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Full text of "Memoires de la Société d'Agriculture, Sciences et Arts d'Angers"

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DAGRICULTURE, SUIBNCES & ARTS DANGERS oi 


(ANCIENNE ACADÉMIE DANGERS) 


Reconnue comme établissement d'utilité 
publique, le 5 mai 1833. 


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DE LA SOCIÉTÉ 


d'Agriculture : Sciences et Arts 


D'ANGERS: 


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SERGE DE 


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DE L'IMPRIMERIE DE L. PAVIE. 


4831. 


MÉMOIRES 


DE 


LA SOCHÉTÉ D’AGRICULTURE, 


SCIENCES ET ARTS D'ANGERS. 


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DE LA SOCIÉTÉ 


d'Agriculture, Sciences et Axts 


D'ANGERS. 


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DE L'IMPRIMERIE DE L. PAVIE. 


1831. [3 «| 


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INTRODUCTION HISTORIQUE 


Aux Mémoires de La Société D' Agriculture, Griences 
et Arts D Angers, 


PAR M. BLORDIER-LANGLOIS. 


> () 


Ox eut de très-bonne heure ; en Anjou; du 
goût pour les sciences et pour les beaux-arts. 
Si l'on en veut chercher la cause , on la trou- 
vera peut-être dans la fécondité’ du'sol, qui, 
procurant abondamment et sans béaucoup de 
peme, des moyens d'existence, laissait un 
loisir, qu'employait à des travaux intellectuels 
l'esprit, encore excité par un ciel doux et des 
campagnes agréables. Les habitans de l’Anjou 
aimaient le repos, quoiqu'une déplorable 
fatalité l'ait souvent éloigné d'eux. Ils se 
contentaient d'une médiocre fortune, ne 
portaient que le moins long-temps qu'ils pou- 
vaient le fardeau du commerce et des affaires, 
et, dans cette modeste aisance qu'un poète 
appelle médiocrité d'or, se faisaient un in- 


4 

térieur charmant, où presque toujours étaient 
admis quelques membres. du clergé nombreux 
de cette province, qui, sil y avait des sortes 
de connaissances auxquelles il ne füt pas fa- 
vorable, était d'ailleurs dépositaire d'un grand 
nombre de celles: qu'on possédät alors, ou 
qu'il füt d'usage de manifester. 


À ces causes physiques et morales se joi- 
snirent de bonne heure des causes d'un autre 
ordre, et qui pouvaient n'être pas moins 
puissantes. Nos comtes, dès le x.° siècle, 
temps. où/les, seigneurs. mettaient leur, bon- 
heur à..se! concentrer. dans leurs domaines ,, 
furent appelés à, la, cour du /suzerain, comme 
grands sénéehaux de la couronne ; Lothaire, 
en considération des. services de Geoffroy. 
Grise-Gonnelle, lui donna cette importante di- 
gnité, pour lui .et ses, descendans, ‘et l'An- 
jou dut nécessairement, se; ressentir, des, rap- 
ports du.comte, et de.sa cour avec celle du 
monarque: Quelque peu éclairée que fût 
alors la cour de nos rois, c'était encore R:que 
le génie répandait le plus de rayons; et les 
grands officiers, tel: qu'était : le, sénéchal, 
devaient en réfléter à leur retour quelques- 
uns dans leurs propres états. Le moindre 
véhicule, la moindre impulsion suffit au génie 


vi 
humain pour franchir des limites dont 1l est 
toujours impatient, et pour décéler sa puissance, 


Les communications devinrent beaucoup 
plus nombreuses avec la capitale, lorsque, 
après la confiscation des domaines dé Jean- 
sans- "Terre, l'Anjou se vit un apanage des 
princes ' de la famille royale. 


Les troubles qui suivirent cette confiscation , 
ceux, bien plus violens encore, qu'amenèrent 
les. prétentions, d'Edouard.JIT à la, succession 
de . Charles-le-Bel, empêchèrent que les An- 
gevins ne profitassent , aussi vite qu ls lau- 
raient pu, de leur nouvel état . politique, 
pour obtenir une Université formellement 
constituée ; mais enfin , le royaume étant pa- 
cifié par les soins de Charles-le- -Sage, Louis L.:', 
duc d'Anjou, son frère, obtint cette ae 
pour . Angers, l'an 1364. Il ne fut question 
alors que. du droit canonique; . une autre 
charte, octroyée l'an 1455, par Charles VIE 
à Louis IIE, duc d'Anjou , son beau-frère, 
y adjoignit à théologie, la médecine et les 
arts. 


A ceux qui ne verraient qu’une è hypothèses 
qu'une induction hasardée, dans ce que nous 
venons de dire du penchant qu'auraient eu, 
à des époques reculées, les peuples de lAn- 


vii} | 

jou pour les sciences el l'instruction, nous 
pourrions répondre par un état positif et in- 
contestable. Sur la fin du x siècle, les 
sciences et la littérature y brillaient de quelque 
éclat. Saint Fuibert, évêque de Chartres, 
envoya à Angers un nommé Bernard. pour 
professer les sciences divines et humames, . et 
ce Bernard porta le premier dans notre ville 
le titre de Mañtre-Ecole. En 1096, Marbœuf, 
Maëtre- Ecole, institua, dit Bourdigné , l'Uni- 
versité d'Angers. Bourdigné se trompe ici, 
comme il le fait souvent dans ses Ænnales ; 
mais son assertion prouve au moins que, du 
temps de Marbæuf, l'instruction florissait à An- 
gers, et que, sil n'y eut pas une Université 
avouée ‘par le monarque, il y en eut une de 
fait, par l’état prospère de la culture dé toutes 
les branches des connaissances humaines que 
comportassent ces siècles, état auquel contribua 
plus que personne Ulger, qui, avant d'être élu 
évêque d'Angers, exerça la dignité de Maître- 


Ecole, depuis 1113 jusqu'en 1124. 


Un évènement arrivé en 1229 contribua à 
rendre nos écoles plus florissantes encore. Sous 
la mivorité de Si Louis, des:actes rigoureux, 
exercés par dla régente contre les élèves::de 
l'Université de Paris, ayant occasionné: leur 


IX 
dispersion, la renommée des écoles d'Angers 
y attira un grand nombre de : professeurs 
habiles et de disciples. Elles avaient en effet 
tant de célébrité, que plusieurs villes et ab- 
bayes, à des distances assez considérables, pos- 
sédaient. à Angers des maisons, long-temps 
depuis appelées collèges, où elles entretenaient 
des élèves qui suivaient les cours de ces écoles. 


Cette disposition première, ensuite l'institu-- 
tion de l'Université, devaient porter les hommes 
à mettre en commun leurs lumières; c'en 
était une conséquence nécessaire : des réunions 
entretinrent donc à Angers cet amour du sa- 
voir, cet exercice de l'esprit, bonheur qu'il 
faut goûter pour y croire, vie morale dont 
les charmes se sentent mieux qu'ils ne se 
peignent. 


: A Paris, des littérateurs et des savans, en- 
traînés par les mêmes besoins, se rassem- 
blaient pour y ‘satisfaire. Le cardinal. de 
Richelieu, averti de ces réunions, n’y trouva 
rien qui alarmât sa puissance, et fut sensible 
à la gloire d'être le fondateur d’une société, 
nouvelle alors en France : telles furent Îles 
causes et l'origine de l’Académie française, 
dont les lettres patentes furent expédiées en 


x 
1636; telles devaient être par la suite celles 
de l'Académie d'Angers. 


Il fut déhbéré en conseil de ville, le der- 
nier jour de mai 1684, que l'on demanderait 
au Roi des lettres patentes, pour la création 
d'une Académie, et que l’on prierait l'abbé 
Ménage, l’un des hommes les plus spirituels 
et les plus instruits de son temps, d'appuyer 
cette entreprise de ses conseils et de son crédit. 


Nous ignorons quelle fut l'influence de Pabbé 
Ménage dans cette affaire, mais voici la marche 
que l’on suivit. M. Grandet (*) porta le placet 
à Versalles, au comte d’Armagnac, gouver- 
neur de lAnjou, pour quil le remit aux 
mains du Roi. Ces. lettres furent. accordées 
en juin 1685, et enregistrées au Parlement 
le 7 septembre suivant. M. de Châteauneuf, 
ministre et secrétaire-d'Etat, fit passer . à 
M. Grandet, à Angers, là copie d'un ‘ordre 
du Ror, adressé à M. Nointel, :intendant. de 
la généralité de Tours, pour effectuer l'éta= 
blissement de, PAcadémie. Ea.ville donna ;Îe 


(*) Conseiller au présidial et échevin perpétuel du 
corps. de ville. Il y avait encore à Angers un autre Gran- 
det , peut-être frère de celui-ci , curé de S.te-Croix , puis 
supérieur du Séminaire, et auteur de plusieurs Pere 
phies pieuses. 


x} 
pavillon du jardin de son hôtel (*), pour tenir, 
ses séances, pourvut à son ameublement , et 
vota un fonds de 40 livres par an, pour ses 
menues dépenses (**). 


Les lettres de l'Académie furent enregistrées 
au présidial d'Angers, le 15 juin 1686, et ce ne 
fut qu'après, que l'Académie fut installée. 


L'Académie se composa de trente, mem- 
bres (**), y compris un chancelier, un di- 
recteur et deux secrétaires perpétuels; elle 
eut le Roi pour protecteur ; et son titre fut : 
Académie royale d'Angers. 

En 1760, l'Académie d'Angers désira d'aug- 
menter le nombre de ses membres, et d’ob- 
tenir un vice-protecteur, qui, plus près d'elle, 
connût. plus aisément ses besoins, et fût son 


(*) C'est ce pavillon massif, d'un seul étage, qui 
fait, l'angle gauche de la rue nouvellement percée , 
pour aller de la place des Halles au-Jardin. des, Plantes. 

(*) L'argent. était alors à! 27 livres le mare ; il est! 
actuellement x 52; c’est. donc à peu-près. le double. ; 

(***) Peut-être les lecteurs-iangeVins me seront-ils 
pas-fâchés de voir ici les. premiers mémbres de cette 
Académie, ; c'étaient.: MM. Arnauld, évêque d'Angers ; 
Bechameil de Nointel, intendant) de: la Généralité de . 
Tours ; d'Autichamp, lieutenant de Roi de la ville et du 
château d'Angers ; le comte de!Sexrant, l'abbé Arnauld; 


xi] 

organe auprès du Roi; ce qui lui fut accordé. 
Elle se composa, comme celle de Paris, de- 
quarante membres, et changea son titre em 
celui d'Æcadémie des- Sciences, Beélles- 
Lettres. et Arts. Le Roi, pour cette fois 
seulement, nomma wzce-protecteur un Ange-. 
vin, M. le maréchal de Contades, et les dix 
nouveaux membres (*), laissant à l’Académie 
la faculté délire elle-même, par la suite, son 
vice-protecteur et les successeurs de ces dix 
membres. 


l'abbé Ménage ; Arthaud, archidiacre d'Angers ; l'abbé 
Pelletier ; Heard ; Gohin, premier président au présidiaf 
d'Angers ; Duplessis de Gesté ; Bernier, médecin ; Char- 
lot; Perchambault, conseiller ; Verdier , conseiller ; 
Gourreau, conseiller; Deroye, docteur en droit; la 
Sauvagère-Guinoiseau, conseiller ; Duplessis-Moreau , 
conseiller ; Grandet ; de Livonnière-Pocquet , conseiller ; 
Martineau , avocat du Roi; de Princé Martineau ; Pétri- 
neau , ex-président de la prévôté d'Angers ; du Trémblai- 
Frein, conseiller; Delaunay, avocat au parlement de 
Paris; Nivard , idem; de la Piquetière-Blouin ; sn © 
avocat à Angers; Brillet de Villate: : 


(”) Ce furent : MM. de Crochard , de Quenneville, du 
Fron, père de l'Orâtoire ; de la Jaillère ; Mélier du Vau;° 
président au présidial ; Gueniveau, ingénieur en chef au 
château de Saumur; Gode, marquis de Varennes ; Bo- 
dard de Vaudesir, Walsh de Serrant ; Marcombe , lieu- 
tenant-général du présidial. 


xh] 
Peu de temps après, le 24 février 1761, 
sous le ministre Bertin, une Société royale 
d'Agriculture fut établie dans la généralité 
de Tours, par arrêté du conseil-d'état. Elle 
fut composée de trois bureaux, à Tours, à 
Angers et au Mans, qui correspondaient en- 
tr'eux. Ainsi commença une S'oczété d'A gri- 
culture, qui compta à Angers des membres 
recommandables, et qui, par la combmaï- 
on de ses travaux avec ceux des deux autres 
bureaux, pouvait rendre à l’Anjou d'éminens 
services, et être une très-intéressante annexe 
de la première Académie. Mais, tout utile 
qu’elle était, elle n’en subit pas moins le sort 
de toutes les assemblées de ce ‘genre, dans 
nos orages politiques. L'Académie et la Société 
d'Agriculture n'’existaient plus en ‘1795. 


Une loi du 18 août 1792 avait supprimé 
toutes les congrégations séculières, chargées 
de l’enseisnement public; le collège d'Angers 
avait alors été fermé : notre ville manquait 
de tout moyen d'instruction. 


Nous voyons, il est vrai, en 1793, une 
organisation provisoire d'écoles publiques, dé- 
crétée par la convention pour le droit, la 
médecine, les arts; un collège y .figure, où 
M. Benaben, ci-devant professeur de mathé- 


x1v 

matiques au collège d'Angers, à le titre de 
principal; mais il n'eut pas de collaborateurs, 
et cet établissement mourut dès sa naissance. 


Cependant les lumières acquises et le goût 
inné qui porte à l'étude, ne s'éteignent pas 
au gré de la politique des circonstances. A 
Angers, où la révolution se fit sentir avec 
une violence particulière, les sciences et les 
‘beaux-arts s’imposèrent un silence nécessaire, 
mais qu'ils rompirent aussitôt qu'ils le purent. 
Les occasions ne tardèrent pas à se présenter. 
Une institution large et éminemment philoso- 
-phique (les écoles centrales) vint réjouir. la 
France et surtout Angers. Plusieurs de: nos 
concitoyens y occupèrent des chaires, et. .se 
montrèrent tout-à-fait dignes de leurs fonctions. 
L'on put voir alors une preuve frappante de 
l'amour de nos concitoyens pour les sciences 
et les beaux-arts, dans le zèle que déployèrent 
à l’envi les maîtres et les élèves. Le v. com- 
plémentaire an VI (21 septembre 1798), 
jour de la première distribution des prix de 
cette. école, fut pour Anpers un jour de ra- 
vissement. Après les désolantes scènes dés an- 
nées précédentes, c'était ane bien douce céré- 
iñonie que celle où s'échappait enfin de tous 
les cœurs, de tous les esprits, léxpression de 


xv 
cet amour, qu'un régune funeste y avait. com- 
primé cinq années. 


Les autorités constituées d'Angers firent, 
le 10 germinal an vi (50 mars 1798), l'ouver- 
ture de la bibliothèque publique, placée alors 
dans la grande salle de l'évêché, bibliothèque 
en partie formée des livres qu'avaient osé 
dérober aux flammes du vandalisme des hom- 
mes amis de l'étude. 


. Un mois après, autre bienfait de cette heu- 
reuse année : le Jardin des Plantes fut égale- 
ment: ouvert au public. Qu'il nous soit per- 
mis de reprendre d'un peu plus haut lhis- 
toire de ce Jardin, Le 17 mars 1777, une 
société de botanophiles créa et entretint à 
ses frais un jardin, près du faubourg Bressi- 
gny. Long-temps trop incomplet, et seulement 
à l'usage de l'école de médecine, il acquit, en 
lan vi, une bien plus grande importance, 
par sa translation dans un lieu plus conve- 
nable et plus étendu, par les secours quil 
reçut du gouvernement , et par l'intérêt qu'y 
portèrent des botanistes très-éclairés: Larevel- 
lière-Lépeaux, qui y avait donné des leçons de 
botanique, devenu membre du directoire, 
contribua puissamment à sa prospérité. Ge 
Jardin fut l'occasion d'une société, dont. 11 


XY] ÿ 

resta membre, et où l’on remarquait encore 
Pilastre, savant agronome, et qui avait fait 
en son nom J’acquisition , pour la société, de 
l'emplacement nouveau; Leclerc, de Chalon- 
nes, qui Joignait au goût de l’agriculture et 
de la botanique, une sorte de passion pour la 
littérature et les beaux-arts; Braux, biblio- 
graphe et conservateur de la bibliothèque pu- 
blique ; Merlet de la Boulaie, homme de 
connaissances variées, instruit en histoire na- 
turelle, et surtout dans la botanique, dont 
il fut le premier professeur au Jardim des 
Plantes. Ses élèves recueillirent en 1809, ses 
herborisations ; et peut-être serait-ce une rai- 
son pour le considérer comme le premier qui 
ait traité de la Flore de notre département. 


Enfin, et toujours dans l’an vi, une Wociété 
libre d'Agriculture se forma à Angers, réveil 
de celle que nous avons vue endormie depuis 
1793; elle réunit dans ses attributions toutes 
les branches de l'agriculture, l'imdustrie, les 
routes, les canaux de navigation, la topo- 
graphie du département de Maine et Loire ; 
elle se composa de 40 membres. 


Un musée de: tableaux, un cabinet d’his- 
toire naturelle, le premier principalement créé 


XVI} 
par le directeur Larevellière-Lépeaux (*), et le 
second , parles soins de M. Renou, professeur 
d'histoire naturelle à l'Ecole PAT d'Angers; 
un cabinet de physique, dont la conservation 
fut confiée au professeur de physique et de 
chimie à la même école, M. Héron, homme 
aussi distingué par son urbanité, par la dou- 
ceur de son caractère, que par son savoir, 
furent ouverts au public, le 1.fnivose an IX 
(22 décembre 1800) : Angers se voyait comblé 
des faveurs de la science et’ des beaux-arts ; 
rien n’y manquait plus à: l'homme: studieux. 
* Et l'Académie ne sortait pas du tombeau 
où elle était descendue en 1795, et la Société 


d Agriculture n'avait recouvré qu’ une exis- 
tence passagère. 


Mais les Angevins 1 n’en avaient, pas une moin- 
dre ardeur pour l'étude; nous en attestons les 
excellens sujets qui, sortis. de l'Ecole Centrale 
et du Lycée, brillèrent s1 nombreux dans les 
corps: du génie , dans. la. jurisprudence, dans 
la médecine, dans: la littérature, dans les arts. 


(°) Le buste de M. Larevellière.vient d'être placé dans 
FA musée d'Angers, et ce, buste ainsi qu’ unautre du célèbre 
chimiste Proust, notre concitoyen À sont de nouveaux 
bienfaits de notre ami le statuaire David, ?!! <° 


xviü} 

A défaut d'une académie dans leur ville natale; 
l'Institut de France et d'autres sociétés savantes 
de l'Europe shonorèrent de plusieurs de nos 
Angevins, élèves de ces écoles. Nons n'osons 
les citer, tout fiers que nous sommes de les 
compter parmi nos concitoyens, parce qu'ils 
font partie de notre Société. IL nous suffit 
qu'ils lisent ces réflexions, et qu'ils Y voient 
‘un témoignage de notre profonde estime. 


Depuis long-temps;à Angers ; des savans, des 
sens de letires, et des agronomes, aspiraient à 
renouer les fils rompus de l’4cadémre et de, la 
Société d'Agriculture. En 1827, plusieurs se 
réunirent dans ce dessein. Elles n'avaient point 
été légalement supprimées ; elles n'étaient que 
tombées en désuétude par l'effet des circons- 
tances. Des règlemens furent rédigés et soumis 
à l'autorité locale, qui permit à la société 
nouvelle de Sassembler provisoirement: C'est 
de cette époque que ‘dâte effectivement l’exis- 
tencs de la’ Société d'Agriculture ; Sciences. 
et Arts ‘d'Angers, comme confondant en elle 
les deux Sociétés de 1685 et de 1764: 

Le Ministre donna son consentement à cette 
société ; mais ce ‘corps né devait avoir d'exis- 
fence incontestable et tout-à fait légale, et ses 
membres ne pouvaient se réunir, que lorsqu'il 


- 


XIX 


aurait été autorisé, et que ses statuts seraient 
approuvés par le Roi. Une lettre du maire 
d'Angers, en date du 1. juillet 1829, pré- 
vient les membres de la Société que, pour 
répondre à la demande que lui en avait faite 
l'autorité supérieure, il avait confié la rédac- 
tion d'un nouveau. règlement à une commis- 
sion, dont les membres étaient choisis. parmi 
les sociétaires: 


Ce règlement fut envoyé au Ministre qui, 
par un arrêté du 25 juin 1831, confirma 
défimitivement la société. 


Elle existe donc, comme continuation des 
deux établissemens précédens, mais libre, sans 
autre condition (*) que d’être, autant qu'il lui 
sera possible, utile et agréable; sans autre 
protecteur que sa fidélité à observer des lois 
qu'elle s'est prescrites elle-même, et qu'elle a 
rédigées de manière à prévenir tout trouble, 
toute occasion de mésintelhgence , entre ses 
membres, toute tentation de simmiscer en des 


.(*) Allusion au protecteur qu'avait Kancienne Acadé- 
mie auprès du souverain , et. aux conditions qu elle avait 
acceptées de faire , à la première séance de chaque année, 
an discours à la louange du roi et à l'honneur de. la pro- 
xnce, FA J 


XX 


matières qui ne feraient que donner une diree- 
tion fausse à ses pensées. 


Son domaine est assez étendu pour qu’elle 
n'ait pas à resretter ces sages réserves. Elle sait 
les nombreux devoirs que lui impose le titre 
de son institution, et n’en est point inquiète , 
puisque ces devoirs se bornent à établir une 
louable émulation dans tout ce qui conduit à 
l'amélioration de l’état social, à donner d’utiles 
exemples, à mettre sur la voie de découvertes 
dont puissent profiter les hommes. Aucun des 
produits de l'intelligence , tendant à ajouter 
quelque chose à leur bonheur ou à leur plaisir 
n'est vu par elle. avec indifférence, L’agrono- 
mie, l'étude de la nature, la science des eal- 
culs, les créations des arts, les jeux de l'esprit 
sont l’objet de son attention et de son estime. 
Les fleurs d'agrément sont aussi un jeu de la 
végétation, qu’elle n’a pas dédaigné d'encourager 
par six prix, qu'elle à décernés dans sa séance 
publique du 44 juillet 1831, après une exposi- 
tion publique. Chaque année elle en décernera 
à quelqu'un des objets de ses travaux. 


Pour améliorer la culture de Farbre früitier , 
la Société ayant conçu l'idée d'en créer une 
école, l'administration municipale veut bien la 
EURE en lui accordant, pour Fly établir, Le 


xx] 
jardin du Musée et le terrain qui suit jusqu'au 
boulevard des Lices. Ce sera un second jardin 
public, que la solidité de ses résultats ne fera 
pas fréquenter avec moins d’empressement sans 
doute, que le Jardin botanique. 

Un autre objet l'occupe sérieusement; c’est 
une Statistique du département de Maine et 
Loire, dont le prospectus paraîtra bientôt, et 
à la confection de laquelle seront instamment 
invités de coopérer non seulement les membres 
titulaires et correspondans de la Société, mais 
toute personne instruite et expérimentée dans 
ces sortes de matières. 


RÈGLEMENT 


De la Société d'Agriculture, Sciences et 
Arts d'Angers, arrété en séance du 5 dé- 
cembre 1830. 


D D 
TITRE PREMIER. 
Du Mode de composition de La Société. 
ART. 1.°° 


La Société d'Agriculture, Sciences et Arts 
d'Angers, est formée par la réunion de mem- 


xxi] 
bres résidans, de membres honoraires, de. 
membres associés et de membres correspon- 
dans. 

ART. 2. 


Les membres résidans sont au nombre de 
quatre-vingt, dont quinze devront être choisis, 
autant que possible, dans les divers arrondis- 
semens du département de Maine et Loire. 


ART: D: er, £ 


Pour obtenir le rang de membre résidant, il 
faut pouvoir présenter soit une production 1m- 
primée, soit un ouvrage où un mémoire ma- 
nuscrit, soit au moins une observation notable; 
et, après un rapport fait par le comité de la 
section dont le candidat devra faire partie, réu- 
nir, au scrutin secret, les deux tiers des voix 
des membres présens. 


ART. 4. 


Les membres associés, présentés suivant la 
forme voulue par les membres résidans, mais 
ne participant que poux moitié aux charges 
communes, auront voix consultative, et en 
outre des droits à êlre choisis pour membres 
résidans, lorsqu'il y aura une place vacante, 
sans que leurs droits cependant puissent faire 
exclure les candidats encore étrangers à la So- 


XXI} 
ciété; de plus ils auront le droit de concours 
pour les prix. 

ART. D. 

Les membres honoraires se composeront : 
4.0-des membres résidans que l'âge ou les in- 
firmités mettraient dans l'impossibilité d'assister 
aux séances, et dont le nombre est illimité ; 
2* des personnes honorables auxquelles la 
Société juge convenable d'accorder ce titre ; et 
quiy ‘sans être soumis aux charges de la Société, 
ont le droit de séance, mais non de scrutin, et 
dont le nombre ne pourra excéder dix. 


ART. 6. 


Les membres correspondans pouvant être en 
nombre indéterminé, seront reçus sur la pré- 
sentation d’un membre résidant, et à la majo— 
rité relative des membres présens, après la 
communication d’un mémoire ou d’un ouvrage 
publié; et sils assistent aux séances, ils ne 
pourront avoir que voix consultative. 


TITRE DEUXIÈME. 
Œomposition et Attribution du Bureau. 
ART... 1:°; 


Le bureau administratif est: composé d’un 
Président, d’un Vice-Président, d’un Secrétaire- 
Général, d'un Secrétaire et d’un Trésorier. 


XXIV 
ART. 2. 


Tous les membres du bureau sont nommés 
au scrutin secret, à la majorité absolue. Dans le 
cas d’un scrutin non décisif, les trois membres 
ayant réuni la majorité relative, seront ballotés 
par un nouveau scrutin. 


ART. 93. 


Le Président reste en fonctions ; pendant un 
an, et il n’est rééligible qu'après une année 
d'intervalle. Les Secrétaires et le trésorier sont 
élus pour deux ans, et pourront être réélus. 


ART. 4. 


Le Président ouvre et clôt les séances, an- 
nonce successivement la nature des objets qui 
doivent faire partie des travaux de la séance ; 
régularise les délibérations, signe les procès- 
verbaux, peut convoquer extraordinairement , 
signe toutes les lettres expédiées au nom de la 
Société, et est remplacé au besoin dans toutes 
ses fonctions par le Vice-Président. 


ART. D. 


Le Secrétaire-Général donne en séance 
communication des objets de correspondance , 
lit les mémoires manuscrits envoyés à la Société, 
dresse de concert avec le président le programme 


XXV 
des séances, rédige les procès-verbaux, sauf à 
les soumettre, pour la rédaction, à l’accepta- 
tion de la Société ; rédige la correspondance 
contresignée par lui, fait les convocations con- 
jointement avec le Secrétaire, fait les fonctions 
d’archiviste, et donne aux membres de la So- 
ciété, sur récépissé, la communication des 
objets composant les archives. 


ART. 6. 


Le’ Président étant absent amsi que le Vice- 
Président, le dernier des Présidens élus siè- 
gera; et, en l’absence de celui-ci, le doyen 
d'âge occupera le fauteuil. Un Président, cessant 
ses fonctions dans le courant de l’année, le 
Président nommé pour la même année ne cesse 
point d'être éligible pour l’année suivante. 

ART. 7. 

Le bureau administratif est chargé des dé- 
penses courantes, et soumet à la décision de la 
Société les dépenses extraordinaires qu'il juge- 
vait convenable de fixer, et prises toujours sur 
les fonds d’annuité. —- Le Trésorier tient état 
des recettes .et des, dépenses. 


ART. 6. 
La comptabilité est régularisée CE année, 


avant les vacances, sur Fe du qu'en ‘pré 
sente le Trésorier. 


XXV] 
TITRE TROISIÈME. 


De La Mature des travaur de La Bociete et De 5es 
Séances. 


ART. À, 


La Société s'occupe d’une manière ou géné- 
rale ou spéciale de l’agriculture, en rattachant 
autant que possible ses travaux au perfection- 
nement de l’agronomie locale ; embrasse toutes 
les branches des sciences physique et naturelle, 
et celles de la littérature et des arts, en se ren- 
fermant dans les attributions de son titre , et 
excluant les matières politiques et religieuses. 


ART. 2. 


La Société tiendra dix séances ordinaires, 
dont une chaque mois (excepté septembre et 
octobre ), et en outre aura une séance géné- 
rale annuelle. Cependant, si ses travaux l'exi- 
gent, elle pourra se réunir extraordinairement. 


ART. 3. 


Les correspondans ont le droit de lecture 
aux séances , après avoir prévenu le président. 
Un étranger, présenté par un membre rési- 
dent, au Président qui l’agrée, peut assister aux 
séances, et y lire les mémoires qu'il aurait à 


XXVi] 
communiquer ou à soumettre à la Société, 
après en avoir obtenu le consentement du bu- 
reau administratif. - 


ART. 4. 


Toute observation ou mémoire écrit, lu ou 
communiqué à la Société, est déposé dans ses 
archives, pour être publié, si la Société le juge 
convenable, sans préjudice du droit qu'a l'au- 
teur de faire imprimer ses ouvrages. 


ART. D. 


Suivant les moyens qui sont à sa disposition, 
la Société peut proposer des prix annuels, ayant 
surtout pour objet l'intérêt du département de 
Maine et Loire. 


ART. 6. 


Les membres de la Société s’engagent à cou- 
vrir proportionnellement les dépenses que peu- 
vent entraîner sa fondation et son entretien 
annuel. 


MÉMOIRES 


DE LA SOCIÉTÉ 


> gricufture, ÉS ciences cf Arts 


D'ANGERS. 


OLD 00SI 000000000000 06 006DeDIM0DOSD SSID IS GO DE0S 


DES CHANGEMENS, : 


PHYSIQUES ET cRmiQuEs QE 


qu l'ÉPROUVENT LES) TRARES 


DANS L OPÉRATION DE : L'ÉCOÂTAGE 


ET, DES RÉSULTATS QUE PEUT EN TIRER -LÂ PRATIQUE 
AGRICOLE (4); sid te nn is _e25ft: 


Par M. DESVAUX, Directeur du Jardin de Butanique. 
Agricultura prorima Sapientiæ. 


Cicer.… 


JA ER par la beauté Fe son “climat, par la 
richesse de son sol, présente un si magnifique en- 
semble, que le tableau en est bien fait pour encou- 


(1) Cé Mémoire avait été préparé pour le Concours ouvert sur 
ce sujet par une société scientifique. 


se aide 
rager ses bte à chérir Eu patrie , et à donner 
leurs soins à la terre qui les vit naître , à la terre qui 
doit les nourrir. Ces heureuses circonstances seront à 
jamais pour cette belle contrée une source inépui- 
sable de prospérité. Mais pour atteindre au plus haut 
point de-bonheur qui l'attend, ‘elle doit trouver dans 
l'agriculture améliorée , et perfectionnée même, au- 
tant que possible , les causes les plus immédiates de 
ses richesses; richesses que ne pourra lui enlever 
l'instabilité-des-évènemrens “offerts torjours par un 
commerce dans des contrées éloignées. Si la Chine, 
avec ses méthodés empyriques let pêu éclairées sur ce 
premier des arts, s, l'agriculture, est t parvenue à nourrir 
près de céntomilhons d'habitans ; Sur une surface 
dépassant à peine celle:de la Frante actuelle, que ne . 
peut-on, pas, ESP spérer sous un. gouvernement; légal, 
dans une région favorisée de toutes les ressources que 
fournissent les stiencés pour éclairer les applications 
utiles , et qui est bien loin encore de compter la moitié 
de cette population! Chaque.association Savanté, ré- 
pandue sur tous les points de la France, donnant 
à tout ce qui l’environne un uüle élan, de tous ces 
efforts réunis naîtra ,. n’en doutons pas, un chan- 
gement manifeste: et déjà il est bien entrevu par ceux 
qui sont habitués à voir , à réfléchir et à comparer. 
Dès que chaque opération d’agriculture se trouvera 
étudiée «et dirigée dans le meilleur esprit possible, 
l'ensemble produira des résultats surpassant l'espé- 
rance la mieux fondée; surtout si l’on veut moins 
rabaisser, que le préjugé ne semble le faire, Ja pro- 
fession si importante d'agriculteur. {ste 9° 


2 


(5) 

Dans le nombre des travaux agricoles, PEcobuage 
mérite d’autant plus de fixer l'attention des agronomes 
que; dans presque toutesles contrées de la France ,par 
l'impéritie des moyens employés pour la pratiquer,’ 
nous avons vu cette précieuse opération n'avoir qu’in- 
complètement les résultats qu’elle devait produire. 

:{Saris chercher à multiplier surabondämment nos 
réflexions sur un'sujet qui ne peut comporter qu’un: 
pett nombre de considérations , nous essaiérons ce 
pendant de le traiter plus méthodiquement qu’on ne 
l’a faitrjasqu’à présént ; en séparant chaque pärtié ] 
afin de rendre plus appréciables les résultats que nous 
voulons offrir ; mais surtoùt nous nous abstiendrons 
d'aller emprunter aux livres des raisonnemens , lors- 
que nousavons la nature sous les yeux et l'expérience 
pour guide. 

IGIABRE $. 
14 “ÉTYMOLOGIE. DU de ere 


sé Yo se ft 0 occupé de cette redire étymolo- 
gique!, nôus l’eussions négligée ici ; mais comme elle 
présentera peut-être des résultats curieux, nous allons 
y consacrer quelques lignes avec d’autant plus de’ 
confiance; que ce manque de notions, dans ceuxquise 
sont occupés del l’écobuage!, leur afait donner de: 
cettepratique d’agriculture des'définitions'imexactes. 

Personne: n’ignore quellé estlopération à laquelle : 
on donne le nom d'écobuagé; sais peut-être n'est-il 
pas à larconnaissance dé toutle mondé ‘que‘ce mot, 
qui: présente quelques: liaisons avec des mots peu 


(4) 

usités de notre langue actuelle, a une origine vräi- 
ment antique, et tire sa source de cette langue pri 
rnitive de l'Euvope, le celtique, ou plutôt le scytique, 
vers laquelle il faut remonter toutes les:fois qu'il s’agit 
de rechercher la racine d’un mot, non-seulement 
français, mais encore latin, grec, ou‘oriental. [l'est 
vrai que par le celtique on ne doit pas entendre le 
dialecte de tel ou tel canton de l’ancienne Gaule où 
de l'Europe , comme l’ont prétendu beaucoup de sa- 
vans, mais bien le fond de la langue de-ces divers 
dialectes , qui semble être la véritable langue primi- 
tive.,;: au moins relativement à nous. 

Les mots ne présentent jamais que des ‘idées de 
choses, ou des idées d’actions, et par-là ils onttoujours 
une raison étymologique, soit directe, soit cri fl 
rique. 

Le mot écobuage, qui indique Paction er 
de la terre en friche les arbustes ou sous-arbrisseaux 
qui peuvent la couvrir ;.et qui n’emporte pas en même 
temps, comme on l’a écrit, l’idée de mettre la terre 
en culture ; ni d'y appliquer le feu, ‘peut: tirer son 
nom de deux sources : du, celtique ou du latin; 
toutes deux en.résultat revenant cependant à la même 
chose. 

Le mot latin scopula.( petit balai), ot être 
l'origine de ce mot, et l'on serait dans le: cas de le 
soupçonner.en se rappelant. que dans le midi dela’ 
France, parmi le vulgaire, on nomme encore écau- 
bettes des plantes servant à.:faire des balais, stelles 
que la chicorée, (cichorium: intybus ) ;: et: la chon- 
drilla juncea, distinguée sous-le nom d’Ecoubette. 


(5) 

jaune; mots qui ne peuvent provenir que de sco- 
pula , avec l’augmentatif e, si fréquent dans le midi, 
et p changé en b, ce qui n’est pas moins ordinaire. 
En ce sens l’écobuage serait l’action d’enlever les 
végétaux suffrutescens , propres à faire des balais, 
des terres qu’on défriche : telles sont les diverses 
espèces de bruyères, de genêts, ete. Il nous paraît 
cependant plus naturel. de chercher directement l’o- 
rigine de ce mot dans une racine celtique scod (bâton, 
morceau de bois}: qu’on voit figurer également dans 
les langues orientales ( hébreu), parce qu’elles ont 
la même origine que la langue scytique RER 
dont elles sont des irradiations. 

Le radical de scod est caud, coed (bois } d’où sont 
venus Cofa, province ancienne, et la forêt de Fi/- 
lers-Cotteret; coteret, fagot de bois; cauder , livre 
dans l’origine composé de plusieurs planchettes de 
bois, changé ensuite en code. 

. Ecot-tire son origine du même mot, en ce que 
dans l’antiquité on marquait sur un morceau de bois 
(scod') sa dépense particulière; et de là cotser, co- 
tisation, dit aussi autrefois az/le , toujours en raison 
d'un morceau de bois encoche. Les lettres radicaïes 
CO, voulant peut-être dire bois, forél, scod a pu 
exprimer #rer dela forêt, extraire de la forét, et 
l’on a dit scobuer, écobuer: et c’est exactement l’idée 
que , dans leur langage agreste, ont conservé de. ce 
mot tous les habitans des campagnes. Pour eux des 
écobus sont toutes les petites broussailles et racines 
enlevées des terres défrichées. Quelquefois, à la vé- 
rité, leterrain a reçu le nom d’écobu; mais cela n’est 


(6) 

pas plus étonnant que de voir un instrument à défri- 
cher retenir aussi le nom d’écobue (1). Enfin, le 
mot écot, morceau de bois sortant hors de terre ; est 
‘encore en usage, ét prouve l’origine que nous donnons 
au nom écobuage ; toutes considérations prouvant que 
da combustion ou incinération n’est pas le 
dans l'écobuage. 

La mise en culture dés terres en friche et cou- 
vertes dé broussailles , résulte de trois opérations très- 
distinctes : r.° l’écobuage ou l'enlèvement de toutes 
parties végétales au moyen d’instrumens , où coupans 
ou extirpateurs ; 2.° le brélis, s’opérant par l’action 
du feu et ne s’arrêtant pas uniquement à la surface; 
3.° le défrichement complet , et s’opérant par 1a houe, 
Ha charrue ou tout autre moyen. 

Qu'on ne croie pas nos recherches oiseuses; elles 
deviennent indispensables pour fixer l’idée devant 
être attachée à l'expression eécobuage , sur laquelle 
les auteurs ne sont nullement d'accord, puisque les 
uns regardent comme écobuer , ‘peler une terre en 
friche; tandis que d’autres prétendent qu'ecobuer, 
c’est faire brûler les broussailles qui la couvrent. Dans 
cet état d'incertitude ;, nous nous en tiendrons à notre 
résultat étymologique, et poùr nous écobuer sera 
toute opération enlevant au sol les végétaux frutes- 
cens ou suffrutescens , qui empêcheraient la mise en 
culture d’une terre. 


(2) En Anjou, toute terre qui se repose au-delà de l’usage reçu 
(de troïs années une), est appelée écobu lorsqu'on la cultive ; qu'il 
_y.ait ou non des broussailles à sa surface. 


(7) 
SS 


DES CHANGEMENS PHYSIQUES QUÉPROUVENT LES 
TERRES PAR L'ÉCOBUAGE, 


D’après l'incertitude sur l’idée qu’on doit, attacher 
au mot écobuage, dans les auteurs, même les plus 
modernes , nous nous voyons dans l’obligation d'en- 
visager l’opération générale du défrichement des terres 
broussailleuses , et d'établir les diverses considérations 
relatives à la mise en valeur de ces terres; et alors la 
question de l’écobuage, vue dans tout son jour, en 
deviendra mieux limitée, plus précise, plus intéres- 
sante, mieux connue. 

Tout végétal, pour croître, a besoin d’un milieu, 
et quelque soit le milieu qui lui soit le plus propre, 
il faut encore que les circonstances soient le plus fa- 
vorables possible, pour qu’il puisse se développer 
convenablement. Les uns, immergés complètement, 
ne peuvent vivre que dans le sein des eaux, sans 
communication avec la terre ; les autres, pour ainsi 
dire isolés dans les airs, végètent dans un milieu uni- 
forme ; mais le plus grand nombre exige des milieux 
de diverses natures, et c’est surtout pour les plantes 
appropriées à nos besoins que ce concours de di- 
vers milieux est nécessaire. Tout l’art de l’agriculteur 
consiste à trouver les circonstances les plus favorables 
pour faciliter le développement des végétaux, qu'il a 
intérêt de multiplier. 


(8) 
1.0 Etat des terres à broussailles, non cultivées. 


Les terres, abandonnées à elles-mêmes, non-seu- 
lement se tassent par leur propre poids, mais aussi 
par l’action des pluies qui frappent leur surface; et 
si les circonstances y appellent les animaux, surtout 
les quadrupèdes , elles sont de plus en plus foulées 
et endurcies. Cependant 1 est urie limite relative à 
chaque espèce de terre, et qui reste la même dans tous 
les temps, lorsque les circonstances se trouvent iden- 
tiques, bien que chaque année, par l’effet des gelées, 
les terres soient un peu allégies, et que par Pimbi- 
bition des eaux, elles reprennent un léger degré de 
porosité; cependant ces moyens d’allégement sont 
bien peu de chose en comparaison du tassement 
qui s'opère par les causes indiquées. 

Les premiers végétaux qui se montrent sur un sol 
nu et abandonné, sont les lichens crustacés, et par 
la suite des temps les lichens foliacés et les mousses ; 
à ces végétations succèdent quelques plantes, que 
remplacent des arbustes par suite des siècles. 

Sur les terres plus ou moims profondes, aban- 
données ou délaissées par l’homme, croissent sou- 
vent d’abondans herbages qui fournissent par leurs 
altérations quelques débris se réduisant à la longue 
en humus végétal. Si chaque année ces débris sont 
abondans, après quelques siècles on y trouve des 
terres noires et très- végétatives, connues sous Îles 
noms de éerre de landes , terre de bruyères. Souvent 
des végétaux ligneux tels que bruyères, ajoncs, ge- 
nêts, cistes, galé, airelle, ont poussé simultané- 


(9) 

ment épars sur ces terres; ou quelquefois, lorsque le 
terrain était favorable à leur développement, ils s’en 
sont exclusivement emparé. Dans ce cas, la nature 
des végétaux d’une terre en friche et leur stature in- 
diquent à l'œil le moins exercé la bonté ou la stérilité 
d’un sol. Dans les lieux humides ou marécageux, les 
débris accumulés des végétaux qu'ils nourrissent, 
composent à la longue des couches de tourbe plus 
ou moins épaisses. 


2» De L'enlivement des broussailles et de L'état des 
terres. 


Si lon ne fait que couper les végétaux frutescens 
d’une terre abandonnée, .les graines non germées, et 
quelquefois latentes depuis plusieurs années, ainsi 
que le démontre l'expérience, donnent naissance à 
des plantes herbacées ; des racines inaperçues et dont 
les grands végétaux gênaient le développement, cou- 
rent bientôt tout le sol de leurs nouvelles pousses; 
mais si on laisse le tout dans cet état de choses, deux 
à trois ans suffisent pour terminer leur règne : les 
rejetons nombreux des végétaux ligneux, dont les 
racines ont pu recevoir plus facilement les influences 
atmosphériques, la terre étant mise à découvert, s’é- 
lèvent rapidement et ne tardent pas à les étouffer. 
Dès-lors le travail qu’on a fait ne change en rien 
l'état de la terre, et c’est le.cas dans lequel se trouvent, 
après des siècles, les bois taillis qu’on coupe tous 
les sept à neuf ans. Pour opérer un changement plus 
marqué et plus constant , si l’on veut que les terres 


(10) 

soient appropriées aux grandes ou petites cultures 
(champs et jardins }, il est nécessaire de faire un 
enlèvement plus complet des végétaux ligneux que 
celui d’une simple coupe ; et c’est ce qu’on obtient 
en bouleversant pour ainsi dire le terrain et détruisant 
toutes les racines, ou les extirpant, soit par la main 
des hommes, ce qui est le plus fatigant, le plus long 
et le plus dispendieux ; ‘soit avec le secours des ani- 
maux , ce qui est le plus économique : surtout si l’on 
a soin d'employer les nouvelles charrues, si simples 
et d'un emploi si facile; c’est là ce qui constitue vé- 
ritablement l’écobuage. 


3. Du remuement des terres et De son effet. 


Quel que soit le moyen qu’on ait employé pour 
labourer une terre et la mettre en valeur (et ici notre 
‘objet n’est pas de traiter de ces moyens}, il en ré- 
sulte que toutes les circonstances deviennent plus fa- 
vorables à la végétation, parce qu'il est bien prouvé 
que les labours rendent les terres plus meubles et par- 
là plus poreuses, 

Comme il faut aux racines des plantes qui, pour 
leur développement exigent deux milieux différens, 
de la chaleur et de l'humidité, il en résulte que par 
l'effet de la plus grande porosité de la terre, l'air 
circule entre toutes ses molécules et par-là se rap- 
‘proche des racines ; et que d’un autre côté, non-seu- 
lement par suite de la dénudation du sol, mais aussi 
par l’allégement des molécules, l’eau pénètre toute 
la masse de la terre ameublie, et y circule facilement, 
ainsi que la chaleur. 


(M) 

. Ce qu’oh aurait peiné à croire , si l'expérience n’é- 
tait I pour le prouver, c’est que les terres rendues 
poreuses sont cependant plus propres à conserver 
leur humidité, et c’est sur cette observation que re- 
pose l'avantage des petits labours superficiels pen- 
dant l'été. Cette porosité empêche la transmission des 
molécules aqueuses ; dès-lors les terres défrichées ou 
labourées sont dans un état plus fdvorable pour faire 
Parcourir toutes les phases de la végétation acx plantes 
qu’on pourra leur confier. 

La nature des terres influe spécialement sur les 
résultats de leur remuement. Quelques-unes, telles que 
les terres réellement sablonneuses, c’est-à-dire, com- 
posées essentiellement de quarz arénace’, ne changent 
pour ainsi dire point, étant toujours poreuses : par 
la solidité de leurs molécules n'étant pas propres à 
se tasser : aussi leur exploitation est-elle plus facile 
que celle de toute autre espèce de terre labourable. 

Les terres tourbeuses et les 2umus végétaux ou 
terres de bruyères, ont aussi une grande porosité ; 
et si on les divise par les travaux de la culture, c’est 
moins dans le but d'augmenter leur porosité, que dans 
celui de les travailler plus aisément. 

D’autres sols, comme les {erres argileuses , natu- 
rellement compactes, ont essentiellement besoin d’un 
long travail pour être rendues meubles et poreuses; 
aussi.est-ce à tort; ainsi que nous l'avons vu dans 
‘ce département, qu’on cherche à les débarrasser des 
pierres d’un petit volume qui s’y trouvent ; ces pierres 
concourant à leur qualité végétative. Très-favorables 
à l'absorption de l’humidité qui les rend alors froides 


(2) 
et compacies, et par-là impropres à la végétation, 
les terres argileuses ne peuvent que par des en- 
grais et de longs amendemens, récompenser des soins 
qu'elles ont exigés. Mais alors, si les produits n’en 
sont pas toujours les plus estimés (1), elles sont les 
plus propres à fournir d’abondantes récoltes. 

Les £erres calcaires sont un peu poreuses, beau- 
coup plus faciles à ameublir que les terres argileuses, 
et se trouvent peut-être celles dont en général la 
culture est Ja plus productive et la plus assurée , 
année commune. 

Nous ne tenons point compte ici des terres vol- 
caniques, très-chaudes par l’effet de leur couleug noire 
ou brune, légères en général et faciles à mettre en 
culture, lorsque les laves en ont été divisées par l’ac- 
tion du temps. 


EMPLOI DU PRODUIT DE L'ÉCOBUAGE. 
Presque toujours les débris enlevés à Ia surface des 
terres écobuées , ou la surface des terres elles-mêmes, 


éprouvent une opération quilesdénature. Quelquefois 
on fait brûler à la surface du terrain tous les végétaux 


(x) En général et d’après nos propres observations, les céréales 
donnent une farine moins blanche dans les térres argileuses; les 
pommes de terre y donnent moins de fécule; les pois, les hari- 
cots et toutes les plantes de la famille des légumineuses y sont : 
moins savoureuses; les citrouilles et les melons y ont moins 
de sucre. 


(13) 

qu'il a produits, surtout lorsqu'ils ne sont qu’ ’en petite 
quantité; ou bien lorsqu'ils n’ont que très-peu de 
valeur. D’autres fois on ne soumet à la combustion que 
les racines, plus ou moïns entremélées de terre 7 après 
les avoir convenablement laissées sécher , et les ayant 
réunies en monceaux plus ou moins gros auxquels on, 
met le feu vers la fin de l'été; ou bien, et ce qui 
est préférable, on n’y applique le feu qu'après en 
avoir construit des sortes de fours dans lesquels lac- 
tion de la chaleur est mieux dirigée et plus intense.’ 

Dans quelques lieux on s’est [CES trouvé, d’après 
notre conseil, de laisser sécher la terre et toutes les 
racmes soulevées, et de les répandre à la surface 
du sol, et de labourer sans Îles enlever, les laissant 
peu à peu pourrir en place. | 

Un autre moyen et qui nous a réussi, essentiellé- 
ment dans les £erres fortes (terres argiléuses }, a été 
d’enterrer, au-dessous du point que peut attemdre 
ordinairement le soc de la charrue, ou coutre, les 
branchages ou jeunes tiges, disposés en faisceaux tels 
qu'en peuvent embrasser les deux mains, et qui LUS 
sont deux à trois ans avant d’être réduits en frag- 
mens: l'effet en a été très-marqué. 

L'emploi du genêt (spartium scoparium ), dans 
des vignes fatiguées et situées dans les terrains argi- 
Jeux, a eu un succès remarquable. Voici comme y a 
procédé, dans le département de Maime et Loire, 
M. Millet, propriétaire : entre chaque ligne de “vigne 
il a fait tracer une tranchée de. huit à ‘dix. pouces, 
(270 milli.}, sans s’occupersi l'on coupait quelques 
chevelus ; on a placé dans cette tranchée, en les im- 


(14) 

Briquant, de grosses poignées de genêt. (ou bruyère, 
si l’on veut) , et l'on.a recouvert le-tout au moyen, 
de Ja terre extraite de la tranchée suivante. 

Pour employer avantageusement les bruyères, les: 
genêts, les cistes , les airelles (1), surtout si le sol a 
une profondeur convenable, il faut les déposer. non 
loin de là. Dès que par un temps favorable, la-charrue 
a pu soulever la surface. du sol, et mettre, à l'air les, 
racines dont un été suffit pour détruire la, propriété 
végétative , à l'automne Ja terre, peut être labourée 
de nouveau, et prépar: ée à receyoir des navets ou des 
choux; ou. a au printemps. des navettes ( bras—. 
0772 campestris) ou des pommes de terre. L'année, 
suivante , et ayant réservé la coupe des écobus dans, 
un coin du champ exploïñé, on peut, au moyen même, 
d’enfans, les placer par poignées à. la suite.les unes 
des autres, au fond de. sillons très-profonds ; dont, 
l’ensemble formera des planches de:terre à la sur- 
face desquelles . on peut opérer les semis : surtoutde, 
lin dans les terres fortes. Ce moyen revient au SUr-; 
plus à l'enfouissement du lupin, du pastel, de la re, 
nouée sarrazin, .qui.a lieu dans quelques contrées de. 
VEurope, lorsque ces plantes, sont encore, en fleur. 

Comme les bonnes terres à écobuer, ont ! toujours 
assez de racines entremêlées. ayec elles , On, ne; doit, 
adopter, ce procédé ‘que dans les. lerres. maigres Ou) 
peu végétatives ; et réserver Pour: les terres en eu. 


(2) Les ajoncs (alex europæus et nanus ) , par là difhculté de 
les maintenir Sous un petit volume, sans les broyer ) ne se prêtent 
pañ älcette opération ; éi‘le sol surtout n’a pas une cértaine pré) 
fondeur, sonopat 93} > + *:C RO : 20 La 


(15) 

ture depuis longtemps, les branchages fournis, en 
les employant à la manière dont nous venons de l’in- 
diquer , et spécialement dans les terres argileuses 
nommées vulgairement #rres fortes, Lerres grasses 
ou £erres lises. Cette opération doit être surveillée, 
pour qu'elle réussisse bien et n’entrave ne les cul: 
tures suivantes. 

Dans l'intérêt de l’agriculture, qu'il nous soit en- 
core. permis de présenter un procédé pour adapter 
les produits de l’écobuage à la culture, mais d’après 
une autre méthode. Ce procédé, qui nous a parfaite- 
ment réussi, mais qui est un peu plus dispendieux , 
ne peut s'appliquer à une grande surface, mais il à 
l'avantage de donner immédiatement un produit avan- 
tageux. Au mois de décembre ou janvier, cé que lon 
nomme la morte saison, temps où, les ouvriers sont 
à meilleur marché, ayant fait dégager le terrain que 
nous supposons médiocrement fourni de petits végé- 
taux ligneux, on fait faire une tranchée de deux pieds 
de large (650 millimètres }, sur huit à douze pouces 
(271 à 298 mil. ) de profondeur, dans laquelle on 
fait renverser cmq à six pouces ( 135 à 162 milli.) 
des terres et racines de la surface qui commence la 
seconde tranchée. Sur cette couche on fait semer des 
fèves de marais ( faba major, ou nana ou minor), 
et l’on recouvre avec le fond de la même tranchée, 
en procédant ainsi jusqu'à la fin. En défrichant bien 
plus tard, nous avons aussi fait semer des pommes 
de térré, en opérant de là même manière. Par ce 
moyen l’écobuage est plus productif, et l'ameuble- 
ment de la terre pour les cultures suivantes, bien 


( 16) 
plus complet; mais il faut avoir soin d'enlever hors 
du terrain les plus grosses racines et les souches. 


SSRES 


DES EFFETS PHYSIQUES DU BRULIS ET DE SES 
PRODUITS SUR LES TERRES. 


Sœpe etiam incendere profuit agros (x). 


Le brélis et l'écobuage sont confondus mal-à-pro- 
pos sous le nom d’écobuage, par un grand nombre 
d'agriculteurs; mais, ainsi que nous l'avons observé, 
ces deux. opérations agricoles doivent être bien dis- 
tinguées, ayant deux objets divers. 

Sans la connaissance de la nature des terres , 1l 
est impossible d’être agriculteur éclairé; et sans cette 
même connaissance, on ne peut juger ni des espèces 
d'engrais, ni des sortes d’amendemens propres à 
chaque terre, et moins encore des quantités relatives 
de ces derniers qu’elles sont susceptibles d’exiger. 
S'il est vrai que les amendemens soient même plus 
avantageux que les engrais , il n’est pas moins vrai de 
dire que pour en avoir méconnu la théorie, nous 
avons vu de bonnes terres.apauvries et dans lesquelles 
alors il fallait augmenter la. quantité d’engrais au-delà 
de ce qu'elles exigeaient auparavant. 


(a) Virgilius, Georg. I:, vers 84.:« Par ce moyen, le feu cuira 

» une partie de la superficie de la terre, et l’eau fera pénétrer les 
» cendres dans le fond, qui lui serviront d’autant d’amendement. 
Orivrer De Serre, Trait. d'Agri., liv.1t, ch: 1. 


(17) 

Ce que nous établissons ici en thèse générale, pour 
les engrais et les amendemens, est d’autant plus ap- 
plicable aux résultats de l’écobuage et du brélis, que 
leurs effets se composent de ces deux moyens d’aug- 
menter la valeur des terres, c’est-à-dire , d'engrais 
et d’amendemens. 

Si l’on ne connaît pas la nature des terres sur les- 
quelles on opère le brélis, il est impossible d'obtenir 
un résultat rationnel; et c’est aussi pour bien faire 
comprendre les effets des produits de cette opération, 
que nous sommes obligés de les examiner dans leurs 
rapports avec les diverses sortes de terres principales 
qui se trouvent soumises à la culture. 

Nous devons donc supposer qu’on connaït ou peut 
connaître, par les moyens simples d’analyse, la com- 
position et les caractères des terres calcaire, argi- 
leuse, siliceuse et humeuse ( humus vegetal), qui 
sont en général les espèces dominantes dans toutes 
les cultures de la France; et celles auxquelles toute 
terre végétale peut être rapportée, quels que soient 
les mélanges qu’elles puissent offrir, en plus ou en 
moins , de chacun de leurs principes constituans. On 
rencontre rarement des terres uniquement composées 
soit de sable, soit de craie, soit de gypse, soit d’a- 
lumine , soit d’humus. 


4.0 Du brûlis sur Les terres calcaires, on à base D'oride 
de calcinnr. 


En général; les terres calcaires sont suffisamment 


poreuses , et les engrais léur sont mieux appropriés 
2. 


(18) 
que les amendemens, à moins que ce ne soit des ad- 
ditions d'argile; le plâtre ou la chaux, dont l'effet 
est plus prompt sur elles, ne leur est peut-être pas 
aussi avantageux à la longue. 

En brûlant les pelouses et racines enlevées ayec 
la terre et desséchées, on détruit toutes les parties 
végétales qui eussent augmenté la porosilé du sol.et 
fourni une grande quantité d'acide carbonique ; en 
se décomposant peu à peu; et on les réduit à une très- 
petite quantité de cendres et de sels, qui sont bien 
loin de compenser les pertes opérées par la combustion. 
D'un autre côté, par l’action du feu, qui s’entretient 
souvent plusieurs jours au milieu des amas de moîttes 
de terre séchées et entremêlées de débris de végé- 
taux, on agit sur un grand nombre de molécules cal- 
caires qui, étant réduites à l’état de chaux, forment 
un amendement, augmentant la qualité végétative de 
la terre par la propriété que cette chaux a d'attirer 
l'humidité de l’air, l’acide carbonique , et aussi par 
la faculté qu’elle a de donner un peu moins de po- 
rosité à la terre, en s’mterposant, au moyen de ses 
molécules devenues comme impalpables , entre les 
molécules les plus grossières de la terre cultivable. 

Tout en proscrivant pour engrais ou amendemens, 
dans le cas présent, la réduction en cendres des pro- 
duits des terres calcaires écobuées, nous engageons, 
si Jon persiste à adopter cette pratique agricole, à 
faire l'opération sur les mottes-sèches, quand bien 
même le terrain serait très-ferrugineux , ce qui arrive 
quelquefois; il n’en éprouverait que des avantages. 

On a nié l’action du feu sur ces sortes. de terres, 


(19) 

pendant le brélis méthodique ; mais l’on n’a pas fait 
attention 1ci que le feu agit sur de très-petites molé- 
cules qu’il a bientôt attaquées, tandis que dans les 
fours à chaux on ne le fait agir que sur de grosses 
masses. Mais au surplus, l’expérience n’est pas équi- 
voque, puisque lesemplacemens à brülis conservent 
pendant plus d'années leur force végétative. que les 
parties environnantes ; bien qu’on en ait enlevé soi- 
gneusement les cendres ou résidus pour les répan- 
dre sur le. sol. 


2, Du brûlis sur Les terres argileuses ou à base 
d'oride d'aluminium. 


De toutes les terres dont les produits de l’écobuage 
sont employés en brélis, pour amendement, il n’en 
est aucune pour laquelle cette opération soit aussi 
avantageuse que pour les terres argileuses; et aucune 
ne le demande pour ainsi dire plus exclusivement. 

Un des grands défauts de ces terres est de manquer 
de porosité et de céder trop facilement leur humidité 
par l'effet de leur trop grande compacité, qualités 
indiquant bien facilement les moyens de changer leurs 
propriétés .. et. de les améliorer à à l'avantage de Ja- 
griculture. 

Lorsqu’on opère la combnstion des amas de mottes 
de terre entremélées de débris de végétaux, on dé- 
truit, bien ; il est vrai, la presque totaliié des prm- 
cipes végétalfs. que présentent les racines des: herbes 
ek,arbrisseaux ; ou ces corps eux-mêmes ;, mais l’ac- 
tion du. feu én une grande portes des a male us 


(20 ) 
argileuses de ces amas à une dureté telle qu’elles 
ne sont plus propres à absorber l'humidité, et qu’a- 
lors elles ne s’incorporent point intimement aux autres 
molécules qui, par l'humidité, deviennent grasses et 
compactes : alors les premières s’interposant, donnent 
de la porosité et de la légèreté à la terre, et font enfin 
l'effet remarquable que nous avons vu produire, en 
conseillant d’ajouter du sable pur à certaines terres 
grasses ou très-argileuses , qui, par-là, de stériles 
qu’elles étaient, sont devenues d’excellentes terres 
arables, ou d’exclusives qu’elles étaient à certames 
sortes de cultures, propres à recevoir de nouvelles 
espèces de végétaux. 

On sait que tous les débris de tuiles, de briques, 
de pots, sont bien appropriés à ces sortes de terres 
grasses. Par cette addition ou celle de sable, on est 
assuré de rendre plus propres à la végétation les 
terres argileuses écobuées, qu’en employant le pro- 
cédé assez circonscrit du bréls, quand bien même 
encore on enfouirait les branchages d’après la mé- 
thode indiquée plus haut. 


3.° Du brûlis sur Les terres siliceuses, sous forme 
granulaire, ou sable à base D'oride De silicium. 


Les sables forment une sorte de terrain dans lequel 
la combustion des produits de l’écobuage ne peut 
avoir aucun résultat désirable, puisque l’action du 
feu n’agit en nulle manière sur les particules siliceuses, 
et qu’elle détruit complètement et réduit à presque 
rien tous les débris des végétaux, tandis qu'a la 
longue, l'humidité, aidée par la chaleur, suffirait 


(21) 

pour compléter leur destruction, et que les plantes 
qu’on y cultiverait profiteraient des principes qui 
s'en dégagent , qui tous seraient employés à l’acte de 
la végétation, et d’une manière plus prolongée et plus 
utile que ne pourrai le faire le produit de l’incinéra- 
tion de mille parties et plus de ces mêmes débris de 
végétaux. Nous savons bien que les légers débris 
de charbon, échappés à l’incimération, attirent l’hu- 
midité de l’air ; mais leur quantité restante, comparée 
à la masse de terre qu'ils accompagnent, est, pour 
ainsi dire, comme nulle. 


4. Du brûlis sur Les terres humeuses où composées 
d'humus végétal. 


S'il est une sorte de terre sur laquelle il faille se 
dispenser entièrement d'employer la combustion pour 
approprier les produits de l’écobuage, c’est la terre 
que nous signalons ici sous le nom d’humeuse, et 
dont les variétés les plus remarquables sont la #erre 
de bruyère ou de lande, les terres tourbeuses, et 
l’'humus végétal, soit des forêts, soit de tout autre 
lieu. Les terres de landes, composées d’une très- 
grande quantité de débris de végétaux, sont presque 
complètement réductibles en cendres; et par-là , bien 
loin de les améliorer, on les réduirait à presque 
rien. et à la stérilité, ne laissant qu’un peu de cendre 
mêlée de sable ou d’un peu deterre. 

Combien. de.fois-n’avons-nous pas reproché à des. 
écobueurs, dans des landes, de détruire par le brülis; 
presque: tous. les avantages de leurs travaux de dé-- 


(22) 

frichement, en soumettant les trois à quatre pouces 
de terre vraiment végétative , qu'ils avaïent enlevés à 
la surface d’un sol mgrat, à action du feu! On ob- 
tenait pour résultat quelques poignées de térré et 
quelques parcelles de substances salines d’un avan- 
tage éphémère , tandis qu'en mêlant cetté superficie 
composée d’humus, avec la couché inférieure, ils 
auraient eu de quoi obtenir, pendant plusieurs an- 
nées, une végétation brillante et lucrative, en céréales 
ou autres plantes plus où moins appropriéées à la 
nature du terraim, et en adoptant un assolement 
méthodique. 

Dans les térrés à Awmus, nous devons faire une 
espèce distincte des térres composées exclusivement 
de débris de plantes, mais toujours plus on moins 
inondés ; d’où résulte une sorte d’humus végétal 
particulier, nommé /ourbe, où terres tourbeuses. 
Lorsqu'on veut rendre ces terres fertiles, on éstobligé 
d’en réduire la partie superficielle en cendrée, mais 
alors on en détruit complètement une portion plus 
ou moins grande ; ce qui en abaisse la surface déjà 
basse et très-souvent du niveau de l’eau, si Von n’a 
eu le som de pratiquer des canaux d’écoulément et 
de déssèchement. Nous ne proposons le brélis dans 
ces sortes de terres que comme dernière ressource : 
Ta chaux , les terres de transport, les gravièrs même, 
dévant être employés de préférence. Cependant on 
peut soumettre au brülrs la croûte tourbeuse éntrez 
mêlée de TaCines , pour s'en’ débarrasser” Mais ce 
léger produit seul serait insuffisant pour rendre ces 
ierres productives. Il faut employer tous les’ amen:£ 


(23) 
demens possibles aux circonstances locales; et ainsi 
par des additions de matériaux de transport, nous 
avons vu d'immenses surfaces de marais spongieux 


changés en belles et excellentes prairies, sans lin- 
termédiaire du bris. 


SSSSS- 


DÉS EFFETS CHIMIQUES DE L'ÉCOBUAGE ET DU 
BRULIS SUR LES TERRES. 


On doit bien se pénétrer de l'idée que pour nous 
l'écobuage n'est que l’action de dégager le sol d’un 
terrain inculté des végétaux qui le couvrent, et 
non l’action de brûler ces mêmes végétaux, d’après 
les recherches faites au commencement de ce mé- 
moire; c’est pourquoi nous considérerons les effets 
chimiques de l’écobuage, isolément du brélis, et 
dans ses résultats propres, et dans les résultats de 
l'emploi des produits de lécobuagé sur Pacte de 
la végétation ; tandis que dans le paragraphe précé- 
dent, nous avons considéré les effets physiques de 


ces deux ‘opérations sur le terrain même qui én 
était l’objet. 


A0) Hésultats propres et directs de l'écobuage. 


La végétation des plantes auxquelles l'agriculture 
donne ses soins, ayant besoin du concours de l'air, 
de l'humidité , de la chaleur, de la lumiere et de 
l'électricité, pour se. trouver dans les conditions les 
plus favorables, rien ne facilite plus l’action de ces 


(24 ) 

agens réunis que les premiers travaux faits pour 
dégager une terre inculte des végétaux inutiles qui 
la couvrent. L'air se promène à sa surface, s’insinue 
dans ses pores; l'humidité peut mieux y arriver par 
tous les points, et avec elle entraîner les effluves 
électriques qui manquent toujours dans les terres 
desséchées, ce principe étant soustrait par les va- 
peurs qui s'élèvent de la terre. En joignant:à cela 
la libre action de la chaleur, qui n’est pas arrêtée 
par les nombreux branchages, on voit que la terre 
se trouve dans des circonstances tout-à-fait diffé- 
rentes. Les débris de végétaux tombés à sa sur- 
face , les nombreuses racines soit vivantes , soit dé- 
composées, existant entremêlées à la terre, viennent 
ajouter aux conditions les plus favorables, dans le 
but qu'on veut atteindre en travaillant à écobuer 
les terres; conditions qui sont d'autant plus amé- 
lorées encore, que. l’ameublissement du sol aura 
été mieux fait et dans des temps plus convenables, 
soit avec la houe, soit avec la charrue. Cetté. der- 
nière opération, praticable dans tous. les temps, 
dans les terres légères, ne peut être commencée 
avantageusement dans les terres fortes ou argileuses 
qu'après les pluies. 


2, Résultats chimiques De L'emploi des éobus en 
nature dans Les terres dDéfrichées. 


Les genêts, les bruyères et autres végétaux de peu 
de valeur , et leurs racines se trouvant brisés et mê- 
lés à travers les terres défrichées et nouvellement 


(25 ) 

ameublies, deviennent non-seulement un bon moyen 
d'augmentation de division, dans les terres grasses sur- 
tout; mais encore ces débris fournissent abondam- 
ment les principes propres à la végétation, en lui 
livrant une énorme quantité de gaz acide carbonique 
qu'ils dégagent ; et quand, dans les endroiis un peu 
humides, 1l y aurait production de gaz hydrogène, 1l 
serait toujours chargé de carbone, et à l'état de gaz 
hydrogène percarboné, susceptible d'être décomposé 
par l'acte de la végétation, et d’être réduit à l’état 
simple de gaz hydrogène. 

Mais une autre propriété des débris des végétaux, 
outre celle de multiplier la porosité du terrain, c’est 
d'entretenir l'humidité, parce que les substances végé- 
tales sont très-hygrométriques, et conservent cette 
propriété tant qu’elles existent à l’état de végétal 
en décomposition. Cette humidité est d’autant plus 
importante qu'elle se charge de gaz acide carbo- 
nique, résultat de la décomposition des débris végé- 
taux, et l'empêche de s'élever à la surface de la 
terre et d'être entrainé par le courant des vents. 
Si notre but était ici de développer la théorie chi- 
mique de cette décomposition , nous verrions qu’au- 
cune parie, aucune molécule n'est perdue; tout 
est employé à l'avantage des végétaux vivant à la 
surface du sol. Ces végétaux en débris auront un 
résultat d'autant plus important qu'ils seront en 
plus grande quantité à travers les terres défrichées. 
Mais ils ne doivent pas être enfouis trop profon- 
dément, parce qu’alors, au lieu de céder du gaz 
acide. carbonique, ils ne font qu'extraire l’oxigène 


(26 ) 
de l'eau ; se réduisent en carbone indécomposable, ét 
alors bien moins avantageux au but qu’on se pro- 
posé. 

Les genêts ont une durée de trois à quatre ans, 
dans une terre argileuse. Les ajoncs, les cistes et 
les bruyères ne sont souvent pas entièrement dé- 
composés après la cmquième année. Les terres cal- 
caires ét les terres sablonneuses décomposent bien 
moins promptement encore les débris de végétaux. 


3. Resultats chimiques de l'emploi des écobus por 
La combustion. 


Nous avons vu, dans le paragraphe quatrième, 
les inconvéniens et les avantages, pour les diverses 
terres, de lapplication du feu sur les écobus et 
sur là terre; ici nous allons déterminer les résultats 
chimiques de cette action. 

Déjà nous avons vu que toutes les foïs que le 
feu agissait sur les portions végétales , il lés anéan- 
üssait. Îl est vrai que la masse de gaz acide carbo- 
nique créé par la combustion, ét la vapeur chargée 
de particules carbonées né sont pas perdues pour la 
nature, et que ces principes vont plus on moins 
loin $’approprier à la végétation , mais ils sont per- 
dus pour le lieu qui les a fournis. Le ligneux, la 
fécule, les gommes, le sucre, le tanin, lés résines, 
les gommes-résinés, les huilés, lés aromités où es- 
sénces, les eaux dé végétation; tous ces produits 
immédiats, entrant dans la composition des végé- 
taux, et propres, par leurs modifications et dé- 


(27 ) 

compositions spontanées, à fournir le carbone, ce 
principe essentiel à la végétition; tous sont détruits, 
enlevés, dispersés au loin, et il ne reste à leur place 
que quelques parcelles de carbonate de potasse, du 
nitrate dé potasse et quelques sulfates, mais le tout 
en si petile quantité, comparée à la masse végétale 
mise en combustion, que c’èst une perte réelle pour 
lagriculteur; tandis que l'effet direct du résultat n’a 
qu'une bien faible influence sur la végétation des 
plantes ‘que l’on confie ensuite à la terre préparée 
ainsi. Si l’on à opéré sur dés terres argileuses ou 
calcaires, il est vrai que cet inconvénient est un 
peu compensé par l’état avantageux dans lequel a 
été laissée une partie de molécules terreuses (voyez 
SSSS, n.° 1, 2), à raison des propriétés physiques 
nouvelles qu’elle à ‘acquise; mais il est si facile 
très-souvent de suppléer à ces résultats, par des 
amendemens appropriés, qu’en-principe la combus- 
tion du végétal est toujours une perte dans les tra- 
väux°de défrichément. 

On'a beaucoup vanté les brélis, usités en Ca- 
talogne, depuis un temps immémortal (r), ‘ét ap- 
pliqués sans distinction à ‘toute espèce de terre; 
mais comme l'on y procède par l'intermédiaire dé 
branchages äpportés d’ailleurs, ét qu’on recommence 
l'opération ‘chaque année, ou au moins tous les 
deux ou trois ans, il en résulté qué l’incinération 
de cés branchages, joints à l’action du feu sur le 


‘(G) Voyéz, sûr l'Écobuage : journal d'Agriculture ‘des Payse 
Bas. Février 1928. Ÿ' 1 


(28 ) 
calcaire ou l'argile entrant comme partie consti- 
tuante de presque toute terre arable, donne en 
même iemps un engrais et un amendement, mais 
dont les avantages réels ne pourraient balancer la 
moindre des méthodes rationnelles d'agriculture, si 
on l’appliquait comparativement à ces mêmes terres. 
Quels que soient donc les avantages publiés sur les 
Jormiges (1) ( fourmillières } embrâsées, méthode 
usitée le long de la mer, entre Barcelone et Tarra- 
gone, nous maintenons que c’est une mode vicieuse 
et! qui n’est bonne que dans le cas où l’on ne 
pourrait en employer aucune autre. 


SSSSSS- 


DE LA DIRECTION QUE LA PRATIQUE DU 
BRULIS PEUT TIRER DES CONSIDÉRATIONS 
PRÉCÉDENTES. 


Ce paragraphe, par sa nature, sera naturellement 
court, puisqu'il ne doit être qu’un résumé succinct 
de tont ce qui a été traité dans le travail qui vient 
d'être présenté, et dans le cours duquel nous avons 
discuté les avantages et les imconvéniens de chaque 
méthode , de chaque pratique particulière. 

12 L'écobuage est la destruction complète de tous 
les végétaux ligneux et plus ou moins gros, crois- 
sant dans des terres abandonnées et en friche, de 


(1) Nom donné par allusion de la forme de chaque monceau du 
brâlis. 


(29) 
quelque manière que puisse s’en faire l'extraction, 
c'est-à-dire, par le travail de l’homme, seul, ou avec 
le secours d’animaux domestiques. 

2. Le plus avantageux et le plus complet sera celui 
opéré par main d'homme, et surtout tel que nous 
Vavons fait exécuter. ( Voyez SSS, vers la fin.) 

3e L'ecobuage est complètement nuisible dans 
toute terre qui manque de profondeur , et il vaut 
mieux avoir une vaste lande , propre au parcours 
des brebis, des chèvres, des mulets et bœufs, que 
de faire les dépenses d’écobuer et défricher un sol 
qui aurait moins de sept à huit pouces de terre 
meuble, ou susceptible de le devenir. 

4. Dans les terres éminemment composées de dé- 
bris de végétaux et connues sous le nom d’humus 
végétal, et vulgairement sous les noms de /erre de 
lande, terre notre, terre de bruyère, de tourbe, 
terre de marais, terre d’étang, eic.; l'écobuage, ou 
enlèvement des végétaux vivans , tant sous le rapport 
des rameaux que sous celui des racines , peut être fait 
complètement , sans qu’il en résulte un notable in- 
convénient, parce que ces sortes de terres sont natu- 
rellement assez légères et qu’elles sont essentiellement 
formées de parties végétales propres à se décomposer 
de plus en plus, et à fouruir en abondance les prin- 
cipes essentiels à la végétation. 

5. Dans les terres calcaires (vulgairement ferres 
franches), les terres siliceuses ou sables, et argileuses 
( vulgairement #erres fortes, bornais, glaises, etc.), 
les produits de l’écobuage doivent être employés tout 
à leur avantage : surtout dans celles dont la profon- 
deur est médiocre et qui sont peu végétatives. 


( 30 ) 

Dans les terres argileuses, les fragmens des yégé- 
taux, soit les racines, soit les branchages (1), doivent 
y être plus spécialement appropriés, et surtout d’a- 
près les méthodes indiquées $$$. L’addition de l'ajonc 
peut même y être faite, mais après qu'il a été trituré 
par les pieds des animaux, étant exposé sur les che- 
mins très-fréquentés, aimsi que cela a lieu dans quel- 
ques endroits du haut Poitou ( département de la 
Vienne }) et de l’Anjou; ce qui s'appelle dans cette 
dernière contrée farre de la ruce. 

6.° La combustion du produit de l’écobuage où le 
brûlis ne peut qu'être nuisible dans les terres sili- 
ceuses et humeuses, ou terres de landes : et ce pro- 
cédé ne doit jamais être appliqué à ces sortes de 
terres, parce que le feu en détruit ou la presque 
totalité, ou la seule portion propre à en entretenir 
et activer la végétation. Si dans les marais tour- 
beux et défrichés, on peut employer le bris, ce 
n’est que pour la portion la plus superficielle, en- 
tremêlée naturellement de trop de racines, pour que 
le travail de mise en valeur soit prompt et facile. 
(Voyez SSSS, N°5 3, 4.) 

7.2 Lorsqu'une terre est éminemment calcaire ou 
argileuse , alors le brélis peut être employé avec 
quelque avantage sur les mottes de terre entremêlées 
de racines nombreuses , après avoir été préalable- 


l 
(1) On doit bien comprendre que toute partie végétale un peu 
grosse et qui approche plus ou moins de la grosseur d’un bâton mé- 
diocre , soit racine, soit branche, doit être enlevée, pour ne pas 
trop entrayer les opérations de la culture, 


(31) 

ment desséchées par l’action de la chaleur de l'été, 
et disposées méthodiquement en monceaux plus ou 
moins gros. Mais cette opération, si elle n’est pas 
dirigée pour réduire le plus grand nombre possible 
de molécules calcaires à l'état de chaux, ou durar 
la plus grande quantité possible de molécules argi- 
leuses, devient nuisible à l'amélioration qu’on se 
propose; et dans ce cas, le procédé d'abandonner 
les végétaux enfouis, à la décomposition sponta- 
née, est et la plus utile méthode, et la seule sus- 
ceptible d’être généralisée dans les opérations de la 
meilleure culture possible. ( Voyez SSS$ , N°, 1,2; 
SSSSS, N° 3.) 

Dans une matière aussi importante que l’agricul- 
ture, rien n’est aussi nuisible que les longues dis- 
cussions et les longs détails. Ils font surtout perdre 
de vue les objets principaux et emploient inutile- 
ment le temps précieux de ceux qui veulent consulter 
les ouvrages propres à leur communiquer des idées 
ps “le application. Qu'on ne soit donc pas étonné 

pour, éviter cet inconvénient, nous ayons donné 
à ni matière que nous venons de traiter le moins 
de développement possible , tout en n’omettant rien 
d'important sur un sujet susceptible de fournir de 
longues discnssions, de présenter de longues varié- 
tés de pratique d'exécution; mais une plus grande 
extension n’eût rien ajouté aux faits principaux, 
aux:faits seuls essentiels, et aux considérations par- 
ticulières dont se compose le travail que nous pré- 
senions. 


(32) 


QUELQUES OBSERVATIONS 


SUR 


LA CULTURE EN PÉPINIÈRES DU PRUNIER SAUVA- 
GEON APPELÉ DAMAS NOIR (1); 


Par M. LEBRETON aîné, Pépimiériste à Angers. 


IL est bien reconnu que le premier besoin du pé- 
- pimériste est de faire un bon choix de ses plants; 
car il est beaucoup de variétés appartenant au même 
genre qui ne réunissent pas de semblables qualités : 
tel serait par exemple celui du prunier; et en ne 
parlant que des variétés de cet arbre propre à servir 
de sauvageon, le damas noir mérite, sous ce rap- 
port, la plus grande considération. 

Cet arbre, de première nécessité par l'avantage 
qu'il possède d’être propre à recevoir, par l’é- 
cusson, toutes les variétés de pêchers, abricotiers, 
pruniers , amandiers , etc., doit fixer toute l’attention 
du cultivateur ; nous ajoutons que beaucoup d’autres 
variétés de pruniers, d’une nature plus sauvage, ne 
présentant pas les mêmes qualités, devraient être re- 
jetées, comme impropres à la plantation d’une pé- 


(1) Nommé aussi Prunier de S.t-Julien, et plus souvent encore 
Prunier d'Amarnoir , dans le département de Maine et Loire. 


(35) 
pinière ; car il est bien reconnu que le prunier damas 
noir est le seul qui, dans cette circonstance, puisse 
devenir profitable au pépimiériste. 

C’est ordinairement par rejetons et par boutures 
qu’on se procure cette variété. De semis, elle est 
sujette à dégénérér, en se rapprochant plus ou moims 
du prunier de haie; ce moyen, en outre, deman— 
derait beaucoup de temps; mais celui qu’on doit pré- 
férer, comme étant le plus certain de bien conserver 
cette variété, est d'en faire des boutures. Bien que 
les rejetons soient également propres à faire de bons 
sujets, on peut néanmoins commettre quelques mé- 
prises en les arrachant, si l’on n’a la certitude qu'ils 
ne sont pas réunis à d’autres espèces. 

Si le pranier damas noir, considéré comme sauva- 
geon, présente au pépiniériste de grands avantages 
pour la multiplication de ses greffes, d’un auire côté 
il faut considérer les pertes considérables qu'il lui fait 
éprouver par sa délicatesse à supporter le froid de 
quelques hivers. 

Lorsque le thermomètre de Réaumur descend à 
huit ou dix degrés au-dessous de zéro , on a lieu de 
craindre pour les plantations de damas noir , et par- 
tieulièrement pour celles qui ont atteint leur seconde 
année ; et il n’est pas possible de les garantir de cette 
malheureuse attaque. Il en est de même à l'égard de 
beaucoup d’espèces d’arbres et d’arbrisseaux , parti- 
culièrement de celles qui ont les fenilles persistantes. 
Mais revenons au damas noir, arbre qui, dans sa 
jeunesse et sous notre climat, craint les fortes gelées. 
Nous avons été à portée de voir des plantations de 

à: 


( 54) 
ce prunier, presque totalement perdues, particulié- 
rement celles qui se trouvaient être placées dans des 
endroits bas et par. conséquent sujets à trop d’humi- 
dité: aussi doit-on établir cette espèce d’arbres dans 
la partie de la pépinière qui offre le plus d’abnis et 
le terrain le moins humide. " 

Si les plantations de damas noir sont totalement 
gelées, c’est un mal irréparable; mais si elles n’ont 
été que saisies par un air glacial, il peut y avoir du 
remède. Ce remède consiste à bien saisir le moment 
de la taille des jeunes arbres, qu’en pareil cas on 
ne devra faire qu’à l’époque où ils entreront en sève; 
et en thèse générale on pourrait dire que lorsqu'un 
hiver a été rigoureux, que l'œil du pépmiériste a 
reconnu l'effet des gelées sur ses plantations, il est 
nécessaire de n’en faire la taille qu’à l'approche du 
mois de mal. 

Dans le mois de janvier 1829, les arbres ont beau- 
coup souffert du froid , entr’autres les sauvageons de 
damas noir portant trois à quatre ans de pépinière. 
Ayant déjà été dupe de trop de précocité à faire le 
travail de la taille, je me décidai à attendre le mo- 
ment du mouvement de la sève, qui devait être plus 
tardif, à raison de l’hiver rigoureux que nous venions 
d’éprouver ; je ne fis ce travail que vers la fn d'avril. 
Les arbres qui éprouvèrent cette taille tardive pous- 
sèrent peu , mais assez pour laisser apercevoir que 
s'ils avaient été taillés pluiôt , il en eût péri une 
grande quantité. À 

Un arbre attaqué de la gelée peut se régénérer 
par son écorce : cette enveloppe, quoique la plus 


(55) 

exposée aux différentes actions de l'air, paraîtrait 
néanmoins être la partie qui souffre le moins de ses 
atteintes. Après une forte gelée de neuf à dix degrés, 
et surtout lorsqu’elle aura été accompagnée de ver- 
glas, si quinze jours après le dégel et à la suite des 
pluies qui le suivent ordmairement on visite les plan- 
tations, afin de reconnaître les effets du froid, on 
aura de la peine à se convaincre que les arbres qui 
les composent ont pu en être atteimts; car ce n’est 
bien que vers le printemps , lorsque la sève se trouve 
être en activité, que l’on peut voir clairement et re- 
‘connaître les arbres qui ont été attaqués de la gelée, 
par les traces qu’elle laisse 2n{érieurement: à Vexté- 
rieur on ne voit rien encore, car il existe un principe 
de vie dans l’écorce qui peut occasionner pendant 
quelque temps l'illusion. 

En résumé, je crois qu’il est plus convenable de 
pratiquer la taille des arbres qui ont souffert de la 
gelée, à l’époque de l’année où la végétation est 
prononcée, bien que dans des temps antérieurs : 
dans cétte circonstance, un arbre taillé trop tôt souf- 
frira, et même finira par succomber par suite de 
cette seconde attaque. En effet, en supprimant trop 
tôt ses rameaux, comment pourra-t-il recevoir er 
assez grande quantité linfluence atmosphérique qui 
lui est nécessaire pour son rétablissement , et qu'il ob- 
tient particulièrement par la présence de ses feuilles ? 


( 56 } 
mm 
NOTICE 


SUR UNE VARIÉTÉ DE CERISE TARDIVE; 


Par M. MILLET, 


Secrétaire général de la société d’Agr., Sciences et Arts d'Angers, 


CERISE DE SPA. ( Fruitier de Maine et Loire, 
cerises, pl. 1:(*) ). 

Fruit ovale, se rapprochant un peu de la forme 
et de la grosseur du bigarreau commun; d'un rouge 


(*) La société d'Agriculture , Sciences et Arts d'Angers, 
ayant décidé qu’elle s’occupera ; indépendamment, de ses autres 
travaux, d’un ouyrage spécial sur les différentes variétés de fruits 
cultivés dans le département de Maïne et TLoïre',' ainsi.que sur 
ceux qu’on pourrait y introduire; invite les personnes qui peuvent 
s'intéresser au succès de cette entreprise à lui communiquer toutes 
les observations qu’elles ont été à même de faire sur cette partie 
trop négligée de l’horticulture, aïnsi que les fruits eux-mêmes, 
avec les noms sous lesquels ils sont connus , afin de pouvoir les 
peindre de grandeur naturelle, et en fixer la nomenclature d’une 
manière positive, pour les réunir ensuite dans un atlas particulier, 
sous le titre de Fruitier de Maine et Loire; cet ouvrage, qui ren- 
ferme déjà beaucoup de variétés nouvelles ou seulement intéres- 
santes, se rattachera en outre à l’école d’arbres fruîtiers que la 
société va créer pour le département de Maine et Loire. 

Tous les renseignemens , ainsi que les fruits dont on voudra bien 
faire part à la société, devront lui être adressés au Jardin des 
Plantes, ou à M. Millet, secrétaire général de ladite société, rua 
Saint-Blaise, à Angers. 


(37) 

pâle; qui passe au rouge vif en murissant; pédoncule 
long de dix-huit à vingt-quatre lignes, placé dans 
une cavité. Feuilles de deux formes différentes : celles 
qui poussent sur l’ancien bois sont ovales, acumi- 
nées, régulièrement dentées et à long pétiole, ce qui 
indiquerait assez qu’elles appartiennent à un cerisier 
aigre, tandis que les feuilles qui naissent avec le bois 
de l’année, et qui sont lancéolées , irrégulièrement 
dentées , à pétiole court, ct pres du double plus 
grandes que les précédentes, paraîtraient provenir 
d’un cerisier doux. 

Cette disparité qu’on rencontre dans les feuilles et 
qu’on remarque aussi dans les fruits, puisque ce 
dernier, rempli d’une eau abondante, acide, sem- 
blerait plutôt par sa forme , sa couleur et par la 
longueur du pédoncule, indiquer une cerise douce ; 
ceïte disparité, dis-je, étant propre à induire en 
erreur si l’on ne considérait pas l’ensemble des ca- 
ractères que présente cette variété , j'ai dû la signaler 
comme une particularité qui lui est propre. 

Cette cerise que je crois inédite a été apportée de 
Montmorency à Angers, sous le nom de Cerise de 
Spa. Elle est cultivée à la préfecture ainsi que chez 
MM. Leroi et Lebreton, pépimiéristes, et mérite 
d’être répandue par rapport, surtout, à l’époque tar- 
dive à laquelle elle mürit ses fruits, qu’on ne peut 
cueillir avant la mi-juillet: époque qu'il est même 
essentiel de reculer , si l’on veut avoir des cerises 
moins acides. 


( 58 ) 


CULTURE 


de lVOguon-Patate, 


PAR M. DESVAUX. 


AYANT depuis quatre années cultivé une variété 
d’ognon, introduite dans le commerce sous le nom 
d’'Ognon-Patate, ou Ognon sous terre, dont on 
ignore l’origine , et qui est encore très-peu connue; 
nous indiquerons en peu de mots ses avantages et 
son mode de culture. 

L'Ognon-Patate, qu’on a pu voir à l'exposition 
horticulturale d'Angers, du 3 juin 1831, ne monte 
jamais en graine; car, sur plusieurs planches de 
cette variété, nous n'avons pu en voir que deux 
pieds monter à fleur, depuis que nous le cultivons. 
Il est en maturité dès la fin de mai, c’est-à-dire 
presque deux mois plutôt que l'autre; et dans les 
greniers 1l ne commence à pousser que trois semaines 
après l’ognon ordinaire, ce qui en prolonge l’usage 
-dans un temps où, avec les autres variétés cultivées , 
l'on manque alors de ce légume. 

IL est des années où l’ognon commun réussit in- 
complètement, soit par défaut de bonnes graines, 
soit par la sécheresse ou autre cause. Avec l’'Ognon- 
Patale on ne peut jamais en être privé, en suivant 


(59) 
le procédé qui nous a réussi et que nous allons 
faire connaître. 

À la mi-février on doit placer en ierre, dans des 
planches et séparément, tous les petits cayeux: ce 
sont eux qui fourniront les beaux et gros Ognons- 
Pätates. À la même époque on plante les plas gros, 
en les recouvrant légèrement, maïs on les plante 
en moindre quantité que les cayeux. Les gros bul- 
bes sont déstinés à fournir du plant pour l’année 
suivanté, chaque ognon, d’après sa grosseur, don- 
nant dé cinq à quinze cayeux, et en outre un où 
deux gros ognons. Les cayeux sont mürs les pre- 
miers et doivent être recueillis dès que la fanne 
commerice à se former, afin de pouvoir regarnir 
d’an peu de terre les cavités qu'ils ont fescdoe en 
en s’élévant du milieu de l’ognon dont ils sont sortis, 
et nourrir les ognons restans déstinés à former du 
gros plant ou de gros ognons à manger. 

On doit procéder à cette récolte des cayéux, afin 
d'éviter que par les pluies de juin ils ne s’échauf- 
fent, comme on le dit vulgairement, c’est-à-dire , 
afin que le petit champignon nommé sc/erotium 
semen, ne se propage de manière à altérer toute 
une planche, comme l'expérience nous l’a appris, 
et comme cela peut arrivér souvent par défaut de 
surveillance à cet égard (r). 


oo 


{1) Dans l’almanach du bon Jardinier, pour 1830, on indique 
de cultiver cet ognon à 12 et 15 pouces de distance; de Je butter 
très-légèrement une première fois, et davantage à la seconde , et 
qu’alors à la récolte il présente une massé de cayeux et d'ognons. 


( 40 ) 

Nous dirons, en attendant que nous traitions 
des végétaux acotylédons nuisibles auxcultures, que. 
dès que les feuilles d'ognon, ciboule, ail, etc:, jau- 
nissent avant le temps ordinaire de leur maturité, 
il faut s'empresser de les cueillir, afin d’éviter la 
propagation rapide du sc/eroliun qui les détruit, 
en formant comme une pulpe fétide de toute la 
parüe solide de ces diverses plantes bulbeuses. 

Nous avons observé que pour s’entretenir d’o- 
gnon et de cayeux d’ognon, il fallait toujours plan- 
ter un quart de gros Ognons-Patates, et. trois 
quarts de cayeux; c’est-à-dire que, si la consom- 
mation d’une maison était de trois planches d’o- 
gnons, une planche ou seulement deux tiers. de 
planche suffiraient pour se pourvoir de plant néces- 
saire pour l’année suivante. Si par hasard quelques 
ognons de cette espèce montaient à graine, il fau- 
drait les enlever soigneusement, afin de ne pas 
altérer la souche de cette variété curieuse et impor- 
tante. 


————_—_—————"— 
DESCRIPTION 


D’'UNE NOUVELLE VARIÉTÉ DE ROSIER, PROVENUE 
D'UNE GRAINE DE ROSIER THÉ ORDINAIRE. 


FLEURS grandes (3 pouces de diamètre ); pleines ; 
d'un blanc éclatant, avec la base des pétales légère- 
ment lavées de jaune tendre; solitaires ou réunies par 


(41) 
deux ou par trois à l'extrémité des rameaux , qui sont 
effilés, à écorce d’un beau vert, comme celle qui 
recouvre le vieux bois; cmq à sept folioles ovales- 
oblongues , d’un vert tendre ; .ovaire pelit, ovale, 
presque nu ; sépales réfléchis ; aiguillons rares, forts, 
d’un rouge brun. 

Cette variété bien remarquable , qui est remontante 
et d’une odeur agréable, mérite, par les agrémens 
qu'elle présente, de fixer l’aitention des amateurs de 
belles fleurs. Elle ne se trouve encore que chez M. Ma- 
réchal ; jardinier à la Croix-Montaillé, qui l’a ob- 
tenue d’une graine de rosier thé ordinaire; et à la- 
quelle les jardiniers d'Angers ont donné le nom de 
Rose Marechal. 


NOTE 
Sur une Description mécanique de La Chaînette, 
PAR M. BOBILLIER ; 


* CHEF DES ÉTUDES À L'ÉCOLE ROYALE DES ARTS D ANGERS. 


LA chaïînette ou la courbe qu'affecte un fil flexible et 
inextensible, quand il est suspendu par ses extrémités 
à deux points fxes, est une des lignes que l’on a le plus 
fréquemment occasion d'employer dans les arts; elle 
joue en effet un rôle remarquable dans diverses applica- 
tons importantes des sciences mathématiques, et en- 


( 42 ) 

{r'autres, dans la coupe des pierres et dans la construc- 
tion des ponts établis sur des chaînes tendues d’une rive 
à l'autre; on en voit un fort bel exemple au dôme du 
Panthéon de Paris, dont l’une des voûtes a la forme 
d'une chaïînette renversée; aussi les géomètres l'ont-ils 
examinée avec un soin tout particulier, et ses propriétés 
sont-elles exposées avec détail dans tous les traites de 
mécanique rationnelle et industrielle. 

Toutefois, il n'existe pas de moyen commode pour 
tracer la chaînette avec précision ; le procédé qui paraît 
le plus répandu, se déduit immédiatement de son équa- 
tion ramenée à la forme la plus simple, 


x 


x 
T 


r 
BE à He r 
PN2 


Dans laquelle la lettre e désigne la base des logarithmes 
népériens; x et y, les coordonnées d'un point quel- 
conque de la courbe rapportée à la verticale qui la 
divise en parties égales et à l'horizontale, non trans- 
verse, distante du point le plus bas d'une quantité égale 
à son rayon de courbure r; il consiste à construire, à 
l'aide des tables, les deux logarithmiques égales et de 
sens contraires , 
x — x 
ÿ sé ,) pre , 

À Sci ensuite leurs ceprditns dans le rapport de 
1:r,.enfin, à prendre, après cétte réduction, des 
moyeunes arithmétiques entre les ordonnées qui corres- 
pondent à une même abscisse. 


(45 ) 

À ce procédé laborieux, nous proposons de substi- 
tuer le suivant : 

Tracéz une parabole mon, dont la distance du 
foyer f au sommet o soit égale au rayon de cour- 
bure x de l'élément le plus bas de la chaïnette que 
vous voulez décrire ; faites ensuite rouler, sans glisse- 
ment, celte parabole sur l'une de ses tangentes 0x; 
dans ce mouvement le foyer ? engendrera la chaï- 
nette cherchée. (Noy. p. 4, fig. 2.) 

Supposons que la parabole, ayant pris la position 
mon, touche en k la directrice ox, en sorte que 
ok — arc ok; soient &æ , B les coordonnées du 
point k par rapport au grand axe o'y et à la tan- 
gente ox’; nous aurons 8 — 4r «, et, à raison 
des propriétés connues du foyer {’, 

PÉAS Sr MreReRte 

kr … 


tang. T’kx = — ang. ko = — su 


’ 


Mais si l’on fait rouler infiniment peu la parabole, 
le foyer f” décrira, autour du point de contact k, 
un petit arc circulaire, et par conséquent la normale 
de sa trajectoire sera f’k: en appelant donc x, y 
les coordonnées courantes du foyer f” relativement 
aux axes rectangulaires ox et oy, on aura aussi les 
équations 


4 
pe 


hair F Re 


( 44) 

Qui, comparées aux précédentes , fourniront 
FT RME ur dr 
Ka og = 


Eliminant présentement la variable 2 entre ces der- 


2 


nières, et supprimant le facteur Wi + com- 


mun aux deux membres, il viendra 
ef V L + ME 
Y ad dx’ 7 


C'est l'équation différenticile de la courbe décrite par 
le foyer £ 

Séparant les variables, et, observant que les x et 
les y croissant en même temps, leurs différentielles 
dx et dy doivent être affectées du même signe, on. 
trouve 


dy dx 
YF — r° r 
Dont l'intégrale est 


IE A 4 x 
log. (y3+ Vy = 5) + const. =: 

Or, l'on doit avoir à la fois x —o et y —r; donc 
con$t, — — log. x et par ee 

VA TE 

log. (LE 5 — ] À, 
T 

D'où l’on üre aisément 

x x 

Le ra os NE Et 

RE ee LE LA 


k T 


(45) 

Ajoutant ces équations pour faire disparaître le radi- 
cal, l’on a celle-ci: 

x x 
stef 0 SLT. 

= vel e € | A 

Qui appartient, comme on l'a annoncé, à une chaï- 
nette dont le rayon de courbure de l'élément le plus 
Bas Eli. 

On peut au surplus éviter le roulement de la pa- 
rabole; il suffit pour cela de prendre, à partir du 
Ste O. dés AJCS ON, 12, du Mao jee qurcis = 
assez petits pour que l’on puisse les confondre avec 
leurs cordes, et de les porter sur la tangente ox en 


ET EME EE A .; puis, des poinis o, 
1,2, 3, 4, see aVec des rayons. égaux /aux 
distances fon frieton É34l ss sde on décrit autant 


de petits ares de cercle qui toucheront tous la chat- 
nette; l'enveloppe de tous ces petits arcs pourra donc, 
sans erreur sensible, être prise pour cette coutbe. 


SUR LE FER ARSÉNICAL 
OU MISPICKEL, 


DÉCOUVERT A ANGERS , PAR M. MILLET ; EN 1930, 


ET 


Sur celui de Saint-Pierre Montlimart; 
Analyse de ces deux Mines , par P. LEBRETON, pharmacien. 


LES travaux qui ont été exécutés tout récemment 
pour donner au boulevard du Jardin des Plantes la 


( 46 ) 

pente qu'il a maintemant, ont nécessité des fouilles 
dans les terrains situés à la partie nord-est d'Angers, 
nommée Place du Pélican; il est inutile de vous dé- 
crire une localité que vous connaissez tous; il suffira 
de vous dire que ce filon métallique est engagé dans 
l'immense couche de phyllade qui sert de base à notre 
cité. Le premier soin de M. Millet a été d’en étudier 
les caractères physiques : ses recherches n’ont point 
été infructueuses; car, même avant d’en connaître l’a- 
nalyse , il est parvenu à lui faire occuper sa véritable 
place dans la méthode d'Haüy, et à lui donner le nom 
qui lui est propre, de Fer Arsenical où Mispickel, 
compacte massif. Un seul des caractères minéralo- 
giques restait à connaître : le caractère chimique ; 
M. Millet a bien voulu me confier cette tâche. 

