  que  les  |ito» 
cr^dules  contest^rent  raotbeoti^ 
la  lance  merveilleuse.  Alors.oa^ 
reellement  qu'elle  devait  po»wJ| 
tons  les  ennemis  du  Cbiist,  ^ 
croyance  rendait  aux  plus  timi»* 
courage,  aux  plus  abattiisder«v[|* 
aux  plus  d^sol^  de  Fespoir.  I^|*|* 
appelaient  le  combat,  lescfaffsir""^ 
de  ne  pas  abandonnerrariaeeai 
Tavoir  conduite  k  J^usaleiOt  toia 
rent  cette  ardeur  premiere  qui  •» 
naguere  lances  sur  TOrient.  Il »] 
pas  jusqu*a  Pierre  rErmitequioesei 

(*)  Voy.  Robert  le  Molne,  RM>i*J^ 
el  Raymond  d'Agiles,  HUL  iaFft9»,m 


SYRIE  MODBRNE. 


577 


sottvtnt  de  son  premier  rdle.  II  se  pro- 
posa  pour  6tre  depute  vers  les  Turcs, 
et  leur  offrir  soit  un  combat  singulier, 
soit  une  lutte  g^n^rale.  U  oarla  mime  a 
Ker  bo^ah  avec  tant  dlnsoieQce,  qu'il  se 
Gt  chasser  de  sa  prince  et  reuvoyer, 
heureusement  sans  avanies, li Antioche. 
Mais  en  traversant  le  eamp  musulman 
il  avait  9per^u  des  provisions  en  abon- 
danee,  desricbesses  k  profusion.  A  son 
retour  aupr^s  des  siens  il  promit  aux 
af&mes  de  quoi  se  nourrir ,  aux  besoi- 

Sneux  de  quoi  s*enrichir,  aux  piliards 
e  quoi  se  gorger ;  et  Tappflt  aune  si 
bonne  rapine,  joint  a  la  conGance  en  la 

f>rotection  cdeste,  acheva  d'entratner 
a  masse,  et  de  la  decider  h  la  bataille. 

DBLIVRAIfCB  DBS  GB0ISB8. 

Le  lendemain ,  jour  de  la  fSte  de  saint 
Pierre  et  saint  Paul ,  29  juin  1098 ,  tout 
^tait  prit  pour  le  combat.  On  avait 
trouve  la  veiile  un  reste  de  provisions  qui 
avait  M  distribue  a  tous  ||ss  soldats. 
Cbacun  entendit  la  messe  avec  une  fer- 
veur  profonde,  et,  apres  s*ltre  age- 
nouilledevant  le  Dieu  des  arm^es,chacun 
se  crut  pousse  et  soutenu  par  lui.  On 
forma  douze  l^ions  en  souvenir  des 
douze  ap6tre8 ;  on  esp6rait  que  chacune 
d'ellesauraitson  protecteur  celeste.  Tous 
les  chefs  se  mirent  a  la  tite  de  leurs  che- 
valiers. Hugues  de  Vermandois,  quoi- 
qu'a  peine  convalescent  d^une  longue 
maiadie,  portait  T^tendard  que  le  pape 
Urbain  1!  lui  avait  remis.  Adh^mar  de 
Monteil  commandait  le  bataillon  au  mi- 
lieu duquel  se  trouvait  le  labarvm  du 
jour,  la  sainte  lance.  Le  seul  Ravmond 
de  Saint-Gilles,  retenu  par  une  blessure 
grave,  devait  rester  a  Antioche  pour  con- 
ten  ir  au  besoin  la  gamison  de  la  cita- 
delle.  Toute  Farmee  d^Gla  dans  les  rues 
de  la  ville  avec  ordre  et  r^olution.  Les 
femmes  survivantes  encoura^eaient  les 
soldats,  les  vieillards  les  excitaient,  les 
prltres  les  b^nissaient.  Le  jeune  clerg^ 
accompagnait  en  armes  son  digne  chef 
Adhemar ,  et  chantait  le  cantique  mar- 
tial :  Que  le  Seigneur  se  l^e,  et  gne  set 
ennemis  soient  disperses.  Le  peuple  en- 
tier  r^pondait  a  chaque  verset :  Dieu  le 
teutl  Dieulevevt{*)I 


{*)  Toyex  Robert  le  Moioe,  et  Raymond  d'A- 
gUet,  toe,  eii . 


Lorsque  Tarm^  fut  sortie  des  portes 
d' Antioche,  tous  ceux  qui  etaient  restes 
dans  la  ville,  femmes,  enfants,  vieillards, 
invalides,  inGrmes,  monterent  sur  les 
remparta,  s^agenouill^rent ,  et ,  levant  les 
bras  au  ciel ,  implorerent  le  Tr^-Haut. 
Kerboghah  fut  tromp^  par  cette  appa- 
rence.  II  crut  que  les  Chretiens  venaient 
implorer  son  pardon  :  il  laissa  Tarmac, 
sans  I'inquifter ,  sortir  par  la  porte  prin- 
cipale  d*Antioche.  Cette  arm6e  ofTrait 
d'ailleurs  dans  la  plaine  un  singulier 
aspect.  Le  plus  grand  nombre  des  che- 
valiws,  a^^ant  perdu  leurs  chevaux,  al- 
laient  ^  pied.  Plusieurs  n*avaient  point 
d*armure.  Les  mieux  6quipes  montaient 
des  dues  ou  des  chameaux.  Dans  les 
rangs  des  legions  on  voyait  des  gens 
maigres,  pftles ,  portant  leurs  armes  avec 
peine.  De  loin  cette  arm^  semblait  d^ja 
vaincue ;  de  pr^s ,  en  voyant  la  mdle  as- 
surance 6crite  sur  tous  les  visages ,  elle 
paraissait  invincible.  Cette  vue  confirma 
rerreur  du  chef  musulman.  II  n*en  dis- 
posa  pas  moins  ses  troupes  en  Echelons, 
lormantquinze  corps.  Mais  apr^  avoir 
consid^r^  quelque  temps  la  marche  pd- 
nibleet  lentedes  crois6s,  il  retourna  dans 
sa  tente  continuer  une  partie  d*6checs 
commence. 

Cependant  I'avant-garde  chretienne, 
command^  par  le  comte  de  Vermandois, 
bouscula  deux  mille  Turcs  preposes  a 
la  garde  du  pontd*  Antioche.  Les  fuyards, 
en  se  rabattant  sur  le  centre  de  I  arm^e 
musulmane^  dessill^rent  enGn  les  yeux  de 
ieur  chef.  Get  homme  si  brave  fut  alors 
frapp(6  d*une  sorte  de  terreur.  II  savait 
que  la  discorde  ^tait  dans  son  camp , 
que  les  Turkomans  de  Redouan  ne  s'en- 
tendaient  pas  avec  les  Syriens  de  Dek- 
kak.  II  Gt  proposer  aux  crois^  un  com- 
bat singulier  entre  un  egal  nombre  de 
chevaliers  francs  et  de  cavaliers  turcs. 
II  ^tait  trop  tard  :  cette  proposition , 
qu'il  n^avait  pas  agr^e  la  veiile,  lui  fut 
refus6e  ^  son  tour.  II  lui  fallut  prendre 
son  parti ,  accepter  la  bataille  generale. 
II  onionna  alors.aux  ^mirs  d'Alep  et  de 
Damas  d*emmener  quinze  mille  hommes 
vers  le  port  Saint-Sim^n ,  de  facon  h 
prendre  les  Chretiens  par  derri^re,  et, 
selon  Texpression  ^nersique  d'un  histo- 
rien,  defa^on k  broyerKe peuple  de  Dieu 
entre  deux  meuks,  Ge  mouvement  eut 
lieu.  Bob^mond,  qui  6tait  k  la  t£te  du 


S78 


L'URlVfiRS. 


corps  de  reserve,  fut  presgue  ^ras^. 
Mais  d'un  autre  c6U  ies  Cbr^tiens  avaient 
d^j^  ravaotage. 

Tout  seunblait  favoriser  le  corps  prio- 
cipal  des  croises.  Uoe  ploie  i^ere  et 
locale  vint  rafralchir  pour  eux  Patmos- 
phere  brQlante.  A  sa  suite  ua  vent  vio- 
lent s^^leva ,  gui ,  Ies  prenant  par  der- 
ri^re ,  ne  Ies  inoommodait  pas ,  tandis 

2u'il  lan^it  des  ouages  de  poussiere 
ansles  yeux  deleurs  eoDemis.  Ge  vent, 
qu'ils  resard^rent  comme  une  faVeur  ce- 
leste, aidait  leurs  fleclies  dans  leur  cours 
et  diminuait  T^Ian  de  ceHes  des  Turcs. 
Aussi,  naalgre  leur  energie  premiere, 
cesderniersne  purent  longtempsresister 
au  choc  imp^tueux  de  Godefroy,  de  Tan- 
crede  et  de  leurs  chevaliers.  Les  Musul- 
mans  commirent  alors  une  faute  qui  leur 
fut  funeste.  Us  mirent  le  feu  a  des  mas- 
ses de  paille  et  de  foin  qui  remplissaient 
les  sillons  de  la  plaine;  mais  la  ^mee, 
loin  d'arrlter  les  Chretiens,  aeheva  ce 
qu'avait  commence  la  poussiere,  elie 
ayeugla  tous  les  Turcs.  Dans  la  confu- 
sion qui  r^ulta  de  cet  acte  desesp^re, 
plusieurs  ^irs ,  suivis  de  leurs  troupes, 

Siitterent  le  combat,  et  les  Turkomans 
cberent  pied.  Le  corps  principal  des 
Musulmans  etant  disperse ,  Kerboghah 
ayant  prisla  fuite,  tous  les  Chretiens  se 
retonrnerent  vers  ceux  qui  avaient  d*a- 
bord  fait  reculer  Bohemond,  et  les  mirent 
en  deroute  k  leur  tour.  Puis,  la  cavale- 
rie  ennemie  une  fois  vaincue,  on  eut  fa- 
cilement  raison  de  I'infanterie  turgue , 
qui  s'^taitr^fugi^e  dans  des  fortifications 
en  bois  auxquelies  on  mit  le  feu.  La  vie- 
toire  ^tait  complete,  les  croises  etaieut 
encore  une  fois  sauves  d*un  des  plus 
grands  perils  qu*ils  eussent  courus  jus- 
qu'alors. 

Avec  ce  trioraphe  tout  changea  pour 
la  croisade.  D'abord  on  trouva  dans  le 
camp  musulman  des  vivres,  des  armes, 
des  ravitaillements  de  toutes  especes, 
quinze  mille  chameaux  et  ohevaux,  sans 
compter  Tor  et  les  pierreries ,  les  robes 
de  soie  et  les  chdles  de  cachemire.  Puis 
ce  succes  prodigieux  ddcouragea  les  Mu- 
sulmans. Beaucoupd'entreeux ,  les  ado- 
rateurs  de  la  victoire  si  communs  en 
Orient,  se  Orent  Chretiens.  Les  defen- 
seurs  de  la  citadelle  offrirent  leur  sou- 
mission.  £nGn  les  differents  emirs  de 
la  Syrie ,  qui  ne  voyaient  dans  Tinvasion 


des  Oocidentaux  qu'iu  onge  \ 
dont  il  etait  plus  prudent  de  t'ecaitv 
tandis  qu*il  s^vissait,  resoluKBt  k 
rester  enferm^  dans  leurs  piaees  forte, 
et  ne  songereni  plus  a  s'oppostrila 
marcfae  de  ees  pelerios  armes,  fioet  it 
ciel  semblait  vouleir  le  tnemphe » 
mentane  (*). 

DISCOBDB  ,  BPIOBMIl,  BfiSSifiB 
BR  BOBOPB. 

A  peine  rassuressur  leur  amir, la 

Srinces  croises  repirirent  leur  caraetcn 
*orgueil  insense,  aesprit  ridicule  (fiDdt- 
peudance,  de  jalousie  indomplaUe.  Ii 
peuple  des  pelerins,  dans  son  boDseflM^ 
mandait  a  partir  immediateiDeot  {xnr 
Jerusalem  ,  ootnptant  avec  n\m  ^ 
les  Turcs  ne  mettraient  plus  d'oistaEk 
a  leur  marche.  Ge  n'^tait  pas  lafiiEin 
des  ambitieux  qui ,  envieux  de  lifiif 
tune  de  Baudonin,  mattred'£desK,fl 
de  Bohemond  f  maftre  d^AntiodKiCfaff* 
chaient  toin  autour  d'eux  quelque  priR 
a  d^vorer,  quelque  vilie  a  surpreuiL 
On  en  vlt  plusieurs  qui,  repraal 
leur  vie  d^aventures  etde  rapines,  ii^ii 
quails  menaient  en  Europe  au  ^ 
detriment  des  populations,  quitunrt 
la  ville,  suivis  de  leurs  bommei,f!lsA 
allerent  par  les  campagnes  oriotiii 
qu^tant  quelque  bon  coupafalie,^ 
que  petite  seigneurie  k  se  coa^' 
Plusieurs  s'^ar^rentquine  revia^ 
mais.  Ceux  qui  resterent  a  Anting 
v^curen t  pas  pour  oela  en  meillettit  v 
ligence.  Dans  leur  reunion  chacuBci^ 
tait  unavis  different.  Gontradietiott|* 
lesvues,  rivalit^  dans  les  coeant^ 
le  spectacle  deplorable  qu'offraicBnii 
leurs  conseils  de  guerre.  Raymov  i 
Toulouse  Burtout  ne  pouvait  panM 
au  prince  de  Tarente  le  succes  de  la  rtf 
qui  Tavait  fait  possesseur  d'AnUov 
A  tout  instant  il  Tattaquait  daas « 
opuiions,  il  denooQaitses  ioteoMSi 
il  calomniait  ses  actes.  II  evt  ^ 
faire ,  le  fin  Normand  ne  se  iaisn  m 
dominer  par  le  haineux  Provencal.  U 
conquSte  de  Bohemond  ^iltropW 
pour  qu'il  ne  silt  pas  la  defeodre  i^ , 
autantdMiabilete  qu'il  avail  mis defiaes*  | 
a  se  la  faire  adjuger.  i 

(*)  Voyei  Kemal-Eddin ,  UitU/in  fd^ 


SYRIE  M0DERI9E. 


27tf 


Cesdiscassions  interieores ,  atissi  sta- 
les qae  proloDg^es,  einployirent  bien 
»  jours  preeieux.  On  avait  mis  neuf 
ois  a  prendre  Antioche ,  on  en  laissa 
utilement  ^uler  plus  de  trois  encore 
105  se9  murs.  Mais  sMl  n'y  ayait  eu 
leperte  de  temps,  le  mal  edt  ^te  r6- 
irabie.  Malheureusement  ToisiTete  des 
idats ,  rabondaoee  dont  tia  abusdrent 
ffime  toujourt,  la  negligence  des 
"aocs  h  assainir  ane  ville  oil  les  meur- 
Bs  s'^taient  sncc^^  si  lonetemps, 
ihalaison  putride  de  tant  de  cada- 
H  mat  enterres,  Taction  d*un  soleil 
ftlant  sur  tant  d'iinpuretes  r^nies, 
nn^nt  naissanc^  a  une  epidemic 
)leflte  qui  enleva  les  croises  par  mil- 
rs.  t 

Danscett&nouvene  calamity,  le  digne 
igue  dn  Puy ,  Adh^mar  de  Monteil , 
iBontra  aussi  d^vou^  k  ses  fireres  qu'il 
lit  M  brave  dans  les  combats.  11 
multipliait  pour  porter  des  seeours 
tOQtes  sortes  aux  malbeureux  attetnta 
^la  maladie.  II  se  montrait  k  la  fois 
Mecin  du  corps  et  mddecin  de  Tdme. 

Eirtait  aux  uns  les  rem^es  que  son 
enee  Jut  dictait,  aux  autres  lea 
■olations  religieuses  que  sa  foi 
inspirait.  fiDfin  il  en  fit  tant^  it  se 
Igua  tellement,  que,  frappe  k  son 
V  par  la  contagion  r6gnante,  il  ne 
It  pas  a  sucGomber  sons  le  poids  dea 
ids  devoirs  qu'il  s'^ait  imposes ,  des 
iifs  <|u*il  avait  brav^  avec  une  trop 
taM  intrepidity,  avec  une  trop  eom- 
la  abnegation.  Uarm^e  le  pleura  sin- 
imettt.  U  meritait  ces  larmes ;  car  il 
k  M  aussi  noble  par  la  pensee  que 
'faction  ^  aussi  desinteresse ,  aussi 
ireox,  que  tant  d'autres  s'^taient 
^Ms  egoistes  et  avides.  Avec  lui 
Mterra  la  vertu ,  sinon  la  vaillance 
ia  croisade.  Seul  repr^senunt  du 
t^  veritable  chef  en  Orient  de  la  re- 
in catholique, dont  rinterdt  etait  en 
16,  ii  emportait  dans  la  tombe  Tilme 
'expedition ,  poor  ainsi  dire ,  ee  qui 
rait  la  sanetifier  plus  tard ,  oe  qui 
lit  arreiee  si  souvent  dans  ses  mon«- 
ex  desordree.  Pierre  rRrmite  n'etait 
la  fou ,  Adhemar  etait  un  sage.  Ge 
le  fou  qui  survecnt  pour  redevenir  le 
dpal  membre  du  clerg^  pelerin  apres 
Nirt  de  celui  qu'Urbain  II,  dans  sa 
!sse ,  avait  prefer^  au  fanatique  pro- 


moteur  de  la  guerre  sainte  pour  deiegue 
de  sa  haute  autorite  morale. 

Cette  perte,  si  sensible  a  tons,  semble 
m^me  avoir  fait  chanceler  la  r^solutiQu 
des  croises.  Ge  fut  a  dater  de  ce  funeste 
eveneroent  qu'ils  ecrivirent  en  Europe 
pour  demander  des  renforts ,  et  mime 
la  presence  du  pape.  II  y  a  bien  encore 
dans  leurs  lettres  la  vanite  et  Tarrogance 
de  Tepoque ;  ils  s'efforcent  bien  de  met- 
tre  a  couvert,  tant  quMls  peuvent,  leur 
orgueil  natif;  ils  savent  toujours  exa- 
gerer  leurs  exploits  et  centupler  les  de- 
sastres  de  leurs  ennemis  :  et  cependant 
il  regne  dans  cette  correspondance  un 
ton  de  doleance  bien  significatif  de  la 
part  de  ^ens  qui  croyaient  tout  vaincre 
en  paraissant,  tout  surmonter  en  per- 
severant ,  tout  executer  en  voulant.  Les 
pretres  ecrivirent  aussi  bien  que  les  sol- 
dats.  Tons  sembierent  d'accord  pour 
reclamer  des  seeours ;  plusieurs  de  leurs 
missives  meme  sont  collectives ,  et  of- 
£rent  une  parfaite  conformite  de  vceux , 
une  entente  reelle  et  cordiale,  chose  rare 
parmi  les  croises.  Le  patriarche  d' An- 
tioche et  les  evlques  de  Texpedition  s'a- 
dresserent  au  clerge  d'Occident.  lis  se 
montrerent  d'abord  aussi  vantards  que 
les  chevaliers  les  plus  orgueilleux ;  voici 
un  ecbantillon  oe  leurs  hyperboles  : 
«  La  perte  de  Tennemi  a  ete  miile  fois 
«  plus  considerable  que  la  ndtre.  La  ou 
«  nous  avons  perdu  un  comte  il  a  perdu 
«  guar  ante  roU ;  ou  nous  avons  perdu 
•t  une  poignee  d'bommes  il  a  perdu  une 
«  legion  entiere;  oQ  nous  avons  laisse 
c  un  soldat  il  a  laisse  un  chef;  entin  , 
«  ou  nous  avons  perdu  un  camp  il  a 
«  perdu  un  royaume.  »  Malgre  cette 
enumeration  toute  gasconne  de  la  valeur 
chretienne,  les  prelats  n'en  terminent 
pas  moins  leur  lettre  par  ces  mots,  qui 
prouvent  a  quelle  extremite  ils  devaient 
etre  reduits  pour  abuser  a  ce  point  des 
menaces  eplscopales  :  «  Dans  la  maison 
«  ou  il  y  a  deux  hommes ,  que  le  plus 
' «  propre  a  la  guerre  prenne  immedia- 
«  tement  les  armes,  surtout  ceux  qui  ont 
a  fait  des  vocux  (de  croisade);  car  s'ils 
«  ne  se  rendent  ici  pour  les  accomplir 
<  (en  Syrie),  nous  les  excommunions, 
«  et  nous  le«  eioi^nons  de  la  societe 
«  des  fideles.  Patnarches  apostoliques 
«  eteveques,faitesensortequ*il880ient 
«  mime  prives  de  la  sepulture  apres 


MO 


L'UNIVERS. 


«  leur  niort,  sHls  n*o]it  une  cause  va- 
«  lable  pour  rester  (*).  » 

Lalettre  des  chevaliers  n^estpasmoins 
pressante  que  celle  des  pr6lats ;  on  y  re- 
marque  en  outre  la  singuli^re  nouvelle 
que  votci  :  «  Apprenez  aue  le  roi  de 
«  Perse  (Berkiarok,  le  nis  de  Melik- 
«  Shah ,  sans  doute, )  nous  a  envoys  un 
«  message  par  lequel  il  nous  previent  de 
«  rintention  ou  il  est  de  nous  livrer  ba- 
«  tailie  vers  la  fSte  de  la  Toussaint.  S'il 
«  est  vainqueur,  son  dessein,  dit-il,  est, 
«  avec  Taide  du  roi  de  Babylone  ( le 
«  khalife  abbasside  de  Bagdacl ) ,  et  de 
«  plusieurs  autres  princes,  de  faire  une 
«  guerre  sans  relache  aux  Chretiens ; 
«  mais  s*il  est  battu  il  veut  se  faire 
«  baptiser  avec  tons  oeux  que  pourra 
«  entrafner  son  exemple.  »  On  ne  pent 
expliquer,  de  la  part  d'un  sultan,  la 
promesse  de  se  laire  baptiser  en  cas 
dMnsucces  (si  cette  promesse  exlsta  ja* 
mais),  que  sous  forme  d'ironie,  d*im- 
possibilit^  tenement  complete,  qu'il  n*y 
avait  que  la  naivete  des  barons  Chre- 
tiens pour  s*y  m^prendre,  a  moins  que 
ce  ne  soitde  leur  part  finesse  d'inter* 
pr^tation,  ou  plutdt  invention   pure. 

En  m^me  temps  que  les  crois^s  expe- 
diaient  leurs  messages  ambigus  en  Eu- 
rope ,  ils  envoyaient  une  ambassade  a 
Constantinople,  compost  du  comte  de 
Vermandois  et  du  comte  de  Hainault. 
Cette  ambassade  avait  aussi  pour  but 
de  r^clamer  des  secours.  £lle  devait  rap- 
peler  k  Tempereur  Alexis  Comn^ne  qu^ii 
avait  promis  de  suivre  les  croises  h  Je- 
rusalem ,  et  de  les  foumir  de  vivres  et  de 
munitions  detoutes  especes.  Malheureu- 
sement  le  choix  des  ambassadeurs  ^tait 
mauvais.  L'un  6tait  un  imprudent,  Tautre 
tin  insoucieux.  Le  comte  de  Hainault , 
pres(]ue arrive  au  terme  de  son  voyage, 
se  laissa  prendre  paries  Turkomans  dans 
les  montagnes  qui  entourent  Nic^e,  et 
disparut  a  tout  jamais.  Le  comte  de 
Vermandois,  h  peine  parvenu  h  Cons- 
tantinople, oublia  dans  ies  d61ices  de 
cette  capitale  Tobjet  de  sa  mission  et 
ceux  qui  la  lui  avaient  confine.  II  ne  prit 
pas  ni^me  la  peine  de  leurrendre  compte 
de  son  ambassade ,  et ,  apr^  quelques 
jours  de  repos  et  de  festoyement,  if  re- 

^  (*)  Vovex  Michaod,  HuMredes  Cnniadet, 
toiM  I,  Piteet  JuaUiicative*. 


touraa  en  France,  emportant  le  mepris 
de  ses  anciens  compagnons  d*armes ,  et 
oonservant  jusqu'a  sa  mort  le  sobriquet 
aue  lui  valut  sa  desertion  :  Corbeau  de 
tarche.  Ainsi  tombe  par  une  lichet^ 
finale  cette  reputation  de  bravoure,  de 
loyaute,  de  grandeur  que  quelques  cod- 
temporains  out  voulu  raire  au  rreresans 
talent  et  sans  vertu  du  deplorable  Phi- 
lippe L  Brave  par  boutade,  loyal  tant 
que  son  interet  y  est  engage,  grand  par 
la  tailie  seulement,  Hugues,  comte  de 
Vermandois,  est  le  type  de  ces  tStes 
creuses ,  de  ces  consciences  larges ,  de 
ces  coeurs  sans  elevation  qui  furent  la 
bonte  du  onzieme  siecle  (*). 

GONDmTB  GRUBLLB  BT   DBPLORABLB 
DBS  CROISES. 

Les  croises  avaient  perdu  neuf  mois 
devant  Antioche,  ils  en  perdirent  buit 
encore  dans  ses  murs.  Jusqu*a  leur  ar- 
rivee  a  Jerusalem ,  leur  conduite  ofFre 
une  monotonie  de  misere ,  de  d^rdre, 
de  superstition,  de  discorde,  veritable- 
ment  tatigante.  Les  chefs  se  montrereut 
encore  pires  que  les  soldats.  Sous  le  pre- 
texte  de  se.  reposer  de  leurs  precedentes 
fatigues,  ils  avaient  resisteaux  voeux 
des  peierins,  qui  voulaient  avant  tout 
parvenir  au  but  de  leur  expedition ,  en- 
trer  dans  la  ville  sainte.  L'epidemie 
qui  ravagea  Antioche  fit  enfin  sortir 
les  princes  et  les  barons  de  leur  funeste 
oisivete.  lis  quitterent  alors  une  ville 
empestee ;  mais  ce  fut  pour  se  disper- 
ser  a  Fa  venture,  pour  alter  ravager  ei 
piller  de  tons  cdtes.  Bohemond  sedTrigea 
vers  le  nord  :  il  songeait  deja  a  arrondir 
sa  principaute  d*Antioche ;  il  prit  tour 
a  tour  possession  de  Tarse,  de  Malmis- 
tra,  place  deja  ceiebre  dans  la  croisade 
par  les  disputes  sanglantes  de  Tancrede 
et  de  Baudouin.  Son  perpetuel  rival  Bay- 
mondde  Toulouse  penetra  dans  la  Syrie, 
et  s'empara  d*Albaree,  gull  mit  a  sac. 
L'exemple  que  donnaient  les  prinoes 
fut  suivi  par  les  baron».  II  n'y  avait  pas 
.  de  jour  qu'il  ne  s'en  eehappflt  qgudques* 
uns  de  la  malheureuse  Antioche,  cou- 
rant  la  campagne  avec  leurs  partisans 
Gomme  des  loups  rddeurs,  flairant  au 

(*)  Voyei  de  Sismondl,  Nittoire  det  Fran- 
fou;  et  Albert  d'Alx,  HUloire  de  Vexpedi- 
Uon  de  JermaUm, 


SYRIE  MODERJ^E. 


381 


loio  le  carnage,  et  s*ehtre*devorant  pour 
se  disputer  les  morceaux  de  leurs  victi- 
mes.  On  ne  rencontrait  plus  ni  ordre ,  ni 
eosemble ,  ni  apparence  mSine  de  disci* 
plioe  dans  ces  bandesde  barbares,  n'ayant 
d^autre  idee  que  le  nieurtre,  d'autre  but 
que  la  rapine ,  repus  aujourd*hui ,  affa- 
mes  demain,  ^4i;orgeant  ou  egorg^  tour 
a  tour.  Tandisque  tout  soldatde  la  croi- 
sade  devenait  brigand,  lesp^lerins,  man- 
quant  de  direction ,  sans  chef  et  sans 
iois,  n'avaient  plus  reeours  que  dans  le 
ciel ,  s'abandonnaient  aux  superstitions 
les  plus  grossieres,  voyaient  en  tout 
ph^nomene  un  miracle,  en  tout  fanati- 
que  un  illuming.  Les  apparitions  recom- 
menc^rent,  et  cbaque  imposteur  trouva 
des  dupes.  Une  nuit,  des  sentinelies  aper- 
curent  un  m^t^re  formant  une  masse 
lumineuse  qui,  apres  avoir  brill^  quel- 
que  temps  et  efface  la  clart^  des  ^toiles, 
se  dispersa  tout  a  coup  sous  la  vodte 
eth^ree.  Les  uns  crurent  que  les  ^toiles 
s'^tatent  r^unies  en  un  groupe  compact 
pour  indiuuer  aux  croislra  le  rassemble- 
ment  de  leurs  ennemis  a  Jerusalem. 
D'autres  interpr^taient  diffi^remment 
ce  ph^noro^ne,  et  croyaient  qu'il  slgni- 
fiaJt  la  reunion  des  Chretiens  devant  la 
villesaiote,  et  leur  diss^minement  en- 
suite  pour  la  conuulte  des  autres  yillet 
de  la  Palestine.  D^autres  enfin ,  qui  ne 
conservaient  plus  aucun  es|>oir  de  suc- 
ces,  n'expliquaient  la  dispersion  des  feux 
celestes  que  comme  un  embldme  de  la 
disparition  successive  des  crois^s. 

Quoi  qu*il  en  soit  de  ces  sentiments 
divers,  ii  n'en  r^ulta  pas  moins  un  en- 
tratnement  plus  C4)nsiderable  de  gens 
a  la  suite  du  comte  de  Toulouse  et  da 
prince  de  Tarente,  qui  avaient  r^ni  de 
nouveau  leurs  forces  pour  marcher  en 
avant  Gette  troupe,  plus  nombreuse 
que  celle  qui  avait  prtodemment  quitt^ 
Antioche,  se  dirigea  sur  Marcah  ,  ville 
situ^e  entre  Haroan  et  Alep ,  au  sud-est 
d* Antioche.  Les  assiegeants  rencontr^- 
rent  une  defense  vigoureuse.  Toutes  les 
fois  qu'ils  essayaient  un  assaut,  on  les 
arrStait  par  une  grdle  de  pierres ,  par 
line  pluie  de  bitume  enflamm^,  par  des 
torrents  de  chaux  vive.  Gette  r^istance 
exasp^ra  les  assiegeants ;  et ,  lorsqu'a- 
pres  plasieurs  semaines  de  combat  ils 
86  furent  emparte  de  ia  place ,  ils  en 
massacr^rent  tous  les  habitants  sans 


acception  d'dge  ni  de  sexe.  Laissons 
parler  un  t^moin  oculaire,  Robert  le 
Moine  :  «  Les  ndtres  parcouraient  les 
rues ,  les  places « les  toits  des  maisons, 
se  rassasiant  de  carnage  comme  unf/ 
lionne  a  qui  on  a  enleve  ses  petits ;  ils 
taillaient  en  pieces  et  mettaient  h  mort 
les  enfants,  les  jeunes  gens,  et  les  vieil- 
lards  cburbes  sous  le  poids  des  annees ; 
ils  n'epaKnaient  personne^  et  pour  avoir 
plus  tot  fait ,  ils  en  pendaient  piusieurs 
a  la  fois  a  la  m^me  corde.  Chose  ^ton- 
nante!  spectacle  Strange  de  voir  cette 
multitude  si  nombreuse  et  si  bien  armee 
se  laisser  tuer  impun^ment ,  sans  qu*au- 
cun  d*eux  fit  resistance !  Les  ndtres  s'em- 
paraient  de  tout  ce  qu'ils  trouvaient ;  ils 
ouvraient  le  ventre  aux  morts ,  et  en  ti- 
raient  des  byzantins  et  des  pieces  d*or. 
O  detestable  cupidite  de  Tor!  des  ruis- 
seaux  de  sang  couraient  dans  toutes  les 
rues  de  la  ville ,  et  tout  etait  joncbe  de 
cadavres.  O  nations  aveugles  et  toutes 
destinees  a  la  mort!  De  cette  grande 
multitude  il  n'y  en  eut  pas  un  seul  qui 
vouldt  confesser  la  foi  chretienne.  Enfin 
Bohemoud  fit  venir  tous  ceux  qu'il  avait 
invites  a  se  renfermer  dans  la  tour  du 
palais;  il  ordonna  de  tuer  les  vieilles 
temmes,  les  vieillards  decrepits  et  ceux 
jue  la  faiblesse  de  leurs  corps  rendait 
mutiles;  il  fit  rdserver  les  adultes  en  dge 
de  puberte  et  au-dessus,  les  honimes 
vigoureux,  et  ordonna  qu'ils  fussent 
conduits  a  Antioche  pour  etre  vendus. 
Ce  massacre  des  Turcs  eut  lieu  le  13  de- 
cembre,  jour  du  dimanche;  cependant 
tout  ne  put  etre  fait  ce  jour-l^  :  le  len- 
demain  les  ndtres  tuerent  le  reste  (*).  » 
La  cruaute  des  croises  avait  etc  aussi 
imprevoyante  qu'atroce.  La  terreur 
qu  ils  inspirerent,  au  lieu  d'attirer  k  eux 
les  populations  d^alentour,  les  fit  au. 
oontraire  fuir  au  loin.  N'ayant  done 
pas  trouve  de  vivres  dans  la  viile,  ils  fu- 
rent bient6t  r^duits  a  d^vorer  les  cada- 
vres de  leurs  victimes.  Au  milieu  de  ces 
scenes  d'une  barbarie  hideuse,  il  y  eut 
encore  place  dans  certains  coeurs  pour 
Tambition  etTenvie.  Bohemond  et  Ray* 
mond  se  disputerent  ce  diamp  de  car- 
nage et  dJhorreur.  Enfin  le  scandale 
Alt  tel,  que  Farmee,  poussee  k  bout, 


(*J  Yoyei  aobert  le  Moloe,  SUtaire  ie  J4- 
nualem. 


283 


LUfOViiJiS. 


pleine  de  mepris  poar  des  chefr  avides 
jusqu*a  la  rage,  resolut  de  d^truire  I'ob- 
jet  de  leur  oontestatioQ  fratricide.  Eile 
abandonna  toot  d  coup  les  etendards 
des  deax  riTBux,  et  emplova  toutes  ses 
forces  a  raser  les  murs,  a  abattre  les 
tours,  a  detmire  les  fortifications  d'une 
Yille  qu'elle  avait  eu  tant  de  peine  a 

(prendre.  Bob^mond  quitta  le  premier 
a  partie,  et  Raymond,  pour  se  rcfaabiliter 
quel^ue  peu  dans  Tesprit  de  ses  propres 
sujets,  feigDit  le  repeotir,  pleura  sa 
faute ,  et  sortit ,  pieds  nus,  au  chant  des 
cantiques ,  de  la  eit^  a  laquelle  ii  avait 
mis  le  feu. 

Gependant  si  deux  des  cbefs  prind- 
paux  de  la  croisade  se  conduisaieat 
a?ec  autaot  d'indigoit^  que  de  folic, 
Godefroy  de  Bouillon  Iui-m6me  sem- 
blait  pris  du  vertige  commun.  Demeur^ 
a'Antioche,  il  avait  perdu  son  temps  a 
s*allier  h  un  ^mir  rebelle  des  environs 
d'Alep.  En  traitant  avec  lui,  il  lui  avait 
inutilement  donn^  une  importance  mo* 
mentan^ ;  rien  ne  resulta  et  ne  pouvait 
resulter  de  ce  rapprochement  sans  va- 
leur.  Godefroy  fit  une  exp^ition  sans 
port^e  pour  sauver  son  infime  alli^  de 
la  vengeance  de  son  mattre;  puis  il 
poussa  plqs  tard  jusqu'^  £desse,  pour 
rendre  visite  a  son  frere  Baudouin.  Ge 
dernier  acte  prouvait  que  le  sens  fhoral 
«t  la  perseverance  politique  manquaient 
h  la  fois  au  due  de  la  Basse-Lorraine* 
11  avait  naguere  reproche  justement  h 
son  fr^re  sa  desertion  interess^e ,  et  il 
semblait  la  justifler  maintenant  en  allant 
amicalement  aupres  decelui  qui  lui  avail 
desobei  en  se  d^shonorant,  et  qui  n'avail 
pas  voulu  faire  amende  honorable  de  son 
crime  militaire.  II  avait  appris  ensuite 
que  Baudouin  tyrannisait  ses  nouveaux 
sujets;  et  c'etait  absoudre  sa  conduite 
que  de  venir  lui  apporter  Tappui  de  sa 
renomm^e  personnelle  et  de  ses  troupes. 
Ainsi  les  meilleurs  d'entre  les  crois^s 
commettaient  faute  sur  faute,  et  mon* 
traient  d'ailleurs  une  indifference  cou- 
pable  pour  le  but  sacre  de  leur  entrc- 
prise  (•). 

Le  peuple  cependant  montra  plus  de 
volonte ,  de  suite  dans  les  idees  et  de 
resolution  que  les  seigneurs  fiftodaux.  II 


{*)  Yoyu  Raymond  d'Aglln,  tiUL  du  Fntnes 
qui  prirent  Jerutalem. 


fit  ^  ces  demios  tant  de  npockK, 
tant  de  reclamations ,  tant  de  prims, 
meiees  de  menaces  parfois,  qv^il  la 
eootraignit  a  se  dinger  eofinstirJai- 
salem.   Le  peuple  avait  nan : « 
avait  deja  trop  tarde  i  profiler  deiw 
toires  de  la  croix,  on  avait  trop  tiAl 
completer  la  defaiteducroissaittto 
rase  et  humilie  devant  AntiodK.  ||ri 
qu  il  en  soit,  les  premiers  pisdeM 
cbretieone  ^rent  beureiu.  Usppf^^ 
tions ,  soit  ierreur ,  soit  syiDfMtlw,  il 
rent    au-devant  d^elle,  lid  ajiftfttl.- 
des  grains ,  lui  amenaDtdestrouM 
la  defrayaot  et  rhebergeaDt  (tasjl 
villages.  Le  printemps  de  fasir  *'■" 
etait  d'ailleurs  aussi  beau  que 
avait  ete  mauvais.  Les  crolses  b'i 
a  souffrir  ni  de  la  cbaleur  ai  de  U 
et  ils  ne  trouverent  des  eBoein 
devant  la  place  d'Archas, »  H 
cliaine  Li&nique,  au  dela  d'CosAi 
Hamah. 

Get  obstacle  pensa  les  arritf 
nouveau,  et  leur  faire  pefdiefi 
la  plus  favorable  a  Is  loogtic  ■ 
qu'ilsavaientenooreadlaetaer.Ui 

elevee  sur  des  rochers  esarpttt 
defendue  par  de  bonnes  mvmi»ti 
a  leurs  premiers  efforts,  llsr 
k  la  prendre  par  la  force,  et 
a  la  tiaire  capituler  par  la  bBU^ 
le  moyen  qu'ils  essajereotr^ 
assieges  touma  bientot  oonv 
mes.  Forces  de  rester  ai^^ja 
place,  afin  de  la  tenir  to«i«»*B 
mentinvestie,  ils  nepureat*|i^ 
rer  de  vivres  par  des  cijwdio* 
lielles ;  etcommeils  n'avaientf*' 
appris  h  se  munir  de  provisMtfi 
trouverent  bientdt  au  depajji^ 
leur  ialliit  se  nouriir  d'twrni / 
radnes  comma  en  Asie  UitMH^^ 
au  siege  d'Antioebe.  Les 
attendaient  avec  des  ravitaiU 
tarderent  d'atUeurs  I  ve&ir.  As 
voler  au  secoura  de  leurs  firWi' 
mond  et  Raymond  s'amosaiesl* 
toutes  les  cites  qu'ils  reacootnHp 
une  fois  ees  cites  prises,  i^  s^* 
talent,  selon  leur  babitode, bP 
sion  les  armes  li  la  main.  ApresU* 
ee  fut  Djebileb ,  puis  Tortose,  M 
points  fortifies  du  littoral,  w»» 
avatent  laiase  queiques  bonoei  «■ 
'      I  et  qui  offraieot  auxic«*" 


SYRIE  MODERNE. 


28$ 


mmn  uoe  ehance  de  pillage  actuel 
un  agraadissement  futar  de  leurs 
sessions. 

ks  souffrances  morteiles  eurent  done 
«iD|»  d^atteindre  un  grand  nombre 
^leriosetde  soldatsdu  corps  prin- 
il  de  rarni6e;  tandis  que  Parri^re- 
de  8*inquietait  a  peine  de  venir  en 
li  ses  eompagnons,  qui  Tattendaient 
npatiemmeot.  Avec  la  faim  la  dis- 
ie ,  la  liceoee ,  le  fanatisme  reparu- 
tpanai  les  erois^.  Ge  dernier  viee 
•m^e  des  proportions  de  plus  en 
tinqui^lantes.  On  ne  parlait  que  d'ap- 
tioiissurnaturelles.  Tantot  c*^taient 
laints  du  Paradis;  tantdt  des  vic- 
•  de  Texpedition  sainte.  Les  una 
eadat^Qt  du  del  pour  encourager 
Merins ;  lea  autres  pour  les  engager 
u>oe«r'a  un  projet  trop  pehlleux 
op  diffieile.  Les  vivants  faisaient 
r  les  morta  selon  leurs  interlts  ou 
fasfjons.  Puis  toutes  les  supersti- 
t,  qui  toor  k  tour  avaient  ete  accep- 
Bir  la  multitude ,  reprirent  aveo 
hrdeur  que  jamais.  Parmi  ces  su- 
iions,  celle  de  la  sainte  lance  ^tait 
iMlpate.  Elle  trouva  pourtant  de 
(«ax  ineredules.  Lea  Normanda 
•aient  d'etre une  invention  des  Pro- 
fee  Les  ProTen^aux  ripostaient  en 
ttnt  qu'ils  avaient  vu  Adh^mar  de 
111  leur  apparaftre  avec  la  barbe  k 
Ibr^lief  la  face.bl^me  ^t  trisle»  et  de- 
t  qu'ii  revenait  de  fenfer ,  eu  il  avait 
iwlques  jours  pour  avoir  doute  de 
atticit^  de  rarme  sacreeC*). 
le  deruiere  imposture  exasp^ra 
inanda.  lis  accus^^eut  les  Pro- 
«  d'etre  des  fourbes,  qui  troin- 
le  peuple  pour  lui  arraclier  de 
t  et  le  eonduire  a  leur  guise.  lis 
t;  positiYement  la  saintet^  de  la 
Muvee  dans  I'^lise  de  Saint- 
d'Autioc^e,  et  pour  terminer 
It  il  fallut  que  le  malbeureux 
qui  s'^tait  pr^t^  a  la  com^die 
if  Raymond,  Barth^leroydeMar- 
te  deeiddt  a  accepter  Tepreuve 
Cet  acte  de  barbarie  eut  lieu  avec 
grande  pompe  et  la  plus  com- 
leonite.  Tous  les  p^lerms  se  reu- 
mtour  du  foyer ,  form^  de  bran- 


ches d*olivier ,  et  place  an  centre  d'une 
vaate  nlaine.  Puis  vint,  pr^dde  du  clerge  f 
en  habits  sacerdotaux ,  le  pauvre  fana* 
tique,  tenant  a  la  main  la  fameuse  lance 
dontle  fer  etait  renferm^  dans  une  ^atne 
en  sole,  precaution  assez  ingenieuse 
pourle  garantir  autant  que  possible  des 
atteintes  de  la  flamme.  Bartn^lemy  tra- 
versa  le  foyer  sans  ^tre  immediatement 
asphyxia  ou  carbonise.  On  cria  au  mi- 
racle, on  Tentoura,  bn  le  pressa  da 
toutes  parts  et  si  bien,  qu*il  mourut 
etouff^  selon  les  uns^  k  la  suite  de  sea 
blessures  selon  d'autres.  Malgr^cedemi- 
succ^,  la  lance  pretend ue  sainte  cessa 
pen  a  pen  de  devenir  une  relique ,  d'oe* 
casionner  des  prodiges,  et  surtout  de 
rapporter  de  Targent  (*). 

Toutes  ces  disputes,  toutes  cesfolies, 
employerent  un  temps  precieux.  L'ar- 
riere-garde,  arriv^e  ennn,  n*amenait 
pas  avec  elle  des  machines  de  si^e  ca- 
pables  d'dtre  utilisees  devant  Archas. 
Les  crois^  ne  purent  done  pas  encore 
essayer  autre  chose  que  de  faire  rendre 
la  place  par  famine.  D'instant  en  ins- 
tant lis  esperaient  d^urager  les  assie- 
g^,  et  lis  prolongeaieut  leur  s^jour.  II 
ne  fallut  pas  moins  qu'une  nouvelle  pr^ 
tention  de  l*empereur  de  Constantinople 
et  une  nouvelle  provocation  du  kbalife  du 
Gaire,  pour  faire  prendre  un  parti  decisif 
a  Tarmee  retombee  dans  son  apathie  ac- 
coutumee.  Alexis  redama  par  lettres 
Tex^cution  du  traite  pass^  entre  les  croi- 
s^s  et  lui,  c'est-^-dire  demanda  qu'on  lui 
remit  les  villes  conquises en  Asie-Mlneure 
et  en  Syrie  par  les  Francs.  On  lui  r^ 
pondit  comme  il  le  m^ritalt,  en  repoua* 
sant  toute  pretention  de  sa  part,  et  eo.  lui 
reprochant  la  Idchet^  qu'il  avait  montreb 
dans  son  abandon  de  Tarmee  cbr^tiennd 
k  son  premier  revers.  Le  khalife  du 
Raire  proposa  de  nouveau  aux  crois^s  de 
les  recevoJr  sans  armes  dans  les  murs 
de  Jerusalem ,  et  leur  conseilla  de  re* 
noncer  k  s'emparer  de  la  cite  sainte  par 
la  force.  Ge  defi  d^ida  les  croises.  Us 
n'attendirent  pas  plus  longtemps  la 
reddition  d'Arcnas,  ville  d'aitleurs  sans 
veritable  importance ,  brAl^rent  le  camp 
oCi  ils  venaient  encore  de  supporter  tant 
de  maux ,  et  s'aebeminerent  vers  Jeru- 


»  Raottl  de  CacD  ,  les  Gettes  de  Tan- 


(•)    Voyez   Raymond  d'Agiles,    M«/.  dies 
Franci  qui  prirent  Jiruialem. 


S64 


L'UNIVERS. 


salem,  pleios  d'enthousiasme,  et  malgr^ 
Topposition  de  Raj^mond  de  Toulouse , 
qui  voyaitavec  depit  une  nouvellq  proie 
lui  echapper. 

ARBrVBB  DBS  GBOISBS  DEYANT  JBBU- 
SALBM. 

Le  sentiment' moitie  chevaleresque , 
moiti^  religieux,  qui  entraina  d^finiti- 
vement  les  crois6s  vers  Jerusalem ,  pro- 
duisit  un  ^rand  bien ,  et  fiit  heureuse- 
ment  exploit^  par  les  chefs  de  rexp6di- 
tion.  Grace  aux  exhortations  des  pr^tres 
et  aux  efforts  des  chevaliers,  une  sorte 
de  discipline  s*6tablit  dans  la  marche 
des  p^lerins.  Les  etendards,  suivis  des 
cavaliers  ,  pr^oMaient  la  colonne.  Ve- 
naient  ensuite  les  divers  corps  de  rarm^ 
avec  les  bagages  au  centre.  Enfin  le  clerg6 
et  la  foule  non  arm^suivaient  i*arri^re- 
garde  en  groupes  serr^.  Ges  derniers 
auraient  pii  ^tre  victimes  de  cet  arran* 
gement,  si  Tennemi  s^^tait  pr^sent^  sur 
les  derridres  de  la  colonne.  Mais  loin  de 
1^ ,  Tennemi  ^tait  rentrd  dans  les  places 
fortes,  ou  bien  s*^tait  mass^  au  cceur 
de  la  Jud^.  Le  seul  ^mir  de  Tripoli 
disputa  le  passage  sur  son  territoire.  11 
fut  vaincu ,  et  racbeta  sa  capitale  par  un 
tribut.  Les  crois^s  avaient  oris  rexcel- 
lente  resolution  de  ne  plus  s  arrdter  d6- 
sormais  devant  les  villes,  et  de  les  tour- 
ner  toutes  les  unes  apres  les  autres,  afin 
de  ne  pas  retarder  leur  marche.  Cette 
tactique,  qu'ils  auraient  dQ  employer 
plus  t6t ,  les  sau va  seule  de  la  destruction 
complete  k  laquelle  ils  6taient  exposes. 
Libres  done  de  toute inquietude,  lis  pu- 
rent  admirer  k  leur  aise  la  belle  nature 
quMls  traversaient.  lis  avaient  choisi  le 
chemin  des  cdtes,  afin  d'etre  ravitaill^s 
de  port  en  port  par  les  flottes  des  G^- 
nois  et  des  Pisans;  or,  en  tournant  le 
capde  Tripoli,  il  se  d^veloppa  a  leurs 
regards  un  spectacle  qui  les  enchanta. 
A  leur  gauche  la  mer  bleue ,  k  leur  droite 
le  noir  Liban.  Ici  une  fratche  valine 

I)leined*une  herbe  verdoyanteet  douce; 
a  unecolline  ou  les  orangers,  les  grena- 
diers et  les  oliviers  s'^tageaient  avec 
grdce.  Parmi  lesmerveillesqui  s^offrirent 
aux  pelerins.  Tune  de  celles  qui  leur  fut 
a  la  fois  la  plus  agreable  et  la  plus  utile , 
fut  un  champ  de  Cannes  dont  le  sue 
etait  aussi  doux  <pie  le  miel ,  et  dont  la 
quality  nutritive  tut  vlvement  appr6ciee 


par  eux.  Les  habitants du  paysappelatent 
la  substance  qui  coulalt  de  ces  Cannes 
zukr.  Ge  fut  done  k  la  premiere  croi- 
sade  que  la  canne  a  sucre  dut  son  trans- 
port et  son  acclimatement  en  Sidle  et 
en  Italic  (*). 

Mais,  apres  avoir  durant  quelques 
jours  c6toye  le  Liban ,  il  fallut  eofin  que 
rarm^e  s*y  engage&t.  La  la  scene  cban- 
gea ,  au  grand  regret  des  croises.  Les 
moutagnesetaientabruptes,  bordees  de 
precipices  profonds,  toutes  coutur6es  de 
crevasses  ou  les  hommes  pouvaient  se 
blesser  en  tombant.  On  fiit  oblige  de 
suivre  des  sentiers  rudes ,  ^troits ,  que 
surplombaient  des  roches  mena^ntes , 
qu'embarrassaient  des  cailloux  roulants, 
et  qui  avaient  des  abtmes  toat  autour 
d'eux.  Une  poignee  d'ennemis  edt  arr€bi 
rarm^e  tout  entiere  a  certain  d^le ;  die 
cut  le  bonheur  de  n'en  rencontrer  au- 
cun.  Les  habitantsde  la  montagne  ^talent 
d'ailleurs  pour  le«  croises.  C^taient 
des  Maronites,  qui  leur  servaient  k  la  fois 
de  guides  et  d^eclaireurs.  Toujours  reso- 
lus  il  ne  pas  retarder  leur  marche,  ils 
passdrent,  sans  les  attaquer,  devant 
B6ryte,  Sidon  et  Tvr.  Les  Musulmaos, 
heureux  de  se  voir  epargn^s,  envoyaient 
aux  Chretiens  des  provisions  de  toutes 
sortes ,  ne  leur  demandant  en  retour  que 
de  respecter  les  arbres  fniitiers  des  ver- 

S3r8  et  les  plantes  potageresdes  jardins. 
8  n'eurent  done  rien  a  souffirir  jusqu'a 
PtoMmais,  laSaint-Jean-d'Acreactuelle, 
sauf  quelques  piqdres  de  reptiles,  appa- 
lls tarerUas,  quails  trouvereot  sur  les 
bords  du  fleuve  Adonis. 

L'^mir  de  Ptolemais  leur  ayant  aossi 
envoys  des  vivres,  et  leur  ayant  promis 
de  leur  livrer  sa  forteresse  iorsaulls  se 
seraient  empar^s  de  Jerusalem ,  les  croi- 
ses se  rejouirent  de  ce  succ^s,  et  pous- 
s^rent  jusau'a  Gesar6e.  Sur  le  temtoire 
de  cette  aerniere  ville,  le  hasard  leur 
apprit  que  la  soumission  feinte  des  Ma- 
sulmans  n*etait  qu'une  tactique.  Une 
colombe,  poursuivie  par  un  oiseau  de 

{>roie,  se  iaissa  tomber  au  milieu  de 
'armde.  £n  la  ramassant ,  r^v^ue  d*Apt 
trouva  sous  ses  ailesla  lettre  suivante 
crue  remir  de  Ptol6maTs  ecrivait  a  oekii 
de  Cesaree :  «  La  race  maudite  des  Gbr^ 

(«)  Voyez  iUbert  d*iUx ,  HisUrin  de  Vegpedi- 
tion  de  Jerusalem;  et  JaogiMB  de  YttrVt  IK*- 
ioire  de  Jerusalem. 


1 


SYRIE  MODERNE. 


285 


«  tiens ,  disait  l*emir,  vient  de  traverser 
«  mon  territoire;  elle  va  passer  sur  le 
«  v6tre ;  que  tous  lesichefs  des  villes  mu- 
ff sulmanes  soient  avertis  de  sa  marche 
«  et  qu'ils  prennent  des  mesures  pour 
«  ^eraser  nos  ennemis.  »  Les  crois^s 
v!rent  dans  ce  hasard  qui  leur  r6v6lait 
les  projets  de  leurs  ennemis  une  pro- 
tection du  ciel ,  et  leur  ardeur  s'en  aug- 
menta  (*), 

II  s*agissait  pourtant  de  quitter  les 
bords  de  la  mer ,  et  de  se  dinger  a  tra- 
vers  de  nouvelles  montagnes  vers  le 
triste  plateau  de  Jerusalem.  L*esprit 
de  la  foule  ^prouva  encore,  en  cette  cir- 
constance,  une  de  ces  fluctuations  sin- 
gali^res  dont  il  avait  tant  de  fds  donn6 
le  spectacle.  Quand  I'arm^e  se  vit  s^- 
paree  de  ces  flots  h  Thorizon  desquels 
il  lui  semblait  toujours  distinguer  la 
patrie  absente,  Rome  qui  la  regardait, 
rEurope  qui  Tencourageait ;  quand  il  lui 
fallut  ne  plus  compter  sur  ces  commu- 
nications maritimes ,  qui  lui  apportaient 
incessammeut  des  secours  en  hommes 
et  en  provisions ;  auand  elle  se  vit  de 
nouveau  seule  et  reduite  a  elle-ra^me , 
un  ^tranee  d6couragement  la  prit.  Elle 
▼enait  d^arriver  a  Ramlah.  Cette  ville 
avait  ^t^  abandonn^ ,  et  dans  ces  murs 
d^erts,  dans  cette  absence  d^ennemis  elle 
erut  apercevoir  un  pr^age  funeste.  Ou 
allait  done  aboutir  son  long  et  si  p^nible 
p^lerJnage?  Cette  vallee  de  Josaphat 
qui  ^tait  la ,  derri^re  les  procbaines  col- 
Mnes ,  au  lieu  de  Musulmans  ran^^s  en 
bataille ,  ne  pouvait-elie  pas  offnr  aux 
Chr<§tiens^terrifi6s  la  lugunre  assembl6e 
des  generations  6teintes?  Les  temps 
peut-etre  etaient  accomplis :  Jesus  sans 
doute  allait  descendre  pour  s^parer  les 
bons  des  mauvais.  Cette  id^e  pr^oc- 
cupa-t-elle  quelques-uns  de  ces  hommes 
au  bout  de  leur  patience  et  de  leur  reso- 
lution ?  LMnstinct  stupide  de  la  conserva- 
tion paralysa-t-il  seul  leur  forcei*  Toujours 
est-il  qu'ils  se  troublerent  pfesque  tous , 
soldats  et  chefs,  qu'ils delibererent  s'ils 
n'iraient  pas  plutdt  assi^ger  Damas  k 
cent  lieues,  le  Kaire  k  deux  cents ,  que 
.  Jerusalem  a  dix. 

Ce  furent  les  pr^tres  qui  surmont^- 
rent  les  premiers  cetetrangeabattement. 


lis  convoqu^rent  les  fiddles  k  la  priere, 
les  exciterentau  repentir  de  leurs  fautes, 
et  les  rappel^ent  a  Fespoir  en  Dieu  et  a  la 
conOance  en  eux-m^mes.  Leurs  efforts, 
du  reste,  manqu^rent  d^^tre  inutiles  par 
le  fait  d'un  accident  celeste.  La  nuit 
que  Tarmac  passa  k  Ramlah,  lumineuse 
oomme  presque  toutes  les  nuits  orien- 
tales,  fut  tout  a  coupehang6e  en  t^cebres 
profondes.  Une  6clipse  totale  de  lune 
avait  occasionne  ce  phenomdne.  Les 
crois^s ,  encore  surexcites  dans  leur  su- 
perstition habituelle ,  s*imaginerent  que 
c'etait  la  i'annonce  d*une  destruction 
prochaine  de  rarm^e.  Leur  effroi  gran- 
dit  encore,  et  il  ne  fallut  rien  moins 
qu'une  interpretation  ing^nieuse  de  quet 
ques  hommes  de  sens  pour  leur  rendre 
Fesperance  et  le  courage.  Ces  hommes 
pr^tendirent  qu*une  eclipse  de  soleil  au- 
rait  ptu  etre  un  pronostic  funeste  aux 
Chretiens,  tandis  qu'au  contraire  une 
eclipse  de  lune  ne  pouvait  annoncer  que 
Textermination  des  infideies.  Un  rien 
abattait  les  croises ,  un  rien  les  relevait. 
lis  crurent  k  la  prediction  de  ceux  qui , 
dit  ie  credule  Albert  d'Aix,  connais- 
saierU  la  marche  et  le  mouvement  des 
astres,  et  d^s  Taurore  ils  se  remirent  en 
marche. 

A  peine  parvenus  au  sommet  des  col- 
lines  qui  s*eievaient  devant  eux,  ils 
aper^urent  un  groupe  de  mnrailles  qui 
scintillaient  au  soieii  levant :  Jerusalem! 
Jerusalem!  s'ecria  I'armee  ainsi  qu*un 
seul  homme.  Puis  comme  un  echo  de  cette 
exclamation,  elle  poussa  avec  plus  d'ar- 
deur  que  jamais  son  cri  de  guerre :  Dieu 
le  veut!  Dieu  le  vent!  La  premiere  im- 
pression generale  Yut  un  delire  d'alie- 
gresse.  Les  cavaliers  descendaient  de 
cheval,  et  voulaient  s'avancer,  pieds 
nus,  jusqu*aux  murailles  saintes.  Les 
fantassins  se  jetaient  a  genoux ,  et  bai- 
saient  avec  ferveur  la  terre  sacree  qui 
avait  porte  Thomme-Dieu.  Ons*embras- 
sait,  on  se  felicitait;  tous  les  coeurs 
battaient  a  Funisson ,  toutes  les  mains 
se  levaient  vers  le  ciel  (*)• 

Mais  lorsque  le  soleil,  en  se  dirige^t 
vers  son  zenith,  eut  eclaire  jusque 
dans  ses  profondeurs  les  plus  secretes 
le  paysage  qui  se  deroulait  aux  yeux  des 


.  (•)  Voy«  Raymond  d'Aglles,  HisUnre  des 
Fnnci  qui  priretU  Jerittalem, 


(•)  Voyez  Robert  le  Molne ,  Histoitt  de  J4ru» 
salem. 


L'UMVERS. 


pj^erins ;  loraqve  lea  rayons  brOlanta 
da  midi  tomberent  d'aplomb  sur  lea 
crois^s  ebahis,  leur  joie  ae  changea  bien- 
tdt  en  tristesse.  Les  Egyptians  avaient 
fait  un  desert  du  territoire  de  Jerusa- 
lem :  ils  avaient  ras^  les  arbres ,  eom- 
bl6  lea  citernea,  enterre  les  sources.  Le 
soleil  avait  termini  I'oeuvre  de  la  des* 
truction  :  il  avait  desa^ch^  le  torrent 
de  C^dron,  ^puise  la  fontaine  de  Silo^, 
hrdie  la  montagne  des  Oliviers ,  efface 
ju$qu*au  dernier  vestige  de  vegetation 
daqs  les  vallees  de  Gehennon  et  de 
Eephaim.  Les  Chretiens  n*avaient  plus 
devaqt  eux  qu'un  vaste  entonnoir  sem- 
blable  a  Tenter  du  Daote,  et  sur  Tun  des 
cercles  duquet  apparaissaient  les  blanes 
rem  parts  d'une  viUe  qui  seinblait  celle 
de  Satan ,  et  non^^elle  de  Jesus.  La  tran- 
cl)^  qui  formait  le  lit  du  torrent  de 
Gedron  paraissait  un  abfme  en  feu ,  et 
lea  minarets  de  la  mosquee  d'Omar  <]ui 
le  dominaient  reasemblaient  a  des  ^pees 
^inceiantes  iev^s  vers  le  oiel.  Linn- 
pression  de  la  terreuir  dans  Tarmee  se 
oommuniqua  de  Tun  k  Tautre,  et  ce  fut 
plutdt  comme  des  ombres  qui  se  ren- 
dent  au  jugement  dernier  que  comme 
des  soldats  qui  marchent  a  una  coti- 
quete,  que  les  crois6s  descendirent  vers 
Jerusalem.  Quaranfe  milie  bommes  les 
y  attendaient  sous  le  comniandemeni 
d'Iftikbar-£ddaiil6,  lieutenant  du  kha- 
life  du  Kaire;  et  ces  quarante  raiile 
bommes  ^talent  bien  arm^,  bien  appro- 
vifiionn^,  et  fanatis^  a  Tegal  des  Cnr6- 
tieiis. 

Le  premier  d'entre  les  orois^  qui 
poussa  son  cbeval  au  galop  vers  J^rusa- 
tern  ne  pouvait  Stre  que  le  brave  Tan- 
crede.  II  alia  presque  seul  reoonnaitre 
\gs  approches  de  la  viUe,  raonta  jus- 
qu'au  sommet  du  moot  des  Oliviers ,  et 
la ,  ayant  rencontrd  un  ermite ,  il  ae  fit 
nommer  les  coUines  saintes  qui  Ten- 
toBraient ,  U  se  fit  montrer  le  Golgo- 
tha et  la  place  ou  Dieu  avait  6tendu 
ses  bras  vers  ie  monde.  Au  milieu  de  sa 
pieuse  contemplation,  oinq  Musulmans 
sortirent  de  la  ville  pour  le  prendre.  U 
en  tua  trois,  mit  les  deux  autres  en 
fuite ;  puis  il  s*en  retourna  tranquille- 
ment  vers  le  gros  de  Tarm^e.  Ce  Tan- 
crcde  etait  un  veritable  h6ros.  II  en  avait 
la  taille  et  la  force,  la  security  et  la  vail- 
lance.  Quelques  jours  auparavant,  il 


6tait  all^  avec  trois  cents  de  ms  soldHU 
planter  la  (sroix  sur  les  rours  de  8f|ii- 
t^em.  Apres  avoir  (^esque  seal  dffttvNi 
le  berceau  du  Christ,  il  avait 


dtre  le  premier  k  en  apereevoir  le  ti«i- 
beau.  Mais  si  la  eonqu^te  de  BelWipB 
lui  avait  sombl^  &eile ,  celle  de  J^^imr 
lem  lui  parut,  par  contre,  toute  flMi 
de  perils  et  de  dfiffioult^ O* 

8IBGB  DB  JBBCSALBIC. 

Comme  devant  I<iio6e,  comme  deMit 
Antioche  ,les  crois^s  neformerentfitai 
demi-cercle  autour  de  Jenisateini*jOe 
demi-oerde  partait  d*un  des  versanHide 
la  vallee  de  Cedron,  et  s'^tendait  jiMa^ 
la  vall^  de  Silo^  La  partie  de  l»sife 
gui  regardait  le  raont  des  Oliviers^  i6- 
rendue  d'ailieurs  par  un  pr6eipiQe  et  pr 
des  mouvements  abruptes  de  temiD, 
avait  ete  n^li^^  dans  rinvestinedMot 
de  )a  place,  Mais  ici  cette  fautedes  as«^ 
geants  pouvait  ^tre  mows  grave  qu'a 
Kicee eta  Antioche.  Let aboraaduaaont 
Morriah  toient  imposeibJea  des  denx 
parts ,  et  en  outre  las  Musolmans  nV 
vaient  guere  a  esperer  derenforts  oude 
ravitaillements  du  pavs  qa'ils  avaient 
abandonn^  et  epuisa.  Les  Noimands  de 
Robert  et  les  Italiens  de  Tancrede  s"^- 
talent  places  au  nord ;  puis  vanaieni  lei 
Lorrains  de  Godefroy ,  et  enfin  les  Pro- 
ven^ux  de  Raymond .  Outre  ces  grandes 
divisions,  il  y  avait  encore  des  Anglaia 
sous  le  commandement  d'un  nouveau 
venu ,  Edgard  Adeling ,  et  des  Bretons 
men^  par  le  due  Alain  Fergent,  le  sire 
deChdteau-Gironet  le  vicomtede0iD«l. 

D^  que  les  camps  furent6tablis,'det 
lugitiis  arriv^ent  de  la  ville  Ters  kiirs 
Ireres,  leur  racont^rent  les  persteitivM 
go'ils  avaient  souffertes,  exdtereot  lew 
indignation  centre  les  Muaulniana,  en- 
ilammerent  leur  courage,  et  lea  pMii- 
serent  a  tenter  immddiateaieDt  uoe  at- 
taque.  L*ermite  du  moot  des  Oliviwa.* 
qui  d^j^  s*etait  entretenu  avec  TancrUe, 
Vint  k  son  tour  appuyw  de  Pautorite  de 
son  experience  et  de  sa  saintet6  prtai- 
m^  le  conseil  qoe  donnaient  les  r^fu- 
gies  Chretiens  aux  crois^.  Ces  demiers, 
pouss^s  ainsi  de  toutes  parts ,  i^solu- 
rent  done ,  malgr^  Tabsenoe  de  toute 

(*)  Voyez  Baoul  de  Caen ,  les  Gestes  de  Tun- 


1«  •  •      •• 


SYRIE  MODERflfi. 


987 


maflbine  de  guerre,  d'essayer  un  as- 
saut  g^D^ral.  On  eonopta  encore  sur 
Dieu  pour  auxiliaire ,  et  lea  chefs  con- 
seotirent  a  ee  que  r^lamait  la  foule. 
On  marcha  en  bon  ordre  vers  les  mu- 
railles ,  les  premiers  bataillons  la  tite 
couverie  du  bouclier,  les  seconds  la* 
fronde  ou  Tarbalete  a  la  main.  Tandia 
que  les  uns  s'effor^ient  h  entamer  les 
murs  avec  des  piques  et  des  marteaux , 
les  autres  lancaient  des  pierres  et  des 
fishes  contre  la  garoison  r^unie  Sur  les 
remparts.  Un  premier  mur  s'ecroula , 
on  crut  k  la  victoire.  Mais  le  second 
mur,  plus  solide  que  le  premier,  r^ista, 
et  k  force  d'huile  bouillante  et  de  poix 
enflamm6e  les  Musulmansoonsumerent 
lesboucliers  des  mineurs,  en  firent  p^ir 
un  grand  nombre,  et  d^cid^rent  la 
masse  a  ia  retraite.  Aucun  prodige  sur- 
naturel  n'^tait  venu  au  secours  des  as- 
si^geants ,  et  il  leur  faliut  se  r^igoer 
k  rentrer  dans  leurs camps,  le decoura* 
gement  dans  TAme. 

Le  lendemain  de  eette  tentative  un- 
puissante,  Tarm^  n'eut  plus  de  force 
que  pour  souffrir.  Le  ciel ,  semblable  k 
de  Tairain  en  fusion,  ^touffait  les  p^- 
lerins  sous  sa  voAte  comme  sous  una 
immense  machine  pneumatique.  La  r^ 
verberation  du  soleil  sur  les  cailloux  du 
sol ,  sur  les  collines  d^nudees,  sur  Tes- 
pace  aride ,  brQlait  les  yaux ;  le  vent  du 
sud ,  tout  impr^gn^  de  la  poussiere  im- 
palpable des  deserts  dessechait  le  go- 
sier,  enflammait  le  sang,  renversait 
le  patient  sur  la  terre  brOlante  dans  les 
ain*es  de  la  mort.  La  soif  d^vorait  Tar- 
m^  entire.  Malgre  aes  sou£&ances, 
elle  demeurait  inerte  et  passive,  taat  que 
Tastre  du  feu  pesait  sur  Thorizon.  La 
nuit  venue,  on  voyait  softir  du  camp, 
un  par  un ,  des  hommes  hftves ,  jaunes , 
au  visage  d^form^  par  la  douleur ,  et , 
selon  Texpression  ^nergique  d'un  chro- 
niqueur,  dont  les  membres  noircis  res- 
semblaient  aux  ossements  dea  tombeaux. 
Ges  hommea  s^en  allaient  cheveher  au 
loin  une  gorg^  d'eau  fangeuae,  que 
leschevaux  auraient  rejet^  par  leura  na- 
seaux ,  tant  elle  etait  corrompue ,  et  qui 
contenait  quelquefois  des  vers ,  des  rep- 
tiles ,  et  jusqu  a  des  sangsues.  Parfois 
la  fontaine  de  Silo^  laissait  ^happer  un 
filet  d'eau  de  sa  source  a  demi  epuisee ; 
et  les  pdlerins,  dans  le  delire  de  la 


torture ,  se  battaient  sur  les  bords  de 
la  citerne  pour  s*arraoher  une  goutte  de 
ce  breuvage  tant  desir^,  ou  se  noyaient 
dans  la  vase  humide  en  s*y  precipitant 
les  uns  sur  les  autres*  La  lontaine  se 
remplissait  ainsi  de  cadavres  qui  en 
putr^daient  les  eaux.  D^autres  malheu- 
reux,  qui  cberchaient  a  apaiser  leur  soif 
inextinguible,  mauquaient  de  force  tout 
a  coup ,  et  tombaient  sur  le  sol  pour  ne 
plus  se  relever.  D'autres  encore ,  deses- 
p^rant  de  rencontrer  des  sources ,  creu- 
saient  la  terre  avec  leur  ^p^ «  et  y  ap* 
pliquaient  la  bouche  pour  y  chercber 
quelque  fralcheur  :  baiser  donn^  a  une 
mar&tre  qui  ne  rendait  que  la  mort. 
D'autres  enfin ,  a  Taurore ,  s'en  allaient 
lechant  les  cailloux  humect^s  d'une  16- 
gere  ros^.  .Dans  cette  calami te  univer- 
selle,  Taspect  seul  de  Jerusalem  arretait 
le  blaspheme  sur  (es  levres  les  plus  irri- 
tees.  On  maudissait  la  nature,  mais 
on  b^nissait  Dieu ;  et  les  plus  entbou- 
siastes  s'en  allaient  mourir  jusque  sous 
les  mura  de  la  cit^  sainte^  baisant  lea 
pierres  comme  des  reliques,  ets^ecriant 
d'une  voix  entrecoupee  des  sanglots  du 
d^sespoir  et  des  hoquets  de  Tagonie  : 
O  J^rusaiem!  re^ois  nos  derniers  soU' 
pirs;  que  tes  muraiUes  tombent  siur 
nous ,  ei  que  la  sarnie  pqussiere  qui 
fenvironne  recouvre  nos  ossements  {*)  I 

Par  quel  etrange  aveugleraent  les 
Musulmans  ne  tomberent-ils  pas  sur 
cette  armee,  k  bout  de  toute  ressource  et 
de  toute  vigueur?  Ignoraient-ils  la  situa- 
tion desesp^r^  des  crois^?  Gela  est 
douteux,  lorsqu'on  les  voi^,  dans  les 
autres  si^es ,  ne  manquantjamais  d'etre 
avertis  par  leurs  espions  ou  par  des 
trattrea.  Craignaien1*ils  encore  ces  om- 
bres dont  la  vaillanoe  immat^rielle  avait 
vaincu  Kerboghah  ?  IVedoutaient-ils  r^el- 
lement  une  intervention  divine  ?  Balan- 
^aient-ils  entre  Mahomet  et  J^us?  Tou- 
jours  est-il  qu'iU  n'attaquerent  pas  les 
Chretiens,  etieur  laisserent  arriver  des 
secours,  grSce  auxquels  la  face  des 
choses  fut  completement  changee. 

Une  flotte  genoise  venait  de  debar- 

3ner  a  Jopp6.  La  nouvelle  s*en  r^pandit 
ans  le  camp.  Aussitot  les   fanldmes 
qui  le  peuplaient  s*agit^rent,  retrouv^ 

(•)  Voyex  GUon,  Poime  sur  la  premiire 
crouade;  et  Baudri ,  Hisloire  (fe  JirH$alem* 


iSA 


L*insiVERS. 


rent  la  souplesse  de  leurs  membres,  la 
resolution  de  leur  esprit ,  Tenergie  de 
leur  dme.  Trois  cents  hommes  se  pr^ 
sent^rent  assez  forts  pour  monter  k 
chevalf  et  pour  partir  au  galop  k  travers 
les  precipices  et  les  d^rts  qui  les  s^pa- 
raient  de  la  mer.  Cette  poignee  de  braves 
rencontra  sur  ie  rivage  des  milliers  d*en- 
nemis ,  elle  fondit  dessus  et  les  dispersa. 
Ces  ennemis  avaient  brille  la  flotte  g& 
noise;  mais  heureusement  les  vivres  et 
les  instruments  propres  a  la  construc- 
tion avaient  ^te  sauv^. 

Au  bout  de  quelques  jours  arriverent 
done  au  camp  des  crois^s  le  plus  utile 
et  le  plus  opportun  des  convois :  des  pro- 
visions ,  des  instruments  de  charpentiers 
et  des  ing^nieurs  g^nois.  II  ne  manquait 

Elus  aue  du  bois  de  construction  pour 
dtir  des  tours,  et  fa^onner  des  machines 
de  guerre.  La  campagne  aride  et  d^o- 
1^,  qui  entourait  le  camp  des  Chretiens, 
sembiait  n'en  devoir  point  offrir  a  plu- 
sieurs  lieues  a  la  ronde.  En  cette  extre- 
mity, Tancrdde  vint  encore  au  secoursde 
sescompa^nons.  Durant  les  courses  que, 
dans  son  mfatigable  ardeur ,  il  n*avait 
jamais  cess^  de  raire  k  droite  et  a  gauche, 
au  midi  et  au  nord ,  il  avait  aper^u  de  loin 
les  cimes  de  quelques  arbres.  II  dirigea 
done  les  crois6s  vers  Tancien  pays  de  Sa- 
marie;  et  ils  ydecouvrirent  une  for^t, 

3ui  partait  des  hauteurs  de  Naplouse  et 
escendaitjusquedans  la  plained* Arsur. 
Dans  cette  for^t  on  trouvades  chines  de 
moyenne  grosseur,  on  les  abattit ,  on  les 
chargea  sur  deschameaux ;  puis  une  fois 
rendus  au  camp ,  ces  chines  servirent  k 
Gonstruire  catapultes ,  beiiers,  tours  et 
galeries.  On  prepara  des  peaux  de  bites 

f^our  arrlter  les  effets  de  Tincendie  sur 
es  machines;  on  Itablit  des  fascines; 
et  Ton  en  vint  a  faire  jusqu*^  des  tours 
de  trois  Stages  qui ,  poussees  vers  les 
remparts ,  devaient  mettre  a  Tabri  les 
mineurs,  et  permettre  aux  assi^geants  de 
combattre  k  la  hauteur  des  assilgis  (*). 

PBISB  DB  JB&USALBH. 

La  vie  Itait  revenue  dans  le  camp 
chrltien ,  et  avec  elle  I'ardeur  des  pas- 
sions religleuses.  Outre  les  preparatifs 
du  combat ,  qui  se  faisaient  avec  one 

^.(*)  Vovex  Alliert  d'Aix,  Hisioire  de  Vexpi- 


grande  activity,  outre  les  oecofriiH 
manuelles  qui  rendaient  des  fomi 
chaeun « I'esprit  avait  aussi  beMnlli 
surexdte.  Le  derge  ooiii^cMi# 
cessite,  pricha  la  conooiia'aiifei 
soMats,  employa  lootesetr' 
usa  de  tout  son  poavoir  i 
tablir  rharmonie,  pour 
licence,  pour  ^oquer  4 
idees  de  remisaion ,  de  | 

3ue  comportait  I'exp'  ^^ 
ecorle  du  titre  do  i 
de  bien  etablir  le  lioa  qai  i 
dans  le  dernier  aete  de  tari 
la  terre  et  le  ciel ,  lee  < 
rent  une  processioft  i 
des  murs  de  la  eit6 1 
sition  fut  adoptfe  ] 


et,  malffrl  les  rayo«s« 
du  soleil,  la  foule  dce-t^ 
mina,  tite  decouT8tttf|] 
partant  du  point  de  ' 
se  trottvait  prtcincnwet 
vaire.  Les  pritres  en  '■  '^ 
poitaBtrimagedesi 
ptoumes,  ouvraieut  iiiri 
suite  les  soldats , 
enseignes,de  leurti 
trompettes ,  s'avan 
quoi^ue  armis  de  i 
venait  la  foule  des  r 
cri  qui  r^sumait  , 
exaltation  et  son  aV 
Dieu  le  vetU! 

Ces  cris,  ces  broilB,^ 
fracas  d'instruments  mi 
renvers^rent  pmot  k 
lem  comme  jadis  let 
a'en  Ibranierent  paee 
des  assiegls.  Ce  qaii 
les  efforts  des  mollahsi 
lesMusulmansunf 
un  antagonisme 
sentiments  exprimte  [ 
avec  une  si  eomplte  \ 
donn^rent  que  do 
la  garnison  vociferate 
les  insultit,  les  prov 
^ons.  lis  lirent  ap 
souillaient,  qn'ifs 
ainsi  a  bien  indiauerle 
signer^vlre  par  leurs  i 
quoi  quails  essayereot, 

3u*a  dissimuler  an  ia 
ans  iaquelle  les  habitaats  4 
meuraient  plong^s  depuisc 


SYRl£  MOMRNE. 


^qa^eM  Tftii^fi  elaineurs  furent  ter- 
into,  tout  retomba  daos  le  sUence  le 
is  f>rofond;et  pNisieors  jours  darant 
I  D^ntendit  s'elever  da  sein  de  cette 
Ktedt^  que  le  chant  des  muessins^ 
tj,  du  baut  des  minarets,  appelaient 
I  Mahom6taos  k  la  priere.  S*il  y  a?ait 
Onodt^QD  entboasiasme  bruvant,  ua 
Mir  manifeste, il  n'y  ayait  de  Taotre 
raoe  resignation  farouche,  one  rage 
irdement  implacable. 
I.es  ebds  crols^  avaient  natarelle- 
nt  prepare  Tattaque  du  e6t^  oili  leur 
np  ^tait  plac^.  Le  terrain  ^tait  plane 
[eee  eodroit,  et  permettait  les  evolu* 
ns  des  machines  de  guerre.  Mais  les 
A^  ayant  par  contre  fortifie  dou- 
tnent  ks  parties  des  remparts  les  plus 
Mc^,  on  ourrit  parmi  les  Chretiens 
Ht  de  changer  de  plan,  et  dVntre- 
todre  Tescalade  k  Tantre  extr^mit^  de 
ffille.  Cetait  habile,  mais  plein  de 
kaltes  :  il  s'agissait  en  efilftt  d'atta- 
t  du  e6U  du  mont  des  Oli viers ,  ma- 
(ks  ravins,  les  rochers,  les  excava- 
m  da  sol  Ce  projet ,  tout  impratica- 
in'il  pardt  £tre  a  quelques-uns ,  n*en 
pas  moins  adopte  par  le  plus  grand 
ibrcGodefroy,  le  premier,  transporta 
l|oartiers  vers  le  point  indique,  en 
i  de  la  porte  de  Cedar.  Tancrede  et 
lert  suivirent  oet  exemple  d*audaee. 
nt  a  Raymond ,  pour  employer  les 
f  foraiioables  qu  ilavaitordonne  de 
Mniire ,  il  fut  oontraint  de  faire  com- 
mn  pr^pice  tout  entier.  Afln  de 
fenir  promptement  ^  oe  but,  il  pro- 
Mtk  dmier  a  tous  eeux  qui  jeteraieut 
ipierres  dans  la  large  crevasse,  et  cet 
kgat&t  poar^aliserau  bOutdetrois 
s  le  terrain ,  malsr^  les  fleches  des 
MBS,  qui  ne  oessaientd*£tre  dirig^es  • 
re  les  travailieurs.  Tous  les  pi^pa- 
lachev^,  toutes  les  precautions  pri* 
Tassaut  gto^ral  fut  fix^  au  14  juil- 
M>9,  qui  ^tait  un  jeudi  (*). 
» le  matin  de  ceijour ,  Taraiee  chr6* 
e  B'ebraola  tout  entiere.  Les  machi* 
ft  guerre  roul^rent  de  tous  cdt^;et 
B  que  celles-ci  lancaient  des  poutres 
e  les  murailles,  celles-l^  criblaient 
Bsi^^  de    pierres.  Ces  derniers 
terent  avec  non  moins  d'ensemble, 

'oyez  Ravnood  d' Affiles »  HUioire  dea 
t  ^Ms  priretil  Jerusdiem, 

19*  lAvrtUson,  (Sybib  modbbrb 


et  de  plus  lancertot  des  imt  contre  les 
tours  en  bois,  qu*on  ne  pouvait  ^indre 
qu'avec  du  vinaigre.  Des  deux  parts  on 
combattit  avec  le  m^me  courage.  Seule- 
ment  du  c6t6  des  Chretiens  c^^tait  une 
ardeur  surhumaine,  du  e6U  des  Mu- 
sulmans  le  sang  froid  de  la  conservation 
personnelle.  Des  chevaliers  audadeux 
appliquaient  des  eehelles  contre  les 
remparts,  et  se  faisaient  hacher  sur  la 
plate-forme.  Godefroy ,  et  ses  deux  pa* 
rents  rest^  fideles  a  la  cause  sainte ,  son 
frere  Eustache  et  son  cousin  Raudouin 
du  Rourg,  donnaient  Fexemple  de  Tac- 
tivite  dans  la  vaillanoe,  de  lajpers^ve- 
ranee  dans  les  attaques.  Plus  lom  c'^tait 
le  bouillant  Tancrede ,  c'6tait  Raymond^ 
de  Toulouse,  qui  ne  manquait  pas  de' 
bravoure,  s'iW^tait  avide  et  envieux; 
tous  deux  eombattant  sans  cesse  a  la 
t^  de  leurs  soldats.  Enfin  sur  tout  le 
front  de  la  bataille  une  emulation  natu- 
relle  entretenait  sans  cesse  le  combat , 
malgr^  la  chaleur  du  jour,  augmentee  en- 
core par  les  incendies  partiels  qu'il 
fiiUait  affronter  de  toutes  parts.  Les  Cnr^ 
tiens  pourtant  avaientbeause  multiplier, 
ils  ^taieot  materiellement  inferieurs  aux 
Musulmans.  Reduits  a  vingt  mille  faom- 
mes  capables  de  porter  les  armes,  ils  se 
trouvaient  presque  partout  un  contre 
deux.  Aussi,  malgr^  leurs  efforts  r6p6t^s, 
leurs  tentatives  successives ,  leurs  traits 
de  courage  sans  cesse  renouveles,  a  la 
fin  de  la  journ^e,  aprte  douze  heures  de 
lutte  non  interrompue,  ils  n'avaient 
encore  ofotenu  aucun  avantaee  r^l.  RIen 
au  eontraire ,  leurs  morts  etleurs  bless^ 
jonchaientle  pied  des  murailles,  leurs 
tours  ne  pouvaient  plus  se  mouvoir;  et 
sans  6tre  vaincus,  il  leur  fsllut  rentrer 
dans  leur  camp  a  la  nuit  tombante,  avec 
la  triste  assurance  que  leurs  sacrifices  et 
leurs  exploits  avaient  6te  inutiles. 

Quelle  que  fdt  la  douleur  des  cruises , 
le  d^uragement  neanmoins  ne  les 
atteignit  pas.  Ils  se  frappaient  la  poi* 
trine  comme  s*ils  s'accusaient  de  n*avoir 
point  encore  ^t^  digues  de  la  victoire, 
mais  ils  n*en  d^esp^raient  pas.  Ce  fiit 
donc^  dte  le  lendemain  matin,  ven- 
dredi  15  juillet  1099,  que  d'un  ^lan 
unanime  ils  coururent  de  nouveau  vers 
la  ville.  Huit  heures  encore  ilscombat- 
tirentavec  une  pers^v^raoce  infatigable, 
et  la  nature  bumaine  en  eux  commen^it 


L*iniIVBRS» 


enfiD  k  •'affiuiier  mhis  les  fatiguei,  siooa 
vis-a-vis  des  dangers  ^  lorequ'une  sorta 
d'iDspiration  divine  raoinia  daos  leur 
Ame  la  fi^vre  du  succ^,  et  oentupla  lean 
forces.  11  6tait  trois  beures  au  soir, 
rheure  derni^re  et  la  plus  soleoDelle  de 
la  passion  y  lorsqae  las  crois^  enirent 
aperoevoir  sur  le  moot  des  Oiiviers  un 
eavalier  e^leste  brandir  son  bouclier, 
et  donner  le  signal  de  pto^trer  dans  la 
ville.  «  (Test  saiDt  George!  »  s'toient 
les  Chretiens;  et  les  voila  de  nooveau, 
avec  une  fougue  indomptable«  un  eosem* 
ble  merveilleui ,  qui  se  precipitent  de 
tons  c6i6s  centre  les  murailles.  Les  fem- 
mes,  les  enfants ,  les  vieillards,  les  bles* 
8^  s*dGbappent  du  camp,  apportant  de 
Teau ,  des  vi  v  res  et  des  armes  ae recba Dge, 
poussant ,  eux  aussi ,  les  machines,  joi-* 
gnant  aux  bras  dee  ouvriers  militaires 
leurs  faibles  bras,  auxquels  Tentbou- 
siasme  pr^teune  puissance  surnaturelle. 
Cest  ie  suprtoe  effort  de  la  croisade, 
et  oe  supreme  effort  r^ussit.  Godefroy 
parvient  a  jeter  le  pontplevisdesa  tour  sur 
les  remparts.  Suivi  deses  plus  intr^pides 
chevaliers,  il  se  bat  d^la  dans  Tint^ieur 
de  la  ville.  On  met  le  ten  anx  ballots  de 
laine ,  aux  sacs  de  paiile  qui  servaient  h 
amortirles  coups  des  briers.  L'incendie 
gagne,  la  fumee  se  rabat  sur  les  assi^^ 
etles  aveugle.  La  terreur  serre  le  coeur 
desMusulmans,etend6truitlavertu.  Us 

Silent,  on  les  poursuit.  Tancrede  et  lee 
eux  Robert  rejoijpMnt  Godefroyetses 
Lorrains.  Les  crois^  sont  en  force.  Us 
aident  les  Proven<^ux  de  Raymond  k 
jeter  par  terre  la  porte-Saint-£tienne; 
et  bient6t  les  rues  de  Jerusalem  reten* 
tissent  da  cri  vietorieux  de  :  Dieu  ie 
veuHDieuie  veutC)! 

