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w
MANUEL
DE
Vénerie française
BIBLIOTHÈQUE DU SPORT
En préparation :
Les Courses, en France, par M. A. de Saint- Albin.
L'Escrime, par MM. Qaston Jollivet et Camille Prévost.
La CÎHASàE a tir, par M. Paul Calllârd.
18294. — Paris. Impri«*fie Lahuro, rot de Fleurtu, 0.
BIBLIOTHÈQUE DU SPORT
MANUEL
DE
Vénerie française
PAR
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LE Ct' LE COUTEULX DE CANTELEU
Lieutenant de louveterie '
OUVRAGE
contenant 32 types d'animaux
d'après k. bodmer et o. de penne
et 54 vignettes
d'après r. bodmer etcrafty
• • •< «
PARIS
LIBRAIRIE HACHETTE ET C"
79, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79
1890' U .
Droit* <U traduction «i d« MprodMtftM tU*rrU.
PRÉFACE
Un Manuel de Vénerie pratique! Voilà un travail qui ne
devrait être entrepris que par un jeune veneur ne doutant
de rien, et non par un vieux chasseur usé dans le métier!
M'est-il permis de croire après cinquante ans de pratique
que je pourrai faire un livre dans lequel on puisse apprendre
à chasser à courre! Non, je l'avoue. Celui qui n'est jamais
monté à cheval n'apprendra probablement jamais dans un
Manuel d'Équitation à devenir un homme de cheval. Celui
qui n'a jamais chassé apprendra encore bien moins dans
un Manuel de Vénerie à bien chasser. Il leur faut d'abord
à tous deux la pratique, et une longue pratique même, et
c'est alors seulement qu'ils pourront peut-être puiser dans
les livres le complément de leur éducation, y apprendre
les finesses du métier, y comprendre bien des choses que
sans cela ils n'eussent peut-être jamais devinées; mais pour
cela que de choses à dire, bonnes dans un pays, mauvaises
ou médiocres dans un autre, sans compter que vous êtes
souvent obligé de dire des choses ou de poser des règles
II PREFACE.
qui sont ou inexplicables dans certains cas, ou dangereuses
dans d'autres !
Pour n'en citer qu'un exemple facile à saisir, si vous
chassez un animal, un cerf par exemple, dans une grande
forêt vive en animaux, cerfs, sangliers, chevreuils, etc., vous
vous êtes dit que ce que vous avez surtout à craindre,
c'est le change, et que. par conséquent, si vous voyez
devant votre meute en pleine chasse un animal autre que
celui que vous avez attaqué, vous devez arrêter vos chiens.
Combien de fois pourtant vous auriez tort de le faire!
Vos chiens suivent bien la piste de votre cerf qui a pris
une certaine avance; devant eux, et sur la voie, a bondi un
autre animal, un autre cerf, une biche ou un chevreuil, etc.;
vous voyez cet animal sauter une allée, un layon devant
vos chiens; vous courez à une autre allée, vous voyez
encore cet animal, vous vous dites : Mes chiens ont fait
change ! Vous arrêtez, vous retournez voir si votre animal
de chasse n'a pas reculé ou ne s'est pas dérobé 1 Vous ne
trouvez rien ni en arrière, ni à droite, ni à gauche, vous
revenez à votre voie, vos chiens n'en refont plus. Votre
chasse est perdue. Eh bien, tout simplement vous avez
arrêté sur la bonne voie, qui était momentanément couverte
par un animal qui avait bondi devant vos chiens après le
passage de votre cerf; et quand cet animal se serait au bout
de peu de temps jeté à droite ou à gauche, vos chiens,
s'ils sont bons, ou au moins une partie de vos chiens, les
meilleurs, seraient restés sur la voie de votre cerf, qu'un
quart d'heure après vous auriez revu devant vos chiens.
Au lieu de cela, les ayant arrêtés, ne retrouvant rien, quand
PRÉFACE. m
vous reviendrez à la bonne voie, il sera peut-être trop tard;
vos chiens, déjà dégoûtés d'avoir été arrêtés quand ils
avaient raison, et trouvant deux voies différentes mêlées et
refroidies, ne voudront plus rien faire et votre chasse sera
perdue ou au moins fortement compromise.
Comment stipuler une règle en pareil cas ? Ce n'est que
la pratique, la connaissance de vos chiens, de leur façon
de chasser, surtout des bons, qui pourra régler votre
conduite, sans compter que vous devez toujours être assez
sobre d'arrêter, car il ne faut jamais oublier que vos bons
chiens sont plus malins que vous.
La chasse est pleine de faits de ce genre, pour lesquels
les règles sont bien difficiles à d'établir et la théorie men-
songère. Un Manuel de Vénerie ne peut donc guère servir
que pour éclairer et perfectionner un chasseur ayant déjà
une certaine pratique, de même que le manège ou le
manuel d'équitation ne peuvent que servir à perfectionner
un cavalier ayant déjà une certaine habitude du cheval et à
lui apprendre à équilibrer son cheval de façon à pouvoir
lui faire exécuter tous les mouvements qu'il ne pourrait
faire sans cela.
11 me semble donc que dans un Manuel de Vénerie bien
fait on doit être sobre de règles précises et tranchées;
dans bien des cas, il faut faire voir le pour et le contre et
rappeler aux veneurs que leur plus grande science consiste
à avoir d'excellents chiens, et dans ce cas à ne pas trop les
contrarier, car un bon chien en sait toujours plus que le
plus fin veneur. Le plus fin veneur avec de mauvais chiens
ne fera jamais rien de bon, tandis que de bons chiens
IV PRÉFACE.
prendront parfaitement leur animal sans leur maître, et je
dirai plus, le manqueront souvent par la faute de, celui-ci.
C'est dans ce sens que je vais chercher à étudier la
chasse des différents animaux, en insistant plus qu'on ne le
fait d'habitude sur les chiens qu'on doit employer, sur les
qualités qu'ils doivent avoir, passant plus légèrement que
je ne l'ai fait jusqu'ici sur les règles de la grande vénerie
comportant un grand équipage, pour étudier surtout la
chasse à courre telle qu'elle est généralement pratiquée en
France, c'est-à-dire avec un petit équipage de quinze à
trente chiens et un seul piqueur. C'est la chasse française
par excellence, et je ne connais pas de pays au monde autre
que la France où un chasseur avec son piqueur et vingt
chiens prenne à force, sans le secours du fusil, un cerf, un
sanglier, un louvard, un chevreuil, au milieu de grandes
forêts difficiles et vives en animaux comme celles que nous
avons encore dans notre pays.
Il est possible que l'on trouve que je me suis trop étendu,
dans ce Manuel, sur les chiens, leurs races, leurs qualités
et leurs défauts; mais c'est que le chien est la base de la
chasse à courre. Sans bons chiens, rien à faire; un médiocre
piqueur, mais qui ne gênera pas ses chiens, un maître peu
savant, mais qui aura confiance en eux, prendront leurs
animaux si leurs chiens sont très bons, et un bon piqueur
et un fin veneur ne feront rien s'ils n'ont que de mauvais
chiens.
LA
CHASSE A COURRE
CHAPITRE I
QUELQUES RÉFLEXIONS SUR LA CHASSE A COURRE
Je ne ferai pas de nouveau l'historique de la chasse à courre,
que tant de maîtres, et entre autres le baron de Noirmont, ont
traité à fond et d'une façon si complète qu'on ne pourrait plus
guère que publier des redites. Je dirai seulement que la chasse
à courre à forcer, la prise d'un animal vivant à l'état libre et
sauvage dans de grandes forêts, avec des chiens courants qui le
suivent et le poursuivent jusqu'à ce qu'il s'avoue vaincu, est
une chasse éminemment française,, je dirai même gauloise, car
Ô LA CHASSE A COURRE.
les Romains, fort chasseurs mais peu veneurs, se passionnèrent
tellement de la chasse gauloise quand ils la connurent, qu'une
fois qu'ils eurent conquis la Gaule, ils poussèrent l'amour des
belles meutes et la recherche des grandes qualités de leurs
chiens et s'occupèrent de leurs pedigrees peut-être plus encore
qu'on ne le fait de nos jours. Certainement, s'ils étaient restés
maîtres de la Gaule, la vénerie eût alors brillé d'un éclat qu'elle
ne retrouva plus guère qu'à partir de saint Louis, car sous les
Mérovingiens et les premiers Carlovingiens les chasses furent
plutôt des tueries et des destructions que des chasses savantes
comme celles de la vieille vénerie française depuis saint Louis
jusqu'à la Révolution.
On peut dire que de François I* r à Louis XIV la vénerie a été
dans toute sa gloire et que nos chiens courants étaient alors
arrivés à posséder des qualités qu'ils n'ont pas encore complè-
tement retrouvées, quoique nous ayons fait d'immenses progrès
depuis quarante ans. Les chiens prenaient au moins aussi vite
que maintenant dans des forêts beaucoup plus grandes, peu-
plées de beaucoup plus d'animaux et bien plus mal percées. Les
chiens duraient plus longtemps et, toujours en déplacement,
prenaient des animaux dans tous les coins de la France. La
vénerie fournissait des chiens à tous les princes étrangers. Grâce
à tous les travaux historiques, à toutes les recherches, à tous les
mémoires, à toutes les lettres publiées depuis plus de vingt ans,
et exhumées des Archives de Londres, de Saint-Pétersbourg, de
Venise, je pourrais fournir des pages entières de preuves à
l'appui de ces faits.
En décadence depuis la fin du siècle dernier jusque vers i83o,
la vénerie à repris faveur. Sans avoir retrouvé toutes les qualités
de nos anciennes races perdues, nous en avons reformé de nou
velles qui commencent à briller d'un vif éclat; nous commençons
à ne plus être tributaires de l'Angleterre et je vois avant peu
le moment où celle-ci pourra bien nous prendre plus de chiens
que nous ne lui en prendrons. Certes, je ne nie pas les grandes
qualités, sous un certain rapport, des chiens anglais; mais la
QUELQUES REFLEXIONS SUR LA CHASSE A COURRE. 7
chasse en Angleterre ressemble si peu à la nôtre, c'est si peu
une chasse, les qualités demandées aux chiens courants diffèrent
tellement de celles qui sont indispensables chez les nôtres, que
le veneur français doit toujours réfléchir, avant d'acheter des
chiens en Angleterre, à l'animal qu'il veut chasser et aux qua-
lités qui leur sont nécessaires pour le prendre. Un seul équi-
page en Angleterre, celui de Devon et Sommerset, chasse le
cerf à l'état sauvage, et c'est par conséquent le seul qui ait à
s'occuper des qualités de nez et de change (bien entendu je mets
à part les équipages de lièvre); c'est le seul qui emploie des
chiens d'attaque qui rapprochent (ils sont appelés tufters). Le
travail du valet de limier se faisant sans chien est complètement
différent* du nôtre. Que ferait leur valet de limier {harbourer)
dans nos grandes masses de forêts fourrées et comment pour-
rait-il rembucher le sanglier, qui fait sept et huit lieues dans
sa nuit ou le loup vagabond et méfiant? Leurs chiens môme à
cet équipage sont plus en voie de biches que de cerfs, puisqu'on
ne chasse le cerf que jusqu'au i5 octobre et la biche le reste de
la saison. Les règles de la chasse diffèrent donc complètement
en Angleterre et en France, et aux équipages de Fox-Hounds
d'où sortent tous leurs chiens, on aime et on cherche le plus
souvent à faire change. On ne croise donc jamais ou plutôt on
ne cherche jamais à croiser les chiens qui ont ces qualités,
puisque les Anglais ne les connaissent pas et que ces qualités
leur sont inutiles. On élève des plus vites, des plus vigoureux
et des mieux ralliants. On ne s'occupe ni de la gorge, ni du
change, ni de ceux qui vont bien au fourré et, pour le nez, il n'est
pas nécessaire de l'avoir bien fin pour chasser un renard. On
n'arrête pas en chasse, d'abord parce qu'on ne pourrait peut-être
pas reprendre la voie et qu'ensuite les cavaliers seraient fu-
rieux. Les chiens sont donc de nature indisciplinée et au Devon
et Sommerset on a grand'peine à les empêcher de se jeter sur
les troupeaux de moutons; tout cela nous paraît singulier, nous
qui, avec nos chiens, passons souvent au travers de troupeaux
de moutons, nous qui arrêtons souvent dix fois dans une chasse,
8
LA CHASSE A COURRE.
souvent en vue d'une harde, et qui reprenons la voie sans que
cela nous paraisse impossible comme à eux. Leurs chiens ne
peuvent donc guère nous servir que pour chasser le sanglier, à
cause de leur vigueur, de leur poussée en plaine et parce qu'ils
sont généralement braves et mordants, et enfin comme étalons
pour faire nos bâtards et leur infuser de la santé et de la vigueur.
CHAPITRE II
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR LES CHIENS COURANTS
Avant de décrire les races de chiens courants employées par la
Vénerie française, avant de faire connaître leurs qualités et leurs
défauts, je dois exposer quelques considérations générales,
propres à tous les chiens courants; puis je décrirai les races
employées, je traiterai du choix des chiens, de leur élevage, des
croisements et des soins à leur donner. Pour moi, la réussite
dans la chasse à courre dépendant surtout des chiens que Ton
emploie, on ne saurait traiter ces questions avec trop de
soin.
Quand un veneur aura une meute composée de bons chiens,
propres à la chasse de l'animal qu'il doit chasser, quand il saura
les faire naître, les élever, les conduire, son succès sera presque
assuré. Le veneur devra connaître les défauts de ses chiens, ceux
qu'il doit particulièrement éviter et les principales qualités qu'il
doit rechercher chez eux.
Le veneur ne doit jamais oublier que le chien qu'il emploie
doit pouvoir lancer l'animal qu'il veut chasser, le suivre en
criant et déjouant toutes ses ruses sans changer d'animal;
ÎO LA CHASSE A COURRE.
il doit enfin être assez vite et assez vigoureux pour le forcer,
c'est-à-dire le réduire à ne plus pouvoir marcher et à s'avouer
vaincu.
Un bon chien courant, de n'importe quelle race, doit, quand
il quête, s'occuper, percer les enceintes et non rester dans
les allées à faire le chien de berger; il doit généralement
quêter le nez près de terre, excepté dans les fourrés ou
landes où il y a des portées et où il peut aller le nez au vent.
Quand il rencontre une voie de l'animal qu'il doit chasser, il
doit l'indiquer autant que possible en se récriant posément
et froidement.
Beaucoup de chiens qui ont moins de nez indiquent seule-
ment la voie en fouettant de la queue; c'est le moins qu'ils
puissent faire. Beaucoup cependant n'indiquent rien du tout,
vu la pauvreté de nez de la plupart des chiens actuels. Le
chien doit, en chassant, être collé à la voie, c'est-à-dire la
défiler bien droit et s'arrêter à l'instant même où il ne l'a
plus entre les jambes, pour tourner à droite ou à gauche ou
reculer du côté où elle va. Cependant quand il y a du vent,
et que l'animal file bien droit, les chiens chassent souvent le
nez assez haut, criant moins et quelquefois loin de la voie,
sous le vent qui leur en apporte l'émanation ; une meute peut
très bien, dans ce cas, passer une route ou traverser une
plaine et une futaie à cinquante pas et quelquefois plus de
l'endroit où l'on a vu sauter l'animal. A cela rien à faire;
seulement, si l'animal a fait un brusque crochet, les chiens
perdront la voie plus facilement; s'ils sont bons, ils prendront
d'eux-mêmes le vent pour la retrouver.
Un chien courant doit avoir autant que possible (hélas,
combien c'est rare maintenant!) le nez fin, c'est-à-dire ne
pas passer sur les voies un peu froides sans en remontrer
et se récrier, et mettre le nez à terre dans les chemins ou
terres rases où les défauts sont le plus difficiles à relever.
Il ne doit pas être bavard, c'est-à-dire crier sans raison
et d'ardeur, là où la voie n'existe pas (faire attention qu'un
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR LES CHIENS COURANTS. I I
chien très tin peut se récrier là où les autres n'y com-
prennent rien); il ne doit pas être chiche de voix, c'est-
à-dire disposé à enlever la voie et à s'en aller sans rien
dire là où elle va (défaut extrêmement dangereux dans les
grandes forêts et les fourrés, où un tel chien peut faire manquer
la chasse).
Dans un défaut, il doit travailler et prendre ses retours de
lui-même, pas trop loin cependant, c'est-à-dire tourner circu-
i aire ment le plus près possible de l'endroit où a eu lieu
le défaut, afin de retrouver la voie. Il doit même, s'il est
très bon , avoir l'instinct de commencer son retour, en
prenant toujours le vent; avec ces chiens-là, il n'y a guère
de défauts : ce qui s'explique d'autant mieux que, les
animaux n'aimant guère à tourner le nez au vent, le chien
a toujours bien plus de chance de retrouver la voie en prenant
le vent qui lui en apportera le sentiment.
Il ne doit pas rebattre ses voies, c'est-à-dire crier sur la voie
défilée, à moins que l'animal ne la double et qu'il n'ait reculé
sur ses pas. Beaucoup ou du moins certains bons chiens ont
l'instinct de ne pas faire les doubles voies : ce qui avance
beaucoup l'animal et est quelquefois utile, surtout à la chasse
du chevreuil ou du lièvre ; mais il faut que ce chien-là soit très
sûr pour qu'on rallie de suite à lui.
Il ne doit pas muser, c'est-à-dire rester au bout de la voie le
nez en l'air à crier ou à regarder les autres ; mais, au contraire,
il doit tout de suite se mettre à travailler pour relever le défaut
et enlever la voie.
Enfin il doit avoir du fond, de la santé, de la tenue, c'est-à-
dire chasser longtemps sans se lasser et sans quitter, rester
toujours sur sa voie sans la lâcher et la travailler quand il l'a
perdue. Il ne doit pas lâcher dans les fourrés, les épines, chose
hélas! bien rare maintenant et le grand défaut de beaucoup de
chiens anglais.
Il doit enfin ne pas aimer à chasser seul, mais au con-
traire bien rameuter, c'est-à-dire, au moment où un bon
12 LA CHASSE A COURRE.
chien relève la voie, après un défaut, d'une manière positive
et sûre, il doit promptement le rejoindre pour reprendre la
voie.
Il ne doit pas être trop ambitieux et surtout ne pas couper au
court pour reprendre la voie en tête, et encore mieux ne pas la
celer en ne disant rien pour la dérober aux autres, car dans ce
cas il ne mérite que la corde.
11 doit être obéissant et bien créance, c'est-à-dire s'arrêter
et revenir aisément à la voix de son maître et au son de sa
trompe; c'est la seule qualité que l'on puisse lui donner, et
encore ne faut-il pas la pousser trop loin, car l'excès de cette
qualité peut tourner en défaut : un chien trop obéissant arrive
souvent à ne plus chasser et à lâcher sa voie si son maître n'est
plus là pour l'appuyer. Il y a là, surtout avec les bâtards,
une question de fait que la théorie peut difficilement indiquer:
mais, pour un bon chien, mieux vaut quelquefois ne pas être
trop obéissant que de l'être trop en ne persévérant pas quand
il a raison.
Un chien courant qui n'aura pas toutes ces qualités ne sera
jamais qu'un chien médiocre.
Toutes ces qualités doivent se trouver dans les chiens qu'on
emploie, quelle que soit leur race, et dans toutes les races j'ai
vu de bons chiens les ayant.
Maintenant le veneur qui veut réussir doit choisir la race de
chiens qui convient le mieux à la chasse de l'animal qu'il veut
prendre, car certaines races sont plus aptes que d'autres à la
chasse d'un animal. Quand je traiterai de la chasse de chaque
animal, je dirai mon opinion à ce sujet, et si un très bon chien est
apte à chasser presque tous les animaux, il est certain pourtant
qu'un chien peut être très bon au lièvre et insuffisant au cerf,
qu'un très bon chien de chevreuil peut ne pas convenir pour le
loup, qu'un très bon chien de sanglier peut ne rien valoir au
lièvre ou au chevreuil. On doit donc adopter la race de chiens
la plus favorable à la chasse que l'on veut faire, si l'on veut
réussir.
CONSIDÉRATIONS GENERALES SUR LES CHIENS COURANTS. l3
Maintenant que nous avons vu quelles sont les qualités néces-
saires à tout bon chien courant, nous allons voir quelles sont
les différentes races de chiens courants employées, décrire les
qualités et les défauts de ces races, et lorsque je traiterai de
la chasse de différents animaux, je dirai quelles sont les races
qui me paraissent les plus propres à être employées pour
chaque animal.
CHAPITRE III
DES DIFFÉRENTES RACES DE CHIENS COURANTS EMPLOYÉES
A LA CHASSE A COURRE
Je crois que tous les chiens courants employés à la chasse à
courre non seulement en France, mais partout où Ton fait de la
vénerie, se composent :
i° De chiens courants français;
2° De chiens courants anglais;
3° De bâtards produits par le croisement de ces différentes
races.
Dans les chiens courants français, plusieurs races fort ancien-
nement connues et estimées sont perdues, ou du moins les
recherches que j'ai faites depuis près de trente ans ne m'en
ont fait retrouver que deux ou trois, et encore quelques-unes de
ces anciennes races ne sont-elles qu'un pâle reflet de ce qu'elles
étaient autrefois.
Dans les chiens courants anglais, quelques races ont de même
disparu, et je crois qu'elles sont définitivement perdues.
l6 LA CHASSE A COURRE.
Les races françaises actuellement encore existantes, pouvant
être employées et régénérées, sont :
i° La race de Gascogne ;
2° La race de Saintonge ;
3° Le chien de Vendée, poil ras et poil dur ;
4° La race du Haut-Poitou ;
5° La race d'Artois.
Les races françaises devenues rares, mais dont il existe des
représentants qu'on peut encore retrouver et qu'il pourrait être
utile de régénérer, sont :
i° La race fauve de Bretagne;
T La race normande;
3° La race de Saint-Hubert;
4° La race des chiens gris de Saint-Louis;
5* La race des chiens de Bresse;
6° La race des chiens de porcelaine;
7° La race des chiens de l'Ariège;
8° La race des chiens d'Auvergne.
Les races françaises disparues sont :
i° La race des Merlants;
2° La race des chiens de La Loue ;
3° La race des chiens bleus de Foudras ;
4° La race des chiens Céris.
Les races de chiens courants anglais encore existantes sont :
i° Les Blood-Hounds (ou Saint-Hubert);
2° Les Fox-Hounds ;
3° Les Harriers ;
4° Les Southern-Hounds ;
5° Les Beagles (plusieurs sous-races) ;
6° Les Otter-Hounds.
DES DIFFERENTES RACES DE CHIEN3 COURANTS. 17
La race anglaise devenue très rare est :
Le Kerry-Beagle.
La race anglaise disparue est :
Le Talbot.
Les bâtards comprennent. tous les croisements faits entre les
différentes races anglaises et françaises ; mais ceux qui sont le
plus connus et employés proviennent des sous-races suivantes,
plus ou moins bien fixées, suivant qu'elles sont mieux retournées
à une des races primitives :
i* Les bâtards provenant du Fox-Hound et du Sainton-
geois ;
i % Les bâtards provenant du Fox-Hound et du Poitevin :
3* Les bâtards provenant du Fox-Hound et du Vendéen
(poil ras ou poil dur);
4* Les bâtards provenant du Fox-Hound et du Gascon.
5° Les bâtards provenant du Fox-Hound et du Normand.
Il y a aussi une foule de bâtards provenant d'un mélange de
plusieurs races dont la physionomie, les qualités et les défauts
sont impossibles à préciser.
Il y a aussi des sous-races nouvelles provenant de croisements,
mais qui, faites judicieusement en retournant à la race française
d'origine, sont arrivées à reproduire presque fidèlement (avec
un peu moins de beauté peut-être) l'ancienne race française, en
l'améliorant sous certains rapports. Elles paraissent destinées
plus tard à remplacer ces races françaises dont le vieux sang, si
longtemps reproduit, finit par dominer le sang nouveau qu'on y
a introduit; tels sont entre autres les bâtards Saintongeois et
Poitevins, si communs maintenant et si recherchés dans les bons
équipages de la Vendée et du Poitou. Les chiens de MM. de
Chabot, Lévèque,deJousselin, d'Oyron, de Vezins, Treuille,etc,
sont dans ce cas. Il en est de même pour les Vendéens de
M. Baudry d'Asson et les griffons de M. Bailly du Pont, etc., et
3
l8 LA CHASSE A COURRE.
bien d'autres que tous les veneurs qui s'occupent de chiens
connaissent aujourd'hui.
Nous allons maintenant décrire ces races, en commençant par
les races françaises encore existantes, et je dirai aussi un mot
des chiens courants auxquels on ne peut assigner aucune race
précise, produits bâtards de toutes les espèces dont il est difficile
de deviner les ascendants, mais souvent employés par les petits
chasseurs à courre et connus sous le nom générique de briquets.
Je parlerai aussi de nos excellentes races de bassets ; mais dans
la description des différentes races je ne donnerai que leur
signalement, l'indication de leurs qualités et de leurs défauts,
sans faire l'historique de la race, l'histoire de son origine, etc.
Les veneurs curieux de connaître leur histoire pourront la
trouver dans mon livre sur les Races de Chiens courants au
dix-neuvième siècle.
- J) J
CHAPITRE IV
DES CHIENS COURANTS FRANÇAIS
I
LE CHIEN DE GASCOGNE.
Le chien de Gascogne est un chien de la plus haute taille,
de o m ,64 à 0^,76, quelquefois même un peu trop grand et trop
massif. Bleus ou blancs avec beaucoup de taches noires ou de
marques couleur lie de vin, souvent du feu aux yeux et aux pattes,
entièrement teintés de noir sous le poil, tête forte, quelquefois
un peu longue, nez extrêmement large, paupière inférieure très
tombante de façon à ne laisser guère voir de l'œil que le rouge
qui l'entoure, oreilles très longues, assez fines, très papillotées,
le rein quelquefois un peu long et plongé, la côte bien faite, la
poitrine très profonde, le fanon épais et un peu trop tombant, le
pied assez bien fait, quoique quelquefois un peu trop large, les
jarrets légèrement en dedans et parfois un peu écrasés, ces
chiens sont un peu trop lents, ont une gorge magnifique, mais
quelquefois un peu trop sourde. Extrêmement droits dans leur
voie, mais presque toujours trop collés, ils sont partant musards
2() LA CHASSE A COURRE.
dans les défauts, où ils manquent un peu d'intelligence pour bien
faire leurs retours; les bons rachètent quelquefois ce défaut par
leur ténacité et la finesse de leur nez, mais ils sont alors obligés
de débrouiller les voies pied à pied.
Ils chassent bien le lièvre, et le loup dans la perfection ; c'est
ce qu'on peut appeler une race de chiens de lçup; ils le chassent
naturellement, et, comme le loup fait rarement de défauts, ils
excellent à cette chasse, où leur seul défaut est d'être trop lents
pour prendre. Beaucoup de chiens de cette race ont l'allure,
la marche du loup et un pied dont l'empreinte s'en rapproche
extrêmement.
En somme, criant beaucoup et bas, d'un ton un peu sourd,
trop lents d'ailleurs, ces chiens ont de superbes tournures, des
nez très fins et l'amour de la chasse. Ils sont très mordants,
mais manquent d'énergie et d'activité. Ils sont de bonne santé et
sous ce rapport sont' assez précieux dans les croisements.
Les plus beaux que nous ayons vus étaient ceux du baron de
Ruble à l'Exposition de i863 et dont la race était conservée dans
la famille depuis Henri IV. Ils sont encore assez nombreux dans
le sud-ouest de la France. Il y a quelques sous-variétés de
Toulouse ou de Bordeaux qui se distinguent par des marques
sang de bœuf.
Il serait à désirer que, par la sélection, on donnât à cette race
plus de perçant, de vitesse et de célérité dans les défauts, qu'on
redressât leurs jarrets et qu'on diminuât leur fanon.
II
LE CHIEN DE SAINTONGE.
Blancs avec taches noires, mais peu couverts, palais et testicules
noirs, deux marques de feu pâle au-dessus des yeux, légèrement
teintés de noir sous le poil, de la plus haute taille (o",64 à o",77),
tête légère, décharnée et osseuse, nez légèrement retroussé ou
du moins le paraissant par suite de la grande largeur et épaisseur
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. DES CHIENS COURANTS FRANÇAIS. 21
des narines, oreilles fines, demi-longues, très papillotées et
attachées très bas, de couleur noire et souvent liserées de feu
pile, le coup long:, fin et léger, pas de fanon, le rein assez étroit
et courbé, le flanc retroussé, la cuisse un peu plate, la poitrine
très profonde mais un peu resserrée, la patte du lièvre, générale-
ment un peu droits sur leur devant, la queue effilée et beaucoup
de l'aspect d'un lévrier, leur vitesse était assez grande, leur
allure étant composée d'un bon branle de galop mélangé d'un
trot allongé et soutenu et leur fond était célèbre.
Ils ont une belle gorge, mais souvent un peu sourde; ils sont
souvent un peu chiches de voix, fournissant de loin en loin. Ils
sont extrêmement droits dans leur voie, leur allure est réguliè-
rement la même, ils ont le grand chasser du vrai chien d'ordre
et des qualités de change remarquables, ce qui a augmenté leur
célébrité pour les croisements; aussi est-ce à eux qu'on doit les
qualités de change des chiens actuels de l'Ouest. Ayant énor-
mément de fond le jour de la chasse, ils se ressentent ensuite de
la fatigue pendant plusieurs jours ; petits mangeurs, ils sont très
difficiles à élever. Peu mordant, sans ambition, le chien de
Saintonge va sans se presser, confiant dans son fond et son
odorat étonnant ; pour lui point de forlongers et, plutôt que de
mettre bas, il consentira peut-être à chasser en queue, mais sa
ténacité viendra à bout de tout ; au débuché, son dos à ressort
le placera bientôt en bon rang. Il est très disciplinable et facile à
mettre en meute.
C'est une des races françaises dont on s'est le plus occupé
depuis quarante ans et, grâce à de judicieux croisements, elle
est encore assez nombreuse. Elle a d'ailleurs donné naissance
à de nombreux bâtards, dont quelques-uns sont presque revenus
au type pur.
Très bon chien de lièvre, de chevreuil et de cerf, le chien de
Saintonge est bon au loup, mais peut-être moins que le Gascon
et le Poitevin.
Cette race est une des plus remarquables parmi toutes les
races de chiens courants.
22 LA CHASSE A COURUE.
III
LE CHÏEN DE VENDÉE.
Ces chiens, qui ont subi bien des croisements et dont il existe
peu de spécimens purs, proviennent ou plutôt n'étaient autre
chose que les grands chiens blancs du Roi, race qui avait été
formée autrefois par le croisement d'un chien de la variété blanche
de Saint-Hubert avec un braque; aussi il est bien rare que même
actuellement on ne retrouve pas dans leur façon de quêter, de
chasser, quelque chose qui indique ce premier croisement, même
dans leur tournure.
Très grands, blancs, à poil très ras et fin, quelques taches
très pâles, jaunâtres, la tête nerveuse, l'oreille longue et attachée
bas, souple et mince, la queue longue, fine et effilée, le rein bien
fait, assez de cuisse, ils ont la poitrine peu profonde et ne
descendant pas assez bas. Beaux chasseurs, fous de la chasse,
ne connaissant pas d'obstacles, surtout au début, quêtant et fai-
sant leurs retours avec gaieté et diligence, fins de nez, adroits
dans les défauts, trop chasseurs pour être bien sûrs, durs à
créancer, batailleurs au chenil, très mordants, ils ne craignent
pas trop la chaleur, mais sont sensibles au froid. Leur naturel
est très querelleur; très vites pendant la première heure, ils s'é-
touffent assez facilement. Ils crient bien et ont d'assez belles
gorges. Ils s'usent assez vite et ne vivent pas vieux. Intrépide
à l'attaque, ce chien a un peu de toutes les qualités qui font le
bon chien ; avec du fond et de la sûreté, il ferait un chien parfait.
Comme je l'ai déjà dit, le Vendéen indiquait bien dans son
chasser un chien courant ayant dans ses ascendants quelque
croisement avec un chien d'arrêt. Fou au départ, poussant son
animal à outrance, il s'essoufle avant lui et est obligé ou de
lâcher ou de reprendre haleine en diminuant de train. Il lance
merveilleusement et, dans les rapprochers, il a de la quête du
chien d'arrêt; travaillant à la main comme limier, il ressemble
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DES CHIENS COURANTS FRANÇAIS. 23
au meilleur pointer. Il a la beauté, l'élégance des lignes, le
superbe port de queue, la finesse de peau et de poil des anciens
grands braques, dont il rappelle aussi les formes accusées et
musculeuses dans les cuisses et les épaules et dans l'arcure un
peu prononcée des jambes de devant.
C'est, avec le courant à poil dur de Vendée, le chien par
excellence des petites meutes. On peut avec 10 ou 12 chiens de
cette race faire ce que Ton ne pourrait faire qu'avec 25 ou
3o chiens d'autre race, chasser un loup, un sanglier et les faire
sortir d'un fort; aussi est-il très recherché des veneurs qui ne
peuvent pas avoir beaucoup de chiens et qui chassent dans des
pays difficiles et fourrés.
Ceux qui existent maintenant ne ressemblent pas tout à fait
aux anciens et ont tous, je crois, un peu de croisement, bien moins
de finesse dans les formes et le poil. Les plus célèbres et les
plus connus sont ceux de M. Baudry d'Asson. Ils sont aussi
moins fins et moins distingués que les anciens, mais un peu de
sang anglais ou poitevin qu'ils ont dans les veines les a rendus
plus vigoureux, plus résistants et plus disposés à garder change.
IV
LE GRIFFON OU POIL DUR DE VENDÉE.
Le griffon ou plutôt le poil dur de Vendée est évidemment
issu du poil ras croisé, soit avec un chien gris de Saint-Louis,
soit avec un chien de Bresse, soit même avec un chien fauve de
Bretagne ; aussi ne donne-t-il pas invariablement les mômes taches
à ses descendants ni même le même poil, faisant tantôt des
griffons, tantôt des poils durs, tantôt même des poils ras.
Ce chien paraît avoir pris du chien de Bresse le nez très fin,
la gorge plus belle, et les formes plus communes et plus défec-
tueuses; du chien gris de Saint-Louis il parait avoir pris le rein
souvent court et harpe, la vigueur, le train et le fond, le perçant
et enfin des taches gris de souris qui dans certains équipages de
24 LA CHASSE A COURRE.
beaux griffons de Vendée constituaient autrefois l'aristocratie
de l'espèce. Enfin du chien fauve de Bretagne il doit avoir pris
ces belles teintes de froment doré, apanage de certains poils durs
de Vendée.
Cette race est une des plus répandues et des plus estimées en
France, surtout dans les grandes forêts de l'Est et du Centre,
parmi les chasseurs de loups et de sangliers, qui avec 10 chiens
de cette race en font autant qu'avec 3o d'une autre. Il est vrai
que c'est avec la race Saintongeoise une de celles qu'on a travaillé
avec le plus de bon sens, soit par la sélection, soit par l'échange
de reproducteurs et en s'occupant particulièrement d'améliorer
la santé, la force, la vigueur et le train.
La livrée du griffon de Vendée est blanche avec taches jaunes,
fauves ou gris de souris. Sa taille est grande (o",62 à o m ,7o), sa
structure forte, sa constitution solide, son rein bon et souvent
un peu harpe, sa cuisse bien gigottée, et généralement le pied est
très bien fait. Fort recherché pour la chasse du loup, sans y
être cependant aussi naturellement disposé que le Gascon et le
Normand, il est excellent pour le sanglier et souvent incompa-
rable pour les rapprochers. Il ira de même attaquer, même seul,
un animal dans les fourrés les plus impénétrables, ou suivra
sa voie dans les ruisseaux et les étangs. D'une constitution
plus solide que les Vendéens à poil ras, et douée d'une intelli-
gence qui dépasse généralement celle de tous les chiens cou-
rants, cette race a presque toujours donné dans les équipages
un chien dont on se souvient toujours.
Comme le Vendéen à poil ras d'où il provient, le griffon de
Vendée a souvent un peu trop de fougue et de poussée au départ.
Après deux heures d'une chasse rapide, il y en a qui sont sujets
à laisser forlonger leur animal ; mais la voie n'est pas perdue
pour cela, grâce à la finesse de son nez. Amélioré par une judi-
cieuse sélection ou des croisements intelligents qui lui font
perdre ce défaut, il devient un chien excellent, surtout quand
l'âge l'a rendu plus calme, Il peut prendre son animal aussi vite
que la meilleure race française, car il a généralement un grand
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I M
DES CHIENS COURANTS FRANÇAIS. 25
pied. Un bon griffon vendéen bien réussi se joue aisément
comme train de n'importe quel chien anglais et je l'ai constaté
maintes fois lorsque j'avais ma meute de griffons pour le
loup.
Sa finesse de nez, son activité et sa grande intelligence lui
font relever les défauts plus vite que n'importe quel chien, et il
y en a beaucoup qui, dans un défaut, ne prendront jamais leurs
retours que du côté où l'animal aura fait sa ruse. Il en résulte
que dans une meute dé bons griffons, si ces chiens ne sont pas
suivis de près dans un balancer, il se forme facilement une
tête.
Malheureusement, comme le Vendéen à poil ras et plus peut-
être encore que lui, le griffon, à cause de son grand amour de
la chasse, est difficile à créancer et à garder le change; il est
sujet à se laisser entraîner à la suite d'un animal qui bondit
devant lui dans un défaut. C'est un vice grave, surtout si l'on
chasse dans une forêt vive en animaux. Il faut donc, dans la
i eproduction de cette race, éliminer comme reproducteurs les
chiens par trop chasseurs et par suite peu disposés à être de
change, croiser les moins fous, les plus robustes et les plus ré-
sistants à la fatigue. De plus, le griffon ayant toujours, dans sa
reproduction, par suite de ses ancêtres de Bresse ou de Bre-
tagne, une tendance à baisser de taille et à devenir plus com-
mun, il est indispensable de croiser entre eux ceux qui ont la
plus belle tournure.
On voit que par les qualités qu'il possède ce chien doit être assez
recherché pour les petites meutes chassant le loup et le sanglier
dans les grands pays couverts de bois, difficiles, où tant d'autres
chiens abandonneraient leur animal; c'est ce qui fait que, malgré
ses défauts, cette race est encore si commune et si souvent
employée. Malheureusement on en voit beaucoup qui sont issus
de croisements de toutes sortes et dont il est difficile de deviner
l'origine. Les griffons Nivernais, fort bons chiens du reste, très
fins et très braves et assez recherchés, m'ont toujours paru
provenir d'un croisement entre un griffon Vendéen et un chien
20 LA CHASSE A COURRE.
de l'ancienne race d'Auvergne, ce qui leur a donné ces taches
noir et feu, un corps généralement plus léger et moins musclé,
une taille moins grande et en somme un aspect plus léger.
LE CHIEN DU HAUT-POITOU.
Cette belle race paraît cette fois bien près d'être perdue dans
son état de pureté, grâce au saignement de nez qui Ta décimée
depuis plus de vingt ans. Néanmoins dans ce pays de beaux
chiens, de bons veneurs et de grands éleveurs il y a encore tant
de chiens ayant de ce sang, qu'on peut espérer qu'avec des croi-
sements judicieux, des retours aux chiens les plus purs, cette
race se reformera dans le pays qui l'a vue naître et qui lui est
propice.
Cette superbe et excellente race devait venir d'une alliance de
la race Saintongeoise avec la race Normande :
i* Parce que du Saintongeois elle avait conservé l'élégante
tournure svelte et légère et le beau chasser régulier, le nez
haut;
2° Parce que du Normand elle devait avoir pris la forme un
peu busquée de la tête, les bosses excessivement proéminentes
sur le crâne et le splendide port de queue d'une longueur extra-
ordinaire ; enfin une largeur et une force de membres qui n'exis-
tait que dans la race Normande ;
3° Enfin il fallait que la race Saintongeoise eût été croisée
avec une race ayant beaucoup de couleur fauve (le Saintongeois
n'ayant jamais eu de taches fauves) pour donner naissance à une
race tricolore.
Le chien du Haut-Poitou est habituellement tricolore, sa taille
varie de o m ,63 à 0^,70, il est un peu mince, il a le dos complète-
ment harpe, la poitrine profonde, la tête très fine, un peu
busquée, avec des bosses fortement accusées, l'œil vif et intel-
ligent, l'oreille assez courte mais extrêmement mince et papil-
DES CHIENS COURANTS FRANÇAIS. 27
lotée, la voix prolongée mais très claire. La finesse de son nez
était extraordinaire (peu de races ont pu fournir de meilleurs
rapprocheurs) et son fond inépuisable. Il est avéré que M. de
Larye, le grand possesseur de cette race avant la Révolution,
après avoir chassé un loup tout le jour, le rattaquait souvent
le lendemain après un rapprocher de plusieurs heures. Ces chiens,
très collés à la voie, n'étaient pas extrêmement vîtes ; mais, ne
soufflant jamais, ils prenaient encore facilement un louvard en
décembre.
Le chien du Haut-Poitou est plein de sang; sa tête fine et
nerveuse était admirablement attachée à une longue encolure,
son nez long et arqué annonçait par sa belle conformation la
puissance de son odorat qui le faisait éventer à plus de cinq
cents mètres des voies de loup assez froides et le rendait capable
d'enlever au galop les plus vieilles voies. Ses membres plats
étaient d'une largeur extrême, inconnue aux autres races, sauf la
Normande, et encore aujourd'hui, dans les bâtards du pays, c'est
à cela surtout qu'on peut reconnaître ceux qui ont du sang du
Haut-Poitou. C'était un chien actif, requérant, prompt en expé-
dients, un des meilleurs chiens du monde pour chasser le loup
et capable de suivre seul son animal d'un soleil à l'autre. Le
premier chien du monde pour passer dans les brandes et les
bruyères, il était comparativement moins vite dans les plaines
que dans les ajoncs, par-dessus lesquels il bondissait comme
un chevreuil.
Il est bien à regretter que cette belle et excellente race ait été
si gravement atteinte par le saignement de nez et qu'elle ait fini
par donner des chiens si délicats.
Chez MM. de la Besge, de Maichin, de Jousselin, d'Oyron, etc.,
on retrouve encore de ce sang et il est à souhaiter que ces
messieurs le conservent avec soin.
28 LA CHASSE A COURRE.
VI
LE CHIEN D'ARTOIS.
Les chiens d'Artois étaient autrefois blancs avec taches fauves
ou grises, la tête courte, le nez court, un peu retroussé, le
front large, l'œil gros et beau, les oreilles plates et très longues,
le corps assez râblé près de terre et bien fait, la queue un peu
fournie, retroussée et quelquefois recourbée.
Tel était le chien d'Artois connu et recherché du temps de
Henri IV et de Louis XIII et si estimé de Selincourt, qui lui
trouvait : « La gaillardise des chiens français avec la sagesse des
chiens anglais, chassant le loup aussi bien que le lièvre et
donnant plus de plaisir en un rapprocher que d'autres en une
chasse entière. »
Maintenant ils sont un peu dégénérés et moins bien construits,
ils ont souvent des taches noires ou sont tricolores, et sont un peu
plus grands. Ils ont été souvent croisés avec des Normands, ce qui
leur a donné la queue plus longue, plus fine et moins fournie.
Leur taille était moyenne (de o m ,5o à o-,6o). Ils sont souvent
maintenant un peu plats, surtout dans leur arrière-main et moins
bien suivis qu'autrefois. Leur gorge est encore superbe, leur
nez exquis et leur intelligence supérieure. Ils sont quelquefois
un peu clabauds et trop collés à leur voie.
Ils avaient une très bonne constitution et du fond; leur vitesse
était moyenne, mais soutenue. Ils étaient très mordants et tra-
vaillaient bien dans les défauts.
En somme la race Artésienne actuelle est un peu métissée et
difficile à trouver pure. Elle n'a pas très grand pied, mais telle
qu'elle est, elle est encore une des meilleures pour la chasse du
lièvre et, sous ce rapport, elle est digne de l'attention des
veneurs, qui ne peuvent mieux faire que de prendre des chiens
de cette race pour cette chasse.
Le nombre des meutes formées de chiens Artésiens est encore
im
DES CHIENS COURANTS FRANÇAIS. 2Ç
assez considérable; c'est d'ailleurs le chien des petits équipages
et la base des meutes pour lièvre. Bien d'autres veneurs sont
encore heureux de trouver des Artésiens même pour chasser le
sanglier, vu la finesse de leur nez pour les rapprochers, leur
bravoure pour attaquer et leur intrépidité pour chasser au fourré.
Nous allons maintenant passer à la description des races de
chiens courants français devenues rares, mais dont il existe
pourtant encore assez de représentants pour qu'on puisse en
retrouver et les faire revivre en les régénérant, si on voulait
s'en donner la peine.
VII
LE CHIEN FAUVE DE BRETAGNE.
Une de nos plus vieilles races de chiens. Poil ras ou poil dur
comme le Vendéen, de taille moyenne, de constitution robuste,
de grand cœur, les chiens fauves étaient très entreprenants,
chassaient admirablement dans les fourrés les plus épais, mais
ils étaient indisciplinables. têtus et avaient peu de qualités pour
le change. Très braves et intrépides à l'attaque et assez fins de
nez, ils s'emportaient facilement par excès d'ardeur et n'ai-
maient pas beaucoup les animaux qui tournent. Ils lâchaient
facilement au bout de deux heures de chasse, comme les Vendéens.
Leur poil était uniformément rouge vif, tirant un peu sur le
brun, quelquefois d'un rouge plus pâle. Tel était et tel est
encore le chien Breton, qu'on peut trouver en Bretagne.
VIII
LE CHIEN NORMAND.
Il est plus que probable que ce chien descendait du vieux
chien de Saint-Hubert, avec lequel il avait beaucoup de points de
3o LA CHASSE A COURRE.
ressemblance; peut-être venait-il du croisement du Saint-Hubert
avec le Vendéen. En tout cas, c'était un animal superbe et j'ai
encore présente à la mémoire la meute de M. Campion, composée
des animaux les plus beaux que j'aie vus de ma vie.
Le chien Normand était un animal de la plus haute taille
(o m .66 ào ,q ,77), tricolore ou à taches orangées, la tête remarqua-
blement longue et sèche, le front avec deux proéminences très
prononcées entre les oreilles et les yeux, et une bosse extraordi-
nairement saillante à l'arrière du crâne, le nez pas trop long,
mais très large aux narines, comme toutes les anciennes races
à l'odorat exquis, la face couverte de rides très prononcées, les
lèvres un peu pendantes, l'œil gros et la paupière inférieure
tombante, l'oreille attachée très bas, mince, très longue et pa-
pillotée en dedans, assez serrée du haut et plus large du bas,
les épfcules un peu chargées, le corps un peu long mais sec et
robuste, le rein assez large, haut et harpe, les membres remar-
quablement forts, quelquefois un peu empâtés, la queue très
longue, très bien portée et toute droite, les jarrets un peu
fléchis et coudés, la cuisse troussée, bien gigottée et large, une
gorge splendide. Très collé à la voie, lent d'allures mais ayant
beaucoup de fond, rapprochant admirablement, chassant tout,
très mordant, se créançant assez facilement, peu intelligent dans
les défauts, musard et sujet à crier sur place lorsqu'il ne pou-
vait débrouiller la voie, tel était le chien Normand, dont on
retrouve encore des spécimens, soit diminués de taille, soit dé-
générés, soit enfin ayant du croisement d'Anglais. Je ne crois
pas qu'on puisse facilement en trouver de purs, du type que j'ai
décrit plus haut et que j'ai connu ; mais dans les chiens venant
soit de chez M. de Trébons, soit de chez M. de la Broise, il y
a encore assez de sang normand pour pouvoir refaire la race.
DES CHIENS COURANTS FRANÇAIS. Ol
IX
le chien de saint-hubert (Blood-Houtid des Anglais).
La race des chiens de Saint-Hubert, si célèbre dans les fastes
de l'ancienne vénerie, comprenait deux variétés pareilles de type,
mais complètement différentes' de couleur, puisque Tune était
toute noire et l'autre toute blanche.
La variété blanche est disparue et c'est en Angleterre qu'elle
a été conservée le plus longtemps sous le nom de Talbot, de
même que la noire y a été conservée jusqu'à nos jours sous le
nom de Blood-Hounds. Il est à croire que la variété blanche
était la même que la race des Merlants, aussi perdue, et dont je
parlerai plus loin, et peut-être aussi la même que celle des grands
chiens blancs du Roi (qui a donné naissance aux Vendéens),
puisque Souillard, leur père, est bien désigné dans les vieux
auteurs du temps comme un chien blanc de la race de Saint-
Hubert.
La variété noire, qu'on pense issue des Ardennes, était d'un
noir tirant un peu sur le roux, les sourcils marqués de feu, les
pattes de la même couleur, les oreilles longues et un peu larges,
le rein assez long. Ils étaient un peu bas sur jambes et avaient
de grandes qualités de chasse, principalement une disposition
extraordinaire à garder change. Ils avaient une gorge superbe,
mais étaient cogneurs plutôt que hurleurs, leur nez était assez
fin, ils avaient beaucoup de fond et de santé et peu de vitesse.
Puissants de corsage, extrêmement membres, ils étaient rare-
ment malades, ne craignaient ni les eaux ni le froid ; ils chas-
saient à merveille, dit-on, le loup et le sanglier, mais j'en doute
un peu, car leurs descendants m ont toujours marqué une grande
préférence pour la voie du cerf sur celle du sanglier. Ils étaient
assez méchants entre eux, et même pour l'homme. En ceci ils
ont un caractère particulier : beaucoup plus attachés à l'homme
et à leur maître que ne le sont ordinairement les chiens cou-
DES CHIENS COURANTS FRANÇAIS. 3l
IX
le chien de saint-hubert (Blood-Houtid des Anglais).
La race des chiens de Saint-Hubert, si célèbre dans les fastes
de l'ancienne vénerie, comprenait deux variétés pareilles de type,
mais complètement différentes de couleur, puisque Tune était
toute noire et l'autre toute blanche.
La variété blanche est disparue et c'est en Angleterre qu'elle
a été conservée le plus longtemps sous le nom de Talbot, de
même que la noire y a été conservée jusqu'à nos jours sous le
nom de Blood-Hounds. Il est à croire que la variété blanche
était la même que la race des Me riant s, aussi perdue, et dont je
parlerai plus loin, et peut-être aussi la même que celle des grands
chiens blancs du Roi (qui a donné naissance aux Vendéens),
puisque Souillard, leur père, est bien désigné dans les vieux
auteurs du temps comme un chien blanc de la race de Saint-
Hubert.
La variété noire, qu'on pense issue des Ardennes, était d'un
noir tirant un peu sur le roux, les sourcils marqués de feu, les
pattes de la môme couleur, les oreilles longues et un peu larges,
le rein assez long. Ils étaient un peu bas sur jambes et avaient
de grandes qualités de chasse, principalement une disposition
extraordinaire à garder change. Ils avaient une gorge superbe,
mais étaient cogneurs plutôt que hurleurs, leur nez était assez
fin, ils avaient beaucoup de fond et de santé et peu de vitesse.
Puissants de corsage, extrêmement membres, ils étaient rare-
ment malades, ne craignaient ni les eaux ni le froid ; ils chas-
saient à merveille, dit-on, le loup et le sanglier, mais j'en doute
un peu, car leurs descendants mont toujours marqué une grande
préférence pour la voie du cerf sur celle du sanglier. Ils étaient
assez méchants entre eux, et même pour l'homme. En ceci ils
ont un caractère particulier : beaucoup plus attachés à l'homme
et à leur maître que ne le sont ordinairement les chiens cou-
/
DES CHIENS COURANTS FRANÇAIS. 33
leurs qualités par les mêmes raisons. Mais, chez quelques grands
seigneurs, ces chiens employés dans les parcs à chasser les
daims que Ton voulait tuer au milieu de nombreux troupeaux
d'animaux, ont perpétué leurs qualités de chasse et surtout de
change, et certaines familles conservées avec soin, comme celles
de Grantley Berkeley d'où venait le vieux Druid de Jennings,
donnent encore naissance à des chiens de chasse superbes et
doués de grandes qualités. Rien n'était meilleur à la chasse que
les chiens venant de M. Holford.
Pas un chien n'est plus facile à mener à lâchasse, ni plus obéis-
sant, ni plus sûr de change; aucun ne reste plus obstinément
sur son animal, au milieu de cinquante autres, qu'un bon Blood-
Hound. A la chasse pour laquelle il a été réservé depuis tant
d'années, il a pris l'amour du cerf et du daim et un bon Saint-
Hubert ou Blood-Hound, ce qui est la même chose, est capable
non seulement de maintenir seul son cerf ou son daim au milieu
de toute espèce d'animaux, mais même de le porter bas à lui
tout seul.
Le chien de Saint-Hubert actuel est très grand (de o^ôçà o~,8o).
11 a le poil court mais assez épais, et fourré en dessous d'un poil
court et doux. Le feu foncé avec une teinte plus noire sur le dos
est la couleur la plus estimée. Sa tête a un caractère tout parti-
culier, qui dénote la race pure chez ceux qui la possèdent; elle
doit être longue et plutôt étroite que large, surtout chez les
chiennes, garnie de plis et de rides. Le crâne est assez étroit et
les lèvres pendantes, la lèvre supérieure retombant un peu sur
la lèvre inférieure. Les oreilles doivent être minces, placées bas
et très longues. Le front, assez haut et bombé, est terminé par
une pointe assez proéminente en arrière, comme chez le Normand.
Les yeux enfoncés laissent voir la conjonctive. Le cou est assez
long et garni de plis avec du fanon, les épaules obliques, les
pattes larges et puissantes, les pieds bien faits, les ongles noirs
ainsi que la sole, qui est très dure et résistante. La poitrine n'est
ni très profonde ni très large, les hanches sont fortes, la queue
attachée assez haut, mais assez souvent recourbée, les jarrets
3
34 LA CHASSE A COURRE.
un peu coudés ; les canines sont presque aussi fortes que celles
du loup. L'ossature est très puissante.
Comme j'ai eu et élevé plus de trois cents de ces chiens, je
puis certifier qu'ils ont un excellent caractère ; ils sont très
fidèles à leur maître et remarquables pour la retraite à la chasse.
Ils aiment beaucoup à être caressés et choyés et ne font jamais
de mal aux enfants, qu'ils affectionnent beaucoup. Leur caractère
ne change que si on les bat ou les malmène : ils deviennent
alors redoutables; mais ils sont ordinairement si obéissants, qu'il
est rare d'avoir à les frapper. La chienne diffère considérable-
ment du chien; elle est presque toujours beaucoup plus petite
et beaucoup plus mince dans la race pure. Je n'ai pas vu de
races de chiens courants où la différence soit aussi grande entre
le mâle et la femelle.
En somme, c'est une belle race, dont on devrait s'occuper
davantage et qui demande à être conservée, car c'est celle qui
réunit le plus les qualités du chien anglais à celles du chien
français : d'un côté, facilité à être créance, santé robuste, grand
fond, obéissance facile ; de l'autre, ténacité à sa voie dans les
fourrés, belle gorge et nez suffisant, sans être très fin.
X
LE CHIEN GRIS DE SAINT-LOl'IS.
Je croyais autrefois cette race absolument perdue, mais depuis
quinze ans les expositions canines nous ont fait venir du fond
des provinces, et principalement du Gers, de grands Griffons
d'un gris noirâtre qui avaient absolument le type et les formes
du chien de Saint-Louis, tels qu'ils sont décrits dans tous les
anciens ouvrages.
De haute taille, la tête sèche, longue, osseuse et un peu bus-
quée, les oreilles attachées très bas, très minces et très papillo-
tées, le rein fort et bien harpe, les membres assez bien dirigés,
le poil gris de loup avec reflets souvent noirâtres ou argentés,
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DES CHIENS COURANTS FRANÇAIS. 35
des voix magnifiques, le nez des plus fins, grands rapprocheurs
et ne manquant pas de pied, ces chiens pourraient, avec une sé-
lection choisie et quelques croisements bien faits et raisonnes,
nous faire revoir cette belle race, si en honneur autrefois dans la
Vénerie française. Ce serait d'autant plus facile que cette race a
une vitalité extraordinaire, bien explicable du reste, car elle avait
peut-être plus de dix siècles d'existence quand on Ta laissé
perdre. Elle a d'ailleurs été autrefois croisée avec presque toutes
les races, comme on le voit par les chiens à poil gris qui sur-
gissent souvent dans les portées des différentes races et qui
souvent ne sont pas les plus mauvais.
Encore une race à conserver et à travailler, d'autant plus
qu'elle convient particulièrement aux veneurs qui n'ont qu'un
petit équipage.
XI
LE CHIEN DE BRESSE.
Cette vieille race de Griffons était très répandue autrefois dans
la Bresse, la Franche-Comté, le Morvan, le Bourbonnais, etc.,
où il est encore facile de se la procurer.
Ces chiens étaient assez laids, de taille moyenne, à longs
poils, souvent même à très longs poils, assez mal faits, écrasés
sur leurs membres, gris ou jaune sale, pas très vites, extrême-
ment fins de nez, formaient des rapprocheurs extraordinaires, et
j'en ai vu dans le Morvan arrêter le soir sur un grand loup, re-
prendre la voie le lendemain matin ou bien encore relever un
sanglier de trente-six heures. Ils avaient beaucoup de fond, malgré
leur aspect et leur mauvaise construction, et vivaient très vieux.
Tous les anciens veneurs du Morvan et du Bourbonnais ont
connu de ces chiens, dont ils n'ont jamais perdu le souvenir et
dont les hauts faits, célèbres déjà dans l'ancienne Vénerie, ont
acquis un nouveau lustre par les récits des chasses des veneurs
du Morvan, si bien racontées par le marquis de Foudras.
36 LA CHASSE A COURRE.
Que de choses je pourrais raconter moi-même sur ceux que j'ai
vus en Morvan et dont j'ai possédé quelques spécimens remar-
quables : le vieux Malino par exemple et Rafano son fils !
XII
LE CHIEN DE PORCELAINE OU CHIEN DE FRANCHE-COMTÉ.
De petite taille (o-,54 à o",6o), poil blanc, fin et ras, taches
orangées, tête fine et rappelant celle d'un joli chien de Vendée,
oreilles fines, pas trop longues et bien tournées, membres
légers, queue droite fine et bien portée, très belle gorge de hur-
leur, nez très fin; ces chiens sont assez faciles à mener et se
créancent assez bien. Assez ardents à la chasse, mais cependant
sans être trop ambitieux ou trop emportés, ils ne manquent pas
de pied, et comme ils ont un nez exquis pour lequel il n y a
guère de mauvais temps, et que d'ailleurs ils aiment peu la voie
du renard, ces charmants chiens, vrais spécimens de chiens de
lièvre, méritent d être spécialement choisis, comme le chien
d'Artois, pour en former des meutes. Ils aiment aussi beaucoup
la voie du chevreuil.
Cette race a été conservée à peu près pure depuis le dernier
siècle; le dernier abbé de l'abbaye de Luxeuil, Mgr de Clermont-
Tonnerre, en avait donné la race au docteur Coillot de Mont-
bazon (Haute-Saône), dont les descendants l'ont gardée soigneu-
sement.
Depuis que je l'ai fait connaître, cette race s'est assez répandue
pour qu'on puisse en trouver facilement.
XIII
LE CHIEN DE l'ARIÈGE.
Le chien de l'Ariège est encore un chien d'une race assez
ancienne et qui ne manque pas de qualités. Il a beaucoup de
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DES CHIENS COURANTS FRANÇAIS. 3j
ressemblance avec le Gascon et le Saintongeois, mais il est plus
sec, plus grêle, plus léger que ces chiens. Il a aussi moins de
noblesse, soit qu'il ait dégénéré, soit, comme il est plus probable,
qu'il y ait eu des croisements de briquets dans ses ascendants.
Ces chiens sont assez grands, avec taches noires et feu pâle ;
quelques-uns, rappelant même une origine primitive des Saint-
Hubert (par les Gascons), reprennent la robe entièrement noire.
Leur tête est très fine, l'oreille assez large et trop longue, la
poitrine trop étroite, le rein généralement trop long, la queue un
peu basse; malgré ces imperfections, on sent en eux une belle
origine dégénérée, soit par le manque de soins ou le mauvais
élevage avec une nourriture peu substantielle, soit par de mau-
vais croisements. Quelques sous-races, d'une taille moyenne,
marquées de bleu sur les reins et les côtes et ayant gagné plus
de pied, existent depuis quelques années sur les lisières des
Landes et dans le Lot-et-Garonne. On les dit remarquables
sur lièvre.
XIV
LE CHIEN D'AUVERGNE.
Le chien d'Auvergne était un chien qui avait une grande
ressemblance avec un Saintongeois appauvri, dégénéré surtout
comme taille. Il n'avait guère que o",54 ou o",6o. A poils ras,
sec et léger, tricolore ou blanc à taches noir et feu, tête sèche
et jolie, expressive, oreilles un peu trop longues; irréguliers
dans leur construction, ces chiens étaient un peu décousus. Le
chien d'Auvergne était du reste un bon chien, ne manquant pas
de qualités et remarquable par la finesse de son nez, qui en fai-
sait un fin rapprocheur, et son amour de la voie du loup. Sa
gorge avait un caractère bien particulier : elle était claire, pro-
longée et modulée et s'entendant de fort loin ; ce n'est que
dans cette race que j'ai entendu des voix pareilles.
C'est une race qui aurait mérité qu'on s'en occupât et qu'on
38 LA CHASSE A COURRE.
l'améliorât comme forme, construction et train. Pour les qualités,
on n'aurait pu guère que lui en ôter, car s'il avait fallu faire du
croisement, on n'aurait pu lui donner de chien qui en eût autant
qu'elle. Il est donc fâcheux que cette race disparaisse, et cela
est, je crois, bien près d'arriver.
Nous allons maintenant dire quelques mots seulement des
races françaises disparues ou du moins dont je n'ai pu retrouver
de représentants ; mais comme il se peut que dans quelque coin
ignoré de la France il s'en trouve encore des spécimens, nous
ne pouvons les passer sous silence.
XV
LES MERLANTS.
C'était une des races les plus fameuses autrefois pour chasser
le cerf. Son nom venait d'un chien appelé Merlant, qui vivait au
commencement du seizième siècle. Cette race composait seule
les équipages des ducs de Lorraine et a été célébrée par le
grand veneur de Ligneville dans ses Meutes et Véneries.
D'après mes recherches, il est à croire qu'elle venait de la
variété blanche des chiens de Saint-Hubert et qu'avec la robe
blanche elle avait la tournure et les formes des Gascons et des
Saint-Hubert, donnant des chiens lourds, puissants et trapus,
osseux, au rein harpe. Ils étaient célèbres comme chiens de
change et passaient pour être hors ligne sur le cerf.
XVI
LES CHIENS DE LA LOUE.
Cette race, perdue depuis longtemps et célèbre sous Charles IX
et Henri II, avait la taille et le type des chiens de porcelaine,
qui en descendent peut-être bien. Plus tard à la Vénerie royale
on appela ces chiens les Régents.
DES CHIENS COURANTS FRANÇAIS. 3g
Il est à croire que les chiens conservés en Russie dans une
des meutes du tsar et qu'on nomme Arlequins ont la même ori-
gine, car ils viennent il y a plus de deux cents ans de Pologne,
où ils avaient été amenés par Henri III.
XVII
LES CHIENS BLEUS DE FOUDRAS.
Le chien bleu de Foudras, que Ton dit être le produit du
Gascon et du Saintongeois, a été célèbre dans le siècle dernier;
mais cette race est, je crois, complètement perdue. J'en ai connu
toutefois les derniers descendants, à ce que je suppose; ils ap-
partenaient à Lazare Fortin, inspecteur de la vénerie du prince
de Condé, qui en faisait grand cas et chassait chevreuil avec
eux. Ils étaient de taille moyenne, très secs et très légers et
remarquables sur chevreuil.
XVIII
LES CHIENS CÉRÈS.
Cette race est, je crois, perdue. Cependant j'ai souvent en-
tendu dire aux veneurs de l'Ouest que des chiens ayant encore
du sang Cérès se trouvaient chez MM. de l'Hermite et de
Montjon. Le fameux Salgor, célèbre en Vendée, et qui venait
de chez M. de Montbron, en était.
Le chien Cérès n'était pas très grand, sa robe était blanche
et orange, presque toujours par plaques rondes et larges sur le
dos, aux oreilles et de chaque côté des joues. Le poil remar-
quablement ras, fin et luisant, la peau très fine et très souple,
le rein droit, large et râblé, la poitrine très profonde, le corps
rond et un peu levrette, les pattes et les jarrets très secs, la
tête osseuse et le front large, les yeux gros et à fleur de tête,
le museau fin et allongé, les oreilles très tire-bouchonnées et
\0 LA CHASSE A COURRE.
d'une finesse extrême, la queue forte à la naissance, mais très
effilée au bout et très bien portée, tels étaient ses caractères.
La voix était très sonore, un peu flûtée mais bien fournie. De
haut nez, grands rapprocheurs, ces chiens étaient remarquables
sur le lièvre et le loup; ils étaient, à ce qu'il paraît, excellents et
on ne comprend pas comment dans un pays de chasse et de
veneurs comme celui où ils étaient, on les ait laissé perdre,
d'autant plus qu'ils avaient grand fond et étaient très vîtes.
Voilà donc la description succincte des différentes races de
chiens courants français existantes, devenues rares ou perdues.
Je crois que toutes les autres sous-races viennent de celles-là;
mais plus j'ai travaillé et fait de recherches à leur égard, plus je
suis convaincu que le roi Charles IX avait raison quand il disait
dans son Traité de Chasse que toutes les races de chiens cou
rants venaient des quatre races royales :
Saint-Hubert ;
Grands chiens blancs du roi;
Chiens fauves de Bretagne;
Chiens gris de Saint-Louis.
DES CHIENS COURANTS ANGLAIS
I
LE BLOOD-HOUND.
Je ne parlerai pas ici de ce chien, que j'ai décrit tout au long
dans le paragraphe consacré au Saint-Hubert.
II
LE FOX-HOUND.
Ces chiens sont employés dans plusieurs de nos meutes fran-
çaises, surtout pour le sanglier, et quelquefois pour le cerf, quoi-
que beaucoup moins qu'il y a vingt ans. Quelques meutes pour
lièvre et même pour chevreuil en emploient peut-être aussi quel-
quefois, et comme d'ailleurs on s'en sert beaucoup pour faire
des bâtards, il est indispensable d'en parler.
Je ferai d'abord une remarque importante pour les veneurs
français : c'est que les vrais bons chiens anglais de bonne ori-
gine ne se trouvent guère que dans les meutes appartenant aux
membres de l'aristocratie anglaise, qui en conservent la race de
père en fils et en élèvent depuis fort longtemps. Ces meutes
sont toutes bien connues en Angleterre, et même par beaucoup
de veneurs français. Comme ces maîtres d'équipages donnent
généralement à leur piqueur le surplus des élèves qu'ils ne gar-
dent pas, ou, s'ils vendent des chiens faits et de valeur, les ven-
dent aux enchères et fort cher, on peut par hasard trouver, chez
les marchands, des chiens venant de ces meutes ; mais c'est rare,
attendu que les meutes de comtés, formées par souscription et
42 LA CHASSE A COURRE.
ayant à leur tête un master of hounds qui change souvent, n'élè-
vent généralement pas et achètent leurs chiens aux équipages
en renom depuis longtemps : les Beaufort, les Fitz William, les
Fitz Harding, les Rothschild, les Rutland, les Poltimore, etc.
Par conséquent, à l'exception de chiens de réforme, usés et dé-
fectueux, les marchands ne peuvent guère nous procurer des
chiens de bonne origine dont les pedigrees soient connus. Cest
ce qui fait qu'on achète en France tant de mauvais chiens anglais
qui n'ont même pas les qualités qu'on pourrait leur trouver;
c'est pour cela aussi qu'il est utile de connaître les marques des
bons équipages, qui, étant faites au fer chaud, sont ineffaçables.
Comment espérer avoir pour 75 fr., autrement que par hasard,
des chiens excellents, quand on voit Lord Poltimore vendre aux
enchères i3 de ses chiens pour i2 5oo fr.} J'ai moi-même acheté
des étalons pour des amis et je les ai bien payés 5oo. Il est vrai
que l'un d'eux était Traveller, qui, chez le comte de la Besge, a
donné naissance à des bâtards excellents.
Je ferai encore remarquer que, quoique beaucoup de chiens
anglais deviennent de change, c'est cependant une qualité que les
Anglais ne connaissent pas dans leurs Fox-Hounds, et dont ils
ne s'occupent pas. Pour le cerf, tous les équipages, sauf un(De-
von et Sommerset), chassent le cerf ou la biche de boîte, et pour
les renards, la grande chasse ou plutôt le grand sport national, ils
font exprès souvent de faire faire change à leurs chiens ; par con-
séquent cette qualité, indispensable chez nous et qui se transmet
si bien par hérédité, est complètement négligée en Angleterre.
Les qualités que le veneur français doit chercher chez le chien
anglais et qu'il peut trouver, c'est d'abord la santé et la résis-
tance, puis le désir de prendre son animal en le poussant plus
à la fin qu'au début, la facilité d'être créance dans une voie grâce
à son petit amour de la chasse, enfin sa bravoure, car il est sou-
vent très mordant. Si, avec cela, on trouve un chien ayant du
nez (chose rare chez les chiens anglais), de la voix (chose qui
devient plus commune qu'autrefois peut-être), si ledit chien
chasse au fourré, aux ronciers et aux ajoncs (ce qui n'arrive
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DES CHIENS COURANTS ANGLAIS. 43
presque jamais), s'il ne quitte pas trop souvent sa voie (ce qu'il
fait si souvent dans les fourrés de nos forêts), s'il chasse enfin
un forlonger (ce qui est encore rare), le veneur peut s'estimer
fort heureux, car alors il aura un chien presque complet.
Je ne parle pas des Stag-Hounds, parce que je crois, après
avoir bien étudié la question, qu'il n'y a plus à proprement parler
de race de Stag-Hounds en Angleterre. Les chiens qui chassent
cerf sont de grands Kox-Hounds, choisis parmi les Fox-Hounds
les plus forts, les plus chasseurs, les plus criants; mais je crois
que la dernière vieille meute de Stag-Hounds proprement dits
(qui avaient beaucoup de sang normand) était l'ancienne meute de
Devon et Sommerset, vendue pour l'Autriche en 1827. — Il y a
toutefois en Angleterre des meutes qui élèvent des Fox-Hounds
plus grands et plus forts que les autres. Elles sont bien connues
en Angleterre et certaines de ces meutes peuvent bien avoir
encore un peu du sang des anciens Stag-Hounds, car il y a parmi
ces chiens quelques animaux dont la figure et la construction
diffèrent des Fox-Hounds actuels : des têtes plus fortes et plus
carrées, des museaux plus larges, des lèvres plus tombantes, des
narines plus larges, une ossature plus puissante, enfin un je ne
sais quoi qui indique un sang moins mêlé de terrier, de lévrier
ou de bull-dog que dans le Fox-Hound proprement dit. Ces meutes
peuvent aussi tenir cette construction des anciens Stag-Hounds,
car il y a quarante ans on trouvait encore assez facilement en
Angleterre des chiens de ce type; j'en ai vu beaucoup, soit à
l'ancienne Vénerie, soit dans l'équipage du comte de Lagrange,
soit dans celui du baron de Poilly. Il n'était pas rare d'y trouver
des chiens de 24 et 25 pouces, avec une construction puissante,
des têtes fortes et caractéristiques, longues et larges en même
temps, avec les oreilles mieux placées et des queues moins fournies
que leurs congénères.
En somme, il n'y a plus en Angleterre que des Fox-Hounds
d'une même race; il n'y a plus que des sous-variétés. Voyons
donc ce que doit être un bon Fox-Hound, d'après les amateurs
anglais.
44 LA CHASSE A COURRE.
C'est d'abord un chien remarquablement construit sous le
rapport de la force et de la résistance, de taille généralement
moyenne (o-,6o à o*,69). Généralement à fond blanc, il varie beau-
coup de couleur. Il est habituellement tricolore, mais beaucoup
sont blancs à larges taches noires, d'autres blancs à taches jau-
nes, d'autres blancs à taches grises. Il y en a même de presque
blancs et d'autres presque entièrement noirs. Beaucoup d'ama-
teurs anglais prétendent :
i* Que les blancs sont ceux qui ont le nez le plus fin;
2° Que les gris ont moins de nez, mais sont très chasseurs.
grands preneurs d'animaux et infatigables dans leur tra-
vail ;
3° Que les noirs et blancs sont bons chasseurs et très obéis
sants, mais souvent muets.
4° Que ceux à taches jaunes sont entêtés et difficiles à crèan
cer.
Le Fox-Hound est admirablement construit : il a les épaules
fortes et obliques, le rein robuste et large, les cuisses fortes et
gigotées, le cou long et sans fanon, la tête assez longue, mais
montrant rarement les caractères que nous aimons dans la tête
d'un chien courant. Les oreilles sont placées très haut et géné-
ralement plates et larges; les narines, petites, indiquent peu de
finesse de nez; le poil est assez gros et commun, la queue est
garnie de poils assez longs, ce qui indique peu de pureté comme
race de chiens courants. Enfin ces chiens ont souvent aux jambes
de derrière des ergots (que les Anglais coupent devant comme
derrière), ce qui indique toute espèce de croisements de chiens
étrangers à la race des chiens courants, car pas un seul chien
courant de bonne race ne doit avoir d'ergots derrière. Les jambes
sont fortes et droites, le pied petit et rond, grande défectuosité
qui explique comment dès quatre ou cinq ans presque tous les
chiens anglais deviennent boiteux, quand ils chassent dans nos
terrains durs et caillouteux.
Le Fox-Hound est généralement assez facile à créancer, il rallie
DES CHIENS COURANTS ANGLAIS. 45
à merveille, est vite et pousse bien son animal, surtout quand il
le sent malmené. Il aime à se relayer pendant la chasse, déteste
généralement le fourré et, dans ce cas, prend volontiers les che-
mins pour rejoindre les autres chiens quand ils en sortiront ou
couper l'animal s'il en sort; mais si l'animal reste dans le fourré,
il le lâchera volontiers, grand défaut dans nos grandes forêts
françaises, avec leurs immenses fourrés de ronces, d'épines
noires ou d'ajoncs. Dominé dans ces fourrés par des chiens qui
n'ont pas son pied, mais qui y passent lestement, il se rattrape
dans les débuchers où il est de premier train, ce qui se comprend
puisqu'il a été créé pour les débuchers. Il aime les voies droites,
déteste l'animal qui tourne et se fait battre, et même sur le san-
glier qui est l'animal qu'il chasse le mieux en France, il est infé-
rieur quand le sanglier se fait battre dans un fourré ou donne
dans une compagnie. Médiocrement sûr de change, il courra
dans les allées comme un chien de berger et prendra alors sur le
premier sanglier qui sortira du fourré, tellement il sera heureux
de ne pas y entrer. Au chevreuil, il sera tout à fait inférieur, car
il ne pourra se faire à ses retours, et dans un forlonger sera
d'ordinaire absolument nul.
Je ferai toutefois observer que depuis quinze ans environ les
Anglais ont acheté beaucoup de bâtards Vendéens (ils auraient
bien dû en acheter d'autres), qu'ils ont donné à leurs lices, ce qui
fait qu'on ramène maintenant souvent d'Angleterre des chiens
qui, sans ressembler à nos bâtards de Vendée (parce qu'ils sont
issus de leurs lices), ont cependant pris des qualités et même
pas mal de défauts du bâtard de Vendée. Ils crient mieux, ont
plus de nez, mais sont plus désobéissants et se créancent moins
bien.
En somme, la Vénerie française peut trouver en France mieux
que le chien anglais pour notre genre de chasse; mais ce qui fera
toujours le succès du chien anglais, c'est qu'on peut s'en remon-
ter à bas prix : un peu d'argent et un télégramme à Wilton, et
tout est dit! Il y a tant de chasseurs qui ne savent pas ce que c'est
qu'un bon chien! Enfin le chien anglais est souvent très utile
46 LA CHASSE A COURRE.
pour faire des bâtards ou retremper certaines de nos races
épuisées, étiolées, auxquelles il donne de la santé, de la rusticité
et du pied. Mais quand on cherche un étalon anglais, on ne sau-
rait être trop difficile sur son origine et on ne devrait jamais le
prendre que dans un de ces équipages d'Angleterre où on élève
depuis fort longtemps et qui d'ailleurs sont bien connus.
III
LE HARRIER.
Le Harrier est un chien qui tient le milieu entre le Fox-Hoond
et le Beagle, et il est à croire qu'il provient d'un croisement entre
ces deux races; mais il y a plusieurs variétés de Harriers. Les
uns ressemblent à des Fox-Hounds très lins, très légers et ayant
une construction merveilleuse au point de vue de la vitesse, de
la force et de la résistance : poitrine profonde, épaules obliques,
rein bien fait et râblé, cuisses bien gigottées, flanc un peu re-
troussé, membres secs et bien plantés, cou long et dégagé, tête
fine et pointue, petites oreilles courtes et plantées un peu haut,
taille o"\5i à o%57.
Tricolores ou à taches noires ou jaunes, ces chiens sont char-
mants et d'un très grand pied. Dans les grandes plaines ou les
pays peu couverts, ils prennent leur lièvre très vite; mais dans
les pays couverts ou de brandes et de bruyères ils laissent un
peu à désirer, surtout quand le lièvre ruse et qu'il y a des défauts.
Il y a une autre variété de Harriers qui a des formes plus fran-
çaises et ressemble moins à des lévriers. Ces chiens sont souvent
tachetés de noir ou de fauve, ont l'oreille plus longue et atta-
chée plus bas, la poitrine moins profonde, les formes moins
accusées. Ils ont le nez beaucoup plus fin, la gorge plus forte et
plus fournie et ils sont moins vites. Ils sont généralement bons
chiens de lièvre et sortent mieux des défauts.
Les Harriers ont été souvent employés en France à la chasse
du lièvre et ont quelquefois réussi ; néanmoins on leur préfère
i ny i
DES CHIENS COURANTS ANGLAIS. 47
certaines races françaises, plus fines de nez et plus disposées
aux retours et à bien faire le chemin, comme le chien d'Artois,
les chien de porcelaine et le chien de TAriège. Essayés bien
des fois sur le chevreuil, ils n'ont jamais très bien réussi. On
leur reproche de devenir difficilement des chiens de change très
sûrs et de ne pas être assez vifs et malins dans les défauts et
les retours.
Néanmoins le Harrier est un bon petit chien, bien fait pour la
chasse du lièvre et qu'on peut employer surtout dans les pays
découverts où il n'y a pas trop d'animaux. Il y en a de très bons
équipages en France actuellement et ils sont même plus nom-
breux qu'autrefois.
IV
LE BEAGLE.
Le Beagle est un diminutif du Harrier; c'est un Fox-Hound
vu par le gros bout d'une lorgnette.
De la plus petite taille, tricolores généralement, les uns sont
à poil ras et les autres à poil dur. Ils ne ressemblent nullement
au Basset, inconnu pour ainsi dire en Angleterre jusqu'à ces
dernières années, car le Beagle est aussi haut que long, et il y en
a de remarquablement faits, comme un joli petit Fox-Hound
ayant de o m ,36 à o-,3ç de haut. Il y en a de très vites et qu'un
cheval a de la peine à suivre en plaine en débucher. Il y en a
de si petits, que le colonel Hardy en a eu une meute de vingt-
quatre qui étaient portés tous à la chasse dans deux paniers sur
le dos d'un cheval.
