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Full text of "Memoires et documents"

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B£QU£ST 
UNlVERSnY  orMICHIGANi 

1  GENERAL  LIBl^ARY  _^ 


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Ai 


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MEMOIRES  &  DOCUMENTS 

PUBLIÉS   PAR 

L'ACADÉMIE  GHABLAISIENNE 


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IMPRIMÉ  SUR   LES  PRESSES 


DE 


A.    DUBOULOZ,    A  THONON-LES-BAINS 


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MÉMOIRES  &  DOCUMENTS 


PUBLIES    PAR 


FONDÉE  A  THONON  LE  7  DÉCEMBRE  1886 


TOME  XI 


M.D.CCC.XCVII 


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L'Académie  laisse  à  chaque  auteur  la  responsabilité 
de  ses  opinions  et  de  ses  assertions 


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; 


BULLETIN 


DE 


L'AGÀDÉMIË  CHABLi^lSIENNE 


1896-1897 


I 

TRAVAUX  DE  L'ACADÉMIE 


Séance  du  9  Novembre  1896 

(présidence  de  m.  JULES  GUYOn) 


M.  le  Président  donne  la  parole  à  MM.  Anthoinoz  et 
L.  Gavillet  pour  l'exposition  et  la  description  de  deux 
appareils  :  le  Solscope  et  le  Gnomographe,  découverts 
par  M.  Anthoinoz,  architecte,  en  vue  de  la  résolution 
de  divers  problèmes  cosmographiques. 

Sans  entrer  dans  des  explications  qui  trouveront  leur 
place  ailleurs,  nous  pouvons  dire  que  le  Solscope  sert 
à  indiquer  en  un  endroit  et  un  moment  quelconques,  la 
position  exacte  du  soleil  relativement  à  l'observateur, 
les  heures  du  lever  et  du  coucher  du  soleil,  les  points 
où  il  se  lève  et  se  couche,  etc,  etc. 

Le  Onomographe  peut  servir  comme  horloge  solaire 


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—   VIII   — 

et  surtout  il  facilite  et  simplifie  le  tracé  des  horloges 
solaires  sur  une  surface  quelconque. 

Cette  communication,  qui  rappelle  celle  faite  par 
MM.  Anthoinoz  et  Gavillet  au  Congrès  scientifique 
d'Evian-les-Bains,  intéresse  vivement  l'assemblée  qui 
remercie  M.  Anthoinoz  et  lui  exprime  ses  vœux  pour 
la  propagation  et  la  divulgation  de  ses  appareils. 

M.  Tabbé  Piccard  communique  ensuite  plusieurs 
diplômes  de  docteur  en  droit  et  en  théologie  délivrés 
au  XVIIIc  siècle,  à  Turin  et  à  Valence,  à  divers  mem- 
bres de  la  famille  Cayen,  d'Evian-les- Bains. 

L'assemblée  adresse  de  chaleureux  remercîments  à 
M.  Engel-Gros,  propriétaire  du  domaine  de  Ripailles, 
et  membre  de  l'Académie,  pour  le  don  de  250  fr.  qu'il 
a  bien  voulu  destiner  à  l'achat  d'une  nouvelle  biblio- 
thèque de  la  Société. 

M.  A.-J.  Vernaz,  président  de  la  Société  d'agricul- 
ture du  Chablais,  au  nom  de  M.  A.  Rigaux,  professeur 
d'agriculture,  demande  à  ce  que  l'Académie  veuille  bien 
prendre  connaissance  de  sa  Géologie  agronomique  des 
Alpes  de  Savoie. 

MM.  Van  Muyden,  président  de  la  Société  d'histoire 
de  la  Suisse  romande,  A.  Anthoinoz,  architecte,  et 
André  Dubouloz,  imprimeur,  sont  reçus,  le  premier 
comme  membre  d'honneur,  les  deux  seconds  comme 
membres  effectifs  de  l'Académie  Chablaisienne. 

M.  Fontaine  Borgel,  secrétaire  de  l'Institut  genevois, 
est  reçu  membre  correspondant  de  la  Société. 


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—   IX   — 

Séance  du  14  Décembre  1896 

(présidence  de  m.   DUPLAN; 


M.  Lek)n   Quiblier  est  nommé  Secrétaire-Adjoint  aux 
termes  du  Règlement. 

Lecture  est  ensuite  donnée  d'une  lettre  du  Ministre 
de  rinstruction  publique  invitant  la  Société  à  participer 
au  Congrès  des  Sociétés  savantes  qui  aura  lieu  à  Paris, 
et  en  Sorbonne,  du  20  au  24  avril  1897. 

M.  le  Président  communique  à  TassembkV»  les  remer- 
ciments  de  M.  A.  Folliet,  sénateur,  et  César  Du  val, 
député,  à  Toccasion  de  leur  réception  comme  membres 
de  l'Académie  Chablaisienne. 

M-  Tabbé  Piccard,  Vice-Président,  donne  lecture  d'une 
lettre  de  M.  Emile  Vuarnet,  de  Messery,  membre  de 
la  Société,  concernant  des  étymologies  de  noms  de 
lieux  du  Bas-Chablais. 

M.  Lucien  Jacquot,  substitut  à  Sétif  (Algérie),  mem- 
bre correspondant,  transmet  un  intéressant  Mémoire 
sur  les  tombeaux  antiques  trouvés  dans  les  fouilles 
de  Sétif.  

Séance  du  11  Janvier  1897 

(présidence  de  m.  a.  duplan) 


Suivant  l'ordre  du  jour,  il  est  procédé  au  renouvelle- 


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—    X   — 


ment  du  bureau  pour  Tannée  1897.   Le  dépouillement 
des  bulletins  donne  le  résultat  suivant  : 
MM.  Albert  Duplan,  Président. 
TAbbéL.-E.  Piccard,  I 


,  Vice-Présidents. 
Jules  GuYON, 

Frère  Valfrid,  Bibliothécaire, 

Léon  PiNGET,  Trésorier. 

Léon  QuiBLiER,  Secrétaire. 

M.  Tabbé  Piccard  communique  ensuite,  à  l'assemblée, 
un  document  concernant  l'installation  des  dignitaires  du 
Conseil  du  Comte  de  Genevois,  Philippe  de  Savoie,  après 
l'abdication  à  Ripaille  d'Amédée  VIII  devenu  Pape 
sous  le  nom  de  Félix  V. 

x\près  son  abdication,  dit-il,  Amédée  VIII,  devenu  le 
Pape  Félix  V,  céda  à  son  lils  Philippe,  le  Comté  de 
Genevois  et  la  Seigneurie  de  Faucigny  et  créa  son 
fils  aîné  Louis  duc  de  Savoie,  Chablais  et  Aoste  (1440). 

Les  9  et  10  janvier  de  la  même  année,  le  nouveau 
Comte  de  Genevois  Philippe  nomma,  à  Ripailles  où 
résidait  la  cour  de  Savoie,  les  dignitaires  de  son  Conseil 
et  de  son  Comté.  C'est  cette  importante  pièce  historique, 
encore  inédite,  de  l'installation  de  ces  dignitaires  que  je 
présente  aujourd'hui  à  l'Académie  Chablaisienne.  On  y 
voit  figurer  les  plus  grands  noms  de  la  Savoie,  tels  que 
Jean  de  Grolée,  Antoine  de  Dragons,  Pierre  de  Men- 
thon,  Jean  du  Clos  de  Bonne,  Guillaume  de  la  Forest, 
Amédée  do  Viry,  Jean  do  Chissé,  Jean  de  Lornay,  etc.. 

(1440  9  et  10  Janvier) 

De  mero  facto  gebennesij  et  ordinaciones. 
Successive  die  nona  januarii  Thononii,   presentibus 


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—   XI   — 

DomiQls  h""**^''^de  Sabaudia  Comité  rotondimontis.  L. 
Domino  RacoQigiimariscalcochoutagnieCoudreeJohanne 
de  Grolea  Montheolo  Boiomyer  Arnaudi  et  Guillelmo  de 
Forosta. 

Prefatus  dous  Comes  gobennesii  coustituit  Domioum 
Anthooium  de  Draconibus  eius  presidentem  gebonnij 
sub  stipendiis  quatuor  centorum  floronorum  parvi  pou- 
deris  auDuatim  soiuendorum  per  thesaurarium  gebeo- 
nensem  quatuor  termiuis  cuiuslibet  anni.  Ita  quod  dno 
Comité  predicto  présente  vel  absente  libram  in  hospitio 
non  capiat. 

Dominus  Petrus  de  Menthone.  Constituitur  jn  consilio 
ciusdem  Domini  Comitis.  Sub  stipendiis  tereentum  flore- 
norum  parvi  pouderis  solvendorum  ut  supra.  Ita  quod 
libram  non  accipiat. 

Nycodus  Festi,  constituitur  de  consilio  et  magister 
computorum  sub  stipendiis  ducentum  florenorum  parvi 
ponderis.  Ita  quod  libram  non  accipiat  ut  supra. 

Johanes  Voteris  constituitur  thesaurarius  et  receptor 
generalis  gebennesij  sub  stipendiis  ducentum  floronorum 
parvi  ponderis.  Ita  quod  libram  non  accipiat  ut  supra. 

Johanes  do  Clause  de  Bona  junior  constituitur  procu- 
rator  fiscal is  consilij  gobonnosij.  Sub  comoditatibus  et 
omnibus  per  consimilos  fiscales  procuratores  percipero 
assuetis. 

Satis  perprius  ante  Henricus  mercerij  ducalis  secreta- 
rius  fuit  decretus  sigillifer  et  clauarius  exactorque  sigiili 
et  multorum  emolumentorum  dicti  consilij.  Sub  comodi- 
tatibus consimilibusjilis  quas  clauarius  consilii  Cham- 
beriaci  solitus  est  percipere. 


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XII   — 

Die  X  Jaauarij  Rippallie  presentibus  Dominis  L.  Do- 
mino Raconigij  Marescallo.  P.  Marchiandj.  L.  de 
Montheolo  présidente  Chamberiacj  et  Bolorayeri. 

Dominus  Cornes  gebennensis  predictus,  Gulllelmo  do 
Foresta  eius  magistro.  Dédit  in  plenariam  remunera- 
tionem  serniciorum  per  eum  jam  sibi  impensorum  et  in 
futuruoi  jrapendendorura  videlicet  quingentos  florenos 
parvi  ponderis  pro  semel.  Et  centum  florenos  annuales. 
Eidem  Guillelmo  annis  singulis  jn  quolibet  festo  natiui- 
tatis  duj  quamdiu  fuerit  in  humanis  et  post  eius  deces- 
sum.  Suis  liberis  et  heredibus  jnfallibiliter  soluendos  per 
thesaurariura  qui  pro  tempore  fuerit  quousque  jdem 
Guillelrnus  vel  sui  predicti.  De  predictis  quingentis  flo- 
renis  obtinuerit  solutionera. 

Preterea  quia  Nycodus  Festi  pridem  magister  compu- 
torum  jpsius  dni  Comitis  gebennensis  constitutus  offl- 
ciarium  sygilliferie  gebennesij  et  foucigniaci  comode 
non  potest  obtinere  quia  ipse  corani  eodem  de  exitibus 
dicti  offlcij  non  débet  computare.  propterea  et  aliis  bonis 
respectibus.  Etiam  ad  requisitionem  dicti  Domini  ndstri 
Ducis.  Jdem  Dominus  Cornes  constituit  eius  sigiiliferum 
Franciscum  Fabrj  ducalem  secretarium  per  unumannura 
sub  stipendiis  et  comoditatibus  consuetis.  Jta  quod 
possit  aiium  ydoneum  loco  sui  subrogare. 


Annodominj  millésime  quatercentesimoquadragesimo 
primo  et  die  vicosima  octaua  januarij  mane  post  pro- 
nunciationem  et  rehemissionem  nnius  Cestellety  decre- 
tibus  dni  Anthonius  de  Draconibus  présidons  gebennesij 
urbanus  Dominus Chivronis  Petrus  Dementhone  Dominus 


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—  XIII  — 

Montistrocterij  Dominus  Amedeus  de  Viriaco  Guillelmus 
de  Forestâ  bailliuus  fucigniaci  Johannes  de  Chissiaco 
aduocatus  fiscalis  Nycodas  Festi  magister  computorum 
Johannes  Veteris  thesaurarius  et  Johannes  de  Lornay 
prestiterunt  juramentum  et  secretarii  omnes  Domino 
nostro  Comiti  juxta  formamsubscriptam  in  suis  manibus. 
Videlicet  omnes  consiliarii  debere  essere  fidèles  et 
fidelitatem  sinceram  semper  seruare  erga  jllustrem  Do- 
minum  nostrum  personam  honorem  bona  et  jura  sua 
toto  posse  obseruando.  Dampnum  seu  detrimentum  per- 
sone  honoris  bonorum  et  jurium  suorum  totis  viribus 
auctando  et  jmpediendo.  Et  ubi  et  quando  hoc  facere  non 
possent  hoc  sibi  veraciter  reuellando  sou  jntimando. 
Jtem  quod  in  omni  casu  eidem  Domino  nostro  fidèle 
consilium  prebebunt,  exprimentque  et  dicent  vota  sua 
seu  oppiniones  suas  secundumdeum  veritatom  justitiam 
juxta  dictamen  etiam  conscientiarum  suarum  non  ex 
aliquojure  directe  aflfectu  Ipsi  Domino  nostro  compla- 
cendi  aut  alterius  etiam  complacendi  vel  displicendi 
Neque  amore  odio  timere  neque  respectu  alicuius  pre- 
mii  vel  comodj  sui  vel  alterius  aut  dampni  alienique 
corde  puro  omni  sincero  aflFectu  fictione  simulatione 
dolo  prece  vel  precio  penitus  Et  cessantibus  omnia  dicta 
jn  consiliis  sécréta  tenebunt  Nilique  nec  unquam  reue- 
labunt  sine  consensu  Dbmini  nuUas  quascumque  ligas  vel 
uniones  particulares  jllicitas  publicas  vel  occultas  jnter 
se  sumant  vel  tenebitur  seu  eis  conficient  Et  si  quis  forte 
sint  nullomodo  vertentur.  Jtem  quod  eidem  Domino 
nostro  jn  consilio  comuni  vel  priuato  nihil  jniquum 
vel  jniustum  suadebunt  vel  requirent  fierj  seu  concedi 
jn  fauorem  vel  odium  seu  dampnum  alterius  Quod  cedere 


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—   XIV  — 

possit  jn  anime  vel  honoris  dicti  Dominj  nostri  detri- 
ment'im,  Dnus  presidens  et  ceterj  ad  exercitium  justitie 
seciim  deputati  tamjnexpeditione  supplicationum  quara 
auditione  décisive  et  difflnitione  causarum  tam  ciuilium 
quam  criminalium  patrimonalium  fiscalium  et  cetera- 
rum  quarumcumque  clausulas  predictas  quantum  con- 
cernunt  actus  justitie  penitus  obseruabunt  rectum  judi- 
cium  tenebunt. 

{Archives  de  la  Chambre  des  Comptes 
Protocole  Declauso.  N^  46  ;  page  6). 

M.  Duplan,  Président,  parle  du  droit  de  justice  ac- 
cordé au  Seigneur  du  Châtelard,  et  fait  don  à  la  Société 
de  diverses  gravures  de  princes  de  la  Maison  de  Savoie. 


Séance  du  8   Février  1897 

(présidence  de  m.  a.  duplan) 


M.  Léon  Pinget,  Trésorier,  donne  connaissance  de 
ses  comptes  pour  Texercice  1896.  L'Assemblée  les  ap- 
prouve en  entier  et  lui  adresse  ses  plus  vifs  remercî- 
ments. 

M.  A.  Duplan  dépose  sur  le  bureau  de  nombreuses 
publications  dont  quelques-unes  très  rares,  intéressant  la 
Savoie  ;  il  en  fait  don  à  la  bibliothèque  de  l'Académie. 

Au  nom  de  M.  Norbert  Dunoyer,  M.  l'abbé  Piccard 
donne  lecture  de  divers  documents  très  importants 
concernant  la  paroisse  de  Juvigny,  pendant  les  XVI% 
XVII«  et  XVIII«  siècles,  et  il  offre  à  l'Académie  le 
plus  curieux  de  ces  documents  relatif  au  passage  des 
Espagnols  (1620). 


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—   XV   — 

M.  Duplan  communique  ensuite  à  l'Assemblée  une 
étude  très  intéressante  do  M.  Lucien  Jacquot,  sur  les 
tombeaux  de  Mons,  région  de  Sétif.  Cette  étude  qui 
doit  servir  de  base  à  un  travail  considérable  sur  les 
sépultures  de  la  région  de  Sétif  fait  le  plus  grand  hon- 
neur à  notre  compatriote;  aussi  l'Académie  Chablai- 
sienne  s'associo  de  tout  cœur  à  ses  nombreuses  et 
savantes  recherches. 


Séance  du  8  Mars  1897 

(présidence  de  m.    l'abbé  piccard) 


M.  E.  Vuarnet  parle  du  séjour  de  Lamartine  en 
Chablais,  en  Mai  et  Juin  1815. 

Au  retour  de  l'île  d'Elbe,  dit-il,  Lamartine  s'expatrie 
pour  échapper  à  la  conscription  ;  il  arrive  parle  Jura  dans 
le  canton  de  Vaud,  à  Nyon.  Il  reçoit  l'hospitalité  chez  une 
famille  noble  de  Borne,  M.  et  M™«  de  Vincy  qui  habitent 
un  château  voisin  de  Nyon.  (Mai  1815),  il  y  passe  quel- 
ques jours.  Comme  cotte  famille  a  été  ruinée  par  la 
Révolution,  il  ne  veut  pas  rester  plus  longtemps  à  leur 
charge,  il  n'a  emporté  de  chez  ses  parents  que  25  louis 
et  est  obligé  de  vivre  modestement. 

XI 

Je  pris,  dit-il,  le  prétexte  d'un  voyage  dans  les  mon- 
tagnes méridionales  de  la  Suisse.  Je  quittai  le  château,  non 
sans  tristesse,  dans  les  yeux  de  mes  hôtes  et  dans  les 
miens  (1).  Je  me  retournai  souvent  pour  le  regretter  et 

(1)  Voyage  de  Lamartine  en  Chablais,  ra.conié  par  lui-même  dans 
son  ouvrage  intitulé  La  J^wn^ss^,  édité  en  1853.  Paris,  librairie 
nouvelle,  15,  boulevard  des  Italiens. 


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—   XVI   — 

pour  le  bénir  des  yeux.  Je  parcourus  seul,  à  pied,  et 
dans  le  costume  d'un  ouvrier  qui  voyage,  les  plus  belles 
et  les  plus  sauvages  parties  de  THelvétie.  Après  trois 
semaines  de  cette  vie  errante,  je  revins  au  bord  du  lac 
de  Genève,  et  je  m'arrêtai  dans  la  partie  de  la  côte  qui 
fait  face  au  pays  de  Vaud,  et  que  J.-J.  Rousseau  a  si 
justement  préféré  au  reste  de  ses  bords. 

Je  me  mis  en  pension,  pour  quelques  sous  par  jour, 
chez  un  batelier  du  Chablais,  dont  la  maison  un  peu 
isolée  tenait  à  un  petit  village  (1).  Le  métier  de  cet  homme 
était  de  passer  une  ou  deux  fois  par  semaine  les  paysans 
d'une  rive  à  l'autre  rive,  de  pécher  dans  le  lac  et  de 
cultiver  un  peu  de  champs.  11  avait  pour  toute  famille 
une  fille  de  vingt-cinq  ans  qui  tenait  son  ménage,  et  qui 
donnait  à  manger  aux  pêcheurs  et  aux  passants.  A  en- 
viron trois  cents  pas  de  la  maison  habitée  par  ce  brave 
homme  et  par  sa  fille,  il  y  avait  une  autre  maison  inha- 
bitée qui  leur  appartenait  aussi,  et  qui  servait  seulement 
de  temps  en  temps  à  loger  quelques  voyageurs  ou  quel- 
ques douaniers  en  observation. 

La  maison  ne  contenait  qu'une  chambre  au-dessus 
d'une  cave.  Je  la  louai.  Elle  était  située  dans  un  terrain 
plat,  à  la  lisière  d'une  longue  forêt  de  châtaigners,  et 
bâtie  sur  la  grève  même  du  lac,  dont  les  flots  bruissaient 
contre  le  mur. 

Ma  chambre  avait  pour  tout  meuble  un  lit  sans  ma- 
telas, sur  lequel  on  étendait  du  foin  ou  de  la  paille,  des 
draps,  une  couverture,  une  chaise  et  un  banc.  L'appui 
de  la  fenêtre  me  servait  de  table  à  écrire.  Je  m'y  ins- 
tallai. 

(1)  Nernier. 


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—   XVII   — 

J'allais  deux  fois  par  jour,  le  matiu  et  le  soir,  preodre 
mes  repas  au  village  chez  le  batelier  et  avec  lui.  Du 
pain  bis,  des  œufs,  du  poisson  frit,  du  vin  acide  et  âpre 
du  pays,  composaient  pour  nous  ce  repas.  Le  batelier 
était  honnête,  sa  fllle  était  obligeante  et  attentive.  Après 
quelques  jours  de  vie  en  commun,  nous  étions  amis. 
J'envoyais  le  batelier  chercher  une  fois  la  semaine  des 
livres  et  des  nouvelles  au  cabinet  littéraire  de  Lausanne 
ou  de  Nyon.  J'avais  de  l'encre,  des  crayons,  du  papier. 
Je  passais  les  journées  de  pluie  à  lire  et  à  écrire  dans 
ma  chambre,  les  journées  de  soleil  à  suivre  sur  la  grève 
les  longues  sinuosités  des  bords  du  lac  ou  les  sentiers 
inconnus  dans  les  bois  de  châtaigniers. 

Le  soir,  je  restais  longtemps  après  souper  à  user  les 
heures  de  l'obscurité  dans  la  maison  du  batelier,  causant 
avec  lui,  avec  sa  fille,  quelquefois  avec  l'instituteur  et  le 
curé  du  village,  qui  s'attardaient  auprès  de  nous.  Rentré 
dans  ma  chambre,  j'y  retrouvais  avant  le  sommeil,  le 
murmure  assoupissant  du  lac  qui  roulait  et  reprenait  les 
cailloux  à  chaque  lame. 

Ma  chambre  était  si  près  do  l'eau,  que  les  jours  de 
tempête,  les  vagues  en  se  brisant,  jetaient  leur  écume 
jusque  sur  ma  fenêtre.  Je  n'ai  jamais  tant  étudié  les 
murmures,  les  plaintes,  les  colères,  les  tortures,  les  gé- 
missements, et  les  ondulations  des  eaux  que  pendant 
ces  nuits  et  ces  jours  passés  ainsi  tout  seul  dans  la  société 
monotone  d'un  lac. 

J'aurais  fait  le  poème  des  eaux  sans  en  omettre  la 
moindre  note.  Jamais  non  plus  je  n'ai  tant  joui  de  la 
solitude,  ce  linceul  volontaire  de  l'homme  où  il  s'enve- 
loppe pour  mourir  voluptueusement  à  la  terre.  Je  voyais 


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—  XVIII  — 

le  matin  briller  de  loin  au  soleil,  à  sept  lieues  de  moi, 
sur  la  rive  opposée,  le  large  et  blanc  château  de  Vincy  ; 
j'aurais  pu  y  retourner  si  j'avais  voulu  abuser  encore  de 
la  touchante  hospitalité  de  ses  maîtres. 

Je  me  contentai  d'écrire  une  lettre  de  remerciement 
à  mes  hôtes,  en  les  informant  de  ma  nouvelle  demeure. 

XII 

Toutes  les  communications  avec  la  France  s'étaient 
fermées  à  cause  de  la  guerre.  Je  ne  savais  pas  si  j'y 
rentrerais  jamais 

Voici  la  comparaison  du  Bulgare  et  du  Savoyard, 

faite  par  le  même  auteur,  sous  le  titre  de  Notes  sur  la 

Servie, 

Semlin,  12  Septembre  1833,  au  Lazaret. 

Le  Bulgare  est  bon  et  simple,  mais  on  sent 

que  prêt  à  s'affranchir,  il  porte  encore  un  reste  de  joug  ; 
il  y  a  dans  la  pose  de  sa  tête,  et  dans  l'accent  de  sa 
langue  et  dans  l'humble  résignation  de  son  regard,  un 
souvenir  et  une  appréhension  sensible  du  Turc  ;  il  rap- 
pelle le  Savoyard^  ce  bon  et  excellent  peuple  des  Alpes.. 

(de  Lamartine,  Voyage  en  Orient^  tome  II,  page  254,  édition 
Furneet  C%  Paris). 

M.  Vuarnet  dit  en  finissant  qu'il  a  trouvé  plusieurs 
médailles  romaines  en  bas  Chablais,  entre  autres  un 
Gordien,  à  Massongy. 


Séance  du  12  Avril  1897 


M.  Norbert  Dunoyer,  de  Juvigny,  présente  un  mani- 


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—   XIX   — 

feste  de  la  Chambre  des  comptes  de  Savoie,  du  15  février 
1786,  relatif  au  change  des  vieilles  pistoles  de  24  livres. 
M.Duplan  fait  uue  commuoication  due  à  TobligeaDce 
de  M.  Clerc,  not''«  à  Evian,  relative  à  Jean  de  Blonay, 
dit  de  S*-Paul,  prieur  du  chapitre  de  l'église  paroissiale 
et  collégiale  de  S^-Anathoile  de  Salins  (Jura). 

Voici  comment  se  composait  ce  chapitre  : 
Du  vendredi  avant  Pasques  flories  vingtième  jour  du 
mois  de  mars  mil  cinq  cent  cinquante. 
Présents  :  Messire  Jehan  de  Blonay  dit  de  St-Paul, 
Prévost. 

—  Jaques  Amyot  (1). 

—  Jehan  Belin. 

—  Anthoine  de  Vers. 

—  Jehan  Dupuy. 

—  Guillaume  Faure. 

—  Jehan  Visoy. 

—  Cyle  Rutyet. 

—  Guy  Bancel. 

—  Jehan  Belin. 

—  Jehan  Guyenet. 

(l)  Amyot  (Jacques)  peut-être  le  parent  de  celui-ci,  fut  un  célè- 
bre écrivain  ;  il  naquit  à  Melun  d'une  famille  pauvre  (1513-1593). 
Il  étudia  à  Paris  au  collège  de  Navarre,  où  il  était  réduit  à  servir 
les  étudiants  riches.  Il  reçut  les  ordres,  devint  professeur  de  grec 
à  l'université  de  Bourges  et  y  enseigna  pendant  10  ans.  Il  com- 
mença à  se  faire  connaître  par  une  traduction  des  amours  de 
Tliéogène  et  Charidée  d'Héliodore  (1546)  qu'il  dédia  à  François  I"" 
et  qui  lui  valut  l'abbaj^e  de  Bellozanne  ;  quelques  années  après  il 
publia  les  amours  deDaphnis  et  Chloé  (1559),  mais  son  titre 
principal  est  la  tradition  de  Plutarque  à  laquelle  il  travailla 
toute  sa  vie.  En  1554  il  fut  nommé  précepteur  des  enfants  du  roi 
Henri  II.  Lorsque  Charles  IX  et  Henri  III,  qui  avaient  été  ses 
élèves,  furent  montés  sur  le  trône,  ils  le  comblèrent  de  faveurs. 
Il  fut  nommé  grand  aumônier  de  France  (1570)  et  pourvu  d^  ri- 
ches bénéfices. 


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—   XX   — 

Le  dit  jour  Messines  Estienne  d'Autetour  et  Anathoille 
Foure!  prestres  familiers  de  Iad«  église  ont  estez  mandez 
venir  aud  chappitre  ce  qu'ils  ont  fait  et  en  l'absence  du 
Sg»*  Prévost  lequel  s'estoit  retirerez  dud.  chappitre  sont 
estez  interrogez  par  led.  Messire  Jaques  Amyot  comme 
leplusantien  chanoine  selon  que  sonsuyt  par  serment 
par  chaqun  d'eulx  prestes  sur  saint  evaugilles  de  Dieu 
estans  es  mains  dud.  Amyot  de  respondre  vérité  sur  les 
articles  suyvans. 

Premièrement  a  estez  interrogez  led.  Messire  Estienne 
d'Autetour  pourquoy  et  a  quelle  raison  il  n'estoit  voulu 
aller  parler  aud.  Seg"*  Prévost  en  sa  maison  selon  que 
led.  Seg"*  Prévost  Tavoit  mandez  quérir  par  son  serviteur. 

A  quoy  a  respondu  led.  d'Autetour  qu'il  estoit  vray 
que  led.  Seig»*  Prevosl  l'avoit  mandé  par  sond  serviteur 
aller  parler  a  luy  en  sa  maison  auquel  serviteur  il  fit 
réponse  qu'il  ny  yroit  point  en  la  maison  d'icelluy  Pré- 
vost craignant  que  led.  Seg"*  Prévost  ne  luy  fit  comme 
ilavoitfaita  Messire  Anathoille  Faurel  lequel  il  avoit 
boussez. 

Encoure  a  este  interrogez  led.  d'Autetour  si  led.  Mes- 
sire Anathoille  Fourel  luy  avoit  dit  qu'il  maintenoit  que 
led.  Sgf  Prévost  estoit  excomunie  lequel  a  respondu  que 
non. 

En  aprez  a  esté  interrogez  led.  Messire  Anathoille 
Fourel  si  led.  Seg^  Prévost  l'avoit  point  baptu  et  que  a 
ce  moyen  il  teuoit  led.  Sg^  Prévost  pour  escomunie  et 
si  l'avoit  point  dit  a  aulcuns  de  Mess»*®»  ou  familliers 
mesmement  aud.  Messire  Estienne  d'Autetour. 

Lequel  Fourrel  a  répondu  qu'il  otoit  bien  vray  qu'il 
avoit  dit  aud.  d'Autetour  que  pour   ce   qu'il  ne  vouloit 


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—   XXI   

sortir  hors  de  la  maison  en  laquelle  led.  Sg'  Prévost 
estoit  et  autres  Seig"  chanoines  assemblez  pour  les 
affaires  de  lad.  église  qu'il  estoit  bien  vray  que  led.  Seig»" 
Prévost  le  boussat  et  que  son  pied  s'estoit  trouvez  entre 
leseuille  et  la  porte.  Mais  qu'il  croit  fermement  que  led. 
Sgr  Prévost  no  fit  cela  par  malice  et  que  jamais  il  n'a  voit 
dit  qu'il  le  tenit  pour  excommuniez.  Ains  le  tenoit  estre 
homme  de  bien  priant  que  s'il  l'avoit  offenscîz  led.  Seg"* 
Prévost  en  ce  que  dessuz  luy  pardonne. 

Encore  a  estez  int^MTOgez  h.'d.  Messire  Anathoille 
Fourel  s'il  avoit  point  dit  et  reprouchez  a  Messire  Guil- 
laume Feuro  chanoine  d'icelle  église  qu'il  estoit  vendeur 
de  cloches. 

Lequel  Fourel  arespondu  qu'il  estoit  vray  qu'a  certain 
jour  il  trouva  led.  Feure  et  estant  seul  avec  luy  luy 
reproucha  comme  mal  advisez  vendeur  de  cloches  le 
priant  de  luy  pardonner. 

Et  en  cet  instant  le  d*-  Sg»*  Prévost  est  rentrez  aud. 
chappitre  lequel  a  la  supplication  et  roqueste  desd.  ses 
chanoines  cy  devant  nommez  a  pardonnez  ausd.  d'Aute- 
tour  et  Fourel  lad.  oflfence  comme  au  semblable  a  fait 
led  Feure  a  Messire  Anathoille  Fourel. 

Signé  au  registre  :  Martinon. 

Le  Frère  Val frid  prend  la  parole  pour  entretenir  la 
réunion  de  l'occupation  française  de  1690-1696,  il  pré- 
sente les  documents  suivants  : 

De  part  le  Roy, 
Nicolas-François   de  Bonual,    Conseillier    du    Roy, 
Commss^e  ovày^  des  guerres   et  ordonnateur  dans  les 
Estats  deSauoye. 


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—  xxn  — 

La  médiocrité  de  la  récolte  des  vios  de  cette  année 
nous  en  faisant  appréhender  une  entière  disette  dans 
les  prouinces  de  Cbablaix  et  bailliages  de  Ternier  et 
Gaillard,  si  nous  ne  prenons  les  précautions  nécessaires 
pour  y  conserver  le  peu  qu'il  y  en  a  en  deffendant  le 
transport  des  vins  tant  blancs  que  clairets  hors  desd«» 
prouinces  et  balliages  dans  les  pays  estrangers. 

Il  est  fait  des  expresses  inhibitions  et  deffenses  à 
touttes  sortes  de  personnes  de  quelle  condition  et 
qualité  qu'elles  soient  de  faire  aucun  commerce  ny 
transport  hors  de  la  prouince  de  Cbablaix  et  des  ballia- 
ges de  Ternier  et  Gaillard  dans  les  pays  étrangers  d'au- 
cuns vins  blancs,  clairets,  nouveaux  et  vieux,  à  peine  de 
confiscation  desd»  vins,  charriots  et  bestes  de  charges 
et  de  cent  liures  d'amende  contre  contrevenant,  ordon- 
nons au  s*"  Rebut  subdésigné  à  l'Intendance  de  Cbablaix 
et  au  s*"  de  Fréjutte  capitaine  de  la  conservation  des 
grains  en  Sauoye  détenir  chacun  à  leurs  ég-ard  la  main 
à  l'exécution  de  la  présente  quy  sera  lue,  publiée  et  affi- 
chée partout  où  besoing  sera  à  fin  que  personne  n'en 
prétende  cause  d'ignorance. 

Fait  à  Chambéry,  ce  31  octobre  1692. 

Du  6  lObre  1692. 

Dans  ce  Conseil  a  esté  proposé  en  l'absence  do  Mes- 
sieurs les  Scindicqs  par  les»*  Collar  que  le  s*"  Commandant 
nouvellement  venu  aux  AUinges  s'est  addressé  à  luy  et 
luy  a  fait  demander  des  ustencilles  qu'il  prétend  luy 
estre  deubts  par  les  villes  de  Thonon  et  d'Evian  et  quy 
consistent  en  estain,  lict  garny,  nappes,  serviettes  pour 
luy  et  cinq  autres  officiers. 


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—   XXJII   — 

Sur  quoy  a  esté  délibéré  pour  ne  don oer  aucun  subject 
de  plainte  aud*  s»*  Commandant  et  pour  tascher  d'attirer 
sa  bienueuilliance  pour  la  ville  que  Ton  concourrat  aux 
ustencilles  quy  sont  nécessaires  pour  sa  personne  tant 
seulement  et  qu'à  cet  effet  quant  à  Testain  que  Ton  se 
servira  de  celluy  quy  doit  estre  entre  les  mains  de 
M.  Claude  Louis  Delasaulge  et  quant  aux  patticyses  et 
lictTon  se  seruirades  trois  que  la  ville  a  aux  Allinges  et 
des  linceuls  quy  sont  destinés  à  ce  subject  et  pour  lesd«» 
nappes  et  serviettes  que  Ton  achettera  pour  deux  nappes 
et  six  serviettes  le  prix  lesquelles  sera  payé  par  les 
fermiers  de  la  ville  et  alloué  dans  leurs  comptes,  et 
pour  l'acquit  d'icelles  est  commis  ledit  s'  Collar,  et  que 
le  tout  sera  consigné  entre  les  mains  dudit  Delasaulge, 
concierge  aux  Allinges. 

M.  l'abbé  Piccard  continuant  pour  ainsi  dire  la  com- 
munication précédente,  donne  de  nombreux  détails  iné- 
dits, d'après  un  manuscrit  de  1  époque,  sur  la  bataille 
de  Marsaglia,  où  Catinat  battit  les  troupes  impériales 
en  1693. 

Enfin  M.  J.  Guyon  parle  longuement  d'une  lampe  an- 
tique de  bronze  trouvée  par  M.  Moynat,  dans  une  vigne 
au  Chàtelard  (Thonon). 


Séance  du  10  Mai  1897 

(présidence  de  m.  duplan) 


M.  Duplan,  Président,  décrit  quelques  pièces  romaines 
trouvées  dans  le  payset  particulièrement  une  de  l'Impé- 
ratrice Théodora.  Il  présente  ensuite  un  contrat  de  ma- 


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—  XXIV  — 

riage,  du  30  juillet  1723,  passé  entre  Amé  Decompoix, 
seigneur  de  Ravorée,  et  d«"«  Marie  Decompoix,  fille  de 
Messire  Charles-Emmanuel  Decompoix,  baron  de  Fé- 
ternes. 

Le  Frère  Valfrîd  donne  quelques  détails  inédits 
concernant  l'occupation  française  de  1691,  sur  laquelle  il 
coordonne  de  nouveaux  documents. 

M.  Tabbé  Piccard  fait  passer  deux  magnifiques  docu- 
ments, émanés  de  la  curie  romaine,  qu'il  présente  au 
nom  du  R^  P.  Elzéar,  gardien  du  couvent  des  capucins 
deConcise-Thonon.  Ils  remontent  l'un  au  Pape  Pie  VI, 
l'autre  à  Clément  XIV. 

Le  même  lit  une  très  intéressante  notice  sur  les  cor- 
porations ouvrières  de  Thonon  au  moyen-àge  et  spé- 
cialement sur  celles  des  S*»  Eloi,  Crépin  et  Crépinien. 

Enfin,  M.  l'avocat  Dubouloz  Ferdinand  donne  des 
extraits  d'une  savante  biographie  du  général  Dupas, 
enrichie  par  M.  le  Sénateur  Folliet  de  nombreuses  notes 
et  de  précieux  documents  tirés  des  archives  du  ministère 
de  la  guerre  à  Paris. 

Ilest  décidé  que  ces  deux  ouvrages  seront  imprimés  (  1  ) 
au  tome  XI  des  Mémoires  et  Documents  de  l'Académie 
Chablaisienne, 

Fînfin  M.  Duplan  donne  connaissance  d'une  ordonnance 
inédite  de  S*  François  de  Sales  relative  au  droit  de 
patronage  de  la  cure  de  Feigôres.  La  voici  dans  son 
entier  : 

(1)  Voir  Mémoires  I  et  II. 


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—   XXV   — 

Droit  de  patronage 

concernant   la   nomination    des    Curés    de    Feigéres 

appartenant  aux  Seigneurs  du  Ghâtelard 

Fraiiciscus  de  Sales  dei  et  Aplicae  sedis  gratia  Epus  et 
Prioceps  GebeûDen  notum  facimus  expositum  nobis 
fuisse  pro  parte  R**  D.  Petri  francise!  de  RossillioD  dicti 
Chastillion  Prioris  commendatarii  B.  Mariai  du  Faulcon 
et  Barcellonaette  et  ecclae  nostraj  Caoonici,  nec  non 
lobannis  Anthonnii  eius  fratris  Dni  Dubois  et  de  Lana 
(ou  Lava)  Prefecti  militiœ  Balivatuura  Ternier  et  Gal- 
liard  :  et  Jacobl  Octavii  de  Rossillion  Dni  du  Chastelard 
a  pedibus  camerœ  serenissimi  Ducis  et  unius  turraœ 
equitum  prefecti.  Manifestum  esse  Ducatum  de  Chablais 
et  Balivatas  Ternier  et  Gaillard  et  per  iniustam  inva- 
sionem  Hœreticorum  Bernensium  ab  octoginta  annis 
populos  ibidem  a  fide  dofecisse  et  ecclesias  suis  bonis 
spoliatas  :  donec  tandem  miserationeDivina  a  quindecim 
circiter  annis  in  gremium  Ecclesiae  reducti  eis  per  fol. 
record.  111"^  et  R"^  Claudium  de  Grenier  Epum  et  prin- 
cipem  Gebennen  predecessorem  nostrum  de  Rectoribus 
provisum  fuerit.  Sed  cum  Ecclae  S*»  Lazari  de  fîgiere 
Ternaci  nulli  cssent  rcdditus  et  ideo  ei  Rector  assignari 
non  posset.  Ill«  et  potens  D"  Jacobus  de  Rossillion  dictus 
de  Chastillion  Dns  du  Chastelard  zelo  pioet  misericordia 
motus  Ecclesiae  dict^  de  fegiere  certes  redditus  quosiure 
emptitio  iuste  asseruàbat  in  manibus  R™^  Dni  de  Granyer 
sponte  pure  et  totaliter  donavit  in  subsidium  Curati  de 
flgiere  quam  vigore  humodi  dotationisnominaret  et  nomi- 
nationem  sibi  et  suis  in  posterum  quoties  vacare  per 
obitum  contingeretacquireret.  Haec  igitur  quse  sequuntur 


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—   XXVI   — 

donavit.  Primo  Decimam  de  Grosse  sitarn  in  parrochia 
de  figiero  inter  décimas  R.  Carthusiauorum  de  Pomier 
et  D.  Carati  S^'  Juliani  valoris  comunis  et  anoui  quator- 
decim  cupparum  frumenti.  Secundo  Primitias  quse  solvi 
solitœ  eraat  quotannis  valoris  sex  cupparum  frumenti. 
Tertio  donavit  certam  terram  in  vineis  Dutins  continen- 
tem  quatuor  fosseratas  sive  seminaturam  duarum  cuppa- 
rum frumenti  cum  domo  iuxta  vineas  Dni  du  Chastelard 
ex  oriente  et  viam  publicam  ex  oriente  et  cymeterium  ex 
vento.  Quarto  quandam  terram  seminatura  sex  cuppa- 
rum frumeti  iuxta  publicum  iter  ex  oriente  et  aquilone 
et  terram  des  Vuagnat  ex  occidente.  Quinto  •  certam 
terram  ad  seminandum  dimidium  quartum  cannabis 
(cannavis)  et  pratum  coutinentem  dimidiam  Seytora- 
tam  propre  Cerniterium  ex  oriente  et  publicum  iter  ex 
occidente  et  vento.  Sexto  donavit  pratum  dictum  Pontii 
continentem  mediam  seyptoratara  propre  fratres  Coex 
ex  oriente  et  propre  Claudium  Rambosson  ex  occidente 
et  publicam  viam  ex  aquilone.  Septimo  certam  terram 
versus  a  Cezire  seminatura  unius  quarti  frumenti  propre 
terram  Aymonis  Olivier  ex  Aquilone.  Octave  certam 
terram  dictam  Duforet  seminaturœ  unius  quarti  frumenti 
prope  terram  Pétri  Portier  ex  oriente  et  pratum  Abra- 
ham Bruet  ex  occidente.  Certiores  igitur  facti  prœmissa 
omnae  veritati  consoni  et  D"*  Guillielmu.  Codurier  hoc 
nostro  diplomate  approbamus  et  confirmamus.  Jta  quod 
ubivacare  contigerit  (partis  ?)  (parlis)  Ecclse  de  figiere 
jus  nominandi  curatu.  facto  prœvio  examine  iuxta 
§0  Trid"»  décréta  sibi  et  suis  in  posterum  acquisierit 
Et  D»  Rector  nominatus  licite  et  pacifice  sine  uUa  ter- 
giversatione  dicta  bonna  sibi  donata  cum  eorum  fructibus 


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—   XXVII   — 

perpetuis  temporibus  sibi  et  successoribus  propria  et  sua 
fecerit.  Jn  quorum  fidem  Hmdi  aostrse  approbationis 
testimonium  per  Grapharium  nostrum  fieri  sigoari  et 
Sygillo  inuQiri  et  dicto  D^  du  Chastelard  ac  etiain  D. 
Curato  expediri  Et  iu  scribauia  nostra  registrari  insinnus  ? 
Datum  Annecii  ia  Palatio  nostro  duodecima  januarii 
millo  sexcentesimo  decimo  octavo. 
Frans  eps  gebennensis. 

S.  DUMONT. 

François  de  Sales  par  la  grâce  de  Dieu  et  du  S*  Siège 
Apostolique  Evoque  et  Prince  de  Genève  nous  faisons 
connaître  que   nous  ayant  été  exposé  de  la  part  de 
K^  D.  Pierre   François  de  Rossillion  dict  Chastillion 
prieur  commendataire  de  la  B.  Marie  du  F.  faulcon  et 
Barsellonnette  et  chanoine  de  notre  église,  et  aussi  Jean 
Antoine  son  frère  Seig»*  Dubois  et  de  Lana  (ou   Lava) 
commandant  de  la  milice  des  Bailliages  de  Ternier  et 
Gaillard  :  et  Jacob  Octave  de  Rossillion  Seig'  du  Chas- 
telard commandant  des  troupes  d'infanterie  et  de  cava- 
lerie de  la  Chambre  du  Sérénissisme  Duc.  Comme  il  est 
très  manifeste  que  le  Duché  de  Chablais  et  les  baillia- 
ges de  Ternier  et   Galliard    par   une  injuste  invasion 
des  hérétiques  Bernois,  depuis  quatre- vingt  ans  leurs 
habitants  ont  abandonné  leur  religion  et  que  les  églises 
ont  été  dépouillées  de  leurs  biens  :  jusqu'à   ce   que  la 
miséricorde  divine  depuis  quinze  ans  environ  ait  ramené 
ces  populations  dans  le  giron  de  Teglise  par  l'heureux 
rétablissement  des  Recteurs  de  parroisse  fait  par  rJH*»® 
et  R°^e  Claude  de  Grenier  évêque  et  prince   de   Genève 
notre  prédécesseur.  Mais  comme  il  n'y  a  aucune  rente 
à  assigner  au  Recteur  de  l'église   de    S*-Lazarre  de 


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—   XXVIII    

Fegére  à  Ternier  rJH®  et  puissant  Seig»*  Jacob  de  Ros- 
sillion  dit  do  Chastilliou  Seig»"  du  Chastellard,  mu  par 
son  zèle  et  sa  miséricorde  remettait  de  son  plein  gré 
certaines  rentes  acquises  par  lui  entre  les  mains  du 
I|mme  goigr  de  Grauier  et  les  donnait  purement  et  en  to- 
talité en  subside  à  la  cure  de  Fegére  et  qu'ainsi  il  aurait 
pour  lui  et  les  siens  le  droit  de  nomination  à  cette  cure 
toutes  les  fois  qu'elle  viendrait  à  vacquer.  En  con- 
séquence il  a  donné  Primo  la  dixième  partie  de 
Grosse  située  dans  la  parroisse  de  Feigero  (Fegiere) 
entre  les  Dimes  des  R*^«  Chartreuse  de  Pomier  et  du 
Seig»"  curé  de  S^-Julien  de  la  valeur  commune  annuelle 
do  quatorze  couppes  de  froment. 

Secundo,  les  prémices  que  Ton  a  coutume  de  payer 
annuellement  d'une  valeur  de  six  couppes  de  froment. 

Tertio  une  terre  en  vigne  à  Dutins  contenant  qua- 
torze fossérés  soit  de  la  semature  de  deux  couppes  de 
froment  avec  une  maison  (»ntre  les  vignes  du  Seig*"  du 
Ghastelard  à  l'orient  et  le  chemin  public  du  couchant  et 
le  cimelière  du  côté  du  vent.  Quarto  une  terre  arable 
de  la  semature  de  six  couppes  de  froment  entre  le  che- 
min public  de  l'orient  et  de  l'aquilon  (de  bise)  et  la  terre 
des  Vuagnart  à  l'occident.  Quinte  une  certaine  pièce  de 
terre  la  moitié  à  semer,  l'autre  moitié  contenant  un 
quart  planté  en  chanvre  et  l'autre  en  pré  de  la  contenance 
de  la  moitié  d'une  sey  torée  près  du  cimetière  à  l'orient,  le 
chemin  public  à  l'occident  et  du  côté  du  vent.  Sexto  un 
pré  dit  Pontée  contenant  la  moitié  d'une  seytorée  près 
des  frères  Coex  à  l'orient  et  proche  de  Claude  Rambos- 
son  à  l'occident  et  le  chemin  public  du  côté  de  l'aquilon 
(de  bise).  Septimo  une  certaine  terre  vers  le  Cezire  de 


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—   XXIX  — 

la  semature  d'un  quart  de  froment  près  de  la  terre 
d'Aymon  Olivier  du  côté  d'Aquilon.  Octave  une  certaine 
terre  dite  Duforet  de  la  semature  d'un  quart  de  froment 
près  de  la  terre  de  Pierre  Portier  à  Torient  et  le  pré 
d'Abraham  Bruet  à  l'occident.  Tout  ce  qui  précède  est 
certifié  conforme  à  la  vérité  et  le  Seig»"  Guillaume  Codu- 
rier  recteur  de  Fegiere  reconnaît  jouir  pacifiquement  de 
tous  ces  biens,  par  la  concession  obtenue  du  Seigf  du 
Chastellard  et  des  siens  et  faite  en  faveur  du  Seig** 
Codurier  ce  que  nous  approuvons  et  confirmons  par 
notre  diplôme.  Ainsi  chaque  fois  que  la  cure  de  l'église 
de  Fegière  viendra  a  vacquer,  après  notre  examen  préa- 
lable, ils  seront  en  droit  eux  et  leurs  successeurs  de 
nommer  le  curé.  Et  le  Recteur  ainsi  nommé,  il  jouira 
pacifiquement  et  sans  tergiversation  aucune  dans  l'ave- 
nir et  a  perpétuité,  pour  eux  et  leurs  successeurs  des 
fruits  des  biens  qui  leurs  ont  été  donnés.  En  foi  dequoy 
et  en  témoignage  de  notre  approbation  nous  avons  fait 
expédier  le  présont  par  notre  secrétaire  (ou  chancelier?) 
signé  par  nous  et  revêtu  de  notre  sceau  et  *  que  nous 
avons  fait  expédier  pour  le  Seig^  du  Chastelard  et  aussi 
pour  le  Seig^'curé  après  l'avoir  fait  enregistrer.  Donné 
à  Annecy  en  notre  Palais,  le  douze  janvier  mil  six 
cents  dix  huit. 
Fran».  eps  Gebennensis. 

DUMONT. 

Après  présentations  régulières,  sont  reçus  membres 
effectifs  de  l'Académie  Chablaisienne  : 
MM.  Chabert  Constantin,  notai re à Thonon-les-Bains. 
DuBouLoz  Ferdinand,  avocat  à  Thonon-les-Bains. 


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—   XXX  — 

Séance  du  14  Juin  1897 

(présidence  de  m.  duplan) 


M.  E.  Vuarnet  parle  d'une  découverte  archéologique 
faite  à  Chens,  canton  de  Douvaine,  dans  le  courant  du 
mois  do  mai  1897.  Des  ouvriers  creusant  les  fondations 
d'un  hôtel  que  fait  construire  M.  Nazard,  ont  mis  à  jour 
une  dizaine  de  tombeaux,  à  un  mètre  vingt  de  profon- 
deur; les  ossements  étaient  intacts,  la  tombe  d'un  enfant 
était  parfaitement  reconnaissable  à  ses  petites  dimen- 
sions. Mais  malheureusement  aucun  objet  permettant 
de  préciser  l'époque  à  laquelle  remonte  ce  cimetière  n'y 
a  été  trouvé. 

Ces  tombes  étaient  formées  de  pierres  éclatées  appe- 
lées vulgairement  dans  le  pays  pierres  plates  et  pro- 
venant des  champs.  Elles  étaient  plus  larges  aux  épaules 
et  plus  étroites  aux  pieds  et  moulaient  à  peu  près  le 
corps,  à  la  manière  de  nos  cercueils. 

Ce  lieu  s'appelle  LaGrage,  ce  qui  en  patois  veut  dire 
le  gravier  ;  on  y  aurait  déjà  trouvé  autrefois  des  tombes, 
mais  à  une  moindre  profondeur,  tout  à  côté  dans  une 
grande  excavation  où  l'on  extrayait  du  sable,  des  tra- 
vailleurs avaient  également  mis  au  jour  des  tombeaux, 
l'une  de  ces  tombes  renfermait  une  épée  qui  fait  partie 
de  hi  collection  d'objets  préhistoriques  que  M.  le  Comte 
Jocelyn  de  Costa  a  formée  en  son  château  de  Beauregard. 

Revon  n'en  a  point  fait  mention  dans  la  «  H^^-Savoie 
avant  les  Romains  ».  Mais  d'après  son  opinion  il  est  à 
présumer  que  les  populations  lacustres  avaient  leurs 
cimetières  généralement  en  face  de  leurs  villages.  Or  le 


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—   XXXI   — 

lieu  dit  :  La  Grage,  placé  à  100  mètres  au-dessus  du 
château  de  Beauregard  domine  également  la  station 
lacustre  du  même  nom.  Ce  pourrait  donc  être  un  cime- 
tière allobroge,  d'autant  plus  qu'avec  leurs  instruments 
primitifs,  ces  peuplades  recherchaient  de  préférence  les 
terrains  sabloneux,  plus  faciles  à  fouiller. 

J'ai  également  remarqué  qu'entre  ces  tombes  et  la 
surface  du  sol,  le  terrain  était  criblé  d'ossements  hu- 
mains, particulièrement  sur  le  devant  de  la  maison, 
soit  la  partie  qui  regarde  le  lac  et  où  des  tombes  se 
continuent. 

La  commune  de  Chens-Cusy  est  d'ailleurs  la  plus  riche 
de  toute  la  rive  savoisienne  en  stations  lacustres  et  en 
cimetières  antiques. 

M.  Duplan  communique  un  acte  d'échange  dont  voici 
la  teneur  : 

Acte  d'échange  du  13  juin  1670 
Entre  les  Nobles  Syndics  et  Conseil  de  la  Ville  d'Evian 

et 
III^^  et  R^  Seig^  Prieur  de  la  prévoté  de  Montjoux 

Comme  ainsy  soit  qu'aux  minutes  et  protocoles  de 
M«  Georgios  Duret  vivant  not»*»  ducal  de  la  ville  d'Evian, 
se  trouve  un  contrat  d'eschange  passé  entre  les  nobles 
Scindiqzet  Conseil  dudit  Evian  d'une  part  et  très  JUustre 
Révérend  Seigneur  Anthoine  Novat  prieur  de  la  véné- 
rable prevotée  de  Montioux  et  d'autre  part,  non  encore 
levé  vicié,  ny  cancellé  dont  la  teneur  s'en  suit. 

L'an  mil  six  cent  seplante  six  et  le  troisiesme  juin 
par  devant  moy  not»"^  ducal  royal  soubsigné  et  présents 
les  tesmoins  bas  nommes  se  sont  personnellement  esta- 


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—   XXXII   — 

blys  et  consttittués  les  Nobles  Scindiqz  et  Conseil  de  la 
Ville  d'Evian  scavoir  Noble  Claude  Mathieu  de  Varax 
Seigneur  de  Neuvesselle,  Mayroux,  Loisin  et  premier 
Scindicqz,  les  M*"^  pierre  Louys  Délaie  et  Estienno  Guilliot 
autres  Scindicqz  assistés  de  Noble  Jacques  de  Loys  Sei- 
gneur de  Bonnevaux,  Le  Crest,  Merlinge,  Belleria  et  de 
Noble  Jean  de  Chastillion  Seigneur  dudit  lieu,  Consei- 
gnour  d*hons,  Allemantet  de  Thollon  et  de  Noble  Jacques 
Ducrest  Seigneur  de  S*  Disdille  et  Vongy,  de  Noble 
Dom  Louys  Dunant  Seigneur  de  Grilly,  de  Noble  Jean 
François  Dunant  Seigneur  de  la  place  et  Conseigneur 
d'hons,  Allemant  et  Thollon  et  de  Noble  iacques  de  Blo- 
nay,  des  spectables  jean  Chessel  et  iosué  Bordet  doc- 
teurs en  droits,  advocats  au  Souverain  Sénat  de  Savoye, 
des  M"  André  Duret,  Jean  Piccot,  Jean  Brun  et  mam- 
mert  Greptbon,  tous  conseillers,  ensuite  des  délibérations 
du  Conseil  tenus  cy  devant  d'une  part,  de  très  JUustre 
Révérend  Seigneur  Anthoine  Novat  prevost  de  la  véné- 
rable Prevoste  de  Montioux  Seigneur  du  mandement  de 
Meilleré  aumônier  et  conseiller  de  S.  A.  R.,  assisté  de 
Révérend  pan taleon  Tournier  procureur  gênerai  et  agent 
de  la  iuridiction  et  mandement  dudit  Meillerée,  du  Ré- 
vérend sieur  jean  pierre  Persot  docteur  en  theollogie, 
tous  deux  chanoines  réguliers  de  la  dite  prevoste  et  du 
sieur  iean  Gaspard  Bellassier  cittoyen  et  des  iuges 
d^Aoust  procureur  et  secrétaire  de  la  dite  prevoste  de 
St  Bernard  d'autre  part  ;  Lesquelles  parties  scachants 
de  leurs  grés  pour  Elles  et  Les  Leurs  successeurs  es 
dites  charges,  ont  faict  et  font  les  eschanges  et  permu- 
tations des  choses  suivantes,  Scavoir  les  dits  Nobles 
Scindicqz  et  Conseil  devant   nommes  ont   donnés  en 


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—   XXXIII   — 

eschanges  et  permutation  au  dit  très  illustre  et  très 
lleverend  Seigneur  Novat  présent  et  acceptant  pour  luy 
et  ses  successeurs  en  la  dite  prevosté,  Scavoir  tous 
droits  tiltres,  noms,  raisons  et  actions,  parts  et  portions 
que  les  dits  Nobles  Scindicqz  et  bourgeois  de  la  ditte 
ville  ont  et  peuvent  avoir  en  et  dessus  les  bois  de  Brest, 
soit  fouillasses  existant  riere  ledit  Meillerée  des  le  Viant 
du  Locon  du  costô  de  Sainct  Gingoulph  iusques  au  nant 
de  la  Reyne  du  costô  de  moilleré  et  par  le  dessus  du 
costé  de  Montagne  dés  le  rach  de  vineiuse  iusques  au 
Lac  avec  ses  autres  meilleurs  confins  appartenances  et 
despandances  quelconques  Et  en  contre  change  et  per- 
mutation Le  dit  Seigneur  Novat  en  la  quallité  qu'il 
agist  a  donné  et  donne  aux  dits  Nobles  Scindicqz  et 
Conseil  présents  et  acceptants  pour  Eux  et  Leurs  Suc- 
cesseurs, tous  et  un  chacun  les  droits  de  dismerie, 
consistant  en  bleds,  vin,  chanvre  etc.  En  quelles  espè- 
ces qu'ils  consistent,  au  dit  sieur  Prévost  deubts  et  a 
la  dite  prevosté,  confinés  des  le  nant  d'oncion  tirant  en 
ault  au  commun  de  darbôn  frontant  au  diesme  d'Abon- 
dance et  des  le  dit  nant  d'oncion  iusques  a  la  Lechere  et 
a  la  vigno  que  fust  de  feu  egrege  Bordet  possédée  par 
spectable  iosué  Bordet  son  petit  fils  tirant  en  ault  par 
un  petit  ruisseau  iusques  aux  communs  de  darbon  et  le 
tout  sans  ampliation  mais  de  la  manière  tant  seulement 
que  L'ont  tenus  Les  hoirs  mammer  Quittent  et  francois 
Baisinge  comme  assensataires  modernes  des  diesmes 
dudit  Seigneur  provost,  Entrevenant  au  présent  acte 
touttes  devestittures  et  investtitures  des  choses  sus 
eschangéos,  constitution  de  possessoires  de  droit  re- 
quises et  neccessaires  Et  Le  tout  faict  soubs  et  avec 


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^-  XXXIV   — 

touttes  deûes  promissions  Serment  preste  d'avoir  a  gré 
le  prnt  acte  Scavoir  les  dits  nobles  Scindicqz  et  Conseil 
sur  les  Sainctes  Escriptures  de  Dieu  touchées  entre  les 
mains  de  ce  dit  notaire  et  le  dit  Révérend  Sieur  Prévost 
manu  ad  pectus  eoclosiasticorum  more  et  a  l'obligation 
de  tous  et  un  chacun  leurs  biens  Scavoir  Le  dit  Révérend 
Sieur  Prévost  de  ceux  de  sa  prevosté  et  Les  dits  Nobles 
Scindicqz  do  ceux  do  la  dite  ville  qu'ils  se  constituent 
tenir,  spécialement,  La  spécialité  ne  dérogeant  a  la  gé- 
néralité, ny  au  contraire,  Les  choses  sus  Eschangées, 
mesme  de  se  maintenir  les  dites  choses  sus  Echangées, 
a  l'obligation  que  dessus  promettant  en  outre  les  dites 
parties  par  leurs  mesmes  serments  et  obligation  que 
dessus  de  faire  advoûer  et  rattiffler  le  présent  acte  con- 
tenu au  présent  contract,  Scavoir  la  dite  ville  par  le 
Conseil  général  et  le  dit  sieur  Prévost  par  son  chapitre 
dans  deux  mois  proche  venants  et  soubs  cette  réserve 
qu'au  cas  que  le  dit  contract  n'eut  effect  ne  puisse  nuire 
ny  preiudicier  aux  droits  respectifs  des  dites  parties 
Renonceant  a  tous  droits  contraires  et  clauses  requises, 
nottamentau  droit  disant  La  Générale  renonciation  non 
valloir  si  la  spéciale  ne  précède. 

Faict  et  prononcé  audit  Evian  dans  la  Chambre  du 
Conseil,  présents  les  honestes  Claudy  fils  de  feu  Estienne 
Gallay  de  la  Forclaz  et  francois  fils  de  feu  iacques  Blanc 
de  Proberc  parroisso  de  Sainct  Paul  et  francois  Gerbh 
résidant  au  cité  d'aoust. 

(Acte  signé  par  tous  les  comparants). 

(Copie  coUationnêey  par  3/*  Genève^  notaire  à 
Eviatty  le  18  décembre  1692). 

M.  Duplan  donne  encore  de  nouveaux  détails  sur  un 


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—   XXXT   — 

chapitre  général  tenu  en  1550,  à  l'église  collégiale  de 
S*  Anathoille  de  Salins  dont  Jean  do  Blonay  était  pré- 
vôt. Il  déclare  devoir  communication  de  ce  document  à 
M.  Clerc,  notaire  à  Evian-les-Bains. 

Le  même  présente,  au  nom  de  M.  L.  Jacquot,  de  nou- 
velles notes  sur  les  tombes  de  la  région  de  Sétif,  notes 
que  rassemblée  apprécie  à  leur  juste  valeur. 

M.  L.-E.  Piccard  donne  connaissance  d'une  lettre,  à 
lui  adressée  par  le  Grand  Vicaire  Fleury,  Tauteur  de 
V Histoire  de  V Eglise  de  Genève,  en  3  volumes.  Il  y  expli- 
que comment  il  a  été  amené  à  écrire  divers  ouvrages  re- 
latifs à  Genève  et  à  S*  François  de  Sales,  et  lit  une 
intéressante  note  sur  les  archives  de  Genève  que  nous 
croyons  devoir  reproduire. 

Les  Archives  de  Genève,  dit-il,  sont  très  riches  en 
documents.  Pour  les  consulter  avec  fruit,  il  faut  les 
connaître. 

Les  Archives  sont  à  la  Maison  de  Ville.  Pour  y  arri- 
ver, on  monte  la  première  rampe,  qu'on  trouve  en  face 
de  soi,  après  avoir  franchi  la  porte  de  l'Hôtel  do  Ville. 
La  première  salle  qu'on  rencontre  est  celle  des  Archives. 
En  y  entrant,  on  ne  se  douterait  pas  qu'elle  contienne 
autant  de  documents.  On  aperçoit  qu'une  suite  d'armoi- 
res fermées.  Elles  contiennent  les  portefeuilles  histori- 
ques où  sont  classés  par  date  toutes  les  pièces  historiques, 
qu'il  faut  demander  à  l'archiviste  et  qu'il  met  de  suite  à 
la  disposition  du  travailleur. 

Dans  l'angle  à  droite,  au  couchant,  est  un  cabinet  vi- 
tré, c'est  là  qu'il  faut  prendre  place  autour  d'un  bureau 
où  il  y  a  de  l'encre  et  des  plumes. 

Pour  ne  pas  perdre  son  temps  en  de  vaines  recherches, 


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—   XXXVI   — 

il  faut  user  de  Tinventaire  et  du  répertoire,  qui  est  à  la 
disposition  de  tous  ceux  qui  eu  demandent  la  communi- 
cation. 

L'inventaire  est  un  registre  où  se  trouve  le  résumé  de 
toutes  les  pièces  numérotées  et  classées  par  date.  Il  a 
été  dressé  par  M.  Sordet,  un  des  archivistes  les  plus 
consciencieux  et  des  plus  habiles  dans  la  paléographie. 

C'est  par  ses  mains  qu'ont  passé  tous  les  parchemins 
qu'il  a  analysés  avec  patience. 

Le  répertoire  est  un  autre  registre  dressé  par  ordre 
alphabétique.  C'est  la  lettre  initiale  du  nom  qui  vous 
occupe  qui  doit  vous  guider.  Vous  trouvez  de  suite  le 
numéro  des  portefeuilles  qui  contient  la  pièce,  et  vous 
l'indiquez  à  l'archiviste  qui  vous  sert.  Ces  portefeuilles 
contiennent  plus  de  30,000  pièces,  patentes,  lettres, 
chartes  ou  cahiers. 

Il  importe  de  savoir  qu'outre  cette  pièce  des  Archives, 
il  en  est  une  autre  souterraine,  nommée  la  Grotte.  On  y 
descend  par  un  escalier  secret.  C'était  avant  1535  une 
chapelle  où  les  magistrats  avant  leurs  délibérations  al- 
laient entendre  la  messe.  Aujourd'hui  la  grotte  sert  de 
dépôt  aux  registres  du  Conseil  depuis  les  temps  les  plus 
anciens  jusqu'à  nos  jours.  Comme  ils  sont  classés  par 
année,  il  suffit  d'indiquer  celle  où  vous  voulez  faire  des 
recherches. 

C'est  dans  cette  même  pièce  que  sont  les  registres  du 
Chapitre,  indiquant  le  nom  des  chanoines  présents,  et  la 
matière  des  délibérations. 

Il  y  a  aussi  dans  la  grotte  quatre  volumes  de  Visites 
pastorales,  faites  l'une  en  1411,  par  Claude  Claudiopolis 
commandée  par  Jean  de  Bertrand;  celle  de  1471  par 


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•  —    XXXVII   — 

Mamert  Fichet  sous  Jean  de  Savoie  ;  la  troisième  faite 
en  1481  par  Barthélemi,  enfin  celle  de  1515  sous  Jean 
de  Savoie  par  Farcin,  évoque  do  Barato. 

Ces  visites  sont  curieuses  par  les  détails  qu'elles  con- 
tiennent sur  rétat  des  anciennes  paroisses. 

Il  y  a  aussi  dans  une  armoire  spéciale  divers  extraits 
des  registres  par  Gauthier,  Flournois  et  d'autres.  On 
trouve  aussi  les  Mélanges  imprimés  de  Grenus,  les  gé- 
néalogies de  Galiffe,  etc.  les  documents  de  la  Société 
(ï Archéologie  et  d'Histoire  de  Genève  :  On  a  à  sa  dispo- 
sition le  dictionnaire  latin  de  Ducange. 

Il  faut  savoir  que  le  bureau  des  Archives  ne  s'ouvre 
pas  le  jeudi  ni  le  dimanche.  Les  autres  jours,  il  s'ouvre 
de  9  h.  à  midi  et  de  1  h.  à  3  h.  l'après-midi. 

Voici  les  noms  des  Archivistes  avec  lesquels  j'ai  eu 
des  rapports.  M.  Sordet,  homme  très  capable  et  toujours 
disposé  à  aider  dans  la  lecture  des  passages  difficiles. 
C'est  à  lui  que  furent  confiés  les  sacs,  contenant  les  an- 
ciens titres. 

M.  Th.  Meyer,  travailleur  intrépide  au  profit  de  la 
Société  d'Histoire,  M.  Henry  Fazy,  toujours  très  disposé 
à  rendre  service.  Après  la  chute  de  James  Fazy,  il  fut 
porté  au  Conseil  d'Etat.  M.  Grivel  le  remplaça.  J'ai  tou- 
jours été  avec  ce  Monsieur  dans  de  très  bons  termes. 
Je  l'ai  toujours  trouvé  très  complaisant.  Le  cinquième 
personnage  qui  a  été  comme  chef  aux  Archives  est  M .  Ph . 
Dufour,  dont  les  connaissances  paléographiques  ont  été 
appréciées.  Il  a  été  nommé,  malgré  toute  l'hostilité  de 
Carteret,  conservateur  de  la  bibliothèque  publique, 
place  qu'il  occupe  honorablement. 

Ont  été  reçus  membres  effectifs  de  l'Académie  Cha- 


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—   XXXVIII   — 

blaisienne:   MM.  Louis  Bouquin  et  Frauçois  Bernaz, 
avoué.  

Séance  du  12  Juillet  1897 

(présidence  de  m.  duplan) 

M.  L.-E.  Piccard  communique  à  rAcadémie  uq  docu- 
ment inédit.  C'est  la  présentation  faite,  le  22  avril  1349, 
par  Isabelle  de  Chàllon,  dame  de  Vaud,  à  Tôveque  de 
Lausanne,  de  R^  Hugues  Mistral  des  Clets,  à  la  cure 
de  Vaurioz  du  susdit  diocèse,  et  du  patronage  de  la  dite 
dame. 

En  voici  le  texte  : 

Litlera  in  qua  Domina  Ysabella  de  Stabillone 

Domina  Vaudj  presentanit  dno  Episcopo  Lausanensl 

hugoninum  Mis  ira  lis 

Reuerendo  in  Chrispo  patri  ac  domino  domino  fran- 
cisée Doi  et  apostolice  sedis  gratia  lausanensi  episcopo. 
Ysabella  de  Cabilone  domina  Vuaudi  débite  recommen- 
dationis  instanciam  cum  sainte.  Cum  ecclesia  parochialis 
de  Vauriez  vestre  Lausanensis  diocesis  vacare  noscatur 
ad'presens  pro  eo  quod  dominus  Johannes  panioti  olim 
rector  supradicte  ecclesie  aliud  curatum  beneficium  in- 
secutus,  cuius  ecclesie  de  Vauriez  ad 
s  et   presentandi  noscitur  pertinere. 
j  dilectum  clericum  nostrum  hugoni- 
îletis  (1)  vobis  ad  dictam  ecclesiamde 
'esencium  presentamus  (2)  tanquam 
ela  vallée  des  Clets,  dans  la  vallée  deTliônes, 

it,  le  droit  de  patronage  consistait  à  pré- 
ecclésiastique destiné  à  desservir  une  pa- 
t  révéque  des  raisons  canoniques  pour  re- 
(Acad.  Cbablais.  t.  VII,  p.  133). 


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—   XXXIX    — 

ydoneum  et  sufficientem  vos  affcctuoso  rogantes  quate- 
nus  eundem  bénigne  admittere  dignemini  et  iustituere 
verum  rectorcm  et  deceruere  ecelesie  supradicte  jurium 
omnium  et  eiusdern.  Datum  Morgie  sub  sigillé  nostro  in 
testimoniumpremissorum  die  vicesima  secunda  nionsis 
aprilis  anno  domini  millésime  cccn^*^  quadragesimo  nono. 
(Turin.  Achives  du  Royaume  ;  Paquet  12.  N"  1). 

M.Duplan  donne  communication  de  divers  actes  re- 
mis par  M.  le  professeur  Saillet,  relatifs  aux  droits  de 
pêche  sur  le  lac,  contestés  au  marquis  de  Marclaz  par 
les  habitants  de  Thonon,  1090-1733. 

M.  Saillet  J.-C,  ancien  professeur,  est  reçu  membre 
correspondant  de  la  Société. 


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—   XL    — 
II. 

DONS  FAITS  A  L'ACADÉMIE  CHABLAISIENNE 


(  Un  Astérisque  accompagne  le  nom  du  donateur 
quand  II  est  en  même  temps  l'auteur  de  l'ouvrage  cité). 


MM. 

*  A.  DuPLAN.  Arrôt  du  Sénat  de  Savoie  et  arbitrages 
(1610-1611). 

L'Existence  de  Dieu  avec  notes,  1  vol.  1607. 

Astronomie  ancienne  de  Bailly. 

Principes  sur  le  Mouvement , 

Gravures  représentant  des  princes  de  la  maison  de  Savoie. 

*  A.  FoLLiET.  Les  Savor/ards  à  l'Armée  d'Italie.    Pont 
de  Lodi. 

L.-E.  PiccARD.  Encyclopédie  des  sciences  et  des  arts  du 
XIX*'  siècle,  72  volumes  in  8°,  de  5  à  600  pages. 

*  Les  Ducs  de  Savoie  et  la  Réforme  dans   les  Baillages 
de  Chablais,  Ternie r  et  Gaillard, 


PUBLICATIONS  PÉRIODIQUES 

TfiONON.  —  Le  Léman  Républicain,  journal  politique,  litté- 
raire, commercial  et  agricole  du  Chablais  (parais- 
sant le  dimanche). 

—  La  Démocratie  Savoisienne,  journal  politique,  litté- 
raire, commercial  et  agricole  des  deux  départements 
de  la  Savoie  (paraissant  le  dimanche). 


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—  xu  — 


IIL 

|lIembFe|  de  Tj^çadémie  Ghablai|ienne 


COMPOSITION  DU  BUREAU 


Vice- Présidents  : 


Président  :  M.  Albert  Duplan. 

\  M.  Jules  GuYON. 

I  M.  l*abbé  Piccard. 

Secrétaire  perpétuel  :  M.  Norbert  Mudry. 

Secrétaire  Adjoint  M.  Léon  Quiblier. 

Trésorier:  M.  Léon  Pinget. 

Bibliothécaire  :  Frère  Valfrid. 


Président  d'Honneur 

Exe.  le  comte  Amédée  de  Foras,  Grand  Maréchal  de 
la  Cour  de  S.  A.  R.  le  Prince  de  Bulgarie. 


Membres  d'Honneur 

MM.  BoLLATi  DE  Saint-Pierre  (le  baron  Frédéric- Emma- 
nuel), Directeur  des  Archives  Piémontaises,  à 
Turin   (Italie). 

Cartuyvvels    (Mgr),   Vice-Recteur    de  l'Université 
catholique  de  Louvain  (Belgique). 

Du  Bois-Melly  Charles,  à  Genève  (Suisse). 

DuFouR- Verne  L.,  Archiviste,  à  Genève. 

Manno  (le  baron  Antoine),  Secrétaire  de  la  Royale 
Députation  d'Histoire  nationale  à  Turin  (Italie). 

Mercier  J.,  Chanoine,  à.Annecy. 

Montet  (Albert  de),  à  Vevey  (Suisse). 


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—   XLII   — 

MuGNiER  François,  Conseillera  la  Cour  d*appel  de 
Chambéry,  Président  de  la  Société  Savoisienne 
d'histoire  et  d'archéologie. 

Poli  (le  vicomte  Oscar  de),  Président  du  Conseil 
héraldique  de  France,  Paris. 

RiDDER  (Alfred  de),  Vice-Président  de  la  Société 
littéraire  de  Louvain  (Belgique). 

RiTTER  Eugène,  Doyen  de  la  Faculté  des  Lettres 
Genève. 

Van  Muyden,  Président  de  la  Société  d'histoire  de 
la  Suisse  Romande,  Lausanne  (Suisse). 


Membres  Effectifs   Résidants 


MM.    Anthoinoz    Alexandre,    Architecte,  à    Thonon-les- 
Bains. 

Bernaz  François,  avoué  à  Thonon-les-Bains. 

Berthet  (l'abbé  François),  Professeur  au  collège  de 
Mélan. 

Blanchard  François,  Docteur-Médecin,  à  Thonon. 

Bouquin  L.,  Propriétaire  à  Thonon-les  Bains. 

ChabertC,  Notaire  à  Thonon-les-Bains. 

Charmot  Félix,  Banquier,  à  Thonon-les-Bains. 

^  Gustave,  Avocat,  à  Thonon-les-Bains. 

Beauregard  (le comte  Jocelyn),  Paris. 

Alphonse,  Docteur-Médecin,  à  Thonon. 
Alphonse,    Propriétaire   aux    Mâcherons 

3S). 

Ferdinand,  Avocat  à  Thonon-les-Bains. 

^ésar^   ancien   Receveur  des   Finances,  à 

i-les-Bains. 

Ubert,    ancien    Magistrat,   ancien    Maire 
i-les-Bains. 


los,  au  château  de  Ripailles. 

les.  Econome  des  Hospices,  à  Thonon. 


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—   XLIII   — 

GiROD,  Principal  au  Collège,  à  Thonon. 

Jarre  Julien,  ancien  Avoué,  à  Thonon  les-Bains. 

Marcoz  F.,  Inspecteur-Voyer  en  retraite  à  Thonon- 
les-Bains. 

MuDRY  Norbert,  Licencié  en  droit,  Directeur  de  la 
Société  des  Eaux  Minérales  de  Thonon-les  Bains. 

PiccARD  Louis-Etienne,  Aumônier  du  Collège,  à 
Thonon-les-Bains. 

PiNGET  Léon,  Banquier,  à  Thonon-les-Bains. 

PiRASSET,  ancien  Président  de  la  Société  Philanthro- 
pique Savoisienne  de  Paris.  Rentier  à  Thonon- 
les-Bains. 

Thorens  Philippe,ancien  Maire  deThonon-les-Bains. 

Tredecini  de  Saint-Séverin  (le  marquis),  au  château 
de  Troches,  à  Douvaine. 

VALFRiD.(le  Frère),  Directeur  du  Pensionnat  Saint- 
Joseph,  à  Thonon. 

Vernaz  André-Joseph,  Président  de  la  Société  d'Agri- 
culture de  Tarrondissement  de  Thonon-les-Bains. 

ViRY  (Baron  Amé  de),  à  Thonon-les-Bains. 

YvoiRE  (le  baron  François  d'),  ancien  Député,  au 
château  d'Yvoire. 


Membres  Effectifs  non  Résidants 

MM.   Arcollières  (Eugène  d'),  à  Chambéry. 

Arminjon     Ernest,    ancien     Magistrat,    Avocat,    à 
Chambéry. 

Balliard  César,  à  Reignier. 

BÉRARD  Léon,  Clerc  de  Notaire,  à  Reignier. 

Blanchard  Jean,  Insp'^  des  Forêts,  à  Gex  (Ain). 

BossoN  Franz,  Pharmacien,  à  SMeoire. 

Constantin  Aimé,  Secrétaire  honoraire  de  la  Société 
Florimontane,  à  Annecy. 


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—   XLIV    — 

Descostes  François,  ancien  Président  de  l'Académie 
de  Savoie,  Avocat  à  Chambéry. 

DuBOULOz  Jacques,  Procureur  de  la    République,  à 
Bonneville. 

DuNOYER  Norbert,  à  Juvigny. 

DuvAL  César,  Député,  Paris. 

Fernex  (le  vicomte  Joseph),  à  Paris. 

Fernex  de  Mongex  (le   comte    Régis),    Avocat,   à 
Chambéry. 

FiNAS-DuPLAN  François,  ancien  Magistrat,  Avocat, 
à  Chambéry. 

FoLLiET  André,  Sénateur,  Paris. 

Gavillet  Léon,  Ingénieur,  à  Fillinges. 

Glover  Melville,  Professeur  d'anglais,  à  Lyon. 

Mathieu  Jean,  Ancien  Conseiller  de  Préfecture,  à 
Massongy. 

Mathieu,  Capitaine  en  retraite,  à  Lugrin. 

RANNAUD,Archiprètre-CurédeSt-Julien-en-Genevois. 

Rigaux,   Professeur  départemental  d'agriculture,  à 
Mende  (Lozère). 

TuRRETTiNi  François,  à  Genève. 

VuARNET  Emile,  Propriétaire,  à  Messery. 

Waag  g.,  Publiciste,  au  château  de  Gaillard,  près 
Annemasse. 

Membres  Agrégés 

MM.    BLONAY\le  baron  G.  de),  au  château  de  Grandson 
(Suisse). 

Blonay  (le  baron   Stéphane  de),   au  château  de  la 
Chapelle-Marin. 

BoiGNE  (le  vic*^  Benoît    de),    château   du  Bettonet 
(Savoie). 

Chambet  Joseph,  Imprimeur-éditeur,  à  Annemasse. 

Dantand    Marie-Maurice,    ancien    vérificateur   des 
poids  et  mesures,  à  Thonon-les-Bains. 

DuBOULOz  André,  Imprimeur-éditeur,  à  Thonon-les- 
Bains. 


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—   XLV   — 

DuBOULOz  Ignace,  Notaire,  à  Annemasse. 

DuFRESNE  Edouard,  Docteur-Médecin,  à  Genève. 

Franc  Léon,  Chimiste,  à  Monthey  (Suisse). 

Froissard  Broissia  (le  vicomte  Sixte  de)^  au  châ- 
teau d'Allemand. 

Gerbaix  de  Sonnaz  (le  comte  Albert  de),  Ministre 
plénipotentiaire  de  S.  M.  le  Roi  d'Italie  à  Lisbonne 
(Portugal). 

Jordan  Elie,  Instituteur  à  Marin. 

Joseph  (R.  P.),  Directeur  de  FOrphelinat  de  Douvaine. 

Le  Marant  de  Kerdaniel  (baron).  Juge  suppléant  au 
Tribunal  de  Thonon-les-Bains. 

LocHON  Georges,  Docteur,  à  Thonon. 
PicuT  J,-B.,  ancien  Directeur  des  Chemins  de   fer 
d'Italie,  à  Massongy. 

QuiBLiER  Léon,  Architecte,  Conservateur  du  Musée, 
à  Thonon. 

QuiNCY  (comte  Alban  de),  au  château  de  Massongy. 

Rive  (Théodore  de  la),  à  Genève. 

Vaudaux  Camille,  Notaire  à  Thonon. 

Membres  Correspondants 

MM.    Bâtisse  Jules,  Architecte,  à  Thonon. 

Bruchet  Max,  Archiviste  départemental,  à  Annecy. 

CiïAVAZ  (abbé  L.),  à  Genève. 

DucLOz,  Imprimeur-éditeur,  à  Moùtiers. 

FoNTAiNE-BoRGEL,  à  Genève. 

Jacquot  Lucien,  Substitut  du  Procureur  de  la 
République,  à  Sétif  (Algérie). 

Levet  François-Joseph-Aimé-Eugène,  Commandant 
du  Génie,  Avignon. 

Meynet  Jean-François,  Géomètre,  à  Bellevaux. 

Pinget  Joseph,  Curé  à  Serraval,  par  Thon  es 
(Ht«-Savoie). 

Saillet  J.-C,  ancien  Professeur  à  Boêge. 

Tavernier  Hippolyte,  Juge  de  paix,  à  Taninges. 

Thorens  Fernand,  Notaire,  à  Bons. 


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—   XLVI   — 

IV. 

SOCIÉTÉS  CORRESPONDANTES 
Académie  Salésiemie. 


Annecy  . 

[  Société  Florimontane 

AosTE  (Italie)  \  ^^^^^^^  ^f^^démique  religieuse  et 

^  ^  ''.'-'  \  scientifique  du  duché  d'Aoste. 

Besançon Académie  des  Sciences  et  Arts. 

Bourg  (Ain) Société  d'Emulation. 

(  Académie  de  Savoie. 
GhambÉry  <  ^^^^^^^  centrale  d agriculture. 

I  Société  savoisiem^e  d'Histoire  et 

\      d  Archéologie. 

DijQN  \  Académie  des  Sciences,  Arts  et 

\      Belles- Lettres. 

Genève  (Suisse) .         .  \  ^^^^^^^  d'Histoire  et  d  Archéologie 
I  Institut  national  ge^ievois. 

Grenoble \  j,<^^dérnie  Delphinale. 

i  bociete  de  Statistique. 

Lausanne  (Suisse)   .  .  \  *^^f/^'^^'  d'Histoire  de  la  Suisse 
^  '         \      Romande. 

Lg  PuY  \  Société  agricole  et  scientifique  de 

\      la  Haute-Loire. 

Limoges Société  «  Le  Gay-Lussac.  » 

Lo™  (Belgique).  .  j  ^^^0.?^:^/.^.^"""^^^^^^ 
MouTiERS  .......      Académie  de  la  Val  d'Isère. 

Neufchatel  (Suisse) .      Société  de  Géographie. 

Romans  \  ^^^'  d'archéologie  religieuse  des 

\  diocèses  de  Valence, Grenoble,  etc. 

S'-Maurige  (Suisse).  .  j  ^""^ff^^^^^^^^  "^^   ^'"'''^' 


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—  XLvn 


S'-Jean-de-Maurienne     Société d Histoire  et  d Archéologie 

!  Renia  dejiutazione  sovra  glistudj 
ai  storia  patria. 
Regia  academia  délie  scienze. 


Zurich  (Suisse)  .  . 
Upsala  (Norvège). 


Société  des  Antiquaires, 
fnstitut  royal  géologique. 


p^j.jg  1  Le  Cyclamen,  Revue  des  Savo- 
i    yards  de  Paris, 


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MÉMOIRES 


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MÉMOIRE  I 


BIOGRAPHIE 


DU 


r  ^ 


GEMEAL  DUPAS 


PAR 


Ferdinand  Dubouloz-Dupas  et  André  Folliet 


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^VANT-j^ROPOS 


Le  Général  Dupas  fut  un  des  héros  des  guerres 
de  la  Révolution  et  l'un  des  plus  glorieux  divi- 
sionnaires de  la  Grande-Armée.  Il  appartenait  à 
cette  étonnante  génération  de  1792  qui,  dans  sa 
lutte  victorieuse  contre  l'Europe  coalisée,  a  produit 
tant  d'hommes  remarquables.  Les  armées  qu'elle 
enfanta  furent  admirables  de  désintéressement  et 
de  dévouement  patriotique,  aussi  longtemps  qu'elles 
combattirent  pour  la  liberté  et  l'indépendance 
nationale. 

Cette  biographie  de  Pierre-Louis  Dupas  comble 
une  lacune  regrettable.  Notre  travail,  aussi  com- 
plet que  possible,  met  en  lumière,  d'après  des  do- 
cuments de  première  main,  la  vie  militaire  peu 
connue  de  l'un  des  plus  braves  soldats  de  notre 
chère  province,  en  même  temps  qu'il  apporte  une 
contribution  à  l'histoire  épisodique  d'une  grande 
époque. 

L'^un  de  nous,  M.  Ferdinand  Dubouloz,  petit-fils 
du  général  Dupas,  a  mis  en  œuvre  des  papiers 
de  famille,  des  documents  originaux  précieux 
pour  l'histoire.  Cette  publication  les  sauvera  de 
Toubli^  sinon  de  la  destruction. 

Son  collaborateur,  M.  André  FoUiet,  Sénateur 
de  la  Haute-Savoie,  auteur  de  nombreux  travaux 


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Yjbis    

historiques  (sur  le  général  Dessaiœ,  sur  les 
Volontaires  de  1792,  etc.),  a  compulsé  avec  soin 
les  archives  historiques  et  administratives  du 
Ministère  de  la  Guerre,  qu'il  connaît  depuis  long- 
temps. Son  travail  renferme  le  résultat  de  ses  re- 
cherches antérieures  et  de  ses  récentes  trouvailles, 
et  il  n'a  point  négligé  les  éléments  d'information 
puisés  dans  les  écrits  du  temps  ou  dans  les  publi- 
cations récentes  de  documents  originaux. 

C'est  ainsi  qu'il  a  trouvé  dans  les  lettres  inédi- 
tes de  Napoléon  P%  publiées  en  1897,  par  M.  Léon 
Lecestre,  la  preuve  que  Dupas,  si  maltraité  dans 
les  Mémoires  de  Bourrienne,  eut  pourtant,  dans 
les  villes  anséatiques  une  conduite  exempte  de  tout 
reproche,  alors  qu'au  contraire  son  déti*acteur 
Bourrienne  s'était,  en  compagnie  de  beaucoup 
d'autres,  rendu  coupable  de  grosses  malversations. 

Nous  avons  voulu  être  exacts  et  sincères.  Et  pour 
obéir  à  ce  devoir  de  probité,  nous  avons,  toutes  les 
fois  que  cela  nous  a  été  possible,  laissé  la  parole 
aux  documents  d'une  authenticité  incontestable. 

A  la  ville  d'Evian  qui  a  vu  naître  le  général 
Z'en-avant,  et  qui  vient  de  donner  le  nom  de 
Dupas  à  une  nouvelle  et  magnifique  avenue,  nous 
dédions  cette  biographie  de  l'un  de  ses  plus  illus- 
tres enfants. 

Les  Auteurs. 


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—  vn' 


bis 


'EiTàTàJ^TJ^ 


Page  103  ligne  27,  au  lieu  de  arrivée  lire  armée 

»  Straslmid  »   Straisund 

»  conduit  »    conduits 

»  trois  officiers  »    deux 

après      Grandjean  fait  ajouter  suspendre 
après  les  mots  près  de  Weysza  ajouter  opérées 
18,  au  lieu  de  faite 


101) 

» 

23, 

115 

» 

5, 

HO 

» 

28, 

140 

» 

30, 

141 

» 

1, 

143 

» 

18, 

143 

T^ 

28 

144 

» 

22 

148 

» 

20, 

170 

» 

H, 

177 

» 

31, 

178 

» 

1, 

faite 

lire  fait 

Grands 

»    Grunds 

Schwarten 

»   Schwartau 

Eyhe 

»    Eybie 

enrôle^' 

»  s'enrôler 

Hambourg 

»   Harrbourg 

Ruxtehude 

»   Buxteliude 

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I 


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ÉTAT  DES  SERVICES  DU  GÉNÉRAL  DOPAS 

(Archives  historiques  du  Ministère  de  la  Guerre) 


Dupas  Pierre-Louis,  né  à  Evian  le. . . .   13  février  1761 

Entré  au  service  du  Roi  de  Sardaigne 
dans  le  Régiment  de  Piémont-  Dra- 
gons le 12  mars  1775 

Au  service  de  la  République  de  Genève  le  30  mars  1784 

Parti  par  congé  acheté  de  sergent-four- 
rier, en 1786 

Entré  au  service  de  France  dans  le 
Régiment  deChâteauvieux-Suisse, 
alors  en  Corse,  le 1«'  août  1787 

Débarqué  en  France 1788 

Passé  dans  la  Garde  nationale  soldée  de 
Paris  (Gardes  françaises)  par  auto- 
risation du  Gouvernement  de  cette 
époque  le 13  juillet  1789 

Passé  aux  Grenadiers  de  TEstrapadeoù 
il  a  i-eçu  la  médaille  de  Garde  fran 
çaise  le 3  septembre  1789 

Nommé  Lieutenant  Colonel  (chef  de  ba- 
taillon) dans  la  gendarmerie  à  pied 
du  6®  arrondissement  de  Paris  le. .   1®""  août  1792 

Capitaine-adjudant-major  dans  la   Lé 

gion  Allobroge   le 13  août  1792 

Chef  de  bataillon  dans  le  même  corps 

(carabiniers)  le l^^  août  1793 

Embarqué  pour  TEgypte  le  22  floréal 

an  VI 11  mai  1798 

ib 


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Chef  d*escadron  dans  les  Guides  à  pied 

du  général  en  chef  Bonaparte  à  la 

prise  de  Malte  le 13  juin  1798 

Chef  de  brigade  au  OU'  Régiment  de  li- 
gne, le  23  nivôse  an  VI 1 12  janvier  1799 

Commandant  de  1»"*  classe  de  la  citadelle 

du  Caire 8  février  1799 

Débarqué  à  Marseille,  avec  l'armée,  le 

1'^»'  vendémiaire  an  X 23  septembre  1801 

Adjudant  supérieur  du  Palais 19  mars  1802 

Colonel  des  Mameluks 2  mars  1803 

Général  de  brigade,  le  11  fructidor  an  XI  29  août  1803 
Commandant  et  I  nspecteur  des  Côtes  de 

la  Seine  à  la  Somme  le  12  vend. 

an  XII 5  octobre  1803 

Commandant  de  la  Légion  d'honneur  le 

25  prairial  an  XII 14  juin  1804 

Sous-Gouverneur  du  Palais  de  Stupinis 

en  Piémont  le 23  septemb»''»  1804 

Général  de  division.  Grand  Cordon  du 

Lion  d'Or  de  Bavière  après  la  ba- 

tailled'Austerlitz,le3nivôseanXIV  24  décembre  1805 

Chevalier  de  la  Couronne  de  fer 25  décembre   1807 

Gouverneur  des  Villes  anséatiques 14  mars  1808 

Comte  de  l'Empire 29  janvier  1809 

A  la  grande  armée,  corps  d'observation 

de  Mayence,  le 17  juin  1813 

Autorisé  à  rentrer  en  France  le 13  septembre  1813 

Mis  en  disponibilité,  sur  sa  demande  Je  31  octobre  1813 
Admis  à  la  retraite  le 25  novembre  1813 


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CAIMPAQNE8 


1789  à  1791  Dans  la  Garde  Nationale  parisienne  ;  le  Gou 
vernement  décréta  que  ce  service  compterait 
pour  campagne. 

1792  93  Armées  des  Alpes  sous  Montesquiou,  du  Midi 

et  siège  de  Toulon  sous  Carteaux. 

1794  Armées   des  Pyrénées-Orientales    sous   Du- 

gommier;  du  centre  à  Puycerda,  sous  les 
généraux  Charlet  et  Doppet. 

1795  Vallée  d'Aran  sous  le  général  Denoyer. 
1796-97  Armée  d'Italie,  où  il  a  toujours  commandé 

des  bataillons  d'élite,  2*^  de  carabiniers,  5-^, 

6*,  7®,  8«  et  1^'  bataillons  de  grenadiers. 

1798  1801  Armée  d'Eg^'pte  sous  Bonaparte,  Kléber  et 
Menou. 

1803-1805  Armée  des  Côtes  de  TOcéan,  commandant  une 
brigade  de  Grenadiers  Oudinot  avec  laquelle 
il  a  fait  la  campagne  de  1805  contre  TAu- 
triche. 

1806  07  Grande  armée  en  Prusse  où  il   a   commandé 

une  division  dans  le  corps  du  Maréchal 
Mortier. 

1808  En  Danemarck. 

1809  Grande  armée  en  Autriche,  où  il  commandait 

une  division  dans  le  corps  du  maréchal 
prince  de  Ponté-Corvo. 

1812  En  Saxe.  Dans  les  corps  des  maréchaux  duc 

de  Castiglione  et  de  Gouvion  Saint-Cyr. 

1813  Admis  à  la  retraite. 

1814  21  septembre.  Aucune  décision  au  sujet  de  la 

liquidation  de  sa  retraite,  son  traitement 
d'activité  continue. 


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BLESSURES 


Cicatrice  à  la  main  gauche  sur  l'articulation  du  petit 
doigt  avec  leô*"  os  du  métacarpe  et  Tankylose  de  cette  arti- 
culation. 

Une  2",  sur  la  main,  quiaproduit  3  cicatrices  situées,  une 
sur  la  2®  phalange  du  petit  doigt,  l'autre  sur  la  3*  du  doigt 
annulaire  (celle-ci  est  accompagnée  d'une  exostose).  La 
dernière  est  placée  sur  la  même  phalange  du  grand  doigt. 

Une  3*  qui  a  produit  une  cicatrice  sur  la  1*"®  phalange  du 
petit  doigt  de  la  main  droite. 

Une  4*  située  sur  l'extrémité  inférieure  et  externe  du  cu- 
bitus de  l'avant-bras  droit,  a  intéressé  cet  os  et  y  a  laissé 
une  cicatrice  adhérente. 

(Ces  différentes  blessures  n'ont  pu  être  constatées,  at- 
tendu que  les  bataillons  d'élite  n'avaient  pas  de  conseil 
d'administration  et  étaient  aussitôt  dissous  que  formés.    * 

Sous  les  ordres  du  général  de  brigade  Lan  nés  et  de  divi- 
sion Dallemagne  commandant  l'avant-garde  en  Italie). 

Une 5%  faite  par  une  balle  qui  se  trouve  encore  dans  l'in- 
térieur du  corps,  a  produit  une  cicatrice  d'un  demi-pouce 
de  longueur  sur  le  flanc  droit,  à  quatre  travers  de  doigt  de 
l'épine  antérieure  et  supérieure  de  l'os  des  hanches.  (An  V, 
22  brumaire,  à  Caldiero.  sous  les  ordres  du  duc  de  Casti- 
glione). 

La  6«aété  faite  par  une  autre  balle  qui  a  traversé  la 
cuisse  droite  dans  sa  partie  postérieure  de  dedans  en  dehors 
et  de  haut  en  bas,  à  peu  près  au  tiers  inférieur  de  ce  mem- 
bre, en  y  laissant  deux  cicatrices,  l'une  interne  et  l'autre 
externe.  (A  Anghiari,  25  nivôse,  an  V,  poursuivant  le  gé- 
néral autrichien  Provera.  sous  les  ordres  du  duc  de  Casti- 
glione).  (1). 

(1)  L'état  des  services  parait  avoir  oublié  une  7®  blessure,  qui 
le  mit  à  deux  doigts  de  la  mort,  causée  par  une  balle  reçue  dans 
la  poitrine. 

Toutes  ces  blessures  sont  constatées  par  les  certificats  des 
médecins,  qui  se  trouvent  dans  les  Archives  de  la  famille  Duhouloz- 
Dupas.  (Note  des  Auteurs). 


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—  5 


ACTIONS   DÉCLAT 


LE  22  Brumaire  an  Vil 


A  passé  le  premier  le  pont  de  Lodi  à  la  tôte  de  200  Carabi- 
niers Allobroges  et  de  la  29^  légère.  A  reçu  pour  cette  action 
un  sabre  d'honneur  et  en  a  été  breveté.  (13  floréal  an  X. 
Privilège  y  attaché  par  arrêté  du  4  nivôse  an  VIII). 

A  soutenu  le  siège  de  la  citadelle  du  Caire  en  Egypte 
presque  sans  aucun  moyen  de  défense,  ne  disposant  que 
d'une  garnison  de  200  éclopés  ou  amputés,  et  n'ayant  pour 
vivre  que  des  restants  de  magasins,  point  d'eau  douce,  et 
environ  3000  habitants  à  contenir  dans  l'intérieur  de  la 
place.  Il  a  bombardé  la  ville  pendant  34  jours,  a  résisté  à 
10,000  Osmanlis  qui  étaient  e'ntrés  dans  la  ville  révoltée 
pour  faire  cause  commune  avec  les  insurgés.  Il  leur  a  pris 
trois  queues  de  pachas,  cinq  drapeaux,  plusieurs  sabres, 
piques,  etc.  Ces  trophées  étaient  encore,  avant  la  déchéance 
de  Napoléon,  suspendus  à  la  voûte  du  dôme  des  Invalides. 

Il  a  été  désigné  dans  les  rapports  sur  la  bataille  de 
Friedland  comme  ayant  rendu  de  grands  services  à  l'armée. 
Il  fut  fait  Chevalier  de  la  Couronne  de  fer  le  25  décembre. 
Il  se  trouvait  encore  en  ligne,  le  second  jour  de  la  bataille 
de  Wagram,  avec  23  hommes  du  5*  léger,  restant  de  sa 
division.  Sa  conduite  lui  mérita  une  lettre  très  flatteuse 
par  ordre  de  Napoléon. 


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—  6  — 

Certifié  véritable,  sauf  erreur  de  quelques  dates  qui 
pourraient  provenir  des  délais  mis  entre  l'arrêté  et  l'expédi- 
tion des  promotions. 

Le  Lieutenant-Général, 

P.-L.  Dupas. 

carré  St-Martin,  n°  299. 

Pour  copie  conforme  aux  piè- 
ces originales  qui  nous  ont  été 
représentées. 

Paris,  le  21  Septembre  1814. 

Le  Sous-Inspecteur  aux  revues^ 
Ch.  Boissy-d'Anglas. 


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CHAPITRE  l-r. 


1776-1796 

Services  de  Pierre-Louis  Dupas  dans  Piémont-Dragons,  dans  les 
troupes  de  Genève,  daus  Chateauvieux-Suisse  en  Corse,  dans 
les  Gardes-Françaises.  —  Dupas  à  la  prise  do  la  Bastille.  —  Il 
résiste  àBailly  et  à  Lafayette.  —  Il  reçoit  son  congé  des  Gardes 
Françaises.  —  L'uu  des  premiers  à  s'inscrire  dans  la  Légion 
Allobroge  dont  il  est  Gapitaine-Adjudant-Major.  —  Campagne 
de  Savoie  et  de  Mauricnne.  —  Capitaine  de  Carabiniers.  — 
Chef  de  bataillon.  Aide  de  camp  du  Général  Carteaux.  — 
—  Campagne  du  Midi  et  siège  de  Toulon.  —  Campagnes  des 
Pyrénées-Orientales  de  17i)i  et  1705.  —  Départ  pour  l'armée 
d'Italie. 

Pierre-Louis  Dupas  est  né  à  Eviaii  le  7  février  1761  (1) 
de  Gaspard-Louis  Dupas,  bourgeois  d'Evian,  et  d'Antoi- 
nette Pellissier.  Sa  vocation  militain^  s*afflrina  dès 
Tenfance.  Grand  et  fort  pour  son  âge,  il  venait  d'avoir 
quatorze  ans  lorsqu'il  s'engagea,  le  12  mars  1775,  dans 
un  des  plus  beaux  corps  de  cavalerie  du  roi  de  Sardai- 
gne,  le  régiment  de  Piémont-Dragons.  Il  eut  tout  le 
loisir  d'y  apprendre  le  métier  de  soldat,  car  il  n'en 
sortit  qu'au  bout  de  neuf  ans.  Le  30  mars  1784,  il  con- 
tracta un  nouvel  engagement  au  service  de  la  République 
de  Genève;  il  en  sortit  en  1786,  en  achetant  son  congé, 
ayant  le  grade  de  sergent-fourrier.  L'année  suivante,  il 
entra  au  service  de  France,  le  l^r  août  1787,  dans  le 

(1)  Registres  paroiss.  d'Evian,  cités  par  M.  A.  de  Foras 
(Armoriai  et  Nobiliaire  de  Savoie).  L'état  des  services  dit  par 
erreur  :  13  février. 


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—  8  — 

régiment  suisse  de  Chateauvieux,  où  il  y  avait  beaucoup 
de  Genevois  et  de  Savoyards.  Embarqué  pour  la  Corse 
avec  son  nouveau  corps,  Dupas  tint  garnison  à  Corte, 
d'abord  dans  la  C'®  Perrett  du  1^^  bataillon,  puis  il 
passa  aux  grenadiers  du  2«  bataillon,  compagnie 
Guedelin  (1),  revint  en  France  Tannée  suivante,  1788, 
et  fut  dirigé  sur  Paris  où  il  entra  enfin  dans  les  Gardes 
françaises. 

Les  Gardes  françaises  formaient  un  beau  régiment  de 
4,000  hommes  qui  ne  quittait  jamais  Paris.  A  la  diffé- 
rence des  autres  régiments  français  qui  portaient  l'habit 
blanc  et  des  régiments  suisses  qui  avaient  Thabit  rouge, 
les  Gardes  françaises  portaient  Thabit  bleu  à  parements 
et  collet  rouges  avec  la  culotte  blanche  ;  ils  donnèrent 
leurs  trois  couleurs  aux  armées  de  la  République.  Dans 
ce  corps  si  brillant,  les  officiers  de  l'ancien  régime, 
tous  nobles,  affects^ient  de  ne  paraître  que  les  jours 
de  parade;  aussi,  les  sous-officiers  et  soldats  livrés  à 
eux-mêmes,  en  contact  permanent  avec  la  population 
parisienne,  avaient  chaudement  épousé  les  idées  de  la 
Révolution  ;  ils  le  montrèrent  à  la  prise  de  la  Bastille 
où  ils  se  mirent  a  la  tête  du  mouvement  populaire.  Un 
grand  nombre  d'illustres  généraux  de  la  République 
sortirent  de  ce  régiment  :  Hoche,  Bernadette,  Lefebvre, 
Junot,  et  tant  d'autres. 

Le  13  juillet  1789,  le  renvoi  de  Necker  excite  l'indi- 
gnation populaire,  on  se  rassemble,  on  court  aux  armes, 
'  ?  sur   la   Bastille  où  se  trouvait  un  dépôt 
[nportant.    La   célèbre   forteresse  tombe  au 

es  de  la  Guerre. 


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_  9  — 

pouvoir  du  peuple  soutenu  par  les  Gardes  françaises  ; 
Dupas  se  trouve  avec  Hulin  à  la  tête  du  mouvement  ; 
comme  Hulin,  il  s'efforce  d'arrêter  les  excès  d'une  foule 
en  délire  ;  la  prison  d'Etat  est  détruite  (14  juillet). 

A  partir  de  cette  époque  les  Gardes  françaises  prirent 
officiellement  le  titre  de  Garde  Nationale  soldée  de 
Paris,  mais,  dans  le  langage  usuel,  on  continua  à  les 
désigner  par  leur  ancienne  dénomination. 

Dés  le  13  juillet,  nous  voyons  Dupas  faire  partie  de 
la  Compagnie  Fournier,  district  St-Eustache,  rue  Coq- 
Héron  (1)  ;  le  3  septembre  1789,  les  officiers  de  cette 
Compagnie  lui  délivrent  un  certificat  déclarant  *  qu'il  a 
servi  avec  zèle,  patriotisme,  honneur  et  probité  »  ;  il 
passe,  à  cette  date,  aux  grenadiers  de  l'Estrapade  (2). 

Le  5  nov.  1789,  les  grenadiers  de  la  Garde  nationale 
parisienne  (anciens  Gardes  françaises)  Compagnie  de 
Cadignan  grenadiers,  pétitionnent  pour  que  Dupas 
soit  décoré  comme  eux  de  la  médaille  nationale  (la 
médaille  de  la  Bastille)  «  l'ayant  méritée  par  la  manière 
dont  il  a  servi  dans  la  Révolution  du  mois  de  juillet 
dernier.  »  (3). 

Dans  c(»s  temps  troublés,  les  officiers  nobles,  ceux 
qui  n'avaient  pas  encore  émigré,  montraient  presque 
tous  le  mauvais  vouloir  le  plus  caractérisé  pour  tout  ce 
qui  touchait  au  nouveau  régime  constitutionnel  établi 
par  l'Assemblée  constituante  en  1790.  Dupas,  au  con- 
traire, caractère  sérieux  et  très  ferme,  servait  avec  toute 
la  passion  d'un  patriote  sincère  le  régime  nouveau  ;  il 

(1)  Archives  de  la  Guerre. 

(2)  Ibid. 

(3)  Archives  Dubouloz-Dupas. 


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—  10  — 

manifestait,  avec  toute  la  franchise  de  son  caractère, 
son  enthousiasme  pour  la  Liberté  et  TEgalité.  L'in- 
fluence que  Tardeur  de  ses  idées  et  sa  taille  imposante 
lui  donnaient  sur  ses  camarades  inquiétait  les  officiers 
qui  cherchaient  à  se  débarrasser  de  lui.  Ils  imaginèrent 
d'amener  les  sous-officiers  et  soldats  de  la  Compagnie 
à  émettre  un  vote  par  lequel  Dupas  serait  forcé  de 
quitter  la  Compagnie,  et,  pour  y  parvenir,  ils  l'accu- 
sèrent devant  ses  camarades  de  divers  griefs.  1°  Il  avait, 
disaient-ils,  commis  un  acte  d'insubordination  en  refusant 
d'obéir,  le  17  avril  1791  ;  2«  Il  avait  lu  au  corps  de  garde 
le  jo.urnal  ï Orateur  du  Peuple  ;  3°  Il  logeait  chez  un 
prêtre  réfractaire  ;  4»  Il  aurait  accusé  le  sergent-major 
de  garder  20  livres  sur  l'ordinaire  ;  5»  Enfin,  il  aurait 
accusé  les  caporaux  de  ne  pas  rendre  compte  de  l'argent 
qu'ils  recevaient.  Ceci  se  passait  en  avril  1791. 

Dupas  se  disculpa  dans  une  curieuse  petite  brochure 
intitulée  :  le  Grenadier  de  l'Estrapade  à  ses  concitoyens. 
Cette  pièce,  presque  introuvable,  (1)  jette  un  jour  très 
intéressant  sur  l'époque  : 

«  Pour  mettre  un  terme  aux  accusations  dont  je  suis 
l'objet,  dit-il,  je  vais  mettre  au  jour  ma  conduite. 

«  Je  suis  parti  avec  la  Compagnie  chargée  de  la 
garde  du  château  de  St-Cloud  ;  l'on  ne  saurait  m'accuser 
des  événements  qui  se  sont  passés  au  départ  de  Leurs 
Majestés.  Pour  me  laver  de  toutes  les  absurdités  dont 
on  me  charge,  je  n'ai  qu'à  exposer  les  faits  avec  cette 
franchise  qui  caractérise  un  vrai  patriote. 

«  Le  dimanche  des  Rameaux,  17  avril  1791,  étant  de 
garde  dans  les  appartements  du  Roi,   j'appris  que   la 

(1)  Arch.  Dubouloz-Dupas. 


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—  IJ  — 

messe  préparant  à  la  communion  pascalo,  devait  être 
célébrée  par  des  prêtres  réfractaires  à  la  constitution  (  I  )  ; 
je  dis  alors  à  mes  camarades  qu'étant  chargés  de  Texé- 
cution  des  lois,  nous  ne  pouvions  pas  être  les  premiers 
à  leur  désobéir.  Mais  alors  le  Capitaine  s'étant  approché 
en  m'enjoiguant  de  lui  obéir  d'une  manière  aveugle,  je 
lui  répondis  qu(î  le  premier  qui  assisterait  à  cette  messe 
serait  dénoncé  ;  il  envoya  aussitôt  chercher  le  Maire  de 
Paris  (2)  ainsi  que  Lafaycîtte  (3)  ;  ce  dernier  s'adressa  à 
moi,  disant:  Que*  signifie  cette  désobéissance?  —  Mais 
je  lui  répondis  qm?  cette  désobéissance  était  légale,  que 
lui-même,  s'il  n'eût  pas  agi  ainsi,  ne  serait  pas  général  ; 
m'adressant  à  Bailly,  je  lui  dis:  Et  vous.  Monsieur, 
vous  ne  seriez  pas  Maire  !  La  France  ne  pourra  jamais 
être  régénérét^  si  vous  n'obéissez  pas  aux  décrets  si 
sages  rendus  par  notre  auguste  Assemblée. 

«  Lafayctte,  s'étant  convaincu  que  de  pareils  senti- 
ments étaient  partîigés  par  le  plus  grand  nombre  des 
Grenadiers,  commanda  Itî  départ  pour  la  mosse  :  tous 
partent,  moi  seul  reste  ferme  et  immobile.  —  Quelques 
instants  après,  Bailly  et  Lafayette  vinrent  me  relancer, 
mais  je  leur  résistai  courageusement,  voulant  respecter 
le  serment  que  la  Garde  Nationale  a  prêté,  de  soutenir 
la  nouvelle  Constitution.  —  Non,  je  n'assisterai  pas  à 
la  messe  d'un  prêtre  qui  ne  se  soumet  pas  aux  lois. 

«  Le  lendemain,  le  Capitaine  m'ayant  interpellé  par 
ces  mots  :  Comment,  vous  désobéissez,  oubliez-vous  que 
vous   n'êtes  que   soldat,  que  je  suis  votre  Capitaine  ? 

(1)  Héfractaire,  c'est-à-dire  ayant  refusé  le  serment  constitu- 
tionnel. 

(2)  Bailly. 

(3)  Général  en  chef  de  la  Garde  Nationale  parisienne. 


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—  12  — 

Ignorez-vous  les  décrets  de  TAssemblée  Nationale  qui  re- 
connaissent la  liberté  des  cultes?  —  Ayant  répondu  que 
les  questions  de  culte  ne  devaient  pas  se  confondre  avec 
la  discipline  militaire,  il  partit  en  me  serrant  la  main. 
€  Les  jours  suivants  plusieurs  Sociétés:  les  Amis  de 
la  Constitution,  le  Club  des  Cordeliers,  la  Société 
fraternelle  séant  aux  Jacobins,  les  Minimes,  les 
Carmes,  etc.,  vinrent  à  la  caserne  de  TEstrapade  pour 
s'assurer  que  je  n'étais  pas  en  prison  ;  le  Club  des  Cor- 
deliers  vint  me  remettre  une  couronne  civique  envoyée 
de  Luzarches,  S.-et-O.  ;  la  recevant,  je  crus  devoir  jurer 
de  défendre  la  Constitution  jusqu'à  la  dernière  goutte 
de  mon  sang.  —  Des  Agents  du  despotisme  vinrent  à 
leur  tour  pour  m'insultor  on  disant  que  tous  les  Clubs 
se  composaient  de  scélérats  ;  —  Ces  malheureux  ne 
connaissent  pas  les  actes  d'humanité  de  ces  Sociétés, 
une  seule  séance  pourrait  cependant  les  convaincre  des 
vertus,  du  mérite,  de  la  justice,  des  principes  de  liberté, 
que  leurs  membres  cherchent  à  répandre.  Le  Capitaine 
qui  les  excitait  contre  moi,  monta  sur  une  table, 
écumant  de  rage,  en  insultant  les  Sociétés  de  patriotes  ; 
il  entraîne  les  officiers,  sous-officiers  et  soldats  à  pren- 
dre le  23  avril  1791,  un  arrêté  par  lequel  il  me  fut 
enjoint  de  quitter  la  Compagnie,  et  demandant  au  Roi 
le  licenciement  de  cette  dernière  ;  tous  m'accusèrent  : 
1«  D'insubordination  ;  2«  D'avoir  lu  au  corps  de  garde 
V Orateur  du  peuple  (1)  ;  .>  Do  coucher  avec  un  prêtre 

(1)  Jourual  de  Fréron.  Avec  beaucoup  moins  de  talent  et  de 
sincérité,  Fréron  était  Témule  de  Marat  ou  plutôt  son  imitateur 
exagéré.  Après  le  9  thermidor  il  ressuscita  Vi^ateur  du  peuple, 
en  nt  la  feuille  officielle  de  la  réaction  et  fut  encoi^e  plus  violent 
comme  réacteur  quUl  ne  Pavait  été  comme  terroriste.        A.  F. 


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—  13  — 

réfractaire  ;  4»  D'avoir  répandu  le  bruit  que  le  sergent- 
major  avait  gardé  20  livres  destinées  à  l'ordinaire  ; 
5<>  D'avoir  dit  que  les  caporaux  ne  rendaient  pas  un 
compte  exact  de  l'argent  qu'ils  touchaient. 

«  Voici  ma  réponse  : 

1°  Qui  oserait  me  disputer  l'honneur  de  la  défense  de 
la  liberté,  d'avoir  su  empocher  le  carnage  que  l'on  mé- 
ditait aux  Tuileries,  à  l'époque  des  chevaliers  du 
poignard  ?  Ne  me  suis-je  pas  alors  opposé  au  départ  des 
troupes  qui  allaient  provoqueV  une  seconde  scène  de  la 
St-Barthelémy  ?  N'ai-je  pas,  par  mon  énergie,  fait  ren- 
trer dans  le  chemin  du  devoir  les  chefs  qui  voulaient  ce 
départ  ?  (1)  Quel  est  donc  le  grenadier  qui  ait  montré  le 
plus  de  zèle,  la  plus  grande  fermeté?  Et  l'on  voudrait 
que  j'assiste  à  une  messe  dite  par  des  rebelles  ? 

2^  L'on  m'accuse  d'avoir  lu  des  libelles  dégoûtants 
(c'est  y  Orateur  du  peuple).  Cent  fois  diflférentes  j'ai  vu 
lire  au  corps  de  garde  des  papiers  qu'on  nomme  incen- 
diaires et  qu'on  vend  publiquement,  ce  qui,  à  ce  que  je 
puis  croire,  peut  autoriser  celui  qui  les  achète  à  en 
faire  la  lecture. 

Je  puis  également  prouver  que  je  ne  connaissais  pas 
cet  ouvrage,  et  qu'en  voyant  sur  la  première  ligne  qu'il 
était  question  de  M.  Lafayette,  j'ai  eu  la  précaution  de 
dire  à  cinq  ou  six  de  mes  camarades  :  Messieurs,  je  vous 
prie  de  ne  point  ajouter  foi  à  ce  que  je  vais  lire,  parce 
que  je  sais  qu'il  y  a  des  auteurs  exaltés  ;  d'ailleurs 
n'est-ce  pas  outrager  la  Compagnie  entière  que  de  sup- 

(1)  Dupas  fait  ici  allusion  à  des  faits  antérieurs  que  nous  ne 
connaissons  pas. 


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—  14  — 

poser  que  la  lecture  d*uQ  écrit  quel  qu'il  soit  puisse 
ébranler  ses  principes  ? 

3«  Je  n'ai  jamais  logé  chez  un  prêtre  réfractaire, 
tous  mes  camarades  ont  pu  se  convaincre  que  ce  jeune 
homme  qui  m'accordait  l'hospitalité  était  étudiant  en 
médecine  (1). 

«  Quant  aux  4«,  5«  accusations,  ce  sont  des  calomnies 
imaginées  pour  me  faire  perdre  l'amitié  des  camarades.  » 

A  la  suite  de  l'arrêté  d'expulsion  du  23  avril,  l'as- 
semblée générale  des  Greaadiers,  Section  de  l'Obser- 
vatoire, prit  à  son  tour,  le  6  mai  1791,  l'arrêté  suivant  : 

«L'an  II  de  la  Liberté.  L'assemblée  ayant  pris  con- 
naissance de  la  décision,  en  date  du  23  avril,  par 
laquelle  il  est  enjoint  à  Dupas,  leur  camarade,  de  se 
retirer  sur  le  champ  de  sa  Compagnie  ; 

«  Considérant  que  nul  ne  doit  être  puni  qu'en  vertu 
d'une  loi  et  dans  les  formes  qu'elle  a  prescrites  ; 

«  Arrête  que  des  Commissaires  seront  nommés  à 
l'effet  de  dénoncer  à  la  Municipalité  l'arrêté  des  Grena- 
diers de  l'Estrapade,  pour  qu'elle  avise  aux  moyens  de 
rappeler  à  la  loi  les  Compagnies  des  Gardes  françaises 
qui  se  sont  permis  des  actes  arbitraires,  de  faire  juger 
Dupas  selon  la  loi,  et  demander  en  outre,  qu'attendu  que 
Dupas  ne  peut  être  considéré  comme  destitué,  sa  solde 
continue  à  lui  être  payée,  jusqu'après  son  jugement.  » 

Sont  nommés  à  cet  eflfet  :  Bosquillon,  Gilles  et 
Lefèbvre  (2). 

Le  résultat  de  cette  réclamation  fut  que  la  solde  resta 


(1)  Joseph-Marie  Dessaix,  le  futur  Général  ;   il  était  docteur  en 
médecine  de  Turin. 

(2)  Le  futur  Maréchal,  duc  de  Dantzick. 


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—  15  — 

acquise  à  Dupas  jusqu'au  30  juillet  1791,  date  du  congé 
absolu  qui  lui  fut  délivré  sous  la  signature  de  Bailly, 
Maire  de  Paris  ;»  Lafayette,  Commandant  de  la  Garde  Na- 
tionale parisienne  et  Gouvion,  Chef  d'Etat-Major.Cecongé 
atteste  «  que  Dupas  Pierre-Louis,  âgé  de  30  ans,  taille  de 
5  pieds  10  pouces  0  lignes,  grenadier  de  la  Compagnie  de 
Cadignan  a  servi  avec  fidélité  du  l^^  septembre  1789  au 
25  avril  1791,  soit  1  an,  8  mois  et  25  jours  »  (1). 

Dupas  resta  donc  libre  de  tout  engagement  depuis  la 
fin  de  juillet  1791,  fréquentant  assidûment  le  Cliùb  des 
patriotes  étrangers  fondé  par  Doppet  et  plusieurs 
Savoyards,  qui  prit  plus  tard  le  nom  de  Cliùb  des 
Allobroges.  Connu  pour  l'ardeur  et  l'énergie  de  son 
patriotisme,  Dupas  reçut  le  l^r  août  1792,  le  brevet  de 
Chef  de  Bataillon  ou,  comme  on  disait  alors,  de  Lieute- 
nant-Colonel dans  la  nouvelle  gendarmerie  qui  était 
formée  à  cette. époque.  Mais,  presque  au  même  instant, 
la  défense  nationale  l'appelait  à  l'armée  des  Alpes,  à  ce 
moment  où  la  patrie  était  en  danger. 

«  Le  2  août  1792,  sur  le  rapport  de  son  Comité  mili- 
taire établissant  la  nécessité  d'augmenter  les  moyens 
de  défense  de  la  frontière  des  Alpes,  l'Assemblée  légis- 
lative autorisa  la  levée  d'un  nouveau  corps  de  troupes 
légères  et,  le  8  du  même  mois,  elle  décréta  la  forma- 
tion, par  les  soins  du  Général  Commandant  à  Grenoble, 
de  la  Légion  franche  Allobroge,  »  (2). 

Dupas  fut  un  des  premiers  à  s'inscrire  sur  les  rôles 
de  la  Légion  dont  le  premier  noyau  prit  part  à  la  journée 


(1)  Archives  de  la  Guerre.   La  solde  lui  a  été  payée  jusqu'au 
30  avril  1792. 

(2)  André  Folliet, /^5  Volontaires  de  la  Savoie, 


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—  16  — 

du  10  août,  où,  Dupas,  Doppet,  Dessaix  et  autres  sauvè- 
rent la  vie  à  plusieurs  soldats  suisses  qui  furent  aussitôt 
incorporés  dans  la  légion,  «  où  Ton  n'eût  d'ailleurs 
qu'à  se  louer  de  leurs  services  »  (1). 

Avant  de  quitter  Paris,  les  volontaires  Allobroges  se 
présentèrent,  le  22  août,  à  la  barre  de  l'Assemblée 
législative.  Doppet  prit  la  parole  au  nom  de  ses  cama- 
rades, et  tous  firent,  devant  les  législateurs,  le  serment 
de  vivre  libre  ou  de  mourir. 

Le  recrutement  s'opéra  promptement  à  Grenoble  où 
la  Légion  se  foi'ma.  Les  premiers  officiers  furent  Busigny, 
officier  vaudois,  Colonel  ;  le  docteur  Doppet,  de  Cham- 
béry,  Lieutenant-Colonel  ;  le  docteur  Dessaix,  Capitaine 
de  la  l^^e  Compagnie  de  Chasseurs;  Dupas,  Capitaine- 
Adjudant-Major.  D'après  une  note  des  Archives  de  la 
Guerre  portant  la  date  du  18  septembre  1792,  «  Dupas 
nommé  Adjudant-Major  parle  Conseil  d'administration, 
ayant  31  ans,  5  pieds  11  pouces  de  taille  (2)  et  11  ans 
de  services,  s'est  déjà  rendu  à  Grenoble  ;  sa  nomination 
date  du  13  août.  » 

Dans  la  nuit  du  21  au  22  septembre,  les  colonnes 
françaises,  ayant  en  tête  la  Compagnie  de  Chasseurs  de 
Dessaix,  tournent  les  batteries  piémon taises  des  Mar- 
ches ;  le  lendemain  le  général  Montesquieu  entre  à  Cham- 
béry  aux  acclamations  populaires.  L'armée  piémontaise 

(1)  Mémoires  du  Général  Doppet. 

(2)  Archives  de  la  guerre.  —  A  Folliet,  les  Volontaires  de  la 
Savoie.  Les  divers  signalements  de  Dupas  qui  sont  aux  Archives 
de  la  Guerre  ou  sur  des  passeports,  lui  donnent  tantôt  la  taille 
de  5  pieds  11  pouces,  tantôt  celle  de  5  pieds  10  pouces  1[2,  tantôt 
5  pieds  10  pouces.  D'après  ces  documents  il  avait  le  nez  gros,  les 
yeux  gris  et  les  cheveux  roux.  La  teinte  de  ses  cheveux  s'adoucit 
avec  rage;  en  effet,  la  famille  Dubouloz-Dupas  conserve  une 
mèche  de  ses  cheveux  coupés  le  jour  de  sa  mort  ;  ils  sont  blonds 
cendrés. 


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—  17  — 

évacue  la  Savoie  sans  combattre,  poursuivie  par  les 
troupes  légères.  Les  Députés  de  toutes  les  communes 
de  la  Savoie  se  réunissent  à  Chambéry  sous  le  nom 
d'Assemblée  Nationale  des  Allobroges  et  expriment 
avec  enthousiasme  le  vœu  d'union  à  la  nation  fran- 
çaise pour  en  faire  partie  intégrante. 

Tandis  que  cette  Assemblée  délibérait  sur  les  desti- 
nées de  la  Savoie,  la  ville  de  Thonon,  qui  avait 
obtenu  d'avoir  en  garnison  la  !»•«  compagnie  allobroge, 
offrait  une  fête  au  général  de  Montesquieu  (»t  à  Tétat- 
major  de  la  Légion  Allobroge  dont  les  rangs  se  renfor- 
çaient chaque  jour.  La  Légion  était  composée  de 
14  compagnies  d'infanterie,  moitié  carabiniers  moitié 
chasseurs,  formant  deux  bataillons  ;  de  3  compagnies 
de  dragons  légers,  et  d'une  compagnie  de  canonniers 
avec  4  pièces  de  montagne  (1). 

Le  l®"*  décembre,  Dupas  quitta  ses  fonctions  d'adju- 
dant-major et  fut  nommé  au  commandement  de  la 
l»"®  compagnie  de  carabiniers.  Il  fut  envoyé  dans  la 
Haute-Maurienne,  au  pied  du  Mont-Cepis,  et  y  passa 
tout  l'hiver  sous  les  ordres  du  commandant  L'Archer 
qui  lui  délivra,  le  30  mars  1793,  l'attestation  suivante: 

«  Le  citoyen  Dupas,  capitaine  dans  la  Légion  Allo- 
broge, s'est  très-bien  conduit  depuis  son  arrivée  à 
Lanslebourg  ;  il  a  fait  observer  la  plus  exacte  disci- 
pline dans  le  détachement  qu'il  commande;  les  propos 
que  pourraient  avoir  tenu  contre  lui  les  ennemis  du 
bien  public  sont  absolument  faux  et  calomnieux.  Il  ne 
m'est  jamais  parvenu  à  son  égard  aucune  plainte,  ni  à 
l'égard  d'aucun  autre  officier  du  détachement,   qui  se 

(1)  André  FoUiet,  les  Volontaires  de  la  Savoie. 

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—  18  — 

sont  tous  également  bien  conduits,  pendant  leur  séjour 
en  Maurieuneoù  ils  ont  donné  des  preuves  du  plus  grand 
civisme  et  du  plus  grand  courage  dans  les  engagements 
qu'ils  ont  eu  avec  les  Piémontais.  Je  déclare  en  outre 
que  le  citoyen  Dupas,  par  un  plan  de  service  qu'il  m'a 
présenté  et  fait  mettre  en  exécution,  a  mis  le  poste  de 
Lanslebourg  hors  d'état  de  surprise. 

Lanslebourg,  30  mars  1793. 

Signé  :  L'Archer, 

Commandant    le   Bataillon    de    Grenadiers   et 
troupes  légères  de  la  République  Française ^ 
au  Quartier  général  de  la  Haute- Mauriennc.  »  (1) 

Dés  la  fin  de  mai  toute  la  Légion  Allobroge  fut 
concentrée  à  Montmélian  d'où  elle  quitta  la  Savoie  le 
28  juin  pour  aller,  croyait-on,  au  secours  de  l'armée 
des  Pyrénées-Orientales  refoulée  dans  le  Roussillon  par 
les  Espagnols.  A  Valence,  la  Légion  reçut  contre-ordre  et 
fut  placée  sous  les  ordres  supérieurs  du  général  Car- 
teaux  pour  marcher  contre  les  insurgés  provençaux. 
Dés  le  13  juillet,  la  Légion  s'empara  successivement 
d'Avignon,  de  Cadenet,  de  Lambesc,  d'Aix.  Le  colonel 
Busigny  ayant  donné  sa  démission  le  31  juillet,  le  len- 
demain, Doppet  fut  nommé  colonel  de  la  Légion  et  fut 
remplacé  par  Dupas  dans  le  commandement  du  batail- 
lon de  carabiniers  ;  Dessaix  commandait  le  bataillon  de 
chasseurs  depuis  plusieurs  mois.  Le  25  août,  Dessaix 
fut  nommé  colonel  de  la  Légion  en  remplacement  de 
Doppet  promu  général,  et  Souviran,  de  Thonon,  fut 
chef  de  bataillon  avec  Dupas. 

La  colonne  de  4,000  à  5,000  hommes,  sous  les  ordres 
du  général  Carteaux,  présentait  une  grande  diversité.  On 

(1)  Archives  Dubouloz-Dupas. 


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—  19  — 

y  voyait  les  habits  blancs  du  régiment  de  Bourgogne, 
Colonel  Pellaprat  ;  les  habits  bleus  des  volontaires  na- 
tionaux, bataillon  de  la  Côte-d'Or,  commandant  La- 
borde,  et  2"»®  bataillon  du  Mont-Blanc,  commandant 
Pacthod  ;  les  habits  verts  do  la  Légion  Allobroge, 
colonel  Dessaix,  et  unc^  compagnie  d'artillerie  com- 
mandée par  le  capitaine  Dommartin  en  l«^  et  en  2« 
par  Napoleone  Buonaparte  (1). 

Dupas  fut  dès  le  début  de  la  campagne  détaché  de 
son  corps  et  choisi  comme  aide  de  camp  par  le  général 
Carteaux.  C'est  en  cette  qualité  qu'il  dirigea  les  colon- 
nes républicaines  au  combat  de  Salon  le  18  août,  de 
Septêmes  le  24  août,  et  qu'il  entra  dans  Marseille  avec 
Carteaux,  le  25  août. 

On  a  reproché  avec  raison  au  général  Carteaux,  fort 
brave  homme  mais  de  peu  de  talents  militaires,  de 
s'être  arrêté  à  Marseille  au  lieu  de  poursuivre  les  insur- 
gés provençaux  dans  leur  fuite  sur  Toulon  où  il  serait 
entré  avec  eux;  ce  qui  eût  évité  à  cette  ville  les  hor- 
reurs du  siège.  Le  1*^^  septembre  on  apprit  que  Toulon 
s'était  livré  aux  Anglais  et  aux  Espagnols.  Le  7  sep- 
tembre, Carteaux  ayant  reçu  des  renforts,  attaqua  et 
débusqua  des  gorges  d'Ollioules  les  Anglo-Espagnols 
qui  s'étaient  joints  aux  insurgés  et  bientôt  le  siège 
commença.  On  sait  comment  se  révéla  dès  le  début  de 
ce  siège  mémorable  le  génie  de  Napoléon  Bonaparte 
qui  venait  d'être  nommé  chef  de  bcitaillon  d'artillerie. 
Carteaux  prit  le  parti  de  le  laisser  faire  ;  d'ailleurs  les 
représentants  en  mission  à  l'armée  appuyaient  le  jeune 
officier  d'artillerie  et  faisaient  adopter  ses  plans  d'atta- 

(l)  A.  FoUiet,  les  Volontaires  de  la  Savoie. 


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—  20  — 

que.  Dés  ce  moment,  le  jeune  Bonaparte  sut  apprécier 
la  résolution  et  la  fermeté  de  Taide  de  camp  de  Carteaux 
et  s'en  souvint  dans  la  suite. 

Le  27  octobre  1793,  Doppet,  qui  venait  d'être  employé 
comme  général  en  chef  de  l'armée  des  Alpes  au  siège  de 
Lyon,  fut  nommé,  après  la  prise  de  cette  grande  ville, 
général  en  chef  de  l'armée  du  Midi  en  remplacement  de 
Carteaux.  Ce  dernier  fut  nommé  par  le  môme  arrêté 
général  en  chef  de  l'armée  d'Italie  (1).  Carteaux  quitta 
l'armée  devant  Toulon  le  6  novembre  et  partit  pour 
Nice.  A  peine  était-il  en  possession  de  son  nouveau 
commandement  qu'il  reçut  un  nouvel  arrêté  du  3  novem- 
bre qui  l'envoyait  commander  l'armée  des  Alpes  tandis 
que  Dugommier  quittait  l'armée  d'Italie  pour  prendre 
le  commandement  du  siège  de  Toulon  et  que  Doppet 
était  envoyé  dans  les  Pyrénées-Orientales. 

Dupas  ne  suivit  pas  son  général  à  Nice  ;  il  se  trouvait 
à  cette  époque  à  Paris  où  il  était  chargé  par  son 
général  de  dépêches  pour  le  Comité  de  Salut  public. 

Le  Ministre  de  la  Guerre  Bouchotte  accorda  à  Dupas 
un  permis  de  rester  à  Paris  pendant  six  jours  (2)  j  et 
le  Comité  de  Salut  public,  sous  les  signatures  de 
Barère,  Robespierre  et  Carnot,  lui  donna  une  décla- 
ration constatant  la  remise  des  dépêches.  En  même 
temps  le  Comité  révolutionnaire  de  la  Section  de  l'Unité 
lui  délivra  une  carte  de  sûreté  pendant  le  terris 
Limitée  au  présent.  Cotte  pièce  est  datée  du  4  brumaire 
an  II  (14  novembre  1793). 

(1)  Archives  de  la  Guerre. 

(2)  Archives  Dubouloz-Dupas.  Cette  pièce  intéressante  est 
reproduite  en  fac-similé. 


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i.  :;  'il  Kl'.'  17')3,  Doppot,  qui  M'wui  '"^^ii^  «^nploy^^ 
•  '  '1  .  i  .r; ..  .  on  chef  du  rarrn'*"  Je-  .AÎp^'s  au  si/*^o  de 
'.  '. :*Lî.  î'i'  îi.^îîuat's  îiprôs  la  prise  d*  i  Hr'  i^raudo  \ilh*, 
'  .  ut'îi'.'iî  r^îî  '^  ^i  do  l'ariii''*(^  du  Midi  ru  cmij)!  icmn^iit  d(' 
r.ii*tfMi,\  <,.•  d'^ruioi*  lui  iioiiinié  par  U»  munio  arndu 
,*M^'ai  ^•:*  .-h'f  de  rarrii-'M' a'ïtali'*  (1).  Cartouux  quitta 
i';nin'"»'  'l'n.iM  i  muIou  \o  i>  n')V('rijbn>  tt  partit  pour 
M  •*•.  \  poiut  «M  lit-il  <  li  p'>ssossiou  d*'^  son  nouveau 
■'-:iihiaMd'"*Htil  qu'il  roçut  uu  nouvel  arroté  du  li  novoni- 
:  '•('  qui  renvoyait  couiuiaiidor  l'armée  dr>s  Alpc»--  taudis 
qu^'  Du^:>:oin:ni<'r  quittiiit  l'artuôe  d'itali»^  pour  prendre 
:  -(ui: mandement  <iu  siègf»  d(*  To\don  et  que  ,l)oppet 
•'-  ol  .'Uvoyé  daiiN  les  Pyrênér\s-(>rientales, 

Dr.jMS  îie  suivit  pas  son  gViui'al  à  Niée;  il  se  trouvait 

*  0'  '''[H)]ue  à  Paris  où  il  était  elnuyé  par  son 
U't  !j*'fui   ijtî  dépèch(\s  pour   \c  Comit/i   de  Salut   public. 

l  e  Ministre  de  la  (^m^rre  Boueh"tte  ac<N)rd.a  à  Dupas 

•  :;  \,.'viii\s  'le  rester  à  Paris  poiHant  sit-  j(ni)\H  Çl),  et 
*<'  i'eiuitè  de  Salut  publie,  v>>.''i-  !t*>,  signatures  de 
Liarére,  IvObespi{n*re  et  Carui  -,  lui  deruia.  une  décla- 
ration constatant  la  l'emise  {]i^<  dépéclies.  En  même 
temps  le  Comité  révolution'Kiire  de  la  Sectioi.  de  rUnité 
î'p  d^JAra  une  carte  de  sn-eté  pendant  le  te)7is 
^v/  '<  e  an  peès'U^J.  C-'U'^  pièt'(^  (}<\  datée  du  l  brumaire 
:e.  Il  (1  1  noxeml'îe  \1'X\), 


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—  21  — 

Dupas  rejoignit  le  général  Carteaux  à  Chambéry  au 
quartier-général  de  l'armée  des  Alpes  et  ne  put,  par 
conséquent,  assister  à  la  prise  de  Toulon.  Une  note  de 
Dupas  qui  est  aux  Archives  de  la  Guerre,  nous  apprend, 
en  effet,  qu'il  ne  rentra  à  son  corps,  la  Légion  AUobroge, 
qu'après  l'arrestation  de  son  général.  Carteaux  fut 
arrêté  à  Chambéry  sur  quelque  dénonciation  et  conduit 
à  Paris  le  2  janvier  1794;  il  ne  fut  délivré  que  par  le 
9  thermidor  (1). 

Dupas  suivit  son  général  à  Paris  et,  avec  sa  franchise 
et  son  courage  habituels,  le  défendit  hautement,  no- 
tamment dans  une  séance  du  Club  des  Jacobins  où 
Momoro  le  félicita  de  sa  courageuse  déposition  (2). 

Avant  son  arrestation,  alors  que  Carteaux  était  encore 
à  Chambéry,  ce  général  chargea  Dupas  d'une  mission 
à  Genève  ;  l'ordre  suivant  en  fait  foi  :  (3) 

((  Soumission  a  la  Loi.  —  République  Française 
((  Jean-François  Carteaux,  général  en  chef  des  armées  de 
la  République  Française,  commandant  l'armée  du  Midi  (4). 
((  Laissés  passer  le  citoyen  Dupas,  chef  de  bataillon  de  la 
Légion  des  Allobroges,  notre  aide  de  canip,  chargé  par  nous 
d'une  commission  particulière  concernant  le  service  mili- 
taire, allant  à  Genève. 

Carteaux.  » 
«  Au  Quartier  général  de  Chambéry, 
le  27  frimaire  de  Tan  2**  de  la  République 
Française  une  et  indivisible  (17  déc.  1793).  » 

Dupas  ayant  rempli  sa  mission  à  Genève,  en  profita 
pour  revoir  sa  ville  natale.  Une  tradition  orale  transmise 

(1)  Biographie  des  Coutemporains.  1827. 

(2)  Biographie,  impr.  Michaud,  1816.  V.  Dupas. 

(3)  Archives  Dubouloz-Dupas. 

(4)  Les  mots  du  Midi  sont  mis  là  par  erreur  :  c'est  des  Alpes 
qu'il  faut  lire. 


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—  22  — 

par  des  vieillards  d'Evian  prétend  qu'au  moment  même 
où  il  y  arrivait,  Dupas  trouva  la  populace  en  ébullition 
et  résolue  a  démolir  le  clocher.  Dupas  tente  vainement 
de  calmer  cette  eflfervescence  ;  la  troupe  des  émeutiers, 
armée  de  pioches,  enfonce  la  porte  du  clocher  et  attaque 
les  murs.  Dupas,  s'emparant  alors  d'un  fusil,  se  précipite 
au  milieu  de  la  foule  en  menaçant  de  tuer  le  premier 
qui  touchera  le  clocher.  Cet  acte  d'autant  plus  coura- 
geux qu'on  était  en  pleine  Terreur,  aurait  produit  l'eflfet 
sur  lequel  Dupas  comptait  :  le  clocher  fut  sauvé,  fort 
heureusement  ;  il  existe  encore,  c'est  un  clocher  du 
XVe  siècle,  un  des  rares  monuments  du  moyen-âge 
qui  subsistent  à  Evian. 

Telle  est  la  tradition,  tel  est  le  fait  que  les  vieillards 
d'Evian  contaient  il  y  a  une  cinquantaine  d'années.  Il 
n'en  existe  aucune  trace  dans  le  registre  des  actes  de 
la  Municipalité.  On  y  voit  seulement  que,  le  19  fructi- 
dor an  II,  soit  le  5  septembre  1794,  après  le  9  thermi- 
dor par  conséquent,  l'Agent  national  avait  demandé  la 
démolition  du  clocher  ;  or  en  septembre  1794  Dupas 
était  à  l'armée  des  Pyrénées-Orientales.  A  défaut  donc 
de  pièces  authentiques  à  l'appui,  nous  mentionnons 
simplement  cette  tradition. 

Après  l'entrée  de  l'armée  républicaine  dans  Toulon 
reconquis  (19  décembre),  la  Légion  Alîobroge  et  le 
général  en  chef  Dugommier  furent  envoyés  à  l'armée 
des  Pyrénées-Orientales  où  le  péril  était  grand:  il 
s'agissait  de  reprendre  le  Roussillon  envahi  par  l'ar- 
mée espagnole.  La  Légion  fut  donc  aussitôt  mise  en 
route,  malgré  son  état  de  délabrement  et  de  misère, 
pour  Perpignan  quartier-général  de  Dugommier,    sans 


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—  23  — 

avoir  eu  un  jour  de  repos,  sans  capotes  pour  l'hiver  ; 
malgré  les  guenilles  qui  les  couvraient  tant  bien  que 
mal,  les  Allobroges  furent  placés  à  Thuir,  aux  avant- 
postes  (1).  C'est  là  que  Dupas,  de  retour  de  Paris  où  il 
avait,  malgré  ses  généreux  efforts,  laissé  son  général 
en  prison,  vint  rejoindre  son  bataillon  de  carabiniers. 

A  Thuir,  où  les  avant-postes  et  les  reconnaissances 
des  Allobroges  eurent  avec  Tennemi  quelques  escarmou- 
ches. Dupas  fut  nommé  par  les  représentants  du  peuple 
commandant  de  la  place.  C'est  en  cette  qualité  qu'il 
reçut  la  notification  suivante  de  la  mise  de  la  place  en 
état  de  siège:  (2). 

«  Les  Représentants  du  peuple  prés  l'armée  dos  Pyré- 
nées-Orientales, 

«  Arrêtent  que  la  commune  de  Thuir  est  en  état  de 
siège  et  qu'en  conséquence  le  commandant  est  revêtu 
de  toute  l'autorité  que  la  loi  accorde  aux  commandants 
des  places  qui  sont  en  état  de  siège. 

Au  Quartier  Général  de  Perpignan, 
le  3  Germinal  an  s**  de  la  République 
une  et  indivisible  (23  mars  1794). 

MiLHAUD,  SOUBRANY, 

Représentants  du  peuple  près  l'armée  des  Pyrénées-Orientales.  » 

Pendant  que  le  général  en  chef  Dugommier  préparait 
son  plan  de  campagne  qui  allait  délivrer  le  Roussillon  et 
que  les  Allobroges  se  concentraient  à  0ms  où  ils  concou- 
rurent d'une  manière  si  éclatante  à  l'exécution  du  plan 
de  Dugommier  (3),  Dupas  recevait  l'ordre  de  suivre  dans 
la  Cerdagne  espagnole  le  général  Doppet,  nommé,  en 

(1)  André  FoUiet,  les  Volontaires  de  la  Savoie. 

(2)  Archives  Dubouloz-Dupas. 

(3)  A.  Folliet,  les  Volontaires  de  la  Savoie. 


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—  24  — 

remplacement  du  brave  Dagobert  qui  venait  de  mourir, 
au  commandement  de  la  division  indépendante  qui  opé- 
rait dans  la  Cerdagne  (1),  appelée  armée  du  Centre, 

Arrivé  le  11  mai  à  Puycerda,  Dupas  fut  chargé  par 
Doppet  du  commandement  de  cette  place  importante 
conquise  sur  les  Espagnols.  Le 26  juin,  tandis  que  Doppet 
revenait,  au  milieu  des  plus  grandes  difficultés,  de  son 
expédition  à  Campredon  en  Catalogne,  Puycerda  fut 
attaquée  par  les  Espagnols  descendus  en  force  des  mon- 
tagnes. Dupas  se  défendit  avec  son  énergie  habituelle,  et 
le  môme  jour  le  gros  de  la  division  Doppet  arriva  fort  à 
propos  pour  dégager  la  Cerdagne. 

La  Légion  Allobroge  venait  de  quitter  la  division  Au- 
gereau  pour  passer  à  Tarmée  du  Centre,  division  du 
Mont-Libre,  sous  les  ordres  du  général  Charlet,  qui  rece- 
vait les  ordres  de  Doppet,  Dupas  reprit  alors  le  comman- 
dement de  son  bataillon  allobroge  avec  lequel  il  repoussa 
vaillamment  à  Belver,  le  30  juin,  l'attaque  des  Espagnols. 

La  Légion  resta  à  Belver  où  elle  reçut  une  première 
transformation.  Ses  deux  bataillons  d'infanterie,  de  7 
compagnies  chacun,  furent  portés,  comme  tous  les  ba- 
taillons de  rinfanterie  légère  de  cette  époque,  à  9  com- 
pagnies chacun,  savoir  8  compagnies  de  chasseurs  et  1 
de  carabiniers.  En  même  temps  elle  reçut  1,300  recrues, 
dont  500  Savoyards,  pour  combler  les  vides  causés  par 
les  balles  ennemies  et  par  les  fatigues  de  la  guerre. 
Chaque  bataillon  à  9  compagnies  fut  en  conséquence 
organisé,  le  22  juillet,  au  complet  de  1,080  hommes  (2). 


(1)  Archives  delà  Guerre. 

(2)  Archives  de  la  Guerre,  — A.  FoUiet,  les  Volontaires  de  la 
Savoie. 


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—  25  — 

Doppet  quitta  son  commandement  pour  raisons  de 
santé  dans  Tautomne  do  1794,  et  la  Légion  fit  partie  de 
la  division  du  général  Charlet,  à  Belver,  où  l'instruction 
des  recrues  fut  poussée  activement.  La  Légion  Allobrogo 
fut  ensuite  cantonnée  à  Puycerda  au  commencement  de 
l'hiver  et,  en  février  1795,  elle  fut  chargée  de  la  défense 
de  la  vallée  d'Aran,  où  elle  passa  sous  le  commande- 
ment du  général  Denoyer  (1). 

C'est  dans  ces  pénibles  cantonnements  pyrénéens,  où 
les  neiges  persistent  une  grande  partie  de  l'année,  que 
Dupas  termina  avec  son  bataillon  la  guerre  contre 
l'Espagne. 

Le  traitéde  paix  conclu  à  Bàle  le  20  juillet  1795,  entre 
la  République  Française  et  la  monarchie  espagnole, 
vint  enfin  terminer  cette  guerre  pénible  €  pendant 
laquelle,  a  écrit  le  colonel  des  Allobroges,  l'armée  s'est 
trouvée  sans  solde,  réduite  à  la  demi  ration  et  dans  le 
dénuement  le  plus  complet  ;  elle  supporta  toutes  ces 
privations  sans  se  plaindre,  en  donnant  journellement 
des  preuves  du  plus  grand  courage,  d'un  dévouement 
sans  bornes  à  la  patrie.  >  (2) 

Après  la  paix  avec  l'Espagne,  Dupas  partit  avec  son  ba- 
taillon pour  Toulouse,  où,  pour  la  première  fois  depuis  trois 
ans,  la  Légion  Allobroge  prit  un  repos  de  trois  mois. 

C'est  à  Toulouse  que  la  Légion  subit  sa  transformation 
en  demi-brigade  en  vertu  de  la  loi  d'amalgame.  Elle 
conserva  ses  deux  bataillons  et  en  reçut  un  3®,  qui  était 
un  bataillon  de  volontaires  connu  sous  le  nom  de  4® 
chasseurs  de  montagnes. 

(1)  Archives  de  la  Guerre. 

(2)  Note  du  général  Dessaix. 


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—  26  — 

Cet  amalgame  complété  on  novembre  1795  eut  pour 
conséquence  le  changement  de  nom  de  la  Légion  ;  elle 
s'appela  désormais  4®  demi-brigade  (bis)  de  troupes  lé- 
gères, mais  elle  continua  à  être  désignée  dans  Tarmée 
sous  le  nom  de  demi-brigade  Allobroge  qu'elle  avait 
illustré.  Son  complet  de  guerre  fut  dès  lors  de  3,240 
hommes  (1). 

Dupas  eut  le  commandement  du  3®  bataillon  dont 
7  compagnies  sur  9  dont  il  était  formé  étaient  tirées 
de  l'ancienne  Légion  Allobroge  (2). 

La  4^  légère  —  qui  prit  l'année  suivante  le  N»  27  de 
l'infanterie  légère  qu'elle  garda  définitivement  —  quitta 
Toulouse  vers  le  milieu  de  janvier  1796  et  s'achemina 
à  travers  le  Midi  de  la  France,  où  elle  souffrit  horrible- 
ment du  froid  et  de  la  neige,  —  pour  rejoindre  l'armée 
d'Italie.  Elle  occupa  les  postes  qui  lui  furent  assignés, 
d'abord  à  Oneille  et  à  Albenga,  puis  à  Bardinetto.  Elle 
fit  partie  de  la  brigade  Rusca,  division  Augereau, 
placée  au  centre  de  l'armée  (3). 

Au  moment  où  les  AUobroges  arrivaient  à  l'armée 
d'Italie,  le  général  en  chef  Bonaparte  venait  d'en 
prendre  le  commandement.  Le  petit  officier  d'artillerie 
avait  fait  du  chemin  depuis  la  prise  de  Toulon  ! 


(1)  A.  Folliet,  les  Volontaires  de  la  Savoie. 

(2)  Archives  de  la  Guerre. 

(3)  Arch.  de  la  Guerre,  citées  par  A.  Folliet,  les  Volonlaires  de 
la  Savoie, 


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—  27  — 


CHAPITRE  11. 


CAMPAGNES  D'ITALIE 

Avril  1796  —  Mai  1798 

Dupas  commande  le  3*  bataillon  de  la  demi-brigade  Allobroge.  — 
Prise  des  redoutes  de  San  Giovanni  de  Murialdo.  —  Dupas  com- 
mande le  2«  bataillon  provisoire  de  carabiniers  à  la  tête  duquel  il 
passe  le  premier  le  pont  de  Lodi.  —  Bataille  de  Lodi.  —  Com- 
bats sur  le  Mincio.  —  Dupas  commande  le  5®  bataillon  provi- 
soire de  grenadiers.  —  Témoignages  officiels  de  satisfaction.  — 
Dupas  commande  le  8*  bataillon,  puis  le  1*'  bataillon  de 
grenadiers.  —  Siège  de  Mantoue.  —  Bataille  de  St-Georges.  — 
Citation  à  Tordre  du  jour.  —  Combat  de  Caldiero  ;  grave 
blessure.  —  Dupas  rentre  à  la  demi-brigade  allobroge.  —  Com- 
bat d'Anghiari  où  il  est  encore  grièvement  blessé.  —  Entrevue 
avec  Bonaparte  à  Milan.  —  La  demi-brigade  à  Coni.  —  Ordre 
de  départ  pour  l'Egypte. 

«  Un  pamphlétaire  a  dit  que  j'avais  conquis  Tltalie 
avec  quelques  milliers  de  galériens.  Le  fait  est  que  peut- 
être  il  n'avait  jamais  existé  une  aussi  belle  armée.  Plus 
de  la  moitié  était  composée  de  gens  instruits,  de  fils  de 
marchands,  d'hommes  de  loi,  de  médecins,  de  riches 
fermiers  et  de  la  bourgeoisie.  Les  deux  tiers  savaient 

écrire,  et  pouvaient  devenir  officiers Oh!  si  toutes 

nos  armées  eussent  été  aussi  bien  coniposées! > 


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—  28  — 

Ces  paroles  de  Napoléon  à  Sainte-Hélène  (1)  expli- 
quent quelles  prodigieuses  forces  d'intelligence  et  d'éner- 
gie ce  génie  de  la  guerre  eut  dans  la  main  pour  com- 
battre et  détruire  successivement  cinq  armées,  celle  du 
Roi  de  Sardaigne  et  les  quatre  armées  que  l'Autriche 
lui  opposa  successivement. 

Le  dévouement  de  cette  admirable  armée  était  ex- 
trême. Le  soldat,  sans  capote  et  sans  souliers,  souffrait 
horriblement  de  la  faim  et  du  froid.  Les  officiers,  depuis 
plusieurs  années,  ne  recevaient  que  8  fr.  par  mois  de 
solde,  et  l'état-major  était  entièrement  à  pied  ainsi  que 
les  officiers  supérieurs.  Les  colonels  et  les  chefs  de 
bataillon  portaient  le  sac  au  dos  comme  tous  les  officiers 
inférieurs.  «  Cependant  le  moral  des  soldats  était 
excellent,  dit  encore  Napoléon,  ils  s'étaient  signalés  et 
aguerris  sur  le  sommet  des  Alpes  et  des  Pyrénées; 
les  privations,  la  pauvreté,  la  misère,  sont  l'école  du 
bon  soldat,  y>  (2) 

La  campagne  commença  le  14  avril  par  une  série  de 
coups  d'éclat  :  dès  le  premier  jour  Dupas  y  eut  un  rôle 
important.  Le  Rapport  historiqice  de  la  demi-brigade 
Allobroge  (3)  relate  ainsi  cette  première  journée  : 

«  La  demi-brigade  allobroge  était  cantonnée-  à  Caliz- 
zano,  rivière  de  Gênes,  lorsque  Dessaix,  chef  de  la 
demi-brigade,  reçut  Tordre  de  se  porter  sur  Ziovetti 
pour  attaquer  l'ennemi  qui  gardait  cette  hauteur  et 
s'emparer  d'une  redoute  qui  la  défendait.  Aussitôt  que 

(1)  Docteur  O'Méara,  Souvenirs  de  Ste- Hélène,  Napoléon  en  eocil. 

(2)  Napoléon,  Mémoires  sur  la  campagne  d'Italie,  dictés  au  gé- 
néral de  Montholon  à  S*'-Hélène. 

(3)  Archives  de  la  Guerre,  A.  Folliet,  les  Volontaires  de  la 
Savoie, 


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—  29  — 

Ton  eût  aperçu  Tavant-poste,  Dessaix  fit  faire  halte  à 
la  troupe  et  se  hâta  d'envoyer  sur  les  flancs  des  tirail- 
leurs. Dirigeant  ensuite  sur  la  redoute  la  marche  de  sa* 
colonne,  il  crut  devoir  éloctriser  le  courage  de  ses 
camarades  par  le  chant  de  l'hymne  patriotique  du 
Départ,  et  au  même  instant,  sans  tirer  un  coup  de 
fusil,  la  redoute  fut  au  pouvoir  des  Français.  Ceux-ci 
se  rendirent  maîtres  des  tentes  et  de  beaucoup  d'autres 
effets  de  campement.  Ils  firent  plusieurs  prisonniers 
dont  quelques-uns  étaient  officiers. 

«  Chaque  soldat  fut  heureux  dans  cette  expédition. 
Il  n'y  eut  que  le  chef  de  brigade  Dessaix  qui,  en  entrant 
dans  la  redoute,  reçut  à  la  tête  un  léger  coup  de  baïoii- 
nette. 

<L  II  fallut  ensuite  poursuivre  l'ennemi.  Ce  fut  par 
des  chemins  tortueux  et  couverts  de  bois  que  nous 
arrivâmes  à  la  portée  du  canon  de  la  redoute  de  Saiut- 
Jeao-de-Murialto  avec  une  vivacité  dont  les  républicains 
seuls  sont  capables.  Le  succès  couronnait  bientôt  l'es- 
poir des  enfants  de  la  Liberté.  Cette  redoute,  armée  de 
2  pièces  de  canon,  était  défendue  par  près  de  GOO  Pié- 
mootais.  Il  s'agissait  de  les  débusquer  de  ce  poste.  A 
cet  effet,  le  brave  chef  de  bataillon  Dupas  descendit  sur 
la  gauche  à  la  tête  du  3®  bataillon,  et,  tandis  qu'il 
marche  à  travers  des  ravins  et  des  précipices  pour 
arriver  dans  une  plaine,  à  dessein  de  couper  la  retraite 
à  l'ennemi,  la  colonne  de  droite  était  en  observation 
et  celle  du  centre  se  disposait  à  emporter  la  redoute 
d'assaut.  Mais  les  troupes  piémontaises  aperçurent 
bientôt  le  mouvement  de  la  colonne  de  Dupas  et  crurent 
devoir  chercher  leur  salut  dans  une  prompte  retraite 


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—  30  — 

que  nous  vîmes  exécuter  au  moment  même  où  nous 
allions  les  attaquer. 

«  La  redoute  devenue  le  prix  de  la  valeur  républi- 
caine, nous  fîmes  plusieurs  prisonniers.  L'ennemi  perdit 
ses  caissons,  mais  il  avait  emmené  ses  pièces,  lesquel- 
les cependant  furent  bientôt  au  pouvoir  des  vainqueurs, 
car,  obligé  d'accélérer  sa  marche,  il  abandonna  sur  la 
route  son  artillerie. 

«  Nous  restâmes  maîtres  du  champ  de  bataille  et 
revînmes  sur  la  redoute  après  avoir  donné  la  chasse 
à  l'ennemi  à  près  de  2  lieues  plus  loin.  » 

De  San  Giovanni  de  Murialdo,  nos  Savoyards  couru- 
rent à  Ceva  et,  une  fois  débarrassés  des  Piémontais  par 
l'armistice  de  Cherasco,  ils  descendirent  dans  la  plaine 
et  marchèrent  rapidement  vers  les  rives  du  Pô  où  la 
brigade  Rusca  arriva  le  4  mai. 

Le  5,  toutes  les  demi-brigades  recurent  l'ordre  de 
compléter  leurs  compagnies  de  carabiniers  et  de  grena- 
diers, détachées  dès  ce  moment  de  leurs  corps,  pour 
former  des  bataillons  provisoires  à  6  compagnies  d'élite. 
Ces  bataillons  de  grenadiers  formèrent  la  brigade  Dalle- 
magne,  division  Masséna,  et  furent  bientôt  après  com- 
mandés par  Lannes,  division  Dallemagne  (1). 

Les  3  compagnies  de  carabiniers  de  la  demi-brigade 
allobroge  et  les  3  de  la  29«  légère  formèrent  le  2«  ba- 
taillon de  carabiniers  sous  les  ordres  de  Dupas  qui  fut 
désormais  détaché  de  son  régiment. 

Le  7  mai  Dupas  effectue  avec  son  bataillon  d'élite  le 


(1)  Archives  de  la  Guerre.  —  A.  Folliet,  les  Samyards  au  pont  de 
Lodi^  mémoire  lu  à  la  réunion  des  Sociétés  Savantes  de  la  Savoie 
à  Evian,  le  l®^  septembre  1896. 


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—  31  — 

passage  du  Pô  à  Plaisance.  Cette  troupe  soutient  avec 
une  admirable  fermeté  le  feu  des  Impériaux  qui  s'oppo- 
sent à  son  débarquement  et  repousse  victorieusement 
les  charges  répétées  de  la  cavalerie  autrichienne. 

Le  8,  combats  de  Fombio  et  de  Codogno.  Toute  la 
brigade  qui  avait  passé  le  fleuve  à  la  suite  de  son  ba- 
taillon de  carabiniers  attaque  et  poursuit  l'ennemi  jus- 
qu'aux portes  de  Pizzighettone. 

Dans  la  nuit  du  9  au  10  mai,  les  carabiniers  de  Dupas 
arrivent  devant  Lodi  harassés  de  fatigue  et  de  sommeil. 
Ils  prennent  4  heures  de  repos,  tombent  sur  l'ennemi 
et,  joints  aux  autres  bataillons,  le  repoussent  sur  Lodi, 
entrent  pêle-mêle  dans  la  ville  avec  les  fuyards  et  les 
chassent  de  cette  ville  située  sur  la  rive  droite  de  l'Adda. 

Sur  la  rive  gauche,  12,000  fantassins  autrichiens 
soutenus  par  4,000  cavaliers  avec  20  canons  étaient 
prêts  à  recevoir  le  choc.  Une  batterie,  soutenue  à  droite 
et  à  gauche  par  de  l'infanterie  qui  avait  crénelé  les 
maisons  voisines,  enfilait  le  pont  étroit  et  en  bois  de 
609  pieds  de  longueur. 

Bonaparte  résolut  de  passer  le  pont  de  Lodi  ce  même 
jour,  10  mai,  sous  le  feu  des  ennemis  et  de  les  étonner 
par  une  opération  si  hardie.  En  conséquence,  il  fit  appe- 
ler la  division  Augereau  qui  était  à  15  kilomètres  de 
Lodi  et,  après  quelques  heures  de  repos  accordées  aux 
bataillons  d'élite  qui  venaient  prendre  Lodi  d'assaut, 
il  les  fit  rassembler  au  nombre  d'environ  3,600  grena- 
diers et  carabiniers  commandés  par  Dallemagne.  Il  n'y 
avait  pas  un  moment  à  perdre.  A  5  heures  du  soir 
Bonaparte  fit  commencer  la  canonnade  contre  les  batte- 
ries autrichiennes. 


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—  32  — 

«  Déjà,  par  ordre  de  Masséna,  tous  les  grenadiers 
étaient  formés  eu  colonne  serrée  dans  Lodi  lorsque  le 
chef  de  bataillon  Dupas,  commandant  le  2«  bataillon 
(carabiniers),  réclama  et  obtint  l'honneur  qui  lui  était 
dû  de  prendre  leur  tète  avec  les  6  compagnies  des 
Allobroges  et  de  la  29®.  Cette  formidable  colonne  devait 
être  soutenue  par  les  divisions  Meynier  et  Auge- 
reau.  »  (1) 

Masséna  fit  droit  à  la  réclamation  de  Dupas  parce 
que  rinfanterie  légère  était  toujours  en  tête  de  Tinfan- 
terie  de  ligne  dans  les  colonnes  d'attaques  et  que,  par 
cette  raison,  les  carabiniers  devaient  marcher  en  tête 
des  grenadiers. 

«  A  rapproche  des  Français,  Sebottendorf  avait 
disposé  3  bataillons  de  Croates  et  14  bouches  à  feu  sur 
la  rive  gauche  de  TAdda,  de  l'autre  côté  du  pont, 
étroit  et  fort  long,  qui  s'appuyait  au  tiers  de  sa  lon- 
gueur sur  un  banc  de  sable  ;  5  bataillons  et  6  escadrons 
formaient  réserve  en  arrière;  enfin,  3  bataillons  déta- 
<;hés  au  couvent  de  Credo,  assuraient  la  communication 
avec  Beaulieu  campé  à  Formigara.  »  (2) 

Bonaparte  parcourut  les  rangs  des  carabiniers  et 
grenadiers  et  les  harangua  ;  il  fut  accueilli  par  les 
soldats  aux  cris  mille  fois  répétés  de  Vive  la  Répu- 
blique/ »  (3) 

L'artillerie  française  couvrait  le  pont  de  boulets  et 
de  mitraille  lorsque  tout  à  coup  Bonaparte  fait  battre 
la  charge,  la  porte  des  remparts  s'ouvre  et  la  tête  de 


(1)  Mémoires  de  Masséna  (général  Koch). 

(2)  Koch,  Mémoires  de  Masséna. 

(3)  Carlo  Botta,  Storia  dltalia.  —  Salicetti,  Lettre  au  Directoire, 


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-^  3:^  — 

colonne  se  dirige  par  un  à  gauche  vers  le  pont.  C'est 
à  ce  moment  qu'elle  offrit  le  plus  de  prise  au  feu  de 
l'ennemi  (1). 

Les  14  pièces  autrichiennes  vomissent  des  projectiles 
et  la  font  hésiter  un  moment.  Ce  temps  d'arrêt  pouvait 
tout  perdre.  Dupas,  Lannes,  s'élancent  en  avant  et 
entraînent  leurs  bataillons  au  cri  de  Vive  la  Répvr- 
blique!  Foudroyée  par  l'artillerie  et  la  fusillade,  la 
colonne  s'arrête  une  seconde  fois.  Alors  les  généraux 
accourent  se  mettre  à  sa  tête:  Berthier,  Masséna, 
Cervoni,  Dallomagne,  à  leur  tête  Dupas  suivi  de  Lannes, 
s'élancent  en  avant.  Profitant  de  l'épaisse  fumée  pro- 
duite par  les  décharges  de  l'artillerie  autrichienne,  les 
carabiniers  et  grenadiers  passent  le  pont  au  pas  do 
course.  Au  tiers  du  pont,  les  soldats  s'aperçoivent  que 
la  rive  gauche  offre  peu  de  profondeur  :  aussitôt  une 
nuée  de  volontaires  se  laissent  glisscîr  sur  le  banc  de 
sable  et  gagnent  le  bord  opposé,  dans  l'eau  jusqu'aux 
hanches,  se  jettent  en  tirailleurs  sur  l'cmnemi  pour  faci- 
liter le  passage  de  la  colonne.  Celle-ci,  bravant  la  mi- 
traille et  favorisée  par  cette  diversion,  franchit  le  reste 
du  pont  à  la  course,  culbute  tout  ce  qui  résiste  et 
tombe  sur  rartillerie  ennemie. 

La  nombreuse  cavalerie  autrichienne  fit  alors  un  retour 
offensif,  refoulant  vers  le  pont  la  colonne  française  épar- 
pillée sur  la  rive  gauche;  celle-ci  courait  le  risque 
d'être  jetée  à  la  rivière,  lorsque  la  division  Augereau 
arriva  très  à  propos,  se  ruant  à  la  baïonnette  sur  les 
carrés    et   sur   la  cavalerie   malgré  la  fatigue  d'une 

(1)  Napoléon,  Mémoire  dicté  à  Montholon  à  Ste- Hélène. 

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—  34  — 

longue  course,  Testomac  vide.  Ce  reufort  assura  la 
victoire  complète.  Beaulieu  ordonna  la  retraite  der- 
rière le  Mincie  pour  garder  les  routes  du  Tyrol  et  ren- 
forcer Mantoue  (1). 

Le  Rapport  historique  de  la  4«  légère  ou  demi- bri- 
gade allobrogc  mentionne  en  ces  termes  la  part  glo- 
rieuse prise  par  ses  carabiniers  à  cette  bataille  de  Lodi, 
très  importante  en  elle-même  et  par  ses  résultats  ma- 
tériels, mais  bien  plus  importante  encore  par  la  pro- 
fonde impression  qu'elle  produisit  en  Italie,  par  la 
démoralisation  qu'elle  jeta  dans  l'armée  autrichienne.  (2). 

«  Les  carabiniers  commandés  par  le  citoyen  Dupas 
s'élancèrent  sur  le  pont  avec  une  intrépidité  qui  n'a  pas 
d'exemple  et  sans  que  rien  fut  capable  de  les  arrêter. 
Ils  passèrent  au  milieu  d'un  feu  terrible  de  mousqueterie 
et  de  20  pièces  de  canon.  Jamais  peut-être  un  spectacle 
ne  fut  plus  frappant  aux  yeux  d'un  ennemi  qui  se  croyait 
si  bien  en  état  do  défense. 

«  Le  citoyen  Ballan,  lieutenant,  est  tué  ;  le  ch(*f  de 
bataillon  Dupas  et  plusieurs  officiers  sont  blessés,  plu- 
sieurs soldats  morts  et  blessés.  »  (3). 

Joseph  Marion,  d'Annecy,  capitaine  des  carabiniers 
allobroges,  les  lieutenants  Allouard  et  Savoye,  tous 
deux  de  Chambéry,  furent  cités  à  l'ordre  du  jour  comme 
ayant  passé  des  premiers  à  la  tête  des  carabiniers.  Le 
sous-lieutenant  François  Marion  fut  blessé.    • 

(1)  Mémoires  de  Massén<f,  —  Carlo  Botta,  alors  médecin  dans 
Tarniée  française,  Storia  d*Italia.  —A.  Folliet,  les  Satoyat-ds  au 
pont  de  Lodi. 

(2)  Ce  document  des  Archives  de  la  Guerre  a  été  publiée  par 
M.  A.  Folliet,  dans  les  Volontaires  de  la  Savoie. 

(3)  Archives  de  la  Guerre.  —  A.  Folliet,  les  Volontaires  de  la 
Savoie. 


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—  35  — 

VhistoHque  de  la  29^  légère  demi-brigade,  dont  un 
bataillon  était  du  département  du  Mont-Blanc  et  avait 
fourni  sa  compagnie  de  carabiniers  au  bataillon  d*élite, 
dit  de  son  côté  : 

<  Déjà  le  bataillon  de  carabiniers  composé  de  nos 
3  compagnies  et  des  3  compagnies  des  Allobroges, 
avaient  effectué  le  passage  ;  mais  ils  n'étaient  pas  assez 
nombreux  pour  faire  abandonner  à  l'ennemi  ses  positions 
avantageuses.  Philippe  (1),  un  de  nos  capitaines  de 
carabiniers,  reçoit  5  coups  de  feu  en  s'élançant  un  des 
premiers  dans  les  redoutes.  Tous  nos  carabiniers  suivent 
l'exemple  de  Philippe  et  font  des  prodiges  de  valeur. 
Corte,  sergent-major;  Fontaine,  caporal;  Vaucher, 
carabinier  et  quelques  autres  dos  plus  intrépides  entrent 
enfin  dans  les  retranchements  où  ils  font  un  carnage 
des  Autrichiens 

«  Nous  fîmes  dans  cette  journée  quantité  de  prison- 
niers. Elle  nous  a  coûté  une  vingtaine  d'hommes  tués 
et  environ  50  blessés.  Germain,  adjudant-major,  a  été  du 
nombre  des  morts. 

€  On  poursuivit  l'ennemi  jusqu'à  la  fin  du  jour  et 
nous  bivouaquâmes  sur  le  champ  de  bataille.  »  (2). 

Le  Rapport  historiqice  delà  4« légère  allobroge  constate 
aussi  que  les  soldats  poursuivirent  l'ennemi  pendant  plu- 
sieurs heures  et  revinrent  avec  beaucoup  do  prisonniers. 

Dupas  fut  blessé  à  la  main  et  reçut  un  sabre  d'hon- 
neur le  25  mars  1797  pour  «  avoir  passé  un  des  pre- 
miers le  pont  de  Lodi.  >  (3). 

(1)  Le  capitaine  François  Philippe,  d'Annecy,  était  oncle  de 
M.  Jules  Philippe,  préfet  et  députe  républicain  de  la  Hte-Savoie. 

(2)  Arch.  de  la  Guerre.  —  A.  Folliet,  même  ouvrage. 

(3)  Archives  de  la  Guerre. 


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—  3G  — 

Le  leodemain  Dupas  fut  envoyé  avec  tous  les  batail- 
lons d'élite  à  Crema,  place  vénitienne  dont  le  gouverneur 
avait  fermé  les  portes  aux  Autrichiens.  Le  13  mai,  rien  ne 
s'opposait  plus,  en  Lombardie,  à  la  marche  victorieuse 
de  l'armée.  Le  14  eut  lieu  l'entrée  triomphale  à  Milan. 

Le  20  mai,  Bonaparte  donna  le  commandement  de 
Tavant-garde  au  général  Kilmaine,  qui  avait  sous  ses 
ordres  4  régiments  de  cavalerie  et  les  8  bataillons  de 
grenadiers  commandés  par  Dallemagne  et  par  les  géné- 
raux de  brigade  Lannes  et  Gardanne. 

Le  25,  Dupas  était  avec  son  bataillon  à  Soncino  sur 
rOglio.  Mais  l'insurrection  qui  éclata  sur  les  derrières 
de  l'armée  fit  rebrousser  chemin  à  Tavant-garde.  Les 
grenadiers  de  la  brigade  Lannes  furent  dirigés  sur 
Bagnasco  et  Pavie  pour  réprimer  et  étouffer  prompte- 
mcntet  violemment  l'insurrection. 

Les  grenadiers  marchèrent  ensuite  sur  Lonato  et 
Castiglione  et  arrivèrent  à  Borghetto  où  ils  passèrent  le 
Mincie  après  un  vif  engagement  et  s'emparèrent  de 
Valeggio  (30  mai). 

L'esprit  qui  animait  les  troupes  est  bien  caractérisé 
par  la  dépêche  de  Bonaparte  au  Directoire  :  «  Je  ne  vous 
citerai  pas  les  hommes  qui  se  sont  distingués  par  des  traits 
de  bravoure,  il  faudrait  nommer  tous  les  grenadiers  et 
carabiniers  de  l'avant-gardo.  Ils  jouent  et  rient  avec  la 
mort.  Ils  chantent  tour  à  tour,  la  patrie,  l'amour,  etc.  » 

Au  commencement  de  juin,  Bonaparte  prenait  ses  dis- 
positions pour  le  blocus  de  Mantoue  et  pour  diverses 
expéditions.  Les  G  compagnies  qui  formaient  le  2®  ba- 
taillon de  carabiniers  furent  renvoyées  à  leurs  corps, 
la  4e  Allobroge  et  la  29^  légère  qui  occupaient  la  rive 


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n\.\'A  f«'irji''!us  portr.siiux  Anti'ichieijs.  Lclauuu,  rifiine 
•-opposjit  plus,  en  Lc»!aî>ar<li<\  à  la  uiaii'li**  vi^tiU'icusc 
de  l'anii^V'.  L(»  M  .Mit  H-mi  TtMitivt»  tritj'iiplt.ii'' û  Milan. 

Lo  20  mai,  Boiuq^artc  donna  le  roniniandeiiKnt  d" 
l'avaiû-^ardt'  an  a'/^néral  Kilinain(\  (|ni  avait  sous  s's 
ordres  4  ré;^ini*'iits  «le  cavalerie  et  l(^s  S  balailiiwis  d.- 
grenadiers  (;()iii!K;indt»s  par  Dalleuiamie  i-t  pai  l<'sa<'nt''- 
ranx  de  l-rigade  Lannes  et  .'îardariiîe. 

Le  'A"),  I)up;.<  était  'avcc  son  batailltni  à  Soncino  sur 

roglio.  Mais  Tinsurroction  qui  éclata  sur  les  d(»i'ï:èivs 

le  rarnu'(;  lit  p'brousser  chemin    à    l'avaut-gardi'.  Lv< 

:.'*'îjadiers    de  la   brigad<'    LamK\s   furent    l'ri^''s    .^ui* 

i'jîn'.'MH)  (^t  P;;vie  pour  rêi)i'im<u'  et   éiouirer  preaipt(*- 

'  ni  '  !  violfMnment  rinsnrn^eûen. 

•  •'-    Ln-enadiors    marchèrent   oiisnilo  sur   L(»nato  »  : 
'  ..•  «-riio'ie  et  aî*rivèi'(Mit  à  Borghrfîoon  \\-<  pas^'-ioiJ  | 
M-       >   ai^rès  un   vif   ''iiKiit^<-niOnt  <  t  s'en:}.arèro!.i    or 
\  ..i.'Liv'io  ('M)  uiai). 

L  ospiit  qui  animait  les  tronpr;  st  lien  caiaci  /•^♦'' 
]'\v  la  (I<'pr''!i'»  de  Donaparte  au  \n  'ecteii''  :  ^^  J<^  r  r  \«  t«> 
cii(;i'ai  pasl(»s  h(Mumi\-qui  m-  S',»nt  «'"  dingues pai  d*'>îrai' 
de  l)ra\our(\  il  faudrrit  rommrr  tous  les  greir  oî<-ïn  «-t 
carabiniers  (K^  Tavanî-garde.  Ils  ioutMit  et  i'i(Mjt  a^ec  '•■ 
lort.  Ms  c]ian!enf  t"ar  à  tour,  la  patrie,  r:i:.. nui",  ^'î.  .   ► 

\u  comni'-nc.  rirent  de  juin,  Bonap  iite  prenait  s.-     "  ■^- 

,•  )-     '^'^  [)ini'   1(^  blocus  de   Mantoue  et   ]»M.a'   div"     s 

',    'i'i'U.-.   I/s  .'' «'ompagni*  s  (jui    l'oiinai'-nt   io  L'*    ba 

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M   i     A liobi'( .«_••'  «•■         ?!•■    1- X' l't' qni  ov,ci:pai(*nt  !:•   .!'  ■ 


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—  37  — 

droite  da  lac  de  Garda  (1).  Mais  Dupas  resta  sous  les 
ordres  de  Dallemagne  et  fut  destiné  à  un  autre  batail- 
lon de  grenadiers,  le  5«.  Le  5  juin  (17  prairial),  par 
ordre  de  Bonaparte,  Berthier,  chef  de  Têtat-major 
général,  adresse  à  Dupas  Tordre  suivant  : 

«  Il  est  ordonné  au  citoyen  Dupas,  chef  de  batîûllon 
de  la  4e  demi-brigade  légère  dite  Allobrogo,  dose  rendre 
sur  le  champ  au  quartier  général  de  Roverbella  pour  y 
prendre  le  commandement  d'un  bataillon  de  grenadiers 
et  les  ordres  du  général  Dallemagne. 

«  Le  chef  de  bataillon  Dupas  amènera  avec  lui  Tadju 
dant-major  qu'il  avait  au  2^  bataillon  de  carabiniers.  — 
Al.  Berthier.  »  (2). 

Le  lendemain  6  juin,  Dupas  était  au  quartier  général 
de  Roverbella  organisant  le  5"  bataillon  d'élite  composé 
des  compagnies  de  grenadiers  des  5f)e,  104«,  209«  demi- 
brigades  et  des  1^"  bataillons  de  Mayenne-et-Loire  et 
de  Saône-et-Loire  (3). 

Le  5®  bataillon  de  grenadiers  fut  dirigé  sur  plusieurs 
points  aux  avant-postes  où  des  engagements  eurent  lieu 
avec  les  Autrichiens. 

Le  3  juillet,  Dupas  étant  au  Quartier  général  à 
Brescia,  reçut  la  lettre  suivante  de  Berthier:  (4). 

Quartier  général  de  Brescia,  le  15  messidor  an  IV. 

«  Le  Général  de  Division  Chef  de  V Etat-Major, 
Ali  Commandant  Dupas 

«  Le  Général  en  Chef,  satisfait  de  la  bonne  conduite 

(1)  A.  Folliet,  les  Volontaires  de  la  Savoie. 

(2)  Archives  Dubouloz-Dupas. 
f3)  Archives  de  la  Guerre. 

(4)  Archives  Dubouloz-Dupas.  Ce  document  a  été  publié  par 
M.  A.  Folliet  dans  les  Volontaires  de  la  Savoie. 


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—  ;w  — 

et  de  la  bravoure  du  bataillon  de  grenadiers  que 
vous  commandez,  me  charge  de  vous  dire  que,  comme 
il  a  remarqué  que  beaucoup  de  ces  braves  soldats  étaient 
sans  souliers  et  sans  habits,  il  donne  au  bataillon  entier 
comme  gratification  un  habit  et  une  paire  de  souliers,  et 
une  culotte  pour  chaque  grenadier. 

«  Vous  chargerez  sur  le  champ  un  ofBcier  d'aller  à 
Castiglione  pour  y  chercher  ces  habillements;  mais, 
comme  il  y  aurait  de  la  difficulté  à  y  trouver  des  voi- 
tures, il  se  les  procurera  ailleurs  pour  y  arriver. 

«  Ci-joint  un  ordre  au  Commandant  de  Castiglione 

pour  délivrer  ces  objets,  Tofflcier  que  vous  y  enverrez  le 

lui  présentera. 

Al.  Bkrthier.  » 

L'ordre  dont  il  est  question  porte  458  habits,  autant 
de  culottes  et  autant  de  paires  de  souliers. 

Dupas  fut  tout  de  suite  mis  en  route  pour  l'expédition 
do  Livourne  ;  il  en  revint  avec  son  bataillon  pour  pren- 
dre part  au  siège  de  Mantoue  ;  il  fut  chargé  de  garder 
le  poste  de  Cerèse,  où  il  eut  à  repousser  dans  divers 
combats  la  garnison  de  Mantoue. 

Les  assiégés  exécutaient  de  fréquentes  sorties.  Le 
10  juillet,  à  2 heures  du  matin,  le  général  Wukassowich 
attaqua  les  avant-postes  français  avec  1,500  hommes 
par  la  porte  de  Cerèse,  tandis  qu'il  en  faisait  sortir 
3,000  autres  par  la  porte  de  Pradella.  L'ennemi  était  à 
une  portée  de  pistolet  des  batteries  qu'il  espérait  enle- 
ver lorsque  les  généraux  Fiorella  et  Dallemagne  firent 
avancer  le  .>  bataillon  de  grenadiers  «  commandé  par 
Dupas,   le  même  qui   le  premier  a  passé  le   pont  de 


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—  39  — 

Lodi  »(1)  qui  barra  le  chemin  aux  assaillants  tandis 
que  les  autres  troupes  tombèrent  sur  les  Autrichiens  et 
les  mirent  en  déroute  après  2  heures  de  combat  et  leur 
avoir  causé  une  perte  de  3  à  400  hommes.  (2). 

La  belle  conduite  du  bataillon  et  de  son  chef,  valut  à 
Dupas  la  lettre  suivante,  si  flatteuse,  de  Bonaparte 
(20  juillet)  : 

«  Quartier  général  de  Castiglione,  2  thermidor 
an  IV  de  la  République. 

«  Bonaparte^  Général  en  chef  de  l'armée  d'Italie 
au  citoyen  Dupas 

«  Je  vous  prie,  citoyen,  de  témoigner  aux  braves  gre- 
nadiers du  5®  bataillon  ma  satisfaction  sur  leur  bravoure 
et  leur  bonne  conduite  devant  Mantoue.  Je  ne  manquerai 
pas  d'en  instruire  le  Gouvernement  et  de  faire  connaître 
à  toute  Tarmée  les  services  essentiels  qu'ils  rendent  à 

la  Patrie. 

Bonaparte  »  (3). 

C'est  au  siège  de  Mantoue  que  Dupas  changea  encore 
de  commandement  ;  le  5«  bataillon  de  grenadiers  ayant 
été  dissous  par  le  renvoi  des  compagnies  à  leurs  corps 
respectifs,  il  reçut  le  commandement  du  8«  bataillon  de 
grenadiers,  à  la  tête  duquel  il  se  distingua  à  la  bataille 
de  St-Georges  (19  sept.)  (4). 

Quelques  jours  avant  la  bataille  de  St-Georges,  le 
11  septembre,  Murât  avec  une  avant-garde  de  cavalerie 
s'étant  imprudemment  engagé  contre  la  division  Autri- 


(IJ  Rapport  officiel.  Victoires  et  conquêtes  des  Français. 

{2}  Victoires  et  conquêtes  des  Français. 

(3)  Arch.  Dubouloz-Dupas.  Document  déjà  publié  par  M.  FoUiet 


dans  les  Volontaires  de  la  Savoie. 
(4)  Archives  de  la  Guerre. 


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—  40  — 

chienne  Ott  alors  qu'il  no  pouvait  être  soutenu  que  par 
Tavant-garde  de  Masséna,  commandée  par  le  général 
Pijon,  ne  put  parvenir  à  couper  la  division  Autrichienne. 
Au  contraire  le  général  Ott  attaqua  vigoureusement 
Pijon,  le  culbuta  et  reprit  le  village  de  Cerca  dont  les 
Français  venaient  de  s'emparer.  Bonaparte  accourut  et 
ordonna  une  prompte  retraite  qu'il  fit  couvrir  par  le 
8«  bataillon  de  grenadiers  de  Dupas.  Grâce  au  courage 
et  au  dévouement  du  8^  grenadiers,  dont  le  général 
Victor  dirigeait  le  feu  avec  Dupas,  les  troupes  mal  en- 
gagées purent  effectuer  leur  retraite,  tandis  que  les 
braves  du  8^  bataillon  soutenaient  avec  une  admirable 
fermeté  tout  l'effort  des  colonnes  ennemies  (1). 

Dans  ces  diverses  affaires  Dupas  reçut  encore  trois  bles- 
sures aux  mains  et  à  l'avant-bras  droit.  «  Ces  différentes 
blessures  ainsi  que  celle  de  Lodi  n'ont  pu  être  constatées 
attendu  que  les  bataillons  d'élite  n'avaient  pas  de  Conseil 
d'administration  et  qu'ils  étaient  aussitôt  dissous  que 
formés.  Mais  il  y  a  une  attestation  en  forme  du  Conseil 
d'administration  de  la  27^  légère  (Allobroge)  »  (2). 

Dupas,  rentré  au  Quartier  général  et  éloigné  de  son 
corps  qui  combattait  dans  le  Tyrol  italien,  venait  de 
recevoir  le  commandement  du  1^^' bataillon  de  grenadiers. 

Placé  sous  les  ordres  d'Augereau,  le  12  novembre, 
a  la  pointe  du  jour,  Dupas  s'élança  avec  son  bataillon  et 
enleva  Caldiero,  tandis  que  Masséna  attaquait  Alvinzi 
sur  la  gauche.  Mais  tous  les  efforts  furent  inutiles; 
Augereau  dut  se  replier  sur  San  Michèle  et  Masséna 

(1)  Archives  de  la  Guerre.  —  Victoires  et  conquêtes  des  Français. 

(2)  Note  de  la  main  de  Dupas,  aux  Archives  de  la  Guerre. 


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—  41   — 

sur  San  Martino.  Dupas  recul  à  Tattaquc  de  Galdioro 
une  grave  blessure  :  une  balle,  qui  ne  put  être  extraite 
et  qu'il  garda  toute  sa  vie,  l'atteignit  au  flanc  droit, 
«  à  quatre  travers  de  doigt  de  Tépine  antérieure  et  su- 
périeure de  l'os  des  hanches  »  (1). 

Ramené  à  l'arriére  de  l'armée,  Dupas  fut  transfère  à 
l'hôpital  de  Crémone  où  il  était  encore  en  traitement 
lorsque,  le  4  janvier  1797,  il  reçut  du  chef  de  l'ôtat-major 
Berthier,  au  nom  du  général  en  chef,  l'ordre  de  rejoindre 
son  corps,  la  27®  sous  Mantoue. 

La  27®  légère  (telle  était  la  nouvelle  dénomination  de 
l'ancienne  demi-brigade  AUobroge)  était  réduite  à  bien 
peu  de  combattants.  Elle  avait,  en  efTet,  beaucoup  souf- 
fert le  17  novembre  à  la  Corona,  où  son  colonel  Des- 
saix,  grièvement  blessé,  avait  été  fait  prisonnier  avec 
39  officiers  et  un  grand  nombre  de  sous-ofHciers  et 
soldats,  ainsi  que  les  généraux  Fiorella  et  Valette  (2). 
Privés  ainsi  do  leur 'colonel  et  de  leurs  officiers  supé- 
rieurs et  commandés  provisoirement  par  l'adjudant  gé- 
néral Duphot,  les  débris  de  la  27'  allobroge  avaient  le 
plus  grand  besoin  d'être  commandés  par  un  chef  comme 
Dupas,  que  Ton  surnommait  à  l'armée  d'Italie  le  brave 
des  braves  (3), 

Dupas  venait  de  rejoindre  sa  27«  légère  à  Legnago, 
division  Augereau.  lorsque  le  14  janvier  1797,  le  jour 
même  où  se  livrait  la  bataille  de  Rivoli,  le  général 
autrichien  Prov(»ra  traversa  TAdige  à  Anghiari,  se  diri- 


(1)  Note  de  la  main  de  Dupas,  aux  Archives  de  la  Guerre. 
(2;  A.  Folliet,  les  Volontaires  de  la  Savoie.  —  Arch.  de  la  Guerre. 
(3)  Biographie  des  Contemporains  par  Arnaud,  Jouy,  Norvins, 
1821. 


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—  42  — 

géant  sur  Mantoue.  Augereau  marcha  rapidement  sur 
Anghiari  à  la  tête  d'une  colonne  dans  laquelle  était  la  27^ 
légère  sous  les  ordres  de  Duphot,  bouscula  rarriére-garde 
de  Provera  et  fit  1,500  prisonniers.  Dans  le  combat 
Dupas  reçut  sa  6«  blessure  :  une  balle  lui  traversa  la 
cuisse  droite  de  part  en  part,  de  dedans  en  dehors  et  de 
haut  en  bas,  à  peu  prés  au  tiers  inférieur  de  ce  mem- 
bre (1). 

Transporté  à  l'hôpital  do  Ferrare,  Dupas  fut  soigné 
par  le  chirurgien  Laurent  qui  constata  que  les  blessures 
commençaient  à  se  cicatriser,  mais  recommanda  au 
blessé  do  ne  pas  reprendre,  avant  longtemps,  son 
service. 

Dupas  fut  ensuite  transporté  au  dépôt  de  la  27®  légère 
établi  à  Milan  après  l'armistice  de  Léoben.  Berthet, 
chirurgien  de  l^^  classe,  et  Montfalcon,  médecin  de 
l'armée  à  Milan,  déclarent  que  Dupas  ne  peut  plus  rem- 
plir ses  fonctions  militaires,  jusqu'à  nouvel  ordre,  et 
qu'il  doit  rester  au  dépôt  pour  se  reposer.  Quant  à  la 
27e  légère,  elle  tint  garnison,  dans  l'été  de  1797,  dans 
les  places  de  Legnago,  Bevilacqua  et  Mantoue  où  la 
troupe  fut  atteinte  d'une  fièvre  épidéuiique  qui  enleva 
beaucoup  de  monde  et  priva  la  27^  légère  de  l'avantage 
de  faire  partie  de  l'expédition  d'Egypte  pour  laquelle 
elle  était  destinée  (2). 