La  gloire  des  armes  fut  bien  vite  6clip- 
s^  Chez  les  Chretiens  par  les  horreurs  at 
la  vengeance.  Lefonatume,  qui  les  avait 
fait  vamcre ,  les  fit  anssi  massacrer  lears 
ennemis.  Jusqu'ii  la  nuit,  e'est-ihdire , 
a  cette  epoque  de  Tannte,  maqu'k  neuf 
heures  du  soir ,  ils  r^pandirent  le  sang 
avec  une  rage  toujours  croissante.  La 
ville  oik  Dieu  avait  pardonn^  aux  bom- 
mfs  devint  Ja  cit^  du  carnage.  On  tua  lei 
babitantsdans  les  raaisons  aussi  bien  que 
les  soldats  dans  les  rues.  Dix  mille  Mu« 

r)  Voyer  Raymond  d'Aglles,  Hittoire  de$ 
^tinct  iiui  prinnt  Jtrusalem, 


Salmans  i^teient  eoten^teli 
vastes  bAtiments  de  la  noifife  A> 
mar.  Apr^  les  y  avoir  &itte,Mfei 
^orgea  tons  dans  eelte  eoeoBlinBii 
Les  femmes  et  les  enfuili,  qsi  I'Mi 
rtfugies,  eux  aussi,  daDseeittile,Kiir 
rent  pas  plus  ^rgn^  que  1m  cMto 
tants.  Les  fontassios  farsatobliililh 
quitter  cette  mare  de  6aDg,ctf  kiit 
liersenavaient  jusqu'au  poitnilM^ 
chevaux.  Ajoutonseonmwdeniiir" 
de  pinceau  a  eette  se^borriUeq 
traits  d*un  temoin  oeulaiie.  •  Uy  < 
il ,  tant  de  sang  i^pando  dans  i 
temple  de  Salomon ,  qua  lei  eorfi 
y  nageaient  nori^  ^k  et  la  nir  iij 
On  voyait  uotterdesoiaiBiAd 
coupes  qui  allaient  sejoiudnitei 
qui  leur  ^talent  etrangen;  de  lorf^^ 
nepouvaitdisUnguera  qiMlGorpii| 
tenait  un  bras qu*on  voyait  lejiia" 
tronc  Les  soldats  eox*mtai,. 
saient  ee  carnage,  supfKNrtaicQtIpi 
fumee  qui  s*en  fsbalatt  >  Voittf 
mosqu^  d*Omar;  voict  aaiatisi 
Ion  Raymond  d'Agika,  pour  li  i 
la  ville: «  QaandlesnAtnsfimBlg 
des  remparta  et  des  tows,  ( 
des  choses  ^tonnaotes  (il  i 
des  ehaus  ^/ojuianln ,  eet  i 
cbroniqueur)  parmi  les  Samni^ 
una  avaient  La  tte  eoupds,  et  i^ 
moins  qui  pi^t  leur  arrivcr  (r 
plaisanterie  !X  les  aatits,  (wr*'*^!' 
ae  voyaient  forete  de  s^elaaorMp 
des  murailles;  d*autres  eAfff 
avoir  longtemps  sonffert,  dttWg 
aux  flammes.  On  voyait,  ajoslili^ 
sibie  chanoine  da  Puy ,  daasbii 
sur  les  plaoes  de  Jtesalsa,  dn 
oeaux  de  tltes,  de  maiai  et  dBf 
Partout  on  ne  marobait  qo^i  i 
des  cadavres.  Mais  tout  cela  b*M 

que  pen  de  cbose. »  Suitbl 

tion  empestante  du  sae  ds  b  r 
d*Omar,  description  daos  b^ 
un  mot  de  piti^  ne  as  troaie  i 
plume  da  ce  pr^tre  aosBi  biitf 
oeux  dont  il  raoonte  les  baateii 
d^executeurs. 

G)ntraste   pitoyaUel 
anssi  stupide  que  bideuss!  a  I 
masaaere  termini,  les  croiite  i 
rent  de  rdle  tout  a  coop :  od  Itfj 
ditpousser  les  sanj^lottdelar^ 
se  frapper  la  poitnne,  at  ^ 


SYRIE  MOD£R]H£. 


991 


tte,  et  8*en  aller  en  procession  k  V6- 
fffisedu  Saint-Sepulcreaeroander  k  J^sus 
la  remission  de  leurs  p^chte.  Le  Dieu  de 
la  clemence  et  de  la  ademption  univer- 
selles  pouvait-ii  accepter  ces  prieres 
blasphematrices,  sorties  de  la  bouche 
des  promoteurs  de  la  guerre  la  plus 
implacable,  la  plus  acharn^  qui  fut 
jamais.  lis  venaient,  tout  souill^  de 
sang  humain,  h  l*autel  de  Tagneau  sans 
tache ;  et  leurs  faces  ne  rougtssaient  point, 
leurs  coeurs  ne  doutaient  pas  de  la  mi- 
s^ricorde  divine.  C'etaient  des  fous  fu- 
rieux,  et  rien  de  plus !  Ge  qui  prouve, 
d*ailleurs ,  leur  deiire  monstrueux,  et  la 
complicity  de  leurs  chefs,  c^est  qu'a- 
pr^s  leurs  patenotres  sans  raison ,  c'est 
qu*apres  leurs  actes  hypocrites  ou  insen-* 
s^s  de  devotion,  ils  n*en  continu^rent 
pas    moins   leur  cgorgement  et   leur 

{ullage.  Tin  conseil  se  tint  dans  lequel 
a  majority  d^cida  Textermination  de 
tous  les  inGd^les ,  quels  qu'ils  fussent , 
mahom^tans,  schismatiques  ou  juifs. 
Huit  jours  durant  la  tuerierecommen^. 
La  populace  de  la  croisade  ne  connut 

Elus  de  bornes  dans  ses  atrocit^s.  Elle 
rQIa  les  juifs  dans  leur  synagogue, 
elle  ^orgea  les  malades  dans  leurs  hd- 
pitaux ,  les  femmes  dans  leurs  harems ; 
les  vieillards  sur  leurs  lits  de  douleur. 
Tancrede  avait  promis  la  vie  sauve  k 
des  Musulmans  qui  avaient  implor6  son 
appui ;  on  lui  arracha  ses  prisonniers , 
et  malgre  ses  reclamations,  malgr^  sa 
juste  mreur,  on  les  decapita  sous  ses 
yeux.  Godefroy  de  Bouillon  ne  s'^tait  pas 
m^ie  au  premier  massacre ;  et  malgr6 
^s  representations,  ses  appel^  k  nn- 
dulgence ,  on  n*en  persista  que  davan- 
tage  a  tuer  jusqu'au  dernier  survivant. 
Raymond  lui-nvSme  cbercha  k  sauver 
quelques  indlvidus  :  on  Paccusa  d*ava  • 
rice ,  on  le  d^non^  comme  ayant  re(^u 
salaire  pour  6tre  clement,  et  il  fut 
QbUge,  pour  se  justifier ,  d'abandonoer 
ceux  qui  avaient  mis  leur  existence  sous 
la  sauvegarde  de  son  honneur  de  che- 
Talier.  On  ne  saurait  ^uumerer  exacte- 
ment  le  nombre  des  victimea  de  la  tourbe 
chretienne,  ait^r^  de  sang  comme  une 
bande  de  tigres.  Les  r^cits  les  plus  mo« 
destes  en  constatent  soixante  milie. 
Quelle  iufamie !  Quelle  inhumanite  (*) ! 

(*)  Voyei  Albert  d'Aix,  tiutoire  de  Vexpe- 
dition  de  Jerusalem, 


s 


C'^tait  done  dans  un  pareil  but  qu'on 
avait  fanatis^  plus  d'un  miUioA  d'Ames, 

Su'on  avait  eipos^aux  dif£^reatet  marts 
s  plus  cruelles  six  cent  mille  mal* 
heureux,  entrain^  a  la  suite  des  ch^ 
valiers  fdodaux  1  C'^tait  done  pour  faire 
de  la  vilie  sainte  un  lieu  ex&rable  de 
suppliees  qu'on  voulait  la  reconquer 
au  cutte  catholioael  Vraiment,  lors- 
qu'on  veut  juger a'ensemble  la  premiere 
croisade ,  le  earact^e  dominant  qu*oo 
lui  trouve ,  c'est  la  cruaut6.  Dans  cette 
agression  barbare  de  TOccident  eontre 
rOrient,  le  courage  est  commun  aux 
vaincus  comme  aux  vainqueurs ;  le  fd^ 
natisme  aussi  devient  bientdt  ^al  entra 
les  Chretiens  et  les  Musulmans.  Mais , 
il  faut  Tavouer,  la  palme  sanglante  de  la 
cruaute  appartient  sans  conteste  aux 
crois^.  Le  khalife  du  Kaire  reuvoia 
les  envoy^s  de  Godefroy ,  Temir  d'An- 
tiocbe  se  contente  de  mettre  hors  de  sa 
vllle  les  bouches  inutiles;  legouvernear 
^gyptien  de  Jerusalem  luim^me,  quoi- 
que  autoris^  k  la  rigueurla  plus  extreme 
par  tant  d*actes  atroces  des  assi^eants , 
epargne  encore  un  grand  nombre  d'habi- 
tants  Chretiens  et  de  pr^tres  eatholiques. 
Les  croises ,  au  contraire ,  exterminent 
partout  et  toujours :  autour  d*Antioehe, 
lis  mettent  la  campagne  k  feu  et  k  sang ; 
k  Marrah  ils  6crasent  les  enfants  eontre 
les  murailles  aux  veux  de  leurs  m^res; 
a  Jerusalem,  ennn,  ils  rencherissent 
sur  leurs  crimes  precedents  :  ils  tortn- 
rent  leurs  prisonniers,  ils  les  coupent  en 
morceaux,  ils  d6chirent  leurs  caaavres. 
Et  qu'on  ne  disc  pas  que  ce  sont  \k 
des  calomnies,  inventees  par  des  histo- 
riens  modernes,  qui,  par  opposition  aux 
cuerres  religieuses ,  ont  outre  les  me* 
laits  des  croises.  Heias!  les  chroni* 
queurs  contemporains  rapportent,  tous, 
les  faits  desastreux  et  desbonoranta 
que  nous  avons  resumes.  Quelques-uns 
les  vantent,  d'autres  les  excusent,  le 
plus  ^^nd  nombre  les  racontent  sans 
reflexion  :  tant ,  a  cette  epoque  deplo- 
rable du  moyen  dge,  le  sens  moral  etait 
al^ent  des  consciences,  tant  Thuma* 
nite  etait  une  vertu  sans  module  et  sans 
signification  presquel 

U  est  miraculeux  qu'une  peste  hor- 
rible ne  soit  pas  resultee  uu  sac  de 
Jerusalem.  On  taa,  nous  le  repetons, 
pendant  huit  jours ;  on  laissa ,  durant 

19. 


7&1 


L'UNIVER^. 


toote  e«tle  aemaine  d^aftsassinats,  les 
corps  imnrU  t'amooeeler  dans  les  nie8« 
s'v  |Nitr66er  au  aoleil  de  juillet;  et  ce 
n W  qu*une  fois  la  besosne  des  bour- 
reaox  entiirement  achevee,  qu'on  son- 
gea  k  d^barrasser  la  ville  de  tous  ees 
cadavres  plus  ou  moins  avano^ ,  a  Pas- 
sainir ,  k  la  laver  sinoD  k  la  purifier. 
Encore  les  chefii  ftjrent-lls  oblige  de 
contraindre  leun  soldats  k  porter  bors 
des  murailles  toutes  oes  Utes  couples, 
tous  oes  bunbeaux  de  chair  humaine, 
touscestroncs  sans  jambes  etsans  bras. 
Les  eroises  semblaient  ne  point  se  ras- 
sasier  de  la  vue  de  leurs  Tictimes  :  ils 
eo  ^taient  venus  a  Maimer  Todeur  f^tide 
da  carnage,  comme  les  vautours  qui 
se  reposent  sur  les  ossements  qu'ils  ont 
dMiiquetes. 

iMOTION  DB  L*I8LAM. 

L'effet  produit  par  la  prise  de  J^- 
salem  fut  immense  dans  le  sein  de  lls- 
lam.  Pour  la  premi^r^  fois,  depuis  cinq 
siecles,  it  serablacraindre  pour  sa  toute- 
puissance,  11  sembla  douter  de  son  ave- 
nir.  Jusqu*alors  c*dtaient  des  querelles 
int^ieures  qui  Tavaient  d6chire  physi- 
quement ,  s'll  est  permis  de  parler  amsi, 
inais  sans  attaquer  son  moral.  Des  sectes 
s'etaient  dispute  la  preponderance, 
naais  sans  alterer  Tessence  m6me  de  la 
religion  musulmane.  Les  unes  oomme 
les  autres ,  les  schiites  oomme  les  sun- 
Qites ,  consid^raient  touiours  Biahomet 
comme  le  propb^te  r^vdateur  par  excel- 
lence; les  unes  comme  les  autres  adop- 
taient  le  Koran ,  la  tradition  divine,  et 
ne  divergeaient  que  sur  le  kballfat,  la 
tradition  humaine.  Bien  plus ,  des  bar- 
bares  ,  les  Turcs ,  teient  venus  du  Nord 
oriental,  et  ces  barbares,  vainqueurs 
par  les  armes,  avaient  M  vaincus  par 
la  parole  :  ils  s'^taient  convertis  a  la  loi 
arabe,  s^ils  en  avaient  conquis  I'empire. 
Des  incrMules  s'^taient  renooutrds,  les 
Kbarmates,  et  ces  incrddules,  apres  avoir 
portd  au  coeur  de  Tlslam  un  ravage  tout 
mat^iel,  avaient  disparu  tout  k  coup, 
comme  par  une  volontd  providentiellCf 
apr^  avoir  fait  amende  honorable  en  rap- 
portant  a  la  Meoque  la  pierre  noire  si  v^ 
ndr^.  Ainsi  les  doranlements  accidentels 
duMabomdtismen'avaientjusque-laque 
prouvd  la  solidity  de  ses  fondements. 
Les  guerres  des  ambitions  humaines  n*a- 


vaient  port^  aocon  pr^uHeeaiODii' 
muabilitd  divine.  Le  triomnheda  cni- 
8^  au  contraire,  frappait  tfun  eoopis' 
rible  toutes  les  croyaoees  da  MmA- 
mans.  Dieu  paraissait  lesabaadooner.Ii 
r^e  du  monde  dtait  dispute  wlva 
par  r£vangile.  Lecroissaotteitsi* 
mentandment  ddipsd  par  la  eroix(*). 
La  oonstemationfutginMepniki 
populations  mahomtenes.  Totttap» 
rent  ^alement.  On  oubiia  la  dMI* 
ments  particuliers;  on  s'liait  dm  It 
communion  de  la  doulear.  Le  kUii 
du  Kaire,  ne  songeant  plus  a  a  Us 
contre  le  khalifat  de  Bagdad,  iAap 
avec  ce  dernier  des  doleantts  A  ds 
lamentations.  L'un  et  FautK  s^esfof- 
rent  des  ambassadeurs  pour  se  eoanttr 
dans  une  pareille  calamity,  poor  fst 
dre  des  mesures  collectives ,  povritM 
ensemble  contre  ce  redoutaUeadTniR 
qu'Allah  leur  envoyait  daas  saoleS) 
et  qu'il  avait  sratifle  de  la  vict(Mr«,ij^ 
le  plus  nuinitestc,  efaez  lesOrieaiiBi 
de  rintervention  celeste.  DusM 
comme  en  £gypte,  les  equritt lei |li 
orgueilleux  comme  les  esprits  lei  (to 
humbles  s*humili^raitalaiois.Leii» 
lards  8*arrachaiem  la  barbe,leigiiHn>> 
les  plus  fiers   se  prostemaieDt  das 

Eoussi^,  les  poetes  cbaDttieBt  itfi 
ymnes  les  plus  fiindlires.  Vtm^ 
derniers,  Ahivardi  semUeaToirM 
dans  le  cri  de  son  ddsespoir ,  tf» 
ments  les  frfus  profonds  l««f"S 
les  plus  vifs :  11  pleare,  mais  ay"^ 
ses  frdres  au  combat;  il  les  csssMi 
et  les  excite  k  la  fois ;  s'il  ieor  £ritM 
de  leur  ddfaite,  il  leur  oavre  «■* 
temps  la  perspective  consolatfieidi>  ^ 
vengeance.  Yoici,  du  rests,  Mtfg  \ 
toergiques,  et  toutes  pleincsdatv 
arabe: 

«  Nous  avoDi  mtii  le  nag  ^rilMaiJ 
de  BOS  Unnci.  II  ne  noai  rale  pdV 
contre  let  malhcan  qui  nous  uimiw*-^ 

«  Les  trbles  annes  pour  anbo— ^*^ 
pandre  despleurs;  lonquela  swntw^ 
toot  de  ses  epte  ^noeleDtei! 

«OenfenU  de  lltlam ,  bien  del  «■* 
votts  reitent  k  soulenir,  dans  laqedii** 
rouleront  a  vospiedsl 

«  Comment  fenner  les  panpicm  loof ^ 

n  Voyct  AboaM-F^dJ,  AMfiktU^ 
dn  genre  hutmaiii. 


STEIE  MODERNE. 


dot 


Brt  alleint  ptr  des  commotions  qui  r^eille^ 
nieDt  fhomme  le  plus  profondement'endormi ! 

«  Vog  freres  dans  la  Sjrie  n'ont  pour  se 
rqNMcr  que  le  dos  de  leurs  chamesux  ou  les 
mmilles  des  ▼aufbnre. 

«  Les  Romains  (*)  les  coovrent  d'oppro- 
ires;  eC  vous ,  vous  uissei  trainer  votre  robe 
Imis  la  moUesse,  comme  quelqu'on  qui  n'a 
Im  a  craindre ! 

«  Que  de  sang  a  Mik  repandn!  que  de 
baunes  a  qui  on  n*a  laisse  pour  oouvrir  leur 
Muite  que  leurs  mains  I 

« Ealre  les  coups  de  lance  et  d^ep^  le 
hoc  tft  si  epouTantable ,  que  la  t^te  des  en- 
iBts  en  blanchirait  de  frayeur. 

«  Telle  est  cette  guerre ,  que  oeux  m^e 
■i  s*doignent  de  ses  fureurs ,  dans  Tespoir 
e  8*en  pr^Mnrer,  grincent  bientot  les  dents 
e  regret. 

c  II  me  semble  voir  celui  qui  repose  k 
Ifidine  (  Mabomet )  se  lever  pour  crier  de 
■le  sa  force  :  O  enfants  de  Haschem  1 
«  Quoi !  mon  people  ne  vole  pas  a  Ten- 
^i  la  lance  i  la  main ,  lorsqne  la  religion 
iMle  par  ses  fondemenU! 
!«II  n'ose  pas  approcber  du  fenycrainte 
I  h  mort  y  et  il  ne  voit  pas  que  le  d^bon- 
pr  est  one  blessure  qui  resle! 
,«  £st-oe  done  que  les  cbefs  des  JUrabes  se 
tigoeront  a  de  teb  maui ,  et  que  les  guer- 
VB  de  la  Perse  se  soumettront  k  un  tel  avi- 
mnent! 

«  S'ils  renonoeiit  aux  recompenses  celestes , 
tone  le  danger  les  appelle ,  ne  seront-ils 
Ida  moins  atttr^  parrespoir  du  butin !  C)  • 

aCTION  VE  GODSFKOY  DB  BOUILLON 
GOVME  ROI  DE  JERUSALEM. 

S  leg  Musulmaos  ^talent  dd^sp^r^ 
b  prise  de  Jerusalem ,  les  Chretiens 
semblaient  embarrass^.  Qu*allaieot- 
faire  de  cette  cit^  isol^,  sans  ressour- 
t  part Jeuli6res ,  sans  appui  autoor 
lie?  Vue  de  loin ,  cette  conqu^te  de- 
tparattre  miraculeuse;  vue  de  pres, 
i  n'etait  que  triste  et  pleine  d'incer- 
tdes.  Les  crois^  ne  s  etaient  jamais 
Q  rendu  compte  de  ce  qu*ils  feraient 
cas  de  victoire.  Le  plus  grand  nom- 
n'avait  compris  dfans  rexpedition 
itequ'im  voyage  pieux,  born^par  con- 


t  que  des  Romaliia ;  Unl  les  Romains  aTaient 
*  de  traces  de  l«ar  empire  en  Orient 
Voyez   Bibiioih^gue  de§  CrouadeSt  tra- 
ion  de  Bf .  Reinaod. 


s^uent  et  temporaire,  qn'un  pelerinage 
avec  la  lance  et  T^p^e ,  au  lieu  d*uii  m> 
lerinage  avec  la  gourde  et  le  bAton.  Une 
fois  leurs  devotions  faites  au  saint  s^pul- 
cre,  lis  n*avaient  plus  ^  penser  qu'^ 
retourner  dans  leur  patrie.  Quant  a  ceux 
qui  n*6taient  venus  la  que  comme  aven- 
turters ,  le  pillage  fini ,  le  butin  s^par6 , 
11  n*entrait  nas  dans  leur  esprit  de  jouir 
de  leurs  ricnesses,  si  p^niblement  amas- 
sdes,  dans  une  ville  austere,  dans  un 
pays  ruin6 ,  sous  un  ciei  qui  n*^tait  pas 
le  leur  (*). 

Lescrois^s,  du  reste,  n'avaient  jamais 
forme  une  de  ces  arm^s  r^uli^res  qui 
ont  des  communications  constantes  avee 
le  point  d*ou  elles  sont  parties,  qui  se 
rattachent  sans  cesse  k  un  centre  com- 
mun,  qui  renouvellent  leurs  forces  en 
correspondant  avec  la  mere-patrie.  La 
eroisade  n'^tait  pas  dod  plus  une  do  ees 
exp^itions  colonisatricespour  lesquelles 
Ton  emporte  en  m^me  temps  des  armes 
et  des  instruments  aratoires,  dans  les- 

Suelles  les  soldats,  la  bataille  adiev^, 
eviennent  des  agriculteurs.  N^  d'une 
exaltation  religieuse,  la  eroisade  avail, 
pour  ainsi  dire,  compl^t^  sa  tAche  en 
ddivrant  Jerusalem  du  iou^  des  infidi- 
les.  Selon  cette  interpretation,  elle  ue 
semblait  avoir  d*autre  devoir  que  de 
remplacer  le  croissant  par  la  croix,  que 
de  retablir  la  pr^ominanee  du  culte  de 
Jesus-Christ ;  et  ellepouvaitse  retirer  en- 
suite  avec  les  benedictions  des  Chretiens 
orientaux,  auxqueLs  elle  aurait  rendu 
leur  aneien  empire.  Malheureusement 
ces  Chretiens  orientaux  n'existaient  plus. 
Les  combats,  les  miseres,  les  pers^ou- 
tions  les  avaient  d^imes.  Vers  le  dernier 

3uart  du  onzieme  siede  ils  ne  formaient 
ej^  plus  qu^une  secte  vis-l^vis  d'un  peu- 
pie,  secte,  d*ailleurs,  aussi  affaiblieau 
moral  qu*att  physique.  Lors  de  la  prise 
de  Jerusalem  enfin  ce  n'^tait  plusqa'une 
poignee  de  maiheureux  meurtris  par 
leurs  cbatoes,  abrutis  par  leur  eselava^, 
qui  ne  savaient  que  tendre  la  main  k 
f  aumdne  et  rendre  de  vaines  actions  de 
graces  k  leurs  lib^ateurs. 

Ainsi,  comme  arm^,  comme  eolonie, 
comme  intervention  religieuse,  la  eroi- 
sade n*avait  plus  d'objet.  Entrte  dans 


(*)  Yoyei  Goillaume  de  Tyr,  Hhioht  d§  ce 
yti*  /«/  pai$4  au  dela  den  men^  etc. 


294 


L'urnvERS. 


la  Tilie  sainte ,  elle  se  trouYait  acculee 
en  une  impasse.  Comme  arro6e,  le  licea- 
eiemeot  la  menaqait;  comme  colonie, 
elie  manquait  de  bras;  comme  iDterven- 
tion  religieuse ,  elle  dersDait  inutile.  Sar 
quoi  fonder  la  duree  de  sa  domination  ? 
Une  fois  les  crois^s  d^bandes,  ilsallaieot 
s'eparpiller  sur  toute  la  surfiace  de  TEa- 
rope,  et  on  n'attendrait  plus  que  de  leurs 
de  r^cits ,  plus  ou  moins  exalte ,  un  nou- 
Teau  soulevement  de  masse,  sansdoute 
aussi  confus  que  le  premier ,  et  dont  Tef- 
ficacit^  ^tait  pour  le  moins  aussi  chan- 
ceuse.  II  n*y  aurait  probablement  que  les 
insens6s  qui  se  jetteraient  de  nouveau 
dans  les  aventures  pour  secourir  leurs 
freres  en  relision.  Les  princes  puissants, 
les  peuples  forts  se  donneraient  bien  de 
garde  de  se  eompromettre  dans  une  ex- 
pedition aussi  lointaine  que  douteuse. 
Suant  aux  ambitieux,  ils  n'auraient 
,  us  qu'a  glaner  sur  les  traces  des  pre- 
miers crois^  :  Nic^  ^tait  h  Alexis, 
£dessek  Baudouin,  Antioche  a  Boh^ 
mond ,  Jerusalem  allait  6tre  possed^e  a 
son  tour.  Puis,  quelle  lamentable  expe- 
rience de  dangers  a  courir,  depriyations 
k  supporter ,  de  combats  a  renouveler 
sans  cesse !  Tout  ^tait  done  lugubre  dans 
I'avenir  de  la  croisade ,  tout  6tait  noir 
li  son  horizon. 

En  cette  extr^mit^,  on  n'e  tronva  pas 
'  d'autre  parti  §  prendre  que  d*6lireun  roi. 
foiger  en  royaume  le  territoire  d^vast^ 
de  Jerusalem ;  ses  habitations  d6peii- 
pl6es ,  ses  nombreuses  ^lises  anx  rares 
fideles ,  ses  campagnes  sans  moisson , 
son  tr^sor  public  sans  argent,  telle  ^tait 
la  deplorable  ressource  qui  restait  a  la 
croisade  pour  ne  pas  avorter.  Dans  un 
conseil  des  chefis,  le  comte  deFlandre  ou- 
Tfit  cet  avis  andacieux ,  mais  indispen- 
sable. Lediscourg  quMI  pronon^a  dans 
cette  occasion,  discours  que  rapporte 
tout  au  long  M.  Michaud,  en  s'appuyant 
de  rhistoirc  d'Accolti  et  de  celle  dTves 
Doehat,  nous  semble  contenir  un  re- 
sume si  complet  de  Finqui^de  des  eg- 
prils  et  de  la  aifficulte  des  circonstance^, 
que  nous  le  citerons  tout  entier ,  quor- 
qu*il  nous  paraisse  un  pen  arrange  (*} : 

«  Mes  freres  et  mo  oompagnoitt,  aurait  dit 
« le  oomie  de  Flandre ,  nous  sommes  reunifl 

(*^yoyez  MlchSiud,  aUtoire  da  Croinidu; 


pour  miter  odc  affaire  dek|ktbMe 
importance;  nousn'edmes  jamiisptukn 
des  conseils  de  la  sagesse  el  des  iosphiisk 
du  del  :  dans  les  temps  ordinaiRs,«d^ 
sire  toujours  que  rautorite-nil  an  bis 
du  plus  habile ;  a  plus  forte  nisoo  igm- 
nous  chercher  le  plus  digue  pour  gonsv 
ce  royaume «  qui  est  enrore  engnniiept- 
tie  au  pouYoir  des  barbares.  Dqi  m 
avons  appris  que  les  ^ptiens  MBrt 
cette  ville  k  qui  nous  alloos  dioiiff  ■ 
maitre.  Ia  plupart  des  goerrien  dntta 
qui  ont  pris  les  armes  sont  inpatial^ 
retoumer  dans  leur  patrie,etvoiti» 
donner  a  d*autres  le  soin  de  defeat  in 
conqu^te.  Le  peuple  noaveaa;  qu  ^ 
habiter  cette  terre.  n'aun  pdot^a 
voisiuage  de  peuple  du-etieB  qoi  ^k 
secourir  et  le  consoler  dans  ui  difia 
Ses  ennemis  soot  pres  de  lui,  so  A 
sont  au  dela  des  mers.  Leroi<]aeioB)i 
aurons  donne  sen  son  seal  apfid  mi- 
lieu des  perils  qui  reaTironuaL  II  h 
done  que  celui  qui  est  appdei^nav 
cepays  ait  toutes  les  qualiles  w^ 
pour  s'y  maintenir  avec  gloire;  il  to^^ 
reunisse  a  la  bravoure,  natupeBeiaxrns^ 
la  temperance,  la  foi  et  rbasiute; at, 
Vhistoire  nous  Tapprend,  e*ai  a  »■ 
qt^on  a  triomphd  par  let  arwu  «'*•* 
confie  let/nuts  dt  la  ticttm  k  kif 
et  a  ia  'vertu, 

«  rToublions  point,  nw  &«»«'■ 
oompagnons,  qu*il  s^agit  nwia  ^ 
d'hui  de  donner  un  rai  qo'nn  ySf^ 
au  royaum«  de  Jenisalem.  Oi^f^ 
choisiroDs  pour  dief  doit  tfvvf 
a  tous  ceux  qui  auront  quilteiw  |««* 
leur  fanille  poor  le  scrvioe  de  Je«^ 
et  la  defeoaedea  aaiats  Ueox-fl^^ 
flenrir  la  tertu  aur  eette  lem  «* 
lui-oeiBe  en  a  donne  k  Bodik;  ■  * 
ramenerles  inBd^lcsa  lareUgisadrtii^ 
les  aocoutumer  4  noa  bmmbi,  ke » 
benir  noa  lois.  Si  ▼©»  tenes  f  *•* 
qui  n*en  est  pas  digne,  tous  ^^**? 
tre  propre  outrage,  el  wos  ib»m>*  ; 
ruine  du  nom  clvetiea  dans  ce  ]f^* 
n'ai  pas  besoin  de  voos  rappdff  ^^ 
ploits  et  les  travaux  qui  nous  «*  •• 
poaaeision  de  ce  territoire ,  je  °^  fvf 
soin  de  redirc  id  les  ▼owi  les  f*"^*: 
sont  restfe  «0(»» 


trahi  et  ne^i^ ,  la  «''P<»"**°!*Jr|J 


lieux  oik  nous  arvons  relete  sb  ■Jr*v]l 
aieurs  alors  ne  manqoeraieDt  pit  "*2 
k  la  fortune,  et  non  lla  tertu,  te  R^ 


SYME  MODERNE. 


295 


«  cIiMM  qae  nons  atoiu  laites,  tandis  que  les 
«  maux  q^eprouverait  oe  royaume  passeraient 
«  aux  yeux  aes  homines  pour  £tre  le  fruit  de 
«  notre  impradenoe. 

«*  If e  croyet  pas  eependant »  mes  fir^res  et 
«  mes  compagoons ,  qne  je  parle  ainsi  parce 
ic  que  faoabitiomie  la  royauli,  et  que  je  r(K- 
«  chercbe  votre  faveur  et  vos  boanes  graces. 
«  Moa ;  je  o'ai  point  taat  de  pitemption  que 
■  daspirer  k  un  tei  bonneur;  je  prends  le 

•  ciel  et  lea  hommes  k  tkaom  que  tors  Bi4me 
m  que  vous  Toudriei  me  donner  la  oouronne, 
«  je  ne  I'aecepteraU  point,  etant  resolu  de 
«  retourner  dans  mes  ^ta.  Ce  que  je  viens 
c  de  vous  dire  n*est  que  pour  Tutilite  et  la 
m  gloire  de  tous.  Je  vous  supplie,  au  reste, 
«  de  recevoir  oe  conseil  comme  je  vous  le 
«  donue,  avec  affection,  franchise ,  et  loyaut^, 
«  et  d*^lire  pour  roi  celui  qui ,  par  sa  Tertu , 
«  sera  le  plus  capable  de  consenrer  et  d'^ien* 

•  dre  ce  royaume  auquel  sont  attaches  I'hon- 
«  oeur  de  foa  armes  et  la  cause  'de  Jisus- 
«  Gfariat»» 

ImmMiatement  aprte  ee  discoare, 
les  chefs  assemble  song^ent  h  nommer 
ce  roi  si  necessaire.  Le  royaume  n'^tait 
pas  teniant;  ce  fut  k  qui  ne  se  charge- 
rait  pas  de  ce  fardeau.  Tous  les  am- 
feHieux  recnlaient  devant  les  difficult^s, 
qui  s'amoncelaieDt  dans  leur  imagina- 
tion. NouTclle  couronne  d*^pines ,  tons 
k  repouss^rent  de  leur  t^te.  On  TofTrit 
flu  comte  de  Flandre ,  qui  avait  si  bien 
parl^;  il  d6clina  ce  dangereux  honneur, 
et  r^p^ta  qu'll  ne  formait  plus  qu'un 
▼ceu,  celui  de  retourner  en  Europe 
evec  le  surnom  de  Jib  de  saint  Geor- 
ge^  que  son  courage  lui  avait  m6- 
rit6.  Raymond  de  Toulouse  fit  aussi 
la  sourde  oreille,  quoiquli  eOt  jur^  de 
rester  en  Palestine.  L'int^ress6  Proveu- 
f al  ne  Vo]^ait  aucun  avantage  dans  la 
la  possession  du  pays  aride  de  J^sa- 
lem;  il  rilvaitd^j^  une  autre  principaut^ 
phis  productive,  et  cherchatt  sans  cesse  k 
concilier  ses  devoirs  religiedx  avec  ses 
int^r^ts  personnels.  Tancr^de,  lui,  ^tait 
un  chevalier  dans  la  plus  complete  ac- 
ception  du  mot.  II  pref6rait  ce  litre  k 
celui  de  roi ,  et  Pind^pendance  qui  y 
^tait  attach^e  §i  la  responsabilit6  d*un 
ehef  de  peuple.  C^tait  une  belle  in- 
^iTidualit^  que  ce  Tancrede,  et  voiU 
tout,  (Juant  k  Robert  de  Normaadie , 
eipritindolentqaoiquecceurcourageux, 
fl  n'avait  ni  la  ?olont6  ni  la  eapaeite 


de  conduire  un  rovaume.  Baudouin 
s'6tait  indignement  fait  sa  part  tout  de 
suite;  Boh^mond  avait  eu  T^ofsme 
de  raster  dans  sa  principaut6  estorqu6e 
d^Antioche.  On  ne  oouvait  pas  penser 
alors  a  ces  deux  d^serteurs.  Restait 
done  Godefroyde  Bouillon.  Aussi  brave 
que  pleux,  aussi  modestequ'actif,  d'uae 
grande  vlgueur  de  corps,  ce  qui  ne 
nuisait  pas,  d*une  certaine  resolution 
d*esprit,  ce  qui  etait  indispensable, 
Godefroy  de  BouilloB  etait  r^ellement 
rhomme  qu*il  fallait  dans  oette  circons- 
tance  si  ^pineuse  (*}. 

On  fit  semblant  n^nmoins  de  s^n- 
qu^rir  du  caractere,  de  rintelligence,  des 
yertus  et  des  vicesdeplusieurscandidats. 
On  nojnma  une  sorte  de  jury  gui  avait  a 
prononcer  sur  les  difterents  prmces  dont 
on  balan^it  les  m^rites.  Ce  jury  devait 
consulter  I'arm^e,  ecouter  les  observa- 
tions de  tous,  pour  fonder  son  jugement 
sur  Topinion  g^n^rale.  Puis  on  ordonna 
des  pri^res ,  on  imposa  des  jeCines ,  on 
recommanda  desaum6nes,  aiin  que  Dieu 
daignSt  eclairer  ie  choix  des  eiecteurs. 
Dans  tout  ceci  il  y  avait  bien  un  peu 
de  oom^ie  de  la  part  des  principaux 
chefs;  mais  il  ^tait  necessaire  de  con- 
cilier tout  d'abord  au  futur  roi  son 
peuple.  et  sous  ce  point  de  vue  la  co- 
m6die  etaitexcusable.  Tous  les  candidats 
laiss^rent  done  fouiller  dans  leur  pass^, 
interroger  leurs  prec^denu,  demander 
k  chacuQ  de  leurs  serviteurs  des  detail^ 
sur  leur  vie  priv^e.  Les  serviteurs  de 
Godefroy  de  Bouillon  firent,  dit-on,  le 
plus  grand  eioge  de  sea  moeurs  et  de 
son  caractere.  A  leur  dire,  il  etait  sa 
chaste  qu'il  n*avait  jamiais  commis  le 
moindre  acta  de  libertinage.  G'etait  Ik 
)a  vertu  principale  pour  gouvemer  des 
masses  dissolues,  pour  r^ner  sur  la  cite 
saiote.  On  ne  reprocha  au  due  de  Lor- 
raine qu'one  devotion  trop  minutieuse , 
et  trop  de  temps  employe  a  demeurer 
dans  les  eglises ,  tant  pour  y  prier  que 
pour  y  contempler  les  images  des  saints 
et  les  peintures  reli^euaes.  Quelques 
chroniqueurs  ont  ete  jusqu'a  rapporter 
qu*on  se  plaignit  aue ,  restant  aans  les 
temples  divins  au  dela  du  temps  des  of- 
fices, il  laissaU,  passer  Vheure  de  ses 

nVojesGoUlaaaie  dt  Tyr,  HkUrire  tff  m 
qt^  t^mtpatsi,  etc. 


9M 


I^UNIVERS. 


repa$.  et  que  les  meU  de  sa  table  se  re- 
firoimsaient  ei  perdaient  leur  aaveur. 
Quoi  qae  firent  ies  Provencaux  pour 
repousser  la  candidature  de  Godefroy , 
lualgre  leurs  caloniDies  grossi^res ,  mal- 
gt6  leur  opposition  viotente,  outre  la 
justice,  la  superstition  Tint  au  secours 
deTelection  du  due  de  Lorraine.  Un  illu- 
ming pr^endit  I'ayoir  vu,  en  songe,  assis 
sur  le  trdne  du  soleil ,  eotour^  d*olseaux 
celestes,  symbole  mystique  des  pelerins. 
Un  autre  attesta  qu*il  lui  ^tait  appara 
portant  une  etoile  en  main,  et  gravis- 
sant  Techelle  de  Jacob.  Selon  une  troi- 
sieme  revelation  il  aurait  ^te  salu^ 
sur  le  mont  Sinai  par  deux  envoy^  de 
Dieu ,  et  en  aurait  re; u  la  mission  de 
gouverner  la  Jerusalem  terrestre.  L'6- 
iection  de  Godefroy  ne  devenait  done 
plus  Toeuvre  des  hommes,  mais  bien 
celte  de  Dieu.  Les  fanatiques  ainsi  fireut 
taire  les  envieux. 

USUBPATION  DU'PATBIABGAT. 

dependant  ii  d^laisait  aux  pr^res 
qu*un  soldat  pAt  rev^tir  les  insignes  de  la 
puissance  mat^rielledans  une  ville  toute 
religieuse.  En  consequence  le  derg6  insi- 
nua  qu*il  ne  fallait  pas  que  Torgueil  pr6- 
siddt  au  rovaume  de  rhumilit6.  11  agit 
avec  tant  d  adresse  qu'une  fois  ^lu,  Go- 
defroy refusa  le  diademe  et  le  sceptre,  et 
qu'il  se  contenta  du  titre  singulier  de 
baron  du  saint  s^pulcre.  Chose  etrange ! 
ce  clerg^  qui  se  montrait  si  suscep- 
tiMe  a  l^droit  de  la  superbe  militaire, 
81  chatouilleux  sor  le  titre  de  son  maf- 
tre  effectif,  n*en  r6clama  pas  moins  pour 
lui  des  honneurs,  des  insignes,  toutes 
les  apparenoes  de  la  domination  spiri- 
tuelle.  Un  grand  seandale  eut  mSme 
lieu  a  cette  occasion.  Toutes  sortes  d'in* 
trignes  se  crois^nt  k  propos  de  T^Iec- 
tion  d'an  patriarche.  Guillaume  de 
Tyr,  rhistorien  archevAque,  s'^ldve  vio- 
lemment  a  ce  propos  contre  Tesprit  du 
derg^  de  la  croisade.  II  accuse  les  pr6« 
tres  d'ambition ,  d'avidit^ ,  de  brigues 
eoupables ;  il  n'en  ^pargne  pas  un  seul , 
et  eondamne  partieuli^rement  un  certain 
evdnue  de  Martharo  d'avoir  soufiO^  sur 
le  olera6  latin  Fesprit  de  faction  et  de 
discorae. 

Le  clerg6  latin ,  en  effet ,  se  conduisit 
indigoement  vis-a-vis  du  clerg^  grec. 
U  lui  enleva  toutes  ses  foncttons,  le 


priva  de  tons  ses  btettcei;  ettaii , 
que  le  vieux  patriarche  Siineoo.  fm 
teur  des  suppliques  a  Urbain  Hi  li » 
time  si  resignee  de  taot  depaiMi^ 
^tait  encore  vivaot  dans  UledeGlp; 
on  ne  se  fit  pas  scnipule  de  ienipi 
dans  sa  cbaire  de  Jeninlem.  [&|i^  ] 
tre  ambitieux,  AmoukI,  diipaUii ' 
due  de  Mormandie,  se  praMtoM 
heriter  des  depoailles  du  nmrn 
meon.  A  foree  de cabaleif ilttt» 
mer  patdarcbe  avant  la  mort  flAiii 
titolaire.  Un  tel  chef  ne  deviiliil  | 
tourer  que  des  gens  de  sa  natmiki  i 
tons  les  grades  rdigieux  fmxSAkk  I 
n6s  a  Tadresse,  et  noo  a  h  f8lil| 
Godefroy  fut  uo  rude  mail  t  ' 
soldat,  Aroould  fatunprdtred' 
et  pr^varicateur.  Oa  avail  etiji 
chansonner  ses  vices  duraotiea 
rexp^ditioQ,  et  il  passait  a  tad 

{)our  un  des  hommes  les  plus  i" 
es  plus  laseifs  du  pelerinage  f). 
Ce  fut  eatre  ses  iodigiieB  i  ' 
Godefroy  pr^  serment  d^ 
de  justice.  M'etait-ce  pas  la  des 
moutrer  une  sorte  de  ftibiew,^ 
ne  pouvait  pas  s^opposer  a  ft 
quasi  poutiiicale  du  cnapeiaiBdr* 
Godetroy  n'aurait-il  pasdd,i 
refuser  tout  rapport  sntm^ 
aussi  indigne  ?  Godefroy  ott^ 
temps  a  eprouver  les  malt 
de  son  aveugle  coDdcscendj 
le  clerg^.  Un  des  premiers  i 
nould  fut  de  ntelamer,  i 
appartenant  a  F^lise  df 
les  richesses  conquises  par  kh 
crdde  dans  la  mosqude  d'OaM 
crede  d'abord  ne  fit  que  soaiiitdT 
en  apprenantles  preteatioosd'Jlr 
Mais  celui-ci  remua  le  clerge/' 
aux  fanatiques,  agit  de  telle  f 

Sour  eviter  peut-£tre  un 
^plorable ,  Tancrkle  fut  c 
prendre  pour  juge  entre  laid  I 
versaire  le  conseil  des  cfaeCs. 
La  scene  fut  vive  et  bien  c 
Arnould  montra  la  plus  perfidek 
sie,  Tancrede  la  franchise  la  (' 
Arnould  accusa  le  chevalier  f 
ne  point  respecter  Us  poMei^  ^ 
ch  depouUler  les  auieU  du  C'^ 


(*y  Voyes  lUymond  d*Asnci, 
Francs  qui  |wirf ii<  Jirmalem. 


SYRIE  MODERNE. 


297 


Tanerede  r^pondit  en  d^Iarant  que  la 
langue  du  patriarcbe  usurpateur  con- 
tenait  de  la  malice  comma  la  queue  du 
scorpion  contient  du  venin.  «  Ou  ni'ac- 
«  cuse,  ajouta-t-il ,  d'avoir  d^pouilie  le 
«  sanctuaire,  d'avoir  detourne,  ou  plu- 
«  t6t  eveUle  Tor  ^ui  dormaU  daos  les 
«  eglises;  mais  Fai-je  garde  pour  moi  ? 
«  Vai-Je  donn^  a  mes  niicesf  ne  1  'ai-je 

•  paspris,  aucontraire,  pourremployer 
«  au  service  du  peuple  de  Dieu,  et 
«  pour  le  rendre  au  cr4ancier  apris  la 

•  moissonf  Vous  le  savez ,  d'aiUeurs, 
«  iravait-on  pas  d^ide ,  avant  la  prise 
«  de  Jerusalem,  que  chacun  de  nous 
«  poss^erait  les  tr^rs  et  les  biens 
«  doDt  il  s'emparerait  le  premier  ?  Ghan- 
«  ge*t-on  de  r^^ution  tous  les  jours? 
«  ]S*ai-je  pas  coinbattu  en  face  ceux 
«  qu'on  nosait  regarder  par  derridre? 
«  ]N*ai-je  pas  le  premier  p^n^tre  dans  des 
«  lieux  ou  personne  n*avait  Taudace  de 
«  me  suivre?  A-t-on  tu  Arnould  medis- 
«  puter  alors  la  gloire  du  p^ril  ?  Pourquoi 
«  vient-il  aujourd*bui  demander  le  prix 
«  du  combat?  » 

Malgr^  cette  dtfense  vigoureuse ,  les 
chefs  assemble  prononcerent  un  juge- 
mentambigu.  Us  craignaient,d'un  c6t^ 
de  blesserle  Juste  orgueil  d'un  des  plus 
valeureux  cbevaliers  de  I'arm^e :  de  rau- 
tre,  its  redoutaient  d^ja  Arnould  et  ses 
intrigues,  son  habilete  perverse,  sa  do- 
mination d^j^  puissante  sur  certains  es- 
prits.  Travail  les  par  de  pareilles  influen- 
ces, aussi  indecis  et  inquiets  dans 
leurs  r^olutionsciviles,  quMIs  ^talent 
d^cid^  et  braves  dans  les  combats ,  lis 
d^larerent  qu*on  pr^l^verait  dans  les 
triors  de  la  mosqu^  d^Omar ,  h  titre 
de  dimedu  butin,  sept  cents  marcs  d*ar- 
gent  pour  en  gratiner  T^lise  du  saint 
sepulcre.  Sentence  pitoyable,  qui  ne 
donnait  tort  ni  h  Fun  ni  a  Tautre  des 
adversaires,  tout  en  faisant  peser  sur 
eux  une  certaine  exag^ration  dans  ce 
que  Tun  demandait ,  et  dans  ce  que  I'au- 
tre  refusait.  Tancr^e  eut  le  bon  esprit 
de  se  sottmettre  h  cette  decision  ridi- 
cule; ce  qui,  sans  doute,  trompa  les  es- 
p^rances  secr^s  d* Arnould  (*). 


n  Yoy«f  Raoul  de  Caen,  le$  G€iU$  d4  Tom' 
crede. 


BATAIIXB  DASGALON. 


Ce  jugeroent  impolitique  fut  le  der- 
nier actederassembl^e  des  chefs  crois^s. 
Tous  les  jours  il  en  partait  quelques- 
uns.  Leur  patience  6tait  a  bout ;  la  nos- 
talgie  les  avait  atteints.  S*imaginant 
avoir  termini  leur  oeuvre ,  ceux  qui  res* 
taient  encore  refusaient  de  prendre  part 
aux  affaires  du  nouveau  royaume  de  Je- 
rusalem. Leur  mauvaise  volenti  ^ata 
surtout  h  rapprocbe  du  p^ril,  le  plus 
grand  peut-^tre ,  que  courut  la  <;roisade. 
Les  Musulmans ,  apr^s  les  larmes  qu'ils 
verserent  si  abondamment  sur  leur  d^- 
faite,  songerent  a  la  vengeance.  Les 
£gyptiens  se  d^dddrent  les  premiers; 
et  comme  toute  discorde  entre  le  kha- 
li&t  de  Bagdad  et  le  khalifat  du  Kaire 
s*^tait  apais^e  en  face  d*une  calamity  qui 
frappait  i'lslam  tout  entier,  des  auxi- 
liaires  venus  des  deux  Iraks ,  de  Perse 
et  de  M^opotamiCf  se  ran^^rent  sous 
les  drapeaux  des  Fathimites.  Afdbal,  ce 
vizir  qui  avait  arrach^  prec^demment 
Jerusalem  aux  Ortokides ,  commandait 
les  troupes  nombreuses  qui  s'^taient 
propose  de  reconqu6rir  la  Palestine. 
Dej&  Afdhal  et  ses  soldats  se  trouvaient 
sur  le  territoire  de  Gaza,  en  Syrie,  h 
quelques  journ^  de  la  cit^  sainte, 
lorsque  la  nouvelle  de  leur  marche  fut 
apprise  par  les  crois^.  Aussit6t  Tan- 
erede ,  le  comte  de  Flandre  et  Eustache 
de  Boulogne ,  qui  s'^aient  port^  vers 
le  pays  de  Naplouse  pour  en  prendre 
possession,  coururentvers  les  rivages  de 
fa  mer ,  afin  de  s^assurer  des  forces  de 
ceux  qui  les  menacaient.  Ds  furent  bien- 
t6t  convaincus  de  Timminence  et  de  la 
gravity  du  danger,  et  le  firent  savoir  a 
Jerusalem. 

On  annonip  ce  message  dans  la  ville 
en  pleine  nuit ,  ^  la  lueur  des  torches, 
au  son  des  trompettes.  Les  crieurs  pu« 
blics  inviterent  les  crois6s  i  se  rendre , 
des  le  lendemain  matin ,  h  F^ise  de  la 
Resurrection ,  et  de  se  preparer  au  com- 
bat. Le  peuple ,  encore  entnousiasme  de 
sa  victoire,  montra  une  grande  Anergic  et 
une  grande  resolution.  Certains  princes, 
au  contraire ,  hesiterent ;  d'autres  refu- 
s^rent  de  s*engager  dans  cette  nouvelle 
lutte.  Robert  de  Normandie  pr^tendit 
que  son  voeu  ^tait  rempH,  et  qu*il  n'a- 
Tait  point  h  suivre  Farroee  de  Godefiroy 


398 


LIJNITERS. 


de  Bouillon,  qui  s'apprttait  h  sortir  au- 
devant  de  rennemi.  Raymond  de  Tou* 
louse,  jaloux  du  due  de  Lorraine ,  Ray- 
mond ,  QUI  enrageait  au  fond  du  coeur 
d'avoir  ti6  oblige  de  remettre  au  roi  de 
Jerusalem ,  ou  plut6t  au  baron  souverain 
du  saint  s^pulcre,  la  forteressede  David, 
ne  voulait  pas  se  souniettre  au  comman- 
dement  de  son  rival.  Cela  nefui  paraisSait 
plus  que  servir  une  cause  particuliere , 
et  son  orgueil  se  refusait  h  tout  acte  de 
subordination.  Le  due  de  Normandie  et 
le  comte  de  Toulouse  repousserent  done 
^galement  Tinvitation  de  se  joindre  h 
ceux  qui  partaient  pour  aller  combattre 
les  £gyptiens.  Cette  decision  6tait  grave. 
Elle  jeta  un  instant  raiarme  et  la  deso- 
lation parmi  les  Chretiens.  Alors  Pierre 
TErmite ,  qui  devait  rester  dans  la  ville 
avec  les  femmes,  les  enfants,  les  vieil- 
lards ,  les  malades ,  se  presenta ,  accon»- 
pagne  d*uue  grande  partie  du  clerg^  et 
d*une  foule  de  p^lerins ,  aux  deux  prin- 
ces dissidents,  les  suppliaavectanta*ins- 
tances,  revint  si  sou  vent  h  la  charge, 
qu*ils  finirent  par  consentir  h  suivre 
leurs  frkes,  et  k  se  joindre,  ainsi  que 
leurs  troupes  uarticuneres,  k  Varm^  de 
Godefroyde  Bouillon  O- 

Cette  arm^e,  k  laquelle  8*^taient  r6u- 
018  tous  les  crois^  ^parpiiMs  sur  le' 
territoire  de  la  Palestme,  en  quittant 
Ramlah ,  son  rendez-vous  g^n6ral ,  des- 
cendi  t  vers  la  cSte,  entre  A  scalon  et  Jaffa. 
Bient6t  elle  trouva  sur  les  bords  d*un 
torrent  nomm6  Sorek  une  masse  consi- 
derable d'dnes^de  mulcts,  de  chameaux 
et  de  buffles.  C'^tait  la  un  butin  tout 
trouv^  pour  les  soldats  de  la  croisade, 
touiourstoutpr6tsarapiner.  Mais  lesage 
Godefroy  ne  permit  pas  k  ses  hommes 
de  perdre  un  temps  utile,  de  se  livrer 
au  pillage,  etd^clara  que  quiconque  quit- 
terait  son  rang  aurait  les  oreilles  et  le 
nez  coupes.  Cette  mesure  de  rigueur 
arrSta  la  debandade,  et  le  soir  m^me  on 
arriva  en  vue  des  Musulmans.  Les  Chre- 
tiens, qui  avaient  emporte  avec  eux  le 
bois  de  la  croIx  divide,  enflamm^s  par 
la  presence  de  cette  relique,  s'avance- 
rent  pleins  d*enthousiasme  a  la  bataille. 
Cetait  le  matin  dela  veilie  de  1  Assomp- 
tion,  14  aoQt  1099,  et  Tapprochede  cette 


grande  fiSte  redoublait  eneore1n» 
fiance.  lis  etaient  assure  de  h, 
tion  celeste,  etcomplaientSBrlt 
comme  sur  J^susCnristpour' 
ner  la  vicloire. 

Les  Musulmans,dot)t9Qeni 
ne  s'accorde  k  ^Mir  lednfln 
mais  qui  ^videmmmt  etaient 
breux  que  les  Chretiens,  ft" 
Taste  demi-cercle  dans  une 
bom^e  a  Test  par  des  collioest^ 
par  la  mer .  Ascalon ,  surlerir 
trait  derri^re  ses  rcmpartset 
rets  une  for^t  de  mdts :  eM 
^ptlenne  toute  prlteiportari 
k  son  arm^c.  En  voyantfemri 
Chretiens ,  les  Masulmaiu 
d*une  sorte  deterreur.  En  vo^ 
sons  :  d'abord  its  ^taifntloia 
les  croises ;  on  leor  avaitdit , 
niers  6taient  a  peine  capaMei 
fendre  k  Tabri  ae  murs ,  et  ill 
tout  a  coup  en  rase  camMflK, 
par  un  singulier  hasara  ,1c9l 
qu'avait  rencontr^  rarmee  ^ 
attires  soit  par  le  bruit  des  e 
par  la  marche  rapide  des 
r^nirent   derriire  lea 
Francs,  etr^t^rent 
leurs  mouvements.  Les  crisdi 
maux,  la  poussitoqne 
course,  fes  firent  prendft^sl 
Musalmans  pour  des  masa 

Alors  rarmee  ^gyptienae 
gae  les  crois^  avaieiit  retjl^ 
breox  renforts.  Cela 
dans  ses  ranss.  Sous 
pantque,  elle  hiissB  ses 
fuer  a  leur  guise.  Godefiw  p«J< 
sans  obstacle  Ters  la  tflte'/ 
pour  en  eontenir  les 
le  combat.  Raymond  de 
s'^tendre  9ree  set  Protenqwt 
mer  et  Tarm^  d*Afdhal ,  de''' 
p^her  toute  eomnrameatiei 
troupes  de  terre  «t  la  fletts.  1 
cfede  et  Robert  de  naadre 
temps  de  diriger  lenr 
point  qoi  leur  parutle 
leurs  adversaires.  Llnfo 
commeD<^  par  laneer  phisicsi 
de  javelots;  puis  bientdt  ii' 
flamande  s'^lftooi  aor  ies  p 
des  infid^les.  £lle  y  trouva 


r«; 


sttaq^i 
»plosf 


dcsi 


n  Voyex  Ttadebode,  Hi»ioire  Ou  voyage  A     "»  genou  fixe ea  terre ,  m  0 
Jirwaiem,  '  '        aussi  bieu  avec  Tare  qajvee 


r^ 


SYRIE  MODERNE. 


999 


mt,  aTfiCfflraod  bruit  de  cimbales  et 
idtniDultede  voix,  deshommes  noirs. 
It. en  mains  des  fl^aux  h  boules  de  fer, 
11  fiappaieat  a  coups  redoubles  sur  la 
|ise  des  chevaliers,  et  sur  la  t^te 
ivrs  chevaux.  Dinstant  en  instant 
imient  d'autres  combattants,  qui 
k  de  (rondes,  oui  de  sabres  recour- 
I  qui  de  lances  enormes.  Malgre  leur 
imoa  rapide,  Tancrede ,  Robert  de 
iMMlie,  Robert  de  Flandre ,  a  force 
riesr  etd'acUvite,  n'en  repousserent 
moias  ces  ennemis  sans  cesse  re- 
iuts.  £nfin  le  due  de  Nornuindie 
pdnetr^  jusqu*au  centre  de  Tarm^ 
tieone,  et  y  arracher  le  grand  ^ten- 
rd'Aldhal.  C^tait  1^  le  plus  beau 
ide  la  bataille;  il  jeta  le  decoura^e- 
Brians  Taroiee  musulmane,  etdevint 
Mai  de  sa  deroute  (*). 
Ve  deroute  fut  aussi  rapide  que 
late.  Malbeureusement  les  fuyards, 
pnde  partie,  tomberent  d'eux-md- 
iuks  les  embdches  qu*ils  aaraient 
Mr.  Ceux  qui  se  precipiterent  du 
les  flots  furent  poursuivis  par  les 
iirs  du  oomte  de  Toulouse ,  et  trois 
^'eotre  eux  se  noyerent  en  viM»- 
Hteiodre  la  flotte  ^gyptkone.  Ceux 
miureBt  se  refiigier  dans  la  ville 
lalon  trouv^reot  sous  ses  murs 
|poy  et  ses  Lorrains,  et  furent 
pia  jusqu*au  dernier.  Plusieurs 
^escalade  les  enceintes  des  jardins 
kiriUe,  et  6tant  mootes  daus  des 
JMres  ett  des  oliviers  pour  s*y  cacher 
|r  hranchage,  furent  abattus  k  coup 
^MS  comine  des  oiseaux.  Tons  ces 
■ireux  vaiDcus,  eoDstern^  de  leur 
^,  ae  laissaient  ^rger  sans  r^is- 
l  Geux  que  le  glaive  yainqueur 
Kgnait  pas  s*^touf£aient  eux-md- 
•IX  portes  d'Asoalon,  tant  ils  s*y 
Htaieat  en  masse.  Afdbal  pourtant 
\tkyf  p^etrer*  D'une  des  touns 
^Ua  il  put  assister  a  la  destruction 
m  arnoee.  Sob  d^espoir  fut  pro- 
li  s^anraeha  la  Wbe;  il  se  noeur* 
irisa^;  il  poussa  des  gemisse- 
;  Di^es  de  blasphemes ,  et  flnit , 
«  pas  s'ecrier  :  «  O  Mabomet! 
it-il  rrai  que  la  puissance  du  Cru- 
i  fdt  plus  grande  que  la  tieane, 

oyes  AolMrt  to  Moioe,  BiMioire  4e  M* 


«  puisque  les  Chretiens  ont  vaineu  tes 
c  disciples?  »  Aprte  ce  cri  de  rage ,  Tor- 
guellleux  vizir  ^gyptien,  saisi  de  ter- 
reur  autant  aue  de  'decouragement,  s'en- 
fuit  sur  sa  dolte,  et  se  h^ta  de  gagner 
le  large.  Cette  fuite  honteuse  ne  laissa 
plus  aucun  espoir  a  Tarm^e  musulmane, 
et  le  peu  qui  s'en  sauva  alia  mourir  de 
faim  dans  le  desert. 

Atelf  B  DB  60DBF&0T.  ] 

A  la  suite  du  massacre  les  crois^ 
s'occup^rent  du  pillage.  Jamais  butin  ne 
fut  plus  riche  et  plus  copieux.  On  trouva 
pour  la  faim  des  gateaux  de  miei  et  de 
riz,  pour  la  soit  de  nombreux  vases 
remptis  d'eau  de  source.  Apres  s^^tre 
.  rassasies  de  toutefa^on ,  les  croises  son- 
{;erent  a  s*emparer  d'Ascalon ;  mais  la 
jalousie  des  chefs  entre  eux  les  arr^ta 
dans  cette  derniereentreprise.  Le  eomte 
de  Toulouse,  le  premier,  avait  somme 
la  garnison  de  se  rend  re.  En  cons^auence 
il  voulait  arborer  sa  banniere  sur  la  ville 
et  la  garder  pour  lui.  Godefroy  de  Bouil- 
lon, en  quality  de  roi  de  Jerusalem, 
s'opposa  a  cette  pr6tention.  Alors  le 
vindicatif  Raymond  eut  Tinfamie  de  s*^ 
loigner  avecses  troupes,  et  de  declarer 
aux  Musulmans  d'Ascalon  qu'ils  n'au- 
raient  rien  a  craindre  de  Godefroy  tout 
seul.  Ge  funeste  exemple  d*ind^pendanee 
fut  suivi  par  beaucoup  d*autres  cheva- 
liers. Le  due  de  Lorraine  ne  put  done 
tirer  parti  de  sa  victoire  et  n*obtint 
qu'un  l^r  tribut  de  la  ville,  dont  il  tui 
etait  &i  facile  de  se  rendre  mattre  s'il 
eQt  ^t^  seconde. 

La  mauvaise  fol  et  la  haine  en- 
vieuse  de  Raymond  de  Toulouse  ne  se 
born^rent  pas ,  vis-a-vls  de  son  rival  cou- 
Tonn6,  a  une  seule  pcrfidie.  En  quittant 
Ascalon,  les  Provencaux  se  porterent 
vers  la  ville  d^Arsouf,  situ^e  sur  le  ri- 
vage  de  la  Mediterranee,  entre  Jaffa  et 
Cesar^e.  Raymond  aurait  bien  voulu 
s*eniparer  de  cette  place.  II  essaya  ua 
assaut ;  on  le  repoussa  vigoureusement. 
Alors,  avant  de  lever  le  si^e,  il  apprit 
^  la  garnison  le  peu  de  troupes  dont 
Godefroy  pouvait  disposer,  et  la  con- 
seilla  de  ne  pas  se  rendre  k  ses  somma- 
tions.  Lorsque  le  roi  si  contest^  du 
pauvre  royaume  de  Palestine  arrive  k 
sen  tour  sous  les  mars  d'Arsouf ,  il  ne 
fut  pas  long  k  se  convaincre  de  la  tra- 


$00 


L'UNlVERS. 


bison  de  celui  <rai  aurait  dd  lui  ob^ir. 
Malgre  sa  moderation  ordinaire  et  sa 
profonde  piet6,  Godefroy  s^emporta, 
jura  de  venger  cette  derniere  offense,  et 
marcha  resolument  contre  Raymond, 
pour  le  punir.  Une  deplorable  bataille 
allait  avoir  lieu ,  lorsque  Tancrede  et 
Robert  de  Flandre  s'interposerent  entre 
les  adversaires,  et  k  force  d'instances, 
de  prieres ,  de  promesses ,  parvinrent  a 
r^oncilier  les  deux  riyaux.  Mais  si  la 
guerre  intestine  n'aVait  pas  ^lat^,  le 
mai  n'etait  pas  moins  terrible.  D^u- 
nion ,  jalousie ,  insubordination  par  or- 
gueil,  trahison  par  rivalit^,  tels  etaient 
les  tristes  r^sultats  de  cette  egalit^ 
entre  les  seigneurs  f§odaux  que  Tdlec- 
tion  de  Jerusalem  n*avait  pas  pa  de- 
tniire  (*).    ' 

Le  retour  de  Godefroy  dans  la  ville 
sainte ,  malgr^  les  clameurs  enthousias- 
tes  du  peuple,  fiit  done  assombri  par  un 
nuage  gros  de  temp^tes.  Le  pauvre  due 
de  Lorraine  sentit  aiors  sa  ralblesse  et 
son  impuissance ;  une  profonde  m6laa- 
colie  s'empara  de  son  dme.  Ge  senti- 
ment ne  fit  que  s'aecroftre,  lorsque 
les  cbefs  crois^  lui  signifi^rent  enfin 
qu*ils  allaient  retoumer  en  Europe ,  eux 
et  leurs  chevaliers.  II  nV  avait  plus  de 
raison  de  les  retenir.  Le  Turc  n'etalt 
plus  mena^nt ,  r£gyptien  dtait  dtoou- 
rag6  par  sa  derniere  defaite.  Robert  de 
Flandre  et  ses  chevaliers,  Robert  de 
Normandie  et  ses  troupes  nombreuses, 
partirent  pour  leur  patrie ,  les  uns  par 
terre,  les  autres  par  mer.  Raymond  de 
Toulouse ,  qui  avait  jur6  de  ne  pas  re- 
toumer dans  ses  £tats,  mais  qui  ne 
voulait  pas  rester  le  subordonn^  de  Go- 
defroy, se  dirigea  vers  Constantinople. 
II  ne  resta  avec  le  due  de  Lorraine, 
fidele  h  son  serment  jusqu'li  la  mort , 
que  le  g6nereux  Tancrede  et  trois  cents 
chevaliers.  La  separation  des  crois^s  tat 
douloureuse  pour  tons.  Durant  quatre 
ann^es  ils  avaient  affronts  les  m^mes 
dangers ,  couru  les  m^mes  hasards ,  et 
nialgr6  la  rudesse  de  leurs  moeurs  ils 
s'etaient  accoutum6s  les  uns  aux  autres 
ets'etaient  vou^  unesorted*affection.  La 
foule  des  p^lerins  surtout,  celle  qui  etait 
trop  pauvre  et  trop  chetive  pour  entre- 


prendre  le  noaveau  et  p^Ue  nBf^i 

du  retour,  se  d^solait ,  geinir^ " 

dans  une  calamite  publiqne.  I 
cheux  et  peu  encoarageant  poor  k 
Qu'allait'il  lui  rester,  cb  effiit, 
monarque  improvise  ?  Quetyieid 
liers,  dont  le  zele  ne  pounit  las^ 
quelquesfantassinsdoiitbfidtel  , 
devenir  de  plus  en  plus  cha]KeK,ii| 
milliers  de  besogneux,  de  iiialate,l^i 
firmes,  voila  pour  les  eroiste;|iii  ' 
Cbretieosorieotaax,  qui  ne  pMtt" 
cune  des  langues  des  FraiKi;tel 
qui  dfssimulaient  leor  religioi,  i 
Arabes  apostats,  en  un  motdst 
tres  et  d^  fourbes.  Est-ee  i  la  ill 
de  gouverner  une  pareillenMBl 
fuse  et  divergente  qu'il  hA  sftT 
le  decouragement  de  Godefroy  M 
Ion  ?  En  tout  cas ,  doming  par  d 
de  plus  en  plus  exeessive,  il  f 
k  pea  le  clern^  empieter  inr  asa  J 
voir.  II  Ini  fit  des  ooneesr — 
breuses,  des  dons  de  toatese . 
bientdt  la  richesse  et  raaloritep 
du  e6t6  des  pr^tres,  an  < 
soldats. 

Sur  ces  entre£alteB  arrin  a  I 
lem  un  nouveau  l^gat  dn  ] 
un  certain  Daimbm,  ai 
Pise ,  homme  imperienx,  i 


4iklf^ 


:*)  Yoyez  Albert  d'Alx,  HUioire  de  I'exp^ 
''—  de  Jerusalem, 


pote,  et  aui  venait 
le  joug  de  r£glise  8iir*les 
peuples  croises.  DaimbectI 
borna  pas  k  Hre  UfSBtt  do  p^t^ 
devenir  patriarehe  de  JenisiBA.tj 
lui  fut  pas  difficile  d^ebrader  kr^ 
d*Arnould ,  prdat  sans  enui^ 
sans  vertu.  Gomme  d'aiHeais  I 
veau  legat  6uit  fort  riefae,  -  . 
cheter  des  partisans,  et,  aieel 
de  Roh6raond ,  qui ,  au  carlms^ 
nte  1100 ,  ^tait  vena  visiter  bi 
Dieu,  il  put  forcer  AmovM^d 
sa  demission ,  et  trdner  i  son  isT 
la  chaire  de  Sim^n.  A  peiai 
de  sa  nouvelle  dignity,  if  red! 
Godefroy  ia  sooverainete  da  qm 
Jerusalem  oh  sVlevait  T^lisedil 
surrection.  Aprte  qaeiqnesf  ' 
servations ,  le  brave  naais  £ii 
Lorraine  se  laissa  d^idiler.  Oi| 
mier  suce^  encouragea  Tambiti 
triarche,  et  a  force  diosistai 
toutes  sortes  il  obtint  eoeore  da  I 
roi  de  la  Palestine  la  oesakNi  de  b  t 


SYRIE  MODEftNE. 


801 


arid  €t  de  la  cite  de  Jerusalem,  en 
leinortdeGodefroysans  post^rit^. 
ft  pour  le  due  de  Lorraine  se  d6- 
r  le  vassal  du  pape « et  en  accepter 
nrement  le  droit  de  regner  sur  le 
qu'il  arait  conquis.  Cette  usurpa- 
leaodaleuse  eut  lieu  devant  le  peu- 
Msembl^  pour  les  c^r^monies  du 
jour  de  Plgues  H- 

MOST   DS   OODEFJftOY. 

ae  reatait  done  plus  h  Godefroy 
I  gouvemement  tout  militaire.  Si 
m  croit  quelqnes  historiens,  il  s'ef- 
pofirtant  defonder  des  lois  civiles ; 
noins  les  Assises  de  Jirusalem^ 
I  lui  attribue,  semblent  avoir 
^  de  telles  modifieations  d*^poque 
loque  qu'll  est  impossible  de  sa- 
au  juste  quelle  ^it  leur  teneur 
nps  du  premier  roi  de  la  croisade. 
qa*il  en  soit ,  ee  recueil  de  lois 
)ii*une  sorte  de  code  fi6odal ,  oi^  le 
K  judiciaire  est  maintenu ,  ou  les 
Isontfavoris^,  ou  le  clerg^  est 
i  dans  ses  privileges;  mais  oik 
fftans^  les  simples  cultivateurs 
It  consider^  comme  rien ,  ou  plu- 
nime  une  propri^6 ,  comme  une 
^  le  serf  avant  la  m^me  valeur  ma- 
t  et  p^unlaire  ou'un  faucon. 
86  i>assait-t*il  aonc  dans  Fdme  de 
iefroy,  soldat  plein  de  valeur,  mais 

sans  r^lie  capacity?  Malgr^  ses 
ions  de  roister  anx  empi^temens 
•^  malgr6  ses  efforts  pour  fonder 
Wable  royaume ,  malgr^  ses  ten- 
rpour  le  consolider  par  un  croupe 
organiques ;  apr^  avoir  ced6  aux 
f  la  partie  la  plus  s^rieuse  de  son 
w,  on  ne  le  vit  plus  s*occuper 

la  guerre.  II  alia  prendre  plu- 
forteresses  aux  Arabes,  il  envoya 
de  en  Gallic  pour  en  assurer 
Bision  ;  puis ,  eelui-ci  ayant  ^t^ 

par  le  aouverain  de  Damns ,  Go- 
ae  porta  k  son  secours  avec  ses 
Hc8  chevaliers ,  et  tour  k  tour  fut 
ar  des  Musulmans  de  Damas  et 

qui  Tenaient  du  dtert.  Cepen- 
Btes  ces  esearmouehes  ne  sufB- 
s  pour  oombler  le  vide  de  son 
our  aatisfaire son  activity,  pour 

ex  Raool  de  Caen.  Ut  GeMiet  de  Tat^ 
CuallUome  de  Tyr,  BiiUrire  d$  ce 
^,ete. 


le  consoler  de  ses  chagrins  intimes. 
II  tratnait  partout  une  melancolie  pro- 
fonde ;  et  pourquoi  ?  Nul  ne  le  sut.  Se 
repentait-il  de  sa  faiblesse  en  vers  les 
prdtres  ?  Croyait-il ,  au  contraire ,  n*a- 
voir  pas  encore  assez  fait  pour  la  reli- 
gion? Regrettait-il  amerement  ces  fral- 
cbes  vallees  de  la  Lorraine  dans  les  arides 
et  brdlantes  campagnes  de  la  Jud^? 
Toujours  est-il  qu^apr^  avoir  langui 
queique  temps  il  finit  par  tomber  ma- 
lade  ,  et  par  mourir  sans  divulguer  son 
secret.  On  le  pleura  cinq  jours  de  suite, 
rapporte  Albert  d*Aix »  et  on  Tenterra 
sur  le  Calvaire,  pr^s  du  saint  tombeau 
qu*il  avait  delivr^.  Heros  de  bras  plu-» 
tdt  que  de  t^te,  il  sut  toujours  donner 
Fexemple  du  courage  dans  les  combats; 
mais  il  ne  se  trouva  pas  capable  de  fon- 
der un  empire.  Lescirconstances  luifu- 
rent  defavorables,  c*est  vrai ;  cependant 
un  autre  que  lui  peu^^treeQt  eu  le  talent 
de  mieux  srouper  les  hommes,  de  les  in- 
t^resser  oavantage  h  leur  conqudte ,  de 
retenir  plusde  trois  cents  chevaliers  li  Je- 
rusalem. Aucune  des  ferocity  de  la  croi- 
sade ne  pent  lui  ^tre  reprocbee  :  il  se 
battait  avec  Anergic  contre  un  ennemi 
qui  lui  ripostait ,  il  ne  savait  pas  for- 
ger un  prisonnier  sans  defense;  son 
malheur  est  de  n*avoir  jamais  eu  assez 
d'autorite  personnelle  pour  arrSter  les 
bourreaux.  II  fut  bon  comme  on  pouvait 
r^tre  dans  un  si^le  de  fer .  d*une  bont^ 
passive.  C'etait  un  grand  natailleur,  ce 
fut  un  pauvre  prince  (*). 

BtoNB  DB   BAUDOCIIC  D'BDBSSB. 

A  peine  Godefroy  mort ,  une  explo- 
sion d'intrigues  contradictoires  eclata 
dans  la  ville  sainte,  dans  la  cite  de  Dieu« 
dans  le  royaume  de  rabn^gation  et  du 
desinteressement.  Ce  ch^tif  £tat  etait 
ambitionne  par  d'ardents  eompetiteurs; 
Daimbert,  appuy6  sur  les  pr^tendues 
promesses  qu  il  aurait  arrachees  k  la  fai- 
Dlesse  du  due  de  Lorraine ,  redamait 
Jerusalem  au  nom  du  pape.  Les  sei- 
sneurs  ftodaux  repousserent  tout  d'a- 
bord  une  pareille  pretention «  et  ne  vou- 
lurent  drautre  chef  qu*un  homme 
d*epee.  Unn  des  leurs ,  Gamier ,  comte 
de  Gray,  parent  de  Godefroy,   prit 

(*)  VoveK  Albert  d'iix,  Bittoire  ctr  I'tspedi- 
tion  de  JirvBalem, 


302 


LUIHIYERS. 


en  coDS^uence  possession  de  la  tour 
de  David  et  des  autres  j)oints  fortifies 
de  Jerusalem.  Le  patriarcbe  fulmina 
une  mal^iction  eontre  le  saeril^e ;  et 
comme  le  comte  de  Gray  mourut  su- 
bitement  qnelques  jours  apres,  plu- 
sieurs  fanatiques  en  cooclurent  qu'il 
avaitet^  (rapp6  par  le  del.  Neanmoins, 
roalgr^  cette  interpretation  a  son  profit 
d'un  accident  dd  au  hasard,  Daimbert 
n*en  cbercha  pas  moins  un  allie,  et 
6crivit  a  Boh^mond ,  son  fidele  protec- 
teur  moyennant  finances.  Helas!  le  fin 
Norinand  s'etait  laiss^  prendre  par  les 
Turcs,  et  perdait  aicsi  avec  la  libert^ 
la  bonne  aubaine  qui  s'offrait  a  lui. 
Force  fut  a  Tavide  patriarcbe  de  c^er  a 
la  n^essitc.  Ses  pretentions  activerent 
m^me  le  choix  des  barons ,  et  ils  offri- 
rent  a  Baudouin  d*£desse  la  couronne 
de  la  cite  de  Dieu.  Baudouin  ne  se  fit 
par  prier.  II  accourut  a  Jerusalem ,  et 
m^me  avec  une  telle  pr^ipitation ,  aull 
manqua  de  tomber  dans  une  embuche 
que  lui  avaient  dressee  les  Arabes  dans 
les  defiles  du  Liban.  A  Fentr^  de 
Baudouin  dans  la  capitale  de  son  nou- 
veau  royaume,  Daimbert  n'eutd*autre 
parti  h  prendre  qu'^  se  retirer,  et,  fei- 
gnant  de  n'^tre  pas  en  sQreti^  sur  le 
Calvaire,  il  se  r^fugia  sur  la  montagne 
de  Sion. 

A  peine  arriv6  h  son  nouveaa  poste , 
Fancien  comte  d*£des8e,  qui  avait  laiss6 
cette  principaut6  a  Baudouin  du  Bourg, 
son  cousin ,  voulut  m^iter  par  une  pe- 
tite exp^ition  les  suffrages  de  ses 
pairs,  (iette  expMition  se  borna  k  une 
sorte  de  promenade  militaire ,  oii  Ton 
fit  beaucoup  de  ravages  et  quelque 
butin.  A  son  retour,  le  nouveau  roi 
voulut  se  faire  couronner  k  Bethl^em. 
On  en  passa  parson  caprice.  Daimbert 
revint  a  composition;  mais  Tancrede, 
qui  se  souvenait  de  ses  nombreux  d6- 
m^l^s  avec  le  fr^re  de  Godefroy,  re- 
fusa  d'assister  au  sacre  d*un  deserteur 
de  la  croisade ,  et  8*en  alia  defendre 
Antioche  durant  la  captivite  de  Boh6- 
mond.  Ainsi  s'eparpillaient  les  forces 
des  Cbr^tiens.  Grftce  h  leurs  dissensions 
intestines,  ils  ne  formaient  aucun6ta- 
blissement  stable  et  puissant  et  Syrie. 
Cette  malbeureuse  province,  comme 
dans  ses  plus  mauvais  temps ,  ^tait  di- 
▼isee  en  petits  £tat8  independants,  et  ne 


profitait  en  aucuoe  facoQ  de  k  km 
tion  firanque.  Bien  au  cootrain,  m  ^ 
ritoire  s'appauvrissait  de  plos  en^ 
ne  servant  que  de  champs  deb ' 
des  luttes  loeessaotes,  11  der 
jour  en  jour  plus  arlde  et  {ilai| 
donn6. 

II  serait  fastidieux  et  inte 
de  suivre  toutes  les  peripetiess 
portance  de  cette  guerre  pq 
oontentons-nous  d'en  iadiqwli 
sultats.  Apres  des  alteroativeif 
ou  le  nouveau  roi  de  Jerusaien' 
tot  vainqueur,  taotdtvaioeai^ 
sieges  inuombrabLe^deforlerai 
des  poiutespousseesarorieotfll 
apres  des  hostilitessaos  profit  f 
rent  plus  de  quioze  aos,  Baa' 
vorise  coup  sur  coup  par  la  i 
combats,  unit  par  porter  lag 
£gypte  mime.  II  y  fut  beoreaifi 
la  viiledePbaramia,  eta'eoief^ 
la  joie  du  triomphe,  lonqued 
ii  tomba  gravement  maiadei 
entre  les  bras  de  ses  amis,  I'ai 
£i-Arischy  sur  les  froDtJoorij 
la  Palestine.  Baudouio, r"^ 
jours  frivole  et  debauche, 
imprudent,    sembla  meillavj 
roi  qu'il  n*avait  iU  ooouMr^ 
valier  ou  comme  comte  d'Edi 
ambition  une  foi  satisfaiujl 
arrogant,  moins  dissiowie, i 
rascible,  moins  injuste, 
qu*il  ne  s'etait  mootrd  iHj 
mentde  la  croisade.  Lespr 
de  leg&ter,  refonnereot^ 
des    vices  de  sa  nitorecil 
ftpretes  de  son  caracteit.  f 
reste,  sans  g^nie,  pnaoef 
vues,  il  oe  sut  que  maiati 
mi^ere  premiere  le  rovaiine^ 
confix.  S*il  ao  etendit  Jes  f 
s'empara  de  quelques  villesi 
il  ne  sut  ni  les  enrichiri  Bt| 
tirer  toujours  uni 
on  le  vit  une  fois  forcer  le  i 
Jerusalem  k  lui  remettre  I 
des  fideles  a  TegUse  de  la  I 
une  autre  fois  dpouser, 
ri^  d^ja  a  une  priiicesie^ 
qu'il  avait  laiss^  a  Edesse,« 
comtesse  de  Sidle,  parwgi 
portant  une  riche  dot  elle  »■ 
sa  detresse  ordinaire.  Epos ■* 
pourvu  de  sens  moral,  il  oe « 


STRIE  MODERI^E. 


808 


ffezpMients ,  at  ton  YoyatuM  que  d'au- 
mdoes  C)- 

Tel  6tait  done,  au  bout  de  viDgt  ana 
de  regne,  le  r^altat  de  la  dominatloD 
firanque  en  Orient  :  un  royaume  mi- 
fi^rable  en  Palestine,  des  eomtte  en 
guerre  pnerp^tueile,  celui  d'^desse  tomb6 
aux  mains  de  Baudooin  du  Boorg,  ee- 
lui  de  Tripoli  coneM^  k  Raymond  de 
Toulooie  par  Tempereur  grec  Alexia, 
la  prfndpant^  d*Antioohe  ruin^  par 
Ta^idit^  et  lea  fautes  aoceeBaives  de 
Boh^mond ;  en  un  mot  une  petite  fito- 
dalit^  sans  consistaBoe ,  aaoa  grandeur, 
aana  a  venir,  iSnidee  en  Syrie  a  I'image  des 
/(MaJit^s  europ^ennea ,  mais  sans  leurs 
prestiges  et  aans  leur  foree;  une  mi* 
s^re  presque  incurable  ches  les  pelerine, 
un  eommerce  ^teint,  une  agriculture 
d^laissee,  une  depopulation  telle  que  Ters 
Tan  1110  tous  leslMbitanU  de  J^nisa- 
lem  auraient  pu  ae  loger  daos  une  seuie 
des  rues  de  la  ¥ille.  Puis ,  en  eompen- 
nation,  queiques  beaux  fiiits  militaires, 
quelques  brillants  actea  de  eourage, 
mais  sans  consequence  victorieuse,  sans 
r<esuttat  dedsif.  fin  r^eume,  la  croisade 
n'afait  porU  qne  la  devastation  ea 
Orient,  le  trouble  dans  lea  existences  des 
Chretiens  auasi  bien  q[ue  dans  celles  dee 
llusulmans ;  ce  n*avail  eteque  la  guerre 
permanente  en  place  de  ranarchie. 

BiONX    DB     BAUDOUlIf     DC     BOUa<l 
ax  DX  FOULQOES  D*AlliOD. 

Rien  n'etait  plus  ni  stable  ni  assure 
dans  eette  pauvre  Syrie.  Tandis  que  Ton 
contestait  a  Jerusalem  le  Irikae  de  la 
ville  sainte  au  cousin  de  Godefroy  de 
Bouillon,  la  malhforeuae  prineipaute 
d'Antioche  etait  k  Tagonie.  Bohemond 
et  Tancrede  une  fois  morts ,  ii  n*y  aTait 
plus  de  gnerriers  capables  de  la  defendre 
centre  les  Turcs.  Geux-d,  en  effet, 
eommandes  par  le  prince  de  Mazdin ,  II- 
Gazi ,  homme  feroee  et  qui  fanatisa  son 
armee,  s*avancerent  aveo  les  gena  d'A* 
lep  centre  un  certain  Rog^r  qui  se  trour 
Tait  Ii  la  tete  des  Cbretiens*  Ce  deniier, 
friyoleetinoapable|^entilhomnie,  tout  en 
attendant  Tennemi ,  a*amusait  k  cbasser 
aux  faucons ,  au  lieu  d'exercer  ses  trou* 
pes.   n  se  laissa  surprendre  par  les 

(*)  Voya  Galllaame  de  Tyr ,  Hittoire  de  ee 
aui  ^nt  wui4,  etc;  et  les  historlens  Arabci 
lLMUl-Ed<Uii ,  noYtlri »  Um-Djousi,  etc 


Musulmans  et  battre  si  compietement, 
au*il  perdit  la  vie  ainsi  que  quinze  mille 
des  siens.  A  eette  deplorable  nouvelle 
pour  tous  les  Francs  de  Syrie,  lenouveau 
roi  de  Jerusalem ,  malgife  les  contesta- 
tions auxquelles  il  etait  encore  en  butte, 
Youlut  yenir  au  secours  d'Antioche.  II 
antra  dans  eette  ville,  dont  le  ffouver- 
nement  etait  presque  abandonne ,  se  fit 
livrer  par  sa  soeur,  veuve  de  rimprud^nt 
Roger ,  le  tresor  de  la  cite ,  leva  des 
troupes,  et  marcha  k  son  tour  contre  les 
Musulmans  I  qui  avancaient  toujours , 
s*emparant  des  differentes  places ,  bou-  : 
levards  de  la  prineipaute.  Malheureuse-  • 
ment  il  n*eut  pas  plus  de  succes  que 
son  beau-frere.  Accompagne  dTArme- 
niens  et  de  Syriens  d^eneres ,  11  ne 
nut  resistor  aux  Turkomans  d'll-Gazi , 
tut  vaincu  en  plusieurs  rencontres ,  et 
dut  se  considerer  comme  tres-heureux 
de  ne  pas  tomber  sous  le  fer  ou  entre 
les  mams  de  ses  ennemis.  Telle  est  du 
moins  la  version  du  chroniqueur  arabe 
Kemal-Eddin.  Selon  les  recits  Chretiens, 
au  oontraire,  Baudouin  du  Bourg  se- 
rait  rentre  k  Jerusalem  apr^s  une  vic- 
toire.  Quoi  qu'il  en  soit ,  la  prineipaute 
d'Antioche  avait  ea  k  souffrir  toutes  les 
sortes  de  calami  tea,  et  noua  ne  pour- 
rions  pas  faire  un  tableau  plus  sombre 
de  sa  situation  que  celui  qu*en  a  laisse 
Gauthier  le  Chancelier,  I'auteur  de 
V/Iittoire  des  guerres  d'Antioche : 

«  Antioche,  dit-il,  depourvue  de 
narnison  et  ayant  perdu  tout  secours 
des  Francs,  se  vit,  par  la  necessite,  sou- 
mise  k  son  clerge ,  et  d^s  lors  elle  eut 
beaucoup  plus  a  craindre  de  la  trahison 
de  ses  ennemis  interieurs  que  de  la 
violence  de  ses  ennemis  exterieurs.  Cela 
ne  doit  paa  surprendre;  car  eette  ville, 
privee  de  ses  biens  par  la  force  et  la 
mecbancete  de  notre  nation  (pi  et  pravo 
'  ingenio  gentis  nortrm  prioata  suis 
bonis ) ,  adonnee  k  de  mauvaises  habi- 
tudes ( addicia  pravae  consuetudini ), 
tres-souvent  accabiee  par  le  desespoir 
(smpius  mcerore  concussa),  aurait 
peut-etre  voulu,  par  un  retour  de  justice, 
rendre  le  inal  pour  le  mal,  et  aurait  pu 
maltraiter  les  ndtres,  soit  ^r  trahison, 
soit  de  toute  autre  maniere.  Le  pa- 
trlarche ,  en  homme  prevoyant ,  appelA 
aupres  de  lui  les  Francs,  et,  s'appuyant 
aur  la  force  de  Dieu  et  aur  le  secourl 


ZM 


L*tWlVfift5. 


de  sou  clerg^,  prit  des  mesures  ponr 
prevenir  toute  trahison ;  et ,  de  concert 
avec  le  clerg6  et  les  Francs ,  il  se  cbars»a 
lui-m^iiie  de  la  garde  d*Antioche.  II  Tut 
r^solu  que  tous  les  habitants,  de  guelque 
nation  qu'ils  fussent,  except^  les  Francs, 
seraient  sans  armes;  que  personne  ne 
sortirait  jamais  la  nuit  de  sa  demeare 
sans  lumi^re.  II  fut  dteide ,  en  outre , 

3u*on  6tablirait  des  tentes  ( sans  doute 
es  especes  de  eorps-de-earde )  dans 
tous  les  endroits  fiaibles  de  la  ville,  afin 
de  prot^er  les  Chretiens ,  et  que  toutes 
les  tours  recevraient  un  nombre  de 
moines  etde  clercs  unisauxlaiques  (*).  » 
Ce  qu*il  y  a  de  signifieatif  dans  la  ci- 
tation ^ue  nous  venons  de  £aire ,  c*e8t 
3u'Antiocbe,  oomme  Jerusalem ,  n*avait 
ans  son  sein  qu'un  petit  nombre  de 
Francs.  C'est  bu'aussi  les  direrses  po- 
pulations qui  rhabitaient,  m^ontentes 
sans  doute  du  f^ouvemement  des  crok 
8^8 ,  ^taient  touiours  toutes  pr^Stes  k  se 
soulever  contre  leursdominateurs.  Ainsi 
anarchic  et  r^volte ,  Yoil&  les  maux  qui 
mena^aient  sans  cesse  les  Francs ,  les- 

Suels  poortant  s'^taient  pr^sentes  comme 
es  lib^rateurs  it  I'oriffine  de  la  con- 
qu^te,  mais  qui  bientdt  devinrent  des 
tyrans  presque  aussi  d^test^  que  ceux 
ie  la  religion  islamique. 