Avant de rendre compte de mon travail, je crois 
nécessaire d'exposer que le minerai auquel cette es- 
pèce se rapporte a été analysé par des savans : MM. 
Chevreul, Stromeyer et Lampadius. 

Je dois dire , en outre , que quand on analyse un 
corps et qu'il peut cristalliser, on emploie de pré- 
férence ce corps sous cette dermière forme, comme 
pouvant donner des résultats plus certains ; n’ayant 
ici que la variété compacte la plus susceptible de mé- 
langes , les nombres proportionnels de mon analyse 
doivent nécessairement présenter des différences avec 
ceux déjà connus. 

Les substances auxquelles ce minerai se trouve or- 
dinairement associé , sont le plomb sulfuré, le cuivre 
pyriteux , la chaux carbonatée , l'étain oxidé ; l’anti- 
moine sulfuré capillaire l'accompagne quelquefois ; il 


( 47) 
existe aussi une variété de mélange qui porte le nom 
de fer arsenical argentifère (1); tous ces corps ont été 
de ma part l’objet de recherches scrupuleuses. 

Notre minerai présenté au feu du chalumeau, dé- 
gage une fumée épaisse accompagnée d’une forte odeur 
arsénicale ; puis, en continuant le feu , il se réduit 
en un grain métallique cassant et attirable à Faimant. 

Une portion, réduite en poudre impalpable, fut in- 
troduite dans un creuset surmonté d’un tube propre 
à recueillir les produits volatils qui pourraient se dé- 
gager pendant la calcmation; on ajouta par degrés 
des charbons sous le creuset. D’abord :ïl s’éleva des 
vapeurs d’un blanc jaunâtre, qui vinrent se condenser 
sur la paroi intérieure du tube; peu à peu on aug- 
menta le feu; deux ponces environ au-dessus du 
creuset , il se forma une tache annulaire d'un gris 
d'acier , ayant l'éclat métallique. On donna ensuite 
un coup de feu violent qui fut soutenu pendant une 
heure; l'appareil étant refroidi, on examina le tube 
dont l'intérieur était comme nous l'avons dit plus 
haut, tapissé d’une poudre jaune cristalline ; cette 
poudre fut détachée, ainsi que l’anneau métallique , 
pour l’examiner. 

1.9 La poudre jaune fut mélangée avec du charbom 
et de la potasse pure ; le tout fut introduit dans an 
tube dont l'extrémité fut tirée à la lampe; on le placa 
sur des charbons ardens. Retiré du feu et refroïdx, 
ce tube présentait dans son intérieur deux couches 


(x) J'ai recherché, mais vainement, dans ce sulfure, la présence 
de l'or. 1 | 


(48) 
bien distinctes ; celle qui occupait la base était d’une 
couleur noire ; cette substance mise en contact avec 
deux gouttes d’eau acidulée , exhalait de l'hydrogène 
dlfné: 

2. La couche supérieure était composée de pail- 
leties brillantes, ayant l’aspect et l’éclat métallique ; 
elles furent dissoutes dans l'acide nitrique faible’; 
cette dissolution précipitait en vert, par le sulfate de 
cuivre, et en jaune, par l'hydrogène sulfuré. 

3. L'anneau métallique , qui s'était formé dans le 
tube où était la poudre jaune, fut pulvérisé et: dis- 
sous dans l’acide nitrique étendu; ce liquide donnait , 
avec les réactifs, des précipités semblables à ceux 
déjà obtenus; en ajoutant une plus grande quantité 
d’acide nitrique pur , on obtint un précipité rouge 
de brique avec le nttrat d'argent. 

Les trois expériences précédentes ‘prouvent évi- 
demment que la portion du minerai qui a été vola- 
ülisée, se composait de soufre etd’arsenic. 

Voyons maintenant ce que contenait le creuset. Ce 
vase renfermait une poudre d’un rouge-brun , qui 
fut divisée en deux portions. 

La première fut traitée par l’acide nitrique con- 
centré; exposée à l’action du calorique, elle fut ra- 
prochée pour en chasser l'excès d’acide ; c’est après 
l'avoir étendue d’eau et additionnée d’une solution de 
sulfate de potasse ; sans qu'il y eût de précipité; c’est 
après avoir essayé vainement à: la fare cristalliser ; 
c’est après Y avoir ajouté successivement et sur 
différentes porüons, de l’oxalate d’ammoniaque , .de 
l'acide sulfurique et de l’acide hydrochlorique ;-enfin 


( 49 ) 
c’est après y avoir plongé une lame de fer bien dé- 
capée, que je me suis assuré que le plomb ;da chaux , 
l'argent et le cuivre ne faisaient point partie de cette 
dissolution. 

La seconde portion de poudre qui était restée dans 
le creuset, fut soumise à l’action de l'acide sulfurique 
étendu ; je désigne cette solution par À. Ce qui avait 
résisté fut repris par l'acide hydrochlorique concentré 
et bouillant : celle-ci je l'indique par B. Il resta un 
résidu très-blanc, insoluble dans les acides puissans. 
Ce résidu fut lavé et fondu avec le double de son 
poids de potasse pure, dans un creuset d'argent ; il 
donna naissance à un verre de liquescent, qui se prit 
en gelée par la concentration , après avoir été dissous 
et saturé d'acide hydrochlorique. 

La liqueur À précipitait en noir par la teinture de 
noix de gale, et en bleu par: l’hyÿdro-ferro-cyanate 
de potasse. 

Le liquide B ne précipitait pas l'hydrochlorate d'or; 
et après lavoir concentré et y avoir ajouté de d’eau, 

. al n’y eut aucun changement. : 

Toutes ces expériences préliminaires ndiquent.assez 
la présence du fer, de la silice ,: et l'absence de Pétain 
et de l’antimoine. 

Muni de ces renseignemens et. me; croyant pd 
samment éclairé sur 5 composition | de ce minérai, 
j'ai cherché à isoler chaque-substance et'à déterminer 
leur poids respectif. , 

Parmuiles procédés qu’on donne et, dont j'ai fait 
-usage ; J'ai remarqué. qu'il. était très-difficile de sé- 
-parer-exactement le fer de l’arsenic,, lorsqu'ils étaient 


À 


( 50 ) 
dans une même dissolution : aussi ai-je pris une autre 
marche, et au lieu de me servir  d’équivalens , suis-je 
presque M5 revenu à agir directement sur le 
minerai même. 

Je séparai d’abord le mineraï de sa gangue, le plus 
qu'il me fut possible ; ; je le réduisis en poudre impal- 
pable et j'en pesai 100 parties qui furent calcmées 
fortement , pendant deux heures, pour en chasser le 
soufre et l’arsenic. Ce qui restait dans le creuset pe- 
sait 53,45; je le fis dissoudre dans l'acide hydro- 
chlorique ; et il resta un résidu insoluble, du poids 
de 3,43, ayant les caractères de la silice. 

La liqueur contenant le fer fut concentrée, puis 
précipitée par l'ammoniaque en léger excès. L'oxide de 
fer, lavé et calciné , pesait 50; or, d’après les pro- 
portions données par M. Berzélius, 100 de per- 
oxide de fer représentent 60,19; donc 5o équivalent 

à 34,60. 

Une nouvelle quantité du mmeraiï, également de 
100 parties , fut attaquée par l’acide hydrochloro- 
nitrique très-étendu; on enleva de la liqueur une 
substance floconneuse d’un jaune verdâtre ; lavée, 
desséchée, elle pesait. 11,20; ce dernier corps était 
du soufre. 

Des essais’ préliminaires m’avaient appris que le 
véhicule au milieu duquel nageait le soufre , devait 
aussi contenir de l’acide sulfurique et même de l’acide 
arsenique provenant de l’action de l’acide nitrique 
sur ce dernier et sur l’arsenic. Pour isoler le premier, 
je sâturai le liquide hydrochloro-nitrique par l’am- 
moniaque caustique ; je filtrai, et ajoutant de l’hy- 


(51) 

drochlorate de barite, j’eus un précipité de sulfate de 
la même base, qui fut mis en digestion dans l’acide 
nirique, pour dissoudre l’arséniate de barite qui l’ac- 
compagnait ; il pesait 97,60, qui représentent 13,47 
de soufre , lorsque d’une part, d’après les pro- 
portionnels de M. Berzélius , r00 d'acide neutralisent 
191,39 de barite, et que d’un autre 40,14 de soufre 
exigent 59,60 d’oxigène, pour se constituer acide 
sulfurique. De la réunion de 11,20 et de 13,47, 
résulte 24,67 de soufre. 

Connaissant les proportions du fer, du soufre et 
de la silice , il était facile d'indiquer le poids de l'ar- 
senic par une simple soustraction; mais alors mon 
travail n’aurait eu de rigoureux que l'apparence, 
parce que la perte que je devais avoir aurait fait partie 
du poids de l’arsenic ; il était donc indispensa bled’en 
déterminer la quantité. 

Je passe au mode que j'ai employé, pour avoir les 
proportions de ce dernier. 

Dix parties de minerai furent mélangées, au 10.° 
de leur poids, de charbon pulvérisé, et au 20.° d’hy- 
drate de potassium. On introduisit cette poudre dans 
un tube fermé à l’une de ses extrémités : l’autre fut 
tirée à la lampe. Ce tube avaït été enduit préalablement 
d’un lut conseillé par Bostock ; on exposa le tube sur 
les charbons ardens , on chauffa convenablement ; 
l'appareil refroidi et rompu, on enleva l’arsenic qui 
occupait la partie supérieure ; on prit note du poids. 
Cette opération fut réitérée trois fois; on eut pour 
terme fe 3,54 ou 35,40 pour 100. 

* Pour s'assurer de l'exactitude de ce procédé, : 


( 52 ) 
interrogea le résidu resté dans le tube; une fois seule 
ment l'hydrogène sulfuré rendit sensibles des atômes 
d’arsenic, équivalens à des millièmes. 

On voit donc que 100 parties du minerai décou- 
vert par M. Millet, se composent de 

der 2 VA. 34,60 
arsenic.s. :45-.35,40 
soufre . . . . . 24,67 
SICe- 2 PEUR D. AD 

Ce minerai qui vient enrichir la collection mné- 
ralogique de noire département , n’est pas le seul de 
cette espèce que nous possédions ; il existe à Saint- 
Pierre-Montlimart , arrondissement de Beaupreau , 
des mines de mispickel connues depuis bien des an- 
nées ; mon intention est de vous en parler dans cette 
note. 

Pour ne point fixer ici plus long-temps l'attention 
sur un sujet aussi sérieux qu’une analyse, je dirai 
que la méthode analytique que j'ai exposée ci-dessus, 
a été appliquée au mispickel de Monilimart , et que 
j'ai eu les résultats suivans ; 

ICRA. us OR 
ATSERIE:) .. pe 41,77 


08 , 10 


En comparant ces deux mines, quant aux pro- 
portions des composans, on voit que le mispickel 
d'Angers contient 5,12 de soufre, 2,17 de silice 
interposée en plus, et 1,24 de fer en moins que 
celui de Montilimart ; c’est peut-être à cette différence 
qu’on doit rapporter l'aspect plus blanc qu’on re- 


( 53 ) 

marque généralement dans le mispickel d'Angers; du 
reste, ces deux mines se rapprochent beaucoup de 
celles de Freiberg, analysées par MM. Chevreul et 
Stromeyier ; elles n’en diffèrent que de quelques par- 
ties; aussi je les regarde, d’après ces savans, comme 
composées d’un atôme de quadri-sulfure de fer, et 
d’un atôme de bi-arsenicure de fer. 

Les mines de Montlimart jouissent d’une certaine 
célébrité, elles passent pour contenir de l'argent ; 
plusieurs fois j'ai eu occasion d'examiner le minerat 
qui en provient , .et toujours l’idée dominante des per- 
sonnes qui me le présentaient était qu’elles soupçon- 
naient l’existence de ce métal. 

Ayant parcouru mes notes pendant le cours de 
cette analyse, voici ce que j'ai trouvé à cet égard. 

En 1818, un orfèvre de cette ville me remit un 
minerai qu'il tenait d’un propriétaire des environs ; 
on l'avait assuré que c'était une mine d'argent, très- 
riche : il ne s'agissait rien moins que de 40 à 5o pour 
cent d'argent ; c'était un trésor. Déjà ce bijoutier , 
qui d’ailleurs avait des connaissances en docimasie, 
avait fait plusieurs essais et n'avait rien découvert. 
Doutant de ses moyens , il me pria de rechercher le 
plomb et l'argent ; j'examinai et ne fus pas plus heu- 
reux que lui; je trouvai seulement du fer, parce que 
mes recherches s'étaient bornées aux deux métaux in- 
diqués ci-dessus ; mais depuis, j'ai rencontré de l’ar- 
senic et du soufre dans un échantillon qui me restait. 

* Les personnes qui s'occupent de toute autre chose 
que d'Histoire naturelle, ne sont pas les seules de 
ceite opinion. Parmi celles qui réunissent les miné- 


(54) 

raux de notre département, il en est: quelques-unes 
qui d’après d’anciennes traditions, d’autres par ana- 
logie et avec assez de raison , pensent que le minerai 
de Montiimart est argenüfère. Je suis loin de trouver 
à redire sur la manière de voir des premiers, au con- 
traire, cela peut avoir un but d'utilité; c’est avec des 
idées analogues, c’est en voyant de l'or dans les mi- 
néraux de couleurs jaunes, et de l'argent dans ceux qui 
sont blancs, que les sectaires de la philosophie her- 
métique soumirent les métaux à des épreuves multi- 
phées, pour leur faire restituer ce qu'ils ne contenaient 
pas; en effet, ils ne trouvèrent le plus souvent, n1or, 
ni argent, mais ils firent des découvertes précieuses 
dont nous recueillons aujourd’hui les fruits. 

Il n’entre point dans mon sujet de chercher à con- 
naître ou à interpréter quels ont été les motifs qui, 
à des époques très-éloignées de nous, ont pu déter- 
miner les fouilles ou excurations faites à S.t-Pierre 
Montlimart : cela peut faire le sujet d’un article de 
Statistique; mais j’observerai à ceux qui cultivent les 
sciences naturelles , que souvent les anciennes tradi- 
tions n’ont de mérite que leur antiquité; qu'il est plus 
convenable de s’en rapporter aux faits de l'analyse; 
que nous devons considérer le mispickel d'Angers et 
de Montlimart comme du fer arsenical , ne conte- 
nant pas un atôme d’argent, jusqu’à ce que l'examen 
de nouveaux échantillons vienne déposer du contraire. 

J'ai pensé, et c’est le but de ce travail, qu'il n’é- 
tait pas inutile de faire cesser l'incertitude qui existe 
même encore aujourd'hui sur le mispickel , afin de 
le mettre à la place qui lui convient. 


(55) 


DESCRIPTION 


D'UNE NOUVELLE ESPÈCE DE CRUSTACÉ, 
L'Sippolute de Desmarets ; 


rar M. MILLET, secRÉTAIRE - GÉNÉRAL DE LA SOCIÉTÉ 
: D'AGRICULTURE ; SCIENCES ET ARTS DANGERS, ET MEMBRE 
DE PLUSIEURS AUTRES SOCLÉTÉS SAVANTES, 


LE genre Hippolyte de Leach, adopté par M. Des- 
marets, dans ses Considérations générales sur la classe 
des Crustacés, et compris dans la famille des ma- 
croures, division dés salicoques, ne renfermait, avant 
la découverte du, crustacé que nous allons décrire, 
que des espèces marines: Nous pourrions même 
étendre cette observation à la section entière à laquelle 
il appartient; car le Symethus fluviatihs de Rañ- 
nesque , signalé dans son Précis de découvertes et 
de travaux somiologiques (publié en 1814), avait 
fait naître dans l'esprit de quelques naturalistes plus 
que_des doutes à ce sujet : si l’on fait attention sur- 
tout à cette note de. .M.. Desmarets ,, consignée 
dans l’ouvrage précité, qui est ainsi conçue ::« On 
ne connaît aucun crustacé macroure de ‘li’ division 
des salicoques, vivant dans les éaux douces’; ét au: 
cun: qui présente les caractères que nous: venons de 
rapporter.» (Desm. pag. 216.) Cependant l'espèce 
parfaitement caractérisée dont noris nous occupons; 


(56 ) 

et que nous dédions à M. Desmareis, auquel nous 
l'avons déja communiquée , ne doit plus laisser de 
doute à cet égard, Fayant observée nous-mêmes dans 
les différentes rivières du département de Maine et 
Loire, où elle vit, réunie ordinairement en société 
au milieu des herbes aquatiques. 

C’est donc un fait intéressant, nous dirions presque 
nouveau, d’avoir rencontré dans l’eau douce un crus- 
tacé de la section des salicoques, auquel nous pour- 
rons par la suite joindre deux autres espèces de la 
même section , peut-être de genre différens , que nous 
avons prises dans la rivière d'Erdre, mais dont quel- 
ques parties absentes nous ont été les moyens d’en 
faire, quant à présent; la description ; cependant le 
rostre ‘de ‘chacune d’elles étant bien conservé, fait 
assez voir que ces deux crustacés doivent former, l’un 
el l'autre ,-une espèce distmcte de celle que nous al- 
lons faire connaître et dont voici la description : 


Hrppozvre ne Deswarers, Hyppotyte Desmarestu, Nob. 
(PL, fig. A4, a,b.) 


Rosrre droit, comprimé, comme lancéolé , serrulé en- 
dessus et en-dessous (25 à 30 dents fines en-dessus, 7 
à 8 en-dessous ) , dépassant les écailles des antennes ex- 
térieures ; qui sont plus longues que le: corps ; filets ‘des 
antennes intermédiaires moiïtié moins Jongs que les an- 
tennes extérieures ; corps transparent hyalin , long de 12 


à. 45 lignes,.0,027 à 0,037. tres: MR 


Corps transparent hyalin, couvert ; ainsi que les 
écailles oulames natatoires.de la queue } de très:petits 
. points verts, quelquefois rougeâtres ; qu’on ne dis- 


(57) 

tingue bien qu’à la loupe ; abdomen composé de six 
anneaux inégaux, arqué vers le troisième article et 
terminé par cmgq écailles natatoires, dont les quatre 
extérieures sont courbées, frangées à leur extrémité 
et plus larges que l'intermédiaire qui est droite, plus 
courte que les autres et terminée par plusieurs petites 
épines , comme réunies; quatre petites epénes sur la 
partie antérieure du test, une à droite et l’autre à 
gauche de chaque œil; yeux noirâtres, mais leur pé- 
dicule de la couleur du corps ; antennes blanchâtres, 
ainsi que les pieds ; les pinces des pieds antérieurs 
petits, et le dernier article des pieds-mâchoires exté- 
rieurs terminé par un faisceau de poils. 

Les œufs qu’on observe en automne, sont ellip- 
tiques , d’un sixième de ligne de diamètre; une femelle 
que nous examinâmes était garnie de deux cents œufs 
ou plus. 

Cette espèce, dont on se procure facilement des 
individus , en visitant les Aerbrers amenés par le filet 
du pêcheur, habite les eaux de la Mayenne, de la 
Sarthe, du Loir, du Thouet et du Layon. 


| DESCRIPTION 
DELA CHENILLE DU BOMBIX HERMINE», 
Par M. COURTILLER, de Saumrr, 


Membre titulaire, non résident. 


LE Bombix hermine que Fabricus réunit au inula 
ou queue fourchue; a été, néanmoins , regardé assez 


(58 ) 

généralement comme devant former une espèce dis: 
tincte de ce dernier, malgré les caractères peu tran- 
chés qui séparent ces deux espèces dans l’état parfait. 

Tout en adoptant cette distinction , que nous 
croyons fondée, nous pensons devoir la motiver plu- 
tôt par des caractères fournis de leurs larves que par 
ceux que peut donner le dernier état de ces bombix : 
les caracières qui doivent servir à séparer ces deux 
espèces étant peu prononcés dans ces lépidoptères 
transformés en papillons, tandis qu'ils sont tout-à fait 
remarquables et distincts dans leurs larves. Ainsi, en 
décrivant la chenille du bombix hermine , celle du 
vinula étant déja connue ( Voy. Godart, noct.tom.7r, 
pag. 160.), et en produisant ici la figure de Fune et 
de l’autre de ces chenilles, nous pensons lever ainsi 
toute incertitude à l'égard de ces deux espèces d’in- 
sectes. 


CHENILLE DU BOMBIX HERMINE, Bombix erminea , 
Godart. 


(PI. 1, fig. 2.) 


. Tête d’un brun-noir, rétractile sous le premier 


anneau, qui n’est pas de couleur cramoisie à son bord. 
antérieur. Corps d’un vert tendre ; une large bande 
de couleur lilas qui part de la tête et couvre tout le 
dessus du corps, se rétrécit sur le troisième anneau, 
qui est relevé en bosse, se dilate ensuite en losange, 
dont le plus grand diamètre se trouve placé sur le 
seplième anneau : cette bande de couleur lilas se ré-— 
trécit encore entre les 10.e et r1.e anneaux, et forme 
un second losange, mais plus petit, qui se termine 


= 


(59) 

à l'extrémité du corps. Du milieu du premier losange 
part un petit trait lilas qui descend jusque sur les 
pattes membraneuses , derrière lequel on voit une 
large bande blanche qui occupe, sur le côté du 
corps, le reste du: septième anneau. Les stigmates 
sont noirs; les pattes membraneuses, vertes; les pattes 
écailleuses , jaunâtres; et la queue, qui est double 
comme celle du vinula, est couverte de points sail- 
lans noirs, qui rendent cette partie aspérulée. 

On rencontre au mois de juin cette chenille sur 
le peuplier dont elle mange les feuilles. 


CHENILLE DU BOMBIX QUEUE FOURCHUE ow VINUIA , 
Bombix vinula, Godart. 


(PL 4, fig. 3.) 


EE —————… — — —…—…—… … …—…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"….…"…—"…"_"."—"_"—".—"———"——"—…""— —…———"———"—— 


SUR LE MELON DÉLICIEUX 


(Cucumis deliciosus ). Planche 1I. 


Par A. Desvaur. 


L'ESPÈCE de Melon que nous voulons faire con- 
naître , est pour ainsi dire perdue dans la science, 
puisque les botanistes , tels que Roëmer , Sprengel, 
De Candolle ,qui viennent de faire des recensemens 
généraux des plantes, ou ne l’ont pas connue, ou 
l'ont si légèrement indiquée, qu’on la voit trois fois 
signalée dans le même ouvrage, et sous des noms 


( 60 ) 

différens (1). Ayant cultivé celte espèce à diverses 
époques dans le Jardin botanique d'Angers, nous 
avons pu suivre ses modifications et la reconnaître 
dans les notes vagues ou irès-courtes données par 
les auteurs. Willdenow, en 1805, dans son Species 
(vol. 4, p.614), avait publié sous les noms de Cu- 
cumis pubescens et Cucurnis maculatus les deux 
variétés de cette espèce, sans mdication du lieu où 
existaient ces plantes, cultivées alors au Jardin de 
Berlin. En r806, Roth, dans le 3.° volume de ses 
Catalecta (p. 327), a publié une courte descrip- 
tion d’un Cucumis deliciosus, comme cultivé en 
Espagne, et sans autre indication d’origme; enfm, 
sous le nom inédit de Cucumis osmocarpon , nous 
avons reçu cette même espèce de notre estimable 
ami le docteur Williams Hamilton, qui lui-même la 
tenait de la province de Carthagène, en Amérique, 
où elle est cultivée et irès-estimée sous le nom de 
Meloncito del olor. 

Cette espèce a les fruits rarement du volume d’un 
œuf d’oie et plus habituellement d’un œuf de dinde, 
avec une forme -elliptique plutôt qu’ovoide. Son 
odeur est des plus suaves, et cependant sa saveur 
ne nous à pas paru répondre au parfum qu'elle ré- 
pand : ce qu’on peut seulement attribuer à la dif- 
férence du climat. Chaque pied donne un assez grand 
nombre de fruits, puisque nous en avons eu jus- 
qu'à vingt sur la variété la plus tachée. 


(1) Prodromus vegetabiliunm. De Candolle, vol. 3, p. 300, 301; 
302. 


( 61 ) 

Si, dans notre opinion particulière sur l'espèce en 
botanique, on nous demandait ce que nous pen- 
sons de ce melon, peut-être, malgré ses caractères 
bien prononcés, en aurions-nous une toute auire 
que celle que nous allons adopter; mais si nous vou- 
lons marcher avec la science, dans son état actuel, 
nous reconnaîtrons le Cucumis deliciosus, comme une 
espèce toute aussi distincte que les Cucumis Melo, 
C. Dudaim , C. Chate ou toute autre, adoptée par 
les botanistes. 

En comparant les proportions générales des par- 
ües , soit fleurs, soit feuilles , de l'espèce qui nous oc- 
cupe, avec celles des parties du melon ordinaire, nous 
ne voyons véritablement que des dimensions moin- 
dres, mais bien plus disproportionnées surtout par 
rapport aux fruits. Les feuilles sont seulement plus 
arrondies et à lobes comme effacés. C’est dans le 
fruit que se trouve surtout le caractère distinctif de 
l'espèce. L’écorce est très-mince, unie, sans sillon, 
et couverte de poils très-courts et nombreux, presque 
comme dans les pêches. 

CUCUMIS deliciosus , caule hirto decumbente: . 
foliis scabris basi cordatis , rotundato-obtusis, ob- 
tusè 5-7-lobatis, erectè dentatis ; fruclibus sub- 
ellipticis , tenuiter pubescentibus, cortice lœvi. 

C. deliciosus A. pubescens (Cucumis pubescens 
W. C. deliciosus Roth, Dec., W., C. osmocarpon 
Ham. ined. Meloncito del olor hispan.), fructibus 
pubescentibus, maturatione immaculatis, flavescen- 
tbus (Voyez PI. IL. ). 


C. deliciosus B. puberulus ( Cucumis maculatus 


(62) 
W. De C.), fructibus pubescentibus maturatione 
subalbescentibus , cortice pallidè viridimaculato. 


Crescit n Americä æquinoxiali in provinciä 


Carthagenæ. Annua. 


MONOIQUE, ANNUEL. | 


TIGES tombantes, hérissées, 
à poils recourbés; obscurément 
à cinq'angles obtus et vrillés à 
côté de la base du pétiole. 

FEUILLES commearrondies, 
cordiformes à la base, dentées : 
à dents courtes, dressées , éloi- 
gnées. . 

FLEURS groupées à l’aisselle 
desfeuilles à pédoncules courts; 
calice campanulé , adhérent à 5 
dents subulées; corolle campa- 
nulée à 5 lobes arrondis avec une 
pointe courte au sommet; fleurs 
pistilifères à étamines avortées , 
courtes, libres, placées au mi- 
lieu de troïs à quatre fleurs sté- 
riles: séyle court à troïs stigma- 
tes; fleurs staminiféres à trois 
étamines distinctes, à anthères 
conniventes sinueuses, et oyaire 
ayorté. 

FRUIT globuloïde ou ellip- 
tique (2-3 pouces de long), 
poilu; à poils courts, écorce 
lisse,très-mince, à dix ligneslon- 
gitudinales formées de taches 
successives : disparaïissant à la 
maturité ; de la variété A passant 


MONOICA, ANNU 24. 


CAULES decumbentes, ob- 
soletè 5-goni, hirii cirrhosi; pi- 
lis adsperis, pellucidis , subre- 
Érorsis. 

FOLTIA. subrotundata, bast 
cordata , dentata. 


FLORES fasciculati atilla- 
res ; calix adhœærens campañula - 
tus 5-dentatus : dentibus subu= 
latis; flore fertili unico, cum 
sierilibus mixto; stylus brevis; 
Stigmata 3. Corolla campanu- 
lata, lobata : lobis obtusis'mu- 
cronulatis ; flores steriles #rian- 
theris, staminibus corollæ inser- 
äs ; antheræ s14atæ conniven- 
tes. 


FRUCTUS. odoratus:; "glo- 
bosus aut ellipticus , pube: tenu 


obductus.: junior wviridis , macu- 


| lis wiridioribus, decem seriaibus, 


longitudinaliter pictus ; adultus 
lutescens ‘absque ullis’ maculis 
(in yarietate A}, aut sibalbes- 


œens, maculis viridibus varie- | au jaune; ou taches très-multi- 


gatus, in varietate B. pliées et comme confuses, res- 


tent visibles à la maturité sur 
un fond pâle, comme dans la 
variété B. 

Les observations présentées dans cette note feront 
connaitre avec cerlüitude, une plante placée sous trois 
noms différens et comme formant trois espèces de 
plantes distinctes dans le Synopsis Plantarum de 
M. De Candolle (en 1829), et dont on ne connaissait 
pas la patrie. Indiquée jusqu’à présent, d’une manière 
vague, celte espèce doit maintenant prendre rang 
sans difficulté dans l’énumération des espèces bota- 
niques. Nous avons fait figurer la variété A : la 
variété B ayant la même forme et le même volume. 


NOTICE 


Sur une nouvelle espèce du genre Taymera. Planche vr. 


Par M. DESVAUX. 


IL paraîtrait que le Thymus cephalotus, publié 
sous ce nom par Linné, n’a été connu par ce célèbre 
botaniste, que sur les figures données par Barrelier, 
et dont Boccone a fait une copie pour son Museo di 
piante rare della Sicilia. Depuis ce temps , les au- 
teurs, qui sur la foi de ces premiers écrivains ont 
parlé de cette plante, n’ont fait que copier les in- 

dications données avant eux et laissé subsister l'erreur 


(64) 

introduite par Linné, qui rapporte au genre 7hyrmus 
une plante qui lui est complètement étrangère. 

Ayant obtenu d’Espagne un végétal qui se rap- 
porte entièrement aux planches , à la vérité un peu 
grossières , citées pour le Thymus cephalotus, par 
tous les auteurs, nous avons reconnu qu’au lieu d'être 
un Thym, c’est une quatrième espèce du genre Zhym- 
bra, et d'autant plus facile à signaler pour nous, 
que nous avons les autres espèces sous les yeux. 
Poiret paraît être le premier botaniste qui ait décrit 
méthodiquement cette plante ( Enc. 7, p.650), mais 
sans en avoir vérifié les caractères génériques ;'et hors 
cela, toute la description qu'il donne convient par- 
faitement à notre espèce. 

On sait que dans le genre Thymbra, le caractère 
est d’avoir les Peurs placées dans laisselle de vastes 

. bractées, plus ou moins colorées, et un calice à deux 

divisions, dont une très-large, à trois pointes irès- 
courtes et conniventes, et l’autre à ‘deux longues: 
dents subulées. 

THvMBRA cephalota. (Thymus lusitanicus cephalo- 
dos squamis capitulorum amplioribus , Tourn. Inst. 
196. Tragoriganum dictamni capite hispanicum , 
Barr. [con. 788. Bocc. Mus, t. 43. Thymus cepha- 
lotus, 1. Sp. plant. p. 826); ‘caulis Zgnosus, bast 
ramosus ;.xann elongati adcendentes ; purpuruscen- 
tes, pruinoso-albescentes ; ramuli avllares densè 
Jfoliati, numerost, breves ; folia petiolata integer- 
rima, oblonga, sub-elliptica, subquadrilinearia 
supra viridi-lutescentibus subtüs pallidis obscurè 
pruinosis marginibus involutis ; flores terminales, 

LA 


( 65 ) 

éapitato-spicatæ , bracteatæ , axillares, conspicuæ 
pedicellatæ ; corolla elongato-tubulosa , calice duplo 
longiora , pubescente-glandulosa ; stamina subin- 
clusa; calyx striatus , tubulosus , margine ciliatus, 
basi subpilosus ; labiæ subæquales , superior lata 
apice obscurè tridentata : dentibus conniventibus , 
inferior bifida : lacinici subulatis margine ciliatis: 
bracteæ enferiores, foliiformes, latæ, subviridæ, 
aliæ lato-ovatæ , membranaceæ, nervosæ , acumi- 
natæ , subadpressè imbricatæ. 

Nous terminerons en rappelant que Tournefont, 
qui avait beaucoup exploré l'Espagne, sous le rap- 
port botanique , a cité trois variétés dans son Thy- 
mus lusilanicus cephalotos (1), et que dès-lors il reste 
quelque observation à faire sur l’une ou l’autre de 
ces variétés. Peut-être même deux seraient-elles du 
genre 7hymus ei l’autre notre Zhymbra. Dans ce cas 
il y aurait aussi un 7hymus cephalotus ; et alors 
Vahl , quiordimairement est exact, citerait avec raison, 
(Symbolæ botanicæ, 3. p. 77.) une plante de ce nom. 
Quant à notre plante, c’est celle que Tournefort a qua- 
lifiée par : Squamis capitulorum amplioribus. 

Nous pensons que le Thymus capitatus du profes- 
seur Lagasca peut être une des plantes de Tournefort, 
mais il est très-différent de notre 7hymbra cephalota. 
C’est aux botanistes espagnols qu'il appartient de lever 
nos doutes à cet égard, s'ils veulent étudier plus ra- 
üonnellement qu'ils ne l’ont fait jusqu’à ce jour, la riche 
et curieuse série de végétaux dont ils sont environnés. 


(1) 120 Squamis capitulorum amphariais ; 2.% capitulo majori : 


3:° capitulo minor. 
e 
), 


( 66 ) 


RAPPORT 


Sur des observations présentées par M. HOSSARD, 
à la Société d'Agriculture, Sciences et Arts d’An- 
gers, sur quelques cas de difformites ; 


Par M. BILLARD, D. M, 


Membre de la Société d'Agriculture, Sciences et Arts: d'Angers, 
et de plusieurs autres Sociétés savantes (1). 


+ L'ORTHOPÉDIE ou l’art de corriger les difformités du 
corps, chez les enfans, est une des plus heureuses 
découvertes de la mécanique chirurgicale ; cet art fut 
long-temps oublié dans une petite ville de Suisse 
où son inventeur le cultivait modestement. Mais la 
France, l'Angleterre et l'Allemagne ont enfin mis 
ses bienfaits à contribution, et nous devons nous fé- 
lciter de voir dans notre ville se maintenir avec succès 
un établissement de cette nature. 

Toutefois, les moyens que l’on emploie pour cor- 
riger les déviations des formes naturelles du corps, 
se sentent encore de l'enfance de ces méthodes, et 


(1) Nota. L'ouvrage de M. Hossard, par l'importance des choses 
qu’il renferme, méritait sans doute de trouver une place dans les 
Mémoires de la Société; mais les développemens nombreux aux- 
quels l’auteur à ététobligé de se divrer pour l’intelligence:de) son 
sujet-rendant-ce-travail- trop volumineux pour pouvoir y être in- 
sété dans’ son entier ,. la Société a-décidé que le rapportplussuc- 
cinct qui en a été fait par M. Billard, serait admis à le-remplacer: 


(67 ) 
c’ést probablement au défaut de perfectionnement des 
machines et de leur application, qu'il faut attribuer 
leur insuffisance ou leurs dangers dans quelques 
cas. 

Mais comme la main des hommes perfectionne avec 
le temps tout ce qu’elle touche, loin de rejeter des 
moyens en faveur desquels plaidént déjà de brillans 
succès, nous devons accueillir toutes les communi- 
cations qui nous sont faites au sujet dé l’orthopédie, 
afin de concourir, par nos encoüragemens et le reflet 
des lumières de la médecine et de la physiologie, au 
perfectionnement d'un art encore naissant, et dont 
lhamanité peut attendre les plus grands services. 

C’est donc avec un véritable intérêt que nous avons 
analysé le travail de M. Hossard, dont nous allons 
essayer de faire ressortir les points esséntiels. 

Cé travail renferme deux obsérvations principales. 

La première à pour sujet un redressement de péeds- 
bots. Ces pieds offraient une luxation complète des 
os du tarse. Le pied se trouvait contourné de ma- 
nière à ce que sa pointe füt dirigée vers la partie 
imterne de la jambe. Deux mois ont suffi pour ra- 
mener les os à leur place respective. On à eu recours 
à des manipulations répétées deux fois le jour , puis 
à l'application d’un appareil modifié de celui de Venel 
et de Jacquard , et qui, à l’aide dés seules courbures 
données à une tige en fer adaptée à une semelle de 
bois , ramène le pied en-déhors en même temps qu'il 
en relève la pointe. C'est par ce moyen que M: Hos- 
sard a guéri plus de trente individus affectés dé la’ - 
même difformité. 


( 68) 

La seconde observation a pour objet une jeune 
personne de 16 ans, d’un tempérament sanguin. 
La colonne vertébrale offrait deux, courbures bilaté- 
rales; la première cervico-dorsale , et la seconde lom- 
baire, formaient des arcs de cercle mesurés par une 
flèche de ,7 à 9 lignes. Cette malade a subi six mois 
* et demi de traitement, pendant lesquels elle a grandi 
de plus d’un pouce. Elle est sortie très-bien guérie. 

Quant à l'appareil auquel M. Hossard a eu. re- 
cours, il en fait un mystère, parce qu’il en est l’in- 
venteur, et que c’est à son perfectionnement qu’il 
doit les résultats heureux qu'il obtient ; 1l s’est borné 
à dire qu'il n’emploie d'extension que ce qu'il en faut 
pour faciliter la souplesse de la colonne vertébrale, 
par un léger allongement des cartilages et des liga- 
mens intervertébraux. Ni lits ni béquilles ne sont 
employés pendant le jour : les malades continuent 
de se livrer à leurs exercices accoutumés. Une cour- 
roie attachée à un busque suffit pour pencher la ma- 
lade dans un sens opposé à la courbure inférieure. 
Telles sont les seules révélations de M. Hossard sur 
sa méthode. | 

Lorsque nous songeons que les contestations qui 
s'élèvent aujourd’hui au sujet de l’orthopédie ne roulent 
que sur l’insuffisance , l'imperfection ou la forme 
nuisible des appareils, on doit regretter que M: Hos- 
sard ne puisse divulguer le sien qu’au préjudice de 
ses intérêts;.car ici nous né pouvons entrer dans au- 
cune discussion sur ses moyens, ni les juger par 
comparaison avec ceux que les orthopédistes ont déjà 
livrés au domaine public. Toutefois il est de notre 


(69 ) 
devoir de proclamer ici le résultat heureux de cette 
méthode; c’est du moins ce que nous pouvons avan- 
cer d’après les faits allégués par l’auteur des obser-- 
vations, puisqu'il ne compte qu’une rechute sur 40 
guérisons. 

Aïnsi des faits nombreux viennent à l'appui de la 
méthode que M. Hossard aime à suivre de préférence 
à l'extension continue, contre laquelle il s'élève avec 
d'autant {plus de raison, qu'il est souvent consulté 
pour dés jeunes personnes qui, après avoir élé sou- 
mises à cétte méthode, viennent trop tard réclamer 
ses soins. 

Telle’ est l'analyse da travail de M. Hossard. Ses 
efforts sont dignes d'éloges, puisqu'ils tendent au 
bonheur’ des hommes. 


De V'Idéal 


DANS LES SCIENCES , LES LETTRES ET LES ARTS 5 
DISCOURS 
Prononcé dans la séance du 14 juillet 1831, 


Par M. BLORDIER-LANGLOIS. 


+ IL est un Idéal attaché à tout ,_et qui en est comme 
Pauréole ;: un Idéal où l’âme humaine ‘aime à se ré- 
pandre , où elle trouve une source de méditations et 
de délices. C’est cetté poésie que Mme de Staël voit 
partout, qu’elle essaie # chaque page de peindre 
cômime elle la’ sent etiqui marque ses ouvrages au 


(70 ) 
coin d’une originalité, d’une profondeur, d’une,sen- 
sibilité qui font d’elle une des illustrations de notre 
siècle. 

Si, dans une statue, le vulgaire ne voit que l’imi- 
tation d’un être qui vécut; si, dans un tableau bien 
fait, 1l est assez heureux pour ne pas prendre le. 
change sur les objets les plus reconnaissables; si les 
sons de la plus donce mélodie ne sont pour lui qu’un 
bruit un peu plus flatteur que ceux qui frappent.or- 
dinaïrement ses oreilles ; combien l’homme que la 
nature a plus favorisé, celui à qui l'éducation a donné 
de nouveaux sens, ne voit-il pas de propriétés mys- 
térieuses et cependant d’un effet irrésistible à cette 
statue, à ce tableau, à cette mélodie? Avec quelle 
indifférence des hommes qui n’ont .que des yeux pas- 
saient devant le groupe de Laocoon, tandis que d’au- 
tres, entièrement sous le charme de l’Idéal, restaient , 
en présence de ce groupe, absorbés dans une ad- 
miration mélancolique et délicieuse ! 

C'est à l’Idéal que l’on doit assigner ces systèmes 
rique qui n’offrent , pour la plupart , que la 
d'ingénieuses personnifications, ét vénérables. par un 
pr à religieux. Un voile trop épais, dira-t-on, est 
étendu sur ces fables ; et les ténèbres de leur origme 
ouvrent un champ irop vaste aux conjectures.:. ; mais 
ces fables existent, elles ne peuvent. être, prises à la 
lettre, et leur antiquité dépose, de ce que peut l'Idéal 
sur les imaginations, plus elles sont. jeunes, et} par 
conséquent vraies. ÀÂu reste, 1l semble démontré que 
les fables antiques ne.sont ; comme je viens de l’avan- 


(71) 
cer, que l’Idéal de la nature. C'était le sentiment de 
Boileau qui dit à leur sujet : 


Tout prend un corps, une âme, un esprit, un visage. 


C'était encore celui de Delille, comme on le voit 
dans des vers charmans de son poëme de l'Imagi- 
nation, dont voici quelques-uns : 

C'étaient des fictions, mais non) pas des chimères, 
Chaque, être, en dépouillant ses :traits imaginaires, 
Reste dans la nature et dans.la yérité. 

Cette considération de l’Idéal nous semble si res- 
pectable , que nous pardonnerions presque à Marcel 
ce mot que l’on a si souvent tourné en raillerie : « Que 
de choses dans un menuet! » Tant de gens ne voient 
rien dans les plus grandes choses ! Heureux Marcel, 
pour qui un menuet était ua si riche spectacle ! Qui 
sait si rien existe en effet, que ce qui existe dans notre 

âme ? 

Ce n'est point ici seulement un thême académique, 

un paradoxe que je m’avise de traiter, Messieurs, en 
débutant avec vous. Il eût été vraiment malheureux 
d'occuper d'un vain fantôme, d’une chimère, des es- 
prits aussi solides , aussi justes que les vôtres. Je 
savais que je trouverais en vons-mêmes de quoi me 
confirmer dans ma pensée ; ce n’était point une pure 
abstraction. C’est par cette sensibilité pour ce que 
j'appelle l’Idéal, que nous voyons plusieurs d’entre 
vous briller d’un vif éclat. L'art de guérir comporte- 
t-il essentiellement cette méditation profonde, cette 
étude de l’état moral de l’homme, cette élévation de 
pensée qui font du médecin une. sorle de divinité pro- 


(72) 

tectrice ? Non, Messieurs: et les disciples d'Hippocrate 
qui font partie de cette association ont su franchir 
les bornes positives de la science , pour s'élever, avec 
la liberté du génie, à ces hautes considérations, qui, 
dans l'antiquité , rendirent Hippocrate si célèbre et si 
révéré, et ce nom n’est point venu sous ma plume 
uniquement pour former une vaine périphrase. La 
science des lois ; l’art de la parole ont leur routécom- 
mune ; mais ce n’est point en s’y tenant, que des 
magistrats, que des légistes qui siègent parmi vous, 
ont atteint la hauteur où on les admire. Les sciences 
naturelles s’honoreraïent-elles, comme elles ont droit 
de le faire, de leurs adeptes ici présens , si ces adeptes 
avaient toujours résisté au génie de l'innovation, qui 
souvent est celui des découvertes ? Les antiquaires dont 
s’honore celte société pénétreraient -ils avec succes 
dans l’obscurité des âges, sans ces clartés qu’eux seuls 
y aperçoivent briller ? clartés qui firent retrouver 
au voyageur Lechevalier la topographie de l'antique 
Troade , à Châteaubriand la place où fut Lacédémone, 
a Montesquieu les titres qu'avait perdus le genre hu- 
main ,-et qu'il lui rendit dans son Esprit des Lois ; 
clartés à la lueur desquelles Marchangy peignit sa 
Gaule poétique, et Victor Hugo son étonnant ou- 
vrage de Notre-Dame de Paris (1). 

Je vous laisse, Messieurs, considérer vous-mêmes 
ce que Sont amitié, l'amour, le patriotisme, quand 


(1) Nous ne mettons point ces auteurs sur la même ligne, 
nou ne voulons parler que de ce que nous ayons vu dans leurs 
#rages qui se rapporte à notre sujet. 


(75) 
ces passions ont atteint l'Idéal ; de quel’ éclat ‘elles 
brillent alors , et combien, dans leaf état positif, elles 
s'offrent froides et décolorées. 

Ta section d’agriculture, dans cette société, pour- 
rait sembler un double emploi, par rapport à la 
section de même nature; dans la Société Indastrielle 
de cette ville, si vous n’aviez l'intention, Messieurs , 
d'élever vos spéculations au-dessus des besoins ordi- 
maires’, et'si vous n’ajoutiez à vos travaux dans cette 
parie l’Idéal qui doit leur donner un autre caractère. 
C'est dans ce sens'que l’on entendra vos encourage- 
mens à l’horticulture. Quoi de plus charmant que cette 
sollicitude pour l'empire de Flore; et quel champ vous 
ouvrez aux formes les plus gracieuses , aux images les 
plus riantes ! Les fleurs sont la poésie-de la végé- 
tation. 

L'histoire, Mood est le récit des faits ; mais qui 
pénétrera dans les pensées, qui sondera les intentions 
secrètes ; qui imterprétera les motifs, si ce n’est la fa- 

-culté devineresse à laquelle on ne parvient que par 
une sorte d’exaltation produite par l’Idéal des faits, 
par l’Idéal des personnages ; qui nous identifie à nos 
héros, qui nous fait agir en eux , et réveiller des pas- 
sions endormies depuis des ‘siècles au fond des tom- 
beaux ? A laide d’une grande instruction , mais aussi 
d’une imagination reproductrice , le passé reparaît 
sur la scène du présent, tout palpitant de naturel 
‘et de vie; mais une vaste instruction ; ‘déniuée de ce 
pouvoir créatéur, dispose de froids mannequins; leur 
imprime une | attitude invariable ; ébauche quelques 
traits superficiels de l'existence; et fait mouvoir les 


(74) 

morts de ce mouvement galyanique: qui fait peur ou 
pitié aux véritables lecteurs. Il me serait plus facile 
de vous citer des historiens de cette dernière classe, 
de ceux qui.ont exhumé des cadayres, que de,vous 
en offrir qui en aient ressuscité ; mais il-existe de,ces 
derniers, votre mémoire vous les rappellera , je n’a 
pas besoin de vous en présenter le modeste tableau. 
Notre école ancienne n’y fut pas heureuse; et Vol- 
taire , qui, dit-on , répandit tant de vie dans ses 
histoires, Voltaire ; dont l’imagination était si puis- 
sante , la subordonna trop à ses intentions satiriques. 
Si ses histoires plaisent ; cé n’est point du charme de 
l'illusion, Elles occupent et divertissent Pesprit, mais 
elles ne ravissent point, elles ne transportent point 
Tâ âme. Voltaire est toujours dans la société de ses per- 
sonnages, il les inspire , il les meut, il les égare pour 
le soutien d’une cause qu'il a pale et pour la- 
quelle, loin d'appeler l’Idéal, iln’a pas trop de tous 
ses moyens de calcul et d’arrangement. Un roman- 
cier, que vous connaissez tous, me semble en pre- 
_ mière ligne dans cet Idéal de l’histoire, qui , selon 
moi, estila véritable histoire. Jamais .on n’a repro- 
duit avéc plus de vérité les hommes et les faits; jamais 
on,n’a fait une illusion plus complète. Heureux si.ce 
grand écrivain , descendant de l’Idéal pour traiter un 
sujet. qui.en.eñt.été le triomphe, .n’eût pas déshonoré 
sa plumeïen, pensant déshonorer un grand homme! 

Ce que, nous disons des historiens, nous devons 
l'entendre.,. à plus forte raison, des traducteurs. Le 
traductenr, doit être l'écrivain original lui-même; il.a 
ses affections, ses haïnes; il a yécu à la cour, ou 


(75) 

loin de la cour; il'fut favorisé de ceux dont äl traite, 

ou ceux-ci ne lui furent connus ni par des bienfaits, 
ni par des offenses, nec beneficio ; nec injurid cognili. 
Il était Oyide à Rome, quand Ovide écrivait ses Poé- 
sies d'Amour; il était Ovide, sur les bords du Pont- 
Euxin, quand. Ovide écrivait ses, touchantes mais 
pusillanimes lamentations ; il eut le malheur le plus 
poignant que puisse éprouver un poëte, celui de 
vivre au, milieu de gens qui ne peuvent l'entendre. 
Non intelligor illis! Et, pour cela, vous concevez 
qu'il n’y,a que la puissance de l’Idéal. Je vous en 
atteste, vous, Messieurs, que yoire goût ou vos fonc- 
tions (portent à traduire; je vous. atteste de dire de 
quoi vous fütes le plus contens, ou des traductions 
que vous dûtes à votre savoir , ou de celtes que créè- 
rent, votre illusion et votre enthousiasme. Ainsi , 
Messieurs, conyenons qu’une vraie traduction est une 
œuvre de génie, et.qu'il est infiniment plus difficile 
de traduire consciencieusement uné page, que d’en 
écrire vingt sous sa propre inspiration, 

C’est ce dont.se doutaient bien peu ceux qui, dans 
les siècles passés ( j'en excepte Amiot },,.se livrèrent 
au métier.de traduire, Ils rendaient.le.sens des mots, 
maïs l'esprit , mais l’âme des mots ; que devenaient-ils 
sous leur. plume de plomb? Le manœuvre poursuit 
sa besogne, sans sortir én idée de la poudre de sa 
bibliothèque; il la poursuit, comme letisserandalonge 
sa toile sur son métier; et, quand il a suivi tout en 
sueur, tout haletant, son original ;.le malheureux 
se jette en d’autres angoisses; il glose; il commente, 
il met ses livres et sa mémoire à la torture, pour 


(76) 

parler de tout à propos de rien ; il mvoque toutes fes. 
langues au secours de la sienne qui lui manque, vé 
ritable Babel, où l'on ne s'entend plus, pas même 
celui qui en fat l'architecte! ridicule ; auquel porta 
d’heureux coups l’ingénieux commentaire de Watha- 
nasius, comme on dit que l'excellente plaisanterie de 
Cervantès mit fin aux merveilleux romans de Cheva- 
lérie. | 

Le triomphe de l’Idéal est le Théâtre. C’est , aussi 
bien que dans l’Histoire, que l'évocation doit être par- 
faite ; ét comment l'opérer ; si ce n’est par une étude 
approfondie de ses héros , si ce n’est par cette grâce 
qu'ilest rare qu’on n’obtienne pas, si on l'appelle avec 
ferveur ; cette grâce dé pénétrer dans tous leurs se 
crets ; dans toutes leürs passions? Mais il faut vouloir 
de bonne foi être instruit de toutes ces choses ‘il faut 
ensuite ; dans ses ouvrages, ne mettre du sien que 
le moins possible: Après avoir créé ses personnages, 
l'auteur doit les laisser agir avec une entière liberté. 
Molière est peut-être le seal de nos écrivains qui ait 
rempli cette condition du véritable drame. Corneille 
et-Racine ne l'ont pis fait toujours, et Voltaire, 
beaucoup moins qu'eux. Voltaire avait un esprit trop 
inquiet, pour ne passe glisser à chaque instant der- 
rière ses personnages ; c’est son ‘défaut. Onle lui a 
pardonné:en faveur de sa philosophie; maïs, en lisant 
sont Théâtre , on se rappelle trop souvent cette ob- 
servation d'Horace : non érat'his locus. en 
*1Mais que diraï-je, Messieurs , de notre Théâtre 
moderne ? Si l'on pouvait écrire d'inspiration sans 
sortir des affaires , des distractions du monde et du 


(745) 

toarbillon des plaisirs; si l’esprit pouvait hanter en 
même temps les vivans et les morts, si l’on pouvait 
tenir auprès de soi à la tribune politique, à la table 
des banquets , au sein des bals et des routs lé spectre 
des temps passés que l’on veut produire sur la scène; 
à la bonne heure ! Mais ce miracle est impossible: 
On n’acquiert le grand art du Théâtre qu’au sein de 
la méditation et du recueillement : aussi trouve-t-on 
bien plus aisé de diviser en scènes quelques chapitres 
d’une histoire ou d’un roman, et même, pour s’é- 
pargner l'embarras du choix , de partager en périodes 
scéniques tout un roman , toute une histoire. 

On a voulu faire au Théâtre l'essai d’une sorte 
d'Idéal, mais nous n’avons vu , dans ces déplorables 
tentatives , qu’une invasion ennemie , qu’une charge 
imposée par l'étranger, contre laquelle se sont ré- 
voliés le goût et la fierté nationale ; qu’une intrusion 
ridicule ; qui venait contrarier toutes nos affections, 
tous nos souvenirs. Certes, si j'étais anglais, j’ado- 
rerais Shakespear ; si j'étais allemand , je resterais 
éveillé aux pièces de.Shiller et de Goëthe, et j'aurais 
apparemment de bonnes raisons pour cela ; mais, 
français, j'aimerais mieux me vouer au dur Lemierre, 
à l'obscur et prolixe Ducis, qui surent allier à leur 
manière l'enthousiasme aux convenances, que d’é- 
crire Cromwell, et de faire scandale sur la scène avec 
Hernani, Christine et Henri I. . 

. Me permetirez-vous, Messieurs, de poursuivre 
une série déjà trop longue de réflexions qui ne vous 
apprennent rien ? Me pardonnerez-vous surtout celles 
que je vais encore hasarder sur une matière que.je 


(78) 
connais à peine , vous dont plusieurs en ont une cot: 
naissance approfondie ? 

Un art, qui se trouvé d’autant plus dû domaine 
de l’Idéal, qu'il approche lé plus dé la vérité; an 
art dont les effets sont un des plus doux comme 
dés plus inexplicables mystères de l’organisation de 
tout être vivant, et surtout de la nôtre , la musique 
est encore un de ceux d’où cet Idéal est générale 
ment disparu, remplacé par un luxe qui éblouit, 
qui surprend, qui pique la curiosité, sans rien dire 
à l'âme. Rien ne semble plus vide dé pathétique et 
d'Idéal que le plus grand nombré de nos opéras 
modernes. Il ÿ à plus d’Idéal dans les deux comé- 
dies charmantés de Beaumarchais, telles qu’elles sor- 
tirent dé ses mains, que dañs tout lé laborieux clin- 
quant dont les ont surchargées Mozart et Rossini. 
Et, à part les difficultés vaincues, l’admiration qué 
produisent chez les adeptes, les Wéber, les Rossini, 
les Mozart, vaudra-t-elle jamais les touchantes sen- 
sations, lés douleurs délicieuses, lé bien-être inex- 
primable que faisaient naître en noûs les inspira 
tions du dernier siècle ? Les premiers ont tué l’Idéal 
par leur sciencé; nous l’avons pérdu sans compen- 
sation: Nous avons le superflu, pour me servir 
d’une expression de Beaumaréhais, sans posséder le 
nécessaire. Ils sônt d'autant plus coupables que, 
sans nous charmer, ils ont dissipé lé charme que 
nous trouvions aux productions de leurs devanciers ; 
qu'ils sont parvenus à nous faire trouver trop sim- 
ples des ouvrages dont le prestige fit notre bon- 
heur auirefois, ét! vit encore dans nos souvenirs. 


(79) 

Sans contredit, il faut de fortes têtes pour combi- 
ner tant d'accords, et mettre en mouvément tant 
d’autémätes à instrumens el à voix; mais que nous 
importe la tête d’an harmomiste, à nous qui ne 
voulons qu’un cœur qui sympathise avec le nôtre, 
qu'un esprit qui nous fasse, sans trop d'ere 
partager ses ravissemens ? 

L’Idéal dans les sciences et dans les arts en est 
la partie entraînante; c’est lui qui enfante les mi- 
racles, qui porte aux plus grands sacrifices, et 
pour quoi lon est heureux de hasarder son repos 
et sa vie; c’est lui qui transporte Volney parmi 
les ruimes d'Héliopolis ét de Palmyre, Châteaubriand 
dans les déserts du Nouveau-Monde, dans la Grèce 
et dans la Palestine, théâtre jadis de tänt de gloire 
et de prodiges; nos savans de l'expédition d'Egypte 
aux tombeaux éternels des Pharaons et aux gigan- 
tésques monumens de la Thébaïde; Byron sur un 
sob qu’avaient foulé les Miltiade et les Léonidas ; 
c’est l'déal qui fait de ce jeuné poète un des plus 
sublimes que l’oni ait admirés dépuis Homère. 

Mais, objectera-t-on, cet idéal, qui conduit à 
de si grandes choses, cet Idéal égare. -- Il égare! 
eh! qui le sait? le Dieu seul qui apprécié nos 
aventureux travaux. Cet Idéal inspire à Descartes 
ses tourbillons, à Newton sa puissance attractive, 
à Bernardin de Saint-Pierre ses Æarmonies ét son 
Système des Marées; Buffon, sur les aïles de FI- 
déal emporté jusqu’à l'aurore des ternps , west plus 
maître de résister au démo qui prétend lui ré- 
véler la création des Hot et Buffon assigne à 


( 30 ) 
là nature ses Epoques. Sublimés égaremens! si.ce 
sont des égaremens; .car qui sait ce qu'est la vé- 
rité?.….… Témérités, mais qui attestent seules, les 
hautes facultés de l’homme et sa céleste origine ! 


Sans le feu de l'audace il n’est point de génie. 


(CozarDeu , les Hommes.) 


Répondons encore à une objection, et nous fini- 
rons par-la. L'Idéal conduit à une sorte d’arbitraire 
favorable aux écoles modernes de littérature et d'arts. 
À Dieu ne plaise que nous reculions devant les 
conséquences du principe que nous traitons, que 
nous concevions des limites au génie , lorsque nous 
réclamons son indépendance! Non, Messieurs. Qu’à 
ses risques et périls l'homme de talent peigne, et 
l'âme et l'esprit, et tout le moral de ses sujets , 
doués ou non de la vie vulgaire ; qu'il prête aux 
fleuves, aux montagnes, aux mers, aux abîmes toute 
leur poésie, toute leur éloquence ; aux monumens 
le récit de leur jeunesse, de leur virilité, de leur 
mort; qu'il n’y aif point de secrets pour lui dans 
les hommes et dans les choses; que notre David, 
s’écartant des routes ordinaires , et peu soucieux des 
formes extérieures, quelque parfaites qu'il les fasse, 
soit surtout le statuaire de l'âme, de l'esprit et-du 
cœur; que Lamartine révèle des affections religieuses 
en une poésie neuve et pleme de richesses et de 
charmes; que Hugo, doué de .plus de mouvement 
et de vie, fécond jusqu’à l'excès, innovaleur jus- 
qu’à la témérité, mais observateur à qui rien :n’é- 
chappe, laisse son lecteur encore moins choqué de 


(81) 

quelques grotesques, que ravi de mille beautés; ap- 
plaudissons à ces travaux, qui doivent donner au 
XIX.e siècle un caractère distinctif, une physionomie 
propre. Honorons nos illustres morts, mais quel- 
qu’étonnés que nous soyons de certaines créations 
contemporaines, étudions-les, jugeons-les sans hu- 
meur, et attendons. Soyons touchés de ces efforts, 
s’il nous est prouvé qu’ils soient consciencieux. Nos 
prédécesseurs se sont créé une gloire; voyons quelle 
gloire nous nous créons à notre tour. Soyons nous, 
mais sans jeter sur nos devanciers un œil dédaigneux 
qui nous serait d’un fâcheux présage. À quelle condi- 
tion une renommée durable attend-elle nos œuvres 
nouvelles ? À la condition que la majorité les ac- 
cueille , et que les autenrs s’approuvent eux-mêmes, 
quand ils se seront considérés et jugés de sang- 
froid. Le désir de bien faire à ses aberrations : mais 
vient le temps où nous les reconnaissons, où nous re- 
tournons sur nos pas, où nous nous faisons justice 
à nous-mêmes. Voilà les lois auxquelles l’Idéal ne 
refusera pas de se soumettre. La force des choses 
entraîne et corrige, et rien n’est mieux corrigé que 
ce qui l’est par le génie qui erra. 

Peut-être, Messieurs, mes jugemens ne trouve- 
ront pas d’écho dans chacun de vous. Je l'ai craint, 
ét cependant je n’ai pas hésité à les mettre au jour: 
cette liberté littéraire me semble l'âme d’une Société 
telle que la vôtre. Celui qui se trompe peut avoir 
au moins le mérite de provoquer des notions plus 
vraies et des doctrines plus justes. Je n’ai.rien dit 
que je ne l’aie pensé, et voila mon excuse. Je suis 

6 


(82) 
prêt à rendre hommage, à qresngee aura rectifié 
mes..opinions. 


MÉMOIRE 


Relatif. à une quantité considérable de Médailles qauloises , 
trouvées vers le milieu du mois d'octobre 1898 , dans un 
champ près du pont de la Chaloire ; à la porte de la ville 
d'Angers (1) ; 

Par M. GRILLE, 


Bibliothécaire de la ville d'Angers et Conservateur des antiquités de 
Maine et Loire. 


LA découverte d’une grande quantité de Médailles 
gauloises , qui a eu lieu vers le milieu d’octobre 1828, 
dans un champ, à la porte d'Angers, estun évène- 
ment qui doit d'autant plus intéresser ceux qui s’oé; 
cupent de nos origines et de la numismatique.du 
département , que ces pièces trouvées sont la monnaie 
des premiers habitans de notre territoire, et que jusqu’à 
ce moment elles pouvaient être regardées commeassez 
rares dans nos cabinets. Comme cette découverte. est 
encore récente , que beaucoup de ses résultats. de- 
meurent ignorés, je vais dans l’intérêt des amateurs. 
et pour répondre en même temps à l'honorable appel 
que la Société a bien voulu me faire, je vais , dis-je, 


1 STIS 

(1) Ce mémoire rédigé sur la demande de l'Administration mu- 
nicipale, a ensuite été adressé à l'Académie royale des Inscrip- 
tions et Belles-Lettrés ; qui en à rendu He Fe sa séance du 
16: juillet, 18304 f À 


( 85 ) 
exposer ici Ce Que J'ai vu par moi-même et cé que 
j'ai pu recueillir de notions au sujet de toutes ces 
Médailles. 

Je parlerai d’abord du lieu où elles gisaient , de 
leur nombre, de leur composition métallique et de 
leur exécution sous le rapport de l’art. Leur module, 
leur origine, la variété et l'explication de leurs types 
et de leurs figures , viendront ensuite, et me condui- 
ront naturellement à émettre quelques conjectures sur 
l'endroit même où ce trésor a été trouvé. 


Lieu où gisaïent les Médailles. 


1.0 Par rapport au lieu où gisaient les Médailles : 
ce lieu , comme on se le rappelle, est un champ joi- 
gnant la ferme et le pont de la Chaloire et dont 
l'exposition est au sud-ouest. Rien de bien notable 
jusques-là ne distinguait ce petit com de terre : il 
fallait pour lui valoir un peu de célébrité que le pro- 
priétaire actuel se mit en frais de le fouiller et d'y 
creuser un réservoir. Les travaux exécutés dans la 
partie supérieure du champ, à l’angle renirant d’un 
mur de clôture, ne présentèrent rien d’abord qui dût 
attirer les regards ; mais quelle ne fut pas bientôt 
la surprise de ceux qui y étaient employés, quand, 
débarrassés des déblais enlevés à la surface du sol et 
arrivés à une profondeur d'environ 5 pieds, ils aper- 
çurent dans le point milieu du réservoir une espèce 
de puisard rempli de terre glaise, et, dans cette terre, 
d’une couleur verdâtre et à moitié saturée d’eau, une 
masse considérable de pièces de métal coagulées en- 
semble et tellement oxidées qu’à la première vue elles 


( 84) 
n’offraient , pour ainsi dire, aucune espèce d’em— 
preinte. 

Peu familiarisé avec ce genre de monnaie , le pro- 
priétaire ne vit en elle qu’une vile matière , sans forme, 
sans dessin, qu'il pût-expliquer ; aussi se contenta-t-1l, 
dans ce prenuer moment, de prélever sur cette masse 
énorme, une fraction de quelques centaines de pièces 
qu’il emporta chez lui comme échantillon et pour dis- 
tribuer à ses amis; après quoi le puisard fut livré aux 
ouvriers et aux Curieux, pour en user et s’y appro- 
visionner tout à leur aise. L'affluence fut grande, 
comme on le pense bien; pareille découverte à la 
porte d’une ville d’un certain ordre ne manque point 
son effet, surtout quand il est question de pièces rares, 
qui ont traversé les siècles, et que, pour les voir et 
se les procurer, il ne s’agit, en quelque sorte, que 
d’un simple signe à des ouvriers et d’un léger pour- 
boire. 


Quantité de Pièces trouvées. 


Passons maintenant à la quantité présumée de ces 
pièces : le terme d’immense , dont je me suis déjà 
servi, ne dit rien de trop. Les petites, je le répète, 
étaient là par milliers (1). Aucun doute qu’elles n’y 


(1) Jamais pareille quantité de pièces n'avait été découverte, 
que je sache, dans le département. On pouvait bien citer , jusques 
là, les médailles romaines d’argent au nombretde {00 , à peu près, 
et toutes à fleur de coin, trouvées il y aune quinzaine d’années aux 
environs d’Ingrandes ; on pouvait citer encore la précieuse décou- 
verte de plus de 150 médailles d’or, faite à la butte des Moulins, 
près le château de Saumur, en 1825; et parmi ces médailles, 2% 
Barc-Antoine, fils, qui d’abord-acheté cinquante francs, et re- 


(5) 

atent été jetées à dessem. Ce puits était une cache, 
et ces pièces, dans le temps où elles ont été enfouies, 
représentaient un trésor réel. Cela est d'autant plus 
évident qu'à l'époque de leur fabrication , qui est 
celle du premier et du second âge de la Gaule, on 
ne connaissait point en ce pays d'autre monnaie que 
celle de cuivre, de potin et de bas argent. L'or, comme 
signe représentatif, y étail au moins fort rare et à 
bas titre. 


Composition métallique de ces Pièces. 


Quant à la composition métallique de toutes ces 
pièces, 1lest à remarquer qu’à l’exception d’une seule 
qui. est en e/ectrum et du module de quinaire , le 
cuivre sert de base à la majeure partie d’entr’elles, et 
s’y.combine plus ou moins avec le plomb et l’étain ; 
mais il y a cette différence des petites aux grandes, 
que, dans celles-ci, le cuivre domine et se montre 
irès-apparent , tandis qu'il entre à peine par petites 
portions dans les quinaires, en qui, d’ailleurs, la cou- 
leur semble indiquer la présence d’un peu d'argent. 


Module. 


Outre la petite médaille d’electrum relatée ci-dessus, 
nous avons deux et même trois modules à signaler 


—" 


vendu ensuite à M. Rollin, marchand'de médailles au Palais-Royal, 
à Paris, la somme de millé francs, est passé'de là, au cabinet 
de M. le prince de Talleyrand, où il manquait, et où il a été 
pa le triple; on pouvait citer enfin les 12 à 1500 médailles 
romaines du Bas-Empire, de moyén et pétit bronze, découvertes 
par la charrue en 1826, dans une métairie de S.t-Maïtin de Beau- 
preäu; mais tout cela, eu égard au nombre, n’approche point du: 
trésor de la Chaloire, et doit être HE pour rien. 


( 86 ) 
dans les médailles. trouvées : le moyen bronze , le 
petit et le quinaire. Le premier , extrêmement rare, 
puisque je n’ai rencontré qu’une seule médaille qui s’y 
rapporte ; le second se comptant par centaines , et le 
troisième par milliers (1). 
Dessin et fabrication sous le rapport de l'art. 


Rien de plus rude et de plus grossier , sous le rap- 
ort de l’art, que toutes ces médailles. Les figures 
qu'elles représentent sont tellement barbares, qu’à 
l'exception de celles indiquées sous les numéros 3 
et 4, c’est à grand’peime qu’on parvient à les déter- 
miner..….. De simples enfans , abandonnés au seul ms: 
tinct de leur âge, produiraient quelque chose de moïns 
ridicule peut-être. C’est en fait de dessin ; l'absence de 
ioute règle, de toute convenance et de toute pro- 
portion. 

Pour ce qui a trait à la fabrication : les grandes 
sont évidemment coulées; l’appendice qui dépasse le 
cordon dans la plupart d’entr’elles , et la bavure du 
métal lindiquent assez. Les petites, exemptes de ce 
défaut, paraissent avoir été frappées au marteau , et 
je les crois, par cela même, d’un âge un peu plus 


rapproché (2). 


().,Ces petites médailles ,, si abondantes ici , sont un «module 
que je ne me rappelle pas avoir ya nirencontré nulle part. Bout- 
teroue, Montfaucon, Martin, Grosson, Caylus, Pellerin, Gri- 
vaud de la Yincelle, Mionnet., men citent et n’en ont fait graver 
aucunes... IL serait curieux d'apprendre que ces médailles fussent 
véritablement inédit es. à ) rt 

(2) On fixe trois époques pour la fabrication des Médailles gau- 
loises. 


(87) 
Origine et A ntiquite. 


Nulle difficulté sur leur origine , dont il nous reste 
à parler. Elles sont bien gauloises, et des deux âges 
les plus éloignés, comme nous Pavons dit. Leur fa: 
brique plus ou moins grossière ; leur manque de lé- 
gendes , et leurs types symboliques et monstrueux 
sont là pour nous le prouver. 


Types et F Iœures. 


Reste à voir .à présent quels sont sur ces mêmes 
pièces, les images chimériques et:les symboles ‘qui 


Dans la première, c’est-à-dire à partir des temps les 'plns re- 
culés jusqu’à la prise de Rome, l’an 387 ayant J. C., la monnaie 
gauloise composée d’un mauvais potin et coulée, est marquée au 
coïn de la barbarie la plus complète. 

Dans la deuxième précédant la conquête, les pièces frappées 
généralement au. martéau et d’un métal,plus pur, présentent aussi 
relativement au dessin, un peu plus de correction, ét semblent, 
pour les têtes surtout, une faible copie des Médailles STECUES, «+.» 
L'émission de la monnaie d’argent et d’or date de la fin de cette 
deuxième époque ;: mais le dessin !de cette monnaie répond à son 
titre et est également très-inférieur ; témoin notre petite Mé- 
daille décrite sous le numéro premier. 

Dans la troisième, c’est-à-dire après la réduction de la Gaule 
en province romaine , la morinaie gauloise, par une sage Poli- 
tique, du vainqueur ;: ‘continuant à ayoir cours, prend sous ces 
nouveaux maîtres un certain degré. de correction qui l’éloigne 
de plus en plus de la barbarie. Dés légendes grécques et, latines 
l'enrichissent, et le nom des villes à qui le, privilège de se, gou- 
verner par elles mêmes était laissé, s y montre,en toutes lettres. 
Cette observation s'applique aux Médailles Autonomes de notre 
cité. Lies mots ‘d'Andec. et d’Andecab. y sont joints à l’em- 
preinte, d'un ‘cavalier où d’un cheval Jibre : signe non équivoque 
des immunités et des franchises dont’elle jouissait. 


( 88 ) 
appartiennent aux usages, aux arts et à la croyance 
de ce peuple. 

D'abord, commençant par la petite Médaille d’or, 
ou pour mieux dire d’electrum , cotée Ne 1.7 (pour 
ce N° et les suivans ,-voy. pl. 3), .et dont il est fait 
mention ci-dessus ; jecrois y voir d’un côté une ‘tête 
de profil, casquée et tournée à gauche; et, au revers, 
un cheval informe au galop , disposé de la même 
manière. 

Passant ensuite à l’unique exemplaire de potin qui 
se soit présenté à moi du module de moyen bronze, 
et qui figure sous le N° 2, on distingue parfaite- 
ment d’un côté, un aigle éployé, et de l’autre, une 
nef équipée de son mât, avec flamme ou pavillon , 
si je ne me trompe , emblème manifeste d’un peuple 
commerçant et possesseur de nombreuses colonies au- 
delà des mers. 

Eu égard, en troisième lieu , à la deuxième gran- 
deur ; voict les différentes variétés de types et. de 
symboles que j'y ai signalés. at À Te 

1.2 N.e,3. Tête humaine. tournée à droite 1 sans 
barbe et de profil, avec chevelure bouffante tom- 
bant à la hauteur des épaules, et enveloppée d’une 
espèce de torsade ou réseau. 07. s0HÉVOTe LE 

REVERS. Aigle éployé, regardant. à gauche: 
( Cuivre.) L AMSRRAI 

Le dessin de cette Médaille et de la suivante ; sans 
être ce qu'on peut appeler correct, ne laisse pas d'être 
plus satisfaisant que celui de toutes les autres pièces, 
trouvées au même endroit ; le métal semble en êtreréga- 
lement beaucoup plus doux , ce qui indique.une époque 
de fabrication moins éloignée. 


(89) 

Les exemplaires de ce type ne sont pas communs ; 
j'en pourrais citer à peine deux ou trois ;! indépen- 
damment du présent. 

2° No 4. Autre tête tournée à droite, et pareil- 
lement ornée de tresses. 

REVERS. Aigle debout, battant de l’aile et la tête 
inclinée vers le sol, où il semble apercevoir et vou- 
loir becqueter quelque chose. ( Cuivre.) 


Variété unique, à ma connaissance. 


3. N.e 5. Autre tête d’où partent des espèces de 
rayons arrondis par le haut, tournée à gauche. 

REVERS. Cheval au galop, grossièrement.dessiné. 
(Poun.) 

Une Médaille exactement semblable à la présente; ‘tant 
pour la figure que pour le revers, a été découverte au 
commencement de ce siècle à Bratus Pantium, près de 
Beauvais, et se trouve décrite dans une dissertation sur 
les camps romains de la Somme, publiée par, Mons. le 
Comte d’'Allonville , à Clermont-Ferrand , format in-4.o,, 
1828. ( Voyez pages 163 et 182 de cet ouvrage. } : 

La nôtre est la seule de ce type qui ait été dé- 
couverte dans le puisard de la Chaloire. 

4e N.° 6. Tête casquée et de Du me du. dessin 
le plus barbare , à droite. 

REVERS. Un animal à long cou, au corps effilé 
et à courtes pattes, ayant une longue queue -recour- 
bée sur le dos, tourné à gauche. Type également 
unique. ( Cette Médaille est en potin, et a la cou- 
leur du plomb.) 


5.0 N.e 7. Tête nue d’un fort relief et du cessin 


( 90 ) 
le plus barbare ;-disposée dans le même sens que 
celle qui précède (1): 

REVERS. Sorte d’animal fabuleux: ayant la tête! 
l’encolure et,le ‘corps d’un cheval, la queue d’un 
lion , les jambes ou pour mieux dire les pattes d’un 
oiseau de proie (l'aigle, je suppose ), avec de longues 
serres et. repliées sous lui; caractères symboliques 
qui, pris en détail, se rapportent précisément aux 
animaux que la Gaule nourrissait, et dont l’image, 
comme attribut de sa force, de son activité, de son 
indépendance et de son courage, flottait sur ses en- 
seignes guerrières et convenait parfaitement à sa 
monnaie. 

Cette médaille, la plus curieuse, sans contredit, du 
puisard'de la Chaloire ; est aussi celle dont le type s' * est. 
trouvé le plas multiplié. ( Elle:ést en potin. y 

6. Numéro 8. Même tête et même revers ; sinon 
qu'ici la tête de l'animal, au heu d'être celle du 
cheval , représente sidubiéeilt celle de l'Urus où 
du BON ( Potin. ) 

7 Numéro 9. Même iête encore et même ani- 
mal; mais ce dernier tourné en sens inverse des 
numéros 7 et 8, c’est-à-dire à gauche. Com.) 
Commune. 


8.° Numéro ro. Tête coiffée d’une espèce de casque. 
à droite. 


(1) Outre le relief dont il s’agit ici, il est à noter que toutes 
ces, Médailles de deuxième grandeur, sont légèrement bombées 
du côté de la tête, et tant soit peu concaves à l’opposite ; les 
quinaires au contraire, ont proportionnellement beaucoup. moins 
dereñef et sont ornées d'un grénetis qui manque aux premières. 


(9) 

Revers. Même animal chimérique à tête de Prison, 
tourné à gauche. ( Potin.) 

9. Numéros 11 et.12, Même tête, 

Revers. Objet imdéterminé. ( Potin.) 

Ces deux médailles couvertes d’une belle patine et 
qui ont l'aspect du plomb, sont rares dans la collection. 

10.0 Numéro 13. Même tête casquée, informe et 
de profil ;. ou encore, peut-être bien , un ours ou un. 
autre animal accroupi, tourné à droite, que je ne 
puis bien déterminer. 

REVERS. Espèce de nœud mystique. (Cwivre.) 
Unique. 

Voir pour ma double interprétation du premier: côté 
de cette médaille, le dessin que j'en ai fait, et qui 
figure, sous le même numéro, au tableau général des 
types joints au présent mémoire. 

11.2 Numéro 14. Tête à gauche, si je ne me irompe. 

REVERS. Cheval à droite au galop, fort mal des- 
simé, avec une’ queue de lion. (Potin.) Rare. 

12.0 Numéro 15. Cheval à droite, au galop. 

REVERS. Indéchiffrable. 

L'empreinte de ce revers, quoique bien conservée, offre 
des caractères tellement confus , tellement indécis et obli- 
térés, qu'il m'a semblé impossible de là déterminer... Je 
n'ai pas connaissance d'ailleurs que, dans toute se masse 
des pièces trouvées, il se soit rencontré un second type 
semblable à celui-ci. (Potin , superbe patine... 

Arrivés à la troisième grandeur , et continuant dé 
suivre la série de nos numéros, nous avons à dé- 
crire plusieurs types et figures qui ne s'offrent point 
dans les métaux et les modules. qui sortent de nous 
occuper. 


(9 ) 

n° Numéro 16. Tête barbare, vue de face, avec 
sourcils épais, moustaches et pommettés proéminentes. 

REVERS. Le Sus gallicus, et au-dessous ;'une es- 
pèce d’arche. (*Bas-argent.) Type sans nombre. 

29 Ne 17: Même Médaille, mieux marquée pour 
le révers. (Bas-argent.) 

3.0 N° 18. Même tête et même animal, mais 
celui-ci franchissant à la course l’e espèce d’arche dé- 
signée ‘ci-dessus. ( Bas-argent.”) 

4 N° 19. Tête de profil à droite, et ornée d’une 
sorte de diadême. 

REVERS. Le Sus gallicus. ( Bas-argent. ) 

Elle est la seule pièce, parmi des milliers de qui- 
naïres , où j'aie vu la tête dans cette position. 

® Ne 20. Même tête, tournée à gauche. ? 
se Le Sus es ( Bas-argent. ) Exces- 
sivement commune. 

6° N° 21. Même Médaille. 

SANT Mieux marqué, (Bas-argent.) 

Ne 2. La même tête, à gauche. 

Ron Tête d’hippogriphe on de griffon. 2 

Variété unique | et, hrès-remarquable entre toutes nos 
Médailles de 3.2 grandeur. Je pars 101 , bien entendu , 
de la supposition que mes yeux ne me trompent pas ; 
que cette figure symbolique . . telle. que je la vois existe 
bien , est bien « contenue réellement dans notre empreinte : 
je suis d'autant plus disposé ? à la faire entrer dans le sys- 
tême monétaire de l’ancienne Gaule, que nous trouvons 
dans le module de noyenne grandeur , un animal dont 
la mystique composition offre à peu près les mêmes em- 
blèêmes , et que’, Sur ce point encore , nos aïeux se ren- 

contreraient avec les peuples les plus PR Plusieurs 


(93) 
villes grecques en effet ont un griffon sur leurs Médailles ; 
il était consacré par elles au soleil ; et, chez les Egyp- 
tiens, ce signe hiéroglyphique était à la fois l'image de 
la force , de la vigilance et de la valeur. 

8.e N:° 23 et dernier. Sorte de palmier ou de ca- 
ducée, accompagné de deux espèces de nœuds en 
forme d'S. 

REVERS. Double semi-zône concentrique , cou- 
ronnée de rayons en zig-zag, le tout formé et par- 
semé de perles. ( Bas-argent.) 

L'S , fréquemment employé sur les Médailles et les 
mn gaulois a représentait ; à ce qu' on croit, sui- 
vant sa configuration , le croissant et le déclin de la lune. 

Les types des quinaires, pour être moins variés, 
comme on vient de le voir, n’en sont pas moins en 
rapport avec les usages et la religion du peuple dont 
nous parlons. Les têtes humaines, tant de face que 
de profil, qui sy montrent en très-grand nombre, 
me paraissent être en effet un hommage rendu par 
Jui au soleil et à la lune, ou, pour mieux dire, au 
dieu de la nature que le Gaulois adorait par-dessus 
tout, et que ces astres représentaient à ses yeux ; à 
moius qu’on n’aime mieux voir dans ces figures les 
images des rois ou des chefs des cités gauloises (1). 

Le sanglier, Sus gallicus, si fréquemment em- 
ployé dans les types monétaires des Celtes, était, 


(1) L’assertion de Grivaud de la Vincelle, sur la rareté des têtes 
vues de face dans les Médailles gauloises, se trouve ici pleine- 
ment démentie par le fait:, oir: Antiquités Gauloises et; Ro- 
maines , recueillies dans les jardins du Eucembourz en 1807 ; 


in-4.o, page 182, 


(94) 
j'imagine aussi, un signe sacré qui leur rappelait et 
leurs forêts mystérieuses, et leurs chasses , et leurs 
expéditions belliqueuses , et leurs sanglans sacrifices. 
Cet animal ne figurait pas seulement sur leurs mon- 
naies ; suspendu à leurs bannières, on le voyait aussi 
précéder leurs cohortes guerrières , et présageant à 
leurs yeux la victoire. 
Telles sont les figures que j'ai pu reconnattre et 
déterminer parmi la quantité immense de pièces qui 
sont passées sous mes yeux. 


Bracelet ou Armille en bronze ; et Fragment de 
poterié. 


Parvenu à la fin de la description ou interpré- 
tation de nos Médailles et de leurs types, je ne dois 
point négliger de faire mention d’un Bracelet en 
bronze, et de quelques fragmens de poterie retirés 
du même puisard, et que j'ai acquis pour mon ca- 
binet particulier, du propriétaire de la Chaloire. 

Ce bracelet, anneau ou armille, comme on voudra 
l'appeler ( voy. pl. 4, £. 1.), semble, par sa pe- 
titesse , avoir été à l’usage d’une femme , et se rap- 
proche, pour la forme, de ceux que portaient les 
Grecs et les Romains. Sa largeur est d’environ 
3 lignes ; 1l est orné d’un grénetis renfermant un 
triple rang de filets dentelés, et sa conservation du 
reste est assez belle (1). 


(1) Les Gaulois, d’après le témoignage de Diodore de Sicile 
(liv. 5), faisaient entrer les bracelets dans leur parure, et leurs 
femmes en portaient d’or. 


(9%) 

Pour larpoterie, qui est d’une pâte grise commune, 
aveé uné couverte brane ; c’est un ouvrage fait à 
la roue, et qui ressemble absolument, et pour la 
pâte et pour la forme, aux poteries romaines vul- 
gaires que l’on découvre tous les jours soit dans nos 
thermes , soit dans les environs de l’'amphithéâtre, 
soit dans les #erres noires (1); je n’y vois de diffé- 
rence que la localité. 


Réflexions et conjectures sur ce trésor et sur l’en- 
droit où il était dépose. 


Que penser de cette découverte à présent? ..….… 
Pourquoi ces médailles en si grand nombre enfouies 
dans un champ isolé, où nul monument, nulle trace 
d'habitation gauloise , nulle antiquité ne se ren- 
contrent ? 

J'interroge les alentours, je consulte les noms, 
la tradition, les personnes, et rien ne me répond... 
Il y a bien là, pourtant, dans le voisinage, un terire 
qui donne à songer : ce tertre s’appelle la Motte... 
Mais ce n’est qu’un nom ; et un nom tout seul, après 


tout, est quelque chose de trop vague pour s'y 
arrêter. 


(1) Les champs des Terres-Noires, situés au sud de la ville 
d'Angers, un peu en-deçà des champs de S.t- Martin, sont une 
mine très-abondante pour l'amateur d’antiquités. Indépendam- 
ment d’une assez grande quantité de Médailles impériales de tous 
les modules , et d’un beau médaillon en bronze, de Marc-Au- 
rèle, qui y ont été trouvés, je. possède dans mon cabinet un 
vase de verre antique , une urne cinéraire en terre rouge et 
un lacrimatoire qui en proviennent également, 


( 96 ) 

Demeurons-en donc là de nos conjectures, pour 
le moment... L'important, ce sont nos. Médailles; 
ce sont les types, les variétés qu’elles présentent et 
que nous avons signalés. Peut-être , avec le temps, 
ce que nous en disons servira-t-1l à jeter quelque j Joue 
sur cet endroit , à y provoquer des fouilles... Tout 
se lie dans ces recherches ; un point mène à és 
et c’est par le fil de l’analogie, souventes fois, que 
l’on arrive à d’heureuses découvertes ! 


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Lrlh.ole Cor renber a Ninle. 


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Lahole CHsssrnceer à Serres 


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PL 4. 


LTith. del Goypoerlier LNerles. 


TABLE DES MATIÈRES. 


è = Page. 
Inrropucrion historique aux Mémoires de la Société 
d'Agriculture , Sciences et Arts d'Angers. ........ L 
Règlement constitutif de la Société........,....... - ‘xxj 


Agriculture. 
Des changemens physiques et chimiques qu'éprouvent 
les terres dans l’opération de l’Æcobuage et des résul- 
tats que peut en retirer la pratique agricole, par 
M. DEsvaAUX..../4...4.......esseereetes # 
. Quelques observations sur la culture en pépinières du 
prunier sauvageon appelé Damas noir, par M. Le- 


BRETON aîné , pépiniériste......:........,.....e 32 
Notice sur une variété de cerise Ne inédite ;-par 
M. NÉE D Rte D au Une. 36 
Culture de l'Ognon- Patate , par M. Desvaux....... 38 
Description d’une nouvelle variété de rosier. ......... . 49 
_Scrences. US 
Note sur une description mécanique de la Chaïnette, 
par M. Diane MED PA LP POI TERRE 4 
- Analyse du fer arsenical d'Angers et deS.t-Pierre-Mont- . 
‘Hmart, par M. _LesreToN, pharmacien.......... 45 : 
Description d’une nouvelle espèce de crustacé, par et 
DES VITRE Are aol ele sie rare ele eine «64e sale 55 
Description de la chenille du Bombix hermine, par 
ME CODRMILLER 0 -. eee see te deetagenisess ce 0 57 
‘Observations sur le Melon délicieux ( Cucumis delicio- à 
sus), par M. DesVaux. lens .e eee se - 59 
Descriptiôn et observations sur une nouvelle espèce du 
genre Thymbra, par M. Desvaux................ + 63 
… Rapport de M. Brrrar», relatif à un mémoire de 
M. Hossard sur quelques cas de difformité.. ...... . 66 
Lettres ét Arts. 
Discours sur l’Idéa], par M. BLORDIER.. cc 69 


- Mémoire relatif à à des médailles gauloises , trouvées za 
pre nee DE GRILHR ete... 82 


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DE LA SOCIÉTÉ sy 


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DE L'IMPRIMERIE DE L. PAVIZ. 
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1832. 


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(97) 


SUR LA GREFFE DE LA VIGNE, 


PAR M. BOURGOUIN ({). 


LA greffe de la vigne est bien connue: mais les 
heureux effets qu’elle produit, les résultats avanta- 
geux qu’on en peut obtenir, voilà ce qui n’est pas 
apprécié dans notre pays vignoble comme il méri- 
terait de l'être. C’est pourtant le moyen le plus sûr 
et le plus prompt de rajeunir une vieille vigne, d’en 
prolonger la durée. C’est par les effets de la greffe 
qu ’on peut, presque sans perte de temps, tr ansfor- 
mer une vigne blanche d'un mauvais cépage en une 
bonne vigne rouge, et réciproquement; enfin, chan- 
ger en tout ou en partie l'essence d’un vignoble, 
avec la certitude de ne perdre qu’une seule récolte 
et même qu’une partie d’une récolte, puisqu’un grand 
nombre de greffes porte du fruit dès la première an- 
née. De plus, il est bien constaté que l'influence de 
la greffe sur la qualité du fruit est presque toujours 
avantageuse. Quelques agronomes très-mstruits vont 
même plus loin : ils pensent que la greffe offre une 
voie pour affranchir la vigne de ces mauvais goûts 
de terroir qui infectent les vins de tant de contrées, 


(1) Lu à la séance du 3 mai 1832. 


A) 


(9%) 
et que ce pourrait être aussi un moyen d’acclimater 
les espèces tirées des contrées méridionales (1). 

Si des expériences bien faites venaient confirmer 
cette dernière opinion , on serait fondé à espérer de 
voir un jour prospérer dans nos contrées ces cé- 
pages renommés dont on n’a pu jusqu’à présent en- 
richir d’autres pays, parce que leur qualité a promp- 
tement dégénéré toutes les fois qu’on les a transportés 
dans un climat moins favorisé par la chaleur. 

Tels sont les principaux avantages de la greffe. 
Plusieurs cantons du Midi et de l'Est comprennent 
parfaitement ces avantages, et l'usage de la greffe 
Y est-généralement adopté. Nous savons même que 
depuis quelques années il s’est introduit dans le haut 
Anjou, et parüculèrement aux environs de Sau- 
mur (2). Ilest probable qu’une pratique aussi avan- 
iageuse se répandrà bientôt aux alentours d'Angers. 
C’est dans l'intention de l’encourager que j'ai re- 
cuelll les faits suivans qui sont le résultat d’un essai 
fat avec soin sur ma prepriété , et dont j'ai lieu 
d’être plemement satisfait. 

Avant d'entrer dans le détail d’une expérience qui 
me paraît eoncluante, qu’il me soit permus de dire 


(x) On :trouve cette idée. dans -l’excellent, ouyrage de M. Le 
Noir, surila culture de la vigne, page 89. Paris, in-8.®, 1829: 


(2) Les vignerons -greffeurs dont.je me suis, servi étaient des 
environs de Saumur.. Ils m’ont certifié que depuis quelques an- 
nées, dans leur pays, le mode de greffer sur racine était em- 
ployé par beaucoup de propriétaires jaloux d'améliorer l’essence 
de leurs vignes, ou d’en changer les mauvais cépages. 


(99 ) 
un mot des différentes espèces de greffes qu’on peut 
pratiquer sur la vigne. 

La greffe au-dessus du sol est sans contredit la 
greffe par excellence: c’est elle seule qui peut nous 
faire apprécié” avec exactitude le degré d'influence 
que le sujet reçoit de l'insertion du rameau. Mais 
cette greffe est difficile à la reprise, et quoiqne pra- 
tiquée généralement chez les anciens, les modernes 
Pont presqu'abandonnée pour la greffe en terre 
dont le succès est assuré: C’est’ donc de la greffe 
sous lé sol que je vais m'ôtéipéer: 

Il -y à deux manières de greffer en terre. L'une 
consiste à greffer en fente sur le jeune bois où 
aventin, qu’on couche ensuile en terre las que le 
cep en forme de provin. Cêtte greffe réussit très 
bien; mais opération est plus délicate et plus longue 
qué/la greffe sur racine que je conseille, que j'ai em- 
plôyée avec succès, el qui est aujourd'hui pratiquée 
de préférence à toute autre dans un grand nombre 
de vignobles. {1 n’y a qu’une circonstance où il sem- 
blerait indispensable de recourir à la greffe sur le 
jeune bois, c’est lorsqu'il s’agit de regarhir par le 
provignage des places vides: 

Voici au surplus le détail de l'expérience que j'ai 
faite chez’ moi. Désirant constater les effets de la 
greffe sur racine, je m’adressat à trois habiles vi- 
gnerons-greffears qui se rendirent sur ma propriété 
située à une licue d'Angers, dans la commune de 
Sainte-Gemmes. Je leur désignaiun demi-quartier 
environ de vieille vigne blanche que j'avais !ré- 
solu de transformer en vigne rouge. J'avais choisi 


( 400 ) 
la portion la plus basse et la, moins favorable, de 
mon enclos, par deux motifs: le premier, afin 
d’avoir moins.de regret.en cas de non réussite ; ! le 
second, pour m’assurér, en cas de succès , que cette 
opération |.pouvait réussir dans -les. expositions les 
moins favorables. 

Ce fut vers le milieu d’avril 1830 ;. lorsque le tra- 
vail.de la sève était en pleine activité, que mes gref- 
feurs se rendirent.sur le terrain. Le travail-se fit en 
ma présence de la, manière suivante : on déchaussait 
les ceps avec une houe jusqu’au collet des racmes. 
Arrivé à on choisissat, le plus près possible des 
racines, un. eüdroit uni et sain pour scier le cep ; 
après, quoi.la-partie sciée était égalisée avec un cou- 
teau;bien tranchant. Le cep était ensuite fendu par 
le milieu au moyen du tranchant d’une forte .ser- 
petite et d’un marteau, .Un coin se.glissait au centre 
de la fente pour la temir ouverte, tandis qu’on pla- 
çait une greffe de chaque côté. Le coin enlevé, on 
posait entre les deux greffes, sur le milieu de la 
fente..et, pour la fermer , un petit morceau aminci 
de bois de vigne ; et le mréflinte avec sa houe, re- 
couvrait le tout de terre, de manière à res) une 
petite butte tout autour du cep , .ne.laissant sortir 
les greffes que de; deux yeux. Il'est à. remarquer 
qu’on ne.se sert ici m1 de ligature , ni de cire pré- 
parée; ce qui simplifie, et abrège beaucoup le tra- 
vail. Quand le ceptest de grosseur ordinaire, la 
tente se referme naturellement sur les greffes et les 
Bent assez serrées pour . n’avoir à redoutér aucune 
avarie. Ce n’est que lorsque vous vous. adressez! à 


( 104 ) 

un cep nouvellement provigné ou trop faible de 
bois, qu’on à recours à la ligature! Pour opérer 
avec célérité , il 'faut'avoir plusieurs greffeurs, dont 
Vüns’occupe uniquement à tailler les greffes et à 
les ranger au fur'et à mesure dans un vase”où il 
y à de l’eau en suffisante quantité pour que le bec 
des greffes y puisse plonger. La greffe 'se prend or- 
dinairernent partie sur du bois de Fannée, partie 
sur'du' bois de: l’innée précédente. Je dis’ ordinai- 
rement , ‘car quelques personnes n’employent que 
du bois dé l’aännéé’et réussissent également. La greffe 
&e taille comme à l'ordinaire; le bec de flûte doit 
commencer immédiatement au-dessous du nœud par 
lequel le ‘bois de l’année tient à celui de deux'ans. 
C'est en taillant la vigne qu’on fait sa provision de 
greffes. On en’ forme “ee bottes qu’on conserve au 
frais soit dans une cave, soit enfoncées de quel- 
ques! pouces en'terre, à l'exposition du nord ; ‘et 
cela jusqu’au moment de s’en servir. 

Voilà toute: l'opération ; elle est très-facile et d'un 
succès cértain, Il'convient de choisir un béau temps. 
S'il pleuvait pendant où immédiatement après l'opé- 
ration, la reprise des greffes serait’moins ‘assurée. 
Iline resteplus d'autre précaution à preridré que 
de ne point déranger; ‘pendant la première année, 
la petite ‘butte deterre’élevée autour dé chaque cep, 
si ce n'est pour la purger destmauvaises herbes. C’est 
dans cette butte de terre que la grefle_ émet elle- 
même, des racines. -qui, concourent ainsi, avec _celles 
du. cep. à imprimer, ce développement PER qui 
nous.chärme et nous étonne: 


( 102 ) 

Sur sept. cents ceps.que j'ai fait greffer, huit, seu- 
lement n'ont pas réussi. Les autres ont poussé avec 
vigueur, excepté, quelques-uns dont; les, bourgeons 
ne se.sont développés qu'àa.la;sèye d'août et.du prin- 
temps.suivant. Une centaine environ,,m’ont, donné 
dès la même, année, des, grappes, qui.sont |arrivées 
à maturité. Mais, c’est l’année suivante , 1831, que 
j'ai été dédommagé de mes soins. Ma, vigne, greffée 
s’est chargée de belles grappes, et ma récolte! a été 
comparativement bien, plus forte que dans mes,autres 
vignes. J'ai obtenu bien. près d'une .demi-barrique 
de: vin rouge_dont la.-qualité promel d’égaler, les 
meilleurs.crus d'Anjou (uhomatcibèn 
Un. résultat aussi posilif et. aussi sâtiéfaisdois ne 
me donne-t-il pas le droit de conclure que la greffe 
de la,vigne sur, racine offre des avantages iticon- 
testables, et. qu'elle mérite. d’être encouragée dans 
notre pays, Je puis déjà; citer, un,propriétaire,de 
notre ville (M: Bigot marchand, tailleur.) qui-a 
fait: subir : à sa:vigne. blanche; la même. opération , 
el.qui a réussi aussi complètement; que::met:6. 

Ainsi, “pour résumer en peu dé: mois: les avans 
tages de Ja, greffe, sur racine, nous, dirons. qu ‘ele 
régénère .une ; vieille «vigne -et; -q'elléceni: prolonge 
la durée; qu’elle offre.un moyen-sûviet; faciles pour 
irier ,, choisir, et, remplacer les-mauvaiscépages. qui 
se rencontrent dans. presque. tous: lessvignobles, ; 


j £ } ob gite. 9449921 


(1) Ce YEButdé GLEHE détruire lassertion de M. Ten de 
Berneaud qui prétend (dans son Manuel’du Vigneron, qu'on dôit 
éviter de croiser le blanc avec le:rouge;: pagéa4ostParis, 1827. 


( 105 ) 
qui abondent dans quelques-uns; qu’elle sert enfin 
à changer en totalité ou en partie l'essence d’une 
vigne, et tout cela sans courir d'autre risque que 
celui de perdre une partie d’une récolte. 

Je termmerar cette notice en disant un mot de 
l’étonnement d’un de mes voisms de campagne, bon 
vigneron lui-même, mais vigneron routinier. Il se 
moqua presque de moi lorsque je km fis part de 
l'essai que je voulais tenter. Je ne tardai pas à 
prendre ma revanche. Vers le milieu de septembre 
dernier, j'allai trouver ce voisin, et sans le pré- 
venir, je le conduisis droit à ma vigne greffée, qui, 
de vigne blanche, se trouvait transformée en vigne 
rouge. Il me serait difficile de peindre toute la sur- 
prise et le: plaisir de ce brave homme, lorsqu'il 
aperçut, en place des vieux céps mousseux de 
l'année précédente, une jeune vigne rouge vigou- 
reusement élancée autour de ses échälas , et! ok 
chaque cep pliait sous le poids de sept à huit belles 
grappes bien fournies et du plus beau cramoisi. 
Son étonnement fut si grand qu’il me régarda pen- 
dant cinq minutes sans parler. Tout son regret, me 
dit-il enfin; était de n’avoir pas connu ; trente ans 
plutôt ; un procédé aussi avantageux. 


