M A G A Z I N
ENCYCLOPEDIQUE ,
o u
JOURNAL DES SGIENCES^..^^
DES LETTRES et DES ARTs/ ■■
R E D I G i: V;,,
_, N^''.'L HAS
Par Mil LIN, Noel et Wai!.e:n-s.
II n'y a picsque plus d'ouvragcs periodiques qui
scrverit de depot aux inventions nouvelles et qui
letraceut i'histoire de I'esprit humain ; ceux qui
OTii: cours stmblent , pour la plupart , evitcr avcc
'rttitctation tout ce qui peut aliraentcr Ic gout dc s
sciences ct rtieme de la morale. Seroit-il done indi-
gnc de la Convention dc s'occuper a reorganiser
cctte branchc de rinstrnctioft naiionale ?
Gr^GOIRe , Rapport sur Ics encouregemens , recompenses et
pensions a accdrdcr aux Savans , p;:ge 16.
Vj e Journal , auqnel !a plupart des liommes qui ont
uii nom distingue, une r6pnlation juslement acquise
dans quelque pailie A^& arls ou de?i sciences^ tels que
les citojens Bitaube , Ciienier ,' Daubexton ,
DrLILLE 5 DeSFONTAINES , DoLOnilEU 5 FOXTANES 5
PoupcROY , Hauy , Heruian , Lacepede , La-
grange , L.AHARPE ,LaL^-DE^ LaIUARk', tANGLES ,
Laplace, Lesrux , Leroy^ l'Heritier , Men-
telle,0berlin,Sicard5Suard, V()LN£y,etc. etc.
coritributront , contiendra I'exlrait des piiucipaujc
•nvrages nati'onnnx ; on s'attarliera siir-tont h en
donner iiiie analyse exacle , et a la faire paroitre le
phis proniplenient possible apres leiir publicalioii. On
y doiiiiera iiiie notice des meilleurs ^'crils imprimis
chez i'elianger.
On y ins^rera les nie moires les y,\us intc^ressans
snr loutes les parties des artset des t^cicnces;on choi-
sira s jr-tout ccux qui seront propres a en acc«^lerer
les progr^s.
Ony publiera les d(^coiiverfesin<;('nieu?es, les inven-
tions utiles dans lous les genres. On y rendra conipte
des e>:p^Tiences nouvelles, de la formation et de Ton-
verture des Museums. On y donnera \m precis de ce
que les seances des societes litteraires auront ofTert de
plus niteressant , une description de ce que les dc'-pors
d'objels d'arls et des sciences renferment de plus
curieux.
On y trouveva des notices snr la vie et les ouvrages
^es Savans , des Litterateurs et des Artistes distiiigurs
dont on auia a regretfer la perte , enfm ies nouvelles
iitteraires de toute espece.
Ce Journal sera compose desix volumes in-fi'^. par
an , de 600 pages cliacun , et au moins de24 gi'^vures
en regard des articles qui en exigeront. II paroitra
toas les quinze join-s un numero de 9 i'euilles.
Le prix de Tabonnem-ent est k raison dc lo .^r.
pour trois mois , rendu franc de port par toute la
K^publique,
On s'adrosse , pour I'abonnement, au BureaT-
MagaziuEncyclopedique, rue Honore, ]N'-\ 94 ; ei pour
les objcls relalifs a la redaction , aux l\edacleurs,ru@
de Provence , N^. 48.
Il_ faut aflrancijir les lettres et charger eelles aui
^nlienuent des asv'ignalii, '*
MAGAZIN
EN CYCLOP ^DIQUE.
TOME SECOND.
^.iwOO'
M A G A Z I N
ENGYGLOPEDIQUE,
o u
JOURNAL DES SCIENCES,
DES LETTRES et DES ARTS,
R E D I G E
Par MiLLiN^ Noel et Warens.
TOME SECOND.
A PARIS,
De I'lmpcimerie du Magazin Encycilopedique ^
rue Hoiiorc , r.' 9^.
L'an troisieme ( 1796 ).
M A G A Z IN
ENCYCLOPEDIQUE
IIISTOIRE NATURELLE.
SysTeme de la Nature , de Charles de Linne ^
classe premiere du regne animal , contenant Us
quadrupedcs vivipares et les cetacees , traduction
frangaise par M. Vanderstegen de Putte ,
ancien echevin de la ville de BruKelles , d'apres Id
ji3." edition latine , mise au jour , lugmentee et
corrigee par Gmelin. Se vend a Bmxelles , chez
Lemaire , imprimeur-libraire , rue de Tlmpera-
trice , 1793.
Cj15 grand ouvrage , intitule Systema Natures , qui
est devenu le guide de tous les naturalistes qui
veulent s'entendre et se concevoir r6ciproquement ,
n*a pas tonjours eu l'6tendue qu'il a aquise depuis 5
il ne consistoit d'abord qu'en douze pages in-folio,
contenant des tables tres-concises : ce fut sous cetto
forme qu*il panit , pour la premiere fois , en lySS.'
Linneus n'avoit que vingt-huit ans quand il jeta la
base de ce grand Edifice qu'il a elevc pour sa gloira
et pour le progr^s des sciences naturelles.
Depuis cette ^poque, jusques en lySS, il j a eu
»euf ^itioiis du SjsUma Natures 5 mais la neu-
A3
'6 Histoire naturdU.
vieme, piiblice a Lcide , ne formoit encore qii'un petit
volume in-8." de 22,6 pages 5 ce n'eloil qu'unejeim-
priession-de la sixienie edition de 1748. Le plan do
rauleur ne Int complet qu'A l^poque de la nouvclle
edition , en 1758. La premiere partie de cette edition,
qui contenoit le regne animal , formoit a elle seule
im volume de 821 pages, et la meme partie, da^is
la douzieme edition , a t'tc port^e a 1827 pages. On
dul regarder ceitedouzieme edition, publiee a Stock-
holm en 1766 et 1767 , comme ajant ete rendiie par
I'auteur aussi parfaite qu'il lul etoit possible. II n'y a
decrit que les espeoes qu'il a\oit vues ,excepte dans
quelqiics circonstances , et ses erreurs sont dans ee
dernier cas excusables, puisque ce qu'il a avanc6 n'est
fondi que sur I'autoritt* d'autrui (i).
Cctte dditionaeter(^imprim^e a Vienne,sans aucune
addition , et cette relmpression, quoiquc tres-infi^rieure
a i'edilion criginale ,pour la correction tjpographi-
que , est devenue presqn'aussi rare et aussi cheie.
J. F. Gmelin a reforme et augmente cette trei-
iieiiie Edition , on plutot il en a donn6 une quator-
zieme , que I'on, peut meme regarder comme une
quinzienie, en comptaiit la reimpression de Vienne
pour la quatorzieme. La premiere parlie a paru en
1788, et le dernier volume va bienlot etre acbevc.
Mais cctte edition, , dont I'objet est de pre-
senter dans I'ordre sjstematique 4labli par Linneus,
( I ) Voye? RcTue gcu^rale des t'erits dc Ctiarles Linneiis ,
ouvrag3 Iraduit de I'anglais , de Richard Pultciiey , avcc un
voluni>j d'additious par A. L. Miiliu. ^Paris j Buisson , 1789.
3 vol. t3.*i
Systeme de la nature. f
Vetat actuel de nos connoissances sur I'HistbIre na-
tiuelle, esi bien loin de remplir le but que I'auteur
s'eHoit propose en ajoutant aux genres et aux especes-
dt'^ja determines par Linncus, tout ce qu'il a regarde
comme nouveau dans les livres qu'il a consultes.
Cette addition n'a pas ete faite avec tout le discerne-
ment et avec la ci'ilique qui auroient ete convenables*.
Aussi ce grand ouvrage est-il rempli d'erreurs gros-
sieres ; il presente une infinite de doubles emplois >
souvent meme de triples.
Le citoj'en Lamarck en a indiqu^ un grand nombre
pour la botanique seulement , dans les actes de la
societe d'Histoire naturelle ; et on pourroit trouver^
en suivant la meme methode , un nombre conside-
rable de pareilles erreurs dans toutes les parties de la
zoologie.
Cette edilion de J. F. Gmelin est cependanfi
eelle que M. Vanderstegen a prise aveuglement pour
guide , sans aucun changement , sans relever aucune
erreur , sansy ajouter aucuns details : i4 est vrai que
la partie des mammiferes ^ par laquelle il a com-
mence, est la moins faulive. Cependant ce travail
^toit tr^s-susceplible de perfectiomiement,
Le ciloj^en Poiret avoit propos6 vers 1787 une
souscriplion pour la traduction des oeuvres de Lin-
ncus ; sa philosopliie botanique a ete tres-bien tra-
duiteen espagnol , et moins beureusement en francaia
par un ciloyen de Rouen. Le Species pLantarum a
ete traduit en anglais , et on a public I'annee derniere
une traduction du Systema dans cette langue ; il ne
paroit pas que I'auteur ait tcute d'ameliorer I'editioix
de Gmelin. A 4
S" Hisioiri naiurelU.
liS tracluction cle M. Vanderstegen n'est accoin?
pagn^e d'aucun pr^liminaire. II nous semble cepen-
dant qu'il aurait dii rendre compte des principes
d'apres lesquels il a redig^ sa traduction 5 il nous
semble qu*il auroit du au moins traduire la dedicace
singulierc de Linneus au comte de Tessin , qui fait
connoitre Toriginalit^ de son esprit. La liste de$
^itions du Sysiema naturce y et la nomenclature
des ouvrages dans lesquels Linneus avoit puis6 les
additions faites a sa douzieme edition , les principe*
d'Histoire naturelle renferm^s dans quelques lignes
qui terminent celte nomenclature , la preface d»-
Linneus et celle de Gnielin : M. Vanderstegen ^
omis tous ces articles , que nous regardons cependant
corajne essentiels , et il commence a la description de
VEmpire de La nature. II omet encore la citaliori
des differens passages de PEcriture et des classiqu€«
latins^ que Linneus a fondus dans son discours.
II passe de-la a la description des mammif^res ;
nous sommes faches qu'il ait substitu^ h ce mot le
nom de quadrupede , contre lequel Linneus s'est
^lev6, et qui est entierement coutraire aux principes
qu'il a ^tablis, puisque les animaux compris dans
cefte classe ont tous des mamelles , et que tous n'ont
pas quatre pieds.
La traduction des noms des ordres ne nous paroit
pas tonjours tres-exacte. Gertainement le mot Jercs
ne peut etre rendu par bites fauves / ce nom no
peut convenir au herisson ^ a la taupe ^ a la be-
Iette_, a la sarigue_, etc., qui sont de cet ordre. Le
Biot pecora ne peut pas iion plus se traduire p<H?
Systcme de la nature. g
bjsstlaux : le cerf , le muse , la gazelle , qui sont
dans cct ordre , ne sont certainement pas des bestiaux'.
Nous dirons la meme chose du nom d^ordre beUucE ,
que M. Vanderstegen rend Y)aT grands quadrapddes:
le coclion n'est pas u;» grand quadrupede , et cepen-
dant il est compris dans cet ordre ; le crocodile est
un grand quadrupede , et cependant il n'appartient
pas H la classe des mamraiferes , puisqu'il est
ovipare.
Ijes noms des genres ne sont pas toujours plus
heureux que ceux des ordres.
Tout cela prouve la difficulte , Je dirai meine I'im-
possibilite de traduire Linneus en francais , eu vou-
lant s'attacher strictement aux mots. Personne n'aime
plus que moi le sjsteme Linneus , personne n'a plus
cherche a faire prevaloir la doctrine de ce grand
naturaliste ; ma's il ne faut pas toujours Jurer d''a'
prts La parole da mattre y il ne faut pas recevoir
jusques a ses erreurs. II faut adopter ses principes ^
sa maniere de trailer I'ilistoire naturelle , raais noii
pas suivre aveuglement tout ce qu'il a ^crit sur cette
matifere. Ce seroit se refuser d'avancer avec la
science et ne pas vouloir suivre ses progres.
II est vrai que les noms iiuposes par Linneus
a ses ordres des m:immif>res sont tres-ditliciles a
traduire, parce qu'ils n'expiiinent pas,comme dans
les autres, les caracteres des animaux que ces oi'dres
renferment.
II est certain que le nom primates convient bien
a riiomme, qu'on pent regarder comme le premier
des cuiimauxj 314 singe encore qui approche de sa
ro Histo'ire naturelle.
forme ; mais il cesse d'etre admissible quand on I'ap-
pliqiie an vespertilion, qiioique ce mammifere ait
des daviciiles ot des mamelles pectorales ; on ne se
lappelle plus que le nom de cet Ordre indique seu-
lement les mammileres qui out quatre iiicisiv^es pa-
ralleles ; on vcut toujours qu'il designe les premiers
et lesplus oxcellens, etoniie peuts*empecher de trou-
ver celte deiiominalion vicieuse.
Je diiai la meme chose de hruta ; je sais bien
que ce nom sigriifie seulement, dans I'acception que
Linneiis lui doiiue, les mamniifercs de-pourvus d'in-
cisives ; niais comme il a une acception morale tres-
connue, c'est celle a laquelle on s'arrete. Dans cette
acceplion ce nom peut convenir an bradj^pe , au
invnne copliage , a cause de leur insensibilit6 , raais
il ne sauroil etre applique avec justice a Telephant,
qui de tous les mainmiferes est celui qui montre le
plus d'intelligence, et au lamantin qui se distingue
par sasociabilile et par son altachement naturel pour
I'iiomme.
Le nom J erce J feroces, carnassiers , est bien acquis
aux grands maramiferes de cet ordre , le lion , le
t;gre etc., mais il ne convient pas a la belette, au
phoque, encore moins a I'innoceut didelplie et meme
au rat ct a la taupe , qui n'ont qu'une fureur im-
puissante.
Les ruminans rc'duits a I'etat domestique sont de
vrais/7eco/'ay mais ce nom paroit ridicule, applique
au crrf , au dain et aux autres betes fauves,
BeUuce souffre aussila meme critique : si ce nom
indique, les mammiferes d'une taille d^mesuree ,
coinmeut peut-il couveuir au pore ?
Sy Sterne de la nature. jy
Tons ces noms , dajis I'acceplio.i que leiir a donnt^e
Xmneus, n'indiquent que I'oidre oii soiit ran^n's \cs
niammiferes dont les dents affeclent la mcwe dis-
position ', mais coni.ne, au lieu d'exprimer cette forme,
Jls sont tires de la maniere d'etre des mamniifercs ,
et que C( ux qui ont des rapports pour les dents, out
souvent des mauns <res-dissemb!ables, il en resulte
que les noms convlennent au plus grand nombra
des especes que confiennent ces ordres, mais que
pour les autresleur application est evidemment fau^se.
Ces noms ont encore Tinconvenient de ne pouvoir
etre traduifsdans aucune langue.
M. Vanderstegen ne donne le nom trivial Linn^ea
qu'en latin , el il ne cberclie point a le traduire ; ily
joint seulement le nom franr;ais de Buffon. Cepen-
dant comme les noms de BufTon n'ont pas toujours
ele imposes d'apres les regies de la critique admise
en Histoire nalurelle, il me semble que I'auteur
auroit du traduire ces noms, ce qui se seroit born6
le plus souvent a leur dom.er une terminaison fran-
^aise ,et ne citer ceux de Buflon que comme sjno-
iiimes.
L'ouvrage est termine par une table des noms
francais : une des noms latins eut ete egalement
necessaire.
Nous sommes d'autant plus fondes a regretter que
I'auteur se soit borne a traduire I'edition donnee
par Gmelin sans corrige:- ses erreurs , que quelques
notes courtes repandues dans l'ouvrage, et qui lui
sont propres, prouvent qu'it a des connoissances ve-
ntables en Histoire naturelle, et que ce travail n'au-
loit pas ete au-dessus dc ses forces.
u Histoire nalurclle.
Nous riferons la traduction d'un des genres les
moins nombreux, pour donner une idee du travail
de I'auteur.
GENRE r I L
O D O B E N E.
Point de dents Incisive s ( dans f adult e ).
Dents canines superieures soiilaires.
Denis moLaires consisiant de chaquecoteen, urb
OS ride.
Corps oblong.
Ijhvres geniinees.
Pleds postdrieurs confondus et reunls en^ nar-
geoires.
I. Le MORSE. Tricheckus Rosmarus.
Dents canines sup^rieiires saillantes et ^loign^es.
Houtt. nat. 2. p. 7. t. II. f. I. Scbreb. Saeugth. 2.
p. 262. t. 79. Svst. nat. ed. 10. p. 38. Briss. quad. 48.
Jonst. pise. t. 44. Worm, mus.289. Olear. Mus. 38.
t. 23. f. 3. Bonau. mus. 269. f. 27. Gesn. aquat. 211.
Raj. quad. 191. Ellis hudson,t. 6. f.3. Martens Spits-
berg 78. t. I. f. B. Buff. List. nat. XIII. p. 358.
pi. 54.
II liabite sous et pres le pole arctique , principale-
ment a I'embouchure des fleuves. II mugit comma
le boeuf, et ronfle en dormant. Sa longueur est
environ de dix-liuit pieds ; il se defend vigoureuse-
meni contre ses ennemis j il se r^unit en troupe.
Pcux petites dexits incisives a la machoiresup^rieurp,
Systeme de fa nature. i3
torsque ranlmal est jeune. Dants c.inines longues ,
tres-eloicmees I'une de Tautre , acuminees, finement
striees , pesant quelquefois (rente livres , et formant
un ivoire a fibres entrecrolsces , qui ne jaunit point
aisenienl , dont cependant le noyau tire sur le brun.
Quatre dents molaires menues , aigues , a chaque
cote des raachoires , creusees a eote de leur sommet
d'un enfoncement plane. Moustaches transparentes
dela grosseur d'un tujau de paille. Narines en forme
de croissant. Cou epais. Cinq doigU aux piods, a
ongles courts. Les Russes font de sa peau des traits
de chariots , en quoi les Franrais viennent de les
imiter. On estime sa graisse. Son squelette jete sur
le sable , const itue en grande par tie ce qu'on croil
€tre les ossemens du mammout (i).
II. Le DUGON. Tdchechus Dugong.
Dents canines superieures saillantes , rapproche«s.
Buff. hist. nat. t. XIII. p. 374. pi. 74- ^enn. syn.
p. 338. n. 264.
II habite la mer depuis le Cap de Bonne-Esp^rance
jusqu'aux iles Philippines ; il est assez semblable an
'•Morse, mais il a la tete plus acuminee et plusetrolte,
les narines plus amples et posees plus haul : au lieu
de dents incisives il a un plan inclin^ , pressv.^ par les
dents canines ; celles-ci inanquent a la machoire infe-
rieure , elles sont rapproohees et Archies en dehors
dans la machoire sup6rieure : dents molaires larges ,
(i) M. d'Aubenton a prouv^ que les defenses et les 03
prodlgicux qu'on attribuoit au Biammout, appartienneot
C pour U plupart ) k r^l^phajit.
I^ Hisio'ire nafureltg.
distantcs , ail nombrc de qiiatre de cliaque c6t^ a la
machoire d'en liaut, an nombre de trols a la machoire
iuforieure. Deux matiielles pectoralcs. La chair du
Diigou a le gout de la viande du bauii'.
HI. Le LAMANTIN. Tdcheclius matiatus.
Point de dents canines.
Art. gen. 79. sjn. 107. Rondel, pise. 490. Gesn. 2i3.
Hern. mex. 32,3. Priss. quad. 49. Cliis. exot. i33*
Aklr. pise. 728. Raj. quad. 198. Buffon hist. nat. XIII.
p. 277. pi. 57.
»^. a. Le La MAN TIN austral. Triclieclius nianatus
au straits.
Pileux ; piedsa quatre doigts onguicules.
II hahite les nicrs d'Afrique et d'Amcrique 5
particidierement a I'embouchure des fleuves , qu'il
remonte tres-souveut , sY4oignant peu du rivage. Sa
longueur est de huit h dixpieds , sa largeur de six
^ sf"))t pieds , son poids de cinq a huit cents livres. Peaii
d'lm ix)ir-cendrd. Dents molaires au nombre de neuf
de chaque cot^ des machoires , carrees , couvertes
d'nne ecorce verniss6e. Vertebres au nombre de
cinquante.
v.h. Le Lamantin Boreal. Tiichechus inanatujs
Bo I cat is.
Sans poil ; pieds dcpourvus dc doigts et d'ongles.
II habite le rivage occidental de I'Amerique et
des lies siluees enlre TAmerique et le Kamtschatka.
II reuiontc aussi tios-frequemipent rembouclinre des
fleuves. XI a vingt-lrois pieds de long et pese hui^
Systime dela nnlure. i5
mille livres. Sa peau est brune lorscju'elle est fraiclie ;
dessdchde, elle est noire. Un os rid6 de cliaque c6t6
dcs machoires au lieu de dents inolaires. Vertebies
au nombre de soixante.
Jjes sauvages de PAnieiiq«e lapprivoisent sou-
vent (i);il aime la miisique ; c'est le Dauph'in des
ancicns, II est tres-vorace et mange sans cesse. Le
male, la femelle et leurs ^etits vivent en 8ociote. lis
sont monogames et s'accoupleiit au prinlems , la
femelle fiijant d'abord le male en faisant dans Teau
divers tournoiemens ; elle se renverse sur le dos pen-
dant le coit. Lorsque I'aninial pait I'berbe des baa
fonds , et qu'ainsi la partie supc'rieure de son corps
paroit a ddcouvert^ les oiseaux s'y abattent pour y
chercher de la vcrnxine. II mugit comme le bceuf.
Sa vue est foible, mais il a I'ouVe d'autaiit plus aigue.
Pieds ant^rieurs palmes presque comme ceux des^
tortucs de mer; au lieu de pieds postei*ieurs se trouva
une queue horizontale. Point d'oreiiles externes.
(i)Gomara, Hist. gen. cap. 3T,raconte qu'on en avoit eleVe
etnourriun jeune clans unlaca Saint-Domingue,pendantvingl-
six ans, qu'il etoit si doux et si prive qu'il prenoit doucement
la nourrilure qu'on lui presentoit , qu'il entendoit son nom ,
et que qnand on I'appeloit , il sortoit de I'eau et se Irainoit ea
lampant jusqn'a la maison pour y recevoir sa nourriture ; qu'il
sembloit se plaire k entendre la voix humaine et le chant des
enfans , qu'il n'en avoit nuUe peur , qu'il les laissoil asseoir
sur son dos et qu'il les passoit d'un bord du lac a I'autre sans
$e plonger dans I'eau et sans lour faire aucun nial. Ce fait ,
ajoute M. deBuffon, ne peutelre vrai dans toutes scs circons-
tances , car le Lamantin ne peut absolumeat se trainer sur la
terr«.
i6 Hislcire naturdle.
Narlnes clistantes , r^giilieres. L^vre supc^rleure hdns-
sie lie moiistaclies roicles, courb^es. Deux mamelles
jieclorales. V. Dccham et SteUer. nou, comm.
Petrop. V. 2. p. 2.g^ et sq. Chair tres-savoureuse.
Son espece est voisiiie du genre des phoques et de
Pordre dcs c^tacees.Ce que les fictions ingenieuses des s'-
renes, si sou vent chanties paries poetes, peuvent avoir
de veritable , naroit devoir apparteiiir au Lamantin.
Tons lesOdobenes , habitans de la mer , vivent de
varec lis , de coralines, de testacees , et point de chair.
Comnie M. Vanderstegen ne s'est propose que de
traduirv3 , nous aurions desire qu'il eut , dans quel-
ques occasions , rendu d*une mauic're plus exacte
les lermes employes par Linneus. Ses ouvrages prd-
senlent j il est vrai , sous ce point de vue de grandes
diUlculles 5 et il faut avouer qu'il les a le plus sou-
vent vaincues : il sera infiniment utile a ceux qui,
ii'ayant point la connoissance et Thaliitude de la langue
Jatine , ne peuvent faire de grands progr^s en
Histoire naturelle _, parce qii'ils ignorent la th^orie
de cette science etablie par le naturaliste SuMois.
Un travail plus utile encore seroit un sjsteine de
ia nature complet, dans lequel on feroit usage des
reformes infroduites par les naturoilistes les plus
justement celebres. II faudroit que la nomencla-
ture franraise fat fixee , corame I'est la nomencla-
ture lali::c , d'apres les principes ^tablis par Lin-
neus dans sa CrUlca Botanica. La society d'His-
toire naturelle avoit entrepris ce beau travail 5 elie
Vendroit de nouveaux services a la science dont
elle a si bien merite, en le terminant.
En
Systcme de la nature, 17
En attendant que notre vopu s'accomplisse , nous
indiquons I'ouvrage de M. Vandeistegen com me
pouvant etre utile dans les ^coles, nous le regar-
dons comme fiiiiaimeut esiimable; son auteur md-
rite notre reconnoissance pour avoir entrepris un
travail aussi p^nible. Nos observations n'ont eu
pour but que le progres d'une science aussi nt^cesr
saire a la cullure de I'esprit et au bouheui de I'iiur
nianilv^\ A. L. M.
L I T H O I, O G I E.
I>ESCRipriONde rEMERAuoE, par le citoyen
DoLOMiBU , inspecteur dts mines et professeuT
d'Histoire naturelle aux Ecoles cmtraUs de Farh ,
d'apres Us princi'^es de sa nouvdle miihodc (i).
J_i'EiVfERAunE est une pierrecomposee, dn troisieme
ordre, du genre des gemmes, dont les parlies cons-
tituantes essentielles sont la sUice pure , VaLuniLae
et la chaux.
(2) L'Emeraude , quand elle est parfaite , quand
(i) Nous avons rendu compte dans notre tome premier
page 35, de la methodemineralogique du citoyen Deodat Dolo-
mieu. Cette monographle de I'Emeraude fera connoitrs la
maniere dont il en^fait I'application pour i^i descrip-
tions. A. L. M.
(2) Je place une espece d'exorde A la tete de toutes mei
descriptions en faveur de ceux qui n'ont pas I'habitude du
langage uiineralogicjue , qui oe connoisseat point la roarahf
Tom. U, '^ B
1$ Lilhoiogie.
elle possede cette belle couleur verte qui lui est par-
ticuli^re , sans lui ctre cssenlielle, tient uii rang tres-
distingiK^^ pariri les pierres precieiises ; et, si elle n'a
ni la durete ni IVclat respl^^ndissant des pierres de dif-
fi^rentes rouleurs , comprises dans I'espece du saphir ,
elle en est d(^doinmag6e par le j?u ravissant de sa
luniiere , par la gaiete de sa teinte , plus qu'aucune
autre agr^able a i'oeil. La vue se rejiose , sedelasse,
se recree dans ce beau vert, auquel on ne peut
comparer que celui dont la nature , dans la saison du
printemps , decore les arltres et les prairies. La lu-
miere qu'clle lance , dit Pline , sernble brillanter
Fair qui I'en-^ ironnj , et teindre par son irradiation
Teau dans laquelle on la plonge. Elle est toujours
belle , toujours eclataiffe , soit qu'elle petille sous le
soleil , soit qu'elle luise dans I'ombre , ou niejme
qu'elle brille dans la nuit k la lumiere desflambeayx,
car ils ne sauroient lui ravir les agr^mens de sa
couleur qui se montre toujours pure. Tels sont les
^loges, sans doute un pen exageres , que donnent a
i'Emeraude tous ceux qui ont voulu la decrire ; mais ,
en lui vojant taut de beautes^ quand elle est dans
sa perfection , que de regrdts n'eprouve-t-on pas de
lystematique de ceUe science ; car ^ lorsqu'ik recherchent
la signification d'un mot qui designe un mineral , ;e ne dois
pas leur faire lire avec ennui et degoiit tous les details d'un©
longue description 5 d'aulant qu'aprejlfibDir mis leur patience
9 urie aussi penible epreuve , je ne pourrois pas encore m»
flatter de leur avoir donn^ une iflee assez juste du mineral
qu'ils veulent sommairement connoilre , pour qu'ilspussent
employer sa denomination dans le sen>s aui ne lui seruit pa«
letalcBiept i^propr«. . ^
Description de VEmerauie. j^
ce que la nature nous la'donne aussi rareinent exe-rapte
des glarur.'s ert des nuages qui la privent , en partie ,
de ses charnjes.
L'Emeraude tieiit aussi un des premiers rangs
parnii les pierres que le luxe e ploie a ia parure.
S Y N O N Y M E S.
En grec , c-^'.a.fa.yScT.
En arabe , z^afnarut.
JEu latin , sniaragdus.
En italien , snieraldo.
En espaj.nol , esmeratdas.
En allemand et en su^dois , stnaragd.
En anglais , enteral,
Smaragdus scyticus , bactrianus ^ cegyptius-
que; Plinii, natur. histor. lib. 87. cap. 5.
Limotilatls ; Plinii , natur. histor. lib. Sy. cap. 10.
Gemma neronlana , ueL domltiana , nonnul^
Lorumj antiquorum.
Borax Lapcdosus , prlsmallcus , peliucidus ,
pyramldibLis truncatls , vlrldis , smaragdus /
Linnei. sjst. natur. III. p. 9.
Smaragdus gemma ; Cronsted , §. 48.
Gemma pelLucidisslma, duritle qulnta^ colors
VLndb^ iti Lgne permanente J smaragdus ; Wal-
lerii , miner, sp. 108.
Gemma smaragdus ; Scopoli , princip. mine-
«al. §. 54. 5.
SUex smaragdus ; Werners , mineraj system.
sp. II.
Emeralds 5 Hills fossils arranged^ pag. 140.
-Ewera/J 3 Kirvans elem of miner, cap. 8. sp. 7.
arv.3. B. '
10 Li hilogU.
Emeraude , pierre gem me , verte de plusieufs
teintes ; Bornn. cafal. Raab, pag. 66.
Emeraude j Vaimont de Bo metre , 2.^ ^dit. esp.
189.
Emeraude du Perou ', Ronid de LLLle , crista!, ir,
pag. 245.
Emeraude du Perou 5 Sage j analyse cliimique 1 1 5
pag. 72.
Emeraude ; Lametherle j manuel de miliar. 5
§. GXIX. 5. (0.
DESCRIPTION METHODIQUE DE L'EMEIIAUDE.
Caracteres exterieurs.
* Aspect exterleur.
CouLeur. Ordinairemeiif vert de pre le plus vif.
Noia. Cette couleur, que le nom d'Emeraude rappelle com-
munement , n'est cependant pas essentielle a cette pierre , il
en est de differentes teintes. Voyez les varietes de premier*
«orte.
Transparence, Transparente , quand elle est par-
faite.
,(i) 11 me seroit tres-facile de donner plus d'etendue a ma
sjnonimie , je pourrois y rassembler les uoms d'un beaucoup
plus grand nombre de min^ralogistes ; mais , sans pretendre
decider entr'eux aucun rang de preeminence, aucun droit
exclusif k la celebrit^^ , je crois devoir borner mes citations
anx ouvrages mineralogiques de diflH^rentes nations , les plus
repandus ; A ceux qu'il est plus ais^ de consulter , quand on
reutetablirl'identite du mineral que jed^cris, avecles especes
semblables , dont il est fail m.:!ntion dans les mineralogies ^
•oit qu'elles y portent les memes denominations , soit qu'elies
y aient ^te designees par d'autres noms. II manque
cependant ici les citations des min(5ralogies espagnoles el
italiennes que je n'ai pas maintenant sous les jeux.
Description df VEvraud'. ti
tlclat. Lcs faces naturelles sout eclalantes.
Forme. Ordiiiairement r^gulicre.
Nota. La crlstalllsalion de rEmt-raude, selon les n'clierclici
et les calculs d'HaA-y , a pour forme primitive le prisma
hexaedre droit , et pour molecule integrante , le prisxuc Uicdr»
i base triangulaire eqiiilaterale et a pans carres.
Surface. Les faces naturelles paroissent lisses.
JSfota. En les examinant avec attention , on apercoit sur
ees faces des petites lames qui leur sont parallMes.
** Disposition des masses.
Les prlsmes d'E'neraude sont commuu6ment iso'^s
enti'eux , et ordinaireraent implanles dans leur
gangue par une de leurs extremiles.
*** jTolume des masses.
Le volume des prismes d'Emeraude arrive jusqu*a
six pouces de longueur el deux pouces de diamelre.
Nota. On a beaucoup exag(?re la grosseur des Emeraudes,
comme nous le disons dans les annotations.
**** Aspect, interieur,
Cassure. Ordiniirement vitreuse.
Conterture. Esseutiellemeiit lamellfuse, les lames
parallelesa la base du prisnie.
Kola. Les lames qui composent I'Emerande ne sont pas
toujours faciles a distinguer , parce que bur tissu est extri*me-
ment serre ^ et quVlles ne delerminent pas le sens dela cassura
accidenlelle , laquelle d'ailleurs devient pleine qnand clle
rencontre leur direction. Mais en clii'a/il cctle pierre selon la
maiiiCire d'llavj , on peut ob;e lir des cassures lisses , les unit,
parallcles a la base , les autres paralliilts aux faces du
prisme.
Grain. Lr.pcrceptible.
B 3
^2 Lithologie.
Figure desjragniens. Indetermin^e , esquilleuse^
***** Toucker,
L'Emeraucle est froide et seclie an toucher.
Caracteres physiques de l'Emeraude.
Tcsanteurspecifique, 277^2, d'apms Brisson.
Biiret6 spdcifique. Eslimee 1200, selon la me-"
thode de Quist 5 i5oo, selon la table de Lamelherie.
Nota. La durete de I'Emeiaude est inferleure a cclle des
_ saphirs , du rubis , de I'hjacinte et de la topase ; elle est
superieure i\ celle de I'aigne-marine , du grenat et du crista!
de roche ; elle raie ces dernieres pierres sans en recevoir
d 'impression. La lime ordinaire ne I'attaque pas ; la lime bicu
acerce I'attaque tr^s-peuet avcc dilScuite. Ellereqoit d'ailleurs
nn poli vif et des plus eclatans.
SoUdite. Elle n'est pas tres-cassante.
Refraction, Double.
'Eiectriclte. Tres-electrique par le frollemcnt , et
non par la cbaleur.
Magnctisine. Aucune action sur I'aiguille ai-
mantle.
Parla coULsLOfi, Ni phospLorescerxe , ni odeur.
Par le choc de fader _, elle dtincele vivement.
CaRACTERES C^IMIQUES DE L'EmeRAUDE.
Decomposition spontanec.
J'lgnore si la longue influence des vicissitudes de
ratmosphere produit quelque alteration sur I'Eme-
raudc.
Essai par le feu.
* Projetee en peudre sur ua fer ckaujfi.
Elle ne donne point de lueur pbosphoriqus.
Description dc tEmtraude. h$
** j^vec Le clialLimeaLL, sans addition.
Fille est fusible.
JVoia. Celle qui est vert? donno un verre gris , compacte et
opaque , espec,; d'email j inais queiquefois I'interieur da
gloLule reste verdatre.
*** All chalunieaic ^ avec des Jondans*
Dans la soude. Elle se r6cluit ea poussiere , se
dissoLit diflicilement et sans effervescence , et elle
produit line masse vitreuse verdatre ou jaunatre.
Nota. C'est toujouvs de I'Emoraude vcrtedont-il esiquestioa
dans cet essai et daiis les suivans.
Dans ie borax. Elle se dissout plus vlte et plus
completercent , et toujours sans enervescence , ct
donne une massa, vitreuse de couleur verdatre.
Dans le pliospliate de soude. Elle est attaquee
ienteaient et sans effervescence , et donne une masse
vitreuse , opaque , de couleur verdatre.
**** A La ckaleur ordinaire da feu des fay ers,
Quelques Eineraudes vertes preniieiit une couleur
lilcue, lorsqu'cUes sont mediocremenf chauffees , et
la conservent tant qu'elles sont dans cette situation ;
mais elles reprennent leur teinte naturelle en vefroi-
dissant. Celles-la sont alors , dit-on , phosphoriques
dans I'obscurile.
Nota. All degve dc ch;ileur dos chaibons enflaninn's qui ne
sont point excites par Tuction des soullets , TEmeraude verte
conserve sa couleur et sa transparence ; c'est ce qui a autorise
M'allerius a definir cette gLunme par les mots : colore viridi
ill i^nc permaneiite , caractc-re qui ne lui convient plus y
quand die a cprouve une clialeur plus considi'rable.
**'** AiiJcLL dcsjournoaux d'essai.
B4
a| Vtholope.
Sous line moufle , rouble par le feu pendant
plus de reux heures , I'Eir.eraude ne perd, ni son
poids, ni sa couleur, ni son poli ; mais elle devieiit
opaque , et ne reprend plus sa Iranspar^nre.
Poussee au feu de fuslcn, elle fond en un verre
blanc opaque ou en un en ail jaiinatve.
J^ota. Au foyer du miroir ardent de Tschirhausen , I'Emc-
raude s'est proraptement fondue , elle y est de venue grise et
opaque , s'est boiirsoufflee , et a forme un Terre bleuatre ,
transparent , assez tendre.
Aveci'air oxi^hne , I'Emerande se fond f^icile-
ment en globules verdatres, remplis de bules.
Nota. Les dim-rentes teinles dn vert , consetvees dans les
Terres en emauxobleaus par la fusion de quelques Emeraudes,
dependent sans doute de I'intensit^ de couleur , et par
consequent de la proportion du principe colorant contenu
dans la pierre quiaet^ soumise a I'essai , nioins abondant
dans celles qui donnent un rerre Llanc.
Essais Of^ec les acides.
Les trols acides n:in6raux n'oni point d'actlon sen-
sible sur I'Emeraude.
Nutc. Trente grains d'Emeraude pulveris(^e , mis en longue
digestion , aid(^e i ar la clialeur , dans un des trois acides nii-
ncraux , perdent a-peu-pri>s quatrs grains de leur poids. Un
tiers dcs parties extraites est un oxide de fer ; le restc
apparlient fl la terre calcaire. Les deux autres terres consti-
taanles ( la silice et I'alumine ) resistant a toutes Taction des
acides, si par une fusion anterieure dans un alkali, elles n ont
pas ^te aUaquees dans leur combinaison intime.
Descrif'tion de rFmerniide. sS
ReSITLTATS de L*ANAtYSE CHI?.:iQUE.
Malibres conslituantes de I'Enieraude verte j
Waprh Berginann J opusc. vol. ri, p. 96.
Terre qnartzeuse 24,00
Terre argileuse 60,00
Terre calcaire 8,00
Fer 6,0D
Perte 2,00
100,00
jyaprhs Achard ^ aiialjse des pierres pr^cieuses.
Terre quaitzense 2r,66
Terre argileuse 60,00
Terre calcaire . 8,33
Fer 5^00
Perte _5?^
100,00
T^ota. La quanlite notable de fer qui se trouve dans TErae-
raude verte , I'absence de toute autre substance metallique,
indiquentsufBsamment quecemeta] est le seul pricipe colorant
dc cette gemme , centre I'opinion de quelques chimistes qui
ont sujjpose qu'elle etoit teinte par le cobalt , pour cela seule-
Jnent que par une fusion imparfaite dans le borax , I'Emeraude
donne quclquefois un ^mail bleuatre , et qu'elle a pu pro-
duire un vert bleu-de-ciel , dans une des experiences de
Toscane , au foyer d'un miroir ardent. D'ailleurs la presence
du cobalt n'a jamais ^te prouv(?e dans cette pierre , ni meme
autrement indiquee. EUe est toute aussi gratuite , la-wp-
position de ceux qui ont voulu qu'elle fiit color^e par le
cuivre ; supposition qui ne trouve d'autre appui que les
rapports de couleurs entre I'Emeraude^ et los malachites. Je na
connois point d'analjse faite sur I'Emeraude blanche.
«6 Litlioloaiic,
BEJIARQtTES St-R. LA COITLEUR DE L'EMERAtTnE , ET
VARIETES QUI EN DEPENDENT.
Varietes de preinlhre sortc.
La couleuT^ regardee comraecaraclerespccifiqiie,
est toujours dans les pierres une qaalire douteuse et
incertain?. Les belles teintes qui ont valii a I'Eme-
raude tous les eloges qu'on s'est plu a lui prodiguer,
ne lui sont pas essentielles 5 011 rourroit men"'e dire
qu'elles sont une parure qui altere la purete de sa
composition , puisqu'une composition n'est jamais
plus jKsrfaite "que lorsqii'elle est reduite aux seuls
if rincipes conslituans , necessaires pour satisfaire aux
lois des affinites. Car ce n'est que dans 'Pexact cqui-
likre de touiesles malieres admises dans une associa-
tion chimique , que se trouve cette resistance a la
decomposition qui bon'C les effets de toutes ult6-
rieures depurations , lorsque les moyens de purifi-
cation, soil ceux employes par la nature seule, soit
ceux UsSites, dans le^^ arts, ont emporle lout ce qui ne
se Irouvoit pas a-sez fortement.enchain^parl'energie
des affinil(^^s cliimiques , pour resister a ce genre
d'epreuves. On peut observer dans les pierres, comme
dans les sels, que, lorsque les uns et les autres se
trouvent reduitsaux seu:s prncipes necessaires pour
les conslituer, ce qu'ils doivent etre esspniiellement,
jls jouissent plus completerae.nt , i.° des proprielos
pbysiques et cbimiques qui en font des elrc s speciii-
qucment distincts de tout autre 5 2..° de toutes le>
qualites d'une agr^gation parfaite , qui peut d'autaut
micux s'efferluer , qu'ii ne se rencontre [oint de
Desrription de TEmtravde. 27
mihsfcincc efrangere capable de porler quelqn'alh'-
talion a la forme des niolj^cules int grantes , ou de
goner leur plus exact rapprochement. J'auiois de la
peine , sans doute^ a faire entendre aux joailliers et
aux amateurs de belles pierreries, que le beau vert
veloutc^ dtis Emeraudes soit pour elles une sorte de
souillure , et qu'elles ne sont reellement parfaites , que
lorsqu'elles sont assez completement depo;)illees du
fer qni ]es colore, pour rester entierement blancncs r
ce qui Ics reduit a etre presque sans feu ; mais ce
n'est pas la seule fois que la pensee du naturalisfe et
du chimiste S3 trouvera oppos^^e aux spe culations dti
commerce, aux idees des simples a iiateurs , et aux
caprices de la mode et de la fantaisie.
Je dirai done que I'Emeraude , sans cesser de pre-
tendre au nora speciflque qui lui est propre , e?t
susceptible de differentes nuances et meme de diffe-
r.?ntes couleurs.
*' Variete iJ^ Emeraudes vertes de differentes
]S"UANCES 3 savoir :
a. Emeraudc du vert h plus parfait et le plm pur.
Noi'a. Tel est le vert des prairies , au commencemcat da
printemps ; cett©^ conleur porle meme plus particulit^remcnt
■]e nom de i-eri d'Emeraude , parce que sa bcaiite n'est com-
parable a nulle autre. I.es Emeraudos qui en sent decorecs,
sont regardees comma les plus ptecieuses.
b. Emeraudc dim vert ohscur t'lrmit sw le noir.
Kota. L'Emorauds dc celtc nuance parcit coaplctemcnt
oolre et vcioulec ^ u la hnniere des flambeaus.
sS Litkolofie.
c. Em?r'^'iic cVun vert tir ■nt snr le hUu.
Nofa. On attiibue cette nuance aux Emeraudes de Tan*
cien continent.
d. Emeran.le d'un ve'^t t'lrant snr le. jaune.
Iv'ota. Ou a suppose que cette tcinte plus claire et pluf
gaie , appartenoit plus particuli^reiaent aux Emeraudes du
Perou.
Dans ces diflerentes nuances de vert , les Emeraudes
ont plus ou moins d'inteiisit.' dans leur teinte ; celles
de Ceylan, pr exeinple, dont la nuance tend au
bleu , sont ordinairem^lit tres-ijeu charjees de cou-
leur, ce qui, en terme de joailliers, se dit foibles
en couleur,
Les belles Emeraudes de cette premiere vari^t^ ,
les seules qui soient connues dans le commerce , se
montent sur le noir, comme les diamans, parce que
\e noir, ! ien lo'n d'alterer leur couieur , la rend plus
rirhe et plus veloutee. Ce fund rcussit sur-tout tres-
bien a celles qui ont naturellement une teinte uu pett
claire ; il produiroit un effet contraire sur des pierras
de toutesaulres couleurs,
Variete 2.® Emeraudes melangees de vert et
de blanc 5 ou mi-parties de ces deux couleurs.
Nota. On en voit de telles dans la collection des roi«
d'Espagne a Madrid, Joseph d'AcOsta ( dans son Histoirc
naturelle des Indes , pag. 157 et suir. ) parle de cette sin-
guliere variety , comme I'ayant observee plusieurs fois , en
il nous fait connoitre I'opinion que I'on ayoit pour lors
et qu'il partageoit , sur le defaut de maturite de cette sorte
de gemme ; car on supposoit que par un plus long sejour
daus leurs mines , ces Emeraudes miparties vertes et tianche*
Le:cnption d^ rRmcraudc. yg
•iirolent ac^cjuis la cl«gre de perfection qui leur mancjuoir,
«t qu'ellcs s'y seroi?nt compUtrment colorees; on crojoii
encore que la couleur commenqoit A se developper dans
3a pierre par Tangle qui dans sa position naturelie regar-
doitle soleil levaut , et qu'eile s'eteadoit progiessivemeat
dans toule I'.Hendue de leur masse.
Les Emeraudes que Bournon a decouvertes dans lea mon-
tagnes du Forest , sont ordinairement blanches aux deux
extremites du priome , et verdatres dans le centre.
VaRIET£3.'-' E:»rERAUDE PARFAITEM£NT BLANCHE.
JS'ota. On trcuy§ au Perou beaucoup d'Emeraudes de cette
Tariete , que je doi» considerer comme la plus pure et la
plus parfaite , sous le rapport de la composition , puisuue
leur existence prouve que la constitution essentielle do i'E-
tearaude peut se passer du princi^je colorant.
J'ai d^couvert \^ne Emerande de cette variety dans lej
granites de I'ile d'Elbe ; sans las autres caracleres qui la
distinguent , on auroit pu la prendre pour un cristalde
Xoche de plus pures.
II n'esl pas Ijors de vraisemblance , que Ton de-
Couvrira encore de veritables Emeraudes qui auront
beaucoup d'autres couleurs et d'autres accidens da
towances, que ceux dont j'ai fait meutioii.
( La fin auXumero prochiin. )
' M E D E C I i\ E.
Froxostjciues et prorrhetioue J.d'Hippograte,
avec tons les passages paralUles , ti adults par
JLefebure-Villebrvne , bibliothecaire tie la Biblio-
tJuque Naiionale. A Paris , chez Theophile
. Barrois,le jeune , libraire , quai des Augustins,
N.® 18, au 3.e , in-i'^ , de 172 pages. Prix,
5 livrcs.
I i E succes de la traduction que le citoyen Ville-
brune a donn^e des Aphorismes d'Hippocrate ,
Ta engasi^e a se livrera celle des ProfiosUques et du
Frorrhetique , qu'il avoit promise et qu'il publie
aujourd^'hui.
Le premier de ces trait^s est regard^, par tous
les erudits , comme t'tant veritablement I'ouvrage
d'Hippocrate , et comme le plus important de ses
Merits sur la Semeiotique. Aucun caract^re d'authen-
licite ne lui manque. La m^thode de cs grand homme
s'j fait aiscraent reconnoitre : il contient les syrnp-
tomes des maladies dc'crits dans un style aphoris-
lique.
II avoit ete deja traduit en fran^ais par Pierre
Verney en 1742 (i) , et par Ci:ar]es Leroy a Mont-
pellier en 1776 (2)3 Pierre Low I'avoit traduit en
(i) Le livredes Presaiges , par Pierre Verney. Lyon, 1542,
4n-8^. 1 553 , in-8°.
(2) Du Pronostic dans les maladies aiguts^ par Ch. le Roy.
Montpellier , 1776 , iu-8?. 1784 , ia-8^.
Les ProriOsliqu-£s (VH'ippocrate, 3t.
anglais, en 1.^97 (i), et Jean Moffat en a ^gale-
ment fait paroitre, il y a quelques annt'es , dans la
nieme langue , une version dans kujuelle le citoyen
Villebrune dit avoir trouve plusieurs erreurs.
Le nouveau traducteur se coutente de donner
inie traduction exacte et aussi precise qu'ii lui est
possible sans la surcharger de commentaires ; il cite
seulenient les passages des autres &Tits d'Hippo-
crate sur la Serneiotique , qui ont du rappor avec
ceuxqu'iltraduit, persuad'if;neja:naisunau'ieur n'est
/iiieux explique que par lui-ineme.
Optimus interpres fjerborum cjuisque suorum.
II indique merhe quelquefois des passages dont
les rapports paroissent plus tloignes ; mais ces pas-
sages prrsentant des circonstances qui s.^ trouvent
quelquefois plus oumoins etroitement liees avec
les sjmptomes dont il s'aiiit, jettent dans la tra-
duction un nouveau jour sur les theories.
La plupart de ces rapprochemens sent tires des
Coaques ( preceptes du m6decin de Cos, patrie
d'Hippocrate). Cependant ce traite est plac6 parmi
les ecrits supposes d'Hippocrate , les temoignagee
(l) The booke of the Presages of deuyne Hippocrates
deuyded into tliree partes. Also the protestation Which
Hippocrates caused his schollers to make.' The whol newly
collected and translated by Peter Low , Aurelian doctor in
the faculty of thirurgcrie. Lond. iSgy. 8.
The Prognostics and Prorrhelics of Hippocrates translated
from the original Greek with large annotations critical and
explanatory ^ to which is prefixed a short account of the lif*
ef Ilippocrales J by Johp >Io£fa,t. Lond. J788. 3®,
3i Medeciiie,
anciens et modernes lui manquent pour attester
son authenticil^, et Galieu liii-raerae le regards
comme faussement attribue a Hippocrate. Aitisi il
ne m^rite pas de faire aulorit6 pour bien connoitre
la doctrine de ce grand homme sur Ics sjmptomes
des maladies.
liC ProrTliotique ou les PrecUctions , dont le ci-^
toyen Villebnme a traduit le premier livre , est ^gale-
ment ref arde comme suppose. Le traducteur le croit
ant^rieur a Hippocrate ; mais il ne nous apprend pas
sur quoi il fonde cette opinion , qui est contraire
a celle de tous les savans ; la seule qu'il allegue
est la conformity de certains passages avec d'autres
des Pronostiques , et son insertion presque enliere
dans les Coaques. Mais n'esl-il pas aussi probable
que le Prorrhetique est tire des Pronostiques
que de dire que les Pronostiques sont s6uvent em-
pruntes du Prorrhetiqne , et dans ce sens , Tinser-
tion dans les Coaques ne pourra pas davantage
deposer de son authenticity, puisque ce tra ta est
un receuil des preteptes attribu^s au medecin de
Cos , a Hippocrate.
La plupart des commentateursle regardent romme
Pouvrage de Dracon , fils d'Hijipocrate ; d'autres
Pattribuent a Thessalius. Galien pense que c'est un
resume des Pronostiques , des Aphorismes et du
traits sur les epidemics. Jero-re Mercurialis pense
que c'est I'^crit d*un des disciples d'Hippocrate ,
public ensuite au temps des Ptolomees, et venduyous
le nom d'Hippocrate Foes ne craint pas de I'atlri-
buer a Hippocrate iui-mcme^ la majeste, lestvle,
Les Tronostiqucs d'Hippocrate. 33
les expressions, les pens^es, la concision, soiit les
moPiis SUE lesquels il ibnde celte opinion. Cepen-
dant tout s'oppose a ce qu'elle soit admisc : en y
trouve une foule d'obscurites, des prnicip.s moms
bien determines, une reunion des symptome. clihT'rens
et oppos^es. Harle pense que le second hyre du
Prorrhetique doit etre place, plutot que le prem.er,
parmi les Merits aullientiques d'Hin-ocrate.
Quoiqu'il en soit , cet ouvrage, redig6 par son fils
ou par un de ses disciples , contient n^cessairement
sa doctrine ; I'ordre dans leqnel il est dispose est
convenable. L'anteur y traite d'abord de la mamere
de se former de vrais symptCnies ; ceux qui sont
les plus utiles a cha.iue maladie sont ensuite dc-
ciits .dans un ordre niellivdique.
Cet ouvrase a c^alement ete tradult en anglais
par Jean Moffat. Cette enlreprise offre plus de diffi-
cullcs que la premiere : les sentences du Pronbe-
lique, dit le citoyen ViUebrun ^ , sont quelquefqis sJ
serrees, si mystl'rieuses , qu'il est impossible d'y
apercevoir mem.e un sens quelconque , si I'on n'est
eulierement familiarise avec le style des m6decins
ancient, sur-tout avec leur t>ieorie. Galien Ivi-meme-
en convient dans plusieurs endroits , les versions lati
ijes fourmillent d'errenrs.
Le citoven Villebrune a suivi dans ses annotations
la meme' m^tbode que pour les" Pronostiques. II
rapnrocl-.e de cbaque ai)borIsme les passages des
Coacjues qui y ont leplus de rapporf.
Sa traduction nous a paru exacle ; nous lui ferons
geulement le reprochs de ne^ibiger un pen tron la
Tome IL ^
34 Mlfecine.
\)UTC\6 fie la langue franraise. II faiit Li respecter^
ineme dans les ecrits didactiques , qui manqueront
de clart^ s'il iianquent dc purele et meiiie d'lina
certaiue Elegance. On lit dans la preface d'Hippo-
crate , qu'au mqyen des Pronostiques , « le medecin
sera plus en (tat de discerner plus directemeut les
iralades qui sero'nt dans le cas de recliapper : » celte
expression commune et triviale qu'on emploie souvent
dans la conversation , n'est pas aduifssible dans uii
ouvrage imprime , et le citojen Villebrune I'emploie
fr^^querament.
Nous df'sapprouvons aussi les citations guecques
Rentes en caracteres latins , et nous sommes persua-
des que sur ce point le citojen Villebrune est de
Molre avis, et qu'il n'a adopts cet usage que par des
consideratiors (^trangeres.
Le citoj'en Villebrune prepare encore la traduc-
tion de quelques ouvrages d'Ffippocrate et une d'A-
retee. L'etude parliculiere et profonde qu'il a faite
des anciens m^decins grecs et latins , doit inspirer
le desir de le voir bientot terminer cette importante
el utile entreprise. A. L. M
A N A T O M 1 E.
Couhtb DESCRipnoN d'il\e Statue anatomiq_u£
4jiui se dimonie tn pius de 5,ooo parties , par
I'OATANA.
Florence , 17 nlvdse.
J_iE Mus?e d'histoire naturelle a Florence, oITre,
ouire Ics j-rodiiclionsde la nature dans '.ear plusgraude
«^lendue , tout ce qui a rapp jrt aux sciences abstraites,
I'astronomivi , la i hysique , la ci iriie , etc. On y
voit encore dans i't'tat Is p!us p-:rfait une immense
collection de pieces anatonii(}ues , en cir^? , qui mon-
trent dans le plus grand dv tail tousles organes et toutes
les parties les p'us dcliees du corps liumain : 0.1 n'y
a point oublie Tart d.^ I'acjouchement , et on y voit
representees jusqu au\ plus ji!;portautes operation^
de la cbirurgle. C-^^tte ro'le;tion, a cetle lieure meraej,
remplit seize cabinets ; Le tout est dessine avec des
couleurs naturelles, accompagne d'e. plications ana-
iogues, et les dessins sont au nombrede ijSoo , tous
>de format grand in-folio.
L'aulei.r de ce tres-important travail a observe que
Tnalgre taut d'organes reprvsentes^ en cire , ,il
mian juoit encore , pour plus praide intelligence du
corpsbiunain,une partie d s plus utiles de 'a 1 lioinie,
la posit'on et les liens d 's or.;nre-; entr\ux et
avec le tout , c'est-' -dire, I'A niton ie de sUuation,
le dessus et.le le ous cles parties , o jet le plus uiilp
et le pius oifEcile qui ait rapport au corps humaia.
36 Anatomie.
Pour remt'cller a ce defaut, que ni les clrrs de
detail, ni seize statues en cire, de grandeur naturelle
et sur le point dVtreachevt'es, ne peuvent remplacer
sufflsamment , Tauteur a foit construire , sous sa di-
rection , une statue. Cette statue est en bois , de gran-
d'ur naturelle. On ptut la demonter; ellepresente
a I'oeil et au tact , les os, les ligamens, les muscles,
les glandes , les visceres , les arteres , les veines^les
nerfs et enfin les vaisseaux Ijmphatiques. Cette statue
se demonte dans toutes ses parties , et se remonte de
nouveau. Les parties qui se d6montent sont aunom-
bre d'environ 3,ooOj et chacune de celles-ci recevant
des vaisseaux Ijn'phatiques, des nerfs, ofTre a I'oeil
Tune dans I'autre, environ cent autres parties, de
fa^on que Poeil voit trois cent niille parties au
moins, bien distinctes enlr'elles.
Cette Statue pent devenir homme et femme suc-
cessivement 5 car on pent au besoin j joindre les
organes des deux sexes : femme , on pent la voir tant
en etat de virginity que de defloration j on peut
meme , si on le vent, la voir enceinte avec son
foetus et tous les organes de celui-ci , tant externes
qu'internes , non seulemcnt comme foetus male,
niais meme comme foetus femelle : male, on voit
la situation des testicules , non encore tombes
dans le scrotum , leur structure , i'usage de la
-ver^e , etc.
II est impossible de donner une juste idee d'une
machine si compos^e , en pen de mots ; irais il est
/acile de juger des difficultes de i'entreprise et de
sonutilite pour I'Analqmie.
VOYAGE.
Voyage a la Novvelle-Galles dv Sud , a Botany-
Bay , Av PORT Jackson, en 1787 , 17S8, i78§,-
par^JoHN Whi-ie, chirurgien en chef de Vetahlisse-
merit des Anglais dans cette parlie du globe ;
Ouvrage oil Con irouve de noiiveaus details sur It
caraclcre et les usages des hahitans du Cap de
Bonne-Espcrance , de Cile Tenerijfe , de Rio-
Janeiro et de la Nouvellc-Hollande , ainsi quune
nouvdle description exacte de plusieurs animaux
hiconnus jusqud present. Traduit de V anglais ,
avec des notes critiques et philosophiques sur FHis-
toire-naturclle et les men its, par Charles Pougens,
A Pans 5 chez Pougin , imprimeur - libraire ,
rue des Peres, N.o 9 . an 3^ de la Re'publiquc,
f 1795 vieux-stye ].
1 ous les Vojages aux iles de la met du Stid ont
droit de nous intCresser. Les decoiivertes de Cook ,
les Iravaux philosophiques de Banks , de Forsler et
de Solander, les- navigations de Bougainvil'e , les
malheursde Lapejrouse ont rendu ces parages sufli-
samment celebres , pour que tons les re< its qui les
conrernent, cxcncut et altachent la curiosite.
La relation la plus consid^-able ct la plusimpor^
tante, imprim^e depuis le Voj:.ge de Cook, c^ioit le
c a
So Voyage.
Voyage clu commodore Pl^lps , tradiiit en franrais ,
en 1792) et pullie cliez Buisson , en un vo-
lume 8.0
Celle da J. -an White Iraite des memes objets ;
inaiselle est precieiise, puree cin'elle cojifirme qut^*
ques details et sert a en lei'utcr d'autres. Get o!:>ser-
valeur etoit cl.iiur<iien en chef de Petabhssement
dcs A.i^lais au port Jackson , et par cons'jquent ,
tres a portc'e d'avoir des renseio;nemense::acts.
II est parti le 9 mars 1787. II indique les precau-
tions pris.^s pour entretduir la salubrity sur ies vais-
seaux , source } rincipae de la conservation de la
sant(^ des gens de m.r ; la flotte conduisoit a Botanv-
Baj les crimiaels condamn^s a la deportation ; I'equi-
page d^barque a Santa-Cm z et a Rio-Janeiro. John
White fait une des ription assez etendue de cette
ville et d.'S moeurs des Portiigais qui I'liabitent. II
donne aussi sur le Gap de Eonne-Esperance des
d(^tails qui soat absolu 1 eiit les memes que ceux que
Pon trouve dans les Vo3^a'.es de Sparmann 'et de
Levailiant ; enfin il arr ve a Botany -Bay , Lapejaouse
et ses compa^.nons J eloient alcrs , et la meilleure in-
telligence areg'ie entr'eux et les Anglais.
John White s'attache principalement a decrire
les pro lucth^ns naturelles du pays, et snr-tout celles
du regne rninal. II est maiheureux qu'au gout de
I'observation il ne joigne pas des connoissances
solides et precises en histoire naturelle. L'ornitho-
logic a fixe plus particulierement son attention ; mais
il dome aussi des details sur plusieurs mammiferes,
la plupart du genre DLdclphe. On aime encore 4
Toyigt a la NouveUe-Galks dn Sud. Sg
lire quelqiies fails relatifs aux moeurs du pays et a la
maniere dont on traito les dt^portt's.
Cel!e Iriicliution a 206 p/iges ; les notes que lo
citojea Pou_ens y a jointes eu o.it 206 ; eiies scmt
plus considirabl^s que le texte. Eiles aimoncent un
grand amour pour les rccherclics et les discussious
philologiques , et d(3s connoissances variees : nous
regroltons seulement que leur auieur se soil trop fie
fi des dictionnqires, et n'ait pas toujours remonte aux
sources ; le simple nom Linaeen, fixe avec certitude,
auroit et^ souvent plus utile que de longues descrip-
tions J tirees d'auteurs qui tons ne sont pas d'uue
grande autorilc en histoire naturelle : aussi trouvHra-
1-on quelques notes superflues, et dont il auroit pii
s'^pargner le travail. II en est cependant d'autres tres-
interessantes : nous indiquerons piincipalemerit cells
du N.» 97 , qui est un resume fort bien fait et fort
curieux de tout ce quia ete ^crit par les Vo; ageurs
les plus justcment celebres, sur l.^s arts pratiques par
les sauvages.
Si nous r?prochons au citoven Pougens de n'avoir
pas toujouis remonte aux sources , ce n'est pas c[u'il
ne les ait souvent consult^es ; il riio le plus frequem-
meut Latham pour les oiseaux , et c'est en effet
Tauteur de la methode ornithologique la plus com-
plete et la plusetendue. Linneus e?tau?si tres-souvent
indiqu6 ; mais nous desirerions que le citoyen
Pougetis ii'eut pas denature son nom , en ^crivant
Linriee. Ce grand naturaliste se nomuioit Linneus.
Plufeieurs noms propres danois ou suedois , tels cjue
Wormius, Celsius, Olaus, Fabricius , out une leruu-
C4
40 Voyage.
liaison latine qu'ils ne perdent que qnand , api es avoir
et6 anoblis, iis le font preceder du?^o/?.^ c'esl-:VcIire,
de : ainsi il faut ccrire Liimeus , ©u de Linne. L'usag(i
apr^valii dt; dire Linneus ou Linne.
On trom e dai;s les notv s du citoj^en Pougens des
etymologies saxones , .' otLiqiies ou suedoises , fort
curieuses ; nous reltverons ce'pendant une erreur
sansdonteinvolo itaire, maisqui pourroit occasionner
quelqne m^i rise. On lit , page 48, que choii-kraut
s\^n\[\s. feuiUe de ckou- _, du nio4 allemand kraut ^
feulUe. Ce mot doit s'tcrire saur-kraut , et il si-
gnifie non pas sQuXernQxAfeuiUe^ ce mot en allemand
se dit blatter^ mais pLante aigrle j, qui a eprouve
la fermenlalion acide : de saur ^ aigre 5 et kraut ^
plante.
Nous re:;rettons encore que quelques-unes des des-
crlptions que Jolin White a donnecs des plantes et
des ar.imaux^ n'aient pas e!e Iraduitesen entierj mais
on a craiiU qu'elles ne parus?ent trop seclies , ce qui
a engage a les ahr;5ger. Cependant il seroil a desirer
que ces descrip lions fussent completes : les natura-
listes qui les voudront consultcr , seront toujours
obliges de recourir a I'original , qui est fort cher, et
commetous les livres nouveaux anglais^ est d'une telle
rarete, qu'il h'existepeut-etre en France que le scul
exemplaire traduit par le citojen Pougens.'
II eiit aussi ete i\ desircr que le libraire cut jftint
au texte les gravures interessantes dont Foriginal es*
ac'^ompagne. II n'est pas le seul qui , dans i'espoir
d'un dt bit plus facile et plus prompt , ait ainsi priv6
un ouvrage utile de grayures interessantes , et qui
Voyage a la Nouvelh-GaUes dn Sud. 41
sont absolument nccessairps a son inteUigenre. La
traduction dii Voyage du commodore Philips a
Botany-Bay , qui a paru en 1798 , presente ie meme
inconvenient ; les gravures ont {{^ supprinu'es , et
avcc plus de desagr^ment encore , puisqu'elles sont
indiqu^es dans le texte par des nimicros. Cesgramres
representent cependant des animaux absolument nou-
veaux , et qui ne se tronvent nuUe part ailleurs.
Nous invitons done , pour I'avantage des sciences et
pour leur propre inieret, les lifDraires a ne plus sc per-
mettra de pareils retrancliemens , a moins que les
gravures ne servent que d'ornement et ne soi^nt
pas necessaires pour Pintelligence de Pouvrage. Le
debit des Voyages de Sparraann , de Cook , de
Bruce , de Mears , etc. , prouve cjue les gravures
utiles farorisent la vente d'un ourrage plutot qu'eltes
ne I'arretent ; et elles ont I'avantage d'enlever aux
contrefactonrs Tespoir de profiier , sans risques , des
veilles d'un anteur et des premieres avances d'ua
libraire.
Le citoyen Pougens est trop eclairc po'ir n'avoir
pas seuti combien la suppression des grarures de-
paroit son ouvrage. Maisil a faitcomme le traducteur
du Voyage a Botany-Bay , il a prnse ciu'il valoit
encore m'eux faire connoifre nn livre utile de celte
maniere, que de ne le jtas publier. Le C Pougens est
un des litte'^rateurs les plus estimal^les et les plus
]ai)0i ienv. Malgr^ de^ ijifirmit-'s qui dccourageroient
line ame moins elevee , il se livre sans relAche a des
travaux opiniat:es, et qui ont loujours jiour but les
progres de rinslruction et Tulilile pubiique, II a dej^
4« Voyage.
public plusicurs ouvrages iut^ressans : le Voyage dc
Forster est iiii cles plus imj)or}aiis. II est actuellemeat
orcuj :e dii troisieme volume , que les gens de letires
attendent avec una impatience que leur a inspir^e lA
lecture des deux premiers. A. L. M.
H 1 S T O I B. E Li •'£ T K R A IP. E.
JExtRAir d'ar.e Uttrc adressee nux Ridactcurs du Ma-
gasm Encyclopedique^ sur Cetat des monumens , des
ohjecs de sciences et arts a Avignon.
XL N me communiquaiit le projet de votre Magasin,
vous m'avez invite a vous donncT des notices sur
i'elat des objeis de sciences et d'arts dans les d^-
parteir.ens que je vais parcourir , autant que mes
occupaliuns pcuiroDt me le permettre j je remplis
deja une partie de mes engagemens ,en vous pariant
d^Avignon,ou je suis depiiis nuelcjUes jours.
Je commencerai par la Bibliotheque , ci-devan^
Celestine , forraee par des ac ais pariicullers et des
dons du savant Gerson. Les livres imprimes offrent
pen de cboses remarc;uables.
Parmi les raanuscrlts , qui consistent principale-
ment en ouvrages de theologie et de piete , un des
p'us precieux est la Bible de Clement VII, in folio >
sur velin.
On y trouve aussi le decrel de Gratien , donn6
en 1 588 aux Celestins parj Claire Larti ; ce ma-
nuscrit paroit anldrieur au XIII'-'"^ siecle 3 ce qui
Etat des Arts a Av'gvon, 4S
le f;uf previimrr , c'est la forme de la tbiare poiu
tificale c]ii\)u voit dans plusieurs des vpnettes qui
decorent cet iii-fblio ; el'e ne pore point de cou-
ror.ne. On ii'ij-n.;ie pas que ce fut Eoniface VIII,
qui occupa le sit\^e pontifical depids 1294 jusqu'a
i3o3 , qui le premier surcbargc^a la tbiare d'una
ti'ij:)!^ couronne.
Ce monument calb'erapbique est de la plus grande
beaute ; mais mallieui-euse;i)ent quelques vignettes
en ont ete coupeesjet avc=c elles des fragmens du
texle d^cr t cL iriere ces vignettes.
II existe encore dans c.-tte bibliotbeque plusieurs
autres inanuscrits dont je croisdevcir pailer ; i*^- une
Bible, format in-4.0 , sur velia tres-fin, a doub'es
colonnes, avec des iettres majuscules enluminees ;
Tecrilure est remarquable par la forme et la
nettete.
2..^ Un autre manuscrit en deux volumes m-
fobo , sur velin , contenant des dissertations sur S.
Matbieu par frere Auguslin de Ancona, de Tordr*
desfreres bermitcs de S. Auguslin.
3^. CapituLa et orationes per annum jmanusznt^
sur v(^^lin, i vol. in-folio.
Parmiles biWiotbcques particulieres on distingue
celle de Spylre Caumont , oii j'ai vu un recueil,
manuscrit, de lettrcs adress^es a Sevtre Caun'ont,
associe de Tacademie des inscriptions et belles-
lettres, par le president Boubier, I'abb^ Botbelin du
Fofsy , le cbevaller Folard et d'autres savans de ce
temps. On y trouveroit siirement des objtts digae«
de salislaire la curiosite des bommcs iiistruits.
^4 Histoire litteraire.
On conserve dans les arcliives plusiciire cartiilai'res
pr^cieux , dont le plus aucieii refiionte an commence-
ment du X""® siecle , consistant principalement
en bulles, privileges, donations ou litres de pro-
pri(5t6 et de feodalit^ ; quelques-uns rcnferment des
objels qui semblert fort intrressans pour I'liistoire,
presque tous avec leurs sceaux j)assablement con-
serves.
Plusieurs titres isol^s sur parcbemin , avec leurs
sceanx, paroissent originaux 5 les plus remarquables
datent depuis le Xlniejusqu'auXIV"^ siecle. On dis-
tinglieentr'autres unc cbarte imp6riale de Cbarles IV,
donnee en 1873 , a laquelle pendoit un sceau en or
fin , qui d*une p rt represenoit la ville de Rome
et de I'aulre la figure pedestre de cet empereur,
parfaitement gravee et bien conservee 5 maiscomme
ce sceau s'est trouve detacbe , ou a cru , pour sa
surete 5 devoir le remettre entre les mains de I'admi-
nistration du district.
Cetle cbarte imp^riale ne tend qu'a confirmer
d'anciens privileges accordes par les pr^decesseurs
de Cbarles IV , aux ci-devant arcbeveques d'A-
vignon , depui> 82^2. II j est particulierement fait
mention des Juifs que Tempereur prend sous sa
protection , pour qu'ils ne soient plus foules ni vexes ,
Cbarles donne la terre de Bedaride a I'arcbeveque
d'Avignon.
L'ecriture de ceUe cbarte est parfaitement belle.
On remar jue encore dans ces arcliives ^ sous la
mcme dale de iSyS , deux protestations originales
Etat des Urts a Avignon. 4j
pnpe Barthelemy , Tune et Pautre munl^R de tretzo
sceaux pendans, en cire. Cette pi^ce est egaleinent
rare et curieuse.
Examiuons a present les monumens d'architecture>
La construction du poitique de !a ci-devant ^glisd
metropolitaine,est antique ', I'intcrieur offre des jam-
beaux de pein tares a fresque que le temps a pres^
qu'entiex'ement d<^giades , entr'aulres , un Saint
Georges qui d^Iivre une Yeinme d'un njonstre qui
la poursuit ; la tradition^ Iransmis que ces peintures
sont Touvrage d\in peinlre itaiien , an.i de P^lrarque ;
que la figure de Saint Georges etoit le v(^rilabl.e
portrait de ce grand poete , et que celle de la femmo
^toit celle de la belle Laure.
'L'eglise des ci-devant Cordeliers n'a de reinax-
quable que la grandeur de son vaisseau et la har-
^ diesse do sa voii;e. Elle renferme les tombeaux de
deux personnages celebres, celuide la belle Laure ,
denue de tout ornement,et celui du brave Crillon ,
qui est d'une assez belle arcbitecture. "
Parmi les monumens de I'antiquit^ que Toa
conserve a Avignon , et qui sont en tres-petit
nombre, on remarque :
Six lampes antiques , en terre.
Une bouteille a buile antique, en terre.
Une souscoupe antique, en terre.
On a commis , ici comnie ailleiu;s , des d(:gra*
dalions.
Les monumens des arts qui out le plus souffert ,
sont :
PluiieuVs tombeaux dans Ttglise mttropx^litaine ;
4^ Htsto're litteraire.
enlr'aiitres, iin^ de Jean XXIt, qui etoit fort remat^
t^uable.
Le bel aiitel des Domlnicains , surmoiitc cVun bal-
da u'n soiitenu pj^f des colonnes.
Le magnifique tombeau de rabb(^ de Simiane
Lacostr' , place dans le < liccur de I'eglise des Beiiedic-
tins.' Ces ouvrages, du cJjbre Zvlalhieu Pereu, sont
presque. tons delruils.
Un tombeau de la maison des Issaids , dans la
ci-devant eglisp du ebapiti e dr Saint-Plcrre , repr^-
senlant le Christ des endn dans Id lom'^eaii , compost
de plusieurs fi^^uies colossa'es de iriarbre blaix, a ete'
Jbrt eridomraag^ 5 ce monument , dusiecl^? de Fran-
cois 1j^ y etoit d'un Ires-beau tr:ivail.
Tousles autres moiceaux de sculpture des eglises
d'Avignon out ete ]. rises et df'truils.
Lestonibeaux des papes, dans la melropole, les
calices d'or , et tout le trtsor , les ostensoirs des
autres eglises , dont plusieurs enricbis de diamans^
ont ete brists ou enleves.
tin autre tombeau de marbre, repres'^nfant rine
dar.e a genoux sur un prie-dieu , a ete detruit dons
I'eglise des Gelestins.
La precieuse croix d'or des memes rellgieuv , d jn-
nee par le roi Rene , d'un tres-bon gout et d'un
travail fiui , malgr6 la barbarie du siecle ou il a ete
fait, aetebrisee s-.ir la fin de 1792. On en porta
un fragment a Tbotel de la raonnoie de Marseille^
'pour coimoitre le degre de puretS de l^'or, et il
fut reconnu ne contenir que tres-peu d'alliage.
A Gadagne, dans i'ec:b"se du village , le tombfeau
Etat des Arts a Avignon. 47
i^emarbre blanc, de la n::ai>on de ce no:n , corripos^
de dt'ux figiiras assez bien executees , a ele eiitiere-
inent dclrnit.
Je sais , citovens . qne jVurois pu etendre p'ua
loin mes observations; inais , force a d'aulrrs tra-
vau\, loftemps me raanque; il me suffit d'avoir in-
db|u^ aux Scivans et aux vovageurs instruils, les
objets qui peu\ent etre dignes de le.ur altc;iilion.
HiSTOlRE LITTERAIRE
D U M O Y E N AGE.
Notice sur Les poetes latins da ninijen ogr; ,
tirde des notes du po'enie anglais de H^TLEVy
sur Id poesLe epique J inserees dans le 4.*
volume de ses oeupres, ^ iniprimees d Londrcs
en 1785 (i).
XL n'y a point en de.siecle entierement dentil de
poetes ingenieiiK et elrgnns, dit le savant Polycarpe
Le'SCT , a; res avoir irace patieininent les progres
pen conniis de la poesie latine pendant ton-, les
siecies olscur^ (2). 11 est ( eriain que le nierile de
(i) On li"ouveraquelqu''s de-tails sur les o-urrages de H&t1^J>
tlans les Mc'ljng's de liltpr?.lure t'trang<>re , d'A. L. Mii n,
qni .int piru en 6 volumes , Ji Paris , chez GogUJt , 1786^
VoTe!'. aussi rEs^irit d ^s journaux.
{j-i) Soji ou^rrage esl iiililule : JPolje. Lejseii hijtoria po'ildh
/8 Hisioire litter aire du mojen age.
plusieurs poe'es latins, a une ^poque ou nous supi
cosons commun^ment les hommes ploughs dans la
4)lus grossiore barbarie , est singuUerenient remar-
quable. Beaucoup d'eutr'eux out fait des poemes
epiqiies ; et comme ils decrivent les nururs et les
visages de leurs temps , un examen complet de leurs
Yoemes pourroit former un ouvrage curieux et amu-
sant.
Abbo , moine parisien , de I'ordre des Ben^dic-
lins 5 a ccrit un poeme sur le si^ge de Paris que
iirent les Normaiids et les Danois , en 886 , et auquel
31 se trouva. Get ouvrage est imprime dans le se-
cond volume du Scdpta Franco rum de Ducliesne ;
et quoiqu'il ait peu de merite poetiqua , ou meme
qu'il n'en ait point du tout , il pent etre regarde
" comme precieux pour I'liistoire. Les vers suivans ,
adressses a la ville de Paris, au commencement de
I'ouvrage , peuveut donuer une idee de ;s@n s-lvle :
Die igitur prcepulchra polls j quod Vanea munus
Libai'it tlbimet , soholes Plutonls arnica ,
Tempore quo prcesul dom'mi et dalcisslmus heros
Gozllnus temet pastorque benignus olebat !
HiSCj inquit ,miror f narrare potest aliqulsne ?
Nonne tnis idem pisisii oculis ? refer ergo :
Vidi equldem , jussisque tuls parebo libcnter.
rum etpoematwn medli ceoi deciwum post annum a naio Christa
quadringentesiinum , scrculorurn. tJalce 3 172.I , iia-6°. On
y trouve la vie cle plusieurs poetes latins , modernes J
;ie tatalogue de leurs ouvragfs. est assez incomplet . L'ouvrage
important et ciulqux que le citoyen Saint-Leger prepare suT
les poetes dumoyen age, sa isfera d'jivanlage la curiosite dcs
^ateurs de ce genre dc Litterature. A L M.
Leiser
Toetes latino ^ ibiqveu 4g
I.ejsera coiifbndu ce poete avec un autre du m^me
Rom ; mais F.nbriciiis a conig/^ cetle n rprise dans
sa BLbtiotlihque iatlne da mo'jen age (i).
(luy , <-vet(ue d' Amiens , jo58 Jus 'u'en
1076 a corit uii poeme heioq k^ s'lr ijs^ApL>its cle
Giiiilaume-le-Connuerant , dans lequel j suivaut Or-
deric Vital, il a imite Virgile el Sl'ice.
Gaillaurae de la Pouille a compose, a la soil ici-
talion du Pane Urbain II , un ] oeme en ciiKrli^/es,
sur les guerres des Norrnands dans la Sicile , la
P6iiille et la- Galabre, jusou'a la mort de Ro))ert
Guiscard , leur prince , au fils duquel j! a adresse
son outrage qui a ete ecrit eiitre les aniiees ic3o
et 1099, imprime pour la pre 1 iere f'ois en i582,
in-4^, et r6imprirae dans les Scriptores reruni ita-
ilcarutn , de Muratori. Ducaiige , dais ses notes
sur I'Alexiade de la princesse Anne Comnene ,
a , ^clairci cette liistoire par de frequentes et lon-
gues citations de Guillaume de la Pouille; mais ,
quoiquc ce savant critique lui donne le titre d'ecri-
vain distingue, sa pj6sie ne me paroit que fort
peu superieure a c^41e du moine Abbo dont je ■siens
de parler. Le lecieur pent en juger par le passage
suivant que je rapporte non seulemcnt pour donner
un exemple du sljle de I'auteur , mais encore parce
qu'il montre que les femmes de ces princes guer-
riers partageoient avec eux tous ' les perils de la
guerre.
(i) B'hUuJieea latiua mediae et infimce laUmtaUs .
Tome II. D
5« Histolre litteraire dunioyen ctge.
U.ror in hoc hello Roberti Jorle sagitia
Qiuklam hesajuit , qiice tnilnere territa , nullarn
Dam spcrahat openi , sc pcne subegerat hasti ,
]S\riie,io cujus se cominendare i^olcbat ,
Jnstanlis metuens 0iciiia pericula lethi :
JIanc deus eripuit j fieri liidibria nolens
Matronos iantce tarn nobilis et venerandce.
La priiicesse Comnene a aussi celebre le courag©
que cette heroine , qui se nommoit Galta , monlra
dans le combat , et il est a remarquer qu'ells a
peint la noble Ainazone plus poetiquement cjue ne
Ta fait Guillaume de la Pouille. Gualfredo , Italien,
qui prit possession de T^veche de Sienne en 1080
et mourut en 1127, a ^crlt un poeme li^roique sur
Texpeditiou de Godefroy de Bouillon , ouvrage qu*on
dit etre encore aujourd'hui conserve a Sienne en
manuscrit. Je crois que Gualfredo est le piemier
poete qui ait trait6 I'lieureux sujet des croisades ,
qui a 6!e ensuite embelli par deux poetes latins,
tres-clegans , Iscanus et Gundier dont je parlerai
tout-cVrbeure, et qui enfin a reQu sa plus grande
gioire du genie du Tasse. II j a aussi sur ce sujet
im ancien poeme' latin , qui est I'ouvrage de deux
^cvivains ri^unis , Fulco et yEgidius , ^le I'exact Fa-
Lricius place au commencement du XIII'°« siecle 5
le titre de leur ouvrage est : Historla gestorum
vice nostri ieinporis Hiero so to niu tartar, II est im-
prime dans le 4.^ volume du Scripta Francoruni,
de Duchesne, et il Test encore , avec des additions
considerables , dans le troisi^me volume des Anee^
data d'Jidme Marteae. Je vai« rapporter une partis
Poi-'tes latins , eblques. 5i
^u commencement de ce poeme, quels Iccteur cu-
ricux pent se donner le plaLsir de comparer avet
telui du Tass?.
Ardor inest , inquam , senienlla f xaque menu
Wersihax et numeris transmit tere posteiitati
Qualiter instinctu deitatis ^ et auspice cultu
F.st nggressa t^ia m&morando iiohills acta y
Qua sacrosancti i>iolanles jura sepuJchri
D/'gfia recepertint meriii commercia prat>i.
Incjuc suis Jrancis antiqua resurgere Troja
Ccfpity el edomuit Ciiristo contraria regno.
j'ajouterai seulement le portrait de Godefroy :
Inclytits ilh ducum Godijridiis culmen honosqu*
Omnibus exemplum honitatls jnililiceque-^
Sire hasta jaculans cpquaret parthica tela f
Cominus autjeriens tei ebraretjerrea scuta,
Seu gladio pugans carnes resecaret et ossa ,
Sii>e-eques atque pedts propellcret agmina densa ,
Hie inimiciJjis cunctis sibi conciliatis
Cunctis possessis pro Vhrisli pace relictis ^^
Arripuit cal/em Christum sectando vocantein.
Le poeme finit par la prise de Jt'rusalera.
Laurence de Vrrone , qui ll^urii vers I'an 112.0^
^crivitun poeme lieroVqueeiiylivres, inxhvX:". IierLcn%
in Majoricii pisaaoruni. EduiU Ugkellus , torn. 3
JtaLLce sacrce.
Mais ces anciens poefe* latins moderncs sent
frt^e-infurieurs en merit et en reputation a Phi-
lip-je Gault ^ler on Gttut'ii.T dj Giitaiilon , le pre-
mier des po( tes latins modernes qui paroit <JVoir
eu uoe eliucellc du vrai g^iii^ j>o6tique. II 6toiC
5-2 Hislolre Utterairt du moyen di;e.
prevot des chanoines de To'irntjy , vers I'an 1200
suivani .M. Warlou , qui a dohi 6 plus'eurs 6chan-
tilloiis de son sijle dans la- secoiide dissertatiou
qu'il a mise a Id lete de son. exceilente HistoLe
de La Poesie angiaise. J'ajoutfrai seuleineiil ici
que la meilLure edition de son Alexandrelde ^
poeine hcroique en div livres sur Ale^:andre-le-
Grand , et celle faite' a Lejde , in-4° , en i558(i).
Le jiidicieux Warton a rgalement fait connoitre
dans la dissertation dont j'ai deja parl6 , le m^rite*
sup^rieur de Joseph Iscanus ou de Joseph d'Exeler ;
et il n'a pas manque de parler de deux pcetes
^piques latins de la meme epoqu;' , qui ont beau-
coup de merite pOur I^ ie; q :: dans iequel ils ont
vecu 5 savoir , Gunther el G uiilaume de Brctagne y
le premier etoit un moine dllemand , qui a ecrit
apres I'an TI08 , ei a laisse plusieurs ouvrages liisto-
riques et poetiques , c t jiarticuiierement deux dans le
genre de Pcpop^e 5 savoir , Ic Solymaiiunv ^ poeme
sur la pri;.e de J^^rusaldm par Godjlroi de Bouillon,
et un autre intitule Llguruius ^ sur les exploits
de I'empereur Frederic Barberousse , ouvra'ie qu'il
termina pendant la vie de ce prince , le premier
ii'a jamais el^iraprime, il y a eu plusienrs editions
du dernier, dont une a ete donnce par le celebr^
Melanciiton en 1569. On verra par Les vers suivans ,
oil il parie de lui-meme . que son merite nature!
etoit estimable a beaucoiAp d'(^^gards :
{i) Je crois qu'on trbuve un extrait <I« ce poeioe dana
J'Aija^e liiteiaire de Freroo,
Tories lathis^ e'h^ques. 5"
Hoc <jno(jue mcjamce , si desint ccetera , solum
Conciliare potest , quod jam per multa latenics
Sceciila \ nee clausis prodire penotibus ausas
Piet ides (.idgare pare j priscumcfue nitorem
Jledderc carniinihus j laidoscjuc cllare po'elas.
Guillaume de Bretggne efoit prc'cepteur d: Pierre
Charles , fils iiaturel de Philippe Auguste , roi de
France ; il adressa a son pupillo un poeme inti ul6
KarLotls , qui n'a pas et- encore public 5 ma is son
plus <.rand ouvrage , appcle PkUippis , poeme hc-
roiqueen douzelivres , est impriine dans les collec-
tions de Duchesne et de Pitlioii , et separea en t clans
im volume in-4''. avec un long commentaire do
Barthius. Malgre les eloges accordes a cet auteur
par son savant commentateur , qui le met au-dessus
detous ses • conteraporains , il me paroit inferieur ,
pour la verve poetiqus , a ses trois rivaux , Gautier
de Cuatillon , Iscanus et Gunl'icr. Cependant son
ouvrage n'est point du tout a mepriser quant au stj-le ,
et il peut elre rcgarde comnie un precieux tableau
des temps dans lesquels il a v'^cii, car il joua lal-
meme un role dans un grand nombre d.^s artions
qu'il dccrit. II s'est propose de celeLrer/les exploits
dc Pliihppe AugustiL^ , et il termine son poeme a
la moii de ce monarque , arriv^e en I223. II adrcs.se
.son ouvnige , dans deux dedicacespoetiques Sv^par^es^
a Louis, successeur de Philippe, et a Pierre Char-
les, son fds naiurel, qui ftil eveque de Nojon, en
1240 , et mourut en 1249. II paroit avoir ete engage
a comi.oscr soji pcKMiie , p ir V Alexandrcide.
D 3
5a Histohe litrc'raire du nwyen age.
de Gai^thipr, a laquolle 11 a fait allusion dans lc5
vers sui^ai>s adresets a Louis :
Oesta duels Macedum ceJebri describere versa
Si, licuit , Guoltere , Ubi , qvce sola relatu
multUago docuit te 0ocijerar,ojamce....
Cur ego quce no>n , propria qu<x Iwnlne ndi ,
jS'on ausim magni magnalia scribere regis. ,
Qui nee Ahxandro minor est i'irtute , nee illo
Vrli Romuiece lolum Cfui suldidit orbem ?
11 trom-e aussi Toccasion , dans deux aulres par-
lies de son toeme,de rendre un nouvel bo3r-mage
a Gaudner a.ui il reconro.t qu>n est inlenei.r en ta-^
lent po^tique, quoi<rae sou admirateur , Eartbius,
n'en convienm pas.Leleeleur pomraiugev de leurs
taltns respeetifs, eu ccmp.^uan. le passage que M,
•Wartop a cit^ de VALe^aadrelde , ^vec ks veis.
suivans, dans lesquels Gudlau.ue cle Bretagne se
sert de la meme coniparaison que son predecesseui ,
m comparant Philippe , son heros , a un jcune lion,
Bex doht ereptarn comiUm sihi .Jreudit , ct irc^.
Occuhare nequit leclos sub pectore motus ,
JSam Rubor iu vultu dupUcatus prodit aperU
Quam gravis iUustiem trahiPindignaUo menicm.
Qualiter in Ijbicis spumante IcuucuJo rictu
SalHbus unguejerox, et dcnUbn. asper adanus ,
Fort's et horrisonis anno jam pene secundo j
Cuit'enatcris venabula forte per armos
Bescendere Uui stringentia s-uTnere. corpus ,
Collarigenshirsutajubis d.csc^vit in hosttm
Jam retrocederitem , nee earn tetigisse polentem ^
Cum nihil exjacto referat nisi dedecus illo,
$fe^ mqra nee requies , cjuin j^^n deghUat ipsum ^
Po'c'lcs latins , cpiquts^ 55
jSi pnuhns Jwstis pra'ie)ito cvspide scuio
T'n'p;iiihus objecto j dum dat vestigia retro ,'
In loca se relraJiat tion imimpeiida leoni ,
Sic piicr in comitem rex dehacchatur , el ipsurrk
Subsequititr presso relegens I'est-gia gressu.
Je rappoiieral eHCore ici le passage sui snt du
Xl-'i'e livre, parce qu'il coiitieiit un portra't anim6
et line comparaison plus iieiive (}ue la pr^ce-
deiite.
^t leei>o in cornu , qui niiUi ivarte sccundus ^
Bolonides pugiicp insislit J cui f'axitnts iiigcns ^
ISunc implet de<rtram , rix itJli bujuhi , qualcin
Jfi BaccJii Jegtmus portasse capanea cunas y
Qitam vix JcBinineo dejecit Jupiter ictu.
Nunc culter vitce inipatjeiis , nunc sanguine pugtsi
3Iucro rubens , gemina e subliini rertive jUlgens
Cornua conus agil , superascjue eduxil in auras
E costis assumpta nigris , qiuisj'aucis in antra
Bianchia balenoe Brilici coiit incoJa pnnti /
T~t qui magnus erat magncv super add:ta mpli
3Iajorem Jaceret pliantaslica pompa vidcri.
u4c vchit in saltus scopulnsa Bier i a salta
Prcecipili niitlil ingenti corpore cerium , \
Cujiis multifidos nu/uei nut a cornibus annos ,
Jilense sub octobri nondun r e pteiti.br e per acta y
ylnnua quandit novis P'enus inciiat ignibus il.'um f
Cursitat in cervos-ramosa J'ronte inimres j
Omnibus lit pulsis rictor sub teo/nine jirci
Connubio ccrvam solus sibi subdat amatam.
Hand seciis e pcdituni medio f qtiibus ipse rotunda
Ut castro cauta se circninsepscral arte ,
J*rosiliens volat in Thi^inain, lioberllgenasquc
JDrocarum coniilcm j Belimeenumque Philippurr% . .]
JiolonidfS,
D4.
^6 His (0 ire littcraire du moyen age.
Guillaume de Bretagne fut immedfatement rem-
place par i.n homme qui paroit I'avoir au nioins egal(i
comrae pot (e latin. Get aufeur se nominoit Nicolas
Dobrai. II t'crivit lui poeme lieroique sur les actions
de Louis Vril , apres la mort de ce monarque j et
il 1^' d'dia a Guillaume d'Auvergne , qui fut eveque
de Paris depiris 1228 jusqu'en 1248. Pour donner un©
idee de son talent dans le genre descriptif , je clioi^
sirai le passage suivant, qui^ fait partie d'uiie longu&
description d'une coupe presentee au roi , lors do s'^a.
avenemeiit a la couronne.
Parant intiare palatta regis
Magnifici cities j gratissima donajerentcs _,
Tegmina qucs ornant (Jarils inscidpla figurii ;
JEt patrem pctrlce jvcundd voce salutant ,
F.I genihus fexls picuschlani dlila dona.....
Ojfertur crater ^ cjucm , si sit credere dignurn y
Perditus ingeniojahricant Muhiher awo ;
3Targine crateris totus depingitiir orhis ,
Et series reriirn bret^ibus distinc/a figuris :
lllic pontus erat , iellus , et pendulus aer ,
Jgnis ad alia volans Qxli super eminet illis ;
Quatuor in partes or bis distinguitur , in gens
Circuit oceanus immensisjluctibus orbem.
Ingenio natnra suo duo luminajecit
Fea:a tenore poli , mundifamulantia rebus.
L'auteur pdnt ensuile Thebes et Troie , telles qu©
c?s deux villes sont rqpreseiilees sur cetle superle
coupe ;et il termine la descrip ion de cet ouvrage,
p-T Ids quatre vers suivans , assez bons pour \i
sitcie dans lequel ils ont ete fajts.
Poc'trs laths , e'piques. 5j
TlTaitis adidteiium resupino margin e pinxit
Mu'ulbei f et cenerem la<jiieis cum rnaite ligafif ,
Plitraqiie ccelassel stib rnaigine , scd piidor illl
Obsiat , ct iugeiiUs renof-'atur causa doloris. '
Ce pob'me , que Pauteur paroit avoir laissd im-
parfait , est imprirae dans le cinquieme voIiimig ({qs
Script a Francorum cle DucJiesnP. On dit (jua
I'Angleterre a produil iin autre porte iieroVqne (I'uii
grand merile , qui a cek'bre en vers latins les e.xptoils
de E.icba1i'd I.^f , et qui fiit nppij'le GuUeLni'ts
Peregrinus _, parce qu'il suivit ce prince dans ! i
Teire Sainte. Lelancl en parle , en le npmniait
GuUlaume de Cantio ^ et Pitt I'appelle le premier
sans contredit des poetes anglais de sox\ temps ; mais
je n'ai pas pu drcouvrir que son poeme eat jamais
^te imprira6, et les diderens biographes qui en ont
parI6 , ne nous disent pas on se trouve le manuscrii.
On presume ([ue la langue latiae a et6 cuUivre
avcc encore plus de succes en Itaiie, et le relaV.is-
sement de la pure'le de cet idiome est attribue ( u
grande'partie h Alberlino Mussato , dor.t le savant
auteur de TEssni sur Pope nous a fait coAnoilre le
premier le mc'rite. Mussato, ne a Padoue, c'toitd'mi
rang distingue , ct avoit de grands lalei'is; mais il fut
rnalhcureux. II mourut en exil , en 1329 , ct laissa ,
indep^ndaniment d'un grand nombre de pisces moms
c (Misid(?rables , un poeme beroKiue , inlitul# : Do
gedtis Jtaloruiii post Henricum VII Cccsarcni ,
6eu de obsidione Doinini Canis Grand is dc
Verona circa inceiiia Padua ncE cicitatis et con^
Jlii^lu ejus. — Quadrioj dai^s bquei je trauscr.s cei
5S Hntoire lU'ernire du moyin a^re.
titrp , flit nne cot ouv rnge est imprini6 clans le dixienao
volume de Muratori ; Vossius , qui pavK' de lui
comine (run lii-itorien, assure qu'il coinmanda dans
la guerre qui Forme le suje! deson poi'me.
Peu d'annees anres la inort do Mu.ssato, P^trarque
recut le laurier a Rome pour son poema ^pique
latin , inJiiul^ JJrica : ouvrage qui a tellenient
dechu de la liaute reputation qu'il a ohtemie autre-
fois , que le grand admirat^ur et entbousiaste ile
P^lrarqne, quia pnbli6 trois volu;nes interessans in-
4°. sur sa vie, arpelle ch poeme ufv ouijrage sa/is
cliateur ^ sans irn^enUorij sans interet ^ qui red
pas mime Le nierUe de La uersificatlon et duo sUjLe,
et dont U est LmpossibLe de souiciiir La Lecture.
Je dois cependaut observer que Le Tasse , dans son
Essai sur la poesie epique, fait un tres-grand elog,9
de I'endroit de ce poeiiie oii Petrarque c^U'bre les
amours de Sophonisbe et de Masinissa. En effet , la
critique de c^t ecrivain , qui a rendu amplement
justice an meiite de P6trarque a tous autres ^gards >
me paroit infmiment trop severe. II y a dans ce
poeme qni est neglige , un grand nombre d'autres
endroils qui sont con(;;us aveo beaucoup de force et
d'imagination , et qui sont exprim^s avec une egale
^l^gance de style. Je vais rapporter quelques vers de
ce morceau que Le Tasse a honore de ses eloges.
Ces vers peignent la douleur du jeune prince
nuraide , lorsqu*il est contraint d'abandonner soa
amante.
Vohitur inde ihoro , ( efuoniam suh pec tore pernor
€(9t>ii amor ^ lacerantque truces prcecordia euros )
ToFtes latins , ' epi'jues. 5 9
Urifiir f ini'igilant moeror ^ metus , itayjiirorque ;
Siepe e' gbse'Ltem lacrjmans duni stii/i^it cniicain ^
Sopjje thoro de-cilt amplexus et dulcia verba
"• JPoitquam nulla I'alent i^iolentnjiceiia dolovi ,
Inclptty el lonQis sol{ilur dainna cjucrclis '
Cina mihi niiniuai , t^ita mihl daicior urnnl y
ScpJionisba cale ! non tc , mca cw.a , uidcbo
J.eniter cctlieieos pvst hue compoucre callus j
Fffusosque auro religantetn ex mrtie capillos j
flulcia non caelum mulcentia verba JJ:osqu9
Oris odurati sacrelaque inurmitra carpain.
Solus ero 3 gelidxjiic insternam nieinbra cubili ;
uitque utinam socio componat aniica sepulchro )
ilt siniul hie vctitos , illic concordiler an.nos j
Contingat duxisse mihi sors optima busti.
'$i cinis aniborum commix/is morte tneduUis
JJnus erit y Scipio nostras non scindet ainurcsu
O utinam infernis etiam nunc una lalebris
Zlinhra simus J liceat pariter per claustra t>agari
Jilyrtca y nee nostras Scipio disjungat ainores»
Jbimus una ambo flcntes et passihus iisdem
Jbiihus , ceterno oonnexijcedere ; nee nos
Feiieus aut jsquos Scip-'o interrunipet amores.
La catastroj lie bien connue de riafaiiunee Sopho-
nisbe est racont e d'une m-^niere riv:^ et po^lique.
La fin de sa vie et sa premitre entree chez lei
jnorts sout pai ticulieremenl Irappanles.
Ilia manit pateramque t^ncns et lumina coelo
u4.tt aliens 3 sol alme j inquit j superiquz , valete !
Masinissa j vale ! nostri menior ; iade malignum
f5eu sitiens hauiit non inotd front e renenum _,
Tartareasque petit violcntus spiritas umbras.
4Vtilta magis S/jgios mii'antum ohscssa. corona
I7jnbra lacus suliit j puslquam diiisa tiijoiraii
fd Histoire littcraire du moycn age.
Partibiis haud cequis stellt ingens machlna mundi,
Oblutu attonifo slahanl horrentia ciiciun
.Agmina Pcenarum ^ sparsoque rigentia villo
Euinenidum tacitis inhiabant rictibus ova.
JRegia vis oculis inerat , pallorque verendus ,
Fa retus egregia majestasj^rontc mavebat.
Indignata tamen superis ^ irataquc inorti y
Jbat , et cxiguo dejigcns luinina Jlexu,
Je terminprai par P(§trarqiie* cet examen succinct
dcscjut 'urs Irop iK^gl^gi^s, qui ontdcvit des po'meslie-
roiVjues fn latia pendant: Je coiirs du moyen age.
Une circonsfance partlcu! ere me force cependant
a ajouler un autre nom a la Ilfte prcctxlente. Jean ,
abbe de Pele?borou\:h ,, t^ciivfl , sous le regne
d'Edounrd III , nu po.nre h-'roiquo , inlllult' i BelUini,
'Nav'arrense _, i366 ^ de Petro rege Ara^ordce et
JEdfvardo principle. On dit qtie cct ouvrage , qui
conlient f^6o .vers , est conserve en maiiuscrit dans la
bibliothecjue Bod'ei'^nne ; el je Tai era digne d'etre
connu , pane qu'd traite un sujet sur lequel
Dryden nousapprend qu'il avoit eu autrefois le projet
de coinj..o er un ; o me epique.
Parrai le grand nombre de po;'mes epiques latins
que les siecles plus modernes out produits, la Cliris-
tiade de Vida , la Sarcods de Masenius , et le
Constandn de Mairbrun meyparoissent ceux qui me-
ri-tent le plus qu'ou y fasse attention ;maisces poemes
mei es sont rareraent lus ; et en effet, le poete qui ,
dans un age cclaire , aime mieux se servir d'une langue
morle que d'une langue vivante , ne doit s'atlendre^
ainsi qu'il le mi^rile peut-etre, qu'a fixer Tattentioa
Foctes latins , epiques, 6i
d'un petit nombre de snvans vivant dans la re-
traite (i), A. M. H. Boulard.
B I B L I 0 G R A PHI E.
Notice sur Us travauK typograpkiqv.es et litie'paires
des Anglais dans i'lnde.
iiE but de cette* notice n'e?l pas uni'queraent de
rtfro-))! r una lacune dans I'iiisloire da, la bibliogra-
-p'lif^^j''et de satsfaire \n cuiiosite de qiielques ^a:-
vans',' nous voudrions aussi exciter I'emulat on de nos
concitoyens, et iixcr leur attention sur ..ii genre de
litterature dont Timportance a etc jusqu'a present
(i) Note du tradiicteur. Hailey a. adop,te ici rppinion d«
plusieuirs ecrivains celebros de nos juurs , qui bat ^ je crois ,
iiui aux Icttres , en dcccuragcant ceux qui se liv-roient'a la
pocsie latine. Uri grand pocte francais ( UeliHe) a observe que
renlrave de la rime suffit pour rendre la poesie francais'e
beaucoup plus difficile que la pocsie latine ; Scaevole
de Sainte-Marte a ccnujose ua e.vcellent poaaie latin . appele
\x Pcedoitophie^ Qises vers franc.ais sent pitoyablfs. Rapia
ft auroit pas pu faire de vers dans notre langue , et'son poi-me
des Jardins est un ouvrage tri^s-estimable. L'art poi'tique de
\ida est un chef-d'oeuvre. Les pottes latins parleht la langue
univcrselle des hommss ii siruits j Adisson , Buclianan ,
Dobson , et beaucoup d'autres ont pa^rle avec succi-s la langue
de Virgile ; et tel qui peut exceller drns ce genre , no pourra
pas etre boii poete dms un idi m_' moderno. Ke nous privoi s
done d'uucun ti'ei;t prtcieax. Encouragons tous ceux qui
essai-'nt ou i!e nous deiaiser ou^ds aaus instiuiis j et J»«
decouragouus 't^ersoui;e.
Ca Typographic.
meconnuc , cA pour Irquel rous avons cercndnni ail*
tant do moyeiis qu'auiJiie autre naiioii de I'Europe*
Depuis qiielqiies aniiees le gouvern?ment anglais
a voulu dinger la politique inlerieurc et radmi-
iiislration civile de toutes ses possessions terri-
toriales en Asie. Le Bengale sur-tout meritoit son
atlentio!! ; -uae cour supr^^me de justice-vient d'j
^tre etabiie, et.ce royaume fa't mainienant parlie
inlegranle de la Grand ■ -liictagiie. B eitti'it il a
fallu s'occuper des mojens d\'tablir une coramuni-
calion facile et directe entre Ics Europeans qui gO'ii-
'Vernent et les ladiens qui ob6issent. Le langate et
Tecriture sont incoutestablemeut les premiers de ces
mojens ct ceux dont on s'cst jusqu'a present le
inoins occupe en Europe , comnie I'observe judicieu'-
sement le r,avaiit IlaltHd (r). L'elegantet fidele his-
torieii de I'lnde , M. Ormes avoit appris par un
long si^jonr dans ces contrees loiutalnes et par la
frequentation desnalurcls , combien il est dangeareux
de conficr cles iiegociations politir iies ou coramer-
dales a des inlerpreles et a des courtiers du pays;
il a fortement insisle anpres de ses compatriotes sul-
la necessile de n'employer a leur service cpie des
Anglais Lien verses dans les langves de I'lnde.
Jieux ct'leLres gouverneurs-g6ncraux du Bengale ,
Vansittart et Hastings , ne se sont point bornes a de
simples invitations , ils out pensioinie des sayans
pour cju'ils se iivrassent eo»:clusivenient a cette <^tude,
(l) Aute-iir de la traduction arglaise du code des Gentovs ,
«t d'une gramiUHire Bei^gale , iuiptimec u Houglj , dont
jaous par'.jfrons l.icritOt,
TrCivcikx typof^rapkiqnes des Anglah dans Clnle. 63
et qu'ils composassent des livres el(^mentaires. Qiiel-
ques-iins de ces ouvrages furent iinprim^s a Oxford
et a Londres^ mais leur expedition pour Tlnde
^pronvoit ensuite des lenteurs qui firent sentir la
ji6cessite d'elever une iripri-nerie dans I'liide meme.
Les Hollandajs et les rkinois avoient deja form^
I'.n ('lablissement de ce jienre des l- commence-
ment de ce siecle , dans leurs coinr loirs de Tran*
^qiiebar , de Colombo et de Batavia ; ils firent cons-
truire leurs presses en Europe ♦et porterent des fon-
tes de Tamoule , de Malay et d'Arabe tout;=s
pretes a m^ttre en casse. h^s A.iglais crcerent
tout sur les lieux 5 un spul boii me executa une
entreprise quiexigeoit leconcours d*un grand noml ro
d'artistes ; ses coups d'essai furent des cnefs-d'ceuvre
typographiques. Get bomme vraiment etonnant et
dont le uom m^nte une place distinguee panri les
bienfaiteurs des lettres, est M. Ch:u4es Wdivins ,
savant profbnden.ent verse dans le Sanskrit ,et connu
depuis en Europe par deux ouvrages Iraduits de
celte langue sacree des Brahmanes (r). Presse par
(0 r.e Bhagitatguita , el V Mltopedes de Vichnou Sanaa.
Le premier ouvrage est un Episode du Mahahharat ( I j. grand*
guerre ^Qf, g^ans centre les Diejs ) M. \'\'ilkins prepar*
line traduction coaiplete de ce poeme volumineux.
J'Hilopcdcs ( iusiruction utile ) est un recueil de fabls,
compost par un Brahmane uommc Viciinou-Sarma ; on re-
^arde cet ourrage dans I'lnde comme le prototype des fables
attribiu-es a Pidpat , Lokman et j^sope. J'en ai donne ua
•xtraitdans la premiere partiede mes Fableset Contes Indiens,
prgctJt.<! d'an discnurs tur la relijJivn ^ Us antiqniUs »t /««
tnCBurs da*- HinJuuM.
64 TyhO(irap}ue.
les soHicitations de M. Hast-ngs , et sans clou te par im
gout iiatnrel pour tout ce vm a rapporl^aJaliifC-
lalure orientale , il s'essa"a sur les caraclei^es ben-
gales ique leurs formes embarrass6es et de longueur
inccale relident rel.ejlj^s aux proc^'di's tj;''pographi^
cjues. Sans alterer ces formes M. Wilkins leur don-
lia plus de regularity, et narvint a taiiler un nl-
pliabet .bengale d'envno) ]5o poin cons Ir^s-clc' gars
et d'llu beau fuii. La ionte lui pr^'senloit de nou-
yelles difficultes, il sut cgalement les surmonter en
employ ant des proc dts inusitts parmi nos fondeiirs
de caracteres europ^ens , coiiime de diviser une ligne
en plusieurs corps , de faire cirener les leltres de
maniore qu'elle enchevretejit les uae sur les autres j
de les f rotter an vif , afm que plusieurs p>lombs ne
former.t qu'une seule lettre sans qu'on voj/e les jonc-
t'.ons, etc. M. Wilkins travaisla ensuite a la casse
et forma des compositeurs. Des 1778 on publia a
Hougly la grammaire bengale de Halhed , dont I'exe-
cution typographique lionoveroit nos plus cclebres
presses d'Europe.
Get lieureux succes d(^termina M. Wilkins a une
seconde entrepfise du meme genre et non moin^
"considerable que la premiere , mais que I'expc'-
rience lui rendoit plus facile. Le Per?an , dont on con-
noit I'utilit^ indispensable pour traiter avec les
Wibdb ou princes musulmans de l'|nde et avec
leurs sujets , ciFroit une nouyelle carriere a ses talens
tvpographiques. On s'est contentc jusqu'a present eii
Europe d'imprimer les textes originaux de ce:te
laiigue ax-ec de grotesques caracteres arabes, telle-
nient
Travaux typograpkiquEs des Anglais dansVInde. 65
rtieint d^figures que les naturels de la Perse ou de
I'Jjide ne peav^nt les lire , et que les Europ(^ens, qui
s'j sont d'abord accoutumes' dans los graminaires
et autres livres el^inentair^s, cpiouvent des diflicuii6s
decourageantes a la premier^ inspection de? m^iius-
crits/Maitre de son burin, M. V^Tilkins a os^ 'nva-
liser le Calame des p!ui'habiles Mo unchi/s ou
(^crivains ^ersans, et 'l6s a egales. II a imagiA^ et
taille ses poin-ons qui irhrtenl parfaitement le taa--
lyq ^ caractere'cursif des Persans (i), dans lequel sont
Perils tons les ouvrages de littejrature , et consequem-
ment tres-propre a la promulgation des actes du
gouverneraent.
« L. L A N 6 L E S.
HISTOIRE DES ARTS.
}< 0 TiCE d'une gravure de 1467, trouvee a la
hihUiotheqne puhlique de Strasbourg , par JtR-
Jacques Oberlin , professeur et biblifthe'caire.
X ARMi les Arts dont I'inveiition appartient k la
.nation aliemande , deux des plus remarquables
sont I'imprimerie et la gravure en taille-douce. Elle
les fit Colore I'un et I'autre au quinzieme si^cle, au
terns meme oii I'aurore de la litterature renaissanta
commencoit a pei^er les tenebres de I'ignorance. Oa
(i) L'impruneric uationale possMe un caract^re taaljq ,
plus Lean c[_ue celul des Angliis ; mais il n'a jamais servi,
quolque lespoin(jons aijjut ete taille* il j a plus de i5o ans.
Tome, 11. £
6eJ Hisloire des Arts.
conserve arec soln les. premiers monumens fypo-
grapiiiquesj et on les a fait servir k moutrer par
qu'.'ls degres cet Art bienfaisant a ^Xk^ porte a sa perfec-
i-Oii.
Les amaleurs de I'Art du desslii etde tousceux qui
en dependent, ne sont pas moins attentifs a recneil ir
les premieres gravureset ales ranger, aidant qn'il se
]xnit , siiivant la date et les auteurs. On a d'autant
)3lnsde peine a former ces colie<:lions,que cesoatpour
la plu_ art des estampes isolees, qu'onavoit negligees
depu is qu'elles sont sorties du burin. Eiles furent fre-
que -ment emplojees a orner la partie ijntt'rieure des
reliur.^s. C'est la que j'en ai trouv^ ciuelques-unes
de fort interessantes dans des livres relies au X\^.™«
siecle, et qui sont conserves a notu bibliolheque
publique. Gelle -dont je parle ici , racriie d'autant
pins i'atlenfiou des connoisseure, qu'elle porte sa
data et les sigles du graveur , duquel on connoit
encore quelqnes autres lieces.
La gravure a 5 pouces 8 lignet de liaut et 4pouces
de large. .5ur le devant de Testarape on voit une
personne a penoux ; elle est sans barbe, vetue d'une
longue robe ; el'e est fort pensive, ecrivant dans un
livre : a son cote pend une boite; h ses pieds on
voit une ecritoire, et a c6t6 un ^lui qui y est attach^
pir une cLaine, et qui ressemble a un ^tui d'iastru-
nent demusiqu?. Devant luise tient un ciigledebo'Jt.
Derri^re cet1e personne est une foret dans laquelie
se montrent un lion, et un clieval qui se cabre. La fjrct
«st bordv'e par la mer , par laquelle S. Ci'ristople,
ieriant en main un arbfe pour baton, porte Jesus^
Gravure de 14^)7. 67
Clirisf. On decouvre une ville dansle lointaio. A c6t6
seprt^sente line autre ville forlifice, au sommet d'un
i-ochcr, et dans les airs la Vierge toute enlour(^e de
rayons, avecl'Enfaiit J^sus dans ses bras.Au has du
rocher coule une riviere dans laquelie nagent des
cvenes.
Le sujel de cettep'anche paroit ^Ire tire de TApo-
caljpse de S. Jean, chap, aij 011^ par une virion, la
sainie cite de Jeru al m lui est montree au sommet
d'une haute monlagne ; 'es rajons dont est enlouree
la Vierge , seroient la pour rcpr^senter la spl?ndeur
tie la cil^, i]lumin^.e par la gloire de I'Elernel.
li'altitude de TEvang^^liste me paroit confirmer cette
id^e. Peut-etie meme que le fleuve et la foret font
allusion a ce qui est rapporte au chapitre suivant.
Quoi quM en soit, le burin est d'une grande finesse;
mais le dessin a de la roideur et n'esJ pas exact. Les
plis de la draperie ont des angles trop saillans.
Le nom de i'ariiste est un probleme, li Taut le
deviuer par L:s sigles gothiques E S^ entre lesquelles
«e lit I'annee 1467. M de Murr^ savant litterateur
de Nuremberg , dans VHistoire de la grai^ure
avaul le lemps cC Albert Durer ( ir.s^ree daus le
«ecoud volume <.le sou Jour-bat alieuiaud Hes Arts
et de la lUterature ), donne la description d'une
^utre piece soitie de la main du me:ne anteur, et
marquee de la meme i^^aniere que la notre. Elle
represente le mouastere d'Einsiedlen enSuiss^^j con-
sacre par les an_es. L'ius Tiption porte : Dls 1st die
etii^elwelli x>a unsrer UebenFraube^ den E ins Led'
lea ( Gest La la consecration faite par les anges
de la JSotre-Dame d'Einsiedlen. )
6g Histoire des Arts,
M. Knorr, dans son Histoire des artistes ^ a
pretend Li que les sigles en question devoient s'ex-
pliquer de Conrai Sckwelnhelm ; mais, outre que
la premiere kttre est evidemment une E et non ua
C, ce Sckwelnhelm^ n'a point et^ graveur. II est
en droit de revendiquer Li gloire d*une invention
fort utile encore, ajant ete le premier qui ait
imprim6 des cartes geograpbiques 5 pratique qu'il
pe quitta qu'a sa niort, arrives en 1478. Au terns
marqu6 fleurissoit la famille des Scfioens , parmi les-
quels le nommQ Martin a laisi^ beaucoup de gra-
vures. Si je ne me trompe , il y eut aussi un Ernest
ou Ernst Sckoen, et, cela etant , ce pourroit bien
etre la I'artiste auquel appartiefit la gravure en
question, selon loute apparence. Christ parle de la
meme gravure, sans oser prononcer sur Texplicatjon
du nom de I'artiste. Voyez sou TraltS ^crit en
langue allemande ^ sur Les monogranies des
pelntres ^ graveurs et autres artistes. ,
B I O G R A P H I E.
Notice sur la vie et les ouvrages de CristophE'
Gabriel Allegrain.
iN ou s V€nons de p6*rdre un de nos plus habiles
ficulpteurs, Crlstophe-GabrleL AUegraln , que la
mort nous a enlev6 la 17 avril 1795 ( v. s. ) 5 ^1
^toit ag6 de quatre-vingts ans et demi^ ^tant 116 au
laaois d'octobre J710.
Notice 5ur AUegrain, 6g
Cet artlite , 61ev^ dans le sein des arts , ^toit hd-«
ritier d'un nom deja counu par des fableaux de paj-«
sages qui avoient procure a son pere et a son ai'eul
nne honorable entree dans I'academie de peinture.
Jete dans une carriere plus vaste , I'artiste que
nous regretlons^a rendu le nom ^ Alle grain vrai-
ment celebre.
Depuis \e Paget jusqu'a nos jours, on ne con-
Boit pas de sculpteur qui ait su rendre mieux que
kri /d moelleiLX et la fiaesse des chairs. AUegrain
tenoit de la nature seule un don si rare el si pre-
cieux ; il I'avoit fait germer en copiant cette vraie
iii^re dels arts , en Pobservant sans cesse , et par ra
travail continuel il avoit appris a la bien choisir ,
et s'etoit peaetre de la plus vive ambition d'en ex-
primer les beautt'-s.
. J.l parvint a la satisfaire d^autant plus sureirient
qu'il ne suivit aucun sjsteme ^tratager a son godt
particulier.
II ^coutoit avec plaisir les avis des statuaires les
plus estinlablbs de son temps ^et s|i^cialement ceux de
Pigal dont il avoit Spouse la soeiir a. I'age de Z2 aus ;
mais il n'a jamais renonce a la ierme volonte de
;n'altendre de progres que de sa niauit re de voii' et
de sentir. Si cette luarclie dans les etudes a I'aya©^
tage de procurer uu genre de m^ri'te vraiment ori-
ginal , eile a aussi le grand inconvhiient de soulevct
ccHitre soi tons les liommes a Viei-lles routinosw^ m
Cependant AUegrain avoit sa vbinere les difKcutr
t^s qui s'eloient oppos^es a sen- entree aTacademid
*le peinture et de sculpture. J£Ue& »j remouli-odenr
7d Biograf'hU.
souvent ■ quand on y apportoit un talent ncuf ef
qu'on n'etoit done ni de souplesse xii d*adresse
d'esprit. A'legrain y etoit ignore, quelqics membres
xnemele n.^prisoient , parce qu'il avoitcru a la pos-
sibility d'atteindre a la perfection , en faisant avec
application les .ouvrages les plus communs et ks
moins pajes. II disoit souvvnt qu'il avoit employe
son ciscau assez long-temps pour un ctTiaiu Mart n,
entrepreneur de sculptures de batimens , a raison
de sept francs par seniaine, et que ce genre de tra-
vail n'avoit pas ete perdu pour ses progres.
En effet il se pr^senta a racad^.mie et y fut recu
en 1751 , sur une Elegante figure de j<une homme,
dans laquelle Narclsse nous paroit cette fois bien
excufable d'etre amoureux de soi-merae. Si la tete
de cpttp fig'ire r'a pas la soLidite ni la grandeur
de forme de la sculpture antique^ on n'j pent pas
souhaiter plus de navvet^ , de graces etd'amabi-
lit^. Les proportions du corps , I' enseni'd I e exact ,
rdunis a Thanronie de toutes les parties , les finesses
des passages , et le choix heureux de ['attitude ,
rcndront loujours ce pr^citux morceau digne d'ua
artiste distingu^.
Maisc'est avec une superiorite bien plus decisive en-
code qu*Allegrain a manifest^ I'^tendue de son savoir
dans une figure de Vdnns dont il fut charg^ pour Ma-
dame Dubarry. Tout ce que Part de scu^pter pent
pr^sejiter de mo/didesse et de graces, so^i dans Tcs
iKcuvemens, soit dans {'execution, se trouve rassem-
bl^ dans cttte statue enchanteresse.
Quelques annees apies AUegrain. fit dans son ata*
Ker I'exposition piibliqu€ fl'iihe Diane que les connoia^
Seurs les p'us difficiles jug^rent dlgne de toute leiil^
admi rat oh. Ce rouveaii di-'f-d'a-uvre avoit la meme
destination que la Venus * il rend diix yeux Ie»
TnoinS evercps tout ce qui pruTcaract^riser la d^ess^
de la cbasse et !a sosuf d'Apolloii , par des formes
plus soutenues et par un sfjle plus gravre que I'au*
teur n'en avoit enii-Ioje pour la deesse de la Voluptc'.
La precision _du caracilre propre n'eAciut pas datw
la belle figure dont nous par'ons, cfs touclies deli-
cates , ces de'ails fins et prc^cieux , enfin cefie per^
fection de rendu si rare, qui distingueront toujours
les beaux marbres d'Allegrain.
.,■ .Si cet artiste -s'abandonna quelqu'efois tro-p-ft^-soft
gout pour les impressions souples de la chair, et s5
par la quelques-unes de- ses^figures reus 'TOontrent
.unerabonpoint un peii'pxag^r^, c'est uri defautqu*6A
ne pcufe reprdclier aux magnifiqiies statues qui furehl
plac^es da'nis- le jardin de Lucienne en 1780. Lent
auteuT' dut,rapres un-tel surc^S'V^tre piact* au rang
denes premiers statuaires , et l*on ne manqivapas
delui proposer Purte de tQ^ sfcitnes de marbres d<!^ti»
n^es a former la galerie dcs grands horames de la
Prance, dans le ctrf^tume de Icur temps. II la refusa^
disant « qu'il n'aimoit pas a faire -t'hlbmtiie 'en
robe de cli'a nbre ». En efTet , le meiife de ca vrit
les beautt's du corps n*etoit pas celiH'do.'ce'^iMncl
sculp eur. -Gi r . .
" Allegrain n'a point fait dVl^ves ; il es> mrrtrrt's<:i
sans enfaits, qv.oiqu'il en ait'-eu plus'eu''rS'"vd»? '{JoA
premier manage. Veuf depi.ii seize ans^, Il t'»poe:^l
]i4
72 Biographie.
en 17785 Utte p'ersonne (\^\ e^visagea seulewient'Bans
pp^tjB union, \h bonheur qu'on n'j pouvoit tronver
IC|U0 ,paF !u,n vif sentiment ;c}n prix , des talens. i
Nous lerminons ici I'eloge d' Allegrain, parce que ses
ynoeujcs, ii^rent aussi siniples et sa vie interijeu^-e aussi
pliscuse^que ses connoissances dans I'art du.statuair®
furent etenidues, et que son merite est digEie d'eclat
et de c^ebrite. • ' -
El mi) uZ:\-
JsprifiS jur la vie et les qur^gts de ^^AN-jAC'Q.m-S
BARtHELEMY. •:) ">
jJ|,E.ji<Ji^J AC Q u E s B 4:B.T.H EX E M Y naqitit a Au-
J»agne, dans la l^iguerie de Marseille, le 20 Janvier
ji-yi^,. Jl perdit sa m«i|R ('M-agd-eleine.Ilastil) a Page
f^qu^tj^l^g. Son.per^ (^Joseph BaTth^temjO'f'sieva,
jefi, .e3:et^;ant de bonne li€«resa6€nsibTlitt;.'tt.Tou9 les
>,j,0in3-y ©r.rivoit-il^ ux-oiS. perQ-incopscI^e' me pre-
i^ ti^Qiti, p^r.-la m^ini, nje Hjeitioit dans uri endroit
3>«.foJitfiir« 5 ii mc fai&oi| aMeoiB.janpres de^ui, {an-'
^ d'^it-en' lapraes , et isn'exhortoit. a pleiirer-la pliis
» tendj-e des merest Je -pleuroi^ et soulageois; sa dou^
» Ifinr., Gfs scenes attendrissante-is et pendimt iong-
» teipps.i?efi"0uv:elei5s *J fipent \ine: profonde impnefsioia
» smj.moii; coeiir ?>. lUen ne'«y obli^ra ; et c'e3t ainsi
qu'il :s'e>pl-inn<Dit'€ncore;(JaAs les derniers temps de
sa vie. .. .1 • -
,Jj,es, premjeies affec'ti'bns de-: Tame ne peeis^nt
j^<>.nG ja;rn,^i^. J elles, ^seides pr^p^rent et a«surent!"le
fiucces de .t'educaUc?ii« GgMq de cet enfaut 'SeiisiJjkj
Noticd sur Bnrth'Iemy. fS
rj^ussit sans peine, et reponcHt ^icntot au-x e^emrxes
qu'on avoit con^ues de lui. Et^nt eutrc , a Marseille ,
au college de I'Oratoire , il y.ihde rapides protres,
sous le P. Raj-naud, maitre Labile , et conn u d«^ puis
par soa eloquence dans les chaiies de la ca^ilale. II
le quitt^i pour faire ses cour5 ds pliilosopiiie et de
tlieologie , pendcint lesquels il s'appliqua serieuse-
jrient a I'etud? du Grec et des langues orientales-
II sortit du s^minaire, p^oetre, assuroitTil^.dfiS v^-
rites de la religion ^ imiis saus avoir aucuue.AVJca^
lion particulicre pour Texercice du iiiinj%^re .evan^
g^lique. Le jeune Bartbelemy n'avoit 4'.4Pire': ?<-'"•-
chant que eelui de IVtji^de, et d'-autre gput que ceiui
des. ietti-ea. II ne.pppyoit donc,pius'Tt^$<et)en'-prciv
vince, ou Vou a du temps sans mojens , des contiTav
dictions ^.et point d'e/iC()ura-i,ejnens ;-roii h-si^id.'es se
r^ti:e<fisspnt et les -objets s^^boUrsouflent. .Sesjeuxse
tpurner^nt • vecs Paris. En.j.aiwivarLt (^i) ^ Ueu* le
i),QnLUew de Iropver dans le .^dvant de Buze un goide
_su;;^t .un airij^ele , aupres du';utl ilvacquit une
pai:^ie do ,ses,connois5^nces nujjjiignialiques, ;\" ;' :
^,j geJUes-cilui me.viteT§<it bjept&t yiae:pl«c« a:!' Aca-
demic des inscrip.iqns et^ belles-lettres (2) , ct apres
la niort de son ami (3), la garde du caijihct d,s
jnedaiUes. Louis XV sCj^is^ta -devle nohiHier a eeite
derniere plac43 5 avant me^ie qtte.d'Arg«HSQn'lui en
eutfciit la proposition. ^f> mindsire ^e co^noissoit en
liommes de lettres , ej, fiOUsuGrage,:, q»»fei i*on:ii*obH
' Tt) En 1744.
' '(2) £11' 1747«
(^3) Jiu 1753.
74 ^lO^rflhhig,
lenoit pas ais^ment , valoit bien celiii du aionarquei
Des-iors raccroissement dc ce precieux depot de-
vint I'obj tries so ns de I'actif B.irtlY''em -. lis n'^us-
sireii* au point que le nombre des medaJles anli-
qii?s a tl6 doub'e par I'acquisilion de plus de vingt
mille, tirees dc* differens caliiiets , fruit de ses pres-
santes sollicitations aupres desministres de Louis XV
et de Louis XVI. Quelques-unes assez rares soiit
dues a ses recherchesparliculiei^es , dans lui vo age
qu'il fit en Italie. II y perfeclionna sou gout pour
lYtud:? de^ raoi umens anciens 5 s'y montra digne de
sa reputation naissai.t.' , tt s'acquit I'estime d^s horn*"
jnes les plus celebres de ce temps (i\ V^nuti ^ Pa-
ciaudi, Gori, Passeri et O'ivleri , saVans aiitiqtifiir'es ;
E4ouard Corsini, ci ronolo|^,isle lumineux ; Bosco-
wits, Jacquier et Le Sueur, habilesmatbeiraticiens;
Assemanri, gar e de lat' Libli'ofh>que du Vatican,
si Vci's^ dans la btt^rature syriaqus ; Albanl , Pas-
sionei et Sj inelli j qui 1 o.ior i nt la pourpre romaine
par leur savoir ; erfin ce Mazoccbi dont notre voya-
geur ad:]7iroit taut la piet6 , la modeslie et ['erudi-
tion , furent ceux qu'il reel ere ha davantage, et dont
il r. cut I'accue 1 le plus dislingu6.
L'es'time et la reputation ne suffisent pas pour
nous rendre heureux ; c'e:^t au sein de Tamitie qu'il
faut chercber les el(§inens du bonlipur. Barthclemy
trouva le sien dans la cotinoissance de la conitesse
de Stainville, depuis ducbesse' de Cboiseul , et de
son mari , arabassadeur de France a Rome. Qua-
rarUe ans d'un 'attachement aussi pir que la verlu,
CO En 1755.
Xotice snr B.irthe'hir.y. 75
n'avoient pu eflfarer ni affoiblir rinipression qua
fuent alors sur lui les qualiu'-s rar?s et toucliautes
de cette respectctble ainie : il en racoit lui-memCj
cjiielque niois avaiil sa mort , ce portrait : « Ma-
» dame la comtesse de Stainville , a feine agce d«
»"i8ans, jouissoit de cette prol'ordo veiieratioa
15 qu'on n'accorde coiiimuiieiuent qu'a un long exer-
» ci.e de vertu. Tout en elle iiispircit de I'interetj
» son a^e , sa figure, la d^licatet^se de sa sant^,
5> la vivacite qui animoit sa parole et ses actions,
» le desir de plaire qu'il lui <^toit si facile de satis-
« faire , et donl elle rajjportoit les s.icces a un epoux,
» digne objet de sa tendresse et de son culte ; cette
» e treine sensibilitt' qui la rendoit heureuse ou mal-
» heureuse du bonbeur ou du malbeur desauires,
» enfin cette purele d'arae qui ne iui pcrraelloit
» pas de soupconner le ma^ , etc »•
Persou'ie n'ou]:ba moins s.^s a-nis dans la faveur ,
que le due de Gboiseul : aussi personiie n'enconserva
plus dans la disgrace.'Cequi pourtantseroit un phrno-
jnene dans I'liistoiiv du cceur humain, si ce!a ne teuoit
pas ades ciiconslances (|u'on nous di-p.^nserade rap-
peler. Appel^ au m-nistere , et jouissynt d'un grand
credit , cet bommp CvlVuie ;tra au-devant du fidelo
Barfhelenij , el Tacca la , comnie celui-ci se plaisoit
a ie.r/peler , de bienfai s , sans amais attendre d'cn
eiro sollicilr. II oJiut pour Ini des pensions sur des
b'-n^fices et des journaux , la gramle tr^sorerie de
iVglise de S. -Martin a Tours (i) 3 enfin il le nonfma
a la pUice de s cn'tair -general des Suisses et Gri-
i^i) En 1765. Le produitnet de ce benefice etoitde 7000 U
j^ BiogrnpUie,
sons (r). tine pareille fortune ne Pdbloult pas ; il ne
iui qu'einpresse de la partager avec des gens de
iettres qti'il aimoit , et dont les besoins lui etoient
Connus. Quelqiiefois il refusoit pour qu'on leur -
donnat , et plus souvent il se depouilloit en leur ,
faveur. L^ titrs de son revenu fut ainsi sacrifie , oir
plutot , passant en d'autres mains , il ne cessa pas
d'etre pour lui un objct de jouissance. Cependant il
se trou\^oit encore assez riche , et pouvoit se procurer
toufes celles du luxe. Sa moderation Pen pr(^^serva ;
il se permit seuleinent de dire : ct j'aurois pris une
» voiture , si je n'avois craint de rou^ir , en trouvant
» sur mon chemin des gens de lettres qui valoient
« mieux que moi ». Quelques-uris d'entir'eux , Irop
ambitienx pour n'etre pas jaloux, n'epargnerent pas
neanmoins le modesta Barlhcleiny , qui ne repoussa
leurs traits k\ »e dejoua leurs intrigues que par le
fcoil usage de sa fortune. II oleva troisde ses neveux,
aida le resite de sa nombieuse famille , et vint au
secoursdes infortunes, sur-tout quand ils lui parois-
soient avoir un goiit decide pour les lettres. C'etoit a
5es jeux une puissante recommandation ; des etrangers
meme en ressentirent l^s eflets. Mais la bienfaisance
et la generosity ont leurs mysteres , auxquels I'amitio
peut etra initiee , sans avoir pour cela le droit de le*
reveler. Parsons do ic k ses travaux particulicrs , et
voj'-ons ce que la litie^rature doit a ses veilles.
Avant de parlir pour I'ltalie, il avoit hi huit m(^
(i) En Ty68. Cette place valoiL 20,000 liv. de rente , et avcil:
ete creee pour un iiomme de JeUies , Malezicu , par le due da
Maine.
Notice sur Barthe'lemy. 77
moires a I'Acadeinie des belles-lettres. Lesu jet da
premier est peu impoiiant ; mais les autres m('ritent,
de la part des savans , beaucoup d'aflention. Oa
adinire sa sagacite 5 eu expliruant mie anci.ime ins-
criplipn qui remonie vers Pan 600 avaiU J. C. C'est
une liste des pretrc^sses du temple d'Apoilon-Amj--
cleen , ccrite en boustrophedo/i (i) ^ a laquelle les
auteur> de la nouvelle diplomatique , malgre tous
leurs efforts, n'avoient rien euteudu. Son essai da
pala^ogiapliie numismatique ouvroit une nouvelie
carriere que les antiquaires avoient jusqu'alors ne-
gligee. Ses reflexions sur ^alphabet de Palniyre le
conduisiient a une d6couverte , celle d'en fixer les
(^k^nens ; et il demontra que les inscriplions en ca-
racterepalmyrenien 5 rapportees au nombre de treize
par Wood {2) , sont en langue sjriaque. Le ;n^moire
qui reulerme ces observations , est un viai clief-
d'ojuvre de discussion 5 jamais on n'a mis plus de
critique , de savoir , de penetration , d'agrement
jiieme , a trailer une mati^re si epineuse etsipeu sus-
ceptible d'int^ret.