Après  la  paix  do  Campo-Formio,  Bonaparte  passa  à 
Milan,  en  octobre  1797.  Le  corps  d'officiers  de  la 
27«  légère,  ou  du  moins  ce  qu'il  en  restait,  car  le  colonel 
et  un  grand  nombre  d'officiers  étaient  encore  prisonniers 

(1)  Note  de  Dupas,  archives  de  la  Guerre. 

(2)  André  Folliet,  les  Volontaires  de  la  Savoie. 


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—  43  — 

en  Hongrie,  alla  saluer  le  général  en  chef.  Les  officiers 
allobrogos  furent  très  bien  reçus.  Après  avoir  dit  des 
choses  flatteuses  à  la  demi-brigade,  Bonaparte  s'ad ros- 
sant à  Dupas,  lui  dit  :  «  Vous  n*étt  s  que  chef  de  kitail- 
lon  !....  Je  n*oubli(Tai  jamais  les  services  que  vous  avez 
rendus  à  la  tête  des  grenadiers  au  passage  du  pont  de 
Lodi,  et  si  jamais  j'écris  l'histoire  de  nos  campagnes, 
vous  ne  serez  pas  oublié  !»(!). 

En  179S,  après  k)  retour  de  captivité  de  Dessaix  et  de 
ses  camarades,  la  27®  légère  fut  envoyée  àConi,  où  elle 
séjourna  six  mois  (2).  Les  chirurgiens  constatent  que 
Dupas  <(  souffre  depuis  longtemps  d'une  affection  de 
poitrine,  do  fièvre,  qui  le  minent  peu  à  peu.  Cette  mala- 
die résulte  de  fièvres  prises  à  Legnago  conjointement 
avec  ses  frères  d'armes  de  la  demi-brigade,  qui  en  furent 
si  pernicieusement  affectés  dans  les  mois  de  messidor 
et  thermidor  derniers.  Mais  les  causes  principales  pro- 
viennent d'une  activité  de  servico  non  interrompu  dés 
le  principe  de  la  Révolution,  à  Paris,  à  l'armée  des 
Alpes,  à  Toulon,  à  Tarmée  d'Espagne,  à  celle  d'Italie, 
notamment  aux  tranchées  de  Mantoue  où  il  commandait 
alors  le  5®  bataillon  de  grenadiers  ;  dans  les  blessures 
couvrant  son  corps,  surtout  celles  reçues  dans  la  bataille 
du  22  brumaire  (Caldiero)  entre  St-Martin  et  Montebello, 
où  il  fut  blessé  gravement  au  flanc;  dans  la  bataille  d'An- 
ghiari  prés  Legnago,  le  25  nivôse  (14  janvier)  où  il  eut 
la  cuisse  droite  dangereusement  traversée;  ce  qui  l'a 
exposé  à  un  traitement  fort  long  et  douloureux,  tant  à 


(1)  Capitaine    Laugier,  Souvenirs   de  la   27^  légère,  cité   par 
M.  André  Folliet,  dans  la  Revue  Satoisienne  d'Annecy. 

(2)  A.  Folliet,  les  Volontaires  de  la  Savoie. 


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—  46  - 


CHAPITRE  III. 


EXPÉDITION   D'EGYPTE 
Mai  1798  à  Juin  1800 

Départ  de  Toulon  pour  TEgypte.  —  Dupas  commande  les  guides 
à  pied  du  général  en  chef  Bonaparte  à  la  prise  de  Malte.  — 
Débarquement  en  Egypte  et  prise  d'Alexandrie.  —  Bataille  des 
Pyramides.  —  Dupas  est  nommé  Colonel  (chef  de  brigade)  et 
commandant  de  la  citadelle  du  Caire.  —  Ses  trente  mois  de 
commandement.  —  Sa  correspondance  avec  Bonaparte.  —  11 
est  cité  à  Tordre  du  jour  de  Tarmée.  —  Départ  de  Bonaparte.  — 
Correspondance  de  Dupas  avec  le  général  en  chef  Kléber.  — 
Défense  énergique  de  Dupas.  —  Sa  correspondance  avec  les 
généraux  Friant  et  Damas.  —  Dernière  lettre  de  Kléber.  — 
Assassinat  de  ce  grand  homme. 

Boaaparte  venait  de  décider  le  Directoire  à  entre- 
prendre cette  fameuse  expédition  d'Egypte  dirigée 
contre  TAngleterre,  cette  ennemie  acharnée  de  la  Répu- 
blique française,  expédition  destinée  à  menacer  et  à  at- 
teindre les  possessions  anglaises  de  Tlnde. 

Dupas  débarqua  à  Toulon  où  il  trouva,  le  19  mai 
1798,  la  flotte  française  prête  à  mettre  à  la  voile  : 
10,000  marins  et  une  armée  de  terre  de  30,000  hommes 
s'embarquaient.  Bonaparte  emmenait  les  meilleurs 
généraux  qui  avaient  servi  sous  ses  ordres  et  quelques- 


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—  47  — 

uus  de  ceux  qui  s'étaient  illustrés  aux  armées  du  Rhin  (1). 

Le  commandement  que  Bonaparte  réservait  à  Dupas 
était  remploi  do  chef  de  bataillon  commandant  les  Guides 
à  pied  du  généml  en  chef  (2).  Le  commandant  des 
Guides  ne  quittait  pas  le  Quartier  général  et  recevait 
directement  les  ordres  du  général  en  chef. 

Partie  de  Toulon  le  19  mai,  la  flotte  se  présenta  devant 
Malte  le  10  juin.  Le  grand-maître  de  TOrdre  de  Malte, 
souverain  de  Tilo,  refusa  l'entrée  du  port  et  se  mit  sous 
les  armes.  Bonaparte  débarqua  quelques  troupes,  entre 
autres  Dupas  et  ses  Guides  (3),  qui  culbutèrent  les 
troupes  de  l'ordre  des  chevaliers  de  Malte.  Le  Grand 
Maitre  rendit  la  forteresse,  Vaubois  y  fut  laissé  en  qua- 
lité de  gouverneur  et  la  flotte  continua  sa  route  sur 


(1)  Etat-major  de  Tarmée  d'Egypte  : 

Bonaparte,  général  en  chef. 

Berthier,  chef  d'état-major  général. 

Dommartin,  général  commandant  l'ai'tiUerie. 

Caffarelli,  général  commandant  le  génie. 

Disponibles  à  TEtat-major:  les  généraux  de  division  Menon, 
Dumay,  Vaubois,  Alexandre  Dumas  ;  les  généraux  de  brigade, 
Dupuy,  Marmont. 

Division  d*avant-garde  :  Desaix,  ayant  sous  ses  ordres  les  géné- 
raux de  brigade  Belliard  et  Friant. 

Division  de  droite:  R«ynier,  ayant  sous  ses  ordres  les  généraux 
de  brigade  Damas  et  Verdier. 

Division  du  centre:  Kléber,  ayant  sous  ses  ordres  les  généraux 
de  brigade  Lannes  et  Lanusse. 

Division  de  gauche  :  Dugua,  ayant  sous  ses  oi*dres  les  généraux 
de  brigade  Vial  et  Mireur. 

Division  de  réserve  !  Bon,  ayant  sous  ses  ordres  le  général 
de  brigade  Rampon. 

Cavalerie  démontée:  division  Murât,  brigades  Leclerc  et 
Zayonschek. 

{2)  C'était  un  usage  dans  les  guerres  de  la  Révolution,  que  les 
généraux  en  chef  eussent  un  corps  de  guides  attachés  à  leur 
quartier  général. 

(3)  Archives  de  la  Guerre. 


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—  48  — 

TEgypte  le  19  juin  (»t  arriva  le  l^»*  juillet  dans  la  rade 
d'Alexandrie. 

La  nuit  suivante,  Dupas  débarqua  à  la  suite  de  Bona- 
parte. ;  tout  de  suite  les  remparts  d'Alexandrie  furent 
attaqués  et  plusieurs  portes  emportées  d'élan.  La  ville 
se  soumit,  et  Kléber,  blessé,  en  fut  le  gouverneur. 

L'Egypte,  sous  la  suzeraineté  nominale  du  Sultan  de 
Constantinople,  était  en  réalité  sous  le  joug  des  Mame- 
lucks,  race  noble  de  guerriers,  seigneurs  féodaux  for- 
mant une  riche,  nombreuse  et  brave  cavalerie.  Cette 
aristocratie  des  Mamelucks  ne  reconnaissait  que  la 
suprématie  de  deux  d'entre  eux  :  Ibrahim,  l'adminis- 
trateur, et  Mourad,  le  guerrier.  Ce  dernier  se  mit  à  la 
tête  des  troupes  égyptiennes  et  marcha  contre  l'arme'^ 
française. 

Battue  à  Rahmanieh  le  10  juillet,  à  Chobràkit  le  13, 
l'armée  des  Mamelucks  fut  anéantie  à  la  bataille  des 
Pyramides  où  périrent  plus  de  10,000  musulmans 
(21  juillet).  Le  25,  Bonaparte  fit  son  entrée  au  Caire 
précédé  de  Dupas  à  la  tête  des  guides. 

Les  mois  suivants  furent  employés  à  repousser  les 
retours  offensifs  de  iMourad-Bey  qui  fut  battu  à  Salahieh 
le  1 1  août,  à  Sedment  le  7  octobre,  et  Desaix  le  pour- 
suivit dans  la  Haute-Egypte. 

Cependant  la  flotte  française,  abordée  par  la  flotte 
anglaise  aux  ordres  de  Nelson,  fut  détruite  dans  la  rade 
d'Aboukir.  Pour  aggraver  ce  désastre,  la  Turquie,  en- 
traînée par  l'Angleterre,  déclara  la  guerre  à  la  France; 
cette  nouvelle  produisit  une  profonde  impression  : 
aussitôt  éclata  l'insurrection  du  Caire  (21  octobre)  dans 
laquelle  périt  le  général  Dupuis,  commandant  de  la  place. 


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—  49  — 

Cette  révolte  fut  éoergiquement  réprimée  par  Bona- 
parte. Mais  il  comprit  qu'il  fallait,  dans  la  citadelle  du 
Caire,  un  homme  exceptionnellement  énergique  et  d'une 
siMidité  de  caractère  à  toute  épreuve.  Aussi,  avant  d'en- 
treprendre l'expédition  de  Syrie,  Bonaparte  nomma 
Dupas  commandant  de  la  citadelle  du  Caire  avec  le 
grade  de  colonel  qu'il  avait  bien  gagné  ! 

€  Le  général  en  chef  voulant  donner  au  chef  de  ba- 
taillon Dupas  un  témoignage  de  la  satisfaction  du 
Gouvernement  pour  la  manière  distinguée  avec  laquelle 
il  a  toujours  servi,  notamment  à  l'armée  d'Italie  et  en 
Egypte,  le  nomme  chef  de  brigade  à  la  suite  de  la 
69«  1/2  brigade  de  bataille  ;  en  attendant  qu'il  soit  en 
pied  dans  ce  corps,  le  général  en  chef  lui  donne  le  com- 
mandement de  la  citadelle  du  Caire  que  lui  remettra  le 
citoyen  Brun  qui  est  employé  àl'état-major  général. 

Alex.  Berthier.  » 

(Archives  de  la  guerre). 

Le  12  janvier  1799,  Dupas  reçut  la   lettre  suivante  : 

«  Du  23  nivôse,  an  Vil 
Au  citoyen   Dupas 
€  Le  chef  de  brigade  Bessiére  vous  remettra,  citoyen, 
votre  nomination  de  chef  de  brigade  à  la  suite  (1)  de  la 
G9«  demi-brigade,  et  l'ordre  pour  prendre   le  comman- 
dement de  la  citadelle Il  vous  donnera  des  ordres 

relatifs  à  ce  commandement.  Salut  et  amitié. 

Alex.  Berthier 
Chef  de  Vétat-major  général.  » 

(l)  Depuis  les  amalgames  successifs  qui  eurent  lieu  en  1794  et 
17^,  les  nouvelles  demi-brigades,  formées  d'anciens  corps  amal- 
gamés, avaient  un  certain  nombre  d'officiers  du  même  grade  qui 
étaient  à  la  suite  ou  surnuméraires.  Aussi  Dupas  rattaché  nomi- 
nalement à  la  69*,  ne  commanda  jamais  ce  corps. 

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—  50  — 

Dupas  prit  aussitôt  possession  de  son  commandement 
qu'il  exerça  avec  la  plus  inébranlable  fermeté  pendant 
trente  mois  au  milieu  des  insurrections,  de  la  famine  et 
de  la  peste  et  avec  de  faibles  moyens  de  défense.  Le 
Journal  qu'il  a  laissé  de  cette  longue  défense  (1)  va 
faire  connaître  les  difficultés  de  la  situation,  ainsi  que 
rénergie  et  l'intégrité  qu'il  déploya  dans  ce  commande- 
ment où  il  eut  à  correspondre  non  seulement  avec  le 
commandement  en  chef  et  avec  l'état- major  général, 
mais  avec  les  généraux  de  division  Damas,  Beliiard, 
Dugua,  Reynier  ;  avec  les  généraux  de  brigade  Duran- 
teau,  Songis,  Friand  ;  les  adjudants  généraux  Aimeras 
et  Firlet,  ce  dernier  chef  d'état-major  de  l'artillerie. 

JOURNAL  DE  LA  CITADELLE 

3  février  1799.  —  Le  journal  de  Dupas  débute  par 
deux  lettres  de  Bonaparte,  les  voici  : 

«Quartier  général  du  Caire,  15  pluviôse  an  VII  (3  février  1799) 

«  Je  VOUS  prie,  citoyen  commandant,  de  prendre  de 
concert  avec  le  commandant  d'artillerie  de  votre  place, 
des  mesures  pour  que  dans  la  journée  de  demain,  il  y  ait 
50,000  cartouches  et  que  l'on  continue  à  en  faire  jusqu'à 

300,000. 

Bonaparte    » 
«  Quartier  général  du  Caire,  19  pluviôse  an  VII  (7  février  1799) 

«  Au  Commandant  de  la  Citadelle^ 
«  Vous  voudrez  bien,  citoyen  commandant,  laisser 
sortir  sur  la  demande  du  général  d'artillerie  toutes  les 

(1)  h^  Journal  de  La  Citadelle  du  Caire  et  la  correspondance 
appartiennent  aux  archives  Dubouioz-Dupas  :  cette  indication  est 
donnée  une  fois  pour  toutes  pour  éviter  les  répétitions.  Le 
Journal  forme  une  série  de  cahiers  manuscrits.  F.  Dubouloz. 


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-  51  — 

munitions  de  guerre  excédantes  pour  tirer  150  coups 
par  pièce  et  300,000  cartouches,  et  toutes  les  munitions 
de  bouche  excédantes  à  ce  qui  (»st  nécessaire  pour 
nourrir  votre  garnison  pendant  cinq  mois. 

Bonaparte.  > 

Pour  se  conformer  aux  prescriptions  de  cette  dernière 
lettre,  Dupas  dresse  un  inventaire;  il  en  résulte  que 
pour  nourrir  pendant  cinq  mois,  c'est-à-dire  jusqu'au 
19  messidor,  toute  sa  garnison,  il  lui  manque  150  quin- 
taux de  riz  ;  — ^  9.482  q.  de  biscuit  ;  —  1,300  fagots  de 
bois;  400  q.  de  gros  bois;  —  73  pintes  d'huile;  — 
26  q.  de  beurre  et  240  pintes  de  vinaigre.  Il  lui  faudrait 
même  une  plus  grande  quantité  de  vinaigre  pour  le 
mêler  à  l'eau  saumàtre,  la  seule  qui  soit  livrée  aux 
troupes  valides,  celle  des  citernes  étant  réservée  pour 
l'usage  de  l'hôpital. 

Eq  présence  des  troubles  qui  agitent  la  population  du 
Caire  et  de  ses  attaques  journalières,  la  citadelle  est 
loin  de  se  trouver  dans  un  état  convenable  de  défense; 
à  tout  moment  elle  est  exposée  à  des  assauts.  Dupas 
s'en  plaint,  mais  ses  réclamations  sont  rarement 
écoutées. 

En  revanche  son  infatigable  activité  et  l'accomplisse- 
ment scrupuleux  de  ses  devoirs  lui  valent  le  22  juin  1799, 
d'être  cité  à  l'ordre  du  jour  de  l'armée,  ce  qui  fut  porté 
à  sa  connaissance  par  la  lettre  suivante  : 

«  Quartier  général  du  Caire,  4  messidor  an  VU. 

Alex.  Berthier,  général  de  diviaion,  chef  de 
V Etat-major  général  de  V armée,  au  citoyen 
Dupas  y  commandant  la  Citadelle  y 

Je  vous  envoie  officiellement,  citoyen,  l'ordre  du  jour 


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^  52  — 

d*aujoard'hui  dans  lequel  le  général  en  chef  vous  donne 

un  témoignage  bien  honorable  de  la  satisfaction  qu'il  a 

de  votre  manière  de  servir.  Je  suis  d'autant  plus  flatté 

de  cette  circonstance,  que  j'avais  prévenu  d'avance  le 

général  en  chef  de  la  satisfaction  qu'il  aurait   de  vous 

avoir  confié  le  commandement  si  important  de  la  cita- 

'^-^^^,  Salut  et  amitié. 

Alex.  Berthier.  » 

r  les  instances  do  Dupas,   Bonaparte  ordonne  la 

en  défense  de  la  citadelle,  et  en  informe  le  com- 
lant  par  lettre  du  7  juillet  (19  messidor  an  VII): 
:oyen  commandant,  le  commandant  du  Génie  a 
des  ordres  pour  donner  200  fr.  par  jour  pour  les  tra- 

de  la  citadelle.  J'ai  écrit  au  commandant  d'artille- 
our  qu'il  me  fasse  un   rapport  sur  les  objets  que 

demandez  pour  la  citadelle.  Je  vous  salue. 

Bonaparte.  » 

)us  interrompons  ici  le  journal  de  la  citadelle  pour 
[ionner  la  détermination  prise  par  Bonaparte  de 
•er  en  France.  Le  22  août  1799,  il  s'embarque  avec 
hier,  Andréossy,  Murât,  Lannes,  Marmont,  etc., 
ant  le  commandement  en  chef  à  Kléber,  qui  ne 
mule  pas  son  indignation  de  cette  façon  d'échapper 
responsabilités. 

!U  de  temps  après  son  retour  en  France,  Bonaparte 
e  coup  d'Etat  du  18  brumaire  et  établit  le  gouver- 
mt  consulaire.  Kléber  succède  dignement  à  Bona- 
î  et  remporte  de  nouvelles  victoires,  de  novembre 
à  mars  1800,  à  Damiette,  Héliopolis....  Mais  une 
rection  formidable  éclate  au  Caire  le  20  mars  1800  ; 
idant  général  Duranteau,  avec  200  hommes  seule- 


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—  53  — 

înent,  résiste  à  ces  flots  d'ennemis.  L'insurrection  durait 
depuis  deux  jours  quand  arrive  le  général  Lagrange, 
ce  secours  rend  le  quartier  général  inexpugnable.  Dupas 
bombîirdait  la  ville  depuis  le  début  de  la  révolte,  ainsi 
qu'il  en  avait  d'ailleurs  reçu  l'ordre  de  Kléber.  Dupas  lui 
avait  répondu  :  «  Les  ordres  que  je  viens  de  rcîcevoir 
m'obligent  à  vous  prévenir  que,  lorsque  les  communica- 
tions de  la  citadelle  avec  la  ville  seront  interceptées,  je 
n'aurai  d'autre  nourriture  qu'un  peu  de  riz  et  l'eau  sau- 
màtre  du  puits  Joseph  ;  les  poudres  sont  mauvaises  et 
sont  presque  épuisées,  il  ne  reste  que  10,000  cartouches, 
soit  25  à  30  par  homme.  Le  nombre  des  fusils  est  insuf- 
fisant ainsi  que  celui  des  ouvriers  réparant  les  affûts  et 
lescrapaudines;  veuillez  m'en  voyer  des  médicaments,  un 
offlcier  de  santé  pour  soigner  nos  blessés,  ce  qui  est 
d'autant  plus  nécessaire  que  des  cas  de  peste  se  sont 
déclarés.  Mais  dans  ces  envois  il  faudrait  que  l'escorte 
soit  doublée  et  arrive  jusqu'à  la  portée  des  feux  de  la 
citadelle,  parce  que  nous  pourrions  lui  remettre  une 
poignée  de  braves  delà  13«qui  se  sont  battus  en  héros.  » 
Ensuite  il  rappelle  que  les  détachements  qui  s'approchent 
do  la  citadelle  doivent  prendre  leur  position  et  attendre 
qu'un  coup  de  canon  leur  ait  signalé  la  sortie  d'un  poste 
pour  les  secourir  au  besoin  contre  les  Osmanlis  et  la 
population  du  Caire. 

Mais  aucune  de  ces  escortes  ne  vint  lui  apporter  les 
munitions  de  bouche  et  de  guerre  qu'il  réclamait.  Sa 
situation  empire  chaque  jour.  Il  prévient  le  général 
Friant  que  tous  ses  boulets  ont  été  lancés  sur  le  Caire, 
et  qu'avant  deux  jours  les  autres  munitions  de  guerre 
seront  épuisées. 


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—  54  — 

Le  lendemain  23  mars,  Dupas  avertit  le  général  Priant 
que  Mourad-Bey  avait  passé  le  Nil  au  dessus  de  Gyzeh 
la  veille  de  la  bataille  d'Héliopolis,  le  20  mars  ;  qu'au- 
jourd'hui 3  germinal  (2;^  mars),  il  l'a  repassé  au  même 
endroit  avec  Ibrahim-Bey  ;  que  l'un  et  l'autre  suivis  de 
200  cavaliers  ont  pénétré  dans  l'intérieur  de  la  ville, 
«  ce  qu'ils  n'auraient  certainement  pu  faire  si  les  sorties 
que  j'ai  ordonnées  et  les  feux  de  la  citadelle  avaient  été 
appuyés  par  le  camp  du  Vieux-Caire.  Je  ne  conçois  pas 
qu'à  la  suite  des  feux  nourris  de  la  garnison,  des  bom- 
bes, des  boulets  lancés  de  la  citadelle,  de  la  poussière 
produite  par  les  chevaux  des  Mamelucks,  le  camp  ne 
se  soit  pas  réveillé.  Jo  \iens  d'écrire  au  général  Verdier 
pour  qu'il  établisse,  au  moins  le  jour,  de  nombreux 
postes  au  bout  du  grand  aqueduc,  afin  d'intercepter  la 
communication  des  insurgés  avec  les  villages  situés  de 
l'autre  côté  du  Nil  ;  pour  qu'il  incendie  les  pailles  et 
grains  renfermés  dans  ces  villages  afin  d'en  priver  les 
chevaux  turcs  et  mamelucks,  ainsi  que  les  habitants.  > 
Dupas  termine  ce  rapport  par  ces  lignes  au  général 
Priant:  «  Je  suis  très  flatté,  citoyen  général,  d'être  sous 
vos  ordres,  j'ose  vous  assurer  d'avance  que  je  ne  négli- 
gerai rien  pour  mériter  votre  estime.  Veuillez  me  don- 
ner des  nouvelles  de  l'armée.  » 

L'armée  était,  avec  Kléber,  à  la  poursuite  de  Tim- 
mense armée  d'Ibrahim,  battue  et  dispersée  à  Héliopolis. 

Le  lendemain  24  mars,  un  Turc  s'était  avancé  jusqu'au 
pied  de  la  citadelle  pour  supplier  que  l'on  cessât  d'in- 
cendier l'un  des  quartiers  voisins;  il  annonça  que  deux 
Pachas  ayant  pénétré  dans  la  ville  le  \^^  germinal 
(20  mars)  avec  quelques  troupes,  un  engagement  avait 


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—  55  — 

eu  lieu  avec  les  Français  où  tous  les  Turcs  avaient  été 
tués.  Les  jours  suivants  do  nouveaux  habitants  arri- 
vèrent à  la  citadelle  pour  supplier  encore  que  Ton  cessât 
de  tirer  sur  la  ville.  «  C'est  ainsi,  ajoute  Dupas  dans 
son  journal,  que  j'ai  pu  me  rendre  compte  des  effets 
terribles  produits  dans  rintérieur  du  Caire  par  nos 
bombes  et  obus.  » 

La  situation  des  défenseurs  de  la  citadelle  devient 
d'un  jour  à  l'autre  plus  critique.  Les  assiégeants  redou- 
blaient leurs  attaques,  et  les  munitions  s'épuisaient 
complètement.  Dupas  ne  recevait  aucune  nouvelle  du 
général  en  chef,  dont  le  retour  au  Caire  était  attendu 
avec  d'autant  plus  d'impatience  que  les  as.siégés  n'a- 
vaient plus  d'autre  espoir  de  voir  les  assiégeants  refou- 
lés, les  communications  rétablies  et  les  munitions  et 
le  matériel  complétés.  Dans  son  désespoir,  Dupas  écrit 
à  Priant  :  «  Malgré  mon  énergie  et  à  moins  d'un  ordre 
contraire,  mais  formel,  je  suis  tenu  de  me  rendrtî,  je  ne 
peux  plus  résister.  »  Il  résistera  cependant,  mais  en 
rappelant  au  commandant  de  la  place  du  Caire,  Priant, 
que  les  troupes  de  la  citadelle  ne  boivent  depuis  sept 
jours  que  l'eau  saumàtre  du  puits  Joseph,  à  laquelle  on 
ne  peut  plus  mêler  de  vinaigre,  la  provision  étant 
épuisée  depuis  longtemps  ;  il  se  plaint  de  l'administra- 
tion parce  qu'elle  n'utilise  pas  les  chameaux,  attachés 
au  service  de  la  place,  pour  fixer  sur  leur  dos  quelques 
outres  remplies  d'eau  qui  arriveraient  ainsi  facilement 
jusqu'à  la  citadelle  (24  mars). 

Cette  situation  ne  fait  qu'empirer.  Dupas  reçoit  de 
l'adjudant  général  Aimeras  un  ordre  émané  de  Priant 
pour  que  la  citadelle  continue  à  tirer  à  boulets  rouges 


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—  56  — 

sur  le  Caire.  Impossible  d'exécuter  cet  ordre  !  L'une 
des  deux  forges  de  la  citadelle  est  mal  construite  et 
n'a  pas  de  soufflet,  et  l'autre  ne  saurait  être  utilisée, 
étant  trop  rapprochée  des  magasins  à  poudre  de  la 
grande  batterie.  Quant  à  l'artillerie,  elle  est  devenue 
inutile,  le  calibre  de  ses  pièces  ayant  un  numéro  diflfé- 
rent  de  celui  des  boulets.  Les  pièces  ont  quatorze  pou- 
ces, tandis  que  les  projectiles  sont  de  douze  pouces,  de 
sorte  que  pour  les  utiliser  il  faut  mettre  une  grande 
quantité  de  poudre,  ce  qui  diminue  singulièrement  les 
effets  produits  par  Téclat  des  bombes.  Malgré  ces  in- 
convénients, Dupas  continua  à  bombarder  vivement  et 
obtint  des  résultats  efficaces,  mais  en  brûlant  une 
énorme  quantité  de  poudre.  Cette  consommation  de 
poudre  préoccupe  le  commandement  de  la  place,  et 
Tadjudant-général  Aimeras  croit  devoir  recommander 
à  Dupas  do  la  ménager.  Dupas  relève  vivement  cette 
observation  et  écrit  aussitôt  au  général  Priant  : 
4c  Permettez-moi  de  vous  dire  que  la  poudre  brûlée 
les  29  ventôse  (20  mars)  et  jours  suivants  a  rendu 
de  grands  services  ;  j'ai  brûlé  beaucoup  de  poudre, 
tiré  des  bombes  et  boulets  sur  l'armée  réunie  des  deux 
Beys  ;  sans  ce  moyen  le  camp  français  n'aurait  pas  été 
prévenu  assez  tôt  qu'une  masse  d'insurgés  venaient  les 
attaquer.  D'ailleurs,  en  ménageant  la  poudre,  les  bombes 
ou  boulets,  j'aurais  été  certainement  bloqué  dans  la 
citadelle.  Ayant  d'un  côté  l'armée  des  deux  Beys,  de 
l'autre,  corné  par  une  masse  innombrable  d'insurgés,  je 
ne  serais  jamais  parvenu  à  maîtriser  ces  furieuses  atta- 
ques et  à  nous  dégager  si  je  n'avais  semé  autour  de  la 
citiidcllo  le  feu  et  la  mort.  J'ai  incendié  cinq  ou  six  fois 


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—  57  — 

le  Caire,  feux  que  les  habitants  insurgés  auraient  pu 
circonscrire  si  je  ne  leur  avais  pas  lancé  des  boulets. 
Toutes  les  poudres  que  renferme  la  citadelle  sont 
détestables  et  leur  quantité  est  insuffisante.  Sur  2.000 
livres  de  poudre  française  annoncée,  je  n'en  ai  reçu  que 
200.  Le  citoyen  Paultrier  est  d'autant  plus  imprudent 
en  réduisant  les  envois  qui  me  sont  faits,  que  toutes 
sont  avariées,  ce  qu'il  est  facile  de  constater,  puisque 
les  bombes  sortant  des  mortiers  de  six  pouces  tombent 
à  une  distance  de  dix  ou  douze  toises. 

«  Les  parapets  de  la  grande  batterie  doivent  égale- 
ment attirer  votre  attention,  il  est  indispensiible  de  les 
relever  aussitôt,  quoique  la  Tour  des  Janissaires  soit 
tombée  en  mon  pouvoir.  La  citadelle  ne  peut  continuer 
sa  résistance  qu'en  redoublant  de  surveillance  et  d'acti- 
vité, qu'en  employant  un  grand  nombre  de  cartouches: 
aujourd'hui  toutes  nos  provisions  en  huile,  beurre, 
vinaigre,  eau-de-vie,  sont  épuisées.  > 

Ces  demandes  n'ayant  pas  été  mieux  accueillies  que 
les  précédentes,  Dupas  écrit  à  Sirlet,  chef  d'état-major 
de  l'artillerie  :  «  Depuis  quelque  temps  je  ne  vous  re- 
connais plus,  vous  me  promettez  beaucoup  et  vous  ne 
tenez  rien.  Je  ne  peux  pas  me  dispenser  également  de 
vous  prévenir  que  vous  ne  devez  pas  disposer  des  cha- 
meaux de  la  citadelle  destinés  exclusivement  au  trans- 
port de  notre  eau  potable,  cependant  vous  vous  en 
servez  à  notre  préjudice  pour  approvisionner  les  forts 
extérieurs.  » 

Pendant  que  la  garnison  de  la  citadelle  et  des  forts 
opposait  une  aussi  énergique  résistance  à  Ibrahim 
qui  était  entré  dans  le  Caire  avec  son  armée  et  avait 


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—  58  — 

soulevé  la  population,  Kléber  poursuivit  les  Turcs,  en- 
leva à  Balbeis  leur  arrière-garde,  et  se  rabattit  ensuite 
sur  la  capitale  qui  était  toujours  en  pleine  insurrection 
et  qui  se  défendit  avec  fureur  ;  il  la  soumit  toutefois, 
après  avoir  forcé  Tennemi  sur  tous  les  points. 

Enfin  Mourad-Bey  traita  avec  les  Français  et  dès  lors 
les  Mamelucks  servirent  fidèlement  la  France  ;  Kléber 
leva  des  contributions  de  guerre,  réorganisa  l'armée  et 
déploya  non  moins  de  talents  dans  Tadministration  du 
pays  que  dans  les  affaires  de  la  guerre. 

La  première  partie  du  journal  de  Dupas,  commencé 
le  27  brumaire  an  VIII,  finit  le  12  germinal  au  VIII 
(2  avril  1800).  Il  prévient  le  général  Damas  que  Kléber 
vient  de  lui  envoyer  deux  hussards  porteurs  d'une  lettre 
ainsi  conçue  :  *  Veuillez  tenir  à  vue  et  de  très  près  le 
jeune  homme  que  je  vous  envoie.  »  Mais,  ne  pouvant 
découvrir  lequel  des  deux  était  visé,  il  les  a  retenus 
l'un  et  l'autre. 

Malgré  l'apparente  pacification  du  Caire,  les  Osman- 
lis  continuaient  les  menées  dans  la  population  musul- 
mane en  l'excitant  à  marcher  contre  la  citadelle.  Le 
14  germinal  (4  avril)  Dupas,  apercevant  des  mouvements 
inquiétants  au-dessous  de  la  grande  batterie  des  re- 
tranchements, envoie  aussitôt  50  hommes  en  éclaireurs 
commandés  par  un  officier.  Mais  ils  rentrent  bientôt 
sans  avoir  pu  remplir  leur  mission.  Dupas  se  met  alors 
à  leur  tête  et  parcourt  divers  quartiers  de  la  ville,  où 
il  constate  que  tous  les  habitants  se  sont  retirés  de  leurs 
maisons,  à  l'exception  d'un  seul  qui  lui  apprend 
qu'ayant  été  menacés  par  les  Osmanlis  d'avoir  la  tête 
coupée  s'ils  ne   se   soulevaient  pas  en  masse  contre  la 


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—  59  — 

citadelle,  ils  s  étaient  eofais,  emportaDt  leurs  meubles  et 
ne  laissant  que  3S  matelas  que  Dupas  distribua  entre 
les  officiers.  Déboncbant  ensuite  sur  Tune  des  places  du 
Caire,  ce  détacbement  fut  assailli  à  Timproviste  à  coups 
de  fusil;  les  insurgés  furent  repoussés  laissant  six 
morts  et  un  grand  nombre  de  blessés.  Aussi,  dès  sou 
retour  à  la  citadelle,  des  bombes  furent  lancées  sur 
toutes  tes  maisons  environnantes  parce  qu'elles  ser- 
vaient d*asile  aux  femmes  indigènes  qui  pouvaient  de  là 
prévenir  les  insurgés,  au  moyen  de  cris  et  signaux  con- 
venus, des  sorties  de  la  garnison. 

Ces  mesures  répressives  jetèrent  la  terreur  dans  les 
quartiers  les  plus  rapprochés  :  les  habitants  de  ces 
quartiers  vinrent  à  genoux  demander  pardon,  promet- 
tant de  combattre  et  de  refouler  les  Osmanlis.  Comme 
gage  de  leur  sincérité  ils  apportèrent  onze  chèvres  et 
neuf  moutons. 

Le  journal  de  Dupas  note  que  si  les  quartiers  situés 
à  droite  se  décidaient  à  suivre  ce  bon  exemple,  on 
pourrait  distribuer  aux  soldats  quelques  viandes  meil- 
leures que  celles  qui  restent  dans  la  citadelle. 

Les  munitions  de  guerre  n'étaient  pas  moins  détesta- 
bles, c'est  ainsi  que  dans  la  nuit  du  1 4  au  15  germinal  (du 
4  au  5  avril  1800),  plus  de  quarante  bombes  éclatèrent 
à  la  sortie  même  des  mortiers,  douze  autres  un  peu  plus 
loin  mais  sans  atteindre  leur  but.  Toutes  cependant 
étaient  en  bronze.  (Rapport  de  Dupas  au  général  Damas, 
chef  de  l'état-major  général). 

Damas  lui  répondit  aussitôt,  mais  sans  faire  allusion 
à  la  mauvaise  qualité  des  munitions  de  guerre  :  «  J'ai 
vu,  citoyen,  avec  intérêt,  votre  rapport  de  la  sortie  que 


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—  60  — 

vous  fîtes  le  14  germinal  ;  le  général  en  chef,  à  qui  je 
rai  communigiu'j  en  a  été  satisfait,  son  intention 
étant  que  les  habitants  du  Caire  soient  bien  persuadés 
qu'il  leur  accorderait  un  entier  pardon  de  leur  conduite 
s'ils  se  détachaient  des  Osmanlis  qui  ne  peuvent  qu'at- 
tirer la  ruine  complète  de  leur  ville.  Vous  direz  à  ceux 
qui  viendraient  vous  parler,  que  le  général  en  chef  qui 
aime  les  habitants  de  TEgypte  et  du  Caire  parliculière- 
meut  est  toujours  disposé  à  la  clémence,  qu'il  aime  mieux 
pardonner  que  punir,  qu'il  ne  sera  fait  aucun  mal  à 
personne,  dans  la  ville  du  Caire,  pas  même  aux  chefs 
qui  tiennent  à  la  maintenir  dans  l'insubordination, 
pourvu  qu'ils  cessent,  pendant  qu'il  en  est  encore  temps, 
de  servir  les  Osmanlis,  dont  ils  essuient  des  traite- 
ments si  barbares,  et  qui  sont  les  seuls  que  le  général 
en  chef  veuille  détruire  pour  en  délivrer  la  ville.  Si 
vous  parvenez  à  leur  persuader  qu'ils  n'ont  rien  à 
craindre  des  Français,  et  vous  pouvez  leur  en  donner 
l'assurance  au  nom  du  général  en  chef,  il  faut  les  enga- 
ger à  ouvrir  les  portes  de  la  ville,  pour  que  les  Français 
viennent  l'occuper,  et  les  assurer  qu'ils  se  réuniront  à 
eux  pour  les  défendre  contre  les  Osmanlis  et  en  délivrer 
la  ville.  Je  vous  salue.  Damas.  » 

Dés  le  lendemain  Dupas  informe  le  général  Damas 
qu'il  n'a  pu  communiquer  ces  conseils  qu'à  neuf  habi- 
tants, les  seuls  dont  il  soit  parvenu  à  se  faire  écouter  : 
tous  l'ont  confirmé  dans  cette  idée  que  le  peuple  souffre 
de  la  pression  que  les  Osmanlis  exercent  sur  lui  pour  le 
pousser  à  attaquer  les  Français  et  surtout  la  citadelle, 
lui  représentant  les  misères  qu'il  endure  comme  étant 
l'œuvre  des  Français. 


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—  Gl  — 

Le  général  Damas,  à  Texemple  du  général  en  chef 
Kléber,  cherchait  avec  raison  tous  les  moyens  propres 
à  nous  concilier  les  habitants  du  Caire,  Tétat  des  affaires 
n'étant  pas  des  plus  rassurants. 

11  est  vrai  quo  d'un  côté  de  la  ville  se  trouvait  le 
quartier  général  de  l'armée,  de  l'autre  la  citadelle: 
mais  ces  deux  forces  militaires  n'avaient  aucune  com- 
munication possible  entre  elles;  l'une  et  l'autre  se 
trouvaient  d'ailleurs  en  dehors  de  l'enceinte  fortifiée  du 
Caire.  La  ville  renfermait  200,000  affamés  soulevés 
sans  cesse  par  les  Osmanlis  qui  attendaient  avec  impa- 
tience le  moment  propice  pour  se  ruer  en  masse  sur  les 
Français.  Aussi  n'est-il  pas  étonnant  que,  malgré  ces 
assurances  pacifiques  du  général  français,  l'effervescence 
populaire  n'ait  fait  qu'augmenter,  rendant  la  défense 
de  la  citadelle  plus  difficile  et  plus  périlleuse. 

12  avril.  Dupas  avait  sous  ses  ordres,  au  nombre  des 
braves  défenseurs  de  la  citadelle,  2  bataillons  de  la  61« 
commandés  par  Richard,  homme  énergique  et  dévoué, 
qui  avait  rendu  et  continuait  à  rendre  de  bons  services. 
Le  général  Damas  fit  sortir  ces  bataillons  et  les  rem- 
plaça par  2  bataillons,  de  la  32«  demi-brigade.  Ces  nou- 
veaux bataillons  étaient  connus  pour  leur  indiscipline. 
Dupas  prévoyant  les  inconvénients  qui  allaient  résulter 
de  leur  présence  dans  la  garnison,  s'opposa  en  vain  à 
cette  décision.  Quelques  jours  se  passèrent,  et  malgré 
la  vigueur  du  commandant  do  la  forteresse,  malgré  les 
ordres  sévères  donnés  aux  officiers,  ces  soldats  com- 
mirent des  dégradations  dans  un  logement  réservé 
à  leurs  chefs  ;  ils  s'introduisirent  également  dans  la 
grande  mosquée  où  Ton  constata  pour  plus  de  10,000  fr. 


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—  6â  — 

do  dégâts;  ils  pillôreut  les  provisions  du  garde-maga- 
siQS   consistant  en  sucre,  biscuit,  tabac,  viandes,  etc. 

Dupas  avait  eu  soin  de  prévenir  le  général  Damas  des 
dangers  que  présentait  la  présence  de  ces  bataillons  dans 
la  forteresse,  de  Timpossibilité  de  sévir  contre  eux,  soit 
parce  que  les  prisons  étaient  encombrées,  soit  parce 
que  les  autres  troupes  de  la  garnison  étaient  impuis- 
santes à  sévir  contre  ces  indisciplinés  :  «  C'est  vous, 
mon  général,  ajoutait  Dupas,  qui  deviez  prendre  les 
mesures  préventives  que  j'avais  cependant  conseillées  ; 
aujourd'hui  à  vous  seul  il  appartient  de  prendre  les  me- 
sures de  répression  que  vous  jugerez  convenables.  Mais 
il  est  indispensable  que  ces  bataillons  sortent  immédia- 
tement de  la  citadelle  et  soient  punis  sévèrement.  » 

Le  général  Damas,  l'un  des  meilleurs  généraux  de 
cette  époque  sous  tous  les  rapports,  s'empressa  de  dé- 
barrasser Dupas  de  ces  deux  bataillons. 

16,  18  avril.  Deux  nouvelles  sorties  furent  exécutées 
les  26  et  28  germinal.  Dans  la  première,  l'abondance 
des  pluies  contribua  à  nous  faire  éprouver  des  pertes 
en  nous  mettant  dans  l'impossibilité  de  profiter  de  nos 
positions.  L'ennemi  nous  attaquait  avec  impétuosité, 
ses  canons  nous  lançaient  de  nombreux  boulets  du  haut 
de  leurs  retranchements,  des  feux  croisés  nous  arri- 
vaient des  créneaux  qui  entourent  la  place  :  la  réunion 
de  tous  ces  obstacles  a  paralysé  nos  attaques,  ce  qui 
cependant  ne  serait  pas  arrivé  «  si  comme  j'étais  en 
droit  de  le  supposer,  nous  eussions  été  appuyés  par  le 
camp  retranché  au  bout  de  l'aqueduc.  » 

Le  surlendemain  18,  un  nouvel  engagement  a  lieu 
dans  la  soirée.  Pondant  cinq  heures,  le  feu  des  retran- 


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—  63  ~ 

chements  ennemis  et  celui  encore  plus  nourri  qui  partait 
de  leurs  maisons  crénelées,  vomissent  la  mort  dans  les 
rangs  de  la  troupe  de  Dupas.  Après  plusieurs  retours 
offensifs  vivement  conduits,  Dupas  réussit  à  s'emparer 
du  principal  quartier  faisant  face  aux  rues  qui  aboutis- 
saient aux  entrepôts  de  sucre  qu'il  fait  incendier  ainsi 
qu'une  trentaine  de  maisons  voisines.  Les  insultés  re- 
foulés vont  se  retrancher  dans  un  vaste  bâtiment  d'où 
il  ne  fut  pas  possible  de  les  déloger,  faute  d'artillerie. 

Sur  la  demande  de  Dupas,  le  général  Songis,  de 
Tai-tillerie  et  son  chef  d'état-major,  le  chef  de  brigade 
Sirlet,  viennent  inspecter  la  citadelle  pour  se  rendre  un 
compte  exact  de  ses  moyens  de  défense.  Quelques  jours 
se  passent  sans  résultats.  Dupas  s'impatiente  et  écrit  à 
Sirlet  :  «  J'espérais  que  votre  inspection  et  celle  du 
général  Songis  m'auraient  procuré  les  moyens  les  plus 
indispensables  pour  la  défense  de  la  citadelle,  ayant  vu 
vous-même  que  cinq  mortiers  n'ont  plus  de  bombes,  que 
deux  autres  plus  petite  n'eu  ont  que  soixante-quinze, 
qu'il  n'en  reste  pas  une  seule  pour  le  service  de  quatre 
autres  mortiers.  Vous  avez  été  surpris  des  plaintes  por- 
tées par  le  capitaine  Gury  sur  la  qualité  des  poudres  et 
sur  les  erreurs  dans  la  quantité  que  l'on  en  avait  an- 
noncée. Il  avait  cependant  raison  :  les  derniers  barils 
reçus  necontenaientréellementque200  livres  l'un,  au  lieu 
des  300  qui  étaient  indiquées.  Les  gardes- magasins  pren- 
nent volontiers  depuis  longtemps  ces  habitudes,  puisqu'il 
y  a  déjà  quelques  jours,  annonçant  l'envoi  de  2,000  li- 
vres de  poudre  française,  je  n'en  ai  trouvé  que  200.  » 

19  avril.  Dupas  reçoit,  de  la  part  du  général  Damas, 
un  Pacha  et  St\  suite,  faits  prisonniers  de  guerre.  Damas 


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—  64  — 

recommande  ce  chef  d'une  manière  toute  spéciale,  et 
engage  le  commandant  à  avoir  pour  lui  les  plus  grands 
égards,  mais  en  exerçant  la  plus  grande  surveillance. 
Dupas  répond  au  général  :  «  Qu'il  ne  peut  offrir  d'autre 
logement  que  l'infirmerie,  qu'il  n'a  d'autre  nourriture  à  lui 
donner  que  du  biscuit,  et  comme  boisson  la  mauvaise 
eau  du  puits  Joseph  ;  que  cette  situation  a  commencé 
le  premier  jour  du  blocus  ;  »  il  insiste  également  sur 
l'impossibilité  d'empêcher  le  prisonnier  de  communi- 
quer avec  les  habitants  du  Caire  ;  cependant  il  ajoute 
qu'il  le  traitera  aussi  bien  que  possible. 

A  cette  époque  deux  moines  arméniens  (1)  se  trou- 
vaient enfermés  dans  la  citadelle  ;  ils  se  plaignaient 
avec  aigreur  de  ne  pas  être  payés.  Dupas  envoie  leurs 
réclamations  au  général  Damas,  ajoutant  :  «  Vous 
connaissez  les  prêtres  et  ce  dont  ils  sont  capables  pour 
avoir  de  l'argent;  ils  devraient  cependant  s'occuper 
plutôt  de  leur  magie  que  de  nos  soldats.  » 

Pendant  le  blocus  quelques  soldats  découvrirent  plu- 
sieurs caisses  enfouies  sous  terre.  Ouvertes  par  le 
Commissaire  des  guerres,  on  découvrit  plusieurs  lingots 
qui  furent  convertis  en  monnaie. 

Le  2  juin,  Dupas  reçoit  la  lettre  suivante  du  général 
en  chef  : 

«  Je  pars  demain  pour  Bah  manié  où  je  vais  établir 
un  camp.  Si  pendant  cette  absence  il  arrivait  quelque 
événement  au  Caire,  conduisez-vous  toujours  ainsi  que 


(1)  Les  chrétiens  du  rite  arménien  ne  reconnaissent  ni  la  pri- 
mauté du  Pape  ni  le  purgatoire  ;  ils  croient  que  le  S*-Esprit  ne 
procède  que  du  Père,  et  à  une  seule  nature  en  Jésus-Christ. 


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—  05  — 

vous  l'avez  fait  jusqu'ici,  et  je  retrouverai  la  citadelle 
à  mon  retour  et  vous  aussi.  —  Kléber.  » 

«  P.-S.  Je  vous  envoie  deux  officiers  anglais,  nau- 
fragés sur  la  côte,  tâchez  de  les  bien  loger  et  traitez-les 
avec  égards,  laissez-leur  une  honnête  liberté,  mais  en 
les  surveillant  sans  cesse.  —  Kléber.  » 

Ce  fut  la  dernière  lettre  que  Dupas  rrçut  de  Kléber. 
Cet  homme  illustre  mettait  tous  ses  soins  à  la  pacifica- 
tion du  pays  dont  la  situation  redevenait  prospère. 
L'Egypte  redevenait  tranquille  lorsque,  sur  les  incita- 
tions du  gouvernement  Turc,  un  jeune  fanatique  de 
Jérusalem  poignarda  Kléber  sur  la  terrasse  de  sa  mai- 
son du  Caire  (14  juin  1800),  le  jour  même  de  la  bataille 
de  Marengo. 


5b 


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06  — 


CHAPITRE    IV 


FIN  DE  L'EXPÉDITION  D'EGYPTE 
Juillet  1800  à  Septembre  1801 

Le  ci-devant  baron  de  Menou,  général  en  chef.  —  La  citadelle.  — 
Mesures  réclamées  et  prises  par  Dupas.  —  Sa  correspondance 
avec  le  général  Belliard,  gouverneur  du  Caire,  et  avec  le  général 
en  chef  Menou.  —  Désastre  de  Menou  àCanope.  —  Le  Caire  est 
isolé.  —  Belle  défense  de  Dupas.  —  Situation  critique  de  la 
citadelle  et  de  la  place  du  Caire.  —  Conseil  de  guerre  convoqué 
par  Belliard.  —  Héroïque  proposition  de  Dupas.  —  Convention 
pour  l'évacuation  de  l'Egypte.  —  Embarquement  des  troupes 
et  rentrée  en  France. 

La  mort  de  Kléber  était  une  perte  irréparable. 
Pour  comble  de  malheur,  le  droit  d'ancienneté  appelait 
le  général  Menou  à  le  remplacer,  et  le  gouvernement 
consulaire  le  confirma  dans  ce  poste  alors  si  important. 
Monou  s'était  fait  musulman  et  avait  pris  le  nom  d'Ab- 
dallah. Le  ci-devant  baron  de  Menou  était  brave  mais 
inhabile  ;  il  passait  pour  être  un  flatteur  de  Bonaparte. 
L'armée  désirait  avoir  pour  chef  le  général  Reynier 
dont  les  talents  militaires  étaient  à  la  hauteur  d'aussi 
graves  circonstances. 

La  grande  armée  que  la  Turquie  avait  envoyée  en 
Egypte  ayant  été  anéantie  par  Kléber,  les  Anglais  pré- 
parèrent une  expédition  et  formèrent  à  Rhodes,  sous  les 


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—  (37  — 

ordres  de  Ralph  Abercromby,  une  année  destinée  à 
opérer  sur  les  bouches  du  Nil.  Les  Turcs,  ainsi  appuyés, 
se  disposèrent  à  reparaître  par  Tisthinede  Suez. 

Les  distances  sur  lesquelles  on  allait  opérer,  la  di- 
vergence des  lignes  d'attaque,  exigeaient  beaucoup  de 
temps  ;  il  fallait  plusieurs  mois  aux  ennemis  pour  arri- 
ver en  Egypte.  Menou  aurait  du  mettre  ce  temps  à 
profit  pour  être  partout  en  mesure.  Mais  lorsque  la  flotte 
anglo-turque  parut,  rien  n'était  fait  pour  la  n^pousser. 

C'est  au  printemps  do  1801  que  les  Français  eurent  à 
repousser  cette  nouvelle  et  formidable  attaque  ;  mais 
pour  le  moment  nous  devons  revenir  au  journal  du 
commandant  de  la  citadelle  du  Caire. 

La  citadelle  était  immense:  elle  embrassait  une  cir- 
conférence de  3,000  mètres.  Elle  n'était  accessible  que 
par  deux  rampes  taillées  dans  le  roc.  Les  principaux 
monuments  étaient  :  le  palais  du  divan  ou  tribunal  des 
Janissaires,  et  le  puits  Joseph  dont  l'eau  était  si  détes- 
table. Ce  puits  taillé  dans  le  roc  vif  avait  une  profondeur 
de  280  pieds,  sa  circonférence  avai.t  60  pieds. 

La  tour  des  Janissaires,  dont  Dupas  s'était  emparé 
dans  le  mois  d'avril  précédent,  était  située  en  dehors 
de  l'enceinte  de  la  citadelle;  elle  était  d'une  grande 
importance  stratégique.  C'est  là,  qu'à  la  suite  des  rap- 
ports faits  par  les  officiers  de  santé,  les  doux  prison- 
niers anglais,  dont  il  est  question  au  Chapitre  précédent, 
furent  transférés.  Les  officiers  de  santé  avaient  pré- 
tendu, en  effet,  que  les  prisons  de  la  citiidelle  étaient 
insalubres  et  pleines  de  vermine.  Tout  en  exécutant 
l'ordre  qu'il  recevait.  Dupas  adressa  les  observations 
suivantes  au  nouveau  général  en  chef  Menou  :  «  L'in- 


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—  68  — 

salubrité  des  prisons  de  la  citadelle  me  parait  d^autant 
plus  cootestable,  que  œs  mêmes  officiers  de  santé  les 
trouvaient  salubres  et  propres,  au  moment  de  la  déten- 
tion des  détachements  militaires  accusés  de  s*êtro 
rendus  trop  vite  à  Al-Arisch  (1).  D'ailleurs,  ajoute 
Dupas,  depuis  longtemps  il  n*est  question  que  d'insalu- 
brité, de  pestiférés,  dans  Tinlérieur  de  la  citadelle, 
quoique  tout  le  monde  se  porte  à  merveille.  »  Il  ter- 
mine en  informant  le  général  Menou  que,  suivant  ses 
désirs,  il  a  fait  des  fouilles  en  messidor,  sous  les  colon- 
nes du  Temple,  dans  Tespoir  d'y  trouver  le  cercueil  de 
Kléber  (2). 

Kléber  avait  formé  des  corps  composés  de  Grecs,  de 
Cophtes,  d'Arméniens.  Un  détachement  décos  troupes  de 
nouvelle  création  formait  en  partie  la  garnison  de  la 
citadelle.  Dupas  informe  le  général  Belliard,  nommé 
gouverneur  du  Caire,  que  ces  Grecs,  Cophtes  et  Armé- 
niens sont  pieds  nus,  sans  armes  ni  habits  et  incapa- 
bles d'apprendre  leur  théorie  ;  les  officiers  instructeurs 
sortant  tous  de  l'administration  ou  du  corps  de  santé. 
Des  fraudes  scandaleuses  continuent  à  être  faites  par 
les  fournisseurs  de  l'armée  :  c'est  ainsi,  dit-il,  que  sur 
472  rations  de  pain,  destinées  aux  Français  détenus 
dans  la  citadelle,  et  436  rations  destinées  aux  autres 
prisonniers,  nos  compatriotes  n'ont  reçu  que  306  ra- 
tions, les  autres  228  seulement. 

«  C'est  à  vous,  général,  conclut  Dupas,  qu'il  appar- 

(1)  Le  20  décembre  1799,  les  troupes  françaises  qui  défendaient 
le  fort  d'El-Ariscli  refusèrent  de  se  battre  et  le  colonel  Cozal  qui  les 
commandait  se  rendit  aux  anglo-turcs. 

(2)  Les  restes  de  ce  grand  homme  furent  apportés  à  Marseille 
par  l'armée  fraov*ise,  lors  de  l'évacuation  de  l'Egypte. 


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—  69  — 

tient  de  prendre  des  mesures  pour  éviter  ces  détourne- 
ments ;  cependant  vous  avez  cru  devoir  m'adresser  un 
blâme  dans  le  dernier  ordre  du  jour.  Il  me  semble 
pourtant  qu'il  n'aurait  dû  s'adresser  qu'aux  chefs  de 
service  spécialement  chargés  de  cette  surveillance  et 
seuls  responsables  des  abus  signalés.  » 

Belliard  reprochait  aussi  à  Dupas  quelques  détails 
administratifs  :  de  faire  apostiller  des  corrt«pondances 
insignifiantes  par  les  adjudants-majors,  d'être  trop  mi- 
nutieux pour  recevoir  les  prisonniers  qu'on  lui  en- 
voyait, d'envoyer  sans  nécessité  des  éclaireurs  hors  de 
la  citadelle.  Dupas  s'empressa  de  lui  répondre  : 

€  Je  ne  crois  pas  avoir  mérité  vos  reproches.  Un  adju- 
dant-major doit  exécuter  les  ordres  du  commandant, 
et  l'on  ne  saurait  me  faire  un  crime  de  lui  avoir  fait 
apostiller  des  lettres  qui  ne  renfermaient  qu'un  ordre 
de  service.  Quant  à  la  réception  des  prisonniers,  Menou, 
général  en  chef,  s'est  expliqué  clairement,  ordonnant 
de  ne  recevoir  aucun  prisonnier  St\ns  connaître  avant 
tout  le  motif  de  l'arrestation  et  le  nom  du  chef  de  ser- 
vice qui  l'envoie,  même  lorsqu'un  ordre  non  motivé 
serait  envoyé  par  lui;  ainsi  vous  ne  serez  plus  surpris 
si  je  ne  m'en  rapporte  qu'à  cette  instruction.  Enfin,  pour 
les  éclaireurs  envoyés  en  dehors  de  la  citadelle,  ce 
reproche  est  encore  moins  fondé.  Comme  commandant, 
je  n'exécute  que  les  ordres  que  je  reçois.  Vous  terminez 
enfin  en  me  priant  de  vous  témoigner  un  peu  d'égards:  à 
mon  tour  je  vous  prierai  d'en  avoir  un  peu  plus  pour 
moi,  parce  que  je  tiens  à  conserver  l'estime  et  l'amitié 
que  m'ont  tous  témoigné  les  généraux  qui  ont  commandé 
la  place  du  Caire  avant  vous.  » 


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—  70  — 

Tel  était  le  langage  des  soldats  de  la  République . 
chez  eux,  la  loyauté  et  la  franchise  s'unissaient  à  Tin- 
dépendance  du  caractère. 

Décembre.  Dupas  avait  non  seulement  à  se  garder, 
mais  aussi  à  réprimer  les  actes  d'indiscipline,  les 
vols,  etc.  Le  24  décembre  il  met  le  capitaine  Camas 
aux  arrêts  dans  la  tour  des  Janissaires  :  la  compagnie 
de  cet  officier  étant  logée  chez  les  habitants  du  Caire, 
les  soldats  avaient  commis  plusieurs  volsetcauséquelques 
dommages.  Dans  la  citadelle  c'étaient  les  indigènes  qui 
volaient  :  deux  turcs  ayant  dérobé  des  farines  dans  les 
moulins  mêmes,  les  meuniers  furent  autorisés  à  leur  ad- 
ministrer des  coups  de  nerf  de  bœuf  sur  la  plante  des 
pieds.  «  Cette  punition  était  d'autant  plus  justifiée,  que 
ces  vols  étaient  toujours  accompagnés  de  dégâts  causés 
dans  l'intérieur  des  moulins;  ainsi  plusieurs  Cophtes, 
ayant  déjoué  la  surveillance  des  gardiens,  firent  de  tels 
dégâts  que  l'on  fut  privé  de  farine  pendant  plusieurs 
jours,  les  charpentiers  appelés  pour  les  réparer,  cau- 
sèrent à  leur  tour  de  nouvelles  dégradations  volontaires 
dans  les  douze  moulins  de  la  citadelle.  Ces  ouvriers  fu- 
rent immédiatement  arrêtés  et  maintenus  en  prison,» 
malgré  les  nombreuses  démarches  faites  auprès  de 
Dupas  pour  leur  élargissement.  Ces  réparations  s'éle- 
vèrent à  900  paras,  mais  en  dehors  de  ces  pertes  ma- 
térielles, la  privation  de  farine  et  par  là  même  de  pain, 
provoqua  dans  les  troupes  des  habitudes  d'alcoolisme 
du  plus  pernicieux  effet.  Pour  les  faire  cesser.  Dupas  fait 
fermer,  le  18  février  ISOl,  toutes  les  distilleries  des 
quartiers  voisins  de  la  citadelle,  saisit  les  alambics,  in- 


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—  71  — 

terdit  toute  vente  d'alcool  sous  peine  d  emprisonnement 
et  d'amende. 

Le  Gouverneur  du  Caire,  général  Belliard,  ayant  fait 
sortir  86  hommes  de  la  garnison  de  la  citadelle  pour  les 
diriger  sur  Suez,  Dupas  se  récrie  contre  cette  mesure 
qu'il  considère  comme  dangereuse  à  cause  de  la  faiblesse 
du  bataillon  de  la  4"  de  ligne  auquel  ces  hommes  appar- 
tiennent; il  n'avait  été  d'ailleurs  nullement  avisé  do 
cette  mesure  par  le  général  en  chef. 

Les  provisions  s'épuisent  de  nouveau  :  les  besoins  de 
la  garnison  exigent  l'envoi  de  1,030  quintaux  de  blé, 
2.809  q.  de  paille,  14  q.  de  sucre  pour  la  pharmacie,  des 
cartouches  et  des  fusils  pour  armer  les  éclopés  :  mais 
rien  n'est  envoyé. 

La  privation  de  tous  ces  approvisionnements  décide 
Dupas  à  faire  déguerpir  223  hommes  avec  leurs  femmes 
et  leurs  enfants,  logés  soit  dans  l'intérieur  soit  au  dehors 
de  l'enceinte  des  Janissaires,  et  qui  se  nourrissaient  à  la 
citadelle.  La  disparition  de  ces  bouches  inutiles  diminue 
les  charges  de  la  garnison. 

Le  général  en  chef  Menou  envoie  à  la  citadelle  le 
cheik  Sada  prisonnier  de  guerre,  et  en  outre  107  fusils. 
En  accusant  réception  de  ces  envois.  Dupas  lui  annonce 
que  deux  de  ses  canonniers  ont  été  tués  à  l'ennemi  : 
Martinet,  de  Champagnol,  et  un  grec  nommé  Antoni. 

Menou  ayant  émis  le  soupçon  que  plusieurs  soldats  et 
quelques  civils  s'étaient  cachés  dans  la  citadelle.  Dupas 
répond:  «  Tous  les  chefs  militaires  et  administratifs 
m'assurent  qu'ils  ne  toléreraient  pas  ces  abus  ;  quant  à 
moi,  vous  pouvez  être  sûr  que  j'exerce  la  plus  grande 
surveillance  :  la  citadelle  que  j'ai  l'honneur  de  comman- 


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—  72  — 

der  ne  servira  jamais  d'asile  aux  lâches  qui  abandon- 
nent leur  poste,  ou  qui  se  laissent  trop  facilement 
alarmer.  » 

La  situation  ne  fait  qu'empirer,  les  munitions  dimi- 
nuent, la  maladie  immobilise  la  plupart  des  bras,  le 
sous-directeur  d'artillerie  refuse  d'établir  des  parapets 
pour  abriter  du  feu  de  l'ennemi  les  canonniers  et  fan- 
tassins. Dupas  écrit  à  Menou  :  «  Si  ces  travaux  ne  sont 
pas  immédiatement  continués,  je  n'aurai  plus  qu'un 
seul  parti  à  prendre,  qui  procurera  de  l'honneur  aux 
soldats  de  la  citadelle  :  nous  nous  passerons  des  travaux. 
Connaissant  leur  patriotisme,  je  suis  bien  sûr  qu'en 
leur  promettant  à  chacun  une  chemise  ils  ne  refuseront 
jamais  de  se  battre.  J'éviterai  ainsi  de  faire  de  nouvelles 
demandes  toujours  infructueuses  quand  il  s'agit  de  dé- 
fondre la  citadelle.  > 

20  février  1801.  Dupas  prévient  le  général  Belliard 
«  que  les  officiers  du  génie  se  plaignent  de  l'insouciance 
apportée  par  le  sous-directeur  d'artillerie  et  surtout  de 
ses  réponses  quelque  peu  déplacées  dans  les  phases 
critiques  que  nous  traversons.  Menou  a  même  écrit  hier 
au  général  directeur  des  fortifications  pour  que  l'on 
travaille  immédiatement  aux  parapets.  Pourquoi  donc 
le  sous-directeur  rofuse-t-il  de  se  mettre  à  l'œuvre  sans 
en  faire  connaître  le  motif?  En  présence  du  mauvais 
état  dos  batteries,  n'ayant  aucun  sac  de  terre,  ce  refus 
est  pire  qu'une  faute.  » 

L'énergie  déployée  par  le  commandant  de  la  citadelle 
finit  pourtant  par  vaincre  tous  ces  obstacles  ;  les  para- 
pets et  la  grande  batterie  s'élèvent,  la  batterie  Joseph 
est  prête,  on  travaille  au  passage  derrière  l'hôpital,  un 


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—  73  — 

corps  de  garde  est  placé  à  la  premiôro  porte,  les  cré- 
neaux sont  réparés,  nos  communications  avec  la  tour 
des  Janissaires  rétablies  ;  ou  démolit  les  maisons  qui  se 
trouvent  dans  le  rayon  de  défense  de  la  citadelle. 

Depuis  quelque  temps,  les  soldats  cophtes  de  la  garni- 
son profitaient  du  moment  où  ils  montaient  la  garde 
pour  déserter.  L'un  d'eux  qui  s'était  déguisé  pour  fuir, 
fut  pris  et  mis  aux  arrêts  :  Dupas  ajoute  qu'il  doit  être 
sévèrement  puni  si  l'on  veut  intimider  les  autres. 
«  Quant  aux  alarmistes,  jamais  je  ne  leur  céderai,  ils 
n'ont  rien  à  attendre  do  moi  ;  la  citadelle  est  encombrée 
d'ordures,  de  peureux,  de  lâches,  sans  nombre,  la  peste 
fait  de  grands  ravages  ;  depuis  doux  jours  l'on  a  trans- 
porté cinquante  malades  au  Lazaret.  Mais,  géfiéral,  puis- 
que vous  aimez  à  connaître  la  vérité,  eh  bien  !  je  peux  vous 
assurer  que  rien  ne  parviendra  à  ralentir  mon  activité,  mon 
ardeur.  Je  relisavec  plaisir  vos  dernières  lettres,  j'y  trouve 
des  consolations;  soyez  sans  inquiétude  sur  la  citadelle 
qui  m'est  confiée,  le  Consul  Bonaparte  m'y  a  placé  !  » 

La  garnison  pouvait  être  fiére  de  tels  sentiments. 
10,000  Osmanlis,  200,000  habitants  en  ébullition, 
exaltés  par  le  fanatisme  l'entourent  et  aucun  secours 
no  lui  est  fourni.  Monou,  comme  Belliard,  no  peuvent 
envoyer  que  des  encouragements,  et  admirer.  Dupas  ré- 
sistera quand  même. 

4  mars  1801.  Menou  à  Dupas  :  Mon  cher  Dupas,  les 
Anglais  sont  devant  Aboukir  et  Alexandrie,  redoublez 
de  vigilance  pour  la  garde  de  votre  citadelle,  soyez 
inexorable  pour  tout  ce  qui  voudrait  remuer.  Je  vous  salue. 

Menou. 
Quartier  général  du  Caire,  13  ventôse  an  IX.  » 


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—  74  — 

5  avril.  Menouà  Dupas  :  «  Courage  et  vigueur,  mon 
cher  Dupas,  je  vous  recommande  votre  citadelle  comme 
le  point  le  plus  important  de  l'Egypte  après  Alexandrie  : 
il  faut  vaincre  ou  périr.  Salut  et  amitié.  Soyez  inexora- 
ble pour  tous  ceux  qui  se  conduiraient  mal,  employez 
tous  les  moyens  pour  bien  vous  retrancher,  pour  répa- 
rer vos  brèches;  lorsque  vous  aurez  besoin  de  sacs  à 
terre,  vous  y  emploirez  les  meubles  qu'on  vous  a  ap- 
portés. Ne  nourrissez  que  les  gens  utiles.  —  Menou 
Abdallah,  général  de  division,  commandant  en  chef.  » 

Dans  l'intervalle  écoulé  entre  les  deux  lettres  qu'on 
vient  de  lire,  Menou  était  allé  livrer  bataille  aux  An- 
glais à  Canope  le  21  mars,  et  grâce  à  son  ineptie  l'ar- 
mée française  avait  battu  en  retraite  après  avoir  subi 
de  grandes  pertes  et  s'était  enfermée  dans  Alexandrie. 
Comptant  sur  l'arrivée  d'une  flotte  française,  Menou 
ne  paraissait  pas  se  rendre  un  compte  exact  de  la  situa- 
tion. Le  26  avril  (0  floréal)  il  écrit  encore  d'Alexandrie  : 
€  Je  n'entre  dans  aucun  détail  avec  vous,  mon  cher 
Dupas,  Paultre  mon  aide  de  camp  vous  mettra  au  fait 
de  tout  ;  vigueur,  activité,  et  gaieté,  nous  nous  tirerons 
d'affaire.  Je  sais  que  dans  votre  citadelle  vous  êtes 
ferme  comme  un  roc;  vomissez  du  feu  aux  ennemis, 
comprimez  tous  les  malveillants  et  comptez  sur  la  re- 
connaissance nationale  et  sur  mon  estime  particulière. 
Salut  et  amitié. 

Menou,  général  en  chef.  » 

De  son  côté  Belliard  écrit  à  Dupas  le  12  mai  pour 
l'encourager  à  continuer  les  travaux  de  défense,  ajou- 
tant :  *  Si  l'argent  ne  va  pas,  je  donnerai  plutôt  le  peu 


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—  75  — 

qui  me  reste  en  attendant  qu'il  entre  des  fonds  dans  les 
caisses.  Bonjour.  —  Belliard.  » 

A  cette  date  toutes  les  communications  étaient  inter- 
ceptées entre  le  gouverneur  du  Caire  et  le  général  en 
.chef;  en  effet,  Menou,  au  lieu  de  marcher  avec  toutes 
ses  forces  sur  le  Caire,  attendait  tranquillement  à 
Alexandrie  avec  0,000  hommes  et  se  laissait  irrévoca- 
blement séparer  de  Belliard  qui  n'en  avait  guère  plus 
de  5,000  au  Caire. 

A  Alexandrie  les  troupes  se  répandaient  en  reproches 
contre  Menou.  Les  soldats  disaient  hautement  qu'il  fal- 
lait prendre  une  détermination  vigoureuse  en  ôtant  le 
commandement  à  un  homme  incapable  de  l'exercer,  et 
en  le  donnant  au  général  Reynier,  qui  seul  pouvait 
sauver  l'armée  du  déshonneur  ou  d'un  anéantissement 
total.  Menou  se  tira  d'affaire  en  faisant  arrêter  Reynier 
et  soD  ami  le  général  Damas  et  en  les  faisant  embar- 
quer de  force  pour  la  Franco. 

La  position  des  troupes  françaises  réunies  dans  le 
Caire  sous  les  ordres  du  général  Belliard  devenait 
tous  les  jours  plus  alarmante.  Indépendamment  de  la  cita- 
delle, ces  troupes  devaient  occuper  quatorze  forts  et 
garder  une  immense  enceinte  qui  renfermait  le  Caire, 
Boulaq,  le  vieux  Caire  et  la  place  de  Giseh  sur  la  rive 
gauche  du  Nil.  Obligé  de  résjster  aux  attaques  exté- 
rieures de  plus  de  45,000  hommes,  Belliard  avait  en- 
core à  contenir  dans  l'intérieur  une  population  nom- 
breuse que  la  situation  présente  des  Français  disposait 
naturellement  à  l'insurrection. 

D'un  autre  côté,  les  vivres  commençaient  à  s'épuiser, 
par  suite  de  la  négligence   apportée  dans  les   appro- 


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—  76  — 

visionnements  avant  l'ouverture  de  la  campagne.  Bel- 
liard,  malgré  toute  son  activité,  n'avait  pu  remédier  à 
rinsouciance  de  Menou  à  cet  égard.  Le  mois  de  juin 
était  arrivé.  Dès  le  6  juin  le  blocus  de  la  citadelle  fut 
complet.  Dupas,  livré  à  lui-même,  se  défendit  avec  une 
vigueur  surhumaine  et,  avec  le  peu  de  ressource  dont  il 
disposait,  il  tint  Tennemi  à  distance  respectueuse.  Il  n'y 
avait  plus  de  vivres  que  pour  dix  à  quinze  jours,  c'est-à- 
dire  jusque  vers  le  5  juillet.  Il  ne  restait  pas  au  Caire 
150  coups  par  pièce  et  Ton  y  manquait  d'affûts  de  re- 
change. L'argent  manquait,  et  la  peste  exerçait  de 
terribles  ra^vages. 

Trois  mois  s'étaient  écoulés,  depuis  que  Menou  avait 
quitté  le  Caire  où  il  devait  revenir  si  promptement  en 
vainqueur,  et  le  général  Belliard  n'avait  reçu  de  son 
chef  que  des  instructions  vagues  et  des  dépêches  insi- 
gnifiantes :  Menou  n'insistait  que  sur  un  point  :  se  dé- 
fendre à  toute  extrémité. 

Belliard  se  décida  à  convoquer  au^uartior  général  tous 
les  officiers  généraux  et  supérieurs  du  corps  d'armée  et 
ceux  qui  se  trouvaient  alors  dans  la  capitale  de  l'Egypte. 
Après  leur  avoir  retracé  les  ravages  que  la  peste  exerçait 
encore  parmi  les  Français,  la  presque  nullité  des  ressour- 
ces qui  restaient,  la  grandeur  de  celles  que  possédait  l'en- 
nemi ,  l'impossibilité  de  défendre  des  retranchements  d'un 
développement  aussi  considérable  avec  un  corps  de  troupes 
déjà  réduit  de  moitié  et  dont  le  nombre  diminuait  encore 
journellement,  Belliard  finit  par  inviter  les  membres  du 
Conseil  à  énoncer  individuellement  leur  opinion,  et  à 
déterminer  le  parti  auquel  il  fallait  s'arrêter  dans  des 
circonstances  aussi  fâcheuses,  aussi  désespérées. 


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—  77  — 

Le  général  de  division  Lagrange  prit  le  premier  la 
parole  et  fat  d'avis  de  ne  point  traiter  avec  les  enne- 
mis avant  de  connaître  les  intentions  du  général  Menou, 
que  sa  qualité  de  chef  suprême  de  l'armée  rendait  seul 
Tarbitre  de  la  conduite  à  tenir  en  cette  occasion.  Le 
général  Donzelot  fit  ensuite  la  noble  proposition  de  se 
retirer  dans  la  Haute-Egypte,  d'y  faire  la  guerre  à  la 
manière  des  Mamelucks,  et  d'attendre,  dans  cette  atti- 
tude généreuse  et  digne  des  guerriers  français,  que  le 
gouvernement  consulaire  eût  fait  passer  des  renforts 
assez  considérables,  pour  recouvrer  la  domination  d'un 
pays  qui  avait  déjà  coûté  le  sacrifice  de  tant  de  braves. 

Le  chef  de  brigade  Dupas,  commandant  la  citadelle 
do  Caire,  ayant  obtenu,  à  son  tour,  d'exprimer  son  opi- 
nion, commença  par  rejeter  les  mesures  qu'avaient 
proposées  ceux  des  membres  du  Conseil  qui  venaient  de 
parler  avant  lui,  pour  en  présenter  une  autre  d'un  genre 
bien  plus  élevé,  et  il  s'exprima  à  peu  prés  en  ces  termes  : 

€  Lorsque  l'armée  française,  victorieuse  des  anciens 
dominateurs  de  l'Egypte,  fit,  pour  la  première  fois,  son 
entréesolennelledans  cette  capitale,  qui  de  nous,  citoyens 
généraux,  et  vous  mes  camarades,  eût  pensé  que  nous 
noas  verrions  réduits  un  jour  à  l'impérieuse  nécessité 
d'aviser  aux  moyens  de  pouvoir  nous  y  soutenir,  ou 
d'en  sortir  sans  compromettre  notre  honneur  ?  Telle  est 
cependant  la  fâcheuse  position  où  nous  nous  trouvons  ; 
mais  en  songeant  à  reculer  une  catastrophe  aussi  ins- 
tante, ou  à  la  couvrir  du  moins  de  couleurs  honorables, 
dites  le  moi,  guerriers  français,  ne  nous  reste-t-il  plus 
aucune  espérance  dans  la  victoire  ?  Sont-ils  donc  morts, 
ces  soldats  qui,  au  nombre  de  quatre  mille,  ont  culbuté 


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—  78  - 

vingt  mille  Osmanlis  dans  la  mer  d'Aboukir?  N'avons- 
nous  plus  ces  mêmes  troupes  qui,  dans  l'espace  d'un 
mois,  ont  reconquis  l'Egypte  entière  sur  une  armée  de 
80,000  hommes  ?  Les  temps  no  sont  plus  les  mêmes, 
va-t-on  me  répondre  ;  aucune  défaite  n'avait  alors  en- 
taché les  drapeaux  français  :  faibles  arguments  !  Non, 
vaillants  compagnons,  ce  ne  sont  point  les  armes  de  nos 
ennemis  qui  ont  abattu  notre  puissance  en  Egypte  ; 
nous  ne  devons  nos  malheurs  qu'à  nos  propres  dissen- 
sions. Osons  croire  qu'il  est  en  notre  pouvoir  de  vaincre, 
et  la  victoire  est  à  nous.  Croyez-moi,  guerriers  de  Bona- 
parte et  de  Kléber,  abandonnons  nos  retranchements, 
allons  affronter  l'ennemi  dans  les  siens,  c'est  là  que  la 
gloire  nous  attend  encore.  Si  notre  résolution  échoue, 
si  rimmense  supériorité  du  nombre  nous  force  à  rentrer 
de  nouveau  dans  ces  murs,  et  qu'il  ne  nous  reste  plus 
d'autre  alternative  qu'une  capitulation  ou  la  mort,  arrê- 
tons-nous à  la  mort,  et  choisissons-en  une  qui  réponde 
à  la  grandeur  de  notre  renommée.  Quel  sujet  d'orgueil 
pour  notre  patrie  et  d'admiration  pour  l'Europe,  lorsque 
l'une  et  l'autre  apprendront  que  cinq  mille  Français 
ont  préféré  la  gloire  impérissable  de  s'ensevelir  sous 
les  ruines  de  leurs  conquêtes  à  la  honte  de  la  céder  à 
l'ennemi  !  > 

L'enthousiasme  qui  animait  l'intrépide  orateur  passa 
dans  l'àme  de  la  plupart  de  ceux  qui  venaient  de  l'en- 
tendre avec  un  religieux  silence;  un  feu  martial  bril- 
lait dans  presque  tous  les  regards.  Entraînés  par  l'élo- 
quence de  Dupas,  un  certain  nombre  de  ses  collègues 
allaient  se  lever  pour  appuyer  sa  proposition  désespé- 
rée, lorsque  d'autres  membres  du  Conseil  entreprirent 


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^  79  — 

de  la  combattre,  ainsi  que  les  deux  opiuious  précédem- 
ment énoncées  par  les  généraux  Lagrange  et  Donzelot, 

Les  nouveaux  orateur  représentèrent  d'abord  qu'il 
est  des  occasions  où  il  convient  do  ne  prendre  conseil 
que  de  soi-même,  sans  recourir  à  une  autorité  qui  ne 
peut  plus  vous  être  d'aucun  secoui*s. 

Passant  ensuite  à  la  proposition  de  se  retirer  dans  la 
Haute-Egypte,  ils  démontrèrent  l'inutilité  de  ce  parti, 
en  faisant  observer  qu'avant  que  le  Gouvernement 
français  pût  envoyer  des  renforts  à  travers  une  mer 
couverte  de  vaisseaux  ennemis,  les  Anglais  et  les  Turcs 
auraient  le  temps  d'acculer  la  petite  troupe  sortie  du 
Caire  jusqu'aux  cataractes  et  de  la  jeter  dans  le  désert 
où  la  faim,  la  misère  et  le  désespoir  achèveraient  d'a- 
néantir ceux  que  le  sort  des  armes  aurait  épargnés 
pendant  un  long  et  périlleux  trajet.  Quant  à  l'avis  du 
commandant  de  la  citadelle,  après  avoir  donné  au  cou- 
rage de  ce  digne  officier  tous  les  éloges  qu'il  méritait, 
un  des  opinants  présenta  les  considérations  qu'on  va 
lire  : 

*  Entre  les  deux  exemples  des  journcîes  d'Aboukir  et 
d'Héliopolis,  cités  par  le  chef  de  brigade  Dupas,  il  con- 
venait, dit  Torateur,  d'examiner  plus  particulièrement 
le  dernier,  attendu  que  la  position  où  s'était  trouvé 
KlébcT  avait  une  certaine  conformité  avec  la  situation 
présente  du  général  Belliard.  En  effet  l'Egypte,  avant 
la  bataille  d'Héliopolis,  était  couverte  de  soldats  enne- 
mis comme  elle  l'était  maintenant  ;  mais  la  chance  ne 
pouvait  plus  être  la  même  :  Kléber  avait  10,000  hom- 
mes réunis  sous  ses  ordres  immédiats  lorsqu'il  entreprit 
de  reconquérir  l'Egypte  sur  une  armée  de  80,000  Turcs  ! 


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—  80  -^ 

Il  restait  à  peine  5,000  hommes  au  général  Belliard 
pour  combattre  à  la  fcis  la  nouvelle  armée  du  Grand- 
Vizir,  le  corps  du  Capi tan-Pacha,  et  12  à  15,000  hom- 
mes de  troupes  anglaises;  on  ne  devait  point  espérer 
de  forcer  dans  leur  camp  un  si  grand  nombre  d'enne- 
mis, et  une  entreprise  de  cette  nature  tenait  plus  du 
délire  que  du  courage  :  il  n'y  avait  d'ailleurs  aucune 
honte  à  céder  un  poste  à  l'ennemi  lorsqu'on  se  trouvait 
dans  l'impossibilité  de  le  défendre,  et  qu'on  en  sortait 
surtout  sous  les  clauses  d'une  capitulation  honorable. 
Enfin  la  position  défensive  du  corps  d'armée,  quoique 
défectueuse  sous  bien  des  rapports,  était  cependant  assez 
respectable  pour  faire  obtenir  au  général  Belliard  toutes 
les  conditions  qu'il  exigerait  pour  prix  de  l'évacuation 
du  Caire,  et  il  fallait  se  hâter  de  profiter  du  moment 
opportun  pour  sortir  avec  honneur  d'un  pays  qu'on  ne 
pourrait  quitter  plus  tard  sans  infamie.  » 

Ce  dernier  discours  fixa  tous  les  esprits,  jusqu'alors 
irrésolus  :  on  alla  aux  voix,  et  il  fut  arrêté  que  l'on 
capitulerait  avec  l'ennemi  (1)  ;  celui-ci  faisait  les  dispo- 
sitions d'une  attaque  générale  lorsqu'un  parlementaire 
envoyé  par  le  général  Belliard  se  présenta  le  22  juin 
dans  le  camp  anglais  pour  demander  une  suspension  d'ar- 
mes qui  permit  de  traiter  des  conditions  auxquelles  les 
Français  consentaient  à  évacuer  le  Caire.  Cette  propo- 
sition fut  reçue  avec  empressement  par  le  général 
Hurtchinson    et  par  le  Vizir,   puisqu'elle   leur  offrait 


(1)  Ce  curieux  et  intéressant  procès- verbal  de  la  séance  du 
(jonseil  de  guerre  tenu  au  Caire  le  22  juin  1801,  sous  la  prési- 
dence du  général  Belliard,  a  été  publié  en  1819  dans  Victoires  et 
Conquêtes^  etc.,  des  Français  de  i792  à  i8i5. 


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-  Kl   - 

l'occasion  d'épargner  lo  sacrifice  do  leurs  plus  bravos 
soldats.  Des  Cîommissaires  se  réunirent  et  arrêteront 
le  27  juin  les  termes  d'une  Convention  pour  Vévacua- 
iton  de  V Egypte  et  le  transport  par  la  flotte  anglaise» 
de  toutes  les  troupes  avec  leurs  armes,  artillorï(\  muni- 
tions et  bagages,  pour  être  débarqués  dans  U^s  ports 
français  de  la  Méditerranée.  La  citadelle,  les  forts  et  la 
ville  devaient  être  évacués  douze  jours  après  la  ratifica- 
tion de  la  convention,  et  les  troupes  devaient  être  ren-» 
dues  cinq  jours  après  au  point  de  rembarquement.  Cette 
convention  en  21  articles  spécifiant  toutes  les  clauses 
relatives  au  rapatriement  du  corps  d'armée  fut  ratifiée 
le  lendemain  28  juin  par  le  général  Belliard. 

Le  jour  suivant,  29  juin  (10  messidor).  Bol liàrd  notifia 
la  convention  à  Dupas  et  lui  transmit  Tordre  d'évacua- 
tion quMl  lui  renouvela  les 5  et  9 juillet;  Dupas  voulait 
tenir  jusqu'au  dernier  moment  et  partir  le  dernier. 

Malgré  la  cessation  dos  hostilités,  les  canons  de  la 
citadelle  tonnèrent  encore  une  fois  :  œ  fut  pour  rendre 
les  honneurs  aux  restes  de  Klébor.  Pleine  de  reconnais- 
sance et  de  vénération  pour  cette  grande  mémoire, 
qu'elle  devait  regretter  par  tant  de  motifs,  cette  portion 
de  l'armée  d'Orient  emmena  avec  elle  lo  corps  de  son 
illustre  général,  inhumé  dans  un  des  bastions  du  camp 
retranché  de  la  forme  d'Ibrahim-Bey.  Cotte  translation 
se  fit  de  la  manière  la  plus  solennelle,  au  bruit  do  l'ar- 
tillerie de  la  citadelle  et  des  forts.  Los  Anglais  et  les 
Turcs,  prévenus  par  Belliard  du  motif  de  cotte  explo- 
sion extraordinaire,  voulurent  concourir  aux  nouveaux 
honneurs   funèbres  que   l'armée  française   rendait  au 

6h 


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—  82  — 

vainqueur  d' Héliopolis,  en  répondant  aux  salves  des 
Français  par  celles  de  leur  propre  artillerie. 

Quelque  temps  après  Menou  signait  une  convention 
semblable  à  Alexandrie,  et  après  trois  ans  d'occupation, 
l'Egypte  était  perdue  sans  retour. 

Dupas  ne  sortit  de  la  citadelle  que  le  29  juillet  avec 
200  éclopés,  restes  de  sa  garnison  :  il  en  sortit  au  mo- 
ment où  les  Commissaires  français  et  anglais  y  péné- 
traient pour  inventorier  le  matériel  abandonné  par  ses 
héroïques  défenseurs  (  1  ). 

Dupas  eut  soin  d'emporter  les  glorieux  trophées  qu'il 
avait  conquis  sur  l'ennemi  dans  ses  nombreuses  et  vi- 
goureuses sorties:  c'étaient  trois  queues  de  Pacha, 
cinq  drapeaux,  plusieurs  armes  qui  furent  suspendues 
au  Dôme  des  Invalides.  Ces  trophées  ont  été  détruits 
dans  un  incendie,  lors  dos  obsèques  du  Maréchal  Sébas- 
tiani. 

Dupas  s'embarqua  avec  toutes  les  troupes  de  Belliard 
à  Aboukir.  Les  transports  firent  voile  le  9  août  pour  la 
France  où  l'on  aborda  le  23  septembre  1801  (l^^  vendé- 
miaire an  X). 


(1)  Belliard  à  Dupas.  (Arch.  Dubouloz-Dupas). 


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—  ^3  ^ 


CHAPITRE  V 


DUPAS  AUX  TUILERIES 
Octobre  1801  à  Décembre  1803 


Le  colonel  Dupas  est  nommé  adjudant  supérieur  du  Palais  des 
Tuileries.  —  M"^*  Junot  d^Abranlès.  —  Il  est  nommé  colonel  des 
Mamelucks  ;  détails  sur  l'organisation  et  Tadminist ration  de  ce 
corps  qui  fait  partie  de  la  Garde  consulaire.  —  Il  est  nommé 
général  de  brigade,  et  bientôt  après  commandant  supérieur  des 
Côtes  de  la  Seine  à  la  Somme,  à  Dieppe.  —  Le  général  Dupas 
est  appelé  à  commander  une  brigade  dans  la  division  de  gre- 
nadiers de  réserve  à  Arras. 


Lorsque  Dupas  débarqua  en  France  avec  ce  qui  res- 
tait de  l'armée  d'Egypte,  la  République  française  avait 
des  relations  pacifiques  avec  toutes  les  puissances.  Le 
Consulat  donna  à  la  Franco  la  période  de  paix  qui  suivit 
le  traité  d'Amiens,  et  il  n'y  eût  pendant  cette  trop  courte 
période  de  calme  d'autres  expéditions  militaires  que 
celles  qui  furent  dirigées  contre  les  nègres  révoltés  des 
Antilles. 

Dupas  n'eut  pas  à  rejoindre  la  demi-brigade  à  laquelle 
il  appartenait  nominalement,  étant  colonel  a  la  suite; 
la  69®  était  commandée  par  son  chef  titulaire,  Brun, 

Le  héros  du  Caire  n'attendit  pas" longtemps  un  em- 
ploi ;  plus  que  jamais,  Bonaparte  tenait  à  garder  auprès 


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—  84  — 

de  lui  son  ancien  camarade  du  siège  de  Toulon,  le  brave 
des  braves  du  pont  de  Lodi,  dont  il  avait  apprécié  la 
rude  franchise,  le  dévouement  absolu  et  la  parfaite 
intégrité. 

Bonaparte  n'avait  pas  de  cour,  n'étant  alors  que  le 
premier  magistrat  de  la  République  ;  mais  il  avait  une 
maison  militaire.  Il  créa  pour  la  surveillance  du  palais 
du  Gouverneiiient  quatre  adijvdanis  ^^upérieurs  qui 
étaient  généraux  de  brigîide  ou  colonels.  Dupas  fut 
nommé,  le  19  mars  1802,  l'un  de  ces  adjudants  supé- 
7i£urs  du  palais  des  Tuileries,  Poste  de  faveur  sous 
tous  les  rapports,  puisqu'il  était  attaché  à  la  résidence 
des  Consuls  et  qu'il  comportait  le  logement,  avec  des 
allocations  extraordinaires  en  plus  du  traitement  du. 
grade  de  colonel. 

Aux  Tuileries  Dupas  fut  en  relation  avec  tout  le  monde 
officiel  du  Consulat.  Le  général  Jûnot  occupait  alors  la 
haute  position  de  commandant  de  la  place  de  Paris.  Ce 
général  venait  d'épouser  une  très  jeune  femme,  Laure 
Permon;  plus  tard,  devenue  veuve  après  avoir  été  du- 
chesse d'Abrantès,  elle  tomba  dans  la  détresse  et  écrivit 
ses  Mé7mires  pour  vivre.  Cette  femme  d'un  esprit  caus- 
tique et  médisant  (1),  très  jeune  d'ailleurs  et  espiègle, 
s'amusait  des  fautes  de  langage  commises  par  Dupas. 
Avec  sa  figure  longue,  jaune  et  blême,  il  avait,  dit-elle, 
une  manière  grave  et  solennelle  de  faire  des  pataquès, 
«  C'était  du  reste,  ajoute-t-elle  dans  ses  Mémoires,  un 
homme  fort  brave,  qui  donnait  un  coup  de  sabre  aussi 
sérieusement  qu'il  disait  je  Vempogna.  » 

(1)  M*"*  Junot  d'Abrantès  raconte  elle-même  dans  ses  Mémoires 
que  Bonaparte  rappelait  petite  peste. 


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—  85  — 

Depuis  leur  soumission  à  Tannée  française  d'Egypte, 
les  Mamelucks  étaient  restés  diî  bravés  et  fidèles  servi- 
teurs de  la  France.  Ilsavaient  en  grand  nombre  sui  via\"ec 
leurs  familles  Farmée  d'Orient  lorsqu'elle  fut  rapatriée 
par  la  flotte  anglaise  en  vertu  de  la  convention  d'éva- 
cuation. Le  gouvernement  consulaire  forma  un  corps  de 
cavalerie  de  ces  jeunes  musulmans.  Ils  furent  réunis  le 
13  octobre  1801  dans  un  escadron  que  Bonaparte  atta- 
cha à  la  Garde  consulaire  et  dont  il  donna  d'abord  le 
commandement  à  l'un  de  ses  aides  de  camp,  le  général 
Rapp.  Comme  récompense  de  leur  dévouement  à  l'armée 
française,  les  Mamelucks  furent  autorisés  à  conserver 
leur  costume  national  (1)  Auprès  de  ce  corps  étaient 
des  réfugiés,  vieillards,  femmes^  enfants,  qui  recevaient 
une  pension  accordée  par  le  Gouvernement  à  titre  de 
secours,  et  pour  lesquels  on  établit,  à  Melun,  un  dépôt 
qui  fut  transporté  plus  tard  à  Marseille. 

Les  deux  compagnies  formant  l'escadron  de  cette 
belle  cavalerie,  fortes  d'environ  200  hommes,  furent 
plus  tard  réduites  à  160  hommes  et  ensuite  portées  à 
250.  Il  fallait,  à  la  tête  de  ce  corps  de  nouvelle  création 
et  dans  lequel  certains  emplois  avaient  été  donnés  à  la 
faveur,  un  chef  sur  l'énergie  et  la  droiture  duquel  le 
Gouvernement  pût  compter.  C'est  ainsi  que  Bonaparte, 
après  avoir  provisoirement  confié  le  commandement  de 
ce  corps  à  son  aide  de  camp  le  général  Rapp,  fut  amené 
à  nommer  colonel  des  Mamelucks  le  chef  de  brigade 
Dupas,  ancien  et  excellent  cavalier  (22  mars  1803). 

Ce  beau  corps  de  cavaliers  musulmans,  dont  le  quartier 

(1)  Fieffé,  la  Garde  Impériale  (1859). 


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—  86  — 

était  à  Melun,  marchait  précédé  de  timbales  et  de  trom- 
pettes. L'étendard  se  terminait  par  une  queue  de  cheval 
noire,  surmontée  d'une  boule  de  cuivre  doré.  L'uniforme 
était  un  riche  costume  turc  :  turban  blanc  à  calotte  rouge 
surmonté  d'un  croissant  en  cuivre  jaune;  veste  bleu  de 
ciel  avec  olives  et  galons  noirs,  gilet  rouge  et  ceinture 
de  laine  verte,  pantalon  rouge  à  la  Mamelitck  et  bot- 
tines jaunes,  sabre  à  la  turque,  espingole,  deux  pisto- 
lets, poignard  à  manche  d'ivoire,  éperons  en  cuivre 
jaune  ;  selle  à  haut  pommeau  et  dossiers  étriers  à  la 
turque  (1). 

Les  Mamejucks  ont  toujours  été  un  des  corps  privi- 
légiés de  la  Garde.  Après  Dupas,  dès  1804,  l'escadron 
fit  partie  du  régiment  de  chasseurs  à  cheval  de  la  Garde 
impériale,  ces  fumeux  chasseurs  à  cheval  qui  ne  quit- 
taient jamais  Napoléon  et  dont  il  aimait  à  porter  l'uni- 
forme vert  (2). 

Dupas  quitta  donc,  au  printemps  de  1803,  ses  fonc- 
tions d'adjudant  supérieur  du  palais  pour  celles  de 
colonel  des  Mamelucks.  Il  ne  perdait  pas  au  change,  au 
contraire  :  il  était  enfin  chef  de  l'un  des  corps  de  la  Garde 
consulaire,  il  ne  quittait  pas  la  résidence  du  Gouverne- 
ment auprès  duquel  un  détachement  de  Mamelucks 
était  toujours  de  service,  et  il  avait  des  émoluments  en 
rapport  avec  le  corps  de  luxe  dont  il  avait  le  comman- 
dement. 

Dans  son  nouveau  commandement.  Dupas  était  sous 
les  ordres  du  général  Bessières,  commandant  la  cava- 
lerie de  la  Garde  consulaire. 

(1)  Fielfé,  Histoire  des  Troupes  Etrangères  au  service  de  France. 

(2)  Ibid. 


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—  87  — 

Le  journal  des  Mamelucks(l)  débute  le  4  germinal 
an  XI  (25  mars  1803)  par  un  rapport  à  son  chef,  le  gé- 
néral Bessières,  dans  lequel  Dupas  demande  l'expulsion 
du  corps  d'un  capitaine  mal  noté  et  mal  famé,  que  précé- 
demment le  général  Happ  avait  décidé  de  renvoyer  : 
«  Fier  de  commander  les  Mamelucks,  de  braves  et  fidè- 
les étrangers  extraordinairement  attachés  au  premier 
Consul  (2),  j'ai  lieu  d'espérer  que  vous  en  ferez  part  au 
général  Rapp,  afin  d'obtenir  l'expulsion  de  M.  L.  et  son 
remplacement  dans  le  corps  des  Mamelucks.  > 

Un  Mameluck  avait  été  mis  aux  fers  après  avoir  reçu 
des  coups  de  bâton,  potir  avoir  volé  quelques  écus  de 
6  livres  à  un  camarade.  Cette  séquestration  parut  suffi- 
sante à  Dupas  pour  ne  pas  le  traduire  devant  un  Conseil 
de  guerre,  mais  il  le  fait  sortir  du  corps  où  il  n'est  plus 
digne  de  servir  : 

«Je  demande  qu'il  soit  porté  sur  la  liste  des  réfugiés 
avec  vingt  sous  par  jour  ;  je  l'emploierai  au  balayage  et 
à  l'entretien  des  cours  du  quartier.  > 

Le  quartier  est  dans  le  plus  mauvais  état,  les  murs 
sont  dégradés,  les  latrines  tombent  ainsi  que  les  écuries, 
les  ouvriers  refusant  de  les  réparer,  parce  que,  disent- 
ils,  «  on  ne  les  paye  jamais,  sans  même  songer  à  rem- 
bourser leurs  avances.  > 

27  mars.  Dupas  témoigne  au  capitaine  Delaitre  sa 
satisfaction  au  sujet  du  zèle  et  des  services  rendus  par 

(1)  Arch.  Dubouloz-Dupas. 

(2)  Napoléon  aimait  ses  Mamelucks.  Il  aimait  leur  agilité,  leur 
élan,  leur  bravoure;  il  aimait  leur  adresse  à  faire  scintiller 
dans  Tair  leurs  damas  redoutables,  leur  habileté  à  manier  leurs 
chevaux  arabes  qu'on  aurait  pris  pour  des  gazelles  quand  ils  pas- 
sèrent rapides  comme  des  flèciies  à  travers  les  escadrons  ennemis. 
(FieflTé,  la  Garde  impériale). 


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—  88  — 

les  sous-officiers.  Il  convient  avec  le  garde-magasin  que 
les  foins  do  premier  choix,  sans  mélange  de  luzerne, 
seraient  payés  dij^-huit  sous  les  cent  livres,  puis  il 
s'occupo  de  l'hygiène  de  la  troupe.  II  obtient  de  bonnes 
carabines  pour  ses  Mamolucks,  mais  il  ne  reçoit  aucune 
balle  de  ce  calibre,  aussi  réclame- t-il  :  sa  troupe  doit 
être  aussi  bien  traitée  que  les  divers  corps  de  la  garde 
qui  tous  ont  reçu  des  carabines  et  les  munitions  qui  leiir 
conviennent  ;  cette  mesure,  ajoute-t-il,  est  d'autant  plus 
importante  que  les  tirs  à  la  cible  sont  interrompus  par 
suite  de  la  différence  de  calibre  qui  existe  entre  les 
carabines  et  les  balles  ;  pour  obvier  à  cet  inconvénient, 
il  envoie  un  moule,  afin  que  le  général  donne  sans  délai 
un  ordre  aux  magasins  d'artillerie  pour  la  fonte  de 
balles  adaptées. 

Dupas  se  plaint  vivement  au  capitaine  Colbert  du 

vétérinaire  qui  n'exerce  aucun  contrôle  sur  les  fourrages 

tant  au  point  de  vue  de  la  qualité  qu'à  celui  du  poids.  Le 

erardc-maerasin  fait  couper  les  foins  pendant  les  pluies, 

iire  que  dans  les  c«is  urgents  (7  juin). 

Ibert  et  le  c<\pitaine  quartier-maître- 
ivaient  mal  pris  certaines  observations 
irait  que  le  quartier-maître  menaça 
aut  lieu  et  de  lui  faire  enlever  son 
lupas  lui  répond  tranquillement  :  «  Je 
ni  épouvanté  des  termes  de  votre 
vMdemment  a  été  inspira  par  h^  capi- 
3  tous  les  cas  vous  pouvez  agir  comme 
seulement  je  vous  invite  très  fort  à  ne 
Itre  vis-à-vis  du  général  Rapp,  parce 


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—  89  — 

que  je  saurai  vous  rappeler  à  Tordre  et  punir  d'une  ma- 
nière exemplaire  vos  impostures,  le  général  Rapp  n'en 
sera  pas  dupe  et  moi  encore  moins.  Vous  ajoutez  que 
votre  intention  est  de  quitter  le  corps  des  Mamelucks, 
cela  vous  regarde,  vous  pourrez  plus  facilement  disposer 
de  toutes  vos  protections  et  m'en  menacer.  » 

Le  capitaine  Delaitre  ne  quitta  pas  le  corps  mais  seu- 
lement  ses  fonctions  de  quartier-maître:  En  septembre 
Dupas  lui  ordonna  de  recevoir  dans  sa  compagnie  le  Ma- 
meluck  qui  était  de  service  auprès  de  M"»«  Bonaparte  ; 
de  metti'e  dans  le  fourgon  partant  de  Melun  tous  les 
fusils  français  et  autrichiens  qui  se  trouvent  encore 
dans  les  magasins,  en  lui  recommandant  do  choisir  les 
deux  meilleurs  et  de  les  remettre  aux  charretiers  pour 
leur  défense  personnelle. 

Le  journal  des  Mamelucks  continue  par  divers  ordres 
de  service  et  la  recommandation  de  faire  un  choix  et 
un  état  des  Mamelucks  susceptibles  d'entrer  en  cam- 
pagne. 

Le  colonel  des  Mamelucks  passa  une  partie  de  l'été 
de  1-803  à  Saint-CIoud  aqprès  du  premier  Consul. 

Dèale  mois  de  mai  le  gouvernement  anglais  rompit 
le  traité  de  paix  conclu  à  Amiens  l'année  précédente  : 
le  premier  Consul  répondit  par  l'invasion  du  Hanovre, 
et  l'état  de  guerre  recommença  entre  la  France  et 
l'Angleterre,  ce  qiii  ne  tarda  pas  à  amener  un  nouveau 
changement  dans  la  situation  de  Dupas. 

Le  19  août  (11  fructidor  an  XI),  il  reçut  sa  nomination 
au  grade  de  général  de  brigade  (1)    avec  l'avis   qu'il 

(1)  Archives  delà  guerre. 


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—  90  — 

allait  recevoir  un  commandement  en  rapport  avec  son 
nouveau  grade. 

Cette  nouvelle  destination  lui  fut  annoncée  par  la  let- 
tre suivante  du  Ministre  delà  guerre: 

«  Bonaparte,  premier  Consul  de  la  République, 
ayant  à  nommer  ungénérat  de  brigade  pour  être  employé 
en  cette  qualité  et  être  chargé  du  commandement  et  de  la 
défense  des  Côtes,  entre  la  Seine  et  la  Somme,  sous  les 
ordres  du  général  commandant  la  15«  division  militaire, 
a  fait  choix  du  citoyen  Dupas.  Il  est,  en  conséquence,  or- 
donné aux  officiers  généraux,  etc.  Fait  à  Paris  le  dou- 
zième jour  du  mois  vendémiaire  an  douzième  de  la 
République. 

Le  Ministre  de  la  Guerre,  Berthier  (1)  ». 

Dans  ce  commandement  des  Côtes  de  la  Seine  à  la 
Somme,  Dupas  est  chargé  non  seulement  du  service  de 
Tarmée  de  terre,  mais  il  a  sous  ses  ordres  les  services 
maritimes.  Il  est  chargé  de  la  création  et  de  l'orga- 
nisation des  chantiers  de  constructions  navales,  de  la 
défense  des  Côtes  et  des  ports  du  Havre  et  Ronfleur  (2). 

Dès  les  premiers  jours  de  son  arrivée  à  Dieppe,  il  si- 
gnale, le  11  octobre,  l'étrange  oubli  du  commissaire 
ordonnateur  de  la  marine,  aucun  des  dépôts  du  Havre 
et  des  côtes  voisines,  n'ayant  encore  reçu  les  foins  et 
pailles  dont  ils  devraient  être  fournis  depuis  longtemps. 
Il  établit  de  nouveaux  entrepôts,  ordonne  que  l'on  visite 
souvent  les  embarcations  des  pêcheurs,  sortant  ou  ren- 

(1)  Arch.  Dubouloz-Dupas. 

(2)  A  son  départ  de  Pans,  Dui)as  reçut  du  Ministre  Berthier 
100  louis  jK)ur  subvenir  aux  frais  extraordinaires  de  la  mission 
qui  lui  était  confiée.  (Archives  de  la  Guerre). 


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—  91  — 

trant  de  nuit  dans  le  port  du  Havre,  afin  de  mettre  ce 
port  à  l'abri  des  projets  perfides  des  Anglais.  Tous  les 
services  souffrent  de  la  pénurie  des  ressources  finan- 
cières. Dupas  s'adresse  directement  au  Ministre  de  la 
guerre  afin  d'obtenir  au  moins  l'argent  qu'il  lui  a  promis 
si  souvent  et  destiné  à  payer  les  frais  de  poste  et  les 
appointements  de  ses  aides  de  camp  ;  ces  derniers  ré- 
clamejït  ce  paiement  avec  d'autant  plus  d'insistance 
«  qu'ils  se  figurent  devoir  être  traités  comme  ils  l'étaient 
étant  de  service  au  palais  des  Tuileries.  > 

Les  attributions  des  commandants  des  Côtes  étaient 
assez  mal  définies  par  rapport  à  celles  des  commandants 
de  subdivisions  territoriales  :  des  diflficultés  ne  tardèrent 
pas  à  s'élever.  Le  général  Treillard,  chargé  du  comman- 
dement du  département  de  la  Seine-Inférieure,  avait 
remplacé  dans  le  commandement  de  la  place  du  Tré- 
port  le  capitaine  Gay  par  le  capitaine  Quentin,  et  avait 
ordonné  les  arrêts  à  divers  officiers  de  cette  place.  In- 
formé de  ces  ordres,  Dupas  s'y  oppose,  et  rappelle  à  son 
collègue  €  que  son  commandement  est  limité  à  l'inté- 
rieur de  la  Seine-Inférieure,  tandis  que  le  sien  s'étend 
sur  toutes  les  côtes  sans  exception,  depuis  la  Seine  jus- 
qu'à la  Somme  ;  qu'aucun  chef,  quelque  soit  son  grade, 
n'a  le  droit,  ne  peut,  ne  doit  s'immiscer  dans  son  com- 
mandement ;  que  d'ailleurs  il  saura  le  faire  respecter 
sous  tous  les  rapports.  » 

Et  de  fait,  Dupas  replace  Gay  dans  son  commande- 
ment, met  Quentin  aux  arrêts,  apprend  à  Trelliard  que 
l'étendue  do  son  commandement,  à  lui  Dupas,  s'étend 
non  seulement  sur  toutes  les  côtes,  mais  de  plus,  sur  la 
gauche  de  la  route  du  Havre  à  Saint- Valéry,  ce  com- 


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—  92  — 

mandemeat  lui  ayant  été  donné  sans  être  tenu  d'en 
rendre  compte,  si  ce  n'est  au  général  commandant  la 
15«  division  à  Rouen.  Il  termine  par  un  conseil  à  son 
collègue  Treillard  :  «  Au  lieu  de  vous  occuper  à  choisir 
des  commandants  de  place,  ne  feriez-vous  pas  mieux  de 
nous  envoyer  du  bois  de  chauffage  ?  >  (l) 

Les  privations  endurées  par  les  troupes  obligent  le 
général  à  s'adresser  directement  au  Ministre  de  la 
guerre.  <  Toutes  les  troupeâ  cantonnées  à  Caen,  surtout 
le  31«  d'infanterie  légère,  excitent  la  pitié,  tous  sont 
nus  des  pieds  à  la  tête,  leurs  fusils  dans  un  état  pire  ;  il 
serait  impossible  d'en  trouver  deux  médiocres  sur  douze. 
Les  sentinelles  postées  sur  les  côtes  n'ont  pas  même  une 
capote  pour  se  garantir  des  pluies  ou  du  froid.  > 

Quelques  jours  plus  tard,  Dupas  annonce  au  comman- 
dant que  par  décision  du  Ministre,  les  sous*offlciers  et 
hussards  du  2«  régiment  recevront  une  solde  supplémen- 
taire de  vingt  centimes  par  jour,  aussi  lés  engage-t-il  à 
manifester  leur  reconnaissance  en  apjirenant  les  ma- 
nœuvres du  canon,  afin  de  se  rendre  utile  suivant  les 
circonstances.  Aux  oflBciers  il  recommande  de  loger  les 
troupes  aussi  près  que  possible  du  rivage  de  la  mer  et 
des  batteries,  de  surveiller  la  propreté  des  fusils,  de  li- 
vrer au  moins  30  cartouches  par  giberne. 

En  même  temps  il  punit  avec  la  plus  grande  sévérité 
plusieurs  officiers  et  hussards  qui  s'étaient  livrés  à  des 
violences  sur  des  gens  du  pays.  Il  réprimande  et  traite 
de  scélérats  les  fournisseurs  et  garde-magasins  qui  n'a- 

(1)  Toutes  les  citations  sont  extraites  dû  journal  Dupas,  com- 
mandant des  Cotes  de  la  Seine  à  la  Somme.  (Arch.  Dubouloz- 
Dupas). 


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"  93  -* 

valent  pas  livré  toute  Teau-de-vie  qui  était  due  aux  eôl- 
dats  do  terre  embarqués  ;  «  ils  sont  déjà  assez  malheu- 
reux de  se  trouver  pendant  leur  traversée  sous  la  dé- 
pendance de  la  marine.  » 

Dupas  ne  se  gêne  pas  pour  adresser  ses  doléances  di- 
rectement au  Ministre  de  la  guerre:  le  4  novembre  il 
écrit  à  Berthier:  «  J*:ii  Thonneurde  vous  adresser  copie 
d'une  réponse  qui  sera  la  dernière  que  je  (ais  au  général 
Treillard  qui,  comme  vous  n'en  pouvez  pas  douter,  cher- 
che à  brouiller  les  cartes  et  à  exciter  des  luttes  qui  ne 
peuvent  qu'être  nuisibles  à  mes  opérations.  Veuillez, 
citoyen  ministre,  en  prendre  lecture  et  donner  des  or- 
dres précis;  il  paraît  que  le  général  commandant  la 
division,  Musnier,  n'a  pas  suivi  les  ordres  que  vous  lui 
aviez  adressé  au  sujet  de  mon  commandement,  que  la 
plus  grande  partie  des  corps  et  des  commandants  n'ont 
pas  eu  connaissance  de  mon  arrivée,  ni  de  ma  nomina- 
tion au  commandement  des  Côtes.  » 

Dupas  prévient  le  Ministre  qu'il  se  rend  à  Valéry 
pouc  se  reposer  mais,  qu'en  prévision  de  cette  absence, 
il  a  donné  ses  ordres  aux  commandants  de  Fécamp,  du 
Tréport,  etc.;  il  leur  a  notamment  recommandé  d'étudier 
avec  le  plus  grand  soin  la  marche  de  quatre  nouvelles 
fr^ates  anglaises  arrivées  pour  nous  observer;  il  les  a 
chargés  également  de  surveiller  de  très  près  et  d'arrêter 
immédiatement  tout  pêcheur  de  la  Côte,  soupçonné  d'en- 
tretenir des  rapports  avec  les  Anglais. 

L'autorité  du  commandant  des  Côtes  s'étendait  aussi 
sur  les  marins  et  ce  cumul  donnait  lieu  à  des  difficultés 
et  à  des  tiraillements.  Chaque  jour  des  soldats,  des  mu- 
nitions, étaient  transportés  par  la  voie  de  mer  sur  un 


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-^  94  — 

point  déterminé.  Les  marins,  jaloux  d'affirmer  leur  in- 
dépendance du  département  de  la  guerre,  ne  se  hâtaient 
jamais,  et  faisaient  volontiers  escale  dans  tous  les  ports 
intermédiaires.  C'est  en  vain  que  le  général  ordonne 
aux  commandants  de  ces  ports  de  ne  laisser  aucun  re- 
pos aux  marins  tant  que  leur  flotille  séjourne  dans  leur 
port.  Il  prie  le  Ministre  de  la  guerre  de  faire  prendre 
par  le  premier  Consul  un  arrêté  privant  de  la  moitié  de 
son  traitement  tout  officier  de  marine  s'arrêtant  dans 
un  port.  «  Ce  n'est  qu'en  usant  de  moyens  répressifs, 
dit-il,  qu'il  me  sera  possible  d'exécuter  les  ordres  et  de 
suivre  les  instructions  de  Bonaparte.  En  l'absence  de  ces 
mesures,  le  zèle,  l'activité  dont  je  suis  capable  sont 
inutiles.  » 

Ce  défaut  de  cohésion  et  d'unité  fut  aggravé  à  la 
suite  d'une  lettre  de  l'amiral  Bruix  à  Dupas  :  «  Tous  les 
officiers  de  marine,  sans  exception,  se  flattent  de  ne 
pas  se  soumettre  aux  ordres  du  commandant  des  Côtes, 
n'ayant  d'ordre  à  recevoir  que  du  Ministre  de  la  marine  ; 
aussi  entendent-ils  continuer  à  entrer,  sortir,  stationner 
où  bon  leur  semblera,  et  pendant  tout  le  temps  qu'ils 
voudront,  »  La  volonté  la  plus  énergique  était  annihilée 
par  cette  résistance.  A  la  suite  d'une  inspection  des 
canonniers  et  bateaux  plats  sortis  des  chantiers  de  la 
Ferté  et  St- Valéry,  nouvelles  discussions  entre  le  com- 
mandant des  Côtes  et  le  copamandant  de  la  division  na- 
vale qui,  malgré  des  ordres  contraires,  avait  abordé  la 
terre  dans  l'une  de  ses  traversées  ;  tous  les  bateaux  fu- 
rent ensablés.  La  10«  compagnie  de  chasseurs  fut  trans- 
portée parla  marine;  tout  l'eflectif,  bien  équipé,  jouissait 
au  moment  de  l'embarquement  d'une  santé  florissante  ; 


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—  95  — 

mais  arrivés  à  destination,  à  la  suite  de  nombreux  sta- 
tionnements sous  la  pluie,  privés  pendant  la  traversée 
d'une  nourriture  saine  et  d'une  bonne  boisson,  ils  dé- 
barquent pâles,  défigurés,  mourant  de  faim  et  de  froid. 
De  leur  belle  santé  il  ne  reste  qu'une  grande  énergie. 

Heureusement  les  tribulations  de  Dupas  vont  prendre 
fin.  Dès  la  fin  de  novembre,  Berthier  lui  annonce  qu'il 
est  appelé  à  commander  une  brigade  dans  les  corps  de 
grenadiers  réunis,  dits  de  réserve,  concentrés  à  Arras, 
mais  qu'un  ordre  ultérieur  lui  fera  connaître  l'époque  à 
laquelle  il  prendra  son  nouveau  commandement.  Cet 
ordre,  du  24  décembre,  lui  prescrivit  de  remettre  le 
commandement  des  Côtes  et  de  se  rendre  à  Arras  pour 
y  prendre  le  commandement  de  l'une  des  quatre  briga- 
des de  grenadiers  de  réserve. 

Aussitôt  que  son  départ  fut  connu  des  autorités  mili- 
taires et  maritimes,  Dupas  reçut  de  toutes  parts  l'ex- 
pression de  leurs  regrets  et  leurs  félicitations.  Carbonnol, 
directeur  de  l'artillerie,  lui  exprime  *  les  regrets  una- 
nimes de  tous  »  ;  le  colonel  commandant  lui  écrit  :  «  Ce 
n'est  pas  moi  seul  qui  vous  exprime  des  regrets  sur 
votre  départ,  veuillez  permettre  que  je  me  fasse  l'inter- 
prète des  troupes,  qui  partagent  les  sentiments  que  vous 
m'avez  inspiré.  »  Le  contre-amiral  La  Crosse  lui  écrit  : 
€  Les  éloges  que  l'on  vous  prodigue,  citoyen  général, 
sont  mérités  par  votre  zèle  et  votre  activité.  Recevez 
l'expression  de  mes  regrets  sincères  sur  votre  départ  ; 
ils  sont  basés  sur  l'estime  la  plus  vraie.  Recevez  égale- 
ment mes  compliments  sur  votre  nouveau  commande- 
ment auquel  votre  mérite  vous  donnait  des  droits  si 
légitimes.  L'inspecteur  aux  revues  de  la  15«  division  : 


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Gaogle 


«  Nous  nous  rappelons  avec  lat  pks  grande  sensibilité 
toutes  les  marques  d'attention,  d'honnêteté,  d'amitié 
que  vous  avez  bien  voulu  nous  donner  pendant  votre 
séjour  à  Dieppe  et  iious  voudrions  bien  être  à  môme  de 
trouver  l'occasion  de  vous  prouver  notre  reconnais- 
sance, etc.  y> 

Dupas  emmenait  à  Arras  (1)  ses  deux  aides  de  campf: 
le  premier  était  le  capitaine  Barrai,  qui  avait  fait  les 
campagnes  d'Italie  et  d'Egypte,  et  avait  servi  avec  le 
grade  de  lieutenant  dans  le  régiment  dès  dromadaires 
organisé  par  Kléber.  «  Cet  aide  de  camp,  dit  M«n«  Junot 
d'Abrànlés  dans  ses  Mémoires,  était  bien  le  meilleur,  le 
plus  digne  des  humains.  Il  était  brave  comme  son  gé- 
néral ;  ils  s'étaient  connus  et  appréciés  en  Egypte,  où 
le  lieutenant  Barrai  était  dromadaire.  Il  avait  de  la 
timidité  dans  le  monde,  où  il  allait  peu,  et  où  c'était  un 
vrai  supplice  pour  lui  d'accompagner  son  général.  » 

Lé  second  aide  de  camp  était  depuis  peu  de"  temps 
attaché  à  Dupas  :  c'était  le  capitaine  Bochaton,  d'Evian, 
qui  s'était  distingué  à  l'armée  des  Pyrénées-Orientales, 
où  il  était  officier  dans  le  5®  bataillon  de  volontaires 
nationaux  dii  département  du  Mont-Blanc.  Il  était  retiré 
dans  ses  foyers  lorsque  Dupas  le  fit  rentrer  au  service  et 
le  prit  pour  aide  de  camp  le  5  octobre  1803,  le  jour* 
même  où  le  général  était  nommé  au  commandement  des 
Côtés  de  la  Manche. 

En  même  temps  que  Dupas,  arrivait  à  Àrràs  le  bril- 


(I)  Dupas  demanda  un  congé  de  10  jour^  pour  se  rendre  à 
Paris  arranger  quelques  affaires;  son  père  venait  de. mourir.  Il 
désirait  ne  se  rendre  à  Arras  qu'après  ce  congé  qui  lui  fut  refusé 
par  Berthier,  alors  Ministre  de  la  guerre.  ( Archives  d^  la  Guêtre). 


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-9t  - 

lant  commandant  de  la  place  de  Paris,  le  général  de 
division  Junot,  qui  venait  prendre  le  commandement  de 
la  division  de  grenadiers.  Pour  Junot,  quitter  le  com- 
mandement de  Paris  était  une  sorte  do  disgrâce  qu'il 
avait  méritée  d'ailleurs,  en  faisant,  étant  pris  de  vin, 
une  scène  scandaleuse  chez  Garchi,  glacier  de  Paris  où 
se  réunissait  la  bonne  compagnie.  Il  fut  remplacé  dans 
le  commandement  de  Paris  par  Murât  qui.  sans  avoir 
beaucoup  de  tôte,  en  avait  une  meilleure  que  Junot. 
Ce  dernier  n'était  qu'un  brave  soldat,  un  redoutable 
sabreur,  un  excellent  instructeur,  mais  point  du  tout 
général. 

Dans  le  chapitre  suivant,  nous  verrons  Dupas  com- 
mander pendant  deux  ans  sa  brigade  de  grenadiers  et  la 
conduire  à  la  victoire.  Quant  au  général  de  la  division 
do  grenadiers,  Junot,  il  ne  resta  à  leur  tôte  que  jusqu'au 
mois  d'août  1804  ;  mais  il  s'en  occupa  avec  l'extrême 
sollicitude  d'un  parfait  instructeur,  et  ce  fut  lui  qui  con- 
tribua le  plus  à  faire  substituer  le  schako  au  chapeau  à 
trois  cornes  si  incommode  pour  la  troupe,  et  à  faire  re- 
noncer le  soldat  aux  longs  cheveux  poudrés  pour  lui 
faire  adopter  les  cheveux  courts  dits  à  la  titus. 


76 


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—  m  - 


CHAPITRE  VI. 


CAMPAGNES  DE  ^805  ET  ^806 
Janvier  1804  à  Décembre  1806 


Dupas  commande  une  brigade  de  la  division  de  grenadiers  de 
réserve  à  Arras.  —  Nouvelles  faveurs  dont  il  est  Tobjet.  — 
Commandant  de  la  Légion  d'honneur.  —  Sous-Gouverneur  du 
château  de  Stupinis.  —  Troisième  coalition.  —  Campagne  de 
1805  contre  les  Austro-Russes.  —  Le  général  Z'-en-avant.  — 
Donawerth.  —  Wertingen.  —  Ulm.  —  Amstetten.  —  Holla- 
briinn.— Au sterlitz.  —  Dupas  général  de  division,  grand  cordon 
du  Lion  de  Bavière.  —  Traité  de  Presbourg.  —  Quatrième 
coalition.  Campagne  de  1806  contre  la  Prusse.  —  Dupas 
commande  la  l"*®  division  du  8®  corps.  —  Opérations  de  cette 
division  en  Allemagne  et  dans  la  Poméranie  suédoise. 


Bonaparte  avait  répondu  ^x  dispositions  menaçantes 
de  rAngl63terre  par  la  création  d'une  formidable  armée 
réunie  au  camp  de  Boulogne  et  destinée  à  opérer  une 
descente  sur  les  Côtes  anglaises.  Recourant  au  pro- 
cédé de   formation  de  troupes   d'élite  qu'il  avait  déjà 
iployé  à  Tarmée  d'Italie,  il  détacha,  dans  un  grand 
mbre  do  régiments  d'infanterie,  les  3  compagnies  de 
enadiers  pour  en  former  une  douzaine  de  bataillons 
îlite.  Seulement,  cette  fois,  les  bataillons  de  grenadiers 
mrent  pas  l'existence  éphémère  de  ceux  de  1796.  Au 


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—  99  — 

fur  et  à  mesure  que  les  compagnies  destinées  à  conriposer 
ces  bataillons  arrivaient  à  Arras,  elles  étaient  organisées 
en  bataillons  et  placées  sous  la  direction  de  Fun  des 
quatre  généraux  de  brigade  sous  les  ordres  du  jeune 
divisionnaire  Junot. 

C'est  ainsi  que  Dupas  reçut  le  commandement  de  la 
3«  brigade  de  ces  grenadiers,  dits  de  réserve,  le  IG 
pluviôse  an  XII,  6  février  1804.  L'instruction,  l'arme- 
ment, la  tenue,  l'entraînement  de  cette  belle  troupe 
occupèrent  tous  les  instants  de  Dupas  dès  ce  moment  ; 
son  chef  lui  donnait  d'ailleurs  sous  ce  rapport  l'exem- 
ple: «Je  n'ai  jamais  vu,  dit  M»*®  d'Abrantés  dans  ses 
Mémoires,  de  mère  plus  coquette  pour  sa  fille,  de  femme 
plus  coquette  pour  elle-même,  que  Junot  ne  l'était  pour 
ses  grenadiers,  leur  toilette  et  surtout  leur  coif- 
fure, etc.  »  (1). 

La  Légion  d'honneur  venait  d'être  créée.  A  la  troi- 
sième promotion  de  cet  ordre,  qui  eut  lieu  le  14  juin 
1804  à  l'occasion  du  4«  anniversaire  de  Marengo,  Dupas 
fut  promu  d'emblée  commandant  (2),  mais  il  était  mem- 
bre de  droit  de  l'ordre,  dés  la  création,  en  sa  qualité  de 
titulaire  d'un  sabre  d'honneur. 

Dès  la  fin  d'août  1804,  Junot  fut  remplacé  par  Oudinot 
dans  le  commandement  de  la  division  des  10,000  gre- 
nadiers.   L'année  se  passa  en  préparatifs  belliqueux, 

(1)  C'est  à  propos  de  ce  séjour  à  Arras  que  M""*  Junot  d'Abrantès 
rapporte  qu'on  appelait  Dupas  le  généralrs*-en  avant,  et  qu'elle 
conte  une  anecdote  sur  l'aide  de  camp  Barrai.  (A.  Folliet,  les  Sa- 
voyards au  pont  de  Lodi). 

(2)  C'est  le  grade  qu^on  appelle  aujourd'hui  commandeur. 
Comme  titulaire  d'un  sabre  d  honneur.  Dupas  était  Membre  de 
droit  àe  la  Légion  d'honneur.  Membre  était  le  grade  qu'on  appelle 
à  présent  Chevalier. 


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—  100  — 

mais  pour  divers  motifs  la  descente  en  Angleterre  ne 
put  être  efliectuée. 

Dupas  jouissait  toujours  de  la  plus  grande  faveur 
auprès  do  Bonaparte.  Depuis  son  retour  d'Egypte,  il 
n'avait  occupé  que  des  emplois  privilégiés  avec  de  beaux 
traitements  on  dehors  de  celui  de  son  grade.  La  faveur 
dont  il  n'avait  cessé  de  jouir  sous  le  Consulat  ne  se  dé- 
mentit pas  lorsque  l'ambitieux  Bonaparte  fut  devenu 
empereur.  Napoléon  lui  réservait  une  de  ces  agréables 
sinécures  qui  comportent  des  appointements  sans  don- 
ner lieu  à  aucune  occupation  ni  responsabilité.  Le  31  oc- 
tobre 180  ii  il  lui  fît  écrire  la  lettre  suivante  : 

«  Saint-Cloud,  le  9  brumaire  an  XIII. 

«  Le  grand  Maréchal  du  Palais^  au  général  de  brigade 

Dupas 

J'ai  l'honneur  de  vous  prévenir  que  S.  M.  vous  a 
nommé  aux  fonctions  de  Sous-Gouverneur  du  palais  de 
Stupinis  (1)  ;  vous  jouirez  des  prérogatives  et  appointe- 
monts  attachés  à  cette  place.  Ces  appointements  sont  de 
six  mille  francs,  pour  l'an  XIII.  Vous  les  cumulerez  avec 
ceux  que  le  Ministre  de  la  guerre  vous  fera  payer  pour 
le  grade  que  vous  occupez  dans  l'armée. 

DUROC.    > 

Napoléon  était  rentré  à  Paris,  le  12  octobre,  d'un  long 
voyage  commencé  le  18  juillet  et,  au  cours  duquel,  il 
avait  inspecté  les  camps  de  la  grande  armée  à  Boulogne, 


(l)  Palais  des  rois  de  Sardaigne  en  Piémont,  devenu  palais  im- 
périal. 


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—  101  — 

décerné  les    récompenses   de  la  Légion  d'honneur  le 
15  août,  et  visité  les  bords  du  Rhin. 

Le  nouvel  empereur  fit  à  l'Angleterre  de  nouvelles 
propositions  de  conciliation.  Le  ministère  anglais  n'y 
fit  qu'une  réponse  évasive  et,  malgré  les  efforts  de 
l'opposition  en  faveur  de  la  paix  dans  le  Parlement,  les 
ministres,  assurés  de  la  majorité,  gardèrent  le  secret  de 
leurs  relations  avec  les  puissances  du  continent  et  la 
paix  présentée  par  la  France  fut  encore  une  fois  re- 
poussée (février  1805). 

Au  printemps  de  1805,  Napoléon  alla  recevoir  à  Milan 
la  couronne  des  rois  Lombards.  A  son  retour,  il  visitix 
de  nouveau  le  camp  de  Boulogne  (2  août).  Son  apparition 
sur  les  Côtes  de  la  Manche  fit  croire  que  l'expédition 
contre  l'Angleterre  allait  être  entreprise.  L'Autriche, 
d'accord  avec  l'Angleterre  et  la  Russie,  crut  l'occasion 
excellente  pour  déclarer  la  guerre  (3  septembre)  et  trois 
armées  autrichiennes  furent  mises  en  marche  :  l'une,  de 
80,000  hommes  (archiduc  Ferdinand),  envahit  la  Bavière, 
alliée  de  la  France  ;  la  seconde,  de  30,000  (archiduc 
Jean),  entra  dans  le  Tyrol;  et  la  troisième,  100,000 
hommes  (archiduc  Charles),  s'avançait  sur  l'Adige. 

A  la  première  nouvelle  des  mouvements  hostiles  des 
troupes  autrichiennes.  Napoléon  avait  quitté  Boulogne 
pour  rentrer  à  Paris.  Il  quitta  le  château  de  St-Cloud  le 
24  septembre  et  arriva  à  Strasbourg  le  27  :  il  y  attendit 
l'arrivée  et  la  concentration  des  troupes  qui  devaient 
former  la  grande  armée  qu'il  allait  conduire  en  Allema- 
gne contre  la  troisième  coalition  :  cotte  grande  armée 
se  composait  de  sept  corps  commandés  par  Bernadette, 


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—  102  — 

Marmont,  Davout,  Soult,  Ney,  Lanneset  Augereau,  plus 
la  Garde  impériale. 

Le  corps  du  Maréchal  Lannes  était  le  5^  ;  il  se  compo- 
sait de  deux  divisions,  savoir:  les  grenadiers  Oudinot 
et  la  division  Suchet,  en  tout  17,000  hommes. 

La  division  de  grenadiers  Oudinot  était  formée  de  dix 
bataillons  d'élite  répartis  en  trois  brigades  :  Laplanche- 
Mortière,  Dupas  et  Raffln. 

La  brigade  Dupas  était  la  2®,  elle  était  forte  de  quatre 
bataillons,  savoir  :  deux  bataillons  d*élite  d'infanterie 
légère,  forts  de  911  hommes,  colonel  Schramm,  et  deux 
bataillons  d'élite  de  ligne,  forts  de  857  hommes,  colonel 
Cabannes,  en  tout  1798  hommes.  Dupas  avait  avec 
lui   ses  aides  de  camp  Barrai  et  Bochaton. 

Il  n'entre  pas  dans  notre  cadre  de  décrire  les  événe- 
ments généraux  de  cette  admirable  mais  sanglante 
campagne  de  1805:  nous  devons  nous  borner  à  la  2^  bri- 
gade des  grenadiers  Oudinot. 

Les  grenadiers  faisant  tête  de  colonne  du  corps  d'armée 
de  Lannes  passèrent  le  Rhin  à  Kehl  le  25  septembre, 
firent  halte  pendant  la  nuit  aux  environs  de  Rastadt, 
et  s'avancèrent  le  lendemain  sur  Ludwigsburg.  De  là 
ils  prirent  la  route  de  Beutelsbach,  Pludershausen, 
Gemund,  Aalen  et  Nordlingen.  Le  6  octobre,  ils  étaient 
à  Neresheim. 

Murât  avec  la  réserve  de  cavalerie  traversa  le  Da- 
nube à  Donawerth  le  7  octobre,  suivi  par  Lannes  avec 
les  grenadiers  Oudinot.  Le  8,  Murât  attaque  une  divi- 
sion autrichienne  à  Wertingen.  Ce  corps  autrichien 
oppose  la  plus  vive  résistance.  Lannes  se  hâte  d'en- 
voyer au  secours  de  Murât  sa  brigade  de  grenadiers  la 


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—  103  — 

plus  rapprochée  qui  était  précisément  celle  de  Dupas. 
9  La  vue  de  ce  renfort  imposant  ne  contribua  pas  peu 
à  accélérer  la  retraite  de  l'ennemi.  Poursuivi  avec  cha- 
leur, le  corps  autrichien  abandonna  dans  sa  fuite  son 
artillerie  ;  la  plus  grande  partie  de  ses  drapeaux  tomba 
au  pouvoir  des  Français,  qui  firent  prisonniers  deux 
lieutenants-colonels,  six  majors,  soixante  officiers  et 
prés  do  quatre  mille  soldats.  Tout  ce  qui  n'avait  pas  été 
tué  ne  dut  son  salut  qu*à  un  marais  qui  arrêta  la  marche 
de  la  seconde  brigade  des  grenadiers  d'Oudinot  que  le 
général  avait  fait  avancer  au  pas  de  charge  pour  tourner 
la  colonne  des  fuyards.  »  (1). 

Le  9  octobre  au  soir  les  grenadiers  vinrent  prendre 
position  à  Zusmershausen,  sur  la  route  d'Ulm  à  Augs- 
bourg  ;  l'empereur  y  établit  son  quartier  général  et 
passa  les  troupes  en  revue.  Il  distribua  des  récompenses 
aux  dragons  de  Murât  ;  les  grenadiers  d'Oudinot  par- 
ticipèrent aussi  à  ces  récompenses,  et  l'empereur  loua 
leur  courage  et  leur  belle  tenue  (2). 

Les  jours  suivants  les  grenadiers  étaient  devant  Ulm, 
les  30,000  hommes  du  général  Mack  capitulèrent  le  17. 

La  division  Oudinot  descendit  ensuite  l'Iser  et  marcha 
par  la  route  de  Landshut,  sur  Braunau  :  elle  fut  déta- 
chée du  corps  de  Lannes  pour  marcher  avec  la  cavalerie 
légère  de  Murât  à  la  poursuite  du  général  russe  Kutusoff 
qui,  se  retirant  par  la  grande  route  de  Linz  à  Vienne, 
avait  fait  prendre  position  à  une  partie  de  son  arrivée 
sur  les  hauteurs  d'Amstetten.  «  Lorsqu'il  eut  reconnu 

(1)  Victoires  et  conquêtes  des  Français. 

(2)  Même  ouvrage. 


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—  104  — 

la  position  de  l'ennemi  et  après  quelques  engagements 
assez  sérieux  entre  la  cavalerie  et  celle  des  Russes, 
Murât  fit  avancer  la  division  de  grenadiers  que  le  géné- 
ral Oudinot  forma  en  plusieurs  colonnes  d'attaque. 

Les  Austro-Russes  opposèrent  d'abord  une  résistance 
assez  opiniâtre  ;  mais  Oudinot  ayant  ordonné  une  charge 
générale  à  la  baïonnette,  l'ennemi  fut  déposté  sur  tous 
les  points  et  laissa  400  morts  sur  le  champ  de  bataille 
et  300  prisonniers  entre  les  mains  des  vainqueurs  ;  il 
fut  poursuivi  par  le  9®  et  le  10®  de  hussards  qui  lui 
firent  encore  1,500  prisonniers.  »  (1). 

Le  13  novembre  les  grenadiers  passèrent  sur  la  rive 
gauche  du  Danube  à  Vienne  ;  le  16  au  soir,  Murât  vou- 
lut absolument  attaquer  l'arriére-garde  du  prince  Bagra- 
tion  à  Hollabrunn.  Lannes  fit  avancer  la  division  des 
grenadiers  d'Oudinot  pour  attaquer  de  front  et  par  la 
gauche  tandis  que  les  troupes  de  Soult  tournaient  par 
la  droite  et  que  Vandamme  appuyait  les  grenadiers. 
La  U^  brigade  de  grenadiers,  Laplanche-Mortière,  fon- 
dit sur  les  Russes  avec  son  élan  accoutumé  et  fut  suivie 
par  les  brigades  Dupas  et  Raffin  ;  mais  il  était  nuit  noire, 
les  Russes  se  défendirent  admirablement  et  ce  n'est 
qu'à  11  heures  du  soir  que  les  Français,  qui  étaient 
22,000,  furent  vainqueurs  de  ces  6,000  Russes.  Le  gé- 
néral Oudinot,  surnommé  le  Bayard  de  l'armée,  qui 
avait,  disait-on,  plus  de  blessures  que  d'années  de  ser- 
vices, fut  encore  assez  grièvement  blessé  dans  ce  combat 
de  nuit  ainsi  que  ses  deux  aides  de  camp. 

(1)  Victoires  et  conquêtes  des  Français. 


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—  105  — 

Duroc  prit  le  commaadement  des  grenadiers  pendant 
l'absence  forcée  d'Oudinot  blessé. 

Le  27  novembre  les  grenadiers  étaient  avec  Duroc  à 
Brunn  et  dans  les  environs  de  cette  place. 

Dans  la  nuit  du  l®'*  au  2  décembre,  à  la  veille  de  la 
grande  bataille  qui  allait  être  livrée  aux  Austro-Russes, 
la  réserve  de  l'armée,  composée  de  dix  bataillons  de  la 
Garde  impériale  et  des  dix  bataillons  de  grenadiers  de 
Duroc,  était  près  de  Turas  entre  ce  village  et  Schla- 
panitz.  Cette  réserve  était  disposée  sur  deux  lignes,  en 
colonne  par  bataillon  à  distance  de  déploiement,  ayant 
dans  les  intervalles  40  pièces  de  canon.  C'était  avec 
elle  que  Napoléon  avait  le  projet  de  se  précipiter  par- 
tout où  il  croirait  sa  présence  urgente.  Les  soldats  de 
cette  formidable  réserve  témoignaient  leur  impatience 
de  n'être  point  engagés  avec  l'ennemi  et  demandaient 
qu'on  les  fit  danser  :  <  Réjouissez-vous  de  ne  rien  faire, 
répondit  l'Empereur,  je  vous  garde  en  réserve  ;  tant 
mieux  si  l'on  n'a  pas  besoin  de  vous  aujourd'hui.  » 

Les  grenadiers  Oudinot  ne  furent  engagés  qu'un  ins- 
tant vers  la  fin  de  la  bataille  d'Austerlitz  :  ce  fut  la 
brigade  Dupas  qui  eut  cet  honneur  et  sut  le  mettre  à 
profit  par  une  intervention  décisive  due  à  une  manœuvre 
habile  et  précise  :  «  La  brigade  de  grenadiers  comman- 
dée par  le  général  Dupas  et  placée  sous  les  ordres  du 
général  Duroc,  dit  la  relation  officielle  de  la  bataille, 
arrivait  sur  le  ruisseau  de  Kobelnitz.  Elle  manœuvra  de 
manière  à  serrer  et  à  tourner  un  corps  de  cinq  mille 
hommes  que  poursuivaient  le  10®  d'infanterie  légère  et 
le  43®  de  ligne  commandés  par  le  général  Morand  et 
lui  fit  rendre  les  armes.  » 


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—  106  — 

Cette  grande  victoire  d'Austerlitz,  due  aux  habiles 
dispositions  de  Napoléon  et  à  Tincomparable  valeur 
des  troupes,  coûta  aux  Austro-Russes  plus  de  40,000 hom- 
mes hors  de  combat. 

Le  3  décembre  les  grenadiers  Oudinot  prirent  la  roule 
de  Hongrie.  Après  Tarmistice  les  grenadiers  revinrent 
survienne  avec  la  Garde:  le  12  décembre  TEmpereur 
était  de  retour  au  palais  de  Schœnbrunn. 

Quelques  jours  plus  tard,  Dupas,  qui  venait  de  justifier 
une  fois  de  plus  son  glorieux  -  surnom  de  général 
Z'en  avant,  recevait  en  récompense  de  sa  brillante 
conduite  sa  nomination  au  grade  de  général  de  division 
et  le  Grand  Cordon  du  Lion  d'Or  de  Bavière.  le  3  nivôse 
an  XIV  (24  décembre  1805). 

Le  26  décembre  fut  signé  à  Presbourg  le  traité  qui 
reconnaissait  comme  rois  les  électeurs  de  Bavière  et  de 
Wurtemberg,  qui  confirmait  la  réunion  de  la  Vénétie 
de  ristrie  et  de  la  Dalmatie  au  royaume  d'Italie,  etc. 
Bientôt  le  roi  de  Naples  était  expulsé  de  son  royaume 
et  remplacé  par  Joseph  Bonaparte;  Louis  Bonaparte 
était  nommé  roi  de  Hollande  et  Napoléon  devenait  le 
chef  de  la  Confédération  de  l'Allemagne  du  Sud  (Bavière, 
Wurtemberg,  Bade,  Berg,  Darmstadt,  Nassau,  etc.) 

Mais  à  peine  la  troisième  coalition  était-elle  anéantie 
par  la  foudroyante  campagne  de  1805  qui  venait  de  se 
terminer  par  Austerlitz  et  le  traité  de  Presbourg,  qu'une 
quatrième  coalition  se  formait  à  l'instigation  de  l'An- 
gleterre. Cette  fois  la  Prusse,  qui  jusqu'alors  était  restée 
neutre,  entra  dans  la  coalition  et  fit  des  armements  ex- 
traordinaires. Dès  le  commencement  de  septembre  1806 
le  gouvernement  prussien,  sans  attendre  l'arrivée  de  ses 


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—  107  — 

alliés  les  Russes,  fit  entrer  ses  troupes  en  Saxe  tout 
comme  Tannée  précédente  le  gouvernement  autrichien 
avait  fait  envahir  la  Bavière. 

En  même  temps  un  ultimatum  était  adressé  par  le 
roi  de  Prusse  au  gouvernement  Français.  Cette 
pièce  singulière,  comparable  par  l'extravagance  dos 
idées  au  fameux  manifeste  du  duc  de  Brunswick  en 
1792,  intimait  pour  ainsi  dire  à  l'Empereur  des  Français 
Tordre  de  repasser  le  Rhin,  d'évacuer  le  territoire 
allemand  et  de  renoncer  aux  couronnes  d'Italie,  de 
Naples  et  de  Hollande;  la  France  était  menacée,  en  cas 
de  refus,  de  toute  la  vengeance  des  armées  prusiennes. 
240,000  Prussiens  sous  les  armes  se  mirent  en  mouve- 
ment. On  sait  comment  Napoléon  tomba  sur  cette  armée 
avec  les  corps  de  Bernadette,  Davout,  Soult,  Lannes, 
Ney,  Augereau,  anéantit  les  Prussiens  le  14  octobre  à 
léna,  à  Auerstaedt  et  en  d'autres  combats,  si  bien  qu'en 
27  jours  la  grande  armée  prussienne  s'était  évanouie. 

Au  moment  où  l'armée  française  allait  commencer 
son  mouvement  en  avant,  le  22  septembre  1806,  Dupas 
reçut  Tordre  de  prendre  le  commandement  de  la 
l^û  division  de  l'armée  gallo-batave  qui  prit  le  nom  de 
8«  corps  de  la  grande  armée  sous  les  ordres  du  maréchal 
Mortier.  Ce  corps  d'armée  composé  de  troupes  françaises 
et  hollandaises  était  rassemblé  en  Hollande  et  se  trou- 
vait prêt  à  entrer  en  campagne  dans  les  premiers  jours 
d'octobre.  (1)  La  force  du  8«  corps  était  de  20,000  hom- 
mes. 

(1)  Organisation  delà  1'*  division  du 8*  Corps  d'armée.  (Archives 
de  la  Guerre), 
Maréchal  Mortier,  commandant  en  chef. 
V^  Division,  général  Dupas,  Aides  de  camp,  les  capitaines  Bar- 


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—  108  — 

La  force  de  la  division  Dupas  était  de  10  bataillons 
dont  six  français  et  quatre  hollandais  avec  rartilierio 
hollandaise  à  l'effectif  de  8,255  hommes  répartis  en 
trois  brigades  aux  ordres  des  généraux  Veaux,  Gency 
et  Grandjean. 

La  l^e  division  du  8«  corps  s'avança  vers  les  frontières 
de  rélectorat  do  Hesse-Cassel  dont  le  souverain  s'était 
allié  au  roi  de  Prusse,  tandis  que  son  envoyé  à  Paris 
cherchait  encore  à  tromper  le  cabinet  de  St-Cloud  sur  les 
intentions  de  son  maître.  Il  eût  été  imprudent,  au  mo- 
ment où  les  Prussiens  battus  à  léna  fuyaient  devant 
Tannée  française,  de  laisser  sur  les  derrières  de  celle-ci 
des  troupes  intactes  et  prêtes  à  tirer  parti  d'un  échec 
de  nos  armes. 

Dupas  était  avec  Mortier  sous  les  murs  de  Cassel  le 
l®"^  novembre  :  voulant  éviter  à  cette  capitale  les  suites 
d'une  occupation  de  vive  force,  le  maréchal  la  fit  sommer 
de  recevoir  sans  résistance  les  troupes  gallo-bataves.  La 
régence  s'empressa  d'obtempérer  à  cette  sommation  et 
à  midi  le  maréchal  entra  dans  Cassel  qu'il  fît  occuper 
en  force.  Le  lendemain  il  annonçait  par  une  proclama- 

ral,  Bochaton,  le  lieutenaut  Orillat. 

Clief  d'Etal-major  :  Dumarest,  adjoints,  Regnaud,  Roguet. 

!••«  Brigade,  général  Veaux.  Aide  de  campj  Curnillon. 

4»  Léger  :  Colonel  Bazancourt,       2  bataillons  1774  hommes. 

15®  de  ligne  :  Cîolonel  Raynaud,        2        id.         1514        id. 

2eBrig.  g*'  Gency.  Aide  de  camp 
Perrin. 

58e de  ligne:  Colonel  Arnaud,         2        id.         1772        id. 

Régiment  du  Grand  Duc  de  Berg,     2        id.         1344        id. 

3e  Brig.,  g**  Granjean  Aides  de 
camp  Jeannot,  Prévost. 

Rég.  du  G^  Duc  de  Wurstbourg,     2        id.         1691        id. 

Artillerie  française  à  pied,  artille- 
rie hoHandaise  à  cheval.  160       id. 

10  bataillons  8255  hommes. 


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—  109  — 

tion  sa  prise  de  possession  de  la  Hesse  électorale  et  or- 
doQDait  aux  troupes  hessoises  de  déposer  les  armes  ou  de 
prendre  du  service  dans  Tarmée  française.  Cette  dernière 
sointion  fut  adoptée  par  un  grand  nombre  de  soldats. 

Après  avoir  ainsi  soumis  la  Hesse  sans  combat,  le 
8«  corps  marcha  vers  le  Hanovre  et  sur  Hambourg  pour 
former  l'Elbe  et  le  Weser.  Les  Français  se  trouvaient 
ainsi  maîtres  de  toutes  les  villes  anséatiquos  des  côtes 
de  la  mer  du  Nord  et  de  la  Baltique  ;  ils  interceptaient 
le  commerce  de  l'Angleterre  sur  tous  les  points  qui  lui 
servaient  d'entrepôt.  C'est  à  ce  moment,  c'est  à  ce  point 
culminant  de  sa  puissance  et  de  sa  gloire  que  Napoléon, 
malgré  le  vœu  du  Sénat  et  de  l'opinion  publique,  rendit 
ies  fameux  décrets  de  Berlin  aux  termes  desquels  il  mit 
en  état  de  blocus  les  îles  Britanniques  et  défendit  à 
l'Europe  d'entretenir  avec  elle  des  relations  commer- 
ciales. Fatale  mesure  qui  devait  accumuler  sur  la 
France  tant  de  désastres  ! 

Les  troupes  de  Dopas,  formant  l'extrémité  gaucho  do 
la  ligne  occupée  par  la  grande  armée,  s'avancèrent  par 
le  Mecklembourg  vers  la  Poméranie  suédoise.  A  leur 
approche,  toutes  les  troupes  suédoises  qui  occupaient  la 
frontière  de  cette  province  se  retirèrent  sur  Stralsmid, 
qui  en  est  la  capitale  (12  décembre),  en  prenant  la  pré- 
caution de  rompre  tous  les  ponts  afin  de  retarder  la 
marche  des  Français. 

A  la  fin  de  décembre  1806,  la  division  Dupas  était  avœ 
Mortier  à  Anclam,  ne  songeant  pas  attaquer  Stralsund, 
place  très  bien  munie  et  fortement  défendue,  mais  se 
préparant  à  entrer  dans  la  Poméranie  Suédoise  pour 
resserrer  cette  place. 


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-  11Ô-- 

Le  22«  et  le  72«  régiments  d'infanterie  et  le  !««•  régi- 
ment de  ligne  italien  vinrent  renforcer  la  division  Dupas 
ainsi  que  le  26«  régiment  de  chasseurs  à  cheval  et  le 
2«  régiment  de  hussards  hollandais.  Le  général  Ruby 
commanda  une  des  brigades. 


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~  ni  — 


CHAPITRE  VU 


CAMPAGNE  DANS  LA  POMËRANIE  SUÉDOISE 
Janvier  à  Juin  1807 


Journal  de  la  division  Dopas  (1).  —  Entrée  dans  la  Poméranie 
Suédoise.  —  Blocus  de  Stralsund.  —  Construction  d'un  pont. 
Passage  de  la  Peene.  —  Prise  de  Loitz.  —  Marches  et  recon- 
naissances. —  Combat  du  14  mars.  —  Marche  delà  division.  — 
Combat  d'Ukermund.  —  Armistice.  —  Siège  de  Colberg.  — 
Broch,  Stettin.  —  La  division  passe  la  Vistule  et  marche  sur 
Friedland  par  Heilsberg.  —Force  et  composition  de  la  division 
Dupas. 

Les  places  conquises  sur  le  Haut-Oder  assuraient  à  la 
droite  la  ligne  d'opération  de  la  grande  armée  ;  Mortier, 
commandant  le  8«  corps,  devait  l'assurer  à  sa  gauche 
sur  le  Bas-Oder;  il  lui  était  surtout  recommandé  de 
pénétrer  dans  la  Poméranie  Suédoise. 

Le  maréchal  avait  établi  son  quartier  général  à  An- 
clam,  le  12  décembre  1806.  A  son  approche  les  Suédois 
qui  occupaient  la  frontière  de  la  Poméranie  s'étaient 
repliés  sur  Stralsund. 

Le  siège  de  cette  place  n'étant  pas  possible  faute  de 
matériel  de  siège,  le  8«  corps  fut  chargé  de  la  bloquer. 

(1)  Rapport  historique  du  général  Dupas  :  27  janvier  1807  au 
30  mars  1809.  Archives  Dubouloz-Dupas. 


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-liâ- 

La  division  Dupas  reçut  donc  Tordre  de  pénétrer  le 
28  janvier  1807  dans  la  Poméranie  Suédoise.  Ce  géné- 
ral attendit  que  la  nuit  fut  close  pour  éviter  la  surveil- 
lance des  espions  et  celle  des  postes  Suédois  établis  en 
face  de  nos  troupes. 

La  nuit  venue,  le  quartier  général  et  ràrtillerio  se 
mettent  en  marche  pour  Sicden-Brûnsow,  la  cavalerie 
légère  pour  Engenilborg,  deux  villages  très  rapprochés 
Tun  de  Tautre,  à  doux  lieues  de  Loitz,  ville  Suédoise 
que  Dupas  attaquera  le  lendemain  et  aussitôt  qu'il  aura 
pu  rétablir  en  face  de  l'ennemi  un  pont  sur  la  Peene. 

Le  4«  régiment  d'infanterie  légère,  qui  occupait  les 
villages  situés  entre  la  grande  route  et  la  Peene,  pro- 
fite également  de  l'obscurité  pour  gagner  sa  nouvelle 
position  ;  les  autres  troupes  ne  quittent  leurs  cantonne- 
ments que  dans  la  matinée  et  tous  se  réunissent  à  Wus- 
tonfelde,  sauf  le  quartier  général  qui  se  fixe  à  Kletzin. 

Les  sapeurs  chargés  de  construire  le  pont  se  rendent 
aussi  avec  le  général  Veaux,  commandant  l'avant-garde, 
et  Riquet,  adjoint  à  l'état-major,  pour  reconnaître  l'em- 
placement du  pont,  réquisitionner  les  matériaux  et  ce 
qui  est  nécessaire  pour  sa  construction. 

Aussitôt  arrivé  à  Brûnsow,  Dupas  fait  distribuer  à  sa 
division  douze  mille  rations  de  pain  et  de  viande  pour 
deux  jours  ;  le  soir,  il  se  rend  à  Demnin  pour  reconnaî- 
tre les  mouvements  des  22^,  58®  régiments  et  faire 
avancer  pendant  la  nuit  le  58®  (Colonel  Arnaud)  jusque 
dans  les  villages  et  faubourgs  ;  ordonner  au  général 
Ruby,  commandant  ces  deux  régiments,  de  placer  des 
sentinelles  aux  portes  de  cette  ville  et  de  ne  laisser  sor- 
tir aucun  habitant.  A  dix  heures,  s'étant  rendu  avec  la 


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—  ii3  — 

brigade  Ruby  à  Wustenfelde  pour  reconnaître  les  ira- 
vaux  du  pont,  Dupas  y  rencontre  le  général  Veaux, 
Riquet  adjoint  et  Tofficier  des  sapeurs  qui  lui  présentent 
un  rapport  concluant  à  l'impossibilité  do  le  rétablir 
faute  de  matériaux  et  parce  que  tous  les  pilotis  avaient 
été  arrachés  ou  coupés  par  l'ennemi. 

Dupas  ne  se  laisse  pas  abattre  par  ces  difficultés,  il 
prend  aussitôt  la  résolution  d'établir  un  nouveau  pont 
à  Demnin  et  de  traverser  la  Peene  à  tout  prix,  mais  il 
envoie,  au  milieu  de  la  nuit,  une  estafette  au  maréchal 
Mortier  pour  le  prévenir  de  ce  contre-temps  afin  qu'il 
ne  s'engage  pas  seul  avec  la  division  occupant  la 
droite.  Ces  précautions  une  fois  prises,  il  fait  requérir 
le  Bourgmestre  de  lui  fournir  les  matériaux  destinés  à 
la  construction  du  pont  et  c'est  avec  le  plus  grand  zélé 
que  cet  administrateur  le  seconde  :  la  place  publique  se 
trouve  bientôt  encombrée  de  voitures  apportant  des 
poutres,  planches,  cordages,  bateaux,  etc. 

Dupas  profite  de  cet  élan  de  toute  la  population  pour 
distribuer  à  l'artillerie  huit  cents  fers  à  crochets,  sept 
cents  clous  à  glace,  quatre  mille  clous  ordinaires  et  six 
mille  fers  en  barre  ou  en  bande  ;  il  donne  au  détache- 
ment du  26®  régiment  de  chasseurs  à  cheval  deux  cents 
fers  à  crochets,  cinq  cents  clous  à  glace  et  deux  mille 
clous  ordinaires  qu'il  avait  en  vain  réclamés  depuis 
trois  jours. 

La  construction  du  pont,  arrêtée  par  le  feu  continuel 
de  l'ennemi,  décide  Dupas  à  envoyer  Orillat  son  troi- 
sième aide  de  camp  requérir  les  sapeurs,  le  4«  régiment 
d'infanterie  légère,  et  Bochaton,  second  aide  de  camp, 
pour  amener  la  cavalerie  et  l'artillerie;  pendant  leur 

8b 


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—  114  — 

marche  sur  Demnin  il  charge  Barrai  son  premier  aide 
de  camp  et  un  officier  d'artillerie  d'aller  reconnaître  le 
pont  et  de  choisir  une  position  avantageuse  pour  y 
placer  rartillerie  afin  de  protéger  les  ouvriers  contre 
les  canons  ennemis  placés  de  l'autre  côté  de  la  Peene. 

27  janvier.  —  Tous  ces  renforts  étaient  arrivés,  mais 
un  froid  excessif  fatiguait  les  troupes  de  Dupas  qui  eut 
en  ce  moment  l'idée  d'arrêter  tous  les  travaux  du  pont 
et  de  vérifier  la  solidité  des  glaces  recouvrant  la  Peene. 

Il  demanda  au  Bourgmestre  un  pêcheur  qu'il  mit  à  la 
disposition  de  Curnillon,  aide  de  camp  du  général 
Veaux  et  de  Carré,  aide  de  camp  du  général  Ruby, 
leur  ordonnant  de  vérifier  la  solidité  de  cette  voie,  ce 
quMls  firent  en  traversaût  ce  cours  d'eau  plusieurs  fois, 
sur  une  longueur  de  cent  toises  environ. 

Dès  lors  Dupas  assuré  du  passage  de  sa  division,  ré- 
quisitionna tous  les  panierset les  cendres  qu'il  put  trouver. 

Les  premières  compagnies  du  4®  les  répandirent  sur 
la  glace  pour  faciliter  le  passage  de  la  brigade  Veaux 
et  des  régiments  de  Ruby  qui  prirent  leur  position  en 
arrière  du  4«. 

La  U^  compagnie  des  voltigeurs  du  4«,  qui  était  passée 
la  première,  cherche  à  envelopper  les  postes  ennemis 
sur  lesquels  elle  tire  quelques  coups  de  fusil  et  les  met 
en  fuite  ;  Dupas  fait  passer  tous  les  matériaux  destinés 
à  la  construction  du  pont  que  l'on  parvient  à  terminer 
le  28,  à  trois  heures  après  midi.  A  partir  de  ce  moment 
la  cavalerie  et  l'artillerie  le  traversent  pendant  que  les 
autres  troupes  passent  sur  la  glace  sans  que  l'on  ait 
d'accident  à  regretter  ;  un  seul  soldat  perce  la  glace  à 
son  passage,  mais  on  le  retire  aussitôt  sain  et  sauf. 


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Aussitôt  que  rartillerio  et  la  cavalerie  furent  passée^, 
Ton  se  mit  eu  marche  pour  Loitz  où  toute  la  division 
arriva  le  soir  à  dix  heures  et  demie;  seize  hommes  et 
un  officier  Suédois  attachés  à  la  garde  de  Tancien  pont 
furent  faits  prisonniers  et  conduit  à  Domnin,  cependant 
Ton  rendit  à  cet  officier  son  épée  et  la  liberté  sur  la 
parole  qu'il  donna  de  ne  plus  servir  contre  la  France. 

Marches  sur  Griemen,  ElmenorsL  —  Dupas  voulut 
repartir  immédiatement  pour  Griemen,  suivant  Tordre 
qu'il  avait  reçu,  et  se  placer  à  la  hauteur  de  Grisswalde 
où  devait  se  trouver  Mortier  ;  mais  les  fatigues,  le  be- 
soin de  sommeil  arrêtant  beaucoup  de  soldats  en  route, 
il  dut  faire  camper  le  58"  dans  le  village  de  Pogondorf, 
le  22e  à  Klevenow  et  à  Barcow  pour  les  rallier  le  len- 
demain. 

Dupas  put  alors  continuer  sa  marche  avec  la  cavale- 
rie, le  4«  léger  et  l'artillerie  hollandaise;  arrivé  à 
Griemen,  il  mit  en  fuite  deux  escadrons  ennemis  et  quel- 
ques soldats  d'infanterie  qui  se  contentèrent  de  mettre 
le  feu  à  leurs  signaux  ;  de  là  il  put  arriver  le  29  à  une 
heure  et  demie  du  matin  à  Griemen  en  suivant  des  che- 
mins affreux  et  au  milieu  d'une  neige  abondante  ;  le 
maréchal  en  fut  averti  immédiatement. 

N'ayant  pu  réunir  toute  sa  division  qu'à  neuf  heures 
pour  se  rendre  à  Elmenorst,  il  envoya  sa  cavalerie 
sur  la  route  de  Richtemberg  pour  observer  l'ennemi  et 
faire  quelques  prisonniers  ;  le  sous-lieutenant  Lamethe- 
rie,  ayant  avec  lui  quelques  chasseurs  à  cheval,  fît  la 
rencontre  d'un  escadron  de  hussards  soutenu  par  une 
centaine  de  fantassins  embusqués  dans  un  bois  situe 
entre  Elmenorst  et  Zarrendorf.  Après  une  courte  recon- 


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-  116  - 

naissance  Dupas  ordonne  l'attaque,  Lametherie  en- 
traîné par  son  courage  se  fait  tuer,  Nubbiolo,  chasseur 
à  cheval,  se  distingue  dans  notre  poursuite  de  l'ennemi 
qui  perd  un  grand  nombre  d'hommes  tués,  blessés  ou 
prisonniers. 

Quand  cette  attaque  fut  terminée,  Dupas  entendit 
plusieurs  coups  de  canons  venant  de  la  position  occupée 
par  la  division  de  droite  commandée  par  Mortier  ; 
il  partit  aussitôt  pour  le  secourir  en  se  dirigeant 
sur  Stralsund  afin  de  resserrer  l'ennemi  entre  les  deux 
divisions  françaises  ;  malheureusement  l'épaisseur  des 
brouillards  et  la  rencontre  imprévue  d'un  marais  arrêta 
sa  marche  ;  l'ennemi  aperçut  le  danger  qui  le  menaçait 
et  eut  le  temps  de  se  retirer  dans  l'intérieur  de  la  place. 
Dupas  n'eut  plus  d'autre  parti  à  prendre  que  celui  de 
prendre  position  à  Woogdhagen  et  de  concentrer  le 
lendemain  sa  division  dans  les  environs  d'Elmenorst 
où  il  établit  son  quartier  général  ;  sa  cavalerie  fut  en- 
voyée à  Abeshagen,  l'artillerie  à  Vittshagcn,  ses  deux 
brigades  d'infanterie  à  Lusfow,  Pantelitz,  Born,  Klein- 
korshagen,  etc.  Pendant  ces  mouvements  l'ennemi  fit 
en  vain  plusieurs  sorties,  ses  nombreuses  pertes  le  dé- 
cidèrent à  démolir  toutes  les  maisons  qui  existaient  en 
dehors  de  sa  ligne  de  défense.  En  ce  moment  nous 
trouvons  le  quartier  de  la  brigade  Veaux  à  Kleinkors- 
hageu,  celui  de  Ruby  à  Steiuhagen,  puis  à  Zinkendorff  ; 
Bugniard  remplit  les  fonctions  de  chef  de  l'état-major. 

Ruby  va  faire  des  reconnaissances  sur  Prohse  et 
jusqu'aux  bords  de  la  mer  pour  empocher  les  sorties  de 
l'ennemi  et  l'entrée  des  vivres  dans  la  place  :  le  feu 
éclate  dans  les  faubourgs.  Le  5  février  Dupas  arrive  à 


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—  117  — 

Stoiuliageu,  ses  avant-postes  sont  canonnés  et  les  offi- 
ciers généraux  suédois  entrent  dans  la  maison  rouge 
qui  est  leur  poste  le  plus  important  pour  étudier  nos 
positions  et  d'où  ils  envoient  un  escadron  à  la  pour- 
suite du  général  Veaux  ;  nous  parvenons  à  nous  empa- 
rer de  ce  poste  malgré  la  résistance  énergique  de  ses 
défenseurs  que  soutenaient  à  la  porte  du  centre  sa 
cavalerie,  Tartillerie  et  son  infanterie. 

Le  même  jour,  Dupas  constate  que  trois  chaloupes 
canonnières  se  sont  dirigées  sur  l'île  de  Rugen  (1)  et  que 
trois  bricks  ont  gagné  la  haute  mer. 

Février.  —.  Ayant  établi  son  quartier  général  à  Zin- 
kendorflf,  son  premier  soin  estde  faire  coupertous  les  pieux 
ainsi  que  le  pont  situé  sur  la  gaucho  de  Grunchufe  par 
lequel  l'ennemi  débouchait  tous  les  matins  pour  faire 
ses  reconnaissances  ;  cependant  le  pont  a  pu  être  réta- 
bli en  profitant  d'une  artillerie  de  gros  calibre  qui  n'a 
pas  cessé  de  tirer  sur  nos  soldats  et  a  permis  à  nos 
adversaires  do  couper  tous  les  arbres;  des  coups  de 
carabine,  de  pistolet  ont  été  échangés  de  leurs  vedettes 
aux  nôtres,  la  cavalerie  et  l'infanterie  ennemies  ont 
dirigé  leurs  feux  sur  nos  avant-postes,  mais  nos  pa- 
trouilles les  ont  poursuivies  pendant  toute  la  nuit  du  15. 

Déserteurs  sicedois,  nouvelles  attaques.  —  Cinq  dé- 
serteurs suédois  qui  se  sont  rendus  au  quartier  général 
do  la  division  ont  affirmé  que  tous  leurs  camarades  dé- 
serteraient, si  l'on  exerçait  moins  de  surveillance,  que 
l'on  encourage,  on  accordant  une  prime  de  trois  ducats, 
à  tout  soldat  qui  tue,  ou  arrête  un  déserteur;  l'un  de 
ces  derniers  n'est  parvenu  à  gagner  le  camp  français 

(l)  Rugen,  ile  Prussienne'(Poméranie),  dans  la  mer  Baltique. 


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—  118  — 

qu'après  être  resté  couché  pendant  toute  la  nuit,  dans 
un  fossé  rempli  dVau. 

Les  munitions  de  guerre  diminuant,  Dupas  donne  les 
ordres  les  plus  sévères  pour  les  ménager,  il  recommande 
de  ne  tirer  sur  les  soldats  ennemis  qu'autant  qu'ils  se 
trouvent  assez  nombreux  pour  nous  procurer  quelque 
avantage  quoique  leurs  attaques  partielles  nous  aient 
fait  éprouver  beaucoup  de  pertes  ;  ces  privations  n'é- 
taient pas  les  seules,  de  nombreuses  plaintes  étaient 
aussi  portées  contre  les  fournisseurs  qui  trompaient 
l'armée  sur  le  poids,  la  quantité  et  la  qualité  des  vivres. 
Le  journal  continue  en  signalant  la  présence  de  sept 
vaisseaux  venant  de  Stralsund  et  qui  semblent  se  diri- 
ger vers  la  haute  mer  ou  peut-être  sur  Tîle  de  Rugen. 
Le  21,  deux  mille  fantassins  suédois  appuyés  par  de 
rartillerie  et  de  la  cavalerie  commandés  par  le  général 
Arrenfelde  se  sont  jetés  à  Timproviste  sur  une  redoute 
établie  entre  les  lacs  pour  surprendre  nos  postes  ;  ce 
fut  grâce  au  sang-froid  d'un  bravo  sergent.  Lassé,  qui 
la  défendait  avec  trente  hommes  seulement,  que  nous 
pûmes  la  conserver. 

L'artillerie  suédoise,  qui  était  masquée  jusqu'au  der- 
nier moment  par  la  cavalerie,  se  découvrit  tout-à-coup 
devant  Lassé  qui  s'écria  :  «  Voici  l'ennemi,  camarades, 
résistons  jusqu'au  dernier  de  nous,  le  premier  qui  sort 
de  la  redoute  est  tué.  >  Après  une  longue  résistance,  il 
fut  assez  heureux  pour  refouler  l'ennemi  qui  laissa  plu- 
sieurs soldats  tués  ou  blessés. 

l*'  Mars.  —  Nous  trouvons  alors  le  quartier  général 
de  Dupas  à  Linkendorff,  le  général  Veaux  à  Klein- 
hordshagen,  Ruby  à  Pulte  ;  toutes  les  populations  ren- 


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—  119  — 

contrées  dans  les  étapes,  principalement  à  Barth,  témoi- 
gnent peu  de  bienveillance  aux  prisonniers  français,  les 
soldats  ennemis  seuls  les  protègent  mais  leurs  officiers, 
loin  de  les  secourir,  no  songent  qu'à  répandre  et  distri- 
buer à  nos  sentinelles  avancées  des  brochures  qui  an- 
noncent une  déroute  complète  de  l'armée  française  en 
Pologne. 

Combat  du  14  mars.  —  Le  14,  quinze  à  dix-huit 
cents  hommes  appartenant  à  Tinfanterie  suédoise,  deux 
escadrons  de  cavalerie  et  six  pièces  d'artillerie  firent  une 
sortie  dans  le  but  de  s'emparer  do  l'un  de  nos  retran- 
chements sur  lequel  ils  marchèrent  au  pas  de  charge; 
ce  retranchement  n'avait  pour  défenseurs  que  les  volti- 
geurs du  58«,  mais  ces  braves  ayant  été  secourus  par 
un  détachement  du  4«  léger  que  leur  avait  envoyé 
Dupas,  sous  les  ordres  de  Barrai,  l'ennemi  abandonna 
l'attaque  de  la  redoute,  ayant  perdu  près  de  quatre-vingts 
hommes  devant  ce  retranchement,  non  compris  les  victi- 
mes trouvées  près  de  la  place  ;  au  milieu  de  ces  pertes  l'on 
constata  la  mort  de  plusieurs  officiers  supérieurs  et  la 
présence  de  beaucoup  de  prisonniers  dont  l'un,  capi- 
taine, était  décoré  de  l'ordre  du  mérite  militaire. 

Dans  cette  attaque,  les  Français  n'eurent  à  regretter 
que  la  mort  de  six  soldats  et  une  vingtaine  de  blessés  ; 
Dupa3  fait  remarquer  dans  ce  rapport  que  les  troupes 
suédoises  qu'il  venait  de  détruire  n'avaient  dans  leur 
rang  aucun  Allemand  que  les  officiers  suédois  cherchent 
à  éliminer  parce  qu'ils  n'ont  aucune  confiance  dans 
l'appui  que  ces  contingents  pourraient  donner. 

Le  lendemain  Dupas  envoie  au  maréchal  Mortier  son 
rapport  sur  la  rencontre  de  la  veille  ;  il  est  daté   du 


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—  120  — 

15  mars,  à  Langendorff  :  «  Eq  quittant  votre  quartier 
général,  je  voulus  voir  les  généraux  de  ma  division  dans 
leurs  cantonnements,  mais  arrivé  à  la  hauteur  de  Woo- 
degchagen,  j'entendis  des  coups  de  canon  qui  me  firent 
aussitôt  quitter  la  route  d'Endershagen  pour  prendre  la 
direction  de  la  plaine  ;  arrivé  aux  avant-postes  do  ma 
division,  je  reconnus  que  cette  attaque  était  dirigée  sur 
mes  troupes,  placées  au  moulin  Abbatù,  je  pris  le  galop  : 
à  peine  arrivé,  la  place  m'envoie  une  décharge  d'artilr 
lerie,  mais  voyant  que  Tennemi  donnait  ordre  à  ses  ve- 
dettes de  rentrer,  je  fus  persuadé  que  son  attaque  ne  se 
ferait  pas  sur  ce  point  mais  qu'il  fallait  le  mettre  en 
état  de  défense  et  le  confier  au  général  Veaux  ;  cela 
terminé  je  me  portai  au  retranchement  de  gauche  d'où 
j'aperçus  un  mouvement  extraordinaire,  mais  l'ayant 
prévu  dés  le  matin  j'avais  prévenu  mes  généraux  de 
brigade  de  préparer  leurs  mouvements  en  vue  d'une  at- 
taque dans  la  journée. 

4c  Ces  prévisions  furent  justifiées,  puisque  à  peine  ar- 
rivé à  ce  retranchement  j'aperçus  une  colonne  ennemie 
de  15  à  1800  hommes  d'infanterie,  deux  escadrons  de 
cavalerie  et  six  pièces  d'artillerie  à  cheval  qui  s'avan- 
çaient en  bataille,  refoulant  nos  vedettes  à  coups  de 
canon. 

€  Cependant  ayant  vu  que  ces  troupes  s'arrêtaient  et 
hésitaient  à  prendre  un  parti,  je  fis  rentrer  dans  notre 
redoute  le  capitaine  de  la  compagnie  des  voltigeurs  du 
58«  en  lui  recommandant  de  se  défendre  avec  vigueur  ; 
ne  voyant  pas  arriver  le  2^  régiment  de  hussards  hol- 
landais qui  devait  soutenir  les  voltigeurs,  j'envoie  à  sa 
place  la  l'«  compagnie  de  voltigeurs  du  4«.    En  même 


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—  121  — 

temps  je  fais  avancer  mou  artillerie  avec  trois  ou  quatre 
compagnies  du  4®  régimeut  léger  qui  formaient  une  ré- 
serve, les  dirigeant  sur  la  gauche  et  sous  les  ordres  do 
Barrai  Tua  de  mes  aides  de  camp  ;  ils  arrivèrent  assez 
tôt  pour  protéger  ma  redoute  que  Tennemi  avait  ce- 
pendant déjà  tournée  avec  l'aide  d'un  feu  terrible  vomi 
par  son  artillerie  et  la  mousqueterie. 

«  Quand  cette  colonne  fut  bien  engagée,  j'envoyai 
depuis  le  grand  retranchement  de  gauche  trois  compa- 
gnies du  4«  régiment  pour  couper  la  retraite  des  Suédois  ; 
s'en  étant  aperçus  ils  quittèrent  leurs  rangs  à  la  course 
et  allèrent  se  rallier  dans  leur  redoute  des  moulins  au 
moment  même  où  Barrai  y  arrivait  ;  cet  officier  s'en 
étant  emparé  après  une  violente  résistance,  tous  les 
Suédois  furent  pris  ou  tués. 

«  L'appui  apporté  par  ces  trois  compagnies  n'a  pas 
donné  un  résultat  aussi  complet  que  je  devais  le  suppo- 
ser, parce  que  le  régiment  de  hussards  hollandais  avait 
mis  beaucoup  de  lenteur  dans  sa  marche  et  n'était  arrivé 
qu'au  moment  où  les  troupes  de  l'ennemi  se  trouvaient 
déjà  sous  la  protection  de  la  place.  Je  suis  infiniment 
satisfait  de  la  compagnie  de  voltigeurs  du  58«,  de  Drivet, 
capitaine.Cherné,  lieutenant, Berthelot,  sous-lieutenant; 
presque  tous  les  schakos  sont  criblés  par  les  balles  et 
les  biscayens. 

«  Pignet,  chef  de  bataillon,  estime  que  l'ennemi  a 
perdu  cent  cinquante  hommes  tués,  blessés  ou  prison- 
niers. Sa  compagnie  de  voltigeurs  a  eu  trois  hommes 
tués  et  onze  blessés  dont  trois  le  sont  gravement. 

«  II  signale  à  votre  bienveillance  les  trois  officiers  dési- 
gnés ci-dessus,  Balland,  sergent,  Duret,  caporal,  qui  est 


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-  122  — 

blessé,  Hure,  sergent-major,  Girard  sergent  ;  mais  d'une 
manière  spéciale  Fudrot,  caporal  et  Lessé  voltigeur, 
blessé. 

«  Les  officiers  de  voltigeurs  du  58®  font  les  plus 
grands  éloges  des  officiers,  sous-officiers  et  soldats  du 
4e  régiment,  surtout  de  Barrai  mon  aide  de  camp,  qui 
est  sorti  des  retranchements  à  leur  tête  et  a  traqué 
Tennemi  jusque  sous  les  remparts.  Dans  le  4®  régiment, 
qui  a  eu  trois  hommes  tués  et  seize  blessés,  le  colonel 
Bazancourt  signale  la  conduite  de  Guigne  sergent,  Druet 
caporal,  blessé,  Magnin,  chasseur,  Olagnier,  Durousset, 
Mathon,  Mollet,  Ferière,  Off'roy,  tambour,  également 
blessés.  L'ennemi  doit  avoir  éprouvé  de  grandes  pertes  ; 
une  quantité  de  voitures  est  venue  prendre  ses  blessés 
pour  les  transporter  à  Langendorff. 

«  Je  n'ai  que  dos  éloges  à  prodiguer  aux  généraux  et 
officiers  supérieurs  que  je  commande,  mais  surtout  au 
général  Veaux  et  au  colonel  Bazancourt  qui  méritent 
toute  votre  bienveillance  ;  vous  connaissez  depuis  long- 
temps le  zèle  et  l'activité  du  général  Veaux  et  du  colo- 
nel Bazancourt  qui  ont  toujours  su  se  distinguer  et  s'at- 
tirer la  confiance  de  l'armée  dans  tous  les  postes  qui 
leur  étaient  confiés. 

«  Il  est  regrettable  que  le  général  Ruby  et  le  colonel 
Arnaud  du  58«  n'aient  pas  eu  à  leur  tour  l'occasion  de 
manifester  leurs  talents. 

Agréez,  Monsieur  le  Maréchal,  etc.  » 

15  au  28  mars,  —  Langendorff,  —  Après  cette 
rencontre  du  14,  la  division  Dupas  poursuivant  sa  mar- 
che, le  quartier  général  se  trouve  placé  à  Langendorfl", 
du  15  au  28;  pendant  ce  séjour,  les  soldats  dépouillent 


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—  123  — 

les  cadavres  des  officiers  suédois  tués  le  14;  toutes  les 
décorations  trouvées  sont  remises  sur  le  champ  entre 
les  mains  du  maréchal. 

Dupas  exigeait  de  ses  troupes  la  plus  exacte  disci- 
pline, et  dans  sa  division  le  respect  des  propriétés  était 
maintenu  avec  sévérité  ;  c'est  ainsi  qu'à  la  date  du 
16  mars,  un  soldat,  iiommé  Mathieu,  coupable  d'un  vol 
à  main  armée,  fut  immédiatement  fusillé.  Le  même 
jour  Dupas  découvrit  dans  Tune  de  ses  inspections  des 
ouvrages  avancés  sur  la  route  de  Barth  que  les  suédois 
venaient  d'établir  en  les  cachant  sous  des  branches. 

Trois  hussards  hollandais  désertèrent  de  nos  rangs  ; 
en  revanche  trois  fantassins  et  un  cadet-dragon  vinrent 
se  rendre  dans  notre  camp  où  ils  nous  apprirent  que 
leur  roi  venait  de  recommander  à  ses  troupes  de  ne  plus 
faire  de  sorties  avant  son  arrivée  prochaine  dans  la 
place.  Celle  que  les  Suédois  avaient  faite  le  14  n'avait 
eu  lieu  qu'à  la  suite  d'une  erreur  commise  par  un  bate- 
lier de  Greisswald  qui  avait  annoncé  que  l'artillerie  de 
siège  du  général  Dupas  était  rentrée  à  Anclam. 

Ils  nous  informèrent  en  outre  du  départ  pour  Colberg 
de  plusieurs  bâtiments  suédois  qui  amenaient  dix  mille 
Prussiens  comme  renforts  pour  la  défense  du  blocus  de 
cette  place  et  d'un  envoi  de  cinq  cents  hommes  tirés 
du  régiment  de  Dallender  qui  étaient  arrivés  le  16  à 
leur  destination. 

Sur  ces  entrefaites  l'on  arrête  un  espion.  Caillou,  ca- 
pitaine au  4«  régiment  d'infanterie  légère,  ayant  été 
menacé  des  arrêts  parce  qu'il  avait  insulté  les  troupes 
hollandaises  dans  un  moment  d'ivresse,  déserte  et  va  se 
rendre  aux  Suédois. 


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—  124  — 

On  punit  plusieurs  sentinelles  avancées  qui  apparte- 
naient au  2«  régiment  Hollandais  parce  qu'elles  liaient 
conversation  avec  les  sentinelles  suédoises.  —  Deux 
colonels,  hollandais  avaient  envoyé  à  Thôpital  sans 
motif  sérieux  vingt-un  hommes,  Dupas  recommanda 
aux  officiers  de  santé  chargés  des  ambulances  de  les  vi- 
siter avec  scrupule  et  fit  rentrer  plusjeurs  d'entre  eux  à 
leur  corps.  —  Le  25,  deux  nouveaux  déserteurs  arri- 
vèrent au  camp  français,  nous  assurant  que  nous  devions 
être  attaqués  avant  peu  de  jours.  —  Des  le  lendemain 
plusieurs  sentinelles  suédoises  se  rapprochèrent  d'un 
poste  holland^ais  qui  occupait  la  droite  de  la  division 
Dupas,  malgré  nos  ordres  elles  ne  voulurent  se  retirer 
qu'après  avoir  reçu  des  coups  de  fusil. 

Le  26  mars  trois  compagnies  de  grenadiers  apparte- 
nant au  7®  régiment  Hollandais  et  ayant  un  efifectif  de 
cent  soixante-dix-huit  hommes,  officiers  compris,  vien- 
nent renforcer  la  division  Dupas. 

Le  27,  un  officier  suédois  qui  montait  un  cheval  blanc, 
accompagné  de  douze  cavaliers,  vint  faire  une  recon- 
naissance sur  les  bords  de  la  mer,  il  arriva  sur  les  der- 
rières de  nos  avant-postes,  sans  que  nos  hussards  hol- 
landais aient  songé  à  enfourcher  leurs  chevaux,  si  ce 
n'est  au  moment  où  l'un  des  soldats  du  4«  d'infanterie 
légère  vint  les  prévenir  et  les  engager  à  une  attaque. 

La  redoute  que  l'on  vient  d'établir  dans  la  plaine 
vient  d'être  armée  avec  deux  pièces  de  trois,  des  retran- 
chements ont  été  construits  sur  la  première  ligne  de 
défense  où  Dupas  parvient  à  faire  couper  tous  les  ponts, 
malgré  les  coups  de  canon  que  tire  l'ennemi. 

4  avril.  Marche  de  la  division.  —  Le  corps  du  ma- 


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—  125  — 

réchal  Mortier  fut  envoyé  au  siège  de  Colberg.  Dupas 
s'était  mis  en  marche  le  29  mars,  poursuivant  sa  route 
de  Stralsund  sur  Colberg  ;  arrivé  à  Treptow  il  prend  le 
commandement  du  72«,  ayant  sous  ses  ordres  le  géné- 
ral de  brigade  Gcncy,  qui  venait  d'arriver  à  Thram  sous 
Colberg. 

Le  72«  part  pour  occuper  un  bois  situé  en  avant  de  la 
Tourbière  et  Dupas  établit  ses  communications  avec  les 
différents  postes  établis  sur  le  bord  de  la  mer  ;  les  6,  7, 
8  avril,  il  prend  le  commandement  du  l^^  régiment  de 
ligne  italien,  qu'il  réunit  suivant  les  intentions  de  Mor- 
tier, au  72«  de  ligne  et  en  se  rapprochant  de  la  place. 

Le  lOavril,  256  hommes  du  72«  et  223  du  1««- régiment 
de  ligne  italien  formant  un  total  de  479  officiers,  sous-offl- 
ciers  et  soldats  sont  envoyés  par  Mortier,  à  Rossenthein. 
Pendant  la  nuit  de  cette  journée,  Dupas  quitte  ses  der- 
nières positions  et  se  met  en  marche  pour  Grioffenberg; 
il  se  met  à  la  tête  du  72«  et  du  2«  bataillon  du  l^^  régi- 
ment italien  et  marche  sur  Gulnow,  Stetten,  Lockenitz, 
Passewalk  qu'il  quitte  le  16,  à  deux  heures  du  matin, 
pour  suivre  la  première  division  dans  sa  poursuite  de 
l'ennemi,  depuis  Passewalk  jusqu'au  delà  d'Anclam. 

Le  16,  Dupas  fait  partir  le  4«  régiment  d'infanterie 
légère  pour  Neuv-Cassenow  où  se  trouve  le  quartier  gé- 
néral du  général  Veaux  qui  avait  reçu  l'ordre  de  s'y 
rendre  pour  compléter  sa  brigade  ;  Veaux  se  dirige  le 
lendemain  avec  ses  deux  régiments,  deux  pièces  d'artil- 
lerie légère  et  un  détachement  de  cavalerie  sur  Uker- 
mund,  où  Dupas  supposait  que  l'ennemi  s'était  établi. 
Ce  fut  en  effet  là  que  Veaux  le  rencontra  ;  malgré  les 
obstacles  qu'offraient  deux  ponts  coupés,  un  froid  exces- 


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—  Iâ6  -- 

sif  et  de  mauvaises  routes,  il  fit  quatre  cents  prisonniers, 
prit  deux  canons  et  les  canonnicrs,  plusieurs  officiers, 
entre  autre  un  major.  Ce  fut  le  colonel,  commandant  le 
4«  régiment  d'infanterie  légère,  qui  fit  le  rapport  sur  ce 
combat. 

«  17  Avril.  —  Le  colonel  Bazancourt  arrivé  sur  la 
Peene,  trouve  tous  les  ponts  coupés  ;  il  jette  quelques 
planches  dans  Teau,  qui  permettent  à  la  première 
compagnie  de  carabiniers  de  traverser  cette  rivière 
et  de.protéger  la  reconstruction  d'un  pont;  la  13«  com- 
pagnie de  voltigeurs  ayant  également  pu  faire  ce 
passage,  elle.se  réunit  aux  carabiniers  et  se  dirige  sur 
Ukermund  où  tous  voient  l'ennemi  qui  se  cachait  der- 
rière les  maisons. 

«  Le  bataillon  commandé  par  Berthet  part  pour  l'atta- 
quer, la  l'«  compagnie  de  carabiniers  est  dirigée  sur  le 
flanc  de  l'ennemi,  précédée  par  des  tirailleurs  tandis  que 
la  compagnie  de  Roux  marche  sur  la  grande  route  pour 
attaquer  de  front  l'ennemi,  qui  après  avoir  été  débusqué 
se  précipite  vers  les  portes  afin  d'en  défendre  l'entrée  ; 
mais  les  tirailleurs  conduits  par  le  sous-lieutenant  Meis- 
tier,  aidés  par  des  carabiniers  et  des  voltigeurs,  arri- 
vent tous  avec  une  telle  précipitation  que  l'ennemi  se 
sauve  dans  l'intérieur  de  la  ville,  sans  avoir  pu  refermer 
les  portes,  devant  Meistier,  sous-lieutenant,  Navaud  et 
Bourinet,  sergents-majors,  Salmon,  sergent,  La  Motte, 
caporal.  Salmon,  après  avoir  piqué  de  sa  baïonnette  deux 
Suédois,  fit  prisonnier  tout  le  poste  ;  pendant  ce  temps  le 
reste  des  tirailleurs  et  l^s  autres  compagnies  pénétrèrent 
dans  la  ville  où  ils  rencontrèrent  les  troupes  suédoises 
qui  s'étaient  mises  en  bataille  et  se  retirèrent  en  désor- 


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-  127- 

dre  vers  le  port,  après  avoir  été  mitraillées,  dans  Tespé- 
rance  de  pouvoir  s'embarquer  ;  plusieurs  d'entre  eux 
furent  pris  immédiatement,  les-autres,  qui  s'étaient  sau- 
vés sur  la  route  conduisant  à  Steitin,  furent  rejoints  par 
Curnillon,  aide  de  camp  du  général  Veaux,  et  faits 
prisonniers,  à  l'exception  d'un  détachement  de  hussards 
qui  se  réfugia  dans  les  bois  où  le  capitaine  Breeck  les 
poursuivit  pendant  quelques  instants.  Mais  bientôt  l'of- 
ficier commandant  les  troupes  suédoises,  précédé  d'un 
clairon,  se  présenta  à  Dupas  pour  offrir  sa  soumission 
qui  livrait  aux  Français  dix-huit  officiers,  trois  cent  qua- 
rante sous-officiers  ou  soldats,  un  canon  et  plusieurs 
caissons. 

«  Parmi  les  officiei*s  et  soldats  qui  se  sont  distingués 
l'on  remarque  :  Berthet,  chef  de  bataillon,  les  capitaines 
Roy  et  Delleau,  Meister  et  FolKet  (1),  officiers  de  cara- 
biniers, les  sous-officiers  Salmon,  Navaud,  Bourinet, 
Chemin,  les  caporaux  Vattet,  Bordillet,  La  Motte.  » 

Après  ce  combat.  Dupas  fait  cantonner  le  2«  bataillon 
du  58«  sur  la  rive  droite  de  la  Peeno  entre  Demmin  et 
Anclam  ;  son  arrivée  empêche  plusieurs  bateaux  chargés 
de  grains  de  livrer  leur  cargaison,  elle  permet  de  re- 
construire le  pont  sur  Demmin  et  de  détruire  quelques 
ouvrages  de  fortification. 

19  Avril.  —  A  la  suite  d'une  suspension  d'armes 
conclue  entre  le  maréchal  Mortier  et  le  baron  d'Essen, 
commandant  supérieur  de  l'armée  suédoise,  quatre  em- 
ployés aux  vivres  faits  prisonniers  nous  sont  rendus,  le 
pont  levis  de  Demmin  est  levé  et  des  sentinelles  sué- 

(1)  Folliet  était  d'Evian,  comme  Dupas  ;  son  nom  est  cité  dans 
le  rapport  de  Dopas  sur  la  bataille  de  Friedland. 


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-  m  - 

doises  sont  postées  sur  la  rive  gauche  ;  les  habitants 
sont  autorisés  à  passer  le  pont  pour  cultiver  leurs  terres. 