(404 ) 


ERREUR 


DES AGRICULTEURS ET DES BOTANISTES 


Le @eff des Abussiis (1), 


PAR M. DESVAUX. 


DEpuIs long-temps nous avions soupçonné que, 
relativement au TEFF d'Abyssinie, il existait une 
erreur qui-se.propageait et, dans, les ouvrages d’a- 
griculture et dans ceux de botanique. Ce. n’est 
qu'après avoir fait, en dernier lieu, une: révision 
de la : famille .des  Graminées , . de cette famille de 
plante si intéressante pour l’homme, que nous avons 
découvert l'erreur que nous allons, signaler. 

Depuis un temps indéterminé, les Abyssins eul= 
tivent, comme plante. céréale,. une éspèce qu'ils 
nomment, 7e/f. (2). Réussissant dans toutes: sortes 
de terrains, le Zeff,sert à faire une grande parte 
du pain d’une population estimée à plus d’un mil- 
lion et demi. Bien que le froment soit cultivé en 


Abyssinie, son usage est plus particulièrement des- 
ds 


(:) Lu à la séance du 19 novembre 183r. 

(2) Qu'on trouve écrit Tef, Tif; mais dont la véritable pr'o- 
nonciation est Teff, mot qui doit ayoir la même racine que le 
Typha des Grecs. 


( 105 ) 
né à lopulence, malgré que le riche fasse aussi 
usage du pam de 7e/ff. 

Dans tous les ouvrages de botanique et d’agri- 
culture, on a cité pour être le Ze/f, une plante 
du genre Paturin (Poa), et bien connue dans la 
science sous le nom de Poa abyssinica. Mais 
nous croyons pouvoir être en droit d'assurer que 
ce Poa, par la ténuité de sa graine et par tout ce 
qu'on a dit du Teff, que les fruits ou caryopses 
du Paturin d’Abyssinie enfin n’ont jamais pu être 
l’objet d’une culture comme céréale, et que le Teff 
dont a parlé Bruce, n’est point ce Poa, maïs un 
véritable Panicum. 

Le voyageur Bruce, qui a résidé plusieurs an- 
nées en Abyssinie, n’était pas botaniste, cependant 
ce qu'il dit du Teff dans sa relation, et la figure 
qui accompagne sa narration, démontrera, si l’on 
veut bien y réfléchir, que tout ce qu’il en dit est 
étranger au Poa abyssinica. « La plante, rap- 
» porte-t-il, se compose de feuilles minces, du mi- 
» lieu desquelles sort.un tuyau d'environ 28 pouces; 
» qui se divise, à huit pouces environ du sommet, 
» en\petites branches... Les fleurs sont eramoiï- 
» sics..s Les graines sont renfermées dans une 
» ‘enveloppe consistant en, deux feuilles creuses en 
». forme conique, lesquelles ; en, se joignant, font 
» UNE. COSSE conique et très —pointue. Les: grams 
»!:sont :oblongs ; et gros ‘au plus comme une tête 
d’épingle. » 

Dans cette description imparfaite; sans doute; et 
dans la figure qui s’y trouve jointe et que: nous 


ÿ 


( 106 ) 
pensons avoir été faite sur les lieux, il est impos- 
sible de méconnaïître un Panicum ; toute grossière 
que soit la figure, toute incomplète que soit la 
description du Teff, et rien n’y convient au Poa 
abyssinica. 

Le premier botaniste qui a publié le, Poa abys- 
sinicarest Aïton ; et Jacquin en a donné une figure. 
Depuis ce temps, agriculteurs et botanistes ont cité 
le Teff comme étant-ce Poa. Cette plante a dû être 
communiquée au jardin de Kew, par Bruce lui- 
même; comment n'est-ce pas le 7eff ? 

IL faut se rappeler que Bruce dit expressément dans 
sa relation, qu'il y a eu une grandeconfusion de 
faite dans les graines rapportées de:son'voyage , 
par la faute-de celui auquel il'avait confié le détail 
de l'arrangement de ces graines ; et il se justifie 
par-A de plusieurs erreurs qu'on luiavait attribuées. 
C'est probablement par cette ‘cause que le Poa 
abyssinica.est parvenu à usurper üne réputation 
qu'il'ne méritait nullement. Les preuves de cette 
méprise sont si évidentes pour nous, que ‘nous 
ne les ferons pas ressortir par de plus longs détails. 
Mais’ nous dira-t-on, quel est le véritable 7e/f ? 
c’est ce que nous allons essayer de chercher. 

Dans les Hlustrations des Genres, par Lamarck'; 
2.° 903 , nous trouvons un Paricum coloratum 
bien connu des botanistes ; maïs il lui est associé 
uné variété B, à chaume ‘plus ‘élevé, qui est indi- 
quée comme provenant d’Abyssinie , et l’on sait que 
Bruce seul ; vers cette époque , ‘nous a procuré des 
grames'de cette contrée , et qu'il'en envoya à Paris 


( 107 ) 

du.tempstoù écrivain le savant, professeur Lamarck. 
Nous,croyons même posséder un échantillon authen- 
tique. de cette plante. Bien. que Lamarck ait rapporté 
plus :tard, la plante d’Abyssinie à son, Panicum 
læve.. elle ! en. est . essentiellement. distincte ;! aussi 
l’ayons-nou$ décrite sous le! nom de Panicum T eff. 

Il.est probable.qu’on a confondu ce Panic avec 
ce.qu'on nomme, //erbe, de Guinée, qui. est une 
plante de:.ce genre.et sur laquelle il règne de la 
confusion dans les auteurs. IL'est à présumer que 
notre, plante. renire dans la série des modifications 
désignées sousile nom général, d’Æerbe dé, Guinée ; 
Brucedit même qu'il.y a plusieurs variétés de Zeff, 
dont. les unes font du, pain plus. blanc. .que les 
auires. Bruce me dit,pas.si.sa plante ;est -vivace ou 
anuuelle MAIS NOUS .SOMmMES peisuadé qu’elle: est 
vivace, ainsi que toutes-celles.qu’on a-nommées herbe 
de.Guinée (_Panicum polygamumSw., jumentorum 
Pers.) On peut. voir dans noire, travail surles 
graminées, n.° 157 ; la description du Panic Teff.(x). 


:SUR L'ENGEUMEN: 


PROPRE A PRÉPARER LES ARBRES DESTINÉS À UN 
VOYAGE DE LONG COURS" (>), 


Far N. E. LÉBRETON mue, Fépiniériste à Angers. 
28 


AE opération de détail d’horticulture, qui n’est 
ps anis doute une chose nouvelle, puisqu’ ‘êlle a été 


4 


» G) Voyez dans ce volume : 'OReedane sur les Graminées 
2%) Lu à la Séance du 5 Avril 1832. 


(. 108 ) 

pratiquée depuis plus de quarante ans à Paris, mais 
qui semble oubliée dans les ouvrages où lon doit 
naturellement supposer qu’elle serait mdiquée , est 
celle de préparer d’une manière particulière les raci- 
nes des végétaux ligneux destinés à un long voyage 
ou à être envoyés au-delà des mers , afin de préser- 
ver lesracines de la dessication , ce qui naturellement 
a lieu après une longue extraction hors de térre. 

Un procédé qui m'a toujours réussi et qui sous 
les yeux de M. Merlet, directeur du ‘jardin de‘botaz 
tanique , a été pratiqué par mon père sur un! millier 
de pieds d'arbres fruitiers expédiés ’il‘ÿ à trente ans 
environ ; à Philadelphie ; ét dont quelques pied$ don- 
nèrentmême des fruits l’année de leur plantation en 
Amérique , mérite d’être recommandé. Il consiste à 
immerger les racines dés arbres qu’on veut préparer, 
dans un mélange de moitié fiente récente dé bœuf où 
vache et moitié terre fortement argilleuse où ‘argile 
leuse::s’il est possible : le tout tenu à consistance de 
bouillie. Ayant laissé sécher à demi la première couche 
dont se-couvrent les racines par l’effet-de leur im- 
mersion , onles{plonge successivément et avec la 
même précaution, jusqu’à ce que l’enduit ait à-peu- 
près d’une à deux lignes d'épaisseur (1 millimètre 
et demi à 2 millimètres): en prenant la précaution 
que les divisions des racines ne s’agglomèrent pas 
en masses après chaque, préparation, Lorsque 
l'englumen est bien fixé et presque sec, on entoure 
les racines , la tige et les branches principales , d’une 
couche de mousse sèche , de trois à sept lignes ( 5 à 
15 millimètres) d'épaisseur, qu'on retient par de très- 


( 109 ) 


mince ficelle tournée en spirale. Les arbres doivent 
être, couchés ensuite dans des caisses de longueur 
convenable, traversées par des barres solidement 
établies , pour y fixer les tiges au moyen de ficelle, 
et l’on remplit tous les interstices de mousse, de 
manière à ce qu'il n’y ait aucun vacillement. Les 
arbres à feuilles persistantes ou dont la végétation 
n’est pas interrompue, doivent être préparés de 
même , mais en trouant les caisses pour y laisser 
circuler l’air. Si l’on est obligé de supprimer quelques 
branches, on recouvre l’entaille par un peu de mastie 
à greffer, tenu liquide à basse température et com- 
posé de parties égales de cire jaune , soufre, résine, 
poix noire et cinq de poix. Ces précautions prises, 
les arbres peuvent supporter plusieurs mois étant 
disposés ainsi, et pousser avec la même vigueur 
que s'ils sortaient des pépinières. 


DES STALACTITES SOUTERRAINES 


OÙ 


PRÉTENDUES FULGORITES ( Planche V. Fig. 1 et 2), 


PAR M. DESVAUX (1). 


IL est à regretter que les sciences soient souvent 
moins riches de faits qu’encombrées pour ainsi dire 
de notions erronées, et nos travaux les plus ordi- 


GP 


(:) Lu à la séance du 22 décembre 1831. 


( 110 ) 
naïres se réduisent à rectifiér les érréurs dé no 
devanciers , en préparant peut-être de nouvelles 
erreurs à relever, pour ceux qui doivent hériter 
de nous. 

Avant de savor que les corps dont nous allons 
parler, eussent été signalés par un nom particulier, 
celui de Fulgorite, nous les avions étudiés en place, 
et nous étions loin d'imaginer qu’on pût leur sup- 
poser une origine ignée. 

En 1823, cherchant des espèces végétales, au 
milieu d’une très-vaste sablonnière (quartz arénacé), 
dans l’arrondissement de Saumur, nous remarquâmes 
un assez grand nombre de corps d’une configura- 
tion allongée presque régulièrement coniques, et dont 
nous pûmes à diverses fois réunir un assez grand 
nombre d'échantillons , pour en orner nos collec- 
tions et en faire envoi aux miméralogistes. Cette 
localité, au voisinage d’un bois, près du chemin 
de Saumur à Loudun , à quelques pas du lieu 
nommé la Belle-Étoile, présente un sable quarizeux, 
mêlé de beaucoup de fer oxidé et de calcaire, au 
milieu duquel sont placés verticalement et sous la 
forme de cônes allongés et renversés et plus rare- 
ment sous celle de longs cylindres (voy. pl. V, 
fig. 2 ), les corps dont nous nous occupons. 

On avait déjà observé ces modifications minérales , 
puisque nous trouvons dans la science une théorie 
sur leur formation, déduite du ‘fait suivant. On a 
remarqué qu’une. forte décharge électrique, dirigée 
sur une masse sablonneuse, déterminait la formation 
d’un pett cône , composé par l’agglomération des 


( 111 ) 
portions witrifiées par l'action de l'électricité. De 
ce fait on en a conclu la formation des corps que 
nous étudions, et delà aussi le nom de Fulgorie , 
qui leur a été imposé. 

Nous ne nous arrêterons pas à réfuter une sem- 
blable théorie , elle ne peut se soutenir dès qu’on 
étudie les choses dans le lieu où la nature nous 
les a offertes. 

Une erreur assez généralement adoptée , c’est que 
la nature minérale est maintenant inerte ; qu’elle 
morganise plus rien, si l’on en excepte les corps 
concrétionnaires calcaires; et cependant Spallanzzani 
a prouvé que des grès se formaient journellement 
près de Messine ; un minéralogiste français à dé- 
montré l'accroissement journalier dans certaines cir- 
constances , des cristaux de roche ( quartz hyalin 
prismé ) ; nous avons vu se former sous nos yeux 
les Pouddings ferrugineux connus sous le nom de 
Grison . dans le département de la Vienne; et 
l’on peut enfin croire avec les mineurs , que dans 
certaines circonstances , les minérais dans les mines 
accroissent leur volume. D’après ces considérations, 
et d’après l’étude des localités et la position des 
prétendues Fulgorites ; mous ne pouvons les 
considérer que comme des Séa/actites hypogées, 
c’est-à-dire formées au milieu du sable : chose 
assez nouvelle et assez curieuse, au moins nous 
le pensons ainsi, pour fixer un instant l'attention 
du physicien et du minéralogiste. 

Ce n’est pas l’existence d’une stalactite , même 
souterraine | qui dans le cas présent est remarqua- 


( 112 ) 
ble, c’est la nature. siliceuse de ce corps: son 
essence tenant du silex pyromaque jaune par sa 
pâte et du jaspe jaune uni par son opacité. 

Les Stalactites de silex n’étaient pas une nouveauté 
pour nous; sans parler des Stalagmites siliceuses 
du Geïsser , des Calcédoines des montagnes: volca- 
niques d'Auvergne et -de l'Hyalite , nous pouvons 
mettre en opposition à nos Stalactites hypogées ; des 
Stalactites de silex, de six «pouces de long (42 c. 
42 milli. } extraites par nous de la voûte d’une 
grotte de calcaire juranique ou ammonéen , dans 
le département de la Vienne, existant dans les 
collections minéralogiques dont nous avons fait 
hommage à la ville d'Angers. 

Nos Stalacütes hypogées étaient en trop grand 
nombre dans le même lieu et de formes assez variées, 
pour éloigner toute idée qu’elles aient été le produit 
de la foudre. Ce qui nous fait pencher à croire 
qu’elles sont le résultat d’une action combinée de 
la concrétion et de la cristallisation confuse des 
molécules, c’est que dans le même lieu et dans la 
même position, on trouvait une grande quantité 
de corps de formes variées approchant de ce qu’on 
nomme Aognons en minéralogie , et de même 
nature absolument que nos Stalactites. 

La formation du véritable Grès lustré au milieu 
des sables, comme la formation des grès ordinaires , 
prouve que la nature a les moyens de tenir en 
dissolution les molécules siliceuses ; les eaux du 
Geïsser nous le prouvent encore , mais l'humidité 
seule nc pourrait pas procurer le même résultat : 


(113 ) 

et cependant nos Stalactites ne nous semblent pas 
avoir une autre cause de formation. Ainsi ; Bien que 
nous ne puissions expliquer comment agit le mens- 
true employé par la nature, nous pensons que les 
prétendues Fulgorites sont produites au moyen de 
l'humidité, au milieu du terrain qui les renferme, 
et que le principe métallique ( le fer } qui les 
accompagne, aide au rapprochement des molécules 
siiccuses par la propriété plus spéciale qu'a l’oxide 
de fer d’être soluble. Si: l'on voulait nier que les 
corps qui nous occupent ici, fussent des Stalactites, 
on pourrait s'assurer du contraire, en observant 
surtout deux de celles que nous possédons figurées 
(pl. VE), et sur une des extrémités desquelles on 
voit les traces d’un canal qui passait par leur centre ; 
et par leur axe qui est d’une substance moins com- 
pacte que la partie extérieure ; enfin au sommet 
de celle qui.est figurée (f.1.), on remarque des 
bourrelets (fig. 1, a.) qui n'ont pu être formés 
que par des molécules tenues en suspension dans 
un liquide, et non en fusion par le feu de la foudre. 
Dans la Stalactite cylindrique (p. VI. £. 2), qui était 
double en longueur de ce que donne la figure, 
existe un tronc très-ténu au centré, qui indique 
les rapports de formation de cette dernière avec 
les Stalactites hypogées les plus ordinaires, qui ont, 
dans le lieu où nous les avons observées , de 7 à 10 
pouces de long (5 à 21 mill.), et presque tou. 
jours les indices d’un canal central, plus ou moins 
prononcé. 

Des morceaux amorphes , de même nature que nos 

8 


( 114 ) 

Stalactites hypogées, ‘avaient dans le même lieu, une 
position si analogue , que nous restons persuadés 
de l'identité de leur origine. Il n’y a qu’une seule 
difficulté : est-ce depuis que les eaux de la mer 
ont quitté le sol, ou lorsque le sol, était couvert 
de ces eaux, que nos Stalactites ont été formées ? 
nous penchons à croire qu’elles se sont formées dans 
la période qui a suivi l'écoulement des eaux de la 
mer; ne supposant pas; après tout examen des loca- 
lités, qu'il en puisse être autrement. 


RAPPORT 
SUR UNE NOTE DE M. DESVAUX ; 
AYANT POUR TITRE | 
Des Stalactites souterraines on prétendues fulgorites, 


Par MM. CHÉRON, PILATTE tr FOURIER (1). 


M. Desvaux fait observer d’abord que des corps 
siliceux semblables à-ceux qu’il a trouvés dans l'âr- 


(1) La Société, après ayoir entendu le rapport de la Commis: 
sion, à décidé qu'il serait imprimé à la suite de l’article de M. 
Desyaux. 

(Note des Rédacteurs.) 


(115 ) 

rondissement de Saumur, près du lieu appelé /a 
Belle-Etoile, ont déjà provoqué l'attention de quel- 
ques minéralogistes qui les ont regardés comme pro- 
duits par l'électricité, s’appnyant sur celte remarque, 
que si l’on fait passer une forte décharge électrique 
dans une masse de sable, il en résulte une agglomé- 
ration des parties siliceuses, qui se présente sous Ja 
forme d’un cône. L'objet de la note qui nous occupe 
est de faire voir que ce mode de formation d'où est 
dérivé le nom de fufgorite, ne sauraït être admis; et 
que les corps en question sont de véritables stalac- 
ttes qui, en raison de leur position, peuvent être 
distinguées par l’épithète d’hypogées ou de souter- 
raines. 

Les motifs sur lesquels cette opinion est établie, 
sont céux-ci : d’abord le grand nombre de corps 
semblables réunis sur le même point, leurs formes 
variées et les masses tuberculeuses de même nature 
trouvées auprès et dans Ja mème position, circons- 
tances qui doivent exclure toute idée d'une origine 
ignée telle que celle attribuée à ces corps; puis, en- 
suite, pour justifier l'hypothèse de leur formation 
par la voie humide, diverses observations qui proa- 
vent que certaines masses minérales se forment en- 
core journellement, et que parmi elles il s’en trouve 
même de siliceuses. Deux des observations rappor- 
tées par M: Desvaux, la formation du grzson (grès 
à ciment argilo-ferrugineux) .. et une stalactite sili- 
ceuse recueillie dans une grotte du calcaire secon- 
daire, lui appartiennent : les autres faits ont été 
observés par divers géologues ; ‘ils consistent dans 


( 116 ) 

les concrétions siliceuses que produisent les eaux des 
Geysers; les enduits calcédonieux que présentent quel- 
ques roches volcaniques; les grès dont Spallanzzani 
et Saussure font mention; enfin, l’observation d’un 
minéralogiste français qui aurait démontré -que dans 
certaines circonstances les cristaux de quartz hyalin 
peuvent croître. 

Il devient nécessaire d'indiquer les principales con- 
sidérations qui ont déterminé Ja commission dans le 
jugement qu’elle a porté du travail de M. Desvaux ; 
Je m’acquitterai de cette obligation aussi succincte 
ment qu'il me sera possible -de le faire. 

L'action destructive et dissolvante. des eaux, ét 
dans des cas plus restreints, leur puissance régéné- 
ratrice sont admises depuis long-temps par des géo- 
logues. L'illustre Saussure, cet-observateur si exact 
et,si consciencieux,, s'exprime ainsi à l'égard duigrès 
moderne que M. Desvaux cite pour exemple d’après 
le témoignage de Spallanzzani: «J'ai vu, dit-il, au 
bord de, la mer, sur le phare.de Messine , auprès 
du gouffre de Carybde, des sables qui sout mobiles 
au moment où les flots les amoncèlent sur les bords; 
mais qui, par le moyen du sol calcaire que,la mer 
yinfiltre, se durcissent graduellement au point de 
servir; de pierres. meulières., On :ne. cesse de lever 
, des pierres sur les bords sans qu'elles s’épuisent , 
ni, que. le rivage, s’abaissé ; les: vagues rejettent du 
sable. dans Le. vides, et-en pen d'années ‘ce sable 
s’agglutine si bien , qu'on-ne peut plas distinguer 
les pierres deformation nouvelle d'avec celles-qui 
sont plus anciennes. { Saussure ;, $: 306.) » Les 


( 117 ) 
tufs, les stalactites et stalagmites, les pyrites glo- 
buleuses, les minérais de fer limoneux, diverses 
roches des terrams de transport et plusieurs pro- 
duits volcaniques, se forment de même presque 
journellement sous nos yeux. Les eaux des pluies, 
après avoir pénétré dans le sein de la terre, en res- 
sortent chargées dé diverses substances minérales qui 
se trouvent ou suspendues dans le fluide, ou dis- 
soutes par lui, soit directement , soit indirectement, 
au moyen d’agens tels que l'acide carbonique, etc. ; 
ces eaux vont déposer sur certains points les subs- 
tances qu’elles ont ainsi enlevées, et, de la sorte, 
se forment continuellement de nouveaux minéraux 
et même de nouveaux. terrains. Les géologues ont 
également observé que des substances que nous ne 
parvenons à attaquer dans nos laboratoires qu’en 
employant un feu violent et les réactifs les plus 
énergiques, n’échappent point à l’action continue 
et prolongée des agens que la nature met'en œuvre: 
Sans parler des faits qui se rattachent aux phéno- 
mènes volcaniques, tels: que ces fontaines des Gey- 
sers en Islande, lesquelles situées dans un pays plat 
et à douze lieues de la côte, lancent par intervalle 
dans les airs des jets de 50 mètres de hauteur d’une 
eau bouillante, hmpide, et pourtant chargée de si- 
lice ; beaucoup d’autres observations ne permettent 
pas de douter que des concrélions siliceuses peuvent 
se former et se forment même actuellement. Ainsi, 
par exemple, on a rencontré des rosettes dé cristaux 
de quariz sur un bois fossile peu altéré, et qui étais 
plutôt un bois à demi pourri qu’un véritable Zi- 


( 118 ) 
gnile (x). On a cité encore un fait plus extraordi- 
maire, c’est un silex trouvé en 1812 en béchant un 
jardin, lequel silex renfermait une vingtaine de 
pièces d'argent dont la plus ancienne n’était que du 
16. siècle. 

On voit donc que la manière dont M. Desvaux 
explique la formation des corps qu’il signale à l’at- 
tention des minéralogistes, n’est nullement en op- 
position avec les faits observés et les idées généra- 
lement. admises. 

Bien plus, dans beaucoup de carrières de grès on 
observe que les limites des parties solides ont des 
formes arrondies et tuberculeuses comme celles des 
concrétions ou des filirations, ce qui donne à penser 
qu’elles sont dues à des dissolutions chargées de ma- 
tière. calcaire ou siliceuse qui, ayant pénétré dans la 
masse, en auront agglutiné certaines parties: dans 
cette hypothèse, la: formation de concrétions de 
même nature que la substance minérale tenue en dis- 
solution, s'explique bien facilement. On conçoit, en 
effet, qu’un léger accident: tel qu’un corps étranger 
enfoui dans le sable, aura pu déterminer le fluide à 
se porter. de préférence vers certains points, et qu’en 
abandonnant la substance qu'il tenait en dissolution, 
il aura recouvert d’un enduit calcédonieux, si cette 
substance était de l'acide silicique, le corps qui lui 


(2) Les collections du Muséum d'Histoire Naturelle d’Angers 
en possèdent de très-beaaux morceaux donnés par M. Desvaux, 
qui offrent cette particularité. 

(Note des Rédacteurs.) 


(119) 


servait de guide; ou bien, qu'il aura donné nais- 
sance à des corps concrétionnés, entièrement nou- 
veaux, par son séjour dans différentes cavités. 

D'un autre côté, l’action de là foudre relativement 
à la production des substances minérales, paraît 
tout-à-fait nulle; et quant aux modifications qu'elle 
peut leur faire éprouver, tout annonce qu’elle est de: 
peu d'importance. On ne connaît qu’un effet remar- 
quable exercé par le fluide électrique sûr les masses 
minérales situées à la surface du globe; il consiste 
dans les iraces de fusion que l'on remarque par- 
fois sûr les roches que la foudre a frappées, et 
qui présentent alors quelques bulles vitreuses. Les 
naturalistes qui ont parcouru les lieux où ce genre 
de phénomènes est le plus fréquent, Saussure, Ra- 
mond, M. de Hümboldt, ne signalent pas d’autres 
changemens que l'on puisse raisonnablement y rat- | 
tacher. 

A l'égard de l’époque à laquelle les concrétions en 
question ont pu se former, M. Desvaux croit que 
c’est pendant la périodé qui à suivi l'écoulement du 
fluide dañs lequel le sable s’est déposé : cette opi- 
ion semble en effet une conséquence rigoureuse du 
mode de formation d’ailleurs probable qu'il a admis. 
On pourrait peut-être, à ce sujet, reprocher à l’au- 
teur de la noté d’avoir été trop sobre de détails sur 
les circonstances géologiques du gîte; car ces no- 
tions sont toujours importantes lorsque l’on cherche 
à fixer, même approximativement, la place qu'un 
miméral doit occuper sous le rapport de l’âge. 

En résumé, l'hypothèse que l’agglomération des 


( 120 ) 
molécules siliceuses dans le cas signalé ici serait le 
résultat de l’action du fluide électrique, est si peu 
probable; et, au contraire, celle qui attribue cet 
effet à l’action des eaux est tellement d’accord avec 
la marche ordimaire de la nature, qu’une discussion 
destinée en partie à faire ressortir le peu de vrai- 
semblance de la première supposition et la possi- 
bilité que des corps semblables à ceux qui sont 
décrits puissent encore se former dans les circons- 
tances actuelles, ne saurait par cela même présenter 
qu'un intérêt secondaire. IL ne s’agit point en ef- 
fet, dans la note de M. Desvaux, d’éclaircir une de 
ces questions sur lesquelles les géologues sont en- 
core partagés et dont la solution importe au progrès 
de la science, mais seulement d’observations qui se rat- 
tachent à des effets connus, et qui viennent, pour amsi 
dire, se fondre dans la série des faits déjà constatés. 
Toutefois, Messieurs, si ce travail nous a paru d’une 
médiocre importance, considéré uniquement sous le 
point de vue géologique; comme objet de rensei- 
gnement, nous pensons qu'il peut avoir quelque 
utilité. C'est, au reste, le jugement que l’auteur 
semble en avoir porté lui-même : tout annonce que 
son but principal a été de réunir des indications pré- 
cises sur des minéraux qui figurent déjà dans quel- 
ques collections ; et 1l faut convenir que ces détails 
peuyent être désirés par les personnes qui s'occupent 
de minéralogie. Cette considération paraît suffisante 
pour motiver les conclusions de votre commission 
qui croit devoir vous proposer d'insérer dans les Mé- 
moires que vous. publiez, la note que vous avez ren- 


(121) 
voyée à son examen; elle est d’ailleurs peu étendue, 
et il ne serait pas impossible que des discussions ul- 
térieures ne vinssent ajouter à l'intérêt qu’elle pré- 
sente actuellement. 


Le Rapporteur de la. Commission : 


h Y. CHÉRON. 


NOTICE BIOGRAPHIQUE 
1 Sur Billard , 


Par M. Gréc. LACHÈSE , Professeur à l'Ecole de Médecine d’An- 
gers (1). 


L'HOMME qui dans sa jeunesse a eu l'avantage de 
consacrer à son pays les productions de ses travaux; 
qui, dans l’âge mûr , a donné des fruits utiles à 
ses’concitoyens; qui, dans sa vieillesse, a su se faire 
remarquer par la sagesse de ses réflexions ; cet 
homme, quand il succombe sous le poids des années, 
mérite des honneurs, et l’on doit des éloges à sa 
mémoire : mais il a été soumis aux lois qui veillent 
à la succession des êtres, et les larmes de l’estime 
et de là reconnaissance qu'il fait répandre n’ont 
rien d’amer, car la mort n’a eu pour lui aucune 


en nmes 


(4), Lu à laséance du 8 mars 1832. 


(12) 


rigueur. Lorsqu’au contraire nous voyons celui qui 
donnait de grandes-espérances fondées sur de nôm- 
breux succès , être enlevé dès le commencement de 
sa carrière, et descendre, presque vivant encore, 
dans le tombeau ; lorsqu'on a pu l’observer for- 
mant , les yeux à moitié déjà fermés, des projets 
pour l’avancement de la science et le bonheur de 
son pays, c’est alors que les regrets sont pénibles 
et que Îles larmes sont douloureuses... Tels sont 
les sentimens dont la perte: &e Billard nous a pé- 
nétrés. ji 

Ce Savant précoce, naquit à Pellouailles , près 
Angers , le 16 juin 1800, de Charles-André-Re- 
né Billard et de Jeanne Blanchouin. Il commença 
ses études, en 1810, à Laval, patrie d'Ambroise 
Paré, et les continua au lycée d'Angers, de 1813 
à 1819. Au mois de novembre de cette dernière 
année , il devint Etudiant en médecine à l'Ecole 
secondaire de, cette. ville , où ïl est resté pen- 
dant cinq années, dont deux en qualité d’externe et 
trois comme interne: Les talens qui dépendent de 
la prompütude de la «pensée, de l'imagination et 
de la mémoire se firent promptement remarquer 
chez lui; il sut les allier à la méditation:et à la 
profondeur qui ordinairement ne se font apercevoir 
qu'au moment où les idées qui se sont succédées 
avec plus ou moins de: rapidité doivent être classées 
avec lenteur et méthode. Jamais élève ne fut plus 
exact à bien remplir ses différens services; il étudia, 
enmême-temps, l'anatomie proprement dite, et l’ana- 
tomie pathologique ,..sans: perdre: un: seul! moment. 


(123). 

Fort de ce savoir, sans lequel il n’y a pas de vé- 
ritable médecin, il partit pour aller smivre les cours 
de la Faculté de Paris, en septembre 1824. Demeu- 
rant, pour ainsi dire, au miliew des grands maitres , 
on le vit remporter, dans de brillans et nombreux 
concours, l'internat de la Pitié, sous le célèbre 
Béclard , puis celui des Enfans trouvés, sous Ba- 
ron; plus tard, ilentra à la maison de santé 
de Dubois. Ces cliniques si importantes donnèrent 
mille occasions de mettre Billard en évidence, et 
l'Ecole de Paris le plaça au rang des plus remarqua- 
bles de ses disciples. Dans ces dispositions si favo- 
rables, il voulut suivre le conseil d’Hippocrate, qui 
recommande les voyages aux jeunes médecins, et il 
alla, en 1828, visiter les principales villes du midi 
de la France ; Genève , où il obsenva des établis- 
semens sanitaires, de la plus haute. philantropie, 
que l’on présente comme modèles ; la, Suisse dans 
ses détails, l'Angleterre et l'Écosse dans: leurs ins- 
ütutions: 

Billard était doué de ces moyens rares qui per- 
mettent. à celui. qui les possède de briller. par 
V'éloquence: du barreau, par le génie qui: fait le 
guerrier, ou par l'observation qui formele: médecin: 
Il préféra celte: dernière profession, tout: ingrate 
qu’elle est, peut-être, parce que c’est celle qui 
exige le: plus -un sens droit et l'amour constant: de 
l'humanité: Personne n’était plus:propre à l'enseigne: 
ment médical, et cependant il ne voulut. pas:s'y livrer. 
Nous l'avons tous vu refuser des: chaïres qu'il devait 
honorer, et jamais nous n'avons pu comprendre 


( 124 ) 

pourquoi il ne se rendait pas à nos pressantes invi- 
tations. Ce qu'il a fait ici dans ce sens, il l'avait 
résolu’ à l'égard de la Capitale, où les vœux du 
célèbre Orfila le ‘voulaient fixer. Il faut que les 
causes particulières de cet éloignement du profes- 
sorat aient été bien puissantes, car il ne pouvait être 
arrêté à l'aspect des difficultés qu'offre une chaire, 
tout enreconnaïssant que rien n’exige plus de talens 
et de travaux ; de patience et d'activité. Il n’avait pas 
tremblé, en effet, en se présentant pour répondre 
à toutes les questions qu'il est possible de faire sur 
une science aussi étendue que la médecine , où il 
étonna, dans sept ou huit séances publiques , les 
auditeurs et les professeurs ; par la rapidité, l’abon- 
dance et la facilité de sa diction. 

- À peine de retour dans notre ville, au mois de 
mars 1828, notre jeune confrère devint le praticien 
le plus recherché, le consultant le plus demandé 
et le sociétaire le plus laborieux : chaque famille 
voulut prendre les avis de celui qu’elle avait cons- 
tamment entendu vanter par ses professeurs , de celui 
qui s’était fait précéder d'ouvrages couronnés et de 
nombreux Mémoires académiques, de celui qui/se 
présentait avec un air gracieux , un empressement 
que n’excitait ni l'amour du lucre ; ni la plus légère 
nuance de vanité. 

En effet, Billard était déjà célèbre , et il n’avait 
pas atteint sa 28.° année : ses Mémoires sur la mem- 
brane gasiro-intestinale, entièrement composés à 
Angérs pendant son internat, étaient couronnés par 
YAthénée avant son arrivée dans la Capitale. Il leur 


( 125 ) 
a donné: beaucoup d'extension quand 1l les a publiés 
en 1825. C'est anssi en 1825 qu'il traduisit la chi- 
mie atomistique de Thomson. En 1828; il fit pa- 
raître son ouvrage sur les maladies des enfans, 
ouvrage qui a beaucoup contribué à le faire pr omp- 
tement rechercher ,::car les:mères ne voyent rien 
au-dessus de l'espoir de calmer les maux de leurs 
chers nourrissons ; et les pères les plus stoïques sont 
promptement inquiétés, quand les êtres, encore fai- 
bles, qui semblent devoir prolonger leur existence 
propre, n’ont plus la gaîté, le sourire, les habi- 
tudes qui faisaient le charme et le délassement de 
leur vie. Rosen, médecin suédois, si connu par son 
traité sur les convulsions de l'enfance, si sage dans 
ses avis pour les prévenir, a été presqu'oublié lors- 
que Billard a paru sur,la scène médicale, parce 
qu’en traitant la même hygiène, il l’a rendue plus 
riche de citations et de découvertes modernes. - En 
1830 ,:1l put, malgré sa pénible clientelle, donner 
sa traduction de Lawrence, sur les maladies des 
yeux. Nous ne parlerons pas d’un grand nombre 
de Mémoires qu'il a fait publier, à différentes épo- 
ques, dans les archives médicales , et qui tous portent 
le cachet de l'observation qui a toujours, distingué 
notre honorable sociétaire. -- Ces œuvres de Bil- 
lard , pour être bien connues des personnes étran- 
gères à l’étude de la médecine, méritant d’être ana- 
lysées, elles ne le seront pas-par nous : nous en 
laissons le soin à un de mos confrères qui con- 
naissait «parfaitement celui que nous cherchons à 
esquisser aujourd'hui, et. dont la plume facile peut 


( 126 ) 


mieux rendre les traits; bornons-nous à regrelter 
cet ami des sciences, à reconnaître le vide qu'il 
laisse, et à apprécier combien nous avions à espé- 
rer de songémie et de son zèle, en attendant la 
séance solennelle de la Société de Médecine, dans 
laquelle le docteur Mirault nous dira à quels titres 
Billard avait acquis sa gloire médicale. 

Quiconque aura lu les ouvrages de Perou, ce sa- 
vant qui a le plus contribué. à l'avantage et aux dé- 
couvertes scientifiques qui sont résultés du voyage 
du géographe et da naturaliste, parti du Hâvre le 19 
octobre 1800, se 'sentira le besoin de comparer Bil- 
lard à ce médecin naturaliste. L'un et l’autre avaient 
une) activité bienfaisante qui les rendait nécessaires 
partout où ils se trouvaient. Tous deux parlaient lan- 
glais, l'espagnol , l'italien, le grec , le latin avec 
facilité, et tous deux'étaient peintres fidèles de ce 
qu'ils avaient vu: Perou a enrichi le Muséum de Pa- 
ris de ses dessinset tableaux représentant les natu- 
rels de! la: Nouvelle-Hollande, de Timor, etc, et 
Billard a produit par son léger pinceau une foule 
d’objets gracieux. Le voyageur aux terres de Dié- 
men, etcelui qui avait bien observé la Grande- 
Bretagne , avaient une vaste érudition , de la viva- 
cité dans: l'esprit, de la chaleur dans le caractère; 
une grande franchise ; leurs affections étaient so- 
lides et durables : aussi, quoiqu’ils eussent de grands 
talens , ils: ont eu‘beaucoup d'amis: L’un et l’autre se 
hâtèrent trop de vivre, en consacrant les jours et les 
nuits à l’étude’et à faire des expériences ; tous deux 
consumés par une langueur mortelle, sentaient leurs 


{ 127 ) 

forces diminuer! en fortifiant leur philosophie. L'un 
et l'autre ontusé l'enveloppe qui renfermait leur gé: 
nie: Perou étant à peine âgé de 35 ans , et Bil- 
lard n’atteignant pas encore sa 32. année. 

Peut-on calculer ce qu’auratent pn produire des 
hommes aussi actifs , aussi lummeux, aussi profon- 
dément observateurs ,; si la mort ne les eût pas ar- 
rêtés dès le début de leur carrière ! 


QUELQUES RÉFLEXIONS 


Sur l'Histoire et sur Les principaux jistortens des 
dDifferens siècles , 


Par M: BLORDIER - LANGLOIS (1). 


Le plus uule, le plus intéressant ouvrage de l'es- 
prit humain, à mon avis, ce serait l'histoire, si, 
comme un miroir fidèle, elle représentait les hommes 
et les choses; mais où trouver l’homme sans, pas- 
sion, sans prédilection , exempt de haime, de fai- 
He d'intérêt, auquel il serait donné de tenir le 
burin de l'histoire ? Quel mortel n’a pas son prisme 
à travers lequel il verra les objets, l'étude spéciale 
à laquelle sa vocation l’entraîne, la disposition à de 
certains systèmes .qui fait une des fragilités de son 


(4) Lu à Ja séance ldu 8 décembre 18514 


( 128 ) 

intelligence ?. 11 faudrait un ange, pour cette tâche 
merveilleuse, et je ne dis pas encore assez, pour 
peu que les anges tiennent de la nature humaine. 
De cette imsurmontable difficulté. découlent tant de 
jugeméns contradictoires sur les mêmes évènemens, 
sur les mêmes personnes; tant de récits étonnam- 
ment divers sur des faits que l’on est convenu: de 
regarder comme ;les plus importans de l’histoire. 
Quelques critiques ont recueilli ces déplorables di- 
vergences, et le nombre en est si grand, que d’ex- 
cellens esprits se sont laissé emporter à prononcer 
ce mot sévère, que l’histoire n’est rien autre chose 
qu’une fable accréditée. 1] n’est pas de tyran qui 

n'ait trouvé ses apologistes : Phalaris lui-même se 
vit louer, à son grand étonnement sans doute; et 
j'ai oublié, sans le regretter, de vil écrivain qui se 
déshonora pour honorer le monstre d’Agrigente ; 
mais nous n'avons pas oublié quels écrivains pla- 
cèrent Auguste au rang des dieux, malgré les fu- 
reurs de son triumvirat; nous avons lu dans Vel- 
léius Paterculns l'éloge de Tibère et de son digne 
ministre ; nous savons que le moraliste Sénèque 
loua Claude, qu'il placa ensuite”dans les cieux sous 
la forme d’une citrouille; nous savons que le ré- 
publicain auteur de la Pharsale consacra dans son 
poëme des vers à Néron, qui, pour prix de sa.. 
faiblesse, lui ordonna par la suite de mourir; .Æ 
PésG le auteur des /ns{ulions oratoires, que le 
chantre de la Thébaïde ont prodigué la louange à 
Domitien; que Martial a -prostitué quatre-vingts de 
ses petites pièces au même tyran; et qu'il répéta 


(129 ) 


les mêmes flatteries pour Trajan, auquel elles étaient 
une injure, chantant ainsi la plus vile palinodie 
contre celui que naguère il avait encensé comme 
un dieu. Le respectable Thomas, dans son: Essai 
sur les éloges, ne peut, à ce sujet, se défendre de 
ce cri d'indignation : « Quel est l’esclave étalé dans 
un marché pour être vendu, qui inspire autant de 
mépris et de pitié qu’un tel écrivain, qui, cepen- 
dant, à la honte de son siècle et de Rome, eut 
de la réputation? » Quels assassinats n’ont pas été 
incriminés et défendus au tribunal de l’histoire! Ne 
sortons point de nos annales. Jean-sans-peur, duc 
de Bourgogne, meurtrier de Louis d'Orléans, trouve 
un défenseur dans le docteur Jean Petit: assassiné 
à son tour à Montereau, tout concourait à char- 
ger le dauphin de ce crime, mais celui-ci ne man- 
qua pas de plumes qui rejetèrent le malheur de 
l'évènement sur l’initiaive qu’aurait prise le duc de 
Bourgogne contre le Dauphin : et l’on veut bien 
regarder ces grands procès comme indécis. Un au- 
tre, avant ces temps, est encore à peu près resté 
comme un des problèmes historiques, je veux par- 
ler de celui des Templiers, par les efforts réci- 
proques des écrivains dévoués à Philippe-le-Bel , 
et de ceux qui se firent les vengeurs de cet ordre 
malheureux. La Saint-Barthélemy n'a-t-elle pas eu 
ses Caveyrac anciens ét même très-modernes ? Le 
sang versé à de certaines époques de notre révolu- 
tion n’a-t-1l pas eu ses approbateurs.? Je. m'’arrête. 
On sait combien de choses sont demeurées problé- 
maliques dans notre histoire, depuis presque un 


9 : 


( 150 ) 

demi-siècle, malgré les innombrables publications 
par lesquelles on a tâché de les éclairair, ou plu 
tôt à cause de cette abondance, telle, qu’on pour- 
rait dire des historiens de nos jours, ce que Lucien 
disait de ceux qui pullulèrent à Rome de la plus 
étrange manière, de son temps, à l'occasion de la 
défaite d’Arminius et des triomphes des armées ro- 
maines contre les Barbares. Lucien compare cette 
épidémie à la fièvre chaude qui s'empara des Abdé- 
ritains après une représentation de 7 Ændromède 
d'Euripide. Si l’on me trouvait trop hardi, que l’on 
veuille bien me dire quel est le point que tant de 
lamières sont parvenues à éclairer. 

De cette disposition de l'esprit humain, si peu 
favorable au iravail de l’histoire, ont résulté des 
règles sans nombre pour l’apprendre ou pour lé- 
crire, espèces d’enseignes où les écrivams ont eu 
du moins la bonne foi de prévenir sur la couleur 
qu'ils se proposaient de donner à leurs composi- 
tions historiques ; où l’on voit que Volney renver- 
sera tous les fondemens donnés jusqu'ici à l’origme 
des peuples, que Condillac insistera sur les rapports 
diplomatiques des nations, que Saint-Réal fera con- 
sister tout l’mtérêt de l’histoire dans des anecdotes, 
et Voltaire dans un système d'irréligion, de scep- 
ticisme et de satire. Un écrivain, le plus spirituel 
peut-être de l'antiquité, est celui qui nous offre 
les plus judicieuses réflexions sur la manière de 
traiter l’histoire, genre où il eut la prudence de 
ne pas s'exercer, se méfiant de son humeur caus- 
tique.et railleuse : cet écrivain c’est Lucien, dont 
nous venons de parler. 


( 131 ) 

Les premières annales furent écrites en vers; elles 
le furent dans l'Orient, le berceau de l'allégorie et 
de la métaphore : de là ce tissu de vérités, de fic- 
tions et de merveilleux qui les composent. Il n’était 
point d’ailleurs inutile d’attacher, par des noeuds 
surnaturels, des peuples naguère nomades, et pour 
qui l’état social était un état circonscrit et gênant. 
Ces annales furent des poëmes, pour que la mé- 
moire les rent plus aisément. On les chantait dans 
les occasions solennelles; mais la mémoire est fail: 
lible, et l'esprit inventif, et c'était une carrière ou- 
verte où de nouveaux mensonges venaient naturel- 
lement se joindre aux premiers. 

Les historiens qui suivirent cette période ne se 
prémunirent pas assez contre ces fictions , soit qu'ils 
y crussent un peu, soit qu'il leur en coûtât de dé- 
senchanter entièrement leurs lecteurs : ainsi nous 
voyons encore des fables amuser des peuples qui 
n'étaient plus dans leur berceau. ( À quel âge d’ail- 
leurs ne nons laissons-nous pas amuser par des 
fables ? » Celles de l'Orient, de l'Egypte, de la 
Grèce, de Rome, vous sont connues. Il n’y eut pas 
de contrée qui n’eût son merveilleux, et notre ville 
ne fut pas exemple de commencer comme les autres. 
Angers, qui s'appelait alors Egada, fut fondée par 
des philosophes, des savans, dans une partie d’une 
vaste forêt où l’on avait remarqué que se plaisaient 
surtout une multitude d’oiseaux au chant le plas mé- 
lodieux, origine que j'ai du plaisir à rappeler au 
sem d’une Académie angevine. Cela se passait peu 
de siècles après le délüge, sous ur roi nommé Sar- 


( 132 ) 

ron. Mais, comme la culture des sciences ét des 
beaux-arts n’est pas toujours compatible avec des 
soins vulgaires, Egada tombait en rumes, sans une 
colonie de Troyens; (où ne irouve-t-on pas des 
Froyens dans les annales des peuples de FOccident?) 
ces Troyens donc réparèrent Egada, et se mêlèrent 
au-peuple de Sarron, etc. 

Mais l’histoire s’épure de plus en plus; et, si 
l’on admet encore quelques-unes de ces sources men- 
songères, c’est avec défiance, c’est avec des formules 
du doute, c’est en multipliant des autorités sur les- 
quelles on se repose du fardeau trop pesant d'une 
croyance que l’on ne partage pas. 

Hérodote fut dans ce cas. Mais que de-reproches 
n’a-t-on pas adressés à l’écrivain consciencieux dont la 
Grèce-ne cessa pas d’être idolâtre ? Pourquoi tant 
de sévérité ? Hérodote consacre une partie de sa 
vie à parcourir les lieux dont il se propose d'écrire 
l'histoire ; il n’est pas de fatigues qu'il ne brave pour 
s’instruire afin d’instruire les autres ; il recueille tout 
ce qui s'offre à son avide curiosité, assuré d’être, 
_avec ce précieux butin, bien venu de la plus curieuse 
nation du monde ; il emploie d’autres années à médi- 
ter sur ses abondans matériaux, à les ordonner , 
à les enchâsser dans l'or de son harmonieux lan- 
gage ; sans doute il rejette plus d’un des renseigne- 
mens qu’on lui fournit dans ses voyages; ce qu'il 
en adopte de trop difüale à croire, il le produit avec 
hésitation ; il va même, dans son scrupule, jus- 
qu'a n’oser affirmer, les jugeant invraisemblables , 
des assertions qui depuis ont été reconnues pour 


( 135 ) 
des vérités ; que pouvait-on désirer de mieux ? Aurait- 
on préféré que les traces de la première existence des 
peuples n’eussent pas trouvé de place dans le livre 
d’Hérodote ? Quelles qu’elles soient , qui de nous 
voudrait qu'Hérodote les eût anéanties ? Enfin un 
ouvrage sort de ses mains, chef d'œuvre de’ grâces 
et de simplicité; et la Grèce entière , à ces solen- 
mités dont le nom fait tressaillir encore toute âme 
sensible, à ces jeux qui firent palpiter tant de cœurs 
généreux , applaudit avec ivresse son historien , et 
donne à chacun des livres qui composent son ouvrage 
le nom d’une dés neuf Muses. 

Ctésias , historien grec, signala beaucoup:d’erreurs 
dans Hérodote, et lui-même en commit de plus 
graves encore: tel est l'esprit humain, que Luther 
compare à un: homme ivre: à cheval: « Relevez-le 
d'un côté, dit-il, et il retombe. de l’autre. » 

Hérodote ‘avait payé son tribut de complaisance 
à la curiosité des Grecs, ou de crédulité à la fai- 
blesse humaine ; deux historiens, qui vinrent après 
Ii, s’affranchirent de ce double tribut , sans en 
être moins chers à: leurs lecteurs ; vous nommez 
Thucydide et Xénophon..La gravité de leur carac- 
ière, les temps plus rapprochés qu'ils avaient à 
faire connaïtre , le désespoir peut-être d’aiteindre 
aux charmes de narration de-leur prédécesseur’, 
leur fit suivre une autre route: tous deux, de génies 
divers, mais tous deux, concis et sévères dans leurs 
récits, ennemis de ious détails étrangers: philoso- 
phes tous deux, l’un disciple d'Anaxagore et l’autre 
de Socrate, mais l’un plus vigoureux , plus exclu- 


( 154 ) 

sivement historien, l’autre plus moraliste , + plus 
fleuri; tous deux exilés par leurs concitoyens, pour 
avoir un moment cessé d’être heureux à la guerre, 
mais emportant dans leur retraite une ame libre de 
ressentiment, d’amertume ; y rédigeant avec calme 
leurs souvenirs et les fruits de leurs études, et se 
consolant de ne plus servir leur patrie deleur épée, 
en travaillant à la servir de leur plume. Thucydide , 
arrêté trop tôt dans sa carrière , laissa incomplète 
la tâche qu'il s'était prescrite, la Guerre du Pélo- 
ponèse, guerre où la Grèce , dont l'union avait été 
si fatale aux Mèdes, se déchirait de ses propres 
mains , ct préparait , pour l'avenir , une proie aux 
barbares. Xénophon à Scyllonte, acheva l'ouvrage 
de Thucydide, finit cette lutte de 28°ans par la 
prise d'Athènes et la tyrannie des Trente. Athènes 
subjuguée par Lacédémone !.. déplorable spectacle !… 
démence qui confond l'esprit humain !..... alliance 
inconcevable d'idées ! 

Xénophon vécut assez pour multiplier ses titres 
à l'immortalité. Ses Æelléniques comprennent depuis 
la:2r.° année de la guerre du: Péloponèse jusqu’à 
la bataille de Manünée : c'était encore une cata- 
strophe imposée à sa plume ; celle d’an grand homme 
expirant sur ses propres trophees ,. pour me servir 
de lexpression d’un grand orateur ; la’ catastrophe 
d’un homme qui valait à lui seul toute la Grèce. 
Epaminondas, héros presque idéal par la perfec- 
tion de ses talens ét de ses vertus , expire vainqueur 
à Mantinée, éteignant par sa mort une petite répu- 
blique, qui n’a que par lui quelques momens d'éclat 


( 135 ) 
dans l'histoire ; mais ne vous attendez pas à tout 
ce pathétique , à ces lieux communs dont les mo- 
dernes eussent accompagné ces évènemens; Xéno- 
phon les raconte; 1l se contente du sublime de la 
vérité. 

En ces deux historiens commence le second, ou, 
si vous le voulez, le troisième âge de l'histoire ; 
une narration exacte et sans ornement. Hérodote 
avait fait presque un poëme; c'était comme une 
perfection des premières annales : Thucydide et 
Xénophon créèrent la véritable histoire antique. 

On a blâmé la sécheresse de Thucydide: Cicéron 
Jui fait le singulier reproche qu'il n’est d'aucune 
ressource pour les rhéteurs; Démosthènes transcrit 
huit fois Thucydide , le texte sous les yeux, et une 
fois de mémoire : décidez entre ces deux jugemens, 
ou plutôt souvenez-vous de ce que disait Jean-Jac- 
ques , que Cicéron était un avocat , el Démosthènes 
un orateur. Thucydide fut surnommé le Phydias de 
Yhistoire, et Xénophon l'abeille attique, par ces 
Grecs qui se connaissaient apparemment en grec et 
en génie. 

Ce fut un peuple prodigieux que ce peuple grec! 
lui seul de tous les peuples semble n'avoir point 
d’aurore; lni seul, à son berceau, brille d’une lu- 
mière éblouissanie. Il n'en est pas ainsi du peuple 
romain. Il était dans sa destinée, disent les poëtes|, 
de gouverner le monde : regere imperio populos; 
les lettres et les arts ne devaient y naître que bien 
tard, ou devaient être pour lui des inspirations étran- 
gères. L'histoire n’y eut que d’obseurs et, barbares 


( 136 ) 
commencemens, et ce fut un grec qui, à Rome, 
ouvrit celte belle carrière. 

Polybe! quel nom réveille le nom de ce grand 
écrivain! Mégalopolis, qu'Epaminondas fonda, le vit 
naître; un des chefs de la Ligue Achéenne, Lycortas, 
fut son père; il fut, dans son jeune âge, le dis- 
ciple et l’ami de Philopæmen. Les malheurs de la 
Grèce l'appelant à Rome, où il resta en Ôtage, son 
caractère et son génie lui firent un ami de Scipion 
Emilien, le vainqueur de Carthage et de Numance; 
il partagea l'intimité de ce grand homme avec Lélius 
et Térence. 

Polybe choisit pour sujet le temps qui s’écoula 
depuis la 2° guerre panique jusqu’à la destruction 
de la monarchie macédonienne. ( période de-53 ans). 
Il'iraite de toutes les nations alors connues ; mais, 
avéc une complaisance spéciale, de Rome, qu'il adop- 
tait pour patrie, sans néanmoins abjurer sa patrie 
naturelle. Il s'applique, avec la vaste portée de son 
génie, avec sa: philosophie puisée aux meilleures 
sources, à faire connaître dans ses détails, un em- 
pire dont il admire la gloire, sans dédaigner la 
Grèce, qui touche. à sa ruine totale. Quoiïqu’habile 
dans la langue des vainqueurs, il écrit dans celle 
des vaincus, hommage qu'il aime à rendre aux dieux 
où. il: vit le jour, et où reposent les cendres de ses 
pères; il écrit une histoire qui va exciter l’émulation 
des romains, et servir de modèle à Tite-Live (1). 


(1) De quarartte livres qui la composaient, il ne reste que les cing 
premiers; les douze suivans, qui ne sont qu’en sommaires, son 
attribués à Caton le censeur, à 


( 137 ) 
Le temps a dévoré la plus grande partie de cet ou- 
vrage. 

La littérature et les beaux-arts vont passer en 
Italie; les Romains vont se donner pour maîtres dans 
les arts de l'esprit, les peuples qu'ils ont soumis par 
ceux de la guerre; la fierté romaine va s’incliner de- 
vant des charmes de la Grèce. Est-ce à ces charmes 
qu'il faut assigner la décadence romaine? Je suis 
loin de le croire , malgré des autorités imposantes. 
L'oracle regere imperio populos est tout de Virgile ; 
c'est, comme tant d’autres, un oracle après lévè- 
nement. Rome pouvait être en même temps et puis- 
sante et éclairée. En vain le plus séduisant des So- 
phistes, dans une célèbre prosopopée s'écrie-t-il : 
« Quelle splendeur funeste a succédé à la simplicité 
romaine! quel langage étranger! quelles sont ces 
mœurs  efféminées ?....….. Romains, hâtez-vous de 
renverser ces amphithéâtres ; brisez ces marbres, 
brûüléz ces tableaux, chassez ces esclaves qui vous 
Subjuguent , et dont les funestes arts vous corrom- 
pent..., etc: » (1) Phrases plus sonores que vraies, 
paradoxe: harmonieux que dément l'histoire. d’un 
grand, nombre de nations. C'est bien à d’autres 
causes qu'aux lettres qu’il faut s’en prendre du dé- 
sordre des guerres civiles de Rome. Marius était un 
homme sans culture ; Sylla dut à son ambition seule 
les fureurs de, sa magistrature, et non à des talens 
acquis dans les trop courts instans d’une jeunesse 


(1) J.-J. Rousseau, discours sur cette question : #2 le rétablis- 
serment des sciences, eëc. 


( 138 ) 


calme et studieuse. César, passant le Rubicone, n’é- 
tait point le César des Commentaires, mais bien le 
ciloyen révolté, qui, traversant une bourgade des 
Alpes, disait ce mot célèbre : « J'aimerais mieux 
être ici le premier que le second à Rome. » Quand 
-Octave quittait si précipitamment ses maîtres d’Apol- 
lonie, pour se porter héritier de son grand-oncle, 
et prendre en main les rênes de l'état, que sa mort 
laissait flottantes, étaient-ce donc ces arts qu'il dé- 
laissait en Grèce, ou l’ardeur prématurée de com- 
mander, qui le faisait voler à Rome? Rome tom- 
ba, parce que les états ont le destin des individus; 
parce que les sentimens nobles et grands s’épuisent 
et font place à des affections sensuelles et désordon- 
nées; parce que l’égoïsme vient avec la ‘vieillesse 
chez les nations, comme chez les particuliers, et que 
l’égoisme est le poison destructeur de toute éléva- 
tion, de touic veriu. 

Je demande pardon de cette digression; il doit 
être accordé au sentiment qu'éprouve naturellement 
un Français à l’idée seule de cette incompatibäité des 
beaux-arts et de la gloire. La France a prouvé, et 
prouvera long-temps encore, j'espère, la vanité de- 
ce paradoxe. 

Je passe à regret et Salluste, qui me semble n’a- 
voir copié personne, et César, qui peut-être eut 
en vue Thucydide, en écrivant ses campagnes. Je 
voudrais me livrer à quelques réflexions sur ces deux 
historiens recommandables, mais ce discours ne de- 
vait être qu’un coup-d’œil, et malgré moi je le vois 
s'étendre. 


( 139 ) 

J'arrive à Tite-Live, qui raconta en un style si 
nombreux et si pur les commencemens et les pro- 
grès de Rome; qui traversa, avec la franchise d’une 
âme indépendante et grande, la période calamiteuse 
où expira la république; qui, sous l'empire d'Au- 
guste, célébra les hommes qu'il croyait être les vrais 
amis de la patrie et les défenseurs de sa hberté mou- 
rante; à Tite-Live, dont le beau caractère, empreint 
parlout dans son ouvrage, devait inspirer noire 
Pierre Corneille, et imposer au cauteleux Auguste, 
qai, pour toute vengeance, l’appelait £ pompeïen. 

Mais Polybe avait donné à Tite-Live l'exemple 
d'une histoire philosophique, que Tite-Live ne sui- 
vit pas. Îl fut souvent un conteur superstitieux et 
crédule. Comme Hérodote, il critiqua peu ses maté- 
riaux. Des imvraisemblances, dont son esprit supé- 
rieur aurait dû se révolter, prirent place, dans son 
livre, à côté des faits les plus authentiques et les 
plus glorienx, et... Mais j'en rends grâces à Tite- 
Live. Assez d’autres ont pris soin d'éplucher son 
histoire et de s’égayer de ses rêveries. S'il n’y avait 
pas donné un si libre accès aux merveilles du vieux 
temps de sa patrie, nous n’aurions pas aussi bien 
connu Rome. L'histoire d'un peuple ne doit pas se 
détacher de celle de ses préjugés, de ses faiblesses 
eh de ses erreurs. 

Un historien devait naître, armé de tout le dé- 
dain des mots et des choses inutiles, de toute la 
puissance d’une inflexible raison, de tout le mépris 
qu'inspire poar l'homme une étnde approfondie de 
l'homme, de toute l'indignation de la vertu pous- 


( 140 ) 


sée à bout. Tacite..… Plus d'erreurs vulgares, plus 
de concessions à la faiblesse humaine, plus de ce 
style plein et cadencé, qui décèle moins une âme 
noblement occupée, qu’un esprit ingénieux et maître 
de lui; plus de fleurs, à moins qu’elles ne naissent 
d’elles-mêmes du sujet. Ce ne sont pas des cou- 
ronnes, mais des palmes qu’il présente à la vertu 
persécutée; ce ne sont pas de verbeux reproches, 
mais ün fer brülant qu'il applique aux délateurs, 
aux tyrans, aux bourreaux. Son style est quelque- 
fois coupé comme les sanglois, son expression pro- 
fonde et brève comme la colère; obscure et sombre 
comme le trouble dont il ne peut toujours se dé- 
fendre. Honneur au prince sous qui parurent Îles 
ouvrages de Tacite; qui ne craignit pas la manifes- 
tation de ses fortes pensées, et qui, loin de se mon- 
trer solidaire avec ses monstrucüx prédécesseurs , 
abandonna leurs vies au ressentiment des peuples, 
et aux méditations des tyrans à venir (1). 

Tacite était un sublime modèle, mais ce modèle 
était décourageant , il ne fut que très-imparfaitement 
imité. J.-J. Rousseau, chez nous, voulut étudier 
sa manière, mais cela ne s'étudie pas: Il avait peut- 
être un peu -de l'humeur de Tacite, maïs il n’en eut 
ni la concision ni le trait. D’Alembert fit les mêmes 
études ; à force d’art il réussit un peu mieux qüe 
Rousseau, mais quoi de plus opposés que le’ froid 


(1) Rarâ temporum felicitate ubi sentire quæ velis, et quæ sers 
tias, dicere liceat. Tac. hist, 


(141) 
ei fin d'Alembert et le peintre de Tibère et de Né- 
ron, de Traséa et de Soranus! 

L'histoire, comme nous venons de le voir, n’est 
jusqu'ici qu'une narration des évènemens. Peu de 
critique, peu de philosophie, peu de notions étran- 
gères aux faits, peu de réflexions morales. Xéno- 
phon, dans sa Cyropédie, pouvait donner naissance 
à un nouveau genre historique; il ne s’en souvint 
plus lui-même dans ses autres ouvrages. Polybe eût 
pu introduire l’histoire philosophique, et ce n’ent 
pas de suite. Tacite avait fait faire des pas immenses 
à l’art historique, dans la peinture des mœurs et 
des caractères ; il n’eut pas d’imitateurs. J’omets des 
écrivains, qui ne furent pas sans mérite, mais qui 
firent plutôt reculer qu'avancer l’histoire. Je me 
traîne à travers le Bas-Empire, où je ne vois que 
des historiens dignes de leurs siècles, siècles de re- 
présailles et d’horreurs, siècles où l'univers, long- 
temps opprimé, se repliait avec rage sur ses op- 
presseurs, désormais incapables de se défendre ; 
siècles où la barbarie, luttant contre une civilisa- 
tion usée, devait bouleverser le monde pour le re- 
vivifier ; siècles enfin où l'historien, sous la dictée 
de la bassesse et de la peur, excusait les vaincus 
en prodigaant l’hyperbole aux mœurs et aux formes 
des vainqueurs (1). Mais que pouvait l’histoire en 
des contrées où les souverains troublaient à plaisir 


(1) On trouve dans Jornandès, his£. des Goths, que les Huns 
étaient enfans de femmes et de démons. 


(14 ) 


leur empiré par des disputes théologiques, quand 
l'ennemi rugissait à leurs frontières, et qu'ils fomen- 
taient d’absurdes querelles de cour, lorque lunion 
la plus compacte eût à peme suffi contre les efforts 
des Huns et des Vandales ? 

Tout subissait une révolution politique et morale; 
les lettres éperdnes n’avaient plus d’asile. Les Gaules, 
trop fidèles aux traditions orales usitées par leurs 
terribles druides, n’avaient point profité, autant 
qu’elles l’auraient dû, des écoles romaines si floris- 
santes à Lyon, à Bordeaux, à Autun; et, tandis 
que Rome voyait ses enfans d’au-delà des Alpes y 

puiser des connaissances dignes de la métropole, les 
imdigènes restaient en général dans une complète im- 
différence pour les travaux de l'esprit. 

Cependant le christianisme pénètre dans les Gaules. 
Des retraïtes s’onvrent de toutes parts au dégoût du 
monde, à la faiblesse, à la piété, retraites déli- 
cieuses en ces temps d’agitation et de crimes; oasis 
de concorde et de régularité, dans ces déserts de 
haine et d’anarchie. Une multitude de disciples de 
Saint Benoît, différens de constitutions et d’habit, 
peuvent, sans trouble, tant est grand alors l’em- 
pire de la religion, partager leurs tranquilles mo- 
mens entre la prière, l'étude et le travail des mains. 
Un génie, favorable aux sciences et aux lettres, leur 
suggère de sauver de la destruction du temps et des 
barbares ce qui leur échappa des œuvres de Pant- 
quité; les manuscrits se multiplient ; ils enrichissent 
les cloîtres, et répandent quelque instruction dans 
le monde. Nous ne pouvons refuser une vive re- 


(145 ) 

connaissance aux laborieux solitaires, qui réchauf- 
faient dans leur sem des germes de civilisation et 
de lumières dont devait sortir une société nouvelle. 

À force de s'exercer sur le génie des autres, on 
se sentit, dans les cloîtres, la vocation d'écrire sous 
son inspiration propre. Etonnons-nous seulement, 
qu'après avoir multiplié d’excellens modèles, les 
moines composassent de si difformes, de si malheu- 
reux ouvrages. Félicitons-nous, d’autre part, que, 
sans redouter une comparaison désavantageuse, et 
dédaignant les formes grecques et latines, ils se 
soient fait une physionomie particulière, se soient 
peints avec une vérité sans réserve, et nous aient 
montré leurs siècles tels qu'ils furent (1). L'histoire 
des fondateurs d’ordres, les chroniques des abbayes, 
les légendes des saints, sont des sources inestimables 
pour l’archéophile. Par elles il vit dans les siècles 
passés , il habite avec les solitaires, 1l assiste à leurs 
exercices consolateurs ; il entenil les successeurs de 
Mérovée et de Louisle-Débonnaire s’exterminer dans 
les partages de la monarchie, autour de ces mo- 
nastères, moins défendus encore par leurs murs et 


(:) Le chancelier de J'Hpital prenait plus de plaisir à la sim: 
plicité de ces anciennes annales qu’à l’éloquence magnifique des 
grecs peu véridiques. 

Nec minis oblector francorum annalia regum 
Scripta legens, ullo sine fuco prorsus ‘et arte, 
Quûm quæ magrificè græcis conscripta leguntur 
Historiis @grè speciem retinentia “vert. 


(Ep. 3.° ad card. Tur.} 


( 144 ) 
par leurs créneaux, que par le respect des choses 
saintes et la crainte des châtimens éternels. 

Mais ces asiles allaient être profanés; les nou- 
veaux manuscrits subir en grande parte le sort 
qu’avaiént éprouvé les premiers de la part des Goths 
et des Vandales ; les temples élevés à grands frais, 
être la proie des flammes; les restes vénérés des 
Saints abandonnés aux vents ou précipités dans les 
eaux : les colonies de Saint Benoit errer désolées, 
et les peuples aux aboiïs ajouter douloureusement à 
leurs prières cette touchante invocation: « à furore 
Normannorum libera nos, Domine. » 

Ces épouvantables Normands, qui parurent des le 
temps de Charlemagne, et ne cessèrent leurs ravages 
que plus d'un siècle après, sous le règne de Charles- 
le-Simple, accablèrent surtout notre provmce; et 
l’on voit encore à Angers un monument de leurs fu- 
reurs. Alors l’Anjou fixa particulièrement les regards 
du souverain : deux comtes, l’un résidant à Sé- 
ronne (1), comte d'Anjou d'Ouire-Maine, l’autre 
à Angers, comie d'Anjou en-decà, furent chargés 
de combiner leurs forces, et de s'entendre contre 
les normands. Ingelger, ce guerrier cher à la gloire 
et aux belles, ce héros de courage militaire, de re- 
connaissance et de loyauté, fat #nvesi de l'Anjou 
en-deçà ; Robert-le-Fort, l'effroi des normands, 
le sauveur de Paris, et qui, par ses exploits, mé- 
rila le titre nouveau de duc de France, et fut la 


1) Actuellement Châteauneuf, 


( 145 ) 
southe! de la 3.° race de nos rois, fut investi de l’An- 
jou au-delà. 

Ici commencent, à proprement parler, nos annales 
et celles de plusieurs autres provinces. 

On sait que, peu de temps après Ingelger, et par 
suite de la concession des provinces à üire hérédi- 
taire, s'établit en France une organisation politique 
bientôt fameuse dans notre Lisioiee de France, je 
veux, dire le régime féodal, alliance des seigneurs 
pour le maintien de leur pouvoir, mais fédération 
différente de toute autre dont l’histoire fit mention, 
par sa gradation descendante du monarque suzerain 
à ses grands vassaux, de ceux-ci à d’autres seigneurs 
d’un ordre secondaire , dont à leur tour ils deve- 
naient suzerains, et cela successivement jusqu’au 
simple châtelain, qui n'avait pas de vassaux, mais 
seulement des sujets ou des serfs; système qui pou- 
vait accommoder chaque possesseur de fiefs, mais 
qui, dans un grand danger, laissait la monarchie 
sans défense, malgré l’héroïsme de la noblesse de cette 
époque; témoins les journées de Créci, d'Azincourt 
et de Poitiers, mais système enfin qui, tout peu 
philosophique qu'il était, sauva peut-être la société 
française, dans ces temps de passion et de barbarie. 
Du moins est-ce pour l'avoir considéré sous ce rap- 
port, que Montesquieu en fait l'éloge que nous li- 
sons dans son Esprit des Lois (1). Au resle ces mille 
puissances, pour la plupart ombrageuses, igno- 


(1) Liv, xx, chap, 1er 


1Q 


( 146 ) 
rantes et cruelles, étaient peu favorables à la fran- 
chise historique : aussi quelles furent les annales et 
les chroniques de cet âge! 

Le sentiment de leur indépendance, et le respect 
que se portaient les feudataires à eux-mêmes, leur 
fit inventer l’ordre militaire et presque sacré de la 
‘chevalerie. L'absence de tout spectacle où l'esprit 
fût pour quelque chose fit tourner à spectacle les 
cérémonies de l’accolade. On institua ensuite des 
jeux, bien faiblement imités de ceux de la Grèce; 
ce furent les tournois. L'ancienne vénération des 
‘Gaulois pour les femmes se réveila dans toute sa 
orce et avec les formes les plus armables dans cés 
solennités (1, où le chevalier prodiguait pour leur 
plaire ses grâces, sa fortune et quelquefois son 
sang. | 

La féodalité, avec le temps encoré, vit naître 
une profession inconnue jusqu'alors, à moms qu'on 
y trouve quelque rapport avec les rhapsodes des 
premiers siècles de la Grèce littéraire : ce sont ces 
poètes chanteurs que l’on nomma Troubadours et 
Trouvères. Les seigneurs, Tes dames surtout s’en- 
nuyant de leur sombre puissance, donnèrent entrée 
dans leurs donjons à ces poètes errans, ‘qui y in- 
troduisirent les plaisirs et l'amour. Les châtelains se 
déridaient parfois, et parfois aussi montraient la 
griffe (qu’on me passe ce mot qui tombé sous ma 


(1) Oui, dans ces-solennités; mais, dans l’intérieur-de-Jeurs 
maisons, les femmes étaient souvent traitées ayec une dureté et 
une brutalité tout-à-fait barbares. 


( 147 ) 
plume). De trop aimables chanteurs éprouverent 
qu'on ne peut pas être toujours 


Fort bien avec les femmes, 
Bien avec les maris. 


De tragiques aventures signalent la vie de quelques 
troubadours. Rien de plus instructif d’ailleurs, par 
rapport aux mœurs et même à l’histoire du temps, 
que les ouvrages de ces poetcs du nord et du midi 
de la France. 

Enfin paraît Froissard. Les dames et les cheva- 
liers ont trouvé leur historien; il est en outre un 
de leurs poètes les plus chéris. De la plume il passe 
à la lyre; il chante l'amour et raconte les faits 
d'armes; et le plus fleuri, le plus gracieux des chro- 
niqueurs va consacrer ses veilles à nous reproduire 
une des plus désastreuses périodes de notre his- 
toire (1). 

Monsirelet, le continuateur de Froissard, moins 
animé, moins pittoresque, mais plus ami de la 
France, nous expose les funestes suites de la dé- 
mence de Charles VI, et les miracles de cet être 
humain et fantastique, illusoire et positif, incon- 
cevable enfant de l’exaltation mystique et de l'amour 
de la patrie; de cette Jeanne d'Arc, si indignement 
traitée de son vivant par ses ennemis et par son ro1, 
et, après sa mort, soit par le lourd pédantisme d’un 
poète, soit par le spirituel cynisme d’un autre; de 


QG) De 1326 à 1e depuis Philippe - -le- Bel jusqu'à Char 
les vrs 


( 148 ) 
cette Jeanne d'Arc, ‘qui dit d'elle si heuréusement 
dans une tragédie nouvelle : 


Jeune et faible instrument de la faveur céleste, 
Je marchais, je parlais... Dieu seul à fait le reste. 


C’est dans ce siècle que nous voyons le chef d’une 
nouvelle espèce de productions historiques, moins 
grave, moins rigoureuse que l’histoire, mais plus 
communicative, plus confidentielle, d'un plus facile 
accès pour une foule de détails qu’elle rejetterait , 
et qui peint beaucoup mieux les âges et les hommes, 
je parle des Hénorres, et de Philippe de Commines, 
qui seul conserva la faveur de Louis XI sans deve- 
nir crimmel ni bas, et qui nous révéla lâme de ce 
monarque rusé, superstitieux et cruel. 

Comment, avec de si bons modeles, Bourdigné, 
notre annalisie, qui pouvait enfin considérer de haut 
l'histoire féconde et variée de l'Anjou; qui, instruit 
par les égaremens de ses devanciers, devait se tenir 
averti de ne pas donner dans leurs folles visions, 
Pourdigné, au XVI: siècle, bien des années fps 
Commines, plus d’un siècle après Froissard, 
temps de la renaissance des lettres, au milieu des 
écrivains spirituels qui font du siècle de François 1.7 
un de nos siècles hitéraires, ne nous donna-i-il 
qu’une pitoyable compilation des chroniques et des 
légendes les moms dignes de foi? Ceux qui auront 
eu la patience de lé lire attesteront combien de contes 
puérils_et absurdes il offre à chaque page, et de la 
meilleure foi du monde. Ici c’est le miracle, d'une 
hostie qui se change en serpent; là un comte, ex- 


(149 ) 


pirant frappé à la tête et aux flancs par l'ombre de 
Saint Maur; là un enfant naissant, qui supplée à 
la distraction de son parram, en répondant lui- 
même Amen au prêtre qui le baptise; tantôt c’est 
une journée qui en dure trois, pour donner à Char- 
lemagne le temps de venger, d’une manière plus 
éclatante, la défaite de son neveu Roland à Ron- 
cevaux ; tantôt c’est la châsse de Saint Germain qui; 
dans l'église d'Auxerre, reconduit d'elle-même, et 
avec une politesse tount-à-fait touchante, celle de 
Saint Martin de Tours, etc.: voilà ce qui fourmillé 
dans Bourdigné: 

La manière dont Philippe de Commines avait traité 
l'histoire eut de nombreux imitateurs. On jugea fa- 
cile le genre des Mémoires, parce qu'il était naturel 
et sans apprêt. Les temps de troubles et d’anarchie 
voient surtout'abonder ces sortes d’écrits, alors que 
chacun croit avoir été ou.être-une puissance, et de- 
voir au monde le secret de ses vues et de ses pensées, 
dont se passerait volontiers le monde : j'en atteste 
les mille et un Mémoires que naguère châque jour 
voyait éclore, et que l’on commence d'apprécier ce 
qu'ils valent, 

Dans cet océan, un petit nombre surnagent. On 
aura remarqué d’Aubigné qui, pendant la ligue, a 
tenu la plume avec passion , avec rudesse, mais avec 
vérité, historien d’un parti qui fut presque toujours 
malheureux, et avec lequel on voulut en finir, 
comme on sait, par une épouvantable catastrophe. 

Une guerre civile ridicule et sanglante, une guerre 
digné d’être chantée en vers burlesques, comme dit. 


(450 ) 


Voltaire, donna naissance à un écrivain aussi bizarre 
qu’elle, le cardinal de Retz, prélat remuant plutôt 
qu’ambitieux, homme souveraimement doué d'esprit 
et de présence d'esprit, factieux populaire qui mé- 
prisait le peuple, frondeur de la cour dont il con- 
voitait les faveurs, espèce d’enfant qui brise et dé- 
compose, moins dans des intentions philosophiques 
et d'analyse, que pour voir ce qu’il en adviendra. Le 
cardinal de Retz met son lecteur dans une entière 
confidence de ses erreurs, de ses étourderies, de ses 
vices, non, comme Rousseau, pour prouver que le 
monde lui doit des statues, mais pour expliquer, en 
fanfaron, la justice que lui rendirent, en l'oubliant, 
et la cour et les gens honnêtes. 

Pour les raisons que je viens de dire, les temps 
où nous vivons devaient voir naître bien des Mé- 
moires. Îls abondent en effet, presque tous dégoû- 
tans d’indiscrétion , de récrimination, de partialité, 
de cynisme. Des hommes de letires d’une rare ha- 
bileté, sans doute, ressuscitent les hommes d'état 
les plus vils, les courtisannes les plus ignorantes et 
les plus frivoles, pour leur mettre une plume à la 
main, et leur souffler l’art d'écrire les scandales ‘de 
leur vie : spéculations politiques ou de librairie , mais 
qui décèlent à un haut degré le talent. de revêtir 
ioutes les formes, de jouer ious les personnages; 
talent , fruit et moyen des révolutions. 

Sauvons-nous de cette misérable cohue de libelles 
ou de niaiseries, et nous.réfugions dans les Mémoires 
que nous donna, 1l y a quelques années, le comte 
de Ségur. Lisons et relisons l'ouvrage charmant d’un 


( 151 ) 

homme qui vécut au sein des cours sans en êlre 
ébloui, qui jugea les grandeurs en sage, sut être 
et grand seigneur et simple parüculier, ne déclama 
contre aucune des conditions sociales, fut philo 
sophe sans jamais l’affecter, ami du plaisir sans en 
abuser jamais, se consola au sein de la littérature 
et des beaux-arts de sa fortune et de ses honneurs 
évanouis , fut par son caractère un des hommes les 
plus heureux de son temps, et nous laissa, dans ses 
ouvrages, un, moyen assuré de l'être, autant du 
moins que dure leur lecture. 

Revenons à l'histoire. Elle devait prendre un ca- 
ractère tout-à-fait différent, en nos siècles où les 
progrès dans les sciences naturelles, politiques, éco- 
nomiques agrandissaient si prodigieusement le cercle 
des idées, et où les écrivains se trouvaient si impé- 
rieusement lancés dans la carrière des digressions : 
de là un genre nouveau, dans lequel nous avons des 
ouvrages d’une haute importance. Malgré la nuance 
de système qu’on remarque en quelques-uns, qui de 
nous n’a pas admiré les travaux des Thierry, des Gui- 
zot, des Châteaubriand, des Sismondi? 

Les siècles passés sont du domaine des recherches, 
des conjectures, de Ja critique; mais. en est-il abso— 
lament de même de l'histoire contemporaine ? Je ne 
le crois pas. J’expose ici mon .opinion avec fran- 
chise. Pourquoi dans l’histoire contemporaine ne pas 
conserver cette simplicité, surtout cette désappro- 
priation que nous aimons chez les anciens, et dans. 
les bonnes annales du moyen.âge?. Notre devoir. est 
d'être comme ceux des peintres fidèles des évène- 


(152) 


mens et des personnes. Que nos récits exercent un 
jour des plumes philosophiques, à la bonne heure; 
ne dérobons pas aux siècles à venir une faculié qu'il 
nous est donné d’exercer sur les temps qui nous ont 
précédés. Ils sont à nous, ceux-ci; permis à nous 
de les interpréter selon notre intelligence, notre 
imagination et nos lumières. Laïssons à nos neveux 
de nous interpréter à leur tour. Ce que nous met- 
trions d’étranger à la vérité ne ferait qu’offusquer 
la vérité. Notre histoire, tout acteurs que nous y 
sommes, et même parce que nous y sommes ac 
teurs, ne nous appartient point; elle appartiendra à 
la postérité; qu’elle en fasse un jour à son plaisir: 
comme nous faisons de celle de la Grèce et de 
Rome. 

Mais gardons-nous, envers les anciens, d’un es- 
prit de prévention et de satire; donnons cet exemple 
à nos neveux, qui nous jugeront. Comme nous 
voyons de loi les objets, nous y apercevons des 
formes, des rapports qui durent échapper aux ‘écri- 
väins du temps. Nous sommes à un point de vue 
qui leur manquait; mais de ce point de vue ne nous 
créons pas des chimères: Expliquons, maïs soyons 
sobres du ‘blâme: Les siècles ne peuvent anticiper 
sur les Sièclés. Ne tümbons pas dans de risibles ana- 
chronismes. Si nous rencontrons des erreurs, ne les 
reprôchons pas à des temps dont cès'erreurs étaient 
insépärables. 

‘TE serait bien temps que je cessassé} et mon cœur 


me sollicité de demander encore quelques minutes 
d’indulgence. 


(155) 


Les autres provinces de France ont pour la plu- 
part d’estimables, et quelques-unes de belles his- 
toires; et notre Anjon, si digne d’être connu, ne 
trouve dans le moyen âge que d’absurdes compila- 
teurs, et dans des temps moins éloignés, que Jean 
de Bourdigné, et Jean Hiret, historiens de même 
force. 

L'abbé Ménage, au XVII. siècle, écrivit un ou- 
vrage, savant, je veux bien en convenir, mais éton- 
namment indigeste et confus; c’est l’Æzsoire de Sable. 
Ce livre, que Ménage aimait d’un amour propor- 
tionné sans doute à ce qu’il lui avait coûté de peines 
à enfanter; précieux, d'accord, pour les familles 
d'Anjou curieuses de leur généalogie (et c'est son 
grand mérite), n’offre d’ailleurs que des notes éparses 
qui, tout intéressantes qu’elles sont, ne constituent 
point une histoire d'Anjou. 

Qu'est-ce que l'ouvrage intitulé, je sais à peine 
pourquoi, Le Mont-Glonne , par l'abbé Robin ? 
je suis vraiment embarrassé pour répondre à cette 
question. C’est un des livres les plus diffus, les plus 
désordonnés qu’on ait faits; plein de choses, mais 
amassées pêle-mêle. Si jamais écrivain se peignit 
dans ses œuvres, c'est l'abbé Robin. Spirituel, rail- 
leur, ennemi de toute gêne, son expression est sou- 
vent aussi heureuse que celle de Montaigne. Il a 
écrit comme il vivait, sans soins, sans art, sans 
préméditation. On trouve dans son livre d’atiles 
découvertes, de spécieuses! conjectures; il est des 
premiers qui aient attiré l'attention sur plusieurs 
monumens d'Anjou, sur les camps romains de Ché- 


( 154) 
nehutie et de Frémur; on a de lui une dissertation 
savante et systématique sur l’église de Saint Pierre 
d'Angers, dont 1l était curé; mais enfin cela n’est 
pas l’ombre d’une histoire d'Anjou. 

Un homme d'esprit et de talent, M. l’abbé Ran- 
geard, qui fut député du clergé de notre province 
aux Etats-Généraux, consacra de longues années 
de sa vie à étudier notre histoire, et en a rédigé 
une partie; je le vois dans les citations de Bodin. 
Il a dû mettre une saine critique dans son ouvrage ; 
jen ai pour garans des amnotatiofs très-judicieuses 
qu'il a faites en plusieurs endroits d’un Bourdigné 
qne j'ai eu entre les mains ; mais cet ouvrage n’est pas 
publié; et, quand il le serait, je ne crois pas que 
cela fût encore une histoire d'Anjou. 

Bodin nous à laissé des Recherches: mais ce n’est 
point une histoire comme Angers mériterait d’en 
posséder une. Ce sont des essais, et Bodin en fait 
l’aveu. Ils épargneront des peines aax écrivains à 
venir. S'il avait vécu plus long-temps, il eût fondu 
ses deux ouvrages du Haut et du Bas-Anjou; il 
eût fait disparaïre ses chapitres; il n’eût plus, 
comme 1l fait sans cesse, interrompu ses récits par 
des digressions d’antiquité. Le livre de Bodin laisse 
bien des faits à désirer ; il manque d'ordre. Si.en- 
core il y avait une table synthétique, à l'aide de 
laquelle on pât coordonner les objets, et les trou- 
ver aisément ! Faute de cetie table, je connais des 
esprits impatiens qui, plus d’une fois, ont fermé 
le livre, avant d’avoir trouvé ce qu’ils cherchaient 
avec trop de-fatigues. 


( 155) 

Et voilà quels historiens étaient réservés, dans le 
moyen âge, à la renaissance et de nos jours, à une 
province, digne au moins autant qu'aucune autre 
de France, d’une grande et sérieuse histoire ; qui 
fut célèbre avant la conquête romame, si l’on en 
croit les monumens celtiques dont son sol est cou- 
vert; que sa position géographique et sa fertilité 
rendirent très-importante aux Romains, témoins leurs 
camps retranchés, leurs amphithéâtres, et tant d’au- 
tres établissemens dont nous voyons encore des ves- 
tiges; que nos premiers rois considérèrent comme 
une des clefs de leur empire; que les normands si- 
gnalèrent par tant de dévastations; qui, sous ses 
princes ingelgériens, exerça une si grande puissance 
hors de ses limites; qui, dans les démêlés de Jean- 
sans-terre et de Philippe- Auguste fut le théâtre 
d’une lutte si sanglante; qui donna des rois à Jé- 
rusalem, et fonda une dynastie en Angleterre; qui, 
par une fatalité déplorable, eut à souffrir de toutes 
les guerres civiles; qui fut presque toujours trou- 
blée (attrait aussi puissant pour les lecteurs que 
matière favorable à l'écrivain ); qui devait être si 
heureuse, et qui devrait bien l'être enfin, si les tré- 
sors de la nature unis aux qualités du cœur étaient 
des élémens suffisans de bonheur et de paix. 


VARIANTE SUR POLYBE. 


Ce grand écrivain était fils de Lycortas, un des 
chefs de la Ligue Achéenne:; il était né à Mégalo- 


(156 ) 


polis, en Arcadie, fondée par Epamimondas. Il vint 
à Rome avec plusieurs autres Grecs, pour y servir 
d'ôtage, garans de la fidélité des Grecs au nouveau 
joug que la république romaine faisait peser sur eux. 
Polybe s’attacha aux deux Scipions, Fabius et Emi- 
lien, et ce fut surtout avec ce dernier qu'il con- 
tracta une amitié étroite, en partage avec Lélius et 
Térence. Mais Polybe, toujours amant de sa patrie, 
ne la répudia jamais dans sa pensée. On voit en 
Jui un Grec des temps heureux de cette contrée cé- 
lèbre, amsi qu’un Romain témoin des faits merveil- 
leux de la période où il écrivait. Ami du vainqueur 
de Carthage et de Numance, 1l montra cette portée 
d'intelligence, cette justesse d'observation, cette li 
berté de penser qui devaient caractériser un homme 
en qui se trouvaient réunis de si précieux élémens: 


(457) 


OBSERVATIONS 


SUR LES GRAMINÉES, 
ET 
Description de Genres st Espèces nouvelles 
DE CETTE FAMILLE, 


PAR M. DESVAUX (1). 


SL les circonstances ne s’y fussent opposées, nous 
devions publier avec feu notre laborieux ami, Palis- 
sot de Beauvois, un Species sur les graminées (2) : 
famille de plante, peut-être, de toutes celles qui 
composent le vaste ensemble des végétaux, la plus 
importante pour l’homme. De nombreux matériaux 
réunis à cet effet, nous eussent mis à même de com- 
pléter la série des genres et des espèces, dans un 
ordre nouveau et moins, arlifciel que celui de 
l’Agrostographie de M. de Beauvois. Notre éloi- 
gnement de la Capitale nous ôtant la possibilité d’ef- 
fectuer ce projet, il ne nous reste qu’à jeter un der- 


(1) Lu en novembre 1831. 


(a) Voyez son Agrostographie dans l'Avertissement. 


( 158 ) 


nier coup-d'œil sur les collections que nous avions 
formées pour cet objet, afin d’en extraire ce qu'il 
y a d’utile et de nouveau pour la science. Déjà dans 
plusieurs ouvrages (1) nous avions décrit des genres 
et des espèces nouvelles, pour cette nombreuse fa- 
mille de plantes; mais, où ces objets ont été trop 
brièvement décrits, ou ils ont été oubliés par ceux 
qui ont entrepris des travaux généraux sur la science; 
et dès-lors nous croyons dévoir offrir aux botanistes 
agrostographes le travail présent, dans lequel sont 
établis onze genres nouveaux et quatre-vingt-trois 
espèces entièrement nouvelles ; et en, outre cinquante 
et quelques espèces que l’auteur du Mémoire pré- 
sent n'avait encore qu'indiquées par quelques notes 
caractéristiques , jointes enfin à une série d’observa- 
tions, tendant à placer dans leurs genres naturels, 
des’ espèces qui avaient été mal coordonnées sous 
ce rapport. 

Dans ce qui va suivre, nous n’emploierons point 
de classification particulière à tel où tel auteur, parce 
qu'aucune de celles proposées ne remplit le but 
qu’on peut désirer: en effet, quels que soient les 
avantages particuliers à célles de Beauvois , Kunth, 
Raspail, ces avantages ne sont pas assez prononcés 
pour oublier celle employée par le respectable pa- 
triarche de notre botanique, M. de Jussieu: 


1. ZOYSIA macrantha (ZLoysia pangéns R. Brow. 
Prod. p. 08, Excl. syn.); culmis sirictis, cæspi- 


(1) Voyez: Encyclopédie méthodique, supplément, vol. 4, et 
Prodromus floræ Indiæ occidentalis d'Hamilton. 


( 159 ) 
tosis; folis lanceolatis ore barbato-ciliatis ; glamâ 


barbatâ (nigrescente). Crescit in Nova-Hollandiä. 
OxservaTIoN. La fleur de cette espèce est beaucoup plus grande 
que celle de la suivante, ainsi que ses feuilles. 


2. L. pungens Will. culmis strictis, cæspitosiss 
foliis lmearibus involutis ore subnudis; glumä acutà 
(flavescente}). Crescit in insulà Borboniæ. 

3. ALOPECURUS a/fénis ; (Al. capensis? Thumb.); 
culmo elato, (18- polli.) fliforme glabro , basi ge- 
niculato; spicis densis oblongis Re et TT: 
valvis ha basi Bee à dorso. cilats ; glu- 


mellarum aristâ torüli. Habitat... 

Ozs. Cette espèce, dont nous,ignorons l’origine, se rapproche 
de PAL, agrestis, mais les fleurs sont plus petites; son épi plus 
court, à fleurs plus pressées; la glume est à peine soudée vers 
le bas et très-ciliée sur les bords. 


4: PODOSAÆMUM capillare Desv. J. Bot. 1. p. 67. 
(Trichochloa expansa De-C. exel. syn. Doi. Apgros- 
tis rubicunda Bosc ined. Tosagris agrostidea P. 
Beanv.) 

P----B. (Trichochloa capillaris De C. SpA ca- 
pillaris Lamk.) 


Oss., L'étude de cette planté, dont M. De Beauvois avait pu 
faire deux genres, nous a prouvé que les troïs espèces publiées 
par M. De Candolle, sous les noms de Trichochloa expansa , 
capillaris et polypogon, ne sont que des modifications d’une 
seule, que nous avions publiée dési810 ( Bult. soc. Phil.) sous le 
nôm de Podosæmum capillare. 


5. PASPALUM pedunculatum Tai: in Enc. suppl. 
4. p- 315; culmo ramoso, ramis glabris nodis ;bar- 
batis; foliis lanceolatis pubescentibus basi cordatis 
ciliatis, vaginis laxis.puberulis ; spicis solitarns (Pol- 
lic) apice ramulorum fasciculatis longèque pedun- 


( 160 ) 
culatis: xhachi subfiliformi intùs. setosà ; floribus 
subdicisformibus ,, mucronulatis, biserialibus glaäbris 
(subminutis ).. Habitat in Carolina? ? et Guyana? 

6. P. micranthum; culmis prostratis ramosis; fo- 
his cordato-lanceolatis (semi-poll.) glaberrunis, 
ligulà-obtusä ; spicis conjugatis; rhachi compressä 
glabrâ ; floribus biserialibus ovatis acutis glabnis 
striatis sessilibus. Crescit in msulà Borboniæ aut 
Maariti. Confer ‘aspectu cum Cynodone. 

7. P. digitarioïdes ; culmis erectis simplicibus ; 
folus lanceolatis pubescentibus mucronatis (2-poll.) : 
vaginis inferioribus densè pilosis; spicis (2-poll. } 
subconjugatis; rhachi subcompressä, glabra; flori- 
bus biserialibus ovous glabris .enervosis. Habitat in 
Brasilio. ; 

8. P: multicaule Desv. Le. p. 309 ; calmis fas- 
ciculatis glabris ; : folis vaginisque laxè longèque 
barbatis ; spicis conjugatis lmearibus: rectis glabris 
(sub-2-poll.); rhachi sinuosâ tenui; floribus (mi- 
nutis) suborbiculatis;biserialibus (flavescentibus ). 
Habiiat in Brasilio. 

9. P. céhatifolium Mich:'fl."bor. am. 1: p: 44. 
(P. supinum Bosc. in Encyel. 5. p. 29); culmo 
elato (ped.,.2-ped.): nodis glabris ; foluis latiuscu- 
lis pilosis serrulatis longè ciiatis : vaginis quando- 
cunque glabris; spicis 1-3 basi pilosis subvirgatis ; 
rhachi filiformi; floribus biserialibus glabris (albes- 
‘centibus) pedünculatis subdisciformibus. Crescit in 
Carolinà! 


Os, Cette espèce variant béaucoup, son caractère diagnos- 
tique était imparfait dans les auieurs. 


( 161 ) 

10, P. sinuosum; culmis erectis (3-ped.); fo- 
lis Hinearibus ( ped. 2, lin. lat.) globris: vaginis 
striatis, ore pilosis: spicis 3-4 (3 poll.) subdistan- 
übus; floribus triserialibus ellipticis pedicellatis obs- 
curè pubescentibus ; rhachi sinuatâ. Habitat in An- 
ullis. 

xs. Cette espècela quelques rapports ayec le P. glabrum ; 
mais les fleurs sont beaucoup plus petites. 

11. P. minuliflorum; culmis geniculatis ramosis 
( biped.) dichotomis angulatis; foliis cordato-lan- 
ceolatis elongatis aculis pubescentibus: vaginis ore 
pilosis; spicis 1-2 distantibus basi pilosis subfal- 
catis ( 3-poll. et ult.); rhachi tenui sinuatâ ; flo- 
ribus triserialibus glabris, subdisciformibus. Habitat 
in Brasilio. 

12. P. spathaceum Desv. 1. c. p.314 ;, culmis 
erectis (2-ped.) angulatis glabnis ;:folüis lanceolatis 
acutis (15-6-poll. 5-6 lin. lat.) basi cordatis sub- 
glabris ciliatis : vaginis margine ciliatis ore nudis ; 
spicis solitariis (an constanter? ); rhachi subfilifor- 
mi arcuatà ; floribus biserialibus elliptcis, rotundo- 
oyals ,,breviter pedicellatis glabris, uninerviis. Ha- 
bitat in, Guyana ? 

Oxs. | C’est :à tort que CR a reporté cette FPT au P. 
debile. 

13. P. faeum; .éulmo recto _elato (2-ped.) gla- 
bro sulcato; folis nervosis elongatis (ped.) latius- 
culis (4 lin.) yaginisqne glaberrimis : ligulà scariosà 
obtusâ ; spicis subternis ( flavescentibus ) glabris 
(3-poll. ); floribus subdisciformibus irinervis gla- 
bris biserialibus : rhachi complanata. Habitat. 

II 


( 162 ) 

14. P. gracile Desv. 1. c. p. 313; culmis cæspi- 
tosis simplicibus ( ped. et semi-ped.) glabris : no- 
dis pubescentibus ; folus linearibus glabris : vaginis 
glabris ore pilosis; spicis (poll.) basi pilosis sub- 
ternis remotis tenuibus glabris; rhachi filiformi sub- 
sinuatÀ ; floribus biserialibus ( minuus) unmervosis 
subsessilibus oblongis. Crescit in Antillis. 

15. P. fortbundum; culmis cæspitosis simplici- 
bus glabris (ped.); folis elongato-lanceolatis (4- 
poll.) glabris nervosis: vaginis striatis ore pilosis ; 
spicis subternis remotis (snb-2-poll. ); rhachi an- 
gustà planà ; floribus triserialibus (mediocris) ellip- 
üais glabris unmervüs, densè imbricatis. Habitat in 
Anüllis ? 

16. P. multiflorum; culmo elato (4-ped.}) nodis 
glabris4 folus lanceolatis (5-poll. 5-lin. lat.) sub- 
tomentoso-pilosis : vaginis striatis pubescentibus , 
margine ciliatis, ore barbatis; spicis 5-9 basi pi- 
losis; rhachi capillari; floribus pedicellatis tri-qua- 
driserialibus glabris uninervüs oblongis ( minutis ). 
Crescit im Brasilio. 

17. P. lanceæfolium ( P. heterophyllum Poir. 
Enc. suppl. 4. p. 315, parviflorum Desv.‘herb. non 
Roth.); culmis erectis cæspitosis (2-ped.) glabris : 
nodis pubescentibus; foliis elongato-lanceolatis gla- 
bris subglaucescentibus (5-8 “poil. 4-lin. lat. ); va- 
gimis glabris ore pilosis; spicis 3-7 bas setosis ; 
rhachi subcapillari; floribus pedicellauis iri-quadri- 
serialibus (minuts) glabris oblongis uninervibus. 


Habitat in Hispanioli. 


Os. J'avais nommé cette plante P. LA ALES mais cenom; 


(163) 


qui devait être changé, à raison d’une espèce qui le porte égale- 
ment, l’a été par M. Poiret sur une indication erronée : un échan- 
tillon d’une autre espèce et à feuilles un peu différentes s’y trou- 
vant réunie par mégarde, 


18. P. melanospermum Vesv. 1. c. p. 315; cul- 
mis elatis (2-ped. et nlt.), cæspitosis apice tri- 
quetris glabris; folis asperis submarginatis elongatis 
(10-poll. 4-5-lin } : vaginis laxis striatis ore pilosis ; 
spicis 5-7. basi piloso-setosis subfalcatis; rhachi an- 
gustà; floribus pedicellatis subquadriserialibus dis- 
ciformibus subpilosiusculis ; glumellà fusco-nigrä. 
Habitat in Guyanä. 

19. P. milioïdeum Desv. 1. c. (P. miliare Spreng. 
spec. 1. p.247); culmis elatis (sub-4-ped.) gla- 
bris; folis planis elongats dein convolutis: vaginis 
longissimis ‘striatis glabris, apice marginibus ore- 
que barbatis; spicis 5-7 basi pilosis adscendenti- 
bus, virgatis (8-10-poll.); rhachi filiformi flexuosä ; 
floribus (pallescentibus) irregulariter biseriatis, su- 
bremotis, glabris oblongis acutis. Habitat in insulà 
Porto-Rici. 

20. P. Commersoni: Lamk. 

Ozs. On doit rapporter à cette espèce le P. Kora de Beau- 
vois (Flor. Ow. 2. 85 — f. 2. En. syn.), qui est très-différent 


du véritable P, Kora De même qu'au P. paniculatum L.'il faut 


rapporter le P, striatum Pers., Roem. et l'Hæmisphæricum de 
Poiret. 