De retour en France , notre savant academicien-
rendit compte a sa compagnie de ses remarques ,
dont quclques-unes , entr'autres celle sur la possi-
bilite de retablir les inscriptions par la trace des
crampons , avoient ^chapd aux observateurs. On
n'avoit pu deviner le sujet de la belle mosaic;ue d^
Palestrine ; Bartlitlemj y t ouva le voyage de i'em-
(i) C'est-a-dire •que les ligacs vont alternativemenl de
^roite a gauche , et de gauche a droite.
(^2) Dans i'ouvrage intitvile : let Ruines d>: Falmjre ^ p. ^I.
7S Biographie.
pereur Hadren en E jpte ; conjectiire bien lieureuse ,
qu'il exposa avec aiitant de modestie que d'^rudition.
Eiicoufag6 par les eloges que son travail sui* ['al-
phabet de Pabnyre lui avoit merit^s , il esp^ra de
t^ussir encore a I'egard de celui de Pht^nicie , bieii
plus important que le premier. II en determina la
valeur de la plupart des lettres , au niojen des ins-
criptions et des medallles. Svyinton, docteur d'Oxford,
revendiqua la priorite de quelques observations. Cela
fit naitre une dispute litt^raire, a laquelle on donna
peiit-etre tropde suite. Mais certainement Je savant
anglais n'y remporta pas le prix de la politesse , n£
celui de la moderation. D'ailleiirs son adversaire sut
tourner au profit de la science ceUe dispute , qui lui
fit nai're d'excellentes idees sur l-'S rapports des
laiigues egjptienne, pb(^nicirn;ie etgre que. Pellerin,
celebre antiquaire , ele a aussi quelques pretentions
sur la preuve tirce des medailles parthes, en faveuf
de I'opinion de Frcret , jusqu'aloi s conjecturale ,
concernant I'tre des Arsa'cides (r). En cette occa-
fiion , r'ftinour-propre se tut Lien tot de part et d'aulre,
I'amilie refusant de l'(^couter. Nous n'entrerons pas
dans de plus grands details sur les autres m6moires
ou dissertations , lus, pendant 45 ans d'assiduit^, aux
seances de I'arademi:". lis sont au nombre de dix-
sept , et tous presentent des re:herches precieuses ,
des vues utiles , et quelques-uns des d^couvertes
lieureuses. On n'y trouve ni charlatanisme , ni
discussions oiseuses. Jamais des assertions trop pro-
noncees n'y indisposent le lecteur j au contraire ,
(i) Fix^e au 24 octohre 3ii a^- J. C.
Notice srir BnrthiUmj. 79
K©iivent les opinions les plus vraisertblables y sont
proposees en forine de tloi t 's. Par-tout on r. marque
uii clioix adinirai le de preuves et une exactitude
rare dans les cilalions. U: e critique judicJeusey est
toujours rf^uiiie au m^^rite du style. Et $• P rl de con-
jeclur^-r fail une pariie es>enti-4ie de la logique ,
comme iin plilos)},hi moderne , Dalembert , I'a
ddmontrc'^ , on ne peut en voir de meill urs inodele*
que dans les mt^inoiivs dont nous paulo<'S.
Au milieu dos ttud/s serieus s, le labo^ieMX Bar-
thelemj^ se procura un dc'lassemcni ; ce fut la com-
liosiliou <i'un romau^ a la maniere grerque, el qu'il
«upposa traduit du Grer. II place la scene au temps
de Tlitsee , et les diHcivns exploits de ce heros for-
inent souvent le nrud et le denouement dt:s a\en-
tures de CarLte et de PoLi/dore. SJ , comme daus
lous les ouvrages de ce genre , les incidens embarras-
sent un yew la narration , i!s so it du mo. ns amines ici
avec b'-aucoup d'art. L'iut:r:t est j^ur-tout tres-vif .
dans le Iv ." et dernier livre. On ne pouvoit mieux
finir ; et la passion s\y tiouve exprim^e av^c autant
<le chaleur que de verile. EnHn ce petit roman res-
pire legout sain de ranliquit.- , (*\. monii*e c;ue I'auleur
la connoissoit parfailement. Du re^te , il est eciit
avec une simpli. ite briliante , pleine de graces et
-d'el^ganc ^ II n:^ seroii pas meme difficile d'y re?on-
noitre !a plume qui devoit nous raconler le vot/a^
da jeuae AnacharsLS.
Euelfet, Barihelemy m^dit )it d/ja le plan de cet
iirportant ouvrage ; et bieniot apres il Ira.ailla \
rextcuterjde ni^ni^rt:"a recouciLer av«« rtrudiUojj
•So Biographic.
les esprlts qu'en b.-vo\X diM^C^^hipkUosophlshie. Ce
plan devoit tout embras-er, i|istoire ^jpeligion , philo-
sophie , arts , usages de la GreCe , -avaiit le regne
d'Alexaiiclre-le-Grand. II Fallot en ecarl. r les dis^
cussions penibles , et ne fatiguer jamais un lecteur
accoutume depuis long.-teihps a n'txercer ni sa
raison ^ ni sa memoire , et chez qui I'e tude devenoit
irn tourmeut am jij:>u d'etre une jouissance. Cette.
triste verite sert.a justiHer I'auteur sur la forme qu'i,!
a adoptee , et doiit bien des personnes Pont blame.
Une marche trop didaitique I'auroit ^loigne de soiH
tut, celuide p laird en inslruisant, Auroit-il pu ,
d'cilleurs, continuer sur le rneme ton. que son intro-
duction est ecrite 'i JN"eanmoins ce superbe propjlee ne
decore point une masure , ni un batihient mesquin j
c'est au contraire Tentree d'un beau temple , elev6
a la gtoire (flu .peuple le plus privilegl^ de la nature ,
et, par son geni.- , le preiuisr de toute I'antiquit^.
Sans doute I'idee de faire venir Anacliarsis de
Scjthie en Grece , pour s'y instruire et couverser
avec les grands hommes de cette derniere contree ,
n'est pas neuve ; e!le se trouve da,ns les dialogues de
Xucien (i) ; mais le^dessin de I'ouvrage francais est
beaucoup plus vaste , plus varie , et I'execution en a
.^t6 pr^sid^e par une intelligence bien superieure.
Loind'imitercesauteursdont notresiecleabonde, qui
dedaignent de s'instruire avant d'ecrire , Barthelemy
emploja trente ans a I'assembler les materiaux de sou
ouvrage. Plus de 20,000 citations furent la base sur
(i) Intitules: Scjtha sen hospes^ ^nac/iarsis she de gymna-
kquelle
Notice sur Bartht'lemy. 8t
liuiiic'He il bcilit. Rapportees avec une exactitude
scnipuleus3, au bas de cbaqi'e ].a<ie , elles ccartent
to'.Ue idee de fiction que le c:iclre pouvo t f'aire
nailr.' , et fournissent un mojen fa. lie d.* vrriiicalion.
Ges citations n'ont pas ete accumult^es, comine csla
irarrive que trop souvent , k I'aide des compilations
ou des tables demalieres, inais d'apres une lecture
reflcchie des textes grecs et latins. Plusieurs articles
en sont meme d'ex- ellentes apaljses ; tel ert celiii de
la politique d'Aristot.^, que Tauteur assuroil lui avoir
coute une annee de travail. II consul ot les p:ens les
plus verses dans les lanL.ues anci nnes , sur le sens
des ]^Ki<sages obscurs. II r unissoit ses amis pour leur
lire diflerens inorceaux ; et il deuiaudoit a ciiacun en
parliculier 5 suivant I'objet de ses t tudes , ce qu'il
pensoit des endrolts quijavoient qu Ipe ra port*
II exposoit les difBcultes et proposoit les doutes avec
autant de grace que de clart- . Dins la discussion , il
mettoit souvent de la c aleir, ct presque toujours il
en faisoit -aillir di's traits de luniere. Quelquefuis il
parolssoit defendre le sentiment oppose au sien , soit
pour mieux s'eclairer lui-me 'iC, soit pour manager
davantage I'amour-j^ropre de son contradicteur qui
crojoit vaincre , en perdant sa r^use.
Quoique , depuis di\ ans , foutes ces consultations
lui eusspnt 6te favorabl 's , et qu'on les cut •)our
I'ordinaire terininees en I'exhortant a public- le
fruit de taut de veil les , il vou'ut encore prr-ssentir
Je gout du public. En conse' u.nice , il permit a ses
arisde fa ir.-^im primer deux frag nens de son ouvrag.^,
le preiuier sur la musique , et le second sur les fete*
Tome. II . F
Si Biographie.'
de D^los. Malgre le succes qu'eurent I'un et I'auire ,
il ne se seroit pas cyterinini' a mettre au jour la
lotaljte , sans la mort du due de Choiseul. Danscette
crise , I'esprit avoit besoin dc venir au secours du
coeur, par une forte distraction ; et rien n'etoit plus
capable dc produire cet effet salutaire , que la publi-
cation du Voyage dii jeaae AnacliarsLs. D'ail-
leurs I'auteur s'etoit ra^nag6 la consolation d'y faire
revivre son bienfaiteur , sous le nom d'Arsame , et
^y rappeler I'epouse qui n'a cesse de le pleurer ,
sous celui de Pliediine. II avoue que ces noms ont
^te bien souvent sur le point de se meler a ces recits,
et finit par y ternoigner son desir , qu'apres sa mort ,
sur la pierre qui couvrira sa ceadre , on grave pro-
fondement ces mots : « II oblint les bontes d'Arsame
» et de Predime ». Pardonronsa la reconnoissance, de
meltre dans la bouclie du philodophe scythe un pareil
langage.
La resolulicm ^tant prise ^ Bartlielemj travailla
d'abord a revoir son manuscrit. II s'apeKjut de plu-
sieuis lacunes qu'il ne balanca pas a re*nplir ; et tons
les nouveaux articles , tels que ceux de Pindare ,
d'Aristippe, etc. ,- ne portent cerlainement pas I'em-
preinte de la main d'un septuagenaire. Non seule-
ment ii j fit des corrections et de.> additions essen-
tielles , mais encore il eut le courage lV'j faire de
grands relrancliem ens 5 espece da saciifice qui coute
tant a la jeunesse , et que la vieiilesse se permet
rarement. Son amour-propie , aussi actif quVclaiie ,
en le faisant triompher des ann;§es et de& infirmit(rs ,
}ui inspiroit des inquietudes faciicuses. A peine is
Notice sur Barthelemy. 83
premier volume eut ^(e imprime , qu'il voulut le
supprimer. II fallut lui arraclier en quelque sorfe les
suivans ; i\ couchoit liors de sa maisori , et alloil sa
cacher dans celle de ses amis , pour ne pas fournir
de la copie aiiv ouvriers. Enfin , au bout de troisans,
fut fiiiie uiie impression qu'un autre auroit iiatee et
fait achever dans })eu de mois* II disoit a scs amis ,
que la chute de sa trlste conipUatiO/i ^ c'est ainsi
qu'il appeloit son ouvrage , ne lui seroit pas suppor-
table, et qu'il la previendroit 5 en ailant s'ensevelir
au fond de sa province.
Les eloges du public vinrent bientot mettre uii
terme a ces agitations de I'amour-propre , d'aiUeurs
justement allarm^ des circonstanc. s. Tousles esprits
etoient alors prcoccupes et pcu disposes a s'eclairer.
Onne vouloit plus lire que pour se con firmer dans
son opinion. C'eloit a I'instant que toutes les pas-
sions sortoient tumultueu?ement de I'antre de la dis-
corde , pour bouleverser la surface de PEurope , I'a-
breuver de sang et y entasser des mines. Quel succeg
pouvoit-on done esp^rer d'un ouvrage compose en
grand partie dans la paisible retraite de Chante-
loup , et m^dite pendant 3o ans , sans avoir meme
en I'achevant, pense a la rv^-volution francaise - Rien
lieanmoins de plus complet que ce succ^s j il sur-
passa de beaucoup les esperances de I'auteur. Son
premier soin fut d'en porter un exemplaire au P.
Raynaud qui vivoit encore. Ce respectable vieil-
lard sembloit n'avoir attendu pour mourir , que de
jouir de toute la reputation de son ancien disciple ,
place lui-meme au couchant de sa vie.
84 Biografh'e.
Elle fut assez prolong^e pour qu'il vit frofs Ml*
t.ons du Forage du jeune Anacliarsis j et la
Iratluclion qu'oii s'enipressa cFen faire dans Icsprin-
ci ales laiv, lies del'Europc. Touly retenlil des eloges
de cet ouvrage. On se disp-nsera de les rapporter
ici , parce qu'ils sont Irop conuus. Encore nioins
cli( rchera-t-on a les appr^cier ; le droit en appar-
tient a la posU^rltL' qui les confirtnera ou les inodi-
fiera , en prononcant definitivemeiit et sans appel.
Parmi les reproch.^s que cette posti^rite severe
fera, peut-etre,a .'A-ademie francaise, on ne coni-
plera pas celui de u'avoir pas recu Barthelemy.
E.le le ftt solliciter en secret de se presenter ; il
n'osoit s'v d lerininer, lorsqu'il apprit que cette ccm-
pai:nie alloil , inalgre cela , proceder a son Election.
Alors il reniplit sans peine k's pn'liminaires ; et fut
re9u(i) d'une voix unanime, a la place de Beauz6e,
homme vtrlueux et granimalrien habile. Dans le
discours d'usage, il le loua en style correct et avec
le ton simjio de la vertu.
Louis XVI , qui venoit aussi de lire Anacliarsis ,
cliart.'ea son niiuistre (2), Saint-Priest, d'offiir a son
auteur la direction g^nerale de cette magnifique
l.iblioilieque an service de la: u. lie il etoit attach^
depuis pres de quarante ans, en sa qualit6 de garde
du cabinet des medaiile?. A]>res les 24 heures qu'on
liii avoit accordces pour se determiner , il remercia
le roi 5 en motivant son refus sur ce qu'accoutum^
(i) En 1789.
(^3 Eu 1790 5 apr^s la retraite de Le Noir.
Sotice sur Barfh'lemy. S5
a des (rav.- ux 1 itcraires , il iie pouvoit plus s'occu*
per des affaires minu lie jses d'un si vaste d^pot.
Le sage Bartl'elemj etoit trop jaloux de son bon-
heur pour se laisser seduire par l'app'\l des grand 'S
places ; et il savoil trc^s-bien que la viaillesse est , prin-
cipalement pour I'homme de Litres, celle de toutes
les saisons de la vie oii l'6tude offre les jouissa les
les plus douces et les plus necer-Faires. Au bn.it de
sa renommee, ecartant toutes les distractions q-i'elle
auroit pu encore lui donner, il reprit done Fes an-
ciens travaux. Une inscription crecque , qu'il nt nma
niarbre de ChoiseuLj en I'honneur du propiicia- e,
ambassacleur de France aupr>s de la Porte O lo-
mane , fi^a d'abord son attention. Tout y fut bienttt
dcchiffre , et rieu n'j prt^senta plus de difficulie aux
yeux d'un savant si exerce dans ce genre d'cTudi-
tion , qu'il paroissoit posseder seul en France dei^ftiir
la mort de Seguier (i) , digne et vertueux disciple
de I'illustre Scipion Maffei. L'objel de cette inscrip-
tion n*est point, a la vcrite, d'une grande impor*
lance 5 mais les obseivations dont Tcdileur raccoin*
pagne , sont fort Judicieuses et pleines d'una rare
sagacite ; celle qui concerne I'epoque de I'iniroducticn
des lettres doubles en Grece,, sur \es rtionumens
publics (2), doit desormais servir de regie dans la
critique lapidaire.
Avant de mettro an jour cette dissertation sur
le marbre de Clioiseul , reveuant sur ses pas , il
(i) Arrivee A Nimes , en 178 4.
(2) Sous Euclide, Archonle :\ Athcpes , la tleuxl^me annJ«
ac la XCIV. Olymp. ti^ av. J. C.
F 3
S6 ■ Biographic,
avoit examine de noiiveau iin des premiers ohjets
de ces etudes, I'explit ation de quelques m dailies
en caracteres samari tains. Loin de la jnslifier , il
rev^la des erreurs qu'elle ontenoit. « La nouvelle
y> medaille , disoit-il, que je produis , prouve que
3) )e me suis tronipe. . . . ». Et , sans vouloir rien
decider: « j'aiinerois mieux proposer des questions,
» qu'entreprendre de l;-s rt^soudre ; et je ne basarde
5) les reflexions suivantes que pour en soUiciter de
» plus propres a repandre. quelque jour sur ceite
» matiere (i) ». Tel etoit le laniage de modeslie
que ce savant , eclaire par une instruction profonde ,
u'avoit jamais cesse de teair. 11 cc ivoit encore :
cc Je ne mets pas beaucoup de prix a mes produc-
31 tions , persuade qu'av( c les memes peines et la
51 merae Constance , un autre auroit ete beaucoup
» plus loin (a) «. Voilacertaineraent lavraie philoso-
phie du savoir , Lien opposcf^e a cette miserable va-
rite d'une fouie d'anliquaires qui , se livrant aux
plus frivoles conjectures, et les appuj ant de fecher-
clies pueriles, s'imaginent faire des ouvrages du-
rables , tandis qu'ils ressemblent a des horames oisifs ,
peniblement occupes a atiacber des toiles d'ara-gnee
aux ailes d'un moulin a vent.
Aux seances de I'acad.'mie des belles - lettres ,
Barthdemy n'eut jamais d'aufre langage que celui
dont nous venons ds citer quelquss traits. II n'oublia
(i) LeUre aux auteurs du Journal des Savans , du 20
aYril 1790.
(2) Letlre a Perez Bayer , du 29 aoiit 1780 3 ad calc, d«
JS'umis Hehoeu-Sarnarit. p. aic
No tire siir Barthckmy. 87
pas qu'il s'(^toit forme dans le sein et a I'ccole de
cette compagnie , et qu'il lui devoit son existence
litteraire. Eii I'illustrant a son tour par ses travaux
ou ses decouvertes , il crut a-la-fois s'acquitter d'une
dette et accroitre sa propre consideration. A elle
principalement se rapportoient toutes ses Etudes ; et
a elle seule son coeur faisoit I'hommage de ses succes.
La gloire de ce corps etoit la premiere do ses pensees ,
et ic bonlieur de ses membres , le plus ardent de ses
voeux. II en eloit devenu le doj^en , lorsqu'une des-
truction procliaine le menaroit. Son maintien et ses
paroles exprimoient assez la vive douleur qu'il eii
ressentoit. Dans les dernieres assemblees , ou se
rendoit encore un petit nombre de ses confreres, on
I'accueilloit avcc joie ; cnsuite on se pressoit triste>-
ment autour de lui 5 on I'obligeoit a presider 5 enfiii
on I'ecoutoit avec cette deference et ce respect que
Page et le merite n'obtiennent pas toujours. Peut-
etre que dans une adversite commune les hommes
sont plus justes, ou moins susceptibles d'envie. Ce
qu'on prevoyoit avec anxiete , arriva bientot ; L^s
Academies, qui offrofent depuis trop long-temps I'idee
fjicheuse d'anciennes corporations , furent suppritnees
par le meme decret (i). Elles ont sans doute une
part assuree a la reconnoissance de la posterite 5
celle des inscriptions et belles-lettres se Test evidem-
ment acquise , en portant le flambeau de la critique
dans les tenebres de I'histoire, en ralTermissant parmi
nous les La»es du goiit , en y conservanl les dernieres
CO Du 8 aout I7g3 , sur le rapport de Ileuri Gvegoire.
8S Biographie.
6tinrelles de la same erudition , et par im legs iiiap-
pre- iablt., celiu du meilleur et dn plus vaster iccucil
de litleialure qui ait existe iusqu'aujourd'iiUi.
Lorsque, dai:s une tempete, lesar resqu'ombrage
un clienc^ antique sont arracii^s et disperses, celui-ci
reste isole et 23resque d^rarine. Tel fut le sort de
Barti ^lemj , apr'^s la suppression de TAc adeirie.
Cependant il voulut encore resister , et tenir a la vie
par de nouveaux travaux. Ce qu^il avoit errit autre-
fois sur la pal«^ographie numis atique , n'etoit qu'un
e«sai ; il prit 1& resolution de I'augmenter , au point
d'en faire un trait6 complet. Rien n'(^toit pluspro: re
a le distraire, en ex'rrcant sa sapacite. II s'ajiissoit de
classer les medailes les plus anciennes , et d'en
trouver I'tpoque aproximative. Pour cela , « il fal-
si lolt examiner de- suites no ; breuses de celles des
M villes et d?s rois , les comparer , soit entr'd'es ,
y> soit avec les autrcs monumens de I'aiitiquitc ,
» saisir , conbiner raille rapports souvent legers et
y> presque imperceptibles... ; remorter a Torigine de
» la gravure des medaiPes, et, malgre le silence des
» historiens, suivre cet art dans ses opt'rations ^ dans
» ses prcgres et dans les revolutions qu'il a ^prouv^'es
» en difr':^rens pajs ; se faire pour cbacun de ces
» pa \s , des s- stemes particuliers cui se rai -portassent
» tous a un plus grand, et qui fut lui-mem.e concilie
» avec I'histoire ('es arts en g(^neral , et avec celle
» du commerce, qui influe toujours sur le nombre,
» le poids t la valeur des especes (i) "• Les motifs
qui lui faisoient entrc-preridre cet ouvrage , et 1»
(i) Acadepi. des inset. T. XXIVj p. dfi.
Nofi^e siir Barthckmj, 8g
desir qii'il avoit , sinon de le (Inir, du moiiis de
I'awiriCer , soiit expriiru''s dans ui-e de ses lettres.
« II faiit se lh:r;3 , y disoii-il , cles illusions ; e'en est
» uiie ])oar luol du contiiiuer ii a palcograpliie. C'est
» line diversion pour mes infirnijl's et pour mes
» peines.... Ajoutant ensuite.... La seule chose que
» je regretlerai en mourant , c'est de ne pas terminer
» mes Iravaux sur les medailles. Car la carriere est
» immense , et bien pen de gen- auroient la patience
» de m'j suivre. Nt'annioais je continue , ayant
» besoin de renipiir les longnes et eiernelles beures
j> de la joui-nee. Autrefois elles me paroissoient tres-
y> courtes, avec de la ieunet.se et de la sante ; main-
» tenant elles out le poids d'une journee ou meme
» d'un siecle , etc. (i) «. ].a pai tie de la grande
Grece et dj la Sicile a ete presque acluv^e , et le
reste auroil pu elre avance , sans un projet qu'il
n'eut pas le temps d'e^ecuter, celui de dom.er une
quatrieme Edition du Voyage (VAnacliar:^ is ^ et ua
recueil de ses dilTerens n^emoires avec d.^s additions.
iMais revcnons ; et qu'on s'anvle un instant sur la
derniere phrase de sa lettre ; elle est assez transpa-
rente. Onj.voit I'etat de son ame, moins contrisl^e
par ses propres infortun. s que par I'iiorrible catas-
trophe de ses meilleurs amis.
La revolution , apres I'avoir prive de 25,ooo livres
de rente, e! r:duit au pli s ^-Iroii necessaire, I'exposoit
encore a bien d. s dangers-. II avoit tout a ciaindre
de sa reputation , dans c. tte aiVreuse crise oii le
m^rite connu fut d'abord un molif de suspicion ,
cnsiiite un arret de mort. C 'perdant cette meme
(i) Du 2.6 prairid j I'an z de la Ri'publiciue,
go Biograj h'e.
Xi^piitation le sauva. Deiioiic6 avec plusleurs mem-i
Jires de la biiilioth^que par un vil calomniateur ,
il est conduit aux Magdeloiiettes (i) 5 les prisonniers
qui &y houvoient , appreiiant son arrivec , des-
cendeut tuus au bas de I'escalier , et I'y reroivent
avec une sorte d attendrissement mel^ de respect.
Dans cet intervalle , Danton et Courtois , avertis de
sa d(itcntion , font rougir le comite de sCirete ge-
lier,;Ie de i'ordre qu'on lui avoit surpris , et a Pinstant
il est revoque. Bartlielemj recouvra ainsi sa libcrte ,
seize lieures seulement apres I'avoir perdue. La joie
qu'il tn ressentit fut courte ; chaque jour, son coeur
recevot de nouvelles blessures. Personne n'j pou-
voit plus verser du bauine ; cetle amie dont la vue
seuJe le consoloit , venoit d'etre renferm^e dans une
maison d'avret. Du moins n'en sortit-elle pas pour
inontersur un echafaud, comme Bailli., Lepelletier
de Rosambo , Boutin , Lefebvre d'Ormesson , La-
JnoiLnon de Malsherbes,elc... cesinnocentes viclimes
de la tjrannie , auxquelles il 6toit attache par d'au-
cienues et etroites liaisons.
C'est alors qu'il se fit en lui un cbangement re-
rnarquable. Son amour, de la gioire parut s'affolblir ,
et il s'euibarrassa moins de I'avenir pmu' lecjuel il
avoit vecu. Xe desir de plaire , qui fut peut-etre
sa passion dominante , dcvint moins sensible , et son
caractere s'exaspera. Tl s'iiidignoit contre le genre
humain , et lui prodignoit les epitbetes inspirees
par cette nisoLtbropie qu'il est malheureuse-
ment si facile d'absoudre. Dans ses acces d'hu-
meur , il disoit que la revolution ^toit mal nom-
(i) Le 2 SL'ptenxbi-e 1793..
Notice SUV Barth-ilemy. qj
xnke , et qu'il falloit I'appeler une repetation.
A la verite , I'action de cetle Uiade de maux qui
I'alTligeoit tant , se raleiitit un pen ; mais elle I'avoit
dcja trop ebraiile. Le poids de ses iniirmites s'ag-
grava de jour en jour. Des accidens assez fr^quens
avoient annonco , depuis qnelque temps , I'appau-
Vrissement de son sang ; la fati-ue d'exister devint
moins supportable, les sources de la vie etant taries.
Apres une courte indisposition , il expira (i) entie
les bras d'un neveu (2) auquel il avoit servi d?. pere,
et qui le soignoit avec une piet^ filiale. Une heure
avant sa mort , il se fit apporter Horace ^ et apres
avoir hi ave.^ attention la IV.^ epiire du 1.^^- livre(3),
il demanda la traduction de ce poete par Dacier ,
sans doute pour en consulter quelque note. A
peine eut-il laisse echapper le volume, qu'il entra
dans une douce agonie, etfinit ainsi tranquillemcnt
sa carriere , laissant ses amis , dont plusieurs ne
Tavoient pas abandonne dans ses' derniers niomens ,
converts des voiles lugubres de la trislesse , et abreuves
de celte amertume profonde que le sensible Tibulle
exprime en ces termes :
Nunc et amara dies ^ et noctis amarior umbra est ;
Omnia jam trisli tempoiajelle maJent (^).
(i) Le 3o avril 1795 ( vicitT style ).
(:i) Bartheleniy tk- Courcai , garde adjoint du cabinet ^es
nie'claiJles.
(3) peut-etre vellechlssoit-il k ces vers :
Onniem cvede diem tibi diluxise supiemum :
did fa sujjciveniet J quae non speialitur hoi a.
U) ^- -■ Eli'S- 4- v. W et 12.
9? Biograjh'e.
Cataiogue r^Es ouvrages de J. J. Barthele-my.
Ouvrngcs iniprhncs sepai e'ment.
i.o Les Amours de Carite et de Polynore , ro-
man tradiiit du grec ; 1760, iii-12.
2.» Lettre au Marquis Olivieri , au sujetde quel-
ques inoiULinens phenlciens ^ pour seri^lr de re-
pome a deux Lettres inserees {par Su-inton ) dans
le 54.'^™'^ vol, des TransacUo/is phclosophiques*
Paris _, Latour^, 1776, in-40.
3.*^ Entretien sur I't'lat de la musique grecque,
pers le niUleu da IV.'^'^e slcde , avant L'^^re i^uL^
galre , in-8^. , 1777.
4.0 Voyage du jeune Anacharsis en Grece , uers
Le milieu die IV.cme slcde ^ avant I'' ere vul^alre,
Paris , chez Debure , 1788 , 4 vol. 111-4.° , ou 7 vol.
in-8.", avec ua atlas ( dresse j^ar Barbie du Bo-
Cuge ). Seconde edition en 7 vol. in-o° , 1789 >
troLslenie edition ^ idem. ^ ^79o-
5.° Discours prononce dans PAcademie francaise,
le mardl ^ 25 aout , 178-;.
6.° Dissertation, sur une aucienne inscription
grecque , relative aux finances des ^ihenlens^
contenant l^etat des soinnies que fournlrent pen-
dant une annee J les tresorlers d'une calsse par-
tlcullere. Paris, ii - . , 1792.
Dans le recuelL des Memo Ires de f Acadiinle des
Inscriptions et belles-lettres.
l.o Recherches sur le Pactole , lu en 1748, m-
Notice sur BnrthcUmy. q3
prinid par extrait , dans La partle historlque
des Mem. T. XXI.
2.« R^Hexions sur une mrda.'lle de Xerxes, roi
d'Armosate , lu en 1747. T. XXI.
3.° Reinarqucs sur u le inscription d'AmycL^e
1749) ^1^0. T. XXIII. '
4.° Essni d'une PalJo^M'aphienu-nis:7iatiqiie , inSo ,
T. XXIV. 1 ' > >
5.0 Dissertition sur deux mcdailles d'Anligonus,
roi de Judee ; 1749, T. XXIV.
6." Remar.iues sur quelques ni('(lailles publicea
par differens auleurs ; 1700. T. XXVI.
7.0 Dissertation sur les medailLs aiabes: i-53.
T. XXVI.
^.^ Reflexions sur I'alphabet et sur la langue dont
on se servoit autrefois a Palmjrej 17.^4. T.^XXVI'
Iniprlmees separement , iii-4.0 et ia-folio. Paris,'
cliez Guerln et Latour.
9-*^ M^moire sur les anciensmonumens de Rome;
1757. T. XXVIIl.
lo.o Pa'flexions sur quelques monumens pheni-
cienset les alphabets qui en r.^sultent \ 17.58. T.XXX.
n.° Exp icafion de la Mosaique de Palestine j
1760. T. XXX; Imprlmie sc pa re merit et a^'ec
une ,!6dlcace au cardinal SpineUi - in-^.^ , a
Pans, c/iez, Guenn et Latour.
12." Rf^li? ions u^uerales sur les rapports des lan-
gues epyptienne, pbenicieune et jire que : 1763.
.Tome XXXn.
54 " h'wp;rnhh'e.
i3.o Remarqiies sur quelques m^dallles ( des rots
'J^arthes ) publiees par differens auleurs-j 1761.
T. XXXII.
14.0 Explication d'un bas-relief egyptien et de
rinscriptiou ph^uicienne qui I'accompagne 5 I76i,
T. XXXII.
1 5.° Remarques sur le nombre des pieces qu'on
lepresentoit dans le meme jour sur le llieatre d'A-
thenes; 1770. T. XXXIX.
16.0 Remarques sur les medailles d'Antonin , frap-
pees en Egvpte j 1775. T. XLI.
17.0 Mcmoire sur quelques medailles samaritaines,
lu en 1790, iniprlnie seutenietiit par extrait dans
le ToLimaL des Savaas de cette annce ^ et reuj^"
prune avec une Lettre de six pages , sur le
meme suet ^ d la fin de l^ouvrage de Perez
Bayer, Intitule .'Numorum Hebreo-Samaritanoruni
vindicice.
JO. Plusieurs articles dans le recueil d'Antlquik's
par le comte de Cajlus , entr'autres , une expU-
cation des inscriptions de cinq autels grecs ;
T. I, p. 6r. Conjecture sur une nioniie ; T. II,
p. 18. Explication d^une medaitle de Cliio ; id.
p 145. etc. etc.
2,° Deux lettres sur les raedailles plieniciennes ,
relativement a La dispute avec le docteur Swinion.
Dans le Jourrial des Savans , aout^ 1760, et no-
vembre 1763.
3.° Description des Fetes de Pelos. Hans les
Notice SUV Bar'k^I<my. gS
Voyages pittoresq Lie de La Grece ^par M.de Choi'
seui-GoLifficr. C. IV, p. 5o, 1782.
4.0 Notice ~6ur des peintures iiKxicaines, eti nia-
nuscrit , perdue.
Alien IE O L O G I E.
Jj E T T R E da citoijen Bussol an reprise ntant
Gregoire J sur l'ancienne cite de MaN"
BEURE (r).
Xj A situation favorable du pays de Montbeliard ,
enfre le Jura et les Vosges , au centre des d^par-
temeiis les plus abondans en productions et denrt'es
de tout genre , aux bords des rivieres du Doubs ,
(t) Ce memoire est tlr^ d'un nianustrlt sur Fliistoire cle
Wurtemberg et du MoalLcliard , que I'auteur a commence il
y a (juelques aunc'es , et qu'il auroit peut-etre publie dans la
suite, si par ses reclierches il etoit parvenu a remplir des
lacunes qui re^toient , el A supplcer au defaut des chartes et des
memoires qu'il n'a pu se procurer. Les circonstances et le
defaut de dooumens ne lui permetffent pas de eoutinuer
actuellement ce travail , et en attendant qu'il paroisse
quelqu'ouvrage sur I'histoire de ces pays , il a appele I'atten-
tion des savans sur ces restes ^pars de la grandeur romaine ,
dont il ne presente qu'un squel^le d^cliarne et sans draperie ,
J'ai puise , dit-il, ces details sur les lieux menies , dans
les arcliives de Montbeliard , dans I'ouvrage de Schoepflin ,
intitule ; ^hatla illusirata y et diplomatica , dans quelques
fragmens du citoyen Perreciot sur le d^^yenne d'Ajoye , uuo
Ancitfiine relation de voyage , en lan^jue aik^mande , etc.
j^g Arcli/coUgk.
.Villain et de la Luzaine, en fait un st.jo,.r Ms.i
aorral>!e que salubre. Les Ro^nains sV plurent, et
v^■ornle.■ent divers ^lablissemens, commo I'altestent
les vastesel superbos nrnesde Mandeure, Ics ,^,stes
d',n. pavo ei. raosa-upe , Irouvfs , il y a pen d au-
n.'es au feax ourg de Montbeliard, plusieu,-s por-
tions de rout s romai,.es ,qui traversent ce pays en
difirr.ns sens et se sont con.ervees jusqu'a ce,our,
ainsi que d'autres n,on,„ne.,s de la glore de ce
^t:^nn:ts;::'des peuple. dn Nord le Mont-
heliard a forn.e une des principa'es d.v.s.ons de
rLpire,souslenunr de CouUe d'Aioye , co„u-
'"^^Lff :::":; ....... ..it . c^r .^^ dn
conue e. la rfeidence des com. s d A,oye Nous
avons encore une c'.arle que Boronus, C comte de
MontbcUard o„ d'Aioye ) peli.-fils d'A.bicou , duo
d' Alsace, V fit reclig:r en 74B.
Ceae g;Jnde vi«e , rapp"1<^e d.ns I'i.ineran-e d'An-
,onin et dans la ta^le Thoodosienne sous e no™
latitude, dans une superbe plaine, term.nee par d«
clllines qui s'abai.sent en amphith^A.res couve.ts
de Vs et de iardins, ..oi. par sa si.ua.on un
des r^n^parts dc I'empire remain e. le s.ege dun
;Ld commerce, la riviere du Doubs , alors nav:-
Lble, traversant cette helle vallce , coupo,. la vd e
r^d'eu. Portons P-^'^l^^Vii c.n"
rt:v:^:r:r:;£:onLtrou.een.re
Antiquites de MandeHve. q^
<Jevs vestiges. En suirant les ruiiies entassees quel'on
voit encore desle village de Bourguignon , a I'ernbou-
cluire du Doubs , pros du pont de Roide , jusfjues
au village de Valentini&n ct au coteau de BeJieu ;
on voit que la longueur de celti3 aiicicnne cile etoit
d'environ deux lieues , et sa largeur d'un quart de
lieue en plusieurs endroits , comnie depuis le chateau
de la Motte jusqu'au rocher de la Colusse et de Va-
lere^ en d'autres endroits eile etoit plus larc^e. Elle
^toit protegee par quatre forleresses ou chateaux,
clui de la Motte qui dominoit presque toute la ville
et avancoit dans son centre , celui de Belieu qui
fennoit le passage du cote d'AUeniagne, et devant
le([uel on voit encore une voie militaire qui con-
duit a Besanr on et a Bale; le chateau de Chamabon ,
au-dessus do Mathaj, sur le bord du Boubs, et le
chateau Julien , que I'empereur Jalien-l'Apostat fit
bdtir pres du pont de Roide , pour fermer encore
mieux le passage d'Aliemagne , et pour arreter les
incursions despeuples du Nord, qui menacoient deja
de ces cotes I'empire remain.
L'origine de cette ville se perd dans la nuit des
temps. Suivant les religieux de Cusance , dans les
Acles de S. Ermenfroi, r6dig('s vers I'an 720, elle
fut ibndee sons I'empereur Vespasien penda it la
guerre de Judt e ; mais il y a quelques raisons de
croire qu'elle ne fut alors qu'agrandie , bltie a la
romaine , et qu'elle est d'origine celtique. Au reste,
sans m'arreter ici a des recherches de ce genre, je
rne bornerai a faire mention de ce qui est parvenu
Tome 11 G
^^g ArcJ.ceologie.
a notre connolssance clans ties lemps posterieurs , et
des mines qui subsistent encore. ^
Celte cil6 magnitique , a laqnelle sa situation
avantageuse devoit assurer une plus longue dur6e ,
ji'existe plus aujourd'hui que dans ses ruines silen-
cieuses, et dans quelques villages dont on a retenu
son nom. On y retrouve encore les villages de
Mathaj , Majeslas-, celui de Valentinien , celui da
Bourguignon , et le pent de Roide ; de ch^tives ca-
banes couvrent les fondations d'un temple ou d'un
palais ; la charrue se traine a travers les decombres
de marbres , de tuileaux , les fragmens de colonnes
et de statues. Le murmure isole des flots et la voix de
quelques agriculteurs se font seuls entendre dans
cette vallee jadis couverte d'une immense population ,
et du bruit tumultueux d'un grand commerce , des
arts et du luxe. J'ai vu I'habitant de ces lieux ,
fouillant le sein de ce^ vastes debris , decouvrir les
murs de plusieurs grands edifices , des fondemens
nombreux , des portions de rues larges et droites ,
couples par d'autres rues transversales^ en tirer des
pierres et des marbres pour batit sa cliaumiere ,
puis recombler ses fouilles , et ces restes de palais
avec leurs colonnes et leurs marbres , et la charrue
re tracer ses sillons par-dessus.
Mais , malgre un long oubli et les ravages des
siecles, tout retrace ici la magnificence de la plus
graude des nations. Par-toTit on foule aux pieds la
brique romaine et des fragmens de marbre de toute
couleur3 par-tout on y delerre des restes de batimens j
Antiquitis de M and cure, g«
des troncons de colonnes , des sculptures , des statues
des fragmens d'inscriptions , des pieces de bois sculp-
tees et a demi-brulees , des medailles et d'autres
monumens. A toutes les maisons du village de Man-
deure , on apefcoit des pio-es de coniiches , ou
d'autres pieces d'ancieniie arciiitecture 5 on j trouve
ties rn^dailles, des unies , des vas, s sculples. Une
s'est meme ^tablie sur un pave de mosaVque. On
trouve a Sfoulgapdz et a Besancon d'amples collec-
tions de medailks et d'autres monumens provenant
de Mandeure , et des amateurs, qui y out scjourne,
ont form6 en pen de temps des cabinets d'antiquitcs 5
on a place dans le jardin d'Etupes cfe belles mines et
des colonnes qu'on a tirces de Mandeure. En 1741 ,
on envoja au celebre professeur SclioepQin une co-
lonne millaire, qui portoit cette inscription : IMP.
NERVA. TRAJANO C^S. AUG. GERM.DIVI.
JN^ERVA. I. P. M. TR. P. .-. P. COS. II.
En 1753, on J trouva la statue d'un Druide tres-
i»ien conservee. Elle fut envoyee a Beiancon , ou
Ton voif aussi, entre autres monumens dc Mandeure,
rinscriplion d'un temple dcdie a Castor par un cer-
tain Tullius ,^ CASTORI SACRVM. TULLIUS.
EX VOTO ; unHerculegaulois, d'airain, uue co-
lonne milliaire qui por.'e le noni de "Erajan et
Vesunt, M. p. xxxxiix 5 dos amuletles en bronze,
des urnes de verre et de terre cuite, des amies , des
casques, des^pees, des statues. Le beau cabinet do
medailles et d'autres antiquites , appartenant au due
de Wurtember- a Stoulgardz , a reru de ricbes sup-
plemens de Mandeure , parti.ulici-einent sous le due
G 2
100 Ardceologie.
Fr^d^rlc , qui avoit ordonne de remettre au Celebre
Baubin son m^decin , tout ce que Fon y d^couvriroit
de remarquable. On lui remit entr'autres une grand©
table de marbre , portant que Elavius Catulus l^gua
joixante et quinze niille deniers remains pour faire
garnir le bain de marbre. On y trouva des medailles
d'or , d'argent et de cuivre , jusqu'au temps de
I'empereur Gratien ( qui fut tue en 386 ) ; les phis
nombreuses furent celles des empereurs Jules-Cesar ,
Auo^uste 5 N^ron , Vespasien , Domitien , Antonin ,
Philippe , Constant , Commode , Trajan , Constantin ,
Gratien , Gordien , Hadrien , Alexandre , Aur^lien ,
Constantin le jeune ; celles de Divse Fauslinae ,
Plautilloe Aug. , etc. Quelques particuliers de Mont-
beliard se sont forme des collections assez precieuses ,
corame celle du citojen Duvernoj et le medailler
que I'on a envoje , il J a quelques annees , au cabinet
du prince Czartoriski. H y a pen d'ann^es que 1@
citoyen Parrot , fouillant ces mines , y trouva un
grand nombre de choses antiques , des medailles , des
statues 5 des anneaux , des pierres precieuses , des
sarcophages_, des urnes, un trident de Neptune , etc.
II d^couvrit un Edifice immense, dont le has etoit
conserve. Le marbre dont les cot^s ^toient plaques ,
les fours de brique places sous le pave , de grandes
platines et caisses de plomb , des canaux de meme
jn^tal qui y aboutissoient , et tout I'arrangement de
ee batiment montroit qu'il avoit servi aux bains pu-
blics. Plusieurs annees auparavant , on en avoit em-
porte des canaux de plomb , pesant plus de dix mille
livres, qui 6toient placds pres de la fontaine Mailiere,
Antiquites d"^ Mandeure. ic«
'd*ou ils porfoient I'eau dans les fonlaines de la ville
et dans les bains publics , places les uns au bas de
cette fontaine, les autres au-dessous dii chateau de la
Motfe. On voit encore les fondemens d'un temple
dans Tendroit qu'on appelle Montoile, et les restes
d'un amphiteatre au milieu de la ville , contre le
Doubs. Quatre families de Mandeure et de Mathay
portent encore les noms de Lentulus et de Varron, et
se pretendent romaines.
Tout semble attester que cette grande ville a et^
detruite par une irruption soudaine et par le feu ;
mais on ignore en quel temps. Suivant une ancienne
tradition du pays, Altila s'ttant rendu maitre de
Mandeure , dans son passage par les Gaules , or-
danna de la bruler. Eu ^-ain les preposes de la ville
et un peuple immense, prosiernes dans la grande
place devantce conqu^rant5!es femmesetlespetits en-
fans lui teudant les bras , implorerent sa clemence ;
Atlila , qui s'etoit montr^ gen^reux ailleurs , fut
inflexible ; il repeta d'une voix ferme : « Qu'on em-
brase cette ville ». O mandatuin durum ! comman-
dementbarbare ! s'ecria ce peuple malheureux. A I'inst
tant cette magnifique cite est en fiammes et ses habitaa-
sont disperses. La tradition porte que ces dernieres pa-
roles de la nation expirante , changerent l*anciea
nom de cette cite , et donnerent a la nonvclle ville
qui sortit de ses cendres ^ le nom de Mandeure.
II est vraisemblable qu'Allila ne laissa pas der-
Tiere lui une place si forte , en Iraversant les Gaules.
Toutes les monnoies qu'on a trouv(^es dans les rui-
nes 3 sont des tcuips antcrieurs a celte epoque , ej
G 3
102 Archceolof^it.
Ton n'en a decouvert aiicune des empereurs qni
Tout siiivie, ce qui sembic ajouter quclque poids h,
cette date.
Mais, quoi qii'il en soil , Mandeure reparoit encore
qnelques siecles apres Atlila ,soit qu'on I'eut relevee
de ses mines , soil que ceilo parlie alt ete conscrv^e ,
ce qui paroit plus vraisembla])le , a la vue des mines
que Ton d^couvre encor-. Au commencement du
huitieme siecle , les religieux de Gusance en parlent
comme d'une ville considerable ( dans les Actes de
St. Eniienfroi 5 rediges v.^rs Ian 720 ). Nous avons
deja cite un acte que Boronus y fit rediger en 748?
et sur la fin du neuvieme siecle , Guj de Ravenues
en parle deux fois , en la nom'mant cii'ltas Man-
droda. On ignore en quel temps et par quel fleau
elle a et6 detruite une seconde fois : mais ce der-
nier malheur a du etrs encore plus terrible et plus
durable que la furcur des barbarcs , puisqu'elle
n'a pu se relever des ruines sous lesquelles elle est
restee ensevelie jusqu'a ce jour ^ et que son peuple
nomfcreux a et^ detruit avec elle. II n'j a , suivant
Perreciot ( dans un fragment sur le Doyenn6 d'An-
joy® ) ? que le bras pesant de la fecdalite qui ait pu
I'antantir ainsi. Dans ces derniers temps , les comtes
d'Ajoje avoient fix^ leur residence au chateau de
Montbcliard , situe a une lieue de Mandeure , sur un
bit de roc vif , d'oii est venu le nom de ce chateau
de la ville, qui fut insensiblement donne a tout le
comt^ , dont la portion du 'Porrentruj a conserve
jusqu^a ce jour I'ancien nom d'Ajoye.
Cet ancien comte s'etendoit ires-loin^ et compre-
Anhquites dc Mandeure,. io3
noit, outre le coint^ actuel de Montbeliard avec Ics
sept terres qui en onl ete arrarliees en 1748 ,le comle
de Ferrette , la ville et seigneurie de Belibrt , Por#
rentruy et le pays d'Ajoye , le comte de la Roche,.
la baroiiie de Granges, les terres de Clerval et Pas-
savant.
Quant au village qui en a toujours fait partie ,
il etoit , comme tout le pavs, divise en petits fiefs
d^pendans du comtd de Montbeliard. Les princi-
paux etoient celui des Montagnons et celui des sei-
gneuries de Grandvillers. Le premier a ete reuni
au domaine direct, le second a el^ vendu ( je crois
en 1222 ), avec Papprobation du comte, a Tarclie-
Veque de Bcsancon : la mouvance est res tee , quoi-
que ces eccl^siastiques n'aient pas continue h repren-
dre de fief, les loix feodales les en ajant dispenses.
Aujourd'hui il se trouve reuni a la Republique
francaise , avec tout le reste du comte de Mont-
beiiard (r).
(0 II esL mallieureux , qu'alnsi qu'il I'a annonce dans sa
note, le citoyen Bussol ne puisse pascontinuerses reclierches et
ses travaux sur Mandeure (jui est trts-peu connue et qui
inerite plus d'attention. Nous ne connoissons sur cette citd
que les Merits cites par I'auteur dans sa note. Cependant I'aca-
demie de Besancon doit aussi possederquelques niemoires sur
celte ville. Le Long , dans sa bibllothcque de la France, en
cite un , ainsi qu'une dissertation de J. B. Guillaume ,
membre de cette academie , sur une statue antique , renjenne»
dans une niche , que V oh trout'a en 17^.3 j sur le ierritoire da
Mandeure. Nous saisirons cette occasion pour demander qu'on
ne Inisse point perdre les meraoircs manuscrils de differenles
academies , parce qu'il y en a plusieurs de trC-s-imporlaii*
G 4
LITTRATURE L AT INK
CoNjvn.iriON DE CaTilina contre la Rc'publique
Romahie, par SallusTe , noiwellemenf traduite sur
les meilleurs editions de cet auteur , avec un dis-
cours priliminaire et des notes litteraires et poll-
tiqucs ; par J. B. L. J. Billecocii , citoyen fran-
cais. Epig. Qjiafju& ipse miserrimavidi , in-i6 de
iSg pages. Paris , de rimprimerie de Crapelet,
an 3.*^, i-jgb {vieux-style ). Maradan , rue da
Cimetiere-Andre-des-Arcs. Prix 6 liv. et 7 liv.
10 s. , franc deport par la poste.
Xj'acteur de cette traduction noiivel'e est deja
avantageusemtnit conn-A dans les lettres. Jusqu'ici il
paroissoit s'crre attache de preference aux ouvrages
modernes, sur-tout a ceux oii I'on trouve les moeurs,
les usages , les productions , les singularites des autres
pays: traducteur fidele de Pallas j de le Long ^
et de Mear^ , on lui doit la justice qu'il n'a pas
fait de son travail une occupation de routine , ou une
affaire de librairie , ce qui nVst arrive que trop
souvent dans ce genre d'ouvrages. Un stvle soign<^. ,
des notes curieuses , des rapprochemenspiquans pour
pour I'liistoire des vllles et des departetnens : il seroit aussi
tres-important que lecomite d'instruclion publique donnatdes
ordres pour receuillir tout ce qu'on pourroit retrouver k
Mandeure , et en general pcur la conservation des monumens
antiques , dont on s'occupe jnalheureusement beaucoup trop
peu. A. L M.
Conjuration de Cntilina. io5
robservateur pbilosophe , des reflexions judicieu ses
qui annoncent un esprit exerce a la meditation , carac-
terisent ce que le citojen BLlLecocq avoit deja fait
paroitre.
AiiJQurd'hui il presente au public un essai d'un
autre genre. G'est une lutte centre un des ecrivains
les plus precis et les plus energiques de Pantiquit^.
Sa traduction est prccedee d'un discours preliminaire ,
dans lequel il expose les motif's qui Pont deci(te a
I'entreprendre , il donne avec modestie son jugement
sur les principaux traducteurs qui Ton devance , et
rend compte des principes qui I'ont guide dans la
traduction.
On compte un as;e^ grand nombre de traduc-
tions francaises de Salluste. Les plus eslimees , celles
qu'on lit aujourd'hui , sont celles du president Do
Brasses , du citojen D.ottevUie , religieux de /'O-
ratoLre^ et de Beau:i>ee. Le citojen Billecocq a eu
sur les divers traducteurs , I'avanlage de vivre dans
un temps plus analogue a celui oii 6crivoit Thistoriea
ialin , et la ressemblance frequente de positions ,
de circonstances ^ de luttes et de factions , a du le
mettre plusenc^-tat d'elever son stjle a la liauteur des
pensees de Salluste.
On ne peut donner 1« nom de traduction a celle
du president de Brasses , qui scmble n'avoir cboisi
Salluste que pour trouver une accasion de placer a
la suite de ses ouvrages les supplemens qu'il avoit
prepares lui-rmeme , et qu'on regarde comnie
d'e.\celleiis raorceaux bistoriques.
La traduction du P. Dotici'Ute est la meilleure.
yoG Litte'rafure latine.
Fidele sans ctre litteral, il s'attaclie au texte, rnais
ne s'j asservit pas scrupiileusemenl. On desireroit
en Iiii plus de rapidittS dans le recit , plus decarac-
tere dans \es portraits, eJ sur-tout plus demouvement
dans les harangues. Mais ces d^fauts sont rachetes
par un grand norabre d*expressions heureuses , par
une diction elegante et pure , et par une attention
peut-efre irop soutenue a Her ensemble les idees de
sonauteur. Trois (Editions succesgives fontassez I'eloge
des travaux de cet estimable litterateur.
Bcaux^ee , habile grammairien , et foible traduc-
teur , e.^ diffus et pesant , ou sec et froid , peu noble
dans son sljle, et quelquefois meme tout-a-fait tri-
vial ; et ce sont precisement les defauts les plus
contraires au gtnie de Salhiste et aux qualit6s
n^cessaires pour le traduire.
Le citojen Bitlecoq rend compte ensuite des prfn-
cipes qui I'ont dirige. Ce sont ceux d'un de nos
meilleurs ipaitres , le celebre Duinarsais. lis sont
exposes dans sa Metliode raisonnee pour apprendre
la Langue latine ^ excellent ouvrage , dont la r^im-
pression'fait honneur au discernement du libraire
c[\\\ I'a entreprise , et qui doit rester sans cesse entre
les mains des jeunes gens qui etudient la langue des
Romains. Le resultat de ces principes est en subs^
tance, que le traducteur doit parler comine fau-
tear auroit parte j s''U ai^oit ecrit en La langue dco
traducteur.
La traduction nouvelle nous a paru noble , fidele,
Elegante ; et il est vrai , comme le traducteur s'en
flatte , qu'il j regne plus de clialeur et d'energie que
Conjuration de Catiline. JO?
clans les precedentes. Quelques moiceaiix donnrroiit
line idee de sa maiiiere. Nous detachefonsle portrait
de Catiliiia, son discours a ses complices , et le por-
trait de Sempronie ; et , pour donner a nos Iccteurs le
plaisir du rapprochement , nous placerons le te.xte
avant la traduction.
Catilinae indoles. L. Catilina , nohili genert
natus ^fuit magna vl et animi et corporis , scd ingcnio
mala , pravoque : huic ah adolescentia bella intestina ,
cades , rapince , discordia civilis , grata fuere : ihiqvx
juventutem suam exercuit. Corpus patiens media ,
algoris , vigilia supra qudm cuiquam credihik est :
Animus audax , suhdolm , varius , cujuslibet ret
simulator ac dissimuJator , alieni appetens , sui pro-
Jusus , ardens in cupiditatibus : satis eloquentia ,
sapientice pariim , vastus animus immoderata , incre-
dibilia , nimis alta semper cupiebat.... Animus im-
purus, aits hominibusque infestns , neque mgiliis, neque
quictihus se dare poterat. ltd conscientia mentem ex-
citam vesahat : igitur color ei exsanguis ^ Jxdi oculi ,
citus modo , modo tardus incessus : prorsus in facie ,
vuUuqucvecordia inerat.
Portrait de Catilina.
« Lucius Catilina, ne d'une famille patricienne ,
avoit rGcu de la nature iine ame forte et un corps
robuste ; mais son esprit etoit nnechant et deprave.
Des ses premieres anne'es, les guerres intestines, le
ineurtre , le pillage et les dissensions civiles avoient
eu des charmes pourlui. C'est au milieu de pareils
jeux qu'il exerca sa jeunesse. II supportoit la faira ,
lo8 Litter ahire Laiine.
les veilles , le froid , avec iine patience Incrojable.
Hardi , fourbe , souple ^ habile a tout feindre comme
a tout dissimuler , avide du bien d'autrui , prodigue
^VL sien , ardent a I'excrs dans ses passions , il avoit
assez d*(^Ioquence , mais peu de Juperaent. Son genie
vaste asplroit sans cesse a des choses extraordinaires ,
mcroyables , sup(5rieures a ses forces... Ce nionstre ,
^galement ennemi de Dieu et des homnies, ne pou-
Voit trouver de cabne , ni dans les veilles , ni dans le
repos, tant son ame inquiete 6toit bourrelee par le
remords. Le visage pale , I'oeil trouble , la demarche
lantot lente , tantot precipit^e , tout en lui annoncoit
la m^chancete et la fureur ».
Nous n'avons a faire ici qu'une critique l^gere ,
encore la soumettons-nous au jugement du traducteur
iui-meme. Le mot de monsire nous paroit trop vague
pour rendre celui d* animus impurus , qui signifie
un coeur gdt6 , gangrene. Peut-etre Fauteur , qui
sans doute en a senti I'cnergie , a voulu y suppleer en
report ant le mot de ni6ckanceti a la fin de la
phrase, et en I'ajoutant a celui dejureur qui rend
vecordia ; mais ce supplement n'est pas un equi-
valent. Nous ferons la meme observation sur le mot
trouble ^ par lequel I'auteur \\?idimi J oedl oculi ^
tiait d'une grande force , au lieu que trouble est foible
et n'offre rien de precis.
Ca'ulinae oratio. JVi virtus f des que vestra satis
spectata mihi foret , nequicquam opfwrtuna res ceci-
disset : spes magna dominationis in manihus frnstra
fuisset : neque per ignnviam , aut vana ingenia , m-
certa pro certis cap tar em : sed , quid midtis ct magnis
Conjuration de Cntiiind. . 109
femptstatibus vos cognovi fortes Jidosqut mihi , ed
animus ausus est maximum atque pulcherrimum faciitus
incipere ; simul quid verbis eadcm , qua: mihi , bona
malaque esse inteile\i : nam , idem vellc atque idem
nolle , ca demiim jirma amicitia est. Sed ego , qua
mente agitavi , omnes jam antca diversi audistis :
caterum mihi in dies magis animus accenditur , ciim
considero qua; conditio vitas Juiura sit , nisi nos-
metipsos vindicamus in liber tatem ; nam postquam
respublica in paucorum potentium jus atque ditionetn
concessit , semper illis reges , tetrarchce vectigale:
esse : populi , nationes stipendia pendere ; cueteri
omnes , strenui , boni , nobiles atque ignobiles ^
fuimus sine gratia , sine auioritate , his obnoxii ,
quibus ^ si respublica valeret ^ Jormidiiii essemus :
itaqne omnis gratia , potentia ^ honos , divitia apud
illos sunt , aut ubi illi volunt : nobis rediquerurU
pericula , repulsas .,judicia , eges tatem : qua quousque
tandem patiemini , fortissimi viri ? Nonne emori per
virtutem prastat , qudm vitam miseram atque inho-
nestam , ubi alienee sapientia ludibrio Jueris , ptr
dedecus amittere ? Veriim enim vero , proh Deum
atque hominum Jidem I victoria in manu nobis est:
viget cetas , animus valet : contra illis , aiinis atque
divitiis , omnia consenuerunt. Tantiimmodo tncepto
opus est , catera res expediet : etenim quis mortalium
€ui virile ingeniym est , tolerare potest, illis divitias
superare quas projundant in extruendo mari , et
montibus coaquandis , nobis rem familiarem etiam
ad neccssaria deesse ? Illos binss , aut amplins
310 Litterature Lat'inc.
domus continuare ^ nobis larem famillarem nusquam
ullum esse : cum tahulas ^ signa ^ toreumenta emunf ,
nova diruunt , alia cp-dificant , postremo omnibus
modis pecuniam trahunt , vexant : tamen summa
lubidine divitias suas vincere nequeunt : at nobis est
domi inopia , forts oss alienum : mala res , spes
multo asperior ; denique quid reliqui habemus ,
prceter miseram animam ? Quin igitur expergiscimini ?
en ilia , ilia quam sape optastis , lihertas : prce-
t^ed , divitia , decus , gloria , in oculis sita sunt ;
Jortuna ea omnia victoribus pramia posuit : res ,
tempus , pericula , egcstns , belli spolia magnijica ,
magis quam oratio mea vos hortenticr : vel imp'e-
ratore , vel milite me utemini : ncque animus , nequ&
corpus a vobis aberit : hkc ipsa , ut spero , vobiscum
una consul agam : nisi forte me animus fallit , et
vos servire magis , quam imperare , parati estis.
Harangue deCatilina.
« Si votre courage et votre devouenient nem'e-
toient sufiisamrnent connus , en vain le moment fa-
vorable seroit arrive j en vain I'esperante d'un grand
pouvoir s'ofifriroit a nous , et je n'exposerois pas
avec des,liommes foibles et sans caractere , le cer-
tain pour Uncertain ; mais plusieurs fois et dans
des temps difficiles , j'ai eprouve votre audace et
votre fidelite , et c'est ce qui m'a determine a i'cn-
treprise la plus genereuse et la plus bardie.
» Je sais d'allleurs, depuis long-temps, qu'il ne
peat y avoir pour vous d'heureux ou de fujaesle
Canjuration de Caidina. irr
que ce qui Test pour moi-meme ; car to u] ours
voutoir ou> ne pas vouloir une trume chose ,
Voila li solide aniilie. D6ja chacuiide vousa sdparc-
ment appris de moi les projels que je medite. Mon
coeur s'j enhardit de plus en plus, lorsque je r^fle-
cliis au sort qui nous attend , si nous ne savons bien-
t6t nous rendre libies.
Depuis que le gouveruement est devenu comme
ia propriete d'un petit nombre d'hommes , desrois,
des tetrarques se sont reudus leurs tributaires 5 des
peuples 5 des ^lats leur paient des impots : quand
a nous 5 citojens genereux et guerriers pleins de
courage , nobles ou plebeiens , nous n'avons plus ii&
qu'une multitude grossiere , sns credit , sans auto-
rite 5 soumise a ceux-la meme dont elle eut et^ l*ef-
fioi , si larepublique etoit ce qu'elle doit etre. Aiusi,
puissance, lionneurs , richesses , influence, tout est
entre leurs mains , ou du moins par-tout oil il leur
plait : ils nous laissent a nous les dc.ngers , les re-
buts , les flelrissures , la misere. Jusqu'a quand souf-
frirez-vous enfia^ braves compagnons? Mourir avec
courage, n'est-ce pas un sort plus digne de vous
que de terminer dans I'opprobre une vie malheu-
reuse et deslionor^e, tristes jouels de quelques su-
perbes dominateurs ? et cependant, j'en atteste les
dieux etleshommes , la victoire est dans nos mains.
Chez nous , la vigueur de I'age et la force de I'ame !
cliez eux, une vieillesse acceleree par la mollesse
et par les annees ! II nous suffit d'oser, te reslc se
/era de sol-mime. Quel est en effet ie liornauh
aucjueL U res^e encore L'encr^le d'un koninie , qui
^j2 Litter ahire Latine.
pulsse voir sans indignation ces sang-sues regorger
des richesses, et les dissiper follement en batissant
sur les mers ou en applanissant des moutagnes , tan-
dis que nous manquons du plus etroit necessaire;
clever palais sur palais, tandis qu'a peine avons-
»Gus quelque part le plus humble %er ; acheter
des tableaux, des figures, des va^es de prix , de-
molir leur maisons toutes neuves encore , pour en
construire d'autres ; enfin, tourmenter, fatiguer leurs
revenus sans pouvoir , meme a foice deprodigali1^s>
eonsommer leurs ricliesses ? Nous , cependant , quel
est notre partage ? la misere au-dedans, au-dehors
des creanciers, des affaires en desordre , un avenir
plus affreux encore. Que nous reste-t-il , en un mot ,
L'une deplorable existencb ? R6veilIez-vous done
entin : la voici , la voici , cette liberie, objet de
vos 6ternels desirs , et avec elle les richesses, les
honneurs et la gloire. Telles sont les recompenses
reserv^es par le sort a neureux vainqueur. Que
cet espoir, que la circonstance , que le danger,
que les besolns, que les depouilles, eclalantes , que
toutes ces considerations vous animent plus que toutes
n.es paroles.' Je serai, moo , chef occ soidat ; man
corps, mon ame sont tout enliers h vous; et qnel-
que jour, ]e Pespere, fait consul par vous, ^e re-
glerai avec vous nos interets communs, a moms
foutefois que mo,, audace ne me ^--^ '^^ ^^
vous ue soyez plus disposes a re-.eNo:r la loi qua
''l^:ierveronsd'abovdquelemc.yZ..-'est
.,..c exactement rendu par le u^ot UevouemeaL
Conjuration de Catilina. ll3
II faut faire attention que Catilina parle a des^gaux ;
car , comma I'a dit Lucain avec tant di precison et
dYnergie, faanus quos inquinat _, cequat ; et
Catilina est frop adroit pour debuter par un ferme
qui presenteroit une idee de superiorite de sa part j
aussi se sert-il d'un mot noble ^Jides ^ qui n'exclut
pas I'idee de I'cgalite.
VesperancG •'^un grand pouvoir^ esttrop va^ue.
Catilira tranche le mot : La doniination , et cette
esperance n'est pas une illusion : spes cert a do-
tnltiationis. Je ri' expo serai pas te certain. II
semble que la sev ri;e de la langue exige : je
ne risquerai pas. Toujours voulolro ll ae pas
vouloir une mime cho^e _, paroit marqi'er d'ele-
gance et en n.erae temps d'exactitude. Cat'lina ne
dit pas une meme chose. C'est Lien plus ; c'est la
conformite de tons les intcrets qui peuvent aniir.er
!es hommes : eadem. lis nous laissent a nous ;
le traducteur a bi.'n senti la force de cette oppo-
sition ; Nobis reLuquai sunt , peut-etre seroit-elle
encore plus marqu.'e , si I'on commencoit comme
le latin : a nouSj Us nous Laissent. Jusqu'd. quand
le souffrirex^-vous enjin , braves conipagnons ?
'Enjin ne paroit pas heureusement place, llapnel-
Ions-nous Boileau.
D'un mot mis en sa place anseigna 1« pouvoii-.
Lie reste sefera de soL-meme _, ne rend pas rh^oani-
ment le tour heureux du latin _, ccetera res expe-
diet. Quel est eneffetle Roinain auquei U reste
encore L'energie d^un homme qui pulsse , etc. y le
latin est d'une simplicite plus expressive. Ce n't'st
Jome II J£
114 Litierature Latine
pns memede t'encrgie que Catilina dismantle. C'csl
iniiqiK-MiieiU te ca racttre cV ho mine j virile Lrigenuun^
On desireroit cl'ailleurs que la phrase fat dobara;see
deces vclatils qui rcndeiit sa uiarche pes uile , qucL ,
auq el J qui. Les recompenses rdservces par te
sort dil a Vheureux va'uiqueur. Ici I'epilhetii
afFoiblit ; vainqueur dit tout. Ce n'est pas a un
^crivalil qui annoiice autaiit de gout que le C. Bil-
Iscoq qu'ilfaut diie, avec Voltaire, que le plus grand
eimeini du substaiifif e^t I'adjectif. Je serai , moi,
i:'aef OIL soldat. Le traducteur reniarque dans line
note qn'il a dans lesplirases suivantes tacliederendre
plus sensible , i^^v les 7T>us multipl es, I'intenlioii
qu'a cue Calilina de paroitre associer entJerement
«on sort avec celui de ses complices, et n'avoir avea
eux qu'ua seul et meme interet. Cette remarque
annonce une etude approfoiidie , non pas seulement
de la lettre, maJs du g^nie de la langue, et de I'ar-
tiuce de I'ecrivain. Mais par la raeine raison on re-
grettera de ne pas trouver dans la traduction I'art
extreme qu'il j a dans ce mot , si simple en appa-
rence : rae dace aat niilite utemini ^ qui semble
faire dependre de la volonte des complices le role
que doit joucr Catilina, et son abandon sans reserve
a cette espece de decision , utemiiii.
Oil voit que*, raalgre ces critiques que nous don-
nons pour notres et non pas pour bonnes 3 ce dis-
cjurs a de la liberte, da la vi3 et de la clialeur,
et ne paroit pas se resssntlr de la gene d'une tra-
duction. Au reste nous invitons ceux de nos lact.^urs
qui aiment les rapprocbemens , a mettre en opposi^
Conjuration de CatUina. 1,5
tlon celui que I'abb^ de S. Real met dans la bou.h*
^ieReaaud dans la conjuration de Venise , el qui
a de grandes beautes.
Semproni^ indoles. In hu erat SemUron^ ,
qu^ multa scBoe vtrilis audacice ficinora commi-
serat : hcBc vudier genere atque Jormd , incetereci
viro atque liberh satis Jorlunata Juit ; iittens grcecis
et laUnis docta ; psalUre , saltarc degantius , rjuam
necesse est prober ; ,nulta alia , g.ce inslrumenta
lu.iu-m sunt; sed et canora sember omnia ^ qudm
decus atque pudicitia fuit ; pecumce an famae minus
Parceret^ hand facile discemeres ; lubidine sic ac-
censa , ut scepiits peteret vivos , quam peter etur ; sed
ea sc^pe ante hac Jidem prodiderat , creditum abju-
raverat, ca^iis conscia fuerat , luxurid atque inopU
Pra^ceps ahierat ; verum ingenium ejus hand ab-
^urdum ; posse versus facere , jocum movere , ser-
^lone uti vcl modesto , vel niolli , ../ procaci ;
prorsus mul tee facets ce , multusque kpos inerat.
Portrait de S e im p r q .m a.
«Parm. cesfemmos on comptoitSempronia , dont
see r t. ^""^ ^'"-^ --S- au-dessus de sou
sexe. Cette femnie , distinguec par sa naissance et
parsa beaute, henreuse epouse , heureuse mere,
avoit une grande connois.ance des langues .recrrue
enatme. Elle chanto.t et dansoit avec ^lus cC^ac
en" o2eT''''' ' "" '"""^ ^"^^"^^^ ' ^' P--Io't
c^es mo^eu. de l^atmage. Tout enfin ctolt J.n
H 3
n6 Litteraturt Latint.
J^ius grand prix pour clle , cjue la piideur et t<%
r6>ewe de son sexc. On auroit pu facilemcnt dis-
cerner ce (|u'vlle in^nag'^oi! be plus , on de sa for-
tune , on de sa teputalion , itaat paruenue a co
point de dissolution, quVlle rechercb.oit plus soiivent
ies Lommes qu'elle n'en etoit rechercliee. D^ja ,
plusieurs fois , elle avoit trahi sa foi , raenti a sa
conscience en niant des despots , particip<^ a des
as^rjssinats ; en un mot , I'amour de la debaucbe et
Texlreme hesoin I'avoient precipitda dans tous Ies
exces. Du reste , elle avoit un esprit agreable , com-
posoit fa ilement des v rs, plaisantoit avec grace ,
et parioit tour-a-tour le langage de la modestie , de
la tendresse , ou de la licence 5 enfin , elle ctoit rem-
plie d'a;. remens et de charmes ».
Nous avons quelques legeres critiques a faire sur
ce |:assag'3. Voici la premiere. Apr^s ces mots , eUe
posscdoLt en outre beaucoup d'atUres taiens qui
ne soai Cfue des niojjens de Libertinage ^ le tra-
du. teur ajoute : tout enfin itoit d'un plus grand
prix pour eUe , que La pudeur et la riserue de
sonsexe. Ce tour de phrase s'emploie ordin:\irement
pour terminer une enum^raiiou , el il serable que ce
ii'est pas la sa place. L'auteur a commeiice par nous
peindre Ies avantapes de Sempronia, et il y oppose
ensuite ses vices et ses exces. Aussi retrouve-t-on
dans sa phrase le signe de I'opposition. Sed ei, ca-^
riora , etc. : ce qu'il ne falloit pas manquer de
rsndre , comme I'exige la suite naturelle des id^es...
Cett3 traduction , La pudeur et La reserve de son
sexe J manque , selon nous , d'exactitude. Le latia
Conjuration de Catilina. jtf
dit decus et pudicitia : decus est la riputation^ de
La vertii qu'on exige dans les femmes, commc pa-
dlcitia en est la reatite. Si I'auteur eut voulu
exprimer la deceiice , il auroit employe le mot
decor. La seconde critique a pour objet cetfe tra-
duc.'ion, qui nous paroit presenter un sens louche et
presque contra-re au sens de I'auteur : on n^auroitpio
facUenient dlscerner ce qu'elle nicnageolt leplus
de sa fortune oll de sa reputation. Pecuniae an,
fanice minus parceret , d't Salluste. II semble
qii'il faudroit lb dioinc. Un gout severe trouveroit
peut-etre aussi quelque chose de repr^tiensible dans
cette addition , qui rend la phrase un peu trainaute s
^tant pari^enue dice point de dissolution^ etc.
On jugera sans doute ces critiques m nutieuses.
Nous n'avons pas besoin de dif-e qu'elles ne nous sont
inspirees que par I'amour des lettres et par I' oteret
du gout. Au reste , des remarques de cette nature
tournent a la gloire d'un auteur , pirca qu'e leS
prouvent moins la subtilite de la critic/ae que la } er-
fection de I'ouvrage.
Le citoven Billccocq annonce la suite des ^c f«
de Saliuste , c'est-a-dire , sa Guerre de JugurlLa^
et ses deux Lettres d Ccsar\, sur les moijeicS
d'administrer la Republique ( de Republica or^
dinandd) : lettres trop peu lues , trop peu mediti'ee
peut-etre , et dans It'squelles Sallujte d^^ploie un©
grande connoissance des besoins d'un Etat , et des
talens ntcessaires h ceux qui le gouvernent. Le-
premier coup d'esscii du traducteur fait augurer favo-
jublementdu reste de son travail. Nous ne pouvoua
H 3
ii8 Littirature Lathe.
que I'exhorter a le coiitinuer , et a pronver , par cet
exemple , que le j^out des lettres anciennes n'est pas
encore 6teint parml nous , comme il prouve , par Ics
notes qui tenninent sa traduction , que , dans son
esprit ainsi que dans sou cceur, I'idee etle sentiment
de Liberld sont inseparables de ceux de raison ,
d'juunanit^ , de lumieres , et sur-tout de vertu.
MELANGES.
Penseks et anecdotes tirees dhin manuscrU
d'Heha ult-Sechelles.
Quel est le pere de la gloire ? Le g^nie. Quelle
est la mere du genie? La solitude.
Pour I'a^Tie qui a ('te occupee par les passions ,
il n'j a plus que la gloire.
On demandoit a Neivton comment il avoit pu
faire ses grandes decouvertes. II repondit ; en les
ckerchant toujours ^ mot sublime qui s'applique
a tout.
L'esprit ne voit que les ressemblances ; le jug^
nient et le genie voient les differences. C'est que
les objets se ressemblent par les cot 's les plus gros-
siers ^ au lieu qu'ils different par les plus delicats.
On a bien dtfini le hasard le cours Inapercu des
Fense'es et Anecdotes.. ucy
*horp5. T! n'y a point de basard : mais nous Tap-
pelons ainsi , lorsque noui; ne vovons pas la cause^
Locne a tivs-bien dit qua lo teinps if est que la
succession de nos pensces.
Oui Trait iittention aux mots, trouveroit souvent
braucoup d'idees dans un seul. Jc me recree n'est
autre chose pour le vulgaire c|U3 juuer a la paume,
aux cartes, etc. j pour le philosoplie , ii y voit une
seconde creation , par laquclle on se retire soi-
meme du neant.
M. Turgot avo"t fait une cliaine sjstemafique de
toutes ses idees, et il liait chaque cliose a une autre.
Cela peut etre fort bonj mais il faut savoir aiors de-
tacher au besoin un anneau de sa ciiaaie, ct nca
pas la trainer toute entiere.
Tout raisonnement juste est une dccouverte.
J'ai vu applaudir de simples raisonnemens denwcs
d'eloquence, mais frappans par leur justesse.
La douleur a des charmes , sans doute, et cela est
heureux pour I'liomme destine presqu'exclusivement
au mallieur. Mais avant d'altendrir, il faut y pre-
parer ; autremcnt les larmes ne viendront pas , cl^\^QU
que touchant que soit ToLjet, et des urnes sans dou-
ceur , mais non sans art , o])li^•nd^ont ce que des cen^
dres reelles n'ont pu arracher. J'cn ai un cxemple
sous hs yeux. A Falaise , M. de Tourny a r^-
pandu dans differentes parties de son jardin les
tombeaux de son lere, de sa ieiume , de sa fille^^
>t4
I20 Melanges.
de son amie et d*une momie. Crolriez-vous que le
mieux enterr^ de tout cela c'est la momie ? EUe est
au fond d'un noir souterrain , oii trente marches cou-
duil^it , tandis que le pere, la femme, la fille,
I'ami sont jetcs en plein (hamp, comme des bette-
raves. Aussi , je l^avoue , quelqu'interessantes que
fussent ces inscriptions : a ma feinme _, A mon
pere , d niajitie _, je n'ai plear^ que la momie
La plupart des gens qui ont fait des livres, ne les
ont fait que pour etudier eux-m^mes. C'est peut-
elre une des raisons qu*il y a tant d*ouvrages foibles.
II J a deux especes de caracteres fermes j celui
qui attaque, celui qui resiste.
II faut mettre son ambition loin de soi ; il faut
la placer dans I'avenir ^ a une distance oii les hom-
ines ne puissent pas I'atteindre.
II y a deux especes de g^nie ; le g^nie de Pes-
prit, le genie du talent. Le g^nie de I'esprit cree
des rapports, le genie du talent, des expressions j
CorneiUe a le premier, Racine ^ le second.
Franklin est I'homme du slecle, dont la destin^e a
^te la plus extraordinaire. Egalement grand , ^ga~
lement cr^ateur dans les deux genres , la nature et la
soci^te ; teraoins Telectrlcite et la hberle de l'Ani6-
rique ; il a fait avec la finesse et I'etendue de sa
raison , ce que les autres font avec leur enthousiasme.
II observoit tout, il decouvroit >^ans cesse. J'ai oui
dire que sou foyer nueme 6toit entoure de ses d^cou-
Pense'es et Anecdotes. 121
vertes. Homme calme, tranqiiille, liuinain, simple,
etre indopeiidant , il se promit de bonne heure d#
n'accorderson assentiment qu'aiix objets qu'il verroit,
apres les avoir biei. regard^s. 11 pen^oit quel'uomme
peut faire lui seul sa sante. II ciloit avec complai-
sance cette pens^e de Salomon ; UkoininG sage
porte ses Longues annees dans sa main II
en tie dans tout moins de fortune qu'on ne croiL
Le fonds d'lm grand talent est toujours beaucoup
de raison.
L'araour ne nait , ce me semble , que de la physio-
nomie et des man teres.
Les grands homnies , ceux qui Ic sont , soit par
leur caractere , soit par leurs talens , vivent seuls. lis
en ont le besoin et k' goU. lis ne se communiquent
aux autres hommes que dans leurs actions publiques
et solemnelies.
II me semble voir beaucoup d'hommrs sur un toit :
Ics uns tombent , et les autres glissent ; la vi^i n'est pas
autre cbose.
Je regarde les cordons bleus et les cordons rouges
CO in me des ficelles.
C'est un grand merite que la sagacite dans les ou-
vrages d'esprit : cliez les aucieus, ou tout ctoit neuf ,
elle s'exercoit sur les sentiraens les plus naturels j
cliez les modenies, dont ['instrument est forme, elle
doit s'exercer sur les sensations les plus fi>jes et les
plus dctournees. II me s^nable beaucoup plus difficile
d'etre un moderne qu'un ancien.
3 2S MelnjiufS.
Que cle geMs prouvcnt q>\e Von pent etre mcVliocrp,
lUQ'.ue avec de I'esprit! c'est que la grandeur et la
sijpei iorile viennent de Tame.
II est important de bien dehuter. Les Lommes
jugiDt toujours au ])ren-.ier coup d'oeil , et leurs
jugemens ne sont gueres que la rep^iition du premier.
II V a devx sortes d'esprit philosophique , celui
qui generalise , celui qui observe. Le second est en-
core plus precieux et plus rare.
Pour les hommes ncs avec un pen de talent , il n y a
que deux sortes de livres a lire , ceux qui font penser ,
et ceux qui conliennent des fails.
Diderot parloit un jour avec empbase de Sliakef^
■pear devant Voltaire. Ab ! Monsieur, lui dit
VoUaire J est-ce que vous pouvez pr^ferera VirgUe,
a Racine, unmonstred^pourvu de gout? J'aimerois
autant que Ton abandonnat VApoilori du Belvedere
pour le Saint Ckristopke de Notre-Dame. Diderot
resta un moment sur le coup ; mais ensuite : que
diriez-vous, cependant, Monsieur, si vous vojiez cet
immense Ckristopke raarcber et s'avaucer dans Ic*
rues avec ses jambes et sa stature colossale? — Voi-
tairejison tourjfut atterre parcetto image imposante.
Je me trouvois un jour avec six bommes de leltres.
Onse deraandoit quel etoit le plus b.^au morceau de
poesie. J'opinai pour que chacun ecrivit secretement
son avis sur un scrutin. Nous fumes tres-6tonnes de
voir que nous nous etions tous reunis a donner la pre-
ference a la peirture d'Adaai tt Eve dans le pa-
radis terrestre , par JMlltorb.
Pf.nse'ei el Ane^'dote';. i^->3
Le^ pei.timens })rotlini,ept le courage aclif, el la
philoso[>lKe , \^ courage passif.
Le talent a besoiii aujourd'hui da caractere , pour
recevoir \\\\ iiouvl^I 6clat.
Taclte est a-la-fois 'in et fort ; nnesagacite prodi-
gieuse el uiie energie egale ; et puis c'est qu*on sent
qu'il se retierit , et qu'il cache toujours la moitie do
ce qu'il montre. II vous dit lout , quoiqu'il ecrive
en presence du ]ion. II a I'art d'e re encore plus
soupconneur qu'arcu.-afeur. CVsf un hi mn.3 qui
vous parle a i'oreille , qui vous eilraia et vcus
cliarme, parce qu'il y a une sorle de plaisir a avoir
pour. II donue, pour ainsi dire , ses idees sous le
manteau. EUes sont souvent infinies, parce qu'elles
ne sont pas finies. Telles ces mines dont le vojageur
admire l'el6vation , el les Irois quarls sont sous la
terre.
J'aime a me trouver av\^c 'es hommes qui ont
concu et termine de grands ouvragcs. On se sent plus
courageux , en approchant des grandes patiences.
Les bons mots, les vrais bons mots naissent blen
plus du cara:tere que de Tesprit. Vo .ez lous les mots
des anciens.
On demandoit a I'im.peratrica de Hassle : Com-
ment avez-vous pu ^tablir tant d'ordre dans vos
finances? — En comptanl lousles jours, r^poudit-elle.
Alexandre fit la meme le. onse a cclui (|ui lui di-
soil : Cjipment se peut-il que, si ji une , vous ayie*
1 24 MeUnges.
execnic tant et de sigrandesclioses?— Enneremetlant
rien an lendemain. C'est aussi le trait par lequel
Lucain caracterise Cesar :
Hfil actum reputans j si quid siipci esset agendum.
Enfin Newton a fait aussi la meme rcponse. V.
page 1 1 8.
Les Ecrivalns mediocres rendent leurs idees ,
mais ne les exprimeni pas.
On se perd dans les villes ; on se laisse a la cam?-
pagne ; il est bon d'aller de temps en temps s'y
3 etrouver.
P O E S I E.
HERMANN ET THUSNELDA,
Ode tradulte de Klopstock,
Thusnelda.
V>0T7VEKT de sang romain , de sueur , de poussiere^
II revient des combats sanglans.
Jamais les traits d'Hermann ne furent si brillaus ^
Et jamais si vive lumi^re
Ne jaillit de ses yeux briilans.
Viens , donne celte ep^e ; elle est encor fumantej;
Varus a requ le tr^pas.
Respire , et viens gouler le repos dans mes bras^
Sur la bouche de ton amante.
Loin du tonnerre des combau.
Hermann et Thu<;nelda, laS
Hermann , repose-toi : que sur ton front j'essule
Tod sang Pt ta noble sueur.
Comme il brule ton front ! de Rome heureux yainqueur.
Non , jamais Thusnelda ravie
Ne sentit pour toi celte ardeur.
Non , pas meme le jour ou , sous un chene antique ^
Hermann , par I'amour emporte ,
FuyantBj me saisit deson bras indompte :
J'observai son ceil h^roique ^
Et )'j vis rimmortalit^.
C'est ton bien desormais. O Germains , plus d'alarmes ,
Germains , dent Hermann est I'appui.
Houte au divin Augusle 1 il s'abreuve aujourd'hui
D'un nectar mele de ses larmes ;
Hermann est plus divin que lui.
Hermann.
Laisse Ik mes cheveux. Vois , p4le et sans lumi^re ^
Le pere ^tendu devant nous.
C^sar,s'il eut os6 s'ofFrir ci mon courroux ^
Seroit ici dans la poussi^r* ,
plus pale et plus couvert d.e coup»»
Thusnelda.
Que tes cheveux , Hermann , en boucles menacant«$ ,
Ombragent ton front glorieux.
Ce corps n'est plus Sigmar ; ton p&re est dans le« cieux 5
Seche tes larmes impuissantes j
Tu le reverras chez les Dieux.
JPar M. J. C H K N I K A.
125 Tohie.
Fragment du poeine de La Nature , tire du r
ckant^jait auant 1770.
Le sage aime a revcr dans un reduit champctre ,
L'agnea.i (]a'ilvoil bondir , la brebis qu'il voit paitre,
Le taure;.ii (fu'II cnlend umgir dansles valtons ,
Le fer cultivateur luisant sur les sillons ,
Les forels , les coteaux et leur fertile pente ,
TJn ze^ihii- qui s'egaie , une onde qui serpente ,
Flattent plus ses vCj^ards , moUement euohantes ,
Que le faste indigent des profanes cites.
Eh ! que dit a nos coeurs le luxe de nos villes ?
Ces palals eieves par tant de mains serviies ,
Ces rapides coursim-s , ces chars tumultucux ,
Ces dehors imposaus d'un emiui fastueux ,
Qu'offrenl-ils aux regards? des surfaces trompeuses ,
Des plaisirs inquiets , des miseres pompeuses ,
Le merite courbe sous le poids des tyrans ,
Et de nos libertes les restes espirans.
Je sals trop que Voltaire , abusant du genie ,
Aut chaiTipetres vertus prodigua I'ironie (i) ,
Et du luxe elalant les utiles progres ,
A d'un vers di'd^ugneux insulte nos guerets :
Jeu sanglantde Tesprit! funeste badinage ,
Plus cruel que le fer instrument du carnage ,
Qui , depouillant le coeur de sa male lierle ,
A lamolesse , a Tor vendit sa liberty !
(l) Voltauc , dans son Mondain , son Antlmondain , ect.
ajfecta de prUhcr le luxe , la nudesse , el de semer le ridicule
sur les ferUis it publicaines. C'esL la qu'll se rnoque de ces
consuls ei us gui laoouruunt la ierre eux-mtmes , et
cju ll dit :
« Cc teniMS profane est tout fait pour nos moeusr ».
Tragment du poh)ie dc la Nature. 127
MalliouTRux, qui changeoit arcc trop d'imprnclencp,
Anx Itslins des Ivrans la sol)ie indeperulanec^ ;
Prodigieux mortel ! hoiiinie uniqu° ft divers ,
Tantot avfc les dieux plananl sur I'lmivers ,
Tdiitot , jusqu'a Zo'ile , abaisse dans la lange ,
De force et de folblesse incrojabb milange ,
Homme au-dessus des rois , s'il \e& eut ignores ,
Et le dieu des taleiis , s'il les eiit vever^s !
Mais du cygne fraocais (i) diPaimant rbariaonie ,
II courut dans le Nord tlatter la tjraunie.
Long-temps de rois en rois sou orgueil a rampe
Sous iiD joug eclalant que ses pieurs out trempe-
Enfin il guide an port d'uue craj use vie ,
H rademanie auK champs su liberie ravie,
Les champs et la naluve aaiment ses acceiis ,
Et ce premier bonhcur a sou dernier enceni.
O maison d" ^lislipye .' 6 jardiiis J' Rpic'u e /
Cast vous qu'il imploroit dans sa reliaiLe obscure-.
De ses destins errans il a fixe le cours,
Pres d'un lac et des bois , loiu d-s trompeuif'S couvi.
La , ce vieillard fameux jouit de sa m^iauii^^ ;
II rallume sa vie au flambeau de la gloire :
Cornelie (i) a vole dans ses bras genereux ;
II a tout expie puisqu'il fait cl?s heureux !
Aiusi , quaiid de Venus les tlammes sont tteintes ,
Quand de I'ambition il sent moius les atteintes,
Le cunir revole aux champs dont il fut separ^ ,
Et raoiene au bonheur son hommaga egir^.
Hwuieux qui , soulevant une chaii'.o importune ,
D^tache ses destins du char de la fortune ,
Et , sans la fatiguer de soupirs eternels,
(l) J. B. Rousseau , contie Uquel il s' acharna duns ses
diinicis ceiiti.
(l) Madame Corneille j, qui V a:it9lC\ dg cejragmeit unoya
a f^oltaiie , en 1760.
isS To hie.
Cultiv'e de ses mains les guerels paterncls ?
Moi s envie paut-etre et plus digne d'envie,
Aux mortels indiscrets il derobe sa vie.
Xoiu des cris inseos^s d'un vulgaire odieux ,
L'innocence d 's champs rend I'homme 6gal aux dieux,
Oui , \~x our de Paies est Tasile du sage :
C'est la que de son ame il fait Tapprentissage.
Seul avec la nature , errant parnii les bois ,
II contemple de loin la fortune et les rois.
Du songe des grandeurs I'image passag^re
Disparoit devant lui comme une ombre 16g^re ,
Et tous ces dieux mortels , ouvrage de nos mains ,
Rentrent a ses regards au niveau des humains.
Tel, a des yeux divers , le meme objet varie ;
Tel , aux jeux du pasteur couclie dans la prairie ,
Le chene , qui deploie un front d^mesure ,
Semble etre un citoyen de I'empire azur(^ ;
Mais au regard per(^ant de I'aigle vigilante.
Qui p^nelre des airs la voute etinceiante ,
L'orgueil du chene rentre au niveau des sillons ,
Else mele aux tapis de nos humbles vallons ;
Mais cetle aigle si fiere et planant sur la nue,
Des regards du soleil est a peine connue ;
Et ce meme soleil n'est aux regards des dieux ,
Qu'une clincelle , un point dans I'abyme des cieux.
iPar LeBrUN.
'y£RS places sur le bustede Desavlt , aussUot
aprts sa morL
Portes du temple de memoire ,
Ouvrez-vous , il I'a m^rite :
II vecut assez pour sa gloire,
Mais trop peu pour i'humdnile,
PiGAULT Le Bruh,
POESIES ERSES.
T R A T H A L,
Poeme (VOssian.
Ce morceaujait portle d' un outrage actuellement sous presse >
et qui doit seri>ir de, suite a TOssiAN c?e Le Tourneur. II
renferme plnsieurs po'ernes flf'OssiAN ct de quelques auires
lavdcs qui Jwent ses modcles ou sef; imitatcurs , traduits
sur Id (version anglaise que John Smith en a publiee , SOUS
le title de Gaelic antiquities , Edimbjurg, 1780.
FiLS du matin, les premiers pas que tu fais dans
ieciel, Tapparence de ta blonde chevelurc au-dessus
des montagaes de I'Orient, for ment le plus doux des
spectacles. A ta vue , les colcaux sourient , les val-
lees etincelautes et leurs ruisseaux azures se re-
jouissent. Les arbres elevent, a travers la pluie, leurs
tetes verdojantes, pour aller a ta rencontre, et tous
les bardes des bocages cojebrcnt ton retour. Mais
en quels lieux se retire la nuit , portle sur sesailes
ten^breuses , lorsqu'elle te voit paroitre ? Ou est le
sejour de I'obscurite ? Oh se rcfugient les etoiles , et
quelle caverne recele leur beaute tremblanto ? Dans
quel desert les bannis-tu , lorsque tu parcours les
hauteurs du ciel , et comme un puissant chasseur,
les poursuis a travers les campagnesdu firmament?
Fils du ciel, on aime a te voir fournir au-dessus de nos
tetes , ta carri^re luraineuse , et disperser loin de toi
les orages. Tu plais encore , au ir.oment oii dispa-
roit ta blonde ciievelure , ou tu t'eufonces dans les
I'onie 11, i
i3o Toesii'i enis.
vagues do I'Occident ; et Ton cberit I'esperance de
Ion reloiir. Jamais tu ne t'egarss dans les vapeuvs
de la nuit ; vaiuement les lempeles s'efTorceat de
contrarier ta marclie dans I'Dcv-^aii trouble. Toujours
pret au si. nal du matin , tu ramenes tes aimables
rajons. lis sont aimables ; mais je ne les vois point ,
car tu ne dissipes pas la nuit qui couvre les jeux
du barde.
Mais le broullard des annees t'obscurcira peut-
^tre un jour; peut-eire , s:mb!ables aux miens,
les pas de ta vieiUesse se traineront avec lenteur sur
Morven. Alors, a I'exemple de ta sanu-, errant dans
le cielsous la forme d'un disque sombre, luoublieras
le moment de ton lever. Tu ne repondras plus a
ia voix du matin. Du haut de sa coiline , le chas-
seur regardera si tu viens , mais il ne te verra plus.
Xes yeux baignes de larmes , « le rayon du ciel ,
dira-t-il a sa meute, le r. 3-on du ciel nous a de-
laiss^s ». II reprendra tr'stement le chemin de sa
butte. Mais la lune paroiira dans sa splendeur , ei les
etoiles se rejouiront dans la place qui leur est assi-
gn(^e. Oui , soleil , un jour tu vieilliras ! un jour ,
peut-etre , tu dormiras dans la tombe , comme Tra-
thal.
O soleil ! ne te souvient-il pas de ce chef? Tu
la'as pu le voir sur nos montagnes , sans elre frappe
de la noblesse de sa demarche. Un jour il parcou-
roit les brujeresdu Gormal , rayonnant de la beauty
du jeune age. 11 tenoit une lance dans chaque main,
et le bouclier de scs peres , large comme ta face
iniposante , convroit sa poitrine. La couleur sombre
TrnlJinl. i3i
de son casque au,'2[me'ntoit I'^clat de ses joucs ver-
meilles, et ses cii-'Viniv oidojans floHoieiit ?ur scs
^pa.iies. En m vchant , il fV donnoit !es luuanges des
heros j un vieillard s pr/sente a lui ; sosyoux sunt rou-
gis par les pleurs ; S3S jou 'S en sont encore liuniecL'es.
«. Je viens , dit-il avec I'ac.ent de la duulear , ja
viens implorer ton aide, si !u es Trntlial, roi djs
lances. II fut un terns on, sur le nv^age lointain de
Dula 5 une multiiude de lieros eiitendit le. son du
fcouclier de Toal-Anna , et ses salles ont vu v.u^
multitude d'eti angers adtnise a ses b.nnquets. Mais les
lieros n'entendent phis le son dj mon bouclier ; et
mes salies , ou les bardes moduloient leurs chants
antour d'un chene eaibrase, sont maintenautfroides,
solitaires et silencieuses. Morardan vit la beaute da
ma fille. Je n'avois point d'autre enfant qu'tl!-. 11
en fut dpris, mais elle ne rcpondit point a son an. our.
il^dissimula son depit j mais un jour que j'etois sur
le rivage avec Slisgala, il parut dans un esquif diri'-^e
par qualre rameurs , et nous obligea d'y enirer. La
tern pete nous retient sur ton rivage. Trathal , donne-
moi une de ces lances , et viens combattre en ma
faveur 6 toi le prem'u'rdesh()mmes » i
A ce di-^cours, la joie et la fureur s'^Ieveren! a-Ia-
fois dans i'ame de Trathal. II donna la 1 nee au
vieillard, et marclia sans craintv". Le bruit de sa
course ressembloit au munnure d'un ruisseau cacht^.
Une arm^e se dc-couvre a ses jeuM ; le vieillard se
perd dans la foule des gu^rriers ; le chef, dans sa
colere , Irve a demi sa lance ; mais son auie lui
dit d'tpargner le vieiliesse du foib e. « O Trathal !
I a
i32 Toestes erses.
]ui dit-elle , ne souiile pas ta lance de son sang ».
Cinquante lances sont dressees ; cinquante glaives
agiteut aiitour de lui leurs flammes , pareilles a des
Eclairs. Colgul se montre au milieu des guerriers.
Son visage est anim^ d'une joie sombre , tel qu'un
feu eiitoiire d'une colonne de fumee, tel qn'un ra^-
teore assis sur un nuage , quand la lune est cach^e ,
et que les monts charges de forets entendent le bruit
de I'orage.
Colgul avoit chasse avec Trathal dans Dorinessa ,
et mesur^ en se jouant sa lance avec la sienne. Mais
qui pouvoit chasser , qui pouvoit raesurer sa lance
avec Tratbal ? La vierge aux yeux noirs, habitante
de Dorinessa , poussa un soupir a la vue du chef ,
et d^tourna ses regards de Colgul. Colgul s'eloio^^na,
renfermant sa colere en lui-meme , ainsi qu'une
Ombre port^e sur son ouragan destructeur , s'e-
loigne d'un chene qu'elle n'a pu briser. Dans sa
caverne nebuleuse , elle attend I'occasion de retour-
ner avec le mugissement des venls. Ainsi Colgul
altendit trois mois , et main tenant que Trathal est
seul , il vient , accompagn6 de ses mille guer-
riers.
Tu es seul , o Tratlial ! maistu ne songes pas a f«ir.
Ta force croitdans le peril , comrae les ondes dTnar ,
lorsqu'on les a resserrees. Ton ame , pareille aux
vagues de TOcean , s'eleve au rugisseinent de la
tempete. Ta joie est terrible , comme un Esprit
nocturne qui leve sa tele ai dente au. milieu des me-
lucres, et voyage de collineen coUine , sur son nuage
toujours plus sombre.
, Tralhal. i33
Le bruit des rochers qui roulent du sommet des
montagues , le bruit des flots quand Ics tempeles sout
dechainees, le bruit des bocagjs dont la flamme en-
valiit les cimes dessi^cliees pendaAt les tenebres , sont
I'image de la terreur qui accompagnoit Trathal.
Colgul et lui ^toient deux torrens ; le son de leurs
armes ressembloita I'^cho d'unq valine ^troite , lors-
qu'on abat ses pins verdojans. Leur choc est terrible.
Tratlial est un orage qui rcnverse la foret , Colgul est
line vague qui s'wlaiice sur le rivage. Mais la lance
de Trathal atteirit le casque de Colgul , et ses yeux
^gares se couvrent d'lin brouillard. Corran a perdu
son bouclier ; il est immobile , comme un roc que
i'eclair a d^pouille. Duchonis arrete avec sa main le
ruissc-au vermeil qui coule de son sein, et s'appuie a
un tronc d'arbre. Le casque de Crusollis est a ses
pieds avec la moiti6 de-sa tete, a vant qu'il ne tombe ;
et les cheveux blancs de Tual-Arma foule sous les
pieds des heros , sont souilles de sang et de poussiere.
Colgul ecarte de ses jeux le nuage qui les couvre.
II voit aulour de lui ses guerriers baignes dans leur
sang. Tel que Tombre obsoure du brouillard du Lego,
il marche en silence derriere Trathal ; mais Trathal
Tapercoit. Colgul prend la fuite. II dirige ses pas vers
Pesquif, et Trathal le poursuit dans sa force. Mills
fleches sont lancees contre lui ^ une d'elles perce
Colgul ; il tombe sur le rivage, a Pinstant oii une de
ses mains avoit d^ja louche I'esquif. Trathal s'j Jette,
et le tourne contre les guerricj-s de Colgul. Mais un
coup de vent le clia.se tn pleine mer, et il tressaiila
de joie au milieu de sa gloire.
13
1 34 Tocsies crses.
X'e}^tise cle Trat!;al eloit reside dans sa demeure.
Deux cnfrins aimables ^]evoient au-dessus de ses
geiioiix leurs teles oinbragees de boucles ondoyanles.
lis se pendient sur Sj harpe, pend:^nt que ses blanches
mains touclienties cordes tremblanfes. Elle s'avrete :
ils r r nu -i^t eu.'^i-inernes 1'. barpe , mais Is ne peuvent
ti-ouver le son ru'ilsadmiroient. « Ponrquoi , 'disent-
jls, ne nous r^pond-e'Ie pas r Montre-nous la corde
ou le chant reside ». Ell^ kur dii dela chercber jus-
qu'a ce qu'clle soit de retour , et leurs doigts delicais
errent parmi \es fits de m -tal.
Sulandona re,^arde si sou biei>-aime paroit 5 Tbeure
de son retour est passee. « Tratbal, de quels ruis-
seaux parcours-tu les rives? Dans quelles forets tes
pas se sont-ils ^gares ? Puissai-je de cette hauteur con-
templer ta stature majestueuse ! Puissai-je voir le
sourire egayer tes joues verm ^illes Eutre les boucles
blondes de ta jeunesse , tu ressembles au soleil du
matin ».
Elle monti sur la colline , serablable au niiage
biancoLimonte la rosee,lori»quesur les rajonsdu ma-
tin, il s*e!eve du vallon retire-, et asJle a peine les
teles brune.s des buissons. Elle dccouvrit un esquit
balance sur les vagues 5 elle vit ses bords converts
des lances. « Surement , dit-elle , c'est Tennemi qui
dresse ses lances , et Tratbal est seul. Uu senl
bomme , quelque fort qu'il soit , peut-il combattre
des milliers d'hommes ? ».
Ses cris se font entendre. Les vallees et tous leurs
Tuisseaux j n'pondent. 1 es jeunes gens se preci-
piteiit du haut des montagnes, et marcbant d'un air
Triithn!. i35
^garc , lren)l)]ent pour leiir chef. Dan? leur col^ire
ils songeoient a fond re siir les guerriers* de Colgiil;
nials Tralhal ^'leva sa voix sur les vagues, et lenr
commaiida de retenir leurs lances. lis se rpjouiren^
en entendant sa voix , en le vo3^ant amener son na-
vire pies de la cote.
Cependant on s'assemble antour de Col^ul : mais
Colgul avoit i'air sombre ^ et le feu ne jaillissoit
plus de ses ycux. Ses guerriers I'entouroient, triste-
inent immobiles ; irais plusieurs d'entr'eux ^toient
^tendus sur la brujere , comine les feuilles sechos
sur la plaine obscure , quand les vents de I'autonine
ebranleni les che nes. Nous leurs aidons a elever leurs
tombes , et d'abord noHS creusons ce'le de Colgul.
Un jeune homine se baisse pour placer la lance der-
riere lui ; sa cotie d'armes , en se soulavant, se d<^-
tache de deux globes de neige. Galmora tombe sur
le cadavre de son amant. Sulindona vient et la trouv©
expiree. Elle reconnut la fille cle Cornglas. Ses larraes
coulerent sur elle dans le tombeau. Elle donna des
louanges a la belle de Soma.
« Fille de la beaute, lu n'es plus. Une rive etrau-
gere ro(^oit ta depouille ; mais tu te rejouiras sur ton
nuage , car tu sommeilles dans la toniLe avec Colgul*
Les Ombres de Morven ouvriront leurs sal les k la
jeune ^'trangere , lorsqu'cllcs te verront approcber.
An milieu des nuages , antour de la table oii cir-
culent des coquillcs vaporeuses , les licros t'admire-
ront, et les vierges toucheront en ton lionneur la
barpe de brouillard. Tu te rejouiras , 6 Calmora !
jnais ton pere sera Irisle dans Soma. Les pas da
14
i36 Poesies erses.
sa vieilleisse vont errrr sur le rivage. Le mugisse-
nient des vagues lui parvieudra des rochers loin-
tains. Calmora ^ dira-t-il ^ est-ce tavoix que j^ en-
tends ? Le fils du rocher lui r^pondra seul. Retire-
toi dans ta demeure , 6 Cornglas ! abandonne la
rive orageuse , car ta fille ne t'entend pas 5 elle che-
Taiiclie loin de toi sur le^ nuages avec Colgul. Peut-
Slre sur les rajons de la lune , elle visitera tes songes ,
quand le silence habitera Soma. Fille de la beaut6 ,
tu n'es plus , mais tu sommeilles dans la tombe avec
Colgul ».
Ainsi I'epouse de Tratbal chanta I'intortun^e Cal-
mora. Mais qui pouvoit louer Colgul ? Lui et ses
gueiriers ^toient venus,comms le nuage qui sort de
i'anlre de Lano et rampe a travers I'obscurit^ dans
ki cabane ^>li chasseur , quand ses jeux sont fermes,
et que tousles vents reposcnt. Souvent leurs Ombres
ont soupire sur lestristes brumes qui rampent liumble-
ment le long destombeaux. Souvent on j a entendii
■ leurs voix solitaires. Mais tu ne les vois pas , 6 soleil •
elles ne viennent que lorsque la nuit envoloppe les
collines , quand tons tes rajons ont disparu. Mais tu
vois rOmbre de Trathal. Souvent , amidi , il marche
au milieu de tes rajons , quand les monlagnes d'alen-
tour sont couvertes de brouillards. Tu aimesa epan-
cher tes rajons sur les nuages qui portent le brave,
tu aimes a les deplojer autour de la sepulture du
vaillant. Souvent je sens leur chaleur sur le lit de
Trenmor , et a present meme, tu ecliaufFes la pierre
grisalre qui couvre Trathal. O soleil, tute souvrens
des heros ! car ils fiixent aimables en ta presence,*
Trathal. 1^7
Tu brillas sur Morveii avant qu'lls j re-nssent le
jour , et tu te souviendras d'eux , 6 soleil ! dans Ics
temps a venir^ quand cette pierregrisiitre seracher-
cliee en vain. Oui , car tu subsislcra? encore , a dit le
barde des anciens jours , apres que la mousse du
iemps aura pousse dans Temom , apres que le vent
des ann^es aura mugi dans Selma.
NOUVELLES LITTERAIKES.
Xj E Jury d'instruction a continue ses travaux pour
le choix des professeurs aux ecoles centrales de
Paris ; il a nomme les citoyens Lacroix pour les
mathcmaUques J A. L. Millin pour L^hUtoLre ,
CuviER pour Vhlstolre naturelle.
Les citoyens MoatucLa , GaiiLard et Marmontei
ont donne leur demission.
On a deja prc^^pare dans quelques dt^parlemens
Forganjcation de res Ecoles ; il ne paroit pas ccpen-
dant qu'elles doivent s'etablir , du moins sur le
premier plan de leur institution. On n'a encore rien
fait a Paris pour cette organisation , que de nomraer
les professeurs. II paroit que Ton attend la publi-
cation de la constitution avec ses lois organlqnes , et
que le projct est d'y reunir tout ce qui ticnt a I'ins-
truction publique.
La France vient de perdre encore un homme
celc'Lre, el dont I'existence (^toit bien precieuse prir
rapplication qu'il falsoit de ses talens au joulagement
de I'humanite , le ciloyen DesauLt^ cliirurgion en
clief de I'hospice de rhumanile, et , comme BarUic-
lem^ J un des collaborateurs de cc journal.
i58 J^ouveilcs litter aires.
Academies e t r a n g e r e s.
I.a socu't6 nconomiqup de Florence vient de pro-
po?er Irois prix, cliaciui d'uae medaille d*or de la
valeiir de a.'? S'quins : le premier sera donn^, a
I'auteur d'une d('cou erte utile et applicable, soit a
I'agrKullure, soit aux aits ou aux manufactures en
Toscane.
Le second et le troisieme seroiit d^cernes au.t
meilleurs rnemoires sur les deux points suivans :
i.o Comparer les mei;leures soies de la Toscane
avec les meiileures du Piemont , determiner les dif-
frrenc.s de ieur eclat , de leur finesse et de leur
resistance , et chercher si cette difference pro vient d©
la difference du climat , de la nourriture et du trair-
tement des vers ;
2.° Determiner si le melange des semences dans 1«
meme champ est utile , et , en cas d'affirmation ,
Irouver les regies que Pon doit suivre pour unir en-
semble , avec avantage , dans un meme terrain, deux
semonc?s ou plus encore , soit qu'elles soient du meme
geiiie ou nou.
LIVRES DIVEKS.
Chirurgie.
Leztoni sopra Le maiattle dellc vie urinaria
del sig. Des AULT , chirurgo primario neW Hotel-
Vleu, dl Pangi ^ tradotte dal francese , con
alcLine annotaz^ioni , perG. G. Consini^ med.
chir. inPavia; 1794, dalla Slamperia Comini ,
con perinisslone J b'.'^, 248 pag. — Leconssuf
L'tvres dirff. i39
les TnalacVi'\s dej vcies iirinaircs iparM. Des vult ,
premier chirurgleii de PH6t.4-Dicu ile Paris , tra-
duites du fiancais, avec quelques notes, par G. G.
CoNCiNi , m^decin et cbirurgien h Pavi^ 5 Coinmi ,
1794,8.", 248pa-es.
Get ouvrage , co rme le litre Tannonce , n'est
qu'iine traduction. L'auteur , apres aVolr paye tin
juste trihut d'eloges au Journal de chirargce du
cele-re Desault^ dont il se plaint que les 4 premiers
tomes aient seuls pen^'tre en Italie, et qifi! re«;arde
comme un des ouvrciges les plus utiles qu'nn bomme
de Part puisse consulter , a cru devoir en Iraduire
une partie qui format un cours complet de lerons
sur les maladies des voles uriiiairt's. Les raisous
qui Pont decide , sent , dif-:l , « la maniere supe-
» rieure av.ec laquelle ces matit'res y sont traitees ,
» Petendue des connoissances et les vues nouvelles de
» l'auteur, la rarete des exemplaires du journal en
» Italie , et la difficult^, pour ne pas dire Pimpossi-
» bilite de s'en procurer dans les circ_onstante3 pre-"
» sentes ». Je crois devoir observer , a cette occasion ,
que les savans d'ltalie se plaigncnt d'etre prives
depuis long-temps de nos ouvra^es d^ science. J'ai
ete moi-m^me temoin de leurs regrets , el je sais que
les savans du Nord les parta-ent." J'invite done toul-
a-la-fois , et ceux de notre pavs , et le gouvernement ,
a s'occuper des mojens de r'ouvrir ces imporlantes
communications. Les notes dont le traducteur ac-
compagne sa traduction , sont tiroes des observations
faites par lui-meme dans. les divers bopifan-v: qu'il a
f I equentes dans le cours de quatre ans. C'est aux gens
dc I'art a les juger.
14® Nouvdhi llttcraire.
HrSTOIRE. '
'Saggio sulla rellgione de Maomettanl di Gtv*
SEPPE Calza, In Venezia , 1794. Dalla nuova
stamperia presso Antonio Fortunato Stella. Con
permissione. 8.° 172 p. Essai sur la religion des
Mahomdtansjpar Joseph Calza, Venise, 1794,
in-8.o,de 172 pages.
Cet ouvrage , d6di6 an noble Alvise Querini, que
le sniat vient de iiommer pour resider en France,
en qiialite de nob'de , est, comine I'auteur ledit lui-
meme, un «br^ge de la parlie dePouvrage du Cli«r.
Muradgia, intitule : Tableau de i' empire Otto^
man, qui regarde sp^cialement la religion musul-
mane. Ce qui pcut lui donner plus d'interet , c'est
que Giuseppe Cal^a a reside cinq ans a Constan-
tinople , attache a I'ambassade de Venise , et par
consequent s'est trouve a portee de connoitre par
lui-m^me tont ce qui a rapport k la legislation
religieuse des Mahometans, que le prejug^ de Pi-
gnorance regarde ordinairement comme priv^s de
lois, et soumis au seul caprice d'nn despote, tan-
dis que le despote lui-meme est plus esclave de ces
lots religieuses que le dernier de ses sujets.
Geographie.
£i?D Beschreibung von Asleiv tiack Bank's^
BLahe's , Cook's and Lloyd's grossein engUs-
chen werke mit x>uz,lehung der bestcn neuesten,
Bcisebesckrelbungeri J fur deutscke bearbeltet
von August Christian BoRjrECK. — GioGRA'
tuiE dei'Asie, d'dpres les cdebres ouvrages da
Livres flivers. 14 r
Banks, de Cooks et de Llojd, el les meilleures des-
criptions de vojages qui ont ptiru depuis , r^digee en
allenlcind par Auguste-Christian B o r r h e k.-
Troisieme et derniere jDartie , Dusseldorf , cliez
Jean-Christian Danzer , 8.«, un vol. de 700 pages.
Les deux premiers volumes de^cette utile G^ogra-
pliie ont paru en 1791 et 1792. M. Borrhek , dont le
nom est bien connu dans les lettrcs , et qui professe
I'histoire et I'^loquence dans i'universite royale de
Duisburg en Prusse , n'a rien neglig^ pour la rendro
complete, et on pent la regarder comme de la plus
grande importance pour la lecture des vo\ agenrs et
des historiens qui out (^crit sur l'As:e , et ])Our la
parfaite connoissance de cette contrce. Le volume
que nous annoncons , termiiie I'ouv' rage ; il contient
la description de I'Asie meridionale ; il commence
par la Turquie asiatique , et flnit par les iles de
rOc^an iudien.
TOPOGRAPHIE.
Beschreibunq des s tacit arid repubLlk Bern, nebrt
vieLen tULz,Locken nachricfitea furfrerade and
elaheiniiscfie.Bern^ typograpkiscfieti socLetat,
1794,8.°, 355 pages. — Description de la ville
et de la republique de Berne , contenant plusieurs
details utiles aux babitans et aux (Strangers. A
Berne , cbez la societe typograpbique , 8.*^ , un
vol. de 355 pages.
Tout le monde connoit I'utilit^ de ces sortes de
descriptions , et combien elles sont agrdables pour les
Vojageurs curieux et attentifs. On trouve dans cellc-r
142 NouvdUs litierairts.
ci line Irstjire abrej-e^ de la \ ille de Benic , dcs
details sur Ls lois, lesmopurs, 'es usages, les eta-
Llissemens civils et lilU'raires de cette republi(]ue. Le
litre est orne d'nn fleuron qui rep resent e«l*elevalioii
de la^eetlu'drale, On Irou ve a la iin de I'ouvrage deux
cartes, !'un? du canlon de B* rne , I'autre de la ville
elle-mcme. Cette derniere carle otrre aussi Televation
de que".':n3s-iihs dcs priiicipaux balimens , tels
que le po;lail de IVglise Saint-Vincent , le stift
et le cons'stoire , Ti opital pour les malades , le
grand greui^r , la Monnoie , et I'^glise du Saint-
Eisprit.
BlOGRAPAIE.
'Adrege de la vie cles aaciens phllo so plies , con-
tenant f analyse de Lcurs si/stemes physiques _,
reiigieux et poiUiques , avec Le reciieil de ieurs
plus belles maxinies. Par F. de Sjlignac de
LA AtoTTE Fenelon. A Paiis , de I'li-nprimerie
cle Honnert , rue du Colom) ier , n." 1160. 1795 ,
I'an 3.= de la Bcoublique. Sj vend chez Morin,
libreire, rue Christine , n." 12, Prix, 8 livres et
9 i:v\ pour les deSpartemens.
Get abrege se fait distinguer par le stjde net et
concis , par Tor are , la pre cislon , Tagrenient et la
variete qui y so .-it repartd.;s , avec ce cliarme dont
Feneion a su embel ir tcutes ses productions.
Oct ouvi ai;e e?t particuliereraeni destine aux per-
sonnesqui veulent s'adonner a l\'tude de la pluloso-
phie. i'.lles y trouveront les divers sjslemes des dcoles
de la Grerr ; cpu.\ d. PAcadi^^mio , ceux des Cjniques,
desCjrc'naiques. drs Slo-cien^ j le systemede Pyt'ia-
Livjes divers, 14.3
gore sur la melempsycose ; celui de Socrate , sur
I'immorialile de Tame ; celui d'Aristota , sur la pliy-
sique du nioride 5 celui d'ipicure , sur ies alomes,
etc. , etc^elc.
Tout ce qui a cto ecrit par rimmorte' r(^n;'lon ,
xi droit de nous iiileress?r ; et cetle reitii} r.^ssion
d*un traite de lui , devenu rare , est asiur(§e du
4ucces.
Arch^ologie.
MiNERALOGlE des HoMER ^ UOtZ AuBI^-LoUIS
MiLLiN y aus deniFranZiOslsckea mit aniiier^
kungen and Bcnc'tlgu.agen, votz Friedricr
TuEODOR Rink J dcr h^hlLosophle doctor.
K-oni'^sbergunxi Leipzslgj beij FriedrLcfi Nicoto-
l>Lus J 1793 J in-8*^. , 126 seiten. — Mineralogte
d'Honiere , par Aubin-Louis Millin , traduitedu
franraispar Frederic-Thfodore Rtnk , avec des
reraarques et des observations du traducteur.
A Konigsberg et a Leipsick , cliez Frederic Nico-
lovius , 1798 , in-8.° de 126 pages.
Les journaux out snffi>aminent rendu compte de cet
ouvrage, lors dz sa publication , en 1791 , Tiicodore
Rinck en a entrepris la traduct on , dit-il,a cause
de I'utilit^ (loiit il pent etre pour I'intelligence des
poetes et des a .ciens auleurs. A. L. Millin a ras-
sembl6 dans cet ^crit , i^s details rrlatifs anx ar's
melallurpiques dans la haute anti:iuit^'. L'^dition ori-
ginals se trouvechezGarneri, me Serpen te, n." 17, eta
la Librairie Encjclopi'dique ^ rue ^de Vaugirard ,
D.o 973.
144 Nouvelles littiraires.
Grammaire.
X^uop'o VocaboLarlo it,allario-tedesco aWaso rfe'
principlanU ,coinpllato ^a Bartolombjeo Bor-
RONi 5 due toinl , 8.°, ciasckeduno di 540 pag,
Milano, i']()^,presso Giuseppe Gaieaz^Xii^ stam"
patore e libra jo con approvaziione. — Nouveau
VocABULAiRE italieii et francais,a I'usage des com-
mencans , compile par Bartbolorn^e Borroni 5
Milan , 1794 , chez Joseph Galeazzi , deux vol. 8.<»j
de 540 pages chacun.
II existe deux dictlonnaires italiens - allemands
estimes, ceux de CasleUi et de Flathe _, imprimes a
Leipsick , Pun en 1782, et I'autre en 1785 , chez les
h^ritiers de W eidnian. Mais s'ils ont le merite
d'etre plus r^cens et plus complets, ils ont I'in-
conveiiient d'etre voluuiineux et chers. C'est ce qui a
d«^cid6 BartlioLom^e Borroni a enlreprendre celui-c I
qui contient avec tons les mots en usage , primitifs
ou composes des deux langues, des eclaircissemens
propres a aplanir la route aux etudians , et qui ,
par son peu de volume et la niodicitd du prix , est
d'un transport commode et d'une acquisition facile.
Le premier tome renferme le dictionnaire italieii-
allemand , d'apves Alberti : et le second , rallemand-
ilalien , d'apres jF/a/Ae ^ Ilubner , et autres auteurs
classiques. L'auteur y a joint tout ce qui pouvoit
facililer les efforts des commencans ; je m'en suis
servi avec avanlajKi pour vaincrv^ les premieres ditli-
cultesj et je crois qu'il pent e!re fort utile, sur-tout
quand on veut posscder les d. u.\ kaigues.
L I V R E S D I V K R S.
L'Abeille francaise. Paris , de flmpdinerlo
francaisc de Miiemorgue, rue desMirainiones,
N.« io6 , e^ ckex, Goiiry Larocfie , an p assays
Honorc.
Le but dii citoyen Edmond Cordfor , en com-
posant ce recueil , a etc de donner des lecons da
morale a la jeunesse. On ne peut qu'applaudir a son
intention. Quelques-uns de ces morceaux sont tires
du Recueil de la societe des neuf soeurs , intitule ?
Trlbut des muses ; d'autres, des meilleurs poetea
ou des meilleurs prosateurs.
La traduction de VlUstoirede la decadence de
i'empire ronialn^ que nousavons annoncee dans
rotre dernier numem , et qui se trouve chr^
Maiadan , libraire , nre du Cimetiere-Andre-du&,
Arcs , SG vend 25o liv.
JirSTOIRE DE LA Con , URATTOy TiE RoBESPJY.nnE^
Vn vol. in-8.", de 220 pages, sur be au papier. Piiv,
7 I'V. , el 8 liv. franc de port pour les depar!'--,
mens et pays conqui^-. A Paris, clirz Moriu , li-
braire, rue Cl-ristinc, u." 12, cl chez ies marcliand^
flp nouveauits,
TABLE
Des Articles conteriLis dans ce Nunidro
HjSTOIRiE NAi'URELLE.
g_'iaductioit JiaiH-aise (in Sjstc
ma naturce de l^iuueus , par
Vanderstegen , page 5
LiTHOIiOGIE.
jjcscription de I'emeraiide } par
Dolomicu , 17
M E D E CINE.
Les Pronosliques el le Frorrhe-
iiijue 1. tf Hippocrate ;, traJuil
eii froncais par Le Febure-
'Viliebruae , 3o
Anatomie.
Dcscn'iJtion d'unc statue anato-
iniijLie , par Fontana , 35
11 I S T O I R E.
S^ctjage dc John IVIiith, a Bo-
tajijBajy iiad.pai Poiigens,37
HiSTOIKE LltTEKAIRE.
Sfat des Arts a Avignon , ^2
Hist. litt. bu moyen age.
Jtk'olice sur ics Foetcs cpiijttes, pai
•Halley , 47
T y P O G R A P HI E.
jPilchlisseincr.t
dfs Anglais dans
Laiigl^s,
HiSTOIEE DES ARTS.
Description d'unc gr autre di
J^Sjy par Obfriin, 61
BlOGRAPHIE.
SSfotice sur Alhgrainj seulptein.
a
JS'olui -un la (--/e et !cs oucragc
de Jjiirt/uifrnj'-. Catahgue iA
its out-ragesj 7-
A R C H ^S O T. O G I E.
Jjgltre sur les aniicjuites de It
>. illi'dc lifandeurc, commumquci
par la repri'sentant Gxc'^oire ,
95
LiTTliBATTJRE LatINE.
Traduclicn de la conjuration de
Catiiinaj par "Rillecocq^ 104
lypographicjiic
ins i'lndc _, pa
61
MELANGES.
Anecdotes et pciisces ddtac/u'e-tf
par H^xauU-Sech^WeSf 118
P o E s I E.
Imitation de Klopstockj par M.
J. Chenier, 124
Fragment du po'eme de la Nature^
par Le Erun^ I2(>
f^'ers pour le bustc de Desaiilt,
par Pigault Le Bruii, laS
Poesies hi^rses.
Trathalj po'eme d'Ossian , 1 29
NOUVEX.LES LiTTERAIRES.
Suite de la nomination des pro-
fess eurs d Vecole centrale de
Paris, I'ij
Mort de Desault, premier chi-
rurgiendei'/iospice de Vhuiha-
nilc, , ibid.
Academies pTRANCinEs.
Socictc Economique dc Florence ^
l38
LiVRES DIVERS.
Chirurgie.
Leziont sopra le malattic dcllc
vie urinaric del sig. Desauil.,
tradotle dalj'rancese, con aitiu--
taxiionij perd. G.Coucini;, ibid.
Histoire.
Sagcrio sulla religionc de* JlTac-
mettanidi Giuseppe Calza^ l.\o
Geograpnie.
Erd Bcschrcibung t^on Asicn ^
i^on A. C. Borheck, ibid.
Topographie.
bcschrcibung dcr siddt und tC'
puhUk Bciii, I^X.
Biographic .
r^ie des anciens pLilosop/ies y
par Fenelon, 142
Archeeologie.
Mineraloi'ic des Homer ^ can Aut
bin-Loiiis Miliin , 143
GHnunaixi?.
Nuoi'o T'ocaholaiio itclianc-le-
d-.sco da B. Bctrom, 1 44
PE L'lMPRI^ISiaS BV MaGAZIN ENCYCtOPKDIQVB.
M A G AZIN
ENCYCLOPEDIQUE ,
OTJ /
1
JOURNAL DES SCIENCES;^;^^^
dp:s lettres it des arts,
^ t J) X o t
P^r MiLLiN, NoiLet Wakens*
II ay * prcjquc phis d'ouvragcs ppiiodi^ue* qui
lervcnt dc depot aux inventions oouvcllcx ct jqui
Tetraceiit Thistoirc d« Tesprit hujfjaiu ; ccux qui
• ■I couTs «cmblcnt , pour la plupavt , eviter.avec
StiTecution tout ct qui peut alimenicT Ic^goAt d«i
icicnces et rjeme dc la morale. Scroit-il done indi-
jne de la Convcniion d«e s'occuper a reorganiscj
cctte lar4mche d« Tinstruction natiooile ?
'S%iiGX>Ilt , 'RJipJiOTi sur lis (Ticvura^emens , recompemes «|
ptns'nT.i a accorder aux Savans , pag« i6.
Vj e Journal , auquel la plupart des hoimnes qui ont
un noin dktingu^ , une reputation justement acquise
d^Mi^qiielquepautie des arts ou des sciences ^ telsqueles
citoy«ns Bitaube, Cabanis , Gaillard, Chemep ,
X)aUBENTON, DsELILLtE^DesTONTAINES , UOLOMIEO,
l^ONTANES jFoURCROY , HaUY , HeRMAN , LaCE-
^EDE , Laorangi, Laharpi,Lalandf^ Lamark,
Langle* , Laplacs , Lebrun , LKRor , I'Hkritier,
MeNTELLEjMoRELLET^ ObERLIW, SrCARDjSOARD,
yoLN£T,etc. etc. eontiibueroBt , conti«adra i'ex trait
iV'. VI. Tome U,
fles pvinrlpaux buvragei aatioiiaux ; ep s'attaclaera
lur-tout ^enfidfiner une analyse exacte , et a lafarie
paroitre le plus pfomptemenf spo^fble apr^s leur pu-
blication. On J donnera u<ie notice dec meilleurt
^crit* imprim6« chex I'^tranger.
On y ins^rera les m^moires les plus int^resiani
•ur toiites le< parties des artset des sciences; on choi-
«ira s r-tout ceux qui seront propres 4 en acc6l^r<^
les progr^s.
Ony publiera les d^couvertejingdnietjse*, les inven-
tions utiles dans tous les genres. On y rendra coropio
des experiences nouvelles, de la formation et de Tou-
verture des Museums. On y donnera un precis de ce
que les stances des soci6t^s litt^ralres auront offert d«
plus int^ressant , une description de ce que les dep&tf
d'objfrtS" d'arts et dei sciences renferment de plus
iiurieux.
On y trouvera des notices sur la vie et les ouvrages
fles Savans , des Litterateurs et des Artistes distinguea
dont on aura a regretter la perte , enfim les nouvelles
litt^raires de touie espece.
Ce Journal sera compost de six volumes in -8'. par
an , de 600 pages chacun , et au moins de 24 gravure«
en regard des articles qui ea exigeront. II paroiUa
tous les quinze jours on num^ro de 9 feuilles*
Le prix de I'abonnement est 4 raison de iS lir,
pour, trois mois , r6ndu franc de port par ^ute It
^^publique.'
On s'ndresse , pour Pabonnement , au Bureau du
Magaain Encyclopedique , rue Honor^, N^. 94 ; et poiir
les objel8 relatifs k la redaction , a>ux R^dacteiirs , rue
cJe Provence, W^. 48.
II faut affranchir les lettres et charter celLes qoi
temtittDQeni des assi|^ats.
HISTOIRE NATURELLE.
LITHOLOGIE.
Suite de la description de VEmeravde . par
D. DoLOMiEU , professeur d'Histoire naturelk ,
aux Ecol'es centrales de Paris.
REMARQUES SUR LA TRANSPARENCE DE
L'EMERAUDE , ET VARIETES QUI EN
DEPENDENT.
VaRIj^TES de SEtONDE SORTE,
JLes Emeraudes sont encore plus sujetes que les
autres gemmes, a etre glaceuses, nua-euses .t mal.
nettes. II est extremement rare d'en trouver qui
soient exemptes de ces defauts. On peut done fixer
sousce rapport trois vari^t^s'principales de TEme-
raude , savoir :
Waniite i.re Emerauhe nette , pure , et aussi
TRANSPARENTE QUE LE PERMET LA GRANDE IN-
TENSITE DE SA COULEUR.
Nota. II existe tr^s-peu d'Emeraudes verles, unpeu Lautes
en couleur , qui aient ce degre de perfection,
VarleU 2.^ EmeHaude demi-transparente.
Nota. Tellss sont presque toutes les Emeraudes d'un certain
volume ; la muliiplicite des ger^ures trouble tellement leur
tiauspareuce , que la luoni^re passe i peine a travers leui
luasse. ' . .
Tome 11, XT
^^5 lithologk.
VarLete 3.^ Emeraude oPAQtJE.
l^ota. Enfin le passage de la lumi&re se trouve totalement
inlercepte dans certain s Emeraudes , non seulement par les
pua..es et gUcjures auxquelles elles sont si suj^es , mais par
destauiliuresetra-gJres.\leur composition ordinaire par
d.s DK^langes de corps lerreux ou pyriteux ciui oat et6 enfermes
dans leur masse lorscju'elle s'est agrc^gc^e.
Eulie ces trois varii:ies de transparence , il 7 a
beaucoup de gradations iaterm6dialres qui influent
surl'estirequ'onpeut faire des Emeraudes. Car ce
nVst point encore autant la vivacite et I'Intensite de
- leurs belles nuances vertes , que le degr6 de leur
transparence, qui determine leur valeur. Vo^ez les
annoUtions.
BEMA.RQUES SITR LA I^ORME DE L'^.ME-
RAUDE, ET VARIETES QUI EN DEPEN-
J)ENT.
Variet^s de troisieme sorte.
a. Torme regulien ou dctermine'e.
Les Emeraudes ont une telle tendance a Fagr^
gation r^guliere , qu'on les trouve presque toujours
cristallisees.
Quoique moins sujetes que beaucoup d autres
plerres , a varier dans leur forme, quoiqu elles ne
fassent jamais disnaroitre le type de leur figure pri*
mitlve, elles (^prouvent cependant quelques modih-
cations de forme, qui influent, et snr le corps des
pxismes , et sur ses soinaiit6s , c. qui ^taUit diffe^.
rentes vari6t6s.
t)escr?ption Je TEmeraude. 14^
J^afiiti i.^^ PftrsME hevaedre dboit , tkonquk
NET A SES DEUX EXTREMIT^S , ET TERMINE PAa
DES plans I»ATt4.LLELES ENTr'eUX ET PEKPE.NDX-
CULAIRES SUR l'uN DES PAISMES.
a. Prisme dont Us six facxs Iciteralei sont egalcs
entr''elles,
li'ota. Telles sont les Eraeraudes les plus communes.
b. Fnsme comprime\ dont ies deux faces oUpOiees soril
larges , et quatre elroltes.
c. Prisjne dont trois faces larges alternent avec trois
faces etr cites.
JSfota. Ces deux dernieres modifications sont assez rates dang
iles Emeraudes.
Cette forme prismatique he'-iedre est la plus,
simple qui puisse r^suller de I'assemblage r^gulier
des molecules integrantes de I'Emevaude. El.'e doit
^tre consideree comrae sa forme primitive , d'apn'S
les belles observations d'Haiij. Mais, s'il esl ordinaire
de trouver des prismes qui const rvent la face hexa-
gone tres-lisse et eclatante qui les termine naturel-
lement d'un cot^ , il est tres-rare dd reucoiitrer les
plans naturels dans les deux extrcmit(5s opposees ;
I'un des deux est presque toujours remplace par une
cassure d*apparence vitreuse , parce que c'est pres-
que toujours par une de ses extremites que le prisma
est engage dans sa matrice. Tres-rarenient on voit
des prismes, couches sur leur gangue , y adlierer pai'
une de leurs faces lat6ralei,et avoir lours deux extrc^;
iDit6s libres et regulieres.
K 3.
l^B ■ Ljthologie.
C'est par des d'croissemens sur les angles du
piisme pri uitil, que I'Emeraude passe a la vari6t6
fiuivante.
P'ariibe 2.^ Prisme dodecaedre droit , TRONQui
^ET A SES DEUX EXTREMITe's.
a. Prisnie dont les dome faces sont egales entfelUs.
b. Fiisme dont les six faces ^ qui remplacent les six,
aretes laterales de C kexaed) e ^ sont moitie plus petites
que les faces laterales primitives.
c. Prisnie subdode'caedre , dont les faces nouvclles
commencent a ctre apparentes.
Tifota. Cette ■vari6te e€t assez comraune dans les Emeraudej
du P^rou,
J^drl^'te S." Prisme dont les six angles soiides
DU sommet sont remplac^s par six faces, qui
rONT AVEC LES ARETES LATERALES DV PRISWE UN
AI^GLE DE 120 DEGRis.
a. Ces six faces trigones.
JVola. Aussi long-temps que ces faces ^tafclies sur les angles
soiides de rextn^mite du pvisme ne s^etendent pas jus(ju'4 se
toucher et ^ empi^ter les unes sur les autres , elles restent
trigones , et la fa.-e sup^rieure qui , dans I'Emeraude , se coa-
lexve toujours , devient dodecag^ne.
b. Cis six fares pentagones.
Zfota. LoTsque ces faces s'etendeut jusqu'a empi^ter les
unes sur les autres , elles d.-vienjaent pentagones , et la faoe
jupt'^rieure xedeyient hexagoive.
Description de rEweraude. i^g
Vdriite 4.^ Pristme dont les six angles solides
ET LES SIX ARETES DU SOM.MET SONT REMPLACES
PAR DES FACES QUI FONT , AVEC LES FACES LA-
TERALES DU PRI.SME , DES ANGLES DE l35 DEGRES.
Nota> Ces apparences de tronca lures , produitps par des
clecroissemens qui se sont fails en meme lemps et sur les
angles solides et sur les aretes , donnent done un sommet
a treize faces , savoir , six faces pentagones sur les angles
solides , six faces trapezo/dales sur les aretes , et la face supe-
rieure qui est alors dodecagone.
II est possible, mais extremem?nt ivire, que les
sommets des prismes de L'Emeraude devieniient plus
compIiqiK^s , ou par I'addition de quekjijes nouvelles
faces qui s'etai;lissenl sur les angles solides ivsullant
des premiers decroissemens , ou par la division des
faces qui caractc^risent. la variety ci-dessus ; division
produite par le prolongement de celles des faces lat^-
rales qui ont rendu le prisiue subdodecaedre , et qui
peuvent s'elendre jusqu'a partager en deux les faces
^'tablies sur les angles solides de Tiiexaedre primitif.