Aprds  la  principaut^  d'Antioche  ee 
fut  le  tour  du  comt^  d'^desse  a  dtre 
envahi,  mis  k  feu  et  sang,  sous  le 
coup  d*une  destruction  presque  totale. 
Josselin  de  Gourtenay  avait  remplace 
Baudouin  du  Bourg  k  Edesse.  II  ne  put 
pas  d^fendre  longtemps  son  comt^ 
contre  Balak,  successeur  d'll-Gazi.  Apr^ 
Dlusieurs  engagements  malheureux ,  il 
lut  m^me  fait  prisonnier,  et  conduit 
dans  une  forteresse  du  nom  de  Karpont. 
En  cette  extr^mit^  les  Chretiens  eurent 
recours  k  leur  chef  sui>r^me ,  le  roi  de 
Jerusalem.  Gelui-ci,  plein  de  bonne  vo- 
lont^  sinon  d'habilete  militaire,  courut 
k  la  delivrance  de  son  vassal.  Mais 
loin  de  le  sauver,  il  ne  panrint  qu*li  se 
faire  prendre,  lui  aussi ,  et  a  devenir  le 
compagnon  d'infortuoe  de  Josselin.  Puis, 
malgr^  un  essai  de  cinquante  Arm^ 
niens  pour  rendre  les  deux  princes  chr^ 
tiens  a  leur  peuple,  Josselin  seul  put 

.(*)  Faifez  Gaothier  le  Chancelicr,  Bella  An- 
iMchena,  traducUoQ  de  la  Bibtiothique  des 
Crotaades. 


s'^chapper  et  aller  demukder  uuim 
k  la  ville  sainte.  Celle-d  D'anitfuk 
temps  de  s'occuper  de  son  ni;  IK 
fallait  songera  son  propRsriilii 
£gyptiens,  apprenaot  ia  ci^iij 
Baudouin  du  Boorg,  ^taieotTflMH 
quer  la  Palestine.  On  dot  mitf 
devant  d*eux  josmie  sons  kii 
Jopp6  (Jaf&),  qu'ut  assitoicBtlhl 
par  mer  et  rar  tene.  Ha 
pour  les  Chrkiens  qu'ils  i 
une  Tictoire  dans  one  plaiie  i 
calon,  et  oue,  grftoe  a  ramiiil 
assec  grand  nombre  de  Yditt  ' 
parvinrent  ensnite  k  s'empiRr^i 
de  Tyr ,  BMyennant  wieenitshl 
laissait  la  vie  sauve  il  tous  les  1 
mans,  et  a  la  camison,  fatmkn 
de   Damasqums ,  en  partie  ^ 

tlCM(*).  • 

Ce  sucote,  dA  sortootMi 
Yenise  et  It  ses  Taisseaax,  jelap 
un  certain  trouble  daas  Fa 
Mahometans.  lis  doataesU 
foia  de  leurs  suec^  fiitsriii 
t^nt  la  ran^on  que  leur  ofibiti 
du  Bourg  pour  sa  liberty  f^ 
faster  de  retoumer  dans  sa  e 
prudent  roi    de  Jtosalen  i 
quelques  chevaliers,  et  8*eta 
le  si^e  devant  Alep.  Bieotdte 
It  le  lever,  et  il  revint  enfiad' 
sainte,  apr^  une  asses  I 
pour  qu*on  le  reoonndtt  a  peiM 
pass^  parfaitement  de  hii  f^ 
ans;  et  il  eut  bean  tenterl 
de  petites  expMtions,  ^ 
dont  le  pillage  etaitle  bot,ii 
mort  avant  <ravoir  rien  £ut  r 
son  royanme  et  honora  i 
m^moire.  On  ne  lone  eo  ho  ^ 
voure  tto^raire,  trop  1 
et  on  pourrait  lui  reprocher  o 
trop  minutieuae  nour  ub 

Serre.  Du  reate  ani  pas 
atsurletrAnedeJ 
cesseur  lui  fut  enooie  iaferia*! 
un  vieillard  que  des  diagritfjr 
avaient  ponsse  en  Orient,  ct4  ' 
sola  en  epouaant  la  fijle  del 
du  Bourg  a  la  condition  de  s 
dernier.  Voillt  comment  Foi 
jou ,  a  peine  arrive  a  J^rustw 
uaissant  rien  aux  mceurs  des " 

(•)  Voyei  Ibn-DJoml ,  JWrwr  *« ' 


SYRIC  MODERNE. 


305 


Orient  et  a  la  guerre  continue  centre 
s  Musulmans ,  devint  le  chef  de  la  co- 
nie  franque  en  Syrie ,  etant  deja  use 
corps  et  d'esprit,  dge  de  soixante 
s  et  couvert  d*infirmit&. 
Les  possessions  des  Francs  en  Orient, 
li  commencaient ,  tant  par  la  debau- 
e  et  la  mollesse  que  par  les  dissen- 
)i)S  intestines,  a  s'ebranler  durant  le 
iine  de  Baudouin  du  Bourg,  menac^- 
atde  se  detraquer  completement  sous 
n  successeur.  La  discorde  pritdes  pro- 
rtionsdesastreuses,  la  demoralisation 
mblait  generale.  Oii  vit  d*abord  Jos- 
ui<feCourtenay,  ce  fou  qui  avait  si 
implement  compromis  le  comte  d*£- 
ise,  s*allier  avec  les  Musulmans  |)our 
aquer  le  fils  de  Boh^mond,  qui  etait 
lu  dltalie  gouvemer  Antioche.  Ce 
dbeareux  jeune  homme  fut  tue  par  les 
rcomans  en  defendant  sa  principaute. 
teine  etait-il  mort  que  sa  veuve  Alyse, 
t  de  Baudouin ,  proposa  a  un  chef 
Mlman  sa  main  et  Tneritage  de  son 
f  Foulques  fut  oblige  de  partir  de  J6- 
bkm  avec  une  armee  pour  mettre 
l>cle  a  rhifamie  de  cette  mere  indi- 
L  II  jr  parvint,  grdce  au  prestige  qui 
Nirait  encore  sa  couroune,  plutot 
lide  par  sa  valeur  personnel  le.  Mais 
itdt  Pons,  comte  de  Tripoli,  se  rangea 
parti  d^Alyse,  et  les  Francs  furent 
g6s  de  marcher  centre  ce  trattre,  de 
Hnbattre  et  de  le  vaincre  pour  r6- 
ur  Itordre  dans  la  Syrie  chretienne. 
tandis  que  Foulques  etait  occupe  au 
*i  la  dissension  atteignait  sa  capi- 
et  sa  propre  maison.  II  trouva  Je- 
tlem  dans  Tanarchie ,  et  sa  femme 
dult^re  avec  un  certain  Hugues, 
tc  de  Jaffa.  Ce  dernier,  denoiic^pour 
llonie,  deshonore  pour  son  crime, 
gea  les  Musulmans  d'Ascalon  a 
^r  la  Palestine.  Sa  trahison  trouva 
vx  d^xcellents  auxiliaires ;  ils  por- 
it  le  pillage  dans  toutes  les  contrees 
Lugues  les  conduisit,  et  quand  iisse 
It  ^ori^es  de  butin ,  ils  abandonne- 
le  traitrecomme  ille  m^ritait.  Mais 
It  enfermedans  Jaffa,  le  chevalier 
ne  Youlut^e  rendrequ'a  la  con- 
1  d'avoir  la  vie  sauve  et  de  pou- 
retourner  en  Europe.  Le  faible 
fues  soiiscrivit  aux  conditions  que 
iposait  le  plus  deloyal  des  Francs , 
Ta  il  rabaissa  son  autorit^  et  lais- 

50*  JJrraison.  (Sybie  hodebne.) 


sa  son  deshonneur  sans  vengeance  (*). 

Chose  singuliere,  et  qui  prouve  en 
quel  etat  de  faiblesse  etait  tombe  le 
royaume  des  Francs  en  Syrie !  ce  fut  le 
successeur  d' Alexis,  Jean  Comnene,  qui 
proGta  seul  des  discordes  entre  les 
Chretiens,  et  des  conqu^tes  de  la  pre- 
miere croisade.  Non-seulemeut  il  reprit 
une  partie  des  villes  de  la  c6te  de 
TAsie  Mineure;  mais  comme  on  lui 
refusait  Antioche  et  Tripoli ,  quMl  desi- 
rnit  aussi ,  il  s'avan^a  jusqu'aux  fron- 
tieres  de  la  Syrie  avec  une  armee  con- 
siderable. Les  pauvres  Francs  etaient 
entre  deux  ennemis ,  aussi  inquietants 
pour  eux  I'un  que  Tautre,  le  Byzantin 
d'un  c6te,  le  Turkoman  de  Tautre. 
Les  Chretiens  implorerent  lesecours  du 
roi  de  Jerusalem ;  mais  relui-ci  etait 
presque  cerne  par  les  Musulmans,  et  ue 
pouvait  pas  faire  un  pas  sans  risquer  de 
tomber  en  leur  pouvoir.  Tout  alors  au- 
rait  ete  perdu  pdur  les  colonies  latines , 
si  Jean  Comnene  lui-m^me  n'en  eAt 
eu  pitie,  et  si ,  au  lieu  de  les  ^eraser 
comme  il  le  pouvait ,  il  n'edt  eu ,  au 
contraire ,  la  generosite  de  leur  offrir 
Fappui  de  ses  forces  centre  les  Musul- 
mans, moyennant  rhommagequ'il  exigea 
du  prince  d'Antioche.  Jean  Comnene , 
du  reste ,  n'eut  pas  a  se  loner  de  sa  mi- 
s^ricorde.  II  ne  trouva  dans  ses  nou- 
veaux  allies  que  des  gens  amollis ,  effe- 
mines ,  ne  sachant  que  jouer  aux  d^s 
ou  chasser  aux  faucons,  etqui  laisserent 
ses  soldats  8'occu|>er  seuls  du  siege  de 
Khaizarieb ,  vilie  situee  sur  POronte ,  et 
nouveilement  prise  aux  Chretiens  par  les 
habitants  d'Alep.  Bient6t  done  il  aban- 
donna  a  leur  turpitude  et  k  leur  impuis- 
sauce  les  fils  degeneres  des  croises  de 
Godefroy,  et  s*en  retourna  dans  son 
empire,  plein  de  mepris  pour  eux. 

Cependant  Foulques,  dans  son  ab- 
sence de  tout  sentiment  moral,  religieux 
et  poHtiqne ,  en  vint  a  louer  ses  troupes 
a  des  emirs  mahom^tans  qui  se  ais- 
putaient  les  cit^  de  TAnli-Liban ,  et 
accepta  des  mains  des  infideles  la  ville 
de  Paneas  comme  prix  de  la  plus  Ilche 
et  de  la  plus  insensee  des  alliances.  Ce 
prince,  du  reste,  etait  alors  presque 
tomb^  en  enfance ;  sa  memoire  etait  de- 


(♦)  Voya  GaiUaume  dc  Tyr,  ffisioire  de  ce 
qui  ^est  passe,  etc 

20 


806 


L'UMVKRS. 


venue  si  courts ,  qu'il  ne  reoonnaissait 
plus  ses  familien  et  tes  aerviteun.  Oa 
doit  done  Texcuser  des  dernierea  fautes 
de  son  r^Qe,quifureQt  plutdtcommises 
en  son  nom  que  4*apm  aa  propre  vo- 
lonte.  El)  tout  cas  ces  fautea  aont  loin  de 
fa  ire  honneur  a  i^esprit  qui  doniinait 
alors  h  Jerusalem  et  i  la  cour  du  d^fen- 
seur  du  8aill^s^pulcre.  Pour  achever  la 
decadence  du  pauvre  empire  des  Francs, 
Foulques  ne  iaissa  qu'un  tils,  i^ededouze 
ans.  La  coupable  reine  Meiisende  allait 
done  ^tre  r^gente ,  et  des  debiles  mains 
d'un  vieiUard  la  couronne  de  Jerusalem 
tombait  aux  faiblea  mains  d'une  femme 
etd'un  enfant  (*). 

DBCADBNCE      DS       LA       DOMINATION 
r&ANQUB  BN  OBIBNT. 

La  Syria  n*^tait  aux  Francs  que  de- 
puis  quarante-cinq  ana,  et  dej^  elie 
avait  eprouv6  autant  de  malbeurs,  elie 
etait  descendue  aussi  bas  que  jamais. 
G*est  qu'aussi  aa  lieu  d'un  seul  conque- 
rant  elie  en  avait  eu  cette  fois  des 
milliers.  Le  systeme  fi^odal,  implanU 
chez  elie  par  la  guerre,  la  trouva  im- 
ca|)able  de  le  supporter.  Les  comtes  de 
Tripoli,  de  Jopp^,  d^Ascalon,  les  barona 
de  Berytbe,  de  Sidon,  de  CaTpbas,  de 
Cesaree,  devinrent  autant  de  petits 
tyrans  qui  Paccablkent  dMmpdts,  firent 
de  ses  agriculteurs  dea  serfs,  de  ses  cam- 
pagnes  des  domaines ,  laissant  k  peine 
aux  citadins  leur  Industrie  et  leur  com- 
merce. Puis,  pour  achever  Toeuvre  de 
decomposition ,  les  discordes  intestines 
des  seigneurs  amen^rent  ranarchie, 
leurs  vices  grand issant  amen^reot  la  de- 
moralisation. Pour  ne  pas  £tre  accuse 
d'exageration  dans  le  tableau  de  cette 
effrayante  decadence ,  nous  emprunte- 
rons  celui  qu'en  a  fait  un  homme 
;  consid^re ,  dans  ce  temps  de  barbarie , 
comme  sage  et  bon ,  Jacques  de  Vitri , 
ev^ue  d*Acre.  Disons  d'abord  que  les 
habitants  du  royaume  de  Jerusalem  se 
composaient ,  outre  des  Syriens  propre-  . 
ment  dits,  deGrecs,  de  Jacobites,  de  Ma- 
ronites ,  de  Nestoriens,  d'Arm^niens,  de 
Georgiens,  puisd'un  petit  nombred*£u- 
ropeens  que  la  piete  ou  plutot  le  goAt  des 
aventures  attiraient  en  Palestine,  et  enfin 


des  descendaiits  diieets  dei  cMh, 
qu'on  appelait  P(mta»ns,  «Ntqif  onkn» 
gardAt  comme  des  bomnesoouvonil 
Qomme  des  poussiiis(ptt/[l),soilpM 
que  leurs  meres  eiaientgendraleinait» 
tivea  de  la  Pouille,  pays  d'oii  les  p- 
miers  crois^  Grant  veoir  des  Iohi 
pour  repeupler  leur  conqufte.  Qnoifll 
en  soit,  ces  Pouiains  parureat  aioirlBi 
les  vices  <ie8  Orientaux  mWs  a  m 
des  Europeena  d*alors.  Mail  kw 
parier  le  v^o^rable  Jacques  de  ^ 
Apres  avoir  montr^  une  graade  i# 
gence  pour  les  premiers  erois6g,tt|i, 
pour  nous,  prouv^  iDdubitaUtontli 
sincerite  des  accusations  au'iIlaiMe(» 
tre  leurs  descendants,  il  ditqaeiittfll 
sainte  ne  renfermait  plus,  aT^ 
ou  noussommes  arrives,  veisFaDlA 
gu'une  race  corrompue  et  diffimk^ 
et  de  quelle  f a^n  encore  (*) ! 

c  Aussi  Tenfer,  ajoute lessen pft 
lat ,  prepara-t-il  des  lors  des  hgem" 
pour  tous  leurs  crime$  H  po»  kmk 
vices  :  depuis  la  plante  des  pidi^ 

Sa*au  baut  de  la  Ute,  11  dW  aval 
e  sain ;  et  tel  6tait  le  peupttt  ^ 
le  pr^tre.  (^omn^entons  par  le 
tuaire.  Depuis  qae  le  moode  a 
etait  devenu  tributaire  des  pdal 
des  ordres  rdguliers  par  ses  a 
ses  offrandes  et  ses  dons,  ks 
paissaient  eux-mtoes.  lis  l 
aux  brebrisleur  lait  et  leiilB««§ 
n'avaient  aucun  soin  des  fiias;c»f4 

fr  a  de  pis,  ils  donnaieot  a  a8# 
eur  etaient  soumis  des  exempla^f* 


fe 


fidie  :  ils  s'etaient  enricfais  de  ii  ll| 
vrete  de  Jesus-Christ  lis  itivsxmi 
nus  superbes  de  son  bumilit6,  f 
de  son  ignominie ,  et  ricbes  de  smI 
trimoine.  Cependant ,  lorsque  jsf 
gneur  dit  h  Pierre :  Paistezmesm 
noqs  ne  voyons  pas  qu*il  loi  ait  jr 
dit :  Tondez  met  breoU... 

«  Les  ordres  r^guliers ,  Ion 
M  infqctes  du  venio  des  rie 
etendu  outre  mesure  loirs  vastasf 
sions;  ils  ont  m^prise  leun  su|» 
rompu  les  liens  qui  les 
eqx,  seooue  le  joug,  et  sent  < 
k  charge  non-seulemeot  aox  t^^ 
aui^  ecclesiastiques ,  mais  a  eux-j"^ 


(*)  Voyez  GaiUaume  de  Tyr,  ITittetrv  tfr  e» 


(•)Voy«J«s(nwideVttri,  tff<w«*^ 


SYRIE  MODERI«£. 


Wf 


m  ia  jalousie  qui  les  <Mvore  et  par 
nisdiaaensioiia.  An  grand  aeandale  de 
Bote  la  chr^tient^ ,  ils  en  sont  Teous  il 
M  oatrages  publics ,  k  des  haioes  ma- 
Ifestes,  k  des  violeooes  et  a  des  com" 
Its.... 

«  Les  abb^ ,  les  prieurs ,  les  moinea, 
B  ebapelaiDS,  rejetant  toute  crainte 
iDieu,  ne  redoutaieot  pas  de  porter 

fyux  dans  la  moissou  d'autrui ,  ni 
Miiir,par  des  manages  clandestins,  des 
Ksennes  qui  ne  (K)uvaieDt  toe  uaies  1^ 
timenieat.  lis  visitaient  les  malades, 
mpar  pitie ,  nais  par  cupidity ,  et  leur 
taunistraient  les  saeremeuts  malgr^ 
m  propres  pasteurs ,  liant  et  d^iant, 
btre  Fordre  deDleu  et  les  dispositions 
I  saints  canons,  les  Am^s  dont  le  soin 
leur  appartenait  pas. 
K  PariDi  les  laiques  et  les  sellers  la 
ruptioa  etait  d*autant  plusgrande 
ilB  ^talent  plus  puissants.  Une  gen^ra- 
i  mecbante  et  perverse,  des  eufanta 
maU  et  d^^nms,  des  hommes  dis* 

E,  des  violateurs  de  la  loi  di?ine , 
It  sortis  des  premiers  croises,  bom- 
^  religieux  et  affr^bles  k  Dieu« 
^e  la  lie  sort  du  vin  et  le  raarc 
Poiivier,  oo  comme  Tivraie  sort  du 
Dent,  et  la  rouille  de  Tairain.  lit 
lent  suec6d^  aux  possessions,  mais 
aux  nicenra  de  leurs  peres;  ils  abu- 
at  des  biens  temporals  que  leurs  pa* 
s  avaient  acquis  de  leur  sang ,  en 
ttettant  poor  Dieu  oontre  des  Im- 
;  Tout  le  monde  sait  que  les  eniants 
eeox  qu'on  nommait  Poulains  ^ 
ffk  dans  les  delioes,  mous  et  effe- 
il,  plus  accoutumes  aux  bains 
fa  combats ,  adonnte  a  la  d^bauche 
Timpuret^ ,  y^tus  auss)  mollement 
desremmes,  se  montraient,  Inches 
iresseux,  tiraides  et  pusillanimes 
w  les  ennemis  du  Christ ;  personne 
tore  oombien  les  Sarrasins  les  m6- 
ieat^  ia  guerre :  leurs  andtres,  quoi- 
I  petit  nombre ,  faisaient  autrefois 
Uer  ces  Sarrasins.  Mais  dans  les  der- 
temps,  ils  n'^taient  plus  redoutes , 
i  ils  n^avaient  point  avec  eux  des 
» ,  Gu  des  ^erriers  d*occident.  Ils 
Mit  des  traits  avec  les  Turcs ;  ils 
nt  en  paix  avec  les  ennemis  du 
I ,  ef  pour  la  plus  l^re  cause  ils 
t  CDtre  eux  en  proc^,  en  querelle, 
acre  civile,  souvent  mdmeils  deman* 


daient  du  seeours  centre  les  Chretiens 
aux  ennemis  de  notre  foi.  lis  ne  rougis- 
saient  point  de  tourner  au  detriment  de 
la  chretient^  des  forces  qu'ils  anraieat 
dd  employer  en  Tbonneur  de  Dleu  et 
oontre  les  paiens.  » 

Et  ce  n^est  pas  encore  U  tout  ce  que 
dit  Jacques  de  Vitri  sur  la  depravation 
^enerale  des  descendants  des  croises; 
il  ne  oesse,  au  contraire,  de  les  denoncer 
en  toute  occasion ,  et  r^ume  ainsi  ces 
maledictions  .*  «  II  ne  pent  voir ,  dit-il , 
dans  la  terre  de  promission  que  des 
irapies ,  des  sacril^es ,  des  voleurs,  des 
adult^es,  des  parricides,  desparjures, 
des  bouifons',  des  moines  lascifs  et  des 
religieuses  impudiques.  •  Guillaume, 
Tardiev^que  de  Tyr  ^  n'est  gu^e  moins 
rigoureux  dans  ses  jugements  que  T^v^ 
que  d^Acre.  Voici  comment  il  carac- 
&rise  les  mimes  hommes  que  Jacques 
de  Vitri  fletrit  si  vigoureusement :  «  A 
la  place  de  nos  peres ,  qui  ^taient  des 
hommes  religieux  et  «raignant  Dieu, 
sont  venus  leurs  fiis,  v^ritables  enfants 
de  perdition,  enfants  d^atur^s ,  con- 
tempteurs  de  la  foi,  se  prteipitant  a 
Tenvi  dans  toute  sorte  d*exces....  Tels 
sont  les  hommes  du  si^cle,  et  surtout 
en  Orient ;  telle  est  la  monstruosite  de 
leurs  vices,  que  si  un  ^rivain  entre- 
prenait  d*en  faire  le  tableau  il  succombe- 
rait  sous  le  poids  d'un  paieil  sujet ,  et 
qu'il  parattrait  composer  plutdt  une 
satire  qu*une  bistoire.  »  On  voit  de 

3uel  m^pris  ^tahsnt  dignes  les  Chretiens 
e  Syde  au  douzieme  sitele(*). 

LB8    HOSPITALIEBS    BT    LBS    TEM- 
PLIBB8. 

Au  milieu  de  tons  ces.ltres  immon- 
des  ou  pervers ,  un  homme  montra  sa 
vie  durant  une  puret^  de  moeurs  inalte- 
rable, une  pi^te  aussi  sincere  que  f& 
conde  en  bonnes  inspirations ,  une  cha- 
rity aussi  ingenieuse  qu*ardente ,  un  d^ 
vouement  k  ses  fr^res  de  toutes  les 
heures,  une  abn^ation  de  tous  les  ins- 
tants. Outre  cette  bont^  si  efficace  dont 
il  ^tait  dou^,  cet  homme  ^uit  aussi 
un  modele  de  courage  dans  les  combats 
et  de  resolution  dans  ses  actes.  Lors- 
qu'il  n'^tait  pas  a  la  guerre,  oocupe  a 

•    (*)  Vovez  Jacques  do  Vltrl ,  et  Guillaume  de 

20. 


308 


LtJNlVERS. 


secourir  les  blen^,  a  d^ager  ceux  que 
leur  t^m6rit^  entratnait  dans  des  dao- 
^ers  presque  insurmontables ,  il  coarait 
Jerusalem  et  ses  environs  pour  porter 
des  consolations,  des  medicaments,  des 
soins  aux  malades.  li  cherchait  aux  plus 
pauvres  un  abri;  et  lorsqu'ils  ^lent 
ffu^ris  il  les  renvoyait  avec  le  produit 
des  colleetes  quil  faisait  pour  eux. 
Son  saint  exemple  groupa  autour  de  lui 
quelques  bonnes  natures ,  qui  Taiderent 
dans  le  bien  qu*il  faisait.  Peu  a  peu  le 
nombre  de  ceux  qui  se  devou^rent  ainsi 
a  secourir  leurs  mres  augmenta  tene- 
ment qu'iifallutsonger  a  leurdonnerune 
rdgie ,  h  leur  tracer  des  devoirs ,  a  les 
organiser.  C'est  dans  cette  intention  que 
fut  cr^e  Tordre  des  Hospitallers,  dont 
Tobjet  principal  etait  de  secourir  les 
blesses  pendant  les  batailles ,  et  les  ma- 
lades apres.  Or  Thomme  excellent  dont 
nous  venous  d*esquisser  le  portrait ,  le 
fondateur  de  Tordre  des  Hospitallers , 
le  digne  successeur  d'Adhemar  de  Mon- 
teil,  ^i  malheureusement  mort  de  la 
peste  h  Antiocbe,  c*etait  un  simple  cbe- 
valier,  appele  Gerard  de  Provence. 

Quoiqu'il  ne  fUt  ni  legat  du  pape,  ni 
seigneur  f6odal,  il  n*en  parvint  pas  moins, 
a  force  de  vertus,  a  acquerir  une  au- 
torit^  reelle,  dont  il  n'usa  lamaisque  pour 
le  bien.  Sa  fondation  des  Hospitaliers 
reussit  rapidement.  Un  assez  grand  nom- 
bre de  gentilshommes8*associerent  ^ses 
vues,  et  Taiderent  et  de  leurs  personnes 
et  de  leurs  fortunes.  Bientdt  de  vastes 
bdtiments  furent  construits  ii  Jerusalem, 
les  uns  pour  servir  d'hospice  aux  mala- 
des besogneux ,  les  autres  d'habitation 
aux  chevaliers  unis.  Ces  chevaliers  ne 
se  nourrissaient  que  de  pain  grossier , 
r^servant  les  mets  succulents  ou  d^li- 
cats  pour  les  blesses,  faisantsans  cesse 
des  ^cooomies  pour  se  procurer  des  me- 
dicaments. Puis  outre  les  soins  aux  in- 
firmes,  la  charity  envers  leurs  Mres,  ils 
s'oblig^rent  a  combattre  sans  cesse  et 
a  outrance  les  infideles,  et  dans  les 
combats  de  servir,  pour  ainsi  dire,  de 
r^erve  toujours  prete  a  se  jeter  dans 
la  m^lee,  lorsque  les  Chretiens  etaient 
en  danger  et  avaient  besoin  de  renfort. 

A  la  suite  des  Hospitaliers,  et  grdce 
au  succes  de  leur  association,  s'^tablit  un 
autre  ordre,  dont  le  but  etait  de  prot6- 
ger  les  pelerins  et  de  d^endre  les  saints 


lieux.  Get  ordre,  ayant  ^levesadeMB 
dans  les  environs  ou  templedeSiloiii, 
fut  connu  d^  lors  sous  le  non  ^  (l^ 
valiers  du  Temple  ou  Ten(iiias.fiii 
aussi  commeocerent  par  des  acts  rt 
p^tes  de  d6vouement  et  de  diarite; « 
si  plus  tard  ils  devinrent  ambitieaK 
avides ,  ils  n'en  rendirent  ^  m 
d'abord  de  grands  services  a  b  dn* 
tiente.  Les  Templiers  rivaliserefltd» 
de  vertus  pratiques  et  de  dev«KMK& 
elfectife  avec  les  Hospitaliers,  pnai* 
ment  au  moment  oik  Fegoisme  r^ 
dans  presque  tons  les  coetir8,ott(ib» 
oubliait  les  malhenrs  de  sod  pradu 
pour  ne  son^er  qu*a  ses  plaisirs.SaiseB 
ordres  religieux  et  militaiics  a  li  te, 
la  regence  de  Melisende  edt  et^aosde^ 
sastreuse  qu*anarchique.  Mais  csf^ 
sence  de  toute  vigueur  dans  le  pMiar 
central,  au  milieu  de  refiervesceoa^ 
n^rale ,  les  Hospitaliers  et  les  Tempiff 
surent  et  mainteair  I'ordre  dam  to 
murs  de  Jerusalem ,  et  defeodreseif^ 
procbes. 

AYBNEHSNT  DE  BACDO0I5  III. 

La  re^enee  de  Mdisende  av»t  dri 
funeste  a  Tempire  oriental  des  FMh 
en  deux  annees  qu'elle  diua  efleoitc 
souvent  Jerusalem  en  p^i ,  qo^a  ftm 
dge  de  quatorze  ans  Baudotda IHi^ 
des  barons  et  des  pr^lats  Fep^  ^JM"" 
et  la  pomme ,  emUdmes  de  kkae^ 
de  la  loi  et  du  royaume.  Cifdg  * 
jeune  ne  pouvait  avoir  ni  prw***^ 
nabilet^.  11  le  prouva  toutd'aboiA«» 
treprenant  une  guerre  aussi  fi(^  9t 
tale.  Un  traltre  vint  lui  ofl&ir  la  «» 
Bosrab.  Ce  trattre.eUit  oa  ArmewW 
service  de  Temir  deDamas,  eiqaj^ 
vernait  un  petit  territoire  sur  les  ei"* 
du  Barrai-al-Cham  ( desert  de  Sfni^«! 


n  y  avait  rien  a  gagoer  a  i 
cit6  isolee,  bAtie  a  Toriginc  des  J 
arides,  separ6e  de  Jerusalem  P^^J^ 
nes  abandonnto,  et  plus  proehe*^ 
mas  quede  la  capitale  de  Tcmpire  wjt 
Baudouin  III  n'en  parlit  pas  jjkm^** 
tons  ses  chevaliers  pour  cetiecqwg 
malencontreuse.  li  iraversee  fat  piJJ 
ble  :  pas  d'eau  et  un  soleil  brtlia»ti  IJ 
• '--=-  et  des  «in«nis  «■ 


de  vivres  frais . 

oesse  renaissants  qui  harcelaraii  a  m 
lonne  chretienne.  A  cha^uei 
une  attaque,  a  cbaque  menie  ■ 


SYRIE  HODERNE. 


W9 


ihe.  Gaillaume  de  Tyr  peint  tr^-bien  la 
lontinaite  des  efforts  mosulroans  par 
es  paroles :  «  II  ^tait  tir^  sur  les  Ghr6- 
feus  une  telle  quantite,  et  quasi  conti- 
tueile,  de  toutes  sortes  de  fleches,  qirel- 
es  semblaient  descendre  sur  eux  ainsi 
[lie  gr^le  et  grosse  pluie  sur  des  mai- 
ions  couvertes  d'ardoises  et  de  tuiles , 
slant  homines  et  b^tes  cousues  d'iscel- 
esO.. 

Dans  cette situation  critique,  uneseule 
sbose  souteoait  Tardeur  des  Francs,  c'e- 
ait  ridto  d'aboutir  apres  cette  raarcbe 
ptoible  a  une  ville  qu'on  allait  leur  li- 
Ter,  et  qui  leur  serait  a  la  fois  un  lieu 
le  refuge  et  de  repos.  Quel  ne  fut  done 
OS  leur  d6sappointement,  lorsqu'arri  ves 
nfin  en  vue  de  cette  cite  tant  desir^ , 
Isapprirent  que  la  femmedu  gou  verneur 
irmenien  se  refusait  h  obtemp^rer  aux 
frdres  de  son  Idche  mari ;  ^u'elle  avait , 
tn  contraire,  arin^  la  garnison,  fdit  en- 
ror  des  renforts  musulmans,  et  s'appr^- 
lit  a  defend  re  la  ville  auiieu  de  lalivrer! 
£8  barons  se  d^couragerent,  et  loin  de 
eager  a  un  siege  v^ritablement  inipos- 
iUe,  et  auquel  on  n*avait  pas  pu  s*atten- 
tie,  lis  ne  penserent  plus  qu'a  la  retraite. 
i*arni^e  fit  done  volte-face ,  serra  ses 
aogs,  les  fantassins  au  milieu,  les  cava- 
lers  sur  les  cotes,  presenta  ainsi  un  mur 
ie  fer  a  sesennemis ,  et  s'achemina  len- 
Hnent,  T^p^e  nue  a  la  main.  Les  Musul- 
iians  essayerent  roaintes  fois  d'entamer 
vtte  muraille  ambulante;  elle  resista 
OQjours  a  leurs  charges  r^pet^es.  D^es* 
fmt  enfin  de  rompre  cette  masse  com- 
^aete,  ces  hommes  si  fermes  et  si  reso- 
ii,  elle  employa  un  autre  moyen  d'en 
Nr  raison.  La  contree  ou  cette  scene 
ipassaity  toute  brdl^  par  les  feux  du 
««  ^tait  couverte  de  bruyere,  d'arbris- 
MX,  de  plantes  parasites  dess6ch^s  par 
ps  ardeurs  de  T^te.  Les  Damasquins  y 
airent  le  feu.  Des  lors  la  fum^  et  les 
lammes  accompagnerent  k  leur  tour  Tar- 
D^  desol^  des  Francs.  lis  marchaient 
ucdes  brasiers;  ils  tombaient  au  milieu 
k  Tincendie  pour  6viter  les  fleches  de 
Bors  adversaires.  Beaucoup  d'entre  eux 
i6rirent  ainsi.  Tous  eurent  k  soufifrir  les 
Drtures  les  plus  affreuses.  Enfin  le  d6- 
■espoir  les  prit ;  la  superstition  les  gagna. 


Us  entour^rent  Tevlque  de  Nazareth , 
qui  portait  le  bois  de  la  vraie  croix ,  et 
le  supplierent  de  demander  a  Dieu  la  fin 
de  leuFsmaux.  Dieu  sembia  exaucer  leurs 
prieres.  Le  vent  tourna  tout  a  coup,  chan- 
gea  la  direction  de  Tincendie ;  et  ce  ne 
lut  que  grdce  a  ce  hasard  propice ,  a  ce 
miracle  si  Ton  vent,  que  Tarmee  put  ren- 
trer  sur  le  territoire  franc,  et  bient6t 
h  Jerusalem.  Cette  expedition  insens^e 
fut  un  fdcheux  commencement  pour  le 
regnedeBaudouinlll  f). 

Cependani  si  les  Francs  ne  pouvaient 
trouver  parmi  eux  aucun  prince  supe- 
rieur,  et  tel  qu*il  en  aurait  fallu  plusieurs 
pour  fonder  un  gouvernement  stable, 
pour  M^er  une  puissance  capable  de  se 
maintenir  contre  des  ennemis  si  perse- 
v^rantsetsi  nombreux,  Flslam,  au  con* 
traire,  reprenait  de  jour  en  jour  son  as- 
cendant. Des  hommes  seformaient  dans 
son  sein  contre  lesquels  les  forces  les 
plus  vives  de  TOccident  allaient  devenir 
n^cessaires  sinon  pour  balancer  la  vic- 
toire ,  du  moins  pour  continuer  Tanti- 
gonisme.  Apres  rardent  Il-Gazi  s*etait 
rencontre  Zenghi,  nature  d6ja  plus 
complete,  caractere  plus  energi<]ue ,  vo- 
lonte  plus  ferme  que  son  pr6decesseur. 
Emad-Eddin  Zenght  etait  primitivement 
eniir  de  Bassorah.  II  montra  de  Thabilet^, 
du  courage  etde  la  resolution ;  et,  faute 
d'bommes  capables  de  les  defendre,  les 
Mossouliens  jeterentlesyeux  sur  lui.  Ils 
lui  proposerent  le  gouvernement  de 
leur  ville :  il  accepta  et  se  fit  agreer  par 
son  suzerain,  le  sultan  de  Bagdad.  Une 
fois  en  possession  de  Mossoul,  il  y  deve- 
loppa  assez  de  qualit^s  pour  que  les 
Alepains ,  a  leur  tour,  vinssent  Je  sup- 
plier de  les  aider  a  conserver  leur  terri- 
toire, et  a  s'opposer  aux  tentatives  des 
Francs.  Zengni,  toujours  pr^t  a  aug- 
mentersa  puissance,  m6me  au  detriment 
de  sa  tran^uillite  personnelle,  se  fit  aussi 
ceder  la  ville  d'Alep,  et  devint  de  cette 
facon  prince  de  toute  la  Syrie  occiden« 
tale.  Certes,  s'il  rendit  Tespoir  aux  po- 
pulations musulmanes,  s'il  retablit  Tor- 
dre  dans  leurs  cites ,  il  ne  panit  jamais 
avoir  de  bien  hautes  qualit^s;  car  ce  fut 
par  la  perfidie  et  la  cruaut^  envers  les 
sienseux-m^mes  qu'il  etenditd'abord  son 


(*)  Toy«  Goinaome  de  Tyr.  fiisloire  de  ce 
^feupttei,  etc 


(*)  Voyez  Gaillaame  de  Tyr,  Histoire  de  ce 
qui^eetT^OMMi,  etc. 


•10 


L*UmVEBB. 


empire.  Llneapable  eomte  d'fide886«  Jo«- 
selin  de  Courtenay,  lui  accorda  une  trive 
k  sa  premiere  demande.  G'^tait  donner 
a  son  ennemi  le  temps  et  le  moyen  de 
deveoir  redoutable.  Zenghi  profita  de 
cette  paix  momentante  avec  les  Francs 
pour  s'arrondir ;  il  trompa  tour  k  tour 
les  ^mirs  d'Uamah  et  d*Hems,  leur  arra- 
cha  leurs  villes ,  et  les  ajouta  k  ses  pos- 
sessions, d6ik  considerables.  De  cette  fa- 
con,  sauf  Antiocbe,  il  avait  presque  tout 
le  cours  de  TOronte,  c'est-lniire  un  pa][8 
riche,  productif,  et  dont  les  vastes  prai- 
ries ^talent  tres-^avorables  k  nourrir  les 
cbevaux  nombreux  desa  ca valeric.  Puis 
il  commen^a  parattaquerle  prince  d' An- 
tiocbe, pour  en  venir  ensuite  au  comte 
d'£desse.  Nous  avons  d6ja  rapporte  les 
diffcrents  refers  de  oesdeux  chefs  Chre- 
tiens ;  ce  furent  les  soldats  de  Zengbui 
qui  les  leur  iirent  ^prouyer. 

Apres  avoir  pris  successiveroent  aux 
Francs  les  villes  de  Barim,  de  ILapbartab 
et  de  Marrab,  Zenghi  meuacait  serieu- 
senient  la  conqudte  des  croises  et  faisait 
au  lointrembler  Jerusalem,  lorsque  la  di- 
version op6t6e  par  Teilipereur  de  Cons- 
tantinople, Jean  Gomnene,  mit  quelque 
entravea  ses  succ^.  Voyant  tout  d'abord 
qu'il  ne  pouvait  lutter  seol,  avec  des 
troupes  quenesoutenaitaucuD  renfort  s^ 
rieux  venu  de  Perse  ou  de  M^opotamie, 
centre  lesGrecs  r^unis  aux  Francs,  tout 
en  conservant  la  campagne  et  en  cou- 
vrant  ses  possessions,  il  usa  de  ruse 

Eour  s^parer  ses  adversaires.  Au  prince 
vzantin  il  ecrivait  de  se  metier  de  ses 
allies  les  Latins;  aux  Latins  ii  d^non- 
^it  la  perfidie  imm^moriale  des  Grecs. 
A  force  de  perseverance  Thabile  musul- 
man  parvint  k  mettre  le  doute  et  la  froi- 
deur  entre  les  auxiliaires  Chretiens  qui  as- 
siegeaient  une  des  places  voisinesd'Alep, 
et  finit  par  leur  faire  lever  le  siege.  Plu- 
sieurs  ann^es  durant ,  Zenghi ,  rassur^ 
du  cote  des  Gbr^tiens,  ne  cbercha  qu'a 
affermir  sa  domination.  Le  voyant  oc- 
cupy centre  des  emirs  rebelies,  les  francs 
n'en  concurent  plus  la  ni^me  apprehen- 
sion, et  le  laisserent  tout  a  son  aise  m^- 
diter  et  preparer  son  grand  coup,  la  prise 
d'fideSse  (*). 

Si  Josselin  de  Gourtenay  avait  etc  un 
homme  sans  foi^  sans  talents  r^eis,  sans 

(*)  Yoyez  Ibn-AlatU,  Hittoin  de$  Jtabeka. 


prudence;  au  moiD8etait-eeimkaii> 
dat,  et  un  prince  toujours  jphfxsfik 
son  comte,  toujours  pr^t  a  le  dtfeodit 
II  n*en  fut  pas  ainsi  de  sod  fib,  jew 
homme  debauche,  ivrogneetioMwdaoL 
Zenghi  attendit  done  la  mort  du  p 
pour  depouiller  le  fils,  eotreprise  qui « 
lui  fut  pas  difficile.  Ge  JossdiQ,d(iuiae 
dtt  nom,  des  que  son  pere  n'exista  pjs, 
quitta  sa  capitale  ^ur  aller  habitcrlor- 
bessel,  ville  de  delices ,  situee  daas  n 
pays  charmant,  entouree  d'one  ofr 
pagne  fleurie,  et  la  il  s'abaodoonaaw 
vices,  negligeantet  de  payer  ses  tnofieE, 
et  d^entretenir  ses  forteresses,  etde  k 
garer  contre  les  incursioos  de  set  a»- 
mis.  Profitant  avec  adcesse  de  l^iaaft 
cite  et-de  Tincurie  de  son  adfersaire, 
Zeoffhi  endormit  c&eore  ses  sooipoi 
en  feignant  d'aller  mettre  a  la  nm 
quelques-uns  de  ses  sujets  revoltB.  Pu, 
au  moment  oft  on  s'y  attendait  le  moiis, 
Tarmee  considerable  qu1l  araitlef^,i 
la  dirigea  tout  i  coup  sur  Edesse.        | 

Gette  ville  ne  manquaitpasd'ai^parm 
comme  place  fortiGee ;  mais  elle  eUitiit'  ' 
pourvue  de  defenseurs.  Uabttee  seilt- 
ment  depuis  le  depart  de  Jo^lin  11  pv 
des  Armeniens  et  des  Ghaldeeiis,boiBaa 
de  commerce  et  non  de  guerre,  elk  o'lrat 

Ju'une  tr^s-petite  garnison  de  Fraaci 
[ue  lui  servaient  done  ses  reiujwti^ 
ves,  ses  tours  nombreuses,  sadaW 
Personne  n'etait  capable  de  dofer  Ji 
peude  troupes  qu'elle  possedaii.Upc*' 
dant  le  sentiment  de  la  consenffla^li^ 
sonnelle  et  de  la  propriete  alM 
d'un  certain  courage  ces  marcfaaodsitf- 
naces  dans  leur  existence  et  da»  i(* 
fortune,  lis  repondireot  aui  exbsli- 
tions  de  leur  clerge  en  s^armaot  eoatt 
ils  purent;  et,  pleins  d'espoir  daoski 
secours  qu'on  leur  promettait,ilsM 
d'al>ord  assez  bonne  contenaoce.  iod^- 
lin  II,  ebahi  de  cette  attaque,  deauidi 
Tappui  du  royaume  de  Jerusalem  ;adi 
son  pauvre  roi  avait  bicu  assa  \ 
faire  chezlui.  Puis  il  setournaverslU^ 
mond,  prince d^Antiociie.  Gedewrii 
avait  voue  une  haine  morteiie,elM 
vouiut  pas  I'oublier  dans  cette  qcb^^ 
Josselin  II  futr^duita  iaisser  sus** 
cours  sa  malheureuse  capitale. 

Voici  comment  Abou'l-Faradj,  Hb*" 
torien  arm^nien,  en  raconte  h  ol* 
trophe : «  Zenghi  parut  devant  Edesseii 


STRIE  MODERNE.      " 


Sll 


mardi  28  novembre  1145.  I^on  camp  fbt 
dresse  pits  de  la  parte  des  Heures,  vers 
r^lise  des  Confesseurs.  Sept  machines 
ixireat  e)ev6es  coDtre  la  ville.  Dans  ce 
danger,  les  habitants  grands  et  petits^ 
sans  exceptor  les  moines,  accoururent 
8ur  les  remparts  et  coinbattirent  avblc 
courage ;  les*  femmes  m^me  8*y  rendi- 
rent,  apportantaux  guerriers  despierres, 
de-  I'eau  et  des  vivres.  Cependant  Tett- 
*inemi  avait  creus6  sous  terre  jusqu"^  la 
▼iUe;  les  a8Sieg6s  creus^rent  aussi  de 
leur  c6t^,  et,  penetrant  dans  la  mihe 
opno»^,  y  tu^rent  les  travailleurs.  Mais 
deja  deux  tours  ^talent  enti^rement  rui- 
D^es.  Comme  elles  ^taient  pr^s  de  s'l^ 
crouler,  Zenghi  le  fit  savoir  aux  aSsi^ 
g^ ,  en  disant :  «  Prenez  deux  hommes 
«  d*entre  nous  en  otage ;  vous  env^rez 
Si  deux  des  vdtres,  et  ils  se  eonvaincront 
«  par  eux-mlmes  de  T^tat  de8  choses. 
«  II  vaut  mieux  vous  rendre,  et  ne  pas 
«•  attend  re  d'etre  soumis  de  force  et 
«  d'etre  extermin^.  »  Get  avis  fut  m^- 
pris^.  Celui  qui  commandait  dans  £desse 

four  les  Francs,  attendant  d'un  moment 
Tautre  i*arriv6e  de  Josselin  et  du  roi 
de  Jerusalem,  reieta  avec  d^iain  la  pro- 
position de  Zengni. 

«  Alors  Tennemi  m!t  le  feu  aux  pou- 
tres  qui  soutenaient  leS  tours,  et  elles 
S*6croul^rent.  Au  bruit  qui  en  retentit, 
les  habitants  et  les  ^v^ques  accoururent 
sur  la  breche  pour  arr^ter  Tennemi. 
Mais  pendant  qu'ils  d^fendaient  cet  en- 
droit,  les  Tures  (soldats  de  Zenghi) 
trouv^rent  les  remparts  disarms  et  for- 
cerent  la  ville.  Alors  les  habitants  quit- 
t^rent  la  br^he  et  coururent  a  l8  cita- 
delle.  A  partir  de  ce  moment,  quelle 
bouche  ne  se  fermerait,  quelle  main  ne 
reculerait  d'effroi,  si  elle  voulait  racon- 
ter  ou  d6crire  les  malheurs  qui  dUrant 
trois  heures  accabl^rent  iSdesse ! 

«  On  ^it  au  samedi  S  de  canoun  se- 
cond ,  ou  Janvier  1145  de  J.  G.  Le  glaive 
des  Turcs  s*abreuva  du  sang  des  jeunes, 
des  vieux ,  des  hommes ,  des  femmes , 
des  pr^tres,  des  diacres,  des  religieux, 
des  religieuses,  des  vierges ,  des^poux , 
des  Spouses.  Hdas!  chose  horrible  h 
dire !  la  ville  d*Abgar ,  ami  du  Messie,  fut 
foul6e aux  pieds pournos  p^ches !  0  de- 
plorable condition  humaine!  Les  p^res 
resterent  sans  piti^  pour  leurs  enfants, 
les  enfants  pour  leurs  p^res,  les  mdres 


furent  insensibles  pour  le  fruit  dis  leurs 
entrailles,  tous  couraient  au  haut  de  la 
montagne  vers  la  citadelle.  Quand  les 

f>r6tres  en  cheveux  blancs,qui  portaient# 
es  chdsses  des  saints  martyrs,  virentf 
luire  let  signes  du  Jour  de  colere,  du  . 
jour  dont  un  proph^te  a  dit :  J'ttpprou-  ^ 
verai  tecanrroux  cilexteparce  que  fat 
pich4,  ils  s'arr^t^rent  tout  court,  et  ne 
cesserent  d'adresser  leurS  voix  h  Dieu , 
jusqu*A  ce  que  le  glaive  des  Turcs  leur 
edt  dt^  la  parole.  Plus  lard ,  on  retrouva 
leurs  corps  en  habits  sacerdotaux  teints 
de  sang.  II  y  eut  cependant  quelques 
meres  qui  rassemblerent  leurs  enfants 
autour  d'elles ,  comme  la  poule  appelle 
ses  petits,et  qui  attendirent  de  perir. 
tous  ensemble  par  T^p^,  ou  d*6tre  k  la 
fois  men^s  en  servitude.  Geox  qui  avaient 
couru  vers  la  citadelle  n'jr  parent  entrer. 
Les  Francs  qui  la  gardaient  refiiserent 
d'ouvrir  les  portes,  et  attendirent  que 
leur  chef,  qui  ^tait  k  la  breche,  fdt  revenu. 
II  arriva  enfin ,  mais  trop  tard ,  et  lors- 
que  des  miliiers  de  personnes  avaient 
m  etouffees  aux  portes.  En  vain  voulut- 
II  s*ouvrir  un  cHemin,  fl  ne  put  passer 
outre ,  a  cause  de^  cadavres  entasses  sur 
son  passage,  et  fut  tu6  k  la  porte  mdme 
d*un  coup  de  fleche.  Enfin  Zenghi, 
touch^  des  maax  qui  accablaient  £desse, 
ordokina  de  remettre  r6p^  dans  le  four- 
reaU(*).  » 

Telle  fut  la  deplorable  fin  du  si6ge 
d'Edesse.  Josselin  Tavait  laiss^  faire  sans 
bouger.  Eiifin ,  poussiS  sans  doute  par  la 
honte  de  sa  conduite,  et  sans  doute  aussi 
entrain^  par  le  ^este  d'hommes  d'hon- 
neur  qui  Tentouraient,  il  tenta  de  re- 

{>rendre  sa  capitale.  II  y  r6u$sit,  grdce  k 
a  faible  garnison  turque  que  Zenghi 
y  avait  laiss^,  grdce  aussi  k  la  coopera- 
tion des  habitants  de  la  ville ,  qui  lui 
tendirent  des  ^chelles  pedant  la  nuit 
pour  escalader  les  remparts.  Mais  le 
triomphe  de  I'indigne  comte  d'^desse 
ne  fut  pas  de  longue  dur^e.  L*un  des  fi Is 
de  Zenghi,  ISour-Eddin,  8oldat  d^ja 
aussi  brave  qu'habile,  revint  contre 
£desse.  Gette  fois  Josselin  ne  se  crut 
pas  de  force  k  lutter  contre  un  pareil 
adversair^;  et,  apres  mille  propositions 
contradictoires  du  conseii  de  ses  cheva- 
liers, il  r^solut  de  fuir  definitivement 

(*)yej«cAl)^ool-Fan^,  CkromfUM9f/rUiqm* 


S14 


LUNIVERS. 


saisir  <t*un  oheval  abandonn^  pour  fliir 
la  mort  ou  resclavage  qui  Tattendait.  Ce 
fut  done  en  fuyard  quil  rejoignit  sa 
femme  et  ses  troupes.  Des  lore  il  fiit 
jug^ ,  et  se  fit  justice  a  lui-m^me  en 
confiant  d^ormais  la  conduite  de  Son 
arm^e  k  un  certain  Gilbert .  Boidat  exp^ 
rimenteet capable.  Grdce  a  ce  dernier, 
et  aussi  h  £verard  des  Barres ,  grand- 
mattre  des  Templiers ,  qui ,  avee  une 
troupe  de  cavaliers  hardis ,  etait  yenu 
au-devant  de  Texpedition  euroD^enne, 
Tarm^e,  apr^s  mille  combats,  mille  souj^ 
irances,  manquant  souvent  de  nour- 
riture  et  d'abri ,  d^m^e  par  les  mala- 
dies ,  diminu^e  chaque  jour  par  le  cime- 
terre  musulman  et  la  rigueur  de  Thi- 
ver ,  arriva  eofin  k  Satalie ,  ville  grecque 
bdtie  sur  le  rivase  mediterrau^en ,  h 
Tenibouchure  du  fleuve  Cestius  (*)• 

La  trahison  attendait  les  crois^s  de- 
vant  ces  murs  inhospitaliers.  On  com- 
men(^a  par  ieur  refuser  Tentr^e  de  la 
cite.  Mais  a  force  d'instances  de  la  part 
de  Louis  VII,  les  sujets.du  perfide  em- 
pereur  de  Constantinople  consentirent 
a  fournir  des  vaisseaux  a  Texpedition 
sainte.  Malheureusement  ces  vaisseaux 
se  firent  longtemps  attendre,  et  Tarro^e 
eut  ie  temps  de  se  voir  accabler  par  tous 
les  maux  possibles,  daus  une  plaine  inon- 
d^e ,  sans  vivres  et  presque  sans  vt- 
tements.  Puis ,  ^uand  les  vaisseaux  ar- 
riv^rent ,  ils  n'etaient  pas  assez  nom- 
breux  pour  embarquertoutes  les  troupes. 
Louis  VII  alors,  malgre  les  belles  pro- 
messes  quMl  avait  faites  a  ses  soldats 
de  he  jamais  les  abandonner ,  de  parta- 
ger  Ieur  fortune  quelle  qu'elle  frtt,  fei- 
gnit  d'etre  contraint  de  partir  le  pre- 
mier, d'etre  appel^  a  Antiochepour  leoien 
general,  et  monta  avec  sa  femme,  ses 
.  chevaliers,  ses  courtisans,  sur  les  navi- 
!  res  qu'on  lui  offrait.  L'infanterie  et  la 
I  foule  des  pelerinsfut  laissee  sur  le  rivage, 
/  sous  le  commandement  de  deux  cheva- 
liers, Thierrv,  comte  de  Flandre ,  et  Ar- 
chambault  de  Bourbon.  Ainsidelaisses, 
ces  pauvres  crois^  suppli^rent  de  noa- 
veau  les  gens  de  Sataiie  de  Ieur  ouvrir 
leurs  portes.  On  eut  encore  la  barbarie 
de  repousser  leurs  prieres.  Alors  ils  s'a- 
chemmerent  tristes ,  d^courag^ ,  affai- 
blis  par  les  tortures  de  la  faim  et  du  firoid. 

(*)  Voyez  (Mod  de  Deoil ,  ibidem. 


lis  cherchaient  h  suivre  la  cAta  ji»qn*d 
la  Syrie;  leurs  guides  les  ^gar^rent,  et 
bientdt  ils  tomberent  dans  une  embuacade 
de  Musulmans.  qui  en  eurent  <aeiie- 
ment  raison,  les  ^orgi^rent  presque 
tou^ ,  ou  les  etnmenerent  en  esclavage. 
Cest  ainsi  ^u6  par  une  suite  dMmpruden- 
ces ,  d'incapacites ,  de  trahisons  succes- 
sives  fut  d6truite  une  arm^  de  prte 
de  cent  mille  Francais ,  au  diire  des  nis- 
toriens  les  moins  exag6r^. 

Tandis  que  son  arm6e  abStttdonnee , 
tandis  que  les  malheureux  pelerihs  qui 
avaient  eu  confiance  en  lul ,  mouraieni 
victimes  de  Ieur  credulity  en  sa  parole 
royale,  LOuiS  Vlt  abordaii  tranquil* 
lement  a  Antioche,  et  a  peine  arrive  s*j 
plongeait  dans  les  plafsits  [>bur  oUblier 
ses  remords  peut-itre.  Mais  le  del  te 
Dunit  de  cette  absence  de  coeur  en  le 
irappant  par  oh  mtoie  il  avait  nMiL 
Le  prince  qui  r^j^nalt  alors  h  Anuoehey 
Kaymond  de  Poitiers ,  ne  manquait  of 
de  ^rdce,  ni  d'esprit,  ni  surtoutdegalan- 
terie.  Sa  cour  voluptueuse ,  qui ,  malgre 
des  dangers  mena^ntSp  ne  songeait  le 
plus  souvent  qu*au  plaisir,  avait  un  bien 
doux  attrait  pour  des  femraes  qui  ve- 
naient  d'6prouver  tant  de  fntinies ,  tant 
de  privations,  tant  dlnqui^tudes  sur  les 
cdtes  desertes  de  la  mer  Miiditerra- 
q^enne,  et  dans  les  montagne^  neigeuses 
de  la  Pamphylie.  Raymond  de  Poitiers 
et  ses  seigneurs  panirent  done  chamiants 
i  £l^onore  de  Guienue  et  ^  ses  da- 
mes d'bonneur.  Puis,  le  printemps  ai- 
dant ,  la  nature  orientale  ajoutant  bien- 
tdt  ses  d^lices  aux  fStes  continuelles,  le 
coeur  naturellemeiit  facile,  di sent  les  con- 
temporaius,  de  I'^pouse  de  Pennuyeox 
Louis  VIl  ae  laissa  entratner  aux  tenta- 
tions  qui  Tentouraient.  Elle  to)uta, 
rapporte-t-on ,  les  propos  d*amour  du 
galant  et  spirituel  Raymond ,  chercha  h 
prolonger  son  s^jour  sur  les  bords  en- 
chants de  rOronte ,  et  finit  par  exciter 
chez  son  froid  et  d^vot  mari  la  pins 
vive  jalousie.  Raymond  de  Poitiers  au- 
rait  voulu  retenir  le  roi  de  France  et 
surtout  ses  chevaliers  pour  Taider  d  re- 
pousser  les  Turcs ,  pour  attaquer  m^me 
] usque  dans  Ieur  nid  ces  vau tours  avl- 
des,  pour  mettre  le  si^ge  devant  Alep. 
L'amour  en  cela  ^tait  pour  lui  d^aocord 
avec  la  politique.  Mais  Louis  YII ,  ()ui 
d*abord  avait  refuse  de  sui  vre  rexp6dition 


SYAm  MODERNE. 


315 


des  habitants  d^Antioche  contre  leors 
^tfi^rnels  ennemis  >  sous  pretexte  quil  de- 
vait  avanttoutse  rendre  h  la  villa  sainte , 
persista  plus  tard  dans  sa  resolution  de 
parti r  au  plus  vite  pour  Jerusalem,  afin 
de  sauver  son  honneur  marital.  Aussi , 
una  nuit,  enleva-t-il  sa  femme,  Tem- 
mena-t-il ,  majgr^  sa  r^istanee ,  dans 
sa  tente  royale ,  et  leva-t-il  bAtiTement 
son  camp.  11  6tait  trop  tard,  sa  femme 
^taitsubjuguee ,  et  des  lors  elle  song^a  i 
faire  rompre  une  union  qu'elle  abhor* 
rait  (*). 

LOUIS    Til    BT    GOTTBAD    III 
k  ji^BUSiXBM. 

Louis  VII  s'achemina  par  terre  vers 
Jerusalem ,  en  ^vitant  d'entrer  dans  les 
grandes  villes,  ^e  peur  d'y  Itre  retenu. 
II  ne  voyait  plus  dans  la  croisade.qu'un 
{M^lerinage  ordinaire,  et  avait  hdte  d*ar- 
river  au  saint  s^pulcre.  Son  expedition 
avait  ete  sollicitee  pour  venir  au  seoours 
des  etablissements  Chretiens  les  plus 
menaces,  pour  arr^ter  le d^veloppement 
que  prenait  de  nouveau  Tlslam  vain- 

Sueur,  pour  reprendre  ^desse;  et  le 
eyot  souverain  ne  songeait  plus  qu'k 
accomplir  un  acta  de  pi^te ,  dissimuiant 
peut-^tresous  eette  afiec^tion  religieuse 
la  honte  qu*il  avait  d'avoir  abandonn^ 
le  corps  principal  de  son  arm^e,  apr^s 
Tavoir  deplorablement  conduit  a  travers 
FAsie  Mineure.  Quels  que  fussentd^ail- 
leurs  ses  sentiments,  il  se  refusa  aux 
instances  du  comte  de  Tripoli ,  qui  Tap- 

Selait  au  secours  de  ses  fronti^res.  A  quoi 
one  servait  cette  croisade,  prech^e  par 
un  saint ,  excit^e  par  un  pape ,  comman- 
d^e  par  deux  souverains?  A  tromper  les 
populations  chr^tiennes  dans  leurs  es- 
p^rances ,  h  ne  leur  prater  aucun  appui 
dans  leur  d^tresse ,  a  mener  jusqu*a  Je- 
rusalem un  roi  bigot,  Louis  Vll,  un 
empereur  sans  talent,  Conrad  III ,  quel- 
ques  barons  f^odaux  sans  enthousiasme, 
queiques  grandes  dames  d^Europe  sans 
pudeur. 

Conrad  III  arriva  dans  la  ville  sainte 
presque  seul ,  et  com  me  un  inutile  pele- 
rin.  11  avait  emmene  plus  de  cent  mille 
bomnoes  d^Allemagne ,  et  apres  en  avoir 
disperse  les  cadavres  dans  la  Pbrygie , 

(*)  Yoyez  GuUIaume  de  Tyr,  Hutoin  de  ce 
qui  t'eit  passi  au  deUi  det  men,  etc 


il  avait  rejoint,  vaincu  et  d^courage, 
Tarmee  de  Louis  VII  sur  les  cdtes  de  la 
Mediterranee.  Puis,  au  premier  echec 
du  roi  de  France ,  il  Tavait  quitte  pour  se 
refugier  a  Constantinople.  EnGn  I'or- 
gueilieux  chef  du  saint  Empire,  si  fier 
auparavant  de  ses  masses  de  Teutons , 
du  nombre  de  ses  etendards,  de  la  foule 
de  ses  cavaliers,  8*en  revint  sur  un 
bdtiment  grec  k  Ptoiemals ,  et  se  diri- 
gea  tristement  vers  Jerusalem,  pour 
demander  sans  doute  k  Dieu  pardon  de 
son  insigne  et  deplorable  folic ,  du  mas- 
sacre de  ses  sujets ,  dont  son  iucapacite 
etait  cause. 

Les  deux  princes  europeens,  une  fois 
reunis  dans  la  ville  sainte ,  ne  montre- 
rent  pas  plus  d*habilete  pour  etre  utiles 
aux  Chretiens  d'Orient  qu  ils  n*en  avaient 
developpe  dans  la  ponduite  de  leurs  ar- 
mees.  lis  epouserent  tout  de  suite  les 
ridicules  dissensions  qui  divisaient  les 
princes  latins.  Une  reunion  de  tons  les 
barons  eut  iieu  a  PtoiemaTs ,  et  loin  d*y 
appeler  le  comte  d'fidesse  fiigitif,  le 
comte  de  Tripoli  menace ,  le  prince  d^An- 
tioche  supportant  seul  le  poids  de  la 
guerre  contre  Tlslam,  on  fit  bande  a 
part ,  on  ne  tint  pas  compte  des  dangers 
que  couraient  des  freres ,  on  ne  se  sou- 
Vint  que  des  querelles  personnelles.  Or, 
loin  de  retablir  la  concorde ,  la  presence 
des  souverains  de  France  et  d' Allemagne 
ne  parvint  qu'a  renforcer  Tanarchie  dans 
les  £tats  Chretiens.  D'une  pareillc  as- 
semblee  il  ne  pouvait  resulter  qu'une 
folie.  Elle  eut  lieu.  On  convint  d'aller 
assie^er  DSimas,  beaucoup  moins  pour 
prendre  une  ville,  qu'on  n*aurait  pas  pu* 
garder,  que  pour  se  preparer  un  pillage 
ou  chacun  se  proposait  une  part  denutin. 
Toutes  les  troupes  qui  devaient  prendre 
part  k  cette  expedition  insensee  se  reu- 
nirent  en  Galilee  au  printemps  de  1148. 
Ces  troupes  etqient  singulierement  com- 
posees  :  elle  formaient  plutdt  des  ban- 
des  separees  qu'une  armee  reguliere.  11 
y  avait  k  la  fois  Louis  VII  et  ses  barons, 
Conrad  111  et  ses  queiques  mercenaires 
grecs,  Baudouin  III  et  ses  Poulains, 
enfin  les  chevaliers  independants  du  Tem- 
ple et  de  Saint-Jean.  Trois  souverains  , 
et  pas  un  general.  Personne  n'avait  eu  le 
genie  de  prendre  le  commandement  de 
Texpedition  tout  entiere.  II  devait  ne- 
cessairement  en  resulter  une  division  fu- 


die 


LTJNIVERS. 


neste ,  deg  oonfliU'  d*autorit^  sans  cesse 
renaissants,  des  discordes  pitoyables  (*). 
Damas,  a  cette  ^poque,  etait  deja 
une  ville  populeuse  et  riche.  Elle  pr^para 
^nergiquement  sa  defense.  Son  emir 
Moin-Eddin  ^tait  k  la  fois  un  homme 
oourageux  et  ruse.  Bien  sdir  que  sa  cit^ 
etait  imprenable  a  Test  et  au  sud ,  grdce 
a  ia  hauteur  de  ses  rourailles ,  il  ne  sod- 
gea  a  fortifier  que  les  c6t^s  de  Toccident 
et  du  septentrion,  tout  couvertsde  jar- 
dins  et  de  vergers ,  et  ou  ia  riviere  £1- 
Barradeh,  quise  precipitait  des  monta- 
gnes  et  qui  se  divisait  en  sept  bras,  avait 
permis  d'^tabiir  une  grande  quantit^^  de 
canaux  d'irrigation.  Moin-Eddin  fit 
en  cons^uence  agrandir  les  fosses ,  re- 
treeir  les  sentiers,  elever  de  place  en 

RIace  des  tourelies  de  combat ,  creneler 
is  enceintes  fermees,  de  &gon  qu*^ 
travers  ce  d^ale  d'eau  et  de  muraflles 
ii  fut  impossible  aux  barons  de  mener 
leurs  chevaux  et  m^me  aux  fantassins  de 
combattre  plus  de  deux  par  deux. 

Pendant  cinq  jours  en  effet  les  croises 
firent  de  vains  efforts  pour  p^n^trer  a 
traversoelabyrinthe  detours,  de  canaux, 
de  palissades.  Les  vingt  miile  chevaux 
de  rarm^e  f6odale  devinrent  inutiles. 
Malgr^  quelques  succ^s  partiels,  les  Chre- 
tiens finirent  done  par  se  decourager  de 
oette  guerre  de  bocages ,  et  dans  uu  de 
de  ieurs  conseils  ils  resolurent  de  chan- 
ger leur  attaaue,  etde  porter  leurs  forces 
vers  lesud  et  rest.  lis  n'avaient  rien  perdu 
de  leur  assurance  premiere,  et  deja  sdrs 
de  la  victoire ,  ils  se  disputaient  la  pos- 
session de  Damas,  lorsque  les  Pouiains, 
plus  experimentes  que  les  chevaliers 
a 'Europe,  entrerent  en  n^gociation  avec 
Moin-Eddin.  Celui-ci  offrit  a  Baudouin 
in  de  lever  le  si^e  moyennant  finances. 
Ce  traits  de  trahison  eut  lieu  au  prix  de 
deux  cent  mille  pieces  d*or.  Seufement 
le  fourbe  Arabe  trompa  Tinnocent  roi 
de  Jerusalem,  en  lui  faisant  remettre  des 
pieces  de  cuivre  artistement  recouvertes 
d'une  lame  d'or.  La  fraude  ne  fut  re- 
connue  que  plus  tard ,  lorsque  la  retraite 
des  Pouiains  et  des  Templiers  eut  en- 
tratn^  celle  des  barons  europ^ns.  Con- 
rad HI,  instruit  de  Facte  odieux  de 
Baudouin,  s'en  retourna  immediatement 


dans  ses  £tats.  Qoant  i  Lous  TE,i 
resta  encore  un  an  dans  U  riliesaiiftpi 
v  terminer  ses  devotions,  etiaisb  is 
bras  croises  a  la  decadence  npiielB 
possessions  chretienncsenOibUV 


NOUB-BDDIV. 

Tandis  que  le  rovaamedeJMi 
et  les  autres  principautes  frufis j 
mal  secourus  par  rinfrudneosecMrii 
de  Louis  Vfl  et  de  Conrad  ID,  tmjH 
de  jour  en  jour  leur  paissaooedioH; 
la  securite  de  leurs  Wiles  iMt^ 
rhonneur  de  leurs  armes  s'ete 
rislam  reprenaitdeploseoplBseMi 
son  ^lat ,  son  nmtk.  Les  praoino^ 
86s  n'avaient  rencontre  en  Oriotf^ 
anarchie  n6e  de  rambition  de  m 
vaux ,  qui  se  disputaient  le  i     "^ 
mais  lourd  heriuge  de  Mellk- 
seconds  crois^  trouvereotnoe 
dynastie  naissante,  oelle  des 
Atabek ,  qui  veut  dire  mota  omI 
du  prince,  fut  le  litre  que  priwfli 
gouvemeurs  puissantsdonBtlafli 
des  sultans  se]djoukides.Gesg(iM 
devinrent  bientdt  des  princes  ii^ 
dants  dans  les  provinces  qu'ookvi 
confiees.  II  y  en  eut  de  (ptRJrt 
auxquels  leurs  fils  sooce(ieRit,tf 
diviserent  en  quatre ro¥iuo6ltl| 
et  ephtoereerapirede  Melik-&Jpj 


que 


(•)  Voyez  AbooU-Fara^ ,  Chronique  syria- 


et  eph  toere  empire  de 
n'avons  pas  a  nous  occuBerAfitfj 
de  Perse ,  de  Medie,  etdiLtf**g! 
Atabeks  dlrak  seuis  coi«(i»«*J2 
les  Francs.  Ces  derniersaBii**ff 
filer  de  cette  division  de  Fcsftt"} 
mique;  nous  avons  vupirfWj* 
de  liautes  il  leur  fut  impossibiejTl 
ger.  Nous  allons  voir  n»iai»» 
Atabeks  de  Tlrak suffirepourlesi* 
Omad-EddinZengbi,fils  (TAkari 
^it  devenu  prince  independiBUW 
talent  et  de  victoires  sur  les  CVl 
11  avait  peu  a  peu  augment^  soap^ 
autant  par  des  concessions  qiK^' 
des  ^mirs  musuimans  que  ps^Ufl 
quotes  sur  les  Francs.  0u pays* 
soul,  dont  il  ^it  le  gouTeraet 
le  principe,  il  s'etait  itenda  jj 
Hems ,  Hamah ,  Alep ,  et  fl  avail 
vie  par  la  prise  d'£desse.  Attlaitfl 
ruse  que  par  les  armes,  ii  s*cuiiij« 

(♦)  Voyei  GaHlaame  de  l>fr.  Bit^ 
qui  ^est  paw  au  dtla  it*  wmi,  cK- 


SYRI£  MOD£RN£. 


3ir 


aotant  par  son  activity  que  par  sa  ^rs^ 
v^ranee ,  il  s'etait  consotide.  Aussi  bon 
adininistrateur  que  brave  soldat ,  il  avait 
fiait  k  la  fois  bonne  guerre  et  bonne  po- 
lice. Grdoe  II  lui,  sa  capitate  Mossoul , 
qu*on  lui  avait  livr^  presque  ruinee, 
avait  vu  ses  fortifications  relev6es ,  plu- 
sieurs  ^ifices  embellir  son  sein ,  enfin 
Fabondance  revenir  k  tel  point  sur  son 
territoire que,  suivant  {'expression  d'un 
auteur  arabe ,  le  raisin  gu'avant  le  r^- 
gne  de  Zenghi  on  coupait  avec  une  ser- 
pette,  de  peur  d'en  perdreun  seul  grain, 
devint  aussi  abondant  qu'il  etait  rare. 
Le  fits  de  Zenghi  n'avait  done  qu'a  con- 
tinuer  I'ocuvre  patemelle  pour  augmen- 
ter  encore  son  heritage.  II  parut  doue , 
du  reste,  de  toutes  ies  qualitesdeson  pere 
jointes  encore  a  une  plus  haute  compre- 
hension de  Tantagonisme  de  TOrient 
oontre  ^'Occident. 

Nour-Eddin,  quoique  le  cadet  des 
enfants  de  Zenghi,  se  montra  des  sa 
jeunesse  le  veritable  successeur  de  sa 
puissance.  II  laissa  son  frere  aine  Saif- 
Eddin  trdner  tranquil lement  a  Mossoul , 
land  is  que  lui  s'etablissait  a  Alep,  aOn 
d'etre  plus  pr^  des  frontieres  de  ses 
perpetuels  ennemis.  II  avait  fait  ses  pre- 
mieres armes  sous  son  pere  de  la  facon 
la  plus  briilante  au  premier  siege  (r£- 
desse ;  il  chercba  k  1  imiter  aussi  dans 
ses  qualites  administratives.  Comma  il 
voulait  passer  pour  aussi  equitable  que 
ferme ,  il  cr^a  une  cour  souveraine  de 
justice ,  qu'il  presidait  souvent ,  et  qui 
devint,  pour  ainsi  dire,  une  veritable 
cour  d'appel  des  jugements  ordinaires  des 
cadis.  II  fit  en  outre  abolir  Ies  tortures 
qu*on  appliquait  avant  lui  a  certains  ac- 
cuse. Puis  il  s'appliqua  k  £tre  aussi 
liberal  qu'6conome.  Ilned^nsaitd'au- 
tres  revenus  que  celui  oe  ses  biens 
propres,  declarant  qu*il  n'etaitgue  depo- 
sitaire  de  la  fortune  de  ses  sujets.  £n- 
nemi  du  luxe  pour  lul-m^me,  il  s'in- 
terdisait  dans  ses  vdtements  Tor ,  Tar- 
gent  et  la  sole ;  scrupuleux  observateur 
des  coutumes  musulmanes,  il  s'abstenait 
de  vin  et  de  toute  liqueur  spiritueuse. 
Ces  diff^rentes  qualites  austeres  ne  Tern- 
p^chaient  pas  d'etre  un  des  plus  bril- 
lants  cavaliers  de  son  empire ,  un  des 

flus  courageux  soldats  de  son  armee. 
I   maniait  uu  cheval  avec  autant  de 
grAce  quede  vigueur;  ii  n'allait  jamais 


a  la  guerre  qu'avec  deux  arcs  et  deux 
carquois ,  afin  de  combattre  personnel - 
lement  comme  le  plus  humble  des  siens. 
Mais  ce  n*6taient  lit  que  des  vertus  or- 
dinaires pour  un  prince  oriental ,  vertus 
bonnes  a  lui  cr^r  des  partisans ,  mais 
insuffisantes  a  lui  acquerir  des  pro- 
vinces. Ge  qui  fit,  au  contraire,  sa  force 
contre  Ies  Francs,  ce  fut  la  piete  qu'il 
affecta,  et  la  resolution  qu*il  prit  de 
faire  sans  oesse  la  guerre  aux  Chretiens, 
tant  crecs  que  latms.  Nour-£ddin  fut 
doncle  veritable  promoteur  de  la  guerre 
sainte  chez  Ies  Musulmans.  Selon  lui ,  il 
ne  s'agissait  pas  avec  Ies  Chretiens  de 
se  venger  d'un  grief  politique,  il  ne  s*a- 
gissait  pas  non  plus  de  reconqu^rir  Ies 
anciennes  possessions  arabes,  il  ne  s'agis- 
sait pas  des  interdts  materiels  de  natio- 
nality, mais  bien  des  interdts  sacr^s  de 
rislara.  II  voulait  forcer  tons  Ies  Orien- 
taux  a  adopter  le  Koran  pour  loi ,  ainsi 
qu'avaient  fait  Ies  premiers  khalifes. 
Voila  ce  qui  le  rendit  terrible  et  victo- 
rieux  (*). 

PHOGB^S     DE     l'ISLAU      CONTBE 
LA     CBOIX. 

Durant  vingt-huit  ans  de  r^gne,  c'est- 
a-dire  de  114G  a  1174,  Nour-£ddiu  r^- 
tablit  peu  a  peu  Tunite  musulmane, 
augmenta  pas  a  pas  ses  possessions, 
consolida  victoire  par  victoire  ses  con- 
quotes.  Apres  la  seconde  prise  d'l^Messe, 
il  n'eut  point  la  peine  de  combattre  Ies 
seconds  croises  :  ils  furent  disperses  ou 
detruits  avant  d'arriver  jus^u'a  lui. 
£n  1148  il  rasa  le  chdteau  d'Arima  dans 
le  comte  de  Tripoli.  Puis  avant  surpris 
une  troupe  de  francs  a  Yagra,  il  en 
massacra  bon  nombre,  fit  le  reste  pri- 
sonnier,  et  envoya  des  captifs  et  une 
part  de  butin  en  pr^ent  a  son  frere , 
maltre  de  Mossoul,  au  khalife  de  Bag- 
dad ,  et  au  sultan  seldjoukide.  C'etait  la 
moins  un  hommage  qu'il  voulait  rendre, 
qu'une  preuve  de  ses  exploits  qu'il  vou- 
lait donner.  Du  comte  de  Tripoli  il 
passa  sur  le  territoire  d'Antioche.  Le 
chateau  de  Harem  couvrait  ia  frontiere 
de  cette  principaute  du  cote  d*Alep. 
Mour-Eddm  I'attaqua ,  et  mit  a  feu  et  a 
sang  ses  environs.  Ensuite  il  se  tourna 
soudain  vers  la  place  d'Anab,  a  I'autre 

n  Yoya  Ibn-AIatIr,  HMoire  des  AtaUU^ 


St8 


LUNIVERS. 


extr6mit6  de  la  frontiere  fraoque.  Le 
prince  d*Antiocbe,  Raymond,  courut 
alors  au  secours  d'une  de  ses  principales 
forteresses ;  mais  des  qu'ii  eut  rejoint 
son  rival  deja  redoutable,  il  fut  battu  et 
tu6  par  lui.  Ce  fut  Renaud  de  Ghdtillon 
qui,  ayant  ^pous^  la  veuve  de  Raymond, 
succ^da  a  ce  dernier ,  maljjpre  les  droits 
d*un  enfant  en  bas  dge.  Aii^si  de  1149 
k  1151  Nour-Eddin  avait  deja  rase  ou 
pris  toutes  les  places  chr^tieoues  de  la 
Syrie  septentrionale.  II  avait  mis  a 
roort  un  prince  d'Antioche,  le  beau 
Raymond ;  il  avait  fait  prisonnier  Tan- 
cien  comte  d'£desse,  Tivrogne  Josselin; 
sa  puissance  etait  consolidee  dans  la 
Syne  Libanique ,  il  jeta  des  lors  les  yeux 
sur  rfigypte. 

Ce  rovaume  se  d^traquait.  Les  kha- 
lifes  fatnimites,  a  Texemple  des  kbali- 
fes  abbassides ,  n'etaient  plus  que  des 
sorter  de  grands  pr^tres  sans  action 
continue ,  sans  autorite  mater ielle  sur 
leur  empire.  Renferm6s  dans  leur  pa- 
laiscoinme  dansun  sanctuaire,  ou  plutot 
comme  dans  une  prison ,  ils  laissaient 
gouverner  en  leur  nom  d'ambitieux 
vizirs,  pour  qui  tous  les  moyens  etaient 
bons  d*accroltre  leurs  richesses  et  de  sa- 
tisfaire  leurs  passions.  Les  £gyptiens, 
qui,  a  la  premiere  croisade,  avaieut  sup- 
porte  tous  les  efforts  des  Francs  en 
Palestine;  qui,  a  le  seconde,  possedaient 
encore  plusieurs  villes  du  littoral  de  la 
Syrie,  n'avaient  plus  en  1153  que  la 
seule  Ascalon ,  et  ne  surent  ra^me  pas 
la  defendre  contre  Raudouin  IIL  Ce 
prince,  si  affaibli  a  Torient  de  son 
royaume,  profita  de  Tanarcbie  du  Kaire, 
ou,  apres  Tassassinat  du  vizir  Adhel, 
plusieurs  rivaux  se  disputaieut  sa  suc- 
cession, pour  mettre  de  nouveau  lesi^e 
devant  Ascalon.  Cette  place,  mal  d^fen- 
due  par  quelques  Egyptians  press^  de 
retourner  dans  leur  patrie,  raal  secourue 
par  sa  m^tropole,  divisee  elle-m^me  par 
des  partis  ennemis ,  apres  avoir  cepen- 
dant  repousse  les  premises  attaques 
des  Francs ,  capitula  tout  h  coup ,  et 
ouvrit  un  beau  iour  ses  portesaux  Chre- 
tiens, tout  ^bahis  de  leur  victoire  (*). 

Suivant  un  auteur  Arabe,  la  prise 
d*Ascalon  resserra  les  poUrines  el 
abatUt  Us  esprits  des   Mustdmans, 

n  V07f»  K«nal-Eddin,  J»tM«  d'jOqi. 


Noup-Eddia  ea  fdt  particiiy^raialii^ 
flig^,  d'autant  plus  qu'en  Vf^mAi 
si^ge  de  cette  ville  il  avait  eDtiefniv 
diversion,  que  rev^neine&t  nehodHi 
pas  le  temps  de  mener  ii  bieD,  i  ft 
s'en  prendre  de  cette  d^feiu,iiain 
rimpuissanoe  des  possessean  iklf 
gypte,   a  la  nouvelle  deeadeanii 
Alides?  Nour-Eddia  songea  pksfr 
jamais  a  pareraoetaffaibliuefflolii 
de  rislam.  Mais  pour  devemr  idm 
de  TEgypte  il  lui  &llait  Daoai  OK 
ville,  ffouvernee  par  no  simple owii 
dependant,  ne  pouvaitdans  sa^ 
ambigue  prendre  une  part  letmil 
srande  iutte  oontre  les  Chretim," 
aevenait  ainsi  un  embarras  pourk 
leureux  promoteur  de  la  guemi 
Damas  etait  d^ailldun  la  fBOsk 
d'£gypte,  c'etait  Tarseoal  fotwa 
vait  Nour-£ddin.  Ce  dernier  tm 
done  toute  son  babilet^  poor  eai 
des  partisans  au  mattre  impoisail 
Damas.  A  force  de  finesse  «t<lefi 
v^rauce,  il  fut  au^i  vaiaqoflorl 
cette  guerre  d'intrigues.  Qoaoi  1^ 
isoie  son  rival,  quand  il  sefutil 
sirer  par  presque  tous  lei  babM 
Damas,  il  demasqua  soobut.^*' 
cba  a  la  t^te  de  toutes  sestnapat 
cette  ville.  Son  rival ,  qui  n^ip* 
t^te,  s*adressa  aui  Francs  povMf 
rer  leur  secours.  Cette  fart*™!! 
sa  chute.  Nour-Eddin ,  pte  (Jjj ! 
que  les  Francs ,  awiva  afa«««^ 
Damas,  y  entra  en  trioofi*.*" 
Chretiens  u'eurent  plus  9uis'««*f 
ner  piteusement,  tandisquef^^ 
mattre  de  Tantique  eapita)edeliS|i 
se  refugiait  a  Ragdad. 

Ces  evenennents  se  pasuieot  ff" 
de  rhegire.  D«8  ranneesoinoUltl 
Eddin  allait  mettre  ses  o^ads  j^ 
a  ex^ution ,  o'est-a-dire  la  doB» 
de  I'Egypte  et  rextinctioo  des  oil 
franques,  lorsqu'un  veritable eaWf 
physique  Tarreu  pour  quelquc  M 
Un  enouvantable  trembiemeDtde^i 
eblanla  la  Syrie  tout  eotiere.  Us  9 
nombre  d'haniUnts  perirent  soosltt; 
nes  de  leurs  maisons.  Les  fbrtM 
d*Antioehe,  de  Tripoli ,  deSeba^ 
Hamah ,  d*Hems  tureot  booleM 
plusieurs  citadelles  croolerent,  p^J 
toutes  les  cit^  fnreot  gravementeiM 
mag^es.  Durant  oette  caiaiart^g^D''" 


SYRIB  MOPERI^E. 


319 


le  loi  d9  J&rusiJ^fD  etait  tranquiUement 
a  GoQStantioople ,  dans  le$  files  et  les 
plaisirs ,  et  revint  trop  tar4  pour  porter 
UQ  secQurs  efficace  a^  d^ssistre  ae  soa 
royaMiD^.  Nour-£d(iin,  nm  contraire, 
se  hUta  de  r^parer  \es  malheurs  de 
800  pays,  de  relever  ses  forteresses, 
d'entourer  sea  viilea  de  nouveiles  mu- 
railles.  Cette  differeDce  de  conduite  eo- 
tre  les  deux  adversaires  fut  bien  fiineste 
auz  Ghretieos.  G'est  qu'aussi  le  roi  de 
Jerusalem  etait  uu  honame  avare ,  am- 
bitieux,  inpapable,  et  par  consequent 
detest^.  Cetait  uq  certain  Amaury, 
irere  de  Baqdouin  III ,  lequel  ^it  iport 
empoisonn^  par  un  noedecin  syrien.  11 
fallait  que  (set  Amaury  fdt  bieh  detes- 
table pour  qu'il  fit  regretter  Tind^is 
et  imprudent  Baudouin  III  (*). 