21. PASPALANTHIUM. Flores unilaterales, ad rha- 
chin membranaceam disposili;, gluma depressa flac- 
cida libera; glumella inclusa coriacea vacua ; ca- 
ryopsis laxè corticatus, 

P. stoloniferum ( Paspalum -- Bosc. purpureum 
BR. Pav. racemosum Jacq- Milium latifolium Cav.) 


(164) 


Os. Cette plate, comme genre, est très-distincte des Pas- 
pales, 1:° parce que sa glume n’est pas apprimée sur la. glu- 
melle ; 2.0 parce que la glumelle est libre et plus couïte que 
la glume; 3.0 parce que le rhachis est membraneux, et non co- 
riace. Ce genre tient du ÆMilium par sa fleur, et du Paspalum 
par son inflorescence. Le Paspalanthium est aussi naturel que le 
Ceresia, autre genre qu’on doit adopter, ayant un caractère de 
fleur en opposition avec les Paspalum et Paspalanthium : sa 
glume est coriace et sa glumeille scarieuse. 


22. CALAMAGROSTIS subspicata ; culmo fiiformi 
(2-ped.) glabro; fois limearibus acutis subconvo- 
lutis: vaginis striatis, ligulâ elongatà scariosâ ; pa- 
niculâ subspicatâ contractä; glumis glabris acutis : 
valvulis subæqualibus; glumellà : valvulà inferiori 
medio aristatà, aristà rectà inclusâ, pilis valvæ ex- 


terioris glumellæ subæquantibus. 

Oss. Nous avons eu cette plante sous le nom de Deyeutia 
subspicata, sans en connaïtre l’origine , bien que nous, la! soup- 
çonnions de l'Amérique australe. 


23. SPOROBULUS Lamarckir Desv. im Prod. Ind. 
Ham. p. 4. (Agrosüs elongata Lamk. ill. 
p- 157, nec sporobolus elongatus R. Brow., Agros- 
Us us Sw. nec L. gramen pratense, etc. Sl. 
hist. 1. t. 73 f. 1.); culmo erecto (3-ped.); pa- 
get à CE et ultra) contracta spicæformi ; folis 
vaginantibus paniculam æquantibus : ligulä vagina- 
rum brévissima piloso-fimbriata. Habitat in Ame- 
ricâ. 

24. S. effusus; culmis erectis (sub- -ped.), su- 
bramosis basi geniculatis, glabris; folüis linearibus 
glabris : vaginis ore subnudis; paniculà elongatä, 
effusâ, ramis semiverticillatis, ramulis divaricatis ca- 
pilaribus ; floribus (minutis) apice ramulorum sub- 


\ 


( 165 ) 
solitariüs ; glumä : valvulis inæqualibus, glumellis 
duplo brevioribus, subacutis ; glumellà: coloratä : 
valvulis æqualibus obtusis à cariopside hiantibus. 
Crescit in Brasilio. 

25. AGROSTIS /anigera; culmo erecio (2-ped.) 
glabro; foliis distichis latiusculis acutis (3-lin. lat.) 
subconvolutis supra basin piloso-lanatis subtus gla- 
berrimis + vaginis striatis glabris ore barbatis; pa- 
nicula :contracta spicata; glumâ muticâ : valvis acu- 
tis subæqualibus, glumellâ inclusâ æquantibus ; 
valvis glumellæ acutis integris. Habitat in Brasilio: 

26. LEERSIA parviflora ( Leersia orizoïdes ? De- 
lille); culmo glabro : nodis pubescentibus ; foliis 
angustis asperis : ligulà:obtusâ oblongä; paniculà 
subcontractâ, ramis simplicibus flexuosis ; floribus 
(.3-antheris ? ) oblongis, sessilibus unolatere :ad- 
pressis, subglabris rigidè ciliatis: Creseit in Ægyp- 
tià. . 

27. GRAMERIUM; spicæ unilaterales germinæ; flo- 
res pedunculatæ ad rhachin filiformem positæ ; glu- 
ma :: valvulis membranaceis acutis, densè lanatis 
subæqualibus:medio glabris nervosis; glumella : val- 
vulis muticis-coriaceis. 

G. convolutum PI. Vn, . 1 ; culmis ( ped. } apice 
pilosis, cæspitosis ,. basi subbulbosis ; folus linea- 
ribus, plicato-convolutis glabris : vaginis hirsutis; 
floribus: alternis elongatis ; rhackii glabrâ flexuosä. 
Habitat in regno chilense. 

Oss. Ce genre rapproché du .Digitaria, m’en.a pas la fleur avor- 
tée, et s'éloigne du Paspalum-par son rhachis non dilaté et toutes: 


ses fleurs pédicellées. Du reste il a 3 étamines et un stigmate bi- 
ide gros et velu. ‘ ! 


( 166) 

28. DIGITARIA platicaulis (Paspalum platicaulon 
Lamk. Enc. 5. p. 34); culmis geniculatis compres- 
sis : nodis pubescentibus ; foliis latiusculis lanceolatis 
nervosis ciliatis : vaginis glabris ore ciliatis; spicis 
2-3, tertio alterno; floribus alternis oblongis sub- 
pubescentibus. Crescit in Hispaniolà et Porto-Rici. 

29. D. setosa Desv. in Prod. fl. ind. occ. Ham. 
p- 6. ( Digitaria horizontalis ? Spreng. nec W. ); 
culmo geniculato; folis vagmisque pilosis ; spicis 
verticillato-paniculatis lmearibus ; rhachi sparsè pi- 
losà : setis flore triplo longioribus; floribus elon- 
gats acutis alternè pedicellatis. Habitat in Antillis. 

30. D. obtusifolia ; culmo compresso geniculato 
suberecto : nodis pubescentibus ; foluis lanceolatis 
oblongis obtusis subpilosis ciliatis : vaginis ore nu- 
dis; spicis duis ternive alternis; glumis (valvä in- 
feriore apice barbatâ ) snbpubescentibus oblongis 
acutis; glumellis : valva inferiore apice barbata. Cres- 
cit in India oriental. A. D. barbatä differt. 

31. D. barbulata; culmo geniculato; foliis sub- 
ciliatis sparsè pilosis; vagimis remotè pilosis : pilis 
horizontalibus ; spicis alternis tribus subvirgatis ; 
rhachi subcomplanatä flexuosà ; floribus geminis, al- 
tero pedicellato, acutis extus glabris; glumis mar- 
gme interiori barbato. Habitat in insulà Borbo- 
niæ. 

32. D. mollissima ( Panicum mollissimum Hort.}; 
culmis elatis (2-ped.) geniculatis ; foliis vagimisque 
tomentoso-pilosis ; spicis subquinis fasciculatis ; flo- 
ribus pedicellatis acutis striatis pubescentibus. Ha- 
bitat in Americà australi ? 


( 167 ) 

33. D. fasciculata; culmis elatis (2-ped.) com- 
pressis geniculatis ; foliis vaginisque glaberrimis ; 
ligulà subnullä; spicis subfasciculato-verticillatis fili- 
formibus; floribus alternis remotis obtusis. Habitat 
im Brasilio. 

34. D. borbonica; culmo ( ped. et ultr. ) radi- 
cante geniculato ; foliis lanceolatis vaginisque hirto- 
pilosis ; spicis fasciculatis subquaternis fliformibus : 
rhachi complanatä ; floribus pedunculatis (minutis) 
biserialibus ovatis acutis pubescentibus. Habitat in 
insulà Borboniæ. 

35. PHALARIS Aumilis; cæspitosa (uncialia); cul- 
mis subnallis; foliis rigidis latiusculis brevibus ner- 
vosis: vaginis dilatatis ;: spicis ovatis subsessilibus ; 
glumis rigidis ciliatis, sub-oblongis. Habitat in 
Oriente. 

Os. Cette singulière espèce qui nous vient d’Ollivier, est an- 


nuelle et ne peut être ramenée à aucune espèce connue; elle n’est 
point bulbeuse. 


36. CAMPULOA. Desv. J. bot. 


Os. Ce genre que nous avions d’abord incorrectement nommé 
Campulosus (Bult. Soc. Phil. 1810), a été successivement appelé 
Monoceras (Ellis), Ctenium (Panzer), etles espèces placées aussi. 
dans les genres Cynosurus, Chloris, Melica ; ce qui annonce la 
nécessité de le conserver : il faudra y ramener la Melica digitata- 
de Roxburg. 

37. AIROPSIS menutæ Desv. J. bot. 1. p. 201. 
(Aïra minuta L. non Lois. Aïra capillaris Lag. 
Varied. de Cien. N° 19, p. 29). 

Os. Notre plante est bien celle de Linné; elle est annuelle, 
tandis que l’Æiropsis agrostidea ( Aira capillaris B. radicans Lag.… 
nov. gen. p. 3) est une plante vivace et rampante, que nous- 
avons observée dans beaucoup d’endroits de la France. 


(168) 


L’'Aira arundinacea de Linné ayant ses fleurs saillantes lors 
de la glume, doit entrer dans le genre Poa, et non dans l_45- 
ropsis, ainsi que nous |l'avions placé. Z’oyez n.0o 166, 


38. À. glabra (Milium roseum? Spreng. Syst. 
veg. 1. p. 251. Panicum glabrum? w. herb.); 
culmis cæspitosis erectis (2-ped.) basi. subramosis 
glabris; folis glaberrimis linearibus (4-5-poll. ) : 
vaginis glabris, ligulâ brevissima fimbriatim pilosa ; 

anieulà ramosissima demüum fastigiata, ramis ca 
pillaribus divaricatis; floribus pedicellatis, pedicellis 
capillaceis ; glumä : valvis subæqualibus glabris sub- 
striatis ovatis obtusiusculis ; glumellà : valvulis ob- 


tusis. Habitat in msula Borboniæ. 

Oss. Nous croyons notre plante la même que celle de Wil- 
Tedenow, maïs nous ne pouvons y saisir la teinte rose : dans 
un échantillon les glumes sont violettes, et dans l’autre! elles 
sont jaunâtres. Une altération de l'ovaire, que nous croyons due 
à une sphérie et non au cas d’Ergot, le prolonge quelquefois 
à son, sommet, en longue pointe noire. 


39. TRIBOLIUM : panicula contracta; glama tri- 
flora, valvis gibbosis acuminatis extùs rigidè hispi- 
dis; glumella : valvulis obtusis dentatis, basi mar- 
gine pilosis. 

T. héspidum PI. VII, f. 2. ( Dactylis hispida 
Thunb. Festuca melangaea Spreng. syst. veg. 1. 
p. 352); culmis erectis (8-poll.) foliosis; folus li- 
nearibus pubescentibus ciliatis : vaginâ subpilosa ore 
ciliato-radiata; paniculà secunda .(uncialià ). Cres- 
cit ad Capite Bonæ-Speiï. : 

Os. Ce genre aurait plus de rapports avec l’Æierochloe ou 


VEriachne, auprès desquels il doit être placé; qu'avec ceux aux- 
quels on l'avait rapporté. 


46. PRIONANTHIUM ; spica cylindrica; rhachis la- 


(169 ) 


nata canaliculata; gluma biflora : valvis plicatis com- 
pressis acutis, dorso incrassatis rigidè dentatis ; 
glumella : valvulis hyalmis integris. 

P. rigidum PI. Vi, f. 3; culmis geniculatis ads- 
cendentibus (8-poll.), basi ramosis; foliis vagi- 
nisque pubescentibus , linearibus; floribus glabris 
sessilibus densè imbricatis. Crescit in India Orien- 
tali. 

Ozs. Ce genre ne présente de rapports bien naturels avec au- 
cun de ceux qui nous sont connus. 

41. MELICA pubescens ; culmis elatis (2-ped.) 
cæspitosis; folis, vaginisque inferioribus , pubes- 
centibus ; paniculâ coarctata densa cylindrica, spi- 
culis ternis; glumis nervosis bifloris ; glumellis : 
valvulà exteriori floris fertili ciliata. Colitur in hor- 
tos botanicos sub nomine M. ciliatä. 

42. M. ciliata L.; foliis vaginisque glabris; pa- 
nicula subsecunda ; glumis bifloris. 

Oss. Ces deux plantes que nous cultivons depuis plusieurs an- 
nées sont très-distinctes, et la première est beaucoup plus ro- 
buste, Dans le département de Maine et Loire nous trouvons 
la vraie Helica ciliata. 

43. SACCHARUM bruneum ; culmo elato erecto: 
nodis pilosis ; foliis linearibus vaginisque glabris ore 
pubescentibus; panicula patente, ramis remotis se- 
mi-verticillatis basi pubescentibus ; glumä lanugine 
breviori membranacea ; flore fertili: glumæ valvis 
apice bifidis breviter aristatis; glumellæ nitidæ val- 
vula inferiori coriacea apicè barbata, superiori ob- 
tusa membranacea; flore staminifero triandro, val- 
A solitaria membranace. Crescit in Indià orien- 
tal. 


( 470 ) 

Oss. Cette plante unie au Saccharum teneriffæ , sera peut-être 
susceptible de former un genre distinct et qu'on pourrait dési- 
gner sous le nom d’Eriolytrum, bien que dans celui-ci la glume 
ne soit pas aristée : nos deux plantes sont triandres et ne peu- 
vent être réunies à l’Erianthus : c’est la glumelle qui est aristée 
dans ce dernier genre. 


E. bruneum; glumella aristata, lanâ fucescenie, 
nodis pubescentibus. 

E. éeneriffæ; glumella mucronata, lana niveà 
nodis. glabris. 


44. HETEROCHLOA; spicata; rhachis articulata ; 
flores dissimiles geminatæ ; flos sterilis abortiva pe- 
dicellata acuta univalvata : pedunculo elongato, 
dilatato margine barbato, basi nuda apice emargi- 
nata; flos fertilis sessilis; gluma: valvula inferior 
rigida acuta medio sulcata, superior membranacea ; 
glumella : valvula inferior membranacea bifida medio 
longè aristata : arista tortili, valvula superior mem- 
branacea acuta. 

H. Ælopecurus, pl. VII, f. 3; culmis cæspito- 
sis acutis (2-ped.) subramosis filiformibus glabris; 
folis linearibus margine serrulatis : vagmâ glaber- 
rima : ligulà bifida fimbriata; spicis (2-poll.) so- 
litariis teretibus ; floribus adpressis. Crescit in insula 
Borboniæ. 


Oss. Ce genre se rapproche de l'Elionurus plus que de tout 
autre, mais en est bien distinct. 


45. DiPLASANTHUM, spicatum; flores sessiles sub- 
unilaterales alternæ, dissimiles ; glumæ : valvis in- 
ferioribus cartilagineis mucronulatis; glumellæ mem- 
branaceæ; flos sterilis bivalvata ; flos ferülis : glu- 
mellâ inferiori basi aristatä. 


(171) 

D. lanosum Planche VII, f. r: caule elato ge- 
niculatô glabro apice lanato; foliis linearibus sub- 
asperis : vaginis ore nudis; spicis geminis peduncu- 
latis; glumis obtusis mucronulatis tomentosis. Ha- 
bitat in India oriental. 

Oss. Si la conformité des glumes des fleurs fertiles et des 
fleurs stériles n’établissait pas un caractère remarquable; ce genre 


viendrait se placer dans l’Æeteropogon dont il doit se rappro- 
cher, avec un port d'Zschæmum. 


46. ANDROPOGON juncifolius Desv. in Prod. fl. 
Ind. occ. Ham. p. 9; culmis cæspitosis (subped.), 
apice dichotomis, nodis pubescentibus; foliüs gla- 
berrimis lineari-subsetaceis supra convolutis : ligulà 
lanceolata acuta ; spicis geminis basi spataceis (nn- 
cialib.) spathâ brevioribus; rhachi dense lanosä; flo- 
ribus sessilibus geminis glabris acutis : fertilibus 
aristatis aristà tortili: sterilibus abortiviss Habitat 
in insula St Cruce Antillarum. 

Oss. Il nous semble que les espèces de ce genre dont la fleur 
stérile est pédicellée, doivent former un groupe distinct de celles 
dans lesquelles cette même fleur est sessile, comme dans l’es- 
pèce que nous décrivons ici; et alors en laissant le nom d’An- 


dropogon à ceux à fleur pédicellée, les autres pourraient être 
nommés ÆEupogons, ou au moins il faut en faire une section. 


47. À. Beloisir; (Andropogon f: 4,t. 23. Agrost. 
de Beauv.); culmo elato apice dichotomo, nodis 
glabris; foliis planis latiusculis glabris: ligula trun- 
cata; spicis ( uncial. ) spathaceis geminis exsertis ; 
spathâ mucronata, rhachi Janat4 ; floribus abortivis 
pedicellatis , pedicello flabellato piloso; flore fertili 
glabro, aristâ tortili elongata. Habitat... 


Oss. Cette plante que j'avais communiquée à M. De Beau- 


vois, et qu'il a figurée sans nom spécifique, me semble nou- 
yelle, 


(12) 


48. À. densus Desv. 1. c. p. 8, (Andropogon 
bicorne Lamk. nec L.); culmo elato ( 3-ped.} 
apice dichotomo, nodis glabris; foliis asperis gla- 
bris, vaginis ore marginibusque pilosis; spiculis 
geminis densè fastigiato-paniculatis; rhachi lanata, 
vaginis tenuibus acutis; floribus abortivis suboccul- 
tis pedicellatis : pedunculo lineari fastigato longè- 
que barbato ; floribus fertilibus longè aristatis.: 
arista rectà flore sextuplo longiori. Habitat:in An- 
üllis. 

Os. Le véritable A. bicorne de Linné est du genre Æ#na- 
therum. 


49. À. ternarius Mich. ( A. virginicus Spreng. 
spec. 1. p. 28 non L.). 

Oss. Cette espèce est un véritable Andropogon,. tandis que 
VA. wirginicus de Linnée est un Ænatherum , puisque ce célèbre 
botaniste l’a décrit par Flosculis muticis. 

50. À. ischæmum B barbinodus. 

Oss. Cette variété a des proportions un peu plus petites que 
Yespèce ordinaire et ses fleurs un peu plus éloignées les unes 
des autres, et en outre l’ouverture de la gaine est bien plus 
poilue. 


51. À. fernartus; culmo elato ( 4-5-ped. )., no- 
dis glabris ; foliis latiusculis elongatis glabris mar- 
gine serrulatis : vagina ore nuda; panicula pyrami- 
data, ramis verticillatis longitudinaliter. floriferis ; 
floribus subremotis basi brevè pilosis ; flore sterili 
acuto pedicellato : pedicello glabro elongato; flore. 
fertili longo; glumä muricata acuta ; glumella : aris- 
ta rectà. Habitat in India oriental. 

Oss. Cette plante semble tenir le milieu entre les genres 47 


dropogon et Rhaphis , et même ellé à plus de rapport ayec ce 
dernier, s’il portait trois fleurs au-lieu de deux. 


( 173 ) 

32. RHapuis Lour.; flores ternatæ basi annula- 
tm barbatæ : intermedio fertili sessile aristato, la- 
teralibus staminiferis pedicellatis , muticis. Panicu- 
latus : ramis simplicibus. 

Os. Pour éviter le rapprochement de sons, avec Rhaphia et 


Rhaphis, nous avions adopté le nom äe Trianthium, maïs nous 
IEESS, P D 
pensons que le nom de Raphis doit être maintenu. 


53. R. Gryllus (Andropogon Gryllus L. Polli- 
nia Gryllus Spreng., Apluda Gryllus P. Beauv. 
agr. PL. 23, f. 6). 


54. R. arundinaceus ( Androp. arundinaceum 
Willd.); panicula subcoarctata, nutante; folis (2- 
ped., poll. lat.) glabris : vaginis glabris striatis ore 
barbaüs, arista tortili flore longiorà : pedicellis. flo- 
rum fertilium pilosis. Habitat in Guinea. 


55. R. cœrulescens ; ( Holcus cœrulescens, Perrot. 
voy. du Cap.; Frecinet. bot. p. 411, t. 27). 

Os. Cette espèce est très-bien décrite par M. Perrotet. 

56. R. aciculare ( Andropogon aciculare Retz. 


Rhaphis trivialis Lour. , Centrophorum Chinense 
Tri. ). 


57. R. ortentalis: (Androp. Gryllus var, ww. 
spec. ) « specimen habeo ex India orientale, quod 
à gramine Europæa ( Andr. Gryllus), fois gla- 
brioribus et panicula tantum diversum W. » 

58. POLLINIA. fulfa; culmo elato apice ramoso 
dichotomo glabro; folus margine asperis glabris.: 
vaginis ore ciliatis; spicis simplicibus vagina folio— 
rum. spathiforme subinclusis; rhachi sparsè pilosa; 
flore sterili: pedicello complanato margine barba- 


( 174 ) 
to, arista subrevis flore fertili, arista medio tortili 
elongatä. Crescit in India orientali ? 

Os. Cette espèce qui semblerait avoir quelques rapports avec 
les P. brevifolia et fragilis, se rapporteraïit surtout plus à cette 
dernière, d’après la courte note qu’en donne Brown sous le nom 
d'Zndropogon fragile. 

59. P. microstachya ( Andropogon microstachyns 
Desv: in Prod. 1: c. p. 8); culmo elato (3-5-pea.) 
compresso; folüs distichys latiusculis elongatis gla- 
bris striatis rigidis margine rugosis : vaginistanci- 
pitibus glabris, ligulà brevissima truncata unolatere 
subpilosa ; paniculä divisa conferta ; spicis solita- 
ris gracilibus (subpoll.), vaginula compressa apice 
subulata, semi inclusis; rhacm pilosa;aristâ floris 
sterili breve, floris fertili elongatä tortile. Crescit in 
Anüllis. 

60. ANATHERUM pedunculosum; culmo elato, 
(2-ped.) glabro, apice ramoso fasciculato, ramis 
longis basi vaginatis; foliis, vaginisque ore nudis, 
glabris : ligula brevi subtruncatà; spicis (semi-poll.) 
solitariis glabris términalibus; floribus appressis acu- 
üs : sterilibus pedicello filiforme. Crescit in An- 
tillis. 

61. À. scoparium; culmo glabro elato ; fois 
glabris subconvolutis retroflexis : ligula breve; pa- 
nicula fastigiata, ramis spathaceis apice spiciferis ; 
Spicis conjugatis: rhachi longissimè barbatä ; flori- 
bus glabris ; flore sterili pedicello plano barbato. 
Habitat in Africa. PP 


Oxs. Plusieurs auteurs ont confondu cette plante avec ?Æna- 
thertém bicorne > mais nous l’en croyons très-différenté par ses fleurs 


(175) 


bien plus rapprochées, doubles en grandeur et ses soies plus 
longues. 


62. À. arrgatum ( Andropogon virgatum Des. 1. 
c. p.9 ); culmo elato (3-4-ped.) glabro; foliis gla- 
bris subconvolutis rigidis ; vaginis ore nudis ; paniculâ 
ramota élongato-virgata: ramis appressis ; spicis nu- 
merosis solitaris spathaceis sub-mclusis; rhachi gla- 
brâ ; floribus ( minutis ) appressis pedicelloque gla- 
berrimis. Habitat im Antillis. 

63. À. arginicum ( Androp. virginicum L. nec 
Spreng. ); culmo glabro apice dichotomo ; foliis li- 
nearibus; virgma ore nuda;. ramis remotis apice fer- 
tilibus; spicis gemimis; rhachi divaricatä  lanigera. 
Habitat in Americà. 


Oss. Cette espèce voisine de lespèceprécédente, l’est surtout en- 
core plus de l’/ratherum bicorne , maïs ses épis ne sont.pas,en pa- 
nicules. 


64. ANTHISTIRIA glabrifola (Anth. ciliata Sw. 
nec. L.); culmo elato glabro; foluis glabris angustis 
margine serrulatis asperis ; ligulà scariosa brevissimè 
obtusa; foliis floriseris basi spathaceis (invol. ) ore 
longè ciliatis; glumis glabris. Habitat in Antillis. 

65. SORGHUM pareiflorum Desv. in Prod. 1. c. 
p-12; culmo elato stricto (3-ped.) glabro ; foliis su- 
blatiusculis elongatis supra rugosis; vagimis ore nu- 
dis ; ligulâ brevissima; paniculä elongata substricta 
alternè semi-verticillata ; floribus sterilibus raris abor- 
üvis muticis pedicellatis : fertilibus subremotis; glu- 
mis adpressè pilosis linearibus; aristis subcontortis 
glumellà longioribus. Habitat in Hispaniolà. 


Oss. Cette espèce remarquable est bien plus près d'un Sorghum 


(176) 


que de tout autre genre, ayant avec cela le port de l’Ændropogen 
avenaceus de Michaux , avec des proportions moitié moindres. 

66. S. anomalum; culmo elato glabro; foliis gla- 
bris margme aspersi : : vaginis ore ciliatis; paniculà 
contracta, ramis APM adpressè floriseris ; 
floribus basi piliferis pedicellatis, pedicellis basi ra- 
diatim pilosis ; glamis glabris striatis ; glumellis flo 
ris fertli dorso aristatis. Habitat in America cali 
diori ? 

Oss. Cette espèce s'éloigne un peu des autres espèces du genre, 


par ses fleurs à pedicèles courts et articulaires, régulièrement dis- 
posés le lüng des rameaux de la panicule. 


67. TRIATHERA americana Desv. Bult. soc. phil. 
1810. (Tri. juncea J. Beauv. agr. p: 39 t. 9 f. 4, 
Atheropogon domingense Spreng. syst. veg.1, p.293), 
culmis:.cæspitosis ramosis; folis glabris: linéaribus 
subconvolutis :vaginis ore Dies spiculis unilatera- 


libus mn aristà basi trifida. 

Oss. En convenant que notre genre Æeferostega peut être réuni 
au Dineba ou à lAtheropogon > nous ne croyons pas que le Zria- 
thera puisse lui être adjoint, ainsi. que l’a fait Sprengel. 


68. T. racemosa (Triæna racemosa Kunth in H. 
et B. n:g8en.,1, p.178; t. 61. Atheropogon Triæ- 
na Spr. L c.); culmis cæspitosis; foliis vaginique 
sparsè pilosis ; spiculis remotis : aristà medio trifidà. 

69: BIATHERIUM ; Spicæ fasciculatæ; flores sparsæ; 
gluma uniflora : valvis acutis æqualibus; glumellarum 
valvulis inferioribus aristatis : : rudimentum floris ste- 
rili pedicellatum longissimè biaristatum. 

B. foliosa. PI. VIT, f. 2 (Chloris foliosa W.:Sp. j. 

p.924): culmis caespitosis, strictis subramosis ; fo 
he distichis glabris lanceolatis (semi-unci. }: vaginis 


(477 ) 


margine oreque pilosis; spicis 2-5 fastigiatis , alter- 
nis; glumis ferè æqualibus subpellucidis, glumella 
multo longioribus ; valvulis glumellæ lanceolatis : 


exteriore longissimè aristatâ. Crescit nm Antillis. 
Oss, Cette plante a un port qui l’éloigne du genre Chloris + ses 


épillets ne,sont pas unilatéraux, elle est transitoire entre le Tria- 
thera et le Chloris. 


70. CHLORIS obtusifolia ; culmis glabris compres- 
sis basi procumbentibus ; foliis glaberrimis latiuscu- 
lis glaucescentibus linearibus obtusis: vaginis glabris 
folio longioribus; spicis 5-7 umbellato-fosciculatis ; 
glumis 2-floris subulatis ; flore superiore abortivo pe- 
dicellato longiore; glumellis glabris : valvulis, infe- 
riore longe aristatâ; arista, valvulà quintuplo lon- 
giore. Crascit m Brasilio. 

71. Ch: elata; culmo elato glabro; folis latiuscu- 
lis subscabris acutis : vaginis glabris ore nudis, ligu- 
la nulla; spicis pluribus (20) umbellato-fastigiatis 
(4-5-poll. long.); spiculis, bifloris; glumä subula- 
à, valva inferior glumella longiora ; glumella, val- 
vula inferisre obovata dorso pilosa margine radiatin 
barbata apice breviter aristata; arista (nigra ) glu- 


mella longiore ; flore abortivo glabro aristato. Habi- 
tat in Brasilio. 


Os. Cette espèce est très-rapprochée de la (CAloris ciliata mais 
très-différente cependant par son chaume plus robuste, ses épis 
plus nombreux et ses épillets moins gros, 


72: Ch: macrantha; culmo glabro geniculato (10- 
poil. ) ; foliis Imearibus acutis asperis sparsè longè- 
que pilosis : vaginis compressis glabris ore pilosis ; 
spicis geminis, basi pilosiuseulis;  spiculis: tnifloris 
biserialibus ; gluma : valvis subæqualibus -subacutis 

12 


( 178 ) 
pellucidis glumella subæquantibus ; glumellis, valvulä 
inferiore aristata ; aristà glumella quadruplo longio= 
ra ; «flore féruli 4 as valvula inferior apice bifi- 
dà. Crescit: An Arabia felice. 

33. PrertuM Desv. j. bot. appl. 1, p: 76 flores ca- 
piiaiæ Subuñilaterales ; involucrum basi. floriferum 
pectinato-sectosum; gluma uniflora ; valvis hyalinis 
subæqualibus aristato-setosis ; glumellà solida, ;val- 
vula inferiori aristato-setosa, superiori acula, seta 
longa. 

P. elegans Desv. 1. c. radice te anmua ; folis 
latiusculis glabris: ligula,scariosa elongata - : 


spica subglobosa, ne barbata. Fe in Syrià. 
Oss. Sice n’est pas le Cynosurus elegans de M.  Desfontaines, 
cette plante est certainement nowyelle- 


74 ARTHROSTACHYS : spicé géminæ; rhachis ar- 
ticulata :articulis subdilatatis oblongis concaviusculis 
basi apicé et unoläteré barbatis : flores dissimiles ad- 
pressæ altérna: géminatæ basi subpilosæ flos- exte- 
rior pedicellata striata acuta staminifera subaristata : 
pedicello complanato‘apicè émarginato; flos interior 
pistilifer ; gluma inferior subcoriacea elongata plica- 
ta; glumella : valtulainterior aristatä: arista Re 
medio tortili. 

À gracilis? PL. {x. f. >. Cülmo gracili (sub-2-ped.) 
glabro’ foliüs linearibus acutis glabris.. ligulà .ore 
longè pilosa; spicis 2. (2-poll. np 56 pedun- 
culis basi piosis, Habitat. soul aiiloi : (Ho 


Os. Cette plante a le port. de Ph rar ais SON! caractère 
s'éné loigne beaucoup et prouve que les plañtes à. rachis articulé 
<dlévront] étre! grouppées, afin de ne pas DE les Hem rés mmiorés 
«les biflores. i n 


( 479 } 

792 RHVYTACHNE Desv. in Ham: Prod. p: rr ; spica 
solitaria ; rhachis articulata glabra, spiculæ bifloræ 
ex cavatiomibus immersæ: flore superiora staminifer ; 
gluma superior coriacea transversè rugosa aristata ; 
glamellis: valvula inferior aristatà. 

R. rotthoellioïdes Desv. 1e. PL 1x. 1. culmis 
cæspitosis erectis glabris ( ped: etult: ); foliis elonga: 
üs convolulo-sctaceis glabris: vagina ore subligulata; 
spica filiforme tereti 1 (5-poll.) subincurvâ. Crescit in 


Antillis: 


Os. Un nouvel examen de ce genre nous prouve que ce ne peut 
être ni un Zsch@munt ni un Rofiboella. 


76.MICROCHLOA Aunthri (microchloasetacea YKoüth 
niéclR. Brow); culmis cæspitosis ; foliis sparsè pi- 
losis: vagind: ofe pilosa. Habitat in America æqui- 
noxiahat 


tOÿs!1 Cette plante; comparée à celle du botaniste anglais, a les 
fleurs plus grandes ef les {épis qus coutbés: 


77. OPHIURINELTA.; spica subteres; flores alternæ 
unilaterales excavalione racheorum immersæ ; gluma 
coriacea umivalvis uninervosa umiflora basi et antice 
bracteata : braétea subabortva, SCArIoSa ; FEU 
valvulis LR UR 

©. micrantha. ; PI. vu, f 7 Calmo RUE ra- 
moso apice dichotomo ; folus lanceolatis (Sübuncial. ) 
glabris internode 1e !Vaginis glabris ‘ore 
ciliats; spiculis tériinalibus Cancial. PARA Gres es” 


cit in insula Borboniæ. ER g 

"'Oxs. Si l’on voulait regarder comme ‘une REA de la glume ce 
que nous nommons Mb alors la valve. dela glume: me serait 
plus'en accord avec léireste de l'organisation, le fruic étant renfer- 
mé dans les He dernières valves. Ce genre n ’est ni Lepturus ni 
Ophiarus ni Afonermd. gi 


( 180 ) 

8. DIPERIUM ; spica teres; flores oppositæ exca- 
vatione rhacheorum perforatum immersæ; bractea 
coriacea appressa flore claudente lævis obliqua ; glu- 
ma glumellaque bivalvibus obtusis pellucidis. 

D. cylindricum PI. 1x, f. 3. (Rottboellia perfo- 
rata ? Roxb.) caule ramoso (2-ped. et ultr.}), ra- 
mis .unolatere compressis ; foliis glabris, vaginis ore 
ciiatis; spicis ce elongatis (sub-8-poll. ) 


Ex indiæ orientali ? 

Obs. Le caractère donné par Roxburg : Corolla utraque fort tri- 
valvi membranacea, ne nous semble pas correspondre à notre 
plante , à moins que la description ne soit inexacte. 


79. PENNISETUM dasistachyum (Panicum cen- 
chroïdes Rich.nec Lamk., densi-spica Poir. Enc.suppl. 
4p-, 273); culmo elato glabro; foliis glabris latius- 
culis: vaginis glabris ore barbaus; spicis (flavescen- 
tibus } densis elongatis ; involucellis glumisque uniflo- 
ris basi pectinato-barbatis. Habitat in Guyanä: 

80. P. erubescens Desv. in Ham. Prod. Flo. ind. 
Occ., p. 11; culmo elato ramoso: folus latiusculis 
subtus sparsè adpressèque pilosis : vagina glabra ore - 
pilosä ; spicis elengatis, setarum in ect unica 
longiorà ; glumis unifloris. Crescit m Antillis. 

81. P. a/opecuroïdes Desv.I. c.; culmo elato glabro 
ramoso; foliis sublatiusculis eee vagina glabra 
ore ee spicis longis (8-poll.) violaceo- rufescenti- 
bus subunilateralibus ; involucris glumisque uniflo- 
ris ; setarum in volucrorum unica longiora. Crescit in 
Mon: calidiore. 

82. P. antillaruüm (Panicum anti Poir. Enc. 
suppl. 4. p., 275); culmo erecto ramoso striato ; 


( 181 ) 
fohis latiusculis acutis pilosis : vaginis apice pilosis ore- 
ciliatis ; spicis elongatis (6-Poll. ) acutis; selis in vo- 
lucrorum simplicibus uniserialibus, una longiori. Ha- 
bitatin Antillis. 

Oss. Cette espèce n’est point un Panicum"par la fleur, ni un Se: 
aria, et son involucre est celle du Setaria, tandis.que sa fleur est 
celle d’un Pennisetum, ce qui prouve que la nature se-joue de nos 
distinctions dogmatiques. 

83. SETARIA {enella ; culmis pluribus geniculatis 
glabris; foliis angustis subasperis: vaginis ore breviter 
piloso-fimbriatis ; spicis ( poll. }; floribus densis; setis 
involucri flore longioribus raris; glumellis puncticu- 
losis. Crescit nm Peru. 

Oss. Cette espèce très-voisine de la Setaria wiridis, est plus petite 
dans toutes ses parties , et n’a pas les bords-de la graine yelus dans 
la partie supérieure. 

84. S. longicauda ; culmo elato (5 pieds); folus 
Rnceolatis plicatis acuminatis (ped. et ulir. 15 lin. 
lat.), basi attenuatis glabris ; vaginis pubescentibus 
ore barbatis; panicula spicata (ped. et ult.) rari se- 
tosâ ; spicis sparse setosis basi hirsutis strictis ; floribus 
secundis irregulariter biseriatis , obléngis acutis ; 
glumis substriatis; glumellis lævibus. Habitat in Bra- 
silio. 

85. S. corrugata; (Panicum corrugatum? Ell: 
glaucum Mich. flor. am. bor. non L. glaucum B. 
Pers. ); culmo elato basi compresso ; foliis latiusculis 
sparsè pilosis ; vaginis glabris ore pilosis; ligula bre- 
vissima scariosa fimbriatä; spicis gracilibus ; setis nu- 
merosis elongatis lutescentibus. Habitat in America 
boreali. 

” Oss. Cette espèce a les soïes de l’involucre beaucoup plus lon-- 


( 482 ) 


gues que la S. glauca ; ses feuilles à poils épars et ses glumelles 
également rugueuses maïs plus petites, en forment une espèce dis- 


tincte. 
86. S. pyramidata (Panicum caudatum var. Poir. 


Enc. suppl. 4., p. 272); culmo elato (2-ped. et 
ult.) glabro ; fous latis lanceolatis acutis glabris , basi 
extùs Sericeis, cordatis : vaginis glabris ore breviter 
sericeo-pilosis; panicula elongaia pyramidata basi 
interruptà ; setis raris flore triplo longioribus; flori- 
bus ovatis; glumellis reticulato- -punctulatis. Crescit in 


America calidiori. « 
Oss. Cette plante est très-différente du Panicum caudatum bien 
pius robuste, et les feuilles ont le triple de largeur. 


87. S. oulpiseta; (Panicum vulpisetum Lamk. 
Enc. 5. p. 737 excl. syn. Sw. ); culmo elato (G-ped-); 
folis latis elongatis asperulis glabris : vaginis margi- 
nibus oreque densè sericeo-barbatis ; paniculà elonga- 
ta spicata contracta ; gluma oblonga nitida longitudi- 
naliter lineatà ; Les dense birsulä : ; sels elongaiis. 
Habitat in Anullis. 

88. S. tenax ; (Panicum tenax Rich. act. soc. 
hist. net. 1., p. 106); culmo elato (/-ped); folis 
latis sub-lanceolatis, basi extüs barbatis cordatis gla 
bris: vaginis ore marginibusque longè barbatis; spicis 
pyramidatis subinterruplis asperrimis ramosis ; rha- 
chi densè hirsutà ; glumä sub-globosa sinuososstriata. 
Crescit in Guyanä. 

89..,S..mazxima ; culmo erecto (4-ped:): fs 
clongat-lanceolatis glaberrimis basi sub-cordatis : 
vaginis, pubescentibus aspice mar gimibus breviter pi- 
pe ligula brevissima pilosà ; spicis elongatis ; flo- 
ribus biens acutiusculis punctato-striatulis. Habi- 
tat in ace 


(183 ) 


Os. Les trois espèces précédentes sont très-distinctes, etc'est 
à tort que Sprengel les a réunies avec la Setaria macrostachya > 
nous croyons en outre que le Panicum selosum de Swartz est un 
Pennisetum , et que la Setaria macrostachya de M. Kunth n’est que 
le S. vulpiseta ;.etile Panicum macrochaetumi de Link sera! une de 
nos trois espèces. Dans les trois espèces précédentes, il n’y en. a 
qu’une à deux soies jaunätres et très-longues;: par fleur; et les lu- 
mellés, par leur forme et leur grosseur, PRRAEEnnÊNE, en outre à 
trois espèces. 

90. S. granosa; culmo elato (3-ped. ) apice pu- 
bescente-piloso: folüs lanceolatis glabris asperis basi 
dorso subpilosis: vagimis subglabris apice margini- 
busque breviter pilosis ; spicis (8-poll.) pyramidatis 
elongatis sub-interruptis tongisetosis; rachi pilosa ; 
ramis inferioribus subremotis. suboblongis ; floribus 
(sabmaximis ) globulosis basi subunosetosis; glu- 
mella punctato-striatulà. Habitat in Brasilio. 

Oss. Cette espèce , voisine des trois précédentes par son port et sa 
stature, à l’épi beaucoup moins fourni, les fleurs plus grossés et plus 
arrondies comme dans la S. fenat, mais les soies ne sont ni Si 
roïdes ni si âpres. 


92. S. caudata (Panicum éaudiint A. Lamk. 
Enc. 4, p. 746); culmo gracili (péd. et semiped. ); 
piloso : nodis glabris; foliis linearibus acutis brévi- 
ier utrumque pilosis : vaginis ore marginibusque 
pilosis;_ panicula spicata  rariflora clongata (2- 
poll. ) interrupta; rhachi pilosa ; ramis inferioribus. 
_elongatis subdistantibus, rectis brevibus ; slumis 
”subacutis oblongis Fe -strialis. Habitat in 


Amertc rs | : 

Ons. Cette espèce qe nous avions sous le faux nom de Panicume 
setosum , nous fait croire qu’elle est d'Amérique. Elle a le port de la: 
Setaria glauca et la couleur des épis de la veréicillata, mais n’en a 
pas l’âpreté; son rachis est bien plus longuementvelu ; enfin,fce 
west ni la Setaria helvola, ni la caudata. 


( 184 ) 

92. S: interrupla; culmo elato (2-ped.) gracili, 
glaberrimo, nodis subpilosis ; foliis linearibus lon- 
gissimis ( pede. et ultrâ), angustis asperulis sub- 
convolulis :vagimis glaberrimis ore breviter pilosis; 
spicis bast interruptis elongatis ; rhachi brevissime 
tomentosis; floribus subglobosis punctato-striatis ; 
selis raris brevibus. Habitat in Brasilio. 

Oss. Cette plante qui a le même port que la S. caudata, a les 


fleurs plus grosses et les feuilles d’une longueur bien plus remar- 


quable. 

93. S. maritima (Panicum germanicum Bauh. 
maritimum Lamk.) 

Oss. Cette plante offre comme la S. ifalica ( millet des oiseaux } 


deux variétés qui sont d’une stature moindre et à plus petits grains 
que/l’italica. 


94. P. sulcata (Panicum sulcatum Lamk. Enc. 4, 
p- 746). 
Oss. Cette espèce remarquable est certainement du genre Seza- 


ria, maïs les soies sont rares et différentes du-Panicum brachyatum 
de Poïret. 


95. P. viscidula ; culmo geniculato filiforme ( sub- 
ped-) succi viscosi repleto; foliis ovato-lanceolatis 
acutis glabris sparsè pilosis; vaginis ore margini- 
busque pilosis; panicula spicata subpyramidata, ra- 
mis inferioribus remotis ; rhachi pubescente ; flori- 
bus oblongis setosis, setis flore triplo longioribus; 


glumellä punctato-striatä. Habitat in insula Mauritii. 


Oss. Lorsque cette plante est fraîche, son chaume est rempli d’un 
suc abondant claïr et visqueux. 


96. S. pélifera ; culmo elato gracili (2-ped.) ge- 
niculato , nodis glabris; foliis elongatis sublatius- 
culis sparsè pilosis ciliatisque ; vaginis, apicè pilosis; 
panicula subspicato-pyramidata; rhachi glabrä; ra- 


( 185 ) 
mis distantibus elongatis ranifloris; floribus uni- 
setosis acutiusculis (minutis) subunilateralibus ; glu- 
mellis punctulato-rugulosis. Habitat in America. 

Ons. Le Panicum gracile de R. Browne (Sefaria Brownii N.), 
doit venir dans ce genre , de même que son P. paradorum (S. lon- 
giflora N. ). 

07. OPLISMENUS sefarius; (Panicum setarium 
Lamk. hirtellum Mich. Orthopogon setarius C. 
Spreng.) 

Oss. Le genre Oplismenus ayant été établi.en 1807 et l'Ortho- 
pogon en 1810, il est de toute justice que le nomimposé par M. De 
Beauvois soit conservé. Nous pensons; après en avoir fait l'examen, 
quele Panicum sylvaticum Lamk. Enc. 4, p. 743, doit être ratta- 


ché à l'Oplismenus Burmanii ; plante que Lamarck ne connaissait 
que d’après ce qu’en dit Retzius. 


98. O. Crus-Galli Desv. fl. de l’'Anjou, p. 51. 
(Panicum -- L. Echinochloa -- P. B. Orthopo- 
gon -- Spreng. ). 

Oxs. M. Beauvois avait eu tort de faire un genre particulier 
de cette espèce et de ses affines : on ne peut les éloigner de 
son genre Oplismenus , auquel les a joints avec raison M. Kunth. 

09: O. muricatus; (Panicum hirtellum Walt. flor. 
Car. p. 72 non L. P. muricatum Mich. non Lamk, 
pungens Poiret. Orthopogon hispidum Spreng. ; 
Panicum Walteri Pursh. F1. am. 1 , p.67. Setaria 
muricata P. Beauv.). 


Os. Dans ce groupe, c’est une des plus curieuses, et ce- 
pendant elle ne semble être qu'une des modifications de l'O. 
CTUS COTVI, 


100. O. semialatus; ( Panicum semialatum R. 
Brow. ). 

Os. C’est l'espèce qui conserve le moins le port général du 

genre par l'irrégularité de ses 2 ou 3 épis; mais cependant on 


ne peut l’en éloïgner à raïson de Ja forme de ses plumes et glu- 
melles. 

101. O. abortipus; (.Andropogon squarrosum L. 
Panicum -- .Lamk. P. abortivum R. Br. Orthopo- 
gon obortivum Spreng. ). 

Czs. Cette espèce est la dernière dégénérescence du: type 
principal, du genre Oplismenus ; ‘elle ne porte .que trois à quatre 
fleurs par épi et encore très-éloignées. les unes, des, autres ; ‘ce 
qui plouve combien tous ces genres que nous distinguons sont, 
relativement à la nature, artificiels et peu caractérisables. 

10%. PANICOM Æymenachne ( Agrostis monos- 
tachya Voir. Enc. suppl. 1, p. 256. Hymenachne 
Myuros, B.. Beauv. agr. p.18, t. 10, f. 8). 

Oss: C'est à-tort qu'on à confondu cette plante avec lÆgros- 
is myuros qui est très-différente’ Sion fait attention ique la 


glumelle est à peine coriacé, peut-être conservera-t-on le genre 
Hymenachne. 


103. P. Urochloa ( Urochloa panicoïdes P. 
Beauv.l..c. p.53.t. 11. f. 1. Setaria pilifera Spr. 
syst. veg. 4. suppl. p. 33); culmo graali glabro, 
nodis sericeo—piloëis ; fohis Jatiusculis lanceolatis 
acutis pilosis bast cordatis : vaginis hirsutis ore pi- 
losis; spicis alternis' oppositisve subsessilibus. secun- 
dis; rhachi smuosâ! complanata sparsè pilosa ::pilis 
flore longioribus; floribus biserialibus oblongis acu- 
tis ; gluma striata; glumella punctato- -Striatulà. Cres- 
cit in insula: Mauritii. 


Oss. Cette plante n'ayant pas été décrité, nous avons cru de- 
voir la micux faire connaître ici. Elle ne peut être du génré 
Setariaz (cé sont de longs poils qu’on:y.observe;et non des soies 
raides; motifs qui font que la plante suivante n’est point aussi 
du genre Setaria. 


.… 104. P. pilosum SW, (P. distichum 44 Enc, 


( 187 ) 
4x. Setaria disticha Kaïth, in nov. 5. et Sp. 
EH. et B. 1. pue). 

105. P. hamatum ; eulmo radicante gracii.(ped.) 
subcompresso geniculato : nodis pubestentibus: fo- 
lüs ovato-oblongis acutis , sparsè pilosis : vaginis 
ore subnudis : ligula fimbriata ; spicis 3-5 remots ; 
rhachi, subteriti; floribus pedunculatis sessilibusque 
remotis secundis ; glumis valva inferiore setosà : setis 
apicè hamatis. Crescit in Brasilio. 

106. P. Novæ-Hollandiæ (Paractænum —— P. 
Beauv. agrost: p. 47, t. 10, £. 6); culmis cæspitosis 
(8-poll.) glabris; folis planiusculis vaginisque gla- 
bris : ligula fimbriata; rhachi angulata apicè nuda acu- 
tà ; spicis 3-5, bi-trifloris. Habitat in Nova-Hollandia. 

Oss. Si, cette plante n’est pas le P. spinescens: de R. Brown 


prod. p. 193, au moins elle doit en être très-rapprochée et de 
la même section dans’ les ouvrages de ce savant. 


107. P. cæspitosum SW. 

Ors. Nous avons une plante que nous croyons celle de Swartz 
et qui n’est pas le! P: prostratum detLiamarck; d'un autre côté, 
notre espèce ne‘s'accorde pas entièrement avec la description 
donnée, ayant les bords'de la gaîne ciliés et quelques poils à 
l’ouverture, des cette gaine, à 

108. P. Zanceæfolium:; culmo: ( pedale ) repente 
geniculato apicè. pubescente : nodis glabris ;: folns 
oblongis, ovatis (2-poll. poll. lat.), acutisglabris ; 
vaginis pubescentibus ore subnudis ; spicis,_densè 
subspicatim dispositis, inferioribus distantibus,; flo: 
ribus unilateralibus subtriserialibus eblongis acutis ; 
glumis.sstriatis ; glumellis lævibus.. Crescit in,locis 
bumidis Brasil. : | 

109. P. Bambusæfolium ; Par clato (5- 7- Hdi) 


( 188 ) 
glabro; foliis lanceolatis basi cordalis acutis ( poil. 
et ultr. lat.) glabris: vaginis marginis oreque ci= 
liato-barbatis ; spicis numerosis pyramidatim dispo- 
sis (2-poll.); rhachi sulcatâ; floribus biseriatis 
unilateralibus subovatis obtusis ; glumellis punctatis: 
Habitat in Brasilio. 


110. P. subspicatum (P. poeforme Desv. in Enc: 
suppl. 4. p. 284 non Willd. dioecum Spreng. 1. 
P- 322); culmo subflaccido glabro ( sub--ped. 
striato basi geniculato compresso, geniculis sub- 
pilosis ; folüs elongatis (8-poll. 3-4-lin. lat.) basi 
attenuatis nervosis subasperis : vaginis glabris ore 
breviter pilosis ; paniculâ elongata subspicata, ra- 
mis abbreviatis inferioribus ramosis paucifloris (5- 
8-flor. ); rhachi subpubescente : partiale flexuosà ; 
foribus subinflatis acutis; glomis substriatis ; glu- 
mellis transversè undulatimque punctato -rogosis. 
Habitat in America ? 

Oss. Cette plante est bien différente de notre Poa melicoïdes 
Cvoy« n.° 140), et a mal à propos été réunie avec elle par 
Sprengel pour en faire une fausse espèce : son P. dioecum. 

111. P. exfensum (P. prostratrum Deli. flor. Æg. 
il. r. p. 51. excl. syn. Lamk.); culmis ramosis 
diffusis subprosiratis extensis nodisque glabris; fo- 
his cordato-lanceolatis acutis marginatis serrulatis 
C1-2-poll. 3-4-Hin. lat.) basi longè ciliatis : vagi- 
nis subinflatis ore marginisque ciliatis ; spicis 3-5 
remotis ( semi-poll. ) subpetiolatis; rhachi glabra 
sinuatà ; floribus biserialibus oblongis striatis gla- 


bris ; glumellis lævibus. Habitat in Ægyptia infe- 


\ori. 


( 189 ) 
112. P. affine Desv. Enc. suppl. 4. p. 273 (P. 


setigerum Pers. syn. 1. p. 81 nec Retz nec P. 
Beauv.); culmis sulcatis compressis elatis (2-ped.), 
nodis glabris ; folis glabris ( 3-lin. lat. ) elongatis : 
vaginis ancipitiformibus glabris ore pilosis; ligula 
nulla; spicis remotis (semi-poll. et ult.) basi pi- 
losis ; rhachi setosâ; floribus triserialibus ; glumis 
villosis ; glumellis glabris. Crescit in India orien- 
tal. 

113. P. palhdifolium; culmo snicitéte ( sub- 

2-ped.) subramoso; nodis puberalis; folüs glabris 

ovato-lanceolatis acutis pallidis, basi ciliatis corda- 
ts: vaginis ‘ore nudis marginibus cihatis 3. spicis 
unilateralibus alternis 7-9 ( pollic. }; rhachi sparsè 
selosä, setis flore longioribus; floribus ablongis sub- 
acutis; glumis glabris; glumellis punctulatis. Habi- 
tat in America calidiori ? 

114. P. orrescens Desv. in Poir. Enc. suppl. 4. 
p. 278 (P. gracilentum? Poir. 1. c. p. 276); cul- 
mo radicante geniculato ramoso ; nodis puberulis ; 
folis glabris (1-3-poll.) acutis {3-lin. lat.) ; vagi- 
nis ore nudis marginibus ciliato-pilosis; spicis ap- 
pressis, paniculatis basi pilosiusculis ; rhachi si- 
nuosà ; floribus alternis unilateralibus pedicellatis 
baie acutis ; glumis glabris; glumelhis re Hu 
pubescentibus. Habitat in Antillis. 

‘Os. Ayant eu cette plante sous le! nom de Panic de la Sa- 
vane et l'ayant 4u cultivée au jardin de Paris, j'ai quelque soup- 


çon que c'est la même que M. Poiret a publiée de nouveau, 
sous le nom de P. gracilenium. 


115. P. Michauxrü Por. Enc. L c. p. ne CP. 
Molle Mich. non Sw.) 


( 190 ) 

Oùs. C'est À tort que Sprengei a confondu cette sé avec le 
Panicum leucophæum,de Kunth. 1 , 

116: P. :unilaterale (Monachne ee P: 
-Beauvagré p:l4guit: 104.09. exel:).; eulmis.cœæs- 
pitosis apicè tomentosis subramosis nodis pubéscen- 
übus;folis!subtoñentosis aus (6-lin. ) -elongalis 
acutisz; vaginis tomentosis : | ligula  sericeo-pilosa,; 
spieis 5-7lunilateralibus}; rhachi tomentosa ; spiculis 
subtriseriahbus subimbricaüs, pedicello apice incras: 
sato; glumis adpresse ! villosis subædqüalibus mucro- 
natis ; glumella acuminata 5 LR Habitat in Amc- 
rica australi:, 2 5 eitélos os 

117. : Bi monachnoïdes : culmo. elato Gub3pcd) 
apiceztomentoso!, nodis pubescéntibüs ; folñs, glabris 
ares nudis ; spicis. 921 6::subpyramidatim. ‘dis positis ; 
floibus-biserialibus remotis ; glamis margine >sub- 
pilosis, acutis. Habitat in Braëilio: +4 on! ! 

Ozs:; Les trois plantes précédentes! sont-très-voisirfés l’une de 
l'autre ; et si le genre! Monachne doit être conservé, elles se- 
raient ‘susceptibles de le former naturellement par l’ensemble de 
Jeur pott'i ‘le seul” Saccharim repians ( Monackiie racemose P. 
B:)) fe’ un! port différent, Notre fdernièrél espèce) a’ les fleurs! plus 
petite que:le . ne 116, etulé:n.:1195,1les-a ss courtes et plus 
grosses que, le même, Me 316. : TR L 

1x8, :P, senegalense : culmo “ie Tamos0 be pie 
geniculato:| modis, pubescentibus; foliis, glabris, lan- 
ceolatis acutis obscur, eiliatis : vaginis .apicè.. ‘barba- 
Us; paniculis . subspica us. secundis. basi.. barbatis ; 
rhachi-complanata simuosa tenai: sparsè ‘pilosä® pilis 
spicülis brévioribüs ;floribus * alternis _pedicellätis 
subgeminis remolis oblongis subacutis; | glumis pu- 
besrenbbes birtis: glumellis oblongt striaus. Hebi- 
tat in Guinea, Se aque: 


( 191 ) 
‘Oss: Cette espèce a le port du P. pyramidatunr. 


119-P. magellanica Lamk. Enc. 4, p. 724. 

Ozs. La plante qui,a été décrite, d'après nous sous,lé nom de P. 
acutiflorum (Desy. Enc. suppl. #, p. 283) estla même que celle de 
Lamarck , et a été omise par les auteurs qu ont t dernièrement fait 
des ouvrages de botamiqué: 


120. P. Airlicalycum Bosc. ined.°(Phalaris vil 
losa Mich. Panicum erianthos Poir. Anthænantia 


villosa P. Bcauv. ) + 


Ozs. Tous ces synonimes appartiennent à la même je plante qu'on 
ne peut éloi gner du genre Panicum et que Bosc avait fait connaitre 
lerpremier. 

121. P. férertutinst culs rainosis (3: poil: et pe) 
filiformibus rectis pubescentibus ; ramis basi com- 
pressis,  nodis subpubescentibus ;, :folis linearibus 
lanceolatis acutis (pollic.).vagmisque pubescenti- 
bus ; paniculis pedunculatis «( poli.) pyramidatis 
ramosis glabris ; floribus,( parvulis ); Shi pubes 


centibus. Habitat in Carolina: ii 

Oss. C'est de toutes: les ‘espèces celle qui nous paraît ayoir ee 
fleurs les plus petites, et nous a été donnée avec un grand nombre 
d'autres par M. Tinturier qui ‘seul et a pied, a parcouru l'Amérique 
septentrionale dans tos les Fi cn amtéux _ toutesiles|bédutés 
delamature. r ! “oriuisdou 


122. P. Mere ME Sau Spseng: euditnosesdua 


où Peu de plantes ont été sujettes à autant d'incertitude; ge 
tait l_4ndropogon insulare de Linné; Haueur lanatum pour Rott- 
boél. (Surin:t. 1 )} 1e Nardus AokrÿTora pour Rôlander; Je Pa- 
nicum: leucophæun: de|M:Kunth} etl lenfin, avec Sxrartz: et Beau- 
vois nous. le repardons comme: un nil &£Hilium., insulare . Desr, 
villosurre Swr. nec Lamk. hirsutum P. Bcauv. D 


ai 


‘128, P. de B. Shbrum à folfs ‘gläucis 


10h 


GliN 


glabri is ore pilosis. Mb 
"Oss. Cette variété qui a les feuilles gages comme s Hpotee 


| L 21 
setrouve dans Jes Florides. QGAR «est 3 143} * 


( 492 ) 

124. P. Dumus; culimo ramosisimo ; foluis planis 
dinearibus acutis elongatis ( r-3-poll.) glaberrimis : 
vaginis brevibus marginibus oreque pilosis; pani- 
culis rarifloris ; floribus (mediocris) ovato-oblongis ; 
glumis glabrisstriatis subæqualibus, :tertia breyissima; 
glumellis lævibus. Habitat in America calidiori. 

Os. Cette plante qui pourrait être le Panicum dichotomum de 
Linné et qui n’est pas le P. nodiflorum, ne convient plus à notre 
plante tel qu'en parle Srrengel. 

125. P. pubescens B. longipilun. 

Os. Cette variété est remarquable par la longueur des poils qui 
couvrent toute, la gaine des, feuilles; tandis que celles-ci ne sont 
pas moins pourvues de poils .que le P. pubescens (Lamk. Enc. 4, 

p- 748), et cependant par ses autres parties telles que la fleur, on 
ne peut trouver de différence spécifique ; dans l’une et dans l'autre, 
les 'glumes sont veluestet la glumelle lisse. 

126: P. aciculare Desv. in Enc. suppl. 4, rl 
culmis dichotomis ramosissimis (8-poll.) genicu- 
las, fastigiatis geniculisque pubescentibus ; foliis 
convolutis acutis Sparsè subpilosis (poll. et ultr. ): 
vagims pubescentibus ore breviter pilosis ; pani- 
culis pluribus. paucifleris (3-7) terminalibus pedi- 
cells puberulis; flortbus subglobosis ; glumis striatis 
pubescentibus; glumellis HEURES Habitat in we | 
orientali. | 

127. P. chatifolium.(P..cihatum? El}; oh 4 
mis cæspitosis (4-poll.): fastigiatis ; folüislineari- 
lanceolatis acutis longissimè ciliatis subglabris (2-poll. 
long. 2 lin. lat.); paniculis subsessilibus subpauci- 
Îloris, ramulis barbatis; pedunculis elongatis sub- 
puberulis ; floribus ovatis subpuberulis ; glumis stria- 
is; glumellis lævibus. Habitat in Americâ boreali. 


( 493 ) 


Oss. Dans sa plante Elliot dit les fleurs aiguës et les feuilles sub- 
cordiformes ; ce qui les suppose bien plus larges que dans.notre es- 
pèce. Elle peut être placée dans les panicules à peu ou à beaucoup 
de fleurs : division peu sûre adoptée par Sprengel. 


128. P. Portoricense; Desv. in Prod. FI. Ind. 
occ. W. Ham. p. 11; culmis numerosis geniculatis 
apicè divaricato-ramosis pubescentibus : nodis pu- 
berufis; folus subremotis glabris elongato-lanceo- 
latis (poll. et ultr.): vaginis marginibus pubes- 
centibus, ore longè pilosis; paniculis terminalibus 
sessilibus divaricatis paucifloris, pedicellis subglabris; 
floribus obovatis; glumis nervosis pilosiusculis ; glu- 
mellis lævibus. Habitat in Antillis. 


129. P. oblongiflorum; culmis fiiformibus strie- 
tis simplicibus glabris (ped. et ult.), basi genicu- 
laüs; foliis linearibus acutis elongatis subconvolutis 
glaberrimis : vaginis ore nudis; paniculis exertis : ra- 
mis raris remotis (4-7); floribus alternis pedicel- 
latis (violaceis) oblongis acutis; glumis nervosis; 
glumellis nitidis. Habitat in Carolina. 

Oss. Le port de cette plante, que nous devons à Bosc, est celux 


de nos Poa , telle que la variété Poa nemorosa rariflora; et du reste 
elle nous paraît très-distincte, 


130. P. rgidifolium ( Agrosus rigidifolia Por. 
Enc. suppl. 1 , p.257). 
Os. Cette plante bien décrite, si ce n’est qu’elle a été mal placée 


par M. Poiret, est un des plus remarquables Panics, par ses feuilles 
comme épineuses au sommet, et roides et épaisses. 


131. P. eriogonum (P. pubescens minor. Poir. 
Enc. suppl. 4, p. 272); eulmis strictis, ramosis , 
iomentoso-pilosis: nodis verticillatim densè: pilosis ; 
folüs lanccolatis (3-poll. et ult, 4-lin. lat.) densè 


19 


( 194 ) 
pilosis ciliatis: vaginis pilosissimis ore barbatis; pa- 
niculis terminalibus subpaucifloris, subglabris; flo- 
ribus (minutis) obovatis; glumis siriatis pubescen- 
tibus; glumellis ( albis) lævibus. Habitat nm America 
calidiori. 

Oss. Cette plante très rapprochée du P. pubescens, se trouve ca- 
ractérisée par ses rameaux dressés et non étalés; par ses fleurs plus 
petites, et son mode de pubescence. 

132. P. cordifolium ; culmo elato (sub-2-ped.), 
geniculato subsimplici glabro: geniculis apicè pu- 
berulis; foliis remotis (2-3) cordatis, lanceolatis 
basi longè ciliatis: vaginis subpubescentibus margi- 
nibus ciliato-pilosis; panicula pedunculata subpau- 
ciflorâ; ramis erectis rarifloris; pedicellis glabris ; 
floribus subpubescentibus striatis; glumellis lævibus. 
Habitat in Americâ boreali. 

Oss. Dés différences essentielles nous portent à croire que no- 
tre plante n’est pas le P. keterophyllum de Bosc, ou ovale d'El- 
liot. 

133. P, ornatum Desx. in Prod. Ham. p. 11; 
culmo elato (sub-3-ped.) pubescente: nodis. apicè 
annulatim barbatis : foliis remotis ovato-cordatis 
oblongis pubescentibus (trip. long. 8-lin. lat.) : va- 
gimis hirto-pilosis; paniculis subsessilibus, pubes- 
centibus paucifloris; floribus (submaximis) oblongis; 
glumis pubescentibus nervosis; glamellis lævibus. 
Habitat in Antillis. 


Oss. M. Poiret, d’après une note placée dans nos collections , 
pense que cette plante est voisine de son P. Boscit, mais nous ne 
croyons pas ce rapprochement convenable. 

134. D. Airticaulum : culmo elato ( subtrip. ) mol- 
liter piloso : nodis subglabris ; foliis Iævibus remotis 
o ? & 


( 195 ) 
elongato-Fanccolatis (6-poll. 5-lin. 1.) infra atte- 
nuatis subtüs subpuberulis : vaginis hirsutis ore 
barbatis; paniculis densè pubescentibus : ramis sub- 
Simplicibus , ramulis 2-4 floris; floribus elongatis 
(magnis); glumis striato-sulcatis puberulis bifloris 
apicè barbatis inæqualibus : flore inferiori bivalve 
slaminifero , glumellis herbaceis : flore fertili subpe- 
dicellato, glumellis lævibus coriaceis. (Crescit in 


Brasilio. 
Os. Si l’on conserve le genre Ænthænantia, on devra y placer 
cette espèce. 
135. P. Séreptostachys Spreng. (Streptostachys 
aspera Desv. J. Bot. hirsuta P.Beauv. Agr. EI. x, 
Lars.) 


Os. Cette espèce , dont nous avions fait un genre, étant observée 
d’une manière plus complète, est en effet un Panic, dont les fleurs 
éprouvent quelquefois une altération qui multiplie les valves de la 
glume, avec une disposition qui donne au tout une courbureen ha- 
ineçon. 


136. P. T{inoniense; ceulmo elato (3-ped.) ra- 
moso geniculato subscabro; foliis latis elongatis 
(6-10-poll. long. 6in. lat.) glabris subasperis : 
vaginis punctatis ‘hirtèpilosis, ore margmibusque 
piloso-ciliatis ; paniculis terminalibus , ramis pubes- 
centibus erectis subsimplicibus ; floribus ‘pedicellatis 
ovalis acutiusculis; glumis lævibüus (bruneis ) substria: 
us; glumellis reticulato-venosis. Habitat in America 
boreali. 

137. P. Sorgordeum Desv. L.'c. p. 10; culmo 
elato ramoso (3-ped. et ult.) glabro; folus lanceo- 
latis obliquis nervosis subiüs ienuissimè pubescen- 
tibus, basi extrorsüs barbatis : vaginis -glabnis’ ore 


( 196 ) 
marginibusque piloso-ciliaus ; paniculis subsessilibus 
ramosis, ramis subpubescentibus; floribus ovato- 
globosis nitidis ; valvula tertia glumæ nervosa mu- 
cronatà ; valvulis subnervosis. Habitat in Hispaniolà 
inque: Brasilio. 


== B. villosum. 

Os. Cette espèce voisine du P. glutinosum, a-les feuilles. très- 
différentes de cette dernière qui ne les a ni striées ni tomenteuses; 
du reste l’inflorescence est la même, mais non glutineuse, La va- 
riété B. est à plus Jongs poils dans toutes les parties , et même dans 
la panicule ; maïs du reste nous n’avons pu la distinguer. 


138. P. Bambusoïdes Des. 1. c. ; culmo elato (6- 
ped.) lignoso ramoso glabro , ramis divaricatis ; fo- 
lis elongato-lanceolatis angustis nervosis glabris : va- 
ginis infimis perennantibus strictis, superioribus gla- 
bris marginibus oreque ciliatis ; paniculis sessilibus 
ramoso-divaricatis , ramis angulatis paucifloris aspe- 
ris; floribus glaberrimis (maximis) ; glumis striatis. 
Crescit in Antillis. 


Oss. Cette espèce compose un groupe assez naturel, étant réunie 
aux deux précédentes et à la suivante, 


130. P. Walther: Desv. nec Poiret nec Pursh ( P. 
Jatifolium Mich. flor. Am. bor. r p. 49 nec L.); cul- 
mo pubescente; foliis oblongis ovato-lanceolatis pu- 
bescentibus nervosis: vaginis pilosis, basi circa no- 
dum oreque barbatis; paniculis sessilibus paucifloris 
pilosis ; floribus oblongis; glumis nervosis ;  glumel- 


lis subacutis lævibus, Habitat in Virgimiä. 

Oss. Nous croyons.que Richard a confondu deux plantes sous le 
nom de P. latifolium , en faisant le travail de la Flore de Michaux; 
car M. Poiret, en décrivant sur nos collections son P. #altñeri, l'a 
fait sur l'échantillon que nous croyons appartenir à son P. Boscis. 
u reste; notre plante est de Michaux même, 


( 197 ) 

140. P. Orizordes Sw. Flo. Ind. occ. 1 p. 162 (P. 
melicoïdes Desv. Enc. suppl. 4. p. 233. diœcum 
Spreng. 1.p. 322). 

Os. Tout nous prouve que notre plante est celle de Swvartz, mais 
il nous semble qu’elle doit être portée dans la, division des espèces 


à épis en panicule. La variété P. orizoïdes minor, est plus petite 
dans toutes ses parties et n’a qu’un pied et demi de haut. 


141. P. petiolatum ; culmo repente geniculato ra- 
moso (sub-biped.) molliter piloso : geniculis pubes- 
centibus ; foliis petiolatis obliquis latè ovatis acumi- 
natis (3-poll.) nervosis glabris subciliatis : vaginis 
pubescentibus ore barbatis; paniculis pedunculatis 
subsimplicibus : ramis angulatis basi villosis remo- 
tifloris ; floribus (magnis) elongatis: glumis glabris 
nervosis. Habitat in Brasilio. 

Oss. Cette espèce a presque la fructification de la précédente. 


140. P. Zœve Lamk. exel. var. B. 


Oss. Il existe dans les ouvrages des botanistes une grande con- 
fusion pour plusieurs espèces très-rapprochées de celle-ci. Lamarck 
a eu tort de joindre à son P. Zæve, que nous avons du Brésil et des 
Antilles, la plante d'Afrique nommée P. altissimum H. P. (P. 
maximum Jacq.), et qui est une de celles données pour Æerbe de 
Guinée. 

143.P.nutans (Agrostis nutans Poir. Enc. suppl.:, 
p: 255. Vilfa nutans P. Beauv. Agr. p. 16.) 

Os. Il n’y a rien d'étonnant dans la méprise de M. Poiret, sux 
cette plante dont les fleurs sont obliques vers leur pointe, et of- 
frent par;leur allongement et leur petitesse, l’apparence de celle des 
Agroslis. 

144. P. cæspitosum Lamk. Enc. 4. p. 742. CE 
diffusum Poir. Enc. suppl. 4. p. 280 exel. syn.) 
*. Oss. Cette plante ne nous paraît pas être celle de Swartz, elle a 


les chaumes dressés et point tombans. 


145. P. patentissimum Desv. in Poir. Enc. suppl 


( 198 ) 

4.p. 283. culmo elato ( 4-ped. etult.) glabro subge- 
niculato : nodis turgidis glabris; folis latè lanceola- 
ts cordatis elongatis ciliatis glabris nervosis : vaginis 
striatis ore marginibusque pilosis ; panicula vasta di- 
varicata glabra rariflorà ; floribus ( subminutis ) gla- 
bris; glumis, valva tertia ciliatà : als glabris; glumel- 
lis lævibus. Habitat in Hispaniolà (et non in novä 
Hispania (1) ). 

146. P. mullinerve Desy. in Enc. suppl. 4. p. 279 
et confertum Desv. 1. c.; culmo elato (2-ped. et uli.) 
glabro; folis latis elongatis basi cordatis attenuatisque 
striaus glabris subasperis : vaginis , internode lon- 
gioribus , glabris striatis ore barbatis ; paniculä exten- 
sa ramosa : ramis basi nudis; floribus (minutis) gla- 
bris subglobosis ; glumis subæqualibus bifloris : unä 


stenili; glumellis lævibus. Crescit in Antillis. 

Os. Ce sont deux individus d’ane même plante que nous avions 
crus différens à raison de leur genre de développement de panicule. 
Les espèces à deux fleurs ne nous semblent devoir faire qu’une sec- 
tion de genres et non un genre. 


147. P. repens L. (P. convolutum P. Beauv. in 
Spreng.) 
Oxs. Sprengel a adopté la plante de M. de Beauvais et a ramené 


le P. repens an P. colorafum, ce qui établit deux erreurs : les indi- 
vidus de la plante de 1a Guinée sont un peu plus élancés. 


148. P. lanceæfotium ; culmo elato (3-5-ped.} 
compresso ramoso glabro apice pubescente : nodis 
extimis pubescentibus ; folis elongato-lanceolatissub- 
glabris nervosis basi attenuatis margine pilosiusculis : 


———— s sl, 0 


(1) Saint-Domingue et non la Nouvelle-Espagne, comme l’a 
dit M, Poiret, 


( 199 ) 
vaginis villosis ore pilosis ; paniculis: pedunculis sub- 
corymbosis, ramis pubescentibus apicè glabris flo- 
riferis ; floribus (minuus) glabris: glamæ valvula ter- 
lia minutà subscariosa, valvulis viridibus subner- 
vosis; glumellis lævibus. Habitat in Brasilio. 

149. P. Guineense Desv. im Poir. Enc. suppl. 4. 
p- 279 (P.ovalifolium Poir. 1. c.); culmo prostrato, 
radicante geniculato : nodis subglabris; foliis ovato- 
oblongis acuminatis sparsè pilosis barbato-ciliatis: 
vaginis hirto-pilosis ; paniculis capillaribns laxis gla- 
berrimis paucifloris; floribus minutis oblongis. Ha- 
bitat in Guinea. 

Os. Le nom que nous avions adopté ne devait pas être changé: 
à la vérité l’'Herbe de Guinée a reçu ce nom de Richard, mais elle 
en avait reçu un autre antérieurement, et qui doit rester. 

150. P. graciliscens Desv. 1. c. culmo suberecto 
(ped.) glaberrimo; foliis ovato-lanceolatis subacu- 
minatis (2-poll. 5-lin, lat. ) nervosis pubescentibus, 
basi cordatis extüs villosis : vaginis pubescentibus ore 
pilosis; paniculis elongatis subfasligiatis , ramis 
longis apicè divisis; floribus (nigrescentibus) obo- 
vatis glabris; glumis glabris nervosis; glumellis 
puncticulato-reticulatis. Habitat in Carolinis. 

151, P. sessilicaule Desv. in Ham. Prod. FI. ind. 
occ. p. 11. (P. cayennense? Kant in N. gen. H. 
B. 1, p- 103, excl. sy. Porr. Enc. suppl. 4, p.272, 
n.° 14); culmis cæspitosis subnullis : nodis pubes- 
centibus; folüs elongatis latiusculis (3-4-poll. 3-4- 
lin. lat.) glabris subtùs nervo pilosis : vaginis pi- 
losis; paniculis elongatis (subped.) subsessilibus : 
pedunculo angulato rhachique hirtis, ramis numero— 


( 200 ) 
sis lateralibus ; floribus (submagnis } ovatis oblique 
acuminalis; glumis glabris substriatis; glumellis læ- 
vibus. Habitat in Carolina ? 


Oss. Cette plante n’est nullement.une variété du P. cayerurense ; 
ainsi qu’on l’a avancé. 

152. P. retrofractum Del. ined. (P. tremulum ? 
Spreng., 1. p. 319); culmo erecto (sub-2-ped.) 
siriato glabro; foliis elongatis latinsculis nervosis 
(3-4-lin. lat.) subasperis : vaginis glabris striatis ore 
nudis ; panicula laxa : ramis retroflexis divaricatis apice 
floriferis; floribus oblongis acutis: glumis striatis 
coloratis ; glumellis (bruneis) lævibus. Crescit in 
America boreali. 


Oss. Sprengel dit que les rameaux de la paxicule de sa plante sont 
flexueux et.ses fleurs obtuses ; ce qué nous ne reconnaissons pas 
dans la nôtre que nous tenons de M. Rafnaut de Lille. 


153. P. hzrsutum Sw. 


Oss. Cette plante omise parSprengel, est très-bien décrite par 
Swartz, si on ajoute que les feuilles sont poilues en-dessous à la 
partie inférieure et les fleurs aiguës : du reste elle a le port du P. 
coloratum. Elle’est de S.t-Domingue. 


154. P. Agrostidiforme Desv. in Prod. Ind. oc. 
W. Ham. p. 10. 
Oss. Cette plante, par l'effet d'un port remarquable , se trouve la 
même que celle à laquelle Lamarck a donné ce nom, et qui croît 
dans les Antilles comme au Brésil, 


155. P. rariflorum Lamk. Enc. 4, p. 746 bis 
(Aüra laxa Rich. act. Soc. hist. nat. Paris. r , p: 106, 
Poa rariflora Rœm. Spreng. Orthoclada -- Beauv.) 


Ozs. Cette plante beaucoup plus rapprochée du Panic que d’aucun 
autre genre, a les feuilles véritablement pétiolées, ovales-lancéo- 
lées acuminées, nerveuses et poilues; mais peut-être l’'Ortho- 
clada deyra-t-il être adopté ? 


( 201 ) 
156. P. polygamum Sw. Prod. p. 24. (P. læve 
Lamk. Enc. 4, p. 740 excl. syn. P.— jamento- 
rum Pers. Ench. 1, p. 83: Herbe de Guimée }). 


Oss. Cette plante dont le diagnostique particulier est d'avoir ses 
nœuds velus, a ‘été confondue sous le nom d’Herbe de Guinée, 
avec plusieurs autres espèces. 


157. P. Zeff. (P. coloratum B. Lamk. ill. n.° 903); 
culmo.elato (3-ped.) glabro erecto cæspitoso ; fo- 
lis elongatis nervosis glabris (4-lin. lat.) : vaginis 
glabris apice margineque piloso-sericeis ; paniculà 
subverticillata : ramis laxis, inferioribns basi pilosis ; 
floribus (subviolaceis ) pedicellatis; glumis oblongis 
submucronulatis; glumæ : valvulà tertia brevissima 
subobtusa ; glumella (alba } transversè puncticulato- 
striatà. Habitat in Abyssimiä. 

158. P. atro-purpureum; culmo elato (3-ped.) 
cæspitoso, glabro ; folis glabris lævibus elongatis 
(3-lin. lat. ): vaginis glaberrimis ore sericeo-pilosis ; 
paniculis elongatis subverticillatis glabris; glumis 
bifloris (læte violaceis) subæqualibus acutiusculis : 
flore staminifero sterili, pistilifero , glumellis lævi- 


bus. Habitat. 


Oss. Si le'genre Zsachne est adopté, malgré son rapport avec 
le Panicum, et qu'ici les glumes sont acuminées au lieu d’être 
obtuses, il faudra y placer cette espèce; mais nous pensons 
qu’il vaudrait mieux en faire une section; et même encore elle 
réunira bien des choses peu naturelles, telles que le P. racemo- 
sum Spr. (Saccharum reptans Lamk.}) et les n.05 105, 115, 116, 
117, 140 et 158 de notre travail ici. 


159: ELYMUS distans ; culmo elato ( 3-ped. ); 
folüs glabris; spica subnutante basi imterrupta, ra- 
mosa ; spiculis subternis : inferioribus elongatis ra- 


( 202 ) 
mosis 3-5-spiculatis ; involucris asperis linearibus 
aristatis flore sublongioribus ; glumis pubescentibus 
aristâ triplo brevioribus ; glumellis adpressè pilosis. 
Habitat... 


Oss. Cette plante dont nous ne connaissons pas l’origine, ne 
peut appartenir à aucune espèce connue, et a le port de l'Ely- 
eus Tramnosus, mais est bien moins rameuse. 


160. ENNEAPOGON Desvauxi P. Beauv. agr. 
p- 82.1. 16.f. 11. ( En. gracile Desv. J. bot. suppl. 
1. p. 70. excl. syn. Br.); culmis cæspitosis erectis 
Cped.) fliformibus pubescentibus : nodis pilosis ; 
folis linearibus supra pubescentibus convolutis : va- 
ginis pubescentibus ; spicis cylindricis (poll. et ultr. 
migrescentibus) ; glumis acutis subpuberulis; aristis 
plumosis. Habitat in Manilià. 


Oss. On à voulu réunir ce genre, que nous avons proposé, 
au Pappophorum; mais il est si naturel que nous ne croyons 
pas devoir adopter cette réunion, et en outre nous croyons notre 
plante différente de celle de M. Brown. Nous l'avons décrite 


ici, M. De Beauvyois n’en ayant donné que la figure, d’après nos 
collections. 


161. TRIODIA festucoïdes ( Panicum festucoïdes 
Desv. Enc. suppl. 4. p. 283); culmis cæspitosis 
elatis (3-ped.) glaberrimis crassis basi vaginiferis ; 
folüs striatis latiusculis (ped. et ult. long. 4-5-lin. 
lat.) nervosis lævibus glabris, nervo medio albo, 
basi extùs semi-annulatim pilosis : vaginis glabris 
nitidis ore breviter pilosis ; paniculâ ramosa fasti- 
glata ; floribus pallidis; glumis sübtnifloris mucro- 
nulatis dorso Jævibus; glumellis basi pilosiusculis : 
valvalà inferiori brevissimè tridentatä. Crescit in 
America boreali. 


( 203 ) 


Ors. Ceité plante ne nous parait appartenir ni au Triodia 
Greenii, ni au pallida, ni au cuprea. Nous soupçonnons qu'il 
y a plusieurs espèces réunies par Sprengel dans cette dernière, 
dont se rapproche le T. novæboracensis N. (Tricuspis — P. B. 
agr. p. 77), par sa ligule poilue; tandis que la Triodia cœru- 
lescens N. (Poa cœrulescens Mich. Tricuspis caroliniana P. Beauy. 
1. c.t. 15. f. 10) forme encore une espèce particulière. 


162. DANTHONIA Zhuarü ( Pentameris Thuari 
P. B. L. c. p. 92. t. 18. f. 8. Avena antarcta ? 
Thunb.); culmo elato (3-ped.) erecto glabro basi 
subramoso ; foliis convolutis elongatis (ped. et ult.) 
glabris . supra pilosis : vaginis ore barbatis ; pa- 
niculis fastigiatis; glumis scariosis acutis “bifloris 
flore Jongioribus ; glumellis (fucescentibus } hispi- 
dis : inferioribus quadrisetosis medio aristatis, aristà 


tortili. Habitat ad C. b. spa? 


Oss. La phrase de T'hunberg : Panicula coarctata, calicibus 4- 
floris , corolla bifida aristata, ne semble pas convenir à notre 
plante, qui ne peut que former une division dans le genre Dan- 
thonia, et n’avait pas encore été décrite. 

163. KOELERA Æérla ; culmo erecio (10-poll.} 
glabro filiformi annuo ; folüs linearibus flaccidis hir- 
to-pilosis : vaginis apice margineque barbatis ; spicä 
densa oblonga (10-lin.); rhachi pubescente ; spi- 
culis bifloris pedicellatis ; glumis acutis subæquali- 
bus hirto-pilosis glamellà æquantibus ; glumellis : 
valvulà inferiori aspera aristata, arista erecta, val- 
vula superiore hyalinä. Crescit in Hispaniâ orien- 
tal. 

Os. Cette plante s'éloigne des Æira par ses glumelles aristées, 
et sa glume est plus prolongée que dans les autres espèces du 


genre Koeleria : genre dans lequel ne doivent pas rester les es- 
pèces non aristées, qui sont de véritables Paturins. 


{ 204 ) 

164. TRISETUM sericeum ; culmo cæspitoso stricto 
{ped. et ult.) glabro; foliis convolutis rigidis gla- 
berrimis basi supra pilosis: vaginis striatis glabris 
ore barbatis; panicula stricta subspicatä, rhachi sub- 
pabescente; spiculis (semi-poll.) 5-6-floris; glnmis 
glabris acutis glumellà longioribus margine pelluci- 
dis ; glumellis argenteo-barbatis : inferiori dorso aris- 
tatâ bifida, divisuris aristatis. Crescit in Brasilio. 


Os. Cette espèce doit certainement faire un genre distinct de 
l4vena , soit qu’on l'appelle Trisetum ou Trisetaria. 


165. POA brachiata; (Panicum divaricatum Mich. 
flor. Bor. Am. r. p. 50 non Lamk. Panicum de- 
bile Poir. Enc. suppl. 4. p. 283). 

Oss. Cette plante ayant deux à trois fleurs par épillet, est ur 
véritable Poa, et pourrait être prise aussi pour une Festuca; et 
aussi ne sommes-nous pas surpris que Richard père l'ait prise 
pour un Panicum. Ce n’est point comme l’a cru Sprengel, le P. 
hians d'Elliot: cette dernière espèce ayant la base des feuilles velue. 


166. P. heteroclita; ( Aïra arundinacea L.). 

Oss. Le port de cette plante est tel que, malgré la constance 
de ses deux fleurs par épillet, à la vérité plus longues que la 
glume, on ne peut s'empêcher de la placer dans les Paturins,, 
dont elle a le port, plutôt que dans celui des Canches. 

167. P. microstachya ; culmo elato (2-ped. et 
ultr.) flexile glabro; folüs latiusculis subconvolutis 
glaberrimis : vaginis striatis ore brevè densèque pi- 
losis ;. panicula elongatä (ped. ) subverticillata, ra- 
mis ascendentibus elongatis (6-poll. ) rhachique 
glabris; spiculis 5-floris; glumâ valvis subæquali- 
bus acutis carinâ serrulatis ; glumellà glabra apicè 
subobtusa serrulata. Habitat in Africa ? 


168, P. Senegalensis ; culmo elato (2-ped.); pa- 


riculà (8-poll.) verticillata; ramis (2-poll.) sub- 
ascendentibus basi longè pilosis; spiculis limearibus 
7-floris ; floribus subremous; glumis minutis pellu- 
cidis imæqualibus carinâ sublævibus ; glumellis ob-— 
tusiusculis :carina serrulatis. Habitat in Africa. 

Oss. Bien qu’en échantillon incomplet, cette plante ne nous 
parait se rapporter à rien de déterminé dans les auteurs, et 
s'il y a un Poa Senegalensis, cultivé au jardin de Paris, véri- 
table Paturin que nous connaissons sous le nom de Festuca fusca 
L., celaine doit pas empêcher notre espèce de porter le nom 
que nous Jui imposons ici, 

169. P. Brasiliensis Spreng. Syst. vég. 1. p. 342. 

Ozs. La plante à laquelle nous avons appliqué ce nom se rap- 
porte bien à la courte notion.qu’en a exposée Sprengel’; mais elle 
a habituellement 20 fleurs par épillet, ce qui nous ferait penser 
que ce n’est pas la sienne, lui en attribuant beaucoup moins : 
si ce nombre peut être employé comme caractère. Le Poa hir- 
suta de Michaux ne nous a jamais offert que trois fleurs ; bien 
que Michaux lui en attribue jusqu’à cinq ; et c’est pourquoi nous 
en avions fait d’abord un Poa arbuscula que Fraser avait pris 
pour un, Panicum ( P. arboreum ). 


170. P. Aypnoïdes Lamk. 
-- --- À. capitata; pubescenlie spiculis ca- 
pitaus. In Antillis. 
-— --- B.laxa; spiculis laxis, pubescente. 
Im Antillis. 
—— —--'C: glabra; spiculis laxis, In Bra- 
silo. 

171. P. stelligera (P. aspera minor? Poir. Enc. 
5. p. 88); culmis cæspitosis erectis ( sub-ped..) ; 
foliis lincaribus sparsis longisque subpilosis :vagi- 
nis pilosis ore barbañis; paniculis divaricatis,.ramis 
basi longè anuulatim barbatis ; spiculis 8-10-floris 


( 206 ) 


linearibus (minatis) complanats ; glumä : valvis sub- 
aculis; glamellis obtusiusculis margine dentato-ci- 
hatis. Crescit in Antilhs ? 

172. P. Domingensis Pers. Ench. 1. p. 88; cul- 
mo erecto elato (6-ped.) crasso; foliis linearibus 
(2-ped. et ultr. 3-lin. lat.) rigidis striatis glaberri- 
mis ore nudis; paniculà elongata (2-ped.) inter- 
rupta; ramis fasciculatis sessilibus; spiculis lineari- 
bus complanatis; floribus 13-15; glumis glumellis- 
que subacutis. Habitat in Hispaniolà. 


Ozs.. Cette grande espèce non encore décrite et oubliée par 
Sprengel, représente en Amérique notre Poa aquatica. 


173. P. alata; culmis cæspitosis erectis, basi sub- 
ramosis (ped. et ultr.); folüs linearibus subconvo- 
lutis pilosis (2-poll. et ult.): vaginis ore margini- 
busque pilosis; paniculâ subspicata interrupta: ra- 
mis sessiibus; spiculis subpinnatim dispositis basi 
rhachique pilosis elongatis linearibus (6-8-lin.) 
compressis sessilibus; glumis glumellisque carinâ 
denticulatis. Habitat in Carolina ? 

Oss. C'est avec doute que nous plaçons cette espèce dans les 


Carolines, malgré une indication de l’herbier de Thuilier; ‘elle 
a Je port des espèces des! Indes orientales. 


174. P. subulata; paniculâ glaberrima elongata 
{ ped.) contracta, ramis subverticillatis appressis , 
spiculis numerosis lineari-subulatis elongatis (6-lin.) 
subcompressis 15-20-floris; glumis glumellisque ob- 
tusiusculis glaberrimis. Habitat in Senegalia. 


Oss. Bien que n'ayant pu observer que là panicule , cette plante 
HOuS paraît nouvelle: 


175. CALOTHECA Prézoides Desv. J: bot. appl. r. 
p.71. Spreng: Syst. vég. 1. p. 348. ( C. elegçans 


( 207) 


P. Beauv. agr. t. 19. f. 7. Bromus brizoïdes Lamk. 
ill. 1. p. 193. Calotheca poæformis Spreng. 1. c.). 

Os. Nous rétablissons ici la synonimie pour un genre que 
nous avons publié il y a déjà long-temps, et sur lequel on à 
commis plusieurs erreurs de nomenclature, ainsi que pour le 
suivant, dont Sprengel n’a plus fait qu’un genre factice, en ÿ in- 
troduisant des espèces qui lui sont étrangères. 


176. CHASCOLYTRUM erectum Desv. 1. €. p. 72. 
( Briza erecta Lamk. L. c. p. 187. Festuca brizoïdes 
Spreng. À. c. p. 353). 

CH. subaristatum Desv. 1. c. (Briza subaristata 
Lamk. L. c. Calotheca brizoïdea P. Beauv.agr. p. 86. 
t 17. . 16. excl. syn. Festuca Commersoni 
Spreng. 1. c.). 

177. BRIZA dura; culmis cæspitosis erectis (sub- 
ped.) fiiformibus; folüs lineari-lanceolatis acutis 
( poll. et ult.) sparsè pilosis : vaginis, margimibus 
oreque ciliatis; panicula pauciflora, ramis remotis 
3-4-spiculiferis : spiculis, extimis solitarüs, subses: 
silibus lævibus obcordatis; glumellis firmis, obtu- 
siusculis, carinâ crassa scabra. Habitat in America 
australi. 


Oss. Cette plante, ainsi que la Briza capensis , ne peut pas 
être éloignée du genre Briza, ayant plus de rapport avec lui 
qu'avec le genre Poa. 


178. B. flava; culmo filiformi ( ped. et ultr.} 
basi geniculato glabro; folüs linearibus elongatis 
vaginisque glaberrimis : ligula elongata scariosa; pa- 
niculà densa ramis sessilibus; spiculis subovatis ; 
glumä subaspera acuta ; glumellis apicè acutis mar- 
gme hyalinis medio coloratis (rufis}. Habitat in 
America australi. 


( 208 ) 


Oss. Nous croyons cette espèce de Buenos-Ayres, d’après ies 
plates avec lesquelles!elle se trouvait; ‘et du este elle ne peue 
être ni un Poa, ni un des deux genres ci-dessus, bien que ses 
épillets soïent plus pointus que ne le sont ceux de nos Priza d’Eu- 
rope. 

179. ÉLEUSINE barbata ; culmis cæspitosis erectis 
bagi compressis glabris ( ped. etult.); foliis glaucis 
tiusculis ( 4-6-poll.. 3-lin. lat.) mucronatis basi 
Supra Sub-parsè pilosis : vaginis striatis glabris ore 
nudis, marginibus subpilosis ; spicis paniculatis al- 
ternis oppositis ( 4-poll.) ; spiculis basi subpilosis 
breviter pedicellatis 3-5-floris lanceolatis: secundis 
alternis remotis; glumis acutis carinâ denticulatis, val- 
vulà imferiore breviori; glumellis subacutis, valvulà 
inferiore subemarginatä margine piloso-fimbriata aris- 
tata : aristâ valvulâ duplo longiori. Crescit in Brasilio. 

Ors. Cette: espèce semblerait lier le genre ! Chloris au genre 
ÆEleusine; maïs si l’on fait abstraction des espèces composant le 
Dactyloctænium , elle est bien plus voisine du dernier; et d’ail- 
leurs ses épillets allongés l’éloignent surtout du CAloris. 

180. SCHISMUS fusciculatus P. Beauv. p. 74 (Pa- 
nicum madritense Cav. ex Balb.); culmo erecto 
elato ( biped. et ult.) glabro; folis glaucis longis 
(ped..et ult.) Jatiusculis (3-4-lin. lat.) nervosis 
subasperis : vaginis ore brevissimè sericeo-ciliatis ; 
pauiculis (8-10-poll.) elongatis strictis ; spicis ( 4- 
poll. long.) erectis; spiculis oblongis secundis sub: 
remots subsessilibus; rhachi filiforme angulatä sub- 
sinuosa; glumà (fusca) pellucida, valvis mæqualibus 
submucronatis dorso asperis ; glumellis : valvulâ in- 
feriori cordato-emarginata mucronato-aristatà. Ha- 
bitat in America calidiore. 


( 209 ) 

* Oxs. Cette plante qui n’a été ni décrite, ni caractérisée par 
M. De Beauvois, et auquel nous l’ayions communiquée , rentre 
parfaitement dans le Schismus , mais le port n’est pas celui du 
Schismus emarpinatus. 

181. DIPLACHNE néorescens ; ligula fimbriata pi- 
losa; ramis rigidis, spiculis remotis; glumis glu- 
mellisque aristatis. Habitat in America australi ? 

Os. Nous ne signalons ici que ce qui peut différencier cette 
espèce du D. fascicularis, dont cette espèce a entièrement le 
port; mais Ja nôtre a les épillets plus gros, plus éloignés es 
uns des autres, les arrêtes et les glumes et glumelles plus 
grandes. 

182. FESTUCA paradoxa; culmis cæspitosis elatis 
C3-ped.) glabris; folis latiuscalis asperis (3-lin. 
lat.) graminosis : vaginis ore nudis : panicula sub- 
patula secunda subnutante; spiculis 4-5-floris:; glumä : 
valvis mulicis sulcatis acutis'inæqualibus ; glumellis 
acutiusculis lævibus. Habitat... 


Os. Cette plante, vivace, qui a été cultivée au Jardin. bota- 
nique, de. Paris, nous semblait avoir quelques rapports avec la 
Festuca nutans ( Willd.), mais elle est dite Ælosculis 7LETVOSES » 
ce que n'offre pas la nôtre, On serait tenté d’abord de la prendre 


pour un Poa;: mais le port des épillets bien que mutiques, 
est plutôt celui des Fétuques: 


183. OLYRA ovata Desv. Prod. in F1. Ind. occ. 
Ham. p. 7; culmo elato basi angulato pubescente ; 
“olüis (8-poll..2-poll. lat.) ovato-oblongis nervosis 
transversè reticulalis acuminatis :subpetiolatis . basi 
subobliquis : vaginis nervosis. apicè auriculatis, su 
perioribus pubescentibus ; floribus paniculatis : pa- 
niculis terminalibus fertilibus, inferioribus stamini- 
feris; glumis subacutis nervosis cinercis: glamellis 
basi pilosis. Crescit in Gnvand. A 


14 


(210 ) 


184. O. cuneatkifolia ; culmo elato pubéscente ; 
foliis obliquis basi truncatis nervosis (3-poll. long. 
poll. et ult.) acutis breviter petiolatis : vaginis no- 
disque subpubescentibus ; floribus paniculatis : supe- 
rioribus ferlilibus paucis; glumis acuminatis elon- 
gatis; glumellis pubescentibus ; floribus sterilibus 
minusculis. Reperitur in Brasilio. 

185. O. media; culmo pubescente; folüs obli- 
quis nervosis lonceolatis acuminatis ( 8-poll. poll. 
et ult. lat.) subglaucescentibus breviter acuminatis 
basi pubescentibus : vaginis piloso-pubescentibus ; 
floribus paniculatis superioribus fertilibus ; glumis 
subcinereo-puberulis fongè acuminatis; glumellis læ- 
vibus reticulatis (an desiccatione ? ). Crescit m Bra- 
silo. | 

186. O. obliqua ; culmo elato glabro : nodis sub- 

uberulis ; folüis petiolatis nervosis basi obliquis 
subtruncatis lanceolatis acutis (10-poll. 2-3-poll. 
lat.) : vaginis striatis subpilosis apicè auriculatis ; 
floribus paniculatis; paniculis laxis, superiore fertili; 
glumis longè acaminatis subpilosis : flori sterili pel- 
lucidis; glumellis nitidis. Habitat m Brasilio. 

187. O. Brasiliensis ; culmo elato pubescente; 
foliis breviter petiolatis nervosis glaberrimis basi 
subobliquis longè acuminatis : vaginis subpubescen- 
übus apicè auriculatis; floribus paniculatis fertihbus 
numerosis ; glumis acuminatis; glumellis glaberri- 
mis. Ex Brasilu. 

Ozs. On pourrait confondre cette espèce avec l’Olyra pani- 
culata de Svvartz ou le Zatifolia, maïs, elle est différente de l’une 


et de l’autre; mais bien plus de la derniere, figurée par La- 
zarck, 


( 211 ) 
188. PHARUS Zancifoius Desv. Prod. 1. c. p. 48. 
Oss. Cette plante est bien représentée par la f. 1. t, 769 des 
illustrations de Lamarck, donnée pour le Ph. Zappulaceus ; tan- 
dis que ce lappulaceus, donné par M. De Tussac, flore des 
Antilles, est différent. 


189. PH. ovalifolius Desv. 1. c. 

Oss. Il ressemble au Zatifolius de Lamarck ill. f. 23 mais 
cependant les fruits de notre espèce semblent bien plus longs 
et sont velus seulement au sommet. Nous ne possédons pas 
assez d'objéts de comparaison pour prononcer en définitive sur 
nos deux espèces. : 

190. NASTUS prodifer; culmo elato ramoso, ra- 
mis sarmentosis, ramulis lateralibus proliferis ; fo- 
lis elongato-lançeolatis acutis subpetiolatis striatis 
subglaucescentibus glaberrimis (ramealibus r-2-poll. 
long.) margine lævibus : vaginis marginibus oreque 
pilosiusculis; paniculis lateralibus ; rhachi angulatä, 
ramulis divaricats ; spiculis unifloris acutis rectis (2- 
lin. PPT 2 pedicellatis ; glumis minutis acu- 
tiusculis ; glumellis striatis acutis, valvulis acutis 4. 
duis vacuis. Habitat in Brasilio. 

191. N. bruneus ; culmo elato ramoso, ramis 
geniculatis ; folüs elongatis lanceolatis striatis gla- 
bris supra asperis, petiolatis : vaginis compressis gla- 
bris apicè biauriculatis; paniculis terminalibus sub- 
contractis ; spiculis unifloris oblongis reclis (4-in.) ; 
glumis : valvis mucronato-aristatis minutis; glumel- 
lis nitidis (bruneis) subobtusiusculis, valvulis 4. 
duis vacuis: staminibus 3. Habitat in Brasilio. 


(212) 


TABLE DES GENRES. 