D'ailleurs ces difTtrenles faces du somnet , em-
pietant inegalement les unes sur les antres , peuyent
donner a ces cristaux une apparence de complication
et d'irregularite qui les rend quelquefuis difficiles ^
analyser.
J'ai trouve dans les granites de Pile d'Elbe un
crislal parlait d'Emerande blanc'ie qui appartient ^
celte variete , laquelle est tres-rare.
b. Forme irreguliere ou indetermine'e.
Quelquefois I'Emeraude est teliement engagt'edajis
K 3
i5o Lithologie.
ga gangiie qu'elle n*a pu prendre qu'imparfaitement
les formes regulieres qui lui sont propres.
On troiive anssi dans le commerce des Emerandes
en masses arrondies , dont Ics angles ont sans doute
^l^ emouss^s en roulant dans les eaux.
Matrices, gangues et substances le pltjs com-
HUNEWENT GROUPEES ET ASSOCIEES AVEC l'E-
JMERAUDE.
La matrice de I'Emeraude varie beaucoup dans
sa nature ; j'ai vu des Emeraudes de differentes cou-
leurs adlierer a deS pierres calcaires noires,ades
schistes argileux ou pjriteux , au quartz , au quartz
micace , au granite de difT'iente composition. Les
prismes y sont ordinairement comme implantcs.
JVota. Leplns beau groupe d'Emeraudes qui existe peut-^lrc,
est celui du tresor de Lorette : pr^s de cinquante prismes d'E-
meraudes verles , de deux pouces de longueur , sur un pouce
de grosseur , y sonL implantes dans une masse quarlzeuse,
tlanche , melee de mica argentin ; pendant que d'autres Eme-
raudes sont comme empalees dans la masse meme. ( La base
de I'autre groupe , qui sert dependant a celui-ci , est faclice^
ft les Eaieraudes y soul artificiellement collees ).
. Les Emeraudes se fiouvent quelquefois associees et
groupees avec des cristaux de quartz , de feldspatU ,
de schorls , de mica , etc.
On voit aussi des prismes d'Emeraudes envelopp^es
*de spatli calraire. de fijpse etc. , sans qu'on puis.rQ diye
que ces malipresleur servcnt de matrice, quoiqu'elles
en aent Pdpp^srence 5 mais il est evident qu'elles
^put venuts occuper des ca^-it(^3 ow rEmeraude etoil
Description de VEmefaude. i5t
i^eja toute formee , et que ce n'est qu'accidentellemenf
^n'ellesse trouvent ensemble.
Assez souvent les prismes d'EmeraucIes sont iii-
crustc's et comnie saupoudres de pyrites.
Nola. Oq. nomme improprement mere d' Emerande , prima
d'Emeraude , racinc d' Emeiaudc y plasma di smeraldo , des
masses pierreuses de diverses sortes , telles que des prases ,
des quartz , schorls , feldspalh , spalli fluors , etc. lorsqu'ils
out quelques nuances de vert ; non que ces pierres aient
reellement quelques genre de rapport avec cette gemme , oa
qu'elles aient une origine semblable et des gites communs,
mais uniquement parce que leur couleur plus ou moins
foncee les a fail regarder comme des Eraeraudes imparfaitcs :
ces memes substances recoivent aussi le nom Aejausses Eme-^
raiides , lorsqu'elles sont cristallisees.
GiSSEMENT DE L'E.ArERAUDE.
L'Emeraiide appartient aux pa3-s dits primilifs.
EUe s'j Irouve dans queliues filons sleriles qui tra-
versent ou les roclies composees , ou les scliistes ar-
gileux. Elle occupe aussi des cavites accideutelles
dans les masses de quelques granites.
Nola. Arracliee par les eaux ou par quelques. autres
accidens , I'Emeraude pent se renconlrcr aussi dans le lit des
rivitTes el dans les couclics de terruins secocdairc-s ou de
niatii-res de transport.
Patrie de l'Emeraude.
Toutes les Emeraudes qui sunt maintenant dans
le commerce , viennent du Pdrou. C'est principale-
ment dnns le nouveau royaume de Grenade qu'elles
se trouvent ; et parmi les mines prcf-sentement ex-
ploitt'es , on designe comme les plus abondant/s ,
ccllas de la juridiction de Santa-l't et celles de \^
K4
1 52 Lithologle.
vall^ede Tunca^ entre les montagnes de la Nou-i
veiU-Grenadc et de Pompa^an.
JVota. Lors de la d^couverte dii Nouveau-Monde , lesEs-
pagnols trouvferent une immense quantite d'Emeraudes a
Pue-'to-VieJo et cl Blonta , sMr la cote S\\ Pdrou , dans la pro-
vince de Quito J et on les transportoit en telle abondance en
Europe , que Joseph d'Acosta dit que dans le vaisseau sur
lequel il revint d'Amerique, - n l585, il y en avoit deux cais-
sons d'un quintal chacun. Ces premieres mines sont depuis
long-temps epuisi'es , et la Condamine remarque , comme
une chose singuliere , que la tradilion des lieux ou etcient ces
mines , soit aujourd'hui entitrement perdue ; que des pro-
vinces et des rivieres coj^servent le nom d' Esitieraldas , sans
qu'on trouve aucun des anciens travaux pour la recherche de
cette pierfe , dont la memoire n'existe plus chez les naturels
du pays. Comme les Emeraudes qui venoient de ces
anciennes mines , etoient plus parfaites, qu'elles reflechissoient
un beau vert de prairie , depure , riche et bien aviv6, ce qui
n'est pas ordinaire aux pierres des modornes decouvertes ,
on les distingue par le nom d'Emeraudes de vieille roche.
Qucique beaucoup d'autres regardent la vraie
Emeraudc comme tellement propre au Wouveau-
Monde, qu'ils la nomraent \o\\]o\\vs Eineraude du>
V^roLh y cette gemme appiirtient aussi aux montagnes
d«s anciei.s coniinens. Auciennement 'I'Egjpte , la
Scjthie 5 la Bactrianeen fouinissoient ; maintenant il
s'eu trouve encore a Cevlan et dans diff^-entcs con-
trees de I'Asi'e et de I'Europe. En Erance , on en a
d^couvert dans les montagnes du Eore«t , du Cha-
rollois, et dans celles de la Bourgogne ; j'en ai ren-
contre de blanches dans les granites de I'lle d'Elbe ,
et il est probable que les recberclies des natiiialistes
en feront recoiinoitfe dans beaucoup d'autres lieux ^
Description de CEmcraude. i53
lorsqii'ils ne regarderont pas la couleiir vcrle comme
uii caiactere constant et essentiel a cetle gemme.
ANNOTATIONS.
( Ann. i'^^) On a donne le nom d'Emeraude a
des pierres entierement differentes par leiir nature, de
la gemme que nous venons de decrire ; celle dite
Emeraude cLll Br^siL ^ est une tourmaline verte,
transparente , un peuenfumee , mais qui par la forme
de son prisme tt de ses sommets , par ses stries
loDgiludinales, par sa propriety pvroelectrique et par
la plupart de ses autres caracteres exk^rieuis, pl"j-
siques et cliimiciues, se distingue suffisamment de
la vraie Emeraude.
La couleur a etc une source continue'le d'erreurs
en denomination ^ et il n'est presque aucur.e pierre
Verte qui n'ait porte quelquefois le nom d'Eme-
raude. Un naturalisle tres-savant ( mon ami, La
Metherie ) n'a pas lui-meme ^vite cette sorte de piege ,
lorsque, dans un m^moire insert dan^ le Jou nal de
phvsique , de fevrier 1793, il a donne , sous le nora
d'Emeraude, la description d'une pierre dont le prisme
est hexaedre, mais dont la pvramide presente dcs
formes et dcs decroissemens qui,n'apparliennent pas
a I'Emeraude, ainsique I'a caicule le celebre Haiiy.
Cette pierre, jusqu'a present innominee , n'a d'ail-
leursni la duretc, ni les autres qualites de I'Emeraude,
quoiqu'elle lui ressemble par sa belle couleur verte.
( Ann. 2de. ) L'ai^ue-marir.e ale rapport de forme
le plus parfait avec I'Emeraude ; et connne ces
deux pierres sont susceplibles de prendre ({uelque-
i54 Lithologie.
fois les memes teintes , elles sont tr^s-aisees a con-
fondre ; elles ont 6[6 piusieurs fois j^nses Tune pour
Tantre pardes Daturalisles; et presque tuujours on a
regard^ raigue-marine comme une simplj variete de
I'Emeraude 5 qui n'eh difFJroit que par la foibless'e
de ses nuances. Mais en compara:it attentivement
ces deux pierres entr'elles , on reconnoitra qu'elles
sont des especes'dislinctes. On trouvca parmi leurs
caracteres exttricurs, qua i'aigue-niaiine a tonjours
de slries longiiudinales pli'S ou moins prononcc^es;
les faces de TEineraude , loujours lisses Qt xemples
de stries , laissent au contraire apercevoir quelques
laines qui leur sor.t pai;alleles.
Mois c'est dans les caracteres | hyslcues que sont
les differences les plus essentielles entre ces deux
pierres, L'aigue-marine est un pen moins pesante
et moins dure que I'Einernude ; elle n'a qu'une simplft
refraction ( distinction bien lemarruable ) , elle de-
veloppe par la collision une lueur pLospliorique
et Podeur oui semble appartenir au quartz , ce qui
n'arrive pas a I'Em vaude.
Enfin , dans les ess^'is cnimiques, Taigue-marine
fait une assez vive effervescence , lorsqu'on la fond
avec cLs alkalis fixes , et elle se trouve par son ana-
lyse coiJenir une 1 ien moindre quantite d'aluniine.
Tout prouve que I'aigu''- marine est d'un genre
infer eur a rEireraude 5 dans (elk-ci, la silice. plus
pure , iiuUemeiii sainree du prinripe qui peut
la faire passr a I'etat de quartz, a ^te susceptible
d'exercer ] lus forlement ses affinitcs avec I'alumine,
et d'en faire entrer une plus grande quantite daiis
sa combinaison.
Description de CEmcraude. i55
( Ann. 3^. ) I-e mot Emeraude , ou un de ceux
qui lui correspondent dans les differentes lan^ues ,
ont pr^sent^ I'id^e d'une pierre precieuse , verte ,
dans les livres de la plus haute antiquii^. On voit
dans le livre d' Esther, que la salle d'Assuerus
etoit psLV^e d'Eineraiides. Mais la longue ^nnmera-
lion que les natnralistes anciens font des differentea
pierres qu'ils appeloient de ce nom , le volume
eAtraordinaire qu'ils suppos rt dans quelques-unes
de ces pierres , doivert fuire croire que le mot Eme-
raude etoit pour eux un nom aenerique , aj^plicable
a toutes les pierres vertes. Cependant est-il bien
certain que notre veritable Enieraude se trouvat
reellement dans le nombre de ceiles qu'iL' ont pre-
tendu designer ? Cetie question a paru douteuse a
quelques savans , et Dutens cntr'autres a cru de-
voir se decider pour la negative. Je serai d'une
opinion conlraire.
Sans doute que parmi les douze esperes d'Eme-
raudes , designees par Pline , les neuf dernieres
especes n'ont aucun rapport avec notre gemme ,
que celles-ci sont ou des malachites , ou des jaspcs
verts, ou des prases, ou des spaths fluors,des ser-
pentins , ou iv.eme.des gjpses verts ^ demi-trans-
parens, pareils a celui dont j'ai vu un echantil-
lon qui vient des environs de Thebes en Egypte,
et dont les carrieres doivent etj'e voisines de rem-
placem.ent de cette ville fameuse. Sans doule aussi
que les pierres de dix coud^es de longueur, dont
parle Theopliraste , sous le nom d'En.eraude , Gt
Hpnt quatve $uflisoicnt pour laire un obelisque dQ
1 56 Lithologie.
40 pieds de hauteur, sont aussi ctrang^res a notre
E'Tieraude , que le cippe d'Eraeraude du temple
d'PIercule a TjT 5 dont Herodote fait mention; que
les ^ravi^.Qs smaragdes ^ dont ^toient faites des co-
lonnes, des slatj^es collossales , citees par Pline et
par differens autres ecrivains de I'antiquite. Mais
pourquoi ]a pierre dont Theophraste dit , PE/ne-'
raude est rare ^ et ne se troui^e jamais qu^en
petit volume J, ne seroil-elle pas notre pemme?
Corairent mcconnoitre la verifabls Eir.eraude au»
traits v)fs et brillans , a la description animee , et aux
difltTens caracteres par lesquels Pl.ne a voulu la
dtpeindre ? A quelle autre pieire verte attribuer
la tres-grande durete tiue le raturaliste romain
attribue a ces trois premieres e?peces , et qui eto^t
telle que le fer ne pouvoit les enfamer ; duritla
tanta est*ut neqaeant vuinerari? Pourquoi cetts
tres-l;aute estimation des ]::lus petites Eineraudes,
dont nous parlerons l.ieutot , si celte pi. rre u'avoit
eu la rarete et les proprietes des vrais gemmes ?
Je ne puis done douter que notre Emeraude ne soit
de meme nature que les trois premieres especes de
Pline , dont il dit : les plus belles j les plus hautes
en couleur y celles qui sont le plus_^u4^ent
exemptes de defaut , iiennent deScyilue , orh
les noij-ime scL/tkiques ; les secondcs viennent
de la Bactrianne ; celles d'Egypte o ecu pent le
troisidi^e rang ; oti les tire des colUnes et des
rockers voisins de Coptos , vLUe de la T/id'
baide.
( Ann. 4.^ ) Les joaiiliers et les amateurs de
Description de CEmtraude. iS;
pierrerles , qui doniient I'^pitht'te d'(jripntales aux
pierres precieuses , non pas pour dcs gner les lieux
de leur ori;4iue , mais pour indiquer plus de feu ,
dV^claf et de transparence , et snr-lout plus de durcte,
ont aussi voulu dislhi.-uer les Emeraudes en orien-
lales et occidentales ; les premieres ont un plus
grand brillant , pare- qu'un poli plus vif a; partient
a une plus graude durel^ ; leur couleur est d'ua
verd plus clair , plus gai , un peu tirant sur le
jaune , k^s Enieraudes occidentales ont , selon eux,
une couleur i^^lus obscure, tirant sur lo bleu. Chardiii
dit au contraire que c*est TE ^ erande de couleur
haute, tirant sur le noir, qui e?t I'orientale 5 et que
celles-la , regardees comrae les plus dures , sont
supposees venir d'Eijpte. On convient maintenant
a'ssez generalement, que toutes les Emeraudes se
ressemblent par L-urs quali es physiques 5 on ne
distingue plus celles qui viennent du Perou , de celles
qui appartisnnent originair'^mcnt aM*ancien conti-
nent ; et s'il exisle reellement des pierres vertes
d'un degr6 de darel6 bien superieur a I'Emeraude,
elles pounoient bien appartfenir a d'autres especes.
Nous connoissons des diamans verdatres ; il tie seroit
point extraordinaire qu'il y en eut d'un vert plus
fonce encore, qui auroient tic pris pour des Eme-
raudes; il est possi' le aussi que la couleur ver'e
ne fiit pas dtrangere aux sapLirs , ct alors ce qu'on
nommoit Emeraude orienta'e, s'il en existe reelle-
ment, appartiendroit a des especes de pierres d'un
ordre bien superieur.
( Ann. 5.^ ) Les Eraeraudes trouvees de nos jours
l!)? Litkoiogie.
dans di'fft^rentes contr^es de I'Euro'pe, eti Francti*
meme , et cell-s apport(^c«s de Ceylan , ne permelteiit
plus de m! \'r:' eti question si cette gemme est
^Iranyere a ran-icn continent) et si elle est r(^-ser-
Vee aiix seiile^ montaenes de rAm^rique m^ridio-
nale , selon le raradovo de Dutens , soutenu de
i'opinion de Tav^i ni;^r et de Ghardln. L'autorit6 de
ces doiiv voyaiieuis est csrtainement d'un tres-grand
poids , : ais elle ne tient pas contre I'existence reelle
denotreg^mme daasnospropres montagnes. C^ardin
et Taveroier ont done ecrit que les terres d'Orient
ne prciciuiso ent point d'Emeraudes , et cependant
ils conviennent nu'il en evistoit avant la dtcouverte
de PAinerique ; car les anciens poi?tes persans en
fjnl aienlion, en les appelant Emeraudes d'Egypte.
Et du temps de ces vojageurs on connoissoit en
Perse trois sortes d'Emeraudes 5 savoir , celle d'E-
gj'pte , qui est la plus belle et qu'on nomnie de
vieille roche; ensuite les Eiiieraudes vieilles et les
Emeraudes nouvelles. Pour accorder ce fait avec
leur supposition , ces vojageurs ont imagin6 que
long-temps avant que nous ne connussions le Nou-
veau-Monde , les an :ens Peruviens faisoiintle com-
merce avec les habilans des iles orientales de I'Asie ,
qu'ils leur apportoient des Emeraudes , et que ces
pierres , passant ensuite dans le continent et en
Egypte 9 se repandoient progressivement jusqu'en
Europe ; et que de-U\ venoit I'opinion qui leur attri-
buoit pour lieux d'origne les pajs d'oii le commerce
les apportoit. lis appuient leur supposilion de I'i-
gnoraace ou I'on est d'aucune mine d'Enieraude dans
Description de VEmeraudf, f 5g
♦out POricnt , et du trafic que font encore mainte-^
..antles Ammcains avec les habitans des Phiiippfnes,
afic dans lequel les Emeraiicles brutes entrent comine
o,^jet d'echange, pour ensuite se repandre dans tout
I'Orient.
Je ne doute pas que , depiiis que les mines du
P^rou ont fourni au luxe de toutps les parties de
Tancien pjonde uue telle quautite d'Emenudes, que
ia valeur en a beaucoup dimipue, toutes les m nes
autr fois exnloitees n'aient et^" pix'squ'aussilot negli-
gees, ta 't cellcs de I'Asie qne ce'les do I'Egv pte : oa
a done bienlot perdu les traces des filons qui les don-
licicnt , coinnie en Am^rique n e.ne on a t llement
ouhlie k^s anciennes mines, quell fraditio'.idL'slieu?:
t[\\\ 'es recc'ljient est meme perdue. Je crolsdjnc qne
Ls nouvel'es Emeraudes, venues de I'Amerique, ont
pu se coufjndre pir leur parFaite ressemblance avec
les anciennes, qu'elles se sont substitutes a elles dans
le coamierce , mais que I'Asie et l'£;-ypte ont r6el-
Icment fourni celles qui ont paru avant la fameuse
ddcouverte du Nouveau-Monde.
( An». 6.«) L'Emeraude etoit a un tel degre d'es-
time chez les anciens , que , lorsque LucuUus , ce
Roraain si celebre par ses rirhesses et par son luxe,
aborda a x^ilexandrie , Ptolemee , ocrupe du soia de
lui plaire , ne trouvarien de plus precieux a luiofTrir,
qu'une Eineraude sur laquelle etoit grave le portrait
du monarque ('^gyptien. ( PLutarcfi. in LucuUo ).
On respectoit tellement la beaut^ de cette pisi're ,
qu'on sembloit, dit Pline , etre convenu de ne pas
rentamer avec le burin. Voilci sans doute pourquoi
i6o Lilhologie.
il est si rare cle tvouver des Hermes antiques graves
sur I'Emoraucle. Cepeiidant le naturaMste roraaiii
coiiviv^nl »^ue lesGiCCS I'ont quelquefois emploj^e a
cet usage.
Les anciens , au rapport de Th^ophraste , se plal-
soieul a porter TEmerJude en bague , afin de s'.'^gajer
la vue par son ^clat et sa couleur suaves. lis la tail-
loient, soit en caboclion pourfaire Hotter sa lumiere,
soit en tables pour la r^flechir regulierement , solt
plufot meir.e en creux, pour reunir un plus grand
xiombie de rayons et pour augmenter son jeu , et
cette concavite, d'un aspect velout^ , renvojoit les
images renversees qui venoient s'j peindre en ra-
courci ; car c'est ainsi qu'on pent entendre ce que
ditPIine d'un einp.reur qui vojoit dan£ une Eme-
raude, comme dan? un miroir, le combat des gladia-
teurs auqucl il assistf^it.
( Ann. 7.") La valeur actuelle de I'Emeraude est
diffi.ile a determiner, parce qu'elle depend raoins du
Volume de cette pievre rue de sa perfection. Boece
et Boot esti'Dent UEe Emeraude parfaite, de quelque
grandeur qu'elle soit, la quatrieme partie du prix
d'un diaraant. Savary donne une table de valeur,
qui , dit-on , n'est pas exacte. Dans I'estimation de
cette pierre^ on convient maintenant cue les pelites
Emeraudes pures et claires valent ensemble a-peu-
pres un lou s le carat. Une belle En^eraude du poids
d'un carat et demi , d.t D: tens , pent valoir cinq
louis, de d^'ux carats ( ix louis. Mais le prix an-dela
de ce poids n'augmente pas en proportion de sa
grandeur , parce (jue les grandes Emeraudes sont
rarement pures et sans d J'aut. Une»
Description de rEmer.iude. 161
line Emeraude du poids de dix carats , qui aiiroit
line belle couleur , de la purely et du for.d , seroit
d'uii prix excessifjs'il montoit araison deson exireuie
raret^ ; cardans I'estimation des diamans dits de la
couronne , une grande Emeraude carree , de la plus
belle couleur , mais mal nette , du poids de 16 carats ,
a ele portee a 12,000 livres ( C'est la plus belle qui
existat dans cette collection de pierreries ) ; pendant
qu'une autre Emeraude de bonne couleur, mais
jilaceuse , pesant 20 carats , ne monte qu'a 6,coo
l.vres.
( Ann. 8«. ) VAcosta j, dans son Histoire natu-
relle des Indes , page 167 , parle de deux Emcraudes
qui pesoient au moins quatre arobes chacune , ce qui
faisoit plus de cent livres. Mais cette grossetu' paroit
extraordinairement exageree, puisque GarcUasso j
dans son Histoire des Incas, dit que la plus grosse
pierre de cette espece , que les Peruviens adoroiout
comme la d^esse-niere des Emdraudes, n'eloit que de
la grosseur d'un oeuf d'autruclie.
On conserve encore a present dans quelqucs cn-
droits de I'Europe^ avec un respect religleux et avec
line estimation exag^r^e , de pretendues Emeraudes
d'un volume tres-consid.'rable , lesquelles ne sont
sans doute que des verres factici^s ou des tluors. Tel
doit etre le morceau quadrangnlaire dit d'Emeraude ,
pesant 20 livres , present fait par Char emagne a
Tabbaj'-e de Reichenau procbe de Constance ; et fel.
est le fameux vase conserve dans le tremor de Genes ,
et que I'on monlre avec une si grande reserve el tant
dc precaution , qu'on doit croirc que les possesseurs
Tome Ih L
l6i IJthologif,
dc cetle merveille doutent euv-i-nemps dc sa grande
vaieur, et craignent I'exaraen d'uii cril exerce qui
en pourroit donner la vraia approciatioii. Ce vase ,
r\ommc S aero Cantino ^ dl snieraLdo orientate,
garde sous plusieurs clefs , qu'on ne peuf voii- qu'avec
line permission expresse du gouvernenient , et qu'un
de'cret du s^nat defend d'approcher de trop j res , ce
vase , doni le prejiige de sa vaieur esl tel qu^en i3i9,
p. ndant un siege deGc'iies, il fut mis en gcige pour
line somme ecju valente a 1200 marcs d'or, et retire
^ douze ans apres , par i'acquit de cetts somme , est
de forme liexagone , avec deux petiies anses , d'une
Foule piece. Son grand diametre est de 14 p6uces ;
sa hauteur , de 5 pouces 9 lignes , et son epaisseur , de
trois lignes. La couleur de ce vase est d'un vert
fonc6 ; M.kle la Condamine , qui I'a examine a la
luenr, des flambeaux , avec autant d'attention que
pcrmettoit la distance oil on le tenoit , dit qu'il n'v a
pas aper.;u la moindre trace de ces glaces , pailles ,
nuages et autres defauts de transparence si communs
dans les vraies Emeraudes et dans toutes les pier; es
precieuses d'un certain volume ; 'mais il j distingua
tres-evddemment plusieurs petits vuides , semblables
a des buUes d'air, de forme ronde et o])longue ,
tels qu'il s'en trouve coram unement dans les cris-
taux ou verres fondus , soit blancs , soit color^s.
( Memoires de I'academie des sciences, annee 1767 ,
page 040 ).
( Ann. 9^. ) Les anciens attri' uoient de grandes
proprietes a I'Emeraude ;ils croj^oient que sa couleur
gaie la reudoit propre 4 chasser la trisiessc , et faisoit
Description de rEmerau^e. iRS
d'sparo'tre los fanfomes inelan(o!iques , appelej
manuals esprits par le vulgaire. lis donnoient de
pins a TEmeraude loiitt's les pret:'ndiies verfus sup-
posees dans les autres pierres pr<^cieus:'S , coiitre le
poison et difTerentes maladies. Stiduil.s par IVclat de
res pierres 1 riliantes, ils s'etoient plua leur im- gmer
aulaiil de vcrtus que de beautes. Mais, aiusi que- le
dil BufTon , au phjsique comme au moral , les qua-
iites exterieur's les plus brillanles ne sont pas tonrours
I'indice du mt'rit^ le plus reel. Les Emeraud^^s , re-
duilesen poudie el prises intericuremenf , ne peuvent
agir aulrernenr que comme poudre vitreuse , action
sans doute peu curative et meme peii salutairf; ; c'est
done avec raison ( we Pon a rejete du nombre des
rem^des d'usage , cette poudre d'Eineraude. et les
cinq tra.miens precicux autrefois si fameux dans la
inedec ne ^aleniqi:. .
Sur TEmeraiide, coasullez les differens livres de
inin<iralogie ; les noles de Guettarrf ^ dans I'edition
de Pline , par Poinsuiet ; i'ouvrage de Dutens ^ des
pierres precieuse.s ] les voyages de Tavcmler et
ceux da Charciln,
La
MA M M A L O G I E.
MtMOiBE suT ime nouvdU division des Mammiferes ,
ft sur Ics principcs qui doivent servir de base
dans cettc sortc dc travail , hi a la sorlfte d'His-
toire naturelle ^ h premier Jloreal de Van troisiime ,
par les citoyens Geoffruy et Cuvier.
±S ous roiis propoFons de soumetire la closse des
aniinanx c^ maraelles, a ime revision pc^nerale ; de
]es ranger en ordre et en genres aussi naturelsque
peiivent I'etre des agregations qui , malgre tout le
soin qu'on mel: a les foimer , n'ont toujours pour
base que les abstractions des naturalistes; de deter-
miner les rspeces avec precision j de discuter leur
synonj'mie , et d'en donner I'enumerati on la plus
complete que l'6tat actuel des connoissances pourra
permetlre.
Avant de soumettre a la societe le plan general
de notre nouvelle distribution , nous allons lui pre-
senter quelques idees sur les principes communs a
loutes les branches de I'Histoire naturelle , et dont
cette dislribulion sera Tappllcation immediate.
Dfes les temps les plus recules , on apercul que
la no lure s'dlo't plu a r^p^ter certaines formes ,
ccrtaines combinaisons totales d'organes , en les
difli^rencianf seulemsrt par des attributsassez lagers
de couleur, de grandeur, ou de proportion.
D>s les te;pps les plus reoiilc^s , on s'habitua a
donner a loutes les especes qui se ressembloient
Methode mammalogiqiu. i65
flinsi par la majority de leurs ranports, nn nom
substautif commiin , et a distinguer chacuiie par un
adjeclii'propre et parliculier; ainsi nous tro'ivons
cliez Jes an:)iens, ie nius domcsticus ^ inus agres-
tls , muf cogi/pUus J niLis alpinus _, etc. lis eui-
ployerent cetle nomenclature , sur-tciut pour les
petites especes, et I'apphquerenl souvent d'apres le
simple coup d'oeil plutot que sur dts rapporls i^els
et constans.
Les naturalistes s'eraparerent de catte i.^ee ,
comme exlremement propre a soulager la memoire.
lis r^unirent ensemble les especes qui se ressem-
bloient le plus par la tolalite de lour organisation ,
et en Ibrmerent les groupes auxquels on a donnj le
nom de genres.
Mais comme la description de toutes les pnrties
par lesquelles les especes d'un meuie ger.rc se re:-
sembloient , cut ete fort longue ; et comme {'exposi-
tion des petites exceptions partielles quiserencontrent
toujours j.'eat rendue ditfase et obscure , on iniaglna
de choisir parmi tous ces rapports d'organisation ,
un des plus saillans , et strr-tout des p' us exclusive-
ment propres a chaque f.ea-re, qu'on exposa isole-
luent , et qu'ou noijima' caracttre essentiet dib
genre,
II ne pouvoit et ne devoit etre qu'un liidicciteur
de la ressemblancc existajite entie toul^s les e?pec.'s
du genre, uue espece dc cachet, qui ne faisoil pas
le genre par lui-meme , mais n'cn etoit pour ainsi
dire que Teuseigne.
Comme ou n'avoit d'abord con:u les ge.nres qutj
L 3
1 66 MammaJofi'ie.
comme cles r^miions foiidees sur la nature elle-
nieme , on ii'avoit pu clioisir arbilrairv'inent leurs
caracteres IndlcateLirs j mais on avoit pris ceux
qu'offioil cbacjue genre , lantot dans une partie ,
tantot dans une autre ; en sorte qu'iis ne prt^-
sentaient solivent aucun point de conlact , et
ne sc pretoient a aucune comparaison ; cliaque
ji,enr«3 semi;lolt isole ; il falloit I'etudier h. part; on
savoit bien que tel caractere etoit cominun a ioutes
les especes du genre , mals on ne pouvoit etre sur
qu'il excliit toutes ceiles qiii n'j appartenoient pas.
Pour remeclier a cet inconvenient , On imagina
de prendre io\\s,\Qs caracteres Indicalcurs dans les
diverses conforniations d'nn organe unique. II etoit
clair qu'il ne pourroit j avoir dans les coupures,
ni obscurity ni incertitude ; que toutes les divisions
et subdivisions naissant d'une dichotomic rigoureuse ,
chaque etre se trouveroit place par une necessity
iiiatbematique.
Cependant cette idee, bonne en elle-meme , estce
qui a fait pendant long-temps de i'Histoire naturelle
une sorte d'art pueril qui ne consistoit qu'a caser
les especes, d'apres dfes, regies, variables au p;r6 de
chaque auteur, et avant la pluparl aussi pen de rap-
port avec I'ordre de la nature , que les places
qu'oc uper t les noms d'homnias dans les dictionnaires
historiques , en out avec Pordre de la chronologie.
Cet o. gane unique qui devoit fournir les caracteres
iridic ateurs ^ fut clioisi arbitrairement, sans egard
a la valeur et a »la Constance «1es caracterf s qu'on
.en tirait , ou , pour mieux dire , les Zoologistcs ( qui
Me'lho^e mnmmalcginne. 167
nous occuperont seuls ici ) n'avoient aucime idee
de ce calcul des caracteres , dont cependant les
botani.sles avoient eiilrevu la realite, et qii'unilliistr©
niembre de ceWc societe a si bien develocp^ dans uu
ou vrage dont tout.'s lesbianclies de riiis^oird riaturelle
scntiront bieiUoi i'heurease iiiflueace, qiioiqu'il n'ait
et6 dirigi' que vers I'uiiJ d'elles.
Celle meprise dans les bases des caracteres brouilla
bientot tout. Ce ne furent plus das genres donnes
par la nature, qui fournirent les caracteres iridic
cateurs y ce Jurent des caracteres indlcateurs
trouves d'avance, qui determineren! \^^ genres \o\x
du moins , si par un r(^ste de pucleur , on altera le
nioins cpi'on le put !es genres naturels , les ordres
qui ne j-oat que des genres plus elev 's , genera
SLunnia^ furent entierement soumis a celtenouvelle
espece de Ivrannje.
II faut done revenir a I'idee originelle, suivre a
la leltre le principe expose par Linnceus , et qu'il
a quelquefois oublie dans la pratique , que Les
genres dolvent founiir Les caracteres j et noii
les caracteres determiner les genres ; genera-
liser ce principe , I'appliquer aux ordres et aux
classes ; enfin ne jamais perdre de vue qu'uii
genre doit-etre foude sur la grande majorite des
rapports ; et qu'un ordre doit coutenir tons les
genres 5 et les genrv?s seule rent qui ne diflerent
que par des rapports d'un degre inferieur.
Lorsqu'on aura forme ses groupes grands ct peiifs,
d'apres celte regie sure et invariable , on leur trou-
vera , si Ton pent, des caracteres indicateurs ; etces
L4
^^^ l^inmmnlogie.
cciracleres, fussent-ils meme impossibles h Iroiivrr
il vaudroit mieuv avoiier son iiiipuissance , qt.a
cle fmre des reunions ou dcs separations conlra
nature.
Mais nous sommes loin d'admettrecette impossibf-
lite; le but de notre m^moire est au contra ire d'iii-
diquerj.ar quelles voies on peut parvenir a foiiner
descoupures naturelles, et neanmoins a leurassigner
des caract^res fixes et determines; a reimir eu un
jr.ot les avantages de I'ordre naturel et ceux d.^ k
dicholomie, qui fait toujours la base implicite ou
df'veloppce de tout sjsteme artificiel.
Comme les bornes de ce iiidmoire , et le temps
qye vous pouvez consicrer a I'entendre , nous res-
serrent un peu, nous supposerons dans tout ce qu^
va suivre,que vous avez pr^sente ci la memoire la
totahte des vrais rapports nafurels , et nous ne nous
attacberons qu'a rechercher les caractcres ladica-
ieurs qui servcnt d'enseigne constaute a la ressem-
blance de ces rapports.
Nous n'avons pas tardc a nous apercevoir que la
solution de ce probleme d^pendoit de la conuois-
sance exacte de la valeur respective des caracteres;
que par consequent les caracteres prunaires , secoa-
dcures , ect. devoient etre cboisis selon le de-re
d'imporlance des organes dans lesquels on ks
"prend.
En effet , on conroil que dans un svsteme aussi
bien lie que Peconomie animale, il est des organes
dontla conformite entraine necessairemeut cellede
Mi'hode m:'immalo,[:iq-ue. 169
la plupart dcs aulres,et qu'ou aoit pouvoir les de-
terminer pcir le raisonnement et par i'expc'rionce.
' II est clair que ces organes une fois decouveiMs ,
Ic'S classes , les ordres qui les auront pour eiiseigne ,
lie contiendroiit que des genre seinblables par la ma-
jorite de Icurs rapports; en uu mot , que le probletiie
d'une division naturelle , indjquee par des caracleres
tranches, sera rt'solu.
Si nous considcror.s mainlenant les divers organes
d'un animal, nous en trouverons qui consiiUieut son
existence _, consid^rce isolement ; d^autres , qui \p
jrmilent en relation avec les autres elres. II est aJsc
de voir que ces dernicrs organes doivent ccder aiix
premiers 5 car Taniinal est d'abord , et pui^il sent
el AGiT. Or Texistence , la vie de I'auimal depeud
d'aboid de la generation qui la hii doniio, et ensniie
d\i moauenient regie de ses Jluides J qui la main-
tient. La generation e\\a. circulation dolxent done
fournir les caracttres priniaires ou indicate a rs du
prt mier ordre.
Les differences essentielles dans le n)ode de la
gc'-neration ne sont pas encore assez coiinues. jla
seule que uous saclnuns elrc penerakment cunstanle,
est celle-ci : les f(jetns de certains animaux sont. j.;en-
fermcs avec une portion toute prepare© de; nqnr-
riture , dans une enveloppe commune non orgauisee,
de laquelle ils sortent ou eclosent , quelqucfois dans
le corps , le plus souveiit liors du corps de lent mere.
D'autres , an contraire , n'ont pas leur pcJrtiou a
part , ni d'enveloppe inorgrinique ; is se noiuriaSint
en pompant les sues du corps de kuir niero , Lt i^j le
quiltent (ju'cu quit'.ant rclal d-j ialus.
170 Mammalogie.
La generation n%i done pn rournlr qu'une seuTe
division ; t\st cello que cIkicuu coiiiioit entre les ani-
maiix a mamelles, les seiils vraimeut vivipures , et
en meine temps les plus parfaitenient organis 's dans
lout le ivste de leur ^conomie ; enti'eiix , dis-je , et
toutes les autres classes uniquement oviparcs ou gem-
mipares.
Les aulres organes du premier rang , ceux de la
circulation , presentent des caracteres plus nombreux.
Jlsont servi en parlie a la grande divn'sion lin^icennf!
en six classes ; mais si on leur avoit entiereai i\t
obei, nous n^aurions pas ceilc des vers, espece dj
classe de rebut, cii on a jet6 tout ce qui ne pouvoit
se placer ailleurs, et qui est devenue par-la un ramas
informe des objets les plus disparates.
Les classes elant ainsi delerminees par les organes
primaiies, il a fallu considerer les organes secon-
dairc's, pour la determination des ordres. Nous avons
Vu qu'ils eloient ceux par lesc[uels les animaux sont
en relation avec les .autres etres. Cette rel:ition est
passive , par les organes des sens , et active y par
ceux du mouvement, de la preliension , de la nutri-
tion.
La presque totalite des mouvemens de I'aniraal est
calculee pour sa conservation , c'rst-a-dire , pour le
preserver des dangers et pour lui Iburnir des aUmens.
La defense variant suivant les attaques, qui peuvent
varier a I'infiui , nVtoit pas su:>cepiible de donner des
caracleres constans. Le mode de nourriture an con-
traire elant an dans cliaque espoce , devoit deter-
Methnde mammnlogique. 171
mincT cl'iine nianiere fixe les organes calcuU's pour
lui. Cliacun sent, par exemple , qu'uii a .iiiial des-
tine a vivre de chair, devoil etie muiii dfs inovens
d'atlaquer et de vaincre ; que celui qui devcit vivre
de fruit , dev oit pouvoir grimper aux arl.res ; ([ue
I'hcrbivore , au coulraire, pouvoit resler coli6 a la
terre.
Les organes de la nutrition sont done ceux qui de-
terminent principalement les relations actuves de
chaque animal.
P^rmi les or^anss des sensations, ce sens-la doit
sans doute avoir la plus grande influence sur toute la
machine , qui est le.plus general , le plus parlait , le
plus necessaire , qui seui complete les idces acquises
par les autres sens. Chacun sent que je veux parler
du sens du toucher. Qui lie idee aurions-nous , sans
lui , de tout ce qui nous environne ? Je reavoie sur
cela aux auteurs de psj cliologie , et mc borne seule-
ment a rappeler ici ce que plusi. urs d'cnlr'eiix out
d^ja remarqu^ sur I'inljueace que doit avoir sur un
€tre quelconque la plus ou moins grande perfection
de ce sens. Quelle prodigieuse distance ne doit-il pas
y avoir eutre les images que se forment des coj ps
environnans, un cheval, par exemple , doiit le pied
se termine en uue masse inert c et insensible , et Ig
singe ou I'ecureuil , dont le? mains sont presqu'aussr
divis6es et aussi delicaies que les notres ?
Nous avoiis une raison de plus d'einplojer prin-
cipalement le toucher parmi les organes des relaliozis
passives ; c*est qa*a lui seul il fournit des divisions
plus nombreuses, plusapparentes et mieux tr^mcbtes
.que tous les autres sens ensemble.
172 Mammalogie.
Ses d'vers degr^s de perfeclion dependent sur-tout
de la division plus ou moins prononcee des doigts, et
de leur revetement plus ou moins delicat. Qu'on
prenne bien garde que je ne parle pas de leur
iiombre ; le nombre des parties ne fournit en Ilistoire
iiaturelle que des caracteres dt3 tres-peu de valeur.
C*est I'ignorance de ce priucipe, qui a ^gare meme
ceux des zoologistes auxquels une espece d'iustinct
avoit fait entrevoir l'im])ortarxe des organes du toucher.
Les organes de la nutrition , consideres dans leur
totalite 5 fourniroi^nt peut-etre' dvi's caracteres egau-^
en valeur a eeux du tact, ou dii'moins il seroit bien
difficile d'assigner leur rang, '^ais ces organes sont
internes et externes ; et, si la consideration des pre-
miers pent et doit necessairement entrer dans Iri
formation des ordres iiaturels , on est oblige , lorsqu'il
ne s'agit.que de caracteres indicateurs , de se borner
aux seconds. II est vrai que les uns ct les autres sont
en rapport intime ; le manque de dents canines, par
exemple , est toujours simultanc a un estomac simple*
et a un enorme crcum ; le manque d'incisives a la
machoire superieure, vis-a-vis de liuit a I'inferieure,
indique toujours un estomac quadruple. Nean-
moins , les dents n'etant qu'une partie assez petite
des organes de la nutrition , nous avons soupconne
qu'elles ne nous fourniroient que des caracteres du
tioisienie rang , c*est-a-dire , inferieurs a ceux du
lact ; et pour nous decider enlierement la-dcssus,
nous avons apjiele i'experience a notre secours. Pour
c^trffet, nous avons suivi I'exemple des botanistes ;
nons iivons corisiderc les faiuilies recoimues de tons ,
Methode mr.v.malogique. 1^3
comme parfaitement naturelles , afin de d(?couvrIr
lequel des deux caracteres (5loit le plus constant.
, Que le nombrc des dents ne le soit pas , c'est ce
qui nous ctoit demonlre depuis long-temps. La fa-
mille des rongeurs meme varie [>our ce nombre ; car
les hjrax, par evemple, out qnatre dents incisives
en has ; les lievres en ont quatre en haut 5 les kangu-
roos, six ou meme huit, tandis que lous les autres
genres de cette famille n'en ont que deux a chaque
machoire.
Mais I'existence simultanee des trois series de
dents, les incisives , les canines et ks molaires , ou
Tabsence d'une , ou de deux de ces sortes, ou meme
de toutes , soit en haut , soit en bas , donne des ca-
racteres qui d'abord paroissent anssi constans que les
leoumens des doigts. En effet, dans les ruminans ,
Pabsence des incisives superieures ne souflPre pas plus
d'exception que lespieds bisulques; dans les rongeurs,
on ne trouve pas plus de canines que de sabots aux
pieds , etc. , etc. Nous verrons plus bas , que meme les
chauve-souris ne font pas una exception reelle a cette
Constance des rapports de dents ; irais il existe uii©
famille vraimenl naturelle, qui decide ab^olument la
fjuestion en faveur des caracteres pris du toucher.
i:ile comprend les cnq genres, elephant, rhino-
ceros, hlppopotame , tapir et cochon. Onfera, si
Ton veut^ cinq ordres de ces cinq genres ; car il faut
avouer qu'ils ne se rapprocheiit pas autant que les
genres des rongeurs, ou des ruminans, par exeinple:
inais loujours faudra-t-il convenir que ces cinq ordres
seront les plus voisins les ims des awtres, et qu'ou ne
174 Matiwialogie.
pent en intercaler aucuii eitr'eux. Pre.fque tout leur
est coraniim , epaisseur de la peau , rarete et duret^
des polls, longueur et m(^])IIite du nez qui va croissant
par degr^, du groin du cochon a la trompe de I'^le^
pbant , petitesse des yeux , forme trappue du corps ,
nourrilure vegetale , quoiqu'ils aient une force suffi-
sante pour s'en procurer d'autre , besoin continuel
d'eau ou de boue , pour humecter et rafraichir ce
cuir epais qui les recouvre. Tout conspire pour de-
montrtr leur grande affiiiitv^
Ell i lien: les caract^res du tact sent constans cliez
eux 5 leurs doigts sont construits et reconverts de
m^me , tandis que leurs dents varient a un point qu'il
est impossible d'en donner une description assez abs«
traite pour conver.ir a ions.
Voi!a done le rang de ces caracteres decide. Les
tegumens des doigts vont aidant Les dents. Ce
priiicipe une fois pose , notre marcbe est devenue
sure , et vous allez voir avec quelle focilit^ nous en
avons deduit des ordres aussi naturels qu'aises h
d^'signer par des caracteres tranches qui ne souffreut
point d'exceptions.
Division primaire , en trols embrancheniens*
Les tegumens des doigts nous fournissent d'abord
trojs grands embranchemens. i." Les aaimaux ma"
rins J qui ont leurs doigts r^unis en nageoires, de
raaniere a ne pouvoir piesque en faire usage pour
la marcbe : ils habitant dans I'eau comme les pois-
sons 5 mais i!s ont besoin de respirer Pair, au moins
de temps en temps ^ quoique le trou ovale du coeur
Mr'.'h'^de mammalog'ique. 17$
restant toiijours ouvert chez eux , leur pennel de
plouger lon--temps sans revenir sur I'eau.
a.° Les manimlj erts d. sabots , dans lesqueb
toute I'extremite des doigts qui povte a terre, est en-
velopp^'C dans un etui de matiere cornee , plus ou
nioins dure. Tous ces animaux sont herbivores ;
rimperfection dj leur touclier , I'inflexibilite dc ieurjs
doigts ne leur permettent ni de grimper aux arbres,
jii de rien saisir avec leur mains, Aucuu d'eux u'a
de clavicules.
3." Les inaniinijeres h ongies j qui ont Jeurs
doigts libres, revetus de la peau ordinaire, et munis
seulement a leur extremile d'un ongle , plus ou.
moins grand. lis sont susrcjitibles de toute sorte de
mouvemens , et de tous les d^^gres de perfection a
regard de la prehinsio 1 . du toucher, etc.; aussi
sont-ilsinlinimeut plus vcirics dausleurs formes et leur
genre de vie , que ceux d.^s deux premiers enibran-
chemens. II yen a , comnie nous le verrons^ de car-
nivores , de frugiv'ures, cl'iierbivores , etc, etc.
Division second a ire.
i'*. Du premier einhranckenient.
Les niani mi feres inariiis _, ou a pieds en foniie
de Ufigeoires , fi'nneut doux families ou deux ordres :
J." Les Cetacdes , qui n'ont que les pieds de devant,
hgurc's en nageolre , absolu.nent inutiles a la niarche.
Les piecis de derriere manquent absoluinent. Leur
queue se termino par une uageoire horizonlale. Get
ordre comnrend les baleines , iiar.vals, cachalots ,
dauphins et marsouins.
176 Mmnmnlfl'>Je.
2.0 Lcs maminijdres amphlbies ; \h ont quntre
pierls, lous en forme rle luigeoire , mais si courts
qu'ils peuvent a peine leur servir n ramper sur les
rJv<;ges ; ce sont lcs phoques , morses , et iainaulins.
Si le norabre des especes l'e>:igeiot , on pourroit
encore subdiviser ces deux families, d'apres I'ctat
de leurs dents et le genre de nourriture qui en
' ri^-snite, et ils fourniroient chacun plusieurs ordr^s
fori analogues a ceux que nous observerons parmi
les niamniiferes terrestres.
• 2.° Du second einbranckeincnt.
liv^s niainmLferes a sabots ^ on a doigts enve-
lopjx's de come , forment trois families, d'aprcs
le roinbre de lenrs doigts , et la plus ou moius
grande afiinite qui en r^sulte entr'enx et les
niamniiferes a angles. La premiere n'a qu'un
seul doigt et un seul sabot a cbaque pied 5
elic ne comprend qu'im seid genre , celui des-«
clievaux , animaux herbivores et munis de trois
series de dents. Nous lui donnons le nom de so-
li pedes.
La Ecconde faraille'a a cbaque -^laddeux doigt s'
et deux sabots. G'est celle qu'on a tQujours connue
sons le nom de runiinans ou pleds foiirclius. Elle
*st herbivore. Tons ses genres manquent de denls
'incisives a la machoire superleure , ont quatre esto-
macs, un ccrcum fort long, nn colon a plusieurs-
circonvoln'ions coneentriques. Leur squelelle a une
4;rande similitude dans tous. Leurs orbites sent lou-
jours
Mehode mammnlogiqiit, lyj
jours complttement s6parh de la fosse tenrporaje?
cs ii'est que pariiii enx qu'oii trouve des axiiniauit
a, deux comes.
La troisi^me famille a au mollis trois , souvent
quatre 5 quelquefois cinn doigts a c'aquepied,- tous
revelus de sabots parliculiers , comitie dans le tci|nr ,
le rliiuoceros ct le coclion ; ou eir^'loppi's eusemble
par une peau epaisse et calleuse, coinme dans Te-
lephant et i'hippopotame.
Les dents de cette famille sont co fonr^es tres-
differerament. lu' elephant a en haul deux ^nonnes
incisives, qu'on connoit sous le noni d ■ defenses ^
cellesd'en bas lui ^manquent , ainsi que les cuiines
des d?ux maclioires. Les rhinoceros manquent
orfthnaireraent d'incisi'/es ; leurs canines, dans les
especes qui en out, sont le plus souvent eloigndes
des raaclielieres par un espace nud. Nous avons
observe dans le sauelette du rhinoceros unicorne
J)
qui fait un des morceaux les plus precieux de la
colleclion du Museum d'Histoire natui\lle , deux
petftes dents incisives , de forme coiiique , qui ^ pen-*
dant la vie de i'aniindl, eioient cachees sous la gen-
cive. 'U hippo pot. line a a cliaque machoire quafra
incisives coniques, placees d'uue maniere fort bi-
2arre , et deux canines. Dans les cochons ^ les in-
cisives Vttiient Leaucoup en nombi'e , et manquen*
totaiement a quclques es;:eces. Leur.; canines sont fort
grosses, et soriies bors l.s levres, en forme de de-
fenses. Pour le tapir , il a dix incisives a chaquel
mAclioire , et point de canines.
Com me nous avons dtja exposd les rapports com-
Toni6 11. M
,^g . Mcunmalogie.
muns deces cinq genres , nous ne les rdp(<terons pas
ici , nous observerons seulement que le cochon a des
If'gers rapports avec les rumiiians , par la brievet6
et presque la nullite de ses deux doigts lateraux,
et par una appendice ds sou estomac , simple dans
notre roclion ordinaire , mais double dans le Pecaii.
Celte famille porlera dans noire sjsteme le nom
de pacliy demies.
3.0 Dll troLsihne embranch:'mcnL
Comme les inanimiftres ci ongles soiit plus nom-
breuK et plus varies qu- les autres , nous ne parvien-
drons aux ordres que par des subdivisions rep^^tees.
Notre divisLon secDndaire sera prise des dents,
ct nous serons obliges , pour la division tertlalre , de
Vevenir aux organes da touclier, et d'y saisir des
differences raoiiis sensilles et raoiiiS importantes que
cei'.es qu3 rous avons em -levies comme caractercs
prlinaires.
On les mammif^res a ongles sont munis des trois
esoecesde dents, o\\ \\s> mtmquent de canines seule-
ment, cu d'incislves feeulement , ou a-k-fois d'iii-
cisives et de canines.
■ Ces trois dernieres subdivisions ne sont pas assez
nombreuses en genres , et leur,> genres .se rappro-
client trop pour qu'elles aient besoiu d'etre encore
par^a-ees : ellesfournironl done trois ordres ^oxsja^
frillies^ savoir :
i.o Les ideates : ils.n'ont ni. i'lcisives , ni ca-
nines, et souvent point de molaires. Lenrs ongle*
soiit fort grnnd^ , et leur touclier pri^squs aussi i:u-
pa.faa que daas ceux k su;.oir. L uv corps eutier
Methodt mammal 6'gique, i^g
tst recouvert de maniere a leiir lai^^ser peu de s;n-
slbilite : dans les manls , par des (^cailles imbri'mees :
dans k^s tatous , par de vraies pieces de cuirasses^
dans quelques fourmilies meme . par uu pofl diir,
non flexible, presque s"mi>Iable a de Pherbe seche.
JjQsmanisel \Qs,fourniULers^Q\mi\\mi^ al'evception
d'une seule espece, aueuues dei.ts, se iiourrissent da
fouruiis qu'ils premient au mojen de leur langue
loi'gue et gluante. Les tatous se nourrisseut quel*
quefoh de fruits ou de raciiies, parce qu'ils ont des
molaires.
2.0 Les paresseux. lis ont des canines et des
molaires, mais point d'incisivs : djs one;les fort
grands, les mouvemens d'une leiUeur ct d'une fui-
blesse extiaordinaire* lis grimpentaux arbrcs, vivent
de leurs feuilies. Leurs manielles situ^es sur la
poitrine , leur habitude de grimper et de s'cisseoiL'
sur !e derricre , d'une part; leur estoimic, tres-di-
vise par des etranglemens, et les pieds de devairt
d'une de leurs esp^ces , qui ii'ont que deux ou^Ies
de I'auire part , semblent leur donner q-ielciues
rapports avec. \es quadra manes et les rununans,
3." Les rongeurs. Coaime ils ont a la place des
canines un grand espace sans dents , aux rieux mu-
choires, et que leurs incisives, quoiuue grandes et
pointues , etant placees a l'exlremit6 du levier des
machoir?s , ii'ont qu'une force mediocre, ijs ne peu-
veiit saisir Mxement avec leur gueule ; i's se bornent
done a ronger soit de grands corps immoljiies , soit
cpux qu'ils peuveot assuj^tir avec leurs pattes do
dt;vaut qui sunt biea divuiees. .lis u'attaqueut donci
o8i Mimmnlo^U.
pa«: \?% animaux v'vansj a"s ils se noiirrissent d*
tallies sorta;:- tie co p , o:t v6pt'tau^, soil animaux ,
d'(^ orrc sou de boi ; qMehjiies-uns brouteiif Tlieibe :
Ic'ur port evl6*ieur est pr i;q':e le m6me dnns tons;
son princii al car^ctoie consist^ dans !a longu.^ur dii
trail) de deniere, eu etard a celui du devant , quf
ne periret a ranimal de courir cue par bonds.
Cette d;ff,Tence dev'e t toui-a-fait demesuree dans
lesgerboises et kangaroos.
Les inci3iv2s sont ordinairement au nombre de
deux ; dans la lievre , celles du baut sont chacune
doubles. Dans les liijrax on damans^ il y en a
quatre en haf, 5 dans les kangaroos il y en a en haut
liuit cu six.
A I'interieur , tous les rongeurs ont un estomac
simple 5 des intesliiis fori longs, un ccecum cnorme,
muni endfdas, c\nns qhdques genres, d'une val-
vule spiraie. Leur cetveau n'a presque aucune cir-
convokilion; les parties de la g<^meration sont tres-
developpdes, et ils ont au prepuce des glandes par-
ticulieres qn'on a sur-tout remarqu^esdansle castor,
ou elles donnent Tonguent connu sous le noin da
castoreuin.
La plupart grimpent aux arbres ; quelques-uns,
m^ire ont une espece de vol, au moyen de la peaii
de leurs flancs , qui se trouve etendus entre leurs
jambes.
II ne nous reste a present que les mammif^res
munis des trois sortes de clents ; nous a'lon^ les sub-
diviser, comixie je I'ai dit,d'cpr^s la conformatioi^,
de leuvs crgan.« du toucbe .
Methode mammaloglque. r^i
Les uns ont les pouces s^pare> aiix quati*e pieds;
d'autres n'en ont qu*au-: picds di demure; enfm
ii enest ou le pouceejt se^iblabie aux autres doigts,
et place de meitie j armi ceux-ci ; Iv^s uns jv^arclieut
.sur Texlremili des doigts seulcmcnt, les anlres ap-
puient en marcbant , ou en ae ten uit arrel<^s , la
planla enliere des pieds de derriere h terre ; d'autres
liennent , en queb^ue sorte , le milieu entre qcs deux
manieres. lis ont , k la verite , les doigfs seulement
a terre , mais leurs tarsss et metatarses sont fort
inclines. Leurs membres courts, leur corps alonge
leur donnent un air tout particuiier ; nous en fjisons
un ordre a part.
Parmi cenx qui appuient la plante enliere, noi?s
sommes aussi obliges de separer les animaux a grande
main revetue de membranes, et tenant lieu d'ailes»
Ainsi les mamuiiferes a oniles , et aux trois sortes
de denis, nous fburnissent six ordrcs j savoir:
i.o Les qLiadramanes , on mammiferes qui ont
les pouces des quatre pieds separes des autresdoigts,
ct sr.sceptibles de leur etre opposes dans la prehen-
sion. Ces animaux sont frugivores , et essentiellc-
ment conformes pour grimper aux arbros , leur
s'joiir ordinaire ; ils ont avec I'bomme plusieurs
rapports de conformation ; mais celui-ci est or-^anis^
pour rester a terre , marcher sur deux pitds, ne
saisir qu'avec ses mains. Ses extn'n^iles poH('rierifS
n'otit pas de pouces separes. Le bassin ^Iroit des
quadrumanes . la compression de leurs cuisses , Tin-
f.M-lion tros-basse do leur muscles llMisseurs de la
jambe , rarticulation vieleur.tete sur le c^u, rendent
M 3
jg2 Mammalogie.
Ja marcAic bipede tres-difBcuItueiise aux qiiadru-
iTiancs ; aussi ont-'ls tous les machoiies plusou moins
proemiiisntes en mnseau , et I'os incisif ou inler-
iiiaxiUairc a la machoire sup^rieure. lis ont la
ver<Te pendante , les mamelles peijlorales , I'es-
tomac simple , le ccecum mediocre , leur orbite
est complet.
Get ordre comprend les singer ( slniia. Lin,) ,
les maids ( lemur L. ) , les indris , genre nou-
veau comprenantdeux especesdecrites par Sonnevat,
qui toutefois n*a pas connu leur dentition , et rap-
portees par Gmelin au genre des raakis. Elles en
difrereni vjar leurs incisives inferieures, qui ne sont
ou'au norabre de quatre , comrae dans les singes ,
rnais alongees et declives comme dans les raakis.
Nous nous deterrainerons peut-eire aussi a faire uri
genre a p::rt du tori ( lemur tardigradus , L. ) 5 le
paresseLix pentadacili edii Bengale , de Yosmncr
( lemur cuccwg , Boddaei t ) , en fera au.ss^ un , airac-
terise par deux incisives en haut , vis-a-vis dc S!-\
en bas 5 le ^hoyac , auire genre nouveau , decou-
vert par «-3 ctioyen Adanson, au Senegal, et vx'n
encore publie par lui , a de meme deux inci.dvts
en haut et six en bas ; mais elles ont une disposilio'ii
parlicuiiere . et il a I'habitus Irger et sautiiiant des
gerboises , et non , comme le cucatig ^ la lenteur
d'lm paresseux. Enfin le tarsier ( tcir.ur tarsias )
formri a encore un genre particulier , qui n'avant
que deux incisives a chaque machoire , lie par ce
xapijorf les quadrumanps aux plantigrades.
S.?. I^uu5 separons des quadrunwrics ' les an!-
Me'thode mammaloglque. i*^3
maux,qiu n'out p:is do [jouc2s aux pieds de deniere ,
€t auxquels nous laissons en parliculier le nom de
^pediinanes. lis en difTerent en lout le reste : or-
ganes de ]a nulrition , de la peuera ion , position
des mamelles : orbites incompljts , ecf. Celta fa-
mille comprend deux genres ; les dldclphcs , qui ont
dix incisives en liaut, liuit en has, et ouatre fortes
cauines , et les phalangers , qui ont enliaut six inci-
sives et quelques canines , en has, deux seuleaient j
grandes et alorigees en avant , comms dans les ron-
geurs san? canines. On iie • onnoissoit jusqu'ici qn'une
esjjece de plialanger( dldelpkls orlenialis , Pall ) :
ils avoient el6 reunisavec. Irsdidelphes , auxquels ils
ressemblent en effet par la poclie da;;? laquelle quelques
especes de ces deux genres portent leurs peiits j mais
ce caractere n'etant )^::.s constant , ne pent entrer
parmi les giacrlques,
?iP Les ckirqpteres , ou animaux a grande main
palnTee. Nous coinprenons dans cet ordre , deja
iiomme ainsi par Blumenbacb, les cbauve-souris ,
et le galeopllhecus de Pallas, ow ienivr ifolans de
Linne. Ces animaux pr(fsentent quelques difft^rences
dans le nombre de leurs dents incisives , et meme
on pourroil croire, si on s'en rr.pportoit aux descrip-
tions publiees jusqu'a ce jour , que ces difference- sont
assez fortes pour inlervcnnir toutes les r-'gles que
nous avons l)asres sur !a coexistence des trois sortes
de dents , ou I'absence de I'une d'elles. Mais nos
observations sur les chauve-souris, vont au contraire
les confirnier. Nou^ nous souimes assures que les
deux vavielcs du fer a c\eval ( vespertiilo fctrum
M 4
J §4 Mammalogie.
equlnumXjm. )ont chacime denx inclslves en hauf.
La grands chauve-souris fer de lance. Buff. siippU
toire VJI. tab. 74 _, en a quatre , quoi: fue Biiffon
les lui aitrefusv'es , parce qu'il n'avoit observe qu'un
individu muiilt'. II est done assez probable que les
autres e peces qui oiit paru raanquer d'incisives , soit
en haiit ,soit en bas, le avoient seiilement , on trcs-
petites , oil tomb^es par quelque accident.
Quoi (^u'il en soit, le nombre, et sur-tout la posilion
respective des dents nous ont fourni des ciiractercs
assez tranches, pour deviser ce genre des chanve-
souris en plusieurs, qu'il seroit trop lan^T d'exposer
ici 5 et sur lesqu?ls nous presenterons inccssammenl im
?nemoire a la societe.
4.0 Les plantigrades j ou mammlf-Tes a orgies et
sans ponces, appujanl la plante entiere des pitds de
deiriere a terre lorsqu'ils niarchent on qirils for.t
debcut , sont les omx& { ursus , L. ) ; les ra;oris
( ursus lolor yjj. ) ; les coatis ( vluerrw nascLa ^
narica _, tctradactUa et {-ulpecula ^ L. ) ; les
blaireaux ( ursus metes ^ etc. ) ; les ^^ouXov.s {ursus
^ido ^ luscLis J vluenxi y fasciata ^ capensis j pii-
toruis y L; } ; les mangousles ( vlverra Ichtieumdn
€t niungos ) 5 le poto ( pwerra caLuil volvula^ L. )>
les taupes {tal-poe-j L. ) ^ {e& musar'aignes {so rex 5
L, } , et les lierissons ( erin-aceus ^ L. ).
II nous seroit impossible d'exposer les raisons des
jiombreux cl angemens que nous avons faits dans les
genres renis jusqu'a ce jour, et dont on vienf d\ivoir
^ne esqujs5e. Ce sera encore I'obj^t d'un raemoiro
particullci, Qu'il nous sufiise d'obser^er que lous \e% -
animaux pL^ntig^arles out d s habinirlcs trisfrs , tin
gout parliculier pour les cavernes et I'obscurifi^ , wm
sorte de demarclie rampante 5 que beaucoup d?Q)\X\\i
eu.x sont condaniubs au soinmcil pendant i'hi/cr j a
rinterieur iis mraiquent Ions de cGeciim,etn'ont nu!Ii3
distinction enlre l('s intestins grelcs et les gr' s. L^i.r
genre de vie tient le milieu entre Irs frii?ivons \. ies
carnivores , car iJs se nourrissenl egalement de diair ^
d'oeufs , de fruifs , de racines , etc.
5.° Les mammifer3S a'ongcf^s , ci pieds courts , a
ra^tatarses inclines, ont recu de Haij le nom de ver-
niLnea que nous leur confervons. lis manquent de
coecuni jcomme les prdcedeus, viveut de chair , sur-
tout de sang et d'ceufs ; leur foraie leur dcane la
facility de se glisser dans les plus petitcs ouverlure.".
Nous en connoissons trois genres seulement : les
belettes ou musteles ( musteia j L. ) , les moufffcttes
( vlverra mephitis , I.. ) ; et les loutres ( inusteta
Ultra J Lutris at lutreola _, L. }.
Enllu les nianiiniferes a jambc^s et tcir?es releves,
et n'appu^-ant que le bout des doigts , les animau-^
carnassiei?, ou betes f(Sroc(spropremenl d i les, form eiit
la d:Tni6ra famille d. s onguicules munis de trois soi tes
de dents.
Celte famille comprend les genres assez connus d$s
cklens J des chats J et celui de la. rii^elle. Nous le
placons ici , parce qu'en effet il ne marche que du
bout des doigts, et que , quoique ass?z alonge , il a a
rinterieur un Cdcum , dont les vtrniinea manquent.
Ses on^les semi-retractiles, sa langue verruqueuse ,
lui douuent des rappor.s avcq les cliats , conime ga
jj;5 Mommalogit.
poche odoriKrante, sa criniere, la disposition cle ses
tacUts l«f endonnen. avec les hyones. Ce!les-c, for-
mcro»t aussi uii geme a part dans celte fam.lle.
II ne nous reste qn'n prc^'sant.r le tableau abregi do
,as ordres , de leurs caraci; res , ct la lisle des genres
que reus fc.isons enl.vr dans cUacun.Nous prevenons
que , n-ayani jas eu le lenn« ^^ ■■<'^°"- P'"''"'" '*' "'
genres , ils ne sont adoptes que proviso.rement.
trais sorus de amis ; pouces scpares auo,
quatre pleds.
Singes.
In fin'?,
Mak's.
Lory.
Ciicang.
K.1 qyak.
Tarsier.
Ordre IL<^ CHIROPTERES. Dolgts ongidadds;
troLs sones de deals ; mciLns aiong^es, paLnw^;
membrane s'tleadantdu cow eatre ies poeds ^
a l/aiTus.
Ga'copitheque.
Chauve-souris.
]Sroctilion.
Njyclere {N^ct^rls).
Rou:fsette. ( Fteropus ).
Methodc fiinmmalogique.. 187
Orpre lU.e PLANTIGRADES. Dolgts ongui^
cules ; troLS sortes de deals ; point de pouces
s dp ares J plants entiere appuijee.
Ours ( Vrsus ).
Raton ( Lotor ).
Gloutoii ( Gulo ).
Blaireau ( Taxus ).
Mangouste ( Mungos ).
Coati ( NasLca ).
Kincajoa ( Potos ).
Taupe ( Tat pa \
Musaraignc ( Sorex ).
Htrrlssori ( Erlnaceus. ).
Ordre IV.« PEDIMANES. Dolgts onguLculcs ;
tro is sortes de dents ; pouces separes aux pueds
de denicre seulenicnt.
Sarigue ( Didelphis ).
Phalanger ( Vliaiangista ).
Orpre V.-^ VERMirOP.MES. Boigts ongiUculcs;
tro is sortes de dents • point de pouces separes ;
corps alongcs;pieds rJappujant queles doigls^
ni^tdlarses inclines ; menibres courts.
M.ox\^ei\Q(Mcpyitis).
Beletle ( Mustela ).
Lonlra ( Lutra ).
Ordre VT.<^ BETES EEROCES, Boigts on^ui-
cules ; tro is sortes de dents ; point de pouces
separes; pieds nappuyant que les doigts ;
menibres redresses.
Civelte ( Cii'-eita y
iS8 Mam^yirilogk.
Hyt'^ne ( Hj/O'na).
Ciiiea ( Cauls )-
Chat (; Fells).
Ordre VIL' RONGEURS. Dolg^s ongulcuUs ;
dents LncLsii^es ct nioLaires scuLenient _, sans
caiunes.
Porc-^^pi- ( Ihjstrix) ).
Agouti ( Cauia ).
Cri-ior ( Castor).
Souvi^ ( Mus ).
Marmot te {. Arctomjjs ).
'EznYem\ {ScUcrus).
Loir ( GiiS ),
Gtrboisy ( Dlpus ).
Kauguroa ( Kangurus ).
Lievre ( Lepus ).
Daman ( Hjjrax ).
Ordre VIIT.« EDENTES. Volgts onguiculc's ;
point (Vlncisives ^ ni de canines.
y
ronrrailier ( Myrmecopliaga ).
Pangolin ( Manis ).
Tatou ( Dasijpus ).
Ordre IX.-^ TARDIGRADES. Boigts ongul-
cuies ; point d'incisi^'es ; des canines et dcs
moLaires.
Paresseux ( Bradj^pus )»
liWihode mnmmn'nf^ique, jg
Ordke X.e PACHYDERMES. Feeds d. sabots ;
plus de deux dolgts aux pieds.
Elephant {Etephantus).
R' inocL^ros ( Rhinoceros ).
I-li[>nopotame ( Hippopotamus }.
Tap;r ( Taper).
Cochun ( Sus ).
ORDREXLe RUMINANS. Pleds d sabots ; deu^
doi^ts a chacun.
Cbameau ( Camcius \
Chevrotin ( Moschus }.
Cerf ( Cervus ).
Giraffe ( CametopardaUs }.
Gazelle ( AnUiope ^.
Ch^vre ( Capra ).
Brebis ( Ouis }.
JBoGuf ( Bos ).
ORDREXII.e S0LIPi-;DE3. Pleds d sabots ; un
seal doL£t.
Cheval ( Equus ).
ORDREXlII.e A]\IPIiIBIES. Feeds en nageoires;
ceux de denUre distuicts.
Yesixi niarin ( Phoca ).
Vache marine ( llosmarus ).
Lamanlin ( Manatas ),
Bugong ( Trichecus }.
3 go Mammafogie.-
Ordrt; XTV.^ C^TACEES. Pleds en nageoires }
puuit iTexircniUes posle/ieures disUnctes.
B;;lei!ie ( Balana ),
Cac'. alot ( P/iLjscter),
Narwhal ( Mo nod on ).
Dauphin ( DeLpliuius ).
E N T O M O L O G I E.
Notice des wanuscrits de Lyonet.
Jacoves Br£z ^ de la sociHe d'Histoire natuTelle de
Paris ^ etc. au citoy?n A. L. Millin.
Utrecht ,17 thai 1795 , v. st.
JJans ma derniere lettre , citoyen ami, je vous
en annonrois une suivante , qui devoit confenir I'a-
iialjse raisonnie des manuscrits postliumes du c6-
le!:tre Lyoinet. Je me hate de remplir ma promesse ,
et Je le fais avec d'aut nt plus de plaisir , que Iss
dulails que j'ai a vous comm.uniqner sont de nature a
interesser vivement tous les naturaHstes, et les insec-
tophiles (i) en paiticulier. Voire Magasln Encj/^
(1) Jean Brez emploie '"ce mot , parcel c|ue c'c.st cehii sous
Icquel il a deiigne un ouvrage tres-ioteressant it tr^s-biea
fait, de sa composition, intitule : la flore des insectophiles. Nous
oLserverons cepeudant que ce nom , compose clu grec et da
latin doit I'etre , d'apr^s les principcs dc la s.ine ciitiqne ,
banni de I'Histoire naturclle , et on doit dire , avec tous les
savans de TEuvope , cntomo.logie ^ • entomopjule , entomo-
lo^iste. A. L. M,
Notice des mdyiu^erits dt Lyonnet. icyt
dopidique est une excellenle vole pour leur en faire
\mv{ ; et je saisis cette occiision pour vous teraoigiier
toule la satisiaction que j'ai eproiivee , en apprenant
I'eAi.lence de ce journal, qui iraiiquoit dej uis si
' long-temps ^u\ scien-es , au\ leltres et aux arts.
Vous , et vos coliegnes , avez rendu un vrai service
aux sarans et aux g^nsde lettres de tous les pays,
en r'oiivrant ponr ei;?: ccs mojens de conamunication
qui leur sont si necessaires.
Je rcvi«iis an principal objet de cett:^ leftre.
Un ami que j'avois a La Ha-e m'apprit , il y a
d^'ja phiFieurs aunees_, que Lyomst avoit l(^gu^ , en
3nourdnt^,,a un de ses neveux , des manuscrifs consi-
derables sur les insectes. Comme je me suis toujourS
attache de preference a cette par'Je de I'iiistoire
naturelle, je n'eus rien de plus preise que de m'a-
dresser directement au proprietaire , pour sav^oir ce
qni en etoit , et j'eus tout lieu de m'en applaudir.
II safisfit a mes deraandes , avec Li plus grande hon-
lietete , et m'invita d'aller visiter moi-mt-me ces
papiers si inleressans. Je fis done le vovage de
I/HHaye_, uniquement pour n:e procurer cette sa-
ti?ia:;tion. La r.^alit6 surpassa de b.aucoup I'attente
que je m'en etois for:Ti<§e.
Vous savez, citoyen, qu'il y a dejci plus de 3o ans
que le public est en posses ion du Traite an atoniiqu c
de la Chenille quiron^e Le bols de sauLe j par
P. Lyonet.
Get ouvrage, au«si 6toni-!ant par son origiu-dit^V,
q\Tc may.nifique dans sjn execution , parut a La Have
en 1764, ei ne tarda pas de s'altirer rc-stime de tous
ip2 Entomologies
les savans. Les burn.ux les plus judlcleuxretentkent
de sjs eloges ; et ies piysic'.ens, dussi bien que les
naUiraUstes , les moddar.i , les a atonilsles et les phi-
losopLes, ]d dois mome ajonter, les graveurs et les
pcintres, s'empresserent a .Vnvi de Tadmirer et d©
le celebrer , [..arce que lous y trouvererit matiere aux
^k '*-?s les mieux fohdcs.
LroNET, qui , aux talens d'un profond observateur
joignoit ceux d'un peintre aero apli et d'uii graveur
qui n'eut peut-etre jamais son pareil, s\'toit d^ja fait
connoitre sous ces cUverses rapports , par son travail
sur la T/i^ologie des Insectes de Lesser , et par
les planclies des Meinoires sur Les Potjjpes de
Trembley. Mais c'eioit sur-lout dans $jn TraitS
anatonugue de La ChenUte , qu'il devoit fair©
brilkr ses talens exiraordinaires. Cct ouvrage est ua
prodige da palience, d'jb^ervation, d'auaiornie , da
peinture et de gravure. L'Histoire naturelle ne pos-
sede rien d'aussi parfait h tous egards ; et les planclies,
en parlieu'id, sont d'une I eaute , d'une v.'^rite , et
d^un fiid qu'on cherc .eroit Vcunemaut ailleurs , et
qui leurassurent I'adiviras on de la posterile. Aussi
Pillustre CliarLes Bonnet^ de Geneve, juge corn-
peteni en ces matlereSi s*i en fut jamais, dit-il, dans
une de scs leltres a I'a-be SpaLLanzani, « qu'il a
» achete ce livre comme une des plus belles denions-
•» trations , eu fait ^. de re>.istenca d'une PREMIERE
» CAUSE «. — « Le travail qui brills dans ce
» Traite ( lui ecrivo";t-il encore), surpasse lout CQ
3) que je pourrois vous en dire , et que vous pournez
w.iinaeiner »*
Notice des manuscrits de Lyonet. I93
On a vu , par la preface du Trait6 anatomique
cfeLa ClienULe du sauLe , que le projet de I'auteur
^loit de donner un jour au public I'anatomie de la
ckrijsalldc ■:-X deVd phai^nc ^ aver autant de details
que celle de la ckenUie. Nous aurions ainsi 3 vol.
in-4." sur U'.ie seuieespece d'insectes ; encore ces trois
volumes ne compreudroient - ils qu'une partie des
mermlles que cet insecte pourroit cflfrir , I'anatomie
^tant le seul oi>jet que notre naturaliste a eu en vue.
Quelque hardi que puisse paroitre ce plan , LYONEr
s'eu c'toit occijpe avec ardeur, et il y auroit mis la
derniere main, si un facheux (5blouisseineiit qui lui
survint aux deux jeux , a Page de soixante ans , ne
I'eut empeche de continucr scs rtcherclies micros-
copiques. Neanmoins, comm.e il avoit deja rassem-
ble un grand nombre de materiaux, et pousse fort
loin son travail sur la chrijsailde et la pkaLtne ^ ainsi
que sur diverses autres especes d'insectes^ il s'occupa
a l( s met're en ordre vers la flu de ses Jours ; et on les
a reimis sous le litre d''CEui/res postkunies sur Les
Insect es , par P. Lyonet , en deux parlies.
La premiere partie contient des Kssals anatomic
qucssur Li chrijsaLid& etiapliaUrie deia ckeniU&
ijui range Le hois de sauLe , pour servlr de suite
axL Traite anato .ique de Ui meme cheniUe. Sous ce
titra trop modeste , le c:^debre Lyonet a expose au
grand jcnir, et demontre , par les fa'its, tousces chan-
geiiiens si considerables et si singuliersqui surviennent
dans I'organisaiiou interne et extv^rne du meme ia-
s^'cle, a diverses ^poques de sa vie. On s'etoit assur6,
avantlui, de ces changeinens remarquables. Swam-,
Tcrnie 11, N
194 Entomologie.
MERDAM , MaIPIGHI , BeaUMUR , BoNNET el DE
Geer avoieiit dit la-dessiis des choscs aiissi neuves
qu'interessantes. Mais ils ignoroient , et nous ignorons
encore profondement, en qiioi ces changeiiiens con-
sistent. Tons les efforts que d'aulres naturalisles ont
fails pour soulever cetle parlio du voile de la nature,
ont dtc a-peu-pres in utiles. II etoit reserve a l'itn»
mortel Lyonet de nous reveler ces profonds mjs-
teres ; et il I'a fait avec une sagacite qui le met
au-dessus de tous les eloges. Et s'il est vrni , comme
on n'en sauroit doutcr , que la veritable science de la
nature ne consiste que dans la connoissance desJaUs,
I'Histoire naturelle , qui doit dej^ tant a LyoxNET , lui
sera encore redevable d'un nouveau pas , et d'uu des
pas les plus importans qu'elle ait jamais fails. Nous
avions jusqu'ici raisonne sur les tratisforniatioris des
insectes 5 disons mieux ; nous avions tdche de les
deviner, A I'aide de Lyonet , jious les verrons ,
pour ainsi dire , s'operer sous nos jeux ; et la lumiere
brillera ou regnoient auparavant pour nous les plus
epaisses tenebres.
La seconde partie de ces manuscrits , que nous
designerons sous le titre d'CEui^res melees sur les
insectes ^ n'est pas moins interessante ; peut-e!re
jTieme le sera-t-elle da vantage pour la plupart des
lecteurSj a cause de la variete qui y regne. Ces
csLwres melees contiennent, enir'autres , des essals
anatomic] ues sur le pou du niouton ^ qui feront
connoitre aux naturalisfes une structure toul-a-fait
differente de cede des insectes qu'on a anatomist's
jusqu'ici, et offriront en genc^ral des particularit^s
jr^s-curieuse3.
Notice dei manuscrits de Lyonet. jg^
VIennent ensuite les poux des oiseaux , dont
Pauteur donne la description et les figures , d'une
maiiiere qui ne laisse rien a desirer. Apres eux pa-
roissent les mlttes _, la tuque , et quelques essais fort
prdcieux sur la nioucke de Saint-JMarc,
Les naluralistes qui se sont inslruifs a I'eccrle de
Lyonet , de la maniere si singuliere dont s'accouplent
certaines arafgnees , lirontici, avec le plus vif inte-
ret , les nouvelles observations qu'il a faites sur ce
sujet, depuis la publication de sa d^couverte,en 1742.
C'est a celte occasion que Reaumur lui ecrivoit, « qu'il
» auroit mieux aime avoir fait son observation sur
» I'accoupleipent des araignees , que d'avoir ecrJt un
» gros volume ». — Qu'anroit-il done dit , s'il avoit
eu connoissan-e des recherciies subsequentes quo
nous annoncons?
Cetle seconde partie est terminee par des essais et
des observations iUY di verses especes de coleopteres ,
de niouc}ies-a.-scie J de tipuLes , de LibeLLaies , do
ckenUles J de papiiiotis j de phalenes ^ de phn/^
ganes , ect. ect. II contient aussi des experiences sur
la muliiplication par bouture des vers de lerre , avec
la description et la figure du civevat inarin.
Par ce l(fger apercu , il est facile de ju^ier que
ces deux voluiv.es d'ceufres post/iumes de Lyonet
reunissenttout ce que Ton pent desirer dansl'ouvrage
d'Histoirg natureile le plus accompli j et qu'ils sont
fails pour etre recus , avec empressement, par tous
li?s savans et les vrais amis de la nature.
QQ%<xuvrcs sontaccompagnecs de cinquante-quatre
planches , dont quatre ont et6 grav6es parXyo/ie^
I( a •
igS Enlomologie.
meme. Ses occupations re lui avant pas permis de
grivrr les auircs , ellcs I'ont ete par d'habiles ar-
tistes , sous sa direction. Et quoiiju'elles soient ainsf
iiif-^rieiires a celles de Lyonet, elles sont pourtant
encore au-dessi:s de toutesles plaitclies d'llistoire na-
turelle qui sont parvenues a naa connoissauce. Quant
au tres-pedt nombre de planches que I'autcur n'a pu
inspecter lui-raeme, elles Tont ^i^ par son neveu Croi-
S¥.-^ , qui pouvoit seul remplacer I'oeil vig lant du
B.EAUMUR HoLLANDAis , parcG qu'ayaiit v^cu fort
long-tems avec lui , il s'est bien mis au fait de sa
njaniere de tra\'ailler.
Tout , dans ces manusrrits , se trouve done dans le
meilleur ordre; et Hs pourroient etre publies sur-le-
chariip , si lescirconstances de I'Europepromettoient
un d^bil propre A compenser les frais considerables
qu'ii a fillu faire pour la gravure , et que necessitc-
roit encore I'impression.
Mais si nos voeux se r^alisent , si nous av;ons le
houheur de voir une pai:t gdnerale succeder b en-
tot a la plus terrible des guerres , le propri^taire
des manuscrits dont je viens de rendre compte, se-
roit a meme d'en faire jouir dans peu le public j
en les proposant par scuscription.
II seroit digne d'un gouvernement qui s'interesse aux
progres des sciences , de faire I'ac juisiti^i de ces
pr^cieux manuscrits , et de les meitre au jour, sans
d^iai. J'en ai propose Tachat au ConiUe cV Instruc-
tion pubUque , de la part du proprielaire ; raais
ma lettre est reste^e jusctu'ici sans reponse.
Les deux parties des cc:^p^rc^/?05^/i"^^e5 deLYONET
Nolice desmamiserits de Lyonct. ig,
seront pr^ct^d^es de son ^'loge historfque. J^espere
que Je public saura quelque gr6 a celui qui, en
% audant quelques fleurs sur la tombe du natura-
liste dj 'a Haye , lui f ra cor.noitre , comme il le
merite, un des hommc^ ics plus extraordinaiies o^ui
aient jamais e\isr^.
Oulre ces osuvres milSes qui se sont trouvc'es
dans u:. ordre pjrfait, a la mort de Lycxet, il a
encore laisse un tres - grand nom! re d'observations
Isoldes , sur des feuillrs volantes. Je m'occuperai a
les redi^ier, pour en faire jouir le public, a la suite
des OEuvres melees,
^ Ce naturaliste infatiga^.Ie avoir entrepris dc faIre
V/iistolre des inscctes des siwirons de La Raye ;
et il avoit d^ja rasseir.ijit- la-dessus une , tr^s-grande
quanlite de mateiiaux, lorsque la mort vint I'enJever
aux sciences et sur-font a celle de la nature. II a
laiss6 n^anmo.ns un monument de ce travail , qui
prouve tout ce qu'on pouvoit en espc-rer, et qui flit
regretter bien vive:Tient qu'il n'ait pu elre acheve.
Ce sont deux volumes m-/o/^ , reniplis de dessins
des insectQs des environs de la Haye , et dont laplu-
parl se rapportent aux obssrvafions isol^es dont je
parlois il nV a qu'im moni^nt. Rlen nc peut (Valer
Padmirafion dont je fus sa.si en par.ourant pour
la premiere fois ce« deux mag.iifi ,ues porto-feuiiies.
Ce ne sont pas , a propremei.t parler , des dessuis qui
les rempbssent, ce sont de verlrables mlriLatures ,
et des miniatures telles qu»on n»a pu encore Iron-
ver jusqu'ici aucun artiste en etat de les rendre par
\^ gravure. J»espere cependant que , sous les aus-
N 3
igS Entomolos.ie.
pices d« la paix , nous pourrons en enricliir le pu-
blic , si ce n'est dans une perfeclion egale a celle
desdesslns , du moinsdans un degr^ quifera ^poque
dans les annales de Pinsectologie, avec les diwres
postliumes que nous annonrons.
A ces ricbesses , dont I'annonce ne peut etre que
t;es-intc'ressaiite pour tons les vrais amis de la na-
ture, nous nous tiouvons dans le cas d'en joindre
d'aiifres. II existe panni les papiers de Lyonet , une
correspondancc tres-pretieuse avec Reaumur ^
BoN^ET 5 Lecat 5 Trembley , ect. Nous la com-
pulserons , et nous en publlercns ce qui nous pa-
roilra meriier I'attention des savans.
Je finirai cette lettre en faisant connoitre au pu-
blic un monument d*un genre aussi singulier que
nouveau. Si vous avez lu la preface du Traitc ana-
tomique de la chenlUe qui ronge le bols dc saule ,
vous y aurez vu que plusieurs personnes s't-toient
permis d'elever des doutes sur la realitedes decouvertes
si etonnantes de I'auleur. Onalloit m^mejusqu'a I'ac-
cuser de n'avoir fait qu'un roman d'Histoire natu-
relle. La probite si reconnue de Lyonet auroit
du le garantir de ces soupcons ridicules j raais
il n'est rien malheureysement qui puissc mettre a
Tabri des censures des sots. Pour leur fcrmer la bou-
che, Lyonet rep^ta ses observations les plus impor-
tantes en presence de plusieurs juges que le public
ne recusera assurrment pas ; Albinus , Mussen-
UROECK, Allamand , Trembley virent , au micros-
cope deleur collegue , les merveilie^qu'il a fait passer
dans les plancbes de sou Traite anatomlque , et
la calomaie meme la plus astucieuse dut se taii^.
Notice def' rn'inuscrits de Lyonet. iqq
Mais ce nVtolt point encore assez pour Lyonet.
D vouloit cju'il rcstat aprcs lui iin monument vivant*
»i je puis m'exprimer aiusi , qui aUestat a jamais I'au-
thenticit^ de ses belles decouvcrtes ; et sa patic nee
ne tarda pas a I'eAecuter. Cast le Sijstcnie neuro-
logique coniplet de la CheniUe da saute ^ qu'il
a eu Part de degager des autres parties , avec une
dext^rite inconcevable , et de placer entre deux
verres. Ce monument est inappreciable a mes jeux .
il mdriteroit d'occuper une place distinguee dans la
Museum national des Fianrais. J'avois pe^ne a en
croire mes yeux , lorsqu'on me le pr^senta. Jen'a-
vois pas cru que la patience humaine put ailer
aussi loin.
C'est tout ce que je puis vous dire , pour le moment
Vous insererez cette iettre dans votre Magasin ,
si vous Pen jugez digne.
Salut et fraternite.
J. B R E Z , ^e /tz Societe d' His to I re
nature lie de Paris, etc.
PHYSIOLOGIE VEGETALE.
TiiEORiE de l- evolution des houtons ajeullles
et dijleurs J par Jean Sesebier ^ biUiothi*
caire de La licpubUque de Genei^e,
iitJANDonavu les feuilleset les fleursdans leurbou-
toiis 3 quaud on s'est assure de la molesse de leurs
K4
«oo Physiologie vegetale*
fibres, on s'c^tonne comment ces fleurs et ces feuilles,
qui ne sont presque d'abord qu'une geles organisee ,
peiivent vaincre la resistance que les enveloppes de
bouton paroissent mettre a leur sortie ; coinment
elles s'echappent malgr6 la tenacite de la colle qui
agglutine les ecailles dequelquesboutons 5 comment
elles surmontent Paction reciproquedcs (Ecailles pour
fermer le bouton , dont la cloiure est si rigoureuse
qu'elle a interdit pendant cinq mois d'hiver I'accss
de I'eau dans des bonlons du maronnier d'Inde ,
que j'y avois tenu plongts , apres avoir couvert leur
section avec la cire d'Espagne.
On a cru qu'une Iniraeur qui se distilloit alors , etoit
le dissolvant de cette colle; mais on ns connoit
gueres comment cetlehumeur quia nourri le bouton
pendant I'annee pr^cedente , sans occasionner aucune
dissolution, prend alors cette propriete dans le mo-
ment oil eile paroit plus delayee : d'ailleurs eel obstacle
Taincu n'ancanliroit pas les autres.
On observe que les poils qui recouvrent les (^.cailles
et le duvet qui enveloppent les pelites feniiles et
les petitesfleurs, sont compressibleset favorisent ainsi
la dilatation des ecailles ^ sans nuire aux parties
tendres des fleurs et des feuilles qui cherchent le
jour; mais ces parties sont si moUes qu'elW semblent
incarables de toute espece de compression ; d'ailleurs
les feuilles et les petales quisortent de leurs boutons
ne paroissent pas coniprim^s.
Quand on examine avec soin les Ecailles des bou-
tons du poirier, on remarque bientot que cliacune
d'elles est logee sur une espece de saillie forme©
Theorie de revolution des boutons afeuilles. 201
dins le bourrelst qui porte le bouton, et cVst de
cette j artie de Tccorce que les ecailles semblent
s'ccbapper. Au commfencement de I'iiiver ,ces saillies
placees sur 1- buurrelet sont fort rapprocbees j mais
lenr eloigiiemeiit s'accroit beaucoup au printemps , par
raccioissem.Mit que le bourrclet prend en longueur,
ce qui occasionne un cbangeme'-.t de situation entre
ces c'cailles 5 elles doivent sur-tout s'ecarter alors de
la feuille,par I'accroissement du bourrelet en gros-
seur.
Ce double ac roissement du bourrel:^t me paroit
la cause de I'ouveiture et de la diute des ^^cailles,
comme il avoit e!e celle qui les avoit vepouss^es
lorsque le boulon a commence de crriire. Le bourrelet
qui porte les ecailles ne pent cbanger dans ses dimen-
sions , sans produire des cbangemers dans la place
des Ecailles qui forment I'etui de la feuille ou de la
fleur : ces ecailles tirailleesa leur base par i-'accroisse-
ment du bounelel engro'^seur, se d(^cbirent dans la
parlie r<isistante , lorsque le bourrclet du boutoa
prend un accroissement grand et subit ; les ecailles
qui cessent de croitre sont mallrait es par ce tiraiile-
ment , elles se refusent a c Ite extensio 1 , et elles S3
d<;^cbirent a leur base ; mais comme celte extension ,
de la base ct des ecailles est graducl'e , de raeme
que I'accroissenient du diainotre du ):onrrelet , cctts
base s'etend tant qu'elle v^^gete, et elle i:e se dtcliire
qu'en cessant de vegeter. Le dechirement commence
toujours par undesbords , et la partis de biree noircit
en se dessetbant ; mais enfin Tecalile entlere lombe
bienlot , par la me-ne raison qui a occas.'oiine ^on
d^cliireiiieut.
802 Thys\olo!i:;ie vege'tn.le.
Les ecailles les plus ext^rieures tiennent plus long-
temps au bourrelet, parce qu'elles sont plus robustes
et plus vegetantes. Les Ecailles des boutons afeuilles
tombent plus tard que !es (Ecailles des boutons a
fleurs , parcB qu'elles sont raoins brusquees par
i'accroissement de leur bourrelet qui se developpe
plus lentement.
Avec un peu d'atlention on voit d'abord le mecha-
nisme de cette operation ; les ecailles qui commencent
a se dechirer par leur base n'ofFrent plus la meme
resislance 5 le bourrelet en grossissant ecarte ces
Readies les unes des autres , et quoique cet ecarte-
ment soit tres-petit a la base , il en occasionne un
tres-remarquable a leur sominet 3 ce qui ouvre la
porte au Louton gonfle par les sues abondans qu'il
recoit : a mesure que le bouton grossit , le bourrelet
grcssit avec Ini , et I'ecartement des ecailles qui
s'augmente , devient proportionnel a I'augmentation
des fleurs et des feuilles , etil favorise ainsi toujours
davantage leur evolution qui est toujours plus de-
terra inee par les sues qui penetrant les boutons avec
plus d'abondance ; enfin les ecailles en se dechirant
par leur base, opposent toujours une resistance moindre
aux efforts de I'accroissement du bourrelet , pour les
t carter, et a ceux de la fleur ou de la feuille^ pour
les repousser : en sorte que^ par cemoyen , la resis-
tance devient toujours moindre que I'efTort qui doit
la vain ere.
C'est ainsi sansdoute que Taction du bourrelet qui
s'accroit , favorise le devt loppement des feuilles et
des fleurs_ avant I'dpanouissement : les ecailles ne se
thcorh de revolution des houtons a feuill^s 2o3
Bc'xhirent pas alors, parce qu'elles prennent cl^ac-
CEoissemont , et parce qu'eiles s'etendenl en croissl^nt ;
mais on voit bien qu'elles se reclressent a leur 5bm-
niet,etce rrdresssment ne peutetreproduit que par
raiigmentahon da diametre du bourrelet sur lequet
ellessonl placees ; mais elles ne tombent point , pares
qu'elles sont susceptibles d'ex tension et de vegetation ,
et parce que les accroissemens du bourrelet sont
plus pelits et plus nuances.
B O T A N I Q U E.
Do.M. CfRTLLT plantnruni regno napoUtam. —
Pl ANTES nires du Royaunie de NapLes , par
Dominique Cyrille , profosseur de m^dec ne et
de philosopbie. A Naples. Fascicule premier et
second , 1793.
li E professeur Cjrille , apres avoir rellgieussment
parcouru les contrt'es Napoiitaines , pour _y obsrver
scrupuleusemf nt et avec regularity toutes les tribus
qui apparticnnent a I'empire dc- Flore , a non seu-
leinent decouvcrt bcaucoup d'especrs rares , nuns
bien encore i)lusiciirs d'incdites. Je vafs en rappeler
aux amateurs de Botaniquc quc-lques-unes qni ne
sont point decriles dans tous nos Pbjlographes nio-
dernes , el qui se trouvent dans le premier fascicule
de son ouvrage. Je ne servirai dcs phrases et des
dtnominaliuns latines du Professeur Cyrille.
10. Scabiosa crenata. Ses cc rollules sont den-
udes 5 les feuilles radicales spatulees et a Irois dents ;
204 Boianlque.
les caulinalres pinnies ; les pinnules plusieurs fois
ti'iparlites. C'est la troisi^me planche.
20. Lainium hLfiduni. Ses fcuilles sont en coRur,
acuminees ; la coroUe en cascue bifide ; les lanieres
divarkjuees. C'est la septieme planche.
30. Hijpochccds mlnuna.Cene plante se distingue
par son pedunrule epais. EUe est la dixi^ re figuree.
4''. Plwrmuim buLbiferum. EUe a la hampe simple,
engrappe; les fleurs penc: ees.C'est la douzienie figure.
5«. Convolvulus stolomferus. Ce liseron est
Pobjet de la cinquieme planche. II n'a ^t6 decrit
jii.sq .'a present , que par le professeur Cyrilb. W.
EGONOIMIE RURAL E.
Confitures d'Airelle,
Le citojen Bosc a remis a la scciete philomalhique
un pain de confitures , compose avec les hsies du vac-
cinium myrtlllus ( I'airelle. ) D'apres le proced6
employe par les sauvages du Canada , pour faire leur
gateaux de baiesde uaccinuun conjmbosum, Ce pro-
cede consiste a faire cuire les baies dav.s un vase de
fer , t a auomenter , par la chaleur du four , la dessi-
cation, jusqu'a ronsistance solide. Cemojen de sub-
slstance habituelle , employe par les peuples sau-
vages du noi d do I'Amerique et de I'Asie , n'est point
a n^gliger dans le moment actuel. Ces confitures sont
tre?-aoreables au gout , et peuvent etre tres-abon-
damment fabriquees d ns quelques departemens.
On salt que les pL'uples chasseurs et ichtyojphages
Economic rurale. 2o5
du norcl de I'Europe et de I'Asie , les Lapons , les
Sa-novedes , les Kamstchadales, les Vosliakes, les
Kouriles, ramassi-rit en tres-grande abondancs les baies
des rubus articus et rubus kerbciceus pour knr
servir de nouiriture v^gctale pendant Thiver j raais
qu'ilsne les font point desseeber, qu'Hs se contenlent
de les mettre dans des vases d'ecorce et de les en-
fouir en terre. Le citoyen Bosc observe que ce prc-
ced(^ pourroit aus i etre employe pour conserver les
bales du vacanum mijrt'dlus ; car il a rennarqud
que les vignerons _, qui font usage de ces baies pour
colorerleurs vins , les gardent , sansinconven'ent , d -
puis le mois de juin jusqu'a la vendange , avec la
seule pr^. aution de les placer a la cave , dans ^ts
vases bien fernu's.
G E 0 G 11 A P 11 I E.
Letire dej. D. BARBit , anx Redacteurs du Magasin
Encyclcpediquc , sur la rERRE de Kergvelen.
La terre de Kerguelen> , autrement nppeb'e tie
de la Desolation J est une grand? i!e de pres de
200 lieues de tour , sitnee an micli de la niev des
Indes, par les 49 a 50° de latitude austral?, et pir
les 66 a 6a^ de longitude a I'orJent du nu-.idien de
Paris , t'est-a-dire , par les 86 a SS"^ a I'orient du
premier meridian , passant par VUe-de-Fer. Elle fut
d^couverte , en 1772, par les Francais , sous la
conduile de MM. de Kerguelea ct de S. Allouarn,
£o6 Geogrcfphle.
et les Franrai'sj retournerent encore , en 1778, soua
la conciuite dii meine capitaine Kergue!en. Pendant
ces deux vojaj^es, 011 leieva la plus graude partie de
la cote meridlonale dc cette lie, toute la cote occi-
dentalc el iine paiiie de la cote septentrionale. Les
Anglais , a leur tour, visilereut cette ile , en 1776 ;
c'eloit dans le troisieme \ oj aye du capitaine Coak ,
et dans sa traversee dn Cup de Bonns-Esperance
a la terre de Die men. Les Anglais 'on^ereni sa cole
septentrionale, et ils la releveient touie eiitiere avec
assez de details, ainsi que la cote oricntale , en sorte
cju'il neresie plusacomioitre qu'une tres-pttile partie
de la cote meriiiionale de cette lie.
Les Anglais lui donnerent alors le noni (\^Ue de leu
Desotat.'Oti J a cause de son aspect aiTreux et sterile.
Eii eflet , sa partie orientale sur-tout n'est composee
que de rochers a moitie brises et fracasses, qui pa-
roisteut toujours prets a tomber, et qui a peine sont
recouverts d'une legere verdure. Toute Tile ne pro-
duit pas un arbre ou uh arbrisseau ; on n^; voit aucune
trace d'habitation, et les aniraaux que I'onytrouve
sont tons etrangers : car ce bont des phoques ou de.s
oiscaux de mer. Des fondrieres et des torrens parois-.
Sv^.nl remplJr I'interienr de File, et quoique sous une
.latitude a^sez peu ^levee, le soramet de ses mon-
lagnes est toujours couvert de n;ige , metne dans le
plein coeur de l'et6. Ajoutez a cela , que Pile est
presque toujours enlouree de brumes qui empecbent
de se voir a deux pas,et le nom que lui ont donne
les Anglais sera pleinement justifie. Cependant il j
a de bons liavres, comme I'ont ej)rouve les Franrais
Sur la ierre de Kerguelen, 107
et les Anglais 5 et co'nrae cette ile se trouva sur la
route dv3 ceuxquivont du Cap de Bonne-Espera)ice
a la mer du Sud ,■ par la terre de Ditinen , et
quVile peut leur servir de relache en cas de besoin ,
c'est cequi m'engage a examiner les delails geographi-
ques de cette ile.
Nous avons dJt qu*il ne restoil plus a connoltre
qu'uiie tres-petite pcirtie de la cote ineridionale de la
terre de Kergueten / mais sa partie eccidentale a
ju9qu'a cette Leure ete Lien mal figiiive sur les carles,
si ce n'est sur celles de ceux qui I'out decouverte.
Xorsque le capitaiue Cook aborda a la terre de Ker-
gueieii y en 1776, il avoit Ires-peu de reuselgnernens
sur les decouvertes des Francais dans cetle partie , ce
qui lui donna beaucoup de peine pour les comparer
avec les siennes. Cetle difficuite augmenla encore
entre les mains des redacteurs ds son vojage , parce
qu*ils adopterent une mauvaise carte manuscrite des
decouvertes des Francais , qu'on leur communiqua,
et qui n'cst relative qu'au premier vojage de M. de
Kerguelen. lis fireut meme graver cette carte sur
celle des decouvertes du capitaine Cook , et par-la
ils donnerent une tres-fausse idee de I'etendue et de la
figure de la terre de Kerguelen. A la veiite ils ne
p iroissoient pas trop se tier a cette carte manuscrite,
et en eff- 1 bientot les voyages de M. de Kerguelen et
et de M. de Pages , qui avoient ^le presens aux de-
couvertes , parurenl et vinrent detruire ^out ce qu'ils
avoient fait. II ne resta done plus aux redacteurs du
troisieme voyage du capitaine Cook , qu'a dementir
dans des notes ce qu'ils avoient fait sur la carte de ce
capitaine, et c'esl le parti qu'ils pvir.^iit.
2»8 Geographies
N^anmolns la carte du capitaine Cook existe clans
soft troisieme voyage avec les d6couverte 5 ^ des Fran-
^ais , tracv'es d'.4pres cette mauvaise carte manus-
crite ; et cette airte a ele una soiree d'erreurs pour
les grographes qui iie lisent point et qui ne font que
copier. Je ne cil: rai a ce sujet que la carte de la
terrede KergueLeti ^ qui se trouve dans la nouvelle
^MncLjclopcdie niethodique j et qui n'est qu*une
copiei^ervile de ci He duca-^itaine Cook. Si unnaviga-
teur se fioit a cetle carte, dans quel danger ne se jet-
teroit-il pas ? II se 1 ri.-^eroit sur la cote, tandis qu'il
croiroit encore en eire a plus de 12 lieues. II est done
bien essenliel de comparer tout ce que I'on pent
connoitre, lout ce quia pu etre fait jusqu'a i'epoque
oil I'on compose une carte. C'etoit la metbode des
cel^bres g. ograpl;es Delisle et Danville ; mais mal-
lieureuseirent on nesuit gut res leurs principesaujoi r-
d'hui ; on se contente de traiter superficiellement uie
matiere qui demande la plus serieuse attention , et le
danger ne paroit rien a cslui qui en est ^^loign^.
J'avois ueja examine toirt cp rn\ avoit ete fait sur la
terre deKerguten^ r<'s t7'''6, lorsque J3 ^orrigeai la
Mappenionde de Danville ; j'avois lu les v : nges
de Kerguelen e^ de Pag^s , ei c'est en cons^queuce
qu'on verra sur cette mappemonde , quoiqu'en bien
petit, que cette terre ne ressemble qu'en partie a la
figure que lui donne la carte qui se trouve d ins le
troisieme vqyape du capitaine Cook. Je remarquerai
encore que je n'ai trouv6 aucun article sur Xa terre
de Kerguelen ^ dans le dictionnaire de geograpliie
moderne de ia noupeUe EncL/clopedle niethodique,
quoique
Sur laterre de Kergnelen. «og
quolque cette terre fut connue a I'epoque ou c? diction-
naire a paru.
Le point de contact des d^convertes des Fran';als
et des Anglais est la ba'je de L^OtseaUj qua les An-
glais ont Hpp3i6 le Ravre de, NoeL , et qui est pres
<lu Cap FrancaLs^ la poiute la plus nord de la terre d&
Ker^uelen.Ceite bayeaeterelex^^e, ducote des Fran-
^ais , par M. deRojhegude, actaellement depul^,
•t les Anglais en ont aussi donn6 un plan qui dif-
fere peu de celui des Franrals. Ceux-ci ont cru qu'il
existoit ensuite un grand golfe- parce qu'ils onl vu dans
Test une terre (jui s'avancoit vers le nord-est jusqu'au
48""^ degre : cependant la carte du cnpitaine Cook
prouve qu'il n*existe point de golfe Hans cet endroit;
mais comme le capitaine Cook , eu lono^eant la cote
septentrionale j ne pouvoit voir jusqu'au 48'^'<^ degre,
j'ai marqu6 en cet endroi , sur la niappe-motule
de DanuUle , des petites iles pour representer les
terres vues par les Fran-, ais.
II est temps actuellement de parler de rafTecta-
tion avec laquclle M. de Pages semble vouloir s'at-
trihuer seul la decouverle de la terre qui porte le
iiom de Terre de Kergueten. Daus toute sa rela-
tion il ne nomnie pas un seul des officiers de I'ex-
pedition , quoiqti'il y eut 3 vaisseaux , le Roland^
gros vaisseau que commandoit M. de Kerguelen
lui-meme, el sur lequel M. de Pages n'avoi: que
Ic titre d'ensecgae ; la fr^-gate I'Olseau , commandee
par M. de Rosnevet , et sur laquelle etoit M. do
Rochegude, etla corvette /^ Daupkine^ command^e
par M. F^rrou. Le Roland et la Dauphlne n\.p-
Tome Hi g
sio Geof^rajhie.
proclierent pas de terre, il ii'j eut que la fregato
fOiseaii qui debarqiia du monde,etde ce nombr©
fut M. de Rocliegude. D'un autre cote, M. de Pages
nYloit que de la 2."'® expedition qui se faisoit dariis
les annees 1778 et 1774 , quoique sa carte repre-
sente les dt'couvertes faites dans I'expedition ante-
rieure , parce qu'elle est copiee sur celle de M. de
Ker^^,uelen ; et enlin , si M. de Pages a mis dans sa
carte generale : ties noLweiles australes uues par
M. de Pagh e/z 1774, il n'en est pas mo'ns vra;i
que ces iL's porleront toujo rs le nom de terre de
KergueLeti y et que , si quelqu'un avoit droit d'en dis-
puter la decouverte _, ce ne pourroit etre que M. de
Saint-A'louarn qui fit le premier voya;:,e avec M,
de KergLielen, en 1771 et 1772, et qui comman-
doit un des deux vaisseaux de cette premiere expe^
difion.
J. D. Barbi£_, charge de la part'u
geogra-phique a la Bibliot':.iqus
natiojiale.
HISTOIRE MODERiNE.
HisToiRE de la guerre de frevte an^. Par M. Freds
Schiller , traduite de Vallemani , ornee d'un
portrait de Gustave Adolphe , roi de Suede.
Berne, chez Emanuel Haller , 1704. , 2 \oI.
in-8.0; le premier de 3oo pag. , et le second
de 29J.
JLi A guerre de trente ans est une des plus int^re^
sanies epoques de I'Histoire germanique, et le traito
de WestpLalie c.ui la termiua, est devenu i'un des
principaux fondemens du droit public de I'Allema-'
gneet meme djePEurope entiere. CefutTesprit de re-
ligion qui ralluma. Tons les grands evenemens da
ce siecle ont eu plus ou moins de connexion avec
ia revolution qu'opera la docfr ne de Luther et de
Zvviugle , et il n'est en Europe aucun etat sur le^.
quel cette revolution n'ait eu une influence plus ou
moins immediate.
L'usage que la maison d'Espagne faisoit de ses
forces imraenses jCtoit presqu'entiereraent dirig6 con-*
tre les sectateurs des nouvelles opinions. Ce fut la
ri^^forme qui alluma ces <iuerres civiL's , qui , sous
quatre regnes orageux , ebranlerent le trone de
France, at'.ir^rent des armies etrangc-resj usque dans
le coeur de ce beau rojaume , et en firent , pendant
le cours d'un demi- siecle, le tlu-dtre des |,liis fu-
iieslcs d^cliirenens. Ce fut la r^forme qui rendit le
joug espagnol insupportable aux Beiges , et leur
O2.
«I8 Histoire modnne.
inspira le desir et le courage de le secouer. Toutes
les veiii^eances que Philippe II , roi d'Espagne , m^-
dita centre la reine Elisabeth d'Angleterre , la guerre
sangiante qu'elle soutint centre lui , ne durent ieur
origine qu'au profond ressentiment du monarque es-
pagnol , irrite de ce qu'elle avoit pris sous sa pro-
tection les protestans des Pajs-Bas , et s*etoit raise
a la tete d'une secte qu'il desiroit ardemmeiit de
d^truire. La scission de I'eglise en Alleraagne fut
suivie d'une loiigue scission politique , qui , si ell©
r6pandit pendant plus d'un siecle la confusion par-
mi les differens ^tats de I'Empire germanique, fut
n^anmoins utile en quelque sorte , en ce qu'elle eleva
une digue centre I'oppression dont ils etoient me-
naces.
Ce fut principalement la reforme qui donna aiix '
couronnes de Danemark et de Suede , le poids qu'elles
out eu depuis dans \i balance de I'Europe. Ce fut par
la reforme que des ^tats presque ignores , obtinrent
nne puissance qui etonna les politiques. Ainsi qu'on
vit tout-a-coup de nouveaux liens unir les princes
a leurs sujets, on vit aussi des nations entieres former
entr'elles de nouveaux noeuds. Les premiers effets
de ce bouleversemenf furent pernicieux et lerribles,
Une loncue paix , souvent interrompue par I'animo-
site des differens partis , fut suivie d'une guerre
ruineuse qui dura trente ans , et qui du cceur de la
Boheme s'etendit jusqu'aux embouchuTes de TEscaut ,
ravagea cent provinces , depuis les rives du P3
jusqu'aux bords de 1 • Baitique , foula les moissons
et mit en cendres des villes et des milliers de vil-
Guerre de trente ans. 2i3
lagcs. C. tte guerre, qui fit perir plus de trois cent
jniile soldats , etei<;nit pour un deini siecle les lu-
mitres que les arts et les sciences conimencoient a
faire luire sur FAUemagne, et la ramena vers les
siecles recules de son ancicnne barbaric ; niais I'Eu-
rope devint libre par cette guerre dosastreuse , dans
laquelle, pour la premiere foisjclle s*etoit envisagce
comme une r^publique formee de divers dtats in-
d^pendans , et I'beureux resultat des nouvelles liaisons
que cette guerre etablit entre des peuples jusqu'alors
etrangers les uns aux autres , sufifjroit seul ])our R-con-
cilier le cosmopolite avec les maux qu'elle a entraines.
li'active industrie en a successivement efTace toufes
les douloureuses traces , et les effets bienfaisans qu'ells
a produits sent dcmeupes.
Ce furent les opinions religieuses qui produisirent
ces grands effets; elles siules rendirent possible ce
que Ton a vu arriver; mais ils s'en faut de beau-
coup que cl's importanles entreprises se soient faites
uniqueraent pour Pamour de la religion.
Si Pinteret des souverains n'y eut concouru , la
voix des theologians et celle des peuples n'auroicnt
jamais rendu les princes et les guerriers aussi cons-
lans, aussi z'les pour la nouvelle doctrine.
Les abus de I'egliss romaine , I'absurditt* de
plusieurs de ses dogmes,etses pretentions oufrees ne
pouvoient que revolter les esprits et les disposer a
embrasser une religion ^pur^e 5 Fattrait de Pinde-
pendance et les richesses du clerge devoient faire
desirer aux souverains un cliangement dans la religion ;
inais des raisons dVHat pouvoieut seules les y rcsoudrc.
03
214 Hisloire moderne.
Jamais les princes protestans de TAllemagne ne se
geioient armes pour la liberto de leur culte , si
Cliarles-Quint ^ dans le coui s de ses prosperity's , n'eut
eiifreint les liberies et les droits dt-s (^tats Germa-
jiiques. Sans I'ambJion des Guises, jamais les Cal-
vinistes de la France n'eussent eu a leur tele un
Conde ou i.n Coli^ny ; enjfin , saus Timposition des
dixieme et vingtieme denier , jamnis le siege de Rome
ji'auroit perdu les Provinces-Unis des Pajs-Bas.
Les souverains com; attoient pour leur defense on
leur a^randissement , et ^e zele pourda religion leur
creoit des armees et ouvroit les tr^sors de leurs pen])les.
Par un singulier encbainement , la scission de
IVglise se trouva encore r<^unie a deux circonstances
cans lesquciles clle a-n-oit vraisemblalleraent eu
des suilps bien diJ"irr -utes . c'^ oient la pres onde-
rance subite de la maison d'Autriche , qui menaroit
la liberte de I'Euione , et le ze!e de cette maison
pour I'ancienne fbi. La reunion de la maison d'Au-
Iriciie a la ligue protestante lui eiit offert ensemble
d'ineslimables a^ antages , enfr'autres celni de | ou-
voir s'agrandir , a rexemple de taut d'autres sou-
verains , aux de^ens d'nn clergo sans defense.
Quelle consideralion put done I'empecber d'en pro-
iiter? II est difficile de croire que la foi a rinfaiiii-
bilite de lY^glise romaine ait eu une grdnde part h
la perseverance religieuse de la maison d'Aufr'clie.
Plusieurs motifs concoururent a lui faire prendre
le parti du caibolicisme, et a se montrerle plusfernie
appui du <ie:e de Ro re, L'Espagne et I'ltalie dont
§lle tiroit unt; grande partie de ses forces, avoient
Guerre de Irente njis. 2i5
pour Rome eel attachement aveugle qui distingua
ies Espaiinols des le temps des Goths. Le moiiidre
j<appro( hemeiit vers la doctrine a' liorr^'e de Luther
et de Calvin , auroit pour jamais fait perdre au roi
d'Espagne I'araoiir de sespeuples , et peut-etre Tau-
roient-ils precipite dii trone. S?s vastes ]orovances en
Italie lui imposoient la meme necessile, ct il eloit
contraint de Ies menager encore plus que sessujc^ts
d'Espagne , parce qu^elles pcrtoient avec impatience
un joug etranger qu'elles pouvoient secouer plus
facilement. D'ailleurs ces memes provinces lui don-
noient la France pour riva-.e et le pape pourvoisin,
ce qui devoit suffire pour erapecher la cour de
Madrid de se declarer en faveur d'une secte qui
rejelte I'aulorite du ponlife.
La branche allemande de la raaison d'Autriche
paroif avoir eu plus de liberie a cet egard • mais si
elle n'eprouvoit point plusieurs des enlraves qui
enchainoient r£spagne,d'autrescirconslances devoient
la retenir. La possession de la couronne imperiale
que ne pouvoit porter un prince hcr^tique, altachait
Ies successeurs de Ferdinand I. a la cour de Rome.
D'ailleurs Ics princes de la branche allemande n'e-
toient pas assez puis?ans pour se passer dessecours
de la branche espagnole , qui Ies leur auroit entiere-
ment ri'lir^s , s'ils eussent paru favoriser la nouvelle
religion. La dignile imperia'e Ies obligeoit eu outre
a maint nir Ies loix fondamentales de TEmpiie , que
Ics proteslans s'efTorroient de renrcrser.
Tels sonl Ies motifs pr^pondc'raus qui excitcn-cnt
la maisou d'Autricl.e a se placer a la lete de la
si6 His to ire mo derm.
]igtje catholique , et a soutenir ce parti aux d^penf
jneiiie de ses etals hereditaires ; et telles furent les
causes principales de cetle lougue gueire , souvent
assoupiie en apparence et toujours renaissante , dan^
laqiielle la plupart des puissances de TEurope furent
fiuccessivement impiiquees , et ou Ton vit les TiDj,
les Mansfeki , les C'iiristian de Brunswick , et apres
eux les Tureine, les Conde , les Luxembourg et les
,Villars , d/plojer tour-a-tour I'^nergie des plus
grauds caractejes et toutes les ressources du cou«ii
rage, du genie de la guerre, et de la plus profonde
politique.
ParUii les guerriers qui figurerent sur ce grand
theatre , il en est deux dont I'^clat obscurcit en quel-?
que sorte tous les autres , et dont I'auteur s'egt plu
particulier; ment a developper les rararteres ; I'un e&f
i' arrogant due de Fridlande Wallenstein , gi^neral
imperial, I'autre ie roi de Suede, le celebie Gus-
tave Adclphe.
« Des murmures universels eclaterent dans I'ar-
ni^e, dit M. Schiller, quand on y eut appris le
. rappel de Wallenstein , et la plupart des meilleurs
pfficiers se retirerent du service ; plusieurs suivirent
le general dans ses terres en Bobeme et en Mora-
vie, et il s'en attacha d'autres par des pensions
considerables , afin de pouvoir les eniplojer au
iJesoin.
» Son plan , e^ rentrant dans I'ctat d'un simple
particulier, n'eloit rien inoins que celui d'une vie
tranquille. Un faste royal qui renvironnaclans sa re-,
lrait3 J parut byayer la sentence de son abaissement,
Guerre de trenle ans. 217
Six portes conduisoient au palais qu'il liabitoit a
Prague, et cent maisons furent den dies pour faire
place a la cour de cet edifice. II fit batir de sem-
blables palais dans le resle de ses nombreuses terres.
Des gentilshommes issus des plus iilustres maiscns,
briguerent i'honneur de le servir , et I'on en vit
rendre a i'empereur leurs clefs de chambeljaii , pour
^n venir faire les ionciionsaupres de "Waiienj^ein. Il
eutretenoit soixante pages qu'U faisoit inst^i ire par
les plus excellens maitres , et son anticl.amhro etoit
gard^e par cinquante satellites. Sa table ordinaire
n'etoit jamais de moins de cent couverts, et son
maitre-d'botel etoit un homme de liaule naissance.
Wallenstein fai^it-d quelque vojage , il ^toit suivi
par scs bagages train^s sur cent vingl-quatre cha-
riots atteles de qualre chevaux , et sa cour Taccom-i
pagnoit dans soixante carosses, a vec ciuquante che-
vaux de main. La magnificence de ses livrees,.celle
de ses equipages et de ses appartemens repondoicnt
a ce luxe. Si\ barons et autant de chevaliers entou-
roient sans cesse sa personne , pour etre prets a
ex^cuter ses moindres signes , et douze patrouilles
faisoient la ronde autour de son palais , pour en
t^carter jusqu'au moindre bruit. Son esprit, sans cesfe
occupe , avoit besoin du silence. Aucun bruit dechar-
liots ne pouvoit se faire entendre pres de son palais ;
et souvent , a cet effet , les nies adjacentes ^toient
ferm^es de chaiues ; sa personne etoit nuiette comme
toutes ses approchtfs ; sombre , reuferme , impene-
trable , il eloit plus avare de paroles que de pr^^ens ,
et le pcu qu'ifc disoit eioit prouuuce d'un ton desa^
»iS His fo ire mod erne.
grc'nl-jle ef atterrant; jamais on ne le vojoit rire , et
son flegme resistoit h toiites les seductions des sens.
Sans cesse ocrupe de gninds desseins , il se refusoit
Ions les vains delassemens dans lesquels tant d'autres
passpnt une vie oisive. Afin de se confier aussi peu
que possible a la discretion d'autrui , il soignoit hii-
me;re une correspondence elendue dans toute I'Eu-
roj-je, et il tcri- oit tout de sa pro| re main. Sa taille
etoit haute et mince ; il avoit le teint jaunatie , les cbe-
veux rouges et courts, les yeux pelits, mais 6iince-
lan^. Unserieux effrayaiit sieL',eo"t sur s)n front, et
m prodigclil^, des recompenses [jouvoit senle retenir
au^res de lui la cohorte tremblanle de ses servi-
teurs.
» Ce fut dans celte fastnense obs uiile que Wal-
leiiistein attendit avec calme, mais non pas oisif,
son h^uYQ brillante et le jour de la vengeance , don t
les victoirts d;^ Gusiave Adolpbe lui fi.ent bienlot
pressentir les douceurs. Aucuji de ses plans vastes
et amLiiieux ne fut a' andoiini' ; I'mgralilude del'em-
pereur n'avoit fait que le delivrer d^ni frein incora-
ni.ode. L'eclat eblou ssant de ta vie priv6e trahis-
soit relan onjueilleux de ses vues; et prodigue en
motiartjue,Ml paroissoit regarder deja comme des
possessions assurees , les biens que son ambition lui
faisoii: espc'rer. «
« Gustave eloit incontestablement le premier ge-
neral ds son siecle ^ et le plus vaillant soldat d'une
armee qu'il avoit crcee. Familiarise avec la tacti-
que des anciens Grecs et des Romains , il en avoit
invent« une plus pariaite , laqueile a servi depuis
Gnem de trcnte an^. 219
de modele aux plus grands capitaines qui lui out
succede. Ce fut lui qui diminua les noinbreux es-
cadrons, pour facililer et reiidre plus rapides les
Evolutions de la cavalerie ; et dans, la meme vue,
il separa les batailions par de plus grnnds espaces.
II rangea sur deux lignes son arra^e , cpii aupara-
vant n'en formoit qu'une scule dans I'ordie dc ba-
taille , afin cpie la seconde lign? put prendre la place
de la pren'iin'e , lors.que celle-ci se verroit conlrainte
de plier. 11 reincdia au deiaut du Irop pt'tit nom-
bre de sa cavalerie, en placant des fanlassins enlre
les cavaliers , ce qui souvent de'cida de la victoire.
Ce fut de Gustave cjue I'Europe apprit a council re
Pimportance ' de I'infanterie. L'Aiiercague entiere
a admire Texacte discipline qui distiDgu.;.it si glo-
rieusement sur le territoire de I'Empire les ari: ees
suedoises : ions les exc^s y ctoient srverement pu-
nis , et plus ri^oureusenient encore le pillage , le
jeu et le dud. Les lois mililaires de la Suede alloient
meme jusqu'a prescrire la temperance et la so'iriete.
Aiissi ne vovoit-on lu or ni argent dans tout le
camp siu'dois , pas meme dans la ienie du nionar-
que. L'o'il du general veilloit avec le meme soin
sur les mceurs dusoldat,qu8 sur sa bra"'oure et sur
I'exactitudc du ser\iwe. Cuaque jour tons les regi-
mens, formes en cercle autour de leur aumonier ,
faisoient la priere du matin et celle du soir , et
le roi lui-meme donnoit i'exemple de ce devoir pieuv.
Une devotion sincere elevoit le courage qui animoit
le copur du grand Gustave. Exempt egalement de
ctn esprit d'irreli'^ion qui aneaulil \c frein ne.cssairs
2 20 Histoire moderne.
aux passions du sauvage barbare , et de cette bigot-
terie avilissante et titnoree qui caraclerisoit Feidi-
iiand , Gusiave, au faile de la gloire et du bonlieur,
ne cessa jamais d'etre horame et d'etre cliretien ,
mais aussi dans sa devotion il fut ton jours roi ,
tonjours b^ros. II supportoit de ineme que le der-
nior soldat ue son arm^e , toutes les fatigues, tons
les dangers de la guerre. Au plus fort de la me\6e ,
son esprit ttoit calme et serein. Present par-tout
par ■ ses regards, loujours on le trouvoit affrontant
les plus pressans dangers.
« Le 20 mai i63o, apres qu'il eut termine tons
ses arrangemens ,et tout elant pret pour le depart,
leroi pnut a Stockhoira dansl'assemblee de la diele ,
pour f^iire ses derniers adieux aux diff(6rens ordres de
son royaume. Li\ il prit entre ses bras sa fille Cbristine,
agee seulenif^nt de quatre ans , et qui au berceauavoit
deja ete declaree son berltiere; il la presenta aux
etatsjcomme celle qui devoit etre un jour leur sou-
veraine ; il fit renouveler , au cas ou il ne revien-
droit pas en Suede , le serraent de fidelite deja pret6
a ce.t eiif:int , et lire I'ordonnance relative a Fad-
minislratlon du royaume pendant son absence , 014
pendant la minorite de sa fille. L'assembl^e entlere
fonclit en lannes , et leroi lui-meme eut besoin de
quelques raoraens pour rappeler sa fermete et se
mettre en ^tat de prononcer ses derniers adieux ^
la diete. »
« Ce n'est point temerairement , dit-il aux quatre
ordres de son royaume , que je me prccipite , et
V<?us avec moi y dans cetie nouyelle et dangereuse
Guerre He trente ans. «2t
gaerre. Je prends a t^inoiii le Dieu tout - pw?;: ^.it,
que je ne vais pas conibaltre pour satisfiiiic uiie
value ardeur trueiTiere.L'empereur m'a iiif''x'iement
offense dans la personne de mes amba.s. : ;;inrs ; il
a donue de I'appui a mes eimemis , li jerstcute
nies allies et iiies freres , il foule au.\ pieds ma
religion , et il ose porter sa main jiisque sur ma
couronne. Les elats oppiimes de I'A'lemagne nous
appellent avec instances a leur aide , et s'il plait
a Dieu , nous leur donnerons du secours.
» Je connois les dang rs auxquels ma vie va
^fre exposee : jamais je ne les ai evites; et il sera
difficile que je leur ^'chappe. La providence divine
m'a jusqu'ici conserve miraculeusement ; ma s enfia
il faudra que je meure pour la dt^^nse de ma pa-
trie. Jevous remets a la protection du Ciel. Sojez
justes, sovez consciencieu?; ; raenez une vie irivpro-
cha! le^ et nous nous reverrons un jour dans i'e-
ternite.
» G'est a vous , senateurs de men rojatime ^ que
je m*adresse d'abord. Dieu v-uiile vous 6claiier ^
vous reraplir de sagesse et diriger tons vos con-
seils pour le plus grand bien de mon rojaume. Je
vous recommaude j brave noblesse , a la protection
du Tr^s-Haut; continuez do vous monlrer les dignes
descendans dc cjs heros de la Gothie , dont la va-
leur fit rentier l'a'ili((ue Rome dans la poussieie.
Yous , ministres de l'<^glise , je vous exhorle a la
tolerance et a la concorde : soy.^z vous - raemesle
modele dcs verlus que vous precliez , et n'abusez
jamais de votre empire sur les cueurs <ie mes peu-
i!2,<2 Ilistoh-i modeme,
plv'^s. Qnant a vons , mess'eurs les deputes des or-<
dres des bonrgeois et des paysans, je vons souhaite
les benedictions du Ciel , des r^colle^ licureus s , re-
compenses de vos travaux et de votre iiiduslrie ; erne
vos granges soient toujours remplies , et que vous
abondiez en tons les biens de cette vie. Je fais ponr
vous tons J t;int absens c,ue pivs ns , le^ voeux les
plus sinceres au Ciel. Je vous dis a tous mes ten-
drcs adieux. Peut-etre est-ce ponr toujours. »
Les pressentimens du vertueux monarquene furent
point vaius. II trouva en efFet ,a mort dans leg
campagnes de Liitzrn, mais la n-^ort glorieuse d'un
soldat 5 et ce ne fut (]u'. pres avoir pousse ses con-
quetes en Allemagne, des bords de la Baltique h
cenx du Rliin et du Danuoe , et fait trembler Fer-
dinantll sur son tro'ie imperial. Wallenslin, le rival
de sa gloire et le principal obstacle au complement
de ses surces , ne lui survccut pas Ion: -temps. Cc-'
lui-ci mourut assassin^ par les ordres, })ul)]iquement
avoues, de I'emp. reur. II est permis- de soupconner ,
d'apres I'auteur allemand , que Gustave I'avoit ete
par des ordres secrets, 6manes de la meme autorit^«
Un grand nomjjre d'ecrivains de toutes les na-
tions se sont exerct's a rapporter les ev^nemens de
cette memorable guerre. Les unsse sont attaches par-
ticnlierement aux details militaires , les autres telsque
le P. Bougeant^ dans son histoiip du traits de JVcst-
phalie ^ ont suivi le fil des negociations. M"". Scltiller
a pris une marche diflerente : il ra. onte rapidement
]es faits , et developpeavec soin et sous un point de
vue philosopliique , les causes qui les out produits.
Guerre de Iren'c ans. 2 23
Son onvrage est seai6 de traits de caractere et d'a-
necdoctes curieuses. II est a regretterquerauteurait
passe aussi rapldement sur repoque a laqiielle la
France prit part a c<"ite fameuse guerre. Peut-etre
a-t-il manque des inaterianx necessaires pour com-
pleter a son gr6 ce'le parlie de son ouvrage , qui ,
au surjiliis est tres-intercssant : le stjle en esteleve
<3t soutenu et la tra.luclioa paroit faite avec soiii. L«
H I S T C) I R E LI TT E R A I il E.
OBSERVArlo^s sur [a notice dc li Chronique dc Pierre
D\iNDLO , par U ciioyen Orerun , imiree duns U
Magasin Encyclopecliquc (i).
V.>ETTE C'lronique , dll le cito'.e;i Oberlin , com-
mence par la cre'ation c!u mop.de , ct elle (init a
I'annee 1400. Plus has, OberLn a\ ertit que cette
chroiiique ne remplit que aeuj pages ^ et quV/ je
pourrolt. que le manus rit decouvert ne coniiutqu'un
exlrait de la cbronique.
I. Qu'est-ce qu^ur.e Chroni jue commenrant a la
creation, finissaul a Tannee 1400 , ct qui ne remplit
que ncuf pa^es ? Assuremciil , les fails do: vent etre
bien presto's dans un si petit noinbre de p^'ges ; a
peine Tauteur a-l-il j u eu iiidiqucr seulement un
pe it nombre.... II est evident que ces neuf j.agesue
contieuneutreellementqu'imextraittres-suecinct d'une
panic de la Chroniqiie de Pierre d'Audlo , qui est
(i) Tome I , p. 216.
$24 Histoire litleraire.
encore ^trouver, quoiqu'on nous la donne cdttimii
dt^couverte.
II. Le citojen Oberlin ne donne pas une iddd
assez comp ele du siisdit abreg6 ou extrait de la
Chronique d'AndIo, en clisant g(^neraleraent,et sans
rien arlicnler de precis, qu'il s'^tend sur les ^v^ne-
mens arrives a Bale et a Colmar. Quels sont ces
^^vetiemens sur lesquels s^etead I'abrege de neuf
pages? Sont-ce Ijs faits de I'histoire civile , eccl6-
siastique , politique : ou bien ces faits appartien-
nent-i's a I'hisl fire des sciences et des letfres? C'est
ce qu'il falloit articuler. Uue Chronique , comme tout
le monde s.';ii , differe d'une autre Chronique par la
nature des fails qii' lie contient. Telle Chronique, a'
cause des details cju'elle pr^sente sur I'histoire civile^
est prt-feree a i.^lle autre dont I'aute.jr s*6tend ou sur
les homines illustres , leurs actions et leurs ouvrages ,
on sur 1: s productions naturelles d'un paj, s , sur les
prodiges que Ton y a observes, etc. Le biographe
He recherc' e dans lesChroniques, que les articles qui
ont trait a la vie des illustres et des savans ; un bi-
bliographe s'attache , de preference , aux indications
de livres anecdotes ou perdus ; I'astronome y chercbe
des observations d'eclipses,- de com^tes , ou d'autres
phenomenes celestes j ie naturaliste n'j veut lire qu^
des descriptions d'animaux , de plantes ou de min^-
raux : en un mot, chaque clause de litterateurs et de
savans cherche dans les chroniques , de ra^me que
dans les autres livre- , les faits qui appartiennent ^
I'objet direct de ses 6tudes; Ce n'est done pas indi-
quer suffisamment le caract^re distinctif d'une Chro-
nique y
Sur la Chronique dc Pierre d' ArifUo. 92S.
nique, que dire vaguement , et sans ariiculer rien del
partlculier , qu'elle s'6tend sur les evenemeiis arrives
eii: tel ou tel pays.
HI. Dans le cours de sa notice, le ciloyen Oberlin
averlit qii'un ouvrage inter, ssant de Pierre d'Andlo ,
,eur la constitution de I'Empire germanique, fut publie
d'apres un seul njanuscrit trouve a Heidelberg , par
Marquard 6<2C/^er et par Tobie Oelhafen. i.o Mar-
quard Frefier ^ ^crivain tres-connu, et dont on peut
voir I'articie avec le catalogue de ses ouvrages (i) ,
dans les m^moires du P. Niceron, tome XXI , pag.
231-248 , Marquard Freker^ dis-je, est celui qui
publia I'ouvrageen question, en i6r2, a Strasbourg,
in-4.° II seroit difficile de reconnoitre ce Fre/ier sous
le noni de Sacker qu'on lui donne ici , je ne sais
pourquoi. 2.° La bibliotli^que nationale possede uu
manuscrit de ce petit ouvrage de Ccesared nionar-*
chid , de P. d'Andlo; J'ai dte curieux de le voir ,
dans I'esperance d'j trouver quelque particularitesur
(i) Parmi les ouvrages de Frelier, il faut bien distinguet
son Diiecloriam in omnesjeie chionologos , annalium scrip-
tores et lusloriiios potissimum Homani (rerrnanicique imperii j
livre excellent pour les lecteurs des Chroniques , dont Jean*
David Koeler , professeur d'Altorf , donna une bonne editiou
a Nuremberg , en 1720 , et une autre en I734. L'ouvtage a re-
paru a Gottingue en 1772 , in-4.° avec des corrections et
des augmentations de George-Christophe Uamberger-^el malgra
«es diff^rentes Editions , il est trop peu connu en France.
L'exemplaire que je possede de I'edition de 1784 , est un
present du feu cardinal Garampi, qui me I'envoja de Vieane^
pendant sa noacia^ttre aupr^s de I'empereur.
Toms il. H
«2(5 Histoire liricraire.
I'auteiir, et aiissi pour comparer le volume manuscrlt
avec I'imprime de Strasbourg, 1612.
Ce manuscrit latiu , cole n.o 6o3o , ollm 9980 ,
et Baluz. 70 , est ecrit sur deux colonnes , et il n'a que
63 feuillels. On y trouve , en tele^ u\\ Prceconium
JBasUeenSLS stadii _, en 8 n-.auvais disliques , dont
\ oici le premier :
Sisjoelix etj'ausio leata uimiine semper
^durea se cuinulant Basllea scecula tlbi.