Sièffe  de  Colberg,  —  Dupas  confie  provisoirement  son 
commandement  au  général  Veaux  et  part  le  23,  avec  le 
maréchal  Mortier  pour  le  siège  de  Colberg,  mais  comme 
il  n'était  pas  encore  ouvert,  Dupas  revint  pour  rejoindre 
sa  division  ;  à  ce  moment  un  nouveau  corps  d'armée,  dit 
d'observation,  formé  sous  les  ordres  du  maréchal  Brune 
fut  chargé  de  relever  le  8«  corps.  Mortier,  devenu  ainsi 
disponible,  reçut  l'ordre  de  rejoindre  la  grande  armée 
avec  le  8''  corps,  composé  de  la  division  Dupas  et  de  la 
division  polonaise  du  général  Dombrowskii 

Dupas  arrive  le  1*^^  mai  à  Brock,  près  Deramin,  le 
58®  régiment  va  à  Stettin,  une  compagnie  du  régiment 
de  Nassau  à  Wismar  pour  surveiller  et  défendre  les 
côtes  de  la  Baltique,  une  centaine  d'hommes  prélevés 
dans  d'autres  compagnies  vont  à  Warnemunde  pour 
observer  une  autre  partie  de  la  Baltique.  La  brigade 
Ruby  est  concentrée  à  Sohmarsow,  Dupas  fait  une  re- 
connaissance sur  la  Trebbel  et  la  Recknitz;  rentré  au 
quartier  général  de  sa  division  pendant  la  nuit  du  5  au 
6  mai,  il  ordonne  au  4®  régiment  d'infanterie  légère  de 
quitter  aussitôt  les  bords  de  la  Peene  et  de  se  rendre 
par  Friedland  à  Passewalk  ;  au  58«  de  quitter  égale- 
ment la  Peene  pour  aller  dans  les  villages  qui  environ- 
nent Anclam,  entre  Passewalk  et  Ferdinand-Hoff;  à 
l'artillerie  de  se  rendre  à  Passewalk.  Le  major  Russe, 
du  régiment  de  Nassau,  signale  le  passage  de  plusieurs 
bâtiments  de  guerre  qui  se  dirigent  vers  l'est  et  la  di- 
minution du  poste  de  Damgarten  :  au  même  moment, 
l'on  vient  prévenir  Dupas  que  les  Suédois  ont  élevé  des 


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—  12Ô  — 

retranchements  à  Schwiugoff,  entre  Schwinge  et  Schu- 
pin-Mulh,  qu'ils  ont  placé  450  hommes  et  4  pièces  do 
canon  à  Brîetursch,  lo  même  nombre  d'hommes  et 
6  canons  à  Griemen,  900  hommes,  dont  300  hussards 
du  régiment  royal,  commandés  par  le  capitaine  Sture 
avec  6  canons  à  Loitz,  plusieurs  postes  devant  Yarmeu, 
deux  r^iments  d'infanterie  à  Stralsund. 

Le  8,  Dupas  transporte  son  quartier  général  à  Ferdi- 
nand-Hoff,  il  fait  partir  pour  Friedland  le  régiment  de 
Nassau  qui  est  lui-même  remplacé  sur  la  Peene  par  le 
2«  régiment  d'infanterie  hollandais  ;  le  58«  et  le  4«  d'in- 
fanterie légère  partent  le  lendemain  pour  Stettin,  l'ar- 
tillerie passe  sous  les  ordres  du  général  Grandjean,  à 
Anclam,  le  régiment  de  Nassau  quitte  Friedland  pour  se 
rendre  à  Stettin.  C'est  là  que  nous  trouvons  le  10,  le 
nouveau  quartier  général  de  Dupas,  d'où  le  général 
Veaux  était  parti  pour  aller  à  Ossova  avec  la  première 
brigade  qui  était  composée  du  4*  d'infanterie  légère,  du 
riment  de  Wurzbourg,  de  la  1"  compagnie  d'artille- 
rie à  cheval  hollandaise. 

Le  colonel  Schœffer,  commandant  le  régiment  de 
Nassau,  se  rend  à  Berlin  avec  lui,  Dupas  va  à  Neuw- 
Stettin  ;  la  seconde  brigade  commandée  par  Gency,  à 
Gross-Crossin,  route  de  Colberg;  le  général  Veaux 
étant  tombé  malade,  sa  brigade  est  confiée  à  Goncy  qui 
remet  la  sienne  au  général  Grandjean. 

Le  16,  Dupas  a  son  quartier  général  à  Neuw-Stettiu, 
mais  Gency  continue  à  marcher  sur  Ossova,  par  Fried- 
land, tandis  que  Grandjean  campe  dans  les  environs  de 
Neuv-Stettin  et  de  Gross-Crossin  où  Dupas  établit  des 

9b 


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—  130  — 

magasios  de  subsistance  ;  le  premier  bataillon  du  régi- 
ment du  Grand  Duc  de  Berg  rejoint  la  division. 

Gency  reprend  le  commandement  de  sa  brigade  qu'il 
va  rejoindre  à  Schooneeck  pour  se  rendre  avec  elle  sous 
Dantzig  ;  le  2^  bataillon  du  régiment  du  Grand  Duc  de 
Berg  ayant  aussi  rejoint  la  division  Grandjean,  va  à 
Rumelsbourg  avec  ordre  de  s'y  trouver  le  21  avec  les 
15»,  58e  régiments  d'infanterie  de  ligne  et  l'artillerie  de 
sa  brigade. 

Dupas  part  ensuite  le  21  suivi  des  troupes  du  Grand 
Duc  de  Berg  et  de  l'artillerie  de  réserve  ;  la  l»*®  brigade 
prend  ses  positions  en  face  du  fort  de  Weichselmunde, 
prés  Dantzig  ;  le  quartier  général  de  Dupas  est  à  Streis 
sous  Dantzig,  la  2^  brigade  se  place  avec  l'artillerie  et 
la  cavalerie  en  face  de  l'escadre  Anglo-Russe  à  gauche 
de  l'embouchure  de  la  Vistule.  Les  communications 
entre  les  avant-postes  et  les  forts  deviennent  plus  difïi- 
ciles,  les  détachements  envoyés  par  le  4»  régiment  et 
celui  de  Wurtzbourg  prennent  leurs  postes  le  soir  à 
dix  heures  à  la  porte,  au  port  et  sur  les  glacis  du  fort 
de  Weichselmunde,  le  58»  régiment  prend  son  bivouac 
sur  un  autre  point  du  même  fort. 

Deux  jours  plus  tard,  Dupas  établit  son  quartier  gé- 
néral a  Langfurt,  prés  Dantzig,  le  régiment  de  Berg  va 
à  Graudentz,  le  58«  pénétre  à  4  heures  du  matin  dans 
lé  fort  de  Weichselmunde  et  remet  deux  cent  dix  pri- 
sonniers prussiens  entre  les  mains  du  commandant  de 
la  place  pour  être  envoyés  au  Maréchal  Lefebvre. 

Les  30,  31,  la  division  Dupas  se  rendit  à  Dirschau, 
par  Rossemburg,  Napoléon  la  passa  en  revue  près 
Longeneau,  entre  Dantzig  et  Rossemburg. 


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-  131  - 

1«  Juin.  — A  Dirschau,  un  sergent  Saxon  soupçonné 
d'encourager  ses  compatriotes  à  déserter  est  arrêté 
dans  son  logement  où  Ton  découvre  quatre  fusils,  trois 
gibernes  et  un  sabre  qui  avaient  appartenu  sans  doute 
à  quelques-uns  de  ces  déserteurs;  le  6,  Dupas  traverse 
la  Vistule,  prenant  ses  cantonnements  à  Saaféld,  puis, 
le  12  à  Heilsberg,  et  le  lendemain  à  Alveek,  à  Tembran- 
chement  de  la  route  de  Kœuigsberg  à  Friedland.  Les 
Français  avaient  battu  les  Russes  la  veille  à  Heilsberg, 
qui  se  trouve  à  65  kil.  5  de  Kœnigsberg;  après  ce  der- 
nier combat,  Mortier  avec  la  division  Dupas,  les  corps 
d'armée  des  maréchaux  Soult,  Ney,  Lannes,  Davoust, 
prirent  diverses  directions  pour  déborder  les  Russes  et 
couper  leur  retraite  sur  Kœnigsberg,  et  le  13,  Napoléon 
suivi  par  les  troupes  de  Mortier,  Lannes,  Ney,  la  garde 
impériale  se  porta  sur  le  champ  de  bataille  de  Friedland. 

La  brigade  Ruby  ne  faisait  plus  partie  de  la  division 
Dupas.  La  brigade  Grandjean,  détachée,  était  restée  en 
arrière  et  Dupas  n'avait  plus  sous  ses  ordres  que  les 
généraux  de  brigade  Veaux  et  Gency. 

A  la  veille  de  la  bataille  de  Friedland,  la  composition 
de  la  division  fut  quoique  peu  modifiée.  Les  deux  régi- 
ments allemands  (Berg  et  Wurtzbourg)  en  furent  déta- 
chés et  remplacés  par  le  régiment  de  la  Garde  de  Paris. 

A  ce  moment  on  peut  évaluer  avec  Thiers  la  force  de 
la  division  Dupas  à  6.400  hommes,  savoir:  lf«  brigade, 
général  Gency  ;  4«  léger,  colonel  Bazancourt;  15«  de  li- 
gne, colonel  Raynaud,  artillerie  hollandaise  à  cheval  ; 
2«  brigade,  colonel  Arnaud  (par  intérim,  le  général 
Veaux  étant  malade)  :  58*  de  ligne,  colonel  Arnaud  ; 


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—  132  — 

r^iment  de  la  Garde  de  Paris,  colooel  Rabbe,  artillerie 
hollaodaise  à  pied. 

'  Chaque  régiment  d'iofaoterie  était  à  2  bataillons,  ce 
qui  donne  pour  la  division  8  bataillons  en  tout,  compris 
rartillerie  environ  G.400  hommes,  d'après  l'évaluation 
de  Thiers. 


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—  133 


CHAPITRE  VIII. 


FRIEDLAND  -  LUBECK 
14  Juin  1807  -  Mars  1808 


Bataille  de  Friedland  —  Importance  du  rôle  du  corps  de  Mortier 
et  de  la  division  Dupas ,  grands  services  que  Dupas  rend  à 
rarmée.  —Rapport  de  la  !•••  division.  —  Grandes  pertes  de  la 
division  Dupas.  —  Départ  de  la  !'•  division,  répartition  de  ses 
troupes.  —  Marche  surLubeck.  —  La  division  Dupas  devient  la 
2*  du  corps  d'armée  de  Bernadotte.  —  Dupas  prend  le  comman- 
dement de  Lubeck.  —  Travemunde,  marche  des  troupes.  — 
Conseil  de  guerre.  —  Mouvements  de  troupes.  —  Dupas  reçoit 
le  commandement  des  villes  Anséatiques.  —  Il  est  nommé 
Chevalier  de  la  Couronne  de  Fer.  —  Ses  divers  traitements  et 
dotations. 


Friedland.  —  L'armée  Russe  se  présenta  le  14  juin 
au  matin  sur  le  pont  de  Friedland,  elle  attaqua  les 
deux  corps  commandés  par  Mortier  et  Lannes  qui  se 
trouvaient  en  première  ligne  :  Lannes  au  centre  et 
Mortier  formant  la  gauche  ;  ces  deux  maréchaux  s'op- 
poseront successivement  aux  efforts  de  Tennemi  et  par- 
vinrent à  conserver  leur  position  :  à  cinq  heures  la 
ligne  française  avait  achevé  de  se  former.  A  ce  moment, 
trois  salves  d'une  batterie  de  vingt  canons  donnèrent  le 
signal  de  l'attaque  générale. 

La  mission  confiée  au  8°  corps  et  en  particulier  à 


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—  134  — 

la  division  Dupas  était  de  conlenir  la  droite  des 
Russes  pendant  que  Ney  enfoncerait  leur  gauche.  Ce 
plan  fut  merveilleusement  exécuté  :  avec  beaucoup  de 
sang-froid  et  de  fermeté,  les  troupes  de  la  l^e  division 
se  maintinrent  contre  des  forces  plus  nombreuses.  Les 
Russes  cédèrent  le  terrain  pied  à  pied,  puis  accen- 
tuèrent un  mouvement  rétrograde,  et  essayèrent  de 
passer  l'Allé  à  gué  ;  ils  y  perdirent  beaucoup  de  monde, 
d'artillerie  et  de  bagages. 

Dans  le  rapport  général  de  cette  grande  bataille,  di- 
gne par  ses  résultats  d'être  comparée  à  Marengo,  à 
Austcrlitz  et  à  léna,  les  généraux  Oudinot,  Marchand, 
Nansouty,  Dupas,  Verdier,  Dupont  et  Savary,  furent 
cités  entre  tous  les  autres  pour  les  preuves  éclatantes 
qu'ils  venaient  de  donner  de  leur  valeur,  de  leur  activité 
et  de  leurs  talents  (1). 

Quoique  exposé  toute  la  journée  au  feu  le  plus  vif, 
Dupas  eut  le  bonheur  de  n'être  pas  blessé  ;  il  est  signalé, 
dans  le  rapport  du  8«  corps,  comme  ayant  rendu  de 
grands  services  à  l'armée  (2)  :  mais  sa  division  souffrit 
énormément.  Le  colonel  Raynaud  du  15«  de  ligne  fut 
tué. 

Les  Russes  eurent  dans  cette  grande  bataille  dix 
mille  hommes  tués  et  quinze  mille  blessés. 

Rappo7^i  de  la  P^  division.  —  Dupas  étant  arrivé  sur 
la  lisière  des  bois  fit  ses  dispositions  d'attaque  et  s'a- 
vança avec  sa  division  dans  le  plus  grand  ordre  sur  les 
batteries  ennemies,  qui  étaient  bien  supérieures  à  l'ar- 

(1)  Victoires  et  conquêtes  des  Français.  —  Archives  de  la  guerre. 

(2)  Arch.  de  la  guerre. 


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—  )35  — 

tillerie  dosa  division,  par  leur  quantité  et  par  la  gros- 
seur du  calibre.  <  Mon  artillerie  ne  put  d*ailleurs  pas 
arriver  aussi  vite  que  mes  braves  fantassins,  de  larges 
fosséset  beaucoup  de  marais  gênaient  sa  marche.  Aussitôt 
qu'elle  nous  eut  rejoint,  une  quantité  prodigieuse  de  mi- 
traille vint  nous  frapper  de  tous  les  côtés. 

«  Cependant  malgré  cotte  infériorité,  ma  division 
parvient  à  s'emparer  et  conserve  le  principal  plateau  au 
milieu  d'une  attaque  furieuse,  depuis  six  heures  du  ma- 
tin jusqu'au  soir  à  dix  heures. 

€  Dans  cette  rencontre,  la  1"  compagnie  d'artillerie 
à  cheval  hollandaise  s'est  admirablement  conduite  ; 
j'ai  pu  remarquer  le  sang-froid  et  la  bravoure  de  Wit- 
ten  Van  Brienen,  capitaine-commandant,  celles  de 
Kraner,  lieutenant,  Reichard,  maréchal  des  logis.  Cette 
compagnie  n'a  perdu  qu'un  homme  et  quinze  blessés, 
dix-neuf  chevaux  tués  et  dix  de  blessés. 

«  Le  4«  régiment  d'infanterie  légère  s'est  bien  conduit, 
surtout  le  colonel  Bazancourt  et  Berthot,  chef  de  ba- 
taillon. »  (Suivent  les  noms  de  quatre  capitaines,  quatre 
lieutenants  et  trois  sous-lieutenants  qui  ont  été  blessés, 
ainsi  que  ceux  de  onze  sergents-major,  sergents  et 
fourriers,  etc).  Dupas  cite  le  carabinier  Michaud  qui 
s'est  fait  connaître  depuis  longtemps  par  son  courage, 
dans  cette  dernière  rencontre  il  s'est  emparé  de  plusieurs 
tirailleurs  russes  qu'il  a  pris  par  le  collet  et  conduits 
prisonniers.  Trois  autres  soldats  sont  encore  cités  pour 
le  courage  qu'ils  ont  manifesté  devant  l'ennemi. 

«  Ce  régiment  a  eu  464  hommes  mis  hors  de  combat, 
entre  autres,  Folliet,  lieutenant  de  carabiniers,  officier 
très  distingué  et  déjà  cité  avantageusement  dans  l'aflfaire 


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—  136  — 

d'Ukermunde,  le  17  avril,  il  a  reçu  une  blessure  dans  la 
soirée  du  14.  Je  recommande  d'une  manière  spéciale  cet 
officier  brave  et  instruit,  qui  est  lieutenant  depuis  le 
9  juin  1793,  je  vous  prie  de  lui  faire  accorder  le  grade  de 
capitaine  qui  est  devenu  vacant  par  la  mort  de  Roy  (1). 

«  Le  15«  régiment  d'infanterie  de  ligne  a  réalisé  mes 
espérances,  par  sa  belle  contenance  devant  l'ennemi,  il 
a  perdu  l'une  de  ses  aigles,  sous  laquelle  un  sous-officier, 
Tadjudant-major  Azan  qui  le  dernier  l'avait  portée,  fut 
tué  par  une  décharge  d'artillerie;  deux  autres  sous- 
offlciers  qui  tenaient  avant  lui  ce  drapeau  ont  reçu  des 
blessures  très  graves.  L'attitude  de  ce  régiment  mérite 
que  le  maréchal  Mortier  le  signale  au  major  général, 
comme. étant  certainement  celui  de  toute  l'armée  qui  a 
le  plus  fait  preuve  de  bravoure  et  de  fermeté  ;  il  a  perdu 
son  colonel  et  trente-neuf  officiers;  neuf  cent  douze 
sous-officiers  ou  soldats  ont  été  mis  hors  de  combat. 

€  Dans  le  58«  d'infanterie,  le  colonel  Arnaud,  com- 
mandant par  intérim  la  2*  brigade,  a  opposé  une  résis- 
tance énergique,  l'on  doit  surtout  signaler:  Forcade, 
chef  de  bataillon,  les  capitaines  Berlancourt,  Firel, 
Théveuot,  Ponson  ;  les  lieutenants  Dandely,  Jonson  ; 
les  sergents-major  Patrix,  Colette,  les  sergents  ou  capo- 


(1)  Folliet  (Jacques),  né  à  Evian  le  23  janvier  1768,  volontaire 
et  lieutenaut  au  5*  bataillon  de  volontaires  du  Mont-Blanc,  fit 
toutes  les  campagnes  des  Pyrénées-Orientales  et  dltalie,  reçut 
deux  blessures,  une  troisième^  Friedland,  fut  nommé  capitaine  à 
raison  de  sa  belle  conduite  (après  14  ans  dégrade  de  lieutenant), 
me  mbre  de  la  Légion  d'honneur  le  28  juin  1808,  chef  de  bataillon 
en  1813,  lieutenant-colonel  pendant  les  cent  jours,  la  seconde 
Restauration  refusa  de  lui  reconnaître  ce  grade,  et  il  fut  retraité 
comme  chef  de  bataillon  avec  une  pension  de  retraite  de  1,200  fr. 
(23  décembre  1816)  avec  ses  trois  blessures  !  Mort  à  Gex  le 
7  mars  1817.  A.  F. 


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—  137  — 

raux  Moreau,  Joubert,  Balland  ;  les  voltigeurs  Genest, 
Simon,  Gérard,  Sudreau  ;  les  d*»»  2,  5  à  12  et  le  15«  ont 
été  blessés.  Ce  régiment  a  eu  587  hommes  mis  hors  de 
combat. 

«  Le  régiment  de  la  garde  de  Paris  et  son  colonel 
Rabbe  se  sont  distingués  ainsi  que  les  capitaines  Higust, 
'Forest,  Lefebvre,  Moreau;  Colard,  Coulée,  adjudants- 
majors  ;  les  lieutenants  ou  sous-lieutenants  Lavarde, 
Steimback,  les  n<»  3,  6  ont  été  blessés.  Ce  régiment  a 
eu  243  hommes  mis  hors  de  combat.  Quant  à  la  pre- 
mière compagnie  du  !•«•  régiment  d'artillerie  à  pied,  il 
serait  difficile  d'en  trouver  une  meilleure,  tant  au  point 
de  vue  de  la  discipline  qu'à  celui  du  sang  froid,  comme 
aussi  pour  la  précision  de  son  tir  en  face  de  l'ennemi. 
Je  dois  signaler  le  capitaine  Goêtz  officier  très  brave, 
les  officiers  Charpentier,  Lavergne,  Liey,  Moura,  Cu- 
rieu,  Plaquet  et  Nottelet,  canonniers.  Cette  compagnie 
n'a  eu  que  trois  tués  et  trois  blessés,  un  canon  démonté 
et  six  chevaux  tués. 

€  Les  quatre  pièces  de  8  formant  la  réserve  comman- 
dée par  le  capitaine  Deschan  ont  contribué  aux  beaux 
résultats  que  nous  avons  obtenus  pendant  cette  journée.» 

Résumé  du  rapport  : 

«  Le  général  de  brigade  Gency  (1)  s'est  particulière- 
ment distingué,  les  capitaines  Perrin,  Genèze  l'ont  mer- 
veilleusement secondé  ;  ce  dernier  est  capitaine  depuis 
quatorze  ans  et  n'est  pas  encore  décoré.  Le  colonel  Ba- 
zancourt  avec  l'aide  d'un  bataillon  du  4«,  a  immobilisé 
par  sa  résistance  énergique  une  charge  de  la  cavalerie 

(1)  Le  général  Veaux  était  malade. 


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—  138  — 

ennemie  ;  j*ai  remarqué  la  bravoure  et  la  prudence  de 
Borthet,  chef  du  l«f  bataillon  du  même  régiment. 

«  Reynaud,  colonel  du  15«  régiment  de  ligue  blessé 
grièvement  (1)  a  fait  preuve  de  la  plus  grande  énergie 
et  du  plus  grand  courage  ;  je  prie  votre  Excellence  d'en 
faire  mention  au  gouvernement  et  d'attirer  principale- 
ment son  attention  sur  le  régiment  entier,  les  pertes  • 
excessives  qu'il  a  subies  prouvent  qu'il  renferme  un 
nombre  extraordinaire  de  braves. 

€  Veuillez  aussi  vous  intéresser  au  brave  colonel  du 
58«,  Arnaud,  qui  n'est  encore  que  simple  légionnaire  ;  à 
Rabbe,  colonel  du  régiment  de  Paris,  qui  a  su  conserver 
sa  position,  maintenir  le  courage  de  son  régiment,  sous 
les  feux  répétés  de  l'artillerie  russe  et  d'un  nombre 
considérable  de  tirailleurs. 

«  Je  suis  satisfait  de  mon  état-major  :  Desmaret  et 
Riquet  ont  reçu  des  balles  dans  leur  vêtement,  les  autres 
ont  rempli  leurs  fonctions  avec  zèle  et  intelligence  ;  Ri- 
quet pourmit  être  attaché  avantageusement  au  service 
de  la  topographie.  Barrai,  l®*"  aide  de  camp  a  été  blessé; 
Bochaton,  2«  aide  de  camp,  a  eu  son  cheval  tué  sous  lui 
par  la  rencontre  d'un  boulet  ;  Orillat,  mon  3«  aide  de 
camp,  s'est  exposé  à  de  grands  dangers  en  allant  placer 
deux  canons  devant  l'ennemi  ;  avant  d'entrer  sous  mes 
ordres  il  était  aide  do  camp  du  général  Reinvald,  com- 
mandant d'armes  à  Francfort,  et  a  demandé  à  entrer 
dans  ma  division  pour  faire  la  campagne  actuelle.  Lieu- 
tenant depuis  cinq  ans,  il  a  fait  les  campagnes  de 
St-Domingue  et  a  été  nommé  capitaine  par  le  général 

(l)  Mort  de  ses  blessures. 


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—  139  - 

Rochanteau,  grade  qui  ne  lui  a  pas  élé  confirmé;  je  prie 
V.  E.  de  lui  faire  remettre  la  croix,  ou  do  lui  faire  recon- 
naître le  grade  de  capitaine.  Au  camp  sous  Tilsitt,  le 
15  Juin  1807.  Dupas.  » 

Les  pertes  éprouvées  par  la  division  Dupas  à  Fried- 
land  furent  considérables,  en  voici  le  résumé  : 
'    Ire  C'«  d'artillerie  à  cheval  hollandaise  :  tués  ou 

mis  hors  de   combat .     .         16 

4«  régiment  d'infanterie  légère  :  tués  ou  mis 

hors  de  combat 464 

15«  de  ligne:  tués  ou  mis  hors  de  combat  : 

ofBcicrs  40,  sous-offlciers  et  soldats  912.  .  952 
58*  de  ligne  :  tués  ou  mis  hors  de  combat  .  .  587 
Garde  de  Paris  :  mis  hors  de  combat.  .  .  .  243 
l^Ciedu  1<^' d'artillerie  à  pied:  mis  hors  de 

combat 6 

Total.     .     .     .    2.268 
et  31  chevaux  tués. 

Barrai  et  Bochaton  furent  nommés  chefs  de  bataillon 
et  reçurent  leur  brevet  le  18,  le  lieutenant  de  carabiniers 
Folliet  fut  nommé  capitaine. 

Départ  de  la  P^  division.  —  Après  Friedland  Dupas 
se  dirige  sur  Stettin,  puis  sur  Berlin;  le  15  juin  son  bi- 
vouac est  à  Klein-Englau,  ensuite  à  Taplaken,  où  le  gé- 
néral de  brigade  Grandjean  prend  le  commandement  de 
la  2«  brigade  confié  provisoirement  au  colonel  Arnaud. 
Du  23  au  25  la  division  prend  ses  cantonnements  dans 
de  pauvres  villages. 

23  Juin.  —  Le  général  Veaux  qui  était  malade  reprend 
son  commandement  et  la  division  est  ainsi  organisée  : 


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—  140  — 

ire  Brigade 

Général  Veaux:  4«  d'infanterie  légère,  15«  d'infante- 
rie de  ligne,  \^^  C'«  d'artillerie  à  cheval  hollandaise. 
2«  Brigade 

Général  Gency  :  58®  de  ligne,  !>•«  C»®  du  1«>"  régiment 
d'artillerie  hollandaise  à  pied. 

5«  Brigade 

Général  Grandjean  :  Le  régiment  de  Paris. 

Le  même  jour  quarante  chevaux  sont  saisis  et  confiés 
entre  les  mains  du  Bailli  d'Ergenisen  prés  Tilsitt,  pour 
être  remis  au  commissaire  des  guerres  Bourdon  afin  de 
les  utiliser  pour  les  besoins  de  la  division  ;  ces  chevaux 
avaient  été  saisis  sur  des  soldats  qui  s'en  étaient  empa- 
rés sans  en  avoir  le  droit  pour  leur  usage  personnel. 

Le  26,  le  quartier  général  est  placé  à  Locarique,  où 
le  15«  régiment  de  la  1"^®  brigade,  passe  sous  les  ordres 
de  Gency;  puis  la  division  arrive  successivement  à 
Gharim,  Pîosiéro  prés  Wirballen,  à  Kalvary  près  du 
Niémen,  Pologne. 

6  Juillet.  —  De  Kalvary,  le  chef  de  l'état-raajor,  se 
rend  à  Tilsitt  pour  prendre  les  ordres  du  maréchal  ;  par- 
tout les  habitants  sont  plongés  dans  une  affreuse  misère, 
les  troupes  ne  peuvent  se  procurer  aucune  ressource  ; 
les  Polonais  enrégimentés  dans  le  15«  se  conduisent 
mal,  aussi  les  fait-on  partir  au  nombre  de  douze  à  quinze 
cents  sous  les  ordres  du  général  Tilszer,  ils  traversent 
Weysza  et  vont  dans  les  environs  de  Loypuny. 

Trois  officiers,  deux  sergents,  un  caporal  sont  nommés 
membres  de  la  Légion  d'honneur,  —  Le  général  Grand- 
jean fait  à  deux  reprises  différentes  des  réquisitions  en 
nature  et  en  numéraire  dans  le  ressort  de  son  comman- 


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—  141  — 

dément,  prés  de  Weysza,  pour  le  compte  du  sixième 
corps,  commandé  par  Ney. 

De  nouvelles  recrues  destinées  au  58*  régiment  de 
ligne  arrivent  du  dépôt  de  Mayence,  les  denrées  devien- 
nent rares,  surtout  à  Lodrey,  où  quarante  ménages  ont 
abandonné  leurs  pauvres  habitations. 

Dupas  voyant  souvent  sortir  les  voitures  et  les  che- 
vaux du  campement,  fait  un  règlement  pour  déterminer 
les  cas  où  cette  circulation  inusitée  sera  permise,  et 
exiger  une  demande  spéciale  dé  la  part  des  officiers  qui 
les  utiliseraient. 

Mounier,  lieutenant  dans  le  4«,  n'ayant  pas  voulu  se 
soumettre  à  ces  prescriptions,  est  mis  aux  arrêts,  en 
même  temps  que  Malbeste,  capitaine  de  grenadiers  au  58% 
pour  n'avoir  pas  su  maintenir  la  discipline  dans  sa  com- 
pagnie qui  était  partie  d'Augustowo  pour  Survalki. 

Morvillers,  directeur  des  postes  de  la  l»"*  division, 
Dumaret,  chef  de  Tétat-major,  arrivent  au  quartier  géné- 
ral de  la  division,  à  Weysza;  Mortier  était  à  Surwalki. 

Marche  sur  Lubeck,  —  Bernadotte,  —  Lubeck,  etc, 
La  division  Dupas  se  remet  en  marche  pour  Stettin,  où 
elle  arrive  le  18  août,  ayant  fait  vingt-cinq  étapes:  Au- 
gerburg,  Nastembourg,  Elbing,  Dantzig,  etc.,  Stettin 
où  elle  reçoit  Tordre  d'allerà  Berlin.  Dans  cette  dernière 
ville  Dupas  reçoit  Tordre  de  partir  avec  sa  division  pour 
Hambourg  où  il  fera  partie  du  corps  d'armée  de  Berna- 
dotte  ;  la  division  Dupas  devient  dès  lors  la  2«  du  corps 
de  Bernadette  ;  elle  se  met  en  marche  le  lendemain,  et 
rétablit  sur  sa  route  l'un  des  ponts,  brûlés  par  les  Prus- 
siens à  Havelsberg  qu'elle  traverse  deux  jours  plus 
tard.  Mais  à  peine  arrivée  à  Perleberg,  l'un  des  aides 


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—  142  —    ^ 

de  camp  de  Bernadotto  l'en  fait  partir  pour  Lubeck.  A 
la  suite  de  ces  nouveaux  ordres,  le  58**  régiment  d'infan- 
terie de  ligne  va  prendre  ses  cantonnements  à  Schone- 
berg,  celui  de  Paris  sur  Dassow,  Dupas  avec  le  4*  régi- 
ment d'infanterie  légère,  le  15»  d'infanterie  de  ligne, 
les  sapeurs  et  l'artillerie,  va  à  Zarrentin,  puis  à  Lubeck 
où  il  établit  le  8  septembre  1807  son  quartier  général; 
il  prend  le  commandement  de  cette  place  qu'il  exercera 
jusqu'au  5  mars  1808. 

Le  15'régiment  de  ligne,  l'artillerie,  les  sapeurs  res- 
tent dans  la  ville  même,  le  4«  régiment  d'infanterie  légère 
va  à  Sch wartow,  le  régiment  de  Paris  rentre  en  France 
en  passant  par  Hambourg  ;  le  général  de  brigade  com- 
mandant l'artillerie  arrive  à  Lubeck,  le  5*  d'infanterie 
légère  va  à  Dassow,  quatorze  compagnies  du  19'  vont  à 
Lubeck  et  quatre  autres  dans  les  villages  voisins. 

Les  5'  et  19«  régiments  d'infanterie  venaient  en  eflTet 
de  passer  sous  les  ordres  de  Dupas. 

Nous  venons  de  voir  que  Dupas  avait  reçu  le  comman- 
dement de  Lubeck  el  de  son  territoire,  situé  en  grande 
partie  sur  les  deux  rives  de  la  Trave,  jusqu'à  son  em- 
bouchure dans  la  Baltique.  La  superficie  de  ce  territoire 
avait  335  kilomètres  carrés,  l'on  y  compte  aujourd'hui 
soixante  mille  habitants  qui  étaient  soumis  à  l'autorité 
d'un  Sénat,  composé  de  vingt  membres  nommés  à  vie, 
choisissant  dans  son  sein  deux  Bourgmestres  élus  pour 
deux  ans  ;  en  second  lieu  à  une  assemblée  bourgeoise 
de  cent  vingt  députés,  nommés  pour  six  ans  au  suffrage 
universel. 

Nous  ouvrons  le  journal  de  Dupas,  quinze  jours  après 
son  arrivée  à  Lubeck:  une  frégate  et  un  contre  anglais 


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—  143  — 

abordent  la  côte,  vis-à-vis  de  Roshagen  où  quinze  hom- 
mes se  hasardent  à  descendre  ;  attaqués  aussitôt  par 
six  chasseurs  du  5«  régiment  d'infanterie  légère  et  rece- 
vant quelques  coups  de  fusil,  ils  s'empressent  de  rega- 
gner leurs  bâtiments  ;  le  caporal  qui  commandait  les 
chasscîurs  a  été  nommé  par  Bernadette  sergent,  à  la 
suite  de  sa  belle  résistance.  Aussitôt  que  Dupas  fut  in- 
formé delà  présence  de  ces  bâtiments,  il  se  rendit  dans 
le  port  de  Travemunde  qui  est  à  vingt  kilomètres  de 
Lûbeck,  mais  pour  assister  le  26  septembre  à  leur  départ, 
emmenant  avec  eux  quatre  bateaux  lubeckois  dont  ils 
s'étaient  emparés. 

Un  bâtiment  de  Travemunde  qui  rentre  dans  le  port 
vient  d'apercevoir  à  douze  lieues  des  côtes  vingt-six 
voiles  anglaises  qui  jetaient  leurs  ancres,  aussi  Dupas 
recommaude-t-il  dertnloubler  de  précautions  et  envoie 
de  nombreuses  patrouilles  sur  les  côtes.  LeSoctobre,  pen- 
dant qu'il  vôriflo  une  nouvelle  batterie  qu'il  a  faite  établir 
à  Travemunde,  un  nouveau  bâtiment  anglais  paraît  à  la 
hauteur  do  Schwansée  poursuivant  deux  barques  char- 
gées de  provisions  de  guerre;  le  capitaine  Traire,  du 
5«  régiment  d'infanterie  légère,  s'avance  avec  un  déta- 
chement sur  le  rivage  et  malgré  les  coups  de  canon  et 
la  mitraille  lancés  par  l'ennemi,  il  parvient  à  faciliter  et 
à  protéger  l'atterrissement  et  à  soustraire  ces  barques  à 
la  rapacité  anglaise. 

Le  lendemain  une  autre  chaloupe  essaye  de  débarquer 
à  la  hauteur  de  Grands-Hagen,  un  caporal  et  six  hom- 
mes du  régiment  cité  plus  haut  tirent  quelques  coups  de 
fusil  et  lui  fout  gagner  le  large. 

Jusqu'au  19,  le  journal  de  Dupas  parle  de  l'arrestation 


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—  144  — 

d'un  espion  et  des  jugements  rendus  par  le  Conseil  de 
guerre  :  Becker  accusé  de  désertion  est  acquitté,  deux 
soldats  du  19®  de  ligne  sont  condamnés  à  deux  ans  de 
fer  ;  deux  autres  par  contumace  à  la  peine  do  mort;  un 
chasseur  du  4«  dlnfanterie  légère  à  deux  ans  de  fer.  Mais 
les  jugements  condamnant  aux  fers  sont  annulés  par  le 
conseil  de  révision. 

Dix  autres  militaires  du  19«  de  ligne  sont  traduits 
devant  un  conseil  de  guerre  à  la  suite  d'excès  commis 
dans  un  village  Danois;  André,  capitaine  de  leur  compa- 
gnie est  mis  aux  arrêts  de  rigueur  pour  un  mois  avec 
une  sentinelle  à  sa  porte  qui  reçoit  trois  francs  par  jour. 

Une  nouvelle  frégate  anglaise  paraît  à  la  hauteur  de 
Neindorf,  Chapuiset,  chef  de  bataillon  dans  le  4«  d'infan- 
terie légère,  menace  avec  une  compagnie  d'attaquer  son 
équipage,  elle  vire  de  bord  et  fait  voile  dans  la  direction 
du  Danemark;  cependant  Michal,  commandant  la  place 
de  Travemunde,  dit  qu'elle  reparut  près  de  Thiemendorf 
où  elle  voulait  faire  ses  provisions  d'eau  douce,  ce  qu'elle 
ne  put  entreprendre. 

Un  poste  de  voltigeurs  placé  entre  Lûbeck  et  Schwar- 
ten  arrête  doux  Danois  se  disant  déserteurs  qui  sont 
conduits  à  Hambourg  ;  Dupas  passe  en  revue  les  4«,  5« 
régiments,  Marchand-Duchaune,  inspecteur  aux  revues, 
passe  celle  du  58®  d'infanterie  de  ligne;  le  port  de  Trave- 
munde laisse  sortir  les  bâtiments  chargés  de  marchan- 
dises françaises,  qui  vont  en  Russie. 

Le  6  novembre,  qui  était  le  jour  anniversaire  de 
l'entrée  des  Français  à  Lubeck,  Dupas  remarqua  que  le 
soir  à  neuf  heures,  les  lanternes  n'avaient  pas  été  encore 
allumées,  il  donne  ses  ordres  pour  que  cet  éclairage  soit 


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-  14S  - 

fait  et  sort  à  cheval,  accompagné  des  i)fflciers  de  son 
état-major,  pour  circuler  dans  la  ville  et  se  convaincre 
que  ses  ordres  ont  été  exécutés.  Ayant  accordé  momen- 
tanément la  liberté  de  navigation  dans  le  port  de  Trave- 
munde,  quatorze  bâtiments  de  Lubeck  chargés  de  meu- 
bles, instruments  de  musique,  drogues,  draps  allemands 
et  français,  soies  italiennes  et  de  Lyon,  mettent  à  la 
voile  :  huit  pour  la  Russie,  deux  pour  Kœaigsberg,  liù 
pour  Rostock,  les  autres  se  dirigent  sur  d*a,utres  ports. 
Mais  trois  ou  quatre  jours  plus  tard,  le  directeur  des 
douanes  ayant  reçu  une  communication  secrète  du 
commandant  de  Travemunde,  Dupas  fait  arrêter  de 
nouveau  la  sortie  des  bâtiments  de  commerce,  mais  leur 
entrée  étant  toujours  libre,  cinquante-quatre  navires  pé- 
nètrent dans  ce  port  entre  le  H  et  le  20  novembre. 

Cependant  la  jonque  Edouard  fut  autorisée,  par  excep- 
tion et  à  la  demande  du  Ministre  de  France  résidant  à 
Hambourg,  à  sortir  et  à  partir  pour  la  Russie.  Pendant 
le  mois  de  novembre,  Duchaune,  sous-inspecteur  aux  re- 
vues, passa  une  nouvelle  revue  des  régiments  d'infanterie 
légère,  quarante-deux  brevets  de  légionnaire  furent  don- 
nés au  4«,  trente-six  au  58«  de  ligne;  le  conseil  de 
guerre  ne  prononça  que  deux  condamnations:  Demay 
et  Col,  fusiliers  au  19®  régiment  de  ligne,  à  deux  ans  de 
fer  pour  vols. 

Quelques  mouvements  de  troupes  se  font  entre  Lu- 
beck et  Hambourg  ;  Jouvencourt,  chef  d'escadron  dans  la 
gendarmerie,  prend  le  commandement  de  la  place  à 
Lubeck,  en  remplacement  de  Steck,  aide  de  camp  du 
Prince  de  Ponte-Corvo. 

Le  2  décembre  qui  est  le  jour  anniversaire  du  couron- 

iOh 


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—  146  — 

neinent  de  )*empereur  et  d'Austerlitz,  une  fête  est  an- 
noncée dès  80pt  heures  du  matin,  par  une  salve  de 
21  coups  de  Canon,  renouvelée  à  midi  et  cinq  heures. 
Dupas  préside  un  banquet,  auquel  assistent  trois  séna- 
teurs, quelques  personnages  do  distinction,  le  Consul  de 
France,  les  autorités  militaires  et  civiles  ;  il  porte  nn 
toast  à  l'Empereur,  sa  maison  estilluminée,  ellesupporte 
un  transparent  avec  Tinscription  de  :  Vive  Naj^oléon  le 
Grand. 

Sur  ces  entrefaites,  les  jugements  rendus  dans  le 
mois  de  novembre  contre  dix  militaires  et  un  capitaine 
à  la  suite  d*excés  commis  sur  territoire  Danois  sont  ré- 
visés par  le  2« conseil  de  guerre  qui  les  renvoie  tousàleur 
corps  ;  Fourcade,  chef  de  bataillon  au  58«  régiment 
dlnfanterie  de  ligne,  se  rend  en  permission  en  France, 
conservant  sa  solde  complètes  à  la  suite  d*une  décision 
de  S.  A.  S.  le  prince  Alexandre,  vice-connétable  de 
Tempire,  qaajor  général  de  la  grande  armée. 

Pendant  le  mois  de  décembre,  le  port  de  Travemunde 
accuse  l'entrée  de  quinze  bâtiments  venant  de  Russie 
ou  de  Suède,  de  Rostock,  ville  du  grand  duché  de 
Mecklembourg-Swérin,  située  sur  la  Warnow,  à  seize 
kilomètres  do  son  embouchure  sur  la  Baltique  et  de 
Mémel  ville  prussienne  située  à  l'embouchure  do  la 
Dange  ;  trois  navires  en  sortent  pour  se  diriger  sur  le 
Danemark.  Le  5*  régiment  d'infanterie  légère,  le  19»  de 
ligne  viennent  cantonner  à  Lubeck,  à  l'exception  de 
huit  compagnies  du  19«  qui  vont  à  Schwartau  et  de  deux 
autres  qui  se  dirigent  sur  Travemunde. 

Les  quatre  dernières  se  rendent  dans  les  villages  de 
Lubeck,  en  suivant  la  direction  de  Travemunde. 


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-  I4t- 

Nous  terminons  cette  période  du  mois  do  décembre 
I8êl,  sur  le  commandement  de  Lubeck,  en  signalant  les 
sentences  rendues  par  le  premier  conseil  de  guerre  qui 
condamne  à  cinq  ans  de  fer  Thouvenel,  carabinier  au 
b*"  régiment  d'infanterie  légère,  comme  coupaJWe  de  faux 
en  écriture  ;  par  contumace  à  douze  ans  dQ  -boulet  et 
1500  francs  d'amende,  Juvénal  Dejouany,  chasseur  au 
5*  régiment  d'infanterie  légère  pour  crime  de  désertion; 
un  voyageur  nommé  Guillaume  Thomas  soupçonné 
d'espionnage  que  la  gendarmerie  conduit  aussitôt  à 
Stralsund. 

Pendant  les  mois  de  janvier  et  février  1808,  douze 
navires  entrent  dans  la  rade  do  Travemunde  venant  du 
Mecklembourg,  de  Wismar,  Stettin,  Neust^dt,  Copen- 
hague; vingt  autres  en  sortent  pour  faire  voile  sur  Neus- 
tadt,  Copenhague,  le  Holstein  ;  le  sous-inspectepr  passe 
une  revue  de  la  !'•  division,  quelques  sapeuraet  soldats 
quittent  Lubeck  pour  rejoindre  leur  compagnie  à  Ham- 
bourg. Le  capitaine  Ivanny  du  58*  de  ligne  meurt  ;  un 
sergent  du  19*  se  noie  ;  le  payeur  de  la  division  apporte 
des  fonds,  le  général  Grandjean  se  rend  en  France  avec 
ses  deux  aides  de  camp  ;  des  soldats  du  train  vont  à 
Erfurth  pour  y  prendre  des  habillements  et  autres  effets 
d'équipement  destinés  aux  sous-ofHciers  et  soldats  de  la 
l''"  compagnie  du  11»  bataillon  du  train. 

Les  conseils  de  guerre  sont  inactifs  pendant  cette 
période,  ne  rendant  que  deux  jugements  favorables, 
l'un  contre  un  soldat  du  19*  de  ligne,  le  dernier  contre 
un  cstpoval  de  carabiniers  du  5"  léger. 

Le  4  mars  Dupas  fait  le  recensement  de  sa  di- 
vision, les  soldats  reconnus  incapables  d'entrer  en  cam- 


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—  148  — 

pùgno  sont  dirigés  jusqu'à  nouvel  ordre  sur  Travèmunde, 
les  hommes  valides  partent  de  Lubeck  et  arrivent  à 
Odensôe  lé  14,  aprôs  avoir  parcouru  dix  étapes  :  Neu- 
munster,  Flensburg,  Kolding,  etc.  A  partir  d'Odensée, 
vïllo  Danoise,  la  division  se  dirige  en  trois  colonnes  sur 
Hambourg  :  la  première  comprend  le  5«  léger,  le  14e  de 
chasseurs  a  cheval  ;  la  deuxième  se  compose  du  19«  de 
ligné  et  de  Tartillerie;  la  troisiètne  a  le58»  de  ligne, 
les  équipages,  Tadministratiôn.  Une  compagnie  de  cara- 
biniers, deux  de  voltigeurs  et  Tune  du  5*  régiment  d'in- 
fanterie légère  vont  à  Nyebvig  ;  les  treize  dernières  dû 
14*  restent  à  Odenëée. 

Dans  Fartillerte  la  moitié  cantonne  à  Odensée,  une 
autre  se  réunissant  à  la  deuxième  colonne  prennent  leurs 
cantonnements  :  le  U^  biàtaillon  du  19«  de  ligne  à  gauche 
de  la  i^oute'de  Middelfart  a  Ôdensée,  occupant  Fulsted, 
Hàrréndrup,  Gàmbye  et  Haarstew  dans  tin  rayon  de 
deux  iieues.  Un'autre  bataillon  est  placé  à  droite  pour 
occuper  également  sûr  une  distance  de  deux  lieues  les 
communications  d'Ëybe  à  Kingstrap  et  Gielsteds. 

La  troisième  colonne,  composée  du  58**  régiment  d'in- 
fantérié  légère,  des  administrations  et  équipages  can- 
tonné à  Frëdericia  ou  dans  les  Villages  voisins  dans  un 
rayon  d'une  lieue  et  demie. 

Le  16,  douze  compagnies  du  5*  régiment  d'infanterie 
légère  stationnent  avec  l'artillerie,  les  2%  4«  compagnies 
de  carabiniers  et  voltigeurs  du  centre,  dans  les  villages 
qui  environnent  Odensée;  le  14*  régiment  de  chasseurs 
à  cheval  s'établit  à  RogenstHî,  les  compagnies  de  volti- 
geurs du  5e  d'infantei^ie  à  Odensée. 
Nous  avons  dit  que  le  19«  de  ligne  faisait  partie  de  la 


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—  149  — 

deuxième  colonne;  «  dans  sa  marche,  il  vit  une  maison 
que  rincendie  dévorait,  aucun  Français  n'y  logeait,  mais 
il  n'écouta  que  les  aspirations  d'une  fraternité  républi- 
caine et  réteignit  :  trois  grandes  fermes  furent  détruites 
mais  un  village  entier  dut  son  salut  à  nos  soldats.  >  (1). 

Le  lo'  avril  nous  retrouvons  Dupas  à  Odensée  où  il 
était  arrivé  avec  toute  sa  division  lo  14  mars,  c'est  là 
qu'il  remit  le  commandement  provisoire  delà  2«  division 
du  corps  d'armée  au  général  de  brigade  Gency,  pour 
aller  à  Hambourg  prendre  lo  commandement  des  villes 
anséatiques. 

Dupas  avait  été  nommé  lo  25  déc^^mbre  1807,  cheva- 
lier de  la  Couronne  de  fer,  distinction  à  laquelle  était 
attachée  une  dotation  de  6,000  francs  qu'ij  cumulait 
avec  le  traitement  de  sous-gouverneur  du  Palais 
de  Stupinis,  sinécure  et  dotation  qui  augmentaient 
de  12,000  francs  son  traitement  de  général  do 
division  et  les  avantages  attachés  au  gouvernement  des 
villes  anséatiques.  Au  moment  où  il  allait  quitter  Lubeck 
pour  se  rendre  à  Hambourg,  il  reçut  l'avis. que  doux  do- 
tiitions  s'élevant  à  un  total  de  50,000  francs  de.  revenu 
lui  étaient  accordées  par  Napoléon  sur  des  biens  situés 
en  Westphalie  et  en  Hanovre. 


(1)  Journal  de  Dupas,  page  4t. 


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—  150  — 


CHAPITRE   IX 


HAMBOURG 
Avril  à   Octobre  1808 

Commandement  des  territoires  anséatiques.  —  Administration. 

—  Revue.  —  Mesures  disciplinaires.  —  Inspection.  —  Emeute. 

—  Espions.  T-  Attaques  faites  par  les  Anglais,  leurs  prises.  — 
Espagnols.  —  Exécution.  —  Le  15  août.  —  Pillages  opérés  par 
les  Anglais.  —  Nouvelles  attaques.  —  Garde  bourgeoise.  —  Fin 
du  commandement. 

Dupas  emmène  Dumarest,  son  ancien  chef  d'état-major, 
et  Bochaton,  son  2»  aide  de  camp,  à  Hambourg,  où  il 
prend  possession  de  ce  grand  commandement,  compre- 
nant vingt  mille  hommes  échelonnés  sur  les  trois  terri- 
toires de  Hambourg,  Brème,  Lubeck. 

Le  territoire  de  Lubeck  a  été  décrit  dans  le  précédent 
chapitre;  celui  de  Brème  s'étendait  sur  les  deux  rives 
du  Weser,  entre  l'Oldenbourg  et  le  Hanovre,  sa  super- 
ficie était  de  75  kîlom.  carrés  et  son  chef-lieu  à  48  kil. 
de  l'embouchure  du  Weser  ;  c'était  le  siège  des  assem- 
blées de  la  ligue  anséatique,  elle  était  gouvernée  par  un 
conseil  suprême  composé  de  deux  bourgmestres,  deux 
syndics  et  vingt-quatre  conseillers.  Cette  ville  est  située 
de  la  manière  la  plus  avantageuse  pour  servir  d'entre- 
pôt aux  marchandises  qui  descendent  le  Weser  ;  son 
commerce  maritime  est  important. 


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—  151  — 

Le  territoire  de  Hambourg  est  enclavé  sur  F  Elbe,  sa 
superficie  est  de  385  kil.  carrés  avec  une  population 
actuelle  de  217.000  habitants  ;  il  se  compose  des  terres 
environnant  la  ville,  du  baillago  de  Bergodorf  posstklé 
en  commun  avec  Lubock  et  comprenant  quelques  îlee  do 
FEIbe,  du  baillage  de  Ritzeburtol,  qui  s'étend  entre 
l'embouchure  de  TElbe  et  celle  du  Wesor,  il  comprend 
nie  do  Neuwerk. 

Il  est  administré  par  un  Sénat,  composé  de  15  mem- 
bres et  3  bourgmestres,  dont  l'un  est  président  do  cette 
assemblée. 

Hambourg  est  un  port  de  la  plus  grande  importance, 
au  double  point  de  vue  de  la  navigation  maritime  et 
fluviale. 

Déjà  en  1807  le  commerce  de  Hambourg  était  im- 
mense, c'était  une  très  riche  prise  pour  l'empire  fran- 
çais. Le  luxe  des  habitations,  le  nombre  des  équipages 
qui  parcouraient  la  ville  à  toute  heure  indiquaient  que 
parmi  les  villes  les  plus  opulentes  de  l'Europe,  Hambourg 
occupait  le  premier  rang. 

Dupas  arriva  à  Hambourg  le  G  avril  1808  et  prit  le 
commandement  des  territoires  anséatiques  qui  occupent 
une  superficie  de  plus  de  800  kilomètres  carrés. 

Il  envoie  deux  compagnies  à  Travemunde  pour  faire 
le  service  de  la  place,  il  donno  à  Bochaton  le  comman- 
dement du  territoire  du  Lubeck  où  ce  dernier  se  rend 
avec  le  général  Gratien  commandant  une  division  hol- 
landaise, ce  dernier  part  avec  son  état-major  pour  y 
remplacer  Nikolson,  généi^l-major  hollandflis. 

Le  9  avril  ont  lieu  divers  mouvements  de  troupes. 

La  gendarmerie  de  Hambourg  escorte  jusqu'à  Brème 


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—  152  — 

treize  mî^rifts  de  la  dernière  levée  faite  sur  le  premier 
de  ceft'territoires,  elle  reçoit  à  son  retour  douze  homnies 
du  19^  régiment  d*infanterieide  ligne  qui  âe  trouvaient 
en  traitetqent  à  l'hôpital  de  Lubeck  et  qui  vont  rejoindre 
leurèorps.à  Hambourg,  et  deux  grenadiers  du  même 
régim0nt  arrêtés  à  Brème  au  moment  où  ils  frappaient 
{les  habitants  de  cette  ville. 

Le  gouverneur  général  Dupas  passe  successivement 
en  revue  un  escadron  du  2«  rc^iment  de  cuirassiers  hol- 
landais!, ta  H  compagnie  d  artillerie  et  l'infanterie  Hol- 
landaises placées  à  Hambourg  ;  il  témoigne  à  ce  dernier 
corps  sa  satisfaction  pour  la  tenue,  la  propreté  des  armes 
et  la  précision  des  manœuvres  ;  sa  dernière  inspection 
est  celle  du  dépôt  des  troupes  espagnoles,  formé  à 
Altona. 

Dans  la  nuit  du  9  au  10  avril  1808  des  malfaiteurs 
s'introduisirent  dans  l'un  des  entrepôts  des  douanes  de 
Lubeck  qui  renfermait  plusieurs  marchandises  anglaises 
que  l'on  avait  saisies. 

Dupas  invite  le  Sénat  à  provoquer  une  enquête  et  la 
punition  dos  coupables.  Ces  voleurs  étaient  des  soldats, 
ils  furent  découverts  et  l'on  put  retrouver  le  21  avril  une 
partie  de  ces  marchandises. 

Engel  Brecht,  chirurgien  militaire,  est  renvoyé  de 
l'armée,  on  le  conduit  sur  la  rive  gauche  de  l'Elbe,  avec 
défense  de  rentrer  sur  le  territoire  qu'il  vient  de  quitter, 
par  suite  de  ses  indélicatesses  à  l'égard  de  quelques 
propriétaires  de  logements  qu'il  avait  occupés. 

Deux  vagabonds  sont  envoyés  d'Odensée  par  le  géné- 
ral Gérard  comme  étant  prévenus  de  mauvais  traitements 
et  menaces  d'ipceudie,  on  les  dirige  dans  l'intérieur  de 


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—  153  — 

la  France  sous  Tescorte  des  gendarmes  ;  deux  soldats 
hollandais  qui  avaient  cassé  les  bras  à  un  bourgeois  de 
Lubeck  sont  arrêtés  ;  un  nommé  Lazarus,  bourgeois  de 
Hambourg,  est  mis  à  la  disposition  du  Préteur  à  la  suite 
de  certaines  propositions  faites  à  un  voltigeur  du  8*  d'in- 
fanterie hollandaise  qui  était  de  faction  dans  la  rue  de 
l'amirauté. 

Dupas  constate  dans  Tune  de  ses  inspections  aux  hô- 
pitaux de  Lubeck  leur  bonne  tenue  et  Texcellento  disci- 
pline des  militaires.  Il  fait  embarquer  Delamarche, 
officier  de  marine  et  commandant  par  intérim  la  station 
de  l'Elbe  avec  le  contrôleur  des  douanes  et  quarante 
hommes  du  5«  régiment  de  dragons  pour  surprendre 
deux  chaloupes  anglaises  qui  venaient  d'aborder  à 
Nerverck  ;  mais  ce  marin  rentre  dans  le  port  de  Trave- 
muode  sans  les  avoir  rencontrée». 

Le  19  une  émeute  populaire  ayant  éclaté  soudainement 
à  la  porte  d'Altona,  le  poste  fut  envahi,  les  soldats  furent 
frappés  avec  des  pierres  et  des  bâtons,  toutes  les  vitres 
cassées,  les  palissades  renversées  ;  trois  émeutrers 
furent  tués,  cinq  autres  blessés. 

La  foule  repoussée  se  dirigea  sur  la  porte  d'Allenthor 
où  elle  commit  de  nouveaux  dégâts  mais  sans  parvenir 
à  s'emparer  du  poste  ;  en  ce  moment  des  troupes,  entre 
autres  les  gardes  hollandaises  et  hambourgeoises  étant 
survenues  avec  un  détachement  de  dragons,  parvinrent 
à  rétablir  l'ordre  en  conservant  leur  sang-froid  et  arrê- 
tèrent l'émeute  avant  qu'elle  eut  produit  des  conséquences 
trop  fâcheuses. 

Cette  émeute  ne-devait  pas  rester  impunie:  six  des 
coupables,  soldats  dans  les  régiments  hollandais,  furent 


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-   154  — 

condamnés  par  le  conseil  de  guerre  à  recevoir  chacun 
50  coups  de  bâton,  et  après  avoir  subi  leur  peine  furent 
chassés  do  leurs  régiments  comme  des  coquins  fieffés. 
Florence,  lieutenant  dans  les  grenadiers,  KroUe,  sergent 
au  7«  régiment  d'infanterie  .hollandaise,  qui  étaient  de 
garde  à  la  porte d'Altona  du  18  au  19  avril,  furent  punis, 
le  premier  de  quinze  jours  d'arrêts  parce  qu'il  n'avait 
pas  osé  refuser  les  clefs,  le  second  d'un  mois  do  prison 
pour  n'avoir  pas  remis  à  neuf  heures  un  quart  ces  clefs 
au  commandant  de  la  place  et  parce  qu'il  avait  permis 
que  des  sentinelh^s  reçussent  de  l'argent  de  plusieurs 
voyageurs. et  conducteurs  de  voiture  qui  désiraient  ren- 
trer après  la  feï'meture  de  la  porte,  ce  sergent  avait  en 
outre  toléré  la  présence  d'une  femme  dans  le  corps  de 
garde. 

Bleckers,  caporal  de  la  3"  compagnie,  8"  régiment 
d'infanterie  hollandaise,  est  cassé  et  condamné  à  un 
mois  de  prison  parce  que,  se  trouvant  de  patrouille,  il 
n'avait  pas  fait  sortir  d'un  bal  public  des  militaires  qui 
voulaient  obliger  le  maître  de  la  maison  à  leur  livrer 
gratuitement  du  vin.  La  gendarmerie  arrête  un  nommé 
Kuno  qui  a  pris  différents  noms,  ceux  d'Angelbrecht, 
Johann,  Hermann  et  se  disant  capitaine  d'un  navire, 
mais  que  Ton  regarde  comme  espion  au  service  des 
Anglais. 

D'autres  espions,  les  nommés  Corneille,  Minoyer,  Jau- 
bert,lesfemmesKenehle,Sush,  sont  tous  amenés  à  Ham- 
bourgavec  une  autre  femme  nommée  Angelle-MarieSuhs, 
soupçonnée  d'avoir  provoqué  à  la  désertion  un  maréchal 
des  logis  du  23*  régiment  dd  chasseurs  à  cheyal.  Un 
fourrier,   quatre  cuirassiers  du  2*  régiment  hollandais. 


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—  155  — 

Fabry  du  58«  régiment  dMofaoterie  de  ligne,  désertent 
de  Lubeck  ;  trois  hollandais  condamnés,  l'un  à  mort 
pour  désertion,  s'évadent  de  leur  prison.  Une  chaloupe 
se  présente  à  1 1  heures  du  soir  au  poste  du  bivouac 
de  Travemunde,  sans  répondre  au  qui-vive  de  la 
sentinelle,  l'arrivée  d'une  patrouille  et  des  coups  de 
fusils  la  mettent  en  fuite,  sans  que  l'on  ait  pu  reconnaître 
si  l'équipage  était  composé  de  marins  anglais  ou  de 
contrebandiers.  ' 

Pendant  les  mois  d'avril  et  mai  1808,  divers  chan- 
gements de  garnisons  :  la  1^  compagnie  du  5*  bataillon 
du  train  français  se  dirige  sur  Erfurth,  quatre-vingts 
hommes  du  58®,  cent  six  du  59«  d'infanterie  de  ligne, 
un  détachement  des  chevaux  légers  belges,  un  autre 
composé  de  marins  passent  à  Hamt>ourg  et  sont  dirigés 
sur  Lubeck  ou  partent  de  Travemunde,  le  port  de  Lu- 
beck, pour  se  rendre  à  Hambourg. 

Des  mouvements  considérables  se  font  sur  toute 
rétendue  des  territoires  anséatiques,  surtout  à  Altona, 
devenue  le  principal  dépôt  des  soldats  espagnols  que 
l'on  dirige  ensuite  sur  les  champs  de  bataille;  dans  la 
marine  ces  mouvements  sont  aussi  fréquents,  les  navires 
marchands  qui  arrivent  surtout  des  ports  de  Lunebourg, 
Horbourg,  Buetchude,  Thsiwielenfleht,  etc.,  déjouent  à 
force  de  ruse  et  d'audace  la  surveillance  des  Anglais  et 
pénétrent  dans  le  port  de  Hambourg.  Vinchon,  officier 
de  marine,  apprend  à  Dupas  qu'une  frégate  et  une  goé- 
lette ennemies  sont  venues  jeter  leurs  ancres  à  une 
portée  de  fusil  do  notre  batterie  de  Cuxhanen  et  lancer 
des  feux  meurtriers  sur  la  ville.  Les  Français  ayant 
répondu  pendant  une  heure  ou  deux  à  cotte  attaque, 


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—  156  — 

les  Anglais  se  retirèrent  et  prirent  leur  mouillage  dans 
la  baie  d'Ottendorff,  mais  ils  avaient  pu  lancer  plusieurs 
boulets  sur  les  maisons  de  Cuxha\  en  et  sur  notre  bat- 
terie, une  femmQ  fut  tuée,  uik>  autre  blessée  au  milieu 
de  la  ville.  Ces  doux  navires  ont  appareillé  le  lendemain 
en  gagnant  la  haute  mer,. le  rapport  sur  cette  attaque 
est  transmis  au  général  Gérard  le  7  mai  1808. 

L'on  répand  un  brwt  qui  anponco  que  plusieurs  vais- 
seaux anglais  sillonnent  la  Baltique  sans  que  Ton  puisse 
deviner  leur  dessein.  Deux  bateaux  de  Windham  et  de 
Neustadt  qui  étaient  entrés  dans  le  port  de  Lubeck  le 
4  mai  sont  saisis  le  9  par  les  douaniers  de  Hambourg; 
les  Anglais  s'emparèrent  le  même  jour  dans  un  port  de 
la  Norvège  do  dix  bâtiments  danois  qui  étaient  chargés 
de  vivres  pour  cette  dernière  ville,  cette  prise  n'a  pu  se 
faire  qu'à  la  suite  de  la  lâcheté  reprochée  au  comman- 
dant de  la  flotte,  oublieux  de  ses  devoirs. 

Pendant  les  journées  des  17,  18  mai  1808,  diverses 
circonstances  attirent  l'attention  de  Dupas  sur  la  pré- 
sence problématique  d'espions  et  d'embaucheurs  ;  pour 
s'en  assurer  il  envoie  des  gendarmes  et  la  police  secrète, 
tous  déguisés,  à  Hambourg-Berg  où  ils  vont  demander 
un  logement  pour  la  nuit,  mais  à  leur  grande  surprise 
tous  les  aubergistes,  sans  exception,  résidant  dans  cette 
localité  et  dans  les  autres  centres  des  territoires  anséa- 
tiques  où  la  même  mesure  avait  été  prise,  se  refusèrent 
à  les  loger  par  le  motif  que  des  logements  ne  pouvaient 
être  donnés  qu'à  la  suite  d'un  ordre  ou  au  moins  d'un 
consentement  donné  par  la  police.  Ce  refus  paraissait 
prouver  que  l'on  n'avait  pas  à  craindre  en  ce  moment, 
la  présence  d'espions  ou  d'embaucheurs.  Cependant  le 


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—  157  — 

lendemain  19  mai,  le  commandant  de  Lubeck  dut  faire 
arrêter  \in  habitant  du  territoire  anséatiquc,  nommé 
Matheysen,  qui  venait  d'embaucher  et  d'embarquer 
pour  le  compte  des  Anglais  plusieurs  jeunes  gens. 

Cette  arrestation  amena  la  découverte  d'une  cave  si- 
tuée à  Hambourg,  où  ces  hommes  étaient  cachés  jus- 
qu'au moment  de  leur  transport  sur  des  vaisseaux  anglais  ; 
un  nommé  Held»,  dénoncé  par  Matheysen  comme  étant 
le  propriétaire  de  cettecavo  et  le  principal  organisateur 
des  embauchemenls  fut  arrêté. 

Cinq  cuirassiers  hollandais  et  trois  fantassins  de  la 
môme  nationalité,  dont  l'un  venait  d'être  condamné  à  la 
peine  de  mort,  parviennent  à  s'évader  des  prisons  de 
Lubeck.  On  arrçte  un  individu  dans  le  village  de 
Hijs'cldorff,  situé  prés  de  Piuneberg,  qui  ne  possédait 
pas  de  passe-port  ;  remis  entre  les  mains  d'un  cavalier 
de  la  police  pour  être  conduit  aux  autorités  françaises, 
il  fut.  trouvé  quelques  minutes  après  étendu  dans  la  rue 
et  frappé  d'un  coup  de  poignard  ;  il  mourut  sans  avoir 
pu  faire  connaître  le  nom  de  l'assassin.  L'auteur  de  ce 
crime  ne  pouvant  être  que  le  policier  chargé  de  le  con- 
duire, il  fut  aussitôt  enfermé  dans  les  prisons  de  Ham- 
bourg où  il  fut  reconnu  comme  appartenant  au  régiment 
espagnol  de  Catalogne. 

Le  12,  â  neuf  heures  du  soir,  une  dizaine  decanonniers 
hollandais  complètement  ivres,  chantaient  dans  les  rues 
de  Brome  ;  Jansen,  capitaine  au  9«  régiment  d'infanterie 
hollandaise  sortit  de  chez  lui  avec  l'intention  de  les  faire 
rentrer,  mais  ces  canonniers  menacèrent  de  le  frapper 
de  leur  sabre,  au  moment  où  deux  sergents-major  et 
deux  caporaux  d'une  autre  compagnie  vinrent  tirer  trois 


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—  158  - 

coups  de  fusil  sur  ces  agresseurs:  deuxcaDODDiors.rereDt 
blessés,  uQ  troisième  fut  eraprisonué  et  les  autres  dis- 
parurent. 

Dupas,  toujours  soucieux  de  Tordre  public  et  de  la 
discipliae  militaire,  ordonne  qu*à  partir  du  G  mai,  un 
piquet  de  deux  cents  fantassins  et  de  cinquante  cavaliers 
soient  sous  les  armes  le  jour  et  la  nuit;  des  signaux 
seront  faits  au  moyen  des  tambours  et  dos  clairons,  pour 
prévenir  les  désordres  ;  il  organise  plusieurs  postes  de 
correspondance  :  Lubeck,  Bergedorff,  Grande,  Kusdorf, 
Lubeck.  Brème,  Harboui*g,  Fostedt,  Rothembourg, 
Ottesbourg,  Brome,  Hambourg,  Buxtehude,  Stade,  Bas- 
beck,  Ottendorf,  Cuxhaven. 

Il  donne  ensuite  le  commandement  de  la  place  de 
Hambourg  au  colonel  Hamelinaye,  l«f  aide  de  camp  de 
Bornadotte,  en  remplacement  de  Damas,  brigadier  dans 
l'armée  hollandaise,  qui  va  prendre  celui  de  Brème, 
occupé  alors  par  le  colonel  Valet,  qui  reçoit  à  son  tour 
celui  des  côtes  et  de  la  place  de  Travemunde  jusqu'à 
Neustadt. 

Au  dépôt  espagnol  d'Altona,  Ramon  de  Lopez  officier 
dans  le  régiment  de  l'Infante,  se  querelle  avec  un  au- 
bergiste au  sujet  d'une  dame  espagnole  qui  habite  l'hôtel. 

Cet  officier  ayant  voulu  frapper  l'aubergiste,  toute  la 
domesticité  de  l'hôtel  arrive  pour  le  désarmer  ;  la  garde 
danoise  protège  l'hôtelier  et  met  en  prison  l'officier, 
mais  l'autorité  militaire  réclame  la  punition  de  l'auber- 
giste et  des  domestiques.  Pendant  ces  incidents,  le 
marquis  de  la  Romana  commandant. le  dépôt,  fait  partir 
les  quartiers-maîtres,    officiers    payeurs,    officiers    de 


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—  159  — 

santé,  à  Texcoptioa  du  médecin  en  chef  et  d'un  chirur- 
gien-major, pour  qu'ils  rejoignent  leur  corps. 

Le  30  mai,  Dupas  ayant  passé  une  revue  des 
troupes  hollandaises  cantonnées  à  Hambourg,  leur  ex- 
prima sa  satisfaction  au  sujet  de  la  précision  des  manœu- 
vres, de  la  propreté  des  armes  ;  \\  la  manifesta  surtout 
à  Tartillerie  de  la  2«  division  commandée  par  le  capitaine 
Areng,  et  au  2®  régiment  de  cuirassiers. 

Vers  le  milieu  de  juin  1808,  plusieurs  détachements 
hollandais  changent  de  résidence,  les  marins  recrutés 
à  Lubeck,  à  Stettin,  sont  dirigés  sur  Brème,  plusieurs 
déserteurs  ou  cmbaucheurs  sontarrôtés.  Le  1"  bataillon 
du  7e  régiment  d'infanterie,  le  1««*  du  6«  avec  quatre 
pi(ices  d'artillerie  venant  de  Lubeck  arrivent  à  Altona  le 
18,  quinze  hommes  du  6«  traversent  Hambourg  pour  s'y 
rendre  aussi;  dix-huit  autres  en  sortent  pour  accompa- 
gner devant  le  Conseil  de  guerre  de  Lubeck  treize  pri- 
sonniers hollandais. 

Le  14  juin.  Dupas  écrit  que  les  Russes  (sans  doute  des 
volontaires  recrutés  qui  servaient  dans  la  division  hol- 
landaise), viennent  de  partir  pour  la  Hollande. 

Un  détachement  du  3*  régiment  d'infanterie  légère, 
vingt  officiers  et  deux  cents  hommes  arrivant  de  Parme, 
traversent  Hambourg  et  rejoignent  leur  corps,  pendant 
ce  passage  l'un  des  ofBciers  et  vingt-cinq  hommes  en 
sont  détachés  pour  escorter  le  trésor  de  l'armée  du 
prince  de  Ponte-Corvo,  un  caporal  et  quatre  canonniers 
choisis  dans  la  compagnie  de  réserve  sont  chargés  de 
conduire  un  train  d'artillerie  de  Hambourg  à  Rends- 
bourg.  Quelques  cuirassiers  du  2*  régiment  hollandais 
boivent  chez  un  cabaretier  et  le  maltraitent  au  lieu  de 


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~  16Ô  - 

payer  leurs  coQSommatiotis,  Dupas  dôune  des  ordres 
sévères  pour  trouver  les  coupables  et  éviter  le  renouvel- 
lement de  ces  abus.  Pendant  le  mois  de  juin,  trente 
navires  marchands  entrent  dans  le  port  de  Hambourg. 

Le  7  juin,' la  gendarmerie  amène  à  Hambourg  trois 
Espagnols,  deux  Français,  un  allemand  de  la  dernière 
levée  faite  pour  la  marine,  deux  Hollandais  et  un  Prus- 
sien, tous  déserteurs.  Parmi  les  Hollandais,  le  journal 
de  Dupas  cite  l'assassinat  d*un  grenadier  commis  par 
Tun  de  ses  camarades  et  le  suicide  de  deux  autres. 

L'on  arrête  encore  à  Lubeck  un  pêcheur  qui  avait 
passé  toute  la  nuit  en  pleine  mer  pour  donner  sans  doute 
des  renseignements  aux  Anglais  ;  à  Travemunde  un  in- 
dividu nommé  Jambert,  qui  était  accompagné  d'une 
femme,  originaires  de  la  Poméranie  suédoise;  ils  arri- 
vaient de  Nyestadt  et  disaient  avoir  servi  comme  do- 
mestiques le  baron  d'Essen,  général  suédois;  ayant  été 
consignés  entre  les  mains  du  colonel  de  gendarnierie 
Maupoint  ils  sont  conduits  quelques  jours  plus  tard  à 
Stralsund  et  mis  à  la  disposition  du  général  Molitor. 

L'on  arrête  enfin  un  grenadier  hollandais  qui  est  tra- 
duit devant  un  conseil  de  guerre  parce  qu'il  venait  de 
frapper  l'un  de  ses  officiers. 

Le  14  juin,  Dupas  fait  manœuvrer  ses  troupes  en 
commémoration  de  la  victoire  dô  Friedland,  trois  salves 
d'artillerie  sont  tirées  à  la  pointe  du  jour,  à  midi  et  le 
soir;  un  autre  jour  il  passa  en  revue  les  dépôts  français 
et  espagnols,  mais  à  sa  grande  surprise  il  né  trouva 
dans  ce  dernier  dépôt  que  trois  officiers,  cent  hommes  et 
cinq  chevaux,  au  lieu  de  vingt-deux  officiers,  deux  cent 
quatre-vingt-dix-huit  hommes,  sôus-officiers  ou  soldats. 


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-  161  - 

dix-neuf  chevaux  portés  sur  la  colonue  des  hommes  pré- 
sents; après  avoir  manifesté  son  mécontentement  au  géné- 
ral Salcedo,  il  l'invita  à  mettre  tous  les  officiers  absents 
aux  arrêts.  Le  19,  Bernadette  vient  à  Hambourg  et  Altoua 
pour  passer  en  revue  les  troupes  hollandaises,  témoi- 
gnant à  Dupas  toute  sa  satisfaction  pour  la  tenue,  la 
précision  et  renscmble  des  manœuvres,  mais  surtout 
pour  les  feux  et  la  marche  en  bataille  ;  cette  première 
revue  des  Hollandais  est  suivie  d'une  autre,  passée  six 
jours  après  par  Gratien,  lieutenant  général. 

La  présence  de  nos  troupes  n'empêche  pas  l'or  an- 
glais de  semer  la  corruption  dans  les  territoires  anséa- 
tiques,  la  police  secrète  signale  la  présence  de  Camiller 
l'un  des  principaux  embaucheurs  de  l'Angleterre.  Dupas 
charge  le  colonel  Maupoint  de  prévenir  le  général 
Laner,  inspecteur  général  de  gendarmerie  commandant 
la  rive  droite  du  Rhin,  que  Camiller  est  domicilié  dans 
un  petit  village  situé  près  de  Gottingue,  qu'il  faut  l'ar- 
rêter immédiatement  pour  le  conduire  au  quartier  géné- 
ral de  Bernadette,  avec  un  autre  embaucheur,  Jurgens, 
que  l'on  avait  déjà  arrêté.  Dupas  envoie  leurs  dossiers 
au  capitaine-rapporteur  de  la  commission  militaire, 
mais  après  une  instru«îtiou  sévère  Camiller  est  acquitté, 
remis  aussitôt  entre  les  mains  de  la  gendarmerie,  on 
lui  enjoint,  par  mesure  administrative,  de  quitter  le  terri- 
toire de  Hambourg  dans  les  vingt-quatre  heures. 

De  nouvelles  arrestations  sont  faites  parmi  les  embau- 
cheurs que  l'on  croit  découvrir  un  peu  partout.  Meau- 
point  va  à  Altonapourse  saisir  d'un  nommé  Tiemann, 
cabaretier  demeurant  à  Hambourg-Berg,  que  l'on  avait 
surpris  au  moment  où  il  livrait  à  Nitsche.  se  disant  offl- 

iib 


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—  I6â  — 

cier-recruteur  pour  la  marine  suédoise,  trois  cuirassiers 
du  2«  régiment  hollandais;  Tiemann  et  Nitscbe  devaient 
être  conduits  immédiatement  au  quartier  général  de 
Bernadette,  mais  les  autorités  civiles  et  le  commandant 
danois  s'y  étant  opposés,  Dupas  se  contente  de  charger 
le  général  Gérard  d'envoyer  la  procédure  à  Bernadette 
et  d'attendre  sa  décision. 

Altona  était  le  rendez-vous  principal  des  déserteurs  et 
de  tous  les  embaucheurs  ;  cela  était  connu  de  Dupas, 
mais  il  lui  élait  difficile  d'y  remédier,  c'est  en  effet  ce 
qu'il  explique  dans  son  journal  :  «  La  situation  topogra- 
phique d'Altona,  l'insuffisance  des  garnisons  leur  assu- 
rent une  impunité  à  peu  près  complète  ;  quelques  gen- 
darmes attachés  au  service  de  la  police  secrète  pour- 
raient peut-être  les  maintenir  provisoirement,  mais  il 
n'existe  qu'un  moyen  sûr  d'arrêter  immédiatement  et 
pour  toujours  les  désertions  et  les  manœuvres  des  em- 
baucheurs, c'est  de  renvoyer  de  l'intérieur  de  cette  place 
militaire  tous  les  officiers  danois  chargés  des  recru- 
ments  ;  une  fois  partis,  les  désertions,  l'embauchement 
cesseraient  immédiatement,  parce  que  ces  misérables 
ne  recevant  plus  d'argent  se  tiendraient  tranquilles. 

«  Les  officiers  danois  qui  sont  aujourd'hui  chargés  du 
recrutement  sont:  le  major  Buskis,  les  lieutenants 
Nitsche,  Buchholtz  ;  je  viens  de  faire  arrêter  Nitsche.  » 

Le  journal  mentionne  pendant  ce  mois  de  juin  1808 
diverses  mesures  d'ordre  prises  par  Dupas,  de  nouveaux 
cas  de  désertion,  un  départ  des  Espagnols  résidant  à 
Altona. 

Un  infirmier  français  attaché  à  l'hôpital  d'Altona  et 
détenu  depuis  longtemps  à  la  suite  de  ses  habitudes 


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-  163  - 

d'ivrognerie,  un  vagabond  originaire  du  département  de 
Mont-Tonnerre  sont  conduits  dans  leur  département  ; 
un  grenadier  de  Tinfanterie  hollandaise  est  emprisonné 
à  la  suite  de  coups  portés  à  un  officier  ;  le  directeur  des 
douanes,  neuf  lieutenants  et  sept  douaniers  sont  desti- 
tués ;  une  enquête  est  ouverte  pour  découvrir  le  nom  de 
plusieurs  cuirassiers  hollandais  qui  après  avoir  pris  des 
consommations  s'étaient  livrés  à  des  voies  de  faits  contre 
les  cabaretiers. 

Plusieurs  prisonniers  militaires,  détenus  à  la  prison 
de  Zuringer,  à  Brème,  sont  arrêtés  au  moment  de  leur 
évasion  ;  un  nommé  Moritz,  invité  à  faire  une  déposition 
contre  un  nommé  Kuno  convaincu  d'espionnage,  ayant 
refusé  de  parler,  est  condamné  à  la  détention  ;  Kuno  ayant 
été  acquitté,  Moritz  est  réclamé  parle  prêteur  Abendroth 
comme  coupable  d'un  ancien  délit.  Quant  à  Kuno,  il  fut 
sur  l'ordre  de  Dupas  et  par  ratîsure  administrative,  en- 
fermé dans  une  maison  de  force  à  Brème  pendant  toute 
la  durée  de  l'occupation  française. 

Trois  déserteurs  espagnols  sont  conduits  auprès  du 
marquis  de  la  Romana  ;  Gavray,  déserteur  du  6®  régi- 
ment français  de  hussards,  est  dirigé  sur  son  corps  ;  l'on 
arrête  dans  un  cabaret  d'Altona  Ludemann,  déserteur 
de  la  marine  française;  à  Schwarteau,  c'est  un  artilleur 
hollandais  qui  avait  en  outre  commis  des  vols  et  s'était 
procuré  par  adresse  un  chapeau  civil  et  un  passe-port, 
il  est  traduit  devant  un  conseil  de  guerre. 

Nous  finissons  cette  période  en  signalant  quelques 
mouvements  opérés  dans  le  dépôt  espagnol  d'Altona 
où  nous  voyons  le  payeur  général  et  cinq  adjoints,  douze 
officiers,  cent  trente  sous-officiers  ou  soldats  quitter  cette 


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—  164  — 

place  pour  rejoindre  leur  corps  en  escortant  neuf  pri- 
sonniers. Dupas  fait  ensuite  quelques  nominations  :  le 
colonel  Vallet  choisi  le  mois  précédent  pour  commander 
Travemunde  et  la  côte  jusqu'à  Neustadt  est  appelé  à 
Lubeck,  Jouvancourt  remplace  Bochaton  comme  com- 
mandant de  la  même  place  et  ce  dernier  est  rappelé  au- 
près de  Dupas  pour  reprendre  ses  fonctions  d'aide  de 
camp. 

Le  commandant  de  la  marine  envoie  à  son  tour  à 
Dupas  ses  rapports  du  mois  de  juin  sur  les  ports. 

Deux  détachements  de  marins  français  venant  de  Lu- 
beck et  de  Stettin  arrivent  à  Hambourg  ;  un  autre  de 
cent  seize  marins  en  sort  pour  aller  à  Brème,  au  nombre 
desquels  Ton  en  choisit  cinq  pour  conduire  trente  barils 
de  poudre  à  Cuxhaven;  c'est  de  cette  dernière  ville 
que  l'on  signale  la  présence  de  grands  vaisseaux  sur  la 
mer,  quatre-vingts  voiles  sont  reconnues  mais  elles  dis- 
paraissent. Un  nouveau  convoi  de  soixante-six  matelots 
se  dirige  de  Brème  sur  Wesel. 

Quarante  navires  entrent  pendant  ce  mois  dans  le 
port  de  Hambourg,  un  seul  arrive  à  Travemunde  ;  seize 
marins  français  viennent  de  Lubeck  à  Hambourg,  deux 
nouveaux  détachements  arrivent  en  même  temps  de 
Stralsund  et  de  Stettin  et  sont  mis  aussitôt  à  la  dispo- 
sition du  commandant  de  marine  siégeant  à  Hambourg; 
soixante-trois  marins  appartenant  à  la  dernière  levée 
concentrée  à  Hambourg  sont  dirigés  sur  Wesel,  cin- 
quante-trois matelots  partent  pour  Brème,  et  soixante- 
trois  le  quittent  pour  aller  à  Wesel. 

Au  milieu  de  ce  mouvement  des  marins,  les  Hollan- 
dais qui  occupaient  la  rive  gauche  du  Weser  arrêtèrent 


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—  165  — 

et  saisirent  cinq  bâtiments  dont  les  feuilles  de  route, 
signées  par  l'autorité  de  leur  pays  d'origine  et  par  le 
commandant  des  douanes  impériales,  indiquaient  un 
chargement  composé  uniquement  de  pois  et  avoines; 
les  ayant  visités  ils  découvrirent  cachés  sous  ces  der- 
nières marchandises  plusieurs  tonneaux  remplis  de 
sucre  et  de  café. 

De  leur  côté  les  douaniers  avaient  saisi  peu  de  temps 
auparavant  d'autres  denrées  coloniales  qu'ils  conduisi- 
rent à  Cologne  dans  un  convoi  de  vingt-cinq  voitures. 

Nous  sommes  en  Juillet.  Nous  verrons  l'application  du 
blocus  continental,  nous  assisterons  à  la  continuation 
des  fraudes  commises  par  les  contrebimdiei's,  à  colle 
des  arrestations,  désertions,  punitions,  espionnages 
au  service  des  hôpitaux,  au  mouvement  du  port  de 
Hambourg,  à  l'entrevue  d'Erfurth,  etc. 

Soixante-dix  voitures,  escortées  par  les  douaniers, 
conduisent  de  Brème  à  Cologne  les  denrées  coloniales 
saisies  les  jours  précédenis;  quarante-deux  barils  de 
poudre  pesant  onze  à  douze  cents  livres  sont  saisis  dans 
une  prairie  à  Altona,  mais  on  les  rend  à  leur  proprié- 
taire aussitôt  qu'il  en  eût  justifié  la  provenance.  —  Do 
Montcabrié,  capitaine -commandant  la  marine  fran- 
çaise, envoie  son  rapport  habituel  à  Dupas  et  lui  apprend 
qu'une  yole  danoise  a  capturé  un  navire  hollandais 
chargé  de  s.ucre,  café,  quinquina,  que  l'on  conduit  à 
Gluckstadt  (1),  que  plusieurs  navires  hollandais  entrent 
à  chaque  instant  dans  le  port  de  l'île  d'Holgoland  (2), 


(1)  Gluckstadt,  ville  danoise,  Holstein,  sur  TElbe. 

(2)  Helgoland  prise  aux   Danois  par   les  Anglais  en  1807,  et 
cédée  définitivement  en  1814,  par  le  traité  de  Kiel. 


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—  166  — 

pour  charger  et  expédier  des  marchaDdises  anglaises. 
Il  achève  ce  rapport  en  le  prévenant  que  les  deux  cha- 
loupes offertes  par  le  Sénat  de  Hambourg  ont  été  ar- 
mées avec  quatre  canons  n«  12,  le  plus  gros  calibre 
trouvé  dans  l'arsenal. 

Cent  nouveaux  transports  do  denrées  coloniales  sai- 
sies partent  de  Brème  les  29  juin,  l«s  6,9,  13  juillet, 
pour  Cologne  ;  une  embarcation  montée  par  sept  contre- 
bandiers est  arrêtée  et  conduite  à  Brème. 

Cette  constante  surveillance  de  la  contrebande  était 
le  résultat  de  la  guerre  économique,  la  plus  dangereuse 
de  toutes —  pour  la  France  comme  pour  l'Angleterre,  — 
qui  était  elle-même  la  conséquence  du  blocus  continental. 
Par  un  décret  daté  do  Berlin,  du  20  novembre  1806, 
Napoléon  avait  répondu  à  la  déclaration  du  pabinet  bri- 
tannique, du  16  mai  précédent,  qui  mettait  en  état  de 
blocus  les  côtes  de  France,  en  déclarant  les  îles  britan- 
niques en  état  de  blocus. 

Cette  pensée  gigantesque  n'était  possible  qu'avec 
l'appui  et  la  bonne  volonté  de  tout  le  continent.  Elle 
eût  anéanti  l'Angleterre,  si  nos  alliés  eussent  observé  les 
traités  qui  leur  étaient  imposés  par  Napoléon.  Pour  at- 
ténuer les  funestes  effets  do  cette  guerre  à  outrance  sur 
le  terrain  économique,  le  3  mai  1808,  le  chef  d'état- 
major  général  Gérard,  prévenait  Dupas  et  de  Montca- 
brié  commandant  de  marine,  que  l'interdiction  de  la  na- 
vigation sur  l'Elbe  et  le  Weser  ne  devait  pas  s'étendre 
aux  bâtiments  des  puissances  alliées  (1). 

Toujours  vigilant,  Dupas  maintenait  l'ordre  avec  le 

(1)  Journal  du  6  mai  1808. 


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—  167  — 

plus  grand  soin  :  son  journal  fait  mention  dans  le  mois 
de  mai  de  quelques  espions,  de  vagabonds,  d'un  caba- 
retier  détenteur  d'uniformes  qui  avaient  appartenu  à 
quelques  déserteurs  hollandais;  plusieurs  contrebandiers 
sont  arrêtés. 

Parmi  les  autres  arrestations  l'on  remarque  celle  du 
secrétaire  du  théâtre  de  Brème,  d'un  libraire,  d'un  im- 
primeur soupçonné  d'avoir  publié  un  pamphlet  contre 
l'armée  hollandaise  ;  on  les  relâcha  sur  caution  quelques 
jours  après.  Deux  boulangers  appartenant  au  môme 
corps  sont  condamnés  à  six  mois  de  prison  pour  fraudes 
commises  sur  le  poids  des  pains  qu'ils  avaient  fournis. 

L'on  enferme  dans  les  prisons  de  Hambourg  :  Gravois, 
déserteur  du  23«  régiment  de  chasseurs  à  cheval  et 
condamné  à  sept  ans  de  travaux  publics,  Jacquin,  des 
chevaux  légers  belges  condamné  à  deux  ans  de  boulet, 
Benoit,  canonnier  au  3«  régiment  d'artillerie  légère  et 
Ramet,  chasseur  au  19«  régiment  d'infanterie  légère, 
accusés  de  s'être  mis  en  route  avec  de  faux  papiers. 
Quarante-huit  hollandais  sont  envoyés  de  Lubeck  dans 
les  prisons  d'Altona,  vingt-neuf  d'entre  eux  ont  déjà 
passé  en  jugement  ;  à  Hambourg  neuf  prisonniers  hol- 
landais condamnés  à  mort  font  une  tentative  d'évasion, 
une  sentinelle  parvient  à  les  maintenir  en  usant  d'une 
grande  fermeté  à  leur  égard  ;  quatre  soldais  de  la  même 
nationalité  ayant  été  acquittés  par  le  Conseil  de  guerre, 
sont  remis  le  16  mai  entre  les  mains  des  autorites  da- 
noises. Plusieurs  déserteurs  arrivent:  deux  du  102^  ré- 
giment de  ligne  condamnés  l'un  à  quatre  ans  de  boulet 
l'autre  à  deux  ans  de  fer  sont  conduits  dans  leur  prison, 
ainsi  que  six  cuirassiers,  dix-neuf  fantassins,  cinq  chas- 


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—  168  — 

seurs  à  cheval,  appartenant  au  3®  régiment  de  chasseurs 
et  à  l'infanterie  du  Grand  Duc  de  Berg.  Les  six  cuiras- 
siers avaient  été  livrés  par  le  roi  de  Danemark. 

Le  15  juillet  1808,  toutes  les  troupes  hollandaises  qui 
se  trouvent  à  Hambourg  et  à  Altona  sont  convoquées  sur 
la  place  du  Saint-Esprit  pour  assister  à  Texécution  de 
la  sentence  de  mort  prononcée  contre  un  brigadier  du 
2«  régiment  de  cuirassiers,  déserteur,  et  à  celle  de  trois 
embaucheurs  arrêtés  le  22  juin  ;  la  commission  militaire 
condamne  alors  trois  nouveaux  embaucheurs  à  la  peine 
de  mort,  ils  sont  exécutés  en  présence  des  troupes  hol- 
landaises. Un  déserteur  hollandais  est  arrêté  et  conduit 
à  Altona,  Benoit,  du  101  «  de  ligne,  Kein,  du  27®  chasseurs 
à  cheval,  condamnés  :  Tun  à  quatre  ans  de  boulet,  l'autre 
à  deux  ans,  partent  pour  leur  destination.  L'on  arrête 
à  Lubeck  deux  déserteurs'  français  qui  sont  reconduits  à 
leur  corps,  à  Stralsund,  un  autre  déserteur  du  départe- 
ment de  la  Lys  (chef-lieu  Bruges),  et  deux  autres  mate- 
lots accusés  du  même  délit  sont  emprisonnés.  Six  soldats 
du  6e  de  ligne  résidant  à  Lubeck  désertent  à  leur  tour, 
mais  sans  avoir  été  repris. 

Plusieurs  autres  déserteurs  appartenant  aux  23«  ré- 
giment de  chasseurs  à  cheval,  1"'  régiment  d'infanterie 
du  Grand  Duc  de  Berg  sont  arrêtés  et  dirigés  sur  leur 
régiment,  un  autre  déserteur,  venant  de  la  légion 
allemande  qui  est  au  service  anglais,  est  envoyé  au  dépôt 
des  soldats  français. 

Le  8  juillet,  l'on  avait  aussi  arrêté  Andréas  Frankes 
et  son  domestique  qui  venaient  d'arriver  à  Travemunde, 
venant  de  Suède  ;  après  avoir  été  consignés  entre  les 
mains  de  Meaupoint,  colonel  de  gendarmerie,  le  pre- 


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—  169  — 

mier  fut  relâché  sous  caution  et  le  second  envoyé  au 
général  de  division  Molitor. 

Des  déserteurs  condamnés  à  mort  et  enfermés  dans 
les  cachots  de  Hambourg  creusèrent  un  souterrain 
communiquant  avec  une  cour  extérieure,  mais  le  courage 
et  la  fermeté  d'une  sentinelle  les  empêcha  de  s'évader. 
Jencke,  brigadier  dans  le  2«  régiment  de  cuirassiers  hol- 
landais, accusé  de  désertion,  est  fusillé  en  présence  des 
troupes  hollandaises  résidant  à  Altona  et  Hambourg. 
Cette  sévérité  des  conseils  de  guerre  atteignait  même 
les  civils,  c'est  ainsi  que  trois  habitants  de  Hambourg 
furent  fusillés  en  présence  de  toutes  les  troupes,  parce 
qu'ils  avaient  été  convaincus  d'avoir  fait  des  embauche- 
ments. 

Un  nommé  Barel  avait  été  arrêté  à  Hambourg,  et 
conduit  à  Arras  au  dépôt  des  prisonniers  anglais,  mais 
il  déserta;  il  était  accusé  de  se  livrer  à  l'embauchage  de 
nos  soldats  pour  le  compte  de  l'Angleterre.  Jurgens,  au- 
tre embaucheur,  est  conduit  au  quartier  général  de  Berna- 
dette pour  être  mis  entre  les  mains  du  général  Gérard, 
chef  de  l'état-major  général,  ramené  le  25  juin  à  Ham- 
bourg, il  fut  acquitté  et  mis  en  liberté,  mais  ayant  été 
repris  comme  vagabond  il  fut  amené  à  Lubeck,  son  der- 
nier domicile,  où  ayant  été  reconnu  comme  appartenant 
à  la  nationalité  hongroise  on  le  fit  partir  pour  ce  pays. 

Les  espions  à  leur  tour  étaient  surveillés  et  traduits 
en  grand  nombre  devant  nos  conseils  de  guerre.  Dupas 
fait  arrêter  Demay,  irlandais,  Schimper,  allemand, 
Heynes,  écossais,  demeurant  à  Altona:  ces  trois 
arrestations  sont  faites  sur  les  indications  de  Bour- 
rienne,    ministre  de  France  à  Hambourg,  qui,  on   le 


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—  170  — 

sait,  était  chargé  de  la  police  politique  dans  ce  terri- 
toire, avec  cette  circonstance  raisonnée  de  la  part  de 
Bourrienne  pour  l'arrestation  de  Heynes,  qu'il  le  déclare 
gendre  d'un  colonel  hanovrien.  Bourrienne  les  accusait 
d'avoir  reçu  comme  espions  anglais,  un  salaire  de  6  fr. 
par  jour. 

Heynes  était  en  outre  soupçonné  d'avoir  contribué  à 
encourager  les  embaucheurs  ennemis,  sous  le  nom  de 
Carie  Meyuer,  domicilié  à  Altona,  à  recruter  nos  soldats 
et  des  habitants;  c'est  ainsi  que  l'on  crut  qu'il  avait 
décidé  le  cuirassier  Peter  à  enrôler  ;  ce  dernier  en  effet 
agissant  do  ruse  accepta,  il  abandonna  son  uniforme, 
se  laissa  déguiser,  toucha  une  bonne  prime,  puis  trouva 
le  moyen  dose  sauver  et  de  rentrer  dans  son  quartier 
où  il  vint  dénoncer  son  embaucheur  ;  cependant  Demay, 
Schimper,  Heynes  ayant  été  traduits  devant  le  conseil 
do  guerre  de  Hambourg,  tous  furent  acquittés. 

L'organisation  de  l'espionnage  par  les  Anglais  était 
formidable  et  son  action  incessante  :  le  30  juin  l'on  si- 
gnale à  Dupas  l'arrivée  de  Smithson,  seigneur  anglais 
qui  vient  de  descendre  accompagné  de  plusieurs  domes- 
tiques à  l'auberge  du  «  roi  d'Angleterre  »;  la  police 
inquiète  s'en  empare,  elle  fait  reconduire  dans  le 
Pas-deCalais  l'un  de  ces  derniers,  originaire  de  ce 
département,  les  autres  et  parmi  eux  Smithson  qui  vient 
offrir  un  cautionnement  ne  sont  relâchés  que  le  8  août. 

Dans  ce  mois  do  juillet  nous  remarquons  que  la  même 
surveillance  s'exerce  à  Travemunde  sur  tous  les  étran- 
gers :  Frank  arrivant  avec  son  domestique  de  la  Suéde 
est  arrêté  à  Travemunde  au  moment  de  son  débarque- 
ment et  n'est  remis  en  liberté  par  Meaupoint,  colonel 


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—  171  — 

de  gendarmerie,  qu'au  moment  où  un  bourgeois  de  Ham- 
bourg arriva  pour  lui  servir  de  caution  ;  cette  arrestation 
n'était  ni  un  fait  isolé,  ni  un  fait  spécial  aux  étrangers, 
les  villes  anséatiques  étant  en  état  de  siège,  cette  mesure 
pouvait  atteindre  tout  le  monde  sans  exception  ;  anciens 
français,  peuples  conquis,  tous  y  étaient  soumis.  Aussi 
voyons-nous  eu  ce  moment  qu'un  ancien  français,  absent 
depuis  plus  de  vingt  ans,  c'est-à-dire  depuis  au  moins  1 788, 
négociant  établi  à  Stokholm  et  arrivant  à  Hambourg 
fut  arrêté  comme  déserteur. 

Dès  le  l^raoût  1808,  le  monde  officiel  se  prépare  à 
célébrer  la  fête  do  l'Empereur.  La  municipalité  d' Altona 
passe  une  convention  avec  un  peintre  décorateur  pour 
orner  l'Hôtel  de  Ville,  mais  s'étant  ravisé,  cet  artiste 
refusa  de  tenir  son  engagement  ;  il  fut  arrêté  et  conduit 
sans  autre  forme  de  procès  dans  les  prisons  de  Ham- 
bourg ! 

Dupas  inspecte  les  troupes  hollandaises  de  Hambourg 
et  d'Altona,  la  fête  du  15  août  est  célébrée  dans  toutes 
les  villes  anséatiques. 

A  Hambourg  outre  les  salves  d'artillerie  et  les  ma- 
nœuvres exécutées  par  toutes  les  troupes  réunies  des 
garnisons  d'Hambourg  et  d'Altona,  il  y  a  messe  et 
Te  Deum  chantés  en  musique  auxquels  assistent  les 
autorités  de  ces  deux  villes  et  une  députation  de  Lubeck 
et  Brème. 

Un  grand  dîner  est  offert  par  le  général  Dupas,  suivi 
d'un  très  beau  feu  d'artifice  lancé  au  milieu  d'une  nappe 
d'eau  formée  par  l'Aster.  Un  brillant  bal  et  un  très 
beau  souper  ont  lieu  ensuite  dans  le  palais  de  S.  A.  S. 
le  prince  de  Ponte-Corvo. 


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—  172  — 

Hambourg  et  Altona  ont  des  illuminations  générales 
et  spontanées,  une  population  immense  réunie  sur  lf*s 
bords  de  TAlster,  pousse  avec  enthousiasme  les  cris  de 
Vive  l'Empereur,  Vive  Napoléon,  dit  le  journal. 

Le  26  août  Dupas  ayant  remarqué  qu'il  existait  beau- 
coup d'infirmités  parmi  les  soldats  du  8«  d'infanterie  de 
ligne  hollandais  qui  se  trouvait  au  dépôt  d'Altona,  or- 
donna que  tous  les  hommes  qui  ne  seraient  pas  capables 
de  faire  une  campagne  fussent  dirigés  immédiatement 
sur  Brème,  jusqu'à  nouvel  ordre. 

Quatre  jours  après.  Dupas  faisait  partir  pour  Flolbeck 
une  compagnie  des  grenadiers  du  7«  régiment  do  ligne, 
quatorze  cuirassiers  du  2«  pour  la  garde  du  quartier  gé- 
néral de  Bernadette,  qui  ne  rentrèrent  dans  leur  corps 
que  le  14  septembre. 

Parmi  les  troupes  espagnoles  nous  voyons  dans  le 
môme  journal  que  quarante-deux  soldats  arrivent  des 
divers  territoires  occupés  par  les  Français,  les  cavaliers 
de  Pinneberg,  de  Lubeck  et  Flolbeck  se  rendent  au  dépôt 
espagnol  d'Altona,  commandé  par  le  brigadier  d'Hcrmo- 
zilla  ;  les  deux  compagnies  de  grenadiers  des  régiments 
dcZamora,  de  la  Princesse,  un  détachement  de  Roi-cava- 
lerie quittent  Altona  et  vont  à  Hambourg,  mais  dés  le 
20  septembre  l'on  procède  au  désiirmoment  de  tous 
les  Espagnols  :  à  Hambourg,  Rendsbourg  et  Altona,  et 
toutes  leurs  armes  sont  déposées  dans  les  magasins. 
Daraith,  capitaine  au  régiment  de  l'Infante-cavalerie,  re- 
çoit aussitôt  Tordre  de  se  présenter  deux  fois  chaque 
jour  chez  le  commandant  de  la  place  de  Hambourg  ; 
Guererzo,  capitaine  d'artillerie,  est  remis  entre  les  matins 
de  la  gendarmerie  de  Rendsbourg  pour   être  conduit  à 


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—  173  — 

Hambourg.  Le  journal  de  Dupas  ne  s'explique  pas  sur 
ces  mesures  disciplinaires. 

Arrestations.  —  Pendant  août  et  septembre  quelques 
arrestations  se  font  à  Hambourg  :  un  domestique  accusé 
de  nombreux  vols  commis  à  Berlin,  Picard  de  la  Car- 
rière, officier  d'ordonnance  dans  l'armée  hollandaise,  ne 
faisant  que  des  dettes,  sont  conduits  le  premier  à  Berlin, 
le  second  dans  son  département  d'origine;  Dupuis,  arti- 
ficier, est  arrêté  sur  la  demande  de  l'un  des  aides  de 
camp  de  Bernadette;  Klapprand,  un  eut  repreneur  de  bals 
publics,  qui  recevait  des  soldats  dans  son  établissement 
le  soir  après  neuf  heures,  est  condamné  à  quinze  jours  de 
prison  ;  un  fabricant  de  voitures  est  arrêté  au  moment 
où  il  insultait  le  général  du  génie  Larouski. 

Parmi  les  déserteurs,  l'on  arrête  un  soldat  du  8«  régi- 
ment de  ligne  hollandais,  un  conscrit  du  département  de 
la  Lys  et  deux  matelots- que  l'on  conduit  à  Altona;  six 
autres  déserteurs  du  6«  régiment  d'infanterie  de  ligne  à 
Lubeck  sont  ramenés  à  leur  corps  par  quelques  soldats 
meckleubourgeois. 

Six  nouvelles  désertions  sont  constatées  dans  le 
7e  régiment  de  ligne  et  dans  le  train,  deux  parmi  les 
Français  des  94»  de  ligne  et  3®  d'infanterie  légère;  l'un 
de  ces  derniers  ayant  été  repris,  fut  condamné  à  douze 
ans  de  boulet.  Neuf  autres  pré  venus  sont  envoyés  à  Altona 
devant  le  conseil  de  guerre  de  la  division  hollandaise. 

La  police  opère  un  grand  nombre  d'arrestations  au 
milieu  desquelles  on  remarque  celle  du  ministre  espagnol 
résidant  à  Hambourg  qui  est  arrêté  le  4  septembre  et 
gardé  à  vue  sans  que  le  journal  Dupas  en  indique  le 
motif. 


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-  174  ^ 

Dans  la  marine  nous  voyons  que  trente-six  bâtiments 
entrent  dans  le  port  de  Hambourg,  qu'il  en  sort  quatre 
partant  pour  Travemunde  et  Lubeck  ;  le  23  août  une 
chaloupe  conduite  par  le  capitaine  Jaspar  Riegol  et  douze 
matelots,  partis  le  dix  novembre  de  Tannée  précédente 
sur  le  Gertrvde  Helena  avec  un  chargement  pour  Riga, 
entre  à  Hambourg.  Ce  capitaine  rapporte  que  le  Ger- 
trude  ayant  été  pris  ainsi  que  l'équipage  par  une  frégate 
anglaise,  ils  étaient  parvenus  après  dix  mois  de  capti- 
vité à  se  sauver  dans  une  chaloupe  qu'ils  avaient  achetée, 
avec  sept  matelots  mecklembourgeois  également  prison- 
niers des  Anglais. 

Le  8  septembre  au  matin,  plusieurs  Anglais  débar- 
quent à  Burhave  à  l'occasion  d'une  foire  que  l'on  y 
tient,  le  Bailli  les  engage  à  ne  pas  commettre  de  dé- 
sordres, les  menaçant  de  faire  sonner  le  tocsin  s'ils  ne 
consentent  pas  à  s'éloigner  ;  au  lieu  d'obéir  ces  matelots 
se  répandent  dans  les  maisons  les  plus  rapprochées  du 
port  pour  les  piller,  de  retour  sur  leur  bâtiment  ils  lan- 
cent de  leur  bateau  une  bombe  sur  la  première  maison 
qu'ils  incendient. 

Huit  jours  après,  les  Anglais  rencontrent  des  bâti- 
ments français  qu'ils  attaquent  de  nouveau  avec  des 
forces  bien  supérieures,  des  coups  de  canon  sont  enten- 
dus depuis  Travemunde  dans  la  direction  du  nord.  Déjà 
l'avant-veille  de  Montcabrié,  capitaine  de  vaisseau,  avait 
annoncé  à  Dupas  qu'une  chaloupe-canonnière  anglaise 
avait  mouillé  vis-à-vis  la  batterie  de  Carlstads,  que  deux 
péniches  transportant  soixante  hommes  étaient  arrivées 
assez  près  pour  tenter  un  débarquement.  Nous  avions 
heureusement  sept  marins  et  trois  douaniers  pour  dé- 


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—  175  — 

fendre  cette  batterie  :  ils  laissèrent  nos  Anglais  s'appro- 
cher jusqu'au  quart  de  la  portée  de  nos  canons  ;  en  ce 
moment  Tennemi  s'efforce  de  gagner  la  côte,  mais  il  en 
est  bientôt  refoulé  par  notre  mitraille. 

Remontés  sur  la  chaloupe  canonnière,  les  Anglais 
tirent  cinquante  coups  de  vingt-quatre  sur  notre  batterie 
qui  riposte  à  son  tour  avec  une  adresse  et  une  habileté 
telles  qu'elle  les  oblige  à  couper  leurs  cables  et  à 
s'éloigner,  après  avoir  reçu  une  quantité  de  boulets  dans 
leur  flottaison  et  dans  leur  voilure.  Le  lendemain  une 
nouvelle  canonnière  tente  de  s'approcher  de  la  batterie, 
mais  s'apercevant  do  l'entrain  de  nos  marins  et  douaniers, 
elle  s'en  éloigne,  sans  avoir  pu  protéger  le  départ  d'une 
galliote  qui  cherchait,  la  nuit  venue,  à  sortir  du  Weser 
avec  un  chargement  de  marchandises  saisies. 

Le  21,  un  grand  nombre  de  vaisseaux  anglais  sont 
signalés  en  vue  de  Fnxierwart  sur  les  rives  du 
Weser  ;  attaqués  avec  trop  de  légèreté  ils  s'éloignent 
sans  avoir  subi  de  pertes,  mais  pour  revenir  une  heure 
plus  tard  ;  nos  feux  sont  alors  si  bien  dirigés  que  les 
Anglais  se  retirent  quelques  heures  après,  avec  plusieurs 
marins  tués  ou  blessés  (1). 

Nous  arrivons  à  la  dernière  période  du  commandement 
des  territoires  anséatiques  exercé  par  Dupas,  c'est-à-dire 
depuis  le  16  août  jusqu'au  24  octobre  1808. 

Dans  l'administration,  Dupas  continue  à  reprocher  au 
directeur  de  l'hôpital  d'Altona  la  mauvaise  qualité  de 
la  nourriture  qui  est  livrée  aux  malades,  il  donne  des 
ordres  sévères  pour  que  ces  abus  cessent  aussitôt  ;  mais 

(1)  Journal  de  1807  à  1809,  p.  110. 


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-  176  - 

sa  surveillance  ne  parvient  pas  à  empêcher  les  fraudes, 
c'est  ainsi  qu'il  apprend  que  pendant  le  mois  de  septem- 
bre toutes  les  rations  de  vin,  pain,  bouillon,  ont  été 
insuffisantes  et  d'une  qualité  médiocre  ;  il  les  signale  et 
parvient  au  moyen  d'une  sévérité  sans  exemple  à  les 
suspendre  de  nouveau  pendant  quelque  temps. 

Il  fait  arrêter  plusieurs  vagabonds,  une  ordonnance  du 
deuxième  régiment  hollandais  qui  cherchait  une  querelle 
à  un  civil  ;  il  passe  en  revue  le  7  et  le  13  août  les  garni- 
sons hollandaises  d'Hambourg  et  trois  cents  recrues 
venant  de  la  Hollande  pour  compléter  le  6«et  le  7«  régi- 
ment d'infanterie.  Notons  le  changement  du  chef  do 
bataillon  Bochaton  d'Evîan,  qui  remet  le  8  septembre  son 
commandement  de  la  place  de  Cuxhaven  à  un  capitaine 
qui  ne  commandait  que  les  troupes  de  terre  ;  la  célébra- 
tion de  la  fête  de  Louis-Napoléon,  roi  de  Hollande,  par 
toutes  les  troupes  hollandaises:  à  Hambourgquatresalves 
d'artillerie  furent  tirées  la  veille  au  soir,  le  matin  à  midi 
et  le  soir  de  la  fête  ;  les  Hollandais  exécutent  des  manœu- 
vres à  Hambourg  et  à  Altona.  Les  officiers  généraux  et 
supérieurs,  les  officiers  hollandais  se  réunissent  dans 
un  banquet  de  deux  cents  couverts  à  Altona,  chez 
M.  Rain ville,  où  toutes  les  autorités  militaires  et  civiles 
de  Hambourg  et  d'Altona  assistent  ;  un  premier  toast 
est  porté  au  roi  do  Hollande,  l'autre  à  l'Empereur. 

Pendant  cette  fête,  Dupas  s'occupe  d'une  nouvelle 
organisation  de  la  Commission  militaire  siégeant  à 
Hambourg,  où  sont  appelés  :  Meaupoint,  colonel  de  gen- 
darmerie comme  président  ;  Carron,  Lebrun,  Mecflet  au 
titre  de  capitaines  ;  Saviare,  Demommerot,  en  leur  qua- 
lité de  lieutenants  et  Alaingy  sous-lieutenant. 


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-  177  - 

Pendant  le  mois  de  septembre  trente-trois  bateaux 
entrent  dans  le  port  de  Hambourg,  cinquante-cinq  ma- 
rins appartenant  à  une  nouvelle  levée  arrivent  do 
Dantzig  ;  des  marins  françiiis  escortent  un  convoi  de 
poudres  destintk^s  à  être  transportées  sur  un  vaisseau  de 
l'Etat  ;  un  troisième  détachement  de  quatre-vingt-dix 
marins  novices  est  conduit  à  Wesel  par  un  officier  et 
vingt-cinq  hommes  du  9«  régiment  hollandais.  Le  journal 
de  Dupas  mentionne  la  présence  d'une  frégate  anglaise 
en  vue  de  Nervork  et  à  doux  lieues  des  côtes  de  Trave- 
munde;  un  brick  suivi  d'une  canonnière  arrivent  le  8, 
pour  la  relever  ;  ils  restent  à  l'embouchure  de  l'Elbe 
jusqu'au  22  septembre,  après  avoir  capturé  un  bâtiment 
hollandais  qui  arrivait  d'Emden  avec  un  chargement  de 
charbons  de  terre,  pour  le  compte  de  Graëmer  de  Ham- 
bourg. 

Une  nouvelle  frégate  et  quai re  autres  petits  bâtiments 
sont  signalés  à  une  distance  do  deux  lieues  de  Blexum. 

Deux  chaloupes  sortent  du  port  de  Travemunde  pour 
aller  prendre  un  chargement  de  bois  à  iNeust*\dt,  après 
avoir  reçu  leur  permis,  signé  par  le  Sénat  de  Lubeck  et 
le  colonel  Mario  ;  le  poste  maritime  de  la  station  du 
Weser  s'empare  dans  la  nuit  du  4  au  5  d'un  bateau 
chargé  de  marchandises  anglaises  qui  avait  été  aban- 
donné par  son  équipage,  —  un  autre  ayant  élé  saisi  sur 
la  rive  gauche  du  Weser,  tous  deux  sont  amenés  dans 
le  port  de  Brème. 

Le  mois  suivant  Dupas  signale  dans  son  journal  les 
événements  qui  se  passent  dans  la  marine  pendant  les 
derniers  jours  de  son  commandement  :  quatorze  bâti- 
ments venant  de  Hambourg,    Ritzbuttel,    Lunebourg, 

iSb 


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-  178  — 

Rnxtehudo,  etc.,  eutreot  avec  leur  chargement  dans  le 
port  de  Hambourg,  un  autre  bateau  va  à  Travemunde, 
étant  tous  munis  de  leur  passe,  signée  par  le  SénaL 

De  Montcabrié  prévient  Dupas  que  le  canot  de  vedette 
appartenant  à  la  station  du  Weser  s*est  emparé  d'un 
bâtiment  chargé  de  café,  sucre,  bois  de  campêche,  et 
d'un  second  qui  a  été  pris  le  2  octobre  sur  le  Weser,  à 
son  entrée  dans  le  port  de  Brème. 

Pendant  la  nuit  du  1®"^  au  2  octobre,  deux  chaloupes 
canonnières  anglaises  portant  le  pavillon  français  se 
sont  présentées  devant  le  poste  de  Travemunde  où  elles 
prirent  leur  position  et  tirèrent  un  nombre  considérable 
de  boulets  ou  mitraille  sur  les  maisons  ;  Tun  d'eux  péné- 
tra dans  la  maison  du  lieutenant  Cartier  commandant  le 
poste. 

De  son  côté  le  général  Van  Hasseld  prévient  Dupas 
que  les  Anglais  étaient  venus  de  nuit  plusieurs  fois 
devant  Federward,  mais  leurs  embarcations  ayant  tou- 
jours été  contrariées  dans  leur  marche  par  les  vents,  ils 
ne  purent  jamais  descendre  à  terre  ;  un  autre  bâtiment 
sortit  du  Weser  en  se  plaçant  à  l'entrée  du  port  de 
Federward,  où  les  feux  do  notre  batterie  l'obligèrent 
bientôt  à  longer  les  côtes  sur  lesquelles  il  vint  échouer 
à  une  lieue  du  port. 

Dans  la  nuit  du  13  au  14,  de  nouveaux  bâtiments 
anglais  s'approchèrent  de  Lange- Warde  pour  protéger 
l'entrée  de  marchandises  prohibées,  mais  une  sentinelle 
donna  l'éveil  et  reçut  deux  balles  dans  son  schako;  les 
Anglais  se  retirèrent  aussitôt  après  l'arrivée  des  ren- 
forts français. 

Dans  le  mois  de  septembre  1808 quatorze  cent  soixante- 


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—  179  — 

onze  soldats,  douze  cent  trente-huit  chevaux  partent  de 
Hambourg  pour  le  Hanovre,  Wesel,  Berg,  Mayence; 
dans  la  marche  sur  Wesel,  les  grenadiers  de  l'ancienne 
garde  du  Prince  s'adonnent  à  Tivresse  en  insultant  les 
officiers  et  sous-offlciers  ;  les  autres  troupes  ayant  chargé 
leurs  armes  et  menacé  de  tirer  sur  eux,  les  grenadiers 
se  calment  un  peu  et  sont  conduits  malgré  leurs  cris  et 
protestations  sur  les  bords  de  TElbe  ou  ou  les  embarque 
aussitôt. 

21  prisonniers  de  guerre  s'évadent,  mais  4  d'entre 
eux  sont  repris,  un  cinquième  rentre  do  sa  propre 
volonté,  un  autre  est  pris  à  Blexam.  LD  sergent  et  1rs 
sentinelles  chargées  de  surveiller  ce  poste  sont 
condamnés  aux  fers. 

A  la  fin  d'août  toutes  les  troupes  espagnoles  à  Ham- 
boui'g,  Rendsliourg,  Altona  avaient  été  désarmées.  Dupas 
avait  eu  des  raisons  puissantes  pour  provoquer  une  telle 
mesure  ;  nous  voyons  en  elTet  dans  son  journal  qu'à  la 
suite  d'une  enquête  dirigée  par  le  colonel  Devaux,  on 
avait  appris  que  tous  les  couteliers  d'Hambourg  avaient 
reçu  des  commandes  de  poignards  destinés  à  être  remis 
entre  les  mains  des  Espagnols  habitant  les  territoires 
anséatiques  ;  plusieurs  soldats  de  cette  nation  avaient 
remis  pour  faciliter  ces  commandes  des  lames  de  sabre  ; 
les  poignards  avaient  une  longueur  de  huit  à  dix  pouces, 
à  forme  déchirante. 

Malgré  les  recherches  faites  par  la  police,  les  auteurs 
de  ces  commandes  ne  furent  jamais  découverts. 

Le  journal  du  Gouverneur  nous  apprend  que  six  mille 
deux  cent  quatorze  Espagnols  sont  détenus  à  Hambourg 
comme  prisonniers  de  guerre,  qu'ils  arrivent  de  Rends- 


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—  180  — 

bourg  (1),  d'Aldembourg,  et  seront  dirigés  sur  Wesel  ; 
que  pendant  le  mois  d'octobre  il  existe  un  passage  con- 
tinuel de  prisonniers  espagnols,  qu'entre  autres  dix-neuf 
cent  seize  d'entre  eux  sont  arrivés  à  Hambourg  venant 
de  Seeland  (2);  qu'un  autre  convoi  de  prisonniers  espa- 
gnols s'élevant  à  deux  mille  quatre-vingt-quatorze  hom- 
mes viennent  d'être  dirigés  sur  Wesel. 

Ces  derniers  étaient  enfermés  en  partie  dans  la  caserne 
du  Hambourger-Berg  ;  vingt  et  un  d'entre  eux  s'étant 
évadés,  Dupas  fait  passer  devant  un  conseil  de  guerre 
le  sergent  du  poste  et  la  sentinelle  qui  était  de  faction. 

A  côté  de  ces  prisonniers,  Dupas  nous  parle  de  l'arri- 
vée à  Hambourg  de  plusieurs  détachements  et  chevaux 
appartenant  aux  corps  espagnols,  qu'il  fait  partir  pour 
le  Hanovre  et  diverses  provinces  prussiennes;  nous 
voyons  encore  que  plus  de  six  mille  soldats  espagnols 
se  trouvent  à  Hambourg.  D'un  côté  sept  à  huit  mille 
prisonniers  de  guerre  espagnols,  de  l'autre  plus  de  six 
mille  soldats  espagnols  combattant  sous  nos  drapeaux. 

Cette  apparente  contradiction  s'explique  aisément. 
Depuis  que  Napoléon  avait  détrôné  Charles  V  de  Bour- 
bon pour  placer  son  frère  Joseph  Bonaparte  sur  le  trône 
d'Espagne,  l'Espagne  était  en  pleine  insurrection.  Les 
prisonniers  espagnols  de  Hambourg  étaient  les  Carlistes 
pris  en  Espagne  par  nos  troupes  ;  ceux  des  Espagnols 
qui  servaient  le  roi  Joseph  formaient  le  contingent  espa- 
gnol de  Hambourg. 

n  nous  reste  à  parler  de  quelques  faits  concernant  le 

(l)Rendsbourg,  île  de  TEyder,  Holstein.  — -  Aldembourg,  ville 
d'Allemagne. 

(2)  Seeland  est  la  plus  grande  île  Danoise,  à  Textrémité  S.  E. 
de  la  Suède. 


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—  181  — 

commandement  de  Dupas,  dans  les  territoires  anséati- 
ques,  où  son  désintéressement,  son  intégrité  ne  laissèrent 
qu'un  souvenir  de  reconnaissance.  Dans  ce  commande- 
ment, il  lui  était  facile  do  suivre  l'exemple  donné  par 
beaucoup  d'officiers  généraux  en  s'enrichissant  de  dé- 
pouilles. Mais  tel  n'était  pas  Dupas,  malgré  les  accusa- 
tions odieuses  et  mensongères  portées  par  Bourrienne, 
que  nous  détruirons  dans  le  chapitre  suivant. 

Dans  le  mois  d'octobre,  le  colonel  Meaupoint,  com- 
mandant la  gendarmerie  dans  les  territoires  anséatiques, 
est  remplacé  par  Dagallier,  chef  d'escadron;  Devaux, 
lieutenant-colonel,  est  chargé  de  la  police  à  Hambourg- 
Berg  sous  la  dépendance  du  colonel  Hamelinaye,  com- 
mandant la  place  de  Hambourg  ;  deux  matelots  améri- 
cains soupçonnés  de  faire  des  enrôlements  pour  le 
compte  des  Anglais  sont  arrêtés  et  mis  entre  les  mains 
de  Bergeret,  capitaine  de  vaisseau,  qui  doit  les  consigner 
au  Consulat  d'Amérique. 

Dupas  ordonne  au  commandant  de  Lubeck  de  moltre 
à  la  disposition  du  roi  de  Danemarck  seize  canons  qui 
lui  seront  livrés  par  un  officier  danois  accompagné  de 
quatre  soldats  passant  à  Kiel. 

Le  3  octobre  à  10  heures  du  soir,  un  factionnaire  du 
poste  établi  à  Burhaven  entend  des  coups  de  fusil,  un 
officier  part  avec  six  hommes  dans  la  direction  de  ce 
bruit,  un  éclaireur  revient  sur  ses  pas  et  signale  la 
réunion  de  plusieurs  hommes  armés  qui  se  tiennent  en 
dehors  d'une  petite  maison,  à  la  hauteur  de  Burhaven 
et  sur  la  digue  ;  le  chef  du  peloton  ayant  fait  inutile- 
ment des  sommations,  des  coups  de  fusil  sont  tirés  au 
milieu  de  l'obscurité  :   un  homme  est  blessé,  quelques- . 


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—  182  — 

uns  s'enfuient,  d'autres  entrent  et  s'enferment  dans  la 
maison. 

De  nouvelles  sommations  n'ayant  été  accueillies  que 
par  des  insultes,  des  coups  de  fusil  sont  tirés,  l'un  des 
hôtes  est  blessé,  quelques-uns  parviennent  à  fuir,  d'au- 
tres se  barricadent;  notre  patrouille  arrive  aux  fenêtres, 
enfonce  les  portes,  fait  eu  vain  de  nouvelles  sommations  ; 
elle  s'empare  de  trois  paysans,  dont  deux  sont  blessés, 
pour  les  remettre  entre  les  mains  du  Bailli  de  Burhaven. 

A  la  suite  des  recherches  faites  pour  découvrir  les  au- 
teurs du  désordre,  l'on  arrête  trente  individus  qui  sont 
emprisonnés  à  Brème. 

Le  13  octobre,  Bernadette  vient  à  Hambourg  et  à 
Altonapour  l'inspection  des  troupes;  le  24,  Dupas  reçoit 
l'ordre  de  quitter  son  commandement  des  territoires 
anséatiques  et  de  se  diriger  sur  le  Danemark  avec  la 
2^  division  du  corps  d'armée  de  Bernadette  ;  cette  divi- 
sion se  met  en  marche  du  23  au  29,  et  arrive  dans  ses 
cantonnements,  savoir:  le  quartier  général  de  Dupas  à 
Itzehoë  avec  celui  de  son  brigadier  Veaux,  celui  de 
Gency  est  placé  à  Hendsbourg. 

Gency  a  sous  ses  ordres  le  5*  régiment  d'infanterie 
légère,  et  le  19«  de  ligne  ;  Veaux  a  le  14«  de  ligne  et  le 
23«  régiment  de  chasseurs  à  cheval. 

Toute  l'artillerie  est  à  Elmshorn,  à  l'exception  de 
deux  pièces  placées  à  Rendsbourg. 


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—  183  — 


CHAPITRE  X 

QUARTIERS  D'HIVER  EN  DANEMARK 
Octobre  1808.  -  AvrU  1809 

Itzehoë.  —  Lubeck.  —  Sévère  discipline  maintenue  par  Dupas.— 
La  division  Dupas  (2®  du  9^  corps)  est  dirigée  sur  Hanovre.  — 
Témoignages  de  gratitude  adressés  à  Dupas  par  les  Sénats 
de  Hambourg  et  de  Lubeck.  —  Les  Mémoires  de  Bourrienne  . — 
Examen  des  attaques  de  Bourrienne  contre  la  conduite  de  Du- 
pas. —  Dupas  justifié  par  les  lettres  inédites  de  Napoléon  ^^  — 
Dupas  est  comblé  d'honneurs  et  de  faveurs,  il  est  nommé 
Comte  de  l'Empire. 

Dès  son  arrivée  à  Itzehoë  le  29  octobre  1808,  Dupas 
contiuua  à  maintenir,  avec  la  sévérité  que  nous  lui 
connaissons,  la  plus  exacte  discipline  dans  les  troupes 
sous  ses  ordres.  Quelques  désordres  qui  s'étaient  pro- 
duits pendant  la  marche  de  la  division  furent  rigoureu- 
sement réprimés. 

Vingt  hommes  du  19®  régiment  d'infanterie  de  ligne, 
ne  pouvant  plus  supporter  les  fatigues  d'une  campagne, 
sont  renvoyés  en  France,  Tétat-major  et  la  5°  compagnie 
du  13'  régiment  de  chasseurs  à  cheval  prennent  leur 
cantonnement  dans  les  baillages  de  Steinhort,  Schwar- 
trenbeck  et  dans  quelques  villages  de  Lanembourg. 

Le  9  novembre  un  voltigeur  du  3«  bataillon,  19«  régi- 


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—  184  — 

ment  de  ligne,  cantonné  à  Rendsbourg  était  rentré  dans 
un  état  d'ivresse;  ayant  cherché  querelle  au  propriétaire 
de  son  logement,  la  garde  danoise  vint  le  prendre  en  lui 
donnant  des  coups  do  crosse,  mais  un  grenadier  du 
même  bataillon  qui  logeait  dans  une  maison  voisine 
voulut  empêcher  les  Danois  de  se  livrer  à  ces  voies  de 
fait  ;  Tofflcier  commandant  cette  garde  croyant  que  ce 
dernier  voulait  délivrer  son  compatriote  lui  fit  donner 
de  tels  coups  sur  la  tête  qu'on  dut  le  faire  recevoir 
immédiatement  à  Thôpital. 

Deux  autres  soldats  du  19^  de  ligne  insultent  le  Bailli 
en  maltraitant  leur  propriétaire.  Un  voltigeur  amène 
l'un  de  ses  amis  chez  sou  logeur  pour  partager  son 
repas,  puis  tous  deux  mettent  le  logeur  à  la  porte  en  le 
battant.  Un  grenadier  et  deux  fusiliers  sont  invités  à  ne 
pas  faire  de  tapage  par  un  officier  de  la  police  civile,  ils 
lui  répondent  en  l'attaquant  et  en  le  frappant  à  la  tête 
d'un  coup  de  pointe. 

Les  désordres  de  ce  genre  étaient  fréquents,  mais  ils 
ne  restaient  jamais  impunis;  ces  perturbateurs  de  l'ordre 
public  furent  en  effet  mis  au  cachot  ou  en  prison  pendant 
huit  ou  quinze  jours  suivant  la  gravité  de  leur  délit.  Trois 
artilleurs  brisent  des  vitres  dansune  maison  particulière, 
un  tambour  menace  de  porter  un  coup  de  sabre;  les  pre- 
miers furent  condamnés  à  quinze  jours  de  prison,  le 
dernier  à  deux  mois  de  cachot  avec  la  défense  de  porter 
dorénavant  son  sabre,  tant  que  la  division  restera  à 
Lubeck. 

Pendant  les  derniers  mois  de  1808,  le  Conseil  de 
guerre  ne  prononce  qu'un  jugement  contre  un  nommé 
François  Martin,  fusilier  au  19-  régiment  d'infanterie  de 


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—  185  — 

ligne;  jugé  par  contumaco  pour  fait  de  désertion  avec 
armes  et  bagages,  il  est  condamné  à  mort  et  à  1 .500  fr. 
d'amende. 

Au  milieu  de  novembre  les  troupes  de  Dupas  conti- 
nuant leur  marche  arrivèrent  dans  leurs  nouveaux  can- 
tonnements :  Dupas  a  son  quartier  généial  à  Lubeck  le 
19  novembre,  œlui  de  Gency  est  à  Hambourg,  celui  de 
Veaux  à  Ratzbourg. 

Dupas  établit  ses  postes  de  correspondance  : 

De  Lubeck  à  Hambourg,  par  Leben  et  Kalckbaun. 

De  Lubeck  à  Ratzbourg,  parGrossarau. 

De  Lubeck  à  Segeberg,  par  Niendorf. 

Bertrand,  chef  de  bataillon  au  19«  régiment  de  ligne, 
est  nommé  commandant  delà  place  deTravomunde;  un 
violent  incendie  éclate  à  Segeberg  qui  aurait  détruit  la 
ville  sans  le  secours  apporté  par  les  troupes  françaises. 
Un  navire  est  signalé  à  trois  lieues  de  Travemunde  et  ce 
ne  fut  que  deux  jours  après  que  les  douaniers  allèrent  le 
reconnaître;  appartenant  au  port  do  Brème  il  fut  autorisé 
à  continuer  sa  route  après  la  vérification  de  ses  mar- 
chandises. 

Pendant  les  deux  premiers  mois  de  1809,  Dupas  fait 
arrêter  les  vagabonds,  ainsi  que  les  conscrits  westpha- 
liens  de  passage  à  Lubeck  ;  les  premiers  sont  ramenés 
dans  leur  pays  d'origine,  les  autres  sont  refoulés  en 
dehors  du  territoire  occupé  par  Tarmée  ;  onze  soldats 
sont  arrêtés  par  suite  de  leur  conduite  à  l'égard  des 
propriétaires  de  logement,  de  leurs  désordres  ou  pour 
des  motifs  d'ivresse,  indiscipline,  insubordination,  vaga- 
bondage, révoltes  contre  la  gendarmerie,  dégâts  dans  les 
maisons  particulières. 


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—  186  — 

Un  conseil  de  guerre  spécial  condamne  un  fusilier  du 
19«  régiment  de  ligne  à  onze  ans  de  boulet  et  à  une 
amende  de  1.500  francs  pour  cause  de  deux  désertions 
successives  ;  le  2'  Conseil  de  guerre  acquitte  un  conduc- 
teur d'artillerie  accusé  de  vols,  mais  on  le  renvoie  devant 
un  autre  conseil  de  guerre  comme  déserteur. 

Pradel,  sous-inspecteur  aux  revues,  inspecte  le  19«  ré- 
giment d'infanterie  de  ligne,  Tartillerie,  le  24^  régiment 
de  chasseurs  à  cheval. 

Suivant  les  intentions  de  Bernadette,  Dupas  fait  par- 
tir d'Oldeslohe,  rétat-major  du  13' régiment  de  chasseurs 
à  cheval  qui  vient  à  Lubeck  avec  la  5®  compagnie  arri- 
vant de  Sogeberg.  La  compagnie  d'élite  du  13®  chasseurs 
qui  est  à  Segeberg  va  au  faubourg  St-Georges,  près 
Hambourg,  la  4«  compagnie,  une  de  voltigeurs  du 
5*  régiment  d'infanterie  légère  partent  de  Hambourg  et 
vont  en  Westphalie,  à  Hamm  et  Horn. 

L'état-major  des  chasseurs  à  cheval,  la  5«  compagnie 
arrivent  le  21  janvier  à  Lubeck,  la  compagnie  d'élite  de 
chasseurs,  le  3«  escadron  du  13«  régiment  prennent  leurs 
cantonnements  dans  le  baillage  de  Schwartronbeck  et 
dans  les  villages  de  Lanembourg  qui  sont  situés  sur  la 
rive  gauche  de  la  Bille.  Le  5*»  régiment  d'infanterie  lé- 
gère, contrarié  par  le  mauvais  état  des  routes,  ne  peut 
arriver  que  le  15  à  sa  destination. 

Pendant  ce  mois,  la  gendarmerie  arrête  trois  chasseurs 
du  24®  régiment  de  chasseurs  à  cheval  pour  tapage  et 
mauvais  traitements  exercés  vis-à-vis  des  propriétaires 
de  logement;  sept  autres  soldats  du  19«  régiment  d'in- 
fanterie de  ligne  sont  emprisonnés  pour  les  mêmes  faits 
ou  pour  motif  d'ivrognerie,  d'insubordination;  dans  ces 


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—  187  — 

dernières  arrestations  Ton  trouve  un  soldat  qui  portait 
un  pistolet  chargé. 

Le  31,  Vernet,  sous-lieutenant,  Mabrie,  sergent  de 
grenadiers  et  deux  caporaux  du  19"  régiment  de  ligne 
n'ayant  pas  su  prévenir  une  violente  querelle  qui  s'éleva 
dans  un  poste  qu'ils  commandaient,  furent  condamnés  : 
Vernet  à  huit  jours  d'arrêts  forcés,  Mabrie  à  quinze 
jours  de  cachot,  les  caporaux  à  huit  jours.  Un  chasseur 
du  5«  régiment  d'infanterie  légère,  atteint  de  nostalgie, 
se  suicide. 

Dans  le  courant  du  mois  de  février  Dupas  envoie  une 
brigade  de  gendarmerie  à  Schomborg,  une  seconde  à 
Travemunde,  deux  cent  dix-huit  officiers  ou  soldats  du 
train  pavssent  à  Lubeck,  un  convoi  de  cent  milliera  de 
poudres  venant  de  Stralsund  passe  la  Trave  pour  être 
remis  entre  les  m  lins  des  officiers  danois,  à  Kurau  ;  le 
conseil  permanent  de  guerre  part  pour  Hambourg  où  il 
se  met  à  la  disposition  du  général  Gérard,  chef  de 
l'état-major  général  ;  Lemaire,  sergent  au  19«  régiment 
d'infanterie  légère  est  tué  en  duel. 

Vingt  soldats  appartenant  aux  divers  régiments  de  la 
deuxième  division  sont  mis  aux  arrêts  pour  cause 
d'ivresse  et  injures  adressées  aux  propriétaires  des  loge- 
ments militaires;  deux  sergents  du5«  régiment  d'infan- 
terie légère  le  sont  pour  avoir  jeté  à  la  porte  un  cabaretier 
qui  refusait  de  leur  donner  de  nouvelles  consommations  ; 
Guénard,  sous-lieutenant,  pour  une  cause  immorale. 

Parmi  les  autres  condamnés  nous  voyons  un  grenadier 
du  19®  régiment  d'infanterie  de  ligne  subissant  un  em- 
prisonnement d'un  mois;  on  le  conduit  pendant  les  trois 
premiers  jours  de  sa  prison,  à  la  parade,  pour  entendre 


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—  188  — 

la  lecture  publique  de  Tarticle  11,  sectioQ  4,  titre  l^^  de 
la  loi  du  19  octobre  1791  sur  riusubordioation  ;  deux 
chasseurs  sont  puais  d'uu  emprisonnement  de  quinze 
jours  pour  avoir  manqué  d'égards  à  un  officier  et  avoir 
sorti  un  cheval  sans  autorisation. 

Dupas  fait  transporter  le  poste  de  correspondance  de 
Syck,  route  de  Hambourg  à  Lubeck,  à  Floisch-Gaffel  et 
celui  d'Ost-Steinbeck,  route  de  Hambourg,  à  Ratzbourg 
et  à  Glinde.  Quatre-vingt-quatre  conscrits  du  5®  régi- 
ment d'infanterie  légère  désertent  de  leur  corps. 

Vers  le  milieu  de  mars  1809,  le  corps  d'armée  de 
Bernadette  (9®  corps  de  l'armée  d'Allemagne)  fut  mis  en 
mouvement.  La  division  Dupas  (2«  du  9«  corps),  quitta 
Lubeck  le  18  mars  et  se  dirigea  sur  Hanovre,  où  elle 
arriva  le  25. 

Le  journal  de  la  division  signale  jusqu'à  la  fin  du  mois 
plusieurs  arrestations  et  diverses  condamnations  :  Qua- 
tre chasseurs  du  13®  régiment  de  chasseurs  à  cheval 
sortis  sans  autorisation,  trois  conscrits  westphaliens 
accusés  de  vols,  un  grenadier  et  un  voltigeur  du  19»  régi- 
ment d'infanterie  de  ligne,  un  boulanger  sont  arrêtés  ; 
diverses  punitions  variant  entre  quinze  et  quatre  jours 
de  prison  frappent  un  soldat  de  la  compagnie  d'élite 
du  13«  régiment  de  chasseurs  à  cheval  pour  avoir,  en 
état  d'ivresse,  brisé  la  vaisselle  de  son  logement,  un 
douanier  pour  cause  d'inconduite,  un  fusilier  du  19®  régi- 
ment d'infanterie  de  ligne  pour  tapage,  un  chasseur  de 
la  compagnie  d'élite  du  13'  régiment  de  chasseurs  à 
cheval  qui  avait  frappé  un  paysan,  deux  soldats  du 
19e  régiment  d'infanterie  de  ligne  pour  mauvaise  conduite. 

Dix  chasseurs  du  5'  régiment  d'infanterie  légère  man- 


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—  189  — 

quent  à  l'appel  depuis  le  17  mars,  quatre  d'entre  eux 
ont  emporté  leurs  armes  et  bagages.  Ou  saisit  une  voi- 
ture de  luxe  qui  renfermait  quelques  marchandises  an- 
glaises ;  l'embargo  est  levé  sur  quelques  navires  du  port 
de  Lubeck,  transportant  en  Russie  des  marchandises 
françaises. 

Le  séjour  do  Dupas  dans  les  villes  anséatiques,  tant  à 
Hambourg  qu'à  Lubeck,  avait  été  de  17  mois.  Il  avait 
eu  la  main  rude  dans  l'accomplissement  de  la  mission  de 
gouverneur  qui  lui  était  confiée  ;  mais  il  avait  été  juste, 
et  avait  mis  tous  ses  soins  à  maintenir  la  plus  exacte 
discipline  parmi  ses  troupes.  II  avait  usé,  avec  la  plus 
rigoureuse  probité,  des  pouvoirs  étendus  dont  il  était 
investi. 

Aussi  lorsqu'il  quitta  Hambourg  en  octobre  1808,  le 
Sénat  de  cette  ville  libre  lui  exprima-t-il  sa  gratitude 
par  la  lettre  suivante  : 

«  Hambourg,  26  octobre  1808. 

A  son  Excellence  le  Général  de  Division  Dupas, 
«  Le  Sénat  m'a  chargé  de  prier  V.  E.  d'agréer  la  petite 
provision  de  vins  ci-jointe,  savoir  : 
N'^s     1  à    4,  800  bouteilles  Margaux. 


No» 

5  à 

6, 

200 

» 

» 

NOB 

7  à 

8, 

100 

» 

Madère. 

No» 

9 

50 

» 

Malaga. 

No» 

10 

50 

» 

Champagne. 

No. 

11  à. 

12, 

200 

» 

Rhum. 

No. 

13  à 

14, 

200 

» 

Chambertia. 

«  Le  Sénat  se  flatte  que  V.  E.  nous  continuera  dans 
l'absence  même  sa  bienveillante  protection  ;  en  vous  re- 


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merciaot  de  nouveau  de  tout  ce  que  vous  avez  bien 
voulu  faire  pour  nous  soulager  pendant  votre  séjour  ici. 

e  Sénat  m'a  chargé  de  vous  renouveler  les  assurances 

e  sa  reconnaissance,  etc. 

Le  Sénateur^  Barhls.  » 

Les  mêmes  sentiments  furent  exprimés  par  le  Sénat 
e  Lubeck  à  Dupas,  où  il  resta  depuis  le  19  novembre 
808  jusqu'au  18  mars  1809: 

«  Monsieur  le  Comte, 

«  Ayant  appris  par  le  Sénateur  Coht  que  V.  E.  se  dis- 
ose  à  quitter  cette  ville  pour  suivre  l'appel  glorieux  de 
.  M.  I.  R.  aux  fonctions  honorables  qu'elle  lui  a  confiées 
illeurs,  nous  ne  faisons  que  remplir  un  devoir  très 
gréable,  en  offrant  à  V.  E.  l'hommage  sincère  de  la 
lus  vive  reconnaissance,  pourtant  démarques  inestima- 
les  de  bienveillance  et  de  bonté,  dont  elle  a  daigné 
ous  honorer. 

«  Le  souvenir  des  bienfaits  que  pendant  son  premier 
èjour  dans  cette  ville  (1)  V.  E.  avait  laissé  dans  notre 
lémoire  y  restera  ineffaçable,  depuis  qu'elle  a  continué 
e  soulager  nos  concitoyens  sous  tous  les  rapports  qui 
épendaient  d'elle,  surtout  en  maintenant  la  plus  grande 
iscipline  militaire  dans  la  ville  et  son  territoire.  V.  E. 
aignora  accueillir  favorablement  le  témoignage  de 
iotre  reconnaissance,  ainsi  que  les  vœux  ardents  que 
lous  formons  pour  sa  prospérité  perpétuelle,  dont  M.  le 
lénateur  Coht  est  chargé  d'être  l'interprètç  auprès  de 
ï,  E. 

(1)  Nous  avons  vu  en  effet  que  Dupas  avait  son  quartier  général 
Lubeck,  le  8  sept.  1807. 


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—  191  — 

4(  Veuillez,  Monsieur  le  Comte,  nous  vous  en  prions, 
garder  ces  dispositions  bienveillantes,  pour  nous  et  nos 
concitoyens,  dont  nous  avons  eu  lieu  de  nous  féliciter 
jusqu'ici,  etc. 

Pour  les  Bourgmestres  et  membres  du  Sénat  de  Lubeck  : 
Tesdorf,  Bourgmestre  et  Président. 

Ecrit  sous  le  sceau  de  cette  ville ^  ce  il  mars  i809.  » 

Nous  avons  dit,  en  analysant  le  journal  de  Dupas,  que 
M.  de  Bourrienne  était  alors  chargé  d'affaires  de  France 
à  Hambourg.  Bourrienne  a  publié  sous  la  Restauration 
des  Mémoires  dont  certains  passages  sont  des  moins 
flatteurs  pour  Dupas.  A  Fen  croire,  notre  compatriote 
aurait  laissé  les  plus  détestables  souvenirs  dans  les  villes 
anséatiques.  Il  importe  de  tirer  au  clair  les  histoires  de 
M.  de  Bourrienne  qui  traînent  partout  depuis  1820  ; 
citons  d'abord  le  passage  des  Mémoires  de  Bourrienne 
qui  concerne  Dupas  : 

€  Le  départ  de  Bernadette  me  devint  bien  plus  sensi- 
ble quand  je  fus  à  même  d'établir  la  comparaison  avec 
son  successeur.  Il  m'est  pénible  de  raconter  les  détails 
de  la  conduite  indigne  de  ceux  qui  compromettaient  le 
nom  français  dans  la  malheureuse  Allemagne. 

4c  Le  général  Dupas  vint  à  Hambourg,  mais  seulement 
sous  les  ordres  de  Bernsidotte  qui  conservait  le  haut 
commandement.  L'empereuren  désignant  Dupas  trompa 
cruellement  les  vœux  et  les  espérances  des  malheureux 
habitants  de  la  Basse-Saxe. 

«Ce  général  fatal  aux  Hambourgeois  disait  d'eux: 
tant  que  je  verrai  ces  b....  là  rouler  carrosse,  je  pourrai 
leur  demander  de  l'argent.  » 


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—  192  — 

«  Comme  général  de  division,  il  avait  vingt  friedericks 
par  jour  pour  ses  frais  de  table,  les  maréchaux  en  avaient 
trente. 

4c  Dupas  voulut  être  traité  sur  le  morne  pied  que  ces 
derniers,  le  Sénat  ayant  refusé,  Dupas  pour  se  venger, 
exigea  chaque  jour  un  déjeûner  et  un  dîner  de  trente 
couverts  ;  Dupas  coûta  plus  à  la  ville  qu'aucun  de  ses 
prédécesseurs. 

4c  Ses  dépenses  se  montèrent  pour  21  semaines  qu'il 
resta  à  Hambourg  à  18.300  francs.  On  ne  buvait  à  sa 
table  que  des  vins  fins,  à  la  cuisine  ses  agents  avaient 
du  Champagne,  etc.  A  la  suite  de  la  résistance  du  Sénat, 
Dupas  exerça  des  vexations;  c'est  ainsi  qu'à  Hambourg 
où  l'on  ne  fermait  les  portes  les  dimanches  que  trois 
quarts  d'heure  après  la  nuit  close,  Dupas  se  mit  dans  la 
tête  de  les  fermer  à  sept  heures  (1).  Les  habitants  s'étant 
dirigés  vers  la  porte  d'AItona  à  l'ancienne  heure  trou- 
vèrent la  porte  fermée  ;  bientôt  une  foule  considérable 
de  promeneurs  qui  rentraient  danâ  la  ville  vient  prier 
inutilement  le  chef  do  poste  pour  qu'on  leur  ouvre. 

«  On  se  détermina  enfin  à  envoyer  prendre  les  clefs 
chez  le  commandant  qui  arriva  accompagné  du  général. 

€  Leur  arrivée  fut  saluée  en  signe  de  réjouiss;\nco 
par  un  hourra  général.  Dupas  se  figura  que  ces  cris 
étaient  le  signal  d'une  sédition  .et,  au  lieu  défaire  ouvrir 
les  grilles,  il  ordonna  de  faire  feu.  Il  y  eut  plusieurs 
tués  ou  blessés.  Après  cette  première  décharge,  la  plate 
fureur  de  Dupas  se  calma  un  peu,  il  ne  donna  pas  un 

(1)  Pendant  Tété,  depuis  le  l**"  juin  elles  restaient  ouvertes  le 
matin,  de  quatre  heui*es,  jusqu*au  soir  à  dix  heures.  Journal  de 
Dupas,  l*''juin. 


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—  m  — 

cours  plus  long  à  sa  brutalité.  Gepeudant  il  persista  a 
ne  pas  faire  ouvrir  les  portes. 

«  Le  lendemain  il  fit  afficher  un  arrelô  pour  défendre 
de  crier  hourra,  menaçant  de  punir  sévèrement  ceux  qui 
le  crieraient,  etc. 

«  Aussi  Dupas  était-il  exécré,  un  officier  me  raconta 
qu'ayant  sur  les  ordres  de  Dupas  placé  deux  canons,  il 
alla  lui  en  rendre  compte,  il  le  trouva  en  fureur,  cassant 
tout,  brisant  tout:  il  cassa  plus  de  deux  douzaines  d'as- 
siettes. 

€  Lorsque  Bernadette  revint  à  Hambourg,  il  envoya 
Dupas  à  Lubeck  ;  là  Dupas  se  cabrait  à  la  moindre  idée 
de  recevoir  de  l'argent,  mais  ses  dépenses  devinrent  si 
exagérées  que  Lubeck  ne  pouvait  plus  y  suffire.  Le  Sé- 
nat députa  vers  Tintègre  et  incorruptible  Dupas.  M. 
Notting,  qui  le  pria  de  permettre  que,  par  une  sorte 
d'abonnement,  il  reçut  chaque  jour  vingt  louis  pour  sa 
table  seulement.  A  cette  proposition  le  général  Dupas 
se  mit  en  fureur.  Il  chassa  le  Sénateur  et  donna  l'ordre 
à  son  aide-de-camp  Barrai  de  le  mettre  en  prison. 

«  Malgré  son  désintéressement,  le  général  Dupas  se 
radoucit  au  point  d'accepter  les  vingt  louis  par  jour 
pour  sa  table,  mais  ce  ne  fut  pas  sans  grommeler,  et  il 
s'écria  plus  d'une  fois  :  ces  b là  m'ont  taillé  les  mor- 
ceaux. 

«  Lubeck  ne  fut  délivré  de  Dupas  qu'au  mois  de  mars 
1809,  lorsqu'il  futappelé  à  commander  une  division  dans 
la  campagne  d'Autriche.  » 

Ce  qu'il  y  a  de  piquant  dans  ces  extraits  de  Bourrienne, 
pour  nous  qui  connaissons  aujourd'hui  les  noms  de  tous 
les  pillards  des  villes  anséa tiques,  c'est  que  Bourrienne 

iSb 


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—  194  — 

lui-même  fut  le  plus  effronté  cte  ces  pillards,  en  compa- 
gnie de  Talleyrand,  le  plus  corrompu  des  hommes,  du 
prince  Bernadette  et,  nous  avons  le  regret  de  le  dire,  dos 
maréchaux  Brune  et  Mortier,  et  beaucoup  d'autres,  au 
nombre  desquels  ne  se  trouve  pas  Dupas. 

La  biographie  de  Bourrienne,  sous  la  signature  de 
Michaud  jeune,  dans  le  supplément  de  la  Biographie 
Universelle,  fournit  les  renseignements  qui  suivent  sur 
la  moralité  du  personnage: 

«  En  1802,  Bonaparte  renvoya  à  Hambourg  avec  le 
titre  de  chargé  d'affaires  de  France  près  le  Cercle  do 
Basse-Saxe.  Sa  mission,  d'après  les  instructions  que  lui 
donna  le  Ministre  de  la  police,  fut  surtout  d'observer  les 
démarches  et  les  rapports  secrets  des  agents  royalistes 
et  ceux  des  différents  cabinets  du  continent  avec  l'Angle- 
terre. Plus  tard  il  dut  y  suivre  les  funestes  conséquences 
de  ce  que  Napoléon  appelait  son  système*  continental, 
c'est-à-dire  arrêter  et  saisir  toutes  les  marchandises, 
tous  les  capitaux  que  l'on  pouvait  soupçonner  venir  des 
Anglais,  afin  d'anéantir  ainsi  toute  espèce  de  commerce 
maritime.  C'était,  il  faut  en  convenir,  une  terrible  mis- 
sion dans  une  ville  qui  n'a  d'existence  que  par  ses  rela- 
tions et  son  commerce  avec  l'Angleterre.  Mais  si  l'on  en 
croit  Bourrienne,  il  a,  comme  tout  faiseur  de  mémoires, 
déclaré  que  dans  dételles  circonstances,  nul  no  fut  plus 
juste,  plus  modéré,  plus  désintéressé  que  lui  ;  il  a  posi- 
tivement affirmé  qu'il  sauva  plus  d'un  royaliste,  et  que 
tous  les  habitants  de  cette  contrée  lui  durent  des  remer- 
ciements pour  les  avoir  préservés  des  exactions  et  du 
pillage  de  beaucoup  de  généraux  et  d'une  foule  d'agents 
français  qui  faisaient  peser  sur  toute  FAllemagne  le 
joug  cruel  de  la  conquête. 


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-  195  - 

4c  L'opinion  publique  ne  jugea  point  alors  aussi  favo- 
rablement les  actions  do  Bourrienne  ;  et  celui  qui  devait 
le  mieux  connaître  ses  penchants  et  ses  habitudes,  Tami 
de  son  enfance  (1),  averti  par  des  plaintes  multipliées  et 
par  TEmpereur  Alexandre  lui-môme,  prit  le  parti  d'en- 
voyer à  Hambourg  un  homme  do  confiance  charge 
d'examiner  les  faits.  Il  résulte  du  rapport  de  ce  commis- 
saire (Augier  de  la  Sauzaye),  que  l'on  pouvait  en  toute 
sûreté  de  conscience  faire  restituer  une  somme  de  deux 
millions  par  le  chargé  d'affaires,  qui,  selon  le  même 
rapport,  s'était  fait  donner  par  tous  les  Etats  de  cette 
contrée  des  sommes  considérables.  Le  Duc  de  Mecklem- 
bourg,  parent  de  l'Empereur  Alexandre,  avait  été  mis 
à  contribution,  pour  une  somme  de  40.000  frédérics  d'or 
et  deux  obligations  d'une  somme  pareille.  Le  Sénat  de 
Hambourg,  successivement  soumis  à  de  pareilles  avanieâ, 
en  portait  le  total  à  750.000  marcs  banco,  environ  deux 
millions.  » 

«  Napoléon,  admettant  les  conclusions  de  M.  de  la 
Sauzaye,  réduisit  à  un  million  la  somme  que  Bourrienne 
eut  à  remettre,  non  pas  à  ceux  qui  en  avaient  été  dé- 
pouillés, mais  dans  le  trésor  impérial.  Dans  ses  mémoi- 
res, Bourrienne  dénature  tous  ces  faits,  et  il  représente 
M.  de  la  Sauzaye  comme  un  ennemi  personnel  et  un 
homme  sans  mission.  H  prétend  même  avoir  répondu  à 
l'injonction  pressante  que  lui  fit  Champagny  de  la  part 

de  l'Empereur  :  «  Dites-lui  qu'il  aille  se  faire  f >  Cette 

insolence  que  Napoléon  n'eut  pas  tolérée,  n'aurait,  au 


(1)  Napoléon  disait  à  S*®-Hélène  :  j'aurais  dû  me  méfier  de  Bour- 
rienne^ il  avait  un  œil  de  pie. 


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—  196  — 

reste,  prouvé  que  beaucoup  de  modératiou  et  d'iudulgence 
de  sa  part. 

«  II  paraît  que  de  tout  cet  argeut  le  chargé  d'affaires 
n'avait  déjà  plus  grand  chose  ;  ses  goûts  de  dépense 
furent  toujours  excessifs,  et  il  s'est  livré  souvent  à  des 
spéculations  imprudentes  de  commerce  ou  de  bourse. 
Cette  affaire  le  mit  dans  un  grand  embarras  et, 
pour  comble  de  malheurs,  il  paraît  être  tombé  dans  une 
disgrâce  complète  auprès  de  Napoléon  qui  ne  voulut 
pas  même  lui  accorder  une  audience.  » 

Pour  ceux  qui  seraient  tentés  de  reprocher  à  la  bio- 
graphie Michaud  un  esprit  de  partialité  malveillante 
contre  Bourrienne,  nous  allons  citer  un  document  qui 
est  rhistoire  même  dans  sa  plus  indiscutable  sincérité. 
M.  Léon  Lecestre  a  publié  en  1897,  en  deux  volumes, 
les  Lettres  inédites  de  Napoléon  !«»•  que  les  éditeurs  de 
sa  Correspondance  n'avaient  pas  jugé  à  propos  de  pu- 
blier jadis.  Or  on  trouve,  dans  le  2«  volume  de  ces 
Lettres  inédites,  deux  lettres  de  Napoléon  au  Comte 
Mollien,  Ministre  du  Trésor  public,  sous  les  dates  des 
13  et  22  juin  1811.  Voici  le  texte  de  ces  deux  lettres  : 

«  Je  vous  envoie  Tétiit  des  sommes  que  les  villes  de 
Hambourg,  Brème  et  Lubeck  ont  payées  à  différents 
Français.... 

«  J'approuve  que vous  fassiez  rendre  parles  par- 
ticuliers ci-après,  savoir  :  parle  général  Girard,  250,000 
francs;  par  le  sieur  Bourrienne,  070,000  fr.;  par  le  gé- 
néral Allemand,  20,000  fr.;  par  le  maréchal  Brune, 
785,000  fr.;  par  son  secrétaire,  99,000  fr.;  par  le  payeur 
Poulain,  33,000  fr.;  par  M.  de  Talloyrand,  680,000  fr.; 
par  M.  Durand,  354,000  fr.;  par  M.  Laborie,  80,000  fr.; 


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—  197  — 

par  M.  Bremond,  250,000  fr.;  par  M.  La  Chevardière, 
134,000  fr.;  par  le  commissaire  des  guerres  Ricard, 
38,000  fr.;  pur  M.  Mathi(^u,  72,000  fr.;  par  M.  Laforet, 
142,000  fr.;  par  M.  Chalopiu, 200,000 fr.;  total 3,804,000 
fr.  Vous  ferez  poursuivre  ces  individus  en  restitution  et 
prendrez  des  inscriptions  sur  leurs  biens. 

*  Le  remboursement  du  Trésor  ainsi  assuré,  vous  ferez 
prendre  des  éclaircissements  sur  les  autres  sommes.  Il 
faut  d'abord  opérer  ces  recouvrements;  après  cela,  nous 
aurons  recours  aux  hommes. 

« Vous  aurez  une  conférence  avec  M .  de  Talleyrand 

pour  lui  faire  connaître  qu'on  a  trouvé  ces  renseigne- 
ments et  qu'il  faut  que  les  fonds  rentrent 

«  Pour  ce  qui  concerne  le  prince  de  Ponte-Corvo,  il 
n'y  a  rien  à  faire  dans  sa  position  actuelle  (1). 

«  Quant  au  maréchal  Mortier,  vous  aurez  avec  lui  une 
conférence  ;  vous  lui  demanderez  à  quel  titre  il  a  reçu 
cette  somme,  et  vous  lui  ferez  comprendre  que,  s'il  n'y 
a  pas  de  quittus  de  moi,  vous  serez  forcé  d'en  poursuivre 
la  rentrée.  Je  ne  veux  pas,  pour  cette  somme,  perdre 
cet  officier  qui  a  conquis  le  Hanovre,  mais  il  faut  que, 
du  moins,  il  se  mette  en  règle. 

4c  Quant  aux  autres,  j'entends  qu'ils  rendent  tout. 

«  Vous  verrez  que  sur  Brème  et  Lubeck,  M.  Bour- 
rienne  y  est  encore  porté  pour  des  sommes  considérables. 

«  Si  le  général  Reubell  a  quelque  bien  en  France, 
faites  aussi  prendre  inscription  sur  tous.  > 

Le  nom  de  Dupas  ne  figure  pas  dans  «  l'état  des  som- 

(1)  Bernadotte  était  devenu  prince  royal  de  Suède.  Il  est  à  noter 
que  les  sommes  non  chiffrées,  reçues  par  Bernadotte,  Mortier, 
Reubell,  ainsi  que  par  Bourrienne  sur  Brème  et  Lubeck,  ne  sont 
pas  comprises  dans  le  total  ci-dessus  de  .3,804,000  francs. 


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1 


—  198  — 

mes  que  les  villes  anséatiques  ont  payées  à  différents 
Français.  > 

On  comprend,  après  avoir  lu  les  lettres  de  Napoléon 
au  Comte  Moilien,  que  les  regrets  exprimés  par  les 
Sénats  de  Hambourg  et  de  Lubeck  au  sujet  du  départ  do 
Dupas  aient  pu  être  sincères.  Les  Sénateurs  de  Ham- 
bourg et  de  Lubeck,  les  malheureux  habitants  des  villes 
anséatiques  étaient  bien  placés  pour  faire  des  compa- 
raisons. Mieux  que  personne  ils  étaient  en  situation 
d'apprécier  le  caractère  et  la  conduite  des  agents  civils 
et  militaires  de  Napoléon.  Dupas  avait  fait  exécuter  avec 
rudesse  la  consigne  qui  lui  était  donnée  ;  il  avait  mis  de 
Texigence  et  do  l'ostentation  à  se  faire  traiter  en  tout 
puissant  gouverneur.  Mais  il  avait  été  juste  et  probe  ;  il 
avait  fait  respecter  par  une  discipline  rigoureuse  Tordre 
public,  les  habitants  et  leurs  propriétés  ;  il  avait 
inflexiblement  traqué  les  mauvais  fournisseurs;  il  avait 
maté  les  indisciplinés  de  toutes  les  nations  réunissons 
son  commandement  ;  il  avait,  il  est  vrai,  réprimé  les 
émeutes  des  habitants  ;  mais  il  était  resté  honnête  et 
n'avait  rien  demandé  ni  rien  reçu  pour  lui-même. 

Au  milieu  do  cette  curée  des  villes  anséatiques,  riche 
proie  sur  laquelle  tant  d'appétits  malhonnêtes  se  sont 
jetés,  notre  compatriote,  qui  pouvait  prendre  comme  les 
autres  et  prendre  une  grosse  fortune,  n'a  rien  voulu. 

Son  irréprochable  droiture  était  d'ailleurs  aussi  ap- 
préciée par  Napoléon  que  l'inébranlable  fermeté  qu'il 
apportait  dans  l'accomplissement  de  ses  devoirs. 

Dupas  était  comblé  de  faveurs,  d'honneurs  et  d'avan- 
tages pécuniaires. 

n  était  Chevalier  de  la  Couronne  de  fer  depuis  le 


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—  199  — 

25  décembre  1807,  et  depuis  1804  Sons-Gouverneur  de 
Stupinis,  simple  sinécure.  Chacun  de  ces  titres  lui  valait 
6,000  fr.  de  traitement.  En  outre,  après  Friedland,  il 
avait  reçu  une  gratification  exceptionnelle  de  50,000  fr. 

Alors  qu'il  était  encore  à  Lubeck,  en  mars  1808,  il 
reçut  deux  dotations  do  25,000  francs  de  rente  chacune. 
Tune  en  Westphalie,  l'autre  en  Hanovre;  ce  qui,  avec 
ses  autres  traitements  et  ses  allocations  de  général  de 
division  en  campagne,  portait  ses  revenus  à  plus  de 
80,000  francs,  non  compris  les  50,000  francs  reçus  après 
Friedland. 

Voici  la  lettre  par  laquelle  il  fut  avisé  des  dotations 
de  Hanovre  et  de  Westphalie  : 

«  Paris,  15  Mars  1808. 

€  Je  m'empresse  et  je  me  fais  un  plaisir  de  vous  pré- 
venir que  S.  M.,  par  décret  du  10  courant,  vient  de  vous 
donner  un  témoignage  de  la  satisfaction  qu'elle  a  de  votre 
attachement  à  sa  personne  et  des  services  que  vous  lui 
avez  rendus,  notamment  dans  la  dernière  campagne. 
S.  M.  vous  accordéon  Westphalie  un  domaine  du  re- 
venu net  de  25.000  francs;  et  en  Hanovre,  un  autre  do- 
maine, d'un  revenu  également  de  25.000  francs,  toutes 
charges  et  frais  d'exploitation  déduits.  Je  dois  vous  pré- 
venir que  ces  biens  étant  destinés  à  faire  partie  de  la 
dotation  du  fief,  qu'elle  est  dans  l'intention  d'instituer 
en  votre  faveur,  ne  pourront  être  vendus,  sans  une  au- 
torisation spéciale,  que  les  fonds  en  provenant  ne  pour- 
ront être  employés  qu'en  actions  de  la  banque  impériale, 
en  rentes  cinq  pour  cent,  ou  en  acquisitions  de  terres 

dans  l'intérieur. 

Alexandre.  > 


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—  200  — 

C'était  par  décret  du  4  mars  1807  que  Napoléon  s'était 
réservé  des  biens  en  Westphalio  et  en  Hanovre  pour 
les  distribuer  à  ses  meilleurs  généraux,  ainsi  qu'il  l'avait 
fait  en  Italie  où,  indépendamment  des  grands  fiefs  et 
d'un  tribut  annuel  de  trente  millions,  il  s'était  réservé 
sur  le  Mont-de-Milan  une  rente  de  douze  cent  mille  francs 
pour  les  .ofHciers  qui  avaient  bien  mérité  (1). 

Pour  la  Westphalie,  ce  revenu  annuel  était  de 
un  million  deux  cent  quarante-trois  mille  cent  deux  fr.; 
pour  le  Hanovre,  de  neuf  cent  quatre-vingt-six  mille 
quatre  cent  cinquante  francs. 

Le  30  janvier  1809,  Cambacérès  prévient  Dupas  qu'un 
décret  lui  conférant  le  titre  de  Comte  a  été  signé  la 
veille,  que  l'on  procède  à  l'acte  de  constitution  des  do- 
tations faites  et  affectées  à  son  titre  de  Comte  et  trans- 
missibles  à  sa  descendance  masculine  suivant  les  statuts 
du  l^r  mars  1808  (2). 

11  reçut  en  effet  son  brevet  qui  était  ainsi  conçu  : 

«  Napoléon,  par  la  grâce  de  Dieu,  Empereur  des  Fran- 
çais, Roi  d'Italie,  protecteur  de  la  Confédération  du 
Rhin,  à  tous  présents  et  à  venir,  salut  : 

«Par  l'article  13 du  l«»- statut  du  l®»^  mars  1808,  nous 
nous  sommes  réservé  la  faculté  d'accorder  les  titres 
que  nous  jugerions  convenables  à  ceux  de  nos  sujets  qui 
se  seront  distingués  par  des  services  rendus  à  l'Etat  et  à 
nous.  La  connaissance  que  nous  avons  du  zélé  et  de  la 
fidélité  que  notre  cher  ami,  le  sieur  Dupas,  a  manifesté 
pour  notrtî  service,  nous  a  déterminé  à  faire  usage  en  sa 
faveur  do  cette  disposition.  Dans  cotte  vue,  nous  avons, 

(1)  Cantu. 

(2)  Archives  Dubouloz-Dupas. 


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—  201  — 

par  notre  décret  du  29  janvier  1809,  nommé  notre  cher 
ami  le  sieur  Dupas,  Comte  de  notre  Empire  ;  le  dit  titre 
sera  transmissible  à  sa  descendance  directe  légitime, 
naturelle  ou  adoptive,  do  raàle  en  mâle,  par  ordre  de 
primogéniture,  après  qu'il  se  sera  conformé  aux  dispo- 
sitions contenues  en  l'article  six  de  notre  premier  statut 
du  1^'  mars  1808. 

€  Permettons  au  dit  sieur  Dupas,  de  se  dire  et  quali- 
fier Comte  de  notre  Empire,  dans  tous  les  actes  et  con- 
trats, tant  en  jugement  que  dehors  ;  voulons  qu'il  soit 
reconnu  partout  en  la  dite  qualité,  qu'il  jouisse  des  hon- 
neurs attachés  à  ce  titrtî,  après  qu'il  aura  prêté  le  serment 
prescrit  en  l'article  37  de  notre  second  statut,  devant 
celui  ou  ceux  par  nous  délégués. 

«  A  cet  effet  qu'il  puisse  porter  en  tous  lieux  les  armoi- 
ries telles  qu'elles  sont  figurées  aux  présentes.  D'or  au 
palmier  de  sinople,  terrassé  de  même,  sur  lequel  broche 
un  cheval  de  sable  galoppant  allumé  de  gueules  ;  bor- 
dure d'azur,  chargée  d'étoiles  d'argent,  quartier  des 
Comtes  tirés  de  l'armée. 

«  Livrées  :  les  couleurs  de  l'écu,  le  vert  en  bordure  seu- 
lement. 

«  Chargeons  notre  cousin,  le  Prince  Archi-Chancelier 
de  l'Empire,  de  donner  communication  des  présentes  au 
Sénat,  et  de  les  faire  transcrire  sur  ses  registres  ;  en- 
joignons à  notre  Grand-Juge,  Ministre  de  la  Justice,  d'en 
surveiller  l'insertion  au  Bulletin  des  lois;  mandons  à  nos 
Procureurs-Généraux,  prés  nos  Cours  d'appel,  et  à  nos 
Procureurs-Impériaux  sur  les  lieux,  de  faire  publier  et 
enregistrer  les  présentes  à  la  Cour  d'appel  et  au  Tribunal 
du  domicile  du  sieur  Dupas,  et  partout  où  besoin  sera, 


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1 


—  202  — 

car  tel  est  notre  bon  plaisir  ;  et  afin  que  ce  soit  chose 

ferme  et  stable  à  toujours  :  notre  cousin,  le  Prince  Archi- 

Chancelier  de  l'Empire,  y  a  fait  apposer  par  nos  ordres 

notre  grand  sceau,  en  présence  du  Conseil  du  sceau  des 

titres. 

€  Donné  à  Paris,  le  10  du  mois  de  février  de  Tan  de 

grâce  1809. 

Napoléon.  » 

Scellé  le  20  février  1809. 

Le  Prince  Arc/ti-Chancelier  de  l'Empire, 
Gambacérès. 

Transcrit  sur  les  registres  du  Sénat,  le  28  février  1809. 

Le  Chancelier  du  Sénat, 
Delaplace. 


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—  203  — 


CHAPITRE  XI 


CAMPAGNE   DE  1809.  -    WAGRAM 
Avril  à  JuiUet  1809 


Marche  de  la  division  Dupas  en  Allemagne.  —  Force  de  la  divi- 
sion. —  Cîorps  d'armée  de  Bernadoite.  —  Etat  des  hommes 
présents  sous  les  armes  au  l"  juin.  —  La  faible  division  Dupas 
est  renforcée  de  trois  bataillons  saxons.  —  Arrivée  à  Pile  Lo- 
bau.  —  Rapport  de  Dupas  :  journée  du  4  juillet.  —  Journée  du 
5  juillet:  sanglante  attaque  de  Baumersdorlf.  —  Seconde 
journée  de  la  bataillede  Wagram,  6  juillet.  —  7  juillet  :  résumé 
du  rapport  de  Dupas.  — Plaintes  de  Bernadotte  ;  éloges  adressés 
à  Dupas.  —  Il  est  nommé  au  commandement  de  la  2®  division 
du  corps  d'Oudinot;  il  refuse,  obtient  Tautorisation  de  partir 
pour  Paris  où  il  demande  le  commandement  de  la  division 
militaire  de  Grenoble. 


En  avril  1809,  T Autriche  saisit  le  moment  où  Napo- 
léon était  en  Espagne  avec  sa  garde  pour  mettre  sur 
pied  500,000  hommes  et  entrer  en  campagne.  Il  n'entre 
pas  dans  notre  cadre  de  suivre  les  péripéties  du  début 
de  cette  guerre. 

Dès  le  mois  d'avril,  le  corps  d'armée  de  Bernadotte 
quittait  le  Nord  de  l'Allemagne  pour  se  rapprocher  de  la 
grande  armée  qui  se  concentrait  sur  le  Danube.  Cecorps 


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—  204  — 

d'armée,  d'une  force  de  30,000  hommes,  se  composait  : 

1°  De  deux  fortes  divisions  saxonnes,  formées  par 
1(3,000  hommes  d'infanterie  et  4,000  cavaliers  (34  batail- 
lons, 21  escadrons);  le  chef  d'état-major  de  ce  corps 
saxon  était  le  général  de  GersdofF; 

2«  De  la  division  Vandamme,  formée  par  les  troupes 
wurtembergeoises,  environ  8,500  hommes  (14  bataillons 
et  16  escadrons)  ; 

3°  De  la  division  Rouyor,  5,500  hommes  des  troupes  de 
Nassau,  Anhalt,  Saxe  ducale.  Lippe,  etc.  (9  bataillons)  ; 

4°  Enfin  de  la  division  Dupas,  française,  composée  de 
5  bataillons,  savoir  :  2  bataillons  du  5"  loger  (brigade 
Gency),  et  3  bataillons  du  19"  de  ligne  (brigade  Veaux), 
en  tout  3,785  hommes,  plus  le  parc  d'artillerie,  colonel 
Bardenet,  qui  comptait  près  de  600  hommes  et  autant 
de  chevaux. 

Le  chef  d'état-major  général  de  ce  grand  corps  d'armée 
était  le  général  Gérard. 

Dupas  avait  quitté  ses  quartiers  d'hiver  d'Itzehoë, 
dans  le  Danemarck-Holstein,  le  1^^  mars  ;  le  25,  il  arri- 
vait à  Hanovre,  et  lorsqu'il  rejoignit  Bernadette,  il  reçut 
le  commandement  des  deux  dernières  divisions  que  nous 
venons  d'énumérer,  savoir  :  la  sienne  qu'il  commandait 
depuis  si  longtemps  avec  ses  deux  brigadiers  Gency  et 
Veaux,  plus  la  division  Rouyer,  dite  des  troupes  ducales 
d'Allemagne.  C'est  à  la  tête  de  ces  troupes  qu'il  se  diri- 
gea d'abord  sur  Ratisbonne,  puis  sur  Passau  où  il  de- 
vait attendre  des  ordres. 

Le  1 5  mai,  l'état  de  la  division  Dupas  était  le  suivant  (  1  ): 

(1)  Arch.  de  la  Guerre.  —  Général  Pelet,  la  guerre  de  1809, 


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—  205  — 
Division  Française 


3.785  hommes. 


Brigade  Geocy  :  2  bataillons  du 

5«  léger,  Colonel  Dubretou. 
Brigade  Veaux  :  3  bataillons  du 

19e  de  ligne,  major  Aubry. 
Parc  d'artillerie:   colonel  Bar- 

denet 597  h. 

et  592  chevaux. 

Division  Rouyev 

Régiments  de  Nassau,  Saxe 
ducale,  Anhalt,  Lippe,  etc., 
9  bataillons 5.488  h. 


Total 9.870  h. 

Les  ordres  annoncés  lui  furent  adressés  par  Bernadette 
le  16  mai  : 

«  Efferding,  16  Mai  1809. 

A  M,  le  Général  Dupas, 

€  Mon  cher  général,  d'après  les  dispositions  arrêtées 
par  S.  M.  l'Empereur,  mon  chef  d'état-major  vous  donne 
Tordre  de  vous  mettre  en  marche  avec  vos  deux  régi- 
ments français,  votre  artillerie  et  votre  administration, 
pour  suivre  mon  mouvement  sur  Lintz. 

«  Vous  laisserez  à  Passau  le  général  de  division  Rouyer 
avec  toutes  les  troupes  qui  formaient  son  commandement 
avant  qu'il  fut  réuni  à  votre  division. 

41  S.  M.,  en  me  donnant  ses  derniers  ordres,  a  daigné 
m'annoncer  que  son  intention  était  d'ajouter  doux  régi- 
aients  à  votre  division. 


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—  im  — 

«  Le  corps  d'arméo  que  je  commande  se  compose  au- 
jourd'hui de  votre  division,  du  corps  saxon  et  du  corps 
wurtembergeois  sous  les  ordres  du  général  Vandamme 
et  des  troupes  du  général  Rouyer.  Je  me  réjouis,  mou 
cher  général,  défaire  la  guerre  avec  vous,  et  parce  que 
je  connais  votre  dévouement  pour  le  service  do  S.  M.,  et 
parce  que  j*ai  une  confiance  toute  particulière  dans  vos 
talents. 

€  Le  12«  régiment  de  chasseurs  à  cheval  restera  dans 
sa  position  jusqu'à  nouvel  ordre  et  sera  mis  sous  les 
ordres  du  général  Rouyer.  Je  vous  renouvelle  l'assu- 
rance de  mes  sentiments  d'attachement  et  d'amitié. 

Bernadotte.  » 

Par  suite  de  cette  nouvelle  organisation,  les  troupes 
wurtembergeoises  formèrent  le  S«  corps  de  l'armée 
d'Allemagne  sous  les  ordres  du  général  Vandamme  ; 
les  troupes  ducales  formèrent  une  division  détachée, 
sous  les  ordres  du  général  Rouyer  et  restèrent  à  Passau. 
Dès  lors  le  9«  corps,  commandé  en  chef  par  Bernadotte, 
fut  composé  des  deux  divisions  saxonnes  et  de  la  divi- 
sion française  Dupas,  réduite  à  ses  deux  régiments  fran- 
çais et  à  l'artillerie.  Les  deux  régiments  promis  n'arri- 
vèrent jamais. 

La  situation  de  l'armée  au  1  «»•  juin,  qui  est  aux  archives 
delà  guerre,  donne  la  force  suivante  à  la  division  Dupas: 
Division  Fi^ançtme  Dupas 

l"î  Brigade  Gency  :  5«  régiment  infan- 
terie légère,  colonel  Dubreton  ...     2  bataillons 

2«  Brigade  Veaux  :    19«  infanterie    de 
ligne,  colonel  Auberg 3  bataillons 

Total    ...     5  bataillons 


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—  207  — 

comptant  en  présents  sous  les  armes,  officiers  103, 
soldats  3,580,  au  total 3.683  h. 

Plus  le  parc  d'artillerie. 

Mais  dans  sa  marche  sur  Vienne,  la  division  Dupas 
subit  encore  une  modification.  Son  parc  d'artillerie  fut 
remplacé  par  son  artillerie  divisionnaire,  12  pièces  du 
1*>^  régiment  d'artillerie.  En  outre,  les  deux  nouveaux 
régiments  français  promis  n'arrivant  pas,  le  commandant 
du  9«  corps  attacha  à  cette  division  trois  bataillons 
saxons,  savoir:  un  bataillon  de  grenadiers  du  régi- 
ment Winckelmann,  un  bataillon  de  grenadiers  du 
régiment  de  Radlofl",  un  bataillon  de  tirailleurs  de 
Metzch;  ce  renfort  porta  la  division  Dupas  à  8  bataillons 
d'infanterie,  soit  un  peu  plus  do  5.000  hommes. 

La  division  arriva  avec  tout  le  9«  corps  dans  la  nuit 
du  3  au  4  juillet,  dans  l'ile  de  Lobau  où  l'Empereur 
avait  établi  ses  tentes.  Elle  pjissa  la  journée  du  4,  prête 
à  marcher,  attendant  des  ordres.  Ici  nous  laissons  la 
parole  à  Dupas  lui-même,  dont  le  rapport  sur  les  jour- 
nées du  4,  du  Set  du  G  juillet  qui  est  aux  archives  de 
la  guerre,  présente  le  plus  haut  intérêt  historique  (1). 

4  Juillet. 

«  Le  4  juillet,  à  9  heures  du  soir,  le  feu  des  batteries 
ennemies  a  commencé  dans  l'île  Napoléon  (île  Lobau). 
Trois  hommes  furent  tués  et  23  blessés  par  le  boulet  ; 
une  mule  de  M.  le  colonel  Dubreton  a  été  tuée.  » 

5  Juillet. 

«  Le  5,  la  division  sous  mes  ordres,  composée  du 
5*  régiment  d'infanterie  légère,  du  19®  régiment  d'infan- 

(1)  Corresp.de  r armée  d* Allemagne^  carton  juillet  i'®  quinzaine, 
liasse  du  7  juillet  1809. 


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—  208  — 

terie  de  ligue,  el^des  bataillons  saxons,  grenadiers  de 
Radloff  et  tirailleurs  de  Metzch,  et  12  pièces  d'artille- 
rie servies  par  le  l*»»*  régiment  de  cette  arme,  s*est 
réunie  au  corps  d'armée  de  S.  A.  le  Prince  de  Ponte- 
Corvo,  et  a  passé  le  Danube  vers  les  lOheures  du  matin, 
sur  les  ponts  établis  en  arriére  de  Stadt-Enzersdorff. 

€  Le  bataillon  de  grenadiers  de  Winckelmann  avait 
été  ôté  de  la  division  dès  le  matin  pour  passer  sous  les 
ordres  du  généml  Reynier.  > 

(Donc,  la  division  Dupas  se  trouvait  réduite  à  ses 
5 bataillons  français,  savoir:  2  légers  et  3  de  ligne; 
plus  les  2  bataillons  saxons,  grenadiers  de  Kadloff,  et 
tirailleurs  de  Metzch  :  en  tout  7  bataillons,  formant  en- 
viron 4.000  hommes,  plus  12  pièces  de  canon.  Mais 
reprenons  la  narration  de  Dupas)  : 

€  La  division  formée  sur  deux  lignes,  en  colonne  serrée 
par  bataillon,  s'est  portée  dans  la  plaine,  à  droite 
d'Enzersdorff  et  a  pris  rang  dans  les  lignes  de  l'armée. 

4c  A  onze  heures  et  demie  la  division  s'est  déployée 
sur  deux  lignes. 

€  A  une  heure,  le  village  de (1)  où  l'ambulance 

de  l'aimée  a  depuis  été  établie  et  qui  se  trouvait  en 
avant  du  front  de  la  division,  et  défendu  par  6  batail- 
lons ennemis,  a  été  emporté  d'emblée  par  le  l*"*  batail- 
lon du  5»  régiment  d'infanterie  légère  ;  on  y  a  fait 
prisonniers  H  officiers  et  une  centaine  d'hommes. 

«  La  division  a  continué  sa  marche  et  s'est  portée 
vers  sa  droite,  d'après  les  ordres  de  S.  M.  transmis  par 

(1)  Lo  nom  ost  en  blanc  dans  le  rapport  de  Dupas.  C'est  le  vil- 
la<je  de  Raschdorf  (général  Pelot,  Stêmoires  sur  la  guerre  de 
1809  en  Allemagne).  Pelet  était  aide-de-camp  de  Masséna  à 
Wagram. 


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—  â09  — 

un  général  de  division  et  un  capitaine  d'ordonnance  ;  utt 
officier  de  Tétat-major  du  prince  de  Ponte-Corvo  qui 
apportait  l'ordre  de  ne  point  sY^^arter  du  village  que 
Ton  venait  de  prendre,  a  été  conduit  à  TEmpereur  par 
le  général  de  division,  aide-de-carap  de  S.  M.  qui  avait 
apporté  ses  ordres.  » 

(La  division  Dupas  se  trouvait  entre  les  Saxons  de 
Bernadette  à  sa  gauche,  et  l'armée  d'Italie  de  Macdonald 
sur  sa  droite,  lorsque  le  général  reçut  deux  ordres 
contradictoires  :  l'un  de  son  chef  Bernadette,  lui  pres- 
crivant de  ne  point  quitter  Raschdorff,  l'autre  de  l'Em- 
pereur, lui  prescrivant  au  contraire  de  marcher  sur  le 
chemin  de  Baumersdorff  (1)  ;  Dupas  se  met  en  régie  en 
envoyant  l'aide-de-camp  de  Bernadette  à  l'Empereur,  en 
compagnie  du  général  aide-de-camp  qui  paraît  avoir  été 
Savary  ou  Mathieu  Dumas.  Bernadette  fut  outré  de  cette 
intervention  directe  de  Napoléon,  donnant  des  ordres  à 
un  de  ses  divisionnaires;  Dupas  fit,  là  comme  tou- 
jours, ce  que  le  devoir  et  l'honneur  lui  prescrivaient 
de  faire). 

«  A  une  heure  et  demie,  le  prince  de  Ponte-Corvo  a 
envoyé  par  un  de  ses  aides-de-camp  l'ordre  de  former 
un  bataillon  en  carré,  à  50  pas  en  arrière  de  la  gauche 
qui  se  trouvait  séparée  des  troupes  saxonnes.  Le  batail- 
lon de  Radloff  a  été  commandé  pour  cet  objet.  La  ligne 
à  continué  de  se  porter  en  avant  vers  sa  droite,  protégée 


(1)  En  attendant  queTarmée  d'Italie  se  soit  formée  en  ligne  et 
pendant  que  Bernadotte  suit  le  chemin  de  Wagram,  au-delà  de 
Raschdortf.  (Général  Pelet). 


Ub 


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—  210  — 

par  le  feu  des  batteries  (1). 

«  A  deux  heures  et  demie  après-midi,  le  l^r  bataillon 
d'iafanterie  légère  s'est  réuni  à  la  gauche  de  la  division 
en  carré  par  échelons,  avec  le  bataillon  de  Radloff 
pour  couvrir  la  gauche  qui  n'était  point  appuyée. 

«  A  4  heures,  la  ligne  saxonne  a  rejoint  la  gauche  de 
la  division  ;  les  bataillons  5*^  léger  et  Radloff  ont  rompu 
le  carré  pour  se  former  en  bataille;  Tordre  a  été  donné 
de  faire  entrer  en  première  ligne  la  deuxième  ligne  de 
la  division  (2). 

«  Vers  les  6  heures  Tarmée  ayant  balayé  toute  la 
plaine  et  Tennemi  s'étant  retiré  sur  les  hauteurs  de  ...(3) 
soutenu  par  une  nombreuse  artillerie,  a  pris  position 
sur  le  plateau  et  y  a  formé  ses  lignes.  L'artillerie  de  la 

(  1  )  Le  général  de  Gersdoff,  chef  d'él  at-major  des  corps  saxons, 
dit  dans  sa  Lettre  à  Gourgaud,  du  25  février  1823:  «  Nous  for- 
mions conjointement  avec  la  très  faible  division  Dupas,  le  9«  corps 
d'armée  ;  nous  passâmes  le  Danube  le  5  vers  midi.  Notre  première 
tâche  fut  de  prendre  le  village  de  RatzendorlT,  ce  que  la  brigade 
de  Steindel  exécuta  lestement,  tandis  que  le  corps  entier  marchait 
pour  former  Taile  gauche  de  Varmée.  La  cavalerie  saxonne  cul- 
buta la  cavalerie  autrichienne  ;  dès  ce  moment  nous  restâmes 
maîtres  de  la  plaine.  Cependant  le  corps  d'armée  du  Prince  avait 
éprouvé  quelques  changements  fâcheux.  La  division  Dupas  avait 
été  réunie  au  corps  du  maréchal  Oudinot  (nous  verrons  qu'il  n'en 
a  rien  été)  ;  2  bataillons  de  grenadiers  étaient  restés  à  la  garde  de 
Tile  de  Lobau,  le  régiment  de  chevaux-légers  prince  Jean  fut  mis 
sous  les  ordres  du  maréchal  Davout.  Le  prince  se  plaignit  amère- 
ment de  tous  ces  changements  et  envoya  plusieurs  officiers  pour 
réclamer  ses  troui)es.  Tout  fut  inutile  jusc|u'à  ce  qu'enfin  vers  la 
nuit  3  escadrons  des  chevaux-légers  revinrent,  le  4®  régiment 
ayant  été  retenu  pour  couvrir  une  batterie.  Toutes  ces  contra- 
riétés affectèrent  le  Prince.  » 

(2)  La  division  Dupas  ne  tarda  pas  à  rejoindre  la  droite  de 
Bernadotte.  L'armée  autrichienne  restait  immobile  devant  ces 
mouvements  (Général  Pelet).  A  aucun  moment  des  deux  journées 
Dupas  ne  passe  sous  les  ordres  d'Oudinot.  Le  rapport  de  Dupas 
ne  fait  aucune  mention  d'un  fait  aussi  important,  et  le  général 
Pelet  pas  davantage. 

(3)  Baumersdorff.  Le  nom  est  en  blanc  dans  le  rapport. 


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—  211    - 

Garde  est  venue  se  placer  à  la  gauche  en  avant  du  front 
de  la  division  ;  dans  le  même  moment  les  lignes  saxon- 
nes ont  fait  un  changement  de  front  vers  la  gauche, 
Taile  droite  en  avant  ;  la  cavalerie  saxonne  a  suivi  le 
mouvement. 

«  A  7  heures  et  demie  un  officier  de  Tetat-major  gé- 
néral a  apporté  Tordre  de  faire  charger  ma  division  sur 
les  lignes  ennemies  qui  occupaient  les  hauteurs  (1). 

«  A  H  heures  la  division  s'est  portée  en  'avant  avec 
enthousiasme  et  aux  cris  de  Vive  l'Empereur  !  Elle  a 
dépassé  l'artillerie  de  la  garde  et  ses  propres  pièces  au 
pas  de  charge  et  avec  sîmg-froid. 

«  Arrivée  an  pied  du  coteau,  il  s'est  trouvé  un  fossé 

(1)  Vers  6  ou  7  heures,  les  ordres  furent  portés  par  Savary  à 
Oudinot  et  à  Bernadotte.  La  canonnade  s'établit  sur  la  ligne,  elle 
fut  dirigée  particulièrement  sur  Baumersdorlf  qui  devint  la  proie 
des  flammes.  I/artillerie  à  cheval  de  la  Garde  s'étant  avancée 
vers  la  gauche,  entre  Dupas  et  Bernadotte,  écrasa  de  son  feu  les 
masses  autrichiennes.  Malheureusement  les  corps  qui  devaient 
attaquer  simultanément  étaient  à  des  distances  inégales  et  n^agi- 
rent  pas  avec  un  égal  dévouement.  La  nuit  arrivait,  le  temps 
pressait,  Tattaque  n'eut  pas  lieu  avec  tout  l'ensemble  nécessaire  ; 
ce  fut  la  seule  cause  qui  Tempécha  de  réussir.  (Général  Pelet, 
la  campagne  de  1809, 

Il  fallait  emporter  le  village  de  Wagram.  Le  Prince  ordonna 
donc  àces  troupes  un  mouvement  encore  plus  à  gauche  et  envoya 
prévenir  l'Empereur  de  ce  dessein,  en  le  priant  de  le  faire  soute- 
nir vigoureusement....  L'archiduc  Charles  avait  faftdéjà  le  4  des 
dispositions  pour  renforcer  son  aile  droite  au-delà  de  Wagram, 
et  c'est  ainsi  qu'il  voulait  coupera  l'armée  française  ses  commu- 
nications avec  le  Danube.  Mais  pour  y  parvenir  il  fallait  que 
l'ennemi  se  maintint  à  tout  prix  dans  Waj^'ram.  C'était  le  pivot 
de  la  position  ennemie  ;  c'était  là  où  l'archiduc  était  aecoui-u,  y 
avait  distribué  ses  ordres  vers  minuit  et  s'y  était  aî*rèté  jusqu'au 
jour.  Dès  lors  une  attaque  sur  Wagram,  supposé  qu'on  l'eut  faite 
même  avec  un  nombre  bien  plus  considérable  de  troupes,  n'aurait 
jamais  réussi.  Mais  le  Prince  n'avaitque  7,000  hommes  d'infante- 
rie, il  tenta  néanmoins  plusieurs  fois  l'attaque,  parvint  aussi  à 
prendre  poste  à  l'autre  extrémité  du  village,  mais  fut  obligé  de 
céder  chaque  fois  aux  violents  elTorts  de  toutes  les  forces  réunies 
des  Autrichiens.  (Général  de  Gersdorlf). 


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—  212  — 

large  de  6  ou  7  pieds  et  plciu  d'eau  (1)  ;  la  ligne  s'y  est 
précipitée  sans  en  connaître  la  profondeur  et  sous  un 
feu  meurtrier  de  balles  et  de  mitraille.  Quelques  hommes 
ont  été  noyés.  L'artilleriS  n'a  pu  suivre  ce  mouvement, 
le  fossé  étant  trop  encaissé. 

«  La  division,  après  avoir  franchi  le  fossé,  a  gravi  les 
hauteurs  avec  la  plus  grande  bravoure.  Arrivés  sur  le 
plateau,  des  tirailleurs  ennemis  cachés  dans  des  baraques 
en  forme  de  trous  de  loup  et  sur  neuf  rangs  de  profondeur, 
ont  voulu  entretenir  la  fusillade  tandis  que  leur  ligne  se 
formait  en  bataillons  carrés  en  arrière  de  cette  position. 