Généralement les plus petits sont appelés Elizabeth-Beagles.
Excepté dans les terrains très convenables, ils sont exposés à
ne pouvoir sortir des bruyères et à se noyer dans les fossés.
On les emploie à la chasse du lièvre et du lapin. Ils sont si
petits, que leur voix n'est pas bien forte et ne s'entend pas de
très loin.
48 LA CHASSE A COURRE.
V
le chien du sud (Southern-Hound).
Il existe en Angleterre un chien qui a beaucoup plus de rap-
port que les autres avec les vieux chiens courants français : c'est
le chien du Sud, employé encore assez souvent pour la chasse
du lièvre, quoiqu'il commence à devenir rare. Il était assez
grand, à peu près comme le Fox-Hound, mais beaucoup plus
plat et plus léger, la tête maigre, longue et osseuse, les oreilles
très grandes et attachées très bas ; sa couleur était bigarrée de
noir, tachetée de fauve, sa poitrine était médiocre ; il avait du
poil sous le ventre et la queue assez grosse à la naissance. Ce
chien a beaucoup de la silhouette du chien de l'Ariège et même
de sa couleur. Il a une très belle voix et un bon nez ; de plus
il est très tenace à la voie. Les Anglais l'employaient surtout
partout où il y avait des bois et où le pays était couvert, là où
précisément leurs autres chiens ne pouvaient guère convenir et
où ils étaient exposés à perdre la chasse. Ce chien n'était pas
très vite, ce qu'on comprend en le voyant, mais il avait de
grandes qualités de chasse.
VI
le chien de loutre (Otter-Hound).
11 nous faut noter simplement cette espèce, encore assez
commune en Angleterre, où il y a bien une dizaine de meutes ne
chassant que la loutre ; mais, à vrai dire, ce n'est ni une race ni
même une sous-race. Croisements de chiens de lièvre avec des
griffons, des terriers écossais, des Bull-Dogs, des Blood-Hounds
même, ils offrent tous les types, et les meilleures meutes
actuelles d'Angleterre ont presque toutes plus ou moins de san#
de mes anciens griffons Nivernais, dont, pendant longtemps,
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DES CHIENS COURANTS ANGLAI3. 49
je leur ai envoyé de jeunes produits, et ma meute tout entière
lors de la guerre de 1870. Aussi y a-t-il dans une meute
d'Otter-Hounds des différences de taille et de physionomie
extraordinaires.
Il m'est donc impossible de classer ces chiens dans une race
précise.
VII
LE KERRY-BEAGLE.
Malgré mes recherches, je n'ai môme jamais pu connaître
d'une façon certaine la forme et la description de cette race.
Cependant M. Paul Caillard, si expert en fait de races de chiens,
m'a assuré avoir vu en Irlande des chiens appelés Kerry-Beagles,
qui n'étaient autres que des Saint-Hubert modifiés, devenus plus
légers, dégénérés à l'œil, mais doués du reste d'excellentes qua-
lités. Il m'a dit qu'on pouvait en trouver encore du côté de
Limerik.
D'un autre côté, un colonel anglais a amené à l'Exposition
universelle de chiens à Paris un chien courant qu'il a présenté
comme Kerry-Beagle, et qu'on est venu me prier d'examiner pour
le classer: ce que je n'ai pu faire. Ce chien ressemblait à un fort
chien courant d'Artois assez mauvais, et je supposai qu'il en
venait et avait reçu une désignation fantaisiste.
VIII
LE TALBOT.
La race des Talbot ou variété blanche des Saint-Hubert ou
des Blood-Hounds me paraît définitivement disparue. Toutefois
j'ai vu une fois amenées d'Angleterre, par un piqueur normand
appelé Eusèbe, des chiennes blanches et roses sans taches, très
fortes, très trapues, à forte tête et à museau carré, auxquelles il
4
50 LA CHASSE A COURRE.
m'a été impossible de désigner une race ou une origine, et malgré
toutes mes recherches pour savoir où le marchand les avait eues
et ensuite pour en retrouver de pareilles en Angleterre, jamais
je n'ai pu réussir. Je le regrette d'autant plus qu'elles avaient un
type de race extraordinaire et peu commun.
DES BATARDS
Maintenant que nous connaissons les principales races de
chiens courants français et anglais, il nous faut parler des
bâtards, dont l'élevage a fait depuis quelques années des progrès
énormes, surtout depuis que, par des croisements modérés, mais
judicieux, quelques amateurs émérites sont parvenus à re-
constituer en quelque sorte certaines de nos races françaises
qui se perdaient, en y infusant avec grand tact du sang anglais.
Pour commencer par les mieux réussis, nous décrirons d'abord
les bâtards Saintongeois et Poitevins, qui forment actuellement
nos meilleures meutes de cerf et de chevreuil et dont il n'y a
qu'à souhaiter de voir perpétuer les qualités.
Comme nous ne pouvons mieux faire que de nous adresser
à un des plus habiles créateurs de la race Anglo-Saintongeoise,
nous allons emprunter à M. le comte de Chabot sa description
du chien qu'il a su si bien créer avec ses collègues et dont il a si
bien fait connaître théoriquement et pratiquement les grandes
qualités.
I
LE BATARD DE SAINTOXGE.
Voici ce qu'en dit M. le comte de Chabot :
€ Le Fox-Hound a été créé avec l'esprit pratique des éleveurs
anglais, uniquement en vue du Fox-Hunting.
L'attrait principal (et même le seul) de la chasse au renard
en Angleterre consiste à franchir des obstacles imprévus, à
courir à bride abattue, à éprouver la vitesse des chiens et des
52 LA CHASSE A COURRE.
chevaux, la solidité, l'audace et l'énergie des cavaliers. Ex-
cellente école pour les cavaliers, médiocre école de Vénerie, tel
est le Fox-Hunting anglais.
Pour nous, veneurs français qui conservons précieusement les
vieilles traditions de nos pères, qui aimons l'art de la Vénerie,
le Fox-Hound, presque toujours muet, peu travailleur, souvent
dur de nez, ne saurait convenir à nos goûts. Dans l'Ouest, nous
avons formé plusieurs sous-races de bâtards réunissant à la
rusticité du Fox-Hound la gorge, l'amour de la chasse et la
finesse d'odorat du chien français. Moins lourds que le chien de
renard, de plus haute taille, plus légers de corsage, mais
musclés et bien reintés, profonds de poitrine, dune construction
élégante, nos bâtards réunissent au plus haut point les qualités
physiques et morales que nous devons chercher dans nos braves
compagnons.
Parmi les sous-races créées en France depuis cinquante ans.
bâtards Haut-Poitevins, Normands, Gascons, Saintongeois, je
ne décrirai que ces derniers, par la bonne raison que je les
connais mieux que les autres, et que d'ailleurs la différence
entre les différents bâtards est légère et que la construction est
presque identique.
i° Les pattes. — Je considère que les pattes du chien courant
sont le point capital, — avec des pattes défectueuses ou trop
faibles, peu ou point de locomotion. La première partie de la
patte et la plus essentielle, à mon avis, c'est le pied. Chez le
bon bâtard de Saintonge, il doit n'être ni trop long, ni trop rond,
muni d'ongles et de doigts solides, l'éponge assez large, une
vraie patte de lièvre, un des points caractéristiques de la race
de Saintonge. J'ajoute que la patte doit être droite; il faut
absolument proscrire les coudes en dehors et les jarrets écartés.
Pour le bâ r .rd, qui doit unir la légèreté à la force, dont le corsage
est élégant quoique musclé, point n'est besoin de pattes énormes.
Quand elles sont légères d'ossature, mais bien garnies de
solides tendons, elles suffisent amplement. J'aime les jarrets un
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LES BATARDS. 53
peu coudés : c'est signe de vitesse et de fond ; le jarret trop droit
et en même temps étroit doit être sévèrement réformé : .c'est un
défaut capital.
2° Les épaules. — Bien que fortement attachées, elles doivent
être plates et très obliques. De la longueur de ces leviers
comme de celle des hanches dépend souvent la vitesse du
chien. Du développement des muscles dans l'appareil locomoteur
dépendent et le fond et la résistance. L'arrière-main doit être
puissant et très solidement établi, répondre en un mot à la
bonne construction des épaules.
3" Poitrine. — Chez le bâtard de Saintonge, elle doit être pro-
fonde, plus encore que large; si elle est trop large, la vitesse
s'en ressent; elle doit en un mot ressembler à la poitrine du
cheval de pur sang. Du reste les poumons sont surtout déve-
loppés dans le sens de la verticale; une largeur moyenne unieà
une grande profondeur suffit donc.
4* Reins. — Les reins doivent être bien attachés, sans aucune
dépression près de leur point d'intersection, c'est-à-dire a la
dernière côte. Le chien dont le rein est très arqué ne s'étendra
jamais dans le môme style que celui dont le rein est plat et un
peu long, il galopera toujours en raccourci.
5° Tête, cou et oreilles. — Ce sont surtout la tête et l'enco-
lure qui, chez le bâtard, dénotent le croisement dont il est
issu.
L'Anglo-Saintongeois doit avoir la tête légère, avec un front
développé et des narines larges. Les yeux doivent être grands,
vifs et intelligents, les oreilles fines et bien attachées, un peu
papillotées, couvertes'd'un poil noir, luisant et doux au toucher;
quand avec cela elles sont bordées sur la face externe d'un liséré
de feu pâle, et que les deux yeux sont surmontés de deux petites
taches aussi de feu pâle, on peut affirmer que le vieux sang de
54 LA CHASSE A COURRE.
Saintonge existe encore dans les veines de l'animal. Le cou doit
être solidement attaché à sa base, mince ensuite et long comme
il convient à un chien chez lequel on recherche, comme chez le
cheval de pur sang, les grandes lignes.
5 # Queue. — Elle doit être forte à sa naissance, et se terminer
en pointe effilée; elle est longue et droite quand le chien est en
mouvement.
6° Robe. -— La robe comprend le poil et la couleur. Le poil
doit être très ras, très fin et par suite très serré. La couleur du
bâtard Saintongeois doit être uniforme. Elle rappellera le plus
exactement possible la couleur de la race que Ton veut régé-
nérer, la vieille race française de Saintonge ; elle sera uniformé-
ment noire et blanche sur tout le corps, soit à manteau noir, soit
à marques détachées, avec du feu le plus pâle possible sur les
joues et sur la face externe de l'oreille, avec deux points de
même couleur au-dessus des yeux.
7° Taille. — Le chien de Saintonge était de haute taille; notre
bâtard, destiné à galoper dans les fourrés, à bondir par-dessus
les ajoncs épineux, les brandes et les bruyères tapissées de
landes piquantes, doit, lui aussi, être grand. Quand le chien
est bien construit, plus il est de haute taille, plus il est beau à
l'œil.
Les Anglais veulent des chiens qui aient le cou long, pour
qu'ils puissent, en chassant, mettre le nez à terre afin de mieux
saisir la voie ; c'est une preuve que la majorité de leurs Fox-
Hounds est dure de nez. L'ancien chien de Saintonge chassait
au contraire le nez au vent, sans daigner baisser la tête. C'est
encore aujourd'hui le signe caractéristique du chien de race, tant
chez les chiens d'arrêt que chez les chiens courants; le bâtard
de Saintonge doit donc chasser le nez haut. J'ai remarqué nombre
de fois des chiens assez lents à la vue, tenir constamment la tête
de la meute et crier admirablement; cela tenait uniquement à
LES BATARDS. 55
leur manière de porter la tête. La position horizontale permet
en effet aux poumons de fonctionner à Taise et par suite aux
chiens de crier facilement et de tenir le train sans fatigue. »
II
LE BATARD DU HAUT-POITOU.
La description si remarquable du bâtard Saintongeois que je
viens de donner pourrait s'appliquer en grande partie au bâtard
du Haut-Poitou, d'autant plus que presque tous les bâtards du
Haut-Poitou actuellement existants ont généralement du sang
de Saintonge, de même que le plus grand nombre des bâtards
Saintongeois ont du sang du Haut-Poitou. Cependant le vrai
bâtard du Haut-Poitou diffère du bâtard Saintongeois, surtout
par la tête et les membres. La tête est plus longue, plus étroite
et plus osseuse, les oreilles plus plates et moins tire-bou-
chonnées; les marques de feu pâle n'existent pas; quant aux
membres, ils sont beaucoup plus larges et plus forts : c'est là
un des signes certains du sang du Haut-Poitou, et même, quand
on vous présente un bâtard noir et blanc à taches feu pâle, si
vous lui voyez la tète longue, osseuse et les membres remar-
quablement larges et forts pour son corps, vous pouvez être sûr
qu'il a du sang du Haut-Poitou.
Régulièrement d'abord ce bâtard doit être tricolore, et s'il est
noir et blanc, surtout avec des taches feu pâle, c'est qu'il a du
sang de Saintonge, car la délicatesse de ces chiens et leur facilité
à avoir le saignement de nez ont fait si souvent retremper la race
avec des bâtards Saintongeois ou Gascons, que beaucoup de
leurs descendants ont pris la livrée du bâtard de Saintonge.
C'est en grande partie au comte E. de la Besge, un de nos
plus célélèbres veneurs, qu'on doit la création du bâtard du
Haut-Poitou. Longtemps cet excellent veneur n'a eu dans sa
meute que des chiens purs du Haut-Poitou, et quels chiens! ce
Marius, resté si longtemps célèbre en Poitou, ce superbe et
56 LA CHASSE A COURRE.
excellent Vaillant, chien de loup hors ligne, qu'il a bien voulu
me céder il y a plus de trente ans. C'est vers cette époque qu'il
a commencé à introduire du sang anglais, précisément, je crois,
pour combattre la délicatesse de santé et le peu de durée des
chiens purs trop croisés entre eux; le croisement fut fait très
judicieusement avec ce Traveller que j'avais ramené d'Angleterre
pour le comte de Barrai, chien dont j'ai parlé plus haut et qui
venait de chez Lord Fitz Harding. Les produits n'avaient pres-
que rien perdu du type et des qualités de la noble race française
dont ils descendaient et à laquelle on retourna judicieusement
pour les nouveaux croisements. La race ainsi formée au chenil
de Persac s'est peu à peu répandue dans tout le pays, et au loin
même vu sa réputation. Les meilleures meutes du Poitou y
comptent quelques ancêtres, et presque toutes celles que nous
avons vues aux Expositions peuvent faire remonter leur origine
au chenil de Persac, qui leur a fourni parmi leurs aïeux les plus
beaux types que le Poitou et môme la France aient jamais produits.
On peut regretter que cette famille soit en train de se perdre
dans la variété des bâtards de Saintonge, car les bâtards du
Haut-Poitou étaient les meilleurs chiens qui existassent, principa-
lement pour le loup.
III
LE BATARD DE VENDEE.
D'après les veneurs de la Vendée et du Poitou, le croisement
de la lice vendéenne et de l'étalon anglais a rarement réussi, et
quand les veneurs étrangers au pays vont en Vendée acheter
des bâtards vendéens, il ne faut pas qu'ils se figurent qu'ils
achètent des chiens issus uniquement d'une lice vendéenne et
d'un étalon anglais. Ils achètent généralement des chiens qui
ont du sang de Vendée peut-être, mais certainement aussi du
sang du Haut-Poitou ou de Saintonge, ce qui fait que si l'on
veut élever de ces chiens, on ne sait presque jamais ce que l'on
^
LES BATARDS, Sj
fera et on s'expose à des surprises fort désagréables dans les
productions qu'ils donneront.
Les produits réels de la lice vendéenne et de l'étalon anglais
sont généralement vites, légers, ardents, très entreprenants,
mais généralement ils manquent de voix et de nez.
Les veneurs de ces pays citent cependant un chien anglais
Crefton, qui a parfaitement tracé avec les lices vendéennes.
Ses fils ont été célèbres dans le pays; presque tous ses
enfants ont été des chiens parfaits, très vites, très sûrs de
change. Il y avait beaucoup de ce sang dans les excellents
chiens de M. de Dan ne.
Ces bâtards avaient pourtant une qualité fort précieuse, celle
de travailler vivement en avant et, quand ils rapprochaient, de
le faire plus vite que tous les autres bâtards. Moins collés à la
voie, ils dépêchaient davantage la besogne dans les forlongers,
qualité précieuse pour la chasse du chevreuil.
Ils étaient généralement tricolores ou à taches fauve foncé et
à manteau. Ils étaient plus communs de formes que les bâtards
Saintongeois et Poitevins, l'Anglais ayant plus d'influence sur la
production avec cette race, qui ne passait pas pour très pure.
Je crois que cette sous-race n'est pas facile à fixer. Si on tourne
du côté de l'Anglais, mieux vaut faire de l'Anglais pur, et si on
retourne aux Vendéens, ceux-ci n'existant presque plus à l'état
pur, on ne sait trop comment s'y prendre.
Il y a beaucoup de bâtards issus des Vendéens à poils durs
et de l'Anglais; il y a même quelques équipages très réussis
qui ont l'air de mieux se maintenir que les autres, parce qu'on
peut plus facilement retourner aux poils durs, dont il existe un
grand nombre de représentants. Ils sont plus ou moins purs,
c'est vrai, mais ils ont encore bien le type et surtout les qualités
de l'espèce.
58 LA CHASSE A COURRE.
IV
LE BATARD DE GASCOGNE.
Quoiqu'il y ait pas mal de bâtards de Gascogne, je ne sais
trop s'il y a une seule meute composée uniquement de bâtards
Gascons. En revanche, il y a énormément de bâtards qui ont
dans les veines du sang de Gascogne, et c'est bien tout ce
mélange de sangs divers qui rend si difficile de fixer les bâtards
et d'arriver à une sous : race à peu près constante, comme on
pourrait le faire si les bâtards sur lesquels on travaillait n'avaient
que le sang des deux races dont ils sont issus.
Les veneurs du Poitou et de la Vendée estiment beaucoup le
bâtard Gascon, à l'égal presque du bâtard Saintong-eois et du
bâtard du Haut-Poitou. Que les produits des Gascons et des Sain-
tongeois avec l'Anglais se soient valu depuis trente ans, cela se
comprend d'autant mieux que M. le baron de Ruble et M. de
Carayon ont longtemps échangé leurs chiens, l'un gardant les
bleus, l'autre les blanc et noir; en somme, le sang était très
mélangé et les produits avec l'Anglais ont dû se ressembler
beaucoup.
D'ailleurs la meute de M. de la Débutrie, qui a fourni presque
tous les équipages de ce pays, avait eu une lice pure Gascogne,
fort célèbre, Panthère, qui, croisée avec un Anglais, Parliament.
avait donné naissance aux Bélisaire, Minos, Chandos, Ro
chester, etc., tous aïeux des meilleurs sangs des équipages de la
Vendée. — Tous ces chiens-là étaient de change et réunissaient
les qualités les plus précieuses : le train, le nez, le fond, l'amour
de la chasse, une gorge magnifique et une santé à toute épreuve,
qualités qui ont été transmises à leurs descendants.
Il ne faut pas oublier d'ailleurs que les bâtards de Gascogne
sont de tous les bâtards ceux qui ont le plus de santé, différant
en cela des bâtards du Haut- Poitou ; c'est donc un type qui a
de l'avenir, car il existe dans tout le Sud-Ouest pas mal de
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LES BATARDS. 5ç
Gascons purs, et, en croisant intelligemment avec l'Anglais, on
peut arriver à un bon résultat en retournant de temps en temps
à Tune des deux races, mais surtout à la française.
V
LE BATARD NORMAND.
Quoique Normand, je connais peu cette sous-race, n'ayant
guère chassé dans ma vie que quatre ou cinq fois avec des équi-
pages de bâtards Normands, qui étaient du reste très beaux,
très criants, ayant même des gorges magnifiques. Ils étaient
fins de nez, mais je les ai trouvés musards et ayant peu de
qualités.
Depuis ce temps-là, la sous-race a été perfectionnée par M. de
la Broise, entre autres, qui était arrivé à avoir de très beaux
chiens et fort bons, m'a-t-on dit, avec lesquels il prenait cerfs et
chevreuils dans des forêts difficiles. Cette famille a été maintenue,
et à l'Exposition de Paris de 1887 v ° n a P u vo * r de magnifiques
échantillons de bâtards Normands, appartenant à M. Du Rozier.
Les bâtards Normands de M. Durécu, Leduc et Hardy, que
j'ai connus il y a plus de trente ans, étaient très beaux, trico-
lores, ayant beaucoup de sang français, secs et gros, non de
graisse mais de muscles, de belles têtes, et des queues comme
des cierges; ils étaient inférieurs cependant de beaucoup à leurs
ancêtres, les Normands purs de M. Campion et de M. Dary. A
la chasse je les trouvais un peu musards et manquant d'activité
et d'intelligence.
Les bâtards Normands sont souvent très colorés, à manteau
noir prolongé et très couverts.
Je crois qu'il est inutile de pousser plus loin cette étude des
bâtards, attendu :
r Qu'il peut exister des bâtards de toutes les races françaises
décrites avec toutes les races anglaises, ce qui nous mènerait
loin;
ÔO LA CHASSE A COURRE.
2* Que je n'ai voulu signaler que les variétés les plus usuelles
et celles qui me paraissent avoir le plus d'avenir.
Sous ce rapport, les races Anglo-Saintongeoises et Anglo-
Poitevines tiennent la corde, et la première se transformera avan:
peu en un Saintongeois perfectionné, moins beau peut-être que
l'ancien, mais meilleur, qui composera plus de la moitié des
meutes françaises, si on peut le maintenir tel qu'il a été si
habilement créé par les la Débutrie, Chabot, Bejarry, Jous
selin, etc., etc. Les beaux jours de la Vénerie française ne sont
pas passés et on pourra ne pas regretter leurs ancêtres; mais il
faut quelques veneurs dévoués pour conserver la race pure.
J'ai décrit à peu près toutes nos races de chiens d'ordre. Ce
livre étant destiné aussi bien à la petite qu'à la grande Vénerie,
il me faut dire un mot des chiens qui sont sans race et qui
néanmoins sont souvent employés à la chasse à courre sous le
nom générique de Briquets.
Produits bizarres, souvent jolis, de toutes les races, même
quelquefois étrangères à la chasse à courre, ils se distinguent
des chiens d'ordre surtout par leur production, qui accuse des
rappels de toutes les races dont ils sont issus, par la présence
fréquente d'ergots aux jambes de derrière (comme bien des
chiens anglais qui, eux aussi, ne sont souvent que des bri-
quets d'un autre genre), par la difficulté de les rameuter à la
chasse, ce qui fait qu'une meute de Briquets chassant ensemble
et rameutée est la chose la plus rare que l'on puisse rencontrer.
Les Briquets forment une catégorie de chiens tellement croisés,
qu'on ne peut leur attribuer de caractères distinctifs. Ils viennent
de toutes les races, et généralement ils reproduisent des animaux
différents de forme et de pied, non seulement avec leurs auteurs,
mais encore entre chiens d'une même portée.
Néanmoins il s'est formé, dans les provinces et chez quelques
chasseurs, des familles de Briquets plus suivies qui, soigneuse-
ment croisées entre animaux semblables, ont fini par se repro-
duire d'une manière à peu près uniforme ; dans ce cas, il y a
LES BATARDS. 6l
presque toujours autant de types que de possesseurs de chiens.
Le Morvan, la Gascogne, les Vosges, la Vendée, les Ardennes,
la Bretagne, etc., possèdent ainsi des variétés plus améliorées,
provenant généralement de chiens d'ordre de ces pays, croisés
pour la plupart avec des chiens sans race et sans caractère et
souvent tout autres que des chiens courants.
On peut dire pour les familles de Briquets que plus ils res-
semblent à leurs ascendants, plus ils sont estimés; ce qui est
tout simple, parce que cela prouve que déjà la sous-race se
confirme, s'améliore et commence à offrir quelque garantie de
filiation suivie.
Les Briquets sont habituellement de petits chiens ; cependant
il y en a qui ont jusqu'à o-,66 et o m ,6o. De tous poils et de toutes
couleurs, cogneurs, hurleurs, indisciplinés, ralliant fort mal,
presque impossibles à mettre en meute et généralement trop
chasseurs pour être créances ou résister à faire change quand
un animal leur bondit sous le nez, ils sont souvent très intelli-
gents dans les défauts. Ils chassent par poussées, ont un fond
souvent médiocre et mettent souvent bas après une première
randonnée; c'est du moins le cas de la majorité : ce qui n'em-
pêche pas qu'il se rencontre quelquefois un Briquet qui fait un
chien de chasse extraordinaire et peut rendre beaucoup de ser-
vices; mais c'est pur hasard, et c'est encore un bien plus grand
hasard, s'il reproduit des chiens aussi bons que lui.
Il n'en est pas de même des Bassets, et surtout de certaines
races, dont je dois en dire un mot avant de terminer la descrip-
tion des races de chiens employées à la chasse à courre.
DES BASSETS
Je n'ai pas besoin de décrire la forme générale des Bassets,
chiens courants avec un corps et une tête identiques aux grands
chiens, mais des jambes torses ou droites si courtes, que le
corps a l'air de s'appuyer sur le sol.
Du Fouilloux et Sélincourt attribuent tous deux l'origine du
Basset à l'Artois et à la Flandre. Leverrier de la Conterie fait
un grand éloge des Artésiens longs de corsage et bien coiffés.
Cette race, qui était à peu près perdue il y a trente ans (si bien
que tout le monde cherchait des Bassets sans pouvoir en trouver',
a été entièrement reformée par moi et par M. Lane. Leur origine
est à peu près la même; seulement je me suis toujours occupe
à maintenir mes Bassets à une taille assez réduite, tandis que
M. Lane en a toujours fait de plus gros et de plus grande taille.
Les deux familles de Bassets que nous avons ainsi recréées
sont bien connues aujourd'hui et fort estimées non seulement
en France, en Angleterre, mais même en Russie. En Angleterre,
ils ont même eu l'honneur insigne d'être classés pour les
concours.
Ces chiens sont tricolores, à poils ras, quelquefois mouchetés;
la tête est assez longue et celle des femelles généralement plus
étroite et plus longue que celle des mâles, les oreilles assez
longues, plus longues toutefois chez les Bassets de M. Lane que
chez les miens. Ils sont soit à jambes torses, soit à jambes
droites mais courtes. Autant que possible, je ne croise que ceux
à jambes droites, attendu qu'on arrive facilement, en croisant les
jambes torses, à faire des chiens qui ne peuvent plus marcher
du tout. Ces chiens sont très vigoureux, il y en a d'infatigables;
ils ont donc un grand fond et une excellente santé et s'élèvent
LES BASSETS. 63
facilement. Ils sont très obéissants, chassant très bien en meute
et sont beaucoup plus ralliants que ne le sont ordinairement les
Bassets.
Us se reproduisent absolument pareils, ce qui prouve bien
que les premiers chiens que j'avais employés étaient purs.
Le Basset est très résistant et parfait pour la chasse à tir.
Très brave, on peut lui faire chasser tous les animaux. Ayant
généralement une belle gorge, il fournit énormément et quatre
Bassets font autant de bruit qu'une meute. Comme ils vont
presque toujours d'un train sage et modéré, en raison de leur
structure, le gibier ne s'effraye pas de leur poursuite et, jouant
devant eux, il se fait tuer plus facilement; toutefois nos Bassets
sont encore assez vites et pourraient prendre un lièvre.
La Vendée produisait autrefois et produit encore des Bassets
très remarquables. Ils sont de taille moyenne, à jambes droites
mais courtes, à oreilles moyennes, à poil dur et soyeux en
dessous. Blancs à taches jaunes ou grisâtres ou entièrement gris,
ils sont fort bien construits et pas trop longs. Ces Bassets sont
souvent d'un pied extraordinaire et en meute peuvent très bien
prendre leur lièvre en deux ou trois heures.
Les variétés de Bassets sont infinies. On doit citer entre
autres les petits Bassets de la Forêt-Noire et des Vosges, noirs
marqués de feu et se reproduisant bien pareils comme forme;
malheureusement il y en a plus de mauvais que de bons.
Les Bassets étaient, il y a vingt ans, inconnus en Angleterre,
et, à la première Exposition de chiens en France en i863, les
Anglais furent extrêmement étonnés de voir ce type de chien
qu'ils ne connaissaient pas. Ils les ont depuis introduits chez
eux, principalement ceux de la Forêt-Noire, les miens et ceux
de M. Lane. Dans les anciens ouvrages anglais sur les chiens
qui ont été traduits en français, les traducteurs ont à peu près
tous traduit Beagle par Basset ; or le Beagle est loin d'être un
Basset. Du reste, à cette époque, nos races de chiens courants
français étaient à peu près inconnues en Angleterre. Les Gas-
cons, les Saintongeois, etc. étaient ignorés et encore aujourd'hui
64 LA CHASSE A COURRE.
beaucoup d'Anglais chassant à courre ne les connaissent pas du
tout. Cela se comprend du reste, quand on sait, comme moi,
combien il y a de chasseurs français qui ne les connaissent pas
davantage, ou mieux, qui nient même leur existence et leurs
qualités.
CHAPITRE V
DU SOIN DES CHIENS
Maintenant que nous avons décrit à peu près toutes les races
de chiens courants que l'on peut employer, nous allons voir
comment on doit les nourrir et les élever, comment ils doivent
être traités et soignés; puis nous examinerons quels sont les
devoirs du maître d'équipage et du piqueur, avant de décrire la
chasse de tous les animaux habituellement chassés en France.
Pour les soins à donner aux chiens au chenil, je ne puis mieux
faire que de raconter comment cela se passait à la Vénerie royale
avant 1789. Ces détails proviennent d'un document très intéressant
que j'ai retrouvé et, abstraction faite de tous les petits détails inhé-
rents au service d'un grand équipage ayant piqueurs, valets de
chiens à cheval et à pied et qui ne peuvent être appliqués abso-
lument de la même façon dans un petit équipage qui n'a par
exemple qu'un piqueur, les soins doivent cependant être les
mêmes. Un piqueur qui sera seul devra faire pour les i5 ou
20 chiens de sa petite meute ce que les piqueurs et valets de
chiens de la grande Vénerie française faisaient pour les leurs.
D'abord, jusqu'à Louis XVI, tous les chenils de la Vénerie
5
66 LA CHASSE A COURRE.
contenaient deux pièces communiquant ensemble, dont l'une
était plus grande que l'autre et dans Tune desquelles existait une
grande cheminée, où Ton faisait du feu l'hiver lorsque les chiens
revenaient de la chasse. La cheminée était entourée d'un haut
grillage en fer. Cette méthode était excellente dans les journées
d'hiver froides, pluvieuses ou neigeuses. Les chiens, bien sèches,
repassaient ensuite dans l'autre chenil, où ils se couchaient bien
secs et réchauffés. Les fenêtres n'étaient point vitrées, mais
garnies seulement d'une toile épaisse, qui permettait à l'air de
circuler librement et empêchait les mouches d'entrer en été. où
elles tourmentent beaucoup les chiens.
Primitivement les chiens étaient nourris au pain de froment:
mais on remplaça plus tard ce pain par du pain d'orge, auquel
on ajouta ensuite un peu de farine d'avoine. On leur donnait
aussi assez souvent de la soupe, de deux jours l'un, et l'autre
jour du pain. Les chiens ne mangeaient jamais dans le chenil,
mais bien dans la cour, où les repas leur étaient toujours donnés
deux fois par jour, dans des baquets ou des auges. Aussitôt
qu'un chien paraissait trop gras, on le gardait au chenil pendant
que les autres mangeaient et on ne le laissait sortir qu'à la fin
du repas, pour qu'il mangeât moins. Si au contraire un chien
était jugé trop maigre, on lui donnait une nourriture spéciale
plus nourrissante, comme de la soupe avec du bouillon de
viande.
Quant au pansage des chiens, voici comme on y procédait à
la Vénerie royale : Un valet de chiens était toujours de garde et
couchait au chenil. En été, les valets de chiens entraient au che-
nil à cinq heures du matin, en faisaient sortir les limiers, les
chiennes qui venaient en chaleur, les chiens estropiés, mordus
ou qui paraissaient malades. Le valet de chiens qui avait été de
garde balayait le chenil et le nettoyait, jetait dehors la paille qui
était sur les bancs et la remplaçait par de la paille fraîche, net-
toyait les baquets et les auges, aidé dans ce travail par le valet
de chiens qui prenait la garde. Tous les deux remplissaient les
auges d'eau. A six heures, la meute sortait, conduite et maintenue
68 LA CHASSE A COURRE.
par les valets de chiens. Elle passait alors l'inspection du pre-
mier piqueur, qui examinait les chiens tristes, abattus ou parais-
sant malades, leur levait les lèvres pour examiner la bouche, et
toutes les fois qu'elle avait une pâleur inaccoutumée, le chien
était mis de côté et ne chassait pas jusqu'à complet rétablisse-
ment.
On promenait la meute pendant une heure, puis on la rentrait
au chenil pour procéder au pansage des chiens. Pour cela,
chaque valet de chiens, muni d'une étrille, d'une brosse, d'un
peigne, d'une paire de ciseaux et d'un couple, prenait un chien,
lui mettait le couple et, lui plaçant les jambes de devant sur un
banc, commençait à le brosser par tout le corps, de la queue à la
tête, lui passant la main sous le ventre et entre les jambes pour
voir s'il n'avait ni boue ni saleté. Il examinait s'il n'avait pas
reçu de morsures la nuit et, s'il lui en trouvait, il coupait le poil
tout autour de la plaie pour faciliter la cicatrisation et le panse-
ment; il rafraîchissait la marque avec ses ciseaux si elle en avait
besoin (la marque était toujours faite au ciseau, comme de nos
jours du reste). On apportait le plus grand soin à nettoyer les
étrilles, les peignes et les brosses tous les jours.
Après cette opération, les chiens recevaient leur premier
repas, puis on soignait les chiens malades et on laissait la meute
tranquille jusqu'à cinq heures, où on donnait de nouveau aux
chiens un léger nettoyage à la brosse et à l'éponge. En hiver,
les chiens ne sortaient pas avant huit heures du matin.
Le premier valet de chiens était chargé de traiter et de panser
les chiens malades ou blessés sous les ordres et la surveillance
du premier piqueur, qui était lui-même obligé de faire le rapport
au chef d'équipage sur tout ce qui s'était passé au chenil, et c'est
de lui qu'il recevait les ordres.
Par ces soins, les chiens duraient fort longtemps. Un chien était
regardé bon à la meute jusqu'à neuf ans au moins, et même sou-
vent plus.
Tels étaient les soins donnés aux chiens dans la Vénerie
royale, et tout piqueur soigneux de ses chiens devra agir de
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70 LA CHASSE A COURRE.
même. N'eût-on qu'un valet de chiens à pied pour mener une
petite meute de 10 chiens, ceuxrd devront être soignés de la
même façon. Le chenil doit être toujours lavé à fond et il doit
être blanchi à la chaux tous les deux mois, pour faire périr la
vermine. Une très bonne chose en été, c'est de mettre dans la
paille des feuilles de noyer et de menthe poivrée, qu'on trouve
facilement dans les prés. L'odeur éloigne les puces et autres
insectes.
De temps en temps, par précaution, on doit donner aux
chiens quelques bains de sulfure de potasse.
Si les chiens d'un chenil ont besoin d'être passés à l'onguent, on
peut être convaincu que le piqueur ne sait pas son métier ou ne
veut pas le faire, car des chiens bien tenus n'ont jamais besoin
d'être passés à l'onguent.
Tout chien étranger, acheté ou rentrant au chenil, arrivant
par chemin de fer, doit être passé à l'onguent avant d'être rentré
au chenil.
Il y a des équipages nourris uniquement à la viande de cheval
crue, nourriture qui leur convient et les rend très vigoureux,
mais qui donne une mauvaise odeur.
D'autres équipages sont nourris au riz cuit dans du bouillon
de cheval. Cette nourriture demande à être très bien faite pour
être bonne.
La nourriture d'été ne doit pas être la même que celle de
l'hiver pendant les chasses. L'été, le chien doit être rafraîchi et
tenu plutôt maigre que gras. Les soupes aux herbes, aux
légumes, du petit lait de temps en temps, doivent être données
aux chiens à cette époque. Au début de la saison de chasse les
chiens doivent être plutôt maigres que gras, tandis qu'en pleine
saison on doit les tenir le plus en état possible. S'ils commencent
leurs premières . chasses trop gras, non seulement ils ne
peuvent chasser, mais ils deviennent sujets à tous les acci-
dents de fourbure, boiterie, coups de sang, etc. S'ils sont trop
gras l'été, ils sont sujets aux dartres et aux coups de sang;
la poitrine s'engorge; ils perdent toute haleine et il leur
DU SOIN DES CHIENS. 7ï
faudra deux mois de chasses mal faites pour se remettre en
condition.
Si, en entrant dans un chenil, vous voyez des chiens ayant un
mauvais poil terne et hérissé, les uns gras, les autres maigres,
quelques-uns ayant des dartres, et que, sans avoir précisément Ja
gale, vous les voyez se gratter, ce sont des chiens mal tenus ; le
piqueur ne sait pas son métier ou ne veut pas le faire. Si
l'homme crie après ses chiens, les tape avec son fouet sans
raison et si, en sortant, les chiens se précipitent, s'échappent,
courent à droite et à gauche comme des fous sans rien écou-
ter, c'est encore une preuve que le piqueur ne sait pas son
métier.
Une très bonne habitude est celle de sortir toujours les chiens
pendant un quart d'heure après la soupe, pour qu'ils se vident.
Du reste, plus de fois un homme sortira ses chiens pendant lu
journée, plus il les promènera, plus il leur apprendra à être
obéissants et à ne pas courir après les gens, les chiens, les
moutons ou la volaille, plus ce sera la preuve que cest un
homme soigneux de ses bêtes.
Une extrême propreté est indispensable dans un chenil, et
jamais un piqueur sale de sa nature n'aura de chiens dans un
état convenable.
Il ne faut jamais de ruisseau ou d'eau courante dans un
chenil, surtout si elle est sans profondeur, parce que les chiens
s y coucheraient ayant chaud et attraperaient des fluxions de
poitrine ou des rhumatismes.
La meilleure exposition d'un chenil, c'est l'Est ou le Sud. Le
chien ne craint pas la chaleur, ou plutôt elle ne lui fait jamais
mal quand il est au repos; mais il craint beaucoup le froid, sur-
tout le vent froid et humide, qui le rend souvent malade.
Le chenil ne doit pas être situé dans un fond, un endroit
humide ou marécageux, mais autant que possible dans un
endroit un peu élevé et sec, à l'abri des vents du nord. Le bâti-
ment ne sera jamais construit en terre, car il deviendrait le
séjour de tous les insectes et bêtes malfaisantes, mais bien être
72 LA CHASSE A COURRE.
en pierres, briques, ciment, plâtre, etc., et comme grandeur
il sera proportionné au nombre des chiens. Les fenêtres seront
assez hautes pour que les chiens ne puissent pas y sauter, et
d'ailleurs il vaut mieux qu'il y en ait peu, et de très petites seu-
lement, pour donner de l'air.
Les bancs en bois où coucheront les chiens ne devront pas
être pleins à planches jointoyées; toutefois les intervalles
Bancs du chenil.
laissés entre les planches devront être assez étroits pour que le
doigt d'un chien ne puisse jamais s'y prendre. Ils devront être
élevés seulement de o",2o à o m ,25 au-dessus du sol, avec un léger
rebord pour empêcher la paille de tomber. Le plafond ne sera
pas trop élevé, afin que les chiens n'aient pas trop froid en
hiver : 2",5o à 3 mètres sont suffisants. Il est bon que la porte
Charnières des bancs.
ait un huisset par où les chiens puissent sortir et rentrer lorsque
la porte est fermée pendant les très mauvais temps. Il faut que
les bancs s'oient à charnières, afin qu'on puisse les relever pour
laver et nettoyer en dessous.
DU SOIN DES CHIENS. 73
Le sol de la cour du chenil ne devra être ni en terre ni en
sable, mais bien en briques ou béton avec rainures ou en pavés
plats et rayés : autrement le sol s'imprégnerait des mauvaises
odeurs ; en outre, les cours en briques ont l'avantage de durcir
beaucoup le pied du chien et de le rendre beaucoup plus résis-
tant et insensible aux cailloux, ronces et épines. D'ailleurs,
comme il faut constamment laver les cours, il. est indispen-
sable qu'elles soient dallées d'une façon quelconque ; mais il faut
autant que possible avoir une autre cour d'ébat en herbe, où
on puisse lâcher les chiens tous les jours pendant un certain
temps.
L'habitude de la Vendée d'avoir dans les cours de chenil une
Porte du grand chenil.
Porte de la cour d'ébat.
espèce de belvédère où les chiens montent se mettre en bon air
et voir au loin est, je crois, une assez bonne chose qui les égayé
et les distrait; mais il faut qu'il soit bien fait, afin que les chiens
ne puissent pas en tomber en jouant ou en se battant.
Il est enfin indispensable d'avoir de petits chenils séparés
pour les chiennes en chaleur, les chiens malades ou blessés, et il
en faut un certain nombre. On aime beaucoup en Angleterre, où
il y a de très beaux chenils admirablement aménagés, que la
porte du chenil soit en deux parties comme celles de nos étables,
pour donner de l'air d'abord en laissant le haut ouvert et ensuite
pour sortir plus facilement les chiens pour manger, le piqueur se
74 LA CHASSE A COURRE.
tenant à la porte, qu'il tient sous son bras gauche pendant qu'il
appelle les chiens et les désigne du bras droit avec son fouet
pour les faire sortir. Je crois cette méthode-assez bonne; cepen-
dant je crois encore meilleur d'habituer, comme en France dans
les chenils bien tenus, les chiens, la porte étant tout ouverte, à
rester sur les bancs et à ne sortir qu'à l'appel de leurs noms.
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CHAPITRE VI
DE L'ÉLEVAGE DES JEUNES CHIENS
Je laisse pour le moment de côté la question des alliances et
des croisements que je traiterai plus loin et je parlerai ici
uniquement de la naissance et de l'élevage des chiens.
Sur cent maîtres et piqueurs, il n'y en a pas dix qui savent
élever des chiens ! Quand je dis élever, je n'entends pas seule-
ment les faire vivre, mais bien produire un beau chien, de belle
taille, fort, vigoureux et membre. Tel piqueur ou tel maître, du
même chien et de la même chienne, vous élèveront des chiens
de 20 pouces, chétifs et sans membres, tandis que celui qui sait
élever vous fera des mômes chiens des animaux de 23 à 25 pou-
ces, réintés, musclés et membres.
Et tout cela se décidera pendant les quatre premiers mois de
la naissance.
11 faut d'abord une chienne de bon âge, en bon état, ni trop
maigre ni trop grasse, bien nourrie pendant sa gestation et ayant
eu de la liberté ; on la retire du chenil à partir d'un mois ou
cinq semaines de gestation. Le nombre des chiens à lui laisser
dépend de la race, de la force et de l'état de la mère. Les, races
^6 LA CHASSE A COURRE.
françaises pures ont généralement beaucoup plus de lait que les
bâtardes, et surtout que les anglaises. Telle chienne ne peu!
nourrir que quatre chiens, telle autre en élèvera six. On les lais-
sera teter le plus longtemps possible; mais à partir d'un mois on
donnera aux jeunes du lait ou de petites soupes, qu'on ne laissera
jamais aigrir ; les vases où on leur donnera la soupe seront
constamment vidés ou nettoyés.
On veillera, surtout après le sevrage, à ce que les chiots
n'aient pas de vers, et on leur donnera pour cela de l'ail, du
semen-contra ou de l'écorce de grenadier. Tout jeune chien qui
ne pousse pas, qui prend l'air rachitique ou qui a un gros ventre,
a des vers et doit en être débarrassé.
Les jeunes chiens sevrés doivent avoir des soupes au moins
six fois par jour, et jamais on ne laissera les soupes dans le
chenil ; mangées ou non, il faut les retirer aussitôt que les
chiens la refusent. S'ils sont nourris à la viande, il ne faut
pas qu'elle soit cuite, mais crue et bien fraîche, et on la donne
en très gros morceaux ; on larde les cuisses ou les épaules de
coups de couteau qui les fendent dans le même sens pour que
les jeunes chiens tirent dessus, ce qui d'ailleurs facilite la denti
tion, et on ne doit jamais couper la viande par morceaux pou-
vant être avalés, sous peine de mort subite par étouffement et
impossibilité de digestion, aussi bien pour les grands chiens que
pour les petits.
Si les jeunes chiens ont la gale de lait, des puces ou des poui,
il faut les frotter légèrement avec de l'huile mêlée de soufre et
de safran, mais ne pas employer le tabac, car ils pourraient se
lécher et tomber malades. D'ailleurs mieux vaut laisser sortir
cette gale que de la faire rentrer.
Il faut les purger de temps en temps avec de l'huile de ricin,
mais ne pas en abuser, et mieux vaut encore ne pas le faire si
leur état de santé ne vous y oblige.
Si le jeune chien paraît souffrant ou disposé à prendre la
maladie, ne pas mettre de séton, le tenir au chaud, lui retirer
toute eau froide et ne lui laisser boire que de l'eau de graine de
DE L ELEVAGE DES JEUNES CHIENS. 77
lin avec un peu de café; de même s'il tousse ou s'il paraît être
pris de la gorge. Tâcher de le nourrir à la viande fraîche
et au sang. La chaleur, la graine de lin, le café et le sang
sont les meilleurs préservatifs et le meilleur traitement
contre la maladie. Si la maladie est dans la mâchoire et les
dents, avec des symptômes ressemblant au scorbut, badigeon-
ner la grueule deux ou trois fois par jour avec une solution de
borax.
Il est indispensable que les jeunes chiens, dès leur naissance,
couchent dans de la paille assez épaisse ou sur un lit assez chaud
pour qu'ils ne puissent sentir le froid du sol. Tout jeune chien
couché sur du pavé ou autre endroit froid est un chien destiné
à tomber malade. Que de poulains, de veaux et de chiens sont
• perdus en France par cette cause !
Les jeunes chiens sevrés doivent toujours être en liberté dans
une cour ; inutile qu'elle soit très grande, pourvu qu'elle soit bien
exposée et que le sol soit très sec, pour que le jeune chien ne
soit pas exposé à coucher dans un endroit humide. Être couché
d'un côté- à l'humidité et de l'autre au soleil, c'est la jaunisse
future ou plutôt immédiate. Quand le soleil est très chaud dans la
journée et que les nuits sont froides, il faut enfermer les jeunes
chiens la nuit dans un endroit chaud : autrement ils prendront
la jaunisse, maladie presque toujours mortelle jusqu'à quatre
ou cinq mois ; quand ils sont plus âgés, on peut les en sauver
par de petites saignées faites immédiatement et renouvelées, la
privation d'eau froide, de l'eau de carotte et du bicarbonate de
soude ; mais les changements de température entre la nuit et le
jour sont presque toujours la cause de cette maladie, ainsi que
les temps humides et froids. On peut donner comme règle gé-
nérale qu'aussitôt qu'un chien est malade, il faut lui retirer
l'eau froide. Suant par la gueule et la langue et ayant la fièvre,
l'eau froide lui ferait le même effet qu'un bain froid à un homme
atteint d'un accès de fièvre.
Si vos jeunes chiens ont de la faiblesse dans les membres ou
dans les reins, ou du rachitisme, il faut les faire coucher sur du
78 LA CHASSE A COURRE.
tan t rien ne le3 redresse mieux. Vous pouvez aussi leur donner
du phosphate de chaux dans leur boisson.
Le chien anglais est formé de très bonne heure, à un an, et k
chien français assez tard, guère avant deux ans. Il ne faut pas
oublier cette règle pour l'époque où on les mènera à la chasse
pour les livrer. Il est vrai que le chien anglais formé de très
bonne heure ne dure pas longtemps et que le chien français
dure facilement trois ou quatre ans de plus.
On met les jeunes chiens au couple à dix mois ou un an, en
les couplant avec un vieux chien tranquille et pas méchant.
Un jeune chien qui est petit et sans membres à quatre mois
ne fera jamais un vrai chien, et il n'est bon qu'à tuer.
Telles sont les règles de l'élevage des jeunes chiens que
quarante ans de pratique d'élevage des races les plus difficiles.
Saintongeois, Vendéens et Saint-Hubert, m'ont apprises. Mal
heureusement il est souvent fort difficile de les inculquer à cer-
tains piqueurs, qui croient savoir élever des chiens et n'en con-
naissent pas le premier mot. Ils appliquent les sétons et les
purgations les plus extraordinaires et les plus dangereuses à
toutes les maladies et tuent en somme plus qu'ils ne sauvent. En
entrant dans un chenil d'élevage, rien qu'en voyant comment
est installée une mère avec ses petits ou en voyant l'état de
jeunes chiens de quatre mois, je sais tout de suite si l'homme
sait élever des chiens, et tout veneur doit pouvoir le reconnaître
aussi bien que moi.
Il faut aussi, quand la chienne allaite, avoir soin que le rebord
du banc ou la planche qui maintient la paille ne soit pas saillante,
pour que la chienne en sortant ou en rentrant ne frappe pas ses
allaites sur la planche : ce qui cause la formation de tous ces
kystes qu'on voit aux mamelles des chiennes dans les chenils
où l'on élève mal.
Pour la saillie des chiennes, je conseille de ne les faire saillir
que vers la fin de la chaleur, le soir et le lendemain matin ; elles
retiendront mieux et plus sûrement, et il ne faut pas laisser le
chien avec la chienne. Beaucoup de bons veneurs la font saillir
de l'élevage des jeunes chiens. 79
une troisième fois avant le neuvième jour; mais si elle a bien été
saillie à la fin de sa chaleur ou qu'elle soit pleine, elle ne s'y
prêtera pas et il ne faut pas la forcer. Je n'ai pas besoin de dire
que toute chienne en chaleur doit être enfermée à clef, la clef
dans la poche du maître ou du piqueur, et l'étalon, après la
saillie, doit être lavé et laissé libre quelque temps, car, si on le
rentrait au chenil, les autres chiens pourraient le piller.
La gestation dure de 62 à 65 jours. Les jeunes chiennes sont
très sujettes à manger leurs petits et on doit les surveiller
attentivement. Souvent elles lèchent trop le nombril de leurs
jeunes chiens, d'où vient une plaie qui peut devenir grave. Il
faut y mettre alors de la teinture d'aloès et renouveler jusqu'à
guérison.
Une lice qui, jeune, a eu la jaunisse fait toujours des chiens
disposés à l'avoir. J'ai fini par ne plus employer à la reproduc-
tion les chiennes dans ce cas, et la jaunisse, qui était très com-
mune chez moi, avait presque fini par disparaître.
Du reste, la bonne santé de la chienne est une des choses les
plus importantes dans le choix de la mère, et mieux vaut ne pas
élever que d'employer une chienne délicate ou ayant un mauvais
sang. Quant à la taille, une chienne de taille moyenne fait
souvent de plus beaux chiens qu'une chienne trop forte ou trop
massive.
^ l
CHAPITRE VII
DES CROISEMENTS
La question des croisements est une des choses les plus im-
portantes de la vénerie, car un bon chien étant, comme je l'ai
sans cesse répété, la base de la chasse à courre et, pour un chien
courant, tout étant dans la nature et presque rien dans l'éduca-
tion, il s'agit de toujours maintenir et même d'augmenter et de
perfectionner les qualités qu'il a et qui tendent toujours à se
perdre. Soit donc que l'on veuille maintenir une race ou la per-
fectionner, soit qu'on veuille créer une sous-race nouvelle, la
question des croisements se présente et demande à être étudiée
avec soin.
Perfectionner et conserver dans sa pureté une race de chiens
demande des soins extrêmes. La production de deux chiens de
même race, surtout si elle est bien confirmée, porte les traits
de ressemblance propres à chacun d'eux et les formes caracté-
ristiques de la race. Si le père et la mère sont de races diffé-
rentes, la production peut tenir à peu près également des deux
espèces ; cependant ce mélange des caractères n'est pas toujours
égal : il penche tantôt du côté du père, tantôt du côté de la mère,
6
82 LA CHASSE A COURRE.
suivant l'ancienneté de la race de chacun d'eux, et souvent il en
prendra alors plutôt les défauts que les qualités, principalemeni
qnand les races sont trop disparates et se combinent mal. Si
l'un des deux, le père par exemple, est d'une race assez pure et
suivie depuis longtemps, et la mère d'une race croisée ou moins
pure et moins ancienne, les produits tiendront probablement
beaucoup plus du père.
La ressemblance ascendante n'est pas un des phénomènes les
moins curieux de la reproduction, car on peut souvent observer
que les produits ont une plus grande ressemblance avec leur
grand-père ou leur grand'mère qu'avec leur père ou leur mère.
Cette particularité se remarque peut-être plus souvent lorsqu'un
caractère commun a été conservé pendant plusieurs générations,
c'est-à-dire lorsque le sang a été conservé pur pendant plusieurs
générations, ce qui forme une race établie bien conduite dans
ses productions successives au moyen d'un bon appareillement,
d'un bon élevage et d'un bon choix de nourriture.
Nous n'avons pas de race pure proprement dite ou pouvant
être garantie telle, car nos races les plus vantées et réputées
les plus pures sont le produit de variétés identiques de la même
espèce, provenant du choix d'individus pareils, généralement nés
dans le même pays. L'homme, actif à augmenter ce qui lui est
utile, a observé ces altérations graduelles, les a améliorées et
les a étendues en s'aidant des causes qui les produisaient et par
des soins postérieurs, les a perfectionnées, perpétuées et rendues
permanentes. Lorsque des variétés accidentelles ont présenté
des formes ou des qualités particulières dont on pouvait tirer
parti, on en a tiré race, et quand ces singularités ont été
observées sur plusieurs sujets d'une même portée, il a été assez
aisé de les perpétuer par leur accouplement réciproque, en le
bornant entre eux.
Toute variété ou sous-race a une tendance à dégénérer et à
reprendre quelque chose de la race originelle. Cette tendance
est plus grande dans les variétés accidentelles ou dans les races
de peu d'ancienneté; mais dans les races qui sont cultivées
DES CROISEMENTS. 83
depuis longtemps, il faut plus de temps pour qu'elles dégénèrent
et c'est à combattre cette tendance bien marquée dans le chien
que se rattache en grande partie l'art d'élever avec succès ces
animaux.
Ou les sous-races tirent leur origine de quelques variétés
accidentelles qui se montrent tout à coup, ou bien une sous-race
peut être établie par quelques formes et qualités sur lesquelles
on s'est d'abord fixé; après quoi on choisit les individus peut-
être pas exactement semblables, mais chacun d'eux ayant quel-
ques points de ressemblance avec la forme désirée, et alors on
atteint le but par leur union et celle de leurs descendants. Une
variété ou sous-race étant adoptée, son existence dépendra
des soins apportés non seulement dans le choix des individus
propres à la reproduction, mais aussi dans la recherche des
circonstances qui peuvent conserver les animaux eux-mêmes
dans l'état ou la forme que l'on désire; ainsi, par exemple, si on
a une grande taille et qu'on veuille la conserver ou encore
l'augmenter, on ne gardera que deux ou trois petits de la même
portée ; non seulement on donnera une nourriture très abondante
àla mère, mais il faudra encore accoutumer le jeune chien à prendre
de bonne heure une nourriture animale, en ajoutant une libre
circulation à l'air dans un lieu assez vaste. Mais par-dessus tout
la durée d'une sous-race dépend du choix judicieux des pères et
mères qui, ayant au plus haut point les formes spécifiées et
définies, sont capables de les transmettre à leur progéniture.
Le soin longtemps continué de n'admettre pour la reproduc-
tion que les individus de la même race constitue la pureté du
sang; une grande importance doit être attachée à cette pureté
de sang ou descendance en ligne directe, et cependant souvent
le choix des plus beaux reproducteurs dans la même race ne
suffit pas pour lui conserver la force, la vigueur et la santé
nécessaires. Le chasseur le plus expert, qui reconnaît au plus
haut degré la valeur de la pureté de race dans la généalogie de
ses chiens, apprend aussi souvent par l'expérience qu'un certain
degré de perfection nepeut souvent -se conserver ou s'obtenir
84 LA CHASSE A COURRE.
que par l'introduction passagère d'un sang étranger pour re-
tremper et vivifier l'ancien. Comme d'ailleurs, en dépit de tous
les soins, il est rare d'obtenir des reproducteurs parfaits et par
suite des productions parfaites, et comme on doit s'attendre à
des non-réussites, il faut porter ses soins à ne pas choisir les
sujets mâles et femelles employés à la reproduction entachés
chacun des mêmes défectuosités; car, quoiqu'ils puissent être
parfaits sous tous les autres points, dans ce cas ils seraient
cependant impropres à donrter race.
Ce ne sont pas les formes seulement que l'on peut altérer ou
donner aux produits, mais aussi les qualités et les aptitudes qui
se communiquent également. Le tempérament, l'intelligence, la
sagacité, l'obéissance, la finesse de l'odorat, la puissance de la
voix sont héréditaires et doivent être pris en grande considéra-
tion par l'éleveur. Les amateurs sans expérience commettent
souvent la faute de ne cultiver qu'une faculté spéciale isolée, ou
une forme particulière, en perdant de vue l'intégrité générale ou
l'amélioration future du tout; aussi un éleveur voulant donner
de la vitesse à ses chiens, et ne pensant qu'à cela dans son
élevage et ses croisements, pourra arriver à leur donner la
vitesse du lévrier, mais ce sera aux dépens de leur odorat, de leur
sagacité et surtout de leur voix. Les éleveurs ne sauraient trop
se souvenir, comme une loi établie de l'économie animale,
qu'un degré supérieur et extraordinaire, naturel ou artificiel, de
quelques parties est toujours produit aux dépens de quelques
autres qualités. Ainsi, si Ton pousse le plus loin possible la
finesse du nez et la beauté de la gorge dans une race, elle
arrivera à une extrême lenteur, telle qu'elle pourra faire perdre
l'avantage de la finesse du nez, et cette loi est surtout visible
dans les animaux dont les races sont portées au plus haut degré
de pureté.
Quant aux unions consanguines, je ne crois pas qu'elles soient
aussi préjudiciables qu'on le pense généralement, pourvu qu'elles
aient lieu entre animaux vigoureux doués d'un sang pur et d'une
bonne santé, car la nature nous offre l'exemple d'animaux sau-
DES CROISEMENTS. 85
vagres forts et vigoureux vivant en troupes de même famille et
se reproduisant par la consanguinité. Le cerf ajoute ses filles
à son harem aussi longtemps qu'il lui reste assez de force pour
écarter ses jeunes rivaux. Il en est de même du taureau et de
Té talon, qui briguent la suprématie jusqu'à ce qu'enfin, vaincus
par Tâg-e ou la maladie, ils se voient forcés de céder la place à
un animal plus jeune et plus vigoureux, qui devient leur maître
et celui des femelles qui les suivaient. Il semble que la nature
ait recours à ce moyen pour prévenir la dégénérescence qu'on
remarque chez les êtres humains lorsqu'un couple faible assume
la tache de produire une famille. Mais, comme le dit fort bien
M. Gayot, « ce serait un mauvais calcul que de s'en tenir
obstinément à sa race et de ne pas vouloir introduire dans une
vieille famille le sang d'une autre famille non moins précieuse et
tout aussi bien douée. En choisissant avec intelligence les
reproducteurs dans l'une ou l'autre famille de la même race, on
opère suivant les règles les plus judicieuses de la bonne repro-
duction : on ne fait pas de croisement, mais de la sélection bien
entendue. Il y a deux chenils, deux familles supérieures de la
même race qui se valent. Eh bien! choisissez les pères et
échang-ez-les entre vous, tous deux vous ferez bien ; c'est là ce
que les Anglais nomment un croisement en dehors; croisement
n'est pas le mot propre, puisque les deux familles appartiennent
à la même race.
« Pour l'animal domestique, la beauté, c'est tout simplement
l'état qui le met en mesure de répondre d'une manière satisfai-
sante à sa destination. La beauté n'est pas une et par consé-
quent n'est pas absolue, puisque cette destination varie suivant
le genre de service qu'on impose à chacun; c'est ainsi que le
bouledogue a des beautés qui seraient des difformités chez le
lévrier, et réciproquement.
€ On conteste au croisement le pouvoir de former des races. Il
donne des individus, dit-on; il fait des produits améliorés, mais
il ne fait pas de reproducteurs, il n'élève aucun de ses résultats
jusqu'à la fixité, jusqu'à cette qualité précieuse en vertu de
86 LA CHASSE A COURRE.
laquelle les races se soutiennent par elles-mêmes et se perpé-
tuent en quelque sorte spontanément du fait de leur virtualité
propre.
« Il en est ainsi, je le reconnais, des mélanges incohérents qui
s'opèrent entre animaux de sangs mêlés. Il n'en est plus de même
de l'union d'animaux choisis dans des races dignes de ce nom.
Mariés entre eux, les premiers n'offriraient aucune certitude
héréditaire : comment exerceraient-ils une meilleure influence
dans leur union avec des animaux aussi peu fixés qu'eux-mêmes.
Ils retombent dans la catégorie des croisements diffus, des
mélanges hétéroclites qui ne doivent pas en prendre le nom, et,
conformément à la loi d'hérédité qui n'a pas deux poids et deux
mesures, ils produisent semblables à eux; animaux de hasard,
sans antécédents héréditaires, ils donnent des éphémères.
« Autre est le résultat d'un croisement qui s'arrête au premier
degré pour faire retour, sans plus attendre, à l'une des deux
races croisées. » (Gayot, le Chien.)
Voilà la vérité et les vrais principes qui doivent guider tout
éleveur de chiens.
On recherche dans le chien courant deux sortes de qualités
distinctes, les qualités physiques et les qualités morales.
La forme, le fond qui en est généralement la suite, la dimen-
sion et le caractère distinctif bien prononcé d'une race, consti-
tuent les qualités physiques.
Le nez, l'instinct, l'intelligence, l'amour de la chasse et la
gorge sont les qualités morales.
Ainsi donc, en réunissant deux individus de race et de sexe
différents que l'on a choisis doués de qualités physiques et
morales que l'on préfère, et en les perpétuant par une série de
générations auxquelles on porte un soin continuel, nul doute
qu'on n'obtienne une race distincte de celles dont elle .provient
et qui réunisse à elle seule les qualités que l'on ne trouvait
que dans elles deux, si l'on se conforme aux règles que nous
avons établies plus haut.
Mais, pour qu'une sous-race se forme et se maintienne, il faut
DES CROISEMENTS. 87
que les mâles et les femelles choisis pour cet objet aient
constamment les mêmes caractères distinctifs, et si l'on arrive à
former des chiens pareils de formes et de qualités produisant
entre eux des chiens semblables à eux et semblables entre eux,
la sous-race peut être considérée comme fixée; encore pour la
maintenir faudra-t-il recourir souvent aux croisements primitifs,
surtout si l'on voit la variété formée soit dégénérer, soit prendre
une ressemblance ascendante avec la race primitive soit du père,
soit de la mère.
Dans l'accouplement quelle est l'influence du père? Évidemment
l'influence la plus grande appartiendra à la race la plus pure et
la plus ancienne; mais si les deux familles sont également an-
ciennes et pures, je déclare que je n'ai jamais pu accumuler
assez de preuves certaines pour dire quelle est l'influence du
père. Je crois cependant que, comme aspect, le produit a plus de
tendance à ressembler au père, et cependant, en comparant un
bâtard fait par exemple avec un chien Anglais et une Sainton-
geoise et un bâtard fait avec un Saintongeois et une Anglaise,
il est certain que comme formes et construction le dernier pro-
duit ressemblera plus à la mère qu'au père.
S*&'
CHAPITRE VIII
DU CHEVAL DE CHASSE
Nous venons d'étudier tout ce qui a rapport aux chiens, ce
grand facteur de la chasse à courre, et, avant d'étudier ce que
doit être le maître d'équipage et le piqueur, il serait rationnel
de parler du cheval de chasse; mais, à mon sens, c'est inutile
dans un Traité aussi sommaire de la Chasse à courre, attendu
que pour les chevaux de chasse nécessaires en France il n'y
aurait pas de règles précises à établir, et si un bon cheval peut
généralement chasser partout, les qualités requises (on ne peut
guère espérer les trouver toutes réunies) diffèrent tellement
suivant les pays où Ton chasse, qu'on ne peut donner de règles
absolues.
Le bon cheval de chasse pour les pays du Nord, des environs
de Paris, de la Normandie, etc. peut ne pas être le même que
celui qu'on doit désirer pour la Vendée, l'Anjou, le Bourbonnais,
le Morvan. Le cheval bon pour les pays de sable, de plaines,
peut très bien ne pas convenir dans les pays de côtes, ou de
pierres, de roches. Le bon cheval pour les boues ou les plaines
à gros sillons de la Haute-Marne et du Morvan, les haies
QC) LA CHASSE A COURRE.
sèches et les fondrières, peut très bien manquer de train et de
coulant pour la Normandie ou les environs de Paris, et celui des
environs de Paris et de la Normandie peut très bien ne rien
valoir devant les doubles fossés, les haies, les barrières et les
ajoncs de la Vendée, de l'Anjou, du Poitou et de la Bretagne.
Un cheval peut être excellent dans les belles allées des forêts
des environs de Paris et ne pas convenir dans les chemins de
bœufs et les mouvants du centre de la France.
Je n'en parlerai donc pas, la taille, la force et les qualités
devant varier en France suivant le pays où l'on chasse et les
animaux que l'on chasse. Il est évident que, pour chasser un
lièvre ou un chevreuil, on peut ne pas être obligé d'avoir le
même cheval que pour chasser un sanglier, un cerf ou un loup
dans un pays difficile et que le cheval qui peut très bien faire
huit ou dix lieues peut très bien ne pas en faire vingt-cinq ou
trente, comme cela arrive souvent dans certaines contrées de la
France.
A chaque veneur donc le soin de choisir le cheval qui convient
le mieux pour sa chasse et son pays. Il le saura mieux par son
expérience que par tout ce que je pourrais lui dire, d'autant
plus que, pour être complet, ce chapitre devrait former un volume
tout entier.
Quant aux soins à donner aux chevaux de chasse, je me per-
mettrai de renvoyer les veneurs à mon petit livre sur la condi-
tion des chevaux de chasse en France, où ils trouveront, je
l'espère, tout ce dont ils pourraient avoir besoin.
CHAPITRE IX
DES DEVOIRS DU VENEUR
Quoique en décrivant la chasse de chacun des animaux de véne-
rie nous traiterons de ce que devra faire le veneur, il est cepen-
dant des règles générales dont il faut parler, parce qu'elles s'ap-
pliquent à peu près à tous les genres de chasse, et ces règles
nous les demanderons surtout à d'Yauville, cet excellent veneur
qu'on ne saurait trop étudier et consulter.
On peut faire de la vénerie aussi bien avec 12 chiens qu'avec
60, et un petit chasseur de lièvres qui prend communément est
souvent un plus fin veneur que bien des maîtres à la tête de
grands équipages.
Entre toutes les qualités nécessaires au veneur, la plus essen-
tielle est certainement d'être assez maître de soi pour modérer
son ardeur. La science de la chasse demande de la réflexion, et
la réflexion est incompatible avec la fougue.
Soit qu'il ait des chiens trop froids, soit qu'il ait au contraire
des chiens trop fous et trop chasseurs, le veneur doit se garder
de les pousser et de les animer trop au départ. Il faut les lais-
ser goûter la voie et en prendre connaissance. S'ils sont trop
92 LA CHASSE A COURRE.
froids, il leur ferait quitter la voie en sonnant et criant avec
excès et les ferait revenir à lui. S'ils sont trop chauds, sa fougue
augmentera la leur, et ils ne tarderont pas à faire des bêtises et
des changes. Il ne les calmera qu'en se calmant lui-même. Tou-
jours maître de ses actions, il doit toujours être occupé de ses
chiens et ne perdre jamais courage. S'il trouve des obstacles,
des changes, des défauts, il redouble d'activité et ne perd
tout espoir que lorsque la fatigue de ses chiens ou la nuit
lui ôte tout espoir de réussir. Que d'animaux ont été pris au
moment où l'on commençait à désespérer !
Le bon veneur est toujours le plus près possible de ses chiens,
mais jamais il ne doit les presser. Il est toujours attentif à leur
façon de chasser : quelques-uns qui balancent lui donnent de
l'inquiétude, tandis que d'autres qui chassent franchement le
rassurent, parce qu'il les connaît tous et par leurs noms et par
leurs qualités. Il sait que le meilleur chien est môme rarement
sans défauts; que l'un, sage par excellence, ne tourne qu'à son
animal, mais ne veut pas le chasser accompagné; que l'autre
chasse son animal au milieu de l'accompagné et l'en sépare
même, mais que quelquefois, après un défaut, il attaque le pre-
mier animal qu'il rencontre. Certains chiens rallient à merveille,
tandis que d'autres aiment à chasser seuls. Il y en a qui veulent
toujours être en tête et qui dans ce cas chassent à merveille, tandis
que, s'ils n'ont pu prendre la tête, ils ne veulent plus rien faire
ou coupent par ambition, et alors font souvent manquer. Si avec
cela ils cèlent la voie, ils ne sont bons qu'à tuer. Il y a des
chiens très requérants, d'autres qui ne font rien quand ils sont
à bout de voie. Enfin il y a des chiens qui deviennent sages en
peu de temps; il y en a de très sages qui ne font rien au début
de la chasse, ne voulant marcher que quand leur animal est
malmené, et alors c'est toujours à eux; il y en a qui ne devien-
nent sages qu'après plusieurs saisons, d'autres enfin qui ne le
deviennent jamais.
Un veneur qui ne connaît pas ses chiens et leurs différentes
qualités ne peut s'occuper de sa chasse qu'au hasard et la con-
DES DEVOIRS DU VENEUR. ÇO
naissance de ses chiens lui est d'autant plus nécessaire qu'il doit
apprendre lui-même de ses bons chiens à bien chasser et à
démêler les ruses de l'animal qu'il poursuit. Il doit donc non
seulement bien connaître ses chiens, mais encore avoir souvent
plus de confiance aux bons chiens qu'à lui-même. Un bon veneur
forcé de maintenir la voie pendant quelque temps seul et avec
peu de chiens doit faire tous ses efforts pour qu'on le rejoigne
et qu'on lui rallie les chiens. Si ses chiens balancent, il s'arrête
et leur laisse le temps de travailler d'eux-mêmes, parce que si
le changre les embarrasse, ses cris intimideraient tout à fait les
plus sages et les empêcheraient de chasser ou exciteraient les
autres et les feraient tourner au change. Il ne doit donc leur
parler que doucement et les encourager, en ne les appelant au
retour qu'après les avoir laissés travailler à leur guise.
Sous quelque prétexte que ce soit, on ne doit jamais enlever
les chiens quand ils sont dans la voie; de même que le moyen le
plus sûr de ne pas perdre la chasse est de ne pas quitter les
chiens, de même le moyen le plus certain de ne pas perdre la
voie, c'est de ne pas la quitter, autant que cela se peut du moins.
Rien du reste ne rend les chiens plus volages et moins sûrs que
de les enlever, car alors, du moment qu'ils sont dans l'embarras,
ils sortent aux routes et courent à tous les chevaux qu'ils aper-
çoivent.
Si cependant on est obligé d'enlever les chiens, un seul cava-
lier marche devant eux en les appelant; les. autres restent
derrière et jamais on ne doit les mener plus vite qu'au trot. Les
cavaliers qui sont en queue les maintiennent, et si un chien veut
s'écarter, un cavalier lui donne quelques coups de fouet en
l'appelant par son nom. Les chiens ne se dressent pas seuls; la
nature leur apprend à chasser, mais ce sont les hommes qui les
rendent souples et dociles, et jamais ils ne le deviendraient si les
veneurs ne s'en occupaient que dans les moments où ils en ont
besoin.
Si l'amusement de la chasse à courre ne consistait qu'à prendre
un animal, il serait bien plus simple de l'attendre au coin d'un
94 LA CHASSE A COURRE.
bois ou d'un buisson avec une laisse de lévriers; mais l'art delà
vénerie est l'art d'attaquer au milieu de bois ou de forêts Tasi
mal que Ton veut prendre, aidé de chiens courants guidés par
des hommes et de le forcer à s'avouer vaincu. Suivre la vote
avec une quantité de chiens suffisante et vaincre ses ruses de
même que sa vigueur est donc le but auquel doivent tendre
tous les veneurs, chacun dans les fonctions qu'il doit remplir.
Lorsqu'on enveloppe un bois ou une partie de forêt ou qu'on
tâte une plaine où l'animal peut avoir débuché, on ne doit
mener les chiens qu'au petit trot, autrement on ne leur laisserait
pas le temps de se rabattre. Dès qu'on voit les bons chiens
mettre le nez à terre, on s'arrête et on leur donne le temps de
travailler; avec des veneurs sages et modérés, les chiens appren-
nent à faire leurs retours d'eux-mêmes et ils retrouvent alors la
voie bien plus vite que lorsqu'on les accoutume à être enlevés.
Si l'animal est accompagné, il est plus difficile de dire ce que
l'on doit faire. Si les chiens sont froids et ne chassent pas dans
l'accompagné, il faut soutenir les bons, les pousser, les exciter
même, en se méfiant de ceux qui sont trop chauds et qui pour-
raient faire change. Si les chiens sont très chasseurs et par con-
séquent généralement moins sûrs, il faut les laisser faire et ne
rien dire, appuyant légèrement les meilleurs et ralliant à eux les
douteux, s'il y a plusieurs chasses.
On ne doit sonner que quand on est avec les chiens et qu'ils
chassent franchement, ou quand, froids dans l'accompagné, ils
ont besoin d'être excités, ou quand on voit l'animal et qu'on est
bien sûr que c'est l'animal de meute pour rallier aux bons chiens
ceux qui se sont écartés ou qui ont fait des bêtises. Lorsqu'on
sonne en tête, ou trop loin des chiens ou trop en queue, on court
risque de les enlever et de leur faire perdre la voie. La trompe
peut faire autant de mal que de bien à la chasse ; généralement
pendant la première heure de chasse, il faut en être très sobre
et mieux vaut ne pas sonner que de sonner loin des chiens.
Il ne faut pas sonner la vue sans être absolument sûr que c'est
l'animal -de meute, cardans les forêts vives on peut facilement
DES DEVOIRS DU VENEUR. Ç)5
sonner sur change. Il ne faut pas sonner le débucher sans voir
les chiens arrivant bien à la voie, car là aussi on s'expose sou-
vent à sonner sur change. On ne peut donc trop recommander
d'être prudent.
On ne parviendra jamais à avoir une meute souple et bien
mise si Ton n'a pas la plus grande attention d'arrêter ou de faire
arrêter les chiens séparés et ce n'est que l'intelligence du veneur
qui doit lui apprendre quand il doit arrêter. Si on est seul et
que les chiens de tête s'en aillent sans qu'on puisse être devant,
il est évident qu'il faut maintenir la tête et qu'on est obligé
d'abandonner ceux qui ont fait change ou qui sont restés en
queue. Mais si on est maître de la tête, on peut arrêter et tâcher
de rallier les autres; toutefois il y a encore du danger : i # que
vos chiens de tête arrêtés ne vous échappent et ne rallient aux
autres plus nombreux, s'ils les entendent; 2° que, les autres
n'arrivant sur la même voie avec l'animal de change, tous les
chiens ne se rallient sur cette voie. On ne peut donc pas donner
de règle précise à ce sujet, mais il serait ridicule qu'un piqueur
seul à la chasse restât pour arrêter 10 ou 12 chiens quand 20 ou
3o chassent de meute, et il serait aussi ridicule que 3 ou 4 veneurs
ou piqueurs s'en allassent avec 8 ou 10 chiens, quand il y en a
20 qui chassent le change.
Un des meilleurs moyens de rendre les chiens souples et dociles
et de les accoutumer à bien rallier, c'est de les arrêter de temps
en temps dans la voie de l'animal et de les y tenir un instant
sous le fouet; les chiens s'accoutument à entendre leurs noms
et à s'arrêter, ils se calment et chassent ensuite plus sagement ;
ils sont forcés de se servir beaucoup plus de leur nez pour
chasser une voie plus froide, ce qui les amènera à pouvoir ensuite
relancer un animal forlongé; mais cependant cette règle, qui
était celle de la bonne vénerie d'autrefois, n'est pas toujours
bonne à suivre. D'abord, au sanglier, c'est dangereux, car le
moindre arrêt ou repos dans sa poursuite le rend souvent
imprenable; pour le loup, la voie est si légère, qu'on courrait
le risque de ne pas la reprendre; enfin les chiens, dont on
LA CHASSE A COURRE.
se sert généralement maintenant sont si peu chasseurs et sont
si froids, ils ont si envie de suivre les chemins et les hommes, qu'il
faut être avec eux très prudent pour leur faire quitter leur voie
et ne pas risquer légèrement de ne plus les voir la reprendre:
il vaut donc mieux souvent les laisser faire et être très sobre
que de vouloir leur donner des leçons. Avec les chiens français
d'autrefois, on n'avait guère cela à craindre; mais avec bien des
bâtards d'aujourd'hui c'est dangereux.
Lorsqu'on veut arrêter, il faut choisir un endroit favorable où
l'on puisse être maître des chiens, car s'ils forçaient, ce serait
une très mauvaise leçon. Il faut bien se garder de les battre,
puisqu'ils sont dans la bonne voie, ne pas trop crier et les
ahurir, ce qui les Vend fous. Les piqueurs que j'ai vus le mieux
arrêter leurs chiens étaient ceux qui ne disaient presque rien
et les arrêtaient pour ainsi dire à voix basse. Du reste, il ne
faut jamais abuser du fouet ni des cris; quand un chien a fait
une vraie sottise, un change, un contre, etc., qu'il ne veut pas
rallier, il faut le prendre sans trop crier, et quand il est bien pris
et qu'on le tient ferme par la queue, lui administrer une correc-
tion des plus sévères dont il puisse se*souvenir, mais ne pas
prolonger les coups de fouet après la correction; il faut au
contraire le caresser, en cherchant à le faire rallier.
Les veneurs sont en bien petit nombre en comparaison delà
quantité de chasseurs qui, faisant de la chasse un objet d'amu-
sement, n'en jouiront que très imparfaitement s'ils n'ont pas
quelque connaissance de la meilleure façon de chasser. Le goût
de la chasse est presque général ; on aime à s'y livrer, on désire
s'y rendre utile, mais la meilleure volonté est souvent nuisible
quand elle agit sans connaissance, et souvent plus nuisible encore
quand elle agit avec des connaissances fausses et imparfaites. Il
faudrait donc que les amateurs qui suivent habituellement les
chasses acquissent quelques connaissances sur la meilleure
manière de chasser. Ils y prendraient plus d'intérêt, ils jugeraient
sûrement de la manœuvre des veneurs et sauraient apprécier
les circonstances dans lesquelles ils peuvent nuire; ils sentiraient
DES DEVOIRS DU VENEUR. g^
combien il est désagréable pour un veneur tout occupé de son
affaire, et souvent,fort embarrassé lui-même, de s'entendre appe-
ler, questionner,, consulter et remontrer. Souvent l'intention est
bonne; mais si, elle était éclairée, on verrait que les observations
sont rarement; bien placées. Toutes les personnes qui aiment la
chasse à courre;et qui la suivent, doivent donc étudier les prin-
cipes nécessaires pour former un bon veneur, dont le premier
mérite est souvent de douter de son savoir, ce que ne font
jamais les igrnorants. Leur goût étant plus éclairé, l'intérêt qu'ils
y prendront sera plus vif; leurs démarches étant plus raisonnées
ne seront plus nuisibles, et les veneurs n'étant suivis et accom-
pagnés que par des gens instruits qui sauront apprécier leurs
manœuvres, en sentir l'intention et en prévoir le but, ne seront
pas sans cesse questionnés, consultés, et continuellement tra-
cassés.