Pauvres  Chretiens  d'Qrientl  depuis  la 
roort  de  Godefroy  de  Bouillon,  ils 
avaient  ^u  une  successiqa  de  princes 
plus  impuissants  les  uns  que  les  autr^- 
lis  avaient  vu  tour  a  tour  leur  pays  d^- 
vaste  par  la  guerre.,  ou  ruine  par  Tari- 
dit^  de  leurs  nouveaux  chefs.  Le  r^ime 
ftodal  leur  avait  6U  aussi  fatal  qu'^ 
I'Europe  au  dixieme  et  au  onzieme  siecle. 
Sans  cesse  inquietes  (>ar  une  lutte  ^ui 
de  jour  en  jour  prenait  une  proportion 
plus  terrible ,  ils  avaient  vu  a  annee  en 
annee  leur  commercediminuer, leur  agri- 
culture baisser ,  leur  Industrie  s'etem- 
dre,  leur  s^curite  devenir  de  plus  en 

Plus  ^pbem^.  La  eroix  avait  remplac^ 
odieux  croissant  sur  leurs  ^lises ;  mais 
cette  croix  n'etait  pour  eux  que  le  signe 
de  la  redemption  celeste,  et  non  celui 
de  la  liberation  terrestre.  Toujours  mal- 
heureux,  que  leur  importait  au  fond  d'e- 
tre en  possession  de  ce  saint  sepulcre, 
radieux  de  loin,  |uf;ubre  de  pres.  lis 
n'avaient  que  le  tnste  droit  de  venir 
user  leurs  genoox  sur  sa  froide  pierre , 
et  ne  pouvaient  esp^rer  tout  au  plus 
que  de  s'^lanoer  de  la,  comme  le  Christ, 
vers  un  monde  meillear.  Rieu  p'etait 
change  dans  leur  destinee  pr^sente ,  et 
ils  ne  pouvaient  songer  a  Tavenir  qu'avec 
terreur.  Le  vieuK  prophite  de  TAncien 
Testament  avait  toujours  raison  :  la 
vallee  de  Josaphat  avait  etc  constam- 
ment  uoe  vallee  de  lariiiesl 

OYofm.  Aboa'l-F^da,  Jnnalea  mosUm... 


REYOLUTIONS  MSf  BOYPTB. 


Les  choses  allaient  de  mal  en  pis  en 
£fljpte,  et  cette  situation  de  plus  en  plus 
difbcile  decida  Nour-£ddin  a  en  tirer 

f)arti.  Plusieurs  ^mirSi  devenus  forts  de 
a  faiblesse  du  khalifat  fathimite,  se  dis- 
putaient  la  preponderance  avec  plusd^ar- 
deur  que  jamais.  lis  combattaicnt  sans 
cesse,  et  par  tons  les  moyens,  la  puissance 
du  vi^ir  en  litre.  Darghapn,  Tun  d'eux  et 
desplus  turbulents,  parviqt  2kchasserson 
oompetiteur  Schaver,  et  se  posa  Qomme 
mahre  de  I'l^gypte.  A  peine ,  du  reste , 
eut-il  en  main  rautorite  qu*on  conspira 
detoutes  parts  contre  lui.  Maisce  Dar- 

gham  etait  un  homme  aussi  feroce  que 
ardi  :  pour  sauver  sa  puissance,  il  ne 
recula  pas  devantle  meurtr^,  etGt  egor- 

f;er  dans  un  reps^s  soixante-dix  emirs  qu] 
ui  etaient  opposes.  Ce  massacre  porta 
^a  prejudice  ino^meose  k  1  Egypte  :  en 
voulant  sauver  sqn  autorite,  Darghaip 
avait  affaibli  sa  piitrie.  Cet  acte,  aussi 
odieux  qulmpolit^que,  d^termina  Nour- 
Eddin  a  soutenir  Schaver,  q^i  s'etait  r^- 
fugie  en  Syrie.  II  accorda  a  c^  dernier 
line  armee  pour  faire  valoir  ses  preten- 
tions, eteq  con^a  le  oompfiandement  au 
brave  Schir-Rou ,  le  plus  puissant  et  le 
plus  audacieux  de  ses  lieutensiqts. 

Cependant  Pargham,  plein  de  resolu- 
tion, alia  au-devant  deses  qouveaux  en- 
nemis.  Lorsque  les  deux  armees  se  ren- 
contrerent  h  £la,  ITextremite  de  la  mer 
Rouge,  Schir-Kou,  etonne  du  grand  nom- 
bre  de  trpupes  du  vizir  dgyptien ,  dit 
a  Schaver  :  «  Yous  nous  assuriez  a  Da- 
ft mas  que  T^gypte  n'avait  pas  de.  sol- 
«  data,  et  nous  voila  en  face  d  une  armea 
«  formidable.  — :Ne  vqus  epouvantez  pas 
«  de  cette  multitude,  rfpondit  Schaver; 
«  la  plus  grande  partie  de  c^ux  que  vous 
«  voyez  devant  vous  se  compose  d'ar- 
ci.tisans  et  de  paysans,  que  le  tambour 
«  rassemble  et  que  1^  bdton  disperse.  » 
Schaver  avait  raison.  II  conseiUa  d'atta- 
quer  les  £gyptiens  au  plus  fort  cje  la 
chaleur  du  jour,  pendant  que  le  plus 
grand  nombre  d'entreeux  avaient  anan- 
donne  leurs  armes ,  e^  s*^taient  couches 
aTombre.  Les  Syriens  eurent  facilement 
raison  de  ces  noncbaiants.  Ustuerent  tons 
ceux  qui  leur  resisterent ,  et  firent  pri- 
sonniers  le  reste.  A  la  suite  de  cette  de- 
iaite  Dargbam  mourut,  maudit  par  le 


320 


L'UNIVERS. 


peuple ,  et  Schaver  le  rempla^  oomme 
vizir  (*). 

Mais  rarm6e  de  Nour-Eddin  avail 
conduit  Schaver  jusqu*au  Kaire,  et  avail 
^tabii  son  camp  devant  ses  mars.  Scha- 
ver, qui  oubliait  dans  satoute-puissance 
lespromesses  qu'il  avail  failes  aux  Syriens 
dans sa disgrace,  voulul  en  outre  forcer 
Schir'Koud*evacuerr£gypte;orcelui-ci, 
dans  soil  indignation ,  au  lieu  d'obeir  a 
ia  sommationinsolented'uningrat,  s'em- 
para  de  vive  force  de  la  ville  ae  Belbeis. 
Pour  sed6faire  d'un  aussi  terrible  pro- 
tecleur,  Schaver  commit  la  faute  de 
s'adresser  aux  Francs  et  de  leur  deman- 
der  Tappui  de  leurs  armes.  Le  roi  de  Je- 
rusalem, Amaury,  accepta  celt6  offre 
etrapge,  etvint,  concurremment  avec  les 
£gyptiens,  assieger  Schir-Kou  dans  Bel- 
b^is.Trois  moisduranllevaillanl  Schir- 
Kou  se  defendit  contre  les  bizarres  al- 
lies qui  ravaient  atlaqu^.  II  aurait  pu 
facilemenl  se  faire  jour  a  travers  les  as- 
siegeants,  et  sau  ver  tons  ses  soldats ;  mais 
il  avail  Fordre  de  Nour-Eddin  de  tenir 
le  plus  longlemps  possible ,  afin  d*occu- 
per  les  chevaliers  Chretiens  en  E^ypte , 
pendant  que  son  maltre  envahissait  leurs 
royaumes  en  Syrie.  Nour-Eddin  en  effet 
ravagea  lout  le  pays  de  Tripoli  et  d'An- 
tioche,  recueillil  un  grand  nombre  de 
bannieres  f^odales ,  Ot  couper  la  cheve- 
lure  de  tons  les  Chretiens  que  ses  soldats 
avaienl  tues,  et,  les  ayant  fait  mettre 
dans  un  sac ,  il  les  envoya  par  un  emis- 
saire  a  Belbeis,  endisant  ^  cet  homme  : 
«  Tu  donneras  cela  k  Schir-Kou;  il 
Texposera  sur  .les  remparls  de  la  ville 

3uMl  defend ,  et  ce  spectacle  remplira 
'effroi  les  infideles.  »  Les  Francs  en 
efiet  voulurenl  se  retirer,  et  Schaver  ful 
contrainl  de  laisser  partir  Schir-Kou 
avec  les  honneurs  de  la  guerre.  Celui-ci, 
toujours  fier,  fit  defiler  tons  ses  soldats 
devant  rarmee  ennemie,  et  s'achemina 
le  dernier,  tenant  a  ia  main  une  ^norme 
massue  en  fer,  el  pr^t  a  frapper  Pauda- 
cieux  qui  aurait  os^Fattaquer  malgre  la 
convention.  INour-Eddin  etail  satisfait : 
d'une  part  il  avail  monlr6  sa  puissance 
en  figypte ,  et  d'autre  part  il  avail  encore 
ruine  plusieurs  etablissements Chretiens. 
Les  Syriens  musulmans  firent  de  nou- 
veau  deux  expeditions  en  liigypte.  Ce  ful 

(•)  Voyez  lbo-A.laUr,  Hisioire  des  Atahtkt. 


encore  Schir-Kou  qui  solBcitallHwa 
dValler,  etqui  Foblint.  Sduver^sn 
cole,  reelamaooefoisdeplosrapputo 
Francs ;  et  eel  appui  fut  anssi  infias  { 
que  le  precedent.  Le  brave  Schir-ln, 
avec  ses  deux  miile  cavalien  etSBB 
miile    Turcomans,   vim  fadlnetf) 
bout  des  deux  armdes  combiQe&ta  i 
ayant  pouss6  jasqu'a  AleiaodriiJ 
laissa  garnison  dans  cette  Tille,6i9| 
ses  ennemis  a  reclamer  laiaix,etni 
retourna  a  Damas  avec  toot  fafi 
qu*il  avail  lev^  sar  les  pn)nMa<|!f 
liennes.  La  troisieme  expedition  a« 
Finfatigable  Schir-Kou,  apres{ikM 
succes,  jusqu'a  la  capitate  de  &Fai^ 
sule,  jusqu'au  Kaire.  LaScham,i^ 
gr6  les  apparences  de  raatorite,  fi" 
qu'il  ne  sorlK  jamais  desoapalaisyil 
bruit   des  tymbales  el  des  eM 
voyail  son  pouvoir  baisser  de  joti 
jour.  Ses  alliances  avec  les Frtton^ 
caus^  son  impopolarite,  et  TinM 
perdu  aux  veux  des  veritabki  tm 
mans.    Les  emirs  resolunot  ^ 
defaire.  II  fut  done  denoocel^^*^ 
a  qui ,  pour  toule  autorite,  ot 
parfois  le  droit  de  faire  couper  ii 
soil  vizir.  On  reclama  dooe^ 
pontife  des  A  lides  Foidred'eififll»< 
qu'on  appelait  un  Irattre,  d  ^^ 
sa  place  Schir-Kou  iui-oi&irf. 

Nour-Eddin ,  de  cctlef8?».^*J' 
vail,  pour  ainsi -dire,  mato«<j|f^W' 
par  son  lieutenant  Mafcawfijj 
Schir-Kou ,  d'origine  kurd^'  ^^'Jfl 
dat  de  Zenghi ,  lieutenant  si  «a*| 
Nour-Eddin,  ^lait  us^  paruBfitai*^ 
de  fatigues  et  de  combats.  lli«P* 
port ,  aeux  mois  el  cinq  jours  8p«*  J 
elevation  au  viziral;  il  sbccobMJ 
indigestion  compliqu^d'ooee 
cie.  Ce  vieux  soldat,  qui  nese 
sail  que  de  viandecommeualiw" 
etail,  avail  besoin  de  FacliTiled»f 
pour  vivre;  le  repos  le  tua.  Maisf 
sail  un  successeur  bieo  dignedel* 
tail  son  neveu,  le  fils  de  sob  te 
jeune  homme  deja  pleia  d'espen 
qui  pourtanl  avail  commence  saw 
la  mollesse  des  serails.  M**^"* 
mene  a  la  guerre  par  son  oacie,!!^ 
lingua  de  plus  en  plus.Cej«of"* 
appele  Youssouf,  devail  sooftlff  fj 
dtalemenla  Schir-Kou  comme'J 
FEgypte,  el  rodriter  bieoidt  le  si» 


SYRIE  MODERNE. 


831 


i  flaunt  et  si  e^^bre  de  Salab-Eddin 
bonheur  de  la  religion),  dont  nous 
rons  fait  le  nom,  si  redout^  par  les  croi- 
^,  deSaladinC). 

Ces  revolutions  d'£gypteavaient  dur^ 
ixans,  et  elles  n*aboutirent  qu'a  ren* 
ireer  la  puissance  de  Flslam,  qu'^  com- 
romettre  les  Francs  dans  des  exp^di- 
ons,  ou  lis  n'avaient  rien  k  gagner ,  et 
lileur  faisaientabandonner  imprudem- 
lent  leurs  royaumes  de  Syrie.  A  mesure 
I'il  arrivait  de  nouveaux  crois^s,  lis  s'en 
laient  en  £gypte,  esperant  plut5t  y 
ioa?er  le  biitin  qu'ils  cherchaient  que 
ins  la  d^solee  Palestine.  Amaury,  dont 
futorite  n*avait  jamais  ete  bien  grande 
Jerusalem  j  ne  demandait  pas  mieux , 
lilieurs,  que  d'habiter  le  moins  possi- 
9sa  capitale,  inecontente  de  lui ,  et  que 
RDtrafner  au  loin  les  rivaux  qui  lui  ve- 
ient  d'Europe ,  et  aui  auraient  pu  lui 
rterombragedans  la  ville  sainte.  Mais 
qtt*il  y  cut  de  plus  honteux  dans  ces 
ores  sans  but,  ce  fut  pour  les  Francs 
devenir,pour  ainsi  dire,  les  mercenai- 
ld*un  vizir  musulman;ce  quMlyeut  de 
Is  deshonorant  pour  le  roi  tres-chr6< 
n  de  Jerusalem ,  c*est  de  s'^tre  mis 
01  a  la  solde  d'un  Mahometan;  ce 
11  y  eut  enGn  de  plus  funeste  pour 
P!enir,  c*est  d'avoir  attir^  les  crois^ 
B  r£gypte,  au  lieu  de  les  dinger  vers 
Syrie  creuse,  faute  qui,  du  reste ,  de- 
iplus  tard  ^tre  commise  aussi  bien 
Philippe- Augustequepar  saint  Louis. 

SALAH-EDDIN. 

^Orient  se  r^uroe  en  Saladin  :  ce 
lisjt  pas  seulement  un  f^and  homme, 
babile  capitaine,  un  int^gre  justicier , 
■it  aussi  ie  vivificateur  de  Tesprit 
ntalj  le  premier  entretous  pour toute 
le,  pour  la  pensee  et  pour  Taction, 
r  la  conqu^te  et  pour  Torganisation. 
fond  politique,  il  sut  s^associer  avec 
ftyzantlns  contre  les  nouveaux  croi- 
r Europe.  11  comprenait  avec  son  g^- 
ce  que  les  autres  sentaient  d*iiis- 
t,  qtril  y  avait  plus  d'affinites  entre 
rurcs  et  les  Grecs  qu'entre  les  Turcs 
s  Francs  ;  que  les  Grecs  etaieiit  au 
des  Orientaux  comme  les  Turcs,  et 
ieot,  a  un  moment  donne,  s*unir  avec 
Tares    centre  les  envahissemeuts 

Toyez  AboU'Scham^b,  Les  deuxjardifis. 
21^  Livraison.  (Sybie  modernb. 


des  Oecidentaux.  Intelligenoe  essentiel- 
lement  unitaire,  il  r^tablit  le  khalifat  de 
Bagdad ,  effa^ant  entre  les  Musulmans 
toute  trace  de  divergence,  6touffant  tout 
schisme,  ramenant  tous  les  Mahometans 
a  la  loi  pure  du  Koran,  a  la  tradition  histo- 
rique  de  leur  puissance.  Capacity  souve- 
ramement  g^n^rale ,  il  eroploya  tous  les 
moyens  pour  vaincre,  adoptant  a  la  fois 
ridee  de  la  guerre  sainte  de  Nour-Eddin, 
et.  la  tendance  aux  traits  internationaux 

3u*avaient  montr^  certains  gouverneurs 
er£gypte.Coeur  aussi  g^n^reux  qu'^- 
lev^,  tout  en  combattant  a  outrance  les 
Chretiens  comme  corps  de  nation,  il  fut 
sou  vent  clement  et  maenanime  envers  les 
individus  Isolds  et  inonensifs  de  la  secte 
de  Jesus ,  comme  il  les  appelait.  Esprit 
d*une  superiorite  incontestable,  il  fut  en 
m^me  temps  le  protecteur  des  lettres  et 
le  modele  des  guerriers,  le  plus  libe- 
ral des  princes  et  le  plus  econome  des 
particuliers ,  le  fidele  le  plus  s^rieuse- 
meut  attach^  k  sa  religion  et  le  moins 
fanatique  des  sectateurs  de  Tlslam  (*). 

Et  cependantp  malgr^  toutes  ces  bril- 
lantes  qualites,  il  n'eut  ni  la  volenti  in^- 
branlable  de  Mahomet,  ni  la  roideur  su- 
blime d^Omar,  ni  la  perseverance  domi- 
natrice  de  Moawiah.  Saladin  ne  tenta 
jamais  de  s*imposer  comme  chef  absolu 
des  dmes  et  des  corps  tout  ensemble  :  il 
pr^f^ra  e^ouronner  de  la  tiare  islamique 
un  fant^me  abbasside  que  de  s'emparer 
k  son  tour  delasouverainete  sacerdotale. 
Saladin  etait  un  sultan,  et  non  un  kha- 
life.  Aussi,  quoi  qu1l  fit,  il  lui  manqua 
toujours  une  des  deux  parts  de  Tautorite 
terrestre;  quoi  qu'il  grandtt,  il  y  eut  tou- 
jours de  par  le  monde  un  homme  aux 
pieds  duquel  il  dut  se  prosterner.  Yoila 
pourquoi  il  ne  fut  jamais  le  premier 
des  Orientaux  de  son  temps;  voila 
pourquoi  il  fut  un  g^nie  r^sumateur, 
et  non  un  genie  fondateur.  II  s^etait 
eieve  peu  a  peu,  dignite  par  dignity,  au 
lieu  de  se  poser  tout  d'abord  au  falte  de 
la  puissance  humaine.  Loin  d*avoir  ar- 
r^te  d'avance,  en  lui,  le  point  ou  il  ten- 
dait,  son  ambition  ne  se  developpa  qu'a- 
vec  les  circoustances.  Les  ^venements 
lirent  sa  fortune  tout  autautquesou  g^- 
nie.  En  unmot,  on  pent  le  comparer  aux 

(•)  Voyez  Boha-EddiD ,  fUa  ei  na  gesia  tul- 
iani  Safadinu 

)  SI 


zn 


L'UNIVEIIS. 


conqu^ranU  Beldjoukides ,  et  non  aux 
illustres  Ommiades  ou  aux  celebres  Ab* 
bas.>ides.  Aussi  sa  puissance  tomba  avec 
lui  :  il  eQt  faliusasuperiorite  pourpou- 
voir  lui  sueo^der  sans  rien  perdredeson 

SoQvoir.  A  sa  mort  i*empire  musu^man 
^cbit;  fia  vie  n'avait  donn^  k  rislam 
qu'uo  Eclair  de  prosp^rite,  qui  s'etetgnit 
DJen  vile.  Ce  iui  un  m^teore  du  moode 
oriental,  et  nou  une  6toite  de  plus  dans  le 
ciel  islamique. 

Voicr  une  petite  anecdote  qui  prouve 
coinbien  ies  vues  de  Saladin  lureut  d'a- 
bord  inodestes ,  et  eomblen  se«  desirs 
^taient  born^.  EHe  se  rapporte  a  Tepo- 
que  ou  il  fa isait  ses  preniieres  armes.  Lais- 
sons  raconter  ie  fait  par  Tauteurder/Zi^- 
ioiredes  Atabeks,  Uii  certain^Ahmed,  fils 
de  Massoud,  parle  en  ces  tennes  :  «  Me 
«  trou  vant  au  siege  de  Harem  par  Nour- 
u  Eddin,  j'allai  in'asseoir  par  basard 
«  sous  un  arbre  avec  un  de  mes  amis, 
a  et  j'y  trouvai  Teinir  Megd-Eddin  Ibn- 
a  Daie  et  Saladin  qui  s'entretenaient 
«  ensemble.  —  PWl  a  Dieu,  disait  Megd- 
«  Eddin,  que  nous  prissions  Harem,  et 
«  que  Nour-Eddin  m'en  fit  pr^entf 
ft  —  El  moi,  repondit  Saladin  ,  plOt  h 
«  Dieu  q\\e  JNour-Eddin  filt  maftre  de 
«  rfegyple,  et  qu'il  in'en  donnSt  ie  gou- 
«  vernementiPtiis^setournantversmoi: 
«  —  Et  tol,  me  d(t-il,  n*as-tu  pas  de  de- 
«  mande  a  faire  ?  —  Mais,  repondis-je , 
«  quand  tu  auras  Tfegypte  et  lVle?;d-Ed- 
«  din  Harem,  il  ne  restera  plus  rieuv 
«  Comme  il  insistait,  je  repris :  —  Puis- 
«  qu'il  en  est  ainsi,  je  mer<^serve  le  cha- 
«  t<^au  de  Hamm.  Voila  comment  nous 
«  parlions  pour  passer  le  temps.  Cepen- 
«  dant  le  Dieu  tr^s-baut  n'en  allait  pas 
a  moins  a  ses  fins ;  il  dechia  dans  sasa- 
«  gesse  que  Ies  Francs  seraient  baltus , 
tt  que  Harem  ouvrirait  ses  portes  et  se- 
«  rait  donn^  a  Megd-Eddin,  q\xQ  j'aurais 
«  Hamm  pour  ma  part,  et  que  Saladin 
«  ne  ferait  qu'un  empire  deTltgyple,  de 
K  la  Syrie,  de  T Arable  heureuse  et  de  la 
a  Mesopotamie  (*).  » 

Nous  avons  dc^a  rapports  comment 
Saladin  devint  vizir  d*6gypte.  Ce  qui  I  y 
a  de  singulier  dans  son  Elevation,  c*est 
que  le  kbalife  fathimite  le  cho  sit,  dit-on, 
comme  le  plu-^  jeune,  le  moins  influent, 
et  ie  plus  faible  des  emirs.  Ce  kbalife 

C*)  Voyez   Ibn-Alatir,  iiisUnre  det  Atabekt, 


ii*eot  pas  de  chanee.  Saladin,  ilettmi, 
8>ffraya  d'abord  de  ia  charge  (fiM 
dont  on  legratifta,  semblableen  m,^ 
tend  un  ecrivaio  arabe,a  ees  ^tresdootl 
esX^WqtiUfaudralestireravecdaM 
nes  pour  ies  /aire  entrer  au  PftniL 
Mais  Saladin  se  rassora  bieiitdt;f(, 
comme  tout  bomme  fort,  aTaatdrl^ 
miner  Ies  autres,  il  comment  a  >'«» 
der  lui-m^me.  Jusqne-la  son  cxrOk 
avait  et6  impetueux  et  l^er.flsel 
calme  et  s^rieux.  Afin  de  ne  s'oeop 
exduslTement  que  des   devoin  k  a 
haute  function,  il  se  sevra  demyk 
plaisirs  et  de  tout  amuse^nent  frirdL 
Puis  sachant  que  ies  largesses  an  !» 
pie  et  a  rarmee^taient  un  nwsmAii 
popularite,  et  ne  tenant  pas  a  FsfAt 
pour  lui-mSme,  il  distribaa,  saasaiiH 
garder,  Ies  tresors  amasses  par  smndt 
Ensuite,  par  une  imitation  assezord^l 
nairechez  lesOrientaux  destnrdHntf 
bibliques ,  comme  it  s^appdait  Jovpk 
(Youssoof),  il  voulut  agir  comae  «tf 
patron,  et  attirer  aiipr^  de  lai,  en  ttf 
pte,  sesfreres  et  son  vieux  pere.  Vkm 
Saladin  reussit  a  tel  point  daiissoopi* 
yernement  qu'il  inspira  de  la  jakxBiel' 
Nour-Eddin.  Celui  ci  avoaa  mkae  fft 
craignait  beaucmip  pour  le  poirr«irll 
son  fils  :  «  Quand  je  serai  mort,  dsM 
«  b  ses  confidents,  prenez  mm  Su Ih 
«  mael  avec  vous ,  et  inener-Ap  M 
«  Alep ;  e>st  la  seule  TilJe  fei  aa  JM 
«  lui  re.stera  de  toutes  mes  prcm»«8«  • 
La  provision  de  Nl»ur-Eddifi  st  nte- 
Un  des  premiers  actes  du  jeo«*erae- 
ment  de  Satadfa  fot  la  repressM»ta 
complot  de  nt^ontents  de  tacrle  sole^ 
d'Alides  ent^t^  et  de  Negnes  de  T  ' 
et  d*Abyssinie.  Les  eonspirateurs, 
le  chef '^tait  le  propre  drrecfeiir  d 
lais  khalifal,  ^crivirent  aux  Frwifs . 
se  joindre  a  leur  coup  de  main.  Mass  S 
ladin,  grdce  a  sa  perpetoelle  vigiaai 
snrprit  Ies  men^  de  ses'eDoeniiS.i 
trancher  la  t^te  a  leor  dbef^  attaqia 
bat  tit  Ies  Negres  dans  leur  qoartier. 
aUa  ensuite  faire  lever  le  siege  de  t 
miette,  que  Ies  Francs  avaient  enlt«(Ril 
Ce  si^e  avait  en  cinquante  Jotirs  de 
ree ,  pendant  laqueile  Hour-  Edcfia 
tout  le  temps  de  ravai^er  en  Syne 
possessions  clir^tiennes ;  ce  qui  fit  all 
pliquer  au  roi  de  Jerusalem  le  proveiftj 
sui  vant :  La  brebis  est  oMecherckeriti 


SYRie  MOBfilU^E. 


83» 


fomessit  eike$i  revenue seM  oreUks. 
Pendant  deux  aos  SaMio  exctca  ses 
foopes  eoDtre  les  Chretiens.  l\  ^  bat- 
it  entre  A8f  alon  et  Ham  tab  ^  sur  leitr 
)roppe  lerriloir*.  Puis  \\  leur  prit  ia  vtile 

ioD^,  et  d'eo  Toil  pouvail  eommaoder 
e  desert  et  la  ^rande  #eiite  d^ypte. 
Aak  ee  n'^tait  fa  ^e  des  detasaemeMs 
KMirSaladtii;  ee  q»i  le  preoceuiiait  gr»- 
^ement,  an  eonlraire,  c'etait  de  d^traire 
fi  dynastie  des  Faihimitee.  A»  profit  de 
|ui  ?  if  ne  poof  ait  pa»  encore  esperer 
inecefot  Aour  lui-m^Ae.  If  sembla  done 
fir  k  la  fois  aonom  du  khelifede  Rag- 
9d  et  de  Nour-Eddin.  Apres  avoir  bien 
lie  ie  terrain,  prepare  les  YoieSy  sond^ 
«  espnts,  il  essaya  un  jour,  durant  tme 
tttoAe<f  Adbeil-Giddifr'AUah ,  dernier 
m  Fatbinites  ,  et  pendaat  qtie  ct  pau- 
ft  lihalife  etarfe  eiiferm^  dMis  son  p»- 
ia,  de  £aire  dire  dans  Hoe  des-  mosgiteee 
iKatre  ia  priere  au  non  du  kbalife  ab> 
fenide.  L'essai  retisait :  on  ne  RMirmura 
«,  e»  hriss»  faire,  et,  Fa  mort  du  kk^- 
Ibfetimmf  e  aidant^  lerevolutions'op^a. 
Meur-Eddiii  n'osit  pas  se  felieiter  de 
f  meersy  ii  redovtait  d^^  Saladiit.  Ce- 
vd,  et  effet ,-  tettt  ea  se  declarant  Ie 
Haidv  mafCre  de  ia  Coel^yrie,  n'en 
isoikkHt  paa  moias  aoo  aouvoir  en 
Qrpte.  11  reirtsah  soareafe  a  Nour-£d- 
I  de  le  seeonder  daasses  expeditions, 
m  M  prdtexte  gae  sa  presence  etait 
ifonrs  indispensable  daas  sofi  gower^ 
rtleat.  Pfour-Eddhi  fluit  par  se  iasser 

set  lergiversatkms  perpetaeHes.  11 
^tna  toat  Inut  ledessein  de  marcher 
Itivr£g7pt0.  Ace(CenoaYelle,Satiidia 
vmbla  sea  prnKipaux  emirs,  sa  f»- 
He  tovt  entiere,  et  leor  demanda  eon^ 
^1  11  temhiait  pencher  vers  la  resis- 
ioe.  Un  de  sea  iieveoi  aHa  m^e  jus- 
a  proposer  de  repousser  ia  force  par 
hree.  A  ces  mots,  ie  pere  de  Saladin^ 
\eva  pietn  de  eoih^i  tt,  s'adressant  at 

fiis,  ii  s^^erra  (*) : 

IViot,  qui  siiia  ten  p^re,  et  Sehehnb* 
;ddin  ici  present,  qui  est  ten  oncle, 
^s  devons  avoir  pear  toi  Men  ptas 
^amoor  que  tons  les  aatres;  eh  Ine n, 
ttew  m>«t  tem^in,  aassrbk»n  qifh  ton 
nele,  quasi  nousvoyiohsfftaifKenant 
fear-Eddiff  ae  pr^irteranoas^aout 

•  Toyes  Iba^Alatl^  Bhtohe  de$  JtoMit. 


«  aoasprottemerioBtdevaDtlaijiitqu*^ 
c  terre,  et  que  s*U  aouseemnrianddit  de  te 
«  eoaper  la  t^te  aoua  le  lerions  sana  ba- 
«  lancer.  Or,  si  moi,  qai  sois  tea  p^e, 
«  et  Scbebab-Eddui,  qui  est  ton  onole, 
«  noQS  sommes  dans  de  semblables  dis- 
«  poskioas,  \u^  par-la  de  eelles  des 
«  aetres.  Non,  il  n'y  a  pas  iei  un  seui 
«  toir  qui,  s'il  apercevait  Nour-Eddin, 
«  6sM  rMster  dans  tea  arfom  et  ne  pas 
«  mettre  pied  a  terre.  Ce  pays  lui  ap- 
«  partieat ,  oous  sommes  set  esclaves. 
«  Ca  done,  qu*on  lui  euvoie  tout  de  suite 
«  an  cot»rner  avec  ces  mots  de  ta  part : 
«  iim'est  revenu  que  umu  uoukz  venir 
«  jusquHei  pour  6ter  fEgupte  de  mes 
«  mains.  Ques^il  besoin  de  toui  celaf 
«  Que  noire  seigneur  n'envoie'MpkuW 
«  vn  ejtpres  pour  me  mener  a  tuk  la 
«  corde  etu  eou;  il  ne  renconireraii  de 
•  ma  pari  aucune  resistance.  »  La- 
dessus  Fassetnbl^fut  reavoyee,  et  cba- 
can  rest  (  persuade  qu'Agouy  ^tait  de 
bonne  foi.  Mais  ensaiie  Agouy  prit  soa 
fils  a  part,  et  lui  dit :  «  A  quoi  peinaia* 
«  tu  eaasaembiaat  les  ^mirs ,  et  en  nous 
«  faisanC  aae  telle  pro()08iUoB?  Ne 
«  sais-tupas  que  si  Nt)ur-£dd)a  appre- 
«  nait  que  nous  voolons  lui  resititer, 
«  il  ferait  tr^ve  a  toute  autre  guerre 
«  pour  veuir  nous  attaquer ,  et  que  nous 
«  ae  pourrions  lui  tenir  t^te?  Ignore>-ta 
«  que  les  emirs,  qui  sent  ici,  lui  soht 
«  tous  devout?  Au  lieu  qu'a  present, 
«  quand  il  saura  ce  qui  sVst  passe,  il 
«  noQ^lafssera  tranquilies;  ii  s'occopera 
«  d'autre  cbose ,  et  le  temps  fera  le  reste. 
«  Par  Diea,  s'il  pr^tendaitexigerdenous 
«  seuiement  une  canne  a  sucre ,  je  serais 
c  le  premier  a  la  lui  diaputer ,  et  je  la  lui 
«  arraciierais ,  ou  fy  laisserais  ma  vie.  » 

Ces  deux  discours ,  rapport^s  textnel- 
lement  par  on  auteur  arabe ,  prouve at 
h  la  fois  et  la  rase  ordinaire  aux  penples 
orieataux ,  et  le  talent  que  devejoppa  en 
cette  occasion  le  vieux  cheick,  cehii 
qui  derail  6tre  le  fondateur  posthume 
d*one  dynastie,  celle  des  Ayoubites. 
Saladin  Vecoanut ,  du  reste ,  la  haute 
raison  de  son  pere,  se  rangea  a  I'avis  de 
Texperience,  et  dissimulti  teilement  set 
intentions  qne  Noar-Eddiny  fut  tromp^. 

Quoi  qu'il  en  soit^  pour  se  mettre  h 
I'abri  des  tentatives  de  son  puissant  ri- 
val, Saladin  songea  a  etendreson  empire. 
II  eavahit  et  sourait  tour  a  tour  la  Nn- 

21. 


S94 


LTTinVEBS. 


bie  et  FAnbie  hetnrmtte.  Ainsi  agrandi , 
il  esp^rait  latter  avee  avantage ;  mais  le 
del  fit  encore  plus  pour  lui ,  et  le  ddi- 
vra  de  son  adfersaire,  qui  mourat  en 
1174,  ^  Damas,  au  moment  m^me  ou  il 
s'appr^it  definitivement  a  punir  son 
douteui  et  d^sobdssant  vassal.  Noar- 
Eddin  ne  laissait  qu'un  fils  sans  g^nie, 
Malek-Saleh  Ismael.  Ce  dernier  f^t  im- 
m^diatement  en  butte  aiix  tentatives  de 
plusieurs  ^mirs ,  qui  voulaient  se  rendre 
independants ,  et  qui,  pour  arriver  plus 
facilement  a  ieur  but,  traiterent  indivi- 
duellement  avec  les  Francs.  L'anit^  de 
rislam  etait  menac^e  de  nouveau.  Gedan- 
ger  dicta  a  Saladin  son  devoir,  il  ^rivit 
unelettre  fulminante  aoeuxqu'il  appeiait 
des  trattres;  et  comme  ces  r^vottes  ne 
r^pondaient  pas  assez  vite  k  ses  injonc- 
tions  imp^atives,  il  se  rendit  avec  une 
arm^  en  Syrie  pour  chdtier  Ieur  inso- 
lence, et  sauver  les  Musulmaos  de  la 
plus  tuneste  des  divisions.  Un  prince 
*du  nom  de  Saif-Fxldin,  roattre  de  Mos- 
soul  et  neveu  de  Nour-Eddin ,  se  mit  da 
parti  des  ^mirs  revolt^,  et  marcha 
contre  Saladin.  Ceiui-ci  le  battit  eom- 
pletement.  Des  lors  il  n'y  avait  plus  k 
douter.  Rendre  la  Syrie  a  Matek-Saieh, 
c'^tait  la  compromettre  follement  Le  ciel, 
la  victoire  aussi  bien  que  la  politique 
Texigeant,  Saladin  s«empara  de  la  suc- 
cession de  Noiir-Eddin,  et  prit  des  lors 
le  litre  de  sultan  (*). 

DBGADENGE    DU   BOYAUMB  DE    JEBU- 
SALEM. 

Pendant  que  Sal  adin  retablissait  Tunit^ 
de  rislam  ,deveaait  souverain  absolu,et 
agrandissaitde  jour  en  jour  sa  puissance, 
le  royaume  de  Jerusalem  etait  h  I'agonle. 
A  cliaque  prince  nouveau  qui  montait 
sur  le  trdiie,  le  peuple  en  6tait  k  se  piain- 
dre  d'un  nouveau  chef  plus  incapable  ou 
plus  (Jur  que  le  ])r^cedeiit.  Sous  Amaury 
on  regretta  Baudouin  111,  qui  au  inoins 
possedait  quelques  vertus  chevaleres- 
ques.  Pourtant  sous  le  regne  de  ce  der- 
nier la  discorde  la  plus  deplorable  avait 
d^chir^  le  royaume.  Ce  n'^tait  pas  seu- 
lemeut  jalousie  entre  barons ,  anarchic 
f§odale,  cVtait  la  plus  houteuse  et  la 
plus  detestable  lutte,  celle  de  la  ntere 
contre  le  fils.  Tant  que  ranibitieuse  Me- 

(•>  Voycz  Emad-Eddfn ,  Viclmr  de  la  Syrie. 


lisende  avait  y€ea\  die  s*teit  achmfe, 
malgr6  les  efiTorts  des  hommes  KffiA 
partager  Fautorit^  avec  Bandooiiin. 
a  contre-carrer  sei  projets  lorstpi^eBeK 
les  approavait  pas,  a  sonlerer  eoBbik 
roi  une  partie  de  acs  sujets,  a  serte- 
▼er  dans  fempire  la  poesessooct  Ip9» 
vemement  de  plusiears  villes.  EaBsa 
ne  fut  que  grdee  aux  instances  reitns 
des  hommes  senses,  aox  prieresdo^ 
pie  entier ,  oo  plutdt  a  la  crainte  im 
soul^vement  g^eral  que  I'oi^ueilln 
reine  mere,  qai  avait  d^ja  leve  hum- 
mto  contre  son  fils,  consentit  h  tin 
deposer  les  armes  a  ses  partisans,  lbs 
d^ja  des  hostility  impies  avaient  «i 
lieu  k  Maplouse  et  an  chateau  de  Mi- 
rabel. 

Lorsque  Amaury  sneoeda  k  Baodm 
III,  les  Chretiens  d^Orient  oa  platotia 
barons  francs  avaient  encore  qodqv 
chose^  perdre,  Phonneur ;  ilsne  maoqai' 
rent  pas  d'en  arriver  a  cette  extrMe. 
Tandisqu'Amaury  et  ses  vassaoi  sed» 
honoraient  en  £gypte  en  devensBt  Is 
auxiliaires  pav^  d^un  vizir  intiiiiait, 
Renaud  de  Cbdtillon  eomroettait  rHk 
le  plus  injuste  et  le  plus  odieux  m  ltt^ 
quant  puis  en  sarcageant  life  de  Off- 
pre.  €e  Renaud  de  Cbdttllon  elait  ■ 
veritable  parvenu .  Chevalier  sansRMBi 
il  avait  epous6  pour  sa  belle  %iiv  li 
veuve  du  prince  d'Antioche.  Vmrapm 
avoir  usurps  le  pouvoir  sur  le  iide 

{>rM^eesseur ,  il  en  avait  us^  dr  b ' 
a  plus  coupable,  trahissant  ks 
de  ses  sujets,  se  riant  de  la 
ternationale ,  et  envahissant,  nripe 
les  traits ,  les  possessions  byxaatin 
Puis,  ayant  ainsi  provoqoe  rempeRff^ 
Constantinople ,  il  eot  plus  tarn  par  ib» 
reur  la  Idchete  de  lui  laire  les  so 
sions  les  plus  completes.  Enfin, 
maladroit  avec  les  MosulmaDS  4ft*m 
les  Grecs ,  il  se  fit  prendre  par  les  sri 
dats  de  Mour-Eddin,  et  condaireenchif>| 
a  Alep.  Le  corote  de  Tripoli  oe 
guere  mieux  que  Tusurpatear  d*Arti 
cbe.  Bl^sd  par  un  procAle  de  Teaf* 
reur  byzantin ,  il  ue  trouva  pas  d  art* 
moyen  de  se  venger  que  de  preodrt  J 
sa  solde  des  pirates ,  et  de  6if*-  r»*«|W 
les  c6tes  de  TAsie  Mineure,  jMHeHj 
convents,  brdler  les eglises,  ae§fm^ 
les  p^lerins,  et  voler  les  mardiafl* 
CEuvre  de  brigand  que  ooauneCtait 


SYRIE  MODERNE. 


335 


crupale  ua  chevalier  qui  se  croyait 
>jal! 

Ainsi ,  a  uause  du  caract^re  d^testa- 
le  de  leurs  princes,  jamais  les  Francs 
e  pureut  pioneer  de  veritabies  racines 
aos  le  sol  oriental.  Les  Musulnians 
raient  ^te  divises,  et  les  Francs  n'a- 
lient  pas  su  profiler  de  cette  division. 
lOrsqu  on  apprit  la  mort  de  Nour-£d- 
in,  les  Chretiens  se  crurent  sauves. 
latheureux  peuple,  qui  ne  s'apercevait 
as  qu'uo  nouvel  antagooiste,  et  plus 
edoutabie  encore  que  le  premier,  aliait 
'clever  con treeux.  Du  reste,  les  Francs 
*avaieot  pas  m^me  compris  Tutile  con- 
uite  a  tenir,  lorsqi;^e  Tambition  de  cer- 
lios  emirs  les  fit  se  soulever  contre  le 
Isde  r^our-Eddin.  S'ils  avaient  appuye 
mael,  ils  se.  seraient  sauves  de  Saia- 
Iq.  Le  fiis  de  Nour-Eddin,  consolrde 
I  Syrie,  serait  peut-^tre  parvenu  a 
lainlenir  Saladin  en  £gypte.  Mais  les 
bretieus  devaient  accumuier  toutes  les 
Ates  imaginables :  ils  s'alienerent  Sala- 
A ,  pour  soutenir  sans  efficacit^  cer- 
jos  revoltes.  Par  leur  ind^'ision,  par 
or  deloyaute ,  par  leurs  rigueurs  lors- 
I'ils  etaieut  victorieux ,  par  leur  avi- 
te  coustante ,  ils  augment^rent  encore 

baine  que  leur  portaient  les  Musul- 
aos.  Aussi ,  des  que  Saladin  fut  trao- 
liUe  sur  Daiiias,  son^ea-t-il  tout  de 
tite  a  s*emparer  de  Jerusalem,  et  a 
itruire  les  colonies  franques  (*). 
Le  ciel,  du  reste,  serablait  vouloir 
Hnine  lui  cette  destruction.  Amaury 
ant  mort  la  m^me  ann^e  que  Nour- 
Idjn,  il  laissa  pour  successeur  un  en- 
ot  de  treize  ans ,  pres^ue  idiot  et  1^- 
eux.  On  se  disputa  la  regence;  et  deux 
'Oimes  se  mirent  sur  les  rangs,  aussi 
testables  Tun  que  Tautre.  Le  premier 
lit  Raymond  ,  comte  de  Tripoli,  d'un 
ractere  eoiport^,  d'une  arrogance 
supportable ,  d*une  durete  sans  exem- 
;;  le  second  ^tait  Milon  de  Plansy, 
gneur  de  Karak ,  que  Guiliaume  de 
r  depeint  comme^tant  sans  vertu, 
IS  remords  et  sans  craintes.  A  force 
itrigues  et  de  violences,  le  pire  des 
IX  concurrents  Temporta  d'abord; 
is  11  fut  tyran  si  execrable  qu'on 
trouva  un  jour  crible  de  coups  d'e- 

')  Toyes  Aboo-F-FMa,  AMgi  de  Vhittoin 
fenre  humain. 


p^e  dans  une  ruelle  de  Ptol^mafs.  Ray- 
mond alors  lui  succeda;  mais  ce  ne 
fut  que  pour  abuser  de  son  autorit^,  se 
jouer  de  la  justice ,  molester  ses  sujets , 
et  gouverner  pitoyablement.  Sur  ees 
entrefaites,  Saladin  marcha  contre  la 
Palestine.  Les  Chretiens  des  frontieres, 
loin  de  se  defeiidre,  s'enfuirent  dans  les 
montagnes  et  se  cacherent  dans  les  ca- 
vemes.  Raymond  perdit  la  t^te,  et  Bau- 
douin  IV,  malgre  ses  infirmit^s,  fut 
contraint  de  prendre  les  r^nes  du  ^ou- 
vernement.  Mais  ce  malheureux  pnnce 
ne  sut  qu'abandonner  Jerusalem,  s'en« 
fermer  dans  Ascalon ,  et  assister  de  Ih  a 
ia  destruction  de  ses  provinces.  Cepen- 
dant  le  desespoir  reudit  une  certaiue 
Tigueur  aux  Francs  :  ils  se  precipite- 
l^^nt  en  masse  contre  un  corps  d'armee 
musulmau ,  le  forcerent  a  la  retraite ,  et 
obtinrent  une  tr^ve  a  la  suite  de  cet 
avantage.  Pauvres  gens ,  ils  ne  surent 
pas  plus  profiler  de  la  paix  que  faire  la 
guerre,  lis  laisserent  Saladin  se  renfor- 
cer  de  plus  en  plus ,  et  preparer  a  I'aise 
la  plus  terrible  des  expeditions.  Un  cer- 
tain Guy  de  Lusi^nan,  etant  venu  en  terre 
sainte,  devtnt  a  son  tour  regent  du 
rovaume  de  Jerusalem ,  en  seduisant  ia 
fille  d^Aroaury,  el  en  la  for^ant  ainsi  a 
r^pouser.  Ce  fut  lui  qui  perdit  d^niti- 
vement  les  colonies  franques. 

Mais  si  les  princes  Chretiens  n'ofifraient 
aue  des  sujets  de  scandale,  de  honte  et 
de  perdition,  les  barons,  leclerge,  etjus- 
qu'aux  chevaliers  dea  ordres  militaires 
ne  valaient  guere  mieux.  Les  barons, 

S>rofitant  de  I'instabilit^  du  pouvoir  a 
^rusalem  ,  s'eiaient  reudus  presque  in- 
dependants  duns  leurs  chateaux  torts. 
(Is  ne  repondaient  plus  aux  injonctions 
de  leur  souverain ;  ne  voyant  que  leurs 
inter^ts,  ils  ne  cberchaientqu'a  agrandir 
leurs  possessions  particulieres ;  ils  en- 
treprenaient  pour  leur  propre  compte 
des  excursions  et  des  pillages ,  et  ils  ne 
s'enqueraient  plus  jamais  de  la  situation 
de  leurs  voisius,de  leurs  freres.  D'autres 
faisaient  pis  encore  :  durant  la  guerre 
contre  les  Musulmans,  ils  trafiquaient 
de  leur  neutrality*,  quelques-uns  allaient 
inline  jusqu'a  vendre  leurs  services  aux 
ennemis  de  leur  foi.  Quand  il  arrivait 
de  nouveaux  chevaliers  d*Europe,  les 
barons  de  Syrie  se  servaient  de  leur  ap- 
pui  les  uns  contre  les  autres,  et  degod- 


d^ 


UUWIVERS. 


taieotbientdi  ies  oouveaiix  vanmh  force 
de  felonies. 

Les  Teiupliers  et  Ies  Hospitalkp  se 
jalousaient  teJ(£mei]t,  q^e  souveot  ils  ea 
yenaient  aux  mains  pour  se  disputer 
quelaues  parts  du  butiu.  Quells  ignoble 
decaoenee!  Ces  Hospitallers  qui  s*etaienfc 
cou  verts  de  gloire  p^ndautuo  denii-sied^, 

aui  s'etaieut  niootres jadis  si  g^nereux,  si 
evoues,  si  desiuteresses,  etaient  devenus 
perGdes,  egoistes  et  spoliateurs.  Pleins 
d'orgueil  et  d'avidite,  ils  refusereat  de 
payer  la  dune  des  depouilles  musulma- 
nes ,  et  eo  vinreiit  jusqu'a  repousser  la 
juridiction  eccle^iastique  du  patriarclie. 
Bient6t  ni^ine  ils  ajouterent  TouOrage  k 
la  desobeissaiice,  en  couvrant  du  bruit  de 
leurs  arnies  les  chants  sacerdotaux  dans 
Teglise  de  la  Resurrection ;  puis,  comme 
on  voulait  reprimer  leur  iiibolence,  ifs 
eureat  Taudace  de  pou2»uivre  a  coups  de 
flechesles  pretres  catholiques.  Quant  aui^ 
Templiers ,  ils  ne  pensateut  qu'a  s*enri- 
cbir,  et  ils  avaient  pour  habitude  d*exi- 
ger,  mduie  les  armes  a  la  main,  la  pos- 
session de  la  moiti^  des  yilles  ou  des 
terrltoires  qui  reciamaient  leurs  secours. 
En  outre,  coiniue  les  Uospitaliers ,  ils 
dedaignaiejit  les  ordres  de  leurs  supe- 
rieurs  sacerdotaux  (*). 

Le  clerge,  mulheureusement,  la^ritait 
le  mepris  qu'oo  iui  avait  voui^.  li  doB- 
nait  1  exeuiple  de  la  depravation  et  de 
la  debauche.  Le  patriardie  Heraclius , 
qui  ne  devait  sa  dignite  qu'a  ses  brl- 
gues  ,  fut  assez  impudent  pour  afficber 
pubhquement  une  mditresse,  assez  in^ 
fi&ine  pour  Iui  prodiguer  \^  tresors  dea 
pauvres  et  des  pelerins.  Uo  clerg6  ainsi 
cojiduit  ue  pouvait  que  souiller  Jj^rusa- 
lem,  et  scandaliser  les  autres  villes  de 
la  Syrie.  C'est  ce  qui  arriva;  et  leg 
schismes  reparureut,  et  les  superstitions, 
et  les  haines  religieuses  :  tous  les  maux 
foudireut  ensemble  sur  ks  Chretieas. 

CATASTBOPHB  DB  JBBUSALElf. 

Cependant  Baudouin  IV  le  Lepreux 
termiua  bientdt  sa  triste  existence,  it 
ne  laissait  qu'uH  enfant  eo  bas  dge.  Get 
enfant  mourut  quelques  jours  apres 
600  pere.  Fut-ce  violemment  ou  natu- 
rellemeot?   G'est  I^  une  terrible  res- 


(*)  Voyez  Jacques  de  Vitry,  Hutotre  de  Ji- 


Sonsabilite  qui  p^  mx  la  n<M 
e  Guy  de  Lusignan.  Toujoun  eM 
qu'il  obtint  la  oouroooe  d'ane  Uf^ 
subreptice  tout  au  naolos.  Cette  m 
tioB  au  trone  du  plus  iacapablep* 
£tre  des  princes  cbretieas  Atakit 
ladin  a  tenter  sen  grand  coup.  II «» 
cha  done  contre  la  palestioe^ablli 
d*une  armee  de  quatre-nngt  ofi 
bommes.  Ses  premiers  pas  fbreot  wk 
qu^  par  plusirurs  vjctoinss.  iyi 
avoir  extermine  cinq  cents  cbe?ali6i« 
Temple  et  de  Saint-Jeao,  qui  fornii 
Telite  des  guerriers  clireUens,  fl  i9t 
para  de  la  ville  de  Tiberiade.  A  a9i 
nouvelle  11  fallut  bien  que  le  faibleGw 
de  Lusignan  se  d^i^id^t  a  la  lutttl 
partit  avec  cinquante  roille  des  s«i 
mais,  au  lieu  cfe  se  retrancber  a  ■ 
endroit  avan^geux,  au  Ijeudecto 
le  terrain  de  la  bataille,  il  alia  ^am 
un  insense  jusque  devaat  Tibriiadei 
Qu  les  soldats  de  Saladio  ^ieflt  n^ 
veilleusemeut  po'stes  sur  les  ooUiDesfi 
doraiaent  le  lac.  Aussi,  malgre  ieor b* 
voure,  makre  leurs  efforts  repeU$,» 
gre  les  exhortatioos  et  les  priemt 
quelques  boos  et  braves  prtoiV 
rrancs  vireut  tout  de  suite  qu^fl 
pouvaient  point  esp^e^  la  TictaA^i 
ne  s*en  battirent  pas  moiDscoiiyMw 
desespere^  pendant  tout  uo jow-W 
la  nuit  etant  venue  sans  suooMjJ^ 
mine,  ils  furent  le  leiideinail<(^ 
par  le  choc  de  leurs  epneipis,Wg« 
disperses,  et  la  deroute  la  plusc(ip» 
commenija.  Les  MusulraaQS  li^ 
trente  raille  Chretiens,  sesaia«Bi*i 
vraie  croix  ,  lireot  prisoDoicrs « JJ 
Guy  de  Lusiguan,  le  seigmurdcM 
et  le  grand  maltre  des  Templiers  (V 
Apr^  cette  victoire  edataoWj  St 
din  alia  mettreincootinetitlesteiffr 
vant  Ptolemals.  Cette  ville,  habitM 
partie  par  des  coramer^anls  peu  [** 
sans  de  ia  guerre,  ne  se  defeodu  # 
moilement,  et  se  renditauboBtdew 
jours.  Puis,  sans  perdreuoioso^'j; 
ladin ,  deployant  la  plus  admiraw* 
activites ,  plauta  tour  a  tour  soaj^; 
dard  jaune  sur  les  cites  d'Yaffo,*^ 
saree,  d'Arrouf,  de  Berilhe;puis«Bw 
remontant  sur  les  hauteurs,  iicnw J* 

(♦)  Voypz  GttUluune  deTyi^  W^^^ 
qui  fe$i  paasi  au  detd  det  mtrti^^ 


SYRIE  AlODhRiNE. 


327 


oup  f^rir  daos  Naplouse,  Jericho  et 
tanilab.  Tout  cedait  devaut  lui.  II  en- 
!)urajt  peu  a  peu  Jerusalem  d'uii  r^eau 
e  garnisons  musulnianes.  Sans  s'achar- 
er  h  preodre  Tjr,  qui  lui  avait  r6sist^ 
*ap  ioogtemps  pour  ses  desseins ,  sans 
ouloir  forcer  Ascalon,  a  laquelle  il 
ecorda  une  capitulation  honorable ,  il 
int  enOn  devant  Jerusalem  porter  aux 
br^tiens  la  coup  de  la  mort  comme  na- 
on.  En  s'approchant  de  la  vitle  sainte 
utadin  fut  inu  par  un  seutiinent  de  cle- 
tence  et  de  generosite;  il  appela  a  lui  les 
otabJes  de  la  cite,  et  leur  dit  :  «  Je 
sais,  comme  vous,  que  Jerusalem  est 
la  maisoii  de  Dieu ;  je  ne  veux  point 
€D  profaner  la  saintet^  par  Teffusion 
du  sang.  Abandounez  ses  murailles  , 
et  ie  vous  livrerai  une  partie  de  mes 
tre>ors ;  Je  vous  donnerai  autant  de 
terre  que  vous  en  pourrez  cultiver.  » 
offre  etait  aussi  noble  qu'avantageuse, 
neanmoins  les  deput^  Chretiens  cru- 
it  devoir  y  repondre  de  la  facon  sui- 
dte :  a  Nous  ne  pou  vons  vous  ceder  une 
rilleou  notre  Dieu  est  mort ;  nous  pou- 
rons  encore  moins  vous  ia  veudre.  • 
cependauX  ces  Chretiens  si  hautains 
lent  iocapables  de  defend  re  lougt^^mps 
B^rieuseiiieut  cette  ville  sacree,  qu*ils 
?aient  pas  craint  de  souilier  par  tant 
crapuies  hideuses.  Kile  n'avait  |jour 
if.qu'un  brave  mais  vieux  guerrier , 
eaD  dlbelin.  11  fit  tous  ses  efiorts 
ir  rassembler  quelques  troupes.  U6- 
tiliravait  autourde  lui  que  quelques 
ards  ^cliappes  au  carnage  de  Tib^- 
ie,  qu'une  reioe  au  desf spoir,  que  des 
unea  veuves  et  des  enfants  orphelins. 
iDmoins,  a  force  d'encouragemeuts  et 
rolont^ ,  Balean  finit  par  reunr  une 
arence  d'armee  qui  se  battit  avec 
ra^.  En  voici  la  preuve  dans  un 
orieo  arabe: 

i^rusalein,  ditlbn«Alatir,  ^tait  alors 
place  trds^forte.  L'altaque  eut  lieu 
Ie  odte  du  nord.  C'est  la  qu'^tait  le 
-tier  du  sultan.  Les  machines  furent 
s^a  pendant  la  nuit ,  et  Tattaque 
lieu  ie  lendemain ,  20  de  regeb.  Les 
ics  monirerent  d'abord  une  grande 
oure.  I>e  part  et  d'autre  eette  guerre 
regard^  conHne  une  affaire  de  re- 
D.  11  n'etait  pas  besoin  de  Tordre 
shafs  pour  exciter  les  soidats ,  tous 
idai3Xit  leur  poste  sans  crainta ;  tous 


combattaient  sans  regarder  en  arri^re. 
Les  assieg^  faisaicnt  cbaque  jour  des 
sorties,  et  desoendaient  dans  la  pJaine.  ^ 
Dans  un  de  ces  combats ,  un  ^aiir  de  5 
distinction  ayant  6x6  tu^,  les  Musul-  : 
mans  s'avancerent  tous  a  la  fois,  en 
comme  un  seui  homme,  pour  venser  sa 
mort,  el  mircnt  les  Chretiens  eu  fuite; 
ensuile  ils  s^approcherent  des  fosses  de 
ia  place ,  et  ouvrirent  la  breche.  Des 
archers,  post^  dans  le  voisinage,  re- 
poussaient  a  coups  de  traits  les  Chre- 
tiens de  dessus  les  remparts ,  et  prote- 
geaient  les  travailleurs.  En  m^me  temps 
on  creusait  la  mine.  Quaod  la  mine  fut 
ouverte,  on  y  plai^a  du  bois ;  il  ne  res- 
tait  plus  qu'a  y  mettre  le  feu.  Dads  ce 
danger,  les  chefs  des  Chretiens  furent 
d'avis  de  capituler.  » 

C'etait  une  veritable  grdce  que  Saia- 
din  faisait  aux  Francs  de  ne  les  point 
forcer  dans  leur  deruiere  place;  e'en 
fut  uqp  autre  de  leur  accorder  la  vie 
sauve ,  le  pouvoir  de  se  radieter,  les 
hommes  moyennant  dix  pieces d'or,  les 
femmes  cinq,  les  enfans  deux,  eniin  de 
leur  acrorder  quarante  jours  pour  le 
payement  de  ce  tribut.  Mais  Saladin  ne 
borna  pas  la  sa  gen^rosite  detainqueur. 
II  permit  aux  chevaliers  de  se  rendre, 
sans  £tre  inquietes,  a  Tyr  et  a  Tripoli. 
II  laissa  les  gens  du  peuple  pr^rer  leur 
depart,  sans  6tre  molestes  d'aueune 
facon.  Et  quand  vint  le  jour  de  ('emi- 
gration g^n^rale,  apres  avoir  fait  fermcr 
toutes  les  portes  de  la  ville ,  moiiis  celle 
de  David,  il  voulut  voir  defiler  devant 
son  trdne  toute  la  population  ,  non  pour 
satisfalre  son  orgueil ,  mais  pour  ^tre  a 
m^me  d'emp^eher  tout  d^ordre ,  de  r^- 
parer  toute  injustice,  d'alleger  toute  mi- 
sere  (*). 

Le  patriarche,  siiivl  du  clerg6  por-- 
tant  les  vases  consacr^s,  sortit  le  pre- 
mier; Saladin  respeeta  en  lui  le  cardct^re 
sacerdotal,  sinon  Thomme.  Purs  vint 
la  reine,  accompagnee  de  ses  femmes 
en  larmes;  Saladin  lui  adressade  nobles 
paroles  de  consolation.  Ensuite  arrive- 
rent,  en  poussant  des  sanglots,  des  e^  ou- 
ses  privees  de  leurs  ^oujt ,  des  meres 
privees  de  leurs  enfants;  Saladin  rendit 
a  quelques-ujies  leurs  maris ,  h  d'autres 

(*)  Yoyes  Bernard  to  tr^rier,  HMoin  ties 
CronadeM, 


828 


L'UN1Y£RS. 


leurs  fits.  Enfin  parurent  des  Chretiens 
qui ,  au  lieu  de  s'^tre  charges  de  leurs 
meubLes  et  de  leurs  hardes ,  portaient 
sur  leurs  ^paules ,  les  uns  leurs  vieux 
parents ,  d'autres  leurs  amis  iniirmes ; 
Saladio ,  emu  de  ce  d^vouemeat ,  en  re- 
compensa  les  auteurs  par  d'abondantes 
aumdnes.  Bien  plus,  pour  qu'aucune  in- 
fortune  ne  fdt  oubliee,  Saladinacheva  sa 
journ^e  de  bienfaits  en  permettant  aux 
Uospitaliers  de  demeurer  k  Jerusalem , 
afin  d'y  secourir  les  malades  que  leurs 
souffrances  avaient  reteuus  mai^r^  eux 
dans  la  ville ,  et  de  les  soigner  jusqu*a 
leur  gu^son.  Sur  les  cent  mille  dmes 

3ui  formaient  la  population  chr^tienne 
e  la  cite  sainte,  quatorze  mille  pauvres 
n'avaient  pas  pu  se  racheter;  Saladin 
vida  sa  bourse  particuliere  pour  payer  la 
rancon  d'un  grand  nombre  d*orphellns 
et  oe  besoigneux,  et  son  frere  Malek- 
Adhel ,  suivant  ce  magnanime  exemple, 
rendit  par  ses  sacrifiies  d'argeiit  la  li* 
bert^  iideux  mille  captifs.  Grdce  a  cette 
conduite  admirable  du  sultan  etd'un  des 
membres  de  sa  famille ,  la  misere  ni  le 
tr^or  public  n*eurent  rien  a  perdre. 

Quelle  difference  entre  cette  conduite 
de  Saladin  et  celle  de  ce  Godefroy  de 
Bouillon  tant  vante!  Saladin  pardonne  a 
tous ;  Godefroy  de  Bouillon  punit  sans 
cesse.  Saladin  defend  tout  pillage ;  Go- 
defroy de  Bouillon  laisse  ses  chevaliers 
saccager  et  voler.  Saladin  emp^che  toute 
vengeance,  tout  massacre,  toutmeurtre 
m^me;  Godefroy  de  Bouillon  tue  jusqu'a 
marcher  dans  le  sang  au  deik  desgenoux. 
Saladin  secourt,  console,  prend  piti^ 
des  femmes;  Godefroy  de  Bouillon  n*e- 
pargne  ni  le  sexe  ni  renfance.  £t  pour- 
tant  Saladin  ^taitpouss^  aux  represailles 
par  ses  ^mirs ,  ses  conseillers ,  ses  lieu- 
tenants ;  mais  Saladin  domine  tellement 
les  siens,  qu'il  salt  leur  imposer  la  cl6- 
mence  dans  la  victoire ,  la  probity  dans 
la  ^erre.  Godefroy  de  Bouiilon^u  con- 
tra ire,  ne  pent  reprimer  ni  les  infamies 
ni  lesassassinats  de  ses  propres  troupes. 
£t  maintenant  de  quel  cot^  ^tait  la  bar- 
baric, de  quel  c6t^  la  civilisation?  L'his- 
toire  peut-elle  excuser  les  horreurs  des 
Francs  sous  le  pr^texte  ^u'ils  ^talent 
Chretiens?  £tait-ce  du  christianisme  que 
ce  fanatisme  violent,  cet  app6tit  de 
carnage,  oette  ra^e  de  vol?On!  ne  ca- 
lomnions  pas'ainsi  la  plus  ^clairteyla 


plus  humaine ,  la  plus  deslDterea^  k 
religions!  Separonsles  boosdesmaata, 
c*€St  le  devoir  de  la  morale  histonqur). 

TBOISISMB    CBOISADB. 

Quoique  le  goAt  des  croisidessft 
beaucoup  diminue  en  Europe,  qoMi  | 
Finsucces  de  tant  d'expeditioDS  A 
rentes  edt  bien  calme  resi'ritiTavatiR, 
quoique  la  philosophie  naissante  eii^ 
refroidi   Pexaitation  retigieuse,  il  ett 
bien  difficile  d'appreudre  sacs  dMii 
et  de  latsser  sans  vengeance  la  att 
trophd  de  Jerusalem.  Ce  fdt&Dfan 
de  Tyr,  I'^nergique  chroniqtteur,leB' 
vant  pr6lat,  qui  vint  en  Europe  aps- 
mer  la  d^olation  des  Chretieasd'OrKd; 
et  prdcher  la  nouvelle  croisade.  ijiii 
s'dtre  entendtt  avee  le  pape,  ii  paiii 
en  France  au  moment  ou  PfailipjpeAi' 
custe  allait  livrer  bataille  a  Hoiil 
d'Angleterre.  Les  deux  camps  etaktt«: 
presence,  les  deux  monarquessete; 
taient  le  Vexin  Normand.  A  foree  w^j 
quence  et  de  cbaleur  d'&meilei^i 
ardiev^ue  sut  r^concilia- 1«  im^ 
vaux  prets  a  se  combattre.  Dsdenaii' 
rent  tons  deux  la  croix.  Mms  P^^lJi 
expedition  aussi  longue  et  aoapo-i 
leuse  il   fiallait  autant  d*arg(flt# 
d'hommes.  Grftce  a  Fappoi  ds  dsi* 
aux  efforts  de  Guiilaume  de  TfTjt 
hommes  ne  manqu^rent  poiitw^ 
Targent ,  voici  la  fa^n  d«*  «  *■ 
procura  :  k  Thonneur  de  Sal»**i* 
cr^a  un  impdt  sp^ial  pour  hi  to« 
guerre,  et  on  I'appela  la  dimeSil^^ 
$ous  ceux  qui  ne  pouvaient  pas  itam 
la  croix  etaient  obliges  de  soWerMj 
de  la  guerre  sainte ,  en  payant  le^4| 
de  leurs  revenus  de  toates  f^f^l 

Malbeureusement  uoe  fois  f*J 
populations  confiantes  eureot  i«a> 
leur  prince  respectif  I'argent  defa*]] 
sade,  les  deux  ambitieux  d'AqgM 
et  de  France  employcrenl  ks  suT^ 
sacrees  a  recommencer  la  guemt 
eux.  Ce  qu'il  y  eut  de  plus  odi«n 
ces  hostilites  sacrileses,  c'est  ^^ 
lippe-Augusteexcitaleflls  contretej 
Richard  contre  Henri.  Les  fi»*tt 


Vatican  furent  impuissanies 
forcenes.  Tout  excommunie  qaii 

(•;  Yoyei  Boha-Eddin,  nta  eims^ 
iani  Saladim, 


STRIE  MODERNE. 


329 


lichard  n*en  persista  pas  moins  dans  sa 
evolte  infdme,  et  Henri  II,  incapable 
e  resister  a  la  fois  contre  une  conspi- 
ition  intestine  et  une  guerre  etrangere, 
lourut  de  chagrin  au  milieu  de  la  lutte. 
on  flJs,  moraiement  parricide ,  lui  suc- 
Ma,  et  soit  bonte,  soit  reinords,  ou 
iQtdt  soit  ardeur  belliqueuse  et  appetit 
»  butin ,  il  (it  sembiant  de  se  repentir , 
(s'appr^ta  a  parti  r  en  Palestine.  Mais 
8  produits  de  la  dtme  avaient  6te  en- 
loutisdans  Tablme  desguerres  civiles, 
i  il  falluit  trouver  d 'autre  argent.  Alors 
tprioce crois^,  rentredans  ie  giron  de 
iffise,  n'6prouva  aucun  scrupule  a  pil- 
r  les  juifs ,  h  les  depouiller  de  tout  ce 
I'f  i5poss^a  lent.  Les  ressources  duvol 
isumsant  pas  encore,  Richard  emplova 
corruption.  li  se  fit  payer  toutes  les 
ai^esae  r£tat  qu'il  n'auraitdO  donner 
raum^riteeta  la  probite;  il  mit^  Ten- 
DJesfonctions  les  plus  elev6es  de  son 
Iraunie,  et  finit  no^me  par  aligner,  con- 
ifarement  aux  lois  de  son  pays,  les 
maiues  de  sa  couronne.  Tel  est  Tun 
(  li^os  les  pi  as  celehres  de  la  troi- 
ne  croisade ;  tels  fiirent  les  ignobles 
rjnans  dont  il  se  servit  pour  satisfaire 
I  godt  des  aventures. 
Sans  aller  aussi  loin  que  son  com- 
;»on  de  croisade,  Philippe-Auguste 
n  epuisa  pas  moins  son  royaume  pour 
w  une  arm^.  Puis  les  deux  monar- 
!8,  s'tont  reunis  a  Nonancourt,  se 
Qt  toutes  sortes  de  protestations  d'a- 
U  et  de  confraternity  militaire. 
meet  meDsongere  comedie ;  ils  ctaient 
i  deux  trop  ambitieux  et  trop  arro- 
ts  pour  ne  point  se  disputer,  a  la 
jBiere  occasion ,  la  prominence  et  la 
duite  supnfime  de  Texp^ition.  Ils 
ibarquerent  s^parement,  Richard  h 
seille,  .Philippe-Auguste  a  G^nes; 
I  une  temp^te  terrible  les  ayant  con- 
its  tous  deux  a  se  r^fugier  dans  le 
de  Messine,  iBt  ^  y  passer  Fhiver, 
e  purent  ainsi  rester  six  mois  amis. 
alousie ,  une  rivalit^  orgueilleuse  et 
onptable,  une  haineferoceeclaterent 
lit  entre  les  deux  princes,  et  se  com- 
iquerent  a  leurs  troupes.  On  fut  sur 
lint  d*en  venir  aux  mains,  de  se  d^- 
e  mutuellement  en  Sicile,  au  lieu 
sr  au  secours  de  la  Syria.  Qu^lques 
iies  sages,  quelques  bons  pr^tres 
nreot,  aforced^instances  etae  pri^ 


res ,  a  plaquer  une  sorte  de  reconciliation 
entre  les  rivaux ,  et  le  printemps  revenu 
ils  se  rembarquerent  avec  leurs  soldats , 
sans  les  avoir  diminu^  heureusement 
par  des  combats  fratricides  (*). 

Gepe ndant  outre  les  rois  de  France  et 
d*Angleterre ,  Tempereur  d'AUemagne, 
le  vieux  et  vaillant  Frederic  Barberousse, 
r^olut  aussi  d*aller  en  terre  sainte.  11 
leva  une  armee  considerable,  et  voici 
comment  il  en  enumere  lui-mdme  les  for- 
ces dans  une  declaration  de  guerre  qu*il 
envoya  a  Salad  in :  «  Dieu  aidant,  vous 
apprendrez  ce  que  peuvent  nos  aigles  vic- 
torieuses ,  ce  que  peuvent  les  cohortes 
de  plusieurs  nations.  Vous  eprouverez 
la  rureur  de  ces  Teutons ,  qui  prennent 
les  armes  mSme  pendant  la  paix ;  vous 
connattrez  les  habitants  du  Rhin;  la 
jeunesse  d'Istrie ,  qui  ne  sut  jamais  fuir ; 
le  Bavarois,  grand  de  taille;  les  habitants 
de  la  Souabe ,  fiers  et  rus^s ;  ceux  de  la 
Franconie,  toujours  circonspects;  le 
Saxon,  qui  joue avec  le  glaive ;  les  peuples 
de  la  Thunnge  et  de  Westphalie;  Tagile 
Braban^on;  le  Lorrain,  qui  ne  connalt 
point  de  paix ;  Tinquiet  Bourguignon ; 
les  habitants  des  Alpes ;  le  Frison,  habile 
a  lancer  lejavelot;  leBohemien,  qui  salt 
mourir  avec  joie ;  le  Polonais,  plusferoce 
que  les  b^tes  de  ses  for^ts ;  TAutriche , 
rlstrie,  ruiyrie,  la  Lombardie,  la  Tos- 
cane,  Venise,  Pise ;  enfin,  le  jour  mar- 
qu^  pour  le  triomphe  du  Christ  vous 
apprendra  que  nous  pouvons  encore 
manier  T^p^e,  quoique,  selon  vous,  la 
vieillesse  nous  ait  d^ja  abattu.  » 

Outre  la  curieuse  Enumeration  que 
fait  ici  Frederic  Barberousse,  sa  der- 
niere  phrase  n'est  pas  non  plus  sans 
originality.  Le  vieux  soldat  Etait  encore 
sensible  aux  blessures  d*amour  propre; 
le  terrible  batailleur,  qui  n'avait  pas  pu, 
trouver  un  seul  rival  en  Allemagne, 
Youlut  aller  le  chercher  au  fond  de  TA- 
sie.  Saladin  lui  paraissait  digne  de  lutter 
avec  lui.  Mais  le  ciel  ne  permit  pas  ce 
duel  grandiose.  Frederic  eut  beau  par- 
tir  k  la  t^te  de  la  grande  armee  qu*il 
avait  annoncEe ;  il  eut  beau  Etre  assez 
fort  pour  punir  de  sa  perfidie  Tusurpa- 
teur  byzantin  Isaac  I'Ange;  il  eut  beau, 
apres  avoir  traverse  THellespont,  battu 

(*)  VoyeB  de  SismoDdl,  HUiaift  des  Fron- 


•luO 


L  LMVLuS 


les  Turcs  a  Laodicee,  s'emparer  d'leo- 
Ilium ,  en  repartir  des  le  priiileinps;  ua 
acciiient  phy>ique  Tarreta  tuut  a  coup 
au  tnilieu  de  sa  carriere.  II  pa$>ait  pres 
d'uri  fleuve,  aux  eaux  limpides  et  irai- 
ches,  au  lit  rempli  d'un  sable  doux, 
aux  l)erges  lleuries;  spduit  par  taot 
d*attraits,  il  voulut  se  baigner  dans  ses 
flots  teiitateurs;  iims  ie  froid  le  saisit 
presque  aussitot,  et,  son  grand  5ge  ai- 
dant la  maladie,  11  ne  put  pas  faire  un 
Eas  de  plus.  Sa  inort  fut  le  signal  i\f  la de- 
andjde  de  son  arniee.  Les  uns  desert^ 
rent ;  les  aulres  >'egarerent  dans  les  inon- 
tagnes;  d'autres  enfln  se  laisserent  at- 
teindre  par  la  famine  et  la  peste.Dece  co- 
lossal d^ploiement  de  forces,  cinq  mille 
hommesseulement,  menes  par  leducde 
Souahe,  fils  de  Frederic  Barberousse, 
parvinrent  jusqu'en  Syrie  en  1150. 

Pend^iut  que  les  Teutons  di>parais- 
saientainslen  AsieMineure,  les  Anglais, 
apris  avoir  ete  encore  une  fois  disperses 
par  un  ouragan,  abordaient  en  (^nypre, 
vaisseau  par  vaisseau,  et  se  voyuient 
refuser  IVnliee  du  port  de  Liraijivso  par 
Isa.ic  (^onmene.  Ce  dernier,  refngi^ 
apres  les  revolutions  de  Constantinople 
d.ins  rile  de  Chypre,  y  re^naitdeja  de- 
puis  quelque  temps ,  lors(jue  arriverent 
les  croises.  Effriiye  du  noinbre  des  nau- 
frages  qiii  descendaient  sur  s»  s  coles  et 
envahissaieiit  son  tie,  il  fit  jcter  en  pri- 
son les  plus  turbuleuts  et  repoussa  les 
autres.  Mais  Richard,  avec  le  reste  de 
ses  navir  s ,  ne  tarda  pas  a  debarquer 
lui-m^ino  en  Chypre.  A  la  nouveile  de 
la  conduite  d'Isiiac  Comnene,  Richard 
s'en  allu  attaquer  sa  capiiale.  Le  prince 
byzantin  ne  put  rcsiater  a  la  mjisse  de 
ses  agressenrs.  II  fut  pris  dans  sa  ville, 
chaige  de  chahic^s  a  son  tour,  et  sorv 
vainquenr  se  declara  roi  de  Chypre  a  sa 
^lace.  Bi»nnc  aubainc  pour  ^Anglais, 
qui  oublia  aiiisi  dans  une  conquete  im- 
provisee  la  pronjesse  quHl  avait  faile  de 
serendre  sansretard  a  Acre  (Plolema'is), 

3ue  les  Chretiens  d'Orient  assiegeaieut 
epu  s  viiigt  mois  (*). 
Philippe-Augnste   avait,   du   reste, 
precede  Richard  au  pied  du  mont  Car^ 
mel ;  niais,  soit  par  un  ridicule  senti- 
ment ciievaleresque ,  soit  par  une  ralsoa 


(*)  Voyex  Gautli&er  Yimsauf  /  lUneruirt  du 
roi  Richard. 


secrete  que  rbistoir€  a'a  pa  peoetreffrsr* 
dent  Philippe-Auguste,  malgre  lesiris- 
taaces  de  ses  freres  en  religiou,  maigrt 
la  politique  et  le  bons  sens  qui  auniiet 
dd  lui  conseiller  d'agir,  se  refwa  ^ 
tinement  a  prendre  U  moindre^si 
siege  de  Plolemais  avaot  VatrimMm 
rival  d*Aogleterre.  Ainsi,  vatvmx 
allemaude ,  reduite  a  queiques  Iiobim 
accables  de  fatigue,  use  amttfrji* 
^ise  qui  se  condamnait  alipbitede 
inaction ,  luie  araaee  anglaise  qvi  i> 
musait  eii  route  a  s^emparerd'iuNilifc 
TArchipel,  tel  ^tait  le  premier  rMI 
de  cette  troisienae  croisade ,  qui  s  aoKo- 
Ctiit,en  partaDt,comiiiedevaDtrc^ 
dre  Jerusalem  et  detruirt  la  puisna 
de  Saladin.  VoyoDS  maiftteout  i  ^ 
en  etoieot  reduius  les  oaiaoies  m 
tiennes. 

SI^B  D*AG]IB  (PTOLEXA&!. 

Le  roVaume  de  Jerusaiem  B*c&i^ 
plus.  Sou  roi  etait  prisoooier,iff  v^ 
etaient  prises.  Dans  cette  posiUM  ^ 
plorable  rambition  parliculiert  ^ 
encore  augmenter  Tetal  frtain  m 
Chretiens.  Le  jeune  Conrai  de  Us^f- 
rat,  arrive  de  Constantinople  i  Iff* 
voyant  le  roTaunie  franc  »bs  brt- 
gence  d*une  teoinie,  som^  as'«tf»- 
rer  du  pouvoir.  Coinme  ia  viliedrTr. 
par  sa  position  sur  un  promtff^nr,^ 
ses  bolides  fortiQcation8,pf«"* 
et  ses  bassins,  etait  facile  4  i(s«^> 
Conrad  parvint  a  dccoura^^*^* 
d'uue  armee  musulmane.  Dei  1(n)  v'' 
crut  tout  perm  is ,  et  ie  fit  ytw^^^ 
de  Jerusalem.  Triste  roi ,  enlertte^ 
une  sorte  d1le ,  a  peine  incapaWe «» 
feridre  la  derniere  place  du  roraomewj 
il  s'elait  erige  ie  maiire.  Ilitedfliwa** 
aucun  ombrage  aux  MusulflMDii  «* ' 
servit  qu'a  opprimer  et  k  diiis*  • 
Chretiens. 

Saladin,  durant  les  dispiiU««M»: 
de  ses  ennefnis ,  contiauait  i  ^'^  \ 
peoter  ses  amies  et  benir  sa  f^^**J* 
A  mesure  qu'il  prenait  une  *'*^^5 
4'en  massacrer  les  iiabitants  a  Ymt3i» 
des  cruises,  il  ieur laissait toojcwft ■•I 
vie  sauve.  Enfiu,  lorsqu'il  ful  mavtm 
toute  la  Palestine,  sa  iwnie  ««^ 
jusqu'a  r6ndre  la  liberie  an  pWT, 
prince  Guy  de  Lusignan.  Qu^fJ"^ 
coioptAt  aucuneffleot  «ur  la  pn*^ 


SYIUE   MOULRNE. 


3^1 


1  tel  homine,  il  ne  t'en  flt  pas  inoins 
(T  de  reaoncer  au  royaunie  de  Jeru* 
m  et  de  retourner  en  Europe.  Des 

Guy  de  Lusignan  se  vit  libre,  son 
nier  aete  fut  de  se  parjurer,  de 
rdes  troupes  centre  son  liberateur, 
e  s'appr^er  a  te  combaltre.  Saladia 
'emut  pas  de  eette  iafamie,  ii  i'avait 
'ue.  Etie  etait  d'aiileurs  utile  a  se$ 
ets ;  void  comme  :  D'abord  les  pre* 
ions  de  Guy  de  L4isignan,  contra- 
t  Tusurpation  de  Conrad  de  Munt- 
at ,  entreteoaient  la  division  panni 
francs;  en  second  lieu,  en  (aissant 

de  Lusignan  assizer  une  ville  du 
ral ,  Saiadin  roettaitpour  longtemps 
l>ri  de  la  guerre  Tinterieur  de  la  Pa- 
ne ;  en  troisieme  lieu ,  en  occupant 
i^ge  d'une  cite  sans  importance , 
^  les  soldats  Chretiens  et  les  reii- 

successifs  que  leur  promettait  la 
ieine  croisade,  il  usait  dans  une 

d'escarinouches  le  courage  et  la 
iT^raoce  des  croises.  La  prevision 
iladin  se  r^lisa.  II  avait  calculi 
:.  aussi  habile  politique  que  grand 
rier,  ii  sut  fatiguer  Ir-s  armees  coa- 

coutre  lui,  eonfondre  les  projets 
s  enneniis,  et  sauver  son  empire 
ce  (*). 

SH^e  d'Acre,  outre  sa  duree  exces- 
eut  cela  d'original  que  les  deux 
*s,  chretienne  et  musulmane ,  s*y 
ereiit  egalement ,  et  que  de  cette 
Acre,  avec  les  deux  camps  qui  IVn- 
ient,  paraissait  une  ville  defendue 
ne  autre  ville  et  altaquee  par  une 
hme.  Saladin  avait  parfuiteinent 
i'acharnement  que  les  Francs 
'eraient  contre  ce  boulevart  inari- 
le  la  Palotioe.  Aussi  fit-il  venir 
He  un  fortiGcateur  c^iebre,  t'emir 
ou.cl],  qui  avait  rele\6  les  murs 
lire  ;  et  il  lui  ronfia  Acre  pour  en 
■a,  premiere  place  de  Syrie.  Les 
ens ,  apr^s  la  prise  de  Jerusalem, 
rii^  d^abord ,  divis^s  ensuite  par 
mentions  de  Conrad  de  Monferrat, 
tes  c'bn>tamment  par  les  truupes 
adin,  qui  tenaient  Tyr  cern^e, 
I  assiegee,  tout  le  territoire  trane 

;  les  Chretiens,  disons-nous, 
ertt  s'opposer  aux  travaux  de  Ra* 
ti.  Aussi,  iorsque  Guy  de  Lusi- 

y  esc  Emad-Eddin ,  V£i:lair  dt  la  Syrie. 


gnan  arriva  derant  les  uiurs  d*Acre,' 
cette  place  n'avait  rien  a  craindre  de  lui. 
Elle  etait  comme  un  appdt  offert  aux 
Francs ,  appdt  qui  ne  devait  servir  qu'a 
les  faire  toniber  tour  a  tour  dans  les 
t&iA  musulmaus. 

Des  que  Saladin  apprit  que  les  Chre- 
tiens cernaient  Acre,  il  marcha  contre 
eux  pour  retablir  les  communications 
entre  sa  ville  et  son  armee.  Les  premiers 
efforts  des  Chretiens  furent  ^nergiques. 
Leur  masse  ^tait  si  compacte  et  si  so- 
lide  que  durant  la  premiere  jour  nee 
les  Musulmans  ne  purent  Tentamer. 
Les  historiens  arabes  la  comparent  a 
un  rocescarpe  aue  rien  ne  pouvait  abat- 
tre.  Mais  le  lenaemain,  apres  avoir  inu- 
tilement  lutte  jusqu'a  midi ,  les  Musul- 
mans  tinirent  par  trouver  Tendroit  fai- 
ble  des  Francs  :  c'etait  au  nord  de  la 
cite,  sur  les  rivages  de  la  mer.  Les  Mu- 
sulmaus fondirent  en  troupes  si  succes- 
sives  sur  ce  point,  qu*ils  enfoncerent 
ieurs  ennemis,  et  s'ouvrirent  ainsi  un 
passage  juscju'a  la  ville.  Mais  des  qu'ils 
furent  enlres  a  Acre  ils  erurent  tout 
termine,  et  commirent  la  faute  de  ne 
pas  poursuivre  ieurs  adversaires  et  de  ne 
pas  achever  leur  del'aite.  Cette  suspen- 
sion «du  combat  rendit  Tesperance  aux 
Chretiens.  Tandis  que  les  Musulinaus 
envoyaient  Ieurs  chevaux  a  Tabreuvoir 
et  Ieurs  chameaux  au  pdturage,  les  Chre- 
tiens passerent  le  reste  de  la  joun;^  et 
de  la  nuit  suivante  a  creuser  autour  de 
leur  camp  de  nouveaux  fosses,  a  reparer 
ieurs  armes,  a  rallier  Ieurs  archers, 
Ieurs  lauciers,  Ieurs  cavaliers.  Et  le  ien- 
demain  ,  Iorsque  les  soldats  de  Salndia 
raarcherent  sur  les  Francs,  dans  la  per- 
suasion de  les  vaincre  sans  difOeulte,  el 
d'en  d^livrer  la  ville,  ils  rencontrerent 
la  resistance  la  plus  desesper^e ,  et  trou- 
verentdevant  eux  un  camp  inexpugnable, 
dont  il  leurfallut  bientot  renoneer  as*  em- 
pa  rer. 

Des  lors  le  siege  prit  des  proportions 
enormes  de  duree  :  on  se  battait  tous 
les  jours,  mais  plutot  en  escarmouches 
qu'en  bataille  rangee.  C^tait  la,  du 
reste,  ce  qu'avait  voulu  Saladin.  II  lui 
etait  indispensable  d'entretenir  I'ardeur 
et  de  conserver  la  reunion  de  ses  trou- 
pes, afin  d'etre  pr^t  contre  riuvasion  ' 
des  nouveaux  croises.  Aussi  ne  cessait-il 
de  pr^ider  lui-m^me  k  loiu  les  eoaibats 


83a 


L'UNIVERS. 


partiels  qai  se  donnaient  devant  la  place 
assiegee ,  et  jamais  son  zete  ne  faiblis- 
sait,  jamais  son  activity  ne  diminuaft. 
Cependant,  a  force  de  luttes  sans  r^suN 
tat ,  les  Musulmaas  Onirent  peu  a  peu 
par  se  n^liger ,  et  par  renoocer  a  atta- 
quer  quotidieonement  leurs  adversaires. 
Les  Chretiens  alors,  qui  crai^naient 
les  renforts  que  Saladin  attendait  d*£- 
gypte,  resolurent  de  prendre  eux-ml- 
mes  Toffensive  sur  une  grande  echeile. 
Saladin  comptait  encore  sur  cette  de- 
cision de  ses  ennemis,  et  sembla  ne 
rien  faire  pour  s'y  opposer.  II  laissa  en 
effet  ses  soldats  se  retirer  par  moitie 
sous  leurs  tentes,  tandis  que  Tautre 
moitie  se  tenait  sous  les  armes. 

Les  Chretiens,  trorapes  par  cette  ap- 
parebce  de  negligence  et  d'apalhie,  sor- 
tirent  en  foule  de  leur  camp ,  se  precipi- 
t^rent  sur  Taile  droitede^  Musulmans, 
la  bousculerent ,  et  la  forcerent  de  plier 
devanteux.Alorslecentrederarmeema- 
bometane  se  porta  au  secours  de  ceux 
qui  fuyaient  deja,et  les  Chretiens,  comp- 
tant  sur  la  victoire  ,  se  tournerent  tous 
immediatement  contre  le  centre  d^arni. 
Saladin  les  attendait  la.  Avec  Taile 
gauche  de  son  arm6e  il  commenca  par 
couper  la  retraite  a  ses  ennemis,  en 
placant  ses  troupes  disponibles  entre  le 
canip  Chretien  et  une  coUine  infranchis- 
sable.  Bientdt  les  fuyards  musulmans 
s'etant  rallies ,  les  Chretiens  furent  a  la 
fois  pris  en  tSte  et  en  queue.  Malgre 
leurs  eflfbrts  prodi^ieux ,  malgr^  toute 
leur  bravoure  individuelle,  ainsi  ^ras6s 
entre  deux  masses  qui  se  rapprocbaient, 
ils  furent  presque  tous  tues  ou  faits  pri- 
sonniers.  Dix  mille  d' entre  eux  reste- 
rent  sur  le  terrain.  Ceux  qui  parent  se 
refugier  dans  leur  camp ,  qui  beureu- 
sement  n^avait  pas  encore  ete  envahi, 
y  auraient  et^  necessairement  forces  le 
lendemain ,  si  on  les  eut  attaques  (*). 