Agrostis . . No RES. Monachne . . N.° 416. 
Aïropsis . 57. Nastus 490. 
Alopecurus . k 5. Ophiurimella. . UT: 
Anatherum . 60. Oplismenus . : 97. 
Andropogon. 46. Olyras 2. À die. ASS. 
Antlusthiria. . . 64. Panicum. . 102 à 158 
Arthrostachys . . 74. Paspalanthium . . 21. 
Biatherium . 69. Paspalum. D 
Briza : 477. Pennisetum . . TUE 
Calamagrostis . 22. Phalaris . 35. 
Calotheca  . 475. Pharus SIeptAss: 
Campuloa . . 36. Poa . .. 465 à 174. 
Centrophorum :. 56. Podosemum. . . . 4. 
Chascolytrum 176. Pollima . Re PRET 
Chloris : 70. Prionanthium 20. 
Danthonia 162. Pteriam . 2 78. 
Diperium. £ 78. Rhaphis . : 52 
Diplachne 181. Rhythachne. . y A2 
Diplasanthum 45. Saccharum . 43. 
Eleusine . 179. Schismus. . . . 180. 
Elymus . ; 159: = "Setarra : 85. 
Enneapogon. 160. Sorghum. 65. 
Eriolythrum. 45. Sporobolus . . qi 25: 
Eupogon. 47. Triathera.. . . 67. 
Festuca . | 482. Trianthium . : . 25. 
Gramerium . O7. Tribolum . 39 
Heierochloa. H 42. Triodia . à 161. 
Koelera . 465. Trisetum. 462. 
Leersia . 26. Urochloa. ; 105. 
Melica 44... ZLoysia 1. 
Microchloa . 76. 


(215) 


on —————— À 


NOTICE 


SUR LA VINIFICATION, 


PAR 


M. DE BEAUREGARD. 


LE département de Maine et Loire trouve dans 
le produit de ses vins une des principales branches 
de ses revenus. Il en exporte, chaque année, 
pour plusieurs millions de francs. Cette source 
de prospérité est trop importante pour ne pas 
appeler l'attention de la Société d'Agriculture. 
Elle doit se demander si les perfectionnemens ap- 
portés par le progrès des sciences physiques dans 
l’art de faire le vin, sont assez répandus dans notre 
département. Nous ne le croyons pas. La plupart 
des propriétaires suivent la méthode qu'ils ont re- 
çue de leurs pères, et que ceux-ci tenaient de Jeurs 
devanciers. 

Nous n’entreprendrons pas de citer les nombreux 
ouvrages qui ont été écrits sur celte matière, de si- 
gnaler ce qui a été fait et ce qui est encore à faire; 
une telle tâche exigerait des volumes et serait au— 
dessus de nos forces. Nous nous bornerons à in- 
diquer deux procédés qui nous paraissent les meil- 
leurs dans l'état actuel de l’œnologie. 


(214) 
Nous nous occuperons d’abord de l'art de faire 


le vin blanc; nous traiterons ensuite de la fabri- 
cation du vin rouge. 


$. DU VIN BLANC. 


Pour bien comprendre les avantages des procédés 
que nous allons décrire, il est nécessaire de rap- 
peler quels sont les principes qui constituent le jus 
de raisin appelé le Moët. 


Ces principes sont le Sucre, la Fecule, le Mu- 
cilage, VAlbumine, \e Gluten végétal, YExtrac- 
tif, la Matière colorante, le Tannin, le Tartre, 
l'Acide malique ei VEau. 


Sous le rapport de la fermentation, on considère 
le moût comme composé de trois substances prin- 
cipales : le sucre, l’eau et le ferment. Cette der- 
nière substance se compose particulièrement de l’al- 
bumine et du gluten végétal. 


Ces principes varient dans leurs proportions selon 
Ja nature et la maturité du raisin. On obtient peu 
de sucre du verjus, mais on y rencontre beaucoup 
de mucilage, d’albumine, de gluten végétal et d’eau. 
Ces principes sont convertis en matière sucrée, lors- 
que, par la végétation et la chaleur, le fruit passe 
à l'état de maturité. Dans les contrées méridionales, 
la partie sucrée abonde; elle est en faible quantité 
dans les pays froids. 


Lorsque ces irois principes sont mélangés par 
l'effet de la pression du raisin et forment une masse 


(215) 

suffisante, le ferment se porte sur la matière su- 
crée, la décompose : le gaz acide carbonique s’ex- 
hale, et l’alcohol se forme. Si la matere sucrée do- 
mine, le ferment sera insuffisant pour Ja dissou- 
dre, le vin restera doux et liquoreux : tels sont 
les vins du Midi. Si, au contraire, le ferment est 
en excès, il n’emploiera qu’une de ses parties à dé- 
composer la matière sucrée, l’autre restera en dis- 
solution dans Îe vin, lui donnera de l’âcreté, et, 
plus tard, le conduira à aïgrir ou à graisser (1). 

Il résulte de ces observations que la vinification 
n’est parfaite qu’autant qu’une juste proportion existe 
entre les trois principes qui composent le moût. La 
rétablir lorsqu'elle est altérée, constitue l’art de faire- 
Je vin. Pour obtenir la proportion convenable, il 
faut ou augmenter la quantité de la matière sucrée, 
ou diminuer celle du ferment. 

Le premier moyen consiste à faire dissoudre du 
sucre ou de la cassonnade dans le moût de raisin. 
MM. Chaptal et Parmentier ont fait sur cette com- 
binaison des essais qui ont élé couronnés de suc 
cès; mais l'emploi de ces matières est tellement 
dispendieux et accroît tellement le prix du vin, qu'il 
n’est pas toujours avantageux d’en faire usage. 


(1) On prévient cette dernière altération, dans les vins blancs, 
en mettant 2 à 4 hectogrammes de tartrate de pot.sse (crême 
de tartre) par barrique de vin, dans ceux qui sont sujets à cette 
disposition , ou. bien en Jeur ajoutant le suc de 2 kilogrammes de 
cormes vertes. 

(Note de M, Desvaux }; 


(216 ) 


Par l'auire moyen on se borne à diminuer la 
masse du ferment. Les expériences que Fabroni et 
Lavoisier ont faites sur la baie du raisin, ont appris 
que la parte sucrée est placée dans les cellules de 
ce fruit et. constitue le jus proprement dit, tandis 
que:le ferment se trouve dans les membranes qui 
séparent les cellules dans lesquelles les liquides sont 
déposés. Ces membranes, qui constituent la lie, 
nagent d'abord dans le moût, puis forment un pré- 
cipité par l'effet de leur pesanteur spécifique. En 
séparant cette lie du.moût, avant que la fermenta- 
lon ait été. déterminée, l’on parvient à diminuer 
considérablement la masse du ferment et à rétablir 
une juste proportion : tel est l'effet du procédé que 
nous allons indiquer. 


Usage de la pompe. 


Au bas de la mar dun pressoir, on pratique un 
bassin assez grand pour contenir tout le moût qui 
peut être obtenu dans un jour : ainsi, dans le ‘cas 
où le pressoir pourrait fournir douze barriques, le 
bassin devra avoir une assez grande capacité pour 
les recevoir. Une pompe soutenue par des colliers 
est adaptée à ce bassin et descend jusqu'à quelques 
pouces au-dessus du fond. Le vin découle de la mai 
dans ce bassin pendant tout le cours de la journée; 
il y séjourne toute la nuit dans un état complet de 
repos. Ce laps de temps suffit pour que la lie se 
précipite au fond. Le lendemain matin on fait pas- 
ser le vin dans les tonneaux à l’aide de la pompe; 
mais comme elle ne va pas jusqu’au fond, elle ne 


( 217 ) 

peut amener la lie. Quand tout le vin est pompé, 
l'on fait descendre dans le bassin un jouvrier qui, 
avec-un baquet, retire la lie restée au fond. Cette 
le n'est pas pure , elle est mélangée de parties li- 
quides et forme une liqueur épaisse. Mise dans des 
tonneaux, elle dépose, et l'on peut quelques mois 
après, par le soutirage, en relirer une quantité de 
vin égale à peu près à la moitié. Ce vin est très- 
dur et très-âcre, tandis que celui provenu de la 
pompe a une douceur et une légèreté qui en amé- 
liore considérablement la qualité. 

La quantité de lie ou plutôt de vin de rebut qu’on 
doit séparer de la masse générale du moüt, conte- 
nue dans le bassin , doit varier selon la maturité du 
raisin. Si l’année a été froide et pluvieuse, comme 
le ferment abondera, il faudra en séparer davan- 
tage. Dans une année ordinaire, la proportion doit 
être d’un douzième : ainsi, en admettant que le 
bassin contienne douze barriques, une barrique se- 
ra laissée pour vin de rebut. On conçoit qu’on peut 
faire varier cette proportion, selon qu'on rapproche 
plus ou moins du fond du bassin, l'extrémité im- 


férieure de la pompe (1). 
108p00frieh D Rp: e60muIE 0p, CS 


(Gi) Un chimiste très-estimable, M. Sebille, a, dans un mé- 
moire publié en 1830, indiqué un autre moyen d'extraire le fer- 
ment. Il consiste à placer le moût dans des chaudières, et à 
lécumer après lavoir amené à l'état d’ébullition par l’action du 
feu. Ce procédé produit de bons résultats , mais il- présente, 
dans son exécution, des difficultés qui le rendent impraticable à 
Leancoup de propriétaires, La pompe est d’un usage plus simple 


(28) 


La nécessité de séparer la lie du moût, pour ob- 
lenir un vin délicat, nous conduit à parler d’un 
nouveau système de bondes dont l'usage s’est in- 
troduit, depuis quelques années, dans notre dé- 
partement. Ces bondes sont garnies de tubes de 
verre destinés à laisser échapper le gaz acide car- 
bonique. On a beaucoup discuté sur les avantages 
et les inconvéniens de cet instrument. Nous pen- 
sons que la bonde à tube sera nuisible si on la place 
sur la barrique aussitôt que le moût est entonné, 
parce qu’elle empêche l'expulsion de l'écume qui, 
rentrant dans la masse, en altère la qualité; mais 
elle sera utile si on l'emploie après la fermentation 
qui dure ordinairement quatre ou cinq jours. Cette 
première fermentation entraîne presque toute l’écu- 
me au-dehors : c’est lorsqu'elle est terminée qu'il 
faut faire usage de la bonde à tube qui offre l’avan- 
tage de livrer passage au gaz acide carbonique, et 
d'empêcher l'introduction de l'air atmosphérique. 
M. Sebille, de Saumur, à, depuis peu, inventé une 
bonde dont il à publié la description. Il la nomme 
bonde hydraulique. Elle nous paraît bien préférable 
à la bonde à tube. Mais nous pensons qu’elle ne 
doit être employée qu'après que la fermentation 
tumuliueuse est terminée. 


ct moins dispendieux. Cette considération m’a déterminé à dé- 
crire avec détail la manière de l’employer. J'ai sur ce point des 
notions d’autant plus précises, que j'en fais usage depuis plus 
de quinze ans. 


(249 ) 


&$. DU VIN ROUGE. 


Nous passons à l’art de faire le vin rouge. Nous 
disons l'art, car le raisin abandonné à lui-même 
iomberait en putréfaction. Ce n'est que par des 
moyens artificiels qu'on obtient cette liqueur fer- 
mentée appelée le vin (1). 


* Inconvéniens du Brassage. 


La méthode la plus ancienne et encore Ja plus 
répandue, de fabriquer le vin rouge, dans les en- 
virons de Saumur, consiste à jeter les grains de ra- 
sin dans la cuve, à les remuer chaque jour jusqu'a 
ce que la fermentation soit terminée, et alors on 
fait passer le vm de la cuve dans les tonneaux, 

Le but qu'on se propose en agitant la masse de 
vendange est d'empêcher que les grains qui sur- 
nagent et forment ce qu'on appelle le chapeau, 
ne contractent de l'acidité par leur contact avec l'air 
atmosphérique. Mais cette opération ne peut pré- 
venir complètement l'effet que l'on redoute; les 
grains, à peine refoulés dans le moût, remontent 
à la surface, et l’acide acétique commence ase for- 
mer. Aussi la plupart des vins rouges ont un prin- 


D pe RE et ER Er RCE TS 


(1) Les fruits sucrés en général, abandonnés à eux-mêmes ; 
passent par les divers degrés désignés par les fermentations al- 
coholique et acide; et nous avons la certitude qu'il se forme 
souvent alors de l’éther acétique, ayant que l’ensemble passe à 
état de putréfaction. 

(Note de M. Desvaur ). 


( 220 ) 
cipe d’acidité qui se développe quelquefois dans la 
barrique et fait tourner le vin au vinaigre. 

Le brassage quotidien présente un autre incon- 
vénient plus grand encore, c'est de laisser évapo- 
rer, avec la chaleur, la partie spiritueuse et l’arome 
du. vin. 

Exiter de brasser la vendange dans la cuve, du- 
rant la fermentation, et cependant prévenir l’aces- 
sence du chapeau, tel était le problême qui se pré- 
sentait. On l’a résolu par nn appareil qui empêche 
les grains de se porter à la surface du moût, en 
maintenant constamment leur immersion. Cet ap- 
pareil est la cuve à double fond que nous allons 
décrire. 


** De la Cuve à double fond. 


Je suppose une cuve ayant la forme d’un cône 
ironqué, et d’une capacité à contenir douze barriques 
indépendamment du marc. ( Voyez PLANCHE X ). 
À huit pouces au-dessous du jable, on cloue des 
tasseaux qui servent à soutenir un fond parsemé de 
trous de deux ou trois lignes de diamètre, et dis 
tans l’un de l’autre d’nn pouce environ. On jette 
dans la cuve les grains de raisin jusqu’à ce que la 
masse soit parvenue à la hauteur des tasseaux. On 
place sur ces tasseaux le fond troué qu'on fixe so- 
lidement, puis on ferme la cuve par un couvercle 
auquel on pratique un trou d’un pouce de dia- 
mètre, pour laisser passage au gaz acide carbo- 
nique qui doit se dégager. La fermentation ne tarde 
pas-à s'établir, la masse de vendange tend alors à 


( 221 ) 

se gonfler; mais comme le fond troué est fixé, de 
manière à ne pouvoir être soulevé, les grains de 
raisin sont contenus, le jus seul passe au travers 
des trous et s'élève jusqu’au jable. Par ce moyen, 
la vendange, constamment baignée dans le moût, 
ne peut aigrir, la fermentation s’opère en vase 
clos, et parcourt toutes ses périodes sans trouble. 
Lorsqu'enfin le moût a passé à l’état yineux , et que 
le moment est venu de le mettre dans les tonneaux, 
la cuve est ouverte pour la première fois ; -elle ré- 
pand alors un parfum qui ne se rencontre pas dans 
les cuves soumises à un brassage journalier usité 
d’après l’ancienne méthode. 


***0 Du Foulage. 


Ayant signalé les avantages de la cuve à double 

fond, nous devons maintenant parler du foulage : 
opération pratiquée avec succès en Bourgogne, dans 
le Bordelais et dans tous les pays où l’art de faire 
le vin est porté à un très-haut degré de perfec- 
uon. 
. La fermentation ne peut s'établir complètement 
qu’autant que le grain de raisin a été brisé. Si, 
au contraire, il.est encore dans toute son intégrité 
lorsqu'il est jeté dans la cuve, il reste stationnaire, 
le jus n’est point transformé. en alcohol, la partie 
colorante n’est point extraite de la pellicule. 

Dans son traité sur l’art de faire le vin, M. Chap- 
tal recommande fortement le foulage. Il s’exprime 
ainsi, page 80 : « Le raisin ne saurait éprouver 
# de fermentation spiritueuse si, par une pression 


((222)) 

» convenable, on n’en extrait pas le suc pour le 
» soumettre à l’action des causes qui déterminent 
» le mouvement de fermentation. {Il suit de cette 
» vérité fondamentale, que non seulement on doit 
» employer les moyens nécessaires pour fouler les 
» raisins , MAIS que l'opération ne sera parfaite 
» qu’autant que tous les grains le seront égale- 
» ment. Sans cela, la fermentation ne saurait mar- 
» cher d’une manière uniforme , le suc exprimé 
» terminerait sa période de décomposition avant 
» même que les grains qui ont échappé au foulage 
>» eussent commencé la leur; ce qui, dès-lors, pré- 
» senterait un tout dont les élémens ne seraient pas 
» en rapport. Cependant, si on examine le pro- 
» duit du foulage déposé dans la cuve, on se con- 
» vaincra que la compression a toujours été im- 
» parfaite : il suffit de réfléchir un instant sur les 
» procédés grossiers employés pour fouler les raiï- 
» sims, pour ne plus s'étonner de l’imperfection des 
» mêmes résultats. » 

Lorsque les avantages du foulage sont si évidens, 
on est étonné qu’une opération de cette importance 
soit presqu'ignorée dans le département de Maine 
et Loire, pour la fabrication du vin rouge. Il est 
vrai qu'en remuant chaque jour la masse de ven- 
dange, on brise quelques grains, mais l'expérience 
apprend qu'il en échappe plus des trois quarts (1). + 


(1) C’est ce que constate encore l'expérience de l’une des, per- 
sonnes chargées de communiquer ses réflexions sur le Mémoire 
de M. De Beauregard, (Note de M: Desvaur ). 


( 223 ) 

La cuve que nous avons décrite présente un moyen 
très-facile d’opérer le foulage. Le double fond étant 
posé sur des tasseaux, à quelques pouces au-des- 
sous du jable de la cuve, forme une véritable mai. 
On y jette les grains à mesure que les raisins ont 
été égrappés. Un ouvrier placé sur la cuve, les foule 
avec les pieds, puis soulevant de temps en temps 
une des planches qui composent le double fond , il 
_se procure une ouverture par laquelle il précipite 
dans la cuve Ja vendange foulée. On n’a pas à crain- 
dre que les pepms soient écrâsés sous les pieds de 
l'oûvrier, la pellicule des raisins et toute la masse 
de vendange offrent une force d'élasticité qui em- 
pêche le broiement. C'est un fait que l’expérience 
a constaté (1). 


D Emploi du Thermomètre. 


On sait que la fermentation ne s'établit facile- 
ment qu'autant que le moût est à un état de dix 
degrés de chaleur ( thermomètre de Réaumur }). 
Si la température était au-dessous de ce point, 
lorsqu'on récolte le raisin, il serait utile de ré- 
chauffer la masse de vendange. Pour y parvenir, 


(1) M. Sebille a inventé une cuve qu'il a nommée cuve à agi- 
tation verticale. Il Jui donne la (préférence. N’ayant pas !été à 
portée de suivre ,cet appareil dans sa marche et d’en:constater 
les effets, je m’abstiens de le discuter. Je me borne à jaffirmer 
que depuis long-temps je me sers de la cuve à fond troué, et 


que chaque année je suis de plus en plus convaincu de ses bons 
résultats, 


(224) 


on fait bouillir quelques seaux de moût; on les jette 
dans la cuve lorsqu'elle est à moitié chargée, puis 
on continue de Ja remplir. Ce foyer de chaleur, 
placé au centre, détermine promptement la fermen- 
tation. 

Le moment de décuver dépend de la qualité qu’on 
veut faire dominer dans le vin ; il varie selon le de- 
gré de couleur et de vigueur qu’on veut obtenir. 
Ces diverses qualités résultent d’une fermentation 
plus :ou moins prolongée. Il est bien important, 
par conséquent, de la suivre dans tous ses déve- 
loppemens. Plusieurs moyens ‘ont été proposés; le 
meilleur est le thermomètre: Pour l’introduire dans 
la cuve, l’on pratique deux irous qui se correspon- 
dent, l’un dans le couvercle, l’autre dans le double 
fond. Par ces deux trous, on fait passer un tuyau 
de fer-blanc, du calibre d’un canon de fusil. À 
l’aide d’une ficelle, on descend un thermomètre dans 
le tuyau, jusqu’au centre de la cuve. Tant qué la 
fermentation tumultueuse se développe, le degré de 
chaleur s'élève ; il s’abaisse quand elle rétrograde. 
C’est alors qu'il faut décuver, parce que le ferment 
ayant achevé de convertir la matière sucrée ou al- 
cohol, rétroagirait sur les pepins, et donnerait de 
l'âcreté au vin. 

Nous venons d'exposer les moyens, d'améliorer le 
vin blanc à l’aide de la pompe, et le: vin rouge par 
l'emploi de la cuve à double fond: En indiquant ces 
procédés, nous n’avons pas proposé de ces théories 
vagues que les faits démentent trop souvent; mous 
avons pour nous l'expérience de quinze années. 


( 225 5 
Nous employons ces procédés, nous les avons oh- 
servés avec attention, nous avons travaillé à les per- 
fectionner: C’est parce qu'ils sont encore peu con- 
nus dans notre département, et que leur utilité nous 
est démontrée , que nous avons cru devoir les pu- 
blier et en recommander l'usage. 


een 04 iQ Ho eme—— 


EXPLICATION DE LA PLANCHE X, 
DESCRIPTION DE LA CUVE A DOUBLE FOND. 


\ 


Fi. I. 


1. Couvercle de la cuve. 

2. Barre servant à maintenir le couvercle. 

8. Trou destiné à donner passage au gaz acide car- 
bonique. 

4. Boucles qui retiennent la barre. 

5. Verges de fer, dont l'extrémité inférieure tient 
à la couette. 

6. Couette sur laquelle la cuve repose. 


Fic. II. 
Description de la Cuve qui laisse voir l'intérieur. 


7. Fond troué qui retient la vendange et laisse 
passage au jus. 
8. Tasseaux pour tenir le fond troué. 
1) 


( 226 ) 

9. Barres pour maïntenir:le fond troué.1Les,che- 
villes dont elles sont surmontées contrebou- 
tentau couvercle ; et:empêchent que le fond 
troué ne soit soulevé ;par l'effort de la masse 
de’ vendange qui:se gonfle lors de la fer- 
mentation. 

10. Tuyau de fer-blanc, dans lequel le thermo- 
mètre est introduit.-Il-est percé d’un grand 
nombre de trous, pour que le moût y en- 
tre et baigne le thermomètre. 


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TABLE DES MATIÈRES. 


Agriculture. 


Sur la Greffe de la Vigne, par M. BourcouIn.... 
Erreur des Agriculteurs et des Botanistes, s le Feff 
des Abyssins, par M. DEsvaAUXx..............:... 
Sur l’Englumen propre à préparer les arbres destinés 
à un voyage dé long cours, par N.-F. LesrETON 
jeune, pépiniériste à Angers.................... 


Sciences. ; 


Des Stalactites souterraines ou prétendues Fulgorites, 
(planche V, fig. 1 et 2,) par M. Drsvaux...... 

Rapport sur une note de M. Desvaux, ayant pour 
titre : Des Stalactites souterraines ou prétendues 

\ Fulgorites, par MM. Cxerow, Przamre et Four- 


MRÉPBRE S'en 2e scie cle 6 = 10;0'slefe eleielaie ele ».e 0e 0,0 Suis 0 Vie aie 


Lettres el Arts. 


| Notice biographique sur Billard, par M. Gréc. La- 


‘ 


" 


cmèse, professeur à l'Ecole de Médecine d'Angers. 
Quelques Réflexions sur, l'Histoire et sur les princi- 
., paux Historiens des différens siècles, par M. Bror- 
DIER- LANGLOIS.........e.esvesseesssenere 


4 ap ue 


Page 97 


1 


[ 


# 
104 


109 


Nota. Les articles suivans étant pris sur une 5.° livraison, 


nous reprenons les matières dans le même ordre. 
Û x . 
Agriculiure. 


. Observations sur les Graminées, et Descriptions de 


Genres et Espèces nouvelles de cette même Fa- 


mille, par M. Desvaux..........-ecssee... 


. Notice sur la Vinification, par M. DE BEAUREGARD- 


157 


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DE LA SOCIÉTÉ 


d'Agriculture, Sciences et Arts 


D’'ANGERS. 


ANGERS, 


DE L'IMPRIMERIE DE L. PAVIE. 


1833. 


| RSS 


(227) 
EU (ON Un Re En 
DE LA BRUYÈRE 
EMPLOYÉE DANS LES VIGNES COMME ENGRAIS, 


PAR M. DE BEAUREGARD,. 


Dans la plupart des cultures, les engrais sont 
d'autant plus appréciés qu'ils fournissent des ré- 
coltes plus abondantes. Ce principe ne peut être 
admis dans toute sa généralité à l'égard de la vigne, 
dont les produits sont estimés en raison composée 
de leur qualité et de leur quantité. C'est sous ce 
double rappait que nous examinerons quels sont 
les engrais qui lui conviennent. 

Les substances suscepübles d'être mélangées avec 
le sol pour accroître sa fertilité, peuvent se diviser 
en trois classes: engrais minéraux , engrais végé- 
taux, engrais animaux. 

Parmi les engrais minéraux, la chaux mérite 
particulièrement de fixer l'attention. On l’emploie 
avec succès sur la vigne; mais quel est son genre 
d'action? La plupart des agronomes qui ont considéré 
la chaux sous ses rapports chimiques , ont reconnu 
que ce minéral n’agissait pas comme subsiance nu- 
tritive , mais comme dissolvant. Son effet est .d’ache- 
ver la décomposition des matières végétales que 
content l’humus, de les rendre sayonneuses et assez 

16 


(228 ) 


solubles dans l’eau pour qu’elles puissent être ab- 
sorbées par les fibres des racines et concourir à la 
nutrition de la plante. On conçoit, d’après cela, 
que la chaux , ne fournissant pas de nourriture par 
elle-même , mais se bornant à dissoudre celle qu’elle 
rencontre, finirait par épuiser le sol si elle était 
constamment et uniquement employée. C’est, dit 
Chaptal, moins un aliment qu’un assaisonnement 
qui, dans la plante, excite l’organe de la diges- 
tion (a). 

Les engrais les plns nutritifs sont, sans contredit, 
les engrais animaux ou végéto-animaux, tels que 
les fumiers formés dans les étables ; mais ils altèrent 
la qualité du vin. On lit dans la Maison Rustique de 
l'abbé Rosier, que les vignes de Suresne produisaient 
autrefois du vin qui était très estimé, mais qu’elles 
ont été dénaturées par les boues et les fumiers de 
Paris que l’on a répandus avec profusion sur leur sol. 

Les engrais animaux et végéto-animaux présen- 
tent un autre inconvénient : comme ils fournissent 
une nourriture très-abondante , ils procurent à la 
vigne un développement trop rapide , elle acquiert 
une espèce d’obésité, son bois devient mou et spon- 
gieux, et, après quelques années, on la voit dépérnr.. 

Nous passons aux engrais végétaux. Parmi les 


(4) On pourrait objecter que la chaux est employée depuis plus 
de 30 ans dans certains sols du département de Maine et Loire, sans 
qu'on ail remarqué qu'ils soient devenus moins fertiles. Mais il faut 
considérer qu’ordinairement:, avant d’en faire usage, on la mélange 
soit avec des fumiers, soit avec des terres substantielles telles que 
curures de fossés ou d'étangs, 


( 229 ) 


plantes qui peuvent être enfouies pour amender la 
terre , la bruyère doit être placée au premier rang. 
Comme elle se décompose lentement, elle n’expose pas 
le cep à être subitement privé de nourriture après 
en avoir absorbé avec excès. Un second avantage 
non moins appréciable , c’est qu’elle accroît l'abon- 
dance du vin sans nuire à sa qualité. Lorsqu'elle 
est employée convenablement, elle communique à 
la vigne une force de végétation extraordinaire. Cet 
effet est dû, en partie, à ce qu'elle divise la terre 
et procure un passage tant aux racines qu’à l’humi- 
dité. Mais la cause principale dé sa salutaire in- 
fläencé doit être attribuée à ce que, en entrant en 
férmentation, elle exhale beaucoup de gaz acide- 
carbonique qui introduit dans les racines et les 
vivifié. 

On connait l'effet prodigieux de ce gaz sur les 
végétaux : Humphry-Davy s'en est assuré par une ex- 
périence très-remarquablé. Il remplit une cornue de 
gaz acide-carbonique et en plaça ouverture sous un 
gazon; en moins d'une semaine, l'effet était de- 
venu sensible : l'herbe contrastait fortement avec 
celle qui ne recevait aucune émanation de là cornue, 
et végétait avec une force extraordinaire. 

Afin de constater les effets des engrais végéto- 
animaux et de la bruyère, j'ai entrepris des expé- 
riences comparatives. Ayant planté un arpent de 
Vigne, je l'ai divisé en deux parties: j'ai engraissé 
là première avec du fumier d’étäble, pour l'autre je 
nat employé qué la bruyère. Dans la partie fumée, 
la vigne a d’abord végété avec une grande vigueur, 


(230 ) 


puis, quelques années après, elle est devenue lan- 
guissante, tandis que la portion qui n’avait recu 
que la bruyère a présenté une végétation moins ra- 
pide, mais qui s’est bien mieux soutenue. 

Lorsque ma vigne a été en rapport, j'ai vendangé 
séparément la partie fumée et celle amendée parla 
bruyère: j'ai reconnu que le vin provenant de cette 
dernière portion était d’une qualité. supérieure. 

La bruyère peut être employée avec avantage dans 
presque toutes les terres, quoique ses effets ne soient 
pas toujours entièrement semblables. Si le sol est 
argileux , elle le divise et accroît sa porosité, mais 
elle, sera décomposée plus lentement , parce que, 
recouverte d’une couche de terre plus compacte , 
elle est moins exposée à l’action destructive de l’eau, 
de l'air et de la chaleur: aussi si on l'enfouissait à 
une trop grande profondeur, plusieurs années pour- 
raient s’écouler, avant qu’elle eût éprouvé une alté- 
ration sensible. Lorsque le sol est léger ; la bruyère 
est plus accessible aux influences extérieures , elle 
entre plus.rapidement en fermentation et son action 
est plus vive. Si. le sol était entièrement sablonneux 
et dépourvu de substances nutritives,. cette plante 
n’offrirait pas un aliment suffisant , elle devrait être 
combinée avec, d’autres engrais. 

Il nous reste à indiquer la manière da la bruyère 
doit être employée. S’il s’agit de planter une vigne, 
on pratique des rigoles de deux:pieds de profondeur 
sur autant de largeur. On étend au fond une couche 
de bruyère de six pouces, puis une couche de terre 
de deux pouces d'épaisseur. On: place dessus le jeune 


( 251 ) 
plant, on le couvre de deux pouces de terre sur 
laquelle’ on répand encore une couche de bruyère 
de la même épaisseur que la première, on ferme 
ensuite la fosse avec de la terre. 

Si lon veut faire usage de cet engrais sur une 
vigne déjà plantée, on pratique entre les rangs des 
ceps des rigoles , dans lesquelles on place la bruyère 
que l’on recouvre de cinq ou six pouces de terre. 

l'est bien important d'employer cette plante 
lorsqu'elle est verte, afin qu’elle puisse entrer en fer- 
mentation et fournir du gaz acide-carbonique. Si 
elle était desséchée , elle ne présenterait plus que 
des fibres ligueuses dépouillées des fluides aériformes 
qui en font la vertu principale. 

Plusieurs écrivains, et notamment M. Desvaux 
dans un très-bon Mémoire sur l’écobuage, ont pro- 
clamé ‘les heureux effets qu’on peut obtenir de 
l'enfouissemeat des plantes pour fertiliser le sol ; 
nous avons cru, qu'il n’était pas inutile de rapporter 
à l'appui des principes qu'ils ont émis, les expé- 
riences auxquelles nous nous sommes livrés. On ne 
peut citer trop de faits pour engager les propriétaires 
de vignes à employer les engrais végétaux et à leur 
accorder la préférence qu'ils méritent. 

La terre, s’épuise en. fournissant des récoltes ; 
mais ordinairement une partie de.ses produits lui est 
restituée et entretient sa fécondité : ainsi la paille et 
le chaume qui sont sortis d’un champ, y rentrent 
après avoir été convertis en fumier par les bestiaux 
employés à sa culture. La vigne n’a pas les mêmes 
ressources : elle produit sans trouver en elle-même 


(282) 


de quoi se renouveler, car je ne compte pour rien 
le marc de vendange. Il faut qu’elle mette à contri- 
bution les engrais qui étaient destinés aux céréales. 
L'intérêt public demande qu'ils ne soient pas en- 
levés à ceïte dernière culture, la plus importante 
de toutes. On ne peut trop recommander l’emploi 
de la bruyère. Si cette plante croît dans des lieux 
peu éloignés de vos, vignes , ne négligez pas ce 
trésor , 1l augmentera vos récoltes sans nuire à leur 
qualité (1). 
Depuis quelques années, l’usage de cet st 
s’est introduit dans l'arrondissement de Saumur, il 
a produit les plus heureux effets. Nous croyons de- 
voir les publier pour contribuer à.sa propagation, 


(1). Les deux principales espèces de Bruyères-qui-existent dans le 
département de-Maine et Loire, sont: 4. -la Bruyère à balais, 
Erica Scoparia, dont la tige a 3 ou 4 pouces, les rameaux sont 
grêles et affilés, les fenilles étroites ét pointues, les fleurs ver- 
dâtres , les, corales :camipanulées:; 2.0: la: Bruyère commune, Erica 
vulgaris, qui s'élèye à 4 ou 2 pieds, et dont'les feuilles sont,op- 
posées ef imbriquées, les fleurs situées aux aisselles des feuilles ; le 
£alice double et eoloré à l'intérieur. 

Cette dernière ‘doit être préférée à la Bruyère à ‘balais’, dont les 
tiges sont plus grosses. plus ligneuses et moins fournies .de : fleurs 
et de feuilles. 

L’£rica ciliaris n'est abondante que dans quelques parties de 
l'Ouest, et les Erica cénérexet tetralixine forment jamais de coupes 
à elles seules, dans aucuné ‘partie du départément-de Maine etLoire: 


( 233 ) 


D 
RAPPORT 


Sur La Œbarrue anglaise, dite de Bauleu, 
(Planche xr.) 


PAR M. DE BEAUREGARD. 


LA charrue doit être considérée eomme le plus 
important des instrumens d'agriculture. Sa perfection 
ou ses défectuosités ont une influence considérable 
sur la prospérité d’un peuple agricole. Si, tout en 
produisant un bon labour, elle exige des forces 
excessives pour être mise «en mouvement , la quan- 
tité de bestiaux employés à son usage absorbe une 
grande partie des produits ; si enfin, comme on 
en trouve l'exemple dans plusieurs paÿs, elle pré- 
sente la double imperfection d'exiger un fort tirage 
et de ne remuer qu'imparfaitement la terre, le col- 
tivateur obligé-à-des dépenses que couvrent à peme 
les produits, tombe dans la misère. 

Ces affligeantés conséquences étaient senties de- 
puis-trop longtemps pour ne pas fixer l'attention 
des agronomes. Ce désir d'amélioration qui s’est 
porté sur toutes Les branches d'industrie, s’est aussi 
occupé des instrumens d'agriculture. Des perfection- 
nemens ont été apportés a la forme des charrues : 
mais ils ont eu le sort de tant d'autres : appréciés 
par des personnes éclairées, ils restent inconnus à la. 
masse des cultivateurs qui devraient en faire usage... 


(254) 


Une de ces charrues perfectionnées a été intro- 
duite, depuis peu, dans notre département : c’est 
la charrue anglaise de Bayley (1). Notre Société, 
dont le désir constant est de travailler à la propa- 
gation des procédés utiles à l’agriculture, a nommé 
une commission pour examiner cette charrue, et lui 
faire un rapport. La commission m’a chargé de vous 
exprimer l'opinion qu’elle s’est formée après l'exa- 
men auquel elle s’est livrée. 

La charrue anglaise dite de Bayley se compose 
d'un soc, d’un sep, d’un versoir ; d'une flèche ; d’un 
réqulateur , de deux mancherons et d’un coûtre. Nous 
examinerons successivement chacune de ces parties. 

Le soc présente la forme d’un triangle rectangle 
dont l‘hypothénuse est longue d'environ 25 centi- 
mètres. Cette dernière partie est tranchante et sert 
à couper les racines qui se rencontrent dans lessillon. 

Le sep est la partie qui forme la base sur laquelle 
repose la charrue; sa position est horizontale. Le 
soc est placé au bout et dans la même direction: 
une semelle en fer, placée sous le sep empêche :sa 
détérioration par le frottement. 

La flèche: ou âge fait l'office d’un timon : l’une 
de ses éxirémités tient au sep; cest à l’autre-ex- 
irémité que l'attelageest attaché. 

CL 

(4) L'importation de cette charrue dans notre département'estidue 
à M. le comte de Serrant qui en fait usage avec sun grand succés. Il 
en à confié un modéle au sieur Baradès qui est parvenu à limiter 


avec une précision qui ne laisse rien à désirer, au prix de 80 fr- 
Celle de M. de Dombasle, prise à Roville, coûte 74 fr. 


(235 ) 

Le: versoir ou l'oreille remplit la double fonction 
de soulever la terre et de la renverser: Cette partie 
si importante de la charrue à été l'objet de nom- 
breux :essais ; la courbe qu’elle doit former a exercé 
les’ calculs de plusieurs savans agronomes: M. Ar- 
buthnot, dans son Journal de Physique ,‘a soutenu 
que la cycloïde était la courbe qui convenait le mieux 
au versoir pour opposer le moins de résistance à 
la terre. Quelques géomètres ont proposé d’autres 
inclinaisons: C’ette question a fixé l'attention d’un 
homme célèbre qui, quoique placé à la tête d’une 
nation puissante, n’a point dédaigné de s'occuper 
du perfectionnement de la charrue, M: Jefferson, 
président des Etats-Unis d'Amérique. Il a publié 
sur ce sujet un Mémoire qui se trouve consigné 
dans les Annales du Muséum d'Histoire ‘Naturelle 
de Paris. Comme les idées qu'il présente sont celles 
qui depuis ont été généralement adoptées , je crois 
devoir en transcrire un passage. 

& Le versoir d’une charrue, ditil, ne doit pas 
» être seulement la continuation de l'aile du soc 
» en commencant à son arrière-bord; mais encore 
» il faut qu’elle:soit sur le même plan. Sa pre- 
» mière fonction :est de recevoir horizontalement 
» du soc la moïte de terre; de l’élever: à la hau- 
» teur convenable pour être renversée, d’opposer 
» dans sa marche le moins de résistance-possible’, 
» et: par conséquent de n’exiger ‘que le menimum 
» de la puissance motrice. Si-c’était là que se bor- 
» nent ses fonctions, le coin offrirait sans doute la 
forme la plus convenable pour la pratique, mais 


Ÿ 


(236 ) 


» il s’agil aussi. de renverser la motte. de terre : 
» l’un des bords du versoir doit donc être sans élé- 
» vallon, pour éviter une dépense.inutile de force: 
» l’autre bord doit, au. contraire, aller en montant 
» jusqu’à ce qu’il dépasse la perpendiculaire, afin 
» que la motte de terre se renverse par son propre 
» poids ; ét pour obtenir cet. effet: avec le moins de 
» résistance possible, il faut que linclinaison du 
» versoir augmente graduellement du moment qu'il 
» à reçu larmotte de terre.et s'élève abliquement, 
» jusqu’à ce! qu'il ait atteint et dépassé la ligne ver- 
». ticale. » 

C'est d’après les principes énoncés dans ce Mé- 
moire qu'a été. détermimée la courbe du. versoir de 
la charrue anglaise qui fait l’objet de notre rapport: 
cette courbe est généralement reconnue pour la 
meilleure: 

Une qualité principale exigée dans la construction 
d’une charrue est qu’elle puisse :prendre plus ou 
moins de terre selon :la volonté du laboureur et 
creuser un sillon ‘plus ou moins profond, c'est ee 
qu'on nomme lenérure : elle dépend de Vinclinai- 
son donnée au soc. D'après le système:des charrues 
anciennes, on obtient cette inclinaison, soit enfai- 
sant varier: par despieces:mobiles l'angle formé par 
la jonction du :sepet de la flèche, soit en appuyant 
sur les mancherons , soit enfin en avançani la flè- 
che sur l’attelage.: Ces moyens accroissent la fatigue 
et du laboureur et des animaux employés au/tirage. 
La charrue de Bayley offre un procédé beaucoup 
plus simple et plus avantageux. Une pièce de fer- 


- ( 237 ) 


nommée régulateur est placée à l'extrémité de la 
flèche. Cette pièce garnie de dents en forme de cré- 
maillère procure la facilité de faire varier l'inclinaison 
de la flèche et par suite du soc. 

Le coûtre et les mancherons ne nous ont pas paru 
devoir donner lieu à aucune observation. 

L'avani-train, dont l’effet est d'ajouter au frotte- 
ment et d’accroïtre le tirage, a été supprimé. 

Toutes les pièces de la charrue de Bayley, à 
l'exception de la flèche et des mancherons, sont en 
fer. L'emploi de ce métal augmente la première dé- 
pense, mais elle-donne une solidité qui, en résultat, 
devient une économie. 

L'examen que nous avons fait de la charrue an- 
glaise de Bayley nous a convaincu qu'elle présente 
à un haut degré le double avantage de ‘produire 
un bon labour, en exigeant peu de forces pour 
être mise en action. 

Nous sommes bien Join de penser cependant que 
cette charrue soit la seule bonne, la seule qui doive 
être recherchée par les cultivateurs : plusieurs pays 
font usage de charrues justement appréciées. On 
conçoit, en effet , qu’en. s’occupant de. la compo- 
sition d’un instrument soumis aux règles de la mé- 
canique, les bons esprits ont dû se rencontrer dans 
leurs calculs, s’accorder sur le primcipe et ne dif- 
férer que dans les accessoires ; la chaprue Belge et 
célle de Roville nous en offrent l’exemple.(r}. 


(4) L'Ecole des Arts d'Angers exécute avec une grande perfection la 
charrue de Roville et autres instrumens d’agriculture , dont on peut 
voir les modèles dans les galeries de cette intéressante instituiion. 


(238 ) | 

Lorsque l’on considère les services que des instru- 
mens aratoires ainsi perfectionnés peuvent rendre à 
l'agriculture, on éprouve un sentiment pénible en 
pensant qu'ils sont à peine connus dans notre dé: 
partement. Le laboureur, assujetti à cet empire si 
tyrannique de l'habitude, conserve avec ‘un respect 
presque religieux d’antiques charrues qui remontant 
à l'enfance de l’art, en présentent les imperfections. 
Par l'effet de leur construction vicieuse, elles exigent 
des attelages très-forts et ne produisent qu’un labour 
défectueux: L'introduction des  charrues perfection 
nées serait un:bienfait pour le pays: 

La charrue de Bayley nous paraît devoir prendre 
rang parmi celles qui méritent particulièrement d’être 
recommandées au choix des agriculteurs. 

La commission émet le vœu que la société exprime 
une opinion favorable à cette charrue ; et qu’elle in- 
sère son opinion motivée dans ses publications, afin 
de contribuer à la: propagation d’un instrument dont 
notre département peut tirer de grands avantages. 


Explication de la Planche XT. 
À. Mancherons. 


B. Perche, haie, ou dge , ou flèche. 
C. Coûtre. : 

D. Régulateur. 

E. Sep, ou affur. 


F. Oreille ou versoir. bérfniih 


G. Soc: 


(239) 


ROSE PYGMÉE. 


La rose pygmée est une variété singulière, dont le 
caractère le plus saïllant est dans la petitesse de la 
fleur : ayant un diamètre qui ne dépasse pas quatre 
lignes. Cette fleur est en outre d’un rouge vif, pleine, 
bien faite et parfaitement remontante. 

La petitesse de cette fleur, état de chose assez re- 
marquable d’ailleurs, lui a valu le nom de Rose 
pygmée , qui lui a été imposé par M. Bizard, con- 
seiller à la Cour royale d'Angers : nom qui lui 
convient d'autant mieux qu'il exprime à lui seul et 
la petitesse de la fleur, et la taille minime du rosier 
qui la porte. 

Cette nouvelle variété, à raison de son exiguité 
générale, ne peut manquer d'attirer l'attention de 
l'amateur : elle est comme un nain, parmi l'espèce 
humaine , que l’on va voir par curiosité. 

Elle a été obtenue d'une graine du Rosa indica mi- 
nima , semée en 1828, par M. Bizard. 


( 240 ) 
a — 
MÉDAILLES 
DÉCERNÉES PAR LA SOCIÉTÉ 


POUR L'EXPOSITION HORTICULTURALE DU 21 sun 1832. 


——— 


Si l'exposition horticulturale de 1832 avait quel- 
que chose de moins remarquable que celle du 3 
juin 1831, les évènemens politiques particuliers au 
pays en ont été la cause la plus directe. Cependant 
la Société a trouvé à faire l’appheation de deux mé- 
dailles d'argent et de six médailles de bronze. 

Le prix le plus important était, il n’y a'pas de 
doute, celui relatif à l'introduction de végétaux nou- 
veaux pour le département. Trois horticulteurs ont 
été remarqués sous ce rapport, ce sont: MM. Ca- 
thet, Leroy jeune et Lebreton jéune. Le pre- 
mier a obtenu Ja 1." médaille d'argent; M. Leroy, 
la 2. médaille d'argent, et M: Lebreïton, la seule 
médaille de bronze accordée pour ce prix. Le nom- 
bre des espèces introduites dans nos jardins ou dans 
nos serres, par ces horticulteurs , justifie le juge 
ment qu’en a porté le Jury d'exposition. 

Un prix à la plus belle plante introduite devait 
être encore l’objet du concours; M. Cachet, pour 
le Nymphœa cœærulæa a obtenu la 1. médaille de 
bronze, et M. Rousseau, la 2.°, pour la beauté 
d’un Polygala cordata. 


(241) 


Trois prix de bonne culture ont été obtenus par 
MM. Potard , Rousseau et Bidault, pour ia belle te- 
nue des végétaux qu'ils ont exposés, et une médaille 
de bronze leur a été donnée, d’après l’ordre où nous 
venons de les nommer. 

La Société, en décidant que des prix seraient ac- 
cordés à l’horticulture , a eu l'intention d'y com- 
prendre non-seulement les fleurs mais encore les 
fruits; espérant plus tard diriger sa sollicitude sur 
des cultures d’une“plus haute importance. 


DESCRIPTION 


DE DEUX NOUVELLES ESPÈCES DU GENRE ANODONTE, 


PAR M. MILLET. 


ANODONTE MINIME : 4nodonta minima ( Millet }. 


( Voyez PI. XII, fig. 2.) 


Coquille avale-oblongue, arrondie et rétrécie pos- : 
térieurement , sub-rhomboïde antérieurement. Valves 
épaisses , recouvertes d’un épiderme brun-noirâire, 
marquées de stries rapprochées formant des sillons 
à peine sensibles ; d’un lacté bleuâtre en dedans, avce 
une large tache irrégulière livide, qui occupe presque 
tout l’intérieur de la coquille. Lame cardinale plus 
ou moins arquée et ondulée , terminée par un petit 


( 242 ) 

sinus. Sommet et crochets fortement .excoriés ; im- 

pressions musculaires assez profondes. 
Longueur:des plus grands individus ; 2 pouces 6 

à 8 lignes; diamètre 1 pouce 6 lignes. 

Habite Jes ruisseaux qui se jettent dans l’Oudon 

(arrondissement de Segré, Maine «et Loire }. 

- Indépendamment des caractères bien tranchés qui 
distinguent cette: espece de ses congénères, sa petite 
taille et sa grande épaisseur seraient seules suffisantes 
pour bien la caractériser. ? 


À. OBLONGUE : Anodonta oblonga ( Millet ). 
( Voyez PI. XIT, fig. 1°) 


Coquille alongée, arrondie postérieurement, bi-an- 
guleuse antérieurement ; valves minces, fragiles, re-. 
couvertes d’un épiderme brun-livide, marquées de 
petites côtes sur leurs parties supérieures et de sillons 
espacés vers la partie inférieure (1); d’un blanc ar- 
genté ou irisé en dedans, avec quelques taches livides. 
Lame cardinale droite, terminée par un léger smus. 
Crochets et sommet excoriés. 

Longueur, 4 pouces; diamètre, 22 à 23 lignes. 

Habite la Mayenne, en Reculée, etc. 

Cette espèce a quelques rapports avec l'Ænodonta 
sulcata de Lam. ‘qui habite les États-Unis, mais elle 
m'a paru distincte. 


(4) Ces sillons n'existent bien que sur les vieux individus. Ils pa- 
raissent en dedans comme en dehors de la coquille. 


(243 ) 


DESCRIPTION 


ET FIGURE DU TRÈFLE A PETITE FEUILLE, 


(Planche xur. ) 


PAR M. DESVAUX. 
Li 


NE possédant plus qu’un seul échantillon de cette 
espèce de trèfle , publiée par nous en 1809, et crai- 
guant de perdre ce seul type à notre disposition, 
d’une espèce qui a été citée déjà plusieurs fois, mais ou 
avec doute ou faussement, parce qu’on ne la con- 
naïssait pas, nous allons en donner une description 
succincte et une figure suffisante pour la reconnaître 
dans quelque partie de la France qu’elle puisse se 
trouver. 

Trifoliunm microphyllum, voy. PI. XHH, ( Desv. 
Jour. Bot. 2, p.316.) radice perenni ; caulibus plu- 
rimis , subrectis, ramosis ; foliolis ovatis, substria- 
tis , tenuê denticulatis , margine ciliato-pilosis ; petiolis 
elongatis, vaginantibus , apicè stipulis lanceolatis ; 
spicis suboblongis , villosis ; calicibus cylindricis , 
sparcé pilosis ; lacinicis barbato-pilosis. Habitat in 
locis sylvaticis Pictavii. 

RACINES vivaces. 

TIGES presque droites, plusieuts ensemble, à ra- 
meaux courts; longues de 9 à 10 pouces. 


17 


(24%) 


FEUILLES à long pétiole, en gaine renflée, glabre. 
à sommet terminé par deux stipules allongées, lan- 
céolées ; entre lesquelles part le süpport des folioles ; 
folioles de 3 à 4 lignes de long, ovales-oblongues, 
striées:; tglabres, à bords pourvuside quelques-longs 
poils. 

FLEURS en épis solitaires ; calice cylindrique à 
longs poils rares, à cinq divisions presque égales , 
longuement ciliées-barbues. 

. plante, que nous-mavons jamais pu retrou- 

, depuis trente-deux ans que nous l'avons re- 
Le dans un bois taillis très-sec, près Poitiers, 
et que nous avons cherchée inutilement à diverses 
fois, a des rapports avec le Trifolium rubens d'un 
côté et un peu avec le Trifolium alpestre , de l'autre. 
Êlle diffère du premier par ses feuilles ovales.et pe- 
tites, par son inflorescence et les poils qui le recou— 
vrent ; elle a encofe moins de rapports avec le Trifo- 
lium alpestre. 


: DU QUARTZ AVENTURINÉ 
ET DE SES GISSEMENS » 


Dar M. Desoaur. 


Nos recherches dans les auteurs ne nous ayant, Trier 
appris sur le gissement “particulier du Quartz aven- 
furiné, nous croyons devoir consigner nos observa- 


(245) 
tions à ‘cet égard : ayant étudié cette variété dans 
divers lieux. 

Lorsque nous publiâmes la minéralogie du dépar- 
tement de la Vienne , en 1804 (1), nous avions ren- 
contré dans beaucoup de lieux ce quartz si agréable 
à l'œil lorsqu’ il'est poli, ‘et qui doït, nous pourrions 
le dire, toute sa beauté à une sorte d’ahtération dans 
sa texture; mais frop nouvellement initié dans la 
science, nous n'avions songé qu’à collecter quelques 
échantillons'et non à étudier l'origine de ce quartz. 
Cette jolie variété, ayant toujours un aspect de cail- 
loux roulés:, il n’y avait pas à douter qu’il n‘appartint 
aux terrains de transport ; et il devait provenir d'an- 
tant plus doin, que, dans les endroits où nous 
Favons trouvé, il n'existait pas dé roches quartzeusés, 
dont lé quartz aventuriné est véritablément un débris. 

Il y a-trois observations à faire sur Île quartz 
aventurmé : comment lefisté-t-il ‘dâns la nature ? 
quelles sont: les causés dés’ caractèrés qu'il offre ? 
et d'où provient-il ? 

Dans de vastes étendues de terrains que noës avons 
remarqués dans le départerfrenit de Ja Vienne, ét dans 
divers ‘endroits de l'arrondissentent dé Saumur , 
terraïs résultant évidemment de transport } soit par 
l'effet de rivières qui ont changé de cours, soit 
par l'effet de l'abandon d'üne partie de l'étendue 
de ce coûrs qui dut être bien plus considérable que 
l'état actuel me le montre, ‘on trouvé mêlée au sol 
et dans une épaisséër d'a mètre ét plus, une grande 


(4) Travaux dé la Société d'Enttiation de Poitiers, pag. 74 à AT. 


( 246 ) 


quantité de quartz roulés , dont un grand nombre, 
surtout ceux qui avoisment le plus la surface du 
terrain, sont plus ou moins colorés en rouge-brun. 
Ces quartz roulés sont enveloppés: d’un, mélange 
de terres de diverses natures , mais ordinairement 
peu favorables à la culture , et. dites terres aigres 
et terres de landes , chargées de fer. oxidé à: l’état 
d'hydrate, et irès-souvent méêlées à des globules 
ou rognons d’oxide terne de manganèse , ou terreux, 
ou pulvérulent. Pour la situation du quartz aventu- 
riné que nous avons étudié,en place, au moyen 
des fossés dont on trouve souvent-ce térrain coupé, 
nons nous sommes assuré quil devait sa teinte rouge 
à l’oxide de fer; et.plus il était près de la surface 
du sol.et plus il offrait une couleur'foncée. Les plus 
beaux, les plus colorés de ces quartz, sont ceux 
trouvés à la surface même du sol. Dans Ja partie 
inférieure de. la couche de terrain de transport qui 
le présente, le quartz aventuriné est incolore ou du 
moins d’un blanc grisâtre , sans aucun indice. de .co- 
Joration. re pt 
D'après cette .«prémmière observation, il .est facile 
de conclure quele quartz.aventuriné-doit son carac- 
tère à Ja nature du.terrain dans. lequel il se trouve 
mêlé ,.et-à la position qu'il occupe .dans ce terrain. 
Sa texture, renfermant beaucoup d’étonnemens ou 
d’interstices dans lesquels les, eaux chargées, d’oxide 
de fer. pénètrent facilement , .ce,même. oxide, de 
jaune qu’il était d’abord , passe, à raison, de la ténuité 
de ses molécules répandues sur une grande surface, 
à l’état d'oxide rouge, par l'effet de l’action con- 


( 247 ) 
tinu de la lumière qui facilite une combinaison plus 
grande d’oxigène. 

Les terrains de transport qui couvrent les pays de 
landes et renferment souvent nos quartz, sont les 
débris d’un ancien sol sur lequel coulaient des eaux 
arrivant des parties montueuses éloignées. Les eaux 
se creusant peu à peu un hit plus bas, diminuant 
dé volame , ont abandonné des débris de roches de 
iransition et primitives, dans lesquelles le quartz 
existe en plus ou moins grande quantité. Ces terrains 
examinés dans l'état actuel des choses, deviennent 
d’une formation inexplicable , si on ne suppose pas 
ces changemens à la surface de la terre. Souvent le 
cours des eaux est si éloigné du point où l’on ob- 
serve les véritables indices d’un antique cours d’eau, 
qu'il faut une répétition d'observations , pour ima- 
giner que l’amas de quartz roulés qu’on a sous les 
yeux ait été transporté par les eaux, tandis que sou- 
vent tout le sol environnant est plus bas sur tous 
les ponts, que celui qu’on étudie. Nos quartz aven- 
turinés, quelle que soit leur position , auront toujours 
été arrachés à des terrains du lom et plus élevés; et 
en roulant par l'effort dés eaux, les angles de chaque 
débris auront disparu, et sous la forme d’an glo- 
bule irrégulier , ie quartz sera venu recevoir d’au- 
ires influences que celles de sa création primitive. 

Nous aurions à expliquer maintenant quelle est 
la nature de structure du quartz aventuriné , et par 
quelle. cause il offre ce grand nombre d’étonnemens , 
cause première de l’accident qui devra en faire une. 
pierre demi-fine recherchée par le joaillier. 


( 248 ) 

Il est certams quartz, mais en pelit nombre, dont 
la cassure présente celle pour ainsi dire du sucre, et 
qui semblerait par cela même être le produit d’une 
cristallisation confuse , celui-ci serait irès-propre à 
recevoir l'accident qui forme le quartz aventuriné, 
cependant en l'étudiant attenlivement, nous croyons 
qu'il n’a aucun rapport avec la formation du, quartz 
aventuriné, et, pour le dire en un mot, nous pen- 
sons que les éfonnemens de ce quartz sont dus à une 
altération. produite par l’action de l'air , et peut-être 
par le concours du froidiet du chaud alternatifs. On 
sait que les joailliers, en exposant. à la chaleur, d’une 
certaine manière, les quartz hyalins taillés, ou cristal 
de roche, et les plongeant dans un liquide froid et, co- 
loré, il s’y forme un très-grand nombre de. glacures, 
gercures on étonnemens, comme on voudra les appeler, 
ils se pénètrent de la couleur de manière à former ce 
qu'on nomme des rubasses dans le commerce, pour 
leur couleur rouge. Nous pensons donc que spontané- 
ment les quartz roulés ont éprouvé unedilatation et un 
retrait particulier, d’où sont nées les gercures, et que 
ces. gercures | pénétrées de. fer oxidé, ont donné au 
quartz, le plus vulgaire, tout le mérite qu’on attache 
ou qu'on a,pu.allacher, surtout.autrefois, à ce qu'on 
nommait ayenturine (quartz aventuriné). Cette pierre 
était anciennement si recherchée que. l'art s’est ap- 
pliqué à limiter; et nous osons assurer qu’à la du- 
reté près, on est parvenu en cela à flatter l'œil plus 
agréablement que la nature elle-même; si, l’on y joint 
le travail du lapidaire, les aveninrines factices l'em- 
portent en, cela sur les ayenturines naturelles que 
nous ayons pu observer, 


(249 ) 


SUR LA NAVIGATION DE LA LOIRE, 


PAR M. DERBIEN, 


Tngénicur en chef du département de Maine et Loire. 


el 


IL y a bien long-temps que l’on songe à rendre 
la Loire constamment navigable. 
Elle est flottable depuis Confolent (Haute-Loire ) 
jusqu’à la Voirie (Loire), sur une 
Jongueur de. . . . . em eee 0 JU, 000 IMÉILOS: 
Elle est navigable imparfaite- 
ment depuis la Moirie jusqu’à l'O- 
céan , sur une longueur de. . . . 763,937 mètres. 


SiNAp line Mir ER mire te 


Longueur tolale:moitse : 798,937 mètres. 
a Er 

Ou 200 lieues métriques de 4,000 mètres. 

On s'occupe d'un canal latéral à la Loire, dans 
la partie de ce fleuxe au-dessus d'Orléans. 

Depuis Orléans } jusqu'à la mer, il y aurait avan 
age à améliorer la navigation de la Loire, dans 
son propre lit; ei je pense que depuis Orléans jus- 
qu'à Nantes, un canal latéral devant coûter beaucoup 
plus que les droits de navigation que l'on y perce+ 
vrait ne pourraient produire, ne serait exécutable 
qu’au moyen des fonds de l'Etat, et que les cré- 
dits annuels alloués pour la navigation intérieure du 
Royaume, n'étant pas en proportion avec les be-- 


( 250 ) 
soins du service, l'exécution de ce canal serait en- 
core indéfiniment ajournée. 

En outre, cette exécution obligerait à enlever à 
l'agriculture des terrains précieux, entre Orléans et 
Nantes, tandis qu’une navigation établie dans le lit 
même du fleuve, conquerrait sur ses deux rives des 
sables qui ne tarderaient pas à devenir très-productifs. 

Dans les temps les plus secs, il y a toujours dans 
la Loire, entre Orléans et la mer, plus d’eau qu'il 
n’en faudrait pour obtenir une navigation constante ; 
mais la trop, grande largeur du lit, la mobilité des 
sables que les moindres crues déplacent et transpor- 
tent, forment des barres, dont la position varie 
continuellement, et qui sont, dans la saison des 
basses eaux, un obstacle à la navigation. 

On a pensé qu’en rétrécissant le lit de la Loire , on 
pourrait la rendre navigable, en tout temps; et pour 
obtenir ce résultat, on commença, entre Nantes et 
Paimbœuf, en 1755, l'exécution de digues submer- 
sibles , qui fut bientôt abandonnée. 

Ce système fut repris en 1825, et essayé en amont 
du confluent de la Vienne dans la Loire, près du vil- 
fige de Chouzé (Indre et Loire }; il n’a pas été con- 
ünué. 

El est bien évident que si lon pouvait, au moyen 
de digues longitudinales , former un lit invariable à la 
Loire, on'auräit résolu le problème de sa navigation 
Constante ; mais 1l est également reconnu que l’exé- 
cution de ce système coûterait plus que celle d’un ca- 


nal latéral, et que conséquemment il doit être aban- 
donné. 


( 251 ) 

On a proposé de construire des digues transversales 
perpendiculaires au cours de la Loire , au moyen des- 
quelles on établirait, sur une des rives, un lit conve- 
nable ; ou d’attacher ces digues à l’une et l’autre rives, 
afin de former, au milieu du fleuve, un chenal suffi- 
sant pour la navigation. 

On emploie depuis long-temps ce système pour les 
rivières torrentielles, qui coulent au pied des Alpes. 
Mais, dans ce cas, il n’est question que de faire creu- 
ser au torrent un lit constant, et il est nécessaire de 
remarquer que le fond des vallées alpines , formé par 
des alluvions successives , est généralement moins ré- 
sistant que les rives presque toujours composées de 
roches plus ou moins dures. 

IL n’est pas question, dans les vallées alpmes, de 
rendre navigables les rivières torrentielles ; le but que 
l'on veut attemdre est de Zimiter les ravages de leurs 
eaux, et de conquérir, sur le lit qu’elles occupent, la 
plus grande étendue possible. 

La vallée de la Loire ne ressemble en rien à celles 
dont je viens de parler. Depuis Orléans jusqu’à Nan- 
tes, la Loire coule généralement sur un fond qui pré- 
sente plus de résistance que les rives.Celles-c1 sont com- 
posées de terre végétale ou d’un sable fin que les eaux 
entraînent avec la plus grande facilité. Le fond, au 
contraire , est formé de roches plus ou moins dures, 
de gravier plus ou moins gros, beaucoup plus résis— 
tans que les bords. 

Ïl résulte de ce que je viens de dire, que les bar- 
rages transversaux que l'on éleverait , soit pour reje- 
ter le chenal sur une rive, soit pour le fixer au miheu 


( 252.) 


dut, ne pourraient conduire à un résultat avanta- 
geux, puisqu'ils n’empêcheraient pas les rives d'être: 
dévorées , dans le sens de la longueur du fleuve, par 
ses propres eaux qui irouveraient latéralement une 
résistance beaucoup moins grande que dans le fond 
du lit même, surtout au moment où elles s’éleveratent 
au-dessus du plan supérieur des digues submersibles. 

Ainsi , non-seulement, 1l faudrait établir le chenal 
sur une des rives ou dans le milieu du fleuve, 
mais il faudrait encore, au moyen de travaux, s’op- 
poser à la corrosion de ces mêmes rives. Autant 
vaudrait-il faire des digues longitudinales, pour en- 
caisser le fleuve, et j'ai pensé, avec tout le monde, 
que ce parti serait ir op coûteux pour être avanta- 
geusement pratiqué. 

Je ne parlerai pas de l'effet qui serait produit 
par les digues attachées à chacune des rives, sur la 
navigation transversale ; j'ai dit qu’un pareil système 
me paraissait impraticable, mais s’il était mis à exé- 
cution, que de plaintes ne s’éleverait-il pas de la 
part des populations, riverames de la Loire qui ne 
pourraient plus, d'une rive à l’autre, communiquer 
facilement entr’elles! 

L’essai fait à Chouzé, et dont j'ai parlé ci-avant, 
ne prouve rien en faveur du système. Les épis sont 
tous attachés à la même rive, et le chenal est porté 
sur la rive gauche du fleuve dont le sol offre une 
grande résistance. L'effet chèrement obtenu dans 
celte localité exceptionnelle est cependant loin d'être 
satisfaisant. 


Je conclus de ce que j'ai dit plus Due 


1. Que le système de digues transversales per- 
pendiculaires au cours des eaux, n’est pas appli- 
cable à la Loire dont les rives sont: généralement 
moins résistantes que le fond du lit. 

2.9 Que ce système n’améliorerait pas la naviga- 
tion, dans la direction du fleuve, et serait nuisible à 
sa navigation. transversale ; 

3.° Que les digues submersibles proposées ne pour- 
raient avoir d'effet utile, pour la navigation, qu’en 
se liant à une défense des rives, combinaison qui 
deviendrait aussi coûteuse que des digues longitu- 
dinales. 

Que faudrait-il donc faire, pour améliorer, dans 
le lit même du fleuve, la navigation de la Loire ? 

Je crois que l’on obtiendrait le résultat désiré en dé- 
fendant, par des plantations, des enrochemens, etc., les 
rives des îles et les bords du fleuve. C’est en les dé- 
vorant, c’est en transportant çà et là les terres qui 
les composent, que la Loire fait varier sans cesse 
son propre hit, que la moindre crue de ses eaux 
en, modifie la forme et la direction, et que le che- 
nal de la veille n’est plus le même que celui du len- 
demain. 

Supposez que les bords soient rendus inaitaqua- 
bles, que les îles soient défendues si.elles sont. uliles, 
ou détruites si elles sont nuisibles, et bientôt les 
sables mobiles qui. encombrent le lit de la, Loire, 
repoussés jusqu'à la mer, ne seront plus un. obs- 
tacle à la navigation. 

D'un autre côté, encouragez les. plantations, sur 
les rives du fleuve, suivant des alignemens déter- 


(254) 


minés , venez au secours des propriétaires qui vou- 
dront rétrécir par des plantations , des enrochemens, 
etc., son lit trop étendu, et vous obtiendrez, dans 
un délai assez court, un bon résultat, à peu de 
frais. 

Mais, pour obtenir ce résultat , il faut créer une 
police sévère, il faut des loix appropriées aux lo- 
calités, et je regarde comme indispensable d’adop- 
ter, dès aujourd’hui, pour la Loire, un système 
uniforme et particulier qui, en favorisant la navi- 
gation, étende et encourage les travaux qui ont 
pour but de rétrécir, suivant. des limites détermi- 
nées, le lit du fleuve. 

Ce but ne saurait être atteint que par la créa- 
üon d’une commission centrale analogue à celles 
qui furent établies à Strasbourg, sous le nom de 
Magistrat du Rhin, par décret du 27 octobre 1808, 
et à Turin, sous celui de Magistrat du P6, par décret 
du 2 février 18rr. 

J'avais déjà émis la même opinion, en 1817, 
dans une commission dont je faisais partie, et qui 
avait pour objet de présenter un travail complet 
sur la navigation de la Loire et des rivières y af- 
fluentes. 

Ce travail demandé par lettre de M. le Ministre 
de l'Intérieur, du 8 février 1817, a été clos et ar- 
rêté, à Angers, le 1.er septembre de la même 
année, et envoyé à Paris quelques jours après. 

Lorsque l’on sera parvenu à maintenir constam- 
ment, dans toutes les saisons et dans les parties 
les moms profondes du lit rétréci de la Loire, #» 


( 255 ) 


tirant d'eau de un mètre (3 pieds), le problème 
de sa navigation constante sera résolu ; Car, au moyen 
de remorqueurs à la vapeur, on pourra naviguer , 
sur la Loire, quelle que soit la direction des vents. 

Je suis persuadé que l’on arriverait à ce résul- 
tait, au bout de quelques années ,en mettant à exé- 
cution le système que je viens d'expliquer. Ce se- 
rait un avantage immense pour le commerce, des 
départemens traversés par la Loire, et principale - 
ment pour les villes de Nanies , d'Angers, de Sau- 
mur, de Tours, d'Orléans.et de Paris. 


RECHERCHE 
DU PLAN PRINCIPAL DES MOMENS 
Par La @héorie 
DE MAXIMIS ET DE MINIMIS, 


PAR M. PENJON, 


Professeur, Chevalier de la Légion-d’Honneur , Licencié ès-sciences, 
-ete., etc. (4). 


POUR rendre plus claire la solution de la ques- 
tion que je me propose, je rappellerai i ici briève- 
ment les définitions et les principes dont on se sert 
continuellement en mécanique. 


(1) L'intérêt de ce Mémoire sera de beaucoup augnienté , lorsqu'on 
saura que M. Penjon,, ayeugle depuis l’âge de 18 mois, s’est élevé 


( 256 ) 


On détermine un point quelconque de l'éspace, 
par ses distances à trois plans rectangulaires qui se 
rencontrent en un même point; ces distances se 
nomment les coordonnées du point, les trois plans 
sont les plans des coordonnées , leurs intersections 
en sont les axes et leur point de rencontre en-est 
l'origine. 

Cela posé, pour déterminer le mouvement d’un 
. système de corps; on a ‘entre les coordonnées de 
ces corps, leurs différentielles et le temps, Six équa- 
tions, dont trois sont relatives au moüvement de 
translation du système, et les trois autres à son 
mouvement de rotation autour d’un point fixe. 
Nous considérerons ‘Senlemient ces trois dernières , 
et nous supposerons que l’origine est le point be 
autour duquel se meut le système. Or, la force de 
chaque corps étant, comme à l'ordinaire, le pro- 
duit de sa masse par- a vitesse dont il est animé, 
et le moment de \cette force ‘étant le produit de son 
intensité par la perpendiculaire menée de l’origine 
sur sa direction ; cé "moment ne sera autre chose 


presque de lui-même et à traverstes obstacles apportés à son instruc- 
tion, à la connaissance des hautes mathématiques , qu'il a professées 
avéc distinction. La Frapée peut donc opposer à l'Angleterre un nou- 
veau “Saunderson;, qui posséde ‘en outre ane instruction ‘tès-variée 
dans les sciences naturelles et les lettres. Au reste, celui qui a dit: 

« L'homme n’est pas fait pour mesurer des lignes et des angles; 

» son âme est trop grande, son esprit trop vaste et sa vie Lrop 
».Courte; pour l’employer à -de si petits objets, » me pont Être tn 
esprit ordinaire et est bien aûü-dessus des-connaissances propres au 
simple mathématiciens (Note du Coniité de Rédaction \: 


(, 2297 4} 
qu'une aire qu’on pourra projeter sur chacun des 
plans coordonnés ; il en résultera donc trois sommes 
de projections qui seront renfermées dans les in- 
iégrales premières des équotions dont nous venons de 
parler. 

Mais il existe un quatrième plan qui est tel que, 
si l’on projette chacune de ces trois sommes sur 
ce nouveau plan, il en résultéra une somme plus 
grande que si on les projetait sur tout autre. C'est ce 
‘plan qu’on nomaïe le plan principal des momens. 

Laplace, qui l’a découvert le premier, l’a trouvé 
an moyen de ces deux conditions , savoir : S1 l’on 
projette les ‘rois sonimes -dout nous avons parlé, 
sur deux plans perpendiculaires à celui-ci, il en 
résultéra deux sommes, dont chacune sera nulle , 
et fourniront par conséquent deux équations ‘au 
moyen desquellés'on détérnnifiera la direction du plan 
principal. C’est à peu ‘près de la même manjèrerque 
M. Poisson y est parvenu. Mais, au lien d'employer 
es” formules d'Euler pour la transformation des 
coordonnées, 11 s'est'servi des moyens ordinaires 
et des six équations de condition qui en sont a 
Suite, équations dont il-a fait un usige remarquable 
dans le caleul du mouvement de roiation. M: Poin- 
Soi, par sa théorie des couples , à résolu le même 
problème, en considérant le plan principal comme 
étant celui du couple résultant de tots les’ édüples 
du système. Sans’ employer ‘adcurié de ées ‘mé- 
thodes , ‘j'y -suis parvenu per;la seule condition .que 
les trois sommes de momens projetées sur ce plan 
donnent une somme maximum. La solution que 


( 258 ) 
celte condition m'a fournie, m'a paru si directe, 
si claire, si courte, que j'ai cru qu'elle ne serait 
pas indigne de vous être présentée. 

Désignons par », la somme des projections des 
momens sur l’un des trois plans coordonnés, sur 
celui des yz, par. exemple. Désignons de même, 
par #7, et par »//, les quantités analogues sur 
les plans des xz et des y, et par a, b, c, les 
angles que fait un plan quelconque avec ceux des 
yz, +2, Zy Enfin, représentons par S la somme des 
projections de », m”, m/”, sur le nouveau plan. 
On a, comme on sait, 


S— m7 cos a+ m° cos b 4m!" cos c (z). 
On a de plus entre a, &, c, l'équation de condi- 
ton : 

cos?a+cos b+cos cc: (2). 
Pour que S soit un maximum, il faut que la 
différentielle en soit nulle, et par conséquent, en.fai- 
_sant attention que &, à, c, sont les seules varia- 
bles, il vient l m4 

m da sina+m’ db sinb+ ml/dcsinc=0o (5). 

Mais, à cause de l'équation (2), on a 
da sin a cos a + d bsin bcos b + dc sin ccosc—o(4). 

Multipliant l'équation (3) par cos a, et l'équation 
(4) par æ, et les retranchant ensuite, . j'aurai 


(m/ sin bcos a m sin bcos b) db + (ml! sinccos 
a —- mn Sin CCos cC)dcZ=0o (5). 


( 259 ) 
Mais, maintenant, les deux différentielles 4 4 et dc 
étant entièrement arbitraires , il faudra qu'on ait 


m’ cos a m cos b— 0, m°/ cos a—m cos c — 0, (6). 
d'où l'on tire 


ml cos a 
LOS RES SE — 


(7); 


// 
cos e= 7 (8). 
712 


Substituant dans l'équation (2), et chassant le dénomi- 
uateur 72°, 1l vient 


(m°+ mm?) cos" a—m* (9), 


5 m 
d'où cos a (10). 
Vm +74? 4e ont 


Mettant cette valeur de cos a dans celle de cos &et. de 
cos c, il vient 


/ 
cos b — … 
V'(m°+m + mt/?) 
Ë (x1). 
Im 
COS CE 
V'(m°+ mme) 


Si l'on substitue dans l'équation, (1) les valeurs. de 
cos a, cos D, cos c;:0n aura ; toute réduction faite, 


S= Vm +m'+mf (x). 
18 


( 260 }) 


Nous pourrions maintenant nous assurer que S est 
un maximum, en en cherchant la différentielle seconde ; 
mais, comme nous avons un autre moyen d'y parvenir 
et qe ce calcul serait un peu long, nous ne nous y 
arrêterons pas. 

Concevons un nouveau plan et d alquue par S” 
la somme des projections de 7, m7, m°/, sur ce plan. 
Soit a?, &”, c?, les angles qu'il fait avec ceux des coor- 
données, on aura-comme précédemment 

S/—1m cos a/+ m7 cos b+ ml cos el (13). 
Mais il sera facile de tirer des équations précédentes 


m—S cos a, mS cos b, ml—=S cos c (14). 


Mettant pour 2, ml, m1, leurs saleurs dans L équation 
(25), il vient 


S—S (cos ‘a cos alæcos b cos Hrnbé ccos cl)(15). 


Où ,'cos a cos alle cos b'cos ble cos c cos c'est le 
cos de l'angle que le plan nouvellement introduit fait 
avec le plan principal des momens : si donc nous dési- 
gnons cet angle par &, onaura 


S7=S cos à. 


Quand « sera nul, c'est-à-dire, . quand le plan dont 
nous venons de parler coïncidera avec le plan principal, 
on aura S=$/; lorsque + sera un: angle droit ,1c'est- 
à-diré, pour tout plan perpendiculaire auplan principal, 
on aura 


S2—" Oj ” 


(261 ) 


Ge qui démontre les deux conditions d'où sont partis 
MM: Laplace et Poisson, pour trouver le plan princi- 
pal des momens. Enfin pour toute autre valeur sde &: 
S’sera plus petit ques et par conséquent S est ansmaxi- 
mum. On peut aussi conclure ‘de:ce calcul :que lorsque 
m, m/, m1, seront des constantes, le plan principal des 
momens consérvera toujours la même direction quelque 
soit le mouvement du système, et le moment principal 
restera toujours invariable. ( Bien entendu qu'on ne 
changera pas le centre des momens. ) 


Ainsi dans notre système planélaie, oùles corps ne 
sont sollicités que par leur attraction mutuelle et par une 
force dirigée vers le centre du soleil, centre qu'on peut 
prendre pour origine, le plan principal des momens,ne 
changera pas de direction et le moment principal restera 
le même. Done, si l’on y rapporte les :corpsidece,sys- 
ième, deux des trois quantités 72, m/, m1l, deviendront 
nulles, :ce qui-rend.le calcul beaucoup: plus facile ebpar- 
conséquent donne de l'importance àcette recherche. Au 
reste, la direction du plan principal ne dépendant que 
de cos a, cos b;:cos ©, on voit qu'elle ne varierait pas 
si les quantités 7, m/, m1l, étaient de la forme 0, u%, 
ul, L, uT. 11 étant des constantes’et9 une fonction 
quelconque du temps. Quant au moment principal , il 
serait proportionnel-à set par conséquent varierait avec 
le temps : remarque qui, ce me semble, na point en- 
core été faite. | 


Pour compléter la théorie du plan principal, j'en vais 


(262 ) 


chercher la position par rapport à un système quelcon- 
que de forces, et en supposant que ce plan passe par 
l'origine. 

Onvoit, d'après les valeurs de cos a, cos b, cos €, 
que l'équation de ce plan sera 


m x mil y + mr 0. 


Or, ou le système a une résultante, ou il se réduit à 
deux forces égales parallèles et de sens contraire, ou il 
peut être remplacé par deux forces inégales et dirigées 
dans des plans différens, ee qui donne lieu à trois théo- 
rêmées que nous allons démontrer d'une manière rigou- 
reuse, quoique les deux premiers aient été regardés jus- 
qu’à présent comme évidens, et qu'il ne paraisse pas 
qu'on aït remarqué le troisième. 

1° Si le système a une résultante R, le plan principal 
renfermera cette résultante. 

Soit z?, yl 21, les coordonnées de son point d’appli- 
cation, X, Y, Z, ses composantes ; on aura 


m 24 ml y + m'lz=0; (©) 


ei les équation de la résultante seront 


Tri Le) ; 


J—H= Ta 7). 


( 263 ) 


L'origine étant le centre des momens, l'équation d'un 
plan qui passe par l'origine sera de la forme 


Az+By+z—o. 


Or, pour que ce plan renferme la résultante, il faut que 
son équation soit satisfaite quelque soit z, lorsqu'on y 
mettra pour x et pour y leurs valeurs tirées des équa- 
ons de cette droite. Ces valeurs sont 


Substituant daus l'équation du plan, il vient 
(AX+BY+2Z) zæA m=Bm—=o. 


Pour que cette équation ait lieu quelque soit z, il faut 
qu'on ait 


Br 


On tire de la seconde À = } 
| ml 


substituant dans la première , on aura 
B(mX+mY)+mLTo, 
mais , d'après l'équation (x), on a 


mm X te MINE ee MAL, 


( 264 ) 
d'où BmlZ=mlZ 


ml 


TT Substituant dans la valeur de À, il vien- 
72! 


donc B= 


dra À Le mettant pour À et B leurs valeurs dans 
mi 


l'équation du plan, on aura 
mr+myt+mlzZo, 


équation qui est la même que celle du plan principal, 
quand on suppose que ce plan passe par l'origine. Donc 
le plan qui contient la résultante-et le centre des momens 
coïncide avec le plan principal. 

2.° Si le système se réduit à deux forces égales paral- 
lèles et de sens contraire, ce que M. Poinsot, appelle 
un couple, le plan principal contiendra ce couple, ou 
du moins lui sera parallèle, Désignons par R et R7les 
deux forces; X, Y, Z, étant les composantes parallèles 
aux axes pour la première, et X7, YZ Z7, étant celles 
de la seconde. Si,, en ‘outre, nous représentons par 
m, ul, m7, les quantités analogues à 7, m1, ml, 
pour le système dont la résultanieest R;etpar ;, 254, 
celles qui se rapportent à R?, il est facile de voir qu'on 


a X1=—X, VI He Z, 


mX+uY+urLTo, (a) 
y X +3 Y +227. 4 


Soit 47 + by 4 z 4e d— o l'équation d'un plan, on 


( 265 ) 

verra par le théorème précédent que, pour qu'il passe 
par la première droite, il faudra qu'on ait 

Z+aX+6Y—o, (8) 

a ul—bu+dTo. (c) 
Pour qu'il passe par la seconde, on aara, outre l’é- 
quation (2) 

a /+6,+ do. (e) 
Retranchant l'équation a de l'équation (c), et far- 
sant attention que p.27 etui + 


bm 
mi 


y2= m1, on aura a ml—bm —o; d'où a 


Substituant dans l'équation (2) et faisant attention que 
les équations (æ) ajoutées donnent 


mX+mY+mlL=o, onentire à — 


mettant cette valeur de 8 dans celle de a, il vient a— 7 


Enfin substituant pour a et à leurs valeurs dans l'équa- 
tion du plan, on trouve 


m + my ml 24 mdr 0 ; 


équation d’un plan parallèle au plan principal; et, 
comme on peut prendre le centre des momens où l'on 
voudra, en le prenant dans le plan du couple, le plan 


( 266 ) 


principal et le dernier se confondront, ce qui démon- 
re le principe d'où M. Poinsot est parti. 

3.0 Supposons maintenant que le système ait deux ré- 
sultantes non parallèles et irréductibles à une seule, on 
pourra le considérer comme composé de deux systèmes 
qui auront chacun leur plan principal. Cela posé, je dis 
que le plan principal du système entier renfermera l’in- 
tersection des plans principaux de ces systèmes partiels. 
En effet, conservant toutes les notations du théorême 
précédent, et observant seulement qu'on n’a plus X77 
XF V7 V7 OT les équations des plans 


principaux de ces deux systèmes seront 


pa tuly Hz To, 
] Up (d). 
CO Pos mo V +) 0; 


Mais, ces équations ayant lieu en même temps, elles 
représenteront l'intersection de ces deux plans. Si on les 
ajoute on trouve 


mimytmlzo, .(e) 


ce qui est l'équation du plan principal de tout le système. 
Or, les valeurs de x, y, z, qui sausferont à la fois 
aux équations (4), satisferont aussi à l'équation (e). 
Donc cette intersection se trouve dans le plan principal. 


( 267 ) 


Le Chevalier 


DE LATOUR-LANDRY, 
ET 
QUELQUES RÉFLEXIONS SUR LE MOYEN AGE, 


Par M. BLorpier-LANGLOIs. 


NOUS nous plaisons à remonter , ou, pour parler 
plusexactement , à descendre au moyen âge; non 
qu'ilsoit aimable, mais parce qu'il pique éminem- 
ment la curiosité, qu'il est libre d'imitation , qu’il est 
lui; qu'il est sans aucun alliage. Cependant aurions- 
nous raison de l'appeler le bon vieux temps , l'âge d’or 
de la France ? Ce n’est pas assurément notre avis ; et; 
sijamais la France eut un âge d’or , nous sommes bien 
loin de penser que ée soit là qu'il faille le chercher. 

On'connut le moyen âge, je ne puis en douter, 
dans:les-siècles qui le suivirent ; et toujours, en le 
peignant ;‘on lui prêta les couleurs du siècle où lon 
vivait. Marotile connut , puisque nous lui devons une 
édition du romande la Rose, et Marot est peut-être 
celui qui lui donnale premier le nom si fameux du 
bon vieux temps. 1 

»Onconnaissait le moyen âge au siècle de Louis XIV; 
on savaitau juste ce qu'étaient ces chevaliers et leurs 


19 


( 268 ) 


jeux sivantés, mais il fallait leur donner la nuance 
du siècle. Attacher les descendans des preux à l’image 
de leurs illustres maïs grossiers ancêtres ; il fallait em- 
bellir la peinture qu’on en faisait, et déguiser la rus- 
ticité des âges passés à l’élégance et à la politesse de Ja 
cour du prince le plus te et le plus poli qui 
eût gouverné la France. Tout dut subir la loi de plaire 
au souverain. Racine y soumit son génie, même en 
traitant des héros de la Grèce fabuleuse ; M:11e de Scu- 
déry crut peindre les premiers temps de Rome dans 
sa Clélie ; la Calprenède, la monarchie française à son 
berceau dans son Pharamond: et c'était toujours la 
cour de Louis XIV : conversations quintessenciées , 
analyses:sentimentales.,, amoureuses langueurs ;0des- 
criptions interminables; que fronda Boileau dans: ses 
satires et dans, ses ingénieux dialogues des. Héros de 
roman, mais qui ne Béphdiéaient pas à ce-X VII ssiècle, 
siècle factice qui fut tout l'ouvrage de Louis, XIV, siè- 
cle de-cérémonial., de tendresse. et de: pédantisme; 
siècle-de génie mais où tout fut incliné, excepté La 
Fontame::aussi-qu’auraient dit les Clisson etles:Du- 
guesclin:; dont les tournois étaient sirudesset; si!sou- 
ventensanglantés ; de-ces élégans carrousels.dont tout 
Fhéroïsme avait'pour programme les tendres wérs:.de 
Quinault et les quatrains galans de Benserade ! T 
L’enchantementcessar Louis XIWeut là doüleur. d'y 
survivre lui-même. Le régent amenarle goût d’anpo- 
sitif quine tournamnullement an° profit des {peintures 
du moyen âge , et bien moins encore“aux-bonnes 
mœurs de Ja: É alai Cette espèce-de saturnales de no- 
ire histoireet de‘notre littérature ne se reproduira pas, 


(269 ) 


je l'espère. On avait bien assez d’exploiter le présent, 
sans se jeter aux siècles des guerres saintes ; le régent 
et son ministre n’étaient pas hommes à soupirer trop 
long- -temps pour leurs belles, comme on dit très-gra- 
tuitement que tel fut l’usage au moyen âge; moins en- 
core étaient-ils hommes à se plaire à la vie simple des 
vieux châteaux , et aux joûtes périlleuses des paladins. 
Si l’on emprunta quelque chose aux temps passés, ce 
fut J'allégorie , gaze transparente que l’abhé:de V'oise- 
non et Crébillon le. fils s’avisèrent: d'étendre sur. les 
mœurs déplorables de leur temps. 

Le XVIIL ‘siècle fit mieux que de Pa des ridicule- 
ment le moyen âge; il l’étudia , ‘et ne nous laisse rien 
à désirer sur ce sujet. Je ne parlerai pas des Sainte- 
Palaie, des Millot, des, Legrand-d’Aussi, qui l’ont 
ressuscité pour nous par, ee travaux sur les Trou- 
badours et les Trouvères. 

LeXIX..° siècle s’est jeté à corps perdu dansle moyen 
âge. Je veux bien croire que son intention a été d'être 
imitateur fidèle ; mais, si trop d'amour pour le siècle 
de Eouis XIV fit composer des tableaux mexacts du 
temps passé, trop de dédain, je dirai plus, trop de mé- 
pris’ pour le nôtre, n’aurait-il pas entraîné quelques- 
uns dé nos écrivains dans une érreur pareille ? faut-il 
donc que toujours; la passion conduise notre plume, 
et que nous ne: parliüns jamais des morts qu’en affec- 
tion ou en haïne des vivans ! Nous ne ARADARONS, pas 
de: ballades où l’on prétend-reproduire le moyen âge ; 
ballades pieuses ; ballädés d'amour ; ballades de cheva- 
lerie, ‘dans an stÿle qui voudrait être antique et qui 
n’est que mais, et où l’on s’imagine , en nes albums 


(270 ) 


couleur de rose et ornés de délicates vignettes, repré- 
senter au naturel la tendresse . la courtoisie, la valeur 
et surtout la piété de ce qu’on nomme le bon vieux 
temps. 

Un écrivain, des plus propres à nous en donner 
une idée qu’on ne contestera pas , est le chevalier Lan- 
dry de la Tour, Angevin qui vivait au XIV siècle (r), 
dont Bodin ne dit que quelques mots dans la Biogra- 
phie du Bas-Anjou , et dont un des ouvrages va être 
quelques instans le sujet de notre examen. Je dois à 
la Revue Britannique, avril 1831, une partie de ce 
que je transmets ici; et, comme cette collection pé- 
riodique s’applaudit des renseignemens qu’elle a ob- 
tenus sur le vieux Landry de la Tour, à plus forte 
raison devons-nous épronver quelque désir de voir 
inséré dans nos mémoires un choix de ces renseigne- 
mens. 

Sans entrer dans aucun détail sur le chevalier de la 
Tour , la Revue nous apprend qu’en 1380, il parut 


(4) Quelque. peu ‘important ‘que! soit, dans!{cette. dissertation} le 
chevaliér, de la Tour, comme rien n’est plus. naturel et, plus, excu- 
sable que l’on soit de son pays et de son siècle, j'espère que per- 
sonne ne trouvera déplacéé ici la note que j’emprunte à un savant 
rapport qui fut fait de mon discoursà la Société. P 

« Une famille respectable! d'Anjou , les Maïillé;; porte encore,lenom 
de la Tour-Landry. Élle avait-droit de lever, bannière ; elle,est con- 
nue comme! souche des marquis de Maillé de la Tour-Landry, ct 
des comtes ‘de Maillé-Brézé; ét remonte à Hilduin/de Maïllé ,‘ dont 
on retrouve le nom dans wne chaïte:de donation faite,à Aubert ; abbé 
de Marmoutier, en 4087. Elle eut un chevalier du Temple: en 4417 ; 
qui fut connu par ses exploits , et un autre chevalier qui, en 4418, 
était maître d'lôtel de Charles VIL5 


(21) 


une traduction allemande de son livre , destiné à ser- 
oir d'instruction à ses filles. Il yen eut nne traduc- 
tion anglaise par Guillaume Caxton, en 1484, sous 
ce titre : « Le chevalier de la Tour traduit du français 
en notre langue maternelle, par moi W. Caxton; 
imprimé à Westminster , le dernier jour du règne de 
Richard IT, r vol. àx-fol. (1). 

Une autre traduction anglaise se trouve parmi les 
manuscrits de la bibliothèque harléienne, n.° 764, 
sous un titre plus moderne, puisqu'il porte la date 
du règne d’'Edouard VI; mais je trouve dans ce titre 
ces mots : éprimé par Caxton. Si c’est le même ou- 
vrage , pourquoi le rédacteur de l’article de la Revue 
dit-il que, pour son travail, c’est de la traduction 
manuscrite qu'il s’est servi, comme étant d’un style 
plus ferme et plus pur, et mélé de gallicismes nom- 
breux2 C'est, ajoute-t-il, un échantillon de la prose 
anglaise à cette époque reculée, où les mœurs natio— 
nales de la France et de l'Angleterre étaient à peu 
près identiques. Ici, nouvel embarras. Que parle-t- 
il de ces mœurs identiques de l'Angleterre et de la 
France ? tout au plus cela convenait au siècle de 
Caxton, où la France, depuis cinquante ans à peine, 
était affranchie de toute influence anglaise. Je ne 
croirais même à cette identité parfaite , que s’il s’a- 


(4) Voici le titre exact de l'édition de Caxton , tiré de la Revue bri- 
wannique; il est remarquable par l'ancienneté du langage et de l’or- 
thographe. «The booke whiche the Knight of the Toure made to the 
enseygnement and teching of his doughtres, translated oute of the 
frencshh into our maternall énglishe tongue byme’ W.Caxton, the 
first yere of the regne of kinge Richard thyrd. 


(272) 
gissait d’une traduction qui se rapportât au temps du 
chevalier de la Tour, temps fameux:par les démêlés 
des maisons de Montfort et de Blois pour le duché de 
Bretagne ; époque désastreuse des triomphes de 
l'Angleterre sur la France, à Créci et à Poitiers: C’est 
alors , c’est dans cette luite longue et sanglante , que 
les mœurs purent se mêler; mais, je le répète, cela 
ne peut se dire exactement du règne de Richard IT, 
(1484), n1 surtout de celui d'Edouard VI (1547). 
Je pourrais donc conjecturer que le manuscrit de la 
bibliothèque harléienne serait du XIV: siècle, et que 
le titre seul, plus moderne, serait celui qu’y aurait 
attaché la personne qui en aurait fait le dépôt, sous 
le règne d’Edouard VI. Quoiqu'il en soit de ces obs- 
curités, je dois trop à l’article de la Revue Britanni- 
ue, pour y insister davantage. 

Un exemplaire, én français je le pense, et 
que je voudrais bien connaître, imprimé à Paris l'an 
1514, par Guillaume Eustace, ix-fo/. en gothique, fut 
jugé assez curieux pour que, dans la vente de la bi- 
bliothèque Mackarthy, ii y a quelques années, il fût 
vendu 615 francs: 

Si la somme d'argent à laquelle fut Dérté un ou- 
ei = en atteste le mérite, jé puis encore mentionner 

1, quelle que soit la sécheresse de pareilles remar- 
pe qu'un exemplaire de l’édition de Caxton a 
été vendu à Londres 105 guinées , qui valaient, dans 
le temps 2,630 francs, et qui en vaudraient actuelle- 
ment 2,770. 

Avant de passer à l'ouvrage. que..le chevalier com- 
D°Sa pour l'instruction de ses filles, je nommerai ce- 


(273 ) 

Jui dont la Revue ne dit rien ; et que Bodin se borne 
àvciter *il'est intitulé le Guidon des Guerres ; et il se 
trouve à ‘la fin du volume imprimé par Eustace en 
1514. 
- Le goût du moyen âge fut l’allégorie. Il est aisé 
d’en trouver la cause dans l’état de sujétion où ‘les 
peuples étaient tenus alors, et dans les mille abus 
qu'ils avaient à supporter, mais qu'ils se sentaïent 
aussi quelquefois disposés à fronder. Les drames m- 
formes dé ces temps étaient presque tous des allégo- 
ries ; beaucoup de petits poèmes, de fabliaux étatent 
allégoriques; on connaît ce long et ennuyeux roman 
de la Rose , qui occupa successivement la vie de deux 
poètes du XIIL:siècle. Ce goût subsistait encore à 
la fin du XV, et au commencement du XVI=Æ; nous 
en avons des exemples dans plusieurs productions de 
notre duc René ,'et dans des tableaux mouvans dont 
Angers amusa François Le', lorsqu'il vint visiter cette 
ville avec la reine Claude, fille de Louis XIL (1): 
Eh bien! contre l'usage de son temps, on ne trouve 
dans le livre’ de notre angevin ni allégorie, ni para- 
bole, à moins que ce né soit comme citation , et pour 
servir d'autorité à ses argumens. C'est la vie des chä- 
teaux , telle qu'elle était en Anjou, et avec toute son 
ingénuité. 

Le chevalier Landry avait perdu une femme qu'il 
aimait ; il va rêver un soir sous un grand arbre de 
son jardin. Ses trois filles , qui s'étonnent de ne le 


(4) F. Bourdigné et Dreux du Radier, Récréations historiques ; 
1.1, p.270. | m4 


. LC 

pas voir revenir, vont au-devant de Jui. A leur aspect 
son cœur paternel est.ému ; iksonge à la destinée in- 
certaine et souvent malheureuse des femmes. « Que 
deviendront mes filles ? quels conseils, quelle éduca- 
tion leur donner, pour les prémunir contre. les dan- 
gers qui les menacent ? » C'est ainsi que débute lou- 
vrage. On, ne pouvait imaginer une introduction. plus 
naturelle et plus. touchante. Mais aussi le secret-du 
bon Landry de la Tour lui échappe, sur la chasteté, 
sur la délicatesse prétendue de ces temps chevaleres= 
ques. ÎLen savait, je pense , quelque chose: ete l’en 
croirai plus que je n’en croirais Messieurs de Château- 
briand et de Marchangy. 

Landry va même jusqu’à ne pas dissimuler qu’il ne 
valait pas/mieux, que. les autres gentilshommes ses 
contemporains. «, (Jue l’on nous accordât ou. non, 
dit-il, le don d’amoureuse merci, nous n’en répan- 
dions,pas moins le bruit de nos succès, vrais ou sup- 
posés; car nous n’avions ni honte ni crainte, et c’est 
ainsi que nous déçûmes gentilles dames et damoiselles, 
médisant d’elles sans pitié, d’où advinrent beaucoup 
de diffâmes et. d’esclandres. » Et voilà le siècle des 
Clisson, des ; Duguesclin, des Beaumanoir: et des 
Mauni, si vénérables sur nos théâtres et dans. nos 
modernes romans ! 

Or Landry. avait dans son château d'Anjou deux 
prêtres, et, deux clercs; il les mit à l’œuvre , et les 
employa à, recueillir dans tous les. manuscrits. de.sa 
bibliothèque , les utiles exemples, les anecdotes, les 
préceptes qu’il devait répandre dans son livre. 

Rien n’était plus négligé ou du moins plus mal con: 


(275) 


duit que l'éducation des femmes. On leur apprenait 
volontiers à lire ; mais, à écrire, les maris y trouvaient 
trop de dangers. On leur interdisait même, autant 
qu'on le pouvait, la lecture ; « car, dit Geoffroy , 
quels sont les ouvrages qui pourraient leur tomber 
entre lès mains ? des enseignemens amoureux, des 
romans immoranx , des fabliaux indécens , et d’au- 
tres récits qui n’entretiennent que de lascivetés et de 
vanités mondaines. » C'est dans ces ouvrages, dont 
se plaint le chevalier de la Tour , mais auxquels on 
me peut refuser beaucoup d'esprit et une invention 
quelquefois charmante , que puisèrent ensuite Boc- 
ace , la reine de Navarre, l’auteur du Moyen de 
parvenir ; Rabelais et La Fontaine. Les religieuses , 
les moines, les prêtres séculiers en font surtout les 
frais, et y sont peints comme se livrant à la débau- 
che la plus raffinée. 

On supposerait de la candeur ; et même de la piété 
dans le siècle où vivait le chevalier de la Tour, aux 
conseils qu’il donne à ses filles de beaucoup jeûner ; 
jusqu’à ce qu’elles soient mariées, et d'écouter chaque 
jour le plus de messes qu’elles pourront. Mais, quelle 
scandaleuse conduite ne tenait-on pas à l’église’ et 
c’est le chevalier de la Tour qui nous en instruit lui- 
même. » Rien de moins édifiant. On y cause, on y 
mange, on s’y donne des billets doux et des rendez- 
vous amoureux... » Aussi Landry fait-il remarquer à 
ses filles tout l’odieux de pareilles profanations ; AUSSI 
montre-t-1l, pour les détourner de suivre de tels éxem- 
ples , toute la sollicitade d’un père, qui n’était devenu 
sage qu'après avoir subi toutes les épreuves de la fulie 


(276) 


Les maris étaient d’une iidulgence:tout-2-fait pré- 
cieuse envers leurs femmes ; pour peu qu’il s’agit d'un 
acte de dévotion. On lit dans /e chevalier de la Tour , 
que , lorsqu'une femme voulait former ou dénouer 
une intrigue galante, elle prétextait un! pélerinage. 
Dans ce cas, liberté tout entière. Elle partait seule, 
ou accompagnée d’un chevalier, car: le sigisbéisme 
était commun alors, et chaque femme avait un te- 
nant que le mari tolérait d’autant plus volontiers , 
qu’il était lui-même. tenant ailleurs. Il eût été ridicule 
qu’elle refusät les hommages d’un chevalier: Nous 
apprenons tout cela de Geoffroi de la Tour. Ainsi 
cet usage accommodant, dont les théâtres et les ro- 
mans de mœurs ont fait de si graves reproches à des 
temps plus rapprochés de nous , se sanctifie en quel- 
que Sortie, en remontant à un âge si vénérable; peut- 
être y verra-t-on aussi une des raisons non avouées, 
qui le firent appeler le bon vieux temps. 