L'auteur y est qualifie , decretorum doctor ^ prce^
posllus ecclesicB coUeglalw Luteinhacensls. ASus'^y
a I'epoqne de la composition do ccite piece, Lautem-
bacli ^toit une egUse colleglale j et non une
abbaje.
A la suite des 8 distiques dont jc viens de parler ,
on trouve, dansle manuscrit, I'opuscule sur I'Empire
germanique , public pour la premiex'-e fois par Marq.
yrelier. Notre rnanuscrit dilfcre en beaucoup d'en-
droits de cette edition de Freher 5 il sercit trop long
d'indiquer ici les variantes 5 je me borne a avertir que
les mauvais vers qui sont a la fin de la dedicace de-
P. d'i^Lndlo, sont, dans notre niaimscrit , tout autre-
jaient que dans Pimprime , dont je n'ai vu que Ja pre-
miere edition de Strasbourg, 1612 , sans avoir pu
trouver cclle de Nuremberg, 1657.
Enfin, au dernier feuillet de notre manuscrit , on
lit un avis qui apprend qu'il fut donne par Jean
Ottlin , dit Herrgot, vlpce vocis oraeuto ^ dum
erat infinnus y magistro Jolianni Video Surgant^
docteur en droit, sou ami , le samedi ayant la Tous-
Sur la Chronique de Pierre (TAndlo. 227
saint, 1.490. Cq Je^n-VlTiQ Surgant , ou Surgand ,
est celui qui soigua I'l'd.iion faite a Bale par Nicolas
Xesler , en 1493', in-folio , de VHomiUanum Hiero-
nijnii , AmbrosU, AugusUai , etc. : Edition citee
au tome i.^r , page 556, not. i , des Annales tjpo-
erapiiiquei de Maitaire , qui estropie le nom de
I'auleur, en I'appelant Jo. Fo/ricus Surgaa^. Je
connois deux ouvrages de ce Surgant , savoir : un
Manuale curatorum , imprime a Majence , par
Jean Schoefrer,en i5o8, in-4.0, reimprim^ a Bale,
en i5i4, raeine format ^ et un Rcglinea studloruni^
imprime aussi a Bale, en 1002, in-4.0 Get auteur
etant fort peu connu, on est bien aise de trouver
qu'il en soit fait mention dans notre manuscrit,
comme existant en octobre 1490 , et comme docteur
et droit.
Voila ce que j'ai cru devoir dire a Pocnasion de la
notice donnee par le citoven Oberlin sur la Chronique
de P. d'AndIo 5 cette notice ajoute quelques } articu-
larites a I'article de ce P. d'Andlo , qui est dans la
bibliotheque latine du mojen age , par Fabricius ; et
sous ce point de vue , elle ne pent qu'interesser I'his-
toire litteraire du XV.e siecle. St. L***
JP a
T Y P O G R A P H I E.
A D R E s s E de la Convention Nalionale au Feuple
tranqais , decre'te'edans la seance du 18 vendemiaire ,
an trouieme de la Republiqiie Franqai^e^ une et in-
divisible , traduite en Arahe par P. Rufin ^ secre-
tairc'i'iterpnte dc la Repuhlique ^ imprimte par
ordre de la Convention Nationale ^ par les soins
de Lovis Laj^gles , Sous-Garde des manuscrits de
la BihlioihlqueNationale , p6ur Ics Langues Arahe ,
Persane , Tartare-Mantchou , etc. Paris , de Tim-
primerie de la Republique , an troisieme , 12
pages in-40.
J\l ous avons public, il j a qiielqiie temps, des oId-
servations utiles d'lin de nos collaborateurs , Louis
Langlfes 5 sur la Typographic orientale. Npus faisofts
connoitre aujourd^hui un monument tjpographique,
ii^it pour rendre k nos presses leur ancien eclat. La
Convention nationale s'est occupee des mojens de
faire renaitre Tetude beaucoup trop negligee des
langues orientales ; elle a foud^ une ecole qui, nous
I'espdrons , va bientot s'ouvrir , et qui , d'apr^s le
nom des professeurs qui ont et6 clioisis , peut nous
faire pr^sager les plus heureux su. ces ; elle a voulu
tirer de I'obscurlt^ oii on les avoit Jaiss^s, les beaux
caractkes qui, apres avoir servi a i'irapression de la
fameuse PoL^gtotte de J Itray ^ etoient detneures
depuis dans ua oubli total. La commission des rela-
tions ext^rieures a senti tout le prix de ce tr^sor j ell%
Imjression Arahe. 929
n VII combien il importoit a la politlaue ef au com-
merce , fie faire connoitie les principes qui clin.ent
la nation franraise depuis le 9 thermidor. Aussi
cette noiivelL^ production peut-elle elre eiivisagee
sous le point de vue politique et commercial , et
.sous I'aspect litleraire. Mais , sous ce dernier rapport
ra^me, elle est egalement tres-propre a donner
line idee des richesses en ce genre , que pos-
sede la Republique. La traduction a ete faite par
P. Rufin , et les epreuves ont ^te revues par Louis
Langles : c'est assez pour faire avantageuseraent pr^-
sumer de leur exactitude. Le texte fran(;ais ne laisse
rien a desirer pour son execution , il est enferme dans
\m cadre noir ; la traduction arabe est en regard, et
enferm^e dans un cadre rouge. II est aise de voir, par
I'inspertion des 'carac teres , qu'ils peuvent rivaliser
avec les lettres des plus beaux manuscrits 5 ils surpas-
sent merae en elegance et en perfection ceux des
imprimes les plus celcbres. Lidependamment des
deux corps employes dans cette adresse , I'imprimerie
rationale en possede encore un plus petit. Le noaibre
des poin(jons de chaque corps s'^leve a plus de dop.
Le caractere persan , dit taaiik _, de cette imprimerie,
est aussi beau et aussi rjche. II est a desirer qu'il soit
(Egalement employ^ , et que l¥tude des langues orien-
lales , remise en lionneur et en vigueur , nous procure
des drogmans bnbiles , dont le nombre est aujourd'hui
trop peu considerable, ce qui est tres-nuisible a la
di[)iomatie et au commerce. C'est a la paix qu'i^l ap-
p.irliendra de donner un heureux essor aux Etudes
vie tons \qs genres \ mais on trouvera du jnoins qua
P 3
5 So Typographic.
c'est avoir bien m^rite de la patrie , que d'avoi'r , an
milieu du bruit des armes , et des troubles polili-
ques J ouvett une route dans laquelle on pourra de-
soniiais marcher d'un pas plus sur. Nous ne termine-
rons pas cette notice, sans paj^er au citojen Dubois-
Lauerne , inspecteur-g^n6'al de: rimprimerie de la
Republique, le tribut dV- oges qu'il merite pour I'in-
telligence et le zele avec lequel il a dirige cetle
impression , qui sera regardee chez toutes les nations
comme un precieux et curieu?^ monument de I'Ai t
Typograpliique. A. L. M.
B I O G R A P II I E.
KoriCE sur la vie ft les ouvrages de Florian,
C_j ' E s T Fannee derniere , le 26 frnclidor ( 12 sep-
tembre, vieux style ), que les lettrcs perdirentFloi ian,
mort dans la commune de Sceaux - /' TJnUe , age
de 39 ans.
Florian etoit ne dans la ci-devant province de
Languedoc , au hameau de Florian, propriete de ses
percs. II etoit parent de Voltaire par $a mere. II eut,
des son enfance, le bonheurde voir, d'interesser ce
grand homme. Sa famille le destinoit au service ^
il J entia ; il fut capitaine de dragons, et cheva-
lier de St-Louis. Le ci-devant due de Penthievre ,
mort il J a quelques ann(^es, eut I'avantage de se
Taltacher , plus encore par I'amitie que par la charge
dont Florian fut tilulaire.
Notice siir la v'e ct hs onvrages de Tlorian. 23 1
Mais CR qui nous int^TCsse ici , et ce qui I'lnte-
rcssoit bcaucoup plus lui-mcme , c'est son talent
llrleraire. II I'annonca des Tannee 1779, c'est-a-
dire a Page de 24 ans, jiar une petite comedie en
un'acte'et en prose, inlilulce Les Deux Billets ^
jouce aux Italiens , et qu'on y revolt encore avec
plaisir. Encourage par le succes de cette piece, et
t'clairc par la chute d'un autr^ cssai , Adequln ,
Moo J Dame et Valet ^ tombe le 5 novembre de
la mcine annce, et jete au fen le 6 du meme mois j
il fit successivement le Bon Menage , le Bon Vere ,
la Bonne Isle re ^ le Bon Fits ^ etc. II crut qu'il
t'toit possible d'allier au theatre I'interet et le comique-
Pour cela il jugoa qu'il avoit heroin A^Aiieqiiin.
II adopta done ce genre da pieces ; et , sans vouloir
imitcr ni Marivaux ^ m DeUsle ^ qui en avoient
tiro un ]:)aiti tres-heureuK , il ctablit ie caractere
de ce personnage d'apres ses idess parliculieres. On
s'ac^orde a dire , qu'en lui conservant ses/aceties
berganiasqiies , il trouva le mojen de Is rendre plus
intcressant et plus moral. II fit rire et pleurer_, et
son Arlcquin fut a-la-fois comique et respectable.
Fiorian joignit au talent de composer ces petits ou-
vrapes, Tagr^ment de jouer lui-meme en societe,
le role d'Arlequin javec une perfection qui rappeloit
Carlin. Feu d'Argenlal, ce coustaut ami de Voltaire,
avoit un theatre siir lequel Fiorian et ses pieces plurent
egalement a des spectateurs dont le goiit etoit dif-.
iicile et siir.
L'academie francalse , en 1779, avoit projiose
po.;r sujct du prix de powsie ^ un edit do ce terns ,
P4
q32 Biographie.
lequel affranchissoit tons les serfs des domaines. Le
prix fut remis deux fois. Florian fit pour le tioisieme
concoiirs la piece intitiilee V^ottaire at le Serf dn
Mont-Jura. Elle fut couronnee.
A cette ^pociue, plus occupy du service que des
leltres , il avoit a peine essaje son talent poet que.
Mais dans de frequens voyages qu'il faisoit a Fernej ,
il avoit enlendu Voltaire parler de la niaui-morte
^vec I'indignation que lui inspiroient tous les crimes.,
de rotre anc'enne legislation , et gt^mir sur le sort
de douze mille habitans du Mont-Jura^ soumis a
cette loi atroce. II fut inspire par l'int(^ret du sujet
et par le nom dj Voltaire. Sa piece, dont le cadre est
heureux et dramatique , prouva , sinon un grand
talent pour Part des vers, du moins quelque habi-
lete dans la composition , de I'esprit , de la sensibi-
lile , et ime d-ctiou raisonnable et pure, m^rite dent
ses juges lui snrentd'aufant plus de gre^ qu'il devenoit
tous le» jours plus rare. Quelques anni-es apres , il
remporSa un autre prix de poesie, dans !es (oncours
de la meme academie. II avoit tire son sujet de
I'Ecriture sainte. C'est Tinteressante ^glogue de.Boo^
Ct Ruth. II envoYa au concours de 1785, pour le
prix d'eloquence , \\n eloge de Louis Xll. Son ou-
■vrage n'oblint qu'une mention honorable. A I'imila^
tion de I'cloquent auteur du sublime eloge de Marc -
^urele, il avoit imagine ini plan dramaliqr.e sur le
fiucces duquel il paroissoit compter beaucoup. II
faisoit lou(r la clemence deceroi par la TrimouUte
qui I'avoit eprouvf^e, sa legislation par le garde-.
4^s-sceaux Poacher y sa yaleur par Bajjard. i^loriau
Notice wr la vie et le^ ouvra^es de Florian. 2 j3
t\e fut point aiissi heursux que Tliomas son modMr.
D'academie n'approuva point la ftjime cpi'il avoit
a(1ojtt^c. En effet, si I'idee de ce plan etoil Ing^-
nieuse, Tex^cution ^toit monotone. Le prix fut donn^
dans le concours suivant , a I'ouvrage bien pense et
bien ^crJt dn ciio^^en Nool , actuellement adjoint a
la commission d'instruction publique, et ci-devant
minislre -de !a repiib'iqne a Venise.
Florian avoit une pn'dilecfion marqiu-e ponr ie
genre de la pastorale. II le trouvoit avec raison peu
Susceptible d'interet dans I'eglogue delacli6v". Vn re-
cueil dVg'ogues lui parois?oit res-em bier a unc^ sui 10
de premi{>res scenes de comedies. II crovoit le drame
pasloial, lei que VAinlnte ^ bien preferable , malgro
sa froideiir pvesque ineviiabie ; mais le roman ,
apres le poeme, lui parut le meilleur moycn de ron-
dre la pastorale vraiinent inltressantc. 11 donna sa
Galalhee, en qualrelivres.Les trois premiers sent une
imitation erabellie dela Galath6e de Michel Cervantes.
Le quatrieme livre est entierement de I'invention ds
Florian. On sait que I'auteur espagnol n'avoit point
complete son ouvrage. II donna quelvjue terns apres
son Estellc,en six livres. Ces d u\ romans, et sur-
tout le premier , eureiit un succes qui s'rst toujours
soutenu. Ge qui nous sembla caracleriser le talent
de I'auteur dans ces deux productions , c*est I'accord
contin»' de senti rens naturels exprimes avec finesse,
et de pens^es ing^nieuses rendues avec s mplicite ;
c'est aussi I'art de reveler avec grace les sensations
les plus mvst^nieuses des jennes coeurs , et le doii
de peindre fidelemQiit les details clioiais d|p la nature
2r>4 Biographie.
champetrc , en evitant I'inconvenienf de la pros©
dans ces peintiires , cehii d'^tendre trop Ics couleurs
et de Ics affoiblir en les chargeanL Enlin , a ces qua-
litescjuilui sont particiilierement propres, il joignit
le merile d'une narration rapide , claire et soignee y
et les formes el^'gantes d'un slvle pur et raelodieux.
II osa enlre|;renclre un ouvrage dout le caractere
plus grave exigeoit des conceplions bien plus fortes.
II fit un reman politique : c'est son Numa Fom-
piUus. Cette production , digne d'eslime, etoit peut-
elre d'un genre trop eleve pour son talent. Les six
premiers livres olfrent des situations et des details
pleins de merile et d'iatt^ret ; mais les six derniers
leur sont bien inferieurs j et en general , si nous osons
le dire , Pordonnance de I'ouvrage n'a point asse,;
de grandeur. Ci lies des conceplions qui, dans ce genre
d'ouvrage tiennent de IVpopc'e , en sont foibles et
communer.Lcs comblnaisons descaracteres produisent
pen d'interet et peu d'effet. La narration est quel-
quefois tellement serree , qu'elle ressemble presqne
a un sommaire. Les vues politiques en sont peu
^tcndues ; mais on y distingue Part de repandre des
couleurs locales. Le caractere de Romulus a de la
verity , et c'est une invention tres-ingenieuse que
d'avoir substilue a la njmphe Egerie, le vieux Zo-
roaslre et sa fille Anais.
Elorian , qui jouissoit deja d'ane reputation bril-
lanle et si bien nieril^e, fut adm'S , quoique tres-
jeune encore , a I'academie franraise, le 14 mai
1788 ( vieux style ). II remplagoit le cirdinal de
Lujnesj et il fut recu par le cilojen Scdaine.
]\^oUcc sur la vie ci ks ouvrngts de Florian. 23 S
II voLilut se rendrc plus digiie cncorr^ dc cplte d'.s^
tii.Ciion , a laquelle on attaclioit al rs b:aiicoun tie
prix/ II pui)lia de nonveaux ouvrage.s.
Son gout pour Micbel Cerv^anles et pour la 1illr-
ratufe espagnole , le porta a composer dci? Nou^
incites , genre d'ouvrages tres-culllve en Espagae. II
en a donne denx recucils. Le choix et la varit'l^
des sujets, le ton proprs a rautcur et^ que nous avons
iadique plus haut , en reudent la Itclure ires-inlt-
ressante.
Numa Pompilius n'avoll point joui du succes (jne
Pauteur avoit espi'-re. II crut qu'en choisissant ua
sujet enire le roman politique et le rontm pastoral ,
il le traiterolt avec plus de bonlicur. Gonz^alve de
CordoLie ou Grenade reconquise ^ en dix livres ,
n'eut pourlant pas un succes aussi briilant ni aussi
sou'enu que Galatliee et qu'Estelle. Cependaiit rrt
ouvrage fait encore beaucoup d'honneur a son talent ;
il est precede d'un precis iiistorique sur Ics rJaurcs
d'Espagne , compose avec mrr-iide ^ plein de ic-^-
clierclies interes antes, et ccrit du stvle qui conviciit
a I'iiistoire.
Elorian a aussi donne un volume de fables. Nous
crojons que ces fables sont , avec Galailn'e, celui tie
sesouvragesquidoi fairc leplusd'iionneurason esprit
et son talent. EUes nous paroissent , s'il nous est permis
d'enoncer noire opinion , bien superieuves a toulrs
ccUes qu'on a ose publicr aprcs Lafonlaine. Gala-
tliee, Estelle nieme, et ce volume de faules peuvent
done assurer a Florian uae r^putatioa durable; et
si Ton songe au merit j de scs aulres productions.
2 36 Biogrupkie.
et a I'age ou la mort I'a enlev^ aux lettres, on ns
pent que d(5plorer la perte pr^matur^e d'un homrae
qui avolt do]a fait beaucoup pour son honneur et
pour nos pliiisii's ; mais qui , par cela meme, ^toit
destine a plus de };!oire , et garantissoit de nouvelK-s
}Ou stances aux amis dcs arts.
INous crojcns (!u'aucun d'euxn'avoit encore appele
les regrets des lecteurssurcetecrivain ingenieux a-la-
fois et sensible, et quia eule merite peu commundese
creer,dans le genrequ'il a adopte, une maniere qni
lui est prople. II avoit presque acheve un poeme ,
lire de Tliistoire des Hebre*ix, intitule EUez^er , et
qu'on assure etre son meiileur ouvrage. L*auleur de
latouchanle (ragedie d'Abufar, le respectable Ducis,
digne ami de Florian , s'ctoit proiuis de lui dedier
sa FamiUe arahc. II ne pent plus la dedier qu'a
ses manes. Nous avons sous les jeux celte dedi-
cace uon encore iniurimee. Sans doula on nous
saura gre d'en extraire le morceau qui suit. 11 donnera
du caractere moral de Dorian , une idee bien plus
juste que ce que nous en pourrions dire ; ct lesc'oges
donnes par I'amitle (t par le genie, auront a-la-fois
plu,> d'int.'ret et plus d'autorit^\
« Oconiien ton Eliezer ou ton nouveau poeme
M des H'breux , non connu encore , mais ton
» > l)"f-d'a^uvre , mais ton plus cbarmant ouvrage,
» mais ecrit sous la dictee des Graces ou de Fene-
>' loo , encbantoit antour de moi , cet et - , les bos-
» quets solitaire.-- , les bauts peupliers sous lesquels
y> tu-in'en fis entendre la lecture !.. O combien il ho-
» nore ton ame I combien il aiqute a ta gloire ! A,
Notice sur la v'e edes ouvrages deFlorian. 237
*» fa gloire ! Et je vois le triste cvj-res qui couvie
» la cendre! N'importe ; tu ii'es pas mort lout en-
» liefr. Tes ouvrages sont entre les mains des gens
» de gout ; Ics meres sensibles et ve; tueuses les re-
» lisent; leurs Jeunes filles a leur tour en font leurs
» delices. Oui , ton nom vivra , il sera immortel 5 il
>' vivra , ct sur-tout il sera aiaie. O Florian ! etoit-
» re avant quarante ans que tu devois nous etre ravi !
» Repose, 6 mon ami! repose , aimable ^leve de
« Fenelon, peintre enchanteur da I'innocence, de
» la valeur, de Taraour , et de la vertu. Qu'd I'as-
« pect de rinimble cjpres qui attend la tombe , le
» coeur encore emu du souvenir de ta perte et des
» douces impressions de tes ouvrages, la benut^ nais-
» s.inte en approche d'un pas timide ei involontaire,
» avec une douleur muette, avec un soupir, une
« larme peut-etre ; qu'elle dise enfiu , en regardant
» sam^reaffligee: PoUd Le cijprbs de Flo dan !
>> que ue pui.-je^ mon ami, j graver ces dernieres
>> paroles qui t'^chapp^rent quelquefois dans le
■'^ pressentiment d'une mort prochaine ! Quand on
" n'a plus long-temps a vlvre, it faut se hater
^> de /aire Le bien. j; V. B.
^ D D I T J 0 N a la notice sur la vie et les ouvrages de
J-J' B ARTH t L E MY.
Uepuis rinjpression de oette notice, on nous a
communique un ouvrage manuscrit de Barthelemj ,
qui avoit eciiappe a uos reclierclies. II a pour litre :
238 Biographie.
B.efLexLons sur urie lob des aiiccens Perscs. C'est
uti petit traite de morale , comj)ose , en lySS , pour
rinsti-uclion du jeurie d'Auriac , neveii dii nuignanime
et iiiibrlune Miilsli' rbes. Le roman de Carife ct do
Poljdore avoit le meme objet. Voici le coniraciice-
inent du premier da ces ecrits : « Xeuophon , parlant
» de I'insiilution des jeunes Perses , dit que, pour
» leur procurer de tonne heure la connoissance des
» loiset des formalites de la justice , on avoit elabli
» dans les ecoles publiques un tribunal ou ils venoient
» s'accuser n utuellement de leurs fautes, et qu'entre
» autres crimes , on j punissoit I'ingratilude avcc
» beaucoup de ?everite. II ajoute que , sous le nora
» d'ingrafs , les Perses comprenoient tous ceux qui se
» rendoient coupables enversles dieux , les parens ,13
» patrie et les amis.
» Cette loi admirable ,non seulement ordonnoit la
» pratique de tous les devoirs , mais elle remonloit
» encore jusqua leur origine et les rendoit aimables.
» En eiTet , si Ton ne ])eut mar.quLn- a ses devoirs sans
» ingratitude, il s'ensuit qu'il faut les remplir par uu
» motif de reconnoissance ; et de-la resulte ce principe
» sublime et lumineux, qu'on ne doit agir que par
» sentiment.
y> II seroit a souhaiter qu'un liomme de beaucoup
» d'esprit eraplojat beaucoup de temps a developper
y> cette grande Verite : elle est la base de la morale
J) et du bonheur. Car, lorsqu'on a^uit par amour , on
39 agit sans peine ; et , lorsque I'amour est bien regl6 ,
j» on est lieureux «.
Ji'auteur , apres (juelques phrases dict^es par la
Addltkon a la notice sur Barthelemy. 239
motlestie , termine son prt-ambule en ces termes :
« Relativement au passage de Xenophon , ces rd-
j) Aexions auront pour objet la religion, les parens,
» la patrie et les amis >\... EUes ne sout , comme il
I'assure lui-meme, que « le d^veloppement de celle-
» ci : c'est dans le ctEur que tout riiomme reside,
7> ct c'est la uniquement qu'il doit cliercher son
« repos , sa gloire et son bonheur ». Ri^n de mieux
d^veloppe que toutes les sages reflexions de Barthe-
lemy. Tout est anim^ par une imagination brillanfe,
mais bien r^gU^e. Une elegante simplicite repand
de Pinteret sur ses lecons. Point de clioses triviales ;
toutes les veiites s'y trouvent prL'sentccs sous un nou-
vcau jour. Quclques-unes ir.eme doivent fixer Tatten-
tion du philosophe. Telle est colle-ci : « L'amour de
y> la patrie n'est autre chose que" l'amour de ses
» devoirs 5 mais un amour noble , dcsiuteresse , qui,
y> loin de se nourrir de I'opinion des autres hommes,
» saura dans le besoin sc sufflre d Lu.l-meme «....
La reflexion suivante m^rite encore d'etre rapportee...
« Voyez autour de vous une multitude erapressee ,
» dont les ames cherchent a se joindre \ la votre , et
» dont les jeux ne vous renvoient que des regards d^
» reconnoissance et d'araour. Quel spectacle ! Non ,
^ la presence des ingrats ne le troublera point ; ils
» fuiront la votre ; on, s'ils osent I'affronter, vous
» serez venges par la douleur int^rieure qu'ilsdprou-
» veront. Car on a beau s'armer d'impudence, rien
» n'elface dans une ame le souvenir d'un bienfait.
» recu, et il faut qu'elle se livre necessairement aux:
S douceurs de la reconnoissance ou aux horreurs d«
240 Biographie,
» la baine « Juste ciel I que vais-je ajouter t
L'homnie corrompu par lasoci^le, balancera rare-
jnent ; il preurira ce dernier parti , et au temps des
vengeances , celui il'une revolution , il (f'gorgera ou
fera rgorger son bienlaiteur. Quand on lisoit dans
La Rochefoucaull , qui ecrivoit apres la fronde : « Les
» lioiivnes liaissent menie ceux qui les ont obliges , et
» cessent de liair ceux qui h ur ont fait des outrages »...
on ne vouloit pas le croire ; aujourd'hui nous pouvons
en dire davantage ; mais hatons-nous de revenir ^
I'ouvrage de B.irtii^lemj.
Avec quel charme ue decrit-il pas le temple de
PAmilie! « Da.is uii des plus beaux cantons de la
J) Grece , s'elevoit un temple d'une architecture
31 simple, majestueuse et solide. II dtoit consacr^ a
» I'Amitie , et fumoit jour et nuit d'un encens qui ,
» loin d'etre agr^able a la divinity , irritoit sa jalousie*
3) Sanscesse entouree d'adoraffeurs mercena^res , ellt?
» ne vooit dar.s leur coeur <jue des liaisons mai
» assorties et presque toutes corrompues dans leura
» principes.
« Uii jour elle dit a un ami de Cresus : Porte ail-
» leurs tes offrandes magnifiqups ; ce n'est pas a moi
» qu'elles s'adressent , c'est a la fortune. Elle r6pondit
3) a un Ath^nienqui se disoit ami de Solon : Tes voeux
» sont I'ouvrage de ta vanit6 5 en te liant avec un
» homme sage , tu n'as cherch^ qu'a partager sa
» gloire , et f ire oublier tes vices. Elle dit a deux
» femraes de Samos , qui s'embrassoient c^troitement
» aux pieds de sa statue { Le goiit des plaisirs vous
■f> unit en apparence , mais vos ca^urs sent dechires
par
Amnion a la not'ire dc Barthe'emy. 241
« par la jalousie, et b seront biv^ntot par la Lalne.
» Enfiu deux Sjracusains, Damon et Pythias, vin-
)v rent, en pre.-eiice de la deesse, evpriiner des senli-
» mens tendres et sinceres par des sons mal arti ules.
)) Jj recois voire horn nage , Irur dit-e 11' , et je le
» rerois des main^ de la vertu : je fais plus, j'aban-
» donne un temple trop long-temps souille par des
» sacrifices impies , et je n'eu vcux plus d'aalre qus
» vos ccpurs. Allez , vivez 1 eureuv , vous aure^
» bientot besoiu de iron secours, AUez montrer au
» tyran de Syracuse , a Tuuivers et a la posterlte,ce
5) que pent I'amitie dans des aimes comme les volres '\..
Vient ensuilj I'aventure b^roi |ue de Damon e* de
Pylliias ; elle ne pouvoit etre mieux araence. L'un
et i'autre , philosophes pytbagoriciens , ne furent ,
dans leur devouement mutuel , que fideles aux prin-
cipes sacr^s de leur ecole , sur Pamitie. Suivant notre
auteur , « I'esprit n'en sauroit etre 1' unique lien,
» Comme il ne cbercbe qu'a briller , et qn'il ne
» pent souiTrir aucnn ranii , ni au-dessus, ni acot^du
i) sien , il esl naUirellement destructeur de cette.
» egalite si necessaire dans un . commerce de senti-
» mens. Parmi les difK'M-entas sortes d'esprit , celui dt}
» saillie et de logerete est le plus oppose k I'amitie ,
» parce c[u'il se nnirrJt grossierement.de son amour-
» propre , et qu'il se sacrifie sans peine celui des
>> autres. Elle s'awCommoderoit mieux de cet esprit
« flnetdelicat, qui senible ne s'exprimer que pour
« plaire, et qui laisse entrevoir plus qu'il nV^xprime.
» Mais observez qu'il ne plait en effet (ju'en prenant
» la tflnt-are du sentiment J ot qu'il reste toujours a.
Tome II. Q
S42 Bh^^'o' h'e.
» savoii' si ses graces S'/chiisanles ne sont pas le fruit
» de Tusage du mondj on de i'hj}K)crisie du coeur.
JO II faul dire a-ppu-pres la meme clo'e de c<M esprit
» d- sag.-sse et de rellovion . dont le sui'ra^e est
« d'auUii t plus ficit eur cui'il paroit etre I'cfF.'t d'une
5) meditation profoude. Ces deux sortes d'esprit, ainsi
» que le gout des arts e' d s talons , sont tres-agrcables
» dans le commerce de I'amitie. lis duivent I'embellir,
M et non la former »... De ces observations , Barthe-
lemy conclut^ju? le coeur doil etre I'unique lien de
I'amitie , et que celui des veritabl. s amis ne pent
avoir d'autres fondemens que I'amour de la vertu et
la conform ite des caracleres. Mais nous crojons en
avoir assez dit poii;- faire desirer la pu])lica'ion de ce
charmant opuscule , digne de la plume tPun discipld
de Platon , ce pbilosophe eloquent , dont Barthelemy
a ^te I'habile interprete (r) , et sou vent I'Leureux
iraitateur.
On lit a la page 72, du dernier n.° de ce journal ,
que J. J. Barihclemj ^toit ne a Aubai ne , dans la
viguerie de Marseille ; pour parler avec exactitvide ,
il falluit diie , d Cassis j prts d'Aubagne j dans
la cl-deuant i^iiruerle (fAix. S. C.
"c
(i) Voyez les cliap. LIV et LIX du Voyage cl'Anacharsis,
IN U JM I S M A T 1 Q U E.
Observatioxs sur un grand nomhrt de MciailUs
de LiciNius le jeune , par le citoyen Gourd in ,
bibliotlncaire a Rouen.
X^iciNius , siirnomme le jeuxe , pour le rlislln-
giier de son pere , n'etoit age ((ue de vingt mois,
liit Aure'ius Vi •lor (i) , lors^iu'en 3i7, il fut cre6
C^sar. II ne jouit de ce tilre , comme nous l'.ip-
prend Theopl ane , que jusqu'a la fin de 323 qu'il
en fut depouille par Coiistcinlin-le-Grand , son oncle
mafeniel (2). Enfinil perdit la vie dans la douzic-me,
ou, comma d'aulres le veulent (3j , dans la qua-
(i) M. Lc Beau , dans son Hislnire du Bas-Empii e , X. I
p. 3oo , a prefere au temoignage d'Aurelius Victor celui 6e.&
liistoriens qui font nommer Licinius . Cesar , non par son on-
cle , mais par son pere, ce qui est plus nuturel. Au reste la
chose est ici fort indifferente.
(2} Le traducteur , comme Ton voit, a corrige une faule
<jui se trouve daiis le texle , on on lit KmgAf^i-^ au lieu de
x,ci)v;eivTt)i}i- Cette faute ne se trouve point dans le manuscrit
du Vatican , ni dans celui de M. Peyrez , ainsi qu'on le fait
voir dans les variantes , p. 5l3.
(3) M. Le Boau fait raourir Licinius dans sa douzii-m'e
annee ( Hist, du Bas-Emp. t. I , liv. 4 , p. 449 ). 11 ne devoit
point etre plus age , selon Cassiodore ( in u4urel. Cassioddri-
Consules , Joan. Caspiniani Comment, p. 191 ) , qui le fait
assassincr un an apres son pere. Ducangc ( Faniil. Blzanliii.
p. 44 ) veut que Licinius fut dans sa quatbrzieme ann^e lors-
qu'il peril. 11 semLle , d'aprts les expressions d'Eutrope, qu'il
144- ' Numismalique.
torzieme ftnnee de son Age. Voila tout ceqiie I'lu's-
toiie nous apprcnd de ce jeune et malhciircux prince
que ses bonnes qualitcs, scion Eutrope , rcndoient
digne d'un meilieur sort. Les medailles qui portent
pour k'gende LICINXVS JVNIOR NOB. CAES ;
et eJles sout en assez grand nomhre,n'ont pu etre
frappees que depuls le premier de mars Siy , jus-
qu'au commencement de 323. EUes ne devrolent
par consequent offrir que les traits d'un enfant de-
etoil encore plus age : "• Piimiim necessitate proseciitus
■» egregluin rii uni , el sororis filiiun , commodoe indolis ju~
J' fenem intcij'ccit ». ( L.ib. X. ). La qualite de vir egiegius
ne peut certainement convenir a un enfant de neuf a dix ans ,
ce qui prouve cju'il n'est point probable que Liclnins alt ete
tue la meme annee que son p^re , comme quelques hisloriens
le font entendre , nl meme un an apres , conune le dlt Cassio-
dore , et comme on pourroit le conclure du Chronlcon Pas-
chale , p. 282 , ou la mort de Crispe est placee un an apres
la defaite de Licinius le pc-re. Laplupart des historiens s'ac-
cordent a dire que la mortde Liciuius suivit de pres celle de
Crispe , et altribuent I'une et I'autre a I'ambitiou et aux ca-
lomnies de Fausta. Pompeius Laetus le dit expressement :
«■ Illud sat perissimile insidiis Faiislcp clrcwnventum Crispum
■u occubuisse tie periiia in mililaiidojiliis ohesset et propterea
^ paulo post suhlatiis Licinius junior j<. ( Rom. Histor. Com-
pendium ). Mai» ces historiens , comme le remarque Ducange ,
dans ses notes sur le Chronicon Paschale , p. 556 , ne s'ac-
cordent point sur I'annee dans bquelle Constantin fit perir
son fits aine. Par consequent il ne nous est pas possible de
marquer precisement a quel agt^ fut assassine le jeune Lici-
nius. Au reste , il nous suffit qn'il ail ele dv-pcuille du titre
de Cesar, aussitot apres la defaite d- son pere , pour que
ses medailles appartiennent aux epoques que nous kur avons
£x6es.
Mcdailles de Litiniiis. 24. ^
puis rAQ;c de c|euv ans jiisqu'a celiii de liult 5u neuf
tout au plus. Ccpeiiclant la iiieclaille qui n)'a ('ic
cpmnuiui(iu-'e offre , ainsi (jue plusleurs autres gra-
V('('s dans Jes JSuniismala Rom. Iniperator. de
D.Baiuluii,p. 198 ,les trailsd'unndolescent ,au point
que leP. Ilardouin (i) , qui a public quelques medail-
les de ce. prince , n'lie&Ile pas de lui donner vingt-
deuxans. ( i\'a/7uj/7i. scecuU Cotistatitlnl , p. 469).
La seconde difficulte est d'appliquer a ce j.eune
prince le revers de notre medaille , semi^lable a plus
de vingt cinires diff^'rentrs pour la maticre ou poiu*
le module , ou bieu frappees en divers endroits. Ce
revers presente dsux ca})lifs assis et encliaines au
(l) LeP. 1'\ a.xAo\y\r\^^Nitn}'. sma I a scpculi ConstLinlliiian! ^■^. ^69 )
Tapporle plusieurs m^dailles de Licinius le jeune, entr'autres
celle-ci : D. N. LICIN. LICINIUS NOB. C. <t Capite galcaio
3 c.)m hastd -" ( Hamero dextro iinposita , dit une note nia-
iiuscrite ajoiitee a la marge de I'exeinplaire dt; la bibliotbt-que
dcs capucins de Rouen ') a. et clvpco , riiltu annorum ciiciler
s XXII. lOVI CONSERVATORL omnind ut in nummo
3> I.icinu pat lis. Similiter ^ decennalia vota lerU6 , ul ibi
J' injra S. M. AN. T. 11. societatis mercatorum primes Narbo-
» nensis Iributum octavnm , est ex ccie ininimo in t.'icsaiiro
» legio ». Ou pouiToit faire plus d'une remarque sur cette
explicalion ; mais ce n'est point ici le lieu.
Lc meme autenr , apr^s avoir rapporle plusieurs medailles
seuibiables a la noire, pour le revers, dit : « P^ictoriam a Liciuio
j> junioi e relatam hoc anno hi nummi significant j> . Alais quelle
est cette annec , et de quelle victoire s'agit-il ? C'esl ce que
le P. llardouin ne dit pas, c'est ce qu'il lui eiit etd impossible
de prouver par le temoignage d'aucun bislorien. Get auteur ,
Irunipe par I'insjection meme des m(^^dailles a prouonc^ avec
un pcu Irop de precipilalion.
Q3
8 4^ Nnmismatique*
pied cl'un trofL('e;au1our : VTRTVS EXERCITVS,
et dans le champ les lettres initiales de Tempo-
rum I'eUcitas. Or, loutes ces cKosps ne peuvent con-
vciiir III ciii fils qui ^toit un enfant , ni au pere, quoi-
quMl fill grand homme de guerre^ parce que-depuis
li' temps oil U ciea s-n fiJs Cesar , en 817 , jusqu'aii
com i ei) eraetit d>,^ 82 , qu'il d^clara la guerre k
son beau-frere et son collv gne , on ne le voit paroitre
ni da"sl'arni('e(!e Cris]:)e qni dc'fit les Francs vers la
jBn d 820, ni dari'- c( lie de Conslanlin qui vain-
quit le? Sarraries en 822 ; qu'au contraire pendant
crt ill rvalle il sp livrcit aux exces de la debauche
la plu^ effrv'nee , comme Eusebe nous I'alteste (i).
Le^ monumens paroissent don? ici en conlradic-
tion av c L\s bistoriens. Pour delerininer a qui nous
devons ajoufer fo , j-osons qnclques priricipes.
II t si certE^in que qiiand un fait est rapporte par
des bistoriens snn«; f^tre "ontredit par d'autres , il doit
etie adm's. Je dis le fait en lui- reme, parce que
lis c'i-corst;.iv es cpii I'acco pagnent peuvent ctre
alt/ires , cban; res , denaturees meme selon Tigno-
rauce , les prejugi^s , I'interet ou la passion de celui
(t) Pcm (inins Loslus semble donner a entendre, ilj.sl i,
qii'i Y a eii plusicurs guerres entre Lieinius et Conslantin :
m;:is il est le seul qui s'exT rime ainsi. Tons sunt d'asca
a dire que Liciuius ch'rchtjit a rendre son collegue odienx ,
que plusieurs fois il trama sa ^erte ; aucun ne parle de guerre
entr'enx do- uis que Licinius le jeune fut cr(^e Cesar , et avant
I'an 3i3. I! re f.-mt done entendre par ces mo Is : iiiodd pox ,
moau ;c!liirn , rien autre chose sinon qu'il ne regnoit poinJ
\iue Yentahle conccrde enirc ces deux empereurs.
Mc'daillej de Lirinin<;. 24.7
qui Irs rnppoi te. Aiii>i , par example , Scins sortir
de notrc sujct , Ics liistoriens s'r.cco dent a dire que
.i^iciniiis ie pt'ie a 6u'' assassin". Co fait ne p"ufc
e!re levp [ue eii doiite ; niais sa mort doit-elle elre
aHrii:!uec a uue veugeance afroce de ConstHntiii qui
jui a\ oit so!enm.dlement proir.is !a v'e ? C\'s\. sar
quoi les historiens nesonf point d'arco d ( ). Cest
(r) Dans I'ouvmge inlituk' : Pnlilia SS. PP. nnslroriint
rnelrop/mm's el ^l/e.randi i y doDt I'Hxtrait se trouve dans la
bibliotlit-que de Pliotlus , p. i^-C^. On lit que Licinius fut
tu6 pour avoir excite une sedition dan^ le lieu de son
exi'.
Thcophane , p. 14 ; Cadrenus , t. I, p. 284 ; Zonaro , p. 3. ,
discnl de meuie que Licinius souleva les barbares. Sozomene
pt Taulcur da Cluonicoii Paschale , disent sim lement quo
Licinius a el.e assassine , sans entrev dans aucun detail.
Eutro e , ]iv. 10 , et Aureiius Viclor donnent ;\ entendre
qu"a peine arrive a Thessaloaique il y fut elrangle par ordra
de Costantin.
Pomponius Lastus , et Zonare ( p. 3 ) pretcndcnt que Cons-
taulin consulta le Scnatsurct; qui' devoit faire de son pri-
sonnier ; que le Senat en rcnvoya Jc jugeni-jnt aux soldatsqui
le luerenT.
On rt'marque aiseraent dans ces recifs difTi'-rens I'espTil
qui anime les historiens. Les ecrivains paiens, sans oser
exruser Licinius , cherchent A rendre odieux Constantln ,
que les ecrivains chretiens ont peut-etre Irop cherche a dis-
culpef dans celte occasion , comme dans plusieurs autres.
Aw teste , il seroil bien singulier qu'ils se fussent tori.<»
trompps , et que Licinius txile dans les Gaules , y fut mortde
inaladie; c'est cequ'as^ure Jean, Pretre de Nicomedie, dan.s la
vie de Saint finsile , eveque d'Amasi'e. Sou temoignage
doit etre d'un grand poids , puisc[u"il dil : T.ilten's Duiidai
etsiiiipla liliucjujie sluJui <jua'cutiu/uc riJ/ , atidi>i , Jidi*
Q 4
548 Niimi'm-tuiue.
sur qiioi on pent elever des doiilos legitimes.
Mais qnaiid iin fait rrpporie prir les historiens,
sp trouve contrcdil par 11 r, p'and nornhre de me-
dail.'es snr P.-int quite descjiie'llf^s on ne pent avoir
ancnn soiipcon , quel parli prendre ?
Eecourir aussitot a Pj^noranre , a I'iiTiperitie , k
I'iiiexactitnde^ a la ivauva'se foi des morietaires ,nVst-
ce point s'exposer amoi Irer souvent sa propre igno-
rance , ou presumcr vn pen trop de ses connoissan-
c.^s , et se tirer d'une 'J.ffi.ulle avec plus d'adresse
que de sinc'rite ? Wesl-cp point donntr quelquefois
du poids a i\Qs explicalior.s 1 izarres et tbrcees , a des
conjee ures hasard.'es et sans fondement ?
D'une autre cote, r'j recourir jan^ais , attribuer
aux niedailles une sorie d'infaillibiiite historique ,
n'est-ce point s'exposer a eire souvent le jouet del'er-
reur on de I'im posture ?
Quand \es meedailles contredisent les hisloriens , il
En effet x avoit ete temoin des persecutions que Liciniiis avcit
exercees centre les chretienSj etn'eloit par consequent point
interesse a flatter ce prince -. on ne voit point qu'il le fut k
.en imnoser. Voici son recjt : « Liciniinn cum J ere ad mortem
» usque hiipeiator ( Constantmilis ) casligasset , regali et qua-
3> ciimque ilia priiic'ipatus poiesiate priialum in G alii am de-
it mandai>ii ///«/« morte punjre noluit Ei autem , ioio
i> Senalii audienle , dixit: luge el pcpnitentiam age... iii/iilumi-
M 7uts taiiitii diiina pcena i eJiementey ilium aggressa est; in
■» ea cm in regioue , ad quant missus est , dijji cilia qiicvdam
-V ulcera , lemedia ejus malitice coiia,iuenlia , similem illiy
j> quaui Macrimiauns passus Jueral, plagam attulenint. Cian
■>> igiiur graviter ingemiscei et et solum f>eium Deum a se lepro-
^ batumjuisse conjessus es^el^ex ]iao i^ita miser ai^uhusjuit «,
( Suvius^ 26 aprilis. )
Mf'daHlrs dc I.irnhis. 549
faut^avant lout , exa viner les ieiTirs,les circons-
taiKCs dans lesquels elles out et'j frappces. En g^nic-
ra!^ ceiU'squi apparticnnent a des tea-psde iroubies,
dv' despotisms ou d'anarchie , doivcnt elre pi\>s-
que lonjours sii^pecles.
D'aj res ces priacipes , que je crois ju^tes, il nVst
pru!-etre pas loujours aussi diilicile qu'il le paroit de
concilier souvent i'Lisluire avec les monuniens. Ces
pnncipes vont done in'aider h r^soudre I'ospece de
probleme que presente nofre ra^daille.
J'obscrve d'abord que cctfe medalle et toutes
eel les qui lui resseinblent, soitpourle revers, '^olt pour
I'inscriplioa ou les lettr^s qui se trouvenl dans le
champ, n'ont dii etre fappees que dans le cours
des annees 321 , 322, et tout au plus tard an coni-
meticement de 323" , cVst-a-dire , avant la ba^aiile
d'Andrinople ; parce que des cette bataille Licinius
Ic [Ore fut vaincu , ensuile battu sur m:r par Crispe ,
eiffm defait a Cbrysopolis par Constantin , depouii!6
de la poiupre , rel^gue a Tliessalonique ou il Tut
assassin(:i. Or des niedaUIes qui sur leurs revers a:i-
uon'.cnt la victoirc ^ la i'cJcur des che/s et des
soldats y la /ilicite des temps , une heu reuse
t ra ncju lit Lie J r\G ^ewwQwi cerlainenient appaitcuir
tout au plus cju'au ,oiii'n'encement de cette annee ,
en supposant qu'on ait voulu c61ebrer les exploits
du pere sur les medailles du ills.
Mais , si le pere , comnie nous I'avo ^s deja rs-
marque , depiiis cjue *on fils eut ete rie6 Cesar, n'a
pris les armes (^u'en celle ainu'-e ou il a topjoui's ete
vaiiicu J el s'il est peu probable que le fils ait <^l9
2'>o Nnwjsmntirjuc.
dans le campde son pere , ainsi qu'il le jTsroIt , pni's-
que Liciniiis, avant la bataille do Clirjgopolis , cr a
Crsar, Marti! ien , mailre des oOiciers d. son pa-
..lais (i), poinquoi ce graud nonibre de iii dailies?
Car Bancii'.ri en rapporle ]-rrs de frente snr le.squelles
on aniionce les vicioi res de cet en fan!. C'esf que
ces ir.edailles ne presentent que des faits , si j'ose
* dire, en espcrancej c'est que Ics reveis offrent des
voeuxtt nun des monuinens.
Voici sur .(|iioi je fonde cetle ex lication ^ qui,
selon noi, n'est point une simple conjecture.
Conslantin travai'loit avec aideur a la popaga-
tion de a rt 1 gion clireliennequ'il vcnoit d'enbrasser.
Par son ordr. , dit i'liisiorien Socrate (2), les lemples
(r) " Constant-no node casira Liclnii irriimpente , Licinius
" J i^i^cnn fctiit . Bizantiurnque Juoa lolucri penemt, ibi Mar^
■»• iimanuitv ojficioium mogistium Cci-saiem cieal ». ( Auid.
J^ictoris epitome. )
C-2J AaAoj Kii-js-Mrtvo; ^V) o ,Sctj-iX?'j; tu th k^i^^ (p^ov^v . . ~
(tVTois aya^.f^ara,. ( Sociat. liii.' i , cap. 3. ). " Kl Constant
'j> tihits quiJein imperaiar cundla aaehal lanquam.christianus ,
^- gcnlilium'^teinpla clatidehs' oc' diiiuens et statitas in-ii.lis po-
•J*^J.itas publicans ». L'expressiun ^ytyaji^um , publicans., pre-
. sentji deux idees ; i.** cells de devoiler les mysteres pour en
liioiUrer le ridicule , I'lnfanai- ^ et les exposer au inepris ;
2.'-^ telle de f ai re y unlive lea stalues , Jes vases places danS
les Lemples : nous prelerons cette deniii^re idee , conihmeQ
par ce passage du C'hionicon Paschale : tto-vtu T<Anhiha.
a«i5vre£Viju Ka,rt?(^tyZ) , y.c/.i 7.-xyrci avrav u^ttXzTO rot ^f5;^«(«r<«
Kcii x,TijfAairoi .y Kcii TTciTDt? ra; z:-i.K>-y,T:o!,^ th x^tsoa t7Hy.i)criv y
• Tiu-Jrc&g -r'o-j; ,'V;^<5<«V'j'f. « Omnia ubique.idola dejecit , eorum-
^•» (jtie pecuniis omnibus et posscssionibiis ablatis ^ uiaii'ersas
■». Chiisti ecclesias omnesque christianos its donai.'il --^ ( p iCi.
Me dailies de L'lr'inuis. 25 1
drs faux cUeiix (^toieiit oii fermrs on alwtfus, lenrs
statues vendues ail profit des e^ lisrs et (le.« c' rrti^ns.
Llciiiius , ail coiitiaire , deseileur dii clirisiic.-
nisme , qu'il n'avoit point enibraGS- d.^ boiinci fci ,
et livre , dit le nieme aiiteur , a toutcs 1 s sii[;er.s-
tilons du paganisms, avoit pour les chivlit-ns une
haiue qu'il porta jiisqu'a la fureur et a I'eMra a-
gance , conime nous I'a.^surent Sozomene , Eu-
scbe^ Tl ro[jhane , Cedren. C'est , Sclon Socrate et»-
I'auteur d'un ouvrage cite par Pliotius , et coinme
I'assure posltivement, apr>s les lii^toiiens du teir.ps,
J. B. Egnati (i) , aux sentiniens opposes qui ani-
moient ces deux empereurs, qu'il faut rapjorterla
guerre qui eclata entr'eux, I'au 323. Mais, des plu-
sieurs aiinees avant, Licinius Iramoit la perte de son
colleguo. Les paVejisne Tignoroient pas;Ils faisoient
des vocux pour le succes des entrepriscs de relui qui
prolegeoit leuvs dieux et leurs autels , coinme ils de-
siroieiit la pei te de celui qi.i s'en ttoit d clare Ten-
iitnii. Dans les colonies, sur-tout , on montroil sans
d^guisenieat le desir que I'on avoit de voir Licinius
tiiomphcr de son collegue;.c'est-a-dire , de voir les
superstitions paiennes se retablir sur les ruines du
cbristianisiue. On se fiat toit que Licinius, a en jnger
par ses dispositions , opercroit cet heureux cbange-
ment.Puur I'y engager, onlui faisoit enlrevoirqu'en-
fin sous le rjgne de son fils , vaincjueur de la race
des Conslanlins , on gouteroit les douceurs de la
paix ,de la felicite , ou , cequi etoit une meraediose ,
que le culle des dieux jouiroit de sou antique L-
(I) Lib. I.
2 5 2 JV u m is mat'iqnt.
l)erl<^ , reprieridroit son premier eclat. Voilapourquoi
sur les medailies de cct enfant , on le veil tantot cou-
ro.iiie de laiiiiers, fanlot le casque en tete, ou rev^tu
du paludamentuin 5 qu'on lui donne sur la noire
la couronne radiale , qui est une sorte d'apotheose :
voila pourquoi sur tant de revei-s on Irouve les
marques de la vicfoire , qu'enfia on y lit dans le
champ les leltrc-s initialesde Tenipomni FeUcitas ,
Beata TranqullUtas,
Ci qui m'autorise a interpreter ainsi notre medaille
et toutes celles qui lui resseniblent , et a "en fixer
la date aux annees 821, 322, ou tout au plus tard
au commencement de 323 , c'est le sujet meme de
la guerre qui s'alluma cette ann^e. Que ce soit Li-
cinius,par liaine pour Constantin et pour le chrJs-
tiauisme , qui Tail declaree , comme le disent Tauleur
extrait par Photius, pag. 1407, et Eusebe , dans
U>i\ hisfoire eccles'astique , livre X , chap. VIII 5
ou bien quece soit Constantin qui ait pris les armes
pour arreter les violences que Licinius exercoitcontre
les Chretiens-, comme I'assurent Socrate , livre I ,
chap. IV; Tli^ophane, pag. iSj Cedren, t.I ,p. 283,
pen nous importe. II suffit que le motif de cette
guerre fut d'un cote la defense de la religion chr^-
tienne , de I'autre relle du paganisme, pour que
notre ex])ljcation soit fondee. Or, outre le t(^moi-
gnaie des 1 istoriens , on en a la preuve convain-
cante dans !e discours mcme que Licinius tint h ses
troupfs , a\ant la bataille d'Andrinople , rapport^
par Eusebe dcins la vie de Constantin. « Mes-
» amis 5 leur dit-il , en leur presentant les idolcs ,
Me failles de Licinius. j53
» volla les dieux qu'acloroient nos ancetres , voila
» Ics objcTs cl'un culte consacrt'! par I'antiquile des
>) temps... Celui cjui lous fait la guerre , la declare
»a nos peres, il la declare aux dieux memes ,
» etc. ».
La contradiction qui paroif re^-ner cntre Piiisfoire
el les revers des medailles de LicinLus le jcunCj
peut done se lever a I'aide de I'histoire meme.
Quant a ce que la tete de ce prince offre des traits
au-desius d^; l'a.ie d'un enfant de liuit h neufaiis,
cette dilKcnlte s'evanouit aisenient, lorsque I'oa sat
combien a'crs les arts elolent declius de leur per-
fection, et que I'on fait rcllexion que cos medailles
ont ete frappees loin de P».oine. Celle doiit je parle
I'a ele a Treves, comme on le lit dans rexergue :
PercLissn TRei^lris. Or , les mom'taires des colonies
copioient ordinairement les tetes des [:rinces d'apres
d'aulres m;'dailles. Eh! combien un portrait ne s'al-
tere-t-il point par des copiv^s sou vent peu soicncos,
on faites par djs artistes mal Labiles , parnii les'juels
on peut mcttre celui de Treves, si i'on examine Ig
irauvais gout et Tincorrcction du dessin^ sur-lout
dans le revers ?
A cette raison g^nc'^rale , on en peut ajonler une
qui regarde parficulierement les medailles de Licl-
nuts Ic jeune. Le mondtaire d3 TreVcS , oninu^
ceux des autres colonies, savoit que ce prince avoit
^t6 rrde Cesar en m^ms temps qua Grispe, (ils aino
de Constantin ; il pouvoit done les su^jposer Tun ct
Tautre a-peu-pres de meme age. II n'ignoroll point
en outre que Licinius avoit ety consul avcc son
^4' NumismfiVque.
oncV , des Tan 819 (i), et qiioique dans res temps
le ct)!isulat lie liil plus qu'uii nom rpii Si-rvoil seii-
lemenl a iixcr la date de& actes piibliis , cepcndant
ceiix qui n'cn rtoieut [.as tpnioins ne pouvoieiit guere
j\na;.,nir c:r.\iii empertur 't.! (!ne Constanlin sa fut
<isso:i , pour collegue dans le consulat , un enfant
de Cjiiaire as.
II ii'est done point oionnant que ce moiietaire et
plusieurs antres aieul donni a Llclulus les traits
de radolesceuce.
Tel est Pe plication que js crois poiivoir donner
de cctte medaiilp ; ({iielf ne fond(^e nu'elie me pavoisse,
je la soumets volontiers aux lumieres des prrsonnes
plus instruites que moi dans la science numisma-
niatique.
(i) Le Chronicon PascJiale ne fait point men lion du con-
snlaL (le Licinius le jeune : il esl etonnant que celte omission ,
ou plutot ceLte faule, ne soit point coviigee dans les notes, puis-
que, dans les pieces cpii sont ajouiees pour I'eclaircisement de
cat ouvrage , on trouve Licinius le jeuue , consul avec Cons-
tantin. ( P^. Paschalis centum aanorum, p. 470. )
Cassiodore le met de meme consul en 32i ; il est bon
cl'observer que la claronique de ce,t; auleur ne s'aecorde point
avec celles des autres historiens. 11 fait donner a Licinius le
titre de Cesar, en Sig, marque la mort de son p^re en 828, etla
sienneen 3i9.(//J ^«'". Cassiodori ConsuUs Joan. Cuspiniani
Commentar. p. 491.)
LITTEKATURE FRANCAISE.
R O M A N S.
CLLESTT^rE.ou /a Flctime r'rs r^^sages , par
CuAnr.OTTE Smttu, autcur d'Anna , el dc
1 Oyh,hnc cl, Chnreau ; traduU He rAnglai. ,
SLir la troc sicme edition , par la crnycnne R
4 vol. in-r2 , imprimes sm- .aracl^e. ckXJ
l)iclo(,et sur papier earn' fin. Vvh: , 24 iv. hro-
cl.e, et 28 \\v. 10 sons , fVan cL- port par la pos c
poiirles dc'parte^^.enset ponr les pavs (c>« juis!
A Pans, Chez F. Bui.son , librairc , rue Hautc-
Ftniille, 11'. 20.
A •
-^ >^eize ans on aime les romans. Le caeiir est
n-uf, la eevivp, I'imauinafon fraicLe , les emo-
tions sont fK-iles; et I'a^ne encore , «re , ponr qui
la vertu n'esf pas nne chimere, se repait a ec d/--
li-esdes illusions tharmant.s qii'on ne perd que
trop f6t. Dans un age a-ance il n'est pas rare de
revenir encore a ce gout ile la premiere jeujiesse.
II sembleqne,lass6 de la trisle recrlire^, on airne h
cherci.erdaus un monde deal, des elres qui fassent
oublier ceuv dont la connoissance nous a si cruel-
lement drlromi)es.^L'hi<toire ne nous offre que irop
souvent le spectacle amigpant de 1' nfrigue en cre-
dit et du crime heur-uv. C'est nn ! esoin pour I, s
nmesscnMbles, de clierc!:er quelquefois dans le pa-s
des fi lions , des iivagps douces et des sealimens r,f-
fecluenxqui les consolent -des tableaux rembrunis ,
<le lY-o.snie et de la sechercsse qu'c.Ics ren ontrent
sjG Litle ratine.
dans le rronde. Les romans auront done toujoura
dis lecieurs.
PaiMu les romanciers, les Anglais se sont dlstln-
f[u6s par le soin qu'ils out eu de prrsenter iin ]ini-^
losoplie , des caracteres , des peintures de mcx3urs ,
et des nuances de senti nens et de passions qui ont
contribue aenmhir I'histoire du coeur hutnain. Ciiez
eux les femnies ont.aussi cultive avec succes cette
I'vanche de litreralnre. Madame Behii , restima-
tie auteur de Cecilia^ et plusieurs an Ires, se sent
fait lire avec un vif interet. Chaiiotte Sinitk a pris
11 n rang honorab'e parmi ces auteurs. VOrpfieLlne
diL chateau ^ fHerititre gaUolse avoient commen-
ce sa repntalion. Le roman que nous annoncons
ii'est pas indigne de ses aines. Une intrigue peu
compliquee , mais naturelle , des peinturts vives, des
passions , des sentimens verlueuv , nne sensibilito
vraie , ces nuances delicates qu'il n'est donne qu'aux
femraes de saisir , caractciisent eel ouvnige 5 c'est
line femtne aus^si qui I'a traduit, et c.'es; avec plaisir
que nous dirons ici que le sljle nous a paru pur et
iiaturel , a qnelques expressions pres , oi^i Madame
B. n'a pu se defendre de ce neo'.ogisme qui a
deja si cruellemant defigurj la langue. Voici I'ana-
Ivse du roman.
Ladj Mortimer , restee veuve a trenfe ans , passs
sur le continent avec ses deux enfans, Georges et
Matilde. Seduite par la siluaiion rianie ct par le
beau climat d'Hieres sur la cote de Provence, elle
y fixe son sejour. Dans une abbcije de Bernardines ,
oil elle avoit plac6 sa fille 3 ciie trouve m:e orphe-
line
Cekitine , on !a Victime des preiage^ , i'j-j
line nomm(''e Celcstine clont on ignore la naissance,
el ilont l:-s graces enfantiiies lui causent le plus vif
intercf. El e forme le projet d'aller arraclicr I'ai-
iTiahle enfant au sort qui la menace , et apres quel-
quesdi^ficul{cs que Lady Mortimer leve ^ prix d'or,
ellc la prcr.d sous sa protection, quoiqu'elle n'ait
])u se procurer aucun eclaircissementsur le mjster^
de sa naissanco.
C^lcstine devenue membre de la famille , se rend
de plus en plus digne des bontes de Lady Morlimer.
Elevee avec ses enfans , la douce intimity qui regne
entr'eux allume insensibleraent , dans le coeur du
jeune homme, una passion qu'il se d^guise d'abord-
«t lorsque sa mere , au lit de la mort , lui fait pro-
mettre qu'il epoust-ra sa cousine, dont les grands
Liens repareront lo d^iabrement de sa fortune , il
voit avec efFroi qu\m sentiment plus fort que toule
Taison le rend rebelle aux dernieres volontes dt; ta
respectable mere , et que Gelestine a decide du sort
du reste de sa vie. Lady Mortimer meurt, et laisse
a Gelestine 5 pour souvenir de son attachemenl, un
legs qui assure son ind^pendance. La jeune orphe-
Lne a concu , pour Id fils de »a bienfaitrice, une
passion dont elle ne £e rend pas d*abord trop compte
a elle-raeme , mais dont ellene reconnoit la violence
qu'avec I'impossibilit^ d'etre jamais h Mortimer,
<lont le mariage, avec Lady Ossoiy, sacousine, est
annonc^comme tres-procliain. Humilice par Matilde
deveuue Lady Molineux , et ne trou\ ant plus dans
I'amie et la compagne de son enfance qu'une femQje ,
vame, dissipee, insensible, Uautaine, qui I'acoable
2 58 lAthnture.
du poids dc' sa siipbiiorile ; senfant d'ailleurs la n(5-
cessite de fuirl'hommequ'elle afme,qiii luia dtklar^
sa passion, et dent le respect pour la m^moire de
£.1 hieufaitrice 5 el la delicatesse lui dofendent d'en-
couraj^er les esperances , elle prend la r^solniion
d'ailer cherclier , dans un asyle solitaire , des forces
conlre un penchant trop cber et contra le danger
de rencoutrer trop soavent Mortimer. Elle execule
sou dessein, et se r^fugie a Tliorp Heath avec un«
jcune personne nommee Jessy , qu'elle a irouv^e dans
la voiiure puhlique , el qui lui raconte ses aveu-
lures.
Mortimer apprend sa fuite. Indigne de la con-
duite de son beau-frere , il rompt avec la famille
Ossorj qui, voulant presser le mariage, s'etoit servi
de Molineux pour enlacer le jeune homme dans un
piege inexiricable. Vavasour, son ami, le sert de
*a bourse. Mortimer arrive h Thorp Heath, annonce
a Celestine que ses engagemens sont rompus, et la
presse deconronner son amour par le don de sa main,
lies objections d'un coeur qui aime sont ais^nient
levies par l*amour. Celestine se rend, les preparatifs
«e font , la ceremonie est sur le point d'avoir lieu ,
lorsqu'un jour une lettre force Mortimer de parlir
Lrusquement pour se rendre ^Exeter. Celestine attend
sonretour avec toute I'anxiet^ qu'on peut s*imaginer j
mr.is elle ne recoit que des lettres mjsterieuses qui ,
en la hvrant aux plus cruelles conjectures , n'offrent
h son imagination aucun espoir , aucun terme a son
iiijCprlitude. Dans sa derniere, Mortimer annoncoit
qn*il ne pouvoit fixer le tejus d» sun retour.
Ci'lesline ou la Victiine des presages. «59
C^lestlne , pour distraire un cocur profond^ment
al?lig6, \accepte un asile qui lui est offert ])ar un
respt'clable recteur. Le plug jeuue de ses fils , nomme
Monlai^ue, prend , dans ses jeux , un amour raal-
lioureux qu'elle lebut.^ , loin de I'encourager , en
drciajaul formellement son intention de n'^couter
aiicune proposition. Pour ^ciiapper a ses persecutions ,
ainsi qu'a celles de Vavasour , ami de Mortimer ,
qui se croit en droit de le remplacer, elle fuit en
Ecosse^ avec une madame ElpLinstone, femme ver-
tueuse et int^ressante , dont le frere a epouse la jeune
Jessj.
Dans la rou!e, la petite Verole qui prend a un des
enfans de madame Elphinstone, fournit a C^lestine
line nouvelle occasion de faire briller la bont6 de
son coeur. Une dame d'un certain age, que le hasard
conduit dans la meme auberge ^ est toucb^e de sa
conduite et de sa sensibilite , et concoit pour ell*
rattacliement le plus vif. Cette dame est Lady
Howard. Elle presse sa nouvelle amie de la suivre
a Londres j.et de passer ses jours avrc elle. L'amante
de Mortimer refuse , et va enterrer dans un desert
de I'Ecossc j tant de graces et do verttis faites pour
6*re I'oriiemeiit des plus brillantes societes.
Nous pas«erons rapidement sur son scjour en Ecosse ,
qui n'otiie d'autre a>enture remaccjuable , que I'ap-
parilion du jeune Montague. Trop profondement
/iprls pour renoncer a toute esp^rance , il a fui d'Ox-
ford , el a suivi les pas de notre b^roine. II arrive
a temps pour rendre des soins a madame Elpliins-
toue, h laquelle ujii accjideut tragique enleva sou
c6o IJtferainre.
mari ; etCelestine, quoique persistant a ne pas en-
courager iin amour qu'elle ne veut jamais ecoiiter,
est forc^e , par la malheureuse situation de son amie ,
a souffrir que Montague les accompagne jusqu'a Lon-
dres. lis soat rencontres par Timpetueux Vavasour
qui ne voit qu'avec depit un rival dont sa vanit6
c'indigne, et Celestine ne calme ses eiiiportemens ,
qu'eu engageant Montague a retourner chez le rec-
teur , son pere. Vavasour est porteur d'une lelfre
de Mortimer , ou ce jeune liorame d^voile enfm a
son amante le mvstere qui a cause son brusque depart.
Une trame ourdie par la mere de Lady Anne , qui
n'a pas renonce a I'idee del marier Mortimer avec
6a fille , I'a force de fuir ceile qu'il aime , dans Tin-
certitude ou il est si elle n'est pas sa soeur, et jusqu'a
ce moment, toutes ses recherclies ont ete vaines.
Vavasour proiite de I'espece d'abandon ou se trouve
Cdestine _, pour la presser de lui donner sa main.
II n'est pas mieux recu que le jeune Montague ,
dont les vertus ont pourtant ete appreciees par Ce-
lestine qui lui a vou6 l'amiti6 d'une soeur, mais dont
le coeur reste toujours fiddle a son premier attache-
ment.
De retour a Londres , I'orpbeline accepte un asile
chez Lady Howard , qui paroit d'abord pencher en
faveur de Vavasour, mais dont la predilection ns
tarde pas a se declarer en faveur du jeune Montague.
La nouvelle en passe la mer , et s'en repand jusqu'eii
Itaiie , oil elle trouve Mortimer qui , dans son depit ,
pense a conclare avec sa cousine Lady Anne Ossory ,
Iin matiage dont ia seule idee I'a toujours fait fremir
Ce'Ieitine , on la Victim/', drs presage's , 261
d*efifroI. Differentescircoiistances presententlesamans
I'lm a I'auire, comme engai^es dans des desfinees
cantiaires a leurs premiers voeux , au point de se
regarder miiluellement comme inlideles , lorsque
I'union clandestine de Ladj Anne avec un Irlandais
degage Mortimer d'un hvmen que sa reconnoissance
pour son oncle le d 'cidoit a conclure contre le voeu
de son coeur. II cherche des distractions dans dti
nouveaux vo^^ages , et s'enfonce dans les Pyrenees ,
oil le liasard le conduit dans un vieuY cliAteau , dont
le proprjetaire liii raconte ses malheurs et sa deli-
vran: e quM doit a la revolution de France. Dans le
cours de la conversation , Mortimer reconnoit avec
transport qu'Jl est I'oncle de cette jeuns orpheiine
^levee a Hicres au convent _, oii un barbare grand-
pere I'avoit condamnee a etre ensevelie , au moment
de sa naissance. Ilrepart, ivre d'amour ct de joie,
traverse rapidement la France , et arrive en Angle-
terre , oil il trouve sa Celestine encore libre et ne
respirant que pour lui. Lady Howard embrasse avec
joie une niece dans I'enfant qu'elle avoit adopte. Un
heureux hymen metuu terme a ces longuessoufirances
des deux amans.
Nousne laisseronspasnos lecteursdansrinquii'tude
sur le sort de l'ijil(^ressant Montagne. Le retour et lo
bonheur de son rival le jettent dans une maladicqui
fait craindre d'abord pour sa vie , et ensuite pour sa.
raison. Les ^poux se servent , pour le gu^rir , de
Tctonnante ressemblance d' Annette, cousiue de Ce-
lestine, avec celle qu'il a aim^e. I J s'accoutume tel-
lement a cette nouvelle Celestine jplus c )mpla;sa iie^
H 3
962 Littcrature.
plus attentive que la premiere, qu'il vient a la chhlr
avec line ardeiir egale a ceile qui avoit caus6 soii
mallieur ; au .retour de sa raiscn , la i-econnoissance
acheve ce que I'instlnct a commenct^ , et son union
avec Annette ne lui laisse plus licn h envaer a
son rival.
Telle est la trame principals de ce roman. On voit
que le funds en est simple , et qu'il ofFre quelques
Ynoyens us^s. Mais on sait aussi que ces sortes d'oLf-
vrages vivent de details 3 et les develoj^pemens, nows
le repetons avec plaisir , en offrent quisont pleinsde
graces et de naturel, et qui en rendent la lecture ex-
tremementattachante. F. N.
P o E s I E.
}pR J GM ENT (Viine traduction de fEpttre de
Pope , au docteur Arbuthnot.
Portrait d^Adisson.
\A V epoque oii cette epitre parut a Londres j ^disson j ai^-
teur de la celebre ii a^edie de Caton , etoit secretaire d'eJat.
JPope crut avoir a se plaindre de lui , et it s'en fcngea par Ics
vers suivans. La vengeance et la satjre sont malheur eusemcnt
trop communes ,• mais ce qui ne Vest pas y ct soni lesjormes
■piquantes de ce portrait oil j contre I'usage ordinaire des auienrs
de ce genre, I'eloge est mile a la satjre et ne fait que la.
rendre plus saillante. II a reuniles bonnes et les mauvaiscs
^ualites de son ennemi , et il est probable quAdisson en Jut
d'autant plus blesse que Pope apoit ete plus juste.
Si ma muse , ^ ces minces aiueurs ,
,Veut bien donaer le i^om d'heureuat copipilateurs ,
VorlraU aAfisson. «63
Que's ens ! Oui , dlsent-iU , clans sa fureur extreme ,
li lancera ses traits contrs Adisson lui-meme.
£^1 bien ! qu'ils meurent done dans kur obscnrite.
Mais representez-TOus un ecrivain \ante ,
P]ein de grace et d'esprit , sachant penscr et vivre ,
Aimablc en sfs discourSj sublime dans unlivre,
Partisan du bon gout , arnoureux de I'liorneur,
Fait pour un nom celebre el ne pour le bonheuv ;
Mais qui , comma les rois que I'Orient riWcre ,
Fense nebien rrgner qu'en etoufTanl son frCre ; (i)
Concurrent dedaigneux et cei cndant jalcux ;
Qui, devant tout aux arts , les persecute eu vous ; (2)
Blamant d'un air poli , louantd'un ton periide ,
Cherchant a vous blesser , mais d'une main timide;
Fiatte par mille sots et redoutant leurs traits ;
Tollement obligeant qu'il n'cblige jamais j
Dont la haine caresseet le souris menace ;
' Bel-Esprit a la cour et ministre au Parnasse ;
Faisant d'une critique une afikire d'etat ;
Ainsi que son hdros (3) , dans son petit Scnat ,
Reglant le peuple auteur , tandis qu'en son extase.
Tout le cercle ebalii se pame a chaque phrase.
Parle ! qui ne'rirait dc ce portrait sans nom ?
Hais qui ne pleureroit , si c'etoit Adisson ?
Et qui n'auroit pitie du contrasie bizarre
D'une ame si commune et d'uu talent ai rare ?
Par Del IL L B.
(i) f^oUaire a pris ce vers a ^ddisson 3 il est juste de U lui
rendre.
(2) On salt qitt Us Uttres a^oicnt Jalt la Jortunc d'^i'
diss on,
(3) Colon,
" 4
Fragment cCuth poeme non linprinid
intltuU : Clialon-sur - Maine , par t a b n e
d'' E G LAN T I N E.
Fahrc d' Eglantine Jit paroitre en 1786^ dans les Etrenne.t
dti Parnasse J un morceau de ce poeme. 11 n'acoit pas eiicoi e
pris a cetfe epoque , entre les po'eies coviiques , cclie place
drstinguee que hti as sin en t principalement le Philiute de
Moliere et I'lntrigu* ^pistolaire. Ceu.x qui aiment assez les rers
pour les hie tons, remarquerent dans ce premier jragment ,
ail milieu d'ldees et d'expressions bizarresj plusieurs t^ers da
suite qui annoncoient a-la-Jois de la renej du naturcl et de
Voriginalite. Le morceau que nous impriwons , sur one cnpic
de sa main, iffVe peut-Hi e encore plus de bizarrerie ; mais
nous au'ons pease que la reputation de Vauieiir et sa dcstinee
politique,ajouteroientquelqii'interct a celuique les t-crs pcuvent
d'ailleurs inspiier comme essaide sapremiere jeunesscy dansun
genre qui exigc bien plus de gout et d' elegance.
Cent fols je me suis dit : 6 si jamfiis le sort ,
Au gre de mes souhaits, me clioisissoit un port !
Je le ^oudrois ici. Ma blanche maisonnette
Regardf^roit Bu«sy, Chalon , Moncoy, la Fretle.
Cliarmante seulement par sa simplicite ;
J'y logerois les moevirs , I'amour, la liberty.
La nature , les avis , dan* cetle solitude ,
Seroient mes goiits cheris et ma plus douce ^tude.
O quel rare plaisir, alors que dans I'ete ,
Vers le milieu du jour, Fair brule dilat(^ ,
Secouru de Biuliin , de Linne , de Barrere , (i)
D'6parpiiler au frais ma moisson priutanniSre }
Dechoisir, d'elaguer , par des soins amoureux ,
Les ramoaux d'une plante et ses appas fibrenx ,
Et d'un doigt delicat , au papier didactique ,
(i) Natiiralistefrancais , auleur.de la France Ec[uiaoxiale>
et d'uuc Histoire dcs oiscaux.
Ch''on.^-sur-Mnrne , Po'we t65
D'oteiidre et inavier leur forme analomii^ue!
I.e Velar dea chanteurs , le soucliet parfumc' ,
Et la Menthe gtrsde, el le Trefle embaum^,
Chacun , pour se ranger dans sa verle faraillr,
Auroit quitle Vordsmie ou le bois ds Cri/ziile.
Des trcaors dc la terre , aiasi rechanliiloa
TapLseroit sans frais mon riant pavilltni.
Sans le secours du luxe fft de sa main couteus* ,
Mes pinceaui orneroient la SparjulJe frilleu**.
Seulement, pour donner aus cadras d#s Umbiis ,
line forme diverse , et meme un peu de prix ,
Des vieui jours de Chaion , vappelant la memoire ,
J'j Toudrciis r«cueillir »a plui antiqje Lislcire.
Ici, Turne, la lampe, ou I'arme des Gaulois ,
Mapprendroifnt et leur culle , et leuri moeuvs , et leura lois»
Plus loin , quclque penate , ouvrage sans scie^c- ,
Me montreroil quels dieux se lit Ic'ur ignorajjcc.
Je saurais qu'A Cbalon, et pr^s de Mtnnecy,
Mercure eut des autels et Cjth6ree ausoi.
Mes sludieux amis , des muses soiiiaiies
y fiend voient comme moi st rendre IriLutairef ,
Soit qii'il fallut d'Elise , aux ciis ncirs , aui yeui pers ,
Resserrer les appas en un ijrique reri,
Ou soit que d'une aubade , i la blonde Angelique ,
II fallut preparer le tribut harmonique.
Tel.t parurent, tels sent , lelis brilleront vos goiits,
Chalonois : ces plaisirs sont cheris parmi tous ,
Une fete , un hymen, qutlque douce aventure ,
De vos vers chaque jour remplisscut la mesurv?.
An midi de la France, aux confins montueux
Qu'arrosent vingt torrens et I'Aude tortueui ,
Tel , doue comme vous d\m petulant genie ,
Tout im peuple poete , armc de I'ironie ,
A force de chansons , de lyriques tr^vaux ,
Terrasse la sottise et combat ie$ rivaux.
Loin de moi ces climats oi\ de sa main doree ^
«66 Tocsle.
Plutus forme awx Fran9ais une ame hypti boree.
Des remparts lyonnais me preservent les dieux f
Le multiple Bareme , A; olion de ces lieux ,
Y bouche les es; rits deson livre bizarre ,
Et d'un fraia jouvenceau compose an vieil arare,
Contraiat par son talent , si quelque jeune e«prit
Y goiite de Boileau le poeilque ecrit ,
Plutus le desherite ; et grace k ranatherae ,
Lr ginie est un yice , et la rime un blaspheme.
L E T T B- E
Alix Redacteurs cLll Magasin Eacijdopddique,
■p
-L ERMETTEz-Moi, Cito}'ens , c!e rcclair.er coutre !a
fbiUe d'impres'?ion la plus etrange. Je la trouve dans
la Fragment dii poeme de la Nature , insere dans
votre dernier numero. Je dis , en parlant de Voltaire :
Degoute des rois, et retire enfin dans sa maison de
rampagne, comme dans un port, apres les orages da
ia vie la plusagitee^
Enfin il guide au port une orageuse vie ,
ce qui a un sens clair et poetique. Au lieu de cela , oa
a imprlm^ :
Enfin il guide au port d'une orageuse vie ,
ce qui offre un non-sens , ou un &Qn& ridicule et inex»
})licable.
On s'est aussi trompe dans la note, sur ce vers :
Cornelic a vole dansses bras genereux.
C'est le nom que Voltaire donnoit lui - meme a
M.iie Corneille ^ lorsque je le soicmai^ ay nojji d#
Lftlre I.e. n?-:n. _ 267
la ; loire, comire I'n ti\^s-blen dii Pa'issot, dedonner
lui as'le ft dcs secuurs au saiij; du grand Coiiieilit; :
cc flit la jeiine Mademoi-elle Conieille (jue ]^- lui
envoyai,et non JMadanic Conu\'llo , comuiti \ous
riiiipriniez. Elie 11' iii excite an un infi'rot.
La note snr le Moiidain et rAnti-Mondaiu u'cst
pas lion plus ce f{a'elle dev; oil etre.
Salut et frateniitL' ,
Le Brun.
P. S. J'ajouteqne, dans raon Eclielle des eires 5
qui termine ce fragment , il failoit iuiprimer :
Tel aux regards perraas ce I'aigle vigilarite-
et non pas , 'let au, regard percant ; pour corres-
pondre aux regards du soifil ct aux regards dts
Die ax.
J'ajoate aussi nn'anivs ce vers:
II a touL expie puiscfu'il fait des Iicuveux;
vers qui deiv^ande grace pour Voltaire, parce qu'ure
J)onn'^ arlion repare biea des ouvrages indiscrels , il
faPoit un aliuca bien niarqut^ , et ne pas I'unir aujc
vers :
Aiusi (juaud de ^'eiius !es flammes sunt iteiiUei , etc.
SPECTACLES.
THEATRE DE LA RUE FEYDEAtJ.
Trenilere representation de Pis on , ^tragedle
en cinq actes,
Jl isoN , Iragedie en cinq actes, donnee pour la
premivTe fois le i3 prairial , a eu pen de succes.
L'tUiteur est le citoyen Petilot, que I'on dit tres-jeune ,
dont cette piece est le debut, et que Pirreusile d'uu
premier outrage ne doit point decourager ; en effet ,
le public , toujoi^rs juste , et les amis des arts ont
remarque au milieu des dcfauts de cette tragedie ,
quelques parties de talent sur lesqueiies on pent fon-
der des esperances.
On sait qu'une tragedie , intitu](^e Epicharis j con-
tinue d'avoir sur le theatre de la B.epublique le succes
qu'elle obtint dans sa nouveaute. Comme le sujet
d'Eplcharls a des rapports avec celui de Pison y
I'auteur da la premiere a declare dans les journaux ,
que la piece du citoyen Petitot a efe coraposee et finie
dans le meme temps que I'autre. Ce tdmoignage ,
rendu par le citoj^en Lc'^gouve a son jeune concurrent,
est interessant a rappeler , parce qu'il est un exemple
de Pemulation fraternelle qui aniiiae les hommes de
lettres dipnes de ce nom.
On connoit cette conspiration de Pison contre
N^ron , conspiration si terrible , dit Tacite , mais
qui ^choua. C'est le sujet de la tragedie de Pison.
Voici, en apercu g^^neral , le fonds de cette piece ^
Pis on , trc^([^g. 2?Jg
dontlo pinna trop pen de m^lhode et d'ensemhje ,
pour (jn'on puisse TexposTT dans ses details avec
regular itc.
Qiielques- iins des personnages ititeres>ans que
fournit Phistoire , se retrouvent dans !a Liag.'die, tels
que la veiiuHuse Octavie, le porte Lucain, el le philoso-
phe S^iieque. P fson et Lucain sont a la tf'te des con-
jures, parini le>quels s\'toient jeles a Pen vi, s^naleurs,
chevaliers , soldats, des femmes iiieme, et par haine
pour le prince, et par interet pour Piion. Dans la
tragef^die, c'est par a?nour pour la patrie que Lucain
conspire ; et il j joue le role que Tacite donne a
Lat^ranus , consul d^signe , et Tun des conjures.
Lucain veut associer S(^neque a la gloire de ses
projets , tandis que les autrps conjures demandent
Senequelui-memepoursecoiide victi 1 e. Maiscomme
N^ron, qui avoit ropudie Octavis , vient de la rap-
peler, ebparoit ainsi c^dcr au repentir, S6ieque ,
qui juge les moeurs de Rome trop contraires a I'esprit
de I'ancienne republique , et qui foude quelque espoir
sur le rappel d'Octavie, combat I'exaltation du jeune
Lucain, et refuse de partager ses desseins. Cependant,
lorsque la voix publique accuse Neron de I'einbrase-
ment de Rome,Seneque enlre enfin dans la conspiration .
Mais elle est bienlot decouv'erte par la trabison d'un
affranchi de Scevinus, et Neron consomme ses ven-
geances par la morl de tous les conjures. Sen^que est
du nombre de ses victlmes ; il vient mourir sous les
jeux nieme de Neron , et L s menaces prophttiques
de ses derni^-res paroles portent un moment le troubls
dans Tame du tyran.
a-t) Jheaiie dc la me Fty.icau,
La veil (able criliquo c'prouve une secrete repu-
gnance, ime peine reoi'e a s'exercer sur le premier
ouvrage crun ):mnr: talent, taiil un debut, meme
inalheureux , a crinteret par lui-iiieine. Mais , a son
tour , le vrai talent reclame la censure, comme une
pi-v^uve d'cstime ; et, s'il nous est pcrmis d'enparler,
I'iiiteret de Part exige tonjours I'applicaijon de ses
pvincipes , dans I'appreciatiou d'lm ouvrage , cpiel
qu'en soit I'auteur. C'est conformonient a ces senti-
mens et a cette verite, que nous prenons la liberie^
de presenter quelques observations sur c?{\e tragedie.
Les conspirations ont toujours iburni beaucoup de
sujets a la scene. En general, comme on I'adit, on
s'interesse au succes d'une conspiration , d^abord
parce que c'est une conspiration. Si , dans les pre-
r.Tiers actes de Cinna, on s'interesse conire Auguste a
Cinua et a Erailie, assur^ment, dans une conjuraiion
centre uu monstre tel que 5^fcTon , les conjurt s s'em-
parent hien plus fortement de tout I'interct. La f^ro-
cite de Neion rend pour eu\- plus grand encore lo
dauger d'etre decouverts. Mais si I'on doit sans cesse
trembler qu'ih ne le soient, il nous semble qu'ils n©
cloivent point Petre, lorsqu'il n'j a point de specla-
teiir qui n'ait pris dans son coeur le parti du motif qui
les anime. Brutus, la Mort de Cesar, Romesauvec,
ar.odeles d('^s::sperans dans ce genre , autovisent cctle
opinion. La conspiration de Pison ^cboue dans la
tragedie , ainsi cue dans Piustoire, On sent combieix
ce resultat bislorique contrarie Pint^ret dramatique ,
sur-tout lorsque , par la contexture de la piece, comme
dans la tragedie de Pison ^ les conjures sent decouverts
Vr.on , tra;:e.i;(. 27 1
des la fin dii qualrieme a( le , et quele cinquiomc arte
etilier prcsenle le triomplie du tjran et I'exercicesan-
glant de sa vengeance. Anssi le public a-t-il liau-
tement manifesleson mtcontentemenl.
A c© vice da su jet , plus sen^i'le encore par un
manque d'arl dans la coudnite de I'aclion , s'en joitil
un autre plus dominant , parce qu'jl suit le cours da
tout Pouvrage : c'est le caractere de Neron.
S'il a fallu tout Tart de Racine pour presenter avec
fuccesei vcrile ce monstre naissant, dans la tragedie
de Britaimicus, comment espdrer de faire supporter
le spectacle de cet etre feroce , hideux des crimes qu'il
a commis , des crimes qu'il commei; , des crimes qu'il
mMite? "Nous le disons avec regret : la tragedie da
Pison n'oflre point ces conceptions faites pour
produire I'effet dont parle Boileau , et que I'admirabiQ
llacine a si bien realise :
II n'est point de serpent , ni de monstre odicux ,
^ui , par Part imit^- , ne pulsse plaire aux yeux.
Mais si I'auteur n'a point eu Tart de rem^-
dier a ces deux vices de sou sujet , il a su du
moins profiter des moyens qu'il lui offroit dans des
personnages int'ressans par leur caraclere , tels
qu'Octavie , Lucaiu et Seneque. La verite historique
se retrouve daus le role de la malbeureuse et sensible
Octavie. Lucaina I'exaltation de son age et de sou
lal'ut ; SL'ueque a la raison d'une longue experience
et le calme d'ua esprit pliiiosopbique. C'est peindre
les mocurs avec vtlrit.'- : el Tauteur a joint a oe merits
#elui de uietlre en cQutra;l3 ces deux personnages,
cy* Spectiu'es.
dans UKe scene bien liee a Paction , I^ien dialosuee ,
bien condiiite , on Ton a remai\]ue de la suite
d ins les idees _, de la noblesse et de la pnrok'' dans la
diction , delafermelc et de iV^isance dans la tonniure
des vers. Octavie n'a point paru altacbre assez ba])i-
leinent a Taciion ; et ea |j,eneral, c'est ce inanque
d'liabilete dans I'oidonnance de la piece , qui a nni
parti-ulieremcnt au succes de cette tragcdie. Mais
I'anteur a mis quolqnefois dans la bourlie de celle
ineme Octavie des vers int^ressans par le sentiment et
le xiaturel.
Les observalions que nous venons de lasardcr,
coniiiinent i'opinion que nous avons d'abord enoncee
qu'il est dans cette tragedie quelques parties de ta-
lent snr lesqnelles on pent fonder des esperances.
C'est dans cette persuasion que nous osons prendre la
liberte de faire aussi quelques remarqucs sur la ma-
niere dont la piece a paru ecrite et versifi6e.
Tons les jours on entend dans la society des
liommes de lettres vieillis dans I'e tude de Tart d'^ciire,
se plaiadre et s'^tonner a-la-fois de cette s^curite ,
en effet etrange , avec laquelle on basarde au
grand jour des ouvrages dont le genre e:>ige I'el^-
gance et le cbarme d'une diction harmonieuse et
pure 5 et dans lesquels I'examen le raoins seve-
re trouve trop souvent la langue violee ^ et les
principes du stjle absolument mcconnus. Nous n'a_
vons point le droit d'^noncer aussi bautement cetle
opinion , mais nous sommes forces d'en rCs^onnoitre
la v6rit^. Heureusement elle est loin d'etre entic'
rement applicable k la trag(^die de -Pison, Le me-
rite
Pis on , tragedie., 278
rite de diction que nous avons cru pouvoir remar-
quer dans la sc^ne doiit nous avons parl^ , entre
I.upain et Sen^que , autorise h penser qi:e I'auteur
en a le talent , et en sent la mcessit^. Cependant
il nous semble avoir oubli^ Tun el T ulre dans deux
morceaux adaiiraules dans Tacite , «.t que I'auteur
de Pison a du , par cela nieme , soigner plus par-
ticulierement. C'est le discours de Stne([ue a N^-
ron , lorsqu'il lui demande k se retJrer de la cour ;
c'est ensuite le tableau de i'incen Je de Rome. Mais,
6i nous osons le dire , le stjle , dans ces deux mor-
ceaux est sans couleur et sans efFet ; la versifica-
tion en est f'aible et commune. Ce dernier defaut
se fait c^ussi trop senlir dans le cours d^ tout I'ou-
vrage. On ne sauroit trop r^p^ter ce que V^oitaire
se plaisoit a nous redire : Cest. ici que Voa volt
la necessite ab^oLus de faire de beaux vers ,
c^est-di-dire ^ d'etre eloquent de cette eloquence
pro pre au caracthre da personn,age et ci la si^
tuation j de n' avoir que des Idees jusLes et na^
turelles y- de ne passe permettre un mot vlcleux^
une construction obscure J, une syllabe rude ; de
ckanner Vorellle et f esprit par une elegance con-
/^Via^. Ilfaut convenir qu'ilest excessivemeut difficile
de remplir ces conaitious. C'est une raison de plus
de nous les rappeler sans cesse.
Totne U,
THEATRE DE LA REPUBLIQUE.
Premltre represenration de Tartuffe niro*
LUTIONKAIRE J OU La SUITE DE l'ImpOSTEUR*
JL ARTUFFE REvoLUTiojMNATRE, coTTK^^dJe en trois
actes et en vers , jou^e pour la premiere fois le 21
prairlal , n'a point eu de succes. Celte piece est du
citoxeii Lemercier.
L'auteu de c tte comddie est Jeune enrore , il
ne se decouragera point sans doule. 11 faut qu'^il
ne regarde son ouvrnge qxie comme iin troisieme
essai qu'un autre plus heureux pourra suivre. II a
d^ja donne au theatre una tragedie intitul^e Met^a-
gre , et un drame en vers , intitule Lovelace. II
avoit, dit-on, seize ans lorsqu'il fit MeLiagre , jou6
il y a dix ans. C'etoit annoncer un ialent bien pr(^-
core. Loi^elace _, quoique cet outrage n'ait point
reussi , a prouv^ des progres , et son Tartuffe re-
volutionnaire 5 malgrc I'echec qu'il vient d'essuyer,
annonceassez de dispositions pour que le C. Lemer-
cier puisse se flatter d'obtenir un jour des succes dans
cette carriere.
Cette piece n'est point du tout la suite de P//71-
posteur , comme le PkUinte , de Fabre d'Eglan-.
line , est la suite du Mysantkrope. Le Tartuffe r^-
Volutionnaire n'est veritablement que la parodie du
Tartuffe de Moliere. C'est le meme plan , ce sont
les m^mes motifs de scenes, ce sont les meraes si-
tuations. Que n'est-ce aussi le nieine style ? Seule^
jnent , au-lieu de tromper sa dupe par le nwjsqua
LeTartuJfe re'rolntionnaire. tyS
da la devotion , Tartuflfe la trompe par le ma<;r|ua
du patriotis ve. C'est , si vous vouh-z , une imita-
tion modeste et foibl'.? du c Lef-d'ceuvre de la scene
Comiqup, mais ce n*en u'est point la suite orgueilleuse.
On ne doit done pas accuser I'amour-proore de
I'auteur , d'une erreur qui a pu nuire a son succes.
Le sujet que le citoyen Leinercier a voulu trai-
ler, exige un esprit plus mur , un oLservateur plus
exerc6 j et le talent du stjle qui , a ce qu'il pa-
Toit , n'est plus assez un objet d'ctude pour quel-
ques jeunes ecrivains. Cependant il seroit injustede
Xie pas reconnoitre dans I'idee et la composition de
cet ouvrage, de I'esprit, dt^ la faci'ite , et quelques
intentions comiques. Par exemple , l*auteur a pa-
rodie d'une maniere assez plaisanfe, une parlie de
la scene admirable ou Orgon se cache sous la table.
Bans la parodie , il se carhe dans une armoir©
sur laquelle on vient poser les scelles , mais ii en
sortau moment ou Tartuffe va les Lriser , pour s'em-
parer des efTets au porteur que Tarraoire renferme*
Ce mojen de d^sabuser Orgon , est gai et thealral*
Mais Id scene en elle-meme est dc'pourvue de ce
bel eiise.nble , de cette unite de but , et de ces pre-
parations habiles qui contribuent a faire de h scene
de Moliiire un clief-d'oeuvre inimitable. La seconde
repr(^sentc)tion de cette piece a eu n-.oins de defa-
veiir , et on a rendu justice a ce que I'ouvrage pent
offrir de louable ^ soit comme parodie, soit comire
ex] ression de quelques v6rites politlques que I'indi-
goation commune a deja popular.sjes.
S a
' LITTRATURE A.RABE.
T^otiCE sur La (,'le et les ollv rages du Hharyry.
Abou-Mohhammed el Qacem ben-A'ly-ben-Moli-
liammed-ben-0'feman , suruomrad H Hkarijiy ( le
Hliarjrien, parce qu'ilhabiloit ifAarj!/-^ pelit bourg
de Perse, naquit a Bassorah, I'aii de I'begire 446
( 1054 de I'ere vulgaire ) , et inourut en 5r5 ( 1121 ) ,
sous le regne de Mostarclied , vlngt-iieuvieme kbaljfe
Abbacjde ; on I'a surnomme aiissi aL Baffry ( le
Bassoryen ), a cause du lieu de sa naissance. II est
celebre parmiles Arabes , sous le nom du Hhar^ry ,
pardes discours acad(^miques , qui passent encore au-
Jourd'bui pour des chefs-d'oeuvre d'eloquence. Ces
discours, nommes en arabe nieq&mat (i) ( mot qui
correspond aux Lieux c&mmuns de nos ilieteurs ) ,
sent d'lm style tres-recLerche et enlremele de vers,
li'auteur se flatte lui-meme , dans sa preface, d'avoir
perfectionn6 Part de bien dure , et 6puise toutes les
richesses et les graces de la lajigue arabe , tant6t/?oar
falre coaler les Larmes de ses auditeurs ^ et tantot
pour eueUler le rire sur leurslhvres. Ces discours ,
qui sont au nombre de cinquanle , roulent sur diffe-
rens sujets de morale , et quelquefois sur des sujets
erotiques, converts d'un voile si ingenieuseraent tissu,
qu'on ne sauroit le penetrer sans elre profonuement
,yers6 dans la langue arabe.
(i) Ce mot revient a notre expression stance acade»
Notice stir la vie el Ic^ ouvrngcs du Hharyry. 2-jj
Void 1 'anecdote a laquelle on attribue la composi-
tion des meqdniats y dont un au!re auteur arabe lui
avoit donn^ I'exeniple.
Le Hharyry allolt souvent s'asseoir dans le temple
des Hharamjlres. Un jour il vit entrer un vieillard ,
convert de lambeanx, dont I'exterieur annoncoit la
misere, mais qui g'expriiroit avec Elegance. Bien-
totil est entoure de curieux 3 on lui deraande quelle
est sa patrie ? — Seroudje , repond-il : son nom ?
—Abou Zeld J etc. Les a\ entures de ce vieillard en-
flamment I'imagination du Hharvrj , qui entreprend
aussitot de les orner des charmes de ['eloquence et de
la popsie. Cette piece , qui forme le quarante-huiti^me
meqamehj parvint jusqu'au visir du khaljfe , il la
trouva digne d'etre mise sous lesyeux'de son maitre.
iLe monarque en fut si content, qu''il accorda des re-
compenses al'auteur, pour continuer de cultiver ce
genre delittt?ralure.
, Les quarante premiers di^cours furent composes
h. Bassorali.Le Hfearjrjlesporia avec lui aBayhdal,
et les montra a plusieurs savans de cette vil(e j ceu.x-
ci nierent qu'il en fut lauteur ' et les aflribuoient
a un Africain c(^l^bre par son Eloquence. Le gou-
verneur de la'ville le fit appeler an dyv/m , et luf
demanda quelle ^toit sa profession. Je cullive les
lettres, rep'ond t-il ; eh bien , compose-nous a I'ins-
tant quelque morccau d'imagination. Le Hharvrj
prend un c'alame et du papier , et se retire daiiS
un coin du djvan , ma's le Tres-Haut ne lui ins-
pire rien 5 il se leve et se retire tout confus. Plu-
sieurs beaux-esprits qui avoient jele des doules sur
S 3
27 S Litterature arahe.
ses talens , ne manquerent pas de le plaisantrr stir
sa deconvenue. Celui-ci leur repondit en publiant
des meqamats plus ^loquens encore que les pre-
cedens.
Get ouvrage I'exposa a d'autres d^sagremens. Les
dcvots Musulmans crurent y voir le dessein impie
de prouver qu'il ^toit possible d'ecrire avec une
Elegance egale a celle qui distingue le Koran , et il
y a toute apparence qu'ils ne se trompoient guere.
Quoi qu'il en soit , comme les devots de tous les
temps et de tous les pajs sont des ennemig dange-
reux , Pauteur crut devoir se justifier et s'attacha ,
dans la preface de ses meqamats , a repousser une
pareille imputation,
Le Hharjry etoit d'une petite faille et d'une fi-
gure desagr(5able ) ce qui Texposoit a de frequens
parcasmes de la part des Arabes , qui attachent
beaucoup d'importance aux avantages exte'rieurs ;
il se contentoit de leur repondre : Vhomme n'est
homme que par ies deux plus petltes parlies de
son Indlvidu^ par sa tangue et par son coeur,
C'est toujours cet Abou Zeid , el Suroudgi qui est
le heros de ces meqamats. C'est une espece d'a-
venlurier , de Ousman d'Alfarache , un vrai Pi-
caro , dont le metier est de vivre aux d^pens de
qui il appartiendra , et dont les tours d'adre?se sont
quelquefois plaisang et toujours varies. On en jugera
par cette piece. L. L a n g l e g.
r
SEANCE A RAMLfl.
Quarante-cLnq Lii^me mecanie d^Hliaryry.
El-Harith-ben-Hemma3I dit :
Depuis que j'ai eiitendu dire a des gons sages et
ex'perimt'ntes , que les voja^^^e^i 6toient le miroir des
merveilles , je n'ai jamais cesse de traverser les de-
serts et d'affronter les lieux les plus perilleiix , pour
cherclier a voir des choses rares et extraordinaires.
Ma curiosite a (^te sou vent satisfaite ; mais parrai
ce qui m'a le plus frappc dans mes courses, je me
rappelle toujours avec une nouvelle satisfaction , ce
qui arriva au Cadi de Kamle , dans le tems quft
i'etois cliez lui. Ce Cadi etoit un honirae riche et
puissant, dont les verfus honoroient le siege qu'il
occupoit. Un jour il se presenta a son tribunal uii
vieillard couvert de haillons, avec une femme qui
pnroissoit fraicbe et belle , sous des vetemens qui
annonroient aussi la misere. Le vieillard alloit com-
nienceva parler et a dire sesraisons, lorsque la jeune
personne , qui I'accompagnoit, Ten empeclia, et reje-
tant derri^re son epaule le voile qui couvroit son
visage , elle dit d'un ton ferme et hardi :
« O toi , Cadi de Raml6 , qui sais dispenser d'uue
y main Equitable les graces et les chatimens !
« Mets des bornes a la coiiduite in juste d'un cpoux
■» qui jdepuisque jeJui appartiens, n'afait qa'un seul
» et unique p^lerinage.
" El je ne me plaindrois point encore, si,apres
>• avoir legalement rempli le preceple , il eut fait
de U'nij>s a autre les visiles de surerogatioa quq
S 4
2 So Litter nfure arahe.
3) recommande le docteur Elbi Jousouf, dans sei
y> commentaires sur ce devoir religi 'uy.
» Mais , loin de la , il a toujours ppfsev^r*^ dans
» son cruel s--st>'me d'indiff rence , qnoiqi.'il n'ait
M jamais eu a ine rejDrocher aucun manque d'egard ,
» ni de complaisance.
« Ordonnc-Uii done, seigneur, ou de me donner
» des preuves d'un amour conjugal, ou bien depro-
5) noncer un divorce eternel.
» Aulrement, jo ne n'ponds point que , sourde a
y> la voix de I'bonneur, je ne parcoure une carriere
)) ignominieuse ».
Le Cadi se tournanl vers le vieillard , kii dit : a Tu
» en tends les plaintes c{\\e ton ^]-.ouse forme conJre
» toi , e{ les menaces qu'elle te fait. C'est a toi a
» decider maintenant, si tu veux remplir envers elle
M les devoirs que te prescrit la lo; , ou bien courir
» le risnne d'etre deshonore ».
Le Clieikh s'assit alors sur ses geiioux, et il rcpondit ,
avec une eloquence oui surprit :
a Cadi equitable , prete I'oreille a ma justification ,
» et ne juge pas ma conduite envers mon epouse ,
» anssi coupable qu'eile pent te le paroitre.
» Si je m'eloigiie de son lit , ce n'est point cer^
y> tainement, et Dieu en est tcmoin , ni par raepris
» pour elle, ni par qu.^lque attacliement [criminel
» do:it mon cceur soil epris,
» N*en accuse que le sort , le sort cruel , don I les
M rigueurs ne cessent de s'appesantir sur moi, apies
» m'avoir enleve tout ce cjue je possedois.
j» Ma maison est aussi depourvue des choses les
Mccame d'^Hh-^ry. 281
5) phis iK^ccssalros , que Ic con de ceHe belle est cIl-
» pourvu des onienieiis qui devoient le parer.
» !C.or--qiie la fortune me rioit, aucua Arabe de la
>) tribu de Ben el Uzre, n'a mieux contiu que inoi
ji raniour et ses lois j mais dansl'etat oii je me frouvo ,
5» je m'6loIgne des femmes , autant que pent le laiic;
« un anacliorete chaste ot pieux , qui craint la scdwc-
3) tion.
» Non , ce n'cst point par aversion quf je me
>) prive de cu'.tiver mon clianip. Je crains seulement
^ les epin3s qui pourroient y naitre.
« Ne condanuie done pas un l:omme qui se trouve
ji dans unc situation si deplorable ; jettc3 plulot sur
» lui un regard favorable , et daigne e\cuser les pa-
3) roles indiscrefes qu'une legitime defense Pa mis
3' dans le cas de prononcer »,
A ce discours, qui parut faire impression sur I'es-
prit du Cadi , la femme s'e hauffa , et S9 di>posa a
le confoudre. Que la mort me delivre de toi , lui
dit-elle , imbecillj vieillard , qui n'es bon ni a ma
procurer d'iieureux jours, ni a me faire passer d'a-
greables units! Quoil ce sont les enfansqui t'eiTiaientl
et ne sais-tu pas que la Providence pend soin d.^
tout ce qui existe. Ta mefiance , ta pusillanimite ,
criminelles aux yeux deDieu et aux yeux des homme?,
prouvent assez la demence et mes malheurs. Maudit
soil le jour oii je me decidai a te donner la main !
« Femme, Femme, reprit le Cadi, un pen de
» moderation. Ta cause me paroit juste , et tu la de-
» fends avec tant de force et d'energie , que si l'<^-
» k)quente Klausa venoit disputcr a\ec toi , lu la
«S2 L'tteralure arahe.
» forcerois an silence ; rrais si ton rpoux n'a dit que
» la "^rite , et s'il n'est pas douteux a tes yeiix que
» son indigence soit aiissi graiide qu'il I'expose, Iti
>» dois un peu compatir au sort d'un homnie qui
» a deja trop d'embarras a ponrvoir a ses besoins >
» pour penser aux plaisirs que tu exigi^s de lui «. ]
Elle ne rejiliqua point , et se mit a fixer la terre
avec un air tioub'e et des jeux enflamm('s , qui sem-
bloient annoncer que des reflexions dlionneur et de
pudicite alloient acliever sa defaite. Le vieillard se
tourna vers elle, et lui dit: » Pese biea la reponse
» qi.e tu vas fcu're , ^t prends garde de traliir la ve-
» rit^, ou de d;^guiser ce que tu sais aussi bien que
» moi »'
« H^Ias ! h 'las ! dit-elle , en poussant im profond
» g^misse'ment , que nous reste-t-il a dire apres une
» dispute si scandaleuse ? Est-ce bien a-present quM
s> s'agit de taire nos secrets ? De tes levres et des
» miennes il n'est sorti que des paroles de verile ;
» mais en ouvrant la bouche, nous nous sommcs
» couverts d'opprobreet d'ignominie. Et plut au Ciel
» que nous fussions devenus muets avant d'arriver
» a ce tribunal » ! En finissant ces mots, elle se couvrit
le visage de son voile , pour cacher sa confusion ,
et elle S3 n^it a pleurer si amerement , que le Cadi
ne put s'empecher de s'attendrir et d'accuser la for-
tune d'injustice envers le vieillard et sa femme. A
I'instant , il se fit ap porter un paquet de deux mille
medins, et il leur dit, en le leur presenrant avec un
air plein de bont^ : « Acceptez , je vous prie , le don
» que je vous fais 3 servez-vous en pour vos besoins
i et pour vos plaisirs. Tout cc qui me res\e encore
» a vous lecominander J c'est de vivr-deciornna's avec
» les Vgards mutuels que prescrlveni les iiceuds c;ue
» vous avei formes ».
Le Cheikh et son epouse temoigereut an C^idi
leur vive reconnoissance , et ils se retirrreiit avec
une apparence de paix et de bonne larmonia,
qui causa a son cceut sensible et genereux , la plus
douce satisfaction.
Apres qu'ils furent partis , le Cadi commen^aa
faire I'eloge de leur esprit et de leur eloquence, et
il deraanda a I'assem' K'e , si quelqu'un i)ar hav^ard
ne connoitroit point ces deux person nagc'^.
Le premier hiiissier du tribunal pril la pnrola
et dit : le Cheikb est ce fameux Surou'lji , dont le
genie et les connolssanres font I'admiration de
lout le monde ; et la feinme qui raccompagnoit ,
est sa legitime epouse. Mais quant au proces donh
il a ete question entr'eux , je gagerois que cVst une
ruse du Ciieikli , et un de ces tours qui lui sont
familiars.
Get eclaircissement piqua vivementramour-propre
dii Cadi J et mortifie d'avoir pu donner dans le
pif'ge , il rerommanda avec bumeur au menie
bomme qui soupcounoit leur bonne foi , de les
joijidre et de les lui araener.
Celul-ci se mit en devoir d*executer ses ordres ,
et il partit avec precipitation. Quelque temps apres
il revient, en se frappant la poitrine , en sigtie du
mau\ais surces de ses tentatives. E!i bien ! lui dit le
Cadi, fais-moi part de tes decouvertes et ne raede-
^S^ tilte'rature arnhe,
guise rlen , quelque chose ddsagreable que tu aies ^
m'ap prendre.
L'emissaire r^pondit : Jaloux de reussir dans la
commission dont vous m'avez charge , j'ai parcouru
la pkipart des rues et des carrefours de la ville ,
jusqu'a ce qu*enfia je les ai atteints , comme ils
oommencoient deja a prendre le chemin de la plains
et a s'eloiguer d'ici. J'ai mis tout en usage pour les
engager a retourner ^ en leur faisant de votre part
'les plus belles promessevS. Mais le ruse vieiliard a
touj )urs6te inebranlable^, 6t il m'a fait entendre qu'il
croyoit plus sage de se contenter de ce qu'il avoit
obtenu et de renoncer a toutes les esperances que je
lui donnois. Sa femme ne pensoit pas de m#me , et
elle insistoit pour qu'il prit le parti de se rendre a
mes invitations. Lorsque le Cl-eikh vit son obstina-
tion a lui donner un conseil que la raison et la pru-
dence desaprouvoient , il la saisit par le has de sa
tunique, et lui dit :
« Ma cLere amie , ccoute ce petit avis ; fa's-en
ton profit ^et ^vite-moi de plus longs commentaires.
yi Lorsque tu auras enlev^ quelques dattes d'un pal-
mier , prononce contre lui le serment du triple
divorce.
» Et ne sois jamais ten tee d'y revenir , quand
meme tu saurois que le proprietaire I'auroit livre
a la discretion des passans.
» Un filou hal ile ne doit plus se montrer dans un
lieu oil il s*est fait connoitre par quelque tour de
son meiier.
•» Et quant a toi 5 me dit-il 5 en m'adressant la pa-^
Micame d' Hhnryry . 285
role 5 je suls fach^ da la peine que tu as pris^ ;
lu peux t'en retouvnerdece pas,et,si tu le trouves
a propos J djs de ma part a celui qui t'a eiivove :
« Ne regrette jamais le Lien que lu as fiiit. Les
hommes cesseroieiit de t'en tenir c ompte , et le C.el
jie repandroit point sur toi ses bc'ii^dictions.
» Ne t'ofTensepas d'uiie petite ruse qu'un indigent
emploie pour exciter ta piti^.
» Sa situation rend excusable les mcnsonges de sa
lan<;ue.
« Et si Ion amour-propre soufTre de s'etre laiss6
tromper . souviens-toi que le clairvoyant Ciieikh-
El-E':h-Arin a ete iroinpe avaiit toi ».
Par ma foi, dit alors le Cadi, on ne peut rien
dire di plus consolant et deplus adroit. Pr.^nds vite
ces deux manteaux et cette bourse ; taclie de les
atteindre , et presenle leur de ma part ce uouveau
don , en les assurant de la disposition ou jc suis de
me laisser toujours tromper a i'avenir pari'tloquence
des gens maliieureux.
El-Haritl'-Ben-; emman , en terminant le rdcit de
cette avenlure , avoue que dans tout le cours de ses
voyages', il n'a rien vu de plus singulier , et que
jamais meme il n'en a entendu ra.onter de sem-
blable.
Venture.
LIVRES DIVERS.
BOTANIQUE.
u^NNjLS den Botanlck , herausgebeti von Paulvs
JjSTERi j sechtes stuck — Ain>'ales de Bo-
taiiit]ue , r(^digees par Paul Usteri , sixieme
partie , 1798 , in-S". 177 p.
11 y a d(^ja quelques annees que cetle collection
de M. Usterl se continue avec un succes soutenu
et meritc. Le premier article de ce num^ro est aq-
compagn6 d'uue figure du jardin botanique de.
Mantoue , par Dominique Nocca. L'abb^ Joseph
Olivi donne ensuite Tex plication du ph^nomene du
xnouvement progressif d'une conferve infusoire ( La
nuztiere verte de 'Priestley ) vers la lumiere. M.
Sennebier y insere sa theorie sur les boutoiis ^
fleurs 5 que nous avons reproduitedans ce num6ro.
liC meme Nocca , d^ja cite , decrit Irois plantes
nouvelles du jardin de Mantoue , sous 'e nom de
Salsota hyssoplfoLia. SoLanum parvlfoiium et
■B.li>ina brasULensLS. On Irouve ensuite une disser-
tation d'Alojsius Gelmelti , sur la racine appelee
Vuli'airement Calaguala ^ et sen usage. M. Usieri
lermine ce fascicule par une notice des principaux
ouvrages sur la Botanique , qui out paru dans
Tannee.
ISfeue Annalen der Botanlck ^ herausgeben von
Dr. Paulvs TJstehi. Zurlck , 1794. In-8^ de
157 pages et trois planches.
Celte septieme partie des annales de Botanique.
Lhre! diven. 287
do M. Usferi , paroit sous le litre do Noiwettes An^
nates tie Boianique ^ premiere partle. Le bui de
l';iii)eur est que ceux qui n'oiit pas pu ss procti-
rer li-s six pren'ier^s parti. -s , et qui commenceut
a rel'e-ci I'ac ui^ition de ses Auuales , .Mient cepen-
danf '!u ouv .T.e complet. Ce fascicule est dedi6
■ .]■ ,; 1 S. .i ii'hi/r. Le premier memoire offre une
;'\;lle els';! i.ition d.'s lichens, par C. TT. Per-
soon. Le viluyen Venleuat , 1 otaiiisle fran ais , dis-
iin,^ue ,. s' n ojvupe depuis long-temps ; il sera
c.urienx de comparer les deux melhodes. M. Usleri
in. prime dans ce nuraerotou^ les memoires pu-
!:<;> dans le premier voknne des actes de la so-
" t '^ d'histoire iiaturelle de Paris, qui traent de
ui Bolauiquej il ter:iiine par un evtrait de'diffe-
rens onvrages suv cette science , et par la notice d'A.
L. Millin , sur Rcmi Willemet , botanisie franrais ,
luort dans I'Inde ou il alia pour faiie des reel. er-
dies d'liistoire nature! !e. Ce fascicule est arcom-
pague de trois pla.iclies representant plusieurs es-
peces nouvelles de lichens.
H I s T o I R E.
VHisTOiREclc la reuoLutlnn deFran-ce^prec^d^e de
f expo s6 rapid e des administ rations successlves
quifont delerniiaee. Nouv. ed tion , revue , corri-
gf'e et augmontee , par deux Amis de !a l;berte.6
vol. in-i6. Prix 82 liv., el franc de port , 35. Paris,
Garnery, 1 Lraire , rue Serpente , N^. 17. 1792.
II sera long-tem- s encore difficile d'^crire I'Lis-
loire de la revolution francaise ; mais , jusqu'au mo-
s88 Livres fivers.
meat ou le burin d'un Tacite se salsira de ces m^-
morables dvenemens , il sera utile de ramasser des
faits. CV si I'avantage que presente cet ouvvage , dont
la premiere edition a eu du succes , et qiii de plus
a le merite de lier les faits entr'eux. L'editeuv I'a
reimprime dans un format plus commode qui le rend
portatif.
Avis aux Sous cri pteur s.
Ceux de nos Souscripteurs dont Pabonnement n'a
^te fait que pour les six premiers numeros ,. et qui
sont dans I'intention de le renouveler, sont invites
a le faire avant le r5 messidor procbain, s'ils desirent
recevoir chaque nu;nero a mesure qu'il paroitra.
LIVRES DIVER^l
ECONOMIE RURALE.
3iMioth^qu^ pkysicO'dconomlque , instructive et
aitiusante. Ann^e 1795 , vieux siylj , ou 14.^" anuee,
conte/iant des niimoLres j observatluns-prati'
Xjaes sur liiconomle rurale ; les nouvelles ad'-
couvertes les plus InUres sanies dans les arts
uUtes et agreables y la descnption et lajigure
des aouvelles machin^es ^ des Lastruniens qa^ont
peat y employer d^aprhs les expidences des
auteurs qui les ont iniaginies ; des rcceiics ,
pratiques j procedds _, mddicamens noui/eaux
externes ou internes _, qui peui;ent sennr aux
kumnies et aux animaux y le nioyen d'aircter
oude prdi^enir Les a<:cidetis ^d'y remidlcr , de
se garantir des fraudes ; de nouvelle^ vues ^r
piusieurs points d'econotjue doniestique j et crt
general sur tous les objeU d^utlUte et d'agrc^
merit datis la vie civile el priu6e , etc. , etc. ; re-^
cueillie et publi^e par les citoyens Parmentikb ^
Deyeux ; a vol. in-ia , de 100 pages. Prix , i5 liv,
bioclie, et 18 liv. franc de port par la poste pour
I6S departemeiis et pour les-pajs loaquis. A Paris,
eliez P. BcissoN, libraire , rue Hautefeuille ,
n.o 20.
La collection complete forme 22 volumes , avec 56
planches ou I4annees , qu'oo peul detacher ; les 20
premiers vohniK s , qui forineiit 1 5 anuses , sc vendcat
cliacun 6 liv. Jiroclj^ , et 7 liv. 10 sols » franc de ] ort.
La i4.« ann^e, qui comprend 2 volumei^se veud
|5 (iv. J et i8 liv. franc de port.
T A B L E
Ves Articles contenus dans ce Numiro*
L 1 T H O L O O I «.^ I
tiidte Je la dtscrifjtion de I'ime-
■ iiude , par Dolowieu, • ag. 14.5
MAMittALOOIK.
Is Dtwelle classification dcs rnam"
tnijetes , par Cuvier el Geof-
fiuj , 164
JSWTOMOLOGIE.
JVotice siir les marmsciils de
L;on«t , par 3. Brex ^ 190
Vhysiologie vkgetalb.
Siir l'ii>vluUon des houtons a
Jletirs , par J. Seunebier ,199
BOTANIQUZ.
Sf^lantce regni napclitanif autore
iUoxn. Cyrillo. 3o3
ECONOHIE KUHALE.
Confitures de bales d* air ell e ,
par L. Bosc , 204
Q to G V. Kf n 11..
Sur la tsrrt de Kei ^^ucicn y pa
3. Barfcie , 2o5
HlSTOIRl MODERNE.
J-Jisioir£ de la guerre d» sept
arisy traduile de I'allemandj de
Sihiller, 211
HiSTOlBl LlTTtRAlRl.
Oh'eri'ations stir la notice don
nee par Oberlin , de la chroni
t^ue d'Andlo 3 par S. h. 3a3
T YPOORAPHIl.
Traduction arabe de VaJresse
Bu peuplg Jrarifais , sortie des
presses nation ales , 2uS
B106RAPHIK.
Satire sur Florian , a3o
Stippltrnent a la notice sur Bar-
tbeleifay , par S. C. aSy
NTTMISMATXQ.trE.
Ohseri-ations sur un gtan'd nom-
hre de 7nt- dailies de Liciniiis h
jsune f par Gourdin. 343
Litt:6rature Fran9ais2.
Cclestine j oti la ticlime def
prcsat^es , ronran traduit dt
l' anglais , par la cil. IX,, a55
P O E 8 I E.
Fragment d'ime tiaduction do
I'epitre de Pope au dncta. ■■ Ax-^
bulhnot. Fortiait d'Adi*t<ju ,
par Delill« , a6a
Fragment d'un\po'eme nan im-
prime y irilitule Chdlon- sur"
Marne, par Fabre d'Eglimtine,
264
J^ettre de Lrbrun avx r^dactenrs |
du .Magasin encjclopediquc ^
Spectacles.
Pison f trag6diey 26S
Le Tartuff'e rh'olutionnaire ^
on la iuite d<i I' Imposteur ■
comedie , iy* 0
Litter ATtTAE arabs.
Notice sur la vie ct les oui'rages
tlu Hhat3rTy , parhan^H 276
Seance ii Ramie ,^ truduil* par
Venture , 279
LlVRE*- BITERS.
Boteni^ue.
Annals den Botanick, herausgc
ben von PauIu»*Usteri^ jet/Kt/f*
stuck J 286
Neue annalen der Botanick, la-
rausgeben vcn Dr. Paulus'Us-
teii f, 286
Histoire.
Histoire de 2a ret-'olutiQn de
Ftanpe J precede e de V expose
rapide des adjninistrations si^C"
cessii^es ^ui I'onl dettrmhice ,
287
Se L'iNrRXMXRIS £¥ MA0AZI9XirCTC]kei>i9XQVS.
M A G A Z I N
ENCYCLOPEDIOUE ,
JOURNAL DES SCIENCES,
DES LETTPvES ft DES ARTS,
RE D I G i
Par M I L L I N , N o E L et W a 21 e N 5* ^^
11 n')' 9. pre»,quc plui d'ouviagcs ptfrir><ji-';u€8 qui
fcivent <lc depot aux inventions uouvcI!c« ec qui
retraccut I'histoirc tl« Tesprit liutnaia ; ccux qui.
oat cours scmblcnt , pour la plupart , eviicr jvzc
ȣfcctation tout cc qui peut alimcatcr le gout dia
•cicaces et r.iemc dc la morale. Seroii-il douc indi-
gne dc la Coiiventioa dc s'occupcr it rcorganiscr
cette braachc dc rinstruciion natioii-ile ?
CuiGoiRt , Rapport sur les encevra^tmcns ., recompenses ■ ei
ptnslens r. accorda e«x Suvans , page i6.
V^ E Jo'trnal , ar.quel la r.l',ip-ivt Jes hoinmes qui ont
Ui\ Dom r{i>-tifipr.6, line n^^piuailoii justemeaK-^(fq.nise
«la7is(|'jelqiic: piirtie des aits ou nes sciences _, k'.'s que les
citovens ^itaoei^,'' Ca»axi« 5'CTjiur. \F*r. , CrjENiFH,
Daubexto??, 3>et.ilt;e,3^fsfoHtaisks,I)olomif.p,
•FONTANES , FoDRCPOr , ilAUT , i^KRJTAN , LaCF.-
P KOK , L AOrx >. NCE , LaTT ARPi , L A f, AiN'D.*' j L.'>!51 AK K,
LaNGLF.S, LaPI.Av;:-: , LfERHN, LfiROY , I'Mep.itier,
Mi:..TKr.LE,MoftF,LLLT^OBf:RLIN, SlC AR r ,Su ' RD,
,YolCNEY,etc. etc. oontribuerout , contiendra I'extrait
jS". ViL 2ome U.
ftfs principaux ouYragea natfonaux ; ofi s'attacTier«
siir - tout a en donncr iiiie aiialj.se exacte , et h. la faire
paroitre le plus promptement possible api cs leur pu-
blication. On y donnera une notice d«s meilleurs
Merits imprimis chez Pcliaiiger.
On y ins6rera les ni^moires les ]»lus int^ressana
6iir toules les parties dcsartset des sciences 5 on choi-
sira s: r-lout ceux t^iii serojit piopres ^ €u accdldrar
les progr^s.
On y publiera ]es d^couvertes ingenleuses, les inven-
tions miles dans tons Irs genres. On y leiidra comptc
des experiences uouvelles, de la lormalion et de Pou-
verture des Museums. On y donnera im precis de ce>
que les sc'^unces des societes litteraires auront offert de
|jhis interessant , une description de ce que les depot*
d'ubjeis d'arts et des sciences reuiernient do plus
curieux.
Ou y trouvera des notices siir la vie et les ouvMg«s
ties Savans , des Lillerateurs et des Artistes distingu^s >
dont on aura k regretler la perte, euiia les nouvelies
litteraires de toute espece.
Ce Journal sera c^mposd desix volumes in-8''. par
an , de 600 pages cbacun , et au tnoins dei^ gravures
©11 regard des articles qui en exigeront. II paroiitra
tous les quiuze jours un num^ro de 9 feuilles,
Le prix de I'abonnement est ^ raison de 25 liv.
ronr truis mois , rendu franc de port par toute U
ilepnbli(|ue.
On s'adre.sse , pour I'abonnement, au Bureau du |
MngazinEncyclopedique , rue Honor^, N°. 94 ; et pour |
Jes objels re'atifs k la redaction , aux Redacteurs , rut '
de Provence, N^. 48.
II faut afTrancbir les lettres ei charger celles qui
«OQtieuxieai doe ai^igQats.
,1
I
PHYSIQUE.
HYDROLOGIE.
Memarques sur Les cnnnolssances physiques
lies aiicienSf par M. Guillaume Falccnsr ^
McdccLii , menibrs de la SocLet^ royale de
JLondres , traduUes par A. M. B. Bo ulard ( i ).
ij A superiorit '' des modernes sur les anr.!ens,dai.s
la plupart d-^s branciies de Ja pliilosophienatnrelle,
est gentTaieaient admise coiT-.me une v^^rile rfcon-
nue , et elle est assurt meiit bie i o dee, N-'anmoins
je suis porfi^ ^ croire que i'kr-orance des anc^ens
a 6te e.\a^eree , et qu lis ont connu , au moins co;}i .,e
fails et cjniine sujels d'observaliofi , pli'S.eurs clo-
ses qu'on p nseen f'^.icral qu'ils o.»t ignor^f-s. M. Du-
tens a depluye beaiicoup de sagacUe et dVrtidition
sur '-e sujet dans ses rec'erc- es tres-m^cnieusrsi-i/r
Vongine des d^couuerles attribueei- uu.x mode/-'
nes ; je deir.aude aussi qu'il me ^oit jjerir.is
d'_y ajoiiter seulemeut uii petit ncniibi'e de fais
(i) Ces remarques sonl tiree<* du prt-mler volume des nse-
Xnoires de la societe lilt«rair» et ibi osophl^aed-^MaBchestpr,
qui o'.it parn k L mdres ''U 178.1. Celic soci te lit.Jraire
donnoit des enconratjemens aux it"unes g ■ 5 qui, quoiqu'i#
n'en fussent }-as mfmbies , lui iisoient dvJ hoa$ njurceaa^
»ur la lilterature. Note du traduclcui .
Tome IL X
Sf)0 Hydro login.
qui se sont prc'senles en lisant cet oiivrage (i);
i,° Je (Tois qu'on regarde M. Black comme ay ant
decouvert le premier que I'eau qui a bouilli gele
plus alsement que celle qui n'a pas subi cette op6-
tation.
Mais Ics anciens savoici^t que Peau qui avoit 6t6
Ciiauffee, etoii: devenue par-la plus facile a con-
■geler.
Aristate (2) observe , u que Peau se glace plus
» aisi-ment lorsqu'elle a ete cbauffee auprravant, et
» que ce fait etoit meine connu de quelques peu-
» pies larbares, siiu(^s sur les ]:!ords duPontEuxin,
» cul faisoieut usage de la glare corame d'une es-
3) pere de cimen!: pour leurs buftes , et que I'eau
)i qu'on faisoit geler a cet cfPet eloil d'abord cbauffee,
» afin qu'elle put deveuir plus prompt .^ment con-
» Crete » (3).
(l) II est aisc^ de voir, par I'explicallon qne I'suteur donne
fle que'qncs-iuis des pheiiomi^nes dont il parle , que ce me-
moire a ete composi il y a quelques annees ( 1785 ) ; cepen-
daut j'ai cru devoir en accc'-.ter la traduetion qiu nous a ^le
offerte par le ciioyen Boulard , parce qu'il contienl uu lap-
prochement de faits ptecieux pour riiistoiredes connoissances
physiques des anciens ; mais }'ai pense qu'il y f^lloit joindre
quelques notes , pour detruirc les erreurs qui s'y trouvent , et
qui soHt dues au temps on il a ete fait, epoque k laquelle
la doctrine pneumatique n'etoit pas aussi generalement
admise, et ou la revolution cliimique n'etoit pas encore
totalement operee. A. L. M.
(2) Aristot. Meteorolog. L. i. Cap. 12. p. 14.5.
(3) II est probable que c-s peuples faisoient Louillir kur
cau pour la prdparatiou de leur cimen t , par une autre raisoa
Connoissances de^ anchns. t^i
PlineCO P^ii'Ie anssf , conime d'utie cIcVouvprfp de
Neroii , de I'operalioii de faire bouillir I'eau «ji,'oq
se proposoitdc faire geler , afia d'accelerer sa con-
creliQii.
Ati.eiiee (2} remarque cgalemont r:ue leshabitans
d.^ Pile C^mole metloienl dans leurs n^frigerans de
eau qui avoir rte t'chauffee p.r les rajons u so-
Itil, et qu'ds faisoient des rr'-primandes a ceux qui
les servoient, si I'eau qn'il. prenoient pour la ron-
verdr en glace, n'avoit pas ete cbaufli^e aupaia-
vani. ^
On trouve dan^ le sixieme livre et dans la qua-
trie.ne section des Epidomiqnes d'Hippocrates , un
passage qui nie paroit avoir quelq ,e rapport a ce
^sujet, quoique jenemeflatte pasde T^claircir snlie-
xenient (3).
II est question, dans' ce copsell , de la preparation
de I'eau qui doit etre hue par le malade 5 Hippo,
que ccIlerapport^eparAristote; car le retour d'une saison
moa.sr,sour*?use auroii fait foudre la glace et emporte le.
Jiai itauons , et le froid qui r^gne sur les bordsdu Poat-Euxia
(la mer Noive ) n'est ni asse^ fort , ni assez constant pour
n avoir point a craindre un parcll retour : on doit done rm^^er
ce procede au nombre des fables ; mais U recit d'Aristote
prouve toujours son opinion sur ce sujet. A L. M.
CO Plinc. L. 3r. cap. 3. II faut lire ainsi dans le texte an-
gluis, au lieu de cap. i3. , le livre 3i de Pline ne contient que
dix chapilres ; c'cst une erreur Ijpugrapliique. A. L. M.
(2) Athenaei lib. 3. p. t^S. 124. Edit. Casaubon.
(3) f^co^ x:p,^„fty ri y,iy a; ^i^^rtii rov ui^a , to c^e ^,
T %
,02- Hydrologif..
crates ordoniie que ce soit de I'ean qui ait boiiilli,
el qii'on fasse celto operation avec de I'eau exposee
fi I'air , et partie avec de I'eau tenue dans un vais-
seau ferm^ (i).
Le j)ut du premier de ces preceptes t'loit de faire
l)ouil!ir ou de chauffer Teau , et le but du second
^toit de la r-efroidir. En effet,,je presume qu'on la
faisoit bouillir pour en ciiasser Fair , et qu'ensuile
on la couvroit pour qu'elle ne put pas en absorber
de nouveau , ce qui auroit retarde son refroidisse-
mentj suivant la tbeorie moderne (2).
(t) Quari<5 I'eau a Jjo^illi, 11 faut avoir soin que I'air puisse
enlrer clans le ralsseau , qua k vaisscau ne soit pas enti^re-
mentpleia'^qti'il ait un couvercle. Hipocrates , loco citato,
(3) Loin que I'accis de Telr soit contrairc a la congelation^
il la favorise au sootreire ; I'eau bien enfermee ne se ge'e
que Ir^^-lenteuicnt ,(3it Fottrcroy d.»ns sachimie ; etd^s qu'on
debouchc le vaisseau daos lequel elle est CQntenue , elle se
g^'e ]beaucou,p plus facUement , quelquefois dans I'instant
Meme oa clJe reroit le contact de I'oir ; la meme chose arrive
dans la cristsllisation <Jcs sels ; ainsi rbpini.>a emise par
M. Falconer^ n'est nullement, coihme ill'gvaace , conforme a
Jachimie moderse , elle "lui est contraire.La pesanleur de I'air
opposapt un obs'.acle a la diletation de i'eau , doit en efFet en
apporter rn ^ sa cono;c''ation : rien ne prouve noh plus
tru'Hi[)pocral3S recoDurande de faire bouiUir I'eau que ses
. inalades devoient baire froi4e pour acceierer sou refroidisse-
jneiit -y ne devons-nous pas presumer qu'il etab'issoit ce
pxecepte pour obteisir une eai\ moius dnre et plus , ure.
ll,es clnmisles et les mi^decioa modernes recommandent ega-
Jement defaire boui"Iii-l''".au que Ton veul boire avec securite ,
parce que rebullidon lui cal^ve le principe odorant desa-
greable qu'^l e peut contenir, et fait precipitex vine pailie des
ge'.s calcaires. Vojez Ciiimie de Fottrcroy , T. i. pago
^2A. ^. L. M.
Connoi^snnces des anrhns. 5^3
Qnoi'qiie Galien n'explique point ce passage en-
iK're.nent (i) de la meme manierf que je PaF fait ,
il p/nsc qu'llippocrates parle de f.ire bouillir I'eaJ
qn'oii doit ])oire ensuite froide, d'aulant plus qu'il
lecommande ce qui est fiold, dans la phr«s3 qui
precede inimediatcment celle dont nous nous occu-
pons. Galien e^piique I'obscuriie de ce passage, en
disant que cesouviages d'Hippocrales ne furent pas
destines a etre publit^s, mais qir'il ne les t^crivit
que comme des notes particulieres pour aider sa
memo ire.
Gahen Ini-meme connoissoit tres - bien cette
propriet<^ de I'eau bouillie , qui consistc k re-
Iroidir plus rapidement et h un plus grand d.^gre
« Lorsque, di^l , nou. voulons domier M'eau le
- plus grand degie de Trold qu'il est possible d'ob-
« tenir, nous commen.:ons par la chaufler , ensuite
» nous entourons de neige le vaisseau qui la contient 5
» ou SI nous n'avons pas de neige , nous la plarons
» dans iin puits cu sur le couPMnt d'lme source ,• et sa
» tem])erature se change plus aisement de cette ma-
» niere ».
Galien atrribue cet efiet a la rarefaction que IVnii
a eprouvee auparavant; mais il est endent qu'i! se
ti ompe a cet egard , puisqu'apres avoir H(' refroid^e ,
I'eau est aussi condensee qu'auparavant. Peui-etre
la veritable cause de ce pucnomene est clle celie
(0 Cependant Galien paroh penser que IVau doit boui'lir
dans un valsseuu decouvert , e. que quand elle est descei.due
dansle re-ngerant, il fauU'enL-rmer de mani^re h exclura
t'^ttt (ur. Qaltn. comm, m lib, ^i , g 4. Epidcm. rJippocr.
T 3
294 Hydrologie.
qiron en donne en gtMieral , savoir I'cxpnlsion de
l'a,ii"5 mais comment cette expulsion contribue-t-elle
a favoriser le refroidissement ? Cela vienl-il de ce
qu'aprts (jiie I'eau a rte privee d'une portion de
son air, une partie de ,-a c. alenr lalente est sortie
avec lui , et I'a rendue ainsi plus susceptible d'etre
fticilement refroidie ? Oj 1g refroidissement est - il
plus facile 5 a cause de I'expulsion de Pair, parce
que Fair , etant uni avec I'eau , et devant en e.tre
separe lorsqu'elle gele , ;)eut , par son attraction aveo
I'eau, exiger un plus grand degre de froid pour
enetredega^'^, quM n'en auroit fallu pour geler I'eau ,
si elle n'avoit pas eu a vaincre cette attraction (i)?
II faut cependant remar uer que Galieji dit , non
seulemeiit , que I'eau qu'on a fait clsauller est
plus aisee a geler , mais menie qu'elle prend plus
aisement claque degre de froid inferieur ^ fait qui
meriteroit d'etre constate par des experiences.