Mais,  par  un  hasard  Strange ,  par  une 
aberration  d'esprit  singuliere ,  les  emirs 
arabes  crurent,  apr^s  cette  victoire, 
avoir  assez  fait  pour  la  cause  de  TIs- 
1am ,  et  ne  demanderent  plus  qu'a  re- 
tourner  dans  leurs  foyers.  On  etait  a 
la  fin  de  Tautomne,  le  siege  durait  deja 
depuis  plus  de  six  mois^  1  epoque  de  la 
guerre  pour  les  Orientaux  etait  terming 

•   («)  Yoyez  BoluhEddki,  ^ie  40  5a/ac(»».     ,'.t 


tous  les  Musulmans  Toolaieot  pnr 
comme  a  Tordittaire  leorhiTer  d«(nt 
quitte  a  revenir  an  priDtem|£.S^. 
eut  beau  faire ,  il  eut  beau  apHqitri  ^ 
politique  a  ses  ^mirs,  leur  mm ; 
qu*une  nouvelle  croisade  ks  mnni, 
les  engager  a  profiler  de  roecasidpt 
cbasser  definitivemeot  les  Chretknl 
la  Palestine,  pour  les  emp^cberdeett 
fa^on  d'toe  utilement  seooomp 
des  renforts  europeens,  m  k^ 
vaincre  reot^tement  des  clx&  > 
bes,  leur  obstination  ahivefwr** 
eux.  Par  respect  pour  leursulta,i^ii^ 
gnirent  de  deliberer  longueiMBt.* 
consulter  leurs  troupes;  nuis a W 
de  quelques  jours  iU  exprin)Wjt 
nouveau  la  resolution  de  v  dM^ 
Ainsi ,  malgr6  son  genie,  Sabdio ug 
vaincre  les  coutumes  iminemoraai 
son  peuple.  N'ayant  pu  coBsenwi^ 
lui  que  sa  garde  particuliere,ses&^ 
luks  d6vou6«,  il  fut  contraiflid«5f 
tirer  sur  le  mont  !Uroubeh,r*" 
quelques  lieues  d*Acrc.  QuaniM^ 
sa  troupe,  elle  se  debaDdi,eta| 
tachement  par  detaeheaw«t,sflj^ 
mas ,  soil  a  Alep,soitm6ffleen"^ 
tamie  (*).  ^ 

Des  que  les  Musuunaosefflw"" 
donne  la  defense  d'Acre,  tejw 
cerndrent  la  ville  deto«se«8t« 
s'occup^rent   plus  qu'a  fig*j! 
camp  une  veritable  place  ijgj* 
Outre  les  foss^ ,  qu'ils  8gn^*2 
core,  ils  eleverent  un  row^JH 
d'une  solidity  a  toute  cpreuw,«*fl 
des  ceuries  pour  leurs  cIjc«w,»J 
qu'a  des  ^lises  pour  y  dire  la  J 
rabri.  Les  soldats  qui  restaienUSJ 
quoiqu'ils  ne  cessassent  V^^^.^ 
les  travail  leurs  francs,  ^^^ 
en  assez  graud  nombre  l»«|^' 
cher  de  mettre  a  fin  leor  ceff* 
devint  bientdt  aussi  comf»leie « 
rassurante  que  possible :  c'ettf» 
blissement  definilif  pour  Ic^CbJ 
qui  ne  pouvait  dcsormaisetreaWJ 

{)ar  eux  qu'aprcs  la  prise  das* 
a  ville.  Les  Musulmans,  dareit^J 
ils  eurent  recu  en  renforts  l« 
egyptiennes  cle  Malek-Adhel,*^ 
la  saison  des  pluies  fut  tennwtfi 


(»)  Voyer  Abd'AllaUf ,  Bi$U>irt  if* 
cha  d'Jlexaudrit, 


i 


SYRIE  MODEKNE. 


338 


Irent  atissi  dans  leur  eamo  de  la  ool- 
e  de  Kisan ,  eo  face  de  celui  de  leure 
rersaires.  Ce  camp  n*6tait  pas  moins 
te,  rooins  important  que  le  camp 
I  Chretiens. 

?o\d  un  extrait  d'Abd'allatif  qui  en 
me  une  id^ ,  et  qui  montre  en  outre 
ament  on  entendait  )a  guerre  a  cette 
tque  des  croisades  :  «  Au  milieu  du 
ap,  dit  I'6crivain  arabe,  6tait  une 
$e  place  remplie  de  cent  quarante 
es  de  mar6chaux  ferrants.  On  peut 
er  da  reste  par  cette  proportion. 
US  une  seule  cuisine  etaient  vingt- 
t  marmites  pouvant  contenir  cha"- 
e  une  brebis  entiere.  Je  fis  moi- 
ne  I'enum^ration  des  boutiques  en- 
istr^es  chez  Tinspecteur  du  mar- 
;  j'en  comptai  jusqu'a  sept  mille. 
esB  que  ce  n'etaient  pas  des  boutiques 
me  nos  boutiques  de  ville  :  une 
Belles  du  camp  en  edt  fait  cent  des 
«8 ;  toutes  etaieut  bien  approvision- 
L  J'ai  out  dire  que  quand  Saladin 

Sea  de  camp  pour  se  retirer  a  Ka- 
b  ,  bien  que  la  distance  fOt  assez 
te,  il  en  co(!ita  k  un  seul  vendeur  de 
1^  soixante-dix  pieces  d*or  pour  le 
ta|>ort  de  son  magasiu.  Quant  au 
she  de  vieux  babits  et  d'habits  neufs, 

ane  chose  qui  passe  Hmagi nation. 
omptait  dans  le  camp  plus  de  mille 
I  :  la  plupart  Etaient  tenus  par  des 
mes  d^Afrique;  ordinairement  ils  se 
alent  deux  ou  trois  ensemble.  On 
rait  Teau  k  deux  eoud^es  de  profon- 
«  La  piscine  etait  d'argile;  on  Ten- 
■it  aane  palissade  et  de  nattes , 

•que  les  baigneurs  ne  fussent  pas 
\u  poblic;  le  bois  ^tait  tir^  des  jar- 

des  environs.  II  en  coOtait  une 
'■d'argent  ou  un  peu  plus  pour  se 
ler.  » 

ksi,  si^reU  contre  les  attaques,  as- 
ice  de  toutes  provisions  necessaires, 
16  ni€me  de  se  procurer  le  superflu, 
■ftaient  les  avantages  que  pr^sen- 
.  ces  vastes  camps ,  qui  etaient  de 
l>le8  cit^.  C^tait,  par  contre,  un 
n  d*^erniser  la  guerre,  et  cela  ar- 
urtout  devant  Acre.  Les  Chretiens, 
l^s,  defendus  comme  dans  une 
#brte  •  purent  recevoir  successive- 
tjous  les  oouveaux  crois^s  qui  leur 
Ejit  d'Europe,  et  qui,  par  nandes 
iO  moins  nombreuses,  prec6derent 


les  trois  grandes  expMitions  d'Allema- 
gne,  de  France  et  d^Angleterre.  Quand 
0/1  avait  6prouv^  un  revers,  on  se  re- 
tirait  derriere  ces  fortifications  pour 
prendre  le  temps  de  le  r^parer;  quand 
on  obtenaitun  avantage  m^me  partiei, 
on  le  faisait  sonner  bien  baut,  afin 
d*attirer  de  nouvelles  recrues  a  Tarmee 
de  la  croix.  Les  revers  furent,  il  est 
Trai ,  pins  graves  et  plus  rep^t^  que  les 
avantages;  cependant  Tespoir  qu'on 
avait  dans  la  solidity  des  murailles  du 
camp  et  dans  la  prochaine  arrivee  des 
troupes  de  Philippe- Auguste  etde  Ri- 
chard emp^cha,  quels  que  fussent  les 
Rebecs  essuyes  par  les  Francs ,  la  lev^ 
d^un  si^^e  sans  utility  bien  prouv^e  et 
qui  codtait  deja  tant  d'hommes  et  tant 
d*areent.  Saladin,  de  son  cdt^,  n*avait 

garde  de  presser  par  trop  ses  ennemis , 
e  peur  de  les  voir  s^eparpiller  sur  les 
differents  territoires  de  la  Syrie,  et, 
quoique  battus .  devenir  inqui6tants  par 
leur  dispersion  m&ne.  II  valait  bien 
mieux  pourlui  les  tenir,  pourainsi  dire, 
sous  la  main,  afin  de  les  atta(]uer  en 
bloc,  et  de  les  detruire  tous  si  Tocca- 
sion  s'en  pr^sentait  (*). 

Saladin,  en  outre,  n^^tait  pas  satis- 
fait  de  son  arm6e.  Malgr^  ses  talents 
militaires,  maigre  son  energie  gouver- 
nementale,  malgr6  la  discipline  severe 
qu'il  maintenait  dans  son  camp ,  il  n'e- 
tait  pas  parvenu  d'une  part  h  obtenir  de 
la  regularit6  dans  ses  recrues,  et  d'autre 
part  k  faire  com  prendre  la  n^ssite  de 
la  permanence  des  bostilit^s  aux  tribus 
nomades  que  commandaient  certains 
^mirSf  ses  vassaux.  Comme  un  jour 
il  etait  alit^sous  sa  tente,  on  Tengagea 
k  permettre  a  ses  soldats  de  prendre  les 
armes ;  mais  il  repondit  :  «  Mon  arm^ 
ne  fera  rien  que  lorsque  je  monterai  a 
cheval  pour  me  mettre  k  sa  t^te.  Je 
connais  depuis  longtemps  mon  armee ; 
si  je  ne  suis  avec  elTe ,  elle  ne  fera  rien , 
ou  plut6t  le  mal  qu'elle  fera  sera  cent 
fois  plus  grand  que  le  bien  qu'on  en 
pent  attendre.  »  On  voit  de  quels  obs- 
tacles ce  grand  bomme  6tait  entoure;  et 
cependant  il  sut  les  vaincre  k  force  de 
perseverance.  Cetait  done  pour  lui  une 
tactique  aussi  necessaire  qu'avanta- 
geuse  de  prolonger  la  lutte  sur  un  seul 

i")  Yoyez  Abd*Allatif,  ibidem. 


334 


LTOnYEfcS. 


point,  et  de  manitenfr  saM  cesse  les 
Chr^iens,  qael  que  fdt  le  nombre  des 
soidats  quMI  possMdt  sons  ses  dra* 
peaux. 

Les  tristes  restes  cle  Tarm^e  de  Fr6» 
d^ric  Barfoeroosse  n'^aient  pas  faits 
pour  rendre  beauconp  d^e^p^rance  aux 
Chretiens.  L'arriv^  de  Henri,  comte 
de  Champagne,  avec  plasieurs  braves 
chevaiiers ,  prodaisit  done  parmi  eux 
un  meilteur  effet  aue  les  ctnq  mille 
hommes  harasses,  oecoarages  du  due 
de  Souabe.  Les  Francs  recommencerent 
alors  Jeurs  entreprises  contre  la  ville, 
en^agerent  ptusieurs  fois  le  combat; 
mais ,  toirjours  recus  arec  fermete  par 
les  assieii^s .  attaques  avec  vigaeur  par 
Saladrnr ,  ils  furent  constamnient  forces 
de  retourner  dans  leur  camp,  apres 
avoir  6prouve  des  nerles  plus  ou  morns 
fortes.  Pour  coinble  de  mallieur,  la 
peste  et  ta  disette  vinrent  enCore,  et 
si  inu I  tenement ,  apporter  la  souffrance 
et)a  mort  parmi  les  Chrelieus.  Beaucoup 
percent  par  lafaim  ou  par  Pepid^mie, 
ft  Vum  des  premieres  vjctimes  fut  le 
due  de  Souabe  tui-m^me.  La  disrorde 
se  joignit  entin  a  tant  de  iiiaiix.''La 
femnrje  de  Gay  de  Lusienan  ^,tant  morle, 
on  contesta  la  eotrroiihe  de  Jerusalem  a 
ce  dernier.  Les  partlsan^de  la  legitimitc 
pretend arent  qtie  le  trone  devart  revenir 
alsabelle,  seconde  fiHe  rf*Amaury,  et 
femme  de  Honfroy  de  Thoran.  Airisi  ce 
sceptre  fictif  avail  trois  pr^tendamts,  Guy 
de  Lusignan  d'abord ,  comme  mari  de 
Tancienne  reine;  Honfrov  de  Thoran, 
CO  I  rime  mari  de  la  nonvtlle;  en  fin  Con- 
rad de  Monferrat,  qui  s'^tait  d^clar^  sow- 
verain  dans  la  vilie  de  Tyr.  Celui-cf  eut 
m^ine  Taudace  de  faire  casser  le  manage 
d'fsabelle  avec  Honfroy  cJe  Thoran,  et 
fut  assez  hahile  pour  obtenir  la  main  de 
la  jeune  reme,  qiioiqn'il  fOt  deja  mari6 
avec  h  soeur  de  renipvreur  byzantin. 
Que  d'intrigues!  que  de  fourberies! 
oue  de  crimes!  Et  tout  cela  pour  se 
OTSputer  nn  royaunie  in  pariibus. 

Telle  etait  la  situation  deplorable  des 
Cbretiens  d'Oricnt  divi<;es  entre  deux 
princes  aussi  pitoyables  Fun  que  I'autre, 
lorsqiie  debarquefeiit  eniin  sur  ta  plane 
de  Saint- Jean  d'Aere  Philippe- A  uguste 
et  Richard.  Tout  d'abord  ces  deux  mo- 
narques,  inalgro  les  j>romesses  de  Con- 
corde et  d'accord  qu'ils  s'etaieftt  renou- 


Telto  en  Sfdte,  diverg^rent  (fepift 
Philippe-Auguste  se  d&bra  poor  (k^ 
rad,  Richard  pour  Guy  deU|m 
Des  lors  nnimitie  Mala  entre  en.  I; 
firent  bande  a  part  Or  lorsqiu  Ini- 1 
taquait  les  Musufmaos,  TaHtre  nev . 
quait  pas  de  deroeurer  oisif  daess' 
camp.  Funeste  conduite,  qui  tai 
tout  Tavantage  a  leurs  ennfmis,<4i; 
tendait  k  prolonger  indefiaiastil 
hostility,  sans  les  decider  janttlfri 
fin  une  nialaiiie  s^rieuse  frapfAibttj 
les  deux  rivaux  de  France  etfA^; 
terre.  A  la  faveur  du  troabkaAi 
Jeta  leur  esprit ,  on  paniot  eooort  i  U 
r^oncilier.  II  fut  decide  que  6r| 
Lusignan  garderait  son  rm  titrca^ 
duraut,etque  sa  succession affetm 
drait  h  Conrad  de  Moaiferrat  (*].     J 

BBDDITION    BS     SAIllT-nill  D^H 

-  GrSce  a  cet  Strange  cora|TOfl», 
put  du  moins  agir  de  coa«ert,eta 
prendre  eflBcacemenl  le  siege  jfutf 
qui  avait deja  dure  plusdevu^tl 
Chaque  jour  c'^tait  noBvelle  M 
nuuvel  assaut ,  lutte  de  plus«n|^«i 
Aucun  historieii  n'a  mieuipro^ 
ardeur  des  Chretiens  que  &bil 
m6me,  et  la  lettrequ'iladressiW 
klialife  de  Bagdad  est  le  meiHwH, 
de  cette  phase  de  Ta  guerre  d<fW> 
contre  TOrient ;  laissons  ^fi^* 
suitan  lui-m^ine :  1 

«  Voire  serviieor  «  toojoonii^JI 
peel  pour  vous;  mais  ikx  li«*»^ 
d'avofr  a  tout  iDSiant  avoBscfi"' 
eunemis,   dont    la    puissa«i«  »*«* 
cessc,  el  donl  la  mcchaaceleo'ifj**' 
lies.  Non  I  jamais  le*  bomine*  i«'w** 
ni  eiitendu  un  Ifl  enii€ini,qoi***?^ 
assi^'ige ,  qui  resserre  el  est  rtssffn,^ 
I'abri  de  ses  relrancheraenls,  Umij* 
cenx  qui  vondraienl  s'ap(»rocher,d 
qiier  rocrasion  k  cenx  qui  hfht'^ 
ce  moment  les  Francs   tie  soat 
dessous  de  ciiiq  mille  caraKrts  «* 
mille  fanta&sins.   Le  carnage  e*  h 


lea  out  aneantis;  la  guerre  le$  i  de«J 
vietoire  les  a  delaisa^  :  maw  la  ■»• 
eux ;  la  mer  s'est  drrhree  poor  W* 
du  feu  (**).  De  vouloir  defiair  le  aa** 

(*)  Voyei  Bernard  le  Tr&orief,  ft** 
Croisades.  .    _^ 

{♦•)  SaladtDveot  falreenteodieftf' 

aue,8uivautl'opiiiioo  de§Mo*uiniaaj»5 
eus  sent  vodfe  au  feu  de  renief.  w.»' 


SYRIE  MODERNE. 


B8A 


pies  <|ui  composent  rann^o  chretienne  et 
■ngues  barbares  qii*iis  parlent,  cela  serait 
DMihle;  riniaginatlon  m^me  oe  saurail 
)  represeuter;  on  dirait  que  e'est  |)OQr 
que  Moteonabbi  a  fail  cg  yen  : 

ii  8ont  rassembl^  toas  les  peupfes  avec 
>  laDgoflB<ltTer&es;  anx  interprttes  seals 
Ioqa6  de  cooTeraer  aveo  eiUL.  » 

C'est  au  point  que  lorsqiie  nous  faisons 
risonnier,  oa  qu'un  d*eo(re  eiix  passe  de 
e  cote,  nous  manquons  d'interpretes  pour 
iBttfodre;  souvent  I'interprete  h  qui  on 
«ise  rcBYoie  a  ud  autre ,  celui>ci  a  un 
idme,  et  ainsi  de  suite.  La  T^rit^  est 
■OS  tranpes  sont  la^sees  et  dego6iees  : 
ont  vaitiement  tenu  bon  jusqu'a  repiii- 
Dt  des  forces. ;  eltes  sont  demeurees  fer* 
jttsqu'a  Tailaibtissement  des  orgaoes. 
etireiuieoMrnt  les  guerriera  qu'ou  nous 
1^  venani  de  fort  loin,  arrivent  en  rooins 
i  Ji9iiil>re  qu'ils  ne  sont  partis,  et  k  poi- 
<u>pressee  par  I'ennui  ae  cette  gitei3*e; 
irirant,  ils  voudraient  partir,  et  ils  ne 
IM  que  de  leur  retour.  Tent  de  faiblesse 
«  pne  nouvelle  audace  a  nos  ennemis. 
toncinis  de  Dieu  iniaginent  tons  l«s 
iuelques  nouTelles  ruses :  tantot  ils  nous 
lent  avec  des  tours,  tantot  avec  des 
Ib  ;  nn  jonr  c'est  avec  fes  cUbadcs  (*) , 
Ire  at^ec  les  betters;  quelqnefois  ils  sa- 
tes imrs;  d'antres  fois  ils  s'avancent 
ear  clieinins  couverfs ;  on  bien  ils  essayent 
0iHer  dqs  fio^ses;  ou  bien  encore  iIr  es- 
nt  lea  remparts;  <ra  bien  ils  attaquent 
er  montcs  sur  leurs  vaisseaux. 
Ailin  Toila  qu'ii  present,  non  contents 
Pi^ier^  dans  leur  camp  un  mtir  de  terre, 
MMU  mis  en  t6le  de  con&truire  des  coi" 
i»Ddes,  en  forme  de  tours,  quUls  out 
f  de  bois  el  de  pierres;  et  lor>que  cet 
^  a  ete  conduit  &  sa  perfectiou,  ils 
)fO»k  la  terre  par  derriere,  et  Font  jetee 
tat  ,  ramoncelani  pen  a  peu ,  el  s*avau- 
ers  la  ville  Fes  uns  a  la  suite  des  autres, 
i  ce  qirils  se  trouvent  matuienant  a 
ewii-portee  de  trait.  Jusqu'ici ,  le  feu 
Aierres  avaient  prise  sur  leurs  tours  et 
^i«sades  de  bois;  mais  ^  present,  com- 
exst«aDer  avec  les  pierres  ou  consumer 
t  Jea  ces  collines  de  terre  qui  soul  a 

idi'«*ss^  an  ctief  rellgienx  de  I'Tsfam,  il 
I  tfjc^rimer  sa  reprobation  compile  con- 
roxiemki  du  Koran. 
es  ticbndes  t'taient  des  machines  forml- 
cofislruites  en  bois  avec  de  graudes 
B  de  fcr,  et  roontees  sur  df«  roues.  Ces 
it««  elaient  munles  d'une  ^norme  l*te, 
a  iT>c>>en  d*un  mecanisme ,  haltait  les 
10^  arree  One  puissance  prodigieuse. 


la  fois  un  rempart  pour  les  hommea,  et  un  abri 
pour  les  macbines  ?  » 

Dans  cette  extremite,  les  assieg^s  n'a- 
vaient  plus  qu'a  capftuler.  L'emir  qui 
eommandait  a  Af  re  alia  done  trouper 
Philippe-Auguste  sous  sa  tente.  II  pro* 
posa  au  roi  de  France  la  reddition  cle  la 
▼ille,  moyennant  la  viesauve  accord^e 
aux  habitants.  Mais  Torgueilleux  prince 
europeen  exigea  en  outre  qii'on  lui  ren- 
dtt  Jerusalem  et  toutes  les  places  fortes 
de  la  Palestine.  Ces  conditions  n'etaient 
pas  acccptables;  Tennemi  les  repoussa 
comme  il  le  devait.  II  follut  done  repren- 
dre  les  hostilil^s,  livrer  nn  rrouvel  as- 
saut.  hes  Musulmaus,  exasp^res  contra 
leurs  ennemis,  les  repouss^rent  avec 
Anergic.  Puis,  a  la  suite  de  ce  succ^,  its 
tenterent  de  quitter  laville,  etde  se  din- 
ger en  masse,  pendant  lanuit,  vers  le 
camp deSaladio.  Mais  les  croisesfaisaient 
bonne  garde;  et  les  assi^ges  durent  re- 
Doncer  a  cette  derniere  ressouree.  Alors 
lis  r^solurent  d'offrir  de  nouvelles  con- 
ditions aux  assiegeants.  lis  leur  propos^- 
rt'Dt  de  briser  les  fers  de  quiuze  cents 
captifs  francs,  de  rendre  le  bois  de  la 
vraie  rroix,  eV  de  payer  deux  cent  mille 
besants  d'or.  Malgre  leurs  pretentions 
plus  hautes,  les  croises  turent  pourtant 
obliges  de  souscrire  &  ces  derni^res  con- 
ditions, fis  exigerent  seulement  que  la 
garnison  et  les  principaux  habitants  de  la 
ville  restassent  prisonniers  jusqu  a  Tac- 
complissement  de  toutes  les  clauses  du 
traite  (*). 

A  peine  maltres  de  la  ville,  les  princes 
croises  s'y  disputerent  la  suprematie.  Lc? 
danger  seul  pouvait  moinentaneinent 
melt  re  d'accord  ces  homnies  de  rac^s  et 
de  laiigues  differentes ,  ces  fiers  suze- 
rains habitues  chezeux  a  faire  tout  plier 
sous  leur  volonl6.  Richard  particuiicre- 
meut  se  inoiitra  d'une  arrogance  insup- 
portable. 11  poussa  un  jour  Finsolence 
jusqu'a  faire  ienominieusement  jeter 
dans  les  fosses  de  la  ville  Teteudard  de 
Leopold  d'Autriche,  qui  flottait  sur  Pune 
des  tours.  Cette  insulte  grossiere  fit  a 
Richard  du  prince  allemand  un  enne- 
ni  irreconciliable,  et  1  on  salt  que  celui- 
ci  s'en  vengea  en  retenant  prisonnier  le 
roi  d'Angleterre,  lorsqu'au  retour  de  la 
croisade  il  traversa  lesfetals  autrichiens. 

(•)  Voyez  Boha-Eddin,  Vit  de  Saladin. 


136 


L'UNIVERS. 


L'anitnosit^  devint  telle ,  la  haine^'aug- 
inenta  d'uDe  faqon  si  progressive  parmi 
tous  ces  crois^ ,  jaloux  les  uns  des  au- 
tres ,  et  m^contents  d*ailleurs  du  mai- 
gre  benefice  qu'ils  avaient  (ait  dans  tear 
expeditioD,  qae  beaucoup  d*entre  eux 
rdsolurent  de  retourner  eo  Europe.  Phi- 
lippe-Auguste  fut  un  des  premiers  a  se 
degoiiter  de  cette  croisade  si  codteuse , 
et  qui  n'avait  abouti  qu'a  s'emparer 
d'une  ville  de  secoad  ordre.  Malgr^ 
les  instances  que  les  Chretiens  d  O- 
rient  Grent  aupres  de  lui  pour  le  rete- 
nlr,  il  n'en  alia  pas  moins  se  rembarquer 
k  Tyr,  se  bornant  a  laisser  sur  les  c6tes 
de  Syrie  cioq  cents  ehevaUers  et  dix 
mi  lie  fantassins,  sous  le  commandement 
du  due  de  Bourgogne. 

I.UTTE  BNTRE  BICHABD  ET  S4LADIN. 

Une  fois  Philippe-Auguste  parti  avec 
les  maledictions  des  Chretiens,  qui  I'ac- 
cusaient  d'avoir  d^sert^  la  cause  sainte, 
Richard  devint  le  chef  supreme  de  la 
croisade.  Aussi  impatient  que  cruel, 
comme  il  trouvait  que  Saladin  tardait 
trop  longtemps  a  remplir  les  clauses  de 
la  capitulation ,  11  eut  Pinfamie  de  faire 
forger,  en  vue  du  camp  des  Musul- 
mans ,  deux  mille  sept  cents  habitants 
d'Acre.  Un  pareit  acte  de  fi6rocit^  fit 
execrer  Richard  paries  Musulmans,  et 
le  souille  a  tout  jamais  dans  Thistoire. 
Comment  vouliez-vous  que  la  civilisa- 
tion ptit  8*etabiir  a  une  ^poque  ou  des  ca- 
racteres  aussi  odieux  se  rencontraient 
parmi  les  monarques  ?  Que  vouliez-vous 
que  f!t  Saladin ,  lorsqu'ou  r^pondait  a  sa 
clemence  en  vers  les  Chretiens  de  Jerusa- 
lem par  le  massacre  des  Musuimans  de 
Saint-Jean  d'Acre?  II  ne  pouvait que  trai- 
ler tes  crois^s  com  me  des  b^tes  feroces,  et 
leiir  faire  desorinais  une  guerre  d*exter- 
roination.  Ainsi,  tous  les  maux  de  la  Syrie 
lui  vinrent,  dans  ce  siecle,  de  la  part 
des  Francs.  Si  cesderniers  s'etaient  mon- 
tr6s  moins  cruels ,  la  reaction  musul- 
mane  n'aurait  pas  eu  lieu. 

Saladin,  dont  YStme  geoereuse  esperait 
encore  ramener  les  croisesaux  sentiments 
de  fhumanite,  et  qui,  comptant  sur  leur^ 
idees  chevaleresqueset  sur  les  nobles  qua- 
lit6s  dont  ils  se  vantaient ,  s'^tait  efforc^, 
durant  tout  le  cours  du  siege  de  Saint- 
Jean  d'Acre,  de  traiter  ses  ennemis 
avec  estime,  de  les  accabler  de  bons  pro- 


c^^,  d'envoyer  aujonrd^hmdejeBi 

pouieta  h  Phiiippe-Augaste  matade.de 

faire  porter  demain  des  soriwts  et  k 

glaces  a  Richard  soaffirant  de  iaebieB. 

de  permettre ,  pendant  lestrto  i^ 

ques-uns  de  ses  officiers  <rassstffas 

toumois  des  Francs;  Saiadio,^ 

nous,  dut  ^prouver  autant  (firriahi 

aue  de  piti^  pour  des  geoa  qdiffr 

daient  si  indignement  a  ses  ima, 

Pauvre  grand  homme  d'Onest,  li 

dans  son  inlelligenoe,  simple  das  t 

bont^ ,  g^n^reux  dans  sa  for»,[lanl 

les  princes  de  TEurope  tallies  sa'wk 

modele;  il  r^vait  la  magDaniioileditt 

les  combats ,  la  grandeur  dans  la  jmi^ 

la  clemence    apres  b  victoire.  II M 

reveille  par  les  torrents  du  sag  ^■ 

siens  que  Riehard  eut  rabominatiflini 

n6e  de  faire  couler  jusque  daassoi  fli|i 

Quel  desencbantement  douloomnpnt 

lui !  II  en  pleura  a  ehaudeslanoes,  I'm 

lent  homme!  11  aurait  voula^npifflv 

Chretiens  dans  ses  conqo^es,  etali 

en  imposait  le  massacre.  Soaesi?il 

dechir^ ;  car  ses  emirs  sembUiestniii 

raison  :  il  fallait  dorenaniat  de  ir«N 

repr^sailles ;  lesfanatiquestnoopMa 

c'etait  une  lutte  a  mort  que  leooim 

devait  poursuivre  contre  la  eraii-  W 

din  courba  en  gemissaot  Je  ^Jf^ 

la  fatalite  de  sa  deatinee;  maisMt 

il  releva  fierement  la  t&e,  rf  A*?"* 

de  nouveau  son  dmeterre  vsusi^' 

Homme  de  genie  et  de  c€Ear,wffl*Jf 

tdt  pour  lebonheurd€frbDinaKte:««^ 

saint  Louis  qu'ii  aurait  dd  anir  p^ 

adversaire  (*) !  | 

Richard  avait  la  pretentioB  de MJ 

querir  Jerusalem.  II  reunit  ea  «■■ 

quence  tout  ce  qu'il  reslaitdeFn* 

sur  la  cote  syrienne ,  c*est-a-<firt  N 

de  soixante  m'ille  combattants,  softfl 

Saint-Jean  d'Acre,  el  se  dirtgea' 

Cesar^e.  Cette  nombreuse  arm* J 

cel6e  constamment  par  la  caTal«» 

honietane,  ne  pouvait  faire  <F**| 

lieues  par  jour.  Ellc  souffrit  lii«*J 

la  soif ,  de  la  faim,  et  tomha  peu  if 

dans  un  profond  deoouragemtft  *^ 

chefs  des  crois^s ,  qui  en  ^^ ' 

aux  regrets  de  leur  expedilioa^ 

contreuse,   s'adrcsserent  aa  n««  J 

Saladin ,  Malek-Adhel,  pour  trai»^ 


SYRIB  MODERNE. 


337 


ta  patx.  Mais  la  coDclition  qulla  y  mi* 
rent  de  la  reddition  de  la  ville  sainte  fit 
hausser  les  ^aules  aux  Mosolmans ;  et , 
maigr^  lean  fatigues,  les  crois^  furent 
oblige  de  oootinuer  leur  chemin.  Dans 
la  Diaine  d'Arsor  ils  rencontr^ot  Sa- 
laoin.  II  fallait  absolameDt  accepter  le 
combat.  Les  Francs  se  Imttirent  en  d6- 
sesoMs.  Lear  chocfut  si  terrible  au*ils 
calbotdrent  les  premiers  rangs  de  leurs 
enneniis ,  et  aaralent  obtenu  sans  doute 
un  grand  r^altat  de  cette  victoire  par- 
iielte,  s*i!s  avaient  os^  poursuivre  dans 
uoe  torit  voisine  rarin6e  masulmane, 
qui  sV^tait  cetir^.  lis  n'obtinrent  done 
pas  d'autre  avantage  de  cette  journ^ 
briliante  que  de  [)OUvoir  entrer  ^  JaflEa, 
dont  Saladin  avait  pr^o^demment  ras^ 
les  murailles  (*). 

Arrift^  dans  cette  Wiley  la  division 
reparut  encore  une  fois  au  milieu  d^enx. 
Richard,  par  son  arrogance  et  sa  duret^, 
blessait  tons  les  amours-propres  et  s'a- 
li^nait  tons  les  coeurs.  II  sentit  alors 
qu'il  finirait  par  ne  plus  avoir  que  das 
4nglais  autonr  de  lui,  tant  la  doertion 
s'^tait  mise  dans  le  camp  des  crois^.  II 
renouveia  done  des  propositions  depaix 
aoprte  de  Saladin.  Cette  fois  il  promote 
Uut  de  retonmer  en  Europe  si  le  sultan 
coDsentait  k  rendre  aux  Chretiens  J6ru- 
saleoi  et  la  yraie  croix.  Cette  nouTclle 
tentative ,  apnuy^  sur  aueune  victoire 
importante ,  tut  repouss^  par  Saladin 
commeelle  Pavait  6t6  pr6o6demment  par 
ion  frere.  Mais  Richard  voulait  absolu- 
meiit  la  fin  de  sa  lutte  personnelle,  et 
cherchai  t  tons  les  moyens  possibles  d'ar- 
rangeoient.  Il  alia  jusqu*^  proposer  en 
manage  sa  soeur  h  Maiek-Adhel.  II  de- 
mandait  seniement  qu^on  eonstitudt 
pour  dot  aux  ^poux  le  royaume  de 
r^rusaiem ,  qui  deviendrait  par  1^  oom- 
nun  aux  Chretiens  et  aux  Musulmans. 
Saladin ,  fort  peu  fanatique  de  sa  na* 
ture,  ne  reculait  pas  devant  cette  pro- 
iHMition;  mais  les  imans  de  son  cote, 
it  les  pr^tres  du  c6t6  de  Richard, 
rrierent  unanimeroent  au  sacril^e.  11 
-altut  done,  malgre  les  deux  souverains, 
feprendre  les  hostility. 

Richard  n'osa  pas  s'engager  dans  les 
rnontagnes  de  la  Jud6e ,  et  se  contenta 

^')  Voyez  Gaolhler  Vinisaaf ,  Wnirain  du 
HM  Richard. 

22*  LivraUon.  (Syrib  moderne.) 


de  longer  les  rivagesrde  la  mer  jusqu*a 
Ascalon.  Mais  eette  place  avait  ^te  ras^ 
aussi  bien  que  Qtsar^^  et  11  fallut  pour 
s'y  maintenir  entreprendre  d*en  relever 
les  murailles.  Cette  oeuvre  de  laa^ns 
d^plut  aux  chevaliers.  lis  profit^rent  de 
cette  occasion  pour  refuser  tout  service 
h  Richard.  Son  ennemi  Lipoid  d'Au- 
triche  doona  le  signal  de  la  desob^is- 
sance.  Le  due  de  Bourgogne  suivit ;  et 
I'envieux  Conrad  avoua  alors  tout  haut 
la  haine  qu'il  avait  con^ue  pour  Richard. 
Pour  ne  pas  voir  avorter  compl^tement 
la  croisade,  Richard  fiit  ennn  oblig^, 
au  printemos  de  Tannee  1082,  de  mar- 
cher sur  Jerusalem.  Cette  r^lution 
rendit  Fesipoir  aux  Chretiens  d'Orient. 
Mais  leur  illusion  fut  de  courte  dur^. 
Richard  avait  appris  que  Jean,  son  frere, 
cherehait  k  s'emparer  de  sa  couronne , 
et  il  ne  songeait  plus  ^u*^  retoumer  en 
Angleterrie.  L'ind^cisiou  le  prit;  una 
sombre  irritation  rendit  son  abord  de 
plus  en  plus  difficile.  Arrive  dans  la  pe- 
tite ville  de  B^th^nopolis ,  a  une  jour- 
n6e  tout  au  plus  de  jAusalero,  il  s*arr^ 
tout  court,  et  malgr^  les  plaintes  de 
son  arm^,  malgr6  les  instances  de  ses 
chevaliers ,  il  perdit  un  mois  sans  agir. 
Saladin  I'attendait  dans  la  ville  sainte , 
Qull  avait  fait  entourer  de  fortifications 
tormidables.  Richard  n*osa  pas  Vy  bra- 
ver. On  le  pressait  de  plus  en  plus  d'al- 
ler  mettre  le  si^ge  devant  Jerusalem ; 
il  s'emporta ,  et  refusa  (*). 

Le  meeontenteraent  de  Tarm^  devint 
gto^ral ;  la  rage  de  Richard  ne  coanut 
plus  de  homes.  Enfin,  on  rassembia 
un  conseil  de  guerre  pour  aviser  a  ce 
qu'il  y  avait  h  [aire.  Richard  s'obstinait 
toujours  a  ne  pas  aller  en  avant;  les  An- 
glais n'osaient  pas  se  detacher  de  leur 
prince :  et  le  conseil  decida  qu^on  quit- 
terait  les  montagnes  pour  retoumer  sur 
les  bords  de  Ta  mer.  Saladin,  tout 
surpris  de  la  retraite  des  crois6s ,  les 
preceda  k  Jaffa ,  et  s*empara  de  cette 
ville  par  surprise.  Alors  le  fftutasque  roi 
d'Angleterre  se  rdveilla  soudain  de  son 
assoupissemeiit  letbargique  :  il  monta 
sur  des  vaisseaux  marcnands  avec  quel* 
ques  troupes,  et  cingia  vers  le  rivago 
de  Jaffa.  Sa  brasque  arrivde  rendit  Tes- 
poir  k  la  citadelle  chretieone,  qui  rdsis- 


(*)  Voyez  Idem,  ibidem. 


22 


3S8 


L*uinyERS. 


tail  eneore.  Ilalgr6  mb  terfilfemtknis 
singulieres ,  malgn  set  entetements  d6- 
sastreux,  Richard  avait  un  tel  cou- 
rage personnel ,  que  sa  aeule  pr^rance 
inqnietait  lea  MusulmaDS,  et  readait 
am  crois^  toate  leur  6nergie.  Avee  uoe 
poign^  dliommea.  il  fit  merveilie  de- 
yaot  Jaffa.  Sorte  de  h^ros  sauYage,  il 
s'^lan^it  parfois  tout  seul  k  travers  lea 
rangs  eoneiiiisyetles  dispersal  ten  grand 
nombre  avee  sa  lanoe  ioTindble.  Mais 
quoi  qa*il  flt,  Saladin  s'apercevait  bien 

gu'il  n'ayait  plus  afifoire  qu*^  an  seul 
omme ,  et  il  aurait  attendu  da  hasard 
des  combats  la  fin  de  la  guerre ,  si  ses 
emirs ,  effrayes  et  d^ourag^ ,  ne  Fa- 
Yaient  pousse  a  rentrer  en  n^ociations. 
Ce  qui  proure ,  du  reste,  la  lassitude 
ou  Ton  en  6tait  arriv6  des  deux  parts , 
c'est  Taspect  des  arni^  bellig^rantes  : 
Richard  en  ^it  r^duit  k  deax  ou  trois 
cents  chcTaliers  et  qaelques  milliers  de 
fantassins.  Saladin  avait  vo  ses  troupes 
refuser  un  jour,  malgrd  ses  ordres, 
d'engager  le  combat.  Lesdeux  camps 
^ient  en  face  Tun  de  Tautre,  et  aa 
regardaient  sans  s'attaquer.  Le  roi  d'An- 
gleterre  ^tant  m^me  tomb^  malade,  il 
^  eut  une  sorte  de  suspension  d'hosti- 
it6s,  dont  les  Francs  profit^rent  pour 
renouveler  une  derni^re  fois  les  onres 
de  la  paix.  Malek-Adhel  y  6tait  favo- 
rable;  saladin  seul,  dont  les  vuesetaient 
plus  profondes  et  plus  nettes,  aurait 
voulu  continuer  la  guerre ,  pour  acbever 
la  destruction  des  colonies  cbr^tiennes. 
Mais  qne  faire  avec  une  arm^  decou- 
rag^,  dans  laquelle  Tinsubordination 
^tait  tous  les  jours  pr6te  a  eclater,  k  la 
veille,  enfin,  delasaison  despiuies,  c*es^ 
5-dire  de  Tbeure  de  la  d^baodade  gen^- 
rale?  Le  sultan  fut  done  oblige  d*eeou- 
ter  k  son  tour  les  propositions  de  paix. 
II  n'y  avait  plus  de  difficult^  que  rela- 
tivement  k  la  possession  d'Ascalon ;  et 
encore  Richard,  oui  faisait  bon  march^ 
des  Chretiens  d'Orient,  ne  r^damait 
cette  ville  que  pour  sauver  son  honneur 
en  Europe ,  et  pour  paraftre  avoir  iait 
autre  chose,  durant  sa  croisade,  que 
de  frapper  hardiment  d*estoc  et  de  taiUe. 
Apres  plusieurs  conferences,  durant  les- 
quel  les  les  Musulmans  montrerent  au» 
tant  de  finesse  que  de  persistance ,  il 
fut  convenu  qu  Ascalon  serait  rasee 
comme  place  torte ,  et  des  lors  il  n'y 


I 


eut  plus  qa*^  pandierer  le  tnUA  k 
paix. 

Les  Musulauns  consentent  toate 
la  Palestine,  j  oompm^  hien  entttdB, 
Jerusalem,  roBJet  de  la  guerre  MMitM, 
le  modf  de  la  troisi^iiie  croisade.  Oa  m 
laissa  auz  Cbr^tlena  que  le  littoral  k 
la  Syrie,  les  places  de  Jafib ,  deCte- 
r6e,  d'Arzouf,  deKaifa,  d'Aeretili 
Tyr.  On  stipola  ainsi  pour  la  liberty  Aa- 
tioche  et  de  Tripoli.  Saladio ,  en  eolR, 
promettait  de  reecvoir  en  peierios  les 
Chretiens  dans  la  ville  sainte  peote 
toute  la  dnree  de  la  paix ,  qui  mitfiiK 
Il  trois  ans  et  quelques  mois.  Ge  fiit « 
commencement  de  aeptemiire  1092  qw 
futaccept^ce  traits  par  Richard  etHavi 
de  Champagne,  qui  avait  saeoM^Cm- 
rad  dans  la  souveraitiel6  des  otoiei 
chretiennes.  La  paix  one  fins  rttifitt, 
les  deux  annees  ae  mdl^rent  daos  do 
r^jouissancea  communes.  Puis  dftm, 
les  gens  pieux  ae  diriaferent  eo  pderi- 
nage  vers  Jerusalem.  lis  y  yenaiefitpir 
bandes  nombreuses ,  les  paavies  eaaoe 
les  riches ,  les  nobles  cooncne  ks  vilaiBk. 
Saladin  les  re^tavec  autant  d'epidi 
que  de  politesse.  II  leur  faisait  senirt 
manger,  et  eausait  gracieusemeotaite 
eux.  Sa  cooduite  en  eette  oeoasioa  ftf 
si  noble  et  si  ^^n^reuse  que  les  priam 
francs  en  pru-eot  de  rombra(ge.  fli 
s'efiforcerent  de  r^primer  le  ad»  dei 
pelerinages ,  de  peur  que  les  OnAm 
ne  prtferassent  la  dominatioa,  ajtfte 
et  SI  douce,  de  Saladin  a  la  Icsr,  fv 
^tait  loin  d^^lre  aussi  equitable  clan 
liberaie  ('). 

MOBT  DE  SALAJDIlf. 

Cependant  Richard ,  relevede  sa  ■»> 
ladie,  finitpar  s'embarquer.  Des  Ion, 
Saladin  n'avait  plus  rien  k  redoutar :  1 
licencia  son  arm^B;  et  la  Syrie,  apii 
cent  ans  de  guerre,  put  enfin  respinr 
sous  le  joug  du  plus  clement  et  da  pba 
honn^te  des  princes.  Malheurecisefsoa 
son  bonheur  ne  dura  pas  longtcaas- 
Moins  d'une  aon^  apres  cette  paix , » 
ladin  mourut  d'une  fievre  bilieose  ii 
etait  n^k  Tekrit,  sur  le  Tigre,  avait  veea 
cinquante-sept  ans  lunaires ,  avait  r^ 
cinq  ans  sur  r£fflrpte  seule,  et  dix-aotf 
sur  la  Syrie  et  1  Egypte  r^nies.  Tons 


(*}yoyczBoha-Ed(Ua  ^Ude 


SYRIB  MODERNE. 


33» 


Bt  Iiigli»rieii8  nuigoimanB  s'aooordent  i 
lire  r^ge  dece  prince,  et  d^olarent 
oe  rafBietion  fot  g^D^rale  k  ta  mort. 
I'teit  k  Damas  qn'il  avait  rendu  la 
ernier  soupir,  et  fa  Tille  tout  enti^re 
Bit  frapp^,gelon  Texpression  arabe , 
rune  tristesse  dont  Dieu  ieui  eiUpuse 
afrefidie.  II  ftait  si  g^nereux,  il  fai- 
Bittant  d*aum6ne8,  qu'on  ne  trouva 
•na  son  trter  particuiier  qu'une  piece 
f^or  et  quarante^sept  petites  pieces  d'ar^ 
;eot,  w  tout  foisant  au  plus  cinquante 
rancs  de  notre  monnaie.  G^est  qu'aussi 

inesureque  Saladin  prenait  une  ville, 
>in  de  raccabler  d'impiSts ,  il  lui  prodi- 
uait  des  largesses.  A  son  entr^  a  Da* 
IMS ,  il  ne  sarda  rien  pour  lui  des  biens 
e  son  pr^deoesseur  Nour-Eddin ,  et  dis^ 
ribua  le  tout.  A  ce  propos  il  eut  m^me 
oecasion  de  dire  oette  oelle  parole,  que 
avarice  itait  faite  pour  let  mar* 
hands,  etnonpouriesrois. 

Ge  guerrier  si  ^ergique  6tait  dans  son 
ilMeurd*une  douceur  sans  ^le.  A  oe 
Bjeton  rapportedeux  traits  bien  earac« 
fristiques.  Tin  jour,  6tant  assis  dans  n 
mte ,  deux  de  ses  mamelouks  se  dis* 
nt^rent ,  et  Tun  jeta  k  la  tdte  de  Tautre 
I  bottine,  qui  vint  eflleurer  la  Joue  du 
sltan.  Saladin  d^uma  auasit6t  la  tite, 
imme  s'il  n*aTait  rien  tu  ni  senti ,  afla 
e  ne  pas  avoir  ^  pnnir  rirr^vtencede 
in  soldat.  Une  autre  fois,tont  malade, 

demanda  de  I'eau  tidde;  on  lui  en 
jiporta  de  bouillante.  II  en  rtelama 
*autre ;  cette  fois  on  eut  la  sottise  de  la 
lidonnerglac^.  Alors,  sans  s'empor- 
sr,  sans  gronder  le  maladroit,  il  secon- 
Mta  de  dire : «  Dieu  soit  lou^  \  ne  pou^ 
li-je  done  pas  avoir  de  Feau  telle  que 
» la  demande.  »  Outre  son  indulgence 
Mr  sea  domesttoues ,  il  ^tait  d'une  po- 
tesse  et  d*une  oienveillance  parfaites 
tMir  868  fiimiliers.  Sa  conversation  ^tait 
I  T^servte,  qu'elle  ne  devait  inspirer 
ii*Dne  ^gale  reserve  a  oeux  qui  caii» 
lient  avec  lui.  II  ne  pouvait  pas  sup- 
Mter  la  m^isance,  etselon  le  dire 
'Aboy V-fiMa ,  personne  devant  lui  n'ou" 
wU  ati  d^hirer  Fhonneitr  de  son  pro- 
\ain. 

Toutes  ces  qualit^s  scares  n'ex- 
luaient  point  pourtantchez  lui  ni  ra- 
tability ,  ni  m6me  la  jovialite.  II  aimait 

jouar  avec  sea  enfants ,  et  Ton  rap- 
orte  que  des  arobassadeurs  cbr^iens  le 


aurprmnt  un  jour  falaant  une  partte  de 
barre  avec  son  plus  Jeune  fils.  Instruit 
Il  la  fois  dans  lea  sciences  et  dans  les  let* 
tree,  il  converaait  aussi  bien  avec  les  bia^ 
toriens  des  traditions  de  rislam.,  qu*a- 
vee  lea  savants  d^astronomie  et  de  ina- 
th^mati^es.  Sa  bont^,  du  reste,  ne 
s^^tendait  pas  seulement  sur  ceux  qui 
Tentouraient,  mais  ella  savait  encore 
soulager  toutes  les  misses  humainea. 
Quand  il  rencontrait  on  orpheltn ,  on  le 
voyait  s'altendrir,  puis  doter  lepauvre 
enunt  et  ie  confier  k  un  des  siens.  S'il 
rencontrait,  aucontraire,  un  vieiilard  du 
peuple,  il  lui  o^daitle  pas,  apres  lui 
avoir  fait  quelques  lib^ralit^.  II  savait, 
en  un  mot ,  faire  Taumdne  sans  jamais 
bumilier  celui  qui  la  reoevait. 

Void  lea  nobles  conseils  qu'il  donnait  a 
son  fils  Oaher,  en  le  nommant  au  gon* 
vemement  d'Alep  :  «  O  mon  fils,  ale 
toujours  le  saog  en  horreur;  prends 
garde  de  le  r^pandre  et  de  t*en  souiller, 
car  le  sang  ne  dort  jamais.  Teille  sans 
eesse  au  bien-£tre  de  tes  suiets,  et  io- 
forme-toi  quotidiennement  oe  leur  si- 
tuation :  tu  es  pour  eux  mon  ministre 
oomme  je  le  suis  moi*mtoe  de  Dieu, 
Aie  soin  de  contenter  tout  le  moode  : 
c*est  par  mes  bonnes  manikes  que  je  suis 
parvenu  k  ce  degr6  de  puissance.  Ne 
garde  de  rancune  centre  qui  que  eesoic, 
car  nous  sommes  tous  mortds.  Sois  at> 
teotif  II  tes  devoirs  cnvers  les  autres ; 
sois  liberal ,  sois  juste :  c*est  en  donuaot 
satisfaction  k  chaeun  que  tu  obticodras 
la  mis^corde  d'Allah(*).  » 

Saladin  donnait  en  outre  a  son  IDs 
rexempk  de  tous  ces  prtoptes.  Mais  il 
aimait  avant  tout  la  justice ,  veilbut  k 
ce  qu'on  la  rendh  exactement ,  et  la  ren- 
dait  lui-m^me  quand  ses  occupations  le 
lui  perraettaient.  Deux  fois  par  aemaine, 
le  lundi  et  le  ieudi ,  il  pr^idait  le  tri* 
bunal  de  ses  aadis.  Dans  ses  expMi- 
tions  militaires  il  agissait  comme  dans 
sa  capitale ,  recevant  toutes  les  requites 
que  les  moindres  de  ses  sujets  tui  pr^ 
sentaient.  Quand  une  cause  exigeajt  une 
minutieuse  attention ,  il  prenait  sur  ses 
nuits  pour  I'appr^der.  Il  se  declarait 
aussi,  comme  les  autres,  coniptable 
de  la  justice  du  pays.  Un  ntarcliand 
arm^nien  I'ayant  cit^  injustement ,  non 


(*)  Voyez  ideoif  ibidem. 


22. 


840 


LinOVEES. 


sealeme&t  il  rint  plaider  luwntoM,  mais 
encore,  aprds  le  jagement,  qui  lai  fiit 
favorable ,  il  donna  an  marchand  ane 
aomme  d'argent  pour  le  rtompenser 
de  la  bonne  opinion  <]u*il  avait  eue  de 
lui  en  I'appelant ,  qaoique  sultan ,  de* 
▼ant  un  simple  kadi.  Son  amour  pour 
la  justiee^taitsi  connu  qu'on  Faccaolait 
h  toutes  les  heures  de  requdtes  et  de 
sollicitations.  Jamais  pourtant  il  ne 
montra  ni  impatience  ni  ennui. 

Un  jour  qu^apr^s  un  long  conseil  de 
guerre  il  s^etait  tourt^  de  la  foule  pour 
prendre  un  pen  de  repos,  un  de  aes 
mameluks  le  poursnivit  pour  r^damer 
de  lui  une  audience  immediate.  Saladin 
le  pria  avec  douceur  de  revenir  le  len- 
demain.  Le  mamduk  insists,  d6clara 
que  son  affaire  ne  souffrait  pas  de  d61ai, 
et  finit  par  jeter  son  m^moire  presque 
a  la  figure  au  sultan.  Saladin,  sans  se 
blesser  de  cette  impatience,  ramassa  le 
m^oire ,  le  lut  tout  entier ,  et ,  trouvant 
la  demande  iuste ,  il  aocorda  satisfaction 
au  mameluk.  Une  autre  fois,  comme 
il  delib^rait  h  eheval  avec  ses  sdn^rauz, 
une  femme  du  peuple  lui  presenta  un 
placet.  Saladin  lui  aemanda  d'attendre. 
Alors  la  femme  s'^ria : «  Pourquoi  done 
ftes*yous  notre  sultan »  si  vous  ne  vou- 
lezpas^trenotrejuge? —  EUe  araison, 
r^pondit  Saladin.  »  Puis  il  quitta  ses 
s^neraux,  s'approcha  de  cette  femme, 
r^couta ,  et  lui  accorda  ce  qu*elle  r^da* 
mait. 

Les  auteurs  arabes  ne  tarissent  pas 
en  pareilles  anecdotes.  Toutes  servent  k 
prouTcr  que  Saladin  unissait  ia  man- 
fiu^tude  h  la  justice,  I'^nergie  k  la  dou- 
ceur, gu'il  se  d6vouait  a  la  fois  k  tons 
ses  sujets ,  de  m^me  qu'^  la  guerre  il 
^tait  toujours  au  premier  ran^.  G^n6- 
reux ,  clement,  charitable,  aussi  mod6r6 
dans  ses  goUts  que  simple  dans  ses  v£- 
lements,  il  ^tait  en  outre  le  plus  habile 
des  g^n^raux  de  son  temps,  le  plus 
hardi.des  conqu<^raDts.  Voici  ce  qu'il 
disait  a  un  de  ses  confidents,  un  lour 
qu*il  se  promenait  sur  les  bords  dfe  la 
mer : «  Je  vais  te  faire  part  de  ce  que  j*ai 
dans  mon  dme.  Lorsaue  Dieu  m'aura 
remis  entre  les  mains  le  reste  des  villes 
chr^tiennes  de  Syrie,  je  partagerai  mes 
£tats  entre  mes  enfants ;  je  leur  laisserai 
mes  dernieres  instructions;  et,  leur  di- 
sant  adieu,  je  m'enftarquerai  sur  cette 


mer  pour  alter  soljuguericstlesetkBiqi 
d'Ooddent.  Je  ne  veoz  mettrebas  lca» 
mes  que  loraqu*il  ne  restera  plus  un  mi 
infidelesurla  terre,  limoiiia  que fiafi 
je  ne  sois  arr6t6  par  la  mort.  » 

On  Toit  par  cea  mots  quels  teientki 
projets  giffantesqoes  de  Saladin , «,  • 
effet,  il  nTivait  et6  air£l^  par  una  aart 
hAti?e.  On  eompreod  aussi  nar  la  — 
■  I  seiu  he 


quo!  il  fut  un  moment  le  sent  hoiUKlB 
son  empire  qui  ne  voulAt  pasaeeoiteh 
paix  aux  Fnnes.  Et  mainteoaat  fl  fan 
moins  s*^tonner  peut-toe  da  mai  r- 
nom  quMl  avait  en  Oeeideot,  de  la  Mm 
ou'on  leva  pour  Taller  eombattre ,  ct  de 
rinsuce^  de  la  troisi^me  croisade.  K- 
ehard  ^tait  aussi  intrftpide  que  Sah<n, 
c'est  Trail  Maia  qu'il  ^talt  loin  d*lbi 
dou^desm&nes  quality  merries,  #a- 
▼oir  sur  les  siais  la  mtoe  ament^lB- 
dto  k  la  fois  sur  lefi6oie  et  la  vertBl  S 
I'un  ^tait  un  ooeur  die  lion ,  cooune  sa 
pan^yristes  Tont  appd^,  rautie  toit, 
pour  tous  les  hommes  sans  exctptiot, 
un  ooeur  d'or.  Certains  htstoricos  cW- 
tiens  en  font  le  mtoe  floge  qaetesli»' 
toriens  musulmans.  L'auteur  de  Fflih 
Mre  de$  patriarckes  d^jilexamdikA 
de  lui  {*) : 

«  Saladin ,  dans  toutes  les  eapilrii* 
tions  qu'il  accorda  aux  Francs,  fit  i> 
deleli  sa  parole.  Lorsqu'une  TiUeainfr 
dah,  il  laissait  les  habiuuts  ssrt^ei 
liberty  avec  leurs  fenunes ,  leunoftsft 
et  tout  ce  qui  leur  appartenatt.  AFffsi 
des  captifs  musulmans  dont  eesdonn 
s'^tatent  empar^s,  Saladin  ofi&ailift1» 
racbeter,  et  proposait  une  somas  ai- 
dessus  de  leur  valeur.  Si  les  Francs  ify 
refusaient,  il  les  leur  laissat,  £sait: 
«  Je  ne  veux  pas  vous  Iiustrer  dsiv 
«  prisonniers;  traitez-les  bien,  oomm 
«  moi-ra^me  je  traite  les  vdtres.  *  Bri^ 
sulta  de  1^  que  plusieurs  Ghritieseli 
remirent  volontairenient  les  piiaonait 
musulmans  quMls  avaient  entre  km 
mains,  et  le  sultan  les  d6domma^4» 
plement  de  ce  sacrifice.  OrdioaireflMl 
les  chevaliers  sortaient  des  places  cm 
quises  avec  leur  Equipage  de  gocoSi 
cest-a-dire  armes  de  la  cuirasse,  dl 
la  cotte  de  mailles  et  du  casque,  m  i 
mot  comme  lorsqu'ils 


n  Voyez  AlKl^Ailatif, 
che»  d*Alexawirie, 


SYRIE  MODERME. 


S41 


combat.  En  lea  foyant  le  sultaD  aou- 
riait,  el  enauite  pleurait  d'attendriaae- 
meat ;  mais  il  ne  leor  faisait  aucun  mal ; 
bien  au  eontraire ,  il  lea  fiaisait  eacorter 
aur  toute  la  route.  G*est  ainai  que  Sala- 
dio  en  usa  avee  lea  ennemia  de  sa  reli- 
gion et  de  son  autorit^,  agiasant  ainai 
par  une  eapto  d*in8piration  divine.  » 
Voiei  maintenant  comment  £mad-Ed- 
dinterminerdlofledu  pluspaiaaant  etda 
meilleur  dea  aoltana  :  «  Ayec  Saladin 
noorurent  lea  grands  honmies ;  avec  lai 
dispamrent  lea  ^ena  de  m^rite ;  lea  bon- 
nes actlonadimmuerent,  lea  maavaiaea 
a'accrurent;  la  vie  de?int  difficile,  la 
terra  ae  convrit  de  t^n^bres,  le  ai^le 
eut  a  pleurer  aon  pb^nix,  et  Halam  per- 
dit  aon  aoutien !  »  Cette  louange ,  tout 
byperbolique  qu'elle  aoit,  ne  manque 
paa,  comma  on  a  pu  le  voir,  d'un  fonda 
de  verity  (*). 

HOOVXLLBS  SOnVFBANCBa 
DB  LA  aVBIB. 

Avee  Saladin  ausai  ae  termina  cette 
srandelutte  entre  TOrientet  FOccident, 
dont  la  troiai^me  croisade  avait  donn^  le 
spectacle.  IMaormaia  juaqu'li  saint  Loula 
lea  cpoisades  n'offrirent  plua  que  dea 
eonbala  aana  importance ,  dea  conqu^ 
tea  d'un  jour,  dea  d^foitea  plua  deplo- 
rablea  que  les  victoirea  n*avaient  pu 
€lre  a  vantageusea.  Tout  d^6n^ra  encore; 
•t  lea  malheureux  Syriena  ne  trouvdrent 

3ue  aouffirancea  nouveUea  dans  chacune 
ea  exp^ditiona  dont  leur  d^livranceaem- 
blait  le  but.  Gontinuona  done,  au  point 
de  vue  de  la  Syrie  aeulement,  ce  long 
martyrologedeaCbr^iensd'Orientqu'on 
a  dMor6  d*un  nora  si  pompeux  dana 
Fhistoire ,  mala  qui  ne  fut  pour  lea  eon- 
temporaina  qu'une  ^poque  de  calamity 
aana  ceaae  renaisaantea. 

La  croisade  dite.  quatri^me  est  par- 
faltement  nulle  :  aucun  bon  aentiment 
ne  Fa  excite,  ainon  les  suppiicationa 
d*un  vieillard  de  quatre-vingt-dix  ana, 
le  pape  C6lestin  III.  Mais  le  malheureux 
vlcaire  de  J^sua-Christ  trouva  Richard 
dto>urag6,  Philippe- Auguste  interess^ 
h  agrandir  son  royaume;  et  illui  &llut, 
en  d^aeapoir  de  cause »  a'adresser  k 
Henri  VI,  empereur  d'Alleraagne,  qu'il 

(*)  Toyei  Bmad-Eddln,  eitraiti  de  VBclair  (h 
laSffntf  Al'borak9l'CKamL 


avait«xcommuni<  un  an  auparavant.  Ce 
fourbe  ambitieux  et  habile ,  aoua  le  pre- 
texte  d'une  croisade,  son^ait  k  a^m- 
parer  de  Maples  et  de  la  Sicile,  ce  qu'ii 
fit.  De  cette  fagon ,  il  n*y  eut,  en  r^- 
lit^ ,  qu'une  femme  fiddle  au  aerment 
aacr^;  ce  fut  Marguerite  de  Hongrie, 
aceur  de  Philippe  de  France.  Pdurtant 
une  exp^ition  quitta  FAllemagne,  et 
commit  encore  la  faute  de  se  diviaer  en 
deux  partiea.  La  premiere,  sous  le  com- 
mandementde  FarcheWSque  de  Mayenoe, 
vint  fort  mal  k  propoa  rompre  la  tr6ve> 
faite  avee  Saladm.  Malgr^  les  observa- 
tiona  aena6es  d*Henri  de  Champagne, 
qui ,  quoiquMl  ne  fQt  roi  de  Jerusalem* 
cnie  de  nom ,  n'en  ^tait  pas  moins  le  re- 
(hr^sentant  le  plusconsiderable  dea  Cbrd- 
tlens  d*Orient,  les  Allemanda,  dans  leur 
orgueilleux  enUStement ,  ne  voulurent 
rien  entendre,  et  commenoerent  lea  hoa- 
tilites.  II  en  r^ulta  que  Malek-Adhel, 
auccesseur  de  Saladin ,  r^nit  aea  ^mira 
et  leurs  contingents;  et  d^  que  son. 
arm^  fut  rasaemblte ,  il  a'en  alia  battre 
les  Allemaoda  dana  la  montagne  de  Ma-- 
plouae^ 

La  aeconde  partie  des  forces  chr^ 
tiennea,  sous  les  ordres  des  dues  de  Saxe. 
et  de  Brabant,  arriva  trop  tardpour  em- 
p^cher  Jaffa  de  tombec  au  pouvoir  dea 
Musulmans.  Ausai,  apr^diverses  alter- 
natives militairea,  dont  aucune  ne  pou- 
vait  ^tre  d^nitive,  la  discorde ,  Fen-, 
vie  ^  la  haine,  aepar^rent  les  Chretiens 
d'Asiedes  crois^,  et  neutralis^rentleurs 
efforta  divergenta.  Les  Allemands  ne 
combattaient  que  pour  For  que  leur  £ii- 
aait  distribuer  Henri  VI :  une  fois  que 
ce  dernier  eut  attaint  son  but,  tout  eu- 
rop^en  et  tout  tempore!,  sa  main  ai  pro^ 
digue  se  ferma,  et  aes  aoldata  se  de- 
band^rent,  ne  laiasant  sur  les  rivages 
de  Syrie  que  dea  cadavres,.desennemi8, 
et  les  Chretiens  d*Orient  plus  ch^tifs  que 
jamais. 

Si  les  Synens  durent  se  oonsid^rer, 
api^  le  depart  dea  Allemanda,  comma 
d  autant  ^lua  malheureux  que  la  rupture 

Jju'on  avait  op^r^  si  malaoroitement  de 
a  tr^ve  conclue  avee  Saladin  faisait  mal 
proffer  de  celle  de  troia  ana  qu'avait 
accord^  Malek-Adhel,  ila  concurent  ce- 
pendant  quelque  eapoir ,  lora  de  F^I6va- 
tiond'Innocentinau  trdne  pontifical.  Ce 
pape,  ausai  6clair6  qu'^nergique,  fit, ea 


843 


LUNIVERS 


effet,  pr^er  iiiie  nooveHe  croisade  tout 
aussi  bien  en  Allemagne ,  en  France,  en 
Angleterre  qn'en  Italie.  Aussi  ardent 
dans  sa  ToIont6  que  dans  son  ex^tion, 
il  r^olut  le  premier  de  donner  Texem- 
pie  des  sacrifices  a  faire  :  ne  pouvant 
pas  marcher  comme  soldat,  il  voulut  con- 
tribuer  h  la  guerre  sainte  par  Fachat 
des  sobsistanciss  et  des  armes.  En  con- 
s^uence  il  ordonna  qu'on  fondtt  sa  vals* 
selte  d*or  et  d'argent ,  ddclarant  qu'il  ne 
se  servirait ,  p^ant  toute  la  dur6e  de 
la  croisade,  que  de  vases  de  bois  et  d'ar- 

gilen. 

Mais  I'^t  agit6  de  I'Europe,  ses  dis- 
soDSkms  int^rieures ,  ses  euerres  inter- 
ndlMibies  entre  princes ,  (retaient  \k  des 
obstacles  qu'il  toil  bien  difficile  a  In- 
nocent III  de  surmonter.  Aussi,  malgr6 
tous  ses  efforts,  n'aurait-il  pas  pu 
meftre  en  branle  une  nouyelle  arm^e  de 
la  croix ,  si  ua  seeond  Pierrre  FErmite 
ou  plutdtun  second  saint  Bernard  n'avait 
sargi  tout  ^  eoap  li  Neuilly  sur  Mame. 
Foulque,  le  simple  eur^,  vint  en  aide  au 
souverain  pontile:  il  s'en  alia  pr^cher  la 
croisade  par  monts  et  par  vaux  ainsi 
que  ses  pr^d^oesseurs.  Ajant  appris 
gu*un  grand  tournoi  devait  avoir  lieu 
a  ia  cour  de  Thibanit  IV ,  comte  de 
Champagne,  il  y  apparut  tout  k  coup, 
fit  honte  aux  chevaliers  r^unis  de  leurs 
jodtes  inutiles ,  de  leurs  jeux  improduc- 
tife,  et  par  ses  paroles  61oquentes ,  de 
gens  de  plaisir  il  flt  des  §ens  de  guerre , 
de  chevaliers  en  liesse  il  fit  d'austdres 
erois^s.  Puis,  passant  en  Flandre,  il 
augmenta  de  jour  en  jour  le  noyau  de 
son  exp^itlon  sainte,  si  bien  qu'au 
commencement  de  Pan  1 20)  one  nou- 
velle  arm^  se  trouva  pr^te^  partir  pour 
la  Syrie. 

Malheureusement  les  chefs  de  cette 
arm6e  de  Flamands  et  de  Oiampenois , 
dans  le  louable  but  d'^viter  les  dangers 
et  surtout  les  lenteurs  des  exp^itions 
prec^dentes,  r^olurent  de  se  rendre 
par  mer  en  terre  sainte.  Or,  il  fallait  des 
vaisseaux,  et  les  V^nitiens  ^taient  senis 
capables  d'en  foumir.  Ceux-ci ,  toujours 
int^ress^,  demand^rent  85,000  marcs 
d'argent  pour  transporter  les  croises  en 
Syrie.  Les  erois6s  ne  purentr6unir  cette 


(*)  Voyez  Muratorl  el  Balaze»  Tie  <nHn<h 
€6ni  ill. 


^norroe  somme ,  ot  Tadnrit  doge  D» 
dolo  proposa  aux  naifii  FlanoiMbdeW 
prendre  la  ville  de  Zara  oomoae  appilt 
de  la  location  qa*il  leur  fiteit  ^ 
mi^  dMation  de  la  en^sade,  fate 
bientdt  suiviedHine  aolare  beaampiki 
eonsid^able.  De  Zara  od  se  dlriaeii* 
Constantinople.  On  Toulait  r^ldir  ■ 
certain  Alexis  sur  le  trdne  byzaalia;* 
rcfliBinkii 


fit  le  si^ge  de  la  capitate  de  I 

la prit,  on  la'  saccagea;  on  y  ioMkm 

Srmce flamand,  et  les  paavres  CI  *^"" 
*Orient  attendirent  en  vain  k  i 
qui  leur  avait  ^t^  si  fastoe 
nonc^.  Les  croisfe  avaient  reoeoalil« 
chemtn  oe  qa*iis  Toulaient,  des  oonMik 
des  pillages,  des  maasaeres,  de  Firi 
voler,  des  femm^  a  Tioler ,  des  na  I 
boire :  que  leur  importaientleisoalto 
ces  de  leurs  frares  en  J^sva-Clnt  dli 
d^faitedelacroix! 

A  coup  sdr,  entre  les  plus  hoatana 
exp^itions  guerri^res  cette  doqvite 
croisade  est  la  plus  honteuse.  Elleitf 
aassi  i^oUe  cpe  stupide  :  oesoatte 
aventuners  ridicules  exploit^  pv  te 
Qsoriers  avides,  des  cbevalien  vradH 
de  la  plaa  basse  espeoe  qui  ae  wM 
aux  gages  de  la  riche  et  avare  Ven. 
Puis  tromperie  sur  tromperie,  e&nm 
a  eorsaire  :  ia  jeuoe  AJexis  cbeRte  i 
berner  les  croises  qui  lui  ont  mdi  9m 
trdne  a  des  conditions  trop  dons? ^M 
on  debitear  qui  ne  vent  pas  PV*!^ 
detta  toonne  que  sa  detresae  ami  a 
fait'conseotir.  Eolin ,  surrial  siin* 
gant  sans  eoura^  et  sana  gMs^latt* 
zoufle,  qui  ne  sait  qae  ooaamettie  ^m 
sur  crime,  perfidie  aur  poMs.  Ui 
excds  des  crois^  avaient  m  tela  iQB» 
tantinople,  qu'Innocent  Oi  leor  aaft 
honte.  Pouitant  il  eonfirma  rMnri* 
de  Baudouin,  comtede  Flandre,  aattiv 
byzantln.  Ce  dernier  ne  fut  |kb  ka|> 
temps  tranquiUe :  on  se  aonleva  cart* 
son  usurpation  en  Tbraer;  les  GaV 
s'ailierent  centre  hii  avee  in  liulff*^ 
battirent  la  louide  eavalerieflaniandt^ 
vantAndrinoplcets'emparerent^a^ 
vei  empereur.  Son  fr^  Henri  i'  "^ 
nault,  vittttcop  tard  k  sonaeeon! 
assez  t6t  pour  re^joer  dix  ana  O- 
IXurant  ces  ^pisodea  do  oefW| 
toutes  temporellffs,  les  soldats  de  lass 


n  Voyei  Hio6UH  Chooiateet 


SYRIE  MODERNE. 


843 


wiiilnieQl  M  Syrle  de  la  famiiie  H«  1& 
^te  el  des  iremblefneiitB  da  terre.  Cette 
lerni^  ealamiU  foppa  partieulite- 
neot  Damas,  Tjrr,  Ptoltoais,  Tripoli  et 
Naploiise.  Mais  comme  si  la  fareur  das 
^l^ments  n'edt  pas  ^t^sufifisante  k  la  des- 
ractioa  das  raees  syricnnes,  la  fureur 
lea  liomioes  ?iot  s'y  joindre.  Las  Hos* 
^talien  et  las  Tampuers ,  eas  soldats 
noiaes  cr^  pour  seeourir  rhumanit^. 
He  scrvaieot  plus  qa'k  la  penteiter.  Gas 
leax  ordras  religieoi ,  dana  le  dtiiie  de 
la  jaloosie ,  se  eombattireot  avee  autant 
de  rage  qu'ils  ea  auraieot  pa  montrtr 
contra  lea  Musulmaos ,  et  portdrent  par 
leutes  las  possessions  ebr&ieniies  le  far 
H  le  feu.  Dans  cette  anarehie  gto^rale  ^ 
Tombre  m^med'un  poavoir  eentral  vint 
i  Dianaaer :  Amaury  mort,  on  fut  oblige 
le  s'aoreser  an  roi  de  France  pour  lui 
Lrouver  an  auooassear.  Jean  de  Brienne 
fat  ehoisi  par  Pbilippe-Auguste;  mala 
le  malheareax  prince  ne  put  trouver 
ians  toute  FEarope  que  trois  cents  che- 
raliers  pour  lui  faire  eort^e,  et  II  n'ar- 
riTa  en  Syne  que  pour  voir  toutes  ses 
brteresses  tomoer  les  unes  aprte  les  ao- 
ves  au  pouvoir  de  Malek-Adbel ,  et  son 
riste  royaume  bientdt  r6duit  k  la  seule 
rille  de  Ptol^mais« 

SIXlibcB  GBOISADB. 

Jamais  la  chr^ent^n'avait^t^aussibas 
\a  Orient.  Elle  tendi  t  encore  one  fois  ses 
nains  suppliantes  vers  I'Europe;  mais 
'Europe  se  oonsuoiait  au  fieu  sioistre  des 
Mssioos  royales,  et  Innocent  III  mou* 
-ut  avant  a  avoir  pu  envoyer  Taumdne 
funsoldatases  fil8d*0rient.Qaedireeii- 
iore  I  Honors  111  ne  put  faire  partir  pour 
a  Palestine  que  guclques  Allemands  et 
Hidques  Hon^is^souslesordres  d'An- 
M II.  Celui-ci ,  apres  quelques  inutiles 
xcursions  sur  les  rives  du  Jourdain  et 
ontre  le  moat  Thabor,  s'en  retourna 
[toiuras6.  Pour  le  remplacer  vinrent  k 
A  suite  les  uns  des  autres  des  Francis, 
es  Italiens,  de  nouveaux  Allemands, 
aioqueurs  des  Maures  en  Portugal :  et 
B  Terre  Sainte  devint  encore  une  fois  le 
hamp-clos  de  soldats  amoureux  des 
ataiUes,  qui  guerroyaient  beaucoup 
ilus  par  int^r^t  que  par  religion.  En 
318  la  mort  de  Malek-Adhel  sembla 
levoir  rendre  quelque.espoir  aux  Clire- 
iens.  Cette  mort  pourtant,  loin  de  leur 


proftter,  les  autorisa  5  iT^adormir.  Ce- 
taitd'une  part  une  apatliie  oonpablech^z 
les  Syriens;  c'toit  iPaotre  part  une  per- 
p^tuelle  promenade  decroiB^s  nonvAiax 
et  un  inrompt  depart  de  eeux  qui  avaient 
une  lois  toucb^  la  Palestine,  cette  terre 
de  larraes  et  de  missies  ^temelles. 

Enfin  le  pr^lat  PHage  arrive.  Loin  de 
s*ooeuper  de  J^salem,  on  assi^eait 
Bamietle.  Cette  ville  fut  prise  au  bout 
de  seize  mols  de  si^.  Une  fois  \k  Far- 
dent  Pelage  voulot  pousser  jusqu'au 
Kaire.  Jean  de  Brienne  s'y  oppose; 
mais,  pour  le  malheur  de  la  croisade,  le 
l^t  du  papa  Femporta  sur  le  roi  de  Je- 
rusalem. Les  croises,  en  eff^,  furent 
d'abord  arr^s  dans  leur  marche  en 
£gypte  par  de  noirs  £thiopiens ,  sorte 
de  oetes  fauves  qui  les  attaquaient  aveo 
furie,  etqui  se  suocMaient  innombra- 
bles  sous  leurs  coups.  Puis  la  nature 
vint  encore  au  seeours  de  la  contr^e  en- 
vahie  :  le  Nil  d^borda ;  et  son  inonda- 
tlonsubiteemporta  dans  ses  ondes  bouil- 
lonnantes  des  bataillons  entfers.  Dans 
cette  extr6mit6  Forgueilleux  Pelage  fat 
oblige,  pour  sauver  le  reste  de  son  ar- 
m^e,  de  trailer  avec  son  ennemi  le  sul- 
tan Malek-Kbamel,*  et  de  proinettre  d'a- 
bandonner  Damiette  et  de  se  retirer  k 
Ptoiemafs.  Ainsi  toojours  les  m^mes 
fautes  :  da  courage  d^pens^  en  pure 
perte,  une  arrogance  ridicule  au  moindre 
sucees,  un  d^sespoir  insurmontable  au 
moindre  ^cbec.  En  somme,  que  voyons- 
noos  sans  cesse  obex  les  croises  d 'Eu- 
rope? Orffueil,  presumption,  et  pro- 
ibnde  indifference  pour  le  sort  des  Chre- 
tiens d'Orieut  :  tant  quMis  sont  victo- 
rieux ,  les  croises  vont  en  avant  pour 
piller ;  quaod  its  sont  vaincus,  ils  se  rem- 
narquent  au  plus  vlte,  et  abandonnent 
leurs  fireres  sans  aucun  scrupule  (*). 

Gependant  la  politique  de  FEurope 
etait  en  pleine  contradiction  avec  ses 
mceurs  actuelles  ettous  ses  antecedents. 
Innocent  III,  malgre  ses  talents,  n'avait 
pas  peu  contribue  a  confusionner  les  es- 
priu.  En  effet,  apres  avoir  ordonne  la 
cruelle  croisade  centre  les  Albigeois,  il 
en  Vint  plus  tard  k  bidmer  onvertement 
la  barbarie  de  Simon  de  Montfort  et  son 
ambition  de  bourreau.  D'nn  autre  c6te, 

n  Voyez  le  coDUnoatear  de  GuUlnuue  d» 
Tyr.et  IbD-Djouzl  alnsI  qulbo-Fdntz. 


L*UNIV£RS. 


il  soutint  la  maisoD  de  Sonabe  eontre 
Othon  de  Brunswick,  else  fit  ^belin. 
quand  tous  sea  pr^^cesseurs  avaientm 
guelfes.  Puis,  il  semble  toot  a  eoap 
renoQcer  h  soutenir  lea  liberty  religieu* 
sea  et  monicipaleaf  ce  qui  pourtaot  ^tait 
le  beau  rdie :  il  anaule  la  grande  Gbarte 
anglaise,  arracbto  an  roi  Jean ;  il  bldme 
Tarchev^ue  de  Canterbury  d*6tre  all^ 
trop  loin  eontre  son  prince  temporal. 
En  un  mot  il  veut  concilier  les  pf^ten- 
tions  et  n*allume  que  leshaines ;  li  cher- 
che  a  mod^rer  les  bommes,  et  ne  parrient 
qu*a  les  irriter  de  pins  en  plus.  Ses  suc- 
cesseurs  k  la  cbaire  de  Saint-Pierre  torn- 
bent  dans  les  mimes  erremeDts.Gr^oi- 
re  IXse  fait  tour  a  tour  Tami  et  Tennemi  • 
deFr^dricIld*AUemagne:  tantdtiU'ap- 
pelle  son  tr^-cher  file  et  le  nomme  chef 
de  la  croisade ;  tantdt  il  lance  eontre  lui 
toutes  les  foudresdu  Vatican.  Cette  in- 
coh^nce  dans  Tespritdes  diefe  saoer- 
dotauz  et  militaires  fit  le  plus  grand  tort, 
au  commencement  du  treizieme  sitele, 
a  la  foi  religieuse.  Les  uns  Tabandon- 
n^rent  presque;  les  autres  devinrent 
plus  fanatiquesque  jamais.  Le  plus  grand 
exemple  de  cette  folic  g^ndrale  eut  lieu 
durant  la  sixi^me  croisade. 

Frederic  II,  quoique  d'unepeti  te  taille, 
d*une  vue  myope,  d'une  tete  6troite, 
^tait  un  prince  d'^ergie  et  de  talent. 
Parmi  les  accroissen^pts  divers  de  sa 
fortune,  il  ne  dedaigna  pas  de  se  laisser 
appeler  au  trdne  de  J^salem.  Mais  au 
moment  de  partir  pour  sa  nouvelle  con- 
qu£te,  le  paj)e  Texcommunia,  et  son 
arm^  de  croisds  sedissipa  sous  ses  yeux. 
Cependant  Malek-Khamel,  inqui^te  par 
I'ambition  de  ses  competiteurs  au  trone 
d 'Orient,  et  ayant  appris  par  la  renom- 
mee  la  puissance  et  Taudace  de  I'em- 
pereur  germain,  songea  a  se  s^parer  le 
monde  avec  lui.  11  envova  done  des  am- 
bassadeurs  k  Fr^d^ric if,  lui  proposant 
une  alliance;  et  pour  la  cimenter ,  pro- 
mettant  de  lui  rendre  B^thl6em  et  Je- 
rusalem, k  la  fois  le  berceau  et  le  torn- 
beau  du  Christ.  L*offre  ^tait  engageaote ; 
et  Fr^d^ric  II  partit  en  reamer  Tex^- 
cution.  Mais  yoil^  bien  la  d^aison  la 
plus  ridicule  etla  plus  funeste  qu'on  vit 
jamais!  Sous  le  pr^texte  que  Frederic  II 
etait  excommunie,  les  Chretiens  d'O* 
rient  refusent  d'entrer  avec  lui  a  Jeru- 
salem, et  d'en  prendre  possession.  Fr6- 


derie  11  est  obiig<  de  pteetnrmen 
seuls  bafODS  dans  le  saint  MifKlm.k 
placer  lui-mtoiesursattoUeoonaii 
Jeru8alem»  et  de  &ire  ooavrir  lai^R' 
cationsdo  people  par  les  aedanatigifitf 
ses  oourtisans.  A  Ptoieoiais  hneefte 
qu*on  lui  fit  fut  encore  pliis<K|ilm: 
les  prltresavaientfulmmeriflieriitB 
la  YiUe  tant  que  remperaor  ?  iqo» 
rait ;  les  statues  des  saints  euioiti- 
l^es,  lesaotels  denudes,  les cniin- 
vers^es;  on  ne  ebantait  pkn^oiBt 
soonait  plus,  les  pritrei  diuBih 
messe  k  voix  basse  et  portes  (iim\t  , 
cequietait  pis  enooEe,lesaiortseta«i 
emport^s  de  lear  demeoze  nns  ti» 
monie  et  sans  prieres,  et  ensefdute 
des  terres  non  eonsacrte.  Fomfati 
Frederic  II  de  quitter  eette  phpfiit 
maudissait,  et  dont  les  babitams  etMi 
assez  stupides  pour  ne  pasaooefMerk 
bien  qu*il  leur  offralt  C)* 

Apr^  Frederic  II  rexcofflimmi^  ■» 
le  triomphateur ,  vinreot  toor  i  tw 
Tbibaut  de  Navarre,  poeie  bcii,  ■■ 
prince  battu ;  et  Henri  ID  d*AogklaR^ 
petit-fils  deRidiard  Coearde-IMsn 
aabord  par  la  renomm6edesQBaKft^ 
mais  incapable  d'y  rienajooter.GBte 
derniers  princes  ne  firent  que  des  t» 
tatives  sans  r^sultals,  ^  s'enreua* 
rent  en  Europe,  Pun,  rABgiais,oM 
abouti  qu'a  rendre  les  hoBoettrgdea» 
puiture  aux  morts  que  raatit,le]^ 
varrais,  avaient  laisMs  sor  leeki^* 
bataille  de  Gaza.  £n  r6ud,(^ 
sixieme  croisade  n*e8t  pas  edridk** 
expedition  unique,  ayant  on  M^ 
mme,  une  armee  homogeoe,da  v 
avec  un  plan ,  des  soldatsavee  vfr 
cipline;  c'est  plutdt  une  proeeooi* 
chevaliers,  et,  pour  ainsiaire,oMP^ 
menade  militaire  de  crois^  aDitesi 
£lle  neproduisit  absolument  ria  f 
Ihabitude  du m^pris  des  trait6,|if 
rompait  ou  qu'on  signait  au  cipnta 
chacun,-  et  par  la  elle  ameoa  a  la  Fas- 
tine  une  nouvelle  cause  ded^cadeoM 
fit  plus  inoonsistante  que  jamais  U«t^ 
nee  des  Chretiens  d'orient. 

(•)  Voyfa  Jean  VllUnI,  ilitioSn  iifltii^' 
et  Frao^oto  Pipio,  Chromigue  it  F.  r. 


STRIE  MODERNE. 


S45 


LBS  TATAB8*]IOaOL8  BT  LBS  KHA- 
BISMIBN8. 

Comme  s'il  ne  suffisait  pas  de  I'an- 
igODisme  des  Chretiens  et  dss  Musai- 
lans  poor  niioer  la  Syrie,  de  nouveaux 
nnemis  Tinrent  encore  t'abattre  sur 
lie,  et  rachcYer.  l^eNord,  si  prodigae 
B  races  innombTables  et  barbares, 
pi^  avoir  fourni  les  Scythes  contre 
empire  ffrec,  les  Hoos  contre  rempire 
omain,  Tes  Abares  contre  Tempire  by- 
antin,  rtervait  d^autres  masses  plus 
srribles  encoreeontre  TRurope  et  i'Asie 
a  moyen  im.  Descendos  des  plateaux 
iae^  de  la  Sib^e,  les  Tatars-Mogols, 
B  s'aebeminaut  inatinctiveinent  vers  le 
[idi ,  groBsireot  leurs  bordes  erraotes 
isqu'a  en  former  des  masses  de  quinze 
snt  mille  Ames.  Ge  n'^tait  j^  une  ar- 
)ik,  c*toit  une  nation  ^migrante,  le 
ar  et  la  torche  h  la  main.  Compost  de 
ibus  f^roees  de  toutes  espeees,  mon- 
is  sur  des  cheraux  aussi  infatigables 
ii*eux-m^mes,  tratnant  a  leur  suite, 
ir  de  grossiers  cbariots,  leurs  femmes, 
urs  enfants  et  leurs  vieillards ,  vivant 
1  besoin  du  lait  de  leurs  chamdles,  ar« 
1^  d'arcs  ^oormes  et  de  ileches  empoi- 
Hinto,  sans  liens  sociaux,  sans jpatrie, 
^bres  et  intr^pides  k  la  fois,  les  Tatani- 
logola  devinrent  la  terreur  de  toute 
s  contrte  qu'iis  travers^rent.  Un  sid- 
ednrant  ils  secontent^rentd'envahir, 
sravager,  de  dtoimer  la  Chine,  et  d'en 
oublerpour  longtem^  rimm^moriale 
▼ilisation.  Mais  tout  a  coup  a  ces  ban- 
es indiscipline,  ^cescbefs  envieux  les 
us  des  autres,  il  arriva  un  maltre  puis- 
int,  Gengiskan  (Djenghuis-Khan,  le 
Mdesrois). 