«  Culbuter  les  tirailleurs  ennemis,  courir  sur  les  car- 
rés a  été  un  mouvement  spontané  dans  toute  la  division  : 
un  drapeau,  quelques  officiers,  150  à  200  hommes  ont  été 
pris  dans  les  trous  do  loups  et  conduits  au  quartier  impé- 


(1)  C'est  le  Russbach  ;  la  position  qui  le  borde  et  qui  était  dé- 
fendue par  les  Autrichiens,  est  forte,  dominante  et  protégée  par 
ce  ruisseau.  Son  lit  de  6 à8  pieds  peut  être  difficilement  traversé 
par  l'infanterie,  et  seulement  sur  les  ponts  par  la  cavalerie  et 
rartillerie  ;  ces  ponts  se-trouvaient  dans  les  villages  qui  étaient 
gardés.  (Général  Pelet). 

A  l'endroit  où  elle  traversa  le  Russbach,  la  division  Dupas 
avait  fait  un  trajet  de  deux  lieues  depuis  le  Danube. 

Dupas  attaqua  le  centre  du  corps  de  Bellegarde.  Retenu  d'abord 
par  les  baraques  du  camp  creusées  dans  la  terre,  où  s'étaient  ca- 
chés les  tirailleurs  autrichiens,  il  s'élança  sur  l'ennemi  qui  fut 
culbuté  sur  la  seconde  ligne.  Dupas,  appuyant  à  gauche,  démas- 
qua le  terrain  devant  la  division  qui  le  suivait.  Cette  division 
était  la  division  Lamarque,  tête  de  colonne  de  l'armée  d'Italie, 
conduite  par  le  général  Reille,  aide-de-camp  de  l'Empereur.  (Gé- 
néral Pelet,  passim). 

Pelet  dit  que  le  prince  Beauharnais  et  Macdonnald  qui  com- 
mandaient l'armée  d'Italie,  eurent  le  tort  de  ne  pas  faire  appuyer 
Dupas  par  une  attaque  sur  les  flancs,  ce  qui  eut  mieux  valu  que 
de  suivre  Dupas  qui  était  tète  de  colonne. 

Les  pièces  autrichiennes  tiraient  à  mitraille  sur  nos  troupes 
ui  n'avaient  ni  cavalerie  ni  artillerie  et  qui  éprouvaient  beaucoup 
ie  pertes.  (Général  Pelet). 


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—  2)3  — 

rial  ;  3  à  400  tirailleurs  ennemis  y  ont  été  tués  ou  blessés. 
«  Déjà  un  carré  avait  posé  les  armes  lorsque  Tennemi 
a  débordé  le  flanc  gauche  de  la  division.  Au  même  mo- 
ment une  2®  ligne  française  formée  en  colonne  serrée 
s'est  présentée  au  fossé  (1),  Ta  passé  avec  un  peu  de 
confusion  et  sans  se  déployer;  la  tête  de  cette  colonne, 
parvenue  sur  les  hauteurs,  ayant  aperçu  les  bataillons 
saxons  qui  occupaient  le  centre  delà  division,  a  fait  feu 
dessus  :  ce  qui  a  causé  un  moment  d'hésitation  et  a  fait 
rétrograder  le  centre  ;  alors  cette  tête  de  colonne,  se 
croyant  chargée,  a  fait  demi-tour  avant  d'avoir  été  dé- 
ployée et,  danSvSon  mouvement  rétrograde,  a  entraîné  sa 
colonne  et  même  une  3«  ligne  (2). 

(1)  C'est  toujours  le  ruisseau  Russbach  que  Dupas  appelle  le  fossé. 

(2)  Cette  2*  ligne  française  dont  parle  Dupas  était  la  tête  de 
rarmée  d'Italie,  conduite  par  Macdonald  et  Lamarque  et  compo- 
sée de  7  bataillons,  plus  4  en  réserve  de  l'autre  côté  du  Russbach 
que  n'avaient  pu  traverser  ni  l'artillerie  ni  la  cavalerie  légère  de 
Sahuc.  Eugène  (Beau harnais)  à  la  tête  des  deux  divisions  du  gé- 
néral Grenier  et  du  général  Seras,  appuyait  l'attaque  de  Macdo- 
nald. Celui-ci  fait  déployer  ses  bataillons  et  pénètre  au  milieu 
delà  première  ligne  ennemie....  Macdonald  est  bientôt  attaaué 
de  toutes  parts  ;  il  se  soutient  et  conserve  son  terrain.  —  Plus 
loinOudinot  fait  attaquer  Baumersdorlf  par  la  division  Grandjean 
qu'appuyait  la  division  Tharreau.  Plus  loin  encore  c'était Davout, 
à  l'extrême  droite.  Mais  à  l'extrême  gauche  du  côté  de  Berna- 
dotte,  rien  ne  se  fit  entendre  pendant  longtemps. 

L'attaque  avait  réussi  au  centre,  les  efforts  de  Dupas  et  de 
Lamarque  étaient  couronnés  de  succès.  Si  leur  mouvement  eût 
été  vivement  appuyé  la  position  conquise  sur  l'ennemi  aurait  été 
conservée  :  la  relation  de  l'archiduc  Charles  l'indique.  Le  généra- 
lissime accourut  à  la  brèche  formée  au  milieu  de  la  ligne,  réunit 
les  régiments  déjà  dispersés  et  les  dirigea  contre  Dupas  et  La- 
marque. La  division  Lamarque  avait  déjà  fait  2.000  prisonniers, 
enlevé  5  drapeaux,  elle  résista  longtemps,  mais  chargée  sur  son 
flanc  droit,  elle  repassa  le  Russbach.  L'archiduc  fut  blessé  au 
milieu  de  la  mêlée.  (Général  Pelet,  camp,  de  1809). 

Au  sujet  de  la  méprise  qui,  dans  l'obscurité,  fît  que  des  corps 
tirèrent  les  uns  sur  les  autres,  Pelet  dit  :  «  On  a  prétendu  aussi 
que  des  troupes  alliées  tirèrent  par  méprise  sur  le  flanc  opposé 
de  Lamarque.  Si  l'ennemi  avait  eu  connaissance  de  cette  ter- 
reur panique,  de  grands  malheurs  pouvaient  en  résulter  pour 
l'armée  française.  » 


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-  214  — 

«  La  division,  livrée  à  ses  propres  forces,  sans  artil- 
lerie contre  un  ennemi  triple  en  nombre  pourvu  d'ar- 
tillerie et  de  cavalerie,  fournit  cependant  trois  charges 
contre  les  carrés  ;  mais  il  n'était  plus  temps,  celui  qui 
avait  mis  bas  les  armes  les  reprit  ;  la  cavalerie  ennemie 
s'ébranla,  et  la  division  prise  en  flanc,  de  front  et 
d'écharpe,  et  n'étant  point  soutenue  par  sa  gauche  (1), 
fut  obligée  de  se  reployer,  ce  qu'elle  fit  vers  dix  heures 
et  demie,  avec  ordre  et  en  continuant  son  feu. 


(1)  C'était  Bepnadotte  qui  aurait  dû  appuyer  sa  gauche.  «  Dupas, 
dit  le  général  Pelet,  s'était  prolongé  à  sa  gauche  vers  Wagram. 
dans  l'espoir  de  se  lier  avec  Bernadotte.  11  fut  attaqué  par  la 
droite  de  Bçllegarde,  dont  les  principales  forces  s'étaient  portées 
contre  I^amarque.  Entouré  néanmoins  par  des  troupes  de  toutes 
arnnes,  foudroyé  par  l'artillerie.  Dupas  se  maintint  pendant 
longtemps  avec  autant  de  bonheur  que  d'intrépidité,  et  ne  se  re- 
ploya qu'assez  avant  dans  la  nuit.  Les  divisions  de  Macdonald  et 
d'oiidinot  lurent  vivement  poursuivies  en  deçà  du  ruisseau.  Le 
désordre  se  communiqua  à  celles  qui  les  appuyaient.  Bientôt  on 
vit  ces  soldats  si  braves  se  retirer  en  confusion  au  milieu  de  la 
plaine.  »  La  nuit  les  sauva. 

Que  faisait  donc  BernadottiC  pendant  ce  temps-là?  Pelet  va  nous 
le  dire:  «  Bernadotte  avait  reçu  vers  9  heures  l'ordre  de  mar- 
cher rapidement  pour  soutenir  l'attaque  du  centre.  Il  s'avança 
/br^^ai-rf,  lorsque  Dupas,  Lamarque  et  Oudinot  étaient  déjà  re- 
l>oussés.  Les  diverses  relations  s'accordent  sur  ce  point  :  Son  at- 
taque présentait  plus  de  facilité  que  les  autres....  11  paraît  cer- 
tain que  les  tirailleurs  de  Dupas  avaient  atteint  les  premières 
maisons  au-dessus  de  Wagram,  dans  ce  moment  Bernadotte  aurait 
facilement  enlevé  et  conservé  ce  p'>ste.  »  Mais  il  attaqua  trop 
tard. 

Le  général  de  Gersdortf  dit  à  ce  sujet  :  «  Quiconaue  s'est  jamais 
trouvé  dans  de  pareilles  rencontres,  connaît  le  désordre  inévi- 
table où  se  trouvent,  pour  ce  moment,  les  troupes  les  plus  braves, 
désordre  que  l'obscurité  de  la  nuit  ne  fait  qu'augmenter.  Telle 
était  notre  situation.  Nos  troupes,  plusieurs  fois  repoussées, 
étaient  disséminées....  à  minuit,  les  brigades  saxonnes  étaient 
ralliées  près  d'Aderklaa.  »  Bernadotte  dit  dans  son  rapport  que 
les  JSaxons  tirèrent  les  uns  sur  les  autres. 

En  résumé  la  division  Dupas  fut  celle  qui  se  conduisit  le 
mieux,  qui  eut  le  plus  do  succès,  et  qui  souffrit  le  plus. 


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—  215  — 

€  Réduite  à  peu  do  raoudo,  elle  bivouaqua  dans  la 
plaine  vis-à-vis  cette  position. 

€  Le  bataillon  de  Radloff  disparut  dans  la  dernière 
charge;  une  partie  de  ce  bataillon  s*6tait  jet<'»e  dans  les 
trous  des  baraques  ;  et  il  ne  restait  que  43  hommes,  offi- 
ciers compris,  du  bataillon  de  Metzch,  qui  s*est  très  bien 
conduit. 

«  Je  me  loue  du  courage  et  de  Tintrôpiditô  que  les  of- 
ficiers et  soldats  ont  déployé  dans  une  lutte  autant  iné- 
gale que  mémorable  et  glorieuse  pour  la  division.  )► 

Il  résulte  de  ce  qui  précède  que,  dans  cette  attaque 
de  nuit,  *  aventureuse  et  mal  concertée  »  (1),  la  division 
Dupas  poussa  ses  succès  beaucoup  plus  loin  que  tous  les 
autres  corps  engagés,  mais  que  ces  succès  devinrent  nuls, 
parce  qu'elle  ne  fut  pas  appuyée  assez  efficacement  sur 
sa  droite  par  Macdonald  et  qu'elle  ne  le  fut  pas  du  tout 
sur  sa  gauche  par  Bernadette.  Dupas  a  raison  d'appeler 
cette  lutte  autant  inégale  que  mémorable  et  glorieuse 
pour  sa  dioision.  Chose  extraordinaire.  Dupas  s'en  tira 
sans  une  égratignure,  alors  que  dans  son  état-major, 
officiers  ou  chevaux,  tout  fut  atteint,  et  que  sa  troupe 

(1)  Lanfrey,  hist,  de  Napoléon^  t.  V.  «:  L'attaque  échoua  parce 
qu'elle  avait^été  mal  combinée  et  mal  soutenue,  telle  est  la  vérité.» 
n  est  bon  de  remarquer  que  Tordre  donné  le  soir  du  5  à  Dupas  était 
le  second  ordre  de  la  journée  qui  était  directement  donné  à  ce 
divisionnaire  par  un  aide  de  camp  de  l'Empereur  au  lieu  d'être 
donné  par  leclieFde  corps  d'armée,  Bernadotte.  Ce  dernier  dit 
dans  son  rapport  que  l'ordre  d'attaquer  Wagram  lui  fut  apporté 
le  soir  du  5  par  le  général  Savary  ;  qu'il  attaqua  Wagram  ;  que 
les  Saxons  qu'il  commandait  tirèrent  les  uns  contre  les  autres  (ce 
qui  prouve  que  dans  l'obscurité  la  méprise  narrée  par  Dupas  a 
dû  se  reproduire  plus  d'une  lois  le  soir  du  5J  et  qu'il  abandonna 
l'attaque  de  Wagram  vers  minuit.  Il  y  avait  déjà  une  heure  et 
demie  que  la  division  Dupas  avait  été  retouléê  dans  la  plaine. 
Bernadotte  attaqua  donc  trop  tard. 


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—  216  — 

subit  des  pertes  qui  dépassèrent  de  beaucoup  toutes  les 
proportions  connues.  Sur  sept  bataillons  qu'il  avait,  un 
bataillon  saxon,  grenadiers  de  Radloff,  disparut  entière- 
ment, fait  prisonnier  sans  aucun  doute  ;  l'autre  bataillon 
saxon,  tirailleurs  de  Metzch,  fut  en  partie  fait  prisonnier 
et  décimé  de  telle  façon  qu'il  n'en  resta  que  43  hommes 
officiers  compris;  de  ses  cinq  bataillons  français,  les 
deiiœ  tiers  au  moins  furent  tués  ou  blessés,  et  les  cons- 
crits se  débandèrent  et  n'avaient  pas  rejoint  le  lende- 
main. Nous  continuons  à  laisser  la  parole  à  Dupas,  la 
suite  de  son  rapport  concerue  les  opérations  du  lende- 
main de  cette  effroyable  échauffourée  nocturne,  dont  un 
témoin  occulaire  a  dit  qu'il  n'avait  jamais  assisté  à  une 
aussi  terrible  fusillade  (1). 

6  Juillet 

«  Le  6  juillet  à  3  heures  du  matin,  le  reste  de  la  divi- 
sion formant  deux  petits  bataillons  (2),  les  conscrits  et 
beaucoup  d'autres  s'étant  égarés  dans  la  nuit,  s'est 
portée  on  seconde  ligne  derrière  les  troupes  saxonnes 


(1)  «  Le  combat  avait  duré  jusqu'à  10  heures  du  soir,  dit  le  gé- 
néral Lejeune  dans  ses  mémoires  ;  jamais  je  ne  m'étais  trouvé  à 
une  fusillade  plus  terrible,  au  milieu  de  laquelle  le  prince  Ber- 
tliier,  major  général,  resta  2  heures  avec  ses  officiers.  C'étaità  ne 
pas  comprendre  que  quelqu'un  put  en  échapper.  Le  prince  et  mes 
camarades,  MM.  de  Pourtalès  et  de  Mongardi  y  eurent  leur^  che- 
vaux tués.  »  Lejeune  était  aide-de-camp  deBerthier.  Thiers  a  très 
fidèlement  donné  la  physionomie  de  ce  terrible  engagement 
d'après  le  rapport  de  Dupas  si  saisissant  dans  sa  simplicité. 

■2)  Ces  deux  bataillons,  reste  de  la  division,  devaient  être  très 
petits  en  effet,  puisque  les  deux  bataillons  saxons  avaient  dis- 
paru, que  les  cinij  bataillons  français  avaient  subi  des  pertes 
déplus  de  la  moitié  de  leur  effectif,  ej.  que  les  conscrits  et  beau- 
coup d'autres  s'étaient  égarés.  Il  devait  rester  à  Dupas  4  à  500 
hommes  sous  les  armes  le  matin  du  6. 


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—  217  — 

(1)  ;  on  mouvement  ayant  eu  lieu  vers  la  gauche,  ces  deux 
bataillons  qui  avaient  déjà  beaucoup  sonflbrt  du  boulet  et 
de  la  mitraille,  reçurent  Tordre  d'entrer  en  première 
ligne  et  ensuite  celui  de  se  porter  en  avant  pour  soute- 
nir des  troupes  saxonnes  envoyées  en  tirailleurs  et  qui 
se  repliaient  du  village  do (2). 

«  Une  seconde  ligne  française  arriva  à  midi;  deux  ba- 
taillons de  cette  ligne  formés  en  colonne  serrée  marchè- 
rent à  l'attaque  de  ce  môme  village;  ils  furent  repoussés. 
Le  reste  de  mes  troupes  se  porta  dans  le  village  pour 
appuyer  ces  bataillons  et  rétablir  le  combat  ;  mais,  trop 
peu  nombreuses,  et  n'étant  point  secondées,  malgré  leurs 
efforts  elles  ne  purent  obtenir  aucun  succès  ot  durent  se 
retirer  avec  perte  (3). 

€  Je  reçus  vers  les  3  heures  l'ordre  de  prendre  position 
au  village  de  l'ambulance  (4)  pour  couvrir  ce  point  et 

(1)  Les  troupes  saxonnes  repoussées  de  Wagram  la  veille  au 
soir,  s'étaient  repliées  sur  Aderklaa  vers  minuit,  et  n'avaient  pas 
tardé  à  abandonner  ce  village  à  Tennemi.  La  reprise  de  ce  village 
fut  le  but  des  elforts  de  notre  aile  gauche  le  6.  «  Bernadotte,  dit 
le  général  Pelet,  s'était  enfin  avancé  entre  Aderklaa  et  leRusstjacIi 
pour  soutenir  Tattaque  de  St-Cyr  avec  les  saxons  et  la  division 
Dupas.  L'artillerie  balaye  le  terrain  devant  l'infanterie  saxonne, 
mais  celle-ci  ne  tarde  pas  à  être  repoussée.  La  cavalerie  attaque 
mollement.  La  division  française,  affaiblie  par  le  combat  de  la 
veille,  se  maintient  courageusement  vers  la  droite.  Des  fujards 
saxons  se  jettent  dans  une  telle  confusion  vers  la  calèche  de  Mas- 
séna,  qu'ii  ordonne  de  charger  sur  eux  pour  les  ramener  à  l'en- 
nemi. 

(2)  Aderklaa.  Le  nom  est  en  blanc  dans  le  rapport. 

(3)  C'est  à  ce  moment  de  la  journée  que  Napoléon,  laissant  sur 
sa  gauche  Aderklaa,  forma  les  colonnes  d'attaque  de  l'armée 
d'Italie  et  les  lança  sur  Sussenbrunn  en  dépassant  et  prenant  à 
revers  Aderklaa  qui  fut  évacué  par  les  Autrichiens. 

(4)  Raschdorff.  C'est  .sans  doute  de  l'état-major  général,  bien 
qu'il  ne  le  dise  pas  expressément,  que  Dupas  reçut  cet  ordre. 
C'était  le  meilleur  emploi  que  l'on  put  faire  de  ces  500  braves,  et 
si  Bernadotte  s'en  est  plaint,  il  a  eu  tort.  Dupas  en  exécutant  cet 
ordre,  a  encore  trouvé  le  moyen,  avec  les  débris  de  sa  division, 
de  rendre  un  grand  service  à  l'armée  en  arrêtant  les  fuyards  de 
l'aile  gauche  tandis  que  le  centre  gagnait  la  bataille. 


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—  218  — 

rallier  les  fuyards.  La  division  y  a  bivouaqué  et  j'y  ai 
rallié  plus  do  12,000  hommes  que  j'ai  fait  diriger  sur 
leurs  régiments  ou  bivouaquer  autour  du  village. 

«  Je  me  loue  particulièrement  de  MM.  Dubretou,  co- 
lonel du  5®  léger  qui  s'est  distingué  par  toutes  les  qualités 
qui  caractérisent  le  vrai  homme  de  guerre  ;  attentif  et 
froid,  il  s'est  trouvé  partout  et  a  saisi  toutes  les  occa- 
sions de  se  faire  remarquer  ;  Dubourg  et  Javerze,  capi- 
taines, Cloux,  adjudant  major,  Laurent,  Gremot,  Du- 
nand,  Colmet  et  Valet,  lieutenants,  et  des  sous-lieute- 
nants Le  Clerc  et  Ledet,  de  l'adjudant-major  La 
Garde,  tous  du  5"  régiment  d'infanterie  légère,  ainsi  que 
deMM.Gruet,  capitaine,  d'Eu,  lieutenant,  Bullier,  adju- 
d<^-major.  Graisse,  Drouard,  et  Dumont,  sous-lieutenants 
au  19®  de  ligne.  » 

RÉSUMÉ 


Demandes 

Bravo  comme  César, 
la  croix  d'officier 
de  la  Légion. 

Serait  bon  colonel, 
ou  la  croix  d'offi- 
cier. 


La  décoration  déjà 
demandée  2  fois. 


A  la  bienveillance  de 
S.  M. 


La  décoration  déjà 
demandée. 

A  la  bienveillance  de 
S.  M. 

A  la  bienveillance  de 
S.  M. 


Barrai ,  chef  d'escadron  aide-de-camp  ; 
a  eu  un  cheval  blessé. 

Bochaton,  chef  de  batîiillon  aide-de- 
camp  ;  blessé,  deux  chevaux  tués. 

Orillat,  capitaine  aide-de-camp;  bles- 
sé, deux  chevaux  tués. 

Dumarest,  adjudant  commande  chef 
démon  état-major;  un  cheval  blessé. 

Delaveyne,  capitaine-adjoint;  fortes 
contusions,  cheval  blessé. 

Général  Gency;  blessé. 

Général  Veaux;  blessé,  un  cheval  tué. 

Cornillon,  chef  do  bataillon,  aide-de- 
camp  du  général  Veaux  ;  tué. 


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—  219  — 
Pertes 

Officiers  tués   Offl.blossés   Soldats  tués   Soldats  blessés  Perte  totale 

5e  Régt  d'inf.  lég.       5        15        183        733        936 

lOeRégtd'inf.del.      17         17        321       1140       1495 
Artillerie     ...)>»  1  14  73  88 

22        33        518       194(5      2519 

Matériel  :  3  pièces  démontées,  1  affût  brisé,  1  caisson 
détruit. 

«  Je  dois  à  l'honneur  de  dire  que  MM.  les  généraux 
Gency  et  Veaux  ont  donné  des  preuves  non  équivoques 
de  talents  militaires,  de  bravoure  et  de  sang-froid  dans 
l'affaire  du  5.  Leurs  blessures  les  rendent  recommanda- 
bles  auprès  de  S.  M.  qui  daignera  leur  donner  sans  doute 
des  preuves  de  sa  bienveillance  ;  je  les  recommande 
particulièrement. 

«  Je  suis  également  satisfait  de  Tordre  qu'ont  main- 
tenu MM.  les  colonels  Dubreton,  du  5^  léger,  et  Aubry, 
du  19e;  lisent  constamment  marché  à  la  tête  de  leurs 
troupes  et  ont  fortement  contribué  à  la  bonne  contenance 
et  aux  actes  de  valeur  que  ces  deux  régiments  peuvent 
s'attribuer. 

«  Tous  les  chefs  de  bataillon  de  ces  deux  corps  ont 
constamment  marché  sur  les  traces  do  leurs  braves 
colonels,  et  tous  en  général  méritent  la  bienveillance 
du  Gouvernement. 

«  Les  officiers  en  général  se  sont  conduits  avec  hon- 
neur et  enthousiasme;  ils  ont  tous  répondu  à  ce  qu'on 
pouvait  attendre  d'eux. 

«M.  le  commandant  Sybille  (artillerie)  a  donné  des 
preuves  de  la  plus  grande  intrépidité  ;  il  désirerait  être 
nommé  officier  de  la  Légion.    M.   Guidamé,  capitaine 


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—  220  — 

d'artillerie  sous  les  ordres  de  ce  commandant,  ne  mérite 
pas  moins  d'éloges;  il  est  ancien  dans  ce  grade  et  n'est 
point  décoré.  La  conduite  et  Tintelligence  de  ces  deux 
officiers  s'est  fait  remarquer.  J'ai  l'honneur  de  les  re- 
commander particulièrement  à  la  bienveillance  de  S.  M. 
I.  et  R. 

«  M.  Dumarest,  chef  de  mon  état-major,  a  donné  des 
preuves  du  plus  grand  attachement  à  S.  M.  en  s'expo- 
sant  aux  plus  grands  dangers  et  donnant  des  preuves  de 
la  plus  grande  valeur  ;  il  n'a  pas  peu  contribué  aux  actes 
de  bravoure  de  ces  journées  des  Set  6.  Je  le  recommande 
à  S.  M.  comme  un  ancien  et  Adèle  serviteur. 

«  Les  deux  adjoints,  MM.  Delaveyne  et  Riquet  ont 
suivi  l'exemple  de  leur  brave  chef  et  ont  rendu  de  grands 
services  en  le  secondant  dans  les  ordres  qu'il  leur  trans- 
mettait. Tout  mon  état-major  en  général  s'est  bien  com- 
porté, et  je  le  recommande  à  la  bienveillance  de  S.  M. 

«  Les  deux  bataillons  saxons  se  sont  parfaitement 
conduits  (les  deux  commandants  se  sont  distingués,  leur 
conduite  mérite  les  plus  grands  éloges)  ;  j'ai  vu  périr 
beaucoup  de  soldats  saxons  qui  ont  été  tués  ou  blessés 
dans  la  plaine  par  l'artillerie.  Ils  n'ont  rien  cédé  et  ont 
également  coopéré  aux  actes  de  valeur  do  la  journée 
du  5.  Je  pense  qu'une  partie  de  ces  bataillons  est  à  Vienne 
ou  dans  le  corps  d'armée  ;  aucuns  chefs,  officiers  ni  sol- 
dats ne  sont  rentrés  depuis  le  6.  J'ai  lieu  de  croire  éga- 
lement que  bon  nombre  d'entre  eux  ont  été  faits  prison- 
niers ou  tués  dans  l'attaque  des  positions  autrichiennes. 
Les  deux  commandants  saxons  se  sont  distingués,  leur 
conduite  mérite  les  plus  grands  éloges. 


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—  221  — 

7  Juillet 

«  Le  7  juillet  la  division  a  reçu  ordre  de  se  réunir  au 
corps  d*armée  de  S.  A.  le  Prince  de  Ponte-Corvo,  à 
Léopoldau;  elle  a  pris  position  en  avant  de  ce  village 
faisant  face  aux  montagnes  (1).  A  2  heures  les  troupes 
se  sont  mises  en  marche  pour  se  rendre  à  Stadt-Enzers- 
dorff,  où  elles  ont  pris  position,  la  gauche  à  la  ville,  fai- 
sant face  à  Essling. 

Au  bivouac  d'Enzersdorff,  le  8  juillet  1809  (2). 

Le  Général  de  division  Comte  de  V Empire, 
P.-L.  Dupas.  » 

Ce  qui  frappe  d'étonnement  dans  ce  récit  sincère,  sim- 
ple et  précis  des  deux  journées  de  Wagram,  c'est  la 
proportion  énorme  des  pertes  subies  par  les  deux  régi- 
ments français  de  la  division  :  leur  perte  en  tués  et 
blessés  est  d'environ  70  pour  cent,  perte  énorme  et  qui 
dépasse  tout  ce  que  l'on  a  jamais  vu  dans  les  récits  des 
guerres  les  plus  meurtrières. 

La  simple  lecture  de  ce  rapport  met  à  néant  la  légende 
d'après  laquelle  la  division  Dupas  aurait  été  mise  dès  le 
5  juillet  sous  les  ordres  d'Oudinot.  Cette  allégation  du 
général  de  Gersdorff  a  été  reproduite  sans  contrôle  par 
Lanfrey  et  plusieurs  historiens.  Si  Dupas  avait  dû  être 
détaché  du  9^  corps,  c'eût  été  pour  être  réuni  à  celui  de 
Massénaou  à  celui  de  Macdonald  qui  le  séparait  d'Oudi- 
not. La  vérité  est  que,  à  deux  reprises,  le  5  juillet  et 
probablement  encore  le  6,  Dupas  reçut  directement  des 
ordres  de  Napoléon  qui  lui  furent  transmis  par  un  géné- 

1)  Les  montagnes  du  Bisamberg. 

2)  Daté  en  tête  du  7  juillet,  le  rapport  est  daté  à  la  fin  du  8. 


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—  222  — 

rai  aide-de-camp,  qui  fut  certainement   Savary  le  soir 
du  5.  Bernadette  en  conçut  de  l'humeur  (1). 

Bernadette  se  plaignit  également  de  ce  que,  dans 
l'après-midi  du  G,  Dupas,  exécutant  les  ordres  qu'il  avait 
reçus,  refusa  de  le  joindre  et  alla  couvrir  Raschdorif 
avec  les  débris  de  sa  division  pour  garder  ce  village  où 
étaient  les  ambulances  et  rallier  les  fuyards  de  l'aile 
gauche  :  on  a  vu  que  Dupas  en  rallia  plus  de  12,000.  On 
ne  voit  pas  bien  ce  que  Bernadette  pouvait  entreprendre 
de  sérieux  avec  les  deux  petits  bataillons  qui  restaient 
à  Dupas  ;  dans  tous  les  cas  c'est  une  question  à  débattre 
entre  Bernadette  et  Bonaparte;  mais  Dupas  est  en  dehors 
du  débat.  Il  reçut  des  ordres  directs  de  l'Empereur,  il 
les  exécuta  comme  c'était  son  devoir  de  soldat.  Toute 
l'armée  connaissait  sa  franchise  et  sa  loyauté  ;  tous  ses 
compagnons  de  gloire,  à  commencer  par  le  général  La- 
marque  qui  combattait  à  côté  de  sa  division,  donnèrent 
raison  à  Dupas  (2). 

(1)  Berhadotte  se  plaignit  amèrement  à  l'Empereur  qui  se  con- 
tenta de  lui  répondre  que  des  erreurs  étaient  inévitables  dans 
d'aussi  grandes  manœuvres.  Napoléon,  de  son  côté,  se  plaignait  de 
Bernadotte  pour  sa  conduite  après  la  bataille  d'Essling,  pour  l'at- 
taque de  Wagram  le  5  au  soir,  pour  l'abandon  d'Aderklaa,  et 
pour  la  déroute  des  Saxons  dans  la  matinée  du  6.  (Général  Pelet, 
qui  ajoute  gue  TEmpereur  refusa  de  le  voir  et  que  Berhadotte 
partit  aussitôt  pour  Paris). 

(2)  Si  l'on  peut  s'en  prendre  à  Napoléon  de  la  mauvaise  combinai- 
son (le  l'attaque  de  nuit  du  5  juillet,  en  revanche  les  historiens 
paraissent  fondés  à  reprocher  à  Bernadotte  d'avoir  attaqué  trop 
tard  dans  la  soirée  du  5,  et  d'avoir  évacué  fort  mal  à  propos 
Aderklaa  le  lendemain  matin,  ce  qui  causa  les  insuccès  de  l'aile 
gauche.  Quant  aux  reproches  que  Bernadotte  paraissait  adresser, 
à  tort  du  reste,  à  Dupas,  on  en  trouve  l'écho  dans  un  des  recueils 
biographiques  parus  au  commencement  de  la  Restauration. 
Dupas,  interrogé  vers  1820,  sur  l'exactitude  des  faits  allégués,  se 
contenta  de  répondre  :  «  Qu'il  ne  songeait  plus  qu'à  l'exploitation 
de  Ripaille  et  à  la  vie  de  famille:  ciuant  à  VarticLe  de  la  biographie 
Arnaud,  qui  est  de  Bernadotte  lui-même  aujourd'hui  roi  de  Suède^ 


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—  223  — 

Lamarque  aurait  en  effet  affirmé  que  Dupas  avait  agi 
sagement  et  utilement  en  restant  au  village  de  l'ambu- 
lance, en  résistant  aux  ordres  du  Maréchal,  qui  contrai- 
rement aux  instructions  de  l'Empereur  voulait  Tentraîner 
«  dans  une  fausse  manœuvre.  »  Ce  fait  a  été  rapporté 
plusieurs  fois  par  Mortier  aux  fils  du  général  Dupas. 

Dès  le  7,  informé  qu'il  va  passer  dans  une  autre  divi- 
sion, Dupas  fait  des  réclamations  au  quartier  impérial. 
L'Empereur  lui  fait  écrire  le  lendemain  parBerthier  (1): 

«  A  Monsieur  le  Général  Dupa  s  ^ 

Woilkersdorlf,  8  juillet  1809. 
«  J'ai  lu  votre  lettre  à  l'Empereur,  mon  cher  Dupas. 
S.  M.  me  charge  de  vous  dire  qu'elle  est  très  contente 
de  voitSy  que  vous  êtes  de  son  ancienne  hande^  et  du 
nombre  de  ceux  qu'elle  aime,  et  sur  rattachement 
desquels  elle  compte.  Quand  les  circonstances  le  per- 
mettront, on  vous  donnera  un  commandement  plus  con- 
sidérable ;  no  doutez  pas,  mon  cher  Dupas,  de  mon 
attachement  bien  réel. 

Le  Major  Général  :  Alexandre.  > 

Cotte  lettre  assurait  Dupas  des  véritables  sentiments 
de  Napoléon  et  do  toute  l'armée  pour  lui.  On  était  très 
content  de  lui,  on  n'oubliait  ni  Toulon,  ni  les  campagnes 
d'Italie  et  d'Egypte,  ni  Austerlitz,  ni  Friedland;  on  le 

peu  m'importe,  ajouta-t-il.  Je  pourrais  cependant,  s'il  m'y  avait 
insulté,  lui  répondre  facilement  et  les  rieurs  ne  seraient  pas  de 
son  côté.  »  Nous  le  croyons  sans  peine.  Dupas  avait  reçu  des 
ordres  supérieurs,  il  s'y  conformait,  c'était  son  devoir,  et  il  est 
vraisemblable  que  les  ordres  qu'il  exécutait  étaient  précisément 
les  plus  utiles  au  salut  de  Tarmée. 

(1)  Archives  Dubouloz-Dupas. 


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—  224  — 

lui  prouverait  lorsque  les  circonstances  le  permettraient. 
En  attendant,  le  9  juillet,  Berthier  lui  annonçait  qu'il 
était  nommé  au  commandement  de  Tune  des  divisions 
du  corps  d'Oudinot  qui  allait  être  promu  maréchal 
avec  Macdonald  et  Marmont  : 

«  Monsieur  le  Général  de  Division  Dupas  (1). 

«  Wolkersdorff,  le  9  juillet  1809,  5  li.  du  soir. 

«  L'Empereur  ayant  jugé  nécessaire  de  dissoudre  votre 
division,  vous  donne  un  nouveau  témoignage  de  son 
estime  et  de  sa  confiance,  en  vous  conférant  le  comman- 
dement de  la  division  du  général  Frère,  blessé. 

«  Rendez-vous  donc  le  plus  tôt  possible  auprès  du  gé- 
néral Oudinot,  qui  vous  mettra  on  possession  de  ce 
commandement.  Ce  général  se  trouve  à  Wolkersdorff, 
route  de  Vienne  à  Brûnn. 

«  Le  5*  d'infanterie  légère  et  votre  artillerie  devront 
partir  demain  pour  se  rendre  à  la  division  Legrand, 
corps  du  duc  de  Rivoli. 

Le  Major  Général  :  Alexandre.  » 

En  même  temps  paraissait  Tordre  général  du  9  juillet, 
en  vertu  duquel  (2)  le  9«  corps  était  dissous  ;  le  corps 
saxon  passait  sous  les  ordres  du  général  Reynier  ;  la  di- 
vision Dupas  qui  avait  si  prodigieusement  souffert,  était 
répartie  entre  les  divisions  Boudet  et  Legrand,  du  corps 
de  Masséna,  et  Dupas  était  nommé  au  commandement 
de  la  division  Frère,  au  2«  corps  (Oudinot).  Ce  corps  se 
composait  de  3  divisions:  Tharreau  commandait  la  l*"*; 
la  division  Frère  était  la  2«  ;  et  Grandjeau,  l'ancien  bri- 
gadier de  Dupas,  commandait  la  3^. 

(1)  Archives  Dubouloz-Dupas. 

(2)  Correspondance  de  Napoléon. 


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—  225  — 

Les  éloges  si  flatteurs  que  lui  valaient  sii  belle  con- 
duite et  celle  de  ses  troupes,  ce  commandemeut  qui  lui 
était  donné  sous  les  ordres  de  son  ancien  chef  Oudinot, 
étaient  des  témoignages  honorables  de  Testinie  dans 
laquelle  il  était  tenu.  Pour  quel  motif  refusa-t-il  c^  nou- 
veau commandement  ?  On  rignore.  Sans  doute  il  invo- 
qua des  raisons  de  santé  ;  ce  qu'il  y  a  de  certain  c'est 
qu'il  demanda  et  obtint  l'autorisation  de  quitter  l'armée 
et  de  se  rondnî  à  Paris,  où  il  demanda  le  commandement 
de  la  7«  division  militaire  (Grenoble).  C'est  là  qu'il  reçut 
la  réponse  suivante  : 

<  Au  Général  de  division  Dupas, 
rue  S^'Honoréf  N^  294. 

<  Paris,  29  Juillet  1809. 

€  Général,  j'ai  reçu  la  demande  que  vous  m'avez 
adressée,  pour  être  appelé  dans  la  7«  division  à  Greno- 
ble, et  être  payé  de  la  solde  d'activité.  Je  charge  le 
Conseiller  d'Etat,  Directeur  Général  des  revenus, 
de  prendre  les  dispositions  nécessaires  pour  ce  paiement, 
qui  vous  sera  continué  sur  le  pied  d'activité,  comme 
disponible  jusqu'à  nouvel  ordre. 

Le  Minûtre  de  la  Guerre:  Duc  de  Feltre.  (1)  » 

La  7«  division  militaire  n'étimt  pas  disponible,  Dupas 
ne  put  l'obtenir  et  il  resta  à  Paris: 


(1)  Arch.  Dubouloz-Dupas. 

i5b 


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—  226  — 

APPENDICE  AU  CHAPITRE  XI 
Forces  de  la  Division  Dupas  à  "Wagram 

GRANDE/RMÉE  9- Corps' 

^''7^'juiS^%œ  ''^    M»»  Bernadotte,  prince  de  Ponte-Corvo 

DIVISION    FRANÇAISE 

Dupas,  général  de  division. 

Aides  de  camp:    Barrai,  Bochaton,    chefs  d'escadrons, 
Grillât,  capitaine. 
Chef  d'état  major  :  Dumarest,  adjudant-commandant. 
Adjoints  à  Tétat-major:  Riquet,  Laveyne,  capitaines. 
Gency,  général  de  brigade. 
Aides  de  camp  :  Perrin,  Genège,  capitaines. 

2  bataillons  du  5^  léger,  colonel  Dubreton   .     1451  hommes 
Veaux,  général  de  brigade. 

Aides decamp:  Curnillon,  capitaine, Bou- 
gaud,  lieutenant. 

3  batiiillons  du  19«  de  ligne,  colonel  Aubry.     2,334  h. 

5  bataillons  de  la  force  de 3,785  h. 

Artillerie  divisionnaire 212  h. 

Total  de  la  division  française    3,997  h.  (1) 

Bataillons  saxons  placés  sous  les  ordres 
du  général  Dupas  : 

1  bataillon  grenadiers  Winckelmann  (laissé 

le 4  juillet  à  la  garde  de  l'île  Lobau)  .     .        579  h. 

1  bataillon  grenadiers  Radloff  (disparu  dans 

la  soirée  du  5  juillet) 583  h. 

1  bataillon  chasseurs  Metsch  (disparu  dans 

la  soirée  du  5  juillet) 572  h. 


Total  général    5,731  h. 

(1)  C'est  de  ce  chilFre  que  doivent  se  déduire  les  pertes  en  tués 
et  blessés  s'élevant  à  2,5r.^  h.,  subies  dans  les  journées  des  5  et  6 
juillet. 


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—  227  — 


CHAPITRE   XII 


RIPAILLÉ 
Août  1809  à  Décembre  1814 


Le  rôle  militaire  de  Dupas  est  terminé  par  son  refus  de  comman- 
der une  division  activ*».  —  Il  est  en  disponibilité  et  obtient  de 
se  fixera  Ripaille.  —  Appelé  à  l'armée  d'Allemagne  en  1813,  il 
est  remplacé  dans  son  commandement  et  obtient  de  se  retirer.  — 
Il  est  mis  d'office  à  la  retraite  le  25  novembre  1813.  —  Sa  de- 
mande de  reprendre  du  service  pour  repousser  l'invasion  n'est 
pas  accueillie. —  Liquidation  de  sa  pension  de  retraite. 

Le  refus  de  Dupas  de  prendre  le  commandement  de 
la  2«  division  du  corps  d'Oudinot  le  priva  de  la  récom- 
pense à  laquelle  il  pouvait  à  bon  droit  prétendre  après 
Wagram  :  le  grade  de  grand  officier  de  la  Légion  d'hon- 
neur. Il  resta  commandant  de  la  Légion  qui  était  compo- 
sée de  112  grands  officiers,  300  commandants,  450  offi- 
ciers, 5.250  chevaliers  (1);  notons  que  ce  nombre  ne  fut 
pas  augmenté,  mém(^  en  ISll  (2);  alors  que  nous 
avions  120  départements,  une  levée  annuelle  de 
377.000  hommes.  Aussi  Ton  reconnaissait  à  cette  épo- 
que quelque  mérite  aux  titulaires. 

Mais  revenons  à   Dupas:   Désormais    la    série  des 

jl)  Les  augmentations  de  1803  et  1805  donnèrent  un  total  de 
C.579  membres,  France  Militaire^  Histoire  des  Armées  françaises 
de  terre  et  de  mer,  par  A.  Hugo,  t.  3®. 

(2)  Suivant  les  chilfres  donnés  par  la  France  Militaire. 


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—  228  — 

grandes  faveurs  qu'il  avait  reçues  était  épuisée.  Napoléon 
n'aimait  pas  qu'on  se  retirât  :  ce  terrible  consomma- 
teur d'hommes  entendait  garder,  utiliser  jusqu'à  l'usure 
complète  de  leurs  forces,  les  chefs  dont  il  connaissait  la 
valeur  et  le  dévouement.  Dupas  avait  besoin  de  repos; 
le  6  avril  1810,  il  demande  au  Ministre  de  la  Guerre  (1) 
l'autorisation  de  se  retirer  chez  lui,  dans  le  domaine  de 
Ripaille,  dont  il  avait  fait  l'acquisition  le  10  avril  1809 
pour  le  prix  de  275,000  fr.  Le  12  avril  1810,  le  général 
renouvelle  sa  demande  (2)  en  ces  termes  : 

«  Souffrant  beaucoup  depuis  quelque  temps  d'un  rhume 
de  poitrine,  et  attaqué  depuis  longtemps  de  douleurs 
rhumatismales  insupportables  qui  me  privent  de  toute 
espèce  de  repos  et  altèrent  particulièrement  toutes  mes 
facultés,  j'avais  supplié  S.  A.  le  Prince  d'Eckmiihl,  de 
s'intéresser  auprès  de  S.  Exe.  pour  m'obtenir  un  congé 
avec  appointements  qui  puisse  me  faciliter  un  traitement 
qui  m'avait  été  conseillé  depuis  mon  retour  d'Egypte 
par  MM.  Desgenette,  médecin  en  chef  de  l'armée  et 
Larrey,  chirurgien-major  de  la  Garde  Impériale.  >  (Il 
explique  que  ce  congé  lui  permettra  de  faire  un  traite- 
ment à  Louôche,  ou  à  Aix,  ou  à  S*-Gervais) 

«  L'infatigable  activité  que  j'ai  toujours  déployée  dans 
les  guerres  et  des  blessures  graves  me  donnaient  lieu  de 
compter  sur  ce  congé.  Je  demande  le  congé  avec  appoin- 
tements, parce  que  de  tous  côtés  je  n'éprouve  que  des 
malheurs.  Dans  mon  domaine  de  Hanovre  l'on  m'a.  brûlé 
une  grange  neuve  pour  laquelle  on  me  demande  16.000  fr. 
et  5,200  fr.  pour  la  réparation  d'un  moulin.  En  West- 

(1)  Arch.  de  la  Guerre. 

(2)  Arch.  de  la  Gaerre. 


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—  229  — 

phalie  au  lieu  de  25,000  francs,  je  n'en  touche  que 
20,000,  etc.  » 

Enfin  le  25  avril  1810,  il  renouvelle  ses  instances  pour 
obtenir  un  congé  de  six  mois,  attendu  «  qu'il  est  privé 
de  sommeil  et  d'appétit  et  que  sa  vue  est  extrêmement 
fatiguée.  >  (1). 

Il  obtint  enfin  ce  congé  et  partit  pour  le  département  du 
Léman  ;  à  Genève  il  faillit  être  assassiné  ainsi  que  nous 
le  verrons  plus  loin,  et  rentra  à  Paris  en  vue  de  son 
mariage  avec  M"«  Raimond-Hullin.  A  la  veille  de  con- 
clure son  mariage  et  désirant  se  rendre  avec  sa  jeune 
femme  à  Ripaille,  il  demande  de  nouveau  Tautorisation 
de  quitter  Paris.  Le  duc  de  Fcltre  lui  répond  le  15  avril 
181 1  :  (2)  «  qu'il  peut  quitter  Paris,  se  rendre  où  il  vou- 
dra, étant  en  disponibilité  ;  seulement  qu'il  doit  faire 
connaître  sa  résidence  afin  de  pouvoir  lui  transmettre 
les  ordres  de  S.  M.  dans  le  cas  où  son  futur  mariage  ne 
le  retiendrait  pas  à  Paris.  » 

Le  30  avril  1811,  l'Empereur  signa  au  contrat  de 
mariage  (3);  les  nouveaux  époux  partirent  aussitôt  pour 
Ripaille. 

Dupas  avait  cinquante  ans,  était  criblé  de  blessures 
et  de  rhumatismes;  il  espérait  être  nommé  au  comman- 
dement de  la  7e  division  militaire  à  Grenoble,  mais  ce 


(1)  Archives  de  la  guerre. 

(2)  Arch.  Dubouloz-Dupas. 

(3)  On  assure  que  lorsque  Napoléon  signait  au  contrat  de  ma- 
riage d'un  général  de  division,  l'Empereur  ajoutait  à  cet  honneur 
une  somme  de  cent  mille  francs  dans  la  corbeille  de  la  fiancée. 
Mais  il  est  probable  que  ce  don  était  réservé  aux  généraux  qui 
étaient  encore  à  la  tête  d'une  division  active.  Or  Dupas  ne  son- 
geait alors  qu'au  repos,  et  quoiqu'il  fût  de  sa  vieille  bande^ 
M"*  Dupas  ne  reçut  pas  le  cadeau  impérial. 


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—  230  — 

poste  n'étant  pas  vacant,  il  resta  en  non  activité  à  Ri- 
paille où  il  eut  un  premier  fils  le  8  février  1812.  Il  fit 
part  de  cet  événement  au  Ministre  delà  Guerre  qui  lui 
adressa,  le  20  février  1812,  ses  félicitations  et  l'informa 
qu'il  devait  adresser  les  noms  et  prénoms  de  l'enfantau 
Comte  Fabre,  sénateur  et  procureur  général  du  Conseil 
du  Sceau  des  titres,  afin  de  conserver  le  majorât  consti- 
tué en  sa  faveur  (1). 

Quelque  temps  avant  son  mariage,  Dupas  recevait  la 
lettre  suivante  de  son  vieux  camarade  et  ami  de  1789, 
le  général  Dessaix  qui  commandait  à  Magdebourg  une 
division  du  corps  d'armée  de  Davout  : 

«  Magdebourg,  le  10  février  1811. 

«  J'ai  appris  avec  beaucoup  de  plaisir,  mon  cher 
Dupas,  que  tu  étais  parfaitement  rétabli  et  que  tu  avais 
heureusement  échappé  à  l'attentat  du  plus  misérable 
des  hommes  qui  pendant  si  longtemps  a  troublé  impu- 
nément le  repos  et  la  tranquillité  des  familles,  mais  qui 
bientôt  sera  réduit  par  la  justice  du  Gouvernement,  à 

l'impossibilité  de  nuire  et  sera  puni  de  ses  forfaits 

Nous  avons  souvent  parlé  de  toi  avec  le  maréchal  duc 
de  Reggio  (Oudinot)  ;  il  t'est  très  attaché  et  a  pris 
beaucoup  de  part  à  l'événement  terrible  dont  tu  as  failli 
devenir  la  victime.  »  (2). 

Cet  «  événement  terrible  »  était  la  tentative  d'assas- 
sinat commise  sur  la  personne  do  Dupas  le  29  septembre 
1810,  à  l'auberge  de  la  Couronne  à  Genève,  par  un  an- 
cien officier  allobroge,  parvenu  au  grade  d'adjudant- 

(1)  Arch.  Dubouloz-Dupas. 

(2)  Arch.  de  M.  A.  Folliet. 


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—  231  — 

commandant  (ou  colonel  d'êtat-major),  et  depuis  long- 
temps sans  emploi. 

Deux  jours  après  cet  attentat,  le  l^»"  octobre  1810, 
l'avoué  Chappuis,  do  Thouon,  en  faisait  le  récit  suivant 
dans  une  lettre  adressée  à  son  frôre,  commandant  de 

dragons  :   <  Le  colonel  M.   Ch a  fait  imprimer  des 

brochures  contre  le  général  Dupas;  aussi  ce  dernier, 
rayant  trouvé  à  Thôtel  de  la  Couronne  à  Genève,  le 
provoqua  en  duel;  M.  C.  accepte  cette  rencontre  pour 
l'après-midi,  mais  ne  s'étant  pas  trouvé  au  rendez-vous, 
il  fut  relancé  dans  l'hôtel  par  Dupas.  De  violentes  dis- 
cussions s'élevèrent  et  finirent  par  attirer  la  présence 
d'un  domestique.  M.  C.  sortit  un  poignard  de  l'une 
des  manches  de  son  habit  et  blessa  Dupas  et  ce 
domestique  assez  grièvement  pour  les  aliter  ptmdant 
quelque  temps.  (1)  Aux  cris  à  l'assassin,  poussés  parles 
deux  victimes,  la  gendarmerie  arrive  et  empoigne  M.  C. 
dont  Dupas  retenait  encore  le  bras.  »  (2). 

Sur  la  plainte  du  général  Dupas,  la  police  impériale 
envoya  l'auteur  de  cette  tentative  de  meurtre  d'abord 
dans  la  prison  de  S*-Malo,  puis  à  Brest,  où  il  resta  jus- 
qu'en 1814.  Il  en  sortit  au  retour  des  Bourbons  et  émi- 
gra  en  Amérique. 

Quelque  temps   après  cette  arrestation,  le  général 

(1)  «  J'ai  été  accusé  d'avoir,  le  29  septembre  1810,  dans  Tau- 
berge  de  la  Cîouronne  à  Genève,  réalisé  une  attaque  à  dessein  de 
tuer  M.  le  Cîomte  Dupas,  général  de  division.  Cet  officier  a  pré- 
tendu que  je  lui  avais  donné  un  coup  de  poignard  dans  le  ventre, 
et  qu'avec  la  même  arme  j'avais  blessé  le  nommé  Granjux  son 
domestique.  »  Lettre  du  colonel  C.  à  M"'«  la  Comtesse  D.  —  11  a 
l'effronterie  d'ajouter  que  Dupas  et  son  domestique  Granjux  «s'é- 
taient blessés  eux-mêmes,  afin  d'avoir  un  prétexte  plausible  de 
l'accuser  d'assassinat  !  »  (Arch.  de  M.  A.  Folliet). 

(2)  Archives  de  M.  Jules  Guyon. 


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—  232  — 

Dessaix  écrivait  à  soq  ami  Dupas,  de  Magdebourg,  le 
7  avril  1811  :  «  J'ai  reçu  une  lettre  de  mon  respectable 
père  qui  me  faisait  part  de  l'arrestation  et  de  la  trans- 
lation à  S*-Malo  du  brigand  dont  tu  as  failli  être  victime  ; 
il  me  disait  que  cet  acte  de  justice  du  Gouvernement 
avait  été  une  mesure  de  sûreté  pour  tous  les  honnêtes 
gens.  En  faisant  connaître  sur  le  compte  de  ce  scélérat 
la  vérité  au  Gouvernement,  tu  as  rendu  à  tout  le  dé- 
partement et  à  nombre  do  familles  en  particulier,  le 
service  le  plus  signalé  ;  je  t'en  ai  pour  mon  compte  la 
plus  vive  reconnaissance.  » 

L'officier  auteur  de  l'attentat  était  une  sorte  de  dé- 
traqué, depuis  longtemps  mal  famé  ;  il  n'avait  fait  que 
très  peu  de  temps  partie  delà  Légion  allobrogo;  il  cou- 
rait sur  son  compte  de  fort  vilaines  histoires  de  toutes 
sortes.  A  raison  de  certains  actes  d'indélicatesse.  Dupas 
l'avait  tenu  à  distance  et  ne  lui  avait  point  caché  son 
mépris.  L'autre  s'était  vengé  en  faisant  circuler  des 
écrits  anonymes  où  Dupas  était  accusé  d'avoir  soustrait 
frauduleusement  des  pièces  d'argenterie  et  du  linge  à 
un  soldat  nommé  Floret,  deCusy  près  Dou vaine,  qui  avait 
été  tué  au  siège  de  Toulon.  La  fausseté  de  cette  accusa- 
tion fut  bien  vite  établie  ;  aussi,  le  frère  de  Floret  qui 
avait  été  poussé  par  le  colonel  C.  à  répandre  ces  calom- 
nies, craignant  des  poursuites  judiciaires,  se  rendit  le 
3  mars  1811  chez  le  notaire  Gharmot  pour  rétracter  tous 
ses  dires.  Le  10  du  même  mois,  le  Préfet  de  police  infor- 
mait Dupas  de  cott(^  rétractation  (»tdu  résultat  de  l'enquête 
administrative  de  laquelle  il  résultait  que  Floret  avait 
porté  ces  accusations  à  l'instigation  du  colonel  C.  (1). 

(l)Arch.  Diibouloz-Dupas. 


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—  233  — 

Le  jury  d'accusatioD  de  Genève  le  déclara-t-il  non 
coupable,  comme  il  l'affirmait  ?  (1).  Ce  qui  est  certain 
c'est  que  le  coupable  ne  passa  pas  en  jugement  et  qu'il 
fut  détenu  jusqu'en  1814  dans  les  prisons  d'Etat  par 
ordre  de  la  police  impériale.  D'ailleui-s  une  fois  enfermé, 
le  colonel  fit  les  plus  plates  excuses  à  ceux  qu'il  avait  le 
plus  odieusement  outragés.  Dans  l'une  de  ses  lettres  au 
général  Dupas,  il  cherche  à  se  disculper  de  l'un  des  actes 
d'indélicatesse  qui  lui  avait  valu  le  mépris  de  ce  général  ; 
de  sa  prison  il  écrit  à  Dupas  le  3  décembre  1812  :  (2) 
«  En  l'an  VI  (1798)  l'ex-gouverneur  Tscharner,  com- 
mandant les  troupes  bernoises,  viola  l'armistice  conclu 
avec  les  Français.  Etant  parti  avec  1,800  hommes  pour 
l'attaquer,  je  fus  assez  heureux  pour  surprendre  ses 
postes,  enlever  son  artillerie  et  le  refouler.  Quand  je  fus 
de  retour  à  Aigle,  j'appris  que  le  général  Tscharner  n'a- 
vait tenté  cette  attaque  que  pour  reprendre  son  mobilier 
déposé  dans  une  maison;  j'en  fis  la  recherche  après  sa 
capture  ;  le  linge  fut  employé  au  pansement  des  blessés, 
l'argenterie  fut  inventoriée  ot  mise  dans  deux  grandes 
caisses,  sauf  une  très  petite  partie  qui  fut  aflfectée  au 
service  de  ma  table.  Le  tout  fut  envoyé  au  quartier  gé- 
néral à  Lausanne.  Lorsque  je  partis  d'Aigle  pour  l'Italie, 
je  me  servis,  il  est  vrai,  de  la  voiture  de  Tscharner  et  de 
ses  deux  chevaux  ;  mais  c'était  pour  remplacer  une  ber- 

(1)  Arch.  A.  Folliet.  Lettre  déjà  citée.  On  ne  sait  pas  pourquoi 
C.  ne  passa  pas  on  jugement,  car  l'Empereur  écrivait  le  28  octo- 
bre 1810  au  général  Ciarke,  Ministre  de  la  guerre  :  «  11  me  semble 
que  le  colonel  C.  étant  au  service  et  ayant  assassiné  son  général 
doit  être  traduit  devant  une  Commission  militaire.  Autant  que  Je 
puis  m'en  souvenir  c'est  un  horrible  sujet  que  cet  homme-là.  » 
{Lettres  inédites  de  Napoléon,  2«  vol.  1897). 

(2)  Arch.  Dubouloz-Dupas. 


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—  234  — 

line  que  Ton  m'avait  prise  eo  Tan  II  (1794),  à  Trouillas, 
pour  le  service  des  ambulances  de  l'armée  des  Pyréoées- 
Orieutales.  C'est  pour  le  môme  motif  que  j'ai  cru  pouvoir 
garder  les  deux  chevaux,  pour  compenser  les  deux  d'un 
bien  plus  grand  prix  qui,  avec  selles,  brides,  harnache- 
ments, me  furent  réquisitionnés  au  moment  de  ma  des- 
titution comme  chef  de  brigade  par  le  Comité  de  Salut 
public.  Je  n'ai  donc  rien  pris,  et  s'il  existe  quelque 
irrégularité  dans  ma  conduite,  elle  s'est  trouvée  couverte 
par  la  légitimité  de  ma -créance,  que  la  République  vou- 
lait me  rembourser  avec  des  assignats  sans  valeur.  » 

(Signé  M.  C). 

Une  seconde  lettre  du  prisonnier,  datée  du  2  octobre 
1813,  dit  en  autres  choses  à  Dupas  :  «  Ecrivez  pour  moi 
une  lettre  à  mon  frère  le  baron  ;  joignez-vous  à  lui  pour 
me  faire  remettre  en  activité  ;  vous  rendrez  à  l'armée 
un  bon  allobroge  et  à  l'Empereur  l'un  de  ses  sujets  les 
plus  dévoués.  Alors,  tous  mes  maux  seront  effacés,  et 
ma  reconnaissance  égalera  la  grandeur  du  service  que 
vous  m'aurez  rendu. 

Forteresse  S*-Michel  (Manche),  2  octobre  1813. 

M.  C,  adjudant-commandant.  »  (1). 

Quelques  jours  après,  le  8  octobre  1813,  le  docteur  en 
médecine  Hedouin  écrivait  à  Dupas  :  «  M.  C.  détenu  à 
la  maison  de  force  du  Mont-S'-Michel,  implore  votre 
pardon  et  vous  prie  d'oublier  le  passé,  il  est  dévoré  de 
remords,  etc.  »  On  sait  que  le  prisonnier  fut  mis  en 
liberté  à  la  Restauration  ot  qu'il  passa  on  Amérique. 

(1)  Arch.  Dubouloz-Dupas.  Le  grade  d'adjudant-commandant, 
sous  l'Empire,  était  celui  de  colonel  d'état-ma^jor,  qui  sous  la  Ré- 
publique était  le  grade  d'adjudant-général  chef  de  brigade. 


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—  235  — 

Maïs  revenons  au  général  Dupas  retiré  à  Ripaille 
pendant  les  dernières  années  de  l'Empire,  avec  le  trai- 
tement d'activité,  mais  dans  la  position  de  «  disponible  ». 

En  1812,  il  fut  question  de  le  nommer  au  commande- 
ment de  la  27®  division  militaire  qui  était  celle  de  Turin, 
alors  chef-lieu  de  département  français  ;  mais  une  note 
dû  Ministre  de  la  guerre  (Clarke  duc  de  Feltre)  porte  : 
«  Attendre  que  l'Empereur  ait  prononcé  sur  la  proposi- 
tion relative  au  général  Puthod.  >  Et  Dupas  ne  fut  pas 
nommé  (l). 

Après  les  désastres  de  Russie  et  l'invasion  de  l'Alle- 
magne par  les  alliés,  on  se  souvint  de  son  antique  va- 
leur. Le  25  juin  1813,  ordre  du  Ministre  de  la  guerre  de 
se  rendre  en  poste  à  M  ayence,  au  corps  d'observation 
de  Gouvion  S*-Cyr.  Le  5  juillet.  Dupas  s'empresse  de 
répondre  :  «  Quoique  rempli  de  douleurs  rhumatismales, 
je  n'ai  d'autre  volonté  que  celle  d'être  utile  et  pouvoir 
servir  S.  M.  D'après  vos  ordres,  j'ai  l'honneur  de  vous 
prévenir  que  je  pars  pour  la  destination  que  V.  Exe. 
vient  de  m'iudiquer,  j'ai  cependant  l'honneur  d'observer 
que  je  suis  sans  chevaux  et  sans  aide-de-camp.  »  (2). 

Le  corps  de  Gouvion  S*-Cyr,  sous  les  ordres  duquel 
Dupas  était  placé,  quittait  le  Rhin  pour  s'avancer  sur 
l'Elbe.  Mais,  au  moment  où  Napoléon  confiait  à  Gouvion 
S*-Cyr  la  mission  d'arrêter  les  Autrichiens  à  l'entrée  de 
la  Saxe,  c'est-à-dire  le  9  août,  Dupas  était  subitement 
remplacé  par  un  jeune  général,  Mouton-Duvernet,  et  il 
était  envoyé  lo  30  août  à  Wurtzbourg,  pour  se  mettre 


(1)  Arch.  de  la  Guerre. 

(2)  Arch.  de  la  Guerre.  Dupas  avait  offert  en  1812  ses  quatre 
chevaux  à  TEtat,  à  titre  gratuit  pour  la  remonte  de  la  cavalerie. 


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—  236  — 

à  la  disposition  du  maréchal  Augereau  qui  commandait 
le  corps  de  réserve.  De  Wurtzbourg,  Augereau  écrit  le 
9  septembre  au  duc  de  Feltre  «  qu'il  n'a  aucun  com- 
mandement à  donner  au  général  Dupas,  tous  ayant  été 
donnés  à  des  génératix  désignés  par  r Empereur  ;  et 
que  d'ailleurs  la  santé  de  ce  général  le  rendrait  incapa- 
ble d'activité  en  ce  moment  ;  que  dans  ces  conditions,  le 
général  Dupas  lui  a  demandé  l'autorisation  de  rentrer 
en  France.  »  (1). 

Du  21  septembre,  ordre  du  Ministre  de  la  guerre  «  au 
général  Dupas  qui  revient  de  la  grande  armée,  de  se 
rendre  dans  le  département  du  Mont-Blanc  où  il  fait 
ordinairement  sa  résidence.  »  (2). 

Dupas  fut  très  sensible  à  cette  série  d'humiliations, 
qui  fut  suivie  d'une  dernière,  définitive  celle-là.  L'Em- 
pereur ne  lui  pardonnait  pas  de  l'avoir  quitté  ;  il  le  fit 
mettre  d'ofïico  à  la  retraite  le  25  novembre  1813. 

Cependant,  à  la  suite  du  désastre  de  Leipzig,  les 
armées  alliées  avaient  envahi  les  frontières  de  la  France  ; 
l'armée  autrichienne  dite  du  Midi  franchit  de  force  la 
frontière  suisse  et  la  division  du  général  Bubna  s'em- 
para de  Genève  et  du  département  du  Léman.  Dupas  se 
rendit  à  Grenoble  d'où  il  écrivit  au  Ministre  de  la 
guerre  le  1er  janvier  i814  : 

«  Les  circonstances  du  jour  m'ayant  forcé  d'abandon- 
ner ma  propriété  en  toute  hâte  avec  ma  famille,  j'ai 
l'honneur  de  prévenir  V.  Exe.  que  je  suis  à  Grenoble 
où  j'attends  ses  ordres;  si  l'on  croit  que  je  puisse  rendre 


(1)  Arch.de  la  Guerre. 

(2)  Arch.  de  la  Guerre.  Le  Ministre  aurait  dû  écrire  Léman  au 
lieu  de  Mont-Blanc. 


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—  237  — 

quelques  services  dans  un  pays  où  une  terreur  panique 
a  fait,  tourner  la  tête  généralement  à  tout  le  monde.  J'ai 
reçu  la  lettre  de  V.  Exe.  qui  m'annonce  ma  retraite, 
quoique  je  ne  Taie  point  sollicitée  ;  je  ne  laisserai  pas 
que  de  m'y  conformer,  quelque  sensible  que  soit  pour 
moi  cette  nouvelle  humiliation.  »  (1). 

Il  se  rendit  ensuite  à  Lyon  auprès  du  maréchal  Auge- 
reau,  et  lui  demanda  de  l'employer  dans  l'armée  de 
Lyon  dont  le  duc  de  Castiglione  venait  de  prendre  le 
commandement.  Mais  les  commandements  de  ses  divi- 
sions actives  étaient  donnés,  et  à  ce  moment  même 
partaient  de  Paris  la  nomination  du  général  Dessaix  au 
commandement  de  la  levée  en  masse  du  Mont-Blanc  et 
du  Léman  ainsi  que  la  nomination  du  général  Marchand 
au  commandement  de  l'Isère  et  de  la  7®  division  militaire, 
en  remplacement  du  général  Delaroche,  destitué  pour 
la  panique  dont  il  donnait  l'exemple.  Le  Ministre  de  la 
guerre  mit  du  temps  à  répondre  à  Augereau  qui  avait 
proposé  Dupas  pour  commander  dans  le  Mont-Blanc  et 
le  Léman,  proposition  dans  tous  les  cas  arrivée  trop 
tard.  Ce  n'est  que  le  15  février  1814  que  le  Ministre  de 
la  guerre  donna  l'ordre  de  répondre  à  Augereau  dans 
le  sens  de  la  note  suivante  :  «  Le  général  Dupas  a  été 
admis  à  la  solde  de  retraite  le  25  novembre  1813,  parce 
que  S.  M.  a  jugé  elle-même  qu'il  ne  convenait  point  à  un 
service  actif.  On  ne  pense  pas  qu'il  y  ait  aucune  suite 
à  donner  à  la  demande  du  duc  de  Castiglione.  »  (2). 

Dupas  fut  donc  forcé  d'assister  en  simple  spectateur 
aux  graves  événements  de  1814  et  de  1815  qui  sépa- 

(1)  Arch.  de  la  Guerre. 

(2)  Arch.  de  la  Guerre. 


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—  238  — 

rèrent  pour  46  ans  sa  patrie  de  la  France.  Quoique  mis 
d'office  à  la  retraite  par  la  volonté  impériale,  le  25  no- 
vembre 1813,  la  liquidation  do  sa  pension  se  fit  très 
longtemps  attendre  par  suite  des  événements  politiques; 
il  continua  à  toucher  son  traitement  d'activité  jusqu'au 
1er  novembre  1814  ;  à  cette  date,  commença  à  courir  sa 
pension  de  retraite,  liquidée  à  6,564  francs  (1)  en  fixant 
son  domicile  officiel  au  Grand  Sacconnex  (pays  de  Gex) 
pour  jouir  de  la  pension  française. 


(1)  Soult,  Min.  de  la  Guerre,  à  Dupas,  8  janvier  1815,  arch. 
Dubouloz-Dupas. 


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—  239  — 


CHAPITRE  XIII 


Dernières  années  (1815  à  1823) 


L'Europe  coalisée  avait  replacé  la  Savoie  sous  Tauto- 
rité  de  ses  anciens  souverains,  rentrés  dans  leurs  Etats 
à  la  faveur  de  l'invasion  autrichienne.  Leur  premier 
soin  fut  de  restaurer  Tétat  de  choses  antérieur  à  1792  et 
de  renforcer  ces  institutions  surannées  par  un  régime 
policier  que  TEdit  royal  de  1814  appelle  Biùon-governo  ; 
les  commandants  de  place  et  au-dessous  d'eux,  les  cara- 
biniers royaux,  étaient  investis  des  pouvoirs  les  plus 
étendus.  Les  vieilles  rancunes  de  la  caste  privilégiée 
remise  en  honneur  et  replacée  au  pouvoir,  les  haines 
contre  les  hommes  de  la  Révolution  et  de  l'Empire  se 
donnèrent  libre  cours. 

En  outre,  la  fortune  acquise  par  le  général  Dupas,  son 
domaine  de  Ripaille  surtout,  lui  suscitèrent  des  envieux 
et  des  malveillants.  Il  s'en  aperçut  lors  de  la  seconde 
invasion,  celle  de  1815  ;  il  s'agissait  de  loger  les  mala- 
des d'une  nombreuse  armée  autrichienne  :  un  incident 
qui  se  produisit  alors  à  Thonon  donne  la  mesure  des 
mesquines  tracasseries  auxquelles  il  fut  alors  exposé.  Le 
3  juillet  1815,  le  Conseil  de  ville  est  présidé  par  l'Inten- 


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—  240  — 

dant,  assisté  par  M.  Jaillet  de  S*-Cergues,  juge-maje, 
et  composé  de  MM.  d'Antioche,  l®**  syndic,  Descombes, 
2e  syndic,  Dapérier,  Dubouloz-Ribout,  Dubouloz  Thomas, 
Bron,  juge,  Fornier,  Carron,  Michaud,  Guinet,  Pinget, 
De  Lort. 

«  Les  commissaires  des  hôpitaux  militaires  se  pré- 
sentent au  Conseil,  où  ils  déclarent  que  suivant  Tordre 
du  général  en  chef,  baron  Frimont,  ils  ont  choisi  : 
l<ï  L'Hospice  civil  de Thonon,  pour  recevoir  200malades; 
2»  Le  Collège  des  Bar nabites,  p'^en  recevoir  400        » 
3°  LeCouventd»capucins(mais.Anthoinoz)  100        y> 
40  Ripaille  300        » 

«  Le  Conseil  représente  que  les  malades  placés  dans 
l'intérieur  de  la  ville,  surtout  chez  les  Barnabites,  em- 
pêcheront l'ouverture  du  Collège  et  provoqueront  des 
maladies  dans  la  ville.  Pour  ces  motifs,  le  Conseil  sug- 
gère aux  commissaires  de  transporter  les  400  malades 
que  l'on  destinait  aux  Barnabites  dans  Ripaille  qui, 
ajoute-t-il,  en  peut  contenir  plus  de  600,  ce  qu'ils  pour- 
ront apprécier,  en  faisant  une  visite  plus  scrupuleuse 
des  bâtiments.  » 

Les  commissaires  s'y  rendirent  avec  Amable  de 
Ruphy,  mais  malgré  Tavis  de  ce  dernier,  ils  reconnurent 
l'impossibilité  de  s'y  rallier  et  persistèrent  dans  leur 
première  résolution. 

Après  la  seconde  et  définitive  victoire  de  la  coalition, 
les  petites  vexations  tournèrent  à  la  persécution.  «  Rien 
n'était  plus  affligeant  que  la  position  des  anciens  officiers 
savoisiens  au  service  de  France.  Ceux  qui  étaient  restés 
en  France  étaient  mis  en  surveillance  et  envoyés  de 
résidence  en  résidence  avec  la  demi  solde.  Ceux  qui 


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—  241    - 

rentrèrent  en  Savoie  étaient  soumis  à  une  surveillance 
plus  humiliante  encore»  et  devaient  s(»  présenter  tous 
les  huit  jours  devant  h*  commandant  de  place*  de  la 
province.  »  (1). 

En  France  sévissait  la  terreur  blanche.  Le  maréchal 
Brune  éUiit  massiicré  à  Avignon  ;  Ney,  Mouton-Duver- 
net  et  tant  d'autres  braves,  étaient  fusillés.  A  Grenoble 
et  à  Lyon  (7«  et  11)«  divisions  militaires),  commandaient 
deux  généraux  de  gucîrre  civile,  Donnadieu  et  Canuel. 
anciens  terroristes,  qui,  à  défaut  du  courage  qu'ils  n'a- 
vaient jamais  montré  contre  l'ennemi,  avaient  déployé 
contre  des  Français  la  férocité  de  leur  caractère  (2).  Ces 
deux  brigands  à  grosses  épauhîttes,  auxquels  le  gouver 
nement  des  Bourbons  avait  eu  l'impudeur  de  confier 
d'importants  commandements  réservés  jusqu'alors  a  de 
vieux  braves  couverts  d'honorabl(»s  blessures,  profi- 
tèrent de  la  folle  tentative  de  Paul  Didier  sur  Grenoble, 
le  5  mai  ISIG,  pour  inventer  la  prétendue  conspiration 
dite  des  patriotes  de  18 16 y  et  épouvanter  le  Dauphiné 
et  le  Lyonnais  par  des  fusillades,  des  emprisonnements 
et  des  dénonciations  sans  fin.  Sur  les  dénonciations  de 
ces  deux  misérabh^s,  le  gouvernement  piémontais  déjà 
eflrayé  par  les  rapports  des  réactionnaires  du  pays,  prit 
peur  et  décida  l'arrestation  du  général  Dessaix  et  l'ex- 
pulsion du  général  Dupas. 

(lU.  Dessaix  et  A.  Folliet,  Le  général  Dessaix. 

f2)  Canuel  :  «  Faisant  fusiller  en  sa  présence  toutes  les  victimes 
de  Quiberon,  et  portant  à  son  chapeau  et  comme  cocarde  des 
oreilles  de  Vendéen.  » 

Donnadieu  :  «  Tn  »j:entilliomme  vendéen  partait  p(>ur  Témigra- 
tion,  Donnadieu  courut  l'attendre  au  coin  d'un  bois,  Ty  surprit 
à  la  nuit  tombante,  le  tua  et  revint  chargé  d'une  tirelire  qui,  en 
or,  contenait  une  somme  considérable.  »  (Général  Thiébault, 
Mémoires  y  t.  v.). 

i6h 


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-  242  — 

Dupas  avait  son  domicile  légal  au  Grand-SaccouDex 
depuis  le  12  janvier  1815,  ainsi  que  cela  résulte  d'un 
certificat  du  maire  de  Fernex,  Marinet,  en  date  du 
8  avril  1 810  (1).  Le  20  mai  1810,  un  sous-officier  de 
carabiniers  convoque  insolemment  à  la  caserne  le  géné- 
ral de  division  Dupas  el  lui  signifie  sans  autre  formalité 
son  expulsion  du  territoire  des  Etats  de  S.  M.  La  nuit 
suivante  (du  20  au  21  mai),  le  général  Dessaix  est  arrêté 
à  Marclaz  en  grand  secret  et  avec  des  précautions  ex- 
traordinaires, et  conduit  en  poste  à  Fénestrelles,  la 
prison  d'Etat  du  Piémont. 

En  recevant  la  notification  de  son  expulsion  et  séance 
tenante.  Dupas  écrit  au  général  d'Andezeno,  comman- 
dant général  du  duché  de  Savoie  : 

«  Le  général  comte  Dupas,  demeurant  à  Ripaille,  a 
rhonneur  de  vous  exposer  :  que  le  20  courant  il  a  reçu 
un  ordre  de  M  Préver,  maréchal  des  logis  dans  les 
carabiniers  royaux,  pour  qu'il  se  rende  chez  lui.  Malgré 
sa  première  surprise,  malgré  le  grade  de  général  qu'il 
tient  d'un  souverain  allié  de  S.  M.,  malgré  les  ordres 
dont  il  est  décoré,  il  a  cru  devoir  se  rendre  tout  de  suite 
à  l'invitation  de  cet  officier  de  S.  M.;  il  y  reçut  un 
ordre  ainsi  conçu  : 

//  est  expressément  enjoint  au  général  Dupas  de 
sortir  des  Etats  de  S.  M.  le  roi  de  Sardaigne  dans  le 
délai  de  24  heures  ;  de  ne  plus  y  rentrer  sans  être 
muni  d'un  passeport  en  règle  qui  sera  vLsé  en  ce  mo- 
ment par  le  commandant  des  carabiniers  royaiur  ré- 
sidant à  Chéne-T/iônex, 

Thonon,  le  20  Mai  1816. 

Préver,  maréchal  des  logis. 

(1)  Archives  Dubouloz-Dupas. 


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—  24.S  — 

€  Le  soussigné  a  été  élevé  comme  militaire  dés  sa 
plus  tondre  jeunesse  ;  désirant  de  se  retirer  dans  sa 
patrie,  il  a  acheté  Ripaille  qu'il  n'a  cessé  d'habiter  de- 
puis la  fin  de  lSl:î.  Ayant  en  octobre  1814,  sa  pension, 
le  ministère  français  lui  fit  demander  le  lieu  qu'il  avait 
choisi  sur  le  territoire  français  pour  la  toucher.  Cette 
mesure  fut  acceptée  par  tous  les  retraités,  habitant  la 
Savoie  ou  la  Suisse,  sans  qu'ils  aient  songé  à  renoncer 
à  leur  patrie  d'origine,  à  leur  qualité  de  sujets  de  S.  M. 
En  1814,  1815,  il  s'est  soumis  aux  nombreuses  réquisi- 
tions de  Tarméi^  autrichienne,  même  en  allant  souvent 
au-delà.  Toutes  ses  économies  ont  d'ailleurs  toujours  été 
consacrées  à  répandre  le  bien-être  dans  la  classe  ou- 
vrière, sans  qu'il  se  soit  jamais  occupé  des  agissements 
faits  auprès  des  pouvoirs  de  la  Suisse,  pour  nous  réunir 
à  œ  dernier  pays  ou  pour  obtenir  la  suppression  des 
douanes. 

«  J'ai  élu,  il  est  vrai,  mon  domicile  en  France,  parce 
que  c'est  là  que  je  retire  ma  modeste  pension.  Vous 
n'ignorez  pas  d'ailleurs  que  tous  les  anciens  officiers 
demandaient  qu'un  arrangement  fut  tenté  auprès  des 
diverses  puissances,  afin  que  chacune  d'elle  paye  les 
retraites  de  ses  propres  sujets  ;  cela  était  désirable  ; 
l'on  aurait  ainsi  fait  disparaître  les  épithètes  de  blem 
et  de  blancs. 

*  Je  ne  suis  jamais  entré  dans  le  rang  des  factieux  ; 
soldat,  jt3  n'ai  jamais  suivi  d'autres  conseils  que  ceux 
de  mon  devoir;  l'armée  me  connaissait  as.sez,  comme 
n'ayant  jamais  flatté  personne,  comme  m'étant  attiré  des 
disgrâces  par  suite  d'une  grande  franchise. 

«  Ma  pension,  mes  services,  mes  grades,  décorations. 


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—  244  — 

dotations,  ne  sont  pas  dus  aux  intrigues,  je  les  dois  à 
quelques  actes  de  dévouement,  aux  services  que  j'ai 
rendus,  et  rien  de  plus «  Pour  ces  motifs  l'expo- 
sant espère  que  vous  voudrez  bien  lever  Tordre  de  ne 
plus  rentrer  dans  les  Etats  do  S.  M.  Si  cependant 
S.  Exe.  ne  pouvait  pas  lever  cette  défense,  il  la  conjure 
de  lui  permettre  de  séjourner  pendant  six  mois  dans  sa 
propriété  de  Ripaille  pour  y  faire  les  récoltes  et  mettre 
un  peu  d'ordre  dans  ses  affaires. 

<  Votre  Excellence  est  priée  de  me  protéger,  m'enga- 
geant  à  faire  des  efforts  pour  mériter  cette  faveur » 

En  attendant  la  réponse  à  sa  réclamation,  Dupas  fut 
expulsé  de  la  Savoie  et  réfugié  dans  le  département  de 
TAin  ;  il  renouvela  ses  instances  le  !«»•  juin  :  il  se  plaint 
amèrement  des  dénonciations  des  réactionnaires  qui  ne 
pouvaient  se  résigner  à  laisser  vivre  en  paix  les  vieux 
guerriers  dont  le  sang  avait  été  glorieusement  répandu 
pour  la  France  de  la  Révolution. 

«  J'ai  toujours  obéi  à  Thonon  aux  réquisitions  ;  les 
dépassant  même,  j'ai  fourni  aux  troupes  les  chaudières 
de  Ripaille  pour  leur  nourriture  à  la  suite  de  l'incendie 
de  l'Hôtel  de  Ville  ;  jamais  je  n'ai  porté  de  plaintes  sur 
le  chiffre  des  réquisitions  arbitraires  que  m'ont  imposé 
quelques  habitants  par  haine  des  services  que  j'ai  rendus 
à  la  France.  Cependant,  lorsque  les  troupes  autrichien- 
nes réquisitionnèrent  tous  les  fours  de  la  commune,  j'ai 
offert  ceux  de  Ripaille  ainsi  que  l'affouage  et  le  service 
de  mes  domestiques  pour  adoucir  les  misères  des  habi- 
tants de  Thonon,  Concise  et  Vongy  ;  cela  gratuitement. 
Mes  aumônes  sont  connues  des  pauvres  qui  tous  répè- 
tent n'en  avoir  jamais  reçu  autant  et   avec  moins  d'os- 


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—  245  — 

tentation  ;  n'ai-je  pas  arrache  de  la  misère  une  foule 
d'ouvriers  à  Thonon  et  dans  les  hameaux  ? 

«  Ripaille,  il  est  vrai,  rapporte  cinq  à  six  mille  francs 
aujourd'hui,  parce  que  je  l'ai  amélioré  en  dépensant  en 
faveur  des  ouvriers  plus  de  cent  quatre- vingt  mille  fr. 

«  Je  suis  la  victime.  Monsieur  le  Gouverneur,  de  la 
haine  jalouse  de  plusieurs  habitants,  parce  que,  possé- 
dant un  pou  do  fortune,  je  ne  dois  rien  à  personne  ; 
parce  que  ce  que  je  possède,  je  le  dois  à  mon  travail,  à 
mon  activité,  à  l'ordre  d'une  jeune  épouse  que  j'aime 
tendrement  ;  épouse  que  j'ai  dû  laisser  seule  à  Ripaille, 
sans  que  l'on  m'ait  seulement  donné  le  temps  de  mettre 
un  peu  d'ordre  dans  mon  exploitation. 

«  Telle  est  la  cause  de  l'envie,  des  haines  d'une  certaine 
classe  méprisable  des  habitants  de  Thonon  ;  elle  ne  se 
conduirait  certainement  pas  ainsi  si  V.  E.  était  ici,  parce 
qu'elle  saurait  me  protéger  contre  ses  attaques  injustes. 

«  Mais  comment  S.  M.  a-t-elle  pu  croire  qu'un  vieux 

soldat  qui  n'a  jamais  forfait  à  l'honneur, se  soit 

compromis  en  commettant  les  lâchetés  dont  on  l'accuse  ? 
Cette  idée  seule  révolte  l'àme  de  tout  homme  d'honneur. 

«  Je  me  suis  retiré  à  Ripaille,  vivant  isolé,  sans  au- 
cune relation,  afin  de  me  mettre  à  l'abri  des  dénoncia- 
tions de  certaines  personnes  occupant  des  emplois 
qu'ils  ne  savent  pas  faire  respecter. 

«  L'on  me  prête  de  grandes  richesses,  elles  viennent  de 
ma  femme  qui  n'a  actuellement  que  l'espérance  de  re- 
cevoir de  l'un  de  ses  oncles  six  à  sept  cent  mille  fr.  (1). 

(1)  Dupas  avait  perdu  ses  dotations  sur  lesquelles  il  avait  éco- 
misé  275,000  francs  qui  lui  servirent  à  l'achat  de  Ripaille.  Quant 
à  sa  femme,  nièce  du  général  Hulin,  elle  ne  reçut  jamais  les 
600,000  fr.  que  lui  avait  promis  son  oncle,  mort  en  1843. 


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—  246  — 

«  Cette  situation  m'autorise  à  déclarer  que,  dans  au- 
cun cas,  je  ne  me  mêlerai  de  questions  politiques.  S.  M. 
vous  a  fait  entendre  que  Ripaille  avait  une  grande  va- 
leur ;  si  S.  M.  désire  rentrer  en  possession  de  ce  do- 
maine, je  suis  tout  disposé  à  le  lui  céder,  au  prix  de 
mon  acquisition  ;  mais  en  me  tenant  compte  des  amé- 
liorations telles  qu'elles  seront  reconnues  par  des 
experts.  En  bon  et  loyal  sujet,  je  serais  charmé  de  faire 
tout  ce  qui  pourrait  être  agréable»  au  gouvernement 
des.  M. 

«  Cependant,  si  tous  ces  sacrifices  ne  devaient  pas  me 
garantir  contre  la  malveillance  et  les  persécutions,  je 
me  déciderais  alors  à  vendre  tout  ce  que  je  possède  pour 
rentrer  en  France,  ma  patrie  adoptive. 

«  Ma  conviction  est  que  toutes  ces  tracasseries,  lc*s 
malheurs  qui  me  frappent,  proviennent  de  ces  mornes 
familles  qui  auraient  converti,  sans  une  intervention 
puissante,  les  bâtiments  de  Ripaille,  en  hôpital,  qui 
voulaient  occuper  l'unique  chambre  que  j'occupe,  s'em- 
parer de  celle  habitée  par  ma  femme  qui  se  trouvait  alors 
en  couches.  Aussi  je  supplie  V.  Exe.  de  me  protéger,  de 
me  permettre  de  séjourner  pendant  quelques  jours  à 
Ripaille,  afin  de  régler  mes  affaires  et  mettre  ce  domaine 
en  vente.  Alors  je  demanderai  la  protection  garantie  par 
les  traités  et  je  pourrai  prétendre  à  jouir  d'une  grande 
tranquillité.  » 

Cette  longue  lettre  se  termine  par  Ténumération  des 
titres  mérités  en  France  :  après  Austerlit^,  général  de 
division  et  (îrand  Cordon  du  Lion  d'Or  de  Bavière  : 
après  Friediand,  comte  de  l'Empire  avec  cinquante 
mille  livres  comptant  et  cinquante  mille  livres  de  dota- 


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—  247  — 

tioDS  OD  biens  fonds,  plus  un  supplément  de  cinq  mille 
et  quelques  francs  ;  après  sa  dernière  campagne, 
Chevalier  de  la  Couronne  de  fer. 

Le  Gouverneur  do  Savoie  mit  fin  à  ces  tracasseries  en 
répondant  à  Dupas,  le  7  juin  1816  : 

«  J'ai  vu  avec  peine  renoncé  que  vous  m'avez  fait,  le 
l^"^  juin  1816,  du  mode  avec  lequel  le  maréchal  des  logis 
vous  a  fait  connaître  mes  dispositions,  et  j'en  ai  un  vé- 
ritable regret. 

€  Je  n'avais  pas  besoin  des  détails  que  vous  m'avez 
donnés,  pour  être  convaincu  do  votre  manière  de  penser, 
et  votre  séjour  à  Ripaille  ne  peut  à  moins  que  d'être 
agréable  au  Gouvernement,  qui,  bien  loin  de  vous 
inquiéter,  sera  toujours  disposé  à  vous  rendre  les  témoi- 
gnages dus  au  rang  que  vous  occupez  personnellement 
et  à  si  juste  titre. 

€  Veuillez  cependant  vous  pourvoir  en  France  d'un 
passe-port,  cette  mesure  étant  générale,  etc. 

D'Andezeno, 

Gouverneur  et  commande  généra l  »  (1). 

Depuis  sa  rentrée  à  Ripaille,  autorisée  par  la  décision 
qu'on  vient  de  lire.  Dupas  vécut  dans  une  profonde  re- 
traite, au  milieu  de  sa  famille,  et  ne  voyant,  en  dehors 
des  siens,  que  ses  vieux  camarades  et  compagnons  de 
gloire  dont  il  était  le  doyen.  Le  plus  cher  de  ces  anciens 
et  fidèles  amis  était  le  général  Dessaix  qui  vivait  à 
Marclaz,  mais  hélas!  moins  tranquille  que  Dupas:   ils 

(1)  Archives  Dubouloz-Dupas. 


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—  248  — 

purent,  pendant  quelques  années,  réaliser  le  rêve  de  se 
retrouver,  après  tant  de  dangers,  couverts  de  blessures, 
«  vidant  ensemble  quelques  bouteilles  de  vin  du  cru  »  (2). 
Un  autre  ami  était  le  général  de  cavalerie  Pierre-Amé 
Chastel,  qui  habitait  Genève,  ville  à  laquelle  il  fit  des 
libéralités  testiimentaires  ;  puis  le  brave  et  ancien  aide- 
de-camp,  le  colonel  d'infanterie  Bochaton,  retiré  à 
Evian;  le  lieutenant-colonel  Folliet,  qui  habitait  Ferney  ; 
Tadjudant-com mandant  Favre,  de  Thonon  ;  le  comman- 
dant Chapuis,  vieux  dragon  allobroge,  de  Concise,  qui 
survécut  à  tous  ses  anciens  compagnons  d'armes. 

C'est  l'un  de  ces  vieux  amis  qui  contait  l'anecdote  sui- 
vante :  Dupas  aimait  à  parler  le  patois  du  pays  avec  les 
soldats  originaires  d'Evian.  Après  Wagram,  il  rencon- 
tre un  soldat  désarmé,  emmené  sous  bonne  escorte.  Ce 
pauvre  diable,  s'adressant  au  général,  s'écrie:  Bonzo, 
brave  général,  sai  de  Macilly,  d'Evian,  vos  savi  !  — 
Ah  !  e  0  vàte,  mon  garçon?  —  Eh!  poure  général,  de 
vais  à  la  mô  pé  un  shancre  de  polaton  que  zai  robo.  — 
Eh  bin  !  bon  voyage,  mon  garçon  !  —  Mais  Dupas  ne 
perd  pas  un  instant  ;  il  court  voir  le  Orand  Prévôt  de 
l'armée,  et  obtient  un  ordre  en  vertu  duquel  le  pauvre 
soldat  de  Maxilly,  au  lieu  d'être  fusillé,  est  renvoyé  à 
son  régiment. 

Une  longue  série  de  périls  incessants  (»t  de  fatigues 


f*<3)  Dessaix,  commandant  une  division  à  Stottin,  écrivait  à 
Dupas  le  4  Juin  1811  et  terminait  sa  lettre  par  ces  mots:  «  Que 
Dieu  nous  préserve,  mon  clitT  Dupas,  des  procès;  qu'il  te 
conservé  ainsi  que  ton  aimable  é|)ouse  en  bonne  santé,  et  j  espère 
que  nous  vutderom  encore  ensemble  quelques  bouteilles  de  vin  du 
crû  qu'il  faut  faire  valoir  pour  n'avoir  pas  recours  aux 
étrangers.  » 


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—  249  — 

inouïes  avait  développé  des  infirmités  qui  abrégèrent  la 
vie  de  Dupas.  C'est  le  6  mars  1823,  à  Tàge  de  02  ans 
seulement,  que  mourut  à  Ripaille  ce  glorieux  soldat  qui 
n'avait  jamais  connu  la  peur  et  dont  la  vie  était  sans 
reproche.  Son  nom  est  inscrit  sur  Tare  de  triomphe  de 
l'Etoile,  côté  sud. 


FIN 


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TABLE  DES  MATIÈRES 


PAGES 

Avant-Propos v  bis 

Errata vu  bis 

Etat  des  services  du  Général  Dupas 1 

Chapitre  W. 

(1775-1796) 

Services  de  Pierre-Louis  Dupas  dans  Piémont- Dra 
gons,  dans  les  troupes  de  Genève,  dans  Château 
vieux-Suisse  en  Corse,  dans  les  Gardes  Françaises. 
—  Dupas  à  la  prise  de  la  Bastille.  —  Il  résiste  à 
Bailly  et  à  Lafayette.  —  Il  reçoit  son  congé  des 
Gardes  Françaises.  -^  L*un  des  premiers  à  sous- 
crire dans  la  Légion  Allobrogedont  il  est  Capitaine- 
Adjudant-Major.  —  Campagne  de  Savoie  et  de 
Maurienne.  —  Capitaine  de  Carabiniers.  —  Chef 
de  bataillon,  Aide  de  camp  du  Général  Carteaux.  — 
Campagnedu  Midi  et  siège  de  Toulon.  —  Campagnes 
des  Pyrénées-Orientales  de  1794  et  1795.  —  Départ 
pour  Tarmée  d'Italie 7 

Chapitre  II. 
Campagnes  d'Italie 

(Avril   1796    —    Mai    1798) 

Dupas  commande  le  3*»"  bataillon  de  la  demi-brigade 
Allobroge.  —  Prise  des  redoutes  de  San  Giovanni 
de  Murialdo.  —  Dupas  commande  le  2«  bataillon 
provisoire  de  carabiniers  à  la  tête  duquel  il  passe 
le  premier  le  pont  de  Lodi.  —  Bataille  de  Loai.  — 
Combats  sur  le  Mincio.  —  Dupas  commande  le 
5"  bataillon  provisoire  de  grenadiers.  — Témoigna- 
ges officiels  de  satisfaction.  —  Dupas  commande  le 
8®  bataillon,  puis  le  l'^"  bataillon  de  grenadiers.  -- 
Siège  de  Mantoue.  —  Bataille  de  S^-Georges.  — 
Citation  à  Tordre  du  jour.  —  Combat  de  Caldiero  ; 


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—  252  — 

grave  blessure.  —  Dupas  rentre  à  la  demi-brigade 
allobroge.  —  Combat  d*Anghiari  où  il  est  encore 
grièvement  blessé.  —  Entrevue  avec  Bonaparte  à 
Milan.  —  La  demi-brigade  à  Coni.  —  Ordre  de 
départ  pour  TEgypte 27 

Chapitre  II]. 

Expédition  d'Egypte 

(Mai   1798    à  Juin  1800). 

Départ  de  Toulon  pour  l'Egypte.  —  Dupas  com- 
mande les  guides  à  pied  du  général  en  chef  Bona- 
parte à  la  prise  de  Malte.  —  Débarquement  en 
Egypte  et  prise  d'Alexandrie.  —  Bataille  des  Pyra- 
mides.. —  Dupas  est  nommé  Colonel  (chef  de 
brigade)  et  commandant  de  la  citadelle  du  Caire.  — 
Ses  trente  mois  de  commandement.  —  Sa  corres- 
pondance avec  Bonaparte.  —  Il  est  cité  à  l'ordre  du 
jour  de  l'armée.  —  Départ  de  Bonaparte.  —  Corres- 
pondance de  Dupas  avec  le  général  en  chef  Kléber. 

—  Défense  énergique  de  Dupas.  —  Sa  correspon- 
dance avec  les  généraux  Priant  et  Damas.  — 
Dernière  lettre  de  Kléber.  —  Assassinat  de  ce 
grand  homme 46 

Chapitre  IV. 
Fin  de  Texpédition  d'Egsrpte 

(Juillet  1800  à   Septembre  1801) 

Le  ci-devant  baron  de  Menou,  général  en  chef.  — 
La  citadelle.  —  Mesures  réclamées  et  prises  par 
Dupas.  —  Sa  correspondance  avec  le  général 
Belliard,  gouverneur  du  Caire,  et  avec  le  général 
en  chef  Menou.  —  Désastre  de  Menou  à  Canope. 

—  Le  Caire  est  isolé.  —  Belle  défense  de  Dupas.  — 
Situation  critique  de  la  citadelle  et  de  la  place  du 
Caire.  —  Conseil  de  guerre  convoqué  par  Belliard. 

—  Héroïque  proposition  de  Dupas.  —  Convention 
pour  l'évacuation   de  l'Egypte.  —  Embarquement 

des  troupes  et  rentrée  en   France 66 


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—  253  — 

Chapitre  V. 
Dupas  aux  Tuileries 

(Octobre  1801  a  Décembre  1803) 

Le  colonel  Dupas  est  noiiim^  adjudant  supérieur 
du  Palais  des  Tuileries.  —  M"»*^  Junot  d'Abrantès. 

—  Il  est  nommé  colonel  des  Mamelucks  ;  détails 
sur  l'organisation  etTadministration  de  ce  corps  qui 
fait  partie  de  la  Garde  consulaire.  —  Il  est  nommé 
général  de  brigade,  et  bientôt  après  commandant 
supérieur  des  Côtes  de  la  Seine  à  la  Somme,  à 
Dieppe.  —  Le  général  Dupas  est  appelé  à  comman 
der  une  brigade  dans  la  division  de  grenadiers  de 
réserve  à  Arras 83 

Chapitre  VI. 

Campagnes  de  1805  et  1806 

(Janvier  1804  a    Décembre   180G) 

Dupas  commande  une  brigade  de  la  division  de 
grenadiers  de  réserve  à  Arras.  —  Nouvelles  faveurs 
dont  il  est  Tobjet.  —  Commandant  de  la  Légion 
d'honneur.  —  Sous-Gouverneur  du  château  de 
Stupinis.  —  Troisième  coalition.  —  Campagne 
de  1805  contre  les  Austro  Russes.  —  Le  général 
Z*-en-avant.  —  Donawerth.  —Wertingen.  —  Ulm. 

—  Amstetten.  —  Ilollabrûnn.  —  Austerlitz.  — 
Dupas  général  de  division,  grand  cordon  du  Lion 
de  Bavière.  —  Traité  de  Presbourg.  —  Quatrième 
coalition.  —  Campagne  de  180G  contre  la  Prusse. 
Dupas  commande  la  1'"  division  du  8*  corps.  — 
Opérations  de  cette  division  en  Allemagne  et  dans 

la  Poméranie  suédoise 98 

Chapitre  VII. 
Campagne  dans  la  Poméranie  Suédoise 

(Janvier  a  Juin  1807) 

Journal  de  la  division  Dupas  (1).  —  Entrée  dans  la 
Poméranie  Suédoise.  —  Blocus  de  Stralsund.  — 

(1)  Rapport  historique  du  général  Dupas:  27  janvier  1807  au 
30  mars  1809.  Archives  Dubouloz-Dupas. 


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—  254  — 

Construction  d'un  pont.  Passage  de  la  Peene.  — 
Prise  de  Loitz.  —  Marches  et  reconnaissances.  — 
Combat  du  14  mars.  —  Marche  de  la  division.  — 
Combat  d'Ukermund.  —  Armistice.  —  Siège  de 
Colberg.  —  Broch,  Stettin.  —  La  division  passe  la 
Vistule  et  marche  sur  Friediand  par  Heilsberg.  — 
Force  et  composition  de  la  division  Dupas 111 

Chapitre   VIII. 
Friediand  —  Lubeck 

(14  Juin   1807  —  Mars  1808) 

Bataille  de  Friediand.  —  Importance  du  rùle  du 
corps  de  Mortier  et  de  la  division  Dupas,  grands 
services  que  Dupas  rend  à  Tarmt'ie.  —  Rapport  de 
la  1"^^  division.  —  Grandes  pertes  de  la  division 
Dupas.  Départ  de  la  l^*'  division,  répartition  de  ses 
troupes.  —  Marche  sur  Lubeck.  —  La  division 
Dupas  devient  la  2«  du  corps  darmée  de  Berna- 
dotte.  —  Dupas  prend  le  commandement  de  Lubeck. 

—  Travemunde,  marche  des  troupes.  — Conseil  de 
guerre.  —  Mouvements  de  troupes.  —  Dupas  reçoit 
le  commandement  des  villes  Anséatiques.  —  Il  est 
nommé  Chevalier  de  la  Couronne  de  Fer.  —  Ses 
divers  traitements  et  dotations 133 

Chapitre  IX. 

Hambourg 

(Avril  a  Octobre  1808) 

Commandement  des  territoires  Anséatiques. —  Admi- 
nistration. —  Revue.  —  Mesures  disciplinaires.  — 
Inspection.  —  Emeute.  —  Espions.  —  Attaques 
faites  par  les  Anglais,  leurs  prises.  —  Espagnols. 

—  Exécution.  —  Le  15  août.  —  Pillages  opérés 
par  les  Anglais.  —  Nouvelles  attaques.  —  Garde 
bourgeoise.  —  Fin  du  commandement 150 

Chapitre  X. 
Quartiers  d'hiver  en  Danemark 

(Octobre  1808  —  Avril  1809) 

It7.ehoë.  —  Lubeck.  —  Sévère  discipline  maintenue 
par  Dupas.  —  La  division  Dupas  (2''  du  9**  corps) 


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—  255  — 

est  dirigée  sur  Hanovre.  —  Témoignages  de  grati 
tude  adressôsà  Dupas  par  les  Sénats  de  Hambourg 
et  de  Lubeck.  —  Les  Mémoires  de  Bourrienne.  — 
Examen  des  attaques  de  Bourrienne  contre  la  con- 
duite de  Dupas. —  Dupas  justifié  par  les  lettres  iné- 
dites de  Napoléon  I^*".  —  Dupas  est  comblé  d'hon- 
neurs et  de  faveurs,  il  est  nommé  Comte  de  l'Empire     183 

Chapitre  XI. 

Campagne  de  1800.  —  Wagram 

(Avril  a  Juillet  1809) 

Marche  de  la  division  Dupas  en  Allemagne.  — 
Force  de  la  division.  —  Corps  d'armée  de  Berna- 
dotte.  —  Etat  des  hommes  présents  sous  les  armes 
au  1®'  juin.  —  La  faible  division  Dupas  est  ren- 
forcée de  trois  bataillons  saxons.  —  Arrivée  à  l'Ile 
Lobau.  —  Rapport  de  Dupas:  journée  du  4  juillet. 
—  Journée  du  5  juillet  :  sanglante  attaque  de  Bau- 
mersdorff.  —  Seconde  journée  de  la  bataille  de 
Wagram.  6  juillet.  — 7  juillet:  résumé  du  rapport 
de  Dupas.  —  Plaintes  de  Bernadotte  ;  éloges  adres- 
sés à  Dupas.  —  II  est  nommé  au  commandement 
delà  2"  division  du  corps  d'Oudinot  ;  il  refuse, 
obtient  l'autorisation  de  partir  pour  Paris  où  il  de- 
mande le  commandement  de  la  division  militaire  de 
Grenoble 203 

Chapitre  XH. 
RipaiUe 

(Août  1809  a  Décembre  1814) 

Le  rôle  militaire  de  Dupas  est  terminé  par  son  refus  de 
commander  une  division  active.  —  \\  est  en  dispo 
nibilité  et  obtient  de  se  fixer  à  Ripaille.  —  Appelé  à 
l'armée  d'Allemagne  en  1813,  il  est  remplacé  dans 
son  commandement  et  obtient  de  se  retirer.  —  \\ 
est  mis  d'office  à  la  retraite  le  25  novembre  1813.  — 
Sa  demande  de  reprendre  du  service  pour  repousser 
l'invasion  n'est  pas  accueillie.  —  Liquidation  de  sa 
pension   de  retraite 227 

Chapitre  XIIL 
Dernières  années  (1815  à  1823) 239 


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MÉMOIRE  II 


LES 


ANCIENNES  CORPORATIONS 
d'Arts  et  llétieps 


DE 


THONON-LES-BAINS 


Par  LE-  PICCARD 


I 


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LES  ANCIENNES  CORPORATIONS 

D'ARTS  &  MÉTIERS 

DE   THONON-LES-BAINS 


Les  sociétés  d'artisans  existAreot  de  tout  temps  on  Eu- 
rope, dès  la  chute  de  l'Empire  romain.  Mais  elles  étaient 
loin  de  présenter  un  état  florissant.  Ce  ne  fut  qu'à  pai'tir 
de  la  création  des  communes  libres,  au  XII«  et  au  XIII® 
siècles,  qu'elles  prirent  une  extension  et  une  importance 
considérables.  Leur  classification  fut  à  peu  près  la  même 
que  celle  des  ouvriers  de  l'ancienne  Rome.  Sous  l'in- 
fluence dos  idées  chrétiennes,  les  saints  de  l'EgHse  furent 
substitués,  comme  protecteurs  de  diverses  associations, 
aux  héros  et  aux  faux  dieux  du  paganisme.  L'union  de 
la  religion,  à  la  profession  dos  Arts  et  Métiers,  devint 
même  si  intime  que  la  corporation  prit  le  nom  de  Con- 
frérie. Elle  avait  ses  privilèges,  ses  règlements,  la 
faculté  do  posséder,  d'administrer  ses  biens,  d'avoir  une 
caisse  commune  alimentée  de  legs,  donations,  cotisji- 
tions  et  amendes,  ainsi  que  le  droit  de  discuter  ses  inté- 
rêts généraux,  de  modifier  môme  ses  statuts. 

Les  anciennes  corporations  ou  confréries  d'Arts  et 
Métiers  de  la  ville  do  Thonon  durent  être  nombreuses 
avant  l'occupation  Bernoise  de  1530;  deux  sont  venues 
jusqu'à  nous:  celles  de  Saint  Eloi,  et  des  Saints  Crépin 
et  Crépinien. 


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—  260  — 

La  première  comprenait  en  général  tous  ceux  qui  se 
livraient  au  travail  du  fer  ou  du  cuivre  ;  c'était  la  so- 
ciété des  serruriers,  chaudronniers,  ferblantiers,  lau- 
terniers,  selliers,  marêchaux-ferrants,  taillandiers, 
couteliers,  armuriers,  épingiiers,  fourbisseurs,  éperon- 
niers.  La  confrérie,  qui  réunissait  à  Thononces  diverses 
catégories  d'artisans,  invoquait  comme  patron  St  Eioi, 
orfèvre  habile,  né  près  de  Limoges  vers  Tan  588,  qui 
devint  trésorier  du  roi  Dagobert,  puis  évêque  de  Noyon. 
Elle  exista  chez  nous  de  temps  immémorial  et  fut  en- 
richie à  travers  les  temps  de  nombreuses  indulgences 
par  les  papes  Innocent  XI  et  Clément  XI  (1). 

Le  premier  registre  des  délibérations  de  la  société 
nous  dit  que  par  suite  de  Thérésie  implantée  par  les 
Bernois  en  Chablais  «  la  dévote  abbaye  et  confrérie  de 
Monseigneur  Sainct  Eloy  aye  esté  jusques  à  présent 
esteinte  et  le  service  d'icelle  cessé  ».  Mais  Dieu  ayant 
chassé  rhérésie,  par  sa  grâce,  «  plusieurs  des  bourgeois 
et  habitants  de  ceste  ville  de  Thonon,  notamment  les 
soubznommés  dernièrement  illuminés,  après  avoir  rendu 
grâce  à  Dieu  de  tel  bénéfice  se  seroyent  deslibérés  et 
essayez  de  remettre  la  dicte  confrérie  en  lumière  aflfîn 
que  le  service  d'icelle  fust  annuellement  faict  et  célébré. 
Ensuite  de  la  trasse  de  leurs  ancestres  en  auroient  selon 
leur  petit  pouvoir  faculté  et  moyen  faict  un  fonds  à  la 

(1)  D'après  Tin ven taire  des  titres  et  registres  de  la  confrérie 
dressé  en  1786,  elle  reçut  quatre  bulles  des  Souverains  Ponti- 
fes, dont  deux  d'Innocent  XI  du  23  mai  1677  et  du  15  juin  1685. 
La  3«  et  4**,  du  13  mai  1712  émanent  du  pape  Clément  XI. 
Nous  les  avons  toutes,  à  part  la  2**  oui  s'est  égarée.  Dans  celle 
du  13  mai  1712,  Clément  XI  dit  qull  a  appris  que  la  confrérie 
de  Saint  Eloi  de  Thonon  faisait  beaucoup  d'œuvres  de  piété  et 
de  charité  et,  en  cette  considération,  il  lui  accorde  de  nombreuses 
indulgences  (Documents  n°*  i  et  2). 


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—  261  — 

dicte  confrérie  et  ont  tiint  faict  valloyr  le  talient  que  le 
fruict  et  profflt  d'icelui  fonds  d'argent  de  cinq  années  et 
Tannée  1647  y  comprise,  seroit  arrivée  à  la  somme 
de....*.(l). 

Les  vaillants  bourgeois  qui  relevèrent  cette  noble 
institution  des  temps  passés  furent  :  Jean-Baptiste  et 
Philippe  Volland,  Claude  Gantin,  Gérard  Losthoz, 
Claude-Charles  Gr(»soud,  Jean- François  Vuarnier,  Ciaudi 
Volland,  George  Dagnin,  François  Vuarnier,  Bernard 
Losthoz,  Claude  Menjon,  Bernard  Genoud,  Jean  Laurent, 
N.  Guyon  fondeur,  François  Ducret,  André  d'Allinges, 
Charles  Rebut,  Charles  Dutruel,  George  Buloz.  Les 
premiers  qui  fui'ent  ensuite  agréés  paraissent  être  : 
Claude  George,  Antoine  Sylvestre,  Jacques  de  Couches, 
Nicolas  Mathieu,  Jacques  Petit,  Jean-François  de  la 
Saulge,  Jean-Rodolphe  Maistre,  Grégoire  Ecarre,  Claude- 
François  Rebut,  Claude  Maistre. 

Cette  résurrection  de  nos  corporations  fut  le  complé- 
ment de  rétablissement  à  Thonon,  par  S*^-Frdnçois#  de 
Sales,  de  TUniversité  chablaisienne  imparfaitement 
connue  sous  le  nom  de  Sainte-Maison  (1599).  Outre  une 
faculté  de  théologie  et  renseignement  primaire  et  secon- 
daire, elle  comprenait  la  Section  des  AvLs  et  Métiers ^  à 
laquelle  se  rattachaient  des  papeteries,  une  imprimerie, 
des  filatures,  fabriques  de  fer,  fonderies...  où  travail- 
laient de  nombreux  mécaniciens,  serruriers,  armuriers, 
etc..  (2). 

Les  archives  de  la  confrérie  de  S^-Eloi  possèdent  deux 
registres  très  intéressants.  Le  premier  contient  les  pro- 

(1)  La  confrérie  aurait  donc  repris  vie  en  1642. 

(2)  Histoire  de  Thonon  et  du  Chablais,  p.  339-402. 


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—  262  — 

cès-verbaux  des  séances  allant  de  1647  à  1735;  et  le 
second,  de  1736  à  1760.  Le  secrétaire  ou  procureur  qui 
était  ordinairement  un  notaire,  les  signait  en  compagnie 
du  prieur  et  quelquefois  des  conseillers.  Ils  émanent,  de 
1647  à  1689,  du  notaire  Pinaus,  puis  ensuite  des  notaires 
Degenève  (1692),  Rosset  (1707),  J.  de  Meruel  (1710), 
Souviran  (1711-1723).  Enfin,  de  1726  à  1760,  ils  sont  de 
la  main  des  notaires  Guyon....  Le  dernier  relevé  des 
comptes  présenté,  en  1783,  est  signé  de  Dessaix,  Dege- 
nève, Dubouloz,  Collet,  Gaillard,  Delacroix,  Michaud, 
Rebut  et  Chenevier. 

Le  16  juin  1651,  une  convention  notariée  intervint 
entre  ses  membres  et  les  R^^^  Seigneurs  Préfet  et  cha- 
noines de  la  Sainte-Maison  de  Thonon.  Ceux-ci  s'enga- 
gèrent à  célébrer  deux  grand'messes  à  diacre  et  sous 
diacre,  au  grand  autel  de  l'église  de  Notre-Dame-de- 
Compassion,  Tune  le  25  juin,  jour  de  la  fête  de  S*-Eloi, 
et  l'autre,  le  lendemain,  pour  les  sociétaires  défunts. 
Le»  confrères  promirent  en  retour,  comme  rétribution 
de  ces  messes,  de  payer  annuellement  sept  florins, 
soit  4  livres  13  sous,  ancienne  monnaie  de  Savoie. 

De  1()73  à  1792,  les  membres  de  la  plupart  des  famil- 
les de  notre  ville  furent  admis  dans  la  confrérie  de 
S^Eloi.  La  série  des  récipiendaires  est  ouverte  en  1673 
par  Honorable  Maurice^  Moret,  maître  armurier,  et  en 
1074  par  Charles  Poulet,  maître  maçon;  néanmoins  on 
y  voit  bientôt  figurer  des  gens  do  tout  état  et  de  toute 
condition  :  des  ecclésiastiques,  des  nobles,  des  juges,  des 
médecins,  des  avocats,  des  notaires  qui  tenaient  à  témoi- 
gner de  cette  manière  le  grand  intérêt  qu'ils  portaient 
à  la  classe  ouvrière  de  l'époque.  Le  chef  de  famille  y 


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—  263  — 

entrait  avec  sa  femme  et  ses  enfants.  A  sa  mort,  son  fils 
aîné  lui  succédait  sans  aucune  formalité.  (1). 

A  chaque  réception  de  nouveau  membre,  la  société 
recevait  une  livre  de  cire  et  une  contribution  qui  variait, 
selon  la  fortune  du  récipiendaire,  de  2  à  5  livres  ou  à  un 
demi  écu  patagon,  ancienne  maison  de  Savoie.  Il  jurait 
«  de  se  comporter  en  homme  d'honneur  et  de  probité,  et 
de  faire  à  ses  frais,  le  pain  bénit,  s'il  venait  à  être  élu 
prieur...»  Le  conseil  d'administration  comprenait  le 
prieur,  le  sous-prieur,  le  procureur  ou  trésorier,  le  secré- 
taire et  plusieurs  conseillers  en  nombre  indéterminé. 
Les  deux  premiers  étaient  renouvelés  annuellement  le 
25  juin,  fête  de  S*-Eloi.  Ce  môme  jour  le  prieur  sortant 
offrait  le  pain  bénit  en  tête  de  ses  confrères  et  présidait 
l'élection  de  son  successeur  qui  promettait,  à  son  tour, 
d'offrir  le  pain  bénit  le  25  juin  de  l'année  suivante  (2).  Si 
par  hasard,  ce  dernier  refusait,  pour  de  bonnes  raisons, 
l'honneur  et  la  charge  du  pain  bénit,  c'était  la  confrérie 
qui  dans  ce  cas  l'offrait  à  ses  frais.  Mais  dans  le  cas 
contraire,  on  le  rayait  de  la  société. 

Le  nouveau  prieur  était  ordinairement  installé  aux 

(1)  Aujourd'hui,  il  paie  2  fr.  d'entrée,  et  les  cadets  7  fr.  (1897). 
Par  délibération  du  26  juin  17.36,  il  fut  arrêté  «  nue  les  confrères 
assisteraient,  avec  les  flambeaux,  à  la  sépulture  aes  femmes  de  la 
confrérie,  comme  on  avait  coutume  de  le  faire  pour  les  hommes.  » 
(Registre  des  séances). 

[2)  Le  Secrétaire  insérait  alors,  dans  son  procès-verbal,  que  le 
prieur  sortant  s'était  bien  acquitté  de  son  administration  et  il 
lui  délivrait  une  quittance.  Ainsi  le  26  juin  1684,  à  la  suite  de 
l'élection  de  la  veille  «  de  M.  Michel  de  Genève  pour  moderne 
prieur  en  la  place  de  M.  Pierre  Pethoud,  précédent  prieur,  le  dict 
sieur  Pethoud  a  esté  acquitté  de  son  administration  comme  bien 
et  dheument  faite,  et  de  quoy  la  confrérie  le  remercie,  ayant 
le  dit  de  Genève  promis  de  faire  le  pain  bénit  et  autres  clioses  à 
l'accoustumé.  »  [Regist.  des  délibérations). 


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—  204  — 

secondes  vêpres  de  la  fête  de  S*-EIoî.  Au  verset  Deposuit 
potentes  de  sede  du  Magnificat,  raacien  prieur  déposait 
les  insignes  de  son  autorité  et  regagnait  le  banc  commun 
des  confrères,  tandis  que  le  nouvel  élu  commençait  son 
gouvernement.  Cette  cérémonie  s'appelait  le  deposuit. 

La  confrérie  adjoignait,  à  son  conseil  d'administra- 
tion, un  recteur  ou  aumônier  ;  c'était  ordinairement  l'un 
des  prêtres  de  la  S*«  Maison  de  Thonon. 

Les  membres  prenaient  part  à  trois  repas  ou  banquets 
communs:  au  déjeuner  du  25  juin  avant  la  grand' messe, 
aux  frais  du  prieur  sortant  ;  aux  dîners  de  ce  même 
jour  et  du  lendemain  aux  dépens  de  chacun. 

Il  fut  décidé  par  délibération  du  26  juin  1698,  <c  que  les 
confrères  qui  n'assisteraient  pas  au  repas  de  la  fête  du 
Saint  Patron,  ne  seraient  point  admis  à  l'audition  des 
comptes.  > 

Mais,  bientôt,  les  prieurs  dœlarèrent  trop  onéreuses 
les  dépenses  qui  leur  incombaient  à  la  sortie  de  leurs 
fonctions.  On  les  déchargea  donc  du  déjeuner,  le  17  juin 
1759,  en  statuant  dans  la  môme  séance,  que  pour  la  con- 
servation des  privilégias,  il  serait  étîxbli  à  perpétuité 
un  conseil  de  six  gradués.  Ce  conseil  fui  composé 
de  <c  spectable  Abrahara-Jos(îph  Michaud,  médecin, 
spectables  Jean-Antoine  Rivollat,  ClaudtvJoseph  Fernex, 
Claude-François  Naz,  François  Degenève,  juge-mage  et 
Joseph-François  Michaud.»  (1).  Les  privilèges,  dont  il  est 
ici  question,  regardaient,  je  pense,  l'organisation  inté- 
rieure de  la  société  qui  avait  du  considérablement  se 
modifier  dés  son  origine.  Chaque  dignitaire  avait  jadis 
S(\s  droits  et  honn(»urs  particuliers.  Le  prieur  était  chargé 

(1)  Ketristro  des  séances  de  la  Confrérie  de  S^-Eloi,  folio  21. 


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—  2G5  — 

de  prévenir  les  abus  vt  do  voilier  à  robservation  du  rè- 
glement relativement  aux  marchandises,  travaux  à  exé- 
cuter, réception  des  candidats  à  la  maitrise  et  comptabi- 
lité financière.  Les  conseillers  ou  jurés,  devaient  recueil- 
lir les  voix  dans  les  élections,  visiter  les  boutiques  et  les 
ateliers,  juger  de  la  capacité  des  aspirants  à  la  maîtrise 
et  leur  assigner  le  chef-d'œuvre  à  exécuter.  Les  mem- 
bres de  l'association  se  divisaient  en  trois  classes  :  les 
maîtres,  les  compagnons  et  les  apprentis. 

On  appelait  maîtres  les  chefs  de  boutique  ou  d'atelier 
jouissant  du  privilège  d'cîxercer  un  art,  un  métier  ;  on  ne 
pouvait  être  reçu  en  cette  qualité  qu'après  un  certain 
nombre  d'années  d'exercice,  suivi  d'un  examen  et  de 
l'exécution  d'un  travail  professionnel  appelé  chef-d'œu- 
vre. Toute  coalition  entre  patrons  en  vue  de  profits  com- 
muns était  défendue  sous  peine  de  déchéance. 

Les  compagnons  étiiient  des  ouvriers  qui  travaillaient 
chez  les  chefs  d'atelier,  moyennant  rétribution,  après 
avoir  terminé  leur  apprentissage.  Ils  ne  pouvaient  être 
renvoyés  sans  cause  légitime,  ni  exercer  chez  un  patron 
de  la  mémo  localité,  après  avoir  quitté  un  atelier,  avant 
un  intervalle  de  3  mois  passés  hors  de  la  commune. 

Enfin,  les  apprentis  devaient  apprendre  dans  toutes 
ses  parties  le  métier  ou  l'art  auquel  ils  se  destinaient.  Ils 
versaient  à  leur  début  une  cotisation,  travaillaient  gra- 
tuitement durant  leur  éducation  professionnelle,  payaient 
même  quelquefois  une  somme  convenue,  et  devaient  être 
logés  et  nourris  dans  la  maison  des  patrons. 

La  cprporation  avait  sa  part  dans  les  oblations  des 
maîtres  et  des  apprentis.  Ainsi  le  20  juin  1(384  «  Hono- 
rable Etienne  Collet  paye  demy  escus  pour  un  sien  ap- 


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—  266  — 

prentif  et  pour  un  autre  qui  veut  aprendre  et  qu'il  a 
enossey  pour  sca voir  s*il  sera  propre  à  son  mestier,  ledit 
deiny  escus  mis  dans  la  boette  en  présences  de  tous  les 
prieurs  et  confrères  ».  (1). 

L'apprentissage  durait  au  moins  deux  ans  et  souvent 
au-delà  de  ce  terme. 

Les  statuts  de  la  corporation  fixaient  dans  le  moindre 
détail,  les  conditions  de  la  main-d'œuvre,  réglaient  les 
heures  de  travail,  la  qualité  des  matières  des  objets  fa- 
briqués ainsi  que  le  prix  de  chacun  d'eux. 

Enfin,  les  œuvres  de  charité  étaient  l'objet  de  la  solli- 
citude particulière  des  confrères  qui  venaient  en  aide  à 
ceux  d'entre  eux  tombés  dans  la  maladie  ou  la  pauvreté, 
les  visitant,  les  consolant  et  les  accompagnant  jusqu'à 
leur  dernière  demeure,  un  flambeau  à  la  main.  On  voit 
en  effet,  dans  les  séances  d'admission  de  la  confrérie  que 
le  récipiendaire  prêtait  serment,  entre  les  mains  du  prieur 
et  en  face  de  l'assemblée,  de  se  rendre  utile  aux  confrè- 
res malheureux  ou  dans  le  besoin.  (2). 

En  1771,  le  procureur  de  la  confrérie,  Etienne  Rebut, 
délivra  à  un  membre  de  la  corporation,  Joseph  Chavan- 
naz,  un  secours  de  9  livres,  1 1  sols  «  et  cela  pour  subvenir 
à  ses  pressants  besoins,  eu  égard  à  la  misère  des  temps 
et  cherté  des  vivres  >,  et  avec  l'agrément  des  membres 
présents  :  Bailly,  Vignier,  Lugrin,  Guyon,  Souviran.  En 
1774,  Dessaix,  conseiller  fait  remettre  24  sols  à  unautre 
confrère,  Joseph  Fillion  des  Epinanches,  etc.,  etc.. 

En  1773,  les  prieurs  furent  encore  déchargés  du  pain 
bénit.  On  ne  l'offrit  plus,  et  il  fut  décidé  que  la  toilette 

1)  Registre  des  délibérations. 

2)  Registre  des  délibérations. 


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—  267  — 

dont  on  n'avait  coutume  de  Torner  serait  donnée  aux 
R**"»  Pères  Capucins  de  la  ville,  pour  servir  à  rornement 
de  leur  autel  pendant  la  bénédiction  du  Saint-Sacre- 
ment. (1). 

Les  revenus  de  la  confrérie  étaient  d'une  trentaine  de 
livres  (2);  mais  les  collectes  et  dons  particuliers  destinés 
aux  confrères  nécessiteux  arrivaient  à  une  somme  consi- 
dérable impossible  à  préciser. 

Nous  avons  dit  que  le  nombre  des  membres  de  la 
corporation  fut  relativement  considérable  ;  de  1676  à 
1792,  il  comprit  particulièrement  les  noms  suivants  : 
Henry  Dubouloz,  Michel  et  Jacques  Collet,  Jacques 
Lhostoz,  Pierre  Gylstin,  André  Vignier(  1676),  Antoine 
Christin  (1681),  Garin  Rebut,  Nicolas  Cha vanne  (1684), 
François  Dufresne  (1694),  Jean  Bernaz  (17(X)),  Pierre 
Souviran,  Jean  Pinget  (1710),  Jean-Claude  Desuzinge 
(1714),  Noël  Cullery,  P.  François  Donzy  (1715),  Jean- 
Baptiste  Margel,  Jacques  Jeandin  (1717),  Etienne  Ge- 
noud,  Jean- André  RoUier  (1720),  Etienne  Frézier  (1721), 
Cl.-Louis  Détraz  (1722),  Pierre  Collet,  Joseph-Amé 
Dechelette,  Etienne  Rebut  (1724),  Joseph  Chavannes, 

(1)  Cette  délibération  (1773)  est  signée  Naz,  A.  Carron,  Dessaix, 
J.  Bétemps,  Charmot  et  Guyon. 

(2)  Voici  le  relevé  des  dépenses  présenté  le  22  juin  1760: 

A  un  confrère  pauvre,  malade 1.10 

A  un  autre  confrère  malade 1.10 

Payé  pour  cierges 3 

Pour  une  messe  de  requiem 8 

Deux  grand'messes 4.13 

Au  marçttillier 4.4 

Au  prédicateur 4.4 

Aux  enfants  de  chœur S 

Au  procureur  pour  son  traitement 8 

Pour  une  messe  de  requiem 8 

Total  :  25.65 


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—  268  — 

Pierre-François  Pethoud  (1725),  Joseph  Favrat,  N*  J. 
Charles  de  Foras,  Jean-François  Guyon,  Claude  Rouge 
(1726),  GuérinBovet,  Marie  Fantin  (1729),  Christophe 
Viger,  Jean-Baptiste  Fantin,  Gabriel  Megevand,  Jean- 
Pierre  Champoury  (1734),  Jean-Claude  Volland  (1735), 
François  Delasaulge,  Joseph  Fillon,  F.  Maître,  Antoine 
Boujon,  Jean-François  Milliet,  Jean-François  Bergoens 
(1736),  Thomas  Dubouloz,  Jean-Bapt.  Mouthon,  Pierre 
Naz,  Joseph  Rebut,  Jean  Charmot  (1737),  Louis  Lom- 
bard, Pierre  Royer,  R^  Joseph  Chêne vier  prêtre,  Fran- 
çois Bétemps,  Pierre-Joseph  Pinet,  P.  Claude  Lançon, 
Bernard  Megemond,  Christophe  Lamy,  J.-Joseph  Pinet, 
François  Mercier  (1738),  R^  Claude  Bioley,  Abraham 
Joseph  Michaud  (1742),  Louis  Jacquet,  A.  Bontron 
(1744),  André-Joseph  Dessaix,  Noël  Carron,  Jacq.  Vau- 
daux  (1747),  Jean-François  Dufresne,  Jean-Ant.  Ri  voi- 
lât (1750))  Joseph  Fillion,  P.  Chessel,  Jean-François 
Girard(1751),  Nie.  Veillet,  Jean-Alexis  Vaudaux,J.-Bapt. 
Novel  (1752),  Cl.-Ch.  Bernaz  (1753),  A.-J.  Delacroix, 
Louis  Gautier  (1754),  Félix  Matta,  maître  fondeur, 
Cl.-Joseph  Fernex  (1755),  J.-Ant.  Carron  (1756),  Fran- 
çois deGenève(1757),J. -F.  Michaud  (1759),  CI.  Gaillard, 
J.-Cl.  Livremont  (1761),  P.-L.  Lancey  (1773),  Jacques 
Chenevier  (1786),  Joseph  Moril,  Joseph  Tondu  (1792). 

CONFRÉRIE 

DES  SAINTS  CRÉPIN  ET  CRÈPINIEN 

Les  cordonniers,  tanneurs  et  corroyeurs  formaient 
une  seule  et  môme  confrérie.  Leurs  patrons  étaient 
Saint  Crépin  et  Saint  Crépinien,   deux  frères  d'une  fa- 


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—  269  — 

mille  sénatoriale  de  Rome  qui  prirent  le  chemin  des 
Gaules,  pour  échapper  à  la  persécution  de  Dioclétien, 
s'arrêtèrent  à  Soissons  où  ils  exercèrent  le  métier  de 
cordonnier  et  subirent  le  martyre  vers  Tan  287. 

L'un  des  registres  de  ses  délibérations  remonte  au 
25  octobre  1001.  Il  porte  dans  ses  premières  pages  que 
le  catholicisme  ayant  été  proscrit  dans  le  Bas-Chablais 
par  les  Bernois,  «  la  dévote  abbaye  et  Confrérie  des 
Saints  Chrespin  et  Chrospinien  aye esté jusquesà  présent 
estinte  et  le  service  d'icelle  cessé,  jusques  à  présent  que 
Dieu  ayant  faict  la  grâce,  à  la  dite  province,  de  y  re- 
mettre la  sainte  foy  et  religion  catholique,  apostolique  et 
romaine,  ayant  chassé  l'hérésie,  plusieurs  des  bourgeois 
et  habitants  de  ceste  ville  de  Thonon  notamment  les 
soubznommés  dernièrement  illuminez  après  avoir  rendu 
grâce  à  Dieu  de  tel  bénéfice  se  seroyent  délibérez  et 
essayez  do  remettre  la  dicte  confrérie  en  lumière  afin 
que  le  service  d'ycelle  fust  annuellement  faict  et  célébré. 
En  suite  de  la  trasse  de  leurs  ancestres....  Les  honestes 
Maurice  Pathoz,  Claude  Maurouz,  Bernard  Guychard, 
Justin  Baud,  iMaurice  Penaz,  Sermez  Chenevier,  Abra- 
ham Peccuz,  Claude  Gantin,  Pierre   Rey  et  Jacques 

Pesson selon  leur  petit  pouvoir  et  facultez  auroyent 

faict  un  fond  à  la  dite  confrérie  de  la  somme  capitale  de 
seize  florins  Savoye  »  qui  furent  remis  à  honorable 
Maurice  Pethoud  «  des  maistros  de  Testât  de  cordonier 
et  tanear,  esleu  novellement  abbé  do  la  dite  confrérie  (1) 
pour  en  être  gardiatour  et  faire  valloir  le  tallent  d'icelle  y> 

(1)  Abbé  ou  chef  de  la  corporation  comme  Abbé  de  Tabbaye  ou 
Confrérie  des  Vignerons  de  Vevey,  si  connue  chez  nous  par  ses 
fêtes  séculaires,  dernier  vestige  du  catholicisme  dans  le  pays  de 
Vaud. 


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—  270  — 

afla  que  les  pauvres  de  la  corporation  puissent  être  sou- 
lagés... (1).  Ce  fut  donc  probablement  S*-François  de 
Sales  qui  la  réorganisa  pendant  sa  laborieuse  mission 
du  Chablais.  (2). 

Par  contrat  de  fondation  du  17  août  1691 ,  les  confrères 
des  Saints  Crépin  et  Crépinien  cédèrent  aux  R*^»  Préfet 
et  prêtres  de  la  Sainte-Maison  de  Thonon,  des  créances 
de  la  valeur  de  1800  florins,  à  condition  qu'ils  s'enga- 
geassent à  célébrer  annuellement  au  maître-autel,  douze 
messes  à  diacre  et  sous-diacre,  suivies  du  chant  du  libéra- 
me,  les  lundis  après  le  troisième  dimanche  de  chaque 
mois,  et  à  faire  sonner  ces  messes  par  toutes  les  cloches. 
L'acte  en  fut  dressé  dans  le  réfectoire  de  la  Sainte- 
Maison.  Etaient  présents,  d'un  côté  :  Honorables  Jean 
Deruaz,  prieur  de  la  coofrôrie;  Claude  Merlin,  Claude- 
François  Chêne vier,  Joseph  Con verset,  conseillers..., 
Jean-Claudeet  Thivan (Etienne)  Duret,  Claude Dufresne, 
Jean-Clande  Vernaz,  Guy  Vuatoux,  Claude  Mamet, 
Jacques  Rebut,  Charles-François  Genoud,  Joseph  Du- 
perier,  etc.,  tous  maistres  cordonniers.  Figuraient 
d'autre  part  :  R*^  Joseph  Marie  de  Rossillon,  préfet  de  la 
Sainte-Maison,  R^«  Jacques  Bourgeois,  Mathieu  Mugnier, 
Fabien  Lacombe,  Jean-Claude  Michaud,  Michel  Marin, 
Louis  Ruffler  et  Alexandre  de  Sonnaz,  prêtres  compo- 
sant le  corps  de  la  Sainte-Maison. 

Il  y  avait,  en  outre,  trois  grands  services  religieux  à 

(1)  Registre  des  délibérations. 

(2)  L'évèque  d'Arenthon  d'Alex  homologuant  un  acte  du  22  août 
1692  présenté  par  les  membres  de  la  confrérie  des  Saints  Crépin 
et  Crépinien,  dit  aussi  que  «  cette  dévote  confrérie  anciennement 
établie  à  Thonon,  avait  été  abolie  pendant  Thérésie  du  dit  pays 
par  les  ravages  qu'elle  y  a  causés  ».(Arch.  de  TEvèchéd'AnnecyJ. 


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—  271  — 

la  chapelle  do  la  confrérie,  érigée  dans  Tôgiise  de  Notre- 
Dame-de-Compassion  :  Tun,  le  premier  vendredi  de 
carême  pour  les  confrères  défunts;  le  second,  le  26  octo- 
bre, fête  dos  Saints  Crépin  et  Crépinien  ;  le  troisième,  le 
lendemain,  27,  encore  pour  les  défunts  de  la  Société.  Les 
prêtres  de  la  Sainte-Maison  recevaient  ordinairement  en 
retour  sept  livres  de  Savoie  et  d'autres  fois  dix  florins  et 
demi.  Ces  détails  sont  consignés  annuellement  dans  les 
registres  de  la  confrérie  qui  sont  les  organes  les  plus 
autorisés  de  son  histoire.  (1). 

Les  élections  du  prieur  et  des  conseillers  avaient  lieu 
chaque  année  d'abord  dans  la  cour  de  la  maison  des 
Chartreux  de  Vallon  au  quartier  de  la  Croix  (2),  puis 
dés  1662  environ,  dans  la  grande  salle  de  la  Maison  de 
Ville.  Les  élections  secrètes  ne  se  faisaient  point,  comme 
de  nos  temps,  par  bulletins  individuels,  mais  chaque 
votant  venait  dire  à  l'oreille  du  secrétaire  le  nom  de  son 
candidat.  En  voici  un  exemple  :  *  Du  19  octobre  1727, 
les  confrères  de  la  confrérie  de  S*-Crépin  s'étant  assem- 
blés ce  jourd'hui  pour  faire  l'élection  d'un  prieur  pour 
l'année  1728  ont  proposé  les  honorables  Joseph  Pissotet 

(1)  Le  plus  ancien  registre  renferme  153  procès-verbaux  des 
séances  allant  du  25  octobre  1601  à  Tan  1737.  Le  secrétaire,  qui 
souvent  signait  seul,  était  toujours  un  notaire  ;  les  cinq  premiers 
sont  de  la  main  du  notaire  Pierre  Rolaz  (que  S*  François  de  Sales 
employa,  maintes  fois,  pour  des  actes  passés  à  Thonon),  puis  les 
suivants  de  celle  des  notaires  Deleschaux,  Girod  (1622),  Mauroz, 

Delasaulge  (1636),  Bougeard  (ia3M()56).  Charles  (1658-1688) 

De  1690  à  1743,  ils  émanent  successivement  des  notaires  Guyon 
père  et  ftls.  Enfin  de  1743  à  1786,  ils  sont  tous  signés  par  Soùvi- 
ran,  Bouvet  et  Aubéry,  notaires,  et  par  les  membres  de  Tadmi- 
nistration  où  figurent  ordinairement  les  noms  Naz,  Détraz,  Bur- 
nat,  Fillion,  Veillet,  Vernaz,  Genoud,  Pissot,  Ticon,  Fornay. 
Buinoud,  Merlin,  Granjux,  Chenevier,  Longet,  etc.... 

(2)  Aujourd'hui,  cour  de  la  maison  Moynat-Brisgand  apparte- 
nant jadis  aux  consorts  Vailly.  ( Registre  des  délibérations) . 


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—  272  - 

Claude  Garin,  et  par  les  voix  données  à  l'oreille  de  moi 
soubsignéy  la  pluralité  d'icelles  est  arrivé  au  dict  Joseph 
Pissot,  lequel  est  reconnu  prieur  pour  Tannée  prochaine 
1728.  Faict  à  Thonon  le  dict  jour  et  an.  Guyon  fils  ». 

Les  revenus  de  la  société,  quoique  de  50  à  60  livres 
seulement,  arrivaient  à  un  chiffre  élevé  par  suite  des 
collectes  faites  pour  les  membres  nécessiteux. 

Les  deux  repas  ou  banquets  communs  des  confrères 
furent  supprimés  en  1740.  Le  procès- verbal  du  16  octo- 
bre nous  en  donne  le  motif  :  «  Les  dicts  prieur,  conseil- 
lers et  confrères  duement  assemblés  comme  cy-dessus 
sont  convenus  de  retrancher  et  supprimer  les  deux  repas 
que  la  confrérie  est  en  coutume  de  donner  le  jour  de 
l'élection  d'un  prieur  et  d'un  conseiller  et  le  jour  de 
S*-Thomas  que  l'on  rend  les  comptes,  attendu  le  déran- 
gement des  saisons  et  la  misère  des  temps,  et  que  d'ail- 
leurs la  confrérie  a  diminué  de  beaucoup  ses  revenus, 
attendu  la  réduction  des  espèces,  et  que  les  intérêts  ne 
se  payent  plus  qu'au  cinq  pour  cent,  et  cy  devant  l'on 
tirait  au  six  et  au  sept.  Faict  à  Thonon  les  dicts  jour  et 
an.  »  (1). 

Les  membres  de  la  confrérie  étaient  soumis  à  l'auto- 
rité d'un  surintendant  nommé  par  le  duc  de  Savoie,  pour 
entretenir  l'émulation  et  la  probité  et  prévenir  les 
fraudes  dans  la  qualité  de  la  marchandise,  sa  fabrication 
et  sa  vente.  Il  devait  aussi  interdire  la  maîtrise  à  tout 
individu  n'ayant  pas  donné  des  preuves  suffisantes  de 
capacité  par  devant  les  maîtres  chargés  de  l'examiner. 
Ces  surintendants  furent,  vers  le  milieu  du  XVII®  siècle  : 
M«  Blard,  maître  cordonnier  d'Annecy,  François  Béren- 

(1)  Registre  des  délibérations. 


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—  )iTA  ^ 

gier,  maître  cordonnier  de  Chambéry,  dont  la  nomina- 
tion fut  signifiée  à  Thonon  en  1051  par  la  pièce  suivante 
conservée  au  premier  registre  de  la  confrérie  (1). 

Charles  Emanuel  par  la  grâce  de  Dieu,  Duc  de  Savoye 
prince  de  Piodmont,  roi  de  Cyppres,  au  premier  huissier 
de  nostre  Sénat  au  dict  Savoye,  ou  sergent  ducal  sur  ce 
requis,  salut. 

Nous  te  mandons  et  commandons  par  ces  présentes 
que,  suivant  le  décret  du  dict  Sénat  au  bas  de  larequeste 
y  jointe,  présenté  de  la  part  d'honorable  François  Bé- 
rengier,  maistre  cordonnier  et  bourgeois  de  la  présente 
ville  maistre  juré  et  intendant  des  cordonniers,  tasneurs 
et  corroyeurs  de  là  les  monts,  suppliant,  et  à  sa  reques- 
te,  tu  fasses  exprés  commandement  et  injonction  de 
nostre  part  à  tous  maistres  cordonniers,  tasneurs  et 
corroyeurs,  de  faire  voir  au  suppliant,  en  qualité  qu'il 
agit,  leurs  marchandises,  cuireries,  besognes  et  œuvres 
de  cordonniers  pour  les  tout  visiter  en  présence  d'aultres 
maistn^s  experts  es  dict(«  professions,  que  le  dict  sup- 
pliant choisira,  pour  être  procédé  ainsi  et  comme  sa 
charge  l'oblige,  avec  inhibitions  et  defFenses  très  expres- 
ses que  tu  feras aussy  de  nostre  part,  en  suitte  des  con- 
clusions d(î  nostre  très  chier  bien  amé  féal  conseillier 
d'Etat  et  procureur  général  de  ça  les  monts,  à  tous  cor- 
donniers, ttisneurs  et  corroyeurs  tant  de  ça  que  de  là 
les  monts  et  à  tous  aultres  qu'il  appartiendra,  d'(^xposer 
ou  faire  exposer  par  intreposittes  personnes  aulcungs 
cuirs  ny  aultres  marchandises  en  vente,  qu'ils  n'ayent 
estes  dheubement  par  luy  et  par  les  aultres  maistres 

(l)  Archives  de  la  confrérie. 


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~  274  ~ 

qui  seront  par  luy  choisis,  visités  et  receus,  ny  aussy 
d'eatrer  en  exercice  du  dict  mestier  sans  de  mesme 
avoir  estes  préalablement  par  luy  et  les  dicts  autres 
maistres  choisis  et  recogncus  cappables  et  par  eux 
receus,  et  c'est  à  peine  de  cinq  cents  livres  d'amende, 
De  ce  faire  donnons  pouvoir.  Donné  à  Chambéry  le 
quatriesme  juilliet  mil  six  cent  cinquante-un,  scellés  en 

grand  sceau  et  signé  par  le extraict  à  son  propre 

original  par  moi  notaire  ducal  royal  soubsigné,  exhibé 
par  le  susdict  Bérengier  juré  et  par  luy  retiré,  bien  que 
d'aultre  main  soyt  escript.  A  Chambéry  les  an  et  jour 
susdicts  signé  Vachier  notayre. 

Et  moi  notaire  soubzsigné  j'ay  les  patentes  sus 
escriptes  copié  et  extrait  sur  le  double  à  moy  communi- 
qué par  Honorable  Aymé  Guyon  maitre  cordonnier  fai- 
sant au  nom  du  dict  M®  Bérengier  et  le  quel  double  ay 

rendu  au  dit  M'  Guyon. 

BouGEARD,  notaire. 

Au  moment  de  son  admission,  chaque  nouveau  mem- 
bre recevait  le  titre  de  maître  cordonnier,  en  versant 
au  prieur  un  droit  d'entrée  de  doux  écus  de  Genève  (ou 
7  livres,  ou  10  florins,  ancienne  monnaie  de  Savoie). 
D'autres,  vu  leur  état  de  fortune,  je  pense,  ne  payaient 
que  4  livres  et  10  sols.  Le  récipiendaire  jurait  de  se  con- 
duire toute  sa  vie  en  homme  d'honneur  et  de  probité. 
En  voici  un  exemple  :  «  Du  17  décembre  1724,  Hono- 
rable Joseph  Bouvet,  moderne  prieur  de  la  confrérie  de 
S*-Crépin,  assisté  des  Honorables  Anthoine  Perrière  et 
Pierre  Brélat  conseillers  et  d'Honorable  Joseph  Boejat 
ancien  prieur,  ont  reçu  au  nombre  de  leurs  confrères  et 
maistres  de  la  dicte  confrérie,  Honorable  Jacques  fils  de 


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—  275  ^ 

feu  Fraoçois  Peray  maitre  taneur  bourgeois  d'Evian 
soubs  la  finance  de  sept  livrt^  de  Savoie  qu'il  a  piV^son- 

tement  comptés  et  dôlivrés  aux  susdicts  cons(nlIers 

soubs  la  promesse  qu'a  faite  le  dict  Peray  de  se  com- 
porter en  homme  d'honneur  et  de  bien,  dans  son  mestier 
de  taneur  et  sans  aucun  reproche,  à  peine  d'être  rayé 
de  la  dicte  confrérie,  ce  qu'il  a  promis  a  peine  de  tous 
dépends,  dommages  et  intérêts,  soubs  l'obligation  de  sa 
personne  et  biens,  avec  dheue  constitution  d'iceux;  et 
moyennant  ce,  il  jouira  des  droits  et  privilèges,  comme 
les  autres  confrères,  et  n'entreprendra  rien  contre  les 
droits  et  privilèges  de  la  dicte  confrérie.  » 

«  Faict  à  Thonon,  le  dict  jour  et  an.  » 

GUYON. 

Le  15  septembre  1G4I  les  prieurs  de  la  confrérie  de 
S^Crépin  de  la  ville  d'Evian,  Biaise  Granjux  et  J.  Mer- 
cier, écrivaient  une  lettre  très  curieuse  aux  dignitaires 
de  notre  corporation,  aux  fins  «  de  s'accomoder  les  ungs 

et  les  aultres  touchant  la  visite  des  conseillers et 

concernant  les  six  sols  accoustumés  percepvoir.  »  (1). 
lisse  déclarent  heureux  d'un  accomodement  pour  con- 
tinuer la  concorde  et  bonne  amitié  d'autrefois.  Plusieurs 
bourgeois  d'Evian  et  habitants  des  localités  voisines  tels 
que  Claude  Maxit,  de  La  Chapelle  d'Abondance  (  1722), 

Genoud,    d'Habéres se   faisaient   ainsi  agréger  à 

l'une  ou  l'autre  de  nos  deux  corporations.  C'étiiit  un 
lien  puissant  de  fraternité  reliant  les  citoyens  d'une 
même  province. 

(1)  Registre  de  la  confrérie  de  S*  Crépin  de  Thonon. 


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—  276  — 
Restauration  et  Fusionnement 

La  tourmente  de  1792  dispersa  les  membres  des 
confréries  :  les  guerres  de  la  Révolution  et  de  TEmpire 
paralysèrent  les  bonnes  volontés.  Aussi  les  documents 
et  registres  relatifs  à  la  Société  de  S*-Eloi  manquent-ils 
de  1786  à  1823  et  ceux  de  la  confrérie  des  S^  Crépin  et 
Crépinien  de  1789  à  1833. 

Celle  de  S*  Eloistî  ranima  quelque  peu  ou  1823;  ses 
comptes  furent  dressés  par  trois  membres  en  1823, 
1830,  1846,  1847  et  1848.  Elle  comprenait  alors  105 
membres. 

Celle  des  Saints  Crépin  et  Crépinien  semble  repren- 
dre vie  en  18;W.  Ses  comptes  sont  exactement  réglés 
dès  cette  époque  jusqu'en  1859.  Elle  ne  comptait  que  83 
membres.  Dès  1833  elles  eurent  toutes  deux  un  prieur 
ou  président  commun  ;  c'était  en  1847,  spectable  Fran- 
çois-Marie Dupérier  (1).  Le  l«r  novembre  de  cette  année 
(1847)  leurs  deux  conseils  considérant  :  que  le  plus  grand 
nombre  des  membres  de  l'une  étaient  aussi  membres  de 
l'autre,  décidèrent  l'achat  d'un  drap  mortuaire  encore 
commun  aux  deux  corporations.  C'est  ainsi  qu'on  arri- 
vait par  la  force  des  choses  au  fusionnement . 

Après  les  grands  événements  qui  réunirent  la  Savoie 
à  la  France,  prieurs  et  membres  du  conseil  étaient 
morts  sans  être  remplacés,  et  nos  deux  confréries  s'en 
allaient  à  la  dérive  sans  chefs  et  sans  administration. 
Sous  l'inspiration  d'un  homme  d'intelligence  et  d'éner- 
gie, Joseph  RoUier,  les  membres  de  l'une  et  de  l'autre 
furent  appelés  à  une  assembhM)  générale  le  10  septembre 

(1)  Registre  des  délibérations  de  la  contrérie  de  S*-Eloi. 


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—  277  — 

1865.  Une  commission  nommée  à  cet  effet  drossa  l'état 
des  fonds. 

Une  seconde  convocation  du  29  octobre  suivant  réunit 
25  membres  qui,  au  nom  de  leurs  confrères  absents, 
déclarèrent  les  deux  confréries  fusionnées  on  une  seule 
sous  le  nom  de  Confrérie  de  S^Eloi  et  des  Saints 
Crépin  et  Crépinien,  On  élut  un  pritmr.  un  sous-prieur, 
six  conseillers,  un  trésorier,  un  secrétaire  et  un  sacris- 
tain. Ces  25  membres  furent  :  Bernaz  Joseph,  Charrière 
Pierre,  CuUery  François,  Champoury  Joseph,  Colly 
Aimé,  David  Alexandre,  Frossard  Pierre-François,  Gail- 
lard Joseph,  Gainon  Joseph,  Greninger  Joseph,  Guyon 
Joseph,  Longet  Joseph,  Maury  Jean,  Maury  André, 
Messiat  Georges,  Duchamp  Jean,  Planchamp  François, 
Plumet  Joseph,  Pioton  Louis,  Rollior  Joseph,  Romanet 
Pierre- Célestin,  Vachat  Jean-Pierre,  Veillet  Charles, 
Vernaz  Joseph,  Vernaz  Jacques. 

Le  nouveau  prieur,  Joseph  RoUier,  devint  le  véritable 
restaurateur  de  la  corporation.  Il  la  reforma  avec  un 
caractère  moderne  de  fraternité  chrétienne  et  lui  donna 
une  vigoureuse  impulsion  qui  Ta  maintenue  prospère 
jusqu'à  ce  jour.  Outre  les  secours  qu'elle  distribue,  elle 
honore  les  sépultures  des  confrères  défunts,  et  soulage 
leurs  âmes  par  des  prières. 

Elle  a  fait  imprimer  son  nouveau  règlement  en  1881 
en  12  pages(l)  et  compte  aujourd'hui  près  de  180  mem- 
bres. 

Joseph  Rollier  fit  place,  en  1880  au  prieur  actuel,  le 
Comte  Charles  de  Foras,  ancien  officier  supérieur  de 

(1)  M.  Josoph-Marie  Grillon,  trésorier,  paya  87  fr.  à  cet  effet 
le  18  novembre  de  la  même  année. 


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-  278  — 

Tarmée  piémontaise,  colonel  des  mobilisés  de  la  E^- 
Savoie  de  1871,  etc.  Sou  zèle  et  la  sympathique  et 
universelle  considération  dont  il  jouit  ont  grandement 
contribué  au  développement  et  à  la  prospérité  de  notre 
corporation. 


CONCLUSION 


On  peut  se  demapder  quels  furent  les  résultats  des 
corporations,  au  point  de  vue  do  Tamélioration  des  ou- 
vriers? Ils  furent  immenses.  D'abord  des  inventaires 
mobiliers  d'ouvriers  au  XI  V«  siècle  établissent  la  preuve 
d'une  aisance  relative  qui  serait  enviée  aujourd'hui  par 
beaucoup  de  pays  d'Europe.  Ensuite  des  actes  de  l'état 
civil,  rapportés  dans  un  congrès  de  Sociétés  savantes, 
établissent  une  proportion  de  lettrés,  qui  ne  serait  pas 
dépassée  à  l'époque  moderne. 

Avant  1789,  dit  un  auteur  peu  suspect,  Proudhon,  l'ou- 
vrier existait  dans  la  corporation  ou  la  maîtrise,  comme 
l'enfant,  la  femme,  et  le  domestique  dans  la  famille. 
La  preuve  de  ce  bien-être  se  trouve  dans  la  réclamation 
des  ouvriers  eux-mêmes  qui  protestèrent  contre  la  sup- 
pression des  jurandes,  aussitôt  après  la  loi  de  1791  et 
de  nouveau  en  1S05.  La  preuve  en  est  encore  dans  une 
décision  du  Conseil  d'Etat,  datée  de  1812,  c'est-à-dire 
prise  par  des  hommes  qui  avaient  assisté  aux  abus  des 
corporations  dégénérées  et,  qui  voyant  les  conséquences 
douloureuses  de  leur  suppression,  concluaient,  à  l'una- 


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—  279  — 

nimité,  au  rétablissement  des  associations  profession- 
nelles. Ces  hommes  êtai(»nt  on  état  de  comparer  et  de 
juger. 

Que  flt  la  Révolution  ?  Elle  supprima  les  corporations 
et  créa  Tantagonisme  des  classes  inconnu,  dit  Proudhon, 
avant  1789. 

Entre  le  maître  et  Touvrier  plus  de  devoirs  récipro- 
ques, ni  de  rapports  de  bienveillance,  plus  que  la  stricte 
justice. 

Ce  fut  la  lutte  :  lutte  du  maître  pour  augmenter  le 
travail  et  diminuer  le  salaire,  lutte  de  Touvrier  pour 
augmenter  les  salaires  et  diminuer  le  travail.  La  victoire 
du  maître  devait  faire  de  Touvrier  le  damné  de  l'enfer 
social,  suivant  le  mot  de  Louis  Blanc.  La  victoire  de 
rouvrier  devait  conduire  le  maîlre,  à  des  conditions  rui- 
neuses, à  des  faillites,  à  des  crises  industrielles.  Le 
dernier  mot  devait  être  la  haine  et  la  guerre  des  classes. 
Telle  fut,  d  après  Proudhon,  Torigine  de  la  question 
sociale. 

Il  fallait  donc  relever,  ennoblir  et  sanctifier  le  travail, 
pour  éviter  des  catastrophes.  Voilà  pourquoi  Téglise  a 
voulu  ennoblir  le  travail  par  si^s  doctrines,  le  sanctifier 
par  ses  moines,  le  Ciinoniser  dans  ses  Saints.  Les  cen- 
dres des  ouvriei*s,  comme»  celles  des  Saints  Crépin  et 
Crépinien,  ont  été  tirées  de  Tobscurité  et  placées  sur  des 
autels.  Les  rois  et  les  reines  sont  venus  se  mettre  à  ge- 
noux devant  ces  restes  vénérés,  les  pontifes  se  sont 
inclinés  et  les  ont  baisé  avec  respi^ct.  L'Eglise  n'a-t-i»lle 
pas  été  fondée  par  douze  pauvres  travailleurs?  Comme 
on  le  voit,  l'ouvrier  du  moyen-àge  n'était  plus  cet  ou- 


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—  280  — 

vrior  avili  et    dégradé  par  le  paganisme  qui  lui  avait 
tout  enlevé,  jusqu'à  sa  liberté. 

La  Petite  République  disait  récemment,  en  commen- 
tant une  Etude  parue  dans  la  Revu£  des  Deux  Mondes, 
sur  les  transformations  sociales  opérées  par  la  Révolu- 
tion :  la  condition  actuelle  de  Touvrier  est  inférieure, 
sous  tous  les  rapports,  à  celle  qu'elle  était  avant  1789. 
Ainsi  aux  XI V«  et  XV«  si('Hîles  l'ouvrier  ne  travaillait  que 
250  jours  par  année  et  la  moyenne  de  son  travail  annuel 
a  oscillé  en  montant  toujours  entre  800  et  1.200  francs. 
Do  nos  jours,  alors  que  la  valeur  de  l'argent  est  bien 
moindre,  que  sa  capacité  d'achat  a  considérablement 
diminué  (pour  300  jours  de  travail  et  non  250),  la 
moyenne  du  salaire  annuel  de  l'ouvrier  n'est  plus  que  de 
1.020  francs.  Autrement  dit,  aujourd'hui,  le  temps  de 
travail  est  de  17  0/0  plus  long  qu'au  moyen-àge,  et  le 
salaire  est  d'environ  20  0/0  inférieur.  Bref,  l'ouvrier  est 
plus  malheureux  ;  le  petit  bourgeois  disparaît  et  tombe 
dans  le  prolétariat,  le  paysan  devient  la  victime  des 
accaparements  juifs. 

Au  moyen-àge,  la  répn»ssion  de  la  fraude  dans  la 
fabrication  restreignait  les  excès  de  la  concurrence.  Des 
lois  spéciales  empêchaient  l'accaparement  et  l'avilisse- 
ment des  prix,  procédés  de  la  spéculation  moderne, 
cause  de  désordre,  de  chômage,  de  ruine  pour  le  plus 
grand  nombre.  Le  patrimoine  corporatif  réalisait  l'asso- 
ciation morale  et  pécuniaire. 

Janssen,  l'auteur  de  Y  Allemagne  à  la  fin  du  moyen- 
df/e,  cite?  une  foul(>  de  règlements  privés  et  publics  en 
vigueur  dans  toute  l'Europe  chrétienne.  Alors,  suivant 
l'expression    proverbial(%    le  maître   tenait   l'apprenti 


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—  281  — 

4f  continuellement  à  son  pain  et  à  son  pot,  >  Les  com- 
pagnons étaient  associés  à  la  famille  da  maitre. 

Les  règlements  domestiques  de  1483,  1520,  prescri- 
vent pour  les  journaliers,  corvéables,  serviteurs  d'exploi- 
tation, touâ  les  jours  le  matin  une  soupe  ou  des  légumes; 
à  midi,  soupe  et  viande,  une  cruche  de  vin,  une  bouillie 
aux  épices  ou  de  la  viande  marinée,  des  légumes  ou  du 
lait,  en  tout  quatre  plats.  Le  soir,  de  la  soupe  et  de  la 
viande  marinée,  des  légumes  ou  du  lait,  en  tout,  trois 
plats. 

Plus  de  cent  ouvrages  documentés  ont  été  consacrés 
à  retracer  l'organisation  des  anciennes  corporations. 
Tous  aboutissent  à  ces  mêmes  conclusions,  quoique 
écrits  par  des  hommes  de  toutes  les  croyances  et  de 
tous  les  partis.  Citons  en  passant  :  Le  Livre  des  Me- 
tiers  j  d'Etienne  Boileau  ;  L'Histoire  des  classes  ouvrières 
en  France,  de  Levasseur;  L'Histoire  des  Corporations 
ouv)i£res  de  M.  Hubert- Valleroux  ;  Les  Etitdes  sur  V in- 
dustrie et  la  classe  industrielle  de  PatnSy  aux  XIII^ 
et  XIV^  siècles,  de  M.  Fagniez,  qui  n'est  pas  un  ca- 
tholique pas  plus  que  Siméon  Luce,  ou  Louis  Blanc,  ou 
Proudhon  qui  ont  cependant  glorifié,  au  point  de  vue 
économique,  le  temps  où  le  gouvernement  et  les  mu- 
nicipalités protégeaient  le  bien-être  de  l'ouvrier. 


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—  282  — 


DOCUMENT  I 


Bulle  du  Pape  Innocent  XJ 

1677 

Innocentius  p.  p.  XJ 

Universis  christi  fidelibus  preosentes  litteras  inspecturis 
salutem  et  apostolicam  benedictionem.  Ad  augendam  fide 
Hum  religionem  ^t  animarum  salutem  cœlestibus  ecclesiœ 
thesauris  pia  charitate  intenti  omnibus  utriusque  sexus 
christi  fidelibus  vere  pœnitentibus  et  confessis  ac  sacra 
communione  refectis  qui  ecclesiam  B.  M.  Virginis  de 
compassione  nuncupatam  oppidi  de  Tonon  gebenneosis 
diocesis,  cui  eccIesiR'  ejus  que  capellisetaltaribusnullaaiia 
indulgentia  reperitur  concessa,  die  festo  sancli  Eligii  a 
primis  vesperis  usque  ad  occasum  solis  festi  hujusmodi, 
singulis  annis  dévote  visitaverint  et  ibi  pro  christianorum 
principum  concordia,  haTeseum  extinctione,  ac  sancto? 
matris  ecclesia»  exaltatione  pias  ad  deum  preces  elïuderint 
plenariam  omnium  peccatorum  suorum  indulgentiam  et 
remissionem  misericorditer  in  domino  concedimus  prœsen- 
tibus  ad  sepCennium  tantum  valituris.  Volumus  autem  ut 
si  alias^  christi  fidelibus  in  quocumque  aiio  anni  diedictam 
ecclesiam  sive  capellam  aut  altare  in  ea  situm  visitantibus 
aliqua  alia  indulgentia  perpétua  vel  ad  tempus  nondum 
elapsum  duratura  concessa  fuerit  vel  si  pro  impetratione 
presentatione  admissione  seu  publicatione  pnrsentium 
aliquid  vel  minimum  detur  aut  sponte  oblatum  recipiatur 
pnesentes  nulla»  sint.  Datum  Roma»  apud  sanctum  petrum 


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—  283  — 

sub  annulo  piscatoris  die  xxiij  maii  m.  d.  c.  1.  xxvij  ponti- 

ficatus  nostri  anno  primo. 

Gratis  pro  Deo. 
Publicentur  ut  sonant.  Da- 

tum  Tononii  die  30  septembris 

16T7. 

Joanes  episcop-geneoensis. 


DOCUMENT  II 


Bulle  du  Pape  Clément  XJ 

1712 

Clemens  p.  p.  XJ 

Ad  futuram  rei  memoriam  omnium  saluti  paterna  chari- 
tate  intenti  sacra  interdum  loca  spiritualibus  indulgen- 
tiarum  muneribus  decoramus  ut  inde  fidelium  defunctorum 
animœ  domini  nostri  jesu  christi  ejusque  sanctorum  suf- 
fragia  meritorum  consequi  et  illis  adjutn^  ex  purgatorii 
pœnis  ad  a»ternam  salutem  per  dei  miserieordiam  perduei 
valeant;  volentes  igitur  eclesiam  paroehialem  sancta»  Mariœ 
Virginis  compassionis  nuncupatam  sancti  Eligii  civitatis 
etiam  nuncupattv  Tononii  gebennensis  diocesis  et  in  ea 
situm  altare  confraternitatis  sub  invocatione  sancti  Eligii 
simili  perpetuo  privilegio  minime  decoratum  hoc  spe- 
ciali  dono  illustrare  de  omnipotentis  misericordia  ac  beato 
rum  pétri  et  pauli  apostolorum  ejus  auctoritate  confisi  ut 
quandocumque  sacerdos  aliquis  secularis  vel  regularis 
missam  defunctorum  in  die  commemorationisdefunctorum 
et  singulis  diebus  intra  illius  octavam  ac  in  una  feria 
cujuslibet  hebdomadaî    per    ordinarium    designanda    pro 


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—  284  — 

anima  cujus  cumqueconfratriset  consororis  dictœ  confrater- 
nitatis  quœ  Deo  in  charitate  conjuncta  ab  hac  luce  migra- 
verit  ad  privilegiatum  altare  celebrabit  anima  ipsa  de 
thesauro  eclesire  per  modum  suffragii  indulgentiam  conse- 
quatur,  ita  ut  ejusdem  domini  nostri  jesu-christi  ac  beats? 
Mariée  sanctorum  que  omnium  meritis  sibi  suffragantibus 
purgatorii  pœnis  liberetup  concedimus,  et  jnduigemus  in 
continuo  faciendum  non  obstantibus  quibuscunque  prœ- 
sentibus  per  septennium  tantum  valituris.  Datum  Roma? 
apud  sanctum  Petrum  sub  annulo  piscatoris  die  xiij  maii 
m.  d.  ce.  xij  pontificatus  nostri  anno  duodecimo. 

Gratis  pro  Deo. 


Traduction  des  Bulles  Pontificales 

Innocent  XI,  Pape 

A  tous  les  fidèles  qui  verront  les  présentes  lettres^  salut 
et  bénédiction  apostolique.  Animé  d*une  pieuse  charité 
pour  augmenter,  par  les  trésors  célestes  de  Téglise,  la  reli- 
gion des  fidèles  et  le  salut  des  âmes.  Nous  accordons 
miséricordieusement  en  Notre  Seigneur,  indulgence  plé- 
nière  et  rémission  de  tous  leurs  péchés  à  tous  les  fidèles 
en  Jésus-Christ,  qui,  vraiment  contrits,  s'étant  confessés 
et  munis  de  la  sainte  communion,  visiteront  dévotement, 
le  jour  de  la  fête  de  Saint-Eloi  depuis  les  premières  vêpres 
jusqu'au  coucher  du  soleil,  l'église  de  la  Bienheureuse 
Vierge  Marie  appelée  de  Compassion  de  la  ville  de  Thonon, 
diocèse  de  Genève,  église  à  laquelle  aucune  autre  indul- 
gence ne  parait  avoir  été  accordée,  non  plus. qu'à  ses  cha- 
pelles et  autels,  et  qui  y  adresseront  à  Dieu  de  pieuses 
prières  pour  la  concorde  des  princes  chrétiens,  pour  l'ex- 
tinction des   hérésies  et  pour  l'exaltation  de   notre  Sainte 


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—  285  — 

Mère  TEglise.  Les  présentes  lettres  devront  être  en  vigueur 
chaque  année  pendant  le  laps  de  sept  ans  ;  mais  nous  vou- 
lons qu'elles  soient  nulles,  si  avant  cette  époque,  il  a  été 
accordé  aux  fidèles  en  Jésus-Christ  pour  quelque  jour  de 
l'année  à  perpétuité  ou  pour  un  temps  non  encore  écoulé, 
quelque  autre  indulgence  dans  ladite  église  ou  chapelle, 
ou  à  son  autel,  ou  bien  si  quelque  don  a  été  fait  ou  si  quelque 
offrande  a  été  reçue  pour  l'impétration,  la  présentation  ou 
l'admission  des  présentes. 

Donné  à  Rome  à  Saint-Pierre  sous  l'anneau  du  pécheur,  le 
23*^  jour  de  mai  1677, 4a  première  année  de  notre  pontificat. 

Gratin  pro  Deo. 

Que  les  présentes  lettres   apostoliques   soient   publiées 
selon  leur  teneur.  Donné  à  Thonon,  le  30  septembre  1677. 

Jean,  éoèque  de  Genève, 


Clément  XI,  Pape 

Puisque,  selon  ce  que  nous  avons  appris,  il  y  a  dana 
l'église  paroissiale  de  la  Bienheureuse  Vierge  Marie  sous 
le  vocable  de  Notre-Dame  de  Compassion  de  la  ville  de 
Thonon,  dans  le  diocèse  de  Genève,  une  pieuse  et  dévote 
confrérie  non  seulement  de  personnes  attachées  à  un  art 
particulier,  mais  encore  de  tous  fidèles  chrétiens  de  l'un  et 
de  l'autre  sexe,  que  cette  Confrérie  est canoniquement  érigée 
sous  l'invocation  de  Saint-Eloi,  et  que  les  confrères  et  les 
sœurs  ont  coutume  d'exercer  beaucoup  d'œuvres  de  piété  et 
de  charité.  Nous  Pape,  appuyé  sur  la  miséricorde  de  Dieu 
tout  puissant  et  sur  l'autorité  de  ses  bienheureux  apôtres 
St-Pierre  et  St-Paul,  afin  que  cette  Confrérie  prenne  tous 
les  jours  de  nouveaux  accroissements.  Nous  accordons 
miséricordieusement  dans  le  Seigneur,   à  tous  les  fidèles 


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—  286  — 

chrétiens  de  l'un  et  de  Tautre  sexe  qui  entreront  à  l'avenir 
dans  la  dite  Confrérie,  une  indulgence  plénière  le  premier 
jour  de  leur  entrée,  si  véritablement  contrits  et  confessés, 
ils  reçoivent  le  Très  Saint  Sacrement  de  l'Eucharistie. 

Nous  accordons  aussi  aux  Confrères  et  Sœurs  qui  sont 
inscrits,  ou  qui  se  feront  inscrire  à  l'avenir  dans  la  dite 
Confrérie,  une  indulgence  plénière  à  l'article  de  la  mort,  de 
quelque  genre  qu'elle  soit,  s'ils  sont  de  môme  véritable- 
ment contrits,  confessés  et  communies,  ou.  si  ne  le  pouvant 
faire,  ils  prononcent  du  moins  avec  contrition  le  Saint  nom 
de  Jésus  ou  l'invoquent  dévotement  dans  le  cœur. 

Nous  accordons  indulgence  plénière  et  rémission  de  tous 
péchés,  à  tous  les  Confrères  et  Sœurs  de  la  dite  Confrérie, 
qui  étant  de  même  contrits,  confessés  et  communies,  visite- 
ront dévotement  chaque  année  l'église,  ou  la  chapelle  de  la 
dite  Confrérie  le  jour  de  la  fête  principale  que  les  confrères 
auront  une  fois  choisie  eux-mêmes  et  qui  sera  approuvée 
par  l'Ordinaire,  et  cela  depuis  les  premières  vêpres  jusqu'au 
soleil  couchant  du  dit  jour,  et  qui  y  prieront  dévotement 
pour  la  paix  entre  les  princes  chrétiens,  pour  l'extirpation 
des  hérésies  et  l'exaltation  de  Notre  Sainte  Mère  l'Eglise. 

De  plus  nous  accordons  sept  années  et  autant  de  quaran- 
taines d'indulgence  aux  dits  Confrères  et  Sieurs  qui  étant 
de  même  véritablement  contrits,  confessés  et  communies, 
visiteront  comme  ci-dessus  la  dite  église  ou  chapelle,  qua- 
tre autres  jours  de  l'année  fériés  ou  non  fériés,  que  les  dits 
confrères  choisiront  de  même  une  fois  seulement  et  qui 
seront  approuvés  par  le  même  Ordinaire  et  qui  y  prieront 
l'un  des  dits  jours  dans  les  mêmes  intentions  que  ci-dessus. 

Outre  cela,  toutes  les  fois  qu'ils  assisteront  aux  messes 
ou  autres  divins  offices,  qui  se  célébreront  selon  le  temps 
dans  la  dite  église  ou  chapelle;  toutes  les  fois  qu'ils  se 
trouveront  dans  les  assemblées  publiques  ou  particulières 


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~  287  — 

de  la  même  Confrérie  ;  toutes  les  fois  qu'ils  logeront  des 
pauvres,  qu'ils  réconcilieront  des  ennemis,  qu'ils  accom- 
pagneront à  la  sépulture  les  corps  soit  de  leurs  Confrères 
et  Sœurs,  soit  des  autres  fidèles,  qu'ils  assisteront  à 
quelque  procession  faite  par  la  permission  de  l'Ordinaire, 
qu'ils  accompagneront  le  Très  Saint  Sacrement  aux  pro 
cessions  ou  lorsqu'on  le  porte  aux  malades,  ou  ailleurs,  ou 
que  ne  le  pouvant  pas,  ils  réciteront  l'oraison  dominicale 
et  la  salutation  angélique  ;  toutes  les  fois  qu'ils  réciteront 
cinq  pater  et  cinq  ace  Maria  pour  le  repos  des  âmes  de 
leurs  Confrères  et  Sœurs,  qu'ils  remettront  dans  la  voie 
du  salut  quelque  personne  qu'ils  verront  s'en  écarter;  toutes 
les  fois  qu'ils  enseigneront  les  commandements  de  Dieu  et 
les  choses  qui  regardent  le  salut,  à  ceux  qui  les  ignorent, 
ou  qu'ils  feront  quelque  autre  (uuvre  de  piété  et  de  charité, 
nous  leur  relâchons  et  diminuons  chaque  fois  pour  chacune 
de  ces  bonnes  œuvres  soixante  jours  des  pénitences  qui 
leur  auront  été  enjointes,  suivant  la  forme  accoutumée  de 
l'église.  Nous  voulons  que  les  présentes  aient  leur  effet  à 
perpétuité,  mais  qu'elles  soient  nulles  si  quelque  autre 
indulgence  avait  été  accordée  à  perpétuité,  ou  pour  un 
temps  non  encore  écoulé  aux  mômes  Confrères  et  Sœurs 
qui  s'acquitteront  des  choses  ci-dessus  énoncées  ;  nous 
voulons  que,  si  ladite  Confrérie  était  déjà  agrégée  à  quelque 
Archiconfrérie,  ou  qu'elle  s'y  agrégeât,  ou  s'y  unit  à  l'ave- 
nir, les  premières  lettres  apostoliques  et  toutes  autres  ne 
les  favorisent  aucunement,  mais  que  dès  à  présent  elles 
soient  nulles  et  d'aucun  effet.  Donné  à  Rome  à  Saint- 
Pierre,  sous  l'anneau  du  pécheur  le  13  mai  1712,  l'an 
douze  de  notre  pontificat. 

Approbation  de  VEvèque 

Que  ces  présentes  apostoliques  soient  publiées  selon  leur 
teneur,  et  pour  leur  effet,  nous  approuvons  l'élection  faite 


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—  288  — 

par  les  dits  confrères   des  quatre  dimanches   qui  suivront 

immédiatement  le  jour  et  la  fête  de  S^-Eloi.  Annecy  le  6® 

juillet  1713. 

Signé:  M.  G,,  éoèque  de  Genèoe. 


Clément  XI,  Pape, 

Pour  future  mémoire  de  la  chose. 

Préoccupé  par  une  charité  paternelle  du  salut  de  tous  les 
hommes,  nous  accordons  de  temps  en  temps  à  des  localités 
consacrées  à  Dieu  le  bienfait  spirituel  des  indulgences,  afin 
que  delà  les  âmes  des  fidèles  défunts  puissent  participer  aux 
mérites  de  Notre  Seigneur  Jésus-Christ  et  de  ses  saints,  et 
que  par  ces  mérites,  elles  puissent  par  la  miséricorde  divine 
passer  des  peines  du  purgatoire  au  salut  éternel. 

Voulant  donc  accorder  le  privilège  de  cet  illustre  don  à 
l'église  paroissiale  de  la  Sainte  Vierge  Marie  de  Compassion, 
dénommée  de  Saint  Eloi  de  Thonon,  diocèse  de  Genève,  et 
à  l'autel  de  la  Confrérie  qui  est  dans  cette  église  sous  l'invo- 
cation de  Saint  Eloi,  nous  accordons  par  la  miséricorde  de 
Dieu  tout-puissant  et  des  Bienheureux  apôtres  Pierre  et 
Paulleprivilègequechaquefoisqu'un  prêtre séculierou  régu- 
lier dira  une  messe  des  défunts  lejour  delacommémoraison 
des  morts  et  tous  les  jours  pendant  l'octave. ou  un  jour  férié 
de  quelque  semaine  que  ce  soit  qui  sera  désigné  par  l'Ordi- 
naire, pour  l'àme  de  quelques  confrères  ou  sœurs  de  la  dite 
confrérie»  qui  sera  morte  en  union  avec  Dieu  par  la  charité, 
et  que  cette  messe  sera  célébrée  à  l'autel  privilégié,  qu'alors 
l'àme  obtienne  du  trésor  de  l'Eglise  par  mode  de  suffrage, 
une  indulgence  qui  la  délivre  des  peines  du  purgatoire,  par 
les  mérites  de  Jésus-Christ,  de  la  Bienheureuse  Marie  et 
de  tous  les  Saints,  et  nous  accordons  cette  indulgence  pen- 
dant cette  année,  nonobstant  toutes  décisions  de  pontifes. 
Donné  à  Rome,  près  de  Saint  Pierre,  sous  l'anneau  du  pê- 


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cheur  le  13»  du  mois  de  mai  1712,  l'an  12'  de  notre  pontiftcat. 

Gratis  pro  Deo. 

DOCUMENT  III. 


MEMBRES  ACTUELS  DE  LA  CONFRÉRIE 

des  Saints  Éloi,  Crépin  et  Crépinlen  (1897) 


Conseil  d'Administration 

MM.  Charles  de  Foras,  prieur, 

Chavanne  François,  sous-prieur. 

Jordan  Joseph,  secrétaire. 

Grillon  Joseph,  trésorier. 

Martin  Marie,  tailleur  ( 

Sabatier  Charles 

RoLLiER  Joseph  l  conseillers, 

Dantand  Claude 

Gaillard  Philippe 

Cheneval  Marie 

Reverchon  Joseph,  sacristain, 

Bernaz  Marie.  Bouquin  Camille,  Bochaton  Marie, 
Balland  Alexis.  Burnaz  André,  Barnoud  Marie,  Bregand 
François,  Bernard  Jean,  Barnoud  François,  Bernaz  Jo 
seph,  Baud  Marie,  Bondaz  Joseph,  Berthet  Marie,  Bar- 
noud Louis,  Berger  Edouard,  Barnoud  François,  Cusin 
Aimé,  Chevallay  Jean,  Chevallay  Paul,  Chevalley  Nicolas, 
Veuve  Cusin,  Cheneval  Marie,  Collet  Claude,  Cônevaz 
Jean-Marie,  Chavanne  François,  Charrière  Maurice,  Ca- 
riator  François,  Charles  Marie,  Charrière  Bernard,  Che- 
nevier  Jean  Marie,  Chappuis  François,  Chamot  Antoine, 
Chamot  Jean,  Charmot  François,  Dantand  Joseph,  Dantand 
Aimé,  Dantand  Claude,  Dantand  Léon,  Delacroix  Fran- 
çois, Decorzent  Claude,  Dôtruche  Charles,  Détraz  Joseph, 
Deleschaux  Jean,  Dubouloz  Louis,  Degrange  Joseph,  De- 
praz  Joseph,  Deruaz  François,  Deleschaux  Isidore,  Du- 
bouloz Jean,  Dantand  Louis,  Decorzent  Jean,  Decroux 
Marie,  Duqueux  Marie,  Duret  François,  Dantand  Joseph, 
Dantand  Prosper,  Dubouloz  Monnet  Auguste,  Dantand 
Guérin,  Dantand  Justin,  Decorzent  Louis.    Degenève  Ju- 

i9b 


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—  290  — 

lien,  Détraz  François,  Duchesne  Louis,  Fornier,  née  Henri, 
Favre  Joseph,  de  Foras  Charles,  Frossard  Joseph,  Faye 
Joseph,  Fernex  Charles,  Frézier  Alfred,  Grillon  Isidore, 
Gauthier  François,  Gogaz  Jean,  Gex  Jean-Louis,  Grillon 
Joseph,  Gaillard  Philippe,  Grillon  Antoine,  Greninger  Jo- 
seph, Gaillepand  Claude,  Gréloz  François,  Gréloz  Joseph, 
Gros  Marie,  Gréloz  François,  Grillon  Auguste,  Girard 
Jean,  Gréloz  Antoine-Joseph,  Gauthier  Joseph,  Jacquier 
Louis,  Jeandin  Jean.  Jordan  Joseph,  Jordan  Eugène,  Lau- 
rent Jean,  Lanier  Clément,  Laj^at  Joseph,  Lombard  Phi- 
lippe, Lugrin  Aimé,  Laperrousaz  Joseph,  Lavanchy  Joseph, 
Lequin  Marie,  Maury  François,  Moynat  Joseph,  Maurice 
Louis  ,  Moille  André,  Marchât  François,  Martin  François, 
Moynat  Joseph,  Merlin  Jacques,  Marchât  Victor,  Moille 
Joseph,  Mufïat  Pierre,  Matringes  Henri,  Moille  André  feu 
Antoine,  Moynat  Joseph,  Morard  Barnabe,  Milliet  Fran- 
çois, Neuvecelle  Maurice,  Neuvecelle  Auguste,  Perrou  d 
Claude,  Pioton  Louis',  Pethoud  Auguste,  Portay  Jean, 
Portier  Marie,  Portier  Edouard,  Planchamp  Antoine,  Por- 
tier Joseph,  Pethoud  Joseph,  Pethoud  Paul,  Portay  Pros- 
per,  Planchamp  François,  Piccard  L.-E.,  aumônier.  Por- 
tier Joseph,  RoUier  Joseph,  Reverchon  Joseph,  Rollier 
Marie,  Randon  Joseph,  Riond  Maurice,  Riond  Charles, 
Ruffîer  Joseph,  Riond  Jean-Claude,  Rutïet  Jean,  Ruffier 
Jacques,  Sabatier  Charles,  Simon  Pierre-Joseph,  Thinaud 
Julien.  Vailly  Victor,  Veuillet  Joseph,  Vachat  Jean-Baptis- 
te, Vauttier  Pierre,  Vernaz  Louis,  Veillet  Joseph,  Zimaglia 
Louis,  Berthet  Aimé,  Chavanne  Marie,  Colly  Aimé,  Char- 
rière  François,  Dantand  Marie,  Decorzent  Claude,  Favre 
Joseph,  Gauthier  Etienne,  Gaillard  François,  Grillon  Fran- 
çois. Gerdil  Claude,  Gauthier  Jules,  Lombard  Michel, 
Maury  Jules,  Maury  Jean,  Mudry  Jules,  Martin  Marie, 
Mégemond  François,  Milliet  Marie,  Malfroy  Auguste, 
Moille  André,  Pethoud  André,  Portay  François,  Portier 
Marie,  Pethoud  (xuérin,  Paget  Joseph,  Portier  Joseph, 
Pethoud  Louis,  Charrière  Bernard,  Gauthier  Joseph. 


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TABLE  DES  MATIÈRES 


Pages 

I.  Travaux  de  l'Académie vu 

Séance  du  9  novembre  1896.  —  Communications 
de  MM.  Anthoinoz  et  Gavillet  (Soiscope),  et 
deMM.  Piccardet  Vernaz.  —  Remercîments 
à  M.  EngelGros  et  réceptions  de  MM.  Van 
Muyden,  A.  Anthoinoz,  DuboulozA.etBorelF. 
comme  membres  de  la  Société vu 

Séance  du  14  décembre  1896.  —  L.  Quiblier  est 
nommé  secrétaire-adjoint.  —  Communications 
de  MM.  Vuarnet  et  Lucien  Jacquot  (tombeaux 
de  Sétif) IX 

Séance  du  11  janvier  1897.  —  Renouvellement  du 
bureau.  —  Dignitaires  du  Comté  de  Genevois 
nommés  à  Ripailles  en  1440,  par  L.-E.  Piccard 
(Documents  imporUmts) ix 

Séance  du  8  février  1897.  —  Comptes  du  Trésorier 
de  la  Société.  —  Communications  de  MM.  N. 
Dunoyer  et  L.  Jacquot xiv 

Séance  du  8  mars  1897.  —  Séjour  de  Lamartine 

en  Chablais,  à  Nernier  en  1815  (E.  Vuarnet).  xv 

Séance  du  12  avril  1897.  —  Communications  de 
MM.  Duplan  (Jean  de  Blonay,  prieur  de 
S'-Anathoile  de  Salins);  Piccard  (bataille  de 
Marsaglia)  ;  Guyon  (lampe  antique) xviii 

Séance  du  10  mai  1897.  —  Communication  du 
F.  Valfrid  (Occupation  française  de  1691)  ;  du 
R**  P.  Elzéar  du  couvent  de  Concise-Thonon  ; 
de  M.  Dubouloz  F.  et  de  M.  Duplan  (Ordon- 
nance inédite  de  S^-François  de  Sales).  —  Ré- 
ception de  MM.  Chabert  C.  et  Dubouloz  F. .         xxiii 

Séance  du  14  juin  1897.  —  Communications  de 
MM.  Vuarnet,  Duplan,  Piccard  (Archives  de 
Genève).  —  Réceptions  de  MM.  Bouquin  L. 
et  Bernaz  F xxx 

Séance  du  12  juillet  1897.  —  Présentation  d'Isa- 
belle de  Châlon,  Dame  de  Vaud,  à  la  cure  de 
Vauriez  (L.-E.  Piccard) xxxvni 

H.    Dons  faits  à  l'Académie  Chablaisienne xl 


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-  202  — 

III.  Membres  de  l'Académie  Chablaisienne xli 

Composition  du  Bureau xli 

Président  et  Membres  d'honneur xli 

Membres  effectifs  résidants xlh 

—  —        non  résidants.. xlih 

—  agrégés    xliv 

—  correspondants xliv 

IV.  Sociétés  correspondantes xlvi 


MEMOIRE  I 

Biographie   du  général    Dupas,    par    Ferdinand 

Dubouloz- Dupas  et  André  Folliet 1-257 

MÉMOIRE  II 

Les  anciennes  corporations  d'Arts  et  Métiers   de 
Thonon-les-Bains,  par  L.-E.  Piccard 257-290 


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—  293  — 

TABLE  AlPHABiTIdUE  DEiS  MATIÈRES 


Aalen                           *  102 

Académie  Chablaisienne  (Membres  de)  xli 

Aboukir  48,  73,  78, 79.  82 

Adige  41, 101 

Abendroth  163 

Adda  31,  32 

Aderkiaa  214,  217,  222 

Aix  (bains  de)  228 

Aigle  233 

Allouard  34 

Alvinzi  (général)  40 

Alexandrie  48,  73,  74,  75,  82 

Aile  (rivière)  134 
Altona          152,  155,  158,  159,  161,  162,  163,  165,  167,  168, 

171,  172,  176 

AUter  171,  172 

Alaingy  176 

Aldembourg  180 

Alexandre  195 

Amstetten  103 

Amédée  viii  (pape  Félix  V)  x 

Amyot  XIX 
Anglais     19,  66,  74,  79,  81,  89,  91,  93.  142,  143,  144,   153, 

154,  155,  156,  157,  160 

Andréossy  52 

Anclam  111,  123,  125,  127,  128,  129 

Antioche  (comté)  240 

Andezeno  242,  247 

Annecy  272 

Anthoinoz  vu,  viii 

Arnaud  44 

Armée  du  Rhin  47 

Arras  95,  96,  99 

Areng  119 

Autriche  3,  28,  101,  107.  193,  203 
Augereau     3,  24,  26.  31,  32, 33,  40, 41,  42, 102, 107,  236, 237 

Austerlitz  105,  106,  134,  146,  223,  246 

Auberburg  141 

Augier  195 

Aubry  205,  219,  226 


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—  294  — 

Avignon  18,  241 

B 

Bàle  25 

Bardinetto  26 

Ballan  34 

Bàlbeis  '  58 

Barrai,  96, 99, 102,108,114,119,121,122,138,139,193.218,225 
Bavière  '  101,  106, 107 

Baltique  109,  128,  142, 156 

Balland  121 

Barel  169 

Bardenet  204,  205 

Barnabites  240 

Baud  Justin  269 

Barthélemi  xxxvii 

Beaulieu  33, 34 

Berthier  33,  37,  38,  40,  47,  49,  51,  52,  90,  93,  95,  96, 

199  216  223  224 
Belliard  47,  50,  68,  69,  71,  72,  73,  74,  75,  76!  79,  80,  81,  82 
Berlin  109,  129,  139,  141, 166 

Berthelot  121 

Berlancourt  136 

Bertrand  185 

Bellegarde  212,  214 

Beauharnais  212,  213 

Bernaz  267 

Bétemps  268 

Beauregard  xxxi 

Blard  272 

Blanc  Louis  279.  281 

Blonay  (de)  xiv,  xxxv 

Bonaparte  3,  26,  31,  32,  36,  37,  39,  40,  42,  43,  44,  45, 46, 
47,  48,  49.  50,  51,  52,  66,  78,  73,  83,  84. 
85,  87,  89,  90,  94,  98.  100,  194 
Boissy  d'Anglas  6 

Bologne  44 

Bon  (général)  47 

Bochaton  (aide  de  camp)     96,  102, 108,  113.  138,  139,  150, 

151,  164,  176,  218,  226,  248 
Bourinet  126,  127 

Bordillet  127 

Bourrienne  (Ministre  de  France)  169,    170,   181,   191.  193, 

194,  195,  196. 197 
Boudet  224 

Boujon  268 


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—  295  — 


Bovet 

268 

Bourgeois 
Bouvet 

270 
271 

Boileau 

281 

Bordel 

XXXII 

Bouquin 
Brescia 

XXXVIII 

37 

Brun 

49,  83 

Brûnsow 

112 

Brème        150,  151,  152, 

157, 

158, 

159, 

163, 

16-1, 

165,  166, 

167. 171. 172,  177 

,182 

:,  19(>,  197 

Bron 

240 

Bréiat 

274 

Busigny 
Bubna  (général) 
Bugniard 
Burhaven 

16,  18 
236 
116 
181,  182 

Bullier  218 


Caire  2,  5,  49,  50,  52,  55  58,  G0-G2,  07,  68,  73-76,  81 

Carteaux  3,  19-21 

Cardignan  9,  15 

Carmes  12 

Cadogno  31 

Caldiero  40,41,43 

Caffarelli  (général)  47 
Caire  (ville)  48,  51,  52,  53,  55,  56,  57,  58,  59,  60,   61,  68, 

69,70,71,75,79,80 

Carbonel  95 

Caban  nis  102 

Carré  114 

Carron  176,  240 

Canuel  (général)  241 

Capucins  de  Thonon  267 

Cayen  vni 

Catinat  (général)  xxiii 

Charles  (archiduc)  101,  211,  213 

Cherné  121 

Charpentier  137 

Chapuiset  144 

Champagny  196 

Charmot  232 


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—  296  — 

Chastel  Pierre-Aimé  (général)  248 

Chappuis  (commandant)  et  autres  231,  248 

Chenevier  262 

C ha van ne  267 

Champoury  268 

Charmot  268 

Chenevier  268 

Chablais  xv,  269,  270 

Chartreux  de  Vallon  .  271 

Charles  271 

Charrière  277 

Chabert  xxix 

Chens,  (canton  de  Douvaine)  xxx 

Clarke  (général)  233,  235 

Clément  XI  (pape)  260,  283 

Colard  137 

Coulié  137 

Cozal  (colonel)  68 

Cologne  165, 166 

Concise  (hameau  de  Thonon)  244,  248 
Confrérie  St-Eloi  xxiv,  259,  260,  261,  262,264,276,  277,285 
Confrérie  St-Crépin  et  Crépinien     xxiv,  259,  268,  269, 270, 

271,  274,  276,  277,  279 

Collet  262 

CoUy  277 

Codurier  xxix 

Crémone  41 
Curnillon  (aide-de-camp)                      108, 114,  127,  218,  226 

Cullery  267 

JD 

Dallemagne  (général)  30,  31,  33,  36,  37,  38 

Damas  (général)      47,  50,  58,  59,  60,  61,  62,  63,  64,  75,  158 

Damiette  52 

Davout  (maréchal)  102.  107,  131,  210,  213,  230 

Dalmatie  106 

Dallenger  123 

Dandely  (lieutenant)  136 

Daraith  172 

Dagallier  181 

David  277 

Denoyer  (général)  3,  25 
Dessaix  (général)       14, 16,  18,  19,  25,  28,  29,  41,  43,  230, 

232,  237,  241,  242,  247 


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—  297  — 


Delamarche 

153 

Devaux  (colonel) 

179,  181 

Delaplace 

202 

Desgenettes 

228 

Delaroche  (général) 

237 

Descombes 

240 

Degenéve 

262,  263 

Delacroix 

262,  268 

Desuzinge 

267 

Deruaz 

270 

Deleschaux 

271 

Détraz 

251,  267 

Délaie  Pierre  Louys  (syndic  d'Evian) 

XXXII 

Dieppe 

90,96 

Dirschau 

130 

Dommartin 

19,47 

Doppet  (général)                                   3,  15,  IG. 

18,  20,  23,  24 

Donzelot  (général) 

77,79 

Donnadieu  (général) 

241 

Drivet  (capitaine) 

121 

Dugommier  (général) 

3,  20,  22,  23 

Dupas  (général) 

1-257 

Dumas  (général) 

47 

Dupuis  (général) 

47,  48 

Duroc  (maréchal) 

100, 105 

Dupont  (général) 

134 

Durand 

196 

Dubreton                                        205,  206,  207, 

218,  219,  226 

Dubourg 

218 

Ducret 

261 

Dutruel 

261 

Duret 

270 

Dufresne  C. 