La piété consistait dans des pratiques dévotes. Lan- 
dry non-seulement ne trouvait rien de repréhensi- 
ble dans cette alliance du vice et de la religion , il 
admettait même, comme compensation , cet étonnant 
amalgame, ‘et c’est le plus sérièusement du monde 
qu’il raconte la légende suivante : « Une Dame, 
allant à un: rendez-vous, se laissa tomber dans un 
puits. Elle se noyait, lorsque deux anges la soule- 
vérent hors du puits, parce que, deux fois la semaine, 
elle avait mortifié sa chair en l'honneur de la Vierge. » 
Telle était la doctrine des bonnes œuvres au XIV: 
siècle. Moins d’un siècle après le chevalier de la 
Tour, la vie de Louis XI nous offre des exemples 


( 277 ) 

fameux. de ces compensations criminelles. L’on pour- 
vait compter ses forfaits par ses’ fondations pieuses. 
À deux lieues et demie d'Angers, sur larive droite de 
la Loire, est la petite et jolie église de Béhuard ; dé- 
diée à la Vierge, ex voto par lequel il espéra de son 
intercession que Dieu lui pardonnerait de dépouiller 
de l’Anjou le roi René, son oncle. 

Landry, pour faire sentir à ses'filles l'inconvénient 
d’être indiscrètes et légères dans le discours, leur ra- 
conte ce petit incident de’ sa vie: « Un de mes amis 
m'avait parlé d'une damoiselle noble et riche ; qu'il 
me conseillait d'épouser. Mon père me conduisit chez 
les parens de la damoiselle. Là on me ‘fit une grande 
chère, etle père me laissa seul avec sa fille, pour 
que nous nous étudiassions avec plus de liberté. » 

» Il'advint que nous parlâmes des prisonniers dont 
les anglais faisaient alors (1) bon nombre, et je lai 
dis 5 En cas de guerre, Mademoiselle, il serait heu- 
reux d'être votre captif. Certes, ce serait une geôle 
plus plaisante que celle ‘où les Anglais enferment les 
leurs (2). » A: quoi elle répondit, en me regardant : 
«Il y a'tel que je voudrais bien avoir pour mon pri- 
sonnier, et que je garderais comme je garde mon 
propre corps. » Puis oubliant la décence et la mo- 
destie, elle me pria de revenir souvent. Je m'émer- 
veillais de cette manière d'agir , sachant qu’elle ne 
m'avait jamais vu auparavant, et qu’elle n’ignorait 


de «re rh dt sida 2 08 at vhs 2 is Pet ent sn iteerme tennis 
(4) Règnes de Philippe-de- Valois et de Jean. 


(2) Les rigueurs qu’exercent les Anglais contre les Français, comme 
on le voit, datent de loin. 


(278 ) 

pas qu'on devait nous, marier ensemble: ct, quand 
nous fûmes partis, mon père me demanda ce que j'en 
pensais, et je, lui repondis que, quoique son esprit 
et sa fortune me convinssent, je ne voulais pas d'elle, 
parce qu’elle était étourdie et légère en ses manières, 
ce dont j'eus sujet de me réjouir plus tard, car il ne 
se passa pas un an avant qu’elle eût donné des preuves 
évidentes de son inconséquence. » 

L'amour de la toilette était, dans les siècles passés, 
et surtout dans celui dont nous parlons, une pas- 
sion effrénée et ruineuse que l’on voulut réprimer 
par des lois somptuaires qui toujours furent éludées. 
IL n’était pas rare que l’on vit des robes et des ha- 
bits de 4 à,500 francs de notre monnaie actuelle. 
À défaut d’autres plaisirs, .e’en était un qu’elles se 
donnaient libéralement, et sans doute au grand mé- 
contentement de; leurs maris qui, d’ailleurs, pre- 
naient leur revanche dans Jes tournois, dont la 
magnificence est connue, s’il n’est pas de même in- 
contestable que les, chevaliers s'y montrassent aussi 
courtois que le disent les romans. Landry raconte, 
au sujet de, ce luxe, une légende que je vais ra-. 
conter à mon tour, en l’abrégeant. 

« Une dame venait de mourir; son. âme monta 
au ciel. Devant le Juge suprême, S.t-Michel.et le 
diable se disputèrent sa possession. Le diable tenait 
une balance, dans l’un des plateaux de laquelle il 
avait déposé l’âme de la dame, avec toutes ses 
bonnes actions; dans l’autre plateau se trouvaient 
les mauvaises. » Vous voyez bien, dit Satan, mes- 
sire Michel, que cette femme est à moi. Elle avait 


( 279 ) 

dix robes de couleur différente et autant de jupons; 
et vous n’ignorez pas qu’une seule de ces robes bro- 
dées avec magnificence auraït pu nourrir et soute- 
nir vingt à trente pauvres qui sont morts de besoin 
et de froid.» Le démon, én'disant cela, entassa 
toutes les parures de la dime dans le plateau des 
mauvaises actions. St-Michel fit entrer dans celui 
des bonnes plusieurs actes de charité, jeûnes ; mor- 
tifications et loyaux dévouemens, qui établirent l’é- 
quilibre; mais le diable alla chercher à son tour 
un paquet de bagues, de brasselets, decolliers, de 
boucles d’oreilles qu’elle avait acceptés de'ses galans;.… 
alors le plateau des mauvaises actions l'emporta ; sa- 
*an:saisit la dame, ses habits, ses bijoux et toute sa 
braverie, et les jeta ensemble dans le grand puits dé 
Venfer. » 

Cette légende n’est pas piquante ; je dois l'avouer : 
elle est peu en accord avec l'ingénieuse ‘et féconde 
imagination du XIX : siècle; cependant je ne demande 
point grâce pour elle. J’ai quelque espoir que le lec- 
teur sé reportant en idée à l’époque où elle fut écrite, 
ce qu'il faut toujours faire quand il s’agit de juger 
les œuvres de l'esprit humain, il la trouvera curieuse} 
parce qu’elle est authentique, ‘et qu’elle est unere- 
De fidèle de la simplicité, sinon dela vertu 
dû moyen âge. , 

Cependant les‘maris perdaient apétqgelos pailence 
avec leurs femmes , ils les battaient "1 était-ce encore 
le bonvieuxtemps ? ou ils les punissaient d'une ma- 
nière' que. nous ‘trouverions : aujourd'hôi infiniment 
trop plébéiénne.» J'aïrvu, dit Landry, une dame de 


( 280 ) 


très-mauvaise, hbumeur,.et qui contrariait à. chaque 
instant son mari devant les étrangers. C'était un.che- 
valier, vaillant, et très-honoré. Un jour ,, mécontent 
de la conduite de sa. femme, il.Ini asséna un: coup 
de.poing , et la jetalpar, terre ; puis; la foulant'aux 
pieds, ..et déchirant: son. visage avec l'éperon 'qni ar 
mait, ses bottes, 1l la défigura tellement que , jusqu'à 
sa mort,.elle n’osa plus, se:montrér, tant elle! était 
honteuse:» Non-seulement La: Tourne blâme point 
le chevalier brutal, mas! encoreil parle. de lui, comme 
on voit, avec élogel;-au.commenceméntide son récit, 
et ne désavoue pas.) à la fin , la manière honorable 
dont il en ,a-parlé. » sestéler é0fe 

». Une. autre dame, dit le chevalier de la Tour; 
n'ayant pas voulu.mangér avec son mari: celui-ci la 
contraignit de manger en sa présence avec le gardien 
des pourceaux. » 

Tout simples que sont ces détails, ou plutôt parce 
qu'ils sont,simples et. qu'ils sont authentiques ;.qué 
ne, puis-je ici les multiplier ! Tous.ces petits tableaux 
de mœufs . doivent. avoir ‘autant rapport. à Angers; 
où le gentilhomme sans doute habitait quelquefois, 
qu'aux lieux où. sa térre était située : que.de documens 
nous aurions sur, cette ville; objet spéciäl-de notre 
amour et/de. nos études, si; l'ouvrage tout ‘entier :du 
chevalier de la Tour était à notre disposition! mais 
enfin, par le peu que j'ai recueilli, noussavons qu'en 
Anjou les gens de qualité battaient leurs fémmes pour 
les rendre meilleures; qu'ils les faisaient.manger a 
la cuisine, avec:le dernier de leurs gens, pour.leur 
apprendre à appréciér l'honneur qu'ils leur faisaient 


( 281 ) 


de les admettre à leur table; nous savons que nos 
églises, que notre cathédrale fut probablement le 
théâtre de plus d’un scandale ; que telle chapelle, où 
de nos jours on ne va que pieusement en pélérinage, 
s’il est dans notre croyance d'y aller, fut souvent un 
lieu de rendez-vous coupable , de sacrilége et d’abus 
de confiance; nous savons enfin si ces siècles vantés 
ont de quoi faire rougir d’autres siècles qu’on a cru 
jusqu’ici leur “ri avec tant de désavantage ; 
nous savons. 

Maïs, si je Fe quelque puissance à.mes paro- 
les, je me reprocherais de désenchanter mes lecteurs 
des brillantes fictions de nos écrivains à créations in: 
génieuses plutôt qu'à souvenirs fidèles. Je le, sais 


Cest quelque chose encor que de faire un beau rève. 


LES , ê 1imè 
j'aime plus qu'un autré, peut-être, ces chimères 
aimables ; plus d’une fois j'ai senti qu’ 


à nos FRS réels c’est une utile trève ; 


mais Ja vérité a son:prix aussi : j'ai cru devoir la dé- 
fendre contre de doux, d’innocens , d'officieux men: 
songes, mais enfim contre des mensonges. 


(282 ) 
ZE 
SOUVENIRS ATLANTIQUES, 


DE 


M. TH. PAVIE. 


APRÈS avoir entretenu la société du premier, peut- 
être, de nos auteurs Angevins, dans l’ordre chrono- 
logique ; qu’elle me permette de lui signaler un 
autre auteur qui, peut-être aussi, est le dernier dans 
le même ordre. Un de nos jeunes concitoyens, em- 
porté par un imsurmontable désir de voir et de s’ins- 
iruire, parcourt , il y a environ deux ans, le Canada 
et les Etats-Unis : il en avait 17 alors. On pouvait 
ne lui supposer qu’une impatience enfantine de sortir 
du lieu qui l’avait vu naître; on ne s'était point 
aperçu qu’il préludât àce voyage: par les études 
d'usage en pareil cas; lui-même n’avait point songé 
à tout le résultat que pouvaient avoir-ses courses ; al 
revint sans matériaux pour les décrire. L'idée senle 
lui eût été insupportable de se faire lire sur des con- 
trées célèbres où l’avaient précédé tant de voyageurs 
illustres. Mais des sollicitations réitérées ont vamcu 
sa modestie, et une mémoire étonnante a’suppléé à 
ce dont il ne s'était pas pourvu. Il rédige donc à 
mesure qu’on l’imprime ; l'ouvrage se fait sans ma- 
auscrit complet et revu dans son ensemble; et pour- 


(285) 


tantil'offre une unité parfaite de conception et d’es- 
prit; on n’y remarque aucune de ces solutions de 
continuité, aucun de ces refroidissemens que pou- 
vait produire une semblable manière de composer. 
L'auteur est encore avec les personnes qu'il peint ; il 
a devant les yeux encore les lieux qu'il décrit, tant 
son imagination et sa mémoire s'accordent heureu- 
sement à le servir! Il est un grand nombre de ses 
pages que ne désavoueraient pas les Châteanbriand, 
Jes Bernardin de Saint-Pierre , les Cooper : et cet 
ouvrage, à peine at-on pu obtenir qu'il fût tiré à 
vingt exemplaires. Son titre est : Souvenirs Atlanti- 
ques ou Voyage au Canada et aux Etats-Unis , 1 vol. 
in-8° de 550 pages, petit romam. Je ne sais quelle 
sera la destinée de cette importante improvisation ; 
mais la notice que j'en donne ne peut être déplacée 
dans ces mémoires, si on lui fait l'honneur de l'y 
admettre; je fais au reste des vœux bien sincères 
pour qu’on ne soit pas réduit à y apprendre son 
existence, et pour qu'une. édition fasse jouir le pu- 


blic du bel ouvrage de M. Théodore Paie. 


N. B. Depuis cette lecture ,, M. L.Pavie, imprimeur-libraire à An- 
gers, a été sollicité par des gens de lettres.et des artistes d’une haute 
célébrité, amis de son fils, de publier réellement cet ouvrage. IL pa- 
raîtra bientôt en 2 vol. én-8.o, avec augmentations, corrections et 
changemens sur l'édition de famille dont nous avons parlé plus haut. 


Depuis cette lecture encore, M. Théodore Pavie, irrésistiblement 
entraîné par son amour. des voyages, s’est arraché, pour la seconde 
fois , à l'amour des siens, qui auraient cxaint d'arrêter l'essor d’une 
vocation frappante et vraiment du plus favorable augure : Ses Souve- 
nirs océaniques nous autorisent à user de cette dernière expression’ 
Les voyageurs que l’on renomme ne sesont pas annoncés autrement ” 


20 


(284) 


ét ce n’est que par cette soif ardente des’instruire qu’on ! devient 
digne d’instruire les autres. 


M..Th. Pavie.est.parti pour Buénos-Ayres, avec l'intention: de vi- 
siter les différens Etats de l'Amérique méridionale. Il remplira sa 
destinée, il reviendra chargé de dépouilles opimes qui n’auront coûté 
de pleurs à personne. Les conquêtes deM. Th! Pavie seront des 
cahiers rédigés dans quelques cabanes, nids d'aigles assis sur’ quel- 
ques crêtes des Andes, loin de toute civilisation , et en présence 
seulement de la puissante et merveilleuse nature , qui de toutes parts 
déploïera son immense horizon à sés yeux: 


NOUVELRLES RÉFLBNIONS 


Servant de supplément à celles qui précèdent 
et De réponse au Rapport qui eu fut: fait à 
La, Societe. 


Je n’avais point entrepris de traiter spécialement 
du moyen âge, dans mes premières reflexions qui 
précèdent ma notice sur le chevalier de là Tour 
Landry. C'était une introduction assez naturelle, 
mais où, tâchant de-ne rien‘ dire qui ne füt vrai, je 
pouvais bien laisser à dire une foule de choses qui, 
au reste, et sur cela nous ne sommes pas d'accord 
messieurs, de la commission et moi, n’auraient pas 
conduit à une autre conclusion que celles que l’on a 
pu ürer de mes réflexions premières. 

J'aurais pu faire formellement le procès du moyen 
âge, mais ce n'a point été ma prétention. J'ai dit 
qu'il fut ce qu'il devait être; qu’il le fut aussi long- 


( 285) 


temps que le voulurent le mouvement spontané des 
esprits, les communications fortuites des peuples, les 
grandes infortunes qui confondent'et sensibilisent les 
individus, des connaissances muries par l’expérience 
et la réflexion, enfin une sorte de fatalité qui s’umit 
à la prudence humaine dans les révolutions politiques 
et morales des états. 

Le moyen âge, je lai déja dit, pique éminemment 
la curiosité ; je l'aime, je m’y complais. Je me sen- 
Urais tout comme un autre, sinon le talent, du moins 
le désir de broder sur sa civilisation, ses préjugés! 
sa crédulité souvent si touchante ; ce n’est point sans 
untrès-vif plaisir que j'ai lu les ouvrages où l'imagi- 
nation, plus que la vérité s’est exercée sur cet âge; 
mais cette vérité doit rentrer dans ses droïts, quand 
il s’agit d'écrire l’histoire. « Un historien; dit le: ju- 
dicieux et sévère : Robertson , doit s'abstenir de faire 
des incursions dans le vaste pays de l'imagination ‘et 
des conjectures. Parler des faits réels, et en expliquer 
les véritables causes et les eflets:, telle est sa fonction 
unique. » M. le rapporteur de la commission con 
firme l'historien de l’Ecosse , etje suis complètement 
de son avis , quand il dit : « Pour l'homme sage, si 
les illusions ont parfois des charmes, il n’y a, en défi- 
nilive, que la vérité «à laquelle ‘il-consacre!son culte, 
parce que-c'est à elle seulé qu'il reconnait un véritable 
prix. » . fit Ii 

Nous sommes d’ LEE Si je m’ai pas dit toute là 
vérité sur lé move âge ; et je ne pouvais même en 
avoir la pensée, à propos d’un ‘écrivain dont, par 
malheur, j'avais si peu de choses à dire, ‘du moins je 


( 236 ) 


crois avoir dit la vérité. J’en ai attesté l’ouvrage au- 
thentique et contemporain du chevalier: j'ai invoqué 
l'autorité des trouvères et des troubadours. Je pouvais 
appeler à mon aide des chroniques et des cartulaires 
curienx, qui, sur l’article des mœurs, auraient «mis 
ce siècle dans un tel état de nudité, que je me fausse 
arrêté plus d’une fois dans mon récit, de peur d’of- 
fenser une société aussi polie que celle-ci. 

Les mœurs des chevaliers sont souvent présentées 
sous de favorables couleurs par les modernes et dans 
les ouvrages contemporains; chez les modernes, par 
l'illusion de l'éloignement : ajor é longinquo; chez 
les contemporains, par la flatterie qui s’attacha tou- 
jours à la puissance. Mais, s'ilnous est permis de 
rappeler quelques grands coupables (j’en prends au 
hasard ; dans une multitude d’autres };: c’étaient: des 
chevaliers que ce François Ie, duc de Bretagne et 
ses cruels suppôts, qui firent’si longuement souffrir, 
si inhumainement-périr le malheureux Gilles de Bre- 
tagne (1450); c'était un chevalier que cet abominable 
maréchal de Retz , qui fut, pour des forfaits inouis, 
publiquement exécuté à Nantes, et dont on a fait 
le conte populaire de Barbe Bleue (1440); c'était un 
chevalier. que ce duc de Bourgogne, Jean-sans- 
Peur, qui fit assassiner à Paris le duc d'Orléans, 
frère de Charles VI (1407); c'était un chevalierque 
ce Pierre de Craon, l'assassin d'Olivier de Clisson 
(1391); que ce Jean-sans-Terre, qui tua de sa pro- 
. pre main , à Rouen, son neveu Arthur (1202); que 
ce connétable félon qui va porter ses talens et ses 
armes à Charles-Quint contre-sa patrie (1523). 


( 287 ) 

Je pourrais opposer moi-même à ces odieux exems- 
ples un assez grand nombre d’autres de chevaliers 
dignes d’une haute estime ; et qu’en conclurait-on ? 
qu'il n’y avait pas dans la chevalerie cette puissance 
d’épurer les mœurs, que lui prêtent messieurs de la 
commission, et que, loin que ces siècles barbares 
montrassent une tendance sensible vers une amélio- 
ration sociale, nous les voyons dans une oscillation 
continuelle jusqu’à la renaissance. 

Les tournois, le plus souvent, je le sais, étaient nn 
hommage aux dames. On n’y était admis qu'après 
qu’elles avaient visité, dans une galerie, les boucliers 
des preux inscrits pour combattre, afin de toucher 
celui dont le maître pouvait les avoir offensées, et 
qui, par ce fait seul , était exclus du tournoi; je 
sais que les chevaliers portaient ordinairement quel- 
que tissu, quelque écharpe aux couleurs de leurs 
dames, façonné, présenté par elles ; que l'on a vu 
ces insignes lacérés, emportés dans l’ardeur de la 
mêlée , être soudain remplacés par une pièce du vé- 
tement des dames spectatrices du combat , et a tant 
dereprises, qu’elles finissaient par se trouver quelque- 
fois dans un état de dénuement dont on aurait ri, 
si la galanterie n’avait pas ennobli toutes ces amou- 
reuses extravagances , et si le peuple eût pu ne pas 
trouver admirable tout ce qui lui venait de si haut. 
Je sais que des dames souvent étaient juges du tour- 
noi; que presque toujours elles y décernaient les 
prix , et qu’un tournoi ne se terminait pas sans qu’on 
y donnät le coup des dames. 

Mais cette urbanité française dont on voudrait 


( 288 ) 


trouver exclusivement l’origine, dans-les jeux cheva- 
leresques,, je la vois, par rapport au culte des dames, 
dès les premiers, temps de notre histoire. Les tour 
nois y donnèrent de fréquentes, de brillantes occa- 
sions; mais, avant même l'occupation romaine, les 
Gaulois étaient renommés par leur respect pour les 
femmes. Leurs druidesses, leurs vellédas ,. leurs 
dryades n'étaient que des créations de leur déférence 
extrême pour un sexe.avec lequel ils croyaient avoir 
Beaucoup plus à gagner en lui accordant tout, qu’en 
le tenant dans l'esclavage. Cette divinitation des 
druidesses n’était que l’ascendant qu'elles exerçaient 
sur les hommes; et c'était, d'elles que les Gaulois 
pouvaient dire justement : 


Notre crédulité fait toute leur science. 


Dans les temps fabuleux de ces temps déja si né- 
buleux eux-mêmes > Nous voyons des êtres surnalu- 
rels qui attestent encore une plus haute antiquité de 
l'empire des femmes sur les hommes : ce sont ces 
fées toute-puissantes qui jouent un rôle si attachant 
dans notre bibliothèque bleue , et que des lecteurs 
à barbe grise se surprennent lisant avec quelque 
plaisir. Vousle savez, messieurs, La Fontaine à dit : 

Si Peau d’Ane m'était conté 
J'y prendrais un plaisir extrême, 

Mais ces tournois que nous venons de: voir du 
beau côté , considérons-les actuellement sous un 
autre aspect. Voyons avec quelsom:, se méfiant des 
sermens prononcés à la cérémonie de l’accolade, on 
pourvoit à ce qu'il n'arrive pas de trop graves désor- 


( 289 ) 


dres; déclaration sur les livres saints que l’art magique 
n’est pour rien dans les moyens de vaincre ; visite 
scrupuleuse des armes, pour s'assurer qu’on en à, 
aux termes des réglemens, émoussé l’estoc et la taille 
(la pointe et le tranchant) ; et les sergens d'armes , 
et les juges du camp, et les rois de lemprise, 
estimer les coups, terminer les différens et mettre le 
holà. Voyons combien les irascibles paladins sont 
prompis à prendre la chose au sérieux, et à tourner 
en combats sanglans ce qui ne devait être qu'un exer- 
cice d'adresse et de galanterie. Souvent c'était trop 
peu pour une bataille, mais beaucoup trop pour un 
divertissement : c’est le jugement que l’on porta d'un 
tournoi donné à Châlons en 1274. Dans un autre 
donné à Nuits en Bourgogne, en 1240, soixante-dix 
chevaliers étaient péris ou par le fer ou étouffés. 
L'église se prononça vivement contre ces jeux .pré- 
tendus, et ce fut en vain. En vain il y eut anathême 
contre les chevaliers tournoyans, et menace des 
peines de l'enfer pour ceux qui mourraient les armes 
à la main. On.y fit intervenir la puissance même 
des légendes miraculeuses. On lit dans l'historien 
Mathieu Pâris, qu’en 1227, un nommé Roger de 
Troéni apparut à.son frère, et lui déclara qu'il était 
malheureux pour l'éternité dans l’autre monde, parce 
qu'il avait trop aimé les tournois. » /@ !/,&æœ mihi.! 
quare unquam. tornamenta exercui ; eë ea tanto studio 
dilexi! Mais tout était inutile. IL fallut lasmort d'un 
roi de France, pour qu'enfin on cessät de se ruiner 
et de hasarder sa vie dans les tournois. 

:: La chevalerie en elle:même-était une institution 


(290 ) 


respectable; an milieu de la plus profonde ignorance 
et des passions les plus effrénées , elle devait n’être 
pas tout-à-fait sans mfluence sur l’ordre social. Les 
chevaliers mêlaient la religion à la cérémonie de l’ac- 
colade; il y avait la veillée des armes, que lon pas- 
sait à prier et à étudier les lois de l’ordre où l’on 
allait entrer; à se plonger dans un bain et à revêtir 
successivement plusieurs robes emblématiques: on 
communiait, avant de présenter son talon gauche à 
l'éperon d’or, et sa nuque aux trois mystérieux coups 
de plat d'épée; cela m'a toujours enchanté, j'en fais 
l'aveu. On jurait Dieu et les dames : honneur encore 
à la chevalerie ? 

Les chevaliers errans dont M. le rapporteur de la 
commission semble ne pas douter, je les admets sans 
examen, combien qu'il y en ait d’apocryphes, s'ils 
ne le sont pas tous; et si le roman célèbre de Cer- 
vantès offusque un peu le prisme à travers lequel 
J'aime à voir ces jolies extravagances. Les plaisante- 
ries délicieuses de l’Arioste (termes de M. le rappor- 
teur) lui rendent toute sa clarté, iont son prestige ; 
et j'en veux à l'historien trop positif, qui m’arrache 
à ces aimables rêveries. 

Mais que devenait Ja piété si fervente dont avaient 
été animés ces chevaliers, au jour de leur accolade!, 
que devenait-elle , lorsqu'un fougueux point d’hon- 
neur, où la soif de la vengeance, ou la rapacité, leur 
faisait tirer l'épée on brandir la lance? Lorsqu’em- 
portés par l'ambition ou une folle gloire, ils pas- 
saient lour-à-tour du camp de Jean de Montfort 


dans celui de Charles de Blois; de ceuxd’Edouard IIE 


(291 ) 


dans ceux de Philippe de Valois: des couleurs de 
Bourgogne à celles d'Armagnac; des drapeaux de 
Bedford à ceux de Charles VII? Quand enfin, sur 
tous les points de la France, les sombres manoirs 
de ces preux, plutôt semblables à l’antre de bêtes 
féroces, comme le remarque M. le Rapporteur lui- 
même, les voyaient s’élancer sur l'infortuné voyageur, 
comme celles-ci sur leur proie. 

On aime à distinguer dans cet âge des hommes qui 
méritèrent d’en être considérés comme les héros. Les 
Mauny, les Beaumanoir, les Duguesclin , les Clisson, 
les Dunois, et celui qui fut le dernier, ce chevalier 
sans peur et sans reproche, sont à nos yeux la 
gloire de la France; nous voyons en eux la rudesse 
de leurs temps, mais aussi la générosité , le dévoue- 
ment, la valeur qui les auraient rendus illustres chez 
quelque nation, dans quelques siècles qu’ils eussent 
vécu. Grandes ames, vous êtes à jamais l'honneur de 
votre patrie! vous lui obtenez grâce pour tant de 
troubles, tant de déraison qui souillent ses annales ; 
on s’en repose sur vos exploits, sur vos immenses 
services: et l’on n’oserait envier à ces époques de ca- 
lamité et de barbarie l'illustre compensation qui, par 
vous, lui était réservée. Je n’ai parlé de ces hommes 
vénérables que pour opposer leurs gigantesques faits 
d'armes dans les tournois aux galantes et puériles 
pantémimes dont leurs descendans amusèrent les 
dames du siècle romanesque de Louis XIV. 

On pourra regarder les croisades comme la par- 
tie brillante du moyen âge, mais quelles expéditions, 
-grand Dieu ! vous les connaissez, vous savez leurs 


(292) 


fureurs; vous savez quel vertige insensé dépeupla 
pendant presque de deux siècles l'Occident , pour en 
précipiter’ les peuples dans les déserts, de PAsie- 
Mineure et:de da Syrie ; vous savez ce que produi- 
sit et l'incapacité des chefs, et l’immoralité des 
guérriers et. la mésintelligence de tous contre la 
bravoure , l'mtelligence , la générosité des orien- 
aux, stupéfaits de voir dans de si scandaleux. sol- 
dats , des soldats de la Foi, des championsdu «chris- 
tianisme. Le Tasse a illustré la croisade de Bouillon ; 
Walter-Scott celle de Richard-Cœur-de-Lion; Join- 
ville nous a, dans la simplicité de son style et de 
sespensées,, rendu vénérable et touchant le récit 
de celle de S.t-Louis. Si ces expéditions -absurdes 
et sanglantes furent, comme je le crois au reste , 
utiles à la civilisation de l’Europe ; si «elles 
acheminèrent à Vaffranchissement des peuples, si 
elles donnèrent un mouvement favorable au génie, 
et quelques inspirations aux poètes de celtemps , 1l 
fallait que la civilisation , les-mœurs , l’état social , le 
génie et les lumières des XII et XEILe siècles fussent 
dans un état bien déplorable. 

Le moyen âge s'instruisit : nous lesavons, l'esprit 
humain n'est pas stationnaire de sa nature, mais 
quels misérables fruits produisit cette instruction mal 
reçue et mal dirigée ! L'étude du droit s’introduisit 
en France, dit M. le Rapporteur ; quelle révolution 
heureuse y t-elle ? Les jugemens de Dieu n’en sub- 
sistèrent-ils pas moins jusque bien avant dans le XVI: 
siècle ? n’en est-il pas moins vrai que le fougueux 
accusé , cité devant le pauvre docteur ès-lois, le pre- 


( 295) 


nait à pare , et l'appelait en champ clos, s'il 
n'était pas content de son arrêt, 

Messieurs de la commission supposent que j'ai 
douté de la croyance des peuples quis’abandonnaient 
aux superstitions que j'ai dites dans ma notice; non, 
assurément; ct, sije me suis mal expliqué, je dé- 
clare ici que la Foi fut-essentiellement la vertu de nos 
pères. Dans des temps où la civilisatiou était si dé- 
fectueuse ‘où l’on manquait si universellement de dé- 
licatesse et de goût, où la plus honteuse corruption 
n'avait pas épargné même un. ordre que ses fonc— 
Uons sacrées devaient prémunir contre ses invasions , 
on ne jugeait point l'abus des jouissances des sens 
incompatible avec une piété sincère. On croyait. On 
passait du crime à un repentir humble ct vrai. Notre 
histoire d'Anjou nous en fournit des exemples frap- 
pans dans la personne de Foulques Nerra et de 
Geoffroi Martel. Après les fureurs qui accompagnè- 
rent la prise de Jérusalem ; on vit Godefroi de Bouil- 
lon et.ses croisés seconvrir de cendre, gémir, pleurer, 
aller pieds nus et la corde au cou au Saint Sépul- 
cre ; demander à Dieu le pardon des forfaits dont ils 
venaient de se rendre coupables; et l’on eût peut- 
être fait pis encore sans la croyance. Quelle imdé- 
chiffrable énigme c’est que l'âme humaine ! 

Il est digne du philosophe , dit M. le Rapporteur , 
d’observer les efforts que firent les Français du moyen 
âge, pour se dégager des liens de la.barbarie qui les 
pressait de toutes paris. fl le serait au moins autant 
de méditer sur cet ingénieux réseau de tyrannie qu’on 
appela régime féodal : sur la constante application 


(294 ) 


de la monarchie à en briser les mailles les unes après 

les autres, pour son avantage privé ;.et sur l’art avec” 
lequel l’église étendit sans relâche ses richesses, ses 

privilèges et sa puissance. 

Messieurs de la commission auraient désiré que 
j'eusse trouvé sur le chevalier de la Tour Landry 
quelque chose de plus que ne m'a fourni la Revue 
Britannique : Dieu sait si je ne l'aurais pas voulu 
moi-même beaucoup plus encore. Fidèle à l’engage- 
ment que prend implicitement tout membre d’une 
société, de concourir, selon ses moyens, aux travaux 
de celte société, je me suis emparé d’un article qui, 
peut-être, sans moi, fût resté enfoui dans la poudre 
des archives d’un salon de lecture. Je n’avais rien de 
mieux à vous offrir sur le chevalier de la Tour, et 
je me dis, comme La Fontaine : 


… Je l’essaie , un plus savant le fasse. 


La commission me conseillait une petite suppres- 
sion à un passage du livre du chevalier , où elle avait 
vu un peu trop de frauc parler, et qui me fit froncer 
le sourcil à moi-même, quand je le lus devant vous. 
Cette suppression nécessaire ne prouve pas en faveur 
du moyen âge; je l'ai faite. 

Je n’ai rien au reste à rétracter; j'aurais fait un 
gros livre, que je l’eusse fait dans le même esprit : 
puissé-je vous avoir donné de suffisantes raisons de: 
ma persévérance. 


(295 ) 


SUR LE COURS 
D’ANTIQUATÉ MONUMENTALE , 


Par SN. De Caumont. 


————— 


L'usage étant de ne faire de rapports que sur les 
ouvrages. dont les auteurs sollicitent le jugement de 
Ja société, nous satisfaisons avec plaisir au désir ma- 
nifesté par M. de Caumont , en rendant un compte 
succinct de l’intéressant travail dont il a publié de- 
puis peu la première partie (1). 

Dans un volume peu étendu , et accompagné d’un 
atlas très-important et très-curienx , M. de Caumont 
a su rendre simple et facile l'étude des antiquités de 
l'ère celtique. Au moyen des nombreux et rares ou- 
vrages dont il s’est entouré ; ou qui ont élé mis à sa 
disposition, et en ajoutant ses propres recherches, il 
a donné sur cette matière le traité le plus complet et 
le plus méthodique qu’il ait été possible de concevoir. 
Par l'effet d’une classification simple et naturelle, 
l'histoire , autant que possible, de tous les genres de 
monumens celtiques, vient se présenter à la médita- 
tion du lecteur. On doit savoir le plus grand gré à 


(4) À Paris, chez Lance, rue Croix-des-Petits Champs, n.o 50. 


(2%) 

auteur de nous initier sans la moindre difficulté , à 
tous les travaux d’un siècle et plus, des érudits qui 
l'ont précédé. On trouve dans le cours d’Antiquité 
monumentale tout ce qu’il est possible de savoir sur 
cette matière si peu étudiée autrefois, mais si inté- 
ressante pour l’histoire de notre civilisation’; et âvec 
une bonne foi remarquable on y trouve jusqu’à l’a- 
vœu de linutilité-des recherches sur certains points 
encore obscurs, ce qui doit donner la plus grande 
confiance sur le reste des considérations de cet ou- 
vrage , dont la suite ne peut être que très-vivement 
désirée. Elle sera relative aux antiquités romaines ; et 
une dernière partie aura pour obiet l'étude des mo- 
numens du moyen âge 


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TABLE DES MATIÈRES. 


Agriculture. 
DE la Bruyère employée dans les vignes comme engrais , 


par M. DE BEAUREGARD. . . . . .. . . . ... ...... 


Rapport sur la Charrue anglaise , dite de Bayÿley, par 
M. De BEAUREGARD. . . . . . . .. A SR PS EMA 


Rose Pigmée. . :....:............4. 


“Rapport sur les Médailles décernées par la Société peur 
_! l'exposition horticulturale du 24 juin 4832. . . . . . .. 


Histoire Naturelle. 


par M UMEEEr.: ele. enr ere 
Description du Trèfle à petite feuille, par M. Drsvaux. . 


Du Quartz aventuriné et de ses Dane par M. Desvaux. 


Sur la Navigation de la Loire, par M. DerniEN , ingénieur : 


en chef du département de Maine et Loire. . . . . . .. 


Recherche du Plan principal des Momens par la théorie 


Page 21 


240 


. Description de deux nouvelles espèces du genre Anodonte, 


Boieneeà physiques et mathématiques. ; 


de Maximis et de Minimis, par M. PENION , pro- . 


ERREUR: CE 1 MUC Ra ete - ape tee ju. 


Littérature. 


s 


(*) Le Chevalier de Zatour-Landry et Réflexions sur le 


moyen âge, par M. BLorpiEr-LANGLois. . . . . . . ... 


M. BcorpiER-LANGLoIs. . ... . ... ... :... . ... 


267 


‘| Souvenirs Atlantiques , de M. Théodore Pavie , par : 


4 Nouvelles Réflexions servant de supplément à celles- ci, F, 


par le même.” ..... DORA NT MR . 


.…..... 


| Cours Antiquité oncle, de M. De Caumont. . . 


249 


* 


_[ nn enrERReRE FE D | 
re di a | + “e 
Si . 
MAS set ie 
sf 4 Fe “a 
Li nn. Rs 
_ ÎLE annees _ 


à 4.9 et Dernière Livraison du 1°! Volume. 


ANGERS, 


* DE L'IMPRIMERIE DE L. PAVIE. 


1834. 


CRE : 


CNRS 


EEE 


TABLE DES MATIÈRES. 


Agriculture. 
i 
RarporT du jai sur l'exposition hoiticulturale des 6, 7. 


‘Des différens âges du Goût € en Sn ne par M. Boris 
. Lancrois. . . . DE ONE 
* Supplément au même HUes par le méme. . : 


étiS juin 18305-40450. 102 . Page 197 
Nouvelle variété du Camellia , oe de graine par 
M. CacHer , Jardinier-Fleuriste. . . . . . 300 
. Description d’une nouvelle variété de Poire, ee "M $ à 
MILLET , . . . 304 
Mémoire sur les Fromens nes en en ou ou on É 
pes peut y cultiver, par ‘M. Desvaux . . 302 
_i De l’usage_de Chlorure de Sodium , dans le | cas Si Mé- Sr 
téorisme ; par M. LAUNAY—JouBERT. 392 ù 
Sur les Moyens de guérir les animaux domestiques de la Ë CSS 
Météorisation ou Enflure , par M. DE BEAuvoys . : 393 
Sur les Moyens d'utiliser les eo . par M. DE BEAU- 
| voys - 395 
Méthode-Pratique on. ér la Digne, 5x . Dies . 4 
Sciences. î 
Examen chimique d'une Arragonite servant de marné, , * 
trouvée dans le en de la Vienne; par M. P° "ENT 
LEBRETON. . . . 2 A 11898 0 
Sur la découverte faite ne ML eos ne Terre ; he 
à Porcelaine , dans le département de Maine et Loire; 4 
! pa M DESVAUS er APR EAU 0 ee 406 | 
Lettres et Arts. 
Rapport d’une {Commission sur un Tableau‘de tue) | 
M. BLAN. . : . / Die NA 410 
© Sür quelques ne de lAnoa, de “M. Do , % 
LANGLOIS. : . . . NACRE 0. 49370 


( 297 ) 


RAPPORT DU JURY 


SUR L'EXPOSITION HORTICULTURALE 


des 6,7 et 8 juin 1833. 


La Société d'Agriculture, Sciences et Arts d’An- 
gers n’a qu'à se louer du résultat de sa «sollici- 
tude pour l’encouragement de l’horticuliure, dans 
ce département. On voit en effet que les dual 
teurs qui, les années précédentes, avaient paru 
aux, expositions avec désavantage, prennent dé plus 
en plus un rang élevé parmi les horticulteurs. 

Si les nouvelles dispositions , prises pour placer 
les plantes exposées, ont été peu favorables au coup- 
d'œil d'ensemble, au moins la fraicheur et l'éclat 
des fleurs ont été ménagés, et le véritable ama- 
teur a pu jouir de toute la beauté de Jeur inflo- 
rescence. 

La, Société avait arrêté quil “sérait donné un 
Prix aux plus belles variétés horticulturales | obte- 
nues par les cultivateurs, et avait prévenu les CONCUr- 
rens que le Jury se transporterait , d’après leur de- 
mande, au milieu de leurs jardins, , pour. examiner 


21 


( 298 ) 


les objets qui n'étaient pas suscepübles de dépla- 
cement. Un seul s’est présenté, M. Guérn ; et, bien 
que le Jury n'ait point eu de terme de comparai- 
son, cependant fl, a! Œensé que le; nombre des 
nouveautés obtenues dans le genre Rosier, par 
M. Guérin, méritait une Médaille d’argent, et 
que c'était donner en outre un témoignage public 
d'encouragement à un horticulteur distingué, connu 
depuis long-temps par de très belles espèces de 
roses , déjà multipliées dans les jardins des curieux. 
Le Jury a remarqué la Âose hybride sondeur, à 
pétales violets en dehors et panachés intérieurement; 
la Nouvelle, panachée., à pétales rouge-vif, panachés 
de. blanc-rosé ; la, Dremont , blanche lavée de jaune 
et de rose au centre » ,provenue de la Rose Thé 
jaune ; ; la Six-Juin., rose remontanie ; le Triomphe 
de. Guérin ; la Cramoisie- T' Re la Belle de 
Fournas ; le: Thé-Bisson à odeur d’aniselte : il 
phigénie et cplosieurs autres moins importantes , 
touies proyenues de semis que poursuit laborieu- 
sement M. Guérin, depuis plus de vingt années. 
Pour le Prix relatif aux collections les plus nom- 
breuses, et .les plus variées , présentées à l'éxposi- 
tion, le Jury n’a point eu à balancer : M. "Cacuer 
a mérité tous les suffrages , ayant offert une foule 
de végétaux rares et qui n'existent encore que dans 
quelques grandes collections de Paris, d’Anglétèrre 
ou de da Belgique. ea 

a plus, belle plante de MÉre appartenait 
encore à M. Cachet, c'était la Sérelitzia imperia- 
lis ; ausfi, a- -t-elle HA une Médaille de bronze. 


(299 ) 


MM. Beser, Porarp, Binrauzr ont également 
obtenu, chacun , une Médaille de bronze, pour la 
beauté de l’ensemble des végétaux qu’ils ont ex- 
posés, et la belle. tenue, et belle végétation de 
leurs sujets. 

M. Rousseau a obtenu une Médaille, d’argent , 
pour ses Cédratiers nouveaux , provenant de ses 
semis, et pour les belles plantes de son exposi- 
tion. | 

M. Gousauzr , pour ses Roses Thé- Isidore, et 
Noisette-Goubault, a eu un Accessit. 

MM. Auem pe NERBONNE , Ozrivier |, Oxxivier 
(Gaspard), ont mérité chacun une mention hono- 
rable , pour les objets qu’ils ont mis en exposition. 


Les Membres du Jury : 


BIZARD, BOURGOUIN , DELAAGE, 
DESVAUX, MILLET- QUE 


rat 


e db au [+6 Dgsvaux , «Rapporteur: 


( 300 ) 


NOUVELLE 


VARIÉTÉ DE CAMELLIA, 


Obtenue de graine par M. Cacrer, Jardinier-Fleuriste , 


Membre de la Société d'Agriculture , Sciences et Arts 
d'Angers. 


CAMELLIA APPOLLINA. 


Fleur grande (8 centimètres de diamètre), à pétales 
d’un rose tendre uniforme , arrondis et entiers : 
ceux du centre comme tourmentés ou chiffonnés, 
sans mélanges d’étamines. Ecailles calicinales d’un 
vert tendre, légèrement velues. Feuilles larges, 
comme cordiformes. 

Cette variété , remarquable par la beauté de sa 
fleur , ainsi que par le buisson vigoureux et fourni 
qui la porte, se rapproche, par sa couleur seule- 
ment, du Camellia Rosæ-flora, quoique d’un rose 
plus tendre. En outre, ses pétales entiers, amsi 
que la forme de sa fleur, qui est à peu prés celle 
du Camellia conchiflora , sufliront pour l'en faire 
distinguer. En un mot, c’est une belle espèce jar- 
dinière que les amateurs ne manqueront pas de 


( 301 ) 


se procurer , et qui vient augmenter la série des 
variétés de ce genre, si remarquable par son feuil- 
lage et ses fleurs, et dont notre collègue possède 
plus de cent cinquante modifications, au nombre 
desquelles on peut ranger le Camellia reticulata , 
qui a fleuri pour la première fois, vers la mi-mars 
dernière , ainsi qu’une autre variété qu’a obtenue 
M. Cachet de ses semis : le Camellia Punicæ-flora. 


DESCRIPTION 


D'UNE NOUVELLE VARIÉTÉ DE POIRE , 


( Planche xiv. ) 


Dar A. Millet. 


Pome Monceau : fruit gros, allongé, de 7 cen- 
timétres de diamètre (2 pouces 6 à 7 lignes) et 
9 centimètres de hauteur (3 pouces 4 à 5 lignes), 
ventru, irrégulier et comme bosselé dans sa pé- 
riphérie ; peau d’un beau vert tendre; ‘qui passe 
au jaune-citron, à l’époque de la maturité, qui 
arrive ordinairement en février et mars. On remarque 
aussi quelques marbrures d’un gris roussâtre, et 
quelques points légers de la même couleur. Œil 
moyen, légèrement enfoncé. Queue courte (6.à 7 
lignes ), placée quelquefois sur le côté. Le bois, 


( 302 ) 


les boutons et les feuilles de cette nouvelle variété 
ont les plus grands rapports avec le bois , les bou- 
tons et les feuilles du Doyenné-Blanc où poire de 
neige. 

Chäir blañche ) nOù pierreuse, fondanté, rém- 
plie d’une eau trés légèrement acérbe et néan- 
moins fort agréable ; en ün mot, c’est un fruit 
excellent’ bo Ele en BdtrE par son époque 
tardive de maturité. 

Celte nouvelle variété de poire, provenue d’un 
pépin de Doÿenné-blanc,, à été obtenue par M. Mo- 
riceau , jardinier à Angers. Depuis deux années 
qu’elle donne des fruits, elle a pu étre parfaite- 
ment jugée : aussi les pépiniéristes d'Angers l’ont-ils 
multipliée de manière à pouvoir répondre conve- 
nablement aux demandes qui ne peuvent manquer de 
leur être faites par les amateutS de beaux et bons 
fruits. 


MÉMOIRE SUR LES FROMENS 


Cultivés (en France ow qu'onpeut y cultiver ; avec: des 
observations  sur..lés avantages oules inconyéniens 
particuliers à chaque. “a : 

eo du Jardin de Botanique: d'Angers. 


r : 
DRE TPS A CUS ". Î 


Ainsi que par Je passé, il n’est plus permis de 
croire que toute la science relative aux végétaux se 


( 303 ) 

réduit à s'arrêter à l'étude des especes , telles qu’elles 
sont fixées par Les lois adoptées par les botanistes. 
L'importance des varietés jet surtout, des variétés 
objet des, soins des, agriculteurs, est toute autre 
pour.la société, que celle qui se rattache à une 
Algue, à un Lichen, ou; à, une, Mousse. venant 
grossir nos catalogues systématiques. Il ;est certain 
que depuis que nous cherchons.à. étudier les plantes 
dans. leurs rapports avec les intérêts sociaux, tout 
nous prouve que les: variétés, obtenues par les ef- 
forts soutenus de l’industrie agricole, doivent être 
étudiées ayec plus de soin.,.et appréciées ayee plus 
d’exactitude qu’on ne. l’a fait jusqu'à. çe. jour: 

Lorsqu'il est question d’une espèce végétale qui; 
telle qu'est le froment, sert. de base à la nourriture 
d’une, population, d’un chiffre trés. élevé. il, est 
permis. d'en parler ayec quelque détail ; et c'est 
ce..qui nous a engagagé . dans tune exposition un 
peu .plus développée peut-être!, que ne: semblait 
l'exiger le simple titre de Mémoire sur les Fr 
mens. : 
La préférence qu'a-obtenue le froment en Eur ape: ; 
dans une gxande partie de l'Asie ; dans une portion 
de. l'Afrique ; dans l'Amérique du Nord ,et, dans 
beaucoup de points de l’Océanie, bien que,le pro- 
duit des communications avec l’Europe , n’est, point 
la suite d’une opiniâtre ou aveugle prédilection. 
En effet, qu'on veuille comparer nos bonnes va- 
riétés de foret avec les variétés de riz’ de l'A- 
sie, que nous avons signalées dans un travail spécial ; à 
qu’on l’oppose aux trente variétés et plus de mais de 


( 304 ) 


PAmérique , que nous avons cultivées ; qu’on l’étudie 
comparativement avec tous les sorgho dont se nour- 
rissent les nègres, en Afrique ; ou enfin qu’on pré- 
sente toute autre espèce végétale fournissant une fa- 
rine nutritive , et l’on verra que, toute prévention 
mise de côté, aucune de ces espèces ne possède les 
qualités salubres, nutritives et agréables, au même 
point que le froment. 

Parvenus à réunir plus de variétés de froment que 
personne ne l'avait fait probablement jusqu’à ce jour, 
notre travail pourra peut“être sé trouver de quelque 
intérêt, puisque nous avons pu comparer jusqu’à 175 
modifications de! cette céréale , provenant dé toutes 
les régions de la terre où le froment s’est répandu. 
Par ce moyen, il nous a été facile de prendre une 
idée assez complète de tout ce qui a rapport aux 
divers fromens, et d'offrir une masse de matériaux 
qui puisse servir de base à des travaux plus com- 
plets, si l’on veut donner suite à ceux que nous of- 
frons en ce moment. C’est dans l’intention: de‘les 
voir compléter nos recherches, que nous avons dis- 
tribuë différentes collections de froment, en rapport 
de nomenclature avec ce Mémoire (1) , afin de servir 
de point de comparaison avec ce que nous n’aurions 
pu observer. 

Notre travail se trouvera naturellement partagé 


(4) Afin de parvenir à ce, but , j'ai envoyé ‘une collection des es- 
pèces que j'ai pu conserver et multiplier: à la Société centrale d’A- 
griculture, à l'Ecole normale de Grignon, et au Jardin des Plantes 
de” Paris. 


( 305) 


en diverses parties, qui toutes suppléeront à ce qu’il 
serait impossible de trouver dans les ouvrages où il est 
traité jusqu’à ce jour du froment. Nous exposerons : 
1.° des recherches d’étymologie, au moins curieuses 
et nouvelles, si elles ne sont pas utiles à l’agri- 
culture ; 2.° le précis des principaux travaux faits 
jusqu’à ce jour, sur les fromens , afin de rendre à 
chacun la justice qui lui est due, et qu’on puisse 
reconnaître la portion nouvelle qui peut nous être 
attribuée ; 3.° des recherches sur l’espèce considé- 
rée par rapport au froment ; 4° le tableau métho- 
dique des modifications que nous avons reconnues , 
et dans lequel il est possible de classer toutes celles 
qu'on pourra observer ; 5.° des remarques sur les 
modifications de froment les plus importantes , et 
par conséquent les plus utiles à connaître ; 6.° enfin 
des observations sur les fromens blancs. 


&. 1. Recherches sur le nom de Froment. 


Le nom imposé au froment par les Romains était 
celui de Triticum , conservé par les botanistes; mais 
ce mot s’appliquait plutôt à la plante qu’au grain, 
lequel recevait divers noms selon ses variétés, tels 
que far, ador, siligo , etc. À raison de ce que pour 
avoir le grain on frappait , on battait, on broyait 
la paille, de éritus ils firent triticum , ou le battu; 
tandis que le grain prenait le nom de froment, fru- 
mentum. Ce dernier nom qui tient à la plus haute 
antiquité, existait sous une forme plus simple chez 


( 306 ) 


les Hébreux; ear c’est Le: bar des anciens Orientaux: 
dans les langues antiques de l'Oriént, bar qui dési- 
gna notre froment avait d’abord signifié nourriture, 
et est probablement la racine ‘du bromos des Grecs. 

La portion de ces Scytes excurseurs , dans la haute 
antiquité , qui se propagea de proche en proche jus- 
que dans la Gaule, ou la Celtique, y apporta cette 
racine bar, que les Gaulois appliquérent laux gâ- 
teaux ou pains sans levain, dont les habitans se nour- 
rissaient habituellement. 

Le nom de bière ; brasserie , et tous leurs dérivés, 
ont bar pour générateur. On a dit bar ou bière pour 
la liqueur de froment fermenié, :qui était le hracium 
brasgia de la basse latinité, et plus tard hrace, brage. 
Para, ou lait de beurre , et barate, instrument à 
faire le beurre, ont la même origine : le beurre. était 
une pâte que dans l’antiquité on assimila à la pâte 
des fromens, qu’on mangeait alors sous cette forme et 
non sous la forme des pains actuels (1). 

Dans la langue osque , ou des Romains primitifs, 
qui étaient Scytes aussi d’après nous, la prononcia- 
tion se trouva plus rude, et le bara fut changé en 
far , qui s’est conservé jusqu’à nos jours, pour dé- 
signer le froment épéautre et le froment locular: 
Le pyros (‘puros ) des Grecs, autre ramification 
des Scytes antiques , ne nous semble que la modi- 
fication de la même racine ; les labiales Bet P sé 


(1) La polenta des Italiens, les gaudes du Midi, les graux de 
l’ouest de:la Franee!, sont un reste de:cet usage, 


( 307 ) 


changeant très souvent , et les voyelles. a ; e, à 
n’éprouvant pas moins de changemens entr’elles, 
soit parmi le vulgaire, soit dans les idiômes ac- 
tuels mêmes. La désinence a , celle de os ( pyr-0s), 
ne peut empêcher de reconnaître une racine dans 
les langues : ces sortes de terminaisons n'étant que 
des euphonies locales. 

Du mot fur, provenant de bar , les ialiens firent 
plus tard fourmento, et les Français fowrment, frou- 
ment, et enfin froment. Cette racine secondaire far 
fut la souche de tous les noms qui se rattachent à 
fruit , sorti de fructus. 

Les Bas-Bretons, derniers vestiges des Celtes de 
l'antique Gaule , ont dit ffeur pour gerbe de froment 
ou de tout autre blé; et c’est ce mot qui est, d’après 
nous, la véritable transition entre le far des Romains 
etle ffurment des Bas-Bretons, devenu froment pour 
le reste des Français. Maïs c’est assez nous arrêter 
sur des recherches de cette nature, qu'il serait très 
possible d’étendre, sans même répéter ce qui a été 
dit ‘par beaucoup d’autres avec plus d’assurance 
que de jugement. 


$. 2. Précis des principaux travaux faits pour la 
distinction des Fromens. 


Les notions répandues dans Théophraste, Pline, 
et surtout dans Columelle , nous prouvent que les 
anciens distinguaient au moins une douzaine de fro- 
mens. Mais ils sont désignés si superficiellement, 


( 308 ) 


et pourraient être si difficilement rapportés à l’une 
ou l’autre de nos variétés actuelles , qu’on ne sau- 
rait en résultat rien préciser à leur égard. 

Dans ce qui suivra, nous ne parlerons point en 
particulier des sept espèces de fromens cultivés, 
admises par Linné: bien connues de tous les bo- 
tanistes , et adoptées presque exclusivement par eux 
tous jusqu’à ce jour. Mais il est positif que les recher- 
ches véritablement exactes sur les modifications de 
fromens cultivés surtout en France, ne datent que 
de 1784 , et furent faites par le savant agronome 
Tessier. Jusqu'à ce moment, ces recherches, éta- 
blies alors avec beaucoup de soin, ont servi de 
base à presque tout ce qu’on a dit des fromens en 
France ; ou même elles ont été copiées sans excep- 
tion par ceux qui ont parlé de ce genre de.céréales, 
sous les rapports agricoles. Le savant auteur de ces 
recherches, en reproduisant en 1822 son travail, 
dans le Cours complet d'Agriculture (16 vol. in-8.°), 
ne lui a donné aucune autre extension ; ne lui a 
fait éprouver aucun changement , malgré l'intervalle 
de trente-huit années. D’après cela, nous prendrons 
comme terme de comparaison et point de départ, 
ce travail important qui avait un mérite bien es- 
sentiel , celui d’avoir groupé à peu près toutes 
les espèces agricoles de froment connues alors 
dans les collections faites de ce genre de végé- 
taux. 

Il ne faut pas s’imaginer que les espèces ou races 
de froment reconnues par le savant Tessier, eussent 
toutes le même degré d'importance de caractères de 


( 309 ) 


classification ; en effet, au milieu de la série qu'il 
a établie, et dont la plus grande partie ne se com- 
pose encore pour les botanistes que de variétés, 
on trouve des espèces botaniques , telles que le 
n.° 23, qui est le Triticum durum de Desfontaines; 
le Triticum polonicum de Linné , qui forme le n.° 22. 
Le Triticum compositum du même savant Linné, 
est le n.° 20 des espèces de M. Tessier. Les n.° 27, 
où Triticum Spelta ; 28, ou Triticum Far de Mazzu- 
cato ; et le n.° 29, ou Triticum monococcum ; sont 
encore des espèces reconnues par la plupart des 
auteurs. Mais il reste aprés cela vingt-quatre mo- 
difications qui se trouvent placées sur la même ligne, 
et qui ne sont cependant , suivant beaucoup de bo- 
tanistes, que des variétés d’une seule espéce : le 
© Triticum sativum de Lamarque , ou Triticum vulqare 
de Villars. D’après d’autres botanistes, elles doivent 
se ranger dans deux espèces particulières : le Triti- 
cum hybernum , où les fromens sans barbes ; et le 
 Triticum æstivum, ou les fromens pourvus de barbes. 
Lorsque l’empirisme dominera moins la science, 
obligés de ne reconnaître qu’un seul froment , la né- 
cessité nous forcera cependant d'admettre un certain 
nombre de races principales ; et, au lieu d’être retenu, 
comme nous-même l'avons été, on reconnaitra vingt 
souches secondaires, au lieu de dix que nous avons 
proposées, et dans lesquelles seront distribuées toutes 
les modifications qu’il sera nécessaire d'indiquer. 


Voir le Tableau ci-joint. 


( 310 ) 

En donnant pourun des caractères ,:fige pleine , 
à certaines espèces , il faut entendre que c’est seu- 
lement le sommet du.chaume, ou tige , qui est 
rempli d’une moelle blanche : ce qui donne à ces 
espèces plus de force pour résister! aux vents et aux 
orages. | 

Les cinquante-deux modifications , en tout, indi- 
quées par Tessier, tant comme variétés du n.o 1. 
au n.e 29, que comme sous-variétés, ont toutes été 
examinées par lui, et la plupart ont été cultivées 
en grand'et comparativement; mais l’étude faite de 
ces espèces agricoles démontrera qu’il y a un peu 
de confusion dans la classification de ce savant agro- 
nome : les caractères distinctifs n'ayant pas été tous 
établis neitement, etes espèces les mieux carac- 
térisées ayant été mises sur la même ligne. que des 
modifications du -deuxième. et. du troisième ordre. 

Ce tableau des espèces reconnues par M. Tessier, 
est bien loin d'offrir le cadre de toutes les. varié- 
tés notables qui nous ont passé sous les yeux.,et 
n’est pas en, harmonie :ayec la science du, botaniste ; 
aussi, .des observateurs ayant enlreyu que ce ira- 
vail ne ,satisfaisait pas aux besoins de la science, 
et, croyant-en même temps que les sepi espéces adop- 
tées. par Linné (1), ne pouvaient renfermer toutes les 
modificaiions connues, ont établi plusieurs espôces, 
dont,nous donnerons successivement les indications. 


41 


(4) Triticum æstioum, hybernum , compositum, turgidum, 
polonicum , Spelta, et monococum. 


(3H ) 


Le professeur espagnol Lagasca , dans un opus- 
cule qui ne nous est pas parvenu ; Hoste, dans 
ses quatre volumes (1#-fol. ) des Graminées d’Al- 
lemagne ; Barelle (1) et: Mazzucato (2), dans leurs 
monographies des Fromens cultivés, et Seringe (3), 
actuellement professeur de ‘botanique à Lyon , ont 
donné des observations qui-ont plus ou moins ajouté 
au travail qui tendrait à mettre en accord la bota- 
nique avec l’agriculture, sans que l’opinion se soit 
encore prononcée pour adopter les uns ou les autres 
de ces travaux. 

Barelle, outre les sept espèces linnéennes , avait 
établi les Triticum candidissimum , cœrulescens , 
creticum et farrum ; et dans quatre planches à figures 
médiocres , avait fait connaître toutes les espèces 
dont il avait traité. Mazzucato reprenant, en 1812, 
son propre travail de 1807 , publié dans les Ephé- 
_mérides de Brugnatelli; et faisant usage de ceux 
de ses compatriotes, Barelle et Arduini , dont le 
dernier avait réuni un grand nombre de variétés 
dans le Jardin botanique de Padoue; Mazzucato 
parvint à donner une dissertation qui mérite de 
fixer l'attention de ceux qui veulent s'occuper de 
l'étude des Fromens , parce qu'il semble se rap- 
procher plus que tout autre des besoins de la science, 
bien qu’il soit imparfait sous plusieurs rapports. Afin 


(4) Monographia frumentorum. 
(2) Triticorum definitiones. 1812. 
(3) Mélanges de Botanique, À vol. Genève. 


(312) 


qu’on puisse en juger; nous allons présenter aussi, 
sous forme de tableau, les espéces adoptées par ce 
Botanisté, ce qui en simplifiera l'exposition, -en 
même temps que le nom abrégé de chaque auteur 
indiquera , à la fin du nom spécifique, celui qui 
en a établi la distinction: Ghacune des.18 espèces 
renferme , dans le travail de Mazzucato ; plus ou 
moins de variétés. 


Des espèces de Froment d'aprés Mazzucaro. 


(315) 
rubrum. 
| 4 æsnivum. L. ... : ... À trimestre. 
| id. rubrum. 
| 2 canninissimum. Bar. .  aristis nigris. 
| aristis coarctalis. 
aristis nigricantibus. 
villosum , spicé pendulé. 
id. aristis nigricantibus. 


id. spicä albd. 


3 COŒERULEUM. Mar. 


aristis nigricantibus. 

Lamarkeum. 

compositum. 
cæruleum. 


4 Barerxe. Maz . . , . 


o Lawarkeum. Maz. . 


6 Harrerranum. Maz. 
aristis nigris. 

7 cowrosiruw. L. . : : ? spicé glabrd. 
cœrulescens. 

8 Tezvesium. Maz . . . :aristis nigricantibus. 

| spicä albé. 

À aristis migris. 

10 nirsurun. Ard. | 


9 rureinum. L. .'... 


A grain sortant des balles ; balles 


TT n, RER D EE OS 
aristées 
j | velues. glabres. 


spicé rubré. 
41 avsernums L: ::. : : À! granis albis. 
: érimestre!rubrd. 
| spicé albd. 
| spicd aristatä. 


glabres. 


12 Persooniuw. Maz. . . 


sans arêtes. 


15 manerri. Maz. 
velues. 14 Wircognowium. Maz. 


= 45 rarrom: Bar. -. .—muticum: —— 
22.046 Srerras: EL: 1h susuibne-ss ist (EN 


. . » 17 monococcux. L. 


(4 


aristées, 


ans les ball. ; ball. 


.. . . 48 Dunaveuium. Maz. (1) 


(2) Les abréviations qui suivent les noms des fromens sont les premiéres lettres 
es noms de LINNÉ , BARELLE, MAZZUCATO, ARDUINI. 22 


(314) 


En supposant que ce travail fût de nature à être 
adopté et par les botanistes et par les agriculteurs, 
les - quarante - trois modifications étudiées par le 
professeur italien, sont bien loin de représenter 
ioutes celles qu’on peut observer, et même les plus 
importantes de celles existant seulement en France. 
Sous un autre point de vue, ce travail repose sur 
des bases peu rationnelles : des choses qui s’y trou- 
vent étant peu convenablement rapprochées ou éloi- 
gnées. Dans un premier travail , Mazzucato avait 
du son Triticum Barelle par le nom de omen- 
tosum: le Triticum polonicum est icule Triticum 
Lamarkeum ; V'alexandrinum a été changé en Hal- 
lerianum ;.\e creticum en Persoonium ; l'egyptiacum 
en Manetti, et l’anglicum en Haldeno ee 

Le naturaliste suisse, Seringe , dans son travail 
sur les Fromens:, s’est peu écarté de la marche 
suivie par les botanistes actuels. Sous le nom de 
triticum sativum , il réunit les fromens sans barbe 
et avec barbe, ouifriticum hybernum ei æstivum de 
Linné ; il adopte: le ériticum. durum de:M: Desfon- 
taines ; ‘il change le érificum farrum de Barrelle en 
triticum amyleum. Au nombre des huit espèces qu a! 
reconnaît (1) se trouve une modification donnée 
comme nouvelle et comme espèce botanique : son 
Triticum venulosum , venant d'Egypte. 


(1) Triticum sativum , turgidum , durum; polonicum, Spelta; 
amyleum , monococcum et venulosum. Ce dernier ne nous est, 
pas connu avec certitude, mais paraît être cependant une de nos 
variétés de froment amidonnier. 


(315) 


Le travail de Seringe a le mérite d’avoir classé 
un assez grand nombre de variétés, dans les huit 
espèces qu'il reconnaît 

Tel est l’état actuel de la science ou agricole oÿ 
botanique, relativement au froment. Voyons s’il n’est 
pas possible d’arriver à quelque chose de plus com- 
plet pour la botanique et l’agriculture. 


$. 3. Recherches sur l'espèce du genre Froment. 


De l’exposé qui vient d’être fait, on voit qu'il n’y 
a presque aucun accord entre l’agronome et le bota- 
niste, lorsqu'ils traitent du froment comme espèce, 
et que le premier regarde presque toujours comme 
espèce ce que le botaniste ne reconnaît que comme 
variété ou même sous-variété : aussi ; suivant qu’on 
envisage la chose, le nombre des espèces adoptées 
est:ou trop vestreint.ou trop grand. Il est trop grand, 
dès que nous pourrons prouver que;le friticum com- 
positum ,;: ou blé de miracle , n’est pas une ‘espèce 
fixe, ou est composée: de plusieurs espèces ; que le 
tmticum durum vient se joindre au ériticum : æstivoum, 
ou froment barbu , par l'intermédiaire de plusieurs 
variétés. Cependant ; ;si la botanique doit. être! mise 
en laccord! avec, l’agronomie , il est, indispensable, 
d'adopter dans les'fromens , des bases de classifica- 
tion autres que celles! employées jusqu'icr par Les. 
deux:sciences. Si nous ne pouvons conserver iouies 
les:-espèces agricoles comme.espèces., si-les espèces: 
liñnnéennes, ni celles de:Seringe ;«né| satisfont, au 
bésoin. de l'agriculture. ni dela botanique ; d’un 


(316) 


autre côté, nous ne pouvons recevoir toutes Îles 
espèces nominales du botaniste italien, Mazzucaio. 

: Il n’y a que ceux qui ont abordé sans préoccu- 
pation l'étude des végétaux, qui peuvent s’aperce- 
voir. combien la nature se joue de nos classifications ; 
de nos doctorales décisions ; qui entrevoient. toute 
l'insuffisance de nos recherches pour fixer la ligne 
de démarcation entre l’espèce et les variétés. Ce- 
pendant il est indispensable d’établir des groupes , 
afin de faciliter les travaux et de guider dans l’é- 
tude. 

Lorsqu'on réfléchira que l’adoption dans les cul- 
tures de ‘telle ou telle variété, espèce , ou modifi- 
cation de froment, peut augmenter ou diminuer de 
plusieurs millions, pour chaque année, la valeur 
des récoltes en France ; on verra qu’iln’est point 
indifférent de pouvoir s'entendre sur le signalement 
des fromens soumis à la culture ; qu’il n’est point 
indifférent de poser des ‘bases rationnelles pour 
en classer toutes les variétés agricoles. C’esten ce 
sens que nous croyons d’une haute importance tout 
travail qui tendra ‘à éclaircir la confusion existant 
encore sur cette matière. 

Si l’objet du botaniste est de fournir les moyens 
de: classification pour chaque chose, celuide:l’a- 
griculteur doit être d'apprécier chaque production 
d’après les temps, les lieux, les'circonstances. Telle 
modification de froment est plus propre à telou tel 
terrain , à telle exposition , etc. ; mais pour parvenir 
à ce but, il faut pouvoir s'entendre, et jusqu’à 
présent la chose est devenue comme impossible : dix 


(317) 


fromens très différens nous sont arrivés sous le même 
nom, etplus souvent encore des fromens complétement 
semblables ont recu des noms très variés. Ne serait- 
il pas possible de ramener à des noms convenus ou 
déjà adoptés , cette nomenclature interminable, 
que l’arbitraire , faute de moyens rationnels connus, 
a mise en usage? Pour cela il faut s’occuper sérieu- 
sement de la théorie de l’espèce dans les céréales. 

Il s'élève deux questions : Les modifications obser- 
vées par les agriculteurs sont-elles des espèces ? 
toutes Les espèces établies par les botanistes doivent- 
elles être considérées comme telles? 

Nous ne pourrons être de l’opinion du savant 
Tessier, et quelle que soit l'autorité d’un nom si re- 
commandable dans l’agronomie , vingt années d’ex- 
périences faites sur l'espèce en botanique et en agri- 
culture, nous ont forcé d’avoir une persuasion 
différente de la sienne. M. Tessier établit la constance 
des espèces agricoles, et nous, ici, nous venons pro- 
fesser une opinion toute contraire. Si l’agronome 
francais a voulu dire qu’une espèce cultivée en grand, 
dans le même lieu et dans les mêmes circonstances, 
n’a pas totalement changé pendant une succéssion 
de trente années de culture, cela peut être vrai, 
vu d’une manière générale, mais non d’une ma- 
mère absolue.Dans ce cas, il faut seulement dire que 
les modifications de formes qui ont eu lieu, n’ont pas 
été observées , et qu’elles n'étaient pas en assez grand’ 
nombre pour avoir été remarquées dans une grande 
culture. Nos expériences, au surplus, sont posilives 
et d’un résultat tout opposé. Nous dirons. même-que 


(318) 


quelque soin qu’on, apporte dans le choix des se- 
mences employées en grand , on verra toujours naître 
quelques épis barbus dans les fromens sans barbe et 
réciproquement (1) ; des fromens glabres dans les 
fromens velus et réciproquement encore ; des fromens 
blanchâtres dans des fromens rouges ; des épis serrés 
qu.milieu d’une espèce à épis allongés et. épilets 
éloignés : toutes différences qui n’ont pu nous échap- 
per. Mais il faut dire aussi que plusieurs des dis- 
semblances formant des variétés , ne prennent un 
caractère trés prononcé que dans quelques individus 
de ces premières modifications , tandis que d’autres 
retournent à la souche dont elles étaient sorties. 
Ainsi les espèces, surtout en agriculture, ne sont 
nullement fixes, et nous avons l'expérience pour 
nous, et bien plus celle de diriger à volonté la 
nature, pour former telle ou telle variété, suivant les 
moyens que l’étude de chaque genre de végétal four- 
nit pour cela. Nous avons pu même établir quelques 
règles pour arriver à nous former une théorie de for- 
mation des espèces : 1.° les modifications ou variétés, 
dans le plus grand nombre des cas, n’ont pas lieu 
brusquement, mais par des nuances souvent très 
légères et qui échappent aux observations superfi- 


(4) Quelquefois les fromens sans barbe ne la reprennent que gra— 
duellement , ainsi que l’a observé un agronome recommandable , 
M. Bujault de Melle; et Yon'voit la partie supérieure prendre seule 
des barbes , ou bien. la totalité de l'épi a des: barbes d’une moyenne 
longueur ; d’autres fois un épi très barbu se montre au milieu d’épis 
sans barbe , bien que toutes les précautions pour éviter l'erreur à 
cet! égard! aient été prises: 


(319) 


cielles ; 2.°les dispositions à la variation existent dans 
l’organisation de la graine, et sont entièrement in- 
dépendantes du sol , de l’exposition, etc. ; 8.° l’ac- 
tion continue d’un genre d'exposition, au moyen 
duquel un végétal est fortement frappé de l’action 
de la lumière, ou placé dans des conditions qui ne 
lui sont pas ordinaires, lui imprime des propriétés 
nouvelles, qui se transmettent et deviennent constitu- 
tives pour un certain espace de temps; 4.° une espèce 
ou variété varie d’autant moins qu’on l’a cultivée de- 
puis long-temps , et qu’on a eu soin de toujours la 
renouveler avec les graines des individus ayant tous 
les caractères des modifications que l’on veut pro- 
pager. 

Ce n’est pas à notre témoignage que nous en ap- 
pelons pour faire reconnaître ces vérités, c’est à la 
nature , c’est à l'expérience , lorsqu'on apportera 
une attention convenable dans les observations. Si, 
avec quelques variétés réunies de haricots, nous 
sommes parvenus à obtenir plus d’un millier de va- 
riétés bien distinctes, sans compter le grand nombre 
de celles que nous avons été obligé de négliger, 
nous avons la certitude qu’en appliquant les mêmes 
soins aux fromens , on parviendrait à suivre la dégé- 
nérescence d’une modification à une autre, ou à créer 
de nouvelles modifications, comme l’expérience nous 
l'a prouvé pour tous les végétaux que nous avons 
étudiés sous ce point de vue. 

En convenant avec nous que les fromens cultivés 
ne sont pas des espèces telles que les naturalistes 
caractérisent ce genre d’abstraction des êtres, on 


(320) 


demandera peut-être quelle opinion on doit se faire 
des espèces annuelles de froment reconnues par les 
botanistes? Nous; allons répondre à cette question, 
qui est peut-être moins importante en réalité, qu’à 
raison des préjugés qu’attaquera la solution que nous 
allons en donner. 

C’est une question qui a souvent été agitée, de 
savoir si le froment que nous cultivons se trouvait 
spontanément dans quelque partie de la terre. Notre 
opinion particuliére est de penser que cela est impos- 
sible, pas plus que de trouver une prune de reine- 
claude ou une poire de bon-chrétien dans les forêts. 
Le voyageur Heintzelmann dit bien avoir trouvé le 
triticum æstioum de Linné , ou froment barbu, dans 
les campagnes incultes des Baschirs, dans la partie 
montueuse de la Tauride, entre Carassubazare et 
Allmetschet ; mais qui nous dira , si le fait est réel s 
que ce ne soit pas les vestiges des communications 
de la Grèce ancienne avec la Tauride, que l’on sait 
avoir été fréquentes? Nous croyons même que le 
froment est une espèce créée par l’homme, et sor- 
tie d’une race agreste, et qu’elle est aussi éloi- 
gnée de son type que la brebis l’est du mouflon ou 
de l’argali dont elle sort. S'il se rencontre une es- 
pèce sauvage, ayant des caractères analogues au 
triticum Spelta , ce sera probablement plutôt d’elle 
que du ériticum œstivum , que seront sorties nos 
espèces actuelles. L’Epéautre ( 7rit. Spelta), est en 
effet plus rustique que les autres espèces , et se rap- 
proche beaucoup de quelque modification du froment 


rempant, dont on a fait aussi diverses espèces nomi- 
nales. 


(321) 


Le professeur de botanique Latapie ; à Bordeaux , 
avançait , d’après des expériences qu'il aurait faites, 
que le froment provenait de l’œgylops ovata, qui est 
annuel, et si commun en Sicile qu’on en vend les épis 
grillés pour les manger, comme ailleurs on mange le 
mais grillé. Mais les travaux de Latapie, dont les 
résultats ne répugneraient point à notre croyance, 
d’après ceux aussi extraordinaires que nous avons 
obtenus dans d’autres genres, ne sont précisés dans 
aucun ouvrage particulier, et auraient mérité d’être 
connus ; nous ne pourrons donc les apporter ici que 
comme présomption favorable , pour faire penser 
que les espèces du froment actuel sont dues à l’in- 
dustrie de l’homme. 

La différence qu’on remarque entre tous les fro- 
mens n’est très souvent que la différence de variété 
à variété , reconnue pour d’autres végétaux. Aussi la 
propriété de quitter ou de ne pas quitter facilement 
les balles, n'est-elle pas de l'importance qu’on 
pourrait le croire au premier aperçu , en voyant 
les orges présenter cette même particularité pour ce 
qu’on nomme les orges mondés , et ainsi que le font 
encore quelques avoines. Les barbes persistantes ou 
non, ou manquant entièrement, ne sont que des 
modifications de variété. La présence ou l’absence 
de poils sur les glumes est dans le même cas. Les 
épis rameux ou simples ; la forme , la couleur du 
grain; celles des glumes , n’offrent toujours que des 
caractères de variété. La couleur, glauque ou bleuâtre 
des feuilles n’est qu’un caractère de variété, ainsi 
que nous l’avons prouvé il y a très, long-temps. 


(32) 

S'il y avait une espèce à reconnaître dans les 70— 
mens, ce serait peut-être le 7riticum monococcum ; 
mais la couleur très verte de la feuille cesse d’être 
caractéristique lorsqu'il est en maturité , et si on le 
compare surtout à quelques variétés de froment qui 
sont voisines de celle-ci. Nous conclurons de là, 
malgré l’autorité des botanistes, qu’il n’y a qu’une 
seule espèce dans tous les fromens. 

Si l’on voulait réfléchir comment ont pu se mo- 
difier graduellement les fromens, nous prendrions 
pour point de départ le plus naturel, l’Epéauire ( Tri- 
ticum Spelta), que Michaux père paraît avoir trouvé 
sauvage en Perse , sur une montagne, à quatre 
journées au nord de Hamadan. De cette espéce il 
y à un passage au Froment plat, par l'intermédiaire 
du Froment amidonnier ; du froment plat aux autres 
modifications , il est plusieurs points de contact, ou 
des passages très naturels , que nous prouverions 
d’une manière irrécusable , si nous avions entrepris 
d'établir la filiation de toutes les modifications exis- 
tantes. Le Froment de miracle(Triticum ceompositum), 
n’est qu’un Triticum turgidum rameux; et le froment 
renflé, lorsqu'il perd ses poils, ne peut ètre séparé 
du froment plat. 

Le Froment de Pologne est l'espèce ou race qui 
nous a offert le plus de difficultés pour saisir ses 
points de contact avec les autres fromens ; et si nous 
Re prenions pas un soin particulier pour faire Îles 
semis et les récoltes de tous nos objets d'expérience , 
il nous eût été impossible de constater avec certitude 
ces rapports. Nous n'avons possédé primitivement que 


(523 ( 


l'espèce à longs épis et longue barbe : elle nous a 
fourni des individus à épis courts et plus pressés , 
qui, serrés eux-mêmes, nous ont donné une variété à 
épi très court d’où est sortie une variété sans barbes. 
La variété à barbes courtes a fourni une variété à 
barbes noires, et celle-ci a enfin donné un froment 
à glumes, à la vérité un peu plus longues que le 
froment dur ( Triticum durum , Desf. ), mais ne pou- 
vant être séparé du froment amidonnier , à barbes 
noires , si son grain ne se füt pas dégagé très facile- 
ment de la balle. 

Ce sont de semblables observations qui , répétées 
sur une longue série de végétaux, ont seules pu nous 
donner des idées sur l’espèce en histoire naturelle, 
autre qu’on en a ordinairement. C’est ce qui ne 
nous persuade pas seulement , mais nous prouve 
sans aucun doute , qu’il n'y a qu’une seule espèce 
de froment dans le froment cultivé. 

Si Les espèces de froment des agriculteurs ; si celles 
des botanistes , d’après nos réflexions précédentes , 
ne sont que des variétés, on demandera comment 
nous pourrons faire des groupemens. Nous agirons 
comme les botanistes eux-mêmes dans quelques cas. 
Par exemple, la nature n’a fait que trois classes de 
végétaux, et la science a distribué la deuxième en 
trois classes et la dernière en onze autres classes. 
Nous formerons donc des groupes de variétés, sous 
le nom d’espèces ; et nous y rattacherons des variétés, 
des sous-variétés de deuxième et de troisième ordre. 

Les botanistes nous accorderont sans peine que les 
espèces de froment des agriculteurs ne sont que des 


( 324 ) 


variétés, mais ils voudront maintenir les espèces adop- 
tées dans leurs ouvrages. Cependant déjà ils ont cédé 
pour les Triticum hybernum et œstioum , ou froment 
barbu et non barbu, qu’ils ont réunis dans une seule 
espèce. Le Triticum compositum n’est certainement 
qu'une monstruosité obtenue par la culture, et qui 
dégénère assez facilement. Le Triticum durum se 
perd au milieu de certaines variétés du Triticum 
æstivum ou barbu , ayant l’épi un peu comprimé : 
notre Triticum compressum. Le Triticum turgidum 
n’est vraiment qu’une variété bien facile à réunir au 
Triticum œstivum, lorsque ses glumes passent à 
l’état glabre : comme cela est d’observation pour 
nous. Enfin le Triticum Spelta avec arête, est bien 
facile à confondre avec certaines variétés du Triticum 
œstivum, qui sont cultivées en Italie , mais dont le 
grain se détache facilement des glumes. Dès-lors , si 
nous semblons adopter des espèces principales, c’est 
moins dans l’opinion que ce sont des espèces, telles 
que les concoivent encore les botanistes, qu’à raison 
de la commodité pour la distribution et la classifica- 
üon de ioutes les formes de froment qu'a obtenues 
l’agriculture. 

Dans le tableau que nous, allons donner de toutes 
les modifications de fromeni qui nous ont passé sous 
les yeux, et que nous avons étudiées et. comparées 
sous plusieurs points de vue, nous signalerons avec 
d'autant plus de soin les variétés et même.les va- 
rictés de plusieurs sous-variétés , que par. ce-moyen 
il sera possible d’y ramener la presque totalité des 
formes existantes ; et s’il en est, comme il n’y a pas 


(35) 


de doute, qui nous soient échappées, il sera facile 
de les placer avec les espèces dont elles pourront 
se rapprocher le plus. 

Ayant étudié dans les diverses contrées de la France 
les espèces de froment qu’on y cultive en grand , 
ou celles qui sont mêlées avec elles , sans que le vul- 
gaire les ait remarquées , nous en pourrons d'autant 
mieux constater soigneusement les formes existantes : 
surtout ayant pu utiliser encore la bienveillance des 
établissemens publics; tels que le Jardin de Botanique 
de Paris, la ferme-modèle de Grignon, ete.-Notre 
correspondance nous a fourni les moyens de donner 
une plus grande extension à notre travail actuel, 
que ne l'avait l’Exposé sur les Fromens , livré déjà 
à la publication par un ouvrage populaire (1). C’est 
en nous entourant de tous les moyens possibles, que 
nous avons pu former un tableau plus étendu et plus 
complet que jusqu'ici n’en a offert aucun ouvrage 
d'agriculture. En utilisant les travaux de ceux qui 
nous ont devancé, nous n’aurons pas l’injustice d’ou- 
blier , ainsi que cela ne se fait que trop souvent, 
les hommes qui nous ont préparé les voies par leurs 
laborieuses élucubrations. 

En réalité, si nous tenions à reconnaître abso- 
lument des espèces de froment, dans le sens des 
botanistes de l’époque actuelle , nous ne pourrions 
reconnaître tout au plus que trois souches : le Tri- 


(4) Dans l'ouvrage intitulé : Précis d'un Cours d'Agriculture, 
ou Znstitutions agricoles , 2.e édition, pag. 95 à 408. 


( 326 ) 


ticum sativum , le Triticum monococcum , et le  Tri- 
ticum \Spelta. Tout en convenant de leurs différences 
actuelles, nous pensons qu’elles ont. pu provenir 
d’une espèce primitive , maïs dont les modifications 
transitoires ne se retrouvent plus. | 

Si, dans les deux dernières des espèces que nous 
avons cru adopter, il y a beaucoup plus de variétés 
que dans les premières, c’est qu’elles ont toujours 
possédé des qualités supérieures , soit sous le rap- 
port du grain, soit pour la facilité de quitter les 
glumes ou balles. De là des soins que leur ont donnés 
plus particulièrement les agriculteurs; soit pour.les 
multiplier, soit pour en propager les variétés ; et 
de là leur culture plus générale que Îles autres es- 
pèces : restreintes à quelques contrées et dans quel- 
ques circonstances de localité. 


$&. 4. Des espèces de Fromens qu’on peut reconnaître 
pour. l'utilité de la science de l’agriculteur et du 


botaniste. 


En croyant qu'il n’y aurait rigoureusement À re- 
connaître qu’une ou deux espèces; trois au, plus de 
froment, nous senions qu'il faut pour l’usage en 
établir un plus grand nombre que ne. l'ont fait les, 
botanistes ; 5. Mais aussi un bien moindre que ne le 
font les ner pour lesquels toute, variété fixée 
est une espèce. C’est entre ces deux extrêmes que 
nous tâcherons de trouver une moyÿenne qui satis- 
fasse aux besoins de la Botanique et de PAgri- 
culture. 


(327) 


Pour ce qui est des espèces dites froment de trois 
mois , et dont il y en a beaucoup qui varient sui- 
vant les contrées, ce sont des races un peu plus 
ou un peu moins précoces. Ayant fait des semis au 
8 octobre , au 4 novembre, au 8 décembre , au 12 
décembre, au 28 janvier et au 18 avril, dans une 
même localité, il n’y a eu de différences bien réelles 
que pour. les espèces semées en avril, dont les unes 
ont monté plus tard et les autres n’ont monté en 
épi que l’année suivante. 

Lorsqu'on veut avoir l’ensemble des caractères 
d’une espèce de froment où d’une variété, il est 
indispensable qu’elle soit en parfaite maturité, car 
sans cela on ne voit ni la couleur de lépi ni 
celle des balles ( la glume ou le calice des bota- 
nistes ), et la forme et la couleur du grain n’est 
point appréciable. La direction même des barbes ne 
peut être aperçue que lorsque l’épi est mür; car 
dans quelques variétés , de dressées qu’elles étaient 
en vert, elles sont divergentes lors de la maturité. 
D’autres modifications des fromens n’ont les barbes 
caduques qu’à la parfaite maturité. 


&. Fromens à grains restant renfermés dans les 
balles. 


I. FROMENT Exeran ( Triticum monococcum ) ; 
épi tres comprimé , à deux rangs opposés de grains 
très rapprochés ; un seul grain par étage; glumes 
presque à trois dents aiguës ; barbes verticales mé- 
diocrement allongées, et une seule par étage de grain 


(328) 


toute la plante d’un vert d’herbe ; gram pelt, 
aplati, dur, sans sillon, comme trigone et plus 
large vers le milieu. 

C’est l'espèce qu’on nomme Petit Epeautre, In- 
grain , où Engrain , dans diverses parties de la 
France. C’est le froment locular de beaucoup d’au- 
teurs , et le n.° 29 de Tessier. 

1. F. Excran veru ( Triticum monococcum pubes- 
cens ); glumes couvertes de poils, à deux pointes 
aiguës et blanches à la maturité. 

Cetie variété est élevée ; et tardive, si on la com- 
pare à tous les autres fromens engrains. Elle à une 
sous-variété à ‘slume jaune-brunâtre. 

2. F. Enerain rarre ( Triticum monococcum fu- 
cescens ) ; glumes glabres’; jaune-brunâtre; épis un 
peu pus petits, ainsi que le chaume, que dans le 
premier ; barbes très fragiles. 

Nous l’ävons recu sous le nom d’Engrain brun et 
de Petit Epeautre. 

3. F. Encraix e1aAnc ( Triticum monococcum minus. 
H. Par. ; T:monococcum, À De C: fl. fr. ). Carac- 
ières du précédent , mais les glumes blanches ‘et la 
tige plus courte ; sa maturité plus prompte de quinze 
jours , le distingue très bien. 

Nous l’avons recu sous les noms d’Epeautre du 
Cap , d'Engrain , d'Epeautre d'automne du Cap. 
C’est le froment locular lisse de la Flore Francaise. 
Il prend quelquefois aux balles une teinte jaunâtre , 
et forme älors une sous-variété ( froment engrain 
jaunâtre ), qui sont le nom de Petit monococcum et 
d’Epeautre du Cap , se distingue en outre par son 


(329 ) 


chaumé très court et sa précocité. Bien qu'ayant 
été semé le 28 janvier , il a été en maturité dix 
jours plutôt que l’autre qui avait été semé le 8 oc- 
tobre. £ 

IT. FROMENT raux-Excra ( Triticum unibarbe) ; 
épi très comprimé, à deux rangs et à grains très 
rapprochés ; glumes à deux grains par étage ; une 
seule barbe très longue, l’autre nulle et très courte ; 
balles obtuses , échancrées ; toute la plante d’un vert 
bleuâtre. 

1. F. raux-Encrain Banc ( Triticum unibarbe al- 
bum ); épis blancs à glumes lisses. 

Il est probable que cette espèce, parfaitement 
distincte, est confondue avec l’Engrain dont elle a 
le port et les dimensions ; cependant elle est un peu 
plus forte que les variétés de l’Engrain ; pour le 
chaume, mais bien moins que les variétés de l’es- 
pêce suivante. EN 

. Elle semble former un passage entre l’espèce pré- 
cédente et la suivante, et confirme nos vues sur 
l’unité d'espèce dans le froment. 

III. FROMENT Epvraume ( Triticum Spelta ; Tri- 
ticum Arduini, Mazz. ); glumes à trois fleurs , dont 
deux seules fertiles, presque: tronquées, à courte 
épine ou pointe ; #lumelle aiguë ; épis trés allongés, 
très espacés , fragiles ; barbes dressées , lorsqu’elles 
existent. 

_ C’est l'Epéautre , la Grande Epéautre , V'Epéautre, 
la Speoüta du midi de la France; du Poutre ou de 
la Poutre, dans la Haute-Vienne , et’le “Blé, chez: 
les Belges.  ) SRTACOA AMAUAGAAL EE | 

23 


(:330:) 


Le grain de toutes les Epéauires, est allongé, a 
trois côtes ou angles fortement prononcés et, por- 
tant, en devant un sillon profond:; il.est ordinaire- 
ment dur et à cassure peu farineuse. 


I. Epéautres à barbes. 


"1: F° Erraurre sac ( Tréticum Spelta alba ; Tri- 
ticum Spelta Mazz. ); glumes blanches, glabres ; 
barbes médiocres: do’ es 

2. F. ErrauTre ROUGEATRE ( Triticum Spelta rubes- 
cens ); glumes glabres , blanc-rosätre. 

Cest le froment Epéautre barbu, n°27, de 
Tessier. site 

3. F. Erraurse oRpNARE ( Triticum Spelta ‘vul- 
gare ); glumes glabres , jaune-blanchâtre. | 

A. F. ErEAUTRE nomATre ( Triticum Spella nigres- 
cens ); glumés gris-noirâtre où noirâtres , trés! pul- 
vérulentes et très pubescentes. 

C'est le! blé rouge barbu de Barelle , de quelques 
collections. snfté ” 

5. F. Epraurre vecu ( Triticum Spelta hirsutum ” 
glumes blanc-jaunâtre , pubescentes. 

Toutes ces modifications se ressemblent àT ie _E 
pour 14 longueur des barbes. 


IL. Epéautres sans barbes. , 5024 ai 


_6.,F. Erraume crisamre, (: Triticum. Spelta. 1 muti- 
cum ); glumes blanc-jaunâtre ou SE Es ai 
gérement;velues. je 

7. F. EPEAUTRE ROSATRE ( Triticum Spelta. rOsea ; à 


(381 ) 


Trit. Spelta muticum Bar.; Trit. Duhamelium Bar. ) : 
glumes glabres, DS DES 

C’est le farro rosso et le Spelta rossa des Italiens 3 
le froment Epéautre, n.° 26, de Tessier. 

8. F. EpraAuTRE BLANC sans pare ( Trüticum Spelta 
albida ); glumes blanches, couvertes d’une abondante 
poussière glauque. 

9. F. Erraurre roux-veLu ( Trificum Spelta pubes- 
cens ) ; glumes roussâtres, un peu velues. 

Sous le nom d'Épéautre sans barbes et dE péautre 
barbu , on confond les neuf variétés que nous indi- 
quons ici, ainsi probablement que plusieurs autres 
qui existent peut-être encore et qu né nous sont 
pas, connues. 

IV. FROMENT ammonvren ( Trofiqum farrum 
Bar. ; Zritic. dicoccon Schreb. ; Tritic. cienfugos Lag.; 
Trib. amyleum Sering.; Zea-dicoccon et far des an- 
ciens }; glumes couvertes d’abord d’une poudre 
glauque; deux des trois fleurs fertiles ; épi trés 
comprimé , serré barbes dressées, lorsqu’ élles exis- 
tent. à ce 

C'est l’Epéautre serrée de la Flore png on et 
le ‘Spilta magyiore , Farro , Alqa et Orzuola “des 
Italiens. Mean ee pr 


Sert 


Dore Bree 

CAT AMIDONNIER SANS. BARBE La 7 riticum farrum muli= 
cum Bar. ; Triticum amyleum BP, Ser. ): : entiérement 
dépourvu de barbes. 


JD ' IEAUE 


(332) 
II. Avec barbes. 


2. K. ammonnier BLANC. ( Tréticum farrum album. 
Nos.; Triticum cienfugos Lag.; Tritic. amyleum A. 
Ser.); balles blanches, lisses, avec poussières glau- 
ques et une pointe recourbée. 

C’est la plus petite des variétés de cette espèce, 
sous le rapport des épis. Elle est mûre la premiére, 
parmi toutes les variétés de froment qui nous sont 
connues. Elle porte les noms d’Æwidonnier blanc , 
Epéautre serrée , Fpéautre blanche aristée, Epéautre 
du Cap, Epéautre du Cap d'Automne, Epéautre de 
Mars , grand Monoccocum, Blé amyleum. 

Il est susceptible de présenter des teintes blanchà- 
tres ou jaunâtres peu appréciables. 

3. F. ammonnrer roux ( Triticum. farrum rufum 
Nos. ); épi roussissant, glabre, passant quelquefois 
au brunâtre. 

Cette espèce ou variété est plus élevée et a les épis 
plus gros que la précédente, mais moins que la sui- 
vante, dont elle a le port et la couleur. 

4. F. ammonnier ÉLEVÉ ( Triticum farrum major ; 
Triticum Bauhini Lag.);. épis roussätres, glabres, 
gros , passant au rougeâtre. 

Ainsi que la précédente, cette variété est trés 
distincte et bien fixe. Depuis douze années que 
nous la cultivons , elle s’est bien maintenue. 

Il nous semblerait que le Triticum venulosum du 
professeur Seringe, qu’il dit provenir de l'Egypte, 
aurait des rapports avec cette variété, si ce n’est 


(335) 
la même : d'autant plus qu’elle est dite appartenir 
à cette section des fromens : c’est-à-dire de ceux 
dans lesquels la glume ou balle persiste sur le 
grain et l'enveloppe même après le battage. 

5. F. amimonnier DE TARrARIE (Tréticum farrum 
tartaricum ); épi jaunâtre ou blanc-jaunâtre , à 
glumes dont la pointe est trés courbe et, très aiguë. 

Le Blé de Tartarie est resté de stature plus pe- 
tite que toutes les variétés précédentes, tout en 
conservant ses épis aussi gros; mais ces épis ont 
eu une tendance à redevenir plus compactes qu’ils 
ne le sont ordinairement. Jamais nous n'avons, vu 
parfaitement réussir ce froment, bien. que. placé 
dans toutes les circonstances des autres fromens 
amidonniers. Le grain est glacé, gros, long et très 
velu au sommet et comme cylindracé. x 

6. F. amnonner veLu ( Triticum farrum villosum ; 
Triticum amyleum C. Sering. ); épis gros, blancs, 
à glumes velues. | 

7. F. ammonnier pARBE-NOmE. ( Zréticum farrum 
nigrescens; Triticum atratum? Most. ; amyyleum D. 
Sering.) 11 ressemble en tout’au précédent, seu- 
lement il a les poils brunissans et les barbes noires 


ou noirâtres. 

Ces deux espèces ou variétés , qui. passent sou- 
vent de l’une à l’autre, ‘établissent un passage si 
naturel entre le froment amidonnier et le froment 
comprimé où le froment d'Afrique, qu “il n y a que 
la différence existant entre Porge ordinaire et Porge 
nue. LPRRGTE PRE é-ted) 
8. F. ammonnier RAMEUx.:( Tréticumi farrumiramo- 
sum; Triticum amyleum E. Sering.) 


( 554 ) 
Cetté variété, que, nous. indiquons ; d’après, le 
professeur de botanique à Lyon, ne nous est pas 
connue. 


&. 2. Fromens à.glumes non persistantes sur le grain, 
mais très, libres et très. longues (1). 


V. FROMENT de Porocxe ( Triticum poloni- 
cüm L.; Triticum Lamarkeum Mazz.); glumes al- 
longéés, grandes, foliacées , écartées du grain, d’un 
blanc jaunâtre , glabres ou velues: axe des épis à 
dents trés poilues; grains très longs. 

Cest le Ble de Pologne , le Froment de Pologne , 
le Seigle de l'Ukraine, Seigle de Pologne de beau- 
Coup d’agronomes. É grain est un peu dur, ou 
glacé, long et gros. 


C2 


54: Suns barbes: 


va F. je cs SANS BARBE (Heures polonie 
cum mutieum N° ).. 

:Epi pressé court, 158 
di est..sorti. de laivariété n°5. 


paie La ee Parbes. 
pl É: DE Poroëne | A Toner BARBE ( Tritioun | po- 
lonicum barbatum de épis lâches, penchés, à longues 
barbes ; Pois, peu apparens sur lès balles. 


(4) C'est-à-dire ne s’appuyant point sur le grain , comme dans. 
lesvespèces\dn troisième Paragraphe. : / 10 : 5 


(835 ) 

C'est la variété la plus répandue ‘et ‘la plus cul- 
tivée. | 

3.1F 5e Porocre ver ( Triticum poloricun: vil- 
losüm ). 

Il ressemble au précédent , seulement Isesglumes 
sant beaucoüp plus velues. to 

4. F. pe Poroene A COURTES BARBES ( Trèticum 
polonicum breve-barbd ); ‘pis lâches “et barbes 
courtes. 

5. F. pe Porocne compacte ( Triticum poloni- 
cum compactui ) ; ‘épis présque dressés, compactes, 
à barbes médiocres. 

Nous l'avons recu sous Îles DOmMS "de Blé de 
Mogador , Bié de Surinam Blé d' Egypte. 

ïl ÿ à une sous-variété à épis courts et “dressés. 

6. F. ne Poroëne À BARBE! NOIRE, (Lritioum por 

* nicum nigro-barbatum |. 

916 rattache à la variété phcere” Séuéhent 

ses 'barbes Sont noires. 
7. F. DE PoLoGNE RAMEUX ( VF ébieun “polonico- 
Féjbridhn Barelte. Mon0g Fra. t. 2, fe 8. ‘4 épis 
se en rameaux . | 
"Cette € espèce a ün épi. rameux ; md 'e nous ne la 
pos Sédons point, pas plus que, celle qui est cou- 
“Verte ‘de! beaucoup plus de prüuine ‘sur son feuil- 
lage que les variétés ordinaires, et que pour. “cela 
on à “nommée | ritioe cum polonico - Cœruleum : sorte 
de modification q qui nous étonne d'autant moiné que 

toute graminée ‘esl buscephible ’de se ‘présenter verte 
je recouverte d’une poussa blane-bleuitre lus ou 
MOiRS ‘dbondanté , Comme on le voit dans plusieurs 


(336 ) 


fromens, et notamment. dans, celui nommé froment 
bleu. D’après cela, le froment de Pologne présente, 
au moins, jusqu’à ce moment , dix. formes distinc- 
tes, en y comprenant celle qui tend à la ratta- 
cher au .froment, d'Afrique, et, dont nous avons 
parlé au troisième paragraphe de ce Mémoire. 


6.13. Fromens à glumes non persistantes sur le-grain, 
mais s'y appliquant exactement. 


VI. FROMENT p’Arrique ( Zriticum durum Desf. ; 
Tritioun gallicum Arduini; Triticum tomentosum 
Barelle; Zriticum Barelle Mazzucato; Triticum mazxi- 
mum Tournon., Klore de Toulouse ) ; glumes velues 
ou presque glabres, à quatre fleurs, mais deux 
sont toujours stériles ; l’épi est comprimé, pendant, 
l'axe de l’épi à articulations trés, poilues : chaume 
plein au sommet; barbes droites ; grain allongé, 
corné, presque anguleux et grisâtre, et très .dur : 
quelquefois jaunâtre. 

Cette espèce , par son port, _se rattache sans 
aucun doute au froment renflé. | 

1. F. D'AFRIQUE BLANCHATRE ( Triticum durum.com- 

mune; Tritic. durum À Sering. ; Zrütic. trevesium 
Mazzuc.) ; épis à glumes blanc-roussätre ; , poils blan- 
châtres. CORTE 

C’est le Froment de Barbarie , le Blé de Barba- 
ie, le Blé corné, et le froment n.° 23 de, Tessier, 

2. F. n’ArriQue nomarne ( Zritècum durum nigres- 
cens. LI 

Il ne diffère du précédent. que par ses poils. des 


(337 ) 


glumes brun-noirâtre et ses barbes également noi- 
râtres. Nous l’ayons recu sous le nom de Blé. bleu 
conique et Blé poulard,bleu ; Froment. à barbes et 
à balles violettes. Ce dernier a le grain plus, petit 
et le même port, et se propage bien ( Zriticum 
durum. medium ). 