Enfant^ ,  selon  la  sopersUtion  de  son 
lys ,  par  un  rayon  du  soleil ,  venu  an 
onde  avec  du  sang  caill^  dans  une 
ain ,  prtoge  sinistre,  signe  de  fl^u 
I  Dieu ,  Gengiskan  d^  I'lge  de  qua- 
rze  ana  accumulait  les.  prodises  de 
leur,  et  se  faisait  6lire  chef  de  la 
ibu  des  Karaites.  Avec  elle  il  rava- 
ait  une  demise  fois  la  Chine;  et, 
renu  Tainquenr  et  couvert  de  butin 

cette  terrible  exp<^ition ,  il  se  d^la- 
It  mattre  du  monde ,  pretendait  que 

titre  supreme  lui  avait  6te  apport^ 
I  ciel  par  un  proph^te,  mont^  sur  un 
eval  blanc;  et  grdce  au  prestige  de 


sa  force  fndomptaUe ,  de  ses  exploits 
nombreux  et  de  son  audacieuse  impos- 
ture, il  a^lom^rait  autour  de  lui  des 
myriades  mfinies  de  cavaliers.  Son  im- 
mense arm^  se  pr6c(pita  comme  une  \ 
trombe  de  fer  sur  Tempire  des  Kharis- 
miens.  Mohammed,  sultan  du  Kha- 
risme,  malgr^  ses  cinq  cent  mille  com- 
battants,  dotcMerdevant  ce  cataclysme 
homain.  Puis  les  Tatars,  victorieux,  se 
r^pandirent  de  la  mer  Caspienne  a  la 
mer  Noire,  p^n6tr^rent  de  la  en  Russie, 
en  Pologne,  en  Hongrie,  et  jusqu'en 
Bohtoie.  UEurope  s'epouvanta  a  leur 
approche;  on  les  redoutait  en  Frise  et 
en  Danemark  aussi  bien  qu'i  Rome ;  on 
croyait  k  tout  instant  et  partout  voir  ap- 
parattreaux  diffi^rents  horizons  la  pous- 
si^re  de  leurs  chevaux  k  tous  crins,  et 
par-dessus  le  poitrail  de  ces  b^tes  6che- 
veie  les  tdtes  jaunes  et  monstrueuses 
de  leurs  maltres  (*). 

Cependant  les  Kharismiens,  refoul^ 
par  leurs  vainqueurs,  se  pr^ipiUrent 
oomme  des  fous  et  des  atfam^  sur  la 
Mesopotamia  et  la  Syrie.  Dans  leur  d61ire 
farouche  ils  semblaient  vouloir  se  venger 
sur  les  malbeureuses  populations  chrd- 
tiennes  de  la  d^faite  qui  les  avait  priv^ 
de  leur  empire.  Leur  avant-^arde  etait 
compost  de  durs  soldats  qui  portaient 
k  leur  lance  les  chevelures  de  leurs  vic« 
times.  Dans  leur  rage  ils  immolaient 
aussi  bien  les  Chr^iens  que  les  Musul- 
mans.  En  cette  calamit6  g^n^rale  les 
peuples de  Syrie oubli^entleur rivalit^ 
religieuse ,  et  s'unirent  pour  combattre 
Fennemi  commun.  Les  soldats  du  Christ 
et  ceux  de  Mahomet,  malgr^  leurs  efforts 
^gaux ,  ne  purent  emp^cher  les  Kharis- 
miens d*entrer  a  Jerusalem,  d'y  mettre 
tout  a  feu  et  k  sang,  et  de  massacrer  les 
femmes,  les  enfants  et  les  vieillards  r^- 
fugi^  dans  T^lise  du  Samt-S6pulcre. 
Pour  vei^r  cette  abomination ,  Chre- 
tiens etlmisulmans  se  r^unirent  de  nou- 
veau,  lutt^rent  deux  jours  contre  les 
Kharismiens ;  mais  ils  ne  purent  r6sis- 
ter  k  la  foucue  de  leurs  ennemis  :  les 
Musulmans  oattirent  en  retraitesur  Da- 
mas  ;  et  les  Chretiens  furent  ^  tel  point 
d^cimes,  qu*il  ne  revint  k  PtoI^maTs  que 
trente-trois  Templiers,  vingt-six  Hospi- 

(*)yoyesAbel  ^imvMi,  RecherchetiurUs. 
Tariarei,  et  de  Guignes,  Histoire  deiffunt. 


S40 


L'UN!VERS. 


taliers  et  trois  chevaliers  Teutoiuqiies. 
Pour  oeUe  fois  c*en  ^tait  fait  d^fiuilive- 
ment  dea  possessions  chr^ilenoes  ea 
Orient,  si  Dieu  ne  leur  avail  envoys  un 
saint  pour  retarder  ieurd^faite,  Louis  IX 
de  France. 

SA^IIIT  LOUIS. 

Fait  inoui  jusque  alors  I  Innocent  IV , 
entrain^  par  sa  haioe  contra  Fr^d^ic  II^ 
qui  s'etait  adress^au  roide  France  oomme 
inediateur  entre  lui  et  le  souverain  poo- 
tife,  s'oppose  de  tout  son  poavoir  an  d^ 
part  de  saint  Louis  pour  laTerre  Sainte. 
Quelle  deplorable  vari^te,  quelle  funeste 
contradiction  dans  cescroisades  1  La  sep- 
ti^e  a  pour  adversaire  un  pape.  Celt 
que  saint  Louis  seul ,  k  cette  epoque , 
comprenait  I'union  catholique ,  la  fra- 
ternite  evang^lique,  la  solidarity  chr^ 
tienne.  Aussi  son  arm^  est-elle  la  v^ 
ritable  £clise  :  il  y  r^unit  ies  proscrits 
d'A  ibi  etoe  Toulouse  aux  plus  ardents  pa- 
pistes,  Ies  ^elfes  aux  gibelins.  Son  ex- 
pedition,  SI  Ies  homrnes  de  son  temps 
eussent  €t^  meilleurs,  aurait  offert 
Texem  pie  d' u  ne  guerre  reellement  sa  i  nte, 
reactive  contre  Ies  traiteinents  cruels 
que  Ies  Musulmans,  pouss^s  k  bout, 
avaient  iniliges  aux  Chretiens,  mais  r^ao- 
tive  seuleiiient  par  la  douceur  envers  Ies 
prisonniers,  par  la  gen^rosite  en  dehors 
de  Taction  du  combat,  par  la  grandeur 
et  par  la  noblesse.  Malheureusement 
saint  Louis  ne  commandait  ni  a  des  hom- 
rnes vertueux  coniaie  lui,  ni  a  des 
troupes  disciplinees  :sessoldatsn'etaienl 
pas  mSme  h  demi  polices  1 

Malgr6  Ies  exhortations  de  sa  mere, 
Blanche  de  Castille,  Louis  IX  se  croisa 
avec  ses  trois  fr^res  :  Robert,  comte 
d'Artois,  Alphonse,  due  de  Poitiers, 
Charles ,  due  d'Anjou.  Sa  croisade  eut 
tout  d*abord  Ies  caracteres  de  la  charity : 
le  roi  ordonna  k  ses  juges  d'activer  tous 
Ies  proces ;  aux  chevaliers  feodaux  en 
querelle  de  jurer  entre  eux  une  tr^ve  de 
cinq  ans;  k  ceux  qui  tenaient  d^  biens 
injustement  de  Ies  restituer  sur  1  heure; 
aux  barons  rigoureux  envers  leurs  vas- 
saux  de  leur  demander  pardon.  Saint 
Louis  voulut  aussi  faire  participer  le 
peuple  a  son  entreprise.  II  emporta  des 
instruments  aratoires,  afin  d*etablir  une 
colonic  agricole  en  £gyptc.  En  outre  il 
avait  fait  creuserle  porta'Aigues-Mortes 


pour  entreteair  plus  tari  des  nph 
commerciaux  avec  rQrienl(*). 

La  croisade  de  saint  Loois  fot,  k 
leste,  une  suite  d'actioos  ooUttet  g» 
reuses  de  sa  part  plmdt  qu'ufle  e^ 
tion  utile  aux  Syriens.  Aioa^pitifii- 
gnes^Mortes  en  automoe  avce  d^Hlt 
mille  hommes,  ii  fut  fonidemt 
cale  en  Cbypre.  Cette  tie  fdi>to9B 
line  sorte  de  lieu  de  deiieesiteifnii 
abondants  desonsd,  lesmaontam 
ses  et  inlompMes  de  sss  haiMi, 
parvinrent  k  eomnipre,danBtk^ 
jour  d'une  saison ,  rann6e  ds  nini. 
Ce  dernier  fat  fortk,  parMjisls^ 
primandes,  par  r^oagie da  saiUBi 
par  la  s^v^nt^  de  ses  ordosBMKS,* 
rendre  k  see  soldats  le  sntiBal* 
rhonnear,  dn  devoir  et  de  la  £fdpfe 
MalheureosemeBt,  enquitiiDteetiitBR 
de  moltesse  et  d*abtodiBaMt,  ■ 
lieu  dese  dinger  SOT  la  Syrie,iienrtp^ 
xAt  devoir  attaqoer  la  puiasaaceft 
sulmaneen  £gypte  q<i*ao  pal  di  1^ 
ban.  II  fit  done  voile  venD»«^<t 
a  peine  aborde  ii  sa  plage  saUvnas^ 
il  donna  Texemple  de  Tintrqiidii^  ■ 
se  prdcipitant  l\in  desprenimfaii 
rivage.  L*6mir  Fakr-Bddin,  m  ■ 
puissante  arm^  de  tore  «l  **; 
attendait  Ies  croisds;  maisles  Mff^ 
ne  purent  roister  a  V&»  i"?** 
des  Cbrdtimis  :  leurs  troupes  fcwJJ 
fonoees,  disperse,  lean  vaiajoW^ 
Ies ;  la  d^route  parml  eux  ft^^JifS 
ne  song^ent  mtoie  pas  kms»^ 
ville,  et  qu'ils  dvaeu^rent  Daoi^'^ 
oser  r^sister  un  instant  demei««F 
santesmurailles.  - 

Les  croises,  a  peuiematw^ 
cite  opulente,  tomberent  ^'•JJ* 
dans  les.d^sordres  et  ks  de#i|* 
de  toutes  espies.  Its  en  Tinn** 
a  m^onnattre  I'autoritd  du  pw|» 
peetable  des  souverains.  Iosooo»i< 
leur  propre  vie,  on  les  voyait<l«'J! 

Postcs  avancds  s*adonoer  an jeBi* 
orgie,  plutdt  que  de  repounec  |fr 
cursions  des  Arabes-Bcdooii»g*J 
vaient  jusque  dans  leur  eaop  WBJJ 
enlever  des  prisonniers.  CetliiBIJj 
de  quelques  partisans  audscietf  »•■ 
Tespoir  au  suhan  du  Raire.  H  »W 

D  Voyei  rabbd  de  Choliy,  '**'* 
Lcwtt. 


L 


SYRIE  MODBRNE. 


347 


MM  de  rdevtr  le  moral  de  ses  popula- 
HIS,  de  rassembler  une  nouvelle  armte 
as  considerable  que  la  premiere;  et 
ooofiance,  qui  reoaissait  de  jour  en 
ur ,  fot  eneore  augment^e  par  la  nou* 
lie  de  la  prise  de  Sidon,  due  k  la  vio- 
ire  des  Husulmans  de  Damas  sur  let 
u^tieos  de  Sy  rie.  U  ne  fellut  rien  moint 
le  le  d^barquement  du  comte  de  Poi- 
are  avec  Tarndre-ban  des  chevaliers 
uiotispour  secouer  raraihiedeacroi- 
s,  a6j^  eff(§min68  par  le  climat  oriental. 
intLouiSfd'ailleurs,  profitadePardeur 
s  Doureau-venus  pour  faire  bonte  a 
3  aodennes  troupes.  Malbeureuaement 
ur  la  chretient^,  si  saint  Louia  avait 
ites  les  vertus  d'un  roi ,  tout  le  cou- 
IB  d*un  guerrier  sans  peur  et  sans  re« 
Mbe,  11  ne  montra  pas  toujours  toute 
prodenoe  d'aa  g^n^ral  consomni^. 
Dsi ,  avec  une  arm^e  qui  ne  pouvait 
ievoir  ni  recrues  ni  ravitaillement, 
leeraignit  pas  de  s'enfonoer  aucoeur 
IB  vaste  empire  et  de  marcher  a  la 
iqu^e  du  Kaire.  Sea  premiers  pas 
«nt  des  succ^.  Sea  ennemis  ne  pu- 
it  emp^cher  sa  marcbe  sur  ie  bord  da 
.  lis  enfurentro^mesi  effray^*  qu'ila 
firent  de  nouveau  des  propositions  de 
X.  Mais  saint  Louiv,  apres  avoir  con- 
t/i  ses  chevaliers,  repoussa  Toffre  dea 
isulmans.  li  semble  aue  ce  fut  un  sys- 
le  chez  les  crois^s  de  ne  rien  devoir 
aleurs  armes,  ala  victoire,  k  la  sou- 
nion  absolue  de  Tame  et  du  corps  : 
nde  faute ,  preuve  dc  barbaric  et  de 
atiamealaiois(*)! 
ivant  d^assieger  la  villa  de  Mansou- 
I,  ks  crois6s  vinrent  camper  sur  le 
d  d'un  canal  qui  leur  barrait  le 
sage,  et  en  face  duquel  ^taient  pos- 
ies Musulmans.  Pour  franchir  ces 
t  profondes ,  saint  Louis  fit  entre- 
odre  une  di<;ue.  Ge  travail  n'inquieta 
les  Musulmans,  qui  y  r^pondirent  de 
aeon  la  plus  ins^nieuse,  en  creusant 
iol  de  leur  c6te.  De  cette  fa^n  la 
!  reculait  sans  cesse  devant  les  Cbr^ 
s;  et  malgre  leurs  efforts  ils  ne  par* 
uent  pas  a  Tatteindre.  Un  mois  du- 
I  les  crois^  s'obstinerent  k  conti- 
r  leur  digue*  Les  Arabes,  par  centre, 
e  iasserent  pas  de  creuser  le  terrain , 

▼oyez  Joiovine,  Chrvnique,  et  Mathiea 
k,  Hutoive^  etc. 


et  de  plus  ils  aocabltont  leurs  advcr- 
saires  de  leurs  tongues  flecfaes  et  de  leur 
feu  grteeois.  Enfin  un  trattre  de  leur  ar- 
voM  indfiqaa  nn  ffo6  aux  Chr6tiens.  Saint 
Louis  et  son  firere  le  eorote  d'Artois  le 
franohtrent  des  premiers;  puis  le  comte 
d'Artois  n'ayant  su,  malgresa  promesse, 
attendre  le  reste  de  Tarmee,  se  preci- 
pita  comme  un  fou  k  travers  les  lignes 
musulmanes .  Decedeimprudence  daleiit 
fiitalement  tous  les  malheurs  de  Farm^e 
ehr^tiennel 

L*irruptioninattenduedu  comte  d'Ar- 
tois  et  de  ses  chevaliers  porta  tout  d*a- 
bord  le  trouble  et  la  conuisioa  dans  les 
rangs  arabes.  Les  Chretiens  jparvinrent 
m^nie,  apr^  un  choc  terrible,  k  s'em- 
parer  du  camp  musulman.  G*6tait  plus 

3ue  jamais  le  cas  de  s'arr^ter,  apres  rar- 
eur  de  consulter  la  prudence.  Le  bouil- 
lant  comte  d'Artois  ne  se  crut  pas  vain- 
queur  qu*il  n'edt  extermin^  tous  ses  en- 
nemis ;  et,  malgre  les  representations 
du  grand  mattredesTempliers,  il  8*en- 
gagea  imm^iatement  k  iaponrsuitedes 
Arabes.  Avec  les  fuyards  il  p^etra  jus- 
que  dans  la  viile  de  Mansourab.  La  les 
Musulmans,  s*apercevant  du  petit  nom- 
bre  de  leurs  vainqueurs,  iirent  volte-face, 
harcelerent  detous  cotes  lesguinze  cents 
chevaliers  du  comte  d*Artoi8,  et  les  ex- 
termindrent  jusqu'au  dernier  avec  le  mal- 
heureux  prince  qui  les  commandait. 

Par  une  fatality  singuiiere ,  pour  r6- 
parer  la  t^m^rite  de  son  fr^re,  saint 
Louis  en  commit  un  nouvel  acte.  II  Gt 
passer  ie  canal  au  reste  de  son  armee, 
de  fajon  qu'a  mesure  que  les  Arabes  se 
ralliaient,  ils  tombaienten  masse  sur 
les  crois^s,  qui  n'arrivaient ,  eux ,  que 
par  pelotons.  fiientdt  une  peur  panique 
vint  encore  troubler  le  mouvemeot  des 
Chretiens.  Le  bruit  se  r^pandit  que  les 
Musulmans  ^talent  vainqueurs.  La  masse 
des  troupes  chr^tiennes  reflua  alors  vers 
le  canal,  et  el  les  s'y  noyerent  en  grand 
nombre.  Saint  Louis,  rest^  presque  seul 
au  milieu  des  ennemis ,  se  d^fendit  aveo 
un  courage  de  h^ros  centre  six  Musul- 
mans. Cette  resistance  desesp^ree  de 
leur  roi  fit  honte  aux  chevaliers :  ils  s'e- 
lancerent  de  nouveau  au  combat,  et  d^ 
gag^rent  saint  Louis(*). 

(*)  VoyeE  Guillaame  de  NaoRto,  Ut  Gettea  d§ 


848 


LUNIVERS. 


Quoique  mattres  du  terrain,  leg  Chr6* 
tiens  n'en  ^taient  pas  moiDS  ^puis^  el  d^ 
cournses.  II  leurtallut  les  jours  suivants 
renou^eler  des  luttes  p^n^rales  qui  les 
lasserent  et  les  d^cimerent  peu  a  peu. 
Quels  que  fussent  les  traitsde  vailfanoe  de 
saint  Louis ,  il  ne  put  faire  gue  son  ar- 
m6e  redeTint  agressive.  Or  la  tempori* 
sation  ne  pouvait  que  lui  Itre  funesle , 
rimmobilit^^taitsa  perte.  Bient6tmtoie 
elle  eut  k  luttercontreleclimataussi  blen 

Suecontre  leshommes.  L'amoncellement 
es  cadavres  autour  du  camp  chr^tien 
oceasionna  une  6pid6mie  ^pouvantable, 

2ui  frappa  k  la  fois  les  chefs  et  les  sol- 
ats.  Mouvel  b^roisme  de  saint  Louis  : 
apr^s  avoir  brav6  le  far  des  ennemis,  il 
voulut  braver  les  atteintes  de  la  peste. 
On  le  vit  k  tout  instant  non-seulement 
porter  des  consolations  aux  mourants, 
mais  soigner  de  ses  propres  mains  les 
malades.  II  fit  tant  que  la  contagion 
Tatteignit  k  son  tour.  Sa  maladie  fut  le 
dernier  coup  pour  son  arm^.  Elle  se 
renferma  dana  son  camp  inerte  et  d^o- 
lee;  elle  laissa  les  Arabes  Tentourer 
d*une  ceinture  de  fer  impenetrable,  lui 
couper  les  yivres,  d^truire  ses  convois 
de  ravitaiilement ;  et  bient6t  pour  elle 
la  famine  sejoignit^  la  peste.  Dans  eette 
extremity ,  saint  Louis  fut  contraint  de 
songer  k  traiter  avec  ses  ennemis.  Ceux- 
ci  voulurent  lui  imposer  des  conditions 
inacceptables ;  alors  le  h^ros  Chretien, 
a  peine  convalescent  d'une  effrayante 
maladie,  malgr^  safaiblesse  corporelle 
sentant  toute  la  force  de  son  Ame,  ra- 
nima  le  courage  de  ses  soldats,  exalta 
leur  enthousiasme,  et  les  entratna  k  sa 
suite  vers  Damiette.  Durant  cette  re- 
traite,  saint  Louis  se  battit  comme  un 
simple  capitaine.  Toujours  a  Tarriere- 
garde,  aussi  actif  que  valeureux,  il  com- 
men^a  une  retraite  oil  il  ne  fut  egal6  en 
heroisme  que  six  si^cles  plus  tard,  par  le 
mar^chal  Ney.  Comme  ce  dernier,  saint 
Louis  lutta  a  la  fois  contre  la  nature  et 
contre  rhumanit6 ;  seulement  au  lieu  du 
soufle  glace  du  septentrion,  c'etait  Tba- 
leine  brtllante  du  simoun  que  le  roi  de 
France  avait  k  yaincre,  aussi  bien  que 
des  myrlades  de  Bedouins,  ces  Cosaques 
de  I'Afrique. 

Apres  s*etre  multiplie  pendant  la  re- 
traite de  ses  troupes ,  saint  Louis  ar- 
riva  epuise  de  fatigue ,  de  maladie,  de 


veilles  dans  le  bourg  de  MuodiJ  a|fr 
rait  y  trouver  un  rduge,  0  B^ynaaa- 
tra  que  la  trahison.  Au  nMMMtdil 
allait  traiter  d'une  sos^euioa  f ns 
avec  Temir  qui  le  poursuivait,iinlHM 
inf^me  parcoumt  les  raogs  de  fni  i 
francaise  en  criant : «  Au  noodeliii 
du  roi ,  came  de  toutes  parts,  idl» 
vous  tous ,  si  vous  ne  voulez  pnfA 
meure.  »  A  cette  faussenouvdleltid^ 
valiers  mirent  bas  les  annes,ilflii 
Louis  fut  charge  defer  pir  aescsHB. 
La  captivite  <Tit  pour  laittae^ 
capitale,  durant  laqudie  aedMMa 
nouvelle  face  de  sa  grande  ime.  w 

Sue  sur  le  Nil  avec  one  partie  bmbIimi 
e  sa  noblesse,  H  voulut  partagercaki 
les  souffranees  et  le  watmai  km 
compagnons.  Tratne  en  triomplieali 
sourah ,  tl  fiit  impassible  deraotlBii' 
jures  de  la  populace ;  jete dans  as oM 
presque  sans  pain  et  sans  v^MilJ 
ne  daigna  pas  se  plaindre.  Sawasg 
fiirent  contraints  d'admirer  la  klM 
de  son  caractere  et  la  fiertedeaw 
gnation.  fitendu  sur  la  paillc,leq 
des  psaumes  k  la  main,  u  M<UMi 
pas  les  yeux  aux  menaces  de  ses  gBfi^ 
et  donnait  la  meilleure  partie  desBjt 
slers  aliments  11  I'unique  seniasrg 
ferme  avec  lui.  Le  sultanduKiiniPP 
de  cette  grandeur  royale,  «w»jit* 
Louis  cinquante  pelisses  d^boaav^ 
lui  et  ses  principaux  ebeniia^  (^ 
Tin  vita  k  un  superbe  festio :  ^^^ 
refusa  et  le  present  et  le  feslip.Uflr 
tan  lui  offritensuite  la  libcrteii»<^ 
dition  de  faire  rendre  aux  Mtfwgi 
les  villes  cbretiennes  de  bPalaW 
saint  Louis  ne  voulut  pas  Mfi| 
Syrie  k  son  profit.  Le  sultan,  irrag' 
sista,  et  mena^  de  mort  le  roi  ina|V 
saint  Louis  resta  aussi  indifliM*] 
menaces  qu'aux  avances  desM*! 
nemi(*).  i 

Sans  doute  saint  Louts  serattw 
gue  devenu  victime  de  sob  suwijj- 
tetement,  si  le  souievemoit  dM| 
du  sultan  n*etait  venu  k  soa  mt^ 
souievement  etait  dd  k  la  toriisw^ 
plus  en  plus  anarchique  des  "*J*5 
mil  ice  fanatique,  composectfeBB*  j 
tars,  qu'on  avail  eievcs  daos  b  w"** 

(•)  Voy«i  DjeDMa-EddiD ,  StMlsirt  H  ^ 
MeUk'SaUh. 


STRIE  MODEANE. 


849 


(^tieni  et  dans  ramoor  du  pillage, 
fat  1^ ,  du  rette ,  ran  des  plus  tria- 
I  rtoltals  des  croisadea,  qui,  en  exaa- 
raot  lea  populations,  poosskent  les 
bCb  arabea  k  a'adreaser  aux  plus  man- 
ia penchants ,  et  k  reeruter  des  d^fen- 
irs  de  risiam  jusque  parmi  les  bar- 
PBB.  Geabarbares^  pourtant,  traiterent 
K  saint  Looia ;  et,  moyennant  la  seule 
lede  Damtette,  lis  rendirent  la  liberty 
roi  de  France.  Quelques  historiens 
ientaux  pretendent  m^me  qu'apres 
Mr  ta^  lear  sultan ,  et  entbousiasm6s 
r  les  vertus  militaires  et  ci?iles  de 
ntLoais,  les  mamelouks  allerent  jos- 
'k  loj  offrir  le  trdne  d*Cgypte.  Quoi 
'tl  en  soit ,  Damiette  fut  ^vacn^e  par 
erois^.  Bien  ne  fot  plus  triste  que 
r  letonr  de  la  deplorable  expedition 
Sgypte.  Una  armee  de  malades,  d'af- 
BO,  demeadianta«  aborda  en  1251  k 
iiemaTs;  et,  une  fois  seeouru  par  leura 
Ns  de  Syria,  chacun  Toulut  s*en 
oomer  au  plua  vite  en  Occident. 
m  IX  perslata  presque  seul  k  raster, 
id'alieger  autant  qu^il  ^tait  en  lui  lea 
iffranees  des  Chretiens  d'Orient 
li'Europe  ne  fut  pas  entrain^e  k  suivre 
lemple  da  saint  roi;  quelques  rares 
ivaliera  r^pondirent  a  son  appel.  Puis 
bergers  et  des  laboureurs  quitt^rent 
rs  tronpeaux  et  leurs  champs  pour 
ir  en  aide  k  saint  Louis.  Ce  fut  \k 
faonunage  anx  qualit^a  de  roi  et 
omme  de  ce  dernier,  quoique  la  croi- 
e  des  pastoureaux  n*ait  point  abouti 
i)u*en  Syrie.  Malgr^  Tabandon  dans 
uel  on  le  laissa,  saint  Louis  n'en 
neora  pas  moina  deux  ans  encore  en 
estine,  releva  les  murs  de  Sidon, 
dit  de  I'autorite  morale  au  royaume 
ftien,'  et  ne  retouma  en  France  en 
4  qu'^  la  nouvelle  de  la  mort  de  sa 
'e,  r^gentedu  royaume.  Louis  IXs*en 
nt  sans  ^tre  parvenu  jusqu'a  Jerusa- 
,  but  de  son  expedition  :  il  ne  rdus- 
qii'^  developper  toutea  les  qualites 
1  bon  prince,  toute  Tintrepidite  d*un 
soldat,  totttes  lea  vertus  d  un  homme 
BQsur ,  douceur,  charite,  bumanite ; 
lerite  lea  plus  grands  eioges  comme 
vidu,  il  pourrait  etre  critique  comme 
rerain. 

'interralle  de  seize  ans  dela  septieme 
huitieme  croisade  est  remplie  en  Sy- 
(ardesdiasenaionadeplorables,^  pro- 


po8  de  commerce,  entre  les  venitiens  et 
les  Genois,  k  propos  de  preponderance 
militaire,  entre  les  Templiers  et  les  Hos- 
pitaliers.  Puis  viennent  les  Tatars-Mo- 
gols ,  sons  la  conduite  d*Houlakou ,  pe- 
tit-filsde  Gengiskan.  lis  tomberent  (Ta- 
bord  sur  Alep  et  Damas;  bientot  ils 
traverserent  le  Liban  et  se  repandirent 
en  Palestine.  Pour  lea  en  chasser,  les 
Chretiens  et  les  Musulmanss'alUerentde 
nouveau.  Desormais  les  colonies  euro- 
peennes  d*Orient  agissent  avec  leurs  ad- 
versaires  et  irrecondliables  ennemis  les 
Musulmans,  comme  si  les  interlts  ma- 
teriels  etaient  k  Favenir  seuls  en  cause 
entre  eux.  Ils  furent  du  reste  dupes  de 
leur  con6ance.  Beybars,  sultan  nsurpa- 
teur  da  Kaire,  apr^s  avoir  vaincu  avec 
les  Chretiens,  Kerbogba,  Tun  des  lieute- 
nants d'Houlakou,  profita  des  dernie- 
res  pertes  de  ses  allies  pour  leur  pren- 
dre la  forteresse  de  Sepned,  la  ville  de 
Jaffa  et  le  chateau  de  Karak.  Puis,  non 
content  de  ces  diverses  perfidies,  il 
s*en  alia  ravager  la  principaute  d'Antio- 
che,  jasqu*alors  a  Tabri  de  la  guerre , 
B*empara  de  la  capltale ,  la  livra  an  pil* 
la^e  de  ses  soldats ,  massacra  dix-sept 
roiUe  de  ses  habitants,  et  en  emmena  cent 
mille  en  esclavage(*). 

Quels  que  fussent  les  malheurs  des 
Chretiens  d'Orient ,  en  Europe  on  ne 
pensalt  plus  k  eux  gue  quand  les  troubles 
civils  etaient  apaises,  les  conquerants 
repus ,  les  rivaux  las.  Si  Tune  des  in- 
tentions des  croisades  a  ete  de  chercher 
k  fonder  parmi  les  Chretiens  un  esprit 
de  secours  motuel  et  de  fraternite ,  une 
alliance  defensive  et  offensive ,  une  so- 
lidarite  dans  la  fortune ,  une  charite  re- 
ciproque  dans  les  rapports  internatio- 
naux,  ilfaut  avouer  que  le  but  des  papes 
a  ete  bien  mal  attaint.  Clement  Iv  pre- 
che  en  vain  une  nouvelle  croisade  : 
saint  Louis  seul  I'entend ,  et  encore  au 
grand  regret  de  Joinville ,  des  esprits 
senses  et  des  populations  fran^ses. 
Mais  Texcellent  roi  nevoulutpas  quitter 
de  nouveau  la  France  sans  lui  assurer 
latranquiliiteet  lebonheur.  II  dicta  done 
cette  ceuvre  de  justice,  de  sagesse  et 
de  liberalisme ,  qui  nous  est  parvenue 
aous  le  nom  (TEtabUssemeni  de  icUnt 

(*)  Voyei  Makrid,  TTnUU  de  larouU  qui 
mitM  A  la  coHnaitsanee  de$  dtfna$Ue9  royaU*. 


850 


L'OHIVERS. 


Louis.  AprSs  avoir  dol6  sea  sujets ,  em- 
brass^,  et  coDsole  sa  femme  Marguerite, 
saint  Louis  s'enibarqua  une  seconde  et 
derui^re  fois,  le4  juillet  1370,  h  Aigues- 
Mortes,  avec  trente  mille  bomtnes  d'in- 
fanterie  et  six  mille  de  cavalerie.  On  ne 
comprend  pas  dans  quelle  ^tran^e  er- 
reur  6tait  tomb6  saint  Louis  en  dirigeant 
sa  flotte  vers  la  terre  africaine ,  au  mo- 
ment des  plus  violentes  chaleurs ,  et 
dans  Tespoir  que  le  prince  de  Tunis  se 
ferait  Chretien.  Fatale  illusion  qui  valut 
h  Tarmee  fran9aise  des  souffrances 
inouTes ,  la  dyssenterte  et  la  peste  1  Une 
des  premieres  victimes  de  ce  dernier 
fleau  fut  le  fils  chM  du  roi  de  France, 
le  due  de  Severs.  En  soignant  I'enfant 
le  pere  fut  atteint.  Saint  Louis  sentit 
bientdtqu'il  6tait  perdu ,  et  il  ne  songea 
a  employer  ses  dernicrs  moments  qu'd 
donner  des  conseils  h  son  fils  afne  et  h 
lui  recommander  sa  patrie  ador^.  £nfin 
apr^s  ses  devoirs  de  p^re  et  de  roi  ac- 
complis ,  il  ne  pensa  plus  qu'li  Dieu,  et 
lui  rt^ndit  son  atne  aussi  pure  que  forte, 
aussi  crande  que  g^nereuse ,  le  25  aoiit 
1270,  a  trois  heures  apr^  midi,  moment 
de  la  journee  ou  le  Christ  lui-m^me  avail 
rendu  le  dernier  soupir.  Telle  fut  la  fin 
d'un  prince  qui  semble  n'6tre  venu  en 
Orient  que  pour  sanctifier  les  croisades, 
pour  en  faire  un  fait  civilisateur,  pour 
terminer  noblementethumaiuement  une 
guerre  qui  avait  et6  si  longtemps  aussi 
abjecte  que  barbare. 

DBSTAUCTION  DB  l'bMPIEB  CHABTIEK 
BN   PALESTINE. 

La  mort  de  saint  Louis  fut  pour  les 
Chretiens  d'Orient  comme  le  signs  de 
Tabandon  de  Dieu.  Apres  lui  ^ouard 
d'Angleterre  seul  vint  k  leur  secours. 
Malheureusement  les  sept  mille  soldats 
(]u*il  avait  amenes  ^talent  ]oin;de  suffire 
a  I  utter  contre  le  sultan  mamelouk  Bey- 
bars,  le  heros  sauvage  de  T^poqoe.  Le  fu- 
tur  conqu^rant  de  TEcosse  seborna  done 
en  Palestine  h  reprendre  la  petite  villa  de 
r^azareth ,  et  h  obtenir  des  Musalmaas 
une  tr^ve  de  dix  ann^es.  Les  esp^rances 
qu'on  avait  concues  en  Syrie  de  rarriv6e 
d'un  descendant  de  ce  fameax  Richard, 
dont  le  nom  ^tait  rest^  r^pouvantaii  de 
rislam ,  iurent  done  bien  promptement 
'frustr^es,  de  mdme  que  eelfes  que  donna 
r^l^vation  de  Thibaut ,  ancien  arche- 


v^ue  crois^ ,  au  trdoe  pMitiM.C« 
^Uit  fait  des  croisades :  Tciprit  dii» 
cle  les  avait  d^passees;  d,  oalpcii 
bonne  volontedu  nouTeattpape,iiit^ 
un  concite  qu'il  avait  ooovoi^apBi 
Lyon ,  il  ne  partit  pour  la  Paksliae  fi 
quelques  chevaliers  aTeDtiiKDX(ti» 
1^.  BeybarsavtitbeaumenaeerdeiriB 
en  plus  Ptoltoais,  demiere  fie  » 
portante  des  possessions  chr^teB. 
TEurope  laissa  faire  le  sultan  duEan; 
et  si  la  mort  n'en  avait  dtiivie  b%- 
riens,  le  royaume  de  Jerusalem  ini 
en  1)77,  sous  le  r^gne  de  eel  wLsa^ 
soldat.  Son  sucoessear,  du  rem,  Ii 
laoun,  h^rita  de  sa  haioe  contie  b» 
lonies  franques ;  et  Tan  mo  il  |ifit,» 
cagea,  rasa  Tripoli,  et  snr  ses  »■ 
fumantes  il  rebfttit  une  autre  cit^f* 
la  entierement  musulinane.  Diiawa 
durant  Kalaoun  ravages  les  ^oamm 
chr^iennes;  et  n'ayant  po  panoiri 
8*emparer  de  Ptolemais,  il  fit  jiucr  iai 
fils  Khalil  de  poursuivre  Mtt  ta^Jk 
Le  fils  fut  fid^e  aux  piescn^ii 
p^e.  A  la  tite  d'ane  arm^  de  soini 
mille  hommes  il  vint  entourer  kMv 
rempart  de  la  croix  en  PalestiaPiV 

Le  premier  effet  que  prodiiiareBfttf 
les  Cliretiens  lesrangsserresteMj^ 
sulmans,  leurs  trois  cents  chancMLJi 
musique  sauvage  de  leufs  taoAflgj 
numbre  prodigieuz  de  leans"** 
de  guerre,  fut  un  effet  d'6pflP»*t^ 
Chretiens  revinrent  poorlirtfcl«* 
froi,  se  d^fendirent  longlcflf  ^ 


courage  du  desespoir,  i  i:|w«»»^ — . 
fois  les  ennemis  enti^  j^''^^ 
vilie;  mais  la  desertion  du  njj^ 
pre  et  de  ses  chevaliers,  tetow'g' 
ment  des  Templiers  et  des  Bo^v 
apprirent  enfin  aux  babitaotsdePv 
mais  qu*il8  n'avaient  plus  qa's  s'<^ 
lir  sous  les  ruines  de  leor  cilt^ 
quMIs  firent.  Au  dernier  a«$vA,(p^ 
purent  pas  repousser,  ii  seretiiM# 

ftasdans  leurs  rues,  d^eodaotpHtiip 
e  terrain,  se  battant  de  maisoBCfi^ 
son ,  )usqu*li  ce  que  la  masse  sax^ 
renaissante  de  leurs  enneniis  )b* 
^ras6s,  vers  le  milieu  do  dix-ti^ 
jour  de  raai  1291.  Apr^  cetleia* 
d^faite  le  massacre  aes  Chreliessi^ 

(•)  Voyei  \boal-a|.Fand].  Cln*^^ 
Hague. 


L 


SYRIB  MODERNR. 


S6I 


n(a  fOfa  n*4tre  plus  interrompo  que 
r  un  ouragan  tmible,  qui  detniisit 
faottlarersa  tout  ee  que  le  fer  et  le 
J  des  Musulroans  n'avait  paa  encore 
ittBtdanslaTille. 

BBSIILTA.TS  DBS  C&OISADBS. 

▲  la  nouvelle  du  dtoatre  d^nitif 
I  Chretiens  d*Orient ,  le  pape  M ioo- 
I  IV  fit  toos  lea  efforta  imagioablea 
inr  r^Teilier  Tardeur  dea  fideles.  Afln 
poosaar  la  efar^tient^  a  une  nouvelle 
naade,  il  acoumula  leapromeasea  mi- 
■ioordieuaes ,  promit  dea  indulgeacea 
toiites  aortea,  admit  parixii  lea  aol- 
ta  de  la  croii  lea  pleura  lea  plua 
hirds^  et  s'adreaaa  tour  k  tour  ^ 
Niard,  roi  d'Angleterre,  h  Rodolphe, 
penur  d'AUeina^e,  k  Philippe  le  Bel, 
de  France,  puis  aux  empereurs  de 
istantinople  et  de  Tr^bisonde*  aux  roia 
rmteie,  de  G^rgie  et  de  Ghypre, 
JQsqu'ao  khan  dea  Tatars-Mogola. 
aa!  toos  sea  efforta  furent  ioutilea, 
tea  aes  lettrea  aana  effet,  toutes  sea 
res  sans  r^ultat«  Depuis  vingt-cinq 
«  da  reste,  les  croisadea  avaient 
tn  leur  dernier  prestige :  or  les  mal- 
neox  Chr^tiena  d*Orieot,  abandon- 
k  eux*mime%^  vaincus  sur  tout  le 
0i  de  la  Sjrrie,  oe  furent  plus  d^or- 
qo'une  tribu  vis-i-vis  d'un  people, 
ne  poiga^  dliommes  eontre  une 
le.  £a  ti^finitive,  qu'adyint-ilde  plus 
de  ees  eroisades  si  vant^  f  Beau- 
d6  malbeur  pour  les  petites  gens; 
[ues  riches  butins  poor  les  che- 
rs^ffodaux;  une  haine  entre  deux 
efttretenue  pendant  deux  slides ; 
laiisme  ,  ce  vice  des  religions,  ali- 
6  par  one  guerre  perpetuelle;  la 
labie  peas€%  du  Christ,  enfin,  chan- 
I  une  intolerance  barbare,  qui  re- 
ft civiiisation  europ6enne  de  troia 

a  preaque  toujours  mal  ju^e  les 
dea  :  lea  nns  enont  fait  un  Episode 
1^  de  l^histoire  desonzieme,  dou- 

et  treiziime  siecles;  les  autrea 
>rte  d'inspiraUon  reKgieuse  qui  a 
98  peuples  tout  k  coup,  et  lea  a 
a  sous  les  drapeaux  de  Dieu  par 
d'uJia  grdce  toute  sp^iale;  ceux- 
0i|dent  qu'eilesfureot  un  sujet  de 
et  de  pr^pond^ranee  elericalea, 
propoa  Us  ont  ^it  des  livres  de 


partis,  desd^amationsultramontaines ; 
oeux-ld  enfin  veulent  qu*d  la  France  re* 
vtenne  tout  Tbonneur  oe  ces  guenrf  s  In- 
terminables.  Quant  k  ces  demiers,  nous 
leur  demanderions  d'abord  ce  qu*ctait 
la  Franee  en  1096?  £tait-ce  Taventu- 
ridre  Normandie,  la  sournoise  mais 
brave  Breta^ne ,  la  molle  mais  indns- 
trieuse  Aquitaine,  le  Poiton  ind^is, 
I'Anjou  ind^pendant,  la  Flandre  alle- 
raaude ,  la  Lorraine  ftodale  ?  Ou  bien 
etait-ce  ee  pauvre  petit  royaume  dont 
le  roitelet,  laible  et  pieux  homme,  avait 
de  la  peine  a  se  defendre  centre  ses  pro- 
pres  vaasaux  Sans  nous  croire  les  ins- 
tigateurs  et  les  seuls  h^ros  des  eroisa- 
des, oontentons-nous  de  leur  avoir  fourn  i 
d^intr^ides  soldats  et  leur  plus  grand 
homme ,  saint  Louis.  Les  Anglais ,  du 
reste,  soot  plus  managers  que  nous  de 
leurs  anc^tres  :  ils  ne  redescendent  pas 
volontiers  dans  les  siecles  pour  epouser 
les  querelles  et  prendre  leur  partde  res- 
ponsabilite  dans  les  actea  de  quelques 
barbares.  Hallam*,  dans  son  Europe  au 
moyen  dge,  ^vite  m^me  de  parler  des 
croisades,  et  par  cons^uent  des  exploits 
de  ce  Richard,  si  vantes  en  Palestine.  II 
n'y  a  pas  de  quoi  en  effet  s'enorgueillir 
de  quelques  batailles  gagnees  a  travers 
tant  de  turpitudes  et  de  crimes  {*), 

Ce  qui  prouve  ^videmment  la  barbaric 
des  croisades,  et  ee  qui  fait  qu^il  est  dif- 
ficile decomprendre  qu*on  en  veuille, 
k  la  gloire  d'une  nation  quelconque,  re- 
vendiquer  Tid^e  et  Tex^ution,  c'est  que 
leurs  lois  de  n^pression  ^taient  aussi  (lu- 
res, aussi  inflexibles,  aussi  injustes  sou- 
vent  que  leurs  lois  de  possession.  Les 
lois  de  repression  ^talent  presaue  toutes 
r^ies  par  la  sauvage  6quit6  ou  talion. 
La  disposition  qui  reglait  la  conqu^te 
toit  la  loi  brutale  du  premier  occupant 
Quant  aux  assises  de  Jerusalem,  ce  fu- 
rent les  lois  du  royaume  de  Godefroy 
de  Bouillon,  et  non  oelles  des  eroisades. 
A  la  seconde  exp^ition,  on  fit  des  r^- 

f;lements,  mais  on  ne  les  suivitpas.  A 
a  troiaieme,  on  6tablit  des  defenses 
somptuaires,  qui  ne  servirent  euere 
plus.  Du  reste,  ce  qui  donne  prects6- 
ment  un  caract^re  de  migration  k  la 
premiere  croisade,  c'est,  outre  les  mul- 

C*)  Voy«  Micbclet,  JJistoire  de  Franee,  V  ? o- 


Z&f 


LUNIVERS. 


titudes  a  la  suite  de  raring,  la  vente 

3ue  firent  les  barons  f^aux  de  leurs 
omaines,  les  richesses  qo^ils  einport^- 
rent  avee  euz,  lear  nombreuz  domea- 
tique ,  le  luxe  de  lean  armes ,  de  leurs 
chevaux ,  de  leurs  habits,  de  leur  table. 
La  seconde  eroisade  a  un  caract^  plus 
guerrier ;  c^est  beauoou^  plus  que  la  pre- 
miere une  expedition  militairey  drcons- 
crite  et  discipline.  Un  autre  abas  qui 
fttt  corrig^  en  partie  h  la  seconde  expe- 
dition, fut  le  privil^e  qu'avaient  les  croi- 
s^  de  ne  pas  payer  leurs  dettes  et  de  ne 
pas  tenir  leurs  engagements,  abus  qui 
faisait  ressembler  la  premiere  eroisade 
a  une  faillite  colossale. 

Gomme  on  le  voit,  les  papes  avaient 
employ^  tous  les  moyens  pour  exciter  a 
la  guerre  sainte :  avec  rentnousiasme  re- 
ligieux  rint^r^t  personnel ,  avec  la  re- 
mission des  p6cbes  la  remise  des  dettes 
et  Texempticfti  de  la  taille,  plus  Fabso- 
lution  du  pass^  et  carte  blanche  pour 
Tavenir.  Ce  qui,  dans  cette  confusion, 
fit  neanmoins  quelque  bien  et  porta  un 
coup  puissant^  la  teodalit6,  fut  le  droit 
aux  possesseurs  de  fiefs  de  les  engager 
et  m^me  de  les  ali^er  sans  le  consen- 
tement  de  leurs  suzerains  et  de  l^urs 
fdmiiles.  En  somme,  on  se  ruine  pour 
aller  k  la  premiere  eroisade ;  a  la  se- 
conde il  faut  justifier  de  la  possession 
de  trois  marcs  d'argent;  a  la  quatri^ne 
enfin  on  re^it  une  solde  de  trois  onces 
d'or  par  an.  Louis  IX  alia  plus  loin  en- 
core, il  paya  ses  propres  chevaliers  :  1*6- 
ventuaht^  des  conqu^tes  et  du  pillage 
n'etait  dej^  pins  une  amorce,  Tacte  reii- 
gieux  n'etait  plus  un  devoir  (*)• 

Avant  la  dime  salacUne,  dte  la  se- 
conde eroisade ,  on  avait  leve  des  im- 
p6ts  pour  la  guerre  sainte;  les  convents, 
les  ^liseSy  le  clerg^  avaient  dH  fournir 
de  Targent  pour  Texp^tionsacr^e.  Plus 
tard ,  comme  tout  se  perfectionne  vite 
en  mati^re  d'irop6ts  k  percevoir  sinon 
k  employer,  on  punit  de  la  prison  les 
mauvais  payeurs ,  et  on  se  racheta  du 
p^Ierinage  arm^  rooyennant  finance. 
Grdce  a  ces  ressources  on  chercha  a  s'ap- 
provisionner  :  le  saint  roi  fit  de  Tile  de 
Chvpre  son  d^p6t  central ;  mais  les  dis- 
tributions se  firent  si  mal  que  la  disette 
accabla  encore  les  crois^  sur  les  bords 

OYoyeiJoinviUe    Chr<miqu$, 


du  Nil.  Done,  silescraiiiisMrini 
auxarmees  earop^eones^tebpm 
au  loin,  ce  fut  oertes  bien m iifs 
desg^nerationsqui  wtnoMnAkm 
cent  qnatre-vingta  annees  m  hn* 
de  la  Palestine. 

II  serait  absurde  d'attribncrHi 
des  croisadestoos  les  progrtini»M 
operes  eo  Occident  dclOK  I  UHl 
faut  se  homer  k  oonstater  eefiii 
sult^  de  direct  de  ce  gruid  mttsii 
de  I'Europe  eontre  TAsie,  tagt«» 
marquant  neanmoins  qiw  la  nnH 
de  guerre  et  de  haine  ruigieaKiiAi 
n6cessairenieDt  moins  faire  en  4eB» 
cles  que  des  relations  amioleiB^flMi 
fait  en  deux  lustres.  Eh  bin,  i  Mi 
sens,  la  seule  eonqu^  Mahfc 
croisades,  ooDquteouiDepsaill» 
nir,  d'aiileun,  que  ae  la  pvc  ^in 
qui  eusaent    a^joam^  '^^"'^J 
Orient ,  qui  eo  eusseot  paroomM 
f(6rente8  contrees,  tandii  qseliMt^^ 
meroe  maritiaie  8*an^  vaiaiiflitf 
cdtea  dans  ses  ezploratioDS,cf«l)iilJ 
qutedequelques  plantesutileiai  w 
hies,  teilesqae  ki  canoe lacR^ 
rosier,  et  d*un  assez  graod  bmMI 
bres  Iruitiers ,  tela  que  le  (ttra 
cerisier.  Cest  k  le  seul  biofflitlir'^ 
et  r6el  des  croisades;  qnaati 
ges  commereiauz,  il  n  y  cot . 
les  V^nitieos  qui  en  proitM' 
dant  des  comptotrs  dans  M>" 
les  villes  de  Svrie,  et  enttaiM< 
manufacture  de  verre  k  Tyrijlg 
zieme  sitele.  Pour  ce  qui 
sultatspoUtiques,  eefiireot 
toute  I'Europe,  lanM>dificati«i 
mefeodalfC'est-Ji-dJrederr  " 
greasier  et  brutal  de  la  u.t-^ 
temps  barbares ;  puis,  en  FnsM 
uncertain  bonbeur,  sinoai  naM 
nos  rois,  raffaiblissemeotdoaoni 
Tind^pendance,  et  partaot  defj 
des  grands  vassaox.  On  doit  wj 
croisades  une  certaine  lei^  nP 
d'hommea ,  une  habitude  de  hiM 
des  impdts  sur  la  noblesse  et  kdai 
Ton  n*avait  point  pu  obtenif  jof  * 

Tel  est  le  bien;  void  le  w  < 
tenant :  Saadi ,  le  grand  poett  ptf 
aussi  sage  qu'il  ^it  savaat,  i^i 
n^reuz  qu*il  toit  inspir^;,  Sapt 
des  gloires  de  la  plus  glonetfe  i^ 
litteratre  de  rorient;  Saadi,  fv 


L 


SYRIE  MODERNE. 


858 


I      uii  de  868  blographes ,  passa  trente  ans 

de  88  vie  dans  I'etude^  trente  ans  dans  les 

'  voyages,  trente  ans  dans  ia  retraite  et 

[      la  composition,  eut  le  malbeor,  k  X^ 

I      poque  oe  la  troisitoe  croisade,  de  tom- 

ber  au  pouvoirdes  Francs.  Ceux-ci,inep- 

tes  et  gros8iersqu*iis6taient,  le  firent  tra- 

vailler,  lui  Thomme  de  contemplation  et 

de  poesie,  a  une  des  tranche  de  Tripoli 

de  Syrie ,  mile  \  des  juifs  sordides  et 

^  de  simples  manouvriers.  Aussi  le  g[rand 

{)oete,  victime  des  Francs  et  ttooin  de 
eur  durete,  dit-il  dans  son  immortel  Gu- 
iJUtany  en  parlant  des  crois^s,  qxiih  ne 
meritent  pas  mime  U  nom  d'hommes. 
V6m\T  et  le  kadi  de  C^aree  s'adres- 
gaient ainsiaux  Chretiens  qui  assi6geaient 
leur  ville  :  «  Pourquoi  voulez-vous  en- 
▼ahir  notre  pays  et  nous  donner  la  mort, 
puisqu'il  est  6crit  que  Dieu  nous  a.cr6^ 
eomme  vous  a  son  image?  »  Paroles  de 
raison,  de  justice  et  de  fraternite  r^elle, 
qui  eussent  dd  fairer^^chir  les  crois^, 
si  le  fanatisme  le  plus  violent  ne  les  avait 
coinpl^tement  doming.  Mais,  sous  cou- 
leur  de  religion ,  les  crois^  n'accom- 
plissaient  en  r^alit^  k  T^ard  des  Orien- 
taux  quele  mime  fait  brutal,  sauvage, 
atroce,  de  tons  les  barbares  du  Nord  dans 
lears  irruptions  oonslcutiveset  spoliatri- 
ces  a  travers  les  pays  mlridionaux.  En- 
core les  irruptions  des  barbares  Jurent- 
elles  jusqu*a  un  certain  point  des  faits 
civilisateurs.  En  efifet,^  la  suitede  ces  ir- 
ruptions les  barbares  demeur^rent  dans 
les  lieux  qu'ils  avaient  envahis;  ils 
s'incorporerent  aux  masses  qu'ils  y 
avaieni  trouvles ,  et  en  venant  appor- 
ter  a  des  gln^ations  vieiUies  du  sang 
jeune  et  chaud  ils  recurent  en  ^change 
des  idles  sociales  gui  les  dipouillerent 
peu  k  peu  de  leur  rlrociti  native.  Dans 
les  croisades,  auoontraire,  les  envahis- 
seurs  ne  purent  pas  se  maintenir  dans 
leurs  conqultes;  loin  de  s'unir  aux 
populations  asiatiques,  mille  causes  les 
en  siparaient ;  ils  ne  leur  apport^rent 
qu'un  fanatisme  extrlme,  qui  excita 
chez  elles  un  autre  fanatisme  rlac- 
tioonaire  :  ce  qui  fit  oontinuer  la 
guerre  mime  apres  la  domination ,  et 
r^ternisa  sans  aucun  avantage.'pour  Fa- 
venir(*). 

(•)  Voyei  Alxml-r-FMa,  Abrigide  Vhistoire 
du  genre  humain. 

2^^  LivraUon  {SYtiiE  hoderne). 


Jamais  de  sinclriti ,  jamais  de  pro- 
bitl  politiques  de  la  part  des  crojsls. 
Voyez  les  Itranges  conflits  diploniati- 
ques  entre  Frideric  Barberousse,  puis 
entre  Richard  Goeur  de  Lion  et  Sala- 
din ,  ou  la  raison ,  le  bon  sens  et  ia  jus- 
tice des  reprlsailles  reste  h  ce  dernier. 
Pourquoi  oonc  les  Oocidentaux  ne  fai- 
saienMls  aucun  cas  des  traitis  conclus 
avec  les  Orientaux ,  des  trives  consen- 
ties  de  part  et  d*autre?  Pourquoi  £es 
loyaux  chevaliers  ne  croyaieni-ils  pas 
forfaire  k  Fbouneur  en  meprisant ,  vis- 
^•vis  leurs  adversaires,  la  lettre  des  con- 
trats?  G*est  pourtant  ce  manque  de  foi 
Internationale  qui  nous  a  fait  le  plus 

frand  tort>t  a  aiscrldite  les  Europeens 
ans  Tesprit  des  peuples  d*Orient,  dont 
la  parole  estsacrle  en  toutecirconstance, 
et  gui  respectent  la  tradition  et  I'usage 
{aJhef)  au  suprlme  desrl. 

Ainsi  on  lenoua  en  Orient  aussi  bien 
par  la  force  des  armes  que  par  le  mepris 
des  traitis.  Ainsi  la  leosiation ,  la  di- 
plomatic aussi  bien  que  Hart  de  la  guerre 
ne  firent,  en  somme,  aucun  progres  par 
le  fait  des  croisades.  Elles  ne  rlussirent 
qu'a  occasionner  une  des  plus  immenses 
boucheries  d'bommes  dont  les  siedes 
ofQrent  Texemple,  qu'k  allumerle  fana- 
tisme dans  deux  religions  qui  avaient 
pourtant  toutes  deux  des  principes  sa- 
crls  de  tolerance ,  qu'a  profiter  a  quel- 
ques  marchands  de  vivres  et  de  navires, 

3u*k  enrichir  quelques  villes  maritimes , 
ont  les  destinies  n'eurent  jamais  au** 
cune  grande  influence  sur  TEurope, 
Pise ,  GInes,  Venise;  qu'&  laisser  enGn 
sur  les  rivages  orientaux  une  peuplade 
mislrable,  quelques  moines  craintifs  et 
une  colonic  k  laquelle  on  sMntlressa  de 
moins  en  moins.  G'est  de  cette  demiere 
dont  il  nous  reste  k  retracer  la  dlplo- 
rable  histoire. 
Plus  disormais  de  grands  Ivlnements, 

{>lus  de  mimorables  batailles,  plus  de 
uttes  gigantesques^  rien  qu*un  abrutis- 
sement  de  plus  en  plus  profond,  un  es- 
clavage  de  plus  eta  plus  penible.  Des  mat- 
tres  difflrents :  des  mamelouks  Borgites 
aprls  des  mamelouks  Bahrites.  Aprls 
un  silcle  d'obscure  servitude  une  tem- 
plte  de  fer  et  de  feu  land  par  Timour- 
Leng :  Alep,  £messe.  Damas  et  tant 
d'autres  villes  noyles  dans  le  sang.  Puis 
Torage  se  ditourne,  laissant  aprls  lui  des 

28 


364- 


L'UMVER& 


rafages  qu'un  siibek  entier  ne  pcut  r6- 
parer.  Enfin  en  1517  un  nouveaa  con- 
qu^rant,  Selim  1*',  un  nouveau  peuple, 
les  Osmanlis ,  qui  impoaent  a  ia  Syne  le 
terrible  gonvernement  des  pachas,  dont 
la  civili^tion  moderne  n'a  pas  pu  en- 
core la  d^livrer.  Gette  demiere  p^riode 
exige  quelques  developpements. 

LBS  OSMANLtS. 

A  la  fin  de  treizi^ie  sieele  s*etait  ag- 
glom^de  dans  I'Asie  Mineure  une  nou- 
velle  race  d'hommea.  Pasteurs  errants 
d'abord,  soldats  d*aventure  ensuite,  les 
Osmanlis  pen  a  peu  devinrent  les  mat- 
tres  d^finitiiis  de  Tempire  t^i6  par  Ma- 
homet, et  h^rit^rent  de  I'autont^  reli- 
gieuse  des  khalifes,  aprte  avoh*  mkcM6 
en  Asre  Mfneure  a  la  puissance  politique 
des  Seldjoukides.  Leur  fondateur,  Os- 
man,  sarnomm^  Ghazi  (le  victorieux), 
prince  aussi  riffide  que  braye ,  de  vassal 
et  lieutenant  mi  prince  seldjoukide  Ala- 
Fddin  (Aladin),  sefit  bientdt  son  rival 
en  force  et  son  ^1  en  droit^  sans  pour- 
tant  le  combattre  ou  le  trahir.  Les  sol- 
dats de  cet  bomme  entreprenant  et  s^ 
vere  appartenaient  a  des  hordes  nomades 
qui  n'avaient  d^autre  occupation  que  de 
niener  des  troupeaux :  r^unis  par  le  g6- 
nie  d*un  chef  beiliqueux ,  lis  ajont^rent 
plus  tard  k  leur  premiere  occupation 
roccupation,  moins  innocente  et  moins 
patriarcale,  d^augmenter  leurs  troupeaux 
des  troupeaux  de  leurs  ennemis  les  By- 
zantins.  C'est  sur  ceux-la  qu'ils  s'agran- 
dirent ;  c*est  avec  quelques-unes  des  an- 
ciennes  provinces  grecques  qu'Osman  se 
fbriiia  un  royaume,  dont  11  sut  de  jour 
en  jour  ^tendre  les  limites.  Cependant , 
lorsqu'il  se  fut  rendu  mattre  de  la  Bi- 
thynie  tout  enti^re  et  d'une  partie  de 
la  Paphlagonie,  il  s'arrfita  juste  a  temps 
pour  consolider  son  empire  par  des  lois, 
apres  i'avoir  6bauch6  par  des  victoires. 
II  oflrit  la  paix  h  quelques-uns  de  ses 
voisins,  s'etablit  dans  les  environs  de 
la  celebre  Brousse,  premiere  convoitise 
des  Turcs  avant  qu'ils  songeassent  h 
Constantino[)1e,  et  organisa  son  empire 
ou  plut6t  divisa  son  arm^e,  et  lui  imposa 
une  discipline  ri(;oureuse.  Onaattribu^, 
du  reste,  les  resolutions  pacifioues  et 
regulatrices  du  premier  sultan  des  Os- 
manlis aux  conseils  de  Malboun-Kha- 


toun ,  femme  tHsor^  oome  f ofne 
•on  nom  (*)• 

Gette  fcmme,  anm  beUe  qteiifii' 
gu^  ditlatnditioa,teittHitaa» 
pie  cheik  (ebef  mmalmn),  boht 
Edebaijr.  OunaoramiieMiiiwclM 
qoand  il  teifc  d^  le  favori  ihi  pin 
seldjoukide  Ala-Eddin.  Tout  ooaaa- 
dant  en  cbef  d^une  arm^  ipwaBk^i 
fiQt^Osiiian  n'en^poiisapasaoiasblk 
du  fieux  cheik.  Elle  deriat  m^  a 
1274  du  saeood  aultan  de  ia  nn  la 
Osmanlis,  OrUiao-Gfaazi.  Oa  ntak 
au  manage  d'Osman  one  tndititt» 
perstitieuae  qui  caffact^rise  ami  hia 
le  fatalisme  oriental.  Avant  fepov 
Malhoun-Khatoatt,  Oamaa  ortaKOi- 
▼ersatioQ  avee  ella,  oik ,  n'oantpid- 
fronter  le  pr^ug^  lu6nrdmim^k 
s^parait  de  aa  mca-ain6e,  cdlMi  li 
eonsola  en  Tinvitant  k  se  ditfrnie  m 
la  guerre  et  par  lee  ttrnqoi^timm 
prouvant  qu*alla  aTait  efiefliae  pn 
son  parti  par  eea  fwoles,  deicaania 
l^bres :  «  1a  iila  iToii  pavm  ebdk,fi 
«  nTa  pour  toote  fortoae  qa^maa* 
c  doctrine  et  one  mnde  veita,  nfitf 
«  asptrer  k  a'oair  1  un  seigaev  ^o^ 
«  tre  rang.  »  Oanan,  dte^iM,  im 
une  nuit  toot  anMw  dans  la  wi» 
tion  et  dans  las  lannea;etaaleMrd 
Taurore,  en  hon  mnanlaaBn,  il  se  ^ 
terna  la  hoe  contra  tern ,  et  prii  a« 
ferveor.  Gette pritee ealoia adMkai 
et  tout  k  coop,  conmie  one  uaHlM 
celeste, un  sommeil  proteddneoi 
suraesyenx. 

Or  il  vit  en  songe 


semblable  k  h  blanche  etaore 
ia  pleine  luna,  soitir  das  ctai  *  ^ 
£debaly,eon]Hie  aotrefoii  Kaedni^ 
d'Adam.  Gette  hiaor  myH^iaat^ 
entourer  Osman,  ea  Kii  fit  apau«iH 
arbre  immenae  qui  preoait  raott  j 
son  nombril.  Get  arbre  fentasti^*' 
levait  joaqn*aax  aoeg;&  aes 
nombrables ,  pandaient  d*! 
fruits  auasi  beaux  que  aafoureai, 
feuillage,  ^paia,  briliant,  inoo« 
rable,  eou  vrait  la  terre  eatieredeaa* 
bre.  Un  des  rameaux,  d'un  vert  ^ 
que  leg  autrea,  et  fii^onn^  en  cintf^^ 
s^tendait  vers  GonstantinopAe.  St0' 
ombrage  prodigieux,   qui  ser^a^^ 

(♦)  Voyei  Cbalooadyle,  De  rehmM  /»** 


SYRIE    MODER-NP: 


^fl/it/<^  f/t'    /  '^  ///^f.  /V  •  ■^v//-'////. 


STRIE  MODERNE. 


US 


tanteau  globe  terrestre,  on  apereevait  ie 
Uxigss  fleuves  roaler  dans  dlmmeoses 
prairies,  et  se  distribaer  en  eourants  di- 
vers ,  qui  allaient  iroctifier  d'admiraUes 
ver^rs  et  des  terres  toutes  couvertes 
d*6pi8;  enfin  dans  de  vastes  plaines  se 
remarquaient  des  villes  aux  admes  co- 
lossaux ,  aux  minarets  aigus ,  dans  les- 
quelles  cent  peuples ,  venus  de  tons  les 
coins  du  monde,  iaisaient  Plater  dans 
les  airs  leurs  acclamations  d'all^gresse. 
Le  cbeik  £d^baly  expliqua  de  ia  fa- 
^on  suivante  a  Osman,  qui  Ie  consultait, 
ce  songe  miraeuleux  :  Tarbre  ^tait  le 
Thoubah,  qui  ombrage  leparadis  maho- 
m<^tan;  sa  hauteur,  ses  fruits  admira- 
bles,  sa  v^^tation  puissante ,  c'^taient 
autant  d'images  de  la  prosp«rit^  de  la 
raced'Osman;  les  fleuves,  lespalais, 
les  villes  indiquaient  T^endue  de  I'em- 
pire  que  oette  race  allait  fonder;  les  ^u- 

f)les  Dombreux  et  satisfaits  exprimaient 
es  diverses  nations  adiointes  tour  a 
tour  k  sa  domination ;  le  rameau  pen- 
cb^  vers  Constantinople  ^tait  le  pronos- 
tic  certain  de  la  prise  future  de  cette 
ville;  enfin  la  lueur  qui  6manait  des 
cotes  du  cbeik  n'etait  pas  autre  choae 

aue  le  fantdme  de  Malnoun-Kbatoun , 
ont  Ie  mariage  avec  Osman  semblait 
£tre  commande  par  Allah  lui-«itoe.  Os- 
man crut-il  aux  promcsses  miraculeuses 
du  vieux  cbeik ;  ou  bien  proflta-t-il  de 
oette  circonstance  royst^ieuse  pour 
vaincre  ses  demiers  sorupules  ?  Les  his- 
toriens  orientaux  ne  le  disent  pas.  Ton- 
jours  est-il  que  Malbonn-Rhatoun  sot 
exciter  dans  son  mari  les  plus  nobles 
passions,  les  plus  sages  pens^,  eCtera- 
perer  par  sa  douoeur  rApret6  queknie 
pen  sauvage  de  ce  fondateur  de  la  dj- 
nastie  des  Osmanlis  (^. 

Sous  ie  regne  d'Orkhan,  fils  bien  di- 
gne  par  sa  vaillance  dans  la  lutte,  son 
Anergic  dans  la  conqudte,  sa  volont^  in- 
flexible dans  le  gouvemement  des  bom- 
mes ,  de  Tillustre  fondateur  d'empire  a 
qui  il  devait  le  jour ,  fut  cr^  cette  mi- 
lice  c^lebre  nomna^  par  nous  les  janis- 
saires,  par  les  Turesy^ni-tekM,  mot 
a  mot  :  nouvelle  troupe.  Ce  furent  les 
Chretiens  qui  firent  les  fraisde  cette  or- 
ganisation militaire  qui,  cinq  sidles 
durant,  leur  fut  si  funeste.  On  leur  en- 

DYoyezCbalcoDdyle,  I>erebm  Tkweieu. 


levait  des  enfants  de  dix  h  quinze  ans : 
on  faisait  abjurer  aux  fils  la  religion  de 
leurs  p^res ;  puis ,  plus  tard ,  on  les  me- 
nait,  arra^  et  fanatis^,  oontre  leurs 
mtos  et  leurs  soeurs.  On  salt  que  cette 
faroucbe  milice  fut  fondle  par  le  con- 
sell  d'Hadji-Bektach ,  sorte  de  moine 
militaire  aussi  fanatique  que  brave, 
vieillard  renomm^  surtout  par  son  ex- 
perience presque  s^ulaire.  Grdce  h  ce 
corps ,  qui  d&  sa  cr^tion  devint  ter- 
rible, et  grdce  a  une  reorganisation  des 
autres  corps  ottomans,  le  sultan  Orkhan 
put^tablir  k  Brousse  Tavant-garde  de 
son  arm^.  Mais  comme  la  r^rganisa- 
tion  de  ces  troupes  encore  barbares  n'a- 
vait  4^  r^lis^  que  par  des  promesses 
de  victoiras,  et  que  ces  hommes  de  fer 
ne  pouvaient  6tre  sold^  que  par  le  bu- 
tin  pris  sur  I'ennemi,  ilfaliutbien  qu*Or- 
khan  ne  restilt  ii  Brousse  que  Tespace 
d*un  campement,  et  s'envolAt  bientdt 
avee  ses  sipahis,  cavaliers  aux  chevaux 
arabes,  ses  azabSy  coureurs  infatiga- 
bles ,  et  ses  jeunes  et  bouillants  y&ni- 
tchifij  vers  de  nouveaux  pays  k  sacca- 
ger,  vers  de  nouvelles  villes  a  detruire. 
Les  prises  sucoessivesd'AIdos,  de  Nic^, 
de  Pergame,  furent  le  r^ultat  de  cette 
maicbe  fiiribonde  en  avant;  et  k  peine 
resta4-il  au  sultan ,  qui  s*avan^it  tour  a 
tour  vers  I'empire  de  Byzance  et  vers 
les  aneiens  royaumes  des  Seldjoukides , 
le  loisir  d'^ever  quelques  monuments 
religieux  k  Nic^  et  un  palais  (serai)  a 
Brousse. 

Pendant  au*une  nouvelle  puissance 
tendait  ainsi  ses  bras  inonstrueux  vers 
elle,  la  Svrie  restait  plong^  dans  Tescla- 
vage  des  Eg}[ptiens  et  dans  Tinsouciance 
de  son  avenir.  Les  derniers  espoirs  de 
soalagementdans  sa  mis^requ'elle  avait 
con^us,  en  1396,  par  rexp<§dition  du 
Mo(;oi  Kazan,  a  moiti^  eonverti  au 
ebnstianisme,(en  1890),  par  la  prise  de 
Rhodes,  due  a  la  hardiesse  des  Hospita- 
llers; ces  derniers  espoirs  k  si  longue 
distaiioes'toient  malheureusement  Chan- 
el bien  vite  en  dtoptions.  L'exp^ition 
de  Kazan  ne  dura  que  le  temps  d'un 
Eclair,  laissant  aprte  son  apparition  plus 
d*obscurite  que  jamais;  laconqudte  d  une 
fle  de  r Arcbipei  sembia  contenter  Tam- 
bitiondes  ex-chevaliers  de  Saint-Jean  de 
Jerusalem ,  et  a  la  suite  de  cet  exploit 
^oiste  ils  abandonn^reot  sans    plus 

33. 


t66 


L'UmVERS. 


s*toonvoir  leurs  frtoes  du  continent 
sous  le  joug  iofleiible  des  mamelouks. 
I*es  Syriens  finirent  m^rne  par  redouter 
plutdt  qu'appeler  les  secours  de  lean 
coreligionnaires  d*  Europe.  £n  effet,  en 
1366,  le  roi  de  Chypre,  apresla  plus 
vaine  et  la  plus  piteuse  promenade  k  tra* 
vers  les  diff^rentes  cours  chretiennes, 
parvint  k  r^nir  quelques  mercenaires, 
et,  les  d6corant  du  nooi  pompeux  de 
croisi^s ,  il  tomba  tout  a  coup  avec  ces 
soudards  sans  discipline  sur  les  cdtes 
d'£gvpte  et  de  Syrie.  Loin  d'etre  pro- 
fitable aux  Syriens,  cette  irruption  leur 
fit  le  plus  grand  mal.  EUe  fut  d*abord 
la  cause  de  Tincendie  de  plusieurs  de 
leurs  cit6s  maritimes ,  et  plus  tard  le 
pretexte  de  nouvelles  pers&utions  con- 
treleur  religion  dela  part  de  Musulmans, 
demeurte  vainqueurs  (*). 

Gependant  le  successeur  d*Orkhan, 
Murad-Kban  (en  frauQais  Amurat),  fut 
encore  plusaudacieux,  s*ii  est  possible, 
et  certainement  plus  ayentureux  que  son 
pere.  Ce  fut  lui  qui  eut  la  gloire ,  |>armi 
les  Osmaniis,  de  mettre  le  premier  le 
pied  en  Europe.  Tout  fier  de  la  prise 
d'Andrinople ,  il  r^olut  d'y  6tablir  sa 
cour,  et  d'en  relever  la  splendeur  en  Tor- 
nant  de  monuments  superbes  et  colos- 
saux.  Le  djami  (cathedrale)  qu'il  fit 
Clever  au  milieu  de  cette  capitale  excite 
encore  Tadmiration  des  generations  ac- 
tuelles.  Ce  prince  eut,  d*ailleurs,  le 
temps  de  fonder  quelque  cbose  de  du- 
rable, aussi  bien  en  edifices  qu'en  insti- 
tutions, k  la  £a?eur  d'une  paix  de  six 
ann^es  dont  il  sut  faire  jouir  son  em- 
pire naissaftt. 

Grdce ,  du  reste ,  aux  Osmaniis  et  a 
leurs  conqu^tes,  les  luttes  de  TOrieut  et 
de  rOccident  sont  desormais  transpor- 
t's bien  loin  de  la  Syrie,  dans  les  pro- 
vinces qui  formerent  depuis  la  Turquie 
d'Europe.  Les  Francs  n'eurent  pourtant 
pas  rhabilet^  de  profiler  de  la  diversion 
que  leur  offrit  en  1403  Tinvasion  de  Ti- 
mour-Leng  et  de  sa  nu'  vengeresse  de 
soldaits.  Les  Syriens  avaient  et^  les  pre- 
mieres victimes  du  plus  invincible  des 
chefs  Tatars.  lis  ne  surent ,  quand  il  se 
retira  de  leur  pays  pour  alier  combattre 
un  rival  digne  delui,  Baiezid  (Bajazet I  ), 
surnomm&  Il-Dirim,  le  foudrede  guerre, 

(*)  Toyes  Zaofliet ,  Chroniguc  de  Cornelius,        {*)  Voyez  Raynaldi ,  AmaaU$. 


gu^ensevdir  leurs  morts  et  iaire  des  vm 
impuissants  pour  la  paix  du  nonde.  Di< 
rant  les  r^es  de  Mobammed-tiBi 
( Mahomet  I«),  &t  Marad-Ua&  (Aa- 
rat  11 ),  mtoe  impuissanee  de  la  inrt  is 
Chretiens  de  Palestine.  La  croisadeiV 
rive  plus  jusqu'a  enx  :  on  ne  oombit  iV 
lam  a  cette  ^poquequ'en  AlbaBie,«Sff* 
vie  et  en  Uong;rie.  Les  deux  h^  a- 
tholiques  de  fepoque,  Jean  Hoooiiie. 
Yanhiy  comme  rappel lent  les  OsflBslii. 
et  Scanderberg  (Iskender-bey)  lottnt  a 
Europe :  la  Syrie  est  trop  loin;  li  Sfne 
est  separ^e  de  ses  freres  par  ine  nn 
nouvetle  de  Musulmans  qui  bieotdt  a 
retournera  contre  elle.  La  Sjrie  iV 

Erouve  done  que  le  contre-eoup  des  i^ 
lites  du  chnstianisme  :  a  la  prise  ie 
Constantinople,  en  1453,  par  lesntini 
sultan  osmanlique,  MubaauneMka 
£1-Fatyh  (Mahomet  II,  le  Cooqanst:, 
elleentrevoit  de  noureaai  maffleo&Efi 
effet  ce  suco^  prodigieiix  de  llsiaa  sa- 
ble rendre  plus  haioeux,piiis  iatoleraiai, 
plus  feroces  les  mamefoiiks,  toug«n 
maltres  de  l«  Palestine.  Us  oe  fcolat 
plus  supporter  ni  I'aspect  des  GfamiBBi 
ni  la  vue  des  objets  de  leur  euAe.  Dsdt 
vastent  leurs  convents,  ila  ruiDeatlen 
dglises ,  iis  dispersent  ies  < 
leurs  saints.  Lesaint^s^lcreeste 
une  fois  la  proie  de  la  rage 
tane(*). 

Le  tombeau  de  Diea, 
ment  yiol6  en  Asia  par  des  birtaes,  ae 
sool^ve  plus  rindigoatioD  des  mies 
europdens.  Le  pape  Galyxte  III ,  nw 
son  z^le  pieux ,  mal^  sa  darite  a 
faveur  de  ses  fils  d*Onent ,  au  fiea  fo 
voyer  une  armde  en  Palestine,  oe  p 
▼lent  qu'k  institner  unepriere,  VJwf- 
ku,  en  faveur  des  eombattaots  dR* 
tiens.  Les  Vdnitiens,  innesque  seuis,  M 
la  guerre  religieuse  aux  Mnsolmaai,* 
1472  k  1478;  et  encore  ils  la  cessei 
apr^  s*dtre  fait  odder  Cbypie  parli 
veuve  de  Jacques  de  Lusignan ,  dnr 
roi  de  Chypre  et  de  Jemsalem.  Eoii  k 
ddcouverte  de  rAmdrique  niioe  ett 
rement  Tidee  des  croisades.  Toss  'm 
esprits  se  tonment  vers  ce  nauvot 
monde;  les  expdditions  miiitaires  aasi 
bien  que  les  missions  evangeliqaei  J 
trouvent  en  mdme  temps  le  but  de  ksn 


L 


SYRIR  MODERNE. 


857 


rives.  Qu'importedor^navant  a  TEurope 

Suelqucs  malheureux  moines  ^ar^ 
ans  la  valiee  de  Josaphat !  Que  ]ui  im- 
porte  le  sondes  Maronites,  a  Tabri, 
d'aiileurs ,  des  ennemis  de  leur  foi  der- 
riere  les  pics  ioaccessibles  du  Liban ! 
Yoici  une  terre  noyvelle  a  conqu6rir, 
d'innombrables  peupiades  a  convertir, 
des  royaumes  k  fonder ,  des  ^glises  a 
elever ,  une  oeuvre  de  guerre  et  de  re- 
ligion k  mener  k  bien ,  el  assez  vaste 
encore  pour  occuper  toutes  les  ambi- 
tions, pour  satisfaire  tous  lesappetits, 
pour  donner  carriere  a  tous  les  vices  et 
in^me  a  toutes  les  vertus !  L'Amerique 
acheve  de  tuer  la  Palestine.  G'est  done 
rheure  pour  les  nouveaux  conquerants 
de  rislam  d'absorber  a  leur  profit  cette 
province.  Mais  helas!  quel  est  Tauteur 
de  cette  con'qulte  definitive,  c*est  le 

{)lus  cruel  des  tyrans ,  c'est  Selim  P' , 
e  feroce  (El-Yavous ). 

GOUVEBNEHERT   DES  PACHAS. 

Le  pred^cesseur  de  S^lim  P^'au  trdne 
ottoman  de  Constantinople,  Balezid  li, 
avait  et^  un  prince  sans  energie,  et  oui, 
]e  premier ,  avait  manqu6  de  la  qualit^ 
ordinaire  et  souveraine  de  sea  aieux , 
le  courage.  Esprit  inquiet,  coeur  de 
femme ,  caractere  sans  solid ite  aucune , 
Balezid  U  avait  pr^sent^  dans  sa  vie  les 
contrastes  les  plus  ^transes  :  d^vot  et 
ddi)auch^  a  la  fois ,  tantot  il  s'enivrait 
de  vin ,  tant6t  il  se  condamnait  a  des 
jednes  prolong^ ;  adonn^  aux  vices  de 
la  chair,  apres  plusieurs  jours  d*orgie 
il  se  faisait  fustiger ,  se  couvrait  d'un 
cilice,  et  cacbait  sous  la  cendre  Vomhre 
de  Dieu>sur  terre.  En  affaiblissant  son 
corps  par  la  debaucbe  et  la  penitence , 
il  parvint  aussi  a  affaiblir  son  esprit : 
dans  les  derniers  temps  de  sa  vie  il 
^tait  devenu  m^lancolique ;  il  passait  des 
senoaines  entieres  en  contemplation  reli- 

f;ieuse ,  le  corps  prosterne  sur  la  terre, 
a  tite  baiss6e  etles  mains  suppliantes; 
et  quand  il  se  relevait  de  cette  attitude 
d'humiliation ,  ce  n'etait  p^s  pour 
agrandir  son  empire,  pour  faire  du 
bien  a  ses  peuples ,  c'^tait  pour  se  livrer 
secretement  et  honteusement  aux  fem- 
ines  et  5  la  boisson. 

11  fallut  un  bapt6me  de  sang  pour 
laver  toutes  ces  horreurs ,  et  le  feroce 
Selim  P"  alia  bien  au  dela  des  prescrip- 


tions les  plus  inhnmaines  du  plus  cruel 
des  dieux.  A  peine  eut-il  monte  sur  le 
trdne,  par  un  caprice  des  janissnires  et 
par  la  volont6  de  quelques  minislres 
ambitieux ,  <]u*ii  r^^git  presque  aussit6t 
conUre  ceux  a  qui  il  devait  Tempire.  La 
reconnaissance  ne  Tembarrassait  passeu- 
lement,  elle  Thumiliait.  Certains  his- 
toriens  accusent  Selim  1^^  d'avoir  fait 
mourir  son  pere  pour  pouvoir ,  en  I'ab- 
sence  de  tout  coropetiteur  au  trdne, 
s'abandonner  a  loisir  aux  elans  fougueux 
de  son  atroce  tyrannic.  Aussi  durant 
les  neufs  ans  que  ce  tigre  bumain  resta 
sur  le  tr6ne ,  est-il  impossible  de  comp- 
ter le  nombre  de  ses  victimes.  Apres 
avoir  massacr^  soixante  mille  dissidents 
religieux  nomm^s  chHU,  ou  partisans 
d'Ali ;  apr^  avoir  fait  ^or^er  des  trou- 
pes entieres  pour  insubordmation ,  des 
chefs  pour  un  conseil  malsonnant,  et 
sept  de  ses  ministres  pour  lui  avoir  d^- 
plu ,  il  s'en  prit  k  sa  propre  famille ,  et 
tit  etrangler  son  frere  Korkoud  et  cinq 
de  ses  neveux.  Le  camp  des  Osmanlis 
^tait  alors  une  cour  martiale  en  perma- 
nence, et  la  tente  du  sultan  la  deroeure 
du  bourreau.  Le  sang  ruisseUnit  sans 
cesdse  dans  cet  antre  de  b4te  fi^roce ,  et 
les  portes  avaient  pour  ornement  les 
tites  perp^tuellement  renouvel^es  des 
executes.  Que  maintenant  on  glorifie 
S^lim  I^'  de  la  conqulte  de  la  Syrie, 
de  r£gypte ,  de  TArm^nie :  pour  nous, 
k  peine  si  ces  trois  royaumes  nous  pa- 
raissent  assez  grands  pour  ^taneher  le 
sang  quMI  a  r^pandu  (*). 

Apres  la  victoire  qu'il  remporta  sur 
le  sultan  d'£gypte  Kansou -Ghawri , 
Selim  T'  n'eut,  pour  ainsi  dire,  qu*a 
traverser  la  Syrie  pour  s'en  emparer. 
Halep,  Hamab,  Henas  et  Damas  lui 
ouvrirent  successivement  leurs  portes. 
Puis ,  a  son  retour  de  r£gypte,  qu'il 
avait  conquise  avec  autant  de  facility 
que  la  Syrie,  il  s'occupa  de  donner  a 
cette  demi^re  les  lois  qui  la  r^issent 
encore.  Ces  lois  sont  avant  toutes  des- 
poti^ues;  et  mal^r6  leur  apparence  d'in- 
t^it^  et  de  justice ,  elles  sont  devenues 
la  source  de  I'arbitraire  le  plus  odieux 
et  des  avaoies  les  plus  r^p^tees.  Divis^e 
en  cinq  pacbalfks ,  la  Syrie  se  trouva 
livr^e  ainsi  a  la  volont^  toute  puissante 

(*)  Voyez  Cbaloondyle,  Dt  rthv»  Thvrcicit, 


.  Qu^est-ce  en 

t  ^  la  fois  un  g^n^ral*, 


3ft8 


de  cinq  vice-rois. 
qu*un  pacha  ?  G'est 

liQ  administrateur ,  un  juge  et  un  exac- 
teur  souverain  en  matiere  d*imp6ts  et 
de  confiscations'.  II  peut  en  mtoe  temps 
mettre  son  pachalik  en  etat  de  si^e , 
y  lever  des  contributions  forcto,  faire 
tomber  la  t^te  de  tou»  ses  ennemis, 
imprimer  en  un  mot  ia  terreur  pour  se 
oonsolider  ou  s'enriehir.  Lon  de  la 
conqu^te  des  Arabes,  Omar  respecta  les 

{)ropri6tes  quMl  trouva  etablies,  et  les 
aissa  se  transmettre  hereditairement, 
niovennant  une  legere  contribution  de 
racnat.  Lors  de  la  conqu^te  des.  Os- 
manlis,  Selim  V  se  d^clara  mattre  su- 
prtoe  du  sol ,  et  les  propridtaires  ne 
furent  plus  oonsid^r^  que  eomme  des 
usufruitiers ,  et  ne  purent  par  conse- 
quent ni  vendreni  transmettre.  £n 
outre ,  sous  le  nom  de  miri ,  chaque 
ex-proprietaire  fut  fome  de  payer  un 
impdt  fonder  au  gouverneur  de  la  pro- 
vince, impdt  qui  variaitselon  les  besoins 
ou  m^me  lea  caprices  des  pacbas.  On  en 
Vint  m^me  plus  tard  a  faire  peser  sur 
tous  les  Syriens  une  nouvelte  charge 
appelee  le  miri  vert,  c'est^a^dire  une 
imposition  sur  les  plans  d'oliviers  et  lie 
mdriers.  Gette  imposition,  fixeed'abord 
a  cinq  pour  cent  du  revenu  d'une  faible 
ann6e,  mouta  bient6t  jusqu'^  dix  et 
quioze  pour  cent ;  et  enqpre  on  imposait 
Tarbre  des  qu'il  etait  plante,  de  faijon 
qu'il  paystit  au  fisc  avant  de  produire 
au  proprietaire. 

Comment  une  telle  facilite  d'ex- 
ploiter  les  populations  n'edt^elle  pas 
fait  du  gouvernement  des  pachas  la 
plus  odieusQ  des  tyrannies?  Ajoutez  a 
cela  que  les  sultans,  de  plus  en  plus  avi- 
des,  (inirent  par  vendre  les  pacbaliks 
a  Tenchere ,  laissant  celui  qui  leur  don- 
nait  la  plus  grosse  somme  se  r^cup^rer 
en  extorquant  le  plus  oargent  possible 
a  tous  ceux  qui  avaient  le  malheur  de 
vivre  sous  son  ioug«  Ainsi,  les  cultiva- 
teurs,  pour  ^chapper  au  miri  vert, 
arracbaient-ils  leurs  mauvais  plants  d'o- 
liviers ,  on  leur  donnait  la  bastonnade 
comme  ayant  voulu  frustrer  le  fisc.  En 
plantaient'ils  de  nouveaux  en  place  des 
anciens ,  on  les  faisait  payer  h  la  fois 
pour  les  anciens  et  pour  les  nouveaux. 
Ces  exactions  continuelles  d^coura- 
g^rent  peu  a  peu  les  Syriens,  et  leur 


L'UNIVERS. 


firent  abandonner  des  coltores  qaidsi 
les  siecles  pass^  leur  servaient  a  r- 
parer  les  malbeors  des  temps.  Les  li- 
tres conquerants  de  la  Syne  aviiat 
parfois  fait  de  cette  proTinoe  un  dnf 
de  carnage;  le  gouvemement  des  pa- 
chas tendait  a  en  Cure  on  desert.  E2 
encore  nous  ne  parloos  id  qoe  d^soi^ 
frances  des  Syriens  musulnaans ;  quart 
aux  Syriens  catholiqaes ,  e*etait  foo 
autre  chose  I  Ces  derniers,  outre  k 
payement  du  baradi ,  c'est-^ire  la  ca- 
pitation ,  le  droit  de  porter  leur  tAe 
sur  leurs  epaules ,  ^taient  en  botte  a 
toutes  les  sortes  d^exactions  et  ^Ta 
mendes.  Portaient-iis  du  rouge  dans  laos 
v^tements ,  amende.  Ifesed^onnaieK- 
ils  pas  de  leur  route  a  Fapprocbe  di 
pacha  ou  de  Tun  de  ses  of&xn, 
amende.  Oubliaient-ils  d'dter  leurdas- 
sure  en  passant  devant  une  mosqak, 
amende.  Montaient-ils  un  ebevsJaslies 
d'un  dne,  amende.  Enfin,  malgre  ks 
capitulations  passees  entre  SouirynnB 
et  Francois  T',  les  Chretiens  d'Orieit 
n'en  sounraient  guere  moins  qo'asp* 
ravant :  settlement ,  les  avanics  afamt 
remplac^  les  persecutions. 