D'ailleurs à tout veneur qui veut monter un équipage, On
peut dire : « Arrangez- vous d'abord pour aller chasser avec
quelques équipages différents; allez voir celui-ci chassant de
telle façon, celui-là chassant de telle autre, puis étudiez, jugez
et choisissez, mais surtout tâchez d'y apprendre votre métier.
Autrefois ne prenait-on pas ses grades en vénerie, et Louis XV
lui-même n'a-t-il pas chassé lièvre, puis chevreuil, puis daim et
mis cinq ans avant qu'on lui permît de chasser cerf? Quel plus
bel exemple de la nécessité d'apprendre un métier avant de
l'exécuter ! Or la chasse est surtout une science pratique, dont
on peut tous les jours contrôler les principes, et qui ne veut pas
l'apprendre et s'y instruire est indigne d'en parler. Mais n'oubliez
pas qu'il vous faudra tenir grand compte des pays où chasseront
les maîtres que vous irez voir; ce que vous verrez faire et
réussir par exemple dans les petites forêts de l'Ouest, bien per-
cées ou plates, dans lesquelles on peut facilement suivre les
chasses et voir l'animal, rallier les chiens, ne peut pas toujours
se faire dans les grandes forêts comprenant des enceintes
énormes ou coupées de côtes, ravins, rivières, où vous ne voyez
presque jamais l'animal de meute, où les chiens qui veulent
7
q8 la chasse a courre.
rallier n'entendent rien ou entendent de travers à cause des
échos et sont par suite incapables de rejoindre la chasse. Là si
vous appliquez le genre de chasse usité chez quelques très bons
veneurs de l'Ouest, au lieu de réussir comme eux, vous pourriez
bien échouer. On est toujours disposé, surtout quand on réussit,
à croire qu'il en serait partout de même et que le mode que l'on
à adopté avec raison, puisqu'il réussit là où Ton chasse, est celui
qui réussirait partout ; erreur extrême ! Aussi le veneur, pour se
perfectionner, doit-il voir chasser dans des pays fort différents et
juger combien la chasse change suivant les pays.
CHAPITRE X
DU PIQUEUR
Nous venons de voir ce que devaient être le veneur et le
maître d'équipage. Voyons un peu maintenant ce que doit être
le piqueur.
Hélas! il doit avoir tant de qualités réunies, qu'il est bien
rare d'en trouver un complet, et, quand on en a un à moitié
bon, il faut encore savoir s'en contenter. S'il a l'amour de la
chasse, s'il, en a l'instinct, s'il n'est pas ivrogne, s'il aime ses
chiens, on doit encore s'estimer heureux de ce que l'on a et le
garder.
Un bon piqueur doit avoir commencé son métier de bonne
heure, soit qu'ayant débuté avec son père s'il est de famille de
piqueurs, soit qu'il ait vécu dans les bois dans son enfance,
ait été valet de chiens dans un bon équipage, y ait appris à soi-
gner les chiens et à bien les tenir et ait cet instinct de la chasse
qui ne se donne pas.
Il doit être actif et, autant que possible, de taille moyenne et
de poids léger, ce qui est un grand avantage pour les chevaux.
Il doit être de bonne santé, car c'est un rude métier, où il se
100 LA CHASSE A COURRE.
fortifiera s'il est un peu robuste et où il s'épuisera, s'il est
faible. Il ne doit pas être paresseux, aimer à se lever de bonne
heure, être grand marcheur et être doux avec les animaux. II ne
doit pas aimer à boire et à fréquenter les cabarets. Beaucoup
ne boivent pas au début, puis ils se mettent à boire petit à petit
pour se donner des forces dans leurs jours de gTande fatigue;
ils en prennent alors l'habitude et finissent par devenir ivrognes.
Le piqueur doit avoir l'instinct de la chasse et cette connais-
sance des bois et de la marche des animaux qui lui fait deviner
les refuites et leurs habitudes, même dans les pays qui lui sont
inconnus et nouveaux pour lui. Il doit avoir du raisonnement et
du jugement, sans quoi il ne sera jamais un bon valet de limier
et à la chasse il ne jugera jamais bien le change. Il doit être
instruit des mœurs des animaux sauvages, connaître et pouvoir
juger leurs pieds, de façon à distinguer par leurs empreintes
tous les animaux qu'on chasse, non seulement leur espèce, mais
leur âge et leur sexe. Il doit avoir une bonne vue et une bonne
oreille, une bonne voix et une bonne poitrine pour appuyer ses
chiens et pouvoir sonner de la trompe à pied et à cheval toute
une journée. Il doit être modeste et se méfier de lui-même, sans
quoi, en faisant le bois, il fera souvent des buissons creux, ou en
chassant il manquera les animaux pour n'avoir douté de rien. Il
doit aimer ses chiens, sans quoi il les soignera mal et ne se fera
jamais aimer d'eux. Il doit les connaître à fond, savoir les
soigner dans la santé et dans la maladie, reconnaître les bons à
garder et les mauvais à supprimer, connaître ceux qu'il faut
ménager et qui le méritent, ceux auxquels il faut avoir confiance,
les avoir toujours en bon état, savoir les nourrir suivant les
saisons, savoir les employer suivant leurs capacités, savoir
les mettre sous le fouet et les rendre obéissants, savoir les
soigner, les faire naître et les élever.
Il doit enfin prendre les intérêts de son maître, faire son
service par amour et non comme un métier, car tout homme qui
ne prendra son service que comme un métier ne fera jamais
tout ce qu'il devrait faire et sera au-dessous de son devoir.
CHOPELIN JACQUES
Né en i8o3 — Décédé en i885
J WWl 'I
DU PIQUEUR. IOi
Aussi les bons piqueurs sont-ils rares. On en voit souvent qui
ont de grandes qualités, qui ont l'amour et l'instinct de la chasse,
mais qui ont des tètes infernales ou une conduite déplorable ;
d'autres, qui sont honnêtes, doux et agréables, mais qui n'ont
aucune initiative et aucun instinct de leur métier; bons hommes
de chenil, mais nuls à la chasse, ils reculent devant les marches
forcées qu'il faut faire le matin pour rembucher un animal, ou
font trois fois plus de chemin qu'il ne faut, s'embrouillent et
n'arrivent à rien. A lâchasse ils ne savent que faire ou appuient
de travers, et le soir ils sont toujours pressés d'arrêter, même au
moment où ils seraient près de finir leur animal.
Il faut songer que le plus grand nombre des équipages de
France n'ont qu'un piqueur. Il faut qu'avant le jour cet homme
parte, aille faire le bois, souvent au loin, marche parfois des
heures entières avant de pouvoir rembucher son animal, dans
l'eau, dans la boue, mouillé du haut en bas. A peine arrivé au
rendez-vous, il lui faut avaler vivement un morceau de pain, puis
le voilà à cheval pour toute la journée, appuyant ses chiens,
sonnant, criant, soutenant souvent de la main et des jambes un
cheval épuisé; le soir il lui faut rassembler ses chiens, puis, fati-
gué et sur un cheval éreinté, faire une retraite quelquefois de
huit à dix lieues avant d'arriver au logis, tard, souvent à dix
heures, quelquefois à minuit. Il lui faut soigner encore ses chiens,
souvent son cheval ; alors il lui reste à les faire manger, et quand
il peut enfin se coucher, il aura travaillé souvent pendant seize ou
dix-huit heures de suite, et quel travail !
Aussi, s'il y a de bons piqueurs, combien y en a-t-il de
mauvais, faisant le bois par renseignements, dans les cabarets,
avec des charbonniers ou autres ouvriers forestiers qui les ren-
seignent plus ou moins mal pour une tasse de café ou un verre
d'eau-de-vie> Le soir des chasses, ils abandonnent une partie de
leurs chiens en forêt et laissent ceux qu'ils ramènent morfondus
se coucher sans être séchés et même sans souper; brutalisant
chiens et chevaux, incapables de tenir leurs chiens propres
sans les passer constamment à l'onguent, incapables d'en élever,
102 LA CHA8SE A COURRE.
ils sont toujours sortis et ne font absolument rien les jours où
l'on ne chasse pas.
Ceux qui sont bons restent généralement dans leur place, et
parmi ceux-là on trouve souvent des' hommes réellement remar-
quables, complets, estimés de leur maître et qui laissent souvent
un nom connu de tous les veneurs. Soigneux de leurs chiens et
de leurs chevaux, prenant les intérêts de leur maître, connaissant
à fond leur métier et le faisant consciencieusement, se méfiant
d'eux-mêmes, ce qui est le propre du vrai mérite, mais ayant
cependant à la chasse des décisions vives et promptes quand il
le faut, soucieux de leur réputation et, aimant à prendre l'animal
qu'ils chassent, ils ne s'inquiètent ni du temps ni de l'heure. Ces
hommes-là ont fait la gloire de la Vénerie française, et leurs
noms sont restés célèbres dans les annales de la Vénerie. Sans
remonter plus haut que le siècle dernier et sans même rappeler
les fameux piqueurs du Grand Dauphin, son célèbre La Jeunesse,
qui à quatre-vingt-dix ans menait encore la tête de l'équipage
dans une refuite de grand loup, des bois de Versailles à Anet,
les noms de Fleury à M. Le Provost, de Langevin au marquis de
Beraay, de Guel au marquis de Saint-Denis, de Raguène au mar-
quis de Faudoas, de La Rivière au marquis de Courcy, deBer-
telot à M. de Fiers, de La Retraite à M. de la Fresnaye, de
Corbin à M. de Canisy, de La Rose à M. de Croman, de
Saint-Denis au marquis de Bologne, etc., sont connus de tous
ceux qui ont étudié l'histoire de la Vénerie française.
Dans ce siécle-ci, les La Trace de la Vénerie Impériale, les
Mousquetaire et les Obry de la Vénerie Royale, la dynastie des
Fortin chez les princes de Condé, les Racot de Rallye-Bour-
gogne, les Saint-Jean de M. de Vichy, les Chopelin de M. de
Boisgelin, les Nennen du marquis César de Moreton, les deux
Charrier, père et fils, du marquis de Nanteuil et du comte de
Barrai, les Baptiste de MM. de Puységur, les Chauveau de M. de
l'Angle, les Salmon de M. de Vatimesnil, les Claude Thuyé de
M. de la Carelle, les Firmin de La Vénerie, les Lefort de M. La-
bitte, les Padronna du baron d'Houdermarre, les Hourvari du
DU PIQUEUR. 103
duc d'Aumale, etc., tous ces hommes ont continué à maintenir
la gloire de la Vénerie française et leurs noms, bien connus de
tous les veneurs de notre temps, seront, je l'espère, transmis
aux générations futures de veneurs.
CHAPITRE XI
DE LA FORMATION D'UN ÉQUIPAGE
Il est assez difficile de donner des règles pour la formation
d'un équipage et on ne peut guère indiquer que des généralités.
Un veneur qui sait déjà chasser, qui a suivi plusieurs équi-
pages, qui connaît les chiens, les qualités et défauts des dif-
férentes races, ne sera pas embarrassé pour se créer une meute;
toutefois, s'il n'achète pas un équipage déjà formé, il doit
s'attendre à être un certain temps avant d'avoir une meute faite
et capable de prendre régulièrement. Un amateur qui ne sait
rien de la chasse que ce qu'il aurait appris dans les livres, qui
n'a pas suivi les chasses de différents équipages, qui ne sait pas
ce qu'est ou doit être un bon chien courant, aura bien de la
peine à se monter convenablement et fera nombre d'écoles ; il ne
saura pas commander et sera à la merci de ses hommes; il
s'exposera à ne rien faire de bon et à se dégoûter. Si son pi-
queur n'est pas très bon, il pourra même avoir de très bons
chiens, ne pas savoir s'en servir et ne rien faire; il les gâtera
même et, s'il les vend avant de les avoir gâtés, il pourra être très
I06 LA CHASSE A COURRE.
étonné d'apprendre qu'ils réussissent à merveille entre les mains
d'un autre veneur qui sait son métier.
En outre, les équipages à former varient beaucoup suivant le
pays où l'on chasse et l'animal que l'on veut chasser. Je compte
indiquer, en parlant de la chasse de chaque animal, quel est le
genre de chien et les races qui me paraissent le mieux convenir
pour sa chasse; mais on peut admettre :
r Qu'on peut parfaitement chasser et prendre des lièvres avec
huit ou dix chiens et un homme à pied, bon marcheur;
T Que pour le chevreuil il faut généralement de quinze à
vingt chiens et un homme à cheval ;
3* Que pour le sanglier il faut au moins de vingt à trente
chiens, un piqueur et un valet de chiens grand marcheur ;
4* Que pour le loup il faut de quinze à vingt chiens de pre-
mier ordre, un excellent piqueur spécial et au moins un valet
de chiens pouvant au besoin être valet de limier.
5° Que pour le cerf il faut de vingt-cinq à trente chiens, un
piqueur et un valet de chiens; encore faut-il, pour n'avoir que
cela, faire souvent le piqueur soi-même et avoir un pays facile;
un second valet de chiens pouvant être valet de limier serait
bien utile.
• Bien entendu, tout cela est le minimum si Ion veut faire de
la vénerie, c'est-à-dire chasser à courre pour prendre.
Il est presque impossible qu'un piqueur n'ait qu'un cheval, car.
celui-ci étant boiteux, malade ou ayant un accident quelconque,
ou même chassant régulièrement, ne peut suffire, et le piqueur
peut être à pied et la chasse compromise.
Si l'on chasse les grands animaux, cerf, sanglier et loup, et
qu'on chasse surtout dans les pays de petites forêts,de plaines,
de petits bois séparés, il faut plus de monde si l'on veut avoir
un animal au rapport ; car dans ces pays les animaux voyagent
plus que dans les grandes forêts, et pour peu que l'on chasse
souvent, ils ont bientôt changé de canton et il faut aller les
chercher au loin. Il faut alors changer le rendez-vous et les
mettre assez éloignés les uns des autres, et pour, le piqueur qui
DE LA FORMATION D'UN ÉQUIPAGE. IO7
sera allé au loin faire le bois, soit à pied avec son limier, soit a
cheval avec ses rapprocheurs, il faudra lui envoyer, au rendez-
vous, la meute, son cheval, son déjeuner souvent, et toujours ses
habits, bottes et trompe. Dans presque tous ces cas, on peut avoir
un homme loué à la journée pour lui porter toutes ses affaires
dans une hotte et ramener le limier et les habits de rechange
du matin; c'est une habitude peu coûteuse et fort commode;
dans certains équipages il y a un mulet ou un âne qui fait ce
métier, conduit par un homme loué pour la circonstance.
Généralement la forme du costume des piqueurs est la même
dans toute la France; la couleur seule diffère.
Le costume se compose de bottes fortes noires, de bons bas
de laine gris-bleu, de culottes de velours, d'un gilet de la couleur
des revers, d'une redingote à un rang de boutons, d'une cravate
blanche et d'une toque en drap pareil à celui de la redingote. La
redingote et le collet, le bas des manches et les revers des poches
sont de la couleur du gilet. Le galon de vénerie qui, pour les
maîtres, est deux tiers or et un tiers argent, est pour les hommes
deux tiers argent et un tiers or. Il se pose en pointe, la pointe
en haut, en bas des manches au-dessus des revers, autour du
collet et en pointe dans le dos, partant des deux boutons de la
taille. S'il y a des revers de poches de côté sur les pans, on y
met aussi un galon en pointe (la pointe en bas). Si l'équipage
a plusieurs piqueurs à cheval, on met doubles galons dans le
dos au premier piqueur.
Les valets de chiens dans les grands équipages ont les
souliers forme molière forts et montant haut, de gros bas de
laine gris-bleu ou blancs montant au-dessus du genou, la culotte
de velours, le gilet pareil au revers, un petit veston droit court,
les pans légèrement arrondis avec collet et revers de manche de
la couleur du gilet, toque pareille à la couleur du drap de la
veste et un galon d'argent seulement, posé comme celui du
piqueur. Toutefois, s'il y a plusieurs valets de chiens, on met
souvent au premier doubles galons dans le dos, comme au
premier piqueur. Dans les petits équipages, les bas sont souvent
108 LA CHASSE A COURRE.
remplacés par des guêtres ou mieux par des bas de jambes en
cuir avec forts brodequins.
Le piqueur porte le couteau de chasse avec ceinturon et
galons de vénerie par-dessus la redingote ; le couteau est k
modèle de l'ancienne vénerie, manche noir monté en argent:
pour le sanglier, il porte ordinairement la petite carabine courte.
Le valet de chiens porte aussi le couteau, mais le ceinturon
est passé sur l'épaule droite, passant sous l'épaule gauche pour
n'être pas gêné en courant. Il porte de la même façon les contre
hardes roulées et doit s'habituer à mettre son fouet à sa trompe,
passé dans le petit intervalle près de l'embouchure, afin d'avoir
toujours les mains libres; il peut le mettre aussi au ceinturon à
côté du couteau de chasse, s'il porte celui-ci.
Les meilleures contre-hardes (celles de l'ancienne vénerie) se
font simplement avec les couples en crin de la façon suivante .
Chaque couple en a une autre attachée à son milieu par un
nœud coulant. La réunion de trois ou quatre couples attachées
ainsi au milieu des autres par un bout étant dans la main, on y
passe dedans, par un autre nœud coulant, soit une corde, soit
une autre couple et l'on a la contre-harde ; bien entendu, si, au
lieu d'une longue corde on a passé simplement une couple, on
allonge successivement par autant de couples qu'il est nécessaire
pour faire une corde par laquelle on tiendra les chiens ou on
attachera la contre-harde à un arbre.
Un bon valet de chiens doit toujours vérifier si les couples
vont bien au cou des chiens et resserrer ou desserrer le nœud
d'arrêt. Il doit ne jamais laisser ses chiens s'embrouiller et immé-
diatement remettre tout en ordre, si cela arrive. Il doit habituer
les chiens à marcher derrière lui, car s'ils étaient devant, il
s'exposerait à ne pas en être maître et à être renversé et traîné.
Les valets de chiens à cheval mènent les relais de la même
façon (les relais sont généralement la meute divisée en relais, si
elle est considérable, car on ne pourrait l'attacher tout entière
à une contre-harde); mais ce n'est que la pratique qui leur
apprend à ne pas laisser prendre les jambes ou la queue du
LE RELAIS VOLANT
DE LA FORMATION D*UN ÉQUIPAGE. IOÇ
cheval, par les chiens passant de droite à gauche. Si les chiens
se jettent à gauche sous la queue du cheval en lui prenant les
jambes, le cavalier doit faire faire tout de suite à son cheval un
demi-tour à droite, pour se retrouver toujours à gauche du relais.
Si le chemin est assez large, il est préférable qu'il tienne son relais à
hauteur de sa jambe droite; autrement, il faut qu'il le maintienne
derrière lui. J'ai, pendant quinze ans, mené ainsi moi-même ma
meute pour la donner sur mes rapprocheurs pour loup, et je Va\
souvent donnée à quatre ou cinq lieues de l'endroit où mes vieux
chiens avaient pris la voie. C'est difficile au début, mais je puis
garantir qu'on arrive assez vite à enlever rapidement ses chiens
et à les mener grand train sans grand embarras. Si un chien se fait
traîner dans un cas pressé, quand on est obligé d'enlever les chiens
un peu plus vite, il vaut mieux descendre et le découpler; autre-
ment il éreinterait les autres et finirait par être étranglé. Il y a
des chiens qui ne suivent jamais bien au couple et qui se font
tirer aussitôt qu'on mène le relais un peu vite ; ces chiens s'y font
rarement et causent une grande gêne et un grand retard, quand
on enlève la meute.
On doit, autant que possible, former la meute de taille conve-
nable, soit au pays où l'on chasse, soit à l'animal que Ton
chasse.
Une meute, pour être belle, doit être resiée, c'est-à-dire que
tous les chiens doivent être de même taille, figure, couleur,
mais surtout de même pied. Ceci est encore plus important que
Von ne croit, et c'est un des inconvénients des meutes composées
de chiens de différentes races, ayant différentes manières de
chasser. Des Bâtards fins de nez se complètent très bien pour les
agréments de la chasse avec des Anglais. Qu'arrive- t-il? Au bois
et dans les fourrés, les Bâtards sont devant et font toute la
besogne, pendant que souvent les Anglais se reposent et se
relayent, suivant les sentiers et les routes; mais, arrivés à un
débucher ou dans de grandes futaies rases, les Anglais prennent
la tête et éreintent les Bâtards déjà fatigués par le travail qu'ils
ont fait et qui, ambitieux, s'épuisent à ne pas lâcher et à se main-
110 LA CHASSE A COURRE.
tenir à hauteur des autres. De là le saignement de nez qui a
tué tant de Bâtards depuis trente ans et qui n'est que le résul-
tat de l'épuisement des bons chiens Jaloux de ne pas céder à des
chiens plus vites qu'eux.
L'ensemble, l'amour de la chasse, la gorge, la tenue, le nez,
la vitesse, la sagesse, sont les qualités constitutionnelles d'une
bonne meute : c'est la bonté particulière de l'individu qui forme
celle de l'ensemble.
Si on monte un équipage et qu'on sache où il y a une bonne
race de chiens, il ne faut pas craindre de l'aller chercher au loin,
car le chasseur qui n'a pas une bonne race de chiens ne pourra
jamais chasser agréablement. Avec de bons chiens, au contraire,
les trois quarts des difficultés s'aplanissent par leur adresse et
leur intelligence; mais il faut non seulement les avoir bons, il
faut encore que leurs qualités soient analogues les unes aux
autres. Il faut, par exemple, qu'ils soient du même pied, et on
doit par conséquent impitoyablement réformer même un bon
chien qui nuit aux autres par une vitesse trop supérieure.
Si dans ce livre je me suis autant étendu sur la question xles
chiens, c'est que je suis convaincu que c'est la base de la chasse;
que si les chiens sont réellement bons, le maître ne ferait-il rien
et le piqueur serait-il absolument nul, on peut encore parfaite-
ment réussir, s'il leur reste à tous deux assez de bon sens pour
ne pas gêner leurs chiens. Le 'plus fin veneur et le meilleur
piqueur, avec de mauvais chiens sans qualité, n'arriveront jamais
à prendre.
fl«ar»
.u
LE RELAIS VOLANT
•aaasu.
CHAPITRE XII
DU LIMIER ET DE SON DRESSAGE
Avant de passer à l'étude de la chasse des différents animaux,
je dois dire un mot du limier et dû- travail que doit faire celui
qui le dresse, sans entrer toutefois ici dans le détail du travail
particulier à faire, suivant les différents animaux qu'on a à
détourner et à rembucher.
Ce travail si important est tout à fait spécial à la Vénerie
française, et je crois bien qu'il est presque inconnu dans tous les
autres pays, ce dont je ne me doutais pas autrefois. Ainsi en Angle-
terre, pour les équipages (réduits à un ou deux du reste) qui
chassent le cerf à l'état sauvage dans le Devon et le Sommerset,
je croyais que le harbourer faisait le même travail que nos
valets de limiers; mais c'était une erreur. Le harbourer va à la
découverte sans chien, surveillant et tâchant de découvrir les
cerfs du haut d'un rocher ou d'un grand arbre même, avec une
bonne lunette au besoin ; mais il n'a aucunement l'idée de suivre
un animal choisi, dans tous les retours et marches qu'il a faits
pendant la nuit, et cela au moyen de son limier, pour arriver à
le rembucher dans une enceinte de façon à dire : « Mon animal
112 LA CHASSE A COURRE.
est là couché à 5o, ioo ou 200 pas d'ici. » Il est de tradition dans
notre Vénerie qu'avec un bois bien fait, un animal bien rembucfce
et une attaque bien faite, ranimai est à moitié pris.
Pour bien dresser un limier, il faut de la douceur et de h
patience.
Je dirai tout d'abord que, contrairement à l'avis de beaucoup
de veneurs, je préfère de beaucoup le limier qui travaille le nez
un peu haut et qui va souvent au vent. Je sais que c'est quel-
quefois dangereux. Si le chien n'est pas sûr, il peut aller ai
vent d'autres animaux que celui qu'il travaille ; mais je réponds
à cela qu'un limier qui n'est pas sûr n'est pas un limier. Quand
un limier, bien sûr comme il doit être, va au vent de l'animal,
il vous indique clairement que l'animal est dans l'enceinte; il
vous permet de ne pas le serrer de trop près, de ne pas le
mettre debout, comme font souvent les valets de limier : ce qui
compromet l'attaque. Si l'animal a vidé l'enceinte et que vous
veniez pour l'attaquer deux ou trois heures après le travail du
valet de limier, avec le peu de nez qu'ont les chiens actuels
vous risquez fort de ne pas attaquer ou d'attaquer tout autre
chose que l'animal travaillé. C'est ainsi qu'on a si souvent au
rapport des dix cors qui se transforment en daguet ou seconde
tête à l'attaque.
Beaucoup d'hommes, peu sûrs de leur travail, mettent ranimai
debout pour voir ce qu'il est, puis attendent près de l'enceinte
pendant un certain temps pour tâcher de le rembucher ensuite;
c'est ce que j'appelle un travail de paresseux et d'ignorant, qui |
réussit en somme rarement, fait manquer les attaques et fait
lancer un autre animal que celui qu'on a travaillé. Il faut avoir
fait le bois pour loup ou pour un vieux sanglier coureur et
méfiant pour savoir l'inconvénient de cette façon de travailler et
pour apprécier l'avantage d'avoir un limier sûr, travaillant bien
au vent. Je n'oublierai jamais mes limiers Grisonno, Publicoet
Montjoie, qui, quand ils travaillaient un loup ou un sanglier et
quand ils se mettaient à aller au vent, le poil relevé sur le dos,
m'indiquaient aussi sûrement que si j'avais pu le voir, que
DU LIMIER ET DE SON DRESSAGE. Il3
Fanimal était dans l'enceinte. Avec de vieux animaux méfiants,
on est quelquefois si embarrassé par les entrées, les sorties et
les doubles voies qu'ils font avant de se remettre, qu'on est
heureux d'avoir un limier qui vous indique clairement par sa
façon de travailler que l'animal est remis; quelquefois c'est
sur le bord d'un chemin ou d'un fossé et souvent du côté opposé
à celui que vous auriez supposé.
Le chien qu'on veut mettre à la main doit être brave d'abord,
hardi, vigoureux ; son nez doit être fin, mais pas trop cependant,
car il vous donnerait trop connaissance des voies du relevé (de
la veille au soir) et vous causerait souvent un travail inutile et
quelquefois si long que vous ne pourriez arriver à rembucher
votre animal. Moi qui adore les chiens fins de nez, je considère
comme un grand défaut pour un limier d'avoir le nez trop fin.
La première leçon à donner au limier, c'est de lui apprendre
à marcher devant et à porter gaillardement son trait. Il ne faut
pas compter lui faire faire cela de force, car, si on le maltraite
la première fois, il abhorrera le trait et n'y sera jamais propre.
Je suis d'avis qu'on doit toujours arriver à faire travailler son
limier libre ; mais il est néanmoins souvent très urgent de lui
passer le trait, pour être sûr qu'il ne se laissera pas entraîner et
ne donnera pas de voix. La douceur, les caresses réitérées sont
les moyens qu'il faut employer.
Une des meilleures méthodes est d'avoir avec soi, la première
fois qu'on sort son chien, quelqu'un menant un limier déjà
formé. On va ensemble et on fait passer le vieux limier devant
le jeune, que cela excite; il oublie la botte et tire sur le trait
pour le suivre; après avoir fait cela cinq ou six fois, on les fait
passer devant alternativement, et bientôt le jeune chien se trouve
en état d'aller seul. Pour l'encourager, on lui dit : « Hou devant,
Hou devant! après, mon chien, après! »
Quand il marchera sans inquiétude et tirera gaillardement sur
son trait, il faudra lui apprendre peu à peu à mépriser les voies
dont on ne voudra pas lui donner connaissance; mais lorsqu'il
se rabattra sur celles de l'animal à la chasse duquel on le destine
8
114 LA CHASSE A COURRE.
et qu'on en reverra, on le flattera en lui disant : « Volcelest, tu
dis vrai, chien, tu dis vrai. »
Il faut bien prendre garde qu'en suivant il ne change de voie:
s'il fait cette faute, il faut le retirer sans le battre, mais eo le
grondant, revenir ensuite sur les derrières et reprendre la voie
sur laquelle on a l'attention de briser de distance en distance.
Cet exercice sera le même jusqu'à ce que le chien soit ferme
dans sa voie, ce qu'on reconnaîtra en retenant le trait. S'il est
ferme, il tirera droit devant lui sans bouger et ne se jettera ni
à droite ni à gauche.
Dès que le chien aura fait plusieurs belles suites, il faudra
lui apprendre à détourner l'animal, et pour cela il faut choisir
un jour de beau revoir. Vous prendrez donc votre limier et,
après lui avoir fait faire suite d'un animal, si vous arrivez à une
enceinte qui vous paraisse favorable, surtout par des terrains
de beau revoir qui l'entourent, vous faites quitter la voie à votre
chien en le caressant et vous commencez à lui faire faire le tour
de cette enceinte. Il est probable qu'il se rabattra sur d'autres
voies, particulièrement sur renard. Dès que vous vous en aper-
cevez, vous lui retiendrez le trait en lui disant : « Fi de ça, fi
de ça! », et puis vous continuerez votre quête. A deux cents pas
environ, vous rétrogradez pour recroiser cette mauvaise voie et
voir si votre chien se souvient de la réprimande. S'il commet
la même faute, vous lui donnez une légère saccade du trait, en
lui disant sévèrement : [« Fi de ça, vilain mâtin, fi de ça! » Si
vous trouvez la sortie de l'animal que vous suivez, votre chien,
accoutumé déjà à bien la suivre, ne la sur-allera pas probable-
ment. Vous le caressez alors et lui ferez faire suite jusqu'au
premier sentier, où vous briserez haut et bas, c'est-à-dire que
vous rompez une branche de la grosseur du doigt que vous
mettez sur la voie de l'animal, le gros bout tourné du côté où
il se dirige, et en même temps vous en rompez une autre à
demi, que vous laissez pendre après le tronc. C'est ce qu'on
appelle briser haut, parce que, s'il passait un homme, un cheval
ou des bestiaux dans le sentier, ils pourraient déranger ou em-
DU LIMIER ET DE SON DRESSAGE. Il5
porter votre brisée basse et il vous resterait au moins la brisée
haute pour reconnaître la rentrée. Dans l'ancienne Vénerie, la
brisée haute signifiait la rentrée de l'animal de chasse et un valet
de limier, passant après vous et reconnaissant l'animal de chasse
rentrant sans brisée haute, avait droit de le travailler et de le
détourner.
Vous prendrez ensuite de nouveaux devants et, à force d'en
prendre, vous arrivez à une enceinte où votre animal vous pa-
raîtra relaissé, puisque vous ne trouvez plus de sortie. Vous
briserez et vous vous retirerez pendant une heure pour accou-
tumer votre limier à reprendre une voie de plus hautes erres ;
après quoi vous viendrez reprendre votre voie et vous la ferez
suivre à votre chien jusqu'à ce qu'il ait lancé l'animal; rien ne
fait plus de plaisir à un jeune limier.
Pour accoutumer votre chien à être muet, aussitôt qu'il veut
donner de la voix, vous vous retirez en disant : « Tout coi, l'ami,
tout coi ! » Vous lui faites suivre un instant le contrepied, ce qui
le mortifie, et le refroidissement de la voie diminue son ardeur
et lui apprend à être muet; puis vous revenez lui faire reprendre
la voie droite.
Un bon limier doit porter gaillardement son trait, mettre sou-
vent le nez aux branches et visiter particulièrement les faux-
fuyants et les rentrées.
Tel est le travail du limier en général. Tous les chiens ne sont
pas aptes à faire des limiers. On en trouve assez rarement de
bons dans les bâtards. Les griffons Vendéens et les Anglais en
fournissent souvent d'excellents; les Saint-Hubert et les Arté-
siens aussi. Du reste, on trouve souvent de bons limiers même
dans les races de chiens étrangers à la race courante et, quoique
je ne les aime pas, cependant je dois dire que j'ai vu des mâtins
et des chiens de berger faire d'excellents limiers. Toutefois il
est préférable d'employer un chien courant. On fera même bien
de le faire chasser de temps en temps, car souvent les limiers
se dégoûtent de faire toujours ce métier sans jamais chasser.
Pour mon compte, j'ai toujours fait chasser mes limiers; c'est
Il6 LA CHASSE A COURRE.
double service, c'est vrai, et bien éreintant pour eux, mais comme
je choisissais toujours pour faire des limiers les plus vigou-
reux, en les laissant reposer de temps en temps, ils duraient tout
autant que les autres. Au sanglier, j'ai fait la bêtise d'en laisser
tuer quelques-uns, entre autres mon excellent Montjoie, que j'ai
bien regretté.
J'ajouterai que je n'ai jamais mis au trait un chien avant qu'il
ne fût bien livré et que j'eusse pu m'assurer qu'il aimait la voie
de l'animal à laquelle je le destinais, car il faut qu'il ait montré
qu'il avait les qualités de bravoure et de hardiesse indispensables.
'ï^Mê^ÏÏ
CHAPITRE XIII
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE
I
LE CERF
Le cerf est le plus bel ornement des forêts de la France.
Il a une forme élégante et légère, les membres flexibles et
nerveux, la tête parée d'un bois vivant qui se renouvelle chaque
année, l'œil bon, l'odorat exquis et l'oreille excellente. Il habite
à l'état sauvage un grand nombre de nos régions boisées, les
forêts du Nord, celles des Ardennes, de Corapiègne, de Halatte,
de Villers-Cotterets et toutes celles des environs de Paris, à peu
près toutes celles de la Normandie, celles de l'Orléanais et de la
Sologne, de la Bourgogne et de la Nièvre, celles du centre de
la France en Poitou, dans une partie de la Vendée et de la Tou-
raine, etc. etc.
Plus de vingt équipages chassent uniquement le cerf et plus
de quarante le chassent aussi en alternant avec le chevreuil.
Les équipages français doivent prendre tous les ans de iooo à
Il8 LA CHASSE A COURRE.
1200 cerfs; les braconniers et les chasseurs à tir dans les petits
bois qui entourent les forêts ou dans les forêts où la chasse à
courre n'est pas réservée, en tuent bien presque autant. On dé-
truit en outre au moins un millier de biches. La chasse du cerf
est donc un des chapitres les plus intéressants de la Vénerie
française, et comme les équipages pour cerf sont généralement
les plus nombreux et les plus beaux, on voit quelle importance
elle a dans un pays où elle occupe plus de huit cents chevaux,
plus de deux cents hommes, sans compter les cochers et pale-
freniers et plus de quinze cents chiens. Le mouvementée fonds
occasionné par ce sport est en proportion; les marchands de
chevaux et de chiens, les selliers, carrossiers, tailleurs, auber-
gistes, employés, gardes, les transports par chemins de fer,
l'impôt des chiens, des chevaux, des voitures, la location des
forêts et des bois profitent de l'argent mis en circulation par ce
sport, dont le total atteint un chiffre extrêmement respectable et
TÉtat y trouve un revenu considérable.
Le cerf varie un peu de taille suivant les lieux où il habite et
son bois varie encore plus suivant la nature des gagnages qu'il
fréquente. Son poids peut aller de 100 jusqu'à 25o kilos, mais il
atteint rarement ce maximum. Il a la tête un peu allongée et le
front large, les oreilles assez grandes, ovales et terminées en
pointe, écartées l'une de l'autre et mobiles, les yeux grands et
bruns. Il a au-dessous de l'œil une fente profonde qu'on appelle
larmier et dans laquelle des glandes sécrètent une substance
grasse d'une odeur agréable, qui se durcit à l'air et devient jaune
foncé et brillant. Les narines sont larges, arrondies et fendues
obliquement sur les côtés. Il a trente-quatre dents, huit sur le
devant de la mâchoire inférieure et six sur chacun des côtés ;
pareillement six dents sur chaque côté de la mâchoire supérieure;
de plus deux espèces de coins arrondis qui prennent en vieillissant
une belle couleur brune et quelquefois presque noire. Les dents
de devant avec lesquelles il naît, tombent jusqu'à l'âge de quatre
ans et sont remplacées par d'autres dents plus larges. Son bois
est opaque et de forme arrondie et repose presque entièrement
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<El<|- DIX -COU S
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/
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE. I IÇ
sur le dos lorsque l'animal fuit ; mais quand il entend le bruit
d'un homme ou d'un chien, il le redresse en avant. Son cou
est assez long, élevé et recourbé en arrière; il se gonfle et
double de grosseur pendant le temps du rut et se couvre de
longs poils durs. Le cerf a le dos assez plat, les cuisses un peu
maigres, la queue de o",25 de longueur environ, la verge mince,
les dain tiers (testicules) de la grosseur d'un œuf d'oie; les
jambes sont hautes, fortes à la partie supérieure, assez minces
par en bas et d'une grande vigueur. Les pieds sont fendus et
d'un noir brillant. J'en ai pris à pieds blancs, mais c'est une
bizarrerie. 11 a au-dessus des talons en arrière deux espèces
d'ergots de corne appelés jambes, dont on n'aperçoit la trace
que quand il court ou qu'il marche sur un terrain mou ; leur
position et leur distance du talon sont très utiles pour juger
de l'âge de l'animal.
La femelle ou biche se distingue du cerf non seulement par
les organes de la génération et par ses quatre mamelles, mais
encore par ses formes et sa groèseur; elle est plus petite et ne
pèse guère plus de ioo à i5o kilos. Elle n'a pas le port et les
belles formes du cerf; son cou n'est- jamais revêtu d'un poil
long et rude et sa tête est dépourvue de l'ornement si caracté-
ristique du cerf. Il peut arriver toutefois qu'une vieille biche
bréhaigne porte des bois et l'histoire de la vieille biche portant
bois chassée par Charles IX dans la forêt d'Amboise est restée
célèbre dans l'histoire de la Vénerie et montre ce qu'on exigeait
des veneurs de ce temps.
La taille et la couleur des cerfs varient suivant les pays qu'ils
habitent; ceux qui habitent les vallées ou les plaines où les
gagnagés sont abondants, sont plus grands et plus lourds que
ceux des montagnes et des collines pierreuses et sablonneuses ;
ceux-ci sont ordinairement plus petits et plus trapus et leurs
bois sont moins longs, mais varient toujours beaucoup néan-
moins suivant la nature des forêts qu'ils habitent et des gagnagés
qu'ils fréquentent. Le pelage le plus ordinaire des cerfs est
fauve; il n'y en a pas beaucoup de bruns. La couleur de ces
120 LA. CHASSE A COURRE.
différents pelages peut aussi dépendre de l'âge et de la nature
de l'animal. Il existait aussi autrefois en France des cerfs blancs,
argentés et noirs. A Chantilly on a conservé pendant longtemps
Biche et son faon.
une race de cerfs à tête blanche, mais on ne trouve plus guère
de cerfs blancs que dans les parcs d'Allemagne.
Le cerf est naturellement doux et timide; il craint l'homme et,
s'il le blesse, c'est presque toujours par accident; mais les
rencontres imprévues sont très dangereuses, car le cerf présente
toujours sa tête aux obstacles qu'il rencontre et rien n'égale la
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE. 121
force et la rapidité avec laquelle il s'élance. J'en sais quelque
chose moi-même, ayant été gravement blessé par un cerf qui,
m'atteignant d'un coup d'andouiller, m'enfonça le crâne et m'em-
porta l'espace de deux cents pas avec une rapidité dont je me
souviendrai toujours. La facilité avec laquelle il me portait au
bout de ses bois m'a fait comprendre l'aisance avec laquelle ces
animaux portent ces beaux bois, dont le poids nous étonne
souvent.
A défaut de ses bois, ses pieds de devant sont aussi pour lui
une défense dont il se sert avec avantage. Quelque doux et
timide que soit le cerf, il est dangereux de l'apprivoiser; il
devient très familier et finit par offenser.
Le cerf vit généralement de trente-cinq à quarante ans ; mais
il atteint rarement cet âge dans nos forêts. Quand le cerf veut
écouter, il lève la tête, dresse les oreilles et entend de fort loin.
Quand il entre dans une taille où il n'a pas la tête couverte, il
s'arrête, regarde de tous côtés et cherche ensuite le dessous du
vent pour sentir s'il n'y a pas quelqu'un aux environs, en em-
buscade. Il est d'ailleurs d'un naturel curieux ; lorsqu'on le siffle,
il s'arrête, regarde fixement et, s'il ne voit ni armes ni chiens, il
continue sa marche d'assurance et passe son chemin fièrement
et sans peur. Le cerf est délicat sur le choix de sa nourriture ;
il mange lentement et, lorsqu'il a viande, il cherche à se reposer
pour ruminer à loisir. Il ne boit guère en hiver et encore moins
au printemps : l'herbe tendre et surchargée de rosée lui suffit;
mais dans les chaleurs et sécheresses de l'été il va boire aux
ruisseaux, aux mares, aux fontaines, et dans le temps du rut il
est si échauffé, qu'il cherche l'eau partout, non seulement pour
apaiser sa soif brûlante, mais aussi pour se baigner et se
rafraîchir le corps. Il nage parfaitement bien.
Le cerf est sujet à avoir entre cuir et chair de gros vers blancs
qui lui causent de grandes démangeaisons et qui au printemps,
cheminant entre cuir et chair, finissent par s'amasser sous la
£orge, où l'on en trouve souvent des paquets gros comme les
deux poings. On prétend qu'ils s'en guérissent en mangeant en
122 LA CHASSE A COURRE.
mars le bouton du jeune bois et en avril les blés verts. La biche I
est également sujette aux taons. Le cerf a souvent aussi suri
le corps des tiques de bois, des poux de cerf et des mouches.]
plates. Il a dans le cœur un cartilage plat et allongé qui a i
parfaitement la forme d'une croix et qu'on appelle croix âe\
Les vieux cerfs sont des animaux tranquilles et paresa
aiment à être seuls ; quelquefois ils s'accompagnent plusk
même âge, mais ils se tiennent ordinairement éloigné*^
jeunes cerfs et ne vont guère avec les biches que le te
rut; cependant, s'il y a peu de cerfs, on trouve encore
souvent un gros cerf avec une harde de biches. Un gros \
passe souvent l'été dans un buisson, dans lequel il s'est
au printemps pour faire sa tête; il ne fera toutes les nuits qJ0t
chemin nécessaire pour aller chercher sa nourriture et évflfh
les berges escarpées, les fossés profonds, tout ce qui lui odîfr
sionnerait quelque effort pénible. Il aime les bois touffu* il
serrés, les côtes et les coteaux; mais il ne pénètre guère dm
les fourrés que par des faux-fuyants ou des coulées qui ne M
présentent pas d'obstacles.
Le cerf est neuf mois dans le ventre de sa mère et, quoique réjffr
que de sa naissance ne soit pas toujours aussi régulière qu'atk
dit, cependant il en sort ordinairement en mai, revêtu d'une pM
régulièrement tigrée, qu'il conserve pendant cinq ou six mois et
qu'on appelle livrée. Pendant tout l'été, il suit habituellement sa
mère, qui l'allaite, le cache et le défend. Il s'appelle alors fam;
à six mois on l'appelle Aatre, à cause de son mauvais poil et de
sa triste mine. A huit ou dix mois, il lui pousse sur la tête des
excroissances ou bosses garnies de poil et à un an il commence à
lui pousser de petites cornes, qu'on appelle dagues. Ses bois
faits, c'est-à-dire à l'automne, il commence à s'appeler daguet et
au mois d'avril ou de mat suivant, ayant deux ans faits et entrant
par conséquent dans sa troisième année, ses dagues tomberont
et il fera sa deuxième tète : mais il ne lui poussera encore sou-
vent que des dagues ; seulement il sera visible aux meules que
ses premiers bois sont déjà tombés et que ceux qu'il porte sont
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE.
123
îjà des bois repoussés. Il se peut aussi, et cela arrive souvent,
j'au lieu de dagrues ou d'une seconde tète avec un seul an-
Grand vieux cerf pendant le rut.
douiller (tête qui est assez rare) il lui pousse deux ou trois
andouillers à chaque branche. A quatre ans, il devient cerf à sa
troisième tête, à cinq ans cerf à sa quatrième tête, à six ans il
124 LA CHASSE A COURRE.
cesse d'être jeune cerf et prend le nom de dix cors. Il croit e:
grossit jusqu'à l'âge de huit à neuf ans, où il est dit vieux ctrj:
c'est alors qu'il est le plus bel animal de nos forêts. Il derât
ensuite grand vieux cerf.
La biche s'appelle aussi faon dans son enfance, puis jeu&
biche, biche, grande biche, et biche bréhaigne lorsque l'âge 1:
rendue stérile.
Les bosses qui poussent sur la tête du haire sont la base <fc
la tête du cerf et prennent par la suite le nom de pivots: cts
élévations osseuses se prolongent lorsque le cerf a un an accofr
pli, mais ces prolongements sont sanguins et presque cartilagi
neux. Cependant l'extrémité inférieure prend de la consistance
et s'ossifie progressivement jusqu'à l'extrémité supérieure; es
dagues restent couvertes d'une peau veloutée, parsemée à
veines ramifiées, jusqu'à ce qu'elles aient acquis une consistant
et une maturité parfaites ; alors les veines meurent et s'atropbknr.
et le cerf se dépouille de cette peau en se frottant contre les
aibres. Vers le mois de mai suivant, quand le cerf entre dans sa
troisième année, ces dagues se détachent du pivot, comme je U
dit tout à l'heure, et tombent; alors le cerf pousse sa second
tête, souvent ornée, comme je l'ai dit aussi, de trois ou quatre
branches, que l'on nomme andouillers; mais comme il arrive aussi
très souvent qu'il n'a que des dagues, celles-ci se distinguent &
celles du daguet par les meules, espèce de bourrelet qui entoutf
le pivot, et qui indiquent qu'un premier bois s'est déjà détaché;
au daguet, les dagues n'étant que le prolongement du pivoî.
les meules sont à peu près nulles. A quatre ans, sa tète peut
porter sept ou huit andouillers (sur les deux branches, l'esté
mité de la perche comptant) et il est dit cerf à sa troisième tête
A cinq ans, il fait une quatrième tête qui peut porter dix m
douze andouillers, la perche se divisant souvent en deux an
douillers, mais qui ne forment pas encore empaumure (en fonw
de main) et qui ne sont pas renversés. A six ans, il est dit dix cors
jeunement et peut porter douze, quatorze et seize andouillefr
l'empaumure se formant alors seulement de trois andouillers^ 1 "
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VENERIE.
125
commencent à se renverser. A sept ans, il fait une nouvelle tête
qui peut porter de quatorze à vingt andouillers, bien ou mal
semés. L'année d'après, il devient vieux cerf ou dix cors, et alors
sa tète varie et n'admet plus ni règle ni mesure quant au nombre
■p*t ?
Quatrième tête poussant ses refaits.
des andouillers ; maïs le merrain
est toujours plus gros et plus haut,
les andouillers plus longs et plus
\ gros, les meules plus fortes et les
• pivots plus courts.
Le nombre d'andouillers ne donne qu'une connaissance sus-
pecte, mais la tête en fournit d'autres plus sûres : c'est par le
plus ou moins d'abaissement du contour de la meule, le plus ou
moins de force et d'élévation des pierrures, des perlures, de la
grosseur du merrain, de la profondeur des gouttières (tracées
i2Ô LA CHASSE A COURRE.
par les veines), de la largeur de l'empaumure, enfin par l'empla
cernent des andoùillers, leur longueur et leur force. La grossear
du merrain varie moins, parce qu'elle dépend de celle du pivot.
qui est un os et ne varie que pour grossir avec l'âge. La gros
seur du merrain et de la meule est donc relative à celle du pivot
et celle-ci doit toujours servir à rectifier ou à confirmer le ]m-
ment que Ton a porté par l'observation des meules et du mer-
rain. Plus le cerf vieillit, plus le pivot augmente, plus la menk
s'approche du massacre, plus les pierrures grossissent, se de
tachent et sont raboteuses, plus les gouttières s'agrandissent et
deviennent creuses, enfin plus l'empaumure s'élargit et devient
creuse.
La tête du cerf est composée des meules ou couronnes qui
posent sur le pivot. Il en sort la maîtresse branche, que l'on
nomme merrain; elle est accompagnée auprès de la meule du
premier andouiller, dit de massacre, qui sort en avant et dont
la pointe est recourbée en montant; c'est le plus long des
andoùillers. Au-dessus et tout auprès, est le surandouiller.
beaucoup plus court généralement. Le troisième andouiller se
nomme chevillure; il est ordinairement plus long que le suran-
douiller. Quelquefois il y a le long du merrain un quatrième
andouiller, que l'on nomme trochure. L'empaumure termine le
merrain ; elle ressemble imparfaitement à la paume de la main et
il en sort plusieurs doigts ou andoùillers, qui varient comme
nombre depuis deux jusqu'à huit, quelquefois même plus, mais
c'est rare.
Une tête de cerf garnie de beaucoup d'andouillers se nomme
une tète bien chevillée, surtout si le merrain est gros et les
andoùillers bien nourris. Pour compter le nombre d'andouillers
dont la tête est garnie, suivant les règles de la Vénerie, on
compte toujours- comme existants les trois andoùillers qui
doivent se trouver sur le merrain, qu'ils y soient ou non; on
compte l'empaumure la plus garnie d'andouillers, en y ajoutant
les trois andoùillers de merrain et on double ce nombre. Ainsi
supposons l'empaumure la plus garnie ayant quatre andoùillers;
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE. I27
n y ajoute les trois du merrain, ce qui fait sept; on double,
e qui donne quatorze, et on dit que le cerf porte quatorze.
seulement si le cerf n'a pas un nombre égal d'andouillers
es deux côtés, on dit qu'il porte quatorze mal semés. Un
ndouiller compte du moment qu'on peut y suspendre une
rompe.
Par suite d'accident ou de jeu de la nature, la tête du cerf
>eut ne suivre aucune . de ces règles et les deux côtés ne se
essembler aucunement. On dit alors qu'il a une tète bizarre, et
'on rencontre des bizarreries de toute espèce. Ces têtes ne
peuvent être jugées que par les pivots, les meules, les perlures
et les gouttières. Elles proviennent souvent de vieillesse ou de
blessures pendant le refait, ou de suites de fourbure, ou de pivots
endommagés par accident.
Les cerfs perdent leur tête à la fin de l'hiver; les gros
commencent en février et en mars. Les jeunes cerfs mettent gé-
néralement bas plus tard, quelquefois seulement à la fin d'avril.
La tête du cerf est entièrement poussée et parfaite en quatre
mois et demi ou cinq mois.
Deux ou trois jours après que le cerf a mis bas, il se forme
une pellicule qui couvre le pivot et l'on dit alors qu'il a les meules
recouvertes. Il s'élève ensuite sur chaque pivot une proéminence
arrondie; elle se prolonge et se divise; on dit alors qu'il a
dénoué quatre. Quelque temps après, cette division s'accentuant,
il se forme deux branches, l'une directe, l'autre horizontale ; on
dit alors qu'il porte quatre. La maîtresse branche se prolon-
geant, il se forme une nouvelle bifurcation : c'est le suran-
douiller; on dit alors qu'il porte six. Cela arrive vers le i5 avril.
Le travail marche ensuite assez rapidement. Vers mi-mai, il a
mi-tête, et il est dit porter grand huit, parce que la chevillure
est bien séparée du merrain. Le refait a alors environ de o",25 à
o",28 de long. Au commencement de juin, l'empaumure commence
à se dénouer et est tout à fait séparée à la fin de juin, où le cerf
est dit alors avoir tout allongé. La tête est alors encore environ
trois semaines à acquérir sa parfaite maturité. Le refait, qui est
128 LA CHASSE A COURRE.
recouvert d'une peau délicate d'un gris noir souvent onde de
blanc, avec ramifications de veines qui forment les gouttières
veloutées d'un poil fin et court, ne paraît d'abord intérieurement
qu'un amas de sang noir et épais. Il devient ensuite cartila-
gineux, puis osseux, en commençant par les extrémités infé-
rieures.
Les cerfs les plus avancés ne touchent au bois que vers le
20 juillet; les plus vieux retardent de quelques jours pour par-
faire leur production; sauf les daguets, ils ont tous touché au
bois à la fin d'août. La tête ayant acquis toute sa maturité, h
peau qui l'enveloppe se dessèche, les veines meurent et s'atro-
phient et le cerf, pour se débarrasser de cette peau, frotte sa
tête sur des branches légères, puis sur des arbres, mais il
recherche ordinairement ceux que ses efforts peuvent faire
fléchir. La peau tombe par lambeaux, la tète apparaît blanchâtre,
puis rougit et se rembrunit, et quand elle est toute dépouillée,
on dit que le cerf a frayé bruni. Je crois que les têtes sont plus
ou moins brunes suivant la nature des arbres contre lesquels ils
se frottent et suivant la force de leurs perlures, qui, étant plus
grosses, retiennent plus du vernis colorant provenant de la sève
des arbres. Les perlures sont les inégalités qui sont le long du
merrain, et les pierrures celles qui sont autour de la meule.
Toutefois la question des causes de la couleur des têtes est
encore peu élucidée à mon avis; elle dépend beaucoup des forêts
et des gagnages, et cependant dans le même pays, dans la même
forêt, elle n'est pas toujours la même.
Le bois du cerf, qui a quelque analogie avec le bois par sa
ramification, n'en a pas la texture. Il est compact et pas veiné;
on peut le scier, le limer, mais on ne peut pas le couper; il se
calcine et ne brûle pas ; on peut donc le considérer comme une
production osseuse.
Le rut est le temps pendant lequel les cerfs sont en amour;
c'est une effervescence que l'animal éprouve naturellement et
sans être excité par la présence des biches; aussi les cerfs
enfermés dans des parcs sans biches n'en entrent pas moins
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE. I2Ç
en rut au temps marqué. Salnove dit qu'une biche qui se trou-
verait être en rut hors de l'époque de celui des cerfs n'en
serait pas moins saillie, et il a raison, puisqu'on voit quelque-
fois des biches avoir un petit à l'automne ou au moins à la fin
de l'été.
Les cerfs commencent à ressentir les approches du rut dès la
fin d'août; ils font plus de chemin, dans leurs nuits, vont d'un
buisson à l'autre, deviennent inquiets, jettent des cris pendant la
nuit, ce qu'on appelle en vénerie raire, grattent la terre avec
leurs pieds, frottent leur tète contre les cépées, mettent le nez
à terre le long des routes, traversent les plaines, des rivières
mêmes considérables, souvent en plein jour, et abondent quelque-
fois dans les grandes forêts sans qu'on puisse imaginer d'où ils
arrivent. Il s'établit un rut dans l'endroit où il y a des biches ;
alors les cerfs n'ont plus de repos, ils ne mangent plus, de-
viennent furieux dès qu'ils aperçoivent un autre cerf. Allant
souvent le nez haut, ils éventent de fort loin les objets et se
portent dessus. Lorsqu'il a assemblé quelques biches, le cerf les
mène généralement dans un endroit un peu découvert, pour qu'un
autre cerf ne vienne pas les lui enlever. S'il survient un cerf à
peu près de la même taille, le combat s'engage tout de suite ;
leurs têtes s'emmêlent quelquefois si bien qu'ils ne peuvent les
dégager; on en a souvent trouvé de morts dans cette position.
Lorsque le cerf assaillant a eu l'avantage sur son adversaire, il
s'empare de ses biches jusqu'à ce qu'un autre, plus fort que lui,
vienne aussi l'attaquer et le vaincre; aussi ce sont toujours les
plus gros cerfs qui sont les maîtres du rut, et les défauts de la
consanguinité se trouvent naturellement combattus par les avan-
tages de la sélection. Les cerfs commencent à raire aux appro-
ches du coucher du soleil ; le tapage, qui dure toute la nuit, ne
se calme que le matin, et les cerfs sont alors souvent tellement
fatigués, qu'ils restent sans faire un mouvement et qu'on les
croirait endormis. Dans le fort du rut, ils se mettent quelquefois
à raire sur le haut du jour; les vieux raient d'une voix phis forte
que les jeunes. Dès que le jour paraît, le cerf se retire dans le
I.^O LA CHASSE A COURRE.
fourré avec sa harde de biches, mais il se couche rarement pré
d'elles et va se reposer dans un fourré à une certaine distance.
Le soir, il rejoint sa harde en signalant son arrivée par un cri
perçant. Pendant tout ce temps, les cerfs ont une odeur très
forte et on les sent même longtemps après qu'ils sont passes:
leur cou grossit, le poil du ventre se rembrunit et celui du cou
s'allonge et raidit.
Le rut dure à peu près un mois et finit vers le 10 octobre, et
n'est guère, dit-on, que de quinze jours pour chaque cerf. II
commence par les vieux, et sur la fin d'octobre il n'y a plus
guère que les daguets, qui ont commencé les derniers.
Le rut est un très mauvais temps pour fajre travailler les
limiers, que l'odeur des cerfs dégoûte à cette époque; leschiens
courants ne les chassent pas non plus volontiers, ni sagement
et sont fort disposés à faire change. Après le rut, les cerfs
retournent aux buissons, pour se refaire avant de rentrer au
forêts.
Les cerfs sont sujets à changer souvent de demeure, suivant
les saisons. Pendant le rut, ils sont toujours en route; mais en
somme ils sont plus souvent à fond de forêt, où ont lieu les
assemblées des biches, et à cette époque un valet de limier doit
être très méfiant dans son rapport, car les animaux vident con
stamment les enceintes.
Pendant le mois de novembre, les gros cerfs sont générale-
ment ensemble dans les grands forts et séparés des jeunes cerfs
et des biches; ils se tiennent alors dans les cantons de brandes
et de bruyères, dont ils mangent les pousses et la fleur, ou en
plaine la nuit dans les pays de pommes et de betteraves, pour
manger des unes et des autres, donnant aux tas qu'ils boule-
versent. En décembre et en janvier, ils accompagnent les biches
et se tiennent avec elles dans les grands forts ou coteaux à
l'abri du vent et de la neige; ils mangent les saules, genêts,
cressons et le lierre qui monte aux arbres, la faîne, le gland
qu'ils ramassent par terre. En février et au commencement de
mars, ils se tiennent plutôt sur le bord des forêts pour aller
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE. l.3l
aux gagnages; les jeunes cerfs y restent, mais les vieux, sen-
tant qu'ils vont mettre bas leurs têtes, gagnent les buissons,
qui leur seront commodes tant pour les gagnages que pour la
tranquillité.
En avril et mai, ils restent dans les buissons, près des jeunes
tailles où ils font leur viandis sans boire, à cause de la rosée qui
couvre les feuilles et les herbes. En juin, juillet et août, ils sont
dans leur plus grande venaison, parce qu'ils ont abondance de
gagnages et du grain dans les plaines. On en prend alors facile-
ment connaissance aux endroits où il y a de Peau, car la grande
chaleur, jointe à la nourriture du grain, leur donne grand soif.
Ils s'y vautrent volontiers.
On a remarqué dans presque tous les équipages qu'au mois de
mars, lorsque les cerfs mettent bas leurs têtes, les chiens les
plus sûrs et à cette époque en complète curée sont sujets à
chasser biche et à commettre des fautes qu'ils n'auraient pas
commises les mois précédents. 11 est à présumer qu'à cette
époque il se fait un changement dans l'odeur des cerfs.
II
DE LA MANIÈRE DE DÉTOURNER LE CERF ET DE LE JUGER
ET DES MANŒUVRES DU VALET DE LIMIER.
Nous venons de décrire le cerf, ses mœurs et ses habitudes;
nous allons maintenant décrire sa chasse et, pour cela, commen-
cer par indiquer ce que Ton doit faire pour le détourner, Je
juger et préparer son attaque et sa chasse.
Les cerfs, comme presque tous les animaux sauvages, se
relèvent le soir pour aller chercher leur nourriture pendant la
nuit et rentrent avant le jour dans leurs enceintes pour y passer
la journée. Il faut donc que celui qui veut les détourner se rende
à sa quête peu après la rentrée de ces animaux, afin de les rem-
bûcher avec son limier. Toutefois il ne doit pas commencer sa
quête trop tôt, parce que le cerf pourrait le voir ou avoir vent
l32 LA CHASSE A COURRE.
de lui et de son chien, n'être pas encore remis ou s'être mis au
ressui sur le bord de l'enceinte avant de se rembucher; alors il
fuirait et serait beaucoup plus difficile à rembucher.
Mais, avant d'indiquer les manœuvres que doit faire le valet
de limier, il nous faut indiquer comment il jugera ces animaux,
et pour cela, parler du pied, des fumées, des portées, etc.. et
surtout des allures.
L'ensemble des parties qui composent le pied du cerf est connu
sous la dénomination de pied, de même que l'empreinte qu'il
laisse sur la terre. Le pied du cerf est composé des pinces, de
la sole, du talon, des côtés et des os. Les pinces sont les deui
extrémités antérieures du pied ; la sole le dessous du pied ren
fermé entre les pinces, le talon et les côtés; le talon, l'extrémité
postérieure du pied; les côtés en sont la circonférence; les os
en sont les ergots; pris séparément, ils s'appellent os, et
réunis, la jambe. On appelle allure la distance de l'empreinte
des pieds de devant à celle des pieds de derrière, la distance
entre ces empreintes en largeur et la façon dont elles sont croi
sées ou droites.
Maintenant ces connaissances varient énormément suivant la
nature des cerfs, les pays où ils habitent et la qualité du sol.
Les règles en sont donc très difficiles à donner et ce n'est guère
dans un Traité de Vénerie qu'on peut indiquer des règles cer-
taines. Dans un pays pierreux, les pieds sont plus ronds, les
pinces et les talons plus usés, tandis que dans un pays de sable
ou marécageux le pied se conserve mieux, la corne se renfle,
les côtés ne s'usent pas et restent tranchants, de façon que le
pied paraît plus étroit; on ne voit souvent que des égratignures
et au premier coup d'œil on peut prendre un pied de cerf pour
un pied de biche.
En règle générale, le cerf diffère toujours de la biche par le
pied et les allures. Le cerf a toujours le pied plus rond et plus
de talon; les côtés et les pinces sont plus arrondis et le talon
plus gros et plus nourri ; la biche a les pinces pointues, le pied
long, le talon resserré, et les côtés tranchants. Le cerf a la jambe
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE. l33
bien tournée, c'est-à-dire que les os sont tournés en dehors et
gros à proportion de son âge. La biche au contraire a les os
menus et tournés en dedans et piquant perpendiculairement. La
façon de marcher est aussi différente; le cerf croise ses allures
alternant droite et gauche, tandis que les allures de la biche
sont toujours en ligne droite, sauf le cas où elle est pleine ;
comme elle est généralement pleine vers la fin de la saison
de chasse, il faut s'en méfier à cette époque. Le cerf, marchant
d'assurance, met les pieds de derrière en avant, sur ou derrière
les pieds de devant suivant son âge, tandis que la biche se
méjuge, c'est-à-dire que les empreintes du pied de derrière
varient constamment de position par rapport à celui de devant.
Les gros cerfs, allant d'assurance, ont toujours les pinces fer-
mées, et si les jeunes cerfs ont quelquefois les pinces de devant
ouvertes, celles de derrière sont toujours fermées, tandis que les
biches ont toujours toutes les pinces un peu ouvertes. Quant
aux biches brehaignes, on peut souvent s'y tromper; cependant
en faisant suite on verra qu'elles se méjugent de temps en temps
et que les os sont mal tournés et plus petits que ceux d'un cerf
qui aurait la même grosseur de pied.
Une des meilleures observations pour l'âge du cerf est basée
sur la différence du pied de derrière avec celui de devant. Cette
connaissance ne dépend ni de l'espèce, ni du terrain, ni du pays.
Ainsi, on trouve un cerf qui a beaucoup de pied, les allures
grandes et même les côtés usés; si le pied de derrière est à
peu de chose près aussi gros que celui de devant, ce sera un
cerf de grande espèce, mais qui sera au plus à sa troisième ou
quatrième tête; mais un mauvais pied de cerf, n'ayant même que
deux semelles d'allures, sera dix cors s'il y a une grande diffé-
rence entre le pied de derrière et celui de devant.
Le daguet est celui qui a le pied le plus semblable à celui de
la biche; toutefois il est plus rond, moins long et a plus de lar-
geur de talon; il a la jambe et le pied mieux faits, le pied de
devant un peu plus grand que celui de derrière, les pinces
moins pointues ; son pied de derrière outrepasse un peu le pied
1*>4 LA CHASSE A COURRE.
de devant; les os tournés en croissant sont éloignés du talon
d'au moins deux travers de doigt. Ses allures ne sont pas
encore bien réglées.
La seconde tète a la pince encore plus large et moins pointue
que le daguet. le talon plus plein et plus large: il est un peu
moins haut-jointé ; ses allures commencent à se croiser, elles
sont encore un peu irrégulières, mais plus longues; son pied de
derrière, plus fermé, est généralement posé sur l'empreinte du
pied de devant, et plutôt sur les pinces que sur le talon.
La troisième tête augmente encore les différences signalées
entre le cerf et la biche ; son pied de devant est plus rond et
plus large, ainsi que ses talons ; les os sont plus arrondis et se
rapprochent davantage du talon: le pied de derrière, qui esta
peu près fermé, commence à être bien plus petit que celui de
devant: ses allures sont aussi bien plus longues et plus
larges.
Il en est de même de la quatrième tête et la différence entre
le pied de devant et celui de derrière est bien plus grande ; les
os se rapprochent du talon, qui s'élargit toujours; ses allures
sont plus longues et surtout plus larges, par suite de l'épais-
seur de son corps : enfin son pied de derrière retarde un peu et
tend à couvrir celui de devant.
Les différences augmentent encore pour le dix cors jeunement.
Le pied de devant n'est jamais ouvert; la sole et le talon sont
plus larges, les os plus ronds, le pied de derrière est tout à fait
sur celui de devant et il commence à attirer la terre en marchant
avec les pinces du pied de devant, ce que ne font jamais les
jeunes cerfs.
Le dix cors a les pinces et les côtés usés, les pinces toujours
fermées. 11 marche généralement plus sur les pinces que sur le
talon; la sole et le talon sont presque de niveau; les os gros et
arrondis s'éloignent l'un de l'autre et se rapprochent du talon:
on peut à peine y placer le travers du pouce; ses allures sont
longues et éloignées de deux semelles et demie d'un pied ordi-
naire. Les pinces du pied de derrière sont presque toujours
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE. 1.15
placées sur le talon du pied de devant, quelquefois même ils le
touchent à peine.
Le vieux cerf a tous les caractères du dix cors; mais ils sont
encore plus marqués, suivant sa vieillesse, car plus il avance en
âge. plus ses os se rapprochent du talon, plus son pied de
devant s'allonge et s'use et plus encore son pied de derrière se
rétrécit et arrive à se placer très en arrière de celui de devant,
quelquefois à plus de o*,k>.
11 est enfin d'autres connaissances que doit posséder le valet
de limier pour cerf et qui lui servent à reconnaître l'animal dont
il fait suite : ce sont les fumées, les foulées, les portées, le frayoir
et les abattures.
Les fumées sont les fientes du cerf et de la biche.
Les foulées sont les empreintes que laisse le pied du cerf dans
l'herbe ou dans les feuilles sous bois.
Les portées sont les branches que le cerf touche et plie avec
sa tète dans la coulée par laquelle il se rembuche.
Le frayoir est la partie dépouillée des jeunes baliveaux contre
lesquels les cerfs ont frotté leur tête pour la dépouiller de sa
peau.
Les abattures sont les plantes, bois sec, fougères cassés ou
abattus par le cerf, quand il traverse un fourré.
Pour les fumées, on faisait grand cas de cette connaissance
autrefois en vénerie, parce qu'on chassait le cerf tout l'été, et
qu'à cette époque de Tannée les revoirs sont souvent nuls, les
cerfs souvent séparés des hardes et enfin les fumées très
variables; mais maintenant qu'on ne chasse plus cerf passé mai.
ces connaissances sont bien moins utiles, car en hiver, si l'on
fait suite d'un cerf, il est sûr que, s'il n'est pas avec une harde,
il aura passé mainte fois sur le passage d'une harde, et il fau-
drait être souvent bien hardi pour affirmer que les fumées ren-
contrées sont bien celles du cerf que vous suivez au milieu de
terrains foulés par les hardes qui y habitent. D'ailleurs ces con-
naissances sont souvent, je crois, trompeuses l'hiver; aussi
autrefois ne s'occupait-on jamais des fumées avant mai, et si les
l36 LA CHASSE A COURRE.
fumées ont pu faire courir quelques cerfs dont on n'avait pas
revu, elles ont fait souvent donner des biches pour des cerfs et,
à mon avis, les fumées ne peuvent guère servir que pour indiquer
à un valet de limier qu'il y a un gros cerf dans un canton ou
une harde. Je ne m'étendrai point sur ce sujet.
Quant aux foulées, empreintes des pieds sur l'herbe, les feuilles
ou la mousse, en y mettant légèrement les doigts, on peut
reconnaître la largeur du pied et surtout la direction qu'a prise
l'animal, le temps où il a passé par la rosée qui est ressuyée,
l'herbe restée abattue et non encore relevée, les légères toiles
d'araignée qui se mettent au bout de peu de temps dans les
empreintes; ces connaissances sont utiles. Il y a des valets de
limier qui savent exactement vers quelle heure l'animal a passé,
en voyant l'empreinte du pied dans l'herbe.
Quand un cerf entre dans un taillis, il ouvre, écarte et pousse
en avant les pointes des branches vertes ou sèches à droite et à
gauche et touche les feuilles du côté où il va, ce dont on peut
généralement s'apercevoir pendant trois ou quatre jours, à moins
de pluie ou de grand vent. Les portées ne doivent pas être
formées au-dessous de 2 mètres, autrement on risquerait de
prendre pour une portée de jeune cerf celle d'une biche; mais
quand les portées sont hautes et larges, on doit les juger d'un
dix cors. Toutefois c'est encore une connaissance dont il faut
beaucoup se méfier, car si par un jour de mauvais revoir vous
faites suite d'une grande biche pesante dont vous ne pouvez pas
bien revoir le pied et qu'elle rentre par un faux-fuyant où est
rentré il y a un jour ou deux un dix cors, les portées sont
restées si le temps a été favorable, et si vous vous en rapportiez
à cette connaissance, vous donneriez la grosse biche pour un
dix cors.
Le frayoir est plus sûr; mais, comme il ne dure guère que
quinze jours et n'a lieu qu'en juillet, il est à peu près inutile
d'en parler, sauf pour le cas où l'on forme un limier. Les gros
cerfs choisissent les plus gros baliveaux, où ils donnent souvent
et enfoncent leurs andouillers. Par la hauteur du frayoir on peut
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE. ÎO?
souvent juger du corsage et de la tête du cerf; toutefois dans
les forêts de sapins les cerfs touchent souvent au bois toute
Tannée, et cette connaissance peut servir.
Les abattures, plantes, bois sec, fougères abattues par le cerf
en traversant une forêt, indiquent assez souvent sa hauteur et
sa force; sa grosseur est indiquée par la largeur du chemin
qu'il a fait; enfin sa hauteur est jugée par celle des plantes
cassées et le sens de sa marche par le sens où sont tombées les
plantes ou branches cassées ; les jours de rosée on peut juger
à quelle heure a peu près l'animal à passé; enfin si l'animal a
rongé l'écorce d'un arbre et que les morsures des dents soient
dans le sens de la longueur du tronc, on peut être sûr que c'est
une biche, le cerf ne mordant jamais les troncs qu'en travers, à
cause de ses bois ; de plus à la reposée, si l'animal a uriné, c'est
un cerf, celui-ci le faisant toujours où il va reposer et la biche
ne le faisant jamais.
Maintenant que nous avons vu quelles sont les connaissances
spéciales que doit avoir le valet de limier et avant de décrire
les manœuvres qu'il doit faire pour détourner un cerf, disons
d'abord ce qu'il doit faire pour être sûr du rerabuchement, c'est-
à-dire pour être sûr que son animal est bien entré dans l'enceinte
où il le croit rentré.
En effet, souvent le cerf ne fait que se présenter à une coulée, y
entrer de quelques pas et, revenant sur ses voies, il longe ensuite
la route ou la plaine pour se rembucher dans une autre enceinte
ou retourner d'où il vient; c'est ce qu'on appelle un faux rembu-
chement. Pour s'en assurer, arrivé à la coulée, il faut laisser
aller son limier une longueur de trait dans le bois et s'arrêter
court; si le limier se tient bien ferme, le trait bien tendu, c'est
la preuve que la voie va devant lui et qu'il ne demande qu'à la
suivre. Vous raccourcissez alors le trait, vous caressez votre
chien, vous brisez haut et bas, vous ramenez le limier sur le
contre-pied, où vous l'arrêtez en le caressant. S'il est grand
matin, vous ne le laissez pas pénétrer dans l'enceinte plus d'une
longueur de trait, car le cerf pourrait être au ressui sur le bord
l38 LA CHASSE A COI/R1Œ.
Je l'enceinte, et en vous entendant il fuirait: mais si au rerabu
chement le limier ne tire pas bien ferme sur son trait, il faut ne
pas bouger et, en l'excitant tout doucement, attendre qu'il se
rabatte et tienne le trait bien tendu. Si, après avoir tâté toutes
les coulées, il ne trouve pas sa voie, il faut le faire retourner
sur ses voies, le laissant faire à droite ou à gauche le long de la
route et de la plaine ou au contre-pied, jusqu'à ce qu'il se
rabatte. Si c'est au bord d'une plaine que le limier s'est rabattu
et que vous ne soyez pas sûr du rembuchement, il faut envelor>
per les derrières, c'est-à-dire tracer derrière les brisées un cercle
de soixante à quatre-vingts pas. Si le cerf a fait un faux rembu
chement, votre chien s'en rabattra d'autant plus aisément que.
les voies du cerf qui s'en va sont plus chaudes que les premières,
attendu qu'il aura séjourné probablement quelque temps sur
le bord du bois. Telle est la manœuvre du rembuchement.
Maintenant voyons ce que doit faire le valet de limier, depuis
son départ de la maison, pour arrivera rembucher un cerf et a
le détourner.
Parti dès le lever du soleil, il prend les grands devants de sa
quête, c'est-à-dire qu'il fait les plaines, routes et chemins qui
l'entourent et la séparent des quêtes voisines. Il caresse son
chien, l'excite tout doucement, le laisse libre s'il est sûr de lui.
Son chien quêtant et tâtant toutes les rentrées, se rabat bientôt:
il reconnaît dune ou de plusieurs biches, il raye de son pied les
empreintes des pieds des animaux par devant et passe outre. L'n
peu plus loin, son limier se rabat' de nouveau; il ne peut rien
revoir à cause du terrain, il suit quelques longueurs de trait
et, arrivant à un endroit plus favorable, il revoit d'un jeune cerf.
Il retourne alors à l'endroit où le limier s'était rabattu et casse
une branche et continue sa quête s'il ne veut pas travailler ce
jeune cerf. Le limier se rabat de nouveau, il revoit d'un cerf dont
le pied lui parait fort, les pinces usées, le talon large et la jambe
près du talon; les allures lui paraissent bonnes; il le travaille
alors et, le menant jusqu'à une bonne enceinte, s'assure du rem-
buchement de la façon que nous avons indiquée plus haut.
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VENERIE. i3y
Le cerf étant bien rembuché et brisé haut et bas, il ne faut
pas perdre de temps pour le détourner. On prend les devants,
c'est-à-dire qu'on fait par les routes le tour de l'enceinte où on
la rembuché. Si le cerf passe une de ces routes, si le travail est
fait avec soin et le limier bon. celui-ci doit s'en rabattre et
annoncer ainsi qu'il est sorti. Si le chien ne se rabat pas, c'est
que le cerf est resté et par conséquent détourné ; mais on fera
bien dans ce cas de refaire le tour de l'enceinte une seconde fois
dans le sens opposé et de s'assurer de nouveau de la voie au
rembuchement, car c'est là le danger; les faux rembuchements
ont fait faire plus d'un buisson creux. Après avoir fait les
devants une seconde fois, le valet de limier se prépare, si
l'enceinte est très grande, à raccourcir son animal, mais seu-
lement dans le cas où l'enceinte est très bonne, c'est-à-dire
fourrée. Raccourcir un animal en faisant le bois, c'est faire dans
l'enceinte un chemin qui la coupe en deux ou la rétrécit d'un
tiers pour que. l'enceinte étant plus petite, l'attaque soit plus
facile; mais il ne faut pas laisser le limier suivre plus d'une
demi-longueur de trait, de peur d'inquiéter le cerf. Comme on
a souvent, dans ce cas, de la peine à en revoir, les foulées, les
portées et les abattures sont une ressource dont il faut user.
Si l'on trouve une voie, on examinera si elle rentre dans la
partie de l'enceinte où vous avez brisé votre cerf; si elle en sort,
il faudra en prendre les devants et refaire votre première enceinte
pour vous assurer que l'animal n'aurait pas été inquiété par
votre travail et n'en serait pas sorti. Si vous ne trouvez pas
votre animal sorti, vous devez croire qu'il est détourné dans la
seconde partie de l'enceinte.
Ce que je viens de décrire du travail « ce ne sont que les roses
du métier. Presque toujours une multitude d'événements ou de
contrariétés viennent entraver votre quête. Si le cerf travaille
est accompagné, comme cela arrive très souvent, de biches et
de jeunes cerfs qui entrent et sortent de l'enceinte, ceux-ci
peuvent avoir effacé les voies de votre cerf en passant
dessus. S'il y a plusieurs gros cerfs rembuchés. il faut se
14O LA CHASSE A COURRE.
demander s'ils sortent tous ensemble de l'enceinte ou s'il
en reste.
Pour s'assurer si le cerf est sorti avec les autres, il faut donc
faire une seconde enceinte, parce que, si les animaux en sortent
encore, on peut trouver quelques éclaircissements à leur sortie.
Si rien ne passe, c'est que tous les cerfs sont restés dans les
deux enceintes. Il faut alors s'assurer de l'endroit où est resté
le cerf que l'on travaille, s'il est seul ou s'il est avec les autres.
Pour cela on revient à la route qui sépare les deux enceintes,
on suit la voie au droit et au contre quelques longueurs de trait,
on observe les foulées (une taupinière, une place à charbon vous
tirent souvent d'embarras, les cerfs s'y jugeant très bien); enfin
on fait les petits chemins, les faux-fuyants, et si l'on est persuadé
que le cerf a passé la route qui sépare les deux enceintes avec
les autres, on prend alors le contre-pied pour revenir aux pre-
mières brisées. Si le chien vous y ramène, les doutes sont
levés ; le cerf a vidé la première enceinte avec les autres.