267,  270 

Du  péri er 

276 

Duchamp 

277 

Dubouloz  A.,  et  autres                                  viii, 

240,  262,  267 

Duplan  (président  de  TAcadémie) 

IX,  X,  XIV,  XV 

Duval  (député) 

IX 

E 


Elbe  (fleuve)  109,  151,  152,  153,  166,  177,  179,  235 

Elzéar  (père  capucin)  xxiv 


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298  — 


Engel-Gros 
Espagnols 

Essen  (général) 
Evian 


VIII 


XIV.  18,  i9,  24,  25,  155,  158,  160,  162, 163. 

172,  173,  179,  180 

127.160 

17,21,22,30,248,275 


JB" 


Fabry 

Fabre  (sénateur) 

Favre  (commandant) 

Férière 

Feltre 

Ferney 

Feigères 

Fillon 

Florence 

Floret 

Fleury 

Foras  (de) 

Folliet 

Friedland 

Friant 


155 
230 
248 
122 
225,  229,  235,  236 
248,  264,  268 

XXIV 

266,268 
154 
232 

XXXV 

7,  268,  277 

IX,  XXIV,  XL,  127,  135,  139,  248 

5,  127,  128,  129,  i 31,  133,  139,  160,  246 

47,  50,  53,  56 

G- 

Gardanne  36 

Gourgaud  210 

Gaillard  268 

Gautier  268 

Garin  272 

Gainon  277 

Gavillet  vu 

Gallay  xxxiv 

Galifïe  xxxvii 

Genève  17,  21,  229,  230,  231,  296,  248 

Gemond  102 
Gency           108,  125,  129, 130,  131,  137, 140,  149,  185,  204, 

218,  219 

Genest  137 

Gérard  261 

Genoud  267,  270,  275 

Girod  271 
Grandjean                     108,  129,  131,  139,  140,  147,  213,  214 

Grillet  108 

Guyon  xxiii,  272,  274,  275 


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—  299  — 

H 

Hanovre    89,  109,  149,  150.   179,  180.  188,   197,  199.  200, 

204,  228 

Hambourg      109.  141,144,  145,  147,  148,  149,  150.  151, 

152,  1,55,  156,  157,  158,  159 

Héliopolis  52,  54,  79,  82 

Hedouin  234 

Hoche  (général)  '           8 

Honfleur  90 

Hulin  (général)  9,  245 

I 

Ibrahim  Bey  48,  54,  57 

léna  107,  134 

Invalides  (dôme  des)  5 

Innocent  xi  (pape)  260,  282 

Istrie  106 

Italie  27,106,  107,200,  223 

Ivanny  147 

J" 

Janissaires  (Tour  des)  57,  58,  67,  70,  71.  73 

Jaubert  (espion)  154 

Janson  (capitaine)  157 

Jambert  160 

Javerre  (capitaine)  218 

Jaillet,  de  S'  Cergues  (juge-maje)  240 

Janssen  (historien)  280 

Jacquot  (substitut  à  Sétif)  ix,  xv,  xxxv 

Jeannot  (aide  de-camp)  108 

Jencke  (brigadier)  169 

Jeandin  267 

Jean  (évoque  de  Genève)  285 

Joseph  (le  Puits)  53,  55,  64,  67 

Jonson  (lieutenant)  136 

Joubert  137 

Jouvencourt  (capitaine)  145,  164 

Junot  (général)  8,  84,  97,  99 

Junot  d'Abrantês  (M™«)                  ,  84,  96, 99 

Jurgens  161,  169 

Jurandes  278 

Juvigny  xiv 

Kléber  (général)        3,  47.  48,  52,  53,  54,  58,  61,  64,  65,  66. 

68,  78,  79,81,96 


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—  300  — 

Koch  f général)  32 

Kolding  148 

Kraner  135 

L 

Lafay  et  te  (général)  11.  13,  io 

Lanslebourg  17,  18 

Laborde  19 

Lanne^  (maréchal)  30,  33,  36,  47,  52,  102,  103,  104,  107, 

131,  las 

Lagrange  53,  77,  79 

Lassé  118 

Larrey  228 

Lausanne  223 

Lamartine  xv,xvn 

Lefebvre  8,  14,130 

Lessé  122 

Legrand  224 

Limoges  260 

Lodi  (pont  de)  5,  31,  32,  34,  35.  39,  40,  43.  84 

Lombardie  36 

Longenau  130 
Lubeck      142,  144,  145,  146,  177.  181,  167,  175,  174. 177, 

185,  188,  189.  196 

im; 

Malte  247 

Marseille  2,  19,  68,  85 

Marat  12 

Marches  (les)  16 

Masséna  (maréchal)  30,  32,  33,  34,  40,  217,  221,  224 

Mantoue  34,  36,  38.  39.  41.  42, 43 

Marmont  47,  52,  102,  224 

Marengo  99.  134 

Marchand  134, 137 

Mayence  141,179,235 

Maupoint  (colonel)  160,  161,  170,  176,  181 

Macdonald  209,  212,  213,  214,  215,  221,  224 

Marinet  242 

Maxilly  248 

Maistre  261 

Mamet  270 

Maxit  275 

Maury  277 

Meynier  32 

Memel  146 


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—  301  — 


Membres  de  la  Confrérie  de  S^-Eloi  de  1676  à  1792,  267,  268 
Mégemond  2^ 

Menthon  (de) 


Mercier 

Merlin 

Messiaz 

Michaud 

Milan 

Milliet 

Mortier 

Montfalcon 

Morand 

Mollien 


268 

270 

277 

21 

36,  42,  44,  101 


3,  107, 108,  115,  116,  119.  125,  133.  136,  223 

42 

105 

196,  198 


Mouton- Duvernet 

Napoléon  5,28.33.86.100.101, 
196,198.  202,203,211 
Naples 

Naz  (conseiller) 
Neker 
Nernier 
Nice 
Niémen 
Norvège 
Noyon 
Novel 
Novat 
Nyon  (Vaud) 

o 

Oder  (fleuve) 

Oglis  (rivière) 

Oldenbourg 

Oneille 

Orillat 

Oit 

Oudinot 


235,  241 


103.105.109,130.166,180, 

,  217.  222, 228,  229. 233.  235 

106.  107 

264,  268 

8 

XVI 

20 
140 
156 

260 
268 

XXXI,  XXXII 
XV,  XII 

111 

36 

150 

26 

113,  138,218.225 

40 

3,  102,  103,  104,  105,  106 


Paris 

Pacthod 

Pavie 

Parme 

Perpignan 

Pethoud 


8,  15,  20,  22,  43,  84,  97,  222,  225,  229,  237 

1*7 

36 

159 

22,  23 

263 


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30â  - 

Peccuz 

269 

Perrière 

274 

Peray 

275 

Piccard     viii,  ix,  x,  xiv,  xv,  xxin,  xxiv,  xxxv,  xxxviii,  xl. 

257,  290 

Pignet 

121 

Pinget 

240 

Pinet 

268 

Pissot 

271 

Pie  VI 

XXIV 

Planchamp 

277 

Plumet 

277 

Ponson 

136 

Puycerda 

23,  24,  25 

Q, 

Quiblier 

IX,  X 

12; 

Rampon 

47 

Rapp 

85,  87,  88,  89 

Raffin 

102,  104 

Raynaud 

108,  131,134,  138 

Rasse 

128 

Ratisbonne 

204 

Reynier 

47,  50,  66,  75,  208,  224 

Reubel 

197 

Rebut 

XXI,  261 

Rey 

269 

Rhodes 

66 

Rivoli 

41 

Richard 

61 

Riquet 

112,  113,  138,220,226 

Ripaille    X,  222,  227,  228, 

229,  230,  239,  240,  244,  246,  249 

Roux 

126 

Roy 

127,  136 

Rolaz 

271 

Rollier 

276,  277 

Romanet 

277 

Ruphy  (de) 

240 

S 

10,80,  100,  101,  108 

St-Cloud  (château  de) 

St-Hélène 

28,33 

S^-Jean-de-Murialto  (redoute)                                         29,  30 

St-Valéry 

91,93,  94 

Salmon 

126,  127 

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—   t5U»5    

Sales  (St  François  de) 

XXIV,  261,  270,  271 

S^-Gervais  (bains  de} 

228 

S*-Michel  (forteresse) 

234 

S^'-Maison  de  Thonon 

261,2t>2.  264.  270,  271 

S'-Anathoile  de  Salins 

XIX 

Saillet 

XXXIX 

Sonnaz  (de) 

270 

Souviran 

18 

T 

Talleyrand 

194,  196,  197 

Tharreau  (f<énéral) 

213.  224 

Thevenol 

136 

Thiébault 

241 

Thonon           17,  239.  242,  244,  245, 

259,  260,261,269.271, 

272.  273,  275,  285 

Ticon 

271 

Toulon                            3,  19,  20,  22, 

43,  46,  47,  84,  223.  232 

Toulouse 

25,26 

Threihlai-d  (général) 

91.92,  93 

Tréport 

91.  93 

Trouillas 

234 

Turin 

235 

u 

Ulm 

103 

Uhermond 

125,  i26,  1.36 

Université  Chablaisienne 

261 

"^T 

Vachier 

274 

Vailly 

271 

Valence 

vin,  18 

Valette 

41 

Valet 

158.  164 

Valfrid  (frère) 

X,  XXI,  XXIV 

Van-Muyden 

vni 

Vaudaux 

268 

Veaux         108.  112,  113,114,  116, 

117,  118,  120.  122,  125, 

427,  128 

,129,  131,139,  140,  182 

Veillet 

268 

Verdier 

47,  54.  134 

Vernaz 

viii,  270,  277 

Vial 

47 

Viry  (de) 

X 

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—  3Ô4  — 

Volland  261 

Vuarnier  261 

Vuatoux  270 

Wagram  5,  211,  214,  215,  216,  221,  222,  226,  227,  248 

Wesel  164.  177. 179,  180 
Westphalie                                            149,  186.  199.  200,  229 

Wismar  128,  147 

Wurtemberg  106,  204.  206 

Wurtzbourg  129,  130,  235.  236 

HT 

Yarmen  129 

z 

Zarrendorf  115 

Zuringer  163 


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IMPRIMÉ  SUR  LES  PRESSES 


DE 


A.  DUBOULOZ,  A  THONON-LES-BAINS 


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MÉMOIRES  &  DOCUMENTS 


PUBLIÉS    PAR 


FONDÉE  A  THONON  LE  7  DÉCEMBRE  1886 


TOME  XII 


M.D.CCC.XCVIII 


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L'Académie  laisse  à  chaque  auteur  la  responsabilité 
de  ses  opinions  et  de  ses  assertions 


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BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  GHABLAISIËNNË 


1897-1898 


I 

TRAVAUX  DE  L'ACADÉMIE 


Séance  du  8  Novembre  1897 

(PB^SIDENCB  DB  M.  A.  DUPLAN) 


Eq  ouvrant  la  séance  de  rentrée  de  TAcadémie  Cha- 
blaisienne,  dit  M.  Duplan,  permettez-moi,  Messieurs,  de 
vous  souhaiter  la  bienvenue  et  de  vous  exprimer  le 
plaisir  que  je  ressens.  Pendant  ces  quelques  semaines 
de  repos,  pris  selon  la  coutume,  vous  avez  puisé  dans 
votre  patriotisme  éclairé  de  nouvelles  forces,  afin  de 
mener  à  bien  notre  entreprise  :  faire  connaître  et  aimer 
notre  beau  Chablais,  en  étudier  l'intéressante  histoire, 
ses  conditions  orographiques  et  météréologiques,  sa 
structure,  sa  faune,  sa  flore,  en  un  mot  nous  occuper  de 
toutes  les  branches  de  science  et  d'art  qui  peuvent 
concourir  à  sa  gloire  et  à  sa  prospérité. 


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—    VI    — 

Permettez-moi,  maintenant,  de  jeter  un  rapide  coup- 
d'œil  en  arrière  et  de  vous  rappeler,  en  quelques  mots, 
Tespaco  de  temps  parcouru  par  notre  Société,  depuis 
cotte  époque  mémorable  du  7  décembre  1886,  date  de 
sa  fondation.  Elle  compte  à  son  actif  onze  beaux  volu- 
mes de  Mémoires  et  Documents, 

S'il  est  bon  de  faire  revivre  le  passé,  soyons  humains, 
laissons  aussi  quelques  fois  dormir  les  morts  et  occupons- 
nous  dos  vivants.  Demandons  à  la  science,  à  Texpériencc, 
ce  qu'elle  peut  nous  donner,  afin  d'aider  dans  la  voie  du 
progrés,  les  efforts  de  tant  d'hommes  éclairés,  dont 
s'honore  notre  pays.... 

C'est  vous  dire  que  tous  les  travaux  intéressant  les 
sciences  modernes  seront  bien  accueillis.  C'est  dans  ces 
espérances.  Messieurs,  que  nous  reprenons  aujourd'hui 
nos  séances  et  que  nous  allons  déployer  nos  voiles  et 
voguer  confiants  dans  l'avenir. 

M.  L.-E.  Piccard  communique  des  documents  très- 
intéressants  tirés  en  partie  des  archives  de  Turin  par  le 
général  Dufour. 

Les  poids  et  mesures  en  usage  en  Savoie  avant  la 
Révolution,  dit-il,  variaient  d'une  province  à  l'autre,  et, 
souvent  même  d'une  baronuie  à  la  baronnie  voisine.  Le 
droit  de  fixer  les  poids  et  mesures  appartenait  aux 
seigneurs  hauts  justiciers,  et  même  à  ceux  de  moyenne 
justice.  Les  usages  locaux  variaient  en  cette  matière 
comme  en  beauQoup  d'autres,  et,  dans  les  mêmes  lieux, 
des  mesures  portant  la  même  dénomination  différaient 
de  contenance  entre  elles,  selon  qu'elles  servaient  au 
mesurage  de  telle  ou  telle  denrée.  C'était  une  source 
intarissable  de  contestations  et  un  obstacle  permanent 


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—    VII   — 

au  développement  du  commerce.  L'aune  de  marchand 
de  Chambéry  était  de  1  m.  142;  celle  d'Annecy  de 
1  m.  154  ;  celle  de  Bonneville  de  1  m.  133;  celle  de 
Thonon  de  1  m.  192.  Les  pieds  usités  dans  le  toisé 
linéaire  étaient  principalement  le  pied  de  chambre 
(0  m.  35937)  et  le  pied  de  roi  (0  m.  32484).  Chacun  de 
ces  pieds  se  divisait  en  12  pouces;  le  pouce  valait  12 
lignes  et  la  ligne  12  points.  On  comptait  la  toise  de 
Savoie  de  8  pieds  de  chambre  et  celles  de  7  pieds  1/2,  de 
7,  de  6,  de  5  1/2,  de  4  1/2  ;  puis  la  toise  de  Genève  de 
8  pieds  de  roi  et  celles  de  7  1/2,  de  7,  de  6,  dite  de 
France,  de  5  1/2,  de  5,  de  4  1/2.  Pour  les  liquides,  le 
pot  de  Chambéry  était  de  1  litre  858  ;  celui  d'Albert- 
ville de  1  litre  845  ;  celui  de  Moûtiers  de  1  litre  50  ; 
celui  d'Annecy  de  1  litre  426  ;  celui  de  SMulien  de 
1  litre  127  ;  celui  de  Bonneville  de  1  litre  133  ;  celui  de 
Thonon  de  1  litre  307;  celui  de  Dou vaine  de  1  litre  128 
et  celui  d'Evian  de  1  litre  212.  Dans  les  mesures  de 
poids,  la  livre  de  Chambéry  équivalait  à  0  kilo  418610  ; 
celle  d'Annecy  à  0  kilo  627902  ;  celle  de  Genève  à 
0  kilo  551860,  etc....(l). 

Mais,  pour  assurer  la  conservation  des  prototypes 
employés  dans  nos  différentes  provinces  correspondant 
à  ces  anciennes  mesures,  les  ducs  de  Savoie  nommaient 
des  Vérificateurs  de  Poids  et  Mesures^  connus  sous  les 
noms  de  Marqueurs  et  Echantilleurs  de  Barils^  de 
Marqueurs  de  Poids,  de  Marqueurs  de  Mesures. 

Il  y  a  vingt-cinq  ans,  Auguste  Dufour  et  François 

(1)  On  sait  que  ce  fut  la  Convention  qui,  en  1793,  adopta  pour 
bases  de  l'uniformité  des  poids  et  mesures,  la  mesure  du  méridien 
terrestre  et  la  division  décimale. 


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—   VIII   — 

Rabut  inaugurèrent,  dans  les  Mémoires  et  Documents 
de  la  Société  savoisienne  d'histoire  et  d* archéologie ^ 
une  série  de  Notes  pour  servir  à  l'histoire  des  Savoyards 
des  divers  états. 

Les  peintres  eurent  le  premier  rang,  puis  vinrent  les 
sculpteurs.  Ce  fut  ensuite  le  tour  des  imprimeurs,  des 
musiciens  et  des  instruments  de  musique,  des  fondeurs 
de  cuivre,  canons,  cloches,  des  armuriers,  des  orfèvres 
et  de  Torfèvrerie.  Le  docteur  Guilland  continua  par 
r Histoire  des  médecins  et  Tavocat  L.  Pillet  par  celle  des 
avocats  du  barreau  de  Chambéry  ;  le  regretté  abbé 
Morand  entreprit  celle  des  anciennes  corporations  des 
Arts  et  Métiers  de  Savoie  et  du  personnel  ecclésiastique 
de  son  diocèse. 

Nul  n'a  encore  entrepris  de  faire  la  monographie  des 
poids  et  mesures  de  Savoie  et  de  leurs  vérificateurs,  qui, 
cependant,  occupent  une  place  considérable,  dans  notre 
vieille  histoire  de  la  patrie  savoyarde. 

Nous  allons  faciliter  la  tache  de  celui  qui  voudra  s*en 
charger,  à  Tavenir,  en  publiant  aujourd'hui  un  certain 
nombre  de  notes  et  de  documents  inédits  tirés  pour  la 
plupart  des  Archives  royales  de  Turin.  Les  instructions 
du  Souverain  à  ce  sujet  sont  intéressantes.  Voici  celles 
adressées  à  M®  J.  Maur  en  1584  (1)  : 

(1)  On  trouvera  aux  pièces  justificatives  :  Thomas  Vallée,  mar- 
queur des  mesures  à  Chambéry  (1561),  (Documents  1);  Pierre 
Rassat,  d'Annecy,  •  marqueur  de  poids  pour  le  Genevois  et 
le  Faucigny  (1545)  (Document  2)  ;  Lettres  pour  Nicolas  et  Pierre 
Pointet,  d'Annecy,  marqueurs  pour  le  Genevois^  le  Faucigny,  et 
Beaafort  (1553-1509),  (Document  3);  Louis  Bron,  Tainéetlejeune, 
marqueur  de  barrils  de  vin  rière  Annecy,  Thônes,  etc.,  (1579), 
(Document  4);  Jean  Pointet,  puis  ses  enfants,  marqueurs  de  poids 
(1613-1631),  (Document  5). 


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—   IX   — 

1584.  4  Janvier. 

M^*  Jacques  Maur,  horloger  de  S.  A.  Commission  pour  le 
fait  des  Poids  en  Savoie.  Archives  de  la  Chambre,  Turin, 
Patentes  de  Savoie.  1582-1584.  V.  15.  P.  269. 

Charles  Emanuel  par  la  grâce  de  dieu  duc  du  Savoye.... 
A  nostre  cher  bien  amé  et  féal  orloger  M*  Jacques  Maur 
salut  et  dilection,  par  ces  présentes  signées  de  nostre  main 
nous  vous  mandons  et  commectons  que  vous  aiez  à  vous 
transporter  à  Chambéry  etaultre  part  que  vous  estes  requis 
et  vous  sera  ordonné  par  noz  très  chers  bien  amez  et  feaulx 
conseillers  les  gens  tenantz  notre  Chambre  des  comptes 
aud  pays  et  illec  procéder  à  la  facture  des  poix  à  la  romejne 
comme  est  porté  par  voz  instructions  a  part  et  d'habondance 
vous  sera  déclaré  par  nostred  Chambre.  Auquoy  et  tout  ce 
qui  en  despent  vous  ordonnons  d'user  la  dilligence  et  vigil- 
lance  requise  en  tel  cas  vous  donnant  de  ce  fere  tout 
pouuoyrauctorité  et  mandement.  Mandons  et  commandons 
a  tous  noz  officiers  et  subiectz  que  a  vous  ce  faisant, 
hobeissent  et  prestent  tout  aide  et  mainforte  car  ainsy 
nous  plaict  :  donné  à  Turin  le  4"  de  janvier  1584. 

C.  Emanuel. 
V«  MiLLiET.  Soubsig  La  Creste  et  scellé  en  placart 

Memoyres  et  Instructions  à  vous  M*  Jacques  Maur  nostre 
orloger,  de  ce  que  vous  aurez  a  fere  pour  nostre  service  en 
Savoye  Maurienne  et  tharentaise  conforme  à  la  Commis- 
sion que  vous  sera  faicte  à  part. 

Premièrement  vous  vous  transporterez  en  nostre  ville  de 
Chambéry  et  arriué  que  vous  serez,  recourez  à  nostre 
Chambre  des  comptes  de  Sauoye  a  laquelle  présenterez 
vostre  commission  et  prendrez  les  memoyres  et  instructions 
qu'ils  vous  dorront  concernant  le  faict  de  vostre  d*  commis- 
sion. 


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—   X   — 

Plus  vous  vous  ferez  remettre  à  nostred  Chambre  vng 
poix  à  la  romaine,  lequel  est  entre  les  mains  du  contrerol- 
leur  Carpinel  et  sellon  icelluy  vous  en  ferez  fere  de  sembla- 
bles et  en  tel  nombre  que  par  lad^^  Chambre  vous  sera 
ordonne,  pour  seruir  à  la  vente  et  distribution  du  sel  tant 
en  sauoie  maurienne  que  tharentaise.  Les  adjustant  et 
esgalanttrès  tous(l)au  sud^et  lequel  poix  ou  soit  Romaine, 
voue  recognoistres  au  preallable  quelle  soit  juste  assauoir 
de  seze  onzes  petites  lai  ivre. 

Plus  pour  moindre  despense  vous  vous  seruirez  des 
coppes  des  ballances  assauoir  de  celles  que  présentement 
seruent  à  la  vente  et  distribution  du  sel  pour  les  adjuster  et 
esgaller  à  la  susdite  Romane. 

Plus  vous  ferez  fere  les  poix  de  bronze  a  ce  que  Ton  ne 
puisse  y  commettre  abbus  aulcun  au  dommaige  de  noz 
subiectz  et  les  ferez  semblablement  marquer  de  noz  armes. 

Plus  pour  l'exeqution  de  tout  ce  que  dessus  vous  aurez 
recours  à  nostred*  chambre  des  comptes  à  laquelle  mandons 
de  vous  fere  prouoir  de  tout  ce  que  vous  sera  nécessaire. 
Et  quand  vous  adjusterez  lesd**  poix  à  Chambéry  vous  y 
procéderez  en  présence  de  deux  maîtres  de  Chambre  et  de 
nostre  procureur  patrimonial  de  tardy. 

Et  finablement  en  ceste  vostre  commission  vous  obserue- 
rez  en  tout  et  partout  ce  que  par  nostred*  chambre  vous  sera 
ordonné  en  assistance  de  nostred*  procureur  patrimonial 
de  tardy.  Faict  à  Turin  le  4*  de  janvier  1584. 

C.  Emanuel. 
V*  MiLLiET.  Soubsig.  La  Creste        et  scellé  en  placart. 


(Ij  Trestos,  tertout,trestot,  trestout....  tout,  tous,  en  général, 
sans  exception....  (Glossaisede  Roquefort). 


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—   XI   — 


1584.  26  mars 


Lettres  de  la  Cour  à  la  Chambre  des  Comptes  1584-1589. 
Vol  no  3.  P.  11. 

Ordre  à  la  Chambre  des  Comptes  de  Savoye  de  faire 
payer  M«  Jacques  l'orloger  des  208  escus  que  S.  A.  lui  a 
donné  en  payement  sur  le  laoud  deub  par  les  frères  Michaud. 
Le  duc  de  Savoie 

Très  chers  bien  amez  et  feaulx  conseillers.  Nous  accor- 
dasmes  dernièrement  aux  frères  Michaud  le  don  du  laoud 
de  la  seign»**  de  corselles  moiennant  deux  cents  et  huit 
escus  solz  desquels  nous  fîsmes  paiement  à  nostre  orlogier 
Jaques  maur  comme  vous  aurez  veu  par  les  lettres  qu'en 
ont  escry  sur  ce  faict,  et  pour  ce  que  nous  sommes  aduertis 
que  lesd's  Michaud  font  difficulté  paier  led' orlogier  nous 
vous  auons  bien  voulu  dire  et  ordonner  par  ceste  que 
voue  aiez  a  fere  contraindre  lesd^«  Michaud  a  paier 
incontinent  et  sans  plus  de  longueur  aud  orlogier  lad 
somme  surpeyne  d'estre  priuez  et  descheuz  du  proffit  des 
lettres  que  leur  en  auons  concédé.  Vous  nous  ferez  outtre 
ce  service  très  agréable  d*y  tenir  main  et  que  led  orlogier 
soit  paie  au  plus  tout....  de  Turin  ce  xxvj  mars  1584. 

C.  Emanuel. 

Soubsig  Bruyset. 


Séance  du  13  Décembre  1897 

(présidence  de  m.  ALBERT  DUPLAn) 


Après  un  hommage  rendu  à  la  mémoire  de  MM. 
Norbert  Mudry  et  Charles  Baet,   membres  fondateurs 


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—  XII    — 

de  r Académie,  ravis  tous  deux  si  promptement  à  Taffec- 
tioD  des  leurs,  M.  le  Président  donne  la  parole  à  M: 
Ritter,  président  de  l'Institut  Genevois,  professeur  à 
la  Faculté  des  Lettres  de  Genève. 

M.  Eugène  Ritter  entretient  T Académie  d'un  poème 
qu'on  a  découvert  à  Paris,  et  dont  l'auteur,  qui  vivait  à 
la  fin  du  moyen  âge,  se  nomme  Thomas  de  Thonon. 

En  1894,  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris  a  acheté 
à  un  libraire  italien  un  manuscrit  qui  avait  appartenu  a 
la  collection  Minutoli-Tcgrimi,  à  Lucques.  Une  notice  de 
ce  manuscrit  a  été  publiée  par  M.  Omont,  dans  la  Bi- 
bliothèque de  V Ecole  des  Chartes,  tome  LVII  (1896) 
page  340;  nous  la  reproduisons: 

No  6539  (des  nouvelles  acquisitions  françaises). 

Recueil  de  traités  de  médecine. 
Folio  4.  Alebrand  de  Florence,  Régime  du  corps. 

Début  : 
«  Diex,  qui  par  sa  grand  puissance....» 
Folio  90.  Recettes  médicales,  en  français  et  en  lalin. 

Début: 
€  Galions  et  Ypocras,  qui  furent  li  meilleur  cler  du 
monde....» 

Folio  99.  Traité  de  médecine,  composé  en  1296,  (sic) 
à  Maubuisson,  par  Thomas  de  Thonons,  en  vers. 
Début  : 
«  Cil  qui  flst  tout  le  monde....» 
Folio  105.  Autre  traité  de  médecine,  anonyme. 
«  Des  signes  des  un  humeurs.  Ainsi  comme  Ypocras 
dit,  qui  veult  bien  connoistre  la  maladie  de  home....» 
XIV«  siècle.  Parchemin,  112  feuillets. 


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Le  3  juin  1896,  M.  Omont  signalait  à  la  Société  des 
antiquaires  de  France  le  nom  jusqu'alors  inconnu  de 
Thomas  de  Thonon,  «  personnage,  disait-il,  qui  prend 
place  pour  la  première  fois  dans  l'histoire  littéraire  de 
la  France.  » 

Le  poème  de  Thomas  de  Thonon  remplit  six  feuillets 
et  les  trois  quarts  d'un  septième  ;  il  y  a  deux  colonnes 
par  page,  une  trentaine  de  vers  par  colonne,  798  vers 
en  tout,  trois  desquels  ont  été  sautés  par  le  copiste, 
comme  nous  allons  le  voir.  Le  manuscrit,  malheureuse- 
ment, a  été  trop  rogné  parle  relieur  :  au  verso  de  chaque 
feuillet,  le  commencement  des  vers  de  la  première  co- 
lonne a  été  coupé  ;  au  recto,  la  fin  des  vers  de  la  seconde 
colonne  manque  çà  et  là  ;  il  faut  rétablir  ces  lacunes  par 
conjecture.  D'ailleurs,  nous  n'avons  de  ce  poème  qu'une 
copie  faite  avec  peu  de  soin.  Il  est  écrit  en  rimes  plates. 
A  trois  reprises,  il  manque  un  des  vers  du  distique.  En 
outre,  à  plus  d'une  reprise,  les  vers  sont  trop  longs  ou 
trop  courts  :  témoignage  d'une  négligence  qu'il  faut  sans 
doute  attribuer  au  copiste,  et  non  pas  à  l'auteur. 

Le  passage  qui  attire  l'attention  tout  d'abord,  est 
celui  où  le  poète  se  nomme,  et  date  son  œuvre.  J'ai  sup- 
pléé entre  crochets  ce  qui  a  été  mutilé  : 

Mestre  Thomas,  nez  de  Thonons, 
Que  l'en  apele  le  Bourgaigno[ns],  (i) 
[En  Tan]  de  Dieu  cest  livre  escrîs 
[M.CC]C.  quatre  vinzet  .VI. 
[Pour  le]  proufit  et  à  Toneur 
[De  mesd]ames  et  du  seigneur 
[De  S]aint-Martin  de  Malbuîsson. 

(1)  Corrigez  :  Qu'en  apele  le  B.;  ou  bien  :  Q^e  Ven  apele  B. 


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—  XlV  — 

Dans  rindication  de  Tannée,  le  dernier  C  et  Textré- 
mité  de  Tavant-dernier  sont  seuls  restés.  On  peut  con- 
jecturer :  M. ce.  —  c'est  ce  qu'a  fait  M.  Omont,  comme 
on  Ta  vu  dans  la  notice  citée  plus  haut,  ce  qui  reporte- 
rait notre  poème  au  treizième  siècle  ;  — ou  M. CGC,  ce 
qui  donnerait  la  date,  moins  éloignée,  d(^  1386. 

Nez  de  Thonon.  Littré  cite  un  vers  du  poème  de 
RoxcisvALS,  mis  en  lumière  par  Bourdillon  (Paris,  1841)  : 

Nez  fu  de  Chartres,  si  avoit  nom  Reiner  ; 
et  Burguy,  un  vers  du  poème  de  Gerars  de  Viane,  pu- 
blié par  Bekker  (Berlin,  1829): 

Neiz  suix  de  Gènes,  filz  au  comte  Raiiiier. 

Notre  Thomas  était  donc  un  Savoyard,  natif  de 
Thonon,  établi  en  France;  un  médecin  attaché  à  Tabbaye 
de  femmes  de  Maubuisson  près  Pontoise,  à  quelques 
lieues  de  Paris.  Il  s'avisa  un  jour  de  rimer, 

A  l'oneur  et  l'utilité 
De  toute  la  conmunité 
Des  clers  et  des  lais  de  Pontoise,.... 
Un  petitet  d'ensaignement, 
Qui  est  estraiz  de  la  racine 
De  noz  livres  de  médecine.... 
Ce  di  bien,  et  n'ai  pas  doutance, 
Que  nul  ne  pourra  la  science 
En  si  petite  heure  descrire, 
Que  n'i  ait  assez  à  redire. 
Mais  ce  n'est  qu'.I.  ensaignem[enz], 
Et  un  petit  d'avisemenz  : 
Comment,  en  chascune  saison, 
Doit  l'en,  par  droit  et  par  raiso[n], 
Chascun  si  bien  son  cors  desfendr[ej 
Que  ne  puisse  enfermeté  pren[dre]. 


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*-  kV  ^ 

Notre  Thomas  parle  d'abord  des 

.IIII.  élémenz 
Qui  sont  desouz  le  firmament,... 
Le  feu,  Teaue,  li  airs,  la  terre. 
Entre  eus  .1111.  n'a  point  de  guerre. 
Le  feu  si  est  et  sec  et  chaut  ;' 
Si  est  près  de  la  lune  en  haut. 
Après,  vient  li  airs  —  ce  me  semble  — 
Moiste  et  chaut  :  et  si,  ont  ensemble 
Entre  eus  deus  une  affinité. 
L'eaue  après  vient  —  c'est  vérité  — 
Qu'est  froide  et  moiste.  A  li  s'ajouste 
La  terre  —  c'est  voir  —  coste  à  coste, 
Qu'est  froede  et  sèche,  et  plus  pesanz 
De  touz  les  autres  élémenz. 

Après  une  cinquantaine  de  vers  sur  les  quatre  éléments, 
notre  Thomas  passe  à  un  autre  sujet  : 

Des  élémenz  plus  ne  diray, 

Mes  des  .IIII.  humeurs  parleray.... 

Les  nons  des  humeurs  je  te  di. 

Et  leur  proprietez  ausi  : 

C'est  ^anc,  fleume,  mélancolie, 

Et  cole.... 

La  cole  si  est  chaude  et  sèche  ; 

A  maint  homes  fait  mainte  tèche. 

Et  deu  feu  istret  sa  semblance.... 

Le  sanc  — ce  est  parole  voire  — 
Est  chaut  et  moiste  par  droiture  : 
De  l'air  est  traite  sa  nature.... 

[Le  fl]eume  si  est  froid  et  moeste... 


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—  XVÎ  — 

[De]  mélancolie  dirai  : 

[Froide]  et  sèche  est,  par  droite  foi.... 

Des  .IIII.  humeurs  oï  avez, 
Et  leur  propriété  savez.... 
As  .IIII.  tens  de  Tan  m'en  vai, 
Et  leur  propriété  dirai. 

Nous  en  sommes  ici  au  vers  212  ;  tout  le  reste  du  poè- 
me roule  sur  les  quatre  saisons;  le  printemps  et  Tété, 
dont  Thomas  se  plaît  à  parler,  et  qui  remplissent  cinq 
cents  vers  ;  l'automne  et  l'hiver,  qui  prennent  beaucoup 
moins  de  place.  Les  conseils  que  Thomas  donne  pour 
passer  la  belle  saison,  sont  la  partie  —  on  n'ose  dire  :  la 
plus  intéressante  de  son  ouvrage  —  disons  seulement  : 
la  moins  sèche  et  insipide.  Le  fait  est  que  notre  poète 
n'a  pas  de  talent.  Ecoutons-le  parler  dans  un  de  ses 
meilleurs  moments  : 

Dont,  je  te  veul  amonester 
Sagement  vives  en  esté  : 
A ^1^    -jant  tu  lèveras, 

Iment  tes  bras, 

s  estent  ensemble, 

oiz,  li  autre  membre. 

i  pingne  ton  chief  : 

pas  moult  grief. 

as,  et  tes  mains  : 

isoles  vains. 

roide  de  fontaine 

i  est  moult  sainne, 

istote  tesmoigne 

où  ce  enseigne. 


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Tantcom  la  chaleur  d'esté  dure, 
Prendras  —  ce  est  chose  seûre  — 
Par  .IL  foiz,  bien  plainne  ta  paume: 
Assez  vault  mielz  lors  que  nul  baume.... 
Puis  après,  si  te  va  joer 
Ou  tout  à  pié,  ou  à  cheval. 
Garde  que  ne  t'eschaufe  pas  ; 
Ainz  t'en  rêva  en  ta  meson, 
Qui  soit  jonchie  de  bîau  jon, 
Arrousé  d'yaue  de  fontainne, 
Trestouz  les  jors  de  la  semaine. 
Après,  si  soit  la  table  mise  : 
Vinaigre  et  laitues  d'assise 

.    .    e  premièrement 

.     .    pain  de  forment 

.    ro]sti  et  cras  chapon 
En  icel  tem]ps  te  sont  moult  bon. 

.     .    poucins,  bon  aigniaus, 

.     .    reunes,  cras  veaus, 

.     .    en  puez  mengîer. 

.     .    es  autre  dangier. 
La  char]  de  porc,  dit  Avicenne, 
Sur  tous]  autres  est  li  plus  sainne. 

Ces  dix  derniers  vers  sont  de  ceux  (au  nombre  de  plus 
de  deux  cents)  qui  ont  été  mutilés  par  le  ciseau  du  re- 
lieur. Il  y  en  a  quelques-uns  qu'il  est  facile  de  compléter, 
tandis  que  pour  en  remettre  d'autres  sur  leurs  pieds,  il 
faudrait  à  l'éditeur  une  inspiration  quasi  divinatrice. 

On  a  vu  que  le  plan  du  poème  est  gauchement  tracé, 
et  qu'il  faut  avoir  beaucoup  d'indulgence  pour  trouver  çà 
et  là,  dans  quelques  vers,  du  sel  ou  de  la  grâce.  Thomas 
de  Thonon  n'a  vraiment  pour  lui  que  son  ancienneté  : 


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c*est  son  seul  mérite,  mais  c'est  un  vrai  mérite  poiir  notlâ 
autres  Allobroges.  Il  est  le  premier  en  date  des  poètes 
do  Savoie.  Amédée  Malingre  (Revice  Savoisienne,  1886, 
page  107  ;  Romania,  1891,  page  449)  lui  est  postérieur 
de  plus  de  vingt  ans,  et  on  n'en  connaît  point  d'autre 
avant  eux. 

M.  Ritter  espère  publier  un  jour,  dans  les  mémoires 
de  TAcadémle  chablaisienne,  le  poème  de  Thomas  de 
Thonon  ;  il  a  obtenu  une  bonne  copie  du  manuscrit  de 
Paris,  grâce  à  Tobligeanto  entremise  de  M.  Omont. 

M.  Norbert  Dunoyer  résume  ensuite  d'importants 
documents  relatifs  à  deux  chapelles  des  anciennes 
églises  de  Monthoux  et  de  Vetraz. 

Par  son  testament  daté  du  7  juin  1465,  dit-il,  M« 
Jacques  Jacopin,  docteur  et  secrétaire  de  l'université  de 
Toulouse,  fonda  deux  chapelles  :  l'une  en  l'église  de 
Monthoux,  sous  le  vocable  de  la  S^®- Vierge  ;  l'autre  en 
l'église  de  Vetraz,  sous  le  vocable  de  S*-Pierre  et  les  dota 
chacune  de  la  somme  de  cent  écus  d'or  sol,  laquelle 
somme  il  avait  prêtée  à  Jean,  Anthoiue  et  Henry  Fon- 
tanaz,  frères  du  lieu  de  Corlier,  soit  Corly,  hameau  de 
la  commune  de  Vetraz-Monthoux.  Ces  derniers  promi- 
rent solidairement  eu  reconnaissant  cette  somme  de 
l'appliquer  en  censés  et  rentes  annuelles  sur  des  fonds, 
et  avec  les  revenus  de  faire  dire,  en  chacune  de  ces  deux 
chapelles,  cent  messes  par  an  comme  il  en  conste  par 
contrat  de  ce  fait  reçu  par  M«  Rodulphc,  soit  Rodolphe 
Le  Sage,  notaire  et  secrétaire  de  Mgr.  Jean-Louis  de 
Savoie,  évêque  de  Genève.  Ces  deux  chapelles  eurent 
successivement  pour   recteurs  :   1*>  Claude  Fontanaz, 


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^-   XIX   — 

frère  des  Fontanaz  nommés  ci-devant  ;  2^  Pierre  Jaco- 
pin,  qui  était,  sans  doute,  un  parent  du  fondateur  ;  et 
3^  François  Brigand,  curé  de  Bonne. 

Le  château  de  Monthoux  ayant  été  assiégé  par  les 
troupes  bernoises  et  genevoises,  en  l'an  1589;  Toglise 
de  cette  localité,  bâtie  près  du  château,  fut  ruinée  à  cette 
occasion,  ainsi  que  la  chapelle  de  la  S*«-Vierge,  qui  y 
était  fondée.  En  même  temps  les  titres  des  revenus  de 
cette  chapelle  et  de  celle  fondée  en  Téglise  de  Vetraz 
furent  pris  ou  égarés  et  recueillis  par  des  personnes  qui 
avaient  tout  intérêt  à  s'en  saisir.  Cette  dernière  chapelle 
cependant  ne  subit  aucun  dommage  de  la  part  des 
partisans  de  la  Réforme  ;  mais  faute  de  revenus  elle 
fut  bientôt  sans  recteur  et  aucun  service  n'y  fut  plus 
célébré  ;  ce  qui  se  prouve  par  la  visite  épiscopale  faite 
à  Vetraz,  par  Mgr  Claude  de  Granier  le  4  juin  1580  et 
par  celle  de  Mgr  d'Arenthon  d'Alex  du  27  octobre  1666. 

M®  Charles-Gaspard  Jacopin  (de  Collonges,  commune 
de  Vetraz)  notaire  ducal,  royal,  commissaire  d'extentes 
et  châtelain  du  seigneur  baron  de  Monthoux  d'Anne- 
masse,  un  des  descendants  et  héritiers  de  M®  Jacques 
Jacopiû  ayant  retrouvé  les  titres  de  fondation  des  sus- 
dites chapelles,  les  communiqua  à  Mgr  d'Arenthon 
d'Alex  et  ce  prélat  lui  enjoignit  de  doter  et  meubler 
décemment  la  chapelle  de  S*-Pierre,  en  l'église  de  Vetraz 
et  d'y  nommer  un  recteur.  Dès  lors  dans  un  inventaire 
des  effets  délaissés  par  feu  noble  Antoine  Livet  de  Cran- 
vcs,  se  trouvèrent  des  titres  indiquant  les  fonds  sur 
lesquels  une  partie  des  cen  " 
chapelle  de  S*-Pierre  étaie 
ces  fonds  devaient  rapporte 


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^  M  -^ 

pelle  quatre  coupes  et  trois  quarts  de  froment.  Cîes 
titres  furent  retirés  par  R^  Jean-Gabriel  Guyot,  archi- 
prêtrfe  et  curé  de  Votraz  par  suite  d'une  déclaration  faite 
à  la  requête  de  M®  Charles-Gaspard  Jacopin,  par  M« 
Claude-Joan  Collet,  curial  de  la  marquise  de  Fleury  de 
Monthoux,  le  24  novembre  1668. 

M«  Charles-Gaspard  Jacopin  voulant  obéir  aux  ordres 
de  Mgr  d'Arenthon  d'Alex,  fit  orner  la  chapelle  de  S*- 
Pierre  de  tableaux,  y  fit  mettre  des  ornements,  une 
pierre  sacrée,  et  par  acte  du  12  janvier  1676  (Cottet, 
not.)en  augmentation  des  revenus  dernièrement  retrou- 
vés, la  dota  d'une  somme  annuelle  de  huit  florins  de 
Savoie,  payable  le  1»^  janvier  de  chaque  année,  moyen- 
nant douze  messes  annuelles  qui  devaient  s'y  célébrer 
le  premier  mardi  de  chaque  mois,  à  moins  qu'une  fête 
se  rencontra  ce  jour-là.  Dans  ce  cas,  il  donne  au 
recteur  la  liberté  de  célébrer  l'ofïice  avant  ou  après 
le  jour  fixé.  De  ces  douze  messes,  quatre  devaient 
se  célébrer  en  l'honneur  de  la  S*«- Vierge,  deux  en 
l'honneur  de  S*-Pierre  et  six  de  Requiem  pour  le 
salut  et  le  repos  de  son  àme  et  de  ses  parents.  En  faisant 
cette  fondation  M®  Jacopin  se  réserva  pour  lui  et  les 
siens  à  perpétuité,  le  droit  de  patronage  et  de  présen- 
tation à  cette  chapelle  et  y  nomma  pour  recteur  R^ 
Jean-Gabriel  Guyot,  archiprêtre  et  curé  de  Vetraz.  Le 
fondateur  ordonne,  en  outre,  que  au  cas  ou  ses  succes- 
seurs ne  nommeraient  pas  un  recteur  dans  le  temps 
prescrit  par  les  statuts  synodaux  et  droit  canon,  que 
le  curé  qui  se  trouvera  alors  à  Vetraz  devienne  recteur 
de  ladite  chapelle.  Enfin  au  cas  où  ses  successeurs 
viendraient  à  ne  pas  payer  au  recteur  les  huit  florins 


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—   XXI   — 

annuels  il  place  et  hypothèque  cette  somme  *sur  une 
pièce  de  vigne  et  pré  qu'il  possède  à  Collonges  (com.  de 
Vetraz)  et  autorise  le  susdit  recteur  à  louer  ou  faire 
cultiver  cette  pièce  sans  mandat  ni  autorité  de  justice 
et  sans  en  payer  aucune  charge  foncière. 

Enfin,  M.  E.  Vuarnet  donne  des  détails  inédits  sur 
rinvasion  de  1589  en  Chablais,  et  sur  un  coup  de  main 
tenté  par  les  habitants  de  Thonon  sur  les  barques  de 
Genève.  Voici  ces  documents  : 

23  Avril  1589,  —  Ce  mesme  jour  23  deux  de  nos  com- 
pagnies de  cavalerie  avec  de  Tinfanterie  sur  les  huit  heures 
du  matin,  prindrent  le  chemin  de  Tonon  où  ils  entrèrent 
étant  reçus  bien  volontairement  par  ceux  du  lieu.  Mais 
d'autant  que  Tentrée  tant  au  chasteau  qu*à  Ripaille  estoit 
difficile,  le  vendredi  25  du  même  mois  on  chargea  trois 
grands  bateaux  de  canons  outre  ceux  qu'on  avait  amené  a 
Gex  et  a  la  Cluse  et  entre  autre  on  mit  dedans  lesdits 
bateaux  les  deux  doubles  canons  qui  esloyent  en  l'arsenal 
et  n'en  est  point  demeuré  de  semblables  a  ces  deux  là. 

Fut  rapporté  le  26  du  mesme  mois  que  les  soldats  du 
château  de  Tonon  s'étaient  rendus  sans  toutefois  avoir 
reçu  le  canon  qui  était  en  chemin  et  que  la  vie  leur  avait 
été  donnée  et  congédiée  avec  une  verge  blanche  en  la  main. 
Aucuns  disent  qu*on  donna  congé  aux  soldats  du  chasteau 
de  Tonon  avec  l'arquebuse  et  la  mesche  éteinte,  les  chefs 
ayant  reçu  entre  eux  serment  de  ne  porter  jamais  les  armes 
contre  le  roy,  Berne  et  Genève. 

Item,  —  Que  les  soldats  d*Yvoire  s'estoyent  rendus  a 
composition. 

Nous  voyons  par  cet  extrait,  que  vu  le  mauvais  état 
des  routes  entre  Genève  et  le  Chablais,  l'artilhîrie  fut 
pendant  cette  guerre  expédiée  par  eau  ;    il  est  certain 


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XXII   

quo  les  châteaux  et  villages  situés  sur  le  rivage  cha- 
blaisien  fureut  bombardés  au  passage,  car  je  possède 
dans  ma  collection  naissante,  plusieurs  boulets,  dont 
un  a  été  trouvé  à  Nernier,  dans  le  mur  d'une  maison, 
située  au  bord  du  lac  (maison  de  la  poste),  un  autre 
trouvé  au  lieu  dit  le  Dévent,  à  200  mètres  levant  du 
château  de  Nernier,  enfin,  un  troisième,  recueilli  au 
pied  du  château  dTvoire  en  creusant  le  port  particulier 
du  castel. 

26  Mars  1590.  —  Le  jeudi  26  ceux  de  Tonon  et  ajitres 
endroits  voisins  ayant  descouvert  par  leurs  espions  que  les 
barques  de  Jean  Barbe,  André  Grivaud  et  celles  de  Vevay 
parties  de  Morges  et  chargées  de  marchandises  argent  et 
vivres  pour  plus  de  cent  mille  florins,  non  compris  beau- 
coup de  lettres,  livres  de  comptes  et  papiers  de  grande 
conséquence  appartenant  a  divers  particuliers  de  Genève, 
qui  estoyent  peu  auparavant  venus  de  Francfort,  revenoyent 
assez  malaisément  sans  escorte,  résolurent  de  les  attraper 
entre  Relies  et  Nyon. 

S'estans  embarquez  en  deux  frégates  et  cinq  petits  basteaux 
au  nombre  de  six  a  sept  vints  hommes,  ils  parurent  en 
plein  jour  à  demi  lieue  de  bord.  Descouverts  par  le  baillif 
de  Nyon,  on  courut  incontinent  aux  armes.  Le  colonel 
Diesbach  avec  quelques  chevaux  et  piétons  s'avança  vers 
Rolle  ;  mais  ni  luy  ni  les  autres  de  Nyon  qui  couroyent  au 
secours  ne  scurent  arriver  si  tost  que  les  ennemis  plus 
habiles,  n'eussent  desia  saisy  la  barque  de  Grivaut,  s'ap- 
prestant  pour  attraper  les  autres  où  ils  eussent  trouvé  peu 
de  résistance.  Et  pour  mieux  exécuter  mirent  en  terre 
trente  arquebusiers  à  la  faveur  desquels  ils  pretendoyent 
butiner  à  loisir.  Mais  voyant  accourir  de  toutes  parts  gens 
qui  entroyent  en  divers  basteaux  et  d'autres  s'amasser  par 


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—   XXIII   — 

terre  de  divers  endroits,  ils  quittèrent  tout  se  contentant 
d'emporter  quelques  fromages  et  vivres  à  la  valeur  de  trois- 
cents  florins,  laissant  deux  de  leurs  soldats  tuez  pour 
récompense  et  se  retirèrent  bien  viste.  On  vint  donner 
l'alarme  bien  chaude  aux  marchands  de  Genève.  La  sei- 
gneurie y  voulut  envoyer  quelques  soldats  au  secours,  mais 
tout  estoit  fait  avant  qu'ils  fussent  à  moitié  chemin.  Chacun 
confesse  que  Dieu  soulagea  grandement  la  ville  ce  jour-là. 
Car  outre  la  perte  de  tant  de  biens  et  de  bonne  somme 
d'argent  monnoyé,  l'ennemy  gagnoit  trois  belles  barques 
dont  il  eut  fait  la  guerre  étant  en  la  revanche  de  Versoix. 
Aussy  y  eut-il  grande  joye  le  lendemain  matin  en  toute  la 
ville  quand  l'on  entendit  ces  bonnes  nouvelles  avec  remer- 
ciement a  ceux  de  Nyon  qui  firent  bon  devoir  a  ce  besoin. 

Suivant  l'ordre  du  jour,  il  est  procédé  au  renouvelle- 
ment du  bureau  de  l'Académie  Chablaisienne  pour  l'année 
1898.  Le  dépouillement  des  bulletins  donne  le  résultat 
suivant  : 

MM.  Albert  Duplan,  Président, 

L.-E.  PiCCARD, 


^  ,      ^  »     Vice-Présidents, 

Jules  GuYON, 

Docteur  Lochon,  Bibliothécaire. 

Léon  PiNGET,  Trésorier. 

Léon  QuiBLiER,  Secrétaire. 

J.-M.  Dantand,  Secrétaire-adjoint. 


Séance  du  10  Janvier  1898. 

(présidence  de  l.  e.  piccard) 


M.    Lucien   Jacquot  parle  longuement  de  quelques 


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—   XXIV   — 

anciennes  sépultures  du  Chablais  se  rapportant  à  des 
sépultures  analogues  qu'il  a  rencontrées  en  Algérie. 

M.  A.  Duplan  envoie  un  extrait  des  registres  des 
Délibérations  de  la  ville  d'Evian,  dont  voici  la  teneur  : 

Du  24  avril  1713,  Ton  at  ce  iourduy  receut  a  quatre  heures 
après  midy  un  ordre  du  Conseil  d'Etat  en  date  du  19  présent 
mois  pour  faire  établir  ^les  gardes  aux  postes  et  frontières 
au  suieot  de  la  santé,  pour  empescher  l'entrée  des  Suisses 
et  des  Grisons  dans  le  pays  de  Savoy e  et  c'est  dans  une 
lettre  escripte  à  la  ville  par  M.  le  sénateur  de  Loysinge  en 
date  du  23  dudit  mois  dattée  de  Genève. 

Délibération  : 

((  4  novembre  1713 —  Conseil  particulier. 

»  Et  at  este  proposé  que  suivant  les  ordres  envoyés  à 
cette  ville  par  Monsieur  le  Président  Gaud  commendant  en 
Savoye,  en  date  des  19  et  23  octobre  proche  passé  concer- 
nant le  faict  de  la  Santé  et  autres  ordres  do  Monsieur  le 
chevalier  Fichet,  comte  de  Ponchy  et  inspecteur  général 
decaz  les  monts  pour  les  affaires  de  la  Santé,  portant 
ordonnance  a  Messieurs  les  nobles  scindiques  d'Evian, 
d'établir  des  gardes  tant  à  la  ville  qu'au  port,  dans  les 
endroits  de  passage  qu'ils  iugeront  à  propos  pour  le  faict 
de  la  santé  et  de  députer  des  conservateurs  particuliers  qui 
prennent  ce  seing,  qui  reconnaissent  les  certificats  des 
passants  et  qui  donnent  des  billiets  de  santé  a  ceux  qui 
voudront  sortir  de  la  province  et  le  tout  en  exécution  des 
dits  ordres  publies  a  ce  suiect,  et  comme  par  la  dite 
ordonnance  de  Monsieur  le  comte  et  chevallier  Fichet 
conservateur  gênerai  decaz  les  monts  pour  les  affaires  de 
santé  en  datte  du  premier  du  courant  et  autre  ordonnance 
au  bas  de  celle  cy  dessus  désignée  en  date  du  3  de  novembre 
pour  faire  retirer  au  port  de  cette  ville  tous  les  batteaux 
dépendants  du  ressort  d'Evian,  Scavoir  d'Amphion  et  des 


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—  XXV   — 

deux  grandes  rives  pour  les  désarmer,  en  manière  qu'ils  ne 
puissent  point  commercer  dans  les  pays  étrangers  et  inter- 
dicts  par  le  faict  de  la  santé. 

Sur  quoy  le  Conseil  a  établi  M'  Claude  François  Genève 
secrétaire  du  dict  Conseil  pour  conservateur  particulier,  qui 
en  prendra  soin  et  qui  reconnoistra  les  certificats  des 
passants  et  qui  donnerat  des  billiets  de  santé  à  ceux  qui 
voudront  sortir  de  la  province  et  le  tout  en  exécution  des 
dits  ordres  et  de  plus  le  dit  Conseil  a  resoulu  de  faire 
fermer  la  porte  de  dessous  du  coté  de  Chavanne  et  que  Ton 
établira  le  corps  de  garde  a  la  porte  dessus  qui  est  auprès 
du  Château,  celle  près  Tesglise  de  la  Thouvière  et  dernier 
les  mouUins  seront  aussy  fermées  et  de  plus  le  dit  Conseil 
ordonne  que  deffences  seront  faites  à  tous  ceux  qui  ont  des 
portes  sur  le  dernier  de  leurs  maisons  dy  introduire  aucun 
estranger,  il  est  pareillement  deffendu  a  tous  hostes  et 
cabaretiers  de  loger  ny  recevoir  chez  eux  aucun  estranger 
qu'auparavant  ils  les  ayent  faits  parroistre  devant  Messieurs 
les  scindiques  à  peine  de  la  vie,  suivant  les  ordres  de  S.  M. 
inthimés  auxdits  nobles  scindiques  par  Monsieur  le  che- 
vallier et  comte  Frichet  inspecteur  général  decaz  les  monts 
pour  les  affaires  de  la  santé.  » 

Dans  son  Mémoire^  relatif  au  Chablais  dans  la 
seconde  moitié  du  X  VI  11^  siècle^  dit  ensuite  M.  Piccard, 
M.  le  sénateur  FoUiet  parle  longuement  d'une  émeute 
des  habitants  de  Massongy,  refusant  d'ascenser  les 
châtaigneraies  do  Rosières  (qui  étaient  un  bien  commu- 
nal) et  dont  le  revenu  devait  être  affecté  au  paiement 
du  rôle  des  impositions  et  par  conséquent  rentrer  dans 
les  caisses  royales  (Académie  Chabl.  t.  X.,  p.  187-191;. 

Nous  sommes  heureux  de  compléter  son  récit  par  une 
relation  de  l'Intendant  général  de  la  Savoie,  à  M.   le 


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—    XXVI    — 

général  dos  Finances,  relativement  à  une  requête  des 
syndics  et  conseillers  de  Massongy  contre  rordonnance 
rendue,  le  27  septembre  1781,  par  Tlntendant  du  Cha- 
blais  Pescatore  qui  a  laissé  de  si  précieux  manuscrits 
sur  l'histoire  de  notre  ancienne  province  (23  mars  1782). 
Ce  document  est  extrait  des  Titres  et  Documents 
déposés  aux  Archives  Départementales  de  la  Savoie. 
(C.  77.  de  rinventaire  Général  des  Archives.  Registre, 
folio  60  et  suivants.)  En  voici  la  teneur  : 

Du  23  mars  1782,  Relation  de  V Intendant  général  de 
Savoie,  M,  le  marquis  de  Cracanzane  au  sujet  de  la 
communauté  de  Massongi  (1). 

Le  placet  présenté  au  roi  par  les  nommés  Catherin 
Champague  Jean-Louis  d*Alex  et  Claude  Picut,  le  premier 
cî-devant  syndic  et  les  deux  autres  ci-devant  conseillers  de 
la  communauté  de  Massongi  en  Chablais  contre  l'ordon- 
nance de  M.  rintendant  Pescatore,  du  27  septembre  de 
Tannée  dernière,  que  M.  le  général  des  Finances  a  bien 
voulu  communiquer  à  l'Intendant  général  soussigné 
avec  les  pièces  y  mentionnées  par  la  lettre  dont  ill'a  honoré 
le  6  du  mois  échu,  exigeait  de  lui  Texamen  le  plus  scrupu- 
leux autant  par  la  nature  de  l'afïaire  qui  en  fait  Tobjet  que 
par  le  compte  qu'il  en  doit  rendre  à  M.  le  général  des 
finances  dont  il  ne  désire  rien  tant  que  de  mériter  l'agrément. 

Pour  pouvoir  juger  sagement  entre  le  dit  M.  l'Intendant 
et  les  susdits  particuliers,  le  soussigné  a  cru  qu'il  importait 
essentiellement  de  connaître  à  fond  la  conduite  tenue  de 
part  et  d'autre  dans  l'affaire  dont  il  s'agit.  C*est  à  cet 
examen  qu'il  s'est  livré  avec  d'autant  plus  de  facilité  qu'étant 
déjà  informé   des  oppositions  et  des  démarches   desdits 

(1)  Voir  rordonnance  de  M.  Pescatore,  Intendant  du  Chablais 
en  date  du  27  septembre  1782. 


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—   XXTII   — 

syndic  et  conseillers  de  même  que  de  leur  punition  il  était 
déjà  occupé  de  prendre  les  notions  et  éclaircissements 
convenables.  Il  a  d'abord  vu  que  le  bois  commun  dit  des 
Rosières  qui  a  donné  lieu  à  l'offense  desdits  syndic  et 
conseillers  et  à  l'ordonnance  contre  laquelle  ils  recourent  au 
roi  a  causé  depuis  longtemps  dos  désobéissances  de  la  part 
du  Conseil  de  la  dite  paroisse.  Il  résulte  en  effet  des  regis- 
tres du  Bureau  do  l'Intendance  du  Chablais,  que  dès  l'année 
1769,  M.  le  vice-président  Quizard  (1)  ayant  voulu  rectifier 
l'administration  absolument  vicieuse  de  cette  commune,  y 
rencontra  l'opposition  la  plus  marquée  de  la  part  du  dit 
conseil  aux  ordres  qu'il  avait  donnés  à  cet  effet,  et  qu'en 
ayant  fait  le  rapport  à  M.  l'Intendant  général  de  Savoie,  il 
en  résulta  un  ordre  du  Bureau  des  finances  de  faire  punir 
les  administrations  de  la  dite  paroisse.  Mais  cet  ordre  ne 
fut  malheureusement  pas  exécuté,  faute  d'une  explication 
de  la  part  du  dit  Intendant  général  sur  la  durée  de  l'em- 
prisonnement à  infliger,  que  celui-ci  ne  fixa  pas  à  M.  l'In- 
tendant du  Chablais,  sur  la  demande  qu'il  lui  en  fit,  parce 
qu'elle  ne  lui  avait  pas  été  fixée  à  lui-même  par  le  Bureau 
des  finances.  C'est  cette  impunité  qui  a  perpétué  dès  lors 
les  vices  de  l'administration  de  cette  commune  du  Bois  de 
Rozières  et  qui  a  donné  naissance  à  cette  audace  avec 
laquelle  après  avoir  fait  échouer  toutes  les  mesures  prises 
par  les  divers  intendants  du  Chablais  pour  le  bien  de  la  dite 
administration,  les  susdits  syndic  et  conseillers  se  sont 
portés  à  la  désobéissance  aux  ordres  de  M.  l'Intendant 
Pescatore  pour  laquelle  il  les  a  fait  punir  selon  l'ordonnance 
contre  laquelle  ils  recourent. 

La  Relation  ci-jointe  de  cet  Intendant  en  date  du  10 
décembre  dernier  que  le  soussigné  envoie  à  M.  le  général 
des  finances  parce  qu'il  l'a  reconnue  vraie  par  toutes  les 

(1)  La  famille  Quizard  est  originaire  de  la  commune  de  Massongy 


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—   XXVIII   — 

informations  qu'il  s'est  procurées  d'ailleurs  et  parla  lecture 
des  différentes  procédures  faites  pour  cet  objet  contre  les 
dits  administrateurs  fera  voir  que,  par  l'habitude  d'une 
renitence  impunie,  ces  syndic  et  conseillers  s'étaient  fami- 
liarisés avec  un  mépris  ouvert  des  ordres  du  Bureau  de 
l'Intendance  du  Chablais,  de  façon  que  ni  M.  Astesan,  ni 
M.  Ratti,  ni  M.  Olive,  n'avaient  pu  jusqu'à  M.  Pescatore 
obtenir  un  rendement  de  compte  du  produit  de  cette  com- 
mune, il  était  donc  temps  de  sévir  contre  eux,  autrement, 
leur  désobéissance  invétérée  serait  devenue  un  exemple 
dangereux  qui  aurait  pu  entraîner  plus  d'une  paroisse  dans 
le  même  cas.  Le  soussigné  avoue  cependant  que  la  dernière 
offense  des  dits  syndic  et  conseillers  étant  envisagée  seule 
et  isolée  pourrait  bien  ne  pas  mériter  entièrement  la  peine 
dont  elle  a  été  punie,  mais  on  ne  peut  pas  l'envisager  de 
cette  façon  puisqu'elle  est  une  continuation  d'une  ancienne 
et  opiniâtre  désobéissance  et  l'effet  d'un  esprit  de  mutinerie 
qui  a  résisté  à  tous  les  moyens  de  douceur  mis  en  usage 
par  tous  les  Intendants  précédents  pour  l'étouffer  de  môme 
que  par  M.  Pescatore  qui,  je  le  sais,  n'a  rien  épargné  non 
plus  pour  y  réussir  par  cette  voie-là. 

Cet  esprit  de  mutinerie  devient  toujours  plus  évident 
quand  on  se  rappelle  encore  la  résistance  du  conseil  du  dit 
Massongi  au  changement  de  l'emplacement  de  la  foire  qui 
se  tient  dans  la  dite  paroisse.  Les  sieurs  Quizard  habitants 
du  dit  lieu  avaient  obtenu  du  roi  la  permission  de  faire  ce 
changement,  en  suite  des  représentations  qu'ils  avaient 
faites  sur  les  dommages  que  leur  causait  l'emplacement  de 
cette  foire  ;  l'Intendant  Olive  à  qui  l'Intendant  général  fit 
parvenir  les  ordres  qu'il  avait  reçus  de  S.  Em.  M.  le  comte 
Corte  pour  ce  changement  après  avoir  tout  mis  en  œuvre 
pour  les  faire  exécuter,  pensait  à  employer  la  force  pour 
contraindre  le  conseil  à  se  conformer  aux  déterminations 


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qui  portaient  ce  changement,  mais  ayant  reconnu  parla  fer- 
mentation où  les  esprits  se  trouvaient  que  ce  moyen  pourrait 
avoir  des  suites  funestes,  il  prit  le  parti  que  la  prudence  lui 
suggérait,  d'attendre  un  autre  temps  pour  ramener  le  con- 
seil à  son  devoir.  Cela  reste  encore  à  faire,  et  comment, 
après  tant  de  preuves  de  Tesprit  de  licence  et  d'audace  qui 
régne  dans  le  conseil  de  la  paroisse  de  Massongy,  pourrait- 
on  espérer  d'y  parvenir  s'il  fut  demeuré  impuni  dans  le  cas 
que  l'on  examine  ;  cette  réflexion  entraine  le  soussigné  à 
approuver  tout  ce  qu'a  fait  M.  Pescatore  et  il  espère  qu'elle 
fera  le  même  effet  sur  l'esprit  de  M.  le  général  des  finances, 
car  il  est  sensible  que  si  on  venait  à  donner  la  moindre 
marque  de  désapprobation  de  tout  ce  qu'a  fait  et  ordonné 
M.  l'Intendant  du  Chablais,  l'on  fortifierait  par  là  les  sen- 
timents d'indépendance  et  de  mutinerie  du  dit  Conseil  et  ne 
pourrait  que  diminuer  le  respect  du  à  la  personne  et  aux 
ordres  d'un  Intendant;  surtout  dans  une  province  dans 
laquelle  ce  n'est  pas  la  seule  paroisse  qui  soit  de  ce  genre-là, 

Après  toutes  ces  réflexions,  le  soussigné  n'hésite  pas  de 
déclarer  qu'il  est  d'avis  que,  sans  s'arrêter  à  examiner  si 
M.  l'Intendant  Pescatore  a  excédé  dans  la  peine  infligée 
aux  suppliants  en  les  déclarant  incapables  d'entrer  dans  le 
Conseil,  il  convient  de  regarder  le  cas  dont  il  s'agit,  comme 
un  cas  extraordinaire  qui  demandait  un  acte  de  sévérité 
pour  lequel  on  ne  pouvait  tirer  de  règle  que  des  circonstan- 
ces aggravantes  que  M.  l'Intendant  Pescatore  a  très-bien 
senties  et  qui  sont  assez  mises  au  jour  dans  sa  Relation. 

Le  placet  dont  s'agit  paraît  donc  devoir  être  rejeté  en 
entier  afin  de  prévenir  des  inconvénients  qui  ne  pourraient 
qu'avoir  des  suites  fâcheuses  pour  une  bonne  adminis- 
tration. 

Pour  prévoir  les  conséquences  dangereuses  qui  résulte- 
raient de  la  moindre  indulgence  que  l'on  aurait  pour  les 


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suppliants,  il  n'y  a  qu'à  jeter  encore  les  yeux  sur  leur 
conduite  depuis  leur  punition.  Il  semble  qu'elle  aurait  dû 
réprimer  leur  mutinerie  et  les  faire  rentrer  dans  leur  devoir 
et  calmer  leur  esprit  turbulent  et  séditieux,  mais,  loin 
d'avoir  produit  cet  effet,  elle  a  excité  leur  audace  à  une 
nouvelle  démarche  des  plus  répréhensibles.  Jean-Louis 
d'Alex,  un  d'entre  eux  et  François  Champagne,  frère  de 
Catherin,  l'un  des  suppliants,  pour  donner  un  air  d'injustice 
à  l'ordonnance  de  M.  l'Intendant,  contraignirent  le  nommé 
Amé  Duffour,  curial  de  l'endroit,  de  se  trouver  le  30  décem- 
bre dernier,  jour  de  dimanche,  à  l'issue  des  vêpres  à  la 
porte  de  l'église  pour  y  recevoir  les  déclarations  qu'ils 
demandèrent  à  haute  vpix  de  leur  approbation  de  la  con- 
duite des  syndic  et  conseillers  cassés  par  le  susdit 
M.  l'Intendant  et  l'on  joint  ici  une  copie  du  verbal  de  ce 
curial. 

On  sent  aisément  l'irrégularité  d'une  telle  démarche,  et 
si  on  la  rapproche  des  autres  auxquelles  les  suppliants  se 
sont  toujours  portés,  elle  rend  toujours  plus  évident  leur 
esprit  de  mutinerie.  11  ne  se  manifeste  pas  moins  dans  celle 
qu'ils  ont  faite  ensuite  de  la  publication  des  dernières  lettres 
patentes  du  roi  du  22  juin  de  l'année  dernière  qui  autorisent 
les  intendants  à  ordonner  d'office  la  vente  des  effets  com- 
muns lorsque  l'intérêt  des  paroisses  l'exige.  Ces  adminis- 
trateurs révoqués  voulant  tout  mettre  en  œuvre  pour  faire 
échouer  le  projet  salutaire  de  l'Intendant  de  Chablais  de 
faire  vendre  la  forêt  de  Rosières  pour  en  faire  servir  le  prix 
à  l'affranchissement  de  divers  fiefs  qui  prennent  rière 
Massongi,  ont  excité  36  particuliers  chef  de  famille  de  la 
paroisse  à  présenter  au  Sénat  une  requête  par  laquelle  ils 
demandent  que  cette  commune  (propriété  communale)  soit 
partagée  entre  les  différents  chefs  de  famille  et  non  vendue 
pour  servir  à  leur  affranchissement,  auquel  ils  avancent 


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qu'ils  peuvent  faire  face  par  d'autres  moyens  ;  cette  requête 
déjà  décrétrée  d'un  comparaîtront  les  parties  dont  le  soussi- 
gné a  eu  l'honneur  de  parler  avec  M.  l'avocat  fiscal  général 
n'aura  peut-être  pas  eu  de  suite  depuis. 

L'on  ne  peut  donc  s'empêcher,  en  finissant  cet  exposé, 
de  répéter  que  la  conduite  des  dits  syndic  et  conseillers 
examinée  dans  toutes  ses  circonstances  lui  parait  (au  sous- 
signé) porter  l'empreinte  d'un  soulèvement  contre  le  Bureau 
de  l'Intendance  de  Chablais  et  que  M.  Pescatore,  qui  n'a 
pu  l'envisager  autrement,  doit  être  soutenu  dans  le  parti 
qu'il  a  pris,  pour  l'honneur  du  Bureau  et  le  rétablissement 
du  bon  ordre  auxquels  la  moindre  indulgence  pourrait 
porter  coup. 

Ue  façon  que  le  soussigné  croit  devoir  ajouter  que  bien 
loin  de  revenir  en  arrière  dans  la  moindre  chose  de  ce  qui 
a  été  fait  pour  punir  les  suppliants,  il  faudrait  encore  punir 
les  deux  ci-dessus  nommés  François  Champagne  et  Jean- 
Louis  d'Alex,  d  avoir  fait  la  démarche  irrégulière  par  elle- 
même  et  injurieuse  à  M.  Pescatore,  d'avoir  demandé  d'une 
manière  si  publique  les  déclarations  de  la  part  des  habitants 
touchant  les  dits  syndic  et  conseillers  et  d'avoir  contraint 
le  curial  de  les  recevoir,  puisque  cette  conduite  annonce 
qu'ils  persistent  dans  leur  mépris  pour  les  ordres  de 
M.  rintendant. 

La  punition  que  le  soussigné  croirait  à  propos  de  leur 
infliger  serait  de  les  mander  par  devant  le  Bureau  de  l'In- 
tendance générale  pour  y  être  réprimandés  après  leur  avoir 
fait  subir  un  emprisonnement  au  moins  de  quinze  jours, 
ce  qui,  leur  faisant  voir  que  l'on  approuve  la  conduite  de 
M.  l'Intendant  et  que  l'on  est  convaincu  qu'ils  sont  coupa- 
bles et  qu'ils  ont  été  justement  punis,  les  ramonerait  infal- 
liblement  à  leur  devoir  et  produirait  sûrement  un  bon  effet 
dans  lé  peuple  de  cette  paroisse  et  des  autres  qui  paraissent 


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s^écarter  de  la  soumission  due  à  Tadministration  de  M. 
rintendant. 

M.  Pirasset,  ancien  Président  de  la  Société  Philan- 
thropique Savoisienne  de  Paris,  est  élu  membre  effectif 
de  l'Académie  Chablaisienne. 

L'échange  de  Mémoires  et  Documents  de  la  Société 
est  admis  avec  la  Société  de  Giessen. 


Séance  du  14  Février  1898 

(présidence  de  m.  a.  ddplan) 


M.  Norbert  Duuoyer  parle  d'une  imposition  extraor- 
dinaire faite  en  Savoie  en  1734. 

Le  mois  de  septembre  1733,  dit-il,  fut  marqué  en 
Savoie  par  de  grandes  ioondatioDS.  L'année  suivante  le 
roi  Charles-Emmanuel  III,  voulant  réparer  les  domma- 
ges causés  par  les  eaux  et  les  prévenir  à  l'avenir,  chargea 
Gaspard-Marie  Donaud,  comte  de  Monteu,  son  intendant 
général  de  justice,  police  et  finance  deçà  les  monts,  de 
lever  des  impositions  dans  les  six  provinces  de  ses  Etats 
de  Savoie. 

Ce  dernier  publia  donc  dans  toutes  les  paroisses  de 
sa  juridiction  un  manifeste  daté  de  Chambéry  du  15  mai 
1734  (1)  où  nous  relevons  ce  qui  suit  : 

((  LE  ROY  étant  informé  des  dégâts  considérables  que 
les  innondations  extraordinaires  arrivées  le  mois  de  sep- 
tembre dernier,  ont  causé  aux  grands  chemins  et  ponts,  de 
même  qu'aux  fonds  voisins  des  torrents  et  rivières,  qui 
par  leurs  débordements  et  changements  de  lits  y  ont   fait 

(i)  ImpriméàChambéry  par  Jacques  Gorrin,  Imprimeur  du  Roy. 


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—   XXXIII    — 

des  ravages  et  corrusion  surprenants  ;  nous  a  chargé  d'y 
faire  faire  les  ouvrages  convenables,  tant  pour  réparer  que 
pour  prévenir  de  semblables  dégâts  ;  pour  le  payement 
desquelles  réparations,  S.  M.  Nous  a  ordonné  d'imposer 
un  quart  de  quartier  de  taille  sur  tous  les  possesseurs  de 
fonds  existants  dans  ses  Etats  de  Savoye. 

((  C'est  pourquoi  en  exécution  des  ordres  de  S.  M. 

«  Nous  Intondant  Général  susdit  avons  imposé  sur 
toutes  les  six  Provinces  des  Etats  de  Savoye,  le  montant 
d'un  quart  de  quartier  de  taille,  revenant  à  vingt-neuf  mille 
centtrente  sept  livres  quinze  sols  neuf  deniers,  payables  par 
tous  les  particuliers  possédant  fonds  cotisés,  de  même  que 
par  les  nobles  et  autres  possesseurs  des  fonds  non  cottisés 
dans  les  dites  Provinces,  sçavoir  pour  chacune  comme  ci- 
après  : 

Province  de  Savoye.     .     , 
Genevois  et  Ternier.     . 

Faussigny 

Chablais  et  Gaillard  .     . 

Maurienne 

Tarantaise 

1.     29137.     15.      2.    8. 
((  En  conséquence  de  laquelle  imposition  la  communauté 
de  (1)  se  trouve  tiré  à  la  somme  de  (2)....  » 

Cette  imposition  devait  être  payée  dans  le  mois  qui 
suivait  la  publication  de  ce  manifeste,  à  l'exacteur  de 
chaque  communauté,  qui  avait  pour  cette  exaction  les 
mêmes  pouvoirs  que  ceux  portés  pour  l'exaction  de  la 
taille  ordinaire. 

M.  Dunoyer  donne  ensuite  connaissance  de  la  teneur 

(1)  Ici  était  le  nom  de  la  communauté,  écrit  à  la  main. 

(2)  La  somme  était  aussi  écrite  à  la  main  et  en  toutes  lettres. 


1.  10112. 

15. 

10. 

9. 

1.   5930. 

0. 

0. 

8. 

1.   4481. 

8. 

5. 

1. 

1.   1856. 

11. 

1. 

1.   3082. 

10. 

1. 

5. 

1.   3G74. 

9. 

7. 

9. 

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G 


d'une  rente  de  cent  livres  que  le  sieur  Claude  Jaillet  de 
S*-Cergues  s'engage  à  payer  aux  R*^^  Pères  Barnabites 
de  Thonon,  contre  un  capital  de  2.000  livres  versé  par 
Cl.-Auguste  Devilleneuve,  procureur  des  Barnabites  (26 
août  1761). 

M.  A.  Duplan  annonce,  en  ces  termes,  la  trouvaille  de 
Morillon  (vallée  du  Giflfre,  Paucigny). 

Il  y  a  quelque  temps,  soit  vers  la  fin  de  Tannée  1897 
écoulée,  dit-il,  un  orfèvre  de  Taninges,  M.  Gerdil,  faisait 
l'acquisition  d'un  certain  nombre  de  pièces  d'or,  prove- 
nant d'une  trouvaille  faite  à  Morillon.  Grâce  à  la  com- 
plaisance de  M.  Gerdjl,  j'ai  pu  examiner  ces  pièces  au 
nombre  de  13  et  je  vais,  si  vous  me  le  permettez,  vous 
en  donner  un  aperçu  : 

A  part  un  sequin  de  Venise,  toutes  ces  monnaies  se 
classent  en  pistoles  et  demi-pistoles  du  Mexique.  Sur 
l'une  des  premières,  j'ai  retrouvé  la  date  :  1623. 

Le  sequin  est  à  peu  près  intact,  mais  les  autres  pièces 
sont  fort  rognées,  ne  représentant  plus  le  poids  que 
j'indique  et  qu'elles  devraient  avoir  : 

Pistoles  du  Mexique  (régne  de  Philippe  IV,  roi  de 
Castille,  d'Aragon  et  de  Portugal).  Valeur  réelle   au 
commencement  de  ce  siècle  20  fr.  72  cent.  : 
6gram.  691  milligr.  — 901  mil. 
5  den»^,  6  grains.  —  21  carats. 

Demi-Pistole  Vieille,  valeur  actuelle  10  fr.  44  cent. 
3  gram.  343  milfigr.  —  902  mil°^«^ 

2  den.  15  grains.  —  21  carats  25/32. 

Sequin  d'Aloys  Mocenigo,  Doge  de  Venise  de  1570  à 
1577.  Valeur  11  fr.  84  cent. 

3  gram.  452  milligr.  —  997  mil°^*^«. 


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—  XXXV   — 


2  deniers,  17  grains.  —  23  carats  30/32. 
MM.  Marcoz  F.,  inspecteur- voyer  en  retraite  et  Deruaz 
César,  ancien  receveur  des  finances,  sont  reçus  membres 
de  la  Société. 


Séance  du  14  Mars  1898 

(PRESIDBNCB  DB  M.  A.  DUPLAN) 


M.  A.  Duplan  analyse  les  diverses  pièces  d'un  procès 
entre  la  ville  d'Evian  et  Guilliot  Jean-Anthoine,  cha- 
noine de  la  cathédrale  de  Saint-Pierre  de  Genève,  ar- 
chiprêtre  et  plôbain  de  la  ville  d'Evian. 

Le  12  juin  1739,  dit-il,  une  délibération  du  Conseil 
particulier  de  la  ville  d'Evian  donnait  à  l'avocat  Bordet 
Gaspard,  mission  de  présenter  une  requête  au  Sénat  de 
Savoie,  contre  R**  Guillot,  archiprêtre  et  plébain  de  la 
paroisse  d'Evian,  pour  obliger  ce  dernier  à  tenir  un 
second  vicaire  et  à  observer  <  tous  les  pieux  usages  et 
coutumes  »  qui  ont  eu  lieu  de  tous  temps  «  dans  l'église 
paroissiale  de  ce  lieu  ».  L'on  avait  eu  soin  de  tirer  du 
coffre  et  de  remettre  à  sp**^®  Gaspard  Bordet  :  la  visite 
de  Monseigneur  Rossillon  de  Bernex,  de  l'an  1698,  la 
fondation  dans  cette  ville  d'un  second  vicaire,  acte  Perret 
not"^*»,  et  le  Conseil  alloua  à  son  mandataire,  pour  les  frais 
de  son  voyage  à  Chambéry,  la  somme  de  12  liv.,  5  s. 

J'ai  retrouvé,  dans  mes  papiers  de  famille,  les  conclu- 
sions de  Rd  Guillot,  en  réponse  à  la  requête  de  la  ville 
d'Evian  et  je  vais  les  analyser  aussi  brièvement  que 
possible.  Le  défendeur  demande  au  Sénat  la  mise  en 


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cause  du  cardinal  de  Teacia  (1),  abbé  d'Abondance  et 
conclut  au  dôboutement  de  la  demanderesse.  Ainsi  le 
plébain  Guillot  prétond  que  Messieurs  de  la  Ville  lui 
fout  un  procès  de  tendance^  parce  que  lui  et  le  curé  de 
la  Thouvière,  ont  pris  le  parti  des  pauvres  de  Thôpital 
dont  les  nobles  syndics  et  conseillers  sont  administra- 
teurs, ce  qui  les  a  obligés  à  rendre  compte  de  leur 
administration.  Quant  à  la  prétention  émise  par  ces 
Messieurs  d'entendre  chanter  mâtine,  lors  des  fêtes 
solennelles,  le  plébain  d'Evian  prétend  qu'il  Ta  toujours 
fait  selon  Tusage  et  les  coutumes,  c'est-à-dire  les  jours 
de  Noël,  les  mercredi,  jeudi  et  vendredi  de  la  semaine 
sainte,  ce  qu'il  est  bien  dans  l'intention  de  continuer  à 
l'avenir  ;  que  du  reste,  dans  la  visite  de  1698,  pratiquée 
par  Monseig*"  de  Rossillon,  il  n'y  a  à  cet  égard  aucune 
indication  d'époques  et  de  jours  fixés. 

Messieurs  du  conseil  de  Ville  ont  émis  en  outre  la 
prétention  d'avoir  deux  vicaires  entretenus  par  le  curé  ; 
ils  ont  même  produit  un  contrat  du  13  avril  1688, 
Perret,  not"^®,  portant  l'établissement  d'un  second  vicaire 
afin  de  seconder  le  curé  et  le  premier  vicaire  dans  leurs 
fonctions.  Ainsi  que  de  la  visite   précitée,  parlant  du 

(1)  Pierre  Guérin  de  Tencin,  né  à  Grenoble  (1680-1758),  cardinal, 
reçut  Tabjuration  de  Law  avec  lequel  il  resta  lié  et  qui  renrichit, 
fut  choisi  pour  conclavlste  parle  cardinal  de  Roban  au'il  suivit 
à  Rome  (1721)  et  demeura  dans  cette  ville  comme  cbargé  d'affaires 
de  France. 

Grâce  au  crédit  de  sa  sœur,  il  obtiut  successivement  Tarcbe- 
vèché  d'Embrun,  le  chapeau  de  cardinal  et  Tarchevêché  de  Lyon  ; 
puis  il  fit  partie  du  ministère  Fleury.  Pendant  qu'il  était  arche- 
vêque d'Embrun,  il  eut  une  grande  part  à  la  condamnation  de 
l'évèque  de  Senez,  Sounon  partisan  des  appelants^  et  dut  à  ce  sujet 
soutenir  une  lutte  contre  les  avocats,  le  parlement  et  les  jansé- 
nistes, contre  lesquels  il  lança  plusieurs  mandements. 

(Diction.  Douillet,  verôo  Tencin.) 


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—   XXXVII   — 

premier  vicaire,  ils  en  concluent  à  Tobligation  pour  R^ 
Guillot  de  l'avoir  entièrement  à  sa  charge,  ainsi  qu'il 
résulte  d'une  transaction  passée  avec  le  cardinal  do 
Tencin,  transaction  par  laquelle  ce  dernier  lui  a  promis 
une  somme  annuelle  de  41  liv.,  un  muid  (12  couppes) 
de  froment,  en  place  d'un  muid  d'orge  pour  supplément 
de  sa  pension  et  pour  colle  d'un  second  vicaire. 

R^  Guillot  répond  à  cela  que  s'il  est  fait  mention  dans 
les  actes  qui  précèdent  d'un  ancien  vicaire  qu'il  doit 
avoir,  il  n'en  résulte  pas  nécessairement,  qu'il  soit 
obligé  de  l'entretenir.  Que  tout  semble  démontrer  le 
contraire  puisqu'il  résulte  de  la  transaction  de  1737, 
qu'on  lui  accorde  un  supplément  pour  subsister  lui-même 
et  qu'il  ne  peut  entretenir  l'ancien  vicaire,  ne  possédant 
au  rôle  des  bénéfices  qu'un  revenu  de  267  liv.,  18  s. 
Peut-il  avec  une  somme  aussi  restreinte  entretenir  un 
vicaire  quand  il  n'a  pas  même  le  nécessaire  ?  Messieurs 
de  Ville  ont  prétendu  que  ses  prédécesseurs  fournissaient 
à  l'entretien  d'un  vicaire,  mais  lui,  curé  actuel  de  la 
paroisse  d'Evian,  demande  la  preuve  de  ces  allégations. 
Il  cite  entr'autres  faits  les  suivants  :  que  le  curé  Chardon, 
pendant  la  durée  de  sa  charge  et  le  curé  Roch,  son 
prédécesseur,  pendant  5  ou  6  ans,  n'ont  tenu  que  le 
le  vicaire  établi.  Que  du  reste,  il  ne  voit  pas  la  nécessité 
d'avoir  un  second  vicaire  à  Evian,  puisque  cette  ville 
possède  deux  curés,  des  cordeliers  et  5  à  6  prêtres  qui 
enseignent,  outre  le  vicaire  fondé.  Il  demande  si  l'on 
veut  absolument  un  2™«  vicaire,  qu'il  soit  autorisé  à 
prendre  sur  les  dîmes  appartenant  à  la  ville,  ce  qui  est 
nécessaire  pour  l'entretien  de  ce  2°»«  vicaire  ;  que  si  la 
somme  en  résultant  était  insuffisante,  les  paroissiens 


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—  XXXVIII   — 

devraient  y  suppléer.  Les  demandeurs  ont  objecté  que 
le  curé  d'Evian,  devait  avant  tout,  pour  l'entretien  des 
vicaires,  épuiser  tout  d'abord  les  dîmes  ecclésiastiques  ; 
c'est  ce  qui  a  été  fait,  ainsi  que  l'appel  en  cause  de  Son 
Eminence,  qui  devra  fournir  les  explications  nécessaires 
à  cet  égard.  On  demande,  en  outre,  au  besoin  la  recision 
de  la  transaction  de  1737.  La  ville  ayant  échangé  des 
biens  avec  Mcss"  du  Saint-Bernard,  postérieurement 
au  Concile  de  Trente,  les  dîmes  sur  les  biens  de  ces 
derniers  sont  toujours  censées  être  ecclésiastiques,  selon 
leur  origine  et  doivent  être  ainsi  appliquées  aux  défen- 
deurs, pour  faire  subsister  les  vicaires. 

Le  défendeur  termine  ainsi  :  <  Il  ne  reste  plus  qu'à 
parler  des  conclusions  prises  au  préjudice  de  ces  nobles 
sindics,  concernant  la  purgation  assermentée  des  titres 
que  l'on  leur  a  demandé  sur  quoy  il  ne  paroit  pas  non 
plus  y  avoir  le  moindre  doute  car  puisqu'ils  sont  restés 
convenants  d'être  héritiers  de  R^  Chardon  et  qu'il  peut 
se  faire  que  parmi  les  titres  dont  ils  se  sont  saisi  à  son 
decoz  il  s'en  trouve  qui  ayent  appartenu  a  la  cure,  il 
s'ensuit  que  celui  pour  qui  je  suis  est  bien  fondé  à  ses 
réquisitions  à  cet  égard  ayant  intérêt  comme  l'a  scavam- 
ment  remarqué  le  seig"^  avocat  général  de  veiller  à  ce 
que  les  titres  du  bénéfice  ne  s'écartent;  auxquelles 
réquisitions  ils  auroient  du  satisfaire  préalablement 
par  ceque  par  ce  moyen  l'on  auroit  pu  s'instruire  des 
revenus  du  bénéfice  et  même  découvrir  la  fondation  du 
prétendu  vicaire  supposé  »  (1). 

M.  Dubouloz  Ferdinand  présente  des  souhaits  inédits 
de  nouvelle  année  mis  en  vers  par  Félix  Dubouloz  en 

(1)  Archives  A.  Duplan. 


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—   XXXIX   — 

1756-1757  et  un  Noël  dialogué  français  et  savoyard  de 
1718.  La  strophe  en  patois  savoyard  répond  à  la  strophe 
française  avec  grâce  et  avantage. 

Enfin,  M.  Anthoinoz,  architecte,  annonce  qu'il  a 
découvert  récemment  la  liste  des  gardes  nationaux  de 
Thonon  en  1793. 


Séance  du  11  avril  1898 

(présidence  de  m.  l.  e.  piccabd) 


Le  F.  Valfrid  communique  un  rapport  sur  la  situation 
de  quelques  Visitandines  de  Thonon,  dressé  le  28  nivôse 
an  II  de  la  République  française. 

Voici  le  texte  original  de  ce  document  : 

Rapport  sur  la  situation  physique  des  ci-devant  Religieuses 
de  la  Visitation. 
Âiant  résulté  du  rapport  fait  par  le  médecin  Duperier 
officier  municipal,  Sylvestre  officier  de  santé  de  Tannée  et 
Portey  chirurgien  chargés  par  arrêté  de  ce  corps  du  jour 
d'hier  de  revérifier  la  situation  des  ci-devant  Religieuses  de 
la  Visitation,  qui  étoient  sans  secours  et  qui  étoient  mala- 
des pour  prendre  à  leur  égard  les  déterminations  qu'exi- 
geoient  l'humanité  et  les  circonstances  que  quatre  desdites 
sœurs  se  trouvoient  exactement  dans  ce  cas,  savoir  :  la 
citoienne  Dumillier  de  la  Roche  âgée  de  septante  deux  ans, 
la  citoienne  Tavernier  de  Morzine  âgée  de  quarante-huit 
ans,  la  citoienne  Colonnaz  de  Maglan  âgée  de  trente-neuf 
ans  et  enfin  la  citoienne  Duc  de  Samoêns  âgée  de  quarante- 
quatre  ans.  Sur  la  proposition  d'un  membre  il  a  été  arrêté 
que   provisoirement  et  vu  l'urgence   les   dites  citoiennes 


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—   XL   — 

seroient  placées  à  THôtel  Dieu  de  cette  ville  pour  y  être 
soignées  conformément  à  leur  situation  qui  est  des  plus 
attristantes  et  quant  aux  autres  elles  devront  se  conformer 
à  Tarrôté  de  ce  conseil  du  jour  d*hier. 

Recètissement  des  ci- devant  Visitandines, 
Le  citoyen  Jordan  notable  député  pour  le  revètissement 
de  rinventaire  des  effets  des  ci-devant  Religieuses  Visitan- 
dines  de  cette  commune  qui  ont  évacué  ce  jourd'hui  la 
maison  nationale  qu'elles  habitoient  a  mis  sur  le  bureau  le 
procès-verbal  qu'il  a  dressé  en  conséquence  de  sa  commis- 
sion accompagné  d'une  lettre  qui  lui  a  été  remise  par  une 
desdites  citoyennes  cette  lettre  signée  par  une  prétendue 
sœur  Josepte  Emmanuelle  dattée  du  lieu  de  ma  résidence  le 
vingt  un  octobre  dernier  (vieux  style)  faitétat  de  l'enlèvement 
des  linges,  ornements  et  argenteries  delà  dite  maison  outre 
bien  d'autres  choses  non  détaillées.  Le  citoyen  Jordan 
ayant  apporté  quant  à  la  même  pièce  que  les  dites  cidevant 
religieuses  l'avoient  requis  de  leur  en  faire  faire  un  extrait 
et  sur  la  motion  de  ce  dernier  oui  l'agent  national  il  a  été 
arrêté  tant  de  refuser  ledit  extrait  que  d'accorder  aux  dits 
commissaires  la  décharge  par  lui  requise  de  ladite  pièce. 
29  neuvième  nivôse  an  second  de  la  République. 


Séance  du  9  mai  1898 

(présidence  de  m.  a.  duplan) 


Charles-Emmanuel  II,  dit  M.  Duplan,  venait  à  peine 
de  terminer  la  guerre  entreprise  contre  les  Genevois  et 
subie  de  part  et  d'autre,  avec  des  alternatives  de  succès 
et  de  revers,  lorsqu'il  mourut  à  la  fleur  de  l'âge  en  1675. 


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—   XLI   — 

II  laissait  de  soo  second  mariage,  avec  Marie-Jeanoe- 
Baptiste  de  Savoie-Nemours,  uo  unique  enfant,  pour  lui 
succéder,  Victor- A médée. 

A  rage  de  9  ans,  sous  la  tutelle  de  sa  mère,  ce  prince 
monta  sur  le  trône,  suivant  en  cela  le  droit  coutumier, 
établi  dans  le  pays. 

C'est  le  récit  de  l'imposante  cérémonie  de  la  presta- 
tion de  serment  des  grands  feudataires  de  la  couronne, 
des  corps  constitués  de  l'Etat,  que  nous  avons  l'honneur 
de  vous  présenter,  écrit  en  entier  par  un  des  membres 
de  la  famille  de  Blonay  d'Evian,  personnage  distingué, 
occupant  un  rang  à  la  Cour  de  Turin. 

Voici  ce  document  : 

Description  de  Vordre  que  Von  at  observé  au  serment  de 
fidélité  preste  à  S.  M.  R.  Victor  Amé  Second  duc  de 
Savoye  prince  de  piedmont  Roi  de  Chipre  et  entre  les 
mains  de  M.  R,  tutrice  et  régente,  % 

Le  12  novembre  1675  leurs  A.  R.  allèrent  après  leur 
disner  dans  l'église  de  S^-Jean  de  la  manière  qu'il  s'ensuit 

La  Noblesse  marcha  premièrement  pesle  mesle  sans 
ordre  de  préséance. 

Tous  les  Chevaliers  de  l'ordre  marchèrent  ensuite  par 
ordre  d'ancienneté  avec  le  petit  Ordre, 

Et  après  suivirent  les  seigneurs  du  sang. 

Ensuite  M^  le  prince  et  M"  les  princes  de  Soissons  ses 
nepueux. 

M.  R.  vint  après  tenant  de  la  main  gauche  S.  A.  R. 

La  première  dame  d'honneur  de  M.  R.  luy  portoit  la 
queue  de  sa  veste,  et  le  grand^chambellan  celle  du  manteau 
de  S.  A.  R.  chascune  de  leurs  dites  A.  R.  ayant  a  son  costé 
son  grand  escuyer. 


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—   XLII  — 

Les  capitaines  des  gardes  du  corps  marchèrent  aussi 
immédiatement  auprès  de  leurs  A.  R.  appres  lesquelles 
suivit  Madame  la  princesse,  sa  première  dame  d'honneur 
luy  portant  la  queue  de  sa  mante. 

Ils  passèrent  dans  cet  ordre  par  une  galerie  faite  exprès 
qui  conduisoit  du  palais  à  la  grande  porte  de  TEglise 
susdite,  ou  M''^  les  Ambassadeurs  estoient  desia  places 
dans  leur  lieu  accoustume,  aussy  bien  que  les  corps*  du 
sénat  et  de  la  chambre. 

Les  officiers  et  soldats  des  Gardes  du  corps  qui  n*estoient 
pas  de  garde  se  treuverent  aussy  dans  leurs  postes  avant 
l'entrée  de  leurs  A.  R.  et  ceux  qui  estoient  de  garde  les 
accompagnèrent  et  estants  dansTEglise  se  rangèrent  aussy 
dans  leur  poste, 

La  noblesse  qui  devoit  iurer  prit  aussy  en  entrant  les 
postes  qu'on  avait  destine  pour  chaque  province,  et  ceux 
qui  ne  dévoient  pas  iurer  se  rangèrent  dans  le  lieu  accous- 
tume qui  est  sur  le  grand  marchepied  devant  la  chappelle 
Royale, 

Les  chevaliers  de  Tordre  se  mirent  pareillement  dans 
leur  poste  ordinaire  au  dessous  de  la  ditte  chappelle  et  les 
seigneurs  qui  ont  des  charges  de  couronne  et  qui  n'ont  pas 
le  Collier  de  l'Ordre,  prirent  place  auprès  des  susdits 
chevaliers  mais  ils  demeurèrent  droits, 

Leurs  A.  R.  prirent  ensuitte  leurs  places  sous  le  d'ay  ou 
il  y  avoit  sept  chaises  toutes  semblables,  celle  de  M.  R. 
estoit  plus  voisine  du  maistre  Autel  et  celle  de  S.  A.  R.  en 
bas  quoy  qua  droite,  mais  pourtant  toutes  deux  en  ligne 
esgale  et  comme  Elles  furent  assises,  Madame  la  princesse 
s'assit  aussy  au  costé  de  M.  R.  mais  un  peu  en  arrière,  de 
mesme  que  M.  le  prince  du  costé  de  S.  A.  R.,  mais  plus  en 
arrière  de  toute  la  largeur  de  la  chaise,  au  lieu  que  celle 
de  Mad.  la  princesse  n'estoit  reculée  que  de  la  moitié,  et 


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—  XLIII   — 

les  trois  de  M'^  les  princes  de  Soissons  tout  a  fait  derrière 
les  autres. 

Entre  le  grand  Autel  et  le  baldaquin  de  leurs  A.  R.  estoit 
une  table  couverte  d'un  tapis  de  velours  noir,  sur  lequel 
estoit  un  missel  ouvert  avec  une  croix  dorée. 

Monseigneur  TArchevesque  de  Thurin  vestu  de  ses 
habits  pontificaux  s'assit  auprès  de  la  dite  table  sur  une 
petite  chaise  assisté  de  deux  chanoines  qui  estoient  derrière 
luy  et  au  premier  jurement  qui  se  fît  il  prit  en  main  la 
susditte  croix. 

Du  coste  droit  de  Monséig'  TArch.  estoit  le  grand  chan* 
celier  assis  sur  une  chaise  sans  appuy  couverte  de  mesme 
dt*ap  que  les  banqeites  des  chevaliers  de  Tordre. 

Du  costé  gauche  estoit  le  premier  président  de  la  cham- 
bre de  piesmont  vestu  solennellement  et  demeura  tou) 
droit,  M' le  marquis  de  S*-Thomas  estoit  aussy  tout  droit 
au  bout  de  la  table,  en  qualité  de  premier  secrétaire  d'estat 
de  leurs  A.  R. 

Les  députés  de  Savoye  et  Aouste  estoient  postés  derrière 
le  maistre  hostel  du  costé  de  leur  A.  R. 

De  l'autre  costé  estoient  ceux  de  Chablais,  Genevois, 
Maurienne,  Tarentaise,  Faucigny. 

Devant  le  dernier  autel  du  chœur  qui  est  du  S*-Sacre- 
ment  estoient  ceux  de  nice,  d'oneglie,  de  marro  et  de  dol- 
ceaqua. 

Du  coste  des  orgues,  entre  l'autel  de  S*-Jean  Baptiste  et 
la  chaire  de  la  prédication  estoient  en  confusion  sans  con- 
séquence les  deux  provinces  qui  estoient  en  conteste  pour 
la  préséance. 

Du  mesme  costé  estoient  les  comtes  de  Coronat  et  appres 
eux  Bielle,  Santhia  et  Adorno, 

Au  dessous  la  tribune  dernière  les  magistrats  estoient 
ceux  du  Canavais, 


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—  XLIV  — 

Dans  la  nef  de  TEglise  estoient  pesle  mesle  tous  les 
feudataires  de  pied  mont  du  coste  de  leurs  A.  R.  et  de 
Tautre  costé  les  villes  et  terres  du  piedmont  et  appres  eux 
ceux  de  Montferrat  et  tous  demeurèrent  dans  les  susdits 
postes,  iusques  qu'ils  fussent  appelés  a  leur  rang. 

Estants  donc  tous  rangés  de  cette  manière,  le  premier 
président  de  la  chambre  s*advanca  au  près  de  M' le  prince 
comme  pour  linviter  a  venit  jurer,  Luy  fit  une  profonde 
Révérence  appres  la  quelle  M'  le  prince  susdit  sestant 
levé  salla  mettre  a  genoux  dessus  un  carreau  de  velours 
noir  auppres  de  la  table  dont  iay  parle  cy  dessus,  et  leut  en 
cette  posture,  tenant  la  main  droite  sur  le  missel  la  forme 
du  iurement  qui  luy  fut  présentée  par  M«*  le  m.  de  S*- 
Thomas  appres  quoy  il  alla  faire  la  révérence  a  M.  R. 
laquelle  sestant  levée  droitte  luy  donna  des  marques  de 
lestime  quelle  en  faisoit,  il  en  fit  de  mesme  à  S.  A.  R.  qui 
luy  fit  aussy  un  accueil  des  plus  grands  et  des  plus  obli- 
geants, 

M"  les  princes  de  Soissons  furent  ensuitte  invites 
pareillement  par  le  susdit  p.  pr.  de  la  chambre  den  faire  de 
mesme  ce  quayant  fait  de  la  mesme  manière  que  M^"  le 
prince,  M»*  le  Marquis  de  S^-Thomas  remit  a  Therault 
d'arme  une  brieve  déclaration  de  M.  R.  pour  lever  toutes  les 
prétentions  de  préséance  et  appres  quil  leut  leûe  a  haute 
voix,  le  susdit  M.  de  S^-Thomas  lui  fit  lire  un  ordre 
dobserver  le  silence  pour  entendre  publier  la  forme  des 
iurementSj  appres  quoy  il  leut  luy  mesme  a  haute  voix 
l'acte  de  iurement  en  francois  pour  tous  les  députes  de 
Savoye, 

Ce  questant  fait  Iherault  alla  faire  une  grande  révérence 
a  M"  les  Seigneurs  du  Sang  pour  les  convier  au  iurement 
ce  qu'ils  firent  dans  cet  ordre,  premièrement  M'  Don 
Gabriel,  puis  M.  Don  Antoine,  appres  M"^  le  marquis  d'Est, 


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—  JcLV  — 

enfin  M.  le  marquis  de  Droney,  et  appreô  avoir  fait  la 
susditte  cérémonie  du  iurement  sur  le  missel,  ils  sen 
allèrent  faire  une  profonde  révérence  a  M.  R.  puis  a  S.  A. 
R.  a  laquelle  ils  embrassèrent  les  genoux. 

M'^  les  chevaliers  de  Tordre  les  suivirent  et  firent  la 
mesme  cérémonie,  aussy  tous  les  uns  appres  les  autres. 

Cela  estant  fait  le  premier  président  quittera  son  poste  et 
le  remettra,  au  premier  président  de  la  chambre  de  Savoye, 
ou  au  ministre  députe  de  ce  corps  qui  se  présentera 

Ensuitte  de  quoy  Iherault  demandera  a  haute  voix  toutes 
les  provinces  de  Savoye  Tune  après  lautre  dans  l'ordre  qui 
suit,  La  Savoye,  Chablais,  Aoste,  Genevois,  Maurienne, 
Tarantaise,  Faucigny, 

Tous  les  députes  de  ces  provinces  iurerent  de  la  manière 
dessus  mais  les  deux  genoux  a  terre,  appres  quoy  ils  firent 
une  profonde  révérence  a  M.  R.  et  puis  a  S.  A.  R.  duquel 
ils  baisèrent  le  bas  du  manteau  et  sa  ditte  A.  R.  les  accole. 

Ils  furent  introduits  par  M^  le  Marquis  de  Sales  appres 
avoir  présente  devant  la  cérémonie  a  M'  le  Marquis  de 
S*-Thomas  leur  procure, 

Sitost  qu'ils  eurent  achevé  le  serment,  le  premier  prési- 
dent de  Savoye  se  leva  et  laissa  de  nouveau  a  celui  de 
piedmond qui  lavoit  auparavant,  appres  quoy  M.  le  Marquis 
de  S*-Thomas  leut  en  Italien  tout  haut  l'acte  de  iurement 
pour  M"  de  piedmont  et  autres  provinces  deçà  les  monts 
appres  quoy  le  députe  des  quattre  comtés  alla  iurer  de  la 
manière  cy  dessus  au  nom  de  tous  appres  avoir  este  appelé 
par  l'beraud,  ils  furent  de  suitte  faire  la  révérence  a  leurs 
A.  de  mesme  façon  que  ceux  de  Savoye. 

Appres  que  les  députes  des  provinces  de  piedmont  eurent 
jures,  ceux  des  villes  en  firent  de  mesme,  elles  en  avoient 
chacune  deux,  et  Thurin  par  prérogative  en  avoit  dix,  et 
fut  appelé  la  première,  appres  quoy  tous  les  feudataires  de 


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—  XLVI  — 

pîedmont  iurerent  sans  aucun  ordre  et  préséance,  non  plus 
que  les  villes  de  chaque  province  de  Savoye  qui  marchèrent 
toutes  sans  conséquence  ; 

Tout  cela  estant  fini  leurs  A.  R.  s'en  retournèrent  au 
palais  par  le  mesme  chemin  et  dans  le  mesme  ordre  quelles 
estoient  venues. 

Les  Archevesques  et  les  Evesques  presterent  le  serment 
dans  la  chambre  de  parade  en  présence  de  toute  la  Cour 
assistée  du  grand  Chancelier  et  du  M.  de  S*-Thomas,  sans 
mettre  le  genoux  a  terre,  et  sans  toucher  le  missel,  mais 
en  se  mettant  la  main  sur  la  poictrine,  et  comme  ils  se  pré- 
sentèrent a  leurs  A.  R.,  M.  R.  les  fit  couvrir,  mais  en  lisant 
la  forme  du  iurement  eux  mesmes,  ils  se  découvrirent  et 
demeurèrent  tousiours  en  cette  posture, 

Appres  eux  Les  Abbes  qui  ont  aussy  des  fiefs  dépendants 
de  la  Couronne,  sans  ordre  de  préséance,  ensuicte  de  la 
déclaration  faite  par  ordre  de  M.  R.  par  laquelle  elle  entend, 
que  tout  se  fasse  sans  preiudice  des  droits  de  préséance 
que  Ton  peut  avoir. 

Le  iurement  des  magistrats  qui  possèdent  des  fiefs  en 
piedmont  sest  fait  a  part. 

M.  Duplan  donne  ensuite  connaissance  du  contrat  de 
fondation  de  la  chapelle  de  la  très  Sainte  Trinité  faite 
dans  l'église  paroissiale  de  S*«-Catherine  de  la  Touvière 
d'Evian,  du  25  janvier  1406,  contrat  provenant  de  la 
bibliothèque  de  M.  de  Costa. 

Noverint  universi  quod  in  prothocoUis  providi  viri  Mer- 
meti  Patenotre  Notarii  publici  viam  universœ  carnis 
ingressi  reperitur  quoddam  publicum  instrumentum  per 
ipsum  receptum  cuius  ténor  sive  effectus  substantialis 
sequitur  in  hœc  verba.  In  nomine  sanctœ  et  individuœ 
Trinitatis  Patris  et  Filii   et  Spiritus  Sancti  Amen.  Via 


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pei:*egi:*înatîonîs  humanœ  miserabilis  et  incerta  pôriôulis  et 
diseriminibus  tôt  et  tantis  noscitui'  subjacere  quod  nuUi 
nisi  divini  flaminis  auxilio  fulciatUr  securuA  patet  transi- 
tas pei*  eandem  :  nam  in  dupplantatored  invisi  insidiantes 
in  cunctis  insistant  nodos  habentes  nocibiles  infinitos  ad 
infelices  animas  laqueandas.  Cum  autem  inter  hostes 
huiasmodi  nemo  de  viribus  cunctis  esse  tutus  valeat 
agit  providé  diquidem  unus  quisque  dum  in  via  peregrina- 
tur  eadem  et  sui  ipsius  compos  viget  salubribus  operibus 
quœ  ipsum  prœcedant  et  ab  hostibus  tueantur  dévote 
insistant  si  de  bonis  temporalibus  quœ  serviendo  produn- 
tur  et  dum  in  piis  usibus  expenditur  centupla  recipiunt 
incrementa  aliqua  in  iliius  honorem  qui  contuiit  universa 
consecrat  dispenset  et  deducet  ut  pro  terrenis  cœlestibus 
felici  gaudio  commutatis  in  cœlesti  domo  prœmia  pro  ipsis 
transitoriis  recipiat  sempiterna  Quapropter  vir  providus  et 
discretus  Petrus  Jocerandi  Burgensis  Aquiani  et  Johanneta 
de  Castillione  ejus  uxor  de  sua  suarumque  animarum 
salute  ac  remedio  salubri  non  immemores  deducentes  in 
exactœ  considerationis  examen  quod  inter  alia  per  quœ 
divina  gracia  impetratur  delicta  ac  peccata  delentur  ani- 
mœque  a  peccatis  solvuntur  et  tam  vivis  quam  mortuis 
œterna  prœmia  obtinet  Sanctorum  intercessio  sacrificiorum 
oblatis  et  orationum  frequens  exhibitio  sunt  prœcipue 
mirabiliter  effectiva  Ideoque  iidem  Petrus  et  Joanneta 
Coniuies  prope  moti  in  mei  Notarii  Publici  et  testium 
subscriptorum  prœsentia  propter  infra  scripta  personaliter 
et  specialiter  Constituti  ex  eadem  certa  scientia  pro  salubri 
remedio  animarum  eorum  ipsorumque  Prœdecessorum 
prœsentium  et  successorum  quorumcumque  ac  omnium 
quos  in  eorum  commemoratione  habent  et  retinent  et 
habere  debent  tam  pro  vivis  quam  quo  mortuis  pro  se  et 
suis  hœredibus  et  successoribus  quibuscumque  fondant  et 
ordinant  struunt  et  construunt  in  et  infra  suam  parrochia 


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~  XLvni  — 

tem  Eccledam  Beatœ  Caiharinœ   de   Thoveria   Aquiani 
Diœceaia  Gebenenais  Videlicei  in  Âltari  dudum  constructo 
a  parte  montis  unam  Cappelloniam  perpetuam  ad  Laudem 
et  Servitium  et  Quitus  ejus  augmentationi  perpetuum  Deo 
conservante  et  auxiliante  et  sub  vocabulo  Sanctœ  et  indi- 
viduœ  Trinitatis  Patris  videlicet  Filii  Spiritusque  Sancti. 
Et  pro  dictœ  Cappellaniœ  dote  conservatione  et  fondatione 
et  in  remissionem  omnium  peccatorum  suorum  suorumque 
parentum  Deo  perpétue  dedicant  res  infra  scriptas  ipsasque 
res  donatione  perpétua  et  irrevocabili    ex   eorum    certa 
scientia  Et  tamquam  pio  animo  moti  pro  salute  sua  om- 
niumque  suorum  dant  cedunt  et  concedunt  modo  fortiori 
quo  fieri  perpétue  et  dici  potest  Altari  et  Capellaniœ  super 
nominatis  ac  Rectori  eiusdum  infra  nominando  et  Sueces- 
soribus  suis  pro  tempore  existentibus  etmihi  Notario  infra 
scripto  stipulanti  ad  opus  dictœ  Capellaniœ  et  Rectoris 
ejusdem  prœdictorum  nihil  in  eisdem  rébus  retinendo  sed 
easdem  res  cum  suis  pertinentiis  in  dictam  Capellaniam 
Âltare  et  eius  Rectorem  totaliter  et  perpétue  transferendo. 
Quœ  res  sunt  dictorum  Pétri  et  Joannetœ  de  puro  et  franco 
allodio  eorumdem  utasserunt.Etsunthœc:  Primo  quœdam 
domus  cum  horto  posteriori  sita  apud  Thoveriam  Aquiani 
juxta  domum  et  hortum   Pétri  Billiet  ab  occidente  iter 
publicum  superius  et  plateam  Jaqueti  Grept  inferius  una 
etiam  cumquadamarcha  magna  matno(?)  dictœ  domus  exis- 
tente  ab  oriente  Item  quamdam  vineam  continentem  circa 
unam  posam  sitam  in  territorio  de  Chavanes  juxta  vineam 
hœredum  Guillermi  de  Berneyab  occidente  vineam  Juqueti 
Lugrini  ab  oriente  res  Peroneti  Dubosson  et  Perreti  Billiet 
inferius  et   iter  publicum  superius.  Item   quœdam    pecia 
vineœ  continens  circa  très  fossoratas  sita  in  territorio  de 
los  bendato  juxta  iter  publicum  superius  vineam  Ysabellœ 
Malliettœ  VuUiermi  et  Joannis  Milonis  fratrum   inferius 
vineam  Pererii  Benedicti  ab  oriente  ac  vineam  dicti  Per- 


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.      —   XLIX   — 

rerii  et  dictœ  Mabili  ab  occidente.  Item  unum  modium 
frumenti  ad  mensuram  Aquiani  et  sexaginta  Sclidos 
monetœ  domini  census  seu  annui  redditus  solvendum 
singulis  anuis  et  perpétue  per  dictos  dotatores  et  suos 
quos  supra  dictœ  Capellaniœ  et  Rectori  ejusdem  insti- 
tuendo  pro  tempore  in  festo  Beati  Andreœ  Apostoli.Quem- 
quidem  censum  prœfati  Dotatores  pro  se  et  suis  quibus 
supra  poDunt  assignant  et  affectant  ac  pro  ipso  obligant  et 
hypothecant  perpétue  dictœ  Cappelaniœ  et  Rectori  ejusdem 
pro  tempore  et  mihi  notario  stipulanti  ut  supra  videlicet 
quemdam  viridarium  ipsorum  Dotatorum  ut  asserunt 
allodialem  situatum  prope  Thoveriam  Aquiani  juxta  iter 
publicum  inferius  et  vineam  et  curtile  Mermeti  Bruni 
superius  et  curtile  dictorum  dotatorum  circa  très  fosseratas 
continens  ab  occidente  et  generaliter  alia  omnia  alia  et 
singula  bona  sua  quœcumque  sint  et  ubicumque  poterint 
reperiri.  Item  quœdam  res  utenclllesquœsequuntur  Primo 
una  culcitraplumœacum  unopulvinali  quatuor  linteamina 
duo  mantillia  unum  copertorium  dimidia  duodena  scutella- 
rum  plastri  munita  ponderis  undecim  libras  Item  una  olla 
metalli  ponderis  undecim  libras  très  quartos  cum  dimidio 
item  unus  potus  stanni  unius  quarteronis  ponderis  quinque 
libras  item  una  cuppa  fuste  biocene  unum  spumatore  ferri 
una  carga  unus  pochonus  ferri  una  petella  frixaria  ferri 
unus  morterius  cum  pitono  item  unum  coquipendium  una 
cum  fondis  juribus  pertinentiis  appendentiis  rerum  supe- 
rius donatarum  universis  ad  habendum  tenendum  et  per- 
cipiendum  per  Rectorem  in  dicta  Capellania  instituendum 
pro  tempore  nomine  dictœ  Capellaniœ  atque  ejus  usum 
usumque  fructuum  suum  totale  convertendum.  Cedenteset 
Concedentes  propterea  idem  Petrus  et  Joanneta  pro  se  et 
eorum  hœrede  et  causam  habentibus  et  habituris  aliquali- 
ter  abeisdem  vel  ab  altero  eorumdem  in  futurum  dictœ 
Capellaniœ  et  ejus  Rectori  pro  tempore  existenti  omnes  et 

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singulàsactioaes  onuntiationesetjurainpi'œrnisâisclonatiâ 
et  dedicatis  compétentes  et  corapetentia  nunc  et  in  futurum 
quocumcjue  titulo  sive  causa  dictam  Capellaniam  et  Recto- 
rem  pro  tempore  existentem  loco  sui  de  dictis  rébus  inves 
tiendo  et  ponendo  se  et  suos  Dicti  Petrus  et  Joanneta  de 
ipsis  rébus  sic  donatis  devestiendo  totaliter  et  dictam 
Capellaniam  dictum  que  Rectorem  in  possessionem 
dictarum  rerum  vel  quasi  ponendo  per  concessionem 
prœsentisinstru menti,  Constituentes  seprœnominati  Dota- 
tores  prœdicta  «lonata  nomine  dictœ  Capellaniœ  et  Rectoris 
ejusdem  instituendi  possidere  donec  Rector  dictœ  Capel- 
laniœ instituendus  pro  tempore  de  ipsis  possessionem 
appréhendent  corporalem  quam  apprehendi  intrandi  et  sibi 
retinendi  prœlibatî  Dotatores  Rectori  dictœ  Capellaniœ 
instituendo  pro  tempore  et  mihi  Notario  subscripto  Stipu- 
lanti  ut  supra  omnimodam  licentiam  dederunt  et  manda- 
tum.  Volentes  retinentes  et  ordinantes  dicti  coniuges 
dotatores  quod  prima  coUatio  seu  presentatio  dictœ 
Capellaniœ  seu  dicti  Altaris  et  collationes  seu  presenta- 
tiones  sequentes  quoties  ipsa  Capellania  seu  ipsum  Altare 
Rectore  vacare  contingent  ad  ipsos  dotatores  quandiu 
vixerint  in  humanis  pertineat  pleno  jure  et  ad  eorumdem 
dotatorum  alterumquisupervixerit  ;  postquam  vero  debitum 
solverint  ambo  conditionis  humanœ  ad  eorum  hœredes 
tanquam  in  hoc  habitaturos  ab  eisdem  una  cum  Consensu 
et  Consilio  curati  et  Rectoris  dictœ  Ecclesiœ  parrochialis 
Capellœ  Thoveriœ  Aquiani  pro  tempore  existente  pleno 
jure  pertineat  seu  ad  illum  vel  illis  cui  vel  quibus  eidem 
Dotatores  vel  eorum  alter  qui  supervixerit  voluerint  vel 
voluerit  in  testamento  vel  extra  concedere  et  donare  de 
consilio  et  consensu  quibus  supra.  Item  volunt  et  ordinant 
dicti  fondatores  et  Dotatores  quod  in  dicto  altari  Rector 
ejusdem  qui  pro  tempore  fuerit  per  se  vel  per  alium  pres- 
byterum  celebret  vel  celebrare  faciat  singulis  hebdomadis 


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—  LI   — 

quatuor  missas  diebus  lunœ,  mercurii  venerîs  et  sabbathi 
pro  remedio  et  salute  dictorum  Dotatorum  et  parentum 
eorumdem  hora  débita  sine  scandalo  prœjudicio  offensa 
aliqua  Ecclesiœ  pappochîalis  dicti  loci.  Item  volunt  et 
ordinant  dicti  Conjunges  Dotatores  quod  Rector  dicti 
Altaris  qui  pro  tempore  fuerit  resideat  et  moram  trahat 
personalem  et  continuant  in  dicta  domo  supra  dicto  altari 
donata  dictamque  Domum  coopertam  Rector  dictœ  Capel- 
laniœ  inferius  nominatus  et  qui  in  futurum  fuerit  acvineas 
prœdesignatas  in  statu  bonno  manutenere  teneantur  ser- 
vitioque  et  obedientiœ  Curati  Ecclesiœ  Parrochialia  supra- 
dictœ  in  Ecclesiasticis  Officiis  et  maxime  diebus  Dominicis 
et  festivis  in  Matutinis  Missis  et  Vesperis  cum  ibidem 
cantabuntur  cum  nota  cum  dito  Curato  Deo  débite  ser- 
viondo  cantare  etofficiare  prout  ibidem  opus  fuerit  teneatur. 
Item  quod  présentes  Litterœ  et  alia  quœcumque  sint 
facienda  ad  opus  dictorum  Altaris  et  Rectoris  ejusdem 
ponantur  et  custodiantur  sub  fideli  sera  et  clausura  Volentes 
etiam  dicti  Dotatores  et  ordinant  pro  se  et  suis  prœdictis 
quod  Rector  quicumque  qui  in  dicto  Altari  institutus  fuerit 
pro  tempore  teneatur  et  debeat  prœstare  juramentum  super 
Sancta  Dei  Evangelia  antequam  in  possessionem  dicti 
Altaris  ponatur  in  manibus  dicti  Curati  quodipse  erit 
continuo  fidelis  Parrochiali  Eccl  esiœ  dicti  Loci  et  Rectori 
eiusdem  pro  tempore  existenti  du  m  dicti  Altaris  et  Capellœ 
Rector  extiterit.  Quam  Capellaniam  et  quod  Altare  cum 
eorum  pertinentiis  probitate  deque  Laudabilis  vilœ  hones- 
tate  ac  scientiœ  suffîcientia  Viri  Discreti  Domini  Mermeti 
Astri  de  Cuer  gebenensis  Diocœsis  Presbiteri  ad  plénum 
inforraati  ac  etiam  confidentes  dicti  Doctatores  et  fundato- 
res  ex  eorum  certa  scièntia  per  prœsentes  constituunt 
dantque  et  concedunt  eidum  domino  Mermeto  Astri  de 
Cuer  Presbytero  cum  suis  pertinentiis  universis  et  eidem 
quantum  possunt  et  ad  eos  pertinet  provident  de  eadem 


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—  Lit  — 

Capellania  inducendo  verbaliter  eumdem  in  possessionerri 
dictœ  Capellaniœ  juriumque  et  pertinenlium  ejusdem  per 
traditionem  prœsentium  Litterarum.  Itaque  quodut  supra 
estordinatum  idem  Dominas  Mermetus  deserviat  Deo  in 
dictis  Ecclesia  et  Altari  salubriter  Promittentes  dicti 
Dotatores  per  juramenta  sua  super  sancta  Dei  Evangelîa 
copporaliter  prœtista  et  sub  rerum  suarum  et  omnium 
bonorum  suorum  presentium  et  futurorum  obligatione  et 
hypotheca  dictam  Cappelaniam  munire  calice  argenteo 
cum  Patena  missali  et  aliis  dictœ  Capellaniœ  necessariis 
nec  non  omnia  universa  et  singula  supra  et  infra  scripta 
rata  grata  et  fîrma  habere  perpétue  tenere  attendere  com- 
plere  et  inviolabiliter  observare  et  non  contra  facere  vel 
venire  vel  per  se  vel  per  alium  nec  alicui  contra  venire 
volenti  in  aliquo  consentire  aliqua  causa  aut  ingenio  de 
jure  vel  de  facto.  Renunciantes  (etc.)  Et  ideo  vobis  Reve- 
rendo  in  Christo  Patri  Domino  nostro  Gebenensi  Episcopo 
in  cujus  Diœcesis  dicta  Ecclesia  et  dictum  Altare  existunt 
dicti  Petrus  Jocerandi  et  Joanneta  de  Castillione  ejus  uxor 
fondatores  Dotatores  prœdicti  vestri  humiles  et  devoti 
Dictum  dominum  Mermetum  presbiterum  ad  Regimen  et 
Servitium  dicti  Altaris  et  dictœ  Capellaniœ  perpétue  obti- 
nendum  ofïerunt  humiliter  et  prœsentant  supplicantes 
humiliter  et  dévote  prœfati  dotatores  quatenus  eumdem 
Dominum  Mermetum  in  dicta  Capellania  et  dicto  Altari 
canonice  instituere  et  de  ipsis  et  suis  juribus  et  pertinentiis 
intègre  providere  misericorditer  dignemini  omnia  et  sin- 
gula supra  in  prœsenti  instrumento  et  infra  ratifîcando  et 
ex  vestra  certa  scientia  perpétue  confirmando  vestramque 
auctoritatem  et  vestrum  decretum  pariter  imponendo.  De 
quibus  omnibus  volunt  et  requirunt  ac  ordinant  dicti 
Dotatores  fleri  unum  vel  plura  publica  instrumenta  ejusdem 
tenoris  et  substanciœ  per  me  infra  Scriptum  Notarium. 
Datum  etactum  apud  Thoveriam  Aquiani  in  domo  habita- 


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—   LUI  — 

tionis  dictorum  dotatorum  anno  Dni  millesimo  quatercen 
tusimo  sexto  inditione  décima  quarta  die  vigesima  quinta 
mensis  Januarii  prœsentibus  Joanne  Geneva  de  Mareschia 
Peroneto  De  furno  Notario  Joanne  Morcerii  Clerico  Bup- 
gensibus  Aquiani  et  Joanne  Bldalis  de  Novassella  testibus 
ad  hœc  vocatis  specialiteret  rogatis.  mermetus  Patenotro. 
Et  Ego  Rodulphus  Pochati  de  Mezingio  Gebenensis 
Diœcesis  Clericus  auctoritate  imperiali  et  Illustrissimî 
Principis  Dni  Ducis  Juratus  commissariusque  Protocollo- 
ruin  Mermeti  Patenotro  prœdictorum  hocque  publicum 
instrumentum  ex  dictis  prothocollis  levari  scribi  et  extrahi 
feci  ex  conimissione  Ducali  mihi  concessa  perPhilibertum 
Christin  Notarium  manuque  mea  subacripsi  et  signo  meo 
mihi  fieri  solito  signavi  in  testimonium  prœmissorum. 


Séance  du  13  Juin  1898 

(présidence  de  m.  duplan) 


M.  Duplan  lit  quelques  notes  à  lui  transmises  par 
J.-F.  Gonthier  sur  Téglise  de  la  Thouvière  et  la  chapelle 
de  la  Sainte-Trinité  d*Evian. 

A  deux  pas  de  Thôtel-de-ville  d'Evian-les-Bains,  dit- 
il,  coule  un  petit  ruisseau  qui  porte  le  nom  de  nant 
d'Enfer-^  il  limitait  jadis  au  levant  la  ville  et  la  paroisse 
d*Evian  ;  le  territoire  de  la  rive  droite  ressortissait  à 
la  paroisse  de  Neuvecelle. 

Mais  grâce  aux  franchises  dont  Pierre  de  Savoie  dota 
Evian,  Evian,  sur  la  fin  du  XIII®  siècle,  prit  de  Tim- 
portance,  de  nombreuses  maisons  s'élevèrent  en  dehors 
des  remparts,  sur  la  droite  du  nant  et  cette  nouvelle 


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—   LIV  — 

bourgade  ou  faubourg  prit  le  nom  de  la  Touviére,  Tho- 
veria  Aquiani. 

A  ce  faubourg,  il  fallait  une  église,  on  la  construisit  à 
50  pas  environ  de  Tenceinte  fortifiée  de  la  ville  et  on  la 
plaça  sous  le  vocable  de  Sainte-Catherine.  Mais  Téglise 
de  la  Touviére,  quoique  paroissiale,  n'était  qu'une 
filleule  dépendant  de  celle  de  Neuvecelle  et  desservie 
chaque  dimanche,  par  le  curé  de  ce  lieu. 

A  quelle  année  remonte  cette  créaticfn  ?  Nous  pouvons 
le  déterminer  d'une  façon  approximative. 

La  première  fois  que  nous  voyons  apparaître  dans 
l'histoire  le  nom  de  Va,  Touviére,  c'est  en  1325.  En  cette 
année-là,  le  comte  de  Genevois  et  le  Dauphin,  après 
avoir  détruit  les  châteaux  de  Brens,  ravagé  Thonon  et 
les  alentours,  vinrent  assiéger  Evian  par  terre  et  par 
eau.  Malgré  l'énergie  de  ses  défenseurs,  la  ville  dut  se 
rendre  :  elle  fut  mise  au  pillage  et  son  château  ruiné.  Si 
l'on  en  croit  la  chronique  de  Prévost,  le  Dauphin  resta 
maître  du  faubourg  de  la  Touviére  et  ne  le  relâcha  que 
9  ans  plus  tard,  au  traité  de  Lyon  (1). 

Dans  le  contrat  de  mariage  de  N«  Mermet  de  Chàtillon 
avec  Jordane  de  Neuvecelle,  qui  est  du  2  juin  1327,  le 
père  de  l'époux  donne  à  son  fils  la  maison  qu'il  possède 
dans  le  village  nouveau  de  la  Touviére,  in  villa  nova 
de  Thoveria,  entre  la  rue  et  l'étang  du  Comte. 

Un  autre  document  constate,  quelques  années  plus 
tard,  l'existence  de  Téglise  de  la  Touviére.  Par  son 
testament  du  24  mars  1341,  Guillaume  II  de  Chàtillon, 
fils  de  Mermet,  y  fonde  une  chapelle  du  Saint-Sacre- 

(1)  Prévost,  Histoire  de  la  mile  d" Evian,  publiée  par  M.  Duplan, 
tome  1,  page  74. 


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—    LV  — 

ment  (1)  et  y  choisit  sa  sépulture.  Guillaume  III  y 
fonde  à  son  tour  une  chapelle  en  l'honneur  de  tous  les 
Saints  et  veut  être  inhumé  dans  le  caveau  paternel 
(1387)  (2). 

A  ces  chapelles  viennent  bientôt  s'en  ajouter  d'autres. 
Ce  sont  :  celle  de  la  Sainte-Trinité  fondée  en  1400  — 
nous  en  reparlerons,  —  celle  des  saints  Pierre  et 
Claude,  dotée  le  23  avril  1447,  Dunant  notaire,  par 
Antoine  Bontemps  et  dont  le  patronage  passa  ensuite 
aux  de  Bonnevaux  (1GG7)  (3).  Sur  le  même  autel,  un  N*' 
François  de  Chàtillon  éleva  une  chapelle  on  l'honneur 
de  S*-François-de-Sales  et  la  dota  le  13  avril  1638  ; 
celle  des  saints  Etienne  et  Louis,  dont  furent  successi- 
vement patrons  les  nobles  de  la  Lex  (1525),  de  Gollioux 
(1606),  de  Blonay  (1667). 

En  1481,  la  Touvière  comptait  30  feux  soit  de  150  :i 
180  habitants,  tandis  qu'Evian  en  renfermait  quatre  fois 
plus. 

Bien  que  do  1536  à  1569,  la  Touvière,  ainsi  que  tout 
le  pays  de  Gavot,  ait  été  occupée  par  les  Vallaisans 
catholiques,  la  tradition  locale  prétend  que  ses  habitants 
passèrent  au  calvinisme,  à  l'exemple  de  ceux  de  Maxilly 
et  de  Montigny.  C'est  une  erreur  manifeste.  L'enquête 
qui  fut  faite  en  1598  après  la  conversion  en  masse  des 

(1)  Dite  aussi  chapelle  de  S»-Blaise  ;  elle  était  en  1467-1475  de  la 
présentation  de  N«  F.  de  Russin,  qui  avait  remplacé  les  de  Chà- 
tillon. 

(2)  Les  N*"  de  Chàtillon,  coseigneurs  de  Thollon,  avaient  égale- 
ment leur  tombeau  dans  cette  église  :  il  était  en  marbre  noir. 
Jean  de  Chàtillon,  dernier  de  la  branche,  voulut  y  être  inhumé 
(testam*  du  9  juin  1701).  Acad.  Chabl. 

(3)  Piccard,  Livre  de  Raison  d'un  Seigneur  de  Savoie^  p.  16. 
Une  chapelle  dédiée  à  SS.  Pierre  et  Sébastien  —  c'est  peut-être  la 
même  —  était  en  1496-1578  de  la  présentation  des  Ne*  Cinquantod. 


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—   LVI   — 

Chablaisienset  qui  énumére  toutes  les  paroisses  naguère 
protestantes,  cite  Maxilly  et  Moutigny  ;  elle  ne  parle 
point  de  la  Touvière.  D'où  il  faut  conclure  que  si  le 
faubourg  d*Evian  vit  se  produire  quelques  défections 
parmi  ses  habitants,  la  masse  resta  fidèle  à  son  Dieu  et 
à  son  Eglise. 

Autant  Toccupation  valaisanne  avait  été  utile  à  la 
ville  d'Evian  et  à  ses  alentours  en  les  préservant  du  joug 
bernois  et  du  calvinisme,  autant  l'invasion  franco-gene- 
voise, survenue  à  la  fin  du  môme  siècle,  laissa  des 
ruines  dans  ce  malheureux  pays. 

Ne  trouvant  plus  guère  à  ravager  dans  le  pays  au 
delà  do  la  Dranse  qu'ils  foulaient  depuis  doux  ans,  les 
Genevois  brûlaient  de  rançonner  le  pays  de  Gavot.  Une 
première  tentative  par  eau  sur  Evian  né  réussit  point 
(2  septembre  1590).  Mais  enhardis  par  l'arrivée  de 
puissants  renforts  amenés  de  France,  ils  partent  de 
Genève  le  11  février  (1)  1591,  sous  la  conduite  de  Guitry, 
saccagent  la  ville  de  Thonon  hors  d'état  de  se  défendre 
et  font  le  siège  du  château,  dont  le  gouverneur  se  rend 
après  avoir  vu  trente  de  ses  soldats  emportés  par  une 
mine  (10  février). 

Le  lendemain  17,  un  dimanche  ou  le  18  suivant  Gau- 
thier, l'avantgarde  ennemie  investit  la  place  d'Evian. 
Celle-ci  était  défendue  par  trois  cents  hommes  d'élite.  A 
la  sommation  de  se  rendre,  la  ville  et  le  faubourg  ne 
répondent  que  par  des  huées  et  des  mousquetades.  Le 
mardi  suivant  19,  l'ennemi  attaque  à  coups  de  canons 

(1)  Spon,  ou  plutôt  son  annotateur,  les  fait  partir  de  Genève  le 
i*''  lévrier  ;  mais  il  ne  faut  pas  oublier  que  le  calendrier  genevois 
était,  depuis  la  réforme  grégorienne,  en  retard  de  dix  jours  sur  le 
nôtre. 


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—   LVII   — 

le  faubourg  et  s'en  rend  maître  le  21.  Il  fait  ensuite 
sauter  la  porte  de  la  ville  au  moyen  d'un  pétard  «  et 
saccage  cette  misérable  ville  jusqu'à  enlever  les  pou- 
tres et  les  planchers,  les  portes  avec  leurs  serrures  et 
les  fenêtres.  Il  ne  restait  plus  que  de  mettre  le  feu 
partout  :  les  habitants  en  ayant  été  menacés,  s'engagent 
pour  se  garantir  d'un  tel  malheur  à  payer  la  somme  de 
2.000  écus.  »  (1). 

Bonvillars,  qui  commandait  au  château,  résiste  vigou- 
reusement pendant  quelques  jours,  après  quoi,  il  se  rend 
à  condition  de  sortir  vie  et  bagues  sauves.  Ce  devait 
être  le  27  février  (2). 

Pour  sûreté  du  payement  des  2.000  écus,  vingt-deux 
bourgeois  des  plus  notables  furent  menés  à  Genève  et 
gardés  prisonniers  l'espace  do  3  à  4  semaines  (3). 

Les  cruels  envahisseurs  restèrent  une  dizaine  de  jours 
à  piller  les  environs  et  ne  se  retirèrent  qu'après  avoir 
dévalisé  les  églises,  les  clochers  et  les  maisons. 

Le  11  septembre  1606,  l'église  de  la  Touvière  eut  le 
bonheur  de  recevoir  la  visite  de  François  de  Sales,  alors 
évêque  du  diocèse.  Le  saint  prélat  y  conféra  même  la 
tonsure  à  26  clercs  et  les  ordres  mineurs  à  10  d'entre 
eux.  Voici  les  noms  des  tonsurés  dont  la  plupart  appar- 
tenaient aux  meilleures  familles  du  paysdeGavot  :  André, 
fils  d'égrège  Jean  Boccard  ;  Pierre,  fils  d'égrège  Claude 
Laurent  ;  Pierre-Paul,  fils  d'égrège  F.  Ramel  ;  Jean- 

(Ij  Gautier  dans  Spon.  Piccard.  Histoire  de  Thonon^l^  p.  231. 

(2)  On  lit  dans  le  Registre  du  Conseil  de  Genève  du  18  (lisez  28) 
février:  «...  A  rapporté  le  parlement  du  château  d'Evian  et  la 
capitulation  qui  a  esté  faicte  avec  le  S'  de  Bonvillars.  Les  soldats 
ont  vendu  les  meubles  à  ceux  de  deçà  le  lac  jusqu'aux  cloz  (clous). 
Ils  ont  composé  tout  le  corps  de  la  ville  à  2.000  escus.  » 

(3)  Piccard,  Histoire  de  Thonon  et  du  Chahlais^  I,  p,  231 . 


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—   LVIII   — 

Jacques,  frère  du  précédent  ;  Jacques,  fils  d'égrége  An- 
toine Fernex  ;  Jean,  fils  de  J.-J.  Jordan  ;  F.,  fils  do  Jean 
d'Haute  ville  ;  Jean,  fils  de  F.  Guillot  ;  Jean,  fils  de  noble 
F.  Dunant  ;  Jean,  fils  d*égrège  B®  Tontemps  ;  Simon, 
fils  d'égrège  Cottet  Laurent  ;  Jean,  fils  d'égrège  Jacques 
Dufour;  J.-F.,  fils  de  N«  J.-F.  Pochât;  Claude,  fils 
d'égrège  Charles  de  Fernex  ;  Etienne,  fils  de  Paul  Cain  ; 
tous  d'Evian  ;  Jean,  fils  de  P.  Mestral  :  André,  fils 
d'Henri  Mollie  ;  F.,  fils  d'égrège  Jos  Tontemps,  de  la 
Touviére  ;  J.-F.  fils  d'égrège  Geo.  Magnin,  do  Bernex  ; 
Jacques,  fils  de  N^  F.  Ducrest  et  Claude,  fils  d'André 
Blanc,  de  S^^Paul  ;  Jean,  fils  de  Girard  Laurent,  de 
Neuvecelle  ;  Claude,  fils  de  J.  Chevallier,  de  Maxilly  ; 
Antoine,  fils  de  Claude  Girod,  de  Brenthonne;  Jean- 
Georges  et  Pierre,  fils  d'égrège  P.  Bataillouz,  d'Annecy- 
lo- Vieux  (1). 

A  cette  date,  l'église  de  la  Touviére  renfermait,  outre 
les  chapelles  nommées  plus  haut,  celle  de  S*^-Crépin  qui 
était  sans  recteur  ni  revenu.  L'église  dépondait  toujours 
du  curé  de  Neuvecelle  qui  la  desservait  par  un  vicaire  et 
continuait  de  percevoir  seul  les  dîmes  de  la  localité. 
Toutefois  cette  situation  devait  prendre  fin.  Les  habi- 
tants de  la  Touviére  obtinrent  d'abord  un  vicaire  résident 
à  titre  provisoire;  puis  le  18  décembre  1638,  un  vicaire 
perpétuel  soit  recteur  qui  fut  nommé  sur  la  présentation 
du  plébain  d'Evian  (sic  !)  ;  enfin,  le  14  juillet  1674,  les 
deux  pasteurs  d'Evian  et  de  Neuvecelle  s'étant  départis 
de  tout  droit  de  nomination  à  ce  bénéfice,  la  cure  de  la 

(1)  Archiv.  de  M.  Henri  Domenjoud.  —  Tous  les  autres  rensei- 
gnements cités  plus  haut  et  plus  loin  ont  été,  sauf  avis  contraire, 
puisés  dans  les  Archives  de  TEvéché. 


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—   LIX   — 

Touviére  devint  iodépendaute.  Nous  donnons  ici  la  liste 
des  prêtres  qui  l'ont  desservie  dés  1038. 

Pierre  Dunant  1638-1673. 

Pierre  Morand  15  juin  1674-1702,  22  octobre. 

André  Carraud  16  janvier  1703-1732,  28  juillet. 

François  Delczaire  1732-1734,  24  juillet. 

J.-F.  Frechet  173M747,  27  avril,  65  ans. 

Gabriel  Laurent  1747-1770,  21  novembre. 

Pierre  Dubouloz  6  février  1771-1789,  26  juin.  Etait 
d'Evian. 

Pierre,  fils  de  Pancrace  Thorens  1789-1793,  natif 
d'Y  voire. 

Le  dernier  curé  do  la  Touviére  appartenait  à  la  famille 
Thorens  qui  compte  de  nombreux  rameaux  à  Yvoire, 
Massongy,  Thonon,  Bons,  etc.  Lorsque  des  décrets 
odieux  imposèrent  à  tous  les  prêtres  un  serment  schis- 
matique,  le  vieux  curé  de  la  Touviére  —  il  avait  62 
ans  —  n'émigra  point,  paraît-il,  mais  se  tint  longtemps 
caché  au  sein  de  sa  famille.  Arrêté  enfin  le  27  novembre 
1797  sur  la  dénonciation  d'un  jacobin  du  nom  de  Novel, 
il  fut  traîné  de  Carougeà  Genève,  de  Genève  à  Chambéry , 
de  Chambéry  à  Carouge,  enfin  malgré  la  loi  révolution- 
naire elle-même,  malgré  son  grand  âge,  il  fut  transporté 
à  rîle  de  Ré,  où  le  vaisseau  atterrit  le  6  octobre  1799. 
Libéré  six  mois  plus  tard,  il  revint  en  Savoie  mourir 
dans  son  pays  natal. 

Le  clocher  de  la  Touviére  ayant  été  démoli  en  1794  et 
réglise  peu  de  temps  après,  l'autorité  ecclésiastique 
supprima  cette  paroisse  lors  de  l'établissement  du  culte 
et  l'unit  à  celle  d'Evian. 

C6>tte  église  mesurait  dans  sa  plus  grande  longueur 


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—    LX    — 

26  mètres  de  long  sur  16  de  large.  Elle  était  située  au- 
dessus  de  la  grandYue  dont  elle  était  séparée  par  le 
cimetière  et  au-dessous  d'un  étang  où  les  Comtes  de 
Savoie  nourrissaient  du  poisson  à  50  pas  des  murailles 
de  la  ville. 

II  ne  nous  reste  maintenant  que  quelques  mots  à  dire 
de  la  chapelle  de  la  Sainte-Trinité,  dont  nous  avons 
donné  Tacte  de  fondation  à  la  dernière  séance. 

Le  25  janvier  1406,  par  devant  le  notaire  Mermot 
Patenôtre,  Pierre  Jocerand  bourgeois  d*Evian  et  Jean- 
nette de  Chàtillon,  sa  femme,  voulant  consacrer  une 
partie  de  leur  fortune  à  la  gloire  de  Dieu  et  au  salut  de 
leurs  âmes,  fondent  dans  l'église  Sainte-Catherine  de  la 
Touvière  et  sur  un  autel  déjà  construit  du  côté  de  la 
montagne,  une  chapelle  en  Thonneur  de  la  Sainte-Tri- 
nité. 

Pour  la  dotation  de  cette  chapelle,  ils  donnent  une 
maison  avec  jardin  sise  à  la  Touvière,  au-dessous  de  la 
grand'rue,  une  vigne  d'une  pose  à  la  Chavanne,  une 
autre  de  trois  fossorées  chez  les  Bendats,  plus 
le  cens  annuel  d'un  muids  soit  de  12  coupes  de 
froment  et  de  60  sols,  pour  l'assurance  duquel  cens  ils 
hypothèquent  un  verger  de  trois  fossorées  qu'ils  possè- 
dent près  de  la  Touvière.  A  cette  riche  dotation  ils 
ajoutent  le  don  de  quelques  linges  et  de  quelques  usten- 
siles de  ménage. 

Enfin  les  fondateurs  prient  l'évêque  du  diocèse  de 
nommer  pour  premier  recteur  discret  Mermet  Astri  de 
Cuer,  prêtre  du  diocèse. 

Cette  chapelle  subsista  jusqu'à  la  Révolution. 

Le  patronage  passa  plus  tard  aux  nobles  Vial  (1482), 


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-*-   LXI   — 


puis  aux  d*Allinges,  seigneurs  de  Larringes  (1598),  etc. 
M.  Jules  Mercier,   député,   présenté  par   MM.    A. 
Duplan  et  A.  Folliet,  est  reçu  membre  effectif  de  l'Aca- 
démie Chablaisienne. 


Séance  du  11  Juillet  1898 

(présidence  de  m.  j.  guyon) 


M.  L.-E.  Piccard  continue  le  cours  de  ses  intéressan- 
tes communications  sur  les  Poids  et  Mesurées  en  Savoie. 

Jean  Veillet,  dit-il,  avait  affermé  .les  poids  et  mesures 
de  Tarentaise,  comme  vérificateur  de  la  région  (1559, 
Document  G). 

Mais  les  habitants  accoutumés  à  «  vendre  et  acheter 
et  à  payer  leurs  cens  et  servis  à  la  mesure  de  Moutiers  » 
d'après  la  pierre  de  la  Halle  de  la  dite  ville,  prétendent 
que  depuis  peu  elle  a  été  piquée  et  augmentée  (Doc.  7.) 

Les  autorités  et  la  municipalité  se  transportèrent  sur 
les  lieux  munis  de  bischets  et  mesures  dûment  marqués, 
qui  en  effet  n'étaient  pas  tout  à  fait  égaux  aux  mesures 
susdites.  On  nomma  deux  commissaires-experts  qui 
firent  établir  deux  eschandaulx  ou  bischets  à  la  juste 
mesure  avec  les  armoiries  de  Jérôme  de  Pelpergue, 
archevêque  de  Tarentaise.  (Ibid.)  Ordre  fut  donné  aux 
parties  de  s'y  conformer  et  au  marqueur  ou  vérificateur 
de  s'en  servir  à  peine  de  50  livres  (1500).  Jean  Veillet 
n'avait  pu  jouir  des  bénéfices  de  vérificateur  ou  marqueur 
durant  ses  contestations,  il  dut  néanmoins  payer  son 
fermage.  Il  est  molesté  dans  sa  charge  en  1562,  car  ii 


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—   LXII  — 

u*a  plus  la  confiance  du  public,  si  Ton  en  croit  certaines 
insinuations  ;  on  le  trouve  néanmoins  encore  marqueur 
ou  vérificateur  en  1572. 

Nous  continuerons,  aux  séances  prochaines,  l'exposé 
historique  des  Poids  et  Mesures  en  Savoie,  Ces  docu- 
ments prouvent,  d'une  manière  irréfutable,  qu'en  cette 
institution  comme  en  toutes  autres  du  même  genre, 
noire  petite  patrie  Savoyarde  a  toujours  marché  on 
tête  des  Etats  d'Europe. 


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^  Lxllt  — 

IL 

DONS  FAITS  k  L'ACADÉMIE  CHABLAISIENNE 


(Un  Astérisque  accompagne  le  nom  du  donateur 
quand  il  est  en  même  temps  l'auteur  de  l'ouvrage  cité). 


MM. 

A.  DuPLAN.  Histoire  de  la  Ville  de  La  Roche,  par  Grillet, 
édition  de  1867,  Annecy. 

Histoire  des  Communes  genevoises  de  Vandœuvres,  Col- 
long  es- Bellerive,  Cologny  et  des  Eaux-Vices,  par  Cl. 
Fontaine-Borgel,  Genève,  1896. 

Lettre  pastorale  de  TArehevêque  de  Tarentaise  sur  le 
serment  d'Egalité  et  de  Liberté. 

Des  affaires  de  l'Italie  et  de  V avenir  probable  de  V Europe, 
par  l'auteur  de  la  solution  des  grands  Problèmes,  Paris, 
Lecoffre. 

Lo  Stato  di  alcuni  archivi  communali  délia  provincia  di 
Suza.  Torino,  1896. 

*  L.-E.  PiccARD.  Les  Anciennes  Corporations  d*Arts  et 
Métiers  de  Thonon-les- Bains,  Thonon-les-Bains,  1898. 


PUBLICATIONS  PÉRIODIQUES 

Thonon.  —  VEcho  du  Léman,  journal  politique,  littéraire, 
commercial  et  agricole  du  Chablais  (paraissant 
le  samedi). 

—  La  Démocratie  Savoisienne,  journal  politique,  litté- 

raire, commercial  et  agricole  des  deux  départements 
de  la  Savoie  (paraissant  le  dimanche). 

—  Le  Messager  Agricole  de  la  Zone  franche  (paraissant 

le  samedi). 


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—  LXIV  — 

m. 

JÏIembFel  de  rj^?adéinie  Ghablai^ienne 


COMPOSITION  DU  BUREAU 
Président  :  M.  Albert  Duplan. 

^  ,  . ,     ,  l   M.  Jules  GuYON. 

Vice- Présidents  :  i    >r    r    t^    r» 

(     M.  L.-E.   PiCCARD. 

Secrétaire  perpétuel  :       M.  Léon  Quiblier. 
Secrétaire  Adjoint  M.  Marie-Maurice  Dantand. 

Trésorier:  M.  Léon  Pinget. 

,,.,,.  ,,  ,     .  ,   M.  le  Docteur  LocHON. 

Bibliothécaires  :  i   xm  n  n  ai         *     -. 

M.  Chamot,  Command*en  retraite. 


Président  d'Honneur 

s.  Exe.  le  comte  Amédée  de  Foras,  Grand  Maréchal  de 
la  Cour  de  S.  A.  R.  le  Prince  de  Bulgarie. 


Membres  d'Honneur 

MM.  BoLLATi  DE  Saint  Pierre  (le  baron  Frédéric- Emma- 
nuel), Directeur  des  Archives  Piémontaises,  à 
Turin   (Italie). 

Cartuywels  (Mgr),  Vice-Recteur  de  l'Université 
catholique  de  Louvain  (Belgique). 

Du  Bois-Melly  Charles,  à  Genève  (Suisse). 

DuFOUR- Verne  L.,  Archiviste,  à  Genève. 

Manno  (le  baron  Antoine),  Seci*étaire  de  la  Royale 
Députation  d'Histoire  nationale  à  Turin  (Italie). 

Mercier  J.,  Chanoine,  à  Annecy. 

MoNTET  (Albert  de),  à  Vevey  (Suisse). 

MuGNiER  François,  Conseiller  à  la  Cour  d'appel  de 
Chambéry,  Président  de  la  Société  Savoisienne 
d'histoire  et  d'archéologie. 


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—   LXV  — 

Poli  (le  vicomte  Oscar  de),  Président   du  Conseil 
héraldique  de  France,  Paris. 

RiDDER    (Alfred  de),  Vice-Président  de  la    Société 
littéraire  de  Louvain  (Belgique). 

RiTTER  Eugène,   Doyen  de  la  Faculté    des  Lettres 
Genève. 

Truchet,  Chanoine  à  S^-Jean-de-Maurienne. 

Van  Muyden,  Président  de  la  Société  d'histoire    de 
la  Suisse  Romande,  Lausanne  (Suisse). 

Membres  Effectifs  Résidants 

MM.    Anthoinoz    Alexandre,    Architecte,    à  Thonon-les- 
Bains. 

Bernaz  François,  ancien  avoué  à  Thonon-les-Bains. 

Berthet  (Fabbé  François),  Professeur  au  collège  de 
Mélan. 

Blanchard  François,  Docteur-Médecin,  à   Thonon. 

Bouquin  L.,  Propriétaire  à  Thonon-les  Bains. 

ChabertC,  Notaire  à  Thonon-les-Bains. 

Charmot  Félix,  Banquier,  à  Thonon-les-Bains. 

Charmot  Gustave,  Avocat,  à  Thonon-les-Bains. 

Costa  deBeauregard  (le comte  Jocelyn),  Paris. 

Dénarié  Alphonse,  Docteur-Médecin,  à  Thonon. 

DÉPiERRE  Alphonse,    Propriétaire   aux  Mâcherons 

(Allinges). 

DuBOULOz  Ferdinand,  Avocat  à  Thonon-les-Bains. 

Deruaz  César,  ancien    Receveur  des  Finances,  à 

Thonon-les-Bains. 

DuPLAN  Albert,    ancien    Magistrat,   ancien    Maire 
d'Evian-les-Bains. 

Engel-Gros,  au  château  de  Ripailles. 

Feige   h.  (l'abbé).  Aumônier  du    Pensionnat    des 
Frères  à  Thonon. 

GuYON  Jules,  Econome  des  Hospices,  à  Thonon. 

GiROD,  Principal  au  Collège,  à  Thonon. . 


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^  LxVl  — 

Jarre  Julien,  ancien  Avoué,  à  Thonon-les-Ëainâ. 

Marcoz  F.,  Inspecteur-Voyer  en  retraite  à  Thonon^ 
les-Baîns. 

Mercier  Jules,  Député,  à  Thonon-les-Bains. 

PiccARD  Louis-Etienne,  Aumônier  du  Collège,  à 
Thonon-les-Bains. 

PiNGET  Léon,  Banquier,  à  Thonon-les-Bains. 

PiRASSET,  ancien  Président  de  la  Société  Philanthro- 
pique Savoisienne  de  Paris,  Rentier  à  Thonon- 
les-Bains. 

Tredecini  de  Saint-Séverin  (le  marquis),  au  château 
de  Troches,  à  Douvaine. 

Valfrid  (le  Frère),  Directeur  du  Pensionnat  Saint- 
Joseph,  à  Thonon. 

Vernaz  André- Joseph,  Président  de  la  Société  d'Agri- 
culture de  l'arrondissement  de  Thonon-les-Bains. 

ViRY  (Baron  Amé  de),  à  Thonon-les-Bains. 

Yvoire  (le  baron  François  d'),  ancien  Député,  au 
château  d'Yvoire. 


Membres  Effectifs  non  Résidants 

MM.   Arcollières  (Eugène  d'),  à  Chambéry. 

Arminjon    Ernest,    ancien    Magistrat,   Avocat,    à 
Chambéry. 

Balliard  César,  notaire  à  Reignier. 

BÉRARD  Léon,  Clerc  de  Notaire,  à  Reignier. 

Blanchard  Jean,  Insp^  des  Forêts,  à  Gex  (Ain). 

BossoN  Franz,  Pharmacien,  à  S^-Jeoire. 

Bruchon  Marc,  Professeur  au  Collège   de  S'-Jean- 
d'Angely. 

Constantin  Aimé,  Secrétaire  honoraire  de  la  Société 
Florimontane,  à  Annecy. 

Descostes  François,  ancien  Président  de  l'Académie 
de  Savoie,  Avocat  à  Chambéry. 

Dubouloz  Jacques,  Juge  au  Tribunal  à  Thonon. 

Dunoyer  Norbert,  à  Juvigny. 


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—   LXVII   — 

DuvAL  César,  Sénateur,  Paris. 

Fernex  (lo  vicomte  Joseph),  à  Paris. 

Fernex   de  Mongex  (le   comte    Régis),    Avocat,   à 
Chambéry. 

FiNAS-DuPLAN  François,  ancien  Magistrat,  Avocat, 
à  Chambéry. 

Folliet  André,  Sénateur,  Paris. 

Gavillet  Léon,  Ingénieur,  à  Fillinges. 

Mathieu  Jean,  Ancien  Conseiller  de  Préfecture,  à 
Massortgy. 

Mathieu,  Capitaine  en  retraite,  à  Lugrin. 

RANNAUD,Archiprêtre  Curé  de  St-Julien  en-Genevois. 

RiGAUX,   Professeur  départemental  d'agriculture,  à 
M  en  de  (Lozère). 

TuRRETTiNi  François,  à  Genève. 

VuARNET  Emile,  Propriétaire,  à  Messery. 

Waag  g.,  Publiciste,  au  château  de  Gaillard,  près 
Annemasse. 

Membres  Agrégés 

MM.    BLONAY^le  baron   G.  de),  au  château  de  Grandson 
(Suisse). 

Blonay  (le  baron   Stéphane  de),   au   château  de  la 
Chapelle-Marin. 

BoiGNE  (le  vie*®  Benoît    de),    château   du  Bettonet 
(Savoie). 

Chambet  Joseph,  Imprimeur-éditeur,  à  Annemasse. 

Chamot,  Commandant  en  retraite  à  Thonon. 

Chappuisat,  Direcf  de  l'Union  électrique  à  Thonon. 

Dantand    Marie-Maurice,   ancien   vérificateur  des 
poids  et  mesures,  à  Thonon-les-Bains. 

DuBOULOz  André,  Imprimeur-éditeur,  à  Thonon. 

DuBOULOz  Ignace,  Notaire,  à  Annemasse. 

DuFRESNE  Edouard,  Docteur-Médecin,  à  Genève. 

Franc  Léon,  Chimiste,  à  Monthey  (Suisse). 


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—   LXVIII   — 

Froissard  Broissia  (le  vicomte  Sixte  de)^  au  châ- 
teau d'Allemand. 

Gerdaix  de  Sonnaz  (le  comte  Albert  de),  Ministre 

filénipotentiaire  de  S.  M.  le  Roi  d'Italie  àLisbonne 
Portugal). 

Jacquot  Lucien,  Juge  au  Tribunal  de  Thonon. 

Jordan  Elie,  Instituteur  à  Marin. 

Joseph  (R.  P.),  Directeur  de  FOrphelinat  de  Douvaine. 

Le  Marant  de  Kerdaniel  (baron).  Juge  au  Tribunal 
de  St-Jean-de-Maurienne. 

Patuel  (l'abbé),  précepteur  à  Y  voire. 

LocHON  Georges,  Docteur,  à  Thonon. 

Penz,  Instituteur  à  Morzine. 

PicuT  J.-B.,  ancien  Directeur  des  Chemins  de   fer 
d'Italie,  à  Massongy. 

QuiBLiER  Léon,  Architecte,  Conservateur  du  Musée, 
à  Thonon. 

QuiNCY  (comte  Alban  de),  au  château  de  Massongy. 

Rive  (Théodore  de  la),  à  Genève. 

RoLLiER  Louis,  Capitaine  d'Administ.  à  Vincennes. 

Vaudaux  Camille,  Notaire  ô  Thonon. 

Membres  Correspondants 

MM.   Bâtisse  Jules,  Architecte,  à  Thonon. 

Bruchet  Max,  Archiviste  départemental,  à  Annecy. 

Chavaz  (abbé  L.),  à  Genève. 

CoNVERSET,  Capitaine  au  133'  de  ligne,  à  Belley. 

DucLOZ,  Imprimeur-éditeur,  à  Moùtiers. 

Fontaine- BoRGEL,  à  Genève. 

Levet  François-Joseph-Aimé-Eugène,  Commandant 
du  Génie,  Avignon. 

Meynet  Jean -François,  Géomètre,  à  Bellevaux. 

PiNGET  Jos.,  Curé  àSerrava^p^'Thônes  (H*«-Savoie). 

Saillet  J.-C,  ancien  Professeur  à  Boêge. 

Tavernier  Ilippolyte,  Juge  de  paix,  à  Taninges. 

Thorens  Fernand,  Notaire,  à  Bons. 


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—   LXIX   — 

IV. 

SOCIÉTÉS  CORRESPONDANTES 

(  Académie  Salésienne. 
(  Société  Florimontane. 

A  n^TP  a  »  a  1  i  P^  \  Société  académique  religieuse  et 

AOSTEiiiaiiPj I  scientifique  du  duché  d'Aoste. 

Besançon Académie  des  Sciences  et  Arts. 

Bourg  (Ain) Société  d'Emulation. 

(  Académie  de  Savoie. 
Chambfry  )  Société  centrale  d'agriculture. 

1  Société  sav>oisienne  d'Histoire  et 

\      d  Archéologie. 

r.,,^„  \  Académie  des  Sciences,  Arts  et 

^^^''^ I      Belles-Lettres. 

GENÈVE  (Suisse) \Sociétéd'Histoireetd'Archéoh^ 

^  '  \  Institut  national  genevois. 

GiESSEN  (Allemagne)  .     Société  d  Histoire  naturelle  et  de 

médecine. 

nnFNORiP  i  Académie  Delphinale. 

GRENOBLE I  Société  de  statistique. 

f  AiTOAKiMP  /G..îoc.»^         S  Société  d'Histoire  de  la  Suisse 
Lausanne  (Suisse)  .  .  j      Romande. 

T  „  o,,^  \  Société  agricole  et  scientifique  de 

^^  ^^^ \      la  Haiite-Loire. 

Limoges Société  «  Le  Gay-Lussac.  » 

T^,,„.,,, /D  1  •       \        ^  Société  littéraire  de  F  Université 
LouvAiN  (Belgique) .  .  j      catholique  de  Louvain. 

MouTiERS Académie  de  la  Val  d'Isère. 

Neufchatel  (Suisse) .      Société  de  Géographie. 

p._,„  S  Le  Cyclamen,  Revue  des  Savo- 

^^^^^ )    yards  de  Paris. 


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—   LXX   — 


paiu  Avc  s  ^^^'  (f  (archéologie  religieuse  des 

^^^^^^ \  diocèses deVale'nce^Grenoble, etc. 

S'-Maurice  (Suisse).  .  j  ^""j^Jl^^^^^  "^^  ^'''''^- 

S'-Jean-de-Maurienne     Société  d  Histoire  et  d  Archéologie 

!  Renia  dej)utazione  sovra  glistudj 
ai  storia  patria. 
Begia  academia  délie  scienze. 

Upsala  (Norvège).  .  .      Institut  royal  géologique. 

Zurich  (Suisse)  ....      Société  des  Antiquaires. 


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MÉMOIRES 


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MÉMOIRE  I 


MESSERY-NERNIER 

&  LEURS  ENVIRONS 

Par  Emile  VUARNET 

Membre  de  l'Académie  Chablaisienne 


Ouvrage  couronné  par  la  Société  Florimontane 

Premier  prix  du  Concours  d'Histoire 

Annecy,  1898 


* 


ih 


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INTRODUCTION 


Affectionnant  par  dessus  tout  ce  pays  de  Messery 
et  du  Bas-Chablais,  berceau  de  mes  ancêtres,  j'ai 
cherché,  pendant  plusieurs  années,  avec  une  véri- 
table passion,  à  recueillir  tous  les  faits  historiques 
s'y  rapportant.  Cependant,  écrire  l'histoire  de 
Messery  n'était  pas,  au  début,  chose  facile  pour 
moi  :  peu  fortuné,  isolé  au  fond  d'une  commune 
rurale,  à  20  kilomètres  de  tout  centre  intellectuel, 
sans  appui,  sans  guide,  je  trouvais  la  Mairie  et  la 
Cure  presque  sans  archives,  le  village  sans  ancienne 
famille  noble  ou  bourgeoise,  l'histoire  du  lieu 
inconnue  aux  plus  savants.  Néanmoins  je  ne  perdis 
pas  courage.  Reçu  membre  de  T Académie  Cha- 
blaisienne,  je  profitai  de  sa  bibliothèque  ,  je  par- 
courus ainsi  toutes  les  publications  des  sociétés 
savantes  de  la  région  et  les  travaux  des  auteurs 
ayant  traité  du  pays.  Je  m'adressai  aux  Archives 
de  Turin,  de  Grenol)le  ;  je  visitai  celles  de  Genève, 
de  Lausanne,  du  département  et  de  l'évêché  d'An- 
necy. Je  fouillai  les  archives  de  nos  familles  de 


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cultivateurs,  je  recueillis  les  légendes  et  les  tradi- 
tions. 

Entre  temps,  je  m'imprégnai  des  recherches  de 
M.  l'abbé  Ducis,  et,  suivant  son  exemple,  je  me 
mis  à  examiner  notre  sol  et  les  débris  antiques 
qu'il  renferme,  à  les  comparer  avec  ceux  conservés 
dans  nos  musées.  De  ce  travail  continu  durant  sept 
anhées  il  est  résulté  cet  ouvrage. 

Messery,  le  1*'^'  Février  1899. 

E.  VUARNET. 


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CHAPITRE  ^^ 


Situation  de  Messery  et  de  Nernier,  limite  de  leur  territoire, 
nature  du  sol. —  Aperçu  géologique,  époque  glaciaire,  formation 
du  Léman.  —  Ses  différents  niveaux. 


Messery  et  Neroier  dont  nous  avons  entrepris  de 
tracer  l'histoire,  sont  deux  communes  limitrophes, 
situées  sur  la  rive  méridionale  du  lac  Léman,  à  peu 
prés  à  égale  distance  de  Genève  et  do  Thonon. 

La  commune  de  Messery  est  la  plus  importante 
(636  habitants)  ;  bâtie  sur  une  hauteur,  on  aperçoit  au 
loin  ses  maisons  et  son  clocher. 

Nernier,  ancienne  résidence  des  seigneurs  féodaux, 
aux  vieilles  maisons  pittoresquement  groupées  au  bord 
du  lac,  est  un  petit  village  de  200  habitants  pour  la 
plupart  pêcheurs  ou  bateliers. 

Le  territoire  de  Messery  et  de  Nernier  est  borné  par 
celui  des  communes  dTvoire,  d*Excenevex,  de  Massongy 
et  de  Chens. 

Au  point  de  vue  géologique  leurs  terrains  appartien- 
nent à  répoque  glaciaire.  D'après  l'opinion  des  géolo- 
gues, cette  époque  a  été  caractérisée  par  la  formation 
d'immenses  glaciers  qui  couvraient  notre  région  du 
sommet  des  Alpes  jusqu'à  Lyon.  Ces  glaciers  auraient 


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—  6  — 

fait  en  grand  ce  que  ceux  du  Mont-Blanc  font  encore 
de  nos  jours,  ils  auraient  accumulé  sur  leur  parcours 
ces  amas  immenses  de  boues  argileuses,  de  sables,  de 
cailloux  roulés,  de  blocs  de  rochers  dont  se  compose 
notre  sol. 

Ces  blocs  de  rochers  quelquefois  énormes,  appelés 
blocs  erratiqiœs,  sont  formés  de  roches  diverses  (granits, 
serpentines,  micachistes,  lias,  poudingues),  ils  ont 
considérablement  diminué  depuis  un  demi-siècle,  grâce 
aux  progrès  de  la  culture  et  à  leur  emploi  pour  la  cons- 
truction. Ils  se  trouvent  encore  en  grand  nombre  le  long 
des  rives  du  lac,  principalement  à  Yvoire. 

D'après  M.  Tlngénieur  Delobecque,  auteur  de  la  carte 
hydrographique  du  lac,  voici  quel  serait  par  ordre 
chronologique  la  succession  des  phénomènes  qui  ont 
trait  à  la  formation  du  Léman  : 

1»  Plissement  des  Alpes  et  creusement  de  la  vallée  du 
lac  ; 

2°  Première  période  glaciaire  et  comblement  de 
cette  vallée  par  les  alluvions  anciennes  ; 

3»  Retraits  des  glaciers  et  creusement  d'une  nouvelle 
vallée  dans  ces  alluvions  ; 

4»  Affaissement  des  Alpes  et  transformation  de  la 
vallée  en  un  lac,  dont  le  niveau  dépassait  de  30  mètres 
le  niveau  actuel  ; 

5<>  Deuxième  et  troisième  période  glaciaire,  comblant 
en  partie  le  lac  (moraines  dTvoire,  caractérisées  par  un 
amas  considérable  de  blocs  erratiques)  ; 

G«  Comblement  du  lac  par  les  affluents  et  abaissement 
de  son  niveau  par  suite  de  l'approfondissement  du  lit 


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de  rémissaire  daos  les  alluvions  anciennes  de  la  Bâtie, 
en  aval  de  Genève  (1). 

Dans  le  territoire  qui  nous  occupe,  j'ai  constaté 
l'exactitude  de  rabaissement  du  lac:  l''  au  pré  des 
Lombardes  (Nernier).  dont  le  sous-sol  renferme  des  gra- 
viers roulés,  mélangés  à  des  fragments  do  tuiles  à  re- 
bords do  l'époque  romaine  ;  il  en  est  de  même  à  la 
pointe  de  Messery  (champ  Servage).  Cette  couche  do 
graviers  est  située  à  plus  d'un  mètre  au-dessus  des  plus 
hautes  eaux  du  lac. 

Quant  aux  traces  que  nous  a  laissé  le  grand  lac  pri- 
mitif, nous  les  retrouvons  au  sommet  des  champs  de  la 
Fontaine  et  de  Verdet (Messery)  en  un  banc  de  graviers 
d'un  mètre  d'épaisseur  environ,  reposant  sur  l'argile 
glaciaire,  des  coquillages  se  trouvent  mêlés  au  sable. 


(1)  Revue  Savoisienne,  1895,  page  147,  compte-rendu  des  séances 
de  la  Société  de  Physique  et  d'Histoire  naturelte  de  Genève. 


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CHAPITRE   IL 


Temps  préhistoriques.  —Stations  lacustres  de  Tàge  de  la  pierre 
et  du  bronze.  —  Traditions  locales.  —  Anciens  cimetières.  — 
Tombeaux.  —  Objets  trouvés.  —  Religion.  —  Autels.  —  Der- 
niers souvenirs.  —  Mots  celtiques  conservés  dans  notre  patois. 


La  situation  de  Messery  et  de  Nernier  sur  les  bords 
d'uQ  des  plus  grands  lacs  de  l'Europe,  dans  une  contrée 
fertile,  alors  très  boisée  et  très  giboyeuse,  dut  y  retenir 
les  premières  peuplades  qui  se  hasardèrent  dans  ces 
parages.  Soit  pour  pêcher  plus  facilement,  soit  pour  se 
mettre  à  Tabri  des  bêtes  féroces,  ces  hommes  plantèrent 
des  pieux  le  long  du  rivage  et  sur  ces  pieux  ou  pilotis 
élevèrent  des  plates-formes,  puis  des  cabanes.  Les  ves- 
tiges de  ces  établissements  existent  encore  sur  nos  rives 
à  une  certaine  distance  du  bord,  on  les  désigne  sous  le 
nom  de  stations  lacitst7*es. 

La  commune  de  Chens  est  la  mieux  partagée  de  toute 
la  cote  Savoisienne,  on  y  rencontre  5  stations,  ce  sont  : 

1°  Station  du  moulin  ou  de  la  vi  à  l'àne  (près  Her- 
mance)  ; 

2°  Station  de  la  fabrique  Canton  (Orphelinat  S*-Joseph); 

3«  Station  du  creux  de  Tougues  ; 

4^  Station  du  château  de  Beauregard  ; 

S**  Station  de  la  Veurze,  en  face  du  ruisseau  de  ce  nom 


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—  9  — 

et  qui  sert  de  limite  entre  les  territoires  de  Messery  et 
de  Chens. 

Beaucoup  d'objets  provenant  de  ces  stations  ont  été 
collectionnés  par  M.  le  comte  Jocelyn  Costa,  en  son 
château  de  Beauregard,  et  par  M.  Carrier,  à  Tougues  ; 
d'autres  figurent  au  musée  de  Lausanne. 

Sur  la  commune  de  Messery  se  rencontrent  deux 
stations  : 

lo  Station  de  la  Pointe,  en  face  la  propriété  Barbier, 
sous  4  mètres  d'eau,  les  poteries  sont  caractéristiques 
de  l'époque  du  bronze  (1)  ; 

2°  Une  autre  station  est  située  à  peu  de  distance  de 
la  précédente,  au  bord  de  la  grève,  en  face  la  propriété 
Faramaz;  les  pilotis  au  nombre  d'une  trentaine  sont 
rongés  par  les  vagues  et  reslent  quelquefois  à  découvert 
aux  basses  eaux. 

Sur  la  commune  de  Nernier  existent  deux  stations  : 

1°  Station  du  pré  de  la  Croix  ou  des  Lombardes,  à 
600  mètres  à  l'Ouest  du  village  et  à  150  mètres  du 
bord.  On  y  a  recueilli  d'après  Revon  une  longue  épingle 
à  tête  sphérique  et  percée  de  4  trous  (musée  d'Annecy), 
une  douzaine  d'épingles  agglutinées  dans  une  matière 
charbonneuse  (id.),  d'autres  épingles  de  diverses  di- 
mensions, quelques-unes  à  boucle,  un  petit  couteau  à 
soie,  un  anneau  de  bronze  avec  boule  de  suspension, 
une  pointe  de  lance,  des  fusaioles  en  terre,  un  anneau 
en  terre  cuite,  des  torches-supports,  des  débris  de  vases 
(collection  Thiolly  et  collection  de  Westerweler).  En 
1870,  un  pêcheur  de  Messery  y  trouvait  une  épée  en 

(1)  La  Haute-Savoie  avant  les  Bomains,  par  M.  L.  Revon,  1875. 


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—  10  — 

bronze,  cet  objet  a  été  vendu  à  Genève  (I).  —  En  1885, 
des  amateurs  do  Genève  y  pratiquèrent  des  fouilles 
fructueuses. 

D'après  Troyon  (2)  cet  établissement  appartiendrait  à 
l'âge  du  bronze  (3),  cet  auteur  a  reconnu  qu'un  des  pieux 
arrachés  de  la  vase  portait  des  entailles  faites  avec  la 
hache  de  bronze.  Cette  station  compte  de  nombreux 
pilotis  de  2  à  5  pieds  de  longueur  sous  12  pieds  d'eau  en 
hiver  ; 

2°  Station  de  Nernier.  On  voit  en  face  de  Nernier,  dit 
Troyon  (4)  et  à  une  profondeur  de  six  pieds  par  les 
basses  eaux,  quelques  piieux  d'un  diamètre  de  près  d'un 
pied;  les  pilotis  entrent  dans  la  terre  ferme  où  ils  ap- 
paraissent dans  le  lit  d'un  petit  canal  dont  le  filet  d'eau 
se  convertit  en  torrent  par  les  grandes  pluies  ;  on  en  a 
même  découvert  en  creusant  un  puits  au  couchant  de 
l'église  do  Nernier,  à  une  distance  de  55  pas  de  la  grève. 
Il  résulte  de  la  disposition  de  ces  pieux  que  le  rivage 
pénétrait  plus  avant  dans  les  terres. 

Le  long  de  la  rive,  on  a  recueilli  (5)  sous  deux  mètres 
d'eau  un  marteau  foré  en  pierre  polie  (musée  d'Annecy) 
de  petites  haches  en  serpentine,  des  lames  de  silex,  un 
manche  pour  scie  en  silex,  formé  d'une  pierre  allongée 

(1)  Communiqué  par  MM.  Louis  et  Jules  Duborgel,  au  Cret 
(Messery). 

(2)  Frédéric  Troyon.  Habitations  lacustres,  18G0,  i)age  127. 

(3)  On  divise  commuuément  Tépoque  préhistorique  en  trois 
âges  :  rage  de  la  pierre,  Tàge  du  bronze  et  Page  du  fer.  L'âge  de 
la  pierre  désigné  ainsi  parce  que  les  hommes  ne  se  servaient  alors 
que  d'outils  en  pierre  est  le  plus  ancien,  Tàge  du  fer  au  contraire 
est  relativement  plus  récent,  il  serait  contemporain  de  la  con- 
quête romaine. 

(4)  F.  Troyon.  Habitations  lacustres,  page  80. 

(5)  Revon.  La  Haute-Savoie  avant  les  Romains. 


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—  11  — 

et  à  rainure,  de§  fusaioles  en  pierre,  une  pendeloque 
formée  d'une  pierre  longue  et  percée  ;  des  os  travaillés 
on  manches  eten  spatules  (musée  d'Annecy),  (collection 
Thiolly  et  surtout  collection  Westerweller).  Cette  sta- 
tion appartient  à  Tàge  de  la  pierre. 

Il  existe  encore  d'autres  pilotis,  sous  3  ou  4  mètres 
d'eau,  en  avant  du  château  de  Nernier  et  de  la  tanne- 
rie (1)  ;  des  piquets  brûlés  par  le  bout  ont  été  trouvés  en 
1864  vers  l'extrémité  de  l'estacade  ou  jetée  élevée  pour 
abriter  les  travaux  du  port  d  escale  (2). 

A  Yvoire,  une  petite  station  existe  en  face  des  murs 
du  jardin  du  presbytère. 

Sur  la  commune  d'Excenevex  une  station. 

Station  du  moulin  Paquis  ou  Riguet,  à  150  mètres  du 
bord,  sous  3  mètres  d'eau,  il  existe  un  fond  peuplé  de 
pilotis  et  semé  de  pierres,  etc (3). 

Il  est  à  remarquer,  dit  Frédéric  Troyon  (4),  que  dans 
la  contrée  d'Y  voire  à  Ilermance,  les  riverains  attribuent 
les  pilotis  du  lac  à  d'anciennes  habitations  construites 
au-dessus  de  l'eau  dans  le  but  de  se  mettre  à  l'abri  des 
bétes  fauves  dont  le  pays  était  couvert.  Quand  on  s'in- 
forme de  l'origine  de  cette  explication  qui  pourrait  avoir 
été  popularisée  par  des  publications  récentes,  la  réponse 
constante  est  que  «  les  anciens  disaient  déjà  cela.  » 
Etait-ce  une  supposition  qui  devançait  les  inductions 
scientifiques,  ou  bien  la  tradition  est-elle  réellement  an- 
tique ?  C'est  ce  qu'il  serait   difficile  de  décider.  Cette 

(1)  Cîommiiniqué  par  différents  habitants  de  Nernier. 

(2)  C.-A.  Ducis.  Revue  Savoisienne^  1865,  page  97. 

(3)  L.-E.  Piccard.  Histoire  du  Chablais^  vol.  I. 

(4)  Troyon.  HaU talions  lacustres,  page  127. 


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—  12  — 

tradition  serait  d'autant  plus  surprenante  que  toutes 
ces  habitations  paraissent  avoir  été  détruites  pendant 
rage  du  bronze.  Je  n'ai  encore  trouvé  nulle  part  ailleurs 
dans  la  Suisse  occidentale  cette  opinion  répandue  chez 
les  riverains  des  lacs,  qui  voient  plutôt  dans  les  pilotis 
des  restes  de  forêts  submergées  ou  des  digues  qui  au- 
raient été  recouvertes  par  un  exhaussement  des  eaux.  > 

Les  bourgades  lacustres  (1)  étaient  quelquefois  fort 
grandes,  celle  de  Morges  couvrait  plus  de  cent  quatre- 
vingt  mille  pieds  carrés,  les  ossements  de  chat,  trouvés 
dans  les  ruines  de  ces  constructions  prouvent  qu'elles  ne 
manquaient  pas  d'un  certain  confortable,  des  fruits 
séchés,  pommes  et  poires  s'y  rencontrent  encore.  Les 
débris  de  bœuf  recueillis  dans  les  stations  lacustres  du 
lac  du  Bourget  ont  permis  de  reconnaître  à  M.  de  Mor- 
tillet,  que  la  race  bovine  qui  habitait  la  Savoie  pendant 
l'âge  du  bronze  avait  la  plus  grande  analogie  avec  notre 
race  tarine;  des  traces  de  fromage  qui  y  ont  été  retrou- 
vées viennent  confirmer  le  dire  de  Strabon  «  que  le  fro- 
mage était  un  des  principaux  aliments  des  Celtes  ou 
Gaulois  >  (2).  On  a  même  retrouvé  dans  la  station  la- 
custre des  Eaux-Vives,  des  scories  renfermant  des  par- 
celles de  bronze,  des  moules,  des  haches,  preuve  que  les 
objets  ouvrés  de  l'âge  du  bronze  se  fabriquaient  sur  les 
lieux  mêmes. 

A  quelle  époque  ces  habitations  ont-elles  été  détruites 
ou  abandonnées?  A  cette  question  Troyon  répond  en 
citant  le  texte  de  Suidas  (3),  énumérant  les    moyens 

(1)  Blavignac.  Etudes  sur  Genève^  1872,  volume  1,  page  68. 

(2)  Revue  Savoisienne.  1890,  page  20^. 

(3)  Suidas.  (Scriptores  rerum  galliae  I,  821. 


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^13- 

qu*employait  le  César  Caius  pour  détruire  les  villages 
insulaires  des  Âllobroges;  cepeudant  si  les  RomaiDS  eu 
détruisirent  la  majeure  partie,  il  semble  que  ce  mode 
d'habitation  se  soit  conservé  tout  au  moins  à  Genève 
jusqu'au  moyen-àgo.  On  voit  encore  au  musée  Rath  un 
vieux  retable  d'autel  qui  se  trouvait  avant  la  Réforme 
dans  la  chapelle  des  Machabées  (1),  il  représente  la 
pêche  miraculeuse  du  lac  de  Tibériade  mais  transportée 
sur  le  lac  de  Genève;  on  voit  sur  le  dernier  plan,  les 
Voirons  et  le  Salève,  puis  le  lac;  devant  Genève,  une 
ligne  de  pieux  se  trouve  à  l'entrée  du  port,  à  droite  se 
trouve  représenté  un  quartier  de  la  ville  formé 
de  maisons  bâties  sur  pilotis,  cette  peinture  date  du 
moyen-âge  (1415).  Mais  les  objets  recueillis  dans  nos 
stations  lacustres  se  rapportent  tous  à  Tépoque  celtique, 
les  peuplades  qui  les  habitaient  faisaient  donc  partie 
de  la  nation  Gauloise  et  plus  spécialement  de  la  confé- 
dération des  Allobroges  dont  parle  César  dans  ses  com- 
mentaires; ils  étaient  établis  sur  le  versant  des  Alpes  à 
tmvers  la  Savoie  et  le  Dauphiné  actuels.  Genève,  Gre- 
noble et  Vienne  étaient  leurs  villes  principales.  Comme 
chez  tous  les  Gaulois,  les  habitations  étaient  bâties  en 
bois  et  treillages  garnis  d'argile  ;  c'est  ce  qui  explique 
que  sur  terre  elles  aient  disparu  sans  laisser  de  traces  ; 
seules,  les  constructions  bâties  sur  l'eau  se  sont  conser- 
vées à  l'abri  des  atteintf)S  des  hommes  et  des  agents 
atmosphériques. 

Anciens  oimetiôres.  —  Tombeaux 
Si  nos  peuplades  riveraines  habitaient  sur  le  lac,  elles 

(  I  )  Mémoires  et  documents  de  la  Société  â^ histoire  et  d'archéologie 
de  Genève,  tome  IV,  page  43.  La  planche  llï  de  ce  volume  repré- 
sente la  peinture  en  question. 


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-  14  — 

avaient  par  contre  leurs  lieux  de  sépulture,  leurs  ter- 
rains sacrés,  sur  la  terre  ferme.  Les  corps  étaient  géné- 
ralement placés  dans  des  tombeaux  en  dalles  ou  pierres 
plates  des  champs.  On  en  a  trouvé  un  certain  nombre 
dans  le  pays,  presque  tous  ont  été  découverts  sur  un 
point  de  la  côte  situé  en  face  des  stations  lacustres 
dont  nous  avons  donné  plus  haut  la  description. 

Ainsi  à  Chens,  1°  au  lieu  dit  La  Graie,  au-dessus  de 
la  station  lacustre  de  la  vi  à  l'âne,  des  tombes  ont  été 
découvertes  vers  1890  en  extrayant  du  sable,  elles  ren- 
fermaient des  armes  anciennes  collectionnées  par  M.  le 
docteur  Mayor,  d'Hermance(l); 

2o  Sur  le  plateau  de  Veretre,  au  lieu  dit  sur  les  Plans, 
des  tombes  ont  été  également  trouvées  en  1869,  par 
MM.  Revon  et  Mayor  (2);  ces  tombes  sont  situées  au- 
dessus  de  la  station  de  la  fabrique  Canton,  aujourd'hui 
Orphelinat  du  R^  Père  Joseph.  M.  Mayor  découvrit  à 
30  centimètres  de  profondeur  une  tombe  en  dalles  ren- 
fermant un  squelette  de  femme  replié  (champ  Mortillet) 
et  M.  Revon  trouva  une  hache  en  pierre  polie,  puis  do 
nombreuses  tombes  en  dalles  de  schiste  micacé  à  40 
centimètres  de  profondeur  ; 

3o  Entre  Vérancy  et  la  mairie  de  Chens,  au-dessus  de 
la  station  lacustre  de  Tougues  dans  une  carrière  de 
graviers,  on  trouve  souvent  des  corps.  Une  épée  recueil- 
lie dans  une  de  ces  tombes  a  été  acquise  par  M.  le  comte 
J.  Costa  de  Beauregard; 

4«  Au-dessus  du  château  de  Beauregard  et  de  la  sta- 

[\)  Mémoires  de  la  Société  (THist.  de  Ojenève^  1892.  —  Recher- 
ches archéologiques  sur  les  vieux  cimetières  et  tombeaux  isolés, 
trouvés  à  Hermance,  Douvaine,  par  Réber. 

(2)  Revon.  La  Haute-Savoie  avant  les  Romains, 


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^  ib  - 

tion  lacustre  du  même  nom,  au  lieu  dit  la  Grage,  des 
tombes  et  des  armes  ont  été  découvertes  il  y  a  une 
trentaine  d'années.  En  mai  1897,  des  ouvriers  creusant 
les  fondations  de  la  maison  Nazard  mirent  à  jour  une 
dizaine  de  tombeaux  en  dalles  brutes,  disposés  côte  à 
côte  et  par  couches  superposées,  les  plus  profonds  étaient 
situés  à  1°»20,  aucun  objet  n'y  a  été  trouvé,  mais  les 
crânes  des  squelettes  étaient  d'une  épaisseur  peu  com- 
mune (1),  un  de  ces  tombeaux  de  moindre  dimension, 
renfermait  le  corps  d'un  petit  enfant. 

Tous  ces  cimetières  sont  situés  dans  des  endroits 
sablonneux.  La  Grage  et  Lagraio  sont  des  termes  patois 
servant  à  désigner  un  terrain  graveleux.  Il  semble  que 
nos  populations  lacustres  avec  leurs  instruments  primi- 
tifs aient  choisi  de  préférence  ces  terrains,  qui  se  lais- 
saient plus  facilement  entamer.  Aussi  le  territoire  de  la 
commune  de  Messery  qui  est  de  nature  argileuse  se 
trouve  relativement  pauvre  en  tombeaux.  Un  seul  a  été 
trouvé  au  lieu  dit  le  Dezé  (champ  Duret),  sur  la  pente 
qui  regarde  le  ruisseau.  Ce  lieu  se  trouve  au-dessus  de 
la  station  lacustre  de  la  Pointe. 

Sur  Nernier.  —  1^  Des  tombes  celtiques  ont  été  dé- 
couvertes sur  la  propriété  de  M.  le  Comte  d'Antioche 
en  1849.  (2) 

2o  Au  lieu  dit  Pierre  Thallin  ou  Pertalin,  ou  a 
trouvé  vers  1838  en  opérant  un  défonçage  pour  de 
la  vigne,  une  trentaine  de  cadavres  placés  sur 
trois  lignes  parallèles,  les  hommes  étaient  tous  d'une 

(1)  D'après  M.  Hovelacque,  directeur  de  Técole  d'anthropologie 
de  Paris,  les  crânes  à  structure  épaisse  appartiennent  à  la  race 
celtique. 

(2)  Mémoires  de  la  Société  (THist,  et  d*Arch.  de  Genève.  Tome  VI. 
Séance  du  12  avril  1849. 


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-  16  - 

haute  stature,  les  mâchoires  avaient  toutes  leurs  dents, 
dont  rémail  était  parfaitement  conservé  quoique  les  os 
fussent  vermoulus  (1),  on  y  a  également  trouvé  des 
tombes  en  dalles  de  grès-schisteux.  M.  l'abbé  Ducis  qui 
tenait  ces  renseignements  de  M.  Jacques-Marie  Duchêne, 
de  Nernier,  a  improprement  placé  ce  cimetière  sur  le 
plateau  d'Essert.  D'après  les  indications  de  plusieurs 
personnes  de  la  localité  le  vrai  lieu  est  Pertalin  (2)  entre 
Nernier  et  Essert,  à  deux  cents  mètres  au-dessus  de  la 
fontaine  defMarsille. 

Sur  Excenevex.  —  1<>  Deux  tombeaux  en  dalles  ont 
été  trouvés  en  1893  au  lieu  dit  vers  le  Ouà,  ils  renfer- 
maient des  squelettes,  mais  aucun  objet  n'y  a  été  dé- 
couvert, un  de  ces  tombeaux  était  très  grand  et 
contenait  deux  corps  (3). 

2<»AuxMarteyrets.  —  Au-dessus  de  la  station  lacustre 
du  moulin,  des  tombes  en  dalles  de  grès-schisteux  ont 
été  découvertes  en  1874  (4). 

3^  A  Cérési.  —  Des  tombeaux  en  dalles  ont  été  trouvés 
il  y  a  trente  ans  par  feu  M.  le  Capitaine  de  Marcley, 
propriétaire  de  ce  domaine  (5). 

Objets  celtiques  trouvés  dans  le  pasrs 

A  part  ceux  recueillis  dans  les  stations  lacustres,  et  que 
nous  avons  déjà  signalés,  les  objets,  armes  ou  ustensiles 
celtiques  trouvés  dans  le  pays  sont  rares,  c'est  princi- 
palement dans  les  terrains  légers,  à  Chenset  à  Dou  vaine, 
où  l'on  a  recueilli  le  plus  d'objets  de  cette  époque. 

(1)  Revue  Savoisienne,  1865,  pages  91  et  97. 

(2)  Cîommuniqué  par  feue  M"*  Catherine  Riyollet. 
(3J  Cîommuniqué  par  MM.  Servage,  à  Excenevex. 

(4)  Revue  Savoisienne^  1874,  page  16. 

(5)  Cîommuniqué  par  M.  Jean  Champpury,  à  Chevilly. 


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—  17  — 

M.  le  Comte  J.  de  Costa,  dans  sa  riche  collec- 
tion préhistorique,  conserve  une  lamelle  de  silex  longue 
de  onze  centimètres,  trouvée  dans  un  champ  de  son 
domaine  de  Boauregard  (1). 