Que  devait  amener  le  gouvernesMt 
des  pachas,  outre  la  ruine  des  poff^ 
tions?  La  guerre  entre  tous  les  rimti  de 
ce  pouvoir  sans  bornes  ddegu^  par  k 
maitre  souverain   de  Constantiaip^ 
Tel  fut  done,  trois  siecles  donsi,  ^ 
sortd^linitif  de  la  Syne.  Pami  een 
qui  se  montrdrent  les  plus  audawn 
et  les  plus  tenaees  dans  cette  n^  dc 
dominatipn,  il   faut  eompter  Farafee 
Dhaher.  N^  en  1686  d'une  raoBdell^ 
douins  qui  erraient  le  long  du  Jov* 
dain,  Dnaher,  a  la  mort  de  soa  per 
Omar ,  partagea  avec  son  oade  a  ses 
deux  freres  le  oommandemeot  4r  fl 
tribu.  Hardi ,  ^nergique,  entrepmaitT 
de  la  petite  villede  Sapbetb,snifn- 
mitif  domaine ,  il  sVlanca  avee  ses  » 
valiers  sur  Tib^riade,  et  s'enenpn     i 
En  1742,  le  gouverneur  de  Daoai  nrt 
Tattaquer ;  il  se  dtfendit  avecoourtfc 
et  fut  servi  par  le  destin,  qui  le  <icitt^ 
rassa  de  son  ennemi.  Alors,ioo*i- 
bition  grandissant,  avec  laperfdiedt 
sa  race  il  se  delivra  tour  a  tour  de  se 
differents  concurrents;  puiseafio.^ 
venu  unique  chef  de  ses  partisans,  ii^ 
rendit  maitre  par  un  ooupd^aadieedt 


L 


SYRIE  MODERNE. 


ZSO 


Saint-Jean  d'Acre  et  de  son  beau  port. 
Une  fois  la  il  lui  fallut  l^gitimer  son 
usurpation,  et  a  force  d'argent  et  de 
caresses  il  obtint  de  la  Subliiue-Porte 
son  investiture  en  1750. 

Par  son  adresie  autant  oue  par  aa 
valeur,  Bhaber  augmenta  de  jour  en 
jour  sa  puissance,  et  finit  par  faire 
ombrage  an  divan  de  Constantinople. 
Des  lors  on  lui  susdta  partout  des 
rivaux.  Ce  furent  d'abord  Othman, 
pacha  de  Damas ,  et  ses  deux  fiis,  pachas 
de  Tripoli  et  da  Saida.  La  guerre  en« 
sanglanta  done  encore  uoe  fois  la  Sy- 
rie ;  et  malgr^  la  d^faite  d'Otbman  par 
Dhaherenl766,elle  se  prolonged  encore, 
grdce  a  rentremise  du  rdvolte  d'£gypte, 
Ali-Bey.  Lea  deux  nouveaux  allies,  aussi 
ambitieux  Tun  que  Fautre ,  voulaient  se 
partager  la  Syrie,  et  y  seraient  peut-^tre 

{)arvenus  ai  la  Pcnrte  aux  abois  n'avait 
dch^  contre  mcb  ennemis  de  ia  Pales* 
tine  un  obat-tigre  huoiain,  le  trop  c6- 
lebre  Ahnoed,  k  qui  sa  oruaut^  valut  le 
titre  de  Djeziar  (leboucher). 

Ahmed  ne  put  paa  d*abord  roister  k 
Ali-Bey  et  k  Dbaher  r^unis.  Mais  Ali- 
Bey  tout  retourn^  en  £gvpte ,  oit  il  fCit 
tu^  par  trahison,  Ahmed,  tant  par  la 
mw  que  par  la  force,  finit  par  vainere 
I'usurpateur  Dbaher.  La  %rie  et  la 
Porte  n'eurent  pas  lieu  pourtant  de  se  fe- 
liciterduehangementde  I'Arabe  Dbaher 
en  DJezzar  le  Bosniak.  Djezzar^Pacha 
devint  pour  Tune  le  plus  execrable  dea. 
tyrans,  et  pour  Tautre  le  plus  rebelle 
des  gou  verneurs .  II  s'enrichit  des  sueurs 
du  pauvre ,  en  mtoe  temps  qu*il  se  mo- 
qua  des  ordres  du  divan.  Auasi  avide 
que  cruel,  il  d^pitait  les  chefs  dea  fa- 
milies puissantes,  afin  des'emparer  de 
leurs  biens.  Yainqueur  dea  Druses,  aui 
s'etaient  r^volt^  contre  lui ,  il  les  d^ 
chatna  plus  tard  oontre  lesMaronites,  et 
trouMa  fiins^la  quietude  du  Liban.  Enfin 
ce  tyran  inflme ,  malgr^  sea  exactions 
de  toutes  sortes,  ses  vengeances  terriblec 
contre  quiconquea'opposait  k  ses  volon- 
t^s,  ses  crimesiiideux,  ses  pasaions  f<6ro- 
ces ,  r^nait  encore  par  la  terreur  et  la 
mort ,  lorsque  Bonaparte  et  les  Francis 
pen^rerent  en  Syrie,  en  fevrier  1799  C). 

II  ne  nous  appartient  pas  de  raconter 


{*)  Voyez  Histoire  du  consulat  et  de  Vempire 
par  M.  Thi«n. 


cette  mervdlfduse  campagne  d'^ypte 
et  de  Syrie ,  ou  le  drapeau  de  la  France 
se  montra  de  uouveau  vainqueur  et,  ce 
qui  vaut  mieux,  dvilisateur  en  Orient. 
Constatons  aeulement  que  le  g^n^raP 
Bonaparte,  alora  dans  te  plus  pur  mo-( 
ment  de  sa  gloire  et  mu  par  ses  senti-> 
menta  devds  de  respect  pour  les  peu* 
pies  et  de  comprehension  du  rdle  sacre 
de  la  r^publique.,  dont  il  6tait  Fun  des 
plus  illustres  enfanta,  tout  en  respec- 
tant  lea  Musulmans  dans  leur  foi ,  sut 
prendre  sous  sa  protection  les  Chretiens, 
imm^morialement  pers^utea.  D'^tapes 
en  Stapes  victorieiAes ,  il  entra  tour  a 
tour  dans  les  villas  d'EI-Arish ,  de  Gaza , 
de  Yafa.  Malheureusement  Tartiilerie 
lui  manqua  devant  Saint^Jeaa  d*Acre, 
et,  les  Anglais  aidant,  il  neput  pas  faire 
br^he  et  Bvrer  assaut  k  ha  place,  avant 
Tarriv^  de  Tannee  turque,  eommandee 
par  Abdallab ,  paeha  de  Damas.  La  ne- 
cessity de  vaiocre  oes  auxiliaires  de  I'exe- 
crable  Djezsar  exigea  que  Farm^  fran- 
false  quiltAt  en  partieSainMean  d'Acre 
^ur  se  rendre  a  Esdrelon,  ou,  ayant 
trouv^une  plaineoonvenable,  elle  battit, 
dispersa  et  d^truisit  ces  janissaires  tant 
vantes,  ces  Arnautes  soi-disant  invin- 
ciblea.  Les  Syriens  respiraient,  et  se 
croyaient  a  Pheure  de  leur  delivranee 
^erneile.  Helas !  une  autre  nation  chre- 
tienne,  qui  avait  jadis  combattu  si  vail- 
lamment  et  si  longtemps  pour  le  triom- 
phe  de  T  Europe  contre  i'Asie  a  T^poque 
des  croisades ,  s*allia  cette  fois  avec  les 
oppresseurs  de  TOrient ,  avec  les  pachas, 
ces  tyrans  subalternes  ,  plus  faroucbes 
au'aucun  de  leurs  aouverains,  et  la 
flotte  anglaise  for^ ,  par  les  ravitaille- 
menta  et  les  secours  qu'elle  offrit  a 
DJezzar,  les  Francais  lifairateurs  a  lever 
le  si^e  de  SainWean  d*Acre  et  a  eva- 
cuer  la  Syrie.  Que  resulta-t-il  de  ce 
crime  de  l^-humanite  commis  par 
r Angleterre  ?  Une  consolidation  du  pou- 
voir  arbitrage  et  deplorable  des  pachas, 
un  etat  pour  ainsi  dire  appMuv^  de 
la  servitude  chretienne,  tousles  mal* 
hours  et  toutes  les  faiblessea  de  Tanar- 
chie,  rimpuissance  gouvernemeutale  de 
la  Porte ,  la  division  haineuse  des  races, 
unelutte  partielle  et  constante  entre 
certaines  tamilles,  Tassassinat,  le  viol 
et  le  pillage  toler^s,  une  misdregenerale 
et  presque  incurable. 


MO 


L'UNIYERS. 


tXAT  DC  LIBAN  BN  1842. 


3; 


Nous  ne  pourrtoDS  pas  faire  un  ineil- 
)eur  tableau  de  T^tat  actuel  du  Libaa 
et  des  trait(6s  qui  en  r^issent  la  pro- 
tection que  le  tableau  suivant,  qui  fut 
presents  h  la  Cbambre  des  depute 
en  1843  par  M.  Pierre  David,  ancien 
consul  genial  en  Orient  de  1806  a  1826, 
et  alors  deput6  du  Calvados.  Revendi- 
quant  Tappui  de  la  France  pour  les  po- 
pulations chr^tiennesde  la  Syrie,  M.  Da- 
vid s*exprimaiten  ces  termes  (*) : 

«  Nous  etions  en  Orient  les  protecteurs 
nes  de  la  religion  catholique  et  de  ceux 
ui  la  professaient.  Nous  tenionsjce  droit 
es  concessions  de  plusieurs  sultans  ^  et 
surtout  de  la  coutume,  ce  consentement 
gen6ral  qui ,  sous  le  nom  d'adhet,  est , 
apres  le  Koran ,  la  loi  commune  des 
Ottomans.  C^  droit  de  protection,  ce 
droit  consacr^  par  une  possession  de 
trois  siecles ,  ce  droit  devenu  respec^ 
table  a  force  de  blenfaits ,  nous  fut  mo- 
men  tanement  enleve,  en  1840,  par  le 
concert  de  quatre  puissances  quipr^ten-* 
dirent  r^ler  sans  nous  les  anaires  in- 
t^rieures  de  Tempire  ottoman.  On  salt 
trop  ce  qu'il  en  r^ulta  de  troubles  et 
de  violences.  Les  pr^tendus  mod^rateurs 
des  Turcs  devinrent  les  destructeurs 
de  leurs  villes ,  frapperent  sur  tous  ies 
partis  a  la  fois,  et,  pour  d^ivrer  les 
Chretiens  du  Liban  de  la  domination  du 
pacha  d'i^ypte,  les  livr^ent  a  des  pa- 
chas de  Syne,  cent  ibis  plus  oppresseurs 
encore.  lis  enleverent  m^me  a  ces  mon- 
tagnes ,  oil  la  croix  surmonte  le  crois- 
sant, le  vieux  ^mir  Bechir ,  victime  ap- 
pareminent  de  son  aucienne  sympathie 
pour  les  Fran^ais.  Plus  que  jamais  les 
aniinosit^s  s'enflammerent.  U  fallut, 
apres  deux  ans  de  guerre  civile ,  inter- 
venir  de  nouveau ,  et  cette  fois  on  vou- 
lut  blen  admettre  dans  le  concert  euro- 
peen  le  veritable  protecteur  de  ces  po- 
pulations ,  le  roi  des  Francis. 

n  Nous  avons  avec  Tempire  ottoman, 
sous  le  nom  de  capitulations ,  des  con- 
cessions imp^riales  qui  remontent  au 
commencement  du  seizieme  siecte.  Ce 
fut  en  1585,  sous  ie  regne  de  Fran- 
cois I'",  que  fut  accorde  le  premier  de 


(*)  Voyez  MtmiUur  vniversel^  seance  de  la 
ChambredeB  D^pul^  du  80  Janvier  iSiS. 


ce8  firmans;  c'est,  sous  one  fane 
nouvdie ,  une  espdee  de  traite  deeo» 
merce  et  d'amiti^  entre  la  France  et  fa 
Turquie.  On  j  stipula  des  eonfitMi 
oui  fondant  notre  droit  Gomnia» 
dans  le  Levant.  Henri  IV ,  Louis  IH 
et  Louis  XY  obtinrent  ie  reaooi^ 
ment  de  ces  coneessioiis ,  el  diafit 
fois  elles  re^orent  plus  d'extensioB,^ 
force  et  de  solennite. 

«  Parmi  les  privil^es  qu'elles  aeeor- 
daient  k  la  France,  k  la  seule  France,  k 
plus  glorieux  sans  doute  futde  faiicGft- 
ferer  la  protection  de  la  retigiimcatki- 
lique  dans  ies  £tats  du  grand-seipMr. 
Cette  protection,  grandissant  de  »de 
en  si^ie,  s*^tendit  au  saint-sepnkn, 
aux  ^lises,  aux  6v^ques,  aux  prto 
et  aux  ordresreligienx,  et,  parmeia- 
terpr^tation  qui  fut  raremeot  eo^esta, 
elle  enveloppa  k  certains  ^rds  iaaa- 
ples  habitants  qui  professaient  le  mtat 
culte.  II  en  results  que  les  popoiatietf 
chr^tiennes ,  g^n^raltaMont  sovsuies  a 
leurs  pasteurs  spirituels,  ae  trsmfot 
couvertes  elles-m^oies  de  eetts  ^gide. 
Ainsi  les  catholiques  de  P«  «t  de  Gi- 
lata,  ceux  deSmyrne,  deSyra,  d»71se, 
de  Naxos  et  de  quelques  aotics  Isi^ 
TArcbipel,  ceux  de  Rhodes, de  0^ 
et  de  la  Syrie ,  fiirent  tacttemcat  mm 
sous  la  protection  de  la  France;  el  e^ 
protection  religieuse  devint  f 
ment  une  protection  dvile,  qui  ( 
tissaitjces  populations  des  avaaies  an* 
quelles  elles  avaient  M  jnsgn'alana- 
pos^.  LaFranoe  nelettrlitja«abie' 
faut;  ses  ambassadeurs  et^MS  ssbsdIs 
se  £aisaient  un  devoir,  miaiae  oa  ta- 
neur,  d*intervenir  sans  oesse.enfricar 
de  leurs  coreligionnaires ,  et  Os  eiea- 
daient  ainsi  dans  ces  vasles  eonlreesk 
respect  du  nom  fran^is. 

«  Le  palais  de  notre  ambaasade,  les 
hdtels  de  nos  consuls  daient  defew 
des  lieux  d'asile;  its  etaienl  nspalB 
par  les  Turcs  des  plus  basses  eoodiiM 
comme  par  leurs  cnefe  de  tous  les  raie 
on  a  vu  souvent  la  fureur  popebfli 
s'amortir  au  seuil  de  ceshabitatioossa- 
cr6es :  les  agents  de  Tautorit^  s'jr  anf 
taient  de  m^me.  Les  coneessioos'tacto 
de  ce  droit  de  protection  sont  aUecs  s 
loin,  que  les  eglises  catholiques  da  Le- 
vant ont  pu  arborer  le  pavilion  fran^ 
sur  leur  portail,  pour  marque  a  toes  la 


L 


SYRIE  MODERNE. 


S61 


yeux  guelle  protection  Auissante  coa- 
vrait  le  cuite  qu'on  y  eelebrait.  Ce  signe 
tut^laire  les  a  garantis  de  toute  insulte 
pfMidant  la  guerre  civile;  enfin,  le  mo- 
nastere  du  moot  Carmel  ^tait  aussi, 
dans  la  Syrie,  un  refuge  prptecteur,  une 
oasis  d'humanit6  au  sein  delabarbarie. 
Le  fanatisme  d'un  pacha  le  detruislt; 
rinfluence  d'un  ambassadeur  de  France 
]e  releva ;  et  c'est  encore  1^ ,  sous  la 
banni^re  fran^aise,  que  tant  de  savants 
voyageurs  de  toutes  les  nations  trouvent 
la  confraternity  europeenne ,  Timage  de 
la  civilisation  et  les  soins  de  Fhospitalit^. 
Qui  peut  mieux  que  ces  faits,  mieux  aue 
notre  longue  possession,  mieux  que  ru« 
sage  encore  recent  de  notre  preponde- 
rance, constater  la  r^alite  des  droits  qui 
nous  fiirent  conc^d^s  par  des  actes  so- 
lennels  ou  par  le  consentement  c^n^ral  ? 
C'^taitjpour  la  France  un  bel  empire 
dans  rOrient  Chretien,  que  ce  droit  de 
le  pro^ger  au  sein  mdme  de  Tlslam ,  que 
cette  faculte  d'y  faire  prdcher  r£vangile, 
cette  loi  du  libre  arnitre,  k  c6i6  du 
Koran,  ce  code  de  la  fatality.  * 

i«  Les  capitulations ,  en  reconnaissant 
h  notre  roi  le  titre  de  padishah,  qui  cor- 
respond h  celui  d'empereur,  nous  ont 
donn^  le  pas  sur  les  autres  nations  fran- 
ques;  mais  qui  pouvait  nous  envier 
cette  pr^toinence,  auand  nous  ne  la 
faisions  servir  qu'^  Fhonneur  commun 
des  nations  chr^tiennes?  Qui  pou/ait 
nous  envier  nos  privileges  commerciaux, 
quand  notre  premier  soin  fut  de  les 
partager  avec  nos  allies?  DeS^  1535  la 
France  obtint  de  Soliman  T'  que  le 
pape  et  les  rois  d' Angleterre  et  d'Ecosse 
fussent  compris  dans  les  premieres  ca- 
pitulations qui ,  comme  je  viens  de  le 
dire,  ^talent  un  veritable  traits  de  com- 
merce et  d'amitie.  Sur  la  sollicitation 
de  la  France,  toujours  conciliatrice,  on 
permit  plustard  aux  autres  nations,  que 
les  Turcs  appelaient  ennemies,  de  navi- 
guer  dans  les  mers  du  Levant  sous  le 
pavilion  fran^ais  et  d'y  jouir  de  nos  pri- 
vileges. Cette  concession  leur  fut  retiree 
par  suite  de  quelques  m^contentements 
politiques.  En  bien ,  la  France  cut  en- 
core une  fois,  sous  Louis  XY ,  la  g^n^- 
rosit^  de  faire  rendre  k  ces  nations  la 
faculte  de  revenir  dans  les  ports  de 
Fempire  ottoman,  a  I'abri  de  notre  ban- 
niere.  Quel  aveu,pour  les  populations 


musulmanes  comme  pour  les  nations 
europ^nnes,  de  notre  incontestable 
preponderance! 

«  Cette  prerogative,  qu'on  nous  a  ravic 
dans  le  Li  ban ,  ce  droit  de  protection 
qui  nous  fut  donne  par  les  souverains 
ottomans ,  et  confirme  par  Tassenti- 
ment  universel ,  comment  Favons-nous 
exerce  lorsque  nous  le  possedions  sans 
partage  ?  Nous  Favons  etendu  non-seu- 
lement  sur  les  Catholiques,  mais  encore 
sur  tous  les  autres  Chretiens,  lorsqu*ils 
Font  invoque.  On  nous  a  vus  prote^er 
les  Armemens  k  Constantinople  et  faire 
rappeler  de  Fexil  une  population  enti^re. 
Qui  ne  se  souvient  de  la  revolution 
grecque  en  1821 ,  et  de  Fappui  que  la 
France  a  donne  partout  k  des  popula- 
tions proscrites?  Le  pavilion  francais  les 
protegeait.  Seul  il  le  pouvait  aux  yeux 
des  Turcs ,  parce  qu*il  leur  etait  egale- 
ment  tuteiaire,  lorsqu'ils  redamaient  sa 
protection  dans  leurs  perils.  Cette  im- 

riale  humanite  fit  sa  gloire ,  et  ren- 
son  droit  sacre  pour  tous.  P^os 
amiraux,  nos  commandants,  tous  nos 
marins  firent  alors  une  croisade  de  civili- 
sation et  d*humanite  qui  les  honore  k 
jamais,  et  qui  les  a  rendus*chers  a  tous 
les  partis. 

c  Les  traites,  dans  ce  pays-la,  les  vrais 
et  bons  traites  ne  sont  pas  ceux  qui 
sont  ecrits ,  mais  ceux  qui  sont  deposes 
dans  la  memoire  des  peuples  et  des  gou- 
vemements.  Tout  y  est  confiance ,  reci- 
prodte  de  services ,  communaute  d^in- 
terlts.  C'est  le  pays  des  faits,  des  sou- 
venirs et  de  la  coutume.  Les  capitula- 
tions soDt  ecrites,  il  est  vrai ;  mais  elles 
ne  sont  point  des  traites  condus  entre 
deux  parties  contractantes  et  se  faisant 
des  conditions  redproques.  Elles  sont  ce 
que  nous  appelions  dans  Fancienne  mo- 
narchic des  lettres  patentes ;  elles  expri- 
ment  les  volontes  du  souverain  en  faveur 
d'un  peuple  ami ,  et  commandent  aux 
sujets  de  s*y  conformer.  Ce  sont  done  , 
ainsi  que  je  les  ai  nommes  en  com- 
men^ant,  des  concessions  imperiales. 
Ces  concessions,  toujours  interpretees 
en  notre  faveur  par  les  dispositions  ami- 
cales  du  pays  et  du  gouverneroent ,  ont 
cree,  ont  etendu ,  ont  fixe  nos  droits  et 
nos  privileffes  en  Orient.  Ce  que  ces 
droits  ont  de  simplement  oral  ou  cou- 
tumier  y  est  aussi  connu ,  aussi  respecte 


862 


L'DNIVERS. 


que  l6s  stipulationB  qui  toat  dans  les  fir- 
mans. 11  fauldonc  lea  conserver,  les  sou- 
tenir  teis  qu'ils  soot  Merits  dans  les  es- 
prits  et  dans  la  eooscienoede  ces  peuples. 
Ne  les  ali^mms  pas ,  ne  les  modinons 
pas,  ne  les  parta^eons  pu ,  car  il  ne  nous 
serait  plus  permis  de  les  rcpreodre.  Ge 
qui  s'effaee  daos  des  archires  tiTantes 
lie  s'y  retroure  jamais. 

«  Gherchoos  mainteiiant  ce  qui  peut 
avoir  arme  les  Druses  eontre  les  Maro* 
nites ,  ces  deux  popalatioos  longtemps 
unies  pour  leur  propre  sArete.  On  a 
parle ,  dans  le  temps,  de  missionnaires 
americaioB  qui  ^talent  venus  Chauffer 
les  esprits  par  uo  mysticisme  relt^ieux, 
ni^l6  d'id^  de  Uberte;  mais  qui  peut 
croire  que  de  Tieux  Catboliques  du 
sixieme  sftele,  sans  lettres,  sans  pre- 
p«iration  d'aueuoe  sorte  aux  id6es  poli- 
tiques ,  oonstamment  sons  les  yeux  de 
leurs  evdques  el  de  leurs  pr6cres ,  se 
soient  hiss6  squire  par  oes  reveries 
transatlantiques?  Qui  pent  croire  que 
descultiTateurs  devignes  et  de  mdriera, 
contents  de  leur  sort,  soient  devenus  des 
penseurs  philosopbes  etdes  Instruments 
revolutionnaires ?  Quant  aux  Druses, 
ces  especes  d'amphibies  religieux  qui 
professent tour  a  tour,  selon  le  besom, 
rislamisroe,  le  duistianisme;  etje  ne 
sais  quelle  obecure  idoMtrie  qui  ressem* 
ble  a  eelle  du  Teau  d*or,  ils  ont  pu  feia* 
dre  unequatritoe  croyanoe,  si  leur  ava- 
rice y  a  ete  int^ressde ,  naufk  la  rejeter 
quand  ils  n'auront  plus  d'int^r^t  k  la 
professer ;  mais  eette  croyanoe,  toujours 
ni^lee  d*id6es  politiques,  a-t-ellepu  touta 
seuie  leur  mettre  les  aemes  h  la  main  ? 
Sont-ils  devenus  des  propa^andistes  re- 
volutionnaires sur  Tiavltation  de  quel- 
ques  pr^dicateursam^icains?  Gela  n'est 
guere  plus  eroyable«  Oik  done  ^tait  la 
cause  de  cette  guerre  civile,  si  eontraire 
a  la  sdret^  commune  des  deux  popula- 
tions ?  On  a  8oup42>eiine  TAngleterre  d'a- 
voirfavoriseles  missionnaires  soi-disant 
americains  dans  un  int^rSt  purement 
politique. 

« lei jem'arr^tedansmes conjectures; 
il  faut  aes  fai^,  des  preures  pour  attri- 
buerdepareilles  manoeuvres  ^un  gouver^ 
nement;  je  m'abstiens  d'autant  plus  que 
leininistred'Angleterre  h  Constantinople 
a  protest^  liautement  centre  Taccnsation 
de  connivence  avec  les  missionnaires 


amdricains ;  mais  je  sois  ofafi^  de  fm 
un  rapprodiemeot  quiietiiMejistiier 
les  doutes  qu'on  a  con^.  L'AngtelaR 
fit  enlever  remir  Bkkir  de  la  moabpe 
a  la  m6me  ^poque  ou  ses  valsseioieca' 
saient  Beyrool  et  Saint-Jeao  Shm. 
Quel  int^r^t  aviex-vous  k  cikreraa 
populations  du  Liban  ee  prince  pilriar- 
cal  qu*elles  Teneraient^EtaitKX  ymk 
remplacer  par  un  geuvenear  de  niR 
choix,  et  iaire  coiocider  la  founim 
de  la  montagne  avec  eelle  do  tittoni? 
Vos  projeU  sur  la  Syrie  n'ayant  pu  ti 
les  suites  que  vous  eo  esperia,  ct» 
trouvanft  ijoum^,  voos  voos  ftam- 
nis  aux  autres  puissanees  poor  r^ir 
la  paix  dans  cette  province: leneiika 
raoyen  sant  <toute  edt  ^dereodicjB 
populations  une  famiUe  priodere  fi 
leur  toit  ch^.  Poorquotdeachiiifo- 
vous  donn^  formelleroeot  retdusoD/ 
C'^talt  lorsque  la  n^iatiootoKkaita 
sa  fin ,  quo  vous  vous  ttes  pronewa 
fortaroent  eontre  elie;  de  sorte  fie  d 
Porte  en  a  pris  pr^xte poorlin«li 
gouternemont  de  la  montagoeanx  «8 
kaimaeama  d'un  pacha.  QaVnnH 
r^ulter?  un  nouveau  malaiae  pirfl^ 
populations,  et  bientdtuaerepri*"^ 
mee  eontre  teurs  oppwaseon.  0*  «" 
prise  d'armes  les  aaaiWIw  de  |iteg 
plus,  et  laisseraees  grandeaban^ 
deTOrieotii  la  dlspodtioa  ■»  P«"* 
occnpant.  ^ 

«  Il  faut  ea  voir  en  effet  «e  ytag 
le  titre  de  kaimacaoM.  On  la  WW' 

rur  nous  raasurer,  par  cdoidadMjJ 
est  vrai,  les  kafmacams  aoet  »«• 
l^u^;  mais  de  qui  le  aoat^?  •» 
pacha  dont  ils  sont  les  lieuwaatt^ 
vous  saurex  que  le  deapotiaroeeaOnjw 
sed^l^uetontentlerdaiap^Mr'''^ 
fSrieur :  il  ne  r^tr^it  oue  ^^^ 
il  s'exerce,  en  passant  du  f  wfld4«P*[ 
aux  pachas,  de  eeux-ci  a  tours  «»»• 
cams,  et  de  ces  deraiera «» *^  *JS 
simples  agas;  mais  daitf  le  pw'JS 
de  bes  cercles  il  a  la  mtoe  in^j^ 
qu'au  s^rail ,  c*e8l-a-dire  Ic  Aj^V*/: 
et  de  niort,  et  surtout  celui  d«aB»j 
arbitraire.  C'eat  la  spirale  du  W«wi 
y  a  souffrance  et  terrcor  tlaw  w^^ 
cercles.  Leskaimaca!ns,enTui!|BK!  , 
sont  done  que  des  pacbas  P^^ 
ils  seront  dans  ^  ^•^"JTi^'b 
nSnts  ou  vice-pachas  i  poUe  »* 


L 


I    ^ 


V 


SYRIE  MODERNE. 


S6S 


arrive  soavent  que  ces  despotes  subor- 
donnessont  plus  violents  que  leurs  chefs, 
surtout  en  niatiere  d'exaction ,  car  its 
ODt  des  tributs  a  lear  transincttre  et 
des  presents  a  leur  faive. 

•Etvoilaradministratioa  promise  aui 

Chretiens  deSyrie;  voita  les  concessions 

obtenues  avec  tant  de  peine  par  les  cinq 

grandes  puissances!  La  seule  France 

autrefois  avait  fait  inieux  que  oela.  Elle 

avait  admis,  avec  les  Druses,  la  fable 

qui  les  faisait  descendre  des  soldats  ^ga* 

res  d'un  comte  de  Dreux,  a  T^poque  dea 

croisades.  Elle  lesprot^geacommeorigf* 

naires  Frangais;  maiselleadmiten  mmt 

temps,  sous  sa  protection ,  ees  vieux 

Chretjena  du  sixitoe  siecle,  qu'on  ap- 

pela  Maronitea ,  da  nom  d'un  de  leurs 

apdtres ;  et  bienloin  de  diviser  oes  deux 

races ,  et  de  les  Cure  egorger  Tune  par 

Tautre,  )a  France  les  rapprocba,  les  reu- 

nit  presqueen  un  seul  corps.  Puis,  apr^ 

que  la  raee  de  leur  fameux  emir  Fakr- 

ed«Din«que  nousappelons  Fakardin,  fut 

eteinte ,  la  France  cut  assez  dlnflueoce 

pour  faire  d^ferer  Fautorite,  par  Telec- 

tion  des  cheiks,  k  la  maison  Schabab, 

^uia  gouTern^  te  Liban  jusqu'en  1840, 

epoque  oik  Temir  Beaonir,  prince  re- 

inont,  a  H6  enlev^  par  les  Anglais  et 

soaduit  a  Malte. 

«  Ceroi  patriarcal  r^nait  depuis  long- 
lemps.  II  avait  vu  les  Fran^ais  en  Syrie, 
H  apr^  letir  retraite  il  en  sauva  Mau- 
»ap  dans  ses  montagnes ;  il  ne  voulut 
lamais  les  livrer  ni  a  la  vengeance  des 
Furcs  Di  k  rhumanit^  des  Anglais.  On 
iit  maintenant  que  nous  avons  eu  k 
wuB  en  plaindre.  J'ignore  les  grie&  de 
lotre  gouvernement;  mais  il  me  semble 
[ue  nos  ressentiments  auraient  di)  se 
aire  devant  ces  souvenirs,  et  surtout  de* 
ant  not  int^r^s  politiques  et  religieux. 
je  prince  da  Liban  ^tait  tributaire  du 
rand^seigneur,  et  non  sabordonn^  aux 
achas  du  littoral  syriaque.  Ces  pachas 
evenaient  souvent  des  rebelles ,  qui  se 
erp^tuaient  dans  leur  gouvernement 
'une  ann^ ,  comme  tit  Djezzar-Pacba 
ana  celui  de  SaintpJean  d'Acre.  Ces 
mrpateurs  ne  tardaient  pas  a  vouloir 
evenir  cooqu^rants.  De  la  les  attaques 
fr^quentes  qu*ils  faisaient  contre  les 
liiicea  de  ia  montagne,  et  la  perp^ 
lelie  resistance  des  Chretiens  pour  d^« 
adre  leurs  eheft  et  leur  ind^pendanee. 


Tel  ^tait  le  {[ouvememeDt  tut^aire  du 
Liban;  c'etait  celui  qu'il  fallait  lui  ren- 
dre.  Mais  au  lieu  de  oette  maison  Scha- 
bab, si  v6ner^  depuis  un  siecle  et 
demi ,  on  assuiettit  les  habitants  de  ces 
montagnea  a  des  primats,  qui  vont  y  ap- 
porter  tous  les  abus,  toutes  les  violences 
du  regime  des  pacbaliks.  Ces  primats 
repondent  sur  leur  t^te ,  au  pacha  de 
Saida,  de  la  souinission  des  populations 
et  du  payement  des  tributa,  doubles 
ou  triple  par  les  exacteurs,  au  profit 
des  kaiinacams  et  de  leurs  officiers.  Ce 
pacha  de  Salda  n*cst  nomme  que  pour 
un  an.  Celui  qui  aura  achete  ce  poste  a 
Constantinople  pourra  dtre  un  autre 
Omer ;  fdt-il  m^me  le  raeilleur  des  Turcs, 
il  fautqu*il  s'enrichisse  pour  payer  ses 

Eroteeteurs  a  la  Porte ,  et  les  nouveaux 
aimaeams  feront  aussi  oomme  le  nou* 
veau  pacha. 

«  On  parte,  pour  r^pondre  a  c«8  crain- 
tes,  de  radoucissement  de  Fadminis- 
tration  turqne.  Nous  aimons  trop  a 
croire  ce  que  nous  d^irons,et  anous 
eontenter  d'illusions  pbilaotliropiques  : 
les  Turcs  sont  ce  quoits  ^talent,  malgre 
leur  travestissement,  et  le  batti-seherif 
de  Gul*Han6,  au'on  a  nomn»6  si  lege- 
ment  la  cbarte  aw  Ottomans,  n'a  deja 

£lus  aucune  valeur.  Le  regime  de  Far- 
itraire  n'a  jaaials  aesa^  dans  les  provin- 
ces ,  et  reprend  toua  les  jours  son  em- 
pire dans  Constantinople,  Mahmoudest 
mort  dix  ana  trop  t6t  :  son  ouvra^e  se 
r6duit  k  quelques  ebangements  de  titres 
et  de  cofttumes.  Je  regarde  done  la  con- 
cession obtenue  de  la  Porte  en  faveur  du 
Liban  comme  illusoire ,  et  renfermant 
toujourson  germe  d'oppression  contre 
nos  Goreligionnaires ,  et  d'abolition  des 
privileges  de  la  France » 

CONCLUSION. 

Que  s'est-ii  passmen  Svriedepuis  1842  ? 
Rien  qui  ait  am^lior6  le  sort  des  Chr^ 
tiens.  Le  protectorat  de  la  Franee  s'est 
de  plus  en  plus  affaibli ,  annule  sous 
riniluence  de  la  politique  ^oiste  du  der- 
nier r^gne.  Aussi ,  dans  leur  d^spoir, 
les  Maronites  envoyaient^ilB  le  12  fe- 
vrier  1848  au  minist^,  si  indifferent 
k  leur  ^ard  ,  de  Louis-Philippe ,  une 
dernito  potion ,  ou  plntAt  un  cri  su- 


364 


UUTflVERS. 


pr^nie  dedouleor,  eontenant  ce  r^um6 
81  pitoyable  des  calamilis  qui  ont  suivi 
dans  le  Liban  notre  abandon  momen- 

tane  :  « Voil^  ia  cause  des  malheurs- 

«  ^ui  nous  ont  atteints,  de  notre  ruine 
«  immense,  de  notre  sang  vers6,  de  Tin- 
«  cendie  de  nos  maisons ,  de  la  profana- 
«  tion  de  nos  ^lises,  du  d68honneur  de 
«  nos  Giles  vierges,  du  massacre  de  nos 
«  enfants,  fendus  en  deux  par  r^p6e  sau« 
«  vage  des  Druses.  » 

Mais  Dieu  semble  enfin  avoir  en- 
tendu  les  g^missements  de  ce  peuple 
si  odieusement  opprim^;  ear  il  a  voulu 
que  sa  petition,  adress^  a  la  monar- 
chle,  fut  rapportee  par  la  R^publique. 
La  R^publique  g^n^reuse  et  sensto, 
par  humanite  autant  que  oar  raison , 
prendra  h  coeur  de  secourir  aes  malheu- 
reux,  et  de  revendiquer  les  droits  et  pri- 
vileges qui  furent  conc^^  il  y  a  trois 
siecTes  k  la  France  par  la  Turquie.  (Test 
la  un  beau  rdle  assurement ,  et  nous  ne 
doutons  pas  qu'il  ne  soit  accept^  tout 
entier  par  le  gouvernementdu  24  f^vrier. 
Seulement  sufflra-t-il  maintenant  de 
ne  r^lamer  en  Syrie  que  le  protectorat 
des  Chretiens  ?  Les  choses  n'en  sont-elles 

Eas  venues  a  ce  point  oik  un  rem^e  plus 
eroique  soit  n^cessaire?  La  haine,  exci- 
tdede  nouveau  et  si  criminellement  dans 
*  le  coeur  des  Druses  cootre  les  Maronites, 
8*apaisera-t-elle  a  un  signe  de  nos  con- 
suls? La  Porte,  aupouvoirsi  faible  et 
si  tiraitle,  pourra-t-elle,  en  admettant  sa 
bonne  volont^ ,  rendre  au  Liban  la  paix, 
a  sesrepr^sentants  en  Syrie  le  sentiment 
de  la  justice,  delaprobite,  deTimpar- 
tialite?  Nous  ne  le  croyons  gu^re,  et 
voici  les  raisons  de  notre  doute  : 

Le  Turc  n*est  plus  aujourd*hui  ce 
qu'il  fut  si  longtemps.  Pfagu^e,  les 
jambes  nues,  le  front  d^ouvert,  la  barbe 
epaisse,  la  poitrine  charg6e  d'armes  de 
toutes  especes ,  il  vivait  fier,  insoucieux, 
dans  la  contemplation  de  sa  puissance 
et  dans  le  m^pris  de  ses  adversaires  :  k 
rheure  qu*il  est,  avec  sa  redingotte  dtri* 
qu^e,  son  pantalon  de  palefrenier,  ses 
bottes  a  ^perons,  qui  le  ginent,  sa  cra- 
vatte ,  veritable  carcan ,  il  semble  aussi 
cb^tif  que  son  anc^tre  paraissait  fort. 
IVaguere,  apr^  avoir  retire  des  peuples 
nouvellement  conquis  tout  le  sue  qu*il 
enpouvait  extraire,  apres  s*ltre  entoure 
du  luxe  de  rameublement ,  de  la  beauts 


des  femmes,  de  la  sensuality  des  ntt, 
apres  s*toe  abandonn^  aux  pbisosit 
toutes  sortes,  il  se  ievait  tout  a  of , 
secouaitson  enivrante  apathie,  duipt 
ses  longs  pistolets ,  aiguisait  son  b 
kandjar,  montait  son  clieval  rapide,! 
avec  quelques  poign6es  de  riz  poor  u» 
riture,  son  raanteau  poareoodx.si 
intrepidity  pourlroe,  s*en  allaiteaiir 
les  longues  plaint  de  la  Senrieoi  Is 
vastes  prairies  hongroises.  Maiofeent, 
range  par  avarice,  sobre  par  neoessst 
ne  recherchant  plus  les  cootrastes  & 
ciens  de  son  existence ,  mais  envioidi 
con/ort  de  la  vie  modeme ,  il  rM 
I'Autriehien  et  tremble  devant  le  RoiK. 
Que  voulez-vous  que  fasse  le  dtrai, 
autrefois  si  orgueilleux ,  actueUeoxstfi 
OKMleste,  le  divan,  qui  s^inspire  diiciiei, 
lui  qui  jadis  n'^coutalt  que  raadacc;qK 
voulez-vous  que  resolve  ce  dwm  k- 
gen^re  vis-a-vis  desdifficultes  insoni^ 
tables  que  lui  nreseote  la  jnd&atie 
du  Liban !  II  a  laisse  des  mwioiiBain 
protectants  y  soufDer  la  discorde ;  ii  i^ 
pas  efOcacement  appuye  des  coTOfs 
francais  qui  charchaient  a  y  rmr 
I'ordfre.  Ce  quUl  fiit  en  1840  et  eo  I84T, 
il  le  sera  tou  jours :  il  sera  tout  aussi  i» 
puissant  pour  fonder  le  bienffliiira^ 
pour  emp^cher  le  mal.  II  d  a  \maa 
trouve,  pourdetraire  en  Syrie  one  a■^ 
chie  de  plus  en  plus  eflrayantCtf*^ 
expedients  sans  duree,  quedesna^ier 
sans  valeur  :  atnsi,  pour  o'eaoiff 

3ue  deux  exemples ,  son  desaiM^ 
ela  montagne,  qui  ne  s'estop^f 
chez  les  Maronites,  et  aucunemcDl  ekii 
les  Druses ;  sa  nomination  de  deas  ^ 
macams,  qui  ne  pouvait  aboatir  fi'<^ 
viser  la  tyrannic  en  deux  portifli«%» 
lieu  de  lui  laisser  au  moins  la  poi»"g 
de  Tunite.  II  n'y  a  rien  done  a  atww 
d'un  gouvemenient  en  decadeocf,^ 
promettra  toujours  sans  tentr,  fanffi 
sans  agir,  ordonnera  sans  etreobo. 

Au  lieu  de  perdre  ainsi  sob  teflfi  ^ 
negociations  inutiles ,  la  France  oe  ^ 
rait-elle  pas  mieux  de  redamer  »*« 
suite  ce  que  Favenir  forcera  laPwte* 
faire,  c'est-a-dire,  neferait-ellcpisBW 
de  demander  au  divan  dc  laisserlo  Ma* 
ronites  se  gouyemer  eux-roeow,  y^ 
ter  le  Liban  comme  il  traitc  la  Mw«** 
la  Valachie ,  la  Servie.  PcMirat(««»« 
but  il  fiiudrait  d'abord  detniire  r«iat  a- 


SYRIE  MODERKE. 


3G5 


UAitMe  de  oes  villages  roixtesde  la  Mon- 
tagne,  oik  les  Druses  arm^  inspirent  sans 
cesse  I'effroi,  Finqui^tude  de  ravenirja 
crainte  du  cri  me  aux  Maroni  tes  d^sarmes. 
II  faudrait  aussi  ^loiffiier  ces  premiers , 
Daturellement  nomades  et  aventuriers , 
en  les  faisant  indemniser,  s'il  y  a  lieu , 
fMir  les  Maronites  devenus  les  h^ritiers  des 
champs  qiie  les  Druses  lalssent  en  friche. 
II  faudrait  encore  permettre  aux  Chre- 
tiens de  porter,  eux  aussi,  le  vatagan 
et  la  carabine,  Tep^e  et  le  fusil.  11 
faudrait  enfin  tolerer  qu'ils  se  fortiGas- 


sent  dans  leur  montagne,  &  la  condition 
formelle  de  n'en  point  sortir.  Alors  le 
Liban  deviendrait  une  Suisse  orientate , 
oii,  grdce  h  rindnstrie  de  ses  habitants , 
a  Factivite  de  leur  travail ,  h  leur  s^u- 
ri^  future ,  pourrait  commencer  pour  ses 
peoples  une  hrt  de  paix  et  de  prosp^rite 
que  nous  leur  avons  vu ,  dans  le  oours  de 
cette  histoire,  esp6rer  inutilement  pen- 
dant douze  sidles ,  et  poursuivre  h  tra- 
vers  tant  de  larmes  et  tant  de  sang.  Nous 
emettons  ce  dernier  voeu  sous  le  patro- 
nage de  la  fraternity  r^publicaine. 


FIN  DE  LA  SYRIK  MODERiNB. 


TABLE  ALPHABETIQUE 

ET  ArtALYTIQUE 
DES  MATli^RES  CONTENUES  DANS  LA  SYRIE  MODERNE. 


NoTA.  -  Les  lettres  a  et  b  qnl  aeeomptgnent  les  cbtfTres  de  rcnrol  <Miignent ,  rone  li  premt^rv  colonne, 

rantre  la  seconde. 


4bd-Allaht  fila  deRavahal),gaerrierarabe,52b. 

ibd'AUah,  ])eau-fil8  d*Abou-Bekr,  66  a. 

4bd' Allah,  fils  de  Zobair;  son  portraii,  122  b, 
123  a,  126  b;  i1  defend  la  Mekke  contre  les 
Syriens,  127  a,  b.  Toy.  aussiI29  a,  130  a, 
131  a,  138  b,  138  a,  150  b. 

m-Attah,  fr6re  dukhallfe  Othman,  TOO  b. 

tbd- Allah ,  fits  d'Omar ;  son  portrait,  122  b. 

lihd'Allah-'ben-Abbas,  ilhistre  membre  de  la 
fiiinllle  des  Abanldes,  150  b. 

fbd^AUah-hen-Mij  onde  d'AbotH-Abbas,  T65  a- 
156  a,  167  a,  168  a,  b. 

ibd-Allah-bei^Saadi  p089e88eiird*Alexandrie, 
96  b. 

4bd'Allah'Klm'HotUtfah ,  WBipagiion  de  Ma- 
homet, 87  a,  b. 

ibd-Allah-KaU ,  g^n^rad  arabe,  113  a,  b,  lT9a. 

ibd-AlloHf,  mMedn  et  historten  araihe,  avtenr 
de  VBistohre  des  patriarches  d^AUxandrie, 
dt^  332  b,  833  b,  340  b. 

tbd-el'Atizj  second  Als  de  Merwan,  IS9  b, 

188  b,  143  b.   ' 
ibd-eUMelih,  His  atn6  et  saccesseur  de  Merwan, 

129  b,  130  b,  134  a,  136  a,  b ;  son  carael^pe, 

13b  b-186  b;  sa  mort,  187  b-i88  t.  Yoy. 

anssi  isob,  I66b. 
ibd-er-Rahman,  IHs  d*Ab(m-Bekr,  et  svoces- 

sear  de  Rofmahi  dans  te  gonveraeneBt  de 

Bostra,  68  a,  60  a,  66  a,  122  b,  I2»4>,  147  a. 
fhd'er-Rahman'hen-'KdbHt   gpuvcfMur   de 

PAfrique,  162  a. 
thivardi,  poSte  arabe;  ses  stances  sar  les  nal- 

heun  de  llslamisme,  392  b. 
ibtm^Ald' Allah,  r^volt^  aodadeOK,  q«f  raine 

rempire  dea  Aghlabites ;  sa  mort,  210  b. 
tbou'Bekr,  sQCcesseur  de  M abomet,  65  a  -  56  b, 

69  b,64b,  91  a,  92  b,  96  b. 


Abou-Djaffar^l-Mamour  (  Le  khaiire  \  siic- 
cessenrd'AbouU-Abbas-el-Salfah,  1&7  b-iriS  li, 
173  a,  174  b. 

Abou-Zbarb  ( le  p6re  de  la  guerre ) ,  audanouK 
aventarier  arabe,  182  b,  183  a. 

Abou*UAbba*,  fr6re  d'lbrahlm-ben-Mohammed, 
154  a-156  a. 

Abou'lyibbas-el'Sa^ah  (  Le  kbalifc  ),  167  1», 
158  a,  173  A. 

AbauTawar,  commandant  de  la  flotte  arabe 
sous  Moawiah,  98  b,  99  a. 

AbouTfaradJ ,  hfstorien  araDe,  cil^  47  b,  62  h , 
64  b,  66  b,  73  b,  100  a,  101  b,  109  a,  ll5b, 
121  b,  123  a,  126  a,  127  a,  179  b,  183  b,  lih>  a, 
208  b,  215  b,  219  b,  310  b,  31 1  b,  316  a,  350  I). 

AbouT/edat  bistorien  arabe,  autear  des  An- 
naUs  moaUfniquea,  clt^  54  b,  64  b,  00  b,  08  a, 
74  b,  77  b,  87  a,  01  a,  98  b,  loi  a,  b.  102  b, 
103  b,  III  a,  112  a,  127  b,  129  a,  137  b,  I45  b, 
147  b,  148  b,  151  b,  152  b,  153  b^  155  b,  156  b, 
167  A,  172  b,  174  b,  175  a,  182  b,  186  b,  187  b, 
188  a,  190  b,  191  a,  192  a,  196  b,  196  b,  198  b, 
200  a,  208  b,  214  l]|,  221  b,  271  b,  292  b,  319  a, 
325  a,  363  a. 

Abou-Mo$lem,  conspirateqr  de  la  famiUe  des 
Abassides,  153  b- 164  b,  168  a,  b. 

jibou^Mouga ,  I'lin  des  arbitres  k  la  notninalion 
da  khalifat  eotre  All  el  Moawiah,  I03  b. 

Abou-Obaida,  gaerrier  arabe ,  66  a-  57  a,  C2  a, 
63  b,  66  a-67  b,  70  b,  71  b,  73  a,  b,  78  a,  b, 
79  h>  80  b,  81  a,  82  a,  84  b,  86  b,  88  b.  89  b, 
96  b. 

JbtU'Sekameh,  auteur  des  Deux  Jardins,  cite 
321  a. 

Abou-Sqfian,  general  mosulroan,  71  a,  1 19  a. 

Ahou-Thaher^  chef  kharmathe;  fonalUme  de 
sa  troupe,  197  a,  b. 

I  Ab'ul'Faradj.  Yoy.  AboWVfaradj. 


867 


ac6 


TABLE  ALPHABftTIQlTE 


,jib*^l'Feda.  Voy.  Abau'Cfeda. 
Acre,  aQcieime  PtoUmaU^  vilie  da  littoral  sy- 
rien  de  la  M^terran^;  bod  histolns,  88  a; 
prise  par  Saladin,  396  b;  plus  tard  asal^gfe 
par  Phillppe-Aogaste  at  Richard  Coear  de 
UoD,  330  b;  leddlttoQ  de  oetteYUle,S34b; 
manitee  doot  FrM^ic  II  y  eat  re^i,  3U  b; 
les  restes  de  rarmte  de  saint  Louis  y  abordeat, 
349  a;  prise  par  Khalil,  360  a;  asst^gfe  par 
le8FraD9ais,369  b. 
Acre  (  Pacbalik  d* ) ;  sa  descriptiOD,  90  b- 38  a. 
Adhemarde  Monteii,  6v^ae  da  Pay,  l^gat  da 
pape,  242  a;  son  portrait,  256  a;  bless^  par 
les  Dalmales,  366  b;  saave  rann^  aa  si^e 
d*Antiocbe,  267 a;  r^tablit  Tordre  et  la  disci- 
pline dans  rarm^  270  a,  b;  ne  croitpas  dV 
bord  a  la  dtoNiverte  de  la  Salnte  lance,  276  a ; 
commaude  to  bataillon  qui  la  porte,  277  a; 
son  d^voaement,  sa  mort,  regrets  qa*elle  ex- 
cite, 279a. 

Afdhal  ( Le  vlsir ),  commandant  de  I'armee  en- 
voyee  par  l^Islam  oontre  les  croises,  297  b ;  son 
d^sespoir,  299  a. 

Agtabites  (  Dynastie  des ),  196  b;  son  empire 
rain6  par Aboa-AbdAllah, 210 b. 

Ahmed'ben-Thouloun,  cbef  tore,  foodateur  de 

I    la  dynastie  des  Thoulounldes,  192  a- 194  b. 

Ahmed,  samomm6  Djezzar  ( le  boacher }, 
36  a,  b;  defait  Dhaher,  359  a;  son  portrait, 
ibid. 

Ahmed-eUMakari,  terivain  arabe,  dt^  189  a. 

Ahcula,  riyi^,  10  b. 

Afetchah,  veave  da  proph^ ;  sa  balne  contra 
Ail,  101  a,  b. 

Aigues'MorUty  ville  de  France  ou  s*embarqua 
saint  Louis ,  346  b,  360  a. 

Aintab,  yille  de  Syrie,  19  b. 

AhhtaU  pofite  arabe  chrMien,  136  a,  137  a. 

Alberofiy  arcbidiacre  de  Metz;  sa  oonduite  aa 
.     8i6ge  d'Antiocbe,  268  b. 

Al'Hadhir  (  La  viUe  d' ),  dtte  66  b. 

Al'Kantara  ( L'oasis  d* ),  36  a. 

Al-Mahadi  ( Le  kbaUle  ),  sucoesseur  d'Abon- 
DJaffar-al-Mansoar,  I74  b. 

Al'Mamoun  ( Le  khalife ),  petit  flls  ^Hanmn- 
alRascMd;  samagdf  licence,  174  b,  176  a.  Toy. 
'    aussii87a,  b,  195  b. 

Al'Manaour-VIllah^  prince  fathimite,  211  b. 

AlbeH,  chanoine  de  T^lise  ^Aix,  autearde 
VHisioire  de  Vexpidition  de  Jeru$alem,  dt6 
2d8b,  239  a,  247  b,  248  a,  249  b,  268  b,  263  b, 
264  b,  268  b,  273  a,  280  b,  284  b,  288  a,  291  a, 

300  a,  301  b. 
Albert  U  Grand  (  ChroDique  d' ),  cite  109  b. 
^Alchod  Chahin,  roi  de  ia  Grande- A rmteie; 

iettre  que  Zlmisces  lal  terit,  204  b-207  b. 


AUp  (  VHaiab  da  arabei;  inriwMMlh 
B^hoe  dea  Grecs  ),  17  b,  I8«,  »t;  tt/jt 
SOBS  le  khaiifeOmar,  77  b«>  a;  pdi}ili 
HamadaDitea,H5b;  par  Hinptano, 
202  a ;  manure  dool  Ziinisete  tnteOBiill 
206  b,  200  a;  prise  par  Us&L4d^,m 
to  pays  d'Alep  ^chott,  afirb  UmaAkh 
lik-ScbaK,  k  od  certain  AksaBk,Sltb;if 
da  goavemement  de  Nour-Eddifi,  W  i 

^^(LariYi^d*),lia. 

Alep  (  PachaUk  d* ),  16  b-2l  a. 

AlexandreUe  oa  Skamderoum,  vffleAi  W 
Syrian  de  la  MMilerrante,  19  a. 

AUxiB^  emperear  de  Conitantlao|»ie,di>i 
leacrois68,ai2  b. 

Aifakis,  ou  doclears  de  la  loi  (La  k  W^ 

AU,  gendrede  Blahomet,  56  b,  74  a,  iif  Hfit 

Alt,  ills  d'AUah-bcn-Abbaa,  iMb,  uii 

Ali^Bey,  pacha  d*£gypte  r^voHi,  Wi. 

Al-Kahirahy  vllle  d*£e^te.  Toy.  Cm'M). 

Alp-Ardan,  sultan  sdtQookide,  SI7 1'M^ 
main  Dlog^  218  a.  b ;  sa  grandeur,  h  9» 
rQ8il6, 218  b;  parallde  de'ee  priaa  d  4t}> 
mar,  2I9  a;samort.  paroksqaliAiw* 
sor  sop  tombeaa,  219  b. 

Alphonte,  due  de  Poitiers,  frteedenU  Ms 
part  pour  la  croisade,  846  a. 

Amaury,  frire  de  Baodooin  III,  roi  deJ^nB- 
lem,  810  a;  pr«te  aecoais  4$Gkiiv.»^ 
321  a;  samofttStta. 

Amorium,  YlUe  de  raodeoiie  GabfiMBS 
parleaarabes  anrHoai^  i06b;flBMP> 
par  Hotaaaam,  180  a. 

Anuvu,  chef  arabe,  68  b,  69  h. 

Arnnm-ben-el-As,  chef  arabe,  68  b,£^'^ 
93  a,  94  a,  102  b,  108  b. 

Andr4  (  L*eanaqae  },  I06  In 

Annah,  vUto  de  rirao-Araby;  |Kte|irl> 
Kbarmathea,  I9<b. 

Anne  ComiUne.  Voy.  Commene  ( >■»  )■ 

Antariihi(^h»  ),  peoplade  deSjneBsiWiiA 
22  a,  b. 

Antakiih,  Voy.  AnUocht, 

AnUoche  ( Antakl^  ),  aodenae  cV^fj 
Syria,  17  a,  18  a,  b,  47  a;  aMl^««*'"r 
life  Omar,  82  b-86  b;  sa  dto*f^**" 
Ommiadea,  I52b;  aasi^parZinii*,*^ 
prise  par  lal,  204  a;  repriie  |»af »»» 
sulmaoa,  206  a;  prise  par  **"'^ 
220b;asd;^  par  lei  eroli*.  « •  Jj^ 
par  eax,  272b^  274  a;sltaallofl*U|^ 
paut^  d'Antioche  k  I'dpoquedeU  ff^ 
croisade,  808  b.  ^ 

AntiochetU,  irilte  de  U  PWdie;  te  ««»*• 
ravitalUent,  268  a,  b. 

Antoura  ( Boarg  et  coovent  d» ),  »* 


fit  ANALYTIQUfi. 


S^d 


^pnmie.  Voy.  PamiaK 
.^Tabat,  ou  cbariote,  41  a. 
.^Tahe  ( Empire );  ion  d^embrement,  196  a. 
.^rabe$;  gnem  des  Grees  oontre  ler  Araba, 
900  a ;  chaaste  d»  Candle  par  If  ic^phore  Pho- 
cas,aoia«b. 
.j^raduM  CL'tle d*),  28  b,  96  b -07  a. 
j^rchas,  place  forte  da  Ubao,  asti^gee  par  lee 

croiB^  282  b. 
^reulphe  (  Saiot ),  eit<  k  propos  des  p61erl- 

nagea,  225  a. 
Mmaud  de  Bretcia,  tonlive  les  Italiens  oontre 

la  papaat^,  230  a. 
^mouid,  cbapelaio  du  doc  de  Normandie,  &u 
aa  patriarcat  de  Jerusalem,  296  b;  oonflft 
eotre  lui  et  TancrMe,  ibid.;  il  est  force  de 
donner  sa  demission,  300  b. 
Armuf,  TlUe  da  littoral  syrien,  assl^gfe  par 
Raymond  de  Tooloase ,  pals  par  Godefroy  de 
Bouillon,  299  b. 
Atealom  ( Rulne  d* ),  45  a,  89  a ;  bataille  d'Asea- 

Ion,  297  b. 
Aiolik,  historian  armenien,  dt^  96  a. 
Aiphaltiie  (  Lac ),  ou  mer  MorU,  10  a,  b. 
Anemani,  cit6  47  b,  116  b,  117  b. 
Aatise*  de  Jerusalem,  code  ftedal  attrlba^  h 

Godefroy  de  Boaifloo,  3oi  a. 
Aiabeks  ( p^res  da  prince )  ( Dynastie  des ),  3 16  b. 
Athalaric,  fib  d'H^racllus,  68  b. 
Atsiz,  lieutenant  d'Alp-Arslan,  2i7  b. 
Aveugiemeni  (  La  Joam^  de  I' ),  72^. 
AzaZt  place  forte  prte  d'Antloefae,  assi^gte  par 

le  reo^t  YoalUnna,  80  b,  8i  a. 
AzixVJUah,  prince  fathlmite,  2II  b. 


Baalheek,  Voy.  Balbek, 

Bagdad^  ville  de  Tandenne  Bfesopotamie,  si^ 

d'an  lLhaUfat,i58a,i7i  b,l74  b,  I93a,i94  a-196  a. 
Baguisian  ( L*^mir ) ;  defend  Antloebe  contre  les 

crois^  267  b,  272  b-273  a,  274  a;  11  est  ta^, 

274  b. 
Baiezid  ( ]m><et ),  sonomm^  U-dirim  ( le  foo- 

dre  de  gaerre  ),  366  b. 
'Bafezid  It;  son  portrait,  357  a. 
BuUau  ( Le  village  de ),  18  b,  19  a. 
Balbek  (  Baalbek  ),  Tanclenne  Hiliopolis,  Title 

de  la  Syria,  44  a- 45  a,  48  a,  67  b;  incendite 

par  lea  Kbarmatbes,  196  b;  prise  par  Zimls- 

c^205b. 
Balian  d*Ibelhi,  brave  chevalier,  dtfend  J^ra- 

salem  oontre  Satadin,  327  a,  b. 
BiUuze,  savant  Ustorlographe  fran^,  aateur 

d'one  Fie  d'lnnocenl  IIJ,  cit6  342  a. 
Bamkhs,  peapladas  odtibres  par  leurs  brigan- 
dages, 2ob. 
34*  Livraison.  (  Syrie  vodernb.  ) 


Batdane  ( L'empereur ),  dit  Philippique,  14 1  a,  b. 

Baroniut  ( L'annalLste ) ,  cit^  80  a,  213  a,  228  b.  ' 

Barihilemg  de  ManeiUe,  qui  avait  pr^ienda 
avoir  trouv^  la  sainte  lance,  aocepte  r^reave 
da  feu,  283  a,  b. 

BoM'Empin  (  Les  historiens  da )  r^fotte  k  pro- 
pos de  la  paix  entre  rislam  et  oet  empire, 
120  a,  b. 

Baskhoniah,  ville  maronite  dallban,  1 15  a. 

Batroun  (  Poiote  de  ),  29  a. 

Baudouitt,  comte  de  Flandre,  &u.  empereor  la- 
tin de  Constantinople,  342,  b. 

Baudouin  /,  frdre  de  Godefroy  de  Bouillon, 
232  a,  251  b;  resle  en  otage  ches  le  roi  bul- 
gare  Koloman,  252  a;  deplorable oooflit  entre 
lui  et  TaocrMe,  263  b;  sa  d^rUon,  264  b;  il 
enire  k  £desse,  et  se  fait  adopter  par  le  prince 
Tbtedore,  266  b;  ^poose  la  nitee  d*ttn  prince 
armdnien ,  ibid.;  son  Election  comme  roi  de  • 
Jerusalem,  302  a ;  meort  k  El- Ariscb ;  son  por- 
trait, 302  b. 

Baudouin  II,  dit  du  Bourg,  cousin  de  Bau- 
douin d*£desse,  302  a ;  du  roi  de  Jerusalem, 
303  a ;  battu  par  les  Turca,  303  b ;  Islt  prison- 
nier  par  eux,  304  a ;  il  se  racb^te ;  sa  mort,  ibid. 

Baudouin  Illy  filsde  Foulques,  du  roi  del^ 
rusalem ,  308  b ;  sa  foUe  ezpMitioo  contra 
Bosrah ,  309  a;  est  tromp^  par  Temir  de  Da- 
mas,  816  a;  meurt  empolitnn^,  3i9  a. 

Baudouin  IF,  successeur  d*Amaury,  roi  de 
Jdrusaiem,  325  a,  b;  sa  mort,  826  a. 

Bttudrit  archevAque  de  Dol,  auteur  d*ane  Hit- 
ioire  de  la  prite  de  Jinualem,  dti  243  b^  249  b, 
261  a,  275  a,  287  b. 

Bayrouth ,  Tandenne  BiryU,  ville  du  littoral 
syrien,  82  a,  b,  47  b,  89  a. 

Bayrouth  (  Yall^  de  ),  32  a. 

Bazlle,  oonJur^  tyrlen,  complice  de  YoaKinna, 
89  a. 

Bichir,  teiir  da  Uban,  360  a;  enlev^  par  lea 
Anglais,  868  a. 

Beladori,  terivain  arabe,  dt4 140  b. 

Belloz,  riviere  de  Syrie,  10  b. 

Beniaia  ou  Dicapolii  (  La  ville  de  ),  se  rend  k 
Zimiscte,  206  a. 

Bernard  le  Tresorier,  chroniqueur,  auteur  d'une 
BiUoire  dee  eroitadet ;  son  opinton  ser  les  pre- 
miers crois^,  249  b,  250  a,  252  a,  827  b,  834  b. 

Bernard  (  Saint  ),  premier  abbe  de  Glervaux, 
230  a,  232  a;  pr^e  la  seoonde  croisade, 
812  a,  b. 

BiryU.  Voy.  Bayrouih. 

Be$eierral,  ville  du  Uban  qiii  deviot  la  capi- 
tate des  Maronites,  1 15  a. 

Beyban,  sultan  du  Kalre,  349  b,  350  a,  b. 

Bibliothique  dee  eroieadee,  collection  traduite 
par  M .  Rdnaod,  dtte  293  a. 

24 


370 

Beha-Eddin,  htotorlen  aniM,  auteur  de  1*00- 
Trage  intitule :  Fiia  et  rea  getUB  »uttani  SalO' 
dmi,  cil^aai  b,  828  b,  33a  a,  336  b.  336  b,  838  b, 
839  b. 

Bok^mond,  flls  de  Gaiscard,  et  prince  de  Ta- 
reote,  233  a;  part  pour  la  croisade,  253  b, 
264  a ;  d^barque  k  Dourazzo,  2S4  b;  rend  an 
bommage  slmul^  h  Alexis  Comntoe,  266  b; 
floo  ordre  terrible  oootreiea  eapiona,  270  b ;  U 
d^fait  trois^mirs,  272  b;  prend  AnUoche  par 
larprlae,  374  b ;  soo  corps  d'arm^  eat  ^as^, 
278  a;  il  prend  Tarae  et  Malmistra,  28ob, 
•es  cruaut^  h  Marrah,  281  b ;  il  est  pris  par 
les  Turcs,  303  a. 

Bokharah,  ville  de  la  Kharismte,  prise  par  Bfe- 
lik-Scbah,  221  a. 

BoUanditiet  ( Les  K  dt«s  226  b. 

Bonaparte,  g^o^ral  frangais  en  Syrie,  369  b. 

Boatra,  ville  de  ridam^  assi^gee,  67  a. 

Briennnu  ( Nloepbore),  bblorien  byRanUn,  ci(^ 
49  a,  62  a,  94  a,  97  b,  III  a,  112  b,  2I8  a,  b. 

Bulgares  (  Les  ),  indigo^  des  exc^  des  crois^, 
en  massacrent  pluskeurs  mille,  246  b;  lis  les 
d^Dt  encore  devant  ffissa,  246  b. 

Bybto9,  ae  rend  k  Zimisc^  206  b.  Yoy.  Djebail. 

Bffzanlm  (  Empire  );  sa  faibiesse  an  oozi^me 
sitele,  237  a-238  a. 


TABL£  ALPHAB^QUE 


Cain  (  Le )  (  Al-Kabirab  ),  vUle  d'figypte,  fon- 
dto  par  Mo6z-LediQ-Allahy  211  b;  saocagee 
par  Hakem,  212  b 
Calixie  ///  (  Le  pape  )  institue  la  pri^re  dite 
If  r^ii^^/aM,8b6b. 

Callinictu,  Invenieardu  fea  gr<^geois,  I09  a. 
Candie,  ville  de  la  Ct^ie,  qui  donna  plus  tard 
sou  noffl  k  l*Ue  eoU^,  prise  par  Micepbore 
r  Phocas,  201  a,  b.  Yoy.  Crete. 
Canne  a  tucre  ( La  ;,  apporteo  en  Europe  par 

les  crols^,  284  b. 
CapUulaiions  de  la  France  avec  Tempire  Ot- 
toman, 360  a,  U 
Carmel  (  Ld  mont ),  et  ses  religleux,  36  b,  37  a. 
Carthage,  c61ebre  ville  de  TATrique  ancienne, 

envoie  ane  deputation  k  Moawiah,  I06  a. 
Ctuiel-Peregrino  (  cbAteau  des  Pdlerins ),  bourg 

de  Syrie,  87  a. 
Cauatim  de  Perceval,  orientaliste  fran^,  cite 

136  b. 
Cidr^nm,  compUateurgrecdte  47  a,  61  a,  83  b, 
94  a,  97  b,  107  a,  109  b,  110  b,  1I3  b,  124  a, 
142  b,  I4ft  a,  188  b,  190  b,  209  a, 
CidreeduLiban  ( Lea),  87  b,  28  a. 
Cenciue,  prtfet  de  Rome,  condamna  au  p^leri- 

nage,238a. 
Cesar^e,  ville  de  Syrie,  87  b,  88  b,  89  a ;  assl4- 1 


gte  par  Moawiati,  98  b;  se  reai  iHns 

206  a,  238  a. 
Chalcondgle,  hiatocteo  grec,  aoteqr  €m  om 

pilation  intitalte  De  wmbue  torcsdi^  ^u^ 

366  a,  867  b. 
Chameau  (  Joanne  da  )«  loi  b. 
Charles,  dnc  d*AnJoa,  frere  4e  i^  Un. 

part  pour  la  croisade,  346  a. 
Chhar  (  Village  de  },  M  b,  es  b,  61a. 
Choisy  i  L'abbe  ),  auteur  cTune  Fie  ir  ah 

Louis,  cite  346  b. 
Chosrois,  roi  de  Perse,  ne  Ycot  pa  a^ee^ 

Fambassadeur  de  Mahomet,  &i  b. 
Chroniqveurs  (  Les  );  leur  opinion  sor  k»  ^ 

miers  crois^s,  249  b-  250  b. 
Chypre,  lie  de  la  Mediterrao^ ;  saiot  Lo^n 

arreie,  346  b;  les  venlUeos  se  to  Icwt  ads, 

366  b. 

C/tfm«ji/ //^  (  Lp  pape ),  prtehe  en  vain  aae  B» 

velle  croisade,  349  b. 
Clermont,  vUle  de  France;  UriuJo  0  y  eoove* 

que  nn  condle,  241  a,  b. 
Comnine  ( Alexis  ),emperear  bysanfln.  337  *. 
238  a,  240  a,  b;  permet  aux  croisn  dta& 
per  devant  GonstaotbDople ,  246  b;  acBRi* 
aux  eroises  le  pardon  de  lears  daoniRs,2i7i; 
le  repent  bieotAt,  248  a;  el  ebmke  a  m 
debarrasBerd'eax,24S  b;  homni^efBifei 
rendmt  les  allies  ffodaoz  ;  U  est  aflsfssiv 
Godefroy,  264  b;  aa  rose,  ibieL;  U  adopie €*• 
defroy  de  Bouillon  poor  Als,  266  a;  TteoA 
aeol  ne  lol  rend  pas  bommage,  266b;  kifx» 
B^s  lui  enyoieot  dlwrriblea  pniivcsdrte 
bommage,  268  b;  son  mroy^  se  Mt  nt^e 
nic^,  200  a;  II  rMame  rexeeotka  Isbb 
traits  avec  les  croiste,  288  b. 
Comnene  (  Anne  ),  tille  de  rempenv  Akife 
Comntoe  et  auteor  de  VJieximt,  dftfe  m  k 
240  b,  948  b,  949  a,  266  a,  200  a. 
Comnine  ( Isaac ),  empereor  byanfia 
sa  condutleli  P^rd  des  Angilals  de 
CoBUr  de  Lion ,  qoi  It  Mi  charger  de 
330  a. 
Comnene  (  Jean  ) ,  sooeesaenr  d*A]exts , 
des  disoordes  des  cbr^tlens,  306  b;  t 
diversion  en  leor  favear,  Sf 0  a. 
Connies  de  Plalsanoe,  940  b;  de 

241  a,  b. 

Conciles  (Collection  des  ),  dCfe  ut  a. 

Conrad  111,  empereor  d'Alleraagne ,  paff  pas 

la  croisade,  313  a;  ses  soldaU  soot  i  pas pf# 

ex  termini  en  AsieMineure,  318  b;tei4 

et  Louis  VII  k  Jerusalem,  316  a;  il  abasda^e 

la  croisade,  316  a. 

Conrad  de  Montferrat,  se  fait  prodaoer  roi  ir 

Jti^rusalem,  330  b;  Spouse  babcUa  iila  Ar 


ET  AWALYTIQUE. 


871 


maary,  834  a;  Pbittppe-Aaguste  se  dMare 

poor  lui,  834b;  U  refiue  toot  Mrvioe  liRi- 

chard  Cceur  de  lioD,  887  b. 
Constant  II  (  L*enipereur  ) ,  Ills  et  saeoesiear 

de  Cobslantin,  97  b,  98  b,  99  b,  too  a,  104  b- 

106  a,  107  a. 
Conttantia,  capitate  de  Tlie  de  Gbypre,  aaoca- 

g^  par  Moawiab,  96  b. 
Cimttantin,  fils  de  Tempereur  H^racUus,  69  a, 

81  b-84  a,  88  a,  89  a,  94  a,  97  b. 
€Jofutantin  7^  (  L'empereur  ),  fila  de  Cona- 

tantll,  I07a,l09a,  iioa,  b,  Ii6a,b. 
C&nstantin  Dueat,  emperear  byzaDtln ,  236  b, 

237  a. 

Constantm  Monoiiuiqut,  6poaz  deHmp^atrice 
Zo^236b. 

€Jonatantinople,  assl^gte  par  lekballfeMoawiah, 

III  a-113  b;  leyte da si^e,  1 17 b-i20 a;atti^ 

gfie  de  Dooveau  par  Souleyman,  142  a- 145  b; 

-    oorraptloD  de  la  oour  de  CoDstantiiiople, 

236  b;  elle  est  saccag^  par  lea  crois^ ,  342  b. 

Constantht  Porphifroginite ,  cit^  10 1  b,  108  b, 
109  b,  iia  b,  116  b.  181  b.  200 b. 

Cot  (  LMIede),  Wyriek  Bfoawiah,  98  b. 

Costhah,  gtoayeroear  de  Tyr,  89  a. 

OmcaupUtre  {  €*e§t-lhdire ,  Pierre  VEncajm" 
chonne  ).  Voir  Pierre  VBrmite, 

Crete  (  LMIede  );attaqa^parAbd-A]lab-Kab, 
1 13  a,  b ;  prise  par  Nio^phore  Phocas,  201  a,  b- 

Cro'uadee;  elles  De  soot  pas  jastitl^  par  les 
exces  oommis  sar  les  chr^ens  par  les  mu- 
sulmans,  207  b,  209  a;  caract^res  divers  des 
croisades,  228  b;  elies  darent  cent  soixaote- 
qulDze  aos,  231  b ;  oe  D*est  pas  la  papaat^  seule 
qui  en  est  TaQtettr,  234  b ;  bat  secret  et  s^ieux 
des  crois^,  236  a,  239  a,  b;  Pierre  I'fimiite, 

238  b  et  sal  v.;  eothoosiasme  des  oroisds,  241- 
244;  arm^  de  Pierre  l*Ermlte,  244  a;  les  Bal- 
gares  massaereotquekiaes  millecroiste,  246  b; 
ceax-d  se  laisseot  aller  aa  d^sespoir,  246  a; 
ilssaccagent  Semlin,  tftid.;  soot  d^aits  par 
les  Bulgares  defant  Nlssa,  246  b;  iear  d^aes- 
poir,  ibid.;  la  crotsade  da  crime,  Gottschalk, 
Foikmar,  £mloon,  947  a -248  b;  trait  de 
cmaute  de  qaelqaes  RormaDds,  248  b;  les 
Teutons  se  s^pareot  des  orolite,  349  a ;  lis  soot 
massacre  |tar  les  Tons,  i6Ml^*qui  talllent  aossi 
en  pieces  rarai6e  qoi  vieot  6  leur  seooors , 
249  b ;  opinion  des  chronlqueurs  sar  les  pre- 
miers crois^,  ikid.;  r^m6  des  ralsons  qui 
flrent  adopter  la  croisade  aa  pape,  260  a,  b; 
mouvemeot  des  anodes  ftodales,  260  b ;  fautes 

'  descroistefftodaax,  261  a;  Godefroy  de  Bouil- 
lon, ibid,;  croisade  de  qaelqaes  sdgoearg 
frao^,  262  a,  b;  panlldle  de  eette  croisade 
6VMUpE6o6deDt0, 969  b,  2686;  les  croiste  fifo- 
daax'en  Asie  Hloeare,  969  a;  spectacle  hor- 


rible qnl  s'offre  h  leurs  yeox ,  269  a;  compo- 
sition de  tear  arm^  ibuL;  tear  nombre,  267  b; 
lescrols^  devant  Rio6e,  368  a;  lis  batfent  Kl- 
lid^l-Arslao,  268  a ;  tear  maoi^  de  combattre, 

268  b;  trait  d'b^rolsme  d'un  chevalier  nor- 
maod,  269  a ;  bataille  de  Doryl^,  260  a ;  soaf- 
france  des  crois^  en  Asie  Hineare,  261  b; 
cooflit  entre  Baadouin  et  TancrMe,  263  b; 
d^rtion  de  Baudouin,  264  b;  les  crofs^  de- 
vant  Antiocbe,  267  a;  mis^re  dans  leur  camp, 

269  a;  ambassade  du  khallfe  d*£gypte,  271  a; 
les  crois^  deterrent  les  morts  enoemis,  273  a; 
surprise  d*Antioche,  274  a,  b ;  nouvelte  famine, 
276 a;  d^ivrance  des  crois^,  377  a ;  discorde, 
^pid^mie  et  messages  en  Europe,  278  b ;  con- 
duile  cruelle  et  deplorable  des  crois^,  280  b; 
leur  fanatisme,  283  a ;  arriv4e  des  crolses  de- 
vant  Jerusalem,  284  a;  leur  all^grease  ft  la 
vae  de  Jerusalem,  286  b ;  leur  tristesse  ensuite, 
286  a;  si^ge  de  Jerusalem,  286  b ;  prise  de  oette 
ville,  288  a ;  massacre  des  musulmans,  290  a,  b ; 
toiotioo  de  rislam,  292  a;  Election  de  Code- 
froy  de  Bouillon  comme  rol  de  Jerusalem, 
293  a;  bataille  d^Ascaloo,  297  b ;  mort  de  Go- 
defroy  de  Bouillon,  301  a;  r^e  de  Baudouin 
d*£de8se,  301  b ;  r^ultats  de  la  croisade,  303  a ; 
r^ne  de  Foulques  d'A^fou,  304  b;  dteadence 
de  la  domination  franque,  306  a;  les  hos- 
pitallers et  les  templlers,  307  b;  av^nement 
de  Baudouin  Ifl,  8u8  b;  seoonde  croisade, 
312 a;  Louis  VII  et  Conrad  ft  Jerusalem,  316  a; 
progrte  de  fislam  contre  la  crolx,  317  b;  Sa- 
lab-Eddin,  831  a;  d^denoe  do  royaume  de 
Jerusalem ,324  a;  Baadouin  IV ,  Guy  de  Lu- 
signan,  325  a,  b;  catastrophe  de  Jerusalem, 
836-327 ;  troisteme  croisade,  328  b;  si^e  d^A- 
cre,  330  b;  reddition  de  cette  ville,  334  b; 
prise  de  JaKa,  337  a;  mort  de  Saladin,  338  b; 
saint  Louis,  346  a;  nouvelle  croisade;  des- 
truction de  rem  pi  re  chr^tien  en  Palestine, 
360  a;  r6saltat  des  croisades,  351  a. 

Cyzique,  ville  de  TAsie  Mineore,  113  a;  assle- 
gte  par  les  Arabes,  ibid. 


D 


Daimbert,  archev^e  de  Pise ,  l^at  du  pape , 
4Ani  patriarche  de  J^usalem,  300  b;  reclame 
Jerusalem  au  nom  du  pape,  801  b;  se  r^fugie 
sar  la  montagne  de  Sion ,  302  a. 

Dalr-Bl'Kamar  (  Maison  de  la  lone  },  riviere 
de  Syrie,  10  b. 

Damas  (  La  riviere  de  ),  if  a. 

DaiNoj,  one  des  principaies  vllles  de  Syrie, 
chef-lieo  d*an  pachalik,  4 1  a-43  a,  48  a;  assi^ 
gfe  soas  Abou-Bekr,  69  b-63  b.  Voy.  aussi 
128  b.  163  b,  166  a,  178  b.  Prlse  par  les  Kbai^ 

24. 


872 


TABLE  ALPHABferrQTJE 


B,  196  1>;  se  rend  h  Zimlscds,  206  b; 
prise  |Mur  M^Uk-Scbah,  820  b;  assi^gfe  par 
Louis  YII  et  CoDrad  III,  316  a. 
Damas  ( Pacballk  de ) ,  38  a-46  b. 
Damit,  odaTe  arabe  devenu  capltaine  et  o61^ 
bra  par  8QD  intrepidity  aa  sidge  d*AIep,  79  b, 
80  a,  86  a,  b,  86  b. 
DamieUe,  irllie  d*£gypte,  prise  par  lea  crolaei, 
343  b ;  par  saint  Loots,  346  b ;  est  rendue  pour 
ia  raofon  da  roi,  349  a . 
Dandolo,  doge  de  Venise,  232  a;  sa  ooDdoite  k 

I'egard  des  crois^,  342  b. 
Dargham  (  Le  vizir  ),  319  b. 
Davidi  Pierre ),  ancien  ooosol  general  en  Orient* 
fait  k  la  cfaambre  des  d^ut^  le  tableaa  de 
retat  aclael  da  Uban,  360  a  et  saJv. 
Defr-il-Konuir,  capitate  des  Druses,  32  b- 34  a. 
Deny*  de  Telmahar,  bistoHen  syrien,  clt^  96  a. 
Dtrhend  ( DeUle  de },  96  a. 
Dhaher,  suocesseur  de  Hakem,  laiisse  rebAtir 
r^Iise  de  la  R^arrection  h  Jerusalem,  226  b. 
Dhaher,  arabe  syrien ;  sa  r^volte,  358  b;  ilde- 
vient  pacha,  369  a ;  defait  Othman,  ibid,;  batta 
par  DJexzar,  ibid, 
DhamouTj  riviere  de  Syrie,  10  b,  34  a. 
Dherar,  Jils  d*Azwar,  intr^pide   masalman, 

60  a,  61  a,  66  a,  69  b. 
Divan,  son  Impuissanoe  h  reparer  le  mal  qu*il 

afaitlilaSyrie,364  b. 
DjaaSoT,  oousin  de  Mabomet,  62  b. 
DJabalah,  dernier  roi  des  tribus  de  Gbaasau, 

69  b,  79  b. 
Djauhar,  Grec,  gtoeral  de  Mofiz-Ledin-Illah, 

211  a. 
DjebaH,  ranclenne  Byblot,  29  a,  89  a,  116  b. 
DJebiUh,  Tille  turqae de  Syrie,  22  b,  28  a,  68  a; 

prise  par  les  croiaes,  282  b. 
Djeboul  ( Salines  de ),  1 1  a,  20  b,  21  a. 
Djeich ,  ills  de  Kbamarouiab,  mis  a  mort  par 

ThagadJ,  IM  b. 
DJeloula,  ville  maritime,  Tandenne  Byzactee, 

assl^g^e  par  iioawiah-ben-JnUr,  106  a. 
DJenuU-Eddin,  hlstorien  arat)e,  auteard^une 
hisloire  du  tuUan  MilikSaUh,  dt^  348  b. 
Djezzar.  Voy.  Ahmed, 
DoryUe,  ville  de  TAsie  Hineure  (  BataiUe  de ), 

26ua-26lb. 
Davin,  ville  d*Armtole,  rteldence  d'un  patriar- 

cbe  grec,  saocag^  par  Habib,  96  a. 
DpUdin,  andenne  r^idence  de  la  famllle  Sbaab, 

33  b,  84  a. 
Driues  (  Les ),  31  a,  b ;  sede  fond^  par  Ha- 

kem,  211  b. 
Ducange^  glossaleur  et  historien  fran^is,  dt^ 
.   225  a,  228  b. 


Sbtt-Khaldmrn,  bIslotieD  arabe*  die  wk 
iTcf^tety  ( Le  ebdk ),  beut-ptec  dX)«B,  Sib, 

366a. 
£den  ( Le  bourgd* ),  27  a. 
^deue,  ciUhn  ville  de  U  ll^iop:>taidr,  dchrf- 

lieu  d^ne  prindpaat^  49  a;  BaofloatejflC 

re^avecallegresK,M6a;  ileadevjal|nBa, 

266b;  prise  par  Zea^hl,  310  b,  3ii  a;  |bIb  tf 

saocagte  par  IfoofCddio,  3U  a. 
idouard,  rol  d'Angleierre,  vicBtaoBOBB 

des  Chretiens  de  Palesttiie,  960  a. 
Jtleonore,  fiUe  do  oomte  de  Polticn^  fccsr  k 

Louis  YII,  part  poor  la  eraisade.3i3s;di 

se  laisse  s^ire  par  Bayinoad  dt  Psifea, 

Si4b. 
tl-Kibir  (  U  grande  ),  rivi«K  de  Syria,  Mk 
il'Ktlb  ( la  rivitee  du  diieo  ;,  lo  b,  21  b. 
SlmaciH  ou  Bl-Madn,  bistorien  anbc,  d^ii  v 

60a,  61b,  64b,70a,72a,b,7Sbk74b,«i, 

•8  b,  100  b,  134  b,  158  b,  179  a,  186  a,  m^ 

192  a,  203  a,  S07  b,  210  a,  b,  311  b,  218  a,  sii  ^ 
£l'Saiib,  rivlete  de  Syrie,  10  b. 
Bmad-Bddin,  bistorien  arabe,  aalenr  de  ZV- 

Clair  de  la  Syrie,  dt<  924  a,  331  a,  341  a. 
inUte.  Voy.  Hewu, 
imieon,  oomte  allemand,  cbef  d'uae  baiidi 

croiste.  247  b. 
Srzerottm,  vlUe  d'Anninie,  eapilaie  dafo^iaa 

que  forme  le  general  de  If  «Uk<SdkabSoBi? 

man,  223  b. 
Btdrelon  ( Plalne  d* } ;  kt  Fnn^ak  vMitf  li 

Janissalres,  360  b. 
Bnpagne  ( £mlgraUoQ  des  Syriens  tt'^MT  k, 

148  a. 
HiieHne,  comlede  Btois  et  de  Cbartics,  psri|aa 

la  croisade,  262  b. 
Budoxie  (  L^mp^ratrice  )  fatt  na  1 

Jerusalem,  224  b. 
Bug^M  III  (  Le  pape  }  autorin  la  i 

croisade,  232  a,  312  a -313  a. 
Europe  ( £tat  de  V )  avani  la  pn 
238  a;  ebrantement  de  I'Eiirope  aa esBBa- 
cement  de  la  craiaade,  243  a. 
Butychius,  hUlorien,  dt^6l  b,64  b,73K«k 
Bverard  det  Barres,  grand  maHn  d«  *■- 
ptien,  seoourt  Taroifo  de  Louis  Til,  au  a 


I 


Fakr-Bddm,  ^ir  droie,  2  b. 

Fakr-Bddm,  6mir  de  Damietlc,  balta  p«  is^ 

Louis,  346  a. 
Fakr^Bddin  Hazy,  terivahi  arabe,  dl^  lU  a. 
Famiah,  Pandenne  Jpamee,  ville  de  Sync,  sU, 

48  a,  49  a. 


ET  ANALYTIQUE. 


373 


Juirazdak,  poSte  arabe,  136 1). 

FiMth'imiies,  dyDOslie  foodie  par  Obald-AIJah- 

AlKMi-Mobammed,  200  a- 215  b;  leur  d^caden- 

cCf  318  a ;  SaladlD  met  fin  a  celle  dyoastie,  323  a. 

FausU  NJHron,  bistorien,  cit^  47  b,  1 16  a,  116  b, 

117  b. 
Faustino  Borbon,  terivain  espagnol,  cit6  130  a. 
Ferid'Eddin-Attar,  poetearabe,  cite  par  extrait, 
101  a. 

wneury  ( L'abb^ ),  auteur  ^^VHUtoire  ecclesiat- 
tique,  cild  243  a. 

Folkmar,  chevalier,  cbef  de  crolste,  247  b. 

Fcrtufiaif  cbefmarooite,  I15  b.  ^ 

Foulcher  de  Chartna,  chroniquear,* auteur  des 
Gette*  de$  Francs  allanl  armes  en  pilerinage 
d  JerutaUm,  rteame  les  ralsons  qui  font  adop- 
ter aa  pape  la  eroisade,  250  a,  b,  253  b,  257  a, 
26S  b,  284  a. 

Fifulque,  cat€  de  Neollly-sur-Marne,  prtehe  la 
cinquleme  eroisade,  842  a. 

Fouique  111,  dit  de  Nerra  ou  le  Noir,  oondamnd 
aa  pMerfnage  k  Jerusalem,  228  a;  dia  roi, 
804  b;  loae  ses  troupes  a  des  ^mlrs  mahome- 
tans,  306  b ;  sa  mort,  306  a. 

France  ( Incursions  des  arabes  eo  ),  146  a- 147  4. 

Frederic  Barberousse,  empercur  d'AIIemagne, 
232  a;  part  pour  la  eroisade,  320  b;  ses  ooq- 
qu6tes  et  sa  mort,  390  a. 