Les voies réchauffées par le soleil sont aussi souvent un grand
embarras ; aussi le valet de limier doit-il avoir soin de rayer le
matin toutes les voies qu'il trouve et qu'il juge de bon temps,
même si le limier ne s'en rabat pas, car, le soleil en ayant plus
tard réchauffé le sentiment, le limier peut en remontrer là où il
n'en faisait rien le matin ; l'on ne sait plus alors si ce sont des
voies nouvelles ou des voies réchauffées. Il faut beaucoup se
méfier des voies réchauffées. Il en est de même si le limier est
trop fin de nez, car il donne alors trop connaissance des voies
du relevé.
Quoique un cerf puisse ne pas avoir été inquiété par le travail,
le valet de limier doit néanmoins continuer à l'observer le plus
tard possible, parce qu'il arrive souvent qu'un cerf remue à
mesure que le jour avance, sans compter qu'il y a des forêts où
ils sont toujours sur pied. Plusieurs causes peuvent le remettre
en mouvement. Lorsque le cerf s'est mis sur le ventre le matin,
il était à l'ombre de quelque cépée; le soleil tourne, il s'y trouve
exposé et il cherche alors un autre abri; les mouches l'inquiètent
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VENEfclE. 141
et le font lever, puis tous les gens et les chiens qui rôdent dans
le bois peuvent le déranger, comme les jours où les femmes
vont au bois mort. Si donc le cerf a été détourné de bonne heure,
il est nécessaire que le valet de limier reste à observer et que
de temps en temps il fasse le tour de l'enceinte avec son limier.
On a remarqué en général qu'on entend crier les pies et les geais
dans une enceinte lorsqu'il y a des animaux sur pied.
111
DE LA CHASSE DU CERF.
Nous voici enfin arrivés à la chasse du cerf; mais, avant de
commencer à la décrire, je dois d'abord dire un mot de la façon,
usitée quelquefois, d'attaquer un cerf sans avoir recours au valet
de limier, façon dont on agit principalement dans les petits
équipages, dans le centre et dans l'ouest de la France.
Je suppose un petit équipage de vingt à vingt-cinq chiens avec
un seul piqueur et un valet de chiens, chassant cerf dans un pays
peu peuplé de ces animaux, pays parsemé de boqueteaux, de
landes et de bruyères et de petits bois où les cerfs peu nombreux
voyagent continuellement d'un bois à l'autre. Il est évident que le
piqueur. seul valet de limier pour faire le bois, aurait beaucoup
de chances de ne pouvoir arriver à détourner un cerf d'une façon
certaine, et très probablement il ne pourrait que donner une
voie plus ou moins froide d'un animal non détourné, si môme il
arrivaità en donner une. Dans ce cas, il est quelquefois très utile
que le piqueur parcoure un peu le pays la veille de la chasse,
pourvoir s'il y a quelque cerf qui donne dans le canton. Le jour
de la chasse, il partira de grand matin avec un couple ou deux
de bons rapprocheurs, bien obéissants et il s'en ira sur le
passage présumé du cerf ou des cerfs dont il a eu connaissance
la veille, à la recherche d'une bonne voie. Aussitôt que ses
chiens s'en rabattent, il s'assure du pied et, s'il reconnaît qu'il a
affaire à un cerf, il appuie doucement ses chiens (pas de trompe)
142 LA CHASSE A COURRE.
et leur fait rapprocher la voie jusqu'au plus prochain boqueteau,
où il les arrête et fait avec eux, avec soin, le tour du bois pour
voir si Tanimal en sort. Si le cerf n'a fait que traverser, les chiens
reprennent tout de suite la voie, qu'ils continuent à rapprocher
jusqu'à ce qu'ils arrivent à un nouveau boqueteau où on ne
trouve plus de sortie. Le piqueur recouple alors ses chiens et
reste un peu de temps à quelque distance en observation, puis
il refait le tour du bois pour voir si le cerf n'a pas bouge et
s'il n'en est pas sorti. S'il n'a pas trouvé moyen de prévenir où
il est et fait dire qu'on vienne le rejoindre, il brise haut et baf
sur la voie et retourne au rendez-vous donné reprendre ur
cheval, mander un morceau et trouver la meute avec laquelle il
reviendra à sa voie, afin d'attaquer de meute à mort.
Si le travail a dû être fait dans un bois assez grand ou dans
une forêt, généralement le piqueur laisse ses rapprocheurs lancer
leur cerf, puis il suit ses vieux chiens en les laissant chasser
jusqu'à l'heure du rendez-vous. Il arrête alors ses chiens, brise
haut et bas, après avoir autant que possible choisi une place
favorable pour arrêter et pouvoir plus tard bien dècoupler. D
retourne alors vivement au rendez-vous pour revenir avec U
meute, qu'il met sur la voie. Il y aura alors presque toujours un
forlonger fort amusant, mais pour lequel il sera bien utile de
découpler les rapprocheurs avec la meute; d'abord parce que h
voie très froide nécessite des chiens plus fins de nez et ensuite
parce que le cerf peut être remis dans une harde et que les
rapprocheurs seront nécessaires pour le déharder. C'est à eus
qu'on rameutera les autres chiens, qui n'ont pas, comme eus.
pris depuis le matin connaissance de la voie de l'animal.
Dans un grand équipage ayant plusieurs piqueurs, valets de
limier ou valets de chiens, et dans ceux où les valets de limier
font toujours le bois, ce qui est l'usage pour le plus grand
nombre, voilà comme l'on doit procéder pour l'attaque. Autre-
fois on paraît avoir eu presque toujours l'habitude de diviser
la meute en plusieurs relais : vieille meute, seconde vieille meute,
les six chiens; on les donnait successivement, et cette habitude
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE. 1 43
détestable ne pouvait que dégoûter les bons chiens qui, fatigués,
voyaient découpler devant eux des chiens frais qui les épuisaient
ou qui, n'ayant pas connaissance de la voie, devaient fatalement
faire souvent change. Je suis maintenant convaincu que ces
habitudes n'existaient guère que dans les Véneries Royales ou
Princières, où Ton n'a généralement connu, comme moyen de
réussite, que celui d'étouffer un animal. Il est juste aussi de
reconnaître que si Ton avait découplé ensemble cent chiens dans
des forêts qui comptaient jusqu'à mille têtes de cerfs, avec la
masse de chasseurs qui étaient présents et gênants, il eût été
bien difficile de bien chasser et de maintenir les cent chiens sur
leur animal. C'est, je crois, ce qui avait fait adopter ce moyen
d'étouffer un animal quelconque le plus vite possible.
.Maintenant on préfère, et avec raison, chasser avec moins de
chiens et prendre de meute à mort. Cependant on fait, et on a
raison, presque toujours deux relais, l'un de jeunes chiens non
livrés qu'on fait mener par le plus vigoureux marcheur choisi
dans les valets de chiens pour les donner à la prise, afin de les
accoutumer à la voie du cerf et les livrer ; l'autre composé des
plus vieux chiens de la meute, vétérans qui ont perdu leur train,
mais qui peuvent être utiles dans un embarras et qu'on peut
donner à la fin de la chasse sans craindre qu'ils dominent les
autres et les dégoûtent. Ce dernier relais doit être généralement
mené par un valet de chiens à cheval, qui doit être le plus intel-
ligent, pour arriver à donner ses chiens avec adresse et sans les
fatiguer.
On attaque donc habituellement maintenant soit avec toute
la meute donnée à la brisée, si l'animal est seul et qu'il n'y ait
pas de harde dans l'enceinte, soit avec quelques vieux chiens sûrs
et hardis qui foulent bien, attaquent de même, et tâchent de
Jéharder le cerf, lorsqu'il n'est pas seul.
On va à l'attaque avec le valet de limier qui a détourné le
cerf et celui-ci, en arrivant à l'enceinte, doit faire revoir du pied
aux piqueurs et aux veneurs capables d'en juger, afin qu'ils
profitent des connaissances qui s'y trouvent pour le reconnaître
144 LA °HASSE A COURRE.
plus tard dans le change. On doit l'examiner avec solo, car les
bons chiens et la connaissance du pied du cerf attaqué sont les
éléments de la boussole qui doit conduire les veneurs jusqu'à la
mort.
Arrivés à l'enceinte et le pied examiné, les veneurs se disper-
sent sur les routes pour voir sauter le cerf si Ton attaque avec
toute la meute; le valet de limier se met sur la voie et le premier
piqueur fait découpler quelques-uns des meilleurs chiens, les plus
sages et les plus sûrs; s'ils prennent tout de suite la voie, on
découple immédiatement ou, ce qui vaut mieux encore, on laisse
aller les chiens, lorsqu'ils ont été amenés découplés, ce qui se
fait dans les meutes bien menées et bien dressées. Si on attaque
avec de vieux rapprocheurs seulement, on leur fait prendre la
voie de la môme façon, la meute étant hardée, couplée et placée
au vent. Aussitôt que le cerf attaqué a bondi hors de l'enceinte
et qu'on a sonné fanfare et la vue, on arrête les chiens d'attaque
et on amène la meute, qu'on découple sagement en commençant
par les plus vieux et les plus sûrs et en ne découplant que
quand- les premiers chiens ont bien pris la voie. Jamais l'attaque
n'est faite avec trop de soin, car une bonne attaque décide bien
souvent la prise. Il faut que les couples puissent se défaire
vivement, que pas un chien ne puisse s'échapper, que deux
chiens ne puissent jamais partir couplés, que les chiens voient
bien les premiers chiens partir sur la voie et l'ayant bien
em paumée de façon à les rallier, sans quoi ils partiraient plus
volontiers au contre qu'au droit. Il faut de plus que le premier
piqueur soit tout de suite au bois avec les premiers chiens
découplés, les appuyant, car sans cela souvent les chiens partant
comme des fous, et passant par-dessus ou à côté de la voie et
ne la trouvant pas, font un retour, trouvent la voie du contre
et y partent comme des furieux. Les hommes restés doivent les
arrêter pour les rallier au premier piqueur, qui continue avec les
vieux chiens les premiers découplés.
Je suppose l'attaque bien faite et tout bien rameuté sur
l'animal de meute ; c'est alors qu'il faut être sage, calme, ne pas
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE. I45
abuser de la trompe et des cris, laisser faire les chiens, pour
que leur fougue se passe et qu'ils goûtent bien à la voie ; en un
mot il faut les laisser faire et se borner à rallier les paresseux
ou à arrêter ceux qui sont sur les ailes ou qui partent sur un
autre animal. Il vaut mieux se ménager au début et ménager son
cheval, car on ne sait pas ce que réserve la fin de la journée.
Si, comme cela arrive souvent, on a attaqué dans une harde
et que le cerf que Ton veut chasser soit beaucoup plus cerf que
les autres, et si on a attaqué avec les vieux chiens seuls, on fera
tout ce qui sera possible pour le séparer ; une fois qu'on y aura
réussi, on arrêtera pour donner la meute. Dans la pratique, cela
ne se passe pas aussi facilement que sur le papier et quelquefois
on ne peut venir à bout de déharder le cerf. On est alors obligé
de donner la meute entière. Il faut dans ces circonstances serrer
de près les chiens pour rallier sur ceux qui ont em paumé
Tanimal de meute, arrêter tous ceux qui chasseraient d'autres
animaux de la harde et rallier aux premiers. Lorsque le cerf
qu'on veut chasser est hardé avec d'autres cerfs de même taille,
ce qui arrive souvent à la fin de l'hiver et que les chiens de
recri ne sont pas capables de séparer un de ces cerfs, il vaut
mieux donner la meute ou du moins tout ce qu'il y a de meilleur
dans la meute, la soutenir pour lui donner le courage de pousser
toute cette harde de gros cerfs, et quand on aura réussi à en
séparer un, rallier à lui, si le cerf séparé est chassé par un assez
gros lot de chiens, surtout si ces chiens sont les meilleurs de la
meute. C'est une des grandes difficultés de la chasse du cerf,
attendu que plus vos chiens sont sûrs, sages et de change,
moins ils aiment à chasser dans l'accompagné (du moins c'est
ainsi que font aujourd'hui presque tous les bâtarde, qui com-
posent la plus grande partie de nos meutes pour cerf). Il faut
donc tâcher d'habituer vos chiens à chasser dans l'accompagné,
sans quoi vous ne pourriez presque jamais rien faire. Qu'ils
marquent l'accompagné, très bien; qu'ils y chassent plus froi-
dement, très bien encore; mais qu'ils lâchent leur cerf dans
raccompagné, c'est détestable, attendu que dans des forêts où
146 LA CHASSE A COURRE.
il y a beaucoup d'animaux, vous arriveriez à ne jamais prendre,
("est un des défauts habituels à beaucoup de bâtards actuels.
Autrefois les chiens étaient trop chasseurs, mais maintenant ih
ne le sont pas assez.
Enfin je suppose les difficultés de l'attaque vaincues et votre
animal bien empaumé par la meute. Il peut survenir un défaut
par suite dune ruse du cerf. Il faut d'abord laisser faire le*
chiens et, s'ils ne reprennent pas, s'approcher d'eux et le>
appeler au retour doucement, tout en ayant bien soin de s'as
surer qu'il ne se forme pas une tête de chiens plus adroits ei
plus malins qui auraient relevé la voie sans qu'on s'en aperçût.
Dans ce cas, il faudra s'y porter tout de suite pour faire rallier
la meute, pendant que quelques veneurs pousseront vivement
eux-mêmes pour tâcher de rallier les chiens de tête et le>
arrêter, afin de laisser à la meute la possibilité de les rallier.
Partout où le change est à craindre, il faut briser dans tous les
endroits où on voit le cerf de meute, car on peut avoir besoin
de revenir à la dernière brisée, s'il y a eu change.
Si l'on donne dans le change et qu'on s'en aperçoive, surtout
en voyant les bons chiens mollir, quitter la voie et revenir aux
routes et aux chevaux (à moins que ce ralentissement ne soit le
fait d'un accompagné comme nous l'avons dit plus haut), il faut
tout de suite arrêter les chiens chassant change et retourner là
où on pense qu'a eu lieu le change, pour essayer de faire
reprendre la voie aux bons chiens. Mais si, la meute chassant
bien et les bons chiens restant bien sur la voie, vous voyez
un autre cerf, même une biche ou un chevreuil, sauter une route
et les chiens passer à la même place sans marquer autrement
4'embarra<s, il n'en faudrait pas conclure immédiatement que vos
chiens ont fait change. Ne les arrêtez pas avant d'être certain
qu'ils ne sont plus sur la bonne voie, car votre cerf peut avoir
sauté avant, à la place même où ont passé ensuite la biche ou
le chevreuil, et quoique vous ayez vu un autre animal devant
vos chiens, cependant ceux-ci avaient raison. Au bout d'un
instant, l'animal qui avait bondi devant eux et suivi la même
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DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VENERIE» I47
voie que l'animal de meute, s'étant jeté de côté, les chiens
continuent au droit et bientôt vous revoyez de nouveau devant
eux votre animal de meute. Que de chasses ont été perdues
pour avoir arrêté ainsi sur la bonne voie, tout le monde criant
qu'il y avait change, qu'on chassait une biche ou un chevreuil!
Je me rappelle, chassant un sanglier avec des chiens très sûrs
(meute Saint-Hubert), être arrivé en même temps qu'eux à une
plaine pour voir débucher un dix cors. Je ne veux pas qu'on
arrête ; je cours au bois suivant, que je traverse pour revoir de
nouveau le dix cors débuchant et traversant une petite rivière,
puis une prairie, les chiens toujours derrière et chassant tou-
jours vivement, même les meilleurs. Je commence naturellement
à être inquiet; poussant vivement à un passage certain situé à
une demi-lieue de là, j'arrive pourvoir sauter\mon sanglier,
suivi à cent pas du même dix cors. En me voyant, il se jette de
côté; les chiens arrivent et, sans balancer un instant, continuent
sur leur sanglier, dont la voie avait-été simplement couverte
par le cerf. Si j'avais arrêté, jamais je nïaurais- retrouvé la voie
de mon sanglier; ma chasse était perdue; j'aurais été convaincu
que mes chiens avaient fait change et, au lieu de leur donner une
bonne leçon, je leur en donnais une détestable.
Quand la chasse avance, que l'animal commence à être mal-
mené et les chiens à se fatiguer un peu, lorsque la chasse a été
dure, il faut les serrer de plus près, les animer et les soutenir,
Si le cerf fait un retour, les bons chiens balancent, les moins
sûrs et les plus fougueux percent; cette façon de chasser avertit
qu'il faut arrêter ces derniers. Si on arrive à une route, que les
chiens sautent et qu'arrivés de l'autre côté ils reviennent au
bout d'un instant ne trouvant pas de voie, il faut travailler de
l'œil pour voir si le cerf a longé la route ou s'il a reculé sur
sa voie. On y fait travailler les chiens doucement, sans trop les
presser. Sur la route les chiens ne s'en rabattront peut-être pas,
toujours à cause de la dureté du terrain et du changement de
sentiment de la voie, qui était très bonne dans les enceintes et
qui n'est plus la même; bientôt, mettant le nez à terre, ils se
I48 LA CHASSE A COURRE.
réjouiront, fouetteront de la queue et finiront par crier et
reprendre. Il ne faudra pas alors les presser et il convient de ne
les appuyer qu'avec réserve. Si on voit les chiens de tète ba-
lancer, méfiez-vous que le cerf ne se soit jeté de côté dans le
bois ou qu'il n'ait pris une autre route.
Maintenant, on est arrivé à une enceinte où on est tombé dans
le change; les chiens ont molli, les bons sont revenus. On voit
un cerf, qui paraît égal à celui de chasse, sauter une route; on y
court, on fait tâter la voie à quelques vieux chiens sûrs, ils n'en
veulent pas : c'est un change. Le cerf de chasse, ayant fait
bondir un change, a fui franchement d'un autre côté, ou bien il
s'est rasé. Il faut commencer tout de suite par faire les devants
et envelopper deux ou trois enceintes. Si le cerf a fui, on retrou-
vera la voie. Si on ne trouve rien, il faut rentrer dans l'enceinte,
en reprenant la voie là où le cerf de meute a pénétré. C'est là
qu'il faudra avoir l'œil aux bons chiens pour les appuyer et em-
pêcher les jeunes et les fous de faire des bêtises et d'entraîner
les vieux. Mais tout d'un coup un chien a crié, les vieux don-
nent franchement, tout rallie, le cerf est relancé et la chasse
recommence vivement.
Cependant le cerf a pris de l'avance et a fini par débucher; les
chiens continuent encore à bien chasser, mais on tombe dans une
terre labourée, couverte de fumier ou qui a servi de passage à
un troupeau de vaches ou de moutonf . Les chiens plus fins de
nez vont encore, ramassant la voie comme ils peuvent. On vient
dire qu'on a vu le cerf passer plus loin et on vous engage à en-
lever les chiens. Tant que vos chiens chassent, ne le faites pas:
ce serait une détestable leçon d'abord, et puis ètes-vous bien sûr
que c'est votre cerf qu'on a vu >
Mais enfin la voie devient tout à fait mauvaise et les chiens
tombent en un défaut qu'ils ne peuvent relever. Alors le bon
veneur réfléchissant où le cerf a la tète tournée, vers quel bois il
doit se diriger, quelle est sa refuite probable, enlève les chiens,
les fait boire, s'il le peut, à une mare et enveloppe à une assex
grande distance sur la refuite probable, en prenant bien le vent
DE LA CHASSE DE8 ANIMAUX DE VÉNERIE. 149
et en choisissant les endroits les plus favorables à conserver le
sentiment de la voie pour y faire requêter ses chiens.
On a enfin retrouvé la voie et les chiens reprennent franche-
ment et emmènent le cerf dans un autre bois ou forêt où il fait
des retours, longe les routes, prend l'eau dans les mares ou
ruisseaux, double ses voies, et finalement les chiens tombent
encore en défaut. Après avoir pris les devants, enveloppé l'en-
ceinte, suivi les routes, on n'a rien trouvé. On doit juger que le
cerf est rasé. On foule alors l'enceinte pied à pied, car un cerf
malmené qui se rase ne part que quand on lui marche dessus.
Quelques chiens se récrient, un animal bondit, mais les bons
chiens n'en veulent pas et ne disent rien : c'est un change.
Arrêtez. Voici qu'un autre chien se récrie; les vieux y vont et
donnent franchement; on voit un cerf qui ressemble au cerf de
meute, mais il va la tête haute et a franchi la route comme un
cerf frais. Cependant les bons chiens chassent et tout se rallie.
Le cerf paraît à une autre route et la longe. Cette fois il ne peut
plus se contraindre, il va la tête en terre, il tire la langue, il pa-
rait mouillé et tout le monde le reconnaît : c'est le cerf de meute.
En effet, un cerf malmené qui se fait relancer bondit souvent
comme un cerf frais et, s'il est surpris par un cavalier, il a l'appa-
rence d'un cerf de change. Parfois du reste un cerf vraiment
forcé, sans être relancé ni surpris, ne tire plus la langue et ne
souffle plus; c'est ce qu'on appelle un cerf retiré.
L'ardeur de tout le monde et de la meute se ranime; la trompe,
la voix des chiens forment un tapage que les indifférents n'en-
tendent pas de sang-froid; par moments le tapage diminue, fai-
blit et cesse, mais c'est pour recommencer plus brillant et plus
vif, parce que le cerf se fait relancer au milieu des chiens qui
l'entourent. Souvent, par un effort dernier et désespéré, il file en
droite ligne et fait une pointe dernière pour tomber mort devant
les chiens. Le plus souvent il va se jeter dans une mare, dans
une rivière, et s'il en ressort, c'est pour se faire chasser comme
un lapin, revenant toujours à l'eau où il s'est mis la première
fois. Bien souvent il se jette dans une cour, dans un jardin, dans
k->o LA chasse: a courre
une maison, car le cerf vient presque toujours se faire prendre
près des habitations. S'il est dans l'eau, il est noyé par les chiens;
s'il tient au ferme sur terre, il fait tête aux chiens, se précipite
sur eux la tête basse, les frappant de ses bois et de ses pieds de
devant et les blessant souvent. Si Ton ne se sert pas de la cara-
bine pour achever son ag-onie, on lui coupe un jarret avec un
couteau de chasse; il tombe alors au milieu des chiens qui le
couvrent et on l'achève sans retard, car on ne doit pas pro-
longer ses souffrances. Les piqueurs sonnent alors l'hallali par
terre; on le laisse fouler un instant aux chiens et on procède
à la curée.
On commence d'abord par s'assurer du nombre de chiens
manquants; puis on met les chiens dans une écurie ou une éta-
ble s'il y en a une voisine, pour qu'ils n'attrapent pas froid,
surtout si l'hallali a eu lieu dans l'eau. Si l'on n'a pas d'abri
pour les chiens, on les fait promener par les valets de chiens.
Pendant ce temps, le piqueur retourne le cerf sur le dos et
lève le pied droit à la jointure du genou, enlève la peau en la
fendant jusqu'à la jointure du boulet, sépare la jointure dans le
boulet, tresse la peau qui a été détachée de la jambe et attache
le pied au manche de son couteau de chasse, puis il procède au
dépouillement du cerf. On incise les quatre jambes aux jointures
des genoux et desjarrets; on part des incisions des genoux pour
en faire une jusqu'au milieu de la poitrine; on part des incisions
des jarrets pour en faire une autre jusqu'à l'entre-deux des
cuisses (on a eu soin d'enlever les daintiers). On incise tout le
long du ventre, depuis l'incision entre les cuisses jusqu'à la
gorge; on lève ensuite promptement la nappe et on détache la
tète restée jointe à la nappe en coupant le cou au premier nœud
de la gorge. On met la tête et la nappe de côté et on lève sur la
bête ce que l'on en veut prendre : les filets, les cuisses, les
épaules, de manière à ne laisser que le coffre. On recouvre
alors celui-ci avec la nappe et la tête. Les chiens sont alors ra-
menés par les valets de chiens et tenus sous le fouet; un valet de
chiens se met à cheval sur la nappe tenant la tète du cerf parles
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VENERIE. l5l
bois avec ses deux mains et la balançant. On appelle les chiens
a la curée, puis on les renvoie une fois ou deux pour les nabi-
Dix cors jcuncmont sur ses lins.
tuer à l'obéissance; entin, sur le si#ne du maître d'équipage, le
valet de chiens enlève rapidement la tète et la nappe, et les chiens
l52 ' LA CHASSE A COURRE.
se précipitent sur la carcasse pour en faire curée, pendant qu'on
crie hallali et que les trompes sonnent. Le premier piqueurprê-
sente alors le pied à la personne désignée par le maître d'équi-
page. La curée finie, on emmène les chiens en sonnant fanfare.
Le bois du cerf appartient au maître d'équipage et la nappe
aux piqueurs.
On fait quelquefois curée froide le soir en rentrant à la mai-
son, ou le lendemain, s'il fait trop froid ou trop mauvais et qu'on
craigne pour les chevaux ou pour les chiens; mais elle ne vaut
pas pour ceux-ci la curée chaude.
Telle est la chasse du cerf, depuis son attaque jusqu'à sa
mort. Évidemment les incidents sont multiples, car il est rare
que deux chasses se ressemblent; mais nous en avons examiné
les principales difficultés, et c'est la seule chose que nous puis-
sions faire.
Il arrive quelquefois, surtout dans les grands pays, que, pour
des causes diverses, on a été obligé d'abandonner le soir un
cerf absolument sur ses fins et qu'on veuille essayer de le
prendre le lendemain; je crois utile de dire ce qu'on doit faire
dans ce cas.
Pour avoir des chances de prendre un cerf abandonné la veille,
il faut prendre en considération les observations suivantes :
i° Il faut s'assurer qu'il n'y avait pas de change.
2° Si c'est en pleine forêt peuplée de cerfs, il est presque
impossible de réussir, à moins que le cerf recherché n'ait des
connaissances à ne pas s'y méprendre, et dans ce cas le mieux
est d'envoyer tous les valets de limiers le travailler pour tâcher
de le rembucher.
3° Un cerf qui a, le soir, battu les petites rivières et les ruis-
seaux est presque impossible à reprendre,
4° Un cerf retourne presque toujours dans la nuit vers le pays
où il a été attaqué.
5* Un cerf qui a abandonné son pays et qui est allé de
buisson en buisson, peut être requêté avec grande chance de
réussite.
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE. l53
6* Un cerf abandonné dans un grand étang peut être encore
requêté avec chance de succès.
Le cerf abandonné sur ses fins retourne la nuit en faisant des
allées et venues et se mêlant avec toutes les bêtes qu'il ren
contre ; s'il trouve un autre cerf, il s'en accompagne, et s'il est
relancé, il tâche de donner change, fait un retour et se jette sur
le ventre. Fatigué, les membres brisés, il se relève pendant la
nuit, puis se recouche, faisant des reposées continuelles, vian-
dant couché, se relevant, marchant les pinces écartées et n'ap-
puyant que du talon.
Les chiens, qu'on aura fait coucher dans les environs, pren-
dront sa voie à merveille si la nuit a été bonne, car pendant
leur sommeil il aura toujours été présent à leur imagination.
Quel est le chasseur qui n'a pas remarqué que ses chiens, au
retour de la chasse et exténués de fatigue, rêvent encore à la
poursuite de la bête qu'ils ont chassée ! *
Si le cerf a pris l'eau la veille à la fin de sa chasse, il y retour-
nera presque immanquablement, et il est probable, que c'est là
qu'il finira. S'il a plu pendant la nuit on s'il a gel£, le requêter
sera presque impossible; mais s'il est ton\bé une fine neige ne
recouvrant la terre que d'un ou deux centimètres, soyez sûr
que, même ne voyant pas les voies, les chiens les rapprocheront
et les chasseront à merveille. La neige semble avoir conservé
le sentiment des voies qui n'a pu s'évaporer sous cette frêle en-
Teloppeet, si je vous le dis, c'est que l'expérience me l'a appris.
Telle est donc la chasse du cerf, qui, comme on le voit,
demande un certain train et un certain apparat; mais cependant
rien n'empêche un bon veneur avec un piqueur et quelques
excellents chiens de prendre un cerf aussi bien que le maître
d'un grand équipage. A ce sujet, je citerai l'anecdote suivante :
On sait qu'après i83o on procéda à la destruction de tous les
animaux des forêts royales. A Compiègne, la destruction fut
particulièrement considérable. Un garde général de cette forêt,
grand amateur de chasse à courre et très bon veneur, choisit à
la vente des équipages de la Vénerie deux chiens d'élite, de ces
I.">4 LA CHASSE A COURRE.
animaux qui, mis sur un cerf, ne le quittaient qu a la mort. Aidé
d'un garde, grand marcheur et très bon valet de limier, il se mit
à attaquer et à chasser successivement tous les plus beaux cerfs
de la forêt. Son garde rembuchait le cerf; M. B., à cheval, suivi
de ses deux chiens, l'attaquait, et les deux chiens, toujours aux
jarrets du cerf, ne le quittaient point jusqu'à la prise, qui, comme
presque toujours à Compiègne, avait lieu dans les étangs. Le
cerf bien forcé, M. B. prenait sa carabine et servait son cerf. 11
en prit ainsi un nombre considérable. On voit que 1 équipage
était plus que modeste.
Après 1848, ayant loué avec mon cousin le comte de B., plu-
sieurs lots de la forêt de Fontainebleau, nous vînmes y chasser
cerf avec vingt-cinq chiens et un seul homme, le célèbre Charrier.
Nos chiens n'avaient jamais chassé que loup et sanglier et nous
avions au moins trois cents têtes de cerfs à bois dans la forêt.
Après avoir mis trois ou quatre mois à mettre nos chiens dans
cette voie nouvelle pour eux, à les former nous-mêmes à cette
chasse également nouvelle pour nous, nous finîmes par si bien
réussir, que l'année suivante nous n'en manquions guère, maigre
le grand nombre d'animaux, et que la troisième année nous en
prîmes souvent deux successivement dans la même journée, si
bien que le comte de B. déclarait alors que les cerfs étaient
décidément des animaux sans fond. Cependant on sait que les
cerfs de Fontainebleau sont vigoureux.
IV
DES CHIENS PROPRES A LA CHASSE DU CERF.
Généralement les équipages pour cerf se composent ou de
chiens anglais ou de bâtards. Dans les chiens français, les
anciens Poitevins et les Saintongeois pouvaient parfaitement
prendre des cerfs et faisaient même des chiens merveilleux; tou-
tefois, pour les Saintongeois, il fallait du repos entre les chasses
et ne pas chasser trop souvent. Les anciens chiens Vendéens
DE LA CHASSE DES ANIMAUX DE VÉNERIE. l55
i Bas-Poitou) une fois créances (ce qui était long) devenaient
aussi très bons, et je n'oublierai jamais ceux avec lesquels nous
prenions les cerfs de Fontainebleau : Barbaro (dont on voit
partout à Paris la lithographie, d'après le portrait peint par Rosa
Bonheur), Lentenor, Mascaro, Calypso, etc. (si bien peints par
Jadin). Aujourd'hui les meutes pour cerfs ne sont guère com-
posées que de chiens anglais ou de bâtards. Je préfère de beau-
coup pour cette chasse les bâtards, qui ont plus de nez, plus de
:, r orge et plus de disposition à garder change, si toutefois ce
>ont des bâtards de Saintonge ou du Haut-Poitou. Il faut des
chiens de grande taille, bien perçants et aussi chasseurs que
Ion peut les trouver, avec les qualités de sagesse et de sûreté
dans le change. Il faut tâcher de les avoir un peu braves (chose
rare dans les bâtards), parce que dans bien des forêts les cerfs
ne sont pas commodes et que, dans ce cas, ils sont sujets à
renvoyer les chiens, surtout dans les fourrés. Alors ceux-ci
lâchent et ne veulent plus rien faire.
En somme, les bâtards du Haut-Poitou et de Saintonge me
paraissent les meilleurs que j'aie vus pour cette chasse, et
comme ils sont assez nombreux maintenant, je crois que c'est
Je cette race qu'il faut se monter pour bien chasser cerf. Certes
un bon chien anglais y réussit aussi, mais ils sont plus rares
a trouver. La plupart n'ont pas grand nez et s'ils aiment à
prendre, ils ne montrent guère cette qualité que quand l'animal
est très malmené et qu'ils sentent que l'instant décisif est proche.
Au commencement de la chasse ils sont mous, rechignent aux
fourrés, lâchent la voie, prennent les allées, et comme ils n'ont
irenéralement pas grande qualité de change, ils prennent volon-
tiers sur un animal qui saute une allée devant eux ou qui dé-
buche. N'ayant pas beaucoup de finesse de nez, ils ne peuvent
généralement ni faire un rapprocher, ni dans un embarras
enlever un forlonger; beaucoup sont muets et cèlent la voie.
Us sont vigoureux, peuvent chasser souvent, sont mordants et
aiment à prendre : c'est déjà beaucoup ; mais ils ne valent pas à
cette chasse nos bons bâtards de Poitou et de Saintonge avec
i56
LA CHASSE A COURRE.
lesquels j'ai fait mes plus belles chasses de cerf. Redoutez par-
dessus tout les bâtards issus de trente-six races, comme on n'ai
voit que trop, chiens qui n'aiment pas la chasse, suivent les
allées, ne veulent pas attaquer, ne veulent pas chasser dans
l'accompagné et qui ont pris tous les défauts des Anglais sans
leurs qualités, sauf bonne santé et grand appétit.
>VV>< \f-
CHAPITRE XIV
LE CHEVREUIL.
Le chevreuil est un des plus jolis animaux de nos bois et de
nos forêts. Beaucoup plus petit que le cerf, il lui ressemble par
sa conformation tant extérieure qu'intérieure; cependant il n'a
point de larmiers comme le cerf et sa queue n'est point appa-
rente; ce n'est qu'une sorte de pinceau. Une fois dans ma vie,
j'en ai tué un qui avait une queue de près de quatre pouces
de longueur et composée de quatre vertèbres. Si je note ce fait,
c'est que j'ai toujours été étonné de voir que les anciens peintres
d'animaux, entre autres le célèbre Ridinger (qui a dessiné et gravé
dans sa vie plus de sept cents planches d'animaux de chasse),
ont toujours fait des queues à leurs chevreuils.
Le chevreuil, à sa pleine croissance, peut atteindre de i-,io
à i-,3o de longueur et o n ,8o à o m ,90 de hauteur; il peut peser de
40 à 60 livres. Le mâle, appelé brocard, a. la tête ornée de bois;
la femelle, appelée chevrette, n'en a pas ; cependant, comme les
biches, mais aussi rarement qu'elles, les vieilles chevrettes
l5tt LA CHASSE A COURRE.
brehaignes pcuventaussi porter un bois. J'en ai tué une qui avait
un bois de petit daguet (sans meule) et trois os ou ergots:
chaque jambe de devant.
Le chevreuil a la tète bien proportionnée et expressive, ta
oreilles grandes et un peu velues en dedans, six dents incisivo
à la mâchoire inférieure, point de coins, six dents molaires tre>
aiguës à chaque mâchoire, le cou long et élevé, les jambes
minces et fines et sous la première jointure des jambes de der-
rière un bourrelet couvert de poils; le conduit urinai est termine
par une touffe de poils. Sa voix est brève, claire et glapissante,
plus grave chez le mâle que chez la femelle. Les chevreuils
font souvent entendre ce son quand ils sont inquiets ou qu'iN
ont vu ou senti leur ennemi. Les chevreuils poussent encore un
cri plaintif quand on les saisit rudement ou qu'ils sont pris par
les chiens.
La couleur du chevreuil a beaucoup de ressemblance avec
celle du cerf. Il a le dessus du corps, les épaules, les flancs,
les cuisses d'une couleur fauve foncé ou d'un roux clair; le
dessus de la tète, le chanfrein et la face extérieure des oreilles
d'un fauve brunâtre plus ou moins foncé; le menton blanc; le
reste du corps et les jambes d'un fauve plus clair, presque blan-
châtre sur les aisselles, le ventre et les aînés. En hiver, son
pelage est d'un gris sale et composé de poils longs, plus épais.
plus plats et plus raides que dans celui du cerf. Les vieux che
vreuils en poil d'hiver ont une tache d'un blanc jaunâtre sur le
devant du cou.
La femelle a les formes déliées, la tête moins jolie et le cou
un peu moins fort que le mâle. Par exception, on trouve quel
quefois des chevreuils tout blancs. Il en vient parfois aux Halles
à Paris et j'en ai vu deux qui, d'après l'enquête que j'ai faite,
provenaient d'une petite forêt du centre de la France.
Le chevreuil est, de toutes les espèces du genre cerf, celui
dont l'organisation est la plus délicate. Il est sensible au froid
et à l'humidité et n'a pas la vie dure. Il a les mêmes ennemis et
les mêmes maladies que le cerf: mais, plus délicat, il succombe
LE CHEVREUL. J ^
où"!?' LCS ChCVreUi ' S meUrent ,e P' us sou ^nt de diarrhée
m de o„so m pt,on. Ils meurent aussi assez souvent, après de
loners hners, de .a pourriture du foie et, dans les parcs princi
■fg£;Jhî&' "
Chcvrillards de dix mois environ.
/>
£ 'el m Tf * " ,a b ° U,e d " eau ' tomme les moutons.
«S ch" t T ,S ha6,tUe,S du Cerf " ,e ^ reu « « à redouter le
S a 1 £ ?"?' "* dit - on ' les belettes - J'«« P" constater
Tu. I " eVr " ,ardS éUient P ns * ssez auvent par les
«on,» ayant trouvé des débris Oans , cs nids de ces oLux.
IÔO LA CHASSE A COURRE.
Quand le chevreuil est chassé, il cherche à éviter son ennemi
par un grand nombre de détours, revient sur ses pas, retourne,
revient encore, et, lorsqu'il a confondu par des mouvements
opposés la direction de l'aller avec celle du retour, lorsqu'il a
mêlé les émanations présentes avec les émanations passées, il
se sépare de terre par un bond et, se jetant de côté, il se met
sur le ventre et laisse
^ passer près de lui, sans
bouger, toute la meute.
Le chevreuil vit en fa
mille avec sa chevrette et
ses faons. La Conterie
prétend qu'il est assez
brave pour livrer bataille
au cerf; c'est possible.
car, quoique facile à appri-
voiser et devenu doux et
familier, il a des moments
de colère, surtout à l'é-
poque du rut et devient
alors quelquefois très mé-
chant.
Le chevreuil mâle mar
que le lieu de sa reposée
par des régalis, en grat
tant la terre ou la mousse
avec ses pieds de devant:
c'est une connaissance utile, car le revoir du pied est souvent
fort difficile avec un animal aussi léger, et si, en faisant suite,
on trouve un régalis, on peut être sûr que c'est un brocard. D
frotte souvent son bois, même hors le temps où il veut le dé-
pouiller de sa peau, contre de jeunes brins de taillis. Il se
nourrit d'herbes, de pousses de ronces, de bourdaines, de
pousses de jeunes branches, de glands, de faînes, de fruits
sauvages. Il va peu aux gagnages et boit très peu.
Vieux brocard refaisant sa tète.
VIEUX BROCARD
MjVJ l
LE CHEVREUIL. l6l
Les chevreuils ne se plaisent pas également dans tous les
pays; ils aiment assez les revers des montagnes et des collines,
préfèrent les bois à feuilles caduques aux bois d'arbres rési-
flHfife "
Chevrette et ses faons.
neux; ils aiment les jeunes taillis parsemés Je
clairières et les endroits marécageux plantes Je bois,
pourvu toutefois qu'il sy trouve des places sèches où
ils puissent se coucher.
Quand le chevreuil s'est trop multiplié, il fait beaucoup de
tort au jeune bois par l'abroutissement, mangeant toutes les
pousses pendant l'hiver; mais dans les gagnages il fait très
peu de dommages.
Après la saison du rut, c'est à-dire vers la fin de novembre, la
h
IÔ2 LA CHASSE A COURRE.
chevrette se trouve ordinairement pleine d T un ou deux faons,
qu'elle porte six mois; elle met donc bas vers le mois de mai
ou de juin. A cette époque elle se sépare du brocard et se recèle
dans la partie la plus fourrée du bois. S'il y a deux petits, on
prétend qu'ils sont généralement mâle et femelle. Ces jeunes
faons portent la livrée comme le jeune cerf; ils sont d'un brun
rouge tacheté de blanc et restent généralement couchés dans
le même lieu pendant deux jours ; mais cependant ils peuvent
marcher tout de suite. Au bout d'une douzaine de jours, ils
ont pris assez de force pour suivre leur mère, qui les ramène
au brocard. La mère les allaite pendant quatre mois environ,
les protégeant de son mieux et se faisant, au besoin, chasser
à leur place.
Les faons restent avec leurs père et mère huit ou neuf mois,
et lorsqu'ils en sont séparés à la fin de leur première année,
leur première tête commence à paraître sous la forme de deux
petites dagues appelées broches. Le faon prend alors le nom de
daguei et porte pour toute sa vie le nom de brocard. Chaque
année il jettera son bois, comme le cerf, et le renouvellera, mais
à une époque différente. En effet, c'est seulement après le rut,
qui a lieu d'octobre en novembre, que le chevreuil jette sa tète
et la refait. Il refait donc sa tête en hiver et elle reste en velours
jusqu'en mars, où il commence à toucher au bois pour le dé-
pouiller et ensuite le brunir.
Rien de plus irrégulier que la tête du chevreuil et on ne peut
tirer aucun indice certain de son âge par le nombre des andouil-
lers; c'est seulement par le merrain, la couronne, les pierrures
et les perlures qu'on en peut juger.
A la fin de la seconde année, dans sa troisième, chaque perche
ou broche jette un andouiller en avant à environ o*,o8 au-dessus
de la meule. L'année suivante, les perches jettent chacune un
andouiller en arrière, à environ o*,o5 au-dessus du premier. Les
années suivantes, le bois continue à grossir et à s'élever, les an-
douillers à s'allonger jusqu'à ce que le chevreuil soit dix cors.
Quelquefois, mais par exception, il pousse d'autres andouillers.
LE CHEVREUIL. l63
mais rien n'est régulier à cet égard. Plus il avance en âge, plus
la hauteur et même le nombre des andouillers diminuent, de sorte
que, s'il devient très vieux, il n'a plus ordinairement que deux
dagues plus ou moins contournées, formant des têtes bizarres
et contrefaites dont les meules se joignent, les merrains sont
plus gros et les andouillers nuls ou plus petits. Du reste
on rencontre toute espèce de bizarreries chez le chevreuil ; mais
ce qui distingue le vieux chevreuil, c'est qu'il a les meules
plus près du /#, qu'elles sont larges (quelquefois rentrant l'une
dans l'autre), que les pierrures sont grosses, les gouttières
creuses, les perlures très saillantes, grosses et détachées et le
merrain gros.
Le rut des chevreuils n'a lieu qu'une fois par an, des premiers
jours d'octobre à la fin de novembre, comme je l'ai dit tout à
l'heure, et il ne dure pas si longtemps que celui du cerf, parce
que généralement chaque chevreuil a sa compagne, dont il jouit
tranquillement. Au lieu de battre le pays comme le cerf, il reste
ordinairement dans son canton. Les chevreuils ne font dans
leurs amours ni grand bruit, ni grand tapage. C'est à ce mo-
ment que le brocard chasse d'auprès de la chevrette les faons
qu'elle avait conservés jusque-là; mais s'il y a dans le canton
plus de brocards que de chevrettes, il s'engage alors entre eux
des combats opiniâtres.
Au printemps, les chevreuils donnent beaucoup dans les
taillis, dont ils mangent les pousses, et cette nourriture qu'ils
absorbent avec avidité, leur fermentant dans le corps, les
enivre au point que, perdant la tête, ils s'égarent souvent dans
les buissons et les plaines et s'approchent du bétail et des lieux
habités.
En hiver, ils se retirent généralement sous les gaulis et dans
les grandes forêts, qui leur fournissent des ronces, des genêts
et des bruyères. Ils préfèrent les endroits élevés et exposés au
soleil; mais si les grands froids leur font manquer de nour-
riture, ils donnent alors dans les bois à proximité des champs.
Les chevreuils sont rarement en troupes nombreuses. Le père,
164 LA CHASSE A COURRE.
la mère et les petits demeurent souvent ensemble ; cependant en
hiver, et surtout vers la fin de l'hiver, ils se rassemblent quel-
quefois au nombre de dix à douze, pour se séparer de nouveau
ensuite.
II
DE LA MANIÈRE DE DÉTOURNER LE CHEVREUIL.
Le chevreuil est de tous les animaux le plus facile à détourner,
et comme généralement il habite un canton dont il ne sort guère,
à moins d'y avoir été plusieurs fois tourmenté, on l'attaque le
plus souvent sans faire le bois, se contentant de s'assurer sim-
plement auparavant, par ses empreintes et ses régalis, qu'il
demeure dans ce canton.
Le travail du valet de limier est même presque nul. D'abord
les chiens ont une grande ardeur sur la voie du chevreuil, qu'ils
aiment beaucoup et sur laquelle ils se rabattent bien plus volon-
tiers que sur celle du cerf.
Le limier avec lequel on fera le bois doit être très secret
En faisant suite, on se bornera à l'aider dans les tours et retours
que fait l'animal. Comme, contrairement à ce qui arrive pour les
autres animaux, on n'a pas lieu de craindre de le mettre debout,
on peut toujours faire suite, et on n'a pas besoin pour le dé
tourner, de faire un travail comme celui qui est nécessaire pour
les autres animaux. Il suffit donc que le limier soit bien muet,
qu'on fasse le moins de bruit possible, et aussitôt qu'on
l'aura mis debout, on s'arrête, on brise et on se retire discrè-
tement. Si on peut se cacher à quelque distance, il est probable
qu'on verra le chevreuil, curieux de sa nature et n'entendant
aucun bruit, revenir à sa reposée pour voir ce qui est venu le
déranger.
Donc le travail pour donner un chevreuil est assez simple. H
sera bon seulement, une fois l'animal mis debout en faisant le
bois, de laisser, en se retirant, plusieurs brisées de distance
DE LA CONNAISSANCE DU CHEVREUIL PAR LE PIED. IÔ5
en distance jusqu'au premier carrefour, afin d'être sûr de pouvoir
retrouver la voie dans l'enceinte.
Si, en suivant, on n'a pas trouva de régalis sur la voie, on
peut chercher les fumées, qui s'appellent moquettes. Si elles sont
aiguillonnées par le bout, elles sont d'un brocard.
III
DE LA CONNAISSANCE DU CHEVREUIL PAR LE PIED.
C'est une science très difficile que celle du pied du chevreuil.
Je crois qu'il n'y a guère que les veneurs très observateurs, et
qui ont beaucoup chassé le chevreuil, qui puissent réellement
la posséder. Cependant, pour le veneur qui chasse le chevreuil,
c'est une connaissance indispensable pour se garder du change
et pour pouvoir travailler dans les défauts. La forme ou plutôt
l'empreinte du pied du chevreuil change plusieurs fois pendant
la chasse et sert à indiquer non seulement si Von est bien sur
l'animal de chasse, mais encore s'il est malmené ou non.
Les jours de mauvais revoir, il ne faut guère espérer distin-
guer le pied du brocard de celui de la chevrette. Par les jours
de beau revoir, au contraire, on peut arriver à distinguer à peu
près sûrement le pied d'un brocard à sa quatrième, cinquième
et sixième tête de celui d'une chevrette.
Un brocard de cet âge a plus de pied devant que derrière, ses
pinces sont plus rondes et son talon plus gros; sa jambe est
plus large et ses os plus gros et plus tournés en dedans que
ceux de la chevrette. Celle-ci a le pied creux, les pinces pointues,
les côtés tranchants et les os plus tournés en dehors. Quand le
chevreuil est dix cors, ces distinctions sont encore plus faciles
à faire. Quand il devient vieux chevreuil, il se ravale, sa jambe
se rétrécit et la différence entre le pied de devant et celui de
derrière est plus grande.
Les allures du brocard sont plus régulières que celles de la
chevrette et ses pieds sont toujours placés à une distance égale.
IÔ6 LA CHASSE A COURRE.
Les chevreuils ont souvent des connaissances aux pieds, ce qui
est très utile à la chasse. ,
Mais, au résumé, il est très difficile de se prononcer d'une
façon positive sur un pied du chevreuil, surtout s'il est isolé, et
il faut une grande habitude pour oser garantir que Ton a devant
soi un brocard ou une chevrette.
La connaissance du pied pendant la chasse est une chose fort
utile et souvent bien importante.
Quand le chevreuil vient d'être lancé, il court et bondit, léger
comme un oiseau ; les pinces s'écartent, mais les os sont peu
marqués. Après une heure de chasse un peu vive, le chevreuil
commence à appuyer fortement sur le talon : ce qu'il ne faisait
pas au départ ; même en rusant et marchant d'assurance, les os
portent encore plus fortement en terre et les pinces écartées
laissent bien voir la forme du pied. Vers la fin de la chasse, si
le chevreuil est malmené, ses jambes se sont raidies, il marche
comme un cheval fourbu, pique droit sur le bout des pinces qui
se resserrent, si bien que, lorsque l'animal vient à marcher dou-
cement, on n'en distingue guère que l'extrémité et les os ne
portent plus à terre. Son pied a donc varié trois fois depuis
l'attaque et à la fin il ne ressemble plus au pied de l'animal au
lancer.
On voit que cette connaissance est indispensable au chasseur
de chevreuil et, comme l'animal ruse beaucoup, qu'il y a souvent
des défauts et que par conséquent on travaille beaucoup au pied,
cette étude est très nécessaire et aide considérablement au
succès final.
IV
DE LA CHASSE DU CHEVREUIL.
La chasse du chevreuil est une chasse extrêmement fine et qui
demande, pour réussir, un veneur qui se donne de la peine et
des chiens de premier ordre ou du moins ayant certaines qualités
DE LA CHASSE DU CHEVREUIL. 167
de premier ordre. Ainsi, il faut qu'ils soient sages et perçants,
qu'ils soient très disposés à garder change, qu'ils soient très
fins de nez et qu'étant sages et de change, ils soient en même
temps tenaces et aimant à travailler d'eux-mêmes, qualités qui
se trouvent rarement réunies. Comme, d'un autre côté, ils n'ont
besoin d'être ni bien braves, ni bien mordants (qualités si rares
chez les bâtards), les bâtards sont généralement les meilleurs
chiens de chevreuil, mais surtout les bâtards de Saintonge ou
dé Haut-Poitou au premier croisement ou avec prédominance
de sang français.
Quant à décrire la chasse du chevreuil, je crois que je ne puis
mieux faire que de m'adresser au grand maître de cette chasse,
le comte de Chabot, qui a bien voulu faire profiter tous les
veneurs de sa science et de sa longue expérience en publiant
son beau Traité de la Chasse du Chevreuil. Je vais donc lui
faire des emprunts dont il voudra bien m'excuser; mais personne,
à mon avis, n'ayant plus clairement et plus simplement décrit
ce que doit faire le veneur qui se livre à ce joli sport, je ne puis
mieux faire que de le prendre pour guide. Si j'ajoute quelques
petites observations basées surtout sur les différences de pays,
il voudra bien m'excuser.
« Lorsque vous ne tenez pas absolument à attaquer un bro-
card, dit le comte de Chabot, attaquez de meute à mort avec
tout l'équipage (que je suppose bon et composé de bons chiens
bien choisis), car du premier coup de collier dépendra très sou-
vent le succès. Si la meute se divise, plusieurs animaux ayant
bondi à la fois, ameutez vivement en faisant rallier au gros de la
meute, de peur qu'un chevreuil trop échauffé ne vous donne
plus tard de l'embarras dans le change. »
Ici je placerai une première observation : c'est que j'ai vu
plusieurs bons veneurs et piqueurs pour chevreuil laisser
chasser leurs chiens pendant plus d'une demi-heure sans rien
dire ; puis, au bout de ce temps, observant le gros des meilleurs
chiens sur un même chevreuil, arrêter les autres chasses et
rallier à la première. A mon avis, ces manœuvres demandent un
IÔ8 LA CHASSE A COURRE.
pays très facile, et je trouve, comme le comte de Chabot, que
l'inconvénient des chevreuils échauffés peut causer plus tard un
grand embarras.
c Au bout d'une heure, l'animal commence à faire retours sur
retours. Il ne faut pas quitter les chiens de tête et, s'ils accusent
double voie en plein fourré où les portées soient suffisantes, nui
doute que le chevreuil ne se soit replié sur ses arrières. Il faut
prendre les retours au petit trot, en sonnant et en encourageant
les chiens. Si au contraire la meute s'est arrêtée sur le bord
d'un chemin macadamisé, d'un fossé plein d'eau, d'une clairière
ou d'un chemin fréquenté, elle peut avoir sur-ailé la voie; le
travail sur les devants est alors indiqué. Il faut donc se garder,
dans le cours d'une chasse, de crier au retour légèrement et
sans se rendre compte de l'hésitation des chiens, défaut trop
commun à nombre de chasseurs, intelligents cependant, mais qui
croient que le chevreuil n'a pas d'autres ruses que de retourner
sur ses arrières. Heureux le veneur qui possède dans son équi-
page trois ou quatre chiens qui commencent d'abord par tra-
vailler sur les devants, car ces chiens feront forcer nombre de
chevreuils et dresseront maître et piqueur !
« Le maître d'équipage ne doit pas laisser au piqueur seul le
soin de suivre de près la meute. Il est indispensable d'être au
moins deux à la queue des chiens, et encore mieux d'être trois.
Avec un équipage habitué à chasser chevreuil, il arrive sans
cesse que les retours sont coupés par les chiens, qui les éventent
soit en chassant par la voie, soit en ralliant à la tête. Si trois
cavaliers suivent les chiens de près, un des cavaliers suit les
chiens qui continuent à chasser la voie droite jusqu'à l'endroit
où le retour a eu lieu, l'autre suit les chiens qui ont coupé le
crochet, le troisième aide le piqueur à faire rallier à la tête les
chiens tombés à bout de voie. On peut remarquer que le che-
vreuil (beaucoup d'autres animaux font de même) a l'habitude,
s'il commence à faire ses retours par la droite ou par la gauche,
de continuer ainsi pendant toute la chasse. Après deux heures
de chasse, vivement mené, l'animal semble à bout de forces; on
DE LA CHASSE DU CHEVREUIL. lÔQ
croit qu'il est près de ses fins, mais il a encore à sa disposition
quatre bonnes ruses dont il se sert parfois avec une intelligente
ténacité : les doubles voies, le bat-1'eau, le change et l'accom-
pagné.
« On dit qu'un chevreuil reprend sa double voie : i° quand il se
met sur le ventre, laisse passer les chiens, et revient en arrière
sur le contre de la voie chassée ; 2° quand, après avoir fait un
demi-cercle, il revient également en arrière, sur le contre de sa
voie. Cette ruse est fréquemment employée par le chevreuil, et
surtout par la chevrette. L'équipage trouvant une voie déjà fou-
lée s'arrête généralement. Le veneur, bien au vent de sa chasse,
s'il ne peut être avec ses chiens, sonnera aussitôt des retours
le plus près possible de la voie chassée et longera les doubles
voies indéfiniment jusqu'à ce qu'il puisse reconnaître le volce-
lest d'aller. Si le volcelest de retour n'est pas marqué, il est
clair, ou que l'animal est remis sur le côté, ou qu'il a fait un
crochet que les chiens n'ont pas relevé. Le veneur fera les deux
côtés de la voie, en commençant par le côté sur lequel le che-
vreuil fait habituellement son retour. »
On voit que toutes ces observations du comte de Chabot sont
faites pour un pays facile, car j'ai chassé dans plus d'une forêt
où suivre les deux côtés de la voie est aussi impossible que de
ne pas quitter ses chiens.
Le chevreuil qui refait ses mêmes ruses pendant le laisser
courre est certainement le chevreuil de meute ; cette observation
est une indication précieuse, dont on doit tenir bonne note. Le
chien qui a connaissance de la double voie, qui la démêle en
criant, est fort rare; c'est une perle précieuse pour un équipage
de chevreuil, surtout dans les forêts où l'on ne peut suivre ses
chiens. La finesse de son nez et un instinct naturel peuvent
seuls apprendre au chien de bonne race à triompher de cette
difficulté. Il y a des chiens chauds de gueule qui crient toujours
sur les retours ; ils sont très dangereux, quand surtout une double
voie se présente, parce qu'ils maintiennent le chasseur dans l'in-
certitude. On doit les réformer sans pitié.
17O LA CHASSE A COURRE.
Pour le bat-1'eau, dans les forêts coupées de canaux, grands
fossés pleins d'eau, rivières, voici ce qui arrive généralement :
Ou le chevreuil a de l'avance et les chiens arrivent à ces obsta-
cles en forlonger, ou il est près des chiens et mené vivement.
Si le chevreuil a de l'avance, il peut avoir fait quatre tours de
son métier : r avoir sauté le canal ou le grand fossé et avoir
piqué en avant ; 2 avoir fait un retour sur les arrières ; 3° avoir
longé le canal ou le fossé en amont, si la profondeur de l'eau le
lui permet ; 4° enfin avoir descendu le ruisseau.
« Le veneur, après avoir laissé à ses chiens le temps de
prendre leurs devants, fera sans hésiter retourner en arrière
son piqueur jusqu'à ce qu'il ait trouvé le volcelest d'aller. Le
piqueur examinera alors si le pied de retour est marqué sur
le volcelest d'aller; pendant ce temps, le maître d'équipage
longera le canal soit en amont, soit en aval. Si le piqueur ne
trouve pas la voie sur le retour et que le défaut n'ait pas été
relevé par le maître d'équipage, en amont par exemple, il des-
cendra le cours d'eau le plus vite possible, en commençant à
l'endroit même où les chiens sont tombés en défaut à l'about de
voie. En travaillant de la sorte, le défaut sera relevé vivement
et sûrement. »
Ici je ferai encore observer que dans nombre de forêts à
moi connues on ne peut suivre les bords des canaux ou fossés
couverts de ronces et d'épines ou d'arbustes et de baliveaux
impénétrables. Le travail excellent indiqué ici y est donc pres-
que impossible.
« Les chiens qui marquent la voie dans une eau claire qui
n'offre aucune portée sont fort rares; cependant ils s'y habituent
encore plus aisément qu'aux doubles voies. Rien n'est beau
comme de voir cinq ou six chiens sûre, criant gaiement et galo-
pant à l'envi dans un canal ou un large fossé. La meute les
suit en courant sur les bords, s'élance à chaque instant dans
l'eau et, n'ayant pas connaissance de la voie, bondit sur les
berges jusqu'à ce que les chiens qui travaillent sur les côtés
aient redressé la sortie de l'eau.
DE LA CHASSE DU CHEVREUIL. 17Î
« Si au contraire le chevreuil n'a pas d'avance, il n'a ni le
temps ni la volonté de faire un retour : ou il bondit par-dessus
le canal ou le fossé, et alors l'équipage n'hésite pas et empaume
facilement la voie de l'autre côté; ou il le longe soit en amont,
soit en aval. Deux hommes travaillant au trot, l'un en remon-
tant, l'autre en descendant le cours de l'eau, suffisent pour avoir
promptement raison de cette difficulté. » , :;,
Ici je renouvellerai l'observation que j'ai faite plus haut : dîest
que tout le travail s'applique à un pays facile où l'on peut suit
vre le bord des canaux, grands fossés, rivières, etc., où le revoir
est commode. Mais que de bois et de forêts où ces fossés,
canaux, rivières sont inabordables, où le travail indiqué ci-dèssus
ne peut se faire et où l'intelligence du chien est la seule ressource,
car il doit presque tout faire par lui-même!
« Le chien qui garde le change, le garde par la finesse seule
de son odorat, qui lui fait distinguer la différence des effluves de
Tanimal échauffé avec ceux qui s'échappent du corps d'un ani-
mal qui vient d'être lancé. C'est ce qui fait la difficulté ou même
l'impossibilité de garder change, si vous avez plusieurs animaux
également échauffés.
< Un animal frais bondit, pendant la chasse, au nez des chiens
de tête et sur un endroit découvert : souvent les meilleurs chiens
font quelques pas à sa suite et pendant tout le temps que l'ani-
mal est en vue; mais à peine est-il entré au fourré, que le chien
sûr de change s'arrête, prend à la branche, goûte la voie et
refuse net. Son odorat est donc son seul guide, puisque la finesse
même de sa vue avait été mise en défaut.
« Mais comment le maître d'équipage s'aperçoit-il du change?
11 s'en aperçoit immédiatement si ses bons chiens s'arrêtent et
rerasent la voie. Dans le cas contraire, il peut encore reconnaître
le change quand, suivant ses chiens de près, il voit les meilleurs
mollir et céder la tète aux plus jeunes. Il peut aussi reconnaître
le change en s'assurant du pied ; mais il faut être bien fort pour
être sûr du pied à cette chasse, ainsi que je l'ai dit. Il faut, s'il
croit qu'il y a change, arrêter la meute et faire tout le travail
172 LA CHASSE A COURRE.
indiqué, et, aussitôt que les vieux chiens reconnaîtront la voie,
ils reprendront d'eux-mêmes leur rang, porteront la tète, chasse
ront plus gaiement que les jeunes.
« Si, comme il arrive parfois, le chevreuil a disparu, s'est éva-
noui en quelque sorte, si le change bondit de tous côtés et que
les difficultés paraissent insurmontables, vous n'avez qu'une res-
source: ramenez au plus vite la meute à l'endroit même où, pour
la dernière fois, vous êtes certain d'avoir eu la voie de votre ani-
mal de chasse. Vous avez quelque chance, ou de démêler la ruse
du chevreuil, ou de le relancer près de l'endroit où il a fait bon
dir le change.
« Avez-vous le bonheur d'avoir un ou plusieurs chiens de
change : ou, s'arrêtant sur la voie, ils reviendront dans les allées.
indication déjà précieuse et qui suffit habituellement ou bien
ils travailleront d'eux-mêmes sur les devants, sur les côtés.
sur les retours, agrandissant peu à peu leurs cercles, jusqu'à ce
qu'ils aient retrouvé leur voie. Heureux le chasseur de chevreuil
qui possède quelques chiens qui s'arrêtent d'eux-mêmes sur un
change et rejoignent le cheval du piqueur!
c Comment enfin former des chiens de change? Creancer à
fond sa meute, chasser le plus souvent possible dans les forêts
vives, suivre ses chiens de près et les observer, faire la plus
grande attention au pied du chevreuil, à ses formes différentes
pendant les phases de la chasse, ne jamais permettre à ses
1 chiens de chasser et surtout de forcer un animal de change, mais
sonner plutôt vingt fois de suite la retraite manquée; découpler
\ fréquemment, pour dompter la fougue des jeunes chiens : tels
I sont, avec le temps et la patience, les meilleurs moyens pour
former des chiens de change ; mais comme, au résumé, d'un mau-
vais chien on ne peut jamais en faire un bon, choisissez dans
I les bons équipages de chevreuil la race qui vous convient pour
cette chasse si fine et si difficile et procurez-vous surtout, coûte
| que coûte, au moins un chien de change. S'il est jeune et vite,
ce sera le maître d'école de votre meute ; à lui seul il peut la
former. S'il est vieux, en le découplant en relais après une heure
DE LA CHASSE DU CHEVREUIL. 173
de chasse, alors que les difficultés sérieuses commencent à
surçnr, il sera, malgré son âge, l'espérance et le soutien du
veneur.
« L'accompagné est la ruse la plus dangereuse, même pour le
veneur expérimenté, par la raison bien simple que les meilleurs
chiens de change, sentant tout à coup une voie fraîche, s'arrêtent
généralement; d'où il suit que le chasseur, s'il n'a pas la connais-
sance par une vue ou un volcelest de l'accompagné, croit natu-
rellement à un change et, par là même, est exposé à se tromper
dans le travail qu'il fait faire à sa meute. C'est donc la ruse qui
déroute ordinairement le plus habile veneur comme la meute la
plus parfaite.
« Le brocard s'accompagne fréquemment; la chevrette use
rarement de ce stratagème, mais fait plus de doubles voies et
bat l'eau plus souvent.
« Quand la vue ou le volcelest vous ont démontré que plu-
sieurs chevreuils courent devant la meute, encouragez surtout
vos bons chiens en travaillant lentement et sagement avec eux sur
les devants, n'arrêtez pas la meute, gardez-vous de gronder vos
vieux chiens, mais modérez seulement l'ardeur des jeunes ; exa-
minez très attentivement les allures des bons chiens de change,
car dans un long accompagné, l'animal de meute peut se déta-
cher quelques pas et vous pourrez remarquer que vos bons chiens
de change en refont pour s'arrêter ensuite un peu plus loin : c'est
la preuve que l'animal de meute s'est rehardé. Si vous voyez vos
chiens de change se refroidir et s'arrêter tout à fait, retournez
en arrière au point où l'accompagné a eu lieu et reprenez les
doubles voies; souvent les rusés brocards se remettent, après
avoir fait bondir une harde, ou reviennent sur les arrières. Tra-
vaillez alors vivement comme pour les doubles voies : vous n'avez
plus guère que cette chance de relever le défaut.
c Si ce travail difficile n'aboutit à rien, il faut alors prendre
son parti et faire les grands devants et porter franchement la
meute à un kilomètre ou deux en avant et en arrière de l'endroit
où l'accompagné a eu lieu.
174 LA CHASSE A COURRE.
c Le chien de change qui chasse gaiement raccompagné est
une perle bien rare.
« En toute circonstance, ayez une prudence extrême et beau-
coup de sang-froid. Si la journée est mauvaise, que le chevreuil.
ayant rusé, se soit forlongé, ait fait sa chasse, puis se soit rasé,
après avoir pris une heure d'avance, il s'est alors refroidi, s'est
ressuyé, double écueil et pour le chien et pour le veneur. Écueil
pour le veneur, qui, s'en rapportant seulement à sa vue, croit
que le chevreuil ressuyé, quand il repart au nez des chiens, est
un chevreuil frais ; écueil aussi pour le chien de change, qui ne
reconnaît plus dans la voie d'un animal refroidi les effluves de
son animal échauffé. Aussi, au lieu de crier arrête sur un che-
vreuil qui, à première vue, vous semble frais et sur lequel vos
chiens de change hésitent, laissez faire la meute pendant quelques
instants; si vos chiens de change se refroidissent graduellement,
arrêtez la meute : c'est un chevreuil frais; si au contraire leur
ardeur augmente, c'est que l'animal reprend peu à peu, par
l'effet même de sa course, le sentiment qu'il avait pendant la
chasse. Sonnez donc sans crainte des bien aller : c'est votre
animal.
« On peut donner comme règle générale qu'un chevreuil de
chasse relancé fait une assez longue refuite sans retour ni cro-
chet; au contraire, il est rare qu'il n'y ait pas, au bout de quel-
ques secondes, une légère hésitation dans la meute, un balancer
en un mot sur un chevreuil frais qui bondit au nez des chiens.
Il faut tenir bonne note de cette précieuse observation. »
Quant à la connaissance du temps, savoir avant la chasse s'il
est bon ou mauvais, il y a longtemps que j'ai reconnu, comme
le dit fort bien le comte de Chabot, qu'un veneur sage doit dire:
« Je n'en sais rien, mes chiens vous le diront tout à l'heure. »
La curée du chevreuil se fait comme celle du cerf et les céré-
monies sont les mêmes.
Telle est cette admirable description de la chasse du chevreuil,
avec ses difficultés et ses péripéties, que nous devons à un de
nos meilleurs veneurs. Il y a dans ces observations bien des
DES CHIENS PROPRES A LA CHASSE DU CHEVREUIL. 1^5
choses que doivent méditer les veneurs, ceux même qui chassent
autre chose que le chevreuil; car les remarques sur le change,
sur l'accompagné, sont aussi justes pour les autres animaux que
pour le chevreuil et bonnes à appliquer à la chasse de presque
tous les animaux.
DES CHIENS PROPRES A LA CHASSE DU CHEVREUIL.
Le meilleur chien pour chasser chevreuil est incontestable-
ment le chien actuel des meutes de la Vendée, du Poitou, etc.,
de ces meutes aujourd'hui si connues par leurs succès.
Les bons veneurs de ces pays ont su se créer une race admi-
rable pour cette chasse, parce qu'ils ont introduit dans ces deux
remarquables races du Poitou et de la Saintonge juste ce qu'il
fallait de sang anglais pour leur donner plus de train, mais sur-
tout plus de fond et de santé; mais plus leurs bâtards ont de
sang français, meilleurs ils sont. Si vous tournez trop à l'anglais,
vous aurez un chien qui n'aura pris de l'anglais que ses mauvaises
qualités et qui aura perdu les grandes qualités de ces belles
races françaises.
Si même vous pouvez trouver pour cette chasse des chiens
anglais qui soient très bons, il est notoire qu'avec une meute
de chiens anglais même excellents personne parmi les veneurs
de ces pays qui l'ont essayé, n'a pu forcer régulièrement de
chevreuil; j'ose même dire qu'ils n'en a peut-être jamais pris
que par raccroc. C'est que le chien anglais, comme je l'ai dit et
répété, n'est pas un chien de change, parce qu'il n'est pas né et
élevé de chiens de change, chiens qui sont inutiles en Angleterre
(sauf pour la chasse du lièvre), et parce qu'il a rarement le nez
très fin, chose indispensable pour être un vrai chien de change.
Tous les meilleurs veneurs de la Vendée et du Poitou vous
diront que leurs meilleurs cjiens sont leurs bâtards ayant une
prédominance de sang français, et ils ont pour le produire un
I76 LA CHASSE A COURRE.
talent extraordinaire. De plus, ils tiennent beaucoup à croiser les
chiennes de change avec les chiens de change, et depuis plus de
quarante ans qu'ils élèvent ainsi (et avec deux races françaises
célèbres par ces mêmes qualités de change), ils sont arrivés à
produire des chiens qui naissent avec de grands dispositions a
cette qualité et qui la montrent dès leur deuxième année de
chasse. L'on peut voir, d'après la description que je viens de
donner de la chasse du chevreuil, combien cette qualité est
nécessaire et même indispensable.
Je conseillerai donc à tout veneur qui veut monter un équipage
pour chevreuil de ne prendre ses chiens que dans les bonnes
meutes pour chevreuil de la Vendée et du Poitou. S'il peut se
faire céder quelques chiens de tête, bien sûrs de change, pour
servir de maîtres d'école aux autres, il arrivera vite à un résultat.
et s'il veut suivre le mode de croisement et d'élevage de ces
messieurs, il pourra au bout d'un certain temps avoir un équi-
page qui vaudra les leurs, surtout s'il étudie avec soin les règles
de cette chasse, si bien posées par le comte de Chabot.
CHAPITRE XV
LE SANGLIER.
Ici je rentre dans mon do/naine, le cerf, le sanglier et le loup
étant les trois animaux que j'ai le plus chassés et étudiés dans
ma vie de veneur. Il ne faudra pas s'étonner si ce que j'en dis
diffère même en plusieurs points de ce que j'écrivais dans mon
Traité de Vénerie publié en i858, car trente ans se sont passés
depuis, et trente ans de pratique continue apprennent bien des
choses. Grâce à Dieu, je n'ai jamais eu la prétention d'avoir la
science infuse et je suis convaincu que si je chassais encore
longtemps, ce qui est très peu probable, j'apprendrais encore
beaucoup.
Avant de décrire le sanglier et sa chasse, je ferai observer
qu'on a généralement l'idée bien fausse qu'il est très facile de
chasser le sanglier, qu'on peut faire cette chasse avec toute
espèce de chiens, même les mauvais, qui sont, dit-on, assez bons
Pour cela; c'est une grande erreur.
Évidemment si l'on veut dire qu'un chien de peu de prix est
12
I78 LA CHASSE A COURRE.
bien assez bon pour se faire tuer, on a raison. Si on dit que la
voie est assez forte pour des chiens n'ayant pas grand nez, on
peut encore avoir raison, à condition de n'avoir jamais à faire de
rapprochera, ce qui est peut-être ce qu'il y a de plus beau et de
plus amusant dans la chasse du sanglier. Si l'on dit que Ton n'a
guère besoin de chiens de change, celui-ci étant impossible à
garder dans la chasse du sanglier, je répondrai à cela que le
change est en effet difficile à garder, parce que, plusieurs sangliers
attaqués ensemble se suivant presque toujours pendant une
chasse, on se trouve presque constamment avoir devant les
chiens des animaux également échauffés. Mais si Ton chasse
avec de bons chiens fins de nez et de change, ils gardent change
presque aussi facilement que sur cerf, surtout si les animaui ne
sont pas chassés depuis aussi longtemps. Mes Saint-Hubert
passaient bien avec leur sanglier au milieu de nombreuses com-
pagnies, sans faire de bêtises; il est vrai que c'étaient de vrais
chiens de change.
D'abord le travail du valet de limier pour sanglier (excepte
dans les grandes forêts très vives en sangliers qui font continuel-
lement échange de demeures) est, après celui du loup, le plus
difficile qui existe. Sa chasse, si on parle de le forcer et non de
le routailler devant quelques chiens, est une des plus pénibles
et dans certains pays une des plus difficiles quant à la réussite.
Un bon animal ragot ou laie ragote de 100 à i5o livres est,
dans bien des pays, des plus durs à prendre. Enfin de bons
chiens de sanglier sont assez difficiles à trouver, car il leur faut
une hardiesse et une bravoure devenues très rares dans les races
actuelles, et il leur faut un fond, un train et une santé peu ordinaires.
De plus, vous avez toujours cette terrible perspective, si vous
avez dans votre équipage 6 ou 8 véritables chiens de sanglier
tenaces, braves et mordants, de les faire tuer et de voir votre
équipage, de bon qu'il était, devenir détestable immédiatement et
incapable de prendre. Ah! s'il s'agit d'attaquer un sanglier et
de le tuer sans s'occuper de le forcer, évidemment ce n'est pas
très difficile. Avec un bon valet de limier, trois ou quatre bons
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u ^
> I
LE SANGLIER. I7Q
chiens français griffons bien braves, de bonnes jambes et un
bon fusil, vous pouvez facilement réussir; mais chasser un san-
glier pour le prendre, c'est une tout autre affaire. Si votre san-
glier n'est pas mené raide au départ et un peu étouffé, si un
défaut, un accompagné, un forlonger lui permettent de souffler,
de pisser, adieu souvent la réussite. Si c'est un gaillard qui a
été souvent chassé, qui ne se trouble pas, qui règle son train,
qui se fait battre dans les fourrés, prend de l'avance et s'en va
alors au trot pour regagner un autre fourré où il recommence le
même manège lorsqu'il se trouve trop poussé, il peut très bien
gagner la nuit en mettant les hommes, les chevaux et les chiens
sur les dents et vous condamner à la retraite manquée. Le ratta-
quer le lendemain demande un pays fait pour cela et des chiens
comme on n'en trouve guère maintenant. Autrefois, dans cer-
tains pays comme j'en ai connus, avec les* chiens qu'on avait,
c'était un jeu de rattaquer son sanjglier de la Veille, et le soir de
la chasse on ne s'occupait que d'une chose, c'était de savoir s'il
pleuvrait pendant la nuit. Aujourd'hui des chiens mis sur des
voies de quatorze ou quinze heures n'y comprendraient pas
plus que vos chevaux. Ces chiens étaient quelquefois insuffisants
pour les étouffer et les prendre le premier jour, c'est possible ;
mais dans les fourrés, les marécages et les épines noires qui
composaient généralement ces bois, vos chiens d'aujourd'hui
feraient-ils beaucoup mieux? Maintiendraient-ils la voie sans être
soutenus de près dans ces immenses enceintes impénétrables?
J'en doute, et je pourrais appuyer ce doute de bien des exemples.
Certainement avec un équipage considérable, 5o à 80 chiens,
des hommes et du monde, il est assez facile de prendre un san-
glier à peu près partout; mais avec un petit équipage de 20 à
25 chiens et un homme, ce n'est pas toujours facile, surtout dans
certains pays, d'autant plus que vous pouvez très bien rester
pour finir votre saison avec 8 ou 10 chiens, naturellement les
plus mauvais, tous vos bons étant restés sur le carreau.
Ces observations faites, je vais parler d'abord du sanglier)
de ses habitudes et ensuite de sa chasse.
l8o LA CHASSE A COURRE.
Le sanglier est conformé à peu près comme le porc domes-
tique; cependant il a généralement la partie inférieure du chan-
frein plus arquée, le boutoir plus fort, les défenses beaucoup
plus grosses, plus grandes et plus tranchantes. Il ya,àmoD
avis, deux types de sanglier très distincts : l'un très armé,
l'autre très peu. Les premiers ont un corps très petit par rap-
port à la hure, un poil noir très épais, très long et très rude,
des défenses d'une largeur et d'une longueur extraordinaires.
Les autres, qui deviennent généralement beaucoup plus gros et
plus pesants, sont très longs, ont une hure très petite par rap-
port au corps, des soies plus courtes et moins rudes, plus grises
ou plus rouges et des défenses beaucoup moins larges, moins
longues et moins fortes; ils sont généralement beaucoup moins
méchants que les premiers et partent souvent de la bauge sans
faire tète.
Les oreilles du sanglier sont droites, plus petites et plus
pointues que celles du porc; les traces (pieds) plus courtes et
plus grosses, les soies plus grosses, plus fournies et plus implan-
tées dans le cuir, le pelage presque noir et la queue asseï
courte et presque droite.
Lorsqu'il court, le sanglier courbe son rein en demi-cercle et
le mâle porte la queue en tire-bouchon. Il naît avec quatre dents,
qui deviennent terribles, deux à la mâchoire supérieure, nom-
mées grèSy contre lesquelles s'aiguisent les deux de la mâchoire
inférieure, qu'on appelle défenses. C'est surtout avec ces der-
nières qu'il blesse et tue ; elles s'allongent à mesure qu'il avance
en âge; dans la vieillesse, elles sont souvent cassées. Le san-
glier a le même cri et presque les mêmes mœurs et les mêmes
habitudes que le porc; toutefois il est généralement doué d'un
détestable caractère; il est très courageux, extrêmement rapide
dans sa course et il a une grande finesse d'ouïe et d'odorat.
La durée de sa vie parait être de vingt à trente ans. Il par-
vient, dit-on, jusqu'au poids de 225 kilos; toutefois je n'en ai
jamais pris pesant plus de 175 kilos. La couleur du sanglier est
habituellement d'un brun noirâtre, plus roux sur le dos, auquel
LE SANGLIER.
181
se môle du gris sur les flancs. Il y en a qui sont absolument
argrentés et quelquefois de blancs jaunâtres provenant probable-
ment de croisements avec des porcs vivant libres dans les bois.
Les soies du sanglier sont dures et raides, partagées à la pointe,
serrées et courbées en arrière sur le dos. Il les relève quelque-
fois toutes droites comme une crinière. En hiver, ces soies sont
mélangées d'un poil doux et frisé ressemblant à de la laine et
qui tombe au printemps. Un pinceau de soies dures'qui se trouve
sous le ventre près du fourreau, et que Ton aperçoit à une cer-
taine distance, peut servir à faire distinguer le mâle lorsqu'il n'a
pas encore de fortes défenses et qu'on ne peut les voir.
Dans les vrais sangliers bien armés, les défenses excèdent
les grès d'un doigt chez le ragot,' de deux doigts chez le tiers
an, de trois doigts chez le quartannier. A ces trois âges, elles
sont des plus meurtrières. A partir de cet âge, les défenses
s'usent ou se cassent, les grès s'allongent en se recourbant et les
défenses arrivent à ne plus dépasser les grès; on dit alors que
le sanglier est miré et il devient moins dangereux. Chez les laies,
les défenses ne sont que des espèces de crochets et ne font que
de légères blessures; toutefois les laies bourrent, frappent,
mordent et cassent ainsi quelquefois les jambes des chiens.