2.° Je crois que le fait de la production du froid
par I'evaporation des fluides (2) , est regardc conime
un^^ decouverte moderne , et il me paroit ponvoir
I'etre a juste titre. Cependant , il semble que, qnoique
ies modernes auteurs de cette decouverte I'aient
(i) Ce phenomt'iie est probablement dd au dt^gagement de
I'air : le calorjqvie que I'eau lic^uide et tr^'s-echaiiff'ee coiuient
en exces, se dissi ;e plus faci'emcnt, et le rapprochement des
molecules de I'eau se fait avec plus de promptitude et de
force. A. L. M.
(2") Get effet depend de ce qu'un corps, qui de solide dcvieni
flnide , abs.;rbe plus de calcrique qu'il n^Gn aroit avaiji^
Cliimie de Fourcroy. T. i, p. i35. A. L. M,
Conho'issancc dcs andens. 2r5
ignoi:c', ce fait ^-toit hes-connu des anciens , et non
seulement des Grecs , niciis vrtrnc des Egyptlens.
^ Athenee dil que « Pmtagorides ,dans sa descrip-
tion de la navigation d'Antiocl-us sur le Nil on sur
TEuplirate , rapporle le mojen dont on se servoit,
dans ce pajs , ponr r.-froidir les flnides , et qui
consisfoit a les cbauffer d'abord en les exposant aii
soleil, ensuile k les passer, et a les mettre dans
dc& vases de terre , a la parfie la plus elevee , la
plus decouverte et la plus expos^e du baliraent ,
pendant que deux enfans etoient occupes , lonie la
nuit, a veiljer a ce que les parois exterieurs des
\-d&Qs fussent ton jours Immides. lis conservoient en-
suite ce degre de froid,en convrant ies vases avec
do la paille. Ce procc^de , dit-il, refVoidi^soit i'eau
a un !el point , qu'ils n'avoieut pas besoin de alaqe
(I) «.
Galien dc'crit ainsi le moycn dout on faisoife
usage a Ale^andrie, pour relroiuir I'cau ; Vers
le couclier du soleil , on jetoit Teau qu'on avoit
d'abord chanffee d.-uisdes jarres suspendues Ci\.\x par-
ties les plus elevees du batiraent_, avec lesfenetres
ouvtrles, a Poppositj du point d'ou le vent soutiloit.
Avant le coucber du soleil , on placoit les jarres sur
la lerre , on en mouilloit les parois extt^rieurs, et
on les couvroit de feuilles froides ct pleines de sues ,
telles que celles de la laitue , afin que I'eau put con-
ser\er le degre de froid qu'elie avoit acquis par cc
proced(§ (2).
(r) Alhcn. p. 124.
(::) Gulen. Comm. iulib. 6. Ejnilora, Ilippcc, coram. 6.
T 4
«()6 Hydrologie.
Le moyen dont on se sert actuellcment tlans les
Iiides orientales pour faire de ]a glace , ressemble
a beaiicoup d'^gards a celui dont ii vieut d'etre parle.
Oil creuse des {vsses dans des plaines vastcs et de-
couvertes , aux endroits tivs-exposes a la circulation de
I'air , ct ronstquer.mpijt a I'evaporation. Ces fosses
sont joTicli^s de roseaiix , afin d'admettre la circu-
lation de i'air de tons les cotes, el on place dcssus
des vases de terre peu profoiids, remplis d'eau ,
et dont la tCvture est si poreuse qu'elle laisse filtrer
I'eau a travers, de maniere aconserver I'exter eur tou-
jours huii.ide , et produisent par consequent le frold
par tvaporatior!. On a fait anssi houillir , auparavant ,
I'eau qui sert a cet usage. II n'est pas necessaire
de remarf[uer combien ce procede^ ressemble a celui
qui a ete ci-devant cite , et combien il est vraiscm-
blable , d'apresl'i'rmutabilite des anciennes n-.cx3urs,
que c'etoit un usage d'une antiquite tres-re-
culee (i).
3." Queiques autres decouver'es , telles que I'eva-
poration cle I'eau en forme d'air, et la facilite que
la C- al !i" L't I'ag.'ation procurcnt a celte Evapora-
tion ,paro'ss-nt n'avoir pas ete incoimuesdes ancicns,
quoiq e 1 urs id'Vs, a cet egard, fusseut fort eloi-
gnees d'etre claires.
L'huraidite , dit Aristote , qui est autour de la
terre , etaiit convertie en vapeurs par le soleil , monte
dans I'atmospliere. Lorsqu'elle s'est eleveCjla cha-
(l) \oytz I'exlraitdu m^inoire snr la maniere dont on fait
«Ttificieliement de la glace a Benaris , Magazin JEiicj elope-
ii<£ue , torac I , p. i5i, A. L- JJI.
Connoissnnce des ancient. 297
leiir a I'aicle de laqiu lie eile y est pervenue , quilte
la vapeur(ouconime diroit le docteur Black, deviant
sensible), et ensuite la vapeiir reprend de nouveaii
de la consistance et quitte sa fonue d'air pour rede-
venir de I'eau (i).
« La raisoii , dit Aristote , pour laquelle la rosee
» et la gelc'^e blanclie ne prenuent pas une forme cou-
» Crete dans (\ci situat'ons ('■levees, c'est que I'air
M y est tres-agite , ce qui dissout (2) la consistance
» de I'eau >-. Ibid. cap. no.
La doctrine de la chaleur latente, du docteur
Black', ne paroit pas avoir el6 entierement incomiue
des anciens.
« La neige J dit Arislote, ne pent etre formee
» sans que le froid doirine , parce qu'il y reste encore
y> beaucoup de chaleur. Car une nuee ou une vapeur
^' contient beaucoup de chaleur qui est un reste de ce
» feu qui a absorbe I'liumidite de la lerre ».
Aristote dit ici, que 1© nuage ou la vapeur con-
tenoit encore de la chaleur ou du feu, et il s'accorde
i usque la avec le sjstene du docteur Black 5 mais
ce (1(^1 ni,M- a deiouvert que , loisque la condensat ou
se fait, !a chaleur qui etoit cacliee auparavaut deviv-ni
alcrs seusibl (3).
(t) Mcieorol. 1. I. c. 9.
(2) Og ^ixX'ift ry^v THU'JTrjV (ru^arty. N. H. Le mot grec iraf-
«5-<,' signiiie 'la consistance , la forme solidede ({uelque chose ,
dans sa signification primitive, et il est souvcnt applic[ue k
IVau. Voyez le Lexique de Budee, au mot s-j^ua-tg.
(3) Le systeme de la chaleur latenic , du docteur Black , se
rapproche beaucoup de celui du cahr;i}ue dy Lavoisier €t de*
29'^ -i^ylrologie.
4.'^ Les anriens connoissoient parfaitement la cause
pour lanuelle I'air efoil plus cliaucl aupres de la terre
qu'a cles n'gions plus elevees. Aristole explique ce
pbeiiomene par la reflexion des rayons du soldi (i)
de dessus la suiface de la terre ; c'est aussi la
ra son que Seneque (2) en donne. Gependant je crois
qu'ou attriljTie gen^ralement celte decouverte _a
Newton.
5.0 Aristote (3) donne une cause de la concretion
soudaine des grains de grele, a laquelle il attribue
avec beaucoup de probabilite leur grosseur : cause
que je n'ai point trouv^e ailleurs, et qui est peut-e!re
la S3ule veritable. II observe cc que c'est en general
daiis un temps chaud que la grele lombe en plus
grande quantite » ; et c'est a ce'te premiere chaleur ,
qiii doit avoir affecfe la vapeur et !'eau"que cel!e-ci
contenoit, qu'il attribue la congelation soudaine de
la grele , de la meaie maniere que I'eau , prealaJjle-
clilmistes pneumatistes franoais. Ces deux sjstemesfont egale-
ment regarder la ohalear oomme une matiere existanle par
elle-meine et inherente aux corps qyu'elle pen^tre. Ce passage
d'.ArlGtcte nrouve que I'o^jinicn de regarder la chaleur comrae
un corps , n'est pas nouveJJe ; mais il y a loin de la a la belle
theorie que Black et sar-t-out Lavoisier en ont de-
duite. A. L. M.
(l) Meteor. Lib. I. c. 13. '
(2} Quod radii soils a terra resiliunt ct in se reciirntnli.
Honim duplicatio proxima quceque a terrls caHJacit. Quce
ideo plus hah enl t&poris , quia sohm his scutiimt.
Senkca. ISat. qiicss^. I. 4. ^ecl. 8.
(3) Mc'LcoroTog. dc Giandine.
Connoissnnre des nncien<;. 209
inent chauffee, gele plus aiseraent et plus promple-
ment i).
6.''' Pareillcraoiit !e fait de la separation de Pair
avec I'eau qui se trouve relVoidie par cet evcnement ,
lie paroit pas avoir ct(^ iiiconrui dc-s anciens. Proija-
blemenf cV.-^t la cequ'enlendoit Hippocrates, lorsqu'il
a dit « que Ics parties claires, L gores ct donees de
I'eau s'evaporentflorsqu'elles sp gelent » : opiuion
qu'ii I'aroit qu'Aristote lira de cette source.
Aulu^elle (2) explique ce passa.e d'Ari^iote ,
comine si I'air etoit comprise , a':;si qu'il I'est en
elTet ]-)ar I'i^au , lorsque celle-ci devient concrete ; et
Macrobe (3) exprime la meme chose dans des termes
(l) Lcs nrincipes de la clihnic pnenmalique c nt fait con-
noitre la cause de la formalion de la grele. E'Je est due a la
recompositiori de I'eau operee par la combustion iostantanGe
du gas llydrog^ne ct de I'air vital, occaaionnee par I'^tin-
celle electrique ; a proportiou que cette eaa perd de son ca-
lorique dans les differeutes regions ou elle passe , elie ap-
proche davantage de Telat de glace et elle devic :t dc la neige
ou une grele plus ou moius grosse et plus ou ruoins
iorte. A. L. M.
{2), Quoin'nm cum atjiia /rif^orc- aeris chirnUir , cl ccit f
iiecesse est fieri evaporaiionem , et quamdam quasi aiirain
tenuissiwam exprimi ex ed et cmanare : id autcm , inquit j in
ed let'issiniiim est quod evaporatiir.
AuLUG. Ge'l. noct. attic. IX. 5.
(3) Omnis aqua y inquit ^ hahet in se aeris tchuissiini poi"
iiuneni , qua. salutaris est : hcbet que tericawjccxem ^ qua est
corpulenta post terram. Cum ergo aeiis Jriooic et oelu coacta
calescity necesse est post cpaporolionem iclul cxprimi ex Hid
iiuram tenuissimam j qua discedente coni^cnial in coaguluin.
Mackob. Satura. L. Vll. c. iz.
3oo Hydrologie.
plus clalrs et plus distincls, et ii semble dire qn'il
etoil iiecessalre que I'eau se sepamt d'avec son air*,
poiir qu'elle se 'congelat.
•7.0 On s'est souvent imagine que le fait de Peau
qui s'eleve a son niveau dans les tuyaux, etoit une
dccouverte raoderne ; mais je crois qu'elle avoit ele
faite par les anciens , et que les aqueducs qu'ils ont
construits a si grands frais pour charier Teau , ri'ont
pas ete construits, parce qu'ils ignoroie t quo des
tuvaux auroient produit le meme eiTet, mais parce
qu'ils etoient persuades que I'eau qui coule dans des
tuyaux de ploiib, est moins saine que de I'eau qui
passe dans un canal decouvert. Palladius prouve
clairement que c'eto't la leur motif (i).
Vltruve e>prime la meme cli05.e, ouoique en Jes
tcrmes beau oup j-^lus obs urs (2) ; et Pline domie des
preceptes particuliersa ce sujel (3).
(1) Si cfuis mojis interjecius occurrit out per Jatera ejus
aqttam ducemiis ohlicjuam , aut ad aquce caput speluncas lihra-
bimus per quariim structurain perveniat. Sed si se vallis inter-
serat , erecias pilas rel arcus usque ad aquce justa vestigia,
construemus , aut pluinbeisj'islulis clausam dejici patiemur ct
explicata valle consiir^ere. Ultima ratio cst j ylumbiis Jis-
tuJis ducere j quce a./uas iwxias reddu'lL
(2) Vitruv. I 8, c. 7.
(3) L. 3i, c. 6.
M I N E B. A L O G I E.
WoY,AGES dans tes deux Slcltes et qiieiqucs
parties de L^Apenaln , par L\ibbe Lazare
Spallanzani y proftsseur d'Histoire Nata-
reUe d L'lJnwersUe de 'Pavlc , ct surintendanA
duMusee public de cette v'die. Tome 2. Pavie
1792. De riinprimerie de B.ithasar Coinmini,
in-o^. avec figures.
X-iE second tome de I'excellent oiivrage du c;'lebre
Spal'anzani, aiissi int'resscint que le premier, traile
enSierement des iles de Lipari. Ges i!es, au no nbre
de dix, siluees dans li moditerranee , entre la Sicile
et I'ltaiie , portent en-.ore ies nanis de yulcanios.
et JEoLice. Leur nature volcanlque, quoique connue
d.-s anciens , est devenue sealement dtir.s ces der-
niers remps I'objet d.?s observations des pUjsiciens ,
sur-tour d- > elles de M. De.luc, du chevalier Hamil-
ton , pt de I):;odat Do'ou-ileu ; mais , outre que ces
natnrali.-^tes n'pnt pa=5 porte leur examen sur loutes ,
iiseu out encore'.n<Sg]!g^: biendescirconstance.s. Notre
ac.teur ^;'est charge d'eii parler d'u.'e mauiere ('ten-
due , et en donne une description Iribs-fidele daiis
siv rliapitres que ce tome renferme.
Notre auleur , dans le dlxieme chapitre d > I'ou-
vraie , et !e premier des six que nous annoiicoris ,
pavle du Stroraboii. Cette ile situce a 3o niilles do
Lipari et k 5o de la Sicile, a une figure coiijue
doui la base , qui s3 divide en dt^ax , pr($seiite une
3os5 Minernlogie.
circonf/rence de '^o nillK^s environ , et vers le milieu
desa lianteiir , uu voka^i tre:>-r.'Connu parses erup-
tions coiUinuelies j il verse de ,^',rands fleuves d'o-
deiir sii!j)hiireus3, et lance uue grele coniinuelle de
laves .s;o;.g!'.. uses de difTv'r ^isdiiaie.'res, acconipaj^nee
d'uii bruit ecl;ila,ni ' I'uue poussiere tres-fiue de
scories brunitres i rjugealrv-s le-eres ^ d'une nature
pTAsque vitreusi^ , et auxqu lies on donne le nom de
ce.id'- s. Da -s les plus gra ides ('ruptions ,on voit en
Fair pi US de mille morceaux de lave , a la hauteur
d'un demi mille et quelquefois meme d'un iriille,
coiiinie TauleurTa -'ppris d sinsulaires. Les moindres
jets de piei res ns vont pas au-dela de 5o pieds , et
sor.t touiours accompagn^s de fracas propoi tionnes.
La vive luii.iere qui se developpe pendant la nuit
au-dessus do volcaa j et les laves emflaramees
furme}it,reun)es , des ravons divergens lonibant sur
ie penchant dv^ a monagne, une grele deTeu rou-
lant , repand sur le sol un beau jour et produit
uii sjiecta'Je imposaiit et iiiajestueux.
Spallanzani rt^forme I'erreur du chevalier Ha-
milton qui , trompe sans dout ' par I'tHoignement ,
avoit cru que le cratere du Siromboli estau sommet
de la monia-iie , tandis que, d'apres le temoi^-^nage
des habitar.s et la tradition , il resulte que , depuis
plus d'un si^cle , il e>t place au milieu environ de
la hauteur de la montagne. L'auteur s'est convaincu ,
enexaminant le volcan de pres sur la montagne meme,
proche du cratere, que les intermittences des erup-
tions, regardees par des vojageurs comme periodiques,
eloient raremenlde trois a qualre secondes, et devoient
Voyage de Spallanz.ini. o55
j)ar consequent vire considerc'es coiiime perp,'tnelles.
Pour bieu examiner ce volcan , notre courageux
-auteur ne n-.^gligea aucune occasion et de jour el de
iiuit. II youlut vnrin contempler I'iutorieur du cva-
ti-re , pour rcmarquer les plu^noinenes cjui s'offroient
a sa vue. Ajant done rencontre une pelile grotte
dans une roche au-dv^ssus du cralere , lequel a 840
pieds de circonft'rence , il se confirma dans la
premiere idee qu'il s'eloit formce dct son peu de
proibndeur, et vit que les parois internes, incrusfes
en quelqu'endrolt de subslances de couleur jaune ,
probablement de sel ammoniac et de soufre , se
retriecissoient en descesidjut en forme de c ')ne tronque
€l renverse. Jusqu'a une certaine hauteur , Je cralere
est rempli d'une mati^re lic{uide emflammee, agitee
seiisibleincnt d'un mouvement intesfin ct trouble,
pt d'un autre mouvement cuassant en haut la matiere
liijuefiJe de laqucUe s'elovoient des buDes d'un dla-
me re de plusieurs pieds. Lorsque celles-ci se crevent
vlhs cbassent les laves embrasnes et encore serni-
fUiidesquis'unissent enti'elles lorsquelles se heurlent
a peu de distance , et se brisent au moment du choc
quand elles ont perdu leur fluidity.
D'apres les diverses particularitc'^s qu'offre ce vol-
can , les hahitans du Stromboli predisent les varia-
tions de I'atmosphere. Pendant tout le temps que
notre auteur resta dans celte ile et dans I'EoIie ,
il trouva que les predictions n'etoient pas tolalement
aver^es. Une chose digne d'observation , c'est que ce
trajet de mer oii tombent le^greles du Stomboli, n'est
piesque jamais rempli dti mat ere volcanique. Les
"^4 Mineralogic.
liabltans des iles Eollennes crolcnt que la mer en
ce lieu est satis fond et en rendeut raison en disant
que toutesles laves qui j tombenl soiit reportees au
cratere par des routes ignonx^s , et qu'il se fait aussi
iin flux continuel de laves du voican a la mer et
de la mer au voican. XJn tel plic' nomine e xplique
invec tant d'absurdite par les insulaires , s'' nlend
aisement par les soins infaiigables de notre natura-
liste. Les laves qui tombent en grele , sont X\<gs,-
spon^/ieuses et se brojeiit facilemeni : il arrive de-la
c|u;^ plusieurs d'elles sont reduites en poudre avant
d'arriver a la mer, et que d'autres qui y tombent
enfieres , se broveiit aussi par le choc frequent et
alternatif produ't par les ondes en courroux , le
inouvement des eaux t'tant presque toujours imp^-
tueux dans ce bras de mer qui offre une profon-
deur de plus de 124 pieds. Toutcs les scories i
ensuile etaut reduites en poussiere , celle-ci est i
tiansporteeailleurs p>ar la violence des courant, et de \
cette maniere ne remplit pas cet espace de mer,
Les productions du Slromboli , ob et du chapitre
XI.^ on le IIi*^ de ce tome , se reduisent au sable
scories , au tuf , aux pierres ponces et au fe
L'ile fournit trois especes de scories. La premiere
especeest tres-leLere,d'unecou[eur entre le noir et le
g:is, et offre quelques peti is m.crceaux recou verts d'un '
vern's vitreux. Les autres espeCv<^s en general sont
coniposees loar la plus gra;nde partie d6 fi!s vitreux ;
.s^mi-lranspaiviis. Li deux ie me espece de. scone dont '
se forme la gre'e , quoique pen different? delapre-
Miiere est cependaat trois fois plus pesante , sans i
fibres
ler. \
;hapitre |
)le , aux I
er poll, I
Voyage de Spallanzan'u 3o5
fibres ,et ne prcsente que de tr^s-l^gers signes de vitri-
iicaiion. E!le est tres-porense , de tex ure iiniforme ,
d'uii. grain peu fin , de cassure irreguJiere , de
mediocre dureti^ , peu scintillante avec I'acier , d'une
odeur un ] eu terreuse , et attire Taiguille aiinai'lee a
la distance d'une moitie de limine ou six poi'its. iCnfiti
la troisieme especj de scorie est aussi legere , ren-
ferme du spatli ; elle appartient a I'ancien voican,
et so trouve a peu de profondeur de i'ile , sous le
sable. Avant de terminer ce cbapitre ; I'auteur rap-
perte quelques experiences faites en exposant a Pac-
tion du feu des fourneaux divers jaspes et porpljjies
de iieux non volcanises. 11 en resulie, 1.° que la base
des porphjres ^gjp liens n'est certainement pas da
jaspe , mais probablenient de la pierre calcaire ;
2.0 qu'en coiifrontaiit les resultats des breches por-
p'ijriques alterees par le feu volcanique , avec ceux
ahercs par le feu des fourneaux , les premiers out
p^rJai leur premiere forme et ont 6te vitrifies 5 le
feu du Slromboli ne les allere pas au point de les
priver totalemeat de leur structure.
Avant d'abandonner ce qui a tra^t a I'hisfoire du
volcan de Stromboli , I'auteur rapporte re qii'en
ont ^crit les anciens 3 il en resulte que I'epoque la
plus anclenne , a notre conuoissance, de ses incendies ,
est de 290 environ , avant I'ere chretienne, lors du
legned'Agathocle , fameux tyran de Syracuse ; puis'
ensupposant, faute de temoignages, que ce volciuiait
d^s lepos de plusleurs siecles , on prouved'ailleurs
oue ses eruplions non interrompues ne s'elendent
pas au-dela d'un periode de 200 aus. Quant aujc
Tome 11, Y
5o^ Mineralogie.
substances qui alimentent uii feu apssi continue!,
* Spallanzaniatlribue cet effet a I'iminense quantite de
soufre,cle pvrotes,de fer et probableiiient encore an
petiole, qiioiqu'il n'ait pu decouvrir aucuu indice de
cebituiiie.
Le douzieme cliapltre ou lo troisieme de ce torae,
offre une tres-coiirte descriplion de Basiiuzzo ,
Bollero , Lisca Bianca , Dattolo , Panaria , et des sa-
lines qui out (§te deja soigneusement examinees par
Deodat D lomieu. Les cinq premieres iles sont
au-dessous de Li pari et de Stromboli , et quelques-unes
sont plutoi des rocliers que des iles.
Basiluzzo , a deux mille de circonff^'rence et
est peu elevee au-dessus de la mer. Sa superficie
est seulement sii.steptible d'une tres-petite culture ,
Tie presentaut qu'une legere couche de lave d(^com-
pos^^e 5 au-dessous de laquelle on decouvre la lave
solide, graniteuse en p'lusieurs en droits, et sembiable
a celles dont le reste de Pile est fonr,e.
Boltero et Lisca Bianca sont deux roc hers formes
principalement de laves decomposees aulrefois par
des vapeurs arides et abondantes de sulfate d'alu-
niiue , ou jjien d'alun. Pres de ces rocbers I'auleur
trouva dans la mer une source de gas bvdrogene sul-
furise ou d'air h^patique , accompagn^ d'une cbaude
exbalaison qui faisoit elever le mercure dans le
tbermomclre de Reaumur, a ri8 d. et i , la tenip^ra-
lin-e de I'atmospb&re 6\!int a 20 d. j , ce qui de-
jnontre que sous ce lieu , qui paroit etre une conli-
iiuation du rocber de Bolteio , il exisfe toujours des
indices de feu.
Voyage de Spallanianl. 3 )/
A pcu (le distance de ces deux rozhers on en
frouv^e un autre nomme Dallolo, forme aussi de laves
encore plus decomposjes; etplus pr^s de Lipari on
voit,l'ile de Panaria, coaiposee de granii volcanisi jCn
partie decompose ,avec une cu-conf^'ence de plus de
8 milles, et une petite elevation sur !a mcr. D'apr^s
I'exameLn de tous ces rochers et ilots , not re auteui-
se range de Popiuion de Deodar Dolomieu , c'est-
a-dire , cpie cliacun d'eux ne doit pas son 04;-
gine a un vo'can pariiculier , mais qu'ils sont
les debris d'une ile t;es-ancieniie ,ea partie detruite,
et probablement de TEuoniinos , la septieme des
Eoliennes , situ6e selon Strabon, a gnuc le en aliant
de Lipari en Sicile, oii sont actueJIement lesilots doiit
nous venons de parler.
La derniere ile que nofre auteur examine dans ce
cbapitre,est celle appelee ancienuement Gem^lla, le
aujourd'hui Saline^ a cause du sel coinraun pu muriate
de sonde que Ton e tr.iit dans un angle de la plafie.
Son circuit a plus de 5 lieues ( i5 milles ) son e tr^-
mil^ se tcrmine en trois pointes , et ^st formi'e d'nn
amas de laves de couches distinctes , provenant de
la hauteur de ces montagnes,ou I'on \oit quelque
vestige de cratere.
Le XIII« c' apitre est relatif a Vol'-ano. Cette
ilea 3 lieues | ( ir milles de circonference ) et ren-
ferme , par le moven d'une Ian .ue de lerre, pro-
duite par une grande erupt on volcanique , un
ilot dont le sol est roug^. El'e a la figure d'un
triangle scalene, triangle qui a deu coles inv''<.aux ,
dont les deux cotes qui s'enfoncent dans la nier
V 2,
3o8 Miner alogie.
sont composes de superficies de laves haules de plu-
sieurs pieds , qui , brisees paries ondes, forment main*
tenant comme une muraille verticale, sur laquelle on
distingue des couronnes de couleurs , nuances et
pastes differentes , toules cependant pen diffe-
rentes de celles des autres volcans , excepie les
deux suivantes. La premiere prtsente dans sa super-
ficie un vrai ciment tres-noir, tres-brillant^ tout-a-
fait opaque , aisement friable, et cor.tenant du spath.
Ce ciment offre encore des bosses pars;^mees de
festons et de gros fils qui sont tous dans la direc-
tion de la montagnea la mer. L'interieur prtsente une
lave grisatre et rougeatre , apre au tact, ierreuse ,
d'odeur argileuse , a base de pierre de corne , et du
feldspath. L'autre espece de lave se trouve sur le
lit et dans I'eau , en forme de globes, avec plusieurs
proprietes destufs volcaniques; mais, a la diffi^rence
de ceux-ci,son grain approche du verre. L'auleur
attribue la molesse de cette lave, non aux acides
sulfuriques qui n'j existent pas , mais au refroi-
dissement subit de i'eau lors de sa fusion , augu-
rant cela des scissures qu'elle manifeste et de la
friability de ses parties. Celle-ci et les autres laves
paroissent etre des productions du craterc principal
qui est eloign^ de 'a mer de 200 pas environ, Celui-ci
est rempli de terre , et conserve encore la forme
d'un cone renverse , d'une profondeur de 80 ] ieds
et d'une circonference au fond de 70 picds environ,
et aux bordsjd'un sixieme de mille. Autour du
cratere de Volcanello s'elevent des trriin^es d'une
fumee blanche 5 etdesfentes d'ou elle sort on voit
Voyage de Spallanzam. Sog
de temps en temrs, pendant la nuit , sMlever de
petites flainraes.
Avant de visiter le principal cratere de Vulcano ,
Spallanzani voulut voir la grotte existante dans cette
lie 5 assez celebre a cause de son eau thermale :
son fond est de mediocre grandeur et encrout6 d'alun,
de scl ammoniac et de soufre. La descente est in-
commode, I'odeur de souffre , la cbaleur de I'air
et la difficulte de respirer ne permettent pas d'y
Tester long-temps. L'eau tliermale ne monte pas k
So d. du thermometre de Reaumur ; et outre une
6iianation sulfuriquCjle sel commun et lesel ammo-
niac qu'elle contient , developpentune quantity con-
stderable d'acide aerien ou carbonique dans I'^tat
de bulles aeriformes.
Pour demontrer que la decomposition des laves
est produite par les exlialaisons acides sulfuviques ,
et non par I'acide murtatique , comme le pretend
Lesage , dans ses Elemens de niineralogie , notre
celebra auteur termine ce cbapitre en rapportant
les ex-periences qu'il a faites sur cet objet en pnr-
ficulier ; il en resulte que c'est a I'acide sulfurique
que Ton doit la decomposition des laves , et Lesage
en seroil convaincu ,si,au beu de decider de son
laboraloire, il eiit visite les volcans.
Dans le XlVe cbapitre notre auteur continue
de parler de Volcano, et rappelle brievement les
observations qu'ont faites^e cetie montagne enflara-
m6e Bartoli en 1646 , Orvi le hoUandais , en 1727 ;
Guillaume Deluc qui est le seul qui ait penetrc^' dans
rinterieur du cratere , en 1767 , et Deodat
V3
1 0 Mineralogie.
DolomieiT , sept ans avaiit notre natural isfe. En
crmparant ccs observations avec les siennes , et
consultant encore lis tciiioignages de Tlincidide,
Aristoie, Po^yl.e , Stiabon , Diodorc, Fazeilo et
Cluvier, Spa Innzani conclut que Volcano, semblable
au Vesnvc et a I'Etna , a ^te soumis a des cLan-
gemens decralores dans di verses ('rn; tio!is , niafsque
depuis, Taliment du feu c'lant devenii moins abon-
daut , les eruptions ont et6 plus petltes et moins
irt'quenles. II resulte aussi da I'autorite des auteurs
cites ci-dessr.s, cue le feu d^ cette montasne est
tres-ancien , puisqu'il bru!o"t du temps de Thuci-
dide qui florissoit 475 ans avanl I'ere cliretienne;
I'auteur en infere avec raison que ces embrase-
menS' doivent avoir une dpoque bien plus re-
culee , puisque I'ile est toute form^e d'^ruptions vol-
caniques. '
Cetle lie ,du cote de Lipari , n'offre a la vue an-
cun vegetal ; ce nVst qu'a I'ouest et au sud qu'elle
est revetue en parlie de chenes et d'yeuses.
Les divers phenomenes que pre>ente Vulcano ,
servent aux Lipariens actuels comn:e is servoient
aux anx;ieiiS , au dire de Poljbe , pour pronostiquer
les variations da I'atmosph^re , et Tespece de vents
qui doit soiiffler 5 mais notre auteur, lors de son
sejour dsns I'de , ne s'est jamais apercu de la ve-
rjte de ces pronostics.
L'ile de Lipari forme le sujet du XV.« cbapitre
que notre auteur divise en deux parties : dans la pre-
miere il parle des couches de terre de cette il6
autour de la mer 3 dans la deuxieme, de ce qu'il a de^
Voyage de. Spallanxanl. Jjr
convert dans son intt'rieur. La premiere partle est
seulemeut dans le tome que nous annont^'ons.
La ville de Lipari s'elend sur le ri\ age, en forme
d'ampliilhealre. Son port est en avant ; c'cst de-la que
notre auteur c.ommen( a ses observations. Les im-
inenses debris des laves qui tombent a plomb dans
la mer,et sur lesqnels est construit le cbateaude la
\-ilIe, font nne vase de feldspatb , d'un grain Knet com-
pact , de cassnre ^cailleuse, seche au tact, et scin-
tillante avec I'acier. Pour donner une id^e plus par-
faite des principaux objets dccrits dans ce tome,
Tauteur I'a orne de oravures representant , i.« Vol-
cano de Stromboli ; 2.0 la caverne dans Hie de
Volcano ; 3.o le cratere principal de cctte ile ; ^.<>
la ville de Lipari ; 5.° son cliatt au^ 6.oet 7.0 Campo-
Bianco vu eu face et de cote.
ENTOMOLOGIE.
Rapport fait a la Societc (VHistoire nnturelle, sur U
CALENDRJER E\TOMOLOGJ(llJS de M, GiORNA ,
par A. L. Millin.
JL'ouvRAGE que 'a societe m'a cbnrge dVxami-
Jierpour lui en rendre comp}e,est intitnl^ : Calen-
DARio ENTOMOLOGico , ossla osserva&lonl suLto
stagLonLproprie agC Insetti net cUina pienionfese
e partLcoLarmcnte ne' I contornl di Torino. Du
GioRNAfigUo. To/-mo^ 1791.— Calenhrier ENTO-
V4
5n Entomologie.
MOLOGiQrE,ou observations suricssaisons propres
a chaque Insecte y dans le cLlmat pleniontals ^ et
prlncipalenienL dans Les environs de Turin.
C'esl a Linneus que Ton dolt I'invention de ces
petits traitcs qui an'ment loutes les parties de I'his-
toire catureJle , en les faisant considerer foiis les
rapports les plus singuliers et les plus capables do
contenter la curiositc et de plaire a I'imaginalion,
II a principalemerit appliqu6 cette nielLode a la
boianique; mais il a aussi eml:elli par ce inojen
toutes les autres branches de la science de la nature;
et plusJcurs de ses prefaces, plusieurs de ses disser-
tations peuvcnt etre considerees comme d'excellens
mal^riaux pour une poelique de I'lustoire naturelU'.
Tout chez lui a de la vie et du sentiment : s'il
examine comment les fleurs s'ouvrent et se ferment,
il paroit les avoir surprises dans leur ^om/TzetY (r);
si Pheure oii s'opercnt ces differens phenomenes ,
est I'objet de ses considerations, il trace fhorloge
de Flore (2,). Les diff(^rentes epoques de la germi-
nation , de la foliation , de la floraison , de la fruc-
tification , etc. forment le caiendrier de la deesse (3).
S'il decrit I'uuion des sexes dans les vcgetaux , il
paroit r^v^ler le mjstere de ieurs amours b'gitimes
ou illegitimes , inconstans ou fideles. II semble pe-
n^ter les secrets les plus caches de I'hymen, et il
nous transmet les d(^tails les plus interessans de ces
(l) Somnus plantarum.
(a) Horologium Fierce,
(3) Calendarium Flora.
Culendrier entcmologlque. 3i3
noces riantes (i). Lcs divers cLanfiemens d'etat des
plantcs , del'Iiomrae ,des insectes ,sont pour lui des
nietaniorplioses {2.) qui ont au-dessus de celles des
anci€ns le racrite de la vtrit^. On diroit qu'il va
nous f^iiie partager le nectar (3) qu'il a puise danS
les fleurs ; enfin , quoiqu'il rapporte tout a una cause
.premiere pour laquelle son ame religieuse montre
le plus saint respect , la mjthologe des Grecs avoit
tellemcnt frappe son imagination vive et brillante ,
qu'il la transporte a Fliistoire naturelle^ qui autre-
fois lui donna en partie la naissance. II n'ecrit sur
aucun sujet sans se croire inspire par la divinite
qui y preside. S'il decrit les plantes d'un pays , son
ouvrage pcrte le nom de Flore. Si ce ne sont que
celle d'un petit canton , celui d'une nymphe leur
suffit, et c'est celui de Chloris qu'il lui substitue. S'il
s'attache aux animaux , il donne a ses ecrits le nom
de Faune. Si les troupeaux altirent plus particuli^
rement son attention , Pari obtient cet l.onneur , et
la terrible Laches is qui file la destinee des bommes
et des empires , n'en est point elle-n:eme privee ,
lorsqu'il Iraite des ovenemensbistoriques (4). S'il nous
apprend a connoitie des animaux dont la plupartsont
juiisibles, on croiroit qu'il vientd'assisteral'ouverture
de la boite de Paadore (.^). Rien ne se fait pour
lui dans la nature, sans Lois ^ sans police, sans ceo-
(i) Sponsalia plantarum.
(2) MetamorpJiosis humana J meCamorphofis plantarum j elc.
(3) Neclaria ftoruvj.
(4) Lac?iesis Laponica.
(5) Pendora injectorum.
3 14 F.niomologie.
nomie , ei cei ensemble de luerveiries qii'il nous pre*
•sente nous tratisporte ct nous enchante.
ToTif prend un corps , uue ame , un esprit , un visage •
Chaque vertu devient une divinite j
Wiuerve est la prudence et Venus la Leaufe.
Ce n'est plus la vapeur qui produit le tonnerre,
C'est Jupiter anne pour efirayer la terre.
Un orage terrible aux yeux des matelols ,
C'est Iseplune en courroux qui gourmande les flots ;
Echo n'est plus un son qui dans I'air reteutissc,
C'est une n^-jnphe en pleurs qui se plaint dc Narcis&c,
Les an'eurs qui son! vcnus apresLiiineiis,qui sorrt
sortis de sou ecolcjou qui en out adopte lesprln-
cipes, out suivi la nieme mauiere de decrire et de
proceder^ et ont ainsi banni de la science la secbe-
resse et la monotonie. "Fabricius est un de ceuxqui,
relalivemeut a la connoissance des insectes , Pont fait
avec le plus de succes.
M. Giorna, le fils , a bwsfA consider^ I'iiistoire
nr^lurelle, et principalement i-Eiitomologie , dont \\
s'occupe 5 sous le meme point de vue. L'ouvragequ'ii
eoumet a la societe, et qu'elle m"a cliargc d'examiner ,
en est la preuve.
II rend compte , dans une courte introduction ,
d'.'s raotifs qui I'ont engage a le composer. II en-
avoit insert; deux trimestes en i'^?>() , dans un journal
ilalien intitide : Glornale Sclentifico Letterano.
Une Ivongue maladie I'a force a interrompre ce tra-
vail ; lor3([u'il a voulu le reprendre , le journal
scientifique et litleraire avoit cesse de paroitre. II a
Teiir.prime cet ecrit5mois parmois, dans k Biblio-
Cdendrler enlomologiqne. ji"!
thcqiie ultramontalne, Bihlioiheca uttramontana,
et il I'a eusuite pii!;lie sopart-menf.
Le but de M. Giorna a rte de faire connoitre les
insectes qu'on pouvolt irouvt-r dans les difltTens lieuK
el dans leiirs differens erats pendant lous les temps
de Tannee. II eniploie les noms laluis et iVanvais
de I'ouvrage de Villcrs , qui , comme Ton sait , e^t
rcdig(^ d'apres lesystenie de Linneus. II demerit toules
les especes qui ne sont point inscrites dans le cata-
logue de Villers, et qu'il croit pouvoir regarder
comme nouvelles. Son pere qui leur a impost les
noms sous lesquels il les desipne , les possede dans
sa collection , et se propose d'en publier les figures
et une description plus elendue.
Tous les pays ne nourrissent pas les memes insectes ;
les cpoques ou ils se trouvent dans les divers cli-
niats sont diflerentes ; ainsi cet ouvrage ne pent guider
d'une maniere bien exacte que les compatriotes de
M. Giorna; mais il peut servir de raodcle pour de
semblal)les compositions appliquees a d'aulrescon-
trres. Le citoyen Bosc avoit entrepris un semblable
travail pour Paris , la societe doit I'encour^iger a
le contiuuer.
M. Giorna indique le terns oil il a trouve cbaqre
espece ; mais il ne pretend pas qu'on en doivc con-
clure qu'on ne les rencontre qiraux memes epoques
et que dans les lieux qu'il dt signe.
Pendant les deux premiers mois de I'annee, Jan-
vier et fevrier, la campague n'offie que le triste
spectacle d'arbressansfeuillages ,et de pres depouill^s
de leur verdure. Les insectes paroissent avoir perdu
5i6 Enlomologie.
leur faciilte reproductive ,'cppendant , celui qui pen-
seroit qu'on n'en pourroil pas alors faire rdcolle ,
se Iromperoit , et il perdroit I'occasion de se procurer
<ies especes qu'il clierciieroit en vain dans une aulre
saison.
A Tapproche de la saison rigoureuse , plusieurs
insectes cherchent un asile dans des lieux ou ils
peuvent etre a Pal ri du fiod. Ils sVnfoncent sous
la lerre , se cacbent sous i'ecorce , dans i'interiewr dcs
arbres , dans les coins des niaisons, dans les fentes
des rochers , dans les trous des murailles , sous les
pierrrs , et ilsy passent tranquillei-pent la saison des
fioids , ou dans I'etat parfait , ou dans I'etat de larve ;
d'aufres meurent , apres avoir depose leurs oeuf's dans
difTt^i-ens lieux vers la fin de Pautomne.
On en compte peu dans la classe des Lepidoptercs
qui se cachent ainsi dans leur ^tat parfait et ne sor-
tent que dans les journees chaudes. Ces Papillons
sont le Dore , VAtaLante ^ le C. Blanc , le FapiUon
dit Nerprun et VAntiope.
11 est inutile , dans ceWe triste saison , de se munir
de pinces et de raquette 5 mais , avec un couteau pour
creuser la terre an pied des murs, on peut encore
trouver des larves de Phalenes , desScolopendres ,
et plusieurs especes de Carabes. CeuX-ci se tiennent
cepeudant le plus souvent sons les pierres le long
des ruisseaux , a rexceplion du Carabe crepitant qui
s'enfonce toujours en tcrre. Les Coccinelles se trou-
vent le plus communcinent rassernbl^es dans les fentes
des murs , et sur-tout , dans les embrasures des fe-
cetres , oii Ton trouve encore un grand nombre de
CriUndrier cntomologinue. 817
petits Insectcs des classes des HemiptLres, des No-
vroptcres et des Diptferes, aux pieds des dilTl-rens
arbres. Leur creux oITrira aussi d'aulres especes de
Nvinplics et de Larves , dc Lucanes , de Ceiambyx ,
de Scarab6s. Les vieilles masures, les cliautlerspre-.
sentcnt encore a I'entomologiste le meme espoir
d'une cliasse heureuse.
All mois de mars, la terre s'ccIiaufTe iin peu ,
la pluie et les nciges sont iiioiiis frequenles j alors
paroussent un grand nonibre de papillons et \xm foulo
d'autres insectes, dont M. Gioi'na donne la lislv?. Nous
lie pouvohs nous etendre sur cetle nomenclaluie qui
e.<t faiteavec autant de soin qiied'exactitude, et qui,
quoique born/e au PiY^morit , peul encore etre api}lica-
ble dans les lieux oii la temj-)eralure est a-pou-pres
la meme. Le noni trivial laliu est loujours accom-
pagiK^ du svuonyme francais.
M. Gibrna dj-crir , en passant, plusieiirs especes
rouvelles dont il donne a la fin de son ouvrage une
liste particuliere. II seme dans ses notes iXas ob-
servations qui annoncent nn naturaliste aussi exerc6
qu'altentif, et un esprit tres-judicieux. II j relieve
le* en\ urs d.'s mt'tliodistes dans la classifica-
tion dc que'ques inseclcs , fait connoitre ds
douijles emplois , si^paie des cspe es n.al - a - pro-
pos rennies. II y joint raissi quelques d(*tails cu-
vienx sur les nia^urs des iusectjs , la manicre de les
cliassor, etc.
Dans une des notes, il cite nn fait remarqnable
sur VEplienicra horaria , rEpiiemaire lioraire,
nppelee ainsi , comme on sail , parce quVlle ne vit
3i8 Entomologie.
dans I'^tat paiTait qu'une null , et qu'elle meurt aux
premiers myoiis du inatin.-. Le pere de M. Giorna
a observe, vers le milieu de Janvier, cet iusecte
fixe a la vitre d'une feneUe,ou il resla jusqu'a la
fin de fcvricr, et d^s que le temps ss radoucit,;il
s'envola. Le cito^-en Villers avoit dcja observe dans
•sa description de VEp/iemera parpula,que I'exis-
tence de tons les Epbemeres n'ctoit pas d'une aussi
eonrte dur^e que celle altribuee a I'Ephemere bo-
raire , et que cette circonstance se bornoit h Tespece
qui sert de nourrifure aux poissons.
M. Giorna enricbit aussi I'Entomologie euro-
peenne d'un sup.^rbe Lc^pidoplere , que les natura-
listes avoient dit n'appartenir qu'a I'Afrique.
Le papillon JasLus , qui a ete trouvc en 1788 k
Nice en Provence , ou Ton en a pris plusieurs in-
dividus dans un canton. M. de Suffren en avoit fait
dessiner I'oeuf , la larve et la cbrjsalide. M. Giorna
nous en donne la description.
II decrit, dans un autre passage, la maniere de
prendre ces beaux Lppidopteres, bl^t^qMs, Spkiax.
II faut , dit-il , les surprendre a I'entrce de la nuit ,
lorsqu'ils sortent pour prendre leur nourriture, et
qu'ils viennent se poser , le plus communement , sur
la belle-de-nuit et la balsamine. On pent ainsi se
procurer des especes qu'il seroit tres-difKcile d'avoir
aulrement. Le clair de lune favorise beaucoup cette
cbasse.
M. Giorna a insere dans son catalogue les especes
cities par Allioni, dans les MisceUanea Taurl-
ncusla , et qu'ii n'a pu Irouver lui-meme. Elles
gont indiqu^es par une croix.
Calendricr entomologhjue. 3 [9
L'ouvrage est termine par unesynonymie ilalienne,
latiiie 5 francaise et piemonlaise des phiutcs cities
dans le calendiier.
Nous rpgardons ce petit traifd coniinc ties -im-
portant, et nous desirous que la patience, le zele.
etl'exactitudede M. Gionia trouveut des iuiilateuis.
B O T A N 1 Q U E.
Nomenclature botankijie contcnant^ i.'^ Cck plica-
lionet traductioTt francaise des noms ct termcs latins^
relatifs a touta Us parlies de la plante ; 2.° C enu-
meration melhodiquc des classes , ordres , genres ,
et de Icurs caractcrcs essentids ^ d'apres le systcvir
de Linui ; 3.° la connoissance de ce systeme et la
maniere de s''en servir. A Vtisage des elives de CecoU
de saute de Montpellier , par GouAN ^ professeur
national de Botanique et de matiere medicate ert
cilte e'cole.
Iflsl utile est quodjacimns , nulla est gloria. PHiTEDR.
A Montpellier, chez G. Isar et_ A. Riciiard ,
imprimeurs de Tecole dc sante , place d'Enci-
vade , N.o 208, troisieme anneeRcpublicaine.
I i E professeur Gouan e>t un des savans les plus
illustres que la France puisse se elorifier de posse-
der.Ilapubli? sur Tiiistoire naturelle, et princlpale-
nient sur la Botanique et sur la Zoologie , des
ouvrages d'un orJrc superieur, et Taits pour inscrir*
320 Botanique.
son nom parmi les restaurateurs de la scleace. Ami
de Linneus avec lequel il a entretenu peuda -t plu-
sieurs auuees une correspondance non inttrro-rpue,
il a ete un des premiers a repandre ses principes,
a etablir en France la veritable thdorie de I'liistoire
naturelle. Son Hortus et sa Flora nwns pelicnsls ^
ses Platitoe rariores , son Ict/iyoLogie , rendent
principalement sa memoire immorielle : et les noni-
breux disciples qu'il a formes dans I'universit^ de
Montpellier, qui, pendant long-temps a pu seule le
disputera l'universit6 d'Upsal , attestent I'etendue de
ses connoissances , et son zele infatigable pour la
science qu'il cherit , et dont il a si bien m6rite.
Lorsque I'on a forme les t'coles de sant6 , le nom
du citoven Gonan devoit se presenter un des pre-
miers a la penseej et a qui pouvoit-on nueux con-
fier la cliaire de Botanique, qu'a ce!ui qui a donne
des preuves d'un savoir si etendu dans cette partie ?
Mais quand il a voula commencer ses lecons , il
s'est bientot apercu de I'impossibilit^ oii seroient
f;es Aleves de se procurer des livres eiamentaires de
Botanique. Les meil'eurs sont en efFel devenus tres-
rares, tres-cliers et fort au-dessus des facultes p^cu-
iiiaires des eSudians. II a cru de son devoir de leur
en composer un , et il a pens6 que le mieux seroit
de r^diger une noniericiature a leur usage.
Ce petit ouvrage , qui renferme beaucoup decboses
dans peu d'espace , merite bien en effel le nom da
JSoiuencAatsur. La qualification Aq Diet lonna ire ^
que le (iloyen Gouan hii donne trop modesleraent
dans sa preface, ne lui couvient meme pas, puisque
les
Nomtndature loianinne. 3f|
\iis mots qii'il expliqiie sont rang(^'S dans un ordre m^-
tliodique, et non pas dans un ordre alpha'.jetique :
ordrc qui n'est ulilc que pour rappeler des faits
oubKes, mais qui ne peut donner aux thieves la serie
d'idees nccessaires pour former une science, t*
Llnneas avoit fiit Ic meme travail a la tele de son
Sj/stcnia vegetabUiiun, II j doime, sous le nora de
Termini J une introduction danslaquelle il explique
par une courtc phrase, et dans un ordre raeiljodique,
tons les termes qu'il a eaiployes dans ses descriptions.
Ce petit trai^e a paru avec plus d'etendue, en 1762,
sous le nom de Termini botanici. C'est la CXIII.«
de ses dissertations , et elle est inseree d^ns le sixieme
volume de celte intcressante collection qu'il a puLliee
sous le titre di^AnieniLes acadimiques.
'Les Term^ini ont ete reimprimes pliisfcurs fbis
st'paienient , principalement dans les universit^s
d'Allemagne. Ce petit Iraite ofTre Pana-yse des prin*^
cipcs botaniqu3S et;yblis par Linneus dans sa preface
de -VHortLis cliff'ortianus ^ dans sa Pkitosophia
botaiiLc^.1 ^ et dans ses autres ouvrages.
Le c.6!ebre Forster a eteiidu ce plan aux autres
parlies de THisloire naturelle. Ilapublie, en 1788,
sous le titre d* Enchiridion j un manuel dans leque!
il donne, dans un ordre nidthodique , Texplication
desterme^ ornitho logic/ lies J des termes icIitijoLo^
giques et L\e?,termes entonioto^iqucs. Non content
de presenter aux jcunes g^-ns un guide sur pour par-
venir a la coimolssance dos oiseaux , des insectes et
des poissoiis , il a aussi conclu son oiivrage par des
Termini botanici , c'cst-a-dire 3 qii*il >i reimpiiin^
Tqiuq il X
3g8 Botaniqut.
cenx de LInneiis avec quelques changemens dans la
disposition el quelques additions.
Le citoven Gouan a profit^ de ces divers travaux ;
il suit en general la derniere edition des Termini ^
r^dig6e par Forster ; il prend , avec Linneus et avec
lui, les plantes depuis la racino, et s'eleve jusques
aux organes de la fructificalion. II cite le terine latin
etabli pour designer chaque partie 5 et, apres i'avoir
traduif 5 il Texplique par une phrase f'lan 'aise.
II seroit de la derniere importance d'avoir une
noraenclalnre franraise invariablement fixee pour
toutes Irs parties d ' I'Histoire naturelle. Les Ang'aJs
et les Esiagnolsy sont a-peu-pres parvenus dans leur
Jant.'i:e , et il seroil anssi facile de le faire dans la
notre. La France possede beaacoup de naturalislcs
cejfhres ; Paris en renfernie qui jouisseni en Europe
d'uno ct'lebrit^ merit^e ; ils devroieat rt^unir leurs
effoiis pour arref^^r ce grand travail. La societe
d'Hisioirena'ur.'lle s'.toit propose de IVntreprendre ;
mais les circonstances ayant occupe ailleurs plusieurs
de ses membres , Font empecliee jusqu'ici de s'j-
livrer.
L'ouvrage du citojen Gouan est deja un pas fait
vers I'etablissement d'une noruenclature franraise 5
mais je ne craindrai pas de le dire , avec le respect dii
h. un aussi grand maitre , ses explications sout en ge»
n^ral savantes et exactes , mais ses noms francais ne
me paroissent pas avoir toujours la precision qu'oa
auroit droit d'exiger.
Je pense que le nom latin doit eire le plus souvent
Jfranclse, ainsi que les noms composes du ^rec, quand
Komenclaltire holamque. 3«5
Cela peut se falre d'une maniere convenable au g(^nie
de noire langue. CVst !e raoyen qu3 la rfOinen^
clature fran .aise ne s'eloigne pas trop de la nornen-
clatiire laline qui doit lu: servir dti rype , puiscitie c'est
dan> la laugue latiiie qu'clle a etr- priiMitisement
fivc-e , el que Irs rao'.s qui la canipose;>t -e doi\ '.'ril pas
tire re;.,ard«"s coinnie appaiienant prc'cisf'iaoiit a la
la langue laline, iiiais roiiiin*^ composart la langue
pariiciiliere , r.u mcjen de iariueile tons c?\\k qui
ciiltlvent I'HJst'jire nafurelle . 'enteiident entr'cax.
C'est en suivant ce prinripe, que es Arglais et les
Espagnuls sont ^arvenus a donner ;es meilleur-s tra-
ductions cominci. do-s, onvrages fie Liivneuo.
Leciioven Gouan areccjn: u cette veiiie. Le plus
sou vent il rend le inol latin par un mot fran^ais qui
a prescjue la in^me consouTiance , et i! v ajoute outre
i'explication un autre mot irancais equivalent. Ainsi
il dit :
Perenn'is J perenne, vivace.
'Biennis J bienne, bisanni.eUe,
Ici il auroit pu traduire siinplement parj^^dceou
bisannuelie J sans que le sens fut altt're ; niais il y a
des cas ou rinexactjtufie de la tn.ductiori peut donner
des idees fausses. Ainsi il traduit :
AphylLus y efeuili^c^ : <:e qui fair pensr^r que la
planle a perdu ss feuill s , tandis que le mot
apkytle indiqueroit tres-bien qu'elle n'cn a jamais
eu.
Scaber ; scabre rendroit raieux ce mot que rude,
Les cilojens Desfontaines et Lamarck I'ont sonveut
employe , et il e.^t g^neralement recu dans la uomea-;
clature i'rancaise. X 2
324 Botnnirjne.
JRecilnatimi seroit tres-bien tra iiJt par reel InS ; il
semble que ces mots incLines ^ reclines j Inflichis ,
dejlcch Is J expriment a\ec exaciitude la direction des
feuilles ou des brandies vers la racine ou vers la tige-
Panduriformc ; !e c toven Gouan traduit en
vlolon : cette pedte p' rase ne devroit etre que Pex-
plication du mot pandur. forme y qui peut aussi bien.
passer dans la angue franca se , que cnicifornie ,
hy po crate rif o rnie ., etc.
Le ci oyen Gouan Iraduit les mots sagittatum ,
hastatum y par en fer de JLhclie ^ de pique ; les
inots sagitte y hastd seroient plus simples , el sont
nieme deja re us.
J- np pousSv'rai pas plus loin mcs observations,
qui n'ont pour objet que de voir fixer invaiiablement
la nomv nclature franraise de I'Histoire nafurelle ,
comTT^e le seul mojen de faire faire a cette science de
veritables progres : car , quand les noms ne sont pas
fi.\^s, les idees se confondent.
Apres les termes , le citojen Gouan donne les
genres de Linneus , ce qui ne se trouve pas dans les
Termini de Forster. II traduit le tableau qui precede
le Systenia vegetabiiiuni. Ce ta! lean des genres,
en offrant le caractere essentiel , celui auquel on doit
toujours s'attacher pour trouver la difference, est
d'une grande utilite. Le manque d'un seniblable ta-
bleau rend 1' usage de la NouveUe Flore des en^
virons de Paris impraiicable. Le ciiojen Gouan
donne le nom latin , puis un nom francais , el le ca-
ractere en francais. Ce petit tableau est tres-proprei
procurer des progres rapides aux Aleves.
Nomcncl'ituft hotnnlque. 3«5
C'est sur-tout ici qu'il convient de fiver Ir's noraj
d'luie inanicre stable. La plupart des, novns francais
Jie sont proprcs qu'a donner des id'es faiisses , ea
allnbuan a un genre line plaute cpii appartieni a un
autre. Ainsi ou appelle /)'s-^Q?a^Y/e;/^j etc. , une foule
dc plantes qui ne sont ni Ijj^ j> nl ceuUlet • les nums
d^arbres y c^herbes soni cncoiv inultij)lies de la ma-
niere la plus coiuraire aux progies de la science. Lo
meilleur parti est de faire passer laiis la lan^ue fran-
caise les noins generiques latins, qnand Js n'ont pai
de fioms gcneriqiies correspondans. Tout le mond©
es habitue a dire un solaruim , uu geranium ^ sans
s'apercsvoir inerre que ces mots sont latins ; et ils
vaient bien ceux moretie ^ bec-de-grue ^ ( tc. , par
lesquels on les traduit. D'ou ce'a vient-il ? De ce
qu'eu effet ce ne sont pas precisement des noms latins r
ce sont les noins-propres des plantes ; il faut done les
conserver dans ]eur intrgrii^ dans toutes les Ungues
oil on les introdnil, on du moinsalterer tres-peu leur
terrainaison ; et , de cette maniere, la nomenclaiure
sera nioins confuse. II suflira ensuite de rapporter les
noms vulgaires dans la synonymie.
Lo citoyen Gouan a en general adopts ces prin-
cipes ; il conserve le plus ^DUvcBt les noms d.jns leur
integriie ; mais il en est qu'il nous paroit tiaduire
Jiial-a-propos par le nom ruh-aire : telsqun^/i lUrea,
Y-avJltcLria , jus tic la par carinentine , utricularicu
par LeiitlcLilait^ ^ crlop/wruni ]^ar Unalgrete. II
ir.e senible qu'il auroit pu dire p/v; Hi rea j justicia,
ulricuialre _, eriophorc y etc. , coirine ai'Ieurs il
ejDploie gratiole ^ Xiixtlpkore ^ nionarde , poij/c^
X 3
3s6 Botanique.
ndme,etc.^ sans faire autr?- chose que changer im
peu la termirtcn^on : ainsi il rendroit samoLus par
Samola y etuonpas, comine il le f;iit, jiar /nouron
d'caLb y car il sait bien que le samote n'est pas un
moi.ron.
C:*s observations ne portent pas sur I'ouvrage du
citoyen Gouau j il a su vi la roiite ordinaire , et dont
OD commence, mais trop lentement, a s'ecarler. Ces
xnoyeus d'amc'.ioralion parliculiers , (jre je propose
dans !a roineucL-ture fraiicaise, peuvent t trealtaqtics
et defendus ; et on ne sanroit feiiie , a juste litre , a un
auteur un veiita..le repro;.lie de ne pas Ics avoir
adopt^s.
Le citoj'en Goiian repvoduit a la fin de ce volume
im pelit t\ril (ju'il c.voit public en 1787, etqui a pour
objet rexplicalion du Sj'sleme-de Linneus (r).
Ritr. de plus utile qu'un semblcible expose faii:
pnr un iionime du in('-}ite du citojeu Gouaii , et qui
connoit si biea le sujet dont il traite. La lecture de
ce traite pf^ut epargner a reux qui commencv iit
retude de ia Botanque, et qui veulent la posseder
th/oriquemeiit , Li -n des relards et des clfficultc's. II
esi d'ai'tant plus precis u: , qu.^ le nombre d*aussl
bon.< ouvrage eU-mentaires est trcs-rare.
Ce petit rrait(^ est le fruit de heaacoup de re-
cberclieset de travau5r. L'aufeur commence par une
exposition des ouvragos botaniques de Linneus. II exa-
mine ensuite si ce (*rand naturaliste auroil mieux fait
(1) En voiri"" le titre : Explteation du Systemg hotanique du
chevclitr Linii6, ;7our setvir d' introduction a V etude de la
JBotani.jue , par M. Gouan. MontpelUer , 1787 , ia-80.
J^ovimclature hotanique. 327
de rhoislr la fleiir, on le fruit, ou la semence , pour
base de son systeine. Le cltoyen Gouan est fort ploign6
cle' le penser. Les parties sexucUes etant les j)lu5
coiistantes, et olTrant un moins grand nombre de di-
visions , ont mt^rite d'etre prtferees. Le citojen
traite du plan general dii systeme , puis de Gouan
chaque classe en particuliiM* ; il s'attache a justiBer
liinueus des aberrations qu'on lui repro'^he 5 il veut
prouver qu'elles sout pen nombreuses et peu embar-
rassantes. II fait connoilre quels sent les caracieres
sur lesquels Linneus a etabli en g^i^ral les genres da
chaque ciasse , et ind cpie l.?s aberrations ; raais il en
annonce si peu, qu'on ne pent pas s^efapeciier de lui
soupcoiiner beaucoup do prevention ; car il est impos-
sible qu'un aussi habile naturaliste que le cit. Gouan
re les connoisse pas toutes. D^ms I'examen de. la
XXIV^ classe , il donne un tableau trei-curieux des
Iravaux sucressifs eulrepris sur les piantes cry'pto-
games, pour decouvrir les par.ies de la fructification
et illustrer le systeme de Linneus. Apres I'examen.
detail le du svsteme, le ciloven Gouan donne lemojeu
de s*en servir. II conseille de pref^Tcr le sy sterna an
genera y parcequ'il iudiquelec ractere essentiel , et
de ne recourir au genera que dans des cas do doute.
Celte m^'thode me paroit en effet prefc'rable a cell&
qu'on snit ordinairement. II donne le moyen de
n'etre pas eiMbarrasse des aberrations , qui est , apr^s
avoir cherche les piantes dans les classes, de voir les
gt nres marques en Icttres italiques ; ce sent ceux qui
font e- ception , il faut alors les chercl.er a leur pfece*
Le citoyen Gouaii trace aiix commen ans la ma-
X4
328 , Botanique.
rnkre la pins commocle de d('-terminer les graniens j
et les syngencsiques J dan? le si/stema de Linueus,
Dans la premit^re c'dilion , il lerrainoit ce pett cu-
vrage p r une explicalioii de plusieurs termes de
liinneus, bien raa] dt'iiiiis dans plusieurs aulres ou-
vrages modernes. Cetle partie de son travail, quoiqiie
tres-courle, rtoitinfuiiment utile etciirieus;\ L'auiear
n'a pas d^cldi'^ la question des ai errations ; il prouve
seulemenl que Linneus nc pouvoit pas'les eviter dans
son sjsterne^ et qu';..lies i. j sont pa,s aussi frequentes
iii ai:ssi diffici'rs qu'on le peiise. Mais cVst pr^c'sement
led.'fiuit dn svsiene < ii'i!|nc dtiend pas sur la dilace-
jat'on des families et des genres les plus naturels. 11
est vrai qu'il a essaj^c de prouver que les parties
sexuel'es etoient les seules que Linnsus a du clioisir
pour base de son systenie. Cela suppose, il en con-
clui qu'il lui ^toit impossible d'en laire moiiis. CVst
preciscnient la une pctiljon de principes, et le rai-
sonnenient n'est pas conLiUant. 11 r-^pporte aussi les
passages de Haller, favcrables a Liniieus , mais il ne
dit rien de ceux qui lui sorit contraires. II attaque
avec vigucur et avec justice, dans sa premiere Edi-
tion , les divers antagouistes ds Linneus qui affectent
de le traiiei avec mopris. Sojons plus justes. Le &ys.-
teme de Linneus a des defauts ; mais tons les autres
sjstemes arlifioiels oifi'cnt les memes, et iis n'ont pas
la menie precision ni la meme facbite. La v. connois-
sance que lui doivent les vrais savans, durera aussi
iong-te;i;ps que la science ; mais il a fonrni des armes
po^^ le combaUre, e! c'est dans ses (Merits qu'ils trou-
veront les moj/tus de le surpasser. Le citoven Gouan
Nomenclature hotarnqne. 3:^
avoit rngrig(^ le cifoyen B.onssc"l a enfrf.-prerdre la
continualioii du Vltiax de Bauliin. I! seroil I)!o,ii
a\ antaoeiix pour la Botanique , que quelqu'un voul.'it
se charger de ce travail.
.Ce nouvet ouvrage du cifoven Gor.an ofTre de.st(5-
moignages d'une ricf.'e erudition ].)otani(iue , cl'une
connoissaiiceintin^e d s o-jvra.^^es de Linneu«. II est
d'une graude uti-il6 pour Ics commenrans , et hsgens
instruits j trouveront encore bien des cliosos a a^;,-
preiidre. A. L. M.
ANA T O M I E.
Anatomie de La FJiine , parFiAyDRiN.
X^E citovv'^n Pinel a rendu compte a la societe
d'Histoire naturellc , dans uue de ses doruieres
stances, de deux menioires envoj^s depuis quel-tue
temps a la soc'^te par le citoven Flandrin. Dans I'un,
il donne la composition d*une liciueur propre a faire
des preparations anatomiques, au moyen de la ma-
ceration. Gette liqueur est un melange d'eau et
d'acide sulfurique, dans des proportions lelles qu'il
reste encore a I'ac ide sulfurique assez de force pour
detruire le tissu celluiaire , mais point assez pour
aitaquerles subslauces membraneuses , tendiueuses et
rerveusesqu'il tient reunies.
Dans Tauire me'moire, lecitojen IFlandrin CM.erche
a determiner, a I'aide de cettc liqueur d^ssolvante ,
la tcrniiiiaison de la reliiie. II a apercu disUiicleincut
33o Anatomie.
les fibres de cette membrane tres-minee s'entrelacant
avec celles de la choro'de , pt s'j perdant. Le cito^en
Piuel, enreridant justice a I'inleref de cettedecbii-
verte , auroit desire que le cilojeu FKiudrin I'eut
lyndue plus claire et plus certaine , par une pr^par^^-
iiou aiialomique, iiiise sous les jenx de la societe ,
ou j:ar une bonne figure. L- cilo ven Flandrin a aussi
cherche a prouver la division de la rctine en deux
membranes 5 mais, d'apres ly rapport du ciojen
•Pinel, i[ n'a pas obtenu dans ce iravail le meme
sucv.es.
ANATOMIE COMPAREE.
Memoire silt le Larynx inferieur des Oiseaux , lu a la
Seriiii (THistoire naiiirelle , par G. Cvvjek , Pi c-
fesssur d'Histoire naturellc,
JuA pe'fectiou de la voix humaine depend sur-lout
de la courbure proportionnee des voutes du nez et
du palais, de la grande jflexibilitc de la langue et des
Icvres 5 enfin de la forme de Touvrrlure de la bouche,
qui est petite et entiereinent situt'e dans le meme
plan. La plupart des quadrupedes, denues de ces
avantages , ou cbez lesquels la nature semble avoir
pratique certaines cavites dans le larj^nx ^exprespour
denaturcr leur voix (i), n'oiil done que des cris plus
ou moias aigres , plus ou moins confus,et aucuu d'eux
n'est parvenu a articuler des sons.
(0 T-^e larynx ^u claeval, dc TanSj du dtochon . dj^'orang-
o\JiaD2 , du sapajou ouarine , etc.
Larynn infhieur dts o'lseaux. 33 1
Les oiscaux paroissent, au premier coup d'oeil, en-
core plus mal pai'lag 'S. Une bouclie de corne , sans
levres, souvent presque sans cavitd, point de vrale
arri^re-bouclie , uiie langiie cartilagineuse , inflexible,
un larvnx nieme beaucoup plus simple que ce'ui des
quadrupedes, ne promettent pas d'abord dcs effets
bieii satisfaisans. Cependant cette classe d'animaux
nous fait entendre les sojs les plus varies , les plus
enchanteurs ; ceux ineme dont la voix n'est pas
agr^able, nous surprennent par sa force et son ^ten-
due ; quelques-uns enfm savent imiter la nulre et
arlicuier ties paroles.
Les anaton.istes ont done dii recliercLer avec soin
les instrumens caches qu'emploio ici la nature ; ils ont
vu que la divrc-e et le voluine de la voix des oiseaux,
avoient leur source dans les grands reservoirs a air
qui occupent leur abdomen et leur poitrine ; ils ont
reconnu qu*outre le larynx superieur et ordinaire ,
tons en avoient un autre a la bifurcation de la tra-
chee ; M^^'^j si la resonnance de la voix produite par
le larynx ordinaire, n'est guere considerable, celle de
I'autre I'est en revanche beaucoup, vu qu'il est sus-
pendu au milieu d'une cavi'^remplle d\.ir et tapissee
par une m-'mbraue bieu tendue sur un os elaslique.
lis ont fait senlir que cette voix, produite dans I'in-
t^rieur, peut etre modiRee de mille manieres par la
structure de la tracbee qu'elle est obligee de traverser,
landis que cet organe n'influe nullement sur la voix
des quadrupedes , qui ne se forme qu'a son issue.
Aussi la trachee est-elle dans les quadrupedes, d'une
I'j r.yant qu'un seul usage
3? 2 Anatomic compnree.
de trcinsmettve I'air du ] oiimrn ru 'arvnx. Dans les
oiseau. , a . co itr.sir ,ou lii trac < e modiile esscDliel-
lyaeiit 1 v-ix, ou ellvri liiii Je ccr,>s de I'insfrument
mubicffi, sa lignrc , sa consislaiice, sa grandeur , sa
courliure, variant ;') I'infini.
II \' a dcja p'usienrs observadons de piiWiees sur
les drT' reus articles que je viens dVnion-cT sommai-
rcireiit, et nous Jcynis toule r.connoissance a ceux
qui s'en sont ocrup6s ; cependant on pent encore
glanvT sur 1^ urs traces, et je crois avoir encore re-
cueilli i.ueltju s epis , apres leurs riches moisons.
J'espere a (tir 1' onneiir de vous coramuniquer suc-
cessiv^ll:col es observations sur le larjnx superieur,
sur la tr\c!.^e, etc. Aujourd'hui je ne m'occnperai
que des dilTv rentes strucliir.^sdu laryi'X inferieurdans
les dliTc^rentes espec. s : suj-t pres u'iutact , du moiils
a ma connoissance. II en exists a la vcrit^ quelqnes
descriptions ('pars s ; mai.> Je ne sache pas qu'ori
en ai; djnnc des suites, ni des coinparaisons de-
tailleex (i),
(i) Herissajit a donne les figures , et de courtes descrlptious
des larynx *rjferieurs de I'c.ie, du canard, el d'un hare, dans
les mc^nioires dei'Acad 'taie des Sciences.
Viq-d'Azyr , dans un mt^moire sur les organes de la voix
des animaux , i ;s6re dans le meroe recueil , annee I779 ,
par'e fort bvievement du larynx inferieur d's oiseanx ; il
tombe meme ^ cet ^'gard dans deserreurs assez fbrtes, notam-
ment celle-ci^, que les o:seaux dojit la voix est la plus agrea-
ble , ont l(?s organes les plus simples.
Ent;n lece't^bre irlityoiogiste Blocli , dans nu recneild'ob-
scrvali ns ornltholog'ques , infis'r.^ parmi ceux de la Societ
des Cujrienxdc la aature, de Berlia , tome III , aocee l^^3^ ^
Larynx infe'riew des eiseaufi, 333
Ce que j'en offre aujourd'liui , est , je I'aroue , pu-
core bieii incom. let ; iiia's il ii'est pas facile a mi seul
homme de se prourer autant d'especes qu'il faudroit
pour ^erfectfonaer ce travail : celte ^baucbe poiirra
du moiiis donner Tid^a a qu?lque amatiur de la
icience , d'evaminer les oi;eau.\: cjui lui lomberont
sous la main , et de suppleer a ce qui iious manque.
Dans tous les oiseaux , la tracli e artere est form^e
d'anneaux carlila^ineux enliers , et n'a pas ces'gment
membraneux qui s'observe dans les quadrupede?. Les
deux broncbes an contraire sont formes d'anneaux
brises , de faron que le cote par iequ>il les broucl.es
se regardent , est ferme par une mem'-raue sans
cartilage. Les anneaux les plus proclies de la Iracliee
sont ordinairement plus grands , et toujours moins
courbes que ceuK qui sont plus pres des pouraons ;
ceux-ci se courbent toujours davanlage, et a Penlree
du poumon ils se ferment presque cntierement. Il
r^sulte de celte structure, que Tespace membraneux
du bronche, qui est tr^s-etroit ve;s la poumon, s*e-
largit de plus en plus, souvent assez subilement, et
prend vers la bifurcation une forme ovale plus ou
moins grande.
On conceit que Pair chasse des rdservoirs et du
decrltles noeuds de la bifurcation de plusicjrs oiseaux palmi-
pedes , et en donnc d s figures exactes ; ilindique, plutot
qu'il ne decrit , les muscles de la bifurcation du corbeau. Voili
tout cc qui est venu a ma connoissance sur ceUe mati^re : jc
n'ai meme connu le memoirc de M. Bloch ^ (juc dopuis 1j\ rf-
daclion de celui-ci.
^3^ AnrJomie. compark.
poimion par les muscles dii thorax et de Pabdomen f
venant a frapper cette ir^mbrane, doit y pioduire
une rivsonnance, a-peu-pres tomme celul de Tint^-
rieur d'un tan. hour cbranic par la peau supt'rieure ,
en prodnit une sur I'infdrieure, et que celle r^sou-
nance doit varier selon que la membrane est plus ou
inoins forte , plus ou moin? ^l^stique, plus ou raoins
tendue.
L'air passe ensuite dans la trachee par Textr^uiite
•up^rieure du 1 ronche ; et on sent que le son doit en-
core eire raodifie par I'etat de rouvertnve qui la
transmet, et que, si la membrane dont ie viqns de
pailer reprosente une peau de tambour, rextremit^
du brouche represente les anches d'un instrument
a vent.
Or non seulement la membrane et I'ouverture va-
rient d'une espere a Pautre, mais eiles sont encore
constituees de maniere a pouvoir varier jusqu'ii i\n
certain point, au gr^ de I'oiseau : de-la ia diffcnmce
des voixdesdiverses especes, et lesmodulaiious de la
voix du meme oiseau.
Entrons mainfenant dans le detail de la structure.
Ilj? ad'abord une paire de muscles commune a foutes
les especes : ce sont les Larijtigi.ens infiricurs et
extemeSjde Vicq-d'Azvr. lis ont leur attacljelive,
a ia face interne des deux apo[)hjses Iriangulaires du
sternum , auxquelles les coles s'arlicuient ; leur
forme est celle d'un cordon cljarnu ; iis se porlent
obliqueinent en liaut, en dedans et en arriere, vout
Larynx inferieur des oiseaux. 3^5
^e coller a la tracbde a que^que distance au-dcssns de
sa bi'una[ion , et se conlinucrt sur la plus {.rande
parlie de ia lonpiieur. L'lisage de ccs mnsc'^s est
d^ibarsser le larjnx inferieur , de raccourci.- les
bronches, et par cons/'quent de diminr.er la tension
de la membrane ovale. I!s doivent aussi , dans qnel-
ques rirconstan.es, porter la trachee en avant, et lii£
fair • faire un angle avec le plan commun des deux
bronches.
Voila , pour ainsi dire , la seule partie qui se
trouve genera'ement ; tontes ies aulres varient, et
Dous allons passer en revue leurs diverses combi-
liaisons.
Commenons par la plus commune , quoiqne la
plus corapliquee , celle des oiseaux clianienrs ( pas^
seres ^ L. ) : et, pour avoir un suj;^t de comparaison ,
prenons pour exemple celle de Vetourneaii(^stur/ius
Vulgaris ).
I."* Les derniers anneaux d3 la irac'-^e , tab. i.^®,
A , 1 , 2,3, a , a , se r^unissent en une piece longue
de deux ou trois ligncs , ^-peu-pres cvlindrique diins
le liaut, et 6va.s^e par en bas, oii elle a deux pointes
obtuses , une anterieure, b, b, I'autre post^rieure,
reunies par un osselet trans\ ersal , c , c, dv? facon q':e
la trachee s*ouvre infc'Mieurement par deux trous
oval(>s, faisant Tun avec Tautre un angle obtus 5 cha-
cun communique dans nn des ! ronclies.
2.° Les trois premiers anneaux de chacjue broncbe
soiit plus rapproclies et plus plats que les sui , ans ; ili
vont en s'alIoDgea:>t par derriere du premier au troi-
336 An n t ami e comb arte.
si^me, defacon que I'extremito post^rieurederelui-ci
faJt une especf de saillie , d , parce que le quatriome
aiHieau diminue subitement. A peine leur courbure
fait-elle un arc de 60 d.gres ; la corde de cat arc est
remplie par la menibmne tympaiiifonne, dont j'ai
parle plus I'aut , f. Le premier recourbe son extr6-
irit^ anterieure, e, vers la face interne du brouche,
oil elle s'articui*' avec un petit cartilage ovale, g , qui
est C0II6 a la membrane tjmpani forme , f. Voila
a-: eu-presle sou letre de ce larvnx. On voit que la
coupe transversaie du Lronche est d'ai^ord presque
circulairie ; qu'eii remonlant , elle devient un segment
de cercle qui se rt'tre.it dans un sens, en s'^lar^issant
dans I'autre ; qu'eufin I'entree de Tair danslatrachee
se fait par deux irons ovales.
3.° Get appareil est garni de di^ muscles , cinq d©
cbaquecote ; je vais les decrire successivement , et en
indiquer Pusage.
Tab. i.'^^ A. f. 5. 6. 7. a. a. a. Le coirstdcteur Lon-
gitudinat atUSrleurde La niembraae tympanic
forme ,
Muscle long, situe \ la partie lalerale anterieure
de la bifurcation. Son attache fixe est au corps de la
trachee, a quelques li^nes de hauteur ; il colle ses
ftbres a plusieurs de ses anneaux 5 descendant un pen
oblic{uement en avant, apres avoir form6 un ventre
sensible , r6imit ses fl: res en un petit tendon , qui
ft'insere a P.* tri'm.te anterieure du troisieme demi-
anneau. II fait mont^r cette e.^tr6mile, el tend par-I^
toute la partie de la membrane qui se trouve au-
dcssous
Laryjix iufcrieur des oisraw:. 33 j
dessous de cet auneau , dans le sens de sa lon-
gueur.
h. h.' b. Le constrocteur. ioiigitudirMi posterieur
de La mcnibrane tyniyanl/onne ^
Est fort semblahle au pri^cedent , et a-peu-pres
parallel:'. II coUe ses fibres d« nieiiie a la parlie la-
t^rale poslerieure de la trachee^ el insere son tendon
a I'extremit^ post^rieure du troiaieme detiii-anneau.
Son effi^t sur la membrane est pareil a lcIuI du pre-
cedent. Lorsqu'ils agissent ens.M'ble , ils rapprochent
la totalite des trois deini-anneaux , et font ^lisser le
premier sous Tare externe de la tracliee , ce qui
diminue considerablement son ouverture. ia parlie
suj)crieure de la membrane doit se trouver relachee
par leur action , puisque I'espace au-dessus du Iroi-
sieme ynneau est diminue 5 mais c'esl a quoi rejnc'Jie
10 constricleur transversal.
c. Le petit constricleur longLtudlnat.
Ce muscle est du doul)Ie plus court que le prece-
dent, et entier.Mnent cach6 par lui. II a son aliacl.e
fixe a la parfie infcrieure poslerieure de la traih,:''e, et
insere son tendon a I'exlremite poslerieure du second
I :mi-anneau. Son action est semblable a cellc du
precec'.ent.
d. Le constricleur oblique
Est situe a cot^ eten avantdu precedent, el egale-
men! cache sousle constricleur longitudinal pos.'ericur.
11 va ob!i([Mementde la Iracbee « rexlr/'mite posle-
ToniQ U. y
33S Anatomic comparu.
rieure dii deuxleme demi-anneau , il doit le lirer en
liaiit et en dehors , par consequent paiiiciner de
Faction des prec^dens et du suivant.
e. e. Le constrlcteur transversal.
Ce muscle est situe a la meme hauteur que les pr^-
cedens, en partie a decouvert , en avant du cons-'
trlcteur arilirleur y et en parlie cache sous lui. II
n'est pas plus long que les deux pr^cedens , mais beau-
coup pkis gros , ventru , et de forme a-peu-p res ovale.
II prend son origine sur le dernier anneau de la
h-achee , se porte obliqricment en has et en avant, et
s'insere en parlie a Texlremil^ anterieuredu premier
anneau , et sur-tout au petit cartilage qui s'articule
sur elle. II rapproche cet anseau de la trachee, le
rend moins courbe en ecartant son exircmite en
dehors, et co-nsequemment il retr^cit cette parlie de
la glotte ; mais sa principale action est de tirer en
avant le petit cartilage , par consequent de t^ndre
avec force et dans le sens transversal la partie supe-
ricure de la membrane tjrapaniforme , ce qui pent
etre necessaire pour certaines modifications de la voix,
mais sur-tout lorsque, les autres muscles relachant
cette partie superieure en meme temps qu'ils tendent
le reste, il etoit besoin d'un muscle qui mit le tout a
I'unisson.
Le larvnglen inferieur et externe se colle a la tra-
chee , dans cette espece , entre les grands constric-
teurs. II est marque , f , f,dans les figures. Ce muscle
est tres- petit dans les oiseaux chanteurs ; je crois
avoir remarque qu'il a plus de volume, a proportion ,
Larynx inferieur des oisenux. 30 ^
dans ceu\- dont le larynx inferieur est moins compli-
que ; peut-etre qu'ajaut molns de n.ojen de changer
I'ttat de I'oroaiie , I'oiseau est oblige de i'ebraiilcr plus
souvent en masse etque, pourcetteraison , le musc'e
con.mun grandit a mesure qn'il y a moins de muscles
particuliers.
^ La structure qtie je viens de dt'crire , se retrouve
a-peu-pres dans ies moineaux, les cl.ardonnerels, les
mesanr^es, les plncons , Is merles, les gnves ,' les
mauvis, lesbruants, les alouettes, etc. On pru', je
crois, la regarder comme commune a tout I'ordre
passcrcs, les hlrondelles et engoulevens evceptes
Les petites differences qui peuvent se frouvef dans la
grandeur respective des cartilages et des muscles
seroient difficiles a determiner, et il le seroit encore
plus d'apprccier leur influence sur la forniaiion de la
voix. J > trouve encore la meme structure dans les
corbeaux, l.s corneilles, les geais et les pies. Aussi
cette partie de I'ordre plcw ^ de Linneus, a-t-ells
paru depuKs long-temps plus voisine des pas^eres
qnc des aulres ^enres auxquels Linn<^ I'a associt^/
Ciiacun se le porsuadera , en parcourant la cl^aine
iiaturelle qmli^Acsetourneaux aux lo riots , cei^d
aux rolUers, aux corbeaux et aux olseaux de pa^
radus ; mais cet objet est elranger au sujet de ce
memoire.
la connoissance que nous venons d'aCquerir d.^s
larynx ,rifcrceurs a dcx muscles, qui caracterisent
ces o,seaax, nous explique le singulier talent de la
P upan, a .miter toute sorie de sons, a apprendre h
^-baiiler des airs , enfin pourr|uoi ceile classe seule
X 2.
54> Anrtomie comparce.
r.ous fournit tousles oiseaux chanleurs. II est vrai que
pliisieurs de cette meiiie classe , teJs que les corbeaux ,
etc., ont la voix Iros-desagveable ; maiscedefaut leur
vienit de Ja duretc ds leur tracbee ; et , puisque le
CO! beau , !e geai , etc. , imiteut la voix de I'bouime , ii
falloit bicn que leurs organes eussent dans leur genre
uu haul deur6 de perfeclion.
Nous alloiis maintenant passer a une autre struc-
ture, molns bien fournie de muscles, mais plus siu-
gubeie par la foriue des cartilages ; c'est celle des
perroquels. On s'imagina bien que Voiseau paiieur
^pa^ excellence ne doit pas etre place dans les degrt's
inferieurs, quant a I'organisation de ses inslrumens
vocaux. Yol'-i ce que j'ai OAsprve dans le perroquet,
iioinni6 par Bufibn ama&one d^ teie jaune ( psU-
tacus oclirocephatus y L. ). Les derniers anneaux
de la tracb.ee sont souries ensemble, et ferment uu
tujau cyiindrique un pcu aplati par les cotes. Le
dernier de to us est presque quarre , etant aussi aplati
par devanl et par derriere , ou il a deux pointes assez
aigurs ( tab. i. B. f. 4, a. a. ). II n'j a pas de cloison
dans rintt'-rieur.
De celte ouverlure pendent les broncbes , forinant
deux tubes njembraneuv, garnis des pieces cartilagi-
neuses qui Kuivesil. i.'° Le premier demi-anneau : ici
il est tour plat, tes-^Iargi, ajar.t presque la forme
d'un croissant , dont le cote convexe seroii tourne en
liaut. Ses pointes scut aigues et tournees en bas. II
n'est pas vertical, mais dans une situation Ires-obli-
que, son bord sup6icur s'appuj-ant coulre le bordde
Ldfyna Infer Uur dcs oiscau>!. 3|i
la traclice, et I'autre rentraivt presqne jusqu'a toiiclH r
celui de son correspondant. Voyez h , b. 2.° Les trois
demi-ann.aux siiivans so:it encore a; solun.ent plats,
et sondes en une pla(;rte demi-circiilaire, anx extre-
miles de laquelle on voit encore leur distinction. La
position de cette plaqne est en tont I'inverse de la
pr^cedenle ; elle s'incllne en sens contraire , et c'e.st
son cote convcxe qui est toui ne en has et en debors.
Vovez d, d. 3.' Les cinquieme, sixi>me et septieme
demi-anneaux , c, c , sont sondes a la plaque prece-
dente, etentre eux dans leur milieu seulement. Leurs
exfremitcs s'ecarient en se couvbant vers le baut. I!s
sont plats, et dans le meme plan que la plaqne qui
les precede. 4.° Les anneanx qui suivcnl ont la
forme ordinaire jusqu'a I'entree du broncbe dans Ic
jfounion.
Le cote par lequel les broncbes S3 regardant , est
membraneux , et les deux memln-anes s'unissent ,
a la bauteur des pointes du prsnuer demi-annean.
De-la , jusqu'a la tracbt^e , elles ne forment qu'un
•eul canal 5 et le retrecisse nent qu'il epronve enire
les Lords inferieurs de ce demi-anneau , pcut eire a
jus!e litre nomme la glolle dece larynx.
J'al observ6 six mus:les dans le perroqn t , trolsde
cbaqne cote. Une paire relacbe I'ouverlure de la
^^lotie ;les deux autres la coutractent.
I." Le premier ( tab. i.B. i, 2, 3,e. e. )asoY>attacbe
fi\e an p^nultieine anneau de la tracbre-artere. II des-
cend presque perpendi nlairement , d'nbord appuye '
sur le Laxateur ^ ensuite coinine ca fair, sans tou-
Y 3
3^2 Anat,om'u comparce.
cher a rien , et va s'ijiiplanter clans le centre de ren -
nio^clesanneaux cirquieme, sixitMue el septietne. II
soulev-e celle parlie ;'et comme die est soudee i la
plaque seiDi-circulaire , d, il ne peut prodnire cet
efK't , qu'en faisant rentrer le bord supwrieur de
cei:e placjue , par consequent en resserratit la gloHe.
i." Le second iruscie, f, f, peut eirs nomme
I'auxiliaire du precedent. Ses fibres occupent une
ceitaine etendue le long de la Iraclieo , a sa foce
anh'rieure ; parvenu a la hauteur de I'origine du
precedent , il s'ecarie en arriers et de cote , ef s'y
colle par un tendon assez mince. Je ne vois pas qu'ii
ait d'autre usage que de le seconder dans ses
fonctions.
3.° Le laxateur de la giotte , g, est situe sous
\&s deux autres musdes. Ha son aitaJie tout le long
du bord de la trachee , a une forme demi-ovale , et
descend en s'epanouissant jusqu'au bord infeiieur et
concave du dernier demi-anneau 5 son ef^let est d'e-
carter ce bord en dehors, et d'elargir I'ouverture de
la glotte.
J'observe que les deux premiers mns les, en fcr-
inantla glotte, tendent en meme temps la raem])rane
tjmpanifornie , puisqu'ils la tirent dcs deux cotes:
ce qui doit contribuer egalement a re^dre le son plus
aigu. Quant a celui qui dilate cette ouverture , il
Ji'augmente pas la tension de la ?nembrane, puisque
celle-ci \q. remcnte pas jusqu'a la hauteur du carti-
lage en forme de croissant ; par cons^'quent il ne
detruit pas , comrae il arriveroit par celle tension ,
le sou grave ^ elTet de i'ouverture plus grande de la
gloHe=
Larynx infer ieur des oiseaux. 843
Oiidoii s'etonncr que les deux structures de larjnv,
les plus compliqu^es que nous coiinoissions, soient si
pcu analogues entre elles, que la nature semblc avoir
travaille sur un plan different. On de.-ireroit trouver
(\'s nuances intermediaires qui enchainent toutes scs
},roductions ; mais il faut remarquer que le genre des
perroquels est tres-eloigne de tons ceux de notre
pays, que nous n'avons pas la faculle de dis^equer
les toucans, les barbus, et autres genres par Icsquels
ils sc rapprochenl graduellement des passeres j et ou
nous trouverions pro1.>ablement des siructures de la-
rynx in fcrieurs, qui tiendroient plus ou moins de ces
deux extremes.
De ces larj-ux a trois paires de muscles , nous
sommes obliges de passer iramcdialement a ceux qui
n'en ont qu'une : je ne connois aucun larynx a quatre
muscles. Ceux a deux sont nombreux ; mais ils difie-
rent par le noml^.re des anneraix elargis et par la
longueur du muscle. II est evident que ceux oa le
muscle qui descend de ia trachee va saisir le premier
anneau ou le second, ?ont susceptibles de dilalalions
et de constrictions mains variees que ceux oii il des-
cendroit jusqu'a des anneaux plus inftrieurs, telsqr.e
le quatrieme ou le cinquieme ; par consequent ce
sont ceux-ci qu'on doit regavdcr comme les plus par-
faits , et , pour les ranger i-D(iihodiquement , seloa
I'ordrs que nous avons adopte , nous comnieuceroni
par'eux notre enumeration.
L? muscle le plus etendu se trouve dans les oiseaux
dc proU nocturnes. H va saisir le seplieme anneau,
Y4
3,1^ AnrAomie comparie.
J'al observe la birurcation dans le hil ou on n;oyrn
^wc^Std'X otus , la c'oiiette ou grande cl evcche ,
slrlx funerca J et roffrave, strix Jlaniniea. EUe
est la meme dans toules ces especes.
Le dernier anneau de la trachee est partage en
deux par une cloi-^on o?s use. Lcs sept premiers
deiin anneaux des bronch.^s voni en auriTientant par
drrrieie, dn ptemier au s 'ptieine ; le huirieme di-
ir.inue snb^te.rent. Par devant, ccs sept anneaux out
un angle obtus, qui jrodult en avant de la bifurca-
tion \m aplal!;-se 1 cnt ovale. Le sep'ieme demi-
a neau , t:ui est le plus lorg de tous , est aussi le plus
c'pais el le plas coirtpact. Un musde ong el plat
s'ai'.ache a son inilieu, et , passant par-dessus ceux
qui le precedent, va se coller au bas de la tracbee.
SontfTet est de tendre la nj'en^.bran? tjmipaKiforme ,
qui :ci e^:i fort grande , ilnd et iransparentr. Le
muscle laryngien inferieur couvre le prtVedent dans
sa silualion nalurelle , et produit un elfet c ontraire , en
relacbanl la n einbrane, comme dans tousles oiseaux.
Vojez tab. i. C.
Apr^s les oiseaux de nuit Tienl le coucon , dent le
larynx infc'rieur a beaucoup de rapper's avec le leur ;
on sail que son cri se rapprpcbe aussi en quelque
f:i on de celui du grand due , strLx bubo ( lioa-hoLi ).
Cinq djml-anneaux seuleinent vont en s'clargissani ,
et le cinquieme est serablable au septieme des
clioucltes ; mais sa courbure se dirige en sens con-
traire. II n'y a pas non p'.us ici cet aplatissement
ovale qu'ou remarque dans les choueties , et le
I
Lnrynx inferienr de^ oiseaiix. 345
muscle qui unit le cinqu'erae anneau a la traclu'e , se
porte uu pen obiiqucnent en avant. Les larynj^iens
inferieursqnittent la lra< bee , et se portent au sternum,
a nne'haut'jur plus nrande que clans le^ cliouettes. Le
cinquicme demi-ani eau a a rinieiieur un bourrelet
de matiere graisseuse, recouvorte par la membrane
interne du bronche , qui fiiit une forte sailiie , et re-
trc'cit considi^rablement le pa.^saue dc; I'air. EnCn les
derniors anneaux de la tracliee ne sunt pas d*une
seule piece , mais formes de deux demi-anueaux 5 e*
la cloison qui srpare le dern'er en deux an<hes , ne
fait pas corps avec lui , et n'y tit.'nt que par les
membranes quileursont communes. Voyez lab. i.D.
Le hdron , le tutor , et proba' Icment tout le
j^cnre ardea , out aussi uu seul musclj constricL:iur,
attache au cinqiiie:r.e d^mi-anneau.
Ces oiseaux , auxquels leur voix enorme devoit
f lire supposer des or^a-.ies tres-particullers , n'ont de
lemarquable qu^me grande elasticlte et unp separa-
tion tres-marqude de leurs demi-auneaux , e.t une
membrane tjiiipaniforme large , mince et elastique.
Des oiseaux qui out I'stla :lie moble ne leur muscle
constilcteur , ius(*rc'c au cinquieme den i-anneau , je
suis oblige de 1 asser aux oiseaux ou cc n uscle s'inscre
au second : je n'en conrois pas 011 il soit attache aux
anneaux interuu^diaires.
Troisdes genres que j'al examines , appartiennent a
cet article : XespeLlcaiis , les inariins-pcdieurs et les
engoulci'ens. Commcnrons par ceu\-ci , comrae ap-
346 Anatoniie comparer..
procliant , par ]e resle de Icur conformation , des paS'
seres dont nous avons deja parle.
Les derniers aiineaux de la Irachee de I'engoulevent
( caprunutgus europoeus ) ^ loin d'etre sondes en-
semble , comme dans les oiseaux a voix forte , sontau
contraire tres-minces, et separes par de larges inters-
tices ; le dernier n'a point de do son transversale. Les
demi-anneaux s'clargissenl jusqu'au sixicme ; ensiiite
ils radiminuent et s'arrondissent par degres , comme
dans tons les oiseaux. Le muscle constricteur va du
bas de la trachee au second demi-anneau des bronchcs.
,Vojez tab. I.E.
Dans le genre pelecanas de Linne , j'ai examine
le larvnx inferieur du cormoran ( petecarius carbo )
et du fou-de-bassan {petecanus bassamis ). Voici
ce que j'v ai observe.
Le dernier anncau de la trachee n'a. point de
cloison transversale ; il est taille des deux coles en bee
de plume, et a en avant et en arriere une pointe
aigu(^. Le premier demi-anneau place presqiie
parallelement au bord de la trachee , est fort cpais et
tres-convexe. Le second lui adhere int'mement , et
donne I'altache mobiite an muscle constricteur. Le
iroisieme anneau etant droit et foit plat , ii exists
entre lui et le precedent un espace membraneux qui
pent elre regarde comm& une seconde membrane
tjmpaniforme ; elle fait une saillie convexeen dedans
du bronclie. Les anneaux qui suivcnt se courbent
toujours davaniage , et le neuvieme fait le cercle
enlier. La memi/rane tympaniforme est done ici en
La^ynH inft'r'eur des ciseau:^. 347
] vjJnte alongee vers le has ; en hauf, clle renionli^
jiisqu'a la llgne qui va cl'ime poinle de la traclu'e a
I'anlrc. Voyez tab. i. F.
Dans le martin-peclieur ( alccdoispida ^ L. ) ,
le dernier annean de la traclu'-e est longet diir, s'eva-
sant en cone Ironque, ayant en avant et en aniere
line l^gerc c'cliancrnre, entre lesquelles est siluee la
cloison transversale qui le partage en deux aiiches
ovaies. Les anneaux vont se "raccourcissant , et s'ar-
rondissant gradnellement a mesure qu'ils descendenl.
Le muscle constric teur , a , est etendu enlre le has
de la hachee , et le second derai-anncau , auquel
il insere ses fibres en les epanouissant. Vojez tab. i. G.
Nous allons maintenant trailer de ceu\- des larjnx
a un seul muscle , oii il a son altache mobile au pre-
mier d^mi-anneau des bronches. lis lont nombreuv ;
j'en ai vu de tels dans les beccasses, les vanneaux ,
les foulques, etc. 5 et j'ai lieu de crore qu'ils se rc-
Irouveroient dans tous les oiseaux de rivage {gratia: ,
L. ) a bee foible, tels que piuvlers y clievallers .,
inauberhes y auoccUes ^ etc. Cependant il ne faut
pas trop donner a Tanalogie , car nous avons dt'ja vu
uans ce memoire , et nous vcrrons encore qu'elle
iiVst pas toujours la meme cnlro les formes e.\tc-
rienres et les structures des larj nx int^^rnes.
Dans la beccasse ( scoiopax rusiicola. L.) ^ nons
lrv)uvons uno particularife que nous n'avions pas
I acore remarquee. Les qualre derniers anneaux de
la Iracliee sent fendus par derriere , et meme leurs
548 Analom'ic cQinparcc.
extre-mit^s s'y ^carlent considtTablement. Les AQu^z
membranes tyrapaniformes se contiiuent par derriere
jiisqu'a Panneau qui reste entier , de sovte que la
ligne <1e leur reunion n'est pas perppndlrulaireal'axe
de la trac hee , comme il arrive ordinairenient ; mais
elle le coupe ol.liquement en doscendant d'arriere
en avant. Le premier demi-anneau est plus large,
et donne Tattac-l e au muscle. Les autres dimiuuenl
graduellement. Voye? tabl. I.
Dans la beccasslne {scoLopax gallltiago)^ le
dernier anneau de la trachee seulement est fcndu,
et ses exfremites sont peu ^carlt'es. Onne s\tonnera
pas de cette difference entre deux especes si voisinesj
si on fait attention a la difference de leur son de
voix.
Dans la foulque on nioreUe {JuLLca atra , L. ),
nous observons quelque ciiose d'acalogue a la struc-
ture de la beccasse. Les deniiers anneaux de la tra-
chea sont fendus fciv derriere; mais la membrane
qui les reunit , est epaisse , presque carlilagineuse ,
et les membranes tjmpaniformes ne remojitent pas
plus liaut que les Jjrouches. Lesdemi - auneaux de
celles-ci n'ont rien de parlicnlier. lis vont en dimi-
nuant graduellement, a compter du premier. Celuf-
ci,qui est le plus gros j s'attache au bas de la tracliee ,
par un muscle assez long qui s'insere k la partie pos-
terieure. Vojez tabl. i. K.
Qiioique la poule (Veau ( j'uUca ckloropus ) ,
s>)it d'un genic! tres-voisin de la foulque, elle s'en
eloigne sensiblement par la structure de sa bifurca-
tion. Le bas de la trachee est soude , osseux , com-
L a lynx infer leur des ohenux. 3 _| (-^
prime lateralement, et parfa-6 par une c]oison_, en
deux anches loiigiies et etroitcs. Le iriiuscle constric-
teur est fort court , large et epais. II sa^sit le premier
tiemi-anneau , qui est le plus gros et le plus long.
Lcs aulres diminuent graduelleraent , comme dans
Ics oiseaux prccedens. Vojez tabl. i. H.
Le vanaeati {tringa vanellus , i. ) , a le Las de
sa trachee-artere forme en triangle Equilateral , don t
un angle serolt iourne en avant. Les deux oiiverlures ,
en forme d'anches tres-^tro.'tes , sout paralleles aux
deux cotes ant^rieurs du triangle. Elles soat separees
par u.ne sorte de plancher osseux Ires - concave en
dessous , de facon que la partie posterieure de la tra-
chee est fort echancree. Le muscle constricleur est
situE fort en arriere, et saisit I'extremite du prexiier
demi-anneau. Les bronches sont conformees comme
dans les oiseaux precMens. Vojez tabl. i. K.
Nous aliens malntenant passer a la derniere clasFe
des larjnx inferieurs ; ceux qui u'ont point de musc'e
propre. lis ne peuvent chancer d't^tal qu'au mojen
du muscle laryngien inferitjur, qui est fort gros dans
cjs especes J et ils ne reprenneaf, iorsque ce muscle
cessed'agir, que le degre de tension que leur donne'
Jeur elasticile uaturelle. Je trouve de ces sorles dij
larynx dans les galliuact'S, et dans plusieurs oiseaux
palmipedes ; cependanl nous ^avons deja que tons
les palmipedes ne sout pas de cetleclasse, puisque
nous avons trouve uu muscle constricleur au larynx
du cDrmoran.
33o Anatomic comparie.
Je vals d'abord decrire la bifurcation da canard.
( anas boSckas ^ L. )• Quoiqu'elle I'ait 6te parplu-
sieiirs anatomisles _, il lie sera pas inulile de la p^/f-
senter de noiiveau dans ie lableau coinparalif que
je donne ici. Voici ce que j'ai observe dans les ca-
nards , tant sauvagcs que domestiques.
Les derniers anneaux de la Irachee sont sourlrs
en un seul corps presque osseux , ou ils ne se dis-
linguent que par quelques slries transversales. Voyez
labl. 2. A. f. I. a. Ce c rps reste cj lindrique I'es-
pace de quelques lignes ; il est cependant un peu
aplali par devant. II forme ensuite deux gonflemens;
I'un est a droite, peu considerable , ressenible un peu
a une portion de cone tronque , dout la base se pro-
longe enarriere, en angle un pati aigu ; I'autre gon-
fiement , situe a gauche, ressemble a une grosse
vessie irregulierement arrondie(c)5et produit ante-
rieurement vers le bas une forte saillie pjramidale ,
B. ; sa face droite est un peu aplatie vers le bas ,
et le bord infcrieur y est ecnancrt- en arc de courbe.
Toutes ces parlies soiit formees d'un cai'tiIaL,e opaque,
tres-din', revetuexterieure^'Tent d'une cellulositeassez
epaisse , abreuve d'une humeur mucilagineuse, et
sur laquelle rampeni des vaisseaux sanguins.
Endessous, cette capsule a deux ouvertures ; I'une,
qui donne issue a Fair vena^it du bronche droit , est
sous le gonflement en cone tronqu6 , de forme alon-
gee, renfennee entre deux arcs de cerv le d'environ
soixante deg^eschacun. L'autre est presque circulaive ;
c'est oil communique le bronciie gaucbe. Pour bicu
connoitre i'intt^rieur de ce singulier tubercule , fji-
Lnryns infer'mir des oisenux. J-">i
Vons, par I'anche du bronche droit , une section pa-
rallele a I'a.ve de la trac'uee. ( Vove. fig. 3 ). On
voii qu'il y a unc cloison qri remonte a plusiems
U.nes de hauteur , D. ilg. 3 ; mais elle ne tient a Ii
imcWe que par sa partie poster;eurc. En arriere,
a y a un interslice anguleux. B. fig. 3. - Coupons
cette cloison , nousverrons que derriere elle, se fait
la communication du bronche gauclia dans la cap^
sule , et celle de la capsule dans la trachce. Ces
deuK trous sont separes I'un de Taulre par une autre
cloison perpcndiculaira a la premiere, de facon que
Pair venant du bronche gauche ne pent parvenir
danslatraolu^e ciu'apies avoir pass6 par la capsule,
tandis que celui du bronche droit y parvient unme-
dialement. II a pourtant aussi une dilatation , nla.s
tres-pelite , e , fig. 3, qui occupe une partie de la sadlie
pyramidale.
Les entries des In-onches sont garnies de mem-
branes cp^isses , an Iravcrs desquelles suinte une
humeur muqueuse fort abondante , que se; aient dcs
glandes fort semblables a celles qui fonrmssenl la
synovie , et placecs entre la membrane et le cartilage.
La face par laquelle les hrouclies se regardant ,
est, comme dans tons les oissaux , si implement meai-
braneusc. Leur face externe est revetue de forts demi-
anneaux , sans aucnn u.uscle propre. Les laryngiens
inferieurs se collent a ki tra bee iaim^diatenient au-
dessus de ses gonilemens.
Tel est le larjnx inferieur du canard male.
Dans le moriUon ( anas JuUguLa , L. ) , ^^ ^^i^"^
de la capsule de gauche est comprime d^avant en
3.") 2 Anaiomie co nip arte.
av^i^re. Sa base posK'rieiire fait uii angle saillant,
a 5 r. 2 ( tab. 2. E. ) ; Tantrrieure , b, f. i , se
confourne en iin c.iiial osseux qui , iTiOntant dans la
tracliee, eiablit line communJcalion enfre elle et la
capsule. II y en a une au^re sous sa parol interne ,
f. f. 5 , longue et 6tro te. Les parois de la capsule
sent mernbraneiisps, renforcees d'un reseau osseux.
Voyez fig. I , 2, 3 et 5. Le septum a deux ecLan-
crures, et est reiilbrcc de deux aretes osseuses sail-
lantes. Vojez g , fig. 4. Les roemlDranes tympani-
formes son! gras,s;^s et epaisses. Un ligament raem-
braneux va de Tune a I'autre , h , fig. i. Tout
I'intLTieur du canal recourbe est revelu J'nne mem-
brane graissenre.
Dans le tadorne ( anas tadorna. ^ L. ) , le cartilage
est d'une nature mince, cede sous le doigt,ei re; rend
sa figure avec un pelt craquement. Les gonllemens
sont a-pen-pres 6gaux et semblables de cLaque cote ;
chacun d'eux est sopare du Injau de la tracliee par
une memlirane epaisse percee d'un trou ovale ; c'est
par ce Iron que i'ciir provenaut des bronclies circule
dans les capsules. Les inuscL'S sont ici comaie dans le
canard.
)3an3 ce genre, les femelles out leur Infurcalion
autrement conformce que celle des males. Voici celie
dela canne.
La derniere piece de la t^Ac^.pe, longue de qua!re
liviics, s'evase fortement par en bas, lab. 2. B. f. t
et 2 , a , a , en avaiit et en arriere ; son boT'd itiferleur
a une ^Khancrurc arrondie. Une cloison ossense tra-
verse d'une ecliancrure a I'autre, et remoiite dans le
canal
Laiyrix hfcrieur det oiseavx. 353
canal; en haut, celte cloison est ter.mn^e oLKque-
ment ea courbe re«lrante , b , f. 3. L?s hroncLes sont
corjform^s com.nerUns tons k^s oiseanx. Leurs demi-
anueaux se raccourcisse.t et se recourbem a mesare
qu'ilsapprochent du poumoii.
Un efft^t bieii naturel de cette d:-ff(:^rence de confor-
mation paroit etve la difference eatre la vol. aigre et
forte de la canne , et les coassemens sourds ei .vav^s
■du canard. Cependant , dans les es .eces de ce oenre
dont le cri re.semble a un sifflement , teves aue anal
penelops, L. , anas autumn ai U , anas krborea
on trouve ^galement ces grandes ca.sules car^ilaoir
Reuses qui semb'eut devoir produire un son b^n
different ; , ai eu occasion de m^^v. assurer su,- Vanas
penelops ',ui a exactement .on larynx n.f.^rieur cun^
torm^ comme le canard ordinaire : celui de Varus
penelops femelle est le meme qn. cc lui d. no.re ranne
Les hades or., aussi leur larynx inferieur bour-
souflc en capsules, mais un pen autrement cue
dans les canards ; 11 y a meme ici en quelaue corte
quatre membranes tympaniformes , an lieu d'e de..x
Le dess.n, tab. ^. D. , et la descripiion sulvante
sont faus d apres la piette , ou petit harle pie , Fergus
aLbeUus, L. ; le renflement du c6t6 droit est a^.ssi
petit que dans le canard. Celui du col^ .aud.e fait h
1 eAtcr;eur une espc.e de crochet, a ,• vers le i aut ii
est comprime en toit dont I'angle seroit fort aigu.' Ii
n a U qu»une seule arete osseuse qui fait lesommet da
toit , b. Des deux c6tc's de cette aiele sont deux meir.^
brancs tres-dnes, transj ar.ntes et \:;,.n (endues. Celle
dedevant, c, est piu;^ considerable que la posterieure.
Tome IL 2
354 Anatomie compark.
Ce rcnnair.ent de gauche forme une grande capsule'
donl la base e.-,t osseuse et sailiit en avanf el vers la
traclic'e, par une convcxite sinueuse, d, d. Ea eiile-
va \t la paroi anterieTire de celte siniuisite ( f. 3 ) , on
voit (in'elle contient le canal, p^ par leqiiel cslte
capsule communique a Panche gau( h: de la tracliee, f.
Elle esi separ6o de I'or^fice du bronclie gducbe dansla
capsule ( g ) , par un ^ ror.ontoire membraneux h ,
forme par la membrane tympauiforme de ce bronf he:
ainsi , comme dans le canard, Fair ne parvient du
bronche gaucbe daws latracijeCj qu'an ts avers de la
capsule. Celui du bronclie droit s'y rend immediate-
. liient, mais par une auclic plus etroite. Tout riate-
rieur de cet appareil est garni , comme dans le canard,
d'nne membrane graisseuse. II n'j a d'autre muscl»
que les larjngiens inferieurs , qui prennent ioutau bas
de la tracb^e.
Je n'ai pas disseque de piette feme'le. J'ai bien eu
I'oiseau reprc-sente , n.*^ 450 des Pianclies eiiluini-
nees _, que Brisson et Buffon donnent pour ia femelle
de la piette. Corame j'6tois alors dans la meme er-
reur, je fus fort surpris de-lui Irouvcr un larjnx infe-
rieur , parfaitement semblaljle a celui de son pretendu
male ; mais ayant continue ma dissection, je vis que
cet oiseau ^toit lui-meme un male , et par cons'iquent
d'une espece differente.
II a le manteau noiratre , I'aile somblable a celle de
la piette , la poitrine ondee de gris , la gorge et le coii
blancs, et la tete rousse. Ces carac teres suflisent pour
le distinguer de tous les harles. On pourroit lui donuer
Laryns hife'rieur des oiseauK. 355
pour nom trivial niergus rnusteiarls , que lui a d<'ja
impost Gessner, av. p. i33 (i).
^Lc genre de I'oie , qui paroit d'abord plusvoisin
des canards que iie le sont les liarles , en diflere
Cependaut davantage par la structure de sa i3;(ur-
cation. Voici ce que j'eu ai observe dans Toie ( anas
anser) et dans le cravant ( anas bernicla ).
La trachee qui est Fort "vosse dans le liaut , di-
minuesiugulieremant vers la bifurcation ,oii elle a ^
peine deux lignesde diametre: a pres de deuv pouces
de distance de 1 1 biiuication , les anneaux se sou-
dent , et la trachee devient un tul)e osseux , un pen
comprime vers ie k^s. Sou ex'.remite inferieure est
un quarre long j sur les deux plus longs -cotes est
iinpriinee un^espcce d'arcnde dent le bordest releve.
Ce qnarre long est parlage selon sa longueur par
une cloison osseuse en deux anclies etroites.-Les bron-
cLes tiennent ciiacuu a la trach6e , par un tuvau
comprime et raembraneux , sans aucunanncau , I'es-
pace de quatre lignes. Le preaiier aimeau n'est in-
tGrrom])u du cote interne que d'un arc d'euviroii
CO ". Le second Test a peine du dixieme de sa cir-
conference. Les snivans foi.t le cercle eniier , mais
sont ncanmoius brisks a lenr cote interne.
Les muscles larjngiens inferieurs coaune a Tordl-
naire.
(i) Pour completer les connoissances sur les noeuds de
la trachee des canards el des harlcs , vojez dans le memolre
dejiV cite de M. Bloch , la iigura et la description de ceux;
d'anas clan<:ula, anas circ'ia , anas mmyla , anas querceduta ,
et de fiiergiis merganser. C'est une loi geperale , que les ii-
melles manquent de renileaiens»
Z 2
356 Anatoniie crmparce.
Dans la perdrix , le has de la traclit'e est com-
prini6 d'avant en arriere. Ses aniieau.v sont mince®
et ln>s-disliiicts. Le deniicr de tons a une forme; sin-
j-uliere. Par derri^re i) est elargi , ct fait deux an-
gles sailLuis, C, f. 2, a. a. Par devant il a une pointe b?
qui se porte obliquemeni en avant el en bas , du
bout de laquelie part une trav-crse osscuse, qui rc-
moDte k la partie post(3rieure de Tanneau. Les demi-
anncaux des bronciies sont tous rninces , sans rieii
de particullL^r. — J^q coc] et le diiiclon different peu
(ie la perdix.
La callls a son dernier anneau formd commo
de la reunion de deux , en avant et en arriere se
fait rei7iarquer un assez gros tubercule , auquei tient
le presnier demi-anneau ^iQs broncbes. Gelui-ci ^lant
courb^ en arc , et tournant sa convexiteen bas , laissa
enir© lui et la irachee un espace membraneux , G.
f. 3, a. a. Les autres denii-anneaux , ainsi que les
membranes tympauifonnes et los muscles larjngiens
infdrieurs jOiit la structure orclinaiie.
Plusiears oiseaux tres-differens des gallinac^s ,
appartiennent encore a cetta classe , c'est-a-dire que
leurs larynx infc^rieurs sont sans muscles propres.
Teis sont les Inipes , les oiseaux do prole dluraes j
(^jaicones^ L. ) , etc. Je i 6serve leur description
pour la suite. J'en ai assez dit poor faire connoitre
le soin avcc lequel la nature a travail 16 cet organe
parliculier aux oiseaux, et la prodi^jeuse variety qui
regne dans sa structure ; variete dont peut-etre an-
cun autre organe ne pourroit fournir un exemple.
Lnryv.K infir'inr da oisea'ix. SS;
Ce.^ d'.'tails sufrir,oient pour faire pivsum^r que Tir^-
fluence du larynx inferio-ir dc.'oit etre ties-^'r«nde
dans Ics modifications de la voix dcs oisraux. J'ai
V'oulu m'assuvijr, par une cxpc'rience di^cisive , qu'il
pent a lui seal produire un son , une voix.
J'a' coupe a un merle vivant la trachde-ariere
vers le milieu de ?a long'jeur ; j'en ai separ^ lescL-ux
bouts coupe's, et d'ailleurs ils sVcartent naturellc-
ment p.ir I'actlon des larvngiens infc^iieurs qui nVst
phis balancte par cslle des hjo-tbyroidiens , ni par
r<^lasticite da la lra::hee. A3'ant ensuits secout* Toi-
seaii d*une maniere que je sa\ais devoir le faire crier,
dans son ^tat ratiirel, il a crie tres-sensiblement , et
a diverses reprises, quoique son cri fut beaucoup plus
foible qu'anparavant.
II est done demon tr(5 que ce larvnx produit une
voix qui est augment^e pai- la trachee , et encore
modifiee par le larynx sup^rieur. La slmcture et les
fonctions particulieres de ces deux derniers organes ^
feront le sujet d'un aulre memoire que j'aurai aussi
riionneur de vous communiquer.
Je sens, mieux que personne, combienle memoirs
actuel est encore imparfait ; je sais que beaucoup
d'oiseaux y manquent encore ; que dans ceux qui
y sont decrits , il eut fallu observer plus ex 'ctement
les differences entre les deux sexes , lorsque leur voix
differe, constater avec plus de detail les dimensions
et I'dlat de la membrane tjmpaniforme , la con dis-
tance et Telasticitc des caTtilages ; comparer les voix
des diverses especes , avec I'etat de leurs organes , etc.
Aussi j'espere me livrer unjour aces recherches,,
Z3
3;,8 Anatomie ccmparce.
si voiis daignez m'encourager par voire approbation ,
el sur-toiU si voiks jiigrz (jue ce travail merite Ifi
peine d'etre corrige et reclilie par voiis.
S T A T 1 S T I Q U E.
Rexseignemens sur lAmp.rioue , lasscmlfla pnr
Thomas Cooper , ci-devnnt de Manchester ^ trn-
duita dc lan^Jai'^ ivecune carte ^ in-8.*^, 292 p-'^gcs.
Prix ^ i-J liv. €t i6 liv. io s. franc de poi-t par
1?? poste. Paris , chez Maradrtn , rue da Gimefeiere
Aridre-des-Arcs , N.o 9 , an troisicme , ijgS.
^U TTiilieu des troubjes qui ont dtsole I'Europe ,
les regards des amis de la liberie, de I'humaniN'^ et
des arts . se sont portes plus d'lmc fois vers PAmeriqu;",
comme le seul pays qui put promettre les ayantagcs
d'un boil gonvernemenl , la liberie , la paix , et la
mesLire d'egalile que la sociele doit adsnetire pour
evitpr cett3 disproportion qui enorgueillit les uns ,
liumilie los autres, et aigrit ceux meme qu'elle avi'if.
On a 1 eraarque que I'Angleterre seule a deja fourni ua
nombre considerable d'cmigrans a I'Amerique , par
la raison qire la conformite de langage et de moeurs
rend leur naturalisalion plus facile. Un ouvrage qui
prescnte des renseigneraens exacts sur les moj'ens et
le but de celte (''iingration , pent done oilrir ini grand
jnleret, ne fut-ce que par Tidce coiisolante qn'il est
sur la terre un asile pour les etres souilrans , quelle
(|ue soit la cause d*e leurs soiiffraaces 3 un eivsee oii les
Rcv.u^ignemens sur VAmhiqiK. Sf)
hommes sensibles et rertiieiit pouvent tronvcr une
nouvelle vie riclie de repos , d'innocence et de bon-
lienr. Mais ceite donee ilUision n'est pas complete ;
et les details de Touvmr^e prouvrront que I'eiiiigiation
et'l« premier etablissemcnt ea A-nerique supposcr.t
dt'-ja des fonds considerables.
L'auteur expose clans sa prt'face les motifs qui Tont
decide a pubber cet ecrit. Avec mie fortune me-
diocre et une nambreuse famiUe , une grande predi-
Mcclionen faveur du gouvernement americain , nr.o
persuasion inlime que TacreAe polinqtie qui nQ
prcvaiit deja que trop dans sa pciiiie , prut amc-
ner cje fTicheux resuitals,'Tb. Coop.r prend le paiU
de quitter un pays dont le svilemc poliii ;ue ne v>vut
plus lui convenir. H qui'.te I'Anglelene, an mois
d'aoCit 1-93 , et sVmbarque a Nexv-York , pour re-
venir en Europe, en fevrier I794- « ^ "^^'^^ ^'^'^°'^^
r, d'Amerique, dit-il , je fus accable de tant de
>r questions sur Petatdelasociete dans ce continent,
» sur les movens d'y vivre , et snr les motii^ qui
>v pouvoient engager a sV (^lablir , que je me decilai
. a n'pmidre par la vole de I'impres^Jion a cellts de^.
« ces questions qu'on me fai^oit le plus souvent , et
,>qai' me parurent etre de I'importance la plus g^-
>, ne:ale. Voila ce qui a occcnsionne ra publication de
« ctfouvrage, que ye ri'hnrois point basardee, si js
« n^ivois et6 plelnemeiTt 'cimVaTnc^ que les rensei-
„ onemens qu'il contiei.t C M^«i>^ p-eu ^tendus ) ,
« seroientar^rL^abies A une 'ctasse nonibreuse de
» iet-treurs dans ce po'/s >■>.
L'auteur commence par discuter to;ites fcs raisons
Z 4
3"o Slatutlque,
^(:n6T^i\c9> qui peuvent engager a passer en Am^rique.
II paicourt rar-ideinent tous Xef, motifs hrH du prix
des terras , des denic'es et des travaux , de la consti-
tution politique , des loix , du climat , etc. , qui peu-
vent i:n're }:cnicber pour un ^tal plutot que pour uii
an! re.
II erclut successivement les i^tats m^ridionaux ,
comins 1.1 Gcorgie tt les deux Carolines , k raison de
I'extremc cba'eiir du rliiiat el de I'esclavage quiy
doininent ; ie New-Hampsliire, le Massachusett etle
Connecticut ( j compris le pavs de Vermont et la pro*
vince de Maine), a cause de I'jnten^it^ et de la duree^
t\u froid 5 de la division des proprict^s et de la cherts
<In terrain ; R.hode~Islarid, plus propre anx paiuragef
fju'a la culture des grains, par rapport a la grande
division des proprietcs et a leur tendance a diminuer
de valeur plutot qu'a en augmenter ; le New-Jersej,
romme Tuar^cageux , mal-sain et tourmentedefievres
et de mousliques ; le Delaware , par les memes raison s
auxuueiles se joignent I'intolerance religieuse de sa
(onstifutioii et l*esclavage des negres ; le Maryland
et la Virginie , par les cbaleurs excessives, insuppor-
tables pour un tempcrainent anglais , qui regnent dans
ces deux ^tals , et l*impossibibt^ de s'y faire servir
autrement que par des negres esclaves.
La vallee de Shenandoah _, si recomn^andee par
Brissot , est ^galement rejet^e. Les objections (in es
de \a. cuaJeur du climat et de la culture par les es-
claves, rcvieniient dans toute leur force, parrappoit
a la plus grandc partie de cette valine , qui s'ttend
depuis Wiiucliester en Virgiaie jusqu'a Carlisle et au
Rcnsei^ncjrrvs sur VAmerique. 3"i
Susquehannah clans la Pensylvanie. D'ailleurs lb ter-
rain esl tiop cher pour promettre les avantages
qu'offrent les pavs ou il est a b;is prix ; et coraiiie li
vallee esf prinripalement peuplt-e d'AIlem nds et rle
Hollandais, elle est plus convenable pour des emi-
grans de ces nations.
L'impatience de nos lecteurs nous devaacc , et >e
porte depuis long-temps sur le Kentucky, cet EU
Dorado dont on nous fait des peinlures si s<'dui-
santes. Th. Cooper ue paroit pas partaf^er tout I'en-
tbousiasme des vojageurs pour cette terre promise.'
Ses raisons soot , i.'' le danger des evcursions des
Indiens, et les demeles frequens nvec eux, qui obli-
gent au service personnel de la milice , et , en cas de
reinplaceraent , a payer des taxes considerables ; 2.^
la necessity'' d'euipUiyer a la culture des esclaves lou^s
par les propri^laires , qui forment environ le sixieme
du nombre total des habitans ; 3.° la disette des eaux
necessaires a ragriculture ; 4.0 la vente au-dessus dc
leur valeur r^elle, d^s positions desirables sur le bord
de rOhio , oil I'on est en surete ; 5.° les proces , fruits
de la negligence du bureau des terresen Virginie, qui
accorde souvent plus d'un3 patente pour le meme
terrain ; 6.° I'tloignemeit des conin:\Mnications avec
I'Europe ; 7.° la nature grasse du terrain et riiumi- ate
du climat, qui rendrnt tres-difficile la confection des
cbeinins ; et enlin la rarete et la i hert6 des comro-
dites europeennes , dont il est si p^aible a \n\ Europ^en
de se passer. Malgr6 ces inconveniens, i'auteur con-
vient pourtant que le voyageur Imlav , qui a donne
du Kentucke une si flatleuse de£cripiiou , a dit la vc-
3 '•'■2 StatistiqM.
rile, e\ redouble par-la le deslr que Ton a de voir
paroitre ici une bonne traduction de ce voyage iule-
ressaut. Nous in^^ilons uu homme de lettres qui s'en
occupe, a presser sou travail que la publication de
cet ouvra^e doll fairc attendre avec impatience.
Piestent I'etat de New -York et la Pensjlvauie ,.
entre lesquels on pent se decider. L'auteur en donne
les details les plus e^:acts ; agriculture , transports >
jiiojens (Tindustrie , i! a tout evaraiue , et rend compie
de tout avec autant de sagacite que de precision. II
pousse I'exactitnde jusqu'a donner !e prix de toutesles
denrees dans les differens lieux oii I'on pourroit etre
le plus tente de s'etablir 5 le taux: des auberges , en un
mot, tousles renseignemens qui peuvent faire juger
de la cherts de la vie et dfs ressources ofTertes aux
colons. II decrit de la maniere la plus circonsfanciee
les maisons rusliques et les plantations americaines ; it
cite toutes les manufactures, tons les metiers , toules
les professions qui peuvent reussir dans ce pays 5 il
donne toutes les insiructions necessaires sur la traversL^e
d'Europe en Amerique ; enfin , en faveur des com-
inereans, il a place a la suite de ses letlres un prix
courant de Pliiladelpbie , et un autre cle Londres ;
diverses tables du cbange et du cours des monnoies
dans les Elals-Unis 5 des droits d'importations', que
pajeut en Araerique les diverses m^ircl>andises ^ uii
tiat de sa population , etc.
L'auteur profere la Pensylvani-^ a I'etat de New-
York , })arce que le cli rat y est phis &ec , et par con-
sequent plus favorable a la sani6 5 vin peu plus cLaud ,
et par consequent plus propice a la vegetation 3 et ,
Reniieievemms svr rAmhiquc 3^3
dans cette meme Peiisylvanie , il donne la prcf^ference
aiix j,aities septentrionales des comtes dc Nortlimiber-
land , dj la Luzerne et de Noithair.pton , et an comlo
d'A!l/ganv. Ses raisons soatia proximitc' d.'s brandies
du Sus([ueli,inna!i , pour IransporlvT Ks d'-nrees a
riiiladelphie et a Baltiinore, I'^tal encore inhabit^
des conilL-s d'All-'ganj et de Nonimmb. rla'd , etc...
On voit que c'est un peu reslreindie i'etendue que
Timagination inquiete des Europeens mal a Taise aime
asefigurer. La chalf ur da I'einigration so:a encore,
refroidie , si I'on observe , d'apies I'auteur , que ,
pour acquerir une possession mediocre , qui dor.ne
tout au plus la subsistance, il fciut une premiere nii^.c
d'environ cinq mille livres sterling , argent courant
d'Anieri([ue , somme qin' , d'apres revaluation de
I'auteur, en la multipliant par trois et divisant par
cinq , donno environ 72 niille livres de notro monnoie,
en numeraire. I! est vrai que ces premiers fonds , mis
dans la culture et non pas dans une luanufdcture ,
peuvent s'aracliorer ra^^idemcnl.
Pour compltler I'ouvrage , M. Cooper y a joi t la
consliiutioncdos Etits-Unis, le dernier chapitre d'uu
ouvragp compose a Phiiadeloliie et pea connu en
France , et un £etit 6crit du cel6bre Frauislin, destine
a i'iiistruclion de cenx qui peuvent desinr de passer
en Ameriqne 5 e! qui paroit plutol calcule pour ea
faire passer 1\ nvie , que pour. la faire naitre.
L'ecrit dont il est quv-'slioa ici ^ a pour titre : Coup
d'(jeU surles Eiats- Lhns cf Ante li que ^ insere dans
une suite de paplers-aouvcLles , a dijjerens tenipSj
entre Ics annccs 1787 et 1794, /.'fi/\Tonch Coxe ,
^64 ^tatlstiqne.
dePhUadelpfuCy appiuje de plbces autheailquer-^
te tout tendatU db prdsciUrr les progrds et I'ctat
present de i% Uherte civile et reUgleuse, de Lipo-
pLilaHoa , de PoQiiculture ^ dcs e.rportations ct
Importations J, dcs peclie/ies ^ de la navigations^
de la construction des valsscaux , des nianufac^
tares y et dit per/ectlonnenient gt'neral. Get ouvrage
a pani a Piiiladelphic, en 1794, '"^vec la geograihie
des Elats-Uiifs, dQ Morse , que Ton peut regnrder
coinme vine vcrifahlo Statis'ique, et dont la traducJion
est pret3 a efre iivn'e a I'iuipression. Get ouvrage im-
portant, &\[ etoit traduit, domieroit ici les idees les
pins justes, les plus pnicu^es et les plus compK-tes sur
j'etat actual des Etats-Uiiis. F. N.
B I O G R. A P II I E.
INoTicE sur Charles -Fra-scois Lhomond ,
uistituteur,
VvHARLEs- Francois Lhomon'd, ne en 1727, a
Chauhips, diocese de Nox/on ,est mort le 3i decembre
dernier, vieux sfjle. II fit ses etudes a Pars, an
college d'lnvilie , en qualite de boursier, et i! eii
devint depuis principal. Nomire professeur au college
app? 1^ alors du Cardinal Lemolne^ Lhomond
jll^erromp■t sa licence oii il se distinguoit , et.desce
mome t , ilse consacra a I'eduratiou des cnfans dans
les classes inferieures , sans avoir jamais voulu accep-
ter les classes superieures qui lui furent offertes plus
Kolice sur CltarUs-Franccis thomoni. 36 S
tVunc foi^. Un gout cl^cid^ ratlarhoit de prcTc'rence
au.x plus jeunes enlans, dont I'txlucaliun I'a coiis-
tiiiiaaient occupi^ pendant plus de 20 ans qu'il pro-
fess:!. Ce gout I'a suivi jus;!ue dans sa retraite dont
il a charra6 les loisirs par la composition de diflerens
o'jvrages destines parliculierement a rinstruction de
la jeunesse , et qui lui valurent une gratification do
l*avant-djrniere asseinbiee dii clerg6 , sans qu'il Teut
rechercliee, et menie sans qu'il sut (pi'ou la soUi-
citoitensa faveur. Simple et modeste dans ses mceurs
et dans ses jnanieres , LLoraond se refusa toujours
aux benefices et aux digait^secclesiastiques.Ses (^xrits,
dont voici le catalogue^ prouvent dans I'auleur un
jagement excellent reuni a une piete solide.
1°. De vLris lUuslrUjus urbls Jtomce-^ in-aj. II y
en a eu 5 editions.
2°.Elemens de la Grammaire latiiLe^ in-12,. J'en
al vu une neuvi^ine Edition.
3°. ELcinens (tela Gramtnaire francalse , in-12.
II J en a euaussi 9 editions.
4°. Epitome Historice nacres, in-12, cinq <5dit'ions.
5°. JDoctririe chrcUerme ^ iu-12, Irois Editions.
6". Abr6ge de Plustoire de ViglLse , in-12 , deux
('dilions.
7". Histolreabregde de La lieligion. Paris 17(^1 ,
in-12. C'e-t la premiere edition.
Ces diffcrens ouvrages ^lemenlaires ont paru svc-
cessivement depuis 1780. La multitude d'^ditions que
Ton en a faites , en prouveroit seule i'utjUi<^^ lis se
trouv^ent tons ^ Paris, chez Colas, libraire , place
Sorbonne.
St. L***.
A K C II M O L O G I E.
jRappo R T an no in ties co mites (VlnstmctLom
pubUq.ue et des Finances , reunis , sur Ceta-
hlissemeni du Mtiscum national des An-
tiques; par Rabaut , depute da departcnient
du Garden La Convention, iiationate ^ daas i a
seance du so prairiai.
J^E savant Barlhelemy a torniine sa glorleuse car-
riere an moment oii vous venlez de recompenscr S6S
travaux et de siibvenir aux besoins de sa viei!!esse.
Cet hom-.me ce'.ebre dans la Eepublique des lettres
par plusieurs ouvrages sur lesantiqiiites, sur-tout par
son Voyage d^ Aaacharsis ^ est mort a quatrc-vingts
ans , emportant avec Ini I'eslime des bommes vertueux:
et les regrets des gens de lettres. Vous avez rendu
im hommage solerr.nel a sa memoire, et paje a ses
travanx un tribut de reconnoissance , en renvovant
an comite d'instrwction publique la demande de notre
coUegue Dussaulx, relative au neveu de ce littera-
teur illustre.
Le comite, qui s'c'toit deja occupe du vide que
la mort du savant Enrthelemj a laiss^ dans la partle
des antiquit^s, croit ne pouvoir m eux honorei sa
memoire qu'en vous proposant d'ntiliser I'int^ressant
d^poL confie a sa sur/eillance, et qu'il avoit aug-
mentc par ses soins et illustre par ses dc^couvertes.
Votre comite d'instruction va vous en presenter les
moyens.
Un de ses membrcs a ete cliarg^ de vous faire
Museum des Antiques. ' 'S^)f
wn rapport sur retablissement d'un Musdum des art-
tiques 5 ce rapport vous serasoumis quar.d vousaurez
termini la discussion des grands objets qui vous
oc ciipent.
Nous v6us proposon.^seulemenl aujourd'hui de pre-
. parcT G^'tte institution, en etahlissant un pioltssiHir
pour classer, ctiquctcr, decrire et demoutrer ces fuo-
luiniens. Volis aurez ainsi , pour le irjoment oii la
nation joniia da r.>pos que vous lui preparez ^ une
science toute prete , une co!l< ction reduite ei* sj-steme ;
et les monumens de tons les siecles , recueiliis et
classes coniaie dans un tableau , preser)teront a TutMl ,
a i'e.'-prit, a la memoire , a I'iDiagination , a i'indus-
tric, les invenlions que les savans et les voyageurs
aiijont pu rc'cueillir chez tous les peuples et dans
tous les siecle?.
La science de I'antiquit^ est absolument abandon-
nee en France depuis I'aneantissement de la sociele
litleraire qui en faisoit son unique occupation : et il
ne faut pasqu'onait a vous reprochcr d'avoir laiss6
perir une seul?. connoissance.
Celle des antiques est d'ailleurs Ires-importante 5
on lui doit le bon ^out dans tons les arlsqui dependent
du dcssin , et personne n'ignore le parti que I'An-
gleltrre a su tirer de ses vases etrusques pour le per-
feciionnement de ses manufactures et I'accroissement
de ses revenus. Sans la connoissance de I'antiquite,
le peintre , leslatuaire , I'arliste dramaliquo , riiomme
de leltres , le savant, rhumme d'etat ineme,coni-
ineltroient chaque jour des fautes de costinne , des
anacLronismes quidcslionoreroient leurs produclion^i3
3')8 Archccologie.
queUjuVstimablesqu'elles fussentd'ailleursi sans cette
(rfude ^explication des auteurs anciens seroit im-
possible. Les monuniens nous pr^sentent le stjie des
differento5 Opaques 5 ils nous instrnisent , en parlant
aux jeux, des usages civils , religieux et railitaires
de tous les peuples 5 enfin ils sont n<^cessaires a PHis-
loire , dont ils c^clairent la niarche , jrcctifient les
t'lreurs et prouvent les assertions.