Frederic  //,  empereur  d*Allemagne,  844  a;  ma- 
Dl^re  dont  le  re^ivent  les  ehrillens  d^Ortent, 
ibid, 

Froimond  ( Le  seigneur  de ),  condamn^  au  p^Ic- 
rioage  de  Jerusalem,  228  a. 


Gabaonr  vllle  Domm^  aussi  Djovel,  se  rend  a 
Zimiscte ,  qui  y  transporte  vingt  mille  Turcs , 
207  a;  il  y  trouve  les  saintes  cbaussures 
de  J.  C,  ibid. 

Galilie  ( L'ancienne ),  38  a. 

Gamier,  comte  de  Gray,  parent  de  Godefroy 
de  Bouillon,  301  b-302a. 

Gauihier  le  Ckancelier,  auteur  d'une  Histoire 
des  guerres  d'Jntioche,  iA\6  303  b,  304  a. 

Gauihier  sans  Avoir,  lieutenant  de  Pierre  l*Er- 
mite,  2U  b;  ne  peat  maintenir  la  discipline 
dans  rarmte  des.crolste,  246  a,  b;  est  tu6  par 
les  Tares,  240  a;  les  crois^  rctrouvent  les 

*  debris  de  ses  troupes,  257  a. 

Gauthier  Finisanf,  chroniqueur,  auteur  dHin 
Jiiniraire  du  roi  Richard,  cit6  830  a,  387  a,  b. 

Gaza,  vine  de  Syrie,  45  a ;  sod  si^  soos  Aboa- 
Bekr,  58  b,  60  a ;  prise  par  lc«  Francis,  350  b. 

Ginisareth,  vllle'de  la  Palestine,  se  rend  h  Zi 
misote,  206  a. 


Gengiskan  ou  Djenguizkhan  ( le  roi  des  rols  \ 
345  a;  d^faiC  le  sultan  du  Kbatism,  345b. 

Gerard  de  Provence,  chevalier,  231  b,  232  a; 
fondateurdes  hospitalieis,  306  a. 

GiloH,  chroniqueur,  auteur  d'un  Poeme  sur  la 
premiire  eroisade,  ci(6  287  b. 

Godefrog  de  Bouillon,  232  a;  ses  ant^cMeoU, 
251  a,  b;  engage  ses  domalnes  pourparlir, 
ibid.;  laisse  son  fr^re  Baudoufn  en  otage  au 
roi  Koloman,  252  a;  ses  menaces  k  Alexis 
Comntoe;  ilfait  la  paix,  254  b;  Alexis  Com- 
ntoe  I'adopte  pour  fils,  255  a ;  il  tue  un  Go- 
liath musulman,  250  a;  vient  au  secours  des 
croiste  devant  Nicde,  261  a;  sa  lutte  avec  uu 
ours,  263  a;  il  reproche  k  Baudouin  sa  con-  '^ 
duite,  265  a ;  et  veut  en  Tain  le  ramener  k  de 
meilleurs  sentiments ,  265  b ;  sa  lutte  avec  un 
g6ant  turc,  273  a ;  il  rend  visite  k  son  fr&re 
Baudouin,  282  a;  son  ^leclion  commeroide 
Jerusalem,  203  a;  sou  r^ne,  200  b;  sa  mort, 
301  a;  paranoic  de  Saladio  et  de  Godefroy  de 
BouilloQ,  328  a.  * 

Gottschalk,  fanalique,  se  met  k  la  t«te  d*une 
bande  de  crois^,  247  a;  leur  conduite,  ibid- 

Grecs  [  Guerre  des  )  oontre  les  Arabes,  200  a; 
ceux  du  moyen  Age  sont  semblables  aux  Ar- 
mdniens  actuels,  235  b. 

GHgeois  (  Feu  ),  100  a-IlO  b. 

Gwibert,  abb^,  chroniqueur  auteur  de  Phistoire, 
intitulte :  Gesta  Dei  per  Francos,  240  a,  243  b, 
246  b,  248  a,  251  a,  270  b. 

Guignes  ( De ),  sinologue,  auteur  de  VHistoirt 
ginirale  desr  Huns,  dt6  108  b,  216  b,  234, 
288  a.  845  b. 

Guillebani  (  Saint ),  pilerin  ii  Jerusalem,  226  a. 

Guillaume,  yioomte  de  Melun,  part  poor  la 
eroisade,  251  a;  ild^serte,  270  a. 

Guillaume,  6v^e  d*Utrecht ;  son  pelerinage  en 
Palestine,  236  b;  sa  mort  227  a. 

Guillaume  de  Nangis,  chroniqueur,  auteur  des 
Gestes  de  saint  Louis,  cAXi  347  b. 

Guillaume  de  Tyr,  archev^ue,  chroniqueur, 
auteur  de  VHistoire  de  ce  qui  s'est  passi  au 
deld  des  mers,  cit^  113  b,  2i7  a,  227  b,  298  b, 
245  a«  248  b,  240  a,  250  a,  263  b,  266  b,  203  b, 
206  b,  301  a,  303  a,  305  b,  306  a,  307  b,  300  a,  b, 
315  a,  316  b,  326  a  *,  il  va  prteher  en  Europe  la 
troisidne  eroisade,  328  b;  et  rteondlle  Hen- 
ri II  etPhlllppe-Auguste,  ibid. 

Guixot,  blstorien  fran^is,  cit6  231  b;sonjuge- 
ment  sur  Loois  YII,  Philippe- Auguste  et  saint 
LoaiB,382b. 

Gundeschilde,  iigoxue  de  Baudouin ;  sa  mort, 
366  a. 

Gunlher,  «v«quede  Bamberg;  son  pMerinage 
en  PalesHne,  226  b. 


374 

Guy  de  Lusignan,  r^Dt  da  royaame  de  Jfini- 
sakm,  325  b;  est  batta  et  prlspar  SaladiD, 
326  b ;  SaladiD  lul  reod  la  liberty ,  330  b ;  par- 
Jare  h  sa  parole,  33i  a;  tlichard  Coear  de  Ltoo 
le  soutient  dans  sea  efforts  pour  arrlver  k  la 
royaul^  de  Jerusalem,  334  b. 


n 


Habib,  lieutenant  de  Moawlah,  commandant 
dc  Kinesrin ;  ses exploits,  96  a,  b. 

Haddethy  \llle  maronile,  115  a,  b. 

HadjadJ  ben-Yousouf»  general  syrien,  131  b, 
132  b-i33b,  140  b,  141  a. 

Hadjal  (  Us  ^rabes  dito  U  20  b. 

IJadjar,  Tantique  Petra,  dans  I'lrak-Araby,  ca- 
pitate des  Kharmatbes,  196  b. 

Hakem-Biamr-AUahy  fondatear'de  Ja  secte  des 
Druzes,  prince  fatbimite;  son  bistoire;  sa  ty- 
rannie,  2i  I  b-2l4  b;  sa  ferocity ;  se  fait  adorer 
comme  Dieu,2l4  a ;  ttest  assassin^,  214  b;  etat 
de  la  Syria  k  sa  mort,  214  b-2i5  b. 

Ualab.  Voy.  AUp. 

HamadatiiUs,  riche  et  nombrease  famille  arabe, 
originaire  de  Tinmen,  I9&  b,  197  b;  s'i^tablis- 
sent  dans  la  vall^  de  Mossoul ,  et  se  conci- 
lient  Taffection  des  Syriens^  199  a  -200  a. 

Hamah,  ville  da  pachaiik  de  Damas,  39  a,  b, 
66  b,  66  A. 

Namaher,  professeur  k  runiversit^  de  Leyde, 
on  des  cootinuateurs  de  la  Byzan  Uncy  cit^  58  b. 

Bamxah,  imposteur,  second  propb^te  de  Uakem, 
214  a. 

Haroun,  on  des  Thouloanides,  mis  sur  le  trone 
par  ThagadJ,  et  ensulte  mis  k  mort  par  Jul, 
194  b. 

Haroun»al-Rascfiid  (  Le  khalife );  sa  magnili- 
ccnoe,  174  b. 

Hasan,  flls  aln^  d'Ali,  103  b,  104  a. 

Hassan-Pacha  {  Khan  d* ),  41  b,  42 a. 

HiliopoUs.  Voy.  Balbeck. 

Hems,  ville  de  Syrie,  Tantique  tmkse,  40  a,  b, 
4S  a,  65 b-67  a,  82  a,  153  at  se soamet a Zimib- 
G^,  205  a;  son  6mir  permet  a  saint  Gulllebaat 
d'acGoroplir  son  p^lerinage,  226  a. 

Henri  de  Hainault,  emperear  latin  de  Constan- 
tinople, 342  b. 

Henri  HI,  roi  d'Angleterre,  cit6  344  b. 

H^acieoms,  frire  de  Tempereur  H^raclias, 
depose,  puis  Qfiutile,  97  b. 

Heraclius,  patrlarcbe  de  Jerusalem  j  sa  condnite 
scandaleuse,  326  a. 

Heraclius  (  L*emperear ),  49  a,  b,  51  b  •52  b, 
54  b,  65  a,  56  b,  67  a,  b,  69  a,  b,  60  b,  61  b, 
63  b,  65  b,  68  b,  81  b,  94  a-95  a,  97  b. 

Herbelot  (  D' ),  orientaliste  francs,  aufeur  de 


TABLE  ALPHABlfeTIQUE 


la  collection  dite  BthUatMiqme  ortoifti^  m 
100  b,  194  a,  197  b,  2foa,  siaa,s9o&,ttlL 

Herbis,  goayernear  de  Balbck,  87  b,«i. 

Hescham  ( Le  khalffe  },  140  a,  f47  a  - 148  L 

Hethoum,  historien  armenien  da  ffistatSm 
sltele,  dt£  86  a. 

Hierapolis,  Toy.  YaraboulaB  et  BatbeL 

Hildebrandj  moine  deCIuny,  pais  papeioa^ 
Dom  deGc^Ire  VII,  233  b-234  b. 

Hongroh  {  Lea  )  lalssent  difQcilaafflt  pwr 
les  croIa6i,  845  a. 

Honori  IJI  (  Le  pape  )  prdche  TauMBBBi  Si 
sixltoie  croisade,  343  a. 

Hosain,  fils  d'Ali,  122  b,  [24  b  -  126  b. 

Hospitaliers  (  Les  ),  307  b ;  leurs  qaen^liesaiir 
les  templiers,  326  a  et  34.3  a;  Saladalor 
permet  de  rester  a  Jerusalem,  838  a. 

Houlakou,  petU-OisdeGengisiLao ;  sescoo^ate, 
849  b. 

Hvgves,  oomte  de  Jaffa,  sorpris  en  sdaieR 
avec  la  femme  de  Foulqaes,  3u9  a;  fl  r^ 
avee  let  mosolmans,  qui  cosatte  rabafida(> 
nent,  ibid. 

Hugue$  de  Fermandtris,  fr6r«  de  Philippe  F, 
'part  pear  la  croisade,  262  a  ;  le  pape  kii  oi» 
fie  mendard  de  I^lise,  253  a;  il s^fmbam* 
k  Bart,  ibid.;  fait  naofrage  A  Daraoo.ft  ^ 
oondoli  oomme  prisonnier  a  Coo^aniiaoptk 
268  b;  il  rend  hommaee  a  Alexb  CoeaK. 
264  b ;  il  porte  Tetendard  du  pape.  27:  t;  s- 
voy6en  amt>aasade,  il  abandonne  IcscraiA 
280  a,  b. 


Ibn-MaHr  ou  Ibn^ilrMkir,  histonn  »tai 

anteor  d*une  Histoire  des  jitabeks,  dlP»4ik 

317  b,  320  a,  322  a,  823  a;  son  rMt date  pnc 

de  Jerusalem  par  Saladin,  327  a.  b. 
Ibn-  DJouzi,  aateur  arabe ;  son  Stiroir  des  ia^ 

dt«304b. 
Ibrahim-ben-Aglab,  flls  d'an  des  lieolmi* 

d'Haroun^al-Raacbid,  et  fondatmr  deU^ 

nastie  des  Aglabites,  196  a. 
ibraMm-bfU- Mohammed^  competitearda|i§- 

fils  du  kbalife  Merman ,  I68  b,  IM  a. 
Ikckidites,  people  d'origine  tarqae,  197  k;  i 

piUent  la  Syrle,  198  a. 
Innocent  III,  pape,  accorde  Hndal^eBer  |i^ 

ni^re  aox  crois^  de  Simon  de  MooliBfl,  SHI; 

il  prtebe  ane  noaveile  croisade,  HI  m.^^ 

a^ssi  343  et  344. 
Innocent  IF  {bt  pape  ),'s*oppoit  an  dcpK 

de  saint  Louis  pour  la  croisade^  346  a. 
Irace,  nomro6e  aussi  Ptolemait^  an  ttad  k  ft* 

misc^,  206  a. 


£T  ANALYTIQUE. 


S75 


Jstnail,  goavernear  de  Damas,  fio  a. 


Jacquti  de  NUibe  (Saiot) ;  sesreliqaea  reprises 

aux  Tores  par  Zimisoes,  306  a. 
JtKquu  de  Vitryy  6v^ae  d' Acre,  chroolqaeor, 

autear  d'one  HUtoirede  JinuaUm,  cM  284  b, 

309  a- 307  b,  326  a. 

JaifOj  ville  de  Syrle,  prise  par  lea  crof s^  337  a ; 
par  Saladln,  337  b ;  par  les  Francis,  369  b. 

Janissairei  (Les)  ( Yini-Tcherif  Doavelle  Iroape), 
cr^  par  Orkban » 366  a;  baltus  par  lee  Fran- 
cis, 369  b. 

JeoHf  fr^re  de  TookiDoa  et  oo-goaTemeor  d'A- 
lep,  78  a -79  a. 

Jean  de  Brienne,  tia  rd  de  Jerusalem,  348  a; 
il  esaaye  vainemeat  de  ooojarer  la  ruloe  des 
crols^,  843  b. 

Jdriualem,  ville  e^l^bre  de  la  Palestine,  46  b, 

^  48  a;  assi^gte  par  Omar,  78  a,  77  b,  176  b; 
devieot,  poor  qaelqae  temps,  la  capitale  re- 
Ugirase  des  masutmaos,  I97  a ;  se  reod  a  Zi* 
misote,  206  a;  pers^outlons  du  chef  turko- 
man  Ortok,  224  b;  si^  de  J^nualem  par  les 
erols^  286  b;  prise  de  cetle  ville,  288  a;  dee 
tioD  de  Godefroy  de  Bouillon  oomme  rol  de 
Jerusalem,  393  a;  usurpatioo  du  patriarcat, 
286  a;  dteadenee  du  royaume  de  Jerusalem, 
334  a ;  catastrophe  de  oette  cit^,336  a ;  Conrad 
deMootferrat  s*y  fait  proclamer  rol,  330  b; 
les  Kbarismieos  la  saccagent,  846  b. 

Jomville  (  Le  duoDiqueor ),  tiU  109  b,  847  a, 
362  a. 

Jonelin  d§  dmrtenay,  prince  d*£de8se,  fait  pri- 
soonier  par  les  Turcs,  304  a;  it  s'^chappe, 
804  b;  son  alliance  avec  les  musulmans, 
306  a.  Voy.  aussi  3ioa. 

Jonel'm,   tils  du  pr^oMent,  comte  d'fidesse, 

310  b;  reprend  sa  capitale  sur  Zenghi,  3II  b; 
il  s'enfuil  devant  Mour-Eddin,  3i2  a. 

Jourdaim^  fleuve  de  la  Palestine,  o  a-io  a. 
Jules  4fricain  (  L'bistorien  }»  cit^  I0»  t>. 
Juttmien  JI ( L'empereur ),  134  a-i 86  a,  I43 a,  b. 


Kaaba,  pierre  sacr^;  prise  etsootllto  paries 
Kharmalbes,  196  b;  porlllte  et  rapports  par 

■    eux,  197  b. 

Keakaa,  chef  arabe,  82  a. 

Kabin  (  Le  marlage  ao  ),  176  b. 

Kaderd,  onclede  M^llk-Sch^h ,  se  r^volte  contra 
loi;  220  a;  enlerm^  par  loi  dans  un  chAteau, 
et  ensuite  mis  a  moii,  220  b. 


Ea{ffa,  villagfrsyrien,  ToMa  da  aioDt  Carmel, 
36  a. 

Kafmacana,  d^I^gu^des  pachas;  leurs  exac- 
tions ,  362  b. 

Malaotin,  sultan  du  Caire,  et  son  tUs  KhalU, 
350  b. 

Kalih,  h^roi  arabe,  ill  a,  lio  a. 

Kana,  bourgade  de  Pancienne  Palestine,  37  b. 

Kanah,  riviere  de  Syrle,  10  b. 

Kanoubin,  convent  roaronlte,  27  a,  II4  b. 

Kararouch^  ^mir  ^gyptien,  dtfend  Acre  oontre 
les  crols^  331  a. 

Kdriat-el'Anep  ( Vall^  de ),  on  de  J6r6mie,  46  a. 

Kasiminkif  interpr^te  de  la  lotion  fran^aisc 
en  Perse,  traducteur  du' Koran,  cil6  176  a. 

Kasmiih  {  \jt  ),  anciennement  JJonUs^  petit 
fleuve  de  Syrie,  I  Ob. 

Kemai'Eddin,  historien  arabe,  auteor  d*ane 
Hietoirt  dP.4hp,  dt«  79  b,  82  a,  b,  267  b,  267  b, 
274  a,  b,  278  b,  303  a,  318  a. 

Kerbogkah,  ^mirde  MomouI,  d^fait  les  croia^i, 
374  b;  fait  chasser  Pierre  l'Ernilte,277  a;  eit 
batto  par  les  crois^,  277  b,  278  a. 

Kerboghak,  Uentenant  d'Boulakoa,  849  b. 

Kesrouan  (  Le  },  contr^  servant  de  rafoge  aux 
maronites,  26  b  •  28  b. 

Khadidja,  femme  de  Mahomet,  60  a. 

KhaUd,  sumomm^  Salf-AUah  { Vipit  de  Uieo), 
guerrier  arabe,  62  b,  63  a,  66  b,  67  b,  68  a,  69  b, 
60  a,  61  a,  62  a  64  a,  66  a,  66  a,  b,  69a-7ob, 
79  a-80  b,  82  a,  84  b,  87  a,  88  b,  93  a,  96  b. 

Khated'btn'Yezid,deniker  peUl-llis  de  Moawiah, 
129  a,  b. 

Kkatouny  chef  arabe,  69  b,  60  a. 

iTAamarouia  A,  soocesaeurdeThoulonn,  194  a,  b. 

Kharadjt  ou  eapKation,  136  b. 

Kharismiens  ( Les ),  et  les  Talars-Mogols,  346  a; 
lis  saocageni  Jerusalem,  346  b. 

Kharmaih^  Imposteur,  fondateur  d'une  sec^  A 
laquelle  il  donne  son  nom,  196  b,  196  a. 

Kharmathes,  sectaires  qui  pretendent  reformer 
rislamisme,  196  b;  leur  liistoire,  196  a- 197 b. 

Khondemir,  ^crivaln  arabe,  cit^  182  a. 

Khoraasan,  province  de  I'empire  des  kbaltfes, 
196  b. 

KieS(  Le),39b. 

KHldj'^rafan  (  Daoud)  ( IV;»^«  de  lion  ),  sol- 
tan  seifJUoukide,  envoie  one  arm4e  cootre  les 
crois^,  240  a;  les  d^lalt,  ibid.,  et  249  b;  py- 
ramlde  Alevde  par  lui  avec  les  ossements  des 
pelerins,  ibid.;  ses  pi^paratlfs  centre  les  crol- 
8^  f^odaux,  267  b ;  il  est  battu  devant  Nlcte, 
368  a;  sa  femme  et  ses  deux  enfants  tombent 
ao  pouvoir  des  Chretiens,  26o  a ;  11  reprend 
roflensive,  260  b;  puis  est  defait,  361  a;  sa 
iaetique,  261  b. 


t76 


TABLE  ALPHAB^TIQUE 


KinewriM,  vllle  ▼oislne  d'Atep,  66  b,  66  b,  153  a. 

Koloman,  rol  de  Hoogrie,  se  dispose  a  paoir 
lei  croMs,  246  a;  massacre  ceux  de  Gotts- 
chalk,  247  a,  b;  ne  perniet  le  passage  k  Go- 
defroy  de  BoaUloo  que  moyenoaDt  otaget, 
352  a. 

Hoiiffa,  caplUle  de  I'lrak,  124  b-I25  a,  I3i  a, 
190  a. 


lance  (  La  salate ),  troav6e  k  Antioebe,  275  b- 
276  b. 

Laodieee  oa  LatakUh  ( Canton  et  vlUe  de ),  22  a, 
68  a ;  prise  par  les  crols4s,  282  b. 

LatakUh.y oy.  LaodMe. 

Lebeau  {  L'hislorien ),  dl^75  b, 76a, 200  b^  20ia, 
235  b,  237  b. 

Lion,  filsdeTbeodore,goavenieard*AEaz,  81  a. 

Lionee,  g^o^ral  de  Jastinlen  11, 134  a. 

Lequien  (  Le  p^re  ),  cit6  47  b. 

JAban,  chatne  de  montagoes  de  la  Syrie;  ^at 
du  Liban  en  I8i2,  360  a. 

JUeibert,  «v^e  de  Cambrai ,  pfelerin  en  Pales- 
tine, 225  b. 

LouiM  Fli,  roi  de  France,  232  a;  Jag6  par 
M.  Guizot,  ibid.;  il  prend  la  croii,  312  b,  813  a ; 
son  incapacity,  313  b;ii  abandonneson  ar- 

.  m^  314  a ;  sa  femme  le  1  rabit,  314  b ;  Louis  VII 
et  Conrad  HI  k  Jerosalem ,  316  a;  il  assiste  k 
la  d^dence  de  la  dooiinatton  franque,  316  b. 

LouiM  IX  ou  »aint  Louii,  roi  de  France,  231  a- 
232  a;  jagemcnt  porti  sarlui  par  Bl.  Guizot, 
232  b;  il  part  pour  la  croisade,  346  a;  preod 
Damiette,  346  b;  refuse  les  propositions  de 
paix  des  musulmans,  347  a;  sa  laute,  347  b 
,  son  b^rolque  dtfense,  347  b,  348  a ;  il  est  folt 

:  .prisonnier,  348  b;  refuse  les  offres  dn  sultan, 
ibid.;  se  racb^,  ^9  a;  revient  en  France, 
ibid.;  nouvflle  croisade, 350  a;  sa  mort,  ibid. 

Luc,  fils  de  Thfedore ,  gouverneur  d*Azaz,  81  a. 

Lueaif  gouverneur  de  Ravendon,  80  b. 

Lucius  II,  pape  lapldd  par  les  Romalns,  230  a. 


M 


Mac-Culloch,  savant  anglais,  clt6 109  b. 
Madhy  (  Le  )  (  chef  des  fiddles ),  sorle  d'ante 

Christ  mabom^n,  210  a.  ' 

Madhyah,  ville  d^Afrlque,  fondte  par  Timpoa- 

teur  Obald- Allah- Abou-Mohammcd,  210  b. 
Mahomet  (  Mohammed ),  le  prophete,  49 1)  •  62  b, 

63  b-  64  b,  66  a,  90  b,  94  b-95  b. 
Maiuarah-Bbn'Bl'At,  jeune  goerrler  arabe, 

86  b,  87  a. 
Maktiai,  historien  arabe,  auteor  du  TraHi  de 


la  route  qui  mhte  a  la  eoMMtttaiia  fa^ 
natUeg  royaUs,  tile  133  a,  M3  b,3llk 

MaUk'Adhel,  tr^n  de  Saladia;  sa  { 
328  a;  les  crofs^  s'adicnent  a  U  pm^ 
ter  deU pais,  336  b;aidiArd  ioii 
scearen  maiiage,  337  a.  Voy.  ansii  I4ih»3i 

MaUk-Khamel,  sultan  iTEicyple,  3tt  b, ) 

Malhoun-Khatotm  (  femme-tRsar  X 
d'Osman;  son  hisloire,  d&4  b,  3S6 a. 

ManiourahoaMttiuimriahy  ▼llled'fig^ll 
d^  par  Al-Mansoar4nilah,  211  a;|riB| 
saint  Louis,  347  b;  Uj  est  pliiitaid|4i6 
an  cacbot,  348  b. 

MofdaStet  { Les ),  peaple  tjfiak^  114  a. 

Maref,  bistorien,  dt6  211  b. 

MartmiUt  {  Gokmie  des  ),  II  a,  b,  »  b-fif 
leur  organisation  dvile,  mfiiialreclr 
30  a.  Voy.  aussi  31  a,  b,  47  b,  it  a;  lar« 
gioeet  leurs  progrte,  II3  b-ll7b;i 
de  leur  chef,  par  ordre  de  JustiiiMB  11,  A ^ 
Voy.  ausst  152  b,2i«  a,  963  a,  h. 

Maroun,  premier  ^reque  maraoile,  m  \ 
116  b. 

Marrah ,  Tille  Toisliie  d'Alep ,  saecagfe  par  lm\ 
crols^,  381  a,  b. 

Martine,  femme  de  rcmperear  Heradtaa»S}k  ' 

Maaoudi,  historien  arabe,  dte  laS  a. 

Maihieu  d'Hdetse,  autear  iTiine  Hiakmt€^ 
meuie,  dte  la  leltre  de  Zimlaote  a  Attsi 
Chahin,  roi  d'Ann^nie,  204  b,  268  b,  an  ^ 

tHatkieu  Pdrie,  chroniqiiear  anglais,  eHrlCs. 

Midine,  ville  sainte  de  PAfabfe,  Mde^pvto 
Kgyptlens,  loi  a.  Voy.  auasl  I2S  a.  Bl>,  n- 
sl6g«e  et  prise  par  lea  Syrtens  son  feril 
127  a. 

Utekk  ( La ),  Tille  sainte  de  r  Arable,  mitt^, 
124b;a8si«g6e  parT^iid,  IS7a,  b;  pvAlM- 
Melik,  133  a;  saocagee  par  les  Kbunnm. 

196  b. 

Milik'Schah,  fils  et  sneoenenr  d'Alp^iri^ 
219  b ;  il  bat  son  onde,  rAvolleeontie  ln,S»«; 
il  ie  fait  enfermer  dans  un  Htitran,  pab  oi 
foroi  delemettre  lioiort,  2aob;aesaB^Bl' 
tes,  X20b-221  b;soa  gouTcnienMOl, il^ 
^tendue  de  soa  empire,  S2i  b;  nme  qiA  #- 
plole  dans  one  position  dangefense,  SSa;! 
disgrade  Nizam-6i-Malk,  ibid^  n^^m^ 
^prouve  de  la  mort  de  son  vlxir,  S23  b;  s 
mort,  ibid, 

Meliaende,  femme  de  Foulques  d'Ai^oi^  Hf^t^ 
3U6  a,  308  b. 

Menebourg,  ville  de  Hongrfe,  ■■il^pfe  psr  sae 
armte  de  croises,  qui  y  ^pronve  one  dtfrib, 
248  a. 

Mef9iut,  autear  de  rouvrage  iaiilflli  OHt, 
dte2Ulb. 


ET  ANALYTIQUE. 


8T7 


Mferwan,  aecrtlalre  d^Olbman  deveou  kbalife, 

101  a,  138  b- 130  b. 
Mtnoon  II,  petit-filB  derancieQ  khaUfe  de  oe 

nom,  rival  de  Yezid,  HI,  162  a -156  b. 
MeUMlu  ( Ln ),  aecUtean  de  raoU-kbaUfe  All, 

31  b. 
MichoMd,  historien  jGrao^,  aatear  d*aiM  ffu- 

toin  da  Croitades^  dt^  328  b,  2fl0  a,  394  a. 
Michei  Calaphaie,  amant  de  nmp^ratrlce  Zo6, 

qui  plus  tard  lui  fait  crever  les  yeax,  336  a. 
MU1ul^Jntioch£{VhitU}thtn\dii96h,  107  a. 
Midkel  Parapinice,  empereur  byzaotio,  337  a. 
Michel  U  P^phlagonien,  amant  de  rimp^trioe 

Zo<,  poii  rnoine,  336  a. 
JUichelei,  blstorien  fran^ais,  dl^  231  b,  333  b, 

312  b,  361  b. 
MtimMt  boarg  d^Egypte,  ou  satot  Looto  est 

fait  prisonoier,  848  h» 
Mhi,  impdt  fonder ;  son  caradere,  358  a. 
WUizei  L^Arm^ofen  ),  courono^  emperear  k  la 

nort  de  Constant  II,  107  a. 
Hioaioiah,  fr^it  de  Ydzid,  secretaire  de  Maho-^ 

net,  devena  khalile,  92  a -94  a,  95  b -Its  b, 

110  b,  113  a,  b,  116  b,  117  a,  I20  a-i22  b; 

samort,  123  a -134  a.  Voy.  aussi  156  b. 
Moawiah  II,  fils  et  suooesseor  da  kbalife  Tddd, 

138  b. 
Moawiah'ben-jimir,  gtocral  da  kbalife  Moa- 
wiah, 106  a. 
Moez-Ledinr Allah,  prince  fatbimite,  311  a. 
Mohammed,  "Soy,  Mahomet, 
Mohammed,  fils  d'Aboa-Bekr,  lOO  b,  101  a,  119  a. 
Mohammed,  fils  d'Ali,  fils  d*Abd-A11ah-ben-Ab- 

bas,  151  a. 
Mohammed  (  Le  khalifa ),  fils  da  khaliCs  Wa- 

thefc,  estappeM  plas  tard  Mohtadiy  i89b  •I90b. 
Mohammed'ben'Merwan,  fr^re  du  kbalife  Abd- 

d-Meli|i,  131  b,  133  a,  134  b,  135  a. 
Mohammed-Neehteghin,  saroomm^  Durst,  im- 

postear,  premier  pmptidte  de  Hakem,  314  a. 
Mohtaz  (  Le  kbalife ),  saooessear  de  Mostain, 

189  a,  b,  193  a. 
Moin'F.ddin,  €mif  de  Damas ;  sa  rase  k  r^ard 

des  crois^  qai  rassltSgeaient,  316  a. 
MokaUham{UoDi de ),  Ilea  sacr^  193  b;  Ha- 

kem  y  est  assassin^,  314  b. 
Mokhtar,  chef  da  parti  des  Alides,  139  a,  131  a. 
MokU^fl  {  Le  kbalife ),  d^rone  Sinan,  et  met  fin 

k  la  dyoastie  des  ThooloooideSt  194  b,  196  a. 
MoniUur  univenel  (  Le  ),  dt6  360  a. 
MomothilUes;  tear  dodrine,  49  b. 
Mon/aster  ( Le  kbalife } ,  assassin  de  son  p^re, 

Motawakkel,  188  b. 
MonUftk  (  Les  Arabes  dits  ],  30  b. 
Mopnurte,  Ttlle  de  Pandenne  QlldCf  prise  par 

lllMphore  Phocas,  qai  la  pUle  et  y  commet 

loates  iortes  d*exces,208  b. 


Moeah,  gouTerneor  de  la  Mekke,  131  a  - 1 32  a.  ' 

Sioilemah,  frtee  de  Walld  l«%  Hi  a,  143  b, 
145  a. 

Mououi,  ville  de  Mesopotamie,  195  b. 

Moeiam^  asorpatebr  da  khalifal,  sous  Mootas- 
ser,  188  b,  189  a. 

M6tamed  ( Le  kbalile),  saceesseor  de  Moham- 
med ditMohtadi,  I90b»  193  b,  193  a. 

MoUuaem  ( Le  kbalife ),  samomm^  VOctonaire, 
179  a -180  a,  181  b,  183  a,  184  b,  187  b. 

Motawakkel  (Le  khalife  ),  181  b-183  b,  184  b- 
186b;sesk>is,si2b,  3i3a. 

Mou^ek,  ithn  palo«  de  MoUmed,  190  b,  191  a, 
193  a,  b. 

Nourad'Khan,  saceesseor  d'Orkhan,  356  a. 

Mouradlia  d'Ohsson,  dipkunate  d  historien,  dtd 
96b. 

Mourzot^fle,  intrigant  da  empereor  de  Cons- 
tantinople, 343  b. 

Moueni'tmir-Ali-Mowmni,  prince  des  Mockrs, 
battu  par  Zimlscte,  306  a,  306  b. 

lUousta,  cd^bre  chef  tare,  190  b,  19 1  |i. 

Mouza'ten-Nozair ,  goovemear  de  r£gypte 
soas  walld  I*',  138  b-i40  b,  143  a  - 144  a. 

Muhammed-Khan-el'Pathy  ( Le  conqu^rant  X 
oa  Mahomet  II,  866  b. 

aturatori,  Credit  et  historien  Kalien,  dte  343  a. 

Mwrex  purpureut  (  Le  ),  mollasqoe  c^l^bre , 
35  a,  b. 

Murphy,  dcrivaln  arabe,  dt6 144  a. 


N 


Piahr-Hai/a  ( U  riviere  d'Halfa  ],  10  b. 
Naplous  (  U  vUIe  de ),  46  a,  89  a. 
Pfasr-ben^Sayyar,  goavemear  da  Kboraisan,' 

153  a,  153  b,  154  a. 
Kaiartlh,  ville  calibre  de  Tandenne  Palestine, 

37  b;  se  rend  k  Zimiscte,  306  a. 
Nestorius,  g6n^ral  grec,  8i  b,  86  a,  86  a.  ' 

Nicie,  ville  de  PAsie  BUneare,  assi^gte  par  lef 

barons  ftodaux,  357  b;  rose  des  crois^  poor 

s*en  emparer,  359  b;  prise  par  Orkhan,  365  b. 
Nicephore  Brienniue.  Toy.  JBrienniut  (  NM- 

phore), 
Nicephore  BoUmiate,  emperear  byxanlin,  337  b. 
NieiUu  ChomaU,  an  des  aateors  de  la  Bpzan' 

tine,  dt6  343  b. 
Nicephore  Phocas,  Voy.  Phoea${  Nicephore ). 
Nicolas  IF  ( La  pape  ),  prtehe  vainement  la 

croisade,  351  a. 
Nieaa,  Tfile  de  Balgarie,  secoart  les  croises, 

345  b;  defaite  de  oeax-d  devant  ses  mars, 

346  b. 

Nizam-el-Mulk,  mlnislre  d*Alp- Arslan ,  317  b; 
et  de  son  fils  Mdik-Schah,29Da-33tb,  333  a,b: 
les  inlrlgoes  de  la  soltane  Tarkhan-Khatoon  le 


J 


)78 


TABLE  ALPHABATIQUE 


font  disgrader,  913  A,  b;  ion  saoeenear  le 
fait  assasstoer,  S28  a ;  goaTBTMBieDt  de  Nlzam- 
el-Mulk;  lettre  qo'UterIt  avant  de  moarir  a 
Mdlk-Schah,  233  a,  b;  regrete  du  saKan, 
333  b. 

Noil  de»  Vergen,  orientallste,  dM  49  a. 

Nour-Eddin,  fliide  Zenghl,  preiid  et  saoeage 
£desse,  313  a;  bod  portrait,  317  a;  ses  con- 
quotes,  317  b-3l8  b;  II  soatleDt  Sehaver, 
319  b;  ses  ravages  en  Syrie,380  a;  envoi  qaMl 
fait  k  son  g^n^ral  Schir-Koa ,  ibid,;  par  Inip 
il  devieot  maitre  indirect  de  rSgjpte,  330  b. 
Toy.  anssi  881,  323,  333  et  334. 

Piowairi,  terivain  arabe,  cit6  138  b,  143  b,  144  a. 


O 


Ohaid-'Mlah'Jh<m'' Mohammed^  imposteuT 
qal  se  bit  passer  pour  descendant  d*Ali  et  de 
Fatiiimab;  son  hisloire;  il  fonde  la  dynastie 
des  Fatbimites,  SiO  a,  b. 

O^ama,  gnerrier  aralM,  55  b. 

OchUf^  ( L'bistorlen  ),  dt6  51  b,  61  a,  75  b, 
78  a,  79  b,  83  a,  85  b,  88  b,  100  b,  120  a,  123  a, 
134  a,  136  a,  137  a,  b,  149  a,  179  a,  184  b,  193  a. 

Odon  de  Deuit,  cbroniqueor,  aatenr  da  Livre 
sur  le  voyage  de  Louis  FII  en  Orient,  cite 
313  a,  314  a. 

Omar^  snocesseur  da  khalife  Aboo-Bekr,  65  b, 
64  b,  65a,  73a-77a,79b,  82  a,83  b-84  a, 
87  a,  b,  90  b,  .91  a,  96  b;  la  mosqaee  d*0- 
mart  Jerusalem  remplaoe  pendant  vingt  ans 
]a  kaaba  de  la  Mekke,  comme  m<^lropole 
religieose  de  IMslamisme,  197  a;  parali^Ie 
d'Omar  et  d*A.lp-Arslan,  319  a. 

Omar-ben- Jhd'el-Aziz,  soocessear  da  khalife 
Soaieyman,  144  a  -  145  a. 

Omar-ben-Saad,  cbef  des  Koaffiens,  136  a. 

Orchosias,  Voy.  Tortose. 

Orient  (  fitat  de  V )  au  onzt^me  siteie,  335  a. 

Oronte,  fleave  de  Syrie,  9  a. 

Ortoh,  cbef  Inrkoman,  s'^tablit  k  Jerusalem, 
334  a;  ses  persteations  k  T^ard  des  p61erins, 
224  b,  339  a. 

Osmanf  sarnomm^  Ghazi  (  Le  Victorieux  ), 
fondateur  des  Osmanlis,  354  a;  son  mariage 
avec  Malhoun-Khatouo,  354  b;  pr^age  de 
son  ^l^vatioo,  ibid. 

Osmanlis  (  Les },  dynastie  fond^  par  Osman, 
354  a. 

Orkhan^  fils  d^Osman,  cr§e  la  milioe  des  Jania- 
saires,  355  a. 

Othman,  sacceasear  d'Omar,  73  b,  74  a,  lOO  b. 

Othony  ev^que  de  Ratlsboooe ;  son  p^lerlnage 
en  Palestine,  226  b. 

Ott«((/,  cap  de  la  Syrle,  38  b,  39  a. 


Pachas  ( GoavememeDt  des  )  en  Syrie,  ST  l 

Pagi,  cordelier  italien,  annaliste,  dlfcwi, 
313  a. 

Palmare.  Voy.  Tadmar. 

Paneraee,  aventnrler  armtofeo,  came  deli  de- 
sertion de  Baadoain,  266  a,  b;  ilTabaadsBK, 
366  a. 

Pavl,  chef  maronite,  115  b. 

Paul  Diaere,  historien  lombard,  fAU  4aa,  ick 

Pelage,  l^t  da  pape,  caose  la  roloe  des  cri- 
ses, 343  b. 

PiterinageM ;  lis  prennent  uoe  extension  texMk- 
rable,  leors  dangers;  pelerinages  chr^Sna, 
334  a,  b;  differences  entre  oeux  drs  dir^fios 
et  oeax  des  mosuimans,  335  a;  persfaodoosii 
fatblmite  Hakem,  235  b;  caradere  des  pk- 
rinages  de  Richard  de  Saint-Viton  et  delitt- 
bert ,  326  a ;  p^erinages  des  ^^qoes  Ssefra?, 
Gaillaame,  Guntberet  Otboo,  SIS  b;<&liB- 
rences  entre  lears  oompagnoos  eC  erax  dk 
Lietbert,  226  b;  IVmir  de  Ramiah  les  drfivn 
des  altaqaes  des  Turkomans,  SS7  a;  lean  Is- 
prudences,  337  a,  b ;  lis  reviennent  en  Eoro^ 
337  b;  les  pderlnages  deviennent  on  h^ 
d'expiation,  227  t>,  238  a ;  caractere  des  peie- 
rinages  aa  onzi^e  siteie,  338  b;  les  persccs- 
tions  cause  des  croisades,  ibid^ 

Pette  (  La  ),  16  a;  en  Syrie,  i*ao  18  de  l^^e. 
89  b,  93  a. 

Philippe  i***,  rol  de  France,  proiDOteor  de fi 
croisade,  252  a. 

Philippe-AugusU,  roi  de  France,  233  i:Jl9 
par  M.  Goizot,  232  b;  Guillaun^e  de  I^it! 
reconcilie  avec  Henri  II,  328.  b;  il  eir^l^ 
cbard  conlre  son  pere,  ibid.;  II  part  af«  li- 
chard  pour  la  croisade,  mais  s'eo  a^pait  tan- 
t6t,  329  a ;  ii  d^barqae  a  Acre,  334  a ;  aprati 
prise  d\Acre  il  abandoone  la  croisade,  sua. 

Phocae  {  Le  tyran  ),  48  b,  49  a. 

PhocM  (  L^on  ),  fr^re  de  Nic^phore  PteoM, 
qnUl  seconde  dans  ses  entreprises  adasiaistii- 
tives  et  goerrieres,  202  a. 

Phocat  ( Nlc^phore ),  fameax  ^to^nJ  grecSWk 
8*empare  de  I*ile  de  Crete,  dont  il  efaese  la 
Arabes,  2oi  a,  b;  entreprend  one  cxp^ifita 
cootre  la  Syrie,  30i  b;  son  adminktraboaip 
Syrie,  2«I2  a;  ses  exploits  oontre  tea  Ar^ss. 
ibid.;  Remain  le  Jeaoe,  Jaloux,  venC  k  hi« 
assasslner,  ibid,;  11  spouse  la  veovede  Roada 
et  s'empare  du  poavoir,  203  b ;  laisae  le  oos- 
mandement  de  I'armte  k  Zimisote,  no  fiedr- 
nant,  dont  ensaite  ii  devient  JaJooz,  S03a,b; 
le  disgrade,S04  a;  est  assaaslne  par  lui,  3Mk 
caract^  de  ses  exp^U4Mis,  397  b,  SS»  b;« 
oondalte  k  la  prise  de  Mopsaeste. 


ET  ANALYTIQUE. 


37» 


Fi€rre  VErmite;  son  portrait,  238  b;  son  ptie- 
rinage  k  J^rasalem,  238  b,  239  a;  son  exalta- 
-lion,  ihid.;  U  s'adrasse  aapape  UrbaSn  II; 
ses  plications,  239  b ,  240  a ;  Pierre  an  eon- 
eile  de  Ciermoot,  241  b ;  son  annte,  244  a ;  son 
lieutenant,  244  b;  11  fait  massacrer  les  habi- 
tants de  Semlln ,  246  a ;  est  batta  par  les  Bal- 
gares,  248  b ;  se  Joint,  en  Asle  Mlneare,  k  l*ar^ 
m&B  des  crols^  fifodaax,  257  a;  s'eehappe 
nnitamment  da  camp  des  crois^,  mais  Tan- 
crMe  1*7  ramtoe,  270  a;  d^pat^  en  parlemen- 
taire,  se  Halt  chasser  par  Rerboghah ,  277  a; 
apaise  les  dissensions  qui  s'^l^rent  entre  les 
cheb  biDis^,  296  a. 

Pepin  (  n«n^ls  ),  antenr  d'ane  Ckrtmique, 
344  Ki 

PJaitance,  Tllle  dltalle,  cooctle  qnl  s*y  tient, 
940  h, 

PoiHen  ( Bataille  de ),  146  b,  147  a. 

PoulatM  (  Les ) ,  descendants  directs  des  crol- 
S^,  306  b,  307  a. 

PtoUmais.  Voy.  Acre, 


Quairem^re  (  £tienne ) ,  oiientallste  fran^als, 
Cfl6  129  ^  131  b,  132  a. 


ttaecah  on  Rakka,  flllede  M^sopotamie,  Ma, 
196  b. 

Rqfy,  lib  d*Omtfrah,  hdros  arabe,  6i  a,  87  b, 
09  b. 

Makka,  Toy.  Raeeah. 

BamUth,  Tille  de  Syrie,  46  a»  77  b,  89  a;  se  rend 
k  Zimisc^,  206  a.  Voy.  aassl  285  a. 

Eapul  de  Caen,  chronlqaenr,  auteur  des  Ge$U$ 
de  Tanerede,  cit^  254  a,  256  b,  261  a,  264  a,  b, 
S75  b,  283  a,  286  b,  297  a,  301  a. 

tUt^-el'jiin,  oa  puite  de  Salomon,  35  b. 

Ravendou,  petite  ville  de  Syrle,  80  h, 

Rmymond,  comte  de  Saint-Gilles  et  de  Tonloose, 
pajt  pear  la  erolsade,  255  b,  256  a;  est  tromp^ 
par  Alexis  Comntoe,  256  b ;  vlent  ao  seooan 
des  erotste  devant  Nlcfe,  261  a;  saocage  Alba- 
rfe»  280  b;  son  repentir,  282  a;  sa  roajindse 
foi,  999  b;  11  abandonne  la  crolsade,  300  a. 

Jtaymofui;  domte  de  Tripoli;  son  indlgoe  con* 
dafte,  324  b,  326  a. 

Moifm&nd  d'Jgiles,  chapelaln  da  oomtede  Ton- 
loose,  aatear  d*ane  Hutoire  dee  France  qui 
prirent  J^rmealem,  dM  256  a,  269  b;  11  est 
HabXi  gardlen  de  la  sainte  laooe,  276  a,  b. 
Toy.  aoasi 277a,282a,283b,  285  a,S89a, 
990  a,  b,  996b. 

Eawmand  de  PoUien,  seignflor  d>Antloeho ,  86- 


duit  ftMonore  de  Guienne,  314  b;  est  batta  ei 
tii6  par  Noor^Eddln,  318  a. 

Raymond  Poreher,  chevalier  eroM;  son  b^ 
roIsm^  273  b -274  a. 

Raynaldi  ( Les  Annales  de  ),  (Mm  866  b. 

Rimutat  { Abel ),  sinolngoe,  anteor  de  Recher- 
chet  ear  le$  Tariaree,  845  b. 

Renaud,  aventorier,  se  met  k  la  tMe  des  Teu- 
tons qui  qulttent  Tarm^e  des  crols^,  249  a; 
▼end  ses  oompagnons  aox  Tares,  et  se  fait 
mosalman,  ibid, 

Renaud  de  ChdtilUm,  cfaevalier;  son  indigne 
oondnite,  324  b.  * 

Restan  (  La  ville  de),  66  b;  prise  par  Aboa- 
Obafda,  66  a. 

RhadUb'  lUak,  vingtlime  Abbasside,  200  h. 

Rhodei  ( L'lle  de ),  cooqolse  par  Moawlab,  96  b , 
99  a ;  prise  par  lea  hospitallers,  365  b;  son 
oolosse,  99  a. 

Rkoeoe  (  Le  hamean  de ),  18  b. 

Rickanlie  (  Les  ),  20  b. 

Richard,  abb6  de  Saiot-Titon,  pterin  k  J^rasa- 
lein,  225  b. 

Richard  Cceur  de  Lion^  Ills  de  Henri  II ,  232  a; 
Phliippe-Aagaste  Peidte  oontre  son  p^, 
328  b;  11  sacoMe  k  Henri  II,  329 a;  manl^ 
dont  N  se  procure  Fargent  n^oessslre  k  la  crol- 
sade, ibid,;  11  s'allle  k  Philippe- Auguste,  mals 
s'en  s^pare  bientOt,  ibid.;  11  d^barqae  k  Acre, 
334  a;  Insalte  qoMl  fait  k  Leopold  d'Autriche 
k  la  prise  d*Acre,  335 b;  ses  cruaat^  ,  336  a; 
lutte  entre  Saladln  et  Richard ,  ibid.;  11  fait 
des  propositions  de  paix,  337  a ;  sa  rage  k  la 
voeda  mtotntentement  de  Parm^,  837  b; 
paix  entre  ial  et  Saladln,  338  a;  11  qultte  les 
croiste,  838  b. 

Robert,  comte  d*Artols,  frire  de  saint  Louis, 
part  poor  la  crolsade,  846  a ;  II  est  to^  par  les 
mosnlmans,  347  b. 

Robert,  due  de  NoraMmdle,  condamn^  aa  p^le- 
rinage  de  Jerusalem,  228  a ;  11  prend  ie  prin- 
cipal ^tendard  des masulmans,  299 a;  II  aban- 
donne la  croisade,  300  a. 

Robert  Courte'Henze,  due  de  Normandle,  part 
pour  la  crolsade,  252  a,  b;  t1  se  retire  k  Lao- 
diofe,  270  a;  son  dlsooors  aux  crols^  sur 
r^eetiori  d*an  rol,  294  a,  b;  11  abandonne  la 
crolsade,  300  a. 

Robert  le  Maine,  chronlqaenr,  anteur  d*aoe 
Histoire  de  Jiruealem,  cit«  242  a,  243  b,  252  b, 
960  b,  272  a;  son  rfcit  de  la  dtoHiverfe  de  la 
Sainte  lance,  276  a,  b.  Voy.  anssl  277  a,  281  a,  b« 
285  b,  299  *a. 

Roderik,  usnrpateordutrdned'Espagne,  139  a,  b* 

Remain,  goavemeor  da  Bostra,  67  b,  58  a. 

Jfomom  Argyre,  emperear  byzantin,  6poux  de 
Zo6,  anpolsooiit  pals  noy6  par  elle,  236  a.    i 


S80 


TABLE  ALPHAB^TIQUE 


Momain  (  Diogpne ),  emperear  byzantin,  batta 
par  Alp-Anlao,  318  a,  b;  sa  ridicule  vaults, 
318  b.  Yoir  aoMl  S87  a. 

Homain  le  Jetiw,  Ala  de  OonataDlin  Porphyio- 
gdoele  II ,  et  ^poox  de  Thtepbaoo,  soo  b;  )a- 
loox  de  la  gloiie  de  If  io^bom  Pbocas,  veat 
to  faire  awMnlner,  9ca  a;  tl  est  empoisoon^ 
par  sa  famine,  aos  b. 

Rome,  piUte  par  Constaot  II,  106  a. 

Uos9euw  Sami-Hilairt,  bistorien  fraofals,  cit6 
130  a. 


8 


Saad,  flis  d'Aboo-Wakkas,  gto^ral  arabe,  83  a. 

Saadi,  poMepersan,  161  b;  les  Fraocs  le  font 
travailler  k  ane  des  trancbto  de  Tripoli, 

'  863  a. 

StUd'Ebn'Jmir,  gto^ral  arabe,  70  a. 

SaiiUh,  Titto  de  Syrle,  Pancieaiie  sidon,  34  a, 
47  b,  175  b. 

Saint  Jean  Damatcine  ( Mosqnte  de ),  41  b. 

Saint'MartiH,  orieoUlisle.  cit^  63  b. 

Saladin  (  Salab-Eddin,  bonheur  de  la  re/t- 
gion  );  son  portrait,  331  a -333  b;  ses  pre* 
mitres  armes,  333  a;  i(  prend  le  tilre  de 
saltan,  834  a;  s'emJMre  de Tlb^riade et  d^fait 
les  cbr^tiens,  336  b;  ses  oooqu^tes,  336  b, 
337  a ;  sa  g^o^rosit^  h  la  prise  de  Jerusalem , 
387  b ;  parall^  de  Saladln  et  de  Godefroy  de 
bouillon,  338  a;  troisi^me  crolsade,838  b; 
li^  d*AcTe,330b;  Saladin  y  bat  les  croises, 
888  a;  est  foro6  de  lever  le  si^,  ibid. ;  des- 
cription de  son  camp,  333  a;  sa  leltre  au 
khalife  de  Bagdad  sar  le  si^e  d*Acre,  334  b; 
lottre  entre  Richard  et  Saladin,  336  a;  11  est 
battu  devant  Jaffis,  337  a;  paix  enlre  lai  et 
Richard,  338 a;  sa  gfoirosit^,  338  b;  sa  mort, 
ibid,;  son  portrait,  389-340;  conadla  qa*il 
doone  k  son  flIs,  339  b. 

Saladine  {Dtme),  A  quelle  occasion  elle  est  Ini- 
titu^  338  b. 

Salem,  prince  maronite,  II6  b,  1 17  a. 

Samarah  ( La  dt6  de )»  fondte  par  Motassem, 
183  a,  b;  eesse  d*Mre  le  si^  de  Pemplre, 
183  a. 

Satnarkande,  rille  de  la  Boukharie,  prise  par 
M^k-Schab,  831  a. 

Samotate,  YUto  de  FAsle  Mineure,  assi^g^e  pds 
achette  par  Bandouin,  366  b. 

Sannin  ( Pic  du  ),  30  a,  b. 

Saphet  (  Village  de  >,  andennement  Pane  des 
quatre  villes  salutes  des  H^reux,  37  b,  38  a. 

Satalie,  yUte  grecque  de  TAsie  Mineuie;  sps 
habitants  trabissent  les  croisds,  314  a. 

SauierelUi  ( Nu4es  de  ),  16  a,  16  a. 

Scaliger,  eit«  109  b. 


Schahpowr,  gouTcneor  de  ia  troiiiene  C^vs- 

dooe,  106  b. 
Schahab  I  Malaon),  dynaatie  de Scteks 4i 

Uban,  363  a. 
Sehaver,  ^mir  eomp^ttieor  de  Durgbn  ««• 

zirat,  est  sonteou  par  Ifoor-fiddin, 3tf  ki 

demande  du  seooois  aox  cbrttfens  ei* 

Nour-Eddin,  330  a;  est  mis  a  nott,  3Bk 
Schir^Kou,  gto^ral  de  Ifoar-Eddia ,  liitB» 

gham,  319  b ;  prend  Belbeis ,  dyettfai* 

assi^  par  SebaTet,  330  a;  fait  lercr fcriip. 

ibid.;  fait   deux  ooavclica    eaprdiliaw  a 

£gypte,  330  b;  sa  mori,  tfruf.  * 
Sehourahbil,  dtoyeo  chef  arabe,  88  a,  81  k 
Sel4fouk,  esdaYe  oa  chef  de  tiiba,  faudilM 

de  la  dynastie  des  SekUoukldea,  3i6a,  bw 
SeldjoukideM  ( Les ),  dynastie  jwlMimr,  3»  btt 

sui?. 
Sigur,  diplomate  et  bistorien^  anteord^aae  Jb> 

toire  wuvenelU,  clt^SSS  b. 
SiUttciei  Souddi«h),Tillec<tttiredeSyiie,n& 

18  b,  47  a,  175  b.* 
Sdlim  /«%  sultan  deConstairfiiiople;  soaenc- 

t^  f^rooe,  357  b. 
SenUin,  ▼Ule  <ie  rEsdaTonle,  est  pfBeectwa- 

gto  par  les  crols^  346  a. 
S«pu<c7v  ( Le  saint )  est  pfot^  oootie  iB  Xpb 

parZUnisoes,  806  a. 
Sirgius ,  gfo^ral  romaln  sous  H^cadin,  wa,  k 
Sidon,  se  rend  k  Zlmlsois,  308  h.  Toy.  SriU. 
Sigtiftay,  archeT^que  de  lfaycnce;fcisloke6t 

son  p^lerinage  k  JerusalesD,  SS8  b. 
Stm^off,  patriacchedeJiftisaleBi,  XMl^ak. 

339a. 
SiiMif,  ills  deThouloun,  detr6o«  parkkWk 

Moktafi,l94b. 
Sismondi,  bistorien  italien,  autcor  de  f  S*»! 

det  Fruueau,  dt6  328  a,  381  b,  saftLSHk 

339  b. 
SkanderouH.  Toy.  AlexandrttU. 
Soknah,  ville  de  Tandenne  Palmyrtee  feat  fit 

les  musulmans,  59  a. 
SoUil  (  Temple  du ),  k  Tadmor,  43  a  -44  \, 
SoUmiah,  vlUe  saocagfe  par  les  Kbaishilln 

196  b. 
Sophroniut,  patriarche  de  J^msaloa,  73  fe,  %i . 

77  a. 
Soueidiih.  Toy.  Sileude, 
SouUyman  (  vulgairement  SoUmau ),  m» 

seur  de  T^alid  I*',  143  a,  143  a- 144  a. 
Sotdegman,  general  et  ooosfai  de  Mdik-Sd^; 

ses  conqudtes,  330b,  331  a;kUBnrtiF■^ 

Uk-Scbah,  U  se  er6e  un  peUtroyaaiBe,Sk 

Toiraossi  337  b,  338  a. 
Sounna  ( La)(tradltk«).rWB4eparsi*«« 

Moawlah,I04b. 
Sour,  Tille  de  Syrie,  randenne  rgr,»r^ 


ET  ANALYTIQUE. 


ZSX 


47  b,  88b,  176  b ;  priae  pat  lei  cnMa,  804  b; 
Ici  y^tiem  y  atbttsMiit,  mi  doazlteMiUde, 
one  iMDafactore  de  vene,  au  b^ 

U^^opiUrm  (  La  TUIe  de  ),  laooafffe  par  Thfo- 
pblle,i7»b. 

l^tvesin  deSacff,  orientaliBtofran^1s,ctt4 184  a, 
181  a.  Slab,  214  b. 

lynuniM,  o^Ubn  vUle  da  Sidle,  priae  par  Moa- 
^wlah,  107  a,  b. 

9sffie  Modeme :  limovucnoH  k  rhistoire  da 
cette  ooDtrte,  I  >a- 8  b^  Sa  dbscbiption  :  •# 
dtoomiDatkm  arabe;  noma  dea  Mnfi  ooatrfea 
qui  la  parlagealant  aneteniiemeDt ;  aa  latitade 
ei  aa  longitade;  aea  ttmltea;  ^tendae  de  aea 
cdtea.  7  a ;  sa  oonatltntion  gfologlqoe,  7  a,  b^, 
vaiMM  de  aon  cUmat,  7  b;  rieheaae  de  son 
rtgne  "v^gMal,  natare  de  aon  terrain ,  vart^td 
de  aea  aapeeli,8a;  noma  de  aea  prlncipales 
moBtagnea,  lear  baatear,  8  a,  b;  aereanx, 
8  b -II  a ;  oonfiguntionde aea  riTagea,  li  a,  b; 
rigne  mineral,  is  a;  r^gney^ta),  is  a,  b; 
r^oe animal,  IS  b-l8  a ;  aa  aoperflcie,  I8  a. 
8E8  MTiaiOIISAGTDKLLES;  18  b,  48l>;pacAa- 
Uk  ^jilep,  18  b-SI  a;  jfaehalik d§  TripoU, 
lia-aob;  paehttUk d^Aen,  aob-38a;  pa- 
chtUik  de  Damat^  88  a- 48  b.  CoNQOfiTBS  DB 
L'lsuui.  £tat  de  la  Syria  en  83S,  48  b-49  a; 
H^racUoa  et  Mabomet,  40  a-  B3  b ;  premt^rea 
hoatim^a  entra  lea  Arabea  et  lea  Romaina, 
SS  b-66  a;  aacete  rapidea  dea  Arabea,  66  a- 
60  b-,  al40B  de  Damaa,  69  b- 88  b;  progi^  de 
ploa  en  ploa  rapidea  dea  Arabea,  88  b-88b; 
JbalaiUednrarmoak,  88  b-78  a;  Omar  |i  J^m- 
satan,  78  a '77  b;  le  ehiteao  d'Alep,  77  b- 
80  b;  priae  d'Antiocbe,  80  b*88  b ;  combata 
daaa  le  Liban,  88  b-87  b;  lea  Romaioa  cbaa- 
ala  de  Syrle,  87  b-88  b;  la  Syria  aoua  lea 
Omniadea,  earaet^rea  dea  premi^rea  oooqnAtea 
arabea,  80  a -OS  a;  oommeocement  de  Moa- 
wiab,  OS  a-04a;  mort  d*H^acliiia ,  04  a- 
86  b;  pvenlteea  exp^tiooa  maritimea  dea 
Arabea,  06  b- lOO  a;  gaerrea  civilea  cntre  lea 
Arabea,  lOO  a  - 107  b;  expMition  oontre  Gona- 
tantioople,  107  b-  ill  a ;  al^  de  Conatanti- 
BO|»le,  III  a- 113  b;  origlne  et  progrte  des 
marooilca,  lis  b-ii7  b;  levfe  da  ai^de 
Conafantlnople,  1I7  b-  ISO  a;  paix  enire  I'la- 
'  lam  el  rempire  byzantin,  ISO  a-  ISI  a;  ei^ra- 
tkm d^«iid  aukbalifat,  isi  a-lS8 a;  moride 
Moawiab,  IS8  a  -134  a ;  T^zld ,  premier  aoo- 
eeaaeor  do  kballfat  par  h^rMitii,  1S4  a  -  IS7  b; 
aHnatlon  de  la  Syria  an  oommeocement  de  la 
dynaatiedeaOmmiadea,  iS7b-l80  b;aocrola- 
acment  de  la  pOlaaanoe  morale  dea  kbalifea  de 
Daaaaa,  130  b-i34  a;  noavelle  defaite  dea 
Greea,  134  a- 136  a;  proap^rit^  aecldenlelle . 
de  la  Syria,  I36  a,  b ;  caract^re  d*Abd-el-Md 


Uk,  i86b-i88b;lapoeale  et  lea  po8les  ara- 
bea ;  188  b  - 137  b ;  mort  d'Abd^M8Uk,  137  b- 
138  b;  oooqoMe  de  TEgpagna,  138  b-i40a; 
fortane  de  Walld  !•' ,  I40  a-i«s  a ;  noaveaa 
ai^  de  Conatantlnople,  I4S  a  - 146  b;  Airan- 
lement  de  la  polaaance  dea  Ommladea,  I46  b- 
149  a;  oommeDoement  dea  Abaaakiea,  ue  a- 
I6t  b;  lea  demiera  Ommladea,  I6I  b- 164  a; 
cataatropbe  dea  Ommladea,  164  a- 167  b ;  lea 
premiere  abaaaldea,  167  b- 160  a;  de  la  pen- 
wbt  orientale^69  a  - 183  a;  da  I'art  oriental, 
188  a- 187  a ;  de  la  po^aie  orienlalc,  187  a - 
171  b;  dre  de  la  dTiliaatioo  ialamiqae,  I7I  b- 
173  b;  luxe  orieptal,  I73  b-i78  a;  oooditiona 
dea  femmea  muaafmanea,  I78  a- 179  a;  noa* 
yeaax  trooblea  en  Syrie,  179  a- 180  b;  appa- 
rition dea  Tnrca  en  Orient,  I80  b-i8i  b; 
domination  dea  Tarca,  I8i  b-i83  a;  loia 
aomptuairea  de  Motawakkel,  183  a,  b;  dtea- 
denoe  immlnente  da  khattfat,  issb- 186  b; 
deapotiame  dea  Tarca,  186  b- 188  b;  lea  kba- 
lifea crtetarea  dea  Torea,  188  b-  loi  a ;  domi- 
nation dea  Tbooloanidea,  I91  a- 196  a;  la  Sy- 
rie aooa  lea  Kharmathea,  I96  b  •  197  b;  pltl4e 
par  lea  Ikdilditea,  198  a;  aooa  lea  Hamadani- 
tea,  108  b-soo  a;  entzepriae  de  IfMptaore 
Pbocaa  oontre  la  Syria,  soi  b-S04  a;  pre- 
mise expMitionde  ZImiaoteeo  Syrie,S03  a,  b; 
aeoonde  expMition,  S04  b;  la  Syrle  repriae 
par  lea  Moaalmana,  S08  a;  lea  Fatbimitea, 
209  b;  tyrannie  de  Hakem,  sii  b;  «tat  de  la 
Syrie  k  la  mort  de  Hakem,  214  b ;  lea  SelOJoa- 
kldea,  S16  b;  moroellemeot  d^aaatreox  de  la 
Syrie,  S33  b;  la  Syrie  mMdionale  tehoit  k 
Toatoadi,  Mre  de  M^llk-Schab,  S23  b;  lea 
Tofkomana  a*y  r^pandent,  leara  exote,  SS4  a,  b; 
la  Syrle  k  I'^poqae  dea  premiere  et  aeoonde 
cririaadea,  S38  a  et  aoiv.;  Salab-Eddla,  3SI  a ; 
noatelleaaooffranceade  la  Syrie  aprte  la  trol- 

*  aiteiecroi8ade.34l  a;  qoatriteae  eroiaade,  ibid.; 
dnquiimecroiaade,  842  a ;  alxitaie  crolaade, 
343  a;  lea  TaUra-Mogola  et  lea  Kbariamiena, 
346  a ;  aaint  Loala ,  348  a ;  deatradlon  de  Tem- 
pire  cbi^tien  en  Paleatine,  360  a;  lea  Oamoo* 
lla,  364  a;  la  Syrie  toajoaca  malbeurfoae,  366- 
368 ;  goovememrut  dea  padiaa,  367  a;  aoof- 
francea  dea  Syriena,  368  a.  b;  ^tat  da  Liban 
en  1842,  380  a; ooncliuion,  383  b  et  aolT. 

Syriem*  Voy.  Syrie  modeme. 


TadH-el'Mulk'Kami,  aooceaaeur  du  vizir  Nizam - 

el-Malk,  le  fait  aaaassiner,  223  a. 
Tadmwr,  Fandenne  Palmyre,  43  a-  44 a,  48  a, 

69  a. 
Tancrede,  oooain  deBob^mood,  232  a;  par. 


382 

IMNir  taeroiiade,  iMa;  leat  de  toot  les  ba- 
looi  ffodaax  oe  rcod  pat  bommafe  k  Alexia 
ComDtee,  366  b;  iMplorable  ooalUtentra  Tan- 
erMe  ek  Baudouio,  963  b;  aaave  rarmte  4 
AnUocha,  967  a;  sa  bravoate,  960  a;  ramtee 
Pierre  I'CrMile,  qui  cherobalt  k  fair,  970  a; 
va  pmqae  seal  reooDiiallre  J^nualeBi,  986  a ; 
d^oouvre  ane  fortt  auz  eavirons,  988  a;  sa 
dispute  avec  ArDoold,  9M  b. 

Tmraboulousi'ChatH,  Voy.  Tripolu 

Tarkhan-Shatoun,  femme  de  Melik-Scbah ;  in- 
triguecoDtre  le  vizir  NUam-eNMulk,  993  a,  b. 

Torse,  viile  de  rancieoDe  Cilicle,  prise  par  Bo- 
bdoioad,  280  b. 

Tatars- Mpgola  (  Les  )  et  les  Kharismieos, 
8A6  a;  leun  conqu^tes  soos  GengUkao,  ibid*; 
soas  Houlakoa,  849  b. 

Tsbrizi,  bistorien  arabe,  dt^  188  a. 

Tekbir  ( Le  ),  pri^  arabe^  70  a. 

Ttmulicus  Melchi,  l&ealenant  de  Zlmisces,  battu 
par  les  Arabes,  204  b. 

Ttmplien  (  Les  ),  807  b;  leun  querelles  avec 
les  liospitaliers,  396  a  el  343  a;  lear  grand 
maitre  est  pris  par  Saladin,  326  b. 

Thagadj,  goavernear  de  Damas,  meartrler  da 
fllsde  KbamarcKiiab  et  comp^Uleur  k  rempirr, 
194  b. 

Thaher,  fondatear  de  la  dynasUe  des  Thab^< 
rites,  dt«  195  b. 

Thaherite*  (  Dypastie  des ).  Voy.  Thaher. 

ThdUb,  triba  arabe,  I9K  b. 

Tharik,  ci\tbrt  chef  berbere,  139  a  - 140  b,  148  a. 

Thashahf  pr^tendant  h  la  saccession  d'Otbman, 
lOi  a,  b. 

Theodora^  s«ar  de  llmp^ratrloe  Zo^,  236  b. 

Theodore,  prince  d^^desse,  adopte  Baudoaln, 
966  b ;  est  prMpit^  par  ses  su^pls,  ibid. 

Theodore,  ills  deTbtodore  fr^re  d*H^racIiUs, 
68  b. 

Theodore,  tthn  de  rempercar  H^acllus,  60  b, 
61  a. 

Thiodore,  gouverneur  d^Axaz,  80  b,  81  a. 

Thdodose,  fr^re  de  Constant  11,  104  b. 

ThiophanCy  bistorien  byzantln,  cit^  47  a,  56  b, 
61  a,  62  b,  69  b,  73  b,  76  b,  83  b,  88  b,  94  a, 
99  b,  100  a,  109  b,  106  b,  108  a,  I09  b,  112  b, 
114  a,  115  a,  119  a,  193  a,  124  a,  135  a,  141  b, 
149  b,  146  a. 

Thiophano,  coartlsane  de  Constantinople,  pats 
femme  de  Romain  le  Jeane,  200  b ;  elle  Pem- 
poisonne,  pais  devlent  repoase  de  Nio^pbore, 
qui  alors  s*empara  da  goavemement,  902  b ; 
ilprise  de  Zlmisces,  elle  sacrifie  Nic^phore, 
qu*elle  lul  fait  assassiner,  904  a,  b;  Zimiscte 
la  fait  renfermer  dans  an  monast^  ibid.; 
paralieie  des  imp^atrices  Tbtopbano  et  Zo^ 
236  a. 


TABLE  ALPflABfiTICtJE 


TheophiUi  Vaupetmu  )» I79a-180  a,t8ik 

Thibautie  Nomurre,  cit^  364  b. 

Thien,  dipkniuitA  et  bistorien  fnofaii;  a^v 

de  rtftftoirv  du  ConsuUi  et  de  rEmpat^m 

869  a. 
Thognmi^Bev.  pettt-fib  de  Sd^ook,  2isb. 
Thomas,  geodre  de  rempereur  HeraefiiB,  Ol 

64  a. 
Thotdtmn.  Toy.  Ahmed-hem-Thtmlma. 
Thoulounides,  dynaatie  (bndte  par  AhaBeM» 
^TbookMin.  Yoy.  Ahmed 'kem-TkmOmm  ct 

Tibere  (  Le  faux  emperear  ),  148  b. 
Tibtriade,  vUlede  randemie  Palestill^  TV 

89  a;  se  rend  k  Zimisote,  a06  a;  Salsfia  b 

prend,  326  b  -,  Dbaher  s'ea  empare,  858  k 
TibMade  ( 'Lac  de  ),  8  b. 
Tifiisy  ville  capitale  de  la  Gtergfe,  96*. 
Timom^leng  defalt  Batazet,  3M  a. 
Tolaiah,  transf uge  arabe»  88  a. 
Tortose,  ville  greoqoe  de  Sycie ,  FaoeieaBr  0^ 

chosiast  98  a»  47 b,  68 a;  priae  par  tescnks^ 

289  b. 
Totark,  Aiabe de  Bagdad,  kqul  Zimiseis  co* 

le  oommandement  de  Damas,  906  b. 
I^iouch,  Mn  de  Mdik-Schah,  UAiak  ea  pir 

tage  la  Syria  mMdlooate,  99S  b. 
Dnemblement  de  tern,  l»  a,  348  a. 
TrHfe  de  Dieu;  ce que ci'^ait ;  eeoz  qiiliviE»- 

ient  soot  ooDdamnte  aa  ptetnage  deJaw- 

lem,  997  b,  941  b. 
Tripoli,  ville  de  Syrle«  aetadleawDt  21rI» 

louei'Cham,  oa  les  noit^Fittes,  9ib-9A 

47  b,  88  b,  176  b;  ae  rend  k  TAmWfoa^mii 

son  ^mir  est  vainca  par  lea  crolsA  dK» 

diMe,984  a ;  SaaditraTaOleli  aea  IbiliflLi** 

863  a. 
rrtpofi  (  Paebalik  de ),  91  ft-80  h. 
Tyipolitaitu  (  H^rofsme  de  dem  Irites  \»»^ 

loo  a. 
Trithurius  ( 'niA>dore  ),  gdodral  i 

laire  imperial  de  Taham,  61  b,  a  b. 
TruandSt  ramas  de  brtgaods;  km  d 

dans  rarm6e  dea  crols^  S73  k 
Tudeboth,  diroaiqiiear,  atilear  d*BBe  i 

du  voyage  A  Jirusalem,  dt«  916  b,XH  a,  t»a. 
Turcs ;  parallde  de  ee  people  avec  eelol  ds  m- 

men,  199  b;  lears  oonqottes  mm  ks  SaH- 

joukides,  916  et  soiv.;  portrdt  des  Itnd  ac- 

toels,  864  a,  b. 
Turkomans  (  Les ),  raee  bAtarde  d«  Taa,  se 

r^ndent  m  Syrie;  lea  exete  qelli  y  «•- 

mdtent  sartoat  k  1i>4gaid  dea  pderlas,  9M  a«b. 

Tyanes,  ville  de 

par  Modemah,  141  a. 
Tgr.  Voy.  Sour. 


ET  ANALYTIQUE. 


883 


U 


Vrbam  //  (  Le  pape ),  932  a,  234  a,  b,  a$0  b; 
ooDToqae  ud  oondle  k  Plaisance,  340  b ;  pais 
k  Clermont,  341  a -343  a;  ses  prescriptions 
pour  les  croiste,  343  b. 


Fadelvoeka,  la  m^e  vilte  qa^Hiliopolis;  prise 

par  Zlmiscte,  306  b. 
Fahan,  persand'orlglne,  commandant  destroQ- 

pes  d'HeracIias ,  61  b,  62  b,  68  b- 70  a,  73  a,  b. 
Villani  (  Jean  ),  bistorien  italien,  auteur  d'une 

HUtoire  de  Florence,  cit^  844  b. 
ri7/eAan2otim,cbroniqaearrran^is,  cit^  343  b. 
FittU  (  Orderic  ),  chrdnlqueor  normand},  dte 

341,  262  b. 
fFakedy^  bistorien  arabe,  ctt6  69  a,  7i  a,  so  b, 

'80.  a. 
JTaiidl*;  flls  alo^  etsaccesseur  d'Abd-el-M^lik, 

138  b,  139  b,  140  a;  saft^ortune,  140  a- 142  a. 

Voy.  anssi  150  b,  Kl.a. 
ff^alid  11,  saoceaseor  da  kbalife  Ibesebam, 

161  b. 
fFatek  (  Le  r^n^t ),  83  b. 
fTridon,  la  mteie  qae  Beryte,  se  rend  k  Zimis- 

cte,  206  b. 


Yd/a,  46  a.  Voy.  Jaffa, 

YfUrahoulM  i  Village  de  ),  pr^lendu  bAU  sar 

Templaoement  de  I'aotique  HierapoliSf  I9  b. 
Yarmouk  (  Bataille  de  ).  Voy.  Syrie  Modeme, 
Yarmouk  (  Eivl^  de ),  69  b. 
Ybrahim  oa  AdonU,  riviere  de  Syrie,  29  a. 
Yimen,  one  desr^onsde  l*Arable;  parallde 

de  sa  habitants  avec  les  Tares,  199  b. 
Yixidy  ills  et  saccesseur  da  kbalife  Moawiah, 

117  b,  118  b,  119  a,  ^20  a;  son  ^l^vation  au 


khalifat,  12i  a -123  a;  il  «t  le  premier  Sac- 
cesseur da  kbalifat  par  b«r^t6, 134  a*i37  a. 

Yizidt  guerrier  arabe,  69  b,  77  b,  83  a,  89  a,  b. 

Yezid  III,  cousin  de  VTalid  IT,  et  son  oomp^ti- 
tear,  I6i  bi62  b. 

Youkmna,  gouveroeur  d*A1ep,  78  a  -81  a,  82  b, 
88  b,  84  a,  86  b,  86  a,  88b,  89  a. 

YouMouf.  Voy.  Saladin, 


Zafd,  affranchi  de  Mahomet,  62  b. 

Zanfiiet  (  Chronique  de  Comiliua  },  cit^  866  a. 

Zem-zem,  pults  sacre  k  la  Mekke ,  combi^  de 
cadavres  par  les  Kharmathes,  196  b. 

Zenghi  ( £road-Eddin ),  4mir  de  Bassorah,  309b; 
menace  la  domination  franqae,  SIO  a ;  prend 
fidesse,  3iob,  311  a.  Voy.  auMi  316  b. 

Zerrad  ( le  faiseur  de  cuirasses ),  livre  Aotiocbe 
aax  croisM,  274  a. 

Zimiscis,  lieutenant  de  Nlc^phore  Phocas,  lui 
sacc^de  dans  le  commandement  de  Tarmi^, 
202  b;  ses  exploits,  303  a;  11  excite  la  Jalousie 
de  If  io^phore,  203  b;  est  disgraci^  par  lui, 
204  a;  s'en  venge  par  an  assasslnat,  et  Spouse 
Tbfopbano,  qa*il  fait  ensuite  enfprmer  dans 
an  convent,  204  a,  b;  entrepreod  une  secoode 
expMiUon  en  Syrie,  204  b;  sa  Jettre  k  Alchod 
Cbahin ,  rot  de  la  Grande- Arm^nle,  dans  la- 
quelle  il  lui  raconte  ses  exploits,  204  b-  207  b; 
caract^re  de  ses  expMiUons,  907  b- 209  b; 
11  est  empoisonn^  par  un  eunaque,  308  a; 
sa  conduite  k  la  prise  d*Alep. 

Zobair,  pr^tendant  k  la  succession  d*Olliman, 
101  a,  b. 

Zo^f  impera  trice,  ni^  de  Basile  II;  ses  debau- 
ches, ses  amants,  236  a;  elle  spouse  Con.stan-  ^ 
tin  Monomaque,  236  b. 

Zjonaras,  bistorien  grec  du  douzitMne  sitele, 
cite  49  a,  202  a,  204  b,  209  a,  218  i). 


••••*«•»«•••*«••••«•••••£••••«•«••«»»»•*»**••••••••  ••»»»«**«*»»««»*f 


TABLE  DES  MATlfeRES. 


IntrcxlucliOD. : i 

Descriplion  de  la  Syrie ( 

Divisioos  actuellM  de  la  Syrie.  •  .- is 

Pachalik  d'Alep *i 

PacbalikdeTripoU ' n 

Paehalik  d'Acro M 

Paclialik  de  Damas 4 

Conqu^tet  de  nslaoi .- M 

£tot  de  la  Syrie  en  622 : M 

H^raclias  et  Mahomet M 

Premieres  hostility  entre  les  Arabea  et  lea  Romaiiu 9 

Succte  rapides  des  Aiabea ^ 

Sl^  de  Damas » 

Progrte  de  plus  en  plus  rapides  des  Arabes ^ 

Bataille  dTarmouk. ^ 

Omar  h  J^salem ^ 

Le  ch&teau  d'Alep ^ 

Combats  dans  le  Liban 1^ 

Les  Remains  cliass^de  Syrie ^ 

La  Syrie  sons  les  Ommiades.  . * 

Caract^  des  premieres  oonqu^tes  arabes. ^ 

Cemmencemenls  de  Moawiab * 

Mort  d'H^racUus ; * 

Premises  expeditions  maritimes  des  Arabes .* ^ 

Goerres  civUes  entre  les  Arabes. ^ 

Exp^tion  contre  Constantinople ^ 

sage  de.  Constantinople "^ 

Origtne  et  progrte  des  Maroniles • '^ 

LeT^dnsi^de  Constantinople • ^^ 

Palz  entre  fislam  et  Tempire  Byzantin '^ 

JftKraUon  d*y&id  au  khalifat "' 

Mort  de  Moa?iah ^ 

Y^tid ,  premier  successeor  do  khalifat  par  hMAM ; ^^ 

Situation  de  la  Syrie  ai.  commencement  de  la  dynastie  des  Ommiadea. ^ 

Accroissement  de  la  puissance  morale  des  kbalifes  de  Damas. ^' 

NoQTelle  d^faite  des  Oreca. • ^ 

8S4 


S8  (•HNHaaon  SIHAS)  •uostwatI  •sz 

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•  •  I 


TABLE  SSS  1UTIKRS8. 

Pages. 

.   dm  l*Xurope  avant  la  praaiire  croldada 233. 

;  (to  l^Oriant  au  onsiiiw  ai4cle 235 

v#  d*Ermlta 236 

(ilea  de  Plalaanee  et  de  Clermont   240 

inleaent  de  1' Europe • •••••••••  243 

«*e  de  Pierre  d*Ermite 244 

iroiaade  du  eriae ••••  247 

lion  dea  chroniqueura  sur  lea  preaiere  croiaia...*  249 

reaant  dea  ara^ea  f4odalea • 250 

lage  rendu  par  lea  all lie  fiodaux  A  Alexia Coanine*  254 

oroiaAa  f4odaux  en  Aaie  Mineure   257 

re  de  NicAe   ibid. 

lille  de  SorylA 260 

rf rancea  dea  croiaAs  en  Aaie  Uineure   •  •  •  • 261 

lorable  conflit  entre  TanerAde  et  Baudouln   263 

irtion  de  Baudouin • • 264 

croiaAa  devant  Antioche  267 

kre  et  faaine  dana  le  eaap  chtAtiea 269 

taaada  du  khalifa  d*Egypte 271 

le  d* Antioche  par  lea  croiaAa 272 

priae  d*Antioche   274 

LTrance  dea  croiaAa  277 

tardea,  Apidiaie,   meaaagea  en  Europe   ••• 278 

luite  cruelle  et  dAplorable  dea  croiaAa 260 

LvAe  dea  croiaAa  devant  JAruaalea • 264 

;e  de  J&ruaalea 266 

le  de  JAruaalea ••  266 

tion  de  l*ialaa 292 

Uion  de  Godefroy  de  Bouillon  coaae  roi  de  <^Ai^fa*  293 

rpation  du  patriarcat 296 

lille  dUacalon •••••  297 

le  de  Godefroy • 299 

t  de  Godefroy 301 

le  de  Baudouin  d*Edeaaa  ••••••• • •ibid. 

le  de  Baudouin  du  Bourg  et  de  Foulquea  d^AnJou  •••  303 

idence  de  la  doaination  franque  en  Orient 306 

hoapitaliers  et  lee  teapliera • 307 

Aeaent  de  Baudouin  III • ••••  306 

)nde  croiaade   ••• 312 

la  VIII  et  Conrad  III  A  JAruaalea 315 

r-lddin 316 

(r&B  de  l*ialaa  contra  la  croix 317 

)lutiona  en  Egypta  319 

ih-Eddin 321, 


L 


TABLE  DBS  lUTIERES  367 

Pages. 

d^nce  du  roj^aume  da  JArusalam  ••• • 324 

•tropha  da  •^Aruaalaa  •••• 326 

slAma  croisada   328 

a   d*Acra  (PtolAmaXs)   ••• 330 

Ition  da  Saint-Jaan  d*Acra 334 

a   antra  Richard  at  Saladin 336 

dci  Saladin  336 

alias  souffrancas  da  la  ^rla  ••« • 341 

&ma  croisada   •••••#•••••••••• •••  343 

Tatars-Mogols  at  kaa  Kharianiana ••••315 

t  Iioula   ••••• 346 

ruction  da  l*amplra  chr4tlan  an  Palaatlna 350 

Itats  das  Croisadaa  351 

Oasuinlla 354 

arnaaant  das  pachas  ••••••••• • ••••  357 

du  Llban  an  1642 ^ 360 

luaion  ••• • • 363 


asr 


PLACEHBNT  SES  GRAVURS8 


▼oluB«  a  d^ux  paginations,  l*una  pour  la  Syria  An- 
•nna,  l^autra  pour  la  Syria  Modarna:  quoiqua  das  daux  a 
rias  da  planchas  portant  an  tata,las  unaa  Syria  An- 
inna.laa  autras  Syria  Modarna, allaa  dsTront  atra 
tarealAaa  au  taxta  ainsi  qua  la  porta  1* indication 
Lvanta i 

Taxta  da  la  8YRIS  ANCIKNNI. 
La  paga  '  <  A  1 a  paga 

^raapla  da  Jupitar  A  Baal- 


l.La  carta  da  la  Syria 

ancianna. 
S.Vua  dd  la  chaina  du 

Lib^  pr4s  da  BayroiAh 
I.Mdaillas  das  villaa, 

pl«8. 
e.  Sculpture  A  Bayrouth, 

}.|^daillaa  daa  roia,pl. 

r.cinotapha  da  CaXda  CA- 

aar  pris  da  Hana  EaiAsa, 

pl.22« 
l*Antiocha,pl«l(8yria 

modarna). 
l.Rulnas  ditaa  da  la 

Porta  da  far  A  An- 

tiocha,  pi* 21. 


bak.piaa. 

jPorta  du  Tampla  da  Jupitar 

A  Baalbak,  pl.li. 
,^^iPlan  du  Tanpla  da  Jupitav 
110/A  Baalbak.  Dl.  14. 

Plan  at  lUVation  du  Taa- 

pla  circulaira  A  Baalbak, 
fBl.17. 

Coupa  tranavaraala  du 

Tampla  da  Jupitar  i. 

Baalbakt  pi-  IS. 

Ruinaa  Afmn  Tampla  k 

^'iaaama,  pkae. 

119. Pont  prAs  la  couvant 
St.-Antoina,  pi*   24. 


da 


Taxta  da  la  SYBIE  liOSSBNB. 
A  (la  paga 


la  paga 

..Vue  g4n4rala  da  la  Uoa- 

QuAa  d*Rabron,pl.l2. 
).Fort  A  lantraa  du  port 

da  Bayrouth, pi .20. 
..Entr4a  du  port  da  Bay- 

.  routh,Dl.21. 
S.L'una  aas  portas  da 


Ian  g4n4ral  du  Tampla  du 
lolail  A,Baalbak(Qyria 
iHCianna),   pi  .10. 
ampla  circulaira  A^Baal- 
bak( Syria  ancianna) .pi •16. 
46. Jaffa,   pl.4. 

Bayrouth,  pi.  19.  ^J-"^"  *J  ^^^^^  fl;i^- 

I.Tombaaux  A  Tartoua,Tor-  59. Porta  A  Oamaa,   pi. 23. 
toaalSyria  ancianna )«       66. Couvant  daa  Darvichaa  A 

8ath*drala  da  Tortoaa,  gce-ErSlllia^ii^iura  A  An- 
i.tripoii,  pi.  S.  tiocha(8yria  ancianna), 

t.Las  cAtoa  du  Liban(Sy-  pi -20. 

ria  ancianna), pi. 4.    282. Tortoaa  (Tartoua),pl.a- 
.Rochars  aculpt*s  A  Bay-327.Tyr,  pl..3. 

routh(^ria  ancianna),   SSB.Tombaaux  A  Oamaa, pi. 24. 


pl.6. 
•  Pont  oris  da  Bayrouth, 

talaia  da  lUmir  A  Bat- 
adin  ou  I)pt4din,pl.l4. 
dam,   pi.   is. 


Chapyalla  da  la  Nativl- 
t4  a  Bathliam,pl.7. 

Egliaa  A  BatJ14am,   pl.6, 

idam.   pi .9. 


-b 


lS.Vu«  •xt4rieure  d«  la 
Porte  d«  M«dl08  k 
intioch«(^rle  an- 
cl«on«)t  pi* 19. 
/Vu«  g4nArala  das  Ru- 
Ulinas  da  Baalbak( Syria 
/anciaima)tpl«9« 
ATaspla  du  Solell  k 
IBaalbakCSyria  an- 
Vplanna)*  pi*  11 


353«Chataau  pria  da 
Tripoli,  pl.l6. 

350.Cloitra  da  Saint- 
Jaan-d*Aera,pl«ll. 

362. Vua  int4riaura  da 
fortifications  k 
Bayrouth,  pl.22:* 

359.Saint-JaanAd*Aera,pl. 
6. 


U   das  Souaoriptaurs  qui  ont  racu  avac  la  livraiaoa 
no. 1491a  la  granda  planeha  raprAaantantlaa  ruinaa 
da  Palmyra  davront  la  conaarvar,pour  la  Joindra 
au  eoluaa  naintanant  sous  praaaa.  da  la  ChaldAa, 
Babylonia •PhAniclia,  Palfl^yrinai  atc« 


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