Les sangliers se plaisent généralement dans les grandes forêts
de bois à feuilles, coupées par des marais, des prairies et des
champs cultivés, surtout quand ces forêts ont beaucoup de four-
rés où ils peuvent se cacher. S'il y a dans ces forêts des cantons
d'arbres résineux, ils s'y tiennent volontiers dans l'hiver, couchés
dans les endroits les plus épais, exposés au soleil. On peut dire,
comme règle générale, qu'on ne les trouvera presque jamais en
hiver sur une pente exposée au nord. Mais il y a des sangliers
que nous appelons sangliers de plaine, qui se plaisent dans les
boqueteaux fourrés disséminés dans les gTandes plaines; ce sont
de grands voyageurs, difficiles à rembucher, toujours en route,
parcourant de vastes espaces de terrain et passant d'un pays à
un autre. Du reste le sanglier est extrêmement voyageur. Un
Pays peut être vingt ans et plus sans sangliers, puis tout d'un
l82 LA CHASSE A COURRE.
coup arrivent un ou deux sangliers éclaireurs, et Tannée d'après
une invasion commence, qui s'étend et se propage. Dans ce
siècle-ci, on peut compter deux grandes invasions de sangliers.
Partis de la grande Forêt-Noire en Allemagne, à la suite d'années
de grande sécheresse où la faîne et le gland avaient manqué, les
sangliers passèrent le Rhin de 1816 à 1818 et envahirent les
Ardennes et le Luxembourg, et de là ils se répandirent en sept
ou huit ans dans toute la France jusqu'aux Pyrénées. La seconde
invasion a eu lieu quelques années avant la guerre de 1870. Peu
accoutumés à les voir et à les poursuivre, les habitants des pays
envahis par eux les laissèrent pulluler pendant quelque temps;
puis il se forma des vautraits, on apprit à les chasser et surtout
à les tuer. Généralement au bout de vingteinq ou trente ans, ces
sangliers envahissants sont détruits et il n'en reste plus que dans
les grands centres boisés, comme les Ardennes, la Haute-Marne,
l'Aube, la Bourgogne, le Morvan, la forêt d'Orléans et toutes les
grandes forêts des environs de Paris : l'Aigle, Compiègne, Vil-
lers-Cotterets, Halatte, Fontainebleau, etc. Le reste de la France
n'en voit plus guère qu'accidentellement pendant une période
de vingt à trente ans, jusqu'à ce qu'une nouvelle invasion les
propage des Ardennes à la Bretagne et de la Bretagne aux
Pyrénées.
Les vieux sangliers vivent presque toujours solitaires (d'où
vient qu'on les désigne par ce nom) hors le temps du rut, pendant
lequel ils se réunissent aux laies. Celles-ci forment avec leurs
marcassins et bêtes de compagnie des troupes nombreuses, où il
se livre alors de rudes combats. On rencontre aussi des troupes
dites de grosses bêtes, composées de ragots et de tiers-ans. J'en
ai attaqué une fois une composée de vingt-deux animaux de ce
genre. Dans les grands pays sauvages et déserts, les troupes de
laies et de marcassins sont souvent attaquées par les loups, qui
réussissent presque toujours à en enlever quelques-uns.
Les sangliers font pour se coucher un enfoncement dans la
terre, sous d'épaisses broussailles, ronces ou fougères; cet
endroit s'appelle bauge. Ils se souillent volontiers dans les
LE SANGLIER.
183
endroits bourbeux, et cet endroit s'appelle souille ; ils y revien-
nent presque toujours, même en chasse. Les boutis sont les
fouillures qu'ils font dans leur nuit pour chercher des
racines, des glands, pommes de terre, racines de fougères,
vers blancs* etc. Les vermillis sont les endroits qu'ils ne font
qu'effleurer de leurs boutoirs en marchant.
Lorsque les sangliers ne sont pas tourmentés, Us se rendent
généralement le matin, en revenant de leur nuit, à leur bauge et
les vieux y portent des brindilles et de la mousse pour y reposer
plus doucement. Outre les glands, faînes, fruits, racines, blé, etc.,
qu'ils mangent, les sangliers dévorent aussi les souris, les lape*
reaux, levrauts, jeunes faons de cerfs et de chevreuils, œufs de
faisans et de perdrix, et ils donnent même à la charogne, car ils
sont très carnivores. Ils s'engraissent énormément dans les
années abondantes en faînes et en glands et délaissent générale-
ment les bois qui en sont dépourvus..
Le sanglier passe très souvent d'une forêt à une autre, et s'il
est attaqué, retourne tout de suite sur sa double voie : ce qui a
donné lieu au proverbe le sanglier n'est qu'un hôte. Quand les
sangliers trouvent beaucoup de faînes et de noisettes, ils devien-
nent généralement très méchants. S'ils en sont privés, ils mangent
des racines, des pommes ou des topinambours; ils sont alors
mous et faciles à forcer. Ils aiment à se vautrer dans la fange et
vont ensuite se frotter contre un arbre, principalement contre
les sapins; aussi sont-ils souvent couverts de résine. Ils font à la
fin de l'été de grands dégâts dans les champs de blé, surtout s'il
y a eu auparavant des pommes de terre dans ces champs ; s'ils
n'ont pas une grande nourriture en forêt, ils sortent dans la nuit
pour se jeter dans les récoltes, qu'ils ravagent sans ménage-
ment. Si la nourriture d'un pays ne leur paraît pas suffisante, ils
émigrent.
Seule de tous les animaux sauvages, la laie attaquée par les
chiens ne retourne pas à ses marcassins; ce sont ceux-ci qui vont
la rejoindre, en prenant sa piste dès qu'ils n'entendent plus le
bruit de la chasse.
184 LA CHASSE A COURRE.
Les sangliers dans leur jeunesse s'appellent marcassins et
portent ce nom jusqu'à six mois, époque à laquelle ils finissait
de changer leur poil de livrée contre un autre de couleur rousse
On les appelle alors bêtes rousses; à un an fait, ils s 'appellent
bétes de compagnie et conservent ce nom jusqu'à deux ans et
demi, époque à laquelle le mâle commence à faire bande à pan
et à s'appeler ragot. De trois à quatre ans, il est dit tiers-an, de
quatre à cinq quartanier, à cinq ans vieux sanglier, puis grand
vieux sanglier ou vieux solitaire.
Les sangliers ne sont guère attaqués par les autres ammau,
sauf les vieux infirmes ou tes marcassins par les loups.
Le rut du sanglier commence généralement dans la 1
quinzaine de novembre et dure jusqu'au mois de janvier. Hsi
alors toujours en route, recherchent les troupes où se tronwtt
les laies, attaquent les autres sangliers et se livrent des combats
furieux. J'en ai pris qui avaient ainsi reçu plus de vingt bles-
sures et avaient des morceaux de défenses cassées restés dans
les os ou la paroi. Le sanglier répand alors une odeur très désa-
gréable et sa chair est moins bonne. Après le rut, les vieux san-
gliers abandonnent les laies et se réunissent de nouveau en
troupes avec les jeunes sangliers jusqu'à l'époque de la mise-
bas, c'est-à-dire quatre mois après, aux environs du mois de mai.
Toutefois je ferai remarquer que, seule aussi des animaux sau-
vages, la laie n'est pas très fixe dans l'époque de sa chaleur et de
sa parturition ; car on trouve souvent des marcassins nés à plu-
sieurs mois de différence. Je présume que cela provient surtout
de l'âge des mères.
Quand la laie va mettre bas, elle recherche un fourré dans un
lieu tranquille, y pratique une fosse un peu profonde, qu'elle gar-
nit de % mousse, herbes et brindilles sèches et y dépose en avril,
mai et quelquefois bien plus tard, depuis quatre jusqu'à quinze
marcassins, qui restent plusieurs jours sans sortir. Lorsqu'ils
sont assez forts pour sortir, ce qui ne tarde guère, elle les con-
duit avec une prudence extraordinaire et les défend courageu-
sement, s'ils sont attaqués.
LE SANGLIER. l85
Le jeune marcassin est rayé de bandes longitudinales alterna-
tivement d'un fauve clair et d'un fauve brun sur un fond
mélangé de ces couleurs; c'est ce qu'on appelle la livrée. Il perd
ensuite ces rayures, et dès l'automne sa couleur est un gris sale
mêlé de brun.
Les vieux sangliers, comme les jeunes, perdent au rut la plus
grande partie de leur venaison. Si une laie ayant ses marcassins
Grand vieux sanglier et son page changeant de pays.
est tracassée, elle émigré volontiers d'une forêt à une autre.
Quand elle voyage avec ses petits, elle a l'habitude de s'accom-
pagner d'un grand sanglier.
Ordinairement, quand un grand sanglier change de pays, va
en éclaireur et arrive dans de nouvelles forêts, il s'accotnpagne
d'un plus jeune, qu'on appelle son page et qui marche habituel-
lement à une certaine distance de lui sur les côtés. Si le page est
tué, vous êtes à peu près certain de ne plus revoir 1^ grand
sanglier.
l86 LA CHASSE A COURRE.
Sur la fin de l'hiver, les sangliers restent habituellement dans
les fourrés de ronces et d'épines exposés au midi, où ils vivent
de racines, de vers et de glands.
En été, — juin, juillet, août et septembre, — ils se tiennent
généralement sur le bord des forèts, à portée des grains et des
fruits, et vont se souiller aux eaux les plus proches, où on en
prend facilement connaissance.
En automne, — octobre et novembre, — quand la récolte est
faite et la terre découverte, ils se retirent dans les grands bois,
pour y trouver du gland, des faines, etc., mais cependant donnent
encore dans les vignes et aux pommes dans les pays de pom-
miers à cidre. A ce moment, ils sont généralement assez mé-
chants, car ils sont gras et bien nourris et la venaison les rend
si échauffés et si furieux, qu'ils chargent avec fureur les chiens
et les hommes.
En décembre, étant en rut, ils courent de tous côtés et se
reposent dans le premier endroit fourré qu'ils rencontrent; mais
ils n'y restent pas longtemps. .
II
DE LA CONNAISSANCE DU SANGLIER PAR LE PIED.
L'empreinte du pied du sanglier ressemble assez à celle du
porc; mais cependant, en l'examinant, on remarque : que le
porc ne met pas régulièrement, comme le sanglier, la trace du
pied de derrière dans celle du pied de devant; que ses pinces
sont plus rondes et plus écartées et que les côtés en sont plus
usés ; qu'il appuie plus du talon que des pinces, contrairement
au sanglier ; qu'il a la sole du pied plus charnue, ce qui fait
paraître son pied plus rond et ses côtés plus gros; que ses
pinces sont grosses et usées et non coupantes, et ne forment pas
d'empreintes nettes comme celles du sanglier; enfin que ses
allures sont courtes, irrégulières et tout à fait déréglées.
Il y a des sangliers dont le pied pourrait rappeler celui d'un
DE LA CONNAISSANCE DU SANGLIER PAR LE PIED. 187
cerf à sa seconde tête, si les gardes n'étaient pas là pour faire
distinguer aux plus novices la différence d'animal, car l'em-
preinte des gardes occupe souvent chez le sanglier un espace
double de celui du pied, tandis que les os du cerf n'occupent
guère plus de largeur que son pied.
Une bête mâle de compagnie a déjà plus de pied devant que
derrière et porte toujours la trace de derrière dans celle de
devant, un peu à côté et en dehors, parce que ses suites qui
commencent à grossir lui font écarter les cuisses ; ses pinces
sont déjà fortes et les côtés tranchants. Il donne déjà de- ses
gardes en terre et commence à les bien tourner. A mesure qu'il
devient ragot, puis tiers-an, il devient plus bas-jointé et ses
gardes s'élargissent, s'abaissent par son poids qui augmente ; en
s'écartant davantage le talon s'élargit également et les pinces
s'arrondissent et deviennent plus grosses.
Une bête femelle de compagnie de la même portée aura beau-
coup moins de talon, ses pinces seront pointues, les côtés cou-
pants; elle marchera toujours les quatre pieds ouverts et, en
marchant, mettra bien aussi la trace de derrière dans celle de
devant, mais ce sera en dedans, contrairement au mâle qui les
met en dehors. Cependant à la fin de l'hiver la laie, pouvant être
pleine, retardera dans sa marche et pourra poser ses traces de
derrière en dehors de celles de devant, à cause de la grosseur
de son ventre ; mais ceci ne peut se rencontrer que fin février,
mars ou avril. Ses gardes seront toujours serrées et peu
ouvertes, sauf à la même époque où son poids les fait ouvrir
davantage.
Au résumé, un sanglier mâle se distingue de la laie ou femelle
par ses allures plus grandes, parce qu'il met la trace du pied de
derrière dans celle du pied de devant, mais un peu en dehors ;
parce qu'il a les gardes plus fortes, plus grandes, plus ouvertes,
et plus près du talon que la laie, qui les a hautes et rapprochées
l'une de l'autre et minces. Ses pinces sont toujours beaucoup
plus pointues et plus ouvertes et elle n'a jamais si bon talon
qu'un sanglier mâle. Comme je l'ai dit plus haut, les traces de
l88 LA CHASSE A COURRE.
derrière seront un peu en dedans de celles de devant, sauf quand,
étant pleine, elle est devenue plus lourde.
Le mâle et la femelle ont tous deux la trace de derrière beau-
coup plus petite que celle de devant.
Plus le sanglier mâle vieillira, devenant quartanier, puis grand
sanglier, plus sa sole sera pleine, ses pinces grosses, sa jambe
large et ses gardes plus près du talon, grosses et abaissées:
les rides du pli du paturon entre les gardes et le talon doivent
s'imprimer dans la terre un peu molle et ses allures sont toujours
grandes et bien réglées.
Il arrive souvent que dans la saison du rut les allures du
sanglier sont déréglées. Les sangliers ont souvent un ongle
plus long que l'autre et courbé en croissant; ces pieds se
nomment pigaches et sont une connaissance pour le change.
Mais, outre le pied, on peut encore distinguer le sanglier et
juger de sa taille par les bbutis, le souil et la bauge.
Pour les boutis, le sanglier les fait généralement bien plus
profonds que le porc et, s'il vermille, il le fera toujours droit
devant lui, tandis que le porc vermillera au contraire çàetla,
dans un endroit et dans un autre. S'il donne dans les blés, le
sanglier abattra tout le blé autour de lui : ce que ne fait jamais
le porc. On peut juger aussi de l'âge et de la grosseur du san-
glier par la profondeur et la largeur des boutis et, à ce sujet, je
ferai une remarque que je n'ai vue dans aucun Traité de Vénerie,
mais dont j'ai pu vérifier par moi-même l'exactitude : Dans les
grands hivers, lorsque la terre gèle profondément et longtemps,
comme en 1873 par exemple, beaucoup de laies et de marcassins
périssent, parce qu'ils ne peuvent fouiller le sol pour trouver leur
nourriture, sauf quand les bandes contiennent de grands san-
gliers, qui, avec leurs puissants boutoirs, parviennent à faire des
boutis où les laies, jeunes marcassins et bêtes de compagnie
viennent travailler à leur tour. J'ai suivi attentivement pendant
cet hiver-là le travail des sangliers de façon à m'en assurer, et là
où il n'y avait pas de grands sangliers, on a trouvé des laies et
de jeunes animaux morts de faim.
DE LA MANIÈRE DE DÉTOURNER LE SANGLIER. 189
Quant au souil, par sa longueur et sa largeur on peut juger
de la taille du sanglier, .surtout à sa sortie, par la hauteur à
laquelle il dépose de la vase sur les arbres contre lesquels il se
frotte. Si, après s'être frotté, le sanglier donne dans l'arbre deux
ou trois coups de défense, on peut être certain de sa méchan-
ceté et on devra s'en méfier.
Enfin par sa bauge on juge aussi de la taille et de \a gros-
seur de l'animal ; les vieux la font plus profonde et, en sortant,
ils jettent leurs laissées, qui sont d'autant plus grosses que la
bête est plus vieille et plus grande.
Comme pour le cerf, le pied du sanglier varie suivant les pays,
et un pied de sanglier dans les pays marécageux et sablonneux
ne ressemble pas au pied du sanglier des forêts caillouteuses et
rocheuses. Celui-ci a un pied beaucoup plus court, plus usé,
les pinces bien plus rondes, si bien que, pour la forme du pied
seul (sans les gardes et les allures), un ragot ou tiers-an d'un
pays marécageux ou sablonneux a le pied presque aussi pointu
qu'une laie d'un pays caillouteux et rocheux. Si on ne peut
revoir que d'un seul pied isolé sans juger les allures, le valet
de limier non habitué au pays devra se méfier, car il lui serait
très facile de se tromper. Ces différences dans les pieds, suivant
les pays, existent surtout pour le cerf et le sanglier et peuvent
faire commettre les mêmes erreurs.
III
DE LA MANIÈRE DE DÉTOURNER LE SANGLIER.
Le travail pour détourner un sanglier est à peu près le même
que pour détourner un cerf; mais il est presque toujours beau-
coup plus pénible et plus difficile, le cerf étant généralement un
animal assez sédentaire et qui tient peu de pays, tandis que le
sanglier est un vagabond qui fait souvent un chemin énorme dans
sa nuit, se rembuche rarement dans le bois d'où il est sorti et
fait surtout, quand il a déjà été chassé et est devenu vieux, de
1ÇO LA CHASSE A COURRE.
faux rembuchements très compliqués. Souvent il se remet sur la
lisière d'un fourré, et s'il a connaissance du valet de limier, il tik
au loin. On ne peut plus le rembucher et on ne l'attaquera que si
l'on a de très bons chiens de recri. La journée risque donc sou-
vent d'être perdue.
Devant le travail qu'il a souvent à faire, le valet de limier pour
sanglier doit être très matinal, son limier robuste, très hardi,
ne se rebutant pas et très muet.
Le valet de limier doit enfin connaître la marche habituelle
des sangliers dans le pays où il fait le bois, afin de les chercher
à l'endroit où il a le plus de chances d'en avoir connaissance.
Ces animaux ont, presque partout, des passages à peu près
certains et, en tenant compte des habitudes des sangliers suivant
les saisons, le valet de limier doit savoir où il peut rencontrer
des voies. En décembre, au moment du rut, l'odeur des gros
sangliers est quelquefois si forte, qu'elle rebute le limier. Il faut
y faire attention, car les voies peuvent vous paraître mauvaises
quand elles sont bonnes, et le limier, à ce moment-là, vous don-
nera plutôt connaissance d'une voie plus vieille de bête rousse
ou de bête de compagnie que d'une voie fraîche d'un gros
sanglier.
Mais il y a une chose à laquelle il faut faire très attention,
vu l'odeur que conservent généralement, pendant une nuit
favorable, les voies d'un sanglier : c'est de ne pas s'obstiner à
suivre les voies du relevé et de ne pas les confondre avec celles
de la fin de la nuit ou du rembuchement. Un valet de limier qui
se met à suivre et à travailler une voie du relevé passerait peut-
être plus d'une journée entière à la suivre et à la débrouiller
sans pouvoir même arriver à rembucher l'animal, car trois, quatre
et six lieues sont souvent peu pour la nuit d'un sanglier. Il faut
donc que le limier ne soit pas trop fin de nez et puisse vous
indiquer si la voie est de la veille au soir ou du matin. Il faut
aussi, en suivant la voie, s'assurer si le sanglier marche droit
devant lui sans faire sa nuit, c'est-à-dire sans fouiller pour
manger, sans faire de boutis ou vermillis. Tant qu'il n'en fera
DE LA MANIÈRE DE DÉTOURNER LE SANGLIER. ICI
pas, vous pouvez être sûr que, n'ayant pas encore fait sa nuit, ni
cherché sa nourriture, le sanglier est loin d'être rembuché.
Il est donc inutile de s'obstiner. Il faut donc prendre les très
grands devants si on connaît bien la direction de l'animal et
jug-er où on pourra le retrouver ; autrement on s'expose, à moins
d'une très grande chance et d'une extrême activité, à ne pas pou-
voir le rembucher.
Si le valet de limier s'est assuré que le sanglier a fait sa nuit,
qu'il a fait boutis, fouillis et vermillis, il le fait suivre rapide-
ment à son limier jusqu'aux grands fourrés ou rentrées de forêt,
mais il n'y pénètre pas et se retire, car souvent surtout les
gros sangliers se remettent sur le bord des enceintes, prennent
vent du limier et détalent. Le valet de limier prend alors les
grands devants pour voir s'il a percé plus loin et cerne l'enceinte
par les chemins les plus favorables pour le revoir. Si la voie
vous amène à de hautes futaies où se trouvent des houx, fou-
gères et autres buissons favorables où les sangliers demeurent
souvent après avoir fait leur nuit, il faut bien prendre soin de
ne pas les approcher à mauvais vent, mais briser et prendre les
devants de tous côtés. Si le limier est bon, s'il va bien à la
brisée et surtout s'il évente bien lorsqu'on lui donne le vent
favorable, il est plus que probable que le sanglier est dans
l'enceinte.
Le vieux sanglier fait souvent de faux rembuchements. Il
entre dans l'enceinte, en ressort, y rentre de nouveau, si bien
qu'on finit par être complètement embrouillé. Il faut alors faire
deux choses :
r Tâcher de trouver exactement toutes ses entrées et sorties,
car s'il est entré six fois et sorti sept, il n'est pas dans l'enceinte;
au contraire si vous trouvez sept entrées et six sorties, vous
devez croire qu'il y est resté. Ce qu'il y a de délicat, c'est qu'on
peut quelquefois sur-aller une sortie ou une entrée.
2° Tâcher de s'assurer de sa présence en faisant bien travailler
le limier au vent, et s'il évente bien, vous devez croire qu'il est
resté dans l'enceinte.
IÇ2 LA CHASSE A COURRE.
Mais souvent il entre dans une enceinte séparée d'une antre
par une route, un chemin, un sentier; il en ressort, y rentre et
puis ressort en sautant le chemin pour se remettre sur le bord
de ce chemin, mais dans l'enceinte opposée, si bien que, pendait
que vous vous assurez de ses entrées et sorties dans la première
enceinte, il prend vent de vous et quitte la seconde, pendant qœ
vous vous obstinez après ses entrées et sorties de la première
où vous le croyez remis. C'est ce que j'ai vu un jour plusieurs
fois. Un excellent valet de limier pour sanglier travaillant un tiers-
an qui avait fait de faux rembuchements, au moment où il croyait
avoir sa bonne et dernière rentrée, l'aperçut tout à coup remis
presque sur le bord de l'autre enceinte en face de sa rentrée
Sans faire aucun bruit, il se retira avec son limier qu'il alla atta-
cher à 3oo mètres de là, puis pendant une heure il revint de temps
en temps à pas de loup, et à une certaine distance, s'assurer que
son sanglier n'avait pas bougé. Quand nous vînmes l'attaquer, il
me mena le voir toujours immobile et, conduisant les chiens
découplés derrière les chevaux, nous lui donnâmes toute la
meute à vue.
Quand le revoir n'est pas beau, tous ces faux rembuchements
sont terribles à travailler et causent quelquefois et même souvent
des buissons creux, sans réellement qu'il soit possible de faire
des reproches au valet de limier, qui finirait, si on lui en faisait
trop, par ne plus jamais vous donner à courre des sangliers
offrant des difficultés. Aussi, au sanglier, j'aime mieux un valet
de limier qui vous donne quelquefois un buisson creux surun
animal difficile qu'un homme qui ne vous donne presque jamais
rien : ce qui arrive presque toujours si on le gronde trop pour
un buisson creux donné par hasard. Il faut avoir fait soi-même
le métier de valet de limier pour loup ou sanglier pour savoir
combien il est souvent difficile et combien on est souvent embar-
rassé. Je citerai encore, et par expérience personnelle, comme
indices des difficultés qu'on peut avoir, ce qui se passe quelque-
fois dans les pays marécageux à grands étangs tourbeux. Vous
faites suite d'un sanglier qui arrive à une grande queue d'étang,
DE LA MANIÈRE DE DÉTOURNER LE SANGLIER. iç3
toute en herbe, comme pour la traverser. Au bout de dix pas, la
voie, qui s'imprimait comme dans la neige, cesse tout à coup;
plus de voie, pas un pied, partout une herbe lisse et intacte.
Tous vos efforts pour retrouver la voie sont inutiles, et pourtant
si. faisant le tour de cette queue d'étang qu'il serait dangereux
de traverser, vous allez de l'autre côté en face de votre voie (ces
queues d'étangs ont quelquefois (Je 3oo à 5oo mètres de largeur),
vous retrouverez votre voie sortant. L'herbe et ce terrain tour-
beux se sont refermés complètement sur les traces de votre san-
glier, qui a traversé ; tout est redevenu lisse et intact en ce6
3oo mètres et l'animal n'aura pas laissé la moindre trace.
Une seule chose rend donc le travail du valet de limier plus
aisé : c'est un excellent limier, sûr et travaillant au vent. J'en ai
eu deux entre autres qui, lorsqu'ils travaillaient un sanglier et se
mettaient à porter au vent, m'indiquaient, aussi sûrement que si
je l'avais vu, que le sanglier était là, dans l'enceinte. Cela montre,
comme je l'ai toujours répété jusqu'ici, que l'âme de la chasse
c'est le chien.
Si le sanglier dont vous faites suite fait ses boutis forts et
profonds et les fait tard, s'il s'est souillé et a frappé les arbres
de ses défenses en sortant, soyez sûr qu'il est méchant et
méfiez-vous-en à l'attaque. On peut le serrer d'un peu plus
près en faisant le bois, si toutefois il n'a pas été trop souvent
chassé : ce qui le rend toujours méfiant.
Les laies ayant de jeunes marcassins prennent facilement
vent du trait et il ne faut pas les serrer de trop court, non
plus.
Le valet de limier ayant rembuché son sanglier ne doit pas
manquer de dire s'il a d'autres animaux dans l'enceinte, car ceci
peut faire modifier l'attaque. Certains piqueurs, ne donnant pas
connaissance des laies avec leurs marcassins, peuvent vous cau-
ser beaucoup d'embarras, en vous faisant attaquer comme si vous
aviez un animal seul dans l'enceinte.
Un bon valet de limier pour sanglier, quand il travaille un
animal pour le rembucher ne doit jamais se faire d'avance une
i3
194 LA CHA88E A COURRE.
opinion sur l'endroit où il peut se trouver; c'est son travail et
celui de son limier qui doivent seuls lui indiquer si ranimai est
remis ou s'il est parti. Généralement, quand le sanglier, à la fin
de sa nuit ou du moins ayant fait tout son travail, a fait plusieurs
rembuchements, il y a de grandes chances pour qu'il ne soit pas
loin ; mais peut être, s'il est méfiant, n'est-il pas précisément dans
l'enceinte où il a fait ses divers rembuchements.
Il faut aussi que le valet de limier acquière l'expérience de
juger de quelle heure à peu près sont les voies qu'il travaille.
Ceci est très difficile, mais important pour juger quelles sont tes
dernières voies. Il est difficile de donner des règles précises à
ce sujet, car les empreintes varient d'aspect et de conservation,
suivant les terrains et le temps qu'il fait. Admettons qu'on
travaille sur un terrain assez favorable, mais qui ne soit pas
glaiseux. Le temps sera ou parfait (calme, sans pluie ni trop de
vent), ou médiocre (pluie légère, brouillard ou vent), ou mauvais
(pluie, tempête, etc.). Dans le premier cas, quelque bon et calme
que soit le temps, les dernières empreintes (celles du rembuche-
ment) seront toujours plus fraîches que celles du soir ou de la
nuit ; dans celles-ci la terre se sera un peu émiettée, l'empreinte
sera moins nette, les petites herbes foulées par le pied se seront
un peu relevées, l'air ou le hâle auront un peu défraîchi l'em-
preinte, tandis que dans celles-là elles seront bien nettes, les
herbes foulées seront complètement collées au fond de l'em-
preinte et les bords seront nets et frais. Si le temps est médiocre,
qu'il ait plu un peu partout jusqu'à trois ou quatre heures do
matin, on a plus de facilité, parce que les dernières empreintes
seront les seules bien nettes, excepté toutefois aux endroits cou-
verts où elles auront été abritées de la pluie, ce qui fait croire
quelquefois à des empreintes d'heures différentes; un grand hâle
peut les vieillir d'aspect et, si la pluie est au contraire tombée le
matin et pas partout, elle peut faire paraître plus vieilles les
dernières empreintes du rembuchement. S'il a fait très mauvais
temps, grande pluie toute la nuit, les plus vieilles voies seront
lavées et plus effacées que les autres. S'il a gelé blanc, les
DE L'ATTAQUE DU SANGLIER SANS FAIRE LE BOIS. iç5
empreintes du matin sont faciles à distinguer tant que la gelée
blanche n'est pas fondue, car celles du matin sont les seules
qui soient marquées sur la gelée blanche; mais si la gelée a été
plus forte et que la terre ait pu porter l'animal, il est probable
que, la gelée ayant été plus forte le matin, ce sont les empreintes
les dernières faites qui seront les moins marquées. Il faut alors
tâcher d'en revoir sur des feuilles ou des herbes, \à enfin où
ranimai a pu laisser des traces ; mais alors le service du limier
est à peu près le seul guide.
En un mot, outre l'activité, il faut au valet de limier une
bonne vue et un bon jugement pour raisonner du travail qu'a
pu faire l'animal, et c'est peut-être là ce qui manque le plus
ordinairement aux valets de limier.
IV
DE L'ATTAQUE DU SANGLIER SANS FAIRE LE BOIS.
Beaucoup de petits équipages de sanglier (tout équipage
uniquement pour sanglier s'appelle vautrait), en France, atta-
quent le sanglier sans faire le bois. Dans ce cas, ils doivent
avoir des rapprocheurs fins et sûrs, autrement ils n'attaqueraient
que par hasard ou « saint Hubert les protégeant leur mettait un
sanglier devant le nez.
Si. vous avez la chance d'avoir quelques chiens bons rappro-
cheurs et sûrs, n'attaquant que le sanglier, il vous faut d'abord
envoyer le reste de la meute à un passage où vous croyez avoir
chance de la donner et vous partez d'assez bonne heure avec vos
rapprocheurs prendre connaissance des voies aux passages habi-
tuels. Si vous trouvez une voie que vos chiens peuvent rappro-
cher et sur laquelle ils crient bien, vous n'avez qu'à les suivre,
en les appuyant dans leur travail et en vous assurant constamment
du pied; en un mot vous faites le travail du valet de limier, sauf
que vos chiens sont libres et que, s'ils sont bons rapprocheurs,
ils activent énormément le travail que vous auriez fait avec le
ig6 LA CHASSE A COURRE.
limier. Si vous avez pris une voie qui ne soit pas trop haute et
que le sanglier n'ait pas fait trop de nuit, si vous n'avez pas
perdu trop de temps dans les embarras et les défauts à relever,
vous pourrez lancer votre animal pas trop tard et vous vous sera
profondément amusé. Rien n'est plus joli pour le vrai veneur
qu'un joli rapprocher; mais si vous avez pris une voie un peu
haute ou que vous ayez eu de grandes difficultés, ou que votre
sanglier ait fait une trop longue nuit, vous pourrez bien ne le
lancer que trop tard pour pouvoir faire autre chose que de le
raccourcir au fusil ou de le rattaquer le lendemain. Dans ce cas,
si la nuit a été bonne et que le pays et vos chiens vous le per-
mettent, vous jouirez d'un grand plaisir, comme je l'ai fait moi-
même pendant de longues années.
On a souvent dans ces rapprochers de grandes difficultés
à vaincre, soit que des troupeaux aient passé sur la voie depuis
le passage du sanglier, soit que, dans le Morvan et le Bourbon-
nais par exemple, les troupeaux de porcs demi-sauvages non
seulement embrouillent les voies, mais encore attaquent les
chiens. Il fallait alors enlever la meute, et faire les grands
devants en dehors des futaies où se tenaient habituellement ces
troupeaux; mais en somme on n'a qu'à appliquer à un rappro-
cher de sanglier ce que j'ai dit pour le travail du valet de
limier.
Une autre difficulté de cette façon d'attaquer le sanglier, c'est
de donner la meute à propos, et si elle n'est pas avancée par un
homme capable et adroit, on est exposé à ne chasser qu'avec
les rapprocheurs. C'est le côté faible de ce système ; mais comme
dans certains pays, avec peu de monde, on ne peut pas agir
autrement, j'ai cru devoir signaler ce genre d'attaque.
On ne peut guère, sans l'avoir vu, se figurer la finesse de nez
de certains rapprocheurs qu'on avait autrefois, surtout en Mor-
van et en Bourbonnais. Je me rappelle entre autres deux chasses
où, ayant arrêté le samedi soir sur un sanglier attaqué trop tard,
nous reprîmes le lundi matin de bonne heure les voies du
samedi soir, toute la journée nous débrouillâmes les voies de
DE LA CHASSE DU SANGLIER. 197
ces deux nuits sans lancer. Le mardi matin nous reprîmes la voie.
L'animal avait fait une nuit assez courte; nous le lançâmes de
bonne heure et le prîmes. Or, sur quinze ou seize rapprocheurs
que nous avions, il y en avait bien cinq ou six qui rapprochaient
les voies de trente-six heures. Il est vrai de dire que dans bien
des pays nous n'aurions pu faire de même et ces mêmes chiens
chez moi, en Normandie, ne rapprochaient au plus que des voies
de douze heures. Nos rapprocheurs étant connus, nous fûmes
plusieurs fois priés par des veneurs voisins qui avaient un grand
vautrait de chiens anglais, de venir leur relancer un sanglier
qu'ils avaient abandonné, presque pris, la veille.
La grande qualité des rapprocheurs que nous avions alors,
mon cousin le comte de B. et moi, était d'être vites dans
leurs rapprochers. Ce n'étaient pas des chiens musards et criant
sur place, mais bien des chiens très perçants et débrouillards ;
aussi la moitié au moins des rapprochers se faisait-elle au grand
trot. Autant j'aime un bon rapprocheur actif et perçant, autant
je déteste un rapprocheur musard, hurlant sur place et ne
sachant où va la voie. Ces chiens ne sont bons à rien.
DE LA CHASSE DU SANGLIER.
Je suppose que vous chassez sanglier en faisant faire le bois
et avec l'intention de forcer. Dans ce cas vous ne devez pas
oublier :
r Que si les sangliers que vous chassez sont vigoureux et
bien nourris de faînes et de glands, s'ils sont souvent chassés,
et toujours en haleine, vous ne les prendrez que si vous les
étouffez.
2* Que si pendant la chasse votre animal trouve le moyen de
se reposer, de souffler, de pisser, vous aurez grand mal à le
prendre.
3 # Que si vous avez des chiens qui n'aiment pas le fourré et,
I98 LA CHASSE A COURRE.
dans le cas où l'animal s'y fait battre, qui le lâchent ou ao
moins pour une grande partie prennent les chemins et sentiers
le long de ces fourrés où votre sanglier se mêle à des compa-
gnies, votre chasse est gravement compromise. Ces chiens, pour
la plupart, prendront à vue sur les sangliers étrangers qui,
effrayés, sortiront du fourré et vous feront faire des changes, si
même ils ne vous font pas perdre les quelques bons chiens qui
peuvent être restés sur votre animal.
4* Que si vous attaquez une compagnie, vous pouvez, si vous
avez le moindre embarras au milieu de la chasse, faire change
même avec d'assez bons chiens. Les sangliers de la compagnie
seront généralement partis après vous, pour rejoindre votre ani-
mal. Ils seront également échauffés, et garder change dans ces
conditions est très difficile.
Ces observations faites, si vous êtes vigoureux et que vos
hommes le soient aussi, s'ils ne craignent pas le fourré, attaquez
votre animal vigoureusement avec toute votre meute, s'il est
seul. Ne découplez que vos chiens les plus braves et les meil-
leurs, si votre animal est en compagnie. Soutenez vos chiens
dans le fourré, sonnez vigoureusement et tâchez de l'effrayer et
de le faire détaler grand train ; plus il sera poussé vite au départ,
plus vous aurez de chance de réussite. En chasse, sonnez vigou-
reusement, mais toujours à la tête et près des chiens, autrement
les chiens mous et un peu craintifs quitteraient la voie pour
revenir à vous. D'ailleurs il faut toujours être à portée des chiens
de tête pour les soutenir lorsque le sanglier fait mine de s'ar-
rêter et de faire tête, et il faut l'empêcher de randonner dans un
fourré et de reprendre haleine ou le forcer à passer vivement
dans les compagnies sans s'y mêler, ce qui n'est pas commode.
Il faut tâcher qu'effrayé du bruit il gagne du pays, car son
instinct le poussera toujours à chercher des fourrés pour s'y
défendre ou des compagnies pour s'y mêler. Là d'ailleurs il
se sent le maître, prend le trot ou le pas, attend les chiens, les
bouscule et les dégoûte, blesse ou tue les meilleurs.
Le sanglier fait rarement de grands retours; il se fait battre
DE LA CHASSE DU SANGLIER. IÇ/J
dans un fort ou file droit devant lui. S'il ruse, c'est dans un
fourré, afin de gagner de l'avance et de prendre du pays pendant
que les chiens démêlent ses ruses. S'il se fait battre après s'être
mêlé à une compagnie, appuyez vos chiens, mais tâchez de ne
pas avoir dans les chemins ou sentiers des chiens prêts à partir
sur le premier sanglier qu'ils verront sortir du fort. Les bons
chiens bien braves et restant bien sur leur animal dans les four-
rés ne feront guère change et c'est à eux qu'il faut rallier con-
stamment; rappelez-vous que c'est là, avec la rareté de la bra-
voure dans le chien, une des grandes difficultés de la chasse du
sanglier.
Lorsque le sanglier a couru et qu'il commence à s'échauffer, il
passe dans les marais, ruisseaux, étangs dont il a connaissance
dans le pays et il ne manque pas de s'y souiller. Il se souille
même souvent au milieu d'un chemin, dans quelque ornière où il
y a un peu d'eau.
Le sanglier, mais principalement une bête de compagnie, un
ragot in, ou une laie de 120, est plus difficile à forcer que le
cerf dans certains pays. S'il ne quitte pas les fourrés, il pourra
bien ne pas être pris; mais, s'il fait de beaux débuchers ou qu'il
débuche par futaies, boqueteaux ou bois clairsemés, il peut
être pris assez lestement. Comme pour le cerf, la nourriture
influera beaucoup aussi sur sa prise. S'il n'a mangé ni faines ni
glands, s'il s'est nourri de topinambours ou autres racines aussi
peu fortifiantes, il n'aura guère de fond et pourra être pris assez
lestement.
Lorsqu'on voit le sanglier par corps, on sonne la vue. On ne
doit pas crier taïaut, mais bien vlôo, vlôo\ c'est le terme consa-
cré en vénerie. On doit observer, pour distinguer en courant la
laie d'avec le sanglier, que la laie a généralement la hure plus
longue, moins grosse que le sanglier. Elle porte toujours en
marchant la queue basse ou droite, tandis que le mâle la porte
en tire-bouchon.
Le sanglier change souvent d'aspect pendant la chasse; sa
couleur varie, d'abord s'il est mouillé, ensuite s'il s'est souillé.
200 LA CHASSE A COURRE.
Mouillé il paraît plus noir, souillé il paraît quelquefois tout gris.
suivant l'espèce de boue qui le couvre. Il varie même de taille à
l'œil : se coule-t-il effaré et vu en contre-bas, il paraît plus petit:
si, au contraire, il saute furieux et gaillard la crinière hérissée, il
paraît beaucoup plus grand. Vu en contre-haut, il paraît quel-
quefois beaucoup plus haut qu'on ne l'avait jugé, si bien que les
veneurs mêmes qui en ont une grande habitude peuvent s'y
tromper.
Le sanglier sait fort bien ne pas débucher lorsque les terres
sont molles et détrempées et, à moins d'être complètement
W^-5
effrayé, il ne s'y risquera guère. Seuls les sangliers de plaine
qui ont l'habitude de ces terrains, s'y hasarderont, et encore ne le
feront-ils qu'après avoir essayé de prendre de l'avance; ils sau-
ront choisir dans les plaines les champs les plus durs et éviter
les grands labours.
Ainsi que je l'ai dit, le sanglier qui commence à être malmené
cherche généralement les fourrés, pour reprendre haleine et ren-
voyer les chiens, mais il ne se fait habituellement pas relancer,
comme le cerf, avant de se faire prendre. Il s'arrête et fait tète
ou continue au pas et au petit trot, renvoyant les chiens quand
ils le pressent de trop près, et si cet halhali courant a lieu dans
des fourrés ou d'épais gaulis, on est quelquefois longtemps avant
DE LA CHASSE DU SANGLIER. 20Ï
de pouvoir le servir. J'aime mieux les sangliers qui font tête
carrément et chargent les chiens ou qui restent immobiles comme
hébétés. J'ai souvent vu manquer des sangliers faisant ces hal-
lalis courants à la tombée de la nuit et qu'on ne pouvait parve-
nir à servir. Le mieux est de se porter en avant de la ligne que
suit ranimai sur ses fins avec une carabine; quand il vous voit
devant lui, il vous charge généralement et on peut alors le tuer
en le visant entre les deux yeux. Quand il fait encore jour et que
l'endroit n'est pas défavorable, on peut le servir au couteau
facilement si les chiens sont mordants et qu'on saisisse bien le
moment favorable; mais, si l'animal est gros, méchant et encore
bien vigoureux et si l'endroit n'est pas propice, mieux vaut cent
fois le servir à la carabine que de risquer de se faire tuer ou
blesser gravement et bêtement. D'ailleurs, quand le sanglier est
bien positivement forcé, mieux vaut, s'il est armé dangereuse-
ment, le servir sans retard, pour éviter de faire tuer ses
meilleurs chiens, lesquels dans un vautrait nous sont si souvent
indispensables. Si j'avais tous les bons chiens que j'ai fait
tuer ainsi, j'aurais de quoi monter deux vautraits comme il
n'y en aurait guère. Aussi, lorsque le sanglier approche de ses
fins, il faut que le piqueur serre ses chiens de près, pour les
secourir.
Le sanglier mort, on lui enlève les suites et on le fait fouler
aux chiens en les flattant de la main, surtout les jeunes. Les
piqueurs sonneront l'hallali et lèveront la trace droite.
On pourra ensuite faire la curée du dedans, qui suffira bien,
car les chiens n'aiment généralement pas la chair du sanglier.
Les chiens anglais sont ceux qui en mangent le mieux.
Aussitôt l'hallali sonné, il faut visiter les chiens pour voir
ceux qui sont blessés et les panser. A cette chasse, les piqueurs
doivent toujours avoir de quoi les panser, dans une trousse
qui contiendra : un bistouri ; des épingles assez fortes en bon
fer doux; du bon fil bien ciré; un flacon de teinture d'aloès.
Quelques bandes de toile sont aussi utiles. Si la blessure du
chien est grande et longue sans être trop profonde, on lave la
202 LA CHASSE A COURRE.
plaie, en ayant soin qu'aucun corps étranger n'y reste; on rappro-
che les bords, et de 3 en 3 centimètres on met une épingle
à travers les deux lèvres de la plaie, qu'on réunit par du fil
bien ciré et bien noué. C'est le meilleur système pour recoudre;
les épingles empêchent le chien de couper le fil et, un des fils
cassant ou étant coupé, les autres tiennent. Si les boyaux sor-
tent et ne sont pas coupés, on les lave avec soin, et on les fait
rentrer à leur place, en ayant soin, si la blessure est trop étroite,
de l'élargir un peu au bistouri pour ne pas comprimer les
boyaux en les replaçant. On recoud, comme je l'ai dit plus haut
en rapprochant un peu plus les épingles ; seulement on fera bien,
avec une bande, de maintenir les intestins par une espèce de
ceinture qui les empêche de peser trop sur la plaie. Une fois
rentré au chenil, le mieux est de ne rien mettre sur la plaie; les
autres chiens la lécheront et elle guérira toute seule. S'il se
forme un abcès, il faut l'ouvrir avec une pointe rougie au feu et
assez profondément, puis on y injecte de la teinture d'iode.
Si les boyaux ont été coupés ou déchirés, il n'y a rien à faire:
le chien est perdu.
VI
DES CHIENS PROPRES A LA CHASSE DU SANGLIER.
Les chiens les plus braves, les plus vigoureux, les plus chas
seurs et les plus tenaces sont les meilleurs pour le sanglier. Si
vous ne tenez pas à forcer et que vous n'ayez qu'une petite
meute, prenez des griffons Vendéens ou Nivernais ; avec peu de
chiens, quand vous les aurez domptés, créances et mis en voie,
vous ferez autant de besogne qu'avec une grande meute. Les
Artésiens sont bons aussi pour cette chasse; ils forment souvent
d'excellents rapprocheurs, chassent bien au fourré, sont braves
et tenaces, mais ils ne sont pas vites.
Si vous voulez forcer et ne pas vous servir du fusil, il vous
faut des chiens vites et très perçants. En chiens français les
DES CHIENS PROPRES A LA CHASSE DU SANGLIER. 203
Poitevins étaient très bons pour prendre des sangliers, car ils
étaient vites, perçants, bons au fourré et braves; mais comme
vous pouvez avoir beaucoup de chiens tués qu'il serait difficile
de remplacer et que de plus il serait vraiment malheureux de
faire tuer ainsi de bons Poitevins qui méritent un meilleur sort,
je vous conseille de vous monter en chiens anglais. Les Ven-
déens (Bas- Poitou) conviennent bien aussi ; mais ils n'ont pas
tout à fait assez de fond et par suite sont souvent sujets à
baisser de pied à la fin de la chasse, lorsque précisément il fau-
drait qu'ils redoublassent de train. Les Anglais sont faciles à se
procurer et ont le grand avantage de ne pas coûter cher ; quand
ils sont tués, la perte n'est pas grande et les regrets modérés.
Achetez-en donc un certain nombre, réformez tout ce qui est
muet, tous ceux qui ne sont pas mordants et tous ceux qui
lâchent au fourré, ceux qui suivent les. allées ou qui coupent, et
en peu de temps vous pouvez vous former un vautrait qui ne
rapprochera probablement pas, mais qui pourra vous prendre
des sangliers assez vivement.
Dans les chiens anglais, il y en a de bons de tout poil ; mais
cependant j'ai un faible pour les chiens gris, dont j'ai souvent vu
des spécimens meilleurs à cette chasse que les autres. Je trouve
que généralement ils sont chasseurs, aiment à prendre, qu'ils
sont plus tenaces à leur voie, qu'ils travaillent mieux dans les
défauts et qu'ils sont moins sujets à rester dans les chemins; de
plus on trouve plus souvent chez eux des chiens qui ont un peu
de nez.
Si vos chiens anglais attaquent trop mal,, ce qui arrive souvent
dans les fourrés (autant ils sont braves à la mort quand l'animal
est pris, autant les mêmes chiens sont souvent lâches pour
lancer ou aboyer à l'attaque un sanglier dans un fort), tâchez de
leur adjoindre trois ou quatre bons chiens français bien braves
et bien chassant au fourré; ils vous rendront service, quitte à
les faire reprendre après l'attaque pour ne pas les éreinter. Si
vous avez une petite meute, faites comme moi, joignez-y trois
°u quatre gros bulls-terriers intrépides ; je vous réponds que
204
LA CHASSE A COURRE.
tous vos sangliers seront lancés et partiront vivement, que les
bulls auront bien vite donné du cœur et de la bravoure aux
autres chiens; mais ces chiens ne vous serviront que pour
l'attaque, car ils ne tiennent guère le train plus d'une demi-
heure. C'est suffisant pour faire détaler votre animal de n'im-
porte quel fourré.
DP
«A«R>-
^«P^
CHAPITRE XVI
LE LOUP.
La chasse du loup est le plus beau courre de la Vénerie
française. C'est l'animal dont la chasse a donné lieu à tant
d'histoires et tant de souvenirs, qui a illustré tant de veneurs et
tant de piqueurs et à laquelle on doit la création en France des
chiens incomparables qu'on n'aurait pu trouver nulle autre part.
Qu'y avait-il de plus remarquable qu'un vrai bon chien de loup?
Dans quel pays aurait-on trouvé des chiens comme ceux qui
composaient les anciennes meutes des chasseurs de loups?
Quels chiens auraient pu ou pourraient égaler les chiens qui
composaient les meutes du Grand Dauphin, de MM. de Larye,
de Saint-Victor, de Brière d'Azy, d'Esneval, de Vichy, de
Charles Brosse, de Moreton, de Vitry, de La Besge? Nez, bra-
voure, train et fond, ces excellents chiens devaient réunir toutes
ces qualités au suprême degré ! Aujourd'hui existe-t-il un seul
équipage ne chassant que le loup? J'en doute. Certes beaucoup
d'équipages en France chassent encore le loup, car, quoique ce
206 LA CHASSE A COURRE.
fauve ait beaucoup diminué depuis une dizaine d'années, cepen-
dant les statistiques officielles montrent que ces années der-
nières il en a encore été tué de 700 à 900. Mais un équipage ne
chassant que le loup, je crains bien qu'il n'y en ait plus, et pour
parfaitement chasser le loup, il ne faut guère que les chiens
chassent autre chose.
Ce que je puis dire par expérience et sans crainte d'être
démenti par les veneurs qui ont fait et aimé cette chasse comme
moi, c'est que pas une chasse ne passionne davantage ceux qui
sont vraiment amateurs de la chasse à courre. Les difficultés de
cette chasse, les finesses de l'attaque, les grands partis que
prennent ces animaux, la façon dont ils ont l'air de se jouer de
vous et des chiens, tout vous entraîne, vous passionne. Un
chasseur jeune, vigoureux qui a un bon piqueur et de bons
chiens pour le loup et qui va parcourant les pays à loups comme
je l'ai fait pendant longtemps de la Normandie dans la Haute-
Marne et de la Haute-Marne dans le Bourbonnais , ne l'oublie
jamais et regrette toute sa vie de n'avoir pu continuer ce métier,
que le vieux M. de Saint- Victor fit, dit-on, jusqu'à plus de
quatre-vingts ans! Citons encore ce piqueur du Grand Dauphin.
La Jeunesse, encore intrépide à quatre-vingt-six ans, dit la
duchesse d'Orléans dans ses mémoires, quoiqu'il n'ait bu, ajoute-
t-elle, jamais d'eau, même dans sa soupe.
Comme il y a encore, ainsi qu'on vient de le voir, pas mal de
loups en France et un certain nombre de veneurs qui le chassent
nous allons donc parler de cet animal qui, en somme, peut très
bien redevenir plus commun, par suite de la diminution de la
culture, de l'augmentation des pâturages et de l'élevage des
troupeaux, choses éminemment favorables à la propagation du
loup.
Le loup a de la ressemblance avec le chien mâtin et certains
rapports avec le renard, mais il est de plus grande taille que le
mâtin ordinaire et il a surtout beaucoup plus de force dans la
mâchoire et dans les muscles du cou et des pieds. Sa tète, qui a
de l'analogie avec celle du chien de berger, est oblongue, plus
LE LOUP.
207
grosse et plus large entre les oreilles et elle a moins de dépres-
sion entre le nez et les yeux que celle du chien. Ses oreilles
■ ■ ^ * 4
rçj.f f ^i..Jnin*.
Vieux loup.
sont droites, quelquefois assez longues et larges (elles varient
beaucoup sous ce rapport) ; mais la plus grande différence existe
dans la position des yeux, qui sont placés très obliquement
208 LA CHASSE A COURRE.
comme les yeux des Chinois, tandis que dans le chien louver
ture des paupières est horizontale. L'iris des yeux est d'un
jaune fauve, les dents sont plus fortes que celles des chiens de
la plus grosse espèce. Il en a le même nombre, 42 ou 44. La
gueule est fendue beaucoup plus loin que chez le chien. La
queue est droite, presque toujours portée basse, excepté quand
il se bat, auquel cas il la relève parfois toute droite. Son arrière
main parait toujours faible et traînante et plus basse que l'avant
main; il a moins de souplesse que le chien, et quand il se re-
tourne, c'est presque tout d'une pièce. C'est pourtant un grand
sauteur et j'en ai vu deux fois en chasse franchir des murs qui
avaient bien près de dix pieds de hauteur. Quand le loup mar-
che, il traîne un peu le derrière, la queue basse, les jarrets se
touchant. Il est presque toujours au galop, et quelque peu vite
qu'il marche, cela lui donne une allure toute particulière quon
ne peut oublier quand on l'a vue. Il a tant de force dans le cou.
qu'il emporte facilement un mouton, renverse un bœuf, coupe
net la jambe d'un poulain ou d'une génisse, comme je l'ai vu.
Les poils qui recouvrent son corps sont assez rudes et fourrés
en dessous pendant l'hiver d'un poil plus doux ; ce poil couvre
complètement le ventre de la louve, de telle sorte que, quand elle
ne nourrit pas, on ne peut voir ses allaites. Sa couleur est géné-
ralement d'un gris jaunâtre teinté de noir à l'extrémité des poils,
avec une raie un peu plus foncée sur les jambes de devant; mais
la couleur des loups est assez variable, depuis le jaune un peu
clair jusqu'au brun assez foncé. Sa longueur est souvent de
i",2o sans la queue et sa hauteur de o",6o à o",8o. Son poids est
ordinairement de 35 à 45 kilos et peut atteindre 64 kilos (du
moins c'est le poids du plus gros loup que j'aie tué). Son corps
dégage une odeur particulière, que tous les animaux ont en hor-
reur et qui leur inspire toujours la plus grande crainte. Il a
l'ouïe excellente, la vue perçante et l'odorat exquis, ainsi que j'ai
pu le constater moi-môme avec deux loups que j'ai souvent em-
ployés comme limiers et qui m'éventaient les charognes, abats
ou la cuisine de leurs camarades à des distances extraordinaires.
LE LOUP. , 209
Il hurle au lieu d'aboyer ou fait entendre quelquefois un petit
aboiement qui ressemble à celui du chien qui rêve. Il chasse le
gibier en se servant de son nez comme le chien, mais sans don-
ner de voix comme le renard, comme j'ai pu le constater avec
un loup apprivoisé que je découplais avec ma meute. Il mange
gloutonnement, avalant des quartiers de viande énormes sans
mâcher et boit en lappant comme le chien. Quoique ne parais-
sant pas à l'œil marcher très vite, quand il court, il a pourtant
un train extrêmement rapide, et dans un débucher il distance les
chiens les plus vites, sauf le lévrier, qui est le seul qui puisse le
rejoindre. Sa vigueur est extraordinaire et son tempérament de
fer. Dans les grands hivers, il traverse les cours d'eau et, tout
couvert de glaçons, se couche dans les buissons; cependant peu
d'animaux aiment autant le soleil, dont il cherche presque tou-
jours les rayons quand il choisit sa demeure. Les jeunes sont
cependant sujets à la jaunisse comme le chien, car j'en ai pris
deux portées qui l'avaient au dernier degré. Le cheval, la vache,'
le cerf, le daim, le chevreuil, le renard, l'âne, le cochon et pres-
que tous les autres animaux deviennent sa proie; il redoute seu-
lement le sanglier, quand celui-ci est dans toute sa force, mais il
se venge sur les marcassins, ou les vieux sangliers infirmes. On
connaît en France deux variétés de loups : ceux des pays de
plaines et de pâturages, qui sont les plus grands, les uns forts
et épais et les autres hauts et étriqués, et la petite variété géné-
ralement appelée loups de montagnes, qui est sournoise et mé-
chante. Les loups ont un goût particulier pour l'âne et pour l'oie.
On trouve quelquefois en France des loups jaune pâle, d'autres
presque blancs et pas mal de loups noirs; toutefois tous les
noirs que j'ai vus m'ont toujours paru plus ou moins métissés :
ce qui arrive assez souvent par une louve sans mâle qui, dans sa
chaleur, s'est fait accompagner et servir par quelque chien de
berger errant et vagabond. De là naissent des métis qui, re-
croisés avec de vrais loups, donnent quelquefois des animaux
bizarres, comme j'en ai pris deux portées : les uns noirs, les
autres jaunes avec taches blanches au cou et au ventre et la
14
2IO LA CHASSE A COURRE.
tête presque comme celle d'un dogue, quelques-uns avec le
bout de l'oreille tombante. J'en ai pris un une fois qui était
presque tout blanc et bien loup pur. Je pense que c'était un cas
d'albinisme.
Quand le loup veut saisir sa proie, il emploie ordinairement la
ruse pour s'en approcher ; mais s'il est pressé par la faim, il
attaque hardiment le bétail, même sous les yeux du gardien. 11
n'existe du reste pas d'animal qui sache aussi bien reconnaître
là où il y a du danger pour lui et là où il peut passer impuné-
ment, ainsi que j'ai pu le constater bien souvent. Il rôde con-
stamment autour des habitations, cherchant à entrer dans les
bergeries en grattant sous les portes ou en assaillant dans les
plaines les parcs à moutons, de façon que les moutons, se préci-
pitant effarés du côté opposé, renversent toutes les clôtures et
s'échappent. Alors le loup, se mettant après le troupeau épars
et fuyant dans la plaine, y fait un terrible carnage. J'ai vu ainsi
quarante moutons égorgés sur un espace d'un kilomètre.
Les loups recherchent les charognes, qu'ils éventent comme
les troupeaux à des distances considérables; ils enlèvent les
chiens qui rôdent, en les abordant à la façon du chat. Le long-
dès rivières et des marais, ils font une grande consommation de
grenouilles, qu'ils aiment beaucoup et, poussés par le besoin, Us
mangent même des rats, des mulots et souvent de la terre
glaise.
Les loups deviennent enragés comme les chiens ; on en con-
naît des exemples terribles.
Lorsqu'un loup veut enlever un animal, il cherche à le sur-
prendre à la manière du renard et à l'atteindre par quelques
bonds; s'il le manque, il lui donne la chasse jusqu'à ce qu'il le
saisisse ou que l'animal échappe par la vitesse de sa fuite. Sïf
peut le prendre, il le saisit à la gorge et l'étrangle, et si l'endroit
ne lui paraît pas sûr, il l'emporte dans un bois voisin, s'en
repaît et enterre les restes à la façon du chien ; mais je crois
que, comme le chien, il en fait rarement la recherche. Dans la
Haute-Marne, en faisant le bois, mon limier m'indiquait constam-
V
o
V
I
.
'•arc-
iï&
LE LOUP. 2ï3
ment des caches de loups auxquelles ceux-ci n'étaient pas revenus
donner. Le loup suit la piste d'un animal qu'il veut prendre
comme un chien d'arrêt, sentant, remuant la queue comme un
chien couchant. Il suit aussi, à la tombée du jour, un troupeau
attardé et, quand l'endroit lui paraît favorable, il tombe sur le
troupeau et enlève un animal sans que le berger s'en aperçoive.
Si le loup n'est pas tourmenté par la faim, il se retire dans un
bois, y passe le jour à dormir et n'en sort que la nuit pour rôder
dans la campagne. Il marche avec circonspection; sa marche est
furtive, légère, au point qu'à peine l'entend-on fouler les feuilles
sèches. Il visite les collets des braconniers pour s'emparer du
gibier qui s'y trouve. Son odorat est si fin, qu'il lui fait découvrir
un cadavre à plus d'une lieue de distance. S'il est dérangé pen-
dant le jour, il se coule derrière les haies, dans les fossés et
parvient souvent à gagner un buisson solitaire sans être aperçu.
Souvent pendant la nuit, s'il rencontre un voyageur accompagné
d'un chien, il le suit d'abord d'assez loin, s'approche ensuite
peu à peu, puis d'un bond se jette sur l'animal effrayé, le saisit
presque dans les jambes de son maître, l'emporte et disparaît.
Dans les forêts retirées où résident les charbonniers qui entre-
tiennent beaucoup de chevaux pour transporter le charbon ou le
bois, les loups attaquent souvent ces animaux pendant la nuit et
les étranglent; mais ils tombent de préférence sur les chevaux
blancs ou gris : je pense que c'est à cause de la plus grande
facilité de voir et de poursuivre dans l'obscurité des animaux de
cette couleur. Il n'y a ni boucher ni écorcheur qui dépouille un
animal avec autant d'adresse que le loup, surtout si c'est un
chevreuil, dont il redoute d'avaler le poih Toutefois j'ai vu faire
cette opération avec la même dextérité par un sanglier que j'éle-
vais et auquel j'avais donné un chevreuil trouvé mort. Je ne
l'aurais jamais cru, si je ne l'avais vu.
Le loup est ennemi de toute société et les loups ne se réunis-
sent jamais, même dans les pays où ils sont nombreux, que
pour attaquer quelques gros animaux. Aussi, excepté pendant le
temps des louveteaux, les vieux loups pillent, mordent et chas-
214 LA CHASSE A COURRE.
sent les jeunes loups, voulant garder leurs quartiers, où ils n'en
souffrent guère d'autres que quelques loups de passage. Lors-
qu'on les tue, ils sont vite remplacés. Aussi les portées de lou-
veteaux sont rarement à moins de quatre lieues les unes des
autres.
Les loups s'apprivoisent assez bien; mais ils sont toujours
méfiants et sujets à devenir méchants en vieillissant. Cependant
j'en ai eu une fois trois magnifiques (depuis l'époque où j'ai écrit
mon Traité de la Chasse du Loup), qui devinrent extrêmement
apprivoisés. Ils se promenaient avec moi, parfaitement libres,
me reconnaissaient en hurlant à plus d'un kilomètre de distance
et les femelles me laissaient toucher et prendre leurs petits
après leur mise-bas. Le mâle était même jaloux et, quand il se
promenait avec moi, grondait les personnes qui s'approchaient
trop de moi. Jamais je n'ai vu animaux plus beaux et plus appri-
voisés. Ces louves ont été les mères de nombreux métis, qui
entrèrent à la meute et dont j'élevai jusqu'à la cinquième géné-
ration.
Il arrive souvent au loup, quand il est chassé et qu'il sait qu'il
n'a à ses trousses qu'un petit nombre de chiens sans piqueuret
sans trompe (instrument qu'il n'aime pas), de se remettre au bout
d'un petit retour et de saisir à la gorge le premier chien qui
arrive sur la voie, ou de revenir en queue par un retour pour
surprendre les traînards et les étrangler. Quand un loup a adopté
cette tactique et pris goût à la chair du chien, il peut arriver à
décimer les meutes d'un pays.
De tous les animaux, le loup est certainement le plus gour-
mand et le plus vorace; mais jamais il ne perd sa méfiance:
aussi ne va-t-il guère à un carnage que la troisième nuit et quand
les chiens errants y sont allés avant lui. Aussitôt qu'il arriTe,
il arrache brutalement un morceau et se sauve à toutes jambes
le manger à deux ou trois cents pas de là. Il se prend assez
difficilement au piège et, s'il est pris par une jambe, il n'hésite
pas à se couper la patte prisonnière.
Dans les battues, le loup est loin de s'effrayer comme les
LE LOUP. 2l5
renards ou les lièvres; il raisonne son affaire et comprend fort
bien que c'est le côté silencieux qui est le plus à craindre : aussi
force-t-il presque toujours les rabatteurs.
Ainsi que je l'ai dit dans mon Traité de la Chasse du Loup, la
louve porte comme la chienne de 63 à 66 jours et fait ses petits
comme elle. La seule différence que j'aie pu constater, c'est que,
la veille du jour où elle met bas, tout le poil doux et fourré qui
couvre le ventre de la louve tombe d'un seul coup en même
temps que le lait arrive aux allaites, et ce poil constitue le lit sur
lequel elle déposera ses louveteaux, en y ajoutant des herbes,
des fougères et des mousses.
La louve n'entre en chaleur qu'une fois par an et toujours à
la même époque, vers janvier et février. Sa chaleur dure beau-
coup plus longtemps que celle de la chienne, ainsi que j'ai pu
m'en assurer chez mes louves apprivoisées, puisque je l'ai vue
durer quelquefois cinq semaines. Ceci est encore un point que
j'ai pu éclaircir depuis que j'ai écrit mon Traité de la Chasse du
Loup. Si l'hiver est trop rude, leur chaleur est retardée; géné-
ralement les plus vieilles louves viennent en chaleur les pre-
mières. Les mâles n'ont point de rut et pourraient s'accoupler
en tout temps. Toutefois je n'ai pu le vérifier, puisque les louves
ne sont jamais venues en chaleur chez moi qu'en janvier et que
je n'ai jamais pu faire couvrir une chienne par un loup, tandis
que j'ai fait souvent servir mes louves par des chiens.
L'accouplement se fait comme celui du chien. Les portées
varient de 3 à 8 ou 9. Les vieux piqueurs de loups croyaient
que le nombre en était toujours impair; mais j'ai pu vérifier que
c'était une erreur, une de mes louves ayant fait une fois 6 petits.
Pendant les premiers jours, la louve ne quitte pas ses petits
et devient terrible pour les défendre. Si la louve en les allaitant
juge que l'endroit n'est pas sûr, elle transporte ses petits ailleurs,
en les emportant dans sa gueule, et elle le fait avec une rapidité
extraordinaire. Je m'en suis assuré en transportant à plus de
5oo mètres les petits d'une de mes louves, qui, en très peu de
temps, les remportait tous à leur liteau et, comme les chiennes,
2l6 LA CHASSE A COURRE.
qu'elle prenait toujours le même le premier. Après les avoir
allaités pendant quelques semaines, elle commence à leur appor-
ter de la viande, qu'elle avale et qu'elle leur dégorge; ensuite
elle leur apporte du gibier vivant, qu'elle leur fait étrangler.
Elle les mène souvent boire, car jamais louve ne fera ses petits
dans un endroit où il n'y aurait pas d'eau, située surtout de façon
qu'ils puissent aller boire sans être découverts.
Si par hasard la louve est tuée avant que les louveteaux aient
la force de trouver leur nourriture, ils ne meurent pas de faim,
mais ils sont nourris par le loup. J'avais écrit le contraire dans
mon Traité de la Chasse du Loup; mais depuis j'ai fait plusieurs
essais et séparé la louve de ses louveteaux en les laissant seuls
avec leur père et, à mon grand étonnement, celui-ci les a par-
faitement nourris, en leur dégorgeant de la nourriture comme la
mère. Le loup est donc, sous ce rapport, bien différent du chien,
qui est absolument indifférent à ses petits.
Vers la fin d'août ou de septembre, la louve commence à mener
ses petits aux bords des champs, où ils restent souvent en atten-
dant que leur mère leur apporte quelque proie. En novembre on
décembre, ils commencent à être assez forts pour se séparer et
battre la campagne séparément pendant la nuit; mais le jour Os
passent la journée ensemble, jusqu'à ce qu'ils aient dix ou douze
mois. Quand arrive le mois de janvier et que les louves entrent
en chaleur, les grands loups chassent alors les jeunes, les pillent
et les mordent. Je ne crois pas que les jeunes louves entrent en
chaleur avant vingt-deux mois.
Les loups ont l'intelligence de respecter le bétail qui entoure
leurs portées. Les troupeaux de moutons parqués le long d'un
bois où se trouve une portée de louveteaux ne sont jamais atta-
qués, tandis qu'à six ou huit kilomètres les parcs sont assaillis
toutes les nuits; mais que la portée soit prise ou tuée, et dès le
lendemain la louve se vengera sur les troupeaux voisins, qu'elle
a ménagés jusque-là.
La louve apprend aussi à ses louveteaux à emboîter le pas,
c'est-à-dire à marcher à la file les uns des autres, les pattes l'une
LE LOUP. 217
dans l'autre, car plusieurs grands loups voyageant de compagnie
iront toujours à la queue leu-leu, comme des Indiens sur le sen-
tier de la guerre.
Les quêtes que fait le loup la nuit varient suivant les pays et
les saisons. Dans les pays très ouverts, très cultivés et très peu-
plés, ils parcourent un grand espace et se remettront aussi bien
dans une garenne ou contre une meule de blé que dans un bois à
loups. Dans les grands et bons pays de chasse, bien boisés avec
des landes et peu de population, ils font moins de chemin et res-
tent plutôt dans les cantons connus pour être des cantons à
loups, où on est à peu près sûr de les lancer. Pour trouver sa
nourriture, un loup fait quelquefois dans une nuit d'hiver un
chemin incroyable et souvent plusieurs valets de limier l'ont
tous traversant leurs quêtes. L'été, ces fauves rentrent souvent
tard au bois et s'attardent dans les blés, les vignes ou le long
des villages. En janvier et février, à cause de la chaleur des
louves, ils font beaucoup de marches et contre-marches ; mais ils
se retirent dans les acculs de forêts, sur les pentes, collines et
endroits bien exposés au soleil. Hors ce moment, ils sont tou-
jours plutôt sur le bord des bois, aux extrémités des forêts, car
le loup vit plus de la plaine que du bois.
Au printemps, au moment où tous les bestiaux commencent à
sortir, les loups font moins de chemin; les louves ont mis bas
ou sont prêtes à mettre bas, et les grands loups, trouvant plus
facilement leur nourriture, se cantonnent davantage. L'été est
l'époque qui leur est le plus favorable, car les plaines sont alors
pour ces animaux autant de forêts qui les couvrent et leur per-
mettent de gagner, sans être aperçus, les troupeaux où ils sai-
sissent leurs proies.
Quant aux portées de loups, elles sont beaucoup plus difficiles
à trouver qu'on ne pourrait le croire. La louve prend toutes ses
mesures pour cacher leur séjour; jamais elle n'abordera le bois
du côté de l'enceinte où sont ses louveteaux. Si ses petits sont
au sud d'un bois et qu'elle arrive par la plaine de ce côté, elle
fera un grand détour pour rentrer par le nord, puis elle fera plu-
2l8 LA CHASSE A COURRE.
sieurs faux rembuchements et suivra des chemins dans une
direction opposée à celle de l'enceinte, pour sauter tout à coup
sous bois et se glisser par les fourrés jusqu'à ses louveteaux.
Aussi, dès qu'on trouve la louve seule ou accompagnée du
mâle, entrant plusieurs fois de suite dans le même bois ou dans
la même enceinte, il ne s'agit plus que de pénétrer dans le fort
pour s'assurer de la présence des louveteaux. Dans ce cas, il vaut
mieux le faire sans chien, de peur de voir la louve déménager
ses petits. Il faut s'adresser aux riverains, laboureurs, ber-
gers, etc., pour savoir s'ils ont vu plusieurs fois des loups ren-
trer dans le bois, parce que, s'il s'y trouve une portée, ceux-ci
finissent bien par voir plusieurs fois les loups y rentrer. Il faut
surtout surveiller les bois connus pour être des bois à loups, que
le piqueur doit toujours connaître.
En été, les loups ont généralement leurs liteaux sur des places
un peu découvertes, où ils trouvent de l'air et en même temps un
peu d'ombre. En hiver, dans les temps rudes, ils se retirent
volontiers dans les bois épais, au milieu des fougères et des
bruyères ou des hautes herbes bien exposées au soleil, car le
loup, comme le chien, aime le soleil. A la fin de l'hiver et au
printemps, ils sont généralement dans les boqueteaux, garennes
ou oseraies fourrées dans les grandes plaines; d'ailleurs les bu-
vards chassés par les grands loups s'y trouvent souvent à cette
époque.
Généralement la louve ne se déchausse jamais dans l'endroit
où elle a ses louveteaux; cependant j'ai vu des exceptions. Il est
vrai que c'était dans un pays où les loups n'étaient jamais chas-
sés ni dérangés, dans la Haute-Marne. Quant au grand loup, il
se déchausse souvent près de l'enceinte où il est remis.
Dans le Morvan, le Bourbonnais, le Nivernais, les piqueursde
loups et les braconniers qui enlèvent les portées savent parfai-
tement s'assurer du lieu où elles sont, en rappelant les loups la
nuit. Ils hurlent en imitant le cri du loup; les jeunes leur ré-
pondent et on relève ainsi l'endroit où ils ont leurs liteaux.
DE LA CONNAISSANCE DU LOUP PAR LE PIED. 2IQ
II
DE LA CONNAISSANCE DU LOUP PAR LE PIED.
C'est une science fort difficile et qui ne peut guère s'appren-
dre que par la pratique.
Il y a des chiens qui ont le pied tellement semblable, à pre-
mière vue, au pied du loup, que sans les allures on pourrait s'y
tromper, si l'on n'est pas très fort et très expérimenté. Les
explications écrites sont donc bien difficiles à donner.
D'abord, il est toujours difficile d'en revoir, le loup évitant
généralement les endroits boueux et marchant plutôt sur le ter-
rain sec ou les feuilles, où il ne laisse pas d'empreintes. En
outre, quand il a gelé et que le terrain est dur, on ne peut en
revoir, sauf les jours de gelée blanche, où le jugement est facile
tant que la gelée n'est pas fondue par le soleil. Dans la neige
on juge bien, excepté quand la neige est trop fondante, ce qui
change la forme du pied, ou quand la neige est trop gelée, car
elle casse et tombe dans l'empreinte en en changeant la forme.
Néanmoins la neige est éminemment favorable, parce qu'elle per-
met de juger les allures, quand môme on ne verrait pas bien le
pied et parce que c'est là la chose importante pour ne pas faire
d'erreurs.
Outre ces difficultés, la plus grande est de bien savoir discer-
ner le pied du loup de celui du chien, et sous ce rapport, je le
répète encore, on ne peut guère être parfaitement sûr si l'on ne
peut distinguer les. allures, point fondamental des différences
entre les animaux sauvages et les animaux domestiques. Pour
le loup par exemple, il y a des chiens courants de Gascogne qui
ont tellement le pied du loup, que sans les allures on pourrait
bien commettre une erreur.
Néanmoins, comparez deux pieds de grandeur égale, celui d'un
grand chien et celui d'un loup. Le grand loup aura toujours le
pied plus serré et moins ouvert que celui du chien, les doigts
a20 LA CHASSE A COURRE.
des pieds plus joints, plus réunis et, ce qui a l'air contradictoire,
pourtant plus détachés les uns des autres; son talon sera bien
plus gros, bien plus large et surtout bien plus détaché du pied
que celui du chien et formera trois fossettes bien marquées en
terre ; enfin les deux doigts de côté seront de même bien déta-
chés à la même hauteur, de façon que le pied aura beaucoup
l'aspect d'une fleur de lis; généralement les ongles sont très forts
et usés. La louve a le pied encore mieux fait que le loup et plus
remarquable à l'œil; il est plus long, plus étroit et plus serré,
plus différent encore de celui du chien. Son talon est encore plus
long et plus détaché que celui du loup; ses ongles sont un peu
plus minces.
Le louveteau est le plus facile à distinguer. Son pied, qui
ressemble déjà à celui d'un chien de bonne taille, ne marquera
jamais d'ongles ou bien ceux-ci marqueront comme des aiguilles.
Le louvard, plus difficile à distinguer, parce que son pied, égal
à celui d'un fort chien, est moins bien fait que celui du vieui
loup, pourra encore se reconnaître à ses ongles, qui sont beau-
coup plus pointus et plus minces que ceux de quelque chien
que ce soit qui aurait la même grosseur de pied.
Quant aux allures, partie la plus importante de la connaissance
du pied du loup, elles sont plus longues, mieux réglées, plus
pareilles et plus assurées que celles de n'importe quel grand
chien. Il faut ne pas oublier qu'en vénerie les allures com-
prennent :
i* La façon de poser les pieds;
2° La distance de l'empreinte des pieds de devant à celle des
pieds de derrière.
Or un vieux loup qui marche droit et d'assurance ne se
méjuge jamais, c'est-à-dire qu'il met régulièrement le pied de
derrière sur l'empreinte du pied de devant. S'il court, le pied de
derrière se trouve placé à deux ou quatre doigts de celui de
devant, qui est beaucoup plus grand et plus large et très facile à
reconnaître. Les allures sont les mêmes pour la louve, sauf quand
elle est pleine, car alors son allure est moins régulière et ses
DE LA MANIÈRE DE DÉTOURNER LE LOUP. 221
pieds de derrière se posent souvent en dehors de ceux de devant.
Si on peut suivre un loup sur la neige, on en apprendra plus
en un instant que dans tous les traités du monde et on verra
tout de suite la différence de ses allures et de celles d'un chien.
Elles forment une ligne absolument droite, avec les pieds régu-
lièrement posés sans que l'animal se méjuge jamais.
Il est encore quelques connaissances qui peuvent servir pour
s'assurer d'une voie de loup. D'abord ses laissées, qui sont tou-
jours ou blanches bu blanchâtres et contiennent des os, du poil
ou de la laine. Celles du grand loup sont toujours dures et pla-
cées ordinairement à côté d'un grand chemin, d'une sente ou d'un
carrefour; celles de la louve sont molles et toujours au milieu du
chemin. Enfin au rembuchement, s'il se trouve des ronces dans
la coulée, on peut examiner s'il n'est pas resté de poil de loup
aux épines, et en observant comment le poil est tourné et fixé à
la ronce, on peut, s'il n'y a pas de revoir, conjecturer si c'est
une rentrée ou une sortie. Si les loups rentrent aux liteaux de
leurs louveteaux, il y a souvent aux ronces et aux épines de la
laine provenant des moutons qu'ils leur rapportent.
Malgré cela, l'expérience et la pratique peuvent seules, je crois,
enseigner la science du pied du loup. D'ailleurs il est bien diffi-
cile à un veneur d'apprendre son métier dans un Traité de Véne-
rie; il peut y compléter ses connaissances et les rectifier,
mais il ne peut guère y apprendre un métier qu'enseignent
seules la pratique, l'expérience et l'intelligence.
III
DE LA MANIÈRE DE DÉTOURNER LE LOUP.
La première chose que doit faire le valet de limier pour le
loup, c'est de s'assurer d'un bon limier pour loup : chose peu
aisée à trouver, car son chien doit surtout aimer la voie du loup,
ce qui est rare. Il faut donc que le limier ait déjà chassé loup en
meute, qu'il ait montré un goût prononcé pour cette voie, qu'il
222 LA CHASSE A COURRE.
ait le nez fin à cause de la légèreté extrême de cette voie. On
n'aura guère à craindre, comme pour les autres animaux, que le
limier se rabatte sur les voies du relevé. Si, après s'être assnré
qu'il chasse bien le loup et qu'il aime cette voie, on l'a mis à
la botte, et qu'alors il paraisse froid sur la voie, qu'il ne la suîtc
pas avec action ou qu'il ne la suive que par manière d'acquit
on fera mieux de le remettre en meute, car il ne fera jamais
un bon limier pour loup. Si, au contraire, il travaille une voie
de loup avec action, mordant môme les branches à la rentrée
quand on tire sur le trait, hérissant son poil au rembuchement.
il faut le perfectionner et l'encourager par la douceur et les
caresses, en lui disant: * Harlou là, mon bonhomme, hariouî
hou devant, tu dis vrai ! » 11 faut naturellement l'habitua- à
mépriser toutes voies qui ne sont pas celles du loup et lui
apprendre à être absolument muet et, autant que possible.
l'amener à travailler libre, ce qui facilite et active énormément le
travail.
La meilleure époque pour faire un limier de loup est en juin,
juillet, août et septembre, époque des louveteaux, dont rôdeur
n'est pas si intimidante et qu'on peut faire suivre et lancer aa
chien. On peut, en outre, lui faire travailler les vieux loups â
leur retour, lorsqu'ils rentrent au fort pour apporter la pâture à
leurs petits. On l'accoutume à travailler des voies de hautes
erres et on le confirme. C'est une voie si facile à sur-aller et si
légère, que, si elle est un peu haute, le limier, sur un terrain
peu favorable, la sur-allera plus qu'aucune autre.