Ce sera done rendre iin service important aux arts,
aux sciences et aux leltres , que d\»xposer au public
la colieclion des antiques, qui, a Texceptipn desme-
dailles et des pierres gravees releguee dans des es-
]3eces de magasins ou de greniers , est actuellement
sans utilite, et se trouve dispersee sans ordre aux
Augustins 5 a Nesle , a Sciinte-Genevieve , a la salle
d'arraes de Clianliily , au garde-meuble national et
^u depot qui est a la bibiiotlieque. Celie collection,
niise en ordre , sera une des plus belles de I'Europe.
Franrois pre^rier ia commeuca , les M^dicis, le car-
dinal Mazaria, plusieurs savans, divers cabinets ,
en particulier celui de Gajlus, I'ont enrichie. Depuis
peu , les collections acadtiniques, ce qui s'est trouv^
dans les e^tilises , ce qu'ont laiss6 les ^migr^s , a rendil
cette collection plus nombreuse ; et il est k pr^voir
qu'elle s'enrichira de ce qui existe chez plusieurs
particuliers , dans les dc'partemens , qui ^ lorsque cetld
collection sera devenue une ccoie nationale , s'em-
presseront 5 lui en porter le trJbut.
Get ^fablissement, digne d'une nation amis des
sciences et des arts , rivalihera un jour avec ies plus
bi^aiix qui existent dans ce genre. Eckel a yiennz ,
Heyne
r,a;,r d^J
Larynx mf des Oiseaiix
tna^ Incirdl.^ p.'33g .ri. U
^^ d.l Larynx mi', des Oiscaiw
Museum da Antiques. 3'jg
Heviie a Gotlingue, Ernesti a Leipsick , dc^^inontrent
ou out demonlie celte science avec succes : le c^-
lebre Oberliii depuis treute ans I'enseigne avec (clat
a Strasbourg, et y aUire une mullilude d'ctra.-!gers
qui contribuent a son opulence.
Get etablissement manque sans doule i Paris; et
lorsque cette s ience , qu'un homme instruit regards
comma necessaire , y sera enseign^e, el!e confri-
buera a multiplier le nombre dcs etrangers qui , apres
la revolution, attires par 'a beautede noire climat,
par les iois sages qui feront le bonheur d'un peuple
libre , par les sciences qui y seront enseignees , vien-
dront nous visiter ; et qui, devenus les amis d'ua
peuple Lospitalier, ami des arts et de la liberte,y
fixeront leur demeurc, et nous apporieront le tribut
de leurs lumieres et de leur industrie.
Le respect ^;u au grand age et aux talens de Bar-
tbelemy avoit empeche jus:[u'ici voire coniitc de le
charger d'un travail ibrt au-dessus de ses forces phv-
siques-, ou de le confier a d'autres savans. Voici le
moment decomraencerrexecutiondece grand desscin.
L'augmenlation de frais sera legere ; les avantages
pour les progrcs de PinslruLtion seront si grands ,
que nous n'avous pas liesit^ a vous proposer cet
(IJtablissemeut.
L'Aiclurologie, ou la science de I'anfquite , se par-
tage en differeutes classes, dont cliacune suHiroit pour
occuper la vie er.tiere d'un bomme laborieux. Elle
reuferme les inscriptions, les diplomes, les statues
le.- bas-reliefs , les pierros gravees , les peintures ,
les mosa\|ues, les madaillcs , les inslrumeus civilsj
Tonic IL A a
3/0 Archazologie.
religleiix et milltalres. Joignons a la connolssanca
matcrielle de ces objels celle des lamuies, dcs dates,
de la ^eographie ancieiine , qu'il faut avoir pour
parvenfr a une explication cxacte des monumeus , et
nous aurons une idee juste de I'immensite de cette
diude.
Le conservateur-professeur de la collection des an-
tiques sera ciiarge de classer ces divers monuinens ,
d'en dresser des catalogues, et de les d^crire dans
des cours publics.
II traitera de la numisinaiique , de la toreutique,
et de la paleo-rapbie j il ensei^nera a expliquer les
iiiedailles, a reconnoilre les pierres -gravees , et si
decbitlrer les inscriptions et b^s titres.
II traitera de I'art cbez les anciens ; il tracera soui
histoire 5 il fera connoitre le gout et le style des
differens peuples , et appliquera ces connoissances a
celles de I'art cbez les modernes.
II expliquera paries monumens les mceurset les
usages de tous le:s peuples ; il se transportera avec
ses (Sieves dans le monde ancien , et le leur fera par-
courir en iijdiquant les monumens qui existent encore,
ceux qui ont ete delruits ; s'ils ont ete decrits ou figures ;
s'ils sonl in d its , etc.
Le comite d'instruction publique prendra des me-
Sures pour que la collection des antiques soit promp-
tement expose.e au public. Cbaque morccau portera
line eti(|uette qui indiquera Touvrage ou il est figure
ou d^crit.
Votre comitu voys pioposQ le projet de decret
suivaid ;
Museum des nnt'iqics. 3-1
La convention nalionalc, a'res avoir cnt, ndu le
rapport de ses coniites d'mslru;. tion pub.iqUL- et des
finances, decrete :
I. Les antiques , telles que les m^dailles , les mon-
noies, les bronzes, les inscriptions , les pierrt^s gra-
vees , recueillies dans la bibliotlieqnc et dans d'aiitres
maisons national-^s, seroiit deposees mclhodiqu :ment
et offertes an public dsns des saLes de cet etablisse-
nient.
II. II sera nonune , par le comite d'inslrucljon
pnblique , un conservateur-professcur et un conserva-
tcnr-bibliothdcaire.
III. Le conservateur-jirofesseur se'^a charge de dis-
poser la collection d'uiie maniere methodique, et
d'enseigner dans des cours publics ct- qui a rapport
aux inscriptions, aux medailles et aux pierres gr.i-
vccs, I'histoire et les progres de Part ciiez les an-
ciens, celle des ma^urs, des costumes et des usages
de Tantiquit^.
IV. Le conservateur-l^ibliollijcaire sera charge des
dc^'tails bibliograpliiq'jes.
V. Ces deux conservateurs auront cliacun 5ooo 1.
de traitement par an.
VI. La commission d'instruction est chargee de.
] 'execution de ce decrel.
VIL Le rapport sera imprim^.
Lc comit6 d'instruciion ])ublique a nomme con-
servateur-professeur le citoven Aubin-Lonis Millin,
un des r^dacteurs de ce journal , et le cito^eii
Bartlieicmv , coiiservateur-bibliolh^caire.
LITTRATURE PERSANE.
Memothes sur diverscs Antiqultes de la Perse ,
€t sur les MedaUies des rois de la dijaastLG
des Sassanides ; saw Is de CHistoire de cette
dynastle jtraduiie da persan de MifxKhond j,
-par A. J. SiLVESTRE de Sacy ^ de fAcade-
mie des Inscriptions et BeUes-Lettres. A Paris,
de i'imprimeric nalionale executive clu Louvre _,
M. DCC. XCIII, iii-40. 5 de 429 pages, sans Pa-
verlissement et la notice sur Mirkhoisd el: sur
PEmir A L I - S c H I R , de 16 p. Get on vrage se
vend chez D E b u R e , libraire, rue Seipente,
]^^ 6.
X.e Journal des Savans venoit de nnir,et aucun
autre de ce genre ne s'impriujoit a Paris, lorsque
ces m^moires parurent. C'est pourquoi ils n'ont pas
^t^ annonces , et que pen de personnes les connois-
seirthr II est de noire devoir de les tirer de cet es-
pece d'oubli qn'ils ne meritent certainement pas.Lns
dans les seances de PAcademie des Belles-Lettrcs,
en 1787, 1788, 1790 et 1791, ils aurojent eu sans
doiite le sort de beaucoup d'autres qui sent rcst^s
dans le porte-feuiUe de Isurs auteurs, ce corps litte-
raire etant s'lppriiiie , et la suite de son recueil n'aj ant
point ete publiee , si le citojen de Sacj n'avoit point
pris le parti de les faire imprimer separement.
Ces jnemoires sont au nombre de quatre : le pre-
mier concerne les inscriptions et les monumens de
iC^akschi-Rouslaiii 3 le second j les iiiscriptioas aral^es
Anliquites de la Terse. SyS
et pcrsanes de Tcbeliel-Mlnar ; le troisieme , Ics m^-
dailles des rois de Perse de la dynastie des Sassa-
nides, et le qualrieme, icsmonuuiens et les inscrip-
tions de Kirmunschah on Bi-Suloiin , dans le Cur-
distan. « Le premier , le troisieme el le qvialrienie ,
» dit Tauleur, n'ont_, pour ainsi dire , qu'iin meme
>' ol»;et. Les ir.onumens que j'y explique appar-
y> tiennent tons an meme pays, sont ecrits dans la
» meme langue ,avec les memes caracterca, et serap-
» rapportent a des epoques peu ^loignees I'une de
» I'autre, puisqu'ils sont relatifs a drs princes dc la
>5 dynastie des Sassanide?. . . . Le memoire qui
M tienl la seconde place dans ce recueil , a pour objet
3» plusieurs inscrijitions dont I'epoque est inoius c'loi-
y> gnce ; les unesecrites en anciens caracteres arabes ,
>) remontcnt au quatriemesieclede I'hegire jlesautres,
» ecriles enlangue arabe ou p.'rsane , et en caracteres
y* modernes , sont du neuvieme siecle de la meme
» ere ; les unesetles autresapparliennentades princes
3) inusulmans. Si I'on ne considere que I'ol.jet de ce»
5) inscriplions , Icur age , la langue et le caractere dans
■-) lesquels elles sont ecrites , elles n'oflrent aucun
^5 ra; port avec les menu ,]■ ens qui sont le sujet des
» trois auties m^moires ; raais elles se Irouvent gravces
>i sur les mines des memes edifices oii se voicnt les
« inscriptions expliquees dans le premier menioire ,
)) et c'est ce qui m'a determine a lour donner place
)) dans ce recueil «.
Apres avoir compare et discute, dans le premier
memoire , les difTerenlcs copies des inscriptions qui
y sont rapport^cs ,16 ciloveu de Sarv donne avec rai-
' A a 3
374 Litleralure persnne.
son la ppf^fcrence icelle qu'apuLliee Niebiihr.Il monfr(^
que ct^s inscriptions grecqucs, gravies sur les ruiues
de Naksclii-Roustaiii, ne soiit que la traduction de
celles en caracleres inconnus, pres desquelles on les
voit placoes. E-1, s lui paroissent de deux genres dVv
critiire differens , I'un tres-ap],rochant de la langue
Pehlv ie , et I'autre qu'il conjecture appart^-nir a un
autre particuliere aux liabitans du Dilera ; mais ricn
ne pent ctre certain a cet egard, que le texte des
inscriptions grecques. II est parfeitement retab'i par
noire auteur qui les explique ensuite de cette nia-
niere :
I'-. A. No. 3. « C'est ici la figure du serviteur d'Or-
y> musd , du dieu Sapor ^ roi des rois de PIran et
55 du Touran , de la race des dfeux ; fils du serviteur
y* d'Orniusd , du dieu Ardescliir , roi des rois de
» I'Iran , de la race des dieux j petit-fils du dieu
» Babec , roi >i.
2". B. N". 3. i< Cest ici la figure du serviteur d'Or-
» musd , c!u dieu Ardescliir , roi des rois de I'Iran;
» de la race des di^ux , fils du dieu Babec, roi ».
3". C. N". 3. « Cest ici la figure du dieu Jupi-
» t. r ».
Les Grers , qui travestissoient la religion de toi:s
les peupies et ramenoient tout a leurs idces, aiuont
sans doute mis icj pour Ornuisd, le nom de Jupiter,
clivinite etrangeie aux Perses. C'( st la reniarque du
tr. ducteur, qi:i I'auroit pu appujer par des exeinples
,encore plus frappaus qu'on ii'en trouve dans la Cjro-
pedie da Xcnoplion ; niais revenons aux denx pre-
mieres inscriptions. Nulle difif^iculle sans doutCj si dans
Aniiqultes de la Terse. Syj
■^inG traduction qui doit etre scrupuleusement litte-
rale, on n'eut pas qualifie S'por, roi de VIraii et
du Touran , Ardeschir , ou roi des rois de Vlran , au
lieu de Sapor, roi des rois des Arianietis^ et d?s Ana-
rlanleiis ^ d'Artaxare _, roi de& rois dc s Arlanieiis^
etc. ^ Jesquels motsse ljse!;t dans hs inscriplions grec-
ques. Le savant de Sacj prou\-c tres-bicn que , soiisle
iiom d'lran , les ecrivains orientaux compronnent
toule I'l'tendue ciu pays qui est renfermee entrd J'Eu-
plirate ,le golfe Persique,lc Gihon et I'lndus ; comme
ils designentpar le nom de Touran., toute la partie
de I'Asie qui est au-dela du Gihon. Seroit-il par la
autorise a inst'rer dans sa traduction , les mots /m/z,
et Touran r D'ailleurs je pense qu'il a existe un grand
peuple sous le nom d'Ariens ou Areiens , d'Araniens
et d'Anaritniens , qu'il occupoit dans la haute Asie,
au nord de la Perse , tout ce qui etoit conipris entre
rinde et la nier Caspienne ; iU'toif maitre de !a Bac-
triane ; Zathrausle avoit ete son legislateur (r) ; et
c'estvraiserablableraent chez lui que les philosophes
Sanianeens SG?\TeuX ■:onnoilre(2).Du moins les Mages
de I'Arie ont ete cclebr. s 5 ils ad.reltoicnt pour cause
premiere, ou principe actifde I'Univers, le Tout in-
telligent (3). Ce peuple ne fut connu des Grecs qu'au
temps des conquetes d'Alexandre ; il avoit gtc an-
, paravant subjugue |;ar les Pc'rses : voila pourquoi
leurs monarques conlinuerent de prendre le titrc dc
roi des rois des Arianicns et des Anarianiens. L'Arie,
(i) niod. Sic. L. I. S. 94.
(::) Observ. prel. sur l'£zoiir-vednni. p. 40.
Q^j Diifnasctn. cxc. op. Wolf. Ajieccl, gfaecT. II.
A a 4
3-^6 Liiterdturt persnne,
proprcment dile etolt son " beir.eau , et en conserve
encore aujourd'bui le nom dans celui de sa capitale ,
H/rat,pres de laqu'elle on voil Ics ruines d'un des
plus anciens pyrc'es de la haute Asie.
Le cito\en de Sacy nionlreensuite le rapport qu'il
y a entre les inscriptions du Naclschi-Roustam et
les bas-reliefs cpii les accompagncnt. II trouve
dans ceux-oi un tableau allegorique de ['insurrec-
tion d'Ardeschir on Artaxerxe contre A rdevan , de
ses combats, de sa victoire et de la defaite du prince
Arsacide. « L'objet du combat entre ces deux rivaux
» est repr^stnte par le diadcme que chacun d'eux
» tacbe d'arrr.cber a son r.dversaire ; les combaltans
» sont distingues par des caracteres qui indiquent
» leur orii^ne, et oui ne pouvo'ent manquer d'etre
» facilemeut saisis par les gens du pays , etc ».
Les anciennes inscriptions de TcheheL-Minar ^
I'antique Perse'polis , ne sont point robjet du second
memoire, comme on I'a dc^ja dil ; c'est une enigma
que I'aut.ur ne pretend pas expliquer; mais il s'at-
tache a relever les meprises que des ecrivains ce-
iel res an; faites sur les autres monumens ecrits , soit
en caracteres cufiques ou ancien arabe , soit en langue
arabe ou persane ; les premieres sonlau nombre de
trois 5 etilest qnesnon, dansl'ime, de la prise d'ls-
palian , en 844" de I'bfgire, ce qui necessite une
digression ou Ton admire une connoissance profonde
de I'bistoire de I'Orient. Dans le nombre des inscrip-
tions de la seconde class:^ , on rcniarqnera celle-ci ,
en langue persane : « Parmi Irs souvenirs de la Perse,
» depuis les siecles deFeridoun, de Dbohak et de
Antiquites de la Terse. ^77
« Djemscnld, en connois-'.ii quelqu'un dontlolrmie
» ait ete a I'abri de la destruction , of ciui n'ait point
y> ete rcnverse par la main de la foriune ? Le Iror.e
« de Salomon ( que la paix repose sur luij n'cloit-
y il pas port»' sur les ailcs des veuts le matin ct Ic
>• soir ? Ne vois-tn pas cependanl qn'il s'est evanoui
» et a ete reduil au neant ? Hcuienx I'hommc qui
» marche accoinpfigne de la science et de la justice!
» Cultive I'arbrede la vertu , tu mangeras cerlaine-
» nement le fruit du parfait conlcntemenl *. . . .
Au-dessous on lit , en arabe :
« Ceri a ete ecrit par Ibraliiin - Sultan , ^\s de
y> Scbahrohli, en I'annec 826".
L'aufeur de cette inscription fait allusion , sulvaut
la remarque du citoyen Sacy , a unc faille rapportee
par d'Herbelot , dans sa BibliolUeque orienlale : « Sa-
)) lomon , exerrant un jour ses chevaux a la cam-
« pngne, et I'heure de la priere du soir elant venue ,
» il descndit aussilot de son cbeval , et ne voulut
« pas permetire que I'on employat ce teras-la ale
)) mener a I'ecur'e , noa plus cjue tous Ics aulres ;
3) en sorle qu'il les abandonna comme n'avant plus de
)) maffrcs , elant destines pour le service de Dieii.
>5 Pour r(^compcnser ce prince de sa lidelile ct de
51 son obeissance, Dieu lui envo a un vent doux ct
3) agr^able , mais fort , qui le porta, depuis cc lemrs-
5) la, par-tout ou il vouloit aller , sans qu'il eutbe-
* roin de clicva! «. II est fait anssi mention de cellc
faldedans I'Alcoran , sur. 21 v. 8r , el sur. 38. v. 83.
Les autrcs inscriptions de cette classc sunt du memc
genre ; nous ne rapporterons qu^me partic dc la cin-
quiomc J de Tau 881 , cgalemcnt en persaii :
SyS L'lUrature persane.
«... Cliaque feuille d'un arbrisseaii porte I'em-
» preinte du visage d'un liomme illustre (dont les
» cendres nourrisseut Ics racines ) ; claque portion
» de terre que le pied foule , est la cendre d'un roi.
» Vis satisfait de ton sort , si tu veux plaire a ton cr^a-
» teur, il tournera iin jour un visage de bontc vers
» le mortel qui aura embrasse la pratique des bonnes
» opuvres ». Voila le caraclereni^laucolique etreflechi
des Orientaux , etleur genio seutencieux. Cortes, rlen
n'est plus propre a reveiller nos idees sur les vicis-
situdes huinaines, que la vue des antiques mines de
Perscpolls. Le citojen de Sacj ne s'est point occupe
des fcimeux bas-reliefs qu'on y voit encore. Peut-t-tre
tasarderons-nous, sur cet objet interessant, quelques
conjectures 5 dans un des numeros de ce journal.
Parmi les medailles des rois que ren ferment les
collections pubiiques et les cabinets des curieux , il
en est une classe que les autiquaires ont cru devoir
range-- a la suite des mc^dailles des Parllies , et attri-
i)uer aux rois de Perse de la djnastie des Sassanides,
mais sur laquelle neanraoins ils n'ont eu jusqu'a ce
jour que des conjectures. Le citoj^en de Sacj les change
en certitude, par la comparaison qu'il a faite des carac-
leres des legendes de ces medailles , avec ceux des
inscriptions deNakscbi-Roustain.Cet heureux rappro-
chement offre des discussions pleines de sagacil^ y
mais qui ne sont gucre susceptibles d'analjse. II faut
done que nous passions de ce troisieme memoire ,
au quatrieme fiur les monuraens de Kirmonschah ,
ville du Curdistan , sur la route des caravanes
qui se rendent de Bagdad a Hamadau , et
-eituc^e a une lieue d'une monlagne exlremement
Ant'iquites de la Ferse. 079
hiule et tics - escarpee , connue sous Ic nom de
Bi-Sutonn.
C'est au pied de cette montagne que se Irouvc un
ancien monument que les gens du paj's apj.elent
2ak/it-Rustam. II consi<te endessalles taillees clans
le roc vif , en forme de portic|ue , sur les murai'.lcs
desquolles on voil des bas-reliefs dont les figures ,
la plupart colossoles , soiit tres-faciles a reconnoitre.
II S' roit trop long d\'n donner ici une descri['tiuii
detaillc^e. EUe resulle de la comparaison que le Cit.
de Sacj fait avec beaucoup de soin et di^ disccme-
ment des trois lelat.ons d'Otier, d'Emmanuel de
St- Albert, et de i'abbe de Beaucliamps. Quelques
savans, entr'aulres le p^^ographe Danville, avoient
ete tentes de rapporJer ce monument au temps de
Semiramis. Noire judicjeux auleur est porte an con-
traire a en meltre I'epor-ue a celle de la dvnastie des
Sassanides. II en donnc d'abord pour rai?on , la tra-
dition du pays , qui attribiie plusieurs de ces uionu-
mens a Khosroes Parviz , des inductions fortes qu'il
tire de plusieurs passages d'auteurs persans, enlin des
inscriptions qu'il public d'apres la copie de I'abho
de Beaucliainps. II y a reconnu les caracleres et la
langued^s inscriptions de Naksclii-Roustara , et des
me lailles des Sassanides. LVxplication en est snivie
de discussions gvammalicales et historiques qui font
infinimen d' onneur a la penetration et au savoir da
cilovcn de S.icj. Ces qualitrs de I'esprit , sans la reu-
nion desquelles on ne pent faire un bou onvra'^e ,
-.c trouvent ; ar-touldans lelnide ce jeuneet laborieux
ccrivain. Elies void meme juscpa'a txciler noire admi-
38o Litteratiire persane,
ration, quelqiies efTorts que nous fassjons pour nous
en garantir. Nous crojy'ons que tout lecteur instrult
partagera ce sentiment, et apercevra sans peine,
dans ces qualre meinoires , Taurore d'un savant du
premier ordre. Puisse sa modestie nous pardonntr
cettc annonce consolante pour les amis des letires,
accabies des pertes successives que celles - ci out
cprouv^es en France.
La traduction de I'liisloire des Perses de la dv-
nastie des Sassanides remplit pres de la moitie de
ce volume. C'est un vrai present pour la litterature.
Nous ne connoissions auparavaut Mirkliond que par
des extraits infideles et informes qu'on trouve a la
suite du voyage de Teixeira. L'ouvrage de cet liis-
torien tres-cclebre dans I'Orient, qui est ecrit en
langue persane, a pour titre leJardin'de la purcUj
ou Histoire des prophetes , des rois et des ki-.alifes, et
se trouve dlvise en neuf parties, I'introduction et
I'appendix y etant compris. II ecrivoit a la fin du
neuvierae siecle de I'hegire , c'est-a-dire , au com-
mencement du quinzieme de notre ere. Un style sec',
pen nalurel et surcharge de m^'laphores , des recils
exagercs ou fabuleux, des details oiseux , stcriles et
frivoles, point de deve.'oppement et de suite dans
la narration des fails , pen de portraits bien traces ,
et beaucoup de maximes triviales ; voila ccqui carac-
terise tous jes bisloriers orientaux, arabes et persans,
et en particuiier Mirkliond. Neannioins, pour ceux qui
voudront oubiier quelques inslans les grands ecii-
vains de la Grece et de Rome, et desireront con-
noitre I'esprit et les moeurs des grandes nations d&
Anliquiics de la Persi.~ 3^T
I'Asie, ils ne peuvent se dispenser de lire les pre-
miers liisloriens c[ue iiousvenons de iiommer. En con-
sequence il seroir fort utile d'en traduira les princi-
paiix; et nous iuvilons le citojen de Sacy d'achevcr
sa traduction de Mirkliond. EUe est bien ccrite et
represcnte fidelement I'original. L'auteur en rend
menie toutes les expr.'ssions m^taplioriques ; par
exemple, il y est dit qaie tousles rois s'empressereut
d'envoyer cles pr^sens a Ardescliir, et « qu'ils cei-
» gnirent laccinture dela soumission etde la d^pen-
» dance , suspendirent a leurs oreillcs I'anneau de
5) la servitude et de Pesclavage , et jelerent sur leurs*
» epauies le havnois de I'obeissance que
» Barham arracba, jusqu'aux racines, Varbre de la
» violence et'de la tyrannie, et planta Varbrisseato
y> de la justice , etc. » . . . Parmi les exagerations
de MirkhondjOu peutrcmarquer celle-ci : « Au temps
» de Nouschirvan le souverain de la Cliine babitoit
.3) un palais pave de perles et de pierreries, dans lequel
M etoicnt deux ruisseaux qui arrosoient dcs arbres de
» camphre et d'aloi'S , dont Fodeur se r^pandoit a
» deux paransages a la ronde ; il avoit dans soubaretu
y> niilie femmes, toutes lilies de rois, etc. » . . .
Mirkliond parle encore d'une filb haute de sept coli-
dees, et dont les paupieres dcsceiidoienl juscpi'a ses
joues , envoyee des Indes a Nousd<irvan. Ce fut sous
son re<:ne que la ccnuoissance dii jeu d'eebecs vint
du menii^ p^}'"^ 7 t?u Perse. Si I'etrange anecdote de
la ra:s5ance de Schapour n'eloit pas trop lougue ,
elle luerileroit d'rire rappoitce ici ; niais finissoiis
>ar la iiia.\iiiie d'un autic priucc do ce noiu : « L^
3o2 Litterature per sane.
» mccl-anceta est iiatiirelle a tous les liommes, et
* nul ii'en est exempt. Lorsque riioiiinie s'cn rend
y> maltre et parvient a la vainrre, elle demeure ca-
y> cli(^e ; mais si elle se rend maitresse de I'liommej
5^ alors elle paroit au-dehors ».
LITTEE.ATURE LATIN E.
HiERONYMi de Bosch Canneii de j^qaalltate
hominum , c'cst-a-dire , Pocine sur l^Egallte des
/lommes , par Jerome de Bosch. Am..t;ndam ,
cliez Pierre den Heiigst , 1798 , iii-4.0 de 80 pages.
VvE poeme plililosophique est partage en deux
livres , dont nous allons presenter d'abord I'analvse
sommaire.
^ Llvre premier ( de 664 vers )
Le poete , apres une invocation a Astrce et a la
Sagesse, peint I'ecaljte d^ iV\?:e priraitif de ce siecle
d'or , si vante dans 'a f.ib'e , ct qui , pour notre
malbeur , est aujourd'hui si loin de nous. Laissant
ensui'e le domaine d?s iiciions, il annonce qu'il va
prendre la nalur^ , la veritc^ , la raison pour guides :
I'ofateur roinaia , dont il fait un pompeux eloge ,
avoit parle leur langage avant lui,dans son Traits
des Lois.
L'tgaliie des homines eclate dans leur commune
origlne et dans la maniiTe uniforme dont ils sont in-
troduits sur la scene de la vie j dans ces facuUes pre-
Tol'me sur rcgallte. 28J
Cieuses qui leur sont communes a Ions , savoir , le don
de la parole, celui de la raison, ceiui des sens ex-
ternes et inti-rnes, dans leur commune fragility, dans
la necessite de mourir, impost'e a tons. — Cependant
aucun objet dans la nature ne ressenible parfa tement
a un autre. Les liommes different entr'eux par leur
caractere, leurs moeurs, leur constitution phjsique ,
leur temperament plus on moins vigoureux , plus oa
moins loible, leur application, leur prudence , leur
instruction. Ceux-la sont doublcment digncs d'elogcs,
qui embellisseut par la vertu leurs qualites Jntel-
lectuelles.
Quoique les facultes physiques et morales soienf
inegalement reparties entre les hommes , la culture
des sciences et des arts les rapproclie par une g^ne-»
reuse emulation. La vertu est a la port6e de tous ,
attendu que la nature a grave dans le coeur de tous urt
sentiment exquis du bon ct du beau ; ce sentiment^
riuanc6 a Pintini , porte dans tous le m^ir.e cachet ,
celui d'une lumiere et d'une force divines. Mais il se
degrade et s'eteint par la mauvaise education ; — cc
qui engage I'auteur k rechercher Porigine du mal
moral et celle des calamites qu'il a trainees asa suite.
Pour cet efiet , il decrit les commencemens de la so-
ciety humaiae. La simplicite et la bonne foi furent
son premier apanage ; mais le regne de ces vertus fut:
de trop courtc duree , et , a mesure qu'elles s'eclip-
serent, des ;' aux inno r.brables fondirentsurle genre
humain. Les desordres actuels de Petal social deri-
vent de < ette source. Une reconnoissance sans borncs
est due a ccvix qui s'appliqueiU a les j-epajier. ^iusi la
o'-Ji ^'' Litteratnre latine.
societe civile a pris la place de la soclele natarelle.
Les loix seuks peuvent dcvenir le mainlien de ce
nouvcl crdrc de clioses. — Malheurs de I'iinarcliie.
— L'uiiivers entier ne subsisle riu'aii nKryeii de Tordre
et des lois destinees a le regler. — Les loix doivent
etre simples , claires , fondees siir la raison et sur la
nature. — Demeiice de ceux qui les meconnoissent.
— Les hommes ont un besoiii indispensable les mis
des aiitres. — Image des rapports sociaux dans les
abeiiles. — L'inegalite des conditions n'exclut per-
sonne de la sagesse , c!e la v^rlu , ni du bonlieur, fruit
de I'une et de I'autre. — Les dons de la fortune niet-
tent aussi de I'in^galile parmi les bommes. Le comble
de I'opprobre seroit de vendre a ce prix sa liberie.
— Tableau liideux de Fes lavage. — Mais une su-
bordination Icgilime , dans I'etat civil aus.^i bien que
dans I'etat doniestique, n'est pas incompatible avec la
liherte. L'liomme libre est esclave des loix.. — De-
voirs respectifs des superieurs et des infc'riears.
— Censure des maitres insolens , iniques ^ oppres-
seurs. — Les Grecs et les Roniaius , pour obvier cice
d'L^sordre , avoient 6labli des fetes solemnelles , qui
ofTroient Timage de I'egalite primitive. — Ainsi le
^souvenir ne s'en est jamais efface parmi les bommes.
LU're second ( de 600 vers ).
Le poete, apres une nouvelle invocation a Astr^e,
decrit un asile cbampetre et un sanctuaire auguste ,
liabitt's par la vertu. II d^couvre dans celte enceinte
fortunee 1-is vrais principes de I'egcilite, et les devoirs
sacres qui en resuitent. La religion recoit ses hom-
niages.
Po'nm s.ur Cei^nlite. 385
ir.ages. Son cnltc , s'il esl nf'ce^snire , n'en est pas
moins essenlielleinent iibre. Elle esl le l.ea le j^lns
puissatit ds I'etat social, et , an milieu cle riuegalite
Desrangs,qiu en est iiiSi'^parable, elle j entretient la
I'ralernite d'airections. L'aulorite supreme, d.uis I'etat
social, doit resider en un seul on dans qiielmi s-!:ms.
Des devoirs dc ceux appeles a ^puveraer. — Jusqn'^
quel point il faut supporter de mauvais princes. —
Tarquin le Superbe , expul e j)ar JBrutu^, ne pent
ctrc r^labli par Porsenna. — Elat de Rome a cetle
^poque. — Lorsqu'il s'eK^vc nn grand proces en ire
luie nation et le chef qn'e'le avoit mis a ?a tele, il fant
ss donner de garde que d'un cotv^ laliaine , le rossenti-
nient , la calo.miie n'imposent an prince c\t-s torts
controuves et imaginaires ; de I'antre, que la licence
populaire ne foule a ses pieds les regies de la justice.
— Le pen pie doit ecouter la \oi\; des sages , ct res-
pecter les autorites emantes de lui-meaie. ^ Fflicitd
d'un peuple docile a ces prt^ceptes. — Tableau de
I'liarmonie sociale cjui en resulte. — Le poefe la com-
jDare a c^dle produite par des instnmiens bien accordes,
et a ct'lle qui regne autre les corps c lestes. — La
moyen le plus assure de produire celle liarmonie, est
que le cherain des lionnenrs suit egalement ouvert a
tous, et que le meriteseul y conduise. — La veritable
noblesse est purement persoimelle. Celle que nous
derivons de nos aVtMix n'est point a nous_, rien n'est
plus vain que ses titres et ses decorations. — Les
Americains out reronuu ces veritos , et ils les ont
sanclionuees par leur couslitulion. — V(ihix ardeus
pour (|ue I'opulencej I'anibition et unc jal«nis3 envio
Tofne IL ^ b
386 Li.tterature latlne.
lie trouMent pas ce bonlieur. — Consells cle la sagpsse
a ct't eiFet. — Rien nVst j)!us a craindrc qii'tme hai-
neuse difTatnation. — Admirahie loi des Perses,poLlr
en ('carter l.s dangers. — Pour une infinite d'aiities
devoirs , il n'esl rien de m.illeur que de livrer les
liommes a la droiture de leursens moral. — Exemple
des Scytlies Nomades. — Les lois ne penvent , ni tout
prevojr, ni tout prcvenir. — La grande versatilite
des circjnslances et la mullipli.ile de nos rapports
apporteni d'ailleurs des nuances iunorabrabies a nos
o'ni;. a;ior!S. — Les administrateurs sur-tout ont be-
soin de connoitre a fond la nature hmmaine. Cast
dans i'^tude de Piiistoire , dans I'experience et dans
Tobservation , bien plus que dans des traitcs scientifi-
ques, qu'ils puiseront cette connoissance. — L'inp-a-
titude , pour ne pas tomber sous le ressort des lois,
n'en est pas moins un vice des plus odieux. — Devoirs
respectifs des epoux, des peres, des enfans. — En
un mot I'obeissance seule aux lois eternelles et Im-
prescriptibles de I'ordpe et de I'hairmonie universclle ,
peut assurer la veritable ^galite , ainsi que le bonheur
de tous. Par elle seule le regne d'Astree pourra re-
flenrir sur la terre.
Tel est le precis de ce poeme , dont la conception
annonca encore plus de courage que I'exccution ds
talent. II falloit cependant un talent tres-distiugu^; ,
et sur-tout trrs-rare aujourd'hui, pour remplir celte
tache^ comme I'a fait M. de B. Nous savonscombien
I'art est diiTicIle et la critique ais(^e. Ainsi nous ne
reprocherous a I'auteur, ni ses liaisons incobereutes
j^l ses transitions forcees en plu?ieurs endroits, ni les
Toi'me sur Vcgalite. 3S7
redondances fr^quentes qui Aous out frappt's dans
son style , ni le technique de sa versification , qui
souvent nous a semble trop sentir le tra\ ail, — Un
poeme didactique a sur-tout besoin d'etre animo par
des images et de> faits. Nous regrettons que M. de B.
en ait manque plnsieurs, qui cnlroient absolument
dans son sujet, et qui aurolent pu lui fournir des epi^
sodes int^ressans. — Oui , nous en voulons sur-tout k
M. de B. de n'avolr pas dit un seul mot sur fes Ba-
taves, ni au passt^ ni au present, ni a I'avenir. —
Mais, plutot que de multiplier des reproclips dictes
par Peslime meme que nous porfons au c'ar?ictere et
aux talens de M. de B., nous allons extraiio de son
ouvrage deux on trois morceaux , qui mettront nos
lecteurs a portee de lui rendre justice.
Dans l*endroitdu premier livre ou il annonce que,
laissant de cole toutes les subtiles disputes des
sophistes , il a de preference consult^ Ciceron
sur la raatiere qu'il se propose de traiter 3 voici
comment il s'exprime : ( v. no — 120).
Unus me teuitit j ciijus modn J^iilmin a Ungues ,
JLngeniumqite sagax sliiptiit rnodo libera Roma j
^rpinitm in paliiam me duj:if , meque locat.it
Sub i^eteri fatem JJariance leginine quercus ;
Hie ubi naturcr nionstrat pvimordia Ifgis ;
Hie ubi disseruit , quid mentibus insita nostris
Recta relit ratio j quid coiifirmala requlrat.
TJt data sit nobis , a numine tracta Deo'rum ,
QufP y /aelenda jubens J prn/iibel contraria j ad omrnss
Iinplendiis partes ct nos inritat lioncsti.
Voici quelques vers dt laches du tableau du com*
Bb 2
3g8 Littcratv.re latine.
nieucement de la socicte. ( L. I, v. 867- 874 ).
tV ;•//// in Icvtam p'enerem genus omne animantum ,
Sk- quoque naius homo sociaJem dcgerc tntam ,
Vt J nil ardaihs calcai ibus Ictus amorls ,
Coiijugis ufjlatue sc se piojccil in vlnas ;
JJumqlc propagandcejlagrarecupldiaeprclis
Ccepis.sct J vitamaue parens curare crealiS j
€onsiUo pollens legU loca lata , n.ccrcnt
Isci^ejcicegcneri J ne^-e inclenientia cxh.
Uii pea plus has vieiU cs lableau. ( v. Sgi - 401. )
Cernimus innocufr qiutJes in limme pitce
Dh-ersinn pueros inter se hidere ladum :
In medUs jucunda jocis concordla regnat,
JPinglt e t unanhnls Icneras dementia malas.
Gaitdla longajorent, longce nisemina culpce
Jn teneros animos amor iujccissct hahcndi.
Ihmc, simul acplacait puerls les una duohus ,
^mbitio placidam depeUit J.ernda paccm ,
' Tamque din ignarce pertarbat corda j men tee ,
Donee amicitice dlsrupit amalile innclum,
Fralernosque animos in mutaa prccUa misit.
Wous ne citerons qu\in seul morceau du deuxleme
livre. L'auteur parlo du bonlieur donl-il suppose que
PAmf rique a joui avant I'arrivee des Europeens.
( V. 319 — 36o ).
Talis erasjorsan , cum nondum audacter Ibems
Vellficatus aquis , largosque cupidine prcedce
Captus , inignotaspeneirasset, America , terras ,
Scque tiocum nondum trlhus adderet orlcm :
Anglia rirginice , Canadce cum Gallia nondum
Jura daret , nullusque eos ingressus opimos
Hostls agros , fmcundco iUeclus muncre gl^bcv :
Tonne sur re;^alhL . 889
Ncc funthns grcmto pretiosa metalla prnfundo j
udigcnti cupldis peragrata Peninia naiitis ;
Mexico et inv,enlo nondum scnsisset in awo
J'l'inicieni latitare tuam , ledasque sub viidis
JPionler opes se posse capi Calijorma scuct.
M. de B. a dedit' son poc?me a son ami, M. DanieL
TV ytteabach ^ prof'esseur d'histoire , d'antiquitt^s ,
de litterature aucienne, dVloqueiice el de poesie h
Amslerdam. L'amilie de t^^ls liomraes honore la
science et les letties (i) 3 leur exemj.le est nn nol>lG
aigiiillon pour une jeunesse a vide de la phis belle de
toutes les glolres, celle de I'instruction et de la vertn.
Helas! ils pleurent encore tons les deux Icnr eleve
favori, im de leiirs disciples vraiment etonnant par
son genie vaste et prccoco , Pierre KLewland ,
mort a Leide le 14 novemi)re 1790, ayant a peine
atteint la trentieme annee di^ son age. Depuis seize
mois 5 il avoit ete appele a remplir dans la ct'lebre
universile de cede ville nne chaire de geometrie , de
phj^siqne , d'architecture civile et mi!i*aire , d'bj-
draulique et d'astronomie. l.e pvofi'ssenr Van Swln^
den , successivemeut son maitre , son ami , son
collegne , en a publie , en Ian;::ne liollandaise , nn
eloge rempli d'intt'ret. Les miises baiaves , couverles
(i) Nous avons exjiose les pvincipaux litres littcraires de
I'un et de I'aiitre dans une note coinmuniquee tl Charles
JPougens pour sa traduction du voyage de Forster , et qui s'y
trouve dans le deuxicme yoluine. Nous regrettons seul;--
menlque ce litterateur estimable ait mele a cjuelques-unes de
nos notices des details qiiilui sont venus d'uue autre mam ,
el de riuexaclitude destjuels uoui no vuulons pas Olrert-sp'.'u-
Babies.
Bb 3
3go Litter ature la tine.
dedenil, ont jet^ d'autres fleiirs sur sa tombe. Nona
nous proposons d'extraire des difftrenles productions
necrologiques auxquelles cette perte a donne lieu ,
une notice biognipliique, qui ser? comme un modeste
fleuion atlache a une iniinortelle couronnv^, et nous
aimons a croire que les redacteurs du Magaslfl Encij-
clopedlque ne nous refuseront pas I'insertion de ce
morceau. P. H. Maron.
LITTER ATURE FRANC AISE.
LINVILLE ET FANNY,
NOUVELLE.
JliiNviLLE , abandonne par une maitresse adoree ,
egare par la plus vive douleur, devint injusteet bi-
zarre j il pensa d'abord bien mal de la Irop aimable
et perfide Zena, puis de quelqu'aulre feinmejpuis
enfin de toutes. Celte injustice s'etendit sur I'huma-
nil(^ entiere. Des voyages entrepris dans celle dis-
position , le confirinerent dans son erreur. Trop sou-
vent les objets qui s'ofFrent a no^ regards prennent
la teinte de noire esprit. Un elre beureux qui vojage ,
voit par- tout des sites romantiques , des cbemius
parsemcs'de fleurs , desruisseaux murmurans. Cbaque
cabanne est I'asile du bonleur, cbaque villa celui
des arts et des plaisirs ; tout a pourlui des foniies
agr^abies, c'est la magie du bonheur. Est-il un elre
flisez mallieureux pour qu'il i\\ii pas au moinSj
LinvilU et Fanny. ?jr)t
pendant de courts instnns , orne de quelques fleurs
la liaiae peiiib'e de ses jours ? Linvillc I'avoit perdue
celte erreur delicieuse, il voyageoit pendant I'ete ;
li'S campagnes eloient axid&s , les c':cmias couverls 6.3
poussiere^ la thaleur excessive. Dans les cliamj^s ,
de ma.ieureuK nioissonneurs sea.bloicnt subir dans
toute son ^tendue la peine riponreuse portee contr©
tous les liommes. La mi tre s'oIBoil par-tout a ses
jeux, elle eniouroit sa voiture a chaque relais. Tous;
les lleux qu'il parcouroit lui offroient les memes ;:as-
sions , les memes vices , I'interet personnel regnant
par-toutetanimant desetresquine different en! 'eux
qiie par le langage et I'liab llc'renl. Les ruines de
ITtalie etoient a ses veux celles du nio!:de , lout doit
finir ainsi ; le monument qui s'eleve, n'est separe de>
celui qui s'ann^autit , que par un espa; e qui paroit
un poiut dans la " succession des temps. Les sciences
se perdent , les arts s'oublient , tout se dc'tiuit , et le
bonheur aus^i5 ajoutoit Linville en soupirant ! Ls
carnaval de Venise lui rappela ces bals de I'Opera^
oil le masque Svfrt de bandeau et de vol'e a I'amour ;
il lui rctra';oit cct heureux hiver passe au seiii deg
plaisirs, marque par des fetes elsur-tout par le bon-
heur d'etre airae. Au milieu d'une foule inconnue
et indlfferente , ses jeux clierchoien t avec empresse-
ment des traits qui pussent ressembler a ceux de
r.nfidelle Ztna , ces traits qu*il fuyoit, qu'il vculoit
ha^r, et que tout pelguoit a son souvenir. Prt^s de
deux annees s'ecoulerent dans cat exil volonlairc.
Le temps, ce reinede infaillible, avoit dimiuue ses
regrets saus cependant ics dctruire. Juti^ue de par^
Bb 4
3-)2 Litterature franqaise.
coiiri'r des lieux ou il n'avoit roiit^, ni les charmes
rie I'amilie ni les plaisirs de ranioiir, il se crut gu^ri
parce cjiril vouioit revenir dans sa palrie, et la re-
. voir sans danger. Ce;tle revoUuion lui fil eprouver
iin in>!anl de ]i!aisir; depuis long-temps il ne Ic con-
jioissoit plus. Les preparaiirs du voja^^^e^ leretour,
la vue de vses parens , .de ses amis , des lieux qui
I'avoient vu naifre , lout , dans \es premiers momens,
lui fit croire que Is calme se retablissoit dans son
ame , et que I'avenir pourroit encore etre agreable
■pour liii ; vricas, ce moment d'ivresse , occasionn^
par la nouveautc dos O' jets , s'evanouit quand le
]ilaL-:ir devieni habitude. Ne avec une ame ardent? ,
lendre , porteca la melancolie,, une imagination trop
active , uiie memoire trop fidele ; il retrouvoit par-
tout ks traces de son bonheur et le souvenir du
mallieur qui lui avoit succede. II revit Zena ; elle
lui fit pcu d'impression ; elle avoit ri de son absence ,
persifl;'' s:i dou'eur , sa sensiiilil^: ,et donne dans mille
travers qni lui avoient aiitant niii dans Pestin e des
gens senses , qu'ils avoient altere sa fraicheur et
gate ses graces naVves. LinvillenePaimoit plus ; mais
il I'avoit aimee. Ce nVloit plus elle qu'il regrettoit,
jnais ie sentiment qu'elle lui avoit inspir^. Une mu-
sique teudre le faisoit rever tristement. Le lever du
soleil , une belle soiree d'ete , ces nuits oii I'astre bril-
lant cpii les I'claire, semble favoriser I'amour et n'exister
que poi:r lui, renouveloient sa douleur , en lui rap-
pelant ses plaisirs , sans lui biisser ineme la consola-
tion de les desirer encore , car il meprisoit Zena^et
ne pouvoit plus I'aimer.
LinvUU et Fanny. 3-)1
Telles otolent les dispositions de Linvillc , lorsqu'il
apprit c[u'utie(lesespareiites,ttabliea Paris depuis son
abs.'iice , v etoit dans ce moment , et devoit bientot le
quitter pour se rendre dans ses terres. L'honnetete ,
bien plus cpie le goiit , le condnisirent chez cetle pa-
rente, qu'il n'avoit vi'.e qu'iine seule fois, dans \m
autre vovage qu'elle avoit fait a Paris, depnis pres
de dix ans. II Irouva pres d'elle nne jenne personne
qu'elle lui-pr^senta comme sa fille ; il la salua sans
y faire grande attention. Fanny n'avoit rien de ce
qui fraj)pe an premier abord , elle n'eloit ni tres-
grande ni Ires-jolie. Sapl'.ysionomie eloit douce , spi-
rituelle et pleine de sensibilile ; mais il fal'oit I'ob-
server pour y trouver tout cela. Ses traits n'etoient
vraiment agreables que lorsque le plaisir les ani-
n.oit et faisoit nailre le plus joli sourire. Dans ce
moment 5 s lencieuse et profondement occupee, elle
regarda beaucoup Linville, I'ecouta avec attention,
mais sans lui parler et sans en etre remarquee.
Madaired'Holcy pria son parent de la voir souvent
pendant lepeu d'instans qu'elle avoit encore a passer
a la ville; il sV trouva meme engog^ par quelques
services qu'il j ourroit lui rendre 'pour des affaires
de fwmille. Quelques jours apres il y retourna , et n'y
vit point Fanny ; il demanda de ses nonvelles : elle
est sortie^ lui dit Madame d'Helcy ; je I'ai engagee,
prescpie malgr6 elle , dans une partie agreable. Depuis
plusieurs mois son caractere cbance^elle etoit trcs-
gaie , elle ne Test plus ; apres avoir beaucoup desire
de veniraParis, elle m'a vivement sollicit^e pour
le quitter. La campagne, disoit-clle, r^tabliroit sa
3g4 Liltirature francaise.
sant($ ; elle en avoit besoin. Pour lui faire plaisir ,
j'ai abandonne plug d'nne affaire essentielle; mais
depuis queique* jourt ellc ne parle plus de partir,
sans en paroitre plus ^^me , plus disposee a s'amuser.
Son esprit a perdu de son egalit6 , memc de ses
graces ; car , si je ne craignois de vous paroitre un
juge trop partial, je pourrois dire qu*elie est reelle-
jiiciit aimable. Linville cbangea de conversation ,
parla d'affaires et sortit* II rencontre lannjr, elle
rcntroit avec une amie de sa ni^re. C'est Linville,
dit cette derniere, lorsqu'elles furent assises, je n&
ie crojois ni de relour de se» voyages , ni gueri de
ses erreurs. De ses erreurs ! reprit madame d'Helcy
d'un air m^content. Peut-on donner ce noni a I'atta-
cliement le plus vif , le plus vrai , a la conduite \a
plus discrete et la plus honnete? Linville a pu aimer
avec trop d'abandon, il a pu etre trompe, trahi ^ mais il
eit incapable d'une erreur , et moinsejacore d'un mau-
vais precede. L'arnie ne c^da pas , et la discussion iut
longue. Fannj- purut Tecouter avec attention , mais
sans J prendre d'autre part : un instant apies elle
aortit , sans en paroitre plus gaie ou plus triste.
Avec une figure tres-franche , personne ne I'etoit
xnoins que Fanny ; on lisolt sur sa phvsionomie ce
qui lui faisoit plaisir, elle ne le disoit jamais. II eloit
xnoins facile de saisir \qs nuances du chagrin et de
la contrari^le , sur-tout depuis qu'une reverie ha-
bituelle etoit devenus son etat naturel. Fanny tou-
clioit a sa vingt-troisieme annee , et Fanny n'avoit
encore rien aim^ , on le soupconnoit du moins, car
daus sa conduite , rien n'en avoit dojine I'indice. Douce
Linv'ilU ft Fr.nny. ^g")
ct gaie dans son enfance , vive , etourdic dans I'a-
dulescence. Sa leg^re^o et sa oi^lancolie semhloi'^nt
«*etre suivis sans intermediaire , et cela sans motifs
apparens , sans alteration de santc : on I'a-cusoit
de caprice , de Lizanerie j n.ais pen de teirips suint
|jour decouvrir une cause plus singuliere el plu^, dou-
loureuse.
Depuis quelques mos oa couroit en foule h cetie
piece bizarre et t^jnt cn'tiqn^e , ou I'auteur s'ecartant
des regies ordinaires, a peint I'a i our dans tout son
^garement , ou ISina, sans raison et presque sans
decence , interesse , emeut , enlraiue les ames sen-
sibles _, les etres o ganis^s pour I'amour, et levolte
ceuT qui , souiiiet!aut tout a 1' nalj'se de la raison et
aux bienseanccs da tht'aire , voier.t seulemfut en elle
line inseusi'e , et le delire de I'esprit dout abusa I'au-
teur.
Linville , tristc et malheureux , vit Nina. 11 en fut
enchant^. Comme elle est intcreisante , disoil-il chez
madanie d'Helcy , celte inrortiinet que I'amour 6gare !
quelle fr^pression ! que de sentiment ! la mosique est
d'une verile ! d'uue ni^'ar.colic ! . . . Jamais op^ra
ne m'a Innt toucb^. ¥anny, trmoin de ses ^loges,
demand© k sa ni^re de Vy mcncr, avec une viva-
city qu'ell? n'avoit pas I'iiabitude do montrer pour
exprimer ses dcsirs. Avec sa teTidre mere ils ^toient
satisfaits aussilot qu'iis ^toient connus. On donnoit
Nina le lendemain , la parlie s'urt'angea; on y va ,
ct Linville les ac onipagne. Pendant le spectacle ,
Fanny , alteniive et silencieusi? , parut nc voir , n'en-
leudre que Nina. Au inomant oii cette denii^re dit
5rj6 Li It era tu re J) an ca Use.
a SMI pore : « Vous avez ure fille.... vous In rendrZ
bipii heureuse ; sur-tout ne la conlnujez i)as daus le
choix de son coBur I ceia fait un iiial ! . . «. A cc
mot, dis-je , Fannv lit un cri , loii ba dans inie pro-
fohde reverie, et parut ne ]^as entendre le resle de-
la piece; elle n'en fit ni I'eloge, ni la crilique,re-
pondlt par niODOsyllabes a tont ceqn'on liii dit pen-
dint la soiree , et se retira le plulot qn'il liii fm pos-^
si.ble. Les jours suivans , il faiiui I'arracher de son
appartement , r-lle \\'e\\ voiiloit plus sortir ; elle inontra
de riiumeur, de I'impatience, tint des }}ropos sans
suite et souvent inintelli^Aibles ; sa table, son secre-
taire etoient converts deceltefoule d'historiettes anx-
qeelles Nii a servoit de modele. Elle paroissoit les
lire avec cette avidite, cet empressement q-i'on a
ponr lesohjets qui frappent fortement. On ne ponvoit
Ten dislraire, elle les repetoit de menjoire , lorsc n'on
les otoit de des^ons ses yeiix , on sembloit ne s'oc-
Cuperderien. Enfin qninze jours snffirent pour assurer
la triste madame d'Helcy , que sa fille avoit aussi
tolalement perdu la raison que Nina, et qn'il seroit
niohis aise de la lui rendre.
L'c'garement de Fanny , la douleur de sa mere
firent siir Linville nne impression- proportionnee a
la vive sensibililc doni le ciel I'avoit ponrvu. La si-
tuation de sen arae en angmentoit la force , et il sV-
loimoit quelquefois que cet ev-enenient ent pu ajouler
tant de trislesse a scs douloureuses reflexions.
Madame d'Helcy , ne vonlant ni conlrarier sa fille ,
ni lui faire essaycr ces remedcs inrertains et fati^ans
qui aug'.ucnlcnt Ic mal au lieu de le diminuer , piil ie
LinvllU el Fvmy. 3 jj
parti de retourner a la campagne , et de tout attcndra
dii temps et de la nature. Elld chargca Linvitle d'une
idFaire qui exi^eoit des soins , le pria de la terminer,
el de venir ensuile a sa tene. Pouvoit-il cxistcr un
instant ou son aniitle Ini fuf plus necessaire ? il pro-
init d3 se trouvjr le lendemain au moment du de-
part. Il n'avoit point vu Tannj depuis le commen-
cement de sa maladie. Avec quel inter^t ses jeiix
se fixerer.t sur les siens qui paroissoient a peine
Tapercevolr ! il ne Tavoil jamais trouvee si jolie : sa
parure en desordre , son air egare , mais pourtant
doux et sensible , lui firent ^prouver pour la premiere
fois une emotion qu'elle ne lui avoit jamais faile. II
reit^ra iimadame d'/jelcy la promesse de se rendre
pres d'elle le plulot qu'il lui seroit possible. Fannj',
dans ce moment, montoit dans la voiture ; elle s'arr^ta,
porta sur sa mere et sur Linville des regards in-
quiets et surpris : « II viendra, dit-elle. . . lui. . .
pourquoi ? . . Qui esl-il? On n'aime pas les mallieu-
reu?i , il aie viendra pas . . ». Madame d'Helcj disoit
adieu a Linville et I'einbrassoit en pleurant.<t Vous
pleurez, dit Fanny en joignant les mains ; vous fait-
il du chagrin ? . . Ah! si vous saviez. . . si jepouvois
dire. . . Mais non . . ». Illle s'arrela , rt^^rit son air
sombre, et ne parla plus jusqu'a son arrivt'-e a Helcv.
Gettemaisou , sitnee tians un endroit solitaire, etoit
tenue avec soin. Une des ailes du chateau se pro-
longeoit jusque vers un bois dont les premiers arbres
touchoient presque aux fenetres du cabinet qui la
terminoit ; cela donno't a cjt appartemont un air de
retraite et de mclanculie, quo sa decoration au<^-
S-iS Littc'rature Jrnncaise.
jnentoit enrore. C'^to; t un salon d'etude ; on y trouvoit
une bibliotheque , les busies en marbre des homines
ics plus c^l^bres de la Grece et de Rome ; quelques
tableaux repr^sentant les d(^saslres de la nature , des
globes 5 des cartes geograpbiques, tels t^toient les or-
nemensde ce salon. C'est la que Fanny vola en descen-
€ant de voiture , et elle declara qu'elie a'en vouloit
plus sortir. Les repr(fsi ntations Taigrirtnt, les prieres
la trouverent inllexible, et il fa lut avoir pourcelte
manie la condescendancequ'on avoit pour tant d'au-
tres. Pendant plusleurs mois, elle y meua co';stam-
ment la meme vie ; elle n'en de endoit pas I'enlree ;
a. quelque hetire du jour qu'on Vy surprit, on la trou-
voit a la meme place , le meme livre sous ses yeux ,
ouvert au meme feuillet. Quelquefois elle ecrivoit ;
on trouva de ses billets, ils etoient sans suite, lea
idees en Etoient tendres, tristes, mais sans objct de-
termine ; on n'en pu tirer aucune luraiere sur ia cause
de sa maladie et ses singuliers »ffets. \
La situation deFannj, sombre et mc'lancolique,
in a is en apparen.e calme et tranquille, donaoit a.
madame d'Helcj'^ I'espoir de lui voir recouvrer un
jour ses cbarmes et sa raison 5elle s'en applaudissoit
avec une amie ; Fanny etoit pr^-; d'elle , et sembloit ,
h son ordinaire , ne rien voir, ne rien entendre. On
remet une lettre k niadame d'Helcj, elle est d^ Lin-
ville. II annoncela fin et Pheureux succes des affaires
qu'on lui avoit confiees , il vient en reudre compte,
il sera a Helcy presqu'aussitot que son epitre. L'air
le plus anime prit , sur le visage de Fanny , la place
de son. abattement habituel 5 elle se levca ay'ec pr^*
Linvilie et Finny. S^g
cipltallon, fixa sur la lettre de Linvilie des regards
ag!i(5s , ;)iiis levant Ics jeux an ciel , e!Ie dit du Ion
le ( lus loucljant : « Mon Disu que je soufTre; raamanj
» cachez moi. . . qtron ne me voie pointy ne ni'ex-
ji po^ez pas a des rejiards qui me feroient mourir »,
Madame d'Helcj Fassura qu'elle ne verroit et ne
seroit vue que des personnes qui ne pourroient pas
la g^ner ; elle atttibua c tte vive Amotion a I'idee de
son elat , et a la sorte de honie qu'elle resse:;loit
dVn avoir un t'traKger pour t^moin.
L'agitalion de Fanny ne se calma point. Pendant
la soiree, elle parut meme augraenter, et sa mere
la quitta a regret pour recevoir Linvi!I(\ Elle lui
par!a de ses chagrins ; il parut s'y interesser vivement ;
niais uialgre la confiance et ramitic qui remjlirent
cetle soiree ^ elle leur parut longue et bien triste.
Ce ne fat qu'au bout de deux jours que Fa uix' con-
sentit a voir Linvilie ; son nom la faisolt rougir, sa
presence I'embarassa et parut lui ^tre penible ; raais
peu-a-peu elle sembla s'y accoutumer, et ledemanda
meme qudlquefois. Dans ces moraens, Fanny agit^e,
^niue , paroissoit vouloir confier quelques secrets a
Linvilie; elle le regardoit d'un air liinide,le pr^-
paroit a I'ecouler , lui demandoit de I'atlention et c:e
la discretion; puis, parolssant s'arreter avec effort,
elle s'eioi,unoit , f^s yeux se rempli.^soient de larmes ,
et elle le conjuroit de la quitter, de la Liisier h elle-
meme.
De semblables scenes souvent rep^t(''es, faisoirnt
sur Linvilie une iir.press'on que cbaciue jouraugincn-
toil 3 il ne pouvoit se ivndre compte de I'espjce d'io-
400 Litte'ratiire frnncaise.
UVet que Fannj avoit fait naitie clans son ame;il
crut loiig-tcmps qu'il ii'etoit ( xcite que par la pitie ;
niais les traits de Fannj^ lui I'loienl tou'ours presens ^
il souflroit par-tout ou ii ne la voyoit pas. Dans ce
cabinet solitaire oi!i souvent lis passo'ent des heures
saus so parier, il oublioit ses nialhours, ses resolu-
tions, ses projets , il oublioit juscju'a Zeiia, Fannj
avoit tout cliango pour lui. Combieii il se reprochoit
d'aimer un elve qui ne pouvoit r;'^pondre a sa teu-
dresse 1 il en accusoit sa bizarre deslinee , il vouloit
partir, ne ]a revoir jamais. . . Mais quitter inadaine
d'Hclcy , TabaiKlonner a sa douleur , il j auroit
de I'ingratitude, et il ne pourroit s'j deter ininer.
Apres plus de six semaines ae trouble et d'inquie-
tude, celte situation devint si penibie pour Linville ,
que ne se sentantplus la force de la supporter, il pre-
texta des affaires , et fixa le jour de son d^^'parr. On
le dit a Fanny, ?ans trop de precaution, et cette
nouvelle parut I'agiter plus que la surprendre. La
veille de ce jour qui devoit separer, peut-etre pour
jamais, doux etr^ s aussi interessausque malheureux ,
jFannj parut plus triste et plus sombre qu'elle ne I'a-
voit jamais ete. Ses reveries avoient Pair de porter
sur nn or. jet qui I'orcupoit foricment et ne I'aban-
donnoit pas. Vers le soir, elle prit un air plus serein
pour demander a Linville , s'il comptoit lui dire
adieu le lendemain : il repondil que c'etoit son pro-
jet ; n'j manquez pns , hii dit-el!e , je veux vous
parier a vons seuJement j vous le ^ oulezbieii , ajoufa-
t-elle , en jelan! sur sa mere un regard crainlif et
timide. Apres un geste d'apprcbaiion de madame
d'ZIelcj ,
Lhiv'dle et Faiivy. 40,
tVlTc'lcy , Fnnnv reprlt; Eh l)icn ! clone, deniain ii
clix hemes : laissez-moi a pr(''sciit , j'al bcsoin d'etre
sen If.
Liiiville se rendita I'heure conveiuie dans I'appar-
Xemvnt de Fann v ; son air abailu , ?a parure simple
et neghgee, im regard incertain ou un rtste d'ega-
remeiit se faisoit a peine remarqner, I'id^e qu'il la
vovoif ponr la dernit-re fois, tout contribnolt a dmou-
voir Lfuville. Fann.- ferma laporteavec I'airdu plus
giand mystere, puis s'approchant de Linville, la
rougeur sur le front, mi cahier a la rriciin, e!le le
pria de le hre la , a Tinstant , mais sans la regarder
sans lui parler, sans dire un mo!; elle exigca sa
parole^ qu'il donna; puis, le faisant asseoir sur un
fanteuil, a demi tourne vers elle , elle lui donna lo
papier qu'elle tenoit,en le priant encore de le par-
rourr. Linville surprls et ne sachant que penser
puvrit le ca'iier et hit ce qui suit :
« Fanny a Linville.
)>La unit el le silence regncnt surTunivers, tout
dorf , tout est tranquille ; moi seule agit^e par mille
sentimens pcniblos, je veille ponr la douleur , ct
n'exisleqneparrom] red'espoirfiuimereste.Demain,
Linville , demain vous parte/ ! Incertaine encore sur
ce que je dois espc'rer ou craindre , livrre an doute ,
a la plus vive incniielude, je vais parler puisqu'il
lie m'est plus possible de me taire. Vous devez me
^olr avant voire d(5part, vous me I'aviez promis,
(f Get instant, sans doute, d/cidora de mou sort...
J'einploie ia unit qui le prck-tjde a tracer ceiecrit,
To/?ie J J. C c
4fi2 Llttcratnrc francahe,
il va declur'n* le voile que depuis long-temps jV^teiicls
sur mes seiitimeiis , vous allez me coimoitre ; rendez
justice a mon ca^ur, pardcnnez une feiiUe dont le
bonheur devoit etre le p'lix , et sur-lout parcourez
cet eorit avaul de dire un mo I , do jeter un regard
sur Fauuj ».
Linville , t^tonn^de ce preambule ou il voj^oit tant
de clioses 5 ou ii crojoit en devirier tant d'aiitres,
s'arre.a pour regarder Fani^y , assise pres d'une table,
]a tele appuy6e sur ses mains , caciiant son visage ;
elb' ne vit point ce mouveniv-nt , ne cLangea pas
d'attitude., ce qui n'p .cla a Linville la promesse qu'il
avoit faile 5 et le rainena avec un trouble marque
a Tecrit qu'il lenolt.
« Mon caractere a toujoursete une^nig-iie , merae
pour cette mere si bonne, si tendre, qui Teiudia
long-temps pour me rendre heureuse , et n'v rtussit
pas. N6e vive , gaie _, mais plus sensible enrore , mon
eufance fut paisiLle , j^arce que cette vive sen.sibi-
lite n't'toit pasdeveloppte ; quandl'espoir du b(.n- eur
embelUt I'aurore de ma vie, je vis lous les objets
sousce point de vue flatleur, dont je matin d'un beau
jour etlereveii de la n iure ornent de rians pavr-ages.
Cbaque jour, ckaque annee en obscure il i'eclat,et
mn course ^loit a peine commenc^e, que d/ja lasse
et fafguee, le courage me manquoit pourl'achever.
)^ Jugeantd'apres mon coeur, je cms a I'amour. A
la verite je n'en IrouvaJ que I'ombre ; seduite par les
apparences , je crus a I'amilie des ferames , j'accordai
lamienne, j'aimai sincercment, et je fus trompee ,
cruellement trompee! Qn m'offiit des liommages ^ils
Lhw'lU et Tminy. ^r.^
enro-ent pu m'rblouir , mals le coeur n'v etolt pour
rit n , !a vaniic eu laiMjit uu commerce ; et la mienne,
dirigee par cPantres principes , cii m'eclairant sur ie
n:otif et le but de ta- t de faussetes, ma s?rvit de
sauve-oarrJe , en m'eiilevant encore une erreur qui
ni¥.toit y]\hve.
« Ce c|u'oti a, pelle plaisirs dans le monde ; Cv? qui
paroit le d/eii de la fonle qui le^; po.irsult, est Lien
peu d;; ri;ose a I'cjeil de{roin])e qui ]. s ob^;'rve et n'y
prut tror.ver le ciujrme du teu'Jre iuteiet qui en fait
tout le prix. QuVst-ce qu'im ba! , une as^embl^iUa
soupcr, oil toul est i:idiiTereut , oii on ne desire, oii
on n'att.md rieu , oii aucuu regard ue peut porter la
trouble et le pialsir dans votre ame, ou I'o.i est tour-
a-tour Pobjei de la crit que ou d'elogs tronip^nirs?
Je ne vis dans c: tumulte,<iu'un long ennni, ur-e fa-
tigante contrajnte. NV plus slier, parut nns singu*
larit- ; y porter Tbumeur et ies tristes reflexions qui
m'a^.itoient , me firent paroitre aussi deplacce, aussi
ennuyeuse que j'y avois i'-^ir ennuvtV. Ma mere, in-
quiete pjur ma sanle, Tali nee dc's qupsliojis oisei:ses
et des observat oiis mali».v"e>j rvie Ht de te-n.lres re-
procbes , de vives inslanres pour lui confier mes
peines. Des peines... , lui dis-je , je n'en ai point ;
rien ne m'occupe , je ne desire rirn , je-n'ai rien a
dire, rien a confier j le monde me deplait et ni'en-
nuie , voila tout.
»Quv"lquys affaires exigeoient que M.^ d'Ke'cy se
rendita Paris; j'cn teinoignai une Joie qui la decida
bien pronq)tement a ce voyage. Les premi.-rs mo^
ir.en^ de mou s6jour y furent agrcables , miile objuLs
C c 2
4^4 LiiUratnre franchise.
iioiivepuxfirent diversion a mes irlees h.^biluelles. L©
d i\d-je ? un es])oii' vague, incerlain, me coiiJuisoit
par-tout ; ,1 ue tardoit pas a ni'abandonncr, inais il
dounoit du ressort a moii ame , il flattoit le vocu secret
de moil ca ur 5 et , toujours trompee, je crojoia tou-
joiirs ne plus I'etre. G'est l:i que j' ntandis parler de
yous pour la pivmicu-e fois... Jamais ma mere ii'avoit
pro; once votre uom devant moi ; awroit-ells craint et
prevu la vivc impressior. que vous deviez m^ faire ?
J.'aventure cruelle qui ^ous avoit fait quiltrT votre
palric, etoit trop rcceule, trop sin^uliere aux jeux
d'un nionde frivole , pour n^elre pas rappelee quenid
on parloit de vous. Je Penteudis souvent, sans y rien
comprendre. On vousblv^moit, on rioil de eel exces
de scnsibiiife j on persiffloit I'esprit romanepque et
bizarre qui n'avoit pu supporter une iiifldtlite, qui
avoit prcfcrti de se taire , de s'c'oirner, au'piaisir
piquant de se venger de I'infidele. Cctte'bizarreri^ ,
donl je trouvois la justiRcaiion dans mon coeur, fut le
premier attrait qui me porta vers vous. Les t^logesc'e
jTia mere el de tons les gens senses do votre connois-
sance en augmeinert-ntla-iorce. Je vous aimai sons
vous connoitie. Vous futes un elre ideal , mais clicra
mon cceur , auquel se rapporterent toutes mes penst-es.
Alors jenVus plus rien a cberciier , et je fuscontente,
sans ctre heureuse. La solitude et la retraite devinrent
I'objet de mes desirs," parce que je vous y trouvois
$ans trouble et sans distractions. Je pressai ma mere
de retourner a la campagne, pour etre plus a moi-
nierne, c'esl-a-dire , plus a vous. Quand on annoura
votre relour, avec quel eiupresseuuni , quelle impa-
Lhwille et Fanny. ^o3
tience j'attenHis le monienl do vous voir ! il nrri^-a
sans etro pr^^vii , sans etre annojici. Je troiivai en
vous toufes les ])erfertions fjont moii imagiiialioa
vous avoit orn^ ; c'eloit le son de voix que je desiiois,
]es regards que je in'etois pejnls cent fois, I'espritqni
pouvoit me sedui)-e... Mais \\('\i\s\ jo ne Irouvois point
dans raimable Linville celte doncc^ impalience dont je
mV'tois flaltc\-. II parut a peine me voir, nj me parla
point ; et j*en fus aussi loutliee, quc"*i , repondant
tlepuis long-teraps a mon amour, i! eut pour la pre-
miere fois cesso de I'eiilendre. Comme je retyreftai
a'ors de ne pas posseJer celte beaute frappante qui
subjugue an premier coup d'>i-il , cet esprit , ces
^mzes briiianles quiallirent, seduiseat^ei lout naiire
I'ainour!
«Desce jour lieureuxet fa{al,}e devinsmalheureuse^
Lien mali.enreuse! Mecontente de vous, de raoi, d©
I'nniversentier,. ce fat en connoissant I'objet de ma
tendresse , que je sen lis le tourment de Tamour. Les
idees les plus e.vtrr.ordinaires , les projefs les plus
bi/arres m'o;cu;;oieut tour-a-tour. Souveui , apres
dj longues et faligantes reveries, j'c'tois etonnee et
fciciiee de relrouver ma raison 5 cent fois je desirai
I'avoir perdue, pour perdre votre souvenir.
»Tel.'e ('t)it ma position, lorsque I'eoge que vous
fifes de Ncncij vint m'e:lairer. Le plus singu'ier des
pro;ets fut adopte , «'X(^xute , avant d'avoir tte r llechi,
calcule : je n\ n vis que le piix ; je m'aveugiai sur
tout iereste. Les propos dn public, la douleurd'une
more trop Jendre, rinc^fitude du svcces , r"en nii
m'arrcta. Inl.Tes-:er Linville , en etro aimee ! . . . . ce
boidieur pouvoit-il s'acheler Irop cljsr ?
4 0 6 Liticrature fra n r. ais e :
»La vive impression que N:iia avoit faile sur pla-
sieurs jcunes • eroonnes , les suites fuiiestes qu'elle
avoit eues, et qui, vraies ou fausses, s'etoient repan-
dr.es clans le pubii. , me parureni d( s raisoius sndi-
sanles ponr doniuruiiair do verity au rnie quej'allois
jouer. D'ailieurs la mt'laiKoiie profcnide a laquelle on
me vojoit livree depuis long-teraps, rin^ga]it(^ de
mon humeur pouvoient paroilre comme ies ayant-
coureurs d'une maladie que la represenlatiori de Nina
avoit seulemeiitd^veioppc'e. Voussavexk^ resle. Que
lie puis-J3 vous peindre Pespece de s'.utiincnt qui
m'agita an moment oii , partant pour iielry , je vis
vos regards se fixer sur moi , avec cet int^ret, celte
sensibilite que la pitie ne donae pas, mais que I'a-*
incur seul inspire ?Dans ce premier instant de surprise
etdcjoift, J8 fas ssr le point de tout dire, de lout
avouer; )Y.ais c'eut ete perdre le fruit da mc!s peines,
et ii fallut attendre.
3) A votre arrivee chez ma mere, vous me trouvales
dans le mewie ^tat , la maladie n'avoit pas fait de
progn\s , n'avoit pas eprouve de dirninuiion ; j'cii
reglois Ifes etfcts, et les tenois au md^e point , je crus
apercevoir , duns votre conduite avec moi, un interet
que vous paroissiez vous reprorher , et dont quelq«e«*
fois vous vous dissimulit z la cause. Ramane #ouveat
pres de la raalheureuse Fanny , vous aviez Fair de
vousy plaire , \o$ r?)',ards peipnoient la teadresse 5
c'etoit a.'-scz pour flatter son espoir, mais pas asscz
pour la convaincre. Auijnce quelquefois par la plus
douce espiTance, je voulois parler, j'en formois !e
projet 3 jc fixois le jour ^ rbeure, le moment 3 il arri-
Linvllle el Fniny. 407
■volt, et je le laissois coulvn- sans rieii dire ; prete k
ouvrir la bouclie, je ne voyois plus que de Tiu- ertl-
tiidt? , des tiontps allreux, ct Tijistant fatal qui alloit
ancantir lout te qui ni'atraclioit a la via.
«Cetle cruelle indecision dtn-oroit encorCjSi jon'avofs
^te forc^e de la surmonter , par la crainte de vous
voir eloigner sans retour. Mais, incnpable de parler,
de m'expii uer raoi-nieme , j'ai voiilu vous instruire
parecrit: j'ai rassemble mes idees 5 vous ventz d©
voir mes sentiiuens, raon amour jConnoissez Ics reso-
lutions qu'il m'iuspire.
p)Si la trop malheurcuse Fanny doit renoncer a I'cs-
poir d'etre aimt^e de vous, si votre coeur, encore iv
Ze-na, se livre au regret de I'avoir perdue, an desir
de la rctrc;-ver , si je me suis trompee aux marques
incertaines de votre attachement , rendez-moi cefc
inutile et funeste ^crit , gardez le silence sur mon er-
reur,l'lionneur vonsen impose la loi. OuMIez Fanny,
tout est lini pour el!e : i'amour qui I't'-gara pouvoit
seul la rendre a la raison , au bonheur , a la socleie 5
en renoncant a lui , elle renonce 3 tout le res'3 ; cette
solitude sera son torab?au , un amour mailieureux et
sans espoir ne tardera pas a I'y faire descendre. La
toiirnure de mon caractere , I'energie qui lui est })ro-
pre , la suite que j'ai niise d-uis nn s proj-'^ts , tout doit
vous con' ain n'eque ce parti est prisirrevocabbment ,
et que vous feriez de vains efforis pour m't- n detour-
ner. Mais si Linville ne fut pas s?ulement aninie' par
la j)itie et la compassion , s'il sut caclier sonsxe voile
des s<rntimeus dont on lui pro;net d'ecouter Tavea
avec transport 3 si Fann}^ lui est cIutp , s'il I'uime
G 04
^oS littirnture francaise.
autant qu'il en est alme , un regard suffit pour Pf;is-
triiire, poar lui (hire oublicr ses peines , ses chagritis,
Ci com; lera ses vocmx ».
Linville leve alors sur Fanny des yeiix remplis de
lannes el de la plus douce expression ; sesyeux char-
mans '(^toient aussi fixes sur les siens ; leurs regards
confondus dirent et expliquerent tout 5 ils s'enteudirent
sans dire un mot, san> prononcer une parole. Ma-
dame. d'Helry fut appelee , instruite ; Linville ne
paitit point ; ils furcnt unis, se fixerei\t a Hel?y , et
visitercnt souvent le cabinet solitaire ou s't^toit fait
rhenr.'ux denouement. Ils le revirent tou jours avec
plaisir ; ils furent lieureuxl'un par I'autre, ch^rircnt
leur bonheur , et ne crurent pas I'avoir achete trop
PC) E S I E.
La Priere LifiU'erselle.
On connoit la P rid re unu'erselle de Pope. Le
lecieur pent so rappel^r la traduction en vers de cet
hjmne , par Lefranc de Pompiguan , ecrivain digne
de beaucoup d'eslime , mais qui eut le tort et le raal-
heurcl'oulra2;er, dans son discours ^Pacademie fran-
raii^e , des homraes de lettres et des pbilosopbes dout
les talens el les travaux honoroient la France. Vol-
taire 5 qui lui avoit pardonn^ le larcin du plan
d'Alzire, ne lui pardonna point I'insulte qu'il osoit
faire a ceux meme paruii lesquels leurpropre volonto
LaPiicre im'vr.rselle. 409
venoit de le placer. Lefranc de Pompignnn fnl long-
temps tounn^- en rirlicule. Voltaire iie til \nAn\ grace a
la Iraihutioii dc la Priere univcrsi^'lle. II nrpporte
cetle pi^ce dans SL'S a?uvres, voUnnc drsFacelies, et
il I'a accoinpagnec d'o'^servalious curieuses. Et sans
doiitc riniperfecion de la piece de Lefranc avoit
engage Turcot a traduire de nouv'eau cet hymne du
poete anglaig. Nous sommrs a«sez heureux pour
poll voir ofTrir aux locteurs cede traduction nou coiinue
du puLlic, et que nous avbns ecritc de la main nieine
de I'auteur. Turgot, comnic on le voit dans les m<'^-
moires sur sa vie, par ie citoyenDupont ,cjUivoit ia
potsie, en meme teir.ps qu'il se livroil aux etudes dz
rhom me d'etat, lantilv ad'accord, disoit Yoltairf?
dans ses conseils a an. journallste ^ entre I'csprit
de» belles-lettres et celui des afTairVs! Celte Priere
universelle de Pope est duo vrais?mblab!einent a
Vhijmne de CLcaiitJie. Comme lacomj'araison;ue la
piece du poete grec peul elre int('res?anie pour les
eixwh de rantic[uite et de la potsie , nous crovorsqu'oii
nous saura gre d'v-n presenter aussi una traductio!i
en vers, par Bougainville. Tre^peu de persouiies
connoissent cclte traduction. On a eu , il y a quelqus
temps, beaucoup d'ln-mnes a TEtre-Supreme. Uno
ou deux de ces pi'ces peuvent meriter d'e're rappro-
cliees de I'byume de C!e uitlio el de celui de Pope.
Mais il est asscz sif>gnl'er qu'a cc^tle t'poque, prrsonne
jTait son^e aux vers du poelo grec , niaceux du poi'te
anglais. IS'ote des redacteurs.
410 Tocsie.
DEO OPTIMO MAXIMO,
Au DiEU TOUT-PUISSANT 3 INFINIMENT BON.
X £HE de tout , o tol qu'en tout temps , en tout lieu ^
Out adore les saints , ]es barbares , les sages !
Sous inille noms divers objet deleurs bommageSj
Jeliovah , Jupiter , ou Dieu !
Eire cacW , source de I'elre ,
Impenetrable Majesle !
A ma foible ruisun toi qui a'as fait connoitre
Q'«^e sa foiblesse et sa boutc !
Tu m'as donne dii nioins, dans celte nuiL obscure.
Be voir le bien , le mal ; k defense et la loi :
Tandis que tes decrets enchainent la nature ,
Tu m'a^ fait libre eomine toi.
Que tnon coeur dans lui-meme et dans sa propr^ cslime ,
Trouvant un jugc? austere et jamais corrompu ,
Redoute moins I'cnfer qu'il n'abhorre le crime;
Desire moins le ciel qu'il n'airpe la vertu.
Loin de moi cette erreur impie
Qui m^connoit tes dons , qui tremble d'en jouirl
Goiiter , cherir les biens dont tu s^mes la vie ,
C'est payer tes p^^sens , te plaire et t'obeir.
jVIais je ne eroirai point que ta munifi-cence
A ce globe ou jerampe ait borne ses effets ,
Qu'errantautonr de moi dans IVtendue immense^
Mille mondes en vain appellent te* bicnfaits.
Que jamais men orgueil , usurpant ton tonnerre,
l^e s'arroge le droit d'eu dirigcr les coups ,
De lai;cor I'anatheme et de juger la lerre ,
Jjiterprel^ ignorant d(? ton secret courroux.
LaTriere universeUe. 411
Si je marche dans la justice,
Jtiscfu'au termt' affermis mes pas ;
Si mon coeurs'e^ara driiis le.s stnti.TS du vice ,
Monlre-inoi le cliCTnia ({ue jt; ne connois pas.
Quclt£u«.s biena quVi mes voeiix refuse ta sagessc,
Ou que verse sur m>u ta libv-raiite ,
Du innrmMre insolent preserve ma foiblesse ;
Et defends ma raison conlre la vanite.
Si tu m'as vu , st-nsible aux malheurs de mes fretes ,
Preler ik leur deumts un voile officieux ,
Adoucis a ton tour tes jugemcns severes ,
Sois indulgent pour moi, si je le fus pour eux,
Je connois mon n^ant , mais ;e suis lonouvrage.
Quel que joit aujourd'bui mon sort ,
Sois mon apnui , mon guide , et soutiens mon courage,
Ou daus la vie ou dan* la mort.
Donne-moi le necessaire ,
La subsistance et la paix :
Si de tant d'aiilres biens quelqu'un m'est salutaire ,
Tu le saii , tu peux tout : j 'adore , et je roe lais.
Ton temple est rimmenslte memo :
Tes autels sont le ciel et la terre et !cs mers.
(>ha;ar des etres , chantcz votre mailre supreme !
Eduto , bj-mne eternel j Ordrc de I'Univcrs !
par Turcot.
Traduction de i'hijnine de C/caalhe , par
Bougainville.
X KRE et maitre des Dieux , auteur de la nature ,
Juniter , 6 sagesse ! 6 loi sub'i'Tie et pure !
Unite bouveruine u qui tons ies mort^-'is ,
4'« Foe'nf.':
Sovs wV.h nom? divers, ^It-veiit des autels ;
^ Jp t'fid( re , rius caurs te dolvent leur homrnage ,
Kous 3o:;wu^s tds fufani , ton ombre , ton image ;
!>•■ t lit vp qui r?«i,ire , anime par tes mains ,
4- c->l(-br r la goire invite les lujm<iins.
B?n; soi.s a jamais ! ma voix rt c ..nnoissante
C nsocre ses accens a tabont-> puissante.
Tu regis i'uuivers. Ce toul-ilimite
Qui re ferme la ti^rre en s n immMisile ,
Ce tout barm.)nieux , einune de loi-meme,
S'applaudit d'obc'ir a ton ordre supreme ;
Ton souffle iulciligent ciroule en cc grand corps ,
En fcconde la masse , en raeut tuus les ressorls j
La fondre et'ncelante en ta main redoutable ,
Porte un ctTroi vengeur dans i'arae (Ju coupable.
Present a tons les temps , tu remplls lous les iieux ,
La terre , I'ocean , le ciel I'oiTre a mes yeux.
Tout derive de toi ^ j'en exeepte nos vices ,
J Nos injustes projots , nos fureurs , nos capiicGS.
Par toi r ordre naq^it du chaos (^Ignce ;
Chaque etre tient le rang ; ar loi seul assigne :
Par toi des {•ItJ'mi.'ns la discorde est bannie , ,
Et des biens et des maux la constanle harmonie ,
Les enchainant entre eux par lui secret lien ,
Forme de leur accord un rrniude ou tout est bien.
L'homme insense qu'aveugle un jour periide et sombre j
Cherclie par-tout ce bien et n'eu saisit que I'ombre ;
T.'i loi s?nle •; ta loi , vrai Hambeau des humains ^
De la feiicile leur monljre les chcmins.
JViais I'un dorl inutile au sein de la paresse ^
L'autre boit de Venus la coupe encbanteresse :
J^e la soif des grandeurs cet autre est dc-vore ,
Ou sCrche aupri^s de Tot dont il est altc're.
Grand Dieu , pi're du jour et mai;re da tonnerre ,
Du crime el de I'erreur daigne purgc^r la terre,
AiTraucliis la raison du j';n.g dc ses I Trans ,
Parie , laisse eutrcyoir aur la'-'iieLs ignora;is
Hy mn t de Clen nthe. 4.3
Dcs ^terneres lois le plan s.^ge et sublime.
Puisse a'ors cle aoi coenri; le concert uuanime
Te rend re un pur hommage t'g;ii a tes bienfailS ,
El {ligne enlin de toi , s'il peul I'etre jamais.
Ame de Tunivers , Dieu , par qui tout respire ,
Qu'a celc'brer ton noni le monde entier conspire ;
Que la terre a I'envi s'unisse avec les cicux :
C\kt it devoir de riiumme 9t le bonheur des Dieui.
Note.
Zcnon , aiiteiir de la secte des Stoicieiis, eiil pour
siiccesseur dans son ecole , Cieantlie qui se rendit
celebie par ses pot''sies philosopliiqucs. Clement d'A-
lexandrie nous en a conserve un fragirent precieux
s;.ir le Bien ou Bon, ef Stobee, Ectog. Phys. , I'lij^Tine
cju'on vient dc3 lire. II est plein de I'orce et d'eleva-
tion , et on en peut difficilement rendie \es expres-
sions heureuses , prises dans la langue de I'imft-
ginalion , celle des Grecs. Nous avons sous les vxn'X
deux aulres traductions de ce bei liynine ; la pre-
miere, en latin , de Jacob Duport ^ habile lieMenisle
d'Anglelcrre ; et la >econde ^ en italieu y de Jerome
Pompei, noble Veronois. Ce!le-cin'"cst qu'uce para-
phrase ; et quoique I'aulre soit plus lillJ'rale , ell«
manque encore de precision. Ala verite , Boujrainville
lie s'ecarte pas absolument du texte; mais toujours
foible et inexact , il n'en offre que I'Dmbre. D'ailleurs
il n'a rien entendu au principe igne j et a cefle raison
cu loi universelle du systeme stoicieu . sur latjuello
le judicic'ux Musheiiri ne s'est pas Irompe ; voyez
fa savunte note concemant un passage de eel hyiiiiiej
414 Pocsie.
In Cudjvortli. syst. datell. T, l^p. 664. A^ anl do
traduire de semblaliles }.ieccs , il Taut se pcnoirei*
des idecs de leur auteur, approfoiidir Ics do,'!i;ii,es
de leur secie, el c'tst inali eureusem.-nt ce que Bou-
gainville e\. beaucoup d'autres, avaut et apres lui,
n'ont pas fait. II resuhe de la , qu'en lisanl sa fra-
duction , on seroit porte a I'atlriijuer plutot a u:i plii-
losophep'atonicien, qu'au second maitreduporti'jue ,
si le nom de Cleantlie ne se Iroiivoit pas au titre.
Malgre ces observ^alions , on ne peut qu'applaudir
aux efforts de Bougainville^ et y reconnoitie son
talent pour la poesie. Des Tape d? 25 aus , il avoit
compose une Iragedie sor la mort de Pii lippe , pere
d' Alexandre. De beaux vers qui en out efe pu: lies ,
font regrettor que tout I'ouvrage n'alt pas ]?aru. 11
n'auroit pas ete vraisemblablement condamne a Pou ] Ji,
si une mort premaluree n'eut pas enleve aiix leltres,
a I'amitie et a la vertu , cetestima})le ecrivain , dans
sa quarante-unieme annee, le 21 juin 1763. Voy.
son eloge par le Beau , son ancien maiire , et sou
successeur dans la place de secreiaire de rA> ad i;;ie
des Inscriptions et Belles - Lettres , torn. XXXI 5
pag. 374. S. C.
NOUYELLES LITTER AlilES.
J-^ ou s ap]:>renons par une letlre de Constantinople,
que les naturali.stes francais, Bruguiere et Olivier,
soEt partis de cette ville a la fin de septembre der-^
Nouvelles Vitlernires. 41 5
Tiiov , avec les fn-mans necossalres pour Icur surete
et pour faciliter leurs rCcherclies.
Outre ces voyageurs , il existe encore dans le
Lv^vanl uu artiste inlinimeiit pr^cieux par ses con-
noissauces sur les monumeus rle Ja Grece et des
pays voisins , le citojen Fauvel : sa passion pour
les arts et pour I'antiquite lui a fait ii\er sa resi-
dence a Atl-enes ; il faut csperer que le comil6
d'iustruction prendra des mojens pour rend're scs
travaux utiles a la R6publique.
Lycee des Arts.
Seance pubtique dtu 20 pralriaL.
II y avoit long - temps que le Lvc'e des Arts
ii'avoit eu de sea'ice puLlique , & cau^e des r J- pa-
rations faites a la sallc.
La seance du 20 prairial a attire un graad nombre
de spectateurs.
D'apres le rapport des citovens Maimer e et Lu-
nel , on a decerne une inedaille au citoven Gar-
deur , pour des ardoises artificieiles ^ fabriquc'es
au mojen d'uneespece de feutre compose des
parties filamenteuses de plusieurs plantes, telles que
le TournesoL _, la Grande Ortie et autr> s , con-
solid^ par dumacbefer pile et d'autres ra::tieres em-
ployees dans la compositon ordinaire des cimens;
cnfin, lie et rendu impt'metrable a I'eau , au moyeii
d'une buile siccative qui aclie.e de lui donuer la
consistance n^cessaire pour etre employd comme
les ardoises ordinaires. Cette composition forme
^i5 Nouvflles littn-rAvfS.
line loiinrc tros - Ic'gcre , e^ Fartiste a. fourm (le«
tcliajitillons de diverses pariios A'auvent , ainsi que
de decorations exterieures d' edifices , qui, n'avaiit
encore pour preiiueie base que de la mati^Te de
vieux cartons pU6. , ii'ont souffert aucune aUera-
ticn sensible depirs vin^.t anne^s. Une poriion de
Faiivent qui est a Teulree i\n Lycee des Arts, est
couverte avec ces nouvelles ardoises ariilicielles ;
et, lualgre la riguenr de I'liivcr dernier, malgre
GuVUcs n'aicnt encore pour base que du c^rtonj
pUe, le degel, les pluies et la grande ardeur du
soleil u'j out produit aucune allevalion sensible.
Le citoyen Dillon a lu un vappcrl sur les trav. ux
du citoven Touroude , ariiste mecaiicien , ci-de-
Tanl facteuv de piano, et dont le genie s\st povte
tout a coup vers les besoins urgens de la Rcpu-
blique : il a construit plusicurs forcries dc canons;
jl a imag-ne une macbine a tourner les loiu- lions;
t'lilin un r.owP'Cflw. soujiet de forge dc canipagnc,
fait en bois , qui ne pent pas etre alK're par les
iBJures de I'air, et pour lequel il ne faul que la
di-^ieu^e partie de la peau qui est employee dans
l.-s soumels ovdinaires. 'J'ous ces perfecbonnemens
ne prescntenl que des applications beureuses de
jnovens d(^ja connus; mais iis prouvent le zeie.au-
taut que rinlelligence de barliste. Le Lj cee lui a
aussi donne une medaille.
Le citoyen Lefebvre, agent g6i6ral de la ci-devant
soci^^tci d'agriculture , a lu uu M6moire inleressant ,
sur ia culture de rolivier.
Le
JS'ouvelles litter ail fs. 417
Le sec'/'lalio a exprlmL* les rc-nels du L"C(5e sur
la perte clu citoyen Dassault.
On a accordo la mention honorable a une shn-
plificilion d'avanl-train ])0!i:- les c ariots rl,' I'ar-
mee, par le ciloy n SchniU/i y ouvrier c arron,
Sur le ra]:>port du cito.en Desaudray, luie me-i
dniilc a ete deceriiee au citnjeji ParmeiitLer {i)
ouvrier toi:rnrur en ivoire et en os, pour des, rou~
ieaux cannelcs qui suppl/ent parfeiterfient a -eax
en acier et en ciiivre, employ(^s si disppiidieusement
dans les filatures de cotorj a I'ang'aise.
Uue autre a ete donnee an ciXo-^ew .Juhert ( 2) , ser-
rarier, pour diiferen-es serrures de suret ', f^rniettn-esa
bascules et auties ouvrnges dc'lleais de serruren'e
dan- lesquels le genie inv-cntif esl ac ompagne da
I'eecution la plus parfaite ^.\ du poli le pius b?au
de TaciiT. Le rapport a eie iait par Ics citojens Trou-
ville el Du : as.
Lecitoyen Beauvllet, sculptenr, a fait l^o-^^mage
au Lycee des Arts d'une statue de la lijjertt'. On
irrvlte les amaleurs a venir la voir.
Le secretaire a annon e Pouvertur,^ des seances
do la societ:'' nationale d'a. rculture, commerce et
manufaclure, ^tailie au L; c^e des A.rts.
Sur le rappor: du citoy. n Da en, uue couronna
a ete decc-rnee au cilf)ven OLU'ier^ manufacturier ,
faulourg Antoine, rue de la Roqu tt«,poursa fa-
(i) Le citoyen Piirmrntler dompurorue dc ]a Tixeranderle,
cliez le ciloycn Foiilaine, meroii^r.
{2) Le citoye.i Auhert. demeure rue des Lombards.
ToniQ 11. D d
4iS Kouvellas llilhmres.
brication impoiianle cL; niLniurn on tnine orange ^
indiisliie prccieuse qu'il a enlevdC aux Ani;lais , et
(ju'il a iondee avec une in cll^enre et ties delails
de peiTeclion diiznrs dj la plus sL!ieii>.e attention.
lid seance a el6 Jeimlni e pur un. concert dans
1 cpiel les jeunes artistes Laiioml el BonClier ont
execute de la maniere la plus saiislaisante un con-
ceito de violon de Vio li ; il a ete termine par des
conp'ets snr la mort du rcjjit'seniant Feroud, clian-
Xds par le citoyen Clienard, avec cetle i'acilils qui
caracterise le viai ialent.
Les sr]e'n:~es et les arts out perdu , le 14 prairial ,
im de 'eurs amis les plus cliers , dans la personne
du citoyen Daiiibourney , raort a sa maison de cam-
pagne d'Oissel , oii il s'Ltoit retire depuis plusieurs
annees.
Tout le nionde sait et pent apprecier avec quel
zele infatigable et guide par les seules hunieres d'un
genie fait pour inventer et perfectionner , il tira une
science du neant^ reduisit a des print ipes fixes les
proc^des pen surs de Part du teintiu-ier , interrogea la
iia!ure, Ti.it a conlributiou tons les vegetaux qu'elle
nourrit , les- tbrra de se dt5pouiller de leurs parlies
colorantes , el , par des combinaisons sans nombre, de-
cupla celui ties couleurs les plus usitees dans nos
manufactures d'eloITes e:i lain.'. La reconnoissance
pui^liquen'oublierapas ceque nous devonsases soins,
pour la culture de la garance en pariicuiier ,et pour
tant d'autres innovations utiles qu'il seroit Irop long
d'cnumercT. Artiste savant ct litterateur , il juignoit
Koiivt'U'i littirahfu 419
a ces avantages reujoueinent et raniabilit:!' qui e;i
doublent encore le pri^ ; les ;irti et •l(?s liunmies
iravoient point de nieilleiir ami.
Le cabinet du Stalbouder est arrive en griiule
paitie do la Hollande ; i5o caiss s out et ■ p')riees
an mns6um d'Histoire natiiielle , et on en a le:.d en-
core un grand nombre. Toute la zoologie i\ ('ij l ree
des caisses, elL^ est exposje dans I'amplrib ..Ire :
on y remarque tons ces aniniauK si bien dt'-criis par
Bodaert , Alkcmand, Camper et Vosmaer; plusieurs
de ceux apportcs de I'fnde et figures dans les i;rands
Ouvrages de Seba , de Martyn , etc. Oa y \ oit nii
squelette de rhinoceros, deux peanv et un sjueletle
de giraffe, un squeletle de sin^^e sansqu. ne, inronnu,
un singe satvre , et une foule de mamniifercs no:i-
veaux qui sfront bienlot connus 1 ar les soiiis du
savant et infali^.able proiesseur GeofTroj. L'oruitlic-
logie est cgalemeut fres-precieuse ; les oiseaux sont
enfermes dans des cages particulieres ou sous des b 0-
caux , et sont en grand nombre; mciis la quanlite
d'insec'tes pris au Cap , a Batavia a Suriua;n, est
prodi;:ieuse ; ce sont ceux qui out servi auv grands
ouvra.es de Merian , de Cramer el de Sepj). 0:i
voit aussi nn nombre considerable de bo a'ux ren-
fermant des iimj^hibies, lelrap des o.i s^n-pe ns : le
savant Lacepede j trouvera des matc'riaux po r u'l
supplement a son ouvrage. La quanlite d'oeufs, da
peaux et d'oi.j. ts ace 'Ssoires est considerable. La mi-
neralogie i^-e^t pas ciicore debad-J^.^
D d 2
LIVRES DIVERS.
A S T R O N O M I E.
AiyTPONOMisciiES Jalirbuck fur das Jalir i'-/(^i*
— ALMANACHaslroiioniiqiie pour /'aiuiee 1797, par
J. E. Bode. Berlin , 1794, 8.« , s52 p.
IIlSTOIRE NATURELLE.
BOTANIQUE.
IcoNES plantarum sponte ncsccntium in rcgnis
Danlcc el Noivcgicc j el la ducatlbus Slesvici ,
JloUaticE et Oldenburgij ad U lust rand a in opus
de iUdem plantls ^ reglo jussi.i exaranduin ^
florcc nomine inscriptum y edUce ii Mabthsio
Vabl j pi'Oj, regio. Volum. VT , conti-
nens Jasclculos XFJ, XVII, XVJU,sevL
tabulas DCCCCI-MLXXX, in-folio , 1792.
— Figures des plantes qui croissent spoiila-
nement dans )es royaumes de Dai:iejijarck et de
JSfo'werge , etc. , ouvrage fait par ordre du roi, et
public pai- Martin V/sHI. , professeur royal, pour
JCiiire suite a la Flore danoise, conteuant les fasci-
cules XVI-XVIII , c'v st-a-dirc , de la plaiiche
DCCCCI a celle MLXXX , in-folio, 1792.
Tout le T-nonde connoit le iDagnifique ouvrage des
profess; urs Oedcr el Muller. Les fascicules que nous
aiinonronsen sont 1) conlinuaticn , e! le merite du
p^oie.-seiir Val.l est un snr ^.arant que cette bel e
enirej.rise ne degf'nerera pas.
^EVES Magax:in f'ur dic botanik in i/irem
IJvre<i divers. 421
ganxien umfange herausgegcberi j von J. J.
RcEMER y ersicr band _, 336 s. , i"}'-)^ , t"-" —
NonvEAU Maoastn botanique , daus lout" son
^teiidue , r^'d-g ' par J. J. Romer , premiero
panic, lie 335 pa.es, 1794 , 8.°
Cet ouvrage est absoluinent dans le meme genre
que celiii du professeur Usteri, que nous avons an-
nonce , tome II , p. 286.
Mais ce champ ne se peiU. tellement moissontiev ,
•Que Ton xx'y trouve encor ^uelv^ue chose a glnaer.
Les articles les plus curienx , contenus dans ce au-
m^ro, sent un supple;!ient a la Flore aliemande , par
M. BoRKHAUSEN J — un fragment d'line disposiiioii
systemaiique des ver^taux , par Jos. Gaertner ;
— un esSfii d'une melhode des cbampignons , par
C. H. Persoon ; — quelques descriptions de planies,
tirees ales manuscrits de Gaertnep. j des observaiions
botaniques du professeur Nocca 5 — fragmens biblio-
grapbiques pour la connoissance de la lilt^-aliire
bolanique anglaise , francaise et ilalienne , dans
Panntk^ preredenie, par le redacleur ; — oi:ser\'alIons
failes par le professeur Vahl, pendant ses voyviges
dans les parties septetilrioniles de la Norwege : les
pi ncbes sont tres-bien exccutees.
AusTVAHL scoehner uad scJtener geuwckse , ais
eine for1setz:>ung der Ainerikanischen gs^
U'crchse. Erstcs hundert ^tab. t-5o_, 1795, 8.''
— Choik des plus belles plantes d'Ameritpje , pi-e-
niicie ceuturie, plancbe i-So, 1795, 8.°
422 L'wrea divers ^
I/auUm a rlioisl ]cs pins rares , et les a copiees
d'cipres les iiieilleurs originaux.
Tb^ite de-s planlcs les nioins fnquenfes , qui
croLssent fuiiurellcmcnt. dans les cnvLrons des
i^illcs dc Cufid , d'Alost , de Temionde et
Bru:rcl!cs J rapportees sous les ddnonilnallons
des .-node rues et des ancieiis ^ et arrangees sui-
uanlle sysicine de LLnneus : auec une expU-
cation des tcrnies de la nomenclature botani-
qi^c , les no ins -rancais etjlaniands de chaque
planle y les lieux posltlf^ oil elles croissent'j et
des observations sur leurs usages dans la me-
decine y dans les aiiniens , dans les arts et
niitiers ; par M. Roucfl. A Braxelles , chez
L'jPiairo ^ iniprimeur-libraire , rue de I'lmpera-
trice ; et a Paris, chez MM. Bossaage et compagnle,
1794, 8.% 118 pages.
L'academie des sciences'el belles-lettres a Bruxelles
])rop^)sn , ea ijS'], ceite question : « Quelles sont les
i> plamcs qui croissent spontaueraent dans les Pays-Bas
» autrlcliieiis, dont il n'a ele fail mention par aucun
» des auteurs, tant anciens que modernes , qui ont
» t'crit sur la Botanique desdites provinces ou des
» pays voisins >?. C'esl ce programme qui a engag^
M. Roucel k publier cette Flore. On j remarque
f rincipalement 27 especes , que les auteurs qu*il a
cousuliv's n'oni pas connues , ou qu'ils ont regardees
comn'c eiiaugeres. II seroit adesirerque les amateurs
de la Bolanique composassent ainsi des Flores parti-
culiei-es des cantons qu'ils habilent. Ce seroit le vrai
moyen crnvoir un systcmo n^'-in'ra! y.]n^ complot.
L'ouvrage de M. Roiicel est ni rc'il' d\m dictionnair.i
des iermes t.-chni'Mies, et t r riiu' pir deux tHbU-'S,
I'une Ifitino, rcuiliv flaniande , des jzenres et des es-
pece^. Mais il y manque (ef;ui rent rcdre un otir^_^
vraie de celt.- ualuiv, rtil- lOur les co iimeu ans ,
line table syslemati lue qui imisse faiie ais;'m;iit
Irouver le genre , en u'orrrant que son caract>ie
esscniiel.
Vdkasttjt. e!c. c a. r!. Essai: rl'un (raitc l ti-
me ntaire de Botanique^ tradu it ea f/anoLS,
sur raiUioii allemande ^ ei enrlchi d' observa-
tions et d'une notice concemant rUcstoirc Uttd-
raire de ceite science en, Danemarck ; par
Henri Stfifexs. A Copenhaguo , chez Bu h,
1794, in-o°. de 400 pn-fs, avec ^rav.
Nous n'orfi-ironsanos lecleursque Tesqulsse de V^U-
toire litteraiie de la Eolanique en Daiicniavck ^
enonc.ee sous ce titre.
Le premier ecrivain danois qui ail rcnl sur la
botanique, est Henri Smith , bour?.iiemestre et pre-
]H)S('' auK poids publics a Malmoe, a'lebre dans sort
temps par scs connuissances empyriques en medecine
et en holani(;ue. Scs ouvrages publies depuis i52o
jusquVn 1527, ne s.)ut guere qu^^le compilation
sterile. II y'parle d^ni certain Clas (on Nicolas)
Vrne^(\\\\ des-lors avoit plants un javdin l^otanique
a Schonem. — Au commencement du dix-s-plieme
siecle( ir)02-ir,39), un nomni^ Votmiz:er, pvopa-
tlement allemand de nation, publia ?i Co]ienl'ague ,
D d 4
424 IJvrr^ d'vers.
nil recnell ds bolaniriue; et vers le meme lemps.
Christian IV accorda ini terrain pour la i iilture dcs
plantes exotiques, doiit ii confia rinspectioii a uii
professour de phvsi uc. 11 en cliargea iin autre de
vojager dans le pays, ct d'e>ainiiier les plaiites in-
digenes.— Olaus IJ Grniins se dislirajnia dans cette
carriere. 11 recueillit un c;jbinet d'liisioire itaturelle
Ires-nir eiix , dont nne <:rande partiese conserve encore
dans le Cabinet des Arts — Simon Paati^ appele
de Nostock a Copenna* u." en 1689, p >ur y cnseigner
la botanioiie, I'arsaloinie et la chiriirgie, passa pour
un des plus savaus botauistes de son temps. II a, le
premier, onvert uu cours de botanique, et faisoit
avee ses ele^es de freqnentes excursions a la cam-
pagne. II mourut en 1680 , age de 7^] ans ; niais
depuis long-temps ses forces ne lui pennettoient pas
de couiinuer ses travaux , et il fut reni})lace par Olaus
'Sorrichius. Celei-ci est autcur d'un discours de
cxperinieniis botanicls , qui prouve la vaste ^^f lidue
de se.s connoissanc; s. — - Peder KL/liing^ daiiQis, lui
snccecla, et ii n'etoit pas sans m:'^rite. — Les deux
Buchi^ald ^ VA-re et Ills, qui er.se.'<inoient la botj-
niqne an coinraenceraeDt de ce siecle, eiuient des
]]OiTimes foit ordinaiies. — Holm^ eleve de Luine ^
qvA pen de temps apres (u'il eut (^tr norame ]>ro-
fesseur d'economie , mourut en 1759 , et dont la perte
prc'inaturee fut nn mallieur reel pour ( ette science ,
est du moins , qu-nnt a la partie des plautes, prefe-
rable a Oeder , quoicuie celui-ci ait acf;nis nne repu-
lation raeritee par sa Flora danica. Get ouvrage^
a cte continue par Olton~J' redenc Muller^ ixUeimmd,
Livrcs divers. 4^.^
et on dcrn-cr liaii j-ar f^ahl , Tiin des plus illustres
bolanistes de nos jours. La botanique a, en gthieral ,
troiive dans ces derniers tt ms plus de protection et
d'encoiiragemeut , et elle a de:^ o ligations particu-
liere> a la societt3 d'Histoire naturelle, form('e en
1788 , par AbUdgaard. Sou elude est cependant
toujours n('<iliopo^ comme nVlant pa^ du nombre de
ceiles qui meuent le plus surement a la fortune.
Beaux-arts.
ISeues Museum fur ki'mstler und ■unsdleb-
liaher , keraasgcgcben i^Ofi Joh. George
MEL'SEL^erstes and z^uet/tes stiick — Nouveau
Museum pour les arts et pour les arlislPS , redig6
par George Meusel , premiere etseconde parties ,
Leipsic, 1794, 8.0
Chaque Iriuicstrr doit voir paroitre una partie de
cet inU-ressant recneil ; los deux que nous aniioncons,
renferment plusieurs articles tres-curieux pour
I'liistoire df sarts. Les prinrinaux sont uu traite sur
Tart de modeler en cire , j^ar M. Exgelschall ;
— sur Ic Christ et Is douze A:)oires de RapH'^el ;
— sur un tableau de Wouvermans, galerie de
Manneim ; — sur un paysage de Gera rd Laipessf,
dans la meine galerie ; — notice sur la vie et sur les
ouvrages de Gottfried Mathias Eichler , graveur
a Berne ; — ra.'porl de la bible avec I'ant que ;
— ca alugue alphab^lic.ue des artistes de Dresde ;
— sur quel([ues morccau.\ orJgiii:iux d'ALUERT
Pi'Riia, etc.
4^6 L'wrc.5 divers.
ECONOMIE POLITIQUE,
Xe commerce ct le gonvcrnenicnt , conslda'ej
rclatweineiit fun db Cautre. Ouvrage elenieii'
taire , par Cabbe de Condillac , de L\icade-
fiUc francaise ., et tncnibre de la socieLe royaLc
cPagricuUure d'' Orleans- Prix 12 U(;.j et fianc
t^e poet i3 Uvrcs 10 s. Nou telle euttion,
A Paris, clez Lelellier , rue Haufe - Fciiiiie ,
W.° 34 , ( t Mara an y lihraire, rue du Ciuictirre-
Andre-des-Arcs , nii troisieme ( 1796 ).
Cet ouvragp est trop connii pour que nons en.
cfonnioiis uiie analyse exacle. Nous nous contenle-
rons de rappelcr q I'il est divise on trols parties.
J>ans la pre nirro , Tauteur donne sur le commerce
«v^s notions elt-menlaires', qu^il determine d'apres des
siTppositions , el dcveloppe les principes de la science
t^conomfque. Dans la deuxicme^il fait craut res su-)-
positions pour juger de I'influence que le commerce
el le gouvemenient peuvent avoir i'un snr Paulre.
I^ans la troisieme, il les considere tons di^.wx d'apres
les fciits, ofin de s'appuyer sur rexperience , aulant
que sur le raisonna.reut.
On doit sav'oir g e anx libraires de s'aUacher a la
ri^impression de pareils ^-crits qui peuveiit donner
des notions utiles dans un moment ou Fon songe
serieihsement a recomposer I'ordre social. Nous ne
decidons pas entre les ^conomistes et leurs adver-
^iires ; mals nous croyons I'ouvrage de Condillac
digne d'appeler toute ratlentiou du legislateur et
de rhominc d'etat.
Livifi divers. 427
E C O N O M I E D O M E S T I Q U E.
De panis nuiltifarici matena. — Mollrro pronre
a fairedu pain ck* divcrses sortcs, luir Ciiarlks
CHRisTrANFLEiscHi-.R, cU: MailH^boiug , conseil-
ler-medecin, 1793, iii-4.^' , Wertomberg.
Ce rfest pas ici line eniimeralion simple , arulc et
seclie , des yegc^tauN: iu'ces<aires et propres a la paiu-
fication : Ton y trouve iion seuleraent leur I istone
naturelle, iTinls bien cncori I'analvse de leuvs pi 111-
cipes pliysicpies et mrdicinaux, la qual'.te de cliaque
espece de pain, avec des vemart[ues infliiiment inte-
ressanles. II y est d'abord question des nrain.s ce-
reales ordinaires ; ensemble des plantesqui donn^nt
des seraences parasites qui se melent avec les fromen-
tacees , et qui cependant ne sont pas nuisibles ^ la
sant^ ; viennent ensuitcles aiitres plantes distnbuc'es
par classes ; savoir , les semences d^ bcauconp
de graminees , divers?s sorles de noix , de baies
farineuses , de fruits legnniineux , les glands^ les
graincs huileuscs , les racines tuberensci , el la nio. lie
sechee de cerlains fruits.
M o 11' A L E.
Instruct TON stlrecs de I'e.xempte des animaux,
SLir les devoirs de ici jeunessc , d i'usagc des
6coies priniaires ; ouvrage auUiiit uttiequ'a-
musaiit, nouu. edit, revue , corrl^ee el auQ-
mentee , a.wec celte rpigraphe ; Vade ad for-
nicamo piger jconsidera uUis ejus. Prov. iu-i6 ,
42 S Livres divers.
194 p. Paris , chez Maradan, rue du Cimetiere-
Andre-des-Arcs , N". 9 , an troisieme.
La premiere edition de ce petit ouvrage a el^
enlevee rapidejnent , et il nous a paru meriter ce
prompt dei)i! , par le clioix des exernples que I'au-
teur cmpioic, et par la maniere de les prv'^senter.
Sermons sur le prLx des clioses Les plus inipor^
tq^nies de ce mon.de , traduits de L\iUemand
de M» ZoLLiJWFEii , pas tear de fegUse rc^
Jormee de Leup suck ^ par 31. de LafeauXj 2 vol.
grand in-S". A Lausanne , cbez J. P. Heubach
et conipagnie.
Ces sermons, au nombre de vingt , roulent snr
la solitude , la vie fhampetre , le prix de la sanfe 5
des peines et des adversites, des luniieres parmi les
liomnies , de la vie active , du boniieur domestique ,
de la vie sociale, de I'amiti^ , de la science, du
commerce , des ricliesses, de I'iinportance du corns
de la vie liumaine sur la terre , de la s6nsibilite ,
des plaisirs des sens, des plaisirs spirituels, desbon-
neurs , de la vertu , et sur la maniere d'apprecier
les Glioses du monde.
Chorographie.
Itineratre dii pays de Vaud , dci goiwer'-
nenient d^'ALjle et du comte de NeufclidteL et
VaUengin. Benie , chez la nouvelle Societe ty-
pographique , 17945 in-8". , J 16 pages.
M. Derdiout Yan Barclieai a doun^ , en 1790, im
Lwrfs diver f. 429
Illneraire de la valk'e de Chaumouu! , d'ane partie
da has Valais ct des moiit;:gnes voislnes. II a cu du
siK ces, et on a siiivi pour celui-ci le meme plon. L'ati-
teiir donne dans ciiaque arlicle des indications sur
la lo})o;^irapliie , le commerce , i'histoire nalurelle et
les moiiumcnsde cliaque canton : c'est un ^uide aussi
sur qu'agreable.
ARCRyEOGR
A P H I E.
'All' excellent.""'" architetto Lf.oneDufourny
sopra uti'antica JiguiL/ia ^ leitera rt't Antomo
GuATTA.vi roniano assessors delie antlchitct
ant'uj uarlo dl S. M. Lire di Fotonia. — Leftre
d'ANToir^E GuATTAM, antiqiiaire dii roi f!e Po-
lopne 5 a ['excellent archifecte Dufourny , sur \\\\
vas? antique de lerre, 1792, in-j.'. , 21 pages,
avec une plane!. e.
Ce vase appartenoit a rer.vovc de France a Naples;
il a c''t('^ trouvv dans la Si ile , et II poiie de ces fi ures
perpcndiculaires et sveltes auxquclks on donne le
nom d't'trusques ou plutot de grccques ancicnnes.
Ces figures sont an nombre de trois; les deux ante-
iiuires qui font principal ment I'objet de cctle disser-
tation sont en regard, l*une vetue d'une longuerobe ,
la tete couverle d*i.n casque, la lance a la main,
et ajnnt nn bouclier orne d'une couronne de laurier,
tient a la aiain droite un vase j^lat dans lequel une figure
de feaime ailce, roetFec d'une espece de diademe
de plumes , et tenant de ia main gaucli^ un caducec,
verse une liqueur. M. Guatlani discule savair.ment
les attrii5uts de chaque figure , ct il ^tablit , par diflc-
43o Livres divers.
reus rapprocliemens , que la fij',ure arnide esl M'nerve
vfctorieiis ^ , a laquelle le genie de quelque cit6 puis-
saiile de l-i Sirile , verse de I'eau pour laver le sang
doiit ses mains sont teintcs , apres liii avoir procure
line n)('morc;bIe vlcloire. Le lieu ou le vase a
a ('\& trouv6 , son siyle^, le sujet et le culte que les
SvracusaiiisiendoientpliisparticuiiereinentaMinerve,
lui font conjecturer que la vicloire dont il esr ici
question, est celle reinportce avec le secours de la
deesse par les S^'racusaius , centre les cliefs des Athe-
iiiens , Nirias, Alcibiade et Lamacus. Si les preuves
de M' Guatlani ue sont jias ceriain?s, elles sont
du moins ingeuieuses. L'ariisie auqnel cette disser-
tation est adressee , est francai^, c'est le citojen Du-
for.rnv , arrive depuis peu de Rome avec une foule
d'objets precieux pour l''.istoir3 des arts. Iljav^cu
long-temps, et il y a meme laisse des monuraens,
entr'autres I'Ecole et Le Jardin botanlque de Pcu'
lernie , dovit M. Guattani dit que I'on pourra fairo
dater le r<^tablisse:nent de I'ancien stjle dorLco-
grec , perdu depuis tant de siecles. La dissertation
est terminee par une plauche qui represente le vase
de demi-grandeur, et les figures de grandeur na-
turelle 5 et quelques m^dailles de Si He, necessaires
a l'e>:pli cation.
La troisienie figure , plar^e sur le derriere du vase,
enveioppec dans son mauteau , ress>?mble a c:s figures
sans nombre qui so reiicoutrent ordinairement der-
riere le sujet princ'pal p'.^int snr les vases grecs
applies elra^ques. Qi:e ce solt le proprii'taire ou
Parllste , c'es! cj cpi'on peu! pr.'su.mer , mais ces figures
^ I.ivrcs d'.fcys. 4^1
n'ont enrove cle expliquees nulle part, crune ma-
nicre salisfaisaiite.
Voyages.
Travels through, north and south Carolina^ c/.r-
— Voyages dans la Caroline sejjlentrlonale tt
ineridlona'e, la Geor^ie , la Fiords orientale (*
occidentale , le p^ys dcs Iroquois, le terriloi. c
eteudu des Muscogulges on de la cor.federatlon
dcs Creeks, dans la contr(5o des Cliadaws , contp-
nant iin expose du sol et des productions de ccs
regions , avec des observations sur les niceurs
des Indiens, et des planches en taille douce ; i^ar
GuiLLAUME Bartkam ', 8.« , de 020 i^ges. A
Londres J chez J. Johnson , 1^95.
Ces Voyages ont ete publi's a Pliladelphie , en
179.) ; ils furent commences en 1778 , et n'ont ete
<icheves qu'en 1778. Le but de leur entreprise etoit
d'observer et de decouvrir les productions rares et
utiles de la nature dans les trois regnes. Barlram doil
elre avantageusemcnt connu desnaturalisles. Son p t*
a ^le c<^lebre parmi les botanistes ; el il a non seule-
j-nent profite de sl^s instructions , niais encore heritc
de son ardeur pour les reclierchcs d'objets naturels.
Anx d'jscriptionsdes diverses produciions de la nature
qn'il a rencontrees , il a soin d'ajonier un precis des
inoenrs,des coutumes,des usages et du goavftrnemenl
des prin ipales hordes de sauvages qui habiteal L'S
pays Uniilroplies des provinces nieridionales de*
432 Lhres divers.
Etats-Unis de PAmericrue ■^eptenfrionale. II regue^
dans tout cet ouvrage, une amtnite qui ne pent man-
qiier de plaire a tons les lecteurs. Bartram paroit n©
rieu rapporter_, qu'ii n'ait vii et exa r.in^ \m nie:iie,
Quatre sections divL^ent cos Voyages, et chaciin©
d'elles offre didtrens ciiapitr^^s. Elles ouvrenl par une
jjreface et une iniiodiittion. Dans la premiere section,
Bartram rend comple de son vojaie de Philadelphie,
et de tons les endroiis qu'il a parnonrus dans I'Ame-
rique seplenlrioriaie. La seconde section conlieit ses
excnrsions dans l'e5t de la Floride, et la descrij»tion
des etablissemens indie^is snr les deirieres de cette
province. Cetie partie est !a rlus considerable et la
plus interessanie. La troisieme ren'erme le voyage
cliez les Iroqnois,les Greeks snpc'rieurset les Cbactaws,
en remontant le fleuve du \'ississipi, le midi de la
Georgia, et en res enantaPliiladelpiiie. Laquatrietne
section comprend un precis des usages, 'des moeurs,
des coutumes et du goaveniemeiit de ces dilferens
peuples.
LiLLERATURE.
IBiBLiOTHECA CLASSIC J _, sLuc LexLcon nianuale ^
quo noniina propria pleraq ue _, a pud scrcptores
grcecos et roinanos inaorlme classLcos obuia y
iUustranUir. Deventer 1794 , in -8.'^
C'est la traduciion de I'ouvrage aiiglais de
Lempriere , mais corsidcTablement augmente et
ameliore.
le prix f'e I'abonnement , pour I'elranger, est,
fra. c d port :
d(- 9 ri dillers en or , |
df 36 hvres en es.^tcs, f pour I'ann^e.
de 20 floiins de Hollaude , J
de 5 rixdallers eji or , ]|
1 i. V I pour 6 mois, ou IZ
d 20 livres en esj).5ces , J. ^ '
de II florins d:' Holl nde , J
On s'abonne , pour la Suisse ,
a Basle , chez J. R. Preisvep.ch ;
a Berne , chez la SocietL- typographique.
Pour les Pajs-Bas et Liege, •
a Bruxclles , chez- Horgnietz.
Pour Ja Hollande,
a La Have , chez Van Cleef 5
a Lejde , chez Murray , freres ;
a Amsterdam, chez ChaxVglion.
Pour TAllemagne,
a Leipsick , chez Voss et Compagnie.
Pour le Nord _,
a Hambourg , chez Hoffmann.
Pour ritalie ,
a Livourne, chez Masi et Compagnie.
Pour iMnglet-erre ,
a Londres J chez Johnson 3 St. Paua Church Yard;
u'r
f
T AB L E
!Bes Articles conlenus dans ce NutnAro.
HyDROLOGIE. I NOUVELLES LlTTERi^IKEj. -
Connoissances /lydi ologiifUcs des] p'oyo^eurj natuialLtejfj 414
anciens , parGr.Td\concT,-z2)C\ Lvei'e des ^^its , 4^5
MiNERAl.ociB. ■Mortde'DdiVahontvxs.j J 418
iP^0Y0s.e dans Les Deux»Siciles , Cabinet du Siathoudcr a Paiis ^
yor Spallanzani , 3oi , ^icj
En'tomologis. I Litres diveri.
Rjpporl iur le Calendrier entn~\ Astrojvomie.
7>:ologiquc de M, Gibrua, 3ll Z ,-^.^o^t,A,t,onov,nsc}us Jar^
B o T / N I Q u >:. , i,,,,,y,,,
ISomenciaienr Hninmqm , pav -^ Botauique.
^°"^"-, ^^^'^ YsLh\,JconeiplantarumSiteci(X,
^natomieaciuK.i :rc,parm^n- j j_ Roej^er marazinjur'^d?^
AnATOMIL COMPAKl^E. _^V„e,-iA«„i;rcA<J« G^ivc^c/^.e 4'il
5»/ /c; i>an/7.T i/,/er.V,7r af^ o.- Roucel^ PlanUs dss eni>iron, c.s
scaux.parG.CnvMT, 33o Biuxelles, 421
bxATiSTlovE. H. Slaphtns, Tmi7t' t7t?mf«/. c'^
;^a;- Cooper, ^5b Eeaux-Arls.
BiOGRAPHlE. J Q Meusel, Bluseum Jiir
X^.^Lce snr Charles - Francois ^Uristh-r , 423
Jjhomond , mstitutew . par ^. . ,..
c T ' 36 ' i.conoraje /'oiidfiuc.
ArcHj^elooie. CoiidiJJac , ^t; Canut.eice et I0
Snr I'^iahlis semen Ufun Mushori <^'>" vemement, 4^6
des ^diitUjues, var Rabant ,( Ecouomie dcinostifino.
3(36 Pan is vmltijnua mate.ia, 427
LlTTI^^RATtTRiB PER^AKNJS. Morale.
udnticiiiites de la Perse j pa: Si!- Instructions tuees de VexempJe
vestreSacy, 373 dcs auimauxj ,^27
LlTTERATURE LAri?!E. Zoill Kofer, 6"<?77/:on.r , 420
jPoi'-/,.e .v.vr riigallt^ ,,par JA- Chocograrl.'if-.
rdmedeBosci, 382 ^^'''-'■^"^^"/'^r^ -3
I.ITTERATURE FrANCAISE.' ■ ArehiSog''
lLini--llleetFannj ynoutcUe. par -^^ Guatlani ^ j, , .; ///.■ .7/;< ca
lacil.J...., • :;-o Jg'dvia, 429
, P O ^ 6 I E. Voy-ges.
Xiz Priere wiifersef'le j traduits Bartraru^ Ttaicls) 481
</« Pope, />ar^ur]rot , 408 LiiUhalure.
Traduction de I' hyn'^ff^deC.lean- Blhliotheca classica j 483
//(*_, /j^? Bougal
M A G A Z I N
ENCYCLOPEDIQUE ,
o u
JOURNAL DES SCIENCES,
DES LETTRES et DES ARTS,
R E D I G E
Par M I L L I N , N 0 E L et W A R E N 5. Va
II u'y a presquc plus d'ouvrages pcriodlques qui
jeivent Jc depot aux inventions nouvcllcs el r.i
xetraceut I'liistoirc dc I'cspril liuniaiu ; rcux qui.
OBt cours sciiiblent , pour la plupart , eviter uvcc
;iffcctation tout cc qui pent aliiiicnier le gout, df »
sciejices ct r.ieme dc la mora.Ic. Seroit-il done indi*
{^nc ds la Convcntioa dc s'orcuper a reorgauiscr
cctic branchc dc I'instiuciioii nationalc ?
GRf.colKS , Rapport sur Us encoxiragcvinis , ruomper.ses tt
s;oni a ntcOrder aux Savans , in'ee iG.
< J E Journal , aiiquel la plupart cics iioinrjies qui out
WW iioin distingue, uue reputation justemcnt aajuise
(lausqueicine partie ties arts ou de.s sciences ^ lelsque ies
cilovens liir.xr'UE, Cabanis , Caillard , Ghemi:r ,
DaUBENTON', D£MLrE,DF.SFONTAINES, JJoLOiMIEL',
I^'ONTANRS , FoURCROY , HaUY , 1£eRMAN , LaCE-
PLDK , Lagrange, Laharpe,Lala.M)E^ Lamark,
L ANGLES, La PL A>CK , .LeBRUN, LeROY , i'HKRlTIER,
Mj:NTELLi£,MoaELLKT J ObERLI.V, SiCARD ,SjARr,
VoLNEYjete. etc. Gaiilribiieront , coutieudra TeAUait
iV-. nil. Tome IT.
1
8<?s pvlrtcipaux ouvrflges r.ationanx ; on s'altachera
sur- torn a en doniier une ciualjse exacle ,et a la falre ■
paroitre le plus prom])temciii possible apres leiir p'!- *
hlicatioK. On y donueia nne iiolice des meilleurs'|
(^ci'ils imprim6s cliez i . ,■
On 3'- ifisorcra les ni('nj(i.'res les plus int<^ressans
snr toutes les parties desarlset des sciences; on clioi-
Sira swr-tout ceux qui serciil proprus a en accelerer
\c& progres.
Oil J ]5iil)]Lera les deconverfes ingr^iienses, les inven-
tions utiles daii.s Ions !. - "; V reudra coniple «
des experiences uonve!! .niion et de Pou-
verture des Mnseuuis. Un _y (ioiiueva nn precis do ce
Cjiic les seances des societes litleraires auroiil oflert do
})!u> interessant , une drscription de ce que les depots
d'ohjets d'ai Is et des sciences reni'ernient de plus
cnr:ee.x.
Om y tronvera des notices sur la vie et les onvrnpjes
fles S.unns, des Lilterdleiirs el des Artistes distingi'es
d'vit on aura a r'^< '■'■'"■ -v '-'i perie , eiilin les nouvelles
iairiiiircs dc low!
Ce Journal sera oivipose desix volumes in-8°. par
an, df! 600 pnii^es cli.ui;i) , <■!: au inoins de 24 ^.'ravuves
en regard des ail ides f|!ii en exigei-ont. It paroilra
tous les quinze jours un nuuiero de 9 f'euilies.
Le prix de I'cibonneinent est a raison de 25 liv.
pour trois mois , iendu IVanc de port par toule la
llepublique.
On s': 1 -.^ -^ , pour rcbonnemeut , au Biirenn dn
Mfigf»/n'n E!;rvc!()j>ediqut , rue Horiore, IN". 94 ; el pour '
^es objeis relatiTs a la redaction jaux Rcdacteurs, rua -
<le Pro; - ''V'. ^\.
II fail! ..iMruiciur !.'s ^eltres et charger cclles qui
ot)ulieuiie«l des assicuats.
H E L M I N T 11 O I, O G I E.
Second Memoire sar L'orgaaLsalLon et Les rap-
ports des aniinauxci sang blanc _, dans ieqaei
orttraile de la structure des ^oli.usques et de
leur decision en ordre , tu h La societe d^liis-
toire tiatureUe de Fans y Le ii pralrial ^ aru
trolslbine ^ par G/CuriER^professeur d'llis-
toLre natureUe.
O E vous al preseiite , dans mon dernier meraoire,
des considtrations geiitrales sur I'ojgaiiisation et
les rapj.orts de tons les aniiiiaux a sang blanc, des-
qu?Uos il nous a paru resjlter qii'o i dsvoit en
faire six: classes, toutes distingiiecs par la co .for-
mation des organes da premier van? , des premiers
mobiles de la vie aniinale , du cotur et du cer-
veau.
II s''a;"jt aujourd'hui de descendre a la considd-
ration particuliere d'une de ces classes, et j'ai clioisi
celle que j'ai determinee sous 'e no n de nioilusques ,
comme la plus jDarfaite , et cependaut la moins
connue pariii celles oil les obscM'vatioiis anatomiques
sont possibles.
Nous sav^ons dcja que tons les moLLusques ont
un C'cenv musculaire , et uu systeme complet de
vaisse:iux , et qu'une partie de ces vaisseaiix Torment
un r6>eau expose a I'clement ambiant , ou , en uu
sen I mot , des branch les.
Tome 11. E e
434 Helm ill lliol o^ici
Ici , commc drais !;• 2-cr-le cb la nr.liirc; , celfc
rouformitt'' chins les organes primaircs, eii enfraiiic
line pnreills dans la inajoiile des aulrcs, el nous
ai.'ous cxposer a la suite de ci caraclere central tt
essentiel , uiie infinite d'aufres carac^eres qui ner
sont sans douto que des resuliats , des especes de
consequences plijsiologlques du premier , quoiqne
]eur di^pendance mutuelle ne nous paroissa pas
tonjoiu's sensible. Cestainslqus dans les mamnaiferes ,
du seal caraclere C\\\nQ gen'ralion reellement vivi-
pare _, on en c!edail unein'iniie d'aulres projirietes:
la lactation , la ijilocularite du c:rur, lacbaleurdu
S9.v.^ , les quaire pieds , I'exislence des levres , la
langue cliarnue , la naiiive des legumens , etc. etc.
Connoissez seulemcnt le caracttTa primairs &'un
elre , vous coanoissez de suita prcsque tons s3s ca-
racleres secondaires.
II y a cepejulsnt une observation imporlante a,
faire ; ell^ a et,' bion developpce pour la bolaniqiie,
par le citqyen Jussieu ; c'est que , a raesurc que les
caractercs bnisscnt d? raug , iLs diiniiiuent aussi de
Constance: aiiisi, da!:is les inammiferes , I'exislence
des p eds u'elant qu'un caactere serondalr.i , n'cst
a la verite j mais totaleraent en defaut , mais se
trouve ccpendant raasquee quelquefois , ronirre
dans les ailes des cliauve-souris , et les nageoiri^s
post/'iieures des pboques j on meme elie se trouve
d(^naturee dar.s I'usage, comme dans ies nageoir^s
pcct v)raies des cetact'es : rieu ne prouve raieux ponr-
lant la rigueur des lois auxqnelles la nature seml^le
assujelie, que ces especes de delours, si on ose paiier
Aniniatix a sang hlanc. 435
.'iinsi ; ricn 11c ri'n'|:(jchoit , ]^ni^qu'il fal!cit des
Jiapeoires iiux retr.ct'xs, de les fcrmer dr la ninnirve
la plus fiirple, par des osscU ts, comirie cellos des
poijs^ons. Cependant elle ii'a joint pr!s c lie \o\q ;
(•lie leura laisse de veritaMes bras, m iinis d'.uiM'rr.s,
jadius , cubitus, d'os du carire, de pi.alanges , etc.
die a rendu lout cela inutile a la prt'heibiou ef a
la iranlie , Ta er.\ elopjx' d'une seule ni ml rane
jiou decoupee 5 eii uu mot ; ellt* a fait uiie na-eoire
avec un 1 ras.
Vous vojez done qu'i! 3' a toujours une scrte de
Constance dans les c<-iracleres secondaires , malfir^
leur d(^'guiscmcnt ; les caractere.- teiiiaires, ou du
troisieme rang, en out bien moins : les po;l< , ] ar
excm])le , quoiqne oislant dans presque tous les
anan.inifcrics, manquent cependanl dansquelques-uns,
les cetactes, ou v sont en parte remp.Iaces j^ir des
t'pines ou des ecailles , comma dans les tatous y les
manis , les /i6rLssons , etc.
J'cspcre qu'on n.e pardonnera de commc nrcr par
une dicrcssion ; tons ks m^moires generaux quo
j'ai presc ntt's jnsqn'ici a la socii'te , ayant eu pour
oh'el ra]'plirat;on a la zcolojAie, du principe, aussi
fee ord (jue sur , de la subordination des raracteres ,
je } cnse cpie tout ce qui contribue a eclaircir ou
ii dcu.onlrer le principe, va direclcmcnt a raou
],:ut.
Rcvcnons a la structure de- niotlusqucs.
Art. I. ciLi niaiilcau.
La parlie de leur corj^s la pins app:u-ente ^
E e 2
436 Helnilntfiologie.
i'extci'Ieur , a (^4e nominee le manteau. II est com-
pose d'une double membrane , doiit l'interval!e est
rempli d'mi parenchjme plus ou I'noiiis lerrae ,
de vaisseau-: el d;i fibres musculairoS ; sa forme ,
ses altaclies diifereni bsaucoup , comme nous le
verrons ; mais il est toujours done d'uiie ssnsibilite
exquise _, et merae garni, dans plusieurs especes, d'or-
ganes parlJculiers deslinc^sau toucher.