Dans  la  même  commune,  au  lieu  dit  sur  les  Plans, 
M.  Revon  découvrait  en  1869  une  hache  en  pierre  qui 
est  au  musée  de  S*-Germain,  prés  Paris. 

Au  lieu  dit  sur  tes  Porches,  prés  du  ruisseau  du 
moulin,  on  a  trouvé  en  1854  un  grand  vase  rappelant 
la  grosse  poterie  lacustre  de  Tàge  du  bronze  (2),  à  Dou- 
vaine,  on  a  découvert  en  1838,  une  hache  à  rebord  et  à 
talon,  4  fragments  de  faucilles,  une  lame  de  poignard, 
plusieurs  tronçons  d'épée,  le  tout  en  bronze  (musée  de 
Genève)  (3). 

Religion,  prêtres,  autels,  mots  celtiques  conservés 
dans  notre  patois 

D'après  les  historiens  de  l'antiquité,  c'est  environ 
15  siècles  avant  notre  ère  que  les  Gaulois  prirent  posses- 
sion de  la  Gaule  ;  comme  la  pure  tradition  du  peuple 
hébreu,  la  religion  druidique  enseignait  l'immortalité 
de  l'àme  et  l'adoration  d'un  dieu  suprême  qu'ils  appe- 
laient Esus. 

Le  principal  attribut  d'Esus  était  le  chêne,  arbre 
majestueux  et  puissant  qui  représentait  la  force,  l'éléva- 
tion du  Dieu  inconnu  et  sur  lequel  on  recueillait  le  gui, 
toujours  vert,  emblème  de  l'immortalité. 

Les  prêtres  gaulois  se  divisaient  en  deux  classes,  les 
druides  et  les  eubages  ou  vates.  Ces  derniers,   d'après 

(1)  Revon.  La  Haute-Savoie  avant  les  Romains, 

"  I  Ibidem. 

Ibidem. 

2b 


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Ëlavîgnac  auraient  laissé  leur  nom  au  Plan  les  Ouattes, 
près  Genève.  Nous  avons  à  Excénevox  les  champs  appe- 
lés vers  le  Ouà  ;  à  Messery,  les  terrains  aujourd'hui 
boisés,  appelés  autrefois  la  Tateft  Ouan  (1),  c'est-à-dire 
la  Tate  au  Yuan,  la  lande  au  Yuan,  ces  noms  se  rap- 
procheraient aussi  du  Yuodan,  dieu  secondaire  ;  mais 
nous  le  reconnaissons,  tout  cela  est  bien  incertain. 

Considérant  la  nature  comme  une  émanation  de  l'être 
suprême,  les  Gaulois  et  plus  spécialement  les  Allobroges 
entouraient  d'un  culte  spécial  les  eaux,  les  sources,  les 
forêts,  les  rochers.  Nos  plus  gros  blocs  erratiques  por- 
tent encore  de  nos  jours  un  nom  particulier.  Quelques- 
uns  portaient  le  nom  d'une  divinité.  C'est  ainsi  que  la 
pierre  à  Niton  à  Genève  et  le  champ  Niton  à  Coudrée 
seraient  un  dernier  souvenir  du  Neptune  Gaulois.  Sous 
Messery,  la  pierre  de  Champ-Marta  pourrait  dériver  de 
Martin  ou  de  Martine,  qui  d'après  Revon  était  donné  à 
un  démon  apparaissant  sous  la  forme  d'une  martre. 
Citons  encore  la  pierre  à  Martin,  à  Ballaison,  et  les 
champs  de  l'Essert-Martin,  à  Messery. 

A  Yvoire,  la  pierre  d'Equarro,  située  devant  le  châ- 
teau, tire  son  nom  de  ce  qu'elle  a  une  de  ses  faces  coupée 
à  angle  droit,  c'est-à-dire  d'équerre,  mais  la  légende 
citée  par  Blavignac  à  son  sujet  est  inconnue  dans  le 
pays. 

Entre  Yvoire  et  Excénevex,  près  de  la  deuxième  en- 
ceinte du  château  de  Rovery  (Ravorée),  j'ai  remarqué 
4  blocs  cubiques  d'environ  un  mètre  d'hauteur,  disposés 
en  carré  et  espacés  chacun  d'environ  soixante  centi- 

(1)  Le  V  est  souvent  remplacé  par  un  0  en  patois.  Ainsi  le 
Vuargne,  nom  patois  de  Tépicéa  maie,  se  prononce  Ouargne. 


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—  19  — 

métros,  ils  sont  situés  sur  un  tertre  ;  à  une  dizaine  de 
mètres  en  contre  bas,  un  gros  bloc  en  forme  de  table, 
ayant  environ  six  mètres  de  long  sur  deux  de  large, 
semble  avoir  roulé  de  ce  lieu.  C'était  peut-être  la  cou- 
verture d'un  autel  druidique,  dont  les  4  pierres  étaient 
les  bases. 

Sur  la  route  d'Y  voire  à  Excénevex,  à  trois  ou  quatre 
cents  mètres  d'Y  voire,  j'ai  remarque  à  côté  de  vieux  châ- 
taigniers, deux  blocs  erratiques  plantés  verticalement, 
dépassant  d'un  mètre  le  niveau  du  sol  et  espacés  de  cin- 
quante centimètres,  la  disposition  de  ces  pierres  n'est 
pas  naturelle. 

A  travers  les  siècles,  les  révolutions,  les  événements 
de  tout  genre  qui  nous  séparent  de  ces  temps  lointains, 
bien  peu  de  choses  nous  sont  parvenues  des  Gaulois. 

Nous  avons  conservé  d'eux,  dans  notre  pays,  la  numé- 
ration vingésimale,  soit  la  manière  de  compter  par 
vingtaines.  Nous  disons  encore  en  français  quatre-vingts, 
et  sur  nos  marchés  il  est  d'un  usage  courant  de  compter 
par  pièces  de  vingt  francs  (louis  ou  napoléons)  (1). 

Nous  trouvons  dans  nos  noms  de  localité  et  de  champs, 
un  certain  nombre  de  mots  d'origine  celtique,  de  même 
dans  notre  patois. 

Tels  sont  : 

Moô,  tas  et  son  dérivé  enmoôUo,  entasser,  qui  provien- 
nent du  celtique  moô.  —  Taune,  tannière,  dérive  du 
kimrique  taw  et  du  gaélique  taobh,  séjour,  lieu  habité. 
—  Tasson,  blaireau,  et  tassonire,  tannière  du  blaireau, 
auraient  la  même  origine.  —  Chouaton,  bâton,  gourdin 

(1)  En  Chablais,  on  compte  de  nos  jours  par  napoléons,  mais 
on  comptait  par  louis  avant  la  Révolution. 


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—  20  — 

et  ses  dérivés  proviennent  comme  Choisy  nom  de  village, 
du  celtique  kouôt,  coat,  bois. 

Nant,  ruisseau  torrentueux,  dérive  d'un  mot  celtique 
qui  voulait  dire  ravin,  vallée.  On  dit  encore  à  Messery, 
dans  les  nants^  pour  dire  dans  les  ravins.  Ce  mot  fré- 
quemment employé  en  Savoie  semble  avoir  donné  son 
nom  à  une  peuplade  gauloise  de  notre  région,  les  Nan- 
tuatos,  soit  habitant  des  vallées  ou  dos  nants(l). 

Le  bois  des  Cornes  à  Messery,  situé  sur  une  hauteur, 
dérive  du  celtique  corn,  angle,  pointe.  (Ce  mot  se  re- 
trouve en  Angleterre  dans  Cornouailles). 


(1)  A.  Constantin.  Etude  étymologique  sur  Gavot, 


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—  21  — 


CHAPITRE  III 


Conquête  du  pays  par  les  Romains.  —  Les  Colonies  militaires.— 
La  Colonie  de  Narni,  ses  routes  et  habitations  éparses  ou  villas 
(villae).  —  Des  fundi  ou  domaines  de  Vétérans.  —  Etymologies 
diverses.  —  Inscription  de  Messery.  —  Coup  d'œil  général  sur 
les  établissements  romains  de  la  région. 

Les  Allobroges  furent  incorporés  à  la  province  Ro- 
maine, après  les  victoires  de  Fabius  Maximus,  Tan  121 
avant  J.-C.  Ils  se  soulevèrent  de  nouveau  60  ans  plus 
tard,  mais  devant  la  discipline  et  la  tactique  de  Tarmée 
romaine  ils  échouèrent  complètement,  les  prisonniers 
furent  vendus  comme  esclaves,  et  leurs  terres  partagées 
entre  les  légionniares,  telle  était  la  politique  romaine. 
Des  colonies  militaires  furent  aussitôt  établies  un  peu 
partout  ;  c'est  ainsi  que  Jules  César  avait  fondé  à  Vienne 
une  colonie  sous  le  nom  de  Colonia  Julia  Viennensis, 
Il  en  fut  de  même  autour  de  Genève  et  de  Grenoble.  Des 
routes  stratégiques  furent  bientôt  tracées,  et  le  pays  fut 
si  promptement  soumis  que  les  Allobroges  ne  répondirent 
même  pas  au  grand  appel  de  Vercingétorix. 

Sans  doute  nos  villages  lacustres  avaient  été  un  centre 
de  résistance,  peut-être  le  dernier  rempart  de  Tindépen- 
dance.  Aussi  les  Romains  durent-ils  établir  dans  leur 
voisinage  leur  domination  d'une  manière  toute  parti- 
culière. Le  lac  étant  une  voie  de  communication  natu- 
relle, les  vainqueurs,  en  gens  pratiques,  surent  en  tirer 


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—  22  — 

parti  et  les  colonies  fondées  le  long  de  ses  rives  furent 
protégées  et  desservies  par  une  flotte  militaire. 

NARNI  (Nernier) 

Les  antiquités  romaines  trouvées  à  Nernier  sont  assez 
nombreuses.  Albanis  Beaumont  en  parlait  déjà  en  1802: 
cette  petite  ville  est,  dit-il,  de  fondation  romaine.  »  (1) 
Mais  malheureusement  cet  auteur  ne  cite  aucune  source, 
aucun  fait  précis,  à  l'appui  de  son  dire.  En  reconstruisant 
réglise,  vers  1830,  on  a  mis  à  jour  plusieurs  tombeaux 
maçonnés  avec  un  certain  luxe,  des  débris  de  mosaïque, 
des  plaques  de  marbre  de  différentes  couleurs,  des 
fragments  de  statues  en  marbre  blanc,  des  médailles(2); 
des  ouvriers  ignorants  brisèrent  ces  objets.  Monsieur 
Tabbé  Favre  qui  collectionnait  pour  la  famille  Costa  de 
Beauregard,  en  recueillit  quelques-uns.  Un  fragment 
de  statue  en  marbre  blanc,  qu'il  trouva  en  élevant  la 
maison  des  religieuses  deS*-Joseph,  a  été  encastré  dans 
le  mur  d'un  jardin,  à  côté  du  presbytère.  D'après  Ducis, 
une  urne  à  cendres  a  été  trouvée  sur  les  bords  du  lac.  (3) 
Vers  1880,  dans  le  cimetière  qui  entoure  l'église,  on 
trouva  une  baignoire  rectangulaire  formée  de  plaques 
de  marbre  blanc  et  un  fragment  de  terre  cuite  portant 
l'inscription  vrvs.  Dans  la  partie  N.-O.  du  cimetière,  le 
fossoyeur  rencontre  à  1°»60  de  profondeur  des  murs  re- 
couverts d'un  ciment  rouge  (appelé  rt^rft^),caractéristique 
de  l'époque  romaine. 

La  plus  belle  trouvaille  a  été  faite  en  1881,  des  maçons 

(1)  Albanis  Beaumont.  Description  des  Alpes  Grecques  et  Co- 
tiennes.  Volume  I,  page  52. 

(2)  A.  Ducis.  Revue  Savoi sienne^  1865,  page  91. 

(3)  Revue  Satoisienne^  18(>5,  page  97. 


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—  23  — 

qui  creusaient  des  fondations  derrière  la  maison  des 
religieuses  de  S*-Joseph  trouvèrent  à  un  mètre  de  pro- 
fondeur un  agneau  en  marbre  blanc,  d'une  sculpture 
remarquable  (1).  Cet  agneau  se  voit  encore  au  château 
de  M.  le  Comte  d*Antioche,  il  est  représenté  couché  sur 
le  flanc,  et  a  une  longueur  de  50  centimètres.  Vers 
la  même  époque,  M.  Quiblier  Victor,  en  creusant  les 
fondations  de  sa  maison  située  non  loin  do  là,  y  recueil- 
lait une  vingtaine  de  pièces  romaines.  Enfin  de  nom- 
breux débris  de  tuiles  à  rebords  (tegulae),  et  de  tuiles 
courbes  (imbrices),  de  Tépoque  romaine  se  rencontrent 
dans  le  sol  des  rues  du  village,  au  cimetière,  aux 
environs  de  la  ferme  des  Granges  et  le  long  de  la  rive 
du  lac  ;  ces  tuiles  de  couleur  rouge  sont  tout  à  fait 
semblables  aux  tuiles  romaines  que  renferment  les 
musées  de  la  région. 
Parmi  les  monnaies  recueillies  à  Nernier,  citons  : 
Une  pièce  à  l'effigie  de  Philippus  P*",  empereur,  mort 
en  Tan  248,  trouvée  dans  le  jardin  de  M.  le  capitaine 
Clerc  ;  une  pièce  à  Teffigie  de  Timpératrice  Thôodora, 
seconde  femme  de  Constance  I«%  trouvée  au  même  en- 
droit; une  pièce  d'Hadrianus,  empereur  (mort  Tan  138 
de  notre  ère),  trouvée  dans  le  verger  de  la  ferme  des 
Granges  ;  une  autre  pièce  fruste  trouvée  au  même  en- 
droit ;  enfin  une  autre  pièce  trouvée  au  pied  de  la  Tour. 
Toutes  ces  monnaies  font  partie  de  ma  collection. 

Etat  de  la  Colonie  de  Nernier.  —  Routes  et  habitations 
Romaines 

Les  colonies  romaines  étaient  fondées  par  l'Etat,  qui 

(1)  Revue  Savoisienne,  1881,  page  81. 


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—  24  — 

en   répartissait  les  terres  entre  les  soldats  vétérans. 

<(  A  ravénement  de  Tibère,  nous  raconte  Tacite  (i),  les 

€  légions  de  la  Panonie  et  du  Rhin  se  révoltèrent.  Les 

«  soldats  se  plaignaient  qu'après  trente  ou  quarante  ans 

€  de  service,  on  les  traînait  dans  des  régions  éloignées, 

€  OÙ  on  leur  assignait  pour  terres  des  marais  imprati- 

<(  cables  ou  des  rochers  incultes.  > 

Il  est  incontestable  que  le  soldat  qui  avait  reçu  un  lot 
de  terres,  faisait  élever  au  plus  vite  au  milieu  de  sa 
concession,  des  bâtiments  d*exploitation.  Ce  sont  les 
ruines,  les  traces  de  ces  pauvres  habitations  de  vété- 
rans, qu'à  la  suite  de  longues  et  patientes  recherches 
nous  sommes  parvenu  à  déterminer  ;  c'est  une  colonie 
militaire  d'il  y  a  deux  mille  ans  que  nous  allons  tâcher 
de  faire  revivre  un  instant,  avec  ses  chemins,  ses  habi- 
tations éparses  ou  villas,  et  les  transformations  succes- 
sives et  inévitables  qui  durent  s'opérer  pondant  les  cinq 
ou  six  siècles  de  l'occupation  romaine. 

Régulièrement  espacés,  les  bâtiments  ruraux  do  la 
colonie  de  Nernier  que  nous  avons  retrouvés  au  nombre 
d'unecinquantaine,  s'étendaient  sur  le  territoire  qu'occu- 
pent de  nos  jours  les  communes  d'Excénevex,  dTvoire, 
do  Nernier,  de  Messory  et  do  Chens,  et  où  vit  actuelle- 
mont  une  population  agricole  de  plus  de  2.000  âmes. 

Nernier  étant  alors  le  seul  port  de  la  côte  en  cet 
endroit,  plusieurs  chemins  tracés  par  les  charriots  y 
aboutissaient.  Nous  allons  les  examiner  séparément. 

I.  Itoute  de  Nernier  à  Sciez.  —  Le  tracé  du  chemin 
antique  est  encore  représenté  de  nos  jours,  jusqu'au  delà 

(l)  Tacite.  Annales.  Livre  I.  Chapitre  XVI. 


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—  25  — 

du  territoire  do  Neruier,  par  la  route  actuelle  qui  va  à 
Yvoire.  A  quelques  pas  du  village  de  Neruier,  sur  la 
droite,  se  rencontrent  sur  une  longueur  de  cinq  à  six 
cents  mMres  les  champs  appelés  les  petits  dévents,  puis 
les  déventSj  Tôtymologie  de  ce  nom  provient,  dit-on,  du 
latin  defensiis,  défendu  ;  c'étaient  des  terrains  dont 
Texploitation  éUiit  interdite,  soit  pour  cause  d'utilité 
publique,  soit  comme  consacrés  à  une  divinité  (1).  La 
route  longe  ensuite  le  ruisseau  de  Hercubioou  Harcubio, 
dont  le  nom  rappelle  vaguement  Mercure,  le  dieu  du 
commerce;  nous  avons,  dans  le  môme  genre,  un  mot  qui 
a  subi  une  *  transformation  analogue,  c'est  le  Mar- 
couret,  nom  patois  de  la  Mercuriale  (latin  Mercurialis). 

Nous  savons  combien  il  faut  se  défier  des  étymologies, 
cependant  avant  d'en  présenter  d'autres,  il  nous  semble 
utile  de  faire  remarquer  que  le  latin  fut  la  langue  offi- 
cielle, la  langue  parlée  dans  notre  pays  pendant  près 
de  mille  ans,  il  nous  en  est  resté  notre  patois  qui  est 
tout  simplement  un  jargon  latin,  un  dialecte  gallo-ro- 
main. Quelques  mots  s'y  sont  conservés  dans  leur  forme 
primitive,  tels  sont:  homo,  homme,  terra,  la  terre, 
d'autres  ont  peu  changé,  tels  sont:  salla  {sella),  chaise. 
sola  (solea),  souliers,  d'autres  encore  nous  ont  été  con- 
servés avec  toutes  leurs  désinences,  ainsi  bos,  bovis,  le 
bœuf  a  formé  le  bù,  lebea,  le  bovi,  le  bovè,  le  bovèron, 
lebovilloa.  Il  résulte  de  ceci  que  dans  le  bas  Chablais, 
n'en  déplaise  à  quelques  auteurs,  les  étymologies  latines 
sont  beaucoup  plus  certaines  et  plus  nombreuses  que 
celles  provenant  du  celtique. 

(1)  Revue  Savoisienne,  1881,  page  6. 


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'  —  26  — 

Mais  revenons  à  notre  route,  elle  franchit  le  ruisseau 
de  Mercubio,  longeant  les  champs  appelés  les  Grands 
dévents.  Deux  cents  mètres  plus  loin  se  présente  une 
bifurcation  ;  on  a  à  gauche  la  route  actuelle  qui  file  sur 
Y  voire  et  Excénevex,  à  droite,  un  vieux  chemin  qui 
escalade  le  coteau  et  suit  la  ligne  des  hauteurs. 

Ce  sentier  était  le  chemin  romain  ;  en  deux  minutes 
on  gravit  la  montée;  à  gauche,  dans  le  champ  appelé 
Diossinge  (Jossinge  sur  un  acte  de  1589),  des  fragments 
de  tuiles  à  rebords  apparaissent  ça  et  là.  Une  pièce 
romaine,  recueillie  dans  une  vigne  voisine,  a  été  vendue 
10  francs  à  un  amateur  de  Genève,  elle  représentait 
une  tête  d'empereur,  ceinte  d'un  diadème  dentelé  (1). 

Traversant  la  tate  des  Chenalets  où  s'élève  une  croix, 
le  chemin  sous  le  nom  do  vi  du  puits  atteint  le  champ 
d'EtineSj  propriété  de  M.  le  baron  dT voire,  les  tuiles  à 
rebords  y  foisonnent.  Il  est  bon  de  rappeler  à  ce  sujet 
cette  phrase  d'un  érudit  (2)  :  «  Rien  qu'à  voir  la  couleur 
«  du  sol,  On  sent  qu'une  habitation  antique  y  a  existé, 
«  dans  certains  lieux  pour  peu  qu'on  remue  le  terrain, 
«  l'impérissable  terre  cuite  des  maîtres  du  monde  repa- 
«  raît  au  grand  jour  sous  forme  de  tuiles  à  rebords  et  de 
«  débris  de  vaisselle  les  plus  variés.  » 

Le  champ  d'Ettine  se  trouve  situe  sur  une  hauteur 
rectangulaire,  formant  un  petit  plateau  facilement 
défendable,  son  étymologie  pourrait  provenir  du  vieux 
français  Estaux,  petit  plateau,  ou  d'Etal,  sorte  de  table. 
D'après  un  vieillard  d'Yvoire,  Etine  a  dû  être  un  vil- 

(1)  Communiqué  par  M.  Baud,  fermier  à  Y  voire. 

(2)  Blavignac.  Livre  I,  page  141. 


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—  21  — 

lage  (1  ),  on  y  a  trouvé  des  ossements,  une  épée,  un  puits 
aujourd'hui  comblé,  les  vignes  voisines  s'appellent  les 
Mortes.  Dans  le  champ  des  Combes,  situé  en  face,  on  a 
trouvé  en  1815  une  tombe,  formée  d'une  seule  pierre 
creusée  comme  une  auge.  Deux  à  trois  cents  mètres 
plus  loin,  en  suivant  le  vieux  chemin,  se  rencontrent  les 
champs  appelés  Les  Mottes,  tuiles  à  rebords.  M.  Novel, 
d'Y  voire,  y  a  trouvé  une  sorte  do  tombeau  maçonné 
avec  un  dur  mortier  et  recouvert  d'une  dalle,  mais  il 
était  vide.  Cinq  minutes  plus  loin,  on  arrive  aux  Frênes, 
des  tuiles  à  rebord  y  apparaissent.  Enfin  plus  loin,  tou- 
jours sur  la  hauteur,  on  atteint  les  Marteirets  ;  au  dire 
de  plusieurs  propriétaires  d'Yvoire,  on  y  a  trouvé,  il  y  a 
plus  de  cinquante  ans,  en  défonçant  le  sol,  des  fragments 
de  lances,  d'épécs,  de  poteries  diverses  ;  des  fondations 
de  maisons  ont  été  également  rencontrées  en  divers 
endroits  ;  la  terre  est  brûlée  et  mêlée  de  charbons  de 
bois  et  de  tuiles  à  rebords,  à  plus  d'un  mètre  de  profon- 
deur. D'après  une  lettre  du  savant  Baulacre,  de  Genève, 
à  l'historien  Besson,  en  date  du  31  juillet  1750,  les 
noms  de  Marteyret,  écrit  martyrium  dans  les  vieilles 
reconnaissances  latines,  seraient  des  lieux  où  des  chré- 
tiens auraient  été  martyrisés  aux  temps  des  premières 
persécutions  (2).  Monsieur  le  Sénateur  Philippe,  dans 
S041  histoire  populaire  de  la  Savoie,  a  émis  la  même  opi- 
nion (3).  Enfin  tous  les  Marteirets  que  nous  connaissons 
sont  d'anciens  villages  gallo-romains,  le  mot  français 

fl)  M.  Novel,  vieillard  de  90  ans,  surnommé  IT^yptien,  parce 
qu*il  fut  embarqué  pour  TEgypte  comme  matelot  de  la  marine 
Sarde. 

(2)  Revue  Savoisienne^  1883,  page  79. 

(3)  Revue  Savoisienne,  1873. 


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—  28  — 

martyriser  se  traduit  en  patois  par  Martérisô.  A  deux 
cents  pas  des  Marteyrets  se  rencontrent  les  champs 
appelés  les  Martyans. 

Le  vieux  chemin  passe  devant  la  croix  des  Combes, 
mais  après  avoir  franchi  les  communaux  d'Excénevex  il 
se  perd,  cependant  en  marchant  quelques  pas  sur  son 
prolongement  on  arrive  au  lieu  dit  le  Grand  Champ, 
autrement  dit  les  hutins,  où  se  rencontre  un  endroit 
tout  rouge  de  tuiles  à  rebords  ;  à  rextrémite  de  ce  ter- 
rain se  dresse  la  croix  de  Cérési,  de  là  le  vieux  chemin 
dévalant  dans  la  plaine  de  Filly  rejoignait  à  Sciez  la 
grande  voie  de  Genève  au  Valais. 

Cet  ancien  chemin  dô  Nernier  à  Sciez  avait  plusieurs 
embranchements  : 

1°  D'Etines,  un  raccourci  va  sous  le  nom  de  vi  des 
bougeries  aboutir  à  la  croix  de  Cérési,  en  passant  à 
Grange  Thorens  et  aux  Urtets  où  les  tuiles  à  rebords 
abondent  (territoire  dTvoire). 

2°  Des  Marterets,  part  sur  la  gauche  une  route  pas- 
sant devant  la  croix  de  TEnfer,  et  traversant  les  champs 
des  Ftempés,  nombreuses  tuiles  à  rebords  (territoire! 
d*Excénevex). 

Avant  de  quitter  cette  route  de  Nernier  à  Sciez,  re- 
marquons que  toutes  les  croix  antiques  des  paroisses 
dTvoire  et  d'Excénevex,  sans  exception,  s'élèvent  sur 
cette  ancienne  voie,  ce  qui  est  une  preuve  de  son  an- 
cienneté et  de  rimportance  qu'elle  avait  autrefois.  Elle 
n'est  plus  de  nos  jours  qu'un  simple  chemin  de  dévesti- 
ture  impraticable  en  plusieurs  endroits. 

II.  Route  de  Nernier  à  Essert  et  à  Conches.  —  A 
300  mètres  de  Nernier  cette  route  atteint  les  champs  de 


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-  2Ô- 

la  fontaine  de  Marsille,  une  habitation  romaine  d*un  cor- 
tain  luxe  s'élevait  en  cet  endroit,  des  fragments  de  statues 
en  marbre  blanc  y  ont  été  trouvés  mélangés  aux  tuiles  à 
rebords  (1).  Vers  1834,  les  frères  Duborgel,  dit  Regretti, 
étant  fermiers  de  M.  le  Comte  d'Antioche,  pratiquèrent 
à  Marsille  des  fossés  de  drainage  ;  ils  mirent  à  jour  quan- 
tité de  débris  antiques,  parmi  lesquels  des  marmites 
intactes,  en  métal  très  épais  et  au  col  étroit  et  allongé  (2). 
En  1895,  le  fermier  y  a  recueilli  une  pièce  de  monnaie 
à  l'effigie  de  l'impératrice  Faustina  Junior,  épouse  de 
Marc  Aurèle,  mariée  vers  l'an  140  de  J.-C.  (3).  A  la 
croisée  d'un  vieux  chemin  appelé  de  nos^ours  la  vi  de 
colonne,  à  proximité  d'une  source  abondante,  cette 
localité  de  Marsille  tire  peut-être  son  nom  d'un  autel 
ou  fanum  dédié  à  Mars,  dieu  de  la  guerre  et  patron  de 
cette  colonie  de  vétérans,  le  nom  (des  chapelles)  donné 
à  la  partie  des  champs  de  Marsille  où  se  rencontrent  les 
débris  antiques,  semble  en  être  comme  le  dernier  souvenir. 

De  Marsille,  la  route  longe  des  vignes  au  nom  latin, 
les  vignes  de  Dioi,  puis  cinq  minutes  plus  haut  atteint 
les  Blandets  (champ  Quiblier  Jean-Marie),  un  pavage 
en  pierres  ovoïdes,  soit  cailloux  roulés,  y  a  été  relevé  il 
y  a  plus  de  quarante  ans,  ainsi  qu'un  fer  de  lance  en 
bronze  au  milieu  de  tuiles  à  rebords  (4). 

Après  avoir  traversé  le  village  actuel  d'Essert,  on 
trouve  à  un  kilomètre  de  là  les  traces  d'une  habitation 
romaine  à  la    Taie   des  Braccaicœ,  des  fondations  de 

(1)  Communiqué  par  M.  Montvua^nard,  propriétaire  à  Nernier. 

(2)  Communiqué  par  Madame  Pauline  Boccard,  sœur  des  frères 
Duborgel. 

(3)  Collection  Emile  Vuarnet. 

(1)  Communiqué  par  M.  Quiblier  Marie,  propriétaire. 


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—  30  — 

maisons  se  rencontreat  au  milieu  de  débris  de  tuiles  à 
rebords  et  de  briques  (lateres),  uq  puits  existait  encore 
il  y  a  environ  30  ans  dans  le  champ  voisin,  appelé  la 
commune.  Braccaux  pourrait  dériver  de  brachiuw.  ou 
d'un  nom  de  gentilice  analogue.  A  deux  cents  mètres 
plus  loin,  nouvelles  traces  romaines  au  Crêtde  laBraza, 
ce  champ  tire  son  nom  de  fragments  de  poutres  char- 
bonnées  qui  y  ont  été  recueillis  autrefois  (1),  on  y  a 
relevé  des  fondations  de  maisons,  la  terre  est  criblée  de 
débris  de  tuiles  à  rebords  (champ  Michel  Quiblier). 

Du  Créé  de  la  Brâze,  la  route  atteint  le  village  actuel 
de  Couches,  puis  Douvaine  (en  patois  Dovain-ô),  station 
romaine  sur  la  grande  voie  de  Genève  au  Valais. 

III.  Route  de  Ne>mier  au  Cret  de  la  Braze.  —  Cette 
route  est  un  raccourci  de  la  précédente.  Sur  son  parcours 
on  rencontre  les  traces  de  deux  habitations  romaines. 

lo  Ferrage,  vigne  et  terre  de  M.  le  Comte  d'Antioche, 
à  5  minutes  de  Nernier.  —  2°  Le  Plantet,  champs  com- 
munaux de  Messery,  à  2  kilomètres  de  Nernier,  de  nom- 
breuses tuiles  à  rebords  y  ont  été  recueillies  en  1835,  aux 
environs  du  puits  communal. 

IV.  Route  de  Nernier  à  Messery  et  à  Genève.  — 
Cette  route  atteint  à  1  kilomètre  de  Nernier  les  champs 
de  Collan,  où  des  tuiles  à  rebords  apparaissent  (champ 
Duret  Auguste),  puis  elle  longe  les  champs  appelés  So^4S 
la  Vi  (sous  la  voie),  et  atteint  le  village  de  Messery  où 
elle  se  confond  avec  la  suivante. 

V.  Route  des  Marteyrets  à  Messery  et  à  Genève,  — 

(1)  Ceci  est  une  tradition.  Ce  champ  portait  déjà  le  nom  de  Cret 
de  la  Brâzaou  de  la  Braise,  en  1700. 


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—  31  — 

Elle  suivait  à  peu  de  choses  près  le  tracé  actuel  de  la 
route  d'Excéuevex,  à  Essert,  Messery,  Chens,  Cusy, 
Hermauce  et  Genève,  cette  route  qui  est  encore  de  nos 
jours  la  plus  importante  de  la  région,  suit  la  crête  du 
coteau  qui  domine  la  contrée  ;  tous  les  deux  ou  trois 
cents  mètres,  nous  avons  relevé  le  long  de  son  parcours, 
des  traces  de  villas  (villae),  soit  habitations  de  colons 
romains.  En  voici  la  description  : 

lo  Commugny  (territoire  d'Excénevex),  sur  la  lisière 
du  bois  des  Essartons:  des  fondations,  des  fragments  de 
vases,  du  soufre,  des  ossements  humains  y  ont  été 
trouvés.  Un  cultivateur  do  Chevilly  M.  Jean  Champoury , 
y  a  recueilli:  un  stylo  en  bronze,  petit  poinçon  à  poignée 
arrondie,  long  de  13  centimètres,  avec  lequel  les  anciens 
écrivaient  sur  des  tablettes  enduites  de  cire  ;  une  tuile 
à  rebords  intacte,  mesurant  49  centimètres  de  long  sur 
33  de  largo,  un  fragment  de  roche  polie  qui  semble  être 
un  débris  de  meule  portative.  Ont  été  recueillis  dans  le 
champ  de  la  famille  Crottet,  au  milieu  d'un  amas  de 
cendres  et  de  braises  :  un  fragment  de  vase  en  pierre 
bleue,  dite  pierre  ollaire  avec  raies  concentriques  ;  deux 
pierres  sphériques,  dont  Tune  légèrement  aplatie,  devait 
servir  sans  doute  comme  pilon  pour  écraser  le  grain  sur 
la  moule  ;  une  pièce  de  bronze  à  l'effigie  de  Néron,  em- 
pereur, mort  l'an  68  de  J.-C.  (collection  Emile  Vuarnet); 

2o  Divonne  ou  Digouna^  champ  situé  sur  la  droite 
avant  d'arriver  au  bois  de  Fécler,  traces  nombreuses  de 
tuiles  à  rebords  ; 

3°  Bonnet  (territoire  de  Messery),  traces  de  tuiles, 
une  épingle  à  cheveux  à  tête  carrée,  en  bronze,  y  a  été 
recueillie  par  M.  Crottet,  une  pièce  romaine  a  été  trou- 


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^^ 


le 


—  32  — 

véo  au  bas  de  ce  champ  par  M.  Louis  Duborgel,  du  Crot; 
40  Blnndet  ou  Tranchc-piat,  à  la  croisée  du  chemin 
do  Nernier  à  Couches  (villa  déjà  décrite); 

50  Frize  (cyrisiam,  sericy,  serozi,  dans  les  charfcîsdu 
moyen-àge),  les  fils  do  Jean  Quiblier  ont  trouvé  dans 
leur  verger,  k  cinquante  métrés  de  la  route,  des  fonda- 
tions en  tuf,  au  milieu  de  quelques  fragments  de  tuiles  à 
rebords  et  de  scories  ;  (les  pierres  de  tuf  n'existent  pas 
dans  la  construction  du  château  de  Frize),  l'étymologie 
de  Frize  qui  selon  Piccard  provient  de  cerise,  pourrait 
aussi  venir  de  Gérés,  la  déesse  des  moissons,  ou  d'un 
gentilice  (nom  de  famille)  ayant  une  forme  analogue  ; 

fio  Les  champs  de  Lata  (champs  de  l'hasta  sur  une 
reconnaissance  féodale  de  1595),  fragments  nombreux 
de  tuiles  à  rebords  et  de  poteries,  sur  le  sommet  du 
coteau  à  50  métrés  de  la  route  (champs  Duborgel  Emile 
et  Degrange),  une  pièce  romaine  fruste  a  été  recueillie 
par  M.  Duborgel  Clément,  cantonnier. 

Il  y  avait  dans  les  légions  romaines  trois  différentes 
espèces  do  soldats,  les  triaires,  les  princes  et  les  hastats. 
—  Ces  derniers  étixient  ainsi  appelés  parce  qu'ils  étaient 
armés  d'une  lance  appelée  hasta.  —  Les  champs  de 
l'hasta  pourraient  donc  avoir  été  le  fundus  (domaine) 
d'un  de  ces  soldats  !  ! 

7°  Les  Ta^'an/inA*  (champ  Duborgel  dit  Granon),  tuiles 
à  rebords  en  grand  nombre  à  50  métrés  de  la  route.  Ce 
nom  nous  donne  peut-être  le  pays  d'origine  des  colons 
qui  y  avaient  élevé  leur  villa,  et  qui  devaient  être  origi- 
naires de  Tarente,  ville  importante  du  midi  de  l'Italie 
au  temps  des  Romains  ;  (ce  nom  est  d'ailleurs  ancien  à 


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Messery,  car  on  le  trouve  cité  sur  une  reconnaissance 
de  1527); 

8°  Véret.  —  Dans  le  chanap  autrefois  à  Boccard  Louis, 
et  le  jardin  Duborgel  Regretti,  on  a  relevé  des  fonda- 
tions, des  ossements;  on  y  voit  encore  quelques  tuiles  à 
rebords  ;  de  l'autre  côté  de  la  route,  à  30  mètres  dans 
les  jardins  existait  un  vieux  puits  étroit,  dont  les  mu- 
railles étaient  très  épaisses  et  qui  a  donné  son  nom  aux 
champs  voisins  (les  champs  du  puits)  au  siècle  dernier  ; 
tout  à  côté  M.  Pochât,  en  bâtissant  sa  maison,  a  trouvé 
des  fragments  de  tuiles  à  rebords  à  plus  de  deux  mètres 
de  profondeur.  Veret  est  un  diminutif  de  vers  Etraz 
(versus  stratum)  vers  la  route; 

9°  Messery.  —  Dans  les  jardins  appelés  Très  le 
Borgel,  des  fragments  de  tuiles  à  rebords  se  rencontrent 
ainsi  que  des  débris  de  murs  ;  plusieurs  pièces  romaines 
y  ont  été  recueillies:  une  pièce  de  Trajan,  empereur, 
mort  en  Tan  1 17  de  notre  ère  a  été  trouvée  aux  Brol- 
liet  (1),  une  à  Teffigie  de  Gallienus,  empereur,  mort  en 
2G8,  a  été  trouvée  dans  le  jardin  do  M.  Duborgel  Joseph, 
rentier  ;  une  troisième  a  été  trouvée  dans  le  jardin  de 
la  famille  Duborgel,  dit  Granon. 

L'étymologio  de  Messery  (missUne^  missiriacum  au 
moyen-àge),  pourrait  venir  du  latin  messis,  moisson,  la 
terminaison  iacum  indiquant  une  localité,  missiriacum 
voulait  dire  pays  des  moissons  (nous  avons  en  notre 
patois  romand,  messe,  seigle)  ;  le  nom  de  la  localité 
aura  été  ensuite  défiguré  par  les  Bur^ondes,  qui, 
d'après  Blavignac  (2)  transformaient 

(1)  Collection  E.  Vuarnet. 

(2)  Blavignac.  Etudes  sur  Genève,  livre. II 


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-.  34  - 

l*e  muet  en  i.  C'est  ainsi  que  Geneva  devint  Ginivis. 
Sans  doute  Messisaria,  Messiriacum  devint  Missiri(\). 

A  Messery,  la  route  s'adjoint  celle  venant  de 
Nernier,  ce  qui  devait  lui  donner  une  certaine  impor- 
tance ;  en  effet  c'est  encore  de  nos  jours  le  seul  chemin 
de  Genève  pour  les  habitants  d'Excénevex,  dTvoire, 
de  Nernier  et  de  Messery.  En  la  suivant  on  rencontre 
à  quatre  cents  mètres  de  Messery  : 

10°  Les  champs  de  Vétro  autrefois  Vétraz.  Dans  le 
champ  appartenant  à  M.  Tabbé  Boccard  et  à  sa  famille, 
les  tuiles  à  rebords  apparaissent,  on  y  rencîontre  des 
fondations.  En  face,  M.  Pochât  Georges,  en  opérant  un 
défoncement  ou  minage,  a  rencontré  à  plus  d'un  mètre 
de  profondeur  des  tuiles  à  rebords  et  des  briques  {la le- 
vés), ces  dernières  portaient  des  signes  gravés  profon- 
dément; un  peson  ou  poids  romain,  en  terre  rouge,  de 
forme  conique  a  été  trouvé  non  loin  de  là  (2).  Les  vignes 
voisines  s'appellent  vers  Tellin,  ce  nom  nous  rappellerait 
peut-être  le  nom  do  la  famille  romaine  qui  habitait  ces 
\\o\ni{Tellus,  Telli)  ; 

1 1°  Oppidum  ou  camp  retranché  de  Quevalou,  —  Do 
Vétro  la  voie  atteignait  les  Couvaloup,  Quevaleu,  grand 
plateau  incliné  limité  par  de  profonds  ravins.  Des  fon- 
dations et  des  puits,  aujourd'hui  comblés,  existent  en 
diflTérents  endroits  et  les  talus  du  couchant  sont  cou- 
ronnés de  murailles  sur  lesquelles  s'arrête  la  chai*rue, 
dos  tuiles  à  rebords  s'y  rencontrent.  D'après  une  tradi- 
tion locale  :  ^  le  village  de  Messery  se  serait  élevé  là 

(1)  La  locution   messis  ridens^  moisson  riante  comme  étymo- 
logie  de  Messerv  serait  également  admissible. 

(2)  CoUection  E.  Vuarnet.  Ce  peson  pèse  2  kilogs  300  gr. 


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—  35  - 

autrefois,  mais  il  aurait  été  détruit  par  la  peste.  »  Quoi 
qu'il  en  soit  les  champs  du  dezé  (du  désert)  au  lovant, 
et  de  la  dezey^ta  (la  déserte)  au  couchant,  évoquent  bien 
ridée  d'une  dévastation  quelconque  ;  à  signaler  égale- 
ment le  champ  du  trône,  situé  entre  Quevaloup  et  le 
lac.  Dans  les  champs  du  dezé  les  tuiles  à  rebords  appa- 
raissent, d'anciennes  poteries  y  ont  été  recueillies  ; 

12°  Echevenet  ou  Chavonex  (champ  Servage  Louis), 
tuiles  à  rebords,  l'étymologie  de  ce  nom  pourrait  venir 
de  es  chevenat/,  soit  es  cabanes  ; 

13°  Les  Bssevts  de  Partaytoix  les  tuiles  romaines  se 
rencontrent,  est  séparé  du  territoire  de  Chens  par  le 
ruisseau  de  la  Veurze.  Au  delà  s'élevait  autrefois  la 
croix  de  Vétry,  (dans  les  champs  voisins  se  rencontrent 
des  tulles  à  rebords)  ;  on  atteint  ainsi  le  village  actuel  de 
Chens,  puis  Verêtre  et  Hermance.  Verêtre  (en  patois 
Verêtro  (l'o  final  étant  muet)  s'écrivait  Oytroz  aux 
siècles  passés.  Vers-Etro,  d'avau  d'Etroz,  Vétro,  Vé- 
traz,  Vétry  sont  des  noms  de  lieu  que  l'on  rencontre 
généralement  sur  le  parcours  d'anciennes  voies  et  qui 
dérivent  tous  de  strata  via,  route,  chemin,  voie.  Enstra- 
/wm,en  la  route;  on  désignait  ainsi  les  habitations  romai- 
nes situées  sur  le  parcours  de  la  voie  pour  les  distinguer 
des  autres  fundi  ou  domaines  qui  ne  jouissaient  pas  de 
cet  avantage,  c'est  ce  qui  explique  leur  nombre. 

Non  loin  de  Chens  se  trouve  le  port   de  Tougues  ; 
d'après  Blavignac  :  «  Lors  de  la  défaite  des  Helvètes  par 
Jules  César 
débarquèrec 
leur  nom.  » 
soldats  rom 


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Combat  dut  se  livrer  sur  la  hauteur  où  s'élève  de  nos 
jours  le  village  de  Chens,  les  lieux  appelés  Chat^age  et 
Morty,  situés  à  côté  du  village,  semblent  en  avoir  per- 
pétué le  souvenir.  Ce  qui  donne  quoique  fondement  à 
cette  hypothèse  c'est  qu'en  plusieurs  endroits  du  village 
de  Chens  (on  prononce  champ),  on  a  trouvé  des 
ossements  humains  et  des  squelettes  de  chevaux. 
Une  pièce  d'Aùrélien  y  a  été  recueillie  par  M.  Marc 
Fleuret;  des  traces  de  tuiles  à  rebords  se  rencontrent 
entre  l'église  et  Charnage.  C'étaient  les  Tigurins  ou 
Tugères  qui  avaient  fait  passer  une  armée  romaine  sous 
le  joug  ;  les  traces  de  Içur  nom  se  rencontrent  encore  à 
Taug,  près  Viuz-en-Sallaz,  à  Tougin,  près  Gex. 
Habitations  isolées 

1°  Les  Epagmj  sont  des  champs  situés  au  bord  du  Vion, 
sur  un  vieux  chemin  allant  de  Commugny  (Excénevex) 
à  Sous-Etraz  (Massongy)  et  Douvaine.  Dans  la  parcelle 
de  Joseph  Bullat,  on  a  trouvé  il  y  a  environ  cinquante 
ans,  des  murs,  un  puits,  au  fond  duquel  furent  recueillis 
plusieurs  monnaies  et  armes  anciennes,  on  y  voit  encore 
des  tuiles  à  rebords.  Le  nom  d'Epagny,  assez  fréquent 
en  Savoie,  donne  à  penser  que  les  colons  qui  habitaient 
cette  station  étaient  originaires  de  l'Espagne.  Il  n'y 
aurait  en  cela  rien  d'improbabe,  car  chacun  sait  que 
les  armées  romaines  se  recrutaient  un  peu  partout  ;  on  y 
voyait  des    auxiliaires   Germains,   des    Gaulois,    des 

Daces,  etc ,   la  légion   thébéenno  était   formée  do 

jeunes  gens  dé  la  Haute  Egypte. 

2»  Lav  Mouilles,  en  amont  des  bois  des  Partays, 
tuiles  à  rebords  ;  d'après  M.  Fichard-Fazi,  une  épée  et 
différents  débris  y  ont  été  recueillis. 


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—  37  — 

3«  Les  boLs  d* Ai  (champ  Pochât  Georges)  tuiles  à  re- 
bords, la  terre  est  charbonnéeà  une  certaine  profondeur. 

4®  Vers  les  Granges  (champ  Athanase  Duborgel) 
tuiles  à  rebords,  pierres  taillées,  recueillies  par  M. 
Pochât  Jules. 

5°  Les  Pignolières .(champ  Duret),  tuiles  à  rebords; 
M.  Michel  Dumont  y  a  recueilli  un  vase  rempli  de  débris 
de  verres  de  toutes  couleurs. 

6<»  Bois  des  Bossons,  en  creusant  des  fossés  dans  ce 
bois,  les  fils  de  Xavier  Duborgel  ont  mis  à  jour  des 
amas  de  tuiles  à  rebords. 

7°  Vers  les  Grands  BoLs,  eu  bas  do  Partays,  les 
frères  Rivollat  trouvèrent,  il  y  a  soixante  ans,  quantité 
de  débris,  tuiles  à  rebords,  briques,  etc 

Enfin  pour  terminer  cette  longue  énumération,  on 
trouve  encore  des  traces  do  tuiles  romaines  vers  Caren- 
tan,  vers  les  Baudaz,  vers  les  Marmoches,  aux  Essar- 
tons des  Ronzets,  vers  la  Dianbeau  ou  Jeanbeau,  vers 
champ  Mareta,  etc. . . 

De  la  grandeur  des  iundi  ou  domaines 
des  Vétérans 

Aux  environs  du  village  de  Messery,  c'est-à-dire  dans 
la  partie  de  la  colonie  de  Nernier  que  nous  avons  le  plus 
spécialement  étudiée,  les  traces  d'habitations  antiques  se 
trouvent  disposées  sur  5  lignes,  parallèles  à  la  rive  du  lac. 

La  première  ligne,  située  à  peu  de  distance  de  la 
rive,  est  formée  par  les  ruines  de  Collan,  Sous  les  Prés, 
les  Marmoches,  Dianbeau,  les  Grands  Bois,  etc 

La  seconde  ligne  est  tracée  par 
Messery,  Chens,  Cusy,  Hermance,  ( 
à  une  distance  du  lac  qui  varie  eut 


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—  38  — 

La  troisième  ligne  est  établie  sur  un  pli  de  terrain 
situe  à  3  ou  400  mètres  en  arrière  de  la  route  ;  on  y 
rencontre  les  deux  stations  des  marais  (champ  Modeste 
Duborgelet  champ  Camenet),  la  Piguolière,  etc.... 

La  quatrième  ligne  à  3  ou  400  mètres  de  la  précé- 
dente, est  située  sur  le  versant  des  bois  de  Messery,  on 
y  rencontre  :  le  Plantet,  les  bois  d'Ai,  Carantan,  les 
Essartons  de  Ronzai,  etc 

La  cinquième  ligne  à  3  ou  400  mètres  en  arrière  dans 
les  bois,  est  formée  par  le  Cret  de  la  Braise,  les  Gran- 
ges (champ  Athanase  Duborgel),  le  bois  des  Bossons,  les 
Mouilles,  etc 

Ceci  nous  donnerait  donc  d'une  manière  assez  juste  la 
longueur  des  fundi  ou  domaines  de  nos  vétérans,  c'est- 
à-dire  environ  350  mètres.  Quant  à  la  largeur  elle  varie 
entre  250  et  300  mètres.  D'après  nos  calculs,  l'étendue 
d'un  domaine  de  vétéran  aurait  donc  été  d'environ  huit 
à  dix  hectares,  soit  en  mesure  du  pays  24  à  30  journaux. 

Voyons  maintenant  ce  que  nous  dit  l'histoire. 

L'an  741  de  Rome,  Auguste  avait  fixé  le  service  des 
prétoriens  à  12  ans,  celui  des  légionnaires  à  16,  et  leur 
service  achevé,  il  leur  avait  assigné  une  somme  fixe; 
cette  récompense  était  pour  chaque  légionnaire  de 
douze  mille  sesterces,  soit  environ  4,000  fr.  et  pour 
chaque  prétorien  de  vingt  mille  sesterces,  soit  environ 
7.000  fr.  de  notre  monnaie.  Mais  quand  Auguste  eut 
augmenté  l'influence  des  lois  et  du  Sénat  et  affermi 
son  pouvoir,  il  osa  resteindre  les  privilèges  du  soldat, 
et  au  lieu  de  ces  récompenses  en  argent  quij  épuisaient 
le  trésor  public,  il  leur  assigna  des  terres  conquises  dans 
le  voisinage  des  Barbares. 


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—  39  — 

Les  S  ou  10  hectares  do  terre  qui  semblent  avoir  été 
réteodue  des  domaines  de  vétérans  à  Messery,  repré- 
senteraient de  nos  jours  une  somme  variant  entre  quinze 
et  trente  mille  francs,  suivant  la  nature  du  sol.  Mais  à 
répoque  de  Jules  César,  les  terrains  avaient  certaine- 
ment moins  de  valeur.  En  tout  cas  ces  domaines  qui 
seraient  de  nos  jours  suffisants  pour  faire  vivre  à  Taise 
une  famille,  devaient  rétro  encore  bien  davantage  à 
répoque  romaine,  alors  qu'ils  n'étaient  pas  épuisés, 
comme  ils  le  sont  de  nos  jours,  par  2.000  ans  de  culture. 
Etymologie  de  Nernier 

Plusieurs  auteurs  se  sont  ingéniés  à  trouver  Tétymo- 
logie  de  Nernier.  D'après  Albanis  Beaumont,  Nernier 
tirerait  son  nom  de  la  tribu  romaine  Arniensis  (1) 
{amiensis  colonia)  ;  selon  Blavignac  (2)  «  les  Nornes, 
prêtresses  celtiques,  auraient  laissé  leur  souvenir  sur 
les  rives  du  Léman,  le  nom  du  village  de  Nernier  se 
traduirait  par  métairie  ou  villa  des  Nornes.  »  Suivant 
d'autres,  Nernier  dériverait  de  villa  Neronis,  soit  d'une 
villa  de  Néron  (3).  Enfin  une  terre  du  Valais  était  ap- 
pelée Nernye  (4)  en  1252. 

Cependant  remarquons  avec  quelle  persistance  les 
noms  de  lieu  se  sont  généralement  conservés  dans  notre 
pays,  surtout  dans  le  langage  populaire  ;  nous  voyons 
César  dans  ses  commentaires,  appeler  Genève  (Geneva); 
c'est  encore  ainsi  que  nous  désignons  cette  ville  en  notre 
patois  romand.  Nernier  se  dit  Narni  dans  le  pays,  il 

(1)  Albanis  Beaumont.  Description  des  Alpes  Grecques  et  Cottien- 
nés.  Vol.  I,  page  52. 

(2)  Blavignac.  Volume  I,  page  85. 

(3)  Revue  Savoisienne.  1865,  page  97. 

(4)  Suisse  Romande.  Tome  XXIX,  page  472. 


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—  40  — 

est  écrit  Narniaco  sur  une  bullo  du  9  septembre  1250  ; 
or  nous  trouvons  en  Italie,  non  loin  de  Rome,  la  ville 
de  Narni,  la  Narnia  des  Romains,  qui  donna  le  jour  à 
l'empereur  Nerva  (96-98).  Il  est  possible  que  des  colons 
ou  des  fonctionnaires,  originaires  de  Narni,  aient  donné 
à  la  colonie  naissante  le  nom  de  leur  patrie. 
La  pierre  de  Messery 

Guichenon  qui  publia,  vers  1660,  son  histoire  de  la 
Maison  de  Savoie  ne  cite  dans  tout  le  Chablais  que 
deux  inscriptions  romaines. 

La  première  placée  en  Féglise  de  Douvaine  s'y  trouve 
encore,  c'est  un  ex-voto  à, Jupiter  et  à  Mars.: 

La  seconde,  dit  notre  auteur,  «  est  au  village  de 
Meyscry  sur  une  colonne  de  roc  ronde,  à  la  porte  de 
l'église.  >  Mais  le  mauvais  état  de  la  pierre  fit  qu'il  en 
donna  une  copie  erronée.  Spon  dans  son  histoire  de  Ge- 
nève (édition  de  1730)  la  rectifia.  Cette  pierre  est  restée 
à  la  porte  de  l'église  jusqu'à  sa  démolition,  en  1846;  elle 
fut  vendue,  à  cette  époque,  avec  d'autres  matériaux  à  un 
habitant  d'Essçrt  qui  la  céda,  vers  1865,  à  M.  Turettini, 
de  Genève.  Elle  se  trouve  actuellement  au  musée  de 
cette  ville,  mais  l'inscription  en  est  aux  trois  quarts 
effacée. 
.  Elle  était  ainsi,  conçue  : 

IMP  .  CAES .  SEPTIM  .  SEVERo 
PIO .  PERTIN  .  AUG  .  ARAB  .  ADIAB . 
PARTHIC  .  MAX^  P  .  M  .  TRIB .  POT  .  IX . 
IMP  .  XI .  COS .  II .  DESIG .  ÏII .  PPPR . 

ET  .  M  .  AVREL  .  ANTONINO  . 
AUG  .  TRIB  .  POT  .  IIII .  COS  .  DESIG  . 
IIII 


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—  41   — 

Elle  doit  so  lire  :  Imperatori  Cœs^ri  Septimo  Severo 
Pio  Pertiaaci,  Augusto,  Arabico,  Adiabenico,  Parthico, 
Maximo,  pontifici  Maximo,  tribunitiae  potcstatis  nono 
anno,  imperatori  uodeciraum,  coQsuli  secundum,  dési- 
gnât! tertittm,  patri  patriae,  proconsul!  et  Marco  Aure- 
lio,  Antooino  Augusto,  tribunitiae,  potestatis  anno 
quarto,  consuli  designato.  Quartum  (1). 

Cette  inscription  dédiée  à  Tempereur  Soptime  Sévère, 
vainqueur  des  Arabes  et  des  Parthesest  de  Tan  201;  ce 
doit  être  une  pierre  milliairo  que  Ton  élevait  sur  les 
grandes  routes  pour  marquer  la  distance.  Le  chiflfre  IIII 
qui  la  termine  indique  peutrêtre  le  nombre  de  milles. 
Elle  a  donc  pu  être  placée  à  4  railles  romains  du  point 
de  départ  de  la  route.  Mais  d'où  partait  cette  route  ?  .   , 

C'est  ce  que  chaque  auteur  a  jugé  différemment.  M. . 
Turettiui  (2)  Ta  d'abord  fait  provenir  de  la  route  de 
Genève  àNyon.  M.  Tabbé  Ducis  Ta  placée  sur  la  route 
de  Genèvo  à  Douvaine  (3),  entre  la  Capite  et  SVMau- 
rice  d'où  elle  aurait  été  transportée  à  Messery.  Ces 
auteurs  ignoraient  les  nombreux  débris  romains  que 
renferme  notre  sol.  Or  d'après  une  ancienne  coutume  il 
était  d'usage  d'encastrer  dans  les  murs  des  églises  les 
inscriptions  antiques  trouvées  dans  la  localité,  comme 
on  peut  le  voir  encore  à  DouvainOyà  Passy,  à  Gevrier, 
à  Annecy-le-Vieux,  à  l'abbaye  de  Talloires.  Il  se  pour- 
rait qu'il  en  ait  été  ainsi  à  Messery. 

Le  mille  romain  vallait  1481  mètres,  les  4  milles  fai- 

(1)  A.  Ducis.  Questions  archéologiques  sur  les  Alpes  de  Savoie^ 
page  224.  Revou.  Inscriptions  de  la  Haute-Savoiey^age  46. 

(2)  Mémoires  de  la  Société  d'hist.  de  Genève,  1865,  page  118. 

(3)  A.  Ducis.  Questions  archéologiques. 


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—  42  — 

saient  5924  mètres  qui  sont  à  peu  de  choses  près  la  lon- 
gueur de  Tancienne  route  de  Messery  à  Douvaino  et  à 
la  grande  voie  de  Genève  au  Valais. 

Cette  colonne  milliaire  a,  d'après  Albanis  Beaumont  (1  ), 
4 pieds  de  haut  et  environ  15  pouces  de  diamètre;  une 
pierre  de  même  dimension  et  de  même  nature  lui  faisait 
pendant  à  la  porte  de  la  vieille  église,  elle  se  trouve 
actuellement  dans  le  mur  du  cimetière  où  elle  sert  de 
boute-roues. 

Goup-d'œil  général  sur  les  établissements  romains 
de  la  région 

Les  nombreux  débris  que  renferme  encore  notre  sol, 
après  les  siècles  écoulés,  démontrent  d'une  manière  irré- 
futable à  quel  degré  d'intensité  arriva  la  colonisation 
romaine  dans  notre  région. 

En  face  de  Nernier,  s'élevait  la  cité  de  ISiovodunum 
(Nyon),  capitale  delà  colonie  Equestre.  C'était  une  ville 
assez  importante  puisqu'elle  fut  le  siège  d'unévêché  bien 
avant  l'invasion  des  Barbares. 

Corsier,  Cologny,  Vésenaz,  Plongeon,  S<^-Maurice 
près  Collonges-Bellerive,  étaient  des  centres  de  colonies. 
A  Corsier,  se  trouvait  une  villa  dont  les  murs  étaient 
revêtus  de  mosaïques  et  de  marbres  précieux  (2).  A 
Vésenaz,  on  découvrit  en  1837  un  trésor  composé  de 
900|)ièces  romaines.  A  S*-Maurice,  on  a  recueilli  des 
pièces  d'or  à  l'effigie  des  premiers  empereurs. 

En  Chablais:  Champanges,  Thonon,  Sciez,  Douvaine, 
Bons  furent  colonisés  ;  les  eaux  de  Thonon  étaient  déjà 

(1)  Albanis  Beaumont.  Description  des  Alpes  Grecques  et  Cot- 
tiennes,  vol.  I,  page  180. 

(2)  Blavignac.  Etudes  sur  Genève^  page  140  et  141. 


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—  43  — 

coQDues,  ot  rextrêmité  orleatalo  de  cette  province  por- 
tait le  nom  dé  Finis  Hevcolana{\e  Fioage d'Hercule)  ;  à 
Champanges  en  1893,  on  découvrait  un  vase  de  terre 
renfermant  plusieurs  milliers  de  pièces  romaines  (1). 

L'eau  potable  était  amenée  à  Genève  par  une  prise 
d'eau  partant  de  la  montagne  des  Voirons,  les  canaux 
avaient  un  diamètre  de  trois  à  quatre  pieds  (2). 

Le  passage  le  plus  fréquenté  des  Alpes  pour  aller  des 
Gaules  en  Italie  était  le  col  des  Alpes  Pennines,  appelé 
le  Montjoux  (MonsJovis),  aujourd'hui  le  Grand  S*- 
Bernard  ;  une  route  militaire  en  descendait,  traversant 
le  Valais  et  longeant  les  rives  du  lac. 

Sur  le  haut  Rhône,  un  corps  de  radeliers  (ratiarii)  (3) 
était  organisé,  et  le  lac  était  sillonné  par  une  flotte  de 
barques  dont  le  préfet  ou  chef  suprême  résidait  à  Ebre- 
duni  Sapaudiae  (Yverdun  de  Savoie)  peut-être  Yvorne. 

Tandis  que  la  culture  du  blé  avait  été  rendue  obliga- 
toire en  Gaule,  celle  de  la  vigne  y  fut  interdite.  C'était 
une  mesure  toute  militaire.  Le  blé  sur  les  bords  du  Lé- 
man était  embarqué  des  colonies  riveraines  et  trans- 
porté par  les  flotilles  romaines  à  Port  Valais,  puis  à 
Agaune,  aujourd'hui  S*-Maurice,  où  il  servait  au  ravitail- 
lement des  armées  qui  passaient  les  Alpes.  Tels  furent, 
croyons-nous,  l'origine  et  le  rôle  de  la  colonie  de  Narni, 
colonie  militaire  et  agricole. 

(1|  Académie  Chablaisienne,  tome  VII,  pageX. 

(21  Blavignac,  page  137. 

(3)  Notice  des  dignités  de  l'Empire,  Prsefectus  classis  barca-- 
riorum  Ebreduni  Sapaudiae.  De  cette  époque  nous  avons  conservé 
le  nom  de  barca,  nom  donné  aux  barques  du  lac,  et  leurs  voiles 
triangulaires  appelées  voiles  latines.  La  forme  même  de  nos  bar- 
ques rappelle  celle  des  trirèmes  antiques. 


—  44  — 


CHAPITRE  IV 


Etablissement  du  christianisme.  —  Le  paganisme.  —  Sa  résis- 
tance. —  Ses  derniers  vestiges.  —  Invasion  des  Barbares. — 
Les  Burgundes. 

La  grande  route  de  Romt3  en  Germanie  et  en  Gaule 
passait  par  le  Valais  et  les  deux  rives  du  Léman,  c'est 
par  là  qu'arrivèrent  les  premiers  missionnaires  de  cette 
religion  nouvelle  qui  devait  changer  la  face  du  monde. 

Le  christianisme  pénétra  à  Genève  dès  le  l*'*'  siècle, 
mais  là  comme  ailleurs  il  eut  à  subir  des  persécutions. 

Les  premiers  chrétiens  étaient  déjà  assez  nombreux 
à  Nyon  au  troisième  siècle,  pour  qu'un  évêché  y  fut  éta- 
bli. Lors  de  la  septième  persécution  de  249  à  251,  trois 
d'entre  eux  y  furent  martyrisés.  Sous  Dioclétien,  entre 
les  années  303  et  305,  onze  autres  disciples  de  Jésus  y 
tombèrent  sous  le  glaive  des  païens  ;  1- église  de  Lau- 
sanne célèbre  leur  fête  le  22  mai  et  le  8  juin  ;  les  corps 
de  ces  saints  martyrs  étaient  conservés  à  Nyon  dans 
l'église  des  Corps-Saints  qui  devint  le  but  d'un  grand 
pèlerinage;  mais  en  1536,  lors  de  l'invasion  des  Bernois, 
ceux-ci  démolirent  l'église  et  firent  disparaître  les  corps 
des  martyrs  (1). 

Le  nombre  des  premiers  chrétiens  qui  périrent  pour 
leur  foi  fut  inimense,  c'est  par  millions  qu'on  les  compte  ; 
la  persécution  de  Dioclétien  à  elle  seule  en  fit  des  cen- 

(1)  Blavignac.  Etudes  sur  Genève,  I,  page  251.       . 


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-4S  - 

taines  do  millo  ;  aussi  n'y  a-t-il  rien  d'étonnant  que  leurs 
noms  se  soient  conservés  si  nombreux  dans  nos  contrées. 
C'est  ainsi  que  les  Marteivets,  déjà  cités  comme  village 
gallo-romain,  prés  Excénevex,  et  le  champ  voisin  appelé 
les  Martians,  pourraient  rappeler  le  souvenir  des 
martyrs. 

Malgré  les  persécutions,  la  religion  chrétienne  triom- 
pha ;  elle  se  propagea  dans  les  villes  où  résidaient  les 
évéques,  mais  fit  moins  de  progrés  dans  les  campagnes 
où  le  culte  des  fiiux  dieux  se  conserva  longtemps  encore 
et  prit,  des  paysans  ou  pagani,  le  nom  de  paganisme. 

Sur  ces  entrefaites  l'empire  romain  amolli,  corrompu, 
par  les  richesses  du  monde  qui  s'y  trouvaient  entassées, 
croulait  sous  les  attaques  et  les  invasions  des  peuples 
Germaniques.  Les  populations  écrasées  d'impôts,  pressu- 
rées par  le  fisc,  s'étaient  détachées  du  gouvernement  ;  les 
9/10  des  habitants  étaient  esclaves  ;  ils  se  soulevèrent 
au  lieu  de  les  combattre;  à  la  guerre  étrangère  se  joignit  : 
la  guerre  civile  ;  c'est  ce  qui  explique  la  facilité  avec 
laquelle  eut  lieu  l'invasion  des  peuples  du  Nord. 

Les  Burgundes,  un  des  principaux  de  ces  peuples, 
s'établit  dans  la  vallée  du  Rhône  et  choisit  Genève 
comme  capitale.  Ils  avaient  déjà  été  convertis  au  chris- 
tianisme par  de  hardis  missionnaires;  leur  établissement 
dans  notre  pays  s'opéra  par  suite  d'un  traité.  Cultiva- 
teurs ou  pasteurs,  ils  préférèrent  la  vie  champêtre  au 
séjour  des  villes  ;  ces  dernières  continuèrent  donc  à  être 
habitées  par  les  Gallo-Romains  ;  les  terres  furent  parta- 
gées entre  les  deux  peuplés.  «  Il  faut  considérer  dit 
«  Montesquieu  (l)que  ces  partages  ne  furent  point  faits 

(1)  Montesquieu.  Esprit  des  lois.  Livre XXX.  Chapitres  VIH  et  IX. 


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-  46  - 

«  par  un  esprit  tyrannique,  la  loi  voulait  que  le  Bour- 
«  guigoon  ait  les  deux  tiers  des  terres,  et  le  tiers  des 
«  serfs.  Le  Bourguignon  qui  était  chasseur  et  pasteur 
«  avait  besoin  de  beaucoup  de  terres,  il  ne  dédaignait 
«  pas  de  prendre  des  friches.  Le  Romain  au  contraire 
«  gardait  les  terres  les  plus  propres  à  la  culture,  il  avait 
«  donc  besoin  de  moins  de  terre  et  de  plus  d'esclaves.  » 

D'ailleurs  les  Burgundes  étaient  tout  au  plus  soixante 
mille  disséminés  sur  toute  l'étendue  du  bassin  du  Rhône 
et  de  la  Suisse,  ils  avaient  toutes  les  raisons  de  mécon- 
tenter le  moins  possible  la  population.  Suivant  un  auteur 
contemporain,  Paul  Orose,  «  les  Bourguignons  vivaient 
au  milieu  des  Romains  non  comme  avec  des  sujets,  mais 
comme  avec  des  frères.  » 

Dans  notre  pays  la  colonisation  Burgunde,  laissant  la 
rive  du  lac  aux  Gallo-Romains,  semble  avoir  choisi  de 
préférence  le  voisinage  des  montagnes  alors  inhabitées. 
Tous  les  noms  terminés  en  inge  et  en  ens  décèlent 
une  origine  Germanique  (1)  ;  ces  noms  forment  une  ligne 
continue  au  pied  du  massif  du  Chablais. 

Tels  sont:  Larringes,  Merninge,  Cursingcs,  Présingo, 
AUinges,  Mesinges,  etc.... 

Marignens,  Brens,  Marcorens,  Brécorens,  Braillant, 
Cervens,  etc 

Les  populations  de  nos  hautes  montagnes  ont  conservé 
jusqu'à  nos  jours  les  mœurs  familiales,  les  traits  et  le 
caractère  de  la  race  Germanique  que  nous  a  dépeint 
Tacite,  le  plus  célèbre  des  historiens  Romains,  et 
comme  l'a  si  bien  fait  remarquer  M.  le  Chanoine  Mercier 
dans  son  histoire  de  l'Abbaye  d'Abondance. 

(1)  Jules  Vu  y.  La  villa  Quadruvium, 


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-  47  — 

Dans  la  plaine,  les  Burgiindes  se  Axèrent  en  moîus 
grand  nombre.  Cependant  cette  augmentation  de  popu- 
lation occasionna  des  défrichements  nouveaux.  Les 
Burgundes  employaient  le  feu  comme  le  moyen  le  plus 
propre  à  opérer  leurs  défrichements  ;  le  mot  Essarta  se 
disait  des  terres  nouvellement  défrichées  (Peyré,  loi 
Gombette),  il  provient  du  latin  eœaro  et  exartare,  il  fut 
très  employé  au  moyen-àge;  nous  avous  le  mot  patois 
essarta  qui  a  la  même  signification,  nos  champs  dérivant 
de  ce  mot  sont  nombreux  :  Les  Esserts,  les  Essié,  les 
Essartons,  Essert  autrefois  Excert,  et  que  Ton  prononce 
Essié  en  patois. 

Vers  1820,  on  découvrit  à  Nernier  à  l'extrémité 
Nord  du  parc  d'Antioche,  à  proximité  de  la  rive  du  lac, 
un  certain  nombre  de  tombeaux  en  dalles,  dans  lesquels 
les  enfants  du  village  allaient  se  coucher  (1);  ce  lieu 
s'appelait  autrefois  Fatamaz,  qui  pourrait  être  une 
corruption  de  Faramaz.  Les  Faramani  cités  dans  la  loi 
Gombette,  auraient  été,  suivant  quelques  historiens,  des 
groupes  de  familles  Burgundes,  que  le  roi  Gondebaud 
aurait  installés  sur  le  territoire  des  villas  et  auxquels  il 
aurait  accordé  la  moitié  des  fruits,  des  vergers  et  des 
essarts  (2). 

Le  terrain  qui  comprend  l'église,  le  cimetière  de 
Nernier  et  quelques  jardins  voisins,  est  désigné  dans  le 
cadastre  de  1738  sous  le  nom  de  Manfy.  Ce  nom  a  été 
défiguré  par  le  langage  local  qui  transforme  l's  en  f. 
(Ainsi  panse  et  pansu,  se  disent  panfe  et  panfu).  Donc 

,    (1)  Communiqué  par  M.  Lucien  Ducliêne,  maire  de  Nernier. 

(2)  Revue  Savoisienne^  1898,  pages  19  et  21.  (Les  Burgundes  en 
Savoie,  par  Marteaux  et  Marc  Leroux). 


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maofy  rappelle  maosy  (mansi),  nom  sous  lequel  on  dé- 
signait, à  répoque  Burgonde,  les  terres  détachées  du 
domaine  et  réparties  entre  le  personnel  agricole. 

A  Yooivey  la  villa  de  Jossinge  (ou  Diossinge,  suivant 
la  prononciation  locale),  nxppelle  un  nom  d'origine  ger- 
manique ou  un  noqi  de  famille  gallo-romaine,  dénaturé 
par  les  gosiers  burgundes. 

A  l'entrée  du  village  d'Essert  existent  les  vignes  de 
Tranchepiat  qui  s'appelaient  autrefois  le  borgel,  une 
vigne  voisine  est  appelée  en  Merode  sur  le  cadastre  de 
1670;  ces  deux  noms  sont  d'origine  germanique,  borgel^ 
dérivant  Aeburg  ou  borg,  maisons  fortifiées,  et  Merode^ 
provenant  comme  Merowig,  de  Mcro,  élevé. 

Evangélisation  définitive  des  campagnes 

Sous  les  rois  Burgundes,  Allinges  devint  la  capitiile 
du  Chablais  actuel  qui  prit  le  nom  de  pagiu^  Allingien- 
sis;  les  évéqucs  au  milieu  de  l'anarchie  et  des  désordres 
étaient  devenus  tout  puissants,  les  circonscriptions 
ecclésiastiques  recurent  les  mêmes  limites  que  les  divi- 
sions civiles  ;  \opagus  Allingiensis  devint  au  point  de 
vue  religieux  le  décanat  d' Allinges,  dont  Messery  et 
Nernier  firent  partie. 

C'est  à  cette  époque  que  remonte  l 'evangélisation  défi- 
nitive de  nos  campagnes.  Un  temple  dédié  à  Jupiter,  si 
l'on  en  croit  une  tradition,  s'élevait  sur  la  montagne 
d'Evoëron  et  l'évangile  éclairait  depuis  longtemps  les 
villages  de  la  plaine  que  l'idole  de  la  montagne  conti- 
nuait de  recevoir  les  hommages  de  ses  fidèles  adorateurs. 
Un  pieux  évoque  de  Genève,  Domitien,  qui  était  en 
mémo  temps  conseiller  de  Gondegisèle,  roi  d(î  Bourgo- 


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-  49  - 

gae,  résolut  de  détruire  ce  dernier  asile  du  paganisme, 
il  monta  donc  aux  Voirons  et  renversa  l'idole  ;  c*ét<\it 
entre  Tan  450  et  500  de  notre  ère  (1). 

Vers  522,  Saint-A  vit,  archevêque  de  Vienne,  revenant 
du  pèlerinage  de  S*-Maurice  par  la  route  d'AUinges, 
inaugura  l'église  d'Annemasse  sur  l'emplacement  d'un 
fanum  ou  temple  païen.  Ceci  était  devenu  général,  ce 
saint  personnage  le  constate  ainsi  dans  ses  homélies: 
«  Sous  le  sceptre  florissant  de  la  puissance  chrétienne 
€  on  voit  se  multiplier  les  lieux  de  prières,  les  temples 
«  des  martyrs,  les  sacrés  parvis;  les  bourgades  se  parent 
€  d'églises  non  moins  que  de  patrons,  ou  pour  mieux 
«  dire  d'illustres  personnages » 

Dès  la  fin  du  VI«  siècle,  l'évangélisation  de  nos  cam- 
pagnes était  une  œuvre  terminée.  C'est  à  cette  époque 
que  vraisemblablement  remonte  la  fondation  de  l'église 
de  Nernier,  bâtie,  comme  nous  l'avons  dit,  sur  des  ruines 
romaines.  Elle  reçut  comme  patron,  S*-Martin,  évéque 
de  Tours,  mort  en  400,  alors  en  grande  vénération  dans 
toute  la  Gaule  (ce  grand  saint  avait  passé  par  Genève 
pour  se  rendre  en  pèlerinage  à  S*-Maurice  en  Valais). 

Mais  le  paganisme  avait  de  profondes  racines  dans 
nos  campagnes,  et  il  se  perpétua  encore  longtemps  dans 
un  culte  superstitieux.  Presque  partout  la  religion  chré- 
tienne dut  élever  la  croix  à  l'endroit  précis  où  quelque 
superstition  persistait. 

Près  des  traces  romaines  de  Collan,  existaient  encore 
il  y  a  trente  ans  deux  blocs  erratiques  énormes,  connus 
sous  le  nom  de  pierres  de  colan.  Autrefois  à  Messery, 
quand  une  personne  ne  savait  à  quoi  saint  se  vouer,  on 

(1)  J.-F.  Gonthier.  Les  Voirons. 

46 


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—  50  -^ 

lui  disait  ea  riant  «  dit  on  pater^  on  avé  pé  la  pirra 
dCColan.  >  (1)  Il  y  a  là  daas  cette  locution  comme  un 
dernier  souvenir  du  culte  dont  on  entourait  cette  pierre  ; 
or  les  païens  avaient  une  déesse,  présidant  aux  collines 
du  nom  de  collaline,  et  le  champ  voisin  porte  le  nom 
de  champ  ou  pré  de  la  Croix. 

Les  divinités  du  paganisme  désignées  par  la  suite 
sous  le  nom  de  fées,  furent  chargées  par  l'imagination 
populaire  de  pouvoirs  merveilleux. 

Près  le  village  d'Essert,  en  face  des  traces  romaines 
de  Bonnet  se  trouve  le  champ  appelé  Félison,  le  champ 
voisin  s'appelle  la  Croix-vy,  la  croix  vieille  (jardin 
Etienne  Quiblier). 

Non  loin  de  là  se  trouvent  les  bois  de  Fécler  (les  fées- 
claires),  à  ce  sujet,  une  légende  :  Il  y  a  de  c(îla  bien 
longtemps,  dit-on  au  village  d'Essert,  un  homme  du 
nom  de  Tabasan,  allait  voler  du  bois,  la  nuit,  dans  la 
foret  de  Fécler;  or  un  soir  qu'il  faisait  clair  de  lune,  les 
fées  l'aperçurent  commettant  son  vol,  elles  le  prirent 
avec  son  fagot,  et  pour  le  punir  le  placèrent  dans  la 
lune,  et  depuis  cette  époque  on  peut  voir  par  les  nuits 
étoilées,  sa  tête  grimaçante  apparaître  dans  cet  astre. 

Au  Cret  de  la  Braise,  existait  autrefois  une  pierre 
plate  rectangulaire  de  la  grandeur  d'une  table  :  une 
femme,  disait-on,  y  apparaissait  la  nuit,  assise  sur  la 
pierre  et  filant.  On  la  désignait  sous  le  nom  de  la  femme 
qui  file.  Les  fées  venaient  y  danser  en  rond  (les 
prés  voisins  sont  appelés  prés  Féron). 

(1)  Traduction  française.  Dis  un  pater,  un  ave  pour  la  pierre  de 
Gollan. 


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—  51  ^ 

Enfin,  non  loin  des  traces  romaines,  des  bois  (ÏAi  à 
Messery,  se  trouve  le  puits  des  Payes  ou  des  Fées.  Ce 
nom  lui  vient  sans  doute  de  sa  position  au  milieu  des 
bois  qui  a  dû  souvent  intriguer  les  esprits. 


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-  b2  - 


CHAPITRE  V 


Le  Moyen-Age.  —  Les  Châteaux.  —  Les  Seigneurs.  —  Beaure- 
gard.  —  Ravorée.  —  Y  voire.  —  Nernier.  —  Frize.  —  Barde- 
nuche. —  Le  Borgel  d'Essert.  —  Le  Borgel  de  Messerv. 


Les  invasions  des  Barbares  aux  IV®  et  V®  siècles,  les 
ravages  des  Francs  en  Tan.  500,  ceux  des  Lombards  au 
VI®  siècle,  des  Sarrasins  aux  VIII^  et  IX^,  firent  dispa- 
raître de  notre  pays  la  civilisation  romaine  et  les  nom- 
breuses habitations  qui  couvraient  notre  sol.  Les  Francs 
semblent  avoir  dévasté  notre  pays  plus  que  tous  les 
autres  barbares,  Genève  fut  brûlée  et  le  pays  entière- 
ment saccagé. 

Devant  le  brigandage  et  le  manque  de  sécurité,  les 
villes,  les  bourgades  s'entourèrent  de  murs,  les  campa- 
gnes se  hérissèrent  de  châteaux  forts  auprès  desquels 
les  populations  cherchèrent  un  abri.  «  L'espèce  de 
«  parallélogramme  dit  un  auteur  sa voisien,  (1)  qui  dans 
«  le  Chablais  moderne  s'étend  depuis  les  confins  de 
«  l'ancienne  chàtellenie  d'Allinges,  entre  le  lac  Léman 
«  et  la  majestueuse  montagne  des  Voirons  jusqu'à 
«  l'Arve,  présentait  au  moyen-àge  un  assez  singulier 
«  spectacle.  Jamais  en  effet  territoire  ne  fut  plus  bi- 
«  zarrement  fractionné  par  le  régime  féodal  ;  c'était  un 

(1)  Léon  Menabrea.  Des  origines  féodales  dans  les  Alpes  occiden- 
tales (page  293). 


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—  53  — 

«  champ  clos  où  les  comtes  de  Genève,  les  comtes  de 
«  Savoie,  les  sires  de  Faucigny,  et  après  ceux-ci  les 
«  Dauphins  de  Vienne  leurs  successeurs,  ne  cessèrent 
<c  pendant  trois  siècles  de  se  livrer  des  combats  achar- 
ne nés.  Chacun  de  ces  princes  y  possédait  des  terres. 
«  des  châteaux,  y  comptait  ses  fidèles,  ses  feudataires, 
«  de  là  des  querelles  sans  fin.  > 

Sur  remplacement  de  notre  colonie  romaine,  il  semble 
qu'un  système  de  défense,  dont  Yvoire  et  Nernier  au- 
raient été  le  centre,  ait  présidé  à  la  construction  de  nos 
châteaux.  Tout  d'abord  en  première  ligne,  sur  la  rive 
môme  du  lac  se  dressaient:  Hermance,  Beauregard, 
Nernier,  Yvoire,  Ravorée,  Coudrée;  tandis  qu'en  arrière 
sur  le  sommet  du  coteau  s'élevait  la  maison  forte  de 
Frise,  et  plus  en  arrière  le  château  de  Bardenuche. 

BEAUREGARD 

Ce  château  est  situé  sur  le  territoire  de  Chens,  entre 
Hermance  et  Messery.  C'est  en  1325  que  nous  voyons 
apparaître  son  nom  pour  la  première  fois  dans  nos 
annales. 

Au  printemps  de  l'année  1325,  les  troupes  du  Dauphin 
Guignes  VIII,  unies  à  celles  du  Sire  de  Faucigny  et  du 
Comte  de  Genevois  ravageaient  *  le  Chablais  et  mena- 
çaient Yvoire  ;  le  bailli  de  Chablais  et  le  vidomne  de 
Genève  appelèrent  à  leur  secours  de  vaillants  hommes 
d'armes  qui  s'enfermèrent  aux  AUinges;  parmi  ces  hom- 
mes d'armes  se  trouvait  Jean  de  Beauregard  (1). 
(Johannes  de  Belregart). 

L'année  suivante  le  château  de  Beauregard  joua  un 

(1)  Académie  Salésienne,  III. 


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—  54  — 

rôle  important  :  le  comte  Edouard  de  Savoie  faisait  de 
grands  préparatifs  en  vue  d'enlever  Hermance  à  Tarmée 
dauphinoise.  La  tour  de  Beauregard  servit  de  quartier 
général  et  des  quantités  de  foin  et  de  vin  y  furent  ame- 
nées (1):  «  cent  et  une  octanes  de  blé,  mesure  de  Genève, 
furent  achetées  au  prieur  de  Douvaine  et  livrées  à  un 
bourgeois  d'Evian  pour  faire  le  pain  nécessaire  à  Tarmée 
de  Savoie  ».  Le  comte  arriva  devant  Hermance  le 
1«^  mai  1326,  mais  un  orage  épouvantable  étant  survenu, 
il  leva  le  siège  et  fit  reconduire  à  Versoix  sur  dix  grosses 
barques,  le  blé,  le  foin  et  le  vin  qui  avaient  été  réunis 
à  Beauregard  (Belregart).  La  tour  actuelle  du  château 
avec  ses  murs  de  trois  métrés  d'épaisseur  remonte 
vraisemblablement  à  cette  époque. 

Nos  châteaux  étaient  reliés  par  des  chemins  stratégi- 
ques, c'est  ainsi  que  le  chemin  de  Langin  qui  traverse 
le  territoire  de  Chens  et  de  Douvaine  conduisait  d'Her- 
mance  à  la  tour  de  Langin.  Suivant  une  tradition,  un 
ancien  chemin  traversant  les  bois  faisait  communiquer 
Beauregard  avec  les  Allinges. 

Que  devint  la  famille  desrfe  Belregart?  Elle  s'éteignit 
sans  doute,  car  nous  voyons  le  10  septembre  1393  le 
pape  Clément  VII  (dernier  fils  d'Amédée  III,  comte  de 
Genevois)  donner  l'investiture  du  fief  de  Beauregard  à 
Pierre  de  Balleyson  déjà  seigneur  du  lieu  (2). 

Le  27  novembre  1422,  Jean  et  Anthoine  de  Balleyson 
se  reconnaissent  vassaux  du  prince  Amédée  duc  de  Sa- 
voie à   cause  de  Beauregard;  dans   cette  reconnais- 

(1)  Octane,  mesure  de  capacité  pour  les  graines,  nommée  aussi 
quelquefois  coupe,  copa,  octana,  oytana.  Académie  Chabl.j  VII. 

(2)  Revue  Savoisienne^  1880,  page  26. 


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—  55  — 

sauce  sont  relatées  les  attributions  judiciaires  dépendant 
de  ce  château.  Elles  comprenaient  : 

«  Les  fourches,  plots,  gibets,  piliers,  piloris  et  autres 
instruments  nécessaires  pour  Texercice  de  la  dite  juri- 
diction ;  avec  aussi  la  visite  des  grands  chemins,  les 
droits  de  lauds,  ventes,  chasse,  eaux,  cours  d'eaux, 
poids,  mesures,  etc.  (1). 

Au  moyen-àge,  chaque  seigneur  avait  ses  poids  et 
mesures  différents  de  ceux  du  voisin  ;  dans  un  contrat 
il  fallait  avoir  soin  de  spécifier  si  la  coupe  de  blé  était 
de  la  mesure  de  Nyon,  de  Genève,  dTvoire,  de  Beaure- 
gard,  etc....;  ces  différentes  mesures  restèrent  en  usage 
jusqu'à  la  Révolution.  Celles  de  Genève  et  de  Thonon  le 
sont  encore. 

Le  château  de  Beauregard  demeura  dans  la  famille 
de  Balleyson  jusqu'au  XVI®  siècle,  Marie  fille  de  Gui- 
gnes de  Balleyson  porta  le  fief  de  Beauregard  à  Claude 
de  Mionnax  son  mari  (1543). 

Cette  famille  augmenta  ses  possessions  en  Chablais 
par  l'acquisition  de  la  seigneurie  do  Massongy  achetée 
aux  redoutés  seigneurs  de  Berne  pour  le  prix  de  800 
écus  d'or  (1552),  puis  par  une  partie  de  la  seigneurie  de 
Ballaison  et  de  la  baronnie  d'Hermance  (2). 

Françoise  de  Mionnas  fille  et  unique  héritière  de 
Claude,  épousa  illustre  et  puissant  seigneur  Bernard 
d'Allinges,  seigneur  d'Allinges.  de  Coudrée,  de  Lan- 
gin,  etc....  C'est  de  cette  époque  que   date  la  toiture 

(1)  Archives  départementales.  Sommaire  des  fiefs),  article 
Beauregard. 

(2)  Revue  Savoisienne,  1880,  page  26,  Comte,  notice  sur  Beaure- 
gard. 


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—  56  — 

actuelle  de  la  four  qui  porte  incrustée  sur  une  solive  la 
date  de  1573. 

Isaac  d'Allinges,  par  son  testament  du  14  janvier 
1 054,  institua  héritiers  de  ses  avoirs  ses  deux  neveux: 
Jacques  d'Allinges  qui  eut  Coudrée  et  Servette,  et  Ber- 
nard de  Budé  qui  eut  toutes  ses  autres  possessions. 

Le  8  septembre  1670,  les  nobles  de  Budé  vendirent 
Beauregard,  à  une  famille  d'origine  génoise,  les  Costa 
qui  le  possèdent  encore. 

Messire  Gaspard  Costa,  comte  du  Villard,  était  prési- 
dent de  la  Chambre  des  Comptes  de  Savoie  ;  son  flls 
Jean-Baptiste  Costa  lui  succéda  dans  sa  charge.  Le 
20  janvier  1700,  Beauregard  fut  érigé  en  marquisat  en 
sa  faveur;  il  étendit  ses  domaines  par  l'acquisition  de 
la  seigneurie  de  Frise  et  d'une  partie  de  celle  de  Nornier. 
Par  suite  de  ces  agrandissements  la  juridiction  du  mar- 
quisat de  Beauregard  s'étendit  sur  Messery  et  Nernicr 
durant  tout  le  XYIII^  siècle. 

Parmi  les  hommes  remarquables  sortis  de  cette  famille 
nous  devons  citer  :  Barthélémy  Costa,  marquis  de  St- 
Genix,  St-Maurice,  Gerbex,  le  Villars,  Beauregard, 
seigneur  de  Nernier,  général  des  armées  de  son  Altesse 
Electorale  de  Bavière,  son  premier  chambellan,  gouver- 
neur de  la  ville  et  province  de  Neumarck  dans  le  haut 
Pahitinat,  1733,  auteur  d'un  ouvrage  d'agriculture 
estimé  «  Essai  sur  la  culture  dans  les  pays  montueux. 
Chambéry,  1773. 

Le  marquis  Albert  Costa  de  Beauregard,  reçu  mem- 
bre de  l'Académie  française,  février  1897,  a  célébré 
dans  son  livre  «  un  homme  d'autrefois  »,  les  vertus  et 


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—  57  — 

les  tribulations  de   son  arriére  grand-père,  le  marquis 
Henri,  pendant  la  Révolution. 

Le  comte  Jocelyn  Costa  de  Beauregard,  frère  du  pré- 
cédent, propriétiiire  actuel  du  château  a  réuni,  à  Beau- 
regard,  une  superbe  collection  d'antiquités  lacustres  et 

préhistoriques. 

ROVORÉE 

Rovéry,  Rovôriaz,  Rovéréa,  dont  les  ruines  surplom- 
bent la  grève  du  lac,  entre  Excénevex  et  Yvoire,  est  un 
de  nos  plus  vieux  châteaux. 

La  famille  seigneuriale  qui  portait  ce  nom  était  une 
des  plus  anciennes  et  des  plus  illustres  du  Chablais, 
c'étiiit  sur  ses  propriétés  que  fut  bâti  avant  1094  le 
cœnobium  ou  abbaye  de  St-Jean-d'Aulps. 

L'étymologie  de  Rovery  (comme  Ton  dit  dans  le 
pays)  provient  du  vieux  français  Rouvre,  chêne,  et  sui- 
vant Tissotdu  latin,  robw\  chêne  (1). 

Par  le  traité  do  Voiron,  26  mai  1293.  nous  voyons 
Béatrix,  dame  de  Faucigny,  faire  donation  à  son  cousin 
Amédée,  comte  de  Savoie,  des  fiefs  de  Rovorée  et  de 
Nernier  (2).  Cependant  Béatrix  rentra  bientôt  en  pos- 
session de  Rovorée. 

La  guerre  ayant  de  nouveau  éclaté,  le  bailli  du  Cha- 
blais en  profita  pour  venir  mettre  le  siège  devant  le  châ- 
teau ;  le  châtelain  de  Versoye  lui  envoya  sur  une  barque 
des  engins  de  guerre  avec  plusieurs  compagnons  et  nau- 
tonniers(3),  Rovorée  fut  pris  et  détruit  le  27  août  1307. 

(1)  Tissot.  Les  noms  de  lieux  de  la  Haute-Savoie.  Retue  Savoi- 
sienney  1891. 

(2)  Académie  Salésienne.   Tome  III,   page    122. 

(3)  Mémoires  de  Genève.  Tome  IX,  page  251  (comptes  des  Châ- 
telains de  Versoix). 


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—  58  — 

En  1308,  parla  paix  do  Montmôlian,  le  Dauphin  Hu- 
gues et  Béatrix  promirent  de  rendre  hommage  à 
Amédée  V  pour  les  fiefs  de  Rovorôe,  de  Nernier  et  de 
Gex  (1).  Rendu  au  duc  do  Savoie,  à  la  paix  de  1355,  le 
domaine  de  Rooéria  ou  Rooery  fit  partie  jusqu'à  la  Ré- 
volution française  de  la  seigneurie  dTvoire. 

Il  ne  reste  plus  de  nos  jours  de  ce  château  que  quel- 
ques pans  de  murs  sapés  par  les  eaux,  et  une  double 
enceinte  de  fossés  encore  visibles.  Mais  autrefois  il 
s'avançait  beaucoup  plus  loin  dans  le  lac  ;  en  1815,  des 
bateliers  s'étaient  mis  à  en  démolir  les  murs  dont  ils 
transportaient  les  matériaux  à  Genève,  au  cours  de  leurs 
travaux  ils  découvrirent  une  cave,  dans  laquelle  ils 
trouvèrent  deux  tonneaux  intacts  qui  renfermaient 
encore  du  vin  (2).  Le  domaine  de  Rovéry  appartient  de 
nos  jours  à  M.  le  baron  d'Y  voire. 

YVOIRE 

Le  village  d'Yvoire  est  bâti  sur  le  lac  à  l'extrémité 
d'un  cap  ou  pointe  appelée  par  nos  bateliers  :  la  becca 
d'Fcoitère;  l'étymologie  de  ce  nom  dérive  du  vieux 
français,  éoa,  évier,  eau.  Sur  une  bulle  du  pape  Inno- 
cent IV,  du  9  septembre  1250  l'église  d'Yvoire  est  dé- 
nommée ecclesta  de  Evyre,  nom  que  les  notaires  du 
moyen-àge  traduisaient  par  Aquaria. 

Le  25  mai  1264  un  Pierre  d'Yvoire,  chevalier,  donnait 
au  couvent  de  Filly  tous  ses   droits  sur  les  bois  de 

(1)  Académie  Salésienne,  Tome  111,   page    127. 

(2)  Communiqué  par  M.  Novel  dit  TEgyptien,  vieillard  nona- 
génaire demeurant  à  Yvoire;  cette  trouvaille  causa  d'après 
M.  Novel  une  certaine  émotion  à  Yvoire,  on  eu  parla  longtemps 
dans  le  pays. 


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—  59  — 

Fescley,    du    Vernay    et   sur   la    dîme  des    Dovales 
dTvoiro  (1),  le  tout  du  fief  d'Anselme  de  Compey. 

Le  5  juillet  1289,  Antelme  de  Compey  dTvoire  pré- 
lait hommage  à  la  comtesse  Béatrix  de  Faucigay  (2). 
Cependant  on  était  au  prélude  de  la  longue  guerre  du 
Faucigny  qui  devait  désoler  notre  pays  pendant  prés  de 
cent  ans.  Le  comte  de  Savoie  considérant  de  quelle 
utilité  pourrait  lui  être  la  position  dTvoire,  afin  de 
contrebalancer  l'importance  d'Hermance  possédée  par 
le  Dauphin,  résolut  de  l'acquérir.  Après  entente  avec  le 
tuteur  des  enfants  d'Antelme  de  Compey  et  leur  conseil 
de  famille,  un  acte  d'échange  fut  passé  au  Bourget  le 
29  août  1306.  Les  de  Compey  en  échange  d'Y  voire  re- 
cevaient la  maison  forte  de  la  chapelle  de  Marin,  la 
mestralie  de  Thonon  et  66  hommes  taillables  de  Marin 
et  dos  environs,  etc.  (3)  et  (4). 

Yvoire  fit  dès  lors  partie  des  apanages  souverains, 
c'est  à  cette  époque  que  furent  élevés  les  remparts  qui 
entourent  encore  le  village.  Quelles  furent  les  luttes 
que  notre  forteresse  eut  à  soutenir  pendant  cette  terrible 
guerre  du  Faucigny  ?  Les  comptes  des  châtelains 
d'Y  voire  (1305-1356)  conservés  aux  archives  Camérales 
à  Turin  pourraient  nous  les  faire  connaître,  mais  en 
attendant  leur  publication  qui  jetterait  une  vive  lumière 
sur  l'histoire  de  notre  région,  voici  ce  que  nous  avons 
pu  recueillir. 


(1)  Académie  Salésienne^  III.  page  127. 

(2)  Turin.  Archives  de  la  Cour^  folio    6  et  Archives  départe- 
mentales. 

(3)  Archives  départementales.  Sommaire  des  fiefs. 

(4)  Revue  Savoisienne.  1897,  pages  156-157. 


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—  60  — 

En  1316,  deux  cents  barques  sont  amenées  dTvoire 
à  Evian  pour  prendre  les  secours  que  le  châtelain  d'Al- 
linges  envoie  à  Louis,  baron  de  Vaud,  en  guerre  avec 
le  comte  de  Genève  (1). 

Vers  la  fin  d'août,  le  bailli  du  Chablais  renforce  la 
garnison  dTvoire  et  parcourt  la  terre  de  Ballaison  en 
brillant  plusieurs  maisons. 

En  1322,  le  1«^  octobre,  le  châtelain  d'Allinges  envoie 
à  Humbert  seigneur  de  Collombes  35  livres  3  sols  3  de- 
niers genevois  pour  la  solde  de  la  garnison  que  ce 
seigneur  tient  dans  la  ville  d'Yvoire. 

En  1323  le  châtelain  d'Allinges,  Jean  Dumont, 
craignant  pour  la  garde  de  la  ville  d'Yvoire,  y  tient 
10  hommes  armes  pendant  20  jours. 

En  1325,  le  môme  châtelain  envoie  le  seigneur  xNi- 
cholet  d'Aulps  avec  huit  clients  armes,  en  garnison  à 
Yvoire  pendant  55  jours.  Enfin  dans  le  courant  de  juin 
et  de  juillet  de  la  même  année,  les  ennemis  menaçant 
Yvoire,  le  même  châtelain  y  envoie  une  première  fois 
18  clients  de  Thonon  et  25  autres  le  27  juillet.  La  paix 
définitive  ne  fut  signée  qu'en  1355  (2). 

C'est  au  milieu  de  ces  vicissitudes  que  le  co.mte  de 
Savoie  en  compensation  des  pertes  causées  par  la  guerre, 
accorda  aux  habitants  d'Yvoire  des  franchises  commu- 
nales et  le  droit  de  bourgeoisie  (2  mars  1324). 

Les  habitants  des  villes  et  des  bourgs  qui  recevaient 
des  franchises  n'étaient  astreints  au  service  militaire  que 
pour  un  temps  déterminé.  Les  bourgeois  d'Yvoire  de- 
vaient, en  cas  de  guerre,  15  jours  de  cavalcade  à  leur 

1)  Gonthier.  Les  Châteaux  des  ÂUinges. 

2)  Ibid, 


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-61  - 

frais,  dans  le  rayon  d'une  journée  de  distance  du  lac. 
Le  nom  de  ville  donné  à  Yvoire  au  moyen-âge  ne 
prouve  pas  que  sa  population  fut  bien  considérable, 
c'était  plutôt  un  terme  do  convenance  donné  aux  bourgs 
murés.  Ainsi  en  1472  Yvoire  et  Nornier  réunis  n'ont 
que  30  feux.  En  1518  Yvoire  a  36  feux,  Nernier  25  et 
Messery  40  (1). 

Par  la  paix  de  1355,  leFaucigny  avait  fait  retour  au 
comte  de  Savoie.  Yvoire  ne  se  trouvant  plus  à  la  fron- 
tière de  l'Etat,  perdit  dés  lors  son  importance  militaire; 
le  comte  de  Savoie  le  vendit  en  1360  à  An  tel  me  de 
Miolans,  il  passa  ensuite  eu  1402  par  mariage  dans  la 
famille  de  Ravorée. 

Le  10  mai  1469  Amblardde  Ravorée, seigneur d'Yvoire 
et  do  Ravorée,  se  reconnaît  tenir  en  fîef  noble,  dos 
comtes  de  Savoie  :  le  château  et  village  avec  les 
péages (2)  fossés,  franchises  de  la  ville  et  limites  accor- 
dées par  le  comte  de  Savoie. 

Ses  autres  droits  féodaux  sont  : 

1»  Le  droit  des  foires  qui  se  tiennent  dans  la  dite 
ville  d'Yvoire  toutes  les  années  pendant  trois  jours  con- 
tinuels, commençaut  le  jour  de  la  S^-Martiu  d'hiver  ; 

2<>  Le  droit  sur  le  marché  qui  se  tient  le  mercredi  de 
chaque  semaine; 

3»  La  leyde  perçue  dans  toutes  les  foires  et  marchés 
du  mandement  ; 

fl)  Piccard.  Abbaye  de  Filly.  pages  161,  176. 

(2)  Les  péages  étaient  un  impôt  prélevé  à  l'entrée  d'une  ville, 
sur  les  personnes,  les  bétes  de  somme  et  les  marchandises.  La 
route  de  Nernier  à  Excénevex  passait  dans  Yvoire,  et  les  péages 
étaient  perçus  aux  portes,  mais  les  bourgeois d'Alliuges  en  étaient 
exempts. 


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-  62  - 

4<»  Les  langues  bovines  qui  se  vendaient  dans  la  bou- 
cherie du  dit  lieu(l); 

50  Le  toisage  des  maisons  de  la  ville,  soit  bourg 
dTvoire  (2)  ; 

60  Les  deux  parts  des  corvées  qu'il  a  riôre  Nernier  et 
Missérier  (Messery)  sur  toutes  les  personnes  ayant  bestes 
à  la  charrue  excepté  les  nobles  ; 

7°  Le  four  banal  avec  ses  droits  de  fournage  ; 

8°  Le  banc  du  vin,  toutes  les  années  pendant  15  jours 
du  mois  de  may,  suivant  la  coutume  du  dit  lieu,  pendant 
lequel  temps  il  n'est  permis  à  personne  d'en  vendre  sans 
la  permission  du  seigneur  ; 

9"  Plus  les  droits  de  pêche,  de  missellerie  (garde- 
champêtre),  etc.  ; 

10°  Plus  une  rente  féodale  rière  Excenevay,  Morsier, 
Yvoire,  Vers  Marterey,  Collonges,  Cornier,  Nernier  et 
autres  lieux  (3). 

En  1494  Yvoire  fut  vendu  à  Georges  d'Antioche  qui 
en  passa  reconnaissance  en  faveur  du  prince  Philibert 
duc  de  Savoie,  le  12  décembre  1500.  (4) 

Son  neveu  Pierre  d'Antioche  le  légua  en  1521  à 
François  de  S*-Jeoire  dit  d'Antioche;  dans  la  reconnais- 
sance passée  par  ce  dernier,  le  23  février   1544,  nous 

(1)  Par  le  droit  des  langues  bovines,  le  Seigneur  percevait  les 
langues  de  toutes  les  bêtes  bovines  tuées  dans  la  localité. 

(2)  Le  toisage  des  maisons  était  un  impôt  sur  la  façade  ou  la 
devanture  des  maisons,  il  était  ordinairement  de  deux  deniers 
pour  chaque  toise  de  superficie,  il  était  dû  par  l'occupant  et  eut 
pour  résultat  de  modifier  Tarcliitecture  de  la  pluj)artde  nos  habi- 
tations, on  diminuait  les  façades  et  Ton  augmentait  la  profondeur. 

(3)  Archives  départementales.  Sommaire  des  fiefs.  Les  ruines  de 
la  maison  des  Marterey  existent  encore  au-dessus  d'Excénevex,  à 
une  centaine  de  mètres  du  lieu  où  s'élevait  le  village  gallo-romain, 
dans  le  champ  dépendant  de  la  ferme  de  Madame  de  Canchy. 

(4)  Archives  départementales. 


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-^  63  — 

remarquons:  1»  qu'un  moulin  existe  dans  la  dite  ville 
avec  ses  bezières,  aiguages,  droits  et  appartenances; 
2^  que  le  banc  du  vin  ne  dure  plus  que  les  5  premiers 
jours  du  mois  de  mai. 

Une  Françoise  de  S*-Jeoire  apporta  Yvoire  à  son  mari, 
noble  Claude  Forestier. 

En  1634  la  seigneurie  fut  vendue  à  noble  Antoine 
Fornier.  Le  8  juillet  1655,  Jacques  Fournierflls  du  pré- 
cédent la  vendit  à  noble  Georges  Bouvier,  d'une  famille 
noble  originaire  du  pays  de  Vaud. 

FiU  1734,  Illustre  Seigneur  Messire  Jacques  Marie 
Bouvier,  baron  dTvoire  et  de  Rovereaz,  Seigneur 
d'Allemand,  Lugrin,  Hons  et  ThoUon,  etc.,  confesse 
tenir  et  posséder  sous  la  charge  d'hommage  lige  : 

lo  La  juridiction  omnimode  sur  le  château  et  ville 
d'Yvoire  et  le  territoire  d'Excevenex,  avec  le  droit  de 
pouvoir  élire  et  nommer  les  officiers  locaux  :  châtelain, 
procureur  fiscal,  curial  et  métrai  ;  avec  le  pouvoir  d'éri- 
ger: fourches  patibulaires,  pillier,  carcant  et  autres 
instruments  de  justice,  à  laquelle  juridiction  sont  an- 
nexées :  les  hommes,  hommages,  censés,  rentes,  servis, 
tailles,  tributs  annuels,  fonds,  flefset  directe  seigneurie, 
chasse,  pêche  du  dit  Yvoire.  Parmi  ses  autres  biens  le 
Seigneur  consigne  au  même  lieu  une  tuilière  et  place 
sur  le  bord  du  lac,  reconnue  féodale,  etc.,  etc.  (1). 

Après  avoir  été  un  instant  la  propriété  des  nobles  du 
Maney,  le  château  d'Yvoire  revint  en  1780  à  la  famille 
Bouvier  qui  le  possède  encore. 

Ferdinand  Bouvier,  gentilhomme  calviniste,  était  gou- 
verneur de  Chilien  en  1589.  Ayant  formé  le  projet  de 

(1)  Archives  départementales. 


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chasser  les  Bernois  du  canton  de  Vaud,  il  fut  dénoncé 
et  arrêté,  il  s'évada,  mais  ses  biens  furent  confisqués  et 
sa  fenrime  livrée  aux  tortures  (1).  Pour  récompenser  sa 
fidélité,  Charles  Emmanuel  lui  alloua  plusieurs  subsides 
et  le  nomma  sergent-major  de  bataille  et  commandant 
en  second  du  château  des  Allinges  ;  son  frère  Jehan 
Bovier,  à  l'approche  de  l'armée  d'Henri  IV  en  1600, 
vint  s'enfermer  dans  cette  forteresse  avec  plusieurs 
autres  gentilshommes  du  Chablais.  Ayant  perdu  une 
de  ses  mains  dans  une  bataille,  il  l'avait  remplacée  par 
un  appareil  en  fer  que  sa  famille  conserve  encore.  Ce 
personnage  a  été  rendu  populaire  par  un  roman  de 
James-Fazy,  iniiixxlé  :  ^  Jean  d' Yvoire  au  bras  de  fer 
ou  le  toicr  du  lac  en  1564,  Légende  Chablaisienne, 
Genève  1840  ».  Mais  le  surnom  d'Yvoire  donné  à  Jean 
Bouvier  est  un  anachronisme,  puisque  sa  famille  ne  pos- 
sédait pas  encore  cette  seigneurie  à  cette  époque. 

Yvoire  fut  bombardé  par  des  barques  armées  en 
guerre  et  pris  par  les  Genevois  le  26  avril  1589  et  par 
les  Bernois  en  1591  ;  plusieurs  boulets  en  fer  ont  été 
trouvés  dans  le  lac,  au  pied  du  chàieau,  un  de  ces  bou- 
lets fait  partie  de  ma  collection. 

NERNIER 

Comme  nous  l'avons  vu  l'origine  de  Nernier  se  perd 
dans  la  nuit  des  temps,  le  château  s'éleva  à  côté  de  la 
bourgade  gallo-romaine.  Il  fut  bâti  sur  le  même  plan 
que  Roverea  et  Yvoire  ;  d'un  côté  le  château  propre- 
mont  dit,  avec  les  habitations  du  seigneur,  les  dépen- 
dances, le  donjon  (aujourd'hui  ferme  de  la  Tour)  ;  de 

(1)  Foras.  Armoriai  de  Savoie. 


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—  65  — 

l'autre  les  maisons  de  quelques  familles  tributaires. 
Comme  à  Yvoire  deux  portes  donnaient  accès  à  l'inté- 
rieur, Tune  au  midi  adossée  à  la  Tour,  Tautre  au  cou- 
chant, vers  le  lac  ;  celle-ci  n'existe  plus,  mais  la  maison  do 
M.  Marc  Duchône  s'appelle  encore  lapouterla(la  poterne). 
Entre  ces  deux  portes  les  maisons  du  village  sont, élevées 
sur  des  murs  très  épais,  qui  semblent  être  les  derniers 
vestiges  des  remparts  du  château  de  ce  côté,  peut-être 
même  du  bourg  primitif  qui  alors  était  très  petit.  (La 
visite  pastorale  de  1472  ne  lui  donnant  pas  plus  d'une 
douzaine  de  feux). 

Comme  toutes  nos  petites  villes  et  châteaux,  Nernier 
avait  ses  péages;  en  1350,  Henri  d'Allinges  obtint 
d'Aymon  de  Savoie  sa  part  de  juridiction  sur  Coudrée 
contre  le  tiers  des  péages  et  pêches  de  Nernier.  Dans 
une  confirmation  accordée  par  les  seigneurs  do  Berne 
en  1544,  les  bourgeois  d'Allinges  étaient  exempts  de 
péages  et  gabelles  à  Nernier  et  Yvoire  (1).  Enfin  le 
8  juin  1545,  dans  la  reconnaissance  do  noble  Bernard  de 
Neuvecelle, conseigneur de  Nernier,  lespéages  dudit  lieu 
sont  déclarés  comme  valant  communément  80  florins (2). 

C'est  vers  la  fin  du  XII«  siècle  que  nous  voyons  appa- 
raître pour  la  première  fois  le  nom  de  Nernier  dans 
l'histoire. 

Le  7  mars  1180.  —  Pierre  de  Langin,  chanoine  de 
Genève,  DalmacedeRavorée,  chanoine  de  Filly,  Willelme 
de  Chevilly,  sont  présents  à  Nernier  comme  témoins  à 
la  confirmation  d'une  donation  faite  à  l'abbaye  de 
S*-Maurice  par  un  nommé  Boson  piscis  (3). 

(1)  Académie  Salésienne^  III. 

(2)  Archives  départementales.  Sommaire  des  fiefs. 

(3)  Regeste  genevois.  N*  117. 

5b 


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L*auaôe  suivante  soit  1181,  Arducîusi,  évêque  de 
Genève,  atteste  et  confirme  les  donations  faites  au  cou- 
vent de  Bonmont  par  diverses  personnes,  de  leurs  droits 
à  un  moulin  situé  sur  le  Rhône,  à  Genève.  Parmi  les 
donateurs  se  trouvent  Pierre  et  Nicolas,  de  Nornier  ;  cet 
acte  est  passé  à  Nernier  (apud  Nernei)  ;  ont  signé 
comme  témoins  :  Mamerius  de  Promenthou,  Anselme  de 
Chevilly,  Boson  piscis,  Sibold  et  Guillaume,  moines  (1). 

Dans  un  échange  du  28  mars  1267,  le  comte  Pierre 
de  Savoie  donne  au  seigneur  Aymon  de  Blonay,  le  fief 
de  Nernier  et  celui  de  Jean  de  Lugrin  qui  appartenaient 
autrefois  au  soigneur  Guillaume  de  Bacio,  chevalier  (2). 

Le  fief  et  le  château  de  Nernier  furent  vendus  le 
4  février  1277  par  dame  Leonette  de  Gex  à  Béatrix  de 
Savoye  dame  de  Faucigny,  fille  du  comte  de  Savoie  et 
épouse  de  Guy  Dauphin  du  Viennois  (3)  ;  le  0  février  de 
la  même  année  le  même  acte  fut  passé  à  Cluses  (archives 
du  Dauphiné).  Par  le  traité  de  Voiron  du  26  mai  1293, 
Béatrix  de  Faucigny  fit  donation  h  son  cousin  Amédée, 
comte  de  Savoye  des  fiefs  de  Nernier,  Ravoréo,  etc., 
que  le  comte  lui  restitua  à  titre  dinféodation. 

Pendant  la  terrible  guerre  qui  désola  notre  pays  de 
1268  à  1355,  Nernier  eut  certainement  beaucoup  à 
souffrir  ;  d*un  côté  Yvoire  et  Beauregard  étaient  occupés 

(1)  Regeste  genevois.  N°422. 

(2)  Regeste  genevois,  N°  1012  et  Historiœ  patriœ  monumenta. 
Charte  1,  page  1475. 

(3)  Archives  deTurin.  D'après  les  recherches  que  j'ai  fait  faire  en 
octobre  1896,  les  archives  de  Turin  renferment  sur  Nernier 
8  documents  sur  parchemins,  portant  les  dates  de  1277,  1302, 
1330, 1426,  1427,  1432. 


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-  67  — 

par  Tarmée  du  comto  de  Savoie  ;  de  l'autre  Rovéry, 
Nernier  et  Hermauce  dépendaient  de  Béatrix  et  des 
Dauphinois.  Que  de  coups  de  mains,  que  de  faits  d'armes 
ignorés   se  sont  passés  sous  ces  murs  ! 

Par  le  traité  de  Montmélian,  Hugues  le  Dauphin 
promit  do  faire  hommage  à  Amédée  V  des  fiefs  de  Ner- 
nier, Ravorée  et  Allinges-le-Vieux  ;  enfin  par  la  paix  de 
1355,  le  Dauphin  abandonnait  définitivement  au  comte 
de  Savoie  :  Genève,  Gex,  le  Faucigny,  et  ses  châteaux 
du  Chablais. 

Pendant  cette  longue  guerre  la  peste  et  la  lèpre  déso- 
lèrent le  pays  ;  la  lèpre  avait  été  apportée  d'Orient  au 
temps  des  Croisades,  mais  la  charité  chrétienne  n'était 
pas  restée  en  arriére.  Plusieurs  maladrerîes  ou  hôpitaux 
de  lépreux  furent  établies  en  Chablais  (1);  un  de  ces 
hôpitaux  s'élevait  à  Mesinges  près  Allinges,  un  autre  à 
Aubonne  près  Douvaine.  Or  les  lépreux  de  Douvaine 
allaient  souvent  implorer  les  secours  de  l'abbaye  de 
SWean-d'Aulps.  Celle-ci  craignant  que  ses  libéralités  ne 
fussent  prises  pour  un  dû,  fit  signer  en  1314  aux  lépreux 
d'Aubonne  une  déclaration  portant  qu'ils  recevaient  ces 
aumônes  par  pure  bonté  du  monastère.  Parmi  les 
lépreux  qui  signèrent  cet  acte  se  trouvaient  un  Fran- 
ceysia  de  Nernier,  un  Alexis  de  Massongy....(2). 

Vers  cette  époque  existait  au-dessus  de  Nernier,  près 
d'une  fontaine  abondante,  un  petit  hameau,  peut-être 
simplement  une  maison  isolée,  qui  portait  le  nom  de 
Marsille.  En  1347,  une  femme  nommée  Félicie  Mallet, 

(1)  Au  moyen-âge  les  hospices  de  diverses  sortes  étaient  très 
nombreux.  C'est  ainsi  qu'Hermance  avait  un  hôpital. 

(2)  Académie  de  Savoie.  IX,  pages  289,  290. 


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-  6S  - 

fllle  de  Pierre  Mallet  de  Marsille  (Marsegli2  slipra  Nei"- 
nier),  était  accusée  d'avoir  volé  uq  bréviaire  dans  l'église 
de  Filly  :  ilo  livre  à  cette  époque  était  chose  rare  et 
précieuse.  Félicie  Mallet  fut  donc  appréhendée  à  Tho- 
ûon  par  le  châtelain  du  lieu  et  conduite  aux  prisons  de 
la  ville,  mais  l'accusée  mourut  pendant  l'instruction  du 
procès  ;  la  procédure  ne  fut  pas  arrêtée  pour  cela  et  le 
25  novembre  le  seigneur  do  Coudrée,  Henri  d'Allinges, 
la  condamnait  à  être  noyée  en  effigie  dans  les  eaux  du 
Foron  :  une  grande  foule  de  gens  s'était  transportée  près 
du  pont  de  Sciez  pour  assister  à  cette  exécution  (1). 

Les  nobles  de  Nemier 

Nernier  renfermait  autrefois  une  famille  noble  de  ce 
nom. 

Nous  avons  vu  en  1181,  Pierre  et  Nicolas  de  Nernier, 
cités  comme  bienfaiteurs  du  couvent  de  Bonmont.  En 
1245,  un  Pierre  de  Nernier  vendait  une  partie  de  ses 
domaines  de  S*-Cergues  près  Annemasse,  à  l'abbaye  de 
S*Jean-d'Aulps  (2). 

En  1302,  un  François  de  Nernier,  prêtait  hommage 
pour  le  fief  de  Nernier  (3). 

D'après  Guichenon,  les  armes  des  de  Nernier  étaient: 
d'azur  à  deux  Dauphins  adossés.  Cette  famille  avait 
peut-être  reçu  quelques  bienfaits  des  Dauphins  dont 
Nernier  dépendait  (4). 

(1)  Piccard,  Filly,  Acad.  Chabl.,  VII. 

(2)  Piccard.  Filly,  page  37. 

(3)  Archives  départementales, 

(4)  Le9septehibre  1309,  dans  un  hommage  prêté  par  le  Dauphin 
Hugues,  sire  de  Faucigny,  en  faveur  du  comte  de  Savoie,  Nernier 
et  Ravorée  se  trouvaient  parmi  les  châtellenies  dépendant  du 
Dauphin.  Turin.  Inventaire  de  la  Chambre  des  Comptes  de  Savoie, 
Vol.  106. 


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—  69  — 

Au  milieu  des  maux  occasionnés  par  la  guerre,  les 
maisons  souveraines  cherchaient  naturellement  à  ré- 
compenser leurs  fidèles.  Aussi  le  3  février  1324,  Guil- 
laume de  Nornier  obtenait-il  le  pouvoir  d'administrer 
la  justice  et  d'ériger  des  fourches  patibulaires  (1). 

Les  fourches  patibulaires  au  moyen-àge  s'établis- 
saient généralement  aux  extrémités  du  territoire 
seigneurial  on  signe  d'omnimode  juridiction.  C'est  ainsi 
qu'en  1309,  le  seigneur  de  Coudrée  avait  fait  planter  ses 
fourches  ou  gibets  prés  du  moulin  d'Ecuchefatte.  La 
seigneurie  de  Nernier  s'étendait  sur  le  territoire  de 
Messery  ;  or,  sur  la  route  de  Messery  à  Couches,  se 
trouve,  de  nos  jours,  le  bois  des  potences,  le  bois  voisin 
s'appello^le  jetieu^  c'était  probablement  le  lieu  où  l'on 
Jetait,  où  l'on  enterrait  les  cadavres  des  suppliciés. 

Parmi  les  membres  de  la  famille  des  nobles  de  Nernier 
nous  trouvons  encore  : 

Jean  de  Nernier,  chevalier,  qui  reçoit  le  1 1  septembre 
1343  l'investiture  du  fief  de  Nernier  (2). 

Girod  de. Nernier,  cité  en  1359  (3). 

François  de  Nernier,  qui  de  son  mariage  avec  Broi- 
sette  de  Langin  eut  3  fils,  Aymon,  Jean  et  Mermet.  Ce 
Mermet  de  Nernier,  testant  le  13  mars  1382,  demanda 
à  être  sépulture  dans  l'église  de  l'abbaye  de  Bellerive 
avec  ses  prédécesseurs,  en  lui  faisant  des  legs,  entre 
autres,  un  autel  à  construire  par  son  fils  Girard  (4).    . 

Jean  de  Nernier,  frère  de  Mermet,  avait  eu  deux  fils, 
François  et  Guigon. 

fl )  ^ rchives départementales. 

(2)  Archives  départementales.  Sommaire  des  fiefs. 

(3|  Piccard.  Filly,  page  95. 

(4)  Ibidem, 


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—  70  — 

François  de  Nevnier,  prieur  de  Rumilly  et  commeo- 
dataire  du  prieuré  de  Bonneguête,  fut  nommé  le  2  des 
kaleudes  d'avril  1394  prieur  do  S*^-Jorioz,  par  le  pape 
Clément  VII  résidant  à  Avignon  (1);  nous  le  trouvons 
prieur  de  Conlamines  en  1410  (2),  il  Tétait  encore  en 
1417  d'après  Besson. 

Guif/on  de  Neinier^  frère  du  prieur,  et  Françoise  fille 
de  Jacques  de  Lucis,  reçoivent  le  11  décembre  1363, 
rinvestituredu  fief  de  Nernier  (3). 

Le  5  décembre  1368,  dans  le  château  de  Nernier  et 
par  devant  le  notaire  Hugo  Rycheis  de  Dovegno  (Dou- 
vaine),  ce  seigneur  passe  un  albergement  en  faveur  de 
François  de  Oussanz  (4).  Il  s'agissait  d'une  pièce  de 
vigne  d'environ  un  tiers  de  pose  situé  en  l'espheieix,  à 
côté  de  la  vigne  de  Bastard  Mistral,  et  d'une  pièce  de 
terre  de  môme  grandeur  située  en  lochetta  escaverier 
(aujourd'hui  luche  du  crot,  c'est-à-dire  le  champ  du 
creux),  touchant  la  voie  publique  tendant  vers  Cf/risiam 
(aujourd'hui  Frise);  étaient  présents  comme  témoins: 

Jean  Balli,  de  Misserier  (Messery),  Jean  dit  Bosson 
DE  Savuaz,  Mermet  d'Abondance  de  Nernier. 

Ce  Guigon  ou  Guigonnet  de  Nernier  épousa  Margue- 
rite de  Neuvecelle  et  reçut,  le  22  février  1384,  l'investi- 
ture de  la  maison  forte  de  Nernier  (5).  Son  fils  Pierre 
se  maria  le  13  février  1410  à  Isabelle  do  Grolée  d'une 
famille  du  Dauphiné;  mais  le  père  et  le  fils  moururent, 
laissant  Marguerite  de  Neuvecelle  héritière. 

(1)  Académie  Salésienne.  Tome  XVI,  page  23. 

(2)  Bouchage.  Le  Prieuré  de  Contamine. 

(3)  Archives  départementales, 

(4)  Ibidem. 

(5)  Archives  départementales.  Sommaire  des  flefs. 


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—  71  — 

En  1414  la  seigneurie  de  Nernier  était  partagée 
entre  Girard  de  Nernier  pour  un  quart  et  Marguerite 
de  Neuvecelle  pour  trois  quarts. 

Girard  de  Nernier  par  son  testament  du  21  août 
1427  fit  donation  au  prince  Philippe  de  Savoie  de  sa 
portion  du  château,  ville  et  mandenoent  de  Nernier 
avec  les  fours,  moulins,  dixmes,  servis  et  autres  droits 
en  dépendant  (1),  ainsi  que  la  seigneurie  de  Troches  (2). 
Girard  mourut  le  2  février  1433,  avec  lui  s'éteignit  la 
famille  des  de  Nernier. 

La  famille  BaiUy 

La  famille  Bailly  était  une  ancienne  famille  Chablai- 
sienne  qui  s'allia  aux  nobles  de  Nernier. 

En  1295  un  Pierre  Bailly  était  juge  du  Chablais  (3). 

En  1330  Félisie  de  Nernier  et  Jean  Bailly,  son  fils, 
échangeaient  avec  Jean,  abbé  de  Filly,  tout  ce  qu'ils 
possédaient  de  droits  et  d'actions  sur  des  biens  et 
hommes  situés  aux  Epagny  prés  Chevilly,  contre  dix 
coupes  de  froment  mesure  de  Thonon,  payables  annuel- 
lement par  l'abbaye  à  la  S'-Michel,  c'est  pourquoi  la 
dite  Félisie  en  fit  la  reconnaissance  sur  la  dîme  de 
Nernier  et  de  Champurry  (4)  ;  le  notaire  Maurice  de 
Quartery,  de  S*-Maurice  d'Agaune,  en  dressa  l'acte  au 
nom  do  l'abbé  et  du  monastère  de  Filly,  à  Nernier 
dans  la  maison  do  la  noble  dame,  en  présence  de  Jean 
Ray,  de  Girod  Favre  et  de  Jean  Meignens,  de  Nernier. 

Le  27  mai  1331,  François  et  Jean  Bally  fils  de  Félisie 

(1|  Ibidem. 

(2)  Trédicini.  Monographie  de  Douvaine,  page  160. 

(3)  Piccard.  Notice  sur  Filly. 

(4)  Piccard.  Filly,  page  94.  La  dime  de  Champurry  était  située 
sur  Y  voire  et  Excenevex. 


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—  72  — 

de  Nernier  acquièrent  de  Nicod  de  Troches  et  de  ses 
frères,  leurs  droits  et  juridiction  sur  ce  qu'ils  avaient 
sur  les  paroisses  de  Nernier,  Yvoire  et  Missirie  en 
'hommes  taillables,  revenus,  vignes...  etc.  (1). 

En  1342  Discret  Jean  Bailly  prend  une  hypothèque 
sur  le  pré  de  Prailles  situe  à  Nernier. 

En  1344  le  seigneur  Chevalier  Jean  Bailly  est  pro- 
cureur du  comte  de  Savoie  en  Chablais  et  Genevois;  le 
,30  avril  1347  il  est  dénomme  juvisprudent  dans  un 
achat  qu'il  fit  du  seigneur  Perret  de  Troches,  damoi- 
seau; il  s'agissait  de  huit  coupes  de  froment  de  revenu 
annuel  avec  hommage  lige,  pour  des  biens  sur  lesquels 
elles  étaient  dues,  situés  à  Nernier,  à  Messery,  à 
Ravoréo. 

En  135G  il  albergo  encore  des  terres  à  un  habitant  de 
Nernier  ;  la  même  année  il  reçoit  une  reconnaissance 
d'ÏIumbert  de  Thonon  et  d'Humbert  Comte  pour  une 
terre  située  en  Conzier  (peut-être  Cancy  au-dessus  de 
Nernier)  (2). 

Nicod  de  Menthon,  seigneur  de  Nernier 

Quelque  temps  après  la  mort  de  Girard  de  Nernier, 
le  duc  Philip[)e  inféodait  sa  part  de  seigneurie  à  Nicod, 
de  la  famille  de  Menthon  (2  février  1433).  Nicod  de 
iM  en  thon,  seigneur  de  Montrottier,  issu  d'une  des  fa- 
milles les  plus  anciennes  et  les  plus  illustres  de  Savoie, 
fut  un  des  plus  brillants  seigneurs  de  la  cour  d'Amé- 
dée  VIII.  En  1426  il  prit  part  comme  chef  de  lances, 
à    la   guerre   contre  le  duc  de  Milan  ;  à  l'appel  du 

(1)  Archives  du  Château  de  Bardenuche;  communiquées  par 
M.  l'abbé  Piccard. 

(2)  Piccard,  Filly^  page  95. 


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—  73  — 

prince,  la  noblesse  savoyarde  avait  donné  toute  en- 
tière; on  y  voyait  également  Georges  et  Pierre  de 
Neuvecelle,  conseigneurs  do  Nernier;  Humbert  de  Ro- 
vorée,  seigneur  dTvoire;  Pierre  de  Lugrin,  seigneur 
de  Frize,  etc.  —  En  1427  nous  retrouvons  Nicod  de 
M  en  thon  comme  écuyer  de  Mario  de  Savoie  ;  en  cette 
qualité  il  fut  chargé  par  Amédée  VIII  de  la  direction 
du  cortège  qui  devait  accompagner  cette  princesse  lors 
de  son  mariage  avec  le  duc  de  Milan  (1).  —  En  1429 
il  est  chargé  d'une  longue  ambassade  en  France,  en 
Angleterre,  à  la  cour  de  Bourgogne,  et  le  Trésorier 
général  lui  donne  les  titres  de  (miles  et  combellanus 
domini  ducis).  Il  fut  nommé  chef  de  Texpédition  (2) 
du  concile  de  Bàle  à  Constantinople  pour  l'union  de 
l'Eglise  grecque  à  l'Eglise  latine  (1437-1438),  puis  de- 
vint gouverneur  de  Nice,  sous  le  régne  du  duc  Louis 
(1440),  châtelain  de  Chàteauneuf  en  Valromey  en  1440, 
châtelain  de  Seyssel  en  Bugcy  en  1456. 

Le  23  février  1451  il  reconnaissait  tenir  en  fief:  la 
moitié  du  château  de  Nernier  avec  ses  édifices,  fossés 
et  dépendances,  etc.  Nous  le  voyons  encore  en  1472  se 
reconnaître  vassal  du  prince  Amédée  duc  de  Savoie; 
dans  cette  reconnaissance  nous  relevons  parmi  ses 
droits  féodaux,  indivis  avec  les  de  Neuveselle  (3)  : 

1"  Les  trois  quarts  de  la  dîme  de  Portier,  rière 
Mesery; 

(1)  Cîosta  de  Beau  regard.  Soutenirs  du  règne  d' Amédée  VIJI^ 
pages  123,  190  et  219. 

(2)  Mugnier.  L'expédition  du  concile  de  Bàle  à  Constantinople. 
Paris  1892. 

(3)  Archives  départementales. 


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—  74  — 

2^  Quinze  coupes  de  blé  à  percevoir  sur  la  dîme  appe- 
lée Detrex,  riére  xMessery  ; 

30  La  pêche  dite  de  Nernier  ; 

40  La  pêche  de  tous  les  ombres  qui  se  prennent  dans 
le  lac,  etc.,  etc. 

Nicod  de  Menton  étant  mort  sans  postérité,  sa  por- 
tion de  seigneurie  fut  réunie  au  domaine  duail  le  15 
janvier  1490(1).  Les  Bernois  s'en  emparèrent  en  153G 
et  la  vendirent  pour  huit  mille  florins  à  François  de 
S*^  Jeoire,  dit  d'Antioche,  seigneur  dTvoire,  et  à  Ber- 
nard de  Neuveselle,  conseigneur  de  Nernier  (25  janvier 
1552).  François  de  S**  Jeoire  avait  épousé  la  fille  d'un 
avoyé  de  Berne,  Marguerite  de  Wateville,  dont  il  eût 
deux  filles,  Françoise  et  Bersabée-Percevende.  Etant 
devenue  veuve,  Marguerite  do  Wateville  se  remaria 
avec  Bernard  de  Neuvecelle  qui  possédait  les  sept-hui- 
tièmes de  la  seigneurie  de  Nernier  et  en  devint  héri- 
tière; elle  testa  en  1574,  laissant  ses  biens  à  ses  deux 
filles  :  Bersabée  de  S*-  Jeoire  qui  eut  la  seigneurie  de 
Nernier.  et  Françoise  sa  sœur  qui  eût  celle  dTvoire. 
FamiUe  de  Brotty 

Bersabée  qui  avait  épousé  en  1569  Charles  de  Brotty, 
originaire  de  Marin,  et  en  secondes  noces  Charles 
Fournicr  dit  de  Rive,  décéda  en  1604,  instituant  héri- 
tiers ses  six  fils,  Urbain,  Maurice,  Antoine  et  Louis 
de  Brotty  ses  enfants  du  premier  lit,  et  Charles  et  An- 
toine Fournicr  ses  enfants  du  second  lit. 

Charles  Fournier  mourut  sans  enfants.  Antoine,  son 
frère,  qui  lui   succéda,  laissa  Jacques  qui,  n'ayant  pas 

(1)  Extrait  sur  l'antiquité  du  château  de  Nernier,  Notice  publiée 
à  Thonon  vers  1860. 


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—  75  — 

(le  postérité,  fit  héritier  le  seigneur  de  Pollinge  et 
C hissé. 

La  seigneurie  de  Ncrnier  passa  ensuite  à  la  maison 
de  Costa  pour  les  cinq-sixièmes.  Gaspard  de  Costa  en 
acquit  un  sixième  le  21  août  1670  des  nobles  de  Chissé, 
et  deux  autres  sixièmes,  le  4  mai  1671,  de  Melchior- 
Maurice  de  Brotty.  Jean-Baptiste  de  Costa  en  acquit  un 
sixième  le  14  juillet  1685  de  François  de  Brotty.  Bar- 
thélémy de  Costa  en  acquit  un  autre  sixième  le  2  jan- 
vier 1717  du  seigneur  des  Charmettes,  marquis  d'Al- 
linges. 

La  famille  de  Brotty  n'en  conserva  qu'un  sixième,  qui 
fut  encore  divisé  avec  Claude-Joseph  Michaud,  bour- 
geois de  Thonon,  époux  de  Claudine-Marguerite  de 
Brotty.  Lorsqu 'arriva  la  Révolution,  les  biens  des  Costa 
et  des  de  Brotty  furent  vendus  comme  biens  nationaux. 
Les  Michaud  s'en  rendirent  acquéreurs  et  les  revendirent 
après  la  Terreur  à  leurs  parents,  les  de  Brotty,  qui  les 
possèdent  encore. 

En  1598,  à  l'époque  de  la  conversion  du  Chablais,  un 
Brott.Y  était  colonel  de  chevau-légers  au  service  du  duc 
de  Savoie  ;  cette  famille  fut  annoblie  au  XVP siècle;  ses 
armes  sont  :  de  gueules  à  trois  sautoirs  d'argent  2  et  1 . 
Besson  donne  aussi  la  version  d'azur  à  trois  sautoirs  d'or. 

Parmi  les  membres  de  cette  famille  nous  remarquons  : 

Louis  de  Brotty,  gouverneur  de  Ripailles  en  1534. 

Jean-André  de  Brotty,  né  le  18  décembre  1647,  curé 
de  Cervens,  docteur  en  théologie  en  1690  (1). 

Jacques  de  Brotty,  syndic  de  Thonon,  colonel  des  4 
compagnies  bourgeoises  de  cette  ville  en  1700. 

(1)  Archives  Vuarnet. 


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—  76  — 

Claude-Fraoçois-Gaspard  de  Brotty ,  mousquetaire  dans 

la  2®  compagnie  de  la  garde  ordinaire  du  roi  de  France 
en  1773. 

Gaspard-Ferdinand  de  Brotty,  né  en  1783,  capitaine 
au  régiment  de  Savoie,  décédé  en  1852. 

Charles-François-Alphonse  de  Brotty,  comte  d'An- 
tioche,  ancien  ministre  plénipotentiaire  du  roi  de  Sar- 
daigne,  commandeur  de  Tordre  des  S*^-Maurice  et  Lazare, 
né  le  18  juillet  1813(1). 

Comme  Yvoire,  Nernier  et  son  château  furent  bom- 
bardés par  des  galères  genevoises  en  1589,  un  boulet  de 
fera  été  recueilli  dans  le  mur  de  la  maison  de  la  poste, 
faisant  face  au  lac  ;  un  autre  dans  le  champ  du  dévent  à 
200  mètres  du  château,  tous  deux  font  partie  de  ma 
collection. 

LE  CHATEAU  DE  FRISE 

Le  château  de  Frise  est  situé  dans  la  commune  de 
Messery,  sur  la  route  qui  conduit  au  hameau  d*Essert. 
Aussi  loin  que  nous  puissions  remonter  dans  nos  annales, 
nous  voyons  ce  fief  appartenir  à  la  noble  famille  des  de 
Lugrin,  une  des  plus  anciennes  familles  du  Chablais;  ses 
armes  étaient  d'azur  à  la  fasce  d'argent  (2)  ;  la  branche 
du  Chablais  portait  selon  Besson,  d'azur  coupé  d'argent 
et  do  gueule. 

Frise  était  autrefois  appelé  Cynsiarrij  Seresi,  mot  qui 
par  suite  do  l'aspiration  du  dialecte  local  se  transforma 
en  /reziy  nom  patois  du  cerisier  (3). 

(1)  De  F*oras.  Armoriai  de  Savoie. 

(2)  Armoriai  de  Galiffe, 

(3)  Nous  trouvons  une  transformation  analogue  dans  le  nom  du 
Fier  près  Annecy,  qui  s'écrivait  Cier  au  moyen-àge. 


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Lo  27  mai  1331,  François  et  Jean  Bally,  fils  de  Pélîsîe 
de  Nernier  sont  présents  à  une  transaction  passée  à  Frise 
avec  Révérend'Messire  Jean  de  Lugrin,  prieur  de  Peil- 
lonnex  ;  les  frères  Bally  avaient  acquis  de  Nicod  de  Tro- 
ches  et  de  ses  frères,  leurs  droits  et  juridiction  de  ce 
qu'ils  avaient  sur  les  paroisses  de  Nernier,  Yvoire  et 

Missirie  en  hommes  taillables,  revenus,  vignes,  etc 

Par  cet  acte  ils  associent  Jean  de  Lugrin  à  la  moitié  de 
cet  achat  et  lui  donnent  l'usufruit  du  tout,  sa  vie  durant. 
Sur  le  même  acte,  François  de  Lugrin,  frère  de  Jean, 
reconnaît  que  Reymond  de  Lugrin,  leur  père,  a  donné  au 
prieur,  pendant  son  vivant,  sa  maison  de  Seresy  (Frise) 
avec  rOche  et  clos  l'entourant  ;  que  lui  François  qui  ne 
doit  en  jouir  qu*après  la  mort  de  son  frère,  tiendra 
compte  au  prieur  des  revenus  de  (îette  maison  qu'il  a 
occupée  jusqu'à  présent  (1). 

Parmi  les  diflférents  membres  de  cette  famille  nous 
trouvons  : 

Reymond  dit  do  Sereciis  et  Perret  qui  habitaient 
Frise  en  1358(2). 

Perret  de  Lugrin,  de  Maxilly,  dit  de  Sericy  (Frise), 
nommé  dans  un  acte  du  20  mai  1364. 

Aymé  de  Lugrin  qui  prend  un  albergement  de  noble 
Aymon  de  Miolans,  le  23  juillet  1390  {archives  d'An- 
tioche). 

Mermet  de  Lugrin  qui  hérite  en  1406  de  son  parent  Jean 
de  Couches,  seigneur  de  Bardenuche  ;  Pierre  de  Lugrin^ 
son  frère,  était  seigneur  de  Frise,  il  prit  part  comme 
chef  de  lance  à  la  guerre  contre  le  duc  de  Milan  en  1426. 


1)  Archives  Piccard. 

2)  Piccard.  Filly,  Académie  Chablaisienne,  vol.  VII,  page  126. 


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-n- 

Guigonet  de  Lugrin^  le  18  septembre  1432,  vend,  au 
prince  de  Savoie,  la  quatriénic  partie  de  ses  hommes 
taillables  de  Messery  pour  30  florins  petit  poids  (1). 

Les  4  fils  de  Pierre  de  Lugrin  (2) 

Le  1er  mars  1548,  François.  Jacques,  Nicolas  et  Phili- 
bert de  Lugrin  fils  de  Pierre  achètent  une  grange  et 
dépendance  d'Antoine  d'Erbach  de  Berne,  habitant  à 
Lucerne;  cette  grange  est  située  à  Serezi  (Frise);  ils  lui 
donnent  en  payement  une  censé  annuelle  de  7  écus  d*or 
au  coin  du  roi  de  France. 

I.  Nicolas  de  Lugrin  alberge  le  l^r  juillet  1572,  à 
Bernard,  Pierre,  Claude  et  Jean  Crépy  de  Nernier,  une 
pièce  de  terre  située  à  Nernier,  au  Bochet.  Il  est  cité 
comme  témoin  sur  un  acte  du  24  février  1589  (3).  Nico- 
las avait  fait  son  testament  le  16  avril  1575,  il  mourut 
sans  enfants. 

II.  François  de  Lugrin  intente  le  G  février  1545  une 
procédure  contre  noble  François  d'Antioche,  seigneur 
d'Yvoire,  qui  lui  demandait  Thommage  personnel.  «  Les 
«  seigneurs  do  Lugrin  ont,  dit-il,  de  tout  temps  reconnu 
«  rhommage  lige  à  leurs  illustres  princes  de  Savoie,  ils 
«  ont  toujours  relevé  do  Thonon  et  non  dTvoire.  » 

Une  cave  du  château  de  Frise  remonte  à  cette  époque, 
elle  porte  sur  son  cintre  la  date  de  1541,  mais  la  partie 
méridionale  du  château  qui  sert  de  fenière  est  beaucoup 
plus  ancienne  ;  on  y  remarque  encore  une  immense  che- 

(1)  Archwesde  Turin.  Communication  de  M.  Max  Brucbet. 

(2)  Pierre  de  Lugrin  père  de  Nicolas,  François,  Jacques  et  Phi- 
libert, n'est  certainement  pas  le  même  personnage  que  co  Pierre 
de  Lugrin  qui,  un  siècle  avant,  avait  pris  part  à  la  guerre  contre 
le  duc  de  Milan. 

(3)  Archives  Vuarnet. 


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mînée  à  colonnes  prismatiques  et  des  portes  ogivales. 
François  de  Lugrin  dit  Vaisné  fut  pris  comme  arbitre 
avec  noble  Charles  Fornyer,  seigneur  de  Nernier,  le 
7  mars  1592,  dans  le  partage  des  flls  de  Georges  Qui- 
blier  dit  Faisant  du  village  d'Essert  (1).  Son  flls  Fran- 
çois feu  noble  François  do  Lugrin,  tient,  le  7  février 
1596,  une  terre  lieu  dit  Es  Foges,  autrefois  possédée  par 
llugonet  Espaulaz,  au  nom  de  Françoise  d*Essert  sa 
femme. 

III.  Philibert  de  Lugrin  eut  un  flls,  Aimable  (2). 

Aimable  de  Serizier,  épouse  en  1541  Demoiselle  Hé- 
lène de  Prez,  il  laissa  six  filles  :  Charlotte,  Bastienne, 
Michiére,  Marie-Françoise,  Eslher  et  Jeanne-Mario. 

Michioro  et  Marie-Françoise  reçurent  pour  leur  part 
la  seigneurie  de  Bardonuche. 

Bastienne  se  maria  à  Charles  de  Chavannes,  de  Ru- 
milly. 

Jeanne-Marie  épousa  noble  Bernard  Cortagier,  de 
Bons,  et  eut  en  dot  trois  mille  florins  (1596). 

Esther,  le  9  février  1641  à  Frise,  fait  sa  sœur  Char- 
lotte son  héritière  universelle.  Cette  dernière  s'était 
mariée  le  25  novembre  1615  à  noble  Georges  Marchand, 
de  Thonon  ;  elle  laissa  deux  flls  qui  flrent  héritiers  les 
Marchand,  de  Thonon,  leurs  cousins.  Ceux-ci  vendirent 
leurs  biens  de  Frise  à  noble  Jacques  Fournier  qui  était 
seigneur  d'Yvoire  et  conseigneur  de  Nernier.  Jacques 
Fournier  dit  de  Rivaz  (3)  mourut  sans  postérité  et  flt 

(1)  Archives  Vaarnet. 

(2)  Archives  Piccard. 

(3)  C'est  sans  doute  ce  seigneur  qui  flt  construire  à  l'entrée  de 
Messery  cette  maison  dite  Chez  de  Rive,  qui  appartenait  aux 
Costa  avant  la  Révolution . 


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—  80  — 

héritier  de  sa  portiOD  de  seigneurie,  le  seigneur  de 
PoUiuge  et  Chissé.  Gaspard  de  Costa ^n  fit  l'acquisitiou 
le  21  octobre  1670.  Le  château  de  Frise  appartint  ainsi 
aux  de  Costa  jusqu'à  la  Révolution. 

IV.  Jacques  de  Lugrin^  quatrième  fils  de  Pierre, 
avait  eu  en  partage  à  Frise  la  maison  appelée  la 
£a/Am,  située  sur  la  partie  septentrionale  de  la  route- 
(de  nos  jours  maison  Quiblier  Jean).  Il  avait  eu  un  fils 
Claude  de  Lugrin.  Nous  voyons  un  de  ses  descendants 
noble  François  de  Lugrin  de  Cerezie,  le  24  janvier 
1648,  passer  une  reconnaissance  en  faveur  du  seigneur 
abbé  d'Abondance,  de  plusieurs  biens  situés  à  Excert, 
hameau  do  Messory  et  aux  environs,  indivis  ou  confinant 
avec  noble  Amable  de  Lugrin. 

Cette  branche  s'éteignit  en  la  personne  de  Bersabée 
de  Lugrin,  mariée  à  Antoine  Perrot  et  qui  donna  ses 
droits  aux  religieuses  visitandines  de  Thonon. 

En  1670,  les  biens  des  religieuses  sont  déjà  cités 
comme  confins,  sur  le  cadastre  de  Messery  ;  elles  possé- 
dèrent ce  domaine  jusqu'à  la  Révolution,  (nous  aurons 
occ;\sion  d'en  reparler  au  cours  de  cet  ouvrage). 

Parmi  les  alliances  que  la  noble  famille  de  Lugrin  fit 
encore  avec  les  familles  du  voisinage,  nous  pouvons 
citer  (1)  : 

Demoiselle  Jacquemette  de  Lugrin  qui  épouse,  le 
23  septembre  1447,  noble  Jean  de  Chatillon,  de  Lu- 
grin ;  son  frère,  Jean  de  Lugrin,  lui  constitue  en  vertu 
du  testament  de  son  père  une  dote  de  100  florins  d'or 
(acte  passé  à  Lugrin  dans  la  maison  du  dit  Jean). 

vl,^  Archives  Piccard. 


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-  81  - 

Noble  François  de  Lugrîn  de  Sergiez,  qui  épouse 
Louise,  fille  de  noble  Pierre  de  Vigny,  de  Langin  la 
ville,  il  teste  le  7  janvier  1495.  {Archives  Costa). 

Antoinette  de  Luffrin,  qui  avait  épousé  noble  Louis 
de  Meyrier,  alias  de  Platea  (de  la  Place)  de  Massongy, 
lui  fait  un  legs  dans  son  testament  du  24  avril  1536. 
(La  famille  de  Meyrier  existe  encore  à  Massongy). 

Philibert-François  de  Luffrin,  appelé  François  le 
jeune,  épouse  par  contrat  dotal  du  20  octobre  1544, 
demoiselle  Françoise  fille  de  noble  Charles  Bouvier,  du 
mandement  d'Aigle. 

François  de  Lugrin,  qui  en  1607,  épouse  Louise  de 
Brotty,  fille  de  Charles  de  Brottier,  de  Concise. 

Plusieurs  membres  de  la  famille  de  Lugrin  s'étaient 
distingués  dans  le  clergé  : 

Jean  \^^  de  Lugrin,  était  prieur  de  Peillonnex  en 
1276  (1). 

Jean  II  de  Lugrin  est  cité  comme  prieur  de  Peillonnex 
en  1331  et  1357. 

Jean  IV  de  Lugrin,  prieur  de  Peillonnex,  est  délégué 
le  27  juin  1371  parFévéque  de  Genève,  pour  lever  Tin- 
terdit  qui  pesait  sur  les  terres  du  comte  de  Savoie  (2)  ; 
le  13  octobre  139311  est  pris  comme  arbitre  par  Guil- 
laume de  Lugrin,  abbé  de  Filly. 

Guillaume  de  Lugrin,  abbé  de  Filly  en  1393  (3), 
vingt-troisième  abbé  d'Abondance,  apparaît  comme 
abbé  dés  l'année  1412  dans  le  contrat  dotal  d'un  mariage 

(1)  Histoire  du  Prieuré  de  Peillonnex.  Société  Savoisienne d* His- 
toire^ tome  XXII,  page  20. 

(2)  Académie  Salésienne.  Vol.  XIV,  page  90,  chapitre  de 
S*-Pierre  de  Genève. 

(3)  Piccard.  Abbaye  de  Filly,  page  123. 

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-  gg  - 

contracté,  entre  deux  membres  des  familles  de  Ëallaîsoti 
et  de  Chignio.  Il  est  nommé  dans  un  acte  ou  sentence 
arbitrale  duduc  Amédoe  VIII,  entre  Tabbayeet  la  vallée 
d'Abondance  en  1425  (1).  Cet  abbé  avait  joui  do  la 
confiance  et  des  bonnes  grâces  des  ducs  Amédéc  VIII  et 
Louis  do  Savoie  ;  ce  dernier  lui  donna  les  titres  de 
conseiller  et  do  très  cher  ami  (2), 

Pierre  de  Lugrin,  prieur  de  Pcillonnex,  transige  le 
13  octobre  1404,  avec  Girard  du  Pas,  abbé  d'Abon- 
dance (3).  Le  5  mai  1413,  Morraet  do  Lugrin,  frore  du 
prieur,  est  témoin  dans  un  acte  passé  à  Peillonnex  en 
faveur  du  curé  de  Passy  (4). 

Messire  Etienne  Lugrini,  était  curé  de  Larriuges  en 
1402. 

Amédée  de  Lugnn  était  chanoine  de  S*-Pierre-de- 
Genève  en  1443  (5). 

Le  lecteur  ne  sera  pas  peu  surpris  d'apprendre  que  le 
nom  et  Thistoire  des  de  Lugrin  se  sont  totalement  effa- 
cés des  souvenirs  de  notre  population  de  Messery; 
comme  eu  beaucoup  d'autres  choses,  c'est  le  cas  de 
rappeler  ce  vieil  adage  «  sic  transit  gloria  mundi  >, 
ainsi  passe  la  gloire  du  monde. 

LE  CHATEAU  DE  BARDENUGHE 

Le  château  de  Bardonuche  est  situé  sur  le  territoire 
de  Massongy,  mais  son  domaine  est  pour  la  moitié  sur 
la  commune  de  Messery.  Au  moyen-àge  il  était  habité 

(1)  Académie  S ilésienne, tim3  Viri,    page  323. 

(2)  Ibidem,  pages  122-123. 
3)  Ibidem. 

(4)  Société  Satjoisienne d*Histoire,tome  XXII,  page  3t. 

(5)  Académie  Salésienne^   tome  XIV,    liste   des  chanoines   de 
Genève.  ' 


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—  83  — 

par  la  famille  des  nobles  de  Conches.  Ed  1317,  un  Nicod 
deConches  était  choisi  comme  arbitre  dans  un  différend 
entre  les  nobles  d'AUinges  et  Tabbaye  de  Filly  (1).  En 
1323,  un  Jean  de  Conches  était  châtelain  d'Allinges  le 
neuf  (2).  Le  23  juillet  1353,  lors  de  la  guerre  du  comte 
de  Savoie  avec  le  Dauphin,  le  châtelain  d'Allinges,  suivi 
d'un  certain  nombre  de  soldats,  incendie  la  maison  do 
Perret  de  Conches;  le  mémo  châtelain  porte  encore  Tin- 
cendie  à  Conches  vers  la  fin  de  janvier  1354  (3).  Le 
château  actuel  de  Bardenucho,  aux  fenêtres  géminées 
avec  accolades,  meneaux  et  chanfreins,  remonte  vrai- 
semblablement à  cette  époque. 

La  famille  des  nobles  de  Conches  s'éteignit  en  la 
personne  de  Messire  Jean  de  Conches,  damoiseau.  Par 
son  testament  du  0  novembre  140G,  il  léguait  douze  sols 
pour  être  enseveli  au  tombeau  de  sa  famille,  au  bas  de 
réglise  de  Massongy  ;  à  l'église  de  Massongy  il  donnait 
un  bischet  de  froment  de  cens  annuel  et  le  droit  de  lever 
les  dîmes  sur  ses  terres,  enfin  il  établissait  pour  son 
héritier  universel  son  proche  parent  Mermet  de  Lugrin, 
dont  le  frère  était  soigneur  de  Frise.  (4). 

Nous  avons  vu  dans  l'article  précédent  que  vers  1540, 
les  de  Lugrin  s'intitulaient  seigneurs  de  Frise  et  de 
Bardenuche  ;  ils  durent  réunir  par  une  route  carrossable 
leurs  deux  châteaux  dont  les  propriétés  se  touchaient. 

(1)  Piccard.  Abbaye  de  Filly,  Document  N°  24. 
(i)  Acad,  Salés.,  lomeiri. 

(3)  Ibidem,  page  143. 

(4)  Piccard.  Filly^  page  127.  Le  bichet  valait  deux  quarts,  soit 
la  moitié  (le  la  coupe  de  blé:  la  coupe  avait  la  même  capacité  que 
le  setier,  mesure  de  Thonon,  soit  54  litres.  Le  sol  de  Genève, 
d'après  Blavignac  valait  à  cette  époque  1  fr.  52  centimes. 


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Cette  roilto  existe  encore  en  partie  comme  chemin  de 
dévestiture,  sous  le  nom  do  chemin  des  Princes  à  tra- 
vers les  bois  du  Raflfour,  de  la  Lanchette,  du  Passérat 
et  les  champs  du  Plantet  (1). 

Vers  1615,  Michière  de  Lugrin  et  sa  sœur  Marie- 
Françoise  avaient  reçu  Bardenuche  en  partage;  la 
première  épousa  Tannée  suivante  noble  Nicolas  de  Lan- 
gin,  la  seconde  Pierre  de  Langin. 

Le  château  de  Bardenuche  passa  ainsi  dans  la  famille 
de  Langin.  En  1670,  un  Pierre  de  Langin  en  était  pro- 
priétaire (2). 

Bardenuche  passa  ensuite  aux  de  la  Fléchère,  par  le 
mariage  de  demoiselle  Françoise  de  Langin  avec  noble 
Hugues  de  la  Fléchère.  En  1704,  loi-s  de  la  visite  pasto- 
rale de  Messery,  ce  seigneur  demande  d'avoir  son  banc 
dans  la  nef  de  l'église  de  Messery,  comme  descendant 
de  Pierre  de  Lugrin  (3). 

En  1713,  Hugues  de  la  Fléchère  et  ses  domestiques 
sont  portés  sur  le  rôle  de  la  capitcition  de  Messery  (4). 

Le  5  juin  1714,  il  échange  des  biens  situés  aux  Ver- 
rières (Veigy),  contre  d'autres  situés  à  Couches  et 
Bardenuche,  et  appartenant  aux  Révérends  Pères  Mini- 
mes de  Thonon. 

En  1771,  noble  Rebut  est  seigneur  de  Bardenuche,  il 
figure  sur  le  rôle  de  la  gabelle  de  la  communauté  de 
Messery.  Lors  de  la  visite  pastorale  de  1768,  le  curé  de 

(1)  Plantet  veut  dire  terrain  plat.  Passérat  dérive  de  passage. 
Lanchette  provient  de  Lanche,  Lanchis,  pâturage.  Raffour  désigne 
ordinairement  un  four  de  tuilerîe  ou  de  charbon  de  bois. 

(2)  Cadastre  de  Messery  de  1670. 

(3)  Visite  pastorale.  Archives  de  rEcéchè. 

(4)  Archives  Vuarnet. 


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—  85  — 

Messery  percevait  la  dîme  à  Bardenuche  et  à  Cooches, 
à  C exclusion  de  tous  autres  (sic). 

Au  point  do  vue  ecclésiastique  et  administratif,  la 
seigneurie  de  Bardenuche  se  trouvait  donc  rattachée  au 
XVIII«  siècle  à  la  communauté  de  Messery. 

Elle  passa  ensuite  à  la  famille  du  Maney,  d'Excénevex, 
puis  par  héritage  aux  de  Canchy.  propriétaires  actuels 
qui  habitent  Dijon. 

Le  Borgel  d'Essert 

A  rentrée  du  village  d'Essert  existe  une  place  com- 
munale, appelée  la  Grande  Tate  ou  la  Toppe  d'Essert. 
Les  vignes  voisines  s'appellent  vignes  des  Tates  et 
Tranchepied.  Or,  en  ce  lieu  de  Tranchepied  et  sur  la 
hauteur  qui  domine  la  contrée,  s'élevait  bien  avant  les 
Croisades,  peut-être  à  l'époque  des  Burgondes,  une  sorte 
de  château  ou  de  réduit  fortifié. 

En  1893,  à  50  mètres  au  Nord  de  la  fromagerie 
d'Essert,  un  cultivateur  défonçant  souterrain  mettait  à 
découvert  les  fondations  d'un  mur  très  épais  en  mortier, 
allant  du  Sud  au  Nord,  parallèlement  au  petit  chemin 
des  BlandetSf  et  se  continuant  sous  la  vigne  de 
Victor  Quiblier.  Dans  cette  vigne,  on  a  retiré,  en 
provignant,  des  tombereaux  de  pierres  cassées.  En 
face,  de  l'autre  côté  du  petit  chemin,  M.  Antoine 
Quiblier  a  relevé  plusieurs  fondations,  en  pierres  des 
champs  et  mortier. 

Ce  lieu  est  appelé  de  nos  jours,  Tranchepied;  mais 
sur  le  cadastre  de  Messery,  de  1670,  une  douzaine  de 
parcelles  de  vignes  d'un  are,  sont  appelées  :  es  Bpurgel^ 


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—  86  — 

es  Bôrffel,  soit  en  les  Tates  ;  le  seillon  de  Borgel  (1): 
On  rencontre  ce  mot  dans  la  terminaison  de  plusieurs 
villes  Scandinaves,  telles  que  Uleaborg,  Viborg.  Le  mot 
burg  en  allemand  désigne  un  lieu  fortifié.  Au  moyen- 
àge  on  désignait  sous  le  nom  de  borg^  un  château  fort, 
un  camp  retranché.  Le  sire  de  Joinville  nous  dit  ceci  : 
«  Et  fist  commencer  le  roy  à  faire  fermer  et  édifier  une 
boarge  tout  à  Tentour  du  chàtel  du  Japhe  (Jaffa).  » 

Tout  à  côté  de  Tranchepied  se  trouvent  :  la  vigne  de 
la  Meraitde  qui  dérive  comme  Mérowig,  du  Germanique, 
Mei'o,  élevé.  La  vigne  de  la  Sergenta,  les  Chastilkmnes 
qui  sont  des  noms  militaires.  D'après  Blavignac,  (2) 
«  dans  bon  nombre  d'emplacements  portant  encore  de 
«  nos  jours  les  noms  de  château,  Chàtel,  Chàtelard, 
«  Chàtillon,  etc....  sur  lesquels  tous  les  renseignements 
«  historiques  sont  muets,  il  a  existé  des  constructions 
«  plus  ou  moins  fortes  dont  la  charpenterie  formait  le 
«  seul  élément.  » 

Aucun  document  n'est  venu  jeter  le  jour  sur  Texistence 
de  ce  petit  bourg  de  Tranchepied  ;  des  ossements  hu- 
mains ont  été  trouvés  tout  à  côté,  en  creusant  les  fon- 

(1)  En  1670,  Jean-François  et  Claude  Vuarnet,  possèdent  Es 
Borgci  le  vingt  qiiattrain  d'une  pose  de  vigne  (cadastre  de  Mes- 
sery). 

En  1710,  Claude  fils  de  Jean-François  Vuarnet  du  village 
d'Essert,  lègue  à  Marguerite  Quiblier,  sa  belle-sœur,  une  pièce 
de  vigne  située  au  lieu  dit:  Le  Seillon  du  Borgel.  (Archives 
Vuarnet),  cette  vigne  est  appelée  simplement  de  nos  jours  :  dans 
le  Seillon. 

Le  mot:  tate  ou  teppe,  en  patois  romand,  que  Ton  prononce  à 
ritalienne  :  Tata,  Teppa  (la  dernière  syllabe  étant  muette)  dési- 
gne un  terrain  inculte,  herbacé,  il  rappelle  le  mot  français  steppe. 

(2)  Blavignac.  Etudes  sur  Genève,  livre  II,  page  332.  Un  Guil- 
lelmus  de  Caslillionne  se  trouvait  parmi  les  hommes  d'armes  ou 
chevaliers  du  comte  de  Savoie  en  1325,  ce  nom  se  rapprocherait 
assez  de  ChastiUone. 


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—  87  — 

dations  de  la  fromagerie  vers  1878  ;  le  champ  situé  en 
face,  de  Fautro  côté  de  la  route,  s'appelle  la  croix-vy 
(la  croix  vieille),  un  for  de  flèche  a  été  recueilli  dans  la 
vigne  de  la  Merode,  une  lance  a  été  trouvée  non  loin 
de  là. 

Dans  la  visite  pastorale  de  1768,  il  est  question  de  la 
dîme  do  Tranchepied;  cette  dime  devait  être  une  novale  ; 
on  appelait  ainsi  les  dîmes  imposées  aux  champs  nouvel- 
lement défrichés. 

Notre  petit  bourg  primitif  d'Essert,  soit  do  Tranche- 
pied,  n'a,  il  nous  semble,  jamais  été  bien  conséquent;  la 
commune  de  Messery  avait  trente  feux  en  1443,  ce  qui 
donnerait  une  douzaine  de  feux  pour  Essert.  Plusieurs 
familles  d'Essert  (de  Exerto),  y  résidaient  en  1451. 

Le  Borgel  de  Messery 

A  deux  kilomètres  au  couchant  du  borgel  d'Essert, 
et  sur  la  même  ligne  d'hauteur  s'élève  aujourd'hui  le 
chef-lieu  de  la  commune,  divisé  en  deux  parties. 

La  première,  sorte  de  faubourg  bâti  en  bordure  sur 
la  route,  porte  le  nom  de  Veret,  qui  est  une  abréviation 
de  Vers  Elvô,  soit  vers  la  route. 

La  seconde  partie,  la  plus  importante  porte  spéciale- 
ment le  nom  de  Messery  ;  on  l'appelle  aussi  vers  la 
ville,  nom  qui  provient  du  latin  villa,  sous  lequel  on 
désignait  nos  villages  au  moyen-àge.  Messery  forme  un 
village  groupé,  serré  avec  une  place  publique  au  centre; 
les  jardins  situés  au  couchant  portent  le  nom  de  très-le- 
borgel,  c'est-à-dire  proche  le  borgel.  La  route  qui  va  de 
la  place  publique  au  lac  s'appelle  la  vi  du  borgé.  Ce  nom 
de  Borgel  que  l'on  renconte  encore  ici,  indiquait  au 


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—  88  — 

moyen-âge  une  petite  bourgade  généralement  close  de 
murs  ;  la  place  publique  de  Messery  porte  encore  le  nom 
de  Ders  les  murailles.  Peut-être  qu'aux  époques  trou- 
blées du  moyen-àge,  les  habitants  du  lieu  fortifièrent 
cet  endroit  pour  se  mettre  à  Tabri  d'attaques  inces- 
santes. 

La  famille  la  plus  nombreuse  du  village  est  la  famille 
Duborgel  ;  un  Jean  Duborgel,  de  Messery,  fut  reçu  bour- 
geois de  Genève  le  13  octobre  1489(1);  une  branche 
de  cette  famille  porte  le  surnom  de  Dagui  ;  une  famille 
Servage,  celui  de  Dagosson,  ces  deux  surnoms  dérivent 
de  dague,  sorte  d'épée. 

Nous  retrouvons  ce  nom  de  Messery,  Missirie,  dans 
plusieurs  endroits  du  bassin  du  Rhône. 

Vers  1250,  une  terre  de  Misyrie  est  citée  dans  les 
revenus  du  diocèse  de  Sion  (Valais)  (2). 

En  1251,  un  Johanes  de  Meiserie  est  cité  dans  le 
même  diocèse  (3). 

Un  hameau  de  Féternes,  prèsThonon,  s'appelle  May- 
sirie. 

Enfin  une  commune  du  diocèse  de  Dijon  s'appelle 
Misserie. 

C'est  en  1296  que,  pour  la  première  fois,  le  nom  de 
Messery  apparaît  dans  nos  chartes. 

Dans  une  querelle  survenue  entre  Martin,  abbé  de 
Filly  et  le  seigneur  d'Allinges,  le  fils   de  ce  dernier, 

(1)  Covelle.  Le  litre  des  Bourgeois,  à  Genève,  1896. 

(2)  Société  d'histoire  de  la  Suisse  Romande,  tome  XXIX,  page  454. 

(3)  Ibidem,  page  465. 


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—  89  ^ 

Pierre  d^Allinges,  suivi  de  quelques  corapagoons,  parmi 
lesquels  A.  Mermet,  de  Messery,  clerc,  mettent  le  feu  à 
Filly,  à  une  graugo  dépendant  de  Tabbaye  et  commet- 
tent des  dégâts  pour  une  somme  assez  forte. 


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—  90  — 


CHAPITRE  VI 


La  Paroisse  ou  la  vie  religieuse 

I/Eglise  de  Nernier.  —  L'Eglise  de  Messery.  —  Leur  origine.  — 
Visites  pastorales.  —  Invasion  Bernoise.  —  L'Abbaye  de  Filly. 
—  Inventaire  Bernois.  —  Les  Ministres  du  Saint  Evangile.  — 
(Conversion  du  Chablais.  —  Noms  des  convertis.  —  Les  curés  de 
Messery  depuis  1601.  —  Les  Dîmes.  —  Rentes  de  Filly.  —  l>es 
fondations.  —  La  Révolution.  —  Prêtres  et  religieux  de  Mes- 
sery et  Nernier. 

L'église  de  Nernier,  bâtie  sous  le  vocable  do  St-Mar- 
tio,  au  centre  du  bourg,  sur  les  débris  d'une  villa  ro- 
maine, remonte  probablement  aux  origines  du  chris- 
tianisme ;  quoiqu'il  en  soit  son  nom  n'apparaît  pour  la 
première  fois  dans  nos  annales,  que  vers  le  milieu  du 
XIII«  siècle.  Dans  une  bulle  du  9  septembre  1250,  le 
pape  Innocent  IV  mettait  sous  la  dépendance  de  l'abbaye 
de  Filly,  les  églises  de  Sciez,  Excénevex,  Yvoire,  ainsi 
que  la  chapelle  de  Nernier  (capella  de  Na)miaco)  (1). 

Quant  à  l'église  de  S^-Pierre  de  Messery,  sa  position 
isolée,  entre  le  bourg  de  Messery  et  le  village  de  Veret, 
en  dehors  des  habitations,  est  remarquable,  il  semble 
qu'elle  ait  été  élevée  à  la  suite  d'une  entente  quelconque 

(1)  Académie  Chablaisienne.  Vol.  Vil,  page  38,  note  2.  Piccard, 
Filly. 


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—  91  — 

bien  longtemps  après  la  formation  de  ces  villages.  Tandis 
que  réglise  do  Xcrnier  dépendait  de  l'abbayo  de  Fillj', 
celle  de  Mossery  relevait  du  chapitre  de  Saint-Pierre  de 
Genève. 

En  1344,  nous  voyons  figurer  nos  deux  églises  dans 
rétat  des  procurations  dues  pour  les  visites  épiscopales 
du  diocèse  do  Genève  (1).  La  taxe  dite  procuration, 
consistait  en  une  redevance  fixe,  que  les  bônéficiers 
payaient  à  Tôvêque,  lorsqu'il  faisait  sa  visite. 

Dognovos  (Douvaine)  était  taxé    4  livres  genevoises. 

Massongii 50  sols. 

Casier  (Chens-Cusy)  ....  25  sols. 

Missirio 20  sols. 

Nernier 20  sols. 

Essevenay 10  sols. 

Messery  figure  encorcî  sur  le  Fouillé  du  diocèse  de 
Genève  de  1365;  c'est  un  registre  des  taxes  que  chaque 
bénéficier  devait  payer  annuellement  au  souverain  pon- 
tife. Cette  taxe  était  fixée  à  la  côte  20,  c'est-à-dire  que 
les  bénéficiers  devaient  verser  le  vingtième  de  leurs 
revenus. 
Dovenos  (Douvaine)  comme  cure  était  taxé  13  livres. 

Massongie 161iv.  lOsols. 

Cusier 10  livres. 

Missirie  ne  payait  pas  la  taxe  (2)  (nichil  solvit). 
Mais  une  dîme  était  afférente  aux  personats  et  pour 
cela  le  bénéfice  de  Missirie  était  taxé  à  XXIIII  octanes 
de  blé.  Le  personat  d'une  église  était  une  pension  pré- 

(1)  Mémoires  de  la  Société  d'histoire  et  d'archéologie  de  Genève, 
tome  IX. 

(2)  Académie  Salésienne,  Tome  III. 


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—  92  — 

levée  sur  ses  revenus  en  faveur  d'un  dignitaire  ecclésias- 
tique qui  ne  la  desservait  pas. 

En  1366,  révêquo  do  Genève  Alamand  donnait  le 
personat  de  Messery  au  chanoine  Porchaton  deS'-Jeoire; 
ce  revenu  échut  ensuite  au  chapitre  de  S*-Pierre  de 
Genève  (1). 

Révérend  Messire  Girod  de  Sorbier  est  le  premier 
curé  de  Messery,  dont  le  nom  nous  soit  parvenu.  Dans 
une  transaction  passée  le  13  octobre  1393  dans  la  grande 
salle  de  la  tour  de  Marinions,  paroisse  de  Sciez,  il  est 
pris  commearbitre,  entre  son  ami  Guillaume  de  Lugrin, 
abbé  de  Filly,  et  noble  Jean  de  Neuvecelle  (2). 

En  1413,  révoque  de  Genève,  Juan  de  Bertrand,  pro- 
cède à  la  visite  générale  des  églises  de  son  diocèse.  Il  ne 
s'arrête  pas  à  Messery,  mais  le  4  juin,  il  visite  l'église 
d'Yvoire  et  celle  de  Nernier,  son  annexe.  Ces  deux  pa- 
roisses réunies  ont  quarante  feux  et  25  florins  de  reve- 
nus; l'église  d'Yvoire  est  en  très  mauvais  état,  il  en  est 
de  même  do  celle  de  Nernier.  Il  manque  à  cette  der- 
nière, une  custode,  un  livre  pour  les  offices,  un  crucifix 
et  l'image  de  S^Martin,  patron  du  lieu  (3). 

En  1425,  Messire  Jean  de  Folla,  est  curé  de  Messery. 

Le  13  décembre  de  cette  année,  il  déclare  par  devant 
l'official  de  la  curie  de  Genève  et  en  présence  de  Berthet 
de  Carro,  notaire  public,  qu'en  sa  qualité  de  prêtre, 
curé  et  recteur  de  l'église  paroissiale  de  Missirier,  il  est 
tenu  de  payer  au  vénérable  chapitre  de  Genève,  chaque 

(\)  Académie  Salésienne,  Tome  XIV,  page  118. 

(2)  Piccard.  Abbaye  de  FiUy^  page   125  (Girodo  de  Sorberio 
curato  Missiriaci). 

(3)  Archives  de  Genève,  Visites  pastorales,  volume  I. 


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âhnéo,  le  jour  de  la  S*-Michel,  20  sols  de  cens,  réversible^ 
à  la  fabrique  de  S*-Plerre  comme  droit  de  personat. 

Le  morne  curé  reconnaît  que  la  dîme  do  Missirie  se 
perçoit  par  indivis  entre  la  fabrique  du  Chapitre  de 
S*-Pierre  de  Genève,  le  curé  de  Messery  et  le  prieur  de 
Douvaine  (Dovenoz),  et  que  le  droit  de  personat  perçu 
par  P.  de  S*-Jeoire,  jadis  chanoine  de  Genève,  fut  in- 
corporé à  la  dite  fabrique  par  le  saint  siège  apostolique. 

Cet  acte  fat  dressé  à  Genève  devant  l'église  Sainte 
Marie  la  Neuve,  en  présence  de  discrets  :  Jean  de 
ViNTiNAC,  prêtre,  Jean  Morel,  de  Magny,  Etienne 
Grilliet,  de  Divonne,  et  François  Buffard,  de  la 
paroisse  de  Contamines,  Clerc  (1). 

Visite  pastorale  de  1443 

En  mars  1443,  Barthélémy  de  Corneto,  évêque  de 
Montefiascone,  procède  à  la  visite  pastorale  des  églises 
du  diocèse  au  nom  de  révoque  de  Genève,  François  de 
Mez,  qui  siégeait  au  concile  de  Bàle  (2).  L'évêque  passe 
le  21  mai  à  Douvaine  et  Massongy,  le  22  mai  à  Excé- 
nevex,  Yvoire  et  Nernier;  ces  trois  églises  étaient  de  la 
dépendance  de  Tabbaye  de  Filly  ;  le  même  jour  il  visite 
celle  de  Messery  sous  le  vocable  de  S*-Pierre  ;  son  curé 
est  le  seigneur  Johannos  de  Chita,  la  paroisse  a  30  feux, 
son  revenu  est  de  30  florins.  L'évêque  ordonne  entre 
autres  remai'ques  générales,  d'avoir  des  tutrices  avec  une 
armoire,  pour  fermer  les  livres  qu'on  attachait  avec  des 
chaînes  sur  le  lutrin. 


(1)  Archives  de  Genève.  Parchemins  du  chapitre. 

(2)  Académie  Salésienne.  Tome  VI. 


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—  94  — 

Visite  pastorale  de  1472 

Eu  1472,  Mamort  Fichet,  originaire  du  Petit  Bornand, 
évoque  d'Hébron  et  vicaire  général  de  Téveché  de  Ge- 
nève, procède  à  la  visite  pastorale  du  diocèse,  comme 
délégué  de  Jean-Louis  de  Savoie  (1). 

Le  12  mars  il  visite  l'église  paroissiale  de  Messery 
(de  Missiriaco),  entièrement  soumise  à  la  juridiction  de 
rOrdinaire.  La  paroisse  a  30  feux,  soit  environ  150  ha- 
bitants et  40  florins  de  revenu  ;  son  curé  est  le  seigneur 
Jean  Ogier  qui  n'y  réside  pas,  mais  la  fait  desservir  par 
Messire  Amédée  de  Chita.  L'église  est  bien  pauvre. 
L'évoque  prescrit  aux  paroissiens  :  de  faire  un  pavé 
dans  le  chœur  et  dans  la  nef,  depuis  les  portes,  en  dis- 
tinguant le  sanctuaire  par  une  élévation  d'un  pied,  de 
faire  de  nouveaux  fonds  baptismaux,  de  faire  relier  les 
livres,  surtout  le  vieux  psautier,  de  faire  une  bonne 
petite  cloche,  d'entretenir  l'huile  de  la  lampe,  de  porter 
le  pain  bénit  comme  ailleurs,  de  limiter  le  cimetière 
comme  l'évéque  l'a  marqué,  etc....  Il  prescrit  au  curé 
d'établir  un  livre  dans  lequel  il  écrira  les  noms  et  pré- 
noms des  enfants  baptisés  et  de  leurs  parents. 

Le  lendemain  13  mars,  le  prélat  inspectait  l'église  de 
S*-Pancrace  d'Yvoîre  avec  son  annexe  de  Nernier,  ces 
deux  paroisses  réunies  ne  comptaient  que  trente  feux  ; 
les  revenus  étaient  de  50  florins.  Le  curé  Peronet 
Michaud,  religieux  de  Filly,  était  absent,  son  vicaire 
présent,  Laurent  Gonverset  n'avait  pas  été  présenté  à 
l'évéque. 

(1)  Archices  de  Genèce.  Visites  pastorales,  vol.  II. 


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-^  95  ^ 

Visite  pastorale  de  1482  (1) 

Claude  Rup,  évoque  do  Claudiopolis,.  suflfragaDt  de 
Jean-Louis  do  Savoie,  visite  le  diocèse  en  1481-1482.  Il 
passe  à  Messery  le  22  janvier  1482;  le  nombre  des  feux 
et  les  revenus  sont  les  mêmes  que  dix  ans  auparavant. 
Le  curé  est  Messire  Jehan  Ogier  qui  n'y  réside  pas;  on 
lui  enjoint  d'y  résider  ou  d'obtenir  le  permis  de  non  rési- 
dence, dans  le  délai  d'un  mois  ;  il  fait  desservir  la  paroisse 
par  Messire  Pierre  de  Valvone,  présent.  L'évéque,  après 
avoir  constaté  les  réparations  à  exécuter,  enjoint  aux 
paroissiens  de  les  faire  sous  peine  d'excommunication 
et  d'une  amende  de  25  livres.  Il  ordonne  en  outre  :  qu'ils 
entretiennent  l'huile  dans  la  lampe,  40  jours  d'indulgence 
sont  accordés  à  ceux  qui  donnent  l'huile  ;  que  les  parois- 
siens paient  les  equanfiœ  pour  la  fabrique  de  l'église, 
aux  termes  qui  leur  seront  désignés,  sinon  il  est  enjoint 
au  curé  de  ne  pas  admettre  à  la  participation  des  sacre- 
ments ceux  qui  refuseront  de  payer,  etc.... 

L'évéque  visite  la  chapelle  du  Saint-Esprit  dont  sont 
patrons  les  nobles  Pierre  et  Jean  de  Lugrin,  seigneurs 
de  Frise  et  leurs  co-diviseurs,  sous  la  charge  d'une 
messe  hebdomadaire  ;  cette  chapelle  est  munie  d'un 
calice  et  d'autres  ornements;  son  recteur  est  le  seigneur 
Andréas  Guibelli. 

Le  même  jour  l'évéque  visite  l'église  paroissiale 
d'Y  voire  et  sou  annexe  de  Nernier;  le  chiffre  des  feux 
et  des  revenus  est  le  môme  qu'en  1471. 

Parmi  les  tenanciers,  soit   fermiers  des  biens  de  la 

(1)  Archives  de  Genève.  Visites  pastorales,  tome  III. 


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cure  de  Messery,  à  cette  époque  nous  pouvons  citer  :  (1) 

Nicod  Marquet  qui,  à  la  réquisition  de  Pierre  Quisard, 
notaire  à  Massongy,  signe  une  reconnaissîince  à  cet  effet 
le  12  avril  1492,  en  présence  de  Révérend  Pierre  Dufour, 
curé  de  Massongy  et  recteur  de  l'église  de  Messery. 

Durant  Tannécî  1492  et  les  suivantes,  plusieurs  mem- 
bres des  familles  Duborgel,  Boccard,  Quiblier,  signent 
des  reconnaissances  analogues  (2). 

Vers  1501,  Ambjard  Goyet,  chanoine  de  S*-Pierre  de 
Genève,  vicaire  général  du  diocèse,  devenait  abbé  de 
Filly  ;  cette  abbaye  était  devenue  une  des  plus  puissantes 
maisons  religieuses  du  Chablais  ;  elle  avait  sous  sa  dé- 
pendance presque  toutes  les  paroisses  qui  Ta  voisinaient  : 
Nernier,  Yvoire,  Excénevex,  Sciez,  Perrignier. 

La  position  élevée  de  son  nouvel  abbé  ajoutait  encore 
à  sa  puissance.  Le  23  janvier  1506,  la  cure  de  Messery 
ayant  été  résignée  par  Messire  Pierre  Goyet  est  conférée 
sur  la  présentation  de  Tabbé  de  Filly  à  Messire  Jacques 
Morel,  prêtre.  Mais  ce  dernier,  au  bout  de  deux  années 
ayant  résigné  son  bénéfice,  est  remplacé  le  23  mars 
1508  par  Messire  Pierre  Goyet  (3). 

Visite  pastorale  de  1518  (4) 

En  1518,  Pierre  Farfeni,  évêque  de  Bairout,  procède 
à  la  visite  pastorale  des  églises  du  diocèse  au  nom  de 
révoque  Jean  de  Savoie. 

Le  17  avril  1518,  il  visite  l'église  de  Missirie,  sous 
rentière  juridiction  de  l'Ordinaire. 

(1)  Archives  Costa  de  Beauregard.  Registre  des  reconnaissances 
de  Messery,  1492. 

(2)  Archi'ces  du  château  de  Beauregard, 

(3)  Communiqué  par  M.  Tabbé  Gonthier. 

(4)  Archives  de  Genève.  Visites  pastorales,  tome  IV. 


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Le  vénérable  Chapitre  de  lUnsigoe  abbaye  de  Filly 
en  est  le  caré  on  le  vicaire  perpétuel  ;  c'est  R**  Messire 
Hugues  Bourgeois  qui  la  dessert.  Elle  a  40  feux,  son 
revenu  est  do  100  florins.  L'évêque  ordonne  que  les  pa- 
roissiens aient  deux  candélabres  de  laiton  pour  l'usage 
du  grand  autel. 

II  y  a  une  chapelle  sous  le  vocable  de  la  bienheureuse 
Vierge  Marie,  qui  a  pour  patron  les  nobles  d'Allinges, 
sous  la  charge  d'une  messe  par  semaine.  Le  recteur  est 
Révérend  Messire  Aymon  Collât  qui  la  fait  desservir 
par  Messire  François  Baudat  ;  elle  est  bien  fournie,  il 
est  enjoint  aux  fondateurs  d'y  ériger  un  autel  en  pierre. 

Une  seconde  chapelle  est  placée  sous  le  vocable  de 
Saint-Biaise  dont  Pierre,  Jean  et  André  Vigny  autre- 
ment dit  Pillet  senties  patrons,  sous  la  charge  de  deux 
messes  par  semaine;  le  recteur  est  Messire  Girard  Gu- 
belli  qui  la  fait  desservir  par  Messire  François  Baudat; 
cette  chapelle  est  bien  fournie. 

Une  troisième  chapelle  est  sous  le  vocable  du  5*- 
Esprit,  dont  les  patrons  sont  les  paroissiens,  sous  la 
charge  d'une  messe  par  semaine  ;  le  recteur  est  Messire 
Antoine  d'Antioche  qui  la  dessert.  Elle  manque  de  tout; 
il  est  enjoint  aux  fondateurs  d'ériger,  avant  4  ans,  un 
autel  en  pierre  en  dehors  du  mur  de  l'église  et  dans  le 
même  délai  de  la  munir  de  tous  ses  ornements  et  d'un 
calice  d'argent. 

Les  confréries  du  Saint-Esprit  que  Ton  trouve  établies 
aux  XV®  et  XVI^  siècles  dans  notre  Chablais,  à  Thonon, 
Douvaine,  Massongy,  Yvoire,  Messery,  etc.,  étaient  des 
associations  chrétiennes  de  secours,  en  faveur  des  pau- 
vres. Chaque  membre  de  ces  confréries  promettait,  en  y 

7b 


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—  98  - 

entrant,  de  payer  chaquç  année,  le  montant  du  fruit  que 
son  bétail  pouvait  produire  dans  lespace  d'un  jour.  On 
peut  voir  par  là  que  ces  confréries  étaient  de  véritables 
bureaux  de  bienfaisance,  et  que  nos  philanthropes  mo- 
dernes n'ont  rien  inventé. 

Le  IG  avril,  révoque  visite  la  paroisse  d'Y  voire  qui 
compte  30  feux,  et  sa  filleule  do  Nernier  qui  en  a  25  ; 
son  revenu  est  de  80  florins,  son  curé  est  Révérend 
Messire  Claude  d'Antioche.  Dans  nos  trois  paroisses  la 
situation  matérielle  est  meilleure  qu'en  1481.  La  popu- 
lation a  suivi  la  même  marche  ascendante,  elle  a 
augmenté  de  dix  feux,  soit  d'un  quart  à  Messery,  elle  a 
doublé  à  Nernier  et  Yvoire. 

La  Chapelle  de  Saint-Biaise  en  Véglvie  de  Messert/, 
dont  il  vient  d'être  question,  fut  fondée  le  l«r  janvier 
1483,  par  honorable  Girard  Vignon  alias  Pillet  (acte  de 
Vallon,  notaire);  son  premier  recteur  fut  André  Guibc^lli, 
prêtre  ;  le  déc('»s  do  ce  dernier  l'ayant  rendue  vacante, 
elle  fut  donnée  à  Jean  Guibelli,  clerc,  le  31  décembre 
1510,   sur  la   présentation  d'Egrôge   Claude  Guibelli. 

Le  nouveau  curé  étant  mort,  Girard  Guibelli  en  est 
nommé  recteur  le  17  mai  1514  sur  la  présentation  de  la 
famille  Vignon  dit  Pillet,  de  Messery.  Cette  chapelle 
devient  encore  vacante  le  4  avril  1526,  par  le  décès  de 
Messire  Girard  Guibelli  ;  elle  est  alors  donnée  à  discret 
Bernard  Régis,  clerc  (1). 

Invasion  Bernoise.  —  Guerres  de  Religion 

Profitant  des  embarras  du  duc  de  Savoie  en  guerre 
avec  la  France,  les  Suisses  se  jettent  sur  ses  possessions 
des  rives  du  Léman  (IG  janvier  153G). 
(1)  Communiqué  par  M.  Tabbé  Gonthier. 


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—  99  — 

Les  Genevois  qui  venaient  d'embrasser  la  Réforme  et 
de  proclamer  leur  indépendance,  se  joignent  aux  Ber- 
nois et  ravagent  les  campagnes  environnantes.  Les  no- 
tables du  Chablais  épouvantés  vont  à  Gex  au  devant 
des  envahisseurs  faire  leur  soumission,  pendant  que 
ceux  d'Evian  et  du  pays  de  Gavot,  pour  échapper  aux 
Bernois  protestants,  appellent  les  Valaisans.  Les  Ber- 
nois s'emparèrent  donc  du  Chablais  jusqu'à  la  Dranse  ; 
ils  divisèrent  le  pays  conquis  en  deux  baillages  :  Ter- 
nier-Gaillard  et  Chablais.  Ce  dernier  eut  Thonon  pour 
capitale. 

Les  catholiques  de  Genève,  tracassés  par  les  nova- 
teurs, voyant  leurs  maisons  détruites,  leurs  biens  con- 
fisqués, s'étaient  réfugiés  en  1535  au  château  de  Poney 
sur  le  Rhône,  et  au  nombre  de  cinquante  tenaient  la 
campagne  contre  Genève.  Un  jour  ils  enlèvent  les  vaches 
de  ceux  de  Genève  sur  la  montagne  du  Sallevoz  ;  un 
autre,  ils  sont  à  Nernier  où  ils  capturent  le  vin  que  des 
Genevois  avaient  déjà  chargé  sur  des  barques  pour 
l'emmener  en  ville  (1). 

Les  Bernois,  pendant  plusieurs  années,  n'innovèrent 
rien  en  matière  do  religion,  ils  se  contentèrent  de  faire 
prêcher  l'évangile  dans  chaque  paroisse,  généralement 
par  des  réformés  français  ;  mais  les  paysans  recevaient 
fort  mal  les  prédicateurs.  Farel  et  Lambertet,  ministres 
protestants,  étant  venus  prêcher  à  Thonon,  on  refusa 
de  les  entendre. 

Le  Sénat  de  Berne  fit  proclamer  des  édits  sévères 
contre  la  religion  catholique  ;  les  chapelles  et  les  autels 
furent  renversés,  le  peuple  forcé  d'assister  au  prêche, 

(1)  Blavignac.  Etudes  sur  Genève.  Livre  11,  page  192. 


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-  loO- 

les  prêtres  et  les  religieux  bannis.  La  force  était  ailjè 
mains  des  novateurs,  les  catholiques  durent  subir  io 
joug  de  fer  qu*on  leur  imposait.  Le  langage  populaire  a 
gardé  de  cette  époque  les  expressions  suivantes  : 
€  Langue  de  Farel  »  pour  désigner  une  mauvaise  lan- 
gue et  €  raide  comme  la  jusllce  de  Berne.  » 

En  1539,  les  Bernois  fermèrent  Tabbaye  de  Filly,  qui 
avait  pris  dans  le  pays  une  grande  extension.  Ses  rentes 
féodales  ou  rcnteg  foncières  s'étendaient  sur  24  paroisses. 

A  Messery,  nous  pouvons  citer  parmi  les  tenanciers  de 
Tabbaye  : 

Nicolet  Quiblier,  qui  en  février  1527,  reconnaissait 
tenir  des  vénérables  religieux  de  Tabbaye  de  Filly  le 
tiei's  d'une  pose  de  terre,  lieu  dit  en  Mornant,  pour 
laquelle  était  due  annuellement  la  censé  d'un  quart  de 
froment,  mesure  de  Nyon. 

Claude  feu  Pierre  Boccard,  pour  demie  pose  de  terre, 
lieu  dit  en  Tarantin. 

André  et  Bernard  feu  Robert  Duborgel,  pour  une  terre 
lieu  dit  Fs-Fossauœ (l). 

Les  pauvres  perdirent  beaucoup  à  la  fermeture  de 
l'abbaye  ;  25  muids  de  froment,  soit  environ  onze  mille 
kilogs  étaient  distribués  chaque  année  aux  indigents  ; 
ces  aumônes  servirent  dès  lors  à  l'entretien  des  minis- 
tres de  la  nouvelle  religion  (2). 

En  1540,  le  Sénat  de  Berne  délégua  une  commission 
chargée  de  dresser  l'inventaire  exact  des  biens  ecclé- 

(1)  Archives  Vuarnet.  Un  quart  de  froment  est  mis  pour  un 
quart  de  coupe. 

(2)  Le  muid  de  froment  valait  12  coupes,  la  coupe  de  blé  pèse 
42  kilogs. 


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—  101  — 

siastiques  de  chaque  paroisse.  Le  commissaire,  spectable 
Nicolas  Vulliaad,  passa  à  Messery  le  18  octobre;  il  s'a- 
dressa à  Michel  Cholet,  Michel  Siccard  et  Jaoyn  du 
Borgc  qui  déclarèrent  que  ces  biens  comprenaient  : 

1*^  Une  maison  et  grange  do  trois  épueds  avec  un 
curtil  d'une  demie  fossorée  et  un  autre  jardin  derrière 
régliso,  la  grange  attenante  servant  à  rentrer  les  dîmes, 
(cette  grange  existe  encore  à  côté  de  la  cure)  ; 

2»  En  Mèneriez,  deux  poses  et  demie  de  terre  et  pré; 

3°  Eu  Roget,  six  poses  de  terre  ; 

4°  En  Vétroz,  deux  poses  dont  une  pose  et  demie  en 
vigne  ; 

5«  Champ  du  fief  de  Savoyo,  vers  le  lac,  trois  seyto- 
rées  de  pré; 

6^  En  Tate,  3  poses  de  bois  (sans  doute  vers  la  Tate 
de  Couches,  où  se  trouve  de  nos  jours  un  bois  appelé 
le  bois  de  la  cure); 

7o  La  dîme  de  la  cure,  valant  tant  blé,  vin,  que  chan- 
vre environ  30  à  40  florins  par  année  ; 

8«  La  dîme  de  Novellay  valant  10  à  15  florins  par 
année  ; 

9°  A  Messerier,  la  chapelle  de  Notre-Dame  et  du 
Saint-Esprit,  dont  honorable  Pierre  Crebly  (Quiblier) 
est  fermier  ; 

10«  Une  autre  chapelle  de  S*^-Blaise,  dont  est  recteur 
honorable  Pillet  (1).  v 

L'église  de  Nernier  était  filleule  de  celle  d'Y  voire, 

(1)  Manuscrit  de  f  Académie  Chablai sienne.  Sey torée,  du  patois 
seyi  faucher,  ancienne  mesure  pour  les  prés.  L'homme  ou  la  fos- 
sorée, ancienne  mesure  pour  les  vignes  valait  40  toises,  c'était 
tout  ce  qu'un  ouvrier  pouvait  bêcher  d'un  jour.  La  pose  ou  jour- 
nal, mesure  de  Thonon,  vaut  36  ares. 