Quand le limier fera bien tout ce travail, il lui faudra encore
pour être parfait deux qualités :
i° D'abord qu'il aime tellement la voie du loup, que, s'il en
suit un, il méprise absolument tout autre animal qui lui bon-
dirait même sous le nez.
2° Qu'il puisse faire son travail en liberté, car c'est alors qu'il
aura moins de chance de sur-aller et qu'il suivra sa voie plus
facilement et plus vite, pour faire ces grandes suites de loup
quelquefois si fatigantes sous gaulis, à trait de limier. S'il
DE LA MANIÈRE DE DÉTOURNER LE LOUP. 223
travaille libre, on le suit rapidement, en n'ayant qu'à le modérer
et à le maintenir à mi-voix à portée de soi.
Les grands loups font souvent de telles nuits, que, pour avoir
chance de les rembucher, il faudrait quelquefois six ou huit valets
de limier, tandis que, si vous avez un seul homme avec un limier
bien mis et bien dressé à travailler libre sans s'échapper (quitte
à lui mettre le trait s'il s'échauffe trop dans certains moments),
il aura un grand avantage et pourra arriver à rembucher un
grand loup après plusieurs lieues de suite, ce qu'il n'aurait
jamais pu faire autrement.
La quête du grand loup est la plus désagréable et la plus
fatigante de toutes, parce qu'il varie beaucoup ses heures de
rentrée et de sortie, qu'il n'a pas de demeures fixes, qu'il change
de pays et de cantons continuellement, qu'il reste souvent sur
pied jour et nuit, qu'il prend aisément vent du trait et que sa
voie est si légère, qu'elle peut à peine être relevée en plaine au
bout de quelques heures, même par un chien très fin. Le valet
de limier ne peut donc guère déterminer sa quête que sur des
conjectures basées sur le raisonnement et l'intelligence; mais
son succès dépendra beaucoup du hasard, qui a bien ou mal servi
le loup qu'il cherche.
Pendant l'été, le loup n'ayant guère de demeure fixe et restant
souvent dans les grains, il faut commencer sa quête dans les
campagnes, autour des villages et des fermes. S'il n'a pas un
abat dans le bois, il fait dans sa nuit tant d'allées et venues à
travers champs, que, si on ne sur-allait pas souvent, on serait
presque sûr de la trouver, lorsqu'il fréquente le canton; de
même, dans les temps de neiges et de brouillards, parce que les
loups sont obligés de courir d'un endroit à un autre pour trou-
ver leur nourriture. Quand un loup a fait capture sans peine et
sans inquiétude, il se rembuche assez volontiers dans un buisson
voisin, surtout s'il y a de l'eau. Si on croit l'avoir rembuche, il
ne faut pas faire longue suite, parce qu'un vieux loup fin et
rusé écoute longtemps au bord du bois avant de s'aliter et il se
remet quelquefois à longueur de trait. S'il a fait un abat consi-
224 LA CHASSE A COURRE.
dérable, il faut, aussitôt qu'on en a connaissance, y aller et
faire exactement jusqu'aux plus petits buissons des environs, or
souvent le coupable reste bien près de cet abat.
Le loup rentre ordinairement par les chemins ou faux-fuyants
sans beaucoup de retours. Si la rentrée se trouve dans un buis-
son de peu d'étendue, il faut en prendre tout de suite les grands
devants pour voir si l'animal est passé, plutôt que de risquer
le mettre debout en faisant suite; mais si la voie rentre dans
une forêt de grande étendue, on peut suivre jusqu'aux bons
endroits, car il est peu probable qu'il se soit remis si près. Si.
en faisant suite, on s'aperçoit qu'il s'est déchaussé de temps
en temps, on est à peu près sûr qu'il est allé s'aliter au loin.
Mais si on arrive à une bonne demeure bien exposée, il faut en
prendre les grands devants, sans faire suite. Si on ne le troure
pas sorti, il faut prendre une seconde fois les devants dans l'autre
sens, en commençant par où l'on a fini, afin que, changeant ainsi
le vent pour le chien, on ait moins de chance de le sur-aller. Si
on ne trouve rien, on doit examiner l'enceinte, voir si elle est
bien exposée au midi ou au soleil levant, avec des herbes et des
fougères, etc., car alors on peut espérer que le loup y est resté;
mais si la voie sort de l'enceinte, il faut continuer à faire suite
jusqu'à ce qu'on croie l'avoir rembuché dans une bonne demeure
et se méfier des faux rembuchements que fait souvent un vieux
loup rusé. Il se présente à une coulée, y entre quelques pas, puis,
revenant sur ses pas, longe le chemin ou la plaine pour aller se
remettre dans une autre enceinte. C'est alors le même travail â
faire que pour les faux rembuchements du cerf, et surtout du
sanglier.
Toutes les fois que le valet de limier voit que son chien tra-
vaille une voie de loup, il doit presser son travail, dans la crainte
que les voies ne vieillissent trop. Il arriverait que, vu leur lé-
gèreté, le limier sur-allerait bientôt, surtout au premier carrefour,
et si l'homme ne peut en revoir, ce qui arrive souvent, il doit
bien examiner la façon de travailler de son chien. Quoiqu'ils aient
à peu près chacun leur façon de travailler, si le chien tient la
DE LA MANIÈRE DE DÉTOURNER LE LOUP. a25
queue bien droite et sans la remuer, flaire la branche d'un air
mécontent, hérisse un peu le poil de son dos, et qu'au même
instant il se mette en devoir de suivre, il est plus que probable
que c'est d'un loup qu'il se rabat. Si dans les carrefours où les
loups jettent ordinairement leurs laissées et se déchaussent, on
trouve sur les pierres ou buissons des laissées de bon temps au-
près de déchaussures grosses et profondes, on peut être sûr qu'on
fait suite d'un grand loup, tandis que, si les laissées sont un peu
molles et au milieu du chemin et les déchaussures plus menues
et moins profondes, il est probable que l'on fait suite d'une
louve. Le loup, comme le chien, levant la patte pour uriner
contre une branche ou un petit buisson, le limier le marque à
merveille en flairant de haut en bas et en l'imitant, tandis que la
louve s'accroupit au milieu du chemin, ce que le limier indique
aussi à sa manière.
Si le loup a envie de se remettre, il cherche quelquefois à
ruser, surtout quand la terre est mouillée. Il suit alors un chemin,
en prend un autre, va et vient sur sa voie, pour prendre ensuite
un faux-fuyant ou une coulée afin d'entrer au fort. On ne laissera
pas le limier entrer plus d'une longueur de trait pour s'assurer
seulement que l'animal y rentre bien, et on se retire pour
prendre les grands devants. Si le limier n'est pas un vieux chien
bien fait au métier, il pourra se refroidir en approchant du
liteau et chercher même à prendre le contre par suite de la
crainte que le loup inspire aux chiens ; mais le vieux limier indi-
quera, le nez haut et en allant au vent, que le liteau est proche.
La quête du valet de limier pour trouver les portées de louve-
teaux est beaucoup plus facile, surtout à la fin de l'été, en août
et septembre, pour peu que Ton soit du pays et que l'on con-
naisse un peu les bois à loups. Si en faisant le bois, on trouve
deux ou trois jours de suite deux loups, ou seulement une
louve entrant et sortant plusieurs fois d'un même buisson ou
d'un fourré bien situé, on doit présumer qu'il s'y trouve des
louveteaux. Il ne faut pas oublier que dans ce cas les loups font
de faux rembuchements et rentrent généralement le plus loin
i5
22Ô LA CHASSE A COURRE.
possible de leur enceinte pour mieux cacher leurs liteaux. Il faut
donc s'assurer de l'enceinte véritable et, pour cela, laissant le
limier en dehors du buisson pour ne pas faire déménager la
louve avec sa portée, on pénètre seul sous bois. S'il y a des
louveteaux, on voit de fortes coulées, l'herbe et la terre sont
battues par places, la mousse est grattée et roulée au pied des
arbres, les petits buissons bas sont mordus et cassés. On doit
même tomber sur la cuisine, plumes, laine, os et carcasses des
animaux que la louve a apportés à ses petits, et on peut même
trouver les liteaux d'après lesquels on peut estimer le nombre
de louveteaux, en se rappelant qu'ils se couchent souvent deux
par liteau.
Quand les louveteaux ont pris de la force et commencent à
voyager, la louve restant très rarement avec eux pendant le jour,
si on veut les trouver, il faut donc suivre le contre-pied du rem-
buchement de la louve.
Il ne faut pas oublier que la louve établit ses louveteaux en
forêt dans un buisson ou une taille de huit à neuf ans, générale-
ment sur le bord d'une plaine ou d'un pâturage, et toujours dans
un endroit où il y aura de l'eau, sous forme de mare ou de ruis-
seau, afin que ses jeunes puissent aller boire facilement et
prendre des grenouilles. C'est là d'ailleurs, près de l'eau, que
l'on prendra le plus facilement connaissance des louveteaux.
Ordinairement une louve ne se déchaussera jamais près de
l'endroit où elle a ses louveteaux. Le grand loup se déchausse
encore assez souvent près de l'endroit où il se rembuche;
néanmoins je crois que c'est plus tôt une exception.
Les vieux piqueurs de loups, les charbonniers des grands bois
de la Nièvre, du Bourbonnais et du Morvan, s'assurent de la
présence des loups et des louveteaux en les rappelant la nuit,
comme nous l'avons dit plus haut. C'est ainsi que faisait mon
piqueur Nennen, quand il travaillait des grands loups. Il partait
généralement la veille au soir et couchait en forêt ou dans les
petits bois fréquentés par les loups, dans une hutte de char-
bonnier ou de sabotier; il sortait à onze heures les rappeler et,
DE LA MANIÈRE DE DÉTOURNER LE LOUP. 227
s'ils lui répondaient, il observait bien la place, allait dormir
quelques heures et, de grand matin faisait avec son limier le
tour des bois, pour voir si un loup rentrait dans l'enceinte d'où
il lui avait répondu pendant la nuit. S'il trouvait la voie, elle le
menait généralement dans la direction qu'il avait relevée et il ne
manquait jamais alors dans son rapport de me dire : « Je le
crois là et il doit être couché près de cet arbre, là-bas. » Le
fait se vérifiait à l'attaque et je ne comprenais pas comment il
pouvait savoir au juste où son loup était alité ; je n'en découvris
la raison que quand, raccompagnant un beau jour, j'eus connais-
sance de ses manœuvres, et je vis comment il relevait l'empla-
cement du liteau en observant dans quelle direction le loup lui
avait répondu la veille. Il faut avoir connu ces vieux piqueurs de
loups du Morvan pour savoir toutes les finesses et toutes les
ficelles qu'ils employaient soit pour trouver des loups, soit pour
les attirer même dans certains bois, les Saint- Jean, Charrier,
Claude Thuyé, Nennen, Chopelin père, Barbouilleau, etc. ; je les
ai tous connus ; avec eux non seulement il n'y avait guère de
buissons creux, mais, ce qui est encore plus extraordinaire, ils
avaient presque toujours un loup au rapport.
Voici comment se faisait le rapport du valet de limier dans la
grande louveterie :
« Je crois avoir détourné un ou deux loups ou louves, etc. Ils
viennent du côté de tel buisson, ou ils reviennent de la pâture du
côté de tel village. Ils ont fait tel abatis, que j'ai trouvé en les
suivant; de là ils vont demeurer en tels buissons, où je les crois
rembuchés. J'ai fait grande suite après, et comme je crois que
leur droit chemin est d'aller de tel buisson à tel autre buisson,
m'est avis de placer la meute ou les relais à tel endroit. »
228 LA CHASSE A COURRE.
IV
DE LA CHASSE DU LOUP.
La chasse du loup demande beaucoup de finesse, de ténacité
et de patience : j'entends surtout parler du veneur qui ne chasse-
rait que loup. Il faut de la ténacité et de la patience, parce qu'on
ne réussit pas toujours à chasser quand on veut et qu'on peut
aller plusieurs fois à la chasse sans rien avoir; il faut beaucoup
de finesse, parce que le raisonnement, la connaissance des lieux,
des mœurs de ces animaux et de leurs habitudes, vous indiquent
les meilleures chances de trouver une voie et de pouvoir lancer,
ce qui est peut-être le plus difficile. Pour cette chasse il faut
admirablement connaître les qualités des chiens qu'on a. Tel
chien ardent rapprocheur deviendra muet ou prendra même le
contre en arrivant au liteau, par crainte; tel autre, chien de tête
habituellement, sera en queue si le loup se fait chasser au nez,
par crainte encore; tel autre, toujours en tête en plaine, parce
qu'il se sent soutenu, lâchera au fourré, encore par crainte; tel
autre au contraire, hardi et vrai chien de loup, ne lâchera pas et
dira vrai, quand les autres auront l'air de n'y rien comprendre.
Il faut avoir l'instinct des lieux, de façon qu'en arrivant dans
un pays nouveau un chasseur de loups voie et comprenne du
premier coup d'oeil quels sont les bois à loups, qu'il juge que
telle position sur un coteau doit être un passage de loups, que
tel buisson bien exposé doit être un séjour, une demeure de
loups. Habituellement, quand j'arrivais dans un pays nouveau,
je le parcourais à cheval avec mon piqueur, et il était rare que
nous ne sussions pas, au bout de deux ou trois jours, où nous
devions aller chercher nos voies.
Le chasseur de loups doit absolument avoir des rapprocheurs
dans sa meute ; car cette voie est si légère, que, sans chiens qui
puissent rapprocher, on s'expose, non seulement à ne pas atta-
quer, mais encore à perdre dans un forlonger. Il faut que ces
DE LA CHASSE DU LOUP. 229
rapprocheurs soient actifs et ne musardent pas sur les voies.
On devra les laisser travailler d'eux-mêmes, ne les aider qu'à
coup sûr, ne leur parler que doucement et ne jamais les enlever
de la voie, sous peine de les voir ne pas pouvoir la reprendre. Il
faut enfin les faire rapprocher souvent, car si on ne leur donnait
que des animaux détournés, ils arriveraient bien vite à ne plus
vouloir ni pouvoir rapprocher.
Généralement à cette chasse le pied des chiens s'égalise, et
c'est peut-être le seul animal sur lequel on puisse découpler des
chiens un peu inégaux de pied; cependant, si l'on a la chance
d'avoir quelques bons chiens hardis, perçants et un peu plus vites
que les autres, il ne faut pas arrêter la tête pour rallier la queue,
car on pourrait bien ne pas reprendre et dégoûter ces excellents
chiens de tête. Il faut tâcher de rallier la queue à la tête ou, si
Ton arrête, que ce soit très peu de temps, car les forlongers au
loup sont très difficiles à enlever, la voie en est bien plus froide
encore que celle de la nuit ou du matin, et se conserve beau-
coup moins. Toutefois je dois dire que j'ai eu deux griffons
superbes, chiens de loups hors ligne, qu'à mon grand regret il
m*a fallu supprimer, car ils attaquaient et emmenaient un loup
tellement vite, qu'il m'était impossible, quand l'animal filait droit,
de leur rallier la meute, et ils me firent ainsi manquer plusieurs
chasses. Je crois avoir rarement vu des chiens d'une poussée
pareille et douze chiens comme eux auraient certainement pris
un grand loup, si on avait pu les suivre, d'autant plus qu'ils
étaient d'une bravoure et d'un mordant extraordinaires.
Si on attaque un loup détourné, on doit aller à la brisée dans
le plus grand silence, car aux premières voix des chiens, et
même peut être avant, le loup aura probablement vidé l'enceinte.
En grand silence on ira donc à la brisée avec ses chiens les plus
sûrs et l'on enverra le reste en harde volante dans la direction
probable où le loup partira. On laissera les vieux chiens em-
paumer la voie, et vit-on sauter le loup, on ne découplera pas
avant que les chiens d'attaque ne soient arrivés, là où l'on a vu
sauter le loup. Si par hasard le loup se fait battre dans l'enceinte,
23o LA CHASSE A COURRE^
on ne donnera pas les autres chiens avant qu'il n'ait sauté hors
de l'enceinte, excepté dans certains pays où vous auriez à craindre
de ne jamais pouvoir donner la meute, car les chiens pourraient
bien, en ralliant dans l'enceinte, prendre le contre, embrouiller
les voies et les faire perdre aux chiens d'attaque. Pendant rem-
brouille le loup filerait; on aurait ensuite un rapprocher en for-
longer, et comme le loup ne se ferait pas relancer et que la voie
si légère se refroidirait de plus en plus, on finirait par la perdre.
Il ne faut pas avoir grande crainte de donner la meute un peu
en queue ; elle ralliera, et cela vaudra toujours mieux que de la
donner trop tôt. Du reste, je condamne absolument le relais et
je ne comprends que la meute en relais volant pour donner sur
les chiens d'attaque, aussitôt que le loup est sorti de l'enceinte.
Si Ton n'a pas envoyé au bois et que, par conséquent, on ne
compte pas sur un loup détourné, ou si votre valet de limier a
fait suite d'un grand loup, mais n'a pas pu le rembucher, il faut
le rapprocher pour tâcher de le lancer. On découple les chiens
de recri, on fait suivre la meute en harde volante, en l'envoyant
sur la refuite présumée de l'animal. En ai-je fait des promenades
en traînant ma meute en harde volante pendant que mon piqueur
rapprochait la voie avec ses chiens de recri! Que de fois ai-je
condamné à mort des chiens qui n'étaient pas mauvais, mais qui
ne voulaient pas marcher à la harde et qui m'exaspéraient en se
faisant traîner !
Il faut appuyer doucement les chiens de recri, et dans un à
bout de voie, si positivement ils ne peuvent l'enlever, il faut
prendre vivement les grands devants pour retrouver la voie dans
un terrain plus convenable. C'est là qu'il faut se fier au bon chien
de loup sur lequel reposera tout l'espoir de le lancer. Il faut
avoir l'oreille attentive, car il est probable que le loup n'attendra
pas l'arrivée des chiens pour filer. Aussitôt qu'il aura entendu
les chiens de recri prendre la voie, il sera parti au plus vite,
sachant que la fuite la plus prompte est le meilleur moyen de se
débarrasser d'eux. Quand les rapprocheurs arriveront au liteau,
il y aura redoublement des cris, et à leur action on verra bien
DE LA CHASSE DU LOUP. 23 1
que le loup est parti. Il faut alors, si on suit avec la harde
volante, donner rapidement les chiens de meute, en faisant
toujours grande attention de ne pas les donner en tête, pour ne
pas causer de hourvaris et pour que la meute ne prenne pas le
contre, ce qui arrive pour le loup encore plus facilement que
pour tout autre animal.
Peut-on forcer un grand loup? C'est bien rare, parce que :
i° L'animal a un fond et une vigueur extraordinaires et qu'il
est toujours en condition.
2° Parce que surtout il règle le train et ménage ses moyens.
Si les chiens sont trop vites, il ne se presse pas et reste même
quelquefois au milieu d'eux; s'il a de l'avance, il va doucement,
s'arrêtant de temps en temps pour voir si la meute arrive.
3° Parce qu'il n'y a rien au monde de plus rare que des chiens
assez hardis pour forcer un grand loup à marcher plus vite qu'il
ne lui convient. Si des chiens sont assez braves pour tomber
dessus à la prise ou même à l'attaque (ce qui est bien plus rare),
il n'y en a guère qui tomberont dessus quand il marche ou galope
devant ou au milieu d'eux.
4* Parce qu'enfin bien des grands loups, perçant droit devant
eux sans s'arrêter, finissent par se forlonger, et alors, la voie
allant toujours se refroidissant, vous finissez par la perdre.
Mais si l'on ne prend un vieux loup que fort rarement, bien
régulièrement forcé (je n'en ai jamais pris que deux moi-même
et un troisième avec M. le comte de Barrai), on peut prendre les
louvards jusqu'en avril, et un bon louvard de décembre à avril
fait une chasse admirable. Les défauts y sont rares, parce que
le loup est rarement loin des chiens ; fort heureusement, car les
forlongers sont terribles et bien difficiles à enlever. S'il y a
un forlonger sur une route, il faut faire suivre rapidement aux
chiens les bordures de la route pour tâcher de relever la voie,
si le loup a fait un hourvari.
Il ne faut jamais, à la chasse du loup, s'amuser à briser ou à
attendre un retour : on risquerait fort de perdre la chasse et de
ne jamais la retrouver. Il y a quelquefois des loups qui font des
ï%2 LA CHASSE A COURRE»
randonnées assez courtes et qui se font battre toute une journée
dans une forêt ; mais généralement il faut s'attendre à être mené
loin et ne pas trop compter revenir coucher à l'endroit d'où Ion
est parti.
Le loup suit volontiers, pendant la chasse, les ravins, les fossés
et les endroits où il peut être à couvert ; quelquefois, mais plus
rarement, il suit les chemins. J'en ai vu que je chassais passer
tranquillement dans des cours de fermes ou de domaines, sans
s'inquiéter des habitants.
Quand le loup n'en peut plus, il s'accule à un buisson, à un
arbre, ou il se terre, la queue devant, sous quelque grosse pierre
ou dans quelque trou. Là il sô défend avec succès contre les
chiens et les intimide souvent au point que ceux-ci se bornent à
l'entourer en criant et ne se jettent dessus que quand les chas-
seurs arrivent à leur secours et les excitent.
Si Ton veut raccourcir un grand loup, par suite de la diffi-
culté de le forcer, le piqueur maintiendra ses chiens d'un peu
près, pendant que les chasseurs s'occuperont de croiser le grand
loup dans sa fuite. Il faut alors piquer résolument en avant, pour
gagner les postes que l'on connaît, et là se poster bien silencieu-
sement à bon vent si l'on veut le tirer. Le loup évente du reste
plus difficilement les tireurs à cheval que les tireurs à pied.
Depuis la fin d'août jusqu'à la fin de novembre, la chasse des
louveteaux est agréable et pour ainsi dire sûre; les louveteaux
se font battre et relancer et sortent rarement du buisson où on
les attaque.
Si l'on a connaissance d'une portée de louveteaux qu'on veuille
ou qu'on soit forcé de prendre, on se transporte avec la meute
qu'on harde au fort près de l'enceinte ; on attaque avec quelques
chiens de recri, mais on peut en garder quelques-uns des meil-
leurs et des plus fins pour attaquer les derniers louveteaux à la
fin de la journée. Le piqueur accompagne les chiens de recri et
les appuie fortement dès qu'ils ont lancé un louveteau. Aussitôt
qu'on s'est assuré de l'animal de meute, on donne les chiens en
les faisant bien rallier, et alors on les appuie, ce qui est de règle
QUELQUES CONSEILS AUX CHASSEURS DE LOUPS. 233
pour toute chasse de loup. Le louveteau se fait battre, et toutes
les fois qu'il se trouve aux lisières de son enceinte, il fait un re-
tour; là le piqueur ne doit pas trop presser les chiens, car ils
outrepasseraient les voies et auraient de la peine à relancer leur
louveteau, qui se remet souvent. Les chiens prennent fréquem-
ment change d'un louveteau sur l'autre, ce qui fait que le pre-
mier est souvent long à prendre, tandis que les derniers, déjà
épuisés, succombent bien plus vite; mais ils sont aussi difficiles
à lancer, par suite de l'entrecroisement des voies de la chasse
dans la même enceinte. Quand le louveteau ne peut plus mar-
cher, il s'accule, et on le prend souvent à la main sans qu'il
cherche à mordre. Après avoir pris un ou deux louveteaux, on
les fait fouler aux chiens et, si quelques jeunes s'y refusent, on les
caresse en les animant pour leur faire prendre de la hardiesse.
Souvent la louve vient pendant la chasse se donner aux chiens
pour tâcher de les enlever, afin de sauver ses louveteaux.
QUELQUES CONSEILS AUX CHASSEURS DE LOUPS POUR MAINTENIR
LEURS CHIENS DANS LA VOIE.
C'est une très grande affaire que de maintenir ses chiens dans
la voie du loup. A moins de posséder des chiens de ces races
comme il y en avait autrefois et dont c'était le goût dominant, il
faut constamment s'occuper de les maintenir dans la voie si on
veut avoir de vrais chiens de loup. J'entends par vrais chiens de
loup non pas seulement des chiens capables de prendre des lou-
veteaux ou d'attaquer un loup par hasard et de le chasser plus
ou moins bien la première fois, mais des chiens n'attaquant que
loup, le maintenant au milieu d'autres animaux, ne le quittant
pas et, à la prise, tenant le ferme ou lui livrant bataille pour
l'étrangler.
Voici comment je procédais dans le temps où je ne chassais
que le loup. J'avais toujours dans un chenil à part deux ou
234 LA CHASSE A COURRE.
trois loups que je prenais l'été dans une portée avec deui ou
trois vieux chiens d'attaque et un ou deux bulls. Mes vieux
chiens bien lents attaquaient un jeune louveteau, et quand j'avais
remarqué un endroit où il passait fréquemment, je m'embusquais
avec un ou deux de mes bulls. Aussitôt que le louveteau arrivait,
je lâchais mes bulls, qui le prenaient; j'arrivais rapidement pour
empêcher qu'il ne fût étranglé, puis j'emportais les louveteaui
à la maison, où je les élevais. Quand ils étaient grands, je les
faisais chasser tout l'été par les chiens, soit dans un grand
parc, soit dans un boqueteau au milieu d'une plaine. Je les fai-
sais prendre une ou deux fois, et la troisième fois je laissais
les chiens les étrangler ; sans cela, ils ne seraient pas devenus
assez mordants. Dans l'intervalle de ces chasses, je prenais
quelques blaireaux à la poche, la nuit, et je les faisais chasser
et étrangler par mes chiens, car j'ai toujours remarqué que ceux
qui les chassaient et les étranglaient le mieux étaient mes meil-
leurs chiens de loups. En procédant ainsi tout l'été, j'arrivais à
la saison de chasse avec des chiens bien en voie et n'en ayant
aucune crainte ; je savais quels étaient les meilleurs et les plus
mordants.
Il m'est arrivé deux fois, alors que j'avais mes meilleurs
chiens de loups, d'avoir affaire à des vieux loups très méchants
qui étranglaient les chiens à l'attaque. La seconde fois que j'at-
taquai le premier de ces loups, mes chiens rebutés le lâchèrent
et ne voulurent plus le chasser. Désespéré, je réfléchis long-
temps à ce que je pourrais faire, et voici le plan que j'adoptai
et qui me réussit à merveille. J'avais plusieurs bulls très forts et
très hardis qui me servaient à coiffer mes loups dans leur chenil
lorsque je les mettais en boite. Je les emmenai â la chasse
jusqu'à ce que mon piqueur Nennen eût pu rembucher ce grand
loup méchant; puis je me portai à un passage certain près de
l'enceinte, en tenant mes bulls hardés avec des laisses à lévrier.
Nennen, pénétrant dans l'enceinte avec ses chiens d'attaque, finit
par faire partir le loup effrayé de ses cris et sonneries. Il s'en
fut tranquillement au pas, accompagné à distance respectueuse
QUELQUE8 CONSEILS AUX CHASSEURS DE LOUPS. a35
>ar les chiens, qui n'osaient rien dire et qui le regardaient de
oin. Il arriva ainsi à la route où j'étais posté et s'arrêta même
me regarder. Je lâchai immédiatement les bulls, qui, partant
omme des fous, le coiffèrent en un instant. Surpris de cette
ttaque si brusque de chiens qui avaient l'habitude de faire leurs
>rises sur des loups de façon à ne pas être pinces eux-mêmes,
3 loup détala grand train avec les bulls pendus après lui comme
les sangsues. Immédiatement les chiens courants empoignèrent
igoureusement la voie et se mirent à la chasse avec une
rdeur extrême et je fis une chasse superbe. Deux fois ce pro-
édé me réussit. La dernière fois, c'était à un loup métis sau-
age que je l'appliquai. Il faisait de grands dégâts et était extrê-
nement méchant, se faisant chasser comme un chien en faisant
ine pointe d'un kilomètre, puis il se retournait et entamait immé-
nédiatement une bataille. Cette fois elle ne lui réussit pas, car
es bulls le coiffèrent si bien, qu'il ne put jamais se dégager.
Du reste, ces bulls sont souvent très utiles quand on a affaire
ï des animaux méchants, et c'est grâce à eux que je rends mon
>etit équipage actuel pour sanglier très mordant et tenant bien le
erme. A l'attaque surtout, ce n'est pas si facile qu'on le croit
)u qu'on le raconte d'avoir dix-huit ou vingt chiens tenant bien
e ferme dans de grands ronciers sur une compagnie de sangliers
)u sur un vieux sanglier méchant. Trois ou quatre bulls don-
îent du courage aux autres chiens, et les bulls ne gênent pas,
ittendu qu'ils ne tiennent pas la voie bien longtemps. Par
îxemple, ils lancent quelquefois tellement vite et raide, qu'il faut
j'en méfier. Ils sont souvent blessés ou tués, et si la chasse est
ongue, on risque de les perdre, car les bulls sont de mauvaise
etraite. Si l'on a un valet de chiens, il est donc utile qu'il s'occupe
i'eux pour les recueillir et les ramener; néanmoins j'en ai sou-
vent perdu.
236 LA CHASSE A COURRE.
vi j
j
DES CHIENS PROPRES A LA CHASSE DU LOCP.
I
Ce n'est pas facile, maintenant surtout, de trouver de vrais
chiens de loup, car il leur faut certaines qualités Spéciales qu'Us
possèdent rarement. Ils peuvent avoir des défauts que vous ae
le leur pardonneriez peut-être pas si vous deviez les employer j
à la chasse du cerf ou du chevreuil, mais sur lesquels tous
passerez, pourvu que le chien soit un vrai chien de loup. Si oc
chien préfère la voie du loup à toute autre, s'il ne chasse que
cela, s'il rapproche une voie un peu haute, s'il a du fond et de
la ténacité, que ne lui passeriez-vous pas, et avec raison, cari!
pourra vous rendre les plus grands services ! Sans lui peut-être
vous n'obtiendriez aucun résultat.
Les chiens qui chassent le mieux le loup sont les Gascons, les
vieux Poitevins, les anciens Vendéens (Bas-Poitou), les Saintoo-
geois, les Normands (quand il y en avait). N'oublions pas cer-
taines races de pays créées dans certains centres où Ton chassait
beaucoup le loup et qui avaient été formées surtout par sélection
entre chiens le chassant bien, sans qu'on puisse facilement dire
à quelle race ils appartenaient. Tels étaient, par exemple, les
anciens chiens de M. César de Moreton.
Les chiens de Gascogne aiment beaucoup la voie du loup; il*
sont fins de nez, mordants, hardis, tenaces, mais ils ont un grave
défaut à mes yeux, c'est d'être trop lents et trop musards, surtout
dans les rapprochers. Ils sont tenaces, c'est vrai, mais leur peu
d'intelligence et de vivacité dans les rapprochers et les défaut*
cause souvent des forlongers dont on ne peut sortir.
Les Poitevins étaient des chiens de loup possédant d'admi-
rables qualités : goût de cette voie, finesse de nez, bravoure,
train soutenu et vive intelligence ; on ne pouvoit rien voir &
meilleur sur le loup. Malheureusement, ils sont bien rares mai*
tenant; mais, comme dans les bâtards issus de cette race il y ena
~'"- 'LW ~^" "
m
, DES CHIENS PROPRES A LA CHASSE DU LOUP. 287
àcore où le vieux sang prédomine, il serait peut-être encore
B8ez facile, en tirant race de ceux qui ont le moins d'anglais,
le se procurer des chiens chassant bien le loup.
Les anciens Vendéens, surtout les poils durs, sont aussi de
rès bons chiens de loup ; ils sont très mordants et très braves et
iment assez la voie du loup ; ils sont vifs dans les rapprochers
:t serrent l'animal de près, car il y en a qui ont très grand pied.
l'en ai eu même d'un train extraordinaire. Leur défaut est de
le pas fournir beaucoup de rapprocheurs (il y en a pourtant dans
e nombre de très fins) et d'être durs à créancer, par suite de
eur extrême amour de lâchasse.
Les Saintongeois aiment généralement moins la voie du loup
que les Poitevins et sont moins mordants ; mais quand ils sont
bien dans la voie, ils sont alors parfaits, à cause de leur grande
finesse de nez, de leur belle façon de chasser et de leur disposi-
tion à garder change.
Quant aux Normands, ils étaient* excellents chiens de loup,
ayant beaucoup des qualités et des défauts des Gascons, avec
lesquels ils avaient du reste bien.de&points de ressemblance.
On pourrait certainement dans les bâtards Saintongeois et
Normands choisir ceux qui ont le plus de sang français et y trou-
ver de bons chiens de loup.
Dans les races spéciales de pays plus ou moins pures, on
pourrait choisir quelques bons chiens pour guider et former les
autres; mais il vaut mieux ne pas en tirer race, car on ne sait
jamais avec eux ce que l'on produira. Leur élevage donne des
chiens grands ou petits, poils ras ou griffons, vites ou lents,
quoiqu'ils sortent des mêmes parents.
Si, avec ce que je sais et ce que j'ai appris en cinquante ans de
pratique, je revenais au bel âge de mes débuts et qu'il me fût
possible de chasser loup comme je le faisais alors, eh bien!
j'avoue qu'en dépit de tout ce que j'ai dit et écrit et même de ce
que je pense toujours, j'essayerais de chasser loup avec des
chiens anglais, avec l'espoir d'en forcer et dans ce seul but.
Pour cela, je choisirais, dans les bons équipages anglais con-
238 LA CHASSE A COURRE.
nus parleur ancienneté et qui ont des chiens plus fins de nez et
plus chasseurs que les autres, des chiens d'élite. Je me procure-
rais quelques belles lices et étalons, surtout dans les chiens gris.
grands et forts, à tète longue, mais un peu carrée, que je choisi-
rais de préférence et dont je ferais des élèves.
Je passerais un an ou deux à mettre ces chiens dans la voie
au moyen de loups que j'élèverais et que je leur ferais chasser
et étrangler, et au moyen de blaireaux que je leur ferais chasser
et étrangler de même. Je n'élèverais jamais de ceux qui ne mon-
trent pas de goût pour la voie du loup ou qui ne sont pas un peu
fins de nez. Puis, après tous ces préparatifs, avec vingt ou vingt-
cinq chiens ainsi obtenus je commencerais par prendre des lou-
veteaux et je m'imagine que, si j'allais dans un pays à loups où
j'aurais établi dans un endroit retiré et désert un bon abat de
chevaux ou d'ânes, le jour où j'attaquerais non loin de ce garde-
manger un bon grand loup bien gavé de la nourriture de la nuit.
j'arriverais à le prendre. Avec des chiens très vites et très mor-
dants, ayant une puissante haleine, si je mettais mon loup hors
de son train et que je le forçasse à faire tête, je le prendrais
comme tout autre animal. C'est en somme ce que j'ai vu faire à
M. Jourdan du Mazot avec la crème des chiens de Rallye Bour-
gogne, qu'il avait amenés dans la Nièvre. Quand ces chiens-là
furent morts, il ne put jamais renouveler ses hauts faits.
CHAPITRE XVII
LE LIEVRE.
La chasse du lièvre est peut-être la plus fine de toutes les
chasses et, au dire de beaucoup de bons veneurs, la clef de toutes.
Un fin chasseur de lièvres est certainement un bon veneur ; un
bon chien de lièvre peut, s'il a du fond et du train, devenir très
bon sur toutes les autres voies. Le lièvre a si peu de sentiment,
ses voies sont si légères et il a tant de ruses dans son sac, que
le chasseur et le chien qui en viennent à bout sont certainement
capables, tous deux, de triompher de tous les autres animaux de
vénerie.
Les conditions météorologiques tiennent une place considé-
rable dans la chasse du lièvre, surtout maintenant que les chiens
fins de nez sont assez rares. Une terre trop sèche, gelée, de la
neige dans l'air, un vent ressuyant, une terre collante que rani-
mai emporte à ses pieds, l'odeur des plantes au printemps ou à
l'automne, sont autant d'obstacles à la réussite et donnent constam-
ment des journées où les chiens ne peuvent enlever la voie, font
24O LA CHASSE A COURRE.
rager les chasseurs et leur font condamner des chiens qui ne
sont que les victimes d'un temps contraire. Indiquer quels sont
les bons temps, je m'en garderai bien, car une longue expérience
m'a appris qu'on se trompe si souvent en voulant juger le temps
d'avance, que je pense qu'on n'en est bien sûr que quand on est
à la chasse et qu'on voit faire les chiens.
Maintenant je crois qu'il est mauvais de faire chasser les
chiens avant que la rosée ne soit ressuyée, car ils n'auraient
plus de nez quand le terrain et les herbes seraient devenus secs;
au moindre coup de soleil, ils ne pourraient enlever la voie.
Il faut aussi, autant que possible, commencer à faire ses chiens
de lièvre en plaine, car autrement, habitués à chasser au bois
avec des portées, ils ne pourraient plus enlever la voie dans les
plaines rases où elles sont souvent ressuyées par le grand air et
où se passe en somme une grande partie de la chasse du lièvre.
Enfin des chiens de lièvre ne doivent guère chasser que cet
animal ou le loup, dont la voie est au moins aussi légère et
difficile à enlever et qui de plus n'est guère destiné à les gêner
ou à leur faire faire change.
Il faut aussi et autant que possible à cette chasse éviter les
à-vue. Il est rare que les chiens ne perdent pas la voie après
un à-vue, surtout au lancer aux débuts du laisser-courre.
II
DU LIÈVRE ET DE SA NATURE.
Le lièvre est un petit quadrupède de l'ordre des rongeurs,
d'un pelage gris plus ou moins roux, suivant les pays; le des-
sous de la mâchoire inférieure est blanc, de même que le ventre:
le bout des oreilles est noir, la queue noire en dessus et blanche
en dessous.
On appelle lièvres ladres, ceux qui habitent les pays maréca-
geux; leur chair est mauvaise. On dit les lièvres de montagne
plus gros que ceux de plaine et ayant plus de brun sur le corps
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DU LIEVRE ET DE SA NATURE. 24 1
et plus de blanc sou9 le cou. On rencontre quelquefois chez eux
des variations de couleur, comme du reste dans tous les animaux.
Le lièvre dort les yeux ouverts ; sa vue ne paraît guère per-
çante et son odorat est médiocre, mais son ouïe e9t des plus fines.
11 est craintif et ne cherche son salut que dans la fuite ou dans
la ruse. Quoique très doux, il égratigne fortement quand on le
prend. Il vit d'herbes, de fruits, de plantes. Il est généralement
très gras en novembre et décembre, et c'est au printemps qu'il
est le plus maigre, à cause de la chaleur des femelles. Il vit de
sept à huit ans, mais il atteint rarement cet âge, par suite de ses
nombreux ennemis, oiseaux de proie, renards, chiens, belettes,
putois, chats, corbeaux, sangliers, blaireaux, etc., et surtout
l'homme.
Le lièvre ne boit pas. Lorsqu'il est en fuite et qu'il veut
écouter ou obseryer, il s'assied sur son derrière et se dresse
quelquefois de tout son corps. Il a les jambes de devant beau-
coup plus courtes que celles de dernère : aussi court-il beaucoup
mieux en montant qu'en descendant, et quand on le chasse,
commence-t-il généralement par gagner les hauteurs. Sa course
est une espèce de galop et il court sans bruit.
Le mâle, appelé bouquin, est plus court, mieux râblé, plus
rouge que la hase, nom de la femelle. Il a la tête plus courte et
plus ronde que la femelle. Il a les oreilles assez courtes, larges
et blanchâtres. Les crottes, appelées repaires, sont plus petites,
plus sèches, plus aiguillonnées que celles de la hase. Quand
le bouquin part du gîte, il dresse une oreille, couche l'autre, la
queue retroussée sur l'échiné, secouant le jarret. Quand le bou-
quin est attaqué et qu'il est du pays, il fait sa première randonnée
franchement et sans ruses; il commence ordinairement la seconde
dans le même goût et la termine par quelques retours et petites
ruses peu embarrassantes ; mais s'il se trouve encore pressé à
la troisième, il ne la finit pas et fait une fuite à faux vent.
La hase est plus grande que le bouquin, elle est plus longue
et a les cuisses moins gigottées, la queue plus longue et étroite,
les oreilles longues ; ses crottes sont plus grosses que celles du
16
lâfl LA CHASSE A COURRE.
bouquin, elles sont mieux moulées et moins sèches. En faisant
sa nuit, elle ne s'écarte guère du premier gagnage où elle est
entrée, par de petits chemins dans les blés et les ronces où elle
a son gîte. Si elle est attaquée, elle part généralement de plus
loin que le bouquin et cherche, enrandonnant autour de son gîte,
à se débarrasser des chiens par mille ruses, rebattant ses ?oies
et repassant par les mêmes endroits et les mêmes coulées. Elle
se relaisse souvent au bout de son premier retour. Si elle est
relancée, elle aime à faire ses dernières et plus fortes ruses dans
les villages et se remet souvent dans les maisons ouvertes et
inhabitées. Mais si elle a des levrauts, elle fait quelquefois une
longue fuite pour enlever les chiens, et alors elle se fait prendre
plus facilement. Lorsque le bouquin est assis, il tient les oreilles
serrées sur les épaules Tune contre l'autre, tandis que la hase
les tient ouvertes et écartées des deux côtés du cou et des
épaules.
Les lièvres multiplient beaucoup et engendrent à peu près en
tout temps; cependant les hases sont plus particulièrement en
chaleur de décembre à mars et c'est pendant ce temps qu'il naît
le plus de levrauts. A ces époques les bouquins accompagnent
souvent les femelles pendant le jour et les suivent comme des
chiens à la piste. On en voit souvent poursuivre ainsi une hase.
Un mois après l'accouplement, la femelle produit de deux a
quatre petits, rarement moins ou plus, qu'elle dépose dans un
buisson ou une haie ou sous une touffe de blé ou d'herbe. Elle
les allaite pendant quinze ou vingt jours, puis elle les abandonne
à eux-mêmes et ils acquièrent presque tout leur accroissement
en un an. Comme les hases sont en chaleur très peu de temps
après qu'elles ont mis bas et qu'elles peuvent concevoir tout de
suite, elles produisent le plus souvent toutes les six semaines. 11
y a même chez les hases beaucoup d'exemples de superfétation.
Une femelle d'un an peut produire du printemps à l'automne
ordinairement trois fois et une vieille hase quatre fois. Elles
peuvent donc faire de huit à douze levrauts, qui sont loin de
tous réussir, par suite de leurs nombreux ennemis. Mais sans
DU LIÈVRE ET DE SA NATURE. 2$
cette grande production il y a longtemps que le lièvre n'existe-
rait plus dans une grande partie de la France.
Dans l'hiver, quand les nuits sont dures et le froid violent, les
lièvres s'enfoncent dans les bois, les halliers, dans les fossés
garnis de ronces, et au mois de mars et d'avril ils abandonnent
généralement les forts pour aller dans les blés verts. Dans les
pays de plaines, ils ne sortent guère des blés tant que ceux-ci
sont debout, et même après la récolte, les jours de temps sec
et clair, ils gîtent dans les chaumes et les labours jusqu'à
l'hiver. Pour les lièvres nés à fond de forêt, ils y restent géné-
ralement, attendu qu'ils ne savent souvent pas qu'il existe un
autre pays, et on les trouve habituellement dans les halliers, sous
les ronciers, dans les grandes futaies ou entre les racines sail-
lantes des grands arbres. Ceux qu'on lance aux lisières des
forêts ne sont pas pour cela lièvres de bois, mais souvent lièvres
de plaine, qui se sont réfugiés là soit à cause des mauvais
temps, soit parce qu'ils étaient inquiétés. Mais, comme le lièvre
paraît prévoir le mauvais temps, il varie son gîte suivant les
circonstances. La neige, la grêle, le vent aigre, les fruits qui
tombent des arbres, les branches cassées par le vent étant choses
qui le tourmentent, il établit son gîte en conséquence. Aussi les
jours de pluie on le trouvera dans les endroits secs et pierreux,
dans les carrières, les guérets secs et labourés de vieux temps,
dans les coteaux à l'abri du vent et de la pluie, dans les fossés
et cavités où il puisse être sèchement et sous le vent. Toutefois,
pendant le rut, les mâles n'ont guère de demeure fixe. On bât
souvent beaucoup de pays sans en trouver un, quoique ayant des
voies chaudes, parce qu'ils sont à la poursuite d'une hase et
qu'ils sont gîtes dans le même canton qu'elle. Quand on y ar-
rive, au lieu d'un, il en part plusieurs.
Le lièvre aime les pays où les bois, les plaines et les prairies
s'entremêlent fréquemment. Dans ces pays, il se tient générale-
ment dans les bois de novembre à mai, en novembre dans les
champs; mais cela ce n'est pas d'une règle absolue.
244 LA CHASSE A COtJRRE.
III
DE LA CONNAISSANCE DU LIÈVRE PAR LE PIED.
Quand on veut chasser un animal pour le forcer, la connais-
sance du pied est indispensable, car c'est souvent le seul indice
que vous ayez, dans certains cas, pour vous assurer que vous
êtes encore sur votre animal de meute. Certes il faudra être très
fort et très hardi pour reconnaître par le pied un change de bou-
quin à bouquin ou de hase à hase, mais on peut arriver facile-
ment à savoir si on a fait change d'un bouquin sur une hase, et
réciproquement; aussi est-il nécessaire au chasseur de lièvre
de se livrer à cette étude et de tâcher d'y acquérir les connais-
sances nécessaires.
Il faut d'abord observer que, de tous les animaux sauvages que
l'on chasse, c'est le lièvre seul chez lequel le pied du mâle est
plus petit, plus serré et plus pointu que celui de la femelle.
Le bouquin a donc le pied plus court, plus serré, plus pointu
que la hase; il appuie plus de la pince que du talon : aussi ses
ongles sont-ils gros, courts et usés, serrés et enfoncés en terre;
quand il marche dans la boue, on voit aussi qu'il a moins de
poils sous le pied.
La hase, au contraire, a le pied long et large, garni de beau-
coup de poils; ses ongles, petits, minces et pointus, sont écartés
les uns des autres et ils entrent peu en terre; son pied n'a
pas, comme celui du bouquin, la forme d'une lancette. Marchant
peu, la hase n'a pas le poil usé sous le pied, et ce poil, repousse
entre les doigts par la terre quand elle marche, lui élargit le
pied; d'ailleurs, étant souvent pleine et lourde, son pied s'élar-
git davantage.
Lorsque le lièvre court ou trotte, il place ses deux pieds de
devant l'un devant l'autre, et ses pieds de derrière viennent se
placer en avant et des deux côtés des pieds de devant, en lais-
sant une empreinte bien plus longue et bien plus large, parce que.
DE LA CHASSE DU LIÈVRE. 245
chaque fois qu'il s'avance, il appuie les pieds de derrière jusqu'au
talon, et même souvent au delà. Il est donc assez facile de dis-
tinguer les pieds de devant de ceux de derrière.
IV
DE LA CHASSE DU LIÈVRE.
On attaque toujours le lièvre à la billebaude, et quand on a
la chance de pouvoir le rapprocher avant de le lancer, il faut
s'en réjouir, car les chiens qui auront rapproché un lièvre avant
de le lancer le chasseront toujours mieux qu'un lièvre parti
subitement devant eux.
Il est donc nécessaire de connaître quelques-unes des ruses du
lièvre pendant sa nuit avant qu'il ne se mette au gîte. D'abord il
ne se remettra jamais là où il aura fait son gagnage ; mais, en en
sortant pour aller se gîter, il aura marché quelque temps plus
ou moins droit, puis, se sentant en état de se gîter, il aura pris
un chemin, s'il en trouve un, sera allé à un carrefour y donner
successivement dans les chemins qui y aboutissent, fera quel-
ques ruses dans un champ voisin et retournera au carrefour. Il
doublera alors ses voies dans le premier chemin par lequel il
est venu, puis, se jetant de côté subitement dans un champ
voisin, il le traversera, reviendra sur ses voies pour reprendre le
chemin et sautera enfin dans le champ du côté opposé, pour
se gîter suivant le temps qu'il fera ce jour-là. Quand il sera
arrivé à cinquante pas de son gîte, il fera des sauts à droite
et à gauche avant de s'élancer dedans. Si les chiens qui le rap-
prochent ont débrouillé ses voies et arrivent près de lui, il
partira rarement d'avance, il se fera petit dans son gîte, s'en-
foncera dedans en les regardant, et s'il les voit occupés à faire
un grand retour et s'éloignant de lui, c'est alors qu'il sortira
de son gîte, les oreilles basses et se faisant petit; il s'en retour-
nera par où il est venu, faisant des ruses dans tous les chemins
qu'il rencontrera, puis se forlongeant en se donnant le vent, et
246 LA CHASSE A COURRE.
s'il entend les chiens chasser mollement ou tomber en défaut, il
s'en ira, toujours rusant, s'établir dans un nouveau gîte.
Si, en rapprochant la voie d'un lièvre, on s'aperçoit qu'il a
passé au milieu des meilleurs gagnages sans s'arrêter et qu'après
avoir fait de grandes ruses, dans les chemins et carrefours, il est
allé se gîter dans un endroit découvert sec et élevé ou dans un
petit boqueteau, on peut le croire étranger et venu à la recher-
che des hases, surtout dans les mois de janvier, février et mars.
Si on le lance dans un boqueteau et qu'il s'y fasse relancer
trois ou quatre fois, il est à coup sûr étranger, regrettant de
quitter le bois parce qu'il ne connaît pas bien le pays et qu'il
se prépare à prendre un grand parti pour retourner dans le pays
d'où il est venu.
En sortant, le chasseur ou le piqueur, entouré de ses chiens
découplés, gagnera les devants des gagnages qu'il suppose bons
pour le lièvre et il laissera faire ses chiens le nez dans le vent;
s'ils trouvent une voie, il les encouragera peu et doucement, il
tâchera de prendre connaissance du pied de son lièvre et y appel-
lera doucement ses chiens, s'il le trouve; en somme, il les lais-
sera faire et ne les enlèvera que si quelques-uns harpaillent sur
les voies du gagnage, sans pouvoir les débrouiller. Il leur fera
alors prendre les devants pour retrouver la voie de sortie du
gagnage qui est plus froide parce que le lièvre y sera resté long-
temps, s'arrêtant pour manger et laissant plus de sentiment. Si
les chiens ont retrouvé la voie, il les laissera faire et ne les
aidera plus guère que quand ils seront tombés en défaut au car-
refour ou dans le chemin ou le champ où l'animal aura commencé
à doubler ses voies pour aller à son gîte. Le veneur ne doit
pas trop les animer, car cette voie est très légère, et comme
le lièvre a dû faire des crochets et des sauts de côté, les chiens
le sur-alleraient facilement. Si, en suivant cette voie, les chiens
la perdent subitement, c'est signe que le lièvre a fait ses grands
sauts, et il faut se méfier, car le lièvre doit être gité près de là et
il ne partira pas facilement. Si pourtant, après avoir bien battu
le lieu où le lièvre a fait ses grands sauts, on ne le trouve pas,
DE LA CHASSE DU LIÈVRE. 247
il faut en prendre les grands devants, puis les arrières, en se
méfiant toujours et ayant l'œil au guet. Le terrain indique d'ail-
leurs ce que Ton doit faire, car si le terrain est couvert d'herbes,
bruyères, etc., et favorable à la voie, on ne doit pas pouvoir la
sur-aller facilement, tandis que si le terrain est nu, sec et pier-
reux, on peut naturellement faire ses devants et ses arrières
plus loin, surtout s'il s'y trouve un chemin peu favorable, que les
lièvres aiment à suivre avant d'aller se glter.
Si, en foulant le terrain, on aperçoit plusieurs vieux gîtes, c'est
signe que le lièvre habite ordinairement ce canton, et si on l'aper-
çoit en foulant, il faut se retirer doucement avec les chiens pour
empêcher un à-vue, attaque déplorable qui crève les bons chiens,
empêche la meute de se coller et amène forcément à perdre la
voie au bout de peu de temps ; un des chasseurs ira faire partir
le lièvre sans que les chiens s'en aperçoivent. On ramènera alors
les chiens et on leur fera prendre la voie le plus doucement pos-
sible, et sans crier ni les appuyer on les mènera sur la voie le
plus doucement possible et sans les appuyer trop, car ils ne
seront encore que trop chauds.
Le chasseur ou le piqueur, s'ils sont à cheval, doivent tou-
jours se maintenir à la queue des chiens, de crainte de faire bon-
dir le change, surtout quand les lièvres sont abondants dans le
pays; jamais ils ne doivent être à côté, et encore moins en tête.
Ils doivent toujours avoir un œil à leur lièvre dans le cas où ils
pourraient l'apercevoir, ce qui pourrait les aider dans un défaut,
mais jamais pour taïauder leurs chiens et les appeler à la voie.
Si le lièvre lancé est une hase, elle ne s'écartera pas beaucoup,
tournera sans cesse dans son canton, doublant et redoublant ses
voies, faisant un petit hourvari et se relaissant. Elle fera ses
ruses le long d'un village, dans les cours et jardins, s'en retour-
nant faire la même chose ailleurs, et là même où elle l'a déjà
fait, ce qui occasionne encore un défaut. Il faut alors envelop-
per le village doucement et prendre garde de sur-aller la voie
aux chemins qu'elle traverse volontiers par des coulées qu'elle
connaît. Si on ne trouve rien, on doit la soupçonner restée
248 LA CHASSE A COURRE.
dans quelque cour ou jardin, le long d'un mur, d'une haie on
d'un vieux bâtiment, et il faut l'y rechercher avec d'autant plus
de soin, que, si elle est sur ses fins, elle se laisserait plutôt
prendre par les oreilles que de repartir.
Il vaut mieux attaquer un bouquin qu'une hase, et pour cela ne
pas quêter aux abords des villages, mais au milieu des champs
ou des landes, sur les coteaux et endroits élevés où se tiennent
de préférence les bouquins.
Si vous lancez, loin des villages, un lièvre plus rouge que fauve
qui part nonchalamment du gîte, se faisant petit, les oreilles
basses ainsi que la queue, puis secouant ses jarrets et rele-
vant sa queue qui paraît ronde et presque blanche, faisant deux
ou trois sauts sur les quatre pieds, prenant ensuite un galop
réglé en couchant alternativement une oreille et puis l'autre,
soyez convaincu que vous avez affaire à un bouquin rusé et vigou-
reux. S'il est étranger, il commencera à ruser dans un petit can-
ton pour se débarrasser des chiens, se fera relancer deux ou
trois fois de suite, puis, tournant le dos à son canton, percera
droit devant lui et retournera droit à son pays, que l'amour lui
avait fait quitter. S'il va dans le vent et que le temps soit bon, il
peut être pris avant d'y arriver; mais s'il y arrive encore avec
assez de forces, il fera ses ruses de lièvre de pays.
Si le bouquin attaqué n'est pas un étranger, il entreprendra
généralement une grande randonnée sans ruser, puis souvent de
suite une autre randonnée encore plus grande, mais en la finis-
sant il commencera à faire quelques retours, puis un hourvari
avec un saut de côté. S'il est relancé, il recommencera ses ruses
et finira par mettre les chiens en défaut. Alors il faut, comme
pour la quête du matin, faire les devants et les arrières; mais
comme le lièvre est debout, et qu'il y a probablement du change
à craindre, il faut d'abord les prendre petits et diligemment, puis
deux autres de plus en plus grands et lentement pour donner
aux chiens le temps de se coller et ne pas sur-aller la voie. Ces
devants et arrières qui forment un cercle dont le défaut est le
centre doivent être pris avec l'attention de faire passer les chiens
DE LA CHASSE DU LIEVRE. 249
sur un terrain qui leur soit favorable, c'est-à-dire plus humide
<<■
Le lièvre,
que sec ou qui ait des portées. Si on les faisait passer sur
25o LA CHASSE A COURRE.
un terrain sec et pierreux et qu'on ne longeât pas les chemins,
on pourrait sur-aller par sa propre faute.
Si on ne trouve pas la voie, il faut réfléchir et conjecturera
que peut être devenu le lièvre et se dire : c Le lièvre ne va pas
là, parce que, par un aussi bon temps, tel ou tel chien ne laisse-
rait pas aller la voie sur un terrain comme celui sur lequel Jn
fait mes retours ; le défaut a pourtant bien eu lieu à tel endroit,
parce que tels ou tels chiens qui ne mentent pas ont recrié jus-
qu'à cet endroit. » Le chasseur observera de quel côté le lièTre
avait la tête tournée au moment du défaut pour prendre ses
devants avec soin de ce côté, et quel pays il a tenu dans ses pre-
mières randonnées, car un lièvre qui en a fait plusieurs dans le
même canton se déterminera difficilement à le quitterai se rap-
pellera quelles ruses il a faites, et de quel côté, car il est probable
qu'il en fera de semblables; si le lièvre est malmené, alors ses
ruses doivent être presque toutes en retours et hourvaris, tandis
que, s'il était encore frais, il est probable qu'il aura percé en
avant et qu'on perd sur du mauvais terrain. Si c'est un lièvre du
pays, il aura probablement battu le canton, tandis que s'il est
étranger, il aura percé en avant et se sera forlongé. Si c'est une
hase, il faudra se méfier suivant l'époque, qu'elle ait des petits
et qu'elle ait percé en avant en se forlongeant pour écarter les
chiens. Si enfin le terrain du défaut paraît favorable et le temps
bon, il est peu probable que les chiens laissent aller la voie eo
avant; le lièvre est ou rasé après un petit hourvari et un saut
de côté, ou il est retourné en doublant ses voies. Si le terrain du
défaut est désavantageux, on peut croire que le lièvre est for-
longé, que les chiens laissent aller la voie en avant ou la sur-
allent; il faut alors faire des devants plus grands au delà du mau-
vais terrain. Si le défaut a eu lieu dans un chemin, les chiens
ont pu empaumer la voie grand train et l'outrepasser de beau-
coup ; il faut donc border le chemin au retour des deux côtés.
Il y a des lièvres qui suivent toujours les chemins, et ce sont
les plus difficiles à prendre. Si votre lièvre a été couru dans la
plaine par un mâtin, chien de berger ou autre, il faut tâcher de
DE LA CHASSE DU LIÈVRE. 25l
voir ou de savoir jusqu'où le mâtin l'a couru et y amener vos
chiens, car sans cela ils ne pourraient enlever la voie couverte,
et s'ils y arrivaient péniblement, il est probable que le lièvre
serait ensuite forlongé et qu'ils ne pourraient plus enlever la
voie. Quoique j'aie dit que l'habitude du lièvre était de faire ordi-
nairement une seconde randonnée comme la première, cependant
il arrive assez souvent que de vieux bouquins font leur seconde
randonnée dans l'autre sens, à gauche s'ils avaient fait la pre-
mière à droite, et réciproquement. Si le lièvre a gagné un champ
fumé ou qui a servi de pacage à des moutons, il est probable
qu'il y fera quelques ruses, car il s'y relaisse souvent après plu-
sieurs doubles voies.
Si le défaut a lieu près d'un ruisseau, il se peut que le lièvre se
soit mis à l'eau, l'ait traversé ou ait plutôt descendu le courant
(jamais remonté) et l'eau, coulant dans le même sens que lui,
aura emporté tout sentiment. Il faut alors se rappeler de quel
côté il a fait ses ruses ; si c'est à droite, commencer par border
le côté droit du ruisseau. S'il y a des joncs et des roseaux, se
méfier qu'il ne s'y soit remis, ce qui est bien probable et, en les
battant avec soin, vous le verrez bondir.
Mais les plus mauvais défauts sont ceux causés par les mau-
vais chasseurs qui taiaudent leurs chiens et les enlèvent sur les
fins d'un lièvre. Ah! â toutes les chasses, que ces gens-là font
faire de mauvais sang aux bons veneurs! Une fois décollés de la
voie, les chiens essoufflés passent et repassent sur elle sans
pouvoir la ressaisir, d'autant que plus le lièvre est chassé, moins
il a de sentiment. Cela perd d'ailleurs les chiens qui ne travaillent
plus et au moindre embarras lèvent la] tête dans l'espoir de
voir le lièvre courir. On ne doit donc jamais taïauder les chiens
que dans le cas où l'on voit le lièvre faire partir un lièvre
de change ; dans la crainte que vos chiens ne partent sur ce
lièvre, vous leur criez alors taïaut sur le lièvre de meute pour
les y rameuter.
Les derniers grands devants et arrières étant faits, les chemins
et sentiers longés en allant et en venant, et tout cela inutilement,
252 LA CHASSE A COURRE.
il ne reste plus qu'à fouler le terrain où a eu lieu le défaut, et
cette recherche doit être faite avec une patience extrême. 11 peut
arriver qu'il parte un lièvre de change. S'il part à vue des chiens,
il est plus que probable que tous les chiens s'emballeront des-
sus ; examinez tout de suite si le gîte est chaud, fait du jour,
bien propre et bien net ; il y aura des chances pour que le lièvre
soit de change. Courez alors à vos chiens, et si vous voyez que
quelques-uns de vos bons chiens de change, comme doit en avoir
tout bon équipage de lièvre, faiblissent, chassent en queue mol-
lement ou même ne veulent plus chasser, arrêtez vos chiens.
corrigez-les en les réprimandant et ramenez-les au défaut. Si
au contraire le lièvre vous paraît lièvre de chasse, que le gîte
ait l'air vieux, qu'il ait plu dedans, qu'il y ait du poil collé au fond
et à peine de chaleur, si, en rejoignant vos chiens, vous voyei
que vos bons chiens emmènent bien la voie et sont bien fermes,
alors vous devez croire que c'est bien votre lièvre qui est reparti
et il faut les suivre en les laissant faire. Si le lièvre est reparti
sans qu'on le voie, il faut laisser faire les chiens, et il n'y a que
la façon dont chasseront les bons qui puisse vous indiquer s'ils
sont sur le même animal ; si les chiens sont bons et bien en
curée, ils reconnaîtront vite que ce n'est pas leur animal, et
comme il faut de bons chiens pour chasser lièvre et qu'on ne
peut réussir sans cela, si vos chiens ou au moins un bon nombre
de vos chiens ne marquent pas le change, il vaut mieux ne pas
chasser lièvre.
Quand des chiens ont pris un lièvre, il n'y a aucun inconvénient
à leur en faire chasser un second ; ils n'en seront que meilleurs
s'ils le prennent. Je me rappelle toujours avec plaisir un excellent
équipage de lièvre appartenant à un de mes voisins et composé
de 20 chiens d'Artois qui prenaient fort régulièrement leur lièvre
(j'entends prendre régulièrement quand sur environ 3o lièvres
attaqués les chiens en prennent 20) et avec lesquels j'ai vu
prendre deux et même trois lièvres dans une seule journée.
La chasse du lièvre est si fine, que le chasseur de son côté
doit être malin pour savoir tirer parti de tout, car il semble que,
DE LA CHASSE DU LIÈVRE. 253
pour causer plus d'embarras, chaque lièvre ait sa façon de ruser ;
aussi, plus un bon chasseur vieillit, plus il avoue qu'il apprend.
Quand les chiens sont bons pour chemins, qu'ils savent
prendre d'eux-mêmes leurs devants et arrières sans trop d'ardeur
ni de vitesse et qu'ils sont requérants, ils n'ont pas besoin d'aide
les jours de bon temps; mais les jours de mauvais temps il
faut les aider. Il faut, dans un défaut, tâcher de deviner, d'après
l'idée qu'on a du lièvre, la ruse qu'il a pu faire et opérer en
conséquence, promptement dans certains cas et lentement dans
d'autres. Un défaut de deux à trois heures ne doit pas étonner,
car on doit trouver son lièvre, attendu qu'il est quelque part.
On reconnaît qu'un lièvre est sur ses fins, quand on le voit
raccourcir ses randonnées et, par ses ruses en hourvari et ses
fréquents relancés, faire défauts sur défauts. Quand un défaut
dans un pays couvert est suivi d'un relancé, puis aussitôt d'un
about de voie, quand on voit le lièvre et qu'on remarque que son
poil est pius noir, qu'il est efflanqué, qu'il a les oreilles basses,
le dos haut, ce qu'on appelle porter la hotte, on doit le croire
très malmené et près d'être pris.
Le lièvre pris, le piqueur le laisse fouler aux chiens, surtout
aux jeunes, sonne le hallali, et fait la curée chaude.
Voici quelles en étaient les règles dans l'ancienne Vénerie :
Aussitôt le maître d'équipage arrivé, le piqueur lève le pied
droit de devant pour le présenter à celui des chasseurs qui lui
est indiqué; ensuite il déshabille le lièvre, en met la peau autour
de sa trompe, près du tenon qui soutient le pavillon. S'il a du
pain, il le trempe par petits morceaux dans le corps et le sang
du lièvre ; ensuite il divise le lièvre en plusieurs parts. Il sonne
alors une vue pour faire lever les chiens couchés, qui viennent
sous le fouet aboyer à la curée et sans quitter l'embouchure le
piqueur leur livre la curée en sonnant le hallali.
Le pied ne se donne pas ordinairement deux fois à la même
personne pendant une saison de chasse et il ne doit jamais l'être
à quelqu'un qui a quelques chiens chassant avec l'équipage, à
moins qu'il ne le demande.
254 LA CHASSE A COURRE.
DES CHIENS PROPRES A LA CHASSE DU LIÈVRE.
Tous les vieux chasseurs de lièvre ont vu, connu ou entendu
parler de quelques chiens sans race précise, produits baroques
et extraordinaires des croisements les plus hétéroclites, qui
manquaient rarement leur lièvre et rendaient les plus grands
services dans certains équipages pour lièvre, où, à leur mort,
leur absence s'est cruellement fait sentir ; mais personne n'a vu
ces chiens produire des enfants doués des mêmes qualités
qu'eux, ou, si cela est arrivé, le fait est tellement rare, qu'on
aurait grand'peine à en citer quelques exemples. C'est que ces
chiens issus d'un croisement extraordinaire, basset et chien
d'arrêt, mâtin et chien courant etc., n'étaient qu'un de ces phéno-
mènes comme on en trouve dans ces croisements bizarres, mais
incapables de se reproduire pareils à eux-mêmes. Ce n'est donc
pas parmi ces chiens, ni parmi les briquets si difficiles à mettre
en meute, qu'il faut chercher des reproducteurs pour se créer
une race de chiens vraiment chiens de lièvre. Il faut les choisir
dans les races déjà fixées et qu'une longue pratique de cette
chasse chez leurs ascendants a amenées par des croisements
judicieux à avoir les qualités indispensables pour la chasse de
cet animal : les chiens d'Artois, les chiens de porcelaine, les
Vendéens de moyenne taille, les bâtards du Haut-Poitou de
petite taille. Il faut généralement qu'ils aient beaucoup de sang
français pour avoir du nez, et en même temps il faut qu'ils
soient vites et pas musards. Il faut qu'ils aient du sang d'une
race disposée au change ou de chiens choisis dans cette race
comme chiens de change. Il faut qu'ils poussent leur voie et ne
restent pas à crier sur place dans un défaut.
Outre les races que j'indique, il y a dans bien des pays des
races ou plutôt des sous-races de chiens de lièvre, formées avec
soin pendant longtemps par des chasseurs émérites (comme la
DES CHIENS PROPRES A LA CHASSE DU LIÈVRE. 255
petite race qu'avait M. de Villars) et dont on est sûr de tirer
tout de suite des chiens excellents et pareils à leurs parents, car
la race en est fixée.
On dit qu'il y a en Angleterre des meutes de Harriers et de
Beagles ne chassant que le lièvre, et le chassant à merveille. Je
le crois sans peine, les Anglais n'étant pas gens à conserver
longtemps une meute qui ne réussirait pas pour l'emploi auquel
elle est destinée ; mais je crois que si l'on veut former une meute
de Harriers ou de Beagles pour chasser en France, il faut choisir
avec soin la race ou plutôt la famille que l'on prend, car ces
races ou familles varient beaucoup en Angleterre. Il y a des
meutes composées de petits Fox-Hounds sans grande voie ni
grand nez, vites comme des balles, qui ne conviendraient guère
chez nous, et il y a des meutes composées de Harriers du Sud
(Southern-Hounds) ou bâtards de cette race qui ont un nez exquis
et des gorges magnifiques : ceux-ci réussiraient bien mieux chez
nous, où une partie de la chasse se passe ordinairement au bois ;
j'en ai vu d'excellents. Les Anglais ont formé, en croisant le
Southern-Hound avec le Harrier ou le petit FoxHound, une
espèce de bâtard qui réussit généralement bien à la chasse du
lièvre et qui est plus vite que le Chien du Sud.
Ce que je reproche aux équipages de Harriers que j'ai vus,
c'est que ces chiens m'ont paru peu travailleurs, se dégoûtant
vite dans un défaut, pas très malins et, sous ce rapport, infé-
rieurs aux chiens d'Artois, aux Vendéens et aux chiens de
l'Ariège. Si je n'ai pas parlé de ces derniers, c'est que je ne
les ai jamais vus sur lièvre, où on dit qu'ils sont excellents.
Maintenant, quand le pays est très favorable, qu'il y a des her-
bages comme en Angleterre, des landes couvertes d'herbes, etc.,
ces chiens très vites peuvent prendre facilement un lièvre ; mais
si vous les mettez dans les bois et fourrés, ou encore dans les
plaines cultivées du Nord ou de la Normandie, avec des champs
fumés, des troupeaux de moutons et des chemins macadamisés,
ils n'y brillent pas souvent et les réussites sont rares, une fois
que les levrants sont devenus lièvres; aussi tout chasseur de
256 LA CHASSE A COURRE.
lièvre qui voudra former une meute fera bien de choisir dans
les races que je lui indique. Il se procurera facilement dans la
Vendée, l'Anjou et le Poitou de ces petits bâtards issus de
bonnes familles ayant du nez, de la gorge, de la finesse ei
l'amour du change ainsi que de la chasse. Leur petite taille per-
mettra d'en faire l'acquisition pour un prix raisonnable. Mais
si l'on ne tient pas à prendre très vite et qu'on chasse à pied,
si on aime la belle musique et les beaux rapprochers, il faut
choisir des chiens d'Artois, des petits chiens de porcelaine, des
chiens de l'Ariège. Alors, pourvu qu'on sache s'y prendre, on
aura des chiens qui donneront plaisir, contentement et réussite.
CHAPITRE XVIII
LE RENARD.
Le renard n'est pas, à mon avis du moins, un animal de
vénerie, parce que, habitant sous terre et ne pensant qu'à se
terrer quand il est chassé depuis quelque temps, on ne peut pas
considérer sa chasse comme étant de la vénerie, puisqu'il peut
se soustraire à la poursuite et vous échapper sans qu'il y ait
faute des chiens ou des hommes. Cependant sa chasse est si
répandue chez nos voisins les Anglais, que quelques veneurs fran-
çais essayent de temps en temps de les imiter, et il est peut-être
utile d'en dire un mot. Toutefois je serai court, imitant en cela
nos maîtres en vénerie, qui ont toujours dédaigné cet animal et
l'ont toujours considéré comme bon tout au plus à chasser à tir
avec quelques briquets et bassets.
D'ailleurs, à cette chasse, il n'y a guère de difficultés, peu ou
point de défauts, sauf quelques ruses relevées assez facilement
à cause de l'odeur et du bruit continuel. Le renard exhale une
si mauvaise odeur, que tous les chiens, mais surtout les plus
258 LA CHASSE A COURRE.
mauvais, peuvent le chasser et ils perdent rarement la voie. Il
tient toujours le fort et ses ruses se bornent à des retours. Il
se tient généralement près des chiens, ne se forlonge presque
jamais et il est si puant, qu'il faut un bien mauvais chien pour en
perdre la trace. Enfin il y a si peu de science à cette chasse,
que le premier valet de chiens qui sait sonner, crier et piquer
au fort, est tout ce qu'il faut pour accompagner les chiens. S il
est bien ignorant, on a la chance de le garder plus longtemps
à son service.
Dans les pays très boisés, soit grandes forêts, soit plaines
parsemées de nombreux bois de moyenne étendue, la chasse à
courre du renard n'est guère intéressante, car il y a des terriers
dans tous ces bois et les boucher avant les chasses devient un
ouvrage coûteux et difficile, presque toujours fait d'une façon
incomplète, de sorte que le renard terre presque toujours, et cela
sans donner grand plaisir. D'ailleurs en France, avec la division
de la propriété, il faudrait envoyer boucher les terriers dans
peut-être vingt bois appartenant à des propriétaires différents,
plus ou moins récalcitrants et n'aimant pas qu'on vienne la
nuit dans leurs domaines. Il n'y a guère que quelques pays
marécageux où, les renards y ayant peu de terriers, cette chasse
pourrait réussir; mais les renards y sont généralement rares.
Cependant je me rappelle avoir attaqué en Bourbonnais des
renards qui ne terraient pas, sauf dans des aqueducs et sous
des ponts et qui faisaient alors d'assez jolies chasses; mais
comme dans ces pays-là précisément les renards sont ordinai-
rement rares, on ne peut les chasser régulièrement.
Enfin, si par hasard on habite un pays où cette chasse puisse
se faire et que quelques veneurs veulent s'y essayer, disons un
mot du renard et de ses mœurs.
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DU RENARD ET DE SA NATURE.
269
II
DU RENARD ET DE SA NATURE.
Le renard est une espèce de chien sauvage; il a la tête poin-
tue, les oreilles droites, la queue grosse, longue et chargée de
poil. Plus il est jeune, plus il est rouge; plus il vieillit, plus il
Renardeau quittant son terrier.
devient gris ; enfin la queue lui blanchit par le bout. Il y en a
dont le poil est presque noir et qu'on appelle charbonniers.
La femelle entre en chaleur une fois Tan, en février; dans sa
chaleur elle appelle le mâle par. un cri rauque et lent, qu'elle
emploie de même pour appeler les renardeaux. Les renards ne
s'accouplent point comme les chiens, mais bien couchés sur le
côté.
2Ô0 LA CHASSE A COURRE.
La renarde porte environ soixante jours et fait sept ou huit
renardeaux, quelquefois moins et rarement plus. Elle les met au
monde dans le terrier le plus profond. Quand ses petits ont un
mois, elle les fait sortir sur le bord du trou, où elle les allaite.
Le père et la mère sont alors continuellement à la chasse pour
prendre gibier et volaille et nourrir leurs petits. Aussi les renards
sont-ils la mort du gibier et la terreur des poulaillers; mais, de
même que le loup, ils respectent généralement les habitations
voisines de leurs portées; du moins on le prétend, si on en croit
le proverbe t Jamais renard n'a chassé sur son terrier ».
Le renard a le pied sec, nerveux, serré, allongé et n'a, pour
ainsi dire, point de talon. Il a le pied de derrière beaucoup plus
petit que celui de devant; quand il va d'assurance, jamais il ne
se méjuge, mettant régulièrement son pied de derrière dans
celui de devant; sans cesse sur Je qui-vive, il prend garde à
tout et voit tout. L'été, il rôde autour des villages, parce que, la
terre étant couverte, on ne peut l'apercevoir. L'hiver, il n'est pas
si hardi le jour, parce qu'il se ferait découvrir; mais la nuit il
rôde autour des poulaillers et des loges à lapins, et s'il y entre,
il égorge tout. Il est encore plus terrible pour le gibier; doué
d'une grande finesse de nez, il évente tout gibier et, plus adroit
qu'un chat, se traînant sans bruit, il approche la- bête qu'il veut
surprendre et s'élance dessus avec tant d'adresse, que la perdrix
qui s'envole est prise en l'air par le secours de sa gueule et de
ses pattes et l'oiseau branché bas est saisi de même.
Le renard chasse à voix comme le chien courant et, comme
les chiens, les renards ont grande confiance les uns dans les
autres. Si l'un d'eux, la nuit, chasse à voix un lapin ou un lièvre,
les autres accourent se joindre à lui. S'il voit venir de loin un
gibier, lièvre ou lapin, il se blottit, se cache de manière à ne
pouvoir être vu, et lorsque sa proie passe près de lui, il saute
dessus et l'emporte.
Quand la volaille et le gibier sont rares dans un pays, le
renard va à la pêche aux grenouilles ; il prend les rats d'eau,
les taupes, les mulots et donne au carnage.
œr^r
DE LA CHASSE DU RENARD. 2Ôl
La chasse du renard est donc indispensable pour celui qui
veut conserver son gibier et sa basse-cour, mais sa vraie chasse
est ou de le chasser au fusil avec des briquets ou des bassets,
ou de le prendre dans son terrier avec des chiens spéciaux, ou
de le faire sortir comme un lapin avec de bons petits chiens
terriers et de le tuer.
Cependant, comme quelques jeunes chasseurs peuvent avoir
envie de le courir, je vais dire deux mots de ce sport.
III
DE LA CHASSE DU RENARD.
Si Ton habite un pays où il y a beaucoup de renards et où
tous les bois sont remplis de terriers, je ne conseille pas
d'essayer de forcer cet animal, car on serait bien vite dégoûté du
métier. Mais si on habite un pays/ où les terriers sont rares et
où on peut les faire boucher au loin 1'âvan.t-veille et la veille de
la chasse, on peut essayer d'en prendre. Encore faut-il que les
bois ne soient pas trop fourrés et, s'ils sont éloignés les uns des
autres, on peut espérer le faire débucher.
Pas besoin d'un piqueur : un petit valet de chiens, montant
bien à cheval, suffit, pourvu qu'il brosse et pique ferme.
Quant aux chiens, il faut qu'ils soient vites et perçants, et
j'avoue que pour cette chasse je crois que les chiens anglais con-
viennent parfaitement. Mais les pays de chasse en Angleterre et
en France ne sont pas pareils, et comme les renards chez nous
se tiennent généralement dans des bois fourrés et s'y font chasser
longtemps en débuchant assez rarement, il faut encore choisir
dans les anglais ceux qui ne craignent pas trop les épines et
les ronces et tâcher de les prendre un peu criants pour pou-
voir bien les suivre au bois. Comme ces chiens aiment beau-
coup la voie du renard, ils chassent mieux cet animal que tout
autre au fourré et arrivent assez vite à se créancer et à ne pas
chasser autre chose.
2Ô2
LA CHASSE A COURRE.
Toutes les ruses du renard consistant en quelques retours et
hourvaris, elles ne doivent pas causer grand embarras. On dit
qu'il se vide quand il est poursuivi de trop près et que cette
odeur rebute les chiens, qui chassent alors très mollement jusqu'à
ce que l'odeur soit passée; mais j'avoue que je n'y crois guère et
que les ruses dans les fourrés sont la vraie cause de la mollesse
des chiens dans certains moments.
Le renard se jette souvent à l'eau, ce qui donne de l'embarras.
Si c'est dans un ruisseau, on fait le travail habituel en descendant
le courant à droite et à gauche. Si c'est dans un étang et qu'il y
ait un petit îlot de roseaux, on peut être presque sûr que le
renard y est remis sous quelque banque ou sous quelque racine :
ce qui lui arrive aussi fort bien sur le bord d'une rivière. Là.
enfoncé dans sa cache et ne montrant que sa tète, il se défend
fort bien contre les chiens.
Mais, encore une fois, la chasse du renard n'est point une
chasse de vénerie.
DICTIONNAIRE
DES TERMES DE VÉNERIE
Abatis. Boeuf, chèvre, etc., ou autre animal domestique mis à mort
par le loup.
Abettures. Plantes, comme fougères, menus bois, que les animaux
abattent du côté où ils vont.