L"^ manteau existe g^neralement dans tons les
molLLLnqiies que je connois, et je ne me rappells
j3oint d'en avoir obssrv6 dans d'autres classes. Nous
aurions done ici un car.'5ctere ext;'rieur , indicaleur
des primaires internes , comme les polls le sont
dans les quadrupedes , les plnraes dans lesoiseaux,
les Readies dans lespoissous, les enveloppes cornees
dans les insectes. — llapp?lez-vous ici , citoyens , c^
que je vous ai dit precederament snr i'imoortance
•de tons les carac teres pris des organes du toucher ,
et voj'ez comment des princip^sune fois bicn etabli- ,
donnent des conchusions sures et Inmineuses.
Gonsiderons le mantea i d'aborddans les bivalves,
ou il est presqne toujours mieux developpt^. Ily est
forme de deux grands lol;es, tonjours rrunis par le
dos. Tel est-il dans les huirres , ou sa bordure est
un muscle epais , j^iarni par-tont , et comme frang6
de tentacules \ dans les acardes et les monies , ori
sonexhvmite infcrieure seulement est garjn'c de
tenlacules 5 dans les bucardrs, les cames , c^tc. , ou
son extr^^'mii^ inf^'-ricure forme d.'ux anneaux ou
tules plus ou moins susceplibles d'alongament
qu'on a pris pour dts parti s*du corps rcem'j , mais
'Aiiiniaux a sang blanc. 437
qui ii'appartienneiit ccTtaiuenieiit qu'aii manfeau.
li'un tie ces tubes , contiuu au rectum , sert ri'anus ;
I'autre est une espcce de Irouipe pour aspir^r I'eau
ou I'air, lesftiire passer sur les hrancliies , et de la a
la bouche qui est a I'extrt'^miie ()j)posee de I'aninial.
Dans un grand iiombre de <c;!res, le manteau
n'est pas ouvert par-devaut, comine dans ceu:; que
nous venous dc cit;a-, mais ferme en tujuu , ct
ouvert seulement aux deux extrcuiifc's ; telssontles
teredo , pluSieurs p/ioLades , et je crois les salens ^
ou niauclies de coulcau.
Ou duit aussi regai'der !es ascldies et l^sbiphores
comjiie des moliusques dont le manteau. est ferme
par-dcvant. II est ouvert aux ^leux extremites dans
les blfjliores , et a une seulement dans !es ascidies,
Mais daus tons les a):inia;ix dont nous venous
de parler , le manteau est coUe entierement a la
tete , ou du moins a la partie qui peut porter ce nom ,
parce qu'elle conlient la bouc e , I'enveloppe comrae
un capucuon , et la rend immobile et incapable
de se monlrer au dehors.
G'est ce oaractere precis , et de la plus grande
imrortan e ' dans reconomie de I'animal , par la
fuiblesse et rimperlection qu'il lui donne , que j'ai
iidople pour former mon troisienie ordre , coamie
jioiis verrons plus bas.
Eaus !es aulres moLlusques ,ceux qui ont la !efe
libre et m.obile , le manteau exftite ^gnlement ,
quoi'Mi''ave,-. moins d'ainpleur et des formes dii!i--
lenlcs ; ainsi , dans les patelles il est ovale et rvXouvre.
tout le corps j dans les poicellaincs , il pent en SQ
Ke 3
^38 Heimitithoiogle.
repliant , envelopper la coquiile ; dans les tliely?^
il ne ivcoilvre que le dessus do la tet3 par-delei
laquelle il s'eleijd comme iin voile; dans'les lapljsies,
il vz\ tc ancre siir le dos et comme fendu presquo
jus ju'a la qume.
Dans K-s liina^ons, il est rogne de pres,€t forme
une cavile assea serr^e qui contient les branchies ;
ccU.3 cavite qui dans les liniar-ons serroit de pres
le§ branchies , est dans les seiclies d'une ampleur
^norme et regne jusqu'a re-iremite posterieure : car
la par lie (i 'on a nonirate jac dans les seiches , est
leur man. lean ; ce qu'on a noinm^ nageoires sont ses
lobes, et ce qu'on a nommc le dos est vraiment,
quant a la posiiion , analogue an p'pd du limaron ,
quoi.su'il i^e serve pas a marcher , p-irce que les
tentacules de la seiche lui sont plus commodes^;;*
pour cot effet ; le vtai dos est le devant du i-a: :
pent-; tie s'ctonnera-t-on que dans la marche de la
seich.e, ce que j'appelle le dos aille en avant;mais
j'observe que si , comme cet animal , nous marchions
snr Iv-S mains , et les pieds en I'air , ce seroit aussi
le dos qui iroit en avant.
Art. II. Des hranc/iles.
Si nous passons a la consideration des branchies
dci mullus sues , nous y trouverons egalement iden-
tile d.:; Conformation essentielle , el varicr6 infinie
de foriH' s exterieures.
De.ns les bivalves et les aJcZ/i/^j" , cesont quaire
feuilkls paralleles, semllables a ceux des poissous.
Les arlciioles et les venues pulmojiaires j formenl.
Anlniaux ci san.^ bltir.c. ^^
ties strles pamlleles eiitr'elles et perpcn:iiciilaiies
a la longueur des fcuiiiets. Ccs branclii.-s soiit situees
(los deux coit's , eiitre le corps c t le nuiiiteau , dn
la ir.eaibraue iut^^rne duqucl dies soiit desduplivd-
tures.
'Di\v,s les patdles , e'.Ies entoureiit aussi lecor;:s ;
mais ce soiit une iiiiiuite de petits fcuiliels Iriangu-
laires , Ibrmant une espece de cordon sur ki srrlkce
iiiferieure du maiiteau.
Les Limacoas les ont comme un plexus, a!laci:es
au\ y.ar^is d'une cavite partlculiere dans laqueile
I'elei.i'^'.it ambiant entre piir uue ouveiiuie elroite ,
s'ouvran; et se lennaiU alleniativement.
Dans les Lapiijsles ^ les brancliies sout des feuill.^ts
pliCv's dans la graiide echaucruro d\i maiileau , et
rerouvertes d'une piece cartilagineuse et mobile.
Les doris les out entleremeiit a djcouveri;, siir
I'extremile posterieure du maiiteau.
Nous uo connolssons pas bien celles d.^s thctU,
Je pense qu'e.les sont dans une cavite comme celles
des liii.acoiis.
Da.'.s les selckes , il y en a ^qxx^ paquets , iiu
de cliaque cote du corps ^ dans la cavi'.e du sac.
C-'tte revue grneraie nous apprciud que les
nioUusques ont tous leuu brancliies absolument
separees des autres vis.-er^s, soitqu'elles aicut una
cavite particuiicre , ou qu'elles soicnt lotaKnient a
decouvert.
Celte circonsfancc ne Lur est commune qu'avec
les cruslacees. Ell^ rappro.he ccs deux class: sil'ani-
jiiaux 5 des animaux a s^iiig rouge , en les dilleren-
1:04
440 HeLmintkotogle,
ciant des autres animaux a sang blanc , qui out fo;is
leursorgancsrespiraloires meles et cnlrelaces dans la
meme cavje avec ceiix de la digeslioii.
Art. III. Organes dec mouvement.
Les organcs du movvcment piogressiF de li
pliipart des inoliusques , coDsislent en un disqiie
iTiusculeux , ovcile , gUi^ineux , qui leur seit de pied ,
et doiit les moLivQjneiis ondulatoires produisent una
espece de rainpcnient. Tuns ceux de la fainilledes
Uniacons en sont doues. II eviste an»a dans la
plupart des bwatves :, souvent clles I'ont enrorebien
mieux organise, et propre a former des fils;carla
partie qui file dans les bucardes , les nioules , etc. ,
est veiitablement le pied , dont rtxlremJe , sil-
lonnee d'uiie goultieie, saisit une inalieiertsineuse
produite par des glandes ])ropres ^ et la tire en Icn^s
fils 5 par un procc'de semhlable a celui qui nous
founiit dcs fils mctalliqnes. Le pied man ne toia'e-
lement a quelques bivalves , et je crols que c'est
toujours a celles dont les valves sont ia(S;ales ; dii
nioii;s je ne connois p:r. encore de coqnille in^qui-
valve dont I'animal ait nn pied. Si ce fait est un
jour reronnn pour genenil, outre qu'il formera une
belle ioi zoologique , il confirmera ceriaities divisions
forniL-es sur les coquiiles seules.
On pourroit en iniagini.ji' une raiscn rlan?ib;e ;
c'est que les vai /es sunt inegnles daos "les espo es
qui doivent rrsfer au me.ne lieu, afin que I'une 1 j
maintienne par sonpoids, et qua i'aulre qui doit
seule s'ouvrir tt se^ former , toii \\wi faciieuieiif mobile
;, raiscn do sa likitrcte.
ax •-'
Anlinaux h sang bianc. 44T
Les bivalves cyliiidriques, a nianleau feniu j)ar
clevant , font s ;itir leur pied par uiie des exti\' miles
do leur co',;iiiilv^ ; il f:e leur sorl poi t a ramper ,
mais ssuleiiieiii as'eiifoncer d vis certalnes m:itler?s ,
ou a en soriir. C't'st le cas des soLens ^ des teredo _, etc.
C; tie parliculr.ritt'" fournini encuro c!esf;aract^resg<'-
Ileliques , crautaKt ]^liis beaux qu'ils seront en
rapport intimp avec les principaux traits des mueurs
des auimwux.
Le moiivcmciit progress:!" des seicliPS s'exuculc rar
des inojens Lien diiferens. Elles out autoiir do la
bouche des orga'ies niusculaires , en coaes alonges?
tres-raobiles , d'luic longueur et d'une grossc'ur de-
mesurees . garnjs j ar-!out ;!e sucoirs en forme do
venfonse. Cliaqiie parlie de cr-s organes , auxquels
on a ]ai.ssi" le t!o;n trop vague dii tentaciiles , pent
s'attacher fi\^ment , par le moyen de res suooirs , aux
corps eirangers , et I'aniinal s'ensert comme de pieds
et de nageoircs ; c'cst sur cette considv'Tation que
je separe les sciclie's des iitnacons , ct que j'en ferai
nil ordre a part 5 que je placerai le premier , a cause
de sa plus grancie pprfevlion.
Art. IV. Organes de la digestion.
Les differences dans les organes de la digeslion _,
soni ,coninie loulcsles autres , reparliesselon ccrtai ;es
lois.
D'abord,JMie Ironve d2 mandibulescornees d;uis
fiucun animal a let-:! im mobile. Comme i!s ws
peuvent se nouirii; que de Teau c^u'iis poriipci.t on
que les nets leur apporleii" , des mandibules kur
44^ Helniintkologte.
t?usi.enl c'!3 iautiles. Leur bouche est f^iife en sncrtii',
et ellc a an pi arjiix uiic valvule fort sciisiLIe dr.rrs
rin:i[rc.
Jc cTjis an rontraire que tons les molljsqiies a
tele iriobile ont cU^s mnchoiiv^s , soit en forme de
hec . comma 1 s .^tirl^es, soit d'arc denleJe , co me
les limacons , soit de courhe carlilagineuse, comtiio
Ics patel!es. Si co lait so tror.ve gejiojal , iioiis aiiroi^s
enrore li un strp, r:,o caiv.r}->re dlsiiuciif. Notre i^.ro-
jnier ordro so distinguait parsespieds iiombreux' des
deiix suivcU's. Le troisieme se distingiiera des deux
premiers , par i'absencc cei irandibuies.
Ties seiches^ dont !a houche a des armes si Icri-ibies-^
senourri,<^ei;t de cabps ,dVcrevisses , de cociuilL'iges.
Si leur bee bris3 ess animaiix , leur estomac est bi?n
confbrme pour l:^s brojer. C'esl un vrai gi^^zier sem-
blable a ce!ui des oisc'aux,et muni e;:alemeut d\ine
velouk'e prcscjue cartilapueuse. Pour rendre la
resseir.iyance plus co;rp!ete , ils ont en avant
d3 ce gcvjer un veritable jalot, on dilaSalion glau-
duleuse de I'a sopbage. Une Ibis le pvlore pass^ ,
j;ous {.'ouvons ia stiucUire des poissons ; je veux dire
ijiiC le canal intestinal revolt, pr€s de son origine ,
t;n grand ceecum glanduleux , comme ily en a tant
daijs bcaucoup dj ];oissous qu'on a supjiose rcmpiir
c:Iiez eux les foiiciions de j^ancrc'-as. Ces reunions
de caraciercs pris dans des cUisses si dirpiirales ,
clof.nent toiijours le nafuraliste.
Dans les autres mollusqnes , le canal intestinal est
genera.'ement plus simple. Cependant rhujire a un
sejoi.d csloiiiae , de forme coiiique et ride longitu-
Aninia.iLx a san'i^blanc. 44^
clinalcmer.f, qui a ^-( s olJice^ J'eiUrcc et tie soriij
a la me:nc3 exhenVite.
Le Ibie existe dans tens Irs m:)lIt5sqM?> , com-nc
nous Tavous VII (hns mon djnKcir inen:o:r?. Dans
\^s s3Lcltcs J il est sinipc, st';)arc (b I'i'Uer.Ji:! , et
y versc3 la bile par deux canauv. Dr.ns Is Uniacofis
et leurs analoguei , il est divisd en lub^s , eii'.re
les'uels ies inleslins ravnpeijt, et il vers^ sa liqirur
par nil canal unique. Dans les biwahcs , c\i:t unc
s.ulc; ir.asse dans riiUc'riLHir de !aquelie I'iutcslin fUit
ses circonvolntion-^ , le foie v verse sa liqueur par
nne inCihile de pores.
Le i;enve dQspatclles^ quoicpie d'ailli^urs riussem-
hlabk^ aux limarons , a nraiunoins le loie cl sis
caiiauv excreteurs comma ^ les bwaUcs ; or, ces
patellcs se rapprorlient aussi des bivalvjs par la
stri:ct;!ve de leurs braxi.ies, comme je Fai erpo-;*?
plus haul. Eappv lez-vous , je vous prie, ce qu- j'^i dit
dans men dernier memo're sur la c oexisli^nce conslante
du foie et des brancbies : vous n'eii screz que plus
frappi's Aw nouveau rapport q'^e nous dc'couvroas
ic: enlre ces deux orpan .v. C'c.,t ainii que la r»liy-
siolo. ie , I'ar.aioniieiel la zo.^do, ie . 'aideronl muSufl'-c-
ment , lors ru'ca Ijsctudira sous leurs vraio pcii:Uci.3
\ ne.
Je ne. liouv.^- poi.it de mm: n:6scii!ero duns la
plupait des n-o'lu?ques. Tl me siMVib'e que Ci:xi\s cenx
dont rintislin ranq:>e davs le foie , les veined rac-rae
du foi3 , portent le cJijle au cceur. Les ariimaux
a sa!ig blanc, n'auroijnl-iis ^a.; de vraij c/icuUi-
lion san£,uii:e ? Leur eocur seroii-ii siii^p'ciueiit une
444 Helnilnt/iologle.
sorte de cisterna c/iyti , qui transmettroil aux parties
le fluide Ijn phatique que lui auroieiit apporte les
vaissraux al^sori ans ? J'avoue que j'ai pense dcpuis
lonp-temps que le hiatus ^^norme qui est entre les
animaux a sang rouge et ceux a sang blauc , iiuli-
quoit dans la princii:)e de la vie; de ceux-ci , des
differences plus graiides que celles qui j sont appa-
rentes ; p;tr 1^ on expliqueroit la cou'enr hjanclie
de I^ur fluide noui ri:ier, c t rimpossibilite qi:'!! y ^
eu jnsqu'ici de ti'ouver I'oripine de la gia)\'e
circulation dans k^s liniacons et les blvahes..
Les vaisseaux puunonairos des liniacons , qui sont
ccrtainemcnt. tons vt-ineux , ne nous ^toni-croient plus^
puisqu'ils ns ?eroient, conuiie toutesles autres veines,
que des vaisseanx absorhans.
On concevrait Tusa.e du vaisseau dorsal des
inscctes et des vers , et son defiiut de branches. Co
seiolf un reservoir recevant le chyle iramediale-
ment des inles;ins, et dans lequel les vaist^eaux ab-
sorbans le pomporoient par leurs racines , beaucoiq?
irop delites pour efre apper.ni?s ; on cntreverroit k-s
raisons de la position extraordinaire du caiur de
beaucoup da bivalves, au milieu duquel traverse
le canal mtestinai. Si le coeur doit simplement rece-
voir le chyle, coinmentpouvoit-iletre lnicu^ place?
le cajsal intestinal rAi qu'a transsuder , ct le cceur sj
reniplit. Certes , cette cause Hnale seroit plus a.briis-
sible que de supposer , comme le font quelqnesaua-
tomistes , que fe coeur entoure l*inleslin pour kivo-
riser le niouvement perista'tifjue, conime si les {i]3res
tirculaires de r.nlestiii iiVlO'eat pas suilisruil.spouv
cela.
'Aiuinaux a sang hlanc. 44$
Enfin, la distance entre les animaux a sang blanc
qui ont un Cijpur et ceux qui en sont totalem nt de-
pourvus , scroit diininuee ; ce Si3ruil un saut de moins
enlre les families nalurelles.
L'id.^e que je viens de developper est peut-etre
t^m/raire ; aiais ie nevous U donne quccotnin:' une
liypolhese. Ne pardonneriez-voiis pas a un homins
occu!)e de rjcliei\hes souvent peniljles et rebutantes ,
de se reposer quelqucfois pas des reves ?
Un3 objection forte est sans doute la circula-
tion Ires-paiTaite des seiclies ; mais atissi obs.^rve-t-on
dins les seiches un rudiment de m^'sent>re , des
glandes blan iiatres , rao!l^s , fort considc'rab es ,
silu^es dans Ie voisin.ige de i'intesUn , colleges a la
veine-rave , et s'y d ■gorgiant p ir plusieurs canaux
fort visibles. Peut-etre est-ce encore ici une de ces
nuances qui lient les classes les plus disparates ; peut-
^tre la seiclie se rapproc'. e-t-elle acetegard, co . me
a laut d'autres , des arimaux plus pari'aits.
Pour achever ce qui rega de la d'gestion , je vais
dire deux mots de I'anus. II est remarquabl- que
dais tousles moUasques , il est Ires-pres des bran-
ciiies , ou du moins de I'endroit par ou Ie fluide
ambiant s'y rend. On avoit bien quelques exemples
analogue- dans certains poissons , dans les larves de
quelques dipit'res , etc. 5 raais dans aucune classe
celte" proximity n'elojt aussi genc'rale.
Art. V. On]anes des sensations.
Je ne m\'irrc:erai pa<; beaucoup a dccrire les ter-
tacules. C^ sont les parties les mieux conuues d.s
44^) Ilel/nuU/i olog'e.
inoUiisqiics ; on s'en os\. mene sorvi po'ir divisor en
i^enre les aniinaux; d.^s uIli'.■alv^s, quouju'll y nit
des caractrTes bien plus iinpyrlaiis, coinme nous le
verrons dans la suite.
J'obs'^rve seulemenl c\\\?. les d^ux ordi-es a Jcto'
mabiie ont leurs lent ;c d \s a la iv'ta ; C3u-: doiit !a
tet3 e;t enveioppee , n'ri;i avoiant pas besJm la, ils
les ont a I'anus.
Vous ro nioissez deja snmsamm?nt les yenx et los
oreilles das seiches. Dans i'ordi\^ qr. les suit , los
llmaco.'is it analogues, on na d ^co ivr3 q e d.}s
veux , encorsextrenir^ment p^elils. Dans no. re troisleme
ordre il n'j a iii yenx ni orsilles.
Art. VI. Organ cs de la gi:i6ratlon.
I.^,s diflL^rences dans la g-'ner:itlon, se trouventrv'-
parlles selon les me'-nies Irois coupures qua tons les
caracteres nonsindiquent.
Les seicbes ont les sexes Sr'pares , le m:\le arros3
de sa kite les oeu fs pond us par la feinelle ; on n'est
pas bien sur encore s'il n'j a pas un accomplenient
preliminaire.
Les limacons et lenrs analogues reunissent les
denx sexes dans le m^me. individu ; mais ils out
]jesoin, pour c I re fecond^?, d'un accouplem^nt reci-
proque ; cependant la liquetir senu'nale de rnnnese
porte pas sur les orufj de Pciulre , car il esl demontre
parTarialoniie , que ( ela ne se pent. La verge n'est
point percre , et le teslicule so d'c'iarge d?.ns la
lualrice mtme et fort loin de la verge 5 mais
rirritation produile par le spasme venerien est
Aiiiinaux a sang blanc. 447
JUS doulG necGosaira pour faiv3 desctiiclre lc5 uiafs
ri la semence dans un r»'ceplacle coimnun , qui
( st la malrice.
Lg troisi-m?, ordre, l:^s bivalves et h^nr analogue^,
n'oiit point d'accouplement, ils sont fjconds isuL-
nienl , ct tons Ics individns pondonl d.-s a-ufs-en cer-
taines saisoiis. II est assez singalier que les ocnCs d:i
mUiUis analimus, du mjja pictoruni , tt s.vii
doutfi de boaucoiip d'autres , se trouvent places cii
crrlaines paisons dans la duplicalure d:s brriUCliics.
Mcrv I'a observe le proaiicr ; il doMnoit menit; aux
branchies le iiom d'ovaire , et ciicercliail le ]^oum(Ki
dans un lout antre lieu. .Te I'ai vu egalcment , cl j'ai
appris depuis peu que c i:e remar.iue a encuic; ulo
faile par d'autres personnes.
Assuremtnt un amcTteur d'craliliiC:S"s auroit dequoi
s'exercer sur un animal sans tele, dont le r.cluni
traverse le cccur , et qui a son poumon poiir ov i-
duclas. C'e^ ponrlant le cas d^ la -yioule.
Aucun moUusque connu n'est pemmipare.
.Te rt^sume toutes les consideralions repandues dans
ce meraoire ^ ct j'en tire les caracteres de la classe et
de ses ordres.
Les JioLLUSQUEs soni une classe d'animan?v- quia
])Oiu' caraceres inlerieurs la p,eneration ovipare, le
sang lilanc, I'exislcnce du ccrur , des vaisseaux et des
lirar'.cbies , le foie ; c-t pour caracteres cxlc^Micurs ,
le nianlean cl les leiitacu^es.
Cetfe classe doit se diviser en Irois ordres :
i*^. Les CEPiiALOPODES. Lcur t.'le est lil^re , mo-
bile el couronnec de jirauds lunlaculcs sur lesquels ils
44? Ilclniinthologie.
niarclient. La cavite dcs Ijrancliies repr^senle im sac
dans lequel la tete pent s'eiifoncer j)lus ou molris. lis
ont des yeux grands , pouivus d'iris , de procps
ciliaircs , da crislallins , de vilre , de clioro/de , ct de
sclv^rotlque ; des oreilles a sac sim ■' ■ et a uii seu*
osselet ; des machoives cornees, ties - forles. Leurs
sexes sont separ^s.
Cet ordre comprend les seicb.es , quo je divlse en
seiches et en poulpes. Je presu i e qii'il faudra y
rap; ortei- aiissi les clio , mals n'-^n a^^ant po'nt dis-
s/'que, je ne piiisraffiniier positivenie;5t.
2°. L?s GASTEROPODES. L'lir tete est libre, mo-
bi-le , et porte deux ou quatre ,^etits tentacules; ils
rampent sur un disque musculeux place sous leur
corps longitudiualement ; leurs branchies varient en
position et en figure. H J a deux yeux fort petits ;
im renforceraent corn6 unique a la levre superieure.
Ils sont hermaphrodites, et ont le besoin et les organes
de I'accouplenient r^ciproque.
Get ordre comprend les I'unax y les LapLijsies ^
jcs dorls J les thetys ^ les tnjjxliies j les ducwes _,
les pLanaires J les, chitons j les patelles ^ el loutes
les coquiiles univalves contournees en. spirale , k s
nautlles except^'s , s'il est vrai que la seiche qu'on
J trouve ne soit pas un bote parasite.
3". Les ACEPHALES. Leur tete est cclL'e et enve-
loppee dans la partie superieure du sac , comme dan^
im capuc'ion , ou , pour mieux dire , ils n'ont pas
de tete du tout, mais seulement une Louche, sanS
dents ni mandibides. On ne leur trouve ni veux ^ r.i
oreilles. Leurs branchies sont quatre feuilleis sXvl'^s
transversalement
"Anlmaux du sang blanc. 44^
transversalement ; leur pied, une masse chnrnue,
sitiK^^e entre les braiicljies, c[ui mancjue quL^lquefois.
lis se ff'coiident isoltMiient et ; omlei t dtis ueufs.
Get ordre compreud les ascidies ^ \.'?, bipkores ^
toiites les bivalv.'S sans exception , et paniu les
muLlivaLvcs J \es phoLades j les teredo ^ el proba-
blement aussi les balanits et les anatiftres.
M I X E R A J- O G 1 E.
Plerres Jle.rib ies.
J_iE cito^^en FLcurLau de Bellevue a presente a la
sociele d'Hi?toire natur 'lie , d;in^ nwe dc >es der-
iiieresseajices, des pieiTesai.xqiK'll s il a c'')mmun que
la propriete d'etre flexibles, }.av d s | r ;ced s ties-
simples , et inseres dans la Journal de Piiys'qae
d'auut T792. 11 a et6 con Uiil a cette d;'coiiverte j^ar
vm marhre flexible, qu'il tronva sur le m(,nt Saint-
Goihard 5 on ne connoissoit encore qir- deux pi'erres
flexii)les, dont on ignovoit absoluinent le gissement :
la premiere , un gres fri;ib'e micac? , qui vient, dit on ,
du Bresil ; la seconde , uu marbre blanc du pala's
Bor^lie;-e a Borne. Le narbrecpril venoitde f.-ouver,
avoit tons les caracleres d." cekii du palais Boigliese.
Le ciloven Fieuriau en examina avec sjin la siluntion
et la nature. II vit n'i! et.-il place vers le sommet
d'une nionlagne et e\])osc^ a u!i dessecli3ment con-
tinual ; UP son i rain etoit cristallin et f )rf gros ; enfin
il y a reco'snu la propriete des dolomies , de ne se
dissoudie que lentement dans les abides , et avec une
Tome IL i' f
*4^o ^Uneralogie.
effervrsceUce tres-l(^gere. II aconclu , avec Dolomleu ,'
que la flexibi]itc des pierres etoit due a un tcartemenk
tres-con^iderable de leurs molecules cristallines ; et les
movens qu'il emploie pour leur communiquer cette
propri^le, prouvent encore celle assertion : ils con-
sistent a faire eprouver , par un feu capable de les
faire devenir rouges , un long desst'cbemsnt aux
pierres que Ton veut rendre flexibles , ct a les amener,
par une flexion L'gere et gradue^e entre les doigts , a
la flexibility qu'elles doivent conservcr. II faut qu'elles
aient un grain cristallin. Celles a cassure terne ou vi-
treuse n'acquierent jamais cette propriete. Le feu , en
ecarfant les molecules crisiallines pendant un long
temps bors de Icur sphere d'al traction , ne leur permet
pas de se remettre , par le refroidissement , dans !eur
premier etat. Alors b s corps soumis a cette action
acquierent un volume plus considerable, absorbent
I'eau en assez grande quantite , et leurs molecules ne
tenant plus , pour ainsi dire , pTr attraction , mais
seulement par enlacement, ils deviennent tres-fragiles.
Le citqyen Fleuriau a present^ a la so: iele du marbre
de Carareetdu gres, devenus flexibles par ce precede.
M E D E C I N E.
Observations medicAles sur la Suisse ^ faltes
oaiis un vojjage dans pLusieurs cantons^ par
Le cUoijeii Drloubs.
On s'esi beiucoup elulie en Me 'eoine pour pro-
noiicer sur ^influence ae I'at Aiosphere sur le corps
I
OhsercatLons sur la Suisse. 40I
humain ; dcpuis Hipt-ocralcs, des liomnies C('l;^bres
ont siiivi scrupulcusement les temperatures qui se
succedoient pendant une suite cl'muees, et out dd-
tmillc les efT.-ts cju'ils croyoieu! en eire les resultats.
Les iaslruclions que nous off eut leurs monumens,
mtrilent notre juste reconnoissaiice ;cependant, puis-
que, de I'aveu meme de ces illusires obsenateurs, la
meme constitution aerienne , observ^e a differentcs
epoques, n'a pas produit les memes maladies, et en
a meme engendre d." contraires ; et com nu' nous
vo. ons les fruits des memes arbr-s diffe- er en quelque
cliose fLaque annre , il paroit que i'mflueiice de Tat-
mospbcre y a fort pen de pari.
Ma reconnoissanc ' euvers ' es liommes qui m'ont
instruit, me porte a reco.nmander le m^me travail
aux amis du genre humain. Je pense que chaque
endroit a une temperature , une constitution qui est
locale ; eile ne depend point de la con.stiiution gene-
rale, mais elle peut en etre modifiee : o"\ diroit que
Pair ne conserve cette quali ^ qu'aulant qu'il y
croupit ; a mesure qu'il en est chasse , il perd ce
caractere local pour se laisser inlluencer par le ter-
ritoire voisin ^ qu'il inonde. II j a done une constitu-
tion generale qui v.iri.- snivant les saisons ; rautreest
pa: ticuliere , locale, et depend de cans s locales.
On obsv'rve cette difference bien marquee dans le
caractere de-; maladies ; om verra dans le cours de
celtedisscrlation , que I'on rei'contre la fievr.' bilieuse,
parexempe, avec un c inct^re malin dan> un en-
droit, taiiciis que cette meiiicfievresera treL-benigaa
a une pv.tile diitauce de la.
Ffa
'4.^2 Medeclne.
La constitution locale depend en partie des emana»»
tlons des veg^taux qui viennent sur les lleux , et des
jTiineraux qu'on y rencontre : le site lui-meme con-
tribue encore a l¥tablir.
Apres avoir coup^ une grande quantite de gero-
fliers dans Tile de Ternate, Pair en devint mal-sain.
li'odeur de Vapfiron doit, assure Pline , occasionner
ie retour d'une maladie quelconque. L'air des mon-
.tagnes de la Suisse est sain 5 on le doit a sa iegeret^ 5
mais le baume des vegc'taux n'j entre-t-il pour rien ?
On sait que l'air du Perou dissout le plomb ou
augmente son poids 5 dans les lieux oii il y a beaucoup
de mines de cuivre, les liabitans ont les dents g^ne-
ralement affect^es ; les mines d'arsenic du Cap de
Bonne-F«p^rance, si elles sont long-temps ouvertes,
corrorapent l'air a faire perir les animaux des envi-
rons. Corabien ne co npte-t-on pas de grottes en
Europe , oil les exhalaisons souterraines reunies s'e-
cliappent et font perir tout ce qui les approche ? Les
montagnes calcaires , suivant le t 'moiguage de Black
et de Priestley , exiialent une grande quantite d'air
nie[Jiytique ; la marne se dissout facilement dans
Pair , qui se trouve necessairement surcharge de ces
differens principes , et devient par-la plusou moins
salubre.
lie site lui-raerne j contribue encore ; je me borne-
rai dais ce Tiioment a uuseul exemplequi m'a frapp6
plus d'uiie fois.
Clii:;pis est m\ village du Valais , dans \? dizain de
Sirre ; il est situ6 a I'embouchure de la vallee d'An-
lievie^ et doiiiiC par cette grande vallee dont le*
Observations sur la Suisse. 453
jnontagnes peuvent avoir six t cuts tois;'s d'elevalion.
Ces mo'itagnes tr;^s-fer!iles sont occupies pendant
r^te par un ^'randnombre de l^estiaux. II semble one
les exhalaisons de ces animaux devroieiit se dissiper
par un air continuellement agile, et suivre I'impul-
sion des vents ; cependant tons ceux qui passent a
CIn'i pis pendant l'('te , rencontrent cette meme
odenr qu'oii sent dans tous les clialelsde lamontagne,
et qui > lent aboulir la par sa pesanteur specLfique , et
pes r sur les liabiians de ce village , qui sont petils ,
laids, et coninie «'crases d'un pareil fardeau. Si oi»
jelfe un coup d'oeilsur tous les habitans d?s embou-
chrres des \ allons valaisans , on observera les memes
resnilals ; le crelinisnie le plus complet j regne , les
liabitans sont petits , laids et parosseux. Mais d'oii
vieiit que le cr ti-nsine de Tvlartiguj^ passe aujourdliui
a Moulhai , qui en e,st eloigne de quatre lieues?
Les liabiians de la Suisse , situes au pied du Jura ,
ofTrent d s varieics bi^n frappanies : en sortant de
Neuc' atcl pour rentrer dans le canton ds Berne, a
peine a-t-oii passe le pont de Bienne , qu'on trouve
un a!:lre p.npip, un autre lan.age, un autre habil-
len.ent. Qui pourroit en designer ies causes topogra-
pliiquesr E '. suivant la n^cme chaine de montagnes
pour entrer dans le canton de Soleure, on observe un
changement marcjue dans deux portions du meme
village ; dans la paiiie qui appavtienl au canton de
Soleure, lonl par^it mieux ; le sang y est deja beau,
on y trouve d'ai:tres fi;iures : en sorlanl de ce nieuie
can! n uour alier a Aran , on rencontre encore un
iiOLiveau changcmciit 3 les belL's Ancinandes tout
4.')4 Medeclne.
phis rf^fl 'cliiVs. Les causes ;vorales , je le sals, poiivent
y contribuer ; mais je voudrois encore qu'iui nalura-
liste in'en e pH uint !es causes nlivsiques, Duisque la
menie religion ne produit pas d'uiie nvuiiere uniTovme
ces memes effets dans lout le canton ou elle est
exerc^e.
Quplquesba'iles me lecins de Neucliatel out obs'erv6
que les rera'des qui leur ont r^ussi dans cette capi-
tale^ n'ont ]'lus prodnit le erne effet dans les raemes
maladies a Bienne, qui n'en est qu'a cinq lieues de
distance : dans cliafjue locality , les maladies pre-
sentert a I'oeil observateur des difT^'ences marquees
dans les symptoi^es et dans les moyens d'obvier a
ces memes maladies.
Quand les medecins auront-ils determine ponrquoi
les ecrouelles sont end;-Miioues siir la coie d;i lac de
Geneve el a Geneve meme (i)? j^ourqnoi le s'^orbut
a aussi sa localite (2) ? pourcjuoi il j a pen d'ecrouelles
(i) Pourquoi I'hyihropisie de cerveaii seroit-elle plus com-
Jnune a Geneve ? pourquoi n'observe-t-on ii Bienne ni guitre
ni gravelle ? I'eau de Bienne est la meilleure qu'on
co;,noisse.
(2) A Lenzbourg les fievres se i rolongcnt facilement ,
pavce que la constitution y est scorbulique : ]a plitysie puru-
iente s'y annonce au printenis , ou en automne ; il y a encore
dans ce pays beaucoup d'liydropisies de cerveau : i! n'y a
point de lievres intermitientes a Berne, et on n'y connoit
pas les fievres lentes nerveuses. La fic^vre quarte est pins o; i-
niatre a Sarnest, canton d'Unerwa den , que par-tout ailJeurs.
Les ph uresies entrent ici encoxe plus facileiuent "en suppura-
tion , cl sci liubiiujs out une tlisposltiou aux bernies.
OhscrvatLons sur la Suisse. 455
a Neucbatel (i)? pourquoi on observe peu de fievrcs
tierces a 01 ten (2) et a Berne (3) , et beaucoup plus a
Saint -Aubain et h. N.'ncliatel? pourquoi les maladies
de poitrine entrent plus facilement en suppuration
dans un endroit que dans un autre ? Pourquoi a Saint-
Aubain on n'observe pjint d'epidemies, ma's scu'e-
meiit d^s maladies de saison ? pourquoi le ja':;p reus-
sit-il mieux a Yverdun que par-tout ailleurs? Quand
les medecii;s sauront determiuer les causes de i'ende-
inicite des maladies, ils en developperont par-la I3
caractere , et la raaniere d'3' obvier sera bien claire
et sure.
II paroit qu'une correspoudance exacte et suivic
(1) Les bydropisies sont tres-frequentes a Neuch;Uel ; on
diroit que les habitans y naissent avec une Jispositiou parti-
cu'iere k de teiles ma'adies ; on y observe une molesse , ua
air d'apathle chcz les femmes , qui ont les pieds tr^s-gros.
Les Bernolses sout mieux prises , eUes ont les pieds mieux
fails et sont moins exposees a celte maladie. Les aperitifs ne
leusissent nulle part mieux qu'a jS^euchateL
(2) On n'observe presque jamais la petite verole a Oltcn ;
quoique dans cette villa la constituti'JU bileuse et pituitcuse
y predomine , cependant TeraJt-q-ie n'y tcuSsit pas comme
en Valais , il y faut des purgaiifs. Les habitans d'OIten qui
ont ete travailles par des afieotions d'ame , tnoubenl , la
plus faciiement qu'aiileurs , dans la pbtyiic quo suit bieul6t
I'bydrupisie.
(3) Pourquoi la dysscntcrie seroit-elie end^-mique k Aran ,
el n'observc-t-ua pas l;i drs ibumatismcs ? Les Auctions de
poitrine y suppurcnt tr;'s-facilemcnt , ce qui est rare i
Aig'e dans le pays do Yaud. A Baden la phlysic est iu-
coiinue.
If4
456 MMeclrie.
pourroit ^claircir tous les doutes , du moi'ns en granda
partie ; tiitiis c" aqiie medecin a sa faron de voir et de
sentir , d'apres lacpelle il jiige et prononce ; car
quelles graiides vari t^\s d\>pinion ne renconfro-t-on
pas siir le nieme cas? W faudroil done que le meme
ceil vit tout par lui-nieme 5 el , pour prendre ^^s ren-
seignexeus plus i^octiC- , il f.uidroit uii sejour plus on
moins loi!g. Jo fis, en 1794, un voyage de ce genre
dans toule la Suisse ; mais je n'ai pn poursuivre bien
Join mes recher; hes , a;"ant ^\.b oblig6 d'abr(^ger mes
s^'jours. J'esperois que le zele de, mes confreres auroit
sup; Ine a ce manque de temps ; mais ces medecinsde
mauvaise bumeur , qui , par leurs duretcs, ontraleuti
mon zele , doivent enfia sentir que leurs pro-
cedrs ne iresont pas personnels, malsqu'ils respirent
im egoi'sme qui ne s'allia jamais avec le v.^ritable amour
de rhu ^aii te. Considerons maintenant les localites
sous un autre point de vue.
La terre,Mui dimnoit naissance s'lr les monldgnes de
la Suisse a des aromates, transportoe sur les cotes du
]ac de Gw^neve , lournit d'autres sinqDles qui sont Lien
differens des premiers. Une puissance , encor? inde-^
terminee par c.s naturalistes , paroit dt'teruiiner la
nature d: s vegetaux. Le mUlefoLlum desmontagnes
a une essence bien dififerente du nuiU'foiiuni des
pajs plats. Les animaux des montagnes sont plus gais
que ccux des plaines ; qu'on mette en parallele un
boeuf qui pait sur les bords du lac Leman , avec celui
qui descend du Sibe thai et du Gessenai : quelle diffe-
rence ? Le heurre fait sur les Alpes est bien plus
exquis que celni qu'on fait a Geneve, ou aillcurs.
Ohsen'alions sur la Suisse. 4^7
^vec .mecreme.ramrorl^e avec soin de nos mem--
tagnes ; il y a un je ne sa s c,uoi , u„ p,inc.p. local r)
caelum q„rM,l:.i...... Hn„. On n. peu, aUr.U.er ces ,, -
„ome„es a I'iull.eMCe <te l'al,.o. lu-re ; ,lj a des ,.y »
oi, les fo -Ciuns se font a m rveillo , et d'autres ou ,es
crudit.'\s paroisseut par-font.
On allrftuem peu:-e..c. pour canse de re, crudW-s,
Iceanx ;' on in ulpera les lerre. par lesquelles les
eanv fiUren, : ,.ai,, on s. lo • p^- ^' 'f^^ '^■' "*
memo nature louv.iisieat tie la bonae et de la mdu-
vais.- ean.
La hauteur de nos montagnes , le p-u de temps
pendaat lequel le soleil ^lardc scs Rayons sur les hab.-
tans de nos vallons, pourroit passer pour otre cause
de res n'sullats ; niais I'observation prouve le con-
iraire. Les habiia .s de Sierre , qui out le ^f^^J'''^
Leurecpar jour plus long-!emrs que ceuK de Marli-
.uy. n'en sent pas moins stupid.s. Faudroit-i latln-
Wala:eg.r.,ede,^ur,ouasasd3UUte les^^^
p^nc'trantdesiTiontagnaids: cct air qui peuelre plu.>
faci!e,r.e.,t les en' rallies de la terre , vivifie lout , et
esl I'agent de tout ce qui s'opere ?
(r) D'ou vientqu'auVourg d. S.Int-Pierr. en Valais , oh
ron vU p.u, de frou.35. 4ue dins ^^ -Ues paro^ss.
de I'Eatrcmont, trouvc-t-o„ , plus qu'adlcurs , des enfans
crui o.t une anlipathle raturelle pour le fromage
r es ulcires aux jambes sont commun a Aigle et en \a a:s.
ov'i le scorbutetles ecrouelles font ravage ; b fievre lemc
nerveuse en ravage tour-a-tour les parois.ses. La l^pre es
dans certains districts du Valal.. A Zmich , luuUe m^ndo a
4'"^^ Medeclne.
M. Grunnor pretend qu'on clofl la non-apparlMoii
c^e la pr, te e:i Suis-e depuis Tan 1629, a Paugmenfa-
liori des glaciers 5 mais il se trompe : les observations
que j'ai iailes d^posent contre lui. On verra dans uii
de rnr« m^moires sur la peste, qu'elle j existoit il n'j a
pas si long-t mps ; elb HoW a la v<§rit^ peu r^pandue ;
niaisPairdes montagnes, lorsrjue les <;r.:mdes foi-tes
de nei.:e ont li.:ii, ergendre loiijours des maladies
d'un mauvais caractt're. Lanj^lioiis croit , avec Beau-
coup d'autres physiciens, que I'eau de glace est la
plus legere ; mais en iisant les experiences d'llippo-
crates a cet f'gard , on verra qu'on se trompe' Ne
seroit-ce point a la leg^rete de Pair qui se mele avec
lese^ux , qu'on doitaltribuer leur bonte ? cette qualite
de Pair influe sur les fruiis , qui pourrissent facilement
OQ Pair est pesant , et abondent f n acide on la legerete
est plus dccidc^.'Le sale des montagnes ds !a Suis e
doit encore a cet air sa qualite. Vojons actuelleracnt
Pinfluence de Pair sur le moral.
li'esnr t est plus pur sur les monlagnes , les facultes
de I'ame ont plus d'energie j vojez les cliants po^-
tiques du crlehre Haller ; mais d'oii rerurent, les
Suisses, leur esirit et leurs loix ? Suivant le rapport
de plusieurs savans , \vs Ht-lvetiens sont des Celtes.
HetvL^ terme celtique qui signifie chasseur^ annon-
ceroii que ce peuple n'est poiiit tine nation celte
qui se r^^fugioit sur ce territoiro, mais une nation
indigene qui vivoit dec basse j les animaux qu'on y
ren:ontroit , les forets immeuies qui s'y trouvoient,
pouvoient suffire a cette pelite penpladc. Si ('eutete
une emigration des Celtes, clle ne &y seroil pas
Observations sur la Suisse. 4^)9
porl.'e, d'lin terrain cultiv^ et civilis<^ , dans des
forets , pour n'j vivre que de la chasse : si les
Celtes, suivant I'opinion de Debo .ijat , ont su bap-
tiser lome la Suisse , il leur fant necr:^Sairement ac-
corder un grain de sel ; or , t omment ce peuple se
seroil-il d^Muiiure jusqu'a ne coiiuoilre que les res-
sources de la chasse ? Oa doit al andonner , j^' pense,
ces opiiiions ; et pourquoi lair? sortir fcous les peuples
les uiis (!e.^ aiMres .' La ualure est par - tout
feconde , et .'•i elle a su produire des goitres en
Suisse, pourquoi n'auroit-elle pas d'eile-meme fait
sortir la tige de ce chairpignon (i)?
Les Hetuis ^ depourvus de loule idrereliiieus? ,
eurent de la peine (nsuite a distinguer I'Elre Su-
preme, avec 'a deciidence de la nature ou lesrevers •
du sort, ils les envisageoient conme les ouvrages
d'un cs[irit malin. Dans le quatorzi^me siecle e j:ore ,
ils faisoient intenter, jar Belial , un proems a J. C.
Le demon (2) v 6toitpresque ador' , alin (ju'il ne fit
pas du mal aux bnb'tans. Get esprit de crtdulite
n'a pu etre dclruit ni par les Celtes , ni paries Car-
(i) La mnnie de faire sortir ]es nations !ps un.?s des autres, a
gagne aussi un fameux auteurdenos jours, qui croit que
les Samoy^dej sent sorlis de lu Finlande; mais les Samoy^des
sent plus ancier.s que cos Labitans de la Finlandt; ; je m'en
xappoTle a un auU-ur qui a ecrit 400 ans avanf I'ere vu!-
gaire.
(2) J'ai un 111-4 o ^'" quatorzl&me sii^cle , qui fraite au long
de CO I'ameux procL-s , et dit que Dieu i- p<' re remit la cause
de son liJs a TarbiUc de SiiiQuiuu , dc Mojsc , d'lsaii ct
d'Ariiiule.
4^o Medecine.
^hacinols , ni par ]es Roniciins , qui vi'nreiit succes-
5ivement dans nos contrecs. Les .HeU'is ^ enrerevant
Ic nt cle ces nations, conscrvert^nt lenrs superstitions 5
et la religion de ceux-la plioit sous ie joug du culle
de cen>-ci ; les arts et les sciences penctrerent dans
les Gaules avec beaucoup de difficultcs, et lout ce
qui y paroi.^soit avoit ie sceau mystique. Ce que
les Utivls ont Ie plws soigneuseraent conserve , c'est
i amour qu'i's ont encore aujourdljui pour les
montarnes, leurs premieres meres r.ourricieres. Le
besom guidoit leurs vues, et dans ur.e grande partie
d© I'Helvttieon mtfnage, encore actuellement , plus
ies animaux que les bommes 5 la sortie de ceu.\-ci
est encore permise.
Parce qn'on rencortre cbez les Helvetiens
quelques rils qu'ils ont appris dcs Gebes ou des
Romains 5 pourra-t-on inferer de-la que les Helve-
tiens descendent des Geltes? On se fait un crime?
dans .quelques districts de la Suisse , de tuer certains
animaux ; mais ce peuple seroit-il descendu de Py-
thagore? Dans un vieux manuscrit que j'ai , il est
simplement dit que Ijs Celies arriverent dans les
Gaules a difft'rentes reprises, ce qui cmnonceroit des
petites recrues, et non pas une emigration com-
plete.
Une naiion tartare venere ^es liaules montagnes,
les Gaulois et les Romains avant eux, eurent aussi une
veneration pour les montagnes. Mais , quoi de plus
^tonnant que de I'observer encore de nos jours ?
Tous nos pelerinages sont dans des lieux escarpes ,
s'iis veulejil faire fortune. Des moiiies se logerent ,
Observations stir la Suisse. 4^1^
en i3i8, dans des troiis pratiques dans des rocs, et
on y observe en Suisse encore des cellules.
En feuilletant les ouvrages d'Hippocrates , et en
apprcciant dilTerens passages, on seroit porte a
croi'.e que cette veneration est I'efiet de la loi
naturtile. Ee feodalisme , en conslruisant des cha-
teaux sur des pains de sucre , peut en imposer ; non
seulement I'em placement de la forteresse , mais
encore Popinion , qui considere tout ce qui est eleve
au-dessns de la sphere commune , quoique les forces
plijsiquesj manquent souvent. II n'y a pas de pays
on il ait en autanl de guerre qu'en Valais, parce que
chaque riche particuher y t-ouvoit des emplacemena
iavorables pour cor.struire des chateaux 5 k's eveques
avoient aussi Ls leurs.
Tons les hommes aiment les montarnes , parce
que rhomme est ne sauvage , et que la mor.tagne
nous approche d^ la condition primitive ; tons les
habitans des campa-nes choisissent , ]>our I'^tabhsse-
ment d.; leur demeur? , on une co'.line, ou une ele-
vation : sortez rhomme de cetle sphere, \e hemve
le snivra par-tout; il vent borner les operations de
son intelligence a la circonference que la nature
tra-a k son berceau. La perspective de s'etahlir
ailleurs gagne fort peu de montagnards , qui n'oc-
cupent cependant pas le site le phis commode dc la
Suisse. L'asperite du sol les rend rustres , et ils ne
rencontrent rieu oii ils puissent mieux reposer leur
imagination , que la ou la nature prit le limon
pour les iormerj la, d'oii Prom^ih^e atte.gnit U
I
462 Medecltie.
soleil pour en arrachcr une etincelle et les ani-
mer (i).
Demander d'ou sortirent les premiers liabitans de
I'Helv^tie 5 c'est demander d'ou sortirent les loups ,
les mouclies et les insecles de la Suisse. Si la meme
terre ne produit pas par-tout les memes aromates ,
pourquoi toutes les nations auroient-elles la meme
origine , les memes prrjuges, L^s n emes supersti-
tions ? Les nations non civili.ees qui formerent peu k
peu un efat social , adopterent d'elles-memes diffe-
rens r'ts et differentes opinions 5 celles qui ss rap-
procherent a cet egard, ne descendent pas plus les
unes des autres , que la reaoncuLe glaciate de la
SIberie ne descend de la renoacLiie gtaciale du
Valais.
(i) On serolt tente de croire que la nature des rayons du
tfoleil n'est pas par-tout ia meme , qu'elle vavie ainsi que ses
cfiets; ondiroit,a en juger d'apres quelques observations, que
ie soleil a pour chaque pays une intlu;^ijce pjrticuli^re ; I'in-
tensite et I'effet de sa clialeur dependent et du corps qui ali-
mente le feu , et de la nature de ceiui qui le recoit.
ARTS C II I M I Q U E S.
Kecueil de procedes et d'expLTLences sur les
teiaiures soLUies que nos vcgclaux Lndlgtiies
coniniuniquent aux laities el aux lainages j,
par le cUoj^en Dambour^ey ^ negocuant ch
KoLiea. NouveUe idition ^ revue ^ corrigce ^ et
dans laquelLe se trouve rcjondu Le supple^
merit qui a puru depuis. A Paris , chez Aubry ,
libraire, rue Baillelte , N." 2. A Rouen, cbez
veuve L. Dnmesnil et Montier, rue de Socrates,
N.o 6 , an 2..^ de la Ropublique franraise , ( 1793 ).
Iii-8.° de 389 pages , saus les tables.
Xj'historiquk litterairc de cct ouvrage exig-^ le
preaml)ule suivant :
II J a plus de quinza ans que le citojen Dambour-
nev , alors secretaire de la ci-devant academie des
sciences , arts et belles-lettres de Rouen , m'entrete-
noit de ses operations cbiraico-tinctoriales. « J'ai fait ,
» me disoit-il , pendant deux ans , des experiences
21 assez inutilement, pour exlraire la fecule bleue de
» nos plantes, dans lesquelles je crojois reronnoltre
« quelqu'analogic avec Tanil. Je vi^ns ausi de m'oc-
« CLiper d.' la rec'.crc' e des plantes qui contienneut
y> assez de nitre , tout form^ , pour fulminer ou ful-
>' gurer en Ijrulant , et la liste en est ^Ja considerable.
« Mais comment en extraire ce nitr , sans le decom-
» poser? C'est a quoi e n'ai pu parvenir. E )ullition ,
« infusion J putrefaction, simple expression, evapo-
464 ^Arts cliLinlques.
» ration tres-lente, meme an solcil , iie ir'ont clonn6
» que des sels denatures , dans lesqu, is !e nitre dumi-
» noit , mais que la base alkaline n'a pu retablir.
y> Cependant cbacune de c?s plantes en poudre m'a
3) donne beaucoup d'acide nitnc[ue , par Pintermede
J) d'acide suirnriqu?. Mon but etoit d'afTrancbir la
» nitridcalion des longneurs et de la puaateur qu'elle
:» enlraine par Li voie ordinaire. Je vois le nitre
» prrsque par-tout , sans pouvoir le sa'sir. Les extraits
» ne m'offrent que des sirops, dont l\''paisseur s'op-
» pose a la cristallisalio j ' et a peine -a fermentation,
» memeputride, detiuit-elle celte raucosit^ ».
An commencement de 1780, le citoven Dambonr-
jiej me f'oisoit part ciu'a i'instir de ma ])-:ytogra]diie
economique , il en redigeoit uiie qui cjntenoit un
cours d'e^ pc^riences , i^our faire voir quelles cou eurs
solides peuveut procurer sur ies laines les ois, fruits,
fleurs et racines indigenes, 'e me trouve dej;; , isoil-
il, i36 bonnes couleurs ou nuan es, et a peiuesnis-je
entr6 dans la carriere. Cela nous prouve cjue les
tresors de la nature sont inepuisables ; il ne nous
manque que le couiage tt le loisir de les tirer de sou
sein. Sur la fia de la meme ani'.ee, le cilojeu Dam-
bonrnej avoit ol tenu 821 nuances de couleurs solides
sur laine 5 extraites de veg'taux du dt'i-arlernent du
Calvados. II ne me manque plus, dit-il , c i!e du
bleu pour complc^ter ma fuco-grapliie, je chercbe
vainement depuis une ann^e actuellement revolue.
Mais la decouverte etla facilite d'employer en grand
le vert natif et solide , sans melange de bleu et de
jaune, m'encournge a poursuiyre mou travail , qui
d a lieurs
Couieurs i-'cgttaies. 465
iVai'leurs m'amuss beancoup pnr la vnricte des plie-
nomenes imprevus qu'il me pivsenle. Je compte
niaiiiteaant ( en 1782 ) plus de 700 produifs soliiles
Mir laine ; vous yoyez que ma phytogiaphie indigpna
tinctuiiale avance. Ma s, depuis ce temps, Ic citoyen
Danii.odrney s'est perseveramnient orcupc^ du meitie
travail ; il a portc^ a plus de i.^oo nurincrss solides ses
iiiporlantes decuuvc^rtcs.
Ce rcrueil , pivcieux au\ arts et auK .sciences ,
indique done avec certilude a nos ma ^uCaclures les
fruits, les fleurs , les bois , les plautes et les raciues
indigenes ou naturaiise's, propres a suppleer les raa-
tic'rcs colorantcs que I'elranger ne nous fouri it (;u'a
grands frais. II ensei^ne avec clarte des proctdi's
simples par lesquels on ])eut aiseinent inultiplieu
leurs nuancps et consolid'. r leurs couieurs. Le citoyen
I>ambourney n'a ^pargi e ni rcclierches, ni travaux ,
iii veilles , ni depenses , pour trouver dans le sein
meme de sa patrie des moyens fac'les et pen dispen-
clieux, de donner a hos manufactures une preponde-
rance sur celles qui nous environment. II a reussi.
La premiere Edition parut en 1786 ; deux ans
apres, le citoyen Dambourney fournit unsuppb'ment.
Cetle nouvelle edition oifre toutca les experiences
primitives et consc^cutives, classees par ordre alpb'a-
betique des no.ns francais d< s vegetauxquiont fourui
des nuances. Une ta})le gen^rale et alphabetique des
couieurs , ainsi qu'une autre t:ible des v^-getaux , ter-
minent cet ouvrage^ ct lacilitent Us dilTerentes re-
cbercbes.
Je leruiiiicra! cet article, en rappflant quelques
loiii.e 11. . O g
i^df, ''Arts chlnilqaes.
traits du Jiigement p ononce siir ce livre par les com-
inissaires de la ci-devant acadeniie de Rouen , les
citoj'Pn Pinard , Gosseaume et Mezaize.
« Avec quelle sensibility le cifojen Dambourney
at-il du voir son travail fructifier dans ses mains,
et les substances , les plus viles en apparence , lui
fournir les plus riches et Irs plus solides couleurs!
» Qu'il s'applaudisse des produits s 'duisans de la
fumeterre , du pcuplier d'ltalie , du sarrazin , du
bouleau, du noyer, de la bruvere, de la gn ranee,
et sur-tout des taics de la bourdaine. II faudroit tout
citer, d^tailler, pour montrer I'ciendue de la recon-
noissance qn'il merite.
» C'est dans celte ]:elle suite d'operalions qu'il est
interessant de le voir interroger sans cessela nature,
revenir avec empressement sur les couleurs les plus
faites , par icur 6clat, pour temp.Ter son ardeur i^r—
J3atiente» les combiner, essayer meme de les decom-
poser, dans la vue d'en extraire de nouveaux tresors.
Mais que ci'ennuis devores ne supposent pas de si
nombreuscs experiences ; Les racines , les fleurs , les
fruits Iss plus coJores , sont toujours ceux qui t ennent
le moins ce qu'iis semblent prometire , ou blen la
couleur la plus s^duisaute s'evanouit a i'epreuve qui
doit en certifier la solidite. Qu'on reflecliisse mainte-
nant aux tenlatives lieureuses on infruclueuses que le
citoyen Damhourney a dii faire, el dont les nuances
qu'il prdsenle ne sont que le r^esullat ^ et Ton commen-
cera a prendre une juste idee de I'etendue de ses
operations.
y Saus perdre de vue sou o])jet principal , il a
Couleurs u^gctaies> 4^
chercli6 tous les moyens de roinmiuii{;ucr an fil ct au
colon les riches couleurs qu'il a su fixer siir la laine ;
et I'inulilite ineme de s^s operations est une acquisi-
tion reelle pour la science , puisqu'elle dispense a
i'avenir d'une infinite de tentatives fastidieuses et sle-
riles , les personnes qui se proposeroient de parcourir,
apres lui, cette nouvelle carriore.
» Observateur atteutif , r(5dacleurfidele, lecltoven
Dambourney ne paroit occup^ , dans tout le rours de
son ouvrage , que du soin de transmettre daris toute
leur integr le les procedes qu'il de rit, les n-anipula-
tions particuiieres qui lui out reussi le mieux ; dv- !aire
passer enfin son exactitude, son intelligence, s'il est
possible , dans l'an:e de tons ses lecti^urs.
» On relrouve par-tout dans cet ouvrage cette pre-
cision , ce!te cltU'tc -ui decelent un artiste maitre de
son travail, I'iutcret qui fait estinier la srience, la
candeur et la modeslie qui font clierir le savant.
WiLLEMET.
B E A U X - A R T S.
P E I N T U R E.
FrJgmens (Van manuscrlt de Diderot ■, sur le.
saioti de Peinture _, de I'jGS (i).
Premier fragment.
Servandoni.
C_^E Servandoni est un liomme que tout I'or dii
Perou n'enrichiroit pas. G'est le Panurge de Rabe-
lais, qui avoit quinze niille mojensd'aniassereitrente
jnille de depenser. Grand macliiniste , grand arclii-
lecte ^ bon peintre , sublime decorateur ; il n'j a
aucun de ces talens qui ne lui ait valu des sommes
immenses. Cependant il n'a rien , et n'aura jamais
rieri. Le roi , la nation , le public , ont renonce
au projet de le sauver de la misere. On lui aime
autant les dettes qu*il a , 'que celles qu'il feroit.
(i) Quoique ces reflexions aient pour sujet les tableaux
exposes a un tres-ancien salon , elles ont cependanl un rap-
port direct a la theorie generale de la Peinture. Nous n'avons
d'ailleurs extrait que les rcinarques sur les tableaux les plus
connus , faits par les luaitres les plus distingucs , il est inte-
ressant de savoir le jugement cju'en a porte un homuie aussi
cel^bre que Diderot , d'apprecier son gout en Peinture , do
juger de la mani^re dont il s'exprime , en parlanl des arts , et
de pescr les motif sur lesquels il appuic ses decisions.
Salon de 1765. 4^9
Deux dessus de fortes. Tableaurt de 4 pled^ 8
pouccs J sur 2 plcds 4 pouces de liaut.
L'lni represente des ruincs et mi tropliec d'ai-
mes. L'effet de la lumiere en est beau , il est bien
colorie; mais je lui pief6reroIs celui oii Ton voit
un tombeau avec des roclu rs , et une chute d'e:iu:
quoiqu'on puisse ecrire au-dessous de tons !es deux, ca^
jiiots qui reufermeut un des mjsleres de. Part : Par-
vus viderl , sentiri niagnus. On sent grands des
objets qu'il a peints petits.
Si I'Hercule Farnesen'est qu'une figure colo?sale oh.
toules les partiesde detail, la tete, -ec ol, les bras, le dos ,
]a poitriiie , le corps , les ; uisses , les jarabes , les pieds,
les articulations, les muscles, les veincs, ov.l suivi prc-
porliDiinellement i'exageralion dela grandeur ,ditcs-
inoi pourquoi celte figure , reduile a la hawleurordi-
liaire, reste toujours un Herculc ? Pourquoi , re-
duite a quinze pouces de hauteur , c'est encore un
Hercule ? Cela. ne s*expli/,ue point, a moins qu'il
n'y ait a ces productions enormes quelques fjrmes
afierlees cjui gardeut leure<ce;, taud s que les au-
tres le jierdeut. Mais a ({U.-lles parties dc ces figu-
res appariient cette cxageralion permancnte quisub-
siste au rrilieu de la reduciiou proportiounelle des
autres ? Je vais taoher de vous le dire. Pcrmeticz
que je romp? par quelqu'ecarl qui nousdvlasse, la
nionoloaie de ces descriptions et reinuii d s mots
para.-ites, heurti ^ empale _, vrai , naturci , bleiv
colnricy been cclaire J cliaudement fait , frold ^
dar . sec J nioldleux j rpie vous avez t:jiit entcndus,
Si.ns tc quo vous les cnler.diez encore.
470 Beaux-Arts.
Qu'est-ce que rilercule de la fable ? C'est im
hoiv.me fort ct vigoureux , qu'elle arme d'une massue,
et qu'elle occiipe sur les grands chemins , dans les
furets , sur les raontagnes, a combatlre des brigands
et a ecrascr des nionslres. Voila I'eiat donne. Sur
quclli^s par'ties d'unlvomrae de cet etat, Texageration
pennan-nte doit-elle principalement lomber.'^ Sur la
tele ? 'Now : on ne con\l)at pas de la tete , on n'ecrase
pas de la tete. La tete gardera done a la rigueur sa
proportion naturjlle , conformement a la hauteur de
la f]£,ure. Sur les pieds ? Non : il suffit nue les pieds
portent bien la figure ; et lis lie feront , s'ils sent aussi
a-peu-pres proportionnes a ia hauteur. Sur le col ?
Oui , sans doute. C'est I'origine des muscles et des
nerfs ; et le col sera exageie de grosseur un peu au-
dela de la ; roportion donnee. J'en dis autant des
ei"^aules, de la poitrino, de lous les muscles de ces
parlies, mais sur-tout d^-s mufTJes. Ce sont les bras
qui portent la massue et qui frappenf. C'est la que
doit etre vigoureux un tiie!;r d'hcmmes, un ecraseur
de beies. II doit avoir dans les cuisses quelque exces
const^^nt et de Peiat (i) , - puisnu'il est destine a
grimper des rochers, a s'enfoncer dans les forels , a
rodvT sur les grands chemins. Tel est en effctl 'Here ale
de Gljcon. Regardez-le bieu , et vous y reconnoiirez
(l) Ct3ci rappeile un mot'de feul'abbo Arnaud sur lui de nos
acteurs cjiii jouisil crlors avec succt^s dans Ja coioedie et dans ja
trcgc'die. Qucicpi'un vantoil son talent dans ce deriiier genre.
A ia boKne heure , dit I'abbe avce son accent meridiona! tp.ii
pjoutoit eiicure au piquant de S(-.s snillies , — a la bonuuhenr*' ;
mais il n'a pastes cuisses tragittues. li'ote des r^Jacteuis,
Salon de 1760. 471
un svsl^me exag^re dans ccrta^ncs parties d -'sign cos
]^ar la condition de I'iioiiiine : exag-'^raiionqui,s'arioi-
blissant insensibleineiit , s'en va avcc im art , un gout ,
un tact sublimes, recherclier les jjroportioiis de la
nature commune a ses deux exlr^mitc's et a loutes les
2>arties quo la condition de I'homme laisse sans Ibnr-
tion. Supposez a present que , d'uii Hercule de huit a
iiruf pieds de baut , vous en iassiez , sur une echelle
p'us petile, nn Hercule de cinn, pieds et demi. Cesera
encore un Hercule ; parce qu'au milieu de la reduction
de ton les \es parties d'une nature ordinaire et com-
mune, il J ei a d'autres (lui , quoiqu'aussi reduit-s
proportionnelleinent , garderont cependant leur exces.
Vous le verrez pel It ^ vous le sentirez grand. Plus
la peTiie non evageree d'une nature onliuaircet com-
mune sera voisine de la pariie qui garde son exces ,
plus vous la trouverez afToiblie ; plus , an coulraire , la
distance enlre la partie exageree et la partie non
exageree sera grande , moins vous en apercevi ez la
disproportion. Tel est encore le caractere de I'Hercule
de Gljcoiu C'est de la tele au col , el non des cuisses
aux pieds , qu'on sent forlcment le passage d'une na-
ture a I 'autre.
iMaintenant,a cote de cet Her.ule , imaginez quei-
ques-unes de ces natures k'geres, elegant, s, sveltco;
uniMercure, par ex.^mple. iFait.s d^croitrc Tune dt>
ces figures , en meme proportion que vous fere/^
croitre I'aulre. Que le Mercure prenne successivemefll
Ion I ce que I'Hercnle perdra dc son exagc ration per-
ii>nnente,et (jue THcrcuie prenne anssi successivemewt
lout ce quo Ic Mrcure pcrdri* de sa iegerete de coa-
G g 4
47^ Beaux-Arts.
dition ei d'etaf. Suivez cette met.miorphosG fdeale,
jus^ju'a cc que vows ciyez deux figures reduiles, qui se
resscnd^Ient pan'aiteiriont ; et vous aurez rencontre
les proportious de i'Aulinoiis. Qu'esl-ce done que
PAndnous: C'esi un ho mi me ([ui u'esl d'aucun t'tat ;
• c'est un faineant qui n'a jaaiais rien f^iit , et dout
aucune des fonctions de la vie n'a allere les piopor-
lions. L'H.rcide e^t I'exiieme de I'homme laborieu?;,
I'Anlinoiis est Pextrenie de I'homme oisjf. II csl ne
grand com ;>e il est. C'cst un mo .ele prirailif et
con.iL.un ; c'est la figure tsiie vous choisirez pour la
plier a toutes sortes de conditions, soit par I'exogera-
tion de quelques parties pour les natures fories, soit
par Paiioiblissement de cas parlies pour les natures
legeres ; et c'est la conr.oissance plus on moins pro-
fonde , plus ou moins cxacte que vous aurez des cou-
dilions , qui determinera les parties sur lesqucdles
rexccs ou I'aiToib'issemenl doii tomijer. Le diiliciiede
la chose ne consiste pas dans ce choix 5 ce n'est pas la
le sublime de Glycon. Ce que je vous deinar.d- ^
c'est que votre sjsteme aiile insensiblemeiit , drs
pf;r!ies que vous aurez afloihlies ou exng 'rees , se con-
fondre dans la nal.ire (ommuue des antres parties,
avec tant d'art et de scieftce , que , f;rand ou petit,
je reconnois?e toujours voire soklat , si c'est a I'efat
ndiita:re que vous ajez condn"t I'Antinoi's ; votie
porte-iaix , si c'est un portj-f.iix que vous en iivcz
fail.
Mais si c'est le diru de la lumiere, si c'e.U le vain-
quenr du ser; eat Pitlion , si I'etat exi^e de la (bice,
*de la grace , de la grandeur el de la vtluciie 'i
Salon de 17').). 478
A.lors vous lalssercz a I'Antinoiis loules ses propor-
(ious dans les pariies sup-rieurcs : je dis ses propor-
lions, et noil son caractere 5 car cc sont dvux riioses
(livrrses ; et en repandant I'alteralion seule:i'ent>sur
les janibes et les cuisses , d'ou elle ira recherclier par
gradation les parties su])^'rieures de l'Antino''is , vous
aurez I'Apollon du Belvedere : vigoureux d'enhaut,
veloce par en has.
C'est ainsi qirun maquignon experimentf' se foririe
I'idee d'un beau clieval de bataJIle. Le cbeval ds ba-
taille est une nature moyenne entre le clieval de trait
le plus vigoureux et le clieval de course le plus leger.
Et soyez sur que deux bommes consoinmes dans le
maquignonage, ont,a de Ires-peiites diuerenccs pres,
la meme image dai.s la fete, ct avec lous les relours
delicats de Texag^ration ou de raiToiblissenicnl a la na-
ture ordinaire et comuuine.
Voila, mori ami, ua (^c iiantillon de la melaplij-
sique du dessin. Toule science, lout art a la sieune,
a laquelle Je genie s'assu;6tit par insfirct sans l9
savoir. Par instinct? Oh! la belle occasion de mc(a-
plijsiqtior encore! Ce sera pour une autre fois, vons
ii'y perdraz rien. II ;. a sur le dessin des cbo«es plus
fines eu.ore , que vous ne perdrez pas davanlage.
B A U D O U I N.
Pcintre en ir.iniature, lion garron ; qui a de la fi-
gure, de la douceur, de I'esprit ; uii peu lihertin ,
K mais qu'vS;-ce que cela fail? Ma fenime a s?s qua-
rnnle-ciiiq ans passes , et il n'aj proc era pas de ma
iiiL: , ni lui. rxi ses coinposiiio.is.
474 BaiLx-Arts. ^
II J avoit au salon line qnantilede peh'ts tableau:*
de Biiudouin , places dans I'embrdsure d'line fenetre;
et toules les jeunes filles, apres avoir promen^ leurs
regards djstraifs siir quelqiies tableaux , finissoient
K iir tournee a I'endroit ou I'on vqyoit la paijsanne
quereiUe par scJmkre , el le cued Lear de cerises.
A un certain age,Non lit plulot uu onvrajie lihreiiu'im
bon ouvrape , et I'on s'arrete plutot devanl nn tableau
ordurier quo da van t nn bon tableau. II y ameme des
vieillcjrds qui sont punis de la conlinuite de leurs
debauches, par b gout sterile qu'ils en out conserve.
Qr.elques-uns de crs vieillards se Irainoient aussi, be-
quille en main , dos voute , lunettes sur le nez , aux
petites infcuiiies de Baudouin.
L E C O N F E.S S I O N N A L.
Un confessionnal est occup6 par un pretre. II est
enloure d'un troupeau de jeunes filles qui vienuent
s'acciiser du pecbe qu'elles out faii , ou qu'elles feroic nt
voloniiers : voila pour Toreille gauche du confcsseur.
Son Oreille d; oite entendra les sotiises des vielllcs ,
des vieux, et des petits morveux qui occupent ce cote.
Le basard ou la pluia a fait entrer deux grands egril-
lards daus I'egiise. Les voila qui ruent tout a travers
le troupeau des jeunes penitentes. Le scandale s'eleve.
Le pretre s'elance de sa hoite 5 il s'adrcsse durement
a nos jeunes elourdis : voila le moment .lu tableau. Le
pretre est a moitie bors dii confessioimal ; il a Pair
indigue. Un de ces jeunes gens , la lorgnette a la main ,
I'airironique et mej^risant, la iete retournf^e vers le
coafcoseur^ est tent^ de lui dire sou fait. Son cama-
Salon r!e 1765. 475
rnde, qui prcssent que raffaire p^ut devenir grave,
cherche a I'entrainer. Les jeunes filles out la pUipnrt
les yeux hypocrilemenc baisses. Les vieilles»et les
vieillards soiit qohitouccs. Les marnioiisjts , places
<lern>.re leurs parens , sourienr. Cela est pUisanf ;
Ilia's la piet ' de nulre archeveque qui n'entcnd pas la
plaisanteric, a foit oter ce morceau du salon (r).
Greuze s'est fait peintre predirafeur des bonnes
iiiCEurs ; Baudonin , peintro prc'dicateur d-'S mau-
valses ; Greuze , })eintre de famille et d'honnetes
gens ; Baudouin , peintre da petites maisons et de
libertins. Mais hcureusement il n'a ni dessin , ni
genie , ni ( ou'eur ; et nous avons du genie , du dessin ,
de la couleur , et nous serous les plus {"oris. Biuidouin
.me disoit un jour Ic sujet d'un tableau. II vouloit
montrcr cbez ur.e sage-fenirne nne fille qui vient d'y
accouclier claMdestinemcnt 5 et que !a misere for- oit
d'ahandonner sou enfaot aux eurans-trouvcs. Eli I
que ue placez-vous, lui reporulis-je, la scene da;is uii
prenier, et que ne me n^onlrez-vous un lionnt'te
femme ^jue le meme motif coutraint a 1 1 nenie artiou ?
Ce^a sera plus beau , plus toucbant et plu> bonnete.
Uii grenier prete plus au talent que le laud 3 d'un;;
sago-femme. Quand il u'eu codf^ aucun saciilice a
Tart, ne vanf-il pas miiuv metlre en scoric la verlu
prv lerablernent au vice? Voire composition n'ins-
(i) No»r, vfiio la plcte eclairee du prelat n'a pas ete choqure
dn cueilleur da ceiisef , ni de \aL fiilc que-eUz* y inals seulc-
MiLjil du '.onJ(ssionnal. ( Note a'g M. G.)
47^ Beaux-Arts.
pirera qii'une pilic sterile ; la mienne Insplrera le
meme sentiment a\^ c fruit,... « Oh! Gela est trop
serien*. Et puis , des niodeles de filles , j'en ircmverai
tant qu'il mc plaira «... Eh bien ! voulez-voiis uii
sujet <:ai ?... v Oui, et me.ne un peu gravelenx, si vous
ponvez : car Je ne m'en dt'feiids pas , j'aime la gra-
vehire, et le public ne la Lait pas «... Piiisqii'il voiis
en faut , il j en aura , et vos mocleles seront encore
rue Fromenteau... « Diies, dites vite «... Tandisqn'il
se froltoit les mains d'aiss, imaginez, continuai-je ,
iiD fiacre qiii s'en va entre onze heures et midi prendre
le chcmin de Saint-Denis. An miUcu de la rue Saint-
Denis 5 unc des soupentes du fiacre casse , et voila la
voiture siir le cote. Les glaces de. ])ois se baissenl , la
portiere s'ouvre , et il en sort nn inoine avec trois
filles. Le Uioine se met c\ courir pour se soustraire
au\ regards du pu])lic. Le caiiiche du fiacre saute«
d'a cote dg son maitre, suit le moine , I'atteint , et
saisit des dents sa longue jaquelte. Tandis que le
nioine se demene , pour se debarrasser du chien , le
fiacre qui ne veut pas perdre sa course , descend de
son siege, ct va au moine. Cependant, une d -s filles
pressoit avec sa main, ou avec la lame de son couteau,
Tine l:oss3 cpi'une de ses compagnes s'etoit faile au
front ; et I'autre a qui Paventure paroissolt comique ,
loute debraillee et les mains sur les cotes , eclatoit de
Tire. L: s marchands et les marchandes en rioient
aussi soug leurs portes 5 et les polissons qui s'etoient
assembles autour du moine, lui crioi^ent : « Ah!il a
chie au lit ^ ah! il a chie au lit ».... Cela estorcellcn^,
ditBaudouin »,... et meme un pcu moral , ajoulai-je :
Salon de 176.". 477
C'est du moins le vice puni ; et qui salt si le moine a
qui ce coutre-lemps est arrive , il y a liuil jours, fai-
saut un tour au salon , ne se reconnoitra pas , et ne
rougirapas? Et u'cst-ce riea que d'avoir fait rougir
un moine ?
G R E u z E.
Voici votre peintre el le mien ; le premier qui se
soit avise parmi nous de dormer des moeurs a Viv t , et
d'encLaiuer des evenemens d'apies le.-xjuels il seroit
facile de faive uu romaii. II est un p.^u vain, n.jire
peintre ; mais sa vanite est ci lie d'un enfant , c'cst
I'ivresse du talent. Otez-lui cette naivet'- qui lui fait
dire deson propre ouviage : « Voy z-mo; cela , cVst
cela qui est beau « ! vouslai oUm-.-z la verve , vous
(^teindrez le feu, et le genie s\ clipsera... Je Grains
bien/, lorsqu'il devi.nidra modeste, qu'il n'ait raisoa
de l^etre. Nos qualites, certaines du moins, tienn-nt
de pres a nos dt'fauts. La plupart des honnctes
fi^/nmcs ont de rhunieur : Ics grands artiste; out un
petit coup de haclie a la tete. Prescpie toutes les
femmes galantes sont genereus?s ; les devotes , les
bonnes meme, ne sont pas exemptes de la mt'disance,
II est difficile a un maitre qui sent qu'il fait le bien ,
de n'etre pas un pen despote. A qui passera-t-on les
defauis , si ce n'est aux grands hommes? Je hais
toutes CCS petites bassesses qui ne montrent qu'uiie
ame abjecte ; mais je ne hais pas les grands crimes :
prcmierement , parce qu'on en fail de beaux tableaux
et de belles tragedies ; et puis, c'est c|ue les grandes
ct sublimes actions et les grands crimes portent le
meme caractere dYnerg e. Si un hommc u'eloil y-as
478 Beaxu-Arts.
capable d'incendicr vine vi!le, uii autre homme ne
seroit pas capable de se prccijriler dans un goulTre,
pour la sauver. Si Tame de Cesar u'eut pas ete pos-
sil^-le, celle de Caton ne Tauroif pas tte davantage.
X-'homme est ne citoyen , tan tot du T^nar? , lantot de
rCljmpe. C'est Castor et Pollux , un beros , uii sce-
lerat ; Marc-Anrele , Borgia : dlvenls sIluUIs ^ ovo
prognatus eodem.
La Jeune filte qui pi.eure son oiseau : Ta-
bleau ovale J de deux pleds de liaut.
La joHe elegie! le cbarmant poeme ! la belle idjlle
que Gessner en feroit ! C'est !a vignette d'un morceau
de ce poete. Talleaii delicieuxl le plus agr<^abie , et
peut-etre le plus intcressant du salon. La pauvre
petite est de face 5 sa tete est aopujee sur sa main
gaucbe. L'oiseau mort est pose sur le bord sup^rieur
de la cage, la tete pendante, les ailes trainantes, les
pattes en I'air. Le job catafalque que cette cage ! que
cette guirlande de verdur ■ , qui sei-p^nte antour, a de
grace ! La pauvre petite, ali I qu'elle est affligee !
qu'elle est naturelle/t^ent p'acce ! que sa tele est belle !
qu'elle est elegamment coefTee ! que son visage a
d'expression ! Sa douleur est profondr. EHe est a son
maltieur jelle j est loute entiere. O ia beHe main! la
belle main I le beau bras ! Vojez la verite des details
de cpsdoi^it-, et ces fossettes , ct cette mo'esse , et
cette teinte de rougeur dont la pression de la tete a
colore le bout de ces doigts dtlicats, et le cbarme de
tout cela. On s'approcberoit da cette main pour la
baiser, si on ne respecloit cette enfant et sa douleur.
Salon de 1765. 4^5
Tout cnchante en elle, jusqu'a son ajustement. Ce
nioiK-lioir de col est jet(^ d'une mani'n-e! il est d'uno
souplosse et d'uiie legc^rete ! Qucind on apcrroit ce
tableau , on dit : dv'licieux ! Si Ton s'y arrete , ou
qii'oii J revienne , on s'c'cri'." : delicieux:, dclicicux !
Bientol on so surprend conversant avec ceile enfaiit,
et la consolant. Cela ei^t si vrai , qu3 voici cs que jc
me souviens de lui avoir dit a diflf.' rentes reprises :
Pauvre p tile, votre doule-ur esf I'ien proforide,
bien rc'flt'clnel Pourquoi cet air reveur et melancoli-
c]ue? Quoil pour un oiseau 1 Vous ne p!eui*ez pas;
vous etes atHi'gee , et la pensce accompar ne voire
aiTlirtion. C"] , pelite , ouvrez-moi votre v(jeur , parlez-
iiioi vrai. Est-ce bien la mort de c.^t oiseau qui vous
retire si fortement et si tristement en vous-meine ?....
Vous baissez les jeux ; vous ne repondez pas. Vos
pleurs sont pr6ts a couler. Je ne suis pas pere , je ne
suis ni indiscret, ni severe... Eh bien! jeleconcois:
il vous aimoit ; il vous le juroit, et le juroit depuis si
long-temps ! II soadVoit taut I le movc^n de voir
soulfrir ce qu'on aiine!.... Eh! laissez-inoicontinuer ;
pourquoi me fermer la louciie de votre main?... Ce
37^.atin-l^.... par malheur, votre mere eloit absente.
II vint. Vonsetiez seule. II 6toit si beau , si passionne,
%i tendre , si charraant! II avoit tant d'a nour dans
lesyeux , tant de v6rit(' dans les expressions! II disoit
de ces mots qui vont si droit a I'ame ! et en les disant ,
il tloit a vos genoux... Cela se conc;oit encore : il
tenoit une de vos mains. De temps en temps vous y
sentiez la chaleur de quelquv-^s larmos qui tomb )ient
de ses yeux, et qui cou:oient le loj)g de votre bras.
4H0 ' Beau.r-Artu
Voire mere no reveuoil toujours point. Ce nVst pas
voire faute ; c'cst la faute de votre mere... Ne voilii-
1-il pas que vous pleurez de plus belle?... Mais ce que
je vous en dis , u'est pas pour vov:s faire pleurer. Et
pourquoi pleurer? II vous a proniis ; il ne manquera
a rien de ce qu'il vous a promis. Quand on a Pt(' assez
heureuvpour|rencontrer une enfant charmanle conime
vous, pour lui plaire, pour s j attacher, c' st pour
lontela vie...« Ei nion oiseau «?.. Mon ami , ellesouril.
Ab ! qu'elle ^toit belle '. Ah ! si vous I'aviez vu sourire
(3t pleurer!... Je coatinuai : Eh bien! voire oiseau ?
Quand on s'oublie soi-merae, se souvient-on de son
oiseau? Lorsque Tb^ur-* du retour de votre mere ap-
procba , votre tendre ami s'en alia. Qu'il eut de
peine a s'arr jcher d'aupres de vous'... Vous me re-
£>;ardez ? Eb ! oui , je sais tout ce!a. Combien il se leva
et se rassit de fois '. combiea il vous rb's et redil adi,-u ,
sans s'en aller 1 combi-n de fois ii sorlit et renlra!
qu'il eloit bnuvux , contnl, Iransporte ! .Te viens de
le voir cbez son pere. II est d'une galte cbarmanle ,
d'une gaite qu'ils parlatent tons sans pouvoir s'en
defendre... Et ma mere? Votre mere? A peine f t-il
parti , qu'elle rcntra. Elle vous trouva leveuse comme
vous I't tiez tout-a-1'lieure ; on Test toujours comme
cela. Votre mere vous parloit , et vous u'entendiez
pas ce qu'elle vous disoit ; elb- vous conimandoit une
chose, et vous en faisiez une autre. Quelques pleurs
se presen'.oient aux bords de vos paupieres ; vous les
reteniez de voire mieux ; on bien vous d;'lourniez la
tete pour les essuj-er furtivcment. Vos di?tractions
conlinues impatienterent votre n>ere 5 elle vous
£roiida
Salon de 176.'). 481
gronda ; et ce vous fut uue occasion de plourcr sans
contrainte et de soulager votre coeiir... Continuerai-je,'
petite ? Je Grains que ce que je vais dire ne renouvelli
votre peine. V(his le voulez?... Eli bien! votre bonric
in6re se reprorlia de vous avoir alllig^*e ; fl'e s'appro-
ch I de vous r, elle vous prit ies mains 5 elle vous baisa
le front et Ies joues ; et vous eu pleurates Lien davan-
tage. Votre tete se pencha sur elle , et votre visage ,
que la rou^^ieur coniiivencoit k colorcr... tenez , tout
comme le voila qui se coiore... alia se caclier dans son
sein. Combien cette bonne mere vous dit de choscs
deuces, et combien ces choses douces vous f.iisoient
de mail Cependant votre serin avoit beau s'e^osiller,
vous avertir , vous appeler, batire des ailes, se plaiudra
de votre ou! li ; vous ne le voyiez point, vous ne
Tentendiez point ; vous eti'Z a d'autres pensces. Son
eau et Sd graii'.e ne furent point ren<;:vplees , et ee
matin I'oiseau n'etoit plus... Vous me regardez en-
core ? Est-ce qu'il me reste encore quelque chose a
dire? Ah! j'entends, petite. Get oiseau , c'est lui qui
vous Tavoit donn^. Eh bien ! il en retrouvera uu
autre aussi beau... Ce n'est as touteucore. Vosyeux
se fixent sur moi et se remplissent de nouveau de
larmes. V"'y a-t-il done encore 'i P. irlez : je ne saurois
vous deviaer....^ Etsi la mort de cet oi?cau n'etoit quo
le presage!... Que ferois-je , que deviendrois-je , s'il
^toit ingrat » ? Quelle id<^e I ne craignez rien , pauvre
petite ; cela ne se pent ; cela ne sera pas.,. Quoi \
mon ami, vous nie riez an nez ; vous vous moquez
d'un grave pcrsonuaga qui s'occnpe a cousoler un
enfant en peinture , dela pejte de son oiseau , de la
Jo me II. H il
•482 Beaux- Arts.
pcrte de toul ce qu'il voiis plaira ? Mais voyez done
comme elle est belle , comme elle est iiiteressantel Je
ii'aime point a alHiger ; inalgro cela , il ne me d^plai-
jrolt pas Irop d'etre la cause de sa peine.
Le suje; de ce petit po^.ne est si lin , que beauconp
de personnes ne I'onfpas entendu ; ils ont cru que
cetle jc'une fiile ne pleuroit que son serin. Greuze a
deja peint une fois le meme sujet. 11 a place devant
ini3 glace feU'e une grand.^ fiUe en satin blanc , pe-
Ii6tree d'une profonde m<-lanco1ie. Ne pcnsez-vous
pas qu'il y auroit autaat de betise a attribuer les pleurs
de notre jeune fille a :a perte d'un oiseau , que la
in^lancolie de I'autre jeune fiile a son niiroir casse ?
Cette enfant pleure autre cbosi^, vous dis-je. D'abord
vous I'avez entendue, elle en convient, et son afflic-
tion reflecbie le dit de rest?. Tant de douleur ! a son
Sge '. et pour un oiseau !... Mais quel age a-t-elle done ?
Quelle question m'avez-vous faite , et que repondrai-
je? Sa tete est d? quinze a seize ans ; et son bras et t-'a
main , de dix-liuit a dx-neuf. C'est un defaut de
cette con^.position , qui devient d'autant plus sensible,
que la tete 6tant appuj4e contre la main , une de ces
parties donne tout contre la mesure de I'autre. Placez
la main autrement, et Ton ne s'apercevra plusqu'elle
est un pen trop forte et trop caracterisee. C'est que la
tete a et6 prise d'apres un modele , et la main d'apr^s
im autre. I)u r. ste elle est tres-vraie cette main , tres-
belle, tres-parfaitement color:ee et dessinee. Si vous
voulez passer a ce tableau cette tacbe legere , avec un
ton de couleur un pen violatre , c'est une cliose tres-
telle. La tete est bien eclaiiee, de la couleur la plus
Salon de 1765. 483
agr('^al)lc qiTon puisse domior a une blonde , car el^e
est blonde notre petUe. Peut-elre dennaiuleroit-oii
que cet'e tele fli un pen plus le rond de bosse.... Le
mouchoir ray6 qirelle a autonr du col , est large ,
Icger, du plus beau transparent : le tout fortement
touc.be , sans nuire aux finesses d3 detail. Greuze peut
avoir fait aussi bien , mais pas mien v.
Lorsque le salon ful tapissd. on en fit les premiers
lionneurs a M. le marquis de Marigny. Le direct, ur
ordonnateur des :irts s'y rendit avec le cortefie des
artistes favoris qu'il admet a sa table ; les aulres s'y
trouverent. II alia, il resarda , il appronva , il de-
daigua. La Pleureuse de Greuze I'arreta etlesurprit.
Ccla est beau , dit-il A I'artiste f[ui lui repondit :
Monsieur, je le sais : on me loue de reste , mais je
manque d'ouvrage. C'est, lui repondit Vern't , que
vous avez une nuee «i'ennemis ; et , parmi ces en-
nerais, ily en a un quia Tair de vousaimer alafolie,
et qui vous perdra. Et qui est cet ennemi ? lui de-
manda Greuze. C'est vous , reprit Vernet.
G E 0 G R A P H I E.
Proposttton d'une nouvclie metfiode pour
enseigiier la Giographie ^ par J. D. Bahbik
cfiarg6 de la partie gco^nipulque a La bLbiio^
theque natlonale.
JLiE but d'une mctbode, dans une science quelcon-
que 5 doit elre de conduire ceiui qui IVtndie , giadut;!''
H h a
4^4 Giogrnpfile,
lement et com me pas \ > as, par toiites les veriteS que
cetle science ren'erme, jusqu'a la plus sublime, s'il
ejt poss'ble ; fon po'nl de depart doit etre celui qui
est le plus h | or;ee d;s ^I>ves ; sa marclie doit etre
«im];ile el naturel e , et l<\s qualites qu'on exige d'elle
S!>i;t !a clarle et la precision. Toutes ces conditions se
trouvent r^unies dans les meliiodes que Pon emploie
depuis quelque temps pour enseigner la chimie , la
phvsique et les matliematiques 5 aussi ces science*
so: t-eiles ties-suivies ; dans la demi^re sur-tout , les
1/as- s sent des ver l6s qui ne peuvent etre meconnues
de Pf'^tre le moins intelligent : d.^^a on s'^ leve par de-
grees , 1a sphere s'agranclit ,etlVtudiant p. rvient5sans
s'.n douter , au plus liaut point de la science. En
Gtograpliio , ta marche est diamelraltment opposee ;
on coir.meuce par transporter son cleve au plus baut
point de la science , et de-'a , par des routes qui lui
sont in onnues, on le ramene au point d'ou il auroit
di'i partir.
C.^lte marcbe n'; st certainement pasnaturelle ; elle
ne lient point a I'esprit d^analyse , qui vent qu'on
ne juj2,e que par coraparaison 5 et comment les ^leve^
|o;irr^ient-ils jnger par co.i^paraison , lorsqu'ils ne
connoissent pas les oLjels qui sont le plus pres d'eux?
Voila ' ouf tant comment on a ense)ga6 la G 'ograpliie
jusfjn'a pre?e:it. On me dira, peut-etre, que I'^tudeda
la G6>^ra lii;^ etant se( h„ ct monotone, il falloit sur-
prer.dre Prittention des eleves pour une science dont
ils aurojent pu d^lourn. r l.s yeux , par de grandes
expositions, paries tableaux des grands effets de la
nature, et^en les iVappaul ainsi d'etonnement , les
Mitkode d'easelgaentent. 4^5
forcer pour ainsi dire de se livrer a un genre dY'tn. I0
qui deiiiaiidc dvi I'lipplicalioii et du travail. Jecon ois
que toiiles ccs expositions, tons ces iabltaux peuvent
€tre utiles dans un traits part culi r ; mais je ne ciois
pas qu'il faille commencer par- la dans une m^thode
qui doit etre simple comnie la nalnre , et (jui doit
prindpalement etre adaotee aux connoissances de
Pt'leve pour lequel elie est fa'te.
Eneffet, la marche que Ton a toiijours sn-vi^en
G^ograpliie, est plus capaile de surprendr • I'atten-
tion que de la captiver. Tons ces grands princip?*; ,
tons ces rapports de la terre avec le c\A , frapiient
l'ima«ination d s eleves , mais ils ne la flxeut pas ; re
sont autant d'^clairs i\\A eblouissent et qui disjinrois-
sent , parce que rien ne pr-'pare a en souteair Teclat ;
tientot apres ^ Peleve se Irouve engag6 dans desd tails
qui sont d'antant plus obsrurs pour lui , qu'il n'a noint
d'objet de comparaison , et enfin il ne se re(oitio't
que lorsqu'il est airive an terme d" sa carrifn\\ C'est
un hommt' que l*on a fa't voyager p nla.t l.^ nuif , et
auqnel il ne reste presqu'aucun sonven'r de son
TOjage. On sent coinbien une pareille methode doit
insfirer de dc'goiifs pour la science qu'e'le en egne,
combien clle doit causer d'cnnnis k celui ({ui la s'u't.
De-la vient sans doute I'indiff rence de bien (Xes, ^pws
pour une science qui n'est pas la premiere , ^^ als qui
ae lie k toutes les autres , et dont le besoin se faltsentir
dans tons les momeni de la vie.
En mathematique^, dont Tetnde n'tst ]^ps "ous
s^che et nioins monotone cjuecellf d • ia Gcog-ap' jV ,
la marciie est bieii ditf«rente 5 on fail passer '^ n el6v«
Hh S
4B6 Giograp/iie,
du connu a I'inconnu , on le mene de d^couTerte en
dfconveite , I'interet va toujours croissant, et enfifi
il parvient aux v^rit^s les plus sublimes. En Geogra-
pliie , n? pourroil-on pas suivre la me • e marciie? II
lie peul y en avoir qu'une pour toutes les sciences,
Vanalyse ^ et ourquoi ne I'appliqueroit- on pas A la
Gdo„rap";ie ''* Dira-t-on que cette inarc'ieseroil bonne
poui' p^rfeiMionner cetie science , mais qn'elle ne pent
serv'ir pour i'enseignv^r , II seroit etrange que le cliemin
qui doit mener a la perfection d'une sciene , ne ftit
point crlui qui put servir a I'enseigner. S'il y avoit
ainsi deux routes oppos^es, alors toutes mes idces se-
roient brouill^es , et je dirois : cessez d'enseigner, car
il v^aut mieux reculer ies bornes de nos connoissan^ es
que de nous trainer ti)ujours dans le sentier de I'en-
iiuveuse routinc\ Maisje crois que VanaLyseesi aussi
applicable a la Geograipiiie qu'aux autres sciences.
Voici done comme.l je procederois :
Je connn^nccrois par les details. Je ferois re' on-
iioilre a mes f leves ce qu'ils out sous les jtux ; je leur
indic;uerois les quatre points cardinaux du monde ?
])ar leur position meme 5 je leur presenterois ensni'e
un plan de la commune qu'ils habitent ; je leur ferois
cliercher sur ce plan leur demeure , et je leur ferois
juger de la distance d'u 1 point a un autre, par celle
qu'ils connoissent. Je leur expliquerois ce que c'est
que I'^clielle d'un plan ; et , en leur pr^s^^niant un
pied on un n)etre , je leur ferois juger de la proportion
di.ns laquelle on est oblig^ de reduire ce pied ou ce
metre , pour pouvoir faire , sur une ft uille de papier ,
im plan assez eteudu 3 je leur ferois remarquer les
Melliode d'enscigiiement. 487
rivieros, los ruisseaux , les arbrcs , et je leur feruis
comparercusobjets aveclcs ol>jets iiemes.
De-la je ferols passer mes el^ves a I'etude cl'une
carte topo|2;rapluqiie conteiiaiit une [ins graude cten-
due de I>a3's. Je leur montrerois leur co 1 mane re-
duite au point de n'y poiivoir pkis reconnoiire leurs
niaisons ; je leur ferois remarquer la proporliou dans
laquelle les objcts du p'ari sont lY^duilssiir cede carte ;
je leur parlerois de IVclielle ; je leur ferois remarqtier
les rivieres et les ruisseaux qu'ils aurolent vus sur le
plan , et coinbien ils sont devenus petils stir cette
carle j je leur ferois juger des autres rivieres et ruis-
seaux, par coriiparai.^ou avec ceux qu'ils coinioilroieiit
dcja ; je leur apprendrois a juger de la distance res-
pect ve des diOergns objels, par I'ecliLlie.
Ensuiie je passerois a une carts cliorograi hique.
La, leur commune ne seroit plus (ju'an point ; je leur
expliquerois les diETerens signes dont on se sert pout
dislinguer les objets ; je leur montrerois les montagnes ,
les bois , les ports de mer , les bancs de sable , etc. ; je
leur indi'^,uerois ce que sign'fient les fiies de points,
c'est-a-dire , les divisions ;et je leur dirois qu'il ini-
povte lorl p«u de quelle couleur est lave nn pa;, s,
pourvu que ces couleurs ne se < onfondent pas ; fju'il
lie faut pas croire, comme plusieurs personnes se i'i-
magiuent , qu'une couleur est affeclee a un pays plutot
qu'a uu autre. La, je leur ferois un petit ta:}leau de
riiisloire du }'avs et d' ses productions, jnais Ires-
k'ger , pour ne pas Irop cnipleter surd'aiitres scienc;es.
De la , je Iransporterois mt'S Aleves sur la carle
d'uii grand pavs , comme la France. I i\ kur com-
H h 4
488 Gdograp/iue.
mune lie seroit egalement qu'un point , ou meme
elle ne paroilroit ])lus 5 je leur ferais jugerde ce que
reiil'erine cetie carte, par comnaioisonavec ce qu'ils
auioient vu sur la carte ciorograpbique ; je leur
expliquerois ce que c'est que le millaire ou la iieue;
je leur dounerois une idee, mais tres-legere, de la
lougiiudu et de la latitude , pour j revcnir lorsque
nous en serious a I'appliratiou de i'aslronomie a la
Geo^'rapliie ; je leur frrois ainsi pa: courir succinc-
te:nent TEurope , sur differentes cartes des grands
paj's qui la composent 5 je leur parlerois des diffe-
reutes mesures d'usage dans ces pays , et ;e leur
dirois uu mot du gouvernemeut et des moeurs des
-ha! itans du pav"".
Qih'ind ines eleves en seroienf la , je leur mettrois
sous les yeux une carte d'Europe ; je leur ferois
refoHnoitre Ics diff^rens pays dont nous aurions
parle ; je les leur ferois comparer entre eux , pour
en connnitre la grandeur respective; et j'ai lieu de
cioire qu'ils en coa:prendroi«nt facilement I'elen-
due , puisque nous serions partis de points qui leur
sont ties-connu3 , de la connois auce de leur com-
mune et de la proportioa dans laquelle on est oblige
de rcduire le pied ou le , metre , pour donner des
cirles plus ou moins generates. Apres la carte d'Eu
r jpe , je leur prc-«cnterois successivement I'Asie ,
I'AiVique et J'A'i'erique.
Je leur mettrois ensuite sous les yeux une mappe-
monde. On voit que je vais toujours en sens inverse
des luetliodt^s , qui descendant des tableaux les plus
gf'neraux aux particuliers j pour moi , je conduis
Meikode d*enseignenient. 489
mes ^Ifeves des tlclails aux objeta generanx* , et Ton
sent que par cg mo^en ils ne cessent d'avoir des
points de compare! son. Je leur explitjuerois ce qu'?
c'est qu'une uiappemoiide ; je leiir ferois recon-
noitre, snr cctte niappemonde, I'Europe , TAsie ,
I'Afvique et l'Am(f^rique ; je lour ferois comparer
entr'elles ces quatre ])arties du mond<^' , fwnr en
connoiire I'etcndne rpsp«ctjve , quoiqu'il y ait bien
qiielque cliose a dire par rapport au relrecissement
quVprouvent les mappemondes , an centre de
chaque hemisphere 5 je leur ferois remarqner les
lies et le grand continent de la Nouvelle-Hollande,
qus I'on ne pent represcnter siir les carles particu-
lieres des qua I re parties du n.onde ; je Icnr ferois
remarquer qu'il y a plus de terres vers le nord que
vers le sud , et je leur ferois mesurer le cercle entier
de la terre. C'est alors que je leur expllquerois en
d(§tail ce que c'est que la longitude et la latitude ;
pourquoi elles sent ainsi nomnu'esj et comment on
est oblige d'avoir recours a I'astronomie pour fixer
la position de differeiig lieux sur la terre.
De-la 5 preuant un globe , je leur ferois com-
prendre que la terre est ronde , et il me semble
qu'ils sentiroient cetle vt'rit^ d'une maniere d'autant
plus sure, qu'ils auroienl etudie tons les details des
terfes immenses qui couvrent le globe. Ce ne seroit
plus pour eu\ un paradoxe , comme cette verity le
devient , lorsqu'avant d'etre prepares on leur po>e
en fait que /a lerrc est ronde. I/'liomme ignorant,
I'enfant , qui ne voi^'ut de tout Tunivers que leur
foiUe horizon , ue peu\enl concevoir CL^tte hvpo-
49^ Gcograpli he.
thes':'; tout leur sembL> ii)cliqucr Ic contraire , le
niveau dcs caux , ra-pli/ip.b di^s nia;sons , leur
TIT arc e r. eiiu ; el &'il en e-\ quehiucs-iujs clout la
curiosil^ se trcnve ]){(|u.e par cettc? su; position, et
qui cbercheut a en pen. Irer les raisons, ombien j en
a-t-il ij(^n se lontei tent tie ce c|u'on leur en dit, etcjui
craignent de s'erga cr tlaii,^ les details d'une seience
qui n'uffre que fles d^.outs et de robscurit6 ?
Ensute je Jeiir expliquerois les cercles de la
sphere • je leur parlerois des cinq zones ^ je leur
dirois quelque chos- de la rotation de la terre sur
son axe j je leur expliquerois pourquoi le jour et la
iiuit, I'ete et I'iiiver reg«:^nt en nieme-teraps sur
la terre , et je leur ferois faire quclques operations
sur le globe, pour ciierclicr la difference d'iicure
enlreplusieurs lieux.
C''est la oil finit le domaine de la G6ogra])liie ; ce
qui est au-dela appartient entierement a i'astrono-
inie. Cependant , pour mettre mes eleves dans le
cliemia de cette science , je leur parlerois succinc-
tement de la revolution de la terre autour du
soleil , de celle de la June autour de la terre , des
eclipses de soleil et de lune , et eniin de la place
qu'occupe la terre dans le syslenie du monde. Je les
quitterois la.
Je pourrois ensuite reyenir sur differentes branches
de la Geographic, comme , par exemple , sur la
Geographie physique et la Geographic ancienne, qui
lie sont pas autre chose que des applications de la
Geographie a la phjsique el a I'histoire , et j'ai lieu
de croire que iiies eleves y feroient des progres
Mithode d'ensclgneincnl. 491?
d'ciufant plus rapides , qu'ils seroient d^ja tr^s-ins-'
triiifs dans la Gvogrnphie positive. II v auroit encore
qiielques autres petiles branches de la Geographie ,
que Ton poiirroit e:''ploiter , comiiie la Geogra liio
polltijiie, et rijydrugrapliie. La Gccgripliie poli-
tique presenteroil aom un meme,,/o;nt de vue la
descr){jiion des deferens pavs app^irtenant a une
meme p issaiice ; elle en incliqueroit les relations
respectives ct cc-lles que ces pays peuvent avoir avec
d'autres puissances, et par ce rtioven elie pjurroit
elTe t;vs-utile a la diplomatic; I'liydrograpliie ren-
fermeroit lonles les connoissances g^ograpiiiques qui
sont n(^^cTssaires a la navigation.
Voila la niethode tjue j'avois h. proposer pour
I'enseigneinent de la Gt'-ograpliie. Elle tient essen-
tie!l'/ment a la mdrche analijtlque de tontes les
sci nces , et c'est par cette raison que je la crois
beaucoup p'us utile que toutes celles que I'on a
suivies jnscpi'a present. J'espere que I'on ne s'ima-
ginera pas- que c'est dans I'intention d'innov^er que
j'en fais Ici la proposition ; cette m^tliode est le fruit
de mon experience a moi-me-ne , et c'est en la
suivant que j'ai appris la Gt^ographie seul et sans
maitre.
H I S T O I R E.
VotAge d'Egypte ET DE jVuBZEj parFBFDEBIC*
Xouis JVoRDEy J noLwette ddltion _, soigneuse-
meat conferee sur rnngLnate ^ ai^ec des notes
et des additions tlrees des auteurs anciens et
niodernes j et des gdographes a rates j, par
L. L Angles J sous-garde au.x manuscrots de to,
BihiLothhque nationale. pour iesianguesarabe,
persannCj tarLat*e r/iantckou y etc. j nienihre de
ta CommissLcn tcmporaire des arts ^ adjointe
ciLL comit6 d" Instruction pubUque j trois vol.
gravd i!i-4.'> orn-s de i6o planches. De I'inipri-
n^erle de P. D'^dot , Taiiie.
Xje voyage de Fr^dtTic-Loiiis Norden est suffi-
samment coiinu de t(-us les amateurs de I'antiquite.
L*exactitude avec laqueiie. 11 a figur^ j la naivelw
avec laquelie il a d4cin 'es r-ionumens de I'E-
gj'pto , Tout fait recliercher avec empressement
par les savans et les curieir:, et W a ^[6 traduit dans
pluieurs langiies. II est en effat de la dernitire im-
portance, puis'que son auteurest le seul Europ^en qui
aft cntrepm jnsqiri.i ua voyage de la liaute et basse
EoJpf3 ? et e ]:,lau d'apres k'f.juel il I'a execute, a
^te suivi depuis Kii par tons ceux qui out d^crit et
dessin(^ les monuniens de rarchitecture des anciens,
CVst Ini qui a iu agine de donner ces ^I^vatious ,
res coupes g^ometrales et tons ces details qui serablent
nous d^convrir le secret de rarcliitecte , et doat les
artistes connoissent hlen toute I'utilite. Le texte d©
scs relations ome de pr^cieux eclaircisgemeiis sur
yoijage en Egypte, 49S
les d.^scriptions qu ' les ancleus nous ont transmises
des njinbreuv et immortcls moiiumeus de I'Egj'pte,
Nordeii ii'a cenendant pas consacrd unique ment son
cravou a nous rctra er les productions de I'art ; 159
planches soi^nc^usement executees, ofTrent alterna-
tivenient le cours du Nil avec tout s ses cataractes et
tons sc's details, des ruin.-s iniposantes, des Edifices
anl^rieurs aux siecies coniuis et qui ont fali^u6 IcS
efrorts d. 1 temps , des cit^s nombreuses , de riches
plantations de])a]miers, des chanins ferliles sans cul-
ture' , et d'arides d.'sei ts. Plein de coiifiance dans un
guide aussi sar , on s'engage avec lui dans les (a-
naux ^Iroils des pyiamid.^s pour arriver jusqu'a la
cLambresupulcLrale etau sarcoj.hage : de leursom-
met vous vontem^ lez les canipagr.es verdoyantes du
Delta , qui contraste.t si fortement aveo Paride plaiue
des momies. E;nbarq e sur le Nil dans un letter
qandjali , la curios le vous appelle souvent a terre.
Alexaudrie , M mphis, Syene , la ville du Soleil ,
I'antique Thebes aux cent pories, ne sont pas encore
aneanties, et on trouve un sujet in^^puisablede medita-
tions dans ces mines imperissables.
Tel est I'inttTet souteiiu que I'oii trouve dans la
lecture de ce vo\age, ([ue Pun peut regarder comiue
un des pus utiles et des plus curieux que ce siecle
aitproduits. Norden Pentrei rit en ^l"^! -> P^i' Purdre
de Christian VI , roi de Danemarck , qui avoit
distingue son talent. II avoit alors 29 ans 3 il ^toit ,
dit son biographe , sage , eclaire , d'un courage
qu*aurnn peril ni aucune fatigue ne rebutoit ; ob-
^ervateur habile , grand desainateur et bon mathe-
494 ULstoire.
nnalicien , et joignoit a toutes ccs qualitcs un gout
delicat et sur. Une forle envie d'examiiier sur les
lieux les raerveilles cle I'Egypte , avoit pr^venu en
lui I'ordre qu'il en recut , et il s'etoit prepare a ce
voyaae par des lectures, par des etudes et par des
excursions daus les (tifrerentes parties de la France
et de !*iralie les plus uliles a connuitre , et par des
liaisons avec les artistes et les savans les plus dis-
tinpuc's de PEurope, parmi lesquels out peut prin-
cipal;') tient citJT ie baron de Stoscli , celebre par
sa collection de pieces gravies ^ et plus encore
par i'araitit^ de Winckelman.
II revint en Europe le 21 fevrier i-^SS , appor-
tant avec lui un ample recueil de dessins et un
grand norn'ore de m^moires et d'observations sur
des feuiiles separees. Le roi voulut qu'il rcdigeat
aussitot la relalion de son vojage , afin qu'elle
put etre pnbliee pour I'instruction des curieux et
des gens de lei ties.
II revit ses memoires et ses dessins ; mais I'assi-
duite avec laqueile il se livroit aux devoirs que lui
imposoit son etit d'officier- de marine , retardoit
beaucoup I'ouvrage ; divers voyages I'interrom-
pirent , et nne mort prematuree I'enleva a Paris ,
en 1742, a I'iige de 84 ans.
II eut la prevojance de j.remrttre ses manuscrits
dans des mains fideles. Daneskiold se montra zele
pour la gioire de son ami ; le roi ordonna d'achever
I'ouvrag'^, et que les dessius fussent graves par le
celebre Marc Tuscb- r de Nuremberg , artiste qui
joignoit k ses taleus le goul de Tauliquite , et qu-
Voyage en Egijpte. 495
avolt ete I'ami de I'aufeur. Quoi ju'll eut formc^ le
projet de renonccr absolament an burin , il con-
sentit cepcndanl a se charger d'lin travail qui pon-
voit honorer la raemoire de son ami , er il vii;t
pour cet effet a Copenhagiie , ou la mort I'a ega-
lei7ient euleve au milieu de sa cavriere ; il avoit eii
cependaut le temps d'achever toutes les planches , a
I'exception de la i59.« qui represente la vue de
Deny, du portrait de I'auleur , et de la mcdaille
qu'il avoit imagn^e pour ilUislrer sa memoire.
Les savans charges de la redaction de I'ouvrage
s'en acquitterent avec la plus grande fidelite 5 ils
r.e se permirent au. nne addition, aucun change-
ment. II lut puljlie en francais. Le premier volume
parut en 1752, le second eu 1755 (i). Les journaux
les plus accrddites dans I'Europe s'empress^rent de
I'annoncer et d'en faire I'e oge.
Un savant anglais, Templeman , en entreprit la
traduction et I'a publi^e en 1767 (2). Cette edition
snlendide ne laisse rien a desirer , elleest pent etre
meme plus belle qne I'^dition originale. II I'enrichit
de notes courantes dans lesquelles il rapporte ce qui
(0 Voyage d'Egyple et de Nubie , par Frederlc-Louls
Norden. Ouvrage enrichi de cartes et de figures dessinees sur
les lieux. Copenhague 1732. — 1755 , 2 vol. grand in-folio.
(2) Travels in Egypt and Nubia, by F. L. Norden trans-
lated from the original published by command of the King
of Denmark , and enlarged with observations from antient
and modern authors , that have written on the anti-
quities of Egypt. By D. Peter TempUman. London , 1757,
in-fo!.2 vol. et 8.^ 2 vJ. Cette traduction a el6 ellc-meme
tradiiite en allemand.
496 HLstoire.
pouvoit le plus illuslrer son auleur ; mais ccs
notes, qiioique remplies d'erudition, prouveiit qu'il
ii'otoit pas beaucoLip plus vers6 que les edileurs
danois dans la litt^nature orientale , sans cela il
auroit Joint aux citations des auteurs grecs et latins
celles des nombreux ouvrages des Arabes sur TE-
g^ypte.
C'est ce que le citojen Langl^s a fait pour cette
rouvelle edition francaise; il a resi ect6 scrupuleu-
s°ment le texte , mais il I'a rectifi^ dans des addi-
lions ; toutes les notes de Templeman ont et©
conservees , mais il les a rejetees vers la fin de
I'ouvrage avec celles qu'il a tirees d'Abulfedha ,
d'Abdelatif et de Maqrizy ; ii les a toutes fondues
dans la table p,eograp!!i(jue , pour ne point detour-
iier I'atlention du lecteur , et pour donner a
ces tables plus d'interet ; nous crojons cependant
que celte forme qui force de tenir continueilement
deux volumes a la main u'est pas la plus commode,
et qu'il auroit 6te preferable de mettre , comme l*a
fait Templeman , les notes au-dessous du texte.
N'ajant pas voulu herisser ses notes de caracteres
Strangers , le cilojen Langles a rassembld: tous les
mots et les passages arabes sous le titre ^additions
e\ corrections, Cjelte portion de son ouvrage a t>te
itnprimee, d'apres la permission du comite d'instruc-
tion , a I'imprinierie de la Republique , avec les ma-
gniiiques caracteres arabes de Vitray (i).
(l) Magazia^ t. II, p. i28,'!jgne anti'penulti^me, lisez poly-^
glof/e de le Jqv , impriincut par f-^ilraj , au lievi de poljglvlte
de yitraj,
r^ous
Voijagcen EgLjpte. ^gy
Nous observeioiis qu'il est vcrita lenient lioiitc^nx
pour les plus celobres imprimcurs d(^ Paris et meme
do lu E.epuLliquc, tels que lesDitlot, Ivs Pierre, et
autres, de iie point posseder uii seal caractere d s
laiigiies oricntales vivintes. On sait c-u;? la p'upart
des iniprimeriesd'Augleterre, d'AlieM;agne, d'I:alie
et meme d^ Madrid, sont nuuiies au moins de font3s
d'arabe. Naus ne parlous pas des riohes collections rle
caracleres orientaux de la Propagande, de Bodoni k
Panne, de Br«it-Kopf a Leips'ck , des presses de
Clarendon a Oxford , qu3 nos or-.ueilleux arti.-tes
croient elmcer, en taillan. avocplas de grace quelqnes
kttres de I'alpliab.t fmncais.
Les geogra plies remarqueiont sans donts av.^c
plaisir les additions faites anx cartes donf la directioa
est due aw ci.toyen Brion pere , connn dej^uis lona-
tenips par ses lalens et ses nonl)rr'ux travMux. I! a
trace d: ssus les dcgr^s de longitude tt de latitude ; les
premiers, suiva.it la double maniere de les conrter
du meridien de IMsIe-de-Fer et du m( ridien dt- Paris.
On troMvera aussi , sur la carte generate du cours
du Nil J les ^chelles des ditf '-r. nt 's mesures itine-
raires d'E.i:ypte et de France, dressee.-; par le meme
geo: raplie. La disrosition inverbe de ces cartes, oii
le nord se Irouve en !>as et le inidi en liaut, a du i^tre
conservee : i'anteur les a dessinees ainsi en remontant
le Nil , pour donuer im.' idee plus j'iste d-^ sa marche,
L'ediein- a copie Hdelement sur ces memes cartes les
noms de lieux , tels que Norden les a dounes
avec le soin d'en indiquer la v/rltabl" prcKn-
cialion dans a tabb- ^^^ograpiiique , et v.eme d ms le
To /tie IL I i
4<)8 lUstoLre.
cours du texte, enlre deux parentheses. Qiiant aux
mots aiabes , I'aiteratioii trop sensible d^s caracteres
autorisoit a ies ecrire plus corrcctement et sur-lout plus
lisiblement.
On a eu pour le dessin le menie respect que pcur le
texte ; I'avtiste s'est fait un devoir de n'ajouter aucun
ornement et de ne supprimer aucun detail. Nous
clevons cependant a la verite , d'avouer que leur exe-
cution n'est pas en g(^n^ral assez soignee , et qu'il s'en
faut bien qu'a cet egard I'cdition francaise puisse le
disputer anx editions danoise et anglaiso j la suppres-
sion des vignettes, des fleurons et des autres ornemens
disperses dans I'in-folio , et leur reunion dans des
■planclies scpar^es , ne sauroient non plus ^tre ap-
prouvees ; ces vignettes sont faites pour \qs places
qu'elles occupent, et en priver I'ouvrage , c'est lui
faire perdre de son elegance et de sa majeste.
L'exccution tjpograpliique , due au citojen Didot
l'ain^,est aussi soignee qu3 tout ce qui sort de ses
presses justement celebres.
Ce premier volume que nous annonrons , contient
la preface avec la vie de I'auteur , sa correspondance
avec le baron de Stoscli , Ies details sur I'anciejme et
la nouvelle Alexandrie , sur le nouveau Caire , sur
Ies pyramides, avec Ies remarques sur la pyramido-
graphie de Joim Greaves. Les planches qui accom-
pagneat cette tioisieme partie , sont au nombre
de59.
Le prix de chacun des trois volumes de eel ouvrage
est de 120 liv. pour le papier ordinaire , et de 3oo liv.
sur papier velin. A. L. M.
EcLAiRcissE.uENT sur ies Vdpres slcUoe
'fines.
l^E massacre des Franrais en Sicile , connu sous le
iiomde ye^prcs.uUcennes.esi mi cn'cniement qui
pour etrc arnve plus de en-, siecles av.nf nous, n'cu
me-ntepas moms notre attention. II o'Sve unc^ le on
salutaire a res hommfes .ue la prosp.rile po, fe roujours
a la licence, et qui, dans leu:- d.^I,re , oul.li..„t ce'fe *
important.^ v^r.te que /. jour des vengeances est
ie LeademaLn de i' injure. Le re it que l.s in.fo-
nens out fait de cet evenement, ne s.lsfair point
un lecteur eclain^ II re.u te d. leur redr des diili-
cultcs qu. m'ont paru conme autant de proUemes
et pour la solution de.^ ncll^s je .n'adressois a'
i hunime le plus vevs6 dans h'-tude do I'hi.toir'^
le savam Brequigny. L'c< laircissement qu'on va
lire est la reponse a mes quesiions. Tout s'v trouve
M saoement discute , qu'on me saura gre L I'avoir
pubhe. Ce n'est pourtanl .u'avec un sentin^ent
de douleur , parce qu'd nie r«ppell. la perte raceme
de I auteur de cet ecrit , arrivee le i5 messidor ( 3 juil,
et ) , dans sa cpialre-vingt-deu^ieme annee. Pendant
Je cours de ^a lor.gue carnere , I.vre sans cesse a des
jravaux utdes etm6me necessaires, i[ n'ambi.icma ni
la fortune, ni la renommee. Le plaisir de b.n /aire
fntson umquebut; et ceLn" de communiquer ses
Inmicrcs , sa seule sau.faction. La s .here de se.
vasles co-moissauces nVtoit eiroii<3 nu'aux yruv de
sa modeslie. Jamais il n'eut m enviJu>c ni ennemi..
Aucune parsion ne troubla le cauue de sou ame ,
li 2.
'5oo Hlstoire.
et rameiiile de ses moRiirs fut inalterable. De
cnielles soufFrances remplirenl les derniers momens
de sa vie ; il les supporla avec courage et sans que
la douceur de son caractere se deincntlt. II est mort
au sen de la tendresso et de la verln, c*est-a-dire ,
tntre It s bras de ses respect<)ble.s filles. Mais I'amitle
que je lui avois vouee me fait onblier ici que le
droit de le louer apparticnt a son digne eieve , au
Z('le coop(^rateur de ses tiavaii'^ , en un mot, a son
heritierlitt^raire. Aussi s'cst-il charge de nousdonner
une notice sur la vie et les oiivrages du sage et
rnodeste Br^quignj,laquelle doit elre inseree dans un
desnumeros de ce journal. S. C.
JJkpuis votrelelfre du 24 juillet, mon cber ami,
j'ai relu tout ce qcie -j'ai trouve a ma portee sur
Les Vepres siclUcnnes j j'ai eu recours anx annales
d'ltalie , de Muratori ; a I'i.istoire de Sicile , par
Fazelli 5 a I'histoire des rois des Deu>-Siciles de la
maison de France , par d'Egli 5 a I'histoire gene-
rale de Sicile, par Burigny ; a I'hisvtoire de Naples,
par Giannone 5 aux histoires d'Espagne , par Ma-
riana , d'Herreras ; au\ h sloriens de Provence Gauf-
fridi et Papon 5 j'ai meme confere avec ce dernier
sur le point d'iu'stoire dont il s'agit , qu'i! avoit exa-
mine avec grande attention. Tons ces auteurs citent
exactementlc pen d'ccrivainscontcmporains qui nous
xestent , Malaspina , Barthelemj de Neoccistro , Vil-
lani qui ecrivoit environ 60 ans apres eux , et uue
ancienne chronique de Sicile , imprim(^e dans le troi-
Vvpres SLCLUeniies. 5or
siemp volume du Tr.\«;or des anc.doles do Martcne.
Ell com]»incJiit leiiis recils , voivi cc qui ine paroit
en resuller :
La r(H'olutioii qu'oii deslgne coiniiuinc'ment sous
Je nom de Vvpres sicUlennes ^ et qui euleva la Si-
cile a Ciiarles d'Aiijou , en 1282, avoil etc pivparee
d'assez loin , niais 1% xplosion eu f'ut suJiite, et I'ius-
tant n'fn fut determine que par uue circonslauce
imprevue. EUe n'eclaia pas meine dans loute Pile,
en meine temps, cximme on le dit ci'ordiiiaire ; et
on auroit pu en interrompie Teffet, ^i on avoil pro-
file de pres d'nn mois qui s'ecoula avant que cet
efTet se fut propag^ de Palermo a Messine. Je \ ais
enlrer dans quelques delaiis.
On sait que C aric:- d'Anjou , frere de Sainl-Loiiis ,
avant ac.ep'.e du Pape I invesl'ture du rovaume de
Si(i!c, en a\oit depouiile Mainfrov , tue, en 1266 ,
dans uue halailte qui avoit deci le du sort de i'lle. II
eloil dv' la poliliqu > de Charles d'ecarter ceux qui
avoieut paru les plus de\;;ues a Main'Vov ; niais il
les persecuta avec acbarnement (i). II confisqua leurs
biens et lesdi.-iribua aux Francais qui I'avoienl suivi.
II accaljla d'impots ses nouveaux sujels ; et ce qui
les iiriloit plus encore, il autorisi , par rimi)uuittS
la licence la plus revoltante a laquelie se lirerent
sesFvaui-ais , dans mi pavs qu'ii spmbloit ai)and;nner
a leur disc^-etion. Les bistoriens cout.Mnporains attc^-
lent t'enorinii^ de ces exces. Des bulles de Cl(^-
(0 Kx Malasplin , lib. 3 , c. 16 , IMuratori , ivinal. , torn*
7. / . 3j2 J Fa^elli , dc rebus SUiUa- , />. ^5o.
li i
^02 Hisioire.
mcnif TV (i) ]iii reproc! ent sa condniie tyranniqae,
et hii en rcpn'sentcnt le danger. Ces sages remon-
trat.cv-s lie le toi'c: ereiit point, et il devint de plus
ei ] his odi<'u\ auv Sicjlieiis.
Paimi ceux qui avoieiit le plus de sujets de se
plaiidre (2; , etoitnn nobie citoyeii de Salerue, Jean-
de Procida , air si apyel- paiee . ii'ii etuit seigneur
d'u e petite ile de ce notu. 11 avoii ele fort attacbe
a Mainfiov ^ c-t en consequeiice J^es bi.-i:s, qui etoieiit
consi I6rables,av )ientet'jco fisque^.OnprT'tendineme
que 1' onneurde y^ f( mme n'avoit point ete respecte.
Pi\>foiuleraeui bless • , brulant du desir de se venger,.
assez ;;abile pour en s^isir roccasion/mai; assez
patient ]jour Tatten're , il trouva sans peine nn asile
aupres du roi d'A:ra on, dosit le fils aroit epouse
Constance , tiile de Maiiifn^y son ancien mailre , et
mon!a sur le trone d'Arra:ion , en 12-^6, sous le
roni de Pierre III. Sa femme lui a^ oit porte ses droits
snr celui de Siciie ; et Nicolas IITqui avolt -te nomm6
Pape, en 1-^78, ne laissoit point esperer a C' arles
les niemes secours que ctux dont il eloit assure sous
les papes j reced?ns. Ce concours de cifconstaiices,
joint 'au meconlentement des Siciliens,qui croissoit
toujouis , parut a Procida la conjoncture la plus fa-
vorable a ses resse:>timens.
EUe ne Tetoit pas moins aux droits du roi d'Ar-
(l) Epist. Clem. JP^ } thesaiiy. annec. toni. 4 , p. 448 y etc^
Haliialdtis, aJ aim. 1266 , u."^ 17 , etc.
(2) ?*Tnrolori ^annal. /. 7 ^ p. 537- Costanzo, hist. sicuK
lih. 2. Gianuone ^ Jtist. di JS^opol. lib. 20 , cap. 5. Fazelliy^uM
supra.
VCprcs, sicUiennes. 5o-3
ragon sur la Sicile , s'll vou^oil Ics faire valoir. Pro-
cida I'y excita Ibitoinent. Ce prince i'rcouta ; ma'S
il alleguoit le dcfaiit de moycns. 11 iiiariquoit sur-loiit
d'argent , et il en falloit beaucoup pour tenJer nne
pareille entreprise. Procida so cl<ar^ea d'en obfeilir
de Michel Palt'ologne 5 emperenr de Conslanliiiople,
a qui il savoit que Ciiarles prujeloil de faire la gnerrc ,
pour soutenir les ]ir^tentions a I'empire de Constan-
tinople que reclamoit Philippe, devenu son gei.dre ,
depuis 1273.
Le projet de Prorida pint au roi d'Arragon , ct
Procida (i) ] arlit si.v-le-cliamp, degnise sons Tlia-
hit de cordelier , de peur d'etre reconnu eu Sicile ,
oil il crut devoir [)as>er d'abord pour sonder tacite-
teinent les dispositions des SicilJens. II les Irouva aussi
irritf's centre les Fran^ais qu'il le souliaitoit. II se
rendit aussitot a Constantinople : ( 'ctoit en 1279. II
etoit muni de letti^es de creance du roi d'Arragon ;
il obtint de Teraperenr une audience secrete; il Ini
decouvrit les projels fo;mes contre lui par le roi
de Sicile ; il lui fit sont'r en meme temps les
moyens de les faire ecliouer , en snscitant a son en-
nenii une guerre dans s-^s ]-;roprPS etat«, soit par la
rcvolte des Siciliens, qu'on 3^ porteroit aist ment ,
soit par une invasion du roi d'Arragon qui s'y en-
gageroit , si on lui fonrnissoit quelques subsides. L'em-
pereur adopta ce plan, en siq^posant la n'alite des
vues hostiles de Charles, dont il voulnt prealable-
ment etre assure. Procida n'eut pas de peine a Tert
convaincre ; et il en obtint non sculement des pro-
(i) Fazelli et Muralori ^ nhi supra.
li 4
5o4 Ills to ire.
in.sses fIV.rgeiit r.iais dcs L ttrrs pour le pape arc*
qi.i ii iwo'ii I'U lie ^.Tandes relations aw >i,jvl de la
n '.M'ioii d.' i'egljso g[\ cque a i'cgHse latiiK\
Procida 5 ir.uni de ccs i tiros, pa>sa aupies du
pa; e dc:n! i: \vA ' ien acciuilH, ct lo m\X dans les
ii.t'relo du i oi d'Ar:agO!i, d'iiutaiit \\\\s aisroent,
que ]e pape eloit persomic llement mecoiitrMl du
roi de Sici'c. Procida relourna en ore dans celte ile ,
ef vexlni b. Con^lantuiopl.^ ou i' aclK va >a i!('go ia-
tlon avec Tei- percnir ; enfin jl en paiiit.en 1281 ,
avcc uii envov e d.' ce r riiice , charg? de p irter an
roi d'Arragon une assez ^jaze £o;:!ime d'argent.
Durant ces courses rau.llipliees, qui a oient consume
b^'uicouji de kinps, il c'toit arrive un cveuement
qui po ivoit dtVoncert r !cs projeis de Procida. Le
pa])e Nicola? Ill ctoit mort des le mcis d'aout 1280 ,
fc! on uvoit eJu , ea sa piace , 1j 22 fVvrier de I'an-
jn'e siiivajite, Llarliii liT, aussi ailache a Cbarlcs
que Nico'.is kii eloi! con'raire ; niais ce coiilie-teinps
n'avoit point arrt te 1\ mpereur , et m changea rien
aux ei^gagenuMis du roi d'Arragon , qui , des qu'il eut
jdcu le secoiiis d'argen! (:ucreiriperenr lui euvojoit,
s'occu;)a d'armcr une tlo te, sons ' reti:'^ le de pojter
la g-ierre en Afrioue contre les Sarrasins , mais en
off t j-our pratiter d'u;;e r?volle en Sicilcj que Pro-
cida lui aniion^oil cjmme prochaine.
L K i d France et !e nouveaii l^ape, devoues au
roi de Siciie , inioraus de cet ar. 'ment,en tiront
d mander le molif au roi d'Ariaron. lis se coiiteu-
toreiil du prtlexte, e! C arl;\< sj cvoyant lien a!T;>rmi
. tur son troiia , ne prit au une mcsure ni coutre I'in-
Veprcs slciUennes. 5o5
vasion d'liii souverain piiiss.uit , qui avoit des pr^'len-
tiojis foiidct'S, iii coiiire le sou'ev.^metii deses j5roi)res
sujets exc^dt's par des ve ations de joiT en jour plus
iiUoleral^es. Pro:ida , toujours d-'^guis/', parcouroitla
Si'.ile, >.'xc!laii!, ei)tieleiiant p.ir-loul la f( iMienialioii
qui dcviiit extreme. II avoit ci.arge la mine ; luais ce
fut ie hasard Cjui eii causa I'explosioii.
L'liistorieii de Sicile , Fa/elli, avoue (jue , selon
ropin on commune adoptee de son lemps sai-iout par
les t'crivaiiis fran'ais, la revolution fut roxcculion
d'uu j)laa trace' par Procida. EUe sui:j)ose qucle jour
et I'lieure oii il devoit s'execuler, etoieiit convenes ;
que le signal etoil le sou de la cloche c[ui annoiiceroit
riieure dts Vepr!\s, ef qn'a I'lustanl tous les Francais
seroient ei:orues dans Telenflne de Tile. Mais Fazelli
ajoute que les liistoriens miv-ux instruils, particulie-
remeut ct ux de Sicile, deientent celte opinion. II
cite meme (i) un diplome du roi de Sicile Pierre II,
d'ou U r(';;uile (jue cetle revoluiion n'eclata d'abord
qu'a Palji me et aux environs, etque ce ne iut qu'a
d; verses reprises que les autres lieux de Pile secouerc nt
le joug des Francais.
Voici, selon ces i.isloriens , comment les ciioses se
passerent. CYtoil I'usage a Palerme d'aller , tousles
. ans , la derniere des fe!es de Paques (2) , a I'heure de
Vepres ^ visiter ca devatio!i et en grande foule la
ci.a})t-lle du Sai!it-Es;)rit , a 600 pas de la ville.
L'autCLir que je cite , dit qne.cet usa.u- S'.ibsisloit
(1) P. 455 et 161. I,e diplome est du 19 mai ij+o.
(2) Tcilio dominiccc vauncct.onii d:c , Fa2v.'lii j p- 433.
5o6 Ilbstolre,
encore do son temrs. Cette fete, en 1282, tombofi
ill! 3r mars. Les habitans de Paierrae (i) sortirenE
done ce jour-Ia (2) a V eiire des Vepres, et sf^ ren-
dirent a la ciianelle, selon la coiitume. S^iiis doute la
fermenlalion qui r/^noit parmi Je peu,)le , faisoit
craindrfi quelque desordie , et le gouvernemmt avait
fait defendrc^ qu'on vint a rassernb'ee aver des arines.
L :s Franra's c'.ari:;^s de veiller a I'exenition de ret
ordre , pr;'t.- ndire;it que la defens." sVteridoit aux
femmcs comrre aux horaraes ; et , sous prt'te.xte de
s'assurer qn'elles n'avoi?nt pas d'armes ca; hees sous
leurs habits , iLs se comporterenl avcc une licence
insultante.
Un d'eux s^'lant adrefse a une femme de qualite ,
les Siciliens indi_^nes assommerent Tinsolent a coups
de pierres. Ses conipatriotes voulurent prendre son
parti , et le iuniulte devint pen^'ral ; on courut a Pa-
lerrae , en crian! aux ar nes contre les Francais. On
Jes rrassacra dans la ville. Ceux qui ^foieut dans la
citadelle J furent forces et tues. Avant la fin dn jour,
on en ^gorgea 5obo. Les jours suivans, les Palermi-
tains se repandirenl dans les lieux voisins, et y con-
(1) Fazelli, ]Mnratori , d'Egli , hist, du rqy. de Sicihj t. 2 _,
/». 2.02. Papon , /list, da proi>. t. 2. y Z , p. 70 , etc.
(2) Plusieiirs protendenl c[ue cc fat le 3o mars , et Fazelli
le clit aussi , maiiilajoute que c'etoit la troisieme fete de
Paques , ce qui dcsigne le 3l mars , j.uisqu'en 12.2)2. Piiques
toinboit au 29 de ce mois. II n'y a gut-re d'apparence qu'ii
se soit trouipe sur les feles , pnisqu'il parle d'un usage annuel
qui avoit lieu de son temps ; inais il a pu se tromper sur le
ealcui du jour ou Lomboil la Paque j en liiSa.
Vcp res sicLlicn n es. Soy
tlniiorpnt le ma?saciv , sans dist'nction dMge ni do
sexe. lis a!loic:it m^me, di!-on, cliei\ her les enfaiis
desFranrais jii^qu^; dans le s'^in de Unirs m(M-es. On
reconrioil a cetie rajie le car.icljre atroce d'luie ven-
geance loiig-lemps conccntr/c.