8. F. ne Tawçearocx ( Zriticum durum Tangaro- 
cence ) ;. glumes légèrement velues, plus on moins 
colorées. en noirâtre , ainsi que les barbes. 

Cest encore le froment. du. Bengal , d’après des 
envois que nous ayons reçus. 

4.:F. ne Tancarock, 81anc ( Zriticum durum. al- 
bescens. ). 

Cette, variété diffère peu de la précédente, si ce 
n’est, qu’elle est blanchâtre, très couverte de pruine 
glauque, au lieu d’être velue. Elle forme un :pas- 
sage très naturel avec l’espèce suivante par plusieurs 
de, ses, variétés. Son grain.est gros et jaunâtre. 

5. F. n’Arrique saunamre ( 7riticum, durum mon- 
golicum) ; épis à barbes et balles jaunâtres ; balles 
très peu parsemées de poils, à pointe courte pres- 
que obtuse ; axe de l’épi à très longs poils ; grain 
dur. 

Cette variété, qui est remarquable, a toujours 
mal. réussi. Peut-être veut-elle des terres sablon- 
neuses,, et.nous..ne. l'avons. cultivée! que dans des 
terres argileuses.. Elle est. cultivée dans la Manaplie 
chinoise. 

VNIL:FROMENT pxar.(, Zriticum. complanatum ; 
Dour cerilern Mazz. ); glumes plabres ,.à,trois 
ou quatre fleurs, dont deux fertiles ; épis aplatis 


( 338 ) 
penchés , à axe souvent très poilu; babes longues, 
droites, lorsqu'elles ‘existent ; grains 6blongs ‘où 
'éourts, quittant quelquefois AH GeribAt lés slumes. 
La tigé où chaume ét rémplie de “moëlle à la 
partie supérieure. . 

Bien que cette espèce soit une dés mièux tran- 
chées , surtout dans Te midi de l'Europe, elle est 
peu connue. Elle a des points de contact avec plu- 
sieurs des ‘éspèces précédentés et avec les’suivantes. 
Par les deux premières variétés Pärbues , elle se 
rattache aux grandes variétés de froment ahidonrier ; 
par plusieurs autres/ elle se rattache d’un côté au 
froment d'Afrique, par le froment de Tanÿarok, 
qui a comme elle le grain dur; ét d’un autre côté, 
par la variété non barbue entr’ MR élle'se jattadhe 
au froment d'Eté ( Triticurn Bo yo | au moyen 
d’un gram moins allongé, plus arrondi et Souvénit 
tendre et très farineux. Plusieurs de ses vafietés stit 
Signalées par le nom de Blé de Providence. Ee Tri- 
“ticum ‘cœrulet. de Mazzucato fentré ‘dans cette” és- 
pète , “comme variété. . A 


[. Won pourvus E HE sb 


1 18 » 
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IST 728 : 310 15 


og Fiopcèt sas sr ( Tréficinn Compressièn in 
“herbe épi blané-jéurâtré ‘glümis" renflées®"raü- 
cronées., À pointé digué :l grain court? vo SF 
geûtre et tendre. cisho 
< SE trouve” miète a ee, de ta ue “. 


Frânte : 914pI0 come + so list 
EC plstreit ! 


( 359 ) 
IT. Avec des barbes. 


2. F.p»rar ecanc ( Triticum compression album N.; 
Triticum candissimum ? Barelle ); épis blancs ; pointe 
de la glume allongée, peu courbée ; grain allongé , 
translucide, anguleux, grisâtre, quittant quelquefois 
avec assez de difficulté les glumes. 

Ce froment établit un passage très naturel entre 
les grosses variétés de fromént amidonnier ‘et le 
froment plat , se dégageant de ses balles avec quel- 
que difficulté: Comme cetté belle variété est cultivée 
dans beaucoup ‘de ‘parties de l’Europe , elle offre 
plusieurs sous-variétés dans lesquelles on remarque 
les pointes des glumes plus ou moins allongtes , 
plus ‘ou moins courbées: C’est le Blé de Providence 
de Téssier, n.° 16. Les barbes tombent quelquefois 
avec la plus grande facilité à maturité ; et c’est une 
disposition qui se soutient, comme nous l’avons vu 
dans un seigle qui a cette même propriété d’avoir 
les barbes caduques. Quelquefois ses da i ont une 
teinte jaunûtre. 

8. F. »car À crocwer ( Jriticum CARRIER has- 
tatum N.).. 

«C'est le froment précédent, mais d’une momdre 
proportion dans toutes ses parties, et ayant la pointé 
dela glümettrés recourbée. Nous l'avons recu sous le 
nom de 7ritioum spumosum(spinosum? ). Mais si Von 
en excepte sa”stature, qui est toujours moindre que 
éelle de la variété préeéaéritel son Caractère des 
glüumes est peu de chose, ayañt vu varier” ce caraëz 
iéresdans le froment Le pu à et autres. d' 


\ 


( 340 ) 

Le froment plat blanc et le plat. à crochet, sont 
susceptibles de donner des sous-variétés à épis rouges 
ou roussâtres, voisins de ceux de la variété suivante. 

4. EF. p1ar roux ( Trticum compressum rufescens ; 
Tritic. hordeiformis Host.; Triticum cœruleum A 
Mazz.; Tritic. platystachys Lag.; Tritic. durum B 
Sering.); glumes très. glauques avant la maturité, 
à pointe courte ; grain jaunâtre , oblong, se déga- 
geant difficilement des glumes. 

‘IL est souvent indiqué comme Blé de Providence ; 
c’est le n.° 13 de Tessier, et.il est connu sous les 
noms de. Goudpe dans: les  départémens de l’ouest, 
et confondu avec le froment renflé dans le dépar- 
tement de.Maine et Loire: c’est aussi l’Ævbron rouge. 
Souyentil perd très facilement ses barbes.Nous avons 
obtenu, une sous-variété qui est plus élevée et d’un 
port semblable à celui du froment. d’Hubérnac: 
Voyez n.° 7. 

5.F. PLAT A BARBES CADUQUES ( Triticum compressum 
denudans N.). 

Il ressemble au précédent, mais la pointe des 
balles est plus allongée. On peut facilement les con- 
fondre ensemble , si celui-ci ne se dégageait.très 
facilement de'ses barbes. Son: grain est tendres mais 
il a glacé. 

6. F. par rouce ( 7° réticum compressum. rubrum) 
épis etbarbes très rouges; grain rougeâtre: 

Cette espèce, du midi de la France,-doit son in- 
tensité. de couleur à l’action, de: la lumiére; etlest 
confondue sous le nom de Blé poulard-avec. les 'suï- 
vans. C’est le, n.° 21 de Tessier; c’est le Blé rouge; 
la Pénatielle rouge à Montpellier. 


(341) 


7. F. PLAT pourarD ( Zriticum compressum. vul- 
gare) ; épis à barbes médiocres ; glumes blanchâtres, 
renflées , à pointe médiocre ; grain rougeâtre , court ; 
il est devenu dur. 

C’est le Blé poulard ou Poulard blane du midi ; 
froment à tige pleine. 

Sous le nom de froment d'Hubernac, nous avons 
une race de cette variété, qui est remarquable par 
la vigueur de sa végétation et la beauté de ses épis 
à barbes fragiles. Il y a aussi une autre sous-variété 
dont les épis sont à grains très pressés. 

8. F. P1aT À Barge NOIRE ( Zrificum compressum 
nigrescens ); épi blanc-jaunâtre et barbes noires ; 
grain jaune-rougeûire. 

C’est une variété qui se trouve mêlée aux deux 
précédentes dans les cultures en grand, et qui est 
commune dans le midi de la France. 

9. F. pLar céanr ( Zriticum compressum gigan- 
teum ); épi roussâtre à pruine blanche abondante ; 
glumes à pointe aiguë; grain gros, court, gibbeux, 
grisâtre. 

Cette belle variété est véritablement l'intermédiaire 
entre le Froment renflé et le Froment plat. La forme 
de l’épi est celle du Froment plat, et celle du grain 
est absolument , pour toutes les dimensions, celle 
du Froment renflé. Si les glumes étaient pubes- 
centes, on aurait de. la peine à la séparer en: effet du 
Triticum turgidum, au milieu duquel elle se trouve: 
Dans le département de Maine et Loire, ce froment. 
partage le nom vulgaire de Gouâpe, et y recoit aussi 
celui d’Æubron rouge. 


( 342) 


10..F.»0ar D’Écvere ( Jrééicum compressum ægyp- 
tiacum); épi rougeâtre, rapproché dé la forme té- 
tragonale; glumes très glauques ; grain petit, allon- 
gé, rougeûtre , dur. 

Ce froment est une variété parfaitement distincte , 
mais d’une petite stature; ayant en outre le grain 
petit et de mauvaise qualité. Nous l’avons recu sous 
le nom de Blé rouge d'Egypte. Bien que ce froment 
n'ait pas ses épis régulièrement déprimés sur deux 
côtés opposés ; cependant il ne peut être séparé du 
Froment plat, comme variété. 

11. F. p1ar ne Xérës( Jrilicum compressum his- 
panicum ); épis épais , blanchâtres , pulvérulens ; 
épilets à quatre fleurs, dont deux sont stériles ; 
glume à pointe aiguë, peu allongée’; grains jau- 
nôtres , durs, gros , allongés. | 

Cette variété ailes épis un peu comme tétragones, 
et semble: former, de même que la précédente, le 
passage au Froment barbu où Triticum æœstivum. 
Elle nous a! été envoyée sous les: noms de! Froment 
de Xérès et de Froment d'Andalousie. Si lé ram 
était: tendres, ce serait: une très’ belle, trés bonne et 
très: sediotité espèce ,réussissant parfaitement bien 
en: France. 

12. F. rtamérhLé ( Zriticun compréssum NE 
sum; Triticum fastuosum"Vag. ) ; épis blanchâtres, 
compactes‘, à poussière glauque abondante; bärbes 
très longues’, ‘étalées’; grain blaric-jaunâtré, MbbE ) 
gros; un ‘peu:translucide où demictransiarent: 

Nous: l’avons eu sous lés noms! de Zwiticum fas: 
tuosum et de Froment de Tangaroch; is it ést très 
différent de ce dernier. 


(343) 


13. F: rcar RAMEux ( Jritècum compressum,ramo- 
sum; Tritic. compositum B. aspica glabre Mazz.; Triti- 
cum compositum L? ); épi blanchätre; épilets glabres, 
rameuxs axe très velu ; grain jaunâtre. 

On ne peut éloigner cette, variété du Froment plat, 
mais elle est confondue souvent avec une variété ra- 
meuse du Æroment barbu, dont nous parlerons plus 
loin. Nous layons recu sous le nom. de Gros Blé 
Pétaniel. I présente une sous-variété à barbes noires. 

VIN. FROMENT rexrié ( Zriticum turgidum L. ; 
Trit. satioum turgidum Viamk.); épi carré, compacte, 
courbé, à barbes dressées; quatre fleurs dont deux 
stériles. ; glumes renflées, ordinairement très velues, 
à pointe plus ou moins allongée; grains gros , ren- 
flés , comme bosselés au dos ; paille pleine au haut. 


I. Sans barbes. 


1. F. RENFLÉ sans parse ( Zréticum turgidum im- 
berbe ); épi tétragone, couvert de poils grisâtres. 

Il reprend très facilement ses barbes ;, du reste, 
il a toute la vigueur et les. autres qualités de la va- 
riété barbue , avec laquelle il se trouve mêlé : ce- 
pendant on l’a remarqué, puisqu'on le nomme 
ni à sans barbe et Gros Blé sans barbe. 


lo Hs sd des barbes. 


Fc LE. sr BLANC ( Triticum tr gidum album, ;: 
Triticumiturgidum. À Sering:;. Triticwn. turgidum B 
Mäzz.) ; épi blanc, barbes blanches: 


(344) 


C'est le n.° 19 de Tessier, où Pétamel blank > 
qu’on trouve mêlé au suivant, dans les cultures ‘en 
grand de cette variété. 

3. F. renrzé Péranierxe ( riticum turgidum ru- 
fum; Triticum turgidum Li. ); épi gros, roux ; 
glumes roussâtres, à pointes très courtes et presque 
droites (1). 

Cette variété, trés remarquable, a été signalée 
par beaucoup de noms qui lui sont communs avec 
les variétés qui suivent. C’est le Blé Pétanielle du 
midi de la France; la Godele du département du 
Rhône ; la Gouäpe (2), l’'Obron ou l’Aubron ; le Blé 
à six carres, et quelquefois le Blé Poulard, de 
Maine et Loire; c’est enfin le n.° 18 de Tessier, 
et qui rentre facilement dans la variété suivante. 

4. F. RENFLÉ BARBE-NOIRE ( Zrificum turgidum ni- 
gro-barbatum ). é 

Ce n’est que la variété précédente avec des barbes 
plus ou moins noires , et qui perd assez facilement 
ce caractère. Cést le Gros Blé noir de quelques 
parties de la France. 

5. F. renrié cris ( Zréficum turgidum cinereum ; 
Tritic. turgidum E Sering. ). 


(4) Nous en avons cependant rencontré une variété à très grande 
pointe; ce qui nous a prouvé outre: d’autres observations à cet 
égard, que ce caractère n'avait qu’une très légère importance. 

(2) Ce mot qui veut dire faucille, dans l’ancien gaulois ou cel- 
tique , est très bien appliqué à ce froment, dont la disposition des 
épis est d’être toujours courbée ou’ penchée: On prononce! gousa 
guap , gouäpe, goîne, CEE gloise,,.groi,, mais! plus habituel- 
lement gouape. 


( 345 ) 


Si ce n’est la pubescence , qui au lieu d’être 
blanche ou rousse est cendrée ou gris-foncé , cette 
variété ressemble en général aux précédentes , et en 
porte souvent les noms. 

C’est le Froment velouté , le Ble de Souris ; c’est 
encore le Froment de la Mecque , le Froment d hiver 
de Dantzick, le Froment turquet, et enfin le Blé géant 
de S1°-Hélène, qui semble avoir une végétation un . 
peu plus forte, mais qui ne diffère essentiellement en 
rien du Froment renflé gris. 

Comme la partie herbacte du Æroment renflé gris 
semble un peu plus couverte de poussière glauque 
que les espèces ordinaires ou Fromens d’été ; on lui 
a donné le nom de Blé bleu conique ou de. Poulard 
bleu. 

Le Froment gros turquet ne nous a .pas semblé 
pouvoir être distingué Il a un peu moins de poils 
sur les glumes , mais ce caractère est variable pour 
son intensité. Le Froment d’hiver de  Dantzick est un 
peu moins haut que ceux de la Mecque et de S.'- 
Hélène, cependant il a encore près de 180 centi- 
mètres ( 5 pieds ): les deux autres ‘atteignant jus- 
qu’à 2 mètres ( 6 pieds ). 

6. F:rexrcé RAMEUx ( 7réticum turgidum ramosum ; 
Triticum compositum L. ); glumes rousses ou cen- 
dréés ; épis rameux; grains rougeâires! 

C’est très anciennement le Blé de miracle ;" c’est le 
Blé'de Smyrne , le Blé d'Egypte: W est: clé dans! 
quelques lieux du département de Maine ee Loire 
sous le nom de Blé à mailloches\, et particulière 
ment dans l'arrondissement de Doupien 


24 


( 346) 


Le savant Tessier a réuni ce Froment, dans son 
n.° 20, avec la. variété n.° 10 de notre septième 
espèce; mais ce n’était véritablement qu’une réu- 
nion empyrique. Cette disposition rameuse n’est au 
surplus qu'une qualité acquise et qu’on maintient 
en semant ces modifications rameuses dans de bonnes 
terres. Nous avons vu toutes les espèces de graminées 
à épis , y compris le froment, devenir rameuses dans 
une terre où la végétation était riche soit par la na- 
ture ou la qualité de la terre, soit par une hu- 
midité abondante. 

7. F. RENFLÉ RAMEUX BLANC (. Tréticum ramosum al- 
bum }; épis rameux ; glumes grisâtres; grain blanc- 
jaunûtre. 

On donne aussi à ce Froment les noms de Blé 
de Smyrne, Blé d'Egypte, Blé de miracle: C’est le 
Froment à tiges pleines ; préconisé avec raison par 
le baron lieutenant-général Dessaix, dans le Journal 
de l’Académie d’Industrie , tome 2, p. 157 ; d’après 
la comparaison que j'en ai faite, sur la communi- 
cation obligeante qu’a bien voulu me faire ce pro- 
priétaire. de Fernex. 

8. F. RENFLÉ RAMEUX BARBE-NOIRE ( Tréficum turgi- 
dumramosum nigrescens ; Triticum compositum ‘A ? 
Mazz. ). 

Cette variété se trouve mélée à la précédente, et 
nous. doutons beaucoup. que ce soit celle indiquée 
par Seringe et Mazzucato, qui ont probablement con- 
fondu entr’elles trois variétés remarquables : nous les 
indiquons. chacune.à leur place dans le, travail pré- 
senti. SD 4 


(347) 


Les trois variétés 6, 7 et 8 présentent ordinai- 
rement des graines tendres, mais nous les avons vues 
passer aussi à l’état de blé dur. 

IX. FROMENT sareu ( Zriticum æstioum L., sati- 
oum Vill.) ; épis ordinairement dressés, imbriqués et 
comme tétragones ; glumes glabres ou très légèrement 
poilues ; grains variables, mais toujours courts ou 
oblongs , sans être bossus; tige ordinairement creuse 
vers le haut. 

Après le Froment sans barbe, cette espèce fournit 
le plus de variétés, ce qui est probablement dû à ce 
qu’elle est plus cultivée que toute autre en Europe, 
à raison de cé que ses grains sont plus généralement 
d’une qualité supérieure : s’ils n’ont pas le volume 
remarquable du Froment renflé, par exemple. 


I. Arétes dressées , épis glabres. 


1. F. sareu DE LA Cuve ( Zriticum salivum si- 
nense ); épi grêle, court, blanc-jaunâtre , à barbes 
courtes ; balles à une seule pointe un peu allongée ; 
grain petit, court, grisatre , dur. 

Cette variété à toujours mal réussi; est d’une pe- 
tie stature, bien que cultivée dans les mêmes circon- 
stances que les cent soixante-quinze que nous avons 
mises en expérience. 

2. F. san À peur ( Zréticum sativum semi-bar- 
batum ; toutes les barbes irès courtes. 

Cette variété se rencontre souvent : c’est celle 
qui fait la transition entre les variétés sans barbes, 
ainsi que nous l'avons constaté : aussi est-elle diffi- 
cile à fixer. 


(348) 


3. F. paru pe SICILE ( Zreticum sativum siculum ; 
Trit. condidissimum ? Mazz.); épis blanchâtres: ou 
blanc-jaunâtre ; glumes allongées:, à une dent longue 
aiguë ; barbes longues ; tige pleine vers le haut. 

Cette variété qui porte les noms de Blé barbu 
de Sicile, Blé treminia, est d’une petite stature, 
et nous semblerait lier le froment barbu au froment 
plat; surtout en la comparant à la petite race du 
froment plat d'Esypte. 


Il. Arétes écartées | épis glabres. 


4. F. sareu DE Toscane ( Zriticum sativum etrus- 
cum ; Tritic. ciliare Hort. Lugd. ); épis blanchi- 
tres, lâches; glumes à très longue pointe (plus 
longue ordinairement qu’elles ); grain petit, long, 
grisâtre , dur. : 

Cette variété. très remarquable présente: deux 
sous-variétés qui peuvent être signalées facilement: la 
première a les épis avec une teinte grise (. Zriticum 
sativum etruscum griseum ); nous l'avons eue cepen- 
dant sous le nom de Zriticum horminum album Hort. 
Lugd.; et Zriticum cochleare. La seconde, au lieu 
d’être blanchâtre ou rosâtre , est jaunâtre ( 7ritic. 
satioum etruscum lutescens ); mais du reste leur res- 
semble entièrement. Toutes se trouvent mélées en- 
semble , et sont cultivée dans plusieurs parties de 
l'Italie. 

5. F,.Bareu À cHaprAU(7riticum satioum spartheum); 
épis blanchâtres ; épilets un peu pressés ; glumes à 
longues arêtes. 


(349) 

Cette variété donnée sous le nom de #roment de 
Toscane , est moins élevée que la précédente, mais 
du reste elle s’en rapproche beaucoup , en formant 
cependant une race distincte qui s’est soutenue de- 
puis dix années d’observations. Elle présente une 
sous-variété ( Zriticum sativum spartheum rufum ), 
dont les grains sont entièrement les mêmes, mais 
les épis un peu rougeûtres. 

6. F. sarsu DE Toscane ÉLEVÉ ( Zriticum sativum 
etruscum robustior ); épis blanchâtres, à épilets un 
peu pressés ; glumes à longues arêtes. 

Par son grain, cette variété se rapporte bien aux 
précédentes, mais ce grain est plus gros , la tige 
un peu plus élevée, et les épis plus nourris et 
plus gros. Il se rapproche du n.° 9, mais son grain 
est moins gros. Les n.® 4, 5 et 6 forment une race 
bien distincte, et qui paraît être exclusivement 
particuliére à l’Italie. 

7. F. sansu mremois (1) ( Triticum sativum tri- 
mestre ); épis lâches, gréles, blanchâtres ; barbes 
moyennes ; glumes à très longue pointe ; grain pe- 
tit, allongé ; chaume peu élevé. 

C’est le Petit Froment blanc barbu, le Froment 
de trois mois , de l’arrondissement de Beaupreau. 

8. F. sareu Hérisson ( 7riticum sativum herinaceum ; 
Tritic. herinaceum Horn. ); épis épais, roussätres ; 
glumes presque luisantes , longuement mucronées ; 
arètes robustes, trés écartées ; grain gros et grisâtre. 


(1) Pour de trois mois : c’est une contraction généralement en 
usage chez le vulgaire. 


( 350 ) 


Cette variété , cultivée dans le midi de la France, 
est très belle, très robuste, et mérite d’être coté 
vée de préférence à beaucoup d’autres. Elle est 
voisine de la suivante, mais plus forte dans toutes 
ses parties. 

9. F. PARBU BLANCHATRE ( Triticum satioum vul- 
gare) ; épi médiocrement dense, blanchâtre ; glumes 
à pointe très allongée ; grain gros, renflé, Le 
tendre ou dur. 

C’est le froment n.° 9 de Tessier; le Froment ES 
de beaucoup de départemens de " France ; le Fro- 
ment à barbes divergentes du Dictionnaire des Sciences 
naturelles. Dans le département de Maine et Loire il 
est connu sous les noms de Blé joanet , Blé barbu, 
Froment gris à barbe, de Froment breton blanc , et 
de Barbichon. 

Sous le nom de Froment fin rouge et Blé rouge, 
on cultive dans le midi une sous-variété dont le 
grain a une temte rougeûtre, et dont l’épi est le 
même que celui du froment barbu blanchâtre ( 7ri- 
ticum sativum vulqare rubrum), et qui peut, comme 
le précédent , présenter des épis à teinte blanchätre, 
d’autres à teinte jaune, et enfin d’autres à teinte 
brunâtre : c’est ce dernier que nous avons vu dé- 
signé sous le nom de Froment mulâtre. L'un et l’au- 
tre appartiennent au froment barbu blanchâtre: 

Sous le nom de Blé mouret, nous avons reçu-une 
sous-variété qui est plus tardive de huit à dix-jours 
pour la maturité : qui du reste se rapporte au Fro- 
ment barbu blanchätre , et donne un grain tendre, 
de bonne qualité. Le Froment du Piémont, qui est 


(351 ) 


tendre et glacé, est encore le Froment barbu blan- 
châtre. Sous le nom de Froment de Russie ; nous 
avons eu une variété de la Bessarabie , qui est plus 
petite et qui ressemble beaucoup à celui que nous 
avons eu sous le nom de Blé du Caucase ; maïs le 
grain de ce dernier est plus gros, bien que la paille 
en soit un peu plus courte. 

Le Blé de Smyrne de quelques collections a le 
grain un peu plus petit que le Blé du Caucase, 
mais du reste c’est le mème. 

10. F. sarru nouGe ( Triticum sativum rubescens). 

IL a tous tous les caractères du précédent , seu- 
lement il a l’épi rougeûtre et est d'une stature un peu 
plus petite. 

C’est dans le PE: de Maine et Loire le 
Froment breton , le Petit Froment breton, le Blé 
rouge , le Blé rouge barbu ; le: Froment à six carres, 
le. Petit barbichon , et souvent le Froment gris à 
barbes ; c’est le n.° 10 de Tessier. Avec le froment 
sans barbes d’Alsace , il partage les noms de fro- 
ment rouge et de froment breton, dans le dépar- 
tement de Maine et Loire. 

11. F. sarëu pu, Car (Zriticum sativum capense) ; 
épis allongés( gros), blanchâtres ; glumes à pointes 
médiocres ; grain gros, jaune, tendre ; feuillage , 
lorsqu'il est vert , étant trés couvert de  pruine 
bleuâtre. 

Cest une variété RU ». uh peu moins hâtive 
que nos variétés, mais réussissant parfaitement; ! 

042. F. sareu Piorer (| Zriticun.sativum pictetia- 
num.) ; ressemble: beaucoup auw-froment barbu: du 


(352) 


Cap , par les glumes et par le grain; mais il est 
moins robuste, moins élevé. Il réussit très bien. Il 
a un peu varié pour la couleur du grain, qui est 
moins jaune depuis qu’il est cultivé dans nos jardins. 

13. F. sareu pe Napzes ( 7riticum sativum nea- 
politanum) ; épis blanchâtres ; glumes à pointe al- 
longée ; grain grisâtre ou brunâtre , un peu allongé , 
demi-dur. 

Cette variété robuste, à épis peu allongés , a ‘un 
trés beau grain et réussit bien. 

14.F. »arBu éRos-Tremois ( 7riticum satioum brigan- 
tiacum) ; épis blanchâtres , gros, allongés ; épilets 
écartés ; glumes à pointe médiocre ; grain petit, 
allongé, tendre, grisâtre. 

Cette variété que nous avons reçue de Briancon, 
sous le nom deFroment de Mars, est bien dis- 
tincte du Froment barbu tremois. 

15. F. sareU TREmois nain ( Zréticum sativum tri- 
mestre nanum ) ; épis blanchâtres, petits; chaume 
trés court; grains petits, oblongs. 

Sous le nom de Blé de Mars blanc barbu, nous 
avons eu cette variété, moins robuste de beaucoup 
que la précédente. Elle paraît donner facilement une 
variété sans barbes ; qui sera établie plus loin 

16. F:BarBu compacte ( Zritioum sativum compac- 
tum ; Triticum compactém Host. ) ; épis blanc-jau- 
nâtre, courts , imbriqués de très près; glumes’à 
pointe aiguë ; ‘raide , longue ; grain petit ;°rou- 
geâtre | arrondi. | 

Nous avons recu; sous le nom de Blé hérisson, 
cette variété, et sous celui de Froment de Tenga- 


( 353 ) 
rock , Froment d'Alsace et de Triticum fastuosum , 
cependant on peut distinguer quatre sous-variétés : 
1° Froment barbu compacte à grain grisâtre. 
2.° Froment barbu compacte à grain jaunâtre. 
3.° Froment barbu compacte à épis bruns. C’est 
une variété du n.° 2. 
4.° Froment barbu compacte hérisson. Il a les 
épis ou jaunes ou bruns. 


III. Fromens à épis velus. 


17. F. sarpu BLANC veLu ( Triticum sativum album 
villosum ) ; épis blanchâtres ; glumes pubescentes ; 
grain gros et long. 

Cette belle variété, qui est souvent mélée au 

° 9 dont elle provient, est assez robuste et mé- 
rite uve culture particulière : son grain étant beau 
et tendre. Elle est plus vigoureuse que la variété 
dont elle sort. 

18. F. sareu ROUGE vELu ( 7riticum: sativum ru- 
brum villosum ). 

Il a les épis rougeâtres, du reste il En er es au 
précédent et se trouve mêlé au n.° 10, dont il est 
une variété. Sa ‘stature est plus petite que celle du 
n.° 17, et dans les rapports de celles du n.° 9 au 
n.° 10. 

19. F. sargu rose ( Zriticum satioum FRE 
rium ). 
IL se rapproche beaucoup du n.°16, mais. le Hlus 
grand nombre de ses barbes sont Locle: à I HE 
quésses glumes, sont -blanches;et :velues. :Il estiro- 


25 


(354) 


buste et se trouve mêlé à un froment donné sous 
le nom de Froment: du Nord , qui est trés voisin 
du n.° 9. 

20: Æ. »arBu TrREmOIS VELU ( 7rèticum sativum tri- 
mestre villosum ); épis allongés , grêles , lâches, 
blanchâtres ; grains petits. 

Cette variété est mêlée au Froment barbu tre- 
mois , n.° 7, et en a toutes.les propriétés et tous les 
caractères , à la pubescence près des glumes. 

X. FROMENT sans, sarge .( Zyiticum imberbe ; 
Triticum hybernum L. ; Triticum sativum imberbe 
Alior. ); «toutes. les glumes privées de barbes, ou 
n'ayant que des pointes très courtes. 

Avec l’espèce précédente c’est le froment le plus 
généralement cultivé et celui qui offre.le plus grand 
nombre de variétés déterminées. Cependant ce fro- 
ment est moins cultivé proportionnellement que:le 
froment-barbu. Cette espèce. tend toujours à re- 
prendre ses barbes, et dans les jardms de, bota- 
nique-toutes ses variétés sont confondues sous le nom 
de Triticum hybernum , ou de Triticum satioum mu- 
ticum ow-imber be. 


> 12 Epis ;velus rouges. 


1. F. sans BARBE DE CRÈTE 9AUNE ( Tréticum imberbe 
créticum luteum); épis Tâches, allongés ,, rougeâtres ; 
tige élevée ; grain court, gros, jaunâtre , tendre: 

19: F.-sAns BARBÉ DE CRÈTE ROUGE ; Trticum imberbe 
creticum* rufescens !). 

Il a les mêmes caractères et la même végétation 


(355) 


que le n° 1*, mais il a un grain tendre à la vé- 
rité, mais brun-rougeûtre. 

: 8. F.'sans BARBE crAND-vELu (: rüticum imberbe vil- 
losum elatior); épis allongés , rouges ; chaume élevé ; 
grain rougeâtre, allongé. 

C’est la plus grande variété de toute cette série : 
elle ‘existe dans les moissons du département de 
Maine et Loire. 9: 

2. EL sans pAfeE DE Kœzer ( 7riticum imberbe Kœ- 
leri); épis allongés, rougeâtres ;: chaume court ; 
grain gros , jaune-blanchâtre: 

Cette variété est différente du n.° 1., bien que son 
grain s’en approche un peu. Nous l'avons eu sous 
lesnom de Froment Kæler ; mais ‘sous ce nom l’on 
renferme ‘ordinairement ‘toutes les variétés velues du 
* Friticum hybernum : M fournit facilement ‘uné sous- 
vañiété à grain plus rouge\que jaune. 

5. F. sas BARBE PETIT-VELU ( Triticum inbele vil- 
losuni minor) ; épis: minces, allongés ,: très rouge- 
brun; Chaume plus petit ‘que dans lé n°3; grain 
aussi ‘plus ‘petit ;: mais: du reste rapprochant par 
le! à 08 RS 


ain Epis. Le blancs. 


6. F:-sANS BARBE :GRAND-BLANC ( Tr riticum “imBebbe 
villosum major:);. épis: blanchâtres , nn tige 
élevée ; grain jaune-rougeâtre;-allongé.s! op insu 

ses l'avons-obtenu-du n: 3::L’une-et l'autre de 
ces deux variétés sont sorties du Froment de. 942 
Lüud. ,On:: 1e nomme dans le: nai -deëla 
Vienne. -Eronient Dleñe:e à disiisr-euoe om eco: Jp 


( 356 ) 

7. F. sans BARBE BLANC VELU ( Jriticum imberbe vil- 
losum album medium ). 

Cette variété est moins élevée que le n.° 6 et a 
le grain un peu jaune-rougeâtre , aussi beau; l’épi 
est un peu compacte. 

8. F. sans pare eros-Kaærer ( Triticum imberbe 
Kœleri major ); épis très longs, médiocrement ve- 
lus; grains rougeûtres. 

n est à peu près de la taille du n.° 7;ila les épis 
plus longs. Dans le département de Dsiiné et Loire 
il est mêlé au froment de S.t-Laud. 

9. F. sans BARSE veLu DE CRÈTE ( 7riticum imberbe 
villosum creticum ); épis assez grêles , lâches; hau- 
teur moyenne; grain jaunâtre, petit, arrondi, tendre. 

C’est une espèce excellente, mais qui a glacé à 
la culture dans les jardins. On l’a donné encore 
sous le nom de Blé de Bohéme. Ge doit être le n.° 7 
de Tessier. 

10. F. ve nue ( Zriticum imberbe densum ). 

Cette variété a le même grain que la précédente, 
c’est-à-dire , tendre et jaune; mais ses épis sont plus 
gros et plus à épilets pressés. En outre; il est le 
plus hôtif de tous ceux que nous avons cultivés : 
en 1833, il était muür le 1.* juillet. 

11. F. pe mue rouce ( Zriticum imberbe den- 
sum rubrum ). Il a les mêmes caractères absolu- 
ment que le précédent, si ce n’est que le grain 
est rougeûtre. Cultivé en plein champ , il est’très 
beau. à 
Sous le nom de Blé de haie tardif , nous indi- 
querons une sous-variété à grains aussi rougeâtres , 


(357 ) 


mais qui est plus de trois semaines en retard sur 
Pautre, et qui a médiocrement réussi. 

12. F. avczais veu ( Zriticum imberbe villosum 
anglicum ). 

Le grain, un peu plus petit et rougeûtre de cette 
variété, le rapproche du Blé de haie rouge tardif, 
et comme lui il est très tardif; mais ses épis sont 
moins gros et moins pressés. [l est provenu du Fro- 
ment blé-anglais rouge. 

13. F. sceu veuu ( Zriticum imberbe cæsium ). 

Ce froment, sorti du Æroment bleu, a les épis 
allongés, médiocrement velus, et le grain rouge. 
Ses feuilles sont couvertes d’une pruine blanc-bleuä- 
tre, plus abondante que dans les autres fromens : 
ce qui lui a valu le nom de froment bleu. 


III. Epis glabres compactes. 


14. F. carré ( Zriticum imberbe compactum ; Tri- 
ticum creticum Mazz.; Triticum persoonium À .Mazz.); 
épis rougeâtres très courts, à épilets très pressés ; 
grains rougeâtres. 

Il a porté les noms de Froment de Candie et de 
Froment de Sicile. 

Il tend souvent à donner des épis allongés, et 
souvent les épis sont un peu barbus au som- 
met. 

15. F. carré DE mars ( Trificum imberbe compac- 
tum trimestre). 

Cette variété, qui est nommée Blé de Mars carré, 
a les mêmes caractères que la précédente ; seule- 


( 358 ) 


ment ses épis sont blanchätres , et son chaume moins 
élevé. Le grain est petit et tendre; il donne.un 
grain dur dans les terres argileuses. 


IV. Epis glabres allongés , blanchâtres ou blancs ; 
grains jaunes. 


16. F. sans BARBE DE TALAVERA ( riticum imberbe 
lutescens ); épis blancs, allongés, serrés ; grains 
tendres, d’un blanc jaune-clair. 

Cette précieuse espèce est connue sous le. nom 
de Froment blanc, dans le département de la Vienne; 
et connue encore sous les noms de Froment de Ta- 
lavera et de Blé anglais: Elle est un peu tardive ; 
sa stature est moyenne. 

Il a donné une sous-variété rougeâtre. Le Blé 
blanc de Hongrie ne paraît pas différer du Tala- 
vera. 1] donne des épis rouges, aussi à grain 
rouge. 

17. F: sans sarse Touzerre ( Triticum imberbe 
Touzella); épis blanchâtres très allongés ; grain 
jaunètre clair, allongé. 

C’est le Petit: blanc de M. Bujault, agriculteur 
distingué du département des Deux-Sèvres, puis- 
qu’il nous dit que ce froment n’est ni notre n.° 16, 
ni le n° 18 (1); c’est le Froment à grain de 
riz. 


(4) Cependant comme il nous dit que son gros blanc et son gros 
Blanc-Zéé , sont l’un et autre d’un blanc de lait, nous aurions 
besoin de constater ce fait sur des échantillons, n’ayant pas encore 


vu de fromens auxquels nous puissions appliquer l'expression de 
blanc de lait. 


( 359 ) 


Le grain de cette espèce est plus allongé que 
celui de la précédente, et du reste, a la même 
qualité. C’est la véritable Zouzelle du Midi; se- 
mée tard (28 février), elle a été à chaume peu 
élevé, mais elle a été plutôt en maturité que le 
n° 16, semé au 8 octobre. 

18. F. sans marge 81Anc p'Onessa ( Zriticum im- 
berbe bessarabica ) ; épis blancs, gros, allongés, 
pressés; glumes de tous les épilets allongées et 
presque en courtes barbes ; grains gros, allongés, 
presque. blanc-jaunûtre. 

Par le grain, qui est plus gros que dans la 
Touzelle et point gibbeux, comme dans le Blanc- 
Zéé, cette variété semble bien distincte , et a pro- 
bablement été introduite dans la Bessarabie et la 
Tauride , de variétés provenant peut-être de l’Es- 
pagne ou de la Flandre. 

19. F. sans Barse BLanc-Zéé ( Triticum imberbe 
grossum ). 

Cette variété a une végétation démontrant un peu 
plus de vigueur que les n° 16 et 17. Le graim 
est.court, arrondi, comme dans le n.° 17. 

C'est le Blé blanc de Flandre ou Simplement le 
Blé blanc et le Blanc-Zéé. Nous pensons que c’est 
le Gros blanc de M.:Bujault. IL donne une sous- 
variété dont le grain est rougeâtre et qui peut , de 
son côté ,- rivaliser avec les bons blés rouges. 

Comme toutes nos expériences sont surveillées 
essentiellement par nous, pour les semis et les ré- 
coltes, nous sommes assurés qu'il n’y a ‘aucunes 
de ces erreurs trop communes dans les jardins de 


( 360 ) 

botanique, qui peuvent en imposer sur les modi- 
fications réelles des végétaux. Au surplus , dans 
toutes les expériences relatives au froment, on peut 
être assuré que , si l’on n’a pas soin de surveiller 
les semences , les meilleures espèces seront, en 
quelques années, complètement dégénérées: soit sous 
le rapport du volume et de la forme des grains, 
soit sous celui des épis ou du chaume, par les va- 
riétés qui se forment et se multiplient impercepti- 
blement. C’est ainsi que dans le Blanc-Zéé nous 
avons pu trouver jusqu’à quatre variétés parfaite- 
ment distinctes : le glacé est plus court et plus 
renflé que l’espèce ordinaire ; le tendre a donné 
des grains qui sont plus petits ou plus longs, comme 
ceux des n.* 16 et 17. 

Nous pensons que le froment décrit dans le Jowr- 
nal de l’Académie de l'Industrie (vol. 2, p. 32), 
appartient à cette division, d’après ce qu’on en 
rapporte et qu'on décrit ainsi : « Froment blanc 
» d'hiver à fleurs rougeûtres ( Triticum candidum ) ; 
» fleurs rougeûtres ; épilets sexflores, renflés, gla- 
» bres, mutiques , imbriqués, d’un blanc luisant, 
» tirant sur le roux; valves de la spathelle diver- 
» gentes; graines blanches , farineuses intérieure- 
» ment.» On le met au-dessus de toutes les cé- 
réales connues , par la beauté de son grain, la 
finesse de sa farine, l’excellence de sa saveur ; tel 
en parle au moins le secrétaire de l’Académie de 
l'Industrie, M. Leroy de Bacres, duquel nous en 
espérions la communication, si notre demande eût 
été accueillie. 


(361) 
V. Epis blancs, sans poils, grains rougeûtres. 


20. F. saxs gare DE Norman ( Zriticum im- 
berbe elatior ) ; épi serré; chaume très robuste, élévé ; 
grains longs , gros , comme bossus, tendres. 

Nous l’avons eu sous le nom de Gros froment de 
Normandie, sous lequel il est connu , de même 
que sous celui de Gros blé. Ses feuilles sont très 
larges, d’un vert foncé; la paille forte. Le Fro- 
ment de Rével nous a paru très voisin de celui-ci, 
mais un peu moins haut, de même que le Froment 
rouge du département de la Vienne. 

21. F. sans BARBE mars-NaIN ( Triticum imberbe 
nanum ); chaume trés petit; épis assez gros et 
pressés ; grain gros, rougeâtre, tendre. 

Nous avons eu cette variété remarquable sous 
le nom de Blé de Mars blanc sans barbe. 

22. F. sans BarsE cros-crAiN ( Triticum imberbe 
gibbosum ). 

Cette variété, cultivée sous le nom de Froment 
rouge, dans quelques parties du département de 
Maine et Loire, a le grain comme le n° 20, et 
aussi beau, mais le chaume s’élève bien moins. 

28. F. sans sarse s.t-Laup ( Triticum imberbe an- 
degavense ); il a la taille du précédent et le grain 
un peu moins gros, et du reste les mêmes quali- 
tés; l’épi est assez court, compacte, blanchätre. 

C’est quelquefois le Froment gris, et le plus or- 
dinairement le Froment de S.'-Laud du département 
de Maine et Loire. Il n’y a pas de doute, d’après 


(362) 


une comparaison faite attentivement, que le Æro- 
ment de S.t-Nuzaire (département de la Loire-In- 
férieure ), ne soit la même chose. 

24. F. sans BargE cris ( Triticum imberbe subla- 
num) ; épis allongés , lâches, blanchâtres ou blanc- 
grisätre ; grains gros et tendres. 

Cest le Blé bricart de plusieurs départemens 
de l’ouest; le Froment la trique de Cholet; le Fro- 
ment raze de S.t-Florent ; le Froment raque de quel- 
ques cantons de l’ouest de Maine et Loire. 

25. F. sans Barse DE Ferceveere ( Tréticum im- 
berbe germanicum ); épis très allongés, blancs , à 
étages nombreux et écartés; grains longs et moyens, 
tendres ou durs; chaume élevé. 

26. F. sceu sans sarse ( Tréticum ahser be cœru- 
leum ); épis allongés, blancs, à étages un peu écar- 
tés ; chäume élevé ; grains un peu allongés, gros. 

Toutes les parties vertes sont très bleuâtres, par 
une pruine abondante , ce qui lui a valu le nom 

de froment bleu. 

27. F. sans BARBE DE mans ( Triticum site tri- 
mestre ); épis gros, pressé, blanc; grains moyens: 

Cette variété, que nous avons recue sous le même 
nom de Blé de Mars ou de Blé de Mars ordinaire; 
et de Froment de Mars sans barbe , et assez difficile 
à distinguer des n.® 21 et 22. Son grain avbeau- 
coup grossi dans les terres de Maine et Loire. 

28. F. sans BARBE DF MARSELAGE ( 7rétécum imberbe 
vernale ). ÿ! 

Ce froment a le grain un peu plus clair que le 
précédent et lui ressemble beaucoup: On le nomme 


( 363 ) 


Blé de marselage (de mars), dans diverses parties 
de la France. | 

29. F. sans sar8e Picrer ( Triticum imberbe pic- 
tetianum ); à épis blancs, gros, pressés; grain un 
peu allongé, tendre. 

Il se distingue assez difficilement, et cependant 
il nous paraît une race particulière qui a müri dix 
jours plus tard que les autres variétés de ce groupe: 
c’est le froment Pictet des agronomes modernes. 

80. F. sans sAR8E RÉvEL n’aiver ( Triticum imberbe 
Reveli hybernum ) ; épis très blancs , longs, serrés; 
grains gros et comme bossus. 

C’est le froment de Rével d'hiver des collec- 
tions. 

31. EF. sans sARBE onRDINAIRE ( Triticum imberbe 
vulqgare ). 

Sous le nom de froment d’hiver, nous avons 
recu du Jardin des Plantes de Paris, une variété 
qui a très bien réussi, et dont les épis sont d’un 
beau blanc; le grain très beau; et de la Ferme 
modéle de Grignon, un froment d'hiver ordinaire, 
qui, dans les mêmes conditions, la semence étant 
belle , a mal réussi, et dont le grain semble quit- 
ter difficilement la balle, et mürit au moins quinze 
jours plus tard que les autres. 

Le froment rouge des environs de Loudun (dé- 
partement de la Vienne ) se rapporte au froment 
sans barbe ordinaire. 


(364 ) 


VI. Epis glabres , allongés, grisâtres ou rougeûtres ; 
grains rougeûtres. 


32. F. sANs BARBE DE MARS cms ( Triticum imberbe 
trimestre griseum ); épis grisätres, allongés, mé- 
diocrement pressés ; chaume petit (plus que dans 
toutes les variétés suivantes ); grain moyen, ob- 
long. 

C’est une variété distincte des autres fromens de 
mars, sorti du n.° 27, mais à chaume plus petit. 

33. F. sans BARBE mars-ÉLEvÉ ( Triticum imberbe 
trimestre elatior); épis grisâtres, grain gros, oblong. 

Ce froment que nous avons eu sous le nom de 
Blé de Mars rouge sans barbe , est plus grand que 
le précédent, et a bien réussi: semé à la vérité 
dès le 28 janvier. 

34. F. sans sarse pu Caucase ( Triticum imberbe 
caucasicum ) ; épis longs , trés rouges , à étages éloi- 
gnés ; grains allongés, gros. 

Il a tous les caractères qu’on attribuait au Fro- 
ment de Rambouillet. 

35. F. sans Barse DE Honene ( Troticum imberbe 
hungaricum ; Triticum hyberneum À. Mazz. 

Si ce n’est qu'il est plus grand que le précé- 
dent, ce froment lui ressemble beaucoup par la 
couleur de l’épi et la forme et couleur du grain: 
seulement les épis semblent plus atténués au: som- 
met. Comme le précédent , il donne des épis ve- 
lus et passe à la couleur grisâtre et de là à la cou- 
leur blanchâtre : donné sous le nom de froment 


(365) 


blanc de Hongrie, où il a dégénéré, le grain étant 
rouge; ou bien c’est un nom faux. 

36. F. sans BaRBE criré ( Zriticum imberbe ru- 
fescens ) ; épis grisâtres, tirant sur le roux, gros, 
pressés ; grains gros, comme bossus. 

Il est cultivé, dans l’arrondissement de Beaupreau, 
sous le nom de Petit froment grillé, et Froment 
grillé , petit rouge, petit Breton sans barbe. 

37. F. sans marge D’Arsace ( Triticum imberbe 
alsaticum); épis rougeâtres, courts, pressés; grain 
moyen , oblong. 

C’est l’une des variétés de cette série les plus 
répandues en France, et qui a aussi reçu le plus 
grand nombre de dénominations. C’était le Blé an- 
glais, n.* 9, de Tessier, connu depuis sous les 
noms de Blé Lammas, Blé chichot, Blé d’'Arden- 
nes, Froment rasé, Froment rouge, Blé triquet rouge, 
Froment mousse. 

38. F. sans 8ARBE GRAND-ROUGE ( Triticum imberbe 
Bujaultii) ; épis rouges, courts ; grains gros , ar- 
rondis, rouges. 

Ce froment , très rapproché du précédent, a 
cependant une plus belle végétation et est bien plus 
élevé. 

39. F. sans BarBe PeTIT-ROUGE ( Triticum imberbe 

subrotundum ) ; épis rouges, courts ; grains gros, 
courts, arrondis, rouges. 
—Getté variété est venue au moins aussi grande 
que la précédente, bien qu’annoncée |plus ‘petite 
que le n.° 38. Toutes deux nous ontparu très dis- 
tinctes des n.® 36 et37, avec lesquels elles ont beau- 
coup de rapports. 


( 366 ) 

Dans les jardins, les, épis des fromens qu’on y 
cultive, acquièrent une moins belle couleur que dans 
les champs, par l’effet d’une lumière. plus brisée, et 
aussi parce qu’on est souvent obligé. de les cou- 
vrir de grosses toiles, lors de la maturité pour 
les préserver du ravagé des oiseaux. 


$. 5. Fineiaus générales Sur les. Fromens et sur le: 
mérite des FRE espèces :ou variétés Riprées à 
la culture ; ou qu'on peutcultiver. 


Nous :croyons avoir !constäté, par une obserya- 
tion continue , que des fromens sans barbe., étudiés 
comparativement avec.les espèces .les. plus rappro- 
chées qui en sont pourvues, ont le grain généra- 
lement plus gros, mieux nourri;.-mais ils ont J’in- 
conyénient d’être ae sujets à être attagaés par les 
oiseaux , que les fromens barbus : les. barbes. de 
ces derniers-.les éloignant jusqu’à un certain point. 

Il ne faut pas croire. que. toute-variété de. fro- 
ment convient à toute espèce de sol.et. à, tout!cli- 
mat; et c'est: par les.essais seuls; qu’on .peut.'ac- 
quérir. des connaissances -positives. à,.cet. égard: 
aussi, en agriculture , il y a une science de localité: 
Une autre observation , et.qui. n’est-pas, nouvelle , 
c’est. .que: les, fromens, de.mars, c’est-à-dire, semés 
en février ou en mars, ont la paillé:moins haute. 
les épis moins fournis, le-grain plus pétit, et four- 
nissent -proportionnellement plus de: son:que des 
fromens d’hiver. On pourrait ajouter .qu’ilssont-un 
peu plutôt en maturité, ce qui ‘semblerait une 


( 367 ) 


contradiction , si l’on ne savait que les racines, 
n’äyant pas eu le temps de pénétrer aussi avant en 
terre que celles des fromens d’hiver, fourmissent 
moins à une végétation prolongée. Les fromens qui 
mürissent le plus promptement sont les plus favo- 
rables pour obtenir des blés de mars ; en même 
temps que leur paille ‘est préférable pour la nour- 
ritüre des ‘animaux domestiques auxquels on la 
donne. 

Le très savant Tessier avait déjà vérifié que les 
fromens pouvaient germer après deux et trois an- 
nées de récolte, ce que nous avons aussi cons- 
taté ; mais avec l’observation que certaines espèces 
conservaient plus long-témps leur propriété ger- 
minative. Ayant voulu , en 1831, remonter à l’o- 
rigine de quelqües fromens que nous possédions 
dès 1824, au Jardin botanique d’Angers, et vé- 
rifier quelques confusions faites dans la récolte des 
fromens que noûs avions réunis, nous avons fait 
lever , au mois de mars, des grains qui dataient 
de la récolte de 1825 : à la vérité, quelques va- 
riétés semées en octobre 1830 et mars 1831, ont 
pourri en terre au lieu de germer. On a eu tort 
de dire dès-lors, que le froment ne pouvait être 
semé après deux années; ce n’est que vers la cin- 
quième ou sixième année qu'il perd la propriété 
de gérer! Les ‘espèces qui restent enveloppées 
dans leurs balles, telles que le Froment épéautre, 
le Froment- amidonnier ; -eicconservent le plus 
leur. propriété germinative : l’action de l’oxigène, de 
V’air étant moins médiate. Parsune! infusion. dans 


( 368 ) 


l’acide hydrochlorique , étendu d’eau, on peut leur 
rendre la propriété germinative ; mais c’est un pro- 
cédé plutôt curieux et bon pour les jardins de bo- 
tanique , que d'application pour les cultures en 
grand. 

Toutes les variétés sont susceptibles de passer à 
l’état de blé tendre, et les blés tendres à l’état de 
blé dur. Nous avons des expériences qui nous ont 
prouvé que cet état ne s'établit que par transition 
insensible , et que la qualité acquise. peut se con- 
server assez long-temps. Dans les pays froids et 
humides , les fromens sont durs ou glacifs (1); et les 
variétés tendres ou à cassure blanche, tendent à dé- 
générer et à devenir dures. Les terrains argileux 
et les fonds humides conservent. ou entretiennent 
celte qualité ou même la font naître. Les terrains 
sablonneux ou calcaires , et trés chauds, sont plus 
propres à conserver les blés tendres ou même à les 
créer, pour ainsi dire ; et toutes les fois qu’on vou- 
dra obtenir une modification, sous ce rapport, il 
faudra toujours en renouveler la semence de temps 
à autre, ou la soumettre long-temps à des circons- 
tances qui, par l'effet du sol ou de l'exposition, en 
modifient les qualités, telles qu’on cherche à les 
avoir: Il n’y a pas de doute que si. le pain :pro- 
venant des Dlés glacifs ou. durs , est moins blanc et 
plus lourd, il_est plus nourrissant et plus sayou- 
reux, et durcit moins promptement : toutes ,obser- 


(1) Voyez les observations qui suivent ce travail, et relatives aux 
blés durstet aux blés tendres. 


( 369 ) 


vations que nous avons constatées par des expé- 
riences comparatives. 

Si les fromens durs semblent plus répandus dans 
le midi de l’Europe que dans le nord, c’est que 
là il y a plus d’incurie sur la qualité des espèces 
de céréales livrées à la culture, que dans les contrées 
où la nature semble s’opposer aux efforts de l’indus- 
trie agricole. Dans les contrées du nord l'esprit de 
l’homme se raidit contre la nature, et obtient sou- 
vent plus qu’on ne le fait dans les climats où tout 
est presque abandonné aux influences d’un sol sou- 
mis aux plus heureuses expositions solaires. 

Le Froment-Epéautre ( Triticum Spelta ) et toutes 
ses variétés ont le désavantage d’avoir des- épis très 
cassans et de rester enveloppés dans leurs balles. 
Cette dernière qualité oblige de leur faire subir 
deux moutures , dont une préliminaire, avec écar- 
tement des meules et un ventilateur, afin de sé- 
parer les balles. La qualité de la farine dépend de 
celle du grain , qui est susceptible d’être blé 
tendre ou blé dur, et aussi bonne que dans les au- 
tres fromens, sans exception. L’inconvénient que nous 
avons indiqué pour la mouture fait abandonner , né- 
gliger l’Epéautre, si ce n’est dans les contrées froides 
ou montagneuses, comme dans la Savoie, dans la 
Suisse et dans quelques départemens de la France 
(les départemens du Mont-d’Or et du Cantal }) , où 
elles résistent mieux aux froids que les autres fro- 
mens, et mürissent aussi plus promptement. Nous 
avons trouvé dans le département de Maine et Loire 
20 à 25 jours de différence de précocité, pour cette 

26 


(370 ) 


espèce : bien que nous en ayons semé en octobre, 
novembre. et janvier. On s’apercoit d'autant mieux 
que le Froment-Epéautre est plus robuste, que pen- 
dant les froids de l'hiver il reste vert et les feuilles 
dressées, tandis que les autres fromens sont souf- 
frans et leurs feuilles jaunâtres et tombantes, lors 
des gelées et des neiges. 

L'Engrain ( Triticum monococcum ) , la plus petite 
espèce de toutes les espèces de froment, partage 
une partie des propriétés de l’Epéautre ; mais comme 
il rapporte très peu, et que son grain est dur, il 
ne peut être un bon objet de culture que pour faire 
des coupes printannières, pour vert à nourrir les ani- 
maux domestiques , et pour les lieux montagneux où 
l’avoine a de la peine même à réussir. 

Le Froment faux-engrain est plus productif que 
PEngrain , mais il nous a paru moins bien LL 
à l'impression du froid. 

Si le Froment - amidonier ( Triticum farrum ) 
n'avait pas le désavantage de rester enveloppé de 
ses balles, il y a plusieurs de ses variétés qui sont 
aussi productives que les fromens les plus cultivés; 
mais la double manipulation qu'il exige, comme 
l’'Epéautre, pour être réduite en bonne farine, ne 
peut jamais balancer la beauté du grain de certaines 
variétés. Au reste, bien que l’on cultive plusieurs de 
ses variétés dans d’assez vastes contrées , elles ont été 
trop peu étudiées pour qu’on puisse rien dire d’im- 
portant à leur égard, et ne peuvent avoir au surplus 
des qualités qui ne puissent se retrouver dans les 
autres fromens faciles à dégager des balles. 


—_ 


É (371) 


Le Froment faux engrain a les qualités de lEn- 
grain , il est seulement un peu plus robuste pour 
la stature. Ï 

Le Froment de Pologne , cultivé souvent sous le 
nom de Seigle de Pologne et de Seigle de l'Ukraine, 
des lieux où il est le plus cultivé, est une espèce 
remarquable pour la beauté de son grain, et la 
grosseur de ce grain , si on le compare au seigle, 
mais qui est inférieure au froment de bonne qualité. 
Sa végétation vigoureuse et son ample feuillage con- 
courent à effriter beaucoup la terre. La paille est 
trop grosse pour fourrages ; cependant il vaudrait 
mieux le cultiver que le seigle, s’il venait bien, 
ce dont je n’ai pas l’expérience et ce dont je doute, 
dans les terres dites terres à seigle. On ne trouve 
rien dans les ouvrages sur la qualité des farines de 
cette espèce, tant on a apporté jusqu'ici d’indiffé- 
rence sur ce qui est relatif aux choses qui sont ce- 
pendant pour nous de première nécessité ; mais nous 
tenons de M. le lieutenant-général comte Dessaix, 
propriétaire de Fernex, que le pain fait avec ce fro- 
ment est très bon, par l’expérience qu’il en a par- 
devers lui. 

Quels que soient les éloges qu’on ait pu donner 
à quelques variétés du Froment d'Afrique, dont 
plusieurs sont cultivées en grand, en Barbarie , en 
Sicile, en Tartarie; quels que soient les avantages 
qui leur soient particuliers , ils ne l’emportent en 
aucune manière sur plusieurs des fromens cultivés 
dans la Belgique , la France et l'Angleterre ; ainsi, 
à moins qu’on obtienne un froment de Tangarock 


(372) 


à grain tendre, nous ne pensons pas qu’il puisse 
mériter, au moins d’après nous, tous les éloges qu’on 
lui a prodigués , si ce n’est peut-être par la quantité 
du produit ; car pour la qualité de ce produit il 
est inférieur , bien que le grain soit gros et jau- 
nâtre. Nous avons vu le froment d'Afrique à grain 
tendre, mais il ne s’est pas soutenu et est devenu 
de nouveau très corné et très dur. 

Le Froment plat , c’est-h-dire à épi comprimé de 
deux côtés , est l’espèce qui fournit, avec le Froment 
barbu et le Froment sans barbe, les meilleures et 
les plus belles variétés. La végétation en est plus 
vigoureuse. Comme il a le chaume plein de moelle, 
vers le sommet, il se brise moins par l’action des 
vents lorsqu'il est en épis et par le poids de l’eau 
lorsqu'il vient des pluies. A la vérité, il demande 
généralement des terres végétatives et profondes. 
Dans les terres arides il réussit mal, comparé à 
certaines variétés que nous indiquerons et qui don- 
nent de très bons produits dans les terres peu riches. 

Le Froment plat sans barbe est une espèce d’une 
qualité supérieure ; il existe au milieu des moissons, 
dans la Provence. 

N'ayant vu que des variétés de fromens durs dans 
le Froment plat blanc, n.° 3 , malgré l'abondance de 
ses produits, dans les bonnes terres , nous ne pou- 
vons le classer que dans les qualités inférieures ; 
mais nous sommes persuadé qu'avec quelque atten- 
tion on obtiendrait une variété à grains tendres, que 
nous aurions observée dans les cultures en grand, 
comme nous l’avons vu pour des variétés suivantes. 


/ 


(375 ) 


Les meilleures variétés de froment plat sont celles 
qué nous avons indiquées sous les noms de roux,n.°4, 
rouge , n.° 6, de Poulard , n.° 7; le grain en est gros 
et nourri, les tiges fortes. Il réussit surtout dans les 
bonnes terres du midi , qui paraît lui être plus fa- 
vorable que le nord : joint à ce qu’il mûrit un peu 
plus tard que les autres variétés de fromens. 

Le Froment plat étalé, n.° 12, est remarquable 
par la beauté de son grain, et mériterait d’être cul- 
tivé en grand. La couleur de ce grain est le jau- 
nâtre, de même que dans le Froment plat rameux. 
Il faut à ce dernier un terrain riche de végétation ; 
autrement 1l réussit mal, et en outre il tend ordi- 
nairement à rentrer dans le Froment étalé ou dans 
une variété analogue : ce qui au reste n’est pas un 
inconvénient, puisque dans les espèces rameuses il y 
a toujours quelques grains avortés dans tous les épis. 

Par les variétés n.” 4 à 7 de cette espèce, on trouve 
un passage très appréciable avec le Froment renflé, 
par l'intermédiaire de la première variété que nous 
avons indiquée dans le Froment renflé, et qui pou- 
vait aussi bien rentrer dans le Froment plat que dans 
le Froment renflé, si elle n’eùt pas eu le grain, la 
grandeur et la pubescence approchant de la dernière 
espèce. 

Le Froment renflé, qu’on peut réduire , d’après ce 
qui nous est connu, à trois races ou variétés fixées : 
le Planc ou Pétianelle blanche, le Pétaniel roux et 
le gris ; mérite d’être plus répandu. 

Ce froment est le plus vigoureux de tous; celui qui - 
exige les meilleures terres et qui rapporte le plus: 


(374) 


aussi convient-il beaucoup après les défrichemens. 
Comme son grain est souvent dur, jusqu’à ce qu’on 
n’ait que des variétés tendres, il aura de la défaveur 
pour la qualité de ses produits. Sa paille très grosse 
et très dure est rejetée des animaux, ou demande- 
rait une manipulation particulière pour être d’une 
facile consommation dans l’entretien des animaux 
domestiques. Son grain très beau à la vérité, trés 
lourd, donne beaucoup de farine, mais rude et 
fournissant une pâte brune, et de là peu favorable 
pour faire de trés beau pain. Malgré tout, nous ne 
saurions trop recommander ce froment , parce qu'il 
jouit de propriétés assez remarquables. Cette an- 
née 1833, il a parfaitement réussi dans les lieux 
où il a été cultivé dans le département de Maine 
et Loire, comparativement avec le froment de S.t- 
Laud, qui a moins bien réussi. Sa végétation a ré- 
sisté à l'intensité de la chaleur; son grain est très 
nourri : seulement il mürit huit à dix jours plus tard, 
ce qui n’est point un inconvénient dans l’ouest ni le 
midi de la France. Il rapporte encore mieux que 
plusieurs bonnes variétés dans les terres médiocres. 
Il pèse à la vérité moins que les bons fromens bar- 
bus , à mesure semblable. Dans le département des 
Deux-Sèvres , il vaut jusqu’à trois francs de moins 
par hectolitre que les bons fromens. 

Comme il est de principe qu’on ne peut prendre 
trop de soin pour se procurer des semences pro- 
venues de pieds vigoureux, parce que la puissance 
de végétation se soutient pendant plusieurs années, 
le Blé géant de S.-Hélène peut être cultivé de pré- 


( 375 ) 


férence ; mais il faudrait en obtenir un blé tendre. 
Voici une expérience faite sur deux litres de cette 
sous-yariété, dont nous devons la communieation à 
J’obligeance de M. Lofficial, membre de la Société 
d'Agriculture , Sciences et Arts d'Angers, et du 
Conseil-général du département. Le froment de S.i®- 
Hélène, semé au milieu de décembre 1832, com- 
mune du Vieil-Baugé, dans un terrain de moyenne 
qualité et non fumé , s’est élevé | malgré la tempé- 
rature défavorable aux céréales, à plus de 15 déci- 
mètres, 125 millim. (5 pieds), et fournissait de deux 
à dix tiges par grain. Au mois de mars, le semis pa- 
raissant trop épais, on en a enlevé les deux tiers. 
Repiqué en rayons, à 15 centimétres ( 6 pouces ) 
de distance en tous sens, il a un peu moins talé, 
mais sa végétation a été plus belle, et il a donné 
des épis plus gros, plus égaux. Chaque épi con- 
tenait de 60 à 80 grains. Pris au moment de la ré- 
colte , un épi entier pesait 7 grammes, et les 72 grains 
qu’il contenait, mis à part et pesés, n'avaient perdu 
que quelques centigrammes. 

Comme il s’est trouvé du mélange de quelqu’auire 
froment dans les deux litres semés, il est probable 

«qu'ils eussent produit plus de 80 litres : produit 
qui a cependant été le résultat de l'expérience, 
bien que vingt litres appartinssent à une autre Va- 
riélé. 

Le Froment renflé est de toutes les espèces ou 
variétés celle dont le produit est le plus abondant, 
et aprés elle nous placons les bonnes variétés ;du 
Froment plat ou Blé de Providence. 


(376) 


Le Froment renflé rameux ou Blé de miracle, s'il 
est cultivé dans de bonnes terres, rapporte beaucoup. 
La qualité de son grain est supérieure à celles des 
autres variétés de cette espèce ;. car il est presque 
tendre et donne une farine blanche, dans la variété 
à grain jaunâtre , que nous avons recue de divers en- 
droits. La variété connue dans l’arrondissement de 
Beaupreau ( département de Maine et Loire), sous le 
nom de Êlé à mailloche, est très bonne et recherchée, 
étant à grain tendre, mais rougeâtre : aussi est-il 
pour nous la meilleure de toutes celles du froment 
renflé. 

Le Froment barbu de Sicile, n° 3, a l'avantage 
d’avoir une paille pleine au sommet , pour résister à 
la force des orages ; mais son grain est assez ordi- 
nairement dur. Cependant comme il est tendre dans 
certains individus , on pourrait, en le surveillant sous 
-ce point de vue, obtenir une variété très fixe ) qui 
rivaliserait avec les autres variétés du froment barbu; 
et l’emporterait même sous le rapport de la qualité 
nourrisante de sa paille très petite , facile à broyer 
par les animaux domestiques qui en seraient nourris. 

Le Froment barbu de Toscane , n° 4, etle Fro- 
ment barbu à chapeaux, qu’on sème très épais, en 
mars, dans les terres les plus médiocres, aux en- 
virons de Florence et de Pise (1), pour en avoir cette 
belle paille propre à tisser les chapeaux d'Italie, du 


Caen ER EE EEE SOU Ce BR CE UERN EU RER CRUE PP AL TO 


(4) En Suisse au contraire, on sème clair pour avoir de grosse 
paille , qu’à la vérité on fend, au lieu de l’employer entière comme 
en Italie. 


(371) 


prix de cinq et six cents francs, sont d’une sta- 
ture moyenne, et fournissent peu, à raison de la pe- 
titesse de l’épi et de celle du grain. Aussi, par la 
qualité de ce grain qui est dur, ce froment n’est:l 
recommandable que pour sa paille et pour en obte- 
nir la Paille d'Italie, dont la qualité a été acquise 
aux dépens du grain , en semant épais, et en mars: 
ce qui lui a imprimé une disposition telle qu’elle 
est comme fixée, et qu'il faudrait un très long laps 
de temps , pour amener une autre espèce à cet état 
désiré. En Suisse, par une singularité opposée, on 
se sert des pailles de très grands fromens, pour le 
même objet. 

Le Froment barbu tremois, n.° 7, ou Blé tremois, 
cultivé dans l’ouest de la France, est constam- 
meni d’une assez petite stature , et à grain petit; 
mais comme il est hâtif, il a l'avantage de pouvoir 
être semé même au commencement d'avril , et de 
rapporter plus qu’une meilleure variété semée dans 
le même temps. On peut dire que c’est une espéce . 
agricole toute faite, et qu’on a plus d’avantage à 
s’en servir que de celles qui n’ont pas l'habitude 
de parcourir toutes les périodes de leur végétation, 
dans un très court laps de temps. 

Le Froment barbu blanchätre, n.° 9, a été l’un 
des plus universellement cultivés en France, il n’y 
a encore qu’un petit nombre d’années ; c’était le seul 
connu dans l’ouest de ce royaume. Dans le dépar- 
tement de Maine et Loire , les fermiers disent qu’il 
résiste mieux à la gelée dans les terres humides et 
courtes, qui semblent les plus impressionnables aux 


(378) 


premiers et aux derniers froids, par la facilité avec 
laquelle elles se soulèvent et se laissent aller aux 
premiers rayons du soleil : terrains que les colons 
nomment terres brécheuses. Un certain nombre de 
cultivateurs tiennent encore à cette variété, bien 
qu’elle donne généralement moins que les espèces 
introduites dans ce département, depuis une quin- 
zaine d'années. Les épis en sont bien fournis et non 
susceptibles de se briser au battage ; le grain est beau 
et se dégage facilement des balles ou glumes ; la paille 
reste plus garnie de feuilles , elle est moins dure que 
celle de beaucoup d’autres espèces, et par cela plus 
propre à la nourriture des animaux domestiques : 
toutes qualités qui protègent encore cette espèce 
dans une grande partie de l’ancien Anjou et sur- 
tout dans l’arrondissement de Saumur, où cette 
variété de froment paraît convenir dans beaucoup 
de terres légères, de nature calcareo-argileuses (1). 
Au surplus, son mérite nous semble un peu fondé 
sur des habitudes de pays; car dans certains endroits 
on le préfère , comme rapportant plus et mieux , à 
certaines variétés qui lui sont supérieures de toutes 
manières : tant les habitudes prévalent long-temps 
sur Îles améliorations les plus avantageuses. 

Le Froment barbu rouge , n.° 10, est assez es- 


. 


(4) Une partie de ces observations nous ont été communiquées 
par notre collègue M. Gontard fils, agriculteur recommandable, et 
au père duquel on doit la précieuse introduction de la chaux comme 


amendement dans l’agriculture du département de Maine et Loire, 
depuis 1788. 


(379 ) 


timé dans plusieurs parties du département de Maine 
et Loire, pour la qualité de son grain, celle de la 
paille et pour son produit. Il paraît convenir sur- 
tout dans les terres à seigle, qui sont généralement 
des terres maigres ou peu végétatives. Dans beau- 
coup d’endroits de ce département on tient à en 
conserver la culture, pour ses avantages connus, 
bien qu'il y ait des espèces d’un meilleur rapport. 
Dans le département des Hautes-Alpes, sous Le sim- 
ple nom de FÆroment on cultive cette variété, mêlée 
souvent au barbu blanchätre. Au surplus , lune et 
l’autre de ces variétés sont susceptibles de passer 
très facilement à une sous-variété, à épis plus min- 
ces et à grain plus allongé; de donner des épis pu- 
bescens ou couverts de poils courts ; et eufin d’offrir 
une couleur rouge très pâle, blanchâtre, jaune et 
brunâtre : toutes modifications qu’on peut perpétuer, 
en ayant le soin d’enlever, chaque fois qu’il s’en 
présente, les modifications étrangères à celles qu’on 
veut fixer. Comme toutes les autres variétés , il peut 
perdre ses barbes et passer au Æroment sans barbe. 
La farine fournie par le Froment barbu rouge, à 
moins de qualité que celle du Froment barbu blan- 
châtre, et on lui reproche aussi d’avoir les épis fra- 
giles sous le fléau ou sous le rouleau. 

Le Froment barbu Pictet, n° 12, est une trés 
bonne espèce à introduire, ainsi que le Froment 
barbu du Cap, n.° 11 : l’un et l’autre ayant un grain 
susceptible de donner, dans les terres convenables, 
des farines de première qualité. 

Le grain du Froment barbu de Naples est tel 


( 380 ) 


que nous ne douions pas de sa bonne qualité, 
dans les grandes cultures. Nous n’avons pu l’appré- 
cier que dans ses produits dans nos jardins de bo- 
tanique ; moyen peu propre à juger de toutes les 
qualités des céréales. 

N'ayant pas vu en grand la culture du Froment 
barbu compacte, nous ne pouvons nous prononcer 
sur ses qualités ; si ce n’est qu'il a toujours très 
bien réussi dans nos semis, tandis que beaucoup 
d’autres variétés ont eu une végétation languissante, 
bien que placées dans les mêmes circonstances. 

Le Froment sans barbe est assez nombreux en va- 
riétés, mais il n’est pas facile de les distinguer. A 
Vextérieur les épis sont blancs ou rougeâtres, velus 
ou glabres , pressés ou lâches ; les grains sont ou 
grisâtres , ou jaunes, ou blanchâtres, ou rongeâtres. 

Le Froment sans barbe de Crète jaune, n° 1°, 
qui a glacé dans nos jardins, est une espèce très 
bonne à cultiver, et au nombre des plus impor 
tantes : son produit nous ayant toujours paru ex- 
cellent. Le grain de la variété rouge est moins bon. 

Le Froment sans barbe grand velu , n.° 3, mérite 
d’être cultivé par la beauté de la végétation ; il ne 
peut sous ce rapport être confondu avec aucune autre 
espèce à épis velus. 

Le Froment blé de haie, n.° 10, vu sa maturité 
prompte et les qualités de son grain, ne saurait trop 
être recommandé, surtout pour les pays septentrio- 
naux. Nous ne connaissons rien qui lui soit supérieur 
dans les fromens, ni pour le produit ni pour la 
qualité. 


(581) 


Le Froment sans barbe de Talavera, n° 16, a 
toutes les qualités des fromens velus à grain blanc- 
jaunâtre. Cultivé dans des terres de moyenne qualité, 
il a rapporté en 1832, année si favorable aux cé- 
réales , plus qu'aucune des bonnes variétés cultivées 
dans le département de Maine et Loire, d’après des 
essais constatés par un des membres du Conseil- 
général , M. Lofficial : ce qui doit encourager cette 
variété qui fournit un pain de la plus éclatante blan- 
cheur, comme toutes les variétés à grain analogue. 
En 1833 il a donné près de moitié plus que le fro- 
ment de S.t-Laud, n.° 23. 

La réputation de la Touzelle des Provençaux, 
n.° 17, est faite ; et ce froment partage sans nulle 
différence toutes les qualités du précédent, dont il 
est peut-être sorti. 

Le Froment blanc d'Odessa est encore une des va- 
riétés supérieures, qu’on ne peut trop recommander ; 
et qui, d’après des essais faits à Grignon , réussit 
presque aussi bien semé au printemps qu'en au- 
tomne. 

Le Froment sans barbe Blanc-Zéé, n.° 19, est 
comme les trois précédens, une variété supérieure 
pour la qualité des produits ; et dont, outre les 
autres caractères , le grain se distingue par sa 
grosseur et sa sorte de gibbosité. Dans les terres 
trop argileuses et dans les terres trop humides, le 
grain perd sa belle couleur blanc-jaunâtre pour pas- 
ser comme au blanc-rougeâtre; mais il reprend bien- 
tôt son premier aspect dans les terres convenables 
aux fromens tendres. Le Blanc-Zéé réussit surtout 


(382 ) 


dans les terres riches , telles que les défrichemens 
des marais et les terres un peu fraîches ; et pour en 
obtenir des produits abondans , il ne peut être cul- 
tivé que de cette maniére. 

Toutes les variétés dont nous allons parler main- 
tenant, auront le grain grisâtre ou rougeâtre et non 
jaunâtre ou blanc-jaunâtre. Cependant il y en a un 
grand nombre qui offrent de très précieuses qualités, 
et ce sont même les bonnes variétés de cette série qui 
sont le plus répandues dans les cultures. 

Le Froment sans barbe de Normandie , n.° 20 , est 
de tous les fromens à épi blanc, celui qui s’élève le 
plus dass tous ceux que nous avons été à même d’ob- 
server ; c’est ce qui fait que sa paille est très grosse 
et un peu désavantageuse par cette raison. Ce fro- 
ment, cultivé avec soin dans le département des 
Deux-Sèvres , par un agronome éclairé, M. Bujault 
de Melle, bien connu, exige des terres fortes | pro- 
fondes et un peu fraiches. Il est d’un très bon pro- 
duit ; et si M. Bujault, qui l’a désigné sous le nom 
de Gros Blé de Normandie , Va abandonné, c’est à 
raison de ce que les terres dans lesquelles il pouvait 
le metire, ne convenaient pas à sa vigoureuse végéta- 
tion : toutes observations que nous devons à l’obli- 
geance du cultivateur que nous venons de citer. 

Le Froment sans barbe Mars-nain, n° 21, doit 
parfaitement convenir aux terres légères , et il mérite 
d’être cultivé de préférence aux autres variétés dites 
de Mars : son produit nous ayant paru supérieur à 
celui des autres Fromens de Mars ou de trois mois, 
que nous avons pu lui comparer. 


( 383 ) 

Le Æroment sans barbe gros-grain, n.° 22, mé- 
riterait d’être plus connu; et comme son grain est 
aussi gros que celui de Normandie et sa paille moins 
grosse , peut-être est-il préférable à ce dernier. 

Le Froment sens barbe S.'-Laud , n.° 23, qui nous 
semble la variété à épis blancs du Froment Lammas , 
doit la réputation qu’il a acquise au loin , aux bonnes 
terres dans lesquelles il végète et dans lesquelles est 
parfaitement bien nourri son grain. Les personnes 
qui le retirent du département de Maine et Loire, 
éprouvent le besoin de renouveller la semence au 
moins la troisième année, parce que dans les petites 
terres il finit par perdre la vigueur qu'il acquiert 
dans les terres de vallées et dans les meilleurs sols de 
l’ancien Anjou. Ce froment réussit beaucoup mieux 
dans les terres légères, profondes , sablonneuses et 
bien amendées que dans les terres argileuses, où il 
offre du désavantage comparé avec le Blé renflé , 
ainsi que nous l’avons déjà dit. k 

Le Froment sans barbe gris, n.0 24, a été l’un des 
plus anciennement cultivé en grand, dans les fro- 
mens sans barbe ; et bien que le grain en soit sou- 
vent d’une bonne qualité, on s’en était lassé, à raison 
de ce que ses épis à épilets écartés finissaient dans 
beaucoup de terres végétatives , par ne rien donner: 
surtout dans des terres où l’on surveillait peu les 
semences. 

Le Froment sans barbe de Fellenberg ; n.° 25, qui 
se rapproche un peu du précédent par la forme gé- 
nérale de son épi, est une très belle espèce, remar- 
quable par la longueur de ses épis et la hauteur de 


( 384 ) 
ses tiges, mais qu'on ne doit confier qu’à de très 
bonnes terres ou à des terres nouvellement défri- 
chées. Il abandonne facilement ses glumes ou balles. 

Le Froment bleu sans barbe, n° 26, est une espèce 
vigoureuse qui produit beaucoup et s’égrène fa- 
cilement. Mais, d’après les observations de M. Bu- 
jault, on doit le couper avant qu’il soit séché sur 
pied , afin d'éviter la perte qui résulterait par la faci- 
lité du grain à sortir des glumes. Bien que la qualité 
de son grain ne soit pas la même que celle de plu- 
sieurs des espèces à grains roügeâtres que nous ci- 
tons, cependant il y a de l’avantage à le semer, 
d’après des essais faits comparativement : donnant 
beaucoup de grain, et ses épis pouvant atteindre 
jusqu’à 15 à 17 centimètres ( 6 pouces et plus ). Il 
exige une bonne terre, des engrais et un sol frais : 
autrement son grain broue , c’est-à-dire est ridé et à 
demi-rempli. Pourvu qu’il y ait bon fonds de terre, 
M. Bujault nous dit, dans ses notes manuscrites, 
que ce froment n’exige pas une nature de terre ex- 
clusive , et par conséquent que les sables, les cal- 
caires ou les argiles peuvent lui convenir. 

Le Froment sans barbe de Mars, n.° 27, ayant eu 
dans les mêmes circonstances que les autres fromens 
de trois mois , dont nous avons parlé, une très belle 
végétation et un produit remarquable , doit être em- 
ployé, surtout dans les bonnes terres, de préférence 
à toutes celles qui portent le nom de Blé de trois 
mois où tremois. Nous supposons que le Æroment 
de marselage , que nous connaissons peu, est une 
variété de froment de mars, qui réussit au surplus 


(385) 


aussi bien que lui, d’après ce que nous avons pu 
en voir. Il nous à fourni un Blé blanc, mais qui a 
mal réussi, même dans les circonstances les plus fa- 
vorables , bien qu’il soit très vigoureux par le 
chaume. Le Froment marselage ne sort pas très fa- 
cilement de ses glumes et varie souvent, en donnant 
des épis grisâires ou des épis barbus. 

Le Froment sans barbe Pictet, n.° 29, paraît 
une bonne espèce. Nous ne connaissons pas assez 
ses avantages agricoles, pour ne l’avoir jamais vu 
en grande culture. Ses grains ne se détachent pas fa- 
cilement de ses glumes. 

Le Froment sans barbe ER a n.° 30, 
ne quitte pas facilement ses glumes ; il est tardif de 
huit jours pour la maturité moyenne des variétés 
que nous avons cultivées ; et dès-lors ne doit pas 
ètre adopté dans les parties du nord de la France. 
Il parait une espèce productive, ayant un très beau 
grain , lorsqu'on tient à la grosseur du froment. 

Les Fromens sans barbe de Mars gris et élevé, 
n® 32 et 33, sont préférables à tous les blés que 
nous avons indiqués jusqu'ici pour leur produit, et 
ils nous ont fourni une bonne observation; c’est que 
les irés petits grains sortis d’une variété à gros grain, 
reprennent le volume du grain de l’espèce dont 
ils sont sortis, si on les cultive dans de bonnes 
terres. 

Bien que les Fromens sans barbe du Caucase et 
de Hongrie , n.” 34 à 35, puissent être, dans la 
contrée d’où ils sortent , des espèces estimées ; ils 
ont l'inconvénient d’avoir des grains qui se déga- 


27 


( 386 ) 
gent difficilement de leur glume et les épis trés cas- 
sans : inconvénient, au surplus, commun à toutes 
les espèces ou variétés à épis trés rouges. 

Le Froment sans barbe grillé, n° 36, vu qu'il 
est d’une végétation peu vigoureuse, était plus ré- 
pandu qu’il ne l’est actuellement, pour les terres à 
seigle et les mauvaises terres où il rapportait pro- 
portionnellement plus que les bonnes espèces. La 
variété à barbe ou Petit Froment breton ou Fro- 
ment à six carres , lui est préférée. C’est le n.° 10 
du Froment barbu. 

Le Froment sans barbe d'Alsace, sous le nom de 
Lammas, a été beaucoup vanté et méritait de l’être; 
cependant nous avons cité plus de vingt variétés 
qui lui sont bien supérieures. On lui reproche d’être 
à épis trop cassans sous le fléau , et de quitter as- 
sez difficilement ses glumes. Très cultivé autrefois 
dans Maine et Loire , bien qu’il brime peu il est né- 
gligé: il est plus rustique. 

Le Froment Grand-rouge, qui s'élève jusque plus 
de 180 centimètres (5 pieds 172); talle tard, mais 
talle très bien. Il est un peu tardif, mais il monte 
rapidement. La balle tient à l'axe, mais le grain 
sort bien. Il préfère les terres fortes et fraîches, 
et donne régulièrement 36 hectolitres par hectare, 
d’après les observations de M. Bujault. 

Le Froment Petit-rouge nous semble d’autant meil- 
leur qu'il a réussi l’un des mieux, dans le grand 
nombre de ceux que nous avons eus sous les yeux. 
IL a égalé même le Grand-rouge en hauteur. M. Bu- 
jault le regarde comme une variété précieuse, qui 


( 387 ) 


vient itrès bien dans les terres très légères , et à 
laquelle il a imposé, ainsi que pour le précédent, 
la dénomination que nous adoptons. Le grain est très 
beau et en première qualité, dans les blés à grain 
rouge. Comme tous les précédens , il donne des 
individus à épis blancs et à épis barbus. 


$. 6. Observations sur les Fromens blancs. 


Il n’est point à mettre en doute que bien des 
qualités, lorsqu'elles dépassent la condition de cer- 
taines limites , ne se changent en imperfections ; c’est 
ainsi que malgré la supériorité des Fromens blanss, 
c’est-à-dire à écorce jaune-blanchôtre, nous les 
avons vus en butie à des reproches. Etonnés de ce 
fait, mous ayons dû rechercher quelle pouvait être 
la cause d’une dépréciation quime nous paraissait ni 
méritée ni naturelle. 

On doit se rappeler que dans l’usage ordinaire, 
parmi les agriculteurs , les fromens sont classés, 
abstraction faite de leur espèce ou variété, en Fro- 
mens tendres ,- c'est-à-dire faciles à rompre avec la 
dent, et offrant une cassure irès blanche, matie et 
grenue; et en fromens durs. Ces derniers, dits 
encore Fromens glacés, glacifs ou à glia, Fromens 
gris, se laissent couper difficilement sous la dent 
et présentent une fracture grisâtre, à surface très 
unie et demi-transparente , sur tous ses points, 
presque de même que la corne. Ces derniers fro- 
mens sont généralement peu.estimés des boulangers, 
à raison de ce qu'ils donnent moins de fleur de fa- 


( 388 ) 


rine. Ils fournissent un pain, nourrissant à la vé- 
rité, mais lourd et grisâtre : la pâte, ayant plus de 
difficulté à lever, le pain qui en résulte est plus 
déprimé. 

Les Fromens tendres se distinguent en deux sé- 
ries : les Fromens rouges ou rougeûtres , et les Fro- 
mens blancs ou d’un blanc-jaunâtre. Les premiers 
sont les plus universellement répandus, et donnent 
en général, de belle farine et de beau pain; mais 
les seconds, tels que le Talavera, la Touzelle, le 
Blanc-Zéé, et plusieurs autres, passent avec raison, 
pour être supérieurs pour la qualité de leurs farines. 
Cependant il est certain que des boulangers ont 
jeté de la défaveur dans certains cas sur les pro- 
duits des fromens blancs. Ils les'ont accusés de faire 
une pâte trop courte et moins liée que celle des 
Fromens rouges, tandis qu'ailleurs on s’en louait. 
Voulant connaître pourquoi, dans un même dépar- 
tement , celui de Maine et Loire, on pouvait porter 
un jugement aussi opposé, nous avons étudié le 
Froment blanc de deux arrondissemens différens. 
Ayant constaté que c'était le même, nous avons ce- 
pendant remarqué que celui de l’arrondissement de 
Segré, dont on se plaignait, avait toute la supé- 
riorité des Fromens blancs tendres; tandis que ce- : 
lui de l'arrondissement de Baugé renfermait un cer- 
tain nombre de grains qlacifs. 

Comme nous avons éprouvé, par les moyens ana- 
lytiques ordinaires , que les Fromens glacés renfer- 
fermaient plus de gluten que les Fromens tendres ; 
nous avons dû en conclure que la présence des 


( 389 ) 


grains glacifs donnait à la farine la qualité de duc- 
tilité qu’on recherche, à la pâte qui en provenait: 
qualité qui manquait au Froment blanc de l’arron- 
dissement de Segré, dans lequel nous n’avons pu 
trouver un seul grain glacé. 

Puisqu'il est prouvé que la présence du gluten 
est nécessaire pour faire une pâte liée et un pain 
savoureux , il est facile de suppléer à ce manque 
de l’un des principes du pain, en y faisant les ad- 
ditions convenables.. 

Nous ne sommes pas persuadés que le gluten 
n’éprouve , dans la panification ni dans la digestion, 
aucune altération, ainsi qu’on l’a avancé; mais ce 
qu’on ne peut lui refuser, c’est d’absorber trois fois 
son poids d’eau ; c’est de concourir à faire une pâte 
liée, et à déterminer la formation des yeux dans 
le pain, par la vapeur qu'il laisse échapper, dés 
que la température atteint 55° ; tandis que l’eau ne 
s’unit et se combine à la fécule qu’à un degré plus 
élevé. D’après ces propriétés, ou bien l’on ajoutera 
de la gélatine animale à la fécule du Froment ten- 
dre, ainsi qu’on l’a fait pour opérer la bonne pa- 
nification de la fécule de Pomme de terre (1); ou 
bien on y ajoutera une petite quantité de froment 


(4) On peut opérer la panifcation de la fécule de pomme de 
terre d’après le procédé de M. Ganal : on fait une sorte de colle 
par un mélange de! 40 kilog. de fécule et 20 kilom. d’eau ; le 
mélange bien fait, on ajoute 40 kilog. de fécule et 10 kilog. de 
farine de froment et 25 centièmes de parties sucrées ; ensuite le 
levain- et la cuisson se font à l'ordinaire: 


( 390 ) 


glacé : telle qu’un dixième où moins même , sui- 
vant les degrés convenables et relatifs à la nature 
des blés mélangés. 

Les proportions les plus favorables dans du pain 
de première qualité, ont été : 


Féeules 4080 00 RE) 
Gluten. . . . . 17. 
au: ou en 33. 

Torarz. . . 100. 


Et il paraît que tout pain qui se rapprochera le plus 
de ces proportions , sera le meilleur. D’aprés cela, 
il est naturel de fournir un peu de gluten aux 
fromens qui n’en offriraient pas une proportion suf- 
fisante, tel que le froment qui a été lobjet de ces 
observations. 
Dans beaucoup de parties de l’Europe, à la 
vérité les moins avancées en civilisation, on préfère 
les Blés durs aux Blés tendrés ; et nous devons 
convenir que pour celui qui ne peut pas avoir du 
pain frais, tous les jours , le pain fait avec du fro- 
ment pglacif; est moins blanc, à la vérité, mais 
plus agréable au goût, ne durcit pas aussi promp- 
tement et paraît mieux nourrir; ou au moins il est 
incontestable que la digestion s’en fait moins promp- 
tement. Aussi, pour lui procurer cette qualité de 
fraicheur, met-on quelquefois du seigle avec le fro- 
ment. 
Les Fromens durs ne donnent que 70 parties 
de pain sur 106 parties de farine brute ; tandis 


( 391 ) 


que les Fromens blancs et tendres donnent jusqu’à 
90 parties sur 100 : ce qu’il est très bon de faire 
connaître, pour indiquer de suite l’avantage des 
Fromens tendres, et surtout des Fromens blancs. 

Ces remarques qui, pour la plupart, nous sem- 
blent faites, pour la premiére fois, d’après ce que 
nous avons pu connaître de tout ce qui a été dit 
sur les Fromens ; méritent d’autant plus d’être prises 
en considération, qu’elles pourront recevoir d’utiles 
applications , par des mélanges mieux appropriés et 
plus rationnels qu'on ne paraît l'avoir fait jusqu’à 
ce jour. 


( 392 ) 


DE L'USAGE 


DU CHLORURE DE SODIUM, DANS LE CAS DE 
MÉTÉORISME ; 


Par SX. Launay-Foubert. 


Ex examinant divers ouvrages relatifs au chlore 
et à ses composés, je rencontrai, l’année derniére, 
dans le Journal des Connaissances usuelles de 1832, 
une note sur l’emploi avantageux du chlorure de 
sodium , contre le météorisme dont les bœufs se 
trouvaient atteints, par suite de l’usage , comme 
aliment, des résidus de betteraves , dans une ma- 
nufacture de sucre. 

Je me proposai d’essayer si ce remède ne pour- 
rait pas également réussir dans les cas de météo- 
risme par le trèfle. 

Je donnai à un fermier de la commune de la 
Membrolle, une fiole de chlorure de sodium de 
Labaraque ; et lui indiquai le moyen de s’en ser- 
vir. Il se présenta bientôt une occasion : il admi- 
nistra le chlorure à la dose de trois cuillerées 
pour un litre d’eau, et après une demi-heure, le 
mal avait disparu. 

Cette expérience constate un fait, qui ne pour- 


( 393 ) 


rait avoir d'importance, qu’autant que les moyens 
employés antérieurement ne seraient pas plus faciles. 

Nous supposons que le chlore gazeux, augmen- 
tant de volume au fur et à mesure de son déga- 
gement , pénètre dans la première capacité de 
l'appareil digestif ; qu’il se précipite dans les se- 
condes voies , et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’il soit 
rendu au siège de formation du gaz météorique 
qu’il neutralise alors, comme il le ferait à l’air libre, 
dès le premier contact. 


SUR LES MOYENS 


DE 


GUÉRIR FACILEMENT LES ANIMAUX DOMESTIQUES 


De la Météorisation ou Enflure, 


Dar A. de Beauvoys, 


- Membre ütulaire’ non résidant, Chirurgien à Seiches. 


La médecine véiérinaire reconnaît, comme la mé- 
decine ; deux sortes de tympanites : l’une acciden- 
telle, sans fièvre ni lésion organique ; l’autre, 
toujours accompagnée d’inflammation de l'appareil 
digestif et de fièvre. Mais le cas le plus ordinaire 


(394 ) 


pour les animaux domestiques ruminans, est la 
première. Plus rare chez le cheval, la météorisation 
paraît y avoir son siège dans le gros intestin. 

Pour combattre les accidens de la météorisation, 
lon a recours ordinairement aux excitans , tels que 
les spiritueux , les substances aromatiques , les car- 
minatifs , la suie, le sel, l’absinthe et surtout les 
préparations ammoniacales ou ammoniac liquide. 
Le chlore réussit trés bien encore, mais nous ve- 
nons constater ici, par des faits, que l’hydroclo- 
rate d’ammoniac ou sel ammoniac n’a pas moins 
de succès, dans le même cas. 

Divers moyens ayant échoué, pour dissiper une 
tympanite très intense, déterminée par la luzerne, 
chez une vache d’un propriétaire de mon voisi- 
nage , je fus instruit de l'embarras dans lequel on 
se trouvait. Je me rappelai alors que, dans un ou- 
vrage très vulgaire, mais méritant peu de confiance, 
l’Almanach de Liège, on recommandait, dans sem- 
blable cas, le sel ammoniac ; j'en prescrivis, à tout 
évènement, en solution dans une verrée d’eau, la 
valeur de 8 grammes (2 gros). On fut surpris de 
la promptitude de l’effet et de la guérison rapide 
de l’animal. Trente minutes après l’eau chargée du 
sel, avalée, on pouvait pincer la peau, et trois 
quarts d’heure au plus ensuite, le météorisme n’exis- 
tait plus. 

Depuis lors, dans un cas de tympanite, chez 
une femme, mais par des causes maladives: assez 
graves, j’essayai la même médication, tout autre 
moyen ayant été infructueux; et en employant l’hy- 


( 395 ) 


drochlorate d’ammoniac, à la dose de 4 grammes, à 
deux fois ( 1 gros): j'obtins un heureux résultat, 
qui m’étonna, et que je consignerai dans une autre 
observation plus précisée. 


SUR LES MOYENS 
D'UTILISER LES TUBERCULES DES ORCHIDÉES, 


Por M. de Beauvoys, : 


Ménibre titulaire non résidant, Chirurgien à Seiches. 


Les Orchis et plusieurs Ophrys, dont une série 
d’espèces est connue vulgairement sous le nom de 
Pentecôtes, portent des tubercules qui, préparés 
convenablement , peuvent suppléer le Salep de l'O- 
rient, fourni par des plantes de la même famille 
et des mêmes genres. Ce fait bien connu a cepen- 
dant besoin d’être vulgarisé, et pour cela il faut 
indiquer le procédé simple pour réduire nos orchi- 
dées indigènes en salep. 

Les Orchis Morio, des coteaux ; méle , tachée , 
des bois; celle à large feuille, des prairies, etc., 
et l’Ophrys araignée , sont les orchidées les plus 
* généralement répandues et celles qu’on peut récol- 


( 396 ) 


ter le plus facilement. Toutes sont à racines en- 
fouies à un décimètre (3 à 4 pouces ) en terre. 
Une bécheite peut les en soustraire, lorsque la 
fleur commence à se développer, parce que dans 
ce temps l’un des deux tubercules n’est pas encore 
entièrement dépéri et ridé. Lorsque la récolte est 
faite, on monde les tubercules, dont les uns sont 
sphériques et les autres à forme de main ; on les 
lave complètement avec frottement, et l’on en fait 
alors des sortes de chapeleis, en les enfilant en plus 
ou moins grand nombre , avec une aiguille et du fil. 
Ces chapelets sont plongés dans l’eau bouillante, 
pendant l’espace de quatre à six minutes , suivant la 
quantité d’eau ou celle des tubercules. Alors on 
retire les chapelets et on les expose bien à l’air ou 
au soleil ; et dans l’espace de 15 à 20 jours, ces 
tubercules sont bien secs : en perdant toutefois les 
deux tiers de leur poids primitif. 

Lorsqu'on veut s’en servir, on peut les piler 
grossièrement, et ensuiie ils fondent et forment avec 
l’eau une sorte de gélatine, par l’effet d’une ébulli- 
tion soutenue. Il en faut 12 grammes ou 3 gros 
avec 5 décilitres d’eau (une chopine ) ou de lait, 
pour faire , à volonté, une sorte de potage, si on 
ajoute sel et beurre au bouillon; ou bien avec le 
lait une bouillie, en y ajoutant du sucre. Ce salep 
indigène, comme le salep exotique, est trés sain, 
très nutritif et d’une facile préparation. 

Nous savons bien qu’en suivant nos indications, on: 
aura bientôt épuisé la source du salep : les orchi- 
dées ne se multipliant beaucoup que par l'effet : 


( 397 ) 


d’un trés long temps; mais enfin on en aura utilisé 
une quantité très considérable , avant de les voir 
diminuer sensiblement, et l’on ne fera que soula- 
ger les prairies où elles sont inutiles ; les bois et 
les coteaux, où elles abondent , n’en perdront rien 
que quelques fleurs de moins. 

Une seule personne peut, dans un seul jour, 
et cela dans un grand nombre de localités, récol- 
ter 3 kilogrammes de tubercules, pouvant fournir 
un kilogramme de salep. Et comme cette substance 
vaut 8 francs le kilogramme dans le commerce, ce 
salep indigène doit au moins avoir moitié de cette 
valeur. On peut faire faire cette récolte par des 
bergers, et le produit, n’en fütil que pour sa 
propre consommalion , serait un avantage , surtout 
étant tiré d’une chose qui est sans valeur pour nous 
maintenant. 


( 398 ) 


EXAMEN CHIMIQUE 


D'UNE ARRAGONITE SERVANT DE MARNE, 
TROUVÉE 


Dans le département de la Vienne ; 


Dar M. Ÿ. Tebreton, 


Membre de la Société de Médecine d'Angers , du Conseil de Salu- 
brité de la même ville, Membre correspondant de la Société de 
Pharmacie , et ide celle des Sciences physiques, chimiques et Arts 
industriels de Paris, Membre honoraire de la Société des Phar- 
maciens de l'Allemagne septentrionale. 


Daxs une de ses excursions fréquentes, toujours 
entreprises dans un but d'utilité, M. Desvaux, pro- 
fesseur-directeur du Jardin de Botanique d’Angers, 
trouva un calcaire qui fixa son attention. Sur le 
désir que je lui témoignai d’en faire un examen 
particulier , il m’en remit une certaine quantité, et 
eut la complaisance d’y joindre une note détaillée 
sur son gisement et sur les caractères qui lui sont 
propres. 