Abois. Les animaux tiennent les abois lorsqu'ils font tète aux chiens
qui les aboient.
Accompagné, s'accompagner. Les animaux s'accompagnent lorsque,
voulant se défaire des chiens qui les poursuivent, ils vont se mêler
avec d'autres animaux de la même race, afin que les chiens se
méprennent et qu'Us puissent par cette ruse se tirer d'affaire.
Accouer. Ancien mot de la vénerie signifiant aborder le cerf pris en
lui coupant le jarret avec le couteau de chasse et le frappant ensuite
au défaut de l'épaule.
Accul. C'est l'extrémité d'un terrier où les bassets ou terriers forcent
les renards ou blaireaux de se retirer.
Allaites. Tcttcs ou branes de la louve.
Aller an bois. C'est aller de grand matin avec un limier à la forêt
ou au bois pour détourner l'animal qu'on a dessein de chasser.
Aller d'assurance. Un animal va d'assurance lorsqu'il ne fuit pas.
C'est la seule allure où l'on puisse le bien juger.
Aller de bon temps. Un animal va de bon temps lorsqu'il est passé,
là où vous trouvez sa voie, il y a peu de temps.
Aller de hautes erres. Un animal va de hautes erres lorsqu'il est
passé, là où vous trouvez sa voie, il y a assez longtemps, comme du
soir au matin.
264 DICTIONNAIRE
Allongé. Lorsqu'un cerf, un chevreuil, a refait entièrement sa tête, 00
dît qu'il a tout allongé.
Allures. Façon de marcher des animaux, distance et emplacement
des pieds.
Ameuter. C'est faire chasser tous les chiens bien ensemble. Les
chiens sont bien ameutés lorsqu'ils chassent bien tous ensemble.
Andouillers. Les andouillcrs du cerf, du chevreuil sont les branches
ou chevilles qui sortent du merrain.
Appel (simple ou forcé). On sonne un appel pour faire avancer les
relais, la meute, etc. Il est forcé lorsqu'il est sonné sur le grêle.
c'est-à-dire sur le cinquième ton, qui est le plus hautain; il ne se
sonne que dans un cas urgent.
Appuyer. Encourager de la voix ou de la trompe les chiens à pour-
suivre vivement la béte qu'ils chassent.
Armure. Peau extrêmement épaisse que les sangliers ont dessus les
épaules et les recouvrant.
Arriéres. Dans un défaut, on prend les arrières en recherchant avec
les chiens la voie de l'animal que l'on chasse du côté d'où il est venu.
Attaquer. C'est lancer et mettre sur pied l'animal que l'on vent
chasser.
Avale. Le ventre d'une lice avale lorsqu'il baisse près de sa mise-
bas.
Avaler la botte. Avaler la botte au limier, c'est la lui ôter, soit
qu'il soit assez sage pour travailler libre, soit qu'on veuille pour le
contenter lui laisser attaquer l'animal.
Avancer. Un animal s'avance lorsqu'il met, en marchant d'assu
rance, le pied de derrière en avant du pied de devant.
B
Babillard. Chien qui crie sans être sur la voie.
Balancé. Défaut d'un instant.
Balancer. On dit que les chiens balancent, lorsqu'ils s'arrêtent un
moment sur la voie par une cause quelconque. On dit aussi qu'un
cerf balance, quand, épuisé, il ne marche plus qu'en chancelant.
Bancs. Lits en bois sur lesquels couchent les chiens.
Barrer. Un chien barre quand il croise continuellement la voie en
avant des autres chiens pour l'enlever seul. On dit qu'on barre une
enceinte, quand on la traverse avec le limier pour, tâcher de mettre
debout l'animal détourné.
Bâtard. Chien sorti de deux races assez distinctes.
DES TERMES DE VENERIE. 2Ô5
Battre. On dit qu'un animal se fait battre, lorsqu'il se fait chasser
longtemps dans la même enceinte. On dit qu'un cerf ou chevreuil
bat Peau, quand, malmené, il se met dans les rivières ou étangs pour
ruser et chercher à se dérober aux chiens.
Bauge. Le lit ou la reposée du sanglier.
Bellement. Terme dont on se sert à la chasse pour calmer les chiens
et les faire chasser en crainte, principalement quand l'animal est
accompagné.
Bote de compagnie. Jeune sanglier entrant dans sa seconde année
et cessant d'être bête rousse.
Bote rousse. Jeune sanglier cessant d'être marcassin et avant d'être
bête de compagnie.
Botes. Terme didactique comprenant toutes les bêtes que l'on chasse.
Les bêtes fauves sont les cerfs, les daims, les chevreuils; les noires
sont les sangliers; les rousses étaient les loups et les renards,
mais ce terme n'est plus guère employé pour les désigner.
Billebaude. On foule un bois à la billebande lorsqu'on quête sans
avoir détourné un animal.
Bizarre. Tête bizarre, tête de cerf ou de chevreuil mal faite, non
régulière, irrégulièrement semée d'andouillcrs.
Bois. La tête (cornes) des cerfs, daims et chevreuils s'appelle toi s.
Bondit. Quand un animal part forcément de la reposée, de la bauge,
du liteau, du gltc, il bondit.
Bosses. Protubérances qui se trouvent sur le crâne des jeunes ani-
maux à tête et qui servent de point d'appui aux perches ; lorsqu'elles
ont acquis tout leur développement, elles se nomment pivots.
Botte de limier. Collier de cuir fait en forme de bricole qu'on passe
au cou du limier pour y attacher le trait.
Bouquin. Lièvre mâle.
Bouquinage. Temps où les hases sont en chaleur.
Bout de Toie. Lorsque les chiens cessent de chasser et qu'ils perdent
la voie, on dit qu'ils sont à bout de voie.
Boutis. Endroits où les bêtes noires ont fouillé la terre; on l'appelle
aussi travail.
Boutoir. Groin du sanglier.
Boutures. Jointures des jambes de devant du chien.
Bousards. Fumées (fientes) du cerf au mois de mai.
Bréaaigne. Vieille biche qui ne produit plus.
Brèmes. Tettes des lices.
Briooler. Un chien bricole lorsqu'il n'est pas collé à la voie, qu'il
voltige à droite et à gauche; ce chien dérange la chasse, fait bondir
le change.
Bricoleur. Chien qui bricole.
266 DICTIONNAIRE
Brisées. Petites branches que le veneur casse et jette sur les traces
de l'animal qu'il a rencontré ou détourné ; le bout rompu indique le
côté où l'animal a la tête tournée. Briser haut, c'est laisser pendre,
à la hauteur de trois ou de quatre pieds, une branche qu'on a en
partie détachée d'un arbre. On brise haut à la rentrée d'un animal
qu'on travaille pour marquer son rembuchement et pour le cas ou
la brisée basse pourrait être emportée par les piétons, bestiaux, etc.
Brocard. Chevreuil mâle.
Broches. Dagues ou premiers bois du chevreuil.
Brosser. C'est traverser les bois sans suivre aucun chemin.
Brout. Jeune pousse des arbres que mange le gibier.
Brunir. Un cerf a bruni lorsqu'il a touché au bois avec sa tête et que
celle-ci a pris sa couleur, brune, rousse ou grise.
Buisson. Bois de moyenne grandeur où les cerfs se remettent pour
refaire leurs têtes et les biches pour mettre bas.
Buisson creux. On fait buisson creux lorsque l'animal ne se trouve
pas dans l'enceinte où le valet de limier le croyait détourné.
Carnage. Viande de cheval ou de tout autre animal que l'on donne à
manger aux chiens. On appelle aussi carnage toute espèce de cha-
rogne où donnent les loups et les renards.
Cépée. Touffe de menu bois, comme genêt ou bois taillis.
Cervaison. On appelle cervaison l'époque où les cerfs sont en pleine
venaison, de juin à septembre.
Chaleur. D'une chienne, d'une louve, etc., temps où la nature dispose
ces deux sortes d'animaux à multiplier leur espèce.
Chandelier. Un cerf porte le chandelier quand il a l'cmpaumurc (haut
du bois) large et creuse.
Change. On dit que les chiens gardent change, lorsqu'ils restent
toujours sur leur animal de chasse, quand même ils en ont un ou
plusieurs autres devant eux. On dit qu'ils prennent change, lorsque
au contraire ils se mettent à chasser un autre animal que celui qu'ils
ont attaqué.
Chapelet. Fumées des cerfs liées entre elles et qu'ils font en juillet.
Chenil. Logement des chiens courants.
Chevillée. Une tête de cerf, daim ou chevreuil est bien chevillée
lorsque les andouillcrs sont bien égaux de nombre, à la même hau-
teur, de la même longueur, bien plantés et bien tournés.
Chevillure. Troisième andouillcr du cerf à partir du pivot.
Cimier. La croupe du cerf.
DES TERMES DE VENERIE. 2 6j
Qabaud. Chien courant qui crie mal à propos, manque de force et de
courage.
Coffre. Ce qui reste à la curée du cerf, la nappe, la tète et les menus
droits levés.
Coiffé. Un chien est bien coiffé lorsqu'il a les oreilles fines, bien
attachées et assez longues.
Coiffer. Les chiens coiffent un sanglier lorsqu'ils le prennent aux
écoutes pour le porter bas.
Collé à la voie. Un chien est bien collé à la voie lorsqu'il chasse
droit, la voie entre les jambes.
Connaissances. II y en a de naturelles et d'accidentelles qui servent
à distinguer un animal et à le faire reconnaître surtout par le pied
et les allures.
Contre-pied. Suivre les traces de l'animal à rebours. Les chiens le
prennent quelquefois soit les jours de mauvaise chasse, soit par
crainte de l'animal.
Cor de chasse. La trompe dont on se sert à la chasse en France.
Cors. On nomme ainsi quelquefois les andouillers, mais surtout pour
les compter : un dix cors par exemple.
Corsage. On dit qu'un animal est petit ou gros de corsage.
Côtés. Ce sont les bords, en dehors, du pied du cerf, du chevreuil et
du sanglier^ depuis les pinces jusqu'au talon.
Couler. On dit qu'une chienne a coulé, lorsqu'elle a avorté peu de
temps après avoir été pelotée.
Couper. Un chien coupe lorsqu'il quitte la voie pour tâcher de la
reprendre en avant, ordinairement par ambition. Grand défaut dans
un chien.
Couple. Corde de crin réunissant deux chiens ensemble ou chainette
en fer attachée à deux colliers pour les attacher ensemble.
Coupler. C'est attacher les chiens deux par deux au moyen des
couples.
Courre. Courir, piquer ou galoper. On dit chasse à courre, courre le
cerf, courre le loup.
Courre. Un beau courre, beau pays de chasse, facile pour les chiens
et les chasseurs.
Couvrir. Une lice est couverte, pelotée ou pleine d'un chien.
Créance. Un chien de créance est un chien sûr auquel on peut se fier.
Créancer. C'est rendre un chien sûr sur une voie d'animal, de façon
à ce qu'il n'en chasse pas un autre.
Crier. On dit que les chiens crient, et non aboient, lorsqu'ils chassent.
Curée. C'est faire manger aux chiens la bête qu'ils ont chassée et
prise. On fait la curée chaude immédiatement après la prise et la cu-
rée froide en rentrant au logis.
2Ô8 DICTIONNAIRE
D
Daguer. L'action du cerf qui s'accouple avec la biche.
Dagues. Petites cornes qui viennent au cerf dans leur seconde année
et qui forment leur première tête.
Daguet. Jeune cerf à sa première tête.
Daintiers. Testicules du cerf.
Debout (mettre). Mettre un animal debout, c'est le lancer.
Débucher. Un animal débuche lorsqu'il prend la plaine pour aller
dans un autre canton ou une autre forât. On dit faire un dé-
bucher, sonner le débucher.
Déceler. Un animal se décèle quand il quitte en plein jour le bots
ou buisson où il s'est recelé.
Déchausser. Un loup se déchausse lorsqu'il gratte la terre.
Déchaussures. Grattées que fait le loup avec ses pieds de derrière
après avoir pissé ou jette ses laissées.
Découpler. C'est ôter aux chiens courants 1 la couple qui les retient.
Décousure. Blessure que le sanglier fait aux chiens.
Défaut. Les chiens tombent en défaut, quand ils perdent la voie de
la béte qu'ils chassent.
Défenses. Ce sont deux grosses et longues dents que les sangber>
ont à la mâchoire inférieure. Se dit aussi pour beaucoup de monde
qu'on place de certains côtés dans les battues pour forcer les animaui
à passer aux tireurs ou à donner dans les filets.
Déharder. C'est ôter la harde qui réunit les couples de plusieurs
chiens. Se dit aussi quand on sépare l'animal qu'on veut chasser de
sa compagnie; on déharde un cerf.
Demeures. Endroit bien fourré et bien placé pour la retraite des
animaux.
Dentée. On ne dit pas qu'un chien a reçu des morsures, mais de*
dentées.
Déployer le trait. C'est faire passer le limier devant et commencer
la quête.
Dépouiller. On ne dit pas écorcher, mais dépouiller un animal.
Dérober (se). Un animal se dérobe quand il file à bas bruit en «
cachant et s'abritant.
Dérober la voie. Lorsqu'un chien trop jaloux d'avoir la tête de h
chasse retrouve la voie dans un défaut et qu'il la suit un certain
temps sans crier, on dit qu'il dérobe la voie.
Derrière. Expression dont on se sert quand on veut arrêter les chiens.
On dit : Derrière, chiens, derrière! .
• DES TERMES DE VÉNERIE. 269
Derrières. Les arrières de la voie.
Dessolé. Un chien est dessolé quand il a la peau du talon écorchée
et au vif.
Détourner un animal. C'est avec son limier rembucher une bête dans
un canton et l'entourer ensuite pour voir si elle n'en sort pas; dans
ce cas elle est détournée.
Devant (mettre). C'est déployer le trait et faire marcher son limier
devant.
Devants. Prendre les devants d'un défaut, c'est se porter en avant
de l'endroit où il a eu lieu pour le relever avec les chiens. Prendre
les devants d'une quête, c'est faire le tour d'une enceinte avec le
limier pour s'assurer si l'animal en sort.
Dix cors. Cerf, daim, chevreuil à sept ans.
Dix cors Jeunement. Cerf, daim, chevreuil à six ans.
Donner aux chiens. Donner un animal aux chiens, c'est le laisser
courre.
Doubler ses voie». Un animal double ses voies lorsque, après avoir
suivi une ligne droite, il revient pour mettre les chiens en défaut.
Dresser la voie. C'est faire prendre la voie à quelques chiens d'élite
dans un défaut ou tout autre embarras.
Droit. Un chien ou un limier suit le droit quand l'un ou l'autre suit la
voie du côté où l'animal a Va tête tournée.
Droit du limier. Le massacre, le foie, le cœur et les rognons étaient
toujours réserves aux limiers ; c'était leur droit.
Eau (battre Y). Quand un animal chassé est dans l'eau, on dit qu'il
bat l'eau.
Ébat. Endroit où Ton promène les chiens.
Écoutes. Oreilles du sanglier.
Écuyer. Jeune animal dont s'accompagne un plus vieux ; pour le
sanglier, c'est un page.
Effilé. Un chien s'effile ou s'énerve quand on le fait chasser trop
jeune.
Empaumer. Les chiens empaument la voie lorsqu'ils la prennent et
l'enlèvent sans difficulté,
Empaumure. Haut de la tête du cerf lorsque les andouillers qui la
terminent sont rangés comme les doigts de la main. Les cerfs n'ont
d'empaumurc qu'à partir de sept ans.
Enceinte. Partie d'un bois dont on peut faire le tour par les chemins
ou plaines qui l'environnent.
270 DICTIONNAIRE
Enfourchure. Haut de la tête du cerf lorsqu'elle se termine par deux
petits andouillers.
Enlever le* chiens. C'est les arrêter sur la voie du change et les
emmener. On les enlève aussi quelquefois pour les donner sur la
voie.
Entées. Fumées dont la forme parait grosse, parce qu'il y en a deux
tellement unies qu'elles ne semblent en faire qu'une seule.
Envelopper. On enveloppe un défaut en quêtant au-dessus et au-
dessous de l'endroit où il a eu lieu.
Épointé. Se dit d'un chien qui a un effort à l'os de la hanche.
Épois. Petits andouillers qui sont au sommet de la tête du cerf.
Éponges. Dessous du talon des animaux à pied fourchu.
Ergoté. Chien qui a par derrière un ongle de surcroît au-dessus du
pied en dedans, signe d'impureté de race ; les fox-hounds l'ont
souvent, mais on le leur coupe en Angleterre quand ils sont jeunes.
On leur coupe même celui de devant qu'ont tous les chiens.
Erres. Vieux mot qui signifie voies. L'animal va de hautes erres,
quand il est passé il y a plusieurs heures.
Érucir. Un cerf, un lièvre érucit lorsqu'il prend dans sa bouche un
bout de branche, une herbe et la suce. Un animal n'érucit que lors-
qu'il est sur ses fins.
Esgail. Rosée du matin.
Essais. Quand les cerfs sont prêts à toucher au bois, ils font des
essais sur les branches minces et flexibles. Un sanglier donne à
l'essai quand il entame les arbres avec ses défenses.
Étruffé. Un chien est étruffé quand il a un effort des muscles de la
rotule.
éventer. Un chien évente lorsqu'il se rend, le nez haut, en humant
l'air, sur un animal dont le sentiment lui est apporté par le vent.
Faire sa nuit. Au déclin du jour toutes les bêtes fauves vont aux
gagnages, où elles restent jusqu'au lendemain matin pour faire leur
nuit ou viander.
Faire sa tôte. Un cerf fait sa tête ou pousse sa tête depuis mars
jusqu'au mois d'août ; un chevreuil, de novembre jusqu'en mars.
Faire tôte. Un animal fait tête aux chiens lorsqu'il est forcé ou
blessé; alors il s'accule et se défend. Un vieux sanglier fait souvent
tac à l'attaque sans sortir de sa bauge.
Fanfare. Air de chasse.
Faon. Petit d'une biche, mâle ou femelle.
DES TERMES DE VÉNERIE. 27 1
Faux-fuyants. Petits sentiers.
Faux rembuchement. Lorsqu'un animal entre de quelques pas dans
une enceinte et qu'il en ressort du même côté, il fait un faux rem-
buchement.
Fins. Un animal est sur ses fins quand il est près d'être forcé.
Flairé. Rasé, caché, remis ou relaissé; c'est la même chose.
Flatrure. Lieu de repos momentané d'un animal chassé.
Forhu. Panse de cerf, chevreuil, etc., qu'on portait au bout d'une
fourche à la curée pour encourager les chiens et qu'on leur donnait
à la fin de la curée.
Forhuir. Appeler les chiens au forhu.
Forlonger. Un animal se forlongc lorsque, étant chassé, il a pris
beaucoup d'avance et qu'il est bien loin devant les chiens.
Forme. Gîte du renard.
Fouet. On ne dit pas la queue d'un chien, mais son fouet; faire le fouet,
c'est couper le poil qui se trouve dessous.
Foulées. Traces légères que le pied de l'animal laisse sur les herbes
ou sur les feuilles.
Fouler. Les chiens foulent un animal lorsqu'ils le mordent après
l'avoir porté par terre.
Fouler une enceinte. On foule une enceinte en la battant en tous
sens avec les chiens pour attaquer, lancer ou relancer un animal.
Frapper aux brisées. C'est découpler les chiens aux brisées du
valet de limier pour attaquer l'animal dont on a fait rapport.
Frayé bruni. Peu de temps après avoir frayé, la tête qui était blanche
prend la couleur qu'elle devait avoir et l'animal est dit avoir frayé
bruni.
Frayer. Les animaux à tête ont frayé lorsqu'ils ont dépouillé leurs
têtes de la peau velue sous laquelle elles se sont formées.
Frayoir. Baliveau contre lequel le cerf se frotte pour frayer.
Fuir. On ne dit pas qu'un animal court ou galope, mais qu'il fuit ou
s'en va fuyant.
Fumées. Fientes des cerfs et des biches. Elles changent suivant le
sexe et les saisons. Elles servent surtout à les juger de mai en
octobre.
Fusée. Vermiller en fusée, se dit d'un sanglier qui fait un espèce de
sillon en droite ligne en labourant et levant la terre pour trouver
les gros vers appelés mans.
272 DICTIONNAIRE
G
Gagnages. Pièces de terre semées de différentes sortes de grains
dans lesquelles les cerfs, les lièvres et les sangliers vont faire leur
nuit.
Gardes. Ergots que les sangliers ont au-dessus du talon.
Gite. Lieu où repose le lièvre pendant le jour.
Gorge. D'un chien qui crie bien, qui a une belle voix, on dit qu'il a
une belle gorge.
Gouttières. Raies creuses qui se trouvent le long de la perche ou du
merrain de la tête des cerfs et des chevreuils et qui sont formées par
les grosses veines de la peau du refait.
Grêle. Le haut ton de la trompe.
Grès. Ce sont deux grosses dents que les sangliers ont à la mâchoire
supérieure et qui aiguisent leurs défenses par le frottement.
Gros. Chasser le gros, c'est chasser les gros animaux.
Gueule. Chaud de gueule, se dit d'un chien qui crie sans raison
comme s'il avait la voie ou en voyant les autres mettre le nez a
terre.
H
Hallali. Cri que l'on fait entendre quand l'animal tient aux chiens
ou qu'il est tué. Après l'hallali sur pied, il y a l'hallali par terre ou
la mort.
Hampe. Poitrine du cerf.
Harde. C'est une longue corde avec laquelle on attache plusieurs
couples de chiens ensemble et dont un bout sert à les mener, soit à
pied, soit à cheval.
Harde de cerfs. C'est une troupe de cerfs et de biches qui s'accom-
pagnent.
Harde de chiens. Plusieurs couples de chiens réunis et attachés en-
semble.
Harloup. Terme dont on se sert pour exciter les chiens à la chasse
du loup.
Harpailler. Lorsque les chiens chassent mal, tournent au change,
ne peuvent emmener la voie, on dit qu'ils harpaillent.
Harpe. Se dit d'un chien qui a l'estomac fort avancé et le ventre
très haut, ainsi que le rein.
Hase. Lièvre femelle.
DES TERMES DE VÉNERIE. 273
Hère. Jeune cerf de six mois à un an.
Herpaille. Hardc de biches et de jeunes cerfs.
Houper. Ancien terme de vénerie qui signifie appeler.
Houraillement. Les houraillements étaient des battues où l'on ame-
nait dans des fermés des animaux destinés à être tirés et qui y
étaient maintenus par des toiles tendues.
Houret. Mauvais chien courant. Briquet sans race.
Hourvari. Un animal fait un hourvari lorsque, pour tromper les chiens,
il revient sur ses mêmes voies. On sonne et on crie aux chiens
hourvari pour les avertir que les voies sont doublées et qu'il faut la
rechercher sur les arrières.
Hure. Tête de sanglier, lorsqu'elle est coupée.
J
Jambe. C'est la distance qui sépare les os du talon chez les bêtes
fauves et les gardes du talon chez le sanglier. Ce mot comprend
aussi la distance d'un os à l'autre os ou d'une garde à l'autre. Ces deux
distances sont du reste généralement solidaires l'une de l'autre; plus
l'animal devient vieux, plus l'une diminue et plus l'autre augmente.
Jeter des fumées. On dit qu'un cerf ou un chevreuil jette ses
fumées.
Laie. La femelle du sanglier.
Laissée. Fiente du loup et du sanglier.
Laisser courre. C'est attaquer l'animal que l'on a détourné.
Laisser suivre. On laisse suivre un limier quelques longueurs de
trait pour assurer le rembuchement, ou plus loin si on veut lancer
l'animal.
Lambeaux. Morceaux de la peau velue qui couvre la tête des cerfs,
daims, chevreuils et qui se détachent quand l'animal touche au bois.
Lancer. Attaquer la bête avec les chiens de meute.
Larmiers. Fentes qui sont au-dessous des yeux du cerf, d'où découle
une humeur jaune.
Lever. On dit lever et non couper le pied d'un animal pour le tresser
et l'offrir au veneur désigné par le maître d'équipage.
Lice. Femelle du chien courant. On appelle lice portière celle qu'on
destine à la reproduction.
18
274 DICTIONNAIRE
Ligner. On dit que le loup a ligné la louve pour dire qu'il Ta cou-
verte.
Limier. Chien courant que l'on accoutume à être discret et avec
lequel on détourne les animaux sur lesquels on Ta dressé.
Liteau. Endroit où le loup se repose et où la louve fait ses petits.
Livrée. Mouchetures qui se trouvent sur le corps des jeunes faons
et des jeunes marcassins jusqu'à l'âge de cinq à six mois.
Louvart. Jeune loup qui a six mois faits.
Louve. Femelle du loup.
Louveteau. Jeune loup jusqu'à six mois.
Louveterie. Equipage pour la chasse du loup. L'institution de la
louveterie remonte à i3o8, son organisation à i520, sa restauration
au 20 août 1814; mais depuis 178911 n'a pas existé de grand louveticr
en titre.
M
Malmené. On dit qu'un animal de chasse est malmené lorsque ses
forces s'épuisent et qu'il est près d'être pris.
Mangeur es. Endroits d'un champ semé de grains où le sanglier a
abattu et mangé le grain.
Marcassin. Jeune sanglier au-dessous de six mois et portant encore
la livrée.
Massacre. Tête du cerf, du daim, du chevreuil séparée du corps.
Méjuger. On dit qu'un animal se méjuge lorsque, marchant d'assu-
rance et sans effroi, il ne porte pas régulièrement son pied de derrière
où il devrait le poser par rapport à son pied de devant, mais qu'au
contraire il le pose irrégulièrement à droite, à gauche, en avant, en
arrière, ce qui fait qu'il ne tire pas ses voies droites et qu'il marche
en chancelant. C'est une des grandes différences des animaux sau-
vages aux animaux domestiques, qui tous se méjugent.
Menée. Belle menée se dit d'un chien courant qui chasse bien droit,
criant bien et juste à sa voie.
Menus droits. C'est, à la curée du cerf, la hampe, le mufle, la langue,
les filets, les daintiers, en un mot les bons morceaux.
Merrains. Les merrains des animaux à tête sont les deux perches
d'où sortent les andouillcrs.
Mettre bas. r Un cerf, un daim, un chevreuil mettent bas leurs bois
lorsque ceux-ci tombent; 2 une chienne, une louve, une laie
mettent bas lorsqu'elles font leurs petits; 3° un chien courant met
bas lorsque, par fatigue, mollesse ou autre cause, il cesse de chasser.
DES TERMES DE VÉNERIE. 2?5
Meule. Espèce de couronne plus ou moins grosse, suivant Page de
l'animal et qui termine la partie inférieure du merrain des animaux
à tête.
Bleuté. Réunion de chiens courants et dont le nombre varie depuis
quinze environ jusqu'à cent. On appelait autrefois meute les pre-
miers chiens découplés sur la voie. Vieille meute, le premier relais
donné après les chiens de meute ; la seconde vieille meute, le deuxième
relais; les six chiens, le dernier relais composé des vieux chiens, les
plus sûrs et les plus lents, qu'on ne donnait généralement qu'à la fin
ou dans les embarras. Généralement, maintenant, on chasse de meute
à mort, c'est-à-dire sans relais.
Moquettes. Les fumées du chevreuil.
Mouée. Soupe que l'on donne aux chiens courants.
Mue. Temps où les cerfs, daims ou chevreuils mettent bas leur tête.
On appelle aussi mue les deux côtés de têtes que ces animaux
perdent.
Muloter. Un limier mulote quand il met le nez à terre là où il n'y
a pas de voie. Un sanglier mulote lorsqu'il fait en terre des trous
très profonds pour enlever aux mulots les magasins de faines, glands
et noisettes que ceux-ci ont amassés pour l'hiver.
Muser. Lorsque les cerfs viennent en rut, ils parcourent les routes
en mettant le nez à terre pour chercher les biches; c'est ce qu'on
appelle muser.
N
Nappe. C'est la peau du cerf.
Nuit. Lorsque les bêtes fauves sortent des bois pendant la nuit pour
chercher leur nourriture, on dit qu'elles font leur nuit ; pour le san-
glier, on dit qu'il fait sa nuit lorsque pendant sa marche de nuit il
commence à faire vermillis et boutis pour chercher sa nourriture.
Le lièvre fait aussi sa nuit.
o
Ongles. On ne dit pas les griffes, mais les ongles du chien.
Os. Les ergots des cerfs, daims et chevreuils.
Outrepasser. Les chiens outrepassent lorsqu'ils s'emportent au delà
des voies de l'animal qu'ils chassent.
276 DICTIONNAIRE
Page. Jeune sanglier (généralement petit ragot) dont un vieux san-
glier s'accompagne souvent. Il marche généralement à une certaine
distance de lui.
Parler aux chiens. On ne dit pas crier, mais parler aux chiens.
Pavillon. Le bout le plus large de la trompe.
Pelage. On ne dit pas qu'un animal a le poil, mais le pelage de telle
couleur.
Pelotée. On dit qu'une chienne est pelotée quand elle a été couverte
par un chien.
Perce. Terme dont on se sert quand on veut activer les chiens
chassant ou quêtant, ou leur faire traverser une route.
Perches. Se dit généralement des merrains sans andouillers; cepen-
dant on dit aussi les perches pour désigner les deux côtés de la tête
d'où sortent les andouillers.
' Perlée. Tête perlée, bien garnie de perlures.
Perlures. Petites inégalités qui couvrent en partie le merrain et les
andouillers.
Pied. On ne dit pas la patte, mais le pied d'un chien, d'un loup, d'un
lièvre.
Pierrures. Petites inégalités semblables aux perlures, mais qui sont
placées sur la circonférence des meules.
Pigache. On donne cette épithète au sanglier lorsqu'il a un ongle
plus long que l'autre. Pour le cerf, dans ce cas on dit qu'il a une
connaissance à tel pied.
Pinces. Les extrémités du pied des animaux à pied fourchu.
Piquer. C'est courir et galoper après les chiens.
Piqueur. Celui qui a soin des chiens et de la meute, la fait chasser,
les appuie de la voix et de la trompe, enfin les accompagne en tous
lieux. On dit ordinairement piqueux.
Piste. Voie de loups et de renards.
Pivots. Les pivots sont les deux os saillants sur lesquels repose
l'extrémité inférieure des perches de tous les animaux à tête.
Plate-longe. Longe de cuir qu'on ajoute quelquefois à un collier pour
ralentir un chien trop vite.
Porchaison. Temps où les sangliers sont gras.
Portée. Jeune famille de la louve ou de la chienne.
Portées. Petites branches et autres espèces de bois que le cerf ren-
verse avec sa tête du côté où il va.
Poste. Endroit où l'on se met pour atteindre la bête chassée avec
l'espoir de la voir ou de la tirer.
DES TERMES DE VÉNERIE. 277
Pourchasser. Poursuivre à outrance.
Prendre le vent. C'est faire chass/r les chiens ou faire travailler le
limier le nez dans le vent pour leur donner plus d'avantage.
Ctaartanier. Sanglier qui a quatre ans faits.
Quête. L'action par laquelle on cherche le gibier.
Rabattre. On dit qu'un limier se rabat bien ou que des chiens se
rabattent bien, pour dire qu'ils trouvent bien la voie, la quêtent
avec chaleur, la rapprochent et la suivent bien.
Raccourcir. On raccourcit un animal détourné en prenant quelque
faux-fuyant qui rend l'enceinte plus petite, afin qu'il soit plus vite
attaqué, mesure délicate qui les fait souvent mettre debout.
Ragot. Sanglier de deux ans faits.
Raire. Cri ou mugissement des cerfs pendant le rut. On dit aussi
qu'ils brament.
Rallier. C'est réunir au gros de la meute les chiens qui ont pris
change ou qui traînent. On crie alors : « Rally, chiens, rally ! •
Rameuter. C'est arrêter les chiens de tête et les obliger d'attendre
ceux qui sont en queue, pour que, réunis, ils chassent mieux, et que
ceux qui sont en queue, dégoûtés de rester en arrière, soient moins
sujets à faire change. On peut avec certains chiens enlever ceux de
queue pour les rallier à la tête sans arrêter celle-ci. Au loup surtout,
il est préférable de tacher de rameuter ainsi.
Randonnée. Circuit plus ou moins grand que le lièvre ou un autre
animal fait autour de l'endroit où il a été lancé.
Rapport. Compte que le valet de limier rend au maître de l'équipage
de ce qu'il a fait et rencontré dans sa quête. Le valet de limier doit
toujours dire « je crois -, et ne pas affirmer.
Rapprocher. Quand les chiens suivent une voie froide et forlongéc
et si, par leur sagesse et la finesse de leur nez, ils finissent par lancer
leur animal, on dit qu'ils ont fait un beau rapprocher. Un chien qui
fait bien ce travail est dit un bon rapprocheur.
Ravalée. On dit qu'un cerf a la jambe ravalée lorsque ses os se sont
fort abaissés vers le talon.
278 DICTIONNAIRE
Rayer les voies. Faire une raie avec le bout du pied proche te
pied d'un animal dont on revoit. Si c'est un cerf ou un brocard, on
raye en arrière du talon ; si c'est une biche ou une chevrette, on raye
en avant de la pince. Autrefois un valet de limier qui trouvait un
pied de cerf rayé en avant de la pince par un camarade, avait le
droit de le travailler.
Rebattre. Un animal se fait rebattre quand il passe plusieurs fois
dans les mêmes endroits. Un chien rebat ses voies lorsqu'il retourne
plusieurs fois en criant sur les mêmes voies : grand défaut.
Receler. Un animal se recèle lorsqu'il se retire dans un boqueteau,
un buisson, une enceinte, sans en sortir. Un cerf se recèle lorsqu'il
fait sa tête, ou quelquefois après les fatigues du rut. Lorsqu'ils sont
chassés trop souvent dans une forêt, les vieux cerfs se recèlent aussi
dans les bois environnants.
Réclamer les chiens. C'est leur sonner un appel ou la retraite.
Récrier (se). Les chiens se récrient lorsqu'ils rapprochent et re-
prennent la voie pour lancer leur animal.
Redresser la voie. C'est relever un défaut.
Refait. La nouvelle tête d'un cerf, daim, chevreuil, se nomme refait
jusqu'au moment où il a touché au bois.
Refuite. Endroit éloigné où se rend l'animal chassé.
Régalis. C'est l'endroit où le chevreuil a gratté la terre avec son
pied. Il n'y a que le brocard qui fait des régalis.
Relais. Hardcs de chiens qu'on plaçait aux passages présumés des
animaux pour les donner. Le relais volant est un relais mené par un
homme à cheval ou à pied pour être donné en cas de besoin et
d'aide pour la meute.
Relaisser (se). Un animal chassé et fatigué se relaisse, c'est-à-dire
se repose dans un fort ou ailleurs, généralement après avoir pris de
l'avance et fait un forlonger.
Relancer. Faire repartir de la reposée l'animal chassé.
Rêlé. Les chiens sont bien rêlés lorsqu'ils sont tous de même
taille.
Relevé (voies du). Ce sont les voies de l'animal lorsqu'il est sorti le
soir de l'enceinte pour aller faire sa nuit. Le valet de limier ne doit
pas les confondre avec celles du rembuchement, car il se donnerait
ainsi un travail probablement sans résultat.
Rembuchement. Entrée de l'animal dans un fort, une enceinte, en
revenant de sa nuit.
Rembucher. Suivre l'animal jusqu'au moment où il est rentré dans
une enceinte.
Remontrer. Quand les voies sont vieilles, le limier ou les chiens
se rabattent froidement et ne font qu'en remontrer.
DES TERMES DE VENERIE. 279
Rendez- vous. Lieu où se tiennent les veneurs et l'équipage en atten-
dant la chasse.
Rentrée. Endroit précis par où la bête dont on fait suite se rembuche
et entre au fort.
Repaires. Crottes du lièvre.
Reposée. Place où les bêtes fauves se mettent sur le ventre.
Reprendre ses voies. Revenir où l'on avait brisé en dernier lieu,
reprendre ses voies et continuer à faire suite.
Requérant. Chien qui requête bien, tourne et quête diligemment.
Requêter. Rechercher avec les chiens les voies de l'animal chassé.
Ressni. Endroit où les bêtes fauves se sont jetées sur le ventre à
l'entrée de leur fort pour se sécher, soit de la pluie, soit de la rosée
du matin; après quoi elles se relèvent pour aller demeurer plus loin.
Ressuyant. Le vent est dit ressuyant lorsqu'il est sec, aigre et
piquant et que, longeant le sol, il enlève le sentiment des voies.
Retour. On appelle les chiens au retour pour leur faire rechercher la
voie du retour qu'a fait la bête à droite ou à gauche.
Retours. Circonvolutions que font souvent les animaux lorsqu'ils sont
chassés.
Retraintif. Onguent fait avec du sel, du vinaigre, du blanc d'œuf et
de la suie qu'on applique sous le pied des chiens aggravés.
Retrait. Lorsqu'un cerf est sur ses fins et qu'il retire sa langue, on
dit qu'il est retrait; il sera bientôt pris.
Retraite. On sonne la retraite lorsque la chasse est finie. Si l'animal
est pris, on sonne la retraite prise; s'il a été manqué, on sonne la
retraite tnanquée.
Revoir (en). C'est retrouver le pied de l'animal. Lorsque la terre est
bonne, on dit qu'il fait beau revoir.
Rides. Plis qui se forment entre les gardes et le talon des vieux
sangliers et se voient facilement par un beau revoir.
Rompre les ohiens. Les empêcher de chasser davantage.
Ronge (faire son). C'est, pour les fauves, remâcher et digérer leur
viandis.
Routailler. C'est faire chasser par un chien qu'on tient au trait un
loup, un sanglier, etc., pour le faire assassiner par des braconniers
postés autour du fort.
Rut. C'est le temps de l'amour des cerfs, chevreuils et sangliers.
Serrer de prés. C'est suivre la chasse de fort près.
Six chiens. Nom qu'on donnait au dernier relais, composé des chiens
les plus vieux, les plus lents et les plus sûrs.
2&> DICTIONNAIRE
Sole. Dessous du pied des animaux.
Solitaire. Vieux sanglier.
Souille. Bourbier où se vautre le sanglier.
Suite (faire). C'est faire suivre à son limier la voie d'un animal jus-
qu'à son rembuchement.
Suites. Testicules du sanglier.
Sur-aller. Un limier, un chien courant sur-aile une voie lorsqu'il passe
dessus sans se rabattre. Le veneur qui, cherchant une voie, passe
par-dessus sans la voir, la sur- aile aussi.
Taïaut. On crie taïaut quand on voit passer la bête de chasse. Il
faut en être deux fois sûr, et du reste moins on le crie, mieux cela
vaut pour les chiens. On ne crie pas taïaut pour le sanglier ni pour
le loup, mais bien vlôo.
Talon. Derrière du pied des animaux.
Taons. Ce sont de gros vers qui s'engendrent entre le cuir et la
chair du cerf par la mauvaise nourriture de l'hiver et lui percent la
nappe pour sortir de leur prison.
Tenir. Lorsqu'un animal est forcé, il tient aux chiens ; quand un san-
glier tient aux chiens, même sans être forcé, on peut sonner l'hallali
sur pied.
Tôt. Vieux mot qui signifie le crâne du cerf.
Tête. Bois du cerf, du daim, du chevreuil.
Tête couverte. Un animal a la tête couverte lorsqu'il est rembuché
ou rentré au fort.
Tirez, chiens, tirez. Terme qu'on emploie pour accélérer la marche
des chiens.
Toucher au bois. Lorsque les cerfs, daims, chevreuils veulent dé-
pouiller leur nouvelle tête de la peau qui les recouvre, ils la frottent
contre des branches, baliveaux et arbres; ils touchent alors au bois,
et quand leurs têtes sont dépouillées, ils ont frayé.
Tout coi. Terme dont on se sert pour faire taire le limier qui fait
suite ou les chiens à la harde.
Trace. Le pied et l'empreinte du sanglier se nomment trace. — On
lève le pied du cerf et la trace du sanglier.
Trait. Corde de crin ou de chanvre qu'on attache à la botte du
limier.
Trochure. Quatrième andouiller de la tête du cerf.
Trôler. Quêter, fouler un bois pour trouver un animal sans l'avoir
détourné.
DES TERMES DE VÉNERIE. 2$I
Trompe. Instrument de cuivre dont on se sert à la chasse. Autrefois
on l'appelait plutôt cor de chasse.
Valet de chiens. Celui qui soigne les chiens, tient le chenil, mène
les hardes, requête les chiens, etc. ; il y en a à cheval et d'autres à
pied, suivant l'importance de l'équipage.
Valet de limier. Dénomination générale qui peut se donner à tout
veneur qui va au bois avec le limier pour y détourner les animaux.
Varl, chiens, vari. Ce qu'on crie aux chiens lorsque la bête que l'on
chasse fait un retour ou hourvari.
Vautrait. Équipage pour la chasse du sanglier.
Venaison. On appelle venaison la chair des animaux à tête.
Vénerie. L'art très étendu de chasser avec des chiens courants toutes
sortes de bêtes, mais principalement les grands animaux.
Veneur. Tout homme qui fait chasser un équipage de chiens cou-
rants d'après les principes de la Vénerie se nomme veneur.
Vermiller. Se dit du sanglier qui fouille la terre avec son boutoir
pour chercher des vers.
Vermillis, ou travail. Ce sont les endroits où le sanglier a vermillé.
Viander. On dit que les bêtes fauves viandent, pour dire qu'elles
mangent.
Viandis. Pâture des bêtes fauves.
Vider. On dit que les chiens se vident, et non font leurs ordures.
Vider l'enceinte. Lorsqu'un animal cesse de se tenir dans une
enceinte, on dit qu'il vide l'enceinte.
Vieille meute. Le premier relais qu'on donnait après la meute.
Vlôo. Cri du veneur à la vue du sanglier ou du loup.
Voies. La trace, le sentiment que laisse l'animal chassé sur le terrain
où il passe; les voies de bon temps sont celles qui sont récentes;
les voies du relevé ou de hautes erres sont celles de la veille ou du
soir.
Voice le st. Terme dont on se sert quand on en revoit de l'animal.
Vrille. Queue du sanglier.
Vue. Fanfare que l'on sonne quand on voit l'animal de meute.
,\
APPENDICE
NOTIONS JURIDIQUES EN MATIÈRE DE CHASSE A COURRE
Nous avons pensé qu'il serait utile aux lecteurs de ce traité d'y
trouver quelques notions de droit se rattachant particulièrement à la
matière de la chasse à courre. Nous traiterons dans cet Appendice :
i° des principes généraux de droit relatifs à la chasse à courre; 2° du
passage des chiens sur le terrain d'autrui et du droit de suite; 3° des
dégâts causés par le gibier; 4 de \a destmetion des animaux malfai-
sants et nuisibles et des bètes fauves; 5° de la louveterie; 6° de la
chasse à courre dans les bois et forêts de l'Etat.
PRINCIPES GÉNÉRAUX DE DROIT RELATIFS A LA CHASSE A COURRE.
La chasse à courre est, avec la chasse à tir, le seul mode de chass
autorisé par la loi d'une manière générale. La chasse à courre est
soumise aux principes généraux qui régissent le droit de chasse :
ainsi l'obligation du permis de chasse est commune à la chasse a
courre et à la chasse à tir, et la chasse à courre ne peut être pratiquée
sur le terrain d'autrui sans le consentement du propriétaire ou de ses
ayants droit. Enfin, l'interdiction de chasser la nuit s'applique à la
chasse à courre comme à la chasse à tir. (Loi 3 mai 1844, art. 1 et 9.)
Il peut y avoir cependant intérêt à distinguer la chasse à courre et
la chasse à tir, parce que les dates d'ouverture et de fermeture peuvent
être différentes pour la chasse à courre et pour la chasse à tir. En
effet, la loi du 22 janvier 1H74, tranchant la controverse qui existait sur
ce point dans la jurisprudence des tribunaux, permet aux préfets de
déterminer, par des arrêtés publiés au moins dix jours à l'avance, les
284 NOTIONS JURIDIQUES
époques d'ouverture et celles de clôture des chasses, soit à tir, soit
à courre, à cor et à cri, dans chaque département. Il est donc possible
que la chasse à courre soit autorisée avant l'ouverture ou après Ja
clôture de la chasse a tir. Il importe dans ce cas de déterminer exac-
tement, au point de vue légal, les caractères de la chasse à courre.
La chasse à courre a pour objet essentiel de forcer le gibier à l'aide
de chiens courants. Le caractère du fait de chasse se déterminera
donc par la nature du gibier poursuivi, le nombre et la nature des
chiens employés à sa poursuite, l'attitude des chasseurs et du piqueur.
L'emploi des chevaux est un des caractères ordinaires de la chasse â
courre; il a été décidé cependant qu'une chasse peut conserver le
caractère de chasse à courre bien que tous les chasseurs ne soient
pas à cheval.
La chasse à courre ne comporte en principe ni le port, ni l'usage de
fusil. Il faut admettre cependant une exception : le port et même
l'usage du fusil seraient licites, s'il y avait péril imminent, soit pour les
chasseurs, soit pour les chiens. Ainsi, pour la chasse au sanglier, û
ne parait pas possible d'interdire aux chasseurs le port du fusil et ie
droit de s'en servir, si l'usage de l'arme est nécessaire pour protéger
la vie du chasseur ou celle des chiens. En dehors de cette nécessite
de défense, l'emploi du fusil constituerait un fait de chasse à tir. fafl
délictueux s'il était commis à une époque où la chasse à tir est inter-
dite.
Après avoir ainsi indiqué le caractère général de la chasse à courre,
nous devons rechercher quelles personnes doivent être considérées
comme participant directement à la chasse, soumises, par suite, 1
l'obligation de se munir d'un permis de chasse et responsables peoa-
lement en cas de délit commis, notamment au cas de chasse sur k
terrain d'autrui, sans le consentement du propriétaire. Ce qui constitue
le fait de chasse, c'est la recherche et la poursuite du gibier. Celui qui
dirige et appuie les chiens, qui prend une part active à la recherche et
à la poursuite du gibier, commet certainement acte de chasse. Mai*
on ne saurait considérer comme des chasseurs les invités qui suivent
la chasse, même à cheval, alors qu'ils ne participent pas directement
à la chasse, bien qu'ils aient assisté au lancé et à la poursuite de
l'animal chassé.
Une difficulté analogue se ' présente à l'égard des auxiliaires em-
ployés pour la chasse à courre, piqueurs et valets de chiens. Le
piqueur, qui dirige et appuie les chiens, fait acte de chasse, bien quM
soit sans armes et muni seulement d'un fouet et d'une trompe. U
piqueur doit donc être muni d'un permis de chasse. Au contraire,
l'obligation du permis de chasse ne saurait être imposée aux valets de
chiens, auxiliaires d'un ordre inférieur, qui sont subordonnés au
EN MATIÈRE DE CHASSE A COURRE. 285
piqucur et sont seulement chargés, sur les ordres du maître de chasse
ou du piqucur, de réunir ou de retrouver, de rompre ou de lancer
les chiens.
Nous avons dit que la chasse à courre supposait nécessairement
l'emploi des chiens. La poursuite du gibier par les chiens est le fait
caractéristique de ce mode de chasse. On doit donc considérer comme
faisant dans tous les cas acte de chasse le maître qui fait ou qui laisse
poursuivre volontairement le gibier par ses chiens. Il y a également
acte de chasse de la part du piqueur qui fait le bois avec des chiens
en liberté. La Cour de Cassation a même décidé que la quête à trait
de limier, et cela alors même que le limier est muet, constitue à elle
seule, et indépendamment de toute poursuite ultérieure du gibier, un
acte de chasse. - Les actes de ce genre, dit l'arrêt du 4 janvier 1878,
que la loi du 3 mai 1844 ne pourrait jamais réprimer s'ils n'étaient
pas des faits de chasse, portent directement atteinte aux intérêts
qu'elle a pour but de protéger, lors même qu'ils ne sont pas suivis de
la poursuite et de la capture de l'animal recherché; ils peuvent, en
effet, éloigner le gibier de l'héritage où ils s'accomplissent, au détri-
ment du propriétaire de cet héritage; en temps prohibé ou en temps
de neige, ils sont un danger pour le gibier inhabile à se défendre par
la fuite, et, à l'époque de sa reproduction, le privent de la sécurité
nécessaire à la conservation et à la propagation de l'espèce; ils ne
nuisent pas moins que la poursuite même du gibier aux récoltes
traversées par le chasseur et par son chien ; ils sont donc des faits de
chasse, d'après l'esprit de la loi de 1844 aussi bien que d'après sa
lettre... ».
Remarquons, en ce qui touche l'emploi des chiens, que l'art. 9 de la
loi de 1844 interdit, d'une manière absolue, l'emploi des chiens lévriers
comme moyen de chasse. L'emploi de ces chiens a un caractère des-
tructif qui a motivé la prohibition. Il a été entendu, dans la discussion
de la loi, que la prohibition s'appliquait aux croisés lévriers ou dérivés
lévriers, ces chiens, a-t-on dit, n'étant pas moins dangereux que les
lévriers pur sang, car ils ont la vitesse de ceux-ci et l'odorat plus fin.
Le même article permet aux préfets d'autoriser, à titre exceptionnel,
l'emploi des chiens lévriers, mais seulement pour la destruction des
animaux malfaisants ou nuisibles.
DU PASSAGE DES CHIENS SUR LE TERRAIN D'aUTRUI ET DU DROIT DE SUITE.
Avant 1789, l'usage avait consacré au profit du chasseur au chien
courant le droit de suite, c'est-à-dire la faculté de suivre avec sa
meute sur le terrain d'autrui le gibier levé sur son propre terrain.
286 NOTIONS JURIDIQUES
Dans le droit moderne, ce droit de suite, tel qu'il existait dans l'ancka
droit, est absolument inconciliable avec les dispositions légales qrc
prohibent, d'une manière absolue et générale, la chasse sur le terram
d'autrui sans le consentement du propriétaire ou de ses ayants dru:.
On a dû reconnaître toutefois que la chasse au chien courant, et pics
spécialement la chasse à courre, serait impossible si Ton considérai!
comme un fait de chasse délictueux le passage sur le terrain d'autra
des chiens lancés à la poursuite du gibier, alors que ce passage i lis
contre la volonté du propriétaire de la meute qui ne peut rompre b
chiens ni arrêter la poursuite du gibier. De là la disposition spéetak
de Part. 1 1 de la loi de 1844, ainsi conçu : « Pourra ne pas être consi-
déré comme délit de chasse le fait du passage des chiens couru»
sur l'héritage d'autrui, lorsque ces chiens seront à la suite d'un gibier
lancé sur la propriété de leurs maîtres, sauf l'action civile, s'il y a liai.
en cas de dommage. •
Il résulte des termes de cette disposition qu'il appartient aux tribu-
naux d'apprécier si le passage des chiens courants sur le terrais
d'autrui constitue ou non un fait de chasse délictueux, et que c'est a
la personne poursuivie pour délit de chasse qu'incombe PobJieatipfl
de prouver qu'elle se trouve dans le cas d'excuse prévu par la loi. La
première condition pour que l'excuse soit admise est que la chasse a:
été commencée avec droit, c'est-à-dire que le gibier ait été lance par
les chiens sur un terrain où leur maître avait droit de chasse. En
second lieu, le chasseur ou le piqueur, son préposé, ne peut pénétrer
à la suite des chiens sur le terrain d'autrui que pour les rompre oa
les rappeler. Le chasseur ou le piqueur commettrait un délit de
chasse s'il suivait les chiens sur un terrain dont il n'a pas la chasse
non pour les rompre ou les rappeler, mais pour les exciter et le;
appuyer. Il faut, en troisième lieu, pour que le passage des chici»
courants sur le terrain d'autrui constitue un fait de chasse non dé-
lictueux ou excusable, que ce fait se soit produit sans la participatioii
du maître des chiens et contre sa volonté. Le maître doit faire se>
efforts pour rappeler les chiens ou pour les rompre, et il n'est exen-
sable que s'il a été dans l'impossibilité d'empêcher le passage de ss
meute sur le terrain d'autrui.
Rien n'empêche, du reste, les propriétaires ou locataires de cba#
voisins les uns des autres d'étendre le droit conféré par l'art, iidcb
loi et d'établir, par une convention expresse ou tacite, la faculté réci-
proque de suivre sur le fonds voisin le gibier lancé par le propriétaire
ou locataire sur les fonds où la chasse lui est permise.
Lors même que le propriétaire des chiens n'est point en faute et ne
commet point un délit de chasse à raison du passage des chiens sur
le terrain d'autrui, ce propriétaire .demeure responsable, dans te
EN MATIÈRE DE CHASSE A COURRE. 287
termes du droit commun, du dommage qui a pu être causé par ses
chiens. L'action civile en dommages-intérêts est formellement réservée
par le § 2 de l'art. 11 de la loi de 1844.
DES DÉGÂTS CAUSÉS PAR LE GIBIER.
Les propriétaires ou locataires de chasses dans les forêts où se pra-
tique la chasse à courre ont intérêt à connaître les règles relatives à
la responsabilité qu'ils peuvent encourir à raison des dégâts causés
aux propriétés voisines par le gibier, et plus spécialement par le gros
gibier.
Le principe sur lequel est fondée la responsabilité du propriétaire
d'un bois ou du locataire de la chasse, à raison du dommage causé
par le gibier aux propriétés voisines, est le principe général des
art. i382 et i383 du Code civil, aux termes desquels tout fait quel-
conque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par
la faute duquel il est arrivé à le réparer, et qui déclarent toute per-
sonne responsable du dommage qu'elle a causé, non seulement par son
fait, mais aussi par sa négligence et son imprudence. Les animaux,
vivant à l'état libre dans les bois, sont amenés, par leur instinct
naturel, à chercher leur nourriture dans les champs qui avoisinent les
bois : ils peuvent causer de graves dommages aux récoltes. Sans doute
on peut dire que la présence du gibier dans les bois est pour les rive-
rains une sorte de servitude naturelle, dont ils doivent, dans une
certaine mesure, supporter les inconvénients. Il ne suffit donc pas,
pour qu'il y ait lieu à responsabilité, qu'il y ait un dommage quelcon-
que, il faut que ce dommage ait une certaine gravité. Il ne suffit même
pas que le dommage existe, il faut en outre que ce dommage ait pour
cause une faute, une imprudence, une négligence du propriétaire des
bois ou du fermier de la chasse. La faute, en pareille matière, consiste
à favoriser la multiplication excessive du gibier; la négligence con-
siste à ne pas prendre les mesures nécessaires pour arrêter cette mul-
tiplication excessive du gibier par une destruction partielle.
La responsabilité ainsi précisée s'applique spécialement aux dégâts
causés par les animaux tels que daims, chevreuils, cerfs, parce que ces
animaux peuvent être considérés comme sédentaires et ne quittent
point les bois dans lesquels ils se sont établis. Dès lors, si le pro-
priétaire de la forêt, ou le locataire de la chasse, a laissé ces animaux
se multiplier dans une proportion inusitée, s'il s'est opposé à toute
destruction du gibier, en gardant rigoureusement la chasse, et s'il n'a
lui-même employé que des moyens de destruction nuls ou insuffisants,
il peut être considéré comme étant en faute et, par suite, être déclaré
288 NOTIONS JURIDIQUES
responsable envers les riverains du dommage causé à leurs champs et
à leurs récoltes par le gibier sortant de ses bois.
La responsabilité est plus rare, et peut plus difficilement être admise,
lorsqu'il s'agit de dégâts causés par les sangliers, parce que ces ani-
maux sont nomades et se transportent souvent à de grandes distances,
d'une forêt à une autre. Il a été décidé cependant a maintes reprises
que le propriétaire d'un bois ou le locataire de la chasse peut être
déclaré responsable du dommage causé par les sangliers aux propriétés
voisines lorsque, d'une part, il a attiré ces animaux, a cherché i les
retenir sur ses terres, et a ainsi favorisé leur multiplication, et que,
d'autre part, il s'est opposé à la destruction par les riverains, et qu'il
n'a lui-même employé que des moyens insuffisants et tardifs pour dé-
truire ces animaux. Il importe, pour éviter la responsabilité, de pro-
céder à des chasses et à des battues fréquentes, en y appelant les
riverains. Si, malgré ces mesures énergiquement prises, les sangliers
continuaient à causer des dommages aux riverains, le propriétaire ou
le locataire de la chasse échapperait a toute responsabilité, parce qu'on
ne pourrait lui reprocher ni faute, ni négligence. Il en serait de même
dans tous les cas où, à raison de la situation et de l'état des lieux, la
destruction serait impossible.
Les mêmes principes s'appliquent aux dommages causés par le petit
gibier, le lièvre et surtout le lapin. On s'est demandé si la responsa-
bilité pouvait s'appliquer aux dommages causés par les bêtes fauves,
loups, renards, blaireaux. On doit, en principe, résoudre cette question
négativement. Toutefois la responsabilité du propriétaire du bois ou
du locataire de la chasse pourrait être engagée, si, dans l'intérêt de sa
chasse, il avait lui-même placé, attiré ou retenu ces animaux, s'il avait
favorisé leur multiplication et s'était opposé à leur destruction.
Les actions intentées par des riverains à fin de réparation du
dommage causé par le gibier sont de la compétence du juge de paix,
conformément à l'art. 5, i°, de la loi du 25 mai i838, qui attribue
compétence aux juges de paix sans appel jusqu'à la valeur de ioo francs,
et, à charge d'appel, à quelque valeur que la demande puisse s'élever,
pour les actions relatives aux dommages faits aux champs, fruits et
récoltes, soit par l'homme, soit par les animaux. Le juge de paix, saisi
de la demande, peut, pour apprécier le dommage, recourir aux moyens
d'instruction ordinaires, visite de lieux, expertise, enquête.
EN MATIÈRE DE CHASSE A COURRE. 289
DE LA DESTRUCTION DBS ANIMAUX MALFAISANTS ET NUISIBLES
ET DES BÊTES FAUVES.
L'art. 9 de la loi de 1844 contient, en ce qui touche la destruction
des animaux malfaisants et nuisibles et la destruction des bêtes fauves,
une double disposition. En ce qui touche les animaux malfaisants ou
nuisibles, il appartient au préfet de déterminer les animaux qui pré-
sentent ce caractère et les conditions dans lesquelles le propriétaire,
possesseur ou fermier, peut, en tout temps, indépendamment de tout
dommage, détruire sur ses terres les animaux déclarés par l'arrêté
malfaisants ou nuisibles. Le fait par le propriétaire ou fermier de
procéder à cette destruction, dans les termes des arrêtés préfectoraux
qui l'autorisent, n'est point un fait de chasse, et ce droit peut être
exercé même par une personne qui n'est pas munie d'un permis de
chasse. Mais il -résulte des termes mêmes de la loi que la destruction
ne peut s'opérer sur le terrain d'autrui, puisque l'exercice de ce droit
est réservé au propriétaire, possesseur ou fermier, sur ses terres.
En ce qui touche les bêtes fauves, la loi reconnaît aux propriétaires
ou fermiers le droit de repousser et de détruire, même avec des armes
à feu, les bêtes fauves qui porteraient dommage à leur propriété. On
doit comprendre, sous cette dénomination de bêtes fauves, les bêtes
fauves proprement dites, cerfs, daims, chevreuils; les bêtes noires,
sangliers, laies, marcassins; les bêtes rousses, loups, renards, etc. Le
droit de destruction des bêtes fauves peut s'exercer même lorsque la
chasse n'est pas permise, et par des personnes non munies du permis
de chasse. L'emploi de tous les moyens est licite pour cette destruction.
C'est ainsi qu'il a été décidé que, pour détruire les bêtes fauves, on
peut recourir à l'usage de chiens courants, même à la chasse à courre,
pourvu que ces moyens soient exclusivement employés à la destruction,
et qu'ils puissent sérieusement aboutir à ce résultat. Aucune autorisa-
tion préalable n'est exigée pour l'exercice de ce droit, et le propriétaire
peut se faire assister de tiers qui participent aux mêmes immunités
que lui. Mais le droit qu'a le propriétaire ou fermier de détruire les
bêtes fauves est subordonné à cette condition essentielle que ces
animaux causent à la propriété un dommage actuel ou la menacent
d'un dommage imminent. Il n'est pas douteux tout d'abord que le
propriétaire ou fermier peut détruire les bêtes fauves au moment même
où elles viennent ravager ses récoltes; mais il faut aller plus loin et
reconnaître que le droit de destruction peut s'exercer avant que le
mal soit déjà accompli, et par cela seul que le dommage est imminent.
Ainsi, la présence prolongée de bêtes fauves sur une propriété, ou
19
NOTIONS JURIDIQUES
I
de ces animaux, des ^«"J^TSe*,^ dans un canton où *
jugé, spécialement, que 1 prescnc d e P neS)ConsWE
«t dévoré des animaux dômes ^f J^lit de cha sse do la f*
un dommage imminent, et . qu un > P s en temps prohbe.
d „ maître d'une ^J^^tett, détruit, au moyen *
\Tmre%^=ctn^^
fauves se rattachent les chasses co lecme ^ M nouveU es * h
par Parrêté du .9 P""**?" J'* éprendre par les maires ^
et plus souvent s'il est ^^(J^^e. ou particulier* a»
les campagnes, des chasses * b * ttu ^.& aux nuisibles . Ces chasse,
loups, renards, blaireaux et autres ^ anima ^ ^^
battues sont ordonnées pu -les pré J , ^/forestiers. Ces M*
? u =%-^^
S rSeSSitST é= de tertre ou * - -
^ds et «^ '^ t 7Ï£r! po* r**#
animaux nuisibles. H n'> a point as P déterminent les w
cette disposition, des arrêtes P^^torau q ^ ^ ^
maux nuisibles, conformément à i art. 9 « ^ de ,.„,* *
Considérer comme anima* «"^J^ de VU e des WWg
l'an V que les animaux dangereux au i AinsrlesM!»
rauxVl'agricultureoudela^
et chasses collectives ne peuvent être nota mment desc***
animaux qui ont le carac e de g*, «y ^ cont raire, «J
^^L^X^*^ Ces animaux - ^
^defdommages ffg^SZ^'*'
tion dans un pays peut, à juste titre, ^
animaux dangereux. j,^ té d e P^ô* *",
Les chasses collectives P e ™'*f ^ préfet . L'arrêté ^
peuvent avoir lieu sans une autonsaUo a P ou deS WB ,
peut autoriser à la fois des chasses
EN MATIERE DE CHASSE A COURRE. 2ÇI
seulement. Lorsque la chasse est autorisée, elle peut avoir lieu avec
chiens et à courre. L'arrêté préfectoral peut également déterminer le
territoire sur lequel la chasse est permise.
Ces chasses peuvent avoir lieu même dans le temps où la chasse
ordinaire est prohibée ; elles peuvent s'exercer, dans les limites de
territoire indiquées par l'arrêté préfectoral, sur les terres et dans les
bois non clos des particuliers,' sans qu'il soit besoin du consentement
des propriétaires, et sans qu'il soit même indispensable de les prévenir.
La direction de la chasse appartient à la personne qui est désignée
à cet effet par le préfet. Autant que possible cette direction doit être
confiée au lieutenant de louvetcrie, qui doit remplir lui-même cette
mission, et ne peut la déléguer à un piqueur ou à un garde. A
défaut du lieutenant de louveterie, la direction de la chasse appartient
à l'agent forestier, chef du cantonnement, ou à son délégué. Elle
pourrait être également confiée au maire de la commune, à la gendar-
merie, ou même à un simple chasseur.
Le lieutenant de louveterie, ou la personne chargée en son lieu et
place de diriger la chasse, peut demander au maire de requérir des
chasseurs, en cas d'insuffisance des piqueurs et valets de chiens
compris dans l'équipage, et des auxiliaires volontaires. Ce droit de
réquisition ne saurait être exercé directement par le lieutenant de
louveterie, l'agent forestier ou le délégué du préfet. Le chasseur,
régulièrement requis par le maire, lorsqu'il ne se rend pas à la convo-
cation, est passible d'une amende de 10 francs, qui est prononcée par
le tribunal de simple police. Il est bien entendu que les chasseurs qui
prennent part dans ces conditions à une chasse régulièrement autorisée
n'ont pas besoin d'être munis d'un permis.
L'arrêté de pluviôse an V exige, pour la régularité des battues ou
chasses collectives qu'il autorise, qu'elles aient lieu sous la surveillance
de l'administration forestière. Le conservateur ou l'inspecteur des
forêts désigne l'agent forestier chargé de surveiller la chasse; cette
mission est généralement confiée au chef du cantonnement du lieu où
la chasse doit s'effectuer. L'agent ainsi désigné peut déléguer ses
pouvoirs à l'un de ses collègues ou même à un simple préposé
forestier.
Il est fort important que toutes les conditions prescrites par l'arrêté
de Pan V soient exactement remplies; autrement, si la chasse avait été
irrégulière, par exemple, si elle avait eu lieu sans autorisation du
préfet, ou en dehors des conditions imposées par l'autorisation, ou
bien si elle avait eu lieu sans la surveillance de l'agent forestier, cette
chasse irrégulière constituerait un véritable délit de chasse tombant
sous l'application de la loi de 1844, si le fait de chasse avait eu lieu
en temps prohibé, ou sans permis, ou sur le terrain d'autrui sans le
2^2 NOTIONS JURIDIQUES.
consentement du propriétaire. La poursuite correctionnelle pourrait
atteindre le lieutenant de louveterie ou le directeur de la chasse, et tes
auxiliaires directs, tels que les piqueurs, les chasseurs qui auraieat
pris part volontairement à la chasse. On reconnaît toutefois que les
tireurs ou traqueurs qui oot été requis de prendre part à une chasse on
à une battue, ne peuvent être responsables pénalement des irrégularités
commises dans l'accomplissement de cet acte, irrégularités qtrïfc
n'avaient ni le moyen ni le droit de contrôler. Indépendamment de la
responsabilité pénale, les personnes qui ont dirigé la chasse irrégulière
ou qui y ont participé pourraient être condamnées à des dommages-
intérêts envers les particuliers sur les terres desquels cette chasse
aurait eu lieu sans leur consentement.
Indépendamment des chasses collectives, le préfet peut accorder aux
particuliers qui ont un équipage de chasse des permissions spéciales
de chasse pour la destruction des animaux nuisibles. Cette permissioa
est nécessaire même aux lieutenants de louveterie lorsqu'ils veulent
chasser des animaux nuisibles autres que le loup. Le permissionnaire.
à moins de restriction spéciale contenue dans l'arrêté du préfet, peut
employer tous les modes de chasse, chasse à tir, chasse à courre, arec
ou sans les gens de l'équipage. Les chasses ainsi autorisées ne peuvent
avoir lieu que sous la surveillance de l'administration forestière; elle?
sont du reste soumises aux mêmes règles que les chasses collectives.
L'art. 90 de la loi municipale du 5 avril 1884 confère aux maire?
des pouvoirs spéciaux en ce qui touche la destruction des animaui
nuisibles, et spécialement des loups et des sangliers. Une première
disposition charge le maire de prendre, de concert avec les propriétaire?
ou les détenteurs du droit de chasse dans les buissons, bois et forêts,
toutes les mesures nécessaires pour la destruction des animaux
nuisibles désignés dans l'arrêté du préfet pris en vertu de l'art. 9 te
la loi du 3 mai 1844. Il importe de remarquer, dans cette première
disposition, Pobligrtion pour le maire de se concerter avec les pro-
priétaires ou détenteurs du droit de chasse. On doit en conclure qw
l'opposition des propriétaires ou détenteurs du droit de chasse empê-
cherait le maire de faire procéder, sur le terrain qui leur appartient
ou dont ils ont la chasse, à des battues pour la destruction des animam
nuisibles.
La seconde disposition est relative à la destruction des loups et de*
sangliers. Le maire est chargé de faire, pendant le temps de neige, 1
défaut des détenteurs du droit de chasse, à ce dûment invités, détourner
les loups et sangliers remis sur le territoire, de requérir, à l'effet »
les détruire, les habitants avec armes et chiens propres à la chasse de
ces animaux, de surveiller et d'assurer l'exécution de ces mesures
Pour que le maire puisse user de ce pouvoir, il faut que les détenteurs
EN MATIÈRE DE CHASSE A COURRE. 2Q3
de la chasse aient été mis en demeure de détruire eux-mêmes les
loups et les sangliers. Cette mise en demeure peut résulter d'un arrêté
pris par le maire et notifié aux intéressés, ou tout au moins d'une
invitation non équivoque adressée aux détenteurs du droit de chasse
d'avoir à détruire, dans un délai suffisant, les loups et sangliers se
trouvant dans leurs bois. Les chasses ainsi organisées par le maire
peuvent avoir lieu en temps prohibé ; ceux qui y prennent part n'ont
pas besoin d'être munis d'un permis de chasse.
DE LA LOUVETERIE.
La louveterie est un ensemble de mesures administratives ayant pour
objet la destruction des animaux sauvages particulièrement dangereux,
et plus spécialement des loups. L'organisation de la louveterie est
régie par une ordonnance du 20 août 1814. Les lieutenants de louveterie
sont nommés par le préfet, sur l'avis ou la proposition du conservateur
des forêts. Le préfet fixe le nombre des lieutenants de louveterie et
détermine l'étendue de la circonscription dans laquelle ils exercent leurs
fonctions. En principe, le nombre des lieutenants de louveterie ne
peut excéder le nombre des arrondissements de sous-préfecture, à
moins de circonstances exceptionnelles, qui doivent être soumises à
l'appréciation du directeur général des forêts. Les lieutenants de
louveterie sont nommés pour un an, mais leurs fonctions doivent être
considérées comme prorogées tacitement, et ils doivent continuer
à les exercer tant qu'ils n'ont été ni révoqués, ni remplacés. Les
fonctions du lieutenant de louveterie sont purement personnelles, et il
ne peut se faire remplacer par son piqueur dans les chasses au loup ou
dans les battues qu'il est appelé à diriger. Les dispositions de l'or-
donnance de 1814, qui déterminaient l'importance de l'équipage de
chasse que le louvetier devait entretenir, sont tombées en désuétude.
Le louvetier choisit, renvoie et remplace, comme il le juge à propos,
les piqueurs, valets de chiens et hommes d'équipage.
Le lieutenant de louveterie a le droit, dans toute l'étendue de sa
circonscription, de pratiquer la chasse au loup, même sur le terrain
d'autrui, sans le consentement du propriétaire.
L'ordonnance de 1814 détermine ainsi les devoirs du louvetier : Il
doit détourner les loups, entourer les enceintes avec les gardes fores-
tiers et les faire tirer au lancé. Dans le temps où la chasse à courre. est
permise, on découple, si cela est jugé nécessaire. Dans le temps où la
chasse à courre n'est plus permise, le louvetier doit s'occuper parti-
culièrement à faire tendre des pièges avec les précautions , d'usage,
faire détourner les loups, et, après avoir entouré les enceintes de
2<J4 NOTIONS JURIDIQUES:
gardes, les attaquer à traits de limier, sans se servir de l'équipage
qu'il est défendu de découpler; il doit enfin faire rechercher avec grand
soin les portées de louves.
Ces différentes opérations peuvent être faites, sous la direction do
louvetier, par un piqueur ou par un homme de l'équipage. Le louvetier
peut employer comme auxiliaires, outre les gens de son équipage cl
les gardes forestiers, des amis et des chasseurs, à la condition, après
la fermeture, que la chasse ne prenne pas le caractère d'une battue.
Les battues ou chasses collectives ne peuvent plus avoir lieu, lorsque
la chasse n'est plus permise, qu'en vertu d'une autorisation du préfet
et en se conformant aux prescriptions de Parrêté du 19 pluviôse an V.
L'officier de louveterie ne peut régulièrement procéder à la chasse au
loup qu'en présence du garde forestier, qui doit non seulement être
convoqué, mais aussi assister à la chasse. Le service forestier a
toujours le droit de s'opposer à la chasse annoncée par le louvetier.
et, si le louvetier passe outre malgré cette opposition, il peut être
poursuivi pour délit de chasse.
Pour permettre au louvetier d'exercer son équipage, l'ordonnance
de 1814 l'autorise à chasser à courre le sanglier dans les forêts de
l'État comprises dans sa circonscription. Ce droit ne peut s'exerça
dans les bois des particuliers, des communes ou des établissements
publics. Cette chasse n'est autorisée que pendant le temps que la
chasse est permise; elle ne peut avoir lieu que deux fois par mois. Le
louvetier doit, lorsqu'il procède à cette chasse, avertir le service fores-
tier, pour le mettre à môme d'exercer la surveillance qui lui incombe.
Il ne peut se faire accompagner de tierces personnes, mais il peut se
faire assister et même remplacer par un piqueur.
Les lieutenants de louveterie sont assujettis à certaines obligations
administratives. Ils doivent adresser au directeur des forêts, par l'in-
termédiaire des agents locaux, des rapports sur les moyens de détruire
les loups, sur la destruction des portées de louveteaux, un état
mensuel des sangliers par eux forcés dans les chasses à courre prati-
quées dans les forêts domaniales, et un état annuel de leurs prises.
DE LA CHASSE A COURRE DANS LES BOIS : ET FORÊTS DE L'ÉTAT.
La location de la chasse dans les bois et forêts de l'État a lieu par
adjudication publique devant le préfet ou le sous-préfet, à la diligence
du conservateur des forêts. Les conditions générales de l'adjudication
sont réglées par un cahier des charges, dressé par l'administration
forestière, et qui porte la date du 6 octobre 1880.
Dans les forêts domaniales, la chasse à courre et la chasse à tir
EN MATIÈRE DE CHASSE A COURRE. 295
peuvent être adjugées séparément et à des personnes différentes. Cette
adjudication séparée est du reste une simple faculté, et la même per-
sonne pourrait être adjudicataire de la chasse, soit à tir, soit à courre.
Lorsque le droit de chasse à courre et le droit de chasse à tir,
dans une même forêt ou sur un même lot, sont loués séparément à
des personnes différentes, la chasse à courre, à cor et à cri comprend
le grand gibier, cerf, daim, sanglier et loup. La chasse à courre peut
être exercée deux fois par semaine et d'après le mode généralement
en usage. Le choix des jours est concerté, au moins un mois avant la
date ordinaire de l'ouverture de la chasse, entre l'adjudicataire et
l'agent forestier, chef du service local, qui prévient du choix ainsi fait
les locataires de la chasse à tir. Les dimanches et fêtes ne peuvent
être désignés comme jours de chasse. Les piqueurs sont autorisés à
aller en reconnaissance avec les limiers en dehors des jours indiqués
pour l'exercice de la chasse à courre, mais à la condition expresse de
ne point pénétrer dans les enceintes.
La surveillance et la conservation de la chasse demeurent confiées
aux agents et gardes forestiers, mais sans que les adjudicataires de la
chasse puissent réclamer d'eux aucun service spécial et extraordinaire
à cet effet. Les adjudicataires ont la faculté, s'ils estiment que la sur-
veillance des gardes forestiers ne protège pas suffisamment la chasse,
d'instituer, avec l'autorisation du conservateur des forêts, des gardes
particuliers, chargés spécialement de la surveillance des forêts ou por-
tion de forêts dont la chasse leur est affermée. Le choix des gardes
doit être soumis à l'approbation du conservateur, qui peut, le cas
échéant, exiger leur renvoi.
Le cahier des charges réserve à l'administration forestière des droits
étendus en ce qui touche la destruction du gibier, dont la surabondance
pourrait nuire aux peuplements forestiers ou aux propriétés riveraines.
Lorsque ce cas se produit, le conservateur des forêts met en demeure
le fermier de la chasse, par une sommation régulière, de détruire, dans
un délai déterminé, les animaux dont le nombre et l'espèce lui seront
indiqués. Si le fermier ne satisfait pas à cette mise en demeure, il est
procédé d'office à la destruction par les soins du service forestier, et
le gibier ainsi abattu appartient à celui qui l'a tué. Le service des
forêts se réserve également la faculté de poursuivre la destruction des
lapins en tout temps et par tous les moyens, sauf par l'emploi du
fusil, sans que l'adjudicataire de la chasse ait aucun droit sur les lapins
pris ou tués dans ces conditions.
Les adjudicataires de la chasse à tir sont tenus de supporter la
destruction des grands animaux effectuée au fusil par les adjudicataires
de la chasse à courre, sur réquisition administrative, sans qu'il soit
nécessaire d'appeler à cette destruction les adjudicataires de la chasse
2<}6 NOTIONS JURIDIQUES EN MATIÈRE DE CHASSE A COURRE.
à tir. Les adjudicataires peuvent, même en temps prohibé, procéder, arec
l'assentiment et sous la surveillance de l'administration forestière, à la
destruction des animaux dangereux, malfaisants ou nuisibles, et ce par
tous les moyens dont l'emploi sera autorisé par le préfet, ou par des
chasses et battues pratiquées conformément à l'arrêté du 19 pluviôse
an V. Ils sont tenus de supporter les battues qui peuvent être ordonnées
pour la destruction des loups et autres animaux nuisibles, et ne
peuvent s'opposer au droit accordé aux lieutenants de louvcterie de
chasser le sanglier à courre, deux fois par mois, pendant le temps ou
la chasse est permise.
Les adjudicataires de la chasse sont directement responsables envers
les propriétaires ou fermiers des héritages voisins, riverains ou nos.
des dommages causés par le gibier ou par les animaux nuisibles. Ds
doivent également indemniser les agents et préposés forestiers des
dommages causés par le gibier aux jardins et terrains affectés à ces
employés. Le montant de l'indemnité à payer est fixé par le consenri-
teur et réparti par lui, le cas échéant, entre l'adjudicataire de la chasse
à tir et l'adjudicataire de la chasse à courre.
PRINCIPALES
SONNERIES DE CHASSE
LE LIÈVRE
Comme Jean Lapin son compère,
Le lièvre, aussi poltron que lui.
Voudrait bien se cacher sous terre.
C'est en vain qu'il cherche un abri
Le pauvret dans sa misère
Se voit déjà civet ou rôti.
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298
LA. CHASSE A COURRE.
LE RENARD
C'est un renard, c'est un sournois.
C'est le plus rusé des matois.
A la garenne
Il faut qu'il vienne.
Embusquons- nous
Et tirons-le tous.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
. 299
LE LOUP
Veille bien, gentille pastourelle,
Pour tes agneaux je tremble beaucoup;
Mais déjà d'une dent cruelle
Ont-ils, ma belle, senti le loup ?
Dis-le-moi, gentille pastourelle.
N'aurais-tu pas déjà vu le loup?
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LA CHASSE A COURRE.
LE LOUVART
A peine, hélas ! séparé de ta mère,
Jeune louvirt, tu trouves le tombeau.
Tu n'as encore d'une jeune bergère
Mordu le chien, croqué le tendre agneau.
Va, l'innocence ne nous sauve guère,
Faut être ici-bas victime ou bourreau.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
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LE SANGLIER
Ferme au lancé,
Grand sanglier;
Arrêt de mort est signé.
Tu cherches en vain le forkmgé,
Courant grand train ;
Par monts et guérets.
Ta fin, hélas 1 va approcher,
Le vautrait va te coiffer.
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3û2
LA CHASSE A COURRE.
LE CHEVREUIL
Voici le chevreuil qui s'élance.
Sa chevrette en bêlant le suit,
Sur leurs traces le jeune faon s'avance
Afin qu'il fuie,
Chasseur fait grand bruit.
Piqueurs, faut épargner la mère
Et sauver son pauvre petit.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
3o3
LE CHEVREUIL DE BOURGOGNE
Marchons, dans sa course légère.