II n'est fait ancune menlion d- Pro ida diirant
cette insnrrcciioi sondainc. Ce qui venoit de se passer
etoit si pen I'efK^t d'une conjuration doiil la uiarcbe
eiit ete combinee, que les Palerm'tains , apres le
massacre des Francnis, ne savoienl a qui S3 donner.
lis eleverent la banniere du pape , et le p'-oclamerrnt
leur souverain. lis igiioroicnt que ce pape • toit I'ami
declare du roi dont ils venoicnt de briser le joug, et
qu'il reietleroit icur ofTie. Ils ignoroient I'appui que
l ur pn'paro t 'e roi d'Arragon , et le> droits fju'il alloit
rcclamer. Procida n'avoit rien laissv^ tran-pir^r d^^ ce
secret important. Peut-etre meme n'ctolt-il pas alors
dans Pile , ou il ne restoit jamais qu'a I'abri d'nu
d^guisement. Le souievementdes Palermitains n'ctoit
done jusqne-la qu'une revolle tumuliueuse , sans plan
et sans chef.
Ils ne laissercnt pas de la sonteuir, et entrcprlr:^nt
de la rendie gent'rale. lis foreeient les nostes oii il y
avoit d-sFianais, qn'iis pass>re:it an fd de IVpee.
Le gonvcrneur de M'S:riiie lenta vainement d'a-.roter
leurs progres ; scs -..aleres et sos troupe^ furent rcnons-
sces ; et Messin- r-sta s?ule continue queitpie teinjis
par la gan.ison. Mais les Fraujaisqui lacomposoi'iit,
conlinuoient d'irriter les Labilans par la maniere d.nit
ils les traitoient , ct Mcs.^ine prit enfin le iiieme parli
5oH Hlstoire.
quePalerme (r). Le 29 d'avril , les Messiiiois ahat-
lirent le drapeau de Ciiorle.s d'Aiijoii , el (fdeverenten
la place reteiidard de la croix ( c'etoit celui de leur
ville ). lis dt^puterent aussitot vers les Palertiuiains ,
pour leur aiinoncer qu'ils se reuuissoient a eiix ; ils
t^ier nt tons lo.^ Fran aisqii'ils j-encojitrerent ; le reste
sVnfuil et se disii a (2). Le massacre ne Put done pas
grndral , com 11 e a Pilerme ^ m:iis il u'y eul que deux
Franrai;, dans toule la Sicile, qui f:ireni volontaire-
iiieiit ^j-arg;!('s.
Tous les historlens out iionimc \^ prem'er , ce fut
GmWawme Desporcelets (3), cleva'ier provencal,
qui commandoit i\ Calassasiiii , dans le val de Maz-
zara, du role de Palenno. L'autre, beaucoup moins
connu, efoit Philippe Scalainbre (4), gouvirnrur
du val deNoto, au Midi de Catane. lis durenl I'un
€t Pauire la vie a la rcpulaion dv- leurs vertus. Aiusi
la verlu etoit encore respcctee cliez les Siciliens ^
au nnlieu de leurs fnreurs; ct cela prouve bien que
Peaces de leur vengeance ne vim quo de I'exces de
I'oppression. L'espoir d'un gouvernemeiit plus doux
(i) Fazelli, Miu-atori.
(2) Colla morte ed espulsione di quont'i Francesl si troi-'oi ono
in quella parte. Muratori , p. 489. Leandre Albert! suppow
aussi cjue le carnage , quoique grand , n'cuveloppa pas tons
les Francais qui eloient dans le canton. Dcscvill. della isola
diSicil.JoI. 33.
(3) Barthelemy di neo Castro , cp. i5 , ct Papon , hist. d»
jPjoi'. t. 3 f p. 72,
C4) Burigny . IL^t, de Sicile ^ t. 2 , p. 186.
Vei'Tes sicUienn.es. 5oq
aiiroit prt'venu In revolte ou rappele la soum'ss on ;
mais Cliarlrs ne connoissoit point cv.s in^Miagcnieii.s,
que la violence dc son carat tere ne liii permit jamais
d'emplovcr.
II otoit avec le pape a M >ntt'fi iscone (r), lors-
qu'il a prit la d'Tection d.' la Siiile ciiliLTC. II
tomba dans le plus violent acces de coli're j il
donna sur-le- champ ordre a la flotte qii'il avolt
prepar^e conir? rempeicur de Constantinople, de
iTiettre a la voile, et partit ponr assiet;er Mcssine 5
il comp!oit snr les secours <:u-'il envova demander
a« roi de France , et le pape I'aida des fonds
qu'U avoii dans ses trc.os. Les Si ili^^ns fnrt'ut
effrayes ; le pa;;e ne Is voular.t point pour sujets,
ils se reduisirent a le pri -r de sol ii iter lenr pardon
anpres de Chr.rles ; et les Messinois assicgf^s ofiiiPvfnt
de capituler. Toutes lenrs propositions furent re-
jetees avec duretc. C' arles vouloit qu'ils se ren-
dissent a discretion , et ils resolurent de se defendre
avec I'opiniatrete du desespoir. On etoil alors au
mois d'aout , et ils ne se dontoicnt pas encore des
secours (jue Procitla leur avo.'t pr.^parc's. II sent t
que c'efoit I'mstant oii les Siciliens ne ponvoient
balancer a se jeter dans les bras du roi d'Arra^on ,
et oil ce prince ne devoit plus drllerer de les lei.r
Guvrir.
II etoit parti de Catalogue des le 6 juln (2) avec
(1) Fazelli , Muratori , etc. ai ubi suyra.
(2) Fazelli , Muratori , ubi supra. Ileneras hist, d' Espni^ne ,
t. ly J p. 33o de la liuducl.JiaiiJai^t.
5io lUstoire.
uiic flolte nombreuse , cnargee de troupes de de1)ar-
que:!;!. lit 5 et masquaut toiijoiirs ses vrais desseins
sous rappareuce d'une.' guerre contre les Sarrasins
d'Afiiqu^', il avoit pris terra a A'-Coll , pros de
Couslantiue, oli , apres quelques legeres hoslililes ,
il allendoit des nouvelles de Procida j qui s'etoit
glisse cbns Palerme. Celui-ci fii pari aux i riucipaux
liabilans de Tile de.-; ressources qui s'ofFroient , et
d:s conditions. Eiles furent acceplees avec empres-
seineiit. II fut conveiiu qu'ils reLonnoitroieiit le roi
d'Arragon pour n aitre. Aussilot Procida se jeta
dans un petit batiment (i) avec trois Sicillens , qui,
eii qiialile de syndics de I'ile enticre , etoient de-
putt's aupres du roi d'Arragon p(>ur I'mvitdr a venir
en prendre possession, lis furent accueiilis comme
Procida le leur avoit proniis. Le roi d'Arragon fit
sur-Ie-champ partir pour Palerme deux envojds,
charges de recevoir le ser.v.ent des Si.ilicns, tant
en son nom , qu'au iioin de la reine Constance sa
femme, a qui la souveraine 6 de la S/cde appar-
tenoi! , cornme fille ( t 1 ertiere de Mainfrov. Le
serment fut pr^le par les ! abitans d_^ Palerme et
par les seigneurs de Tile , qui s'y etoient rendus.
Des que le roi d'A ra_on en eut rern la nouvelle,
il ]^assa lui-mr-me a Palerme, ei v fut couronne roi ,
le ID aout,
Prrt de qu'tter TAfrique , ilavoit eci if a Edounrd I ,
roi d'An<.'leterre , une Kllre oii U lui faisoil part de
la deputalion des Sicilieus, et de la resolution qu'il
(l) IL^d J etc. Ginmioiie , ubi sups a , y. 62. Fazelli _, p. 4,54.
Vcprcs siclllctincs. Srr
avo.t prls3 (I'eiii! rasser cei:e occ.is'on de recou-
vrtr un ro aume sur lequcl sa femine et ses iils
avoient des drolls incoatestable-;. Celte leilre est iin-
priinc^e dans le recueil de Ryuicr (i) , et confirine
en grande ]jar!ie ce que ja viens de dire.
Le roi d'Arragon ne tarda pas a nuirclier vers
Messine , dont le sii'-ge fut leve. II y eiitra les
premiers joirs d'octobre (2),apres que sa flotte eut
bath) (3) celle de Charles , qui se vit lorce de quitter
Ja Si.ile ; et les liabitans soumis au roi d'Arragon,
Pierre III , n'eurent plus a redouter que les foudres
de Mariin I, dont ils s'efTra) erent assez peu : « Vous
» nous ave/ juges indignes, lui disent-iis, de la
» grace de St. Vierre et di la voire. Celui qui a
» soin des grands et des pelits a envove a uotre
» secours un auire Pierre que nous n'attendionspas ».
Nouvelle preuve que la n<^gociation avoc ce prince,
qui avoit dure plus de deux ans , s'etoit faite par
Procida , sans que les Siciliens en fussent instruits.
On ne s'accorda pas sur le nombre des Fiancais
massacres par les Siciliens ; les uns le font monter
•a 28,000 J les aulres diniinuent ce nombre de plus
de moitie. On en compte 5ooo (f^gorges dans le mas-
sacre de Pak'rme , et 3oo > dans celui de Messine.
II est probable qu'il en p^rit moins dans les autres.
lieux , d'oii ils »urent le loisir d'ecliapper , car^ de
Taveu des bistoiiens , il s'en ^chappa. Aiusi je me
(i) Rymcr , t.\., part, a , p. 20G.
(2) La 2 octobre selou Henerag , etlc 10 selon Giannone.
(3) Fazelli , p. 453.
5t2 Hist aire.
ranuerois volontlers de ropiiiion do rruv qui
crcl'iil qn'oii peut seduire la pcrte tolale des Fraii-
cais a doiize iiiil'e.
Je crO!S_, mon cl;er ami, fine ce qi^e je viens de
dire repond a loutes les questions que vous m'avez
faites , sur ce qn'on a jupe a propos de nomnur les
T'cpres SicLlicnnes. Ce rom convenoit a: s?z a ce qui
se passa , en 1282, a Pcilerme et aux environs, le
snr-leodemaln de Paques. Mais c'est mal-a-propos
qn'on ' etendn cette denomination a la revolution
gcnernle qui en fnt la snitr\ Cette rrvolntion ne
s'J'tant faite qn'a plusieurs reprises , a des intervalles
ess?7. eloi^ines les uns d':'s autres, et avec des cir-
constances absoluraent differentes , cette denomina-
tion commune a p-oduit une telle confusion , qu'oii
a cru que le massacre qui s'etoit fait a Palermo,
a r eure de vipres ^ s'^trvit fait par toute la Si ile
a la meme lienre ; ce eni a conduit a supposer
qii'il s'etoit fait a nn signal conveiiu 5 et ce nom de
Vtpres s icUie lines ^ dont on se servoit pour de-
signer cet affreux cvenement , a donn.e lien d'ima-
giner que ce signal avoit ^t6 le son de la cloclie des
vepres.
On voit , p'?r le recit exact des faits, combien
to"tes ces suppositions sont ^loignees de la verite.
li'insurrection de la Sicile ne fut point nne con-
juration : il n'v eut point de conjures. Ce ne fut
point nn plan concerte pour etre execute a certain
signal , et par-!ont en mom© temps ; ce fu! I'ex-
piosion sondaine vi tumuliuense d3 haines accu-
mulees J comiiie presque loutes les iusurectioris
con I re
Veprcs SLcUiennes. 5r3
rontre les gouvernemens onpresseurs. Procida la
prc'vit , sans doiit;^ , et la liata en ccliauffant Is
esprits, mais il ii'en d<'terinina ni I'liistaiit , rii lo
mode. EUe se seroit tentee saus lul ; mais sans lui,
cll3 auroit cclioue. Carles factieiix fureiit un mo-
ment decoiira.czc-s , et demandoient praco , qiuiiid
Procida leiir annonca les ressources qu'il leur av oit
menagees a leur inscti. Giannone et la phipart des
historiens bnt done admis bien gratiiitenienl le secret
qn'ils supposent que les Sicillens gaiderrnt mer-
veilleusement sur ces ressources. On ne leur en fit
part que lorsqu'il u'y eut plus do secret a garder :
on n'aurait pu meme leur en fai:^ part plutot,
puisque Is roi d'Arragon avoit resolu de ne se
declarer que lors^ju'il n'y auroit plus , de !eui- part,
rien a craindre. Mais ce qn'on doit admirer ,
c'esl I'adress", la Constance, I'aclivite de Procida,
durantpres dc trois ans de negocialions et d'intrigues,
dont il sut cacher I'objet a ceux qu'elles intt'res-
soient le plus, et qui al-outirent a-la4bis a v^enger
tes injures personnelles , a affranchir ses concitojens
d'un joug tyrannique , et a servir les li.'ritiers legi-
times de son ancien sou^erain.
Brequigny.
Tome 11. K. k
HISTOIRE LITTERAIRE.
OnsERrATiONs du citoyeii Oberlin surles obser^
vatioas dtt cLtoyea Si. L*** Inserees dans Ic
Magaslfi EncLjcLopedLque J tome II ^ p. 2,23.
.1 i A critique , en fait de litl6rature , sert a decoumr
des vtrites, a eclaircir des doutes, a relever cles er-
reurs. C'est iiii service que les litterateurs se rendent
inutuellement. G'estace tilra que le cltoyen Si. L***
a droit a ma recomioissance. II me semblecependant
qu'il auroit pu s'epargner la peine de nous dire com-
ment ii falloit s'j prendre pour donncr une notice
complete d'une cbronique dunt on fait la decouverte.
Personne m I'ignore. Mais dans le cas dont s'agit , je
n'avois promis qu'unc notice sar la decoiuverte de
la chrojiique de P. d'Andlo , d'apres les renseigne-
mens.que raon ami m'en avoit Fournis. Je ne pourrai
sitisf ire lacuriosit^^du citoyen St. L*** etla mienne,
que Icrsqne.j'aurai I'ouvra^.re memesous les jeux.
Le citoyen St. L*** appuie beaucoup sur une er-
reur" par laquelle le nora do l:relier ^ si connu , a et6
converii en cekii de Sacker. II ajoule , qu'il ne salt
pourquoi? II preiend qu'il est lien difficile cl'j re-
con iioitre le nom de Freker. Je parie qu'aucun litt6-
r-'iteur n'aura de la peine a faire la decouverte qu'il a
faite. D'ailknirs, quant an pourquoi ^ il n'avo t qu^a
s'adresser aux redacteurs du Magasin , qui lui au-
roienf appris que c'est une faute d'impression 3 que ,
dans moil manuscrit, il y avoit Freherj et que je
Heponss ducltoi/cn Obeiiln. 5i5
nV'US pasplutot iu rarlicle imprime, que je Ics priai
de mettre dans les errata deux fautes Irop grossieres
pour ii'efrcp as relevees, celle dont il s'agit, et une
autre qui se tronve a la page suivante , oli il faut lire ,
do gpt die welt gesc/iLiff ( loisque Di.u crca le
monde }.
Je finis par une rcniarque v^ faire sur le nom
d"* Ulricas Surgantj dont il est 'ait mention dans les
observations du ciioyen St, L***. Surgaut j dans
Maittaire, est une faute d'impresslon. Le nom de P^ol^
rlcLis n'est point fau!if. Dans le dial h te suabe , on fait
sooner avec 1'^^ ou oll alleniand un o ^ que i'on avoit
coutume autrefois de placer ou au-dessus de i'a ou v ,
ou a cote , de facon qu^ Uolrlcus ou Volrlcus se
prononce Ouolrlcus. Nj connoissant pas celte ma-
iiiere de prononcer , on a trfmsforme dans VHl^tolre
lltteralre de France k' nom de I'eveque Uto encelui
de Voto. C'est de I'o place autn^fois au-dessus de Vuj
que vient I'usage^de metlre dans Tecnture alienianda
un demi-cercle sur Vu.
Kk 1
B I O G R A P H I E.
JVoTicE siir JM. de HEnTZBERG J minlstre d'etat
et ciiratcur de L'Accidcnile des sciences de
Berlin,
_l\(Io^steuR le comte de Hcrtzkerg, minlstre d'elat
et du cabinet de S. M. !e roi de Prusse, chevalier
de I'orrire de I'Aiglo-Noir, etoit originaire d'une an-
cieime faiialle d'AIIeuiagne , ctab;ie depuis le trei-
zieme siecle en Pom^ranie , ou ses ancetres se dis-
lini.;uereiit par les services les plus eciatans, reiidus
aiix electeurs de Brandebourg.
Les electeurs n'ayaiit point assez de troupes sur
pied, la noblesse poraerMnienne, ctant extremement
no. "ibreuse , alioit servir les souverains efrangers. Le
pere de M. le comte de Hertzberg passa an service
ciu roid.? Sardaigne, ets'y distingna pendant la guerre
dela siiccession et dans loules les balailles auxquelles il
se trouva presque loujours. Ala paix^M.deHertzberg
revint vivre an milieu de sa famille, et jouir deS
esp^ianccs que lui donnoit son fils, clonl la facility
pour acquerir tontes les connoissances Immaines , etoit
elonnante. II I'envoja de bonne hc-nre h Pnniversite
de Halle , on Is jeune eleve cut le bonbeur de I'en-
conirer des professeurs ceUbrcs , des pbilosophes ,
des jnrisconsultes , des savans dislingnes. VoKT , Bobe-
iier, Lndierq, Schmaiis elevercnt son genie aux pins
liautes conceptions. Le droit public devint sur-tout son
etude favorite, et c'est dans I'bisioire ancienne et
iTioderne qu'il alia saisir Ic lil des revolutions sur
lesquelles s'appuie le droit pul^lic des nations 5 c'es
Notice sLir M. dc Jicrtx^herg. 5i7
la qn'il snivit la-marche des enpires, et qu'il
aperrut ces donnees , plus c irconscritps qii'-m ne
pense , qui scvvent de l-as;>. a la morale et a la
politique toujouis versatile des elafs.
Danscetage oil les passions parlv-'t>llmpcvlcuseirienr,
ou on glisse sur Ics superficies , oii , avec de. la forlnne
ct dela iialssance , on se croit dispense de former son
cceur et de cultiver son esprit , ou vil sortir dr la plums
de M, 1q conile de Hertzler-; des ('^crits lumineux
sur les points les plus imporiaus dn droit public ct
de riiisloire d'Alleaagne (i). Le miimtre de Berlin
ne crut pas devoir laisser le jeune auteur loin de la
capitale et loin dcs affaires. Fiodt'ric le Grand ,
qui savoit non senlement apprecier les i.omnies
de m^^riie , mais deviner ceux qui pouvoient le deve-
nir, plara, en 1740, le jeune de Hertzberg dans
le departement des affaires etrangeres ; peu apres ,
il I'envoya , en qualite de secretaire d'amijassade ,
a Francfort-sur-k-Mein , pour assister a rclection
de Fcrapereur Francois prcMr.ier.
A son retour , M. de Hcrtzber.?-, contlnua do tra-
vail ler an departement des afTaires ^tranG:.eres et aux
archiv s ; ( 'est la qu'il agrandit la spbere de ses
connoissances , et qu'il se n,it <\\ clat de pouvoir
defendre un jour les drolls et les pretentions de Frc-
di'ric le Grand. II avoit dc'ja commence de foJiruir
an roi les savans e:< traits sur lesquels cc monarqne
composoit I'iiistoire de Brandebourg , et a ecrit dans
la suite Thistoire de son temps. C^^ travail le rap-
(i) De (tnionlba; ct coniitiis d^jUxclibus. J::j pitlucun*.
5 1 8 Blograph ie.
proclia du roi qui ne laissa plus echapper ancnne
ocrasion de liii temoignersa confiance et de le charger
des j)Uis iiiipoiiaiiles rotnniissions.
En lyao, moiirut le conseiller prive d'YIjern ; Ie
roi donna aussilot a M. de ISerlzberg la direction
des archives secrc tes de tiat . Le dv sordre y regnoit ;
mais , grace a re.«piit methodique du noiivel adini-
nistrateur , la co ifusion disparut , et on ne vit jamais
un depot aussi bien tenu.
L'Acadcmie de Berlin ayant propose un prix sur
I'aiicipnne pcpulcition de la Maiclie ele-ctorale de
Brandebourg , M. de Hert/.berg remp'it le Vfru de
I'Academie qui lui adjugea Ie prix, et qui, suffisam-
ment instruite de I'ei-udiiion et des talens du jeune
Candida t , Ie rectit an ncn;bie de ses n^einbres. Dans
le meine tt mps , Ie roi le nomn.ason conseiller priv6
d'ambassade.
Trois annccs apies , il fut noramr premier secre-
laiie d'etat. I.a conimenca , pour ne plus finir, ?a
carriere po'itiqsje et une cliaine non ioterromjjue de
travaux dont I'Europe a souvent leconnu Fimpoi-
tance. De sa plume >ont sorlis des memoires et des
depe'clies les plus inttressanlcs de ce teiTps, qu'ou
regardeia comme un monument j recic-ux , ton tes les
fois que la politique cberchera des lumiorcs et uii
guide sar dans les i'eciierciies des laits.
Ce fut (n 17.^3 que se pr^para celte cj^joque si
3T)^morabiC poui- les anna'es de TEurope^ et si glo-
liCuse pour ia Prusse , epOf:iie terrible qui promena
dans tcute PAilemaciie ie iL au dc la guerre , et qui
doiina ii?u au -rand Frcueric de deploj'er ses taleas
Notice sur 31. de Jicrtx.-bcrg. 5jq
niililairos, son courage el tuiiles les ressoiircos de
son gdnie. C'csl alors que le roi , deji recomman-
(Inble 1 ar son amour pour les sciences et pour ks
arls , odVit nux mis un gn.nd niodMe , un lieros (|ui
d.^voit effacer les plus puissans iiioiiarcjucs et laiiscr
line renommee ('Mernelle.
Ce fut en 1756, que le roi, inslruil d'une ligue
formee contre lui, vouhinl Juslifier ses deniarci;es
aux jenx de I'Europe , rotnii a M. de Hertzberg
les pieces qui serrircnt an nanifeste qui preceda son
invasion en Saxe. Ce nionarque ayaiit trouvd dans
les arc:.ives de Dresde la ccrr( snoiidar.ce secrele de
la cour de Sa>c, dcpuis 1706, ordonna a M. do
Hcrlzberg els composer _^ce niemoire qui a ck'- si
univtrsellenient esfime , avant pour litre .- Mc-
moire raisoiine sur La conduite des cours de
Fierine et de Saxe ^ el sur tears desseins daii-
gereux contre le roi de Prusse , apec les pieces
originates et justificatiues (i). On n'a point ou-
Ll.c quelle sensation il produisit dans tons les ca-
binets el sur les etranger> , et avec qut-lle r.i[,id;t.i
il clla^^^ea I'opinion publique a IVgard du grand
Fr/'d.'ri-.
Pendant que ce monarque condjattoit avec lant
de glo.re a la te e de son annee , j^our conserver
sa courjnne et son existence politique , M. de
Herl;d)erg prouvoit aux j)iinces d'Alleniague coni-
])i(Mi il t^oit dangereux que le svsterae de i'eni])iie
flit (h'truit , et qu'il le scroit par Ic renversenient
(i) On vendit A ^'^icaue aiOjOOOCxeinplairos de ce lut-iuoii*',
dans un jour.
Kk 4
520 Biographle.
dc la monarclilt"^ prussienne , qui seule etoit assez
forie }oiir rc'sist.T aiix puissances qui teiiieroicuit
d'alleicr sa conslilutiou. Cc n'etoit point sculcmeut
le ir.inistre d'elat qui parloil , on retrouvoita cliaque
page l'e{ anrlien:e!it d'uu palriote parfaitonient
instruit c!e la i aiure tt do ia constituiiou genna-
iiiqiie. '
Ce patrlotisme r\e s'exhaloit pas loul cnlicr dans
scs cciiis, M-. de Hertzbcrg en n'servoit uuc grande
pariie pour voler au secours de I'tlal. En 1758,
la Pomeranie-Ultcrieure et 'a foiteresse de Stvrlhn
furcnt nieuacejs d'une invasion par Irs Suedcis ;
les tionpes re<.n!iere3 conibalioierit sous Frc'dcric 11,
dans les canr-.agnes de la Silc'sie ; il ne re.stoii a
Siellin que queiqnes bataillons, M. de Hertzherg ne
perd pas un moment , il a^spmb'e les elals de Po-
meranie, et les eagage a lever douze balaiilons
d'inranterie ; le roi lui euvoja des officiers pour
\:s exercer, ct la ;/a:■ni^o^ de St^'tiin fut bien'ut en
ela! do braver i'erinenii. M. de Hertzberg ne quilla
pciint la ];iume, lant que dura celte guerre desas-
■{leuse ; il prrparoit dans tous les cabinets, c}\^z
toutes les nailors , des revolutions utiles a Frederic,
la mort de PimpE'rairxe ElisabeiU kii procura un
succes si long-temps et si secrerernent mesiage. La
fa.-e des e.da.ires clirrr.gca , !e successeur d'Eiisabcth
etoit pnit'lrc des motifs dont M. deHcrlzbrrg I'a' oit
instruit 5 les pnissanctsbelligerantcs, ^clairt'es a leur
lour el epuistks, desioiejit la paix 5 la conr d.3
Sa-e jarla la preiniere , et la prjpesa eii Alle-
iiih'gne ; etle fit des inst -nces au:r cours de Yienno
et de B(.^riia.
\
Notice sur M. dc Ilcrtx^her^ 1^21
Ces Irnis puissances convinrent enfin cronvojer
leurs pleiiipotentiaires an cliateau cl' Hubertsbourtj,.
M. ck; Herlzhjig fiit cliarge de concliire , au noni
de son inaitre , ceUe paix memorable. Apies qucl-
ques difiiciiht's qm le miiiistre prussien eut la
gloire d'aphmir , die fr.t sig".<?e , It; i5 fevrier 1768.
Cclle paix, qui est un d.'s pla=; grands soutieiis de
la consfifution germaniqi;c , sera a jamais glorieuse ,
puisqu'elie relablit , apres une lutte opiniatre centre
I'Europe enliere , le grand Frederic dans tons scs
etals , et qu'e le ramcna le caliiie en Europe. Une
guerre ausii coiiipliquee dans son origine , et qui
annoncoit na r^nivcrsement total dans I'ordre poli-
tique, flit tcrminre par unc negocialion courle ,
gracj a I'liabilete de M. dc Hertzberg ; Fred(^n'icII
lui tcnioigna son contentement par ces paroles :
Vons av^ez fait la paix co:nme j'ai fait la guerre,
un centre trois.
A j-JC-iiie le roi fn!-il rentrs dans ses rtats , qu'il
nomma M. de Hert/.berg son ministre d'etat et dii
cabinet. Depuis ce temps I'Europe a connu son
mdrite de plus pres , toufcs les cours out apprecie
la justcsse de S3s plans , et rccounu la sagesse de
scs operations.
L'Aulriclie , la Russie et le roi de Prusse avant
j(^?olu de faire vaioir leurs droits sur une partie de
la Pologne, M. do H?rtzberg prouva , d'ur.e ma-
iiiere incontestable (i) , ct par des faits averes , les
(i) Get ecrit a pour liir« : Expose des droits de S. M. le
roi de Prnsse , sur le duche dc PomorcUie et snr plusieurs
aiilr 's dlsiricls da Ilojaumc de Pol- guL" , ivcc les pieces
justlftcatives.
522 BLographie.
droils dn grand IFnVit'vic sur le diic'l'^ de. Poir.c-
rellie , dont ses aiicelres avoient ct^ depoiiilles, et
sur le port de la Visiule. II eut^ ]iar le liaile de
1773. J le plaisir de voir n'unir a sa palrie , 11011
seulement toute la Prusse occideiitale , inais encore
le dislrict annexe aiitj-efois a la Nouvelle-Marclie ,
avec la ville de Dav.tzlck. Par cette acquisition , les
parties essenlielles de la monarchie prussieniie furent
rapprocliecs , ct composent un corps de puissance
stable , en etat d'entretenir des correspondances
suivies.
La inort de I'elccteur Maxirailien -Joseph de
Baviei's (i) donna lieu a ces prc^tentions trop conniies
de la cour de Vienne, qui attirerent touie I'atten-
tion du grand Frederic. M. de HertzLerg porta le
flandjeau dans ces contestations , que I'interet per-
sonnel prenoit plaisir a rendre obscures ; ses in6-
nioires p^uvent etre rCijardes comme le plus ex-
cellent code du droit public d^Allemagne el de sa
constitution actuelle (2) 5 on y voit briller en outre
ime logique male , un ton ferme et noble , une
clarte et une precision qui sied si bien quand on
fait ecrire, parler, ou penser un roi.
Le grand Frederic, convaincu des talens eminens
de M. de H?rlzberg_, iie cessa de le consulter dans
toutes les alfraires d'etat. II eut la plus grande iii-
(i) Expose des motifs qui ont engage S. M. prussienne i
s'opposer au clemembrPiucnt de la Baviere. Consideration
sur ]a succession de Baviere.
(2) M. le comte de Hertzberg a compose d'aulres c^crits sur
eette discussion j qui £«ut dans ^1 iaiigive aliemande..
Notice sur M. de Hcrt^hcrg. r>i''^
f\ucncc sur les delineations qui se tiuivnt pendant
I'liiver a Berlin , et sur les r/'gociatbns qui pr6c( -
derent la paix de Tescl.en , a laquelle il ent ^ecre-
tcment une part si decidee , que le grand TrM- r,c
consacra, par un monument allegorique , la mc-
moire du nt'-gociateur ct de la paix.
Pendant le se^our que FnWric Ht a Breslau , ce
mouarque se plmsoit a aoitcr , durant son diner ,
des points de litlerainre et d'liisioire ancienne ;
M. da Herlzberg saisit I'occasion que, le roi lui
offrit enfin, de soufeuir Pexcellence de Ic^. langue et
de la littprature alieniande, dontle raonarque n'eloit
point persuade'. Celtj dispute donna lieu a une cor-
respondance entre le roi el son ministre, el produisit
la disserlaliou sur la litl('ral':re allemande, qui se
trouve dans le recueil de I'academie.
Le roi avant soutenn que rAUeniagne n'avolt point
t'le anci nnement la^ palrie de ces peuples qui out
delrnil Tempire ron.a'.u , M. de Herlzberg prouva
le coniraire, d'apres les anciens l.i.>tor;e;is , dans
un dis.ours qu'il piononra a racademi ■ d;?s science?,
le 24 Janvier 1780. IS'ous pouvons atErmer que celie
diss rtalion s-ra coiVipiCe pour une des n;e lleures
productions historiques- de ce siecle ; on y voit dis-
cutcr sans pe^lanlerie, sans une surcharge oiseuse
dc citations, wn poinf important d'ldsloirc tivs-dil-
ticile £i i'tlaircii- , el que pea de savans eussent ap-
prof;jndi avcc clartc et mtlhode. Depuis celte
/e,>oque^ M. de Hcrtzberg sVst impose I'obligation
di-^ lire lous les a-isd s dissertations intercssantes, la
p-bipart desL^uellds sout un compte rendu de sjn mi-
5^4 Biograp/iie.
nislere , et un tableau annuel des ameliotatlons
onlonm'es par ¥it cL'hic.
M. de Hortzbcrg le fait connoitre sous une forme
pivcieuse; on aime a descendre avcc lui dans tous
les details de la vie privee du grand Frederic ^ et
irouver I'ljomme sensii>le , simple, cccupe sans re-
lache du soin de multiplier sa population , en donnant
a ses peuples des mojens d'etre heureux. Quand on
a la connoissance morale du caractere de M. de
Herlzberg, on ne doute point que le ministre n'ait
souvenl dirige les vues bienfaisantesdu roi.
La publicile que M. de Hertzherg a donnee par
ses disserlaiions aux operations de la monarcbie
prussienne , a cerlainemeut conlnbu^ a lever ce
voile dont les gouvernemens de ['Europe crojoient
devoir s'envelopper 5 ils se mouvoient dans le cercle
obscur d'une politique sourde et secrete. M. de
Hertzberg a fait sentir qu'un bon gouveniement 5
loin de perdre , a tout a gagner par une sage pulili-
cile. Ces discours tiendront lieu d'annales pour les
dernieres epoques du regne du grand Frederic, et
bonorcront la memoire de ce roi, bien plus que de
vains elogesj M. de Hertz]5erg , en parlant de lui,
ne sait le louer que par des faits averc^s.
II est pen de rois qu'on puis5?e comparer au grand
Frederic; il est pen de minislres qui osent s'assi-
miJer a M. de Hertz ';erg. II en est pen qui aient
fourni une carriere aussi longue et aussi active. On
n'aura point de peine a croire que le ministre du
grand Frederic, durant un regne si aiiite, et doiU le
ministerc a etc tenu dans une continuelle observa.-
Notice sur M. de Hertz^her^. 525
tion, a da etro oc.up6 tout entier ; tiiai's c^ qui est
difficile a croire, c'est qu'il ait Irot've des momens
pour cuhiver les Ictties , pour enlr'prendrft des
recherclies qui demaudent toute ['attention d'un
Lomme oisif et tranquille. Ses com oi?>ani e.s econo-
miques et ses plans pour ran.elloratioii i\o rasrieul-
ture, feroient seuls I'eioge d'uu citoyen qui se seroit
consacr6 a une pareille etude : non seulemeut les
details de I'industrie nationale et du coinm rce lui
sont famlliers , mais il est encore le cn'ateur de
C€tte branche nourriciere de la prospi'rite desttals.
II entretient en outre une correspoudance presque
universellc dans toutes les ]-)ai-ties de i'Eiirope. II
regne dans ses lettres un fonds d'amt^mite qui an-
nonce un bon coeur , une ame droite et un carac-
tere uni , aussi eloign^ des pretentions du rang et
de la Kaissance , que de ces maneges avec lesquels
on parvient a ediafauder ces renommees viageres
qui s\'^vanouissent avec I'homme et aveo le credit
du moment. Nous pouvons affirmer que dans tout
ce que je viens de dire sur M. de Herlzberg , nous
m^ritons d'en etre crus 5 la correspoudance qu'il veut
bien entretenir avec moi , en offriroit des preuves
non (Equivoques ; mais , pour n'etre point accus^ de trop
de prevention ,je vais transc rire I'eloge qui en a ete
fait par un alleuiand, fameux par ses malliours, par
Treiik , dont le livr:' est dans toules lc5 mains.
«f A peine fus-je arrive a Berlin, dit-il, que le grand
et tr^s-renonnne miuisire d'elat, comte llertzberg ,
me re:;ul avec toute la bonte imaginable ; cjuiconnoit
comme moi cct liomme respectable , fchcil-jra I'elat
K26 B'ographie.
qui sait I'esfimer et i'e'n|-)loyev ; son liabilete clans
les affaires, son erudition litteraira et politique, sa
connoissaiice ties laugues et sur toulesles sciences dans
lesqnellcs il est tres-verse , sonl Ires-dlgnes d'ad t ira-
"lion 5 son parler est uiiv3 ^'locution epurc'e ; son carac-
fere noble , son coeur pt^tri de sentimens elevc's, sou
zele effervescent pour la patrie , son amour ; our le
sotiverain ne sont point fondes sur des prejuges ; on
le distingue enrore a son assiduite infatigable dans le
travail, a sa fermel6 mab' , a son amabilita dans la
socitHe ; sa maison est le premier bospice des etats ;
il parle au paysan avec affabilite , aux pau vres necessi-
teux avec bonle.
»L'ennemi de la patrie merae pent compter sur sa
parole ; la duree de la puissance prussienne est son
unique but , mais sou coeur est incapal^le de mettre
en usage la politique de Machiavel ; il sait eluder les
ruses de ses adversaires, recevoir les gens baulains
avec iierte , et eloigner avec prudence I'orage 5 il
jemplit par lui-meme tous les grauds devoirs de son
poste. II ne chercbe pas a mani fester sa grandeur
par de splendides repas , ni par de brillan^ Equipages ;
il enricbit I'etat autant qu'il peut ; il cousent a vivre
comme un simple citojen , pourvu qu'il voie tout le
mondehenreuxautour de lui. Brukbick, sii maison de
carapague pres Berlin , n'est pas Chanteloup, raais
c'est un modele pour les patriotes qui desirent ap-
prendre P^conomie 5 c'est la qu'il se delassy , tous les
niercredis , de ses grandes occupations. Ses services
importans ne content annuelleraent que cinq mille
6cus au moiiarque 3 il v'it avec econoniie , et il bribe
Kotoce surM. dc Ilertx^herg. [\2'j
lorsque la biensc'ance Texige ; alors il piiise dans sii
caisse , et non clans le tr^'sor piil)lic '\
Telles sont les expressions non sii'^p'^cffs d'lin
liommc qni , dans son otivra^ie, sarrifle loules les
considerations ^ la plainte et ou r ssontiinent de se^
inalheurs. Qui ne desireroil de retroiivrr h la tefe <]cJ
radministralion dc sa patrie un minisire cIoik^ de ta-it
de qnalif(^s? Qui n'enviera M. le comte de Hertzberg
alaPiusse?
x^Lpres la qnerellc sur la Baviere , M. do Ilert/.b^rg
€ut une brillanle occasion de donner luic nouvelle
preuve de son habilef(5 ct des ressonrces deson g"nie,
en fixant pour ain<i dire le s^stenie de I'Allemagne et
presque celui de I'Europe ; il discr.ta les droits de5
princes de rempire gersnanique, dtvi loppa los prin-
cipes flottans e! compliques de e vaste corps dV'tat ;
et de cette di-;cnssion il^en est resu't,4 V union germa-
nique J dont le but est de conserver I'cquilibred^
I'empire. On ?ait a^ ec quelk^ clialeur il a negocie ,
lant eu Hollande qu^a la cour d.^ France, pour piv-
venir les suites d.?s dissentions qui troubloient la palx
interieure des Provin es-Uuies.
Lor.^que le *!,rand Frederi- senllt approcher le lerme
de sa vie, il a])p?!a , six seaia^ines avaiit sa mort ,
ISI. de Herizberg a Polsdam,oii il s'entretcnoit tons
les jours avec lui. Ce ministrey resta jusqira son dvT-
uicr mo nent , ety recueillit le dernier soupir du roi.
Frederic-Giiillau'ne a suivi, d'une nianiere cjuifait
honneur a son coeur , les int?ntions de Fr/deric le
Grand, en conferant a M. de Hertzberg son ordre de
TAi^le-Noir. et eu lui accordiul toute sa confiance 5
SaS Biograpkie. ^
M. de Hertzberg I'accompagna dans toutes les pro-
vwices, ]-our y pomvoir a la solemnito dosliominages
qiroM read a ciuique roi , n son avenemonl an tione ;
il alia, en qualitv' decomniissciire prini^ipa!, cnPomc-
ranie, pour (aire prcter au roi le serment da cette
province. DiiTerenL'S preslaiions fnrent successive-
meiit faites aver, beancoup d'oidre , par les sages
mesnres que M. de Herlzberg avoit prises. II fit
frapper a ses d(''peRS les niedaiiles dii regne, qu'il dis-
tribuaen Prnsse , en Pomeranie , en Sil 'sie, et dans
relec-torat d^', Brandebourg, oii il remplissoil les fonc-
tions de Ghaffcelier. Le roi hii confera, a son retour,
le titre de coi;>le, et, pen de t mpsapn^s , le nomma
curalenr de I'aca.'iemie des sciences ; la voix publi-
que lavoil deja appele a celte prcsidence , dont il
eloit si digne. Les sciences et les muses oni rarement
des protechHirs d'un mcrite au;-si eminent.
Depuis ce temps, sa favear chancela qne^qnefols ;
mais son merite re fut jamais ni meconnr} , ni eclipse j
-et en monrant dans un age avance , il a emporte les
regrets du royaume et meme de la coiir.
M. de Hertzberg est mort a Berlin , le 27 de mai
1795 , a la suite d'une raaladie de nerfs , ag6 de
soixante et dix ans. II avoit e^e miaistre pres d'lui
demi-siecle.
Cette noiice est tiree d'un ouvrage nouveau par
M. de Meyer J dont voici le titre : CEuvres polLti-
ques de M. le co'tnte de Hertz>bergy miaistre de
S. M. le roi de Frusse ^ precedees d^une notice
sursa personne et si.ir Les emplois qLi^lL a succes-
swenient rempLis ; 3 vol. S.*^ , prix 3o 1. , et 36 1.
franc
Notice sur M. dc Hcrt:iberg. 529
franc de port par la poste. Berlin, et se trouvc a Paris,
cliez Maraclcm , rue du Cinutiere-Aiiclie-dL's-Arcs ,
N.o(j, ail troisiome ( 1795).
Le ]5rejnior volumo coiilleat des dissertations sur
divers objels (U^ politique et (riiistoir.^ ; eiles sout
trailecs avec autant de phiiosophie que d'erudi-
tion , el n'ofrreal que de grauds resultats, des bases
fondaiaeutales el des raalieres iiiiportantes et pro-
Ion des.
On tro ivc dans le second toutes les pieces publiqnes
de la cour de Berlin , depuis 1756 5 1'iiistoire poiilique
de la guerr3 de 7 aus , celle de Bdviere et du par-
tage de la Poloiine , et toutes k's graudes o|)erations
du regne de Frederic IL
L3 troisieme renferme des pi>ces et actes diplo-
matiques. 11 est termine par deux memoires , I'un
sur le vrai carav-^tere d'une bonne hisloirc , et I'autre
sur I'administration intf^rieure de la Prusse pendant
I'annee 1788. Get ouvraze offre des notions utiles
aux diplomates et aux liouimes d'ciat.
A il C li. /E O L 0 G I E.
JExTnJj'r cVuiie tcttre de J. J. Barthelemy y
an Comic d' A hues son- ^ sur les aiiiiquLtcs
de La France merUiionale.
J\! ous n'avons pas voulu pc'Mi^'trer en Italic, sans
Jeter un coup d'ceil sur b^s anliquites (|ui sidj^isteut
encore dans les parties mtridionales d.' Id France.
Tonic 11. L 1
53o Arclia^ologie.
ALjon, nous avons vii plusieurs inscriptions qui out
dt ja ^te pnbliees , et d'aufres qui ne Tout jamais 6t6 ,
line entr'autres d'un particniier qui faisoit tout le
marili , il naissoit le inaidi , il inoaroit le n ardi , il
s'efoit marie le mardi , elc.
Nous avons vu l'arc-de-triomp1ie d'Orange ; il est
com] os6 de Irois arcades el charge de bas-reliefs
representant des combats, des trophees , des instru-
mensde guerre , des tridens, des bees de navire, etc.
Xes antiquaires sont partag's sur le temps et Pobjet de
ce monument ; les utis le rapportenl a Marius apres la
defaile des Cimbres, d'autres a Jidcs Cp?ar apres la
conqucte des Gauks ; d'autres enfiu an siecle d'lla-
drien. Le gout du Iravail et d'autres petiies circons-
tances nous out fait juger que la s.conde de ces
opinions etoit la phis probal-le. Ce monument a ete
grave plusieurs fois , et ne Pa jamais et<'^ exarJem.ent.
On Irouve encore dans cette viile les reslps d'uu
theatre an^nen ; les gradins sont presque tousdctruits ,
mais la scene est demeuree dans son entier. C'est uu
niur d'environ no pieds de hauteur et de pres de 828
de lom'ueur, orne d'arcades , et co.!!struit avec des
pierres d'environ deux pieds en ouarre , taillees et
imies ensemble avec un artinfini. Le gout, la soU-
dil^ , la grandeur , tout se trouve reuni dans ce monu-
ment pr('cieux.
Si I'impression qu'ou en reroit pouvoit etre effacee,
ellele seroit sans doute par le pont du Gard et les an-
tiquitGS de Nimes.
Le pont est un ouvraf!e des plus grands, des phis
beaux et des plus hardis qi.e les RomaJns uoiis aieut
Antlqultes de la France mirldlonale. 53i
laiss('^s ; et I'imngidation est e{fiajee, quand on pense
que ce moiiiiineiit n' 'toit destine qu'a SDtitcnir tin
atjuediic ])onr transporler la pelite liviei'/ d'Enra
aupres d'CIzes jiisqu'a Niines, ou I'on ir.iuvoit I'Aiil-
leuis les eaiix abondantes d? cetio font.'.ine c/'lebrequ^
ne farit jamais et (}ui siihsisfoit dii temps des Roniuint^
Maisc'est a Nimes prinipa-emnil , ou tout devicnt
«n o! jet d'admiraffon pour \\\\ ai;iiquair(\ C'est la
qu'oD. trouve I'ainphillit'atre ie iiiieux consaivt^ de Ions
ceux qui subsist nt, et celte maison quair(!fe cpi'on
regarde depuis long-teinps co.unie Ie chef-d'teuvrede
rarchitectiire ancieiiiTe et Ie desQspoir de la ninderiie.
Cependan on ne jouit de ce spectacle qu'avec une
s'^rfe de douieur. CJn peuple irossier, lo/' dans
I'interieur et sur les gradins nieme de I'ainphi.litaire ,
Ie drgrade sans cesse, et detruit inipun^nienr ce que les
flaninies avoienl epargne tlu temps deCliar'es Mnrtel.
Dans lis tra\-au\ de la nouvclle fontaine, on
a vu des onvriv-rs barbares rautile ■ des sEatues , des.
Fno^aiques, et rLM)longt'r dans les londemens des ins-
criptions que Ie h.isard lenr laisoit d6cou\Tir. \a?.s
sbins de M. 'Ie S!. Priest enoutsiuve quelques-uiies
de la iurour de ces i( ouociasles ; rais ces sums, i|ui
s'etend^iit sur tons les mouimiens de Nimes, ne sau-
roient tn'ompher dj la negliv^enra dus s;:i.ahernes.
Plusieurs personnea d-^ gout it digues de foi nous out
attesl^ qu'oii a vu quelquefois des enTans assit^ger la
maison quairee , el detruire les ornemeiis d'archi-
teclure qui la decDr.int , pour y prendre des nids
ti'oiseaux. On nous a nioi)ti\'; les traces de ces di. -
prcdatioiis \ nous avr^ns vu Ivi belles f'eailles d'acau*
Li i
55^ 'Arcluvoiogie.
tliC qui forment fes cliapiteaux d?s coloiines, brisees
a coups de pierre, et nous avons irgrette qu'un si
heau monument ne ful point a ecu vert de pareilles
insultes. Ind^pendamment des outrages des hornmes ,
la maison quarrec a beaucoup soufRnt des injures dii
lemps ; un (\es, murs a perdu son a-plomb dans Ja
paiiie du milieu , vraisemMablement par le toit dont
on I'a Tecouvert,et paries ouvrages qu'on a construits
en dedans de I'edifice, lorsqu'on avouluen faire une
('glisp.
En sorlant de Ninies, nous avons vu a Si. Remy tui
arc-de-triomphe en I'hov-neur ^'un general romain ,
et son lombeau place lout auprcs. Ces deux monu-
mens , dont on n'a donne que di^s dessins inforraes ,
meme, dans les memoircs( de Tacademie des belles-
lettres 5 meriteroienl d'etr^ dessines plus exactement,
etr. ...
De Marseille , le 3o aoijt , lySS.
AddiTioisi,
Les plalntos que Baribele:ry fait au ministre, dans
cetle icltre , sur les de^graclations de la maison quarr^e
a Nimes, C-loieiit Ires- fondles ; mais la gen^rosil^ de
Seguier a depuis tout i-^par^. I! entendit un jou*-
3nettr3 aux enclicres ])ou»- i5oo liv. la reslauration de
ce monument. Jr-ipp6 du danger qui Je menacoit , il
parla au conseil de ville , et fit cesser ces eacheres. En-
suite , malgr^la modicite de sa ibrtune , il en emploja
plus 6.^ 14,000 liv. i faire les reparations ncfcessaires ,
«ou6 «a seide direction ; et , }2,race a ses soins , ce 1 eau
znonumeui est aujourd'hui en bon c'tat. StSguier avoir
^llemeatfollicitu'le d^'biaiemeat des arenes, et offert,
'^AiitiquiUs dii la France nicrUlLoiialc. 533
pour y contribucr, deux inaisons qii'il possedoit dans
reiict'irite. Cl^ lie fiit iicanuioiiis quo peu dc te;nj)S
avarit ]a r^xohifioii , qii'ou se d(;tormiiia a celte vv.~
treprise si desir^^e par Bartaeiemy ; j'i^iiore jus^^u'ou
on I'a po tissue.
Dans des notes manuscritcs de ce dernier sa^^lnt ,
on troiive luie addition a ce qn'on vient de lire
dans sa lettre , sur les anli^uil^'s de Saint-Remy , Tan-
cien Glanutn. II explique rinscription da muusole
on cdnotaphe , SEX. L. M. JV'TJEI C. F. PA*
RENTIBVS SVEIS , j^ar ces rnols , SexUus ,
Lucius J, Marcus ., Julll Call filii ^ parent Ibus
suis.J)cL\\s ce c;inton , on ecrivoil , d'npres la pronoii-
cialion , EI pour I ; riiiscription de I'arc d'.i Saint-
Cl:amas en fournit la preuve. Celui da Sainf-Remy
avoit ele erige en rhoiineur de Cains Julius , auqnel
ses trois fils, Sexlius, Lucius- et Marcus elcerent le
tonibeau qui est a droile aupresdu monument de sa
gloire. II est place sur un teitre qui domiue une
grande plaiue , dans laquello vraisemblablein?nt ce
Julius avoit remporto qnelque avantage signale .vir
les ennemis. L'arc d'Orange sa trouvea-peu-pr^sdans
la nienie situation.
Ces deux arcs et celui d:^ Carpentras , cpntiiuic
Bartlu'lrniy , sont du memo travail ct du nienie gout.
Pour fixer le temps oii ils ont hx construirs, il faudroit
connoitra Page de ce CaVus. Or uons voyons sur les
medaille^s attribuees vulgairemcnt ii C^sar, un tropl:<:^e
orne de boucliers et d'autres armes Fort semblables a
celles qu'on Irouve gur lo« monumeiis dont il es( ici
question , lesquelles portent cetle legende ! IMP.
LI 3
534 ^ArchccologLe.
Cv'ESAR. Peut-elrc ces medaiiles pourroient se rap*
poi tor a revcLeinont cjui a fait elever ces arcs , et
qu'elles appartieiment a ua cUs ancelres cle Juks
Cc^sar.
MejiArques sur ii/ie l/iscripllon decourerle
a Ninics'.
Uatvs Ips malli;>urf^ux fronblos qui ont apitc- la ville
d?Ni., es, qiielque.s catliolicjues s'etoie.it vefirjic^s et
def:'r.(ius dans in:e tour voisijitj de la salle de spec-
la-.-le ; pour safisf;iire le peuple , on abaltil, en 1790 ,
cetic tour, qui cachoit ujie ])aitis de inur aiiliquc?, et
line porie an-dtssus de laquelie on lisoit rinscriptioii
ci-Jointc.
La premiere li-ne de cette inscription n'ufifi-e
auciine diiliculte irammati' ale. II n'en est pas de
iT'cnie du dernier n ot de 'a seconde : COLonloi
DAT ; ceia na ire paioit pas du style lapidaire. II
fciudruit (|u'il y eut EEG.l.T ou P.EFECIT , comme
Fun \oit S(;r lous -ei n.oiiumeas de ceile esjiece.
D'aiilenrs on pent cruire qu'U aianque a la liu qucl-
ques mots ow letlres. Ncaumoins le sejis n'en est pas
Oouteux 5 et nous apr>Luoas par la , qu'Aupusle fit
<f-lev»^r a se^ dq ens les mars et les portes de la ville
ds Nimes.
Les litres qu'on domie a ce prince , mdrilent
quel;;ues observations. Je remaiquerai d'abord que
c;(!iui (X*IniperLiUjr e^^t ruclcjueibis suivi d-J (,1'JiTres
roniains J mais alors A se hoiive icp;'i6 dans .'ins-
ciiption, et pU.ce .siez ordiiiain-nK'nt apies ia puis-
sance IribiUjiLiciiiie : ce qui bO \ oit entry autrcs sur
|. llldcfoj Sncyd.
N
'I^PWEST-VIfl
7
injcri/ition t/c
nu^oj SncyU I U. p . .f .74 .
r
INPC/^£SmDlvhFA'(»S.COS-XI-TRlBMESTVI[I
PORTAS-1
:)S- COL DA'tc-
'_-^
in,\-riphi>n Jc /a vor/e Jc Nu
I
IncrifUoii de N lines. 535
celledeNnples, TLUBVNIC. POTEST. XXXU ,
IMP, XVI MVRVM TVRHIiIS^Vh: llEFE-
CIT (i). \,K^^ habilans (L- Nini^s negligerent celle
ri'petitioii , sans doute glorieuse, puis^iu'eile df-siaioit
le nombre d;js victoiies. A celle ^po.ue , Augusts
avoit deja rec-u plusieurs ibis uu pareil iioiuieur ; maii
ce mot n'ctuit deveiiu son jn-cnom que Ireize ans
auparavant I'an 720 de la fV)iuiatioii de Pvonie(2).
Cependant , ni la dale aiouk'e au mot iniperator ^
ni celle du consulat iie servcut a delenniiier les cve-
nemeus publics 5 cei a\ anlage est da a la connoissance
de I'aniiee dans laquelle ies enipereurs exerroient I3
puissance iribnnitienue. Getle anm'e,toujours marquee
sur leurs monnmeus, est d'une grande ulilit.^ pour la
chronolo-ie(3).Toutefoisilscoiilinuoier.tad..il. rdeleur
dernier consulat ; de maniore qu'entre le XI et le XII
d^ ceu.\ d'Augnste 5 il y a un esnace de dix-sept aus ,
lequelse irouverempli par autaut d'ann^es d'exercice
de la puissance tribunitienne. II est fait mention de
la VllI-, et du XI^ consulat, sur Tinscnption de
Wimes : ce c(ui prouve qu'elle se rapporte a i'an 788
on 73'-; de la meme ere , ce prince ayant ete , liuit
ans aupaiavant, invesli de celte puissance pour touts
sa Vie. Taclle dil qu'Auguste eul , trente-sepl aimees
consi.'cn lives, la puissance tribunilienne (4) : ce qui
sj Irouve conlirnie par Tiuscription du pont dc Ri-
(l) ^(j. Spot! misc. p. 265.
(li) Di'j Cass.l. XLlI,s. 41.
(3) ScNViirU dc ^-Jug. Cas. Tiib. pot, s. 20.
U) Auu.l.I.c. IX.
"36 ^Archcco Logic.
mini , et par I'epoqiie de sa niort , arrivee Tan 767*
On cloit encor^" observer que ces annt'Cs tribuni-
tieuncs fl*e!oicnt pas comme cfelles des autres charges r
dans )esquelk i on cntroit en fonction 011 aux Idesde
fl«^cembrc on imx Kalendes de Janvier ; l(.\s eniperenrs
lie datoient Pexercice do leur piiissance iribnnit.enne
qne du jour oil ils y avoient tte promus. Un passage
uc VelifrusPcir:ercaUis fi) nous ajjprend qu'Auguste
i^'en ful revc'tu que le V des Kalendes de juillet ; de
sorle qu'on ne peiit fixer precisenient ia date de Tins-
crlption de Nimes , laquelie aura ete posee on les six
derniers n:!ois de I'an 788 , ou les six premieis de
I'dnn^^esuivante. Ce prince efant mortle XIV des Ka-
lendes de septembve (^), on peut done supposer
qu'il avoit commencd la 38.^ aniiee de si puissance
tribunilienne. Il ne s'en demit jamais, il la partagea
seulement d^abord avec Agrippa , ensuite avec
Tibere. Mais il conserva loujours en entier le sou-
verai-n ponlilicaf ^ dont il entra en possession apres la
iiiOrt de Lepide( 3 ), postcrieure de troisans a Tins-
cription de Nimes , ou par consequent le tilre de
Pontifex-Maxiinus ii'a point ete doniie h Auguste ,
comme sur tous les autres monmiiens, depuis cette
epoque. Cclni de Pater Patrice ne potivoit ^ga-
leivient lui etre decerne , puisqu'il ne le prit que
I'an 75ii , suivaat laremarquedu savant Noris(4}.
(i) Hist. 1. II, c. cm. F'id. Hyppol. op. t. I, p, ic^
i-S) Dio. 1. LVI, s. 3o
(3) 33io Cass. 1. LIV5 »• 27.
(4) Ccuolaph. Pisdu. c. Hi_
Inscription de Is tines. 537
Les murs, dont il est qucslion dauscclle Inscription ,
sont ceux de I'ancienne enreiiile de la ville de Niuies.
Ellc avoit environ trois mille toi^es do circonfcTence,
si, coinine on le croit ordinairemen.t , la Tour-
Magiic e;i faisolt parlio. Ces nuirs fureut elevt's
k)rsqu'Aii<^nste y envoya nne colonic romaiac , ct
detruite dans presqne tonte son etendne par Charles
Martel,qui,eu737deJ.C.^milh'feuauxportcsctc\nx
arenes(i). Ge qui en reslcdul ctie incorpore dans !a
iiouvellB enceinte que les habilans formerent , d'upi os
la permission qn'ils en obtinrenl par nne chartc par-
ticulicre do Raimond V , comic de Toulonse(2}.
Cesdernicres murailU'Sont snbsislc jusqu'aujonrd'hni,
Tnalt',re les nouvcUes foriifical ons qnc Ic due do
Rohnn fit construire a Nimes , et la demolition qui
en fut ordonn^c par Louis Xllf , en i63o.
La gdnerosite d'Augusle a Tcgard des habitans
de Tancienne ville de Nimes, devoit n^cessaircment
exciter leur reconnoissance ; el il est trcs-probable
qn'ils la pousserent , dans cet age de servitude,
jusqu'a I'exprimtr par des momimens d'une cou-
pable adulation. Ce qui sembleroit favoriser les ing^-
nieuses conjectures de Sc'guier sur la dedicace du
temple appele vulgairemeut 31aison quarrce. II
s'est flatte d'y retrouver sur le frontispicc les noa)s do
Lucius et Caius ., His adoplils d'Au^iuste. E:i ap-
plaudissant a la sagacite de ce respectable savant, jo
n'ai pu me dissimuler les dilllLuit^s qu^oU're son
(1) D. Valss. hist, dc Lang. t. I , p, 40^.
(2) Menard , hisl. dc liinics , i. L
538 Airha'ographie.
explication. On iie trouvc pasd'exeirple cPiin leinple
consacre aux fils ou aiix j^difs-lils dcs empereurs ^
pendant Ic ngtie de cciix-ci , dont il f'alloif lu'ces-
sairenienl avoir la permission , el ]v doule qu'ils
I'eussent von In donner. Qnoiqno la villc do Pi*e
ii^oubli :t rien pour houoicr la memoire de Lucius i t
de Caius , dont le premier ^toit son pairon , e!le ne
leur (^leva point de temple , raaisnu simple cenotaphCy
n^ec un autc'l ])our y iaire des Jibatioias , dts uf-
frandes et des sacrifices funebres (i). Parmi les
nionumens qu'Auguste et Livie corsacrerent a !a nie-
iijoire de leurs pelit£-lils, le principal qncnousremar-
qnonspst nn I;ois d'arbres touiours veris,appele Nenius
Ccesamm {£). j^Udle partonne voit c[ue des temples
leur eussLiit eUi dedies, ni pendant leurvi« , ui apres
leur mort. Les vifs reprets que CMusa li perte de
Germanicns^ dans tout i'erapire , dont il etoit la
j^loire et le soutien , ne lirent pas imaf^iner de pa-
reilles consecrations , uniquemenl reservees aux
enqjereurs et aux imperatrices.
On nie repondra sans doute que ^'argument dont ie
me sers ici n'etant que negatilV, ne deanit point
I'explicat on de Seguicr. En veriie , je serois bien
portL^a me la persuader moi-meme ,si lous les trous de
la frise et de i'arcliitrave eussent eie employes dans
la combinaison des le.tres, el si par-la I'iiiscriplion
qui en r^sulte ne nous preseutoit pins aucun^ diiiicult^.
Mallieureusement il reste nn ii,raud nombre de ces
(i) Decret. Pisaii j ad L. Cics , etc.
C^) t^uL Nuru Ceiiotapli. fh. C XVIIL
Inscription dc ytmes. .').'^9
trous, sur lesqiiels Siguier s'expHque en c<*s term fs :
« L'ouvricT ii'ayant pas fait lei trous h la liauleur
» proportioniicUe des tenons, avoit tfe ob'ige cWn
» iaire d'antres loisqu'il voiilut i^cser les lettrf^s ,
» atin qu'ellfs ne fii?sent iif Irop haiites ni tro))
» basses .... cela ne nic causa, ajonle-t-il, plus
« de peine, ce fut une nouvelle preuve rie ma de-
») couverle (i). . . » N'en concluroit-on pas le con-
traire? L'artiste avoit sous les ytux les letfr.'Sj et
les pla:;oit les unesa}. res lesautres ; il pouvoit prendre
mal ses niesures pour une ou i'.eux : nmls il est dif-
ficile de croire qu'il con'inviat de s« tromper jiisciu'a
la fin. C'est sur-tout la premiere ligne qui se troupe
surchargee de ccs faux tiousj et on j voil m.caie les
traces de lettres diiFtTentt's de celles que St'i^uier a
cboisi.s. Je dois le dire pour son bonneur, il n'eioit
pas lui-menie anssi cowvaincu de la certitude de sa
decuuverte, qu'il le paroit dans sa dissertation. Les
magislrals de Kimes en ajant t^te frapp^s , et la
crovau'i cerfaine, iui prcposerent de Iaire r(^^tahlir,
sur la facade du temple , I'iiiscription t^-lle qu'il
venoit de I'iinaginer. II ne voulut pas y cons.ntir ( t
les exliorta a ne point adopter si l^^ren^ent son expli-
cation. Ce Irait^caie je ticnis de lui-meme , e.^t I'effi't de
celle sage meiiance etde cette rar." mode^tie dont il ne
se di'parlit jamais. Les doutes sur sadecouverte I'em-
pecb>rent meiue d'en puljlier une autre de ce genre i
et faite d'apres les nieir.es procc'dc's ; je \ cnx parlor
de cc^le de I'inscription t[u'ii suppoj.oii nvclr exiite
au frontispicc de I'ancien temple da Vieuue eu
(_!') Dissjrt. iur la mjibcu '^uarrce.
540 ^ArcliceoLogie.
Daiipliin.^ , cLargc jadii en t'glisc , sous le noili de
K. 1). de la /7e.
Uii voja^cur tjes -instruit , Henri Swinburne,
tipres avoir expose ropiniou de Seguler , ajoiite :
« Cos ar;^uiliens sont plausibles; mais , i mon avis ,
» il en esld'autres qui niG paroissent sans replique,
» qu'on pi lit deduire d'un e; amen exact de I'inte-
» rieur do ce temple , et qui les dcfruiscilt entiere-
» ment* La comparai.son que j'.ii iaile entre ce
> bAtinient et les nionunicns leconuus du siecle
» d'Aupusle 5 me persuade absohnnent -qu'ils ne
« sont pas du meme temps, et qn'il s'est passe an
» nioins wn siecle entre les didit^rentes epoques de
* leur conslniclion. Dans la maiscn quarree , j'r<p-
jf) perrcis luic p'ofusion et nne recherche d'orne-
y> mens qu'on ne Ircuve' point dans I'archilecture
» plus 5iinpie du siecle d'iki'guste ; il y a aussi une
* grand? dilTcience dans les proportions. L'expli-
« cation de M. Set:,uier auroit en plus de poids sur
y> mon espri , si je n'avois pas vu claiiement que
'^ la disposition de$ trons n'tioil pAs toujours nni-
" forme a la rc'petition de la mcme let(re , et qu'il
« y en avoit aussi pkisieurs dont il n'a poisit fait
» usage, en placant les lettrcs. 11 rend raison de
5) cetle redondanre , en suppo^ant qn'iis sont ce que
>j les peinlres appeilent penttmentL ^ on des erreura
■y> que les ouvriers rectifioienl ensnite , en en taillant
» d'aulre^ (r) «. Les observations de M. Swinburne
sar le temps do ia coustruclion de laraaiyon quarree
»era3 paroissent pas, comme ^ lui , sans replique^
Inscnptlon de Humes., 5:^tf
!es artistes ayunt reconnu cet Mific© disne , pav la,
justesse de s.'$ proportions , .dj Ti^-ociuc^ 1 1 plus
brillaulc de Part cbez les roaiains, Mais, fiit-il ,
suivaut raiicicniio opinion j du rigne d'lla-
drien , cela viendroit eacore k Tappui de mos rc-
marqiiee, qui n'oat point entierement cchappe a la
sagacit6 du voyagcur ani^lais.
Peut-6tre que des inscriptions dinercatesr ont ^te
pos{'es succeislveaient h la frisa do la maison
quarree ; ce qui aura ^te la cause d^ co gi'and
norabre de tr©us , et de la diHijuU^ qu'il y a da
les employer tous. D^ pare'llea variations sur les
jiionumcns publics , ont <'t6 PefTet de la kaine ou
ctilui de I'adulatiou. L'bistoire en ofire un grand
nombre d'exemples qu'il est inutile de rapporter ; o:i..
se conlentera ^eulement de remarquer qua dans c«
der,nier cas le changement devpit etre adopts d'au-
tant plus volontiers qu'i! c^pargnoit de ^raudi frai«.
de construction. S. C.
LITTERATUKE GllECQUE.
Vie de Xenofhon j suivie (Vun ecctraii kLsto-
rique el raisonne de ses oiivrages : ou se troupe
La traducUon de pLusieurs opuscules de cet
auteur y qui n'oal pouit encore pa ru en J^raa-
cais J tels que fapoLogie de Socrates j terminee
par la traduction complete et nouueUe i du
Banquet de JLenophon, A paris , chez Gail , au
coll^gc3-de-France 5 place Gambrai, et Nyon jeune ,
li! raire , pavilion cles Quatres-Nations , an 3/' da
la Republique Francaise , in-8.o de 5o pages.
jliN rendant compte de la traduction du professeiir
Gail , dont les amaleurs de la litteratnre grecque
desirent la continuation , nous avons atinonce qu'un
savant disiingue, que les lettres disputt-nt aux mathe-
matiques ^ le C. Fortia, s'occiipoil d'une vie de
Xenopbon et d'une notice de ses ouvrages ; cette
vie a paru depuis , c'est celle dont nous publions
I'exlrait.
Ce sera un fort beau pr6ambule a la traduction
des oRuvres comyjletes de cet ecrivain grec , pbilo-
sopbe , lilti'rateur et guerrier. Le citoyen Fortia a
enirepris un travail fort etendu sur son auieur, et
cette monograpliie d'iiistoire littcraire est un des
ouvrages Ls plus curieux et des mieux faits qui
aient pari! en ce genre.
Le C. Fortia rend compte lui-nieme , dans uue
courle preface , des principes qui I'ont dirige pour
Notice lies ouvrages de X^nnpfwn. r^jfl
Pex^xution. II a rejete toute citation , tout apparcil
scieiitilique. On ue pent nit r ce] endant que , sans
imiter ceux qui font , par cLs cital'ons multip'iees
el fdoiles, un grand etalaue d'tTuilition , il est utile
d'indiquer avec precision les passages sur le.squels
on a'ppuio ses femaic[ues , pour leur (iorincr plus de
credit, et eviti r des poines a cen < qui out le temjis
d ! recourir au< sources. Sans parler des savans du
dernier siecle , de reux de I'Allemagne et do I'Au-
gleterre, cjui out rendu auv lettrcsdesi ^^-raud? se;-vices,
et qu'on affecteeu grneral uu peu troj) de ni('priser , le
celebre traducleur cVHcrodote , le C. Larclier ,
rimmcvtel auieur des P'oijages du jeune Ana-
ckarsis ^ Bart:,eleiTvy , se sent asiervis a cef usage,
et leur conduite a cet egai'd peit faire autorite.
Le citojen Fortia a suivi ave.. rai.son la mediode
du profond lielieni;t8 LardiLn- , en ecrivant la letLre
s a la fin des mots dont la tenninaison est en e ,
cowwnc Soc rats sS\ J AsUagcs yil faudroitquo Vow jnit
aussi dive: JMaiidane ^ llerodotos \ mais ces ter-
n\inaisons seroieat trop contraires a rnsage» Cepen-
dant celui de denaturer ainsi lesnoms projiresest Ires-
inal imaging, il leur fait p-rdre la physionomie da
leur pays ; il est certain cpie Vcs fXm Grccs et.
\lls des Latins se coiifondent dans notro e nuit't ,
et que , sans nne instruotion preliminaire , on ne
devineroit pas lecjuel d'Arsace , dL^ Laius on fV Ho-
race est perian , gr^-X ou roinain. O i ue >auroit trop
dire pourquoi on ne prononc.^ pas VirgdiLLS roaiiiui
on fait Brutus ; uiais un ouvva e renipli dj ces nonis
rendusa leur termiuaison priaiitivj , devien Iroit au-
544 Ijitteratnre prcquC.
joiird'hiii clioquant par le roncours Irop nombrPn:isf
tie SODS Insolites^ il vant mieux vSe conformer .• iix
usages recus. La rectification dc^ja introduiie par le
C. lurcher pent elre jiourlant admise sans incouve-
uienl , sur-loiit nyant I'araiitage d'avoir 6le aiissi
adopt(^e par un litteralcur du iiKhile du C. Fortia.
Revenoiis a son ouvrage.
II comnirnce par nn expose tics-bien foit de la
vie de Xcnophon , de ses etndes i)hiiosopliiques sous
ia conduite de So rates ^ de ses e.vploits niilitaires ,
de sa fameiisc' relraite a la tete de dix m;lle Grecs
fju'il ramen€ dans leur palrie,a travers niilJe dan-
gers ; de ses travaux ]KiMr venger la memoire de
son inaitre clieri 5 (':e plu^ieiu's des act'oiis de sa vie
priv t e , ct enfni de sa n^ort , dor.t ii fixe I'epoque
a I'annee 3^9 avant notre ere. II discute ave ^ aii-
tant d'erudition que de clarte les opinions des savans
qui ont eu sur ces eveiienicns (\e^ idres differentes
des, siennes. Prinripalement celle du C. Larclier ,
cpii n'admet point qne Xeiioplion ait ete saiiv6 par
Socrates a la batail!e de Delium , parce qn'i) cette
epoque il ne devoit avoir que cinq ans ; chacun
d'eax se fondo sur un point de cbronologie qn'ils
etablissent difl 'remment ; on sait conibien il est dif-
ficile d'accorder entr'eux les chronologistes , les
^tymologistps ct les gcologues.
Une autre opinion qne le G. Fortia atlaqne t'^ale-
ment , c'est cclle de Voltaire sur la retraite des dix
iiiille. Celui ci n'altaclie ]3oint autant d'iinportancs
que les antres ecrivains a cette action niilitaire ; il
croit la retraite de Prague , par le marecnal d3
Bel.'sle
Notice des outrages de Xcnophoti: 545
Belisle tivs-supuri.ure ; le C. Forlia regaidc , au
coutraire ,1a ic'lraitede Xuioplion coinine iin d 'i |.la^
hauts fails qui aient pu illiK.iier 1111 j.c::eial ; il y
a , je crois , iiiojeii de les concili.;r tons lus deux ;
la retraite de .X^nophon est uii des grauds evene-
mens rnilitaires de i'auliquite , considtiee rclative-
meiir aux connoissances qu'on avoit alors de la tac-
tique , et I'opin on de Voltaire ;^'est ui:e erreur
qu'eu ce qu'ii I'apprecie d'apres les coiinolji^auces
mo denies.
Le C. Fortia relevc avec les t'gords dus a u;i grand
^crivain , quelques erreurs cchappees a Voltaire;
mais son euthousiasme pour son auteur le rend
quelqiiefois injuste a son tour 5 ainsi il reproclie a
Voltaire d'avoir dit que Xenoplion (f-toit un apen^
lurler. Lui qui^ dii-il , avoit decouvert le premier
ie mojen de r^diger en corps de morale la docirine
deSocrates ! Cependaut Volltiiry n'a suremen' pas en-
lendu ce mot aveiitunerd-ans lesensbas et abject qu'on
lui donne pour designer un liomme qui fait loutes
sortes de metiers , entreprend toutessorles d'affuires
pourvu qu'il y trouve son profit ; mais ce mot a
toujoursservi a designer les hommesqui , conduits par
une inquietude naturelle , vont ch^rcher les combats
dans une terre ^trangere, et ^ en ce sens, Xpnoplion^
qui abandonne sa palrie et s'arrache a Tamiti^ dd
Socrates pour servir dans i'armoe du roi de Perse
peut meriter le noni d^aventurler.
Si je voulois discuter a mon tour les dilTerentes
opinions disttut^cs par le C. Foriia , il me laudio.t
Tome XL M m
546 Liticratitre grecque.
faire aussi un livre , et ce ne scrolt pas avec aiitani
de talent et de Succes.
De la vie de Xeiioplion il passe a une notice de-
tailL'e de ses ouvivigps, de leurs dlflf.':rentes editions,
des dilTerentes Iradiictions laliiies et fran. aises qui eii
ont ete fc!it>?s , dv s imitations auyquel'es ilsontd nne
lieu, desdisserlatio; sdont ilsontete I'objet. M.HarleSj
dans ie tome troisienie de sa nouvelle t^dition de la
Bii.liolbe que grec ue de Faltricius, avoit deja en-
trepris le meine travail; niais celuidu C. Fortia a
I'a antage d'etre complet relativetnent aux ouvrages
francdls , et ce litterateur a su donner h son livre une
forme qui pent le faire lire avec plaisir et avec in-
ti'ret. II est mal.;eureux qu'il ix'y ait pas fait entrer
un extract des travaux des Anglais , des Allemands ,
des Ita'iens , etc. sur Xenophou. Ce defaut rend en-
core celte mouograpliie d'hisloire lltiv'rnire incom-
plete , et ob iv^era tou;olirs le "Franrais qui voudra
counojtre ce que les elratigers out ecrit sur Xeno-
plion , de rt courir a la B bliotlieque grecque, si consi-
derablera> nt enricbie par le savant ITarlef..
En exposant son opinion sur les ecrits relatifs a
Xenophon , et les motifs qui lui font prc'^ferer une tra-
duction a u!;e autre , le C. Fortia est guide par une
saine critique , el s'exprime toujours avec celte ame-
nite dont le verita!)!e bomme de letlres ne doit ja-
mais s'ecarter , lant qu'il n'est dirige que par un
amour vrai^ d;^ Part qu'il cullive. Son stjle a de la
noblesse et d^ la coriect'on , et il sait altaclier dans
les parties qui en paroiss^nt le moins susreptibles.
Or trouve a la fin de I'ouvrage nu catalogue ds
Notice des outrages de Xenophon. 547
119 edilionsou traductions lalines et {Vancaises des
dil^Rrens ouvrages de Xciioplioii , et encore peul-on
liii reprocher quelqu'omis«ion , inais il est plus
aisede trouver une fautj! dans des listes qui exi-ent
autanl depalienceet dereclieiches, quede les compo-
ser; le ijlaisir de decouvrir une legere errjur dctnsles
tvavaux qui ont a'osorbe plusieurs ann^cs de la vie
d'un savant distint^ue, ne peut couteuter que I'igno-
rance et la mediociite.
Le citoyen Fortia a insere dans cet ouvrage la
traduction de quelques morceaux com p lets non
encore traduits en francais a I'epoque oii il a ei^
Compose, tels que VApoLogie de Socrate j traduite
d.-'puis par le savant professeur Gail ; et le Banquet
de Xenophon J tr:iduit par un de scs amis , littera-
ieur eslip.::a]:le, Pierre Lamonlagne.
Eti traitaiit de la Cjropedie, il a rassevbl^ les
divers traits de I'liistoire dePanlht'ej qu'Jlar-unis
ensuite pour en composer une histoire plus suivie et
plus detaillee de cette epouse fidele et gt'n.Teuse*
Ouoique cette liinoi:e se trouve dans toutcs les tra-
ductions de la Cjrop^'die et dans le Voyage d'Ana-
chavsis , de Bartiielemy , !e citoven Fortia I'a iraduito
et presentee avec tant d'cloquenve ; elle a nn carac-
tere si noble et si fouclianl, que ceux qui ne la con-
roissent point sevont assurement bien aises de la lire,
et que ceux qui Tojit di'-ja lue ne seront pas facht's de
la retronviT sons cette nouvelle forme. Nous la dou-
nerons dans un de nos prochains uumeros.
Mm a
IJTTERATUKE ANGl.AISE.
Lettres de MrLAnr Montague , pendant ses
VOL/ages en Europe ^ en Asie ei en. Afilque ,
contenant 3 entre autres relations carieuses ,
des details siir La reL'bglon J Le go uv erne meat et
les niceurs des Tares ; traduction nouvelie ,
avec pLusieurs additions tirees de La dernihre
idltlon anglaise ■> imprunee a Paris chez,
Theoplule Barrels , en 1790, deux volumes.
A Paris, chez Bailly , libraire , rue St.-Honor6,
baiTiere des Sergens , I'au 3". de la Republiqu ,
3795.
X/Es Lettres de Milady Montague ont ete tradultes
d-ins toutes les lanpnes ; nous en avons deux versions
fran aises , et tnules deux so«t infideles. La premiere,
imprimee en 176,3 , a Amsterdam , est la plus exacle ,
mais le style n'en est pas supporla] le ; la seconde ,
rublieeaParisen 1764, et reimprimee eu 1788, est
d'une main plus exercie ; le style est assez aise et assez
correct; mais on peut lui reprocher des omissions
importantes qui d.'naturent I'ouvrage et ne laissent
qu'une aride description des voAages , au lieu de
faire connoitre les tournures d'esprit de la Scvigne
anplaise. Les plus importantes de ces omissions sont
les morceaux de poesie inseres ]iar Milady Montague
dans ses Lettres , et qui pcuvent faire appvecier sou
merite pour ce genre de .talent ; I'autre omission est
celle des plaisanlorics t-u'elle se permet quelquefoia
Lett res de Mlladij Montague r)49
siir !es reliqucs et sur des points de discipline , on siir
des ceremonies de lY^glise de Rome, ain>;i que snr
les mceurs franraises. L'auteur a sans doute cle force
par les censeurs a relranchcu- ( es legeres epigrammes,
souvent tres-justes, toujoiirj pardonnahlcsaune pro-
testante et a une Anglaise , qui font encore appr^fier
la dt-Iicatesse de son jugement et la fin'^sse de son
esprit. II etoit n^ce«saire , dans ceft.Mi juvelle traduc-
tion , de rendre a Milady Monla^.ue tout ce qui lui
apparlient.
L'ancientradncteurnpconservoif lias les expressions
franraises de Miladj Montague, c t nous ]-rivoit ajnsi
du plaisir de juger comment elle pensoit quelquefois
en francais.
La preface de i'^'diteur anglais , celle de I'am.ie
de Montague , sont ^galement suj)pri;i.ees. On j
trouve aussi une foule d'inoxacti'.udes. Celle d'ap-
peler Ce Heros l\imante du passionne Leandre ,
Hero J dont I'Listoire est si coniuie, n'cst pas la m.oins
considc^rahle.
L.^s lelires de Miladj Monlajzue m^ritolcnt qu'uu
homme altcntif et exerce a e. r:'re en donnatune nou-
velle tradiiciion. Nous ne ferons pas l*analjso d\iu
ouvrnge si connu : il siillit d^ rappeler qu'aucun ou-
vrige ue peint les Turcs dans lour iiiterleur , avec d?i;
coulours plus vraies et plus inti-ressantes. El'e a vu ce
qu'une femrne seule pouvoii voir, et son esprit etoit
capable des ol servation.-s les plus Knes ; c'esi aelle que
nousdevons I'inoculalion, don I, a son relour, elle pro-
voqua la pratique en Angleterrc. Eiifin ce:te amLas-
' M lu 3
55o LUtl(^raturc an^lalse.
sailrl-e, liee avec tons les homines distingocs par
quehjue genre de mcrile que ce fat, qui parloit toules
les langues moderuas , poss.^doii les laiigues aucip.nnos
et reunissoil des coiuioissances ires-variees , est iine
femme tr: s-ceiebre a jusle titre ; et lout ce c;ui tend a
la faire blen oonnoilro , ne peut etre que Ires-avanla-
geuseraent re^u.
La nouvelle trarkr tion est du citoyen A., conini
par dcs travaux uliles d.:ns i'assembiec tu-itionai.^ cons-
ti^uaiito , dont il eloit imeinbre, et oii il s'^st, princi-
pa'emeiif occiine des finances; comme Turgot , li
<ultivoit la poefcieen vneme-tenvps qu'il se livroil aux
eludes de I'l^omtne d'etat; quelques pieces fugitives^
quolques chansons du citoyen A., com poseesseu le-
nient pour la socitte, ont paru assez agreables pour
francb'r le cercle anquel elles eloienl desiinees , et
pour devenir popalaires. C'est encore le c;is de rc-
peter le mot que nous avons cile de Voitair-,
clans ses conseils a uii jourcalisle, qu'ii ,v a beaucoup
d'accoid eutre 1 esprit des belles lettres et celui des
affa res. tons les grands orateurs gre-.s et romains
ont ete bomraes d'etat. Xenopbon cloit !itterate-ir
et guerrier ; Cesar , bistorl;^! et general ; l^Hopila? ,
Lamoigr.on, etc., ont ete litlerateurs et n agisjrats.
Le citoyen A- . . , oblige de se cacber pendant
les ^n'enemeus de I'annee 1794, a fait de I'etuds
des laugues I'occupeition de sa solitude. La iradu:-
tion est en effet le travail qui convient le mieux dajis
celte posiiion , il exige peu de Hvros , on peut
le repreadre et le c|uitt«r a volonle j il distrait des
Lett res de MUodjj Montague. ^fii
pens(5es tristcs , melancoliqiies , sans priver tofa!e-
nient du charme que , loin de tout ce qu'oii
alme , on eproirX'e quelquefois a s'y livrer ; enfin ,
r.Hiteur que Ton traduit devient , pour ainsi dire j
notre consolateur et notre ami , le plus clr. r
compagnun de notre solitude.
11 est fiise de voir que le ciloyen A. s'est beaucoup
ailache au sien. II ne s'est permis aucnne otTiission ,
il a resiitue a leur veritable place le< six letlres de
rnilady Montague , qui out paru si'parer, en! , en
176M. Nuns avons comi.are sn tr;:cluLtiou sur I ori-
ginal, et ele nous a paru par-loul Ire.^-HclM'^ , saus
que le stjle peniil rimde la correction et de TeK-
gr.nce qui lui cou\ if nt.
C'esl sur I'edilio^ide Tlieophile Barrois, de 1790 ,
que le ciloyen A. a fait cette traduction ; il en a
adopie jusqu'au forn-'at , ahu que djns les bi!;lio-
tliecjues on put les placer a cote I'une de Pautre.
Cet Guvrage, ainsi tralte , outre son merile lilt^raire
et ragrenieut qu'il procure };ar sa lecture , peut de-
venir utile a ceux qui vculent etudier ia langue
anglaise sans luailre , par la facilite qu'il lour doa-
nera.
Le cifoyen A. . . a imit-.' en vers tous les nior-
ceaux de poesie ; inais , alin de ne rien faire pcrdre
deson ori^iinal, il a aussi traduit ir meme morceau
en prose, ligne par ligne. Sf's traductions en ver*
sent en gerun-al henreusement fail-js ; nous alloiig
citer le n orceau qui nous a paru avoir le plus o«*
n.eritej c'est aussi le plus cou::idcral;!e.
M ai 4
552 LUterature anglaise.
T^ERS composes a Vera ^ dans un Kiosck dont
la vueit'etcrid, sur la vlUe de Constantinople _,
a la fin duniols de decembre 171 8 j par milady
Montaigne.
Oui , grand Dieu^ e'en pst fait, je borne mon en\ie
A terminer ines jonrs dans une metaiiie
Qui s< il oliancle en hirer ;,qu'" j'y scnimeille en palx ;
Qu'unbois , pend;inl I'ete ^ rn'oiTre un ombrage eials j
Qu'du print:>m])s , d'un rocher crouse par la n;iture ,
Coule paisiblement une onde vive et pure.
L -i:! dc moi ces fossi's , ces su;:erbes caiiaux ,
Ces tubes arrondis pnnr tourmenter les eaux ;
Je ne veux ni bssssins , rii gevbes , ni cascades.
Ces cuvrages de I'art sont FeHToi des naiades.
Si Pcnijne sourit a mon pelii jardin ,
Jc n'ai plus q^u'un d?sir , c'est un air doux et sain.
Paries vents destrucleurs notre ile dominee.
Sous le poids ties giacons gomit emprlsonnee ;
Les arbres Qepouilips dans nos sombres cHmats,
Oat change leur verdure en de Iristes frimats.
T,:s ciseaux cperdus vont , loin de leurs aslles ,
Cliercber ua ciei plus beau , des forels plus tranc|uilles ;
La TomisK n'a pJus d'un fleuve que le nom ,
. Sa nyrn- he so-iiajre en pleure Fabandon ;
Dans l^s ^ rc'-s blanchissans plus de danse riantc ,
Les jeux sont eblouis de leur paleur brillanle.
Mais ds I'aslre du jour les rayons bienfaisans ,
De cons tan res mcissons couvrenl ici les champs ;
L'ete , favorlsant ces plaines fortunees ,
Avcc le priutems senl partage les aunees ;
Et rautoinne , a jaai-ija reunie avec eux ,
De I'hiver ne craJut point le retoiir nebuleux.
Si la reine des flenrs avec le jjnir expire ,
II o'est point d'interregne en so^j aimable empire ;
Letlres de Milady ]\f(uUague. 553
Et , plus frais que lent mere , on voil ses rejctons
Eiiibeliir les bosquets de leurs jeuiies boutons.
Pres d'eiix mot]cslement nait I'humble violelte ,
Ce motlMe fjuchant d'uae vcrtu parfaite ;
Sa douce oflt-iiv sVxhalc tvec simplicite ,
Et sa liciie ooiileur dccore la beaute.
La jonqiiille , avcc Tor de son riche petale ,
De I'aiirore naissanle ose elre 'a rivale.
Les oiseaux font entendre a ton'.e lieure , en tons licux,
Daus !cs plaines de I'air leurs clianls melodieux ;
Dcs limpiJes ruisseaux , sous un cii.'l sans nuages ,
Le cristal u'esl jamais terni paries orapes ;
D"s vallons , des coteaux les gazons sont charmans ;
Toujours I'orubre des bois prolAge les amcns.
Quel spectacle ! la mer , de fertiles campagnes ,
Une vaste cite , I'Asie el s^s montagnes ,
Qui;sorit de ce tableau le cadre interessaut.
Je vjis sur tous res monls un sommRt imposant ,
C'est rOlj'mpe , ou souvent les puissances celestes
Donnerent aux mortels des exemples funestes.
Je ne me lasse point d'un spectacle si beau ,
A mi?s yeux etonnes il est toujours nouveau.
En contemplant ces tours j ces aigui'ies antiques ,
Tous ces croissans dores , ces domes magniiiques ,
Je me dis : U repose un stupide sultan
Confondu dans la tombe avec le conqu^rant;
L'un ne pour le mepris , I'autre vainqueur du monde;
Tous deux onldisparu sous leur voutc profonde.
Ce temple se vantoit jadis d'etre clirelien ;
De son notn , de sa gloire il n'existe plus rien ;
Ses aiitels reyer(5s , donl la noble structure
Devoit moins son I'clat a \\>x qu'a la sculpture ,
Par un z'le bavb.ire onl ete venversi'S ;
Je cherche vaincment leurs rosles dispersi'-s,
Tu fus seule epargnee , o celebre Sopbie ,
Ton nom oemesur vit ; oiiii* qncL? ignouiinie!
5v^4 LittcratLire angtalse.
Au Heu cle tam de rois dans tes murs prosternej ,
Tu vols par les dervis tes manes profanes.
Vo Id ta desiinee , 6 yille impti-iale ,
Qui du nionde voulois etre la canitale !
Que soni i's dcvenns cea imruenses palais
Par taia cle souverains eJeves a grands frais ,
On ies arts de la GnH-e , avant leyr decadence ,
Prodig.joient a 'eiivi ie luxe etl'e egance ?
La iix^rerit hnirs cnurs des rois volujjtaeux ;
Et d'a litres , ;i t;.i voi.v ci'un primal org-ueilleux ,
Bassemtnt traver.tis i*n pauvies solitaires ,
Cuaiig.-rc'nt ces pa cis en triste.? moiiujitres.
Ou sunt tie i'.tuj c^s fails Ies aiiciens mon-iniens ?
T'f nunb.re , I'ciiralu meme est i rise par le teiups ;
Le inAmf coin de terre enseveJit suns Tlierbe
Le> noTiis du ; fyice obscnr ^ di^naonarqiie superbe.
La de tout I'uaivers , pouvvcT i;}!ustes lauri^iTs ,
TJne seconde Ilel^ne asseniLIa Ies guf rrJcrs ;
Sa beau'ie ne fut poial I'excuse cle leurs araies ,
Mais Ta religion emploie aussi ses charaics.
Tel d'enlre eux , dont le bras du trone ^ut i'appt3i ,
Ryugiroit pour son ncm , s'il vuyoit aujourd'liui ■
Ses foibfes d^scendans plonges dans la misere,
Leurs Veux pourroient encore inspire- un Homtre ;
Mais chez Ies Grecs , fletris par de gr^ssiers travaux ,
S'il est quelques beautes , il n'est pas nu iieros.
Oublions ces debris de ]eurs grandeurs passees j
Sur Ies lisurpateurs proinenor.s nos ]>ensees.
Quelle rariete d'arnies , d'hahiicmens !
De fourrures du nord , de perles , de turbans ,
Je vois se deoloyer la pompe orientale !
Seroit-ce d'un Su tan la marche Iriompbale ?
Ce n'est que son visir , maisnon mcins redoute.
Son panacbe flottant marque sa dignite ,
Sc'g etriers sent d'or ; et mille pierreries
De sa vicliy parure ornent Ies Lroderies^
Lett res de MUadij Montague. 555
5ix esclavcs k pied , v t is superbemt-Dt ,
Chercbent a contcnir sou coursier petulant :
II resifite i\ des uiiiins qu'il > atoit meconnoitre ,
II senible ^ artoger loiiL I'oigueil do son uuilre.
l)e gardes ; rt-s de lui quel nombrcMix oscadron !
Voyez , au gve des yenis , voliigv-r sur leur front
Les J lumagos brilians Ai'!, oiseaux de I'Asie ;
Ilsmo(itt«iit des coursiers que fuurnil I'Arabie.
Le peujde , k cet aspect , courb^ , respectutux ,
Conserve eii sa bassesse un air reHjiieux.
Au.ssi mor u! que lui , le cortege en silence
Vers I'auguste Divan tr-inquillement s'avance.
Sur des objets plus gais ramenons nos regards ;
Cent vaisseaux sur la n|Nr yoguenl de toules parts ;
Ce melange eclatant de mats et de dorure ,
De palais , de jardins , de domes , de verdure ,
De CCS tableaux divers rirr.^gaiarife ,
Dans sa cunfusion plait a l'a;i! enchante.
S'ils emeuvent men ame au milieu de I'tlude,
C'est qu'ils sont loin de moi , loin de ma solitude.
Ici d'un sr.eleral , ou d'un fat ennuyeux ,
Les insolens sncces ne choquent point mes yeux ;
Je n'entend.s point sifflcr les serpens de i'envie ;
JV^cbappe au fade encens de I'humble hypocrisie ;
Periide adulateur , je ne veux rien de toi ,
La retiommce a peine arrive jusqu'a moi.
A I'abri du scandale el de rimperlincuce ,
Je ne crains plus enifnTaffeusemedisance ,
Dont la langue cfuel e aime tant a noircir
La jeunesse qui fuit les atlraits du plaisir.
Los autrcs i-norc?au's so;t diveives iniilations des
autours anciens , iiue d^claralioit d'a;r:oar turqiio, et
les vers de Pope sur miladj Montague.
Le dtrnitr volume est termini )Dar des notes tiCi-
cuurtes, servant a riiitcUigci'ce de la traduction ou
5o6 Lute rat are anglause.
du texte , et par une tcible dps chapltres , pour re-
tracer plus aiscmeiit les d^lails que les leltres ren-
ferment.
Nous ne pouvons qu'encourager le citoyen A. a
s'extr.er snr dautres auteurs, et a cul liver un genre
de lilti'iaUnv utile, et plus difficile qu'on ne le
croit. A. L. M.
p o E s I :e,
V E R T U 1\T N E E T P O IM O N S ,
FRAGTiJENT (ILL jCIVj- Uvrc clcs Metamorpkoses
d' Ovule (i).
-t OMONE , SOUS Procns , c1(n-nier roi d.-'s Altains ,
Fit fleurir i'arl; Iieureax de ooigner les jardins,
(i) On sait que le cltoyv-iO S'. Ange est occupe depnis
long - temps de la trc.ductioti des iietiimorphoses d'Ovide,
dont il a deja puLlie piusieyrs livres ; il louche a la llu de
rouvlage , et 11 va bipnlot dormer le cjualorzieme livre , dans
iecfuel se IrouA^e celte fable Ae' F'eriumne et Pomone ; c'est le
premier morceau sur lequel il s'est essay^ ; ce fut son succes
qui le delermina a se charger d'une si longue et si difficile
entreprise. Ce morceau fut insc're alors dansle Journal de lec-
ture ; mais il I'a retravaille encore pour le faire reparoitre
dans son quatorzit'ine livie. II i:'y a qu'unc cjuarajitauie de
Ters qui subslstent tels qu'ils out ete imprimes , il a rt'taLli
I'e; isode d'Anaxarllle qu'il avoit alors supprime. Cette his-
toire , et les changem?ns considerables fails :i ce fragment
de traduction , le reudent absuluincnit neuf , rt c'egt ce qui
nous engcgt' a roiTiir a r4'v.s kcteur^. A. L. M.
VerlLiinne ct Pomone. 55^
Jamais dans les vergers une main plus habile
IVe cultiva des fruits la richcsse lorlile ,
Kp sut mieux diriger un flexible arbiiss;'au,
L'etcndre en espalier , le.courber en berceau.
Amanle des enclos eiiriohis par rautoniiie ,
EUe dut a ces soins le beau nom de Pcmone.
Sur le bord des etangs , dans le fond des forets ,
La ligne , ou Tare en main , on ne la vit jamais
S'adonncr a des jeux tjui n'onl pas su Ini plaire.
Armee , au lieu de traits , d'une serpe leg^re ,
Dans I'ecorce entr'ouverte elie insure un bouton ,
Du rameau , cjui I'adopte , Stranger nourrissoa ;
Et des jets dereglcs reprimant la licence ,
Emonde avec le fer leur sterile abondance.
El'e sait d'une source ^ en pavtageaut son cjurs ,
Eiitre ses plants divers , menager les secours ;
Et conduisaut son onde , A leuri pi.-ds altiree ,
Abreuvevde fraicheur la racine alteree.
Ce sont la tous ses soins , %^^s plaisirs les plus doux.
Son amc effarouchee au seul nom d'un epoux ,
Des faveurs de Venus craint la trompeuse amorce.
Pour ^carter loin d'elle et la ruse et la force ,
Un rempart de verdure enferme ses jardins ,
Enclos impenetrable aux amoureux S3'lvain3.
Tous les Dieux des hameaux envlolent sa cjiiquet*.
Pan , qui du sombre ; in se couronne la tele ,
Les Faunes bocagers , et ce dieu dent la faulx
De nos fruits murissans ecarte les oiseaux ,
Des Satyrcs badins la riante jeunesse ,
Sylvain plus jeune encore en sa verte vieillesse ,
Essayerent cent fois de lui plaire ; et centfois ,
Pour cacher leurdepit , s'enfuirent dans les bois.
Verlumne , dieu des frnils que septembre colore.
Sans etre plus aime, I'aima plus qu'eux encore.
O que n'invenla point son amoureux espoir
Pour altirer sa yua , et sur-lout pour la voir !
558 Po^sle.
Tanlot d'nn moisonneur rcrabrnni par le linle ,
II pr.>nd I'habil rustlque el ]a rudosse male,
£a gerbe sur sa tete est chargee en faisceaux ,
Et son bras demi-nu s'est armc^ d'line faulx.
Tanlot tel qu'un faneui- , des tresses de verdures
lEnftelacent sans arl sa noire cbevelure.
Si d'un fouet qui fend Pair il fait sifflf-r les noeiids,
Vous diriez qu'il revient de deteler scs boeiifs.
Porte-t-il une epoe , iineserpe , uneligne ?
li est soldat , pechenr , ou faconne la vigiie.
Un jour couvrantson front sous de faux cheveux gris,
Emprnnlant d'nne vieille et I'age et les habits ,
Courbe sur un baton , dans I'endlos de Poinone
II entre , et voit ses soins dans lesdoa* de I'Automne.
Admirant et ses fruits , et son teinl , et s^s jeux ,
Oui , vons etos plus bflle encor que ces beaux lieux ,
I>ui-dil~il, et Ini donne , en louant son ouvrage ,
Des baisers qui n'ont point la froideur du vieil age j
Puis sur un verL gazon , va s'asseoir a pas ients ,
A I'ombre des rameaux sur sa tele pendans.
La domine un grand ornie ; uae vigne I'eiubrasse ,
La grappe autotir ele lui serpente et s'entrclace.
Voyez , lui-dit le dieu ; vojez ce couple heureux :
L'orme , epoux de la vigne , emlielli ar ses noeuds ,
Charge de ses raisins , et sans elle steri e ,
N'aurnit que la baute d'un feuillag^e inutile •
El la vigLie qui monte el s'eleve avec lui ,
Arrachee a ses bras , ramperoil sans appui.
Un exemple si bc-au n'a-t-il rien qui vous louche
Et faut-i: que toujours I'hymen vous efiarouche ?
Ah ! ne resistez plus a des noeuds si charmans.
Helt^ne et Penelope aurojit eu moins d'amans.
Que dis-je ? a tous les vceux ce cour inaccessible ,
Que) coeur a-t-il trouve , qu'il n'ail rendu sensible ?
Morleis , dieux , demi-dieux , dedaigues tantde fois ,
Tout aspire ^ vous plaire j d vivie sous vos ioix.
Vertunine et Pomonc. 5:T9
Mais si vous eles sage , et consu'lez vous-m?me
Ma vieillesse prudenie , et moii caur , c^ui vou:, i-ime...
Plu« que tons vos amans , et que vdus ne pen^ez •
Fuycz un noeud vu'gaire: uiin-z , mais choisissez.
Quel autre que Vertunine est digne de Pomone ?
Je Ic connois : suivez I'avis que je vous donne,
II n'cst pas mieux connu de lui meme... el c'est moi
Qui reptmds de son coeur^ qui repouds de sa foi.
Jamais on ne le vit , de rivrge en rlvagc ,
Porter i viiigt beautes un indiscret honima<re.
Cet heureux coin du mondeest pour lui I'uuivers •
Et ce ruissoau voisin , la Larri.'^re des mers.
II vous vil, et c'est vous qu'il aima la premiere ;
C'est vcus, vous que Vertunine aimera la dcmiere.
Que lui faut-il de plus pour etre voire epoux ?
Comme vous il est jeune , uimabic comme vous :
"V'lngt fois changeant de forme, a vous plaire docile,
Ordounez , et pour vous tout lui sera facile.
Reunis par vos goiits , unissez vos dcstins..
Comrae vous il habltc , il aime les jardins ;
Et si du so'n des fruits vous faites vos delices,
Dea fruit* , sur son aulel . il recoitlos premices.
De ces foibles presens s'il a ; aru jaloux,
C'est qu'offcrts par vos mains , ils deviennent plus dou»,
Mais, et le don des fleurs, et le tribut des p antes,
Qui croissent k I'envi sous vos mains diligentcs
Et 1 hommage des fruits par vos soins cullivcs.
Quel cLarme ont-ils encor , our ses sens captives ?
A son cosnr qui soupire , il faut une autre ofTrande.
C'est votre amour enfin que son amour demonde :
Oui, croyez que resent aux lieux oii je vous vois ,
Celt lui qui vous implore, et parle par ma voix.
Craignez s dieux vengeurs, Venus etsa colere,
Et Nemesis, tonjours aux ingrats sisert-re.
Quand on abeaucoup d'age , on a beaucoup aopris;
Et je veux vous «iter^ pour vaincre tos mepris ,
S6o Poesle.
\]n exemple effrayant , conuu de Chypre entiere ,
Et qui doit vous lleclui.- , et vous rendre moins fiere.
Par-toutd'Anaxar^te on raiUoit la beaute.
Iphis la vit J Ipliis , nc dans I'obscurite ,
El ra^lgre les aieux . qui la rendoieut si vaine ,
Ne put voir , sans rainier , cette belle inluimame.
II combattit sa fiamme et voulat I'etouffer,
Mais, belas! sa raison ne put en triompher.
II va chercher V bjetqui ca live son ame ;
D'abord a sa nourrice il dt-clave sa flamme,
' Auiir(>s d'Anaxarfete esp^re son secours,
L'im loreau nom des soins qu'elle a pris de ses jours,
Flatte le raoindre esclave admis a son service ,
Et tache , a ses desirs, de le rendre propice.
Interprete timide , un amoureux billet ,
Souvent est de ses feux le messager discret.
Quelquefois , a la porte il suspend des guirlandes ,
De pleurs et de baisers liumecte ces offrandes ;
Et la unit , sur le seuil , couc^e jusqu'au matin ,
II se plaint aux verroux, qu'il injurie en vain.
Plus sourde que la mer qui se gonfle et qui gronde,
Quand I'aslre des cbevreaux s'abaisse dans son onde ,
Plus dure que le fer dompte sous les marteaux ,
Pins dure que le marbre, aux rocliers de Pares ,
Son amante , insensible aux tourmens qu'il endure ,
Joint rinjure aux refus , et I'outrage a I'injure ,
Le condamne a souiirir , et lui defend I'espoir.
Cen est trop : pour Iphis , mourir est un devoir ;
Et sur le seuil barbare , a sa maitresse altiere ,
II adresse , en ces mots , une plainte derniC-re :
Je cMe , objet ingral , je cede , et ne veux plus
T'importunpr encor de mes voeux superllus. ^
B.ejwuis-toi , cruelle ! et prepare une fete :
Trioxnphc, etde laurier vas couronner ta.tete.
Tuleveux : je reno '<e a la ciarte du jcur.
Si ton orgueil long-temps s'est plaint d« vxon amour ,
Rcdevubla
Vertumnc ^t Pomone, S6i
Redevable k ma main qui va finir ma via,
Tu me loucras du moins de t'avoir bicn ser/ie ;
Mais a ma deruicre beure, ^pris de ta beautd ,
Crois qu'avant roon amour" je perdivii la ciaite.
Et ne presume : oiut <jue pat la reo -nimee ,
Des appreU de ma mort tu seras iiiftrm^e :
Je serai devant toi ; temoin de raon malbsur ,
Tu pourras eu repailre ct tes yeux et ttu coeur.
O vous , dieux inimorteLs ! si vous dai^at'<c m'entendte,
Vengez au moius le nom de Tamaut ic plus ttudre j
Qu'il vive J quaiTd je meurs , et qu'uja long souveuir
Transmette ma memoire aux sicclei a venir.
II dit; et sur la porte encore de {leurs uraee ,
De fleurs doct tant de faii ses maii'.A I'ouL ccuronn^e ,
Atlaclie, Tail en pleurs el les deux bras tendus,
D'liomicides JIcms aux barreaux suspeiidus,
Le» voila ces festons digues de toi , ciuelle ?
Bit-il ; et q-and il meurt, encor tourn6 vers elle,
Dans Ic cordeau fatal , qu'il serie par son pcids,
Demeure suspeudu sans Laleine et sans v.ix.
Deses pieds tremblotans la douleur convuiiive
Ebraule les verroux At la porte plaintive.
On ouvre ; on voit les nc8«ds , instrumens da trepag ;
On vcut les detacher ; chacun s'empresse.... Helas !
II a'est p'.us temps : Iphis a vu sa dernier^ beure.
On le porte ^ sa mere , en sa triete demeure.
E;ie lerre en ses bras son malheureux Iphis j
Dt cent fois i la mort redemaudant son lils,
EUe dit, elle fait tout c» qu'en sa mise-re,
Une mere e«t capable et de dire et da faire.
Elle accompagne enfin la pompe de sun dcuii,
Etsuit, en sanglolant, le funebre cercueil.
ha marche du convoi , lugubre et gcmijsante.
Passe devant le seuil d'ui-e insensible amante
Qr.'un Dieu punil deja par des reurords vengeurs-
A/iaxar<^te amend les sauglou et ics pleura.
Tornc IL N a
B6i^- Podslt.
Voyons , dit-elle , an moins la pompe fun^raire.
Mais enfin son orgueil eut un juste salaire.
Tourn^s vers le cercueil, ses yeux sont obscurcis ;
Elle vent reculer, ses pieds sont endurcis :
Elle s'efforce en vain de dc'tourner la lete •
Seg muscles sont roidis j son sang glaee s'arrete.
Tout son corps , autrefois si vain de sa beaute ,
ipe son coeur insensible a yris la dureti^.
Ce n'est point une fable ; et Venus , dans son temple ,
A Salaraine encore, ofFre ce grand exemple.
-Ou y voit la statue j elle instruitles ingrats.
Profilez de Texemple , ct ne I'imitez pas.
II dit ; et, depouill^ de sa fausse vieillesse,
Le dieu chang.e etparoit revetu dejeunesse.
Beau comme le soleil , quand , d'un nuage obseur ,
II sort etincelantde son feu le plus pur.
Peut-etre il eut suivi son araoureuse audace ,
Peut-etre.... Mais lanyraphe , eprise de sa grace ,
Deji\ tremble, soupire, et ressent tous ses feux.
C'cn est fait : elle cMe, eL Vertumne est heureux.
Par Saint-Ange.
N. B. Ceux qui veulent se procurer les six premiers Hvres ,
dej4 publi6s , de ceite traduction , sont prc?enus que, depuis
la mort de Valleyre , aine , on doit s'adresser k Cailleau, im-
primeur - libraire , rue Galande, eta Moutard , im^rimeur-
librairs , rue des Mathurins.
NOITVELLES IJTTERAIRES.
JURY DES ARTS.
Avis aux Artistes et aiix amateurs des Arts.
Xj'assembl^e du Jury des Arts se proposant de
ft'occuper iucessamment de la discussion et redaction
Jiiry dcs Arts. 5??
d*iin sijstimc g6neraL d^'^nscigncnient et iV encou-
ragement pour les arts du dessin , qui , eij K*s ro-
gencrant , pui.'^se les porter an (fegr^ de peiTecJioti
(lont i!s sout susceptibles , et assurer a ja ! ais eur
prospeiitc'' ; considt^raiit combiv-n il irhpor'eaa su.ces
de son cnlroprise , de r,-unir anx luinieies(]ii\'li\' peut
trcuver dans son sein , dies dc tons les ciloyens qui \
par etat on par gout, se soiit occupf''s dcs arl> , a"
arrcte, d:ins sa s.'ancc du ii messivloi- , qu'il seroft
fait en son nom , par la voie des journaiix: < i papiers
publics, nne invitation aux artistes et amalems des
arts,de voulo'r bien contribuf-r de toutes ieurslaniieres
a la perf-'ction d'un travail aussi iniporlatil.
En con^-eqii'-nc3 les artistes, les amat'urs, et of'-
neralement tons les citoj^rns qui , n V'ta?it ])as etrangers
aux arts, et s'lntc'ressant a lenrs progres, ont r^ih'chi
sur les niojens et les iuj-t'tulions les plus propres a en
favoriser la culture vt a les faire fleurir, sont invites a
communiquer an Jury le rt^sullat de lenrs mediia-
tiohs, soit en venaut eux-memes en doiuier 1 Ttnre
dans ses seances qui se tiennent pul liqu>ment au
Louvre dans la salle duliaocoon , tousles priaiidisde
cbaqne decade , depuis six heures du soir jusqu':^
neuf, soit en envojant a I'adresse du president die
Jurij des Arts ^ seant au Loui^'re j lenr nK^moifes
avec leurs noni?,patrie et dem -ure ,afiu que, dans 'e
cas on le Jnrv f/roit usage de ces malerlau; , il puii^e
I'aiie lionneuracLacun de ce qui Ini appartient.
Leon Pufourny, secn-laire.
N u a
M6^ T^ouvette lUtiralre.
LYCEEDESARTS.
Siance publique du 20 messLdor.
C^HARLES Desaudr\T a ouvert la seance par un dii-
Cours sur la necessi.^ cle porter sur les objets de
simpte perfect CO nnement dans Les arts et manLi"
factureSj un regfird aussi vigilant que sur les sublimes
invetitions et les d^rouverles qui indirjuent , il est vrai,
la supeiiorite du genie, mais dont les fruits sont lents
et difficilenneiit coristat(^s par I'operience , tandis que
les prewTiers viennent sans cesse ameliorer la concur-
rence dans nos echanges avec I'^tranger, et peuvent
finir par d(5cider en noire faveur la balasce avec le
reste de rEurope.
Le citoyen Iloiiel a lu nn rapport %\ir les nom-
breuses industries qui concouren! a la fabrication des
papiers-tentun s, sur bi ■[■crfection de leiir ensemble
dans les irsnnfactuve^ des ci-devant ReueiUoti et
Arthur ; et mention honorable des c toy ens Jaque-
xrart , Benard et Robert, qui ont port^ dans ces fa-
iriques , acluellem nt superieures a ton les celles
d*Ang;elerre , rt-cononi^e, !e bon ^out, el la variel^
des dessias qui en font justement la reputation,
CI arlesDesandray a fait un rapport snr une prepa-
ration des aidoises 01 Jinaires a la raaniere anglaise , •!
lur un crayon an nioyen duquel en peut ecrire et
chiffrer sur ces ardoises aussi long-tempi qu'on 1«
veut 5 avec la faciiite d't ffiicer cbaque fois ce que I'on
t trace ; par lo cit yen CoUbert ^ rue Poupde ,
ii»o 3. ^ Get objet , qui paroit d'abord assez peu in-
t>ycee des Arts. S6S
t^ressant, fst pourtant, selon !e rapport(*ur, le niln-
cip'-' de la l^gM'U* de la main et de Id Jxillc denture
des Anglais j d'ailleurs , dans im moment oil le papier
est si cher, celte m^thode devie .t tr s-i'Couo nique
poiir leseiifans, el scroit d'un usage trej-avantageux
dans les ecoles prima ires.
Le citoyeii Mai/ierbes a fait un rapport sur des
toiles vernies a la ii^anii^re angiui^e, par I'artiste de
flarmc , rue Laz^are. QA artiste a obtenu la men-
tion honorable et la m^dailie.
Le citoven MUet-Mareau a fait un rapj)ort sur
I'art de rimprinerie, el pai ti, uliere.reut sr.r la su-
perl^e t'ditiou de la derniero adresse de la Couvenlion
a la Nation Francaise, traduite en arabe ^ dansle«
plus beaux caracteres, et doe aux soins des cito3^ent
Kirfin J I.angles , et Vuboij -Lav erne iuspec-
teur-g neral de Pimprimche de la Rc^nuLlicjue. Le
livcee lenr a decerne la mention iionorabie et des
xn^dailles.
Charles Desaudra^ a lu nn rapport sur d^ nou»
vc'Ues jambes mi'caniqnes , en hois, e.t'tiittes par le
C. Sonneck Ivanest ^ artiste Jiu'catiirien , dcmeu-
Tdiit rue de Greueile-Germain, n." 82. Ces jnmbes
ont tous les mouvemens nalurels dans le gcnouil , le
larse et le mefatarse. Elless'attachent tres-faci lenient,
ne genent point dans la marciic , sont d^me tres-
grande l^g(^rel6 ^ dispensent de s'aider de bequiiles,
ii'exigent pas nieme une canne , et remplacent par-
faitement une jambe coupe e an-dessus du genouil,
ou merae jusqn'au haut de la cuisse. Pluijieiirs de-
fenseurc de U .patiie, cbaxg^ de ces houorablet
Nn 3
$66 ^"ou velles Lutera Ires.
blessures , ont paru et marche clans la salle ;,
^vec tant d'aisance , que I'asserabl^e en a tt^moign^
§a surprise et sa satisfiiction par ies pliis vifs applau^i
disscnieus. L'artiste Soniicck a obteiiu la mention
honoi\ib!e et la in^daiUe;
Le meme rapporteur a fait connoifre line nouvelle
construction de cuves et lo^:neaux de forme carree , qui
pruvpnttlre ('tallis dans le plus petit village , paries
ouviiers Ies plus ordinaires, aumei'leur marche po.>
sible, pour remplacer Ies tonneau\ et cuves ordi-
naires qui manqu nt de tout cote , et dont Ies ouvriers
sont,Jres-rarcs dans Ies- campagnes. Les cuves ont
cela d'avantageux quVlles ont an fonds nobile, qui
cbsce'jd ires-fac;lement a mesure que Fon en tire le
yiii , de nianlere qu'il ne reste jamais en vidange.
—• Ce perjecllonnement deyient d'auiant plus utile
dansce moment, que nous apprenons que, faine de
tO:^neaux,on prepare en Bour.ogne et a Orleans
des fosses en terre glaise pour y pouvoir conscrver
levin de la r^colte p:ochaine. Gotte invention a eu
la mention honorable.
Chailes Desaudraj a invite le public a ailer voir
la rc.eute ediicaiion de vers a sole , suivant la m^-
thode de Beihezen , qui va etre commencee par la
C.« Laplass;e , aux ci-devant FeuiilanJines , rue
Jacques.
II fait un rapport, sur Pappli-alion des meca-
r-iques auglaises ^ Xa fi^^a^ture de La laLne , par I'ar-
tisle ir^^yre-r, m^caiitcien jobjet du plusgraud iiit(het
pour ies cair^paiue, et pour la France , celle uou-
■veiie industrie se tvouvant ibudee eulieremeut sur
Liures divers. $6j
une matiere premiere , pour laquelle il ne sera plus
necessaire de s'adrcsser a rc'lrn:;g;^r.
II en a lu un autre, par Desaudraij , sur Ics
divcfs systemes dc fortifiiHlions dos places fortes,
et particulierement sur celni de la Joriijlcation
perpcndicuLalre^ et des batteries casematdes.
DIscours du general Moutalep. bert a ce sujet. —
Get inger.ieur a obtenu la raen ion honorcil)le.
La seance a ete termini'e par un concert dans lequel
la C.® Carori a execute sur U; piano un concerto qui
a ete generalement applaiidi.
LIVRES DIVERS.
Theglogie morale.
Lettres sur La religion ^ par Desalignac de
Lamotte Fenelon ^ Lin volume in-12. ^ lm~
primd sur beau papier. Prix 5 liv. 10 sols , et
6 liv. franc de port par la poste. A Paris , chez
Morin, libraire et commissionnaire, rue Christine,
n.o 12. II faut afFrancbir les leltres , et faire charger
a la poste celles qui contiendrout das as5igr-ats.
Tout ce qui a ete ecrit par I'immorfel auteur de
T^lemaque, est recherche a juste litre. Quelle que soit,
sur le sujet qu'il traite, la differer.ce d.s opinions, on
le lira avec interet , comme on app!audit aux vers
par lesqu'^ls lo citoj'en C .^niera si bien peiut son ca-
ractere dans la piece qui porte son nom,
Statistiqui.
Le commerce et le souvernenient conslder^s reld^
N n 4
568 Zlvres divert,
tiverncnt Pun d Uaatre ; ouvrage cUrnentalre ,
par M. Cahb^, dc Condtllac j de I'acadimlc
Jrancalse y et niemhrc de la socidtc rotate
d'agriculture d'OrUans j nouveile iditipiv j
T^is covsili expers male niit srut :
f^'itn tgmperctain di quoqu6 protehuitt
Jn majns . ; . »
J vo!. A Paris , c}iez Blanchon , libraire , rue
Haute-fcuille , n.^ 14 , an 3.
]S[ous avons deja annoric^ utie aiitre edition de cet
onyrage,rhez iin autre libraire : I'^mpressftment qu'on
met k le reimprimer , prorve sa reputation et son
utilite.
Morale.
Xb Vatriotisme da coeur et de Vesprlt , oa
0 Accord des devoirs et des droits de Ckommc
pour le bonlieur coniinun,
Zes MalAbtes du coeur et deCespsltj par le cit.
Leclfrc , auteur de I'Hisloire physique , morale ,
civile et politique de la Russie , et de plusleurs
antics ouvrages, 2 vol. in-8^, prix i5 1. pour Paris,
et i8 liv. , franc de port, pour les departemens.
Versailles , cliez Leb'anc,- imprimeur, rue Cliance-
lier-l'Hopital , n''. 14.
. Et se trouve a Paris, chez A. CI. Forget , impri-
meiu-librairc , rue du Four-Honore , n°. 487.
B O T A N I Q tJ E.
'IcoNEs et descrvptiones pLaiitarum ^ quas aut
Liwres divers. 569
sponte on Hispania c re scant ^ aut in hortls
hospitantur. — Descriptions et (igures des ['laiitca
qui croi«ent spontandinent en Espa^ue , et de celles
qu'on y ,cultiv e dans les janiins. TtMiies premier et
second. A Madrid J de I'lmpruncrie ro^aic , 1791 ,
1794 , in-folio.
L'ab;*6 Antolne-Joseph Cavanilles , de Valence,
en Espagne , docteur en theologie , mp.rahre de I'a-
cad/;i.nie des sciences d'Upsal , corres])ondant de la
society d'agriv ulture da Paris , da la socic't6 es-
pagnole de Basagonde , connu dans Pempire de
Flore par dix cxcellentes dissertations sur difTt^rens
genres de plantes difliciles a connoitre , vient d'en-
treprendre iliistoire de la botanique d'Espagne. La
description des plantes des deux preinifrs volumes
presente par-tout, dans I'aiiteur, ua plijtographe
zel^' pour la sciene, et en menie-temps infiuimeut
6claire. Le second volume traite de presque toutes
les plantes indigenes et naturelles au rovaunie d«
Valence. Apres la description et I'histoirenaturelle de
cliaque plante, on trouve des assertions qui rcpandeut
beaucoup de jour sur plusieurs points es'jentiels de
la botanique , apres quoi il donne des details pli/-
siques sur \e& nioatagncs de Penagolosa , Aiiana,
Mariola , Enguera , et de la vallee de Cofigr.tes.
Le 4 avril 1796, 1'abbe Cavanilles ecrit de Madrid ,
qu'il vient d'iionorer un de scs genres nf.uveaux du
nom de son ami M. Willdenow , savant liotaniste
yrussien. Ce nouveau genre se trouve gravodansla
planchs 89. • de son volume iconologique ^ oii il est
57® Litres divers.
nomme TVlil 'enoiva glaadulosa. La plante eit
channaiite , ■. e ^eiire est vokin de celui des Ta-
gcies.
BiBLIOGRAPHIE.
^LLGEMEixEn Biicfier ieoclcon yetc. Diet ion naire.
hihUograp/iiqiie generaL ^ ou, catalogue aipha-
betique des livres unprinzes en ALieinagne eC
dans les pays adjaceas j avec les noms des
libra ires el leurs prix j par GuillAumb
Heinsius. a Leipsic k , dans rimpriiiierie de
I'auteiir 5 5 vol. 111-4.° ^79'^> ^794-
HEi]^srr7s,qni est tont-a-!a-foIs Tauteur et le llbraire
de ce recueil lexiqiie, a employ^ les noras des au-
teurs par ordrc aJpLab^tique , comme ^tant le plus
facile a !a recliercbe (\qs lecteurs. II promet, pout
les annt'es 1797 et 1798, un voluine de supplement.
Voyages.
Hetsen in verschiedene provinx^en des Ka-nig"
reiclis Neapel. — Voyages en differentes pro-
vinces du rojaunie da Naples ^ par Charles
Ulisse pe Salis Marschlins, tome premier, avec
figures, a Zurich , chez Ziegleretfils, grand in- S"*,
de 442 pages , avec dix figures , dont quatre re-
preseeJent des obj ts d'histoire naturelle j elles
sent enluminees j les autres sout noires.
Fm du tome second.
TABLE DES ARTICLES.
A S T R O N O M I E.
J. E. Bocle Aslronomischcsiahrbucb, filri7g2. . Page 420
II I S T O r E E N A T U R E L L E.
Cabinet du Stathouder a Paris 419
Htdrologie.
Connoissances hyclrologiques des anciens , par G. Fal-
coner 289
M I N E R A L O G r E.
Description de TEmeraude J par Dolomieu 17
Suiie de la description de I'Euieraude , par Dolomieu. I45
Voyage dans les Ueux-Siciles , par Spallanzani. . . . Sot
Sur les Pierres flexibles, par Fleuriau de Bellevue. . . 449
B o T A N I Q u E.
Nomenclatenr botanique, par Gouan Siq
Iconcs planlarum , aut. Cavanilles 568
Plantaeregni neapolitani,autoreDom Cyrillo 2o3
Annals der fcotanick herausgegeben von Paulus I'sleri ;
Sechstes Stiick 286
ISeiJe annalen dcr Botanick, faerausgegcben vcn Paulus
Usteri zQS
J. J. Rcemer magazin fiir die botanick 420
Vabl , Icones plantarum Daniae 420
Boucel , plautes des environs de Eruxellcs ^21
Amerikanisclie Gev^'a:chsc 421
H. Stephens , Traite elenienlalre de Botanique. . . . 423
P H Y S I O L O O I E V E G E T A J, E.
Sur i'evolulion des boutous a Heurs , par J. Senntbior. 199
S^ Table des articles.
MAWMIFinES.
TridnctioB francaise du Systema naturae de Linneo* ,
par Vandi rst<'gen 5
Ko»velIe ela^sificatioD dps Mantimif^r«.i ^ par Cuvier et
GeofTruy jg^
Ektomologie.
Notice «UT les manuscrlts de Lyonet , par ^ean Brex. . I90
Ka|»j;ort »ur le Calendri.T ent"mol'.»git£ue de M. Giorna. 3lX
K E. L M 1 N T B O L O G I S.
Organ isaiio-B des animaiix a. f.:v:z, biano ^ par G. Cuvier. 433
A N A T O M I E.
B»srn.ption d'nne statu? auatcinic]:ie , , ar Fontana. . S5
itnatemie de Ja Ketine , av Eiandrin 3^9
pHYSIOtOGTE COMPARJ^E.
Sar le Ljrrynx infcri'?ur des oiseaux , par G. Cuvier. . 33o
M E D E C I N E.
Iic* pronostiques el le prorraptiqup i crHippocrateSj tra-
4niis en l'ran(^;ais par V? Febvre VilleLrnne. .... 3e
tgsioai .<iopTa le rnalattle deile rie urinarie del sig. De-
sauU , tradotte dal francese , con ftnnotazioni , per G.
G. Coiicini /^.
Observations nn^dtrales suv la Suisse, parDeloges. . . 45a
E C O N O M I E D O r.J I S T I 0 X7 J.
Soc:"(?te econorait'i'.e de Flcfence l38
C .nSturrs d:^ b?.*?s d^airelle, par L. Bosc. .... ^04
Pa:iis raultlfaria maferisr 427
A K T S C H t M T 0 U E S.
Sar la tejjiture tire? des vi'geta»jx , par Dambournej. . 463
Statistique.
Conutjsrce et Gouverneraent, par Gondii Jac. .... 563
Cocidillao , i« Cojom^rc* »t le G<"-iveirjieiBent. . , . 426
Ta b l€s desa rttcles, 573
Theologie moral k.
Lettreasutla religi D , parFeu^Ion 5^7
Philosophic.
Vie dea ancieBS philosopheSjparFeneloo I4J
Morale.
patriotisma du cceur et de l>s;>rit, par Lecicrc. . . , 563
Anecdotes ot pensees d6tach»''«j , par Ildrault - i)echell«5. Ii3
Instru-clious tirees del'exeuipjedes animaux. . ^ . . 4217
Beaux-Arts.
description d'ane gravure de 1.^67 , par Oberiin. . . 65
J. G. Mcusel , Musoam fiir Kuriiller. • 4^5
Traginens sur le lalvjn de peinlure de I765 , par Dide-
rot 468
Geographie.
Nouvelle m^thode pour ensciguer la gJographie, par J.
D.Babid 483
Erdbesclireibung von Asicii , von A. G. BorbecV. . . lb,
Sur la terrede Kergue]en,par J. Barbie 2oi
T o p o G R A p n I E.
Beschreibung der stadtund republik Bern 14I
Itineraire du pays de Vaxid 4i8
Voyages.
Kouvelle Edition du vojage de Norden ,par L. LanglJj. 494
Bartram's Travels 43i
Reisen in d?s Kopnigreich ISeapel. 670
Voyage de John. W'bith , k Bjtany-3ay , tradult par
Pou-ers 37
Rensei^nempiis sur l'x\in^ric£ue, par Cooper 358
J.ettres dt' miliidy Montague , traduites par A. . . . S^S
H I S T O I R E.
Observations snr les Vepri>s siciliennes , par Breqtiigny. 499
Sag^iosullj religlane de Irraomettani di Giuseppe Cal^a. l^d
Hiitoire d? Ja guerre de sept ans , traduit^deraUeinand
A« S-hiliw «l<»
574 Table des articLes,
Hisloire (3e la tevolution de France , pr^cedee de I'expos^
rapide des administrations succcssives qui I'onl deter-
mia^e 287
BlOGRAP HIE.
Nolice surle mlnistrellertzberg , par M. Meyer. . . . 5i6
Notice sur Allegrain, sculpteur 68
Notice sur la vie etles ouvrages de Bartlielemj, — Cata-
logue deses ouvrages : . . . 73
Notice sur Floriau. 2?>o
Supplement a ]a notice sur Bartludeniy , par S. C. . . 287
Nolice sur la vie et les ouvrages du Hhar^'ry , par Lan-
gles 276
Notice sur Charles-Francois Lhomond, iustiluteur , par
S.L 364
HiSTOIRE LTTTERAIRE.
H^ponse du cit. Oberlinaucit. S. L 614
Guili. Heinsiua aligemeiues Biicher lexicon 670
Jijcee des Arts 564
Etat des arts a Avignon 43
Suite de la nomination des professeurs, a I'ecole centrale
de Paris iSy
Mort de Desault , premier chirurgien de I'hospice de
I'humanite. lb.
Observations sur la notice donnee par Oberlin , de la
chronique de d'Andlo , par S.L 223
Vojageurs naturalistes 414
Lycee des Arts 415
Mort de Dambourney. .^^18
Jury des Arts 563
BiBLIOGRAPHIE.
Bibliotheca classica ^33
Typographie.
JEtablissemcnt typograpliique des Anglais dans I'lude ,
par Langlcs 6i
Table des articles. 5j5
Traduction arate de I'adresse aa Peu le Fianqnls ,
sortie des presses natlonales. 228
ARCHiEOLOGIE.
>Iineralogie des Homer, von Aubin-Louis Millin. . . 143
Sur I'elablissement d'un Museum dej autu|ues ^ par
Rabaut. . . « ZCG
Auticjuites de la Perse , par S3'lve4re Sacy 3^73
Arch^ographie.
Letlre de J. J. Barthelemj , sur les antlquites de la
France meridionals 529
Lettre sur les antiquites de la vllle de Maudeure , com-
muniqu6e par le representant Gregolre 95
A. Giialtani , sopra un'antica figulina. .' 429
Remarques sur uuc inscription decouverie a Nimes ,
par S. C 534
N U M I S M A T I Q U E.
Observations sur un grand nombre de medailles de Li-
cinius le jeune , par Gourdin 24S
LiTTERATURE ARABS.
Seance a Ramie , traduit par V..'riture. ..... 2'JQ
LiTTKRATURE GRECQtlE.
Kotice sur les ouvrages de Xencphon , par Fortia. . 54a
Litter A" TURE latin e.
Traduction de la conjuration de Catilina , par Billecoq. 104
POE SIE LA TINE.
Poeme sur I'egalite , par J(5r6me de Bosch 38a
G R A M M A I R E.
Kuoyo Dizzionario italiano-tedesco da B. Borroni. . . 144
POESIE FRANCAISE.
Imitation de Klopstock , par M. J. Chenier 124
Fragment dn poeme de lu nature , par Lc Biun. . . 126
Vers pour le buste de Desault , par Pi^aultLs Brufl. . i^g
576 Table dcs articles.
Fragment d'ufte traduction de I'^pitre de Pope au docteur
Arhuthnot. Portrait d'Adisson , par Delilie. . . . 26%
fragment d*un poome non imprime, intitule : Cbalons-
sur-Marne , par Fabre d'Eglanfine ^64
Lettre de Le Brun aux redacteurs dii Magasin Encjclo-
pedique 266
La Pri^re universelle , traduite de Pope , pag- Turgot. . 408
Traduction de rhjmne de Cleanthe , par Bougainville. 411
Veriumne et Pojiione , fragment du XIV livre des Me-
tamorphoses d'Ovide , par St. Ange 556
Vers composes k Pera , dans un kiosck , par milady
Montague 55a
Po^SIE ERSE.
Trathal , poeme d'Ossian laj
Romans.
Celesline , on la Victime des prejug^s , reman traduit
de I'anglais , par la cit. R a55
Linville etFanny , .nouveile ,par lacit. J 890
T H ]S A T R Ev
I/fi Tartufie.revolutionnaire, ou la suite de I'lmposteur,
comedie ^74
Pison , trag^die 268
Fin d§ la taih du torn* ttcond.
5^.
Le prlx do I'abonnement , pour I'etranger, est,
franc de port :
ir I'annde.
de 9 rixdaLers en or, 1
de 36 I ivres en es;-.^ces , r pou:
de 2o florins de HoUande , j
de 5 rixdaliers en or , "J
de 2o livres en espoccs , l P°"^ ^ ^^'^^ "" ^*
de II florins de HolLmde , j ""'n^^i«s-
On s'abonne, pour la Suisse ,
a Basle , cliez J. R. Preisvebch ;
k Berne , cliez la Socit'te tjpographique.
Pour les Pajs-Bas et Liege,
a Bruxelles , chez Horgnietz.
Pour la Ilollande,
a La Have , cliez Van Cleef j
a Lejde, chez Murray, freres;
a Amslerdam, chez Changuiqn.
Pour TAllemagne,
a Leipsick , chez Voss et Compagnie.
Pour le Nord,
a Harabourg , ci.ez Ho;ffmann.
Pour I'ltalie ,
a Livourue, chez Masi et Compagnie.
Pour I'Angleterre ,
aLondres,che2 JoHNso:NaSt. Paui, Church Yard.
TABLE
Des Articles conteiius dans ce Nunidro.
II E r, M 1 N T H 0 I- 0 G 1 E. .Bcmarqiies stir line insc, iptwn
On-yni.uifion des auim^vx a dJcoiuertv a J\h,ies , .>J4
.ariM hlanc. par G. Cuvior,' LlTTi^RATUKU GUICCQUE
e ^33 JS'uticc siir Us ouprm^es ac vit-
j iiophnn ) par Ic ('. i'-rliH , ..14a
MlNERALOGIE
Siir les pleri i's fUxihi'-s
C. rieui iavx J« Bel
M E D E C I N E.
Ohscrvalions mcdicnh-.-: siir la
Suisse, par le C. tel;^^"^ 3 •h'o
Arts chimiqvks
S
parle LtTTKiiATU
, ,_ L^ fires de A
1 44*5
' '^ Iraduct. rioii.
Pers coinpos: s .
K'osck J par
P O K
.Ji/7^.t>' ^^"^■■
'^ji
ur la ieintarc llrce des rea^. VertumncelJ'onroncJra^n^ent
'^ . I scs d Oi'idi 3 par le C. Saint-
B E A u X - A R T s. ^ ! At f-e , 556
:fras.niens sur le salon de pc in- jsfoUVELLES LlTTEiVAlRKs.
iure de into , par Diderot^ 46B j^^^y. ^^^ ^^^,.f^ , 553
G i5 O G R A P H I E. j Lycee des Arts , !ju4
Ji^owelleinethodeponr e.-iseigner> LiVRES BIYER.S.
/<,• Gcogiaphie, par J. D. Bar-j Tlu^ologie morale.
hie J
Voyages.
J^ou^'elle edition dti P'ojage de
iVo7dcn J par LangUs , 492
H I S T O I R E,
y.claircis semens sur les f^t'pres
^uciliennesypar BTcquigny ,499
HiSTOIRE littx^raibe.
Tiiponse du C Oberiin aa C.
'S.L. ^1-^
B I O G R A P H I E.
Jfotlce sur le j>iiiiislrc IJcrts-
lerq ; par ill. Meyer , 5i 6
ARCK.T.r.OGiK.
J^ettre de. J ..J. BarlJu-Ien^- , sur
hs antiquitcsde la France me-
ridian ate y ''^-,<
Addition cicetts hitrc y ^S2
^" Zeitres sur la Religion _, pai
Feneion , ••'07
Stalistique
Le Conimeiof et le Goueeme-
nient J par Condiiiac , 667
Morale.
Pattiotisme du co-ur , 563
Les maludi'cs du carnr el de- l'i\''-
prit . par le C. .Le C trc , 563
Bolajiii|i!.e^
Icones plantaruni Hispaniir ,
autoie Cavanilies , 50d
Biogra);bis.
Guill. Ileiu.sius AUgerndncs
Buclier lexicon , ^'/O
Voyages,
B.ciscn in eerschiedcne prerrnjen
des Kucnis^reich Neapels , 573
PE L'I.J^PRIMSRIF. BVMAeAZIN ENCTCLOPiDI'^UE.^