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—  102  — 

ses  biens  comprenaient,  déclarent  les  experts  : 

1°  Une  chapelle  deS^-Sébastien,  qui  possède  une  mai- 
son située  à  Nernier  ; 

2o  Une  chapelle  de  Notre-Dame  qui  a  aussi  une  mai- 
son, laquelle  est  affermée  par  le  bailli  de  Gex  ; 

3oUnc  chapelle  de  S*-Michel  qui  n'a  plus  de  droits, 
cependant  on  dit  qu'elle  a  une  fondation  de  100  florins. 

A  la  suite  de  cette  enquête,  douze  ministres  furent 
établis  en  Chablais  et  mis  immédiatement  en  possession 
des  biens  ecclésiastiques.  A  Messery,  le  ministre  vint 
résider  à  la  cure;  la  paroisse  de  Nernier  qui  jusque-là 
avait  été  filleule  d'Y  voire,  et  par  conséquent  était  dé- 
pourvue de  cure,  fut  rattachée  à  Messery  ;  ces  deux  pa- 
roisses restèrent  ainsi  unies  jusqu'à  la  Révolution  de 
1793. 

Cependant  la  fortune  sourit  aux  armes  de  Savoie;  par 
le  traité  de  Lausanne,  et  la  convention  de  Nyon  signée 
le  30  octobre  1504,  le  Chablais  fut  rendu  au  duc. 

Les  Bernois  avaient  stipulé  que  la  religion  réformée 
serait  respectée  ;  trois  ministres  seulement  restèrent 
dans  le  Chablais,  le  premier  à  Thonon,  le  second  à 
Bons,  le  troisième  à  Messery-Nernier. 

En  1579,  les  biens  de  l'abbaye  de  Filly  non  aliénés 
furent  donnés  à  l'ordre  de  S^-Maurice  et  Lazare  en  vertu 
d'un  bivf  du  pape  ;  on  en  fit  une  commanderie,  dite 
Commanderie  de  Filly;  diverses  charges  y  furent  atta- 
chées entre  autre  le  traitement  des  ministres.  Le  mi- 
nistre de  Miserie  reçut  2  muids  G  coupes  de  froment, 
et  200  florins  de  traitement  annuel  (1). 

(1)  Piccard.  Abbaye  de  Filly ^  page  198. 


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—  103  — 

Les  ministres  de  Messery  dont  les  noms  nous  sont 
parvenus,  sont  : 

1»  Claude  Duvet,  ministre  de  Messery  :  en  1579,  il  y 
possède  une  vigne  lieu  dit  au  Molin. 

2°  Spectable  Jérôme  Dubois,  ministre  du  S*-Evangile 
et  pasteur  des  .églises  de  Messery  et  Nernier.  En  1588, 
il  possède  une  maison  avec  pré  et  curtil  au  village  de 
Messery,  une  terre  aux  Kipettes  (1). 

3°  Jean  Michaud  :  en  1589  une  ordonnance  du  comte 
de  Martinengue  permet  à  trois  ministres  protestants  de 
prêcher  en  Chablais,  parmi  lesquels  Jean  Michaud  à 
Nernier  (2). 

On  était  alors  en  pleine  guerre  religieuse  ;  le  19  mai 
1589  le  gouverneur  des  Allinges,  baron  d'Hermance, 
après  avoir  mis  des  garnisons  en  plusieurs  endroits  du 
baillage  de  Thonon,  permit  au  ministre  do  Missery, 
nommé  Michaud,  de  faire  la  Cène,  prescher  et  baptiser 
afin  de  n'effaroucher  personne,  mais  dit  la  chronique 
«  il  n'y  a  point  d*exercice  en  tout  le  baillage  que  là  »  (3). 

C'est  sans  doute  pour  cette  cause  que  les  bandes  gene- 
voises ne  vinrent  pas  porter  leurs  ravages  à  Messery  ; 
car  nous  les  voyons  le  29  mai  1590  à  Douvaine  prélever 
des  contributions  sur  les  habitants  des  villages  voisins, 
«  mais  ceux-ci  s' avouant  sujets  du  duc,  sonnent  le 
«  tocsin,  s'afnassenc  au,  nombre  de  300,  tuent  le  capi- 
«  laine  La  Guiche  avec  trois  de  ses  soldats  et  en  font 
«  prisonniers  trois  autres  qui  étant  blessés  sont  enfer- 
«  mes  au  château  de  Cou^rée.  »  (4). 

(1)  Archives  Vuarnet. 

(2)  Picc3ir(i.  Histoire  de  Thonon. 

(3)  Archives  de  Genève.  Manuscrits  historiques,  volume  67. 

(4)  Archives  de  Genève.  Manuscrits  historiques,  volume  67. 


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—  104  — 

Le  1er  juin,  quelques  cavaliers  geuevois  étant  allés  à 
Douvaiue,  vengent  la  mort  de  La  Guiche  en  tuant  cinq 
ou  six  paysans. 

«  Le  dimanche  '^0  septembre  1390,  les  nôtres,  dit 
«  la  chroniqiœ genevoise,  notamment  ceux  de  cheval, 
«  fi)'ent  diverses  courses  vers  Massonyier  et  Dovaine, 
«  d'où  ils  emmenèrent  force  bestail  et  quelques  pri- 
«  sonniers,  notamment  les  paysans  qui  ont  tué  La 
«  Guiche  et  au  lieu  de  demewer  cois  en  leurs  maisons 
«  ont  voulu  porter  les  armes 2)Our  les  Savoyards,  »(1). 

Cette  guerre  de  dévastation  dura  jusqu'en  1593,  épo- 
que où  un  événement  inattendu  vint  changer  la  face 
des  choses.  Henri  IV  abjurait  le  protestantisme  (25  juillet 
151)3)  ;  les  ligueurs  conclurent  avec  lui  une  trêve,  dans 
laquelle  le  duc  de  Savoie  et  Genève  furent  compris. 

Au  milieu  de  ces  troubles,  les  soldats  débandés  rava- 
geaient les  campagnes.  Le  12  février  1589,  une  galère 
de  Genève,  pesamment  chargée  de  marchandises,  se  di- 
rigeait sur  Morges,  lorsqu'arrivée  à  la  hauteur  du  vil- 
lage de  Nernier,  elle  fut  rejointe  par  une  barque,  sur 
laquelle  se  trouvaient  une  douzaine  d'arquebusiers  pié- 
montais  de  la  garnison  de  Ripailles.  Les  piémontais 
abordent  et  se  précipitent  sur  le  barquier,  Jean  Barba, 
qui  est  frappé  d'un  coup  de  stylet  à  l'épaule,  puis  ils  se 
retirent  après  avoir  fait  main  basse  sur  une  grande 
quantité  de  marchandises.  Sur  les  réclamations  du  con- 
seil de  Genève  et  comme  la  guerre  n'était  pas  encore 
déclarée,  le  procès  des  coupables  fut  rapidement  ins- 
truit; quatre  des  soldats  piémontais  furent  saisis  par  la 
justice,  ot  le  2S  février  1589,  le  procureur  fiscal  de  Tho- 

(1)  Ibidem.  (La  Guiche  était  un  capitaine  genevois). 


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—  105  — 

nou  demandait  au  conseil  de  Genève  de  bien  vouloir 
lui  prêter  le  bourreau  pour  rexécution  des  condamnés  (  1  ). 

En  mars  1592,  Pierre  Genêt,  du  village  de  Chevilly, 
commune  d'Excénevex,  apportait  à  Thonon  40  florins  des 
contributions  do  février,  lorsqu'arrivê  au  pont  de  Mar- 
claz,  il  se  vit  dépouiller  par  5  ou  6  arquebusiers  et  gens 
de  pied,  italiens  ou  savoisiens  (2). 

Ces  soldats  mercenaires  étaient  la  plaie  do  l'époque 
et  comme  nous  le  montre  cet  exemple,  ils  n'épargnaient 
môme  pas  les  populations  qu'ils  étaient  chargés  de  dé- 
fendre. Il  en  était  d'ailleurs  de  même  à  Genève,  où  sui- 
vant un  auteur  local  :  (3)  «  les  officiers  eux-mêmes  ne 
«  prêchant  guère  d'exemple^  le  Conseil  se  décida  à 
«  seoir  contre  trois  d'enti'e  eux  qui  s'entendaient 
«  comme  larrons  en  foire!  !  !  » 

Conversion  du  Chablais 

La  paix  conclue,  le  duc  de  Savoie  désormais  tranquille 
du  côté  do  la  France,  résolut  de  ramener  le  Chablais  au 
catholicisme.  L'évoque  de  Genève,  résidant  à  Annecy, 
envoya  sur  les  lieux  des  missionnaires  qui  durent  se 
retirer.  C'est  alors  que  François  de  Sales,  prévôt  du 
Chapitre,  demanda  et  obtint  l'autorisation  de  partir 
pour  la  mission  du  Chablais.  S'étant  adjoint  son  cousin 
Louis  de  Sales,  ils  vinrent  frapper  le  14  septembre  1594, 
à  la  forteresse  des  AUinges,  où  ils  furent  reçus  par  le 
baron  d'Hermance,  gouverneur.  De  là,  chaque  jour  ils 
parcouraient  les  campagnes,  prêchant  dans  les  villages, 

(1)  Henri  Fazi.  La  guerre  du,  pays  de  Gex^  pages  66,  67,  68. 

(2)  Piccard.  Histoire  de  Thonon.  La  famille  Genêt  existe  de  nos 
jours  à  iMessery.  En  1721,  Hippolyte  Genêt,  fils  de  Philibert, 
natif  de  Chevilly  se  marie  à  Messery. 

(3)  Henri  Fazi.  La  guerre  du  pays  de  Gex,  pages  190  et  191, 


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—  106  — 

dans  les  champs,  sur  les  routes.  Après  trois  années  de 
ce  rude  labeur  (1597),  François  de  Sales  appela  à  son 
aide  des  prêtres  savants  qu'il  plaça  dans  les  villages. 

Le  chanoine  Grandis  accepta  la  cure  de  Douvaine  et 
Loisin. 

Le  chanoine  Théodore  Warouf-Gondan  celle  dTvoire 
et  d'Excénevex. 

Louis  de  Sales  se  réserva  la  cure  de  Brens. 

En  juillet  1597,  des  pères  capucins  et  des  pères  jésuites 
vinrent  aider  S*  François.  Le  20  septembre  1598,  des 
40  heures  eurent  lieu  à  Thonon  au  milieu  d'une  grande 
affluence  de  peuple.  Le  duc  do  Savoie  arriva  en  cette 
ville  le  28  septembre,  précédant  de  deux  jours  le  légat 
du  pape,  cardinal  Alexandre  de  Médicis.  Les  populations 
du  Chablais  furent  invitées  à  se  rendre  de  nouveau  à 
Thonon  pour  de  secondes  quarante  heures,  La  cérémonie 
commença  le  1^^  octobre  ;  des  processions  de  toutes  les 
communes  du  Chablais  s'y  rendirent,  celles  de  Messery 
et  de  Nernier  étaient  du  nombre  (1).  Cependant  quelques 
seigneurs  et  nombre  de  familles  refusaient  de  se  con- 
vertir. Le  6  octobre,  par  un  édit,  le  duc  les  chassa  de 
ses  Etats.  Parmi  ces  derniers  se  trouvait  le  seigneur  de 
Nernier,  noble  de  Brotty,  colonel  de  chevau-légers, 
qui  se  retira  à  Nyon. 

Le  lendemain  de  cet  acte  de  rigueur,  7  octobre  1598, 
les  paroisses  de  Ballaison,  Messery,  Hermance,  Cou- 
drée  allaient  abjurer  ;  elles  étaient  conduites  par  le  père 
Sébastien,  prédicateur  capucin  :  «  c'était,  dit  Vabbé  de 
Baudry^  le  fruit  de  ses  infatigables  travaux,  car  ce 

(1)  DeBaudry.  Relation  abrégée  des  Travaux  de  V apôtre  du  Cha- 
blais. Tome  11,  page  201. 


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—  107  — 

bon  père  pour  a  voiv  occasion  de  catéchiser  les  paysans, 
travaillait  avec  eicx  clans  les  vignes  et  se  faisait  ainsi 
tout  à  tous  pour  les  gagner  à  J.-C.  »(1). 

A  rarrivée  do  chaque  paroisse  dans  l'église  S*-Hippo- 
lyto  de  Thonou,  une  commission  de  12  c*ccl6siastiques 
avait  été  chargée  de  recueillir  les  noms  des  abjurants  ; 
cette  commission  n'inscrivit  que  les  chefs  de  famille.  Un 
tableau  des  abjurants  fut  envoyé  à  Rome  ;  on  Ta  re- 
trouvé, il  y  a  quelques  années,  dans  la  bibliothèque  du 
Vatican  ;  (quelques  noms  furent  mal  prononcés  ou  mal 
orthographiés,  mais  il  est  facile  de  les  reconnaître). 

Liste  des  Abjurants  de  Messery  (2)  (7  Octobre  1598) 

Michel  Sauva  ;  Bernard  Pochât;  Bertrand  Moloyllet; 
Jean  Chollet;  Pierre  Criblier;  Guillaume  Criblier;  An- 
toine Dayon  ;  Claude  Peignent;  François  Criblier;  Jean 
Fayssan  ;  Guillaume  Verbod  ;  Pierre  Chaudet  ;  Pierre 
du  Borgé  ;  Pierre  Mathieu  ;  Louis  Boccard  ;  Bernard 
du  Borgé;  Bernard  delaCrosa;  Jean  Vuarnet;  Bernard 
Benoit;  François  Parguen;  Jean  Criblier;  Maximilien 
Criblier;  Georges  de  Creusa;  Michel  do  Creusa  ;  Fran- 
çois Criblier  dit  Faysan;  Jacques  Criblier;  Samuel 
Sauva  (Servage)  ;  Jean  du  Borgé  ;  François  du  Borgé; 
Florence  Chaudet  ;  Aymon  Secard;  Jean  Criblier  dit 
Crusilat;  Pierre  Borgeallet  ;  Jean  Broillet;  Martin 
Sauva  ;  Bernard  Martin  ;  Jacques  Souva  ;  Jacques  Crespi  ; 

(1)  Abbé  de  Baudry.  Relation  abrégée  des  Travaux  de  V apôtre 
du  Chablais.  Tome  II,  page  238.  Le  père  Sébastien  naquit  à 
St-Jean-de-Maurienne  en  1571,  il  entra  au  noviciat  en  1588  ; 
comme  le  père  Chérubin,  il  avait  une  voix  forte  au  service  d*une 
mémoire  excellente,  il  mourut  en  1634  à  St-Jean-de-Maurienne. 
(Vie  du  père  Chérubin^  par  Tabbé  Truchet).  Chambéry.  1880, 
page  367. 

(2)  Académie  Salésienne.  Tome  11,  document  VllI. 


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—  108  — 

Pierre  Motella  ;  Noël  Criblicr;  Louis  Criblier  ;  Jean- 
François  Arpin  ;  Catherine  Paysan  ;  Jeanne  Seccard  ; 
Jeanne  femme  de  François  Martin  ;  Maurice  BroUiet  ; 
Jacques  Sauva  ;  François  Chaudet  ;  Pierre  Sauvage  ; 
Jean  de  Creusa. 

Liste  des  Abjurants  de  Nernier  (9  Novembre  1598) 

Nicolas d'Éssert ;  Pierre  Duchesne;  Philibert  Jacquin; 
Daniel  VuUiermo  ;  François  Bolliet  ;  Guillaume  Crespi  ; 
Guillaume  Jaquin  ;  Pierre  Favre  ;  André  d'Essert;  la 
veuve  de  Pierre  Scutistère;  la  veuve  de  Pantaléon  Por- 
tier; Bernarde  femme  de  Humbert  Bonnevaux;  Amédée 
Chauderon  ;  Daniel  Mottct  ;  Hippolyte  Gruiller  ;  Pierre 
Vuliermoz  ;  Pierre  Serard  ;  Philippe  Dacquin  ;  Humbert 
Bonivard  ;  Bernard  Pottey  ;  François  Vuliermoz  ;  Salo- 
mon  Mottet;  Girarde  Crespi  ;  Da vienne  Mochet  ;  Louis 
Cul  de  Corzent;  Berthe  Pellessar;  Bornon  Rigaud  ; 
Jeannette  Canevet  ;  Jeanne  de  Balleyson  ;  Claudine  JVIa- 
ret  ;  Françoise  Chevallier  ;  Jacqueline  Putod  ;  Pernette 
Piccud  ;  Marie  Baudier;  Jeanne  Bouinard  ;  Louise  Du- 
four  ;  Claudine  Pui  ;  Péronne  Tornier;  Françoise  de 
Lestand;  Jeanne  veuve  de  Bernard  Piccut;  Jeanne 
veuve  d'Antoine  Ocli  ;  Antoine  Piccard  ;  Berthe  Planta  ; 
Pernette  Piccut;  Claudine  Voysin;  Jeanne  Mousset; 
Françoise  femme  de  Pierre  Châtelain  ;  Genète  Canavey  ; 
Claudine  femme  de  Bernard  Cornu  ;  Georgine  Servage  ; 
Pernette  femme  d'André  Pernon  ;  Gonine  femme  de 
Jean  Pelu  ;  Françoise  femme  do  François  de  Merle  ; 
Vincente  femme  de  Daniel  Puoard;  Péronne  Verne, 
veuve. 

Mais  les  abjurations  ne  se  firent  pas  sans  résistance  ; 


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-  loô  - 

tandis  que  les  paroisses  voisines  des  pays  restés  catholi- 
ques, telles  que  Bellevaux,  abjuraient  dés  le  21  septem- 
bre, celles  situées  dans  le  voisinage  de  Genève,  telles 
que  Mcssery  et  Hermance  ne  vinrent  à  Thonon  que  le 
lendemain  de  Tédit  du  duc  (7  octobre).  Les  paroisses  de 
Nernier  et  d'Yvoirc  composées  on  majeure  partie  d'une 
population  flottante  de  bateliers  et  de  pécheurs  ne  se 
rendirent  que  les  dernières  :  Yvoire  le  19  octobre,  Ner- 
nier le  9  novembre. 

A  Mcssery  bien  des  noms  manquaient  à  Tappel. 
Qu'étaient  devenus  :  Louis  Dex  alias  Curtet,  Antoine 
Savuaz,  Isaac  Savuaz,  Michel  Duborgel,  les  nobles  de 
Lugrin  seigneurs  de  Frize,  Samuel  Communal,  Jacques 
Duret,  maître  Bernard  Duret,  notaire,  cités  sur  des  actes 
antérieurs  et  postérieurs  à  1598?.... 

A  Nernier  l'abjuration  n'avait  été  pour  beaucoup 
qu'une  simple  cérémonie,  plusieurs  mémo  l'avaient 
esquivée,  en  y  envoyant  leurs  femmes.  Si  l'on  en  croit 
une  tradition  locale,  lorsqu'il  leur  fut  défondu  dose  ser- 
vir de  l'église  pour  le  culte  réformé,  ils  allèrent  cons- 
truire un  temple  en  planches,  sur  le  terrain  communal- 
de  rUche  du  Crot,  non  loin  de  l'endroit  où  s'élève  de 
nos  jours  la  chapelle  de  Notre  Dame  du  Lac  (1). 

L'exemple  de  la  noblesse  locale  n'était  d'ailleurs  pas 
fait  pour  décourager  les  mécontents.  On  a  vu  la  résis- 
tance du  colonel  de  Brotty.  Quant  au  soigneur  d'Yvoire, 
Claude  Forestier,  il  n'abjura  lui,  que  cinq  années  plus 
tard  en  1G03,  entre  les  mains  de  S*  François  de  Sales. 
Le  seigneur  de  Beauregard,  Isaac  d'Allinges,  aima  mieux 

(1)  CommuDiqué  par  feue  M"*'  Catherine  Rivollet. 


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—  110  — 

s'exiler,  il  mourut  à  Genève,  le  7  juin  1654,  sans  avoir 
abandonné  la  réforme.  Marguerite  de  Brotty,  dame  do 
Nernier,  fervente  calviniste,  n'abjura  qu'à  son  lit  de  mort 
le  23  octobre  1648,  à  l'âge  de  75  ans. 

Le  pays  converti,  il  fallut  songer  à  assurer  le  service 
religieux.  Par  lettres  patentes  du  5  octobre  1598,  une 
commission  fut  chargée  de  dresser  l'inventaire  des  re- 
venus ecclésiastiques  du  Chablais.  Cette  commission 
composée  de  Messire  Claude  d'Angeville,  vicaire  géné- 
ral, et  de  noble  Claude  Marin,  procureur  fiscal,  visita  le 
6  novembre  :  Excénevex,  Yvoire,  Nernier  et  Messery. 

A  Yvoire,  nous  dit  le  compte-rendu  de  la  visite,  le 
toit  et  la  voûte  du  chœur  sont  tombés,  il  n'y  a  pas  de 
plancher,  pas  de  cloches  ;  l'une  est  engagée  à  Genève 
depuis  un  an  pour  200  florins.  La  pierre  d'autel  a  été 
trouvée  vers  la  fontaine,  du  côté  de  Nernier.  Répara- 
tions 2000  florins. 

A  Nernier,  Tégliso  est  en  assez  bon  état,  pierre  d'autel 
non  dressée.  Réparations  300  florins. 

A  Messery,  l'église  est  en  assez  bon  état,  sans  pierre 
d'autel,  ni  cloches.  Réparations  200  florins.  (Les  cloches 
avaient  sans  doute  été  emportées  comme  butin,  par  les 
bandes  genevoises,  pondant  les  dernières  guerres)  (1). 

Pendant  le  mois  d'août  1600,  l'évêque  de  Granier 
convoqua  un  synode  pour  régler  les  bénéfices  des  cures 
du  Chablais.  Le  résultat  de  l'enquête  fut  le  suivant  : 

«  L'église  S*-Pancrace  d'Yvoire  avec  son  unie  de  S*- 
«  Martin  de  Nernier  sont  toutes  deux  sans  maison 
«  c'est-à-dire  sans  cure  ;  celle  d'Yvoire  a  quelques  biens 

(1)  Gonthier.  Mission  de  Si  François,  page  240. 


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- 111  - 

4c  stables,  les  autres  sont  en  partie  vendus,  en  partie 

«  aliénés,  les  dîmes  dépendent  en  partie  do  Fabbaye  de 

«  Filly,  que  les  chevaliers  de  S*-Maurice  et  Lazare  pos- 

«  sèdent,  en  partie  sont  perçues  par  certains  gentils- 

«  hommes  laïques. 

4c  L'église  de  S*-Pierreapostre,  du  village  de  Messery, 
«  a  sa  maison  do  cure,  avec  quelques  biens  stables,  le 
«  reste  est  aliéné,  certaine  partie  des  dismes  appar- 
ue tiennent  au  prieuré  de  Douvaine,  au  chapitre  de 
4c  Téglise  cathédrale  de  S^^Pierre,  l'autre  partie  est 
«  possédée  par  eerUxins  gentils-hommes  laïques,  et  une 
4c  autre  encore  dépend  de  Tabbaye  de  Filly  (1).  » 

A  la  suite  de  cette  enquête  Nernier  fut  réuni  à  Mes- 
sery et  Y  voire  à  Excénevex.  La  plupart  des  curés  des 
paroisses  du  Chablais  reçurent  un  traitement  fixe  de 
70  écus  d'or.  Mais  les  chevaliers  de  S^-Maurice  et  La- 
zare opposèrent  une  résistance  opiniâtre  à  la  reconstitu- 
tion des  bénéfices  des  paroisses  sujettes  de  l'abbaye  do 
Filly.  L  évoque  de  Granier  dut  faire  acte  d'autorité  ; 
par  ordonnance  du  28  septembre  1601,  il  assigna  à  cha- 
cun dos  curés  d'Y  voire  et  de  Messery,  comme  traite- 
ment, soixante  coupes  de  froment  à  prendre  annuelle- 
ment sur  les  censés  féodales  dépendant  do  l'abbaye  de 
Filly  (2). 

Messire  Moccand  Bernard  fut  nommé  curé  d'Yvoire 
et  d'Excénevex,  et  Messire  Jean  Brun,  curé  de  Messery 
et  Nernier. 


(1)  Charles-Auguste  de  Sales.  Vie  de  St  François.  Edition  Vives. 
Tome  1,  page  228. 

(2)  Piccard.  Abbaye  de  Filly.  Acad.  Chabl.,*  vol.  Vil,  page  482. 


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^  112  - 

LES   CURÉS  DE   MESSERY 
De  1601  à  nos  jours 

1601-1614,  Jean  Brun,  curé  de  Messery  et  Nernier. 
—  Par  transaction  passée  à  Thonon,  entre  S^  François 
do  Sales  et  don  Thomas  Bergera,  procureur  général  de 
Tordre  de  S*-Maurice  et  Lazare,  le  7  juillet  1G07,  tous 
les  biens  ecclésiastiques  précédemment  incorporés  à 
Tordre,  sont  remis  à  Téveque  pour  assurer  le  traitement 
des  curés,  sauf  pourtant  ce  qui  dépend  de  Tabergement 
de  Nerny  qui  reste  aux  chevaliers  (1). 

Cependant  nos  voisins  voyaient  de  mauvais  œil  les  pro- 
grés do  la  religion  catholique  et  son  affermissement  dans 
nos  contrées;  ils  se  souvenaient  aussi  de  Tescalade  de  1G02, 
il  en  résultait  une  certaine  animosité,  qui  dégénérait 
souvent  en  rixes  sanglantes.  «  En  1G12,  un  genevois 
nommé  Jacques  de  la  Maisonneuve,  avait  déposé  à 
Nerni,  dit  un  auteur  genevois  (2),  une  certaine  quantité 
de  blé  ;  un  savoyard  qui  prétendait  avoir  des  droits  sur 
ce  blé,  le  fît  arrêter.  De  la  Maisonneuve,  au  lieu  do 
s'adresser  au  juge  du  village  pour  faire  lever  cette  saisie, 
résolut  do  se  rendre  justice  par  lui-même,  il  vint  en  ba- 
teau à  Nerni,  accompagné  de  six  soldats  armés  d'épées, 
déjà  il  commençait  à  charger  son  blé  sur  le  bateau, 
lorsque  le  fils  du  seigneur  de  Nerni  accourut  pour  Ten 
empêcher,  suivi  de  plusieurs  personnes  armées  de  mous- 
quets ;  un  combat  s'engagea  aussitôt  dans  k^quel  de  la 
Maisonneuve  tua  le  fils  du  seigneur  et  un  ou  deux  sa- 
voyards, et  mit  les  autres  en  fuite.  Los  officiers  de  Sa- 

(1)  Académie  Salésienne.  Tome  II,  page  370. 

(2)  Piccot.  Histoire  de  Genève.  Tome  II,  page  370. 


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—  113  — 

voie  se  plaignirent  de  cette  affaire  comme  d'un  attenùxt 
commis  contre  leur  souverain,  mais  ils  n'obtinrent 
aucune  justice.  » 

1614-1617.  Quesian  Jean-Louis,  docteur  en  théolo- 
gie et  chanoine  de  Genève,  fut  nommé  par  S*  François 
de  Sales  curé  de  Messery  et  Nernior,  le  30  juin  1G14  (1); 
il  devint  curé  de  Douvaine  le  18  août  1617.  S^  François 
de  Sales  l'avait  en  grande  estime,  il  le  délégua  plus  tard 
pour  aller  recevoir  la  profession  des  ermites  du  Voiron. 

1617-1663.  Delà  f russe  Etienne,  Des  difficultés  étaient 
encore  pendantes  au  sujet  du  traitement  des  curés;  par 
transaction  du  28  octobre  1021,  passée  entre  S*  François 
de  Sales  et  le  chevalier  dom  Thomas  Bergerat,  il  fut 
convenu  que  MM.  les  curés  d'Yvoire  et  de  Messery 
auraient  chacun  45  coupes  de  froment,  mesure  de  Tho- 
non,  à  prendre  sur  la  dîme  d'Outrevion,  enclavée  dans 
les  dites  paroisses,  et  qui  dépendait  avant  les  Bernois, 
de  l'abbaye  de  Filly.  Le  reste  de  cette  dîme  fut  appli- 
qué aux  pauvres  des  paroisses  respectives  (2). 

A  la  suite  de  cette  transaction,  qui  diminuait  son  trai- 
tement de  près  d'un  tiers,  le  curé  Delafrasse  se  trouva 
sans  doute  quelque  peu  gêné  ;  nous  le  voyons,  le  22  mai 
1622,  louer  différents  biens  pour  la  somme  de  68  florins 
6  sols  de  Bernard  Fischard,  de  Chens,  tuteur  des  en- 
fants d'Urbain  Servage  (3). 

L'invasion  bernoise  en  Chablais  avait  fait  disparaître 
la  presque  totalité  de  nos  fondations  religieuses,  aussi 

(1)  Gonthier.  Journal  du  .Sain^,  page  166. 

(2)  Archives  Vuarnet.  Acte  Duret,  notaire.  La  dîme  d'Outrevion 
était  appelée  ainsi  parce  qu'elle  était  située  au-delà  du  Vion, 
ruisseau  qui  sépare  Messery  et  Excénevex  de  Massongy  et  Filly. 

(3)  Archives  Vuarnet. 

8b 


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-  114  - 

dés  que  la  paix  fut  rétablie,  le  zèle  des  catholiques  s*ap- 
pliqua-t-il,  le  mieux  qu'il  put,  à  réorganiser  le  patri- 
moine de  nos  églises. 

Le  5  octobre  1G57,  à  Nornier,  Charles,  François  et 
Maurice  de  Brotty,  et  Jacques  fils  de  noble  Antelme 
Fournier,  tous  seigneurs  et  conseigneurs  de  Nornier, 
rappelant  que  leurs  prédécesseurs  avaient  établi  des 
chapelles  annexées  à  réglise  de  Nornier,  mais  que  Tin- 
troduction  de  Thérésie  en  Chablais  les  a  privées  de 
leurs  rentes,  donnent  un  champ,  lieu  dit  aux  Fully, 
proche  Téglise  de  Messery,  pour  faire  célébrer  des 
messes  dans  ces  chapelles,  dont  est  recteur  Messire  Jean 
Pignand,  prêtre  coadjuteur  du  curé  de  Messery  (1). 

1662-1675.  Boéj a è  Jean- Jacques.  Il  reçoit,  le  20  octo- 
bre 1663,  la  visite  de  Monseigneur  d'Arenthon  d'Alex, 
évêque  d'Annecy.  La  cure  est  complètement  en  ruines  ; 
il  est  enjoint  aux  paroissiens  de  la  rebâtir,  sinon  le  curé 
acceptera  la  maison  que  lui  offrent  les  habitants  de 
Nernier  et  fera  sa  résidence  ordinaire  en  ce  dernier 
village.  A  la  sacristie  se  trouve  un  calice  d'étain  et  deux 
pyxides  d'argent,  une  des  pyxides  avait  été  donnée  à 
l'église  par  M.  de  Brotty,  il  est  enjoint  aux  paroissiens 
d'acheter  un  calice  d'argent  (2). 

L'église  de  Nernier  visitée  le  même  jour  avait  une 
chapelle  dédiée  à  Notre-Dame,  à  gauche  en  entrant  et 
une  dédiée  à  S*-Sébastien,  à  droite. 

1675-1680.  Delachenal  Jacques.  Il  est  porté  en  1677 
par  l'évoque  Monseigneur  d'Arenthon,  sur  la  liste  des 

(1)  Société  Savoisienne  d* histoire  et  d'archéologie.  Tome   XXX, 
page  VII. 

(2)  Archives  de  Tévêché  d'Annecy. 


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—  115  — 

prêtres  excellant  le  plus  en  piété,  en  doctrine  et  en  ta- 
lents dans  le  diocèse  de  Genève  (1). 

Le  10  juillet  1679,  cet  évêque  visite  l'église  de  Ner- 
nier  ;  entre  autres  prescriptions,  il  ordonne  de  recons- 
truire la  toiture  do  Tèglise,  de  placer  un  crucifix  en  relief 
entre  le  chœur  et  la  nef;  la  chapelle  de  S^-Sébastien  est 
sans  autel  et  dépourvue  d'ornements. 

Le  même  jour  il  visite  l'église  de  Messery,  de  laquelle 
dépend  celle  de  Nernievy  son  annexe.  Il  enjoint  aux  pa- 
roissiens de  faire  réparer  le  sous-pied  et  le  lambris  do 
la  nef  comme  aussi  la  clôture  du  cimetière,  de  sorte  que 
les  animaux  n'y  puissent  entrer  ;  d'acheter  un  antipho- 
naire  et  une  chaire  pour  le  prône  (2). 

1680-1699.  Burnod  Michel.  En  1686,  il  choisit  Mauris 
Boccard,  de  Messery,  comme  dismier  dos  dîmes  d'Outre- 
vion  ;  cette  dîme  se  partageait  alors  entre  la  maison 
des  arts  de  Thonon  et  les  curés  d'Yvoire  et  de  Messery  (3). 

En  1689,  les  Luzernois  ou  Vaudois  protestants,  chas- 
sés de  ses  Etats  par  Victor- A  médée  II,  voulurent  rega- 
gner leur  pays  d'origine,  les  vallées  de  la  Luzerne,  si- 
tuées sur  le  versant  du  Piémont.  Partis  de  Nyon  dans 
la  nuit  du  26  au  27  août  1689,  au  nombre  de  un  ou  deux 
mille,  ils  débarquèrent  entre  Nernier  et  Yvoire  à  la 
pointe  du  jour.  La  route  passait  dans  Yvoire,  ils  som- 
mèrent les  habitants  d'ouvrir  leurs  portes,  sinon  ils 
donneraient  l'assaut;  les  portes  furent  ouvertes  et  les 
Luzernois  continuant  leur  route  par  Filly,  Saxel,  allèrent 
camper  près  de  S*-Jeoire,  puis  filant  par  Sallanches, 

il)  Chanoine  Fleury.  Histoire  de  V église  de  Genève. 

(2)  Archives  de  Tévéché  d'Annecy. 

(3)  Archives  E.  Vuarnet. 


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-  116- 

Megéve,  TigileSi  le  Modt-Ceûis,  ils   regagnéreût  leurs 
vallées. 

En  1699j  Révérend  Burnod  fut  nommé  curé  d'Argon- 
ùex  ;  en  bon  prêtre  il  se  souvint  do  sa  première  paroisse 
en  faisant  à  l'église  de  Messery  une  fondation  qui  existe 
encore. 

1699-1125.  Vallier  François.  Le  26  août  1704,  il 
reçoit  la  visite  de  Monseigneur  de  Rossillon  de  Bernex, 
évêque  du  diocèse;  la  cure  de  Messery  a  doux  étages, 
une  grange,  un  four,  un  pressoir,  un  petit  jardin  devant 
la  cure,  un  autre  derrière  Téglise.  Le  curé  exige  de 
ceux  qui  ont  communié  et  qui  veulent  être  inhumés 
dans  réglise,  dix  florins  et  des  autres  sept  ;  ces  revenus 
sont  applicables  aux  réparations  de  Téglise.  L'évêque 
enjoint  aux  paroissiens  d'avoir  un  bassin  et  un  cuvier 
d'étain  pour  administrer  le  sacrement  de  baptême. 

Le  lendemain,  Tévêquc  passe  à  Nernier,  filleule  et 
annexe  de  Messery,  il  visite  la  chapelle  de  SMoseph, 
entretenue  par  la  confrérie  du  rosaire,  et  la  chapelle  de 
S*-Sébastien  entretenue  par  les  seigneurs  de  Nernier;  le 
recteur  de  cette  chapelle  est  noble  Jean-André  de  Brotty, 
curé  de  Cervens(l). 

1725-1739.  Guillaume  Jean-Bapliste  ;  il  était  natif 
de  Brens.  A  peine  arrivé  il  s'occupe  immédiatement  des 
réparations  de  son  église. 

Le  4  mai  1726,  à  la  suite  des  conventions  et  délibéra- 
tions prises  à  l'issue  de  la  messe  paroissiale,  les  com- 
muniers  de  Messery,  afin  de  faire  refondre  une  de  leurs 
cloches  qui  est  cassée,  vendent  un  terrain  communal,  dit 

(l)  Archives  de  Tévèché. 


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—  117  — 

les  Grands  Prés,  de  la  contenance  d'environ  «  un  quart 
de  Genève  de  sématuro  »  pour  le  prix  de  vingt-deux 
livres  (1). 

1739-1760.  Panrier  Pierre,  fils  de  feu  Jean-Fran- 
çois Panrier,  bourgeois  de  Rumilly,  était  curé-archi- 
prétre  de  Messery  et  Nernier. 

1766-1793.  Pav;/  Benoit,  fils  de  feu  Fabien  Pavy, 
bourgeois  de  Rurailly,  était  le  neveu  du  précédent,  qui 
Tavait  appelé  auprès  de  lui  comme  vicaire  en  1765. 
Révérend  Pavy  était  docteur  de  Sorbonne. 

En  arrivant  à  Messery,  le  nouveau  curé  trouve  le 
presbytère  dans  un  état  lamentable.  Aussi  le  3  mai  17G6 
adresse-t-il  une  plainte  à  Tlntendant  do  la  province  du 
Chablais  (2). 

€  Il  n'y  a  point  de  chambre  pour  le  vicaire,  dit-il,  il 
«  n'y  a  point  de  grenier,  si  ce  n'est  une  chambre  dont 
«  les  poutres  sont  pourries,  les  poutres  de  la  grange 
«  menacent  une  ruine  prochaine  ainsi  que  la  plupart  do 
«  celles  de  la  cure.  Il  n'y  a  point  non  plus  de  sacristie 
4c  dans  laquelle  on  puisse  retirer  les  habits  et  linges 
«  d'église,  le  prêtre  est  obligé  de  s'habiller  à  l'église, 
«  l'autel  manque  même  d'ornements  et  surtout  de  chan- 
«  deliers.  > 

Mais  la  contrée  était  sans  commerce  et  sans  argent, 
le  conseil  de  Messery  s'opposa  sans  doute  aux  demandes 
du  nouveau  curé,  car  peu  après  ce  dernier  adresse  une 
seconde  plainte  à  l'Intendant. 

«  Quant  à  la  présente  chambre  pour  le  vicaire,  dit-il, 
*  les  conseillers  n'ignorent  pas  qu'elle  n'est  pas  logeable, 

(1)  Archives  Vuarnet. 

(2)  Ibidem. 


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—  118  — 

«  étant  de  simples  planches  et  qu'il  faut  passer  pour  y 

«  entrer  par  une  autre  chambre,  point  du  tout  éclairée, 

«  où  loge  et  couche  la  servante  ;  il  n'y  a  qu'à  être  péné- 

«  tré  de  sa  religion,  pour  voir  que  cela  est  indécent  et 

«  ne  convient  nullement  à  des  ministres  du  Seigneur, 

«  qui,   par    leur  état,  sont    obligés    d'empêcher  tout 

«  ce    qui    pourrait  donner  la  moindre  atteinte  à    la 

*  pudeur,  etc (1). 

Pourtant  à  la  suite  de  ces  plaintes,  diverses  répara- 
tions furent  faites  à  l'église  et  à  la  cure,  notamment  en 
1776,  et  durant  les  étés  1789  et  1790  (2). 

Le  29  juin  1768,  le  curé  Pavy  reçoit  la  visite  de  l'évê- 
que  Biord  ;  la  paroisse  contient  65  feux,  il  y  a  environ 
186  communiants  et  297  âmes.  Il  y  a  un  clerc  entretenu 
par  les  paroissiens  ;  ce  clerc  en  qualité  de  marguiller 
perçoit  annuellement  six  quarts  de  froment  de  la  Maison 
des  Arts,  sur  la  dîme  d'Outrevion.  Le  révérend  curé 
perçoit  pour  les  sépultures,  le  drap  qui  est  sur  la  bière,  le 
luminaire  et  la  rétribution  des  messes. 

Le  même  jour  l'évêque  visite  l'église  de  Nernier; 
cette  annexe  contient  environ  i30  feux  et  142  âmes.  Le 
clerc,  comme  celui  de  Messery,  touche  6  quarts  de  blé 
de  la  Maison  des  Arts  et  est  entretenu  par  les  habitants. 
Entre  autres  injonctions  l'évêque  prescrit  aux  habitants 

(1)  Archives  Vuarnet. 

(2)  Ibidem.  Dans  le  courant  de  Tété  1789,  Mariou  Mathieu,  veuve 
de  Claude  Durât,  a  livré  aux  ouvriers  travaillant  à  Téglise,  66 
bouteilles  de  vin  rouge  à  12  sols  le  quarteron  (le  quarteron  valait 
2  pots,  il  y  avait  24  quarterons,  soit  48  pots  dans  le  setier  de  54 
litres),  8J  bouteilles  de  même  vin  à  14  sols  le  quarteron,  52  livres 
de  pain  àtroissolsla  livre,  Il  livres,  soit  89  batz  pour  livrance 
de  soupe,  à  raison  de  une  batz  par  jour  par  chaque  personne  (la 
batz,  monnaie  vaudoise,  valait  3  sous). 


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—  119  — 

de  Messery  de  faire  élever  la  clôture  du  cimetière  (1). 

En  1768,  il  existait  drjàcinq  fondations  de  messes  en 
faveur  de  l'église  de  Messery,  et  quatre  en  faveur  de 
celle  de  Ner nier;  ces  fondations  témoignent  de  la  piété 
des  fidèles  de  nos  paroisses  à  la  veille  de  la  Révolution. 

Voici,  en  outre,  quelques  extraits  de  testaments  : 

i66<?.  Jacques  do  Fournier,  co-seigneur  de  Nernier, 
lègue  à  réglise  du  dit  lieu  le  revenu  annuel  de  30  duca- 
tons  pour  Tentretien  d'un  prédicateur  pendant  le  carême 
à  Nernier  (2). 

n  10.  Claudine-Marguerite  de  Brotty  et  sieur  Claude- 
Joseph  Michaud  son  époux,  lèguent  par  testament  quatre 
mille  florins  en  1710,  puis  2.G6G  livres  eu  1720,  sous  la 
charge  de  faire  tous  les  dimanches  le  catéchisme  dans 
réglise  de  Nernier. 

1121,  1^^  Octobre.  Marie  Genoud,  de  Douvaine,  épouse 
de  Bernard  Duborgel  dit  Joffé,  lègue  à  Téglise  de  Mes- 
sery, pour  réparations,  une  pistolle  valeur  de  seize  livres 
de  Savoie,  afin  que  son  corps  soit  sépulture  dans  l'église, 
plus  demi-pistollo  à  la  confrérie  du  Très  Saint-Sacrement 
et  deux  écus  patagous  pour  des  messes  basses  du  re- 
quiem. 

1155.  13  Février.  Marie Quiblier,  veuve  Servage,  du 
village  d'Essert,  lègue  aux  Révérends  Pères  Capucins 
de  Thonon,  sa  croix  d'or  plate  pour  faire  célébrer  20 
messes  basses  de  requiem  ;  item,  donne  à  la  dévote  con- 
frérie du  S**-Sacrement  dont  elle  a  l'honneur  d'être 
agrégée,  son  anneau  d'or,  priant  les  dévots  confrères  et 

(1)  Archives  deTévéché  d'Annecy. 

(2)  Ibidem, 


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—  120  — 

sœurs  de  lui  faire  part  de   leurs  suffrages   après  sa 
mort  (1). 

Les  Dîmes 

En  1768,  la  dîme  de  Messery  était  perçue,  par  égale 
part,  entre  le  curé,  le  marquis  Costa  et  le  sieur  Michaud. 

Le  curé  percevait  encore  la  dîme  de  Bardenuche  à  la 
cote  vingt-cinquième  (c'est-à-dire  une  gerbe  de  blé  sur 
25),  et  celle  de  Couches  à  la  cote  vingt-deuxième  ;  la 
dîme  entière  du  vin  sur  le  territoire  de  Nernier  et  Vor- 
say  à  la  cote  seizième  ;  la  dîme  des  novales  (champs 
nouvellement  défrichés)  portant  sur  le  blé,  les  légumes, 
le  vin  et  le  chanvre.  Enfin  il  percevait  annuellement 
45  coupes  de  froment  sur  les  dîmes  dTvoire,  Nernier  et 
Messery,  appelées  d'Outrevion  (2). 

Cette  dîme  provenait,  avons-nous  dit,  de  Tabbaye  de 
Filly,  qui  chaque  année  au  printemps,  distribuait  aux 
ménages  pauvres  des  paroisses  environnantes  25  muids, 
soit  trois  cents  coupes  de  froment.  La  part  de  Messery 
et  Nernier  était  de  3  muids  et  8  coupes,  celle  dTvoire 
et  Excénevex  de  G  muids  1  coupe.  Après  le  départ  des 
Bernois,  la  dîme  d'Outrevion  fut  donnée  aux  chevaliers 
de*.  S*-Maurice  et  Lazare,  puis  en  1603  à  la  Sainte  Maison 
do  Thonon,  enfin  en  1678  à  la  Maison  des  Arts  de 
Thonon.  Cette  dernière  avait  pris  l'engagement  d'en- 
tretenir 36  enfants  pauvres  originaires  des  8  communes 
dépendant  de  l'abbaye,  et  de  leur  apprendre  un  métier  ; 
ceci  dura  jusqu'à  la  Révolution  de  1793  (3). 

(1)  Archives  ou   papiers  de  famille  de   divers  habitants   de 
Messery. 

(2)  Archives  de  Tévéché.  Visite  pastorale  de  1678. 

(3)  Piccard,  Histoire  de  Thonon^  tome  L 


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—  121  — 

Les  curés  de  Messery  et  d'Yvoire  louaient  donc  cette 
dîme  d'Outrevion  à  des  dîmiers,  conjointement  avec  les 
procureurs  des  pauvres  ;  mais  Messieurs  les  curés  se 
plaignirent  souvent  que  les  blés  renfermaient  une  grande 
quantité  d'ivraie  et  d'autres  mauvaises  graines,  aussi 
par  acte  du  6  juillet  1721  firent-ils  insérer  que  le  blé 
serait  «  ôon,  beau,  recevable^bien  vanné  et  bien  crainte 
et  passé  par  le  crible.  » 

En  1709,  la  récolte  du  blé  ayant  manqué,  le  Sénat  de 
Savoie  décida  que  les  curés  do  Messery  et  dTvoire  à 
défaut  de  froment  pourraient  prendre  de  Forge  ou  d'au- 
tres grains  en  même  quantité  (1). 

Rentes  féodales  de  Filly,  —  L'abbaye  de  Filly  possé- 
dait, avons-nous  dit,  des  rentes  féodales  qui  s'étendaient 
sur  24  paroisses,  elles  passèrent  en  1617  aux  pères 
Barnabites  de  Thonon  qui  les  perçurent  jusqu'à  l'affran- 
chissement eo  1781. 

En  17:i2  les  Barnabites  réclamaient  à  ce  sujet  sur 
Messery  : 

En  monnaie  de  Savoie  :  26  sols  4  deniers. 

En  monnaie  genevoise  :  40  sols  1 1  deniers. 

En  monnaie  ancienne  :  25  sols  6  deniers. 

En  nature  24  coupes,  1  quart  de  froment,  mesure  de 
Thonon. 

3  coupes  de  froment,   mesure   dTvoire. 

Une  coupe  d'avoine,  3  setiers  do  vin,  4  chapons. 

Les  cens  étaient  perçus  sur  222  poses,  8  maisons  et 
1  four  (2). 

(1)  Archives  Vuarnet.  Mémoire  des  curés  de  Messery  et  d'Yvoire. 

(2)  Revue  Savoisienne.  1893,  page  125. 


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—  122  — 

LA  RÉVOLUTION 

Le  22  septembre  1792,  Tarmée  française  envahissait 
Ja  Savoie;  un  mois  plus  tard,  l'assemblée  des  Allobroges, 
sous  les  menaces  de  la  Convention,  votait  Tabolition  de 
la  royauté,  de  la  noblesse,  de  la  dîme  et  la  confiscation 
des  biens  du  clergé.  Le  8  février  1793,  la  Convention  dé- 
crétait la  nomination  des  éveques  et  des  curés  par  les 
électeurs  ;  les  prêtres  employés  au  culte  devaient  dans 
les  8  jours  prêter  serment  à  cette  nouvelle  constitution  ; 
le  refus  du  serment  était  suivi  de  la  déportation  ou  du 
bannissement.  C'est  ce  qu'on  appélaVà constUutioncivile 
du  clergé.  La  religion  n'était  plus  libre,  la  persécution 
commençait. 

Dans  la  nuitdu21  au  22  avril  1793,  la  garde  nationale 
se  présente  à  la  cure  de  Douvaine,  le  curé,  M.  Gallay, 
est  pris  et  conduit  dans  les  prisons  de  Thonon.  Cette 
nouvelle  répandit  la  terreur  dans  le  pays.  Le  curé  Pavy 
abandonnait  sa  cure,  vers  la  même  époque,  car  le  der- 
nier acte  qu'il  enregistra  est  un  acte  de  baptême  du  22 
avril  1793  (1).  Le  pauvre  prêtre  occupait  la  cure  de 
Messery  depuis  26  ans  ;  à  Messery  il  célébrait  la  messe 
dans  les  maisons,  où  chacun  s'efforçait  de  le  cacher  ;  il 
se  réfugia  ensuite  dans  les  bois  de  la  Chaux  et  dans  ceux 
du  Raffour;  mais  l'hiver  vint  et  la  terreur  augmentant, 
le  curé  Pavy  dut  quitter  le  pays. 

Révérend  Etienne  Duborgel  dit  Es  Vève,  était  curé 
d'Yvoire  lorsque  la  Révolution  éclata  ;  il  avait  alors 
55  ans  ;  le  13  février  1793  dans  la  maison  de  Jacques 
Duchêne  dit  Comtois,  à  Nernier,  il  cède  à  son  frère 

(1)  Archives  de  la  cure  de  Messery  (registre  des  baptêmes). 


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—  123  — 

Maurice  tous  ses  biens  pour  le  prix  de  seize  mille 
livres  (1),  puis  eu  avril  1793,  devant  Timpossibilitô 
d'exercer  plus  longtemps  son  ministère,  il  émigra  à 
Nyon,  emportant  ses  registres  paroissiaux.  Révérend 
Duborgel  appartenait  à  une  des  meilleures  familles  de 
Messery  ;  outre  de  grands  biens,  son  frère  possédait  un 
petit  bâtiment  à  voile  non  ponté,  appelé  barcaniin,  avec 
lequel  il  pouvait  aller  facilement  d'une  rive  à  Tautre. 
Etant  ainsi  en  relations  continuelles  avec  les  siens,  le 
curé  Duborgel  se  trouvait  être  dans  une  situation  privi- 
légiée comparativement  aux  autres  prêtres  émigrés. 
Aussi  en  recueillit-il  plusieurs  dans  sa  demeure  ;  on  y 
voyait  Révérends  sieurs  Carrier,  curé  de  Meignier  ; 
Gandin,  vicaire  dTvoire;  Saulnier,  curé  d'Amancy; 
Bouvard,  curé  d'Anthy  ;  Regard,  curé  de  Grilly  au  pays 
de  Gex;  Pavy,  curé  de  Messery  (2).  Outre  ses  parois- 
siens. Révérend  Duborgel  eut  à  bénir  les  mariages  de 
fidèles  venant  de  contrées  souvent  fort  éloignées,  telles 
que  :  Mariiez,  Avusy,  Theiry,  Vulbens,  le  Chàble, 
Choisy,  Chilly,  Vaux,  Marcellaz,  Neidens,  Lenevens  en 
Bugey,  Beaumont,  Curzeilles,  Chavornay  eu  Bugey,  etc. 
Quelques  dames  de  Nyon  déployèrent  une  charité 
vraiment  chrétienne  envers  nos  malheureux  prêtres. 
Quarante  ans  après  ces  événements,  les  femmes  de  nos 
villages  qui  se  rendaient  au  marché  de  cette  ville, 
allaient  de  préférence  chez  une  vieille  dame  protestante, 
qui  tenait  une  épicerie  au  quartier  de  Rive  et  les  plus 
âgées  disaient  aux  autres:  «  Allons  acheter  chez 
Madame  Oranger,  elle  a  été  si  bonne  pour  nos  prêtres.  » 

(1)  Papiers  de  famille  de  M.  Etienne  Quiblier. 

(2)  Archives  de  la  cure  d'Y  voire. 


—  124  — 

A  Essevty  un  des  notablea  de  Tendroit  désirait  épou- 
ser une  demoiselle  Bullat,  du  village  de  Chevilly,  «ne 
promeuade  sur  Teau  en  hiver  ne  souriait  saus  doute  pas 
à  cette  dernière  ;  or  le  bruit  courait  dans  le  pays  qu'un 
prêtre  se  cachait  dans  la  montagne  du  côté  d*i\rmoy. 
Notre  homme  partit  donc  un  beau  matin  à  sa  recherche, 
suivi  de  sa  fiancée.  La  route  fut  longue,  le  prêtre  cou- 
chait rarement  deux  fois  dans  le  même  hameau  ;  après 
avoir  été  renvoyés  ainsi  de  village  en  village,  ils  le 
trouvèrent  enfin  aux  Habères,  au  milieu  de  la  nuit.  La 
cérémonie  eut  lieu  dans  une  grange  ;  ils  étaient  seuls, 
le  prêtre  se  tournant  vers  eux,  annonça  trois  fois  leur 
mariage,  puis  il  les  bénit  (1).  La  sœur  d'Urbain  Quiblier, 
appelée  Cécile,  était  religieuse  lorsqu'éclata  la  Terreur  ; 
chassée  de  son  couvent  elle  vint  se  réfugier  à  Essert  où 
son  frère  la  recueillit. 

Dumont  Joseph,  de  Concise,  prêtre  en  1781,  était 
vicaire  de  Messery  en  93,  il  prêta  le  serment  constitu- 
tionnel et  devint  curé  de  Douvaine.  Mais  la  population 
lui  fit  tant  d'aflfronts  qu'il  se  retira  ;  requis  par  la  levée 
en  masse,  il  disparut  pour  un  temps  assez  long.  Vers 
la  fin  de  sa  vie  il  rétracta  publiquement  ses  erreurs 
(1818)  et  se  retira  chez  ses  parents  où  il  mourut  en 
1823(2). 

A  Nernier,  le  comte  d'Antioche,  surpris  par  une  visite 
domiciliaire,  n'eut  que  le  temps  de  se  réfugier  dans  la 
maison  de  la  famille  Peccoux,  où  on  s'empressa  de  le 


(1)  Urbain  Quiblier  mourut  le  31  mai  1849,  âgé  de  88  ans,  c'était 
mon  arrière  grand'oncle. 

(2)  Trédicini.  Monographie  de  Douvaine. 


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-  125  — 

Cacher  ;  le  lendemain  il  passait  le  lac  et  se  réfugiait  à 
Nyon  (1). 

A  Thonon,  la  supérieure  et  les  principales  religieuses 
de  la  Visitation  quittèrent  leur  couvent  le  9  octobre 
1793;  les  dernières  durent  Tabandonner  le  18  janvier 
1794.  Les  unes  rentrèrent  dans  leur  famille,  les  autres 
se  réfugièrent  dans  des  maisons  amies.  Knfîn  sous  la 
menace  d'être  traduite  devant  le  tribunal  révolutionnaire 
et  comme  Ton  était  au  printemps  (avril  1794),  elles 
quittèrent  Thonon  et  s'embarquèrent  à  Rives  afin  de  se 
rendre  à  Messery  dans  leur  maison  de  Frise  (2). 

Comme  nous  l'avons  dit,  cette  campagne  leur  venait 
des  anciens  nobles  de  Lugriu.  Déjà  propriétaires  en 
1670,  les  religieuses  avaient  fait  réédifler  leur  maison 
vers  1730  (3).  Soit  que  les  locaux  fussent  peu  convena- 
bles, soit  que  le  comité  de  Thonon  eut  été  averti,  le 
séjour  des  Révérendes  sœurs  ne  fut  pas  long.  Au  bout 
de  8  jours  elles  quittèrent  Messery,  qui  eut  ainsi  l'hon- 
neur d'avoir  été  sur  la  terre  française  le  dernier  asile  du 
dernier  couvent  de  France!  Traversant  le  lac,  les  Visi- 
tandines  débarquèrent  à  Nyon,  où  elles  restèrent  deux 
jours  ;  elles  se  rendirent  ensuite  a  Lausanne,  où  les 
dames  protestantes  émues  de  tant  de  malheurs,  s'em- 
pressèrent de  les  secourir;  après  un  séjour  de  4  mois  et 
demi  dans  cette  ville  elles  passèrent  en  Italie  où  elles 
furent  dirigées  sur  divers  couvents. 

(1)  Communiqué  par  Madame  Marie  Arpin,  née  Bruchon,  de 
Neruier,  âgée  de  82  ans. 

(2)  Communiqué  par  M.  le  chanoine  Boccard,  aumônier  de  la 
Visitation  de  Thonon. 

(3)  Archives  Duborgel,  chez  M.  Quiblier  Etienne,  à  Essert. 

Le  sable  pour  la  maison  des  Visitandines  avait  été  tiré  d'un 
champ  appelé  Prélaz  ou  Prèle,  appartenant  à  Jacques  Vuarnet. 


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—  126  — 

Chute  de  Robespierre 

Avec  la  chute  de  Robespierre  (27  juillet  1794),  dispa- 
rut le  régime  de  la  Terreur  ;  la  France  respira  quelque 
peu,  les  émigrés  et  les  prêtres  rentrèrent  en  grand  nom- 
bre. M.  Pavy  vint  reprendre  son  poste  de  combat;  mais 
vaincu  par  Tàge,  les  fatigues,  la  maladie,  il  mourut  le 
21  février,1796,  et  fut  enseveli  dans  Tôglise  de  Messery  ; 
il  était  âgé  de  61  ans,  il  y  avait  31  ans  qu'il  était  pasteur 
de  la  paroisse  (1). 

II  fut  remplacé  par  Révérend  Etienne  Duborgel  ;  ce 
dernier  en  qualité  de  curé-missionnaire  célébrait  la 
messe  tantôt  dans  les  maisons,  tantôt  dans  les  églises, 
suivant  Tintensité  de  la  persécution  ;  chacun  se  faisait 
un  honneur  de  le  recevoir  et  do  le  cacher  ;  d'après  ses 
registres  il  célébra  des  mariages  dans  la  maison  Bonne- 
foy,  chez  Jacques  Duchêne  dit  Comtois,  et  chez  Etienne 
Dubouloz  à  Nernier,  dans  la  maison  de  la  veuve  Marie 
Quiblier  à  Essert,  dans  la  maison  de  Charles  Portier  à 
Chevilly,  chez  la  veuve  Duret  et  chez  Pierre-Antoine 
Boccard  à  Messery,  etc....  (2). 

Au  printemps  de  1799  la  persécution  se  ralentit.  Enfin 
le  10  juillet  1800,  le  curé  Duborgel  retournait  définitive- 
ment à  Yvoire  (3). 

RÉTABLISSEMENT  DU  CULTE 

1803-1813.  R^  Thorens  Claude,  curé  de  Messery. 
—  Né  le  21  août  1745  à  Yvoire,  curé  de  la  Touvière 
d'Evian  quand  la  révolution  éclata,  nous  le  retrouvons 

fi)  Archives  d'Yvoire.  Communication  de  M.  Duchosal,   curé 
actuel  d'Y  voire. 
(2)  Ibidem, 
(3   Ibidem. 


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-  127  - 

en  décembre  1795  à  Yvoire,  chez  ses  parents,  exerçant 
les  fonctions  sacerdotales  en  qualité  de  curé-mission- 
naire, par  délégation  du  grand  vicaire  M.  Dubouloz.  Le 
2  février  1797,  il  procède  à  la  bénédiction  de  la  petite 
cloche  d'Y  voire  (1),  mais  la  persécution  s'étant  rallu- 
mée, il  est  arrêté  le  27  novembre  de  la  même  année. 
«  J'étais,  dit-il,  dans  ma  maison  paternelle,  quand  arri- 
«  vèrent  à  4  heures  du  matin,  cinq  gendarmes  et  dix 
«  fusiliers,  conduits  par  un  jeune  homme  d'Yvdre,  qui 
<t  sans  attendre  qu'on  leur  ouvrit  l'entrée  de  la  maison 
«  en  enfoncèrent  la  porte.... (2)  ».  M.  le  curé  Thorens 
passant  par  un  passage  dérobé,  se  réfugia  dans  l'écurie 
où  ses  parents  le  cachèrent  sous  un  tas  de  feuilles.  Un 
des  soldats  ayant  sondé  les  fouilles  piqua  le  prêtre  qui 
se  redressa  (3)  ;  il  fut  appréhendé  et  conduit  aux  prisons 
de  Carouge,  puisa  celles  de  Chambéry,  où  il  se  trouvait 
encore  le  30  août  1798.  Ramené  à  Carouge  (octobre 
1798),  il  fut  déporté  à  l'Ile  de  Ré  où  il  arriva  le  6  octo- 
bre 1799.  Il  ne  fut  libéré  que  le  5  avril  1800. 
Napoléon  V"^  ayant  rétabli  l'ordre  en  France  et  signé 

(1)  Archives  de  la  cure  d'Yvoire.  Les  registres  de  M.  Thorens 
furent  recueillis,  après  son  arrestation,  par  M.  le  curé  Duborgel 

(2)  Lavanchy.  Le  diocèse  de  Genève  pendant  la  Résolution, 
Tome  II,  page  138.  Cet  auteur  a  commis  plusieurs  erreurs.  Son 
Thorens  Pierre,  curé  delaTouvière,  est  un  personnage  apocryphe. 
D'après  M.  /)ac/iosa/,  curé  actuel  d'Yvoire,  il  y  eut  deux  prêtres 
du  nom  de  Thorens.  originaires  d'Y  voire.  Le  1«%  R^  François  Tho- 
rensy  fils  de  Philibert,  né  le  6  janvier  1707,  curé  de  Ville-la- 
Grand,  fit  son  testament  en  faveur  du  curé  d'Yvoire  le  23  août 
1773,  il  n'existait  plus  au  moment  de  la  Révolution.  Le  2®, 
R^  Claude  Thorens,  fils  de  Pancrace,  né  le  21  août  1745,  était  le 
neveu  du  précédent,  d'abord  curé  de  la  Touvière,  il  devint  curé 
de  Messery.  Il  avait  eu  pour  parrain  son  frère  Pierre  Thorens, 
ancêtre  de  M.  Thorens,  maire  de  Thonon  en  1885  et  de  la  famille 
Thorens  dit  Roget. 

(3)  Tradition  locale. 


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—  128  — 

lo  Concordat,  Révérend  Thorens  Claude  fat  nommé  curé 
de  Messery  en  1803.  Durant  le  cours  de  cette  année 
différentes  réparations  furent  faites  à  Téglise. 

Révérend  Thorens  mourut  le  10  octobre  1813,  et  fut 
inhumé  au  cimetière  de  Messery  (1). 

18 13' 1836.  Révérend  Joudon  Joseph,  natif  d*Evian. 
—  En  1821  et  1822  quelques  réparations  sont  faites  à  la 
cure.  En  1822,  une  croix  en  pierre  est  élevée  dans  le 
cimetière  ainsi  que  des  murs  de  clôture.  En  1825,  on 
procède  dans  Téglise  à  différents  travaux  de  décora- 
tion (2).  Révérend  Joudon  quitta  Messery  en  1836,  il 
mourut  curé  de  Champanges  en  1842.  Durant  son  mi- 
nistère, mourut  Révérend  Etienne  Duborgel,  curé  d'Y- 
voiro  ;  par  son  testament  il  léguait  200  francs  à  Téglise 
de  Messery  et  400  francs  aux  pauvres,  autant  à  l'église 
et  aux  pauvres  dTvoire  et  250  francs  au  séminaire  de 
Chambéry  (celui  d'Annecy  n'étant  pas  encore  rétabli  (3). 

1836-1860.  Faurax  Bernard,  néàDouvaine,  vicaire 
de  Pringy  de  1825  à  1826,  préfet  des  études,  puis  supé- 
rieur du  Collège  de  Cluses  de  1826  à  1836,  devint  curé 
de  Messery  en  1836.  Par  sa  science,  ses  connaissances 
étendues  en  médecine,  ses  services  rendus,  il  sut  bientôt 
y  acquérir  une  grande  influence. 

Construction  de  la  Cure 

La  cure  tombait  en  ruines  ;  depuis  bien  avant  les 
Bernois,  c'était  toujours  le  même  bâtiment,  bas,  écrasé, 

(1)  Archives  de  la  cure  de  Messery. 

(2)  Archives  municipales,  budgets  de  1820  à  1825. 

(3)  Papiers  de  famille  de  M.  Quibier  Etienne. 


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couvert  en  tuiles  courbes.  Dès  1837  et  1838,  le  nouveau 
curé  obtenait  de  la  municipalité  la  réfection  complète  de 
la  cure.  Mais  M.  Faurax  ne  s'arrêta  pas  là  ;  la  popula- 
tion avait  doublé  en  moins  de  cent  ans,  Téglise  était 
devenue  trop  petite  ;  semblable  à  celle  de  Nernier,  elle 
possédait  des  tribunes  et  les  cordes  des  cloches  pen- 
daient devant  la  porte  ;  elle  occupait  la  place  où  s'élève 
de  nos  jours  la  croix  du  vieux  cimetière. 

Construction  de  l'Eglise 

Par  lettre  ministérielle  du  29  avril  1839,  la  commune 
se  vit  autorisée  à  contracter  un  emprunt  de  six  mille 
francs  pour  la  reconstruction  de  1  église.  Comme  cotte 
somme  ne  suffisait  pas  à  couvrir  les  frais,  M.  Faurax  fit 
appel  aux  habitants.  Par  suite  de  la  grande  culture  du 
blé,  il  y  avait  alors  plus  de  trente  paires  de  bœufs  dans 
la  commune.  Chaque  propriétaire  fut  imposé  de  50  fr. 
par  paire  de  bœufs  et  de  25  francs  par  vache  ;  la  popula- 
tion se  chargea  en  outre  de  tous  les  charrois  et  de  la 
nourriture  des  ouvriers.  L'église  fut  terminée  en  1841 
et  inaugurée  le  jour  de  la  fête  patronale.  Le  clocher 
s'éleva  en  1844  à  la  suite  d'un  emprunt  de  3100  francs 
voté  par  le  Conseil  municipal.  Puis  ce  fut  le  tour  des 
cloches  ;  à  cet  effet  Guillaume  Quiblier,  par  testament 
en  date  de  1842,  avait  légué  500  francs,  le  Conseil  mu- 
nicipal votait  sur  le  budget  une  somme  semblable  et  le 
reste  fut  le  produit  d'une  souscription  publique.  Parmi 
les  principaux  donateurs  nous  devons  citer  :  Urbain 
Quiblier  (300  francs).  —  Etiennette  Duborgel  dit  Dagui 
(300  fr.).  —Jean  Quiblier  dit  Faisant  (300  fr.).  L'église 
ne  possédait  que  deux  petites  cloches  ;  la  plus  ancienne 


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-.  130- 

fut  cdilservée  (1),  Tailtre  entra  dans  la  coûlpositidn  deë 
nouvelles.  La  paroisse  obtint  de  cette  façon  deux  su- 
perbes Cloches  qui,  à  cette  époque,  étaient  les  plus  belles 
du  canton.  Elles  sortent  des  ateliers  Paccard,  à  Quintal, 
prés  Annecy. 

Le  4  août  1846,  Monseigneur  Rendu,  évêque  d'An- 
necy, vint  en  grande  pompe  à  Messery  présider  à  la  con- 
sécration de  réglise;  la  population  lui  fit  un  accueil 
triomphal  ;  guirlandes  de  verdure,  arcs  de  triomphe, 
couronnes  suspendues,  couvraient  le  chemin  par  où  de- 
vait passer  Tévêque.  Une  nombreuse  jeunesse  à  cheval 
était  allée  à  la  frontière  de  la  paroisse  ;  cent  jeunes 
gens  choisis  s'avançaient  au  devant  du  pasteur. 
L'évêque  était  suivi  du  marquis  de  S*-Sé vérin,  du  mar- 
quis Costa  de  Beauregard,  du  comte  d'Antioche.  Toutes 
les  paroisses  voisines  s'étaient  réunies  à  Messery.  Un 
clergé  imposant  et  nombreux  venu  des  diocèses  d'An- 
necy et  de  Lausanne  entourait  l'évêque  (2). 

(1)  La  petite  cloche  dont  nous  avons  parlé  remonte  au  XVII* 
siècle,  elle  a  été  fêlée  il  y  a  une  vingtaine  d'années.  Elle  porte  au 
sommet  Tinscription  suivante: 

t  Pro  nativitate  béate  Marie  Virginis.  —  Jean-François  Ruync  f  IHS 1 1660 

Sur  le  côté  droit.  —  Françoise  de  Monthoud,  marquise  de 
Trivie,  dame  de  Monthoud,  Senoceh  et  Marcossay,  baronne  de 
Charansonnay,  dame    d'honneur  de  Madame  royale,  marraine. 

Sur  le  côté  gauche  :  illustre  Clère,  dame  Marie  de  Malliard  et 
de  Tornon,  dame  de  Monthou. 

Au-dessous  de  chaque  inscription,  sont  sculptées  les  armoiries 
des  nobles  dames. 

D'après  les  renseignements  qu'a  bien  voulu  me  communiquer 
M.  Tabbé  Donche,  curé  de  Vétraz-Monthoux,  Dame  Françoise 
de  Monthoux,  marquise  de  Trévie,  ftt  une  fondation  en  faveur  de 
l'église  de  Monthoux,  en  août  1659.  —  Dame  Clère  Marie  de 
Tournon,  baronne  de  Monthoux,  fit  une  fondation  en  faveur  de  la 
même  église  le  29  septembre  1645. 

Ces  personnes  pieuses  auront  vraisemblablement  doté  de  cette 
cloche  l'église  de  Messery  qui  en  était  alors  dépourvue. 

(2)  La  Sentinelle  catholique.  Numérodu  12  août  1846. 


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—  131  — 

De  1846  à  1850,  la  commuoe  s'imposa  encore  certai- 
nes sommes  nécessaires  à  la  construction  du  pérystile  ou 

chapiteau,  du  plancher  de  Téglise,  etc Le  curé  Fau- 

rax  fit  don  du  maître  autel,  des  fonds  baptismaux  et  du 
bénitier,  le  tout  en  marbre  ;  il  fit  encore  élever,  par 
souscription  publique,  un  oratoire  à  la  jonction  des  rou- 
tes dT voire  et  d'Essert  sur  un  terrain  offert  par  M. 
Marc  Boccard  ;  (en  face  se  trouvait  autrefois  une  an- 
cienne croix  appelée  la  croix  du  Jubilé). 

En  1852,  M»«  Félicie  Duborgel  dite  Dagui,  offrait  le 
grand  lustre  (prix  300  francs).  R*^  Faurax  quitta  Mes- 
sery  en  1860  et  se  retira  à  Douvaine  son  village  natal. 
II  mourut  le  8  avril  1873,  léguant  sa  fortune  et  sa 
maison  aux  pauvres  de  cette  localité.  Sous  le  titre  de 
«  Choix  de  lettres  édifiantes  {Genève)^  il  fit  publier  en 
1872  un  volume,  renfermant  sa  correspondance  avec 
plusieurs  personnages  distingués,  tels  que  :  les  évêques 
de  Thiollaz,  Rey,  Magnin,  etc.... 

1860-1875,  Révérend  Robert  Jean-Marie,  natif  de 
Thiez,  vicaire  deS<^-Jeoire  pendant  18  ans,  fut  nommé 
curé  de  Messery  en  1860.  A  cette  époque,  le  seul  revenu 
de  la  Fabrique  nécessaire  à  parer  aux  frais  du  culte  était 
la  taxe  des  chaises  de  Téglise.  Elle  produisait  un  revenu 
de  165  fr.  Aussi  grâce  au  zèle  du  curé  Robert,  les  dons 
des  fidèles  continuèrent-ils  d'affluer  en  faveur  de  l'église. 

En  1863.  —  De"e  Favre  Françoise  léguait  par  testa- 
ment 900  fr.  en  faveur  du  curé  de  Messery.  Pierre  Du- 
borgel dit  Roson  léguait  par  testament,  1000  fr.  pour 
une  horloge,  1500  fr.  pour  une  mission,  500  fr.  pour  les 
pauvres,  2000  fr.  pour  fondation  de  grand'mosses. 

En   1866,  Jeanne  et  Suzanne  Duborgel,  donnaient 


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ÔOO  fr.  pour  Tachât  de  la  statue  de  la  Vierge  ;  une  fêté 
magnifique  eut  lieu  le  7  mai,  jour  de  son  installation. 

Le  1 1  juillet  de  la  même  année,  Tévêque  du  diocèse 
Mgr  Magnin,  en  visite  pastorale,  s'arrêtait  à  Messery  ; 
une  réception  splendide  lui  fut  faite,  le  sacrement  de 
confirmation  fut  administré  à  116  personnes. 

Les  années  suivantes  la  série  des  dons  continue  (1). 

Par  testament  du  19  février  1867,  Jeanne  Duborgel 
dite  Roson,  léguait  au  curé  de  Messery  le  capital  de 
4000  fr.  pour  fondation  de  grand'messes  ;  500  fr.  pour 
orner  et  embellir  l'autel  de  S*-Pierre.  Une  statue  du  Saint, 
sculptée  à  Annecy,  fut  inaugurée  à  Messery  en  juin  1870. 
Le  2  octobre  1870,  l'abbé  Hippolyte  Boccard,  de  Mes- 
sery, donnait  50  fr.  pour  l'achat  d'une  pixyde.  En  1871, 
Michel  Quiblier  faisait  élever  à  Essert  la  superbe  croix 
en  marbre  blanc  qui  est  placée  à  l'entrée  de  ce  village. 
—  Le  9  décembre  1872,  Joseph-Marie  Duborgel,  des 
Repingons,  léguait,  par  testament,  500  francs  à  l'église 
de  Messery,  pour  son  ornementation  intérieure  et  500  fr. 
pour  une  horloge  publique.  —  Le  4  avril  1875,  la  dé- 
coration de  la  grande  chaire  était  due  à  la  générosité 
de  M.  Genoud  Pierre,  du  village  de  Veret,  apiculteur 
distingué. 

R^  Robert  mourut  à  Messery  en  1875,  regretté  de 
toute  la  paroisse  ;  il  fut  inhumé  devant  l'église  à  droite 
de  la  grande  porte. 

Sous  son  ministère  un  fait  regrettable  eut  lieu  à  Mes- 
sery. Le  9  février  1872,  un  vendredi,   des   malfaiteurs 

(1)  Registre  de  la  Fabrique. 


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—  133  — 

restes  îuconnas,  brisèrent  une  des  fenêtres  de  la  sacris- 
tie et  après  avdir  tout  bouleversé,  prirent  deux  calices 
avec  les  patènes,  les  ampoules  des  saintes  huiles  et  un 
magnifique  reliquaire  (1). 

1875-1887.  Barnabe  Fleury,  natif  de  S^-Paul, 
ancien  vicaire  de  Messery  sous  Révérend  Faurax,  prit 
possession  de  la  cure  do  Messery  le  I^»*  juin  1875. 

En  1884,  Demoiselle  Arpin  Louise,  qui  habitait  Dou- 
vaine,  léguait  par  testament  600  francs  pour  Tachât 
d'ornements  sacerdotaux  à  Téglise  de  Messery,  son  vil- 
lage natal. 

Révérend  Floury  mourut  à  Messery  en  1887,  il  fut 
inhumé  à  gauche  de  la  grande  porte  de  Téglise. 

1887-1898.  Magnin  Joseph^  natif  de  Mer/ève,  d'a- 
bord vicaire  à  Evian,  puisa  Samoëns,  est  nommé  curé 
de  Messery  le  I*»*  février  1887.  Il  est  appelé  à  la  cure  de 
Naves,  en  octobre  1898. 

Nous  devons  noter  durant  cette  période,  la  création 
d'une  école  libre  de  filles,  due  à  la  générosité  d'un  enfant 
de  Messery,  Monsieur  l'abbé  Janvier-Hippolyte  Boccard, 
aumônier  du  couvent  de  la  Visitation  de  Thonon.  Le 
12  août  1888,  Révérende  sœur  Joséphine  Communal, 
native  de  Veyrier,  près  Annecy,  de  la  congrégation  de 
Smoseph,  venait  avec  2  de  ses  compagnes  prendre 
possession  de  la  nouvelle  écolo,  qui  est  depuis  cette  épo- 
que soutenue  par  la  générosité  des  habitants  de  la  loca- 
lité. Monsieur  le  Comte  Jocelyn  Costa  de  Beauregard  a 
bien  voulu  s'intéresser  à  cette  œuvre  d'une  manière 
toute  particulière. 

(1)  Union  Savoisienne  du  17  février  1872, 


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—  134  — 

Pendant  ce  temps  les  legs  en  faveur  de  Téglise  n'en 
continuaient  pas  moins. 

Philippe  Duborgei  donnait  une  chape  de  velours  noir 
(300  fr.).  La  famille  de  Louis  Duborgei  dit  Es-Vève,  un 
grand  ostensoir  de  300  fr.  Un  anonyme,  une  statue  de 
S*-Joseph  ;  un  autre,  deux  candélabres  à  7  branches  ; 
un  autre  encore,  une  statue  du  Sacré-Cœur,  etc 

Révérend  Sage  Joseph^  né  en  1854  à  Contamines- 
sous-Marlioz,  ordonné  prêtre  en  1882,  vicaire  deS*-Paul, 
puis  curé  de  Leschaux,  près  S*-Jorioz,  a  pris  possession 
de  la  cure  de  Messery  le  3  novembre  1898. 
Prêtres  et  Religieux  de  Messery 

Claude  Slcard  alias  Picard  de  Messery,  promu  aux 
ordres  mineurs  le  27  février  1518,  ordonné  sous-diacre 
le  18  décembre  1518,  prêtre  le  23avril  1519  (1). 

Révérend  Etienne  Duborgei  dit  Es-  Veives,  né  à  Mes- 
sery le  29  juillet  1738,  élove  du  séminaire  d'Annecy  en 
1767  et  1768,  ordonné  prêtre  en  1769,  curé  dTvoirede 
1789  à  1793;  émigré  à  Nyon  en  1793  et  1794;  réinté- 
gré curé  dTvoire  en  1803,  mourut  le  15  janvier  1816. 

Révérend  Victor  Boccard,  né  à  Messery  le  25  juillet 
1796,  d'abord  professeur  de  philosophie  à  Thonon  vers 
1824,  puis  supérieur  du  Collège  de  Bonneville,  de  1846 
à  1852,  devint  curé  de  Sciez  le  29  octobre  1852.  Il  pu- 
bliaen  1837  un  poëmeen  cinq  chants  intitulé:  «Alliance 
de  la  Charité  catholique  et  de  la  Liberté  des  peuples.  » 
On  a  encore  de  lui  un  syllabics  philosophiœ  et  un  cours 
de  philosophie  simplifiée.  Il  mourut  le  15  décembre 
1855  (2). 

(1)  Communiqué  par  M.  Gonthier. 

(2)  Piccard,  Histoire  du  ChablaiSy  II,  page  425. 


I 


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—  135  — 

L'abbé  H ippoly te- Janvier  Boccard^  chanoine  hono- 
raire, neveu  du  précédent,  est  né  à  Messery  en  1836, 
ordonné  prêtre  le  18  juin  1859.  Ancien  professeur  et  su- 
périeur du  Collège  de  La  Roche,  il  est  actuellement  au- 
mônier du  couvent  de  la  Visitation  de  Thonou  ;  c'est  le 
fondateur  de  Técole  libre  de  Messery. 

Le  Père  Alexandre  Boccard  (de  Frise) ^  né  en  1869, 
missionnaire  de  S^-François  de  Sales,  licencié  ès-letttres, 
actuellement  professeur  au  Collège  d'Evian. 

I^e  Père  Augustin  Allamand,  né  à  Messery  en  1873, 
religieux  barnabite,  élève  du  Collège  italien  de  Rome, 
actuellement  professeur  au  Collège  de  Gien  (Loiret). 

Prêtres  et  Religieux  de  Nernier 

Duchêne  Jean-Claude,  fils  de  Jacques  Duchêne  dit 
Carnouche,  né  à  Nernier  vers  1732  ;  prêtre  de  1760, 
curé  de  Combloux  près  Sallanches,  le  14  décembre  1778; 
quitta  sa  paroisse  le  l«'mars  1793  pour  se  réfugier  à 
Verceil  en  Piémont.  Ses  paroissiens  lui  ayant  écrit  une 
lettre  touchante  pour  le  rappeler  au  milieu  d'eux,  (1)  il 
rentra  à  Combloux  le  l^»-  juin  1796,  mais  il  fut  arrêté 
dans  le  courant  du  mois  d'août.  Voici  comment  il  raconte 
son  odyssée  : 

«  J'ai  été  saisi  au  milieu  de  la  nuit  par  les  gendarmes 
«  et  40  soldats,  puis  conduit  de  cachot  en  cachot  aux 
«  prisons  de  Chambéry,  où  j'ai  été  renfermé  pendant 
«  neuf  mois,  c'est-à-dire  jusqu'au  mois  de  mai  1797.  Je 
«  fus  alors  élargi,  mais  avec  défense  rigoureuse  de  ne 
«  plus  exercer  le  saint  ministère,  ce  qui  a  été  cause  que 

(1)  Lavanchy.  Le  diocèse  de  Genève  pendant  la  Révolution, 
tome  1,  page  566  et  II,  page  556, 


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«  je  me  réfugiai  dans  les  endroits  les  plus  cachés  de  la 
«  paroisse  et  des  villages  voisins  ;  souvent  les  particu- 
le liers  n'osaient  me  donner  Thospitalité  parce  que  des 
«  lois  sévères  le  leur  défendait  sous  de  grosses  amendes 
«  et  punitions  (1).  » 

Nous  le  retrouvons  plus  tard  en  fructidor  1800,  refu- 
sant noblement  de  promettre  fidélité  à  la  constitution  de 
ran  VIII. 

M.  Duchêne  mourut,  curé  de  Comblonx,  le  21  décem- 
bre 1805,  âgé  d'environ  73  ans.  Il  a  laissé  à  son  église 
quelques  pieuses  fondations. 

i?^e  Sœur  Séraphine  Duchêne^  née  à  Nernier  vers 
1800,  de  Tordre  des  Sœurs  de  Charité  de  La  Roche  ; 
fondatrice  et  première  supérieure  de  Tasile  du  Béton 
(Savoie),  de  1830  à  1860,  décédée  vers  1865. 

R^  Peccouœ  Maurice^  né  à  Nernier  vers  le  commen- 
cement du  siècle,  resta  33  ans  curé  de  Vulbens-en- 
Vuache,  mourut  en  retraite  àSavigny,  vers  1870. 

li^  Arpin  Jean-Augitste,  né  à  Arbusigny  en  1837, 
où  son  père  se  trouvait  de  passage;  prêtre  en  1863, 
fondateur  et  premier  curé  de  la  paroisse  de  Gaillard,  a 
été  nommé  curé-archiprêtre  de  Cruseilles  en  1892. 

Ferdinand^  Joseph,  François  Favre,  plus  connu  sous 
le  nom  de  l'abbé  Famé,  naquit  à  Nernier  le  2  février 
1800,  il  eut  pour  parrain  M.  le  Comte  de  Brotty  dit  d'An- 
tioche.  Elève  du  collège  de  La  Roche  en  1810,  il  entra 
ensuite  au  séminaire  de  Chambéry  ;  une  épidémie  ayant 
fait  licencier  les  élèves  du  grand  séminaire,  M.  Favre 
passa  une  année  dans  la  famille  d'Antioche  comme  pré- 

(1)  Registres  paroissiaux  de  Combloux.  —  Communication  de 
M.  Victor  Masson,  curé  actuel  de  Combloux. 


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—  137  — 

cepteur.  Vers  1823,  M.  Favre  rentra  au  grand  séminaire 
d'Annecy  qui  venait  d*être  formé,  il  y  fut  ordonné  prê- 
tre ;  de  là  il  fut  envoyé  an  collège  de  Mélan.  Mais  d'un 
esprit  faible,  d'une  conscience  timorée,  assailli  d'idées 
jansénistes,  se  croyant  damné,  il  dut  quitter  le  collège 
de  Mélan  pour  entrer  à  l'hôpital  deThonon.  A  sa  sortie 
de  l'hôpital  on  n'osa  lui  confier  un  poste  ecclésiastique, 
et  il  rentra  à  Nernierchez  ses  parents. 

A  partir  de  cet  instant,  l'histoire  de  sa  vie  est  le  ré- 
sumé de  l'histoire  de  Nernier  durant  le  restant  du  siècle. 

A  cotte  époque,  soit  en  1829,  il  n'y  avait  dans  le  pays 
aucune  école.  Dans  son  amour  pour  son  village,  l'abbé 
Favre  se  fit  instituteur  ;  une  quarantaine  d'enfants  de 
Nernier  et  des  villages  voisins  répondirent  à  son  appel  ; 
mais  les  locaux  faisaient  défaut. 

Dans  l'intervalle  des  classes,  suivi  de  ses  élèves  il 
amassait  le  sable  du  lîvage  ou  déterrait  les  pierres  des 
chemins,  qu'il  faisait  conduire  sur  un  emplacement  choisi 
pour  la  future  école.  Après  bien  des  peines,  et  grâce  au 
dévouement  de  M.  le  Marquis  Costa  de  Beauregard  qui 
lui  laissa  3000  fr.,  l'école  fut  terminée  en  1836,  on 
baptisa  ce  nouveau  bâtiment  :  V Académie.  Sur  ces  entre- 
faites, l'abbé  Favre  partit  pour  Rome  afin  d'étudier  la 
théologie.  Elève  du  Collège  Romain,  il  reçut  à  sa  sortie 
en  récompense  de  son  travail,  une  médaille  de  vermeil. 
Il  devint  ensuite  précepteur  des  enfants  du  Marquis  Léon 
Costa  de  Beauregard. 

Animé  du  désir  de  convertir  le  pays  de  Vaud,  il  se 
rendit  à  Nyon,  et  se  mit  à  la  disposition  de  M.  l'abbô 
Vandel,  curé  de  cette  ville,  pour  l'aider  gratuitement 
dans  son  ministère  ;  mais  ayant  éveillé  par  son  zèle  les 


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—  138  — 

susceptibilités  des  notables  protestants  de  cette  ville, 
il  dut  rentrer  à  Nernier.  L'abbé  se  mit  alors  eu  devoir 
de  bâtir  une  école  congréganiste  ;  il  employa  les  mêmes 
moyens  que  la  première  fois  et  en  1849,  trois  religieuses 
de  S*-Joseph  venaient  prendre  possession  de  leur  nou- 
velle demeure. 

Mais  le  zèle  deTabbé  Favre  ne  s'arrêta  pas  là,  il  ré- 
solut d'élever  à  Nernier  un  sanctuaire  à  la  Mère  de  Dieu 
sous  le  nom  de  Notre  Dame  du  Lac.  Pour  se  procurer  les 
moyens  nécessaires,  Tabbé  se  fit  quêteur  et  ouvrit  un 
bazar  à  Nernier  ;  c'était  un  véritable  capharnaum  où 
tous  les  habitants  de  la  région  accouraient  s'approvi- 
sionner. M.  l'abbé  Favre  allait  quêtera  Lyon,  à  Paris, 
et  réalisait  chaque  année  1500  à  2000  fr.  de  bénéfices. 
Une  famille  vaudoise  l'aida  puissamment;  c'étaient  les 
nobles  de  Saugy  qu'il  avait  eu  le  bonheur  de  ramener  au 
catholicisme.  Une  fête  superbe  eut  lieu,  le  jour  de 
l'inauguration  de  la  chapelle  ;  l'indulgence  de  la  portion- 
cule  y  fut  attachée,  et  chaque  année  un  triduum  solennel 
avec  prédication  y  attire  un  grand  concours  de  fidèles. 

L'abbé  Favre,  affligé  dans  ses  derniers  jours  d'une 
maladie  mentale,  mourut  à  Genève,  à  l'hôpital  catholi- 
que de  Plainpalais,  le  4  mars  1876.  Son  corps  ramené 
de  Genève  repose  dans  la  chapelle  de  Notre  Dame  du 
Lac.  Dans  son  testament  il  léguait  aux  Révérendes 
Sœurs  de  Nernier  tous  ses  biens  afin  de  leur  assurer  un 
traitement,  et  à  son  village,  l'école  des  garçi 
l'Académie  ;  c'est  aujourd'hui  la  cure  de  Nernie 

Le  Père  Jean-Marie  Vandel,  né  à  Nernier 
ami  et  compagnon  de  l'abbé  Favre,  fut  curé  d 


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—  139  — 

de  1847  à  1855;  accablé  de  fatigues,  il  renonça  au  mi- 
nistère. Pendant  sa  convalescence,  il  fonda  YŒuvre  des 
Campagnes,  qui  a  pour  but  de  procurer  -aux  paroisses 
rurales  pauvres  des  retraites  pascales  et  des  missions. 
En  1865,  étant  aux  eaux  du  Mont-Dore,  il  y  rencontra 
le  père  Chevalier,  fondateur  de  la  Congrégation  des 
Missionnaires  du  Sacré-Cœur  d'Issoudun,  dans  laquelle 
il  fut  admis  Tannée  suivante.  Peu  après,  le  père  Vandel 
fonda  la  petite  œuvre  du  Sacré-Cœur,  dont  il  resta 
directeur  général  jusqu'à  sa  mort  survenue  en  1877.  Il 
collabora  au  bulletin  mensuel  de  Tœuvre  des  campa- 
gnes ;  on  a  de  lui  un  livre  sur  cette  œuvre  et  une  notice 
sur  Tabbé  Favre. 

RéGérend  Michel  Rivollet,  naquit  à  Nernier  en  1805, 
élève  du  séminaire  de  Fribourg,  ordonné  prêtre  en 
1834,  il  exerça  son  ministère  à  Vevcy,  puisa  Progens 
dans  le  canton  do  Fribourg.  En  1841,  il  fut  nommé  curé 
de  Thônex,  près  Genève,  où  il  resta  35  ans.  Il  y  fonda 
des  écolescatholiques  qu'il  soutenait  de  ses  deniers  soit  de 
la  culture  des  abeilles  dans  laquelle  il  excellait.  En  1876, 
la  persécution  religieuse  qui  sévissait  à  Genève  l'obligea 
à  quitter  sa  chère  paroisse  et  à  venir  chercher  un  abri 
dans  son  village  natal  (1).  Il  mourut  le  20  septembre 
1882,  et  fut  inhumé  à  Nernier  à  l'endroit  où  s'élève  de 
nos  jours  la  sacristie  ;  sa  pierre  tombale  est  fixée  dans 
le  mur. 

Prêtre  modèle,  il  était  également  patriote  excellent  ; 
l'anecdote  suivante  dont  il  fut  le  héros  en  est  un  exemple. 
En  1834,  l'abbé  Rivollet,  revenant  du  séminaire  de  Fri- 

(1)  Courrier  de  Genève  du  27  septembre  1882. 


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—  140  — 

bourg,  reçut  Thospitalité  à  Nyon  chez  des  amis.  Au  mi- 
lieu de  la  Duit  il  est  éveillé  par  un  bruit  de  vpix  ;  il  prête 
Toreille,  un  coociliabule  avait  lieu  dans  la  chambre  voi- 
sine. Les  conjurés  se  basant  sur  la  tentative  des  Luzor- 
nois  au  XVII«  siècle,  ne  parlaient  de  rien  moins  que 
d'entrer  en  Savoie  par  le  Chablais  et  de  révolutionner 
le  pays.  L'abbé  Rivollet  ne  perd  pas  de  temps,  il  s'ha- 
bille à  la  hâte,  saute  sur  un  bateau,  fait  force  de  rames, 
traverse  le  lac,  aborde  à  Nernier,  et  sans  s'arrêter  chez 
ses  parents  qu'il  n'avait  pas  vus  depuis  fort  longtemps, 
court  à  Thonon,  où  il  arrive  avant  jour;  il  avertit  les 
autorités  du  danger  qui  menace  le  pays  (1).  Des  ordres 
sont  immédiatement  donnés  par  voie  diplomatique  ;  il 
en  était  temps.  En  effet  de  Genève,  de  Nyon,  sous  la 
direction  de  Mazzini  et  de  quelques  autres  réfugiés  ita- 
liens, huit  cents  hommes  devant  former  le  noyau  de 
l'armée  insurrectionnelle,  se  tenaient  prêts  à  partir.  La 
colonne  de  Nyon,  surveillée  de  prés  par  les  troupes  du 
canton  de  Vaud,  s'embarque  à  la  hâte  et  descend  à  La 
Belette,  où  elle  est  cernée  par  la  police  genevoise.  Quant 
à  Mazzini  il  échoua  piteusement  à  Annemasse  contre 
quelques  brigades  de  douaniers.  Ainsi  finit  cette  folle 
équipée  (2). 

Le  Père  Jules  Vandel,  né  à  Nernier  en  1860,  neveu 
du  père  Jean-Marie  Vandel,  ordonné  prêtre  en  1884,  est 
actuellement  missionnaire  du  Sacré-Cœur,  à  Sydney 
(Australie). 

Révérende  Mère  Léontine  Vandel^  née  à  Nernier  en 

(1)  Communiqué  par  M"**  Catherine  Rivollet. 

(2)  Un  des  douaniers,  Guérin  Dubouioz,  de  Nernier,  se  battit 
vaillamment  au  pont  d'Etre  mbière.  (Piccard.  Histoire  du  Chablais^ 
tome  II,  page  354). 


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-  141  - 

1835,  est  également  la  nièce  du  père  J.-M.  Vandel. 
Elève  du  pensionnat  des  religieuses  de  Thonon,  elle  entra 
au  noviciat  des  Sœurs  do  Charité  de  La  Roche,  en  1852, 
fut  nommée  institutrice  à  Douvaine,  puis  directrice  de 
récolede  Mions,  près  Lyon,  et  ensuite  de  celle  de  la  Ri- 
vière-Enverse  (Haute-Savoie).  Appelée  peu  après  à 
Rome  comme  secrétaire  particulière  pour  les  commu- 
nautés de  France,  elle  fut  nommée  secrétaire  générale  de 
rOrdreen  1893,  assistante  en  1894  et  supérieure  générale 
en  décembre  1896  (1). 


(1)  Croix  de  la  Haute-Savoie^  namérodu  12  janvier  1897. 


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—  142  — 


CHAPITRE  VII 


La  Commune  ou  la  vie  civile 


Premiers  recensements.  —  Mouvements  de  la  population.  —  Les 
familles.  -~  Cadastres,  tailles  et  impôts.  —  Affranchissements. 
— -  La  justice  sous  Tancien  régime.  —  Les  Châtelains. 


Nous  avons  vu  au  cours  de  cette  étude  que  la  popula- 
tion de  Messery,  vers  la  fin  du  moyen-àge,  était  de  30 
feux,  c'est-à-dire  de  trente  familles. 

Quels  étaient  les  noms  de  ces  familles?  C'est  ce  que 
les  comptes-rendus  de  nos  visites  pastorales  ne  disent 
pas.  Après  bien  des  recherches,  nous  avons  réussi  à 
nous  procurer  plusieurs  documents,  qui,  dans  leur  en- 
semble, arrivent  à  former  une  réponse  satisfaisante  à 
cette  question.  Ces  documents  proviennent  de  sources 
diverses,  ce  sont  par  ordre  chronologique  : 

/.  Un  rôle,  lire  des  archives  de  Turin,  relatant  les 
subsides  de  la  chàtellenie  de  Nernier,  en  1451.  Les  chefs 
de  famille  de  la  seigneurie  qui  ont  payé  le  subside  sont 
au  nombre  de  vingt-deux. 

Ce  sont  :  à  Nernier,  —  Pierre  Voutier  ;  Guigue 
Balli  ;  Jean  Clerc  ;  Guigue  Bard  ;  Girard  Patry. 

A  Missérier.  —  Hugonin  Ciccard  ;  Pierre  Joly  le 
jeune  ;  François  Dex  alias  Curtet. 

A  Essert.  —  Pierre  Quiblier  ;  Jean  Quiblier  ;   Robert 


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-  143- 

d^Éssert  (de  Exerto)  ;  Pierre  d'Essert  alias  Poigneot  ; 
Jacquemete  Coda  ;  Colette  Barde  ;  Pierre  Benoit  ;  An- 
serme  d'Essert  alias  Peignent;  Pierre  Joly  notaire; 
Pierre  Dex  alias  Curtet  ;  Mermet  Choudet  ;  Guillaume 
Quiblier  ;  Pierre  Quiblier  et  Jean  Quiblier. 

Le  montant  de  cet  impôt  s'élevait  à  la  somme  de 
trente-trois  florins  petit  poids. 

La  famille  Balli,  dont  il  a  déjà  été  fait  mention  à 
Messery  et  à  Nernier  en  1330  et  1368,  a  disparu  de  ces 
deux  villages.  En  1669,  plusieurs  personnes  de  ce  nom 
habitaient  encore  le  petit  village  d'Ecerezi,  paroisse 
d'Excenevex  (1),  cette  famille  existe  encore  à  Sciez. 

La  famille  d'Essert,  aujourd'hui  disparue,  a  donné  un 
Johannes  de  Exerto,  soit  Jean  d'Essert  qui  était  notaire 
public  à  Douvaine  en  1486  (2).  Cette  famille  émigra  à 
Nernier  au  XVI«  siècle.  Un  Pierre  d'Exert  y  résidait 
encore  en  1738  (cadastre  de  Nernier).  Enfin  les  familles 
Peignons,  Quiblier  et  Clerc  existent  encore  de  nos  jours 
à  Essert  et  Excenevex. 

IL  —  Ulnventaiy^e  Bernois  dressé  pour  Messery  le 
18  octobre  1540.  Il  nous  donne  les  noms  de  quelques 
propriétaires  dont  les  terres  confinent  aux  biens  de  la 
cure.  (Voir  aux  documents). 

III.  —  Le  Rôle  des  tailles  de  Thonon,  dressé  par 
les  Bernois  en  1550,  et  que  nous  avons  découvert  aux 
archives  de  Lausanne.  Il  est  intitulé  : 

«  Livre  des  tailles  et  contributions  imposées  par  leurs 
Excellences,  rière  le  baillage  de  Thonon,  à  raison  d'un 

1)  Cadastre  de  Messery,  1669. 

2)  Trédicini.  Monographie  de  Douvaine  (document  VI),  page  174. 


—  144  — 

pour  cent,  pour  débtn^uer  (1)  le  pais  et  payer  les  dettes 

contractées  par  Charles  duc  de  Savoie. 

1<»  Messery  à  cause  dTvoire 
(c'est-à-dire  dôpendaot  de  la  seigneurie  d'Yvoire). 
Humbert  Savuaz,  possède  665  florins. 

André  Duborgel,  616      » 

Jacques  et  Louis  Brolliet  et  leurs  frères,  318      » 
Jehan  Borjallet,  :W2      > 

Michel  Duborgel,  639      > 

Louis  et  Nicod  Duborgel  et  leurs  frères,     994      » 


Bernard  Duborgel  le  vieux, 
Bernard  Duborgel  le  jeune, 
Jacques  Duborgel  n'a  rien. 
Pierre  Moteilla,  possède 
Bernard  Boccard, 

660 

477 

544 
230 

> 

Claude  du  Nant, 

142 

» 

Pierre  Boccard, 

548 

> 

Michel  Quôsan,  autrement  dit  MoteUa, 
François  Verbo, 

210 
205 

Georges  Verbo, 
Jehan  Verbo, 

165 
12 

> 

Bernard  Verbo, 

605 

> 

Les  hoirs  de  Pierre  Favre  ne  paient  rien 
car  ils  sont  de  Genève. 

> 

Loys  Bourgeois,  possède 
Biaise  Furjod  n'a  rien. 

A  MiSSÉRIER 

235 

> 

Jehan,  fils  pupil  de  feu  Pierre  Vignon 
doit  rien. 

dit  Pillet,  ne 

(1)  Les  archives  de  Lausanne  renferment  plusieurs  documents 
relatifs  au  Chablais  et  à  la  Savoie,  débriga  est  un  mot  patois  qui 
veut  dire  débarrasser. 


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242  florins 

222 

» 

410 

» 

685 

» 

132 

> 

3120 

» 

132 

» 

130 

» 

—  145  — 

A    EXCERT 

Pierre  Quiblier  dit  Vuarnet,  possède  226  florins,  et 
doit  33  florins  4  sols. 

ExcERT  à  cause  dTvoire 

Jehan  de  la  Crusa,  possède 

Jacques  de  la  Crusa, 

Pierre  de  la  Crusa, 

Guillaume  et  Pierre  Marti  dit  Girod, 

Pierre  Béné, 

Jehan  Plantet, 

Pierre  de  Laidefort, 

Georges  de  Laidefort  (de  Loy  do  fou) 

IV.  —  Parmi  les  tenanciers  emphythéotes,  soit  fer- 
miers perpétuels  dépendant  de  la  seigneurie  de  Nernier 
et  Beauregardy  noiùs  trouvons  à  Messery  : 

En  1521.  —  André  et  Bernard  Duborgel  fils  de  feu 
Robert;  Maitre  Pierre  Duborgel  et  consorts;  Nicolet 
Quiblier;  Claude  Boccard;  Jean  Vigny  alias  Pillet  (1). 

En  1588,  —  Louis  Dex  alias  Curtet;  Anthoine  Sa- 
vuaz  ;  Isaac  Savuaz  ;  Guillaume Choudet  ;  Jérémie  Chou- 
dot  et  ses  frères  Jean  et  Pierre;  François  Choudet; 
Pierre  feu  François  d'Essert  ditLabori  ;  Amed  Brolliet; 
Michel,  François  et  Louis  Boccard  ;  Jean  feu  Jean 
Arpin  ;  Bernard  Pochât  ;  Bernard  Verbod  ;  Pierre  Mo- 
teylaz  alias  Guichon  ;  Pierre  Duchable,  tuteur  do  Pierre 
Servage;  Urbain,  Pierre  et  Jérôme  Servage. 

En  1589,  —  Jacques  Duret  ;  Louis  Boriallet  ;  Jean- 

(1)  Archives  E.  Vuarnet.  André  et  Robert  Duborgel  sont  la  sou- 
che des  familles  Duborgel  dit  Es  Vèves,  et  Duborgel  dit  Joffé. 

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-  146- 

t^ierre  Duborgel;  Martin  Savuaz;  Georgiile  diccai^d 
alias  Buevoz;  Jacques  et  Bernard  Vuarnet  (1). 

En  1594.  —  Samuel  Communal  ;  Michel  Duborgel  ; 
iîean  Mouchet  ;  Philibert  Quiblier  dit  Faisant;  les  filles 
de  Louis  Duborgel* 

En  1595.  —  Maitre  Bernard  Duret,  notaire  ducal. 

V.  —  Liste  des  abjurants  de  1598.  —  Le  nombre 
des  chefs  de  famille  de  Messery  qui  abjurèrent  le  pro- 
testantisme est  de  50,  nous  en  avons  donné  la  liste  au 
chapitre  précédent. 

VL  —  Cadastre  de  Messery/.    En   1670,  le  nombre 
des  propriétaires  de  Messery  qui  figurent  sur  le  cadas- 
tre est  de  73,  dont  39  habitent  Messery  et  34  la  section 
d'Essert. 
En  1768.  —  La  paroisse  compte  65  feux  et  297  âmes. 
En  1772.  —  La  paroisse  de  Messery  compte  70  feux 
se  décomposant  ainsi  : 
Village  de  Messery  chef-lieu  21  feux. 

Vers  Veret,  15    » 

Chez  Repingon,  7     » 

Excert,  22     » 

Le  Crest,  2    » 

Frize,  2    » 

Bardenuche,  1     > 

De  297  âmes  en  1768,  la  population  de  Messery  mon- 

(1)  Dans  le  partage  de  la  famille  Quiblier  dit  Faisant^  en  date 
du  7  mars  1592,  Jacques  Vuarnet  et  Martin  Savuard  son  beau- 
frère,  sont  pris  comme  arbitres  et  prudhommes  en  Tassistance  de 
Noble  François  de  Lugrin  Tainé,  et  de  Noble  Charles  Fornyer 
seigneur  de  Nernier,  pour  subarbitres  et  notables.  Signé  Duret 
notaire  à  Oytroz,  aujourd'hui  Verètre,  hameau  deChens.  (Archives 
Michel  Quiblier). 


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—  147  — 

tait  à  483  en   1802;  676  en  1848;  606  en  1861  ;  636  en 
1885  et  616  en  1890. 

Emigration 

Cette  marche  ascendante  dans  la  population  de  Mes- 
sery,  cette  augmentation  continue,  qui  se  fit  sentir  éga- 
lement depuis  le  XV®  siècle  dans  toute  la  région,  obligea 
nombre  de  familles  à  s'expatrier. 

I.  —  Genève  étant  la  capitale  géographique  du  pays 
et  la  ville  la  plus  rapprochée,  c'est  tout  d'abord  vers  ce 
centre  que  se  dirige  le  principal  courant   d'émigration. 

Le  13  octobre  1489.  —  Jean  du  Borgel  (Johannes  du 
Borgello)  de  Messery,  escofïîer  soit  cordonnier,  est  reçu 
bourgeois  de  Genève,  moyennant  8  florins  (1). 

Le  11  avril  1494.  —  Pierre  Arpin  fils  de  Guillaume, 
de  Chivillier,  paroisse  de  Essenevay,  est  reçu  gratis 
bourgeois  de  Genève,  par  l'intercession  de  Louis  Ves- 
péris  (2). 

Le  19  juin  1545.  —  Claude  du  Borgel  surnommé 
Gayot  fils  de  Pierre  Duborgel  de  Messerier,  navatier 
soit  batelier,  est  reçu  bourgeois  de  Genève  moyennant 
10  écus  et  un  seiilot  de  vin.  En  1556,  deux  membres  de 
cette  famille,  Boniface  et  Bernard  Duborgel,  cordon- 
niers, acquièrent  également  la  bourgeoisie. 

Le  21  juin  1547,  Jacques  Communal  alias  Savua,  fils 
deHumbertde  Misserier,  est  reçu  bourgeois  de  Genève 
moyennant  10  écus  et  un  seiilot  de  vin  (3). 

fl]  A.  Cîovelle.  Le  livre  des  Bourgeois,  Genève  1896. 

(2)  Des  familles  Arpin  existent  encore  à  CheviUy,  Nernier, 
Messery  ;  ce  nom  est  très  ancien  dans  la  région,  un  Jacquemet 
Arpin  vivait  à  Bonne-sur-Menoge  en  138L  (Archives  de  Genève). 

(3)  SeiUot  est  mis  ici  pour  baquet  de  vin.  En  1482,  Claude  et 
Jean  Communal  de  Nernier,  vendaient  au  dit  lieu  18  sous  de 
cens.  Archives  de  Genève,  parchemins. 


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--  148- 

Le  6  novembre  1572.  —  Thiven  et  Pancro  Chicard  de 
Messerier  sont  reçus  bourgeois,  moyennant  12  écus  et 
deux  seillots  de  vin. 

Le  23  décembre  1631.  ^-Michel  Verbeux  fils  de 
MauriSj  originaire  de  Nernier,  batelier,  et  son  fils  sont 
reçus  bourgeois  de  la  dite  ville  moyennant  25  écus,  un 
mousquet  et  un  seillot  de  vin  (1). 

II.  —  Un  second  mouvement  d'émigration  se  dirige 
sur  le  Jura. 

En  1690,  un  Pierre  Duborgel  de  Messery  réside  à 
Arbois  (comté  de  Bourgogne). 

En  1700,  la  famille  Decreusaz  va  s'établir  à  Vuadan 
prés  Arbois  (2). 

En  1712,  Jean-Jacques  Sauccard  ou  Sicard  va  égale- 
ment résider  au  même  endroit. 

III.  —  Enfin  depuis  la  Révolution  de  1793,  le  mouve- 
ment d'émigration  s'accentue.  Un  Michel  Dumont  du 
hameau  des  Repingons,  est  négociant  en  broderies  à 
Paris,  l'an  XI  de  la  République;  il  avait  épousé  Marie- 
Madeleine  Maillet,  née  à  Villers-sur-Aumale  (Seine-In- 
férieure). En  1810,  il  réside  à  Turin  comme  maître  d'hôtel 
de  son  A.  I.  le  prince  Borghèse,  boau-frére  de  Napoléon. 

Philibert-Félix  Quiblier,  ofBcier  de  santé  à  l'armée 
d'Italie,  devint  médecin  du  roi  Murât  ;  il  resta  à  Naples 
après  la  mort  tragique  de  ce  prince  et  y  mourut  en 
1830,  laissant  sa  fortune  à  ses  héritiers  de  Messery  et 
de  Thonon.  (Voir  aux  documents  ses  états  de  service). 

Un  de  ses  nev(jux,  de  la  branche  de  Thonon,  était 
Intendant  à  Albertville  avant  l'annexion. 

(1)  A.  Covelle.  Le  litre  des  Bourgeois. 

(2)  Archives  Vuarnet. 


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—  149  — 

Durant  lecours  du  XIX«  siècle,  plusieurs  membres  de 
la  famille  Duret  s'établissent  à  Paris,  à  Thouon,  à  S*- 
Disdille,  aux  bouches  de  la  Dranse. 

Des  Verbeux  vont  à  Ugines,  à  Corzent  prés  Thonon. 
Des  Quiblier  à  Paris,  à  Genève,  à  Thonon,  à  Rives- 
sous-Thonon,  à  Nernier,  à  Yvoire,  à  Excénevex,  à  Lyon, 
à  Annecy,  à  Crans.  Des  Duborgelà  Annemasse,  à  Nyou, 
à  Nernier,  à  Chens,  à  Yvoire,  en  Maurienne.  Des 
Vuarnet  à  Yvoire,  à  Ballaîson,  à  Nernier,  à  Châtelaine 
près  Genève.  Des  Servage  à  Loëx,  à  Excénevex,  à  Che- 
villy,  à  Paris.  Des  Boccard  à  New- York.  Des  Pochât  à 
Aniéres  (canton  de  Genève). 

Immigration 

Par  contre,  la  fertilité  du  sol,  la  douceur  du  climat,  la 
beauté  du  site,  ont  attiré  à  Messery  de  nombreuses  fa- 
milles. 

En  1721,  Hippoly te  Genêt,  natif  de  Chevilly,  vient  se 
fixer  à  Messery. 

En  1740,  Jacques  Calliat,  de  Massongy,  vient  habiter 
Nernier. 

En  1751,  Claude  Girod,  maître  horloger  à  Douvaine, 
vient  à  Messery.  Ce  village  reçoit  encore  en  1758  : 
Claude  fils  de  Jean  Rivolat,  natif  de  Chens,  en  1763, 
la  famille  Philippe,  originaire  de  Seyssel  ;  en  1774, 
Jean  Genêt,  natif  de  Sciez  ;  en  1777,  Simon  feu 
Jean-Louis  Détruche,  natif  de  Cusy  et  originaire  de  Bal" 
laison  ;  en  1781,  François  Grillon,  natif  de  Sciez  et  la  fa- 
mille Basolaz,  originaire  du  haut  Chablais. 

Durant  cette  période,  Nernier  recevait  les  familles 
Peccoux,  Vandel,  Duchêne  dit  Comtois  et  Bonnefoy, 
tous  originaires  des  Rousses  (Jura),  d'autres  familles, 


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—  150  — 

toiles  que  les  Duchonedit  Calli  et  les  Caillas  quittaient 
Nernier  pour  se  fixer  à  Essert. 

Durant  le  XIX«  siècle,  rimnaigration  continue  ;  arri- 
vent successivement  :  les  familles  Vallier  de  la  Drômeen 
1S:35  ;  Dumont  du  Plantet,  du  hameau  d'Aubonne  près 
Douvaiue  en  18.35;  Genoud,  de  Chilly  près  Douvaiuc; 
Ducret,  d'Hermancc;  Rollux,  de  St-Paul;  Chappuis,  de 
Féternes;  Allaraand,  deChevilly;  Lalliard,  d'Arenthon 
près  Bonneville  ;  Fichard,  de  Chens  ;  Dufour,  de  Mas- 
songy;  Pittet,  d*Echallcns (Suisse);  Favre,  de  TOber- 
land  ;  Vernaz,  de  Vinzier;  Michoux,  de  St-Paul  ;  Longhi 
et  Albertoni,  du  Piémont;  Biguet,  de  Paray-le-Monial; 
Blanc,  de  Thollon  ;  Fontanel,  d'Allinges  ;  Pautex,  de 
Vètraz-Monthoux  ;  Plassat,  de  Chens;  Rossié,  de  Veigy; 
Sauthier,  de  Burdignin;  Demoxi,  de  Rumilly;  Dalex, 
do  Massongy;  les  frères  Lan  vers,  de  Morzine  ;  Millet, 
de  Larringes  ;  Gruz,  de  St-Paul  ;  Taberlet,  de  Morzine  ; 
Nombridoz,  d'Oron-la-Ville  (canton  de  Vaud). 

Familles  notables  de  Messery 

Famille  Michaud. —  C'était  une  famille  bourgeoise  de 
Thonon.  Nous  ne  savons  si  elle  avait  un  lien  de  parenté 
avec  Jean  Michaud,  ministre  de  Messery  en  1589.  Eu 
tout  Cixs  Maître  Abraham  Michaud,  de  Thonon,  possédait 
déjà  en  1(370  de  grandes  propriétés  à  Messery.  En  1710 
nous  trouvons  cette  famille  alliée  aux  de  Brotty  de 
Nernier,  par  le  mariage  de  demoiselle  Marguerite  de 
Brotty  avec  Claude-Joseph  Michaud  (I)  ;  par  leur  testa- 
ment du  U  mai  1710,  ils  lèguent  (3000  florins  à  Téglise 
de  Nernier.  En  1711,  Claude-Joseph  Michaud  est  chargé 

(1)  Visite  pastorale  de  1768.  Archives  de  FEvéché. 


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—  151  — 

des  bancs  du  sel  pour  Thonon  et  Nernior  ;  il  lui  est  or- 
dooné  de  ne  pas  vendre  le  sel  plus  de  4  sols  la  livre  (1): 
Le  26  mai  1710,  Kévérend  Jean-Claude  Michaud,  prêtre 
administrateur  de  la  Sainte  Maison  de  Thonon,  loue  sa 
ferme  du  Cret,  située  à  Messery,  à  Jean  et  Pierre  Qui- 
blier  dit  les  Gliames  (2).  En  1752,  Jean-Baptiste  Mi- 
chaud,  natif  de  Nernier,  est  contrôleur  des  sels  et  salines 
à  Bellerive  où  il  habite.  Il  avait  épousé  Demoiselle 
Josephte-Marie  Delamare,  native  de  Chêne.  En  1768, 
son  frère  spectable  Joseph-François  Michaud  est  avocat 
au  Sénat  de  Savoie,  il  signe  au  bas  du  procès-verbal  de 
-la  visite  pastorale  de  Messery  de  1768.  Jean-Marie  Mi- 
chaud fils  du  précédent  est  député  de  Messery  à  rassem- 
blée des  Allobroges  ;  nous  le  retrouvons  Tan  IV  de  la 
République,  commissaire  des  guerres  à  Lyon  où  il  ré- 
side ;  il  devint  quelque  temps  après,  avec  son  frère, 
acquéreur  de  la  plus  grande  partie  des  biens  nationaux 
do  Messery  et  Nernier.  Le  dernier  membre  de  cette  fa- 
mille légua  toute  sa  fortune  à  Thôpital  do  Thonon  ;  sa 
ferme  du  Cret  fut  vendue  en  1857  par  les  soins  de  l'hô- 
pital et  acquise  par  divers  habitants  d'Essert.  La  ville 
do  Thonon  reconnaissante  a  donné  son  nom  à  une  de 
ses  rues. 

Familles  Quibliev  et  DuborgeL  —  Ce  sont  les  deux 
plus  anciennes  et  aussi  les  deux  plus  nombreuses  familles 
de  Messery.  Le  nom  de  Quiblier  est  assez  répandu  dans 
notre  région.  En  1547  un  Pierre  Quiblier , natif  de  Thoy- 
rier,  en  la  terre  de  Gex,  était  reçu  bourgeois  de  Ge- 
nève (3).  En   1718,  Révérend  Gaspard   Quiblier  était 

(1)  Académie  Chahlaisienne.  Tome  V,  page  X. 

(2)  Archives  Nfichel  Quiblier  (Essert). 

(3)  Covelle.  Le  livre  des  Bourgeois  de  Genève, 


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—  152  — 

recteur  de  la  chapelle  de  la  crypte  de  S^Hippolyte  do 
ThonoD.  En  1896,  cinquante  Quiblier  se  trouvaient  ins- 
crits sur  la  liste  électorale  de  Mcssery  ;  il  y  avait  39 
Duborgel. 

Cadastres,  tailles  et  impôts 

L'impôt  rural  s'appelait  taille  ou  cote,  parce  qu'on 
avait,  au  rnoyen-àge,  l'habitude  de  marquer  par  des  en- 
tailles sur  un  bâton,  le  compte  de  chaque  proprié- 
taire (1).  Au  XVIP  siècle,  les  ducs  de  Savoie  dans  le 
but  de  répartir  l'impôt  foncier  d'une  manière  plus  équi- 
table, ordonnèrent  l'établissement  d'un  cadastre,  ren- 
fermant rénumération  de  chaque  parcelle,  avec  sa 
contenance  et  ses  confins.  Cette  mesure  semble  avoir  été 
générale.  M.  l'abbé  Ducis  signale  le  cadastre  de  Beau- 
fort  dans  son  ouvrage  sur  cette  vallée.  Thonon  en  avait 
un  depuis  1656.  Celui  de  Messery  fut  établi  par  suite 
d'un  décret  de  la  Chambre,  en  date  du  l*'»'  février  1669. 
Seuls  les  biens  du  peuple  étaient  imposés.  A  Messery  le 
nombre  des  propriétaires  était  de  1 19,  dont  46  habitaient 
en  dehors  de  la  commune.  Le  total  de  l'impôt  foncier 
se  montait  à 74  florins  10  sols  6  deniers  (2). 

On  payait  1  sol  pour  une  pose  de  terre  (la  pose  vaut 
36  ares  85). 

1  sol  1/2  pour  une  pose  de  pré. 

2  sols  1/2  pour  une  pose  de  vigne. 

En  1738,  le  roi  de  Sardaigne  fit  dresser  un  nouveau 
cadastre  basé  sur  l'égalité  des  citoyens  devant  l'impôt  ; 

(1)  Cette  manière  de  marquer  était  encore  en  usa^re  il  y  a  une 
trentaine  d'années  dans  nos  viHages,  par  exemple  dans  Tes  frui- 
tières ou  fromageries. 

(2)  [^e  tlorin  valait  alors  en  Savoie  0,61  centimes.  Le  florin  était 
divisé  en  12  sols  ou  sous,  chaque  sol  valait  12  deniers. 


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—  153  — 

la  noblesse  fit  bien  entendre  quelques  récriminations, 
mais  elle  s'exécuta  et  l'Eglise  elle-même  autorisait  en 
1741  l'impôt  sur  les  biens  ecclésiastiques.  Ce  ca- 
dastre fut  établi  avec  matrice  et  mappe  à  l'échelle  de  1 
pour  2372.  Le  total  des  impôts  pour  Messery  se  montait 
à  917  livres  10  sols. 

En  1812,  Napoléon  P"^  fit  dresser  un  grand  cadastre 
avec  matrice  et  mappe  à  l'échelle  de  1/2500. 

Le  cadastre  de  1882  est  à  l'échelle  du  1/1000,  c'est 
une  beauté  caligraphique,  mais  il  renferme  bien  des 
erreurs. 

La  capitaiion.  —  Comme  son  nom  l'indique,  elle  se 
prélevait  sur  chaque  tête  d'habitant  ;  c'était  un  impôt  de 
guerre  venant  s'ajouter  à  l'impôt  foncier.  D'après  le  rôle 
de  la  capitation  de  Messery  (1)  pour  l'année  1713,  la 
commune  comprend  78  numéros.  Le  total  de  la  capita- 
tion s'élève  à  310  livres  10  sols,  somme  qui  représente 
le  tiers  de  l'impôt  foncier.  Cet  impôt  variait  avec  la  po- 
sition et  la  fortune  de  chacun. 

Ainsi  :  Estienne  Duborgel  dit  Repingon  est  taxé  cinq 
livres  10  sols. 

Pierre  Duborgel,  granger,  quatre  livres. 

Jean  Duborgel,  charpentier,  trois  livres. 

L'Anthoine  Béné,  servante,  une  livre  dix  sols. 

Le  Révérend  curé,  sieur  François  Vallier  et  le  sei- 
gneur de  Bardenuche  en  sont  exempts. 

Le  présent  rôle  dut  être  publié  par  les  soins  des  offi- 
ciers locaux  et  syndics  à  l'issue  de  la  messe  paroissiale. 

(1)  Archives  Vuarnet. 


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—  154  — 

L'ordre  venait  de  Charabéry.  La  Savoie  était  alors  occu- 
pée d(»puis  dix  ans  parles  troupes  de  Louis  XIV. 

La  Gabelle.  —  C'était  un  impôt  sur  le  sel,  le  gou- 
vernement avait  alors  le  monopole  de  la  vente  de  cette 
denrée,  qu'il  vendait  d'ailleurs  fort  cher.  Les  particuliers 
usaient  de  contrebande.  Pour  y  mettre  un  terme,  le 
gouvernement  imposa  d'office  chaque  famille  d'une  quan- 
tité de  sol  déterminée. 

En  1772,  le  collet  du  sel  à  lever  pour  la  paroisse  de 
Messery  se  montait  à  la  somme  de  4(317  livres  de  sel  à 
répartir  entre  70  feux  (1). 

Outre  ces  impôts  qui  se  levaient  régulièrement,  il  y 
en  avait  (Timprév'us  comme  nous  le  montre  la  note  sui- 
vante : 

«  Claude  Duborgel,  sindic  de  la  communauté  de  Mes- 
sery, exigera  trois  sols  par  feu,  chez  tous  les  habitants 

dudit  Mossery  à  cause  de  la  prestation  de  fidélité 

Signé  :  Guigonat,  Châtelain  (2).  » 

Le.ç  Garnissaires,  —  Dans  chaque  village  se  trouvait 
un  exacteur,  sorte  de  percepteur  chargé  de  lever  les 
impôts  et  de  les  remettre  au  trésorier  do  la  province. 
Le  pays  sans  débouchés,  sans  routes,  sans  commerce, 
était  réduit  à  la  misère;  il  arrivait  souvent  que  les  pau- 
vres gens  ne  pouvaient  payer.  Le  gouvernement  em- 
ployait alors  la  contrainte,  il  envoyait  vivre  dans  les 
familles  des  soldats  appelés  ^arwmtfi;r,ç. 

C'est  ainsi  que  le  3  avril  1792,  le  Sous-Intendant  Mou- 
thon  décide  que  les  particuliers  do  Messery-Nernier  en 

(1)  Archives  Vuar net. 

(2)  Guigonat  fut  châtelain  de  la  seigneurie  de  Nernier,  de  1728 
à  1710. 


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—  155  — 

retard  pour  le  payement  des  impôts  logeront  un  soldat 

en  brigade  pendant  8  jours,  auquel  ils  payeront  20  sols 

par  jour  jusqu'à  ce  qu'ils  aient  soldé  entièrement  ce 

qu'ils  doivent.  Le  9  avril,  la  liste  en  était  dressée   par 

Michel  Détruche,  exacteur  de  Messery-Nornier  ;  elle 

renfermait  21  noms,  et  le  13  avril,  Pierre  Arpin,  natif  de 

Nernier,  soldat  de  milice,  recevait  8  livres  pour  8  jours 

de  brigade. 

Affranchissements 

Malgré  ces  impôts  de  gouvernement,  nos  pères  étaient 
toujours  soumis  aux  impôts  féodaux  :  censés,  servis, 
péages,  leydes,  échutes,  droits  de  pêche,  de  chasse, 
d'épave,  etc.,  etc.,  que  nous  avons  déjà  mentionnés  au 
chapitre  des  châteaux. 

Le  roi  Charles- Emmanuel  par  ses  édits  du  20  janvier 
1762  et  du  2  mars  1763,  affranchissait  gratuitement 
son  peuple  des  servitudes  féodales  personnelles,  mais 
ces  édits  s'appliquaient  au  domaine  royal  et  non  aux 
seigneuries  particulières. 

Enfin  le  19  décembre  1771  parut  le  décret  d'extinc- 
tion générale  des  fiefs,  moyennant  rachat.  Notre  Savoie 
sur  le  chemin  des  réformes  était  donc  en  avance  de  plus 
de  20  ans  sur  la  France.  Beaucoup  de  familles  avaient 
déjà  profité  de  ce  nouvel  état  de  choses. 

Les  Dubovgel  dits  Es  veuves  s'affranchissent  par  acte 
du  9  janvier  1767,  de  l'hommage  lige,  taillable  dû  au 
seigneur  Alexis-Barthélémy  de  Costa. 

Le  21  janvier  1769,  le  seigneur  Marc-Antoine  de  Costa 
affranchit  Bernard  Duborgel  dit  Es  Veuves,  de  la  censo 
annuelle  d'un  demi  setier  de  vin  blanc,  mesure  de  Ner- 
nier, pour  le  prix  de  54  livres.  Ce  demi  setier  était  dû 


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—  156  — 

pour  une  pièce  de  vigne,  d'une  demie  pose,  située  en 
les  Molles. 

Le  9 janvier  1767,  Claude  Boccard  s'affranchit  des 
censés  féodales  qu'il  doit  sur  sa  maison  et  sur  26  pièces 
de  terre  en  cédant  au  seigneur  de  Costa  deux  poses  et 
demie  de  bois,  lieu  dit  en  Partays. 

La  famille  Durel  s'affranchit  en  1768.  La  famille 
Arpin  en  1785;  ne  pouvant  paj'er immédiatement,  cette 
dernière  passa  une  obligation  dont  elle  acquitta  les  ren- 
tes jusqu'en  mil  huit  cent  soixante-sept. 

La  Justice 

La  justice  était  rendue  sous  l'ancien  régime  par  les 
seigneurs  ou  par  leurs  ofHciers. 

Le  premier  de  ces  officiers,  le  châtelain,  était  en  quel- 
que sorte  le  gardien  du  château;  il  réunissait  au  moyen- 
àge  les  attributions  financières,  judiciaires  et  militaires. 

Voici  quelques  noms  de  receveurs  des  revenus  de 
Nernier  : 

1451.  —  Noble  Jean  du  Vernay,  lieutenant  et  pro- 
cureur. 

1486.  —  Noble  Mermet  Cornu. 

1496.  —  Gabriel  Burges. 

1516.  —  François  Vulliet  et  Guillaume  Nicod  (1). 

Après  1567,  les  châtelains  ne  conservèrent  plus  guère 
que  les  fonctions  judiciaires;  leurs  attributions  n'étaient 
plus  à  peu  de  choses  près  que  celles  de  nos  juges  de 
paix.  Au  dessus  des  châtelains  se  trouvait  le  juge  do 
province  appelé  juge-mage,  qui  siégeait  à  Thonon.  et  le 
Sénat  de  Savoie  ou  cour  suprême  qui  siégeait  à  Chambéry . 

(1)  Piccard.  Académie  Chablaisienne,  Volume  VU,  page  368. 


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-  157  - 

Lo  châtelain  était  nommé  par  le  seigneur,  ainsi  que 
les  employés  inférieurs  tels  que  le  métrai^  chargé  do 
la  police,  le  sergent  royaly  sorte  d'huissier,  Ce^acteur^ 
soit  percepteur  des  impôts,  lesauthiery  garde-champêtre. 

Voici  les  noms  de  quelques  châtelains  de  la  seigneurie 
de  Nernier  et  Messery  :  (1). 

1670-1704.  —  Maître  François  Arpîn,  notaire  ducal 
résidant  à  Messery. 

1713.  —  Maître  André  Novel,  notaire  résidant  à 
Yvoire.  (Maison  de  la  Tour). 

1728-1740.  —  Guigonat. 

1740-1754.  —  Jacques-Amédée  Lemasson,  notaire 
résidant  à  Oytroz,  aujourd'hui  Vorôtre,  nommé  châte- 
lain le  23  juillet  1740  sur  la  présentation  des  nobles  do 
Costa,  qui  avaient  à  cette  époque  le  droit  de  nommer  les 
juges  et  châtelains  du  marquisat  de  Beauregard  et  de  la 
seigneurie  de  Nernier. 

1792.  — Thorens,  notaire,  résidant  à  Yvoire. 

En  1700,  un  parricide  avait  été  commis  àEssert  sur 
Michel  Decrosaz,  par  ses  fils  Mauris  et  David,  et  la 
femme  de  ce  dernier  Jacquemine  Thorens.  Le  1 1  mars, 
maître  Vespasien  Carron,  procureur  du  marquisat  de 
Beauregard,  fit  procéder  aux  informations  et  par  sen- 
tence du  15  février,  la  famille  Decrausaz  était  condamnée 
à  543  florins  d'amende;  les  frais  de  justice  se  montaient 
à  569  florins.  Les  biens  de  cette  famille  vendus  aux  en- 
chères, produisirent  900  florins.  Complètement  ruinés, 
les  Decrausaz  s'expatrièrent  et  allèrent  résider  à  Vuadan 
près  Arbois  (comté  de  Bourgogne). 

(1)  Archives  de  différentes  familles. 


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—  158  — 

Dafis  les  frais  et  amendes  : 

132  florins  sont  adjugés  au  président  Costa  marquis  de 
Beauregard. 

33  florins  4  sols  aux  R<^»  Pères  Capucins  de  Thonon 
pour  faire  prier  Dieu  pour  Tànie  du  défunt. 

5  florins  à  la  Charité  de  Charabéry. 

100  florins  au  lieutenant  pour  frais  de  procédure,  va- 
cation. 

59  florins  au  greffier,  etc.,  etc. 


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-  159  — 


CHAPITRE  VIII 


S3rndics  et  Maires.  —  Conseil  de  Commune 

Conseil  Municipal.  —  La  Révolution.  —  Les  biens  Nationaux.  — 
Les  nouveaux  imf)ôts.  —  Les  réquisitions.  —  La  conscription. 
Passage  des  Autrichiens.  —  Séjour  de  Lamartine  à  Nernier.  — 
La  Restauration.  —  Annexion  à  la  France. 


De  temps  immémorial  en  Savoie,  les  affaires  commu- 
nales se  traitaient  devant  Téglise  au  sortir  des  offices. 
C'était  un  dernier  vestige  des  assemblées  franques  et 
burgundes  ;  là  le  châtelain  du  lieu  donnait  connaissance 
des  affiiires  courantes  aux  communiers  de  la  paroisse, 
composés  de  tous  les  chefs  de  famille.  En  1738,  un  édit 
créa  dans  chaque  commune  un  conseil  chargé  de  l'admi- 
nistration des  affaires  communales  ;  ce  conseil  devait  se 
composer  d'un  syndic  et  de  deux  conseillers.  Cependant 
Messery  était  déjà  doté  de  cette  institution  bien  long- 
temps avant  cette  époque. 

Voici  la  liste  des  syndics  et  conseillers  que  nous  avons 
pu  relever  : 

1679.  —  Honorable  Anthoine  Quiblier,  syndic  de  Mes- 
sery, signe  en  cette  qualité  au  bas  du  procés-verbal  de 
la  visite  pastorale  de  Mgr  Jean  d'Arenthon. 

1720.  —  Hugonin  Arpin. 

1703.  —  Honorable  Jean Duborgel,  syndic;  Jean  Qui- 


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—  160  — 

blîer  et  François  Quiblier,  conseillers.  Le  22  juin  de 
cette  année,  le  syndic  et  ses  deux  conseillers,  sur  Tordre 
de  l'intendant  de  la  province,  procèdent  à  l'élection  d'un 
sujet  manquant  au  contingent  du  régiment  provincial 
de  Chablaix  ;  ils  élisent  pour  soldat  Urbain  flls  de  Ber- 
nard Duborgel  dit  Es  Veuves  (1). 

1768.  —  Jean  Servage,  syndic,  Henri  Peccoux,  Nico- 
las Quiblier,  conseillers,  engagent  une  plaidoirie  au  su- 
jet de  la  fontaine  de  Marsille. 

La  famille  Michaud,  alliée  aux  de  Brotty,  était  pro- 
priétaire des  champs  de  Marsille,  au  milieu  desquels 
coule  la  fontaine  de  ce  nom  ;  les  habitants  d'Essert  al- 
laient y  puiser  Teau  pour  leur  usage.  Le  21  mai  1771, 
la  famille  Michaud  fit  condamner  Jean  et  François  Qui- 
blier dit  les  Aymo,  qui  pour  se  rendre  à  la  fontaine, 
avaient  traversé  le  champ  de  Marsille  avec  leur  charriot. 
Le  conseil  de  Messery  étant  intervenu  fut  également  dé- 
bouté par  acte  du  1®'  avril  1773.  En  ayant  rappelé,  le 
conseil  n'eut  pas  meilleur  sort,  mais  les  habitants 
d'Essert  et  de  Frise  n'en  continuèrent  pas  moins  d'aller 
à  la  fontaine,  d'où  nouvelle  assignation  au  tribunal 
de  Thonon  le  25  août  1774  (2). 

1791.  —  Pierre-François  Peccoud,  syndic,  Simon  Dé- 
truche  et  Quiblier  Joseph,  conseillers  ;  Jean-François 
Violland,  notaire  à  Douvaine,  secrétaire. 

En  1789,  la  commune  de  Messery  est  en  procès  avec 
les  royales  gabelles  au  sujet  d'un  port  à  bateaux  dont 
jouissait  la  paroisse  au  bord  du  lac,  au  lieu  dit  la  Pointe(3). 

(1)  Extrait  du  livre  de  délibérations  du  conseil  de  la  coqimu- 
nauté  de  Messery.  En  1755,  Claude  Duborgel  dit  Joffé  était  caporal 
dans  le  régiment  de  Savoye. 

(2)  Archives  Michel  Quiblier,  à  Essert. 

(3)  Archives  départementales. 


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—  161  — 

La  Révolution 

L'armée  française  entra  en  Savoie  le  22  septembre 
1792.  Peu  de  jours  après,  la  population  était  invitée  à 
se  réunir  afin  de  procéder  sans  délai  à  Télection  d'un 
député  par  commune. 

Les  électeurs  de  Messery  nommèrent  pour  leur  député 
Jean-Marie  Michaud  et  ceux  de  Nernier,  Favre  Jean- 
Baptiste.  Le  21  octobre,  les  représentants  des  655  com- 
munes de  la  Savoie  réunis  dans  Téglise  cathédrale  de 
Chambéry,  nommèrent  président  leur  doyen  d'âge  et 
secrétaires,  leurs  deux  plus  jeunes  collègues.  C'est  ainsi 
que  le  député  do  Messery  devint  secrétaire.  Deux  jours 
après  l'assemblée  constitua  son  bureau  définitif  ;  mais 
sous  l'influence  des  délégués  de  la  Convention  et  des 
baïonnettes  françaises  le  parti  démagogique  prit  le  des- 
sus. L'assemblée  s'affubla  du  nom  d'Assemblée  des  AUo- 
broges,  vota  l'annexion  de  la  Savoie  à  la  France,  la 
suppression  de  la  noblesse,  le  séquestre  des  biens  des 
émigrés,  le  retour  des  biens  du  clergé  à  la  nation,  etc.. 

Mais  bientôt  la  terreur  commença,  les  prêtres  furent 
traqués,  les  églises  fermées.  A  Messery,  Michel  Détru- 
che  est  nommé  officier  de  l'état  civil  ;  les  livres  de  la 
cure  lui  sont  remis  (1),  et  il  dresse  son  premier  acte  le 
5  juin  1793.  Le  3  prairial  an  IV  de  la  République,  Jean- 
François  Duborgel  est  officier  public  de  la  commune  de 
Messery.  Pierre  Duborgel,  dit  Es  Veuves,  lui  succède 
en  l'an  V.  Enfin  le  l®^  thermidor  de  l'an  VIII,  le  maire 
Pochât  reconnaît  avoir  reçu  de  ce  dernier  tous  les  re- 
gistres de  mariage,  décès,  naissances,  tant  anciens  que 
nouveaux. 
(1)  Archives  de  la  cure.  Registre  des  baptêmes. 

iib 


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Les  Biens  Nationaux 

âur  les  3242  joaroaux  ou  poses  (1027  hectares),  dont 
se  composait  le  territoire  de  Messery  en  1738,  le  sixième, 
soit  6i60  jourdaux,  faisaient  partie  des  biens  nobles  ou 
ecclésiastiques.  Ces  biens  se  décomposaient  ainsi  : 


NOMS  DES  PROPRIÉTAIRES 

jornuim 

TOISB 

Biens  de  la  cure 

Chapelle  S'-Sébastien  de  Nernier  .     . 

Visitandines  de  Thonon 

Noble  de  Brotty  dit  d'Antioche.     .     . 

Noble  de  Costa 

Noble  de  Bardenuche 

Noble  de  Marcley,  seigneur  de  Filly. 
Noble  de  Foras,  de  Douvaine    .     .     . 

18 

2 

127 

(>3 

323 

12 

3 

6 

88 
4(J8 
404 
310 

20 
150 
217 

88 

Le  marquis  Costa  de  Beauregard  outre  ses  323  jour- 
naux possédait  à  Messery  : 

1°  Le  château  de  Frise,  au  midi  de  la  route,  alors  eu 
ruines  ;  2^  la  maison  dite  Chez  de  Rive;  3®  une  maison 
au  village  de  Véret  (maison  dite  des  Bossons);  4^  une 
maison  au  village  do  Messery  (maison  dite  des  Granons). 

Les  Visitandines  possédaient  à  Frise  une  maison  ap- 
pelée La  Bathia  (aujourd'hui  maison  Jean  Quiblier), 
avec  30  journaux  de  terre  d'un  seul  tenant. 

A  Nernier  sur  les  1046  journaux  (331  hectares)  que 
renfermait  le  territoire  de  cette  commune,  près  d'un 
tiers  faisait  partie  des  biens  nobles. 

Le  marquis  Costa  de   Beauregard  possédait  :   1<>  la 


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—  163  — 

ferme  des  Granges;  2»  la  maison  et  la  ferme  de  la  Tour  ; 
S""  la  maison  Remillet  actuelle  ;  4<»  la  maison  Duchêne 
(tannerie)  ;  5°  les  remises  Duchêne  (situées  en  face  la 
tannerie);  6»  les  masures  du  Vieux  Château  appelées 
La  Montagne,  et  137  journaux  de  terre. 

La  famille  de  Brotty  possédait  2  maisons,  2  granges 
et  2  masures  où  s'élève  de  nos  jours  le  château,  plus  71 
journaux  de  terre. 

Les  Visitandines  possédaient  sur  Nernier  un  pré  de 
6  journaux,  soit  2  hectares,  appelé  le  pré  de  Praille. 

Le  6  germinal  an  III  de  la  République,  sur  la  réquisi- 
tion de  ragent  national  de  Thonon,  la  municipalité  de 
Messery  réunie  dans  la  maison  commune  (ci-devant  cure) 
procède  à  la  location  soit  ascensement  dos  biens  natio- 
naux qui  ne  sont  pas  encore  loués.  Sont  adjugés  : 

I.  A  François  Boccard  natif  de  la  commune  de  Cho- 
lex  :  1<>  la  maison  de  commune  cy  devant  cure  en  très 
mauvais  état,  avec  remise,  pressoir  et  jardin  ;  2<»  une 
grange  et  écurie  prêtes  à  tomber  avec  une  pièce  de  jar- 
din contenant  demy  fosserée,  appelée  Chez  de  Rivaz, 
procédé  du  cy-devant  Decostaz  Marquis  de  Beauregard 
sous  la  censé  annuelle  de  trente  et  un  francs. 

II.  A  Henri  Boccard,  natif  de  Messery,  une  pièce  de 
pré  marais  appelée  au  Raffor,  de  la  contenance  de  quatre 
seitorées  sous  la  censé  annuelle  de  103  francs. 

III.  A  Claude  Dalmy,  de  Nernier,  le  domaine  appelé 
de  Frize,  procédé  des  cy-devant  religieuses  visitandines 
de  Thonon  sous  la  censé  annuelle  de  quatorze  quintaux 
de  froment,  douze  quintaux  d'orge  et  quatre-vingts  li- 
vres monnaie  de  la  République. 

Pressée  par   le  besoin  d'argent,  et  l'incertitude  du 


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^  164- 

lendemaiD,  la  Conventioa  décréta  la  vente  des  bleue  nà-« 
tionaux.  La  famille  Michaud  en  retint  la  majeure  partie 
tant  à  Messery  qu'à  Nernier  ;  le  4  prairial  an  IV  de  la 
République,  ilous  trouvons  déjà  Jean-François  Michaud 
Installé  dans  sa  maison  de  Frise.  Les  frères  Michaud 
revendirent  vers  1803  tous  leurs  biens  de  Nernier  (en- 
viron 104  journaux  de  terre  avec  le  château)  à  M.  de 
Brotty  comte  d'Antioche,  et  vers  1811  toute  la  canapa- 
gne  de  Frise,  provenant  des  Visitandines  et  des  Costa, 
à  M.  Véret,  alors  sous-prefet  de  Nyon.  Le  château  de 
Frise  était  en  ruines  depuis  nombre  d'années  (1),  le  nou- 
veau propriétaire  le  fit  réédifler  dans  le  goût  de  l'époque, 
tel  qu'il  est  de  nos  jours. 

Etat  des  chemins  au  X  Vil  fi  siècle 

A  part  quelques  routes  importantes,  les  chemins  au 
XVIII«  siècle  se  trouvaient  dans  un  état  lamentable  ; 
c'étaient  pour  la  plupart  de  vrais  sentiers  à  mulets,  tra- 
versant torrents,  monts  et  vallées,  sans  aucun  ouvrage 
d'art. 

On  raconte  que  le  marquis  Costa  étant  venu  un  jour 
visiter  ses  terres  de  Messery,  son  caresse  s'embourba 
d'une  telle  façon  sur  la  route  de  Chens  qu'il  fallut  l'aide 
des  gens  du  village  pour  l'en  sortir. 

Un  procès  de  1789  nous  apprend  que  le  chemin  de 
Messery  à  Nernier,  appelé  la  vi  du  bugnon,  corrodé 
par  les  eaux,  était  devenu  impraticable  aux  voitures, 
voir  même  aux  piétons  ;  ceux-ci  pour  se  rendre  à  Ner- 
nier traçaient  des  sentiers  à  travers  les  prés  du  Mal- 

(1)  Le  château  de  Frise  est  porté  comme  étant  eu  ruines,  sur 
le  cadastre  de  1738. 


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—  165  — 

lard.  Henri  Pochât  étant  devenu  maire  en    1800  le  fit 
réparer. 

Par  suite  du  mauvais  état  des  routes,  le  commerce  de 
la  contrée  se  faisait  sur  le  lac  ;  la  batellerie  était  alors 
beaucoup  plus  importante  que  de  nos  jours.  Messery 
possédait  un  port  naturel  à  la  Pointe  ;  les  bois,  les  vins, 
les  blés  y  étaient  embarqués  ;  une  route  passable  y  con- 
duisait, elle  était  déjà  désignée  en  1540  sous  le  nom  de 
chemin  du  port  (1). 

Impôts  nouveaux 

Si  la  Révolution  avait  supprimé  la  dîme,  la  gabelle, 
les  droits  féodaux,  etc..,  elle  créa  par  contre  des  char- 
ges nouvelles,  telles  que  les  patentes,  les  réquisitions, 
rimpôt  des  portes  et  fenêtres,  la  conscription,  les  assi- 
gnats. 

La  patente.  —  C'était  un  impôt  prélevé  sur  les  indus- 
triels tenant  magasin  ;  cet  impôt  était  variable.  Les 
noms  des  patentés  de  Messery  à  cette  époque  nous  sont 
donnés  par  l'acte  suivant. 

Liste  des  citoyens  de  la  commune  de  Messery  qui  sont 
sujets  à  la  patente 

Jacques  Servage,  maître  cordonnier. 
Fabien  Boccard,  maître  cordonnier. 
Pierre   Duborgel    dit  Es  Veuves,  maréchal-ferrant, 
armurier. 

(1)  Voir  aux  documents  (Inventaire  Bernois)  ce  chemin  est  ap- 
pelé de  nos  jours,  ni  de  Tate  à  Meurry. 

Le  23  février  1787.  —  Claude  Duret  de  Messer}'  vend  la  coupe 
de  son  bois  du  Jetieu  à  Maurice  Duborgel  qui  promet  de  rendre 
soixante  moules  de  bois  et  quatre  milles  fascines  marchandes  à 
deux  liens  au  [)ortde  Messery  avant  le  mois  d'avril  1788.  (Archi- 
ves Etienne  Quiblier). 


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—  166  — 

François  Servage  qui  vend  son  vin  à  la  bouteille. 

Fait  à  Messery  l'an  VU  de  la  République  française  elle  1 1* 
jour  du  mois  de  Frimaire. 

Signé:  Maurice  Duborgel,  agent. 

Pierre  Duborgel  payait  comme  armurier  neuf  francs 
de  patente. 

Réquisifions.  —  Le  même  citoyen  quoique  marié  est 
réquisitionné  le  20  thermidor  an  II  pour  aller  travailler 
trois  mois  à  Carouge  dans  les  ateliers  militaires. 

Le  2  nivôse  an  III,  la  commune  de  Messery  devait 
fournir  une  certaine  quantité  de  froment  pour  approvi- 
sionner le  marché  de  Thonon  (1). 

Le  29  thermidor  an  VII,  la  même  commune  dut  trans- 
porter aux  magasins  militaires  de  Carouge  diverses 

marchandises  29  quintaux  de  paille,  etc C'était  en 

vue  derapprovisiounement  de  l'armée  d'Italie. 

La  Conscription.  —  La  France  assaillie  de  tous 
côtés,  dut  appeler  à  son  aide  tous  ses  fils  ;  la  levée  en 
masse  fut  décrétée;  bon  nombre  d'enfants  de  Messery 
furent  enrôlés  dans  les  armées  et  scélérent  de  leur  sang 
l'union  de  la  Savoie  à  la  France. 

Voici  les  noms  de  quelques-uns  de  ces  vaillants  : 

Philibert-Félix  Quiblier^  chirurgien  de  3®  classe  le 
l»»"  vendémiaire  an  VI,  cité  à  l'ordre  du  jour  de  l'armée 
d'Italie.  Chirurgien-major  au  1"  régiment  des  Chasseurs 
do  la  Garde,  attaché  au  service  de  Sa  Majesté  le  roi  de 

(1)  RÉQUISITION. 

Je  soussigné  déclare  avoir  reçu  delà  citoyenne  Duborgel  un 
quintal  et  cinq  livres  de  froment  à  compte  de  ce  que  doit 
la  commune  de  Messerier  pour  l'approvisionnement  du  mar- 
ché du  district  de  Thonon. 

Thonon  ce  2  nivôse  an  III  de  la  République  française. 

Signé  :  Bbrnaz. 


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—  167  — 

Naples  de  1807  à  1815.  (Voir  ses  états  de  services  aux 
documents). 

Vincent  Grillon^  tue  dans  les  dernières  guerres  de 
l'Empire.  François  Vuarnety  soldat  de  Tarmée  d'Italie 
mort  à  Vicence  des  suites  de  ses  blessures.  Jean-Louis 
Vuarnet,  frère  du  précédent,  soldat  de  Tarmée  d'Italie, 
mort  à  l'hôpital  militaire  de  Turin.  Augustin  Duchêne 
dit  de  Vigny ^  Claude  Dubor gel  di{  Rojon  et  Clément  Du- 
borgel  dit  Du  gui,  tous  trois  soldats  de  l'armée  d'Espagne, 
faits  prisonniers  à  Baylen,  restèrent  sept  années  captifs 
à  Cabrera,  une  des  îles  Baléares,  où  ils  endurèrent  toutes 
sortes  de  privations.  Georges  Quiblier  dit  Faisant  du 
Crety  qui  reçut  la  médaille  de  Sainte-Hélène.  Claude 
Servage  d'Essert,  Simon  Quiblier  dit  le  Baron,  etc. 

Les  hommes  mariés  étaient  exempts  de  service  mili- 
taire ;  cette  particularité  détermina  nombre  de  conscrits 
à  se  marier.  Il  en  résulta  des  familles  nombreuses  et  un 
accroissement  considérable  de  population.  Il  n'était  pas 
rare  alors  de  voir  des  familles  de  12,  13  et  14  enfants. 

Le  tableau  suivant  nous  donnera  une  idée  des  pro- 
grès énormes  de  la  population  au  commencement  du 
XIX«  siècle  (1). 


PAROISSES 

luit  17(1 

m: 

11(1 

11(1 

Messery    .     .     . 
Nernier     .     .     . 

297 
142 

483 

208 

676 
306 

606 
251 

Yvoire  .... 

243 

440 

387 

Cusy  (Chens).     . 

313 

589 

560 

(1)  Pour  le  recensement  de  1768,  voir  Visites  pastorales,  An- 
necy. Archives  deTEvèché. 

Pour  les  recensements  de  1802  et  1848,  voir  Dessaix,  Savoie 
historique,  page  435. 

Pour  le  recensement  de  1861,  voir  Annuaire  de  la  Haute- 
Savoie, 


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—  168  — 

Chute  de  TEmpire.  —  Passage  des  Autrichiens 
Séjour  de  Lamartine  à  Nernier 

Le  2  janvier  1814  les  Autrichiens  firent  à  Thonon 
leurs  premières  réquisitions;  une  de  leurs  colonnes 
passa  de  nuit  au  village  d'Essert  et  alla  camper  à  Ner- 
nier où  elle  resta  une  quinzaine  de  jours.  Ils  se  montrè- 
rent bons  et  disciplinés  (l)  et  opérèrent  quelques  réqui- 
sitions dans  la  contrée.  Le  15  avril  1814,  le  maire  de 
Messery,  Henri  Pochât,  dut  réquisitionner  trois  setiers 
d'eau-de-vie  (162  litres),  cinquante  quintaux  de  froment, 
trente-deux  quintaux  de  foin,  trente  setiers  de  vin.  Le 
23  avril  la  commune  de  Messery  dut  encore  livrer  dix 
quintaux  de  froment,  quatre  setiers  et  seize  quarterons 
de  vin  rouge  (2),  etc. 

En  août  1814,  la  commune  de  Messery  fut  encore  frap- 
pée d*une  contribution  do  guerre  de  150  francs  et  de 
diverses  autres  réquisitions,  mais  elles  furent  plus  tard 
intégralement  remboursées  grâce  à.  la  rançon  de  la 
France  qui  dut  livrer  un  milliard  aux  alliés.  Nous 
voyons  en  effet  qu'en  avril  1821  le  percepteur  Duchône, 
de  Nernier,  versait  à  Maurice  Duborgel  dit  Es  Veuves  la 
somme  de  78  francs  pour  sa  part  do  remboursement  des 
contributions  autrichiennes  (3). 

Pendant  les  Cent  jours,  Lamartine,  le  grand  poëte, 
avait  quitté  la  France  et  s'était  misa  parcourir  la  Suisse; 
il  vint  à  Nyon,  puis  à  Nernier  où  il  résida  quelque  temps 
(4)  ;  il  prenait  pension  chez  un  nommé  Favre  qui  trans- 

(1)  Communiqué  par  M.  JeanGindre,  de  Nernier. 
{2)  Le  quarteron  valait  2  pots  ;  il  y  avait  24  quarterons  dans  le 
setier  de  51  litres.  Le  quintal  du  pays  vaut  50  kilogs. 

(3)  Archives  Etienne  Quiblier  (Essert). 

(4)  Piccard.  if îs^otr^  du  Chablais.  Vol.  H. 


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—  169  — 

portait  les  voyageurs  à  Nyonavec  son  bateau  ;  ses  repas 
se  composaient d'œufset  de  laitage  que  luiapprôtait  Gene- 
viève, la  fille  du  batelier.  Comme  Ton  était  à  l'époque 
des  travaux,  peu  de  monde  restait  au  village  durant  la 
journée  ;  M.  de  Lamartine,  accompagné  des  enfants  du 
voisinage,  aimait  à  parcourir  nos  vieux  chemins  om- 
breux. Sa  promenade  favorite  était  le  moulin  de  Mercu- 
biodont  les  ruines  se  dressent  encore  entre  Nernier  et 
Yvoire(l).  Mais  Waterloo  et  la  chute  de  l'Empire  vin' 
rent  interrompre  ses  rêveries  et  M.  de  Lamartine  reprit 
le  chemin  de  la  France. 

Le  grand  poète  dans  ses  Souvenir^s  de  jeunesse  édités 
en  1846,  parle  ainsi  de  son  séjour  parmi  nous  :  «..Apres 
«  trois  semaines  de  cette  vie  errante,  je  revins  au  bord 
«  du  lac  de  Genève  et  je  m'arrêtai  dans  la  partie  de  la 
«  côte  qui  fait  face  au  pays  de  Vaud  et  que  Jean-Jacques 
«  Rousseau  a  si  justement  préférée  au  reste  de  ses  bords. 
«  Je  me  mis  en  pension,  pour  quelques  sous  par  jour, 
«  chez  un  batelier  du  Chablais,  dont  la  maison  isolée 
«  tenait  à  un  petit  village.  Le  métier  de  cet  homme 
«  était  de  passer,  une  ou  deux  fois  par  semaine, 
«  les  paysans  d'une  rive  à  l'autre,  de  pêcher  dans  le  lac 
4c  et  de  cultiver  un  peu  de  champs.  Il  avait  pour  toute 
4c  famille  une  fille  de  25  ans  qui  tenait  son  ménage... etc..  > 

Restauration 

1815-1821.  —  F^^ançois  Quiblier,  syndic.  Les  Autri- 
chiens ramenaient  avec  eux  la  famille  de  Savoie  et 
l'ancien  régime  ;  les  nouvelles  réformes  furent  abolies  et 
l'on  en  revint  aux  lois  d'avant  1792.  Le  maire  fut  rem- 

(1)  Communiqué  par  Jean  Gindre,  de  Nernier. 


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—  170  — 

placé  par  le  syndic  ;  le  juge  mage  et  le  procureur  fiscal 
furent  rétablis.  Sur  ces  entrefaites  la  famine  désola  le 
pays.  En  1816,  des  pluies  continuelles  avaient  retardé 
considérablement  la  récolte  :  «  on  ne  moissonna  les  seigles 
«  et  froments  qu'au  mois  d'août,  les  orges  et  vesces 
«  (pesettes)  qu'au  mois  d'octobre  ;  les  vendanges  n'eu- 
«  rent  lieu  qu'après  la  S*-Martin  (1 1  novembre),  et  pour 
«  avoir  lo  peu  de  jus  qu'il  y  avait  il  fallut  piler  les  rai- 
«  sins  sous  la  meule.  Le  vin  rouge  qui  avait  gelé  se 
«  vendit  néanmoins  au  marché  de  Genève  24  francs  de 
«  France  soit  un  louis  >  (1).  Aussi  pendant  l'hiver  et  le 
printemps  de  1817  la  disette  sévit-elle  dans  le  pays. 

Dans  presque  toutes  les  maisons  de  nos  villages  on 
faisait  la  soupe  aux  horties  sans  beurre  et  sans  sel  ;  la 
coupe  de  blé  se  vendit  100  francs  (elle  vaut  8  fr.  de  nos 
jours)  ;  plusieurs  familles  vendirent  leurs  terres  pour 
acheter  du  pain.  La  famille  Veret  de  Frize  se  distingua 
par  sa  charité  ;  elle  vint  en  aide  aux  pauvres  par  des 
distributions  de  soupe  et  par  de  grands  travaux  entre- 
pris dans  sa  campagne  (défrichement  des  bois  de  la 
Chaux,  23  journaux  ;  captage  d'une  source  entre  Frize 
et  le  Cret).  Les  habitants  des  villages  voisins  venaient 
y  travailler  pour  leur  nourriture.  A  la  mort  de  M.  Veret 
survenue  en  1835,  la  campagne  do  Frize  fut  vendue  à 
divers  habitants  de  la  localité. 

1821-1824.  —  Pochât  Henri,  syndic  de  Messery. 
Déjà  maire  durant  la  Révolution  et  l'Empire,  il  est 
nommé  syndic  le  21  février  1821.  Claude-Louis  Piccut, 
notaire  à  Massongy,  est  secrétaire  communal.  Dès  le 

(1)  Mémoires  du  maire  Henri  Pochât.  Archives  Théodore  Du- 
borgel. 


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—  171  — 

mois  de  mai  1821,  dos  réparations  sont  faites  à  l'église; 
Tannée  suivante  on  élève  les  murs  du  cimetière.  A  cette 
époque,  la  route  de  Messery  à  Genève  passait  encore 
dans  le  lit  du  torrent  de  Savonnex  ;  sur  Tiniliative  du 
syndic,  un  pont  y  fut  élevé  par  prestations  volontaires  : 
il  fallut  910  charriotsde  terre  pour  les  remblais;  les 
habitants  d'Essert  ne  prirent  pas  part  à  ce  travail  (1). 

1824-1836.  —  Duhorgel  Pierre,  syndic.  En  1825  le 
Conseil  vote  un  subside  de  400  francs  pour  le  pont  d'Ecu- 
chcfattc.  Les  années  suivantes  il  entre  en  procès  avec 
les  frères  Duret  au  sujet  de  places  communales,  puis 
avec  la  famille  Costa  de  Boauregard  au  sujet  des  bois 
de  Partays.  De  1830  à  183G,  le  budget  communal  se 
solde  chaque  année  par  des  excédents  de  recettes  va- 
riant entre  900  et  1450  livres.  Les  biens  communaux 
loués  pour  la  première  fois  en  octobre  1834  donnent 
un  revenu  de  397  francs.  Ces  diflTérentes  sommes  per- 
mettent à  la  municipalité  de  commencer  la  recons- 
truction du  presbytère. 

1837-1846.  —  Basile  Boccard,  syndic.  Les  années 
1837  et  1838  sont  consacrées  aux  travaux  du  presbytère 
et  celles  de  1840  à  1846  à  la  construction  de  l'église  et 
du  clocher.  (Emprunt  de  9 100  francs). 

1846-1852.  —  Boccard  Janvier  syndic.  En  1846,  le 
Conseil  vote  140  francs  pour  le  traitement  du  clerc  ou 
sacristain,  en  remplacement  des  quêtes  qu'il  fait  chaque 
année  pour  son  salaire  et  de  différents  droits  qu'il  pré- 
lève pour  les  ensevelissements  et  en  allant  porter  l'eau 
bénite  à  chacun  (sic)  (2). 

(1)  Mémoires  du  maire  Pochât.  Archives  Théodore  Duborgel. 

(2)  Archives  municipales.  Budgets  communaux  de  1821  à  uos 
jours. 


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—  172  — 

En  1848,  à  la  suite  des  idées  émancipatrices  qui  se- 
couaient l'Europe,  le  roi  de  Sardaigne  signa  la  constitu- 
tion du  8  février,  deux  arbres  de  la  Liberté  furent  plan- 
tés, Tun  sur  la  place  communale  à  Messery,  l'autre  à 
Essert  ;  cette  cérémonie  donna  lieu  à  quelques  réjouis- 
sances, des  setiers  de  vin  furent  servis  sur  les  places. 
La  garde  nationale  fut  instituée  dans  chaque  village, 
l'élection  des  chefs  eut  lieu  à  Messery  sur  la  place  com- 
munale, sous  le  maronnier.  Alexandre  Duborgel  dit 
Dagui  fut  nommé  capitaine. 

1852-1860.  —  Etienne  Servage  dit  Mastrec,  syndic. 
Dès  1854,  le  nouveau  syndic  reprend  le  procès  des  bois 
de  Partays  ;  de  1857  à  1860  il  procède  à  la  réfection  de 
la  route  de  Messery  à  Conches. 

Annexion  à  la  France 

1860-1870.  — Etienne  Servage  mairie. 

A  la  suite  de  la  campagne  d'Italie  (1)  le  Piémont  cé- 
dait à  la  France  la  Savoie  et  le  comté  de  Nice;  nos 
populations  accueillirent  ce  traité  avec  satisfaction. 
Depuis  le  traité  de  Lyon  sous  Henri  IV,  la  politique  du 
Piémont  s'était  tournée  du  côté  de  l'Italie  ;  la  Savoie 
abandonnée,  sans  voies  de  communication,  sans  com- 
merce, accablée  d'impôts,  était  enserrée  d'une  ligne  de 
douanes  qui  l'étouffait. 

Tous  nos  villages  avaient  leurs  brigades  de  douaniers  ; 

un  poste  était  établi  à  Nernier,  un  autre  à  la  Pointe  de 

Messery. 

(1)  ATissue  delà  campagne  de  1859:  «  2  enfants  de  Messery, 
par  suite  de  leur  bonne  conduite  et  de  leur  valeur,  furent  au  nom 
de  l'empereur,  décorés  de  la  médaille  militaire  française  :  c'é- 
taient Maurice  Vuarnet,  sergent-major  au  2®  régiment  de  la  bri- 
gade de  Savoie,  âgé  de  23  ans,  et  Joseph  Duborgel  dit  Es  Veuves, 
maréchal  des  logis  au  Royal  Artillerie,  âgé  de  25  ans,  » 


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-.  173  — 

L'annexion  à  la  France  changea  cet  état  de  choses. 
Le  traité  avec  le  Piémont  avait  été  signé  le  1 1  juin 
1860.  Le  31  août  Tempereur  venait  à  Thonon  où  il  fut 
acclamé;  les  ports  de  Thonon,  d'Evian  et  de  Nernier 
furent  aussitôt  décrétés  et  une  brigade  de  gendarmerie 
fut  placée  dans  ce  dernier  village.  (Elle  y  resta  jusqu'en 
1870). 

Une  zone  franche  fut  créée  dans  la  Savoie  du  Nord  afin 
de  faciliter  le  commerce  du  pays  avec  le  marché  de  Ge- 
nève ;  à  la  suite  de  cette  convention  les  douanes  furent 
enlevées  de  la  ligne  du  lac  et  reportées  à  30  kilomètres 
en  arrière. 

Les  bois  de  Partays.  —  Perte  du  procès 

Des  procès  interminables  ruinaient  les  familles  ;  le 
gouvernement  français  décida  que  tous  ces  procès  de- 
vraient être  terminés  avant  cinq  ans. 

La  commune  de  Messery  plaidait  depuis  plus  de  cent 
ans  avec  la  famille  Costa  de  Beauregard,  au  sujet  do 
bois  communaux  lieux  dits  en  Partays,  situés  sur  les 
confins  de  Chens  et  de  Messery. 

Le  3  juin  1793,  les  officiers  municipaux  de  Messery 
soutenaient  :  1^  que  dès  la  publication  du  cadastre  de 
1738,  le  berger  commun  de  la  paroisse  avait  chaque 
année  mené  paître  les  bestiaux  de  chaque  particulier 
dans  ces  bois  ;  2°  que  tous  les  habitants  de  la  paroisse 
qui  le  voulaient  allaient  y  couper  du  bois  pour  leur 
usage  (1). 

Le  procès  se  continua  sous  les  syndics  Pochât  et 
Pierre  Duborgel  ;  suspendu  on  1836  à  cause  des  travaux 
de  l'église,  il  fut  repris  en  1854  par  le  syndic  Servage. 

(1)  Archives  Quiblier  Etienne,  Essert. 


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-  174  — 

De  1854  à  1859,  les  dépenses  du  procès  varièrent  anhuel- 
it  de  150  à  600  fr.;  mais  le  syndic  ne  s'en  occupait 
5  et  en  1865  le  tribunal  de  Chambéry  déboutait  la 
lune  qui  eut  à  payer  plus  de  six  mille  francs  de 
de  procédure. 

Affaire  de  Marsille 

rsille  est  une  fontaine  qui  jaillit  sur  le  flanc  du 
u  sur  lequel  s'élève  le  village  d'Essert  ;  de  temps 
morial  les  habitants  de  ce  hameau  allaient  y  pui- 
)ur  leurs  besoins  domestiques. 

1865,  le  comte  d'Antioche,  comme  propriétaire  du 
n,  s'avisa  de  capter  la  source  pour  la  conduire  à 
làteau.  Le  maire  de  Messery,  Servage,  lui  en  donna 
)  l'autorisation.  La  population  d'Essert  en  fut 
•érée.  Le  25  septembre  1865,  à  l'heure  de  midi, 
les  hommes  du  village  au  nombre  de  67,  armés  de 
;  et  de  pioches  arrivèrent  à  la  fontaine  et  détrui- 
,  la  maçonnerie  qui  la  couvrait.  La  brigade  de 
irmerie  de  Nernier  arrivant,  les  hommes  d'Essert 
!irent  tous  :  «  Nous  venons  défendre  nos  droits  !  !  » 
)cès-verbal  fut  donc  dressé  contre  les  assaillants, 
l'affaire  en  reste  là,  et  depuis  comme  avant  les 
ints  d'Essert  ont  continué  à  venir  à  la  fontaine. 

0-1877.  — Duret  Joseph^  maire.  Pendant  lamal- 
use  guerre  de  1870-71 ,  la  Savoie  comme  toutes  les 
5  provinces  de  la  France  répondit  à  l'appel  de  la 
I,  elle  mit  sur  pied  33.000  hommes,  dont  23.500 
isés.  Nos  trois  bataillons  de  mobiles  formant  le 
I  marche  ne  quittèrent  pas  le  rayon  de  la  place  de 
-es.  Deux  enfanta  de  Messery  tombèrent  au  champ 


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-  m  - 

d*hontieur,  Duchêoe  Jules  dit  Calli,  tué  à  Champigny 
près  Paris,  et  Duchene  Jean  dit  Béné,  tué  sous  Metz. 

Comme  travaux  durant  la  gestion  du  maire  Duret, 
nous  devons  signaler  l'horloge  publique  (1873),  Torne- 
mentation  intérieure  de  Téglise,  la  roule  d'Essert  aux 
Braccots,  la  route  de  Chens  aux  Repingons  et  le  nou- 
veau pont  de  Savonnex. 

1877-1900.  —  Duborgel  Gabriel,  dit  Do  gui,  maire. 
Par  suite  des  subsides  importants  qu'accordait  alors  le 
gouvernement  de  la  République,  de  grands  travaux  sont 
entrepris  parla  municipalité.  C'est  d'abord  en  18801a 
construction  de  la  mairie  avec  salles  d'écoles  (22.000  fr.) 
et  la  réfection  de  la  route  des  Repingons  à  la  frontière 
d'Y  voire  qui  transforme  le  village  de  Messery.  (L'an- 
cienne route  passait  par  la  Plantô  et  le  Sarzieu  pour  re- 
descendre aux  Repingons). 

A  la  suite  de  cette  rectification,  la  translation  de  la 
croix  du  Sarzieu  à  la  croisée  des  Repingons  donne  lieu 
à  une  imposante  cérémonie  religieuse. 

En  1884,  c'est  la  création  de  la  route  de  Messery  à 
Dou vaine  (longueur  5  kilomètres),  le  puits  communal, 
place  de  la  Mairie  ;  en  1888,  la  création  du  nouveau  ci- 
metière (5.200  fr.)  ;  en  1891  l'achat  de  la  pompe  à  in- 
cendie, la  route  de  Messery  à  Essert  et  à  la  frontière 
d'Excénevex  ;  en  1895  la  route  de  Messery  à  la  Pointe 
avec  quai;  en  1897  le  pont  des  Granges;  en  1898  la 
route  d'Essert  àChevilly  (1). 

Ces  travaux  se  complétaient  à  Nernier  par  la  création 

(1)  Tous  ces  travaux  ne  se  sont  pas  faits  sans  de  nouveaux  im- 
pôts. Le  total  des  recettes  communales  de  Messery  qui  était  de 
2008  francs  en  1839  montait  à  6497  francs  en  1893,  et  la  dette 
s'élevait  à  cette  époque  à  39.870  fr. 


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—  176  - 

d*un  quai,  d'un  bureau  de  postes  et  télégraphes  (1891) 
et  d'un  œurrier  faisant  journellement  le  service  des  voya- 
geurs et  des  colis  postaux  entre  Nernier,  Messery  et 
Douvaine. 

Depuis  plusieurs  années  des  démarches  actives  ont 
été  faites  par  la  population  à  Toffet  d'obtenir  la  création 
d'un  débarcadère  sous  le  village  de  Messery.  Deux  sous- 
criptions ouvertes  à  ce  sujet  en  1888  et  en  1897  ont 
produit  près  de  5.000  fr.  Déjà  plusieurs  villas  se  sont 
élevées  dans  notre  commune,  la  création  du  débarcadère 
ne  ferait  qu'augmenter  leur  nombre  et  par  suite  l'im- 
portance de  la  localité. 


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—  177  — 


CHAPITRE  IX 


ŒUVRES  DIVERSES 


Ecoles 


A  répoque  romaiDO  rinstruction  était  assez  répandue, 
môme  dans  les  campagnes;  le  colon  qui  perdit  sou 
styleàCommugny(Excùnovcx),  les  inscriptions  trouvées 
à  Nernier,  Messery  et  Douvaine,  en  sont  la  preuve.  Mais 
rinvasion  des  Barbares  arrêta  cette  civilisation  dans  son 
essor,  et  la  nuit  se  fît  dans  notre  pays.  Seuls  les  moines 
conservèrent  dans  les  abbayes  les  débris  des  lettres  et 
des  arts. 

Au  moyen-àge,  dans  presque  tous  nos  villages,  exis- 
taient ordinairement  un  ou  plusieurs  notaires  publics 
exerçant  souvent  de  pore  en  fils;  tels  étaient  : 

A  Douvaine,  Hugo  Rycheis  en  1368;  la  famille  de 
Exerto  en  148G;  à  Nernier,  Quisard,  en  1560-1562;  à 
Essert,  Pierre  Joly  en  1451  ;  à  Massongy,  Pierre  Qui- 
sard en  1492;  à  Messery,  Maître  Pierre  Duborgel  en 
1527,  Maître  Bernard  Duret  en  1595,  les  Arpin  en  1670 
et  1715;  à  Verêtre,  les  Duret  en  1680,  les  Lemasson  en 

1740,  à  Y  voire,    les  Novel,    les  Thorens,   etc Au 

XVI®  siècle  les  Bernois  établirent  des  écoles  dans  leurs 
bai  liages  de  Savoie  ;  il  nous  est  parvenu  quelques  actes 
et  reconnaissances  de  cette  époque,  signés  de  noms  de 

i5b 


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fanliiles  dfe  la  localité,  tels  que  :  Boccard,   Duborgel, 
Quisard,  etc.,  (1). 

Oepeudant  avant  la  Révolution,  les  familles  aisées 
pouvaient  seules  faire  donner  une  bonne  instruction  à 
leurs  enfants.  Ainsi  en  1753,  Bernard  Duborgel  dit  Es 
Veuves  de  Messery,  met  son  flls  en  pension  chc^z 
Révérend  Louis  Echernyer,  curé  de  Machilly,  à  raison 
de  I2écus  patagons  et  sept  coupes  de  blé  par  année  (2). 

Dans  quelques  paroisses,  les  vicaires  devenaient  insti- 
tuteurs, mais  d'une  manière  générale,  aux  XVII«  et 
XVIII®  siècles,  la  plus  grande  partie  de  la  population  était 
illettrée.  La  Révolution  bouleversa  l'ancien  ordre  de 
choses,  mais  elle  opéra  aussi  quelques  réformes.  En  1802, 
nous  trouvons  un  certain  Benoit  Mazaut,  instituteur  à 
Messery,  il  signe  comme  témoin  sur  un  acte  du  9  bru- 
maire an  X  (3);  mais  les  guerres  et  les  invasions  vinrent 
sans  doute  contrarier  cette  institution  naissante. 

La  paix  revenue,  le  besoin  d'instruction  se  faisait  de 
plus  en  plus  sentir. 

De  1815  à  1848,  des  demoiselles  du  village  faisaient 
la  classe  moyennant  une  légère  rétribution  allouée  par 
les  parents.  Vers  1848,  une  demoiselle  Challande  ouvrait 
à  Frize  une  école  payante.  Mais  le  gouvernement  sarde 
voyait,  paraît-il,  de  mauvais  œil  l'instruction  se  répandre 
parmi  le  peuple,  et  pendant  plusieurs  années  le  crédit 
voté  par  le  Conseil  municipal  pour  le  traitement  de 
deux  maîtresses  d'écoles  fut  rejeté,  il  ne  fut  agréé  qu'en 
1853  (4). 

(1)  Archives  Vuarnet. 

(2)  Archives  Etienne  Quiblier. 

(3)  Archives  Théodore  Duborgel. 

(4)  Archives  delà  Mairie.  Budgets  communaux. 


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—  179  — 

Entre  temps  les  garçons  de  nos  villages  fréquentaient 
les  écoles  de  frères,  ouvertes  à  Nernier  par  Tabbô  Favre. 
Enfin  après  l'annexion,  le  gouvernement  français  plaçait 
à  Messery  un  instituteur  à  titre  définitif  ;  le  poste  fut 
confié  à  M.  AUamand,  originaire  du  Faucigny  (1). 

Mais  il  n'y  avait  pas  encore  d'écoles  de  hameau.  En 
1864,  un  généreux  bienfaiteur.  Monsieur  Melchior  Qai- 
blier,  ancien  banquier,  soit  capitaine  trésorier  dos 
douanes  et  gabelles  piémontaises,  léguait  à  la  commune 
une  rente  de  400  francs,  nécessaire  à  l'entretien  d'une 
institutrice  au  village  d'Essert.  Enfin  en  1887,  s'élevait 
l'école  libre  des  religieuses  de  SWoseph  dont  nous 
avons  parlé  au  chapitre  VI. 

Bureau  de  Bienfaisance 

Avant  la  Révolution,  l'abbaye  de  Filly  allouait  aux 
pauvres  de  Messery  et  de  Nernier  une  aumône  annuelle 
de  44  coupes  de  froment.  Il  y  avait  aussi  la  Confrérie 
du  Saint-Esprit  qui  s'occupait  spécialement  des  pauvres, 
mais  les  malheurs  des  temps  firent  disparaître  ces  ins- 
titutions. 

En  1816,  Révérend  Etienne  Duborgel,  curé  d'Yvoire, 
léguait  la  somme  de  400  fr.  à  distribuer  aux  pauvres 
de  Messery. 

En  1830,  un  pauvre  domestique  de  campagne,  appelé 
Radollet,  mourait  à  Frise,  léguant  à  la  commune  tous 
ses  avoirs,  soit  cinq  cents  francs,  à  condition  que  les 
intérêts  seraient  partagés  chaque  année  entre  les  pau- 
vres delà  commune.  Cette  somme  produit  la  rente  an- 

(1)  Il  eut  pour  successeurs  :  MM.  Rey,  originaire  de  Seytroux  ; 
Séchaud,  natif  de  Brentlionne  ;  Châppaz,  des  environs  d'An- 
necy; Mauroz,  de  Mieussy,  instituteur  actuel. 


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—  180  — 

huelie  de  27  francs,  c'est  encore  de  nos  jours  le  seul  re- 
venu du  bureau  de  bienfaisance. 

Société  de  Sapeurs-Pompiers 

Pompe  d'Esseri.  —  Une  souscription  ayant  pour  but 
rachat  d'une  pompe  à  incendie  fut  ouverte  dans  le  vil- 
lage d'Essort  en  novembre  1864  ;  chaque  ftimille  s'imposa 
suivant  ses  ressources;  la  souscription  atteignit  2,400  fr. 
et  18  setiers  de  vin.  La  pompe  construite  à  Nyon  fut 
reçue  à  Essert  le  jour  de  la  S*-Pierre  1865  ;  Quiblier  Au- 
guste dit  Jacqueminon  fut  nommé  capitaine. 

Pompe  de  Messery,  —  Un  généreux  bienfaiteur, 
Pierre  Duborgel  dit  Rojon,  avait  légué  en  1867,  mille  fr. 
à  la  commune  pour  l'achat  d'une  pompe  ;  cette  somme 
avec  SCS  intérêts  servit  à  l'acquisition  en  1891  de  la 
pompe  du  village  de  Messery,  commandée  à  Besançoa 
pour  le  prix  de  3,200  francs.  Une  Compagnie  de  sapeurs- 
pompiers  fut  formée  à  cette  époque;  elle  comptait  73 
pompiers,  dont  43  pour  la  section  de  Messery  et  30  pour 
celle  d'Essert.  M.  Daborgel  Emile  on  devint  le  capitaine. 
La  Compagnie  a  été  équipée  en  1892  ;  l'année  suivante, 
à  la  suite  d'une  souscription  elle  recevait  un  superbe 
drapeau  en  soie,  commandé  à  Lyon.  En  1895,  chaque 
membre  de  la  Compagnie  recevait  un  diplôme  repré- 
sentant la  pompe  et  l'église  du  village,  don  de  M.  Cha- 
puis,  lithographe  à  Lausanne.  ^ 

Société  de  Secours  Mutuels 

Le  1er  janvier  1877,  une  Société  de  Secours  Mutuels 
était  fondée  à  Messery  sous  le  nom  A' Enfants  du  Lé- 
man, pour  les  communes  d'Excénevex,  Yvoire,  Nernier, 


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—  181  — 

Messory  et  Chens  (1).  Elle  compte  actuellement  88 
membres,  et  a  pour  président  M.  Quiblier  Alexandre, 
cafetier  à  Essert.  La  société  a  en  fonds  2,800  francs, 
ses  membres  paient  une  cotisation  annuelle  de  12  francs, 
moyennant  quoi,  ils  ont  droit  gratuitement  aux  visites 
du  médecin,  aux  médicaments  et  à  une  indemnité  jour- 
nalière durant  leurs  maladies. 

Industries  diverses 

Notre  territoire  loin  des  grands  centres  industriels, 
sans  cours  d'eaux  importants,  contrarié  de  plus  par 
une  ligne  de  douanes  à  la  frontière  suisse,  se  trouve  dans 
des  conditions  tout  à  fait  défavorables  à  l'établissement 
d'industries.  Il  n'existe  de  nos  jours  qu'une  petite  tan- 
nerie à  Nernier  et  une  tuilerie  à  Yvoire;  cette  dernière 
appartient  à  M.  Nékati,  directeur  de  la  tuilerie  de  Ver- 
soix  ;  la  tuilerie  d'Yvoire  travaille  principalement  pour 
la  Suisse.  Mais  il  n'en  était  pas  de  même  autrefois  où 
chaque  seigneur  jaloux  de  ses  prérogatives  avait  ses  fa- 
briques particulières,  moulins,  tuileries,  scieries,  etc 

Yvoire  possédait  déjà  au  XVP  siècle  une  tuilerie  située 
au  bord  du  lac,  elle  est  notée  dans  la  reconnaissance 
passée  en  faveur  de  noble  de  S*-Jeoire,  seigneur  d'Yvoire, 
le  23  février  1544(2). 

Un  champ  près  des  Crêtes  à  Excénevex  ;  un  autre 
près  du  ruisseau  de  Mercubio  à  Nernier  ;  un  bois  proche 
le  Vion  à  Messery,  s'appellent  encore  les  tuilières.  Mais 
la  plus  renommée  de  toutes  était  la  tuilerie  des  Bois, 

(1)  Elle  avait  été  approuvée  par  décision  préfectorale  du  20  oc- 
tobre 1876. 

(2)  Sommaire  des  fiefs.  Archives  départementales. 


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—  182  — 

proche  Ecérézi  qui  dépendait  de  Tabbaye  de  Fiily,  et 
dont  les  produits  s'exportaient  au  loin. 

En  1452,  noble  Etienne  Frédéric,  faisant  réparer  son 
château  de  Ferney,  l'entrepreneur  de  la  toiture  déclare 
qu'il  a  employé  une  première  fois  12.000  tuiles  plates 
(tiolla)  au  prix  de  4  florins  le  mille,  achetées  à  des 
hommes  do  Filly  (1);  cette  tuilerie  qui  existe  encore 
appartient  à  M.  Bartholoni,  elle  a  cessé  de  fonctionner 
depuis  quelques  années. 

Cette  abondance  de  tuileries  anciennes,  provient  de 
ce  que  le  sous-sol  du  pays,  formé  de  boues  glaciaires, 
renferme  des  argiles  très  variées. 

Un  gisement  de  terre  grasse,  excellente  pour  la  pote- 
rie, existe  au  bas  du  bois  de  Fécler,  elle  s'exportait  il  y 
a  7  ou  8  ans  à  la  poterie  de  Nyon,  cette  terre  est  ré- 
fractaire,  il  en  existe  d'autres  gisements  en  divers 
points  du  territoire  de  Messery. 

Une  source  d'eau  minérale  (gazeuse  et  ferrugineuse) 
coule  au-dessous  de  Messery  au  lieu  dit  Salins. 

Sociétés  de  Fromagerie  ou  Fruitières 

La  fabrication  du  fromage  façon  gruyère  ne  date  à 
Messery  que  du  commencement  du  siècle.  Auparavant 
chaque  famille  travaillait  son  lait  dans  sa  maison  et  fa- 
briquait un  fromage  blanc  appelé  tome. 

En  1811,  M.  Antoine-Henri  Veret,  natif  de  Nyon, 
établissait  dans  son  domaine  de  Frise  une  fromagerie 
soit  fruitière  sur  le  modèle  de  celles  de  la  Suisse. 

Le  31  janvier  1818,  les  frères  Duret  et  plusieurs  au- 

(1)  Acad.  Chahl.y  vol.^  I,  page  47,  le  florin  de  Savoie  à  cette 
époque  représentait  environ  la  valeur  de  12  francs  de  notre 
monnaie. 


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—  183  — 

très  particuliers  de  Messery  achetaient,  de  la  famille 
Veret,  ses  ustensiles  et  meubles  propres  à  fabriquer  le 
beurre,  fromage  et  sérac  pour  le  prix  de  480  livres.  — 
Le  premier  local  fut  choisi  chez  les  frères  Duret.  En 
1837  la  société  de  Messery  put  enfin  édifier  la  fruitière 
actuelle  à  côté  de  la  place  communale. 

Essert  se  sépara  alors  et  forma  une  fruitière  distincte  ; 
après  avoir  occupé  divers  locaux,  la  société  d'Essert 
fit  ériger  en  1880  au  lieu  dit  la  petite  Tate,  la  fruitière 
actuelle. 

En  1895,  la  société  de  Messery  cessa  de  fabriquer  et 
vendit  son  lait  ;  le  prix  de  vente  varie  chaque  année  ; 
il  était  de  0,13  centimes  le  litre  en  1895,  0,11  centimes 
en  189G,  0,10  c.  1/2  en  1897  et  0,11  c.  1/2  en  1898. 

Le  total  du  lait  pour  la  fruitière  de  Messery  (année 
1896)  était  de  99,071  litres,  soit  un  revenu  de  plus 
de  10,000  francs. 

La  société  d'Essert  est  d'environ  un  tiers  plus  faible 
que  celle  de  Messery  ;  elle  continue  de  fabriquer. 
Agriculture 

L'agriculture  a  subi  une  crise  intense  depuis  la  cons- 
truction des  chemins  de  fer  ;  les  blés  qui  se  vendaient 
18  francs  la  coupe,  mesure  de  Thonon,  avant  1870,  ne 
valent  plus  que  8  fr. ,  alors  que  le  prix  de  la  main-d'œuvre 
a  doublé.  Il  s'en  est  suivi  que  la  culture  du  blé  a  été 
abandonnée  à  un  tel  point  que  la  commune  de  Messery 
qui  exportait  annuellement  depuis  des  siècles,  une 
grande  quantité  de  cette  céréale,  en  est  réduite  de  nos 
jours  à  la  faire  venir  en  partie  de  l'étranger. 

Les  cultivateurs  se  sont  adonné  à  l'élevage  du  bétail 
et  principalement  à  la  culture  de  la  vigne.  Mais  les 


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—  184  — 

maladies  de  ce  précieux  arbuste  n'ont  pas  tardé  à  faire 
leur  apparition  ;  le  mildew  ou  maladie  des  feuilles  est 
survenu  en  1888,  le  phylloxéra  en  1891,  ce  dernier  est 
heureusement  resté  stationnairo  depuis  cette  époque. 

Le  commerce  des  bois  de  chauffage  est  également 
tombé  par  suite  de  l'emploi  toujours  croissant  du  char- 
bon de  terre  ;  il  en  est  de  môme  des  écorces  de  chêne 
qui,  dans  le  tannage,  sont  de  plus  en  plus  remplacées 
par  divers  ingrédients  chimiques. 

La  culture  du  chanvre  et  par  suite  la  fabrication 
de  la  toile  de  ménage,  sont  également  tombées  devant 
le  bon  marché  des  toiles  de  magasin. 

Le  bas  prix  du  pétrole  a  fait  abandonner  Tusage  de 
rhuile  de  noix  et  les  gigantesques  noyers  qui  ombra- 
geaient nos  champs  ont  presque  tous  disparu. 

Cependant  Tagriculture  a  fait  d'immenses  progrés 
depuis  quarante  ans  ;  les  outils  agricoles  se  sont  per- 
fectionnés, les  terres  sont  mieux  travaillées,  nos  vignes 
peuvent  rivaliser  aujourd'hui  avec  celles  de  nos  voisins 
de  la  Suisse,  pour  le  rendement  et  la  bonne  tenue. 

Mais  d'un  autre  côté  la  vertu  diminue,  les  habitu- 
des d'ordre  et  d'économie  ont  presque  disparu,  un  cer- 
tain luxe  a  envahi  la  jeunesse  et  les  habitudes  d'intem- 
pérance et  d'inconduite  se  propagent  dans  la  classe 
ouvrière  d'une  manière  effroyable. 

Le  service  militaire  obligatoire  détourne  la  jeunesse 
du  travail  de  la  terre  ;  le  jeune  homme  à  son  retour  du 
régiment  méprise  la  maison  de  son  vieux  père  et  n'as- 
pire plus  qu'après  un  emploi  quelconque. 

Ainsi  s'en  va  la  famille,  ainsi  diminue  cette  popula- 


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—  185  — 

tiou  agricole  qui  a  fait  la  France  forte,  la  France  d'au- 
trefois! Ainsi  s'étiole  la  race,  ainsi  s'en  va  la  patrie! 

Depuis  vingt  ans,  la  baisse  du  prix  des  terrains,  les 
ventes  de  biens,  la  dépopulation  des  campagnes,  en  sont 
des  preuves  lamentables. 


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—  186  — 


CHAPITRE  X 


TIENNES  EXPRESSIONS.  -  ANCIENS  USAGES 


ES  Calavrais  sont  des  feux  de  joie  que  les  enfants 

villages  allument  chaque  année,  le  soir  du  premier 

anche  de  carême;  ils  ont  toujours  lieu  à  une  place 

,  éloignée  des  habitations.  Rien  n'est  plus  beau  par 

îiel  étoile  que  de  les  voir  briller  à  tous  les  coins  de 

rizon.  Les  enfants  brandissant  des  tisons  enflam- 

dansent  en  rond  autour  des  feux  en  chantant  ce 

ain  : 

Calavrai,  calavralla  !  ! 

,  fennaà  (un  tel)  est  mézalla  (la  femme  à  un  tel  est  stérile) 

Ah!...  Hou!!!... 

s  jettent  leurs  tisons  dans  le  feu. 

ette  fête  annuelle   semble   remonter  à  une  haute 

quité,  peut-être  au  paganisme  ;  elle  dut  ensuite  être 

stianisée  (1),  d'abord  parce  qu'elle  a  lieu  le  l^"*  di- 

iche  de  carême,  ensuite  en  souvenir  de  cette  parole 

'Ecriture  :  «  L'arbre  qui  ne  produit  pas  de  fruits 

i  brûlé,  » 

étail  à  noter  :  dans  le  bassin  du  Léman,  les  commu- 

protestantes  ne  suivent  pas  cet  usage.  (En  France 

3ur  est  appelé  le  dimanche  des  Brandons.) 

Calavrai  proviendrait,  selon  les  uns,  du  latin  calidus^  chaud! 