Chasseurs, arrêtons le chevreuil.
Son pied ne touche pas la terre,
Sa vitesse fait son orgueil.
Marchons, dans sa course légère.
Chasseurs, arrêtons le chevreuil.
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304
LA CHASSE A COURRE:
LA i" TÊTE OU LE DAGUET
Le daguet n'a sur la tête,
Qu'une dague seulement;
C'est une petite bote,
Qui se fait chasser lestement.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
3o5
LA *• TÊTE OU LA DISCRÈTE
Cerf à sa deuxième tête,
Enfin porte Fandouiller;
Mais à la chasse qui s'apprête
Ne faut pas s'en laisser dépouiller.
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3o6
LA CHASSE A COURRE.
LA 3« TÊTE OU LA DAUPHINE
Chasseurs, pour cette fois,
C'est un trois-tôte
Dont nous avons fait choix.
Latreille a levé les fumées,
Un bien-aller sur ses brisées :
Avant qu'elle ait quitté le bois
Nous mettrons la béte aux abois.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
307
LA 4 « TÊTE OU LA FANFARE DU ROI
Beau quatre- tête, garde à toi !
De la meute n'entends-tu pas la voix*
Hors de l'enceinte
Malgré ta feinte
Il faut partir,
Déguerpir,
Ou sinon, sans honneur,
Ta sotte peur
Hâtera ton malheur.
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LA CHASSE A COURRE.
LA 4 C TÊTE BOURBON
La quatrième tète Bourbon
Mérite bien tout son renom.
L'auteur,
Grand chasseur,
Courut maintes fois
Beaux cerfs, jolis minois.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
309
LE DIX-CORS JEUNEMENT
C'est un dix-cors jeunement
Qui débuche à l'instant;
Ne laissons échapper, ma foi,
Ce beau morceau digne d'un roi.
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LA CHASSE A COURRE.
LE DIX-CORS OU LA ROYALE
En foulant cette enceinte,
J'eus d'un dix-cors connaissance, je crois.
Il s'enfuit avec crainte
Au bruit de mes pas,
De ma voix.
Ma dernière brisée
Parait attester qu'il se rembuche ici.
La victoire est aisée,
Nous sonnerons avant peu l'hallali.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
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LA TÊTE BIZARDE
Ah! combien elle est laide à voir !
Tête bizarde sur un faible corps.
La journée est belle au revoir,
Chasseurs, cherchons donc un cerf dix-cors.
Ne laissons pas tromper notre ardeur.
Notre veneur
Est un fin connaisseur.
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LA CHASSE A COURRE.
LE BLAIREAU
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
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LE RÉVEIL
Voici le réveil,
Chassez le sommeil,
Au son du cor,
Peut-on dormir encor!
Chasseur au levé,
Chasseur au levé,
Déjà quatre fois le réveil
A sonné.
Holà! debout!
Vite debout!
Vite debout!
Levons-nous, levons-nous.
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3. 4
LA CHASSE A COURRE.
LE RÉVEIL DU POITOU
Dès l'aube vermeille,
Le joyeux buveur
Saisit sa bouteille,
Y puise le bonheur.
Une ardeur pareille
Presse le chasseur,
Gaiment le réveille
Et remplit son cœur.
La nuit s'efface,
Habillez -vous !
Allons vite en chasse,
La béte est debout.
Amis, sur sa trace
Accourez tous!
Et que chacun fasse
Honneur au Poitou.
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LA CHASSE A COURRE.
LA SORTIE DU CHENIL
Sortez du chenil,
Mes vaillants limiers;
Il faut aujourd'hui
Battre tous les halliers.
Au relais d'attaque, les meilleurs gosiers;
Les relais volants viendront les derniers.
Que du cerf en fuite, mes vaillants limiers,
Vos museaux béants touchent les daintiers.
PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
3l 7
LE DÉPART POUR LA CHASSE
Pour aller à la chasse
Il faut être matineux.
Nous n'avons pas besoin de peigne
Comme tous ces jeunes amoureux,
Les ronces et les épines
Dénoueront nos cheveux.
3i8
LA CHASSE A COURRE.
L'ARRIVÉE AU RENDEZ- VOUS
Au rendez-vous de chasse,
Vite, unis, courons joyeux ;
Et ce soir à la même place,
Ayons rendez-vous amoureux.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
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LA CALÈCHE DES DAMES
De la chasse le plaisir
Et le désir
Vont se ralentir,
Car bientôt tu vas sentir
D'une autre ardeur
Toute la douceur.
D'une belle
Noire prunelle
Vaut bien, ma foi,
La chasse d'un roi.
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LA CHASSE A COL'RRE.
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LA CUA58E A COURRE.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
325
LE VOLCELEST
Sonnez donc le volcelest,
La bête est près.
Elle a passé par ici ;
Les chiens sont après,
Car voici son pied tout frais
Dans la forêt.
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LA CHASSE A COURRE.
LE LANCE
Chasseurs, nous lançons chaque jour
Le cerf et le chevreuil tour à tour.
La meute bruyante
Est ardente :
De ce plaisir
Hàtons-nous de jouir.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
327
LA VUE
Nous avons vu la bête,
Vite, sonnons, sonnons.
Fanfarons !
Pour cette noble fête,
Chasseur laisse toujours.
Toujours,
Les amours.
Plus d'incertaine quête,
Ni plus de trompeurs détours.
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328
LA CHASSE A COURRE.
LE HOURVARI DE L.\ VUE
Taïaut! qu'avez-vous fait, méchantes bêtes?
Sur la voie à l'instant remettez-vous tous !
Allons, vous êtes prêtes,
En chasse élançons-nous t
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
329
LE FAUX-REYU
Piqueur, là-bas,
Ne vois-tu pas
La bête aux abois >
Elle a quitté le bois.
Je n'ai rien vu, répond le drôle.
En quête, nous nous remettons.
Ecoutons.
C'est la bête qui frôle ;
Tout droit au fourré
Marchons.
33o
LA CHASSE A COURRE.
LES ANIMAUX EN COMPAGNIE
Nombreuse compagnie,
Vient bondissant vers nous.
Voyez-vous >
Une troupe jolie,
Le dix-cors en avant,
Sous le vent.
Attaquons-le sans nul retard.
Prends garde au défaut, laissons le brocard.
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LA CHASSE A COURRE.
LE DÉBUCHÉ
Nous avons vu sortir la bète,
Elle fuit devant nous;
La voyez-vous >
Rien ne l'arrête,
Et notre cor
Augmente encor
Son essor.
Avec regret,
Loin de la forêt
La peur. hélas !
Précipite ses pas.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
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LA PLAINE
Ce qui me rend heureux,
Ce sont surtout de jolis yeux;
Rose mine, taille fine,
Voilà ce qui me rend heureux.
J'aime à prendre en mes bras,
Fille aux contours dodus et gras.
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336
LA CHASSE A COURRE.
LE CHANGEMENT DE FORÊT
Jouez des jarrets,
Piqueurs et valets,
Notre daguet
Change de forêt.
Soyez aux aguets,
Aht que de regrets
S'il nous échappait,
Ce muguet.
Ce soir chez Babet,
Son tendre filet,
Trempé de clairet,
Fera bon effet.
Mais du cabaret
Chasseur indiscret
Jamais aux forêts
Ne dit les secrets.
PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
337
TERRER DU RENARD
338
LA CHASSE A COURRE.
LA BOITEUSE
La pauvre bote
Courbe la tête,
Elle s'arrête
A chaque pas.
Elle est boiteuse;
La malheureuse
Sur chaque yeuse
Lit son trépas.
Adieu, belles montagnes,
Vastes campagnes,
Où j'allais bondir !
Adieu, verte bruyère,
Douce fougère,
Faut-il mourir !
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
339
LE BAT-L'EAU
La béte a chaud,
Elle prend Peau;
Comme Santor,
Fanfare et Brifaut,
Elle bat l'eau.
Mais sur sa quête
Et sans bateau
La suit Baliveau,
Taïaut!
Taïaut !
Sa belle tête,
Sous le couteau,
Tombera bientôt.
Elle est à l'eau,
La pauvre bête,
Elle est à Peau,
C'est là son tombeau.
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340
LA CHASSE A COURRE,
LA SORTIE DE L'EAU
Mais elle fait la demoiselle,
Voyez- vous comme elle chancelle !
Veneur, prépare ton couteau,
La chasse finira bientôt.
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PRINCIPALES SONNERIES DE. CHASSE.
34Ï
L'HALLALI SUR PIED
Chiens et chevaux se réjouissent.
Le cerf aux abois va tomber.
Les cors à Penvi retentissent,
Et le limier
Va redonner du gosier.
042
LA CHASSE A COURRE.
L'HALLALI PAR TERRE
Les cors à Penvi retentissent,
Et te limier
Redonne du gosier.
Déjà les chasseurs applaudissent
Ce qu'au diner
Chacun va raconter.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
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LA CURÉE
Le cerf a vécu,
Nous Pavons vaincu ;
Mais je suis fourbu
D'avoir tant couru.
Sur l'herbe étendu,
Le ventre fendu,
Qu'un bâton fourchu
Tire son forhu.
De leurs cris aigus
Nos chiens éperdus
Saluent le menu,
Qu'ils ont obtenu.
Son filet charnu,
Chasseurs, nous est dû,
Je suis convaincu
Qu'il sera dodu.
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LA CHASSE A COURRE.
LES HONNEURS DU PIED
Que le pied soit offert au vainqueur!
Sonnez, veneurs,
Sonnez les honneurs !
Du triomphe goûtons les douceurs !
Vaillants chasseurs.
Joyeux buveurs,
De la cantine
La plus voisine
Tirez le vin,
Versez tout plein!
Bordeaux, Champagne,
Bourgogne, Espagne,
Au son du cor,
Coulez à plein bord.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
3 4 5
LA RETRAITE PRISE
Pour la retraite
Que tout s'apprête.
Il faut partir.
Nouvelle fête,
Autres conquêtes
A nous vont s'offrir.
Qu'on se prépare,
Sonnez, fanfares;
Chantons le plaisir.
Pour la retraite,
Que tout s'apprête,
Il faut partir.
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LA CHASSE A COURRE.
LA RETRAITE DE GRACE
Vaillants veneurs, cessons la chasse,
Notre ennemi s'est bien défendu ;
Jusqu'à demain faisons-lui grâce,
Notre temps ne sera pas perdu!
Comme il nous a bien tenu tête!
Le forcer serait inhumain.
Laissons dormir la pauvre bête,
Nous la rattaquerons demain.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
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LA RETRAITE MANQUÉE
Sonne, franc piqueur !
Sonne avec ardeur,
Fais sonner ton cor,
Ramène l'essor,
Rappelle tes chiens,
Pour rattaquer demain.
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LA CHASSE a COURRE.
LE RETOUR DE LA CHASSE
Au retour de la chasse,
Amis, vidons cent flacons;
Le vin donne de l'audace
Et rend les chasseurs lurons.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
LA MARCHE DE LA VÉNERIE
Chiens et chevaux,
Fuyons les sentiers,
Les routes tracées;
Et levons dans nos percées,
Par monts et par vaux,
Des gîtes nouveaux.
Dans ce hallier,
Sa retraite,
Si discrète,
Que tout gibier
Devienne notre prisonnier.
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LA CHASSE A COURRE.
LE RETOUR DES PRINCES
OU LA RENTRÉE AU CHATEAU
A cheval, à cheval !
Du retour
Le déclin du jour
A donné le signal.
Les princes rentrent au château.
Pour nous, demain, rendez-vous nouveau.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
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L'ADIEU DES MAITRES
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LA CHASSE A COURRE.
LA RENTRÉE AU CHENIL
Labrisée est en courroux.
Il a perdu ses toutous.
Je le vois là-bas,
Bien dans l'embarras,
Sonnant, requêtant,
Et courant à grands pas.
Rentrez donc, rentrez chez vous ;
A demain, mes bons toutous.
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PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
353
L'ADIEU DES PIQUEURS
Adieu, fanfare,
La nuit nous sépare ;
Mais à demain,
La trompe en main,
Chez son hôtesse,
Le vieux Lajeunesse
Payera le vin
Blanc du matin.
Mais pour la fête
Qui s'apprête,
Faut être dispos,
Prenons du repos.
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354
LA CHASSE A COURRE.
LE BONSOIR
Il est tard, mes amis, bonsoir.
Gardons l'espoir
De nous revoir.
A demain,
Bonsoir.
Tout plaisir a sa fin,
Aujourd'hui plus de refrain;
Mais demain
Autre cerf, partons grand train.
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PRINCIPALES S0NNERIE8 DE CHASSE.
355
LA SAINT-HUBERT
D'âme et de cœur, du patron de la chasse
Fêtons la gloire, intrépides chasseurs;
A ce banquet accourez prendre place,
Le verre en main, francs piqueurs et veneurs.
Qu'à rire, à boire ici chacun s'apprête,
Des bons vivants suivons bien les leçons,
De saint Hubert aujourd'hui c'est la fête,
En son honneur entonnons cent chansons.
Certain chasseur nous dit qu'une légende
Faisait d'Hubert un saint par trop bourgeois,
Parce qu'un cerf, dit-on, l'erreur est grande
Lui fit quitter l'amour et son carquois.
Détrompez-vous, il aimait fort les belles.
Dont il était le joyeux échanson,
Il buvait sec, et daignait auprès d'elles
En vrai Gaulois, entonner sa chanson.
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LE LAISSÉ-COURRE ROYAL
PRINCIPALES SONNERIES DE CHASSE.
357
LA BOURBON
La chasse, le vin et les belles,
C'était le refrain de Bourbon.
Il rencontra peu de cruelles,
Et trouva toujours le vin bon;
Ses maltresses étaient fidèles,
Et ses chiens avaient du renom.
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LE GRAND CONDE
STATISTIQUE
DES MEUTES ET ÉQUIPAGES, DE FRANCE
EN MAI 1889
(Se sont comptées comme meutes que celles qui comprennent au moins
10 chiens.)
NOTE EXPLICATIVE
J'offre ici aux veneurs mes collègues un travail qui n'a
jamais été fait qu'une fois (par moi-même), en i863; mais
en vingt- six ans il s'opère tant de changements en France,
qu'il m'a fallu recommencer ce travail entièrement.
Cette statistique est, je le sais, incomplète et défectueuse
en bien des points; et cependant on se figurerait diffici-
lement le mal qu'elle m'a donné à dresser et le nombre
immense de lettres qu'il m'a fallu écrire pour arriver à ce
résultat. Si encore tout le monde m'avait répondu!... Je
crois fermement que cette statistique doit être très utile
à tous mes collègues, surtout parce qu'elle pourra leur
apprendre où ils peuvent trouver les chiens qu'ils désirent,
la race qu'ils recherchent et le genre d'animaux chassés par
les différentes meutes.
J'estime qu'il manque à cette statistique plus de soixante
équipages, et parmi ceux-là plus de trente équipages connus
de moi et aux maîtres desquels j'ai inutilement écrit. D'autres
3ÔO STATISTIQUE DES MEUTES ET ÉQUIPAGES
enfin me sont certainement inconnus; je prie les maîtres
de ces équipages de m'excuser s'ils n'ont pas reçu mes
questionnaires.
Au résumé, il doit y avoir en France plus de trois cent
cinquante équipages de chasse à courre, prenant environ
neuf mille animaux.
Le nombre des chevaux indiqués ne comprend guère que
celui des chevaux des hommes de service (sauf quelques
rares exceptions, principalement pour les grands équi-
pages) ; si l'on comptait le nombre de chevaux des maîtres,
invités et amateurs qui suivent les chasses, il faudrait cer-
tainement décupler au moins le nombre de chevaux inscrits
dans ces tableaux.
Pour un grand nombre de petits équipages de la Vendée,
de la Vienne, delà Haute-Vienne, du Poitou, etc., il faudrait
diminuer le chiffre total de leurs prises pour être dans le
vrai, beaucoup de ces équipages se réunissant ensemble
pour chasser, et ayant naturellement chacun indiqué le
nombre de prises auxquelles avaient assisté leurs chiens.
Néanmoins le nombre total d'animaux (7000 environ) ne me
paraît pis exagéré, puisqu'il ne donne guère que vingt-six
animaux par équipage.
Pour tous les renseignements (races de chiens, nombre
d'hommes, etc.) j'ai scrupuleusement copié les renseigne-
ments donnés. Peut être se trouve-il quelques erreurs,
principalement sur les races de chiens. Ces erreurs, si elles
existent, ne sont pas de mon fait.
DE FRANCE EN MAI 1889. 36ï<
Je remercie ici tous mes excellents collègues qui m'ont
répondu et donné les renseignements que je demandais;
mais j'ai eu tant de mal pour faire ce travail, auquel j'ai eu
bien souvent envie de renoncer, que je voue aux changes
et aux buissons-creux perpétuels tous ceux qui m'ont fait
écrire cinq ou six fois sans me répondre. Je suis encore
persuadé que je ne cherchais qu'à leur rendre service, et
j'espère qu'ils n'ont d'autre excuse que de ne pas l'avoir
compris.
36a
ÉQUIPAGES DE 80 A ioo
NOMS.
M* de 1' Aigle.
ADRESSES.
Paul Bredin.
VChandon de Bri ail-
les.
Duc de Gramont.
C* Greffulue.
S. A. R. le prince de
Joinville.
MM. Menier.
V de MONTSAULNIN.
C" Henri de la Roche.
V" de la Rochefou-
cauld.
Emile Rècipon.
Château du Franc-Port,
près Compiègne (Oise).
A Beaumont, par Cunfin
(Aube)
Château de la Cordelière,
parCbaource (Aube). • .
Château de Mangé (Sarthe).
Chat, de Bois-Boudran, par
Nangis (Seine-et-Marne).
Arc-en-Barrois (Hte-Marne)
A Villers-Cotterets (Aisne).
La Grand*Garenne,parNeu
vy-sur-Barangeon (Cher).
La Croix-Maupioux , par
~" ').....
Meilhan (Cher).
A Bon né table (Sarthe) . .
Château de la Roche-Gif-
fard par Bain-de-Bretagne
(lUe-et-Vilaine) ....
M
18
3 12
16
80
40 5o
3o
80
90
90
90
9f>
IOO IOO
60
5o
40
80
80
80 80
CHIENS ET AU-DESSUS
363
OBSERVATIONS.
BOUTONS ET DEVISES.
LIVREES.
Rallye-les-Charmes.
Bouton : pied de cerf avec
devise.
Pique avant, Champagne.
Bouton : sanglier fuyant.
Rallye-Bersay.
Bouton : cerf au lancer.
Bois Boudran.
Bouton : tête de sanglier
avec la devise.
Vautrait d'Orléans.
Bouton : avec la marque des
chiens d'Orléans.
Bouton : un cerf dans un M.
Berry Sologne.
Bouton : tête de chevreuil
entourée d'une jarretière
portant la devise.
Au bois comme à table,
Bouton : tête de sanglier en-
tourée de la devise.
A la rescousse.
Bouton : tête de cerf entou
rée d'une jarretière en ga-
lon de vénerie, avec la de-
vise.
Bien faire et laisser dire.
Bouton : tête de sanglier en-
tourée d'une trompe avec
la devise.
Blanc gris, collet et pare-
ments amarante, culotte
blanche, collet et poches
en velours pour les maî-
tres et en drap pour les
hommes, galon de véne-
rie.
Rouge, parements bleus.
Bleu de roi, parements et
poches blancs.
Rouge garance, parements
jaune soufre.
Bleu.
Bleu d'Orléans.
Rouge, gilet rouge et cu-
lotte blanche.
Vert, parements et gilet
drap Diane, bordés galon
de vénerie, culotte ve-
lours vert.
Vert, parements et gilet
amarante.
Rouge, col et parements
violets.
Habit rouge et culotte
blanche.
36 4
ÉQUIPAGES DE 80 A 100
NOMS.
B~ Roger.
Stern J .
Duchesse d'UzÈs.
C" Bertrand de Valon.
ADRESSES.
Chàt.deVouzeron, parNeu-
vy-sur-Barangeon (Cher).
Château de Fitz-James, par
Clermont (Oise)
ABonnelles (Seine-et-Oise).
Chaînant, par Senlis (Oise).
HOMMES
5o
3o
5o
60
108
5o
80
80
40
45
40
ÉQUIPAGES DE
NOMS.
ADRESSES.
V w d'ANCHALD.
Jacques Archdtacon.
James Aucher.
Chat, de Ferrière (Nièvre).
Chat, de Beaumarchais, par
Autrèche (Indre-et-Loire).
Château des Ogonières
(Loir-et-Cher)
Bailly du Pont.
La Châtaigneraie (Vendée).
40
5 4
40
40
CHIENS ET AU-DESSUS (Suite)
365
OBSERVATIONS.
BOUTONS ET DEVISES-
Vouzeron Sologne.
Bouton : chevreuil sautant,
avec la devise.
Bouton : un sanglier.
Bonnettes.
Bouton : tète de cerf avec
légende.
Par monts et rations.
Bouton : pied de cerf avec
la devise.
LIVREES.
Rouge, habit à la fran-
çaise, col et parements
blancs, culotte mastic,
galon de vénerie.
Rouge, col et parements
blancs.
Rouge, col, parements et
gilet bleus, galon de vé-
nerie.
Rouge, parements rouges,
gilet blanc.
I
40 A 80 CHIENS
w
>
-
•
•
IO
û
te
<
S5
U
es
OBSERVATIONS.
BOUTONS ET DEVISES.
LIVRÉES.
•
»
IO
Equipage renommé pour la
qualité de ses chiens.
Bouton : tête de sanglier
surmontée de la devise.
•
•
•
Toujours.
Bouton or.
Drap bleu, col et pare-
ments grenat.
Bleu.
Drap bleu galonné or.
Livrée rouge.
>
•
40 chiens griffons. — Cet
équipage est renommé
pour la beauté de ses
griffons.
366
ÉQUIPAGES DE
NOMS.
Anatole Bardin.
M. deBAUDRY-D'AsSON.
G. de Baufpres.
A. Beauchamp.
R. de Becquincocrt.
Jules Bizet.
C u de Boisgelin.
C" de Brigode.
C" Calvet-Rogniat.
B" Carayon-Latour.
ADRESSES.
Château de Médini, par
Tôten (Seine-Inférieure)
Château de Fonteclose, par
la Garnache (Vendée)
Château de Vauvaye, par
Envenneu (Seine-Inf.). . .
Château de Vaumas, par
Dompierre (Allier) .... 3
T!
Château de Billancourt, par
Nesle (Somme). . . .
Château de Bartillat (Allier).
Château de Beaumont-le-
Roger (Eure) .....
Château de Folembray ,
par Coucy (Aisne) . . . .
Château de Chamagrnieu,
par Crémieu (Isère) .
Virelade (Gironde).
40
3o
i5
58
5o
40
16
40
3o
40
40
40
5o
40
40
5o
70
3b
4 o A 80 CHIENS (Suite)
367
OBSERVATIONS.
Très beaux • et très bons
bâtards.
1/
40 chiens vendéens. — Équi-
page bien connu. — 3o
chiens sont à poil ras et
10 à gros poil, de la belle
race de Vendée.
Superbes bâtards.
45 chiens griffons, vendéens,
nivernai6.
40 chiens Saintonge. — Cet
équipage, bien connu,
conserve la race la plus
pure de Saintonge avec
un peu de croisement de
Gascogne.
BOUTONS ET DEVISES.
Tête de loup en argent et
or entourée d'une jarre-
tière.
Soutiens Vendée.
Bouton : tête de cerf sur-
montée de la devise.
Rallye- Du gués clin .
Bouton : un pied et un bois
de chevreuil croisés ; au
dessus la devise.
Rallye-Misère.
•Buisson Picardie.
Bouton : une trace de san-
glier surmontée de la de-
vise.
Rallye-Lespinasse.
Bouton : tête de sanglier
avec la devise.
Rallye- Puisaye.
Tête de sanglier avec la
devise.
Picard Piqu'Hardi.
Bouton : hure de sanglier
dans une trompe avec la
devise.
Rallye-Chamagnieu.
Bouton : tête de lièvre dans
une jarretière portant la
devise.
Droit dans la voie.
Bouton : tête de cerf entou-
rée d'une jarretière avec
la devise.
LIVRÉES.
Vert foncé, collet, pare-
ments et revers vert clair.
Vert, avec gilet blanc et
parements blancs.
Vert foncé, parements vert
émeraude.
Bleu, parements rbuges.
Livrée rouge, parements
velours noir, galonnés de
vénerie pour les hommes.
Livrée bleue, revers rouge
solférino.
Livrée verte, parements
rouges.
Rouge garance, poches,
collet et parements verts,
galonnés de vénerie pour
les hommes.
Livrée bleue, collet, pare-
ments et gilet amarante,
culotte velours bleu.
Livrée bleue, collet, pare-
ments, poches et gilet
velours grenat, culotte
velours grenat, galons de
vénerie.
368
ÉQUIPAGES DE
NOMS.
M* de Chambray.
M" de Charnacê.
V G. de Chêzelles.
Léon Collas.
O de Cornulier.
Etienne Coste.
Henri Desbordes.
Lucien Dêvrê.
Marc Didier.
Léon de Dorlodot.
Raymond Dupuytrem.
ADRESSES.
Château de Chambray, par
Damville (Eure) ....
Château de Bois-Montbour-
cher, près le Lion-d'An-
gers (Maine-et-Loire). . .
Château de daignes, par
Crépy-en-Valois (Oise). .
A Saint-Gérand-de-Vaux ,
par Bessay (Allier). .
A Fontaine-Henri (Calva-
dos)
A La Canche, près Arnay-le-
Duc <Côte-dX)r)
Château de Pocancy, par
Vertus (Marne). . . .
Chat, de Blandan, par Neu
ville-sur- Sarthe (Sarthe).
A Neuville-aux-Larris (Mar-
ne)
Château de Tardais, par
Senonches (Eure-et-Loir).
Les Martins, Saint-Julien-
de-l'Ars (Vienne) . . .
3 5
40
40
40
40
40
40
3o 5o
60
25
60 .|5:5
40."
40
40
25
5o 5o
60
60
3o
35
40 A 80 CHIENS {Suite)
369
OBSERVATIONS.
. r X* renommé pour la
qualité de ses chiens. —
Cest celui de France qui
prend le plus de cerfs.
BOUTONS ET DEVISES.
LIVREES.
Jamais de carabine. Vert et noir.
Bouton : couteau de chasse
et fouet entrelacés.
Très beaux et très bons
bâtards.
équipage qui a possédé
des chiens de toute beauté.
60 chiens bâtards normands
40 chiens vendéens, Hiver-
nais. — Cet équipage est
composé de très beaux
griffons, vendéens, Hiver-
nais, d'une très belle con-
struction.
25 chiens griffons.
Equipage renommé par la
beauté de ses chiens.
Anjou.
Bouton : pied de cerf.
Picard Piqiï Hardi.
Tête de sanglier or sur fond
argent.
Partout fen suis.
Bouton : tête de chevreuil.
Ni trêve ni repos.
Bouton : avec la devise.
Rallye- Ver tus.
Bouton : sanglier avec la
devise.
Bouton : tête de sanglier
vieil argent.
Rallye-Reims.
Bouton : tête de loup.
Bouton : tête de sanglier
argent avec jarretière d'or.
Rallye- Plessis.
Bouton : un D dans lequel
passe un chevreuil.
Bleu et amarante. *
Bleu, parements, collet et
gilet ventre de biche, cu-
lotte bleue.
Bleu, parements jaunes.
Bleu et gris, parements
amarante.
Gris-bleu, parements rou-
ges.
Bleu foncé, revers ama-
rante.
Vert, culotte grise.
Bleu sur bleu, gilet marron.
Vert, parements amarante.
Vert, collet, revers, poches
et retroussis amarante.
370
ÉQUIPAGES DE
NOMS.
Michel Epbrdssi.
M* de Fricom.
MM. Gouge et du Ver-
rier.
C- de Herce.
B- d'HoUDEMARE.
B~ de JûNCHERAT.
Paul Labitte.
Louis de Lagrange.
C u François de la Ro-
chefoucauld.
Gaston de Lauverjat
Guillaume Laveis-
sière.
M 1 * de Lestradb.
ADRESSES.
Avon, près Fontainebleau
(Seine-et-Marne). . . .
Château des Gaschetières,
par LaiUy (Loiret) . . ,
Château de Monts (Vienne)
Chat, de la Haye (Mayenne).
Pont Saint-Pierre (Eure). .
Château de Grandes-Mai-
sons, par la Membrolle
(Maine-et-Loire)
Au Mesnil-sous-Vienne
(Eure) ,
A Mayenne (Mayenne).
A Fresnay, par Plessé
(Loire-Inférieure). . . .
Chat, du Coteau, par Azay
sur-Cher (Indre-et-Loire).
A Deville-lès-Rouen (Seine-
Inférieure)
La Grange Arthui6, par La-
vau (Yonne) ,
14
35
35
5o
25 3o
40
i5
2 6
70
55
45
70
3o
i5j5
4 o A 80 CHIENS (Suite)
3 7 i
OBSERVATIONS.
BOUTONS ET DEVISES.
Rallye- Franchard.
Bouton : un cerf avec la de-
vise.
Sologne.
Bouton : cerf courant avec
la devise.
Rallye-Poitou.
Bouton : tête de cerf avec la
devise.
Bouton : tête de sanglier.
Bouton : tête de sanglier.
Rallye-Thiouré.
Bouton : tête de brocard
avec la devise.
A moi Saint-Hubert.
Tête de sanglier entourée
de la devise.
Bouton : tête de sanglier.
Bouton : une croix.
Bouton : sanglier argent
sautant entre deux L fond
or.
Puisaye Pique de près.
Bouton : tête de sanglier
avec la devise.
LIVREES.
Rouge,revers et parements
bleus.
Bleu foncé, parements ama-
rante.
Habit rouge, passemen-
terie vieil or, culotte
grise, toque noire.
Vert, parements et gilet
rouges.
Gris- bleu, collet, parements
jaunes.
Bleu chasseur à cheval,
parements vert mousse,
culotte velours réséda.
Habit rouge, parements,
gilet et culotte verts.
Vert, gilet amarante.
Rouge et bleu.
Bleu foncé, revers rouges.
Vert foncé, parements, col-
let et gilet vert clair.
Bleu-gris, parements ama-
rante, culotte velours
bleu.
372
EQUIPAGES DE
NOMS.
V" de Lestrange.
ADRESSES.
Château de Lancôsme, par
Vandœuvres - en - Brenne
(Indre)
Levesqde.
C l# du Luart.
LUZARCHE d'AZAY.
F. de Luze.
C u du Maisniel d'Ap-
PLAINCOURT.
Léon Malfilatre.
Auguste Merle.
Em. de la Motte.
Château de la Poterie,
par la Chapelle-sur-Erdre
(Loire-Inferieure). . .
Au Luart (Sarthe) .
Château d'Azay-le-Ferrou
(Indre)
Le Paveil, par Margaux (Gi-
ronde)
Château de la Triquerie,
par Abbe ville (Somme). .
A Villequier (Seine-Infé-
rieure)
Jacques Olry.
M" de Perthuis.
Château de Guilbaudon,par
Monéteau (Yonne) . . .
Château de Mont poupon,
par Ceré (Indre-et-Loire).
Château de Souvilly, par
Breteuil-sur-lton (Eure)
A Soran, par Rioz (Haute-
Saône)
iO
55
3o
40
40
5o
60
70
i5
40
#>
55
5o
60
M
40 A 80 CHIENS (Suite)
3 7 3
OBSERVATIONS.
Equipage renommé par la
qualité de ses chiens de
chevreuils et un de ceux
qui en prennent le plus,
BOUTONS ET DEVISES
Bouton : cerf argent sautant
par-dessus une banderole
sur laquelle est écrit : Fo-
rêt de Lancosme.
Bâtards de grande qualité.
55 chiens harriers.
Equipage
splendid
J e possédant
splêndides bâtards.
de
Rallye-là-Haut.
Bouton : un cerf malmené
entouré d'une jarretière
avec la devise.
Jusqu'au bout.
Bouton : un cerf passant
avec la devise.
Bouton : une trompe et au-
dessus saint Rapnaël.
Bouton : un loup hurlant.
Rallye-Guerche.
Bouton : un sanglier pas-
sant avec la devise.
Rallye-Guilbaudon.
Bouton : sanglier avec la
devise.
Bouton : un M.
Bouton or avec tête de loup.
A moi saint Hubert.
Bouton : une tête de san-
glier avec la devise.
LIVREES.
Rouge, parements vert
émeraude.
Habit rouge.
Bleu, collet et parements
orange.
Livrée bleue galonnée.
Bleu de roi, parements et
gilet amarante.
Bleu, parements et velours
tenue de la louveterie.
Bleu de roi avec parements
bleu clair.
Marron, collet et parements
rouges.
Rouge, parements et gilet
amarante.
Bleu, col, parements, po-
ches et gilet amarante,
culotte velours bleu.
Bleu de roi, parements
blancs.
374
EQUIPAGES DE
NOMS.
ROCQCIGNY.
Sallandrouze.
M u de Talhouet et M k
de J LIGNE.
Duc de Talleyrande
DE VALENÇAY.
Raoul Treuille.
Elie V aillât, Doryant
et Huart.
H. de Vatimesnil.
Léon Veil-Picard.
Jacques de Vezins.
M" de Vibraye.
ADRESSES.
Châteaud'Ouville-U-Rivière
(Seine-Inférieure)
Aubusson (Indre)
Château du Lude (Sarthe) .
Château de Valençay (Indre)
Château de Chitré t p»rVou-
neuil-sur-Vienne(Vienne).
Puyravon, par Belabre (Cor-
Chât. de Vatimesnil. par les
Thilliers-en-Vexin (Eure).
Château de Saint- Fergeux,
par Besançon (Doubs) . .
Chat, de la Frapinière, par
Joué-sous-Gounord, près
Vihiers (Maine-et-Loire) .
Château de Cheverny, par
Cour-Cheverny (Loir-et
Cher)
i5
60
25
25 5o •
60
60
60
5o
60
60
10 35
40 A8o CHIENS {Suite)
375
OBSERVATIONS.
Très bon équipage pour san-
gliers, possédant de su-
perbes bâtards.
25 chiens fox-hounds.
Très beaux bâtards.
35 chiens fox-hounds.
Très beaux bâtards.
Très beaux bâtards.
60 chiens griffons, ni vernais
et chiens de race franc-
comtoise.
Equipage bien connu pour
ses succès et un de ceux
qui prennent le plus de
chevreuils.
BOUTONS ET DEVISES.
Rallye-Ouville.
Bouton : tête de loup avec
jarretière et la devise.
Rallye-Mirambel.
Bouton : tète de loup.
Anjou.
Bouton d'Anjou.
Bouton : métal blanc avec V.
RaUye-Chitré.
Bouton : argent sur or.
Puyrayon.
Bouton : tête de loup sur
fond or.
Tout à VEure.
Bouton : tête de chevreuil
avec la devise dans les
bois.
Rallye-Comté.
Bouton : tète de loup avec
devise de l'équipage sur
fond or.
Sologne.
Bouton d'or avec cert d'ar-
gent et banderole au-des-
sus portant Sologne,
LIVRÉES.
Gros vert, parements et
revers grenat.
Bleu barbeau, collet et pa-
rements rouge écarlate.
Bleu, parements rouge vif,
col droit à la française
et galons de vénerie.
Vert, parements velours
noir.
Vert, collet et parements
verts.
Bleu, avec parements et
collet amarante.
Vert, galons de vénerie.
Habit rouge.
Bleu de roi, revers rouge
ponceau, gilet velours
rouge.
376
ÉQUIPAGES DE
NOMS.
Raoul d'ÂBAoïE.
B- d'AlLLY.
Raoul Aldebert.
O Geoffroy d'ANDiGNE
V- René d'ANDiGNÉ.
AUBELLE.
C M A. d'AUBERJON.
M'* de Beacmont.
C* de Beauregard et
Henry de Beaure
GARD.
A. de Bejarrt.
Henri de Bernede,Jac-
quault et Dubois.
Arthur de la Bbsge.
ADRESSES.
Chat, de Chezcorat, par Ma-
gnac-Laval (Hte- Vienne) .
Chat. d'Alosse, parMarcilly-
en-Villette (Loiret). .
A Millau (Aveyron). . .
Chat, de la Blanchaye, près
Segré (Maine-et-Loire). .
Chat, du Champ de la Pierre,
par Carrouges (Orne)
Château de Vinceuil, près
Preuilly (Indre-et-Loire) .
A Saint-Félix (Haute-Ga-
ronne)
Château de Beaumont-la-
Ronce (Indre-et-Loire). .
Château du Deffend, par
Cerizay (Deux-Sèvres).
Chat, de Château roux, par
Sainte- Hermine (Vendée)
A Landonnière, par Gencay.
Château de Pindray, par
Montmorillon (Vienne).
&
3o
3o
3o
35
25
27
3o
3o
3o
3o
3o
ao A 40 CHIENS
377
40
25
OBSERVATIONS.
Equipage renommé par la
qualité de ses chiens bâ-
tards.
3o chiens beagles.
Equipage renommé par la
qualité de ses chiens.
Beaucoup de sang du Poi-
tou.
BOUTONS ET DEVISES
Bouton argent : têtes de cerf
et de loup accolées.
Je tiens ferme.
Tête de chien tenant en sa
gueule un pied de che-
vreuil.
Toujours prêt.
Rallye vieil Anjou.
Bouton : tête de brocard.
Rallye va de Vavant.
Bouton : tête de sanglier.
Rallye Ramodens.
Tête de chevreuil argentée
avec la devise.
Rallye-Beaumont.
Bouton d'or.
Rallye-Vendée.
Bouton : tête de cerf dans
une trompe de chasse.
Honneur aux dames et gloire
à Saint-Hubert.
Un loup en marche.
Taïaut Rallye-Pindray.
Bouton : Rallye-Molière.
LIVREES.
Vert, revers et parements
bleus.
Bleu hussard.
Bleu de roi, parements
amarante.
Bleu foncé, collet et pare-
ments amarante.
Bleu, parements rouges.
Livrée verte, parements et
poches noir galonné de
vénerie, culotte verte, gi-
let amarante.
Bleu.
Habit rouge.
Bleu, parements noirs.
Vert.
378
NOMS.
V u de la Besge.
Joseph de Beynac.
Victor Blanchet.
V w du Boberil.
M"deBO!SFLEURY.
F. de Boissiei.
Bordier Georges.
ÉQUIPAGES DE
Bordier René.
C" de Bourbon Ligniè-
res.
C u A. de la Bourdon-
NAYE.
M u du Bourg de Rozas.
ADRESSES.
Château de Persac, par
Mont morillon (Vienne).
Château de Beynac , par
Saint-Saud (Dordogne). .
A Rives (Isère)
Château de Beauchène, par
Renazé (Mayenne) . . .
Chat de Boisfleury.parGué-
méné Penfao (Loire- Inf.)
Château de la Forêt, par
Moulins (Allier)
AValette^par Saint-Maixent
(Deux-Sèvres)
Chat, de Fougeré,r>ar Saint-
Maixent (Deux-Sèvres). .
Chat, de Lignières (Cher). .
Chat, de la Bourdonnave,
parCarentan (Morbihan).
Château de Prye,parSaint-
Benin d'Azy (Nièvre). . .
a:
e
fi
90 20
35
35
M
25
25
35
35
25
35
35
24 24
20 A 40 CHIENS (Suite)
379
OBSERVATIONS.
BOUTONS ET DEVISES,
LIVREES.
Le maître, un des plus célè-
bres veneurs de France, a
possédé les meilleurs
chiens connus de la race
de Poitou.
Taïaut Rallye.
Rallye la bête.
Bouton : tête de loup enca-
drée dans une trompe ; au-
dessus Limousin.
Un renard, et au-dessous
Breiz.
Bouton bronzé avec hure de
sanglier.
Rallye-Forward.
Bouton : tête de renard de
profil en haut; en bas :
Always sir ai gh t.
Patience, persévérance.
Bouton : tête de loup.
De meute à mort, patience,
persévérance.
Tête de loup en relief.
Rallye V ajonc breton.
Bouton : têtes de renard et
de lièvre accolées avec la
devise.
Vert, gilet velours grenat.
Habit rouge, gilet vert.
Bleu et rouge.
Habit rouge.
Bleu, parements velours
noir.
Habit rouge.
Vert foncé, parements ve-
lours noir.
Gros vert, parements et
pattes velours noir, gilet
rouge, culotte velours
gris.
Bleu à revers blancs, cu-
lotte ventre de biche.
Vert, col, poches et pare-
ments velours noir.
Berry Nivernais.
Bouton : lièvre courant sous
la devise.
Vert, parements écarlate.
38o
EQUIPAGES DE
NOMS.
M 1 * de Certaines.
O de Chabot.
B- de Champchevrier.
Eraest de Champigny.
Maxime Champigny.
Gustave Chevalle-
keal.
René Clayeux.
M" de Compiègne.
De CONDAMY.
Couet (Frères).
ADRESSES.
Château de Villemolin, par
Corbifrny (Nièvre) . . ,
Au parc Soubise, par Mon-
champs (Vendée). . . .
Château de Marcilly, par
Château-la-Vallière (In-
dre-et-Loire)
Château de Poussignol,par
Montreullon (Nièvre). ,
Château de Chambiers, par
Durtal (Maine-et-Loire). .
Châeaut de Boissorin. par
Saint-Hermine (Vendée) .
Château des Gouttes, par
Jaligny (Allier). ....
Château de La Chaise, par
Soulaines (Aube). ....
Château de Bois-1'Abbé,
par Boisgnillaume (Seine-
Inférieure)
A Château-Gontier (Mayen-
ne)
3o
3o
3o 3o
3o
5 3o
B
3o
35
25
3o
3o
35
3o
25
3o
ao A 40 CHIENS {Suite)
38i
OBSERVATIONS.
BOUTONS ET DEVISES
LIVREES.
25
Équipage renommé pour la
qualité de ses chiens.
Où tu voudras mort certaine,
Bouton : tête de sanglier.
Vendée.
Bouton argent avec tête de
cerf encadrée dans une
trompe, avec devise dans
les bois.
Bleu de roi, parements jgre-
nat, galons de vénerie.
Habit rouge, gilet et culotte
ventre de biche.
3o chiens griffons. — Équi-
page qui a eu une race
de griffons remarquables
pour le loup.
Renommé pour la beauté
des chiens.
3o chiens race de Cossé.
Bouton : tête de sanglier.
Rallye-Chambiers.
Bouton : bronze avec tête
de loup argent vue de
face, entourée d'une jarre-
tière portant la devise.
Toujours gaiement.
Bouton : chevreuil sautant
Les Gouttes.
Bouton : tête de chien or
surmontée de deux traces
de sanglier croisées avec
la devise.
Rallye- Champagne.
Bouton or, avec lièvre
gent et devise.
Rallye-Picardie.
Bouton : tête de sanglier
entourée d'une jarretière
portant la devise.
Habit rouge.
Feuille morte, toque bleue
avec cor de chasse.
Vert foncé, parements ve-
lours vert clair.
Habit rouge, parements
verts.
Bleu, retroussls rouges,
gilet rouge,culolte bleue.
Rouge vif, collet, pare-
ments et poches rouge
vif, gilet blanc, culotte
blanche, bottes à revers.
Bleu clair, col et parements
velours noir, retroussis
rouges.
Rouge, collet et parements
bleu foncé.
1
382
ÉQUIPAGES DE
!
NOMS.
ADRESSES.
V Albert de Cirel.
Château de Verpillières, par
Essoyes (Aube) ....
Daguilhon-Pujol.
Albert Firmin Didot.
C" Du Bourg.
E. Du Temps.
Toulouse (Haute-Garonne).
Chat, de Chandai (Orne).
Chat, de la Motte-Serent,
par Andouillé (Mayenne).
Chat, de Griffier, par Beau-
voir-sur-Niort (Deux-Se
vres)
C" Christian d'ELVA.
Château du Ricoudet, par
Laval (Mayenne). . .
De Falguerolle6.
De Fontenay.
B- Maurice Gérard.
Alexandre Gibaud.
Château de Ladevèze, par
Puy-Laurens (Tarn) . .
Château de Fourdevaux,
par Nevers (Nièvre).. . .
Château de Maisons, par
Baveux (Calvados). . .
Le Bois-Tinrais. par Pou-
zauges (Vendée) ....
35
35
20 • 30
30
35
35
35
3o
3o
35
3o
Bo A 40 CHIENS (Suite)
383
i
3o
3o
3o
OBSERVATIONS.
20 chiens Gascogne.
35 chiens normands et Sain-
tonge.
20 chiens barrière.
3o chiens griffons.
i5 chiens Saintonge et
Ariège.
20 chiens beagles.
20 chiens griffons.
BOUTONS ET DEVISES.
Bouton : couronne de vi-
comte.
Bouton : tête de loup.
Saint-Hubert aidant.
Bouton : fond d'or avec cou-
teau de chasse et oliphant
f>lacés en croix en argent,
e tout entouré de la jar-
retière avec la devise.
Rallye-Mayenne.
Bouton or avec la devise.
Bouton : tête de chevreuil
avec devise, Père, Beau-
voir, Rallye-Chizé.
Courre a mort.
Têtes d'animaux entourées
de la devise.
Rallye-Ramoudens.
Bouton : tête de chevreuil
avec devise.
Patience et Persévérance.
Bouton : chevreuil bondis-
sant par-dessus la devise.
A Gascon Normand.
Bouton or.
LIVREES.
Livrée bleue.
Livrée verte.
Bleu avec parements et gi-
lets velours bleu plus
foncé, culotte gris perle.
Les hommes gilet ga-
lonné et gilet garance.
Bleu de roi, parements vieil
or.
Tenue rouge, parements
velours vert.
Bleu, collet et revers ama-
rante.
Habit rouge, gilet bleu, cu-
lotte noisette.
Bleu et rouge.
Livrée bleue.
384
ÉQUIPAGES DE
NOMS.
M' Gosse de Gorre.
M to de Goulaine.
MM. le C- et V- de
Grailly.
Alfred Hache.
B~ Hainguerlot.
M'* de Harem bure.
MM. Hennessy.
A. Hersart du Blron.
Alexandre Jabet.
ADRESSES.
Château de Gorre, près
Béthune (Pas-de-Calais)
Chat, de La Grange, par La
Rocheservière (Vendée) .
Chat, de Panloy, parle Port
d'Envaux (Charente- Inf.).
A Vienon (Cher) i
A Villandry (Indre-et-Loire).
Château deHarembure, par
Preuilly-Yzeures (Indre-
et-Loire) ,
A Cognac (Charente).
Château de Bois-au-Voyer,
par Maure-de-Bretagne
(Ille-et-Vilaine)
Château de Chamberet, par
Limoges (Haute-Vienne).
Nathaniel Johnston. Chat, de Beau caillou, par
Saint-Julien (Gironde) .
3o
35
3o
35
35
35
3o
3o
25
36
25
3o
3o
20 A 40 CHIENS (Suite)
385
OBSERVATIONS.
BOUTONS ET DEVISES.
LIVREES.
20 chiens Saintonge pure. —
Annoncés comme presque
purs de Saintonge.
40
3o
i5
3o chiens barrière.
25
20 chiens Ariège.
I • 1 ' I ! !
La Grange.
Bouton avec la devise.
Rallye Saint-Hilaire.
Boulon : tôle de chevreuil
avec la devise.
Mieux vaut hache qu'épieux
et dagues.
Bouton : un sanglier sur-
monté de deux haches en
croix avec la devise.
Vilandry.
Bouton : portant Vilandry,
Saint-Hubert et les dames.
Bouton : avec la légende et
un cerf argent sur fond or
la traversant.
A -mot Saint-Hubert.
Bouton : fond or, tête de re-
nard argent avec la devise
au-dessus, et au-dessous :
Bois-au-voyer.
Bouton : un loup.
I Hallali Médoc.
Bouton : masque de renard
{lu centre flanqué de deux
ièvres avec la devise.
Vert,
Livrée verte.
Vert, gilet et parements
orange.
Bleu.
Habit rouge, culotte blan-
che.
Vert, parements amarante.
Livrée rouge galonnée de
vénerie au col et au re-
vers pour les nommes.
Habit rouge pour les maî-
tres avec le bouton.
Bleu foncé,doublure rouge.
Vert, collet et parements
rouges.
25
386
ÉQUIPAGES DI
NOMS.
O de Jocsselin.
Adolphe Labadie.
De la Borde.
Leopold Lalanne.
Henry de Lamandè.
Henri Laniel.
Edgar de Lassée.
J. de Lauzon.
A. E. de Lècluse-Tré
VOEDAL.
Paul Lecointre.
C* Le Couteulx de
Canteleoj
ADRESSES.
Château de la Beaupisière,
près Fontenay-le-Comte
(Vendée)
A la Chaumière, par Mios
(Gironde) ,
A Segré (Maine-et-Loire).
A Préchac (Gironde) . . .
Château du Doussay, par
La Flèche (Sarthe).. .
A Vimoutiers (Orne) . . .
Château de Saint-Martin-
Lars, par Usson -du -Poi-
tou (Vienne)
Château de Péré-en-Forêt,
par Beauvoir (Deux-Sè-
Tres)
Château de Kéristum, par
Audierne (Finistère) . . .
Château duChâteignier,par
Jiellac (Haute-Vienne)..
Château de Saint-Martin,
par Etrépagny (Eure).. .
hommes
3o
25
25
25
3o
20 A 40 CHIENS (Suite)
38 7
OBSERVATIONS.
Cet équipage est renommé
pour la qualité de ses
bâtards.
20 chiens beagles. — Equi-
page ravissant et excel-
ent.
20 chiens beagles.
20 chiens griffons fauves de
Bretagne. — Chiens fau-
ves de Bretagne recréés
avec un croisement de la
race de Cossé. — Sont
très réussis.
20 chiens vendéens.
BOUTONS ET DEVISES.
LIVRÉES.
Tunique rouge, collet, pa-
rements et culotte bleus.
Seur mes vistement.
Bouton : têtes de lièvre.
A tous coups Von gagne.
Rallye-Moulins.
Rallye-Charente.
Bouton or : tète de loup en
argent.
Rallye-Chizi.
Bouton or avec tête de bro-
card.
Bouton : tête de brocard
gravée.
Harlou, mes beaux Vexin.
Bouton : pied de loup enve-
loppé d un ceinturon avec
Vexin au-dessus.
Vert.
Livrée verte a filets blancs.
Bleu clair.
Bleu foncé, parements et
gilet velours bleu ciel,
culotte velours blanc.
Livrée rouge, parements
bleus.
Bleu de roi.
Bleu, collet, poches et pare-
ments velours amarante,
gilet bleu galonné,culotte
velours bleu.
388
EQUIPAGES DE
NOMS.
C-Léjeas.
Lemoinb.
M" de Lespinay.
B~ de Lestang de Fins.
C H de Léyis Mirepoix
Charles Martenot.
Martin du Puytison.
Henry de Mauduit.
C" René des Mous-
TIERS-MÊRINVILLE.
D' Léon Moynac.
Louis de Neuville.
Officiers de Lunêville.
ADRESSES.
Chat d'Aiserey (Cote-d'Or).
A Dienav, par ls-sur-Tillc
(Côte-d'Or)
Château de la Mouée, par
Chanlonnay (Vendée). . .
Château de Fins (Indre). .
Château de Chéreperrine.
par Mamers (Sartne) . . .
A Maulnes, par Cruzy-le-
Châtel (Yonne)
Château du Puytison, près
Limoges (Haute-Vienne)
Château de Kerbertrand,
par Quimperlé (Finistère).
Château de Saunât, par Bel-
lac (Haute-Vienne). . . ,
A Bayonne (Basses-Pyré
nées) ,
Chat, de Combas, par Ma-
gnac-Bourg (Hte-Vienne).
A Lunêville (Meurthe-et-Mo-
selle)
35
28
3o
3o
3o
25
3o
3ô
3o
35
25
28
25i«|
sa A 40 CHIENS (Suite)
389
40
OBSERVATIONS.
Cet équipage prend quel-
ques daims.
20 chiens beagles.
Equipage renommé pour la
qualité et la beauté de ses
bâtards.
24 chiens vendéens.
35 chiens Saint-Hubert et
Saintonge.
28 chiens harriers.
BOUTONS ET DEVISES
Bouton : brocard galopant.
Bouton or : tête de chevreuil
or et hommes bouton
blanc, tête de chevreuil or.
Bouton : tête de cerf dix-
cors.
Rallye-Maulnes et Paufol.
Bouton or : loup argent.
Rallye-Carnoit.
Bouton or.
Rallye-Brigueil.
Bouton : un lièvre, dessous
comme légende : Saunât.
Rallye-Fayat.
Bouton : loup passant.
Large bouton doré avec
un L.
LIVRÉES.
Bleu clair, parements jon-
quille.
Vert.
Tunique rouge, parements
verts.
Bleu, parements bleu de
ciel, gilet et culotte noi-
sette.
Habit bleu, parements et
gilet rouge.
Bleu clair, culotte havane.
Bleu de roi.
Gros bleu a la française,
revers et parements
orange.
Bleu.
Bleu de roi, retroussis
rouge.
Gros bleu, col et parements
amarante.
3go
ÉQUIPAGES m
NOMS.
ADRESSES.
V • Henri (TOnsembray. A Fleury-8ur-Andelle(Eure).
Hector Orvah.
MM" Patin de La«
farge.
Du Payrat.
Payraudeau.
C* Maurice de Pon
cins.
Camille de Pontparcy
Félix Potier.
Emile Proust.
B" du Puynode.
Henry Recules.
A la Brillière, par Verrières
(Vienne)
A Viviers (Ardèche) . . . .
Château de l'Isle-sur-Serein.
Château desBrouzils,l'Her-
bergement (Vendée). . .
Les Places, par Feurs
(Loire)
Château de Champfleury
par Melay - du - Maine
(Mayenne)
A Forét-Paré, par Moisdoh-
la-Rivière (Loire-Inf.) . .
Château Noir, par Mouli-
herne (Maine-et-Loire) . .
Chat, des Certaux, par An
gles-sur-l'Anglin (Vienne)
Château de Mas-Cerise
(Haute- Vienne)
28
35
25
26
25
25
25
35
26
25
25
20 A 40 CHIENS (Suite)
391
t~
OBSERVATIONS.
Connu ponr la bonté et la
beauté de ses bâtards.
28 chiens harriers.
20 chiens griffons nivernais.
BOUTONS ET DEVISES.
Harlou mes beaux Vexin,
Bouton : un pied de loup
enveloppé ae la devise,
Rallye- Verrière.
Bouton : tête de chevreuil,
Bouton pour les maîtres : or
portant les armes du Mar-
quis de Poncin. Pour les
hommes : bouton blanc,
tête de lièvre aux oreilles
couchées.
Bas-Maine.
Bouton argent et tête de
chevreuil avec la devise,
Bouton portant : Bretagne.
Rallye-Monnoie.
Bouton or avec tête de re-
nard..
Saint-Hubert et les dames.
Bouton or, avec un cerf en
argent et banderole avec
la devise.
Bouton : tête de loup de
face entourée d'une trom-
pe, avec Limousin au-
dessus.
LIVREES.
Bleu de roi, col et pare-
ments velours amarante,
gijet bleu galonné, cu-
lotte et velours bleu.
Vert.
Bleu marin , parements
jaunes.
Tenue des maîtres : vert,
parements velou rs noir et
gilet velours noir. Tenue
des hommes : bleu foncé,
parements rouges, cu-
lotte bleue.
Vert, parements et col
rante.
Habit rouge, parements
verts.
Habit rouge, revers. noirs.
Drap vert, col et parements
velours amarante.
Rouge, revers grenat.
ÉQUIPAI S DE
Riocst de Largen-
TAYE.
DC ROBINEAU.
B- de Rochebouet.
Edgar de Rochefort
V de Rodays.
Château de Largrentaye, par|
Plancoet (Cotes-du-Nord).
Château de la Burtière, par
Candé (Maine-et-Loire). .
Château de Rouvoltz, par
Seiches (Maine-et-Loire)
Château du Bot, par Langon
(IUe-et- Vilaine). . . .
P. du Rozier.
Château d'Orties, par Sal-
bris Loir-et-Cher) . .
Château du Petit-Jars, par
la Ferté (Orne) i
B- de Ruble.
A Blanquefort, par Aubiet
(Gers)
■ 3o 3o
B- Saladin.
Edmond de Saint-Sau-
veur.
Ernest Simons.
Château de Bossancourt,
parjessains (Aube) . . .
A Darbois, près Châtillon-
sur-Seine (Côte-d'Or). .
Château du Magnet, par
Mers (Indre)
35
3o
35
3o
35
35 35
3o
30»0
2 2 2
20 20
f
20 A 40 CHIENS (Suite)
393
i5
OBSERVATIONS.
équipage possédant d'ex-
cellents chiens de che-
vreuil.
Le seul équipage possédant
des chiens de sang nor-
mand avec un peu d'an-
glais, superbes et de
grande qualité.
20 chîens Gascogne. — Cet
équipage possédait autre-
fois les plus beaux chiens
de Gascogne de race pure.
3o chien s Artois croisés pays.
20 chiens croisés pays.
BOUTONS ET DEVISES.
Bouton : tête de chevreuil.
Rallye-Cornuaille.
Bouton : tôte de brocard
avec la devise.
Rouvoltz.
Bouton : tête de brocard
avec la devise.
Écoute, écoute à la tète.
Bouton : tête de renard avec
la devise.
Sudais.
Bouton or, pied de cerf avec
devise : Sudais. .
Huberto semper Fidelis.
Bouton : tête de cerf en-
tourée de la devise et dans
les bois la croix or pour
les maîtres, argent pour
les hommes.
LIVREES.
Bouton : tête de chevreuil
blanc sur or pour les maî-
tres et tout blanc pour les
hommes.
Bleu de roi et parements
jaunes.
Bleu chasseur à cheval, re-
vers et gilet rouge cerise,
culotte velours réséda.
Habit rouge, parements et
gilet bleu saphir, culotte
gros bleu.
Rouge, revers amarante.
Vert, parements, col et re-
vers velours amarante.
Bleu, parements rouges.
Livrée bleue
Bleu-gris, parements et
gilet amarante, culotte
leue.
394
ÉQUIPAGES DL
NOMS.
Georges de Ter<
rouenne.
V de Terto
Chat, de Villiers, par Ménes-
treau-en-Villetle (Loiret).
Château des Routies, par
Saint - Maurice - les - Cha-
rencey (Orne)
Henry Thonier
V de Tingcy.
V* de Tocqueville.
ADRESSES.
I
. 3o
3o
Evaux (Creuse)
Chat, de Fresne, par Nueil-
les-Aubiers(Deux-Sèvres).
Pavillon de la Garenne, par
Vendœuvre-en-Brenne
(Indre)
C" de Valanglart.
Louis Valpinçon.
Varin d'Espensival.
J. de Villemandt de la
Mesnière.
Chat, de Sainte-Foy, par
Longueville (Seme-Inf.)
Château des Bois-Francs,
par Verneuil (Eure). .
A Épensival. par Givr>-en-
Argonne (Marne)
L_
Chat, du Gazon (Charente).
I
2 4
25 25
3o
25
25
3o
3o
2 6
i 8
3o
3o
28
3o
ao A 40 CHIENS (Suite)
3g5
3o
35
OBSERVATIONS.
25 chiens normands.
20 chiens otter-hounds.
Le seul équipage chassant
la loutre.
25 chiens griffons fauves de
Bretagne. — Ces chiens
sont de la môme origine
2ue ceux de M. de
amande, sauf la cou
leur moins uniformément
fauve.
3o chiens petits croisés, bar-
rière et Gascogne.— Equi-
page remarquable pour la
chasse du lièvre et possé-
dant des chiens char-
mants.
08 chiens griffons nivernais
croisés. — Excellents grif-
fons d'une ancienne race
maintenant perdue.
BOUTONS ET DEVISES.
Bouton : sanglier vieil ar-
gent.
Bouton : tète de sanglier.
Bouton : tète de loup.
Forez Normandie.
Bouton : lièvre courant en
argent avec banderole
portant la devise sur fond
or.
Argonnc, Argonne.
Bouton : tête de sanglier.
Hallali Charente.
Bouton : tête de sanglier
avec la devise.
LIVRÉES.
Rouge, parements bleus.
Bleu.
Bleu, parements rouges,
gilet groseille.
Livrée vert et rouge.
Livrée bleue, parements
bleus.
Vert, col, parements et gi-
let velours oreille d'ours,
culotte chamois.
Livrée feuille morte.
Rouge, parements grenat.
30
EQUIPAGES DE
NOMS.
B"* Andras de Marct.
V* d'ANTHBNAlSE.
B - * d'ARIPE de Lanne
CAUBE.
P. AUDRBN DE KERDREL
BARRAU DE MU RAT EL
L. Barre.
B- de Bastard.
Antonin Batle.
}. de Be LABRE.
Jean -Basile Bouger
cot.
De la Brunie re.
Gustave Chanier.
Albert Clayeux.
ADRESSES.
Château de la Belouze, près
Poiseux (Nièvre)
Château de la Taulière, par
Varades (Lofre-Inf.
Château d'Osserain (Basses-
Pyrénées)
Château de Rouai, près
Lannilis (Finistère). . .
Château de Montagnet, par
Sorèze(Tarn)
Issoudun (Indre).
Château de Grossouvre, par
Sancoins (Cher) ....
Bugeat(Corrèze).
Château du Puy-Jobert,par
St-Léonard (Hte-Vienne)
Chat, de Missery, par Mont-
Saint-Jean (Gôte-d'Or).
A Beaulieu, par Mothe-
Achard (Vendée).
Au Plaix, près Moussac, par
Chantelfe (Allier). . . .
Château de Coulon, par
Jaliçny (Allier). ...
HOMMES
16
i5
18
18
f io A 20 CHIENS
397
25
3o
25
5o
OBSERVATIONS.
16 chiens griffons vendéens-
nivernais.
BOUTONS ET DEVISES.
Un sanglier courant.
Tète de lièvre.
18 chiens vendéens croisés
Artois.
12 chiens gascons-sainton-
geois.
3o
14 chiens saintongeois-gas-
cons.
14 chiens griffons vendéens-
nivernais.
LIVRÉES.
Habit et retroussis rouges,
gilet rouge, culotte verte
ou jaune.
Habit vert uni, gilet rouge.
Fond or, loup en relief en
argent.
Marron.
Bleu de roi.
i5 chiens griffons.
12 chiens griffons.
Rallye-Misère.
Livrée bleue.
3g8
NOMS.
Chartes Clctelle.
Condamne (Frères).
P. CORNARD.
Georges Corne au.
De Coulonges.
Amédée Dassy.
ÉQUIPAGES DE
ADRESSES.
La Chaboissière, près Poi-
tiers (Vienne)
HOMMES
•a
Daubertau - Desmou-
lins.
Delorme.
Alcide Dorvan.
Charles Dottin.
Ferdinand Druon.
A Amon (Landes)
La Prévière, près Pouancé
(Maine-et-Loire). . .
Château de Sautou, par
Donchery (Ardennes) .
Chat, de Bois-Grollier, par
Suettes (Maine-et-Loire).
A Meaux (Seine-et-Marne).
A Montmarault (Allier). . .
A Sainte-Croix (Ain) ....
Château de la Planchette,
près le Blanc (Indre) . . .
A Oissy, par Molliens (Som-
me)
Château de Meyrac, canton
d'Arudy (Bses-Pyrébées).
16
16
io A 20 CHIENS {Suite)
399
35
25
18
i5
OBSERVATIONS.
12 chiens mâtins.
i5 cfeiens race de Cossé. —
Les chiens griffons de
Cossé proviennent dun
croisement fait au com-
mencement de ce siècle
entre des griffons de Ven-
dée et une chienne de ber-
ger. — Ces chiens ont eu
une grande réputation. —
Ils sont vifs, perçants,
et ont beaucoup de dis-
positions au change.
Anjou.
Tête de lièvre avec la devise.
i 1
13 «biens landais croises
Saintonge.
BOUTONS ET DEVISES
Taïaut- Rallye.
La devise sur le bouton.
Bouton blanc.
Rallye-Verrière.
Tète de chevreuil.
LIVREES.
Vert.
Habit rouge.
Velours brun.
Livrée bleue.
Livrée verte.
Vert sur vert.
400
ÉQUIPAGES DE
NOMS.
Maxime Dubray (fils).
Justin Dupata.
V** Christian de Faillt.
J. de Felcourt.
Albert de Foucault.
Joseph Fourcade-Ma
rés.
Fressinaud.
Germeuil-Mazeacd.
Paul Gervais.
Léon GlLLAIZEAU.
G. Gourdan de Fro-
JIENTEL.
ADRESSES.
A Saint-Gautier (Indre) . .
A Montfort-en-Chalossc
(Landes)
Château de Bourberouge,
parMortain (Manche) . .
Château de Maisons, par
Loisy-sur-Marae (Marne)
Au Béquet, à Tournebu
(Calvados)
Château d'Albarède, par
Guitalens (Tarn) . . . .
Nouhand, par Bourganeuf
(Creuse)
A St-Yrieix (Haute-Vienne).
Château du Rosoy, par Acy-
en-Multien (Oise). . . . v
A Avrillé, par Talmont (Ven-
dée)
Château de Bouhans, par
Autrey (Haute- Saône)..
s.
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io A 20 CHIENS (Suite)
401
3o
3o
OBSERVATIONS.
12 chiens briquets landais.
14 chiens roquets.
12 chiens Ariège.
14 chiens race Beaune limou-
sin. — La race limousine
de Beaune est la race des
chiens de M. de l'Hermi-
tre, c'est-à-dire de l'an-
cienne race de Cérès.
i5 chiens harriers.
i5 chiens griffons.
i5 chiens porcelaine. — Ces
chiens sont annoncés de
la race de porcelaine 0a
race du docteur Coillot).
BOUTONS ET DEVISES.
Pro Patria et non Refublica.
Argent avec têtes de lièvre
et sanglier.
Limousin.
Tête de loup encadrée dans
une trompe avec la devise.
Rallye-Lepus.
Tête de lièvre avec la devise
passant à travers les
oreilles.
Toujours droit.
LIVREES.
Bleu.
Habit rouge.
Livrée puce, parements
orange.
36
402
ÉQUIPAGES DE
NOMS.
ADRESSES.
Sylvain Grégoire.
Y 1 " de Gremte.
Emile Gridel.
A Landes, par Saint-Gautier
(Indre)
Château de Glos-sur-Risle,
par Montfort (Eure) . . ,
A Baccarat (Meurthe-et-
Moselle)
V**de laGubronnière.
Edmond Guichard.
Désiré Hauchard.
Léon Hiard.
Gabriel Hopsore.
René Jacob.
Les Granges, près Confo-
lens (Charente)
Emile Jacquault.
Julien Jordanbt.
Aux Ages, par Availles-
Limousin (Vienne). . .
A Appeville-Annebault, par
Montfort (Eure) . . .
A Mugron (Landes) .
A Tricqueville (Eure). .
A Epoisses (Côte-d'Or) . .
Château de Landonniére,
par Gençais (Vienne)..
A Lafrançaise (Tarn -et -
Garonne)
A. de La Cour.
Château de Montheron
(Meuse)
14
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16
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»9
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18
io A 20 CHIENS (Suite)
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3o
i5
OBSERVATIONS.
i5 chiens matins bâtards. —
Mâtins croisés courants.
— Équipage très connu
pour le sanglier.
io chiens griffons.
Le loup exclusivement (un
des seuls équipages an-
noncés ne chassant guère
que le loup).
Normands croisés poitevins
tout à fait français.
12 chiens griffons.
16 chiens artésiens. — Très
beaux chiens d'Artois de
l'ancienne race.
BOUTONS ET DEVISES
LIVRÉES.
Un lièvre sur le bouton.
Livrée noire et jaune.
404
ÉQUIPAGES DE
NOMS.
De Lamartraye.
Landard.
V* de Langle.
Laporte.
Albert Larcher.
Alfred Larêe.
C" de la Roche-
Aymon.
C u de la Roque-
Ordan.
Fernand Laval.
Le Chevalier de La-
VENNE DE SlCHAMPS.
matmm
ADRESSES.
A!Fontenay-sur-Eure (Eure-
et-Loir)
A Castfllon-sur-Dordogne
(Gironde)
Château de Pennelé, près
Morlaix (Finistère) . . . .
A Beaume, par Montmarault
(Allier)
Villa du Puison, par Nou-
vion (Somme)
Château de Saint-Guiraud,
par Saramon (Gers) . . .
Chat, de Mainsat (Creuse) .
A Laroque-Ordan, par Auch
(Gers)
Château de Miraval, par
Castres (Tarn)
A la Motte, par Billy-sur-
Oisy (Nièvre)
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HOMMES
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18
M
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io A 20 CHIENS (Suite)
405
OBSERVATIONS.
BOUTONS ET DEVISES.
LIVREES.
10 chiens Artois. — Ces
chiens sont déclarés d'Ar-
tois à poil dur. — Race
inconnue.
80
i5
25
12 chiens Sain ton ge et Gas-
cogne. — Chiens de petite
taule croisés Saintonge et
Gascogne.
Bouton jaune.
// faut hurler avec les loups.
Tête de loup avec la devise.
Livrée bleue.
Livrée vert émeraude, ga-
lons de vénerie.
i5 chiens griffons.
10 chiens griffons.
12 chiens Gascogne. —
Chiens blancs de Gasco-
gne.
18 chiens gascons et Ariège.
14 chiens gascons-sainton
geois. — Ces chiens sont
issus de Gascons et de
Saintongeois des meil-
leures origines. — Quel-
ques Ariégeois dans le
nombre.
Bronzé avec tête de lièvre.
Rallye-Gascogne.
Tête de lièvre avec deux
pattes croisées.
Livrée verte.
Livrée bleue, parements
velours bleu, culotte
bleue, gilet chamois.
L.S.
Bleu de roi.
4o6
. ÉQUIPAGES DE
NOMS.
Emile Leblanc-La-
BORDE.
S. Levassecr.
LV Levrot.
G. LlCERET.
Albert Lckg.
Raoul de Maicuin.
L. Martin.
Etienne de la Mau-
FREYIÈRE.
Ménager (Notaire).
Constant Meunier.
Ode Montperrê.
ADRESSES.
A Boisjardin, par Donzy
(NièTre)
A Sainte - Beuve - Epinay,
(Seine-Inférieure)
A Arpenans, par Lure (Hte-
Saône)
A Nuits (Cote-dOr) . . . .
Chat, de Moussey (Vosges).
Chat, de Vernon, La Ville-
Dieu-du-Clain (Vienne). .
A la Loupe (Eure-et-Loire).
Château de Tousnelaye, par
Neuil-les-Aubiers (Deux-
Sèvres) ,
A la Bouxière (Ille-et-Vi-
laine)
A la Combe, par Chàteau-
d'Olonne (Vendée) . . .
Chat, du Gué-des-Pierres,
par Evron (Mayenne). . .
18
io A 20 CHIENS (Suite)
407
40
5?
24
OBSERVATIONS.
12 chiens griffons nivernais.
i5 chiens vendéens.
12 chiens porcelaine. — Ces
chiens sont annoncés de
la jolie race du docteur
Coillot.
14 chiens mâtins bâtardes.
Bâtards tricolores de petite
taille, très connus des ve-
neurs pour leurs qualités.
— Doivent avoir encore
un peu de sang Cérès.
ir chiens griffons vendéens.
12 chiens saintongeois et
poitevins.
i3 chiens griffons vendéens.
BOUTONS ET DEVISES.
Rallye-Lepus.
Bouton doré, avec un lièvre
courant.
Pour tien faire par-ci, par-
la, par tout. \
Un lièvre passant.
LIVRÉES.
Habit bleu , parements
orange.
Livrée bleue.
Vert, parements amarante,
gilet amarante.
408
ÉQUIPAGES DE
NOMS.
Henri Morel.
ADRESSES.
Léon Morin.
B~ de Nkxon.
X. de la Perraudière.
Marc Picaut.
Cléophas Picon.
Ch. Poxcelet.
PORRJQUET.
A le Bo- (Calvados).
A Nexon (Haute- Vienne). .
Château de la Bréhon
nière, par Cossé-le- Vivier
(Mayenne)
Argenton-sur-Creuse (In-
dre)
HOMMES
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Louis du Portal.
De Poulpiquet.
LouiS POURTIER.
M to de Pracomtal.
A Mizérieux (Loire) . . . .
A Amont (Ardennes) . . . .
A Bar-le-Duc (Meuse) .
A Lafemade, par Montau-
ban (Tarn-et-Garonne). .
Château de Tréfry-Que-
ménéven (Finistère). . ,
A Miramont.
A Châtillon-en-Bazois (Nié
vre) ,
E. Querrière.
A Argences (Calvados) .
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OBSERVATIONS.
BOUTONS ET DEVISES.
LIVRÉES.
»
18 chiens mâtins.
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•
Bouton avec tête de loup.
Loup en argent hurlant.
Bouton : M. P.
Le Forez.
Blanc argent.
»
Habit gros bleu galonné
de vénerie.
Livrée bleue.
•
Livrée bleu de roi.
Livrée blanc et jaune.
18
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•
»
16 chiens griffons.
»
12 chiens griffons vendéens-
nivernais.
10
10 chiens griffons de Vendée.
•
•
•
•
17 chiens saintongeois.
»
»
14 chiens gascons Sainton-
•
5
•
•
10
10 chiens gascons.
»
•
»
Livrée rouge.
•
.
Livrée bleue.
4io
ÉQUIPAGES DE
NOMS.
Joseph Reigneaud.
Riant-Lamotte.
Paul Rives.
Germain Rots.
Camille Saillard.
Gabriel de Saint-Vul-
FRAN.
MM. Samuel, Garmer
et Goutte.
Emile Schwob.
Therouanne.
Valaï-Calleu.
Ch. dU VlGNACD.
ADRESSES.
Château des Guérauds, par
Dompierre (Allier)
Château de Coulombières v
Ear Bourbon - l'Arc ham-
ault (Allier)
A Château- Valet, par Saint
Aulare (Dordogne). . . .
Château de Flenayros, par
Saint -Antoine (Tarn-et
Garonne)
A Bar-sur-Seine (Aube) .
A Brestot, par Roulot
(Eure)..
A Chalon-sur-Saône (Saône-
et-Loire)
A Héricourt (Haute-Saône).
A Montplaisir- les -Outre-
bois, par Doullens (Som-
me)
A Préchac (Gironde) ....
Chat, de Monteil, par Saint-
Junien (Haute- Vienne). .
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io A 20 CHIENS (Suite)
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35
35
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OBSERVATIONS.
BOUTONS ET DEVISES.
12 chiens briquets griffons.
Bouton argent, lièvre en re-
lief.
Gaiement.
Bouton d'or.
Quand même.
Bouton : tête de sanglier.
Livrée bleu chasseur.
Livrée cul de bouteille.
Habit vert, parements 1
lets.
i5 chiens gascons-ariégeois.
14 chiens artois artésiens.
Très jolis artésiens.
12 chiens Saintonge.
Sans Souci.
Bouton cuivre.
LIVREES.
Livrée bleue.
Livrée bleu foncé.
2 12 chiens porcelaine.
10 chiens artois artésiens.
16 chiens briquets gascons.
Bouton avec tête de loup.
Livrée grise galonnée c
gent.
Livrée bleue.
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LA CHASSE A COURRE.
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TABLE
Préface i
Chapitre I. — Quelques réflexions sur la chasse à courre. ... 5
Chapitre II. — Considérations générales sur les chiens courants. 9
Chapitre III. — Des différentes races de chiens courants employés
à la chasse à courre i5
Chapitre IV. — Des chiens courants français 19
1. Le chien de Gascogne - . 19
II. Le chien de Saintonge 20
III. Le chien de Vendée 22
IV. Le griffon ou poil dur de Vendée 23
V. Le chien du Haut Poitou 26
VI. Le chien d'Artois 28
VII. Le chien fauve de Bretagne 29
VIII. Le chien Normand 29
IX. Le chien de Saint-Hubert 3i
X. Le chien gris de Saint-Louis 34
XI. Le chien de Bresse 35
XII. Le chien de porcelaine ou chien de Franche-Comté.. . 36
XIII. Le chien de PAriège 36
XIV. Le chien d'Auvergne 37
XV. Les Merlants 38
XVI. Les chiens de la Loue. 38
XVII. Les chiens bleus de Foudras 39
- XVIII. Les chiens Cérès 39
Des chiens courants anglais 41
I. Le Blood-Hound 41
II. Le Fox-Hound.. 41
414 TABLE DES MATIÈRE 8.
III. Les Harrier 46
IV. Le Beagle 47
V. Le chien du sud (Southern- Hound) 48
VI. Le chien de loutre (Otter-Hound) 48
VII. Le Kerry Beagle 49
VIII. Le Talbot, 49
Des bâtards.. 5i
I. Le bâtard de Saintonge 5i
H. Le bâtard du Haut Poitou 55
III. Le bâtard de Vendée 56
IV. Le bâtard de Gascogne. . . - 58
V. Le bâtard Normand 59
Des bassets 62
Chapitre V. — Du soin des chiens 65
Chapitre VI. — De rélevage des jeunes chiens 75
Chapitre VII. — Des croisements 81
Cuapitre VIII. — Du cheval de chasse 89
Chapitre IX. — Des devoirs du veneur 91
Chapitre X. — Du piqueur 99
Chapitre XL — De la formation d'un équipage io5
Chapitre XII. — Du limier et de son dressage m
Chapitre XIII. De lâchasse des animaux de Vénerie 117
I. Le cerf 117
II. De la manière de détourner le cerf et de le juger et des
manœuvres du valet de limier . i3i
III. De la chasse du cerf 141
IV. Des chiens propres â la chasse du cerf 154
Chapitre XIV. — Le chevreuil 157
I. Le chevreuil 157
II. De la manière de détourner le chevreuil 164
III. De la connaissance du chevreuil par le pied i65
IV. De la chasse du chevreuil • 167
V. Des chiens propres à la chasse du chevreuil 175
Chapitre XV. — Le sanglier 177
I. Le sanglier 177
II. De la connaissance du sanglier par le pied 186
III. De la manière de détourner le sanglier 189
TABLE DES MATIÈRES. 4l5
IV. De l'attaque du sanglier sans faire le bois 195
V. De la chasse du sanglier 197
VI. Des chiens propres à chasser le sanglier 202
Chapitre XVI. — Le loup 2o5
I. Le loup 2o5
II. De la connaissance du loup par le pied 219
III. De la manière de détourner le loup 221
IV. De la chasse du loup 228
V. Quelques conseils aux chasseurs de loups pour main-
tenir leurs chiens dans la voie 233
VI. Des chiens propres à la chasse du loup 236
Chapitre XVII. — Le lièvre 238
I. Le lièvre 239
IL Du lièvre et de sa nature 240
III. De la connaissance du lièvre par le pied 244
IV. De la chasse du lièvre 245
V. Des chiens propres à la chasse du lièvre 254
Chapitre XVIII. — Le renard 257
I. Le renard 257
IL Du renard et de sa nature 259
III. De la chasse du renard 261
Dictionnaire des termes de vénerie 263
Appendice. — Notions juridiques en matière de chasse à courre. 283
Principales sonneries de chasse 297
Statistique des meutes et équipages de France en mai 1889. . . 359
18 294 — Imprimerie A. Lahure, 9, rue de Fleuras, à Paris.
DEC 7- 1933