Voici ses expressions : « Dans la commune de 
» Gencay, département de la Vienne, il existe 
» une vaste étendue dont le sous-sol est de terrain 


» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 
» 


» 


( 399 ) 


sédimentaire, composé d’argiles et de marnes ; 

mais la marne y est de nature bien plus calcaire 
qu’argileuse. C’est au milieu de cette formation 
marneuse que se trouveni des masses plus ou 
moins volumineuses, du diamètre de 2 à 5 dé- 
cimètres ; irrégulières à leur surface et mélangées 
de marne ou d'argile, sur différens points. Ces 

masses sont d'apparence fibreuse, et avaient fixé 
aussi l’attention de M. Mauduyt, correspondant 
de la Société d'Agriculture d'Angers, à laquelle 
il a même communiqué un travail sur les marnes 
de cette localité. Ces masses dures sont suscep- 
tibles de se déliter à l'air, à la manière des 
marnes , et sont appropriées de la même manière ; 
mais leur aspect intérieur ne rappelle l’idée d’au- 
cune modification de calcaire , et pourrait faire 
soupçonner que ce serait une variété de strontiane 
sulfatée ou plutôt carbonatée : l’effervescence avec 
les acides n'étant pas douteuse. Ces masses fi- 
breuses sont toujours plus ou moins rayonnantes , 
souvent en fibres courtes ; mais le plus ordinai- 
rement à fibres très prolongées, formant une sorte 
de pierre blanchâtre, cassant facilement , un peu 
plus dure que le calcaire spathique ou hyalin, sans 
aucune translucidité. Cette substance ne peut être 

rapprochée de lArragonite fibreuse conjointe par 

ces caractères empiriques, qui quelquefois sont 

d’un assez heureux usage dans le premier coup- 

d'œil qu’on jette:sur un minéral. Cette arragonite , 

par son gisement au milieu des marnes ; par son 

aspect autre que celui des calcaires , et notam- 


( 400 ) 


ment du calcaire fibreux conjoint , et rappelant 
» l’idée de certains gypses: différent des diverses 
» modifications d’arragonite, méritait un examen par- 
» ticulier. D’après l’examen suivant il résulte que 
» c’est une nouvelle variété d’arragonite, remar- 
» quable par son entière opacité, tandis que dans 
» les arragonites fibreuses radiées il existe toujours 
» un certain degré de translucidité. Il est vrai que 
» dans quelques masses d’arragonite fibreuse , l’on 
» avait déjà remarqué que leur translucidité dispa- 
» raissait dans certaines parties , et alors ces portions 
» d’un blanc mat offraient l'aspect terreux ; tandis 
» que dans la variété que nous signalons , le blanc 
» mat terne existe dans toute la masse, même au 
» moment où les masses sont extraites de leur gise- 
» ment qui est ordinairement à 2 ou 5 mètres au- 
» dessous de la surface du sol. Nous la désignerons 
» sous le nom d’Ærragonite fibreuse terne. » 

Un petit fragment de ce minéral, exposé un ins- 
tant au feu du chalumeau, ne décrépite pas ; néan- 
moins il survient un écartement dans les cristaux, 
qui alors se divisent facilement entre les doigts. 

Une certaine quantité de ce minéral bien porphy- 
risée a été soumise à l’action de l’acide hydrochlo- 
rique qui ne l’a pas dissoute entiérement. IL y eut 
une vive effervescence due au dégagement du gaz 
acide carbonique ; on jeta le tout sur le filtre ; la 
portion insoluble résista à l’acide sulfurique bouillant; 
mais fondue dans la potasse et dissoute dans l’eau, 
elle se prit en gelée. Après avoir saturé et évaporé 
la liqueur, elle présenta tous les caractères de la 
silice. 


VV 
èa 


( 401 ) 


Je soumis la liqueur à l’action du réactif. L’infu- 
sion de noix de galle , l’hydrocyanate de potasse, 
indiquèrent la présence du fer : la premiére en don- 
nant un précipité d’un brun-clair, qui passe au bleu- 
violacé par son agitation à l'air; le second par un 
précipité d’un vert-bleuâtre-clair peu prononcé. 

Pour s'assurer du degré d’oxidation du fer , on fit 
dissoudre uné certaine quantité de ce minéral dans 
l’acide hydrochlorique faible ; la liqueur fut étendue 
d’eau privée d'air, et l’ammoniaque donna un pré- 
cipité blanc, qui, agité dans l’air , prit une légère 
teinte de rouille. Cet oxide présenta, surtout avec 
l'infusion de noix de galle, le caractère propre aux 
sels de protoxide de fer. L’oxalate d’ammoniaque 
précipita abondamment. 

Nous dirons aussi que l’on s’occupa spécialement 
de la recherche de l’alumine, en précipitant l’oxide 
de fer par l’ammoniaque et le traitant par la potasse ; 
sa présence ne fut pas reconnue. 

Une autre portion de la liqueur fut précipitée par 
le sous-carbonate d'ammoniaque. Le précipité con- 
verti en nitrate, et évaporé , fut dissous presque en- 
tièrement par l’alcohol concentré. Evaporé à siccité et 
repris à l’eau distillée, il ne donna aucun in- 
dice de magnésie, ce qui n'avait pas été dissous 
par l’alcohol fut de nouveau ajouté à ce véhicule. 
On enflamma le mélange, alors l’alcohol brüla avec 
une flamme purpurine, indice certain de la pré- 
sence de la strontiane ou oxide de strontium. 

Je passe au mode que j’ai employé pour isoler ces 
divers principes et en déterminer les proportions. 


(402) 


Cent parties de ce calcaire furent porphyrisées,, et 
calcinées dans un creuset de platine, pendant plu- 
sieurs heures, pour en dégager l’acide carbonique. 
La différence de poids donna 40 parties présumées 
d’acide carbonique. Pour s’assurer si une portion 
d’eau ne concourait pas à former ce poids , on dis- 
posa un appareil convenable, pour dégager et faire 
passer le gaz dans l’eau de baryte. On introduisit 
dans l’appareil la même quantité de pierre porphy- 
risée , et l’on dégagea le gaz par l’action de l’acide 
hydrochlorique, étendu convenablement et aidé du 
colorique. Lorsqu'il n’y eut plus aucune efferves- 
cence, et quelques heures après, on déluta ; le car- 
bonate de baryte. fut recu sur un filtre et desséché : 
son poids était de 174,722, d’où acide carbonique 
39,033. Le carbonate de baryte étant formé de : 


base, 77,6. 
acide, 22,34. 


174,722 x 22,34 
100 
nique. On voit, d’après cette opération, qu'il y a eu 
un dégagement d’eau par la calcination, car nous 
avons eu d’abord 40: nombre qui excède 39,033 
de 0,967, et qui provient évidemment de l’eau éva- 
porée. Nous reviendrons sur ce point. 

Je traitai de nouveau 100 parties du même mi- 
néral par l’acide hydrochlorique ; la liqueur ayant 
été convenablement étendue et filtrée , il resta sur 
le filtre une portion insoluble qui, bien lavée et 
calcinée, pesait 8 : c'était de la silice. 


On aura — 39,033 d'acide carbo- 


( 405 ) 


: J'ajoutai un léger excès d’ammoniaque à la liqueur, 
pour en séparer l’oxide de fer, qui fut reçu sur un 
filtre et desséché. Dans cet état il était insensible au 
barreau d’aimant; mais chauffé convenablement, 1l 
perdit de son poids ; prit une couleur rougeâtre, et 
devint magnétique. Son poids sur 100, fut représenté 
par la fraction 0,50 qui représente elle-même 0,127 
d’hydrate d’oxide de fer. En supposant l’hydrate 
79,618 d’oxide , 
de fer composé de 20,382 d'eau , on aura 
20,382 x 0,50 
79,618 
La liqueur , de laquelle on avait séparé cet oxide, 
contenait encore les hydrochlorures de chaux et de 
strontiane; ils furent précipités par le carbonate d’am- 
moniaque en excés (1). Les carbonates étant séparés, 
furent convertis en nitrates et évaporés à siccité. Le 
nitrate de strontiane n'étant pas sensiblement so- 
luble dans l’alcohol très concentré, j'employai ce vé- 
hicule pour le séparer du nitrate de chaux. Je filtrai: 
ayant ainsi isolé le nitrate de strontiane , je le traitai 
par l’acide sulfurique ; je calcinai fortement dans'un 
creuset de platine, pour séparer l’excès d’oxide;' et le 
poids de ce sulfate fui représenté par 1,66, d’où 
strontiane 0,94, qui d’aprés la composition du, carbo- 
70,05 strontiane, 


nate de strontiane ainsi déterminée ù 
e i insi L ermi 29.94 acide , 


= 0,127 d’hydrate de fer. 


EE" — 


(4) On fit évaporer la liqueur et calciner dans un creuset de 
platine, pour s'assurer si la précipitation avait été exacte. 


( 404 ) 


exige 0,401 d’acide carbonique, d’où l’on a 1,341 

û 100 x 0,94 
carbonate de strontiane , car 35,0% — = 1,341 
carbonate de strontiane. 

L’alcohoi , contenant le nitrate de chaux, fut aussi 
évaporé et décomposé par un excés d’acide sulfu- 
rique , et l’on calcina long-temps. Le nouveau sul- 
fate fut représenté en poids par 85,493, d’où chaux 
47,938 , qui d’après la composition du carbonate de 

nue 
chaux a an exige 38,622 d’oxide carboni- 


43,61 x 49,938 
que, car SON 36,622 et donne 88,560 
de carbonate de chaux. 

Reste maintenant à déterminer , autant que pos- 
sible, la quantité d’eau et d’acide carbonique ob- 
tenue par la calcination. En comparant le résultat 
de cette combinaison avec les proportions d’acide 
carbonique exigées par la chaux et la strontiane, L'ée 
se constituer carbonate : 

1.° Nous avons eu 40, d’acide carbonique pré- 
sumé ; | 

2.° 174,722 carbonate de baryte, d’où 39,33 acide 
carbonique , quanüté moindre que la premiére ; 

3.0 88,560 de carbonate de chaux ne donnent que 38,622 

4.° 1,841 carbonate de strontiane ne donnent que 1,401 


Ce qui en résultat représente une quantité de 39,023 
nombre qui est moindre que le précédent, de 0,010. 
Ayant déterminé plusieurs fois la base du carbonate ; 
et le résultat étant le même à quelques centiémes 


(405 ) 


près , je crois qu'il est plus exact d'adopter ce 
nombre comme le véritable ; nous aurons alors 
40,000 — 39,023 = 0,977 eau de cristallisation. 


Il résulte de ce travail que ce minéral se com- 
pose de : 


Carbonate de chaux. . . . . 88.560 
Carbonate de strontiane . . . 1,341 
Hydrate de protoxide de fer. . 0,127 
Eau de cristallisation. . . . . 0,977 
STI Es NORME 8,000 
PERTE LA. don (ei MAT Sr 0,995 

100,000 


Cette variété de l’arragonite, par sa composition, 
a beaucoup de rapport avec l’arragonite proprement 
dite ; cependant elle en diffère en ce qu’elle ,con- 
tient de la silice en proportion très remarquable, 
vu les circonstances dans lesquelles elle se rencontre. 


( 406 ) 


: SUR LA DÉCOUVERTE 
D'UNE TERRE A PORCELAINE, 


Dans le département de Maine et Loire. 


Au nombre des objets de minéralogie envoyés 
du canton de Vihiers à la Société d'Agriculture , 
Sciences et Arts d'Angers, par M. Bourgeois pére, 
vieillard respectable de plus de 80 ans, se trou- 
vait une terre intitulée Zerre de Cossé, soupçonnée 
terre calcaire par celui qui faisait l’envoi : le but 
de la communication étant d’obtenir des moyens 
de constater le calcaire pour en tirer avantage pour 
l’agriculture. Cette terre soupconnée, à l'inspection, 
être du Kaolin, par M. Desvaux, et paraissant étre 
en assez ue quantité, devait a ten fixer 
l'attention de la Société : M. Desvaux, qui s’est oc- 
cupé de la minéralogie de Maine et Loire, n’ayant 
jusqu'ici rencontré que de trés légers indices de 
Felspath compacte ou Pétrosilex, passé à l’état de 
kaolin ou terre à porcelaine. D’après cela, il était 
important de fixer son opinion sur un fait qui peut 
avoir d’heureux résultats sur notre département ; et 
Rour acquérir une conviction plus intime sur la 


( 407 ) 


nature de la terre de Cossé, M. Lebreton, connu 
par ses travaux distingués sur l’analyse chimique , 
fut prié d'étudier cette substance ; et voici le résultat 
obtenu : 


Analyse du Kaolin de Cossé par M. Lebreton. 


Oxide de silicium. . . . ‘70,94. 
Oxide d'aluminium . . . 20,92. 
Oxide defer . . . : . 2,50. 
Oxide de calcium. . : . 1,50. 
Perte. . Lau QE on fe ovtite 

. 100,00 


Si l'on compare cette analyse avec celles de sub- 
stances analogues, qui ont été faites par deux cé— 
lèbres chimistes, on verra bien que notre terre de 
Cossé est absolument de la même nature : 


Analyse d'un Kaolin, D'un autre, par 
par Vauquelin , Rose , 

Sihce 0 OUAIS 105 1 A 

Aline. 1: 19,86 + NO -int de O2 

PERMET 0, du crie LR 0 38: 

Chaux . . . LP DR EME Er 0 

Perte) 4 : A,34 pie ve 4,67... 

RE RUN G 78 ur ARE 0 
100,00 : : : : : 100,00 


Puisque l’oxide de silicium est le principe domi- 
nant dans notre terre de Cossé, comme des kaolins 


( 408 ) 


ci-dessus , il ne reste plus de doute à cet égard ; seu- 
lement il faudra constater si la quantité existante est 
susceptible d’exploitation. En attendant. que la lo- 
calité soit explorée avec soin (1), nous donnerons 
les détails qui nous ont été transmis par M. Bour- 
geois. : ; 
« Entre les deux points les plus élevés du coteau 
» des Gardes (Za Salle de Vihiers et les Gardes Ds 
» sur la’ partie la plus affaissée , est situé le bourg 
» de Cossé, qu’en hiver le soleil éclaire rarement. 
» C’est dans la commune dont Cossé est chef-lieu, 
» que se trouve la ferre de Cossé ; sur la métairie 
» de la Tomancerie. La couche principale de la terre 
» est à 2 mètres de profondeur, à en juger par 
«> l’espèce de carrière ou cavité, servant aujour- 
» d’hui d’abreuvoir. L’épaisseur de la terre blan- 
» ché est, sur ce point, d’un mëètre au moins. La 
direction de la masse serait au sud-ouest, si l’on 
> en peut juger par un affleurement de cette même 
» terre, se faisant apercevoir , et qui annonce cer- 
tainement une liaison entre le premier point in- 
» diqué et cet affleurement, et aussi avec une masse 
» encore au-delà, dans la même direction, dans 
‘laquelle on observe les mêmes caractéres. 
» D’autres propriétés voisines de la Tomancerie 
» promettent d'offrir la même terre, si l’on en juge 
» d’après quelques apercus premiers. » 


VU 
[2 


Ÿ 


4 


EN 5 NP af m5 NN SON 


(1) Le peu de sécurité dans laquelle se -tronve la contrée où 
existe ce kaolin, a suspendu les recherches d'exploration que s’est 
proposées la Société d'Agriculture, ; Sciences et Arts d'Angers. 


( 409) 

L'existence de notre terre à porcelaine en masse 
assez remarquable, n’est donc plus douteuse ; mais 
il restera à savoir si elle sera suffisante pour com- 
porter une exploitation suivie ; si elle sera géné- 
ralement assez pure pour faire une porcelaine d’une 
belle qualité. La nature du sol de Maine et 
Loire, tel qu’il nous est connu , ne répugne point 
à voir fondé un espoir de succès, puisque nous 
avons rencontré de très grandes masses de Pétrosilex 
et d'Eurtes dans ce département, et qu’assez géné- 
ralement on trouve du Kaolin dans les terrains de 
transition. 


DESVAUX, 


Rapporteur, 


( 410 ) 


TABLEAU DE LECTURE , 


Por M. Blain, 


Chef d’Institution à Angers , et Membre de la Société d'Agriculture, 
Sciences et Arts de cette ville. 


Cer ingénieux travail se compose de deux parties: 
1.° d’une synopsie des élémens phoniques et des 
articulations simples ; 2.° d’un syllabaire divisé en 
cinq exercices. Nous ne pouvons, sans risquer de 
compromettre les intérêts de l’auteur , entrer dans 
des détails sur son ouvrage; nous nous bornerons 
à insérer ici le jugement de la Commission qui 
fut chargée de l’examiner. 

« Ce Tableau nous a paru bien conçu; le cadre 
» en est simple et la distribution méthodique : nous 
» croyons que son emploi dans les classes de lec- 
» ture abrégera le temps des premières études, si 
» pénible pour l’enfance, que l’empyrisme a pres- 
» que toujours égarée dans cette importante période 
» de sa vie intellectuelle. » 


(4) 


ane dou 
POUR GREFFER LA VIGNE, 


Por A. Le Général Delaage, Baron de Saint-Cur. 


La greffe de la vigne est faite avec des succès 
constans dans tout le midi de la France et dans le 
Saumurois. Les vignerons angevins ne la connaissant 
pas ou la négligeant, je crois devoir appeler toute 
l’aitention des propriétaires de vignobles sur ce tra- 
vail qui doit apporter des changemens avantageux 
dans la culture de la vigne, et surtout beaucoup 
d'augmentation dans ses produits. En outre, on sait 
que les fruits gagnent beaucoup de saveur sur les 
arbres greffés; saveur qui augmente même par la 
multiplication des greffes. 

Jai pris dans plusieurs ouvrages, et notamment 
dans le Manuel des Vignerons, ce que j'ai jugé 
utile : en y ajoutant, avec les détails qui m'ont paru 
convénables , les moyens d’assurer la réussite de ce 
procédé, d’après ma propre expérience. 

Nous voyons que les nouvelles habitudes des con- 
sommateurs aisés les rendent tributaires des vignobles 


(412) 


rouges , tandis qu’ils délaissent nos vins blancs, ex- 
cepté ceux de dessert. 

Nos vins blancs ne se gardant pas en barriques, 
nous sommes forcés de nous en défaire souvent à 
vil prix, dans l’année de leur récolte; les vins rouges, 
au contraire, acquièrent en vieillissant une qualité 
qui dédommage bien au-delf du coût de leur con- 
sommation. Le propriétaire qui les garde fait une 
spéculation sûre dans les années , assez rares à la vé- 
rité, où ces derniers réunissent la quantité à la bonté : 
aussi avons-nous vu leur prix augmenter de cent pour 
cent, d’une année à l’autre. 

Il est donc du plus grand intérêt de changer la 
couleur des vins de qualités inférieures que nous 
récoltons ; et c’est par la greffe que nous parvien- 
drons à obtenir cet heureux résultat. 

Pénétré de ces vérités, j'avais essayé les greffes 
sur la vigne , de bien des façons, depuis quinze ans ; 
et même javais fait pratiquer celles indiquées dans 
le Manuel des Vignerons , par des jardiniers qui 
manquent peu de.greffes d’arbres ou de rosiers: je 
n’en réussissais pas-une sur vingt; j'y avais renoncé. 

Après bien des recherches , et me rappelant com- 
ment j'avais vu opérer dans le Midi, j'ai fait greffer 
devant moi MM: Pillet, vignerons près Saumur: (leur 
adresse est connue dans de grands vignobles qu’ils 
ont changés de couleur, ou rajeunis ). Jai travaillé 
avec eux ; ils ont accueilli quelques observations ; 
et je me suis convaincu que leur méthode.est sûre. 
Ils prouvent, par quarante ans de travaux, qu’ils 
réussissent plus de dix-neuf greffes sur vingt: on 


/ 
{ 


(45) 


peut s’en assurer dans mon vignoble , où ils en ont 
fait environ trois mille. 

J'ai écrit leurs lecons sous leur dictée ( et la 
main à l’œuvre ), avec tous les détails d’une exacti- 
tude assez minutieuse pour guider les vignerons 
dans leur travail le plus important. Ce travail leur 
offre la certitude de rajeunir les vignes usées, de 
remplacer par de bonnes espèces les mauvais cé- 
pages , de récolter quantité de bon vin rouge sur 
les vieux plants de vigne blanche qui ne produisaient 
rien, de renouveler ceux dont les gelées , la bruine 
ou la sécheresse ont altéré la souche ; tout en con- 
servant à leurs vins le goût que donnent les vieilles 
vignes, les greffes le pompant des racines qui les 
nourrissent les premières années de leur pose. 

J'ai bu du vin rouge provenant de greffes de deux 
ans sur de vieux plants de vigne blanche, au Plessis- 
Grammoire ; il avait un bouquet agréable et une 
qualité très supérieure au vin blanc du même crû. 

On peut juger, d’après cela, que la greffe est un 
moyen bien plus prompt et plus économique pour 
remplacer les mauvais ceps, que l’ancien usage de 
mettre de jeunes plants, qui ne sont en rapport 
qu'après dix à douze ans de soins, et dont les fruits, 
pendant plusieurs récoltes, ont ce goût de jeunes 
vignes, qui altère celui des vieux ceps ; et que les 
marchands savent bien distinguer , si le propriétaire 
n’a pas l'attention de les vendanger à part. 

Dans nos vignobles , les mauvais ceps sont dans 
la proportion de dix au moins sur mille. Par leurs 
fortes racines , par leurs longs rameaux, ils nuisent 


(414) 


à la croissance des ceps de bonnes espèces , tou- 
jours moins vigoureux : par la greffe, vous for- 
cerez ces parasites à devenir productifs. 

Chaque année quelques ceps dépérissant, il faut se 
hâter de les renouveler par la greffe ; leurs racines 
sont encore vertes, quand la souche paraît morte 
hors de terre. 

Les soins prescrits pour la culture des greffes sont 
à-peu-près les mêmes que ceux apportés aux jeunes 
planis ; seulement il faut que les vignerons sachent 
distinguer et arracher avec précaution les pousses 
qui partent des vieilles racines , afin de fournir plus 
de sève aux bourgeons des greffes. 

Dès la seconde année, les greffes donnent demi- 
récolte ; on taille à vin le bois des plus fortes, etony 
place des soutiens, comme aux autres vignes rouges. 
Le produit de la troisième année rembourse toutes 
les dépenses , et les ceps, ainsi rajeunis, puisent une 
nouvelle vie dans les racines qui partent du collet 
des greffes. 

Au premier coup-d’œil, on juge que la greffe sur 
la vigne est aussi facile à opérer que celle sur les 
autres arbres ou arbustes; mais, en examinant avec 
attention le tronc d’un cep coupé, on reconnaitra 
que la nature a donné à cet arbuste des conduits bien 
différents pour sa sève : il n’a pas d’écorce vivace, 
et la sève flue à plein bois. 

Ce fait constaté, il a fallu étudier la taille, la 
pose des greffes, et profiter de cette prodigieuse 
quantité de pleurs pour assurer, leurs reprises sur 
les vieux ceps. 


(415) 


Deux planches expliqueront au greffeur les détails 
ci-après, que la pratique m'a démonirés indipen- 
sables pour l’entier succès de cette espêce d’enture. 

l.o Les sarmens destinés à servir de greffes doi- 
vent avoir deux pieds de long, dont deux ou trois 
pouces du bois d’un an, et le surplus du bois de 
l’année ; en outre , être coupés de manière à ce qu'ils 
forment le plus possible la perpendiculaire avec le 
crochet ou crossette. Il faut aussi que le bois soit 
bien assaisonné ou aoûté , très vigoureux , noué 
court, et que les yeux soient bien prononcés. ( Voyez 
A.P1.15.°) 

On coupe les sarmens après la chute des pampres. 
Pour les conserver, il faut les metire dans un endroit 
frais et à couvert des injures de l’air , les vieux bois 
près de terre, les arroser une fois par semaine; 
surtout ne pas les mettre dans la terre ( comme le 
Manuel l’indique ) : ce qui rend l'écorce du vieux 
bois trop tendre et facile à se lever quand on les 
taille. 

J’ai réussi nombre de greffes, en plaçant dans le 
mois de mars des sarmens coupés le même jour : 
il ne faut toutefois employer ce moyen que dans le 
cas où l’on manquerait de sarmens vieux coupés ; 
il serait même mauvais, si le bois avait été al- 
iéré par de fortes gelées ou par des grélons. 

IL faut éviter de greffer pendant les jours où il 
tombe de la pluie ; si elle frappait sur l’ente avant 
qu’elle fût couverte de terre, elle pourrait empé- 
cher la s oudure de la greffe. sur la coupe des ceps. 


( J'ai voulu braver cet invonvénient, j'ai eu lieu de 
m'en repentir. ) 


(416) 


2.0 Pour préparer les greffes , choisissez les brins 
qui réunissent le mieux les qualités prescrites à l’ar- 
ticle précédent ; surtout prenez garde que l'écorce 
du bois ne soit ridée : ce qui arrive quand les 
sarmens ont séché pour avoir été ramassés trop tard 
aprés la taille, ou bien quand ils sont réunis en trop 
grande quantité, dans un lieu où ils ont été mal 
soignés. 

On réduit leur longueur à 9 à 10 pouces, non 
compris le bois d’un an: c’est ce vieux bois que 
l’on taille en forme de coin , et non en bec de flûte, 
comme le Manuel le dit. ( Voyez B. PI. 15°) 

On doit avoir attention que les épaules soient très 
prononcées et coupées en vive-arète, que cette 
coupe commence à un pouce du nœud de jonction 
du jeune et du vieux bois; observer que la coupe 
du côté le plus mince soit plus courte , afin que la 
greffe soit rentrante sur le centre du cep : l’habitude 
fera juger de quel côté on doit l’entailler pour ob- 
tenir cet important résultat. 

3. Otez la terre jusqu’à la naissance des racines, 
sciez avec l’égohine le pied du cep au-dessus du nœud 
le plus bas, ou près du second nœud, si l’on croit 
ne pas trouver assez de bois pour ouvrir la fente 
sans séparer la racine. (Voyez C. PL 15°): 

J'ai essayé, dans de mauvais ceps dont la souche 
était gätée , de placer des greffes sur les racines ; 
je n’ai pas bien réussi, cependant MM. Pillet le 
font quelquefois avec succés. 

Soutenez la tête du cep avec la main gauche , 
et achevez le sciage avec un couteau ou serpelte, 


(#17) 


afin d'éviter de déchirer la jeune écorce ; puis ra- 
fraîchissez cette coupe avec le couteau, pour la 
rendre très unie. (PI. 16, fig. 4.) 

4° On fend le pied de vigne avec la serpe 
(Voy. PI. 16, fig. 5.), pour placer les greffes sur 
la partie la plus vive, en suivant les lignes des 
veines , Ou rayons médullaires, qui paraissent les 
meilleurs conducteurs de la sève ; ils se trouvent 
au-dessus des plus fortes racines : évitant surtout 
les échancrures et tous les endroits endommagés 
par une cause quelconque. ( Voyez D. PI. 15°) 

On enfonce la serpe avec le marteau (PI. 16°, 
fig. 6), dans les forts ceps, mais on fend les 
jeunes avec la couteau (PI. 16.°, fig. 4.), pressé 
par la paume de la main. 

5° Un ciseau en fer (PI. 16, fig. 7), ou le 
diable à revers des jardiniers ( PI. 16°, fig. 8), 
sert à ouvrir les lèvres de la fente ; on l'enfonce 
avec le marteau, dans la longueur d’un pouce ou 
plus, suivant la force du cep , l’atlirant ou le 
poussant légèrement , d’après le plus ou moins de 
résistance que l’on éprouve à l'introduction des 
greffes. (Voyez E. PI. 15.) 

6.° Passez la pointe du couteau dans la longueur 
de la fente; vous coupez ainsi les fils ou brides 
qui s’y trouvent : ‘ils seraient un obstacle à l’en- 
trée des greffes ; et vous évitez par là de déchirer 
l'écorce dont lPunion avec des greffes est le plus 
sûr garant de la reprise. 

7° Placez les greffes de manière à faire rejoin- 
dre leur écorce extérieure avec celle du pied de 


29 


( 418 ) 


vigne , et fixez-les si bien entre les lèvres de la 
fente, qu'il ne paraisse aucun jour entre leurs épaules 
et les bords de la coupe , lorsque vous retirerez 
le ciseau qui a servi pour l'ouvrir. (Voyez F. PI. 
15.e.) 

Comme il reste un peu de vide dans la fente 
entre les greffes , si la pluie ou la terre y péné- 
traient, la soudure se ferait mal , la sève y flue- 
rait en pure perte, et la moisissure ferait périr la 
souche. Ayez donc soin de couvrir ce vide avec un 
des petits coupeaux obtenus en rafraîchissant la 
coupe, que vous fixez avec un peu de terre. 

Je préfère mettre sur le coupeau de la terre 
glaise mêlée de fiente de vache humide ; qu’on 
nomme onguent de S.t-Fiacre : c’est un peu plus 
long, mais c’ést plus sûr. 

En général , les vieux ceps sont assez forts pour 
retenir les greffes ; mais vous êtes obligés de lier 
avec un osier ou plomb la coupe des jeunes plan- 
tes qui n’ont pas un pouce de diamètre , ou les 
vieux ceps qui se trouvent endommagés dans quelque 
partie de leur tronc, afin de rapprocher les lèvres 
de la fente sur les greffes. 

Evitez que la fente soit trop longue ; elle ne 
doit être que d’un pouce. Il vaut mieux être forcé 
de frapper avec le marteau sur le vieux bois de 
la crossette pour la faire entrer, que de trop en- 
foncer le ciseau : il écarterait les lèvres qui se 
fermeraient difficilement, si on oubliait de les lier 
avec un osier. 

8° Si les ceps sont trop couchés, on les re- 


(419) 


dresse en mettant dessous une pierre ou une motte ; 
le sciage alors est plus facile. Souvent leurs pieds 
sont tellement contrefaits, que l’on ést forcé de 
corriger la taille des greffes , afin de les poser per- 
pendiculairement sur la coupe du cep, et que 
leurs épaules portent carrément sur la fente. Le 
moindre vide empêcherait leur soudure, qui d’ail- 
leurs s'opère si promptement, qu’un homme né pour- 
rait arracher les greffes après le flux de la sève, 
à moins de les renverser en dehors de la coupe. 

Beaucoup de vieux ceps étant mutilés en terre 
par la pomte des pics, il faut placer les greffes 
sur les parties restées saines. On peut les fendre 
en trois ou en quatre, sans être forcé de suivre 
une ligne droite ; mais il faut lier les lèvres des 
fentes. 

9. Si un cep est tellement couché qu’on ne 
puisse y placer les greffes carrément, on doit en 
Ôter la moelle , et rapprocher leurs becs , en les 
ployant suivant le rond du tronc. 

Quelque difficulté que la difformité des ceps pré- 
sente, il faut observer que les écorces extérieures 
des greffes soient plutôt rentrantes que saillantes 
sur les bords de la fente. ( Voyez PI. 15°) 

Le greffeur doit avoir beaucoup de greffes tail- 
lées à l’avance, pour qu’il puisse choisir celles qui 
conviennent mieux , suivant la forme du cep. 

Quand on greffe de la vigne rouge sur de la 
‘blanche, il faut supprimer la moitié des ceps 
blancs : la vigne rouge exigeant plus d'espace pour 
sa culture, et pour la maturité de ses fruits: 


(420 ) 


Les greffes postes, on doit les entourer de cinq 
à six pouces de terre rendue maniable, que l’on 
dispose en forme de taupinière ou de cône renversé 
avec l’instrument ( PI. 16, fig. 2.) ; de manière à ne 
laisser découverts que les deux yeux supérieurs qui 
attireront la sève. 

Cette motte a le double avantage de soutenir les 
greffes et de provoquer la naissance des chevelus, 
qui doivent partir du nœud de jonction du jeune 
et du vieux bois; c’est par ce chevelu que les 
greffes prennent une telle vigueur qu’elles se nour- 
riraient seules, si le cep qui les porte venait à périr. 

J'ai éprouvé, à mes dépens, combien il faut se 
montrer sévère sur le choix des sarmens destinés 
à fournir les greffes : ils doivent être pris de pré- 
férence dans de jeunes ceps. 

N'en ayant pas assez de coupés chez moi, j'en 
fis venir de Saumur plusieurs bottes, dans un temps 
de hâle; une sans doute avait été desséchée par 
le vent, ses brins ont ridé sur l’enture. J’en ai 
perdu beaucoup, tandis que les mêmes greffeurs 
n’en ont pas manqué 10 sur 2,009 : ils avaient 
employé les brins de vigne que je leur avais fournis 
ou qu'ils avaient apportés avec soin. Il est vrai de dire 
que l’extrême sécheresse du printemps les a privés de 
la majeure partie de la sève des ceps, qui aurait 
dû les faire reverdir. | 

Je recommande de choisir et de soigner les sar- 
mens , comme je l’ai dit en commençant; ou si 
Von est forcé d’en faire venir d’un peu loin, de 
veiller à ce. que leur transport ait lieu peu de 


(44) 
jours aprés leur coupe. À leur réception, on les 
divise par petites bottes de 25 à 30 brins, afin 
que l’humidité les entretienne frais dans l’endroit où 
l’on veut les déposer. 

Enfin, lorsque les greffes sont poussées, vous 
rabattez, dans le fond du rang, la terre du sillon 
ou du déchaux , à la hauteur des bourgeons pous- 


sés, pour préserver les racines des trop vifs rayons 
du soleil. 


. Nota. Il serait à désirer que la Société encourageût. 
des vignerons , par quelques primes, pour qu’ils ap- 
prissent cette sorte de greffe ; j'offre de leur livrer 
dans mon vignoble des ceps, sur lesquels je ferai di- 
riger leurs essais, dans le mois de mars prochain. 

Les journées du greffeur sont très lucratives. On 
paie deux sous par cep susceptible de recevoir une, 
deux ou trois greffes, selon sa grosseur. J'ai vu, 
dans un jour de mars, greffer soixante à soixante- 
dix ceps: ce qui porte le prix des journées à 6 ou 
7 francs , depuis le 20 février jusqu’au mois de juin. 
La concurrence que la Société exciterait rendrait 
donc un grand service à notre pays, en faisant di- 
minuer de beaucoup le prix de ce procédé. 

Je dis qu’il faut défendre de greffer par le mau- 
vais temps, surtout pendant la pluie : l’ouvrier uti- 
lisera ce repos en taillant les greffes, qui peuvent 
se garder bonnes pendant 8 ou dix jours, pourvu 
que leurs vieux bois trempent dans l’eau. 


(422) 


Cette opération sera bien plus prompte si on 
emploie une femme pour tailler les greffes ; avec 
un peu d'usage ; elle réussirait à en préparer par 
jour plus qu’un homme ne saurait en placer. Un 
enfant de dix ans mettra sur les coupes l’onguent 
de S.t-Fiacre avec un pinceau ; il peut également 
ameublir la terre avec la binefte, ou la tranche plate, 
et élever les mottes de terre pour soutenir les greffes. 
Je ne doute pas qu’un homme avec ses deux aides, 
et après quelque temps de pratique , ne puisse enter 
au moins cent ceps dans Sa journée. 

Le greffeur porte ses outils dans un baquet à ven- 
dange, dans lequel il entretient trois à quatre pouces 
d’eau pour tenir les crossettes fraiches ; il peut aussi 
y placer le pot dans lequel sera l’onguent de S.t- 
Fiacre ; sil n’a pas un enfant pour le porter. 

Nous parviendrons , je l’espère, à poser les greffes 
avec plus de promptitude. Dans le Bordelais on ne 
paye que 4 francs par cent, ét cependant elles sont 
garanties. Le Manuel dit même qu’un homme peut 
greffer deux cents ceps de vigne par jour : C’est un 
puissant motif d’émulation pour nos élèves (1). 


(1) Les figures de la PI. 45 sont réduites de la moitié de leur gran- 
deur naturelle. 

La fig. 2, PI. 46, est faite sur une échelle d’une ligne 174 par 
pouce ; les autres figures de la même Planche sont réduites de moi- 
tié de leur grandeur naturelle. 


(423) 


SUR QUELQUES ÉCRIVAINS 


DE L'ANJOU, 


Par M. Blordter-Langlois. 


JE commence par un de nos anciens souverains, 
homme d'imagination , homme sensible bien plutôt 
qu'homme de génie. Esprit léger, ame compatis- 
sante et superficielle, il ressentait vivement les dis- 
grâces de sa destinée, mais sans lui garder ran- 
cune. Sa facilité, non sa philosophie, le prémunit 
contre d'innombrables adversités qui auraient ac- 
cablé un stoïcien même. Faible roseau, il ployait aux 
fureurs des tempêtes. Toujours la victime du sort, 
les beaux-arts lui tenaient lieu de ces fleurs dont 
les Anciens avaient coûtume de parer les victimes 
de leurs sacrifices. 

- Les ouvrages de René sont de l’espèce la plus 
pâle , la moins attachante , l’allégorie ; mais c’était 
le goût du moyen âge. Les titres seuls feraient bäiller 
aujourd’hui; ce sont: Doulce mercy, Mortifiement de 
vaine plaisance , Les amours du berger et de la ber- 
gère. 

René fut un peintre habile, si l’on en croit M. de 
Villeneuve, qui se fonde sur d’anciens témoignages ; 
car très peu de tableaux de ce prince existent ac- 


(424) 


tuellement. Il avait recu , dit-on, des lecons de 
Jean de Bruges; il devait connaître Bramante et 
Léonard de Vinci, ses contemporains : je me sou- 
viens du tableau qu’il avait composé pour son tom- 
beau ; c'était assez bien fait pour un ouvrage de 
souverain. 

René fut poète. Il ne put ignorer que Pétrarque 
eût écrit, et il ne tenta pas même d’imiter la douce 
et spirituelle galanterie de ce poète. Il sut, on ne 
peut en douter, qu'il existait en Italie, un poème 
intitulé la Divina Comedia; mais le Dante n’était 
pas à sa portée. 

Au reste, félicitons René de cette résignation 
qui lui fitchercher dans les arts un refuge contre les 
tribulations de sa vie. Tout ce qui console est res- 
pectable, surtout si l’on y met le choix que le bon 
sens et le bon goût approuvent. Quelle énorme 
différence entre les délassemens de René et ceux 
d’un Antiochus, roi de Syrie, qui charmait les soins 
de la royauté en faisant jouer des marionnettes : 
d’un Æropus, roi de Macédoine, qui occupait ses 
loisirs à faire des lanternes, et de ce duc de Mos- 
covie, qui se délectait à sonner des cloches! A la 
fin du siècle dernier, un prince célèbre faisait d’as- 
sez méchans vers et jouait de la flûte ; mais ce 
prince savait gouverner ses états qu’il avait doublés 
par la conquête. Peut-être, avec un peu moins de 
dévouement aux beaux-arts, René eût maintenu sur 
sa tête quelques couronnes de plus : mais que font 
les couronnes au bonheur de la vie ? 

Le moyen âge allait finir, que René ne s’en dou- 


( 425 ) 
lait pas; l'imprimerie allait ouvrir le champ le plus 
vaste à l'esprit humain, qu’il en était encore à 
rêver la résurrection des troubadours et le rétablis- 
sement des Cours d'Amour. 

Un autre Angevin se présente au commencement 
de la période nouvelle, celle de la renaissance 
des lettres et des beaux-arts en France ; c’est Joa- 
chim Dubellay. Il naquit à Liré, l'an 1524. Il 
écrivit trés jeune, et Francois 1.‘ remarqua la 
douceur et lélégance de ses vers. Après la mort 
de ce prince, il fut attiré à Rome par le cardinal 
Dubellay , son parent, et il y demeura trois ans. 
Desservi auprès du cardinal pour quelques torts de 
conduite, il revint à Paris , tellement affecté de cette 
tracasserie, qu’il mourut d’apoplexie, en 1560 , âgé 
seulement de 86 ans. 

Dubellay s’attribue l'introduction du sonnet en 
France; Pasquier , dans ses Recherches, ne le lui 
conteste pas : ainsi c’est à notre Anjou que la poé- 
sie française est redevable d’une sorte de poëme 
dont les Italiens faisaient un fréquent usage; ei 
cette gloire, nous la devons d’autant moins dédai- 
gner, que , jusqu’à la fin du XVII: siècle, les 
sonnets furent la passion de nos écrivains : vous Sa- 
vez, messieurs, que Boileau disait : 


Un sonnet sans défaut, vaut seul un long poème. 


Nous lisons, en tête des œuvres de Dubellay, 
un traité de l’{ustration de la langue française, 
où les principes littéraires sont le fruit d’une étude 
approfondie des Anciens , et par conséquent raisonna- 


(4%) 


bles et sûrs. C'était un mérite assez ordinaire alors 
chez les écrivains , que cette connaissance. des 
sources grecques et latines. Si l’on s’occupait de 
traductions, c'était surtout pour apprendre à ma- 
nier sa propre langue, pour en rechercher. toutes 
les ressources; et c’est dans cet esprit que Du- 
bellay traduisit le 1v. et le vi.‘ chant de l’Enéide, 
quoiqu’il regardât les poètes comme intraduisibles; 
et cette opinion est vraie. Une traduction peut être 
plus où moins élégante, plus ou moins exacte, 
mais elle ne tiendra jamais lieu du texte. 

La langue de Dubellay n’est nullement pour nous 
en accord avec la langue majestueuse et sonore de 
Virgile; ce n’est pas sa faute. Il parlait sans doute 
aussi bien qu’on le püt faire de son temps; mais, 
dans ceux qui suivirent , les traductions du xvr.° 
siècle semblèrent être des parodies. On a dit que 
Scarron ayait inventé le genre burlesque ; mais 
Scarron le trouva presque dans ces traductions. 

Dubellay chérissait Anjou ; cette belle, province 
est souvent le sujet de ses vers: 


.-. Tant que ma lyre 

: Voudra les chansons élire , 
Que je lui commanderai, 
Mon Anjou je chanterai , 


dit-il, dans une pièce qu’il lui a consacrée tout en- 
tière. 

Dubellay sentit le désagrément de ces rimes mas- 
culines ou féminines qui, dans les poésies de son 
temps, se rencontrent sans rimer entr’elles ; et, s’il 
ne fut pas tout-à-fait exempt de cette négligence, 


(427) 


il l’évita souvent. Une de ses plus jolies piéces, son 
Adieu aux Muses, traduite de Buchanan , n'offre 
pas une seule succession vicieuse de rimes. 

Pendant son séjour à Rome, Dubellay , capable 
de lire sur les débris de cette antique capitale du 
monde son génie , sa gloire et ses revers, les dé- 
crivit en poète aussi-bien qu’en homme instruit. Ses 
vers ne sont point indignes du sujet. Combien cet 
ouvrage est supérieur aux frivoles conceptions de 
la plupart des auteurs ses contemporains , à ces jeux 
insipides si communs au xvr.° siècle, et qui furent 
trop imités par les Dorats du xvrrr.*! 

Dubellay mourut peu de temps après Henri Il ; 
mais il assista au tournoi qui coûta la vie à ce 
prince. Il chanta l’hymen de Marguerite, fille de 
Henri, avec Philibert de Savoie; c'était cet hy- 
men et celui d’Elisabeth de France que Henri cé- 
lébrait dans ce tournoi funeste : Dubellay écrivit 
sur cet évènement une longue et belle pièce de 
vers latins qu’il traduisit en vers français. 

Je le répète, Joachim Dubellay, qui fut une des 
gloires du xvr.® siècle, est l'honneur aussi de notre 
littérature. Ses vers respirent la décence, la sen- 
sibilité, le bon goût. Il ne se fit pas un ridicule 
métier de son ‘art, comme la plupart des poètes 
qui fourmillaient de son temps. S'il influa sur les 
auteurs d’un autre âge, s’il contribua à épurer la 
poésie française , s’il prévint quelques-uns de ses 
perfectionnemens ultérieurs ; si ses stances à son 
ami Macrin ont: donné à: Malherbe quelque ‘idée 
de celles à Duperrier, ce que je croirais volon- 


(428 ) 


tiers, à cause de plusieurs rapports que je trouve 
entre ces deux pièces ; si Malherbe a concu, d’a- 
près quelques-uns des poèmes nobles de Dubellay, 
celui des Ruines de Rome, par exemple, l’idée du 
genre de poésie qui fit dire à Boileau de lui: 


Enfin Malherbe vint... 


combien ne devons-nous pas nous féliciter de le 
compter parmi nos compatriotes | 

En même temps que l’aimable Joachim Dubel- 
lay, vivait et écrivait le sévère et docte Jean Bodin; 
il naquit à Angers, en 1529. 

Bodin étudia la jurisprudence à Toulouse, devint 
un des plus profonds légistes de son temps, se fit 
recevoir avocat à Paris, et fut remarqué de Henri III, 
qui se plaisait dans sa conversation. Le duc d’A- 
lençcon , frère du roi, l’attacha à sa personne 
comme conseiller, dans les voyages qu'il fit en 
Angleterre et aux Pays-Bas. Bodin finit par s’éta- 
blir à Laon, y exerça les fonctions de procureur 
du Roi, et mourut l’an 1596, âgé de 67 ans. 

On trouvera dans les biographies la liste com- 
plète des ouvrages de Bodin; mon intention est 
de n’examiner ici que quelques-uns des plus im- 
portans. 

La Démonomanie des sorciers est un monument 
de la crédulité de l’auteur et de celle du temps où 
il vécut, mais un monument curieux comme ou- 
vrage de mœurs, comme résumé de tout ce qu’on: 
lit dans l'antiquité sur les démons et sur leurs agens, 


( 429 ) 
ici-bas ; c’est un répertoire à l'usage des inquisi- 
teurs, à l’usage des magistrats auxquels il pourrait 
advenir d’être chargés de pareilles affaires ; un livre 
écrit de conscience, pour susciter une guerre à mort 
à ceux qui se croient de la puissance par les dé- 
mons. Avant de lire {a Démonomanie , j'avais pensé 
qu'un homme aussi grave que Bodin n’avait en- 
trepris de traiter un pareil sujet que pour en dé- 
montrer l’absurdité ; j'étais dans une grande erreur. 
J'ai lu ce livre, et je me suis instruit que Bodin puisa 
sa croyance dans une érudition aveugle et irréflé- 
chie. Le savoir conduit à l’aveu d’un être suprême; 
mais comment conduirait-il à de honteuses super- 
stitions’ On rencontre fréquemment , il est vrai, 
chez les Anciens, la doctrine des démons et des 
spectres, mais il faut peser et non pas compter les 
autorités ; il faut se donner la peine de critiquer 
un peu ses lectures, se souvenir que le merveil- 
leux est la passion innée des hommes ; surtout il ne 
faut pas s'appuyer sur des poètes, dans des questions 
si sérieuses. Théocrite et Virgile ne se sont pas 
doutés, vraisemblablement, que l’on fonderait jamais 
les plus épouvantables sentences sur quelques-uns de 
leurs vers, qui, pour eux, n’avaient été qu’un jeu. 
Bodin prend tellement la chose au sérieux que, 
non content des büchers nombreux allumés pour 
les sorciers de son temps, il gourmande encore la 
mollesse de certains magistrats. Voici ce que je 
lis au chap. 1. du liv. 1v.: « D’autant que les pro- 
» cureurs du Roi sont souvent plus négligens en 
» leur charge que les juges, il est expédient que 


( 430) 
» chacun soit recu accusatewr. en cecrime | sans $’ar- 
» rêter s’il va de l'intérêt. particulier ou non.» 

Tous les moyens tentés anciennement et encore 
de nos jours auprès des ignorans et des, têtes. faibles, 
se trouvent dans la Démonomanie ; sous ce rap- 
port, c’est un livre que je verrais -avec peine entre 
les mains de certains lecteurs. Les cas de nœud de 
l’aiguillette, de voyages dans l’air sur un manche 
.à balai, etc., faisaient retentir chaque jour les tri- 
bunaux, du témps de Bodin. Les malheureux 
-avouaient tout, sans doute dans les souffrances de 
la torture, et Bodin expédiait ces affaires conseien- 
cieusement et pour la plus grande gloire, de la 
Pharmaceutrée de Théocrite. Je lis au chap. un. du 
liv. u. l’invocation qu’il appelle Gastromantie, «qui 
se faisait, dit-il, par vaisseaux de verre ronds, 
pleins d’eau, et où l’on voyait les réponses par 
-marques et par signes.» Voilà cette divination par 
la caraffe, que nous savons employée de nos jours, 
mais pour laquelle on se garde bien de brûler per- 
sonne. 

Pendant qu'on imprimait /a Démonomanie , un 
médecin ,'nommé de Wier, publia ‘un ouvrage où 
l’art de la sorcellerie ‘était traité de chimère, et où 
l’on appelait l’indulgence sur les pauvres esprits qui 
prétendaient le posséder ; Bodin suspendit l’impres- 
sion de son livre jusqu'à ce qu’il eût raison de 
Wier. Il tenta de le réfuter, et toujours par des 
textes anciens. D'abord il l’accuse d’être unsor- 
cier : telle était la polémique du XVI.e siècle ; et 
sa preuve, c’est la manière respectueuse dont l’a- 


(431) 


vocat des prétendus sorciers parle de Corneille 
Agrippa, fameux par sa philosophie occulte. Puis 
vient l’étalage de la plus diffuse érudition; de 
Vhébreu, du grec, du latin : il fait feu de toutes 
ses batteries contre Wier, qui peut-être riait de 
ses doctes folies. Au reste, cette réponse de Bodin 
est pleine de chaleur et de dialectique ; la péro- 
raison est remarquable par une onction religieuse 
dont on s’étonne de la part d’un homme qui, dans 
un entretien sur les religions, fait justement dou- 
ter de son orthodoxie. 

L'auteur des Recherches sur l’Anjou pense que 
Volney pourrait avoir emprunté l’idée de ses Ruines 
de l’heptaplomeron de Bodin ; tout au plus Vol- 
ney y aurait puisé l'inspiration de son chapitre de 
l'Origine et filiation des idées religieuses : les deux 
ouvrages, au reste, ne sont pas comparables. Bo- 
din et Volney furent , sur cette matière, des francs- 
penseurs, voilà une de leurs analogies ; Bodin est 
auteur d’un bon ouvrage sur la Manière d'étudier 
l’histoire, voilà une autre conformité avec Volney; 
tous deux enfin furent chargés des intérêts d’une 
province dans une assemblée de la nation, et tous 
deux s’y montirèrent les défenseurs des libertés du 
peuple et les ennemis de la tyrannie. 

Le plus beau titre de Bodin à la renommée, si 
son premier n'est pas la fermeté qu'il déploya aux 
Etats de 1576, c’est son livre de la République. 
L’art d'analyser les gouvernemens, d’en apprécier 
les ressorts, d’en prévoir les progrès et la chute, 
s’est, dit-on, perfectionné de nos jours; le grand 


(432) 


mérite du livre de Bodin est l’érudition ; il y en 
a jusqu’à l’abus, selon ‘la coutume d'alors. Nos 
écrivains d’aujourd’hui diraient qu’on ne savait pas 
faire un livre ; qu’on n’avait pas l’heureuse adresse 
de délayer un peu de savoir en beaucoup de phrases 
fines et Hiarmonieuses. Les auteurs du siècle de Bodin 
sont en effet des abîmes de science. Un écrivain 
moderne doit éprouver , à la lecture de pareilles 
compilations, la sensation de certain sybarite qui 
suait en voyant scier du marbre ou fendre des chênes. 
Les principes de Bodin, dans sa République, sont 
justes; sa morale est d’un honnête homme; il puise 
tout dans les autorités les plus respectables ; il ma- 
nifeste une ame généreuse et indépendante; la po- 
litique de Machiavel lui est odieuse. Tous les gou- 
vernemens , le gouvernement tyrannique excepté, 
lui présentent des raisons de prospérité et de dé- 
cadence ; il en indique les moyens conservateurs 
et curatifs , mais en avouant l'insuffisance des re- 
mèdes dans de certains cas, et la nécessité alors 
d’une régénération radicale. 

L'Esprit des lois de Montesquieu aurait été, selon 
l’auteur des Recherches, une inspiration de la Re- 
publique de Bodin. Tant mieux, certainemeni, pour 
ce dernier. Une inspiration de cette importance lui 
ferait plus d'honneur que tous ses livres. Au moins, 
dit-on encore, Montesquieu aurait pris dans Bodin 
l'influence du climat sur le caractère des peuples : 
mais , de bonne foi, Montesquieu n’aurait - il pu 
imaginer cela sans Bodin ? 

On est fâché de retrouver toute la superstition de 


(433 ) 


de Bodin dans son livre de la République. Le chap.n 
du livre 1v est rempli des absurdités de l’astrolo- 
gie , de l’effet des corps célestes sur les destinées des 
états et des hommes; des années fatales, des nom- 
bres, .etc. Ce chapitre est étonnant de savoir et de 
crédulité. 

La République de Bodin, justement célèbre, quoi 
que nous nous soyons permis d’en dire, et dont on 
peut tirer beaucoup de lumières, si l’on n’a pas trop 
de répugnance pour les livres ennuyeux, fut traduite 
en anglais et enseignée publiquement dans les écoles 
d'Angleterre. Bodin la traduisit lui-même en latin, 
et elle acquit une renommée européenne. Le pré- 
sident De Thou reproche à l’auteur de ne pas s'être 
défendu , à ce sujet, de cette vanité, défaut i#nato 
genti, dit le savant historien ; ce que Ménage inter- 
prête par «naturel aux Angevins. » Ménage se con- 
naissait en vanité ; mais Bayle, plus indulgent pour 
nous que Ménage, traduit l’expression de De Thou 
par «naturel aux Francais. » 

Avant de mourir, Bodin recommanda de brüler 
quelques manuscrits où il se donnait des libertés sur 
la politique et la religion. Un d’eux a échappé à cet 
arrêt, c’est l’Heptaploméron , dont j'ai déjà parlé, 
mais qui n’a pas été imprimé. L'évêque d’Avranches 
Va réfuté dans son ouvrage De la Démonstration 
évangélique. | 

Passons à Ménage ; il naquit à Angers, quelques 
années avant la mort de Jean Bodin. Sa réputation 
fut grande. Comme Bodin il subit les influences de 
son siècle, mais les mœurs n’étaient plus les mêmes. 


30 


(434) 


C'était bien encore le temps d’une érudition exces- 
sive; il montra le plus vif penchant pour les re- 
cherches , il fut, malgré son apparente frivolité, un 
des plus savans hommes de son siècle ; et cette fri- 
volité, -pédantesque et maniérée, c’est à son siècle 
qu’il la dut , et aux sociétés dans lesquelles il passait 
sa vie. L’oracle des précieuses de son temps, coupable 
sans doute de la préciosité de quelques-unes , il 
sema le monde galant et littéraire de petits vers qui 
firent grand bruit, et échaufférent la bile de l’au- 
teur des Femmes savantes. Mais comment , à moins 
d’avoir le génie de Molière, deviner que la ville et 
la cour (comme on disait alors), qui admiraïent en- 
core Voiture, n’auraient pas au moins pour l'abbé 
Ménage de l’indulgence ? 


Qui Bavium non odit amet tua carmina , Mævi. 


Mais enfin le nom de Ménage ne périra point, 
grâce à son utile compilation qu’il a intitulée Hés- 
toire de Sablé, grâce à son Dictionnaire étymologique 
où sont, parmi des futilités, de curieux articles ; à 
ses Remarques sur la langue française, ouvrage qui, 
avec celui de Vaugelas, son contemporain, fournit 
des documens sur l’histoire de notre langue ; grâce 
à de fort bonnes poésies italiennes , et à quelques 
vers francais d’assez bon goût, entre lesquels il faut 
distinguer la Requeste des Dictionnaires , plaisanterie 
souvent spirituelle , dont on lui garda rancune , et 
qui fut cause qu’il n’entra pas à l’Académie française. 

L'époque dont il s’agit ici est une époque hono- 


( 435) 


able dans notre littérature angevine ; elle attsste la 
solidité de nos esprits. Presque au temps de Ménage 
vivait Claude Ménard, dont toute la vie fut passion- 
nément employée à débrouiller notre histoire, et 
dont l’ouvrage le plus important est encore inédit. 
Vers le même temps, de laborieux jurisconsultes con- 
sacraient leurs veilles à commenter les coutumes et 
les lois. Leur existence fut utile, ce qui vaut mieux 
que brillante. On a, sur la foi de certain adage 
latin, reproché de la mollesse aux habitans de l’An- 
jou; cependant le beau climat de cette province n’é- 
nervait point la constance de ces légistes érudits. 
Peut-être était-ce à l’ombre de nos bois, au mur- 
mure de nos ruisseaux, aux bords délicieux de notre 
fleuve que Chopin, Grimaudet, Dupineau , Pierre 
Ayrault, les deux Pocquet de Livonnière méditaient 
les sérieux ouvrages qui les ont rendus les flam- 
beaux de la jurisprudeuce. 

Il faut descendre jusqu’à la fin du xvur.° siècle et 
dans celui-ci pour trouver quelques Angevins célèbres 
dans les sciences , les lettres et les arts. Alors se 
présente un exemple remarquable de l'influence des 
circonstances et des objets extérieurs sur l’imagina- 
üon et le génie des habitans de l’Anjou. Volney, 
qui, dans le cercle étroit de ses amis et de ses rela- 
tions , n’eût été qu'un penseur ordinaire, qu’un 
homme de sens et de savoir, s’avise de voyager, 
et le point vers lequel il se dirige est la Syrie et 
l'Egypte. De là le besoin de la langue arabe , la- 
quelle langue ouvre à ses méditations une carrière 
immense vers l’origine des peuples, leur civilisa- 


( 436 ) 

“üon, leurs lumières. Bientôt, dans cette archéologie 
“intellectuelle et conjecturale , nous verrons Volney 
prendre un essor qu’il ne sera plus maître de mo- 
dérer. Ses études le méneront à scruter les cultes 
religieux du monde et leur filiation : ce deviendra 
occupation de toute sa vie, son idée fixe, erreur ou 
révélation d’une étude consciencieuse, mais non sys- 
tème froidement emprunté de l’Heptaploméron de 
Bodin , que Volney peut-être ne connaissait pas. 

Je n’entrerai dans aucun détail sur l’ouvrage des 
Ruines. Il eut beaucoup de vogue dans un temps 
où l’anti-catholicisme devait prendre la couleur des 
circonstances , qui étaient graves; où il devait être 
sérieux , après l’impiété moqueuse de Voltaire. 

Ce qui fonda la renommée de Volney mieux qu’au- 
cun autre de ses ouvrages, c’est son Voyage en Sy- 
rie. Les systèmes anti-religieux se suivent et s’ef- 
facent les uns les autres; jamais écrivain voyageur 
ne rendra inutile le voyage de Volney. Il subit, 
comme on sait, l'honorable épreuve de notre ex- 
pédition d'Egypte : y a-t-il bien des écrivains à qui 
cette épreuve n’eût pas été fâcheuse ? L'ouvrage de 
Volney fut trouvé d’une parfaite exactitude. Tout y 
est, en outre , enchaîné de la manière la plus heu- 
reuse : philosophie, histoire naturelle, physique, 
érudition, topographie. Les autres livres de vo 
périraient que celui-ci subsisterait. 

Mais ce qui ne périra pas non plus, c’est cetle ar- 
deur d’un génie éclairé des langues de l’orient , qui 
fit voir tant de découvertes à faire , tant de notions 
vitales à retirer du tombeau des siècles, dans cette 


(437 ) 


partie du globe ; et qui lui fit faire de si constans: 
efforts, de si louables sacrifices, pour favoriser ce- 
nouveau genre d'étude. 

Volney encore méritera l’éloge de la postérité. 
pour des Discours sur l'histoire, prononcés à la pre-. 
miére école normale qui s’ouvrit en l’an u1; discours. 
qui peut-être ont fait naître l’idée d’un enseignement. 
beaucoup plus large et plus approfondi de l’histoire ; 
qui ont porté , sinon la lumière , du moins une cri- 
tique puissante dans des siècles que n'avaient point 
connus les Hérodote et les Diodore de Sicile ; dis- 
cours enfin qui, s'ils ne nous ont pas encore ré- 
vélé des vérités , nous ont conduits, jusqu’à ce mo- 
ment, de probabilités en probabilités, en des ténèbres. 
visibles qui ne messiéent point à l’origine du monde 
civilisé. Nous avons tous entendu, je pense, les sa- 
vantes inductions d’un jeune professeur que nous 
nous honorons de posséder dans cette Société, et 
nous avons pu juger si ses lecons inspirées par les 
modernes. écoles historiques, et auxquelles les dis- 
cours de Volney n’ont peut-être pas été inutiles ; si 
ses lecons, dis-je, ne nous ont pas paru plus fécondes 
que les documens des Millot et des Lenglet Du- 
fresnoy. 

Lorsque je parle de l’histoire et de ses systèmes , 
je laisse à l'écart, et dans une respectueuse excep- 
tion , le discours de Bossuet, ce tableau rapide où 
tous les faits sont subordonnés à une Providence » 
où toutes les révolutions sont une conséquence des. 
invariables décrets de Dieu, où une phrase peint: 
une longue durée, où un mot peint un personnage ,. 


( 438 ) 

un évènement ; où plane un esprit d'inspiration pour 
ainsi dire surnaturel. Ce discours est au-dessus de- 
la critique et en dehors de quelques autres récits 
que ce soit. Le lecteur de Bossuet, entrainé par tant 
de beauté, n’a pas même le temps de penser qu’il 
pourrait être à l’univers d’autre origine que celle 
consignée dans la Genèse , et une autre chronologie 
que celle des livres saints. 

Volney, voyageant aux Etats-Unis, n’aurait pu 
être aussi attachant que Volney en Syrie et en Egypte; 
la cause en est dans le prestige nécessairement attaché 
aux lieux jadis illustres.On aime d’un amour religieux 
les pays signalés par les grands écrivains ; on aime 
à visiter avec Moïse, avec Homère, avec Hérodote, 
le berceau des nations autrefois florissantes et qui 
n’existent plus. Rien de cela n’attendait Volney dans 
son second voyage. Au reste, ce qu'il en a rédigé 
instruit, intéresse. La liberté a des prestiges aussi, 
et mieux que des prestiges. La jeune Amérique à son 
tour aura été, pour les siècles à venir, la terre de 
l’héroïsme et des miracles; et cet oracle est si sûr 
que l’on peut d'avance s'inspirer à cette renommée 
future. 

C’est ainsi qu’elle attira , il y a peu d’années, 
M. Théodore Pavie. Deux volumes de Souvenirs 
atlantiques ont été le fruit de ce voyage fait d’en- 
thousiasme , à 18 ans , dans les Etats-Unis et le Ca- 
nada; c’est un semblable aitrait qui l’emporte encore 
en ce moment dans les nouvelles républiques de PA- 
mérique du sud, et qui nous promet des observations 
marquées au coin d’une expérience plus müre et 
d’études plus suivies. 


(439 ) 


Un contemporain de Volney, Jean-Baptiste Le- 
clere, homme d’un honorable caractère , d’un pa- 
triotisme à l'épreuve , d’un savoir étendu et varié, 
mais surtout d’une imagination mélancolique et fleu- 
rie, se partagea long-temps entre les affaires publi- 
ques et la culture des lettres et des beaux-arts. Je 
ne connais pas ce qu'il écrivit en politique , je sais 
seulement qu’à l'ombre de ses saules, et au mur- 
mure de la Loire qui baïgnaïit ses prairies, il écrivait 
des idylles dans le genre de Gessnér, et des chansons 
dont il faisait la musique. Invariable dans sa philo- 
sophie, comme René l’avait été dans son insouciance, 
il tempérait, pendant la révolution, les inévitables 
émotions de son ame, par de douces créations de son 
cœur, et, pour parler encore le langage de la Mytho- 
logie , se réfugiait dans le sein des Muses contre les 
discordes civiles. Obligé de quitter la France , après 
la chute de Napoléon, ses douces rêveries le sui- 
virent dans son exil; il y composa une épopée en 
prose , Eponine et Sabinus, ouvrage un peu faible, 
dont la fable est trop scrupuleusement imitée de 
tous les poèmes épiques connus, et dont le #er- 
veilleux, emprunté de la mythologie des Celtes, n’est 
point assez attachant. De retour dans sa terre de Cha- 
lonnes, Leclerc, constant dans ses goûts, se livra 
exclusivement aux charmes de la nature ; il cultiva 
ses champs et rassembla , dit-on, les matériaux d’une 
histoire de la musique. 

On s’étonnera que je ne dise rien de J.-F. Bodin, 
l’auteur des Recherches sur le haut et bas Anjou. Je 
prie d'observer qu'il ne s’agit point ici d’une biogra- 


(440 ) 


phie complète de nos écrivains ; j’en ai voulu seu- 
lement présenter quelques-uns dont les talens se fis- 
sent remarquer par un caractère particulier, et qui 
contrastassent entr’eux d’une manière un peu tran- 
chante ; et l’auteur des Recherches, sous ce double 
rapport, n'avait rien qui le fit entrer dans mon cadre. 
Personne , au reste, ne rend plus de justice à ses 
intéressans Essais , à l'esprit d'indépendance et de 
justice dans lequel il les rédigea , aux lumières enfin 
qu’il a le premier offertes aux Angevins, réduits avant 
lui à des dissertations détachées ou à de misérables 
chroniques. L'ouvrage de Bodin fut accueilli comme 
il méritait de l'être; mais il appelle une autre his- 
toire , et je ne le dis qu’aprés lui. 

Une belle partie de notre histoire littéraire c’est 
celle qui traitera de son état présent. 11 est peu de 
branches des travaux de l’esprit qui ne présentent un 
grand nombre d’Angevins estimables ou célébres. La 
littérature légèré ou principalement d’imagination 
sera la seule qui semblera pâle dans cet honorable 
tableau; on en dira la raison. Ce sera la partie faible, 
et l’on s’en montrera d’autant plus surpris que nous 
habitons un pays qui offre assez de sympathie avec 
une imagination riante et fleurie. Mais combien la 
littérature sérieuse, combien la jurisprudence, la mé- 
decine , la politique , le publicisme , la critique, la 
Statuaire , la peinture ne comptent-elles pas d’An- 
gevins distingués ! Trop faible, sans doute, pour une 
semblable tâche , si je la tente un jour, ce sera fort 
au moins de mon amour pour le lieu qui m’a vu nat- 
tre, et des sentimens que m'inspirent les succès de 
mes compatriotes. 


DES DIFFÉRENS AGES DU GOUT 
EN FRANCE, 


Por M. Blordier-Langlois. 


Le beau n’est point arbitraire ; il existe de lui- 
même , d’une manière absolue dans la nature, dans 
les arts et dans les travaux de l'esprit. Mais le 
goût destiné à le percevoir n’est point aussi absolu , 
aussi indépendant. L'état politique et social d’un 
individu, ses dispositions morales sont un prisme 
inévitable à travers lequel il verrra les objets, ou un 
voile qui lui en dérobera les beautés. Il faut que 
l'ame soit prédisposée à apprécier ce qui l’envi- 
ronne. Opprimée et souffrante, elle ne sentira rien 
que son oppression et sa douleur. Il faut qu’il y 
ait quelque sympathie entre elle et les choses qui 
l’affectent, pour qu’elle y trouve du charme ou 
de la consolation ; pour qu’elle se les assimile en 
quelque sorte. 

Pour la perception des beautés intellectuelles, 1l 
faut davantage encore. Il faut un peu plus de réflexion, 
plus de disposition à comparer les idées avant d’en 
porter un jugement, quelque habitude, de la vie 


( 442 ) 

morale, un peu de cette insiruction qui guide 
l'intelligence et intéresse l’amour-propre ; il faut 
enfin (et c’est ici le cas des peuples civilisés à 
l'excès) un esprit qui résiste à la satiété, à l’a- 
mour de l’innovation et des systèmes, et qui, dans 
les anxiétés auxquelles nous sommes tous sujets, 
sache se munir contre sa propre raison de la rai- 
son universelle. 

J'ai cru, Messieurs, que ces réflexions préli- 
minaires trouveraient leur application dans le ta- 
bleau rapide que je vais vous présenter des va- 
riations du goût en France; il était utile que je 
commencasse par Îà, si je ne voulais pas accor- 
der que le goût ne soit qu’une faculté probléma- 
tique, opinion qui n’est pas du tout la mienne, 
et dont je désavoue pleinement les conséquences. 

Après l’invasion des Francs, le goût des études 
romaines fit place à celui des études qu’imposait 
la religion nouvelle : les monastères se multipliè- 
rent, autant pour servir d’asiles, dans le conflit 
des barbares conquérans et des peuples conquis, 
que pour pratiquer avec plus de recueillement la 
Foi chrétienne. Les livres saints, des autorités mal 
comprises ou mal eritiquées, la fabrication et la 
lecture de légendes plus nuisibles qu’utiles, assu- 
rément : telles étaient, en général, les occupations 
de l'esprit. C’est bien à juste titre que nous pou- 
vons donner à cet état le nom de barbare, mais 
il était, pour les hommes de ce siècle, le seul état 
qui püt être ; et c’est en se transportant en idée à 
ces siècles qu'il faut les juger, non en les compa- 


(443) 


rant à d’autres. Des moines nous conservérent d’an- 
tiques manuscrits en les transcrivant : c'était un 
moyen de profit et légitime et honorable. D’autres 
moines raturérent le vélin dépositaire d’un chef- 
d'œuvre de l'antiquité, pour y substituer la règle 
de leur ordre ou la vie de leur saint fondateur : 
c'était nécessité, ignorance probablement; mais dans 
l’un ou dans l’autre cas, ces moines sont à plain- 
dre plus qu’à blâmer. Je ne serais pas surpris que 
la vie merveilleuse de S.i-Benoît ou de S.t-Martin 
couvrit quelque part ce que nous regretions au- 
jourd’hui de Tite-Live ou de Tacite; et tout en 
convenant qu’il n’y a pas compensation, je n’en 
concluerais rien, sinon que ces moines n'étaient pas 
dans une disposition morale ou sociale à goûter et 
Tite-Live et Tacite. Le goût chez eux ne pouvait 
aller plus loin; le fil des traditions antiques était 
coupé. Comment eussent-ils été sensibles aux jouis- 
sances de l'esprit, eux dont le travail des mains 
était une obligation essentielle, dont la règle, par. 
ses minutieuses prescriptions, absorbait le peu de 
temps qui leur restait, et qui vivaient dans un 
état perpétuel de crainte; ce que prouvaient les 
moyens de défense dont alors étaient entourés leurs 
monastères? 

Les Sarrasins d’Espagne qui, au VIIL.* siècle, se 
répandirent en France, pouvaient y faire naître le 
goût des sciences et des beaux-arts ; Charles-Martel 
les extermina prés de Poitiers, et tout le fruit de 
cette expédition fameuse fut l’affermissement de sa 
puissance , à moins que la postérité de quelques 


(444) 


Maures échappés au carnage de Poitiers, et réfu— 
giés au midi de la France , ne fût l’origine nébu- 
leuse de ces troubadours qui illustrèrent ces mêmes 
contrées aux XIe, XIIe et XIIL.e siècles : origine 
dont je ne sache pas qu'aucun critique ait eu 
l’idée. 

Un homme, tel que l’histoire en présente: peu 
dans ses annales, Charlemagne pouvait faire une: 
révolution immense dans l’esprit et le goût humain. 
Au sein de la plus profonde barbarie, il se lève 
comme un astre capable de ranimer et d'éclairer 
les peuples. Il aime les sciences, il en cultive quel- 
ques-unes , il appelle auprès de lui les hommes. 
les plus instruits de son temps, il en forme un 
conseil académique qui ne le quitte point, des: 
écoles s’instituent dans iout son vaste empire ; 
les continuels voyages de Charlemagne ne laissent 
aucune de ces écoles sans inspection, sans encou- 
ragement, sans récompense : mais tout était à faire 
pour Charlemagne. Des peuples intraitables s’obsti- 
naient à ne pas reconnaître son autorité, et mal- 
heureusement , il était aussi opiniâtre qu'eux. Il 
fallait imposer aux partisans d’une dynastie déchue, 
et consolider la sienne par des moyens politiques: 
et militaires peu compatibles avec les sciences et: 
les arts, qui nous occupent en ce moment. 

Les arts d'imagination auraient pris un essor re-- 
marquable sous l'influence d’un homme de génie- 
et de tête en relation avec un autre homme éga-: 
lement puissant, le calife Aaroun-al-Raschid. On. 
sait qu’ils s’estimaient l’un l’autre ; le souverain de: 


( 445 ) 

YOrient avait envoyé au souverain de l’Occident 
une clef de l’église du S.t-Sépulcre, comme pour 
remettre à sa discrétion la visite des lieux saints; 
on sait qu’il lui fit présent de la première horloge 
qui parut en France. Le goût allait sortir du som- 
meil où il était plongé depuis l'extinction du gé- 
nie grec et romain. 

Mais, par une fatalité assez ordinaire, la posté- 
rité du grand homme dégénéra avec une déplorable 
rapidité. Le fils de Charlemagne ne put porter le 
fardeau de son empire. Des troubles domestiques 
démolirent piéce à pièce le superbe édifice de ci- 
vilisation que nous voyions s'élever tout-à-l’heure ; 
et, pour comble d’infortune, des hordes toujours 
renaissantes de barbares fondirent , du nord de l’Eu- 
rope, sur la monarchie de Charlemagne. Les mo- 
nastéres furent détruits, les bibliothèques incendiées, 
et les peuples au désespoir oubliérent bientôt ces 
occupations intellectuelles dont ils avaient vu la 
brillante aurore. 

Les Normands cessèrent leurs dévastations; mais 
la féodalité dont elles avaient été l'occasion vint 
couvrir de son réseau fatal les peuples déjà aux 
abois. Jamais l'ignorance ne régna plus complète- 
ment qu'à partir de celte époque. Peut-être que 
ce grand système politique sauva la société de son 
entière dissolution ; mais quels étaient donc les maux 
que de pareils remèdes nécessitaient ! Que pouvaient, 
pour les sciences et les beaux-arts, ces mille sou- 
verains si occupés à exercer leur pouvoir, et à se 
défendre les uns des autres? Que pouvaient les 


( 446 ) 

peuples au sein du plus dur esclavage Les mo- 
nastéres eux-mêmes avaient goûté la séduction de 
la puissance. Presque aussi ignorans que les sei- 
gneurs laïcs , les seigneurs cloîtrés , oublieux des rè- 
gles de leur ordre, partageaient les plaisirs des gens 
‘du siécle, et faisaient leur étude d'augmenter leurs 
richesses par des moyens coupables. Les plus sages 
écrivains de nos temps en font foi, et l’on peut 
bre ce qu’en dit l’abbé de Feury dans ses discours 
sur l'Histoire Ecclésiastique. J’ai recueilli des do- 
nations de ces siècles, qui ne confirment que trop 
cette honteuse cupidité. 

C’en étaït fait pour long-iemps des sciences et 
des arts ; en France, sans les croisades. Les croi- 
sades , que les écrivains philosophes ont frappées 
d’anathémes, non sans quelque raison, donnérent 
cependant aux esprits un mouvement qui tourna 
très heureusement à leur avantage. Les individus 
cessèrent d’être isolés et stagnans ( je ne puis ap- 
peler société leur agglomération captive ). Les liens 
d’une dépendance abrutissante se relächèrent ; les 
passions recouvrèrent une partie de leur ressort et 
de leur énergie ; le monde s’agrandit pour elles ; 
le peu de lumières éparses dans l’Europe entrèrent 
en communication ; l’Orient fermé pour nous de- 
puis le siècle de Charlemagne et du calife Aaroun, 
ouvrit aux peuples de l’Occident quelques-uns de 
ses trésors ; le nouvel empire latin reçut les tra- 
ditions de l’empire grec; l'Egypte révéla celles des 
Ptolëmées, et la Syrie celles des califes de Bagdad. 
L'architecture s'enrichit du style sarrasin si aérien, 


( 447 ) 
si élégant. Pour élever dans les airs ces étonnantes 
basiliques , quelles connaissances il fallut acquérir 
dans les sciences exactes ! 

Les: troubadours sont aussi de ce temps. Ils ex- 
citérent les seigneurs à prendre la croix, ils chan- 
térent leur bravoure, ils censurèrent leur conduite. 
Leur langage naïf et fleuri se prétait aux douces 
peintures ; l'amour résonna sur leur lyre ; ils ai- 
mérent , ils furent aimés. Des souverains se firent 
honneur d’être agrégés à la gaie Science , et un des 
plus puissans rois du moyen âge fut un de ses plus 
célèbres troubadours, je veux dire Richard Cœur- 
de-Lion. 

Les troubadours eurent la gloire de fonder en 
quelque sorte la littérature italienne ; ils inspirèrent 
Pétrarque et Boccace, et nous, nous laissâmes s’é- 
teindre l’influence de cette précieuse période du 
génie français. Les Italiens  commencérent d’être 
célèbres par eux dès le XIIL.e siècle, tandis que 
les Français ne commencèrent à montrer quelque 
goût, quelque talent qu’à la fin du XVI. 

Le midi de la France eut au nord ses imita- 
teurs ; les trouvères, moins doucereux, moins re- 
dondans que les troubadours, répandirent avec pro- 
fusion le sel de leurs contes joyeux et de leurs sa- 
tires. Ce furent le fléau des nobles et des gens 
d'église ; et, si l’on fait la part de l’exagération, 
dont sont rarement exempts les jugemens de la 
classe inférieure à l'égard des classes plus élevées ; 
on ne peut disconvenir d’ailleurs, que les fabliaux 
picards comme les sirventes languedociens ne soient. 
de très curieux monumens du moyen âge. 


(448) 


Honneur donc aux XII.e et XIIL.° siècles où fleu- 
rirent les troubadours et les trouvères! C’est d’eux 
que nous pouvons dater la naissance du goût fran- 
çais, de ce goût varié des chants héroïques, des 
récits d'amour et de la satire. Rien n’était plus 
analogue au caractère que nous avons développé 
depuis : ce devait continuer, et nous aurions mar- 
ché de front avec l'Italie ; et nous aurions aussi- 
tôt qu’elle compté nos Dante, nos Pétrarque, nos 
Boccace, nos Trissin, etc. 

Des dissentions sanglantes, dira-t-on, arrétérent no- 
tre essor ; la succession de Charles-le-Bel, la démence 
de Charles VI et les fureurs d'Isabelle de Bavière 
entraverent la marche du génie; mais l'Italie était- 
elle bien plus tranquille ? Les longues querelles de 
l'Empire et de l'Eglise , et les rivalités toujours re- 
naissantes de ses nombreuses et turbulentes répu- 
bliques laissaient-elles donc plus de loisir au goût 
pour se former ? Chez les Italiens le génie des beaux- 
arts s’enflammait au feu des combats; chez nous il 
se laissait aller au découragement. Nos populeuses 
et inquiètes écoles se consumaient dans la polémique 
d’une théologie sophistique et subtile, toujours prêtes 
d’ailleurs à se mêler à l’administration temporelle , 
et à se faire craindre des gouvernemens. L'histoire 
du moyen âge abonde , comme vous le savez , en dé- 
tails sur leurs séditions quelquefois très meurtrières. 

Si le goût français n’avançait pas d’une manière 
sensible, cependant les circonstances lui devenaient 
de jour en jour plus favorables. Les démélés de Lu- 
ther et d’autres sectaires avec la cour de Rome exci- 


(449) 


taient les esprits. Mais la langue nationale ne se 
formait pas. De précieux chroniqueurs lui avaient , 
il est vrai, confié le fruit de leurs veilles, et 
nous les entendons fort bien ; mais la poésie mar- 
chait à pas lents, et notre langue se prétait mal 
encore aux nobles pensées. Marot , qui excella à 
l’époque la plus avancée de ces temps, Marot, très 
aimable dans quelques madrigaux et dans quelques 
contes , n'est plus supportable lorsqu'il veut traiter 
d'objets héroïqués ou sérieux. 

L’imprimerie, inventée au milieu du xv.° siécle ÿ 
devait produire une révolution dans les esprits ; elle 
leur donna une direction qui ne fui point favorable 
à imagination. Une innombrable quantité de com- 
mentateurs, de scoliastes affluèrent, pour publier 
des éditions exactes des manuscrits antiques, qu’a- 
vait altérés l'ignorance ou la distraction des co- 
pistes. Loin de moi de ne pas apprécier ces laborieux 
critiques ! Il y aurait trop d’ingratitude. Combien 
d'écrivains de nos jours, fiers de leur sagacité, 
mauraient pas rectifié, purgé , expliqué vingt pages 
de ces manuscrits qui, pour la plupart , étaieni dans 
une inextricable confusion ! Combien, sans les citer, 
se font honneur des travaux de ces infatigables aris- 
tarques ! Mais enfin l’érudition gagna seule d’abord 
à la découverte de l'imprimerie ; et delà au pédan- 
üsme il n’y avait qu’un pas. Il était assez naturel 
que des reclus, enfoncés dans la poudre des biblio- 
thèques, la secouassent quelquefois pour annoncer 
au monde, avec une ridicule emphase, les résultats de 
leurs veilles. Etrangers à la société, dédaigneux de 


31 


( 450 ) 


la politesse qui commençait à s’y introduire, àl 
n’était point étonnant que les Muret, les Scaliger, 
les Scioppius, abimes d’érudition, comme ils se nom- 
maient eux-mêmes, divertissent ou scandalisassent 
le public de leurs violentes et savantes disputes. 

Un autre inconvénient, qui d’ailleurs annonçait 
quelques progrès dans le goût français, ce fut l’imi- 
tation, la traduction des chefs - d'œuvre antiques ; 
que ces essais furent d’abord malheureux ! N’é- 
tait-il pas inconcevable que des écrivains , qui pou- 
vaient connaître parfaitement les Sophocle , les 
Euripide, fussent si mal inspirés par eux! et que 
les faits, brillans sinon solides, de Charles VIIT, 
de Louis XII et de François 1.*, ne tirassent pas le 
génie français de sa torpeur ! Sous ces règnes , nous 
avions eu des communications fréquentes avec l’Italie 
qui possédait /& Mandragore de Machiavel , la 50- 
phonisbe du Trissin, l'Italie délivrée du même poète 
et les délicieuses folies de l’Arioste. Je ne parle pas 
du Tasse qui n’écrivait pas encore, mais qui, peu 
de temps après, se plaçait entre Homère et Virgile, 
quand Ronsard enfantait son poème aujourd’hui si 
complètement oublié de la Franciade. 

Rien ne profitait au génie français ; et, lorsque tout 
concourait à l’émanciper , il se débattait encore dans 
ses langes. L'imitation ne valut à Ronsard que ses 
mots burlesquement composés du grec et du laun, 
et à Baïf que ses infructueuses tentatives des vers 
scandés. En se tenant pour dit que la langue fran- 
çaise manque de cette prosodie rigoureuse qui dis- 
tingue les langues anciennes, que n’étudiaient-ils 


(451) 


le génie des Anciens? Notre littérature eût gagné un 
siécle ; et des Malherbe, des Rotrou, des Corneille 
eussent consolé leur patrie des déplorables règnes 
des derniers Valois. 

Ces grands hommes étaient réservés au temps de 
Henri IV et de Richelieu. On ne traduisit plus, à 
proprement parler, dans ces temps vraiment l’aurore 
de notre littérature; on imita. Rotrou seul tint à l’an- 
cien et au nouveau système, mais en homme supé- 
rieur, eu homme digne que le grand Corneille l’a- 
vouât pour son maître. Je ne dirai rien de Malherbe 
que vous connaissez, rien de Corneille dont tous les 
beaux vers vous sont familiers. 

Enfin le magnifique siècle de Louis XIV s'ouvre, 
et par ce même Corneille vieillissant , et par Mo- 
liére , le comique le plus parfait que les temps aient 
produit , et par l’auteur des Provinciales; la carrière 
est ouverte. Racine y va faire entendre les plus har- 
monieux accens que notre langue soit destinée à 
produite. Il imite encore, mais comment ! Et que 
diraient les Anciens s’ils savaient que l’on reprochât 
à Racine de les avoir imités ainsi? Il imite, mais 
de quelle inimitable manière ! Il imite, mais avec 
quel puissant génie il invente aussi! À qui Racine 
a-t-1l emprunté Mithridate, Britannicus, Athalie ? 
Grand homme , dont le seul défaut est d’être trop 
connu , et admiré depuis trop long-temps, tes anta- 
gonistes, crois-moi, n’auront point à se plaindre 
d’une pareille disgrâce. 

Le siécle de Louis XIV eut sans doute ses taches ; 
mais n'est-il pas ridicule de prétendre qu’un siècle 


(452) 


Jittéraire sôit parfait? Louis XIV lui imprima trop 
peut-être de cette symétrie, de cette grandeur un 
peu guindée qu’on Jui reproche; mais, quand ce 
siécle eût pu deviner l’immoral laisser-aller de la Reé- 
gence, y eût-il donc eu pour lui tant d’avantage à 
l’adopter , au lieu.de sa marche décente et noble? Il 
fut croyant et soumis; eût-il beaucoup gagné à an- 
ticiper sur l'esprit hardi et innovateur de sages pré- 
tendus qui ne s’entendaient pas entr’eux? Il fut fidéle 
aux règles littéraires qu’avaient établies d’excellens 
critiques de l’antiquité , sur des ouvrages qui depuis 
deux et trois mille ans font l’admiration du monde; 
eût-il mieux valu qu’il les secouât toutes, comme 
nous le. voyons faire de nos jours, ei qu’il montrât, 
cent cinquante ans plus tôt, le génie s’agitant dans 
les angoisses d’une pénible agonie? Messieurs, vous 
connaissez ce siècle qui porte le nom de Louis XIV; 
je ne vous ferai point l’énumération trop aisée de ses 
immortels écrivains ; quelle que soit votre opinion, 
vous me permettrez d’énoncer ici la mienne: que ce 
siècle fut l'apogée du génie français, et que de ce 
sommet il ne pouvait plus que descendre. 

Le siècle de Louis XV devait offrir, mais dans 
des bornes raisonnables, plus de liberté que le 
précédent; il n’a manqué qu’en partie à sa desti- 
née. Cette liberté a produit des écrivains du pre- 
mier ordre et qu’on lit avec ravissement; mais une 
sorte d'inquiétude et de préoccupation marque leurs 
ouvrages ; et l’on voit que, sil ne leur est pas 
donné d’avoir des disciples et des imitateurs en lit- 
térature, ils ne manqueront pas d’applicateurs de 


( 453 ) 


leur doctrine ; on voit que leurs assertions auront 
d’ardens approbateurs, et que leurs tètes puissantes 
trouveront des bras forts et entreprenans. 

Ils n'avaient rien laissé à dire; l’éducation phi- 
losophique des Français était achevée; un autre 
siècle voulut avoir aussi sa’ gloire : ce siècle, 
messieurs, c’est le nôtre. Les libertés du XVIIL.* 
ne lui convenaient pas ; il y avait entr’eux la ré- 
volution de 1789: bientôt il y eut la restauration. 
Revenir à Louis XIV, ce n’était plus possible, on 
s'était trop naïvement exprimé à son sujet : on se 
jeta dans des siècles et à des imitations sans const- 
quence. On exploita le moyen âge, et avec quelle 
fidélité ! On essaya de parler la langue de Thibaut 
de Champagne et de Charles d'Orléans. Ce ne: fut 
plus que chapelles gothiques , que dévots pélerins, 
que tendres chevaliers, que doucereux ménestrels: 
Des écrivains à riche imagination fournirent abon- 
damment de textes à ces nouveaux troubadours. 
On puisa à pleines mains dans le Génie du Christia- 
nisme, dans la Gaule poétique et dans Tristan le 
Voyageur. 

Nous n'avons point de théâtres, à entendre nos 
jeunes écrivains ; car sérieusement sont-ce des théà- 
tres que ceux de Corneille, de Racine et de Vol- 
taire ; écrivains , que l’on ne désigne plus , du moins 
les deux derniers, que par leur ample perruque ? Il pa- 
rut excellent d’en demander à Shakespear, à Lope de 
Véga , à Goëthe et à Schiller. A la bonne heure ! 
Comme des écoliers qui secouent en étourdis le joug 
‘salutaire de leurs maitres, il n’y eut plus d’Aristote, . 


(454) 


plus d’'Horace, plus de Quintilien : tout cela fut 
enfoncé. Et vous savez, messieurs, ce que produit 
ce mépris des règles, Ronsard, à son grand éton- 
nement, se voit ressusciter, par les soins d’un cri- 
tique digne assurément d’un plus honorable office; 
on fouille dans la vie privée des rois, pour mettre 
leurs faiblesses en lumière , las de n’avoir vu jus- 
qu’à présent exposer sur la scène que des évène- 
mens glorieux pour leur règne et pour la France. 
On fait plus ; tant pis pour ceux sur qui cela tombe! 
on leur attribue, sans scrupule, des faits évidem- 
ment faux: un de ces auteurs les plus renommés 
en fait l’aveu. Ce n’est plus de l’histoire, on en 
convient, c’est une idée morale que l’on s'amuse à 
développer aux yeux d’un public qui n’y voit que 
des idées lihertines, et qui s’en arrange parfaite- 
ment; car les auteurs font à la longue l’opinion de 
leur siècle , s’il nest pas assez prononcé pour faire 
la leur; et Dieu sait combien auront de comptes 
à rendre aux âges à venir les écrivains du nôtre! 
L’exemple gagne involontairement, et nous voyons 
plus d’un bon esprit aujourd’hui , signant comme 
les auires l’ostracisme d’un de nos génies passés, 
dire, pour toute räison : « Je m’ennuie de toujours 
l'entendre appeler un écrivain parfait. » 


(455 ) 


SUPPLÉMENT A L'ARTICLE PRÉCÉDENT. 


Jar trop à me louer de l’indulgente politesse de 
la Commission chargée d'examiner ce dernier opus- 
cule, pour ne pas lui tenir compte des observa- 
tions par lesquelles elle termine son rapport. J’au- 
rais dû, selon elle, ne pas dédaigner autant que 
je l’ai fait, les chroniques et les annales qui nous 
ont conservé curieusement les origines de notre 
histoire. Elles sont nombreuses, je l’avoue ; elles sont 
d’une inappréciable utilité pour ceux qui s’exercent 
dans le genre historique ; mais quel goût spécial 
manifestent les auteurs de ces compilations pesan- 
tes? Que sont-ils au VI. siècle , qu’ils ne soient 
encore huit siècles après? Quelle forme leur voit-on 
adopter de siécle en siècle, qui annonce que le goût 
soit pour rien dans leurs travaux, jusqu’à Froissard ? 
Tout vénérables qu’ils sont, et quelque cas que je 
fasse de ces monumens précieux, je n’en excepte 
pas Villehardouin lui-même et Joinville, considérés 
sous le point de vue général où j'ai envisagé mon 
sujet. 

Le Rapporteur de la Commission, dont la voca- 
tion est bien certainement l’histoire, et qui l’accom- 
plit dignement, s'étonne surtout que je n’aie pas 


(456 ) 


remarqué Grégoire de Tours. Cet écrivain sera tou- 
jours pour nous d’un trés grand prix. Je ne vais 
aucun de ces défauts qui sont de son temps, mais 
j'apprécie et la couleur qu'il sait donner à ses ta- 
bleaux, et la clarté de ses récits, et la sagesse 
de ses réflexions, et la modestie de ses prétentions. 
Grégoire de Tours, vivant, comme il le -dit lui- 
même, dans une des plus malheureuses périodes 
de notre histoire, au sein de l'ignorance, de la 
barbarie et de la guerre civile, ne constitue pas 
le goût de son siècle; il n’en a recu l'influence ni 
ne lui a imposé la sienne ; il était comme un Oasis 
au milieu des déserts : c’est sur la foi même de Gré- 
goire de Tours , juge incontestable de son âge , que 
je fondai mon jugement sur cet âge, jugement que 
la Commission a cependant trouvé sévère (1). 

Je dirai la même chose des controversistes reli- 
gieux, qui furent nombreux dans tous les temps, 
mais dans lesquels on trouve peu empreint ce goût 
qui fait l’objet de ma dissertation ; raisonnablement 
étranger à ces graves matières , à moins que le 
siècle ne les entraîne et ne les signe malgré eux de 
son sceau. 

Je passe à nos temps, et je rends un sincère 
hommage à des écrivains dont je n’ai pas parlé, 
parce que ce n’était pas le lieu. Dans la position 
où je m'étais mis de chercher des caractères sail- 
lans, pouvais-je hésiter à choisir cette moderne lit- 


(4) Voyez Grég. de Tours , en sa préface. 


(457) 


térature qui prétend réellement donner sa couleur 
au siècle , et marquer une ère nouvelle? Je n'ai 
donc pu rendre à MM. Guizot, Thierry, Ville- 
main, etc., la justice qu’en une autre circonstance je 
leur aurais rendue avec enthousiasme. Ces messieurs 
d’ailleurs ont écrit comme dans tous les temps où 
Von écrit bien ; leur place est partout où l'élégance 
est unie au savoir et l'imagination au bon sens. 
M. de Châteaubriand n’est plus aujourd’hui qu’un 
classique ; son école l’a laissé bien loin derrière 
elle ; son école, 


Triste objet . . .. 
-. . Que méconnaïtrait l'œil même de son père. 


Je regarde un peu M. de Lamartine comme 
étant dans le cas de M. de Chäâteaubriand, par 
rapport à la nouvelle école. Je reconnais la pro- 
fondeur de sa pensée et de sa sensibilité, la force 
de son expression; et, s’il se reproche quelque 
obscurité dans sa métaphysique, quelque embarras 
dans sa phrase , c’est surtout à la vue de tant de 
prétendus imitateurs de son très beau talent, sur 
le mérite desquels nous sommes , je crois, assez 
d'accord, M. le Rapporteur et moi. 


(458) 


ERRATA. 


Pag. 2, ligne 44, au lieu de surface, lisez : surface cultivée. 


27, ligne 5, --- nitrate de potasse, lisez : carbonate de 
soude. 
56, ligne 43, --- été, lisez : ôté. 
426, ligne 8, --- Pérou, lisez : Péron. 
425, après N.° 3, ajoutez : N.° 4. Trou pour introduire le ther- 
momètre. 


Nota. Les Nos suivans, pour s’accorder avec les figures, doivent 
être élevés d’une unité; celle des deux Planches 5 qui renferme 
des graminées doit être numérotée 8. 


( 459 ) 


TABLE DES MATIÈRES 


Contenues dans le premier Volume. 


Introduction historique aux Mémoires de la 
Société d'Agriculture, Sciences et Arts d’An- 
gers . . . . . . vV 

Règlement constitutif " la Société. TEE] 


AGRICULTURE, 


Des changemens physiques et chimiques qu'é- 
prouvent les terres dans l’opération de l’E- 
cobuage et des résultats que peut en reti- 
rer la pratique agricole , par M. Desvaux. 1 

Quelques observations sur la culture en pépi- 
nières du prunier sauvageon appelé Damas 
noir, par M. Lesreron aîné, pépiniériste. 32 

Notice sur une variété de cerise tardive ; iné- 


dite, par M. Mnzer. . . £ 36 
Ce de l’Ognon-Patate, par M. me 38 
Description d’une nouvelle variété de rosier. 40 


Sur la greffe de la Vigne, par M. Boureou. 97 
Erreur des agriculteurs et des botanistes sur le 
Teff des Abyssins, par M. Desvaux. . . 104 


( 460 ) 

Sur l'Englumen propre à préparer les arbres 
destinés à un voyage de long cours, par 
Lerreron jeune, pépiniériste à Angers . 

Notice sur la Finification , par M. ne Beaure- 
GARD . L UNE 

De la Bruyère col ae ds le vignes comme 
engrais, par M. DE BEAUREGARD 

Rapport sur la Charrue anglaise , dite de Bad 
ley, par M. ne Beaurecarn 2 M 

Fose Pigmée . 

Rapport sur les Médailles du Dee par cr $o- 
ctété pour l'exposition horticulturale du 21 
Juin 1832 . 

Rapport du Jury sur l’ net Ron oT es 
rale des 6, 7 et 8 juin 1833. ï 

Nouvelle Dares du Cameliia, obtenue de 
graine par M. Cacuer, jardinier-fleuriste. 

Description d'une nouvelle variété de Poire, 
par M. Mnrer se 

Mémoire sur les rbiceris bises en Front 
ou qu'on peut y cultiver , par M. Desvaux. 

De l'usage du Chlorure de sodium , dans le cas 
de Météorisme, par M. Lauvay-Jouserr. 
Sur les moyens de quérir facilement les animaux 
domestiques de la Météorisation ou Ft 

par M. De Beauvoys . 

Sur les moyens d'utiliser les Orchidées par 
M. De Brauvoys. À 

Méthode-Pratique pour gra la En par 
M. Deraace 2 ADR MEN TN : 


Pages. 


107 


213 


227 


233 


239 


240 
297 
300: 
301 

302 


392 


393 
395 


A1 1: 


(461) 
SCIENCES. 


Note sur une description mécanique de da 
Chaînette, par M. Bosnxier. 

Analyse du fer arsénical d'Angers et de S.t- t- 
Pierre-Montlimart, par M. Lerrerow, phar- 
macien £ . : 

Description d'une Far espèce de Gear it 
par M. Murer. ; POLE 

Description de la chenille ur Ba hi nn x 
par M. Courtircer Res 

Observations sur le Melon délicieux dr 
deliciosus }, par M. Desvaux. » & 

Description et observations sur une nouvelle es- 
pêce du genre Thymbra, par M. Desvaux. 

Rapport de M. Burar , relatif à un mémoire 
de M. Hossard sur 'e cas de diffor- 
mile . LE 4 PNA Ê 

Des Stalactites souterraines où PE Hoi 
gorites ( planche F, fig. 1 et nn par 
M. Desvaux. 

Rapport sur une note # M. M apét 
pour titre : Des Stalactites souterraines ou 
prétendues Fulgorites, par MM. Cuerow, 
Pirate ET F'OURRIER - 

Observations sur les Cie iés iBécrene 
tions de Genres et Espèces Fren de cette 
même Famille, par M. Desvaux . ; 

Description de deux nouvelles espèces du genre 
Anodonte , par M. Muxer . 


Pages, 


66 


109 


114 


157 


241 


( 462 ) 


Description du Trèfle à ae Fi > par 
M. Desvaux. : ML à 

Du Quartz aventurine et de ses gissemens , 
par M. Desvaux . ; 

Sur la Navigation de la db. , par M. Dale 
ingénieur en chef du département de Moi 
et Loire. 

Recherche du Plan MER &s abs. par 
la théorie de Maximis et de Minimis , par 
M. Pexox , professeur . pal, 

Examen chimique d'une Arragonite servant de 
Marne , trouvée dans le département de la 
Vienne, par M. P. Lesrero. 

Sur la découverte, faite par M. Boris) 
d'une Terre à Porcelaine, dans le dé paihes 
ment de Maine et Loire; par M. Desvaux. 


LETTRES ET ARTS. 


Discours sur l'Idéal , par M. Brorner-Lanezoïs 
Mémoire relatif à des médailles qauloises, 
trouvées près Angers , par M. Gruxe. 
Notice biographique sur Billard, par M. Gréc. 

LaACHESE, Ce à l'Ecole de Médecine 
d’ ie : : 
Quelques Réfexions sur d'Histoire \ et sur les 
principaux Historiens des différens siècles. 
par M. Bcorprer-LancLois . 3 
Le Chevalier de Latour-Landry et Réfasions 
sur le moyen dge , par M. BLorprer-LaneLois 


Pagés, 


243 


244 
. 240 
255 
3938 


496 


69 


82 


121 


(463) 


Souvenirs Atlantiques, de M. Théodore Pavie, 
par M. BLorprer-LANGLOIS . eee (De 

Nouvelles Réflexions servant de Te à 
celles-ci, par le même . ! 

Sur le Cours d’'Antiquité RAM de 
M. De Caumont . j 

Rapport d'une Commission sur un T, rs de 
Lecture de M. Blain. 

Sur quelques Ecrivains de lAnjon > par "M. 
BLorprer-LANGLois . 

Des différens âges du Goût en FEU par 
M. BLorprer-LaAxGLois. 

Supplément au méme article, par 1e cine, 


Pages. 


282 


284 


295 


_ 410 


423 


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Millet del. 


Lilho. de Ernest Le Seurd, Angers. 


PL 15 


ll 10 


AVIS. 


Les Sociétés qui n'auraient pas envoyé en échange 

leurs publications , et qui sembleraient par-là renon- 
cer à la correspondance de la Société d’Agriculture, 
‘Sciences et Arts d'Angers, sont prévenues qu’elles : 


ne recevront point la suite de ses Mémoires, dont : 


‘cette livraison termine le 1.® volume. 


A es Er 
l'fce aies 


Din PS 


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