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—  187  —    f 

On  a  barlato,  est  une  expression  patoise  signifiant 
que  Ton  a  remué  des  tonneaux  dans  la  cave,  elle  re- 
monte au  moyen-àge.  A  cette  époque  il  n'y  avait  point 
de  ponts,  les  chemins  étaient  peu  accessibles  aux  voitu- 
res; le  transport  des  vins  se  faisait  au  moyen  de 
chevaux  et  de  mulets,  à  l'aide  de  trois  barils,  placés  un 
de  chaque  côté  du  bat  et  le  troisième  au-dessus.  Les 
conducteurs  avaient  une  réputation  de  grands  mangeurs 
et  buveurs,  on  les  appelait  barlàtis,  contraction  vul- 
gaire de  bavHli  latores, 

L'ÉMiNE.  —  Quand  Adhemar  Fabri,  évêque  de  Ge- 
nève, accorda  eu  1388  les  franchises  de  cette  ville,  un 
article  spécifiait  que  les  meuniers  n'avaient  droit  pour 
la  mouture  qu'à  une  éminCj  qui  était  la  trente-deuxième 
partie  de  la  coupe. 

De  nos  jours  encore,  quand  une  femme  cuit  son  pain 
au  four,  elle  dit  au  fournier  :  «  Preni  vutr'emna  », 
c'est-à-dire  :  prenez  ce  qui  vous  revient,  et  le  fournier 
prélève  un  peu  de  farine  ou  de  pâte  pour  son  paiement. 
Il  en  est  de  même  quand  l'on  presse  sa  vendange  chez 
quelqu'un  ou  que  l'on  va  faire  l'huile  ;  l'émine  est  dans 
ce  cas  d'environ  un  litre  ou  deux  par  setier  de  50  litres. 

Il  a  fait  de  la  futaine,  ou  il  a  tapé  sur  le  plot, 
sont  deux  expressions  qui  servent  à  désigner  dans  le 
langage  populaire  qu'un  homme  a  fait  une  faillite  frau- 
duleuse ;  elles  remontent  au  moyen-àge. 

Les  plots  étaient  des  sortes  de,  billots  dont  l'usage 
ressemblait  beaucoup  à  celui  du  pilori.  Le  jour  des 
assises  devant  toute  la  population  assemblée,  les  mau- 
vais payeurs,  les  banqueroutiers  étaient  obligés  de  s'y 
asseoir  à  plusieurs  reprises  et  do  crier  chaque  fois  : 


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—  188  — 

«Je  paie  mes  dettes!  Je  paie  mes  dettes!  »  Cette  cou- 
tume existait  également  en  Lombardio,  elle  s'est  perpo' 
tuée  jusqu'à  nos  jours  dans  certains  jeux  de  famille. 

Les  plots  sont  enuméres  parmi  les  instruments  de 
justice  du  seigneur  de  Beauregard  (reconnaissance  du 
27  novembre  1422,  citée  au  Chapitre  V  du  présent 
ouvrage). 

Baptêmes.  —  Le  jour  du  baptême,  le  parrain  et  la 
marraine  seuls  avec  la  sage-femme  accompagnent  l'en- 
fant à  l'église.  Il  y  a  trente  ans  à  Messery  on  portait 
le  nouveau -né  à  la  cérémonie,  dans  un  berceau  couvert 
d'une  garniture  de  mousseline,  sous  laquelle  se  trouvait 
un  transparent  rouge  ou  rose;  un  bouquet  de  fleurs 
artificielles  placé  sur  l'arceau  indiquait  le  sexe  de  l'en- 
fant ;  quand  le  bouquet  était  de  côté,  c'était  un  garçon  ; 
quand  il  était  dessus,  c'était  une  fllle.  Le  berceau  était 
porté  par  la  sage-femme.  De  nos  jours  cet  usage  a  dis- 
paru. Le  parrain  fait  sonner  les  cloches  à  ses  frais  ;  la 
marraine  jette  des  bonbons  aux  enfants  du  village. 
Ensuite  on  revient  à  la  maison  où  le  père  de  l'enfant 
ofl're  un  repas. 

Mariages.  Noces.  —  Un  dimanche  ou  deux  avant 
les  noces,  il  est  d'usage  que  les  jeunes  gens  dont  les 
bans  sont  publiés,  oflTrent  à  boire  à  la  jeunesse  du  vil- 
lage ;  la  règle  habituelle  est  d'un  setier  de  vin  (50  li- 
tres), on  appelle  cela  donner  Vabadouche!  (l'abada  en 
patois  est  synonime  d'abandon). 

Dans  les  noces  on  portait  autrefois  des  rubans  au 
bras  ;  les  jeunes  filles  portaient  des  fleurs  artificielles 
où  le  rouge  dominait;  la  mariée  avait  un  bouquet  au  côté 
avec  un  flot  de  rubans  et  une  ceinture  de  soie  appelée 


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—  189  — 

te  fian.  Cette  ceinture  était  ensuite  offerte  à  Téglise 
pour  orner  la  croix  de  la  procession.  De  nos  jours,  les 
jeunes  mariées  ne  portent  plus  le  ruban,  mais  elles 
rachètent  toujours  pour  Toffrir  à  l'église  du  village. 

Le  jour  du  mariage,  en  sortant  de  la  cérémonie,  on 
jette  des  caramels  (bonbons  plies  dans  du  papier)  aux 
enfants  que  Ton  rencontre,  on  appelle  cela  : 

Tri  la  pirra  à  Barnâda 
cesi-à'dire  :  Tirer  la  pierre  à  Bernarde. 

Autrefois  tous  les  hommes  du  cortège  tiraient  des 
coups  de  pistolets,  de  nos  jours  on  tire  les  boîtes,  espèces 
de  mortiers  verticaux  que  Ton  bouche  fortement  avec 
un  tampon  de  bois  tendre. 

Sur  le  passage  du  cortège  il  n*est  pas  rare  que  Ton 
barre  la  route  avec  un  char  ou  une  planche;  pour 
passer  il  faut  offrir  un  pourboire. 

Quand  la  jeune  mariée  arrive  à  la  maison  du  futur, 
on  ferme  la  porte  ;  une  personne  se  tient  derrière,  elle 
ouvre  en  donnant  à  Tépousi^e,  un  balai  s'il  y  a  une 
belle-mère,  ou  les  clefs  s'il  n'y  en  a  pas,  car  les  clefs 
sont  l'emblème  de  la  maîtrise  ! 

Conduite  de  l'ane.  —  Autrefois  quand  une  femme 
battait  son  mari,  toute  la  jeunesse  masquée  se  réunis- 
sait; on  louait  un  àne  pour  deux  ou  trois  jours.  Un 
jeune  homme  le  montait  à  califourchon  et  sens  devant 
derrière  ;  un  autre  menait  la  bête  par  la  bride,  toute  la 
troupe  suivait  et  frappait  à  coups  redoublés  sur  le  dos 
du  cavalier,  qui  était  censé  représenter  le  mari  battu. 
On  se  promenait  ainsi  par  les  villages  en  criant  et 
chantant,  puis  l'un  des  figurants  armé  de  lunettes  et 


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—  190  — 

d'une  pancarte,  lisait  à  haute  voix  la  proclamation  du 
mariage  et  le  jugement  de  Tépoux. 

Charivari.  —  Quand  un  veuf  ou  une  veuve  se  rema- 
rient, s*ils  ne  paient  à  boire  à  la  jeunesse,  tous  les 
jeunes  gens  du  village,  pendant  quinze  jours,  le  soir 
venu,  se  réunissent  aux  environs  de  la  maison  dos 
futurs  époux  en  faisant  un  bruit  infernal;  les  uns  son- 
nent de  la  trompe  ou  frappent  en  cadence  sur  de  vieux 
ustensiles,  les  autres  font  résonner  des  faulx  suspen- 
dues à  une  cordelette,  ou  sont  armés  de  clochettes  et 
de  grelots. 

SÉPULTURES.  —  Aux  sépulturos  des  nobles  on  distri- 
buait autrefois,  aux  pauvres,  les  tentures  qui  se  trou- 
vaient dans  réglise,  le  jour  des  funérailles. 

Ainsi  lors  de  Tinhumation  du  marquis  de  Coudrée  en 
1846,  toutes  les  personnes  nécessiteuses  qui  se  présen- 
tèrent recurent  deux  aunes  de  drap.  A  ronterrement 
du  comte  d*Antioche  en  1884  on  distribua  des  pains 
aux  pauvres. 

Dans  nos  villages,  avant  la  levée  du  corps,  tous  les 
hommes  de  la  parenté  reçoivent  un  crêpe  que  Ton  épin- 
gle au  bras,  le  crêpe  est  blanc  si  le  défunt  est  céliba- 
taire, noir  s'il  est  marié;  il  en  est  de  même  pour  le 
drap  mortuaire  et  les  fleurs  qui  recouvrent  le  cercueil. 
Les  porteurs  sont  choisis  parmi  les  jeunes  gens  si  le  dé- 
funt était  célibataire,  et  parmi  les  hommes  mariés  s*il 
était  marié. 

Depuis  cinq  ou  six  ans  un  nouvel  usage  s*est  implanté 
parmi  nous,  c'est  la  coutume  de  rendre  Vhonneur. 
Après  la  cérémonie  funèbre,  tous  les  hommes  de  la  pa- 


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t^eùté  se  rangent  sur  un  rang  et  les  assistants  défilent 
devant  eux  chapeau  bas. 

Montage  des  tuiles.  —  Pour  monter  les  tuiles  sur  une 
toiture  neuve,  il  est  d'usage  que  tous  les  voisins  s'aident 
gracieusement,  sans  exiger  de  salaire.  Il  y  a  ordinaire- 
ment 10  ou  15  hommes  formant  la  chaîne  et  se  passant 
les  tuiles  de  mains  en  mains.  On  distribue  ensuite  à 
boire. 

Rafraîchissements.  —  La  plus  haute  marque  d'es- 
time d'un  Chablaisien,  c'est  d'offrir  à  boire  à  son  hôte; 
pour  cela  on  va  généralement  à  la  cave  ;  refuser  en  ce 
cas,  serait  faire  un  affront  au  propriétaire.  Cette  coutume 
remonte  aux  premiers  siècles  do  notre  histoire,  elle 
nous  est  signalée  par  Augustin  Thierry  dans  ses  Récits 
Mérovingiens  (1). 

Autrefois  il  no  se  trouvait  à  la  cave  qu'on  pot  pour 
boire,  de  nos  jours  on  se  sert  généralement  d'un  verre 
qui  reste  toujours  sur  un  tonneau;  le  patron  du  lieu  tire 
au  tonneau  et  boit  le  premier,  puis  chacun  vide  le  verre 
à  tour  de  rôle.  Cette  dei'niéro  coutume  rappelle  la  coupe 
des  anciens  qui  circulait  à  la  ronde. 

Teillage  du  chanvre.  — Il  y  a  20  ou  30  ans,  dés  le 
mois  d'août,  tout  le  monde  teillait  son  chanvre  le  soir 
sur  les  places,  ou  devant  les  maisons  ;  de  nos  jours  on  a 
abandonné  la  culture  de  cette  plante  textile. 

Confection  des  allumettes.  —  Comme  lesallumettes 

(1)  Augustin  Thierry. —  4*  récit  des  Temps  Mérovingiens.  — 
Meurtre  de  Tévéque  Pretextatus.  —  Les  seigneurs  Francs  malgré 
leur  répugnance  acceptent  le  vin  offert  par  Frédégonde.  Ils  sui- 
vaient, en  cela,  les  règles  de  la  bienséance  de  Tépoque,  qui  étaitde 
ne  jamais  refuser  le  vinollert  par  celui  qui  vous  donnait  Thospi- 
talité. 


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—  102  — 

chimiques  étaient  ou  inconnues  ou  trop  chères,  'on  ra- 
massait les  tiges  ou  bûchettes  de  chanvre  teille  que  Ton 
attachait  par  paquets  ;  on  souffrait  ces  paquets  des  deux 
bouts,  et  en  laissant  toujours  des  braises  sous  la  cendre 
du  foyer,  on  obtenait  ainsi  du  feu  à  volonté.  On  appelait 
ces  allumettes  primitives  des  chenevottes. 

Lampes  d'autrefois,  -t-  Ces  lampes  ayant  la  forme 
d'une  coquille  s'appelaient  crezoua,  mot  dérivé  du  latin 
barbare  critsellos,  forme  irrégulière  du  latin  cricsta  co- 
quille. On  les  remplissait  à  moitié  d'huile  de  noix,  dans 
laquelle  nageait  une  mèche;  elles  étaient  munies  d'un 
crochet  qui  servait  à  les  suspendre  à  une  tige  tournante 
fixée  au  plafond  de  la  chambre.  Ces  lampes  avaient  à 
peu  prés  la  même  forme  que  les  lampes  romaines. 

Fin  des  travaux.  —  Après  l'Ascension,  les  premiers 
bêchages  do  la  vigne  sont  généralement  terminés.  S'il 
reste  encore  quelques  vignes  non  labourées,  l'ou- 
vrage est  alors  très  pénible  et  l'on  compare  la  dureté 
de  la  terre  à  de  la  viande  de  cavale.  Les  ouvriers  qui 
ont  terminé,  se  tournant  alors  vers  quelque  vigne  en- 
core inculte,  crient  en  chœur  de  toute  la  force  de  leurs 
poumons  et  d'une  voix  traînante  : 

Su  Ja  cavalla  à  (un  tel 

Oh!....  hisse  ! 

Les  veillées.  —  Il  y  a  20  ou  30  ans,  durant  les  lon- 
gues soirées  d'hiver,  toute  la  famille  se  réunissait  dans 
la  salle  du  poêle  appelée  te  peille  ;  les  moins  fortunés 
allaient  passer  la  veillée  et  se  chauffer  chez  leurs  voi- 
sins plus  aisés,  et  pendant  que  les  femmes  filaient,  les 
hommes  formant  le  cercle  autour  du  foyer  devisaient  de 
leurs  travaux  ou  se  racontaient  les   légendes,  les  histoi- 


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—  193  — 

res  et  les  souvenirs  du  bon  vieux  temps.    Aujourd'hui 
ces  habitudes  disparaissent. 

Esprit  de  charité  et  de  mutualité.  —  Si  une  mai- 
son brûle,  le  sinistré  passe  dans  les  villages  avec  un 
charriot,  et  chacun  lui  donne  :  soit  une  gerbe  de  paille, 
soit  une  gerbe  de  foin,  soit  une  pièce  de  monnaie. 

Si  une  bête  vient  à  périr,  chaque  famille  de  la  pa- 
roisse se  fait  un  devoir  de  prendre  une  certaine  quan- 
tité de  viande,  de  sorte  que  le  propriétaire  de  la  bête 
se  trouve  presque  toujours  indemnisé. 

Autrefois  si  une  femme  était  veuve  et  chargée  de  fa- 
mille, ses  travaux  de  campagne  se  trouvaient  souvent 
en  retard  ;  les  hommes  du  village  s'entendaient  alors 
entre  eux,  et  le  dimanche  avant  la  messe  tout  le  monde 
allait  gratuitement  travailler  le  champ   de  la   veuve. 

Coutumes  religieuses.  —  1^  Bénédiction  des  grains 
pour  le  bétail,  —  Chaque  année  le  jour  de  la  S*-An- 
toine,  17  janvier,  toutes  les  familles  portent  à  l'église 
dans  une  serviette,  du  blé,  de  l'avoine  et  du  sol;  le  curé 
à  l'issue  de  la  messe  bénit  ces  denrées  qui  sont  desti- 
nées à  attirer  la  protection  divine  sur  le  bétail. 

Bénédiction  des  champs.  —  L'eau  bénite  est  consa- 
crée le  samedi  de  la  Pentecôte  ;  chaque  famille  en  re- 
cueille dans  une  fiole,  et  pendant  les  jours  qui  suivent, 
chacun  va  avec  son  eau  bénite  faire  le  signe  de  croix 
sur  ses  champs. 

BÉNÉDICTION  DES  GRANGES.  —  Chaquo  anuéc  au  mois 
d'août  lorsque  les  récoltes  sont  rentrées,  le  curé  du  vil- 
lage annonce  en  chaire  qu'il  ira  tel  jour  procéder  à  la 
bénédiction  des  récoltes.  Le  jour  dit,  accompagné  de  son 

iSb 


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—  194  - 

clerc  qtii  porte  un  panier,  le  curé  en  surplis,  pénétre  dans 
toutes  les  granges  de  la  paroisse  ;  la  maîtresse  de  la 
maison,  un  cierge  à  la  main,  se  tient  sur  le  seuil  et  la 
bénédiction  une  fois  donnée,  elle  dépose  dans  le  panier 
du  clerc  un  certain  nombre  d'œufs. 


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—  195  — 


DOCUMENT  I 


Estratto  dal  Rotolo  in  pergamena  intilolato  : 

Nernier  en  Chablais  Subside  —  1451 

«  Compte-rendu  par  N.  Claude  veuve  de  feu  Humhert  de  la 
«  Ravoree,  Seig^  d*Yvoire  cy-devant  Chatellain^  et  Rece- 
«  veur  du  Subside  accordé  par  les  hommes  et  habitans 
((  de  la  Chàtellenie  de  Nernier.  )) 

Cûmputathic  pro  primo  et  secundo  terminis  dicti  subsidij 
ad  racionem  decem  octo  denariorum  grossorum  parvi  pon- 
deris  pro  quolibet  foco  videlicet  pro  duobus  terminis  festi 
beati  martinj  yemalis  annis  domini  millesimo  quatercen- 
tesimo  quinquagesimo  primo  et  millesimo  quatercentesimo 
quinquagesimo  secundo,  quorumquidem  focorum  nomina 
et  cognomina  sunt  hec.  Et  primo. 


Petrus  vouterij 
Liberi  guigonis  balli 
Johannes  clerici 
Petrus  balli 
Guigo  barde 
Girard  us  patry 

Miserier.  Hugonis  ciquardi 

Petrus  joly  iunior 

Liberi  franscisce  dex  alias  curtet 

Exertum,  Petrus  Quiblerij 
Johannes  Quiblerij 

Nec    sunt    ibidem     plures 


Robertus  de  exerto  alias  estuier 
Petrus  de  exerto  alias  poignant 

Jaquemeta  coda 
Coletus  bardo 
Petrus  benedicti 

Ansermusdeexertoaliaspoigt 

Petrus  joly  notarius 
Petrus  dex  alias  curtet 
Mermetus  choudet. 
Guillemus  Quiblerij 

Petrus  Quiblerij  et  Johannes  Quiblerij 

neque     paucioires,    focum 
nerniaci  nec   erant  tempore 


facientes  in  dicta  castellania 

concessionis  presentis  subsidij  preterquam  supranominati 

viginti   duo  foci. 


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—  196  — 

Qui  valent  computato  quolibet  foco  focorum  predictorum 
d  racionem  decem  octo  denariorum  grossorum  pro  dictis 
uobus  terminis  ipsius  subsidij  ut  supra  XXXIII  florenos 
arvi  ponderis. 

Summa  tocius  recepte  huius  computi  pro  dictis  duobus 
îrminis  XXXIII  floreni  parvi  ponderis. 

(Tiré  des  Archives  de  Turin). 


DOCUMENT  II 

Inventaire  Bernois,  1540 

'ensuyt  Vinoètaire  des  biés  immeubles  des  cures  et  chap- 
pellesdu  balliaigede  Chablaix  faict  par  moy  Ny collas 
Vulliaud  comissaire  d'y  celles, 

Messerier 
La  cure  de  Messerier  par  la  revellacion  de  Michel  Cho- 
t,  de  Michel  Siccard  et  Janyn  du  Borgé  pris  le  dix-hui- 
ème  d'octobre  mil  cinq  cent  et  quarate. 
Pour  le  Ministre,  — Premièrement  une  maison  et  grange 
3  trois épueds  avec  ung  curtil  entre  deulx  dernier  atenant, 
iviron  demy  fossorée  avec  aussi  ung  curtil  dernier 
église  du  dit  lieu. 

Les  places  a  la  dicte  maison  y  attigue,  jouxte  le  cymis- 
ère  devers  le  vent,  la  vigne  de  Jehan  Quisard  devers  le 
c,  et  la  maison  de  la  chappelle  de  sainct  Biaise  devers  le 
3nt.  Ung  service  tendant  de  Messerier  a  Nernier  devers 
bize,  laquelle  grange  cy  dessus  joincte  avec  la  maison 
»t  astraincte  de  alberger  les  diesmes  lesquelles  sont  et  ap- 
irtiennent  à  la  dite  parroche. 

Comme  dessus,  — Item,  Une  pièce  de  pré  et  terre,  size 
1  lieu  appelé  en  Melleriez  contenant  environ  une  pose  et 
îmy,  jouxte  ung  service  ou  vionet  (sentier)  devers  le 
mt,  la  terre  de  Bernard  du  Borge  devers  la  bize,  la  vigne 


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—  197  — 

de  Michel  Boyte?  et  de  ses  co-divisôurs  devers  la  montai- 
gne,  le  chemin  publicq  devers  le  lac. 

Item,  —  Au  dit  lieu  environ  une  pose  de  terre  jouxte  la 
terre  de  Joha  Ruffîez  de  vers  la  bize,  la  vigne  de  Johan  de 
Savoard  et  de  ses  co-diviseurs  devers  la  montagne^  la  terre 
des  héritiers  de  Pierre  du  Borge  devers  le  vent,  et  le  che- 
min publicq  tendent  d'Hermèce  (1)  à  Nernier  devers  le  lac. 

Item  —  Environ  2  poses  sizes  au  lieu  appelé  en  Roget, 
jouxte  la  terre  de  Michel  Verbo  et  de  ses  co-diviseurs  de- 
vers la  montaigne,  la  terre  ou  pré  des  héritiers  de  Pierre 
du  Borge  devers  le  lac,  la  terre  de  André  du  Borge  devers 
la  bize  et  la  terre  des  héritiers  de  Pierre  du  Borge  devers 
le  vent.  *• 

Item,  —  Une  aultre  pièce  de  terre  au  dit  terrijtoire»  conte- 
nant environ  quatre  poses  jouxte  la  terre  et  pré  de  Michel 
Chollet  devers  la  bize  et  devers  le  lac,  la  terre  de  Jehan 
Boriallet  devers  le  vent  et  la  terre  des  Borgez  et  Savuard 
devers  la  montaigne. 

Item.  —  Une  pièce  tant  terre  que  vigne,  contenant  envi- 
ron deux  poses,  assavoir  une  pose  et  demy  de  vigne  et 
demy  pose  de  terre  size  au  lieu  appelé  en  Veytraux,  jouxte 
la  terre  de  Loys  du  Nant  devers  la  bize  et  affronte  le  fosselz 
devers  la  montaigne,  le  chemin  publicq  devers  le  lac  et  la 
terre  de  Bernard  du  Borge  devers  le  vent. 

Item.  —  Une  pièce  de  pré  contenant  environ  troys  sey- 
teurines  de  pré  size  au  champ  du  fief  de  Savoye  jouxte  le 
chemin  publicq  tendent  de  Messerier  au  port  du  lac  devers 
la  bize,  les  communs  du  dit  lieu  devers  la  montaigne,  et 
affronte  à  la  rive  du  lac  devers  le  soleil  couchant,  et  ung 
service  ou  chemin  publicq  devers  le  vent. 

Item,  —  Environ  troys  poses  de  boys,  size  au  lieu  appe- 
lée en  tate  (tate  de  Conches),  jouxte  le  pré  et  boys  de  E. 

(1)  Hermèce  pour  Hermance. 


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—  198  — 

Bernard  Quisard  devers  la  montagne,  le  bois  des  Boriallet 
evers  le  lac,  le  boys  des  Foraz  devers  la  bize  et  le  bois  des 
itz  Brolliet  devers  le  vent. 

Item.  —  La  diesme  appartenant  à  la  dicte  cure  vallant 
our  année  tant  blé,  vin  que  chenevo  environ  de  trente  à 
uarate  florins,  unefoys  plus  et  aultre  moyns  selon  la 
lison. 

Item.  —  Le  diesme  appelé  le  diesme  du  Novellay  vallant 
3ur  année  de  dix  à  quinze  florins. 

Et  touchant  les  censés  et  revenuz  disent  n'en  avoir  point 
e  droitz,  combien  que  Tadmodiataire  du  lieu  az  promis 
allier  le  coctet  et  ne  scay  s'il  monte  peu  ou  prouz. 

Item.  —  Au^dit  Messerier,  la  chapelle  de  Notre  Dame  et 
u  Sainct-Esprit,  disent  les  parrochiens  appartenir  à  eulx 
la  relacion  de  hon  Pierre  Crebly  (Quiblier)  admodiatèur 
cjs  dictes  chappelles  qui  dit  n'en  avoir  point  de  droitz  ne 
très  à  y  celle  appartenants. 

Item.  —  Une  autre  cliappelle  de  Sainct-Blaise  de  laquelle 

\i  recteur Pilletet  ne  se  appert  qu'il  y  ays  point  de  ti- 

es  ny  droitz. 

De  la  prémisse  répondent  comme  les  prècédens. 

(Manuscrit  de  V Académie  ChablaisienneJ. 


DOCUMENT  III 
Quiblier,  médecin  du  roi  Murât 

Philibert-Félix  Quiblier,  naquit  à  Messery  le  7  novem- 
'e  1779  :  élève  du  pensionnat  libre  de  Meillerie,  il  entra  à 
jge  de  19  ans  en  qualité  de  chirurgien,  à  l'hôpital  militaire 
i  Carouge.  Après  diverses  campagnes  où  il  se  fit  remar- 
ier par  son  héroïsme,  il  fut  nommé  le  20  août  1807  par  dé- 
•et impérial,  chirurgien  particulier  de  Murât,  roideNaples. 


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—  199  ^ 

Après  la  mort  tragique  de  ce  prince  en  1815,  M.  le  médecin 
Quiblier  se  fixa  à  Naples  où  son  talent  lui  procura  bientôt 
une  position  enviée.  Il  mourut  vers  1835,  victime,  selon  les 
uns,  de  la  jalousie  des  médecins  napolitains. 

Voici  d'ailleurs  ses  états  de  services  qui  nous  ont  été 
gracieusement  communiqués  par  la  famille. 
GARDEjoïALE  ^^^  ^^^^^^^^  ^^  CHASSEURS  VÉLITES 

In  Tan  ter  ie 

Etat  des   services,    campagnes,   actions    et   blessures   de 

Monsieur  Philibert-Félix  Quiblier,  chirurgien-major  du 

dit  régiment,  né  à  Messenj,  département  du  Léman,  le 

7  novembre   i779. 

Services 

Entré  au  service  en  qualité  de  chirurgien  de 
3*^  classe,  surnuméraire  k  l'hôpital  de  Carouge,  par 
commission  du  ministre  de  la  guerre  le  1"^  vendé- 
miaire an VI 

Passé  à  l'armée  de  réserve,  qui  devint  armée  d'Ita- 
lie, le  22  floréal  an viii 

Après  la  bataille  de  Marengo,  il  fut  employé  dans 
les  hôpitaux  d'Alexandrie,  à  l'hôpital  de  Suxe  le 
18  thermidor  an ix 

A  celui  de  Turin  le  10  germinal  an x 

A  celui  de  Mont-Calieri  le  6  vendémiaire  an xii 

Promu  au  grade  de  chirurgien  aide-major  pour  le 
29"  régiment  d'infanterie  de  ligne,  le  19  fructidor  an       xii 

Passé  au  service  de  Sa  Majesté  le  Roi  de  Naples, 
par  décret  de  S.  M.  l'Empereur  et  Roi  du  20  août. . . .     1807 

Passé  chirurgien  aide-major  au  régiment  des  Vol- 
tigeurs de  la  Garde  le  21  décembre 1807 

Promu  au  grade  de  chirurgien  major  du  régiment 
des  Vélites  à  pied  de  la  Garde  le  12  décembre 1808 

Devenu  1^^  régiment  des  Chasseurs  Vélites  de  la 
Garde. 

Décoré  de  la  médaille  d'honneur  le  7  janvier. . .     1815 


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—  200  — 

Campagnes,  Actions  et  Blessures 

A  fait  la  campagne  de  l'armée  de  réserve  et  d'Italie,  com- 
mandée par  le  premier  Consul  en  Tan  VIII. 

Le  2  frimaire  an  IX,  il  eut  la  main  droite  gelée  en  ac- 
compagnant sur  le  Mont-Cenis  une  évacuation  de  malades. 

A  fait  la  campagne  de  l'an  XIII  dans  le  Royaume  de  Na- 
ples  sous  les  ordres  du  général  Gouvion  St-Cyr,  avec  le 
29™«^  de  ligne. 

Celle  de  l'an  XIV  à  l'armée  d'Italie  commandée  par  le 
général  Masséna.  Blessé  au  flanc  droit  le  26  vendémiaire 
an  XIV  au  passage  de  l'Adige  devant  Vérone,  en  donnant 
des  soins  aux  blessés  sur  le  champ  de  bataille;  l'Etoile  de 
la  Légion  d'honneur  fut  demandée  en  sa  faveur. 

A  fait  les  campagnes  de  1806  et  1807  en  Calabre,  sous  les 
ordres  du  général  Régnier  et  de  son  Excellence  le  maréchal 
Masséna. 

Celle  de  1808  à  la  dite  armée  avec  la  Garde  Royale,  sous 
les  ordres  du  général  Saligny. 

Celle  de  1809  en  Fouille. 

Celle  de  1810  en  Calabre  avec  la  Garde,  commandée  par 
S.  M.leRoi. 

Celles  de  1814  et  1815  sous  le  même  commandement. 

Nommé  Chevalier  de  l'Ordre  Royal  des  Deux  Siciles. 

Certifié  véritable  par  nous,  membres  du  Conseil  d'admi- 
nistration du  dit  régiment,  le  présent  état  des  services, 
campagnes,  actions  et  blessures  de  M.  le  chirurgien  major 

Quiblier. 

(Suivent  les  signatures  et  le  cachet). 


AHMÈE  29«  RÉGIMENT  D'INFANTERIE  DE  LIGNE 

de  Naples  

Citation  à  l'Ordre 

Nous  membres  composant  le  Conseil  d'administration  du 
dit  régiment,  certifions  que  M.    Philibert-Félix  Quiblier, 


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—  201  — 

chirurgien  aide-major  au  dit  régiment,  a  été  blessé  par 
l'ennemi  au  flanc  droit,  d'une  balle  de  fusil  le  26  vendé- 
miaire an  14,  au  passage  de  l'Adige  devant  Vérone,  en 
donnant  des  soins  aux  blessés  sur  le  champ  de  bataille. 

Nous  certifions  en  outre  que  le  zèle  et  le  dévouement  de 
cet  officier  de  santé  dans  les  journées  des  7,  8  et  9  bru- 
maire an  14,  devant  Caldiéro,  excita  l'admiration  et  la 
reconnaissance  de  toute  l'armée.  M.  le  Maréchal  Masséna, 
témoin  de  tant  de  dévouement,  voulut  récompenser  une 
si  belle  conduite  et  demanda  pour  lui  l'Etoile  de  la  Légion 
d'honneur. 

En  témoignage  de  la  vérité,  fait  à  Montéléone,  le  26  mai 
1807. 

(Suivent  les  signatures  et  le  cachet). 

(Extrait  des  archives  de  Madame  Quiblier-Lombard,  à  Passei- 
rierprès  La  Roche). 


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1 


202  — 


TABLE  DES  MATIÈRES 


PAGES 

Introduction m 

Chapitre   !«''. 

Situation  de  Messery  et  de  Nernier.  —  Limite  de 
leur  territoire.  —  Nature  du  sol.  —  Aperçu  géolo- 
gique. —  Epoque  glaciaire.  —  Formation  du  Lé- 
man. —  Ses  différents  niveaux 5 

Chapitre  IL 

Temps  préhistoriques.  —  Stations  lacustres  de  Tàge 
de  la  pierre  et  du  bronze.  —  Traditions  locales.  — 
Anciens  cimetières.  — Tombeaux,  objets  trouvés. 

—  Religion,  autels,  derniers  souvenirs.  —  Mots 
celtiques  conservés  dans  notre  patois 8 

Chapitre   IIL 

Conquôte  du  pays  par  les  Romains.  —  Les  colonies 
militaires.  —  La  colonie  de  Narni.  —  Ses  routes  et 
habitations  éparses  ou  villas.  —  Des  fundi  ou  do- 
maines de  vétérans.  —  Etymologies  diverses. — 
Inscription  de  Messery.  —  Coup  d'œil  général  sur 
les  établissements  romains  de  la  région 21 

Chapitre  IV. 

Etablissement  du  christianisme. —  Le  paganisme,  sa 
résistance,  ses  derniers  vestiges.  —  Invasion  des 
Barbares.  —  Les  Burgundes 44 

Chapitre  V. 

Le  moyen-âge.  —  Les  châteaux.  —  Les   Seigneurs. 

—  Beauregard,  Ravorée,  Yvoire,  Nernier,  Frize, 
Bardenuche,  le  Borgel  d'Essert,  le  Borgel  de  Mes- 
sery         52 

Chapitre  VI. 
lia  Paroisse  ou  la  vie  religieuse.  —   L'église  de 
Nernier.  —  L'église  de  Messery.  —  Leur  origine. 

—  Visites  pastorales.   —  Invasion   Bernoise.    — 


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—  203  — 

L'abbaye  de  Filly.  —  Inventaire  Bernois.  —  Les 
Ministres  du  Saint-Evangile.  —  Conversion  du 
Chablais.  —  Noms  des  convertis.  —  Les  curés  de 
Messery  depuis  160L  —  Les  dîmes.  —  Rentes  de 
Filly.  —  Les  fondations.  —  La  Révolution.  —  Prê- 
tres et  religieux  de  Messery  et  Nernier 90 

Chapitre  VIL 

La  Commune  ou  la  vie  civile.  —  Premiers  recense- 
ments.—  Mouvements  de  la  population.  —  Les  fa- 
milles. —  Les  cadastres.  —  Tailles  et  impôts.  — 
Affranchissements.  —  La  justice  sous  l'ancien 
régime.  —  Les  Châtelains 142 

Chapitre  VIII. 

Syndics  et  Maires.  —  Conseil  de  commune.  —  Con- 
seil municipal.  —  La  révolution.  —  Les  biens  na- 
tionaux. —  Les  nouveaux  impôts.  —  Les  réquisi- 
tions.—  La  conscription.  —  Passage  des  Autri- 
chiens. —  Séjour  de  Lamartine  à  Nernier.  —  La 
restauration.  —  Annexion  à  la  France 159 

Chapitre   IX, 

Œuvres  diverses.  —  Ecoles.  —  Bureau  de  bienfai- 
sance. —  Société  de  Secours  mutuels.  —  Société  de 
Sapeurs-pompiers.  —  Industries  diverses.  —  So- 
ciétés de  fromagerie  ou  fruitière.  —  Agriculture. . .     177 

Chapitre  X. 
Anciennes  expressions.  —  Anciens  usages 186 


DOCUMENTS 

PAGES 

I.  Extrait   du  rôle  intitulé  Nernier   en  Chablais^ 

subside,  1451 195 

II.  Inventaire  Bernois,  1540 196 

III.  Biographie  et  états  de  services  de  Philibert-Félix 

Quiblier^  médecin  du  roi  Murât,  1779  1835. . . .     198 


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MÉMOIRE  II 


LA  GARDE  NATIONALE 

A  ÉVIAN 

ET  CHOSES  DE  GUERRE 

(Du  l"  Août  au  23  Octobre   1793) 

(Archives  Municipales) 


* 


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-.  207  — 


LA  GARDE  NATIONALE  A  EVIAN 

ET  CHOSES  DE  GUERRE 

Du  1^^  Août  au  28  Octobre  1793.  —  Archives  Municipales  (i) 


Le  cadre  trop  restreint  de  cette  minuscule  étude  ne 
comporte  pas  des  développements  historiques  de  quel- 
qu'importanco.  Les  lignes  suivantes  serviront  à  résumer 
les  faits  les  plus  saillants  de  cette  époque,  particulière- 
ment troublée,  de  la  grande  épopée  révolutionnaire  (2). 

Au  mois  de  juillet  1793,  la  France,  en  proie  aux 
factions  intestines,  présentait  un  bien  triste  spectacle  : 
ennemis  au  dedans  et  au  dehors,  défections  nombreuses 
et  cruelles  représailles,  d'une  part  ;  de  l'autre  :  l'Europe 
armée  contre  nous  et  l'invasion,  se  ruant  déchaînée,  sur 
le  sol  de  notre  malheureuse  patrie. 

Depuis  la  bataille  de  Neerwinden  et  la  défection  de 
Dumouriez,  une  suite  constante  de  revers  nous  avaient 
fait  perdre  nos  conquêtes  et  nos  frontières  du  Nord, 
menacées  par  80.000  hommes.  Du  Rhin  aux  Alpes  et 
aux  Pyrénées,  une  succession  ininterrompue  de  révoltes, 
menaçaient  les  derrières  de  nos  armées  et  coupaient 

(1)  Registres  des  délibérations  :  Conseil  général  et  Municipalité. 

(2)  Auteurs  consultés:  Thiers,  Hist,  de  la  Révol.  Franc.,  Géné- 
ral A.  Hugo:  France  militaire.  —  Grilliet.  Diction,  hist,  — 
Claude  Genoux  :  Hist.  de  la  Savoie. 


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•      —  208  — 

leurs  communications  et  là  encore,  se  groupaient,  nom- 
breuses et  en  armes,  les  populations  ennemies  de  Tétat 
de  choses  alors  existant. 

Le  long  des  Alpes,  les  Piémontais  en  armes,  essayaient 
de  reprendre  la  Savoie  et  Nice  ;  leurs  troupes  .dissémi- 
nées en  nombreux  groupements,  depuis  le  petit  Saint- 
Bernard  jusqu'au  Col  de  Tende,  présentaient,  comme 
partout,  le  système  de  postes  avancés,  gardant  les 
vallées  ;  elles  opéraient  sans  relâche  des  mouvements 
offensifs,  qui  nécessitèrent  même  le  retour  du  général 
en  chef  Kellermann. 

Tel  était,  sans  être  poussée  au  noir,  la  situation  exté- 
rieure inquiétante  de  notre  pays,  à  Tinstant  où  la  Garde 
Nationale  d'Evian  fut  appelée  à  jouer  son  rôle,  com- 
parse bien  effacé,  dans  le  grand  acte  de  la  défense 
nationale  du  sol  envahi  de  la  patrie. 

Sur  un  avis  reçu  que  les  ennemis  se  préparaient  à 
violer  les  frontières,  le  Conseil  de  la  ville  d'Evian  se 
réunissait  à  l'Hôtel  de  Ville,  à  2  heures  après  minuit, 
le  13  août  1713.  Là,  après  avoir  mûrement  délibéré,  la 
municipalité,  ouï  le  procureur  de  la  commune,  déclarait 
que,  malheureusement,  les  frontières  étaient  insuffi- 
samment garanties  par  le  peu  de  troupes  opposées  aux 
envahisseurs,  mais  que  dans  ces  tristes  conjonctures, 
son  devoir  était  de  concourir  «  de  toutes  ses  forces  »  à 
défendre  Tintégrité  du  sol  de  la  patrie  et  qu'il  lui  dictait 
de  prendre  les  résolutions  suivantes  : 

«  De  requérir  les  citoyens  capitaines  de  la  Garde 
Nationale  de  la  commune,  de  tenir  toujours  prêtes  à 
ses  ordres  leurs  compagnies  respectives  ; 

«  Arrête,  en  outre,  que  les  citoyens  ayant  des  armes, 


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-  m  - 

de  quelque  nature  qu'elles  soient,  seront  tenus  de  les 
déposer  de  suite,  après  la  publication  du  présent  à  la 
maison  commune  ; 

«  Plus  arrête,  vu  la  facilité  avec  laquelle  on  peut  s'em- 
parer des  bateaux  et  que  Ton  ne  peut  avoir  trop  de  vigi- 
lance sur  un  objet  aussi  important,  il  sera  fait  défense  à 
tous  bateliers,  pêcheurs  et  individus  quelconques,  de 
s'éloigner  des  bords  sans  autorisation  du  Conseil  géné- 
ral et  sous  la  responsabité  des  préposés  aux  douanes  et 
des  propriétaires  de  bateaux  et  pour  faciliter  l'exécution 
de  cet  arrêté,  il  ordonne  que  tous  les  bateaux  de  la 
commune  seront  réunis  à  porte  d'Allinges  et  que  les 
municipalités  de  Neuvesselle  et  de  Maxilly  seront  invi- 
tées à  les  réunir  à  la  Tourronde.  » 

Le  14  août  suivant,  le  citoyen  Joseph  Davet  présente 
le  citoyen  Bérard  Bleis,  qui  doit  le  remplacer  comme 
soldat  réquisitionné.  La  municipalité  ne  s'oppose  pas  à 
ce  remplacement  et  fait  aussitôt  porter  sur  l'état  des 
citoyens  en  réquisition,  Bérard  Biais  à  la  place  de  Davet 
Joseph. 

Le  directoire  du  district  de  Thonon  avait  requis,  le 
13  août,  un  grand  nombre  de  citoyens  d'Evian,  de  se 
transporter  sur  la  frontière  à  St-Gingolph,  afin  d'y  sur- 
veiller les  mouvements  de  l'ennemi  et  la  défendre  contre 
toute  agression.  Les  citoyens  désignés  pour  cette  expé- 
dition avaient  fait  parvenir  une  pétition  à  là  munici- 
palité, lui  demandant  un  tambour  et  lui  indiquant  un 
des  fils  Solderet,  comme  capable  de  remplir  cet  emploi  ; 
le  fils  de  Solderet  est  accepté  comme  tambour  du  dé- 
tachement à  destination  de  St-Gingolph. 


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Ce  même  jour,  une  autre  pétition,  dont  voici  le  te^tte, 
est  encore  présentée  : 

«  Sur  la  pétition  des  citoyens  officiers  et  sous-officiers 
des  compagnies  de  la  Garde  Nationale  de  cette  ville, 
qui  ont  été  élus  pour  former  le  détachement  qui  doit 
aller  à  St-Gingolph  ensuite  de  l'arrêté  du  Directoire 
du  District  en  date  du  jour  d'hier,  tendant  à  garder 
dans  cette  marche  les  places  qu'ils  occupent  dans  leur 
compagnie,  ne  connoissant  aucune  loi  qui  nous  autorise 
à  les  leurs  conserver,  ou  à  les  faire  rentrer  dans  la 
classe  do  simple  garde  nationale,  quoiqu'il  nous  paroisse 
très  raisonable  que  ce  nombre  déterminé,  sorti  do  diffé- 
rentes compagnies  ne  doivent  pas  reconnoitre  quelques- 
uns  des  officiers  élus  et  qui  ne  sont  pas  de  leur  compa- 
gnie, au  reste  il  s'y  rencontre  2  capitaines,  2  lieutenants. 

«  La  municipalité  observe,  qu'à  forme  do  l'article  4 
de  l'arrêté  du5  du  courant,  elle  nepourroit  pas  en  remplir 
l'exécution,  si  elle  ne  pouvoit  pas  choisir  dans  la  classe 
des  officiers  qui  sont  des  plus  avisés  et  non  employés  à 
l'agriculture,  arrête  en  conséquence,  ouï  le  procureur  de 
la  commune,  de  prendre  l'avis  du  Directoire  du  District, 
en  lui  faisant  tenir  la  susdite  pétition  et  les  procès-ver- 
baux des  différentes  nominalioxis,  dont  les  listes  des 
éligibles  nous  ont  été  fournies  par  les  capitaines  res- 
pectifs des  compagnies,  à  l'exception  de  celle  des  gre- 
nadiers qui  a  procédé  à  son  élection,  ainsy  que  vous  le 
verrez...  » 

A  cela  les  pétitionnaires  ont  répondu  :  «  Le  projet 
d'arrêté  ci-dessus  donne  une  couleur  différente  à  la  pé- 
tition précédente  et  change  également  leurs  sentiments.  » 
Ils  déclarent  être  prêts  à  verser  la  dernière  goutte  de 


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—  211  — 

leur  sang  pour  la  défense  de  la  patrie.  Ils  ajoutent  qu*ll 
est  facile  de  se  rendre  compte  par  Texamen  des  motifs 
et  par  celui  des  conclusions  de  leur  pétition  :  «  qu'ils  ne 
veulent  qu'une  exacte  observation  de  la  loi  et  qu'ils 
baissent  les  coups  d'autorité  arbitraire,  ainsi  qu'il  paroit 
y  en  avoir  un,  en  ce  que  la  municipalité  seule  a  choisi 
une  multitude  d'officiers  contre  la  teneur  de  l'artide 
sus  énoncé,  qui  laisse  même  le  restant  des  compagnies 
désorganisées,  et  ce  pour  les  faire  rentrer  contre  la 
teneur  du  dit  article  dans  la  classe  des  soldats.  »  Mais 
les  pétitionnaires  déclarent,  que,  malgré  les  griefs  ex- 
posés ci-dessus,  ils  sont  prêts  à  marcber  comme  simple 
volontaire  et  suivant  l'avis  du  Directoire,  sans  qu'on 
apporte  d'entrave  à  l'exercice  de  leurs  droits,  n'enten- 
dant pas  se  départir  des  faveurs  qui  leur  sont  concédées 
par  la  loi. 

Prenant  en  considération  les  observations  qui  précè- 
dent, la  municipalité  arrête  d'envoyer  aussi  au  Directoire 
du  District  une  copie  des  observations  qui  précèdent. 

Un  arrêté  du  Directoire  du  District,  en  date  du  14 
août,  donnait  au  citoyen  Billiod  la  mission  de  se  con- 
certer avec  la  municipalité  d'Evian  et  le  Commandant 
du  bataillon  des  Basses-Alpes  en  résidence  dans  le  can- 
ton, afin  de  déterminer  quels  étaient  les  postes  les  plus 
importants  à  occuper  sur  les  frontières  menacées.  En 
même  temps,  l'on  devrait  encore  étudier  la  question  de 
savoir  par  qui  ces  postes  importants  seraient  défendus  ? 
Parle  4«  bataillon  des  Basses -Alpes  seul,  ou  bien  devrait- 
il  être  renforcé  par  la  garde  nationale  locale  ? 

Un  membre  de  la  municipalité  fait  alors  observer  : 
«  que  le  défaut  de   tactique  des  gardes  nationales  ne 


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permcttaot  pas  do  les  placer  en  première  ligne,  îl  serait 
beaucoup  plus  prudent  de  faire  avancer  la  totalité  du 
bataillon  sur  les  différents  postes  frontières  et  que  la 
garde  nationale  de  cette  ville  serait  réservée  pour  rester 
en  seconde  ligne.  » 

La  discussion  ou  verte  à  ce  sujet  fit  décider  :  que  Tétat- 
major,  avec  la  compagnie  Grenudiôre,  se  transporterait 
à  Vacheresse,  comme  le  lieu  le  plus  aucenti'edes  diffé- 
rents postes  du  bataillon  et  que  l'autre  compagnie  ren- 
forcerait les  postes  de  Meillorie  et  de  S^-Gingolph  ;  ces 
deux  compagnies  partiront  d'Evian  à  5  heures  précises. 

Un  autre  membre  fait  encore  une  motion,  par  laquelle 
il  demande  que  le  citoyen  Méfred  délivre  à  la  munici- 
palité les  armes  qu'il  peut  avoir  en  réserve.  Le  chef  de 
bataillon  des  Hautes-Alpes  Méfred  répond  :  qu'il  no 
possède  que  l'armement  régulier  nécessaire  à  ses  trou- 
pes, mais  que  l'on  pourrait  cependant  utiliser  un  certain 
nombre  d'armes,  en  y  faisant  les  réparations  nécessaires  ; 
il  offre  ce  matériel  inutilisé  à  la  municipalité,  qui  arrête 
de  tàive  prendre  immédiatement  ces  armes  et  décide  en 
mémo  temps  que  tout  citoyen  capable  de  contribuer  aux 
réparations  voulues,  sera  requis  de  suite. 

Le  fait  suivant  appelle  ensuite  l'attention  de  la  muni- 
cipalité :«  Le  citoyen  Gaussin,  chasseur  volontaire  de 
la  Rochelle,  actuellement  en  cette  ville  chez  Gabriel 
Cachât,  est  venu  se  consigner  et  se  mettre  en  état  de 
réquisition  pour  le  service  de  la  ville,  attendu  que  son 
état  maladif,  pour  lequel  il  est  ici,  ne  lui  permet  pas  de 
faire  la  campagne.  » 

La  municipalité  arrête  :  qu'il  sera  fait  mention  hono- 


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—  213  — 

rable  de  son  civisme,  avec  inscription  au  procés-verbàl 
des  séances. 

La  municipalité  étudie  ensuite  une  question,  qui  lui  a 
été  soumise  par  le  District  du  département,  concernant 
les  mesures  de  sûreté  à  prendre  dans  le  but  de  pourvoir 
à  la  défense  de  la  rive  française,  quoique  rien  ne  soit  de 
nature  à  faire  prévoir  des  actes  d'hostilité  de  la  part  de 
la  Suisse. 

D'autres  mesures  s'imposant  encore  pour  le  service  de 
la  patrie  menacée,  elle  prend  les  précautions  suivantes  : 
«  la  municipalité  décide  que  chaque  propriétaire  de 
barque,  brigantin  et  autres  petits  bateaux,  seront  tenus 
sous  leur  responsabilité  pour  les  conséquences  et  sous  la 
peine  de  confiscation  desdits  batteaux,  de  les  tenir  en- 
cadenattés  et  aûn  de  ne  p'às  priver  nos  communes  des 
ressources  qui  concourent  à  les  faire  subsister,  elle  ar- 
rête que  deux  petits  batteaux  chaque  jour,  devront 
servir  à  cette  fin,  conduicts  seulement  par  trois  batte- 
liers  ;  qu'ils  ne  pourront  partir  sans  aucune  permission 
de  la  municipalité  qui  désignera  les  objets  du  transport, 
le  nom  des  personnages  qui  devront  se  rendre  dans  le 
même  jour  au  lieu  de  leur  départ  et  seront  tenus  de 
consigner  leur  retour.  » 

Un  membre  observe  que  ce  n'est  pas  sans  un  grand 
préjudice  que  les  pêcheurs  pourraient  se  conformer  à  cet 
arrêté.  En  effet  pour  exercer  leur  profession,  ils  sont 
sou  vent  obligés  d'aller  jusqu'à  moitié  lac,  devant  ensuite 
continuer  leur  route  jusqu'en  Suisse  pour  y  vendre  le 
produit  de  leur  pêche,  ce  qui  rend  leur  retour  pres- 
qu'impossible  pour  l'époque  assignée  ;  que  du  reste  le 


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—  214  — 

Directoire  a  fait  choix  du  citoyen  Cachât  pour  dooner 
les  ordres  nécessaires,  relatifs  à  la  navigation. 

La  municipalité  prenant  en  considération  les  observa- 
tions qui  précèdent  et  avant  de  prendre  une  décision  dé- 
finitive, est  d'avis  d'entendre  à  cet  égard  les  observations 
du  citoyen  Cachât. 

Nous  croyons  devoir  reproduire  en  entier  la  séance  du 
17  août  1793,  dans  laquelle  la  municipalité  Eviannaise 
prend  plusieurs  déterminations,  relativement  impor- 
tantes, donnant  l'expression  exacte,  des  questions  posées 
et  à  résoudre  dans  l'intérêt  de  la  défense  nationale: 
«  sur  l'observation  d'un  membre,  que  par  arrêté  du  Di- 
rectoire du  District  du  13  du  courant,  la  municipalité  fut 
invitée  à  faire  partir  50  hommes  armés  de  la  Garde  Na- 
tionale, pour  le  poste  de  S*-Gingolph  ;  qu'en  exécution 
de  cet  arrêté,  il  se  forma  de  suite  une  compagnie  de  60 
hommes,  sortis  des  différentes  compagnies  aux  fins  de 
remplir  ce  but,  mais  que  par  un  autre  arrêté  du  Direc- 
toire du  District  du  lendemain  14,  le  citoyen  Billiod, 
l'un  de  ses  membres,  fut  député  par  cette  municipalité 
pour,  de  concert  avec  elle  et  le  chef  du  4°»«  bataillon  ca- 
zerné  pour  lors  dans  cette  ville,  iroient  renforcer  les 
postes  de  S*-Gingolph  et  Chàtel  de  préférence  aux  gardes 
nationales  de  cette  commune  ;  qu'il  fut  ensuite  arrêté 
qu'une compîj^nie  dudit  bataillon,  renforceroit  le  poste 
de  S*^-Gingolph  et  que  Tétat-major  avec  la  compagnie 
seroient  destinés  pour  Vacheresse  et  que  le  poste  de 
cette  commune  seroit  confié  à  la  garde  nationale,  par 
les  motifs  exposés  dans  l'intérêt  de  cette  municipalité 
du  15  courant. 

«  La  municipalité  considérant  que  cette  compagnie 


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—  215  — 

organisée  pour  marcher  à  la  frontière  est  entièrement 
restreinte  au  service  de  la  commune,  que  de  sa  forma- 
tion, il  est  résulté  une  désorganisation  totale  dans  les 
autres  compagnies  dont  quelques-unes  se  trouvent  pres- 
que sans  chef,  parce  que  Ton  en  a  sorti  un  grand  nombre 
d'officiers  au  nombre  de  7  et  sous-officiers,  considérant 
que  la  réquisition  de  cette  compagnie  paroit  être  levée 
par  le  départ  des  compagnies  du  4*  bataillon,  qui  se 
sont  rendues  au  poste  destiné  à  cette  compagnie,  choisie 
des  citoyens  pour  son  complément  des  15  hommes  de- 
mandés par  l'arrêté  du  département  du  5  courant,  ce 
qu'elle  ne  pourroit  effectuer  dans  le  cas  ou  elle  resteroit 
en  réquisition  ;  arrête  en  conséquence,  ouï  le  procureur 
de  la  commune,  de  requérir  au  Directoire  du  District  la 
dissolution  de  cette  compagnie  composée  en  grande 
partie  de  gens  mariés,  en  les  faisant  rentrer  dans  leurs 
respectives  compagnies  pour  continuer  le  service  de  la 
commune  et  faciliter  la  levéedes  15  hommes  demandés.  » 

Sur  la  pétition  ci-jointe,  la  municipalité  demande 
au  Directoire  du  District,  si  les  officiers  des  différentes 
compagnies  ne  peuvent  pas  être  élus  conformément  à 
l'art.  4  de  l'arrêté  du  département  du  5  courant,  les 
pétitionnaires  invoquant  l'article  23  de  l'organisation 
des  gardes  nationales.  La  municipalité  arrête  que  copie 
du  présent  sera  communiquée  de  suite  au  Directoire  du 
District  et  charge  son  bureau  de  solliciter  une  prompte 
réponse. 

€  L'an  et  jour  susdit,  la  municipalité  en  conséquence 
de  l'arrêté  du  Directoire  du  District  qui  adhère  à  celui 
de  la  municipalité,  tous  les  deux  de  ce  jour,  considérant 
que  les  mêmes  motifs  qui  y  sont  exposés,  méritent  les 


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—  216  — 

mêmes  observations,  arrête,  ouï  le  procureur  de  la  com- 
mune, que  les  citoyens  mis  en  réquisition  le  13  du  cou- 
rant et  organisés  en  compagnie  le  lendemain  14,  sont 
hors  de  réquisition  spéciale  et  déclare  la  dite  compagnie 
dissoute,  et  que  pour  ce  qui  concerne  le  service  de  la 
commune,  tous  les  Gardes  Nationaux  continuant  à  être 
requis  à  cet  effet,  chacun  dans  leur  compagnie  respec- 
tive, fourniront  à  la  garde  fixée  provisoirement  au 
nombre  de  15  hommes,  la  garde  existante  continuerat 
son  service  jusques  à  demain  à  midi,  qu'elle  sera  relevée 
à  la  même  heure  par  la  compagnie  dont  conviendront 
les  capitaines  ou  lieutenants  respectifs,  qui  en  seront 
prévenus  demain  avant  8  heures  du  matin. 

€  Du  dit  jour  la  municipalité,  ensuite  de  l'arrêté  du  dé- 
partement du  5  courant,  portant  que  le  département  du 
Mont-Blanc  requis  par  le  général  Kellermann,  pour  le 
contingent  de  860  hommes,  à  être  fourni  par  chaque  Dis- 
trict, à  raison  de  leur  population,  celui  de  Thonon  fixé 
à  82  et  le  contingent  de  cette  commune  (Evian)  ayant 
été  fixé  à  15  par  le  Directoire  du  District,  ainsi  qu'il  nous 
en  constepar  une  lettre  du  14  courant,  après  une  longue 
et  réfléchie  discussion,  désirant  se  conformer  en  tant  que 
possible  à  l'article  4  dudit  arrêté,  a  élu  les  citoyens  : 
Pierre  Morand,  Joseph  Deblonay,  Joseph  Bugniet  ca- 
det, François  Delajoux,  Joseph  Chatillon,  Joseph  Vul- 
liez,  Joseph  Dupas,  Jean  Echernier,  François  Georges, 
François  Cachât,  André  le  cadet  fils  de  Pierre  Bonnevie, 
Joseph  Braconnay,  Jean  Pellicier,  François  Granjux, 
Jean  Jacquier  et  attendu  que  la  municipalité,  n'a  pu 
faire  plus  tôt  l'éllection,  vu  que  la  plus  grande  part  des 
éligibles  étoient  en  réquisition  permanente  pour  mar-  • 


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—  217  — 

cher  au  premier  ordre  et  qu'elle  a  été  dans  le  cas  d'at- 
tendre jusqu'à  ce  jour,  la  décision  du  Directoire  sur  cet 
objet,  elle  a  arrêté  de  faire  signifier  le  présent  aux 
susd*»  élus,  pour  se  rendre  à  Chambéry  le  24  au  plus 
tard  et  de  se  présenter  au  Directoire  le  lundi  prochain  19.  » 

Dans  la  séance  du  18  août,  les  citoyens  Blonay  et 
Morand  exposent:  que  leur  situation  est  loin  d'être 
aisée  ;  que  non  seulement  ils  sont  grevés  de  lourdes 
charges  et  qu'ainsi  ils  ne  peuvent  être  rangés  dans  la 
classe  des  citoyens  contemplés  par  l'article  4  de  l'arrêté 
du  département  ;  ils  appartiennent  en  outre  à  la  classe 
des  cultivateurs. 

La  municipalité  arrête,  qu'avant  de  statuer  sur  le 
fond  de  la  question,  elle  transmettra  au  Directoire  du 
District,  pour  lui  demander  son  avis,  la  pétition  présen- 
tée par|  les  citoyens  Blonay  et  Morand. 

Il  est  établi  dans  la  séance  du  19  août  1793,  que 
François  George,  élu  par  arrêté  du  19  juin,  n'a  pas  l'âge 
requis  par  la  loi  ;  il  devra  donc  être  rayé  des  rôles  et 
exempt  de  service. 

La  municipalité  procède  immédiatement  à  son  rem- 
placement en  la  personne  de  Thomas  Guillot. 

Elle  députe  ensuite  le  citoyen  François  Pélicier  (Pe- 
lissier),  afin  de  présenter  les  élus  au  Directoire  du  Dis- 
trict. 

La  municipalité,  vu  l'arrêté  pris  par  le  Directoire  du  Dis- 
trict et  les  observations  qu'il  présente  au  sujet  des  péti- 
tions des  citoyens  Blonay,  Morand,  Echernier  etGranjux, 
décide  de  maintenir  ses  arrêtés  des  17  et  19  du  courant 


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—  218  — 

et  requiert  de  nouveau  «  les  susdits  citoyens  de  se  ren- 
dre sans  faute  pour  le  24  du  courant  à  Chambéry .  » 

A  l'ouverture  de  la  séance  du  20  août  1793,  le  citoyen 
commandant  le  4°*®  bataillon  des  Basses-Alpes,  fait  ob- 
server que  la  compagnie  des  grenadiers  qui  est  à  Va- 
cheresse,  sous  les  ordres  du  lieutenant  Meyer  (ou 
Mejer)  et  la  8°»e  compagnie  envoyée  à  Meillerie,  en  ren- 
forcer le  poste,  ne  paraissent  pas  y  être  d'une  absolue 
nécessité,  et  le  commandement  de  ces  troupes  est  rendu 
très  difficile  pour  lui,  à  cause  de  leur  éloignement  et  de 
la  difficulté  de  correspondre  avec  elles.  «  La  municipa- 
lité considérant  que  ces  observations  paroissent  fondées 
en  égard  aux  avis  reçus,  qu'il  ne  paroit  pas  que  les  pié- 
montais  veuUent  pénétrer  par  ces  montagnes,  qu'au 
contraire  d'après  le  bulletin  du  15  du  président  de  la 
République  du  Vallais,  les  Suisses  arment  ;  considérant 
en  outre  que  par  ce  dernier  motif,  il  est  important  de 
garnir  les  bords  du  lac  et  qu'il  paroit  très  nécessaire 
qu'elles  occupent  cette  ville,  d'où  elles  pourroient  aisé- 
ment se  porter  au  besoin,  arrête,  ouï  le  procureur  de 
la  commune,  que  les  dites  observations  seront  commu- 
niquées aux  administrateurs  du  District.  » 

La  municipalité  accepte  ensuite  le  remplacement  du 
citoyen  Joseph  Blonay,  par  le  citoyen  Estiot  de  S*- 
Jean-de-Maurienne,  à  la  charge,  par  les  intéressés,  de  se 
conformera  l'arrêté  du  17 courant. 

Le  commandant  du  4°»®  bataillon  des  Basses-Alpes, 
venu  de  Vacheresse  à  Evian,  s'empresse  de  prévenir  la 
municipalité,  qu'il  vient  de  recevoir  deux  fourgons  de 
ballots,  contenant  diverses  marchandises  destinées  à 
rhabillement  des  troupes  composant  son  bataillon.  Il 


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—  219  — 

fait  connaître  qu'il  a  déjà  reçu  ces  mêmes  fournitures  et 
qu'ainsi  elles  font  double  emploi;  que  n'ayant  pas  la 
possibilité  de  réunir  le  Conseil  d'administration  du  ba- 
taillon dispersé  dans  les  différents  postes  assignés,  il 
doit  dans  ces  conjectures,  prendre  l'avis  de  la  munici- 
palité. Il  est  en  outre  de  son  devoir  de  lui  faire  obser- 
ver, que  les  fournitures  qu'il  vient  de  recevoir,  ne  peu- 
vent être  conservées  pour  le  bataillon  déjà  antérieurement 
pourvu  ;  qu'il  serait  peut-être  imprudent  de  laisser  des 
fournitures  militaires  aussi  considérables  à  Evian,  les 
moyens  de  transport  manquant  pour  les  conduire  ail- 
leurs, «  si  malheureusement  les  circonstances  nécessi- 
taient leur  départ.  t> 

4c  Sur  quoi,  la  municipalité  arrête,  ouï  le  procureur 
de  la  commune,  d'accorder  acte  audit  citoyen  comman- 
dant de  ses  observations  ci-dessus  et  de  l'autoriser  au 
besoin  de  faire  repartir  lesd.  fourgons,  qui  n'ont  point 
été  déchargés,  en  faisant  faire  un  chargé  aux  dits  voitu- 
riers  et  de  renvoyer  le  tout  à  Grenoble  au  dépôt  de 
l'habillement  des  troupes  et  de  prendre  avec  les  dits 
voituriers  tous  les  arrangements  possibles,  tant  pour 
leur  retour,  que  pour  le  payement.  > 

Le  même  jour,  en  conformité  de  l'art.  16  de  la  loi  du 
24  février  dernier,  la  municipalité  accepte  le  remplace- 
ment de  Joseph  Blonay. 

La  municipalité  a  reçu  hier  (22  août)  une  lettre  du 
Directoire  du  District,  donnant  l'ordre  de  faire  conduire 
à  Versoix,  ou  dans  quelqu'autre  lieu  sûr,  les  équipages 
du  4*  bataillon  des  Basses-Alpes.  Afin  de  se  conformer  à 
cet  ordre,  la  municipalité  a  convenu  avec  le  citoyen 
Gallaz,  en  lassistance  du  citoyen   Bron,-  commissaire, 


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—  220  — 

que  le  transport  dont  s'agit,  à  Versoix,  s'effectuerait 
par  bateau,  au  prix  débattu  et  arrêté  de  275  fr.  en 
assignat. 

Un  extrait  de  la  convention  qui  précède,  sera  inimé- 
diatement  envoyée  au  Directoire,  qui  fera  passer  les 
275  fr.  à  qui  de  droit.  On  luy  fait  observer  la  difficulté 
éprouvée  de  trouver  des  voitures  pour  cette  destination, 
ce  qui  aurait  bien  augmenté  le  coût  de  ce  transport. 

Le  citoyen  Joseph  Cachât  de  cette  commune,  arrêté 
comme  déserteur  piémontais,  à  Meillerie,  au  moment 
où  il  débarquait  et  conduit  devant  la  municipalité 
d*Evian,  déclare  vouloir  servir  sa  nouvelle  patrie  et  de- 
mande un  répit  de  quelques  jours  pour  régler  ses  affai- 
res de  famille.  Une  décision  intervient  aussitôt,  conçue 
en  ces  termes  :  «  considérant  que  comme  inscrit  sur  les 
registres  en  qualité  de  volontaire,  il  est  tenu  de  fait  à 
servir  la  République  et  que  comme  déserteur,  il  est  tenu 
à  la  même  obligation,  vu  que  la  municipalité  est  ins- 
truite qu'il  a  réellement  quelques  affaires  à  régler,  ar- 
rête qu'il  lui  sera  accordé  10  jours  pour  s'en  occuper,  et 
ayant  comparu  de  suite,  le  citoyen  Pierre-AmédéeCayen 
se  rend  caution  dudit  Cachât  et  se  charge  de  le  repré- 
senter à  première  réquisition  ;  à  quoi  la  municipalité 
adhérant,  consent  à  relâcher  le  susd*  citoyen  Cachât, 
qui  a  signé  le  présent  avec  le  citoyen  Cayen.  > 

Le  Directoire  du  District,  a  rendu  les  30  et  31  août 
dernier,  des  arrêtés,  invitant  la  municipalité  d'Evian  à 
fournir  un  certain  nombre  de  gardes  nationaux  de  bonne 
volonté  ;  ils  doivent  concourir  avec  les  grenadiers  du 
district  de  Gex  et  les  gardes  nationaux  de  Thonon,  au 
maintien  du  bon  ordre  et  assurer  la  tranquillité  publi- 


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C[tie  ce  !«'  septembre  et  le  jour  de  la  foire.  La  municipa- 
lité, 80  prêtant  avec  empressement  à  cette  mesure,  ar- 
rête d'envoyer  30  hommes.  Ayant  ensuite  fait  assembler 
les  compagnies,  34  hommes  de  bonne  volonté  se  sont 
fait  inscrire,  ainsi  que  le  capitaine  des  grenadiers 
Morand. 

En  conséquence  la  municipalité  arrête  que  la  liste  des 
34  gardes  nationaux  sera  remise  au  capitaine  Morand, 
qui  devra  les  présenter  au  Directoire  du  District  et  in- 
viter ce  dernier  à  faire  fournir  aux  volontaires,  la  nour 
riture  nécessaire,  pendant  les  deux  jours  que  durera  la 
foire  de  Thonon. 

Sur  la  pétition  du  citoyen  Rey,  tendant  à  ce  que  la 
municipalité,  en  conformité  de  son  arrêté  du  5  août 
dernier,  eut  à  remettre  les  meubles  des  casernes  pour  le 
prix  convenu  et  suivant  Tétat  qui  en  a  été  dressé,  il  ré- 
sulte que  ce  mobilier  consiste  en  10  couvertures,  267 
banquettes  et  50  lits  en  traitieaux^  que  le  citoyen  Rey 
a  fait  emmagasiner. 

4c  La  municipalité  arrête  que  tous  les  dits  meubles  sont 
à  la  disposition  du  citoyen  Rey,  qu'il  est  le  maître  de 
les  retirer  ou  bon  lui  semble  et  que  sa  signature  cy- 
après,  luy  servira  de  reçu  à  la  ditte  municipalité  ;  dé- 
clarant en  outre  ledit  citoyen  Rey  avoir  reçu  lesmeubles 
des  casernes  qui  a  voient  servi  ci-devant  aux  piémontais; 
et  après  compte  fait  avec  ledit  citoyen  Rey  pour  le  prix 
des  dittes  fournitures,  elles  se  sont  trouvé  former  la 
somme  totale  de  1527  liv.  10  s.,  monnoie  de  la  Répu- 
blique. » 

Signé:  Rey. 


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Goosle 


-  Û22- 

Par  un  arrêté  du  10  septembre,  le  Directoire  do  Dis- 
trict ordonnait  le  rétablissement  de  la  compagnie  dis- 
soute par  son  arrêté  du  17  août  dernier.  Un  membre  de 
la  municipalité  fait  observer  que  les  mêmes  motifs  qui 
Ta  voient  poussé  à  solliciter  cette  mesure  existent  encore  : 
4c  que  dès  lors  les  manœuvres  criminelles  qu'ont  mani- 
festé les  habitans  des  montagnes  qui  nous  avoisiment 
et  les  faux  bruits  répandus  par  la  malveillance  sur  l'état 
de  nos  forces  comparées  à  celles  de  nos  ennemis,  pa- 
roissent  avoir  rallenti  la  confiance  générale  ;  en  consé- 
quence le  maintien  de  Tordre  et  Texécution  des  lois 
exigent  que  la  municipalité  conserve  à  sa  disposition  un 
certain  nombredo  citoyens  patriotes,  que  cette  compagnie 
renferme  en  grand  nombre,  qu'il  seroitdonc  nécessaire  de 
faire  ces  observations  au  Directoire,  en  représentant 
aussi  qu'elle  ne  peut  pas  en  fournir  un  plus  grand  nom- 
bre, surtout  pour  être  dans  le  cas  de  faire  un  service 
habituel  hors  de  la  commune. 

«  Sur  quoi  la  municipalité  arrête,  ouï  le  procureur  de 
la  commune  et  prévenant  le  Directoire,  qu'elle  ne  ces- 
sera jamais  de  concourir  de  tous  ses  efforts  à  la  deflfense 
de  l'unité  et  de  l'indivisibilité  de  la  République,  et 
qu'extrait  du  présent  sera  de  suite  envoyé  par  un  exprès.  » 

Le  13  novembre  1793,  la  municipalité,  en  exécution 
des  arrêtés  du  Directoire  du  District,  sous  date  des  1 1 
et  12  du  présent  mois,  arrête  de  requérir  les  citoyens 
de  cette  commune,  composant  la  compagnie  organisée 
le  15  août  dernier,  et  de  leur  donner  l'ordre  de  se  trou- 
ver demain,  à  8  heures,  sur  la  place  de  porte  d'Allin- 
ges,  pour  y  recevoir  les  ordres  qui  leur  seront  communi- 
qués. 


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—  223  — 

Le  14  septembre  1793,  la  municipalité  arrête  :  que  Id 
citoyen  Blonay,  capitaine  de  la  compagnie,  mise  en 
réquisition,  devra  ouvrir  un  registre,  sur  lequel  les  ci- 
toyens de  bonne  volonté  devront  s'inscrire  et  qu'il  de- 
vra transmettre  leurs  noms,  ati  fure  et  mesure  de  leur 
inscription. 

Dans  la  séance  du  15  septembre  1793,  le  citoyen  Bron, 
commissaire,  député  spécialement  par  l'Administration 
de  ce  District  expose  :  qu'il  est  autorisé  à  prendre  les 
mesures  qu'exigent  les  circonstances,  principalement  en 
ce  qui  concerne  «  les  menaces  d'incursion  de  la  part  des 
habitans  des  montagnes  qui  paroissent  diriger  leurs  pas 
sur  la  ville  de  Thonon.  »  Le  Conseil  général  sur  les  ré- 
quisitions du  citoyen  Député,  arrête  :  «  que  les  citoyens 
composant  la  compagnie  du  citoyen  Blonay,  mise  en  ac- 
tivité par  arrêtés  du  Dirc*ctoire  des  10  et  12  courant, 
seront  invités  à  se  rendre  de  suite  à  Thonon  et  que  le 
susd*  citoyen  Blonay  sera  requis  de  réunir  tous  ceux  de 
la  ditte  compagnie  qui  pourront  avoir  des  armes.  > 

Sur  le  même  sujet,  un  membre  observe  :  qu'il  serait 
plus  à  propos  que  la  municipalité  invitât  tous  les  citoyens 
de  cette  commune  de  se  tenir  en  armes  et  prêts  à  mar- 
cher au  premier  signal  ;  d'inviter  aussi  les  municipalités 
et  les  communes  des  campagnes,  voisines  de  nos  monta- 
gnes insurgées,  d'observer  la  plus  exacte  vigilance  et 
d'avoir  des  personnes  aux  aguets,  on  correspondance 
avec  la  commune  d'Evian  et  instruisant  cette  dernière 
des  mouvements  des  ennemis.  En  cas  d'attaque,  ces 
municipalités  et  ces  communes  joindraient  leurs  forces, 
afin  de  les  repousser. 

«  Le  Conseil  arrête,  oui  le  procureur  de  la  Commune 


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qu*en  rapportant  son  arrêté  ci-devant,  elle  adhère  aux 
représentations  ci-dessus,  et  qu'elle  agira  en  conformité 
d'icelles.  » 

Conseil  Général  du  6  Octobre  1793 

<  Dud.  jour  et  an,  la  municipalité  sur  la  proposition 
faitte  par  les  officiers  et  soldats  de  la  compagnie  Grena- 
dière  destinée  pour  les  postes  de  la  Tourronde,  Meilleré 
et  S*^-Gingolph  pour  qu'il  leur  fut  délivré  Tétappe  ainsi 
qu'elle  est  portée  dans  leur  ordre  de  route,  dans  lequel 
il  est  expliqué  clairement,  qu'ils  la  recevront  dans  cette 
commune  et  que  l'étappier  de  Thonon  a  reçu  injonction 
de  la  faire  transporter  ici,  qu'il  est  7  heures  du  soir  et 
que  l'étappier  n'a  point  paru  encore  et  qu'il  est  instant 
qu'ils  reçoivent  leur  subsistance  ou  au  moins  leur  valeur  ; 
la  municipalité,  considérant  qu'il  n'y  a  aucun  étappier 
établi  en  cette  commune,  prenant  en  considération  les 
motifs  sus  exposés,  Arrête,  ouï  le  procureur  de  la  com- 
mune et  du  consentement  des  pétitionnaires,  qu'il  sera 
payé  pour  chaque  ration  d'étappe50  s.,  vu  que  les  den- 
rées sont  chères  et  qp'on  ne  pourroit  pas  fournir  celle  de 
l'etappe  à  un  prix  au  dessous,  qu'en  conséquence  elle 
charge  son  bureau  d'en  faire  le  déboursé  et  que  la  muni- 
cipalité se  pourvoira  de  suite  contre  l'étappier  de  Thonon 
pour  en  obtenir  le  remboursement  et  quant  aux  rations 
de  fourrage,  la  municipalité  les  a  évalué  à  5  fr.  l'une, 
attendu  la  cherté  des  foins  et  la  rareté  de  l'avoine.  > 

Le  7  octobre,  le  municipalité  assemblée,  s'étant  rendu 
compte  que  la  paille  qui  garnit  les  paillasses  de  la  ca- 
serne destinée  au  logement  dos  compagnies  des  gardes 
nationaux  de  Chambéry,  est  brisée  et  inutilisable  ;  que 


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—  225  — 

déjà,  pîir  ce  même  motif  œs  gardes  nationaux  ont  dû 
être  logés  chez  les  particuliers.  La  municipalité,  ne 
pouvant  elle-même  fournir  la  paille  nécessaire  pour  ce 
casernement,  arrête,  que  son  bureau  fera  part  immé- 
diatement à  Tadministration  de  cette  difficulté  et  devra 
solliciter  l'autorisation  nécessaire  pour  se  procurer  de 
la  paille  dans  les  communes.  Le  payement  de  cette 
fourniture  et  les  frais  de  logement  chez  les  particuliers, 
devront  être  supportés  par  qui  de  droit. 

Ce  même  jour,  en  exécution  de  l'arrêté  du  Directoire 
du  District,  la  municipalité  est  autorisée  à  faire  fournir 
par  les  municipes  voisins  la  paille  suffisante  pour  le  ca- 
sernement des  troupes  actuellement  détachées  dans 
cette  commune.  Cette  fourniture  devra  être  prise  de 
préférence  dans  les  maisons  des  individus*  présumés 
émigrés  et  le  citoyen  Pierre  Piccollet  est  spécialement 
député  pour  procéder  en  conformité  de  l'arrêté  sus 
visé. 

Le  commissaire  envoyé  à  la  Grande-Rive  pour  y  faire 
établir  un  corps  de  garde,  en  conformité  de  l'arrêté  du 
Directoire  du  District  du  5  octobre  dernier,  rend  compte 
de  son  mandat  et  fait  connaître,  qd'aprés  les  plus  minu- 
tieuses recherches,  il  n'y  a  trouvé  aucun  emplacement 
propice  à  une  installation  de  genre,  à  part  la  maison  du 
citoyen  Maxit,  actuellement  fermée,  son  propriétaire  se 
trouvant  en  ce  moment  à  La  Chapelle  d'.Abondance. 
Les  propriétaires  des  maisons  voisines  de  cette  habita- 
tion ont  fait  connaître  que  la  seule  chambre  pouvant 
être  utilisée  pour  un  corps  de  garde,  était  garnie  de 
meubles.  «  Sur  quoi  la  municipalité,  tout  bien  considé 
et  observant  la  grande  nécessité  de  prendre  cette  cham- 

i5b 


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bre  podr  n'avoir  pas  trouvé  aucun  autre  emplacement, 
attendu  que  la  maison  est  fermée,  que  le  propriétaire 
est  absent  et  occupe  un  pays  occupé  par  les  rebelles, 
que  par  conséquent  on  ne  peut  lui  en  donner  avis,  arrête 
que  le  Directoire  du  District  sera  consulté  sur  les  moyens 
de  pouvoir  occuper  cet  emplacement  ;  que  son  bureau 
fera  passer  par  exprés  extrait  du  présent.  » 

Lettre  reçue  par  la  Municipalité 

€  De  Meilleré  le    16    Octobre   1793,    l'an    2^  de  la 
lièpichlique  une  indivisible  et  démocratique  : 

4c  Citoyens,  j'onvoyo  dans  le  chef-lieu  de  votre  canton 
3  déserteurs  du  piémont,  2  du  régiment  de  gennevois 
qui  se  nomment  Claude  Dunant  et  Jacques  Contaz,  ori- 
ginaires de  La  Roche,  et  Tautre  du  régiment  de  Savoye 
infanterie,  nommé  Joseph-Marie  Goutry,  originaire  de 
Flumet  ;  je  les  fais  conduire  do  poste  en  poste  à  desti- 
nation, ils  me  sont  parvenus  hier  dans  un  batteau  ve- 
nant de  Vevey,  à  5  heures  après-midi  et  se  sont  pré- 
sentés à  moi  comme  déserteurs. 

Salut  et  fraternité. 

Signé  :  Bovet.  » 

Nous  donnons  maintenant  un  document  rentrant  dans 
le  cadre  de  notre  sujet,  le  : 

4c  Procès-verbal  du  Conseil   Général  du  département 
du  Mont-Blanc,  soies  date  du  24  septembre  1793: 

€  Le  Conseil,  oui  la  pétition  des  gardes  nationaux  de 
Chambéry,  cantonnés  à  S*-Jeoire,  et  de  Tavis  du  pro- 
cureur général  sindic,  arrête  ce  qui  suit  : 


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—  227  — 

Art.   l^^. 

«  A  défaut  de  vins  cantonaux,  le  Directoire  des  Dis- 
tricts d* Annecy  et  de  Carouge,  sont  invités  d'acheter 
des  particuliers  quelques  tonneaux  de  vin  et  de  les  faire 
passer  aux  pétitionnaires,  soit  à  S*-Jeoire,  soit  dans 
tous  les  autres  lieux  où  ils  seront  envoyés,  pour  leur 
être  distribué  à  raison  de  20  s*  le  pot. 

Art.  2. 

4c  L'indemnité  qu'il  sera  dans  le  cas  d'accorder  aux 
vendeurs  sur  le  produit  de  la  vente  de  leur  vin,  sera 
payé  par  le  département. 
Signé:  Chamoux,  président.      Mermoz,  secrétaire,  » 

Réquisition  : 

«  L'administration  de  ce  District,  invite  et  au  besoin 
requiert  la  municipalité  d'Evian  de  faire  fournir  à  tous 
les  citoyens  soldats  cantonnés  dans  l'arrondissement  du 
canton  de  la  dite  ville,  le  vin  nécessaire  pour  l'usage 
des  susd*8  citoyens  soldats  et  officiers  en  conformité  et 
exécution  de  l'arrêté  du  Conseil  général  de  ce  départe- 
ment du  24  septembre  1793.  » 

ThonoD,  le  14  octobre  1793. 

«  Le  16  octobre  1793,  la  municipalité  assemblée,  en 
exécution  de  l'arrêté  du  département  du  Mont-Blanc  du 
24  septembre  dernier,  suivi  de  celui  de  l'administration 
de  ce  district  «  considérant  qu'il  est  notoire  que  le  ci- 
toyen Joseph  Davet  est  propriétaire  d'une  grande  quan- 
tité de  vin,  qu'il  est  le  seul  qui  en  ait  le  plus  dans  cette 
commune,  que  cette  quantité  excède  de  beaucoup  la 
consommation  ordinaire  de  la  maison,  d'autant  plus  que 


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—  228  — 

partie  de  ce  vin  était  destiné  à  passer  à  Tétranger,  ar- 
rête toujours  en  conformité  de  l'arrêté  du  département 
du  24  septembre,  que  le  citoyen  Joseph  Davet  sera 
tenu  de  délivrer  la  quantité  de  deux  chars  de  vin  à  rai- 
son de  20  s.  le  pot,  soit  40  c.  le  quarteron,  mesure  de 
cette  commune,  non  compris  ce  qu'il  en  a  déjà  fourni, 
ensuitte  de  la  réquisition  qui  lui  fut  faite  le  jour  d'hier, 
par  le  citoyen  Baud,  premier  officier  municipal,  à 
laquelle  la  municipalité  adhère  au  besoin  et  qu'extrait 
du  présent  sera  délivré  au  citoyen  Buchard,  comman- 
dant en  cette  ville,  de  même  qu'au  citoyen  Davet. 

«  Et  quant  à  l'indemnité  à  accorder  par  le  départe- 
ment, la  municipalité  et  le  citoyen  Davet  nommeront 
des  experts  pour  fixer  le  prix  du  vin  et  faire  ensuite 
leur  rapport.  » 

Extrait  d'ordre  : 

«  Il  est  ordonné  au  commandant  des  troupes  qui  sont 
en  cantonnement  à  Evian,  défaire  mettre  un  poste  de 
6  hommes  et  un  caporal  au  clos  du  citoyen  Buguiet  sur 
le  chemin  de  Chavanue  au  bord  du  lac  ;  ce  poste  comme 
tous  ceux  qui  ont  été  placés  par  son  ordre,  surveilleront 
avec  exactitude  touslesbatteaux  qui  aborderont,  comme 
ceux  qui  partiront  ;  il  enverra  tous  les  rapports  à  Evian, 
le  16  octobre  1793,  l'an  2  de  la  République. 

Signé.  L'Adjudant-Général:  Seignette.  » 

Le  citoyen  Joseph  Davet  comparait  le  18  octobre  de- 
vant la  municipalité  assemblée  et  présente  les  observa- 
tions suivantes  :  dans  la  livraison  de  vin  qu'il  a  faite  aux 
soldats  cantonnés  dans  cette  ville,  livraison  opérée  sur 


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—  229  — 

les  réquisitions  de  la  municipalité,  une  erreur  s'est 
glissée  dans  les  bons  délivrés  par  cette  dernière.  Ainsi 
le  citoyen  Davet  a  remis  au  lieu  de  la  mesure  le  pot, 
celle  du  quarteron,  ce  qui  constitue  au  préjudice  du 
fournisseur  une  erreur  de  la  moitié  en  moins,  le  pot 
équivalant  à  la  moitié  du  quarteron. 

La  municipalité  donne  acte  au  citoyen  Davet  de  sa 
déclaration. 

Dans  la  séance  du  18  octobre,  le  citoyen  Davet  de- 
mande qu'il  lui  soit  donné  acte  qu'il  n'a  point  refusé  du 
vin  aux  troupes,  se  conformant  ainsi  à  l'arrêté  du  dé- 
partement du  24  septembre  passé. 

«  La  municipalité  considérant  que  le  dit  vin  a  dû  être 
remis  au  citoyen  Gaffe,  excusant  l 'adjudant-major,  a 
fait  mander  à  la  barre  le  dit  citoyen  Gaffe,  lequel  ici 
présent  atteste  que  le  citoyen  Davet  fut  prié  de  venir  à 
cette  Municipalité,  à  l'effet  de  lui  observer  qu'il  ne 
pouvoit  lui  distribuer  le  vin  aux  prix  porté  par  le  dit 
arrêté  Départemental,  attendu  que  la  mesure  de  cette 
commune  excédoit  de  beaucoup  celle  de  Ghambéry, 
observant  en  outre  le  dit  citoyen  Gaffe,  que  du  15  au  18 
du  courant,  il  a  été  livré  par  le  citoyen  Davet  61  quar- 
terons, mesure  de  cette  commune  au  détachement  de  la 
garde  nationale  de  Ghambéry  et  90  quarterons  à  la 
compagnie  des  chasseurs  Rochellois  de  détachement  en 
cette  ville,  qui  n'ont  été  payés  au  dit  Davet  qu'à  raison 
de  20  s.  le  quarteron,  ayant  été  distribué  à  ce  prix  à 
tous  les  soldats  ;  et  comme  le  quarteron  d'Evian  excède 
le  pot  de  Ghambéry,  c'est  le  motif  des  réclamations  du 
citoyen  Davet  pour  en  obtenir  indemnité  du  département 
toujours  en  conformité  de  son  arrêté  et  le  dit  citoyen 


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—  280  — 

Davot  offre,  pour  s'y  conformer  toujours  mieux,  sous  la 
réserve  de  rindemnité,  de  livrer  à  la  troupe  dès  ce  jour 
le  vin  qu'il  a  été  requis  de  délivrer  par  arrêté  de  la  Mu- 
nicipalité du  16  courant  ; 

»  Sur  quoy  la  Municipalité,  ouï  le  procureur  de  la 
commune,  vu  la  déclaration  sus  désignée,  arrête  d'ac- 
corder au  dit  citoyen  Davet  acte  que  dessus.  > 

Délibération  du  Séjour  de  la  5«  décade  du  i«'  mai 
de  l'an  2^  de  la  R.  F. 

La  Municipalité  cherche  les  moyens  les  plus  prompts 
pour  procurer  l'exécution  du  décret  du  8  courant,  soit 
le  7«  jour  de  la  2«  décade,  relativement  à  la  levée  de  6 
chevaux  par  canton.  Par  l'art.  5  du  décret,  les  chefs-lieux 
sont  plus  spécialement  chargés  de  cette  levée. 

Sur  cet  objet,  la  Municipalité,  consiâérant  qu'elle  Bfe 
peut  déterminer  le  choix  des  6  chevaux  sans  le  concours 
et  l'avis  des  Municipalités  de  son  arrondissement  et 
qu'en  vertu  du  même  article,  elles  doivent  se  concerter 
pour  fournir  ce  nombre  déterminé  pour  l'époque  du 
1«"^  novembre,  jour  auquel  ils  doivent  être  rendus  à 
Vienne,  avec  leur  équipement  :  «  Considérant  en  outre 
que  les  Municipalités  sont  à  cet  égard  tenues  de  faire 
transporter  et  livrer  dans  le  terme  susdit,  la  quantité 
d'avoine  nécessaire  pour  nourrir  pendant  un  an  le  nom- 
bre de  chevaux  qu'elles  doivent  fournir,  arrête,  ouï  le 
procureur  de  la  commune,  que  toutes  les  Municipalités 
de  l'arrondissement  de  ce  canton  sont  invitées  de  se 
réunir  en  ce  chef-lieu,  lundi  21  du  courant,  à  9 heures,  et 
d'envoyer  chacune  des  membres  d'icelle;  la  Municipalité 


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—  231  — 

charge  son  Bureau  de  faire  passer  extrait  du  présent 
dans  le  jour  ou  au  plus  tard  dans  la  matinée  de  demain 
à  chaque  municipe  ;  le  Bureau  de  cette  Municipalité 
restant  responsable  du  défaut  d'avertissement.  » 

Le  10'  jour  de  la  S'^  décade  du  l^r  mois  de  Tan  2  de  la 
République  Française,  eut  lieu  à  la  maison  commune, 
une  séance  sur  le  sujet  traité  dans  la  précédente  séance  : 

«  Conformément  à  l'arrêté  de  cette  Municipalité  du 
8®  jour  de  cette  décade  et  délibérant  sur  Texécution  du 
décret  de  la  Convention  Nationale  du  8«  octobre,  soit 
le  7e  jour  de  la  2®  décade,  aux  personnes  de  Charles 
Thiébaud,  Joseph  Bugniet,  Pierre  Grilliet,  officiers 
municipaux  de  cette  commune,  Bernard  Burquier  et 
Jean  Fleury,  officiers  municipaux  de  St-Paul,  Joseph 
Christin,  maire  de  Vinzier,  Pierre  Biraud,  maire  de 
Bernex,  Antoine  Blanc,  ï^rançois  Chevallay,  Guérin 
Betemps,  Pierre  Servez,  François  Pinget,  officiers  mu- 
nicipaux de  Bernex,  François  Roch,  officier  municipal 
de  Thollon  et  Joseph  du  Four,  procureur  do  la  commune 
du  lieu,  François  Joennet,  maire  de  Larriuge,  Pierre 
Blanc,  maire  de  Publier,  Amed  Buttay,  notable  de 
Neuvesselle,  Amed  Bouchex,  officier  municipal  de  Ma- 
xilly,  Jean  Lugrin,  maire  de  Lugrin  ;  les  communes  de 
Féterne  et  de  Marin,  n'ayant  fait  aucune  députation, 
le  secrétaire  de  cette  première  comparaissant  dit  que  la 
Municipalité  n'ayant  pu  être  convoquée  en  raison  de 
l'absence  de  plusieurs  de  ses  membres,  et  quand  à  celle 
de  Marin,  le  Bureau  produit  une  lettre  dud.  lieu  qui 
annonce  l'incapacité  de  la  commune  de  fournir  aux  objets 
portés  par  le  décret  et  son  éloignement  à  paraître  à  la 
convocation,  il  est  arrêté  : 


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—  232  — 

«  1«  Que  rassemblée  délibérera,  quoiqu'il  manque  des 
députés  de  Féterno  et  de  Mario. 

<  2oQue  les  communes  de  Féterne  et  de  Marin  concou- 
reront  à  la  fourniture  comme  les  autres  en  proportion  de 
leur  faculté. 

«  3°  La  matière  mise  en  délibération  sur  le  mode 
d'effectuer  la  dite  levée,  il  est  arrêté  quMl  sera  nommé 
deux  commissaires,  l'un  pour  l'achat  des  chevaux,  aux- 
quels il  sera  facultatif  de  s'adjoindre  un  expert  visiteur, 
l'autre  pour  se  procurer  les  sabres,  pistollets  et  bottes. 

«  4«  Que  chaque  municipalité  sera  tenue  de  donner 
aux  commissaires  la  note  des  personnes  qui  pourront 
préférablement  à  d'autres,  fournir  les  chevaux,  les 
bottes,  sabres  et  pistollets. 

«  5°  Que  chaque  commissaire  recevra  pour  sa  vacca- 
tion  dix  francs  par  jour. 

«  G®  Que  lesdits  commissaires  seront  tenus  de  faire 
conster  leurs  marchés  par  devant  la  Municipalité  du 
lieu  où  le  marché  se  concluerat  et  qu'ils  en  feront  dres- 
ser procès- verbal. 

«  7°  Le  citoyen  Guillot  est  nommé  commissaire  pour 
l'achat  des  chevaux  et  la  Municipalité  d'Evian  est 
chargée  de  l'achat  des  pistollets,  sabres  et  tottes. 

<c  8®  Quand  à  l'objet  de  l'avoine  à  fournir  pour  la  nour- 
riture d'un  an  de  chaque  cheval  qui  monte  par  approxi- 
mation à  la  quantité  de  400  couppes,  mesure  deThooon, 
la  discussion  ayant  été  très  vive,  la  Municipalité  de 
cette  commune  représente  qu'il  ne  s'en  sème  point  dans 
l'étendue  de  son  territoire,  celle  de  Publier,  Neuvesselle, 
Maxilly,  Lugrin,  St-Gingolph  et  Novel  déclarent  n'en 
pas  avoir,  celle  de  Larrioge  qu'une  très  petite  quantité, 


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—  233  — 

quant  aux  autres  présentes,  elles  en  fourniront  leur  con- 
tingent à  rate  de  la  taille  et  rien  de  plus  ainsi  qu'elles  le 
déclarent. 

«  9®  Que  les  commissaires  chargés  de  Texécution  des 
objets  portés  art.  7,  seront  tenus  de  l'effectuer  dans 
trois  jours  et  de  les  faire  conduire  en  cette  ville. 

«  10«  L'administration  de  ce  district  sera  consultée 
dans  le  jour  sur  la  disposition  de  l'art.  8  du  présent 
arrêté. 

«  11°  Enfin,  il  est  arrêté  que  le  présent  sera  signifié 
aux  municipalités  de  Féterne  et  Marin  qui  n'ont  point 
comparu  ». 

Le  l^f  jour  de  la  l"*®  décade  du  2«  mois  de  l'an  2,  la 
Municipalité,  ensuite  de  l'arrêté  du  Directoire  de  ce 
district  du  9«  jour  de  la  dernière  décade  du  1«'  mois,  sur 
la  réclamation  du  citoyen  Maxit,  portant  injonction  à  la 
Municipalité  de  faire  évacuer  de  suite  la  maison  occupée 
par  le  corps  de  garde  établi  à  la  Grande-Rive  ;  la  mu- 
nicipalité objecte  qu'il  est  inexact  d'affirmer,  comme  le 
soutient  le  citoyen  Maxit  qu'il  y  existe  d'autres  empla- 
cements favorables  pour  l'établissement  d'un  corps  de 
garde;  qu'il  y  a  un  besoin  urgent  d'occuper  cette  chambre 
parce  que  les  minutieuses  recherches  auxquelles  on  s'est 
livré,  établissent  qu'aucun  autre  local  ne  peut  remplir  le 
but  que  l'on  s'est  proposé.  En  effbt  les  familles  de  ce 
hameau  y  sont  logées  fort  à  l'étroit,  eu  égard  à  sa  popu- 
lation, relativement  considérable.  Il  est  bon  de  remar- 
quer en  outre,  que  le  local  sur  lequel  l'on  avait  primitive- 
ment jeté  les  yeux,  n'est  pas  approprié  à  la  surveillance 
des  bateaux  et  des  passagers,  que  son  état  actuel  fait 


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—  234  — 

craindre  des  incendies,  exigerait  de  nombreuses  et  coû- 
teuses réparations  longues  à  faire,  ainsi  qu'il  en  conste 
par  la  visite  des  lieux,  opérée  avant-hier  par  lescitojens 
Maxit  et  Thiébaud. 

Par  les  motifs  qui  précédent,  la  Municipalité  «  invite 
le  Directoire  de  ce  district  de  faire  reconnaître  les  dits 
emplacements  et  il  résultera  que  la  maison  du  citoyen 
Maxit  composée  de  plusieurs  chambres  est  la  plus  vaste 
et  celle  où  on  peut  loger  sans  crainte  d'incendie.  » 

Extrait  des  Registres  des  Délibérations 
du  Conseil  Général  du  District  de  Tlionon  : 

(  Séance  du  23  octobre  1793,  l'an  2  de  la  R.  F.) 

«  Un  membre  annonce  que  le  bataillon  du  Rhône  et 
Loir  arrive  ce  matin  et  que  le  général  Verdelier  laisse  à 
cette  administration  le  soin  d'en  distribuer  la  force  dans 
les  endroits  où  elle  sera  jugée  nécessaire  ;  l'administra- 
tion après  avoir  pris  l'avis  du  commandant  du  dit  batail- 
lon et  de  la  municipalité  de  cotte  ville,  arrête  ouï  le 
procureur  siudic,  que  3  compagnies  du  dit  bataillon  se 
rendront  à  Evian  dans  le  courant  de  ce  jour,  où  elles 
resteront  cette  nuit,  que  l'une  d'icelle  fera  le  service 
ordinaire  avec  la  compagnie  des  chasseurs  Kochellois 
et  fourniront  entr'elles  deux,  un  poste  de  12  hommes  à 
Amphion  et  un  autre  de  10  hommes  à  la  Grande-Rive, 
qu'une  compagnie  du  d.  bataillon  restera  à  la  Tourronde 
et  fournira  un  poste  de  15  hommes  à  la  petite  Rive, 
que  l'autre  compagnie  sera  répartie  à  Meillerie,  10 
hommes  à  Novel  et  le  surplus  à  St-Gingolph  ;  arrête  de 
plus  qu'une  compagnie  partira  de  cette  ville  demain, 


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—  2:35  — 

pour  se  rendre  à  Lullin,  où  elle  fera  le  service  ordinaire 
et  que  le  surplus  du  bataillon  restera  provisoirement  à 
Thonon. 

S.   BÉTEMPs,  Vice- Président j 
Favrat,  Procureur-Sindic, 
Deleschaux,  Secrétaire.  » 

Extrait  de  Consigne 
pour  le  bataillon  de  Rhône  et  Loire  : 

€  Le  commandant  de  chaque  poste  aura  pour  consigne 
et  surveillera  à  ce  que  les  hommes  qui  lui  sont  confiés  : 

«  1»  Ne  laissent  partir  aucun  bateau  ou  barque  (ceux 
des  pêcheurs  n'allant  pas  au-delà  de  la  portée  de  la  vue, 
exceptés),  sans  que  le  propriétaire  ait  préalablement 
fourni  son  chargement  à  une  visite  qui  sera  scrupuleu- 
sement, mais  toujours  honnêtement  dirigée  par  le 
commandant,  autorisé  à  faire  la  saisie  de  tous  les  objets 
prohibés  à  la  sortie,  dont  il  sera  fait  distribution  au 
profit  et  en  conformité  de  la  loi. 

«  2®  Qu'il  se  fasse  régulièrement  dans  la  nuit  des 
patrouilles  pour  prévenir  des  embarquements  et  des 
débarquements  clandestins  et  faire  toutes  arrestations 
et  traduction  en  ce  chef-lieu  de  personnes  regardées 
comme  suspectes. 

«  30  Que  tout  bateau  venant  do  l'autre  rive  soit  exa- 
miné et  fouillé  scrupuleusement,  ainsi  que  les  individus 
qu'il  contiendra  et  tous  étrangers  arrivant  par  iceux 
seront  conduits  céans  pour  y  être  leur  passeport  vérifié. 

«  4«  Enfin  il  procurera  l'exécution  des  lois,  la  pros- 
périté de  la  République  et  propagera,  autant  qu'il  sera 


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—  236  — 

en  lui  les  principes  sacrés  de  notre  révolution,  référera 
de  toutes  ses  opérations  par  des  procès- verbaux  en  forme. 
«  Les  Municipalités  acquiesceront  à  peine  de  déso- 
béissance aux  réquisitions  conformes  au  bien  public  qui 
leur  seraient  faittes  par  le  commandant  de  chaque  poste 
au  moyen  de  la  seule  exhibition  du  présent  dont  extrait 
à  cet  effet  sera  délivré  incessamment,  ainsi  que  pour 
être  mis  en  exécution  dans  tout  son  contenu. 

«  S.  BiLLioD,  faisant  f,  de  Président. 

«  Députation  ; 
«  CLambéry,  5  octobre  1793  de  la  R  une  et  indivisible  ; 

«  Les  représentants  du  peuple,  envoyés  par  Tarmée 
des  Alpes  sur  le  décret  de  la  Convention  Nationale  qui 
ordonne  la  recette  en  nature  des  impositions  foncières, 
ainsi  que  l'établissement  de  Magasins  Nationaux,  nom- 
ment à  cet  effect  comme  directeur  de  ces  magasins  et 
recette,  dans  le  département  du  Mont-Blanc,  le  citoyen 
François  Babin  de  Rumilly  avec  ordre  de  conster  ses 
pouvoirs  et  nomination  par  devant  les  autorités  consti- 
tuées du  département  et  district  de  son  ressort,  ainsi 
qu'au  Ministre  de  la  guerre  et  à  celui  de  Tintérieur, 
en  y  joignant  son  certificat  de  civisme  visé  par  la  Muni- 
cipalité de  sa  commune,  par  le  directoire  du  district  et 
de  département,  ainsi  qu'un  certificat  do  la  Société 
populaire  de  Rumilly.     «  Signé  :  Simond  et  scellé. 

«  7  octobre  1793. 

«  S.  Chamoux,  Président  et 
Mermoz,  Secrétaire, 

Evian-les-Bains,  le  12  Décembre  1898. 

Albert  DUPLAN. 


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DOCUMENTS 


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—  239  — 
DOCUMENT   No  1 


1559.  19  Août.  —  Arrêt  pour  Thomas  Vallée  serrurier 
pour  Jouir  des  préhéminences  de  marqueur  des  mesures. — 
156i .  2  Août,  —  Mandat  pour  Thomas  Vallée  à  cause 
des  mesures  quil  a  marquées.  (Archives  de  la  Chambre. 
Turin.--  Arrêts  de  la  Chambre.  Vol.  7«^.  P,  18  et  202^). 

Presens  Mess"  M«»  Jean  Carra  et  Hugues  Michaud 
maistres  et  auditeurs. 

Dud^  jour  19*»  d'Aost  1559  de  releuô. 

Sur  la  requeste  de  M®  Thomas  Vallée  serrurier  afin  de 
jouyr  des  préhéminences  et  office  de  marqueur  de  mesures 
ainsi  que  il  en  a  osé  jusques  a  ores  suyuant  les  lettres  a 
luy  octroiees  par  feu  monseigneur  Charles  duc  de  ce  païs 
La  Chambre  a  continué  le  suppliant  en  la  charge  et  ferme 
de  marquer  et  signer  toutes  mesures  selon  lesd'^  lettres 
pour  trois  ans  prochains  commencez  au  diziesme  juilliet 
dernier  passé  moiennant    deux    florins   par   an. 

Samedi  2^  jour  d'Aost  1561  de   matin. 

Presens  Mess"  Jean  Carra  Hugues  Michaud  et  pierre 
Sautier  maistres. 

Sur  vn  rôle  présenté  par  Thomas  VaHée  marqueur  des 
poix  et  mesures  en  cette  ville  de  Chambery  contenant  le 
nombre  des  mesures  par  luy  marquées  pour  les  greniers  à 
sel  deuement  certifié  à  la  fin  d'icelluy  par  Jeanpierre  blanc 
fermier  de  la  gabelle  dud^  sel  du  trentiesme  de  juilliet 
dernier  auec  vn  marc  de  plomb  par  luy  fourny  pourenuoyer 
a  bourg  La  Chambre  attendu  le  marché  fait  auec  led^ 
Thomas  Vallée  a  ordonné  au  trésorier  de  Sauoie  de  paier 
et  deliurer  aud*  Thomas  pour  lesd*«  mesures  la  somme  de 
nouante  trois  florins. 


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DOCUMENT  No  2 


1545.  29  janvier.  —  Requête  et  lettres  de  constitution  de 
Marqueur  des  poids  dans  le  comté  de  genevois  et  baronie 
de  Foucigny  en  faveur  de  Pierre  à  feu  Charles  Rassat 
bourgeois  d'Annecy,  (Archives  de  la  Chambre,  Turin. 
Registres  dea  Abergemens  etc.  du  Genevois,  —  Années 
1541  à  1545.  Vol.  9.  Page  146r). 

A  votre  excellence  est  expousé  de  la  part  de  pierre  rassat 
fils  de  feu  charles  rassat  fourgeur  et  serrurier  de  ceste 
vostre  ville  d'Annecy  comme  il  fust  député  maystre  pour 
fere  et  arraysoner  les  poys  et  leuraulx  en  vous  pais  tant 
conté  de  genevoys  que  baronnies  de  foucigny  et  beaufort 
mandement  de  fauerges  et  vgine  sousletrent  (1)  etseruyde 
six  solz  annuelz  durant  ladministration  dudit  office  et 
dailleurs  comme  est  contenu  aux  lettres  patentes  quil 
produict  concédées  par  messeig^^  de  bonne  memoyre  très 
Illustres  princes  et  seig'^  vous  prédécesseurs  Si  et  II  que 
alant  de  vie  a  trespas  led'  Charles  FUissat  pour  aultant  que 
led'  pierre  et  aultres  ses  frères  encoures  estoient  pour  Ihors 
en  aage  de  pupillayre  lad**  charge  fust  bailliez  et  a  ce 
député  feu  maystre  Vincent  Proussel  lequel  a  administre 
led'  office  jusques  a  son  deces  doupius  lequel  led'  office  a 
vacque  et  led^  expousant  qui  est  venu  en  bon  aage  est 
expérimente  en  la  fourgerie  suyvant  l'art  de  son  dit  père 
Supplie  très  humblement  playse  a  la  forme  desd^^  lettres 
concédées  a  sond*  feu  père  ladmettre  aud'  office  auec  les 
priuilèges  preheminences  et  commodités  ordinayre  et 
charge  a  ce  requise  Soy  offrant  de  mesme  poyer  annuelle- 

(1)  Tren,  Vectigal,  vieux  terme  de  coutumes...  du  latin  J,ribu- 
tum.  Richelet.  Tom.  3*. 


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—  241  — 

ment  les  seruis  pour  ce  accoustume  et  Illuy  recognoystre 
comme  auoyt  faict  sond*  père.  Et  d'ailleurs  comme  plaira  a 
votre  excellence  que  dieu  veuille  preseruer  et  garder. 

Charlotte  dorléans  duchesse  denemour  contesse  douayere 
degenenoys  ayant  la  garde  et  administration  etc.  et  noble 
gouuernement  de  notre  très  chier  et  bien  ame  filz  Jacques 
de  Sauoye  duc  de  Nemours  etc....  A  vng  chascun  soyt 
notoyre  et  manifest  que  avons  veu  en  notre  chambre  des 
comptes  de  geno  noys  par  noz  treschers  bien  amez  et 
feaulx  conseilliers  les  président  et  maysires  d'icelle  nostred** 
Chambre  la  requeste  cy  soubz  attachée  ensemble  lettres 
patentes  en  icelle  relates  auec  les  présentes  attachées 
veulliant  soubuenir  a  nouz  soubget  pour  éviter  le  dommage 
que  au  pupillayre  a  deffaut  de  arraysonler  les  poys  et 
liuraulx  de  noz  pays  peult  aduenir  Estant  aussi  bien  Infor- 
me lesd'  noz  treschiers  bien  âmes  feaulx  de  nostred** 
Chambre  de  la  preudhomie  vertu  facoulte  et  expérience 
de  pierre  filz  de  feu  Charles  rassat  suppliant  notre  subget  et 
bourgeoys  de  ceste  notre  ville  d'Annessy  Icelluy  a  cest 
efïest  avons  estably  crée  députe  et  constitue  et  par  ces 
présentes  establissons  créons  députons  et  constituons 
durant  le  temps  quil  nous  playra  et  notre  bon  vouloir  sera 
et  led'  suppliant  se  portera  en  homme  de  bien  en  lexercice 
dud'  office  maystres  onuries  pour  arraysonner  et  fere  les 
poys  en  nozd'»  pays  Et  II  procède  de  droyt  et  rayson  comme 
le  cas  le  Requerra  Et  en  tout  et  partout  exercer  et  fere 
sellon  la  forme  et  teneur  desd"»  lettres  sus  mentionnées 
jadis  concédées  a  feu  charles  rassat  père  dud*  suppliant 
avec  les  commodités  charges  prouffist  et  honneurs  sembla- 
bles questoient  aud'  feu  Charles  concédés  a  la  charge  aussi 
que  led^  suppliant  poyera  annuellement  durant  le  temps  de 
sond'  office  six  solz  genevois  de  seruis  annuel  et  iceFuy 
servis  recognoistre  aux  mains  de  nostre  très  cher  et  bien 

i6b 


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—  24â  — 

âme  noz  commissayre  de  notre  mandement  d'Anneâsy  a  la 
forme  desd*^«  lettres  Mandant  a  cest  effect  a  nozd^«  très 
chiers  et  bien  amez  et  feaulx  conseillers  les  président  et 
maystres  de  notre  d**  Chambre  aux  bailijz  de  genevoys  et 
foucigny  Chastellain  d'Annessy  et  auttres  noz  subalternes 
ou  leurs  lieutenants  a  tous  noz  subjects  et  aultres  a  quil 
appertiendra  et  a  vng  chascun  diceulx  a  poyne  de  cent 
liures  genevoysfts  pour  vng  chascun  inférieurs  a  ceulx  de 
nostred"  Chambre  par  le  suppliant  de  bien  vser  dud*  office 
et  daillieurs  comme  est  requis  ces  présentes  noz  lettres 

tiennent  obseuent  etc Donné  Annessy  nonobstant  notre 

absence  car  ainsy  auons  commande  estre  faict  ce  vingt- 
neufuiesme  dejanuier  mil  cinq  cens  quarante-cinq. 
Par  mad*  dame  à  la  relation  de  Mess" 

FRANÇOIS  DE  MICHALLIE 

seig*'  doultrechese 
Président 

CLAUDE  MIGGARD 

des  maystres  auditeurs 

de  la  chambre  des  comptes  en  genevois. 
Nota  que  aud»*  Rassat  ont  estes  Remises  douze  pierres 
pour  fere  lesd'**  poys  dont  les  vnze  sont  de  pierre  auec  leurs 
boucles  et  la  dernière  de  fer  desquelles  la  1*"*  poyse  XI 
luires.  —  La  2^'  XXXI  li.  —  La  3"  XXV  li.  —  La4«  VIIJ 
L.  —  La  5«  VU  Liv.  —  La  6^  VJ  Luires.  —  La  7MIIJ  liv. 
—  La  8"  IIJ  Li.  —  La  9«  IJ  Liv.  —  La  10«  J  luire.  --  La  11« 
J  liv.  Et  la  12*  de  fer  J  liv.  desquelles  sera  tenu  rendre 
compte.  Luy  ont  estes  aussi  Remises  deux  marques  de  fer 
Lune  des  armes  de  monseig*'  et  Taultre  de  madame. 


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—  243  — 
DOCUMKNT  No  3 


1553,  24  octobre,  —  Lettres  de  constitution  de  Marqueurs 
des  poids  dans  le  Genevois  ^  Foucigny  et  Beaufort  en 
faveur  de  M^'  Nicolas  Poentet  3f '•  serrurier  et  bourgeois 
d'Annecy.  Il  succède  à  Charles  Rassat.  — 1569.  6  juillet. 
—  Mêmes  lettres  pour  Jlf«»  pierre  fils  de  feu  Nicolas  son 
père  à  qui  il  succède.  (Archives  de  la  Chambre.  Turin. — 
Reg^^  des  Abergem^  constit^^  d'office  du  Genevois. — 
Années  1549-1555.  Vol.  11.  Page  92.  —  Années  1562- 
1574.  Vol  15.  Page  78. 

Jaques  de  Sauoye  duc  de  Nemours  conte  de  genève 
geneuoysetc.  A  tous  ceux  qui  ces  présentes  lettres  verront 
salut  Scauoir  faisons  comme  de  la  part  de  notre  ame 
nycolas  poentet  serrurier  borgoys  de  ceste  notre  ville  dan- 
nessy  II  nous  seroit  esté  présenté  Requeste  en  notre 
chambre  des  comptes  de  geneuoys  narrant  par  icelle  comme 
loffice  de  maistre  des  poys  a  crochet  et  leuraulx  de  nozd^* 
conte  de  geneuoys  peys  de  foucigny  et  beaufort  estoit  a 
présent  vacant  par  le  trespas  de  feu  pierre  Rassat  en  son 
viuant  maistre  desd^^  poys  Suppliant  et  requérant  dicelluy 
office  estre  pourueu  auec  ses  droits  preheminences  et  ap- 
partenances Laquelle  veue  et  visitée  par  noz  très  chers 
et  bien  amez  et  feaulx  conseillers  les  président  et  maistres 
de  nostred»»  chambre  des  comptes  Et  considère  le  contenu 
dicelle  pour  obuier  aux  abus  que  journellement  se  commec- 
tent  en  noz  dits  peys  sur  les  marchandises  a  cause  desd^^ 
poix  pour  nen  estre  bien  exchandillies  et  marques  dont 
noz  subgectz  et  toute  la  chose  publicque  en  sont  grande- 
ment intéressez  ainsi  que  nous  a  esté  Remonstre  par  notre 
cher  et  bien  ame  procureur  fiscal  Pour  ces  causes  et  aultres 


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—  244  — 

bons  Respectz  et  considérations  a  ce  nous  mouuans  En 
ensuyuant  sur  ce  la  desliberation  desd'«  de  noz  comptes 
Et  après  auoir  ouyt  notred'  procureur  fiscal  pour  cest 
ëffect  appelle  en  riostred"  chambre  et  informe  aussi  des 
ëens  sodffisiirice  prôudhomie  capacité  et  expérience  dud' 
hycôhls  poenlet  Icclliiy  pdenlet  avons  fait  créé  constitue  et 
ëstablls  faysôns  créons  donsUtuons  et  establissons  par  ces 
^i^ésenle  màistre  desd^''  poys  et  levi:*aulx  en  nousd'*^  peyâ  de 
^enedôys  foûcigny  et  beaufort  et  leurs  Ressortz  aux  hon- 
HeUrs  (îhârgesJ  droictz  prouf fi ts  auctoritez  preheniinences 
et  Commoditez  accoustumes  et  aud'  office  appartenantz  Et 
de  par  manière  de  prouision  pour  vng  au  tant  seulement  a 
commencer  des  la  dacte  et  expédition  des  présentes  Et  en 
oultre  tant  quil  noz  pleyra  et  jusques  a  ce  que  par  vous 
aultrementen  soit  pourueu  Pour  icelluy  office  de  niaistre 
des  poys  auoir  jouys  et  exercer  auec  pouoir  et  puissance 
de  faire  lesd^^  poys  et  levraulx  et  iceulx  araysonner  ex- 
chandillier  marquer  et  adjuster  justement  et  esgalement 
ainsi  qu'il  est  de  besoing  jouxte  la  coustume  des  lieux  sans 
toutes  foys  y  fere  ny  commettre  abut  ou  concussion  quel- 
conque pourueu  que  aultre  ne  soit  desia  par  nous  pourueu 
dud^  office  Et  a  la  charge  que  led'  poentet  sera  tenu  nous 
pa^^er  annuellement  durant  le  temps  quil  aura  et  tiendra 
led^  office  la  somme  de  six  solz  monnoie  de  Sauoye  es 
mains  de  notre  bien  ame  chastellain  et  fermier  de  notred' 
ville  et  mandement  dannessy  présent  et  aduenir  au  mesme 
terme  et  tout  ainsi  quil  nous  estoit  acoustume  payer  led 
feuRassatenson  viuantM^desd^^poysaussiet  de  recognois- 
treled^  office  a  nous  et  ez  nostres  ez  mains  de  noz  commis- 
saires dud*  Annessi  en  cas  quil  jouist  dicelluy  office  oultre 
led'  temps  dune  année  a  luy  baillée  Et  lequel  poentet  a 
preste  le  serment  entel  cas  Requis  et  accoustume  es  mains 
desd's  de  noz  comptes  Si  donnons  en   mandement  etc.... 


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—  245  — 

données  Annessy  nous  absent  car  ainsi  Tauons  commandé 
fere  le  24"  jour  du  mo^^s  d'octobre  Tan  de  grâce  1553. 

Pour  Monseigneur  a  la  requeste  des  s*'''  francois  de 
Michallie  seig^  d'oultrecheze  président  henry  pelard  seig"" 
du  noyer  Loys  machard  s*"  de  Chasseyts  m^'*  et  auditeurs 
des  Comptes  de  Genevois. 

Inventaire  des  pierres  et  marez  Remis  a  maistre  nycolas 
poentet  maistre  de  poiy  et  liuraulx  le  sixième  jour  de 
nouembre  1553  par  mons*"  le  président  des  comptes  et  les- 
quelles led'  poentet  a  promis  restituer  quant  en  sera 
requis  (1). 

Premièrement  vne  pierre  de  charneron  auec  sa  bocle 
pesant  44  liures 

Aultre  auec  sa  bocle  de  30     id. 

id.  id.  25     id. 

id.  id.  8     id. 

id.  id.  6    id. 

Aultre  aussi  de  6  liures  auec  sa  bocle 

id.   auec  sa  bocle  de  4     id. 

id.  id.  6     id. 

Quatre  aultres  petites  pierres  auec  leurs  bocles  non  mar- 
quées. 

Aultre  petite  sans  bocle  dune  Hure 
Plus  vne  aultre  de  fonde  de  cuiure  pesant  une  Hure 
Plus  le  ponsons  des  armes  de  monseigneur  pour  mar- 
quer lesd^**  liuraulx.  Pointet. 

Leitrea  de  constitution  de  Af'"  des  poix  et  liuraulx  en 
genenoys  faucigny  et  heaufort  au  prouffit  de  pierre 
poentet. 

Jaques  de  Sauoye  etc..  scauoir  faisons  que  ce  jourdhuy 

(1)  Nota  quelles  auoient  esté  rendues  par  la  mère  de  feu  pierre 
Rassat  auparavant  M«  desd*'  liuraulx. 


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_  246  — 

datte  des  présentes  Receu  auons  en  notre  chambre  des 
comptes  de  geneuoys  Ihumble  supplication  et  requeste  de 
pierre  filz  de  feu  ny colas  poentet  luy  viuant  serrurier 
bourgeois  de  nostre  ville  dannessy  et  par  nous  constitue 
maistre  des  poix  et  liuraulx  ez  nousd*»  pays  de  geneuois 
foucigny  et  beaufort  Narrant  par  icelles  comme  led^  estât 
est  Taccant  par  le  deces  et  trespas  de  sond*  feu  père  qui 
lauroit  tenu  jouy  et  vse  à  la  forme  de  noz  lettres  que  Luy 
en  aurions  octroyé  desquelles  nous  a  faict  ostension  Nous 
suppliant  et  requérant  très  humblement  le  voulloir  prouuoir 
dud'  office  et  des  honneurs  etc....Veu  et  visité  lad®  requeste 
etc....  ensemble  lesd^'»  lettres  de  constitution  faicte  par 
Nous  aud'  feu  Nicolas  poentet  le  23*>  décembre  1561  (1) 
actestation  faicte  par  Nous  bien  amez  scindiques  de  notre 
présente  ville  dannessy  et  la  légalité  prodhonne  vie  catho- 
lique et  expérience  dud*  pierre  poentet  suppliant  du  22® 
feburier  1567  signe  bontemps  ouy  sur  ce  notre  bien  ame 
procureur  fiscal  qui  auroit  consenti  icelluy  suppliant  estre 
pourueu  dud^  office  Et  le  tout  considère  Et  mesme  pour 
obuier  aux  abus  etc....  de  notre  certaine  science  pour  nous 
et  les  nostres  hoirs  et  successeurs  quelconques  Nous 
inclinant  a  la  dicte  requeste  comme  ciuile  et  raisonnable 
Pour  ces  causes  etc....  estant  informe  tant  par  lad*  certiffî- 
cation  desd*»  scindiques  que  aultrement  de  sens  suffisanze 
prodhomie  capacité  et  expérience  dudict  pierre  poentet 
icelluy  poentet  auons  faict  créé  constitué  et  estably  faisons 
créons  constituons  et  establissons  par  ces  présentes  maistre 
desd^'^  poix  et  leuraulx  en  nous  d*^  païs  de  geneuois  fouci- 
gny beaufort  et  leur  ressort  aux  honneurs  etc....  Et  ce  par 
manière  de  prouision  tant  seullement  et  jusques  aultrement 
par  nous  il  soit  pourueu  et  ordonne  pour  icelluy  office  de 

(  1  )  Je  n*ai  pu  rencontrer  les  lettres  de  constitution,  et<;.,  de  cette 
date. 


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—  247  — 

maitre  de  poix  auoir  jouyr  et  exercer  comme  faisoit  sond' 
feu  pereauec  aussy  pouuoir  et  puissance  défère  lesd*''  poix  et 
leuraulx  et  iceux  araisonner  exchaiidiller  marquer  et 
adjuster  justement  et  également  ainsy  (juil  est  requis  et 
nécessaires  sellon  la  coustume  des  lieux  sans  toutes  fois  y 
fereny  commectre  aulumg  abus  ny  concussion  a  peyne  de 
priuation  et  d'aultre  amende  arbitrayre  a  la  charge  toutes 
fois  que  led'  poentet  sera  tenu  nous  poier  annuellement 
pendant  quil  tiendra  et  exercera  led*  office  La  somme  de  six 
solz  monnoie  de  Sauoye  Entre  les  mains  de  notre  fermier 
de  notre  mandement  d*Annessy  au  mesme  terme  quauoit 
accoustume  poier  sond^  feu  père  Et  lequel  a  presto  le  ser- 
ment en  tel  cas  requis  et  accoustume  entre  les  mains  desd*^ 
de  nos  comptes  Si  donnons  en  mandement  etc.... 

En  foy  et  tesmoingt  de  quoy  Nous  auons  octroyé  les 
présentes  Annecy  le  6  juillet  1569. 

Par  mond  seign'  en  sa  chambre  des  comptes  Mess"  M« 
Jehan  Martin  seig*"  de  la  Cour  président  et  henry  pelard 
seig*"  du  noyer  des  m'^  et  auditeurs  de  lad''  chambre  à  ce 
presentz. 

DOCUMENT   N«  A 

1579,  2S  septembre,  —  Concession  de  Marqueur  et  Echan- 
iilleur  des  Barrils  de  vin  et  mesures  rière  le  mandement 
d'Annecij,  Thones  et  Val  des  Clefs  en  faveur  de  Louis 
l'ai  né  et  Louis  le  jeune  Bron,  —  Archives  de  la  Chambre* 
Turin.  Lettres  de  Dons  et  Constitn  d'office.  V.  IS.  P.  59. 

Jaques  de  Sauoye  duc  de  genevoys  et  nemours,  etc..  A 
tous  ceux  qui  ses  présentes  verront  salut  scauoir  faisons 
Receu  auons  Ihumble  supplication  et  requeste  de  Lois  layne 
et  Lois  le  jeune  enfans  de  feu  Jean  lois  bron  dict  cardinel 
du  village  de  Veyzy  a  notre  mandement  d*annessy  contenant 


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—  248  —      . 

que  le  neufîesme  jour  de  septembre  en  Tannée  1551  par 
lettres  expédiées  en  notre  Chambre  des  Comptes  scellées  et 
segnees  Jambaz  nous  aurions  remis  et  alberge  a  leur  feu 
père  et  a  pierre  cardinel  son  nepueu  la  marque  et  seignie 
de  la  mesure  des  barraux  de  vin  a  veyture  riere  nous  man- 
demenlz  d'Annessy  Thone  Val  des  Clefz  et  leurs  resort  a 
leur  vie  durant  seulement  auec  pouuoir  de  faire  lesd^^  barraux 
les  eschandillieraray sonner  marquer  et  adjuster  esgalement 
ainsy  quil  est  requis  suyuant  la  forme  des  mesures  accous- 
tumees  esdictz  lieulx  et  ce  moiennant  le  seruy  de  neufz  solz 
annuels  lequel  abbergement  par  aultres  lettres  par  nous 
signées  scellées  et  contresignées  le  mort  du  11*  de  mars  en 
Tannée  1562  Nous  aurions  confirmée  a  leurs  père  et  a 
sond'  nepueu  comme  de  tout  ce  appert  par  lesdictes  proui- 
sions  soubz  nous  présentes  attachées  Est  II  que  ledict 
Jehan  lois  Cardinel  leur  père  seroit  decedé  Tellement  que 
les  suppliantz  desireroient  et  de  ce  nous  ont  très  hault 
requis  et  semblablement  led^  pierre  cardinel  nepueu  de 
leurd*  père  les  pouuoir  en  lestât  de  marqueurs  eschandil- 
lieurs  desd^s  barraux  a  veyture  sellon  les  mesures  accous- 
tumes  riere  nousd'^  mandementz  dAnnessy  Thones  La  Val 
des  Clefz  et  leur  resort  au  lieu  de  leurd*  père  auec  Icelluy 
pierre  souffrant  nous  pour  leur  part  de  semblable  seruy  de 
neufz  solz  que  faisoyt  leurd'  père  a  Ihumble  supplication  et 
requeste  desquelz  Lois  layne  et  Lois  le  jeune  enfans  dudic^ 
feu  Jehan  Lois  bron  et  pierre  cardinel  comme  juste  et  rai- 
sonnables Nous  Inclinons  ensuyuant  sur  ce  laduis  et 
délibération  de  nous  très  cheirs  bien  aymes  et  feaulx  con- 
seilliers  Les  gens  de  notre  chambre  des  comptes  et  ouy  le 
soustitut  de  notre  procureur  fiscal  et  veu  le  consentement 

par  luy  preste  etc estantz  Informes  de  la  capacité  etc.... 

a  iceulx  pour  ses  causes  et  aultres  bons  respectz  etc.... 
Auons  alberge  et  remis  la  charge  de  lad**  marque  et  segne 
de  la  mesure  desd*s  barraux  de  vin  a  veyture  riere  les  lieux 


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—  249  — 

sus  exprimes  pour  en  jouir  et  vser  leur  vie  durant  tant 
seulement  et  tant  quil  nous  plaira  aux  honneurs  proufBctz 
et  esmolumentz  accoustumes  tout  ainsy  et  de  mesme  que 
faisoyt  leur  dict  feu  père  auec  led*^  pierre  sond'  nepueu  leur 
donnant  pouuoir  de  faire  lesd^^  barraux  les  marquer  et 
esgaler  justement  suiuant  la  mesure  accoustumee  rière 
lesdicts  lieux  et  mandementz  sans  y  faire  ny  commettre 
abbuts  Et  ce  lauons  faict  et  faisons  tant  libéralement  que 
de  grâce  spéciale  moyennant  leur  part  dud^seruys  de  neufz 
sols  geneuoys  anuuelz  que  seront  tenus  paier  a  chescune 
feste  de  Sainct  André  es  mains  de  notre  fermier  d'Annessy 
présent  et  aduenir  et  soub  icelluy  seruys  nous  recognoistre 
la  présente  permission  dans  trois  mois  es  mains  de  notre 
commissaire  dextentes  de  ceste  ville  dannessy  et  lesquels 
suppliantz  pour  lobseruation  de  tout  ce  que  dessus  ont 
preste  le  serment  requis  et  accoustume  en  nostred**  Cham- 
bre des  Comptes.  Par  ce  mandons  et  commandons  etc — 
Donné  Annessy  le  23'*  jour  de  septembre  mil  cinq  cents 
septante  neufz. 

DOCUMENT  No  5 


1613,  12  janvier.  —  Lettres  de  Constitution  de  marqueur 
des  poids  dans  le  Geneuoisfoucigntj  et  Beaufort  en  faveur 
de  Jean  Pointet  en  survivance  a  son  père  Jaques  qui  resigne 
led^  office  en  faveur  de  son  fils.  —  1623.  3  janvier.  — 
Breuet  d'armurier  ordinaire  de  la  maison  du  Duc  de 
geneuois  pour  Jean  pointet.  —  1634.  15  marj.  —  Patentes 
de  survie  pour  les  enfans  de  Jean  pointet.  —  Archives  de 
la  Chambre.  Turin.  Lettres  dons  et  Constitution  d'office 
en  Genevois.  Années  1611-i629.  Vol.  24.  Page  i63et 
164.  Années  1611-1629.  Vol.  24.  Page  321.  Années 
1631-1643.  Vol.  27.  Page  173. 

Henry  de   Sauoye  duc  de  geneuois  de  Nemours  et  de 


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—  250  — 

Chartres  etc....  A  tous  ceux  qui  ces  présentes  verront  salut 
sauoir  faisons  que  pour  le  bon  rapport  que  faict  nous  a  esté 
de  la  personne  de  notre  bien  amez  Jehan  poentet  de  notre 
ville  d'Annessy  de  ses  sens  suffisance  loyautte  preudhomie 
expérience  et  bonne  diligence  a  icelluy-  pour  ses  causes  et 
aultres  a  ce  nous  mouuans  Auons  donne  et  octroyé  donnons 
et  octroyons  par  ses  présentes  lestât  et  office  de  marque  des 
pois  et  leuraux  rière  noz  duché  de  geneuois  baronnie  de 
foucigny  et  beaufort  que  naguères  souloit  tenir  et  exercer 
jaques  poentet  dict  Chambon  père  dud'  Jehan  vacant  par  la 
pure  et  simple  résignation  quil  en  a  faicte  au  proffit  de 
sond*  fils  pour  led*^  office  auoir  tenir  et  dores  en  auant 
exercer  et  en  jouir  ,et  vser  aux  honneurs  aucthorites 
prerogatiues  preheminences  franchises  libertés  droictz 
fruictz  proffitz  reuenus  et  emolumenz  accoustumes  et  qui  y 
appertiennent  tout  ainsy  quen  a  cy  deuant  jouy  led' Jaques 
poentet  tant  quil  nous  plaira  Si  donnons  en  mandement  a 
noz  chers  bien  amez  et  feaulx  conseillers  etc....  faict  a 
thurin  le  douziesme  de  januier  1613. 

Henry  de  Sauoye 
Scelles  et  Contresignes  Dufresne 

Intérinement 

Sur  la  requeste  présentée  par  hon®  Jehan  poentet  etc.... 

Veu  la  requeste  etc....  les  lettres  pat"'  données  a  turin  le 
12  janv.  1613  etc.. 

La  Chambre  a  interiné  et  veriffie  les  lettres  dont  est 

question  etc....  faict  Annessy  au  bureau  des  Comptes  ce 

dernier  septembre  1616. 

Pelard  et  Myncet. 

Brevet  pour  Jehan  Pointet  par  lequel  monseigneur  le  faict 
armeurier  ordinaire  de  sa  maison. 

Auiourdhuy  3"  iour  du  mois  de  januier  mil  six  cens  vingt 


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—  251  — 

troys  monseigneur  le  duc  de  Geneuoys  de  Nemours  et  de 
Chartres  estant  a  Lyon  voulant  se  seruir  de  Jehan  pointet 
armurier  habitant  Annessy  et  se  seruir  de  luy  la  retenu  et 
retient  pour  armurier  ordinaire  de  sa  maison  veult  et  entend 
que  doresnavant  en  ceste  quallitô  il  jouisse  des  honneurs 
priuileges  et  franchise^  qui  sont  accordées  et  dont  jouissent 
les  aultres  ofTiciers  domestiques  de  sa  mayson  de  quoy 
mondict  seigneur  luy  a  accordé  le  présent  breuet  quil  a 
voulu  signer  de  sa  main  et  commandé  a  moy  son  conseiller 
et  secrétaire  ordinayre  le  contresigner. 

Signé  lÏENRY  DE  Sauoye 
Scellé  et  Contresigné  Lepoyure 

La  Chambre  a  donne  acte  au  suppliant  de  la  présentation 
du  breuet  mentionne  en  la  présente  par  luy  obtenu  de 
monseigneur  Et  ordonne  quil  sera  enregistre  céans  faict 
Annessy  le  vingt  vnieme  mars  1G24. 

Signé  Flocard  et  de  Chauanes. 

Pour  les  enfants  depohentet  a  cause  de  la  survie  de  leur  père 
pour  rayson  de  Voffi.ce  d'armurier  et  maistre  marqueur 
des  poids, 

Anne  de  Lorraine  duchesse  de  geneuois  de  Nemours  et 
d'Aumasle  tutrice  de  nosire  très  cher  et  très  aimé  fils  louis 
de  Sauoye  duc  de  geneuois  de  Nemours  et  d*Ausmale  etc,.. 
Ayant  sceu  et  recogneu  le  grand  zèle  et  affection  que  hon'" 
Jean  poentet  en  lexercisse  de  sa  charge  et  office  darmurier 
et  maistre  des  poids  et  a  notre  seruice  et  celluy  de  notre  très 
cher  et  bien  aime  filz  pour  dautant  plus  luy  donner  subjet 
a  continuer  et  eslever  ses  enfantz  masles  aud'  office  auons 
par  ces  présentes  accordé  et  concédé  accordons  et  concé- 
dons auxd^*  masles  et  ses  enfants  et  au  premier  né  de  lun 
a  lautre  la  suruie  de  leur  père  auxd'»  offices  pour  iceux 
exercer  estant  daage  et  capables  et  arriuant  que  led^  honno- 


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—  252  — 

rable  Jehan  pohentet  leur  père  vinsse  a  mourir  auant  que 
lesd^^  enfans  masles  soient  capables  et  daage  pour  lexercisse 
desd^s  charges  volons  entendons  et  nous  plaict  que  lesd^^ 
offices  soient  exercez  pendant  led*^  temps  et  à  leur  nom  par 
vn  commis  et  sest  tant  seulement  jusques  a  ce  que  lesd'^ 
enfantz  soient  en  âge  et  capables  duxl^  exercisse  a  quelles 
fins  mandons  et  commandons  a  notre  Chambre  des  Comp- 
tes de  geneuois  de  veriffier  et  interiner  les  présentes  sellon 
leur  forme  et  teneur  etc....  Données  Annessy  le  15«  jour  du 

mois  de  may  1634.  , 

Signé  Anne  de  Lorraine 

Scellé  et  Contresigné  Malliard 


DOCUMENT  N«  6 


Arrêta  originaux  i560.  Vol.  ï.  Page  35.  Turin.  Archives 

de  la  Chambre  des  Comptes.  --  Jean  Velliet.  Décret  sur 

sa  requête  portant  lettres  de  contrainte  contre  les  refusans 

ou  dilations  de  bailler  leurs  mesures  et  poids  a  fin  qui 

soient  marqués  des  armoiries  de  S.  A.  ensuite  de  la  ferme 

a  lui  expédiée. 

26  Janvier  1560. 

A  Noz  Seigneurs  des  Comptes. 
Supplie  humblement  Jean  Velliet  disant  que  les  marques 
des  poix  et  mesures  de  tharentaise  dessoubz  le  sex  luy 
auroient  esté  accensés  et  baillies  a  ferme  pour  vne  année 
comme  de  ce  appert  par  led^  bail  a  ferme  cy  attache,  les- 
quelles marques  led^  suppliant  ne  peult  fere  sans  auoyr 
lettres  de  vous  mond'  seig  aux  fins  de  contraindre  les 
Reffuzantz  ou  dylaiantz  de  baillier  lesd*'»  mesures  et  poix 
pour  icelles  estre  marques  des  armoiries  de  mondict  sei- 
gneur. 


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—  253  — 

Ôe  considère  il  vous  plaira  octroier  aiidict  suppliant 
lettres  a  ce  requises  auec  la  déclaration  quil  vous  plaira 
fere  combien  le  dict  suppliant  prendra  pour  chescune 
marque  ensenble  puissance  de  pouuoir  fere  exchandallier 
les  poix  et  liuraulx  dudict  pais  aud*  catellin  cy  belle  de 
la  villa  de  Mostiers  Estant  icelluy  catellin  au  preallable 
certiflîe  de  sa  soufTizance  par  deuant  Monseig^  ou  bien 
aultres  maistres  serruriers  souffîzantz  qui  seront  nommes 
et  eslus  par  icellui  suppliant  auec  le  juge  de  tharentaise 
lequel  a  ces  fins  il  vous  plaira  commettre  se  ferez  bien. 

Seront  faictes  les  lettres  demandées  au  suppliant  lequel 
Recepura  pour  les  marques  ce  que  par  le  chastellain  de 
tharentaise  appeliez  les  scindiques  sera  lauxe  fait  au  bureau 
des  comptes  le  xxvj  de  januyer  ir)(>0. 

MiCHAUD. 

Même  VoL  t.  Page  S6.  Mines  des  marques  des  mesures 
apperienaniz  a  laltesse  de  monseigneur  a  cause  de  la 
chastellainie  de  sallin  expédiées  par  nous  Jehan  loys  de 
heaulniont  chastellain  pour  son  altesse  tant  dessus  que 
dessoulz  lesex.  la  chandoille  allumée. 

Du  jour  18*>  de  septembre  1559. 

Michiiel  minoret  iiij  fl. 

Ilumbert  Arnod  nij  fl. 

Led^  minoret  v  fl. 

Led'  Arnod  v  fl. 

Led^  minoret  vj  fl. 

Led'  Arnod  vj  fl. 

Led'  minoret  vij  fl. 

Led'  Arnod  vij  fl. 

Led*  mineret  viij  fl. 

Et  après  a  requeste  dud'  Arnod  la  chandoille  a  esté  real- 
lumée. 
Led'  Arnod  vnj  fl.  iij  gr. 


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—  254  — 

Ledit  minoret  a  présenté  neufz  florins  a  la  charge  que 
présentement  luy  soit  expédie  sans  aultre  enchiere. 
Cathellin  cybelle  ix  fl.  nij  gr. 

Pierre  veillet  ix  fl.  démy 

Amed  excofferot  x  fl. 

Humbert  arnod  xj  fl. 

Michiel  minoret  xij  fl. 

lïumbert  arnod  xiij  fl. 

Led'  minoret  xiij  fl.   d. 

Jehan  velliet  xnij  fl. 

Led'  minoret  xuij  fl.    d. 

Led'  velliet  xv  fl. 

Led'  minoret  xv  fl.    d. 

Led'  veillet  xvj  fl. 

Et  lequel  office  de  marqueur  a  este  expédie  aud'  Jehan 
velliet  par  nous  chastellain  et  récepteur  susd'  comme  plus 
offrant  pour  led*  pris  de  seze  florins  pour  vng  au  tant  seule- 
ment commence  le  dixiesme  du  mois  de  julliet  payables  de 
six  mois  en  six  mois  et  a  la  charge  quil  velliet  prendra 
lettres  de  Mess"^  des  Com  ptes  a  ses  despens  de  la  susd« 
expédition  Et  a  cautionne  par  george  fardeller  cordonnier 
de  moustier  qui  a  promis  par  ses  foy  et  sermentz  et  obliga- 
tion de  sa  personne  et  biens  fere  ut  accomplir  tout  ce  que 
dessus  Renonçant  au  droit  de  discution  Et  au  droict  disant 
Le  principal  debuoir  estre  plustost  conuenu  que  la  fiance 
Et  lequel  velliet  par  semblables  sermentz  et  obligation 
garder  lad«  pleige  de  tous  dommaiges  Faict  en  la  banche 
Chastellanie  de  Sallin  En  présence  de  mons'^hûgonin  villar 
prestre  chanoyne  régulier  de  sainct  pierre  de  tharentaise 
nurmer  germain  et  jehan  exchelles  Tesmoingtsy  assistantz 
les  an  et  jour  susd'^. 

Extrait  des  Registres  de  la  Chastellainie  de  Sallin. 

MOLLIER. 


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^  255  - 
DOCUMENT  N'  7 


Sindics  et  hahitans  ez  Régions  dessous  le  Saix  en  Taren- 

taise.   —    Arrêt    sur    requêtes  portant  approbation   de 

V ordonnance  cy  jointe  du  Juge  mage  de  Tarentaise  que 

sera  observée  à  l* advenir  au  regard  des  poids  et  mesures. 

Prorogations    de  delay    a   Jean  Veillet   marqueur  des 

mesures  en  Tarentaise,  etc.  —  Arrêts    originaux  1560. 

Vol.  2.  Page  150, 

21  Juin  1560. 

A  nos  Seigneurs  des  Comptes. 

Supplient  humblement  les  scindiques  et  communautez 
manans  et  habitans  es  régions  dessoubz  le  saix  en  Taren- 
taise comme  suyuant  les  decretz  et  commissions  de  céans 
ilz  auroient  faict  informer  sur  le  faict  des  mesures  de 
mostier  et  Visitation  dicelles  comme  appert  par  l'Informa- 
tion cy  attachée  etc.... 

Ce  considère  plaise   recepueoir  lesd"'*   informations    et 

procédures  et  sur  icelles  pourueoir  aux  suppliants  etc....  et 

feres  bien. 

Decarris. 

Soit  monstre  au  procureur  patrimonial  fait  au  bureau  des 

comptes  le  xxj  de  juing  1560. 

Michaud. 

Veu  la  procédure  règlement  et  ordonnance  faicte  par  le 
juge  mage  de  tharantaise  ensemble  par  le  juge  du  seig' 
archeuesque  dud'  tharantaise  du  xij*»  du  présent  moys  de 
juing  sur  le  faict  du  différent  qua  este  entre  les  scindiez  et 
procureurs  dessubiectz  de  monseig^  aud'  tharantaise  d'une 
part,  les  suppliantz  et  le  marqueur  de  mostier  d'aultre 
pour  raison  et  a  cause  de  leschandil  et  principale  mesure 
dud'  tharentaise  Nous  disons  que  lad*^  ordonnance  a  bien 
et  deuement  procède  Requérons  Tobservation  dicelle  et  que 


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^ 


--  256  — 

commandement  soit  faict  aux  parties  intéressée  respectiue- 
ment  et  icelle  obseruer  et  garder  etc....  a  peyne  de  cinq 
cens  liures  Et  que  commandement  soit  faict  aud*  marqueur 
de  vacquer  dilligemment  a  marquer  et  eschandillier  les 
mesures  suyuant  sa  charge  a  peyne  de  cinquante  liures  et 
aultre  amende  arbitraire  faict  au  bureau  des  comptes  le  xxj 
juing  mil  v«  soixante.  Bruyset. 

Soit  faict  comme  est  requis  par  le  procureur  patrimonial 
faict  au  bureau  des  comptes  le  xxj  de  juing  1560. 

MiCHAUD. 

Arrêts  originaux  i560.  Vol.  2.  Page  15 L 

A  vous  seigneurs  juges  de  tharentaise  tant  pour  son 
altesse  que  pour  la  temporalité  de  Tesglise. 

Supplient  humblement  les  manans  et  habitans  dud' 
tharentaise  au  dessoubs  du  sex  disans  comme  Jehan  velliet 
de  moustier  se  disant  commissaire  pour  marquer  les  biches 
et  mesures  moleste  les  suppliantz  aux  fins  luy  apporter 
leurs  biches  et  mesures  pour  icelles  marquer  et  pour  ce  que 
lesd^'*  suppliantz  sont  acoustumes  et  leur  encetres  vendre 
et  achepter  auxi  poyer  les  censés  et  seruis  par  eulx  deubs 
a  la  mesure  de  moustier  laquelle  est  eschandaillieet  apray- 
sonee  a  la  pierre  de  la  haie  de  moustier  laquelle  dempui  s 
peut  de  temps  en  ca  auroit  esté  picquee  crue  et  augmentée 
en  tant  que  les  biches  vieulx  et  bien  marques  se  trouuent 
tous  foybles  au  grand  préjudice  et  domaige  desd'**  sup- 
pliants et  de  la  Republique  en  ce  que  concerne  le  payement 
desd^**  censés  et  seruis. 

Ce  considère  vous  plaira  pour  le  bien  de  Republique  et 

debuoirs  de  justice  comettre  et  députer  commissaire  vng 

au  deux  aux  fins  de  apreysoner  lad*  pierre  et  que  soit  faict 

\ng  eschandillion  auquel  pour  laduenir  ont  aye  recours  et 

vous  feres  bien. 

ViBERT  Martini  Richard 


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—  257  — 

Sera  par  nous  faicte  Visitation  de  la  pierre  de  la  halle  de 
moustier  assistantz  les  suppliantz  et  les  sindicqz  de  mos- 
tiers  si  bon  leur  semble  appelles  aussi  les  procureurs 
fiscaux  etc....  ce  17  juing  1560. 

M.  DE  Ride.  Philtp  Rapin. 

Du  douz*  jour  du  moys  de  juing  1560. 

Nous  philippe  rapin  docteur  ez  droictz  conseiller  et  juge 
maie  pour  son  altesse  au  pays  de  tharentaise  et  Maurice 
de  ridde  aussi  docteur  ez  droictz  juge  maie  de  monsieur  le 
reuerendissime  mong'  larchevesque  et  comte  de  tharen- 
taise a  tous  ceulx  qui  ses  présentes  verront  scauoir 
faysons  comme  ce  jourd*huy  nous  estant  présenté  requeste 
de  la  part  de  mestres  george  vibert  et  jean  martini  moder- 
nes scindictz  de  la  cite  de  mostier  et  maîtres  anthoine 
blanc  scindict  de  doucy  francoys  richard  scindict  daygue- 
blanche  procureurs  generaulx  des  subiectz  de  laltesse  de 
monseig'  en  son  pays  de  tharentaise  soub  le  sex  en  bas 
sus  la  modération  et  apray  sonnementzau  echandaiiliement 
de  la  pierre  establye  pour  mesurer  le  grain  en  la  présente 
cite  de  mostier  Et  après  que  par  lesdictz  scindictz  Nous 
auroient  pries  nous  vouloier  transporter  a  la  grande  hasle 
de  lad*»  cite  on  est  size  ladicte  pierre  et  illec  fere  veve  ocus- 
layre  dicelle  nempechant  que  nous  sus  le  charge  de  nous 
conférences  ayons  a  mesurer  aulcungz  bichetz  Et  mesures 
de  boys  anciennes  des  mieulx  marques  et  plus  apraysonnes 
que  trouuer  nous  porrions  Pour  sus  icelles  mesures  me- 
surer et  apraysonner  ladicte  pierre  et  sur  le  tout  ordonner 
ainsi  que  verriont  estre  a  fere  par  rayson. 

Nous  annuant  a  la  juste  requeste  desd'«  suppliantz  et 
pour  obuyer  a  tous  procès  et  differens  que  de  ce  porroient 
suruenir  et  pour  la  conseruation  du  bien  public  Nous 
serions  transportes  a  la  dicte  pierre  et  illec  aurions  faict 
apporter  certains  nombres  de  bichets  et  mesures  deubement 

ilb 


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—  m  — 

marques  tant  des  armories  de  feu  de  bonne  memoyre  mon- 
seig""  Charles  duc  de  scauoye  que  de  bonne  memoyre  messire 
Jean  philippe  de  grolee  en  son  viuant  archeuesque  et  comte 
de  tharentaise  Et  lesd'^  bichets  estans  au  preallable  mesu- 
res et  approuues  par  lesd'^  scindictz  pour  justes  et  rayson- 
nables  du  consentement  desd**  scindictz  iceulx  bichetz 
aurions  faict  mesurer  et  parangoner  a  lad*  pierre  et  trouuant 
lesdictz  bichetz  vng  peu  plus  foybles  et  differens  de  lad* 
pierre  par  ce  mesures  comme  nous  auroict  appareu  que  les 
poteaulx  des  queulx  Ion  vse  contre  les  tros  par  lesquels  se 
vuyde  le  bled  de  ladicte  pierre  se  trououient  aulcunement 
conquaues  et  vses  par  les  extrémités  ne  reuenant  a  la  fleur 
de  lad*  pierre  et  aultres  raysons  considérables  prouenans 
tant  par  vsaiges  naturelz  et  antiquité  queaultrement  aurions 
faict  apporter  certainne  quantité  de  bled  et  aultre  grain 
menu  tant  que  souffire  nous  a  semble  pour  la  mesure 
Suyuant  la  contenance  desdictz  bichetz  Et  pour  ce  que 
ledict  blé  a  veue  deul  ne  ramplissoict  si  bien  la  dicte  pierre 
comme  il  ramplissoient  les  bichets  ayns  estoict  de  quelque 
peu  comme  dict  est  dyminues  et  manques  nous  par  bonne 
considération  a  ce  nous  mouuantz  et  du  consentement 
desdictes  parties  auons  commis  m'  humbert  arnod  expert 
en  tel  faict  pour  auoir  este  de  long  temps  apraysonneur 
des  bichetz  et  mesures  de  ladicte  cyte  Et  honneste  jean 
foreytier  charpentier  cytoiens  de  lad**  cite  de  mostier  pour 
sellon  la  quantité  dudict  bled  menu  susdict  a  eulx  par  nous 
remys  apraysonner  lad*  pierre  et  la  rendre  conforme  a 
lansienne  mesure  et  contenance  desd'*  bichets  de  sorte  que 
tout  ledict  grain  face  le  complément  de  lad®  mesure  plus 
ni  moingz  sans  en  rien  fallyr. 

Lesqueulx  prodhommes  comme  dict  est  accorde  moyen- 
nant serment  entre  nous  mayns  preste  et  appres  avoir  par 
plusieurs  foys  exchandellie  et  apraysonne  lad*  pierre  en- 
semble les  poteaulx  nous  auroient  relattes  et   rapportes 


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—  259  — 

nauoier  trouue  aultre  différent  en  ladicte  pierre  sinon  en 
tant  que  lesdictz  poteaulx  ne  se  trouoient  reuenantz  a  fleur 
dicelle  pierre  a  tome  dung  doyts  et  demy  du  dessus  et 
estoient  conquaues  et  croses  du  dedans  et  ne  jognient 
entièrement  a  ladicte  pierre  comme  ansiennement  soloient 
fere  de  sorte  que  le  différend  de  ladicte  pierre  Et  Jesd* 
bichetz  ne  porroit  excéder  la  contenance  dune  escuelle  de 
bled  ou  enuiron  lequel  différent  et  excessivite  ils  auroient 
toile  et  oste  par  le  moien  des  noueaulx  poteaulx  quil  leur 
auroict  semble  de  fere  reuenantz  a  fleur  de  ladicte  pierre 
Et  jusquez  au  fond  dicelle  de  plus  grande  espesseur  que 
nestoient  les  aultres  précédentes  vieulx  et  mieulx  jogniant 
a  ladicte  pierre  Lesqueulx  poteaulx  appliques  a  icelle 
pierre  et  exchundallie  ledict  bled  contenant  la  juste  mesure  ^ 
comme  dessus  est  dict  ils  auroient  trouues  ledict  bled 
reuenir  et  accomplir  la  juste  mesure  de  ladicte  pierre  tout 
ainsi  que  justement  il  ramplissoit  lesdictz  bichetz  et  exchan- 
deaulx  sans  aulcune  différence  du  moingz  considérable. 

Lequel  rapport  par  nous  commissaires  susdictz  entendu 
et  lesdictz  poteaulx  en  nous  mayns  receuz  pour  le  parachè- 
vement de  nostre  dicte  commission  auons  dict  et  ordonne 
que  a  cette  fin  que  memoyre  en  soit  esternelle  et  que  diffé- 
rent ne  peult  pour  laduenir  eschoier  entre  lesd***  parties 
occasion  desd*»  mesures  comme  est  aduenu  bien  souuant 
pour  le  passe  Issd*»  poteaulx  ainsi  quilz  sont  faictz  et  aprai- 
sonner  estans  de  cueur  de  noyer  comme  nous  a  appareu 
seront  par  lesdictz  experts  signes  et  marques  au  dedans  de 
la  pierre  des  armories  de  reuerendissime  seign^  yeronime 
de  Vaulpergaz  modernement  nomme  archeuesque  de  tha- 
rentaise  et  seront  faictz  et  establys  deux  exchandeaulx  ou 
bichetz  a  la  juste  mesure  que  dessus  bien  et  deuement 
apraysonnes  par  lesdicts  experts  de  arain  ou  aultre  metail 
plus  perdurable  lesqueulx  seront  semblablement  marques 


-  è6Ô- 

des  armoiries  de  laltesse  de  mond*  seigneur  et  dudîct  s*" 
reuerendissime  au  fondz  diceulx  et  aultres  lieulx  néces- 
saires ausqueulx  sera  adioustee  tant  de  foy  que  a  ladiete 
pierre  Et  desqueulx  les  subiectz  de  laltesse  de  mondict 
seig''  en  retireron  long  en  leur  pouuoir  et  ceulx  dudict 
seig'  reuerend  laultre  que  seront  remys  en  lieu  certain  au 
prouflRct  du  populayre  et  de  qui  il  appartiendra  a  perpétuité 
demeurant  lad^^  pierre  ensemble  la  rase  dicelle  en  son 
entier  quant  au  résidu  sans  rien  y  innouer  despens  des 
présentes  vacations  entre  les  dictes  parties  compenses  Et 
ce  a  este  faict  es  présences  desd^  scindictz  et  de  jean  loys 
de  Beaumont  dict  carra  (1)  escuyer  chastellain  pour  son 
altesse  et  de  M*  francoys  abondance  cytoien  dud'  mostier 
'  lieutenant  du  balliz  du  balliage  de  Mostier  qui  a  nostre 
dicte  ordonnance  nauroient  dissenty  ains  auroient  consenti 
desquelles  chouses  sus  narrées  lesdictz  sindictz  nont  requis 
acte  lequel  leur  avons  octroyé. 

Philip  Rapin  Jugemaje  et        M.  de  Ride  Jugemaje  de 
commissaire  susdict  la  temporalité  archié- 

piscopale  et    commij" 
susd^  de  tharentaise. 

Rambersend. 

Arrêts  originaux  1560,  Vol.  2.  Page  156, 

Du  21  Juin  1560. 

Sur  la  Requeste  présentée  par  les  scindicques  et  com- 
munauctez  manans  ethabitanses  Régions  dessoubzle  saix 
en  tharentaise  tendant  aux  fins  que  les  informations  faictes 
a  leur  Requeste  sur  le  fait  des  mesures  de  mostier  Et  verif- 
fîcation  dicelles  soient  Receues  Et  les  procédures  y  faictes 

(l)Arrétsde  la  Chambre,  1559-1561.  Vol.  1.  Page  19.— Janlois 
de  beaumont  dit  Carra  escuier  ce  requérant  a  esté  receu  et  institué 
en  Toffice  de  châtelain  de  tharentaise  dessus  et  dessous  le  saix  Et 
a  preste  le  serment  a  ce  requis  suiuaot  les  lettres  de  sa  constitu- 
tion par  Mons'  le  marchai  de  Sauoie  du  19«  de  ce  mois  (Aost)  1559. 


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—  261  — 

pour  sur  Icelles  Leur  estre  pourueu  au  Reiglement  du 
marqueur  sellon  les  fins  de  Leurs  Requestes  précédentes. 

Veu  la  coppie  de  la  requeste  présentée  par  Anthoine 
Blanc  Et  francois  Richard  procureurs  generaulx  des  hom- 
mes ducaulx  dessoulz  le  saix  du  vingtseptième  de  may 
dernier  coppie  d'aultre  Requeste  etc....  Acte  Règlement 
ordonnance  Visitation  fecte  par  led'  jugemage  et  juge  de 
Tarcheuesque  dud'  tharentaise  etc.,  en  date  du  12«>  jour 
dud' juing  etc.... 

La  chambre  dict  que  suyuant  les  conclusions  dud*  proC 
patrim*  Il  a  esté  bien  et  deuement  procède  a  lad*  ordon- 
nance Le  contenu  de  laquelle  sera  entretenu  et  obserue,  Et 
ordonne  que  commandement  sera  faict  ausd*»*  parties  Res- 
pectiuement  dicelle  obseruer  etc....  Et  en  aduertir  la 
Chambre  dans  le  moys  a  peine  de  cinq  cens  Hures  Et  en 
oultre  que  commandement  sera  faict  aud'  marqueur  de 
vacquer  diligemment  a  marquer  et  eschandillier  les  mesu- 
res suyuant  sa  charge  a  peine  de  cinquante  Hures  et 
aultre  amende  arbitraire,  faict  au  Bureau  des  Comptes  le 
21«  jour  de  juing  1560. 

MiCHAUD. 

Jean  Veille t  de  Moustiers  marqueur  des  mesures  en  tharen- 
taise. Prorogation  de  dëlay.  Arrêts  originaux.  1560. 
Vol.  3.  Page  82. 

8  Juillet  1560 

A  messeignieurs  de  la  Chambre  des  Comptes. 
Supplye  humblement  Jehan  Veillet  bourgeoys  et  citoyen 
de  mostier  comme  après  les  procedeures  cy  attachées  a  la 
parfin  Et  seullement  le  S'*  jour  du  présent  moys  de  julliet 
luy  seroit  esté  deliure  ballie  et  expédie  vng  bichet  boys 
deuement  ferré  et  marqué  pour  est  allon  des  mesures  grain 
portées  par  son  bail  a  ferme  du  dixiesme  julliet  mil  cinq 
cens  cinquante  neufz  etc....  Et  pour  ce  que  sans  sa  coulpe 


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—  262  — 

négligence  ou  dol  quelconques  il  auroyt  este  trouble  moleste 
et  empesche  au  faict  et  exercice  desd's  marqueurs  de  ma- 
nière que  au  lieu  de  recouurer  et  retyrer  a  soy  les  deniers 
quil  auroyt  promys  payer  par  sad»*  ferme  luy  auroyt  conue- 
nu  frayer  menger  et  consommer  vne  partie  de  son  bien 
dont  cependant  le  temps  et  terme  prefîx  par  sond'  bail  a 
ferme  et  presque  passe  et  expiré. 

Ce  considère  etc....  playse  vous  luy  continuer  et  proro- 
ger sond'  temps  et  ferme  pour  vne  année  prochainement 
venant  etc....  saufz  et  a  luy  reserue  son  recours  desd^» 
despens  etc.... 

Ssit  monstre  au  procureur  patrimonial  faict  au  bureau 
des  Comptes  le  vj  juillet  1560. 

MiCHAUD. 

Veu  le  bail  a  ferme  faict  au  suppliant  d'un  xxvj"  januier 
dernier  de  lestât  de  marqueur  pour  vne  année  etc....  et  quil 
ne  nous  appert  que  pour  le  regard  des  poix  mesures  dhuyle 
de  vin  et  aultres.  Il  ayt  este  empesche  ains  seulement  pour 
le  regard  delà  mesure  du  bichet  du  bled  quil  y  auroyt  heu 
quelque  opposition  laquelle  est  plustost  venue  a  la  coulpe 
du  suppliant  que  des  opposans  a  faulte  de  voulloyr  eschan- 
dillier  lesd^s  pierres  lesquelles  se  peuuent  accroistre  par 
continuations  de  pluies  et  aultrement  Nous  disons  qu'il  ny 
a  lieu  de  luy  proroger  aulcung  delay  ains  quil  soict  estre 
contraing  a  payer  sa  ferme  sans  preiudice  de  ses  domaiges 
et  interestz  contre  les  empeschans  lesquels  il  fera  appeller 
si  bon  luy  semble  et  saufz  a  eulx  leurs  defïenses  faict  au 
bureau  des  comptes  le  vj  juillet  1560. 

D  ETA  RDI  p^. 

Soit  fait  comme  est  requis  par  le  procureur  patrimonial 
fait  au  bureau  des  Comptes  le  viij*'  juillet  1560. 

MiCHAUD. 


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—  263  — 

Répertoire  des  Arrêts  1559-1561,  Vol  i.  Page  i60. 
Lundy  8«  jour  de  juilliet  Pan  1560. 

Presens  Mess'  Jean  Carra  et  Hugues  Michaud  maistres. 

Sur  la  requeste  de  jean  veillet  bourgeois  de  motier  mar- 
queur des  mesures  en  tharentaise  pour  vn  an  commence 
au  dizième  de  juilliet  mil  cinq  cens  cinq*®  neuf  afin  d'auoir 
prolongation  dud'  bail  pour  vne  autre  année  prochaine 
attendu  que  il  luy  a  seulement  este  expédié  le  26*  de  janvier 
dernier  et  depuis  n'a  peu  joyr  dud*  office  de  marqueur  a 
cause  des  empêchements  etc....  La  Chambre  suiuant  les 
conclusions  du  proC^  patrim^  au  pied  de  sa  requeste  du  vj« 
de  ce  mois  a  dit  n'y  avoir  lieu  d'aulcune  prorogation  de 
delay  Et  que  led'  fermier  sera  contraint  a  paier  sa  ferme 
sans  preiudice  de  ses  dommaiges  etc.  ut  supra. 

Répertoire  des  Arrêts  1561.  Vol.  2.  Page  110. 
Du  vendredy  20*  feburier  1562. 

Sur  la  requeste  présentée  par  jean  veilliet  bourgeois  de 
moustier  tendant  a  ce  qu'il  plaise  a  la  Chambre  luy  abber- 
ger  l'office  de  marqueur  des  poix  et  mesures  du  pays  de 
tharentaise  soubz  le  saix  ou  bien  le  continuer  en-icelluy 
etc....  ayant  esgard  a  plusieurs  pertes  quil  a  supporte  aud* 
office  lequel  cy  devant  il  a  fidellement  exerce  aud'  lieu  et 
sur  ce  luy  pouruoir  ainsi  que  de  raison. 

La  Chambre  suyuant  les  conclusions  etc.  A  continué 
et  continue  le  suppl'  en  Testât  et  office  de  marqueur  etc.... 
Et  ce  jusques  au  dernier  jour  du  prochain  mois  de  décem- 
bre etc,...  faict  a  Chambery  au  bureau  des  comptes  les  an 

et  jour  etc.... 

Meilleret.  Michaud. 

Répertoire  des  Arrêts  1561.  Vol.  2.  Page  i26. 
Du  lundy  9»  de  Mars  1562. 
Sur  la  requeste  présentée  par  Jean  Veillet  etc...  Tendant 


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—  264  — 

affin  quil  soit  maintenu  aud'  office  de  marqueur  auec  inhi- 
bition et  defïenses  a  tous  quil  appertiendra  ne  le  troubler 
ou  bien  receu  de  se  désister  dud'  estât. 

Veu  par  la  chambre  lad*  requeste  etc.... 

Ladicte  chambre  etc....  a  faict  inhibition  et  defïenses  a 
tous  subiectz  de  son  alteze  du  pays  de  tharentaise  soubz  le 
saix  dequelle  qualité  quilz  soient  de  ne  troubler  led*  sup- 
pliant en  sond*  office  de  marqueur  au  preiudice  de  la  cons- 
titution a  luy  faicte  et  de  n'auoir  recours  a  aultre  pour  le 
faict  de  mesurer  et  marquer  mesures  et  poix  que  vers  le 
suppliant  et  aultres  que  par  cy  après  seront  commis  de  la 
part  de  son  alteze  aud'  lieu  a  peine  pour  vng  chescun  con- 
treuenant  de  deux  cens  Hures  Et  en  cas  d'opposition  les 
parties  ranuoyes  céans  a  la  huictaine  garniz  de  leurs 
tiltres  et  droictz  etc....  fait  aChambery  etc.  les  an  et  jour 

que  dessus. 

Meilleret  Michaud  Mompon 

Répertoire  des  Arrêts  1572,  VoL  9.  Page  2. 

12  Janvier  1572 

A  Noz  Seignieurs  des  Comptes. 

Supplie  humblement  hon®  jehan  veillet  etc....  comme  il 
auroit  este  cy  devant  pourueu  par  la  chambre  dud^  office 
de  marqueur  aud^  tharantaise  pour  le  temps  porté  par  ses 
lettres  de  prouision  cy  joinctes  du  dixiesme  aupéril  mil 
cinq  centz  soixante  cinq  Et  despuys  continue  En  icelluy 
pour  aultres  troys  ans  par  aultres  lettres  de  lad^  chambre 
du  dix  neufuiesme  jour  de  januier  mil  cinq  centz  soixante 
neuf  aussi  cy  attachées  Et  parce  que  le  terme  desd's  troys 
ans  est  prochain  Et  quil  a  tousiours  rendu  debuoir  au  faict 
de  lad"  charge  desireroit  y  estre  continue  sil  plait  a  la 
chambre  et  sur  ce  luy  estre  pourueu. 

Ce  considère  vous  plaise  en  continuant  led*  suppliant 
audict  office  de  marqueur  des  pois  et  mesures  dud*  paye  de 


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—  265  — 

tharentaise  ordonner  quil  en  jouira  suyuant  la  forme  et 

teneur  de  ses  dictes  lestres  de  prouision  et  continuation 

dud' office  et  charge  etc....  pour  au Itre  trou  ans  ou  aultre 

plus  grand  terme  quil  plaira  a  la  chambre  et  a  ces  fins  luy 

donner  lettres  et  prouision   nécessaires  9t  il  continuera 

prier  dieu  pour  votre  prospérité. 

BoNAUD  pr"" 

Soit  monstre  etc....  faictà  Chambery  etc,...  ce  9®  janvier 

1572. 

Sauoye. 

La  chambre  etc..  a  ordonne  que  le  suppliant  continuera 
a  lexercice  de  sad"  charge  de  marqueur  laquelle  de  nouveau 
luy  est  accordée  pour  aultres  troys  ans  a  commencer  de 
l'expiration  du  terme  porte  par  sa  prouision  et  constitution 
du  dix  neufuiesme  janvier  1569  et  soubz  les  mesmes  char- 
ge etc....  faict  a  chambery  au  bureau  des  comptes  ce  12 
janvier  1572. 

ROFFIER. 

Jehan  Velliei  marqueur  des  poids  et  mesures  en  Tarentaise 
appellant  de  sentence  contre  Antoine  Dunant  marchand 
de  moutiers,  —  Répertoire  des  Arrêts  1574.  Vol.  11. 
Page  20. 

Entre  Jehan  Velliet  marqueur  de  tharentaise  appellant 
de  la  sentence  rendue  par  le  Juge  mage  de  tharentaise  le 
dernier  apuril  d'une  part. 

Et  Anthoyne  Dunant  Marchantde  Mostier  etc.,  d'aultre. 

Veu  les  lettres  de  prouision  et  constitution  de  Marqueur 
audict  pays  de  Tharentaise  décernées  par  la  Chambre  aud^ 
Velliet  des  Iheureuse  restitution  des  estatz  de  son  altesse 
Jusques  a  ce  jourdhuy  certaines  procédures  faictes  par 
deuant  le  chastellain  dud*  lieu  Ensemble  exploictz  de  pu- 
blications faicts  en  vertu  des  susd«  lettres  requestes  pré- 
sentées céans  par  led*  Velliet  les  26  et  27«  août  1567  etc... 


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—  266  — 

etc..  etc..  Et  tout  ce   que  a  este   produict  bien   veu   et 
considère. 

La  Chambre  a  mis  etmet  lesappellations  respectiuement 
a  néant  sans  amende  ny  despens  etc....  Et  ayant  esgard  a 
la  négligence  vsee  par  led^  Anthoine  Dunant  dict  fosson 
Marchant  de  Représenter  fere  eschantillier  et  remarquer 
son  aulne  suiuantles  proclamations  sur  ce  faictes. 

A  ordonne  que  ce  dont  a  este  appelle  sortira  son  plain  et 
entier  effaict  Et  dautant  que  par  acte  de  Visitation  faicte 
céans  le  13«  aoust  1571  les  chantillion  produict  et  exibe  de 
la  part  de  Jehan  Velliet  marqueur  de  tharentaise  se  treuue 
deTungdes  costez  estre  tallie  en  encharpelad*  taillie  plus 
haulte  dung  coste  que  de  laultre  et  Jnegale  pour  euiter  a 
toutes  difficultés  etc....  Lad®  Chambre  a  ordonne  que  led' 
Velliet  marqueur  fera  et  prendra  noueau  eschantillon  con- 
forme au  vray  aulnage  de  tharentaise  en  présence  du  pro- 
cureur fiscal  dud'  Tharentaise  et  rapportera  céans  sembla- 
ble eschantillion  etc 

ROFFIER.  DeVEUGIE. 


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—  267  — 


TABLE  DES  MATIÈRES 


Pages. 


I.  Travaux  de  TAcadémie  Ghablaisienne. 

Séance  du  8  Novembre  1^97.  —  Communications 
de  MM.  A.  Duplan  et  L.-E.  Piccard  (Poids 
et  mesures  en  Savoie). 

Séance  du  13  décembre  1897.  —  Communica- 
tions de  MM.  E.  Ritter  (Le  poète  Thomas  de 
Thonon  vivant  vers  1386). —  Norbert  Dunoyer 
(Chapelles  de  Vétraz-Monthoux)  et  de  E. 
Vuarnet  (Les  habitants  de  Thonon  et  les 
Barques  de  Genève  en  1589).  Renouvelle- 
ment du  Bureau  de  TAcadémie. 

Séance  du  10  janvier  1898.  —  Anciennes  sépul- 
tures du  Chablais  (Lucien  Jacquot). —  Déli- 
bérations de  la  ville  d'Evian  en  1713  (A.  Du- 
plan).—  Emeute  de  Massongy(  L.-E.  Piccard). 

—  Réception  de  M.  Pirasset  comme  membre 
de  la  Société. 

Séance  du  14  février  1898.  —  Communications 
de  N.  Dunoyer  et  de  A.  Duplan.  —  Récep- 
tions de  MM.  F.  Marcoz  et  C-  Deruaz. 

Séance  du  14  mars  1898.  —  Procès  entre  le 
plébain  et  la  ville  d'Evian  (A.  Duplan).  — 
Communication  de  MM.  F.  Dubouloz  et  An- 
thoinoz. 

Séance  du  11  avril  1898.  —  Les  Visitandines  de 
Thonon,  Tan  2  de  la  République  (F.  Valfrid). 

Séance  du  9  mai  1898.  —  Communications  de 
A.  Duplan. 

Séance  du  13  juin  1898.  —  La  Touviére  d'Evian 
et  son  église   (J.-F.    Gonthier    et    Duplan). 

—  Réception  deM.J.  Mercier,  député,  comme 
membre  de  la  Société. 

Séance  du  11  juillet  1898.  —  Poids  et  Mesures  en 
Savoie  (L.-E.  Piccard). 

IL  Dons  faits  à  TAcadémie  Chablaisienne. 


XI 


xxni 


XXXH 


XXXV 


XXXIX 


XL 


LUI 


LXI 
LXIII 


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—  208 


cadémie  Chablaisienne. 

LXIV 

1  Bureau. 

LXIV 

jmbres  d'honnt'ur. 

LXIV 

ifs  résidants. 

LXV 

non  résidants. 

LXVI 

es. 

LXVII 

)  pondants. 

LXVIII 

•ondantes. 

LXIX 

MÉMOIRE  I. 

leurs  environs,    par   Emile 

1-204 

MÉMOIRE  II. 
^Kvian  (1793).  par  A.  Duplan.     205-236 


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—  269  — 

TABLE  ALPOABÉTIOUB  DES  MATIÈRES 


Abadouche,  coutume,  188 

Abondance  (Abbaye  (d'),  81 

Académie  Chablaisienne,  v,  xxv.  —  Membres  de  l'Acadé- 
mie Chablaisienne,  lxiv-lxviii. —  Sociétés  corres- 
pondantes avec  TAcadémie  Chablaisienne  lxix,  3, 

43  54  90  101.  182  198 
Académie  Salésienne,  53,  57,  58,  59,  65,  70,  81,  82,  83*  91, 

92,  93,  107, 113 
Académie  de  Savoie,  67 

Agaune  (S^-Maurice).  43,  49 

Albanis  Beaumont,  22,  39,  42 

Alex  (d*)  Jean  Louis.  xxvi.  xxx,  xxxi 

Allamand,  religieux  barnabite,  135 

Allinges,  48,  52,  55,  65,  97 

Allobroges.  13,  18,  21 

Ampbion,  xxiv,  234 

Annecy,  archives  et  autres,  3,  114,  115,  116,  119,  120, 

167,  240-255 
Annemasse,  49 

Aiithoinoz,  architecte,  xxxiv 

Antioche  (d*),  62,  74,  76.  97,  124, 130 

Archives  de  Beauregard,  81.  96.  —  Archives  départemen- 
tales d*Annecy,  xxvi,  55,  59,  62, 63,  65,  68,  69,  70. 
73,  160,  181.  —  Archives  de  Genève,  3,  92,  93,94, 
95,  96,  103,  KM.  —  Archives  de  Grenoble.  3.  — 
Archives  de  Lausanne,  3,  144.  —  Archives  de  Tu- 
rin, vi,  VIII,  IX,  3,  59,  (56,  68 
Arenthon  (d*)  d'Alex,  évoque  xix,  xx,  114 

Arpin  Louise,  133.  —  Arpin,  prêtre,  136 
Astesan,  intendant,  xxviii 

Auguste,  empereur,  38 

Autrichiens,  168 

Avit  (S'),  archevêque,  49 


Babin  de  Rumilly,  236 

Bailly  (les),  71 

Bardenuche  (Château  de),  82 


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—  270  — 

non,  XXXIV,  121 

27 
•ien,  106 

249,252 
'  aucigny,  57,  66 

53,  55 
lat,  209 

XXI,  44,  55,  64,  65,  74,  99,  100,  102,  113, 

143,  177 

70.  75,  76 

ident),  235 

162 

211,  214,  236 

118 

231 

cier  municipal,  231 

12. 18,  26,  33,  35,  39,  43, 83,  86,  99 

6 

217.  223 

xLi,  m 

idic,  171.  —  Boccard,  chanoine,  135.  — 

nvier,  syndic,  171.  —   Boccard  Marc, 

occard,    missionnaire,    135,    Boccard, 

133,  134 
114 
216 
)cat,  XXXV 

làteau  de),  85 

(château  de),  87 

i.  70 

ire,  231 

12 

63,  64,  81 

216 

219  223 

74,  106,  110,  114,  116,'  119 

111 

mt,  228 

XI 

:iei*  municipal,  231 

124 

45,  46,  47 

115 

flîcier  municipal,  231 

le,  231 


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—  271  — 

o 


Cachât,  délégué  du  Directoire  et  autres, 

214,  220 

Cadastre. 

152 

Cafïe,  aide-adjudant, 

229 

Calavrai.  coutume, 

186 

Canchy  (de), 

85 

Capitation  (impôt), 

153 

Capucins  de  Thonon, 

119,  158 

Carpinel,  contrôleur  de  poids  et 

mesures 

X 

Carrier, 

9 

Catherin  Champagne,  syndic, 

XXVI 

Cayen  (Pierre-Amédée). 

120 

Challande,  institutrice. 

178 

Chambéry, 

IX,  217,  224,  226 

Chamoux,  président, 

236 

Champagne  François, 

XXX,  XXXI 

Champanges, 

43 

Chappuis,  lithographe, 

180 

Chardon,  curé. 

XXXVII 

Charles  Emmanuel, 

IX. 

xii^  XXXII,  XL,  155 

Chasseurs  Rochellois, 

229,  234 

Chatel, 

214 

Châtelain  (le), 

156 

Chatillon  et  de  Chatillon, 

XLvii,  LUI,  Lv,  216 

Chénevottes,  allumettes, 

192 

Chens, 

8,  14,  36 

Chevaliers  de  Saint-Maurice  et  Lazare, 

120 

Chevallav,  officier  municipal. 

231 

Chevilly'(de), 

66 

Christin,  maire. 

231 

Clément  VII,  pape, 

54 

Compey,  dTvoire, 

59 

Conche  (de), 

83 

Concile  de  Trente, 

XXXVIII 

Confrérie  du  S*-Esprit, 

179 

Constantin  A., 

20 

Convention  nationale. 

VII,  236 

Corsier, 

42 

Corte  (Comte), 

XXVIII 

Costa  de  Beauregard  (familles  des),  5G,  75,  130,   133,   137, 

162,  173.  —  CostaJocelyn 

(Ct^),9, 

14,17,57,73.81 

Coudrée, 

65,  69,103 

Cravanzane  (Marquis  de). 

XXVI 

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—  272  — 


Dantand,  xxin 

Dauphins  (les),  de  Vienne,  53,  67 

Davet  Joseph,  soldat,  209,  227,  228,  230 

Decrosaz  (famille),  157 

Delachenal,  curé,  1 14 

Delafrasse  Etienne,  curé,  H3 

Delajoux  François,  216 

Delebecque,  ingénieur,  6 

Deruaz  César,  xxxv 

Diesbach,  colonel,  xxii 

Dioclétien,  enripereur,  44 

Domitien,  évèque,  48 

Donau,  Intendant  général  de  justice,  xxxii 

Douvaine,  14,  16.  17,  40.  67,  91,  97,  103,  104 

Duborgel,  10,  29,  88.  —  Duborgel,  curé,  122,  123, 126,  128, 
134, 179.  —  Duborgel  Félicie,  129,  131.  —  Dubor- 
gel Joseph,  maréchal  des  logis.  —  Duborgel  Ga- 
briel, maire,  175.  —  Duborgel  J.-M.,  132.  —  Du- 
borgel Pierre,  131,  171.  —  Duborgel,  notaire,  177. 
Dubouloz  Ferdinand,  xxxviii.  —  Dubouloz  Guôrin,  140.  — 
Dubouloz,  grand  vicaire,  127 

Duchône,  135,  136, 175 

Ducis,  abbé,  4,  IL  16,  22,  41 

Dufour  Amed,  curial.xxx.  —  Dufour,  curé,  96.  —  Dufour, 
écrivain,  vu.  —  Dufour,  général,  vi 

Dumont,  prêtre.  124 

Dumouriez.  général,  207 

Dunoyer  Norbert,  xviii,  xxxii,  xxxiit 

Dupas  Joseph,  216 

Dupérier,  médecin,  xxxviii 

Duplan  Albert,       v,  xi,  xxin,  xxxii,  xxxiv,  xxxv,  xl,  xlvi. 

Lin,  Lxni,  205-236 
Duret  Michel,  maire,  174.   —     Duret,    notaire,   146,    177, 

autres  lix 

Emine,  mesure,  187 

Enfants  du  Léman,  société,  180 

Evian  (Touvière  d^Evian),      xxiv,  xxxv,  xi.vi,  LXI,  60,  99, 
208,  209,  214,  216,  219,  220,  227,  228,  232,  234.  — 
Garde  nationale  d*Evian,  207,  236 
Excénevex,  11,  16, 17,  28,  31,  45, 177 


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—  273  — 


IF 

Fabius  Maximus. 

Fabri,  évoque, 

Farel,  ministre  protestant, 

Faucigny, 

Faurax,  curé, 

Favrat,  procureur,  syndic. 

21 

187 

99 

240  243,  249-252 

128,  129,  131 

235 

Favre,  abbé,  22,  136,  179.  —  Favre  Françoise,       131 

Fazy  îlenry,  historien,  105 

Fazy  James,  64 

Féternes,  231,  232,  133 

Fian  (1q),  coutume,  189 

Fichet,  chevalier,  comte  de  Ponchy.  xxiv 

Filly,  abbaye,  83,  90,  93,  97, 100,.102, 111,113, 120, 179, 182 
Fléchère(dela),  84 

Fleury,  chanoine,  historien,  115.  —  Fleury,  curé,   133.  — 
Fleury  (de)  deMonthoux,  marquise^  xx 


FoUiet,  sénateur. 

XXV,  LXI 

Foras  (de),  historien, 

64,76 

Fornier  (noble). 

63,74,114,119 

François  (S*)  de  Sales, 

LVII-LVIII 

Francs, 

52 

Frise  (château  de), 

a- 

76 

Gabelle  (impôt). 

154,160 

Gallay,  curé. 

122 

Gallaz,  commissaire. 

219 

Gaulois, 

12,  13, 17,  18 

Genève,    xxi,  xxii,  XL,  7, 

10,  13,  17: 

,43,44,45,52,76,91, 
93,  99,  104,  105,  147 

Genève  Claude-François, 

secrétaire, 

XXV 

Genevois, 

XIX,  99,  104.  249,  252 

Genoud, 

119. 132 

Gerdil,  orfèvre. 

xxxrv 

Giessen  (société  de). 

XXXII 

Gingolph  (St), 

109,  110,  214,  234 

Girard  (noble). 

71,97 

Gonthiep  J.-F.,  historien. 

1 

LUI,  49, 60,  96,  98, 1 10 

Gorin,  imprimeur. 

xx^rii 

Granger,  épicière  à  Nyon^ 

123 

Graqier  (de),  évèque. 

XIX 

Graajux  François, 

216 

Grenoble, 

219 

i8b 


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-Ô74- 


Grillon  Vincent, 
Guichenon,  historien, 
Guilland,  écrivain, 
Guillaume,  curé, 
Guillot, 
Guyon  Jules, 
Guyot,  archiprêtre, 


167 

40,68 

vin 

116 

XXXV,  232 

xxni 

XX 


H 


Helvètes,  35 

Hermauce,  53,  54,  59 

Hovelacque,  Direct'  de  l'école  d'Anthropologie  de  Paris,    15 
Humbert  de  la  Ravorée,  •       W5 


Impôts  féodaux. 
Impôts  nouveaux. 
Innocent  IV,  pape. 
Invasion  autrichienne. 
Inventaire  bernois  du  Chablais, 


155 
165 
58 
168 
196 


Jacopin  Jacques^  notaire,  xix-xx.  —  Jacopin  Pierre,  rec- 
teuf*.  XIX.  —  Jacopin,  secrétaire  de  l'Université  de 
Toulouse,  XVIII 

Jacquier  Jean,  216 

Jacquot  Lucien,  xxiii 

Jaillet,  de  S^-Cergues,  xxxiv 

Jean-d'Aulph  (Abbaye  de),  57,  67,  68 

Jean-Louis  de  Savoie,  évèque,  '       xviii 


Jeoire  (Saint), 
Jocerand  Pierre, 
Jordan,  notable, 
Joudon, curé. 


Kellermann,  général^ 


k: 


226,  227 

XLVII,  LX 
XL 

128 


208,216 


Lamartine,  poète, 
Langin  (tour  de), 
Larringes, 
Lausanne^ 

Lavanchy,  historien, 
Léman  (lac), 


168 

54 

232 

44,  125 

127,  135 

46 


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—  275  — 


Livet  (noble)  Antoine, 

XÏX 

Lochon  (docteur), 

XXIII 

Loysinge,  sénateur, 

XXIV 

Lugrin  (de),  76,  77.  —  Lugrin  Jean 

,  maire,                      231 

Lullin, 

235 

Luzernois, 

140 

im: 

Magnin,  curé, 

133 

Magnin,  évoque, 

132 

Maisonneuve  (de  la), 

112 

Maison  (S*®)  de  Thonon, 

120 

Maison  des  Arts  de  Thonon, 

115,  120 

Malet  Félicien, 

67 

Malinges  Amédée,  poète. 

xvin 

Marcoz  F., 

XXXV 

Marin, 

231,  232.  233 

Marsille  (fontaine), 

174 

Martin  (S^),  évoque, 

49 

Massongy,                                xxv. 

XXVI,  XXVIII,  XXIX,  XXX 

Maubuisson  (Abbaye), 

XIV 

Maur  Jacques,  horloger, 

IX,  XI 

Maurice  (S'), 

65 

Maxilly, 

LVi,  209,  232 

Maxit, 

225,  233 

Mayor,  docteur, 

14 

Mazaute,  instituteur. 

178 

Mazzini, 

140 

Médicis  (de),  cardinal. 

106 

Meillerie, 

234 

Ménabréa  Léon,  historien. 

52 

Menton  (de). 

72 

Mercier,  historien,  46.  —  Mercier, 

député,                       LXi 

Mésinges, 

67 

Messery  (notice  sur). 

1-204 

Meyer,  lieutenant, 

218 

Meyrier  (de). 

81 

Michaud  (frères). 

XI,  75,  150,  160 

Mocenigo  (doge  de  Venise), 

XXXIV 

Montesquieu,  historien, 

45 

Monthoux, 

XIX 

Moraud, 

VIII,  121 

Morges, 

12 

Morillon, 

XXXIV 

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Ga 


—  276  — 

Mortillet,  12 

Mudry  Norbert,  xi 

Musée  d'Annecy,  9,  10, 11.  —  Musée  de  Genève,  17,  40.  — 

Musée  de  S'-Germain,  17.  —  Musée  de  Lausanne,  9 

Nantuates,  20 

Nernier  (notice  sur),  1-204 

Neuvesselle  209, 232 

Niton  (Pierre  à),  18 

Novel  27,  58,  232,  ^34 
Novodunum  (Nyon),  42,44.  —  Nyon,    xxii,  xxiii,  137,  140 

o 

Olive,  intendant,  xxviii 

Omont,  écrivain,  xii,  xiii,  xiv,  xviii 

Orose  Paul,  historien,  46 


Proussel  Vincent,  marqueur  de  poids,  240 

Publier,  232 

Paurier,  curé,  117 

Partays  (bois  de),  173 

Pavy,  curé,  117,  122,  126 

Peccoux,  de  Nernier,  124,  136 

Pellicier  François,  216,  217 

Pescatore,  intendant,  xxvi,  xxvii,  xxviii.  xxix,  xxxi 

Philippe,  historien,  27 

Piccard  L.-E.,      vi,  xxiii,  xxv,  xxxix,  lv,  lvii,  lxi,  lxiii, 

11,32,61,68,69,71,77,79,  80,  81,  83,  92,  102, 
103,  105,  111,  120,  134, 140,  156,  168 
Piccolet  Pierre,  225 

Picut  Claude,  conseiller,  xxvi 

Piémontais,  208,  218 

Pillet  L.,  écrivain,  viii 

Pinget  Léon,  xxiii 

Pirasset,  xxxii 

Pochât  Henry,  syndic,  170 

Poids  et  mesures  en  Savoie  (Chambéry,  Annecy,  Genevois, 

Faucigny,  Beaufort,  Thônes,  Val  des  Clefs,  Ta- 

rentaise),  vi-xi,  lxi-lxii,  239-266 

Portay,  chirurgien,  xxxix 


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—  277  — 

Quartery  (de),  71 

Questan  Jean-Louis,  chanoine, 

Quiblier  Auguste,  Capitaine  des  pompiers,  180.  —  Félix, 
chirurgien  militaire,  16G.  —  Guillaume,  129.  — 
Léon.  XXIII.  —  Marie,  119.  —  Melchior,  179.  — 
Michel,  132.  —  Médecin  du  roi  Murât,  198.  — 
Victor,  23 

Qu  isard.  xxvii,  177 

Ta 

Rabut,  écrivain.  viii 

Rassat  Pierre,  marqueur  de  poids,  240 

Rebert,  14 

Rendu. évoque,  130 

R^vonL..  9,  14.  17,  18 
Revue  savoisienne.  7, 11,  12,  16,  22,  23,  25,  27,  39,  47,  M, 

55,  59,  121 

Rey,  221 

Ripaille.  xxi,  104 

Ritter,  président  de  l'Institut  genevois,  xii,  xviii 

Rivollet,  prêtre.  139 

Robert,  curé,  131 

Robespierre,  126 

Rossillon  de  Bernex,  évèque,  xxxv,  116 

Rovorée  (château  de),  57 

s 

Sage.  curé.  134 

Savoie  (princes  de  la  maison  de),       ix-xi,  xxxii,  XL-XLVI, 

243-254 
Sales  (de)  S«  François,  105,  106,  113 

Sales  (de)  marquis,  XLVI 

Seignette,  adjudant-général,  228 

Sénat  de  Savoie,  xxxv.  156 

Septime-Sévère,  empereur,  40,  41 

Severin  (S^)  marquis,  130 

Sicard,  prêtre,  134 

Société  d'histoire  et  d'archéologie  de  Genève.  7,  13,  14, 
15,  41,  91.  —  Société  savoisienne  d'histoire,  viii, 

81,82,184 
Soissons  (princes  de),  XLI,  XLiii 

Spon,  historien,  40 


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—  278  — 

Stations  lacustres,  8 

Strabon,  historien,  12 

Suidas,  historien,  12 

Suisse,  XXIV,  213,  218 

Suisse  romande  (Société  de  la),  39,  88 


Tarentaise,  LXI,  255-206 

Tencin  (de)  cardinal.  xxxvi 

Thiébaud  Charles,  officier  municipal.  231,  234 

Thierry  Augustin,  historien,  191 

Thomas     (S')  marquis,    XLiii,    XLiv.  —    Thomas,     poète 
de  Thonon,  xii,  xiii,  xiv,  xv,  xvi,  xvii 
Thônes  (ville)  (Les  Clefs),  247-249 

Thonon.  xxi,  xxxix,  lvi,  42,59,  60.  68,  71,  75,  80,  84.  97, 
99.  105-107,  112,  127,  140.  151,  156,  166,  183,209, 

216,  220,  223,  235 
Thorens,  curé,  126,  127,  177 

Tissot,  57 

Tougues,  14, 35 

Tourronde,  209,  234 

Touvière  (faubourg  d*Evian,  chapelle  et  église  de  laTouv), 

_      ,  XLVI-LXI 

Trédicini,  écrivain,  71 

Troche  (de),  72,  77 

Troyon  Frédéric,  10,  11,  12 

TJ 

Union  savoisienne,  133 


Vacheresse,  213, 214,  218 

Valaisans,  99. 2I8 

ValfridF.,  xxxix 

Vallée  Thomas,  marqueur  4e  mesures,  239 

Vallier,  curé,  116 

Vandel,  curé,  137,  138.  —  religieuse,  140 

Vaudois,  II5 

Vercingétorix,  21 

Verdelier,  général,  234 

Versoix.  219 

Vétraz-Monthoux,  xviii 


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—  279  — 


Vevey 

XXIt 

Victor-Amédée, 

II,  XLI,  115 

Viennes, 

230 

Vigny  (de). 

81 

Visitation  (couvent  de  Thonon), 

XXXIX,  125,  162 

Voirons, 

.  ^    *  '"      ' 

Vuarnet  E.,  xxi.   —  François, 

soldat,    167.  — 

sergent- major, 

Vuy  Jules,  historien, 

Y 

Yvoire.xxi,  Lix,6,  11,  18.  19,  27,28,53,  60,  61,9 
Yvorne